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Débats du Sénat (Hansard)

Débats du Sénat (hansard)

2e Session, 37e Législature,
Volume 140, Numéro 7

Le jeudi 10 octobre 2002
L'honorable Dan Hays, Président


LE SÉNAT

Le jeudi 10 octobre 2002

La séance est ouverte à 13h30, le Président étant au fauteuil.

Prière.

[Traduction]

DÉCLARATIONS DE SÉNATEURS

LE CABINET DU PREMIER MINISTRE

LE JUBILÉ D'OR DE SA MAJESTÉ LA REINE ÉLIZABETH II—LA NOMINATION DES PREMIERS MINISTRES PROVINCIAUX AU CONSEIL PRIVÉ POUR SOULIGNER L'OCCASION

L'honorable Noël A. Kinsella (leader adjoint de l'opposition): Honorables sénateurs, demain et samedi, les capitales du Canada et du Nouveau- Brunswick accueilleront Sa Majesté Élizabeth II, reine du Canada. Je suis certain que la population de Fredericton, représentative de tout le Nouveau-Brunswick, continuera à exprimer les sentiments d'affection manifestés par les Canadiens qui ont accueilli la reine jusqu'ici pendant sa visite. Je suis également sûr que la population de la région de la capitale nationale montrera la même joie et la même affection dans son témoignage de bienvenue.

Compte tenu du fait que cette visite royale spéciale célèbre le
50e anniversaire du couronnement de la reine, j'invite le gouvernement du Canada à marquer cette occasion unique en nommant tous les premiers ministres provinciaux actuellement en exercice au Conseil privé de Sa Majesté, comme cela avait été fait à l'occasion de la visite de la reine au Canada en 1982 et du centenaire du Canada en 1967.

LA COLOMBIE-BRITANNIQUE

L'UNIVERSITÉ TRINITY WESTERN— L'OUVERTURE DU LAURENTIAN LEADERSHIP CENTRE

L'honorable Gerry St. Germain: Honorables sénateurs, je voudrais informer tous les sénateurs de la récente expansion de l'un des excellents établissements d'enseignement de la Colombie-Britannique. L'Université Trinity Western, de Langley, a officiellement inauguré cette semaine son campus d'Ottawa, le Trinity's Laurentian Leadership Centre.

Le nouveau centre accueillera des étudiants de troisième et de quatrième année qui envisagent de faire carrière dans les affaires, en informatique, en communications, en histoire, en études internationales ou en sciences politiques. Les étudiants recevront une formation en leadership, en politique publique, en éthique et en culture contemporaine, que dispenseront des enseignants hautement compétents, avec l'aide de conférenciers choisis parmi les chefs de file du gouvernement et du secteur privé. Des stages permettront aux étudiants d'apprendre directement de députés, de chefs d'entreprises, de dirigeants du secteur des technologies de l'information, de professionnels des médias ou des communications et de cadres d'entreprises privées. Les étudiants auront donc pour professeurs les gens mêmes qui pourraient devenir leurs futurs employeurs et auront l'occasion de les observer dans l'exercice de leurs fonctions de leadership.

L'objectif du nouveau centre est de favoriser la mission de l'Université Trinity Western en familiarisant les étudiants avec le fonctionnement du gouvernement fédéral et avec la culture politique et d'entreprise qu'on trouve à Ottawa grâce à des stages dans différents bureaux de la capitale, en facilitant aux étudiants de l'Ouest l'accès par la suite aux emplois dans l'administration fédérale ou à des charges publiques, en formant quelques-uns des dirigeants futurs du Canada selon la mission de l'université, en donnant aux étudiants l'occasion de voir comment de bons chrétiens travaillent dans le secteur privé et les organisations non gouvernementales, dans l'espoir que certains d'entre eux aspireront à œuvrer dans la fonction publique.

Le Laurentian Leadership Centre se trouve dans les locaux de l'ancien Club Laurentien, qui a été autrefois la résidence
deJ.R. Booth, au 252, rue Metcalfe.

Je voudrais préciser à tous les honorables sénateurs que Trinity Western est ouverte à tous, sans distinction de race, de couleur ou de religion. C'est un excellent établissement, situé à deux pas de l'endroit où j'habite. Je sais que tous les honorables sénateurs voudront se joindre à moi pour souhaiter la bienvenue au Laurentian Leadership Centre d'Ottawa.

LE MOIS DE LA SENSIBILISATION AU CANCER DU SEIN

L'honorable Catherine S. Callbeck: Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd'hui pour attirer votre attention sur une grave maladie qui sévit dans notre pays. Ce mois-ci, les Canadiens prendront davantage conscience du cancer du sein.

Je suis heureuse de vous signaler que le nombre de décès dus au cancer du sein est en régression au Canada. D'après la Société canadienne du cancer, le taux de létalité du cancer du sein est passé de 33 p. 100 en 1992 à 26 p. 100 cette année. C'est le taux le plus bas depuis les années 50.

Même si ces chiffres sont encourageants, il faut poursuivre le combat. Les statistiques du cancer du sein demeurent inquiétantes. En moyenne, 394 Canadiennes apprennent chaque semaine qu'elles en sont atteintes et, chaque semaine, 104 en meurent. Une femme sur neuf court le risque d'être touchée.

Je suis certaine que le cancer du sein nous a tous touchés, dans une certaine mesure, parce qu'une mère, une sœur, une conjointe, une fille ou une amie en a été frappée. J'espère de tout mon cœur que la tendance à la baisse du taux de décès se maintiendra en réponse à nos efforts pour trouver un remède.

Bien qu'il soit important de sensibiliser davantage la population au cancer du sein durant toute l'année, le Mois de la sensibilisation au cancer du sein offre aux Canadiens l'occasion d'en apprendre davantage sur la maladie, sur l'importance d'un dépistage précoce et sur les mesures préventives. C'est aussi le temps pour nous de nous rappeler celles qui ont perdu leur combat.

LA CONFÉRENCE DES ASSOCIATIONS DE LA DÉFENSE

LE RAPPORT INTITULÉ UNE NATION VULNÉRABLE

L'honorable J. Michael Forrestall: Honorables sénateurs, j'ai le grand plaisir de prendre la parole aujourd'hui pour féliciter les membres de la Conférence des associations de la défense pour leur travail acharné et leur conscience professionnelle qui sont évidents dans leur récent rapport intitulé Une nation vulnérable sur la crise

que traversent actuellement les Forces canadiennes. Je souhaite aussi associer mon parti, le Parti progressiste-conservateur du Canada, et moi-même à ce rapport et à ses importantes conclusions.

Le rapport démontre de manière crédible que les Forces canadiennes ont besoin d'une augmentation urgente de
1,5 milliard de dollars de leur budget pour mettre un terme à l'érosion de leur état de préparation et de leurs capacités opérationnelles. Cela n'a rien de nouveau; c'est un écho du rapport qu'a présenté précédemment la vérificatrice générale ainsi que des rapports présentés par le Royal Canadian Military Institute, le Council of Canadian Security in the 21st Century, le Comité permanent de la défense nationale et des anciens combattants et le Comité des finances de l'autre endroit, ainsi que notre propre Comité sénatorial permanent de la sécurité nationale et de la défense.

(1340)

Je voudrais spécialement remercier le principal auteur du rapport, le colonel Sean Henry — le doyen des analystes en défense au Canada — et ses collègues Richard Gimblett et Donald MacNamara, le général Robert Morton, le colonel Howard Marsh, John Selkirk et Hugh Smith. Ces hommes ont apporté une contribution utile au débat sur la défense au Canada et j'invite les sénateurs à les soutenir dans la requête qu'ils ont formulée au nom des Forces canadiennes, une grande institution nationale.

LE PATRIMOINE

L'OCTROI D'UNE SUBVENTION À LA FONDATION BILL REID

L'honorable Jack Austin: Honorables sénateurs, au nom de nombreux habitants de la Colombie-Britannique et du Canada, je tiens à remercier le gouvernement du Canada, et notamment la ministre du Patrimoine canadien, l'honorable Sheila Copps, pour leur décision d'accorder jusqu'à 500000$ à la Fondation Bill Reid. Grâce à cette subvention, la fondation pourra se porter acquéreur d'une partie des oeuvres appartenant à sa succession et à sa femme, Mme Martine Reid, et constituer une collection permanente qui sera mise à la disposition des Canadiens.

La Fondation Bill Reid est composée d'un conseil d'administration et d'un conseil consultatif regroupant des artistes haïdas et des dirigeants des Haïdas et d'autres communautés autochtones. La fille de Bill Reid en fait partie, au même titre que d'autres personnes des milieux d'affaires et des milieux artistiques de la Colombie-Britannique et du Canada. La très honorable Kim Campbell, l'ex-première ministre, fait elle aussi partie du conseil consultatif de la fondation.

La Fondation Bill Reid, qui existe depuis plus de trois ans déjà, a recueilli des fonds pour ses activités et détient actuellement 500000$ en dons privés destinés à cet achat obligatoire. Dès qu'elle aura fait l'acquisition de la collection, elle organisera une campagne de collecte de fonds privés pour l'exposer et, bien sûr, faire de nouvelles acquisitions.

Bill Reid est du nombre des artistes majeurs du Canada et ses sculptures, poteaux totémiques, bijoux de fabrication artisanale et gravures sont très prisés des collectionneurs. Il est également réputé de par l'action qu'il a menée pour remettre au goût du jour les formes d'art autochtone du Pacifique et de par la formation qu'il a donnée à de nombreuses personnes de talent marchant dans ses traces.

Je sais que les Canadiens qui visitent notre ambassade à Washington s'enorgueillissent de l'oeuvre intitulée «The Spirit of Haida Gwaii», une sculpture de bronze illustrant une légende haïda. Elle est unique en son genre à Washington et c'est une création distinctement haïda et canadienne.

LA JOURNÉE MONDIALE DE LA VUE

L'honorable A. Raynell Andreychuk: Honorables sénateurs, dans les collectivités pauvres du monde entier, des gens deviennent aveugles à un taux alarmant. De nos jours, toutes les cinq secondes, une personne devient aveugle dans le monde. Un enfant le devient chaque minute, à cause de problèmes sanitaires, de nutrition, d'éducation ou de santé. La cécité est sans aucun doute l'un des plus graves handicaps. C'est particulièrement vrai pour les gens qui ont déjà du mal à trouver la sécurité et suffisamment à manger. Pour eux, leur vue est vraiment une question vitale.

Le Canada a l'occasion de jouer un rôle de premier plan dans le renversement de cette tendance. À l'heure actuelle, il y a 45 millions d'aveugles dans le monde et 135 millions d'autres personnes souffrent de graves troubles de la vue — ce que nous considérerions la cécité légale — ce qui fait un total de
180 millions de personnes, soit six fois la population du Canada, qui sont handicapées par des troubles de la vue.

Quatre-vingt pour cent de ces cas de cécité sont évitables et
90 p. 100 des aveugles du monde vivent dans des pays en développement. Les statistiques montrent que c'est une tendance qui s'accroît. Sans une intervention appropriée, le nombre d'aveugles va atteindre les 75 millions de personnes d'ici 2020. Il est temps que cette grave question de santé fasse partie des priorités de l'aide internationale.

À l'occasion de la Journée mondiale de la vue, le 10 octobre, nous devrions unir nos forces pour attirer l'attention sur les graves problèmes de cécité dans le monde. En coopération avec Vision 2020: le droit à la vue, une initiative de l'Organisation mondiale de la santé et de l'Organisation mondiale contre la cécité, on espère que les principales causes de la cécité évitable seront éliminées d'ici 2020.

Je demande aux honorables sénateurs d'apporter leur aide en attirant l'attention sur ce terrible problème dans le cadre de leurs activités au Canada et dans leur sphère d'influence internationale. Les enfants ont besoin de votre aide.

VISITEURS DE MARQUE

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, avant de passer aux affaires courantes, je voudrais vous signaler la présence à notre tribune de M.Salim Sultan Al-Ruzaiqi, premier secrétaire de l'ambassade du Sultanat d'Oman à Washington accrédité au Canada. Il est ici à l'invitation du ministère des Affaires étrangères et du Commerce international et il est aujourd'hui l'invité de l'honorable sénateur Prud'homme.

Au nom des sénateurs, nous vous souhaitons la bienvenue.

Des voix: Bravo!


[Français]

AFFAIRES COURANTES

L'ACCÈS À L'INFORMATION

DÉPÔT DE LA RÉPONSE DU COMMISSAIRE AU RAPPORT DU GROUPE D'ÉTUDE

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, conformément à l'article 39 de la Loi sur l'accès à l'information, j'ai l'honneur de déposer la réponse au rapport du groupe d'étude de l'accès à l'information, un rapport spécial au Parlement du Commissaire àl'information du Canada.

DROGUES ILLICITES

DÉPÔT DU RAPPORT DU COMITÉ SPÉCIAL EN CONFORMITÉ AVEC L'ARTICLE 104 DU RÈGLEMENT

L'honorable Pierre Claude Nolin: Honorables sénateurs, conformément à l'article 104 du Règlement du Sénat, j'ai l'honneur de déposer un rapport intérimaire qui porte sur les dépenses encourues à ce jour et une estimation des dépenses non comptabilisées du Comité sénatorial spécial sur les drogues illicites au cours de la première session de la trente-septième législature.

[Traduction]

PROJET DE LOI SUR LES ESPÈCES EN PÉRIL

PREMIÈRE LECTURE

Son Honneur le Président annonce qu'il a reçu des Communes un message accompagné du projet de loi C-5, Loi concernant la protection des espèces sauvages en péril au Canada.

(Le projet de loi est lu une première fois.)

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, quand lirons- nous ce projet de loi une deuxième fois?

(Sur la motion du sénateur Banks, la deuxième lecture du projet de loi est inscrite à l'ordre du jour de la séance d'après-demain.)

[Français]

PROJET DE LOI SUR LES PRODUITS ANTIPARASITAIRES

PREMIÈRE LECTURE

Son Honneur le Président annonce qu'il a reçu des Communes un message accompagné du projet de loi C-8, Loi visant à protéger la santé et la sécurité humaines et l'environnement en réglementant les produits utilisés pour la lutte antiparasitaire.

(Le projet de loi est lu une première fois.)

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, quand lirons- nous ce projet de loi une deuxième fois?

(Sur la motion du sénateur Morin, la deuxième lecture du projet de loi est inscrite à l'ordre du jour de la séance dans deux jours.)

(1350)

[Traduction]

LE CODE CRIMINEL
LA LOI SUR LES ARMES À FEU

PROJET DE LOI MODIFICATIF—PREMIÈRE LECTURE

Son Honneur le Présidentannonce qu'il a reçu des Communes un message accompagné du projet de loi C-10, Loi modifiant le Code criminel (cruauté envers les animaux et armes à feu) et la Loi sur les armes à feu.

(Le projet de loi est lu une première fois.)

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, quand lirons- nous ce projet de loi une deuxième fois?

(Sur la motion du sénateur Jaffer, la deuxième lecture du projet de loi est inscrite à l'ordre du jour de la séance dans deux jours.)

[Français]

LA LOI SUR LE DROIT D'AUTEUR

PROJET DE LOI MODIFICATIF—PREMIÈRE LECTURE

Son Honneur le Président annonce qu'il a reçu des Communes un message accompagné du projet de loi C-11, Loi modifiant la Loi sur le droit d'auteur.

(Le projet de loi est lu une première fois.)

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, quand lirons- nous ce projet de loi une deuxième fois?

(Sur la motion du sénateur Day, la deuxième lecture du projet de loi est inscrite à l'ordre du jour de la séance dans deux jours.)

[Traduction]

PROJET DE LOI SUR L'ACTIVITÉ PHYSIQUE ET LE SPORT

PREMIÈRE LECTURE

Son Honneur le Présidentannonce qu'il a reçu des Communes un message accompagné du projet de loi C-12, Loi favorisant l'activité physique et le sport.

(Le projet de loi est lu une première fois.)

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, quand lirons- nous ce projet de loi une deuxième fois?

(Sur la motion du sénateur Robichaud, la deuxième lecture du projet de loi est inscrite à l'ordre du jour de la séance dans deux jours.)

BANQUES ET COMMERCE

AVIS DE MOTION VISANT À AUTORISER LE COMITÉ À POURSUIVRE L'ÉTUDE DE LA SITUATION DU RÉGIME FINANCIER CANADIEN ET INTERNATIONAL

L'honorable E. Leo Kolber: Je donne avis que, à la prochaine séance du Sénat, je proposerai:

Que le Comité sénatorial permanent des banques et du commerce soit autorisé à examiner, afin d'en faire rapport, la situation actuelle du régime financier canadien et international;

Que les documents et témoignages recueillis à ce sujet au cours de la première session de la trente-septième législature et tout autre document parlementaire et témoignage pertinent concernant ledit sujet soient renvoyés à ce comité;

Que le comité soit habilité à permettre le reportage de ses délibérations publiques par les médias d'information électroniques, en dérangeant le moins possible ses travaux;

Que, nonobstant les pratiques habituelles, le comité soit autorisé à déposer un rapport intérimaire sur ledit sujet auprès du greffier du Sénat, si le Sénat ne siège pas, et que ledit rapport soit réputé avoir été déposé au Sénat;

Que le Comité soumette son rapport final au plus tard
le 19 juin 2003.

[Français]

LE SÉNAT

AVIS DE MOTION VISANT À AUTORISER UN COMITÉ À EXAMINER LE RAPPORT INTITULÉ ÉTAT DES LIEUX SUR LA SITUATION DE L'ACCÈS À LA JUSTICE
DANS LES DEUX LANGUES OFFICIELLES

L'honorable Jean-Robert Gauthier: Honorables sénateurs, je donne avis que, conformément à l'article 57(1) du Règlement, le mardi 15 octobre prochain, je proposerai:

Que le rapport intitulé État des lieux sur la situation de l'accès à la justice dans les deux langues officielles, révisé
le 25 juillet 2002 et commandé par le ministère de la Justice du Canada, soit déféré à un comité du Sénat pour étude et rapport;

Que le comité soit autorisé à entendre les témoins, visiter les communautés de langue officielle vivant en milieu minoritaire et ainsi assurer le suivi de cet important rapport en vue d'articuler l'idée d'une justice réparatrice où l'offre de service dans les deux langues officielles devrait s'imposer;

Que le comité clarifie l'exercice des droits linguistiques en proposant les modifications, notamment à la Loi sur le divorce, la Loi sur la faillite, le Code criminel, la Loi sur les contraventions et d'autres lois en conséquence, s'il y a lieu.

AFFAIRES SOCIALES, SCIENCES ET TECHNOLOGIE

AVIS DE MOTION VISANT À AUTORISER LE COMITÉ À CONTINUER SON ÉTUDE DU DOCUMENT INTITULÉ SANTÉ EN FRANÇAIS: POUR UN MEILLEUR ACCÈS
À DES SERVICES DE SANTÉ EN FRANÇAIS

L'honorable Yves Morin: Honorables sénateurs, je donne avis que, le mardi 22 octobre 2002, je proposerai:

Que le Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie soit autorisé à examiner et à faire rapport sur le document intitulé Santé en français — Pour un meilleur accès à des services de santé en français;

Que les mémoires reçus et les témoignages entendus par le comité dans la première session de la trente-septième législature soient déférés au comité;

Que le Comité présente son rapport final au plus tard
le 31 décembre 2002; et

Que le comité soit autorisé, par dérogation aux règles usuelles, à déposer tout rapport auprès du greffier du Sénat si le Sénat ne siège pas à ce moment-là; et que le rapport soit réputé avoir été déposé à la Chambre du Sénat.

[Traduction]

SÉCURITÉ NATIONALE ET DÉFENSE

RÉPONSE DU GOUVERNEMENT AU RAPPORT INTITULÉ L'ÉTAT DE PRÉPARATION DU CANADA SUR LES PLANS DE LA SÉCURITÉ ET DE LA DÉFENSE—AVIS D'INTERPELLATION

L'honorable J. Michael Forrestall: Honorables sénateurs, je donne avis que, le mardi 22 octobre 2002, j'attirerai l'attention du Sénat sur la réponse du gouvernement au rapport du Comité permanent de la sécurité nationale et de la défense intitulé L'état de préparation du Canada sur les plans de la sécurité et de la défense, déposé au Sénat le mercredi 9 octobre 2002.


PÉRIODE DES QUESTIONS

LE CABINET DU PREMIER MINISTRE

LE JUBILÉ D'OR DE SA MAJESTÉ LA REINE ÉLIZABETH II—LA NOMINATION DES PREMIERS MINISTRES PROVINCIAUX AU CONSEIL PRIVÉ EN COMMÉMORATION DE L'ÉVÉNEMENT

L'honorable Noël A. Kinsella (leader adjoint de l'opposition): Honorables sénateurs, ma question s'adresse au leader du gouvernement au Sénat.

En 1967, année du centenaire de la Confédération canadienne, l'honorable Paul Martin, qui était alors député d'Essex — Est, avait informé l'autre endroit que cette Chambre serait heureuse d'apprendre que, le 11 janvier 1967, le premier ministre avait fait savoir qu'il lui plaisait d'annoncer qu'il avait plu à Son Excellence le Gouverneur général d'approuver sa recommandation de nommer tous les premiers ministres des provinces du Canada au Conseil privé du Canada, et que ces nominations, en cette année particulière, symbolisaient de façon tout à fait appropriée, selon M. Martin, l'unité et la diversité qui sont des caractéristiques fondamentales de l'histoire de ce pays. Sir John A. Macdonald a consacré sa vie à la réalisation et à la préservation de cette unité, dans le respect de la diversité que les provinces incarnent.

Plus tôt aujourd'hui, pendant les déclarations de sénateurs, j'ai donc attiré l'attention de la Chambre sur le fait que cette année est l'année du jubilé, un grand moment de notre histoire. J'ai parlé de l'importance de souligner ces grandes occasions, comme le premier ministre Trudeau l'a fait en 1982, lorsqu'il a recommandé au gouverneur général de nommer au Conseil privé tous les premiers ministres canadiens en fonctions.

Madame le ministre va-t-elle communiquer cette recommandation au Cabinet? Elle pourrait peut-être même l'appuyer.

L'honorable Sharon Carstairs (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, l'honorable sénateur Kinsella fait une proposition intéressante. On se souviendra que nous avons célébré, en 1967, le centième anniversaire de l'existence du Canada en tant que pays. Cette célébration a symbolisé, avec la nomination des premiers ministres au Conseil privé, l'unité et la diversité de notre pays.

En 1982, nous ne célébrions pas un anniversaire du Canada, mais un changement unique de la Constitution du Canada, soit la formule d'amendement et, ce qui est encore plus important, la nouvelle Charte des droits et libertés qui, selon moi, représentait un important progrès pour nos documents constitutionnels.

(1400)

Tous les premiers ministres avaient activement participé au rapatriement de ce document constitutionnel et de la Charte, y compris aux discussions qui ont conduit au rapatriement et à l'évolution de la Charte.

L'année 2002 représente une occasion particulière pour la reine et pour nous, ses sujets. Je vais sûrement intervenir auprès du premier ministre, au nom de l'honorable sénateur. Cependant, il ne faut pas perdre de vue que le premier ministre a toujours montré beaucoup de réticence en matière de nomination de conseillers de la reine. À ma connaissance, en fait, il n'a jamais nommé personne au Conseil privé qui n'était pas membre du Cabinet.

L'honorable Marcel Prud'homme: Honorables sénateurs, j'ai une question complémentaire. Je sais que c'est inhabituel de le faire en public, mais puis-je exprimer à madame le ministre ma grande déception à ce sujet? Je dis partout au Québec, en français et en anglais, que je suis monarchiste et que je le resterai tant que les Canadiens n'auront pas décidé du genre d'avenir qu'ils veulent. Je dois dire avec une grande tristesse qu'en dépit du fait que je sois le seul à avoir reçu des mains de Sa Majesté le titre de membre du Conseil privé, je n'ai été invité à assister à aucun événement ce week- end. Dans la culture française, ce genre d'oubli serait la marque d'un manque de classe. C'est regrettable. J'y aurais pourtant assisté.

Indépendamment de ce que l'opinion publique pense de cette visite, tant qu'elle est le chef constitutionnel de notre pays, je ne peux pas oublier qu'à 16 reprises, je crois, j'ai prêté le serment d'allégeance à la reine. Je dis donc «Vive la reine!» jusqu'à ce que les Canadiens décident du genre d'avenir qu'ils veulent.

Madame le leader peut-elle transmettre ma grande tristesse publique? Je ne demande pas une invitation, mais je crois que les responsables auraient dû être conscients des très rares personnes qui ont été l'objet de ce grand honneur. Et comme je suis Canadien français du Québec, je crois que, si j'avais été invité, cela aurait aidé à établir un certain équilibre.

Le sénateur Carstairs: Je remercie l'honorable sénateur de son intervention. Comme il le sait fort bien, le choix des personnes qui assistent aux différentes activités de cette nature n'est jamais facile. Je reconnais que j'ai trouvé un peu étrange de ne pas être invitée moi-même à une seule des activités organisées au Manitoba durant la visite de Sa Majesté dans cette province. Le premier ministre du Manitoba en avait pourtant décidé ainsi. La seule chose positive que je puisse dire est que je crois savoir que beaucoup de jeunes ont été invités à cette occasion. Si j'avais eu l'occasion de me désigner pour faire partie de ce groupe de jeunes, j'aurais été très heureuse de le faire, mais je n'en ai pas eu la possibilité.

De toute évidence, il y a eu des déceptions. L'honorable sénateur n'est pas le seul dans ce cas. Je crois savoir qu'il y a des manifestations de déception au Nouveau-Brunswick également. On y a peut-être porté remède. Cependant, j'ajouterais que, à mon avis, la confection de ces listes ne se fait pas toujours comme elle le devrait.

[Français]

L'honorable Pierre Claude Nolin: Honorables sénateurs, je voudrais permettre à madame le ministre de corriger sa réponse à la question du sénateur Kinsella. Ce ne sont pas tous les premiers ministres provinciaux qui ont participé et été d'accord avec le rapatriement de la Constitution au Canada.

Malgré sa volonté, le premier ministre du Québec de l'époque, fut- il un membre du Conseil privé, n'a pas été d'accord avec ce rapatriement, à l'instar de tous les premiers ministres du Québec depuis. Madame le ministre pourrait-elle corriger sa réponse?

[Traduction]

Le sénateur Carstairs: Honorables sénateurs, il est très important de consigner cela au compte rendu. Toutefois, j'ai déjà indiqué dans mon intervention qu'il y avait un certain désaccord quant à la nomination des membres du Conseil Privé. Si je comprends bien, tous les premiers ministres en poste à l'époque ont été nommés de cette façon.

Le sénateur Nolin: Honorables sénateurs, mon argument portait sur la réponse de la ministre au sénateur Kinsella lorsqu'elle a déclaré que tous les premiers ministres ont appuyé le rapatriement de la Constitution. De toute évidence, je crois qu'elle devrait rectifier cette déclaration. Tous les premiers ministres n'ont pas donné leur appui. Je pense que M.Lévesque n'était pas en faveur du rapatriement, à l'instar de la presque totalité de la population du Québec. En outre, les premiers ministres qui ont succédé à M.Lévesque ne l'ont pas non plus appuyé.

Le sénateur Carstairs: Le sénateur Nolin a raison. Mes propos doivent être rectifiés.

LE JUBILÉ D'OR DE SA MAJESTÉ LA REINE ÉLIZABETH II— LA VISITE AU NOUVEAU-BRUNSWICK— LE TRANSPORT EN HÉLICOPTÈRE

L'honorable Noël A.Kinsella (leader adjoint de l'opposition): Honorables sénateurs, je suis certain que mes collègues du Nouveau-Brunswick, qui se joindront à Sa Majesté à l'occasion d'un déjeuner à Moncton, seront très heureux de transmettre les vœux de notre collègue, le leader du gouvernement au Sénat.

Toutefois, ce qui m'intéresse c'est que Sa Majesté s'y rende, parce que, honorables sénateurs, d'après l'emploi du temps qui a été rendu public, la reine doit prendre l'hélicoptère samedi de l'hôtel Sheraton à Fredericton pour se rendre à Sussex au Nouveau-Brunswick, où elle assistera à certains événements, puis, de Sussex, elle doit...

Le sénateur Forestall: De quel genre d'hélicoptère s'agit-il?

Le sénateur Kinsella: Voilà ma question. Madame le leader du gouvernement peut-elle préciser au Sénat s'il s'agit d'un hélicoptère Sea King ou si le gouvernement utilise un autre type d'hélicoptère. Si c'est un autre hélicoptère, de quel genre s'agit-il?

L'honorable Sharon Carstairs (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, je ne sais pas du tout quel type d'hélicoptère sera utilisé, mais je peux assurer l'honorable sénateur que tous les plans de la visite ont été approuvés par le palais de Buckingham, comme c'est toujours le cas. Par conséquent, j'en conclus que la reine se sent en toute sécurité.

Néanmoins, je dois avouer qu'un incident mineur est survenu sur la rivière Rouge plus tôt cette semaine. D'après ce que j'ai compris, l'embarcation de la reine a eu une panne mécanique et a dû être poussée par une autre embarcation.

Nous sommes tous très heureux d'accueillir Sa Majesté dans notre merveilleux pays à l'occasion de l'année de son jubilé, et j'espère que son séjour ne sera pas obscurci par d'autres incidents malencontreux.

LA DÉFENSE NATIONALE

LA POSSIBILITÉ D'UNE GUERRE CONTRE L'IRAK—LE PROGRAMME D'ENTRAÎNEMENT DU 2e BATAILLON, THE ROYAL CANADIAN REGIMENT

L'honorable J. Michael Forrestall: Honorables sénateurs, pardonnez-moi, mais je ne peux résister. J'assure au leader du gouvernement au Sénat que Sa Majesté ne se déplacera pas à bord d'un Sea King parce qu'on a interdit à ces hélicoptères de voler au- dessus du territoire au cas où ils devraient atterrir d'urgence. Je crois comprendre qu'elle se déplacera à bord d'un Griffin, un très bon appareil, d'ailleurs. Si jamais Sa Majesté doit voyager à bord d'un chariot muni de roues d'acier, elle a toute ma sympathie.

Je reviens aux questions que j'ai posées ces derniers jours. Madame le ministre sait que le 2e Bataillon du Royal Canadian Regiment poursuit un entraînement intensif à la BFC Gagetown. Peut-elle expliquer pourquoi le 2e Bataillon du Royal Canadian Regiment est en période d'entraînement intensif, faisant notamment des exercices de tir réel et des missions de nuit? Je crois comprendre aussi que ce bataillon acquiert des munitions en quantité telle que la région atlantique est incapable de suffire à ses besoins. On y a par ailleurs interdit les congés de maternité et de paternité, alors qu'il ne s'agit pas du bataillon dit disponible puisque, comme chacun le sait, est le 3e Bataillon RCR basé à Petawawa.

Madame le ministre peut-elle répondre à cette question ainsi qu'à une de mes questions complémentaires et nous dire si le 2e Bataillon du Royal Canadian Regiment se prépare à être déployé, peut-être en Irak, s'il en reçoit l'ordre?

L'honorable Sharon Carstairs (leader du gouvernement): Le sénateur pose une question au sujet de la rumeur concernant un entraînement intensif. Que je sache, il n'y a pas d'entraînement intensif en ce moment.

En réponse à la question complémentaire du sénateur, je dirai que nous nous efforçons de veiller à ce que nos troupes soient prêtes à toute éventualité. Pour le moment, le gouvernement fédéral a pour politique de suivre les directives et les instructions de l'ONU, et l'ONU n'a encore nullement fait savoir qu'elle souhaitait faire la guerre à l'Irak.

(1410)

Le sénateur Forrestall: Je présume alors que le 2e Bataillon duRoyal Canadian Regiment se livre à l'heure actuelle à des activités extraordinaires d'entraînement à Gagetown. Que fait le 3eBataillon?

L'AFGHANISTAN—L'EMPLACEMENT ACTUEL DU MATÉRIEL MILITAIRE LOURD

L'honorable J. Michael Forrestall: Madame le leader du gouvernement au Sénat peut-elle nous dire où se trouve le matériel militaire lourd que nous avons envoyé en Afghanistan? Est-il revenu au Canada, ou traîne-t-il quelque part dans le golfe Persique, quelque part autour de la mer d'Oman ou dans un port du Pakistan?

L'honorable Sharon Carstairs (leader du gouvernement): En réponse aux premières observations du sénateurs, je lui dirai qu'il ne peut rien présumer du tout, car je ne sais absolument pas s'il y a un entraînement extraordinaire à la BFC Gagetown à l'heure actuelle ou si c'est simplement de l'entraînement ordinaire.

Quant à la deuxième question du sénateur, nous avons demandé des renseignements concernant le matériel lourd qui était en Afghanistan, mais nous ne les avons toujours pas reçus.

LA POSSIBILITÉ DE GUERRE CONTRE L'IRAK— LE PROGRAMME D'ENTRAÎNEMENT DU 2e BATAILLON, THE ROYAL CANADIAN REGIMENT

L'honorable J. Michael Forrestall: La question que j'ai posée il y a une semaine sur les activités d'entraînement à la BFC Gagetown n'intéressait-elle pas assez madame le leader du gouvernement au Sénat? A-t-elle demandé des renseignements et, pour une raison ou pour une autre, ses collaborateurs ou elle préfèrent-ils ne pas y répondre?

Je veux savoir pourquoi des congés ont été annulés et pourquoi des congés de paternité et de maternité ont été annulés. Que se passe-t-il? Les Canadiens voudraient bien le savoir.

L'honorable Sharon Carstairs (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, je dirai très respectueusement que, sauf erreur, cette question n'a été posée qu'aujourd'hui. Je n'ai pas ce renseignement aujourd'hui. Je ne sais pas ce qui se passe à BFC Gagetown à l'heure actuelle concernant les activités d'entraînement ou les congés.

L'honorable sénateur m'a posé une question la semaine dernière sur l'emplacement du matériel militaire lourd. J'ai transmis cette question au personnel du MDN et j'attends une réponse, mais je ne l'ai pas pour l'instant.

Le sénateur Forrestall:C'est très bien, mais je demanderais à l'honorable leader du gouvernement de bien vouloir se renseigner au sujet de Gagetown, s'il vous plaît.

LES NATIONS UNIES

LA POSSIBILITÉ D'UNE GUERRE CONTRE L'IRAK—LA RÉSOLUTION DU CONSEIL DE SÉCURITÉ VISANT L'ENVOI D'INSPECTEURS EN DÉSARMEMENT—
LA DEMANDE D'UNE SÉANCE PUBLIQUE

L'honorable Douglas Roche:Ce matin, le premier ministre a confirmé que le Canada mettra à contribution nos forces armées si le Conseil de sécurité de l'ONU autorise la guerre contre l'Irak. Le Conseil de sécurité n'a pas encore donné d'autorisation à ce sujet. En fait, les membres du Conseil travaillent très fort actuellement à rédiger une résolution qui permettra aux inspecteurs de l'ONU d'avoir libre accès à l'ensemble du territoire de l'Irak afin de déterminer si ce pays met au point des armes de destruction massive.

Madame le leader du gouvernement au Sénat peut-elle nous dire ce que le Canada fait actuellement pour veiller à ce que la résolution de l'ONU puisse dénouer cette crise sans qu'il y ait de guerre? Le Canada envisage-t-il de demander la tenue d'une séance publique du Conseil de sécurité, séance où des pays comme le Canada pourraient faire une déclaration sur la façon de mener des inspections couronnées de succès?

L'honorable Sharon Carstairs (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, permettez-moi de réitérer la position du gouvernement du Canada. Je pense que le sénateur connaît bien cette position, mais permettez-moi de la rappeler aux fins du compte rendu:le gouvernement du Canada a dit très clairement qu'il respectera toute obligation internationale qui lui incombera ou qui lui sera conférée à la demande du Conseil de sécurité des Nations Unies. Comme chacun le sait, le Conseil de sécurité des Nations Unies a à coeur d'envoyer des inspecteurs en désarmement en Irak pour s'assurer qu'il n'y a pas d'armes de destruction massive dans ce pays.

À mon avis, le Conseil de sécurité, comme nous tous, j'imagine, espère que pareilles armes n'existent pas, mais si elles existent, les résolutions des Nations Unies seront mises en application et ces armes seront retirées. Voilà la position du gouvernement du Canada.

La situation n'a pas changé. Quant à la tenue d'une séance publique, à ma connaissance, le gouvernement du Canada n'a pas formulé de demande en ce sens.

Le sénateur Roche: J'aimerais réitérer ma requête voulant que le gouvernement du Canada songe à demander la tenue d'une réunion ouverte, ce qui serait loin d'être nouveau au Conseil de sécurité, parce qu'il est extrêmement important que les Nations Unies, et non les États-Unis, décident si une guerre est justifiée ou non. C'est une décision qui aura une incidence sur la vie de nombreux Canadiens. Je pense que le Canada doit déployer tous les efforts nécessaires pour s'assurer que l'on trouve une solution juste et équitable afin de dépouiller l'Irak de toute arme de destruction massive. Madame le ministre peut-elle rassurer les Canadiens qui suivent très attentivement ce dossier sur les moyens qui sont envisagés pour éviter la guerre?

Le sénateur Carstairs: Je peux assurer aux Canadiens que notre premier ministre et notre ministre des Affaires étrangères ont affirmé catégoriquement que, selon nous, nous avons une obligation envers les Nations Unies, et non envers les États-Unis.

[Français]

LES FINANCES

ALLOCATION DE FONDS SUPPLÉMENTAIRES AUX PROVINCES

L'honorable Jean-Claude Rivest: Honorables sénateurs, ce matin, les ministres provinciaux de l'Éducation et de la formation professionnelle se sont réunis dans l'Ouest canadien. Ils ont pressé le gouvernement fédéral d'augmenter sa contribution et son aide financière aux gouvernements provinciaux pour satisfaire aux besoins pressants de formation de la main-d'oeuvre spécialisée car il y aura sans doute une pénurie à court terme dans l'ensemble du Canada.

Au cours des derniers mois, au Québec, des études et un débat intense ont eu lieu au sujet du déséquilibre fiscal entre les gouvernements provinciaux et le gouvernement fédéral.

La ministre pourrait-elle, compte tenu de son expérience à l'Assemblée législative manitobaine, rappeler au premier ministre et au ministre des Finances que la croissance des besoins, en particulier dans les domaines de la santé et de l'éducation,place les provinces dans des situations difficiles?

Madame le ministre pourrait-elle aussi leur demander si le gouvernement fédéral pourrait faire davantage pour satisfaire aux besoins de la population?

[Traduction]

L'honorable Sharon Carstairs (leader du gouvernement): En vérité, la question posée par l'honorable sénateur traduit en partie une position défendue par le Québec, soit qu'il existe un déséquilibre financier entre la capacité des provinces et celle du gouvernement fédéral de recueillir des fonds. Je fais remarquer que bon nombre de provinces canadiennes ont choisi de réduire leur taux d'imposition bien avant que le gouvernement fédéral se juge lui-même en mesure de faire la même chose. Il est clair pour le gouvernement fédéral que si les provinces peuvent se permettre de réduire les impôts, c'est qu'elles ont aussi les moyens d'offrir des services supplémentaires. Les provinces font des choix, tout comme le gouvernement fédéral.

Pour ce qui a trait aux services de santé, que l'honorable sénateur a mentionnés plus précisément, je pense que nous attendons tous avec beaucoup d'intérêt le rapport de la commission Romanow. Je crois comprendre qu'il sera déposé le mois prochain, conformément à l'échéance fixée. Nous allons certes prendre note des ressources supplémentaires qui, selon lui, devraient être consacrées à la santé par les provinces et le gouvernement fédéral, lequel a déjà manifesté son intention de s'acquitter de ses obligations sous ce rapport.

(1420)

Le Sénat attend, d'ici la fin du mois, le dépôt d'un rapport qui fera probablement état de la nécessité de ressources supplémentaires. Il y aura, en janvier 2003, une conférence fédérale-provinciale des premiers ministres qui traitera de cette question afin que, c'est à espérer, nous puissions améliorer les services de santé offerts aux Canadiens et, partant, la santé de ceux-ci.

[Français]

Le sénateur Rivest: Les gouvernements provinciaux ont effectivement réduit les impôts. Ils l'ont fait pour permettre d'atteindre des objectifs de croissance économique qui ont largement profité à l'ensemble des travailleurs canadiens. Sauf erreur, madame le ministre, le gouvernement canadien a fait exactement la même chose.

Il est difficile pour les gouvernements provinciaux d'accepter que l'on refuse leur demande sous prétexte qu'ils ont réduit leurs impôts. Au cours des dernières années, le gouvernement canadien a fait la même chose pour atteindre des objectifs de croissance et de soutien économique.

Il ne s'agit pas de savoir si le gouvernement fédéral a raison de diminuer les impôts ou pas. En matière de santé, d'éducation et de formation professionnelle, les besoins des Canadiens sont pressants. Voilà le problème fondamental.

Ces responsabilités relèvent des gouvernements provinciaux certes, mais c'est toutefois la responsabilité du gouvernement canadien d'être conscient des besoins de la population et d'accorder les sommes nécessaires à la satisfaction des Canadiens.

[Traduction]

Le sénateur Carstairs: Honorables sénateurs, on pourrait dire que l'élimination des déficits constitue également une façon de soutenir une activité économique viable. Nombres de provinces canadiennes ont choisi de ne pas éponger leur déficit avant de commencer à diminuer les impôts. Le gouvernement fédéral a fait l'inverse, c'est- à-dire qu'il a choisi de ne pas abaisser les impôts tant qu'il y avait un déficit.

Mon argument est simple: les gouvernements fédéral et provinciaux choisissent entre accroître les services et diminuer les impôts. Parfois, ils peuvent faire les deux, mais, dans bien des cas, cela leur est impossible. Alors, chaque ordre de gouvernement décide de son ordre de priorités.

LES TRAVAUX DU SÉNAT

L'honorable Nicholas W. Taylor: Honorables sénateurs, je m'interroge au sujet de la présentation de projets de loi du Sénat que nous examinions la session dernière. Je sais que, selon le Règlement du Sénat, nous ne pouvons pas rétablir ou ramener un projet de loi et l'étudier à partir de l'étape de la première lecture. Toutefois, la Chambre des communes peut ramener un projet de loi qu'elle a étudié dans une session précédente. Certains des projets de loi qui ont été présentés au Sénat ont déjà été adoptés à la Chambre des communes. Autrement dit, le Sénat en était saisi avant la prorogation. Comment se fait-il que la Chambre des communes puisse déposer un projet de loi au Sénat alors qu'elle a déjà réglé ce dossier au cours de la session précédente et ce, sans devoir suivre le processus établi?

Compte tenu de la forte majorité détenue par le gouvernement au Sénat, il est toujours possible qu'on nous mène par le bout du nez ou que nous répondions trop rapidement aux ordres du Cabinet du premier ministre. N'aurait-il pas été préférable que la Chambre des communes nous demande de reprendre l'étude des projets de loi sur lesquels nous travaillions au cours de la dernière session? C'est une chose que la Chambre des communes dépose à nouveau des projets de loi auxquels elle travaillait, mais c'est en une autre de déposer à nouveau des projets de loi auxquels nous travaillions.

Puisque nous n'avons pas la possibilité de présenter à nouveau un projet de loi que nous étudiions, ne serait-il pas logique qu'elle nous demande de nous pencher à nouveau sur un projet de loi qu'elle avait adopté au cours de la session précédente?

Son Honneur le Président: D'autres sénateurs ont-ils des commentaires à formuler sur cette demande de renseignements?

J'aimerais attirer l'attention des sénateurs sur le fait que les procédures en cours à l'autre endroit ne visent que l'autre endroit, tout comme les procédures en cours au Sénat ne visent que le Sénat.

Les projets de loi qui ont été déposés aujourd'hui ont tous été lus pour la première fois et la deuxième lecture de chacun a été inscrite à notre ordre du jour pour la date appropriée. C'est la procédure que nous suivons au Sénat lorsque nous recevons une mesure législative en provenance de l'autre endroit. Notre collègue n'a pas remis en question la procédure adoptée à la Chambre, mais en a simplement reconnu l'existence. Aussi, je ne crois pas pouvoir faire plus que de dire ce que je viens de dire.

LA DÉFENSE NATIONALE

LA POSSIBILITÉ D'UNE GUERRE CONTRE L'IRAK—LE PROGRAMME D'ENTRAÎNEMENT DU 2e BATAILLON, THE ROYAL CANADIAN REGIMENT—RECOURS AU RÈGLEMENT

L'honorable J. Michael Forrestall: Honorables sénateurs, j'ai parfois du mal à établir la distinction entre un rappel au Règlement et une question de privilège. Ce qui suit constitue dans un certain sens un rappel au Règlement, mais je crois que cela touche également une question de privilège.

À la page 32 des Débats du Sénat, le leader du gouvernement au Sénat peut lire textuellement la question que j'ai posée, c'est-à-dire:

Madame la ministre peut-elle expliquer pourquoi le
2e Bataillon du Royal Canadian Regiment basé à Gagetown, au Nouveau-Brunswick, est en période de formation intensive...

Je suis curieux de savoir comment il se fait que les collaborateurs de madame le ministre n'aient pas vu la question et qu'elle ait cru que je ne l'avais pas posée. Je l'ai bel et bien posée et je ne veux pas qu'il y ait de malentendu à ce sujet. Si je me suis trompé, vous m'en voyez désolé. Autrement, madame le leader pourrait-elle m'obtenir l'information?

J'en profite pour lui dire, tandis qu'elle est debout, que je ne suis absolument pas étonné qu'on ne l'ait pas invitée à accompagner Sa Majesté, mais que j'en suis fort déçu.

L'honorable Sharon Carstairs (leader du gouvernement): Je présente toutes mes excuses au sénateur. Nous sommes tous les deux affligés du même problème. Je porte deux appareils auditifs, tout comme le sénateur. J'ai l'impression que, parfois, nous ne nous entendons pas l'un l'autre, surtout si je néglige de porter l'écouteur à mon oreille aussi vite que possible.

Je puis assurer au sénateur Forrestall que mes collaborateurs lisent très attentivement les Débats du Sénat et qu'ils écoutent ses paroles. S'il a posé cette question, je puis pratiquement lui garantir que la demande de renseignements a déjà été transmise. Si elle ne l'a pas été, je veillerai à ce qu'elle le soit aujourd'hui.

Le sénateur Forrestall: Je vous en remercie.


ORDRE DU JOUR

LA SANCTION D'UNE ACTION MILITAIRE CONTRE L'IRAK EN CONFORMITÉ AVEC LE DROIT INTERNATIONAL

MOTION—SUITE DU DÉBAT

L'ordre du jour appelle:

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Roche, appuyée par l'honorable sénateur Taylor:

Que le Sénat prenne note de la crise entre les États-Unis et l'Irak et confirme l'urgent besoin, pour le Canada, de se conformer au droit international en vertu duquel, en l'absence d'attaque ou de menace imminente d'attaque, seul le Conseil de sécurité des Nations Unies a le pouvoir de déterminer le respect de ses résolutions et de sanctionner une action militaire.—(L'honorable sénateur Taylor).

L'honorable Nicholas W. Taylor: Honorables sénateurs, j'interviens pour parler de la motion de notre honorable collègue de l'Alberta, le sénateur Roche. La plupart des Canadiens appuieraient cette motion. On craint, au pays, que nous risquions d'oublier la règle de droit pour penser plutôt à la règle du plus fort.

(1430)

On pourrait dire que nous devrions appuyer inconditionnellement les États-Unis. De toute évidence, ils sont nos amis. Comme quelqu'un l'a dit un jour, ils sont nos amis qu'on le veuille ou non. En fait, on leur rendrait un mauvais service en ne soulignant pas de temps à autre qu'il existe d'autres façons de procéder. Je suppose que ce n'est pas mauvais de mentionner de temps à autre au joueur le plus costaud de l'équipe de football, ou au petit dur dans la cour d'école, qu'on peut toujours avoir recours à la diplomatie au lieu d'employer la force brute. Quand on dispose d'autant de moyens que l'administration américaine peut en avoir à sa portée, il arrive qu'on ait tendance à choisir la manière rapide et dure pour régler le problème.

Je m'intéressais particulièrement à l'Irak parce que j'ai passé quelques années comme géologue à différents endroits du Moyen- Orient. Je sais donc que le pétrole pèse très lourd quand on parle de politique. Je me souviens que, jeune géologue, je travaillais en Iran en 1952 quand les Russes, les Américains et les Britanniques ont envahi ce pays, qui n'était pas alors bien armé, pour rétablir le shah. Il n'a pas duré longtemps par la suite. Comme vous le savez, il a plus tard été remplacé par l'ayatollah. Le pétrole était au centre de cette invasion. La vieille société de prospection d'Arcy, créée par Churchill et devenue plus tard la British Petroleum, puisait beaucoup de son pétrole en Iran. Comme le temps passait au Moyen-Orient, une autre crise s'est annoncée lorsque la nationalisation des sociétés pétrolières a commencé en Arabie Saoudite, en Libye, et cetera. Quand l'Iran a nationalisé la société pétrolière pour former la Société nationale des pétroles iraniens, les autres sociétés se sont demandé pourquoi elles se suffiraient de quelques cents le baril quand les promoteurs des États-Unis et de l'Europe occidentale pouvaient extraire le pétrole, l'envoyer dans un pays n'ayant pas d'impôt sur le revenu, comme les Bermudes, les Bahamas ou le Luxembourg, monter le prix de 1,50 $ à 10 $ ou 11 $, puis le vendre aux raffineries de leur propre pays, pour qu'elles le revendent aux consommateurs?

Le pétrole était très important dans l'économie du Moyen-Orient. Le fait que les sociétés privées ont été expulsées de l'Iran a donné l'exemple. Les sociétés pétrolières d'État ont joué un grand rôle dans la hausse du prix du brut, lors de la première crise du pétrole, lorsque ces prix ont grimpé de 2 $ à 10 $ ou 11 $ le baril. Bien sûr, vous pouvez imaginer la stupéfaction des responsables des sociétés pétrolières nationales du Moyen-Orient quand nous avons accepté la hausse à 10 $ et l'avons tout simplement transmise aux consommateurs, qui l'ont acceptée tout aussi facilement. L'idée que le prix du pétrole peut être augmenté presque à l'infini est vraiment troublante. L'OPEP tente encore aujourd'hui de composer avec cette idée. La réalité, c'est que, quand vous achetez un litre d'essence, au Canada, aux États-Unis ou en Europe occidentale, une petite fraction du prix revient au Moyen-Orient ou au pays où le pétrole a été extrait. Le reste, ce sont des taxes.

Je n'essaie pas de présenter un schéma détaillé de la situation en Irak. Bien entendu, quand l'Irak a envahi le Koweït, nous avons évalué la situation et avons accepté la notion qu'il s'agissait d'un grand tyran qui prenait possession d'un petit pays voisin plutôt que la notion qu'il s'agissait d'un grand tyran qui possédait déjà un tiers des réserves de pétrole du Moyen-Orient. En occupant le Koweït, l'Irak aurait augmenté ses réserves de 10 à 15 p. 100 de plus. Ainsi, il aurait été bien placé pour manœuvrer l'OPEP et peut-être exiger de hausser le prix du pétrole exporté aux États-Unis.

Même si beaucoup de gens avaient l'impression qu'en allant au Koweït, nous allions au secours d'un petit pays, il est important d'être honnête à ce sujet: le gouvernement de l'émir du Koweït n'était pas exactement un modèle de démocratie, et il ne l'est toujours pas. Les femmes ne sont pas admissibles au Parlement koweïtien. Les membres de ce Parlement ne sont pas élus. Quoi qu'il en soit, nous sommes allés là et avons châtié l'Irak pour avoir tenté d'étendre son contrôle de l'industrie pétrolière.

Je suis inquiet quand nous parlons aujourd'hui d'attaquer l'Irak: le ferons-nous parce que Saddam Hussein est dangereux pour les autres ou bien parce que nous voulons nous assurer que les réserves de pétrole du Moyen-Orient restent à notre disposition en Europe occidentale et en Amérique du Nord?

Examinons les faits. Pendant des années, les Américains ont financé et armé Saddam Hussein quand il faisait la guerre à l'Iran, probablement pour la raison même pour laquelle les Américains et les Britanniques étaient allés en Iran 1952, c'est-à-dire pour s'assurer que le pétrole iranien demeurerait à la disposition de l'Amérique du Nord. Même si Saddam Hussein n'a pas réussi à battre l'Iran, il a réussi à se constituer une armée aux frais des États-Unis, armée dont il s'est ensuite servi pour essayer d'occuper le Koweït.

Je ne peux comprendre cet aspect du traité de paix qui a donné aux Britanniques et aux Américains le droit de survoler certaines zones de l'Irak. En fait, ils survolent tous les jours près des deux tiers du territoire irakien. Environ une fois par semaine, selon les Américains eux-mêmes, ils lâchent des bombes sur l'Irak quand ils pensent qu'ils ont une bonne raison de le faire. Parfois, les bombes ne visent que des installations radar, mais on sait qu'ils ont en fait bombardé des installations radar commerciales dans des aéroports. Voici ce que je me dis: «Comment Saddam Hussein serait-il en train de s'armer jusqu'aux dents si nous survolons son territoire tous les jours?» Il est difficile de savoir ce qui se passe et de déterminer comment il peut soudain avoir des armes à la main quand les

Britanniques et les Américains survolent et bombardent l'Irak. Comment Saddam Hussein peut-il avoir à portée de la main de quoi menacer le monde entier, ou du moins disposer d'armes de destruction massive? Personne n'est allé jusqu'à dire qu'il a les vecteurs nécessaires pour envoyer ces armes à destination.

Un des autres arguments que le public invoque régulièrement c'est que Saddam Hussein est peut-être en train d'élaborer une bombe atomique. Ce n'est plus un secret bien gardé à l'heure qu'il est. Je veux citer un éditeur et rédacteur de la publication Smoky Lake Signal. C'est un petit journal publié dans une localité du nord-est de l'Alberta. L'éditeur en question s'appelle Lorne Taylor. Il n'y a aucun lien de parenté entre nous. Pour une raison que j'ignore, le nom Taylor semble très courant en Alberta. Nous avons dû avoir des ancêtres prolifiques dans les Prairies à une certaine époque. Quoi qu'il en soit, pour autant que je sache, nous ne sommes pas apparentés. Il vient d'une famille d'intellectuels et d'érudits qui était propriétaire de journaux partout en Alberta. Je cite un extrait de son éditorial:

Nous espérons que Saddam Hussein permettra aux inspecteurs en désarmement de l'ONU d'entrer en Irak. On craint en fait qu'il ne s'apprête à élaborer une bombe nucléaire

Toutefois, les armes de destruction de masse ne se trouvent pas uniquement dans les républiques fantasques. À l'heure actuelle, on compte dans le monde 35000 armes nucléaire, possédant une puissance explosive équivalant à 700000 fois la bombe larguée sur Hiroshima. Il n'y a tout simplement pas assez d'inspecteurs en désarmement pour qu'il soit possible de tout voir. Pendant la guerre froide, les États-Unis, dans leurs mesures préventives, ont produit 10656 bombes. On estime que la Russie possède pour sa part encore 10000 bombes, la Chine, 400 et la France, 350. Israël en aurait apparemment plus de 200, le Royaume-Uni, 185, l'Inde, 60 et le Pakistan, entre 24 et 48.

Il y a suffisamment de bombes pour faire trembler la terre et faire rôtir tous ceux qui s'y trouvent, même sans Saddam Hussein.

(1440)

L'idée de cibler un dictateur, un désaxé, dans un monde rempli de désaxés, dont j'exclus le Canada, afin de lui donner une leçon n'a pas de sens. Qu'on se le dise, ses voisins possèdent l'arme atomique. En effet, le Pakistan et Israël possèdent des bombes atomiques, et on n'a aucune garantie quant à ce qui pourrait se passer là-bas. De nos jours, tout le monde a la capacité de fabriquer une bombe atomique.

Que l'on pense à la réaction des intégristes musulmans dans le monde entier si Saddam Hussein était attaqué. Peu importe l'opinion que nous avons des intégristes musulmans, ceux-ci ont une grande influence dans des pays comme l'Égypte. Je fais pas mal d'affaires au Caire, et je sais que les intégristes musulmans essaient de renverser le gouvernement égyptien. C'est un des problèmes de l'Égypte, d'ailleurs. On sait par ailleurs à quel point les intégristes musulmans sont fanatiques en Indonésie. Dans certaines régions que ces intégristes contrôlent, les chrétiens courent des risques dès qu'ils mettent le nez dehors.

Le Pakistan compte aussi ses intégristes musulmans. On prend le Pakistan pour un «grand modèle» de démocratie, alors que l'opposition est interdite et qu'une seule formation politique peut se présenter aux élections dans ce pays. Or, le Pakistan, qui ne tolère aucune opposition électorale et qui possède l'arme atomique, est néanmoins notre ami. Je rappelle aux honorables sénateurs que Saddam Hussein était aussi notre ami il y a quelques années.

Ce qui je veux dire, c'est qu'on ne peut attaquer un pays juste parce qu'on pense qu'il n'est peut-être pas engagé dans la voie qu'on souhaiterait. Je soutiens qu'il y a d'autres façons de régler la question.

Néanmoins, je serais disposé à suivre, quoique avec réticence, si les Nations Unies devaient voter en faveur d'une résolution permettant d'attaquer l'Irak parce que Saddam Hussein bloque le travail des inspecteurs. Chose certaine, la dernière chose que nous devrions faire, c'est emboîter le pas juste parce que les Américains le souhaitent. Les États-Unis peuvent le suggérer, ils peuvent faire bien d'autres choses, mais n'attaquons pas militairement l'Irak sans l'aval des Nations Unies.

L'honorable Bill Rompkey: Honorables sénateurs, j'ai écouté attentivement le sénateur Taylor et je voudrais souscrire à la motion. Cependant, je me demande si le sénateur pourrait nous parler de l'ONU elle-même, de sa constitution, de son bilan, car ce qui m'inquiète, c'est l'efficacité de l'ONU elle-même. Je comprends que l'ONU est la seule institution de cette nature que nous ayons, mais si nous devions demander au major-général Lewis MacKenzie et au général Dallaire de nous dire ce qu'ils pensent de son efficacité, ils pourraient avoir des observations intéressantes à formuler.

Ma question au sénateur est celle-ci: combien de temps attendons- nous avant que la seule organisation que nous ayons prenne des mesures efficaces, étant donné son bilan? Il y a au pouvoir en Irak un homme qui, c'est évident, ne peut être contrôlé à l'intérieur de son propre pays. On sait que personne en Irak ne peut empêcher Saddam Hussein d'agir. Il n'y a personne dans cette région du globe qui veuille prendre des mesures.

Le sénateur Taylor: Honorables sénateurs, ce sont-là d'excellentes questions. Je vais essayer de répondre à la dernière en premier lieu. Je vais utiliser la réponse que m'a donnée un de mes amis au sein du gouvernement iranien lorsque j'étais à Téhéran la dernière fois. Il m'a demandé: «Qui allez-vous mettre à sa place?» Il tient en quelque sorte la balance du pouvoir entre les musulmans chiites au sud et les Kurdes au nord.

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, je suis obligé de signaler que le temps de parole du sénateur Taylor est écoulé. Le Sénat lui permet-il de terminer sa réponse à la question?

Des voix: D'accord.

Le sénateur Taylor: Comme je le disais, mon ami dans le gouvernement iranien demandait: «Qui allez-vous mettre à sa place?» «Au moins il contrôle le pays», a dit mon ami. C'est là la position d'un pays qui l'a combattu pendant huit ans. Selon mon ami, malgré tous ses défauts, Saddam Hussein arrivait quand même à stabiliser la région, lorsqu'on sait qu'il y a les Saoudiens d'un côté, les Turcs de l'autre et les Kurdes et le reste ailleurs. Autrement dit, si méchant soit-il, il a une influence stabilisatrice.

Quant à l'efficacité de l'ONU, celle-ci a plutôt bien fait en Corée.

En Bosnie, l'ONU a été menottée en partie, privée de la coopération des États-Unis et d'autres pays. Les États-Unis et l'OTAN ont agi sans elle lorsqu'ils ont attaqué les Yougoslaves au Kosovo, et je ne vois pas comment cela a pu améliorer la situation.

Je pense qu'à long terme, que cela nous plaise ou non, il faut observer la règle de droit. Dans notre propre société, la police ne punit pas toujours les contrevenants comme nous le voudrions et aussi souvent que nous le voudrions, mais, de façon générale, il est préférable que nos tribunaux et nos services de police soient assujettis à ce genre de mécanismes de contrôle, au lieu d'avoir le pouvoir de rendre la justice comme bon leur semble.

(Sur la motion du sénateur Rompkey, le débat est ajourné.)

[Français]

LE SÉNAT

LE COMITÉ DES LANGUES OFFICIELLES—LA MODIFICATION À L'ARTICLE 86 DU RÈGLEMENT—ADOPTION DE LA MOTION

L'ordre du jour appelle:

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Gauthier, appuyée par l'honorable sénateur Gill:

Que le Règlement du Sénat soit modifié, à l'article 86:

par le remplacement de l'alinéa (1)e) de ce qui suit:

«Langues officielles

(e) Le Comité permanent des langues officielles, composé de neuf membres, dont quatre constituent le quorum, auquel peuvent être renvoyés, sur décision du Sénat, les projets de loi, messages, pétitions, interpellations, documents et autres matières concernant les langues officielles en général.»; et

Qu'un message soit transmis à la Chambre des commune pour l'informer que le Sénat ne participera plus au Comité mixte permanent des langues officielles.—(L'honorable sénateur Comeau).

L'honorable Gerald J. Comeau: Honorables sénateurs, je voudrais revenir au moment de la mise sur pied du Comité mixte des langues officielles. En grande partie, le comité a été conçu pour tenter de ralentir l'assimilation des francophones hors Québec et pour trouver des moyens de contribuer à la survie des communautés minoritaires, anglophones au Québec et francophones ailleurs.

Au tout début, les membres du comité comprenaient très bien les enjeux. Siègeaient alors à la Chambre des communes les conservateurs, les libéraux et les néo-démocrates. Les trois partis étaient d'accord sur la mission du comité, et la fondation même du Canada n'était pas remise en question.

Nous devions voir à ce que la Loi sur les langues officielles réponde aux besoins de nos communautés minoritaires. Nos divergences portaient souvent sur les moyens utilisés pour répondre à ces besoins.

(1450)

À l'époque, nous avions de grands champions, des gens de conviction qui comprenaient bien les enjeux. Des gens tels Jean- Robert Gauthier, Jean-Maurice Simard, les sénateurs Gildas Molgat, Louis-J. Robichaud, Serge Joyal et bien d'autres prêchaient la valeur des deux langues officielles.

J'ai moi-même siégé au comité à cette époque. C'était un honneur et un privilège d'être aux côtés de ces grands champions de la langue toujours prêts à montrer aux nouveaux arrivés comment contribuer au comité et comment prendre la relève.

Par contre, avec l'arrivée du Bloc québécois et des réformistes, tout a changé. En 1993, le Bloc québécois formait l'opposition officielle à la Chambre des communes. C'était un groupe de séparatistes qui voulaient démontrer que le Canada n'était pas viable et que les politiques sur les langues officielles et la protection des minorités linguistiques ne fonctionnaient tout simplement pas.

Les séparatistes profitaient de toutes les occasions pour dénigrer les minorités francophones. Ils nous ont traités de «dead ducks» et de «cadavres chauds», en passant par «Ils sont finis, ces francophones hors Québec». Encore aujourd'hui, les séparatistes distinguent le Québec du Canada anglais et donnent encore l'impression que le Québec est francophone et que le reste du Canada est anglophone. Depuis 1993, les séparatistes sont appuyés par le Parti réformiste, parti doctrinaire anti-français, désireux que le Canada soit divisé par un Québec francophone. On nous arrive maintenant avec des expressions aussi intéressantes que «territorial bilingualism».

En somme, peu de choses ont changé et un de ces deux partis régionaux forme l'opposition officielle à la Chambre des communes. On rêve en couleur en faisant appel au Bloc québécois et aux réformistes pour aider les minorités linguistiques. Pour leur part, les membres du Parti conservateur et du NPD ne possèdent pas les ressources humaines nécessaires pour travailler à l'avancement des communautés minoritaires. Depuis 1993, les communautés sont négligées par les partis de l'opposition et, pendant tout ce temps, le taux d'assimilation ne cesse d'augmenter.

J'apprécie le travail du sénateur Shirley Maheu et du député Mauril Bélanger. Je constate toutefois qu'ils sont limités par ces deux partis dont les intérêts diffèrent de ceux de nos communautés linguistiques.

J'aimerais féliciter M. Mauril Bélanger et le sénateur Shirley Maheu pour leur excellent travail, plus particulièrement dans le but d'assurer que la télédiffusion de La Soirée du hockey se poursuive au Canada. Ils travaillent actuellement à assurer un meilleur accès à des soins de santé en français au Canada.

Mauril Bélanger est un homme très dévoué. Cet été, il a pris de son temps personnel pour effectuer une tournée des régions acadiennes. Cela témoigne bien de sa contribution à la cause des communautés minoritaires au Canada.

Par contre, j'ai quelques problèmes avec l'idée de continuer à participer à un Comité mixte des langues officielles. Au Comité du Règlement, de la procédure et des droits du Parlement, certains sénateurs ont fait des commentaire selon lesquels le Sénat appuyait cette idée. Les quelques sénateurs qui ont été invités à présenter leurs commentaires au comité sont tous des Québécois. J'ai moi-même demandé à comparaître devant ce comité et je n'ai pas été invité. Il faut nuancer ces propos lorsqu'on dit que tous les sénateurs sont d'accord avec le fait de continuer avec le comité mixte parce que ce n'est pas le cas.

Tous les sénateurs doivent comprendre que les défis et les problèmes du Québec ne sont pas les mêmes que ceux des régions isolées qui, pour la plupart, sont des régions en situation minoritaire. Il est beaucoup plus facile d'être francophone à Québec que de l'être en Nouvelle-Écosse ou à l'Île-du-Prince- Édouard. Les infrastructures du Québec ne sont pas aussi disponibles dans ces provinces.

Je retourne souvent dans ma communauté francophone de la Nouvelle-Écosse et chaque fois, je vois les ravages de l'assimilation et de l'anglicisation. La situation semble se propager à l'Île-du- Prince-Édouard, à Terre-Neuve et à plusieurs communautés de l'Ouest canadien. Je crains parfois qu'il ne soit trop tard pour stopper le processus d'assimilation.

Le Sénat proclame qu'il est là pour protéger les communautés minoritaires. Il y a même un petit livret du Sénat qui dit que l'institution existe dans le but de protéger les intérêts des communautés autochtones et des communautés francophones hors Québec. Peut-être le Sénat devrait-il prêcher ce qu'il publie dans ses petits livrets.

Dans le passé, j'ai souvent donné le bénéfice du doute au Comité mixte des langues officielles. J'ai même été coprésident du comité pendant un certain temps. Pour être bien franc, j'ai bien vu que ce comité ne fonctionnait pas du tout et j'ai demandé à être retiré du comité. J'avais perdu confiance et espoir qu'un tel comité fasse avancer les intérêts des minorités linguistiques.

L'argument avancé par la Chambre des communes selon lequel les élus représentent des intérêts qui ne sont pas représentés au Sénat me semble évident. Il n'y a pas de séparatistes au Sénat et leurs arguments ne m'intéressent pas. Ils ne croient pas à un Canada uni. Je suis fatigué des réformistes qui s'inquiètent de l'anglais sur les boîtes de céréales et qui ne cessent de parler de bilinguisme territorial.

Avec l'arrivée des partis régionaux, certains d'entre nous avons tenté de combler les lacunes du Comité mixte des langues officielles, devenu moins viable, en créant un caucus. Je faisais partie de ce caucus qui était composé de députés et de sénateurs qui se rencontraient une fois par semaine.

Nous avions embauché l'ancien commissaire aux langues officielles, D'Iberville Fortier, et nous avions baptisé notre groupe «Le groupe Louis-J. Robichaud» parce que Louis-J. Robichaud en était le fondateur. Des conservateurs, des libéraux et des membres du NPD faisaient partie du groupe et ils écoutaient tous ceux qui ne bénéficiaient pas d'une oreille attentive au comité mixte.

(1500)

Malheureusement, ce groupe est stagnant depuis un certain temps. Ce n'est pas par manque d'intérêt, mais plutôt parce que nous avonsperdu plusieurs des grands de ce comité dont les sénateurs Simard, Molgat, Duhamel, ainsi que le sénateur Gauthier en raison de problèmes de santé et Roméo LeBlanc, qui a été nommé gouverneur général. Par contre, les membres du groupe Robichaud ont pu apporter une très bonne contribution mais c'est un comité ad hoc et ce n'est peut-être pas le moyen idéal pour répondre aux besoins des communautés.

Le Sénat doit prendre sa responsabilité au sérieux, offrir un forum d'écoute et être sensible aux besoins réels des communautés minoritaires au Canada. Le talent de nos sénateurs est réduit lorsqu'ils doivent discuter des mérites d'un Canada uni ou des inscriptions des boîtes de céréales en anglais. Notre crédibilité en tant que défenseurs des communautés minoritaires peut être

diminuée si on joue à ces jeux. Souvent, les communautés se tournent vers des moyens inhabituels pour faire avancer leurs dossiers — l'approche d'un parti seul ou du Parti libéral — et ce n'est pas la solution. Ils devraient pouvoir se présenter devant un groupe formé du Parti libéral et d'autres partis afin que nous puissions examiner les problèmes de tous les intervenants. Nous devons aussi éviter que ces groupes aient recours aux moyens judiciaires — ce qui arrive trop souvent — pour obtenir satisfaction.

[Traduction]

Les grands penseurs bloquistes et réformistes rêvent d'un Québec francophone et d'un Canada entièrement anglophone en dehors du Québec. Je trouve qu'il s'agit du pire scénario possible pour l'unité canadienne.

Pour paraphraser la ministre Fry, je dirais que de nombreuses communautés au Canada sont en voie d'être anglicisées. Nous avons une décision à prendre. Nous pouvons continuer d'avoir un comité mixte affaibli par des partis d'opposition séparatistes et régionaux, ou accepter notre responsabilité et notre obligation de répondre aux besoins de la minorité linguistique au Canada.

Le Sénat a le talent et l'expérience nécessaires pour faire une différence. Le comité mixte a mal tourné en 1993. Des progrès ont été accomplis au cours des derniers mois grâce au tenace leadership des sénateurs Maheu et Bélanger, mais pourra-t-on continuer dans la même voie?

[Français]

Nous devons créer un comité sénatorial qui répondra aux besoins de nos communautés. Pour ces raisons, j'appuie la motion et l'initiative du sénateur Gauthier.

[Traduction]

L'honorable Joan Fraser: Honorables sénateurs, je n'avais pas l'intention d'intervenir à ce stade-ci, mais le sénateur Comeau m'a inspirée.

J'ai aussi participé aux travaux du comité mixte; je n'y consacre pas autant de temps que bon nombre de mes collègues, mais j'y suis assez présente pour me former une opinion à ce sujet.

J'ai été particulièrement frappée par la description de la dynamique qui existe au sein du comité selon le sénateur Comeau en raison du nombre de partis de l'autre endroit devant y être représentés. Je reconnais que cette situation a été à l'origine de problèmes. Si c'étaient les seuls problèmes, j'hésiterais encore devant la proposition du sénateur Gauthier, car j'estime qu'une situation temporaire ne justifie pas que l'on modifie une chose aussi fondamentale que la structure des comités.

Plus je réfléchis à la question, plus je suis convaincue qu'un comité mixte de cette nature comprend des difficultés intrinsèques. Les comités mixtes fonctionnent le mieux lorsqu'ils examinent des questions directement liées au Parlement. À titre d'exemple, le Comité mixte permanent de la Bibliothèque du Parlement fonctionne bien, tout comme le Comité mixte permanent d'examen de la réglementation.

Le Comité mixte permanent des langues officielles est dans une situation légèrement différente. Un de ses problèmes inhérents, c'est qu'il ne peut étudier de mesures législatives parce que ces dernières doivent passer par les comités de chacune des chambres et non par le comité mixte.

Ce fait m'a frappée au cours de la dernière session de la législature, lorsque le Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles s'est livré pendant une longue période à une étude rigoureuse d'un projet de loi ne portant que sur des questions de langues officielles, en particulier des règlements ou d'autres ordonnances du gouvernement susceptibles de n'avoir été publiés que dans une langue. Le comité du Sénat a accompli de l'excellent travail dans le cas de ce projet de loi. Les amendements apportés par le comité ont renforcé le projet de loi et ont servi la cause de la justice linguistique au pays. Toutefois, n'aurait-il pas été préférable de renvoyer ce projet de loi à un comité des langues officielles ayant acquis des années d'expérience?

Des projets de loi concernant les minorités de l'une ou l'autre langue officielle sont étudiés au Sénat. Un comité mixte est limité dans la mesure où, en bout de piste, il n'a pas le mandat d'examiner des mesures législatives. Il est sans doute plus limité à l'autre endroit qu'il ne l'est ici si l'on s'arrête à l'attention que recevront ses propositions de la part des personnes au pouvoir, parce que ce comité n'a pas de pouvoir. Il ne peut que faire des recommandations. Il ne peut pas bloquer un projet de loi. Pour ces raisons, il serait donc positif qu'un comité sénatorial dispose des pouvoirs normaux d'un comité sénatorial.

Je regrette beaucoup de le dire, mais c'est vrai. Compte tenu de cela, il serait merveilleux de pouvoir seulement poursuivre avec un comité mixte vraiment efficace. Je suis d'accord avec les sénateurs qui ont fait remarquer que, ces derniers mois, peut-être parce que l'autre endroit a reçu un coup de fouet en apprenant ce qui se passait ici, ce comité a mieux travaillé que la dernière fois où j'en faisais partie. J'en suis venue néanmoins à croire qu'un comité sénatorial serait peut-être plus productif.

Je nourris à l'égard de ce comité un seul souhait et une seule petite préoccupation. J'espère sincèrement que, dans ses délibérations, il se souviendra qu'il n'y a pas que des minorités francophones au Canada, mais aussi des minorités anglophones, comme la communauté que je représente ici.

Compte tenu de la nature du Sénat, notre communauté sera toujours moins bien représentée que les francophones hors Québec, car le Sénat vise à représenter les provinces. Il y a des minorités francophones dans bien des provinces, mais une minorité anglophone dans une seule province. Par conséquent, nous serons toujours moins nombreux ici.

Il importe beaucoup que les honorables sénateurs qui siègent à ce comité se rappellent qu'il y a une minorité anglophone au Québec et que, en dépit des mythes qui y sont associés, elle a aussi de sérieux problèmes.

Le sénateur Comeau a rappelé certaines des étiquettes accolées aux francophones «hors Québec», comme on dit: cadavres chauds, «dead ducks». Notre étiquette à nous est celle de Rhodésiens blancs, comme certains le savent peut-être. Les étiquettes ne sont pas plus exactes pour les anglophones que pour les francophones.

(1510)

Nous avons vécu des ajustements déchirants depuis une génération, et c'est loin d'être terminé. Il y a des questions relevant tout à fait de la compétence fédérale qui méritent d'être examinées, par exemple la sous-représentation spectaculaire des anglophones dans la fonction publique au Québec, même si les anglophones au Québec affichent un très haut niveau de bilinguisme, de sorte que la compétence linguistique n'est plus un obstacle comme elle l'a peut-être été dans le passé.

À l'instar des communautés francophones à l'extérieur du Québec, notre communauté vit aussi d'autres problèmes. Ainsi, beaucoup de sénateurs ne le savent peut-être pas, mais l'assimilation n'est pas un problème qui touche seulement les francophones. Dans des régions du Québec à l'extérieur de Montréal et à l'extérieur de la région de la capitale nationale, je suppose, ce sont les anglophones qui se font assimiler, et cela a des répercussions directes sur les services dispensés à notre communauté dans l'ensemble du Québec.

De plus, en raison de la situation unique du Québec à titre de foyer de la minorité francophone en Amérique du Nord, les politiques provinciales sont souvent très largement axées sur les besoins légitimes des francophones, ce qui a parfois des répercussions dramatiques pour les anglophones. Ainsi, les services de santé offerts aux anglophones en anglais, particulièrement à l'extérieur de la région de Montréal, se heurtent souvent aux exigences législatives provinciales stipulant que tout le monde doit pouvoir s'exprimer en français, y compris ceux qui offrent des soins aux anglophones.

Le gouvernement fédéral ne peut modifier les lois provinciales, et je ne voudrais pas non plus qu'il tente de le faire, mais il peut influer sur les modes de dépense, par le biais de ses programmes de financement.

Voilà des questions sur lesquelles se penchera, je l'espère, le comité sénatorial, une fois qu'il sera créé, ce dont je ne doute pas. Les besoins des minorités francophones hors Québec font désormais partie intégrante de la réalité de notre pays et nous ne devons jamais les oublier. Nous manquerions à notre devoir si nous négligions ces besoins, mais je crois que la même chose vaut pour les besoins de ma minorité.

L'honorable Tommy Banks:Madame le sénateur Fraser accepterait-elle de répondre à une question?

Le sénateur Fraser:Certainement.

Le sénateur Banks: Je crois, moi aussi, que le Sénat formera un tel comité. C'est l'une des premières choses que j'ai entendues ici, à mon arrivée, et je ne me permettrais certainement pas d'aller à l'encontre d'une opinion qui semble presque faire l'unanimité chez les sénateurs. Cependant, quand on démolit une maison branlante, il n'est pas mauvais d'examiner celle qui la remplacera.

Mardi dernier, j'ai posé une question au sénateur Gauthier à savoir quelle importance prendrait le comité mixte qui va maintenant sans aucun doute se scinder en deux comités distincts. J'ai reçu hier un document auquel j'ai porté une grande attention. Le comité mixte permanent se distingue non seulement par le fait qu'il ne peut étudier de mesures législatives, mais aussi par certaines

des tâches dont il doit s'acquitter. Il doit revoir l'application de la Loi sur les langues officielles et tous les règlements d'application pertinents, ainsi que les rapports du commissaire aux langues officielles, du président du Conseil du Trésor ainsi que du ministère du Patrimoine canadien qui sont rédigés en vertu de cette loi.

Lorsque j'ai soulevé cette question au sujet du comité auprès du sénateur Gauthier, il a répondu, avec raison, que le Sénat pouvait prendre les mesures qu'il jugeait souhaitables lorsqu'il créait un comité et que nous n'avons, en aucun cas, les mains liées par cette loi. Cependant, je répète que la loi ne précise pas que deux comités seront investis de ces responsabilités d'examen. Si l'on se reporte à la version française de cette référence dans la loi, elle dit que le Parlement désignera ou établira «un comité». Je crois que c'est clair comme de l'eau de roche.

En conséquence, «un» comité parlementaire se verra confier la tâche de l'examen continu de toutes les questions dont j'ai parlé précédemment et qui ont trait à la Loi sur les langues officielles. Le problème, c'est que le comité qui fera tout ce qui est énoncé dans la loi sera un comité de la Chambre des communes.

Le sénateur croit-il qu'il soit possible que ces responsabilités qui sont énoncées dans la Loi sur les langues officielles puissent être confiées au comité du Sénat, qui, je n'en doute pas, ferait de l'excellent travail? Parmi ces tâches, on compte, je l'espère, la protection de la minorité francophone de ma province, qui est non négligeable et importante pour moi, et je sais qu'il en va de même de ma collègue de la Saskatchewan.

Le sénateur Fraser: C'est une question intéressante. D'abord, en ce qui concerne le texte français, d'après ma connaissance de la langue française, «un comité» est la seule façon de rendre «a committee» ou «one committee». Il n'y a pas de distinction possible entre les deux en français.

Je ne suis pas avocate, mais je pense que la loi n'est pas nécessairement restrictive. En fait, elle dit au Parlement qu'il doit y avoir au moins un comité.

Quoi qu'il en soit, le Sénat est libre de créer le comité de son choix et de lui confier le mandat de son choix. J'estime que ce serait une bonne chose qu'il y ait deux comités, mais si, par malheur, il ressort de ce débat qu'il n'y en avait qu'un seul et que ce fût notre comité, je pense qu'il pourrait faire de l'excellent travail.

Peu importe ce que les gens pensent du Sénat en général, les comités sénatoriaux sont réputés partout pour accomplir du travail de premier ordre, du travail solide, approfondi et d'une grande portée. Je ne vois pas pourquoi ce comité ne pourrait pas perpétuer cette tradition.

[Français]

L'honorable Pierre Claude Nolin: Honorables sénateurs, j'aurais quelques commentaires à faire. C'est avec intérêt que j'ai lu ce document, même si la distribution en avait été maladroite. Il n'en reste pas moins que le document a circulé. Je suis entièrement d'accord avec les commentaires des sénateurs Comeau et Fraser.

Je viens de vivre une expérience au sein du Comité spécial sur les drogues illicites, où nous avons démontré que le Sénat peut traiter avec rigueur, profondeur, précision et exactitude de questions très controversées.

L'histoire de notre pays nous a démontré que la question linguistique, que l'on appelait à l'époque la question religieuse, a été au coeur de l'entente fédérale. Toutefois, si on lit bien les textes de nos prédécesseurs on comprend qu'il s'agit bien de la question linguistique.

Relisez les textes des parlementaires de l'époque, surtout ceux des Québécois, et même ceux de certains parlementaires anglo- ontariens, et vous comprendrez que le contrat fédéral prenait son fondement dans le respect que nous devions accorder à cet équilibre.

Mes collègues ont mentionné leur expérience de vie. Ils ont aussi mentionné des terminologies irrespectueuses de cette réalité linguistique minoritaire. Ne serait-ce que pour ces raisons, le Sénat, qui est à l'abri de la chaleur partisane, devrait réfléchir rigoureusement et intelligemment à des questions qui sont à l'occasion très controversées.

C'est notre devoir, ce n'est pas juste une question d'avoir le droit de le faire, c'est notre devoir.

(1520)

J'ai participé à quelques occasions aux réunions du comité mixte. J'éprouve beaucoup de respect pour les députés qui y ont participé avec assiduité, même pour ceux du Bloc québécois. Je pense, entre autres, au coprésident, M.Bélanger, qui a tout mon respect.

La formule ne fonctionne pas. Lorsque cela devient trop litigieux, la partisanerie s'empare du comité. On en est alors réduit à accepter des demi-mesures qui ne sont pas à la hauteur de notre mandat. Le respect est au coeur de l'entente fédérale et de ce que mes ancêtres ont accepté. Si cela n'avait pas été de ce respect, mes ancêtres n'auraient pas accepté le pacte fédéral. S'il y a une Chambre qui peut maintenir ce respect, c'est bien le Sénat.

Dans le document distribué hier, il y a un argument qui pourrait aveugler quelqu'un qui ne s'y arrête pas. Dans la fameuse Loi sur les langues officielles— et le sénateur Banks vient de poser une question fort à propos, — en français, lorsqu'on dit «un», ce n'est pas limitatif. «Un» veut dire «au moins un». Sinon, on aurait tenté de l'écrire différemment en français. On aurait pu dire «au comité» et cela pourrait être un comité du Sénat ou un comité de l'autre endroit.

Comme le disait le sénateur Fraser, si nous sommesconsciencieux — et je suis convaincu que nous sommes capables de faire un travail rigoureux, sérieux et en profondeur —, c'est le comité du Sénat qui prévaudra à la longue.

Revenons à la loi. Lorsque je lis la motion du sénateur Gauthier, il ne parle pas de la Loi sur les langues officielles. Il nous parle de créer un comité du Sénat pour examiner les questions de langues officielles. Cela signifie que toutes les questions de langues officielles — surtout celles qui posent problème — pas uniquement les questions liées à la Loi sur les langues officielles qui, de toute évidence, devront être incluses dans le mandat de ce comité permanent du Sénat.

Quand y a-t-il de l'ébullition dans la question linguistique? Pas quand cela va bien, mais plutôt quand cela va mal! Au Québec, la question francophone ne pose pas de grave problème. Par contre, j'admets que pour la communauté minoritaire anglophone, la question linguistique peut à l'occasion poser des problèmes. En tant que francophone, lorsque je vais à l'extérieur du Québec, je me fais un devoir de syntoniser les stations de radio de la Société Radio- Canada en français parce que pour moi, c'est le dernier poumon qui reste à la communauté francophone qui vit à l'extérieur du Québec pour survivre. Lorsqu'on se promène dans certaines provinces, la réalité francophone, si ce n'était pas de la Société Radio-Canada, serait difficile à identifier.

Notre devoir est d'empêcher le sénateur Comeau de tomber dans l'aveu selon lequel la bataille a été perdue et qu'on ne doit pas continuer à faire des efforts. En tant que Québécois, je m'impose. C'est bien de constater qu'il est difficile de vivre en français à l'extérieur du Québec, mais c'est aussi un devoir pour moi, en tant que francophone, de faire tout ce que je peux pour aider ces francophones qui vivent à l'extérieur du Québec. Il nous faut comprendre qu'ils ne sont pas seuls. En tant que sénateur, je me dois d'examiner la question de façon beaucoup plus sérieuse.

La motion du sénateur Gauthier est, selon moi, tout à fait appropriée. Il y a fort longtemps que nous aurions dû retrousser nos manches et décider, quoi qu'il advienne dans l'autre endroit, de faire nos devoirs. Comme nous allons faire un travail sérieux, rigoureux et en profondeur, je suis convaincu que nos recommandations auront l'heur de plaire aux gens de l'autre endroit. S'ils décident d'avoir leur propre comité, tant mieux pour les langues minoritaires à travers le Canada. J'appuie entièrement cette motion.

J'ai lu le document qui nous a été distribué hier et il ne m'a pas impressionné. J'ai du respect pour les coprésidents de ce comité, mais il a été construit de façon beaucoup trop étroite alors que le mandat d'un comité sur les langues officielles doit être très large, à la hauteur des problèmes générés par l'existence des langues officielles au Canada. Il ne doit certainement pas être réduit à l'application et à la réglementation qui découlent d'une seule loi, soit la Loi sur les langues officielles.

L'honorable Gérald-A. Beaudoin: Honorables sénateurs, je suis membre de ce comité mixte depuis au moins deux ou trois ans. Nous avons réussi, dans certains domaines, à atteindre nos objectifs.

Cependant, il y a un problème juridique, en ce sens que la version française de l'article 88 de la Loi sur les langues officielles de 1988 parle d'un comité soit du Sénat, soit de la Chambre des communes, soit des deux. Le texte anglais n'est pas aussi précis. À mon avis, ce qu'on voulait, c'est qu'il y ait un comité. Il y a eu un comité mixte. J'étais membre de ce comité mixte et, à quelques occasions, nous nous sommes interrogés sur la question de savoir si on devait créer un comité sénatorial.

Le Comité des affaires juridiques et constitutionnelles fonctionne admirablement bien au Sénat. À la Chambre des communes, le comité sur la justice fonctionne bien aussi. Donc, il peut y avoir deux comités. Était-ce l'intention du législateur d'empêcher le Sénat de créer un comité dans son domaine? Je ne crois pas. Si on voulait enlever à une Chambre législative comme le Sénat le pouvoir de créer un comité, on l'aurait exprimé de façon beaucoup plus précise. Selon moi, nous pouvons créer un comité du Sénat.

La question qui demeure est celle-ci: est-ce une bonne chose?

Mon expérience au sein du comité mixte m'a appris que notre champ d'étude est tellement vaste qu'il serait possible qu'il existe deux comités. Il est possible aussi que l'un détienne quelques pouvoirs différents de l'autre. Ce n'est pas à exclure. Si on me demande si j'accepte que le Sénat crée un comité sur les langues officielles, ma réponse est oui. J'accepterais un tel comité parce que nous avons des exemples d'autres comités, dans d'autres secteurs — j'ai mentionné le Comité des affaires juridiques et constitutionnelles parce que je le connais très bien— où cette pratique fonctionne très bien.

Je me rappelle que, lors de l'amendement de l'article 93 de la Constitution pour le Québec, un comité mixte coprésidé par le sénateur Lucie Pépin et le député Denis Paradis s'est penché sur la question. Cela a fonctionné à merveille. Un comité mixte a aussiétudié l'amendement constitutionnel pour Terre-Neuve àl'article17.

(1530)

Dans le domaine des langues officielles, devrait-on nécessairement avoir un comité mixte et seulement un? Je ne crois pas. Le Sénat possède une compétence évidente dans ce domaine et si on avait voulu exclure le Sénat, on l'aurait précisé à l'article 88 de la Loi sur les langues officielles.

C'est un domaine extrêmement vaste qui doit nous intéresser beaucoup. Les droits linguistiques sont des droits constitutionnels parmi les plus importants au Canada. Il y en a d'autres, comme le partage des pouvoirs et la Charte des droits et libertés.

J'appuie la proposition du sénateur Gauthier visant la création d'un comité sénatorial en matière de droits linguistiques.

L'honorable Raymond C. Setlakwe: Honorables sénateurs, j'abonde dans le sens du sénateur Beaudoin. Je suis membre du comité mixte depuis presque deux ans. Mon expérience m'a démontré que ce n'était pas si mal d'avoir des contacts avec des membres de l'autre endroit. Cela nous permettait d'avoir une autre conception de leur façon de voir les choses.

J'ai beaucoup de respect pour le sénateur Gauthier et pour le travail énorme qu'il a accompli pour la cause du français, non seulement à l'extérieur du Québec, mais partout au Canada. Je m'incline devant sa très grande sagesse et j'appuie sa motion malgré les réserves que j'ai pu formuler dans le passé.

L'honorable Eymard G. Corbin: Honorables sénateurs, il est évident que j'appuie cette initiative. J'ai été parmi ceux qui, au sein de mon groupe parlementaire, s'est plaint il y a plusieurs années du fonctionnement de ce comité. C'est pour cette raison que j'ai refusé d'en faire partie lorsqu'on me l'a demandé. Le sénateur Murray et moi avons été les premiers à coprésider ce comité. À l'époque, nous

faisions face à plusieurs nouveautés et nous avons dû aborder des questions épineuses et complexes et sensibiliser la fonction publique canadienne ainsi que les agences canadiennes chargées de l'application de la Loi sur les langues officielles.

Les choses ont évolué depuis. Je ne répèterai pas les commentaires de plusieurs de nos collègues quant à la nécessité de créer un comité sénatorial pour étudier ces questions.

Je voudrais exprimer un espoir. D'abord, nous n'avons pas à doubler les initiatives de la Chambre des communes en matière de dossiers d'étude. Le comité sénatorial sur les langues officielles devra faire preuve d'innovation et aller au fond des questions importantes. Il devra faire un travail fondamental et ne pas hésiter à revoir le mandat du commissaire aux langues officielles. Le fait que le commissaire aux langues officielles soit un ombudsman ne me semble plus suffire à la tâche. Il faudra peut-être lui assigner d'autres responsabilités.

J'ose espérer que le comité trouvera le temps, à l'occasion — soit une fois l'an ou tous les deux ans — d'aller rencontrer les gens de leur région, qui essaient de garder la tête hors de l'eau de l'assimilation.

Plus souvent qu'autrement, nous entendons à Ottawa des porte- parole d'associations représentatives des groupes minoritaires. Cependant, il y a plus que cela. Il est important que nous allions nous-mêmes nous plonger dans les régions pour connaître les conditions de vie et de survie de ces minorités linguistiques tant au Québec qu'en Gaspésie, en Saskatchewan, en Alberta, en Colombie- Britannique et à l'Île-du-Prince-Édouard. Ce sont des régions que j'ai occasionnellement eu la chance de visiter. Quand on connaît le milieu, la perspective est fort différente de ce que nous entendons à Ottawa. Je crois que la Chambre serait disposée à recevoir la question, Votre Honneur.

[Traduction]

L'honorable Lowell Murray: Honorables sénateurs, je ne m'opposerai pas à la motion du sénateur Gauthier, car j'ai été persuadé, à la lumière de l'expérience de ceux qui ont participé aux travaux du comité mixte au cours des neuf dernières années environ, que le comité ne fonctionne plus comme il le devrait. Je reconnais ce fait à regret, entièrement pour les raisons personnelles évoquées par le sénateur Corbin. Lui et moi étions coprésidents du tout premier comité créé en 1980 ou 1981.

Nous devons comprendre que, même si nous mettons fin à une situation intenable, nous perdons quelque chose. Il y avait un certain symbolisme important dans ce comité mixte et une certaine réalité importante. Pour commencer, il représentait les deux chambres du Parlement du Canada sur une question qui, comme le sénateur Beaudoin l'a signalé, est absolument essentielle à notre existence en tant que pays. Le symbolisme continuait avec le fait qu'un président devait venir du Sénat et l'autre de la Chambre des communes, l'un devait être un ministériel et l'autre un membre de l'opposition, et on devait avoir un francophone et un anglophone. Ainsi, la composition du comité n'était pas le fruit du hasard. Notre collègue, le sénateur Joyal, qui faisait alors partie du Cabinet Trudeau, a joué un rôle clé dans cette planification et cette conception.

Le comité a fonctionné très bien et le message est passé à ceux qui, à Ottawa et à l'extérieur devaient mettre en oeuvre la Loi sur les langues officielles et les politiques du gouvernement et du Parlement dans le domaine des langues officielles. Nous n'avons jamais eu à traiter avec des émissaires de second plan envoyés par les

divers ministères pour témoigner devant le comité. Lorsque nous convoquions des ministres, ils venaient. Le plus souvent, nous voulions que les administrateurs généraux des ministères ou des organismes viennent nous expliquer ce qu'ils faisaient dans ces ministères ou organismes pour mettre en oeuvre la loi et la politique. Ils comparaissaient en sachant très bien qu'ils seraient soumis à un barrage de questions, et cette perspective a aidé, selon moi, à améliorer le bilan de nombreux ministères et organismes. Les plus importants bureaucrates au Canada, les dirigeants d'organismes comme la Banque du Canada et la GRC, ont comparu devant nous à plusieurs reprises pour répondre à nos questions, en tant que membres du comité, ainsi que le commissaire aux langues officielles, qui siégeait au Bureau comme le vérificateur général peut le faire au Comité des comptes publics de l'autre endroit. Il y avait un symbolisme très important et il y avait du réalisme dans ce processus extrêmement efficace.

(1540)

Le sénateur Fraser a fait remarquer que nous ne pouvions étudier des projets de loi. Ce n'est pas le rôle des comités mixtes. Toutefois, on n'a pas fait fi des recommandations que nous avions présentées au Parlement et au gouvernement. En fait, nombre d'entre elles se sont retrouvées dans la Loi sur les langues officielles de 1988. Le sénateur Gauthier et moi-même avons dans nos dossiers des lettres de l'ancien premier ministre Trudeau dans lesquelles il commente en long et en large les modifications que nous avions recommandé d'apporter à la loi, à la politique, et cetera.

Pendant la plupart des 13 années allant du début des années 80 jusqu'en 1993, c'était un comité important. J'ai cessé de suivre ses activités en 1994, quand les conservateurs sont arrivés au pouvoir et que d'autres membres de mon parti on été nommés à la présidence de ce comité. Si je me souviens bien, un sénateur libéral anglophone du Québec, le sénateur Wood, était la coprésidente représentant le Sénat.

En tout cas, je déplore la fin d'une bonne idée, d'une bonne notion qui a bien fonctionné pendant longtemps. Elle a grandement contribué à sa manière et en son temps à la justice linguistique. J'espère que le jour viendra où nous pourrons revenir à cette notion.

Son Honneur le Président: Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.

(La motion est adoptée.)

L'INDÉPENDANCE DU PRÉSIDENT DANS LE MODÈLE PARLEMENTAIRE DE WESTMINSTER

INTERPELLATION—AJOURNEMENT DU DÉBAT

L'honorable Noël A. Kinsella (leader adjoint de l'opposition), ayant donné avis le 8 octobre 2002:

Qu'il attirera l'attention du Sénat sur l'indépendance du Président dans le modèle parlementaire de Westminster.

— Honorables sénateurs, cela fait aujourd'hui une semaine que le gouvernement a compromis l'indépendance et la neutralité du Président du Sénat en en appelant de sa décision sur une motion, non pas parce que celle-ci était incorrecte, mais simplement parce qu'elle ne lui convenait pas. C'est une malheureuse atteinte à l'indépendance de la présidence. Cela va aussi à l'encontre de la doctrine du gouvernement responsable, que beaucoup de parlementaires avant nous ont développée et défendue avec acharnement.

Qu'entend-on par l'indépendance du Président? En règle générale, on s'attend à ce que le Président agisse comme modérateur de nos débats sans faire intervenir la partisanerie et à ce qu'il s'abstienne de se livrer à des activités partisanes pendant la période où il occupe le poste prestigieux auquel il a été nommé. Si on se reporte à d'autres Présidents du Commonwealth britannique, on voit que ces engagements constituent le minimum commun à respecter. On constate que le poste de Président confère une dignité. Au Canada, l'ordre de préséance est le suivant: le gouverneur général, puis le premier ministre, le juge en chef de la Cour suprême du Canada, le Président du Sénat et le Président de la Chambre des communes.

Dans une communication intitulée «Theory Building and the Parliamentary Speakership», présentée par Tom Urbaniak à la conférence annuelle de l'association des sciences politiques des provinces de l'Atlantique à l'Université St. Thomas le 6 octobre dernier, seulement trois jours après que l'on ait malheureusement interjeté appel de la décision du Président au Sénat, on fait observer qu'il est pratique courante au Parlement de Westminster — le modèle des parlements — que le Président renonce non seulement à toute activité partisane, mais aussi qu'il se présente comme indépendant aux élections subséquentes.

Étant donné qu'au Canada, la politique est très concentrée autour des partis, nous imposerions probablement un sacrifice trop lourd à notre Président si nous lui demandions de renoncer à toute partisanerie. Toutefois, le Président s'acquitte de tâches assez lourdes, et le moins que pourrait faire son propre parti serait de respecter le pouvoir de présider les débats qu'il lui a confiés et lui permettre de rendre des décisions impartiales avec la certitude qu'elles ne seront pas contestées et renversées pour des motifs spécieux n'ayant rien à voir avec la conduite pertinente des débats et tout à voir avec la pure et simple partisanerie.

Je souligne que la doctrine de l'indépendance du Président est d'origine récente et que, selon moi, nous serions mal inspirés de faire marche arrière. Selon la thérorie d'Urbaniak, ce phénomène est le produit de deux courants historiques — la montée de la doctrine du gouvernement responsable et l'apparition du régime des partis dans le contexte des affaires parlementaires.

Selon lui, avant l'avènement du gouvernement responsable, il n'était même pas nécessaire qu'il y ait apparence d'indépendance. Le Président était souvent le représentant de la Couronne ou un défenseur d'intérêts politiques connu sous l'appellation de «champion de la Chambre». La communication que j'ai mentionnéeprécise que:

Même des personnages imposants et magnanimes comme Thomas More (qui a été président de la Chambre des communes pendant une partie des années 1620), n'étaient pas indépendants. Pour sa part, More oscillait entre sa loyauté au roi et la défense des droits des citoyens à la Chambre.

Il revenait au président d'organiser les coalitions spéciales pour faire adopter le programme de la Couronne. Toutefois, même à l'époque, lorsque la Chambre était trop méthodique au goût du souverain, le Président demandait à la Couronne de patienter. Lorsque ce modèle de gouvernance représentative a commencé à chanceler au Canada dans les années 1830, c'est le Président qui a rallié les troupes contre la clique du château. Avant la création d'un gouvernement responsable, le Président était une véritable figure politique, plutôt qu'un arbitre.

Le développement de la notion de gouvernement responsable a fait en sorte que le pouvoir exécutif allait être constitué en puisant dans les rangs du pouvoir législatif, plutôt que de se trouver de fait et de droit à l'extérieur de la Chambre, comme c'était le cas historiquement. Cette situation, à son tour, a donné lieu à la création d'un pouvoir exécutif tenu de rendre des comptes au pouvoir législatif, puisqu'il devait conserver la confiance du pouvoir législatif et non le contraire. Certains observateurs ont alors parlé de «fusion des pouvoirs», par opposition à la séparation des pouvoirs pratiquée par le gouvernement des États-Unis. Néanmoins, cette fusion des pouvoirs ne signifie pas pour autant une fusion des horaires.

Le gouvernement étant aujourd'hui représenté physiquement à la Chambre, il n'a plus été utile que la présidence intervienne, sur le plan politique, comme représentante de la Couronne. Le gouvernement était en position d'organiser ses propres coalitions pour faire adopter son programme législatif.

L'émergence au Parlement d'un système moderne de partis assorti d'une discipline rigide, voilà l'autre force qui a amené l'indépendance de la présidence. Les partis politiques ont vu le jour à la fin du XIXe siècle par suite de l'admission au suffrage des masses — aussi limitée que fût l'initiative par rapport aux normes du suffrage universel d'aujourd'hui. Cette admission au suffrage signifiait que seuls les partis politiques pouvaient mobiliser suffisamment de ressources locales pour obtenir des votes lors des scrutins. L'évolution de la notion de parti politique a également débouché sur la mise en place d'un mécanisme permettant d'obtenir régulièrement, à l'issue des scrutins, des gouvernements majoritaires. Sachant que l'organe législatif garantissait l'existence du gouvernement, la discipline de parti permettait de faire en sorte que tous ceux qui avaient été élus avec le soutien d'un parti politique appuient à leur tour le gouvernement formé par ce parti. Ce qui a eu pour effet de rendre la fonction de la présidence de moins en moins partisane.

Aujourd'hui, la présidence peut agir en toute indépendance; elle peut diriger les débats, au Sénat ou à l'autre endroit, sans avoir à prendre position sur le plan politique. La présidence étant ainsi habilitée, elle doit agir dans ce sens. Elle doit diriger nos travaux et nos délibérations sans craindre que ses décisions ne soient sujettes à des annulations arbitraires par la majorité au pouvoir.

La remise en question des décisions de la présidence doit tous nous préoccuper au premier chef, car elle pourrait sérieusement compromettre la prise de décisions au Sénat. Si la présidence en arrive à craindre que ses décisions justes risquent d'être régulièrement annulées arbitrairement, elle pourrait envisager de rendre des décisions erronées pour éviter l'embarras de les voir annulées.

(1550)

À l'autre endroit, honorables sénateurs, on a résolu le problème en supprimant simplement la possibilité d'appel. En vertu de
l'article 10 du Règlement des Communes, les décisions du Président ne peuvent pas être contestées. Cet article est ainsi libellé:

L'Orateur maintient l'ordre et le décorum et décide des questions d'ordre. En décidant d'une question d'ordre ou de pratique, l'Orateur indique l'article du Règlement ou l'autorité applicable en l'espèce. Aucun débat n'est permis sur une décision de ce genre, qui ne peut faire l'objet d'aucun appel à la Chambre.

En fait, les mesures destinées à assurer l'indépendance du Président remontent à loin, d'après cette communication très intéressante du professeur Urbaniak:

Il y a eu, on l'admet, des incidents occasionnels qui mettaient en cause l'impartialité de la présidence, comme l'expulsion en 1881, par Henry William Brand, de plusieurs députés nationalistes irlandais qui étaient déterminés à entraver le fonctionnement de la Chambre. Toutefois, ces incidents étaient souvent suivis de modifications du Règlement, proposés par le parti au pouvoir, ce qui protégeait le Président de situations intenables du même genre qui auraient pu se présenter plus tard et assurait au gouvernement, s'il persévérait, du maintien de son programme législatif.

De récents événements survenus au Sénat, à un moment où le programme du gouvernement ne courait aucun danger réel, permettent de croire qu'il conviendrait de faire un effort pour renforcer et étayer l'indépendance de notre Président. Peut-être est-il temps pour nous d'adopter une politique semblable à celle de l'autre endroit en soustrayant les décisions du Président aux contestations arbitraires.

(Sur la motion du sénateur Kinsella, au nom du sénateur Oliver, le débat est ajourné.)

LA COLLINE DU PARLEMENT

L'ACCÈS À L'ENCEINTE—MOTION—AJOURNEMENT DU DÉBAT

L'honorable Eymard G. Corbin, conformément à l'avis donné
le 2 octobre 2002, propose:

Que le commissaire de la Gendarmerie royale du Canada et le chef de police d'Ottawa veillent, durant la présente session, à ce que les rues et les voies menant à l'enceinte du Sénat demeurent ouvertes et à ce qu'aucune obstruction susceptible de nuire au libre accès des sénateurs à l'enceinte du Sénat ne soit permise.

Que le greffier du Sénat communique cette ordonnance au commissaire de la Gendarmerie royale du Canada et au chef de police d'Ottawa.

— Honorables sénateurs, je ne souhaite pas vous retenir trop longtemps avec cette question. Je crois qu'il s'agit d'une affaire simple relevant des pouvoirs définis dans la loi fondamentale de notre pays, c'est-à-dire la Constitution.

Avant d'aborder les détails, je voudrais revenir à un échange que j'ai eu le 6 décembre 2001 avec l'honorable sénateur Kroft à la suite d'une plainte que j'avais portée à l'attention du Sénat, du leader du gouvernement et du sénateur Kroft. J'aimerais lire la réponse qu'il m'a donnée lorsque je l'ai interrogé au sujet de la politique du Comité de la régie interne concernant le privilège qu'ont les honorables sénateurs de bénéficier d'un accès sans entrave à l'enceinte du Parlement et, bien sûr, au Sénat du Canada.

Le sénateur Kroft avait dit ce qui suit:

Honorables sénateurs, personne n'a à avoir de comportement inconvenant dans l'exercice de ses fonctions, quelles qu'elles soient, jamais!

Je venais de me plaindre parce que j'avais été invectivé par un constable à mon arrivée devant les portes de la colline. Le sénateur Kroft a ajouté:

Je ne voudrais pas aborder ici le cas d'une personne en particulier dans un cas bien précis.

Permettez-moi, honorables sénateurs, de formuler un commentaire plus général. Tout d'abord, je tiens à affirmer à l'honorable sénateur que, depuis qu'il m'a informé de cette question à titre de président du Comité de la régie interne, toute cette question fait l'objet d'une surveillance et d'un examen constants du comité. La surveillance, au sens large, des questions de sécurité sur la colline relève d'un processus administratif auquel le Sénat participe par l'intermédiaire du greffier. Je tiens à préciser clairement que si la question de l'honorable sénateur signifie de façon implicite — et je ne suis pas sûr que ce soit le cas — que nous devrions, à titre de sénateurs ou de parlementaires, bénéficier de règles différentes de celles appliquées à d'autres personnes venant sur la colline, permettez-moi de ne pas être d'accord avec l'honorable sénateur. Je crois qu'il faut tenir compte des droits et des privilèges des sénateurs et des députés. Malheureusement, il se peut que ceux qui cherchent à nous nuire puissent accéder librement aux voitures des sénateurs quand elles sont stationnées en dehors des endroits surveillés en permanence.

La politique précise que tous les sénateurs, tous les députés et tous les membres de l'administration qui s'approchent de la colline du Parlement doivent être traités de la même façon que toute autre personne, en termes simples: ni mieux ni pire. Vouloir que les mesures de sécurité obéissent à d'autres normes serait malvenu et nuirait à leur efficacité.

En remerciant le sénateur Kroft de son aimable réponse, je lui ai dit qu'il n'avait raison qu'à moitié. J'ai dit ceci:

Il existe un privilège parlementaire, et je crois qu'on en abuse à l'heure actuelle.

Je pourrais ajouter aujourd'hui que l'outrage au Parlement existe aussi.

Ma motion n'est pas inhabituelle au sens où la mesure que je propose a aussi été proposée par les deux chambres du Parlement de Westminster, de l'initiative de chacune et non par le truchement d'un message transmis d'une à l'autre. Chacune des chambres a le pouvoir et l'entière discrétion de déterminer quels sont ses privilèges et ceux de ses membres.

(1600)

À ce moment-ci, je voudrais citer le chapitre 12 de l'ouvrage d'Erskine May, à la page 210. Le chapitre s'intitule «Sources de procédure parlementaire». Au bas de la page, on peut lire ce qui suit:

Certains ordres et résolutions (plus particulièrement qualifiés de «sessionnels») sont renouvelés régulièrement, le premier jour de chaque session de la Chambre des communes et ils sont à toutes fins utiles des ordres permanents, sauf qu'ils ne régissent pas la procédure de la Chambre elle-même; essentiellement, ils prescrivent les règles de conduite des individus qui ne sont pas des parlementaires dans leurs rapports avec la Chambre.

Cela inclurait les personnes ou les organismes responsables de la sécurité et de la liberté de mouvement dans l'enceinte du Parlement ou à proximité de celle-ci.

Toujours selon Erskine May, dans le même chapitre, sous la rubrique «Accès aux chambres du Parlement», on peut lire ce qui suit:

Pour faciliter la présence des parlementaires sans interruption, les deux chambres, au début de chaque session, par ordre, donnent instruction au commissaire de police de la métropole de garder libres et ouvertes, pendant la session parlementaire, les rues menant aux chambres du Parlement et de ne tolérer aucune obstruction nuisant au passage des lords ou des députés. Par conséquent, la police offre toute l'aide possible aux parlementaires et aux dirigeants des deux chambres pour qu'ils puissent traverser les rues et s'approcher des chambres du Parlement sans interruption et, au besoin, elle arrête la circulation à cette fin. Le Président informe la chambre lorsque, pour une raison particulière, on s'attend à ce que la police ait de la difficulté à respecter les modalités de l'ordre sessionnel.

Je pourrais lire une très courte liste d'ordres sessionnels.

À la Chambre des Communes, on aborde constamment des questions diverses avant le rapport du discours de la reine par le Président. L'ordre des travaux le premier jour d'une session devrait être les motions pour l'émission de nouveaux brefs, puis les ordres sessionnels.

C'est sous la rubrique «Ordres sessionnels» que chaque Chambre de Westminster émet l'ordonnance suivante. Ceci est un extrait des débats de la Chambre des lords du mercredi 20 juin 2001.

Arrêts dans les rues — Il est ordonné que le commissaire de la police de la métropole veille, durant la présente session du Parlement, à ce que les rues menant à cette chambre demeurent ouvertes et à ce qu'aucune obstruction susceptible de nuire au libre accès des lords à cette chambre ne soit permise; et qu'aucun désordre ne soit permis à Westminster Hall, ou dans les voies menant à cette chambre, durant la présente session du Parlement; et qu'il n'y ait aucun trouble à l'intérieur et à l'extérieur; et que l`huissier du bâton noir attaché au service de cette chambre communique cette ordonnance au commissaire susmentionné.

J'ai en ma possession plusieurs extraits en provenance de la Chambre des communes britannique reproduisant précisément le même texte.

Nous n'avons pas adopté cette coutume dans notre pays car on suppose qu'elle découlerait normalement des dispositions de la Constitution canadienne.

Voici maintenant l'article 18 de la Loi constitutionnelle de 1867, qui se lit comme suit:

Les privilèges, immunités et pouvoirs que posséderont et exerceront le Sénat, la Chambre des communes et les membres de ces corps respectifs seront ceux prescrits de temps à autre par loi du Parlement du Canada; ils ne devront cependant jamais excéder ceux possédés et exercés, lors de la passation de la présente loi, par la Chambre des communes du Parlement du Royaume-Uni de la Grande-Bretagne et d'Irlande et par les membres de cette chambre.

Qu'est-ce qui m'amène à proposer aujourd'hui que, au début d'une nouvelle législature, d'une nouvelle session, nous suivions l'exemple de la mère de tous les parlements en ce qui a trait à l'accès au Parlement?

Nous sommes tous ici sur ordre de la reine. Si vous lisez le parchemin frappé du grand sceau, vous remarquerez que nous sommes ici sur ordre de la reine et que nous sommes tenus d'être présents quand le Parlement siège. Cela ne nous laisse aucun choix. Il en découle que, si nous avons ordre d'être présents, aucune obstruction ne devrait nous empêcher de nous rendre sur la colline du Parlement.

Cependant, on peut dire que nos pratiques sont plutôt relâchées. Cela ne figure nulle part dans le Règlement ou ailleurs, exception faite des précédents et des décisions occasionnelles du Président de l'autre endroit. Je n'ai jamais entendu parler d'un tel incident concernant le Sénat ou l'un de ses membres, mais il existe un certain nombre de précédents où le Président des Communes a constaté très clairement des cas d'outrage au Parlement, à première vue, parce qu'on avait interdit à des députés, pour différentes raisons, l'accès à la colline du Parlement. Il existe des précédents au Canada, mais nous n'avons pas de règle générale. Ce n'est certainement pas dans notre Règlement. Nous disons tous que nous bénéficions de privilèges, mais la nature de ces privilèges demeure mal comprise. Ils ne s'appliquent pas personnellement aux sénateurs. Ils nous touchent plutôt en notre qualité de membres du Sénat du Canada, comme une façon d'assurer que nous aurons accès à ces bureaux sans obstacle lorsque nous devons nous rendre ici pour effectuer notre travail.

C'est la raison pour laquelle j'ai proposé cette motion. Son libellé est beaucoup plus simple que celui qui est utilisé à Westminster, et j'aimerais qu'on en fasse l'un des premiers points à l'ordre du jour chaque fois que nous inaugurerons une nouvelle législature ou une nouvelle session puisque, à la lumière de mon expérience personnelle et de celle des autres sénateurs avec qui j'ai discuté de la question, les autorités policières de la ville d'Ottawa ne comprennent certainement pas le caractère et la nature de cet endroit, et n'hésitent aucunement à nous arrêter en chemin vers la colline.

(1610)

Son Honneur le Président: Sénateur Corbin, vos 15 minutes sont écoulées. Les honorables sénateurs accordent-ils au sénateur Corbin la permission de continuer?

Des voix: D'accord.

Le sénateur Corbin: Les événements du 11 septembre ont beaucoup tendu nos rapports. Peut-être que ce n'est pas le cas de chacun d'entre nous, parce que ceux qui se rendent sur la colline à pied n'ont pas de problèmes. Mais ceux d'entre nous qui s'y rendent en voiture sont traités différemment pour des raisons de sécurité. Je pose donc cette question, à laquelle je crois avoir une réponse logique: Les privilèges des sénateurs doivent-ils être assujettis à des conditions de sécurité qui nous sont imposées par le gouvernement et que met en application un corps de police? Voilà la question fondamentale.

Le sénateur Kroft, quelqu'un à qui je n'ai rien à reprocher, a tenté honnêtement de trouver une solution, mais je pense qu'il ne saisit pas parfaitement la nature de l'immunité parlementaire nous assurant un accès sans entraves au Sénat. Le sénateur Kroft et son comité ont bien essayé de concilier le besoin de sécurité et le respect de l'immunité parlementaire, afin d'éviter toute possibilité d'outrage au Sénat.

Honorables sénateurs, l'inobservation de l'immunité diplomatique ne constitue pas nécessairement un outrage à la Chambre, mais ce serait certainement le cas ici. La Constitution et tous les textes afférents nous reconnaissent le droit absolu d'entrer librement dans cette enceinte.

J'ai dit précédemment que j'ai été enguirlandé par des membres de la GRC. Je m'en suis plaint dans cette enceinte. Je me suis également fait dire: «Je ne comprends pas le français, mais c'est votre problème, car j'ai le droit de parler anglais.» N'est-ce pas ici l'endroit où la Loi sur les langues officielles devrait s'appliquer en premier? Les premières initiatives modernes au plan linguistique ont été prises ici, sous ce même toit, et affinées au cours des années. Il reste cependant encore des dinosaures qui ne savent pas qu'il y a deux langues officielles. Je blâme les personnes responsables de l'affectation des policiers qui font fi de la Loi sur les langues officielles.

Comme il y a 35 ans que cette loi existe, il n'y a pas de raison que ce genre de choses se produise. Je me suis plaint au bureau de la commissaire aux langues officielles. En sa qualité d'ombudsman, la commissaire aux langues a communiqué avec le commissaire de la GRC et j'ai reçu l'assurance que cette situation n'allait pas se répéter. Le jour suivant la réception de la lettre, la même chose s'est produite. Il faut croire que c'est la nature du Canada.

La GRC doit comprendre, comme tous les préposés à la sécurité de cet immeuble le comprennent, que les sénateurs et les députés ont le droit, plus que quiconque, à un accès tout à fait libre à leur chambre respective.

Honorables sénateurs, je n'insinue pas que ces agents ne font pas leur devoir. Je dis plutôt qu'ils devraient être mieux informés des droits et privilèges des parlementaires. Il serait utile qu'une consigne soit donnée au début de chaque session. Ce serait, dans un esprit de coopération, un rappel amical de la marche à suivre. Nous ne sommes pas des touristes. Nous sommes ici sur l'ordre de Sa Majesté, et nous avons un travail à faire. C'est pourquoi on devrait nous respecter.

L'honorable Lowell Murray: Honorables sénateurs, je ne peux commenter l'expérience que le sénateur Corbin a vécue, mais je comprends bien le point qu'il soulève. Nous devrions affirmer plus souvent et de façon plus officielle notre droit d'accéder à l'enceinte du Parlement et de nous y déplacer librement.

Néanmoins, avant de me prononcer sur la motion, je voudrais savoir quelles en seront les conséquences pratiques, d'après l'honorable sénateur. Quiconque arrive en voiture sur la colline du Parlement, par les temps qui courent, doit passer par l'un des deux seuls points d'entrée. L'un d'eux est situé à l'angle des rues Bank et Wellington, et il y a deux voies, dont une est réservée aux sénateurs et députés. On se présente au poste de contrôle, on s'arrête quelques secondes pour s'identifier comme sénateur à la satisfaction de l'agent et on se rend ensuite au stationnement.

L'honorable sénateur estime-t-il que cela constitue ce qu'il décrit dans sa motion comme une obstruction à faire disparaître?

Le sénateur Corbin: Toute forme de barrière est une obstruction, honorable sénateur, qu'il s'agisse d'un panneau d'arrêt ou d'un ordre d'arrêter donné par un agent. Cela ne me dérange pas si la police m'arrête, car le processus a été grandement amélioré pour les sénateurs. J'ignore ce qui se passe pour les députés et je ne m'en soucie guère.

Pour aider les agents de la GRC, nous avons maintenant à l'entrée centrale, en face de la tour de la Paix, au-delà de la pelouse, un agent du Sénat qui identifie rapidement un sénateur qui franchit la barrière, et on nous dit de passer. C'est ainsi que les choses doivent se faire.

L'aménagement de l'entrée au coin de la rue Bank n'est pas idéal. Il est arrivé souvent, lorsque j'ai voulu entrer par là, que la grille de l'entrée centrale soit fermée à clé et qu'il n'y ait pas d'agent du Sénat posté là. On m'a demandé de produire une pièce d'identité. «Où est votre autocollant du Sénat? Pourquoi n'est-il pas à l'avant de votre voiture?» J'ai répondu que l'autocollant se trouvait dans la lunette arrière de la voiture parce que c'est là qu'on nous avait dit de le mettre. Les camions de livraison utilisent cette entrée même si c'est écrit qu'elle est réservée aux députés et aux sénateurs. Nous devons attendre. Faut-il que nous attendions? Ce n'est pas ce que dit la Constitution à cet égard.

La relève de la garde tous les jours durant l'été fait également problème. Je n'ai rien contre le fait qu'un agent de la GRC m'arrête et me dise: «Vous êtes le sénateur Corbin, je vous connais. Allez-y.» Toutefois, le gardien change tous les jours ou tous les deux jours, de sorte que nous devons tout recommencer, s'il n'y a pas d'agent du Sénat en poste. Cela devient irritant et nous sommes retardés. Le Règlement de la Chambre des communes et de la Chambre des lords en Angleterre prévoit que les députés et les sénateurs peuvent librement entrer au Parlement et en sortir.

L'intersection où nous sortons est impraticable après 15 h 30 presque tous les jours. Les navettes du Parlement s'arrêtent à cette barrière. Si les sénateurs pouvaient prendre la voie de sortie et tourner à gauche, ils seraient déjà en route vers leur foyer ou ailleurs. L'autocar parlementaire s'arrête à cet endroit. Le gouvernement a acheté de magnifiques véhicules blancs portant l'emblème de la GRC. Ces automobiles sont garées partout sur la colline, mais pas un seul agent de la GRC n'est là pour aider les sénateurs à sortir de cet endroit. Bien des petits irritants de la sorte nous rendent inutilement la vie fastidieuse, voire carrément difficile parfois.

(1620)

Cette motion demande que les sénateurs puissent rencontrer les policiers, une fois par année peut-être, pour revoir les privilèges parlementaires que d'autres n'ont pas, mais que nous avons parce que cet endroit est notre lieu de travail. Grâce à cette motion, les policiers auraient une meilleure connaissance pratique des privilèges parlementaires.

J'aimerais que les membres du personnel soient informés afin qu'ils puissent reconnaître facilement les sénateurs. J'ai été à Westminster. J'ai été à l'Assemblée nationale. J'ai été à Bonn lorsque c'était une capitale. J'ai vu différentes façons d'agir dans des situations exigeant le plus haut degré de sécurité, à Bonn par exemple. Les parlementaires des deux Chambres étaient toujours traités avec respect. Ceux qui se trouvaient là régulièrement reconnaissaient les parlementaires. Ils pouvaient prendre de bien meilleures dispositions en conséquence.

Je ne cherche pas à obtenir des privilèges sur le plan de la sécurité. Je demande simplement que mes privilèges parlementaires soient respectés.

(Sur la motion du sénateur Robichaud, le débat est ajourné.)

[Français]

L'AJOURNEMENT

Permission ayant été accordée de revenir aux avis de motion du gouvernement:

L'honorable Fernand Robichaud (leader adjoint du gouvernement): Honorables sénateurs, avec la permission du Sénat et nonobstant l'article 58(1)h) du Règlement, je propose:

Que, lorsque le Sénat s'ajournera aujourd'hui, il demeure ajourné jusqu'au mardi 22 octobre 2002, à 14 heures.

Son Honneur le Président: La permission est-elle accordée, honorables sénateurs?

Des voix: D'accord.

(La motion est adoptée.)

(Le Sénat s'ajourne au mardi 22 octobre 2002, à 14 heures.)


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