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Débats du Sénat (Hansard)

1re Session, 42e Législature,
Volume 150, Numéro 60

Le mercredi 5 octobre 2016
L'honorable George J. Furey, Président

LE SÉNAT

Le mercredi 5 octobre 2016

La séance est ouverte à 14 heures, le Président étant au fauteuil.

Prière.

[Traduction]

DÉCLARATIONS DE SÉNATEURS

La superinformatique

L'honorable Kelvin Kenneth Ogilvie : Honorables sénateurs, j'aimerais vous inviter à visiter le kiosque que nous tiendrons sous le thème « La superinformatique : une infrastructure d'innovation ».

Les chercheurs canadiens proposent de nouvelles idées et trouvent de nouvelles façons de renforcer nos collectivités, notre économie et notre compétitivité sur la scène mondiale.

La superinformatique est une infrastructure essentielle pour nos chercheurs et nos innovateurs. Les superordinateurs, ou plateformes informatiques à rendement élevé, sont utilisés de façon stratégique partout dans le monde afin d'accélérer les découvertes scientifiques et, ce faisant, d'améliorer la compétitivité nationale et la réussite économique. Il est essentiel d'avoir accès à cette infrastructure pour former une main-d'œuvre diversifiée et bien préparée à relever les défis propres au XXIe siècle.

Le lundi 17 octobre, vous aurez l'occasion de rencontrer des chercheurs et des innovateurs canadiens de calibre mondial qui utilisent la superinformatique et les mégadonnées canadiennes pour réduire la criminalité et attraper des criminels, prédire les résultats des élections et l'opinion publique, et aider les entreprises canadiennes à innover dans le secteur de la fabrication 3D.

Ces innovateurs s'attaquent à certains de nos plus importants défis scientifiques; par exemple, ils cartographient le cerveau humain, guérissent des maladies — ils n'en atténuent pas les symptômes, mais les guérissent — et réduisent les émissions de gaz à effet de serre produites par les avions.

Calcul Canada, qui reçoit des fonds du gouvernement fédéral, appuie plus de 10 000 chercheurs et professeurs partout au Canada, de même que leurs partenaires industriels et internationaux.

Ils veulent que les parlementaires sachent en quoi les Canadiens profitent de la puissance de la superinformatique. Ils ont donc constitué un groupe unique de spécialistes canadiens de calibre mondial, qui présentera les percées effectuées dans divers domaines, comme la médecine personnalisée, les grands projets scientifiques, les matériaux avancés et écologiques, la génomique et les mégadonnées.

Vous apprendrez en quoi la superinformatique révolutionne l'industrie, l'innovation et les découvertes au Canada. La plateforme nationale d'informatique avancée qu'ils construisent est essentielle à l'économie d'aujourd'hui, au même titre que la construction du chemin de fer national revêtait une importance capitale il y a un siècle.

Vous aurez la chance d'en apprendre plus sur cette technologie en discutant avec des personnes qui ont été soigneusement choisies pour leur capacité à expliquer ces percées en termes faciles à comprendre.

L'activité se tiendra le 17 octobre, de 15 heures à 19 heures, à la salle 256-S de l'édifice du Centre. Vous pouvez venir n'importe quand durant cette période. Nos kiosques sont interactifs. Venez découvrir pourquoi les superordinateurs sont une infrastructure essentielle à l'innovation. Merci.

[Français]

La Déferlante roulante sur la Colline

L'honorable Chantal Petitclerc : Honorables sénateurs et sénatrices, c'est avec grand plaisir que je prends la parole aujourd'hui pour vous rappeler que demain se tiendra la 10e édition de la Déferlante roulante, une initiative de notre ancien collègue, l'honorable sénateur Vim Kochhar, qui a maintenant passé le flambeau à la sénatrice Martin.

[Traduction]

Cette activité excitante rassemblera certains des meilleurs athlètes en fauteuil roulant au monde, y compris notre propre médaillé de bronze à Rio, Alexandre Dupont, pour une course de 10 kilomètres sur la Colline. Tandis qu'ils se disputeront la victoire à une vitesse moyenne de plus de 30 kilomètres à l'heure, une foule massive d'étudiants les encouragera.

[Français]

Ces milliers d'élèves auront aussi la chance de participer à un relais sur la Colline afin de sensibiliser la population à la santé et aux personnes qui vivent avec un handicap. Cet événement, au-delà de la performance sportive, vise à ouvrir les esprits et à sensibiliser les élèves et les leaders parlementaires à l'idée que les personnes handicapées ont beaucoup plus de potentiel que de limites.

[Traduction]

La troisième composante de la Déferlante roulante vous intéressera particulièrement. Il s'agit d'un relais de parlementaires. C'est un simple relais en fauteuil roulant pour des équipes de quatre, mais les enjeux sont de taille. Non seulement est-ce votre chance de remporter le trophée, mais aussi, soyons honnête, c'est une occasion unique de tenter de battre une médaillée olympique ou paralympique, puisque la sénatrice Raine et moi y serons de féroces participantes.

Alors, honorables sénateurs, êtes-vous prêts à relever le défi? Si votre réponse est oui, veuillez communiquer avec mon bureau ou celui de la sénatrice Martin. Qui sait? Vous parviendrez peut-être même à négocier une longueur d'avance.

Visiteurs à la tribune

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, je vous signale la présence à la tribune du révérend Maurice O'Quinn, prêtre de paroisse retraité de Stephenville, à Terre-Neuve-et-Labrador, ainsi que de M. James Mercer, travailleur social retraité, et de son épouse, Mme Catherine Mercer, enseignante à la retraite, tous deux de Stephenville Crossing, à Terre-Neuve-et-Labrador.

Au nom de tous les sénateurs, je vous souhaite la bienvenue au Sénat du Canada.

Des voix : Bravo!

Le décès de Shimon Peres

L'honorable Linda Frum : Honorables sénateurs, comme tous les Canadiens de bonne volonté, j'ai été attristée d'apprendre, la semaine dernière, le décès de l'ancien président et premier ministre d'Israël, Shimon Peres. J'ai été très honorée d'être invitée à me joindre à la délégation qui s'est rendue dans ce pays pour assister à ses funérailles, et c'est avec beaucoup d'humilité que j'ai participé à cet hommage.

Le fait que le lieu de son dernier repos soit situé près des tombes des fondateurs d'Israël, Theodore Herzl, Yitzhak Rabin et Golda Meir, sur le mont Herzl, témoigne du rôle qu'il a joué dans la création de l'État d'Israël.

Plus de 70 chefs d'État et dirigeants de presque tous les grands pays, y compris des représentants de l'Autorité palestinienne, sont venus rendre hommage à ce champion de la paix. Constater tout cela de mes propres yeux m'a donné beaucoup d'espoir pour Israël, et pour la planète.

(1410)

Il est difficile de songer à d'autres chefs d'État qui susciteraient autant de respect et d'affection véritable que ce géant parmi les hommes. Comme le président Obama l'a dit pendant ses remarques vendredi dernier, « l'histoire de Shimon Peres, c'est l'histoire d'Israël. »

Sa longue et distinguée carrière a débuté par un combat pour l'existence même de l'État d'Israël aux côtés de David Ben Gourion. Shimon Peres a mené une vie au service du public. Il faisait ce qui était nécessaire, non pas pour la gloire ou les honneurs, mais parce que cela devait être fait. Cela fut nettement établi lorsque, à deux occasions, on lui a demandé d'agir à titre de premier ministre par intérim dans des périodes d'incertitude.

Parmi les nombreux postes qu'il a occupés au Cabinet, il y a eu celui de ministre de la Défense pendant l'opération Thunderbolt, l'audacieux sauvetage de 102 otages israéliens à Entebbe, en Ouganda.

Son patriotisme et son amour pour son pays étaient la marque d'un véritable serviteur de l'État. Il était un homme qui faisait passer son pays devant ses propres intérêts.

Je vais citer les propos de Stephen Harper, un bon ami du regretté président Peres : « Il a mené une vie de sacrifices non seulement pour sa patrie et ses concitoyens, mais aussi pour la notion même d'Israël, ce rêve d'un État juif sûr et prospère où il est possible de vivre en paix avec ses voisins. »

J'ai eu la chance de rencontrer Shimon Peres à diverses occasions. Son attitude calme et humble était toujours impressionnante. Pour quelqu'un qui a occupé les postes les plus prestigieux de l'État d'Israël, il est demeuré un homme d'État remarquablement modeste, terre-à-terre et sans prétention.

Je souhaite aux membres de sa famille de trouver un peu de réconfort en cette période de deuil. Que sa mémoire soit pour eux une bénédiction.

Les services communautaires Boyle Street

L'honorable Grant Mitchell : Honorables sénateurs, j'aimerais vous parler aujourd'hui du travail remarquable réalisé par les services communautaires Boyle Street, un organisme à but non lucratif d'Edmonton. Fondé en 1971 et implanté au centre-ville, cet organisme sert 12 000 clients et gère au moins 150 000 visites par année. Comme 80 p. 100 de leurs clients sont d'origine autochtone, les services communautaires Boyle Street constituent le plus important organisme d'aide aux Autochtones à Edmonton. L'organisme a des bureaux à huit endroits différents dans la ville et, qui plus est, il met en œuvre un programme de travail de rue.

Plus tôt cette année, j'ai eu l'occasion de rencontrer les responsables des services communautaires Boyle Street. J'ai appris que l'organisme s'occupe de 40 programmes visant à répondre aux besoins complexes de ses clients, dont un grand nombre sont aux prises avec des problèmes liés notamment à la toxicomanie, à la santé mentale, à l'itinérance et à un traumatisme intergénérationnel. L'organisme offre des services de santé, d'hébergement et d'emploi, des services axés sur la culture autochtone et des services aux familles.

Le travail effectué par les services communautaires Boyle Street est littéralement synonyme de réconciliation en action, car la plupart de ses programmes visent à favoriser la guérison des victimes de traumatisme, en particulier celles qui ont vécu un traumatisme culturel lié à leur expérience au sein d'un pensionnat indien. La vision de l'organisme est d'aider tous ses clients à améliorer leur état de santé en faisant partie d'une collectivité solide, accueillante et respectueuse.

Les services communautaires Boyle Street ont eu, et continuent d'avoir, un effet durable et considérable sur la vie de nombreuses personnes. Quatre-vingt-cinq pour cent des sans-abri hébergés dans le cadre du programme d'hébergement de l'organisme ont toujours un toit. Quatre-vingts pour cent des enfants admis dans le programme d'aide à l'enfance offert par l'organisme vivent maintenant dans des foyers familiaux ou sont pris en charge par des proches. Vingt pour cent d'entre eux se trouvent encore dans des foyers collectifs. Avant que l'organisme voie le jour, les données révélaient une situation totalement inverse : 80 p. 100 des enfants se trouvaient dans des foyers collectifs, tandis que 20 p. 100 étaient hébergés dans des foyers familiaux.

Comme les services de Boyle Street sont en demande croissante année après année — à plus forte raison, étant donné le ralentissement économique en Alberta — la capacité physique et logistique du centre a été atteinte. Par conséquent, Boyle Street se propose, en collaboration avec ses partenaires et fournisseurs fédéraux, provinciaux et municipaux, de réaménager son centre communautaire en édifice multiservice et multisectoriel d'inspiration autochtone. Les plans sont magnifiques. Le nouvel édifice permettra à Boyle Street non seulement de continuer d'offrir ses services actuels, mais également d'en élargir la gamme afin de répondre aux besoins urgents de ses clients en mettant à leur disposition un refuge pouvant accueillir plus de 100 personnes, des services grandement améliorés de santé mentale et de toxicomanie, une buanderie ouverte jour et nuit, des douches, des installations sanitaires et des services de garde.

Grâce à son personnel et à ses bénévoles résilients, bienveillants et privilégiant la famille, que j'ai rencontrés en grand nombre lors de cette journée, les services communautaires Boyle Street constituent un apport vital pour les habitants d'Edmonton. Il ne fait aucun doute que ce centre est porteur d'espoir en un avenir meilleur pour de nombreuses personnes.

La Journée mondiale des enseignants

L'honorable Thanh Hai Ngo : Honorables sénateurs, j'interviens aujourd'hui à l'occasion de la Journée mondiale des enseignants, célébrée chaque année le 5 octobre dans plus de 150 pays.

À titre d'ancien enseignant, comme bon nombre de nos honorables collègues, je souligne avec fierté le rôle clé que jouent plus de 230 000 enseignants à toutes les étapes de l'éducation, de la maternelle aux études supérieures. D'un bout à l'autre du pays, ces enseignants qualifiés sont les travailleurs de première ligne qui ont le mandat d'apprendre aux nouvelles générations les valeurs essentielles à la paix, à la tolérance et à la compréhension. Je crois que l'éducation est un droit fondamental qui doit être garanti à toutes les personnes, tout au long de leur vie, et qu'il faut que cet accès à l'éducation s'accompagne de qualité. Après tout, la liberté passe par l'éducation, et les enseignants ouvrent les portes vers un monde meilleur sur lequel nous pouvons tous compter.

[Français]

Tous les jours, les membres de la profession enseignante du Canada touchent la vie de millions d'élèves de tous les horizons, de diverses langues, de différentes cultures et de toutes les religions. En tant que gardiens du système d'éducation du Canada, ces enseignants et enseignantes transmettent leurs connaissances aux jeunes, améliorent la vie des enfants et leur enseignent les compétences nécessaires pour réussir dans la société.

Si nous voulons créer une société stable et démocratique, l'école doit être un lieu central où les gens peuvent se réunir et apprendre à vivre ensemble. Après tout, savoir vivre côte à côte, en harmonie, voilà l'un des plus grands défis de notre siècle.

En cette Journée mondiale des enseignantes et des enseignants, je tiens à remercier nos pédagogues canadiens et à souligner les mérites des membres de la profession à l'échelle mondiale. J'encourage tous les Canadiens à profiter de cette occasion pour remercier leur enseignante ou leur enseignant préféré, passé ou actuel.

[Traduction]

Honorables sénateurs, en cette Journée mondiale des enseignants, je vous invite à vous joindre à moi pour remercier les enseignants et enseignantes qui améliorent l'expérience d'apprentissage partout au Canada. Merci.


AFFAIRES COURANTES

Le commissaire aux langues officielles

La Loi sur l'accès à l'information et la Loi sur la protection des renseignements personnels—Dépôt des rapports annuels de 2015-2016

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, j'ai l'honneur de déposer, dans les deux langues officielles, les rapports annuels 2015-2016 du Commissaire aux langues officielles, conformément à l'article 72 de la Loi sur l'accès à l'information et à l'article 72 de la Loi sur la protection des renseignements personnels.

L'étude des questions relatives aux délais dans le système de justice pénale au Canada et les rôles que jouent le gouvernement du Canada et le Parlement pour y remédier

Dépôt du huitième rapport du Comité des affaires juridiques et constitutionnelles auprès du greffier pendant l'ajournement du Sénat

L'honorable Bob Runciman : Honorables sénateurs, j'ai l'honneur d'informer le Sénat que, conformément à l'ordre de renvoi adopté par le Sénat le jeudi 28 janvier 2016 et à l'ordre adopté par le Sénat le mardi 21 juin 2016, le Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles a déposé son huitième rapport, intitulé Justice Différée, Justice Refusée : L'urgence de réduire les longs délais dans le système judiciaire au Canada, auprès du greffier du Sénat, le vendredi 12 août 2016.

(Sur la motion du sénateur Runciman, l'étude du rapport est inscrite à l'ordre du jour de la prochaine séance.)

Modernisation du Sénat

Présentation du sixième rapport du comité spécial

L'honorable Scott Tannas, membre du Comité sénatorial spécial sur la modernisation du Sénat, présente le rapport suivant :

Le mercredi 5 octobre 2016

Le Comité sénatorial spécial sur la modernisation du Sénat a l'honneur de présenter son

SIXIÈME RAPPORT

Votre comité, qui a été autorisé par le Sénat le vendredi 11 décembre 2015 à examiner les façons de rendre le Sénat plus efficace dans le cadre constitutionnel actuel fait rapport de ce qui suit :

Dans son premier rapport déposé le 4 octobre 2016, votre comité a étudié le processus de sélection du Président et du Président intérimaire et maintenant recommande ce qui suit :

Que le Sénat donne instruction au Comité du Règlement, de la procédure et des droits du Parlement d'élaborer un processus, dans le cadre du Règlement du Sénat, qui permettrait aux sénateurs d'exprimer leur préférence quant au choix du Président en désignant jusqu'à cinq sénateurs dont la candidature sera soumise au premier ministre, qui fera sa recommandation au gouverneur général;

Que ce processus se déroule au début de chaque législature.

Que le Sénat donne instruction au Comité du Règlement, de la procédure et des droits du Parlement de recommander des changements au Règlement du Sénat afin que le Président intérimaire puisse être élu au scrutin secret par les sénateurs.

Que le Président intérimaire soit choisi parmi les membres d'un caucus ou d'un groupe différent de celui du Président.

Respectueusement soumis,

SCOTT TANNAS

(1420)

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, quand étudierons-nous le rapport?

(Sur la motion du sénateur Tannas, l'étude du rapport est inscrite à l'ordre du jour de la séance d'après-demain.)

[Français]

Le Sénat

Préavis de motion concernant la période des questions de la séance du 18 octobre 2016

L'honorable Diane Bellemare (coordonnatrice législative du gouvernement au Sénat) : Honorables sénateurs, je donne préavis que, à la prochaine séance du Sénat, je proposerai :

Que, pour permettre au Sénat de recevoir un ministre de la Couronne au cours de la période des questions tel qu'autorisé par le Sénat le 10 décembre 2015, et nonobstant ce que prévoit l'article 4-7 du Règlement, lorsque le Sénat siégera le mardi 18 octobre 2016, la période des questions commence à 15 h 30, toutes les délibérations alors en cours au Sénat étant interrompues jusqu'à la fin de la période des questions, qui sera d'une durée maximale de 40 minutes;

Que, si un vote par appel nominal coïncide avec la période des questions tenue à 15 h 30 ce jour-là, ce vote soit reporté et ait lieu immédiatement après la période des questions;

Que, si la sonnerie d'appel pour un vote retentit à 15 h 30 ce jour-là, elle cesse de se faire entendre pendant la période des questions et qu'elle retentisse de nouveau à la fin de la période des questions pour le temps restant;

Que, si le Sénat termine ses travaux avant 15 h 30 ce jour-là, la séance soit suspendue jusqu'à 15 h 30, heure de la période des questions.

[Traduction]

Agriculture et forêts

Préavis de motion tendant à autoriser le comité à étudier l'acquisition des terres agricoles au Canada et ses retombées potentielles sur le secteur agricole

L'honorable Terry M. Mercer : Honorables sénateurs, je donne préavis que, à la prochaine séance du Sénat, je proposerai :

Que le Comité sénatorial permanent de l'agriculture et des forêts soit autorisé à évaluer, afin d'en faire rapport, l'acquisition des terres agricoles au Canada et ses retombées potentielles sur le secteur agricole y compris :

a) les raisons expliquant l'augmentation de la valeur des terres agricoles au Canada;

b) les préoccupations et défis des intervenants agricoles en matière d'acquisition de terres agricoles;

c) les solutions potentielles pour remédier aux enjeux posés par l'acquisition des terres agricoles;

Que le comité présente son rapport final au Sénat au plus tard le 30 juin 2017 et qu'il conserve tous les pouvoirs nécessaires pour diffuser ses conclusions dans les 180 jours suivant le dépôt du rapport final.


[Français]

PÉRIODE DES QUESTIONS

Les affaires intergouvernementales

Les consultations avec les provinces

L'honorable Claude Carignan (leader de l'opposition) : Honorables sénateurs, ma question s'adresse au leader du gouvernement au Sénat. Lundi dernier, l'annonce du premier ministre concernant l'imposition d'une taxe sur le carbone dans les provinces et les territoires a fait sursauter plusieurs Canadiens et Canadiennes, particulièrement les ministres canadiens de l'Environnement qui se réunissaient à Montréal. En effet, ceux-ci croyaient à tort qu'ils étaient des partenaires à part entière avec le gouvernement fédéral dans les efforts pour lutter contre les changements climatiques.

Le premier ministre a annoncé son plan unilatéral de leur imposer une taxe sur le carbone. De toute évidence, le résultat était prévisible. Trois provinces ont quitté la conférence en laissant plusieurs de leurs homologues troublés et déconcertés par l'approche du premier ministre. Le gouvernement libéral a aussi montré de l'arrogance à quelques reprises à l'égard des provinces dans le dossier de la santé lors de la période des questions. Les libéraux font souvent référence à la collaboration et à la coopération, mais il est de plus en plus évident qu'ils y ont recours seulement lorsque cela leur convient.

Ma question est simple : le gouvernement fédéral a-t-il renoncé à toute collaboration avec les provinces? Le leader du gouvernement au Sénat peut-il nous dire quels seront les prochains domaines de compétence dans lesquels le gouvernement du Canada s'ingérera?

L'honorable Peter Harder (représentant du gouvernement au Sénat) : Je remercie le sénateur de sa question.

[Traduction]

Si vous voulez une réponse brève, je vous dirai non, mais je vais quand même fournir quelques précisions : c'est évidemment un dialogue que le gouvernement du Canada entretient avec les provinces, c'est-à-dire les ministres de l'Environnement, sur la question de la tarification de la pollution par le carbone. Au cours des négociations, le gouvernement du Canada a clairement énoncé sa politique à l'égard d'un prix plancher.

Comme le sénateur le sait, 80 p. 100 des Canadiens habitent dans une partie du pays où un mécanisme de tarification de la pollution au carbone est déjà en vigueur. Le gouvernement du Canada s'assure que ce mécanisme sera largement appliqué et qu'aux endroits où ce sera le cas, les recettes iront à la province. Nous sommes dans une période de négociation, et j'espère que nous pourrons arriver à une entente négociée avec toutes les parties, mais le gouvernement tient à ce que les provinces et les Canadiens sachent qu'il a la ferme intention de voir à ce que le régime de tarification du carbone englobe toutes les provinces et tous les territoires.

[Français]

L'environnement

La taxe sur le carbone

L'honorable Claude Carignan (leader de l'opposition) : Dans la lettre de mandat de la ministre de l'Environnement, on peut lire ce qui suit, et je cite :

En partenariat avec les provinces et les territoires, établir des cibles nationales de réduction des émissions et veiller à ce que les provinces et les territoires disposent d'un financement fédéral ciblé et de la souplesse nécessaire pour élaborer leurs propres politiques pour respecter ces engagements, y compris leurs propres politiques d'établissement du prix du carbone.

Cet objectif comptait parmi les priorités essentielles dans la lettre de mandat de la ministre, mais on constate que le premier ministre a changé d'avis. Il ne respecte plus les promesses faites par son gouvernement.

Quels sont les autres éléments de la lettre de mandat de la ministre qui tomberont à l'eau au cours des prochaines semaines?

[Traduction]

L'honorable Peter Harder (représentant du gouvernement au Sénat) : Je vous remercie de votre question, dont je n'accepte cependant pas la prémisse. La ministre s'acquitte des obligations définies dans sa lettre de mandat, obligations selon lesquelles elle doit travailler en collaboration avec les autres et formuler des propositions qui conduiront à l'adoption d'un régime de tarification de la pollution au carbone englobant tout le Canada.

Le gouvernement s'est montré très souple en indiquant aux provinces qu'elles sont libres de mettre en œuvre le mécanisme de tarification du carbone qui leur convient, mais que le Canada devra respecter sur tout son territoire les engagements qu'il prend concernant la tarification de la pollution au carbone.

La justice

Le processus de nomination des juges de la Cour suprême

L'honorable Jane Cordy : Honorables sénateurs, ma question s'adresse, elle aussi, au sénateur Harder, le représentant du gouvernement au Sénat. La semaine dernière, dans cette enceinte, des sénateurs se sont dits inquiets de voir que le gouvernement ne garantirait peut-être pas le respect de la tradition voulant qu'un des juges de la Cour suprême provienne des provinces de l'Atlantique.

Une motion prévoyant le respect de la tradition de la représentation régionale a été adoptée à l'unanimité à l'autre endroit, et je dois dire que le premier ministre a voté pour cette motion. Lorsque j'ai appris le résultat du vote, je me suis dit, comme beaucoup d'autres personnes, que le gouvernement allait honorer l'esprit de la motion et nommer à la Cour suprême du Canada un juge de la région de l'Atlantique lorsque le juge Cromwell prendrait sa retraite.

Cependant, la ministre de la Justice nous a appris plus tard ce jour-là que ce n'était pas le cas et qu'en fait rien ne garantissait la nomination d'un juge du Canada atlantique à la Cour suprême, malgré le vote unanime en faveur de la motion à la Chambre des communes. Les propos de la ministre de la Justice et le vote du premier ministre à l'appui de la motion qui demande le respect de la coutume semblent se contredire. J'ignore quelle est au juste la position du gouvernement. Y a-t-il un siège à la Cour suprême qui est garanti pour le Canada atlantique ou non? Je reçois des messages contradictoires.

(1430)

L'honorable Peter Harder (représentant du gouvernement au Sénat) : Je vous remercie de poser la question. Dans ma réponse, je signale que plusieurs sénateurs de la région de l'Atlantique ont adressé ensemble une lettre au premier ministre pour lui faire part de leur point de vue, qui correspond en gros à la teneur des questions.

Je pense qu'il est juste de mentionner qu'une motion a été présentée à l'autre endroit relativement à cette question et qu'un vote a eu lieu. Je pense que le gouvernement reste d'avis qu'il serait bon que le processus de candidature soit le plus large possible. Bien entendu, je ne participe manifestement pas au processus décisionnel ni ne suis au courant de ce qu'il en est, mais je crois vraiment qu'il est très important que le gouvernement, en étudiant les demandes qui lui sont soumises, tienne compte de votre question ainsi que des commentaires et des lettres à ce sujet, en plus de la motion présentée à la Chambre.

La sénatrice Cordy : Je crois certainement que le gouvernement devrait prendre cela en considération. C'est la coutume depuis la création de la Cour suprême, en 1875. Toutefois, j'ai lu dans le journal qu'un porte-parole de la ministre de la Justice, Jody Wilson-Raybould, a dit que le vote — le vote en faveur de la motion — « [...] signifie seulement que le gouvernement s'est engagé à inclure des candidats du Canada atlantique sur la liste des candidats présélectionnés pour le poste ».

Donc, en quoi inclure des Canadiens de la région de l'Atlantique dans une liste de candidats potentiels remplit la promesse d'une représentation régionale si, en fin de compte, ils ne sont pas choisis pour combler les postes vacants? C'est comme lorsque vous postulez un emploi et que vous découvrez que vous avez été retenu dans la présélection. Cela ne vous permet pas de payer le loyer. De dire que des Canadiens de la région de l'Atlantique figurent sur la liste de présélection ne remplit pas l'engagement de veiller à ce qu'un Canadien de la région de l'Atlantique siège à la Cour suprême du Canada ni ne correspond à ce que veut la coutume.

Cette coutume, comme je le disais à l'instant, existe depuis la création de la Cour suprême, en 1875. J'aurais cru qu'on continuerait de la respecter en 2016.

Le sénateur Harder : Je remercie encore une fois l'honorable sénatrice de sa question. Je la remercie en outre d'avoir fait état d'une inquiétude largement répandue, du moins parmi les Canadiens de l'Atlantique, que j'ai vus applaudir. Très bien. Je tenais seulement à m'assurer que tout le monde puisse participer à cette discussion.

Je dirai deux choses : en premier lieu, le gouvernement du Canada s'est doté d'un vaste processus de nomination et d'examen des candidatures à la Cour suprême. Parce qu'il mise sur l'ouverture, ce processus est du jamais vu, et je crois que la ministre mérite des félicitations. Nous verrons en temps et lieu comment les décisions seront prises. Cela dit, les questions comme la vôtre, sénatrice, les motions comme celle dont l'autre endroit a été saisi et, oui, les applaudissements des autres participants à la discussion ont tous leur place et je suis convaincu qu'ils pèseront dans la balance quand viendra le temps de choisir un candidat.

La modernisation du Sénat

La date de publication du rapport—La participation des sénateurs indépendants à la consultation

L'honorable Pamela Wallin : Je vous remercie, Votre Honneur. Ma question s'adresse au sénateur McInnis.

Le rapport intérimaire publié cette semaine par le Comité sénatorial spécial sur la modernisation du Sénat demande au Comité du Règlement de faire rapport au Sénat, d'ici le 30 novembre, des modifications nécessaires pour redéfinir le terme « caucus » et remplacer le terme « leader d'un parti reconnu ». Pourriez-vous nous dire s'il existe un quelconque mécanisme nous garantissant que l'échéancier du 30 novembre sera respecté, que les sénateurs indépendants pourront participer pleinement au processus, individuellement et collectivement, et qu'ils seront considérés sur le même pied que n'importe quel autre sénateur?

L'honorable Tom McInnis : Merci. En fait, ce statut leur sera accordé si la recommandation est adoptée.

Nous avons inscrit la date du 30 novembre dans la recommandation parce que nous jugeons que c'est important. C'est évidemment ce qui sera demandé.

Il est toujours dangereux de prétendre parler au nom de tous les membres du comité, mais je vous dirai bien franchement que je pense dans ce cas-ci que c'est assez urgent. J'espère que cette question sera réglée le plus rapidement possible après avoir fait l'objet, comme il se doit, d'un débat au Sénat. Étant donné le temps qu'il reste, le 30 novembre est une échéance ambitieuse, mais si la priorité pouvait être accordée à cette question, je pense que cette date pourrait être respectée.

La sénatrice Wallin : En l'absence de la présidente, la sénatrice Fraser, je vais poser ma question complémentaire au sénateur White. Pourriez-vous nous en dire plus sur la nécessité de répondre...

Son Honneur le Président : Excusez-moi, sénatrice Wallin. Malheureusement, les questions ne peuvent être posées qu'aux présidents des comités, pas aux vice-présidents. Si vous voulez adresser votre question complémentaire au sénateur McInnis, allez-y.

La sénatrice Wallin : Je reprends, alors. Je comprends ce que vous dites. Nous espérons que les membres du comité accepteront de respecter l'échéance. Votre trousse prévoit-elle un mécanisme ou une mesure si l'échéance n'est pas respectée?

Le sénateur McInnis : Selon moi, nous devrions attendre que cette recommandation soit présentée — ce qui est déjà fait — et qu'elle fasse l'objet d'un débat. À mon avis, les discussions pourraient vous éclairer.

Je vous remercie de votre question. Je comprends votre idée et je crois qu'il faut y réfléchir, mais c'est l'ensemble du Sénat qui en décidera.

L'emploi et le développement social

Les prestations d'assurance-emploi

L'honorable Rose-May Poirier : Ma question s'adresse au leader du gouvernement ou au représentant du gouvernement au Sénat. Le 21 avril, j'ai posé une question sur le projet du gouvernement Trudeau de raccourcir, en la faisant passer de deux semaines à une, la période d'attente avant le premier paiement de prestations d'assurance-emploi, à compter de janvier prochain. J'espérais avoir une réponse la semaine dernière, mais je n'en ai pas eu.

Monsieur le leader, les Canadiens méritent une réponse. Est-ce que, à cause de ce changement, ils perdront une semaine de prestations à la fin de la période, oui ou non?

L'honorable Peter Harder (représentant du gouvernement au Sénat) : Merci de votre question. Je vais m'efforcer d'avoir une réponse d'ici quelques jours.

La sénatrice Poirier : Merci. Je vous en sais gré, car cela fait près de six mois qu'on attend.

Je ne critique pas la mesure, car les gens sont contents de voir la période d'attente passer de deux semaines à une. Ils se demandaient simplement si cela revenait à prolonger d'une semaine la période de prestations, ou si la période restait la même, mais que, au lieu de perdre deux semaines au début de la période, ils allaient en perdre une à la fin, ce qui ne ferait pas vraiment leur affaire. Leurs revenus de prestations sont inférieurs à leur salaire d'employé, et c'est souvent au moment d'être mis à pied qu'ils reçoivent leur dernier chèque. Leurs difficultés financières sont donc souvent plus prononcées à la fin de la période de prestations, surtout s'ils ne se retrouvent pas immédiatement du travail. Nous demandons des avis à ce sujet et aimerions avoir une réponse, merci.

Le sénateur Harder : Je ferai en sorte que les questions que vous soulevez soient portées à l'attention des personnes compétentes pour y répondre.

La justice

Le processus de nomination des juges de la Cour suprême

L'honorable Norman E. Doyle : Honorables sénateurs, ma question s'adresse au leader du gouvernement au Sénat. En fait, c'est une question complémentaire à celles que j'ai posées la semaine dernière au sujet du nouveau processus de nomination des juges de la Cour suprême proposé par le premier ministre. Mes questions visent également à donner suite aux observations que la sénatrice Cordy a faites plus tôt dans la période des questions d'aujourd'hui à propos de ce dossier très important. J'aimerais aussi souligner que, après la mise aux voix de cette motion à la Chambre des communes, le Globe and Mail a révélé que, selon une porte-parole de la ministre de la Justice Jody Wilson-Raybould — je tiens à souligner les propos de la sénatrice Cordy —, « [...] le vote signifie seulement que le gouvernement s'est engagé à inclure des candidats du Canada atlantique sur la liste des candidats présélectionnés pour le poste [...] ».

Ma question au leader du gouvernement au Sénat est donc la suivante. Qu'est-ce qui explique cette apparente volte-face effectuée en un temps record par le gouvernement dans ce dossier très important? Le gouvernement a-t-il, oui ou non, l'intention de nommer un juriste du Canada atlantique pour remplacer le juge Cromwell?

(1440)

L'honorable Peter Harder (représentant du gouvernement au Sénat) : Je remercie l'honorable sénateur de sa question. Je crois avoir répondu à cette question lorsque j'ai répondu à la sénatrice Cordy, mais j'aimerais tout de même rassurer les sénateurs : les préoccupations qui sont soulevées par le sénateur et par les autres sénateurs et qui sont aussi soulevées dans des motions à l'autre endroit devront toutes être prises en considération par le gouvernement au moment où celui-ci devra faire un choix. Je suis convaincu que les sentiments exprimés par l'honorable sénateur et d'autres encore seront pris en compte adéquatement dans le cadre du processus de prise de décision.

Le sénateur Doyle : Le leader pourrait également formuler des commentaires sur la façon désorganisée dont le dossier a été traité. On a pu lire récemment dans le Toronto Star que M. Darrell Samson, un député libéral de la Nouvelle-Écosse, a révélé récemment lors d'une assemblée publique que cinq noms figurent sur la liste restreinte de candidats et que deux des candidats sont du Canada atlantique. Je répète que deux des candidats proviennent du Canada atlantique. Le leader du gouvernement peut-il confirmer ce renseignement, et, le cas échéant, comment se fait-il que le député soit au courant? Les renseignements liés aux nominations à la Cour suprême, et les nominations à un poste de juge en général, sont très confidentiels. Pourrait-on dire que les deux candidats du Canada atlantique bénéficieront d'une attention spéciale, puisqu'il existe une convention bien établie selon laquelle un Canadien de la région atlantique siège à la Cour suprême du Canada?

Le sénateur Harder : Je remercie l'honorable sénateur de sa question complémentaire. Je ne peux ni confirmer ni nier l'utilité d'un reportage paru dans le Toronto Star au sujet du point de vue à cet égard d'un député fédéral du Canada atlantique.

Toutefois, je tiens à rassurer le sénateur — comme j'ai tenté de rassurer tous les sénateurs en répondant aux questions à ce sujet. La décision qui sera prise quant au prochain juge de la Cour suprême s'inscrit fortement dans le contexte des voix qui se sont exprimées dans cette enceinte et à l'autre endroit. La ministre et le premier ministre examinent les candidatures à partir du plus vaste bassin possible dans le but de nommer la personne la plus compétente qui soit à la Cour suprême.

L'honorable David Tkachuk : Est-ce que la même politique va s'appliquer à l'ensemble du Canada, sauf le Québec, qui bénéficie d'une garantie en la matière?

Le sénateur Harder : Sénateur Tkachuk, je crois que la ministre a dit clairement que le gouvernement élargirait le bassin des candidats aux postes de juge à la Cour suprême qui seront vacants. Dans ce contexte, l'ouverture et l'élargissement du processus de nomination constituent une approche innovatrice et rafraîchissante en matière de représentation régionale, qui, évidemment, sera prise en compte dans les décisions concernant d'éventuels postes vacants à la Cour suprême.

L'honorable Jim Munson : J'aimerais obtenir une précision. La coutume veut que l'Ontario compte trois juges à la Cour suprême. Est-ce qu'un juriste de la Colombie-Britannique ou d'ailleurs pourrait aujourd'hui se porter candidat à ces postes? Le processus est-il ouvert à des juristes de l'extérieur de l'Ontario pour qu'ils puissent présenter leur candidature à l'un des trois postes à la Cour suprême qui, selon la coutume, sont attribués à des Ontariens? Est-il ouvert à tous?

Le sénateur Harder : Il serait fort souhaitable que votre honorable serviteur soit responsable du processus, mais ce n'est malheureusement pas le cas. Le processus incombe à la ministre de la Justice et procureure générale du Canada. C'est elle qui a annoncé les réformes au processus de sélection et de nomination des candidats pour le poste actuellement vacant et pour ceux qui le seront à l'avenir. J'invite les sénateurs à prendre connaissance de ce processus et je leur souligne l'importance du respect de la tradition historique concernant la représentation des régions canadiennes à la Cour suprême.

[Français]

L'honorable Claude Carignan (leader de l'opposition) : J'aurais une question complémentaire. Je crois qu'il est important que le prochain juge vienne des provinces de l'Atlantique. Le premier ministre a également dit que les juges de la Cour suprême devaient être bilingues. Le critère du bilinguisme sera-t-il maintenu au sein du bassin des avocats des provinces maritimes susceptibles d'être nommés?

Le sénateur Harder : La position du gouvernement est claire. Le gouvernement a indiqué que le candidat devra nécessairement avoir la maîtrise des deux langues officielles afin d'assumer pleinement son rôle de juge devant la cour.

[Traduction]

La santé

Les transferts en matière de santé

L'honorable André Pratte : Honorables sénateurs, ma question s'adresse au représentant du gouvernement au Sénat. Le gouvernement du Canada propose que le Transfert canadien en matière de santé soit augmenté tous les ans d'un pourcentage équivalant à l'augmentation du PIB et que le seuil minimal soit fixé à 3 p. 100. Il s'agirait donc d'une augmentation d'environ 4 p. 100. Selon le directeur parlementaire du budget, entre autres, cette augmentation ne suffirait pas à couvrir l'augmentation des coûts de base et des coûts associés au vieillissement de la population, et elle ne permettrait pas d'investir plus d'argent dans la santé mentale et les services de soins à domicile.

Pourquoi le gouvernement n'ajustetil pas le taux du transfert en matière de santé en fonction de la croissance des coûts réels des soins de santé, au lieu de verser des sommes insuffisantes aux provinces, qui ne peuvent donc pas répondre aux besoins urgents des Canadiens?

L'honorable Peter Harder (représentant du gouvernement au Sénat) : Je remercie l'honorable sénateur de sa question et de l'intérêt qu'il continue de manifester à l'égard de cet enjeu, car il y a eu d'autres questions sur ce sujet plus tôt cette semaine.

Le gouvernement du Canada est d'avis qu'il est souhaitable d'offrir des augmentations prévisibles et, comme l'honorable sénateur l'a mentionné dans sa question, c'est pour cette raison qu'il a décidé d'établir un seuil minimal, soit 3 p. 100 de l'augmentation du PIB. Je crois savoir que, dans l'ensemble, les dépenses en santé ont diminué en moyenne de 0,6 p. 100 depuis 2011, tandis que le transfert, lui, a augmenté de 6 p. 100. Bien entendu, le gouvernement souhaite que le niveau de croissance soit prévisible dans le contexte de la prestation de services, et il veut également favoriser l'innovation et les pratiques exemplaires. Donc, c'est bien plus qu'une simple discussion sur l'augmentation des paiements de transfert.

Pour ce qui est de la question complémentaire ou du deuxième aspect que mon collègue a soulevé dans son discours, en l'occurrence la démographie, je vais tout simplement répéter ce que j'ai dit l'autre jour, lorsque j'ai parlé des 3 milliards de dollars qui seront consacrés aux soins à domicile. Cet investissement a pour objectif principal d'accroître la capacité en ce qui concerne les soins à domicile, qui sont souvent liés à la santé et sont offerts au groupe démographique dont vous avez parlé.

[Français]

Le sénateur Pratte : Justement, cette idée de la ministre Philpott sur le paiement d'un montant de 3 milliards de dollars est une approche de fonds ciblés qui a déjà été tentée par le gouvernement fédéral par le passé. Nous avons vu les effets pervers de cette approche où les fonds, lorsqu'ils cessent d'être versés après deux ou trois ans, laissent les provinces avec leurs problèmes sur les bras. Au lieu d'employer une approche dont l'expérience a montré qu'elle ne fonctionne pas, pourquoi le gouvernement n'augmente-t-il pas les paiements de transfert en faveur de la santé, afin de couvrir l'augmentation prévisible des coûts du système de soins de santé et les besoins à venir pour les 10 prochaines années?

[Traduction]

Le sénateur Harder : Je remercie l'honorable sénateur de sa question. Comme je l'ai déjà dit, j'ai l'impression que, aux yeux de la ministre responsable et du gouvernement du Canada, la participation de ce dernier au cadre stratégique national en santé ne se résume pas à un simple transfert d'impôt. Il est aussi un partenaire important dans le domaine de l'innovation et il est là pour s'assurer que la modernisation du réseau de la santé du pays respecte les compétences de chacun, évidemment, mais aussi qu'elle se fait à un rythme plus soutenu. N'oublions pas non plus que certaines priorités du réseau de la santé, tels que les problèmes associés au vieillissement de la population, comme il en a été question, sont abordées de manière plus directe et plus délibérée dans le cadre des discussions fédérales-provinciales.

(1450)

Les transports

Le transport des grains

L'honorable Donald Neil Plett : Ma question s'adresse également au leader du gouvernement au Sénat.

Monsieur le leader, la Fédération canadienne de l'agriculture a prévenu à maintes reprises le gouvernement, et surtout le ministre des Transports, que les récoltes devraient encore être exceptionnelles. Même s'il s'agit d'une bonne chose en soi, les agriculteurs sont cependant en droit de craindre que le scénario de 2013-2014, qui a coûté des milliards de dollars à l'économie, ne se répète encore cette année et que le réseau ferroviaire ne soit à nouveau engorgé.

La fédération réclame une rencontre entre le ministre des Transports et les agriculteurs du Manitoba, de la Saskatchewan et de l'Alberta depuis avril, mais le ministre refuse de les recevoir.

Monsieur le leader, comment le ministre des Transports peut-il refuser de rencontrer les représentants de l'industrie agricole pour discuter d'un enjeu aussi important, économiquement parlant, que le transport des grains?

L'honorable Peter Harder (représentant du gouvernement au Sénat) : Je remercie l'honorable sénateur de sa question et de l'intérêt assidu qu'il porte au bien-être du secteur agricole.

Ce problème, comme le sénateur l'a laissé entendre, est directement lié à l'abondance des récoltes. Il figure parmi les nombreux problèmes que le Sénat a voulu régler en élargissant la portée de certaines dispositions de la Loi sur les grains du Canada et dont il est question dans l'excellent rapport de M. Emerson sur l'examen de la Loi sur les transports au Canada.

Le gouvernement procède à de vastes consultations, et le ministre s'est rendu dans l'Ouest, notamment au Manitoba, pour consulter les parties intéressées par rapport à la réforme des transports et à l'examen de la loi.

Pour ce qui est de savoir si le groupe que vous avez mentionné comptait parmi les parties intéressées rencontrées, je devrai m'informer. Je sais toutefois que le ministre passe beaucoup de temps dans l'Ouest en raison des préoccupations exprimées, avec raison, par le groupe de parties intéressées.

Le sénateur Plett : Puisque vous mentionnez la Loi sur la participation publique au capital d'Air Canada, nous vous remercions du travail que vous avez fait dans ce dossier. Tandis que le ministre des Transports donne au Manitoba le fameux doigt d'honneur à la Trudeau, nous travaillons très fort pour obtenir quelque chose de mieux pour le Manitoba.

Les agriculteurs veulent simplement donner leur opinion au ministre alors qu'il examine, comme vous l'avez dit, un rapport qui réclame des changements majeurs pour le transport ferroviaire du grain. Le ministre a rencontré les compagnies de chemin de fer, mais chaque fois que la Fédération canadienne de l'agriculture communique avec son cabinet pour demander une rencontre, on se contente de leur répondre : « Le ministre n'est pas disponible. »

Alors, monsieur le leader, auriez-vous l'obligeance de demander au ministre des Transports de ne pas seulement tenir compte de l'opinion des compagnies de chemin de fer bien nanties, mais de faire la bonne chose et de rencontrer les bons agriculteurs de l'Ouest du Canada que tant de nous appuyons et dont tant de nous dépendent?

Le sénateur Harder : Bien sûr, sénateur. Toutefois, je veux également vous rassurer : le ministre n'a pas seulement rencontré l'industrie ferroviaire. Il a rencontré un vaste éventail de parties intéressées, y compris les provinces, le milieu des affaires, la communauté agricole et les Autochtones qui ont leur mot à dire dans cet examen des transports.

Cela dit, je vais m'informer précisément au sujet du groupe que le sénateur a mentionné, comme celui-ci m'invite à le faire.


ORDRE DU JOUR

Projet de loi sur le renforcement de la sécurité automobile pour les Canadiens

Projet de loi modificatif—Deuxième lecture—Ajournement du débat

L'honorable Peter Harder (représentant du gouvernement au Sénat) propose que le projet de loi S-2, Loi modifiant la Loi sur la sécurité automobile et une autre loi en conséquence, soit lu pour la deuxième fois.

— Honorables sénateurs, je souhaite prendre la parole au sujet du projet de loi S-2. Il vise à renforcer la protection des consommateurs et la sécurité automobile au Canada grâce à un cadre de réglementation qui, comparativement aux dispositions législatives actuelles, serait plus efficace et mieux adapté à l'évolution des technologies automobiles et aux problèmes de sécurité connexes.

J'aimerais d'abord préciser que le gouvernement précédent a présenté un projet de loi semblable l'année dernière, le projet de loi C-62. Je vais expliquer la différence entre les deux projets de loi, mais je tiens à féliciter et à remercier le gouvernement précédent du travail qu'il a effectué dans ce dossier, et à souligner que le gouvernement actuel continue d'appuyer le renforcement de la protection des consommateurs et de la sécurité automobile pour les Canadiens.

[Français]

Le nombre de personnes blessées et tuées sur les routes du Canada diminue progressivement, ce qui est particulièrement encourageant, puisque le nombre de véhicules en circulation augmente. Selon le gouvernement, la Loi sur la sécurité automobile ainsi que les réglementations et les normes connexes contribuent à améliorer la sécurité automobile au Canada. Cependant, nous veillerons à ce que le gouvernement fédéral se porte garant de la sécurité des véhicules et des pièces d'automobile en production.

En outre, nous nous assurerons que les cadres législatifs et juridiques suivent l'évolution rapide des technologies automobiles afin que nos lois fédérales s'adaptent aux nouvelles réalités du transport automobile.

Les règlements canadiens en matière de sécurité automobile s'appliquent à tous les véhicules en circulation. En effet, le gouvernement fédéral, par le truchement de la Loi sur la sécurité automobile, énonce clairement ses attentes aux constructeurs et importateurs de véhicules et d'équipements. Ces règles et normes formulées par le gouvernement fédéral inspirent confiance aux divers intervenants du secteur de la sécurité automobile, soit les gouvernements provinciaux et territoriaux et la population canadienne.

[Traduction]

Le projet de loi C-62, qui visait à modifier la Loi sur la sécurité automobile, a été présenté à l'autre endroit en juin 2015. Ce projet de loi prévoyait de nouveaux pouvoirs concernant la correction de défauts, les rappels et les inspections ainsi qu'un nouveau cadre de sanctions administratives pécuniaires. Ces modifications législatives ont été reprises, à quelques différences près, dans le projet de loi S-2. Par ailleurs, ce projet de loi prévoit de nouvelles dispositions qui tiennent compte de l'évolution rapide des technologies ainsi que des dispositions sur le consentement pour amener les entreprises ayant contrevenu à la loi à mieux se conformer aux exigences en matière de sécurité.

Comme c'est le cas pour le projet de loi C-62, les principales modifications prévues dans le projet de loi S-2 ont trait aux rappels de véhicules et d'équipements automobiles. Il y a parfois des situations où Transports Canada estime qu'il existe un éventuel défaut de sécurité ou un cas de non-conformité, avis que ne partage pas le constructeur.

Le projet de loi S-2 autoriserait le ministre des Transports à enjoindre une entreprise de remédier à un défaut ou à un cas de non-conformité d'un véhicule ou équipement s'il estime que c'est dans l'intérêt de la sécurité publique. On propose également que le ministre soit autorisé à ordonner que ces véhicules ne soient pas vendus à un acheteur au détail tant que le défaut n'a pas été rectifié.

Ces pouvoirs d'exécution sous forme de décret complètent le pouvoir, existant dans le régime de sécurité des véhicules automobiles, d'ordonner à une entreprise d'émettre un avis de défaut ou de non-conformité et de remédier à une grave lacune. Cette modification fera en sorte que les Canadiens soient tenus au courant des problèmes de sécurité de leurs véhicules et garantira que les problèmes sont rectifiés.

Les véhicules qui circulent sur les routes canadiennes sont des engins ultra-évolués, comme le savent les sénateurs. Leur complexité continue d'augmenter chaque année, et la plus grande partie de la technologie est brevetée. Compte tenu de cette complexité, il est de plus en plus difficile de recueillir les données nécessaires sur les défauts ou les cas de non-conformité. De ce fait, le ministre des Transports sera investi du pouvoir d'ordonner aux entreprises de procéder à des essais, des analyses ou des études sur un véhicule ou un équipement que le ministre estime nécessaires. Ces pouvoirs qui autorisent la collecte de renseignements aideront également à assurer que les inspecteurs des véhicules automobiles disposent des renseignements dont ils ont besoin pour aider à veiller à ce que les entreprises se conforment à la Loi sur la sécurité automobile. Toutefois, et c'est ce qui importe le plus, ces pouvoirs assureront que les Canadiens soient plus en sécurité au volant de leur véhicule.

(1500)

Bien que ces exigences et ces outils opérationnels contribuent à assurer en permanence la sécurité des Canadiens, il manque encore de moyens d'application de la Loi sur la sécurité automobile et de son Règlement. À l'heure actuelle, cette loi ne comprend que très peu d'outils de réglementation pour encourager les entreprises à s'y conformer. Quand il soupçonne une violation, le ministère des Transports du Canada en avertit l'entreprise, puis effectue un suivi pour vérifier si celle-ci a pris des mesures correctrices. S'il constate qu'aucune mesure n'a été prise, le ministère n'a actuellement d'autre choix que d'intenter une poursuite au criminel. La voie juridique est longue et coûteuse pour l'industrie, pour le gouvernement et même pour les consommateurs. Dans certains cas, cette mesure ne convient pas à la violation commise.

C'est pourquoi les modifications proposées comprennent un système de sanctions administratives qui encouragera les entreprises à respecter la loi par l'application de moyens plus efficaces et moins coûteux qu'une poursuite criminelle. Les entreprises pourront se porter en appel de la sanction administrative pécuniaire auprès du Tribunal d'appel des transports du Canada. Au cours du processus d'examen, on vérifiera si l'entreprise ou la personne a commis une violation aux termes de la loi et, dans l'affirmative, si la sanction imposée convient. Dans certains cas, des mesures autres que le paiement d'une amende conviennent mieux ou contribuent plus efficacement à assurer la sécurité des Canadiens. Ces mesures peuvent se traduire par le lancement d'une campagne de promotion de la sécurité ou par la modification de la culture de l'entreprise en matière de sécurité. Ce projet de loi prévoit un nouvel outil — que le projet de loi C-62 ne prévoyait pas —, que l'on appelle un « consentement ». Ce mécanisme permettra au ministre de négocier une entente acceptable pour toutes les parties qui contribuera à renforcer la sécurité automobile. Une fois signées, ces ententes seraient enregistrées à la Cour fédérale, et l'ordonnance qui suivrait serait affichée sur le site web de Transports Canada pour faire preuve de transparence.

Outre les changements destinés à appuyer les enquêtes sur la conformité et l'application de la loi, d'autres changements visent à suivre l'évolution continuelle et toujours plus rapide des technologies automobiles. Il est possible que ces nouvelles technologies améliorent la sécurité, encouragent l'innovation et réduisent l'impact écologique des véhicules. Toutefois, les règlements en vigueur ne sont souvent pas assez souples pour s'adapter à ces changements. Il est donc proposé d'adopter de nouvelles dispositions pour modifier les dispositions actuelles relatives à l'arrêté à effet provisoire et à la dispense qui figurent dans la Loi sur la sécurité automobile, afin de donner à cette loi la souplesse nécessaire pour appuyer les innovations et pour soutenir l'industrie canadienne tout en maintenant des normes de sécurité qui protègent tous les Canadiens.

Plus exactement, le projet de loi S-2 modifierait le pouvoir de l'arrêté à effet provisoire, qui suspend l'application d'un règlement en vigueur ou qui le modifie, afin de prolonger la validité de l'arrêté de un à trois ans. Nous aurons ainsi tout le temps nécessaire pour parachever les règlements officiels et pour adopter aussitôt que possible toutes les nouvelles technologies qui avantageraient les Canadiens.

De plus — et cela non plus n'était pas prévu dans le projet de loi C-62 —, ce projet de loi propose de renforcer l'efficience du processus de dispense visant certains modèles d'automobiles. Cela facilitera l'adoption de nouvelles technologies pour ces véhicules. Les pouvoirs ainsi proposés permettront au ministre de dispenser une entreprise de se conformer aux normes en vigueur afin de soutenir l'application de nouveaux dispositifs de sécurité ou de technologies novatrices sans compromettre la sécurité.

Grâce à ces mesures, la Loi sur la sécurité automobile pourra continuer de protéger les Canadiens tout en facilitant l'innovation et l'utilisation de technologies qui pourront aussi profiter au Canada.

Ces changements visent à renforcer les normes de sécurité en fournissant au ministre des Transports et à ses fonctionnaires les outils nécessaires pour garantir la conformité des entreprises aux exigences législatives et réglementaires du Canada en matière de sécurité.

Ce projet de loi fournira aussi au Canada et aux fabricants d'automobiles les moyens d'aborder de nouvelles technologies.

Avec l'apparition des véhicules automatisés, des véhicules branchés et des nouvelles technologies écologiques, nous devons avoir la capacité d'évaluer l'aspect « sécurité » de ces technologies tout en encourageant leur développement.

Je conclus en disant que la combinaison des dispositions du projet de loi S-2, en l'état, renforce la Loi sur la sécurité automobile pour tous les Canadiens. Elle donnera lieu à un regain de confiance chez les consommateurs et raffermira la sécurité automobile. Je recommande que vous accordiez toute votre attention à ce projet de loi.

L'honorable A. Raynell Andreychuk : Sénateur Harder, accepteriez-vous de répondre à une question?

Le sénateur Harder : Bien sûr.

La sénatrice Andreychuk : J'écoutais votre réponse, quand vous disiez que le but était d'assurer la sécurité des Canadiens, et nous sommes tous favorables à cela. Ce qui m'apparaît moins clair, et nous en parlerons peut-être en comité, c'est la possibilité d'élargir par voie de règlement ce qui pourrait être mieux servi par d'autres modifications à la loi. Un des avantages d'apporter ces changements par la voie législative, c'est que le public en est conscient. Les règlements sont devenus monnaie courante. Quelle garantie les provinces et les responsables de l'application de la loi auront-ils d'obtenir les ressources nécessaires pour s'adapter continuellement au changement en vertu de la réglementation? Comment le public saura-t-il s'il est en sécurité? Par quel mécanisme pourra-t-il en avoir la certitude si les choses se font par voie de règlement?

Le sénateur Baker est l'un de ceux qui font observer ici, dans cette enceinte, que nous procédons trop souvent par voie de règlement plutôt que de maintenir les dispositions dans une loi. J'aimerais savoir ce que vous en pensez, sénateur Harder.

Le sénateur Harder : Je remercie l'honorable sénatrice pour sa question et reconnais que, lorsqu'on présente des projets de loi avant les cadres réglementaires — et cette mesure en est un exemple —, il faut trouver un juste équilibre entre, d'une part, ce que les règlements devraient inclure pour offrir une certaine latitude et, d'autre part, ce que le projet de loi lui-même devrait encadrer.

Je trouve qu'en ce sens le projet de loi établit un cadre réglementaire adéquat. J'ai souligné, à certains égards, que la transparence se trouve améliorée par certaines des procédures prévues dans cette mesure, comme le recours à des ordonnances de la Cour fédérale et le fait d'ordonner aux entreprises de lancer une campagne pour avertir les consommateurs de certaines défaillances, puisqu'à l'heure actuelle, le ministre ne peut pas le faire.

Au rythme où évolue la technologie, il est souvent difficile d'intervenir rapidement. Comme la sénatrice le sait bien, la capacité à réglementer à l'intérieur d'un cadre juridique établi permet d'agir plus rapidement, selon l'évolution des technologies et des circonstances.

Dans ce projet de loi, nous visons à établir l'équilibre suivant : nous voulons que tous les Canadiens sachent que la sécurité automobile est extrêmement importante, tandis que nous fixons pour les fabricants des limites qui leur permettent d'innover et d'appliquer de nouvelles technologies afin que le secteur canadien de l'automobile et des pièces d'automobiles devienne un centre d'innovation de choix pour l'industrie.

Son Honneur le Président : Madame la sénatrice Lankin, vous avez une question?

L'honorable Frances Lankin : Oui, répondriez-vous à une autre question, sénateur? Merci beaucoup. Ce projet de loi m'intéresse. Je pense depuis longtemps que notre gouvernement ne prend pas assez au sérieux les défauts et les vices de fabrication ainsi que les problèmes de sécurité que l'on signale. Le gouvernement réagit très lentement, au détriment de la sécurité des Canadiens. Je vois donc dans ce projet de loi un effort visant à inciter le gouvernement à agir plus activement pour régler ces problèmes.

Vous avez, entre autres, parlé de la possibilité de porter des accusations criminelles, ce qui permettrait d'accélérer le règlement dans certains cas. Je crois que nous avons tous entendu parler de l'affaire Volkswagen. Une telle situation entraînerait probablement une accusation au criminel.

Je me demandais s'il est déjà arrivé que l'on décide de ne pas porter d'accusations criminelles pour des incidents de ce genre et si, par conséquent, les Canadiens sont restés sans défense parce que le gouvernement ne prenait pas de mesures énergiques.

Le sénateur Harder : Je crois qu'on peut dire, sénatrice Lankin, que l'impulsion qui a donné naissance à ce projet de loi s'explique de plusieurs façons. Il y a notamment l'avantage dont jouissent les consommateurs américains dans un régime qui autorise et qui prévoit des ententes de consentement pour que des enquêtes soient menées plus tôt, que la conformité soit vérifiée et que des changements soient apportés. Le seul recours au Code criminel ne fournit ni la souplesse ni la rapidité d'intervention que le projet de loi C-62 visait à fournir et que le projet de loi que nous examinons cherche à étendre, par la conclusion d'ententes de conformité.

Bien qu'on se heurte toujours à des situations exceptionnelles auxquelles les ententes de conformités ne s'appliquent pas — et vous en avez mentionné une —, il est évident qu'une bonne politique publique viserait à détecter les failles le plus tôt possible, à en avertir les consommateurs et à exiger du fabricant un dédommagement monétaire approprié ou une autre forme de compensation.

La sénatrice Lankin : Merci beaucoup. J'aime beaucoup cela, c'est très prometteur.

J'ai une question à poser au sujet de la réaction de l'industrie ainsi que du milieu de la sécurité à cette mesure.

(1510)

Si j'ai bien compris, le projet de loi C-62 n'a subi que l'étape de la première lecture. Je ne pense pas qu'il ait été plus loin, alors il n'y a pas eu de discussion approfondie, de débat ou de présentation de points de vue pour ou contre le projet de loi. Je sais que, si le projet de loi dont nous sommes saisis est renvoyé au comité compétent, nous aurons l'occasion d'avoir une bonne discussion.

Pourriez-vous nous faire part, pour autant que vous le sachiez, de la réaction qu'ont eue à ce projet de loi les fabricants d'automobiles, l'industrie de la production et les syndicats, ainsi que le milieu de la sécurité?

Le sénateur Harder : Merci. Comme la sénatrice le sait, le projet de loi a été déposé au Sénat avant que nous n'ajournions nos travaux pour l'été. On m'a dit que certains intervenants en avaient débattu.

Je vous dirai franchement — et je suppose que c'est signe d'un bon équilibre — que le projet de loi n'a déclenché ni critiques amères ni appui sans bornes. Il est vu comme un pas prudent. J'espère que, dans le contexte de nos audiences — puisque ce projet de loi est d'abord débattu au Sénat —, nous entendrons les points de vue des intervenants afin d'avoir la certitude, avant de prendre un vote définitif, que nous avons établi un juste équilibre et que nous aurons étudié comme il se doit les préoccupations des intervenants, s'ils nous en présentent. C'est pourquoi je suis heureux que vous ayez posé cette question, et je crois que nous pourrons y apporter la meilleure réponse une fois que nous aurons entendu directement les points de vue des intervenants.

(Sur la motion du sénateur White, le débat est ajourné.)

La Loi sur les aliments et drogues

Projet de loi modificatif—Deuxième lecture—Ajournement du débat

L'honorable Nancy Greene Raine propose que le projet de loi S-228, Loi modifiant la Loi sur les aliments et drogues (interdiction de faire de la publicité d'aliments et de boissons s'adressant aux enfants), soit lu pour la deuxième fois.

— Honorables sénateurs, le Canada est confronté à une crise, soit l'augmentation du taux d'obésité, qui a un impact sur la vie de nos enfants. Aujourd'hui, au Canada, plus de 30 p. 100 des enfants d'âge scolaire sont en surpoids. Dans 13 p. 100 des cas, on peut parler d'obésité. Depuis 1980, le pourcentage d'enfants obèses a triplé au Canada. Même les enfants d'âge préscolaire sont à risque. La semaine dernière, les médias ont fait part de recherches montrant des problèmes dès l'âge de 6 mois.

Nous avons les preuves que les enfants en surpoids ou obèses risquent de souffrir prématurément de maladies chroniques comme le diabète de type 2, de maladies cardiaques, d'accidents vasculaires cérébraux, de certains cancers et de problèmes articulaires.

Nous savons que l'obésité est difficile à inverser et que les enfants en surpoids ou obèses sont plus susceptibles d'avoir des problèmes de poids toute leur vie. Nous savons aussi que le fait d'être en surpoids ou obèse a des effets sur la santé mentale et l'estime de soi des enfants. C'est pourquoi j'ai présenté ce projet de loi, et j'ai choisi de l'intituler « Loi sur la protection de la santé des enfants ».

Le surpoids et l'obésité n'ont pas une seule cause. Ils sont dus à la fois à une mauvaise alimentation, à un manque d'exercice et probablement à trop de temps passé devant un écran. Il peut y avoir des causes génétiques, mais ce n'est normalement qu'une simple question d'apport et de dépense de calories. S'il absorbe plus de calories qu'il n'en dépense, le corps finit par stocker l'excès sous forme de graisse dans des cellules adipeuses spéciales.

La nutrition est un sujet complexe. Tout au long de ma vie, j'ai vu les choses évoluer, de la cuisine familiale avec très peu d'ingrédients transformés à l'actuelle abondance d'aliments tout prêts et de restaurants rapides. Nous faisions auparavant la cuisine avec des ingrédients de base et utilisions les aliments de saison venant souvent de notre propre jardin ou d'un marché fermier. Nous devions parfois faire des conserves maison et manger des conserves ou des surgelés, mais il existe maintenant une abondance de produits frais disponibles hors saison, expédiés de partout dans le monde.

Les aliments nutritifs de qualité sont parfois plus chers, mais je dirais qu'ils n'ont pas besoin de l'être. Nous devons réapprendre à faire la cuisine nous-mêmes en utilisant des légumes de saison, des lentilles, des haricots et des grains entiers et en assaisonnant nos plats avec nos propres épices au lieu d'utiliser des sauces du commerce. Nous devons aussi comprendre que l'alimentation est la clé de la santé. Si vous vous nourrissez surtout d'aliments malsains et transformés, tôt ou tard, vous vous retrouverez avec des problèmes de santé.

J'ai également assisté au début du calcul des calories, probablement parce qu'avec la popularité des appareils inventés pour réduire l'effort, nous avons commencé à brûler moins de calories en accomplissant notre routine quotidienne. Nous avons assisté à un virage dans l'étiquetage promotionnel des produits; aujourd'hui, ce n'est plus tant le gras qui est mauvais, mais plus souvent le sucre. Il est intéressant de constater que la hausse des taux de surpoids et d'obésité a coïncidé avec la promotion des régimes à faible teneur en gras, probablement parce que les fabricants ont dû ajouter du sucre dans leurs produits pour en améliorer le goût.

Il semble que la réduction du gras dans les produits ait entraîné une hausse de la quantité de fromages sur le marché, un aliment à forte teneur en gras et en sel, qui est ajouté à une foule de produits, notamment aux collations. Aujourd'hui, de multiples produits contiennent de la sauce au fromage.

En 2015, l'Organisation mondiale de la Santé a recommandé que 5 p. 100 seulement du nombre total de calories proviennent du sucre, contre 10 p. 100 auparavant. On parle ici de toutes les formes de sucre, tant le sucre présent naturellement dans les aliments que celui ajouté dans les aliments transformés. Le taux recommandé ne représente pas beaucoup de sucre. Ceux d'entre nous qui ont un mode de vie plutôt sédentaire ne devraient consommer que 2 000 calories par jour en moyenne. Cinq pour cent de ce total équivaut à seulement 100 calories provenant du sucre. Une canette de boisson gazeuse de 310 millilitres contient environ 120 calories. Une seule canette nous fait donc dépasser la quantité maximale de sucre recommandée par jour. Même un verre de jus d'orange de huit onces, avec ses 110 calories, vous fera dépasser la limite.

Certaines personnes passent aux boissons-diète, mais on constate de plus en plus que les boissons-diète donnent envie de consommer du sucre et, de nos jours, il y a du sucre caché dans à peu près tout. Lisez les étiquettes; presque tous les aliments transformés contiennent du sucre. Il n'est donc vraiment pas facile de couper le sucre, sans parler du gras et du sel. L'eau demeure le meilleur choix.

Honorables sénateurs, il est évident que l'enfant qui développe un goût pour les boissons gazeuses et toutes sortes d'autres produits édulcorés a de fortes chances de souffrir d'embonpoint ou d'obésité. C'est pourquoi, je le répète, mon but avec le projet de loi S-228 est d'empêcher que les enfants ne deviennent accros à des produits qui les font ressentir le besoin de consommer des boissons et des aliments néfastes pour leur santé.

Honorables sénateurs, si vous me le permettez, je vais m'écarter un peu du sujet pour parler des deux autres causes d'obésité chez les enfants : trop peu d'exercice et trop de temps passé devant un écran. La combinaison des deux est un sérieux problème, et il y a lieu d'agir. Chaque fois que j'aborde le sujet de l'obésité infantile, il y a quelqu'un pour dire qu'il faut remettre au programme des écoles les bons cours d'éducation physique. Je ne sais pas si c'était la même chose dans toutes les écoles primaires, mais je me souviens que, à la récréation et à l'heure du dîner, nous courions comme des fous. Il est vrai qu'autrefois, les enfants n'avaient pas le choix, on les obligeait à aller jouer dehors. Cela leur permettait de développer leur créativité en inventant plein de jeux.

De nos jours, certains parents ont peur de laisser leurs enfants passer du temps non structuré à l'extérieur et, comme eux-mêmes sont trop occupés pour les emmener jouer au parc, ce sont les téléviseurs et d'autres appareils électroniques qui sont devenus leurs jeux de prédilection. Il est important de redonner aux enfants le goût pour les jeux sains et actifs, de les faire jouer, dehors de préférence. Nos enfants en ont besoin plus que jamais.

(1520)

Je voudrais que les parents comprennent à quel point trop de temps passé devant un écran est nocif pour la santé de leurs enfants. Selon les experts, il n'existe pas de durée saine passée devant un écran pour un enfant de moins de 2 ans et, pour un enfant d'âge préscolaire, une heure par jour devrait être le maximum. Ce temps ne doit pas comprendre les animations où tout bouge à toute vitesse. Des mises en garde ont également été formulées dans le cas des enfants d'âge scolaire : s'il est tellement important de limiter la durée que ce groupe d'âge passe devant un écran, c'est que les activités physiques — y compris celles qui font appel à la motricité fine — sont essentielles au bon développement des compétences sociales et de la créativité.

On reconnaît aujourd'hui que frapper des touches de clavier plutôt que d'apprendre à former les lettres et à les écrire nuit au développement de l'enfant. De nouvelles études montrent que, si les parents utilisent leurs appareils, les enfants veulent les imiter. Si la famille n'y prête pas beaucoup d'attention, ce phénomène peut aboutir à un trouble du détachement, avec les conséquences que cela implique pour la santé mentale de l'enfant. Les enseignants à la maternelle et au primaire doivent maintenant composer avec des problèmes de comportement qu'on ne rencontrait que très rarement jadis.

Bon, voilà pour cette longue parenthèse. Je voulais seulement qu'il soit clair que je sais que la commercialisation des aliments et des boissons auprès des jeunes enfants n'est pas la seule responsable de l'augmentation des taux d'obésité. Je demeure quand même convaincue que son interdiction aiderait à atténuer le problème. Les familles trouvent que leurs bambins sont bombardés par la publicité et les offres promotionnelles sur les boissons et les aliments, à un âge où ils sont particulièrement vulnérables à ce type de message.

Honorables sénateurs, pourquoi l'industrie et son marketing ciblent-ils les enfants, je vous le demande? Saviez-vous que, aux États-Unis, les annonceurs d'aliments et de boissons dépensent annuellement entre 10 et 15 milliards de dollars en marketing destiné aux enfants? Nous n'avons malheureusement pas de chiffres pour le Canada, mais c'est probablement au moins un milliard de dollars.

La publicité influence les préférences alimentaires des enfants. Pour chaque heure passée devant la télévision, leur consommation de calories augmente, non seulement parce qu'ils grignotent en même temps, mais aussi à cause de la publicité qu'ils voient. Le risque d'obésité chez l'enfant d'âge préscolaire augmente de 6 p. 100 par heure passée quotidiennement devant la télévision. Une annonce de 30 secondes peut influencer les préférences alimentaires de l'enfant dès l'âge de deux ans. Il ne fait aucun doute que le marketing qui cible les enfants fonctionne, tout comme il est manifeste que les enfants exercent une forte influence sur les choix des parents et que l'acquisition d'habitudes alimentaires malsaines est une des conséquences de cette exposition à la publicité.

La conservatrice que je suis croit que le gouvernement n'a pas à s'immiscer inutilement dans nos vies. C'est aux parents qu'il revient d'assumer leurs responsabilités parentales, mais les parents sont occupés, ils ont besoin de notre soutien pour faire ce qui s'impose. Les fabricants de nourriture et de boissons seront toujours capables d'écouler leurs produits. Ce projet de loi ne fera que leur interdire de court-circuiter les parents en commercialisant leurs produits directement auprès d'enfants vulnérables. Ce n'est pas évident d'être parent aujourd'hui, avec toute cette publicité qui fuse de partout et qui impressionne autant les enfants. C'est difficile pour les parents de juguler cette industrie multimillionnaire qui cible leurs enfants.

L'année dernière, en Saskatchewan, deux adolescentes ont monté un projet scolaire qui consistait à observer des familles en train de faire leurs emplettes. Leur recherche a montré que, après six ou sept ronchonnements, les enfants obtenaient ce qu'ils voulaient à l'épicerie. Ces jeunes filles soulignent que, non seulement les emballages, mais aussi l'emplacement des produits sur les tablettes était conçu expressément pour attirer l'attention des petits.

Le projet de loi S-228 sera un soulagement pour les parents assiégés qui pourront désormais acheter ce que bon leur semble. L'industrie n'aura d'autre choix que de rediriger ses messages ailleurs que sur les héros de dessins animés sous licence et leur attrait, vers des moyens plus rationnels de faire des choix alimentaires.

Pour résumer, ce n'est pas avant le début de l'adolescence — c'est-à-dire vers l'âge de 12 ans — que la majorité des enfants acquièrent une bonne compréhension de la vraie nature d'une annonce publicitaire. Avant cet âge, ils sont vulnérables aux différentes stratégies commerciales mises en œuvre pour venir les chercher, tout simplement parce que leur développement intellectuel ne leur permet pas de discerner la force de persuasion des annonceurs et de faire preuve de sens critique.

Honorables sénateurs, étant donné les nombreux avantages financiers que retirent les industries qui ciblent des enfants, il est très important que ceux-ci soient protégés et que les pratiques de marketing leur étant destinées soient réglementées. C'est un choix que la province de Québec a déjà fait. En fait, en 1980, elle a interdit toute forme de publicité destinée aux enfants. Les résultats sont mesurables. Les enfants québécois mangent plus de fruits et de légumes et les enfants francophones ont un poids plus sain que leurs petits camarades anglophones, vraisemblablement en raison des techniques de marketing sur les chaînes de langue anglaise de l'Ontario et des États-Unis.

La mesure législative québécoise a été promulguée en vertu de la Loi sur la protection du consommateur et a été contestée devant les tribunaux. En 1989, la Cour suprême a reconnu le bien-fondé de la loi et a raisonnablement conclu qu'il fallait empêcher les annonceurs d'exploiter la crédulité des enfants et que la publicité destinée aux enfants était en soi manipulatrice.

Le projet de loi S-228 s'harmonise bien à la législation québécoise, qui concerne une seule forme de marketing : la publicité. Il y a beaucoup d'autres façons de faire de la commercialisation, et le projet de loi S-228 cherche à rendre compte de toutes ces techniques. Peu importe la forme qu'elles prennent, toutes les pratiques de marketing destinées aux enfants sont tout simplement mauvaises.

Honorables sénateurs, ce n'est pas la première fois qu'une mesure législative sur cette question est présentée au Parlement canadien. En 1974, le député de Terre-Neuve James McGrath avait présenté le projet de loi C-21, visant à modifier la Loi sur la radiodiffusion afin d'interdire la publicité destinée aux enfants. M. McGrath était un conservateur qui est devenu plus tard Président de la Chambre et lieutenant-gouverneur de Terre-Neuve. Il est encore vivant et je pense qu'il sera très heureux de la présentation de ce projet de loi.

Malheureusement, son projet de loi est mort au Feuilleton. Le 25 février 2009, Peter Julian, député du NPD, a présenté le projet de loi C-324, anciennement le projet de loi C-414, à la Chambre des communes. Son projet de loi est également mort au Feuilleton. J'espère et je suis persuadée que ce projet de loi du Sénat, non partisan, recevra tout le soutien dont il a besoin pour être adopté.

J'aimerais expliquer ce que le projet de loi S-228 va accomplir. Il va modifier la Loi sur les aliments et drogues afin d'interdire toute publicité d'aliments et de boissons destinée aux enfants de moins de 13 ans. Au Canada, la Loi sur les aliments et drogues réglemente les aliments, les médicaments, les produits de beauté et les dispositifs thérapeutiques. La première partie du projet de loi porte sur les différents produits et la deuxième partie traite des questions administratives ainsi que de la mise en vigueur.

L'article 2 de mon projet de loi ajoute une nouvelle définition à l'article 2 de la Loi sur les aliments et drogues : « enfants Personnes âgées de moins de treize ans ». La Loi sur les aliments et drogues contient déjà une définition des termes suivants, qui sont utilisés dans le projet de loi S-228 : publicité, aliment, emballage et vente.

En vertu de la Loi sur les aliments et drogues, les aliments incluent les boissons et la définition de publicité est très large, puisqu'elle s'entend notamment de la présentation, par tout moyen, des produits visés en vue d'en stimuler directement ou indirectement l'aliénation, notamment par vente.

La définition de publicité est neutre quant au support et elle formulée de telle manière qu'elle pourrait continuer à viser les technologies émergentes et les méthodes de marketing de plus en plus sophistiquées.

L'article 4 du projet de loi S-228 ajoute un nouveau sous-titre à la Loi sur les aliments et drogues intitulé « Étiquetage, emballage et publicité destinés aux enfants ». C'est à cet endroit que les nouvelles dispositions définiront la publicité qui sera interdite, par exemple en regard du parrainage de manifestations ou d'activités principalement destinées aux enfants ou le parrainage de lieux comme les écoles ou les garderies.

Une autre disposition interdit l'usage de témoignages et d'appui, y compris par des personnes réelles ou fictives, des personnages ou des animaux. Des dispositions interdisent également les cadeaux destinés aux enfants dans le but de les convaincre d'acheter un aliment, quand l'objet que vous obtenez pour acheter un certain aliment est principalement destiné aux enfants.

Honorables sénateurs, la réaction superficielle que je reçois par rapport à ce projet de loi, c'est qu'il gâche le plaisir des « joyeux festins » des enfants, mais là n'est pas la question. Alors que ce type de promotion était autrefois une gâterie, maintenant on en retrouve partout et c'est nuisible. Lors du lancement d'un film pour enfants, les personnages sont immédiatement utilisés sous licence dans des publicités qui leur sont destinées.

La formulation « s'adresse principalement aux enfants » est utilisée dans toutes les nouvelles dispositions. Elle sera définie par la réglementation qui découlera du projet de loi. Cela signifie qu'à l'avenir, à mesure que les techniques de marketing évolueront, la réglementation pourra être adaptée sans qu'on doive modifier à nouveau la loi.

La Loi sur les aliments et drogues prévoit des sanctions sévères pour les infractions. Elles sont suffisamment importantes pour avoir un effet dissuasif réel si le projet de loi est adopté.

Actuellement, l'organisme Les normes canadiennes de la publicité est l'organe indépendant d'autoréglementation de l'industrie au pays. Leurs membres, qui incluent les annonceurs, les agences de publicité, les médias et les fournisseurs, se sont engagés à s'autoréglementer de façon efficace et responsable. Depuis 2007, le Conseil des normes administre l'Initiative canadienne pour la publicité sur les aliments et les boissons destinée aux enfants, dont les participants s'occupent de la publicité destinée aux enfants de moins de 12 ans.

(1530)

Bien que cette initiative d'autoréglementation soit louable et que nombre de participants se soumettent aux règles, tous les fabricants ou annonceurs ne sont pas membres du conseil. L'autoréglementation par l'industrie requiert que les participants se soumettent à des normes mises au point par les entreprises elles-mêmes, relativement à des choix alimentaires plus sains.

Je crois que tous les produits devraient être pris en compte et que nous ne devrions pas nous écarter du sujet en nous demandant quels produits sont suffisamment sains. Le problème, c'est la commercialisation visant les enfants. J'espère que les participants de l'industrie verront d'un bon œil une situation équitable pour tous où les règles sont claires et où leur publicité peut s'adresser à des consommateurs qui ont l'âge de décider par eux-mêmes.

Honorables sénateurs, il incombera à l'Agence canadienne d'inspection des aliments de faire appliquer la loi. L'agence publie d'ailleurs sur son site des bulletins judiciaires. Il existe aussi un service de signalement auquel la population peut recourir pour signaler ce qui la préoccupe. Il incombera à l'ACIA d'établir comment elle mettra en œuvre et appliquera le projet de loi S-228 quand il deviendra loi, mais elle pourrait certainement actualiser son service de signalement en publiant un lien qui permettrait de déclarer toute préoccupation liée à la commercialisation des boissons et aliments destinés aux enfants.

Mon projet de loi permet les messages relatifs à la santé publique et crée une exception pour les messages faisant la promotion des boissons et aliments sains diffusés par un organisme de santé publique, ou des collaborateurs d'un tel organisme, dans un but éducatif. Imaginez la puissance qu'aurait un tel message de santé publique s'il émanait d'un athlète olympique.

Le projet de loi S-228 prévoit également des exemptions pour l'équipement sportif et d'autres biens durables, de même que pour le matériel fourni par un commanditaire en soutien à un événement ou à une activité. Je sais que les programmes sportifs de certains enfants pourraient être touchés par ce projet de loi, mais il nous faut déterminer pourquoi certaines entreprises tiennent tant à commanditer des programmes pour enfants. Pourquoi offrent-elles des bons pour une boisson gratuite dans leur restaurant d'alimentation rapide? Je suis certaine qu'il y a au Canada des entreprises animées d'un esprit communautaire qui ne commercialisent pas des aliments ou des boissons et qui voudraient bien commanditer des programmes destinés aux enfants. Souhaitons-nous vraiment que nos enfants soient la cible de publicités pour des produits dont on sait qu'ils leur causent du tort?

Honorables sénateurs, je suis non seulement convaincue que cette législation est nécessaire pour protéger la santé de nos enfants, mais aussi que le moment est venu de la mettre en œuvre. Au mois de janvier 2016 — seulement en janvier dernier — l'Organisation mondiale de la Santé a déclaré que des preuves irréfutables établissaient que la commercialisation de boissons sucrées et d'aliments malsains a un impact négatif sur l'obésité juvénile. Elle a recommandé de prévoir dans toute tentative pour contrer l'obésité juvénile une réduction de l'exposition des enfants à la publicité. Dans son rapport de mars 2016 intitulé Obésité au Canada : une approche pansociétale pour un Canada en meilleure santé, le comité sénatorial a recommandé, que le gouvernement fédéral interdise toute publicité destinée aux enfants pour des boissons et des aliments. Le gouvernement a accepté en principe les recommandations du comité. Il est d'ailleurs question de la publicité destinée aux enfants dans la lettre de mandat de la ministre de la Santé.

Je crois également que c'est une chance que notre premier ministre ait de jeunes enfants, car il est sans doute au courant du problème. Il est temps d'agir. Nous n'avons plus besoin d'étudier la question. Ou nous agissons maintenant, ou les contribuables verront les coûts de la santé augmenter à l'avenir. Nous devons tous assumer la responsabilité de la santé de nos familles. Protéger nos enfants contre la publicité d'aliments et de boissons, à un âge où ils sont particulièrement sensibles à l'effet persuasif qu'elle exerce sur leurs préférences et leur consommation, constitue une première étape importante. Ce n'est pas la seule, loin de là, mais c'en est une qui est importante.

Honorables sénateurs, j'ai hâte d'entendre vos commentaires durant le débat et d'entendre les témoins quand la mesure sera renvoyée à un comité. Je compte sur vous pour faire adopter ce projet de loi.

Merci.

L'honorable Frances Lankin : Je félicite la sénatrice pour cette initiative. Je crois qu'elle est importante et qu'elle tombe à point nommé. En vous écoutant, j'avais l'impression de remonter dans le temps, alors qu'on nous disait que la fin des commandites par les compagnies de tabac allait faire perdre de l'argent à plusieurs projets communautaires. Nous avons survécu et nous sommes passés à autre chose, alors nous survivrons à ceci également.

Plus précisément, comment pouvez-vous être certaine que la définition de « publicité » sera neutre quant aux médias employés et qu'elle pourra tenir compte des nouveaux développements, technologiques ou autres, dans la transmission des messages?

J'ai eu l'occasion de rencontrer le Conseil canadien pour le contrôle du tabac récemment, et on m'y a fait part des progrès réalisés en matière d'emballage et d'interdiction de la publicité dans l'industrie du tabac. À présent, quand on ouvre un paquet de cigarettes, on trouve des éléments d'emballage qui retiennent les cigarettes à l'intérieur et qui contiennent de la publicité. Ce n'est pas visible de l'extérieur, mais c'est une chose qu'on a achetée et reçue avec l'achat.

Avez-vous envisagé quelque chose du même genre — par exemple, quand vous achetez un sac de croustilles, que vous l'ouvrez et que les promotions sont à l'intérieur? Votre projet de loi envisage-t-il ce genre de publicité à l'avenir?

La sénatrice Raine : Merci beaucoup. On m'a assuré que le projet de loi était neutre quant aux médias utilisés et qu'il y a donc une façon d'inclure les méthodes en constante évolution dans la réglementation.

Je sais également que la technologie n'a pas que des mauvais côtés. La technologie peut nous permettre de bloquer des publicités sur Internet, par exemple. Elle peut avoir son utilité, puisque de plus en plus de parents utilisent des outils de blocage de publicité pour contrôler l'utilisation que leurs enfants font d'Internet.

Il y a, par exemple, une fonction dans Google. Je ne sais pas précisément comment elle fonctionne, car je n'ai pas de jeunes enfants. Il faut donner son approbation avant d'avoir accès à certaines choses sur Internet. Il faut que les parents les approuvent et permettent à leurs enfants de moins de 12 ans d'y avoir accès. On peut évidemment mentir sur son âge, mais selon moi il faut s'attaquer à toutes les formes de publicité qui s'adressent aux enfants. Nous devons tout faire pour en limiter la présence et la contrôler. Je vous remercie.

La sénatrice Lankin : Acceptez-vous de répondre à une autre question? Que pensez-vous de ce qui se passe dans bien des écoles du Canada? Les conseils scolaires se battent, par exemple, pour interdire les machines distributrices faisant la promotion de certaines marques dans les écoles, où les enfants peuvent y avoir accès. Cette question touche autant les écoles primaires que les écoles secondaires. Bien des conseils scolaires ont d'ailleurs décidé d'interdire ces appareils et de proposer, par exemple, un bar à salade à la cafétéria. Ces conseils scolaires essaient de faire ce qui s'impose, mais beaucoup d'autres n'ont encore rien fait. L'interdiction de la publicité que vous proposez couvre-t-elle aussi ces cas? Faudra-t-il par exemple que les machines distributrices n'affichent aucune publicité et qu'elles ne fassent la promotion d'aucune marque? Je ne sais pas si vous y avez réfléchi jusqu'à présent, mais c'est une question intéressante pour ce qui est des sphères de compétences. Les conseils scolaires et les comités de parents discutent actuellement de ces questions.

La sénatrice Raine : C'est une excellente question. Je sais que le projet de loi aidera les conseils scolaires qui veulent faire quelque chose. Nous ciblons les enfants de moins de 13 ans. Le projet de loi ne vise donc pas les écoles secondaires, mais c'est tout de même un début.

En ce qui concerne les groupes d'enfants plus âgés, nous devrions nous demander ce que nous allons faire pour exercer un contrôle sur certains des produits dont le marketing cible les adolescents et les étudiants plus âgés, notamment les boissons énergisantes, qui contiennent beaucoup de caféine. Par ailleurs, qu'en sera-t-il de la marijuana? Nous devons vraiment prendre conscience du danger. Il est sûr que, partout, les écoles fonctionnent avec des budgets serrés et les gens me disent souvent : « Ils ont équipé les classes d'ordinateurs, mais ils ont aboli les cours d'économie et d'éducation physique », ou ils ont fait des compressions.

Je sais que les districts scolaires de tout le pays se débattent avec ce problème, qu'il existe d'excellents programmes et qu'il y a moyen de s'attaquer à ce problème. Je sais qu'il y a des écoles en Colombie-Britannique où, par exemple, le jour de la rentrée scolaire, les enfants reçoivent une bouteille d'eau avec leur nom gravé dessus. Cette distribution est organisée par les comités de parents et ils remplissent leurs bouteilles d'eau. Les élèves n'apportent pas de bouteilles d'eau : les distributrices d'eau et autres distributrices sont d'ailleurs interdites dans la plupart des écoles. La Colombie-Britannique a un très bon programme pour des écoles en santé. Je ne connais pas la totalité des programmes, mais je suis sûre que toutes les provinces sont maintenant plus conscientes du problème. La population lance un appel à l'aide, et il nous incombe à nous, parlementaires fédéraux, d'y répondre.

(Sur la motion du sénateur Eggleton, le débat est ajourné.)

(1540)

Projet de loi sur les sanctions non liées au nucléaire contre l'Iran

Deuxième lecture

L'ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Tkachuk, appuyée par l'honorable sénateur Baker, C.P., tendant à la deuxième lecture du projet de loi S-219, Loi visant à dissuader l'Iran de parrainer des actes constituant du terrorisme, de l'incitation à la haine et des violations des droits de la personne.

L'honorable Yonah Martin (leader adjointe de l'opposition) : Passons au vote.

Son Honneur le Président : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?

Des voix : D'accord.

(La motion est adoptée et le projet de loi est lu pour la deuxième fois.)

Renvoi au comité

Son Honneur le Président : Quand lirons-nous le projet de loi pour la troisième fois?

(Sur la motion du sénateur Tkachuk, le projet de loi est renvoyé au Comité sénatorial permanent des affaires étrangères et du commerce international.)

Projet de loi sur les langues autochtones du Canada

Deuxième lecture—Suite du débat

L'ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Joyal, C.P., appuyée par l'honorable sénateur Eggleton, C.P., tendant à la deuxième lecture du projet de loi S-212, Loi visant la promotion des langues autochtones du Canada ainsi que la reconnaissance et le respect des droits linguistiques autochtones.

L'honorable Murray Sinclair : Honorables sénateurs, je n'ai pas encore terminé la préparation de mes notes d'allocution sur cette question. Je propose donc que le débat soit ajourné à la prochaine séance pour le reste du temps de parole dont je dispose.

(Sur la motion du sénateur Sinclair, le débat est ajourné.)

Le Code criminel

Projet de loi modificatif—Deuxième lecture—Suite du débat

L'ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénatrice Dyck, appuyée par l'honorable sénateur Eggleton, C.P., tendant à la deuxième lecture du projet de loi S-215, Loi modifiant le Code criminel (peine pour les infractions violentes contre les femmes autochtones).

L'honorable Yonah Martin (leader adjointe de l'opposition) : Le sénateur McIntyre étant notre porte-parole pour ce projet de loi, je propose l'ajournement du débat au nom du sénateur McIntyre.

(Sur la motion de la sénatrice Martin, au nom du sénateur McIntyre, le débat est ajourné.)

Le Sénat

Motion tendant à exhorter le gouvernement à prendre les mesures qui s'imposent pour désamorcer les tensions et rétablir la paix et la stabilité dans la mer de Chine méridionale—Suite du débat

L'ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Ngo, appuyée par l'honorable sénateur Cowan,

Que le Sénat observe avec inquiétude le comportement de plus en plus hostile de la République populaire de Chine dans la mer de Chine méridionale et exhorte par conséquent le gouvernement du Canada à encourager toutes les parties en cause, et en particulier la République populaire de Chine, à :

a) reconnaître et maintenir la liberté de navigation et de survol garantie par le droit international coutumier et la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer;

b) cesser toutes les activités qui pourraient compliquer ou aggraver les différends, notamment la construction d'îles artificielles, l'extension du territoire terrestre en mer et l'accroissement de la militarisation de la région;

c) respecter tous les efforts multilatéraux antérieurs visant à régler les différends et s'engager à mettre en oeuvre un code de conduite contraignant dans la mer de Chine méridionale;

d) s'engager à trouver une solution pacifique et diplomatique aux différends qui est conforme aux dispositions de la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer et respecter les ententes de règlement conclues par la voie de l'arbitrage international;

e) renforcer les efforts visant à réduire considérablement les impacts environnementaux des différends sur le fragile écosystème de la mer de Chine méridionale;

Que, de plus, le Sénat exhorte le gouvernement du Canada à appuyer ses partenaires et ses alliés régionaux et à prendre les mesures additionnelles qui s'imposent pour désamorcer les tensions et rétablir la paix et la stabilité dans la région;

Qu'un message soit transmis à la Chambre des communes pour l'en informer.

L'honorable Jim Munson : Votre Honneur, la motion est inscrite au nom de la sénatrice Cools, mais nous avons convenu qu'elle reviendrait à son nom une fois que j'aurais terminé mon intervention.

Son Honneur le Président : Est-ce d'accord, honorables sénateurs?

Des voix : D'accord.

Le sénateur Munson : Je vous remercie, honorables sénateurs.

La présente motion exhorte le gouvernement à prendre les mesures qui s'imposent pour désamorcer les tensions et rétablir la paix et la stabilité dans la mer de Chine méridionale. Je suis reconnaissant à notre collègue, le sénateur Ngo, d'avoir formulé cette interpellation sur les événements inquiétants qui ont actuellement cours dans la région de la mer de Chine méridionale. J'étais prêt à aborder la question en juin, mais mon intervention a été reportée à aujourd'hui à cause de contraintes de temps.

Des changements sont survenus depuis et j'aimerais vous donner certains détails à ce sujet. J'ai fait le point à quelques reprises sur les tensions qui existent dans la région et qui ont été exacerbées perdant l'été.

La mer de Chine méridionale est une partie de l'océan Pacifique qui s'étend sur près de 3,5 millions de kilomètres carrés. On y trouve des centaines de petites îles, pour la plupart inhabitées, notamment les îles Paracel et les îles Spratly. Chaque année, ce corridor voit passer un tiers du trafic maritime mondial, qui représente une valeur estimée de 5 mille milliards de dollars en pétrole et en marchandises.

Cette région possède des réserves considérables de pétrole et de gaz naturel. Un rapport de l'Energy Information Administration des États-Unis, publié en 2013, évalue les réserves de pétrole à 11 milliards de barils et les réserves de gaz naturel, à quelque 190 mille milliards de pieds cubes. L'enjeu est colossal.

La mer de Chine méridionale recèle un tiers de la biodiversité marine de la planète. Il s'agit en outre d'une importante région de pêche qui fournit 10 p. 100 des prises mondiales totales. Au nombre des États et des territoires qui bordent cette étendue d'eau, mentionnons la République populaire de Chine, les Philippines, la Malaisie, le Brunei, l'Indonésie, Singapour, le Vietnam et Taïwan. Pendant des centaines d'années, et pour des raisons évidentes, certaines îles et parties de la mer de Chine méridionale ont fait l'objet de revendications concurrentes de la part des États et territoires de la région. Il y a 25 ans, à l'époque où j'étais reporter pour la chaîne CTV News et où je vivais en Chine, j'ai fait la couverture de certains événements liés aux intérêts concurrents entre les pays qui bordent la mer de Chine méridionale. La Chine avait adopté une position très musclée à l'époque. Elle s'était servie de son pouvoir économique et de manœuvres d'intimidation pour faire plier l'échine aux petits pays de la région. Aujourd'hui, elle a adopté une position encore plus ferme.

En lançant une interpellation, le sénateur Ngo cherchait notamment à nous faire comprendre qu'il est dans notre intérêt de prêter attention à ce problème persistant et en voie d'atteindre des proportions de crise, même s'il ne semble pas nous toucher de près. Depuis plus de 30 ans, la Chine fait montre de plus en plus d'ambition et de pugnacité dans sa quête de souveraineté. Elle se sert de ce qu'on nomme communément « la ligne en neuf traits » pour tracer les contours d'une zone sur laquelle elle prétend avoir des droits historiques. Cette zone couvre presque 90 p. 100 de la mer de Chine méridionale et les îles qui s'y trouvent. Presque effrontément, elle s'étend à 50 milles marins à l'intérieur de la zone économique exclusivement attribuée aux Philippines en vertu de la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer, de même qu'elle empiète sur la zone économique exclusive du Brunei, de la Malaisie, de l'Indonésie et du Vietnam, portant atteinte ainsi à leurs droits en matière d'exploitation des ressources maritimes.

La Chine fait partie des signataires de la convention des Nations Unies, tout comme les Philippines et les autres pays longeant la mer de Chine méridionale. En ratifiant la convention, la Chine s'est engagée à résoudre tout différend maritime de manière pacifique. Assurément, la Chine manque à sa parole. Les Philippines ont officiellement contesté les prétentions de la Chine devant la Cour permanente d'arbitrage à La Haye. La Chine refuse toutefois d'être impliquée dans le litige et persiste à dire qu'elle fera fi de la décision de la cour. Cet été, tandis que les choses évoluaient, La Haye a rendu sa décision, où sont rejetées les prétentions de la Chine concernant les droits historiques qui lui donneraient le contrôle sur la plus grande partie de la région. En outre, le tribunal critique vivement la Chine pour son approche antagoniste qui s'est traduite notamment par la construction d'installations militaires sur les îles Spratly.

(1550)

Les mesures prises par la Chine témoignent d'une quête de contrôle sur tout, notamment le droit international. Comme l'indiquent divers bulletins d'information dont vous avez peut-être pris connaissance, la Chine a construit ces dernières années des îles artificielles qu'elle a équipées de diverses infrastructures telles que des pistes d'atterrissage, des hangars pour avions de chasse, des bâtiments, des quais et, peut-être aussi des dispositifs de radars et de surveillance. Selon un article publié par le New York Times, pendant les mois d'août et de septembre, des satellites et autres technologies de surveillance ont permis de recueillir des images montrant que la Chine poursuit la construction d'un vaste complexe militaire.

Le choix de mots du président de la Chine, Xi Jinping, laissent peu d'espoir quant au règlement pacifique du conflit. Celui-ci affirme en effet : « Nous sommes fermement résolus à préserver la souveraineté et la sécurité du pays, et à défendre l'intégrité du territoire. »

C'est une déclaration menaçante.

De son côté, le Council on Foreign Relations déclare ce qui suit :

L'expansion territoriale de la Chine a de graves conséquences pour la sécurité. Depuis décembre 2013, Pékin a récupéré plus de 2 900 acres, soit plus que tous les autres pays combinés au cours des quarante dernières années. La possibilité de déployer des aéronefs, des missiles et des systèmes de défense antimissile sur une des îles qu'elle a aménagées augmente considérablement la projection de ses forces en lui permettant d'étendre son rayon d'action d'au moins 1 000 km au sud et à l'est.

La Malaisie, les Philippines, le Vietnam, le Brunei et Taïwan ont des revendications sur les îles Spratly, où ces grands travaux de construction se poursuivent. Face à l'agression de la Chine et à son mépris des méthodes juridiques et autres établies pour régler les différends, ces pays ne savent pas comment réagir. En exprimant la futilité de traiter avec la Chine, l'ancienne présidente des Philippines, Mme Aquino, posait la question en ces termes : « Comment peut-on, de façon réaliste, faire plier une superpuissance? »

Les Philippines ont travaillé en partenariat avec le Japon pour améliorer leurs compétences en matière de défense et de surveillance. Conformément à la convention des Nations Unies, le Vietnam insiste sur la nécessité d'établir un climat de confiance, de favoriser la collaboration et un dialogue productif et de se conformer au droit international. Le premier ministre du Vietnam, Nguyen Tan Dung, a affirmé que son pays ferait ce qu'il pourrait pour travailler avec les autres pays de la région à consolider la paix et la stabilité dans la région.

Les États-Unis et les autres pays alliés surveillent de près ce qui se passe dans la mer de Chine méridionale. Même s'il ne veut pas se mêler des conflits territoriaux, le président Obama a clairement dit que son pays s'intéresse à la sécurité, à la prospérité et à la dignité des gens de la région de l'Asie-Pacifique. Les États-Unis ont envoyé des navires de guerre défendre la liberté des voies d'eau stratégiques de la région et ont exhorté la Chine, les Philippines, le Vietnam et les autres pays à trouver une solution pacifique aux revendications territoriales conflictuelles.

Au printemps, iPolitics a déclaré qu'il est depuis longtemps révolu, le temps où la Chine se repliait et battait en retraite dès qu'elle apercevait un groupement tactique sur un porte-avions américain. Il est fort probable qu'une réaction hostile de la part des États-Unis amènerait la Chine à exercer des représailles, ce qui pourrait provoquer de violents affrontements.

Les tensions dans la mer de Chine méridionale préoccupent le pays; elles nous préoccupent tous. Les biens et le pétrole qui transitent par ce passage de même que les réserves de pétrole et de gaz nous intéressent tous, particulièrement à cause de leur incidence sur l'économie mondiale. De plus, les stocks de poisson et la qualité des terres et de la mer dans la région sont en danger. Si les territoires et les États qui bordent la mer de Chine méridionale pouvaient travailler de concert, ils seraient mieux en mesure de collaborer aux efforts pour améliorer l'environnement naturel et en empêcher la destruction.

À l'heure actuelle, la surpêche est généralisée, et peu d'attention est accordée aux lois et aux pratiques établies afin de mettre un terme à la pollution et à d'autres causes de dégradation. La Chine est si déterminée à accaparer des terres et à accroître son pouvoir qu'elle suscite des réactions contre-productives de la part des autres pays de la région de l'Asie-Pacifique. Les tensions sont si fortes en ce moment qu'un conflit pourrait facilement éclater si une mesure pouvant ressembler à des représailles était prise.

Le risque d'un conflit est une autre raison pour laquelle nous devons nous préoccuper de ce qui se passe dans la mer de Chine méridionale. Le ministre des Affaires étrangères du Canada, l'honorable Stéphane Dion, a publié une déclaration en juillet dernier dans laquelle il met l'accent sur l'importance de respecter les lois internationales. Voici les derniers mots de cette déclaration : « Par conséquent, le Canada demeure prêt à contribuer aux initiatives qui aideront à rétablir la confiance dans la région. »

Au cours de sa visite en Chine le mois dernier, le premier ministre Trudeau n'a rien mentionné au sujet de telles initiatives et a plutôt mis l'accent sur l'ouverture du Canada pour ce qui est de faire des affaires avec la Chine. Cela doit changer.

Ce que l'on constate actuellement dans la mer de Chine méridionale, c'est de toute évidence une situation d'intimidation — la recherche injuste, destructrice et illégale du pouvoir. Les risques augmentent, et le temps est venu pour le Canada de prendre position et de collaborer avec ses alliés afin de résoudre les questions qui sont au cœur de la crise et ainsi désamorcer cette crise.

Dans le cadre de l'interpellation, la sénatrice Martin a donné un aperçu des variables et des risques à prendre en compte. Elle a aussi parlé du rôle que devrait jouer le Canada et a mentionné la fière tradition du Canada en tant qu'intermédiaire diplomatique juste et non colonial. Le Canada doit avoir recours à la diplomatie et à d'autres moyens non militaires pour convaincre les États et les territoires visés par la situation d'accepter et de respecter la décision de la Cour internationale de justice à La Haye.

Si la Chine ou une autre partie refusait de respecter la décision rendue par l'entremise de cette source officielle des plus fiables, le Canada devrait collaborer avec ses alliés afin de négocier une solution pacifique et réalisable. Pour reprendre les mots de la sénatrice Martin : « Honorables sénateurs, les enjeux et les répercussions possibles à l'échelle mondiale sont trop vastes pour que nous n'intervenions pas dans le différend en cours dans la mer de Chine méridionale. »

J'aimerais à nouveau remercier le sénateur Ngo d'avoir lancé cette interpellation. J'ai un intérêt personnel dans ce dossier, car j'ai déjà travaillé dans cette partie du monde. Tout ce qui nous en sépare est un plan d'eau. Nous sommes tous des voisins. Un très grand nombre de nos concitoyens viennent de cette partie du monde. C'est ce qui fait la grandeur de notre pays.

Je remercie le sénateur Ngo d'avoir lancé cette interpellation afin de nous sensibiliser au comportement de la Chine dans la mer de Chine méridionale et au devoir qu'a le Canada de s'en occuper. J'appuie totalement ses objectifs et je lui suis reconnaissant de pouvoir le faire.

Je me permets de vous signaler que le débat sur cette motion est ajourné au nom de la sénatrice Cools.

Merci, honorables sénateurs.

(Sur la motion du sénateur Munson, au nom de la sénatrice Cools, le débat est ajourné.)

Adoption de la motion tendant à ce que tous les documents remis au vérificateur général par chacun des sénateurs qui a été l'objet de la vérification approfondie soient retournés à chaque sénateur respectif

L'ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Moore, appuyée par l'honorable sénatrice Hubley :

Que tous les documents, informations, articles et rapports remis au Vérificateur général du Canada, par chacun des sénateurs qui a été l'objet de la vérification approfondie effectuée par le Vérificateur général, suite au dépôt de la motion adoptée par le Sénat le 6 juin 2013, soient retournés intacts et complets à chaque sénateur respectif, incluant toutes les copies réalisées, dans les trente (30) jours suivant l'adoption de cette motion.

L'honorable Yonah Martin (leader adjointe de l'opposition) : Le vote!

Son Honneur le Président : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?

Des voix : D'accord.

(La motion est adoptée.)

(La séance est levée, et le Sénat s'ajourne au jeudi 6 octobre 2016, à 13 h 30.)

 
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