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Débats du Sénat (Hansard)

1re Session, 42e Législature
Volume 150, Numéro 237

Le jeudi 18 octobre 2018
L’honorable George J. Furey, Président


LE SÉNAT

Le jeudi 18 octobre 2018

La séance est ouverte à 13 h 30, le Président étant au fauteuil.

Prière.


DÉCLARATIONS DE SÉNATEURS

Les victimes d’actes criminels

L’honorable Pierre-Hugues Boisvenu : Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd’hui pour donner une voix aux familles de victimes d’actes criminels relativement à certains faits troublants qui se multiplient à travers le pays. Au cours des derniers mois, les familles de victimes de meurtriers, notamment des tueurs en série tels que Robert Pickton et Elizabeth Wettlaufer, ont été victimes du non-respect de leur droit à l’information, tel qu’il est énoncé dans la Charte canadienne des droits des victimes.

Comme vous le savez, la Charte canadienne des droits des victimes repose sur quatre grands piliers, dont l’un est le droit à l’information. Ce droit est essentiel pour les victimes d’actes criminels et leur famille afin qu’elles puissent retrouver un semblant de quiétude et tenter de vivre normalement.

Au cours des derniers mois, le Service correctionnel a manqué plus d’une fois à ses obligations d’informer les proches de victimes. Il y a une semaine, nous avons appris que les autorités n’avaient pas informé le père de la petite Tori Stafford, victime de Terri-Lynne McClintic, du transfert de celle-ci vers un établissement de ressourcement.

Ce n’est pas la première fois que des renseignements sont volontairement cachés aux proches de victimes. Il y a quelques jours, les médias ont révélé que la meurtrière en série Elizabeth Wettlaufer, coupable de l’assassinat de huit personnes et soupçonnée de plusieurs autres meurtres, a été transférée à l’Institut Philippe-Pinel, au Québec, sans que les proches de ses victimes n’en aient été informés. Les proches des victimes ont appris la nouvelle du transfert grâce à une enquête de Global News. C’est inacceptable.

En septembre, j’ai adressé une correspondance au ministre de la Sécurité publique pour savoir pourquoi des proches de certaines victimes de Robert Pickton, meurtrier en série d’une cinquantaine de femmes, n’avaient pas été informés de son transfert vers le pénitencier de Port-Cartier, au Québec. Pourtant, les proches des victimes ont le droit d’être informés avant le transfert.

Honorables sénateurs, je suis très inquiet du profond manque de respect du gouvernement à l’égard des victimes d’actes criminels. Il est inacceptable que le droit à l’information des victimes ne soit pas respecté.

À titre de parrain de la Charte canadienne des droits des victimes en cette Chambre, où cette loi a été adoptée à l’unanimité, un projet qui me tenait à cœur bien avant ma nomination au Sénat, je ne peux accepter cet état de fait. Aucune victime d’actes criminels ne peut accepter de voir bafouer un droit aussi fondamental que le droit à l’information. C’est une question de respect et de compassion, mais aussi un droit reconnu, une question de droit à la sécurité.

Je vous invite à vous mettre dans la peau de ces familles : aimeriez-vous vivre dans l’incertitude, ne sachant pas dans quel coin du pays se trouve le meurtrier de votre enfant? J’invite aussi les victimes et leur famille à profiter du mécanisme de plainte prévu par la Charte des droits des victimes afin de dénoncer les manquements à leur droit à l’information.

Je vous remercie.

[Traduction]

Visiteurs à la tribune

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, je vous signale la présence à la tribune de Darcy Ataman et de Shannon Johnson, qui sont accompagnés de Marcia McClung, petite-fille de l’archiviste Nellie McClung. Ils sont les invités de l’honorable sénatrice McPhedran.

Au nom de tous les honorables sénateurs, je vous souhaite la bienvenue au Sénat du Canada.

Des voix : Bravo!

La Journée de l’affaire « personne »

L’honorable Marilou McPhedran : Honorables sénateurs, nous soulignons aujourd’hui la Journée de l’affaire « personne ». Aucune sénatrice ne siégerait ici aujourd’hui si l’affaire « personne » n’avait pas connu un dénouement heureux. Les Célèbres cinq se sont battues d’abord et avant tout pour l’égalité des sexes. Hier, la sénatrice Andreychuk nous a expliqué pourquoi le Dr Denis Mukwege et Mme Nadia Murad avaient obtenu le prix Nobel de la paix. Ce prix leur a été décerné en raison de la lutte qu’ils mènent dans le monde entier afin de promouvoir l’égalité des sexes et le droit de vivre à l’abri de la violence.

M. Darcy Ataman, un Manitobain qui est fondateur et PDG de Make Music Matter, ainsi que Mme Shannon Johnson, directrice des opérations de cet organisme, sont présents aujourd’hui dans cette enceinte.

Make Music Matter est un organisme de bienfaisance canadien à l’origine du programme Healing in Harmony, qui a démarré sous la gouverne du Dr Mukwege à l’hôpital Panzi situé à Bukavu, au Congo.

Des chercheurs universitaires confirment que des survivants d’agression sexuelle et de viol qui ont été opérés par le Dr Mukwege ont vu leur vie s’améliorer considérablement. Grâce à un partenariat avec le Dr Mukwege, Make Music Matter utilise la musique comme outil de guérison, permettant aux survivants d’agression sexuelle de se faire entendre et de panser leurs blessures internes en se servant de leur propre voix.

Je tiens aussi à reconnaître la solidarité et la collaboration qui existent entre les sexes pour faire progresser les questions féministes. Le Dr Mukwege et M. Ataman nous montrent comment les hommes et les garçons peuvent favoriser l’égalité des sexes, ainsi que la sécurité et la guérison des survivants de violence fondée sur le sexe, dans l’intérêt de la société en général.

Aujourd’hui, un programme féministe consiste à reconnaître l’égalité entre les sexes et à utiliser les droits acquis. N’oublions pas que ce n’est qu’en 1929 que le Canada a reconnu que les femmes étaient capables d’occuper des fonctions de pouvoir, comme celle de sénatrice.

[Français]

Nous accueillons à la tribune la petite-fille de Nellie McClung, Mme Marcia McClung. Elle s’évertue à garder vivant le travail de sa grand-mère qui faisait partie des Célèbres cinq, ces femmes qui ont combattu l’inégalité des genres et qui ont promu l’inclusion des femmes dans la vie politique.

[Traduction]

Je suis heureuse d’accueillir ce soir sur la Colline, en plus de Mme Clung, la Fondation canadienne des femmes. Nous soulignerons la Journée de l’affaire « personne » de 17 heures à 19 heures, à la pièce 256-S.

Je vous invite, chers collègues, à venir souligner ce tournant de l’histoire canadienne avec nous. Merci. Meegwetch.

Tommy Ricketts

Le centième anniversaire de l’obtention de la Croix de Victoria

L’honorable Norman E. Doyle : Honorables sénateurs, le dimanche 14 octobre, les Terre-Neuviens se sont rassemblés au musée provincial pour souligner le 100e anniversaire de l’obtention de la Croix de Victoria par le sergent Thomas Ricketts, du Royal Newfoundland Regiment.

On a également rendu hommage au caporal Matthew Brazil, de Spaniard’s Bay, qui s’est vu décerner la Médaille de conduite distinguée pour l’héroïsme dont il a fait preuve le 14 octobre 1918, en Belgique.

(1340)

La Croix de Victoria, la plus importante distinction militaire en Grande-Bretagne, est décernée en reconnaissance d’actes d’abnégation héroïques et d’un dévouement ultime au devoir en présence de l’ennemi.

Tommy Ricketts est le seul membre originaire de Terre-Neuve dans l’histoire du Royal Newfoundland Regiment, et le plus jeune soldat de l’armée britannique dans un rôle de combat, à avoir obtenu cette distinction.

Né à Middle Arm, dans la baie Blanche, ce jeune pêcheur de 15 ans s’enrôle en se faisant passer pour un homme de 18 ans, impatient de se joindre à des milliers d’autres hommes et garçons de Terre-Neuve prêts à se battre pour leur pays et leur roi.

Tommy Ricketts quitte St. John’s le 31 janvier 1917, mais bien vite ses fantasmes juvéniles de gloire volent en éclats lorsqu’il se retrouve confronté à la sombre et sinistre tragédie de la guerre de tranchées.

Après avoir livré combat en France et survécu à des engagements tels que la bataille de Cambrai, le jeune soldat se retrouve en octobre 1918 sur les champs de bataille belges. C’est à ce moment précis, sur une terre agricole près de Drie Masten, qu’il manifeste son sens du devoir et du sacrifice.

Le 19 janvier 1919, le roi George V décerne la Croix de Victoria à Tommy Ricketts dans le York Cottage, sur son domaine de Sandringham. Au cours de la cérémonie, le roi souligne qu’il s’agit du « plus jeune soldat dans mon armée à recevoir la Croix de Victoria ».

Ricketts meurt le 10 février 1967. Le lieutenant-gouverneur, le premier ministre de Terre-Neuve et tous les dignitaires de l’époque assistent à ses funérailles d’État.

La vie militaire et civile de Tommy Ricketts a fait couler beaucoup d’encre. Frank Gogos, président du musée du Royal Newfoundland Regiment, a écrit le résumé suivant dans son document intitulé « Newfoundland’s Reluctant War Hero » :

M. Ricketts a laissé derrière lui un héritage concret et l’idée qu’une personne peut améliorer son sort si elle fait preuve d’humilité et de bienfaisance et travaille fort sur son éducation. Il est passé de pêcheur analphabète au plus grand héros de guerre de Terre-Neuve, et s’est servi de sa célébrité pour obtenir une éducation et devenir un pharmacien respecté dans la collectivité [...] Il a montré que, si une personne se fixe un objectif, elle peut atteindre des sommets, peu importe ses origines modestes.

Il a vécu modestement et a mis du cœur à l’ouvrage — il n’aurait pu y avoir de meilleur médaillé de la Croix de Victoria. Tommy était un vrai soldat et un véritable héros.

Visiteurs à la tribune

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, je vous signale la présence à la tribune de Marion Dasko Adams, fille de la sénatrice Dasko, accompagnée d’amies. Elles sont les invitées de l’honorable sénatrice Dasko.

Au nom de tous les honorables sénateurs, je vous souhaite la bienvenue au Sénat du Canada.

Des voix : Bravo!

La Journée de l’affaire « personne »

L’honorable Donna Dasko : Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd’hui pour souligner la Journée de l’affaire « personne ».

Le 18 octobre est la journée désignée pour souligner la décision constitutionnelle rendue en 1929, qui a établi que les Canadiennes devaient être reconnues comme des personnes et obtenir le droit de siéger au Sénat du Canada. L’affaire « personne » a été lancée par les Célèbres cinq — cinq femmes influentes dont les réalisations sont aujourd’hui reconnues partout au Canada, dans les livres d’histoire, sur des plaques commémoratives, dans des parcs publics et grâce à des statues célèbres érigées dans deux provinces et ici, sur la Colline du Parlement.

La Journée de l’affaire « personne » a de nombreuses significations. Tout d’abord, elle est typiquement canadienne. Les Canadiens participent à des événements internationaux qui ont lieu dans le monde entier, comme la Journée internationale des femmes et la Marche des femmes de janvier, mais la Journée de l’affaire « personne » est notre journée. C’est aussi une célébration. Nous devons nous souvenir à jamais des tragédies de l’histoire du Canada, mais nous devons aussi reconnaître ses triomphes, et cette journée en fait partie.

Qui plus est, la Journée de l’affaire « personne » revêt une signification spéciale pour les membres de cette Chambre. Le fait que nous célébrons l’admission des femmes au Sénat fait la fierté des sénatrices et des sénateurs. La Journée de l’affaire « personne », c’est tout cela, mais c’est surtout une victoire pour les femmes.

La victoire dans l’affaire « personne » en 1929, l’obtention du droit de vote pour les femmes et l’élection de la première femme au Parlement fédéral en 1921 — je parle évidemment d’Agnes Macphail, du comté de Grey, en Ontario — ont été des événements importants de cette ère où les femmes ont obtenu les droits à la participation politique et à la représentation de base.

Aujourd’hui, nous visons un autre objectif, soit celui de l’égalité dans les institutions politiques. J’y travaille depuis trois décennies et je poursuivrai mes efforts. Nous n’y sommes pas encore arrivés, mais, lorsque le jour viendra, j’espère que nous le célébrerons ensemble.

Ce soir, je vais sortir avec cinq jeunes femmes qui sont assises à la tribune derrière moi. Nous nous arrêterons à la statue des Célèbres cinq avant de poursuivre notre soirée et de nous amuser. Vous savez, les féministes aussi peuvent s’amuser.

Je souhaite à tous les honorables sénateurs une belle Journée de l’affaire « personne ». Merci.

Visiteurs à la tribune

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, je vous signale la présence à la tribune de membres de la famille Windsor et de Thibaut Houssier-Perbet. Ils sont les invités de l’honorable sénatrice Deacon (Ontario).

Au nom de tous les honorables sénateurs, je vous souhaite la bienvenue au Sénat du Canada.

Des voix : Bravo!

Jim Landry

Souvenirs et vélo sur 1 000 kilomètres

L’honorable Joseph A. Day (leader des libéraux au Sénat) : Honorables sénateurs, il y a presque deux ans, j’ai eu l’honneur d’assister à une cérémonie spéciale au Musée canadien de la guerre en compagnie du chef d’état-major de la Défense et du président-directeur général du musée, Mark O’Neill. Au cours de la cérémonie, le Nouveau-Brunswick a fait don au musée de deux objets de grande valeur datant de la Première Guerre mondiale. L’un de ces objets était la croix ayant marqué temporairement la tombe du soldat John F. Ashe, du 26e bataillon, qui avait succombé aux blessures reçues lors de la bataille de la crête de Vimy en avril 1917. Cette croix a été donnée par Jim Landry, de Saint John, au Nouveau-Brunswick, le petit-neveu de M. Ashe.

L’an dernier, à l’occasion du 100e anniversaire de la bataille de la crête de Vimy, Jim Landry a organisé la plantation de près de 100 chênes de la crête de Vimy un peu partout à l’Île-du-Prince-Édouard et dans sa province, le Nouveau-Brunswick.

Cette année, Jim continue de rendre hommage aux anciens combattants de la Première Guerre mondiale en parcourant 1 000 kilomètres à bicyclette, en Belgique et en France, pour recueillir des fonds pour la Société Alzheimer de Saint John. Jim appelle son aventure « Souvenirs et vélo sur 1 000 kilomètres ».

Jim a commencé son périple le 20 septembre, en parcourant 400 kilomètres à l’Île-du-Prince-Édouard et au Nouveau-Brunswick, où il habite. Il en a profité pour planter des chênes le long du parcours, dans le cadre de cérémonies. Il est arrivé à Ypres le 1er octobre et il a enfourché sa bicyclette pour poursuivre son périple en sol européen.

Au cours des 10 jours suivants, Jim a parcouru 600 kilomètres en Belgique et en France, prenant le temps de s’arrêter à des champs de bataille et à des monuments le long de son parcours et mettant en ligne des photos et des vidéos émouvantes sur sa page Facebook, que je vous invite à consulter.

Il a conclu son périple en plantant son chêne de la crête de Vimy dans un parc, dans la ville d’Arras, non loin du Monument commémoratif de Vimy.

Honorables sénateurs, tous les ans, des personnes comme Jim Landry montrent une détermination sans faille à honorer la mémoire des Canadiens morts au combat. Joignez-vous à moi pour saluer les efforts de Jim Landry et son voyage de commémoration sur les champs de bataille en France et en Belgique.


(1350)

AFFAIRES COURANTES

ParlAmericas

La visite bilatérale à Santiago et à Valparaiso, au Chili, du 11 au 14 mars 2018, et à Montevideo, en Uruguay, du 14 au 16 mars 2018—Dépôt du rapport

L’honorable Rosa Galvez : Honorables sénateurs, j’ai l’honneur de déposer, dans les deux langues officielles, le rapport de la Section canadienne de ParlAmericas concernant sa visite bilatérale à Santiago et Valparaiso, au Chili, du 11 au 14 mars 2018, et à Montevideo, en Uruguay, du 14 au 16 mars 2018.

Le Sommet mondial du Partenariat pour un gouvernement ouvert, tenu à Tbilissi, en Géorgie, du 17 au 19 juillet 2018—Dépôt du rapport

L’honorable Rosa Galvez : Honorables sénateurs, j’ai l’honneur de déposer, dans les deux langues officielles, le rapport de la délégation parlementaire canadienne concernant sa participation au 5e Sommet mondial du Partenariat pour un gouvernement ouvert, tenu à Tbilissi, en Géorgie, du 17 au 19 juillet 2018.

Affaires étrangères et le commerce international

Autorisation au comité de siéger en même temps que le Sénat

L’honorable A. Raynell Andreychuk : Honorables sénateurs, avec le consentement du Sénat et nonobstant l’article 5-5j) du Règlement, je propose :

Que, pour les fins de son étude du projet de loi C-79, Loi portant mise en œuvre de l’Accord de partenariat transpacifique global et progressiste entre le Canada, l’Australie, le Brunei, le Chili, le Japon, la Malaisie, le Mexique, la Nouvelle-Zélande, le Pérou, Singapour et le Vietnam, le Comité sénatorial permanent des affaires étrangères et du commerce international soit autorisé à se réunir le mardi 23 octobre 2018, et le mercredi 24 octobre 2018, même si le Sénat siège à ce moment-là, et que l’application de l’article 12-18(1) du Règlement soit suspendue à cet égard.

Son Honneur le Président : Le consentement est-il accordé, honorables sénateurs?

Des voix : D’accord.

Son Honneur le Président : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion?

Des voix : D’accord.

(La motion est adoptée.)


PÉRIODE DES QUESTIONS


Les finances

L’équité fiscale

L’honorable Larry W. Smith (leader de l’opposition) : Ma question s’adresse au leader du gouvernement et concerne le fardeau fiscal des petites entreprises du Canada.

En juillet, le gouvernement fédéral a annoncé qu’il donnerait à certaines grandes sociétés des allégements spéciaux de la taxe sur le carbone qu’elles auront à payer à partir du 1er janvier 2019. Le gouvernement a déclaré qu’il était motivé par les risques pour la compétitivité occasionnés par la tarification du carbone.

Bien que le gouvernement ait reconnu que sa taxe sur le carbone nuira à la compétitivité des grandes sociétés industrielles du Canada, il n’a pas accordé cette même considération à nos petites entreprises, qui ont du mal à demeurer viables.

Puisque certaines grandes sociétés bénéficieront d’allégements de la taxe sur le carbone du premier ministre, le leader du gouvernement pourrait-il nous dire pourquoi les petites entreprises doivent toujours payer plus? Comment cela peut-il être considéré comme équitable?

L’honorable Peter Harder (représentant du gouvernement au Sénat) : Je remercie l’honorable sénateur de sa question. Je tiens à rappeler que la tarification de la pollution est un élément important, tant du point de vue économique que du point de vue environnemental, puisqu’il permettra au Canada d’être prêt à poser les gestes nécessaires pour satisfaire à ses obligations internationales et pour améliorer son rendement économique dans un monde où les changements climatiques ont des conséquences économiques considérables.

Le Sénat a examiné le régime de tarification du carbone et lui a donné son approbation législative. Une fois ce régime en place, le gouvernement suivra évidemment de près l’évolution du rendement économique du Canada en fonction du contexte concurrentiel, qui change lui aussi. Le ministre des Finances évalue continuellement l’économie et les mesures que devrait prendre le gouvernement, et je suis certain qu’il tiendra compte de cet élément.

Je tiens à affirmer aux sénateurs et, par leur entremise, à toutes les entreprises, que le gouvernement s’emploie à assurer l’équité fiscale de toutes les facettes de l’économie canadienne. Outre les mesures soulevées dans la question, il offre un soutien considérable aux petites entreprises.

Le sénateur Smith : Je crains que le leader n’ait pas vraiment répondu à ma question. Je disais tout simplement que la taxe sur le carbone coûtera plus cher aux petites qu’aux grandes entreprises. La plateforme libérale n’en avait que pour les Canadiens de la classe moyenne, alors il me semble justifié que nous nous intéressions aux petites entreprises et aux travailleurs à revenu moyen.

Outre la taxe sur le carbone, les petites entreprises du pays verront leurs cotisations au Régime de pensions du Canada augmenter en 2019. C’est sans parler des complexes modifications fiscales que le gouvernement a apportées au fractionnement du revenu et aux investissements passifs, il y a un an. À la fin de l’année dernière, le Comité des finances nationales a recommandé au gouvernement de revoir de fond en comble le régime fiscal canadien. Mardi, le Comité des banques et du commerce a abondé dans le même sens et réclamé la tenue d’une commission royale d’enquête sur la fiscalité.

J’ai une question toute simple pour vous, monsieur le leader : le gouvernement a-t-il l’intention de suivre les conseils de ces deux comités sénatoriaux?

Le sénateur Harder : Je remercie l’honorable sénateur de sa question. Les travaux du Sénat sont pris très au sérieux par le gouvernement. Ce n’est d’ailleurs pas moi qui apprendrai à l’honorable sénateur que les deux Chambres se sont dotées de procédures concernant la suite que le gouvernement doit donner aux études réalisées, et le gouvernement leur a toujours donné suite.

J’imagine que, si le Sénat adopte le rapport dont il vient d’être saisi et demande une réponse au gouvernement, celui-ci y répondra, car il accorde beaucoup de valeur aux travaux du Sénat.

Les transports

Le pont Champlain

L’honorable Leo Housakos : Honorables sénateurs, ma question s’adresse au leader du gouvernement. Elle porte sur un sujet que j’ai déjà abordé ici à quelques reprises ces derniers mois, et je veux parler de la construction du nouveau pont Champlain à Montréal.

Comme nous le savons tous, le consortium à qui a été confiée la construction du pont devait livrer le projet le 1er décembre 2018. Malheureusement, celui-ci a annoncé il y a quelques semaines qu’il ne serait pas en mesure de respecter le délai. Dans le cadre d’un PPP, le précédent gouvernement avait conclu avec le consortium un contrat à toute épreuve, prévoyant des amendes de 400 000 $ par jour de retard. Non seulement le gouvernement n’a pas imposé ces amendes qu’il pourrait percevoir, étant donné que le délai n’est pas respecté — il l’a reconnu lui-même en demandant qu’on reporte la date au 21 décembre —, mais il a en plus jugé bon de verser plus de 400 millions de dollars supplémentaires au consortium, essentiellement pour faire accélérer les travaux afin que le nouveau délai puisse être respecté.

Le leader du gouvernement peut-il assurer au Sénat que le nouveau délai du 21 décembre sera respecté et que le consortium livrera le projet à temps?

L’honorable Peter Harder (représentant du gouvernement au Sénat) : Je remercie l’honorable sénateur de sa question. Le gouvernement a jugé réaliste et faisable l’engagement pris de terminer le pont en janvier. Il est toujours d’avis que, si le délai est très serré et ambitieux, il motive tout de même les personnes concernées par la construction du pont. Le gouvernement rapporte que, malgré les difficultés, il s’attend à ce que le délai soit respecté.

Le sénateur Housakos : La nouvelle échéance est dans à peine plus de deux mois. Le leader du gouvernement est-il en mesure de confirmer que l’échéance sera respectée — nous voulons une réponse ferme — et d’assurer que, dans le cas contraire, on imposera les pénalités prévues au contrat initial, c’est-à-dire 400 000 $ par jour pour chaque jour de retard?

Le sénateur Harder : Encore une fois, je remercie l’honorable sénateur de sa question. Je le répète : selon les informations dont je dispose, le gouvernement s’attend à ce que le délai soit respecté. Les éventualités qu’évoque l’honorable sénateur sont hypothétiques, et nous aviserons si la situation change.

Les affaires étrangères et le commerce international

Les investissements de la Chine au Canada

L’honorable Thanh Hai Ngo : Ma question s’adresse au leader du gouvernement au Sénat. Huawei est prêt à construire la prochaine génération de réseaux de communication mobile au Canada, ce qui suscite de vives inquiétudes à propos de notre sécurité et de la protection de nos vies privées.

(1400)

Six organismes de sécurité des États-Unis, sept sénateurs américains et l’appareil de sécurité de l’Australie pressent tous le premier ministre Trudeau d’empêcher la compagnie de bâtir la prochaine génération de notre réseau Internet, en soulignant la menace bien réelle que la Chine représente pour notre cybersécurité. Ward Elcock, Richard Fadden et John Adams, trois anciens conseillers supérieurs en matière de sécurité au Canada, ont eux aussi mis en garde le gouvernement fédéral, soutenant qu’il faut se méfier de Huawei, qui serait sous la coupe du gouvernement chinois.

Le premier ministre Trudeau a déclaré cette semaine qu’il ne voulait pas mêler la politique à cette décision.

Voici ma question : pourquoi le premier ministre ignore-t-il les inquiétudes du public ainsi que les avertissements de ses partenaires du Groupe des cinq et d’éminents experts en sécurité, qui le mettent en garde contre l’accord?

L’honorable Peter Harder (représentant du gouvernement au Sénat) : À l’instar du premier ministre, je suis persuadé que l’honorable sénateur ne veut pas faire de la politique avec ce dossier. Le gouvernement du Canada est convaincu de l’efficacité de ses mécanismes de surveillance dans le domaine de la cybersécurité et de la protection des intérêts du Canada. Bien que nous accueillions les conseils des sénateurs américains, ceux-ci ne font pas partie du processus décisionnel au Canada. Le gouvernement du Canada demeure convaincu que les mécanismes en place sont tout à fait indiqués pour assurer la sécurité et la cybersécurité du Canada.

La sécurité publique

La cybersécurité

L’honorable Thanh Hai Ngo : Le gouvernement communiste de la Chine se sert des entreprises d’État et des entreprises privées chinoises pour s’ingérer dans nos réseaux de communication et ceux de nos alliés. Ce mois-ci, un article publié par Bloomberg a révélé que la Chine a espionné et piraté plus de 30 entreprises américaines, dont Amazon et Apple, à l’aide de super micropuces qui sont à peine plus grosses qu’un grain de riz. Ces micropuces, assemblées sur une carte-mère par le fabricant chinois, ont été découvertes dans les centres de données du département de la Défense, le centre d’opérations conjointes de la CIA et le réseau de bord des navires de la marine.

Sénateur Harder, Huawei a déjà commencé à déployer son équipement sans fil par l’entremise de Bell Canada. La société a aussi collaboré avec Rogers pour devenir le commanditaire de l’émission Hockey Night in Canada.

Le gouvernement fédéral va-t-il exiger que Huawei cesse toutes ses activités commerciales d’ici la fin de l’examen relatif à la sécurité nationale?

L’honorable Peter Harder (représentant du gouvernement au Sénat) : Encore une fois, je tiens à assurer au sénateur et à l’ensemble du Sénat que le gouvernement du Canada demeure vigilant et s’assure que des mesures de protection et de cybersécurité sont en place pour protéger les Canadiens, et que ces mesures s’appliquent en temps opportun à l’ensemble des intervenants et des marchés concernés.

Pour ce qui est de la prémisse de la question, j’aimerais réaffirmer le consensus établi au Sénat, du moins parmi nombre de sénateurs, selon lequel le Canada doit, dans le cadre de ses efforts de diversification, resserrer ses liens économiques avec la Chine. Ce pays représente 25 p. 100 de la population mondiale et compte certainement pour 50 p. 100 de la croissance en Asie. Il est donc parfaitement normal que le Canada profite de toutes les occasions de renforcer sa relation économique avec la Chine, d’autant plus que les nouveaux marchés sont la clé de notre prospérité future.

[Français]

L’application de la réglementation sur le cannabis

L’honorable Pierre-Hugues Boisvenu : Sénateur Harder, en février dernier, j’ai demandé à la GRC combien de ses détachements disposaient de la présence d’un agent évaluateur 24 heures sur 24. Cette présence est importante, car ce sont ces experts qui peuvent effectivement préparer les dossiers pour les causes devant la cour. En l’absence d’agents évaluateurs dans les bureaux de la GRC, il sera très difficile de présenter ces dossiers à la cour dans les cas d’intoxication.

Finalement, j’ai dû déposer une question écrite afin de recevoir, des mois plus tard, une réponse de la GRC qui était très désolante. Je vous en ai d’ailleurs parlé hier.

Comment expliquez-vous que, trois ans après l’élection du gouvernement libéral, lequel avait promis de légaliser la marijuana, on ne compte aucun poste d’agent évaluateur disponible 24 heures par jour dans l’ensemble du pays dans la majorité des postes de la GRC?

[Traduction]

L’honorable Peter Harder (représentant du gouvernement au Sénat) : Je remercie l’honorable sénateur de sa question. Je le remercie également de l’attention qu’il porte à cet enjeu en me posant des questions au sujet de l’état de préparation, en particulier des policiers, en vue de la mise en œuvre de l’important projet de loi qui a été adopté au Sénat en juin dernier. Le gouvernement a pris des mesures pour contrer la conduite avec facultés affaiblies, qu’il s’agisse d’outils législatifs étudiés ici même ou de cette campagne de sensibilisation fort bien réussie, qui s’intitule « Ne conduis pas gelé ». Le gouvernement a investi 274 millions de dollars pour appuyer les forces de l’ordre afin qu’elles aient accès à la formation et aux technologies requises pour utiliser les nouveaux outils dont elles disposent. Grâce à ces investissements, le gouvernement a constaté une hausse de plus de 60 p. 100 du nombre d’experts en reconnaissance de drogues au Canada. Plus de 13 000 policiers partout au pays ont déjà été formés pour effectuer les tests normalisés de sobriété utilisés dans les contrôles routiers. De toute évidence, le processus continuera au cours des prochains mois et des prochaines années afin que les forces policières détiennent de solides moyens pour appliquer la loi qui a été adoptée par la majorité au Sénat, même si l’honorable sénateur s’y est opposé.

[Français]

Le sénateur Boisvenu : Sénateur Harder, je vous rappelle que la marijuana est maintenant légale. Votre gouvernement agit comme si la légalisation entrerait en vigueur dans un an. Je vous rappelle que le cannabis est légal depuis 24 heures. Je vous ai posé la question hier et, un peu à la blague, vous m’avez dit que je posais les mêmes questions depuis un an. Je pense qu’il faudra continuer à poser les mêmes questions tant et aussi longtemps que les Canadiens et les Canadiennes ne recevront pas de vraies réponses.

Hier, une nouvelle étude diffusée au Québec a révélé que 86 p. 100 des familles québécoises éprouvent des inquiétudes quant à la façon dont la marijuana a été légalisée. Elles seront encore plus inquiètes en apprenant que les appareils de dépistage que votre gouvernement a choisis produisent des résultats erronés dans 33 p. 100 des cas.

Je répète ma question, qui est la même qu’hier : quand la ministre de la Justice s’engagera-t-elle à utiliser d’autres appareils moins coûteux et plus performants afin de rassurer les familles au sujet des contrôles routiers au Canada?

[Traduction]

Le sénateur Harder : Permettez-moi de rappeler aux sénateurs que le nouveau système légal de distribution de la marijuana strictement supervisé et réglementé qui est entré en vigueur hier fait partie, comme je l’ai dit hier, d’un processus de mise en œuvre. Le système antérieur, où la circulation du cannabis illégal était aux mains du crime organisé, aura été un fiasco total. Les statistiques, celles de MADD Canada en particulier, l’auront montré aux honorables sénateurs : la drogue joue un rôle plus grand que l’alcool dans les accidents mortels de la route, et nous avons assurément un problème au Canada. Il n’est pas apparu avec la légalisation. Bien franchement, la solution commence par la légalisation et le strict respect des lois et des règlements; c’est la voie sur laquelle nous nous sommes engagés.

La justice

Le processus de nomination des juges

L’honorable Paul E. McIntyre : La question que j’adresse au leader du gouvernement au Sénat concerne encore une fois les vacances au sein de la magistrature. En avril dernier, lorsque j’ai posé une question à ce sujet au leader du gouvernement, il y avait 59 vacances à la magistrature fédérale. Aujourd’hui, on en compte environ 50 à l’échelle du Canada. Le projet de loi C-44, soit le projet de loi d’exécution du budget de 2017, a créé 22 nouveaux postes de juges de juridiction supérieure. Cet été, plus d’un an après que ce projet de loi a reçu la sanction royale, nous avons appris que seulement la moitié de ces postes avaient été comblés.

Monsieur le leader, quand le gouvernement et la ministre de la Justice prévoient-ils pourvoir les postes vacants à la magistrature pour assurer, de manière concrète, que les victimes d’actes criminels obtiennent justice et pour rétablir la justice dans notre système judiciaire?

L’honorable Peter Harder (représentant du gouvernement au Sénat) : Je remercie encore une fois le sénateur de sa question et de son intérêt soutenu à l’égard de ce dossier. Je lui assure — comme je l’ai fait en ce qui concerne d’autres dossiers — que la ministre de la Justice s’emploie avec diligence à faire nommer à ces importantes fonctions dans les meilleurs délais possibles des personnes qui représentent la grande diversité canadienne et qui sont qualifiées pour siéger à la magistrature. Cela demeure son objectif. Il va sans dire que je ferai directement part à la ministre des préoccupations que le sénateur a exprimées pour qu’elle constate la vigilance du Sénat à l’égard de ces importantes nominations.

(1410)

Le sénateur McIntyre : De graves accusations criminelles ont été abandonnées au lendemain de l’arrêt Jordan, rendu par la Cour suprême à l’été 2016. Le leader du gouvernement se rappelle peut-être de la question que je lui ai posée en avril sur un individu accusé en Alberta de meurtre au premier degré, de complot en vue de commettre un meurtre et de direction d’une organisation criminelle, qui a finalement été libéré parce que les délais pour la tenue d’un procès étaient trop longs.

Monsieur le leader, pourriez-vous vous renseigner pour savoir combien d’accusations de meurtres ont été abandonnées au cours des deux dernières années?

Le sénateur Harder : Je me ferai un plaisir de me renseigner.


[Français]

ORDRE DU JOUR

Le Code canadien du travail
La Loi sur les relations de travail au Parlement
La Loi no 1 d’exécution du budget de 2017

Projet de loi modificatif—Message des Communes—Adoption et rejet de certains amendements du Sénat

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, j’ai l’honneur d’informer le Sénat que j’ai reçu le message suivant de la Chambre des communes :

Le mercredi 17 octobre 2018

Il est ordonné,—Qu’un message soit envoyé au Sénat afin d’informer leurs Honneurs que, en ce qui concerne le projet de loi C-65, Loi modifiant le Code canadien du travail (harcèlement et violence), la Loi sur les relations de travail au Parlement, et la Loi no 1 d’exécution du budget de 2017, la Chambre :

accepte les amendements 3, 5b), 6 et 7a) apportés par le Sénat;

rejette respectueusement l’amendement 1 parce que l’ajout de « s’entend notamment de » occasionnerait un manque de clarté pour les employés et les employeurs;

rejette respectueusement l’amendement 2, parce qu’il engendrerait un déséquilibre en mettant l’accent sur le harcèlement et la violence par rapport à toutes les autres mesures en matière de santé et de sécurité au travail en vertu de la partie II du Code canadien du travail, et parce que d’autres textes législatifs, notamment la Loi sur l’équité en matière d’emploi, abordent certaines de ces questions;

propose que l’amendement 4 soit modifié en supprimant l’alinéa z.163) et en modifiant la numérotation pour que l’alinéa z.164) devienne l’alinéa z.163), parce que l’ajout de cet alinéa z.163) voudrait dire qu’un seul incident de harcèlement et de violence dans un lieu de travail serait considéré comme une violation du Code canadien du travail de la part de l’employeur, et aurait pour effet de miner le cadre adressant le harcèlement et la violence que le projet de loi C-65 vise à établir;

rejette respectueusement l’amendement 5a) parce que l’enquête dont font l’objet les plaintes en vertu de l’article qui serait modifié ne vise pas les plaintes déposées à l’égard d’un incident de harcèlement ou de violence; et

rejette respectueusement l’amendement 7b) parce que cela s’éloignerait des autres obligations de rapports annuels de la Commission des relations de travail et de l’emploi dans le secteur public fédéral en vertu de la Loi sur la Commission des relations de travail et de l’emploi dans le secteur public fédéral et de la partie I de la Loi sur les relations de travail au Parlement, et parce que cette Commission ferait seulement rapport d’un petit nombre de cas où des appels ont été interjetés, ce qui créerait un risque élevé que soit révélée l’identité d’employés advenant la publication de telles statistiques.

ATTESTÉ

Le Greffier de la Chambre des communes

Charles Robert

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, quand étudierons-nous le message?

(Sur la motion du sénateur Harder, l’étude du message est inscrite à l’ordre du jour de la présente séance.)

[Traduction]

Les travaux du Sénat

L’honorable Diane Bellemare (coordonnatrice législative du gouvernement au Sénat) : Honorables sénateurs, conformément à l’article 4-13(3) du Règlement, j’informe le Sénat que, lorsque nous passerons aux affaires du gouvernement, le Sénat abordera les travaux dans l’ordre suivant : la deuxième lecture du projet de loi C-68, suivie de tous les autres articles dans l’ordre où ils figurent au Feuilleton.

La Loi sur les pêches

Projet de loi modificatif—Deuxième lecture—Ajournement du débat

L’honorable Dan Christmas propose que le projet de loi C-68, Loi modifiant la Loi sur les pêches et d’autres lois en conséquence, soit lu pour la deuxième fois.

— Honorables sénateurs, je suis heureux de prendre la parole au Sénat cet après-midi à titre de parrain du projet de loi C-68, Loi modifiant la Loi sur les pêches et d’autres lois en conséquence.

Ce projet de loi revêt de l’importance pour moi parce que le secteur canadien des pêches me tient à cœur. De plus, l’océan est important pour le Cap-Bretonnais que je suis ainsi que pour la nation mi’kmaq.

Par ailleurs, le fait que je puisse examiner en toute indépendance cette mesure législative et les modifications qu’elle propose compte aussi beaucoup pour moi. À titre de sénateur mi’kmaq indépendant, je ressens le besoin de dire que je n’adhère à aucune idéologie politique. J’estime que le projet de loi vise à appuyer les améliorations aux lois et aux politiques pouvant être bénéfiques pour la mer, ses habitants marins et les gens qui en tirent leur subsistance.

Le projet de loi propose de rétablir les mesures de protection des habitats marins et de l’habitat des poissons, y compris des poissons d’eau douce, ainsi que d’incorporer des mesures de protection écologiques modernes dans la Loi sur les pêches. Ces modifications permettront d’assurer la durabilité économique et environnementale du secteur canadien des pêches.

Je suis particulièrement ravi que le projet de loi C-68 vise à mieux reconnaître les droits des peuples autochtones et à respecter leurs connaissances traditionnelles en matière de pêches.

En tant que fier Mi’kmaq et ami du regretté Donald Marshall fils, qui a défendu le droit de pêcher de notre nation, c’est avec le sens du devoir que j’affirme l’importance de protéger les droits des Autochtones en votant en faveur de l’adoption de ce projet de loi crucial.

Honorables sénateurs, certains d’entre vous se rappellent peut-être que le gouvernement précédent a changé, en 2012, les dispositions de la Loi sur les pêches relatives à la protection des habitats. Les mesures de protection du poisson et de l’habitat du poisson ont été revues pour qu’elles ne s’appliquent plus qu’à la pêche commerciale, récréative ou autochtone.

Les changements apportés à la loi ont particulièrement inquiété les groupes autochtones et environnementaux. Toutefois, je crois que la question de la protection du poisson et de l’habitat du poisson tient à cœur à tous les Canadiens.

Les partenaires de l’industrie ont été plongés dans l’incertitude en ce qui concerne leurs responsabilités légales. En revanche, le projet de loi C-68 va permettre de rétablir la confiance du public en assurant à nouveau la protection de tous les poissons.

Les modifications proposées dans le projet de loi C-68 peuvent être regroupées en quelques grands thèmes : la collaboration entre les peuples autochtones et le gouvernement fédéral; l’amélioration de la planification et l’adoption d’un mode de gestion intégrée; le renforcement de la réglementation et des mesures d’application; l’amélioration des partenariats et de la collaboration, y compris avec l’industrie; et, enfin, une plus grande transparence envers les Canadiens grâce à une meilleure surveillance et à la production de rapports.

Le projet de loi C-68 rétablit certaines dispositions supprimées et cherche à mieux servir les Canadiens en ce qui concerne la gestion des pêches.

Le projet de loi vise à créer un cadre adéquat de gestion et de contrôle et à orienter les décisions prises en vertu de la Loi sur les pêches.

Les modifications proposées dans le projet de loi C-68 fourniront des règles plus claires, plus solides et plus simples permettant d’établir et de gérer des zones d’importance écologique et de protéger des habitats vulnérables ou importants.

Grâce au projet de loi C-68, les Canadiens pourront plus facilement exiger des comptes du gouvernement fédéral concernant les décisions qu’il prend relativement aux poissons et à leur habitat. Le gouvernement prend des mesures pour sauver et restaurer des habitats, et pour reconstituer les stocks de poisson décimés.

Ces mesures conféreront également au ministre le pouvoir de prendre des arrêtés de gestion des pêches qui lui permettront de prendre rapidement des mesures ciblées lorsqu’une menace identifiable pèse sur la préservation et la protection des écosystèmes marins et d’eau douce.

On a également ajouté au projet de loi C-68 un élément qui oblige le ministre des Pêches et des Océans à examiner les effets négatifs potentiels que pourraient entraîner les décisions, dans le contexte des droits des peuples autochtones, tel que reconnus à l’article 35 de la Loi constitutionnelle de 1982.

Je tiens à rappeler aux sénateurs que, en vertu de l’article 35 :

Les droits existants — ancestraux ou issus de traités — des peuples autochtones du Canada sont reconnus et confirmés.

Je me réjouis de l’inclusion dans cette loi d’une disposition de non-dérogation, selon laquelle :

[...] il est entendu que la présente loi ne porte pas atteinte à la protection des droits des peuples autochtones du Canada découlant de leur reconnaissance et de leur confirmation au titre de l’article 35 de la Loi constitutionnelle de 1982.

Je trouve cela encourageant, certes, mais je suis d’avis qu’il pourrait y avoir de meilleures façons d’appliquer une disposition de non-dérogation pour ce projet de loi. Il me tarde d’explorer les possibilités lorsque le projet de loi sera renvoyé au comité.

(1420)

Je suis tout aussi encouragé de voir que, sous le titre « Obligation du ministre », le projet de loi indique explicitement que :

Le ministre prend toute décision sous le régime de la présente loi en tenant compte des effets préjudiciables que la décision peut avoir sur les droits des peuples autochtones du Canada reconnus et confirmés par l’article 35 de la Loi constitutionnelle de 1982.

La Loi sur les pêches est l’une des lois les plus anciennes du Canada. Elle a été adoptée peu après la Confédération et est donc en vigueur depuis plus de 150 ans.

Le projet de loi à l’étude et les améliorations qu’il contient jouissent de l’appui du public et de parlementaires.

Parlant de l’appui du public, je peux dire aux honorables sénateurs que les pêcheurs mi’kmaq de ma région, au Cap-Breton, étaient ravis de voir des mesures concernant la Politique du ministère des Pêches et des Océans sur la préservation de l’indépendance de la flottille de pêche côtière dans l’Atlantique canadien incluses dans le projet de loi.

La politique favorise la pêche commerciale dans l’Atlantique canadien et un solide secteur côtier indépendant. Elle repose sur une approche globale pour aider les pêcheurs à conserver le contrôle de leurs entreprises, faciliter l’accès au financement de la part des institutions prêteuses traditionnelles et maintenir dans les collectivités côtières la prospérité générée par la pêche.

L’inclusion de la politique dans les dispositions du projet de loi fait passer le programme de politique ministérielle à loi, ce dont les pêcheurs mi’kmaq sont très satisfaits.

Le projet de loi C-68 viendra consigner explicitement dans la loi des mesures qui, depuis longtemps, sont considérées comme la raison d’être de la Loi sur les pêches. Je voudrais passer en revue certains des principaux éléments du projet de loi qui visent à moderniser cette importante loi en matière de pêches.

Le premier de ces éléments concerne la protection des poissons et des habitats du poisson.

Le projet de loi remet en place des dispositions interdisant la détérioration, la destruction ou la perturbation de l’habitat du poisson, ainsi que celles interdisant toute action causant la mort du poisson par d’autres moyens que la pêche. En pratique, cela signifie que tous les poissons seront protégés, pas seulement ceux qui ont une valeur commerciale.

La perte et la dégradation de l’habitat du poisson et les changements entravant le passage du poisson et le débit d’eau contribuent tous au déclin de l’habitat du poisson en milieu marin et en eau douce au Canada. Ce déclin représente un grave problème environnemental, et c’est pourquoi la restauration des habitats du poisson dégradés est essentielle.

Les modifications proposées à la Loi sur les pêches prévoient que la restauration soit prise en considération dans la prise de décisions entourant un projet.

Le projet de loi C-68 prévoit des modifications afin que de meilleurs règlements soient mis en place pour la création et la gestion de zones d’importance écologique, afin que les habitats du poisson sensibles ou importants soient mieux protégés.

L’un des principaux éléments de la modernisation de la protection du poisson et de son habitat consiste à mieux gérer les projets susceptibles de leur nuire au moyen d’un nouveau régime de permis pour les gros projets et d’une approche plus souple fondée sur des codes de conduite pour les plus petits projets, comme ceux visant des champs d’agriculteurs. Le but est de mettre les efforts là où on en a le plus besoin.

Le projet de loi permettra de prendre les règlements grâce auxquels une liste de projets désignés pourra être dressée. Ces projets seront constitués d’ouvrages, d’entreprises ou d’activités pour lesquels un permis sera toujours requis.

Le gouvernement consulte actuellement les peuples autochtones, l’industrie, les provinces et les territoires et d’autres intéressés pour s’assurer que les bons types de projets sont inclus dans la liste des projets désignés.

Cette question est, bien entendu, d’une extrême importance pour moi et, dans le cas de la pêche mi’kmaq en Nouvelle-Écosse, elle est cruciale. C’est une question au sujet de laquelle j’aimerais que nous redoublions d’efforts ici, et j’ai hâte que cet élément de la mesure législative soit étudié rigoureusement par le comité.

Un autre élément clé de la modernisation et de la façon dont on traite la question de la confiance du public est l’introduction d’un registre public. Ce registre favorisera une plus grande transparence et un meilleur accès pour que le public puisse prendre connaissance des décisions du gouvernement concernant la protection du poisson et de son habitat et les évaluer.

De plus, les modifications touchant le poisson et l’habitat du poisson instaurent la possibilité pour les promoteurs de mettre en place des réserves d’habitats pour que les promoteurs de l’industrie ou les municipalités puissent planifier plus efficacement les projets à long terme qui doivent être compensés par des projets de conservation.

Les réserves d’habitats vont faciliter une gestion plus efficace des dommages résiduels, de même que l’atténuation de la perte d’habitats globale causée par les projets d’exploitation.

Sur le plan de la réconciliation et de la collaboration avec les Autochtones, il ne faut pas oublier que les ressources halieutiques et les habitats aquatiques ont une grande importance sociale, culturelle et économique pour bien des peuples autochtones.

À mon avis, on ne peut respecter les droits des peuples autochtones sans tenir compte de leurs intérêts et de leurs aspirations en matière de possibilités économiques liées aux pêches et de protection du poisson et de l’habitat du poisson.

Ainsi, les propositions que renferme le projet de loi C-68 apportent, nous l’espérons, des moyens de favoriser le renouvellement des relations de nation à nation essentielles à notre avenir commun.

Afin d’appuyer l’atteinte de cet objectif, le projet de loi C-68 propose des modifications qui préparent le terrain pour l’établissement de partenariats avec les peuples autochtones, et les responsabilités et les obligations du ministre des Pêches sont, à cet effet, clairement énoncées : le ministre doit tenir compte des effets préjudiciables que la décision peut avoir sur les droits des peuples autochtones du Canada.

Le projet de loi C-68 permettra en outre au ministre de mettre sur pied des comités consultatifs multilatéraux en vue de la réalisation de la loi, comités qui pourraient comprendre des représentants autochtones — et qui, à mon avis, le devraient, et j’insiste sur le mot devraient.

Les droits des peuples autochtones seront donc au centre des décisions, exactement où ils doivent être. Il s’agit d’un heureux changement.

Cette mesure législative propose également une disposition qui permettra au ministre de conclure des accords avec les corps dirigeants autochtones en vue de la réalisation de l’objet de la Loi sur les pêches, un avantage réservé jusqu’ici aux provinces et territoires. Il s’agit d’une autre heureuse amélioration.

Ces accords peuvent servir de fondement en vue d’officialiser la manière dont le gouvernement travaille avec les collectivités autochtones pour gérer les intérêts collectifs dans les pêches et l’habitat des poissons.

Comme de nombreuses collectivités autochtones vivent à proximité de zones où ont été proposés des projets qui pourraient avoir des répercussions sur la pêche et l’habitat du poisson, plusieurs d’entre elles ont exprimé la volonté d’assumer une part des tâches dont se charge actuellement le ministère des Pêches et des Océans du Canada.

Les activités les plus souvent citées étaient les examens des projets relatifs aux répercussions sur la pêche et l’habitat du poisson, la surveillance et l’application de la loi.

Le projet de loi C-68 conférera aussi le pouvoir de prendre des règlements pour permettre la délivrance de baux, de permis et de licences pour un terme supérieur à neuf ans. À l’heure actuelle, c’est le gouverneur en conseil qui délivre des baux pour des termes supérieurs.

La capacité de prendre des règlements signifie que l’échéance des permis et des licences détenus par les collectivités autochtones serait harmonisée à celle des ententes sur les pêches d’une durée limitée. Cette disposition ne se limite pas uniquement aux collectivités autochtones. Elle pourra aussi être utilisée pour offrir de la stabilité et de la prévisibilité à toute activité de pêche à long terme.

Honorables collègues, permettez-moi de parler franchement. J’appuie ce projet de loi et les améliorations qu’il prévoit. À mon avis, les dispositions pourront contribuer à promouvoir une plus grande collaboration de nation à nation.

Cependant, en toute franchise, je surveillerai de près la situation pour voir si ces dispositions conduisent, en fait, aux améliorations promises. On ne peut pas encore qualifier la relation entre les Autochtones et le ministère des Pêches et des Océans de saine ou de solide. J’ai bon espoir qu’elle pourra sensiblement s’améliorer.

Le ministre des Pêches et des Océans et la sous-ministre affirment qu’un esprit de changement et d’optimisme règne au ministère. De plus, je suis personnellement déterminé à faire tout mon possible pour encourager et soutenir cet esprit positif.

Cependant, il ne faut pas se leurrer : il reste du travail à faire. J’invite les honorables sénateurs à participer au débat pour que nous puissions faire en sorte, au mieux de nos capacités, que les dispositions du projet de loi C-68 soient assez rigoureuses pour apporter les changements voulus.

Un autre thème clé important pour les Autochtones est le traitement, l’application et le respect du savoir traditionnel autochtone.

(1430)

Les modifications proposées dans le projet de loi C-68 exigeraient que le ministre tienne compte des connaissances traditionnelles des peuples autochtones du Canada lorsqu’il prend certaines décisions, plus précisément celles qui concernent le poisson et son habitat. Les connaissances autochtones comprennent notamment la connaissance du terrain, des espèces et des écosystèmes dans toute leur complexité.

Les connaissances autochtones sont d’une grande importance pour nos communautés. C’est pourquoi le gouvernement a aussi inclus dans le projet de loi l’exigence de protéger les connaissances autochtones communiquées au ministre à titre confidentiel, comme les peuples autochtones le demandaient depuis longtemps. Par conséquent, lorsque des connaissances autochtones sont communiquées dans le contexte des décisions prises en vertu de la loi, ces renseignements doivent rester confidentiels; ils ne doivent pas être transmis a public ou aux médias, et c’est très bien ainsi. Ces connaissances pourront être communiquées seulement si la détentrice de ce savoir — donc la communauté autochtone — en autorise la communication, ou si elles sont nécessaires à des fins de justice naturelle et d’équité procédurale, ou si le public y a déjà accès.

J’approuve ce changement progressiste, mais j’ai quelques réserves. Les connaissances autochtones et les anciens qui détiennent ce savoir sont sacrés dans nos communautés. Ils ne doivent jamais être traités à la légère ou de façon cavalière. Le ministère des Pêches et des Océans n’est vraiment pas reconnu comme un organisme attentif aux peuples autochtones, à leurs pratiques et à leurs coutumes. Par conséquent, la prudence sera de mise. Il est évident que le personnel du ministère est peu au fait de la culture autochtone et a grandement besoin d’une sensibilisation à ce sujet.

Chers collègues, il y a un certain nombre d’autres dispositions du projet de loi qui ont été mises à jour et modernisées afin de mettre en place des mesures de protection pour affronter les obstacles écologiques et environnementaux du XXIe siècle. Permettez-moi de parler de certaines d’entre elles. Les modifications prévoient notamment la mise en œuvre de nouvelles dispositions qui notamment : prévoient le maintien du stock de poissons; confèrent au gouverneur en conseil le pouvoir de prendre de nouveaux règlements, notamment concernant le rétablissement des stocks de poissons; confèrent au ministre le pouvoir de prendre des arrêtés de gestion des pêches interdisant ou limitant la pêche pour une période de 45 jours en vue de parer à une menace à la gestion et la surveillance judicieuses des pêches et à la conservation et la protection du poisson; confèrent au ministre le pouvoir de prendre des règlements en vue de la conservation et de la protection de la biodiversité marine; autorisent la réglementation des importations de poissons, de mollusques, de crustacés et de mammifères marins; mettent à jour et renforcent les pouvoirs d’application de la loi et établissent un régime d’accords sur les mesures de rechange; ajoutent des dispositions modernes comme la fixation de droits, la possibilité de demander des renseignements et l’examen périodique de la loi; interdisent la pêche de cétacés — baleines, dauphins ou marsouins — dans les eaux canadiennes lorsqu’elle a pour but leur mise en captivité, sauf si le ministre l’autorise dans certaines circonstances, notamment parce que les animaux sont blessés, sont en détresse ou ont besoin de soins, ce qui, comme les sénateurs le savent, est aussi une proposition de l’ancien sénateur Moore qui se retrouve maintenant dans le projet de loi d’intérêt public du sénateur Sinclair, à savoir le projet de loi S-203.

Il y a eu de longs débats houleux au sujet des baleines en captivité, ici et au comité. On en a aussi beaucoup parlé récemment dans l’espace public dans l’affaire de J-50, le jeune épaulard femelle que les scientifiques envisageaient de capturer temporairement au large des côtes de la Colombie-Britannique afin de tenter de lui sauver la vie, parce qu’il avait perdu trop de poids.

Le projet de loi S-203, Loi visant à mettre fin à la captivité des baleines et des dauphins, modifierait la Loi sur les pêches afin d’interdire la capture d’un cétacé lorsque l’intention est de placer l’animal en captivité, sauf si les circonstances l’exigent, par exemple si l’animal est blessé ou en détresse ou s’il a besoin de soins.

Chers collègues, les dispositions concernant les stocks de poissons du projet de loi C-68 feront que le Canada sera en phase avec le consensus international quant à l’établissement d’obligations légales lorsque les grands stocks de poissons se retrouvent sous un niveau assurant leur durabilité. Aux termes du projet de loi, le ministre doit mettre en œuvre des mesures, prévues dans la réglementation, pour la gestion durable ou le rétablissement des stocks de poissons.

Si le ministre des Pêches et des Océans estime qu’il n’est pas possible ou qu’il n’est pas indiqué, en raison de facteurs biologiques ou de répercussions socioéconomiques négatives, de mettre en œuvre des mesures à cette fin, les Canadiens seront informés des raisons qui motivent sa décision et des mesures qui seront prises pour minimiser le plus possible le déclin des stocks.

Le projet de loi C-68 prévoit aussi deux outils importants concernant la gestion par zone au titre de la Loi sur les pêches. Le premier outil est l’arrêté de gestion des pêches.

Le projet de loi C-68 ajoute des dispositions modernes qui donnent au ministre le pouvoir de gérer et de contrôler adéquatement les pêches en lui permettant de modifier les exigences relatives aux permis une fois qu’une pêche est en cours. Ces arrêtés de gestion des pêches seront utilisés pour permettre au ministère des Pêches et des Océans de réagir de manière ciblée, rapide et locale aux nouveaux problèmes touchant la conservation et la protection du poisson.

Le deuxième outil est le pouvoir ministériel d’élaborer des règlements en matière de protection de la biodiversité. Comme le Sénat l’a déjà mentionné lors des discussions entourant le projet de loi C-55, Loi modifiant la Loi sur les océans et la Loi fédérale sur les hydrocarbures, le Canada s’est engagé à atteindre des objectifs de conservation marine en protégeant 10 p. 100 des zones marines et côtières du Canada d’ici 2020. Cet outil accorde de nouveaux pouvoirs pour restreindre des activités de pêche précises dans le but de conserver et de protéger la biodiversité marine à long terme.

Ces nouveaux règlements créeront des refuges marins, qui viendront s’ajouter aux aires marines protégées au titre de la Loi sur les océans, proposées dans le projet de loi C-55.

En terminant, honorables sénateurs, le projet de loi C-68 permet à la fois d’actualiser et de moderniser la Loi sur les pêches en s’attaquant à un certain nombre d’enjeux. Il rétablit la protection offerte au poisson et à son habitat, en plus de fournir une feuille de route claire pour les petits comme pour les grands projets, ce qui sera un gage de stabilité pour l’industrie.

Les Canadiens auront désormais un moyen simple et transparent de demander des comptes à leur gouvernement grâce au futur registre consignant les décisions relatives au poisson et à son habitat.

Toutefois, surtout, et je reviens aux Mi’kmaq, le projet de loi C-68 prévoit une série de mécanismes et d’outils pratiques qui favoriseront la réconciliation, permettront aux Mi’kmaq d’exercer plus librement leur droit de pêche et paveront la voie à la conclusion d’accords de partenariat avec les peuples autochtones.

J’invite les honorables sénateurs à bien se renseigner sur le projet de loi C-68, à en étudier les dispositions, à en débattre et à proposer, le cas échéant, des façons de l’améliorer. C’est le sénateur mi’kmaq des Maritimes qui vous y invite, car j’ai le plus profond respect et un immense attachement pour l’océan et les espèces qui y abondent.

John F. Kennedy a déjà fait ressortir le lien profond qui unit l’humain à la mer. Il a dit ceci :

J’ai du mal à expliquer pourquoi nous sommes tous autant attachés à la mer, si ce n’est qu’outre le fait qu’elle change constamment, comme la lumière qui la frappe et les navires qui y voguent, nous venons tous de la mer. Biologiquement, le sang qui coule dans nos veines contient exactement le même pourcentage de sel que l’océan. Il y a donc du sel dans notre sang, dans notre sueur, dans nos larmes. Nous sommes intimement liés à l’océan. Et lorsque nous retournons à la mer [...] nous retournons là d’où nous venons.

J’invite donc tous les honorables sénateurs à se joindre au dialogue que le pays doit tenir pour que son secteur des pêches soit aussi dynamique et durable que possible.

Wela’lioq. Je vous remercie.

L’honorable Donald Neil Plett : Le sénateur Christmas accepterait-il de répondre à une question?

Le sénateur Christmas : Oui.

Le sénateur Plett : Je vous remercie de votre discours. Je n’allais pas poser de question jusqu’à ce que vous parliez du projet de loi S-203.

Lors de la visite au Sénat du ministre LeBlanc, il y a quelques mois, je lui ai posé une question sur les projets de loi S-203 et C-68 pour savoir s’il considérait que le gouvernement avait trouvé le juste équilibre. Il m’a répondu que oui et il a ajouté que, selon lui, le contenu du projet de loi S-203 relevait de la compétence provinciale et qu’il ne devrait pas être traité par le gouvernement fédéral.

Avez-vous discuté avec des représentants du gouvernement pour savoir pourquoi ils n’ont pas inclus les objectifs du projet de loi S-203 dans le projet de loi C-68? Étant donné qu’il traite déjà de la mise en captivité de cétacés vivants, pourquoi n’y aurait-on pas inclus les dispositions du projet de loi S-203?

(1440)

Le sénateur Christmas : Je vous remercie de votre question. Le sujet a soulevé de nombreux débats au cours des dernières années, depuis mon arrivée ici. Je dois vous avouer que je suis encore quelque peu perplexe devant tout le dossier.

La Chambre des communes a adopté le projet de loi, et le Sénat en est maintenant saisi. Je serais heureux de continuer d’en parler au comité pour déterminer les interactions entre les deux projets de loi. Personnellement, je ne connais pas la réponse à votre question, mais j’ai hâte de pouvoir discuter du sujet plus en profondeur.

Le sénateur Plett : Vous n’avez donc pas discuté du fait que le projet de loi S-203 serait de compétence provinciale, que le projet de loi du gouvernement serait de compétence fédérale et qu’il y aurait une différence très nette entre les deux?

Le sénateur Christmas : C’est exact, honorable sénateur.

Le sénateur Plett : Merci.

L’honorable David Tkachuk : Merci pour votre discours. Vous aviez parlé de l’étude en comité et de manières d’améliorer le projet de loi. Êtes-vous ouvert à des amendements, et le gouvernement a-t-il laissé entendre qu’il était ouvert à des amendements à ce projet de loi en comité?

Le sénateur Christmas : Merci, sénateur Tkachuk. Oui, j’ai reçu l’assurance du gouvernement qu’il était ouvert à des amendements.

Le sénateur Tkachuk : Vous-même, en tant que parrain du projet de loi, et votre Groupe des sénateurs indépendants, êtes-vous aussi ouverts à des amendements?

Le sénateur Christmas : Oui.

Le sénateur Tkachuk : Très bien.

L’honorable Lillian Eva Dyck : Le sénateur accepterait-il de répondre à une autre question?

Le sénateur Christmas : Oui.

La sénatrice Dyck : Sénateur Christmas, merci beaucoup du discours solide que vous avez prononcé et de l’explication que vous nous avez donnée au sujet du projet de loi. Je trouve cela encourageant que le gouvernement y inscrive la volonté de respecter les droits ancestraux des Autochtones.

Vous avez parlé de la disposition de non-dérogation du projet de loi. Comme vous le savez, il a été question, hier soir, au Comité des peuples autochtones, du rapport de 2007 du Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles, dirigé par le sénateur Watt et le sénateur Sibbeston, dans lequel était mise de l’avant la version « Cadillac », si vous me permettez, de la disposition de non-dérogation. Je vais en citer un extrait. Ma question est la suivante : la disposition de non-dérogation du projet de loi C-68 est-elle conforme à la recommandation formulée par le sénateur Watt et le sénateur Sibbeston dans le rapport de 2007? L’extrait se lit comme suit :

Tout texte doit maintenir les droits ancestraux ou issus de traités reconnus et affirmés aux termes de l’article 35 de la Loi constitutionnelle de 1982 et ne pas y porter atteinte.

Le sénateur Christmas : Oui, c’est une crainte que j’ai aussi après avoir étudié le projet de loi C--68. J’ai consulté d’autres projets de loi dont le Sénat est saisi. Il semble exister différentes versions de la disposition de non-dérogation en ce qui concerne les droits autochtones. C’est préoccupant.

J’ai été très heureux d’apprendre au Comité des peuples autochtones, hier soir, que le Sénat s’était penché sur la question en 2007. J’ai hâte d’étudier la question en détail au comité et de me pencher sur toutes les différentes versions des dispositions de non-dérogation dans les lois canadiennes, pour les comparer. J’ai hâte de faire cette étude.

(Sur la motion de la sénatrice Martin, le débat est ajourné.)

Le Code canadien du travail
La Loi sur les relations de travail au Parlement
La Loi no 1 d’exécution du budget de 2017

Projet de loi modificatif—Message des Communes—Motion d’adoption de l’amendement des Communes et de renonciation aux amendements du Sénat—Ajournement du débat

Le Sénat passe à l’étude du message de la Chambre des communes concernant le projet de loi C-65, Loi modifiant le Code canadien du travail (harcèlement et violence), la Loi sur les relations de travail au Parlement et la Loi no 1 d’exécution du budget de 2017 :

Le mercredi 17 octobre 2018

Il est ordonné,—Qu’un message soit envoyé au Sénat afin d’informer leurs Honneurs que, en ce qui concerne le projet de loi C 65, Loi modifiant le Code canadien du travail (harcèlement et violence), la Loi sur les relations de travail au Parlement, et la Loi no 1 d’exécution du budget de 2017, la Chambre :

accepte les amendements 3, 5b), 6 et 7a) apportés par le Sénat;

rejette respectueusement l’amendement 1 parce que l’ajout de « s’entend notamment de » occasionnerait un manque de clarté pour les employés et les employeurs;

rejette respectueusement l’amendement 2, parce qu’il engendrerait un déséquilibre en mettant l’accent sur le harcèlement et la violence par rapport à toutes les autres mesures en matière de santé et de sécurité au travail en vertu de la partie II du Code canadien du travail, et parce que d’autres textes législatifs, notamment la Loi sur l’équité en matière d’emploi, abordent certaines de ces questions;

propose que l’amendement 4 soit modifié en supprimant l’alinéa z.163) et en modifiant la numérotation pour que l’alinéa z.164) devienne l’alinéa z.163), parce que l’ajout de cet alinéa z.163) voudrait dire qu’un seul incident de harcèlement et de violence dans un lieu de travail serait considéré comme une violation du Code canadien du travail de la part de l’employeur, et aurait pour effet de miner le cadre adressant le harcèlement et la violence que le projet de loi C-65 vise à établir;

rejette respectueusement l’amendement 5a) parce que l’enquête dont font l’objet les plaintes en vertu de l’article qui serait modifié ne vise pas les plaintes déposées à l’égard d’un incident de harcèlement ou de violence; et

rejette respectueusement l’amendement 7b) parce que cela s’éloignerait des autres obligations de rapports annuels de la Commission des relations de travail et de l’emploi dans le secteur public fédéral en vertu de la Loi sur la Commission des relations de travail et de l’emploi dans le secteur public fédéral et de la partie I de la Loi sur les relations de travail au Parlement, et parce que cette Commission ferait seulement rapport d’un petit nombre de cas où des appels ont été interjetés, ce qui créerait un risque élevé que soit révélée l’identité d’employés advenant la publication de telles statistiques.

L’honorable Peter Harder (représentant du gouvernement au Sénat) propose :

Que le Sénat agrée l’amendement que la Chambre des communes a apporté à l’amendement 4 du Sénat au projet de loi C-65, Loi modifiant le Code canadien du travail (harcèlement et violence), la Loi sur les relations de travail au Parlement et la Loi no 1 d’exécution du budget de 2017;

Que le Sénat n’insiste pas sur ses amendements 1, 2, 5a) et 7b), auxquels les Communes n’ont pas acquiescé;

Qu’un message soit transmis à la Chambre des communes pour l’en informer.

—Je prends la parole au sujet du message de la Chambre des communes concernant le projet de loi C-65, qui porte sur les questions de harcèlement et de violence en milieu de travail. Si le Sénat accepte ce message, le Parlement aura réussi à adopter une mesure législative nécessaire pour apporter les changements qui s’imposent dans les milieux de travail parlementaires et sous réglementation fédérale.

Il est évident que le harcèlement et la violence dans les milieux de travail continuent d’avoir des répercussions dévastatrices sur beaucoup trop de personnes. On parle ici de cicatrices physiques et émotionnelles, de carrières détruites et d’ambitions réduites à néant.

[Français]

L’adoption de cette loi marque le début d’une nouvelle réalité. Avec l’adoption du projet de loi C-65, on relègue au passé la tolérance des comportements agressifs et de la violence dans nos milieux de travail.

Honorables sénateurs, j’aimerais souligner la collaboration et l’excellent travail de tous les membres de cette Chambre et, surtout, l’excellent travail du Comité sénatorial permanent des droits de la personne. Grâce aux membres de ce comité et grâce à nous tous, nous avons aujourd’hui un projet de loi dans lequel nous avons foi.

[Traduction]

Je tiens également à remercier les témoins qui ont comparu devant le comité d’avoir partagé leurs connaissances et leurs expériences. Ces personnes ont présenté des perspectives précieuses, allant d’opinions d’experts à des histoires extrêmement personnelles. Leurs interventions ont grandement permis d’éclairer l’étude du projet de loi en comité.

J’aimerais aussi remercier nos collègues de l’autre endroit. Comme vous le savez, bon nombre des amendements qui ont été présentés par le Sénat ont été acceptés. Je vais en donner quelques exemples.

Lorsque le Sénat a effectué son étude approfondie du projet de loi, il a affirmé qu’il était nécessaire de préciser que le Code canadien du travail, tel que modifié par le projet de loi C-65, n’aurait pas préséance sur la Loi canadienne sur les droits de la personne. Justement, la Chambre des communes a proposé de modifier le projet de loi pour y inscrire cette précision.

[Français]

Honorables sénateurs, nos collègues de l’autre endroit ont reconnu le besoin d’être précis sur cette question et ont accepté cette modification. Le projet de loi, tel qu’il est modifié, est clair : le Code canadien du travail n’éclipsera pas le message existant; au contraire, il lui servira de complément.

[Traduction]

Cela signifie que les employés comprendront qu’ils n’ont pas à choisir un type de recours plutôt qu’un autre. Ils auront plutôt accès à plusieurs mécanismes de cours.

En plus de clarifier le projet de loi, les membres du comité voulaient supprimer le vocabulaire désuet du projet de loi C-65. C’est pourquoi ils ont proposé d’éliminer les termes « futile, frivole et vexatoire » de la partie du projet de loi décrivant les plaintes sur lesquelles le ministre pourrait refuser d’enquêter. Ils ont demandé de les remplacer par le terme « abus de procédure », qui est plus neutre. La Chambre des communes a appuyé cet amendement proposé, car elle a reconnu que, même si ces termes sont couramment utilisés en droit, il est indéniable qu’ils revêtent des connotations négatives.

[Français]

Une autre modification qui a été acceptée concerne la formation des personnes qui reçoivent les plaintes. Les sénateurs voulaient s’assurer que toute personne désignée par l’employeur pour recevoir les plaintes concernant des incidents de harcèlement et de violence aurait la connaissance, la formation et l’expérience de ce type de situation et connaîtrait les lois pertinentes. À cette fin, une modification a été proposée, et l’autre endroit l’a acceptée.

[Traduction]

L’autre endroit a aussi accepté un autre amendement du Sénat, qui veillera à ce que nous disposions des données nécessaires pour améliorer le projet de loi C-65 à l’avenir. La Chambre des communes a aussi retenu notre proposition d’inclure dans le rapport annuel du ministre des données statistiques comportant des renseignements classés en fonction de chaque motif de distinction illicite établi par la Loi canadienne sur les droits de la personne. Grâce à ces données, qui seront fournies volontairement afin que soit respectée la confidentialité des personnes qui ne veulent pas divulguer de tels renseignements, nous nous assurerons que le projet de loi donne les résultats escomptés pour les employés qui sont les plus vulnérables.

Les données de tous les lieux de travail visés par le projet de loi C-65, y compris la Colline, seront incluses dans ce rapport.

[Français]

Honorables collègues, comme vous pouvez le constater, plusieurs modifications proposées par cette Chambre ont été acceptées.

(1450)

[Traduction]

Même si les amendements proposés par le Sénat n’ont pas tous été acceptés, je suis persuadé que les objectifs qu’ils visaient ont été pris en compte.

Par exemple, un des amendements proposés visait à modifier la définition de « harcèlement et violence ». Après avoir étudié ce projet de loi et entendu un large éventail d’experts pendant des mois, le comité de la Chambre des communes a présenté et approuvé une définition avec l’apport de tous les partis.

Par conséquent, l’amendement proposé par le Sénat au sujet de la définition du harcèlement et de la violence au travail n’a pas été accepté.

Un autre amendement proposé visait à faire progresser l’égalité des sexes et à aborder les questions liées au racisme et à la discrimination. Cet amendement aurait créé de nouvelles attentes qui n’existent pas à l’heure actuelle aux termes du Code canadien du travail.

Cet amendement n’a pas été accepté puisque d’autres lois, comme la Loi sur l’équité en matière d’emploi et la Loi canadienne sur les droits la personne, abordent déjà ces questions.

Le Code canadien du travail, qui n’est pas conçu pour aborder ces questions, n’empiète pas sur ces lois, mais leur sert plutôt de complément.

Dans certains cas, le Sénat a proposé des amendements auxquels on donnera suite dans la réglementation. Par exemple, un des amendements proposés visait à faire en sorte que l’employé et le plaignant reçoivent par écrit une copie du rapport d’enquête. Cette disposition a été ajoutée à un article qui porte sur le protocole de traitement des plaintes autres que celles concernant des incidents de harcèlement et de violence. En conséquence, cet amendement n’a pas été accepté par l’autre endroit. Toutefois, le but de l’amendement sera atteint au moyen d’un règlement exigeant qu’un exemplaire du rapport soit remis à toutes les parties.

Un autre amendement proposé concernait la collecte des données relativement aux appels entendus par la Commission des relations de travail et de l’emploi dans le secteur public fédéral. Selon le projet de loi, le rapport ne comprend que les données relatives aux appels entendus par la commission, et non le nombre total d’incidents de harcèlement et de violence survenus dans des lieux de travail parlementaires. Ces données figurent plutôt dans le rapport annuel du ministre du Travail, mentionné dans d’autres amendements du Sénat.

De plus, ce sous-ensemble de données est si restreint que le fait de le catégoriser selon ce que prévoit l’amendement — par exemple, en fonction de chaque motif de distinction illicite établi par la Loi canadienne sur les droits de la personne — risque de permettre d’identifier ceux qui portent plainte, ce qui constituerait une violation de la vie privée et découragerait les autres de porter plainte. Ce risque irait d’ailleurs à l’encontre de l’un des principes fondamentaux du projet de loi C-65, qui est de protéger l’identité et la vie privée de toutes les parties concernées.

Honorables sénateurs, j’estime que les deux Chambres ont été aussi loin qu’elles le pouvaient pour produire le meilleur projet de loi possible, et c’est celui dont nous sommes saisis aujourd’hui.

[Français]

Le projet de loi C-65 était solide lorsqu’il a été déposé, et il l’est encore plus aujourd’hui grâce à ceux qui ont consacré temps et efforts à l’améliorer.

[Traduction]

Il nous incombe désormais de garantir l’adoption rapide de ce projet de loi important. Une fois adopté le projet de loi C-65, il restera à mettre au point la réglementation qui soutiendra sa mise en œuvre dans les milliers de lieux de travail relevant de la compétence fédérale. Plus tôt la réglementation sera en place, plus tôt nous pourrons constater un changement réel.

Je crois que le changement de culture dont nous avons besoin s’opère déjà, mais je crois aussi que le projet de loi C-65 est un élément essentiel pour réaffirmer le changement de culture à venir.

Compte tenu de ces facteurs, j’exhorte vivement tous les sénateurs à approuver le message que nous avons reçu et à appuyer complètement le projet de loi C-65.

Merci.

L’honorable Michael Duffy : Merci, chers collègues, et merci au sénateur Harder de l’important travail qu’il a accompli dans ce projet de loi.

J’aimerais avoir une précision. Dans votre discours, vous avez mentionné au moins à deux reprises que le projet de loi s’applique à la Colline du Parlement. Doit-on en conclure que le personnel politique sera désormais couvert par la Charte des droits et libertés, et que nous ne verrons plus les incidents qui surviennent ici être balayés sous le tapis? Le projet de loi s’applique-t-il à tout le monde, c’est-à-dire pas seulement aux fonctionnaires, mais aussi aux employés des bureaux de sénateurs sur la Colline du Parlement?

Le sénateur Harder : Merci, sénateur. Le projet de loi prévoit que la procédure de règlement de plaintes s’applique à toutes les entités relevant de la compétence fédérale, y compris la Colline du Parlement. Il s’agit d’une chose nouvelle et favorablement accueillie par tous.

Sans vouloir devancer la sénatrice Hartling, qui parraine le projet de loi et qui interviendra après moi, je signale qu’elle parlera de l’application du projet de loi et de son entrée en vigueur, que nous anticipons tous dans le cadre du changement de processus.

L’honorable Nancy J. Hartling : Honorables sénateurs, c’est une bonne journée pour moi. C’est aujourd’hui la Journée de l’affaire « personne » et j’ai l’occasion de parler du projet de loi, le premier dont je suis la marraine.

D’entrée de jeu, je dirai que le projet de loi C-65 est très important et qu’il représente une étape cruciale dans la protection des employés contre le harcèlement et la violence dans les lieux de travail sous réglementation fédérale — y compris le harcèlement sexuel. Plus particulièrement, une fois que le projet de loi sera mis en œuvre, les employés qui travaillent sur la Colline du Parlement, dont ceux de nos propres bureaux, seront également protégés.

Comme l’a expliqué en détail le sénateur Harder, le gouvernement a accepté plusieurs des amendements proposés par le Sénat. Étant donné qu’il a expliqué très clairement tous les amendements, je ne passerai pas la liste en revue. J’aimerais toutefois souligner que la ministre responsable du projet de loi, la ministre Hajdu, a indiqué dès le début qu’elle tiendrait compte de tous les bons amendements visant à améliorer et à renforcer le projet de loi. Selon moi, elle a tenu parole.

L’été dernier, le gouvernement a tenu des consultations sur la réglementation et a produit un document de consultation qui couvrait certaines des promesses faites par la ministre et des fonctionnaires de son ministère lorsqu’ils ont comparu devant le Comité sénatorial permanent des droits de la personne.

Par exemple, ils ont notamment promis de se concentrer sur le règlement rapide des cas, de prévenir la violence en augmentant la sensibilisation en milieu de travail et de décrire les rôles clés de la personne compétente et du comité local.

À l’origine, j’ai décidé d’être la marraine du projet de loi C-65 au Sénat parce que la défense des droits de la personne me passionne, tout comme l’élimination de la violence et du harcèlement. Je suis heureuse du message que nous avons reçu et des amendements qui ont été approuvés.

Une fois que le projet de loi aura reçu la sanction royale, nous verrons des retombées positives pour les employés, les employeurs et l’ensemble de la société. C’est une grande transformation culturelle, à mon avis. Comme je l’ai décrit dans mon discours à l’étape de la deuxième lecture, ces retombées seront notamment les suivantes : une meilleure compréhension de ce qui constitue du harcèlement et de la violence en milieu de travail et des comportements qui sont inacceptables; une meilleure compréhension, par les employés, de leur droit à la sécurité et à la protection, qui, espérons-le, les incitera davantage à signaler les incidents; des mécanismes adéquats en place pour aider les victimes à tourner la page; puis, au final, une importante transition culturelle en milieu de travail vers la tolérance zéro pour le harcèlement et la violence.

J’aimerais également vous rappeler les trois piliers du projet de loi, que j’appelle PRS : « P », pour la prévention des incidents de harcèlement et de violence; « R », pour la réaction efficace à adopter lorsqu’ils surviennent; enfin, élément très important, « S », pour le soutien aux victimes, aux survivants et aux employeurs.

Un environnement de travail libre de harcèlement et de violence doit constituer un droit protégé par la loi, et non un privilège. Octobre est le Mois de l’histoire des femmes au Canada. C’est l’occasion de célébrer les réalisations et les contributions des femmes et des filles partout au pays et tout au long de l’histoire de notre pays.

Favoriser la sécurité en milieu de travail aidera les femmes à atteindre leurs objectifs. Cependant, ce projet de loi est inclusif et il nous protégera tous.

Je suis très reconnaissante des efforts de tous ceux qui ont collaboré à l’élaboration du projet de loi C-65, en particulier les témoins qui ont eu le courage de nous parler de leur situation, ainsi que tous nos collègues.

Ne retardons pas davantage l’étude de ce projet de loi. Je vous exhorte à répondre à ce message avec célérité.

Merci.

Son Honneur la Présidente intérimaire : Avez-vous une question, sénatrice Martin?

L’honorable Yonah Martin (leader adjointe de l’opposition) : Oui. Avant de proposer l’ajournement pour le reste de mon temps de parole, je tenais à profiter de cette importante journée pour souligner officiellement vos efforts, sénatrice Hartling, ainsi que ceux de notre comité à l’égard de ce projet de loi.

Nous avons effectivement entendu des témoignages qui nous ont vraiment convaincus de prendre les mesures qui s’imposent. Je tiens donc à assurer au Sénat que je n’ai pas l’intention de retarder l’étude, mais je propose l’ajournement du débat pour le reste de mon temps de parole. Je m’attends...

(1500)

Son Honneur la Présidente intérimaire : Sénatrice Martin, d’autres personnes souhaitent intervenir dans le débat.

La sénatrice Martin : D’autres personnes souhaitent-elles prendre la parole? Je suis désolée. Je vais proposer l’ajournement après leur intervention.

L’honorable Jane Cordy : Honorables sénateurs, je remercie la sénatrice Hartling, qui a accompli un travail formidable au Comité des droits de la personne en orientant l’étude de ce projet de loi, et la sénatrice Pate, qui a présenté quelques excellents amendements, dont certains ont été acceptés par la ministre. Je remercie la ministre Hajdu, parce que ce projet de loi et les mesures destinées à améliorer les choses sur la Colline du Parlement se font attendre depuis longtemps. Je remercie la ministre Hajdu d’avoir présenté cette mesure législative.

Il ne fait aucun doute que nous assistons à un changement de culture, mais il est extrêmement important de l’inscrire dans la loi. La culture peut changer, mais il est extrêmement important que les employés sur la Colline du Parlement constatent qu’il y a une loi et connaissent leurs droits. Nous avons entendu des témoignages déchirants d’employés sur la Colline du Parlement à propos de choses qu’ils ont vécues et nous ne voulons certainement pas que cela se reproduise. La sénatrice Hartling a parlé des trois piliers du projet de loi, dont la prévention. C’est ce que nous voulons faire d’abord et avant tout, afin que nous n’ayons même pas à invoquer cette mesure législative. Nous voulons que ces choses n’arrivent jamais sur la Colline du Parlement, ou ailleurs au Canada, mais, si elles arrivent, nous pourrons réagir efficacement. Quelqu’un a dit plus tôt qu’il arrive que l’on balaie les incidents de ce genre sous le tapis et qu’on évite d’en parler parce que cela paraît mal. Avec ce projet de loi, les gens pourront suivre une procédure s’il leur arrive quelque chose. Cela ne se fera pas derrière des portes closes, et il n’y aura pas de réunion en cachette. Pour tout dire, ils disposeront d’un moyen pour régler le problème.

J’estime que ce projet de loi est une mesure très positive pour nous tous, ici sur la Colline du Parlement et pour les gens au Canada, et qu’il améliorera les choses.

L’honorable Marilou McPhedran : Honorables sénateurs, je serai brève. Ce projet de loi, en particulier la modification, mérite notre appui. Nous pouvons être fiers de son contenu et du processus d’amendement qui a été rendu possible grâce à la collaboration de la sénatrice Hartling, en tant que marraine, et du Comité sénatorial des droits de la personne.

Les amendements que nous avons proposés et auxquels la sénatrice Pate a contribué ont été acceptés par l’autre endroit. Les amendements ont été élaborés à la suite de vastes consultations et ont été acceptés par tous les membres du Comité sénatorial des droits de la personne.

Les sénateurs Harder, Hartling et Cordy vous ont déjà expliqué en quoi consiste le projet de loi. Je suis d’accord avec leur évaluation positive et me réjouis du message que nous avons reçu aujourd’hui. En terminant, je rappelle qu’il faut garder à l’esprit ce que cette nouvelle loi ne permettra pas de faire ni de régler. Nous sommes une entité autoréglementée qui n’est pas assujettie à la plupart des lois administratives que d’autres entités autoréglementées du Canada doivent respecter. Les décisions que nous prenons, fondées sur les règles de procédures et le code d’éthique, ont donc une grande incidence sur notre crédibilité.

Actuellement, certains de nos collègues qui siègent aux comités sénatoriaux permanents qui s’occupent de l’éthique et de la régie interne participent activement à l’examen de notre code d’éthique et des politiques et des procédures du Sénat concernant les cas de harcèlement, notamment le harcèlement sexuel, allégués dans notre lieu de travail. Le projet de loi C-65 vise, pour la première fois, à établir des normes juridiques uniformes et bien définies au Sénat concernant les cas de harcèlement, ce qui est une bonne chose. Cependant, il ne faut pas croire pour autant que les examens d’importance cruciale qui sont en cours, menés par la sénatrice Andreychuk et la sénatrice Saint-Germain, ne sont plus importants ou urgents. Grâce à ces examens et aux informations présentées ici par les sénateurs qui ont pris la parole — et par ceux qui ne se sont pas encore exprimés — au sujet de l’interpellation no 26, concernant le harcèlement, sexuel et autre, au Sénat, nous pouvons être sûrs que nous, sénateurs, continuerons à nous tenir publiquement responsables, conformément à notre code d’éthique, y compris l’article 2.1 — l’amendement adopté en 2014 —, selon lequel les sénateurs « sont tenus de donner à leurs fonctions parlementaires préséance sur toute autre charge ou activité ».

Merci, meegwetch.

(Sur la motion de la sénatrice Martin, le débat est ajourné.)

Le Code criminel
La Loi sur le ministère de la Justice

Projet de loi modificatif—Troisième lecture—Motion d’amendement—Suite du débat

L’ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l’honorable sénateur Sinclair, appuyée par l’honorable sénateur Pratte, tendant à la troisième lecture du projet de loi C-51, Loi modifiant le Code criminel et la Loi sur le ministère de la Justice et apportant des modifications corrélatives à une autre loi.

Et sur la motion d’amendement de l’honorable sénatrice Pate, appuyée par l’honorable sénatrice Deacon (Ontario),

Que le projet de loi C-51 ne soit pas maintenant lu une troisième fois, mais qu’il soit modifié :

a)à l’article 10, à la page 5 :

(i)par substitution, aux lignes 20 à 22, de ce qui suit :

« b) il est incapable de le former, pour l’activité en question, notamment pour l’un des motifs suivants :

(i) il n’a pas la capacité de comprendre la nature, les circonstances, les risques et les conséquences de l’activité sexuelle en question,

(ii) il n’a pas la capacité de comprendre qu’il peut choisir de se livrer ou non à l’activité sexuelle en question,

(iii) il n’a pas la capacité de manifester son accord de façon explicite à l’activité sexuelle en question par ses paroles ou sa façon d’agir; »,

(ii)par adjonction, après la ligne 22, de ce qui suit :

« (2.2) L’article 153.1 de la même loi est modifié par adjonction, après le paragraphe (3) de ce qui suit :

(3.1) Il est entendu que la capacité de consentir au moment de l’activité sexuelle à l’origine de l’accusation ne peut être déduite d’éléments de preuve portant sur la capacité de consentir lors d’une autre activité sexuelle. »;

b)à l’article 19, à la page 9 :

(i)par substitution, aux lignes 23 à 25, de ce qui suit :

« b) il est incapable de le former, pour l’activité en question, notamment pour l’un des motifs suivants :

(i) il n’a pas la capacité de comprendre la nature, les circonstances, les risques et les conséquences de l’activité sexuelle en question,

(ii) il n’a pas la capacité de comprendre qu’il peut choisir de se livrer ou non à l’activité sexuelle en question,

(iii) il n’a pas la capacité de manifester son accord de façon explicite à l’activité sexuelle en question par ses paroles ou sa façon d’agir; »,

(ii)par adjonction, après la ligne 25, de ce qui suit :

« (2.2) L’article 273.1 de la même loi est modifié par adjonction, après le paragraphe (2) de ce qui suit :

(2.1) Il est entendu que la capacité de consentir au moment de l’activité sexuelle à l’origine de l’accusation ne peut être déduite d’éléments de preuve portant sur la capacité de consentir lors d’une autre activité sexuelle. ».

L’honorable Frances Lankin : Honorables sénateurs, j’interviens aujourd’hui pour parler de l’amendement proposé par la sénatrice Pate au projet de loi C-51, Loi modifiant le Code criminel et la Loi sur le ministère de la Justice et apportant des modifications corrélatives à une autre loi. L’amendement lui-même concerne la disposition relative à la capacité de consentir, et je vais concentrer mes commentaires sur ce point-là.

Je ne puis m’empêcher de joindre ma voix à celle de tous ceux qui ont dit à quel point il est significatif que nous soulignions aujourd’hui la Journée de l’affaire « personne ». La discussion sur cet amendement, qui vient tout juste après le début du débat sur les dispositions relatives au harcèlement en milieu de travail pour le Code du travail, tombe vraiment à point.

Je suis heureuse d’entendre le sénateur Harder parler de la nécessité de clarifier les droits que les gens détiennent en ce qui concerne la notion de consentement. Je dirais que c’est la même chose en ce qui concerne l’amendement dont nous nous apprêtons à discuter, les commentaires de la sénatrice Martin, généralement favorable à la modification, et l’hommage que vous et d’autres avez rendu aux témoins qui ont comparu et nous ont aidés à faire ce qu’il fallait. J’espère que nous ne l’oublierons pas au cours de notre discussion sur l’effet qu’aurait cet amendement sur les victimes d’agressions sexuelles.

D’autres avocats et anciens juges de renom vont en parler et aborder les nuances juridiques. Fort bien, mais je tiens à préciser d’avance qu’ils vont exprimer leur vision de l’interprétation que font actuellement les tribunaux des dispositions sur le consentement en ce qui concerne les agressions sexuelles. Je suis bien consciente que la magistrature a déjà l’obligation de considérer la question du consentement telle qu’on la conçoit depuis des années, soit que le consentement doit être donné à toutes les étapes de l’interaction sexuelle. C’est une exigence constante. La magistrature, dans la plupart des cas — et j’insiste pour dire « la plupart des cas », parce qu’il y a eu des exceptions notoires et atroces —, prend en considération un large éventail de facteurs, en fonction de la preuve propre à chaque cas, y compris les cas d’agression sexuelle.

Je suis favorable au concept d’indépendance dans le système de justice et je suis consciente de tout ce que les juges doivent prendre en considération. D’ailleurs, je suis contre le concept des peines minimales obligatoires parce que je suis d’avis que, la majorité du temps, les juges doivent pouvoir tenir compte de l’ensemble des éléments et des circonstances pour déterminer quelle est la peine appropriée.

On pourrait donc croire que le fait que j’appuie l’amendement de la sénatrice Pate va à l’encontre de ce que je viens de dire, mais je ne pense pas que ce soit le cas. À mon avis, la loi doit être le reflet de ce que vivent les Canadiens. Je parle surtout des Canadiens qui ont été victimes d’agressions sexuelles.

Nous devons toujours penser au contexte social et culturel dans lequel les lois seront interprétées et appliquées. C’est pourquoi je souhaite prendre un instant pour parler non pas des détails juridiques, mais du contexte social et culturel, pour que nous l’ayons tous à l’esprit.

Je m’attarderai tout d’abord aux observations qui ont été faites par la sénatrice Andreychuk pendant le débat à l’étape de la deuxième lecture du projet de loi C-337. À titre de rappel, ce projet de loi a été présenté à la Chambre des communes par l’ancienne députée et chef du Parti conservateur, Rona Ambrose. Il porte sur l’amélioration de la formation que reçoivent les juges à propos des agressions sexuelles, de l’interprétation et de l’application de la loi et de la complexité liée à ces dossiers et à la façon de prendre l’intérêt des victimes en considération. J’appuie ce projet de loi, comme le montre le discours favorable que j’ai prononcé à l’étape de la deuxième lecture.

(1510)

La sénatrice Andreychuk a parlé de l’importance de réaliser qu’il y a encore des juges qui président des procès et qui ne comprennent absolument pas ce qui constitue une agression sexuelle et quel effet a ce crime sur la vie de la victime. Elle a ajouté que cette incompréhension fait comprendre aux victimes d’agressions sexuelles qu’il est préférable pour elles de garder leur souffrance secrète plutôt que de dénoncer l’agresseur.

Je veux parler précisément de l’affaire que la sénatrice Andreychuk, par souci de concision, a donnée en exemple, car beaucoup d’autres affaires auraient pu être présentées. Elle a fait référence à l’affaire controversée de l’ancien juge Robin Camp. Il a fait l’objet d’une audience de renvoi devant le Conseil canadien de la magistrature, et la sénatrice a cité certaines des conclusions du conseil concernant la conduite du magistrat. Je vais citer la sénatrice alors qu’elle citait elle-même le rapport :

La conduite a consisté, entre autres, à demander à la plaignante, une femme vulnérable de 19 ans, pourquoi elle n’avait pas simplement laissé son postérieur tomber dans le lavabo, de façon à ce qu’il ne puisse pas la pénétrer et pourquoi elle n’avait simplement pas serré les genoux, ajoutant que la douleur et le sexe vont parfois ensemble, que ce n’est pas nécessairement une mauvaise chose. Le juge a aussi laissé entendre à la procureure de la Couronne que, si elle [la plaignante] avait dévié son bassin quelque peu, elle aurait pu esquiver son agresseur.

La sénatrice Andreychuk a ensuite ajouté que le comité avait constaté que le juge avait fait des commentaires ou posé des questions révélant son antipathie à l’égard des lois visant à protéger les témoins vulnérables, à promouvoir l’égalité et à assurer l’intégrité des procès pour agression sexuelle. Il avait également constaté que le juge s’était fondé sur des mythes discrédités, des stéréotypes sur les femmes, et qu’il avait adressé des reproches à la victime pendant le procès et dans les motifs de son jugement.

Ces mythes et ces stéréotypes à propos des femmes et le rejet du blâme sur la victime sont encore très courants, malgré le mouvement #MoiAussi. Ils sont scandaleusement répandus, et ce, jusqu’aux niveaux les plus élevés. Il n’y a pas si longtemps, le président Trump, par ses propos destinés à ridiculiser, à humilier et à blâmer Christine Blasey Ford, s’est conduit, à mon avis, de manière répréhensible. Je ne trouve pas d’autre mot. J’étais scandalisée, et il est rare qu’il arrive à me scandaliser, car je me suis habituée aux déclarations déstabilisantes.

Ces mythes et ces stéréotypes sont omniprésents dans notre culture. Nos lois doivent être interprétées dans ce contexte et nous essayons, au moyen de ces amendements — toute une série au fil des ans — d’éradiquer ces mythes et stéréotypes. Aujourd’hui, les propos qu’on entend de certaines des personnes les plus haut placées de la société nord-américaine et la propagation de ces mythes et stéréotypes qui a repris de la vigueur grâce aux médias sociaux, en réaction au mouvement #MoiAussi, n’encouragent pas les femmes à dénoncer. Comment va-t-on les traiter? Comment l’appareil judiciaire va-t-il interpréter leur situation et leur absence de consentement? Va-t-il les admettre?

Je suis remplie d’optimisme par les millions de femmes qui font entendre leur voix, mais nous savons qu’il y a encore beaucoup trop de femmes qui ne signalent pas leurs expériences. Elles sont incapables de le faire, parce qu’elles craignent d’être victimisées de nouveau par le processus judiciaire, comme cela a été le cas pour de nombreuses femmes. De plus, le processus contribue au développement du trouble de stress post-traumatique chez beaucoup de victimes. Cela se produit souvent lorsque des victimes subissent un traumatisme dans un endroit, au travail ou au cours d’une procédure subséquente, qui aurait dû être un sanctuaire. Eh bien, un tribunal devrait certainement représenter un sanctuaire pour la victime d’un crime. Cependant, il arrive trop souvent, mais pas invariablement — je ne veux pas exagérer le problème, car, dans l’ensemble, je crois que le corps judiciaire fait ce qui s’impose —, que les victimes soient victimisées de nouveau.

Les lois que nous adoptons aujourd’hui doivent refléter le contexte actuel. La disposition visant à apporter plus de précisions sur la notion qui veut qu’une personne ne puisse pas donner son consentement si elle est inconsciente est la bienvenue, mais je trouve incroyable qu’elle soit nécessaire. Or, c’est maintenant seulement que nous tranchons la question, soit sept ans après la décision rendue sur ce point dans l’affaire R. c. J.A. Oui, l’idée qu’une personne inconsciente n’est pas en mesure de donner son consentement devrait aller de soi, mais des décisions que des juges ont rendues en appel ont rendu cette précision nécessaire. Pourtant, nous voilà aux prises avec un enjeu de ce genre sept ans plus tard. Vous vous souviendrez de l’affaire Bassam Al-Rawi, où des policiers ont trouvé un chauffeur de taxi en train d’agresser sexuellement une femme qu’il avait fait monter dans sa voiture et qui n’avait aucun souvenir de l’agression parce qu’elle était inconsciente à ce moment-là. Dans cette affaire, le premier juge a rejeté la prémisse voulant qu’elle n’ait pas donné son consentement parce qu’elle était inconsciente.

Nous jugeons qu’il est maintenant nécessaire de préciser dans le Code criminel qu’une femme ne peut donner son consentement si elle est inconsciente. Ainsi, les juges et tous les autres intervenants du système, notamment les avocats de la défense et les procureurs, seront tous sur la même longueur d’onde.

Toutefois, si cela est jugé nécessaire, il est sans doute nécessaire aussi de donner des directives plus claires, en nous fondant sur nos valeurs communes, et notre compréhension de la chose doit être beaucoup plus profonde, comme le montre la récente affaire Barton, où Mme Gladue est la victime. En fait, comme l’a fait valoir la juge en chef McLachlin dans les motifs écrits de la décision dans l’affaire R. c. J.A. — auxquels je vais faire référence, car ils sont importants —, la question est beaucoup plus nuancée que le laisse croire la disposition à l’étude. La juge affirme qu’une personne inconsciente est manifestement incapable de consentir et revient sur la façon dont le Parlement a défini cette capacité. Elle fait valoir que ce n’est pas aux tribunaux qu’il revient d’établir des exceptions à la capacité de consentir. C’est au Parlement, s’il le juge nécessaire, qu’il incombe de légiférer sur le consentement en matière sexuelle.

Je suis donc d’avis qu’il est justifié pour le Sénat d’appuyer l’amendement de la sénatrice Pate, étant donné la portée de notre mandat et les circonstances actuelles, qui sont déplorables.

Le sénateur Harder a formulé des observations importantes en opposition à l’amendement à l’étude. Il souligne, à juste titre, la qualité des délibérations entre les membres du comité qui ont débattu de l’amendement et fait valoir que le comité a rejeté l’amendement.

Je tiens à préciser que, lorsque l’amendement a été mis aux voix, six sénateurs s’y sont opposés et six l’ont appuyé, si bien qu’il a été rejeté, comme le prévoit la procédure, car il n’a pas obtenu une majorité des votes. Il est clair que la question est comprise différemment par certaines personnes et fait l’objet de différents points de vue convaincants. Il est donc judicieux que l’amendement ait été proposé à l’étape de la troisième lecture pour que nous ayons tous l’occasion d’exprimer notre opinion à son égard lorsqu’il sera mis aux voix.

J’aimerais expliquer pourquoi j’estime que cet amendement relève du mandat des sénateurs. Bien entendu, nous pouvons présenter et accepter n’importe quel amendement, mais je m’efforce toujours de comprendre la portée de notre travail par rapport à celui de la Chambre des communes. À mon sens, cela ne relève pas seulement d’une différence de politique par rapport au gouvernement. Nous avons le devoir de tenir compte des besoins des populations minoritaires. Cela dit, les victimes d’agression sexuelle sont, non pas exclusivement, mais majoritairement, des femmes, et les femmes ne sont pas une minorité au pays. Toutefois, la lutte pour nos droits, notamment le droit de voter ou d’être entendues, que l’on célèbre en cette Journée de l’affaire « personne », la lutte pour faire reconnaître que non, c’est non, qu’il faut explicitement dire oui, la lutte contre ces normes culturelles de discrimination en fonction du sexe, qui évoluent et changent, mais qui existent toujours, tous ces combats poussent les femmes, en particulier celles qui sont victimes de violence sexuelle, dans un rôle de minorité.

(1520)

Je crois qu’il est important que l’on protège leurs droits. Dans un cas comme celui-ci — et cela ressemble aux observations qui ont été formulées au sujet des modifications du Code canadien du travail —, les gens ont le droit de connaître leurs droits. Dans une affaire judiciaire, il n’y a pas que le juge, le procureur, l’avocat et son client; il y a aussi la victime. Les victimes doivent savoir qu’elles seront prises au sérieux lorsqu’elles sont en train de décider si elles vont se manifester et prendre la parole. Elles savent que si elles disent...

Son Honneur la Présidente intérimaire : Je suis désolée. Votre temps de parole est écoulé.

La sénatrice Lankin : Puis-je avoir cinq minutes de plus?

Son Honneur la Présidente intérimaire : Est-ce d’accord, honorables sénateurs?

Des voix : D’accord.

Son Honneur la Présidente intérimaire : D’accord, vous avez cinq minutes de plus.

Le sénateur Plett : Dans un esprit de coopération.

La sénatrice Lankin : Je vous remercie, sénateur.

Elles doivent pouvoir connaître leurs droits à la simple lecture de la loi. Elles doivent savoir que, si elles avaient consommé de l’alcool dans un contexte social au point de ne plus pouvoir donner leur consentement, ce facteur sera explicitement pris en compte.

Je l’ai dit et je le répète, les juges en tiennent compte depuis longtemps déjà, mais, dans certaines causes... On pourrait en citer plusieurs autres, outre celle que la sénatrice Andreychuk et moi avons donnée en exemple, comme les affaires J. A., Al-Rawi et Barton. Quand la loi est mal interprétée au point de rendre nécessaire la tenue d’un appel, ce qui oblige les victimes à revivre leur calvaire, force est de constater que les droits des femmes doivent être plus clairement définis si on veut les encourager à se faire entendre.

J’ai déjà dit que, selon moi, la loi doit être adaptée à la réalité d’aujourd’hui, et j’y reviens encore cette fois-ci. Nous vivons une petite révolution quant à la manière dont sont perçus les rôles traditionnels, l’oppression sexuelle et la discrimination. Même si ces mots peuvent paraître galvaudés, ils n’en sont pas moins justes et exacts.

Face à tout cela, j’ai une réaction quelque peu émotive, comme vous l’avez peut-être remarqué. Je suis fâchée, et j’estime que les lois ne doivent pas être faites sous le coup de l’émotion. Je crois cependant qu’il convient d’apporter des précisions, que le Parlement peut donner son avis, et qu’on peut en tenir compte en plus de s’appuyer sur les examens judiciaires détaillés de tous les facteurs pertinents.

Par conséquent, chers collègues, je vous exhorte à appuyer cet amendement. Je crois qu’on donnera à nombre de victimes d’agression sexuelle le sentiment d’avoir été entendues, rassurées et, surtout, d’avoir été écoutées si nous votons en faveur de cet amendement. Merci beaucoup.

[Français]

L’honorable Lucie Moncion : La sénatrice Lankin accepterait-elle de répondre à une question?

[Traduction]

La sénatrice Lankin : Oui.

La sénatrice Moncion : Sénatrice Lankin, vous avez fait allusion au mouvement #MoiAussi. J’ai lu quelque chose ce matin. Saviez-vous que, depuis la naissance du mouvement #MoiAussi, un hôpital de Toronto — je ne me rappelle plus lequel — dit être passé de 3 ou 4 cas d’agression par mois à 26 000 en 2017, soit 20 000 en une année? Étiez-vous au courant de ces chiffres?

La sénatrice Lankin : Je vous remercie de votre question, sénatrice Moncion. Oui, je l’ai lu aussi. Je ne me souviens plus de quel hôpital il s’agit. C’est pourquoi j’ai mentionné que, en réaction au mouvement #MoiAussi, les commentaires à caractère discriminatoire prolifèrent et on perpétue les mythes et les stéréotypes : le blâme est rejeté sur la victime. C’est une réaction négative. Comme je l’ai dit, je suis contente de voir que de plus en plus de femmes, comme vous venez de l’indiquer par ces chiffres, sont disposées à dénoncer, mais il en reste encore beaucoup qui ne le font pas. Il nous incombe, à mon avis, de créer un contexte dans lequel une victime se sent représentée par la loi, voit qu’elle a des droits et a l’impression qu’elle sera traitée de manière équitable par le système judiciaire.

(Sur la motion du sénateur Dalphond, le débat est ajourné.)

La Loi sur les douanes

Projet de loi modificatif—Deuxième lecture—Suite du débat

L’ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l’honorable sénatrice Coyle, appuyée par l’honorable sénateur Pratte, tendant à la deuxième lecture du projet de loi C-21, Loi modifiant la Loi sur les douanes.

L’honorable Marc Gold : Chers collègues, permettez-moi de vous rappeler où nous en étions la dernière fois.

Comme je l’ai dit dans mes observations préliminaires au sujet du projet de loi C-21, j’ai passé beaucoup de temps à réfléchir à la sécurité nationale et à ses liens avec les droits constitutionnels à la vie privée. Je suis heureux de prendre la parole pour appuyer le projet de loi C-21 parce que, à mon avis, il contribuera à sa manière à la sécurité nationale tout en respectant les droits des Canadiens à la vie privée.

Comme on l’a entendu dire dans le discours à l’étape de la deuxième lecture de la sénatrice Coyle et dans les observations que j’ai formulées, nous avons tous l’habitude de donner certains renseignements lorsque nous franchissons la frontière canado-américaine. Nous donnons notre nom et le numéro de notre passeport, plus précisément toute l’information à la page 2 du passeport. Vous avez peut-être remarqué que nous ne communiquons pas cette information à des agents de l’Agence des services frontaliers du Canada lorsque nous quittons le pays. En fait, ils n’ont pas le mandat de recueillir ces données. À cet égard, nous nous distinguons non seulement de nos alliés démocratiques, mais également de la majorité des pays. Nous avons tous l’habitude de donner ces renseignements lorsque nous quittons les autres pays.

Le projet de loi C-21 comble ce vide et, dans une grande mesure, met le Canada au diapason du reste du monde. Il nous permettra aussi de conclure des ententes avec les États-Unis, plus précisément une entente conclue entre l’ancien premier ministre et le président Obama en 2011.

L’important, c’est que les données sur les sorties que les agents des services frontaliers canadiens recueillent quand les Canadiens quittent le pays par voie terrestre ou autre — et la loi comporte tous les détails techniques auxquels on pourrait s’attendre — peuvent être communiquées, quand la loi canadienne le permet, à d’autres organismes canadiens chargés d’assurer la sécurité nationale ou l’intégrité de nos programmes d’immigration et d’autres programmes d’aide sociale. C’était là où je m’étais arrêté. Permettez-moi donc de continuer.

À mon avis, permettre aux autorités canadiennes et américaines de collaborer en vue d’échanger de l’information, conformément aux lois et aux ententes conclues et de façon supervisée, est essentiel à notre sécurité nationale. Par exemple, il y a deux étés à peine, les autorités canadiennes ont réussi à prévenir une attaque terroriste à Strathroy, en Ontario, grâce à des renseignements fournis par les États-Unis. Grâce à un tuyau du FBI, la GRC et la police locale ont pu empêcher une tragédie d’une bien plus grande ampleur.

Dans l’intérêt national, il est très important de collaborer avec nos partenaires américains en échangeant de l’information selon les règles. Pour le dire simplement, le fait de pouvoir localiser une personne est crucial pour l’application de la loi et la sécurité nationale. Sans données fiables sur les sorties, les autorités sont tout simplement incapables de s’assurer qu’une personne soupçonnée ou recherchée a quitté ou non le pays.

Le ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile a très bien résumé la situation à l’autre endroit lorsqu’il a dit ce qui suit :

Cette mesure viendra combler une lacune dans notre cadre de sécurité et d’administration en fournissant un profil plus clair de ceux qui sortent du Canada de sorte que nous puissions mieux assurer le mouvement efficace des biens commerciaux et des voyageurs ainsi que la sécurité à nos frontières.

Au cours des débats tenus à l’autre endroit, on s’est dit inquiet au sujet du caractère adéquat des mécanismes de surveillance et d’examen qui s’appliqueraient à la collecte et à la communication de cette information, de même que des conséquences du projet de loi sur le droit à la vie privée des Canadiens.

(1530)

Ce sont des questions importantes et je n’ai absolument aucun doute qu’elles seront examinées à la loupe par un comité. Cependant, j’aimerais faire quelques brèves observations.

En ce qui a trait à la surveillance et à l’examen, il est vrai qu’il n’existe pas, actuellement, d’organe de surveillance qui supervise l’Agence des services frontaliers du Canada, mais je crois savoir qu’on travaille sur un projet de loi à l’autre endroit pour créer un organisme de surveillance qui traiterait les plaintes. Cependant, gardez en tête que le système d’enregistrement des entrées et des sorties sera en place, si le projet de loi est adopté, dans le contexte d’un cadre de reddition de comptes de plus en plus solide en lien avec la sécurité nationale.

Le projet de loi C-22, que nous avons adopté, a constitué le nouveau Comité des parlementaires sur la sécurité nationale et le renseignement, et le projet de loi C-59, que nous renverrons bientôt à un comité, du moins je l’espère, permettra de constituer le comité de surveillance des activités de renseignement de sécurité, qui aura la capacité d’examiner les actions de l’Agence des services frontaliers du Canada en ce qui a trait aux questions de sécurité nationale. Donc, il y aura un examen même si aucun projet de loi traitant des plaintes n’est présenté à l’autre endroit et adopté ici. Il y aura un examen des questions de sécurité frontalière et de sécurité nationale si le projet de loi C-59 est adopté.

Qui plus est, le projet de loi C-21 à l’étude aujourd’hui servira de complément au projet de loi C-59. Ainsi, les données de sortie recueillies par l’ASFC pourront être utilisées pour établir une distinction entre certains voyageurs et des personnes ayant un nom semblable qui figurent sur la liste d’interdiction de vol, un problème concret qu’il faut absolument régler. Le projet de loi prévoit que l’on attribue un numéro d’identification unique à ces personnes pour aider les agents à vérifier leur identité avant un vol.

J’aimerais aussi ajouter quelques mots sur la protection des renseignements personnels en général. Des craintes ont été exprimées au sujet d’un décret qui a été signé par le président Trump pour soustraire les personnes qui n’ont pas la citoyenneté américaine aux protections offertes par la loi américaine sur la protection des renseignements personnels. Dans son plus récent rapport, le commissaire à la protection de la vie privée du Canada a décrit les mesures prises par son bureau pour obtenir des précisions sur la protection des voyageurs et pour déterminer si les autorités américaines se conformeraient aux dispositions relatives à la protection des renseignements personnels qui figurent actuellement dans divers accords multilatéraux et bilatéraux.

Selon le commissaire, les autorités américaines ont assuré à Sécurité publique Canada que le décret n’avait pas sensiblement réduit les mesures de protection des renseignements personnels visant les citoyens canadiens, que certains accords continueraient d’être respectés et que les mécanismes de règlement des différends resteraient en place.

De manière plus générale, lorsque l’autre endroit a étudié le projet de loi C-21, le commissaire à la protection de la vie privée du Canada a déclaré ce qui suit :

[...] je suis généralement convaincu des importants objectifs d’intérêt public visés par l’initiative lorsqu’il s’agit de ces renseignements personnels, qui ne sont pas particulièrement sensibles.

Je vous rappelle qu’il s’agit tout simplement, comme la sénatrice Coyle l’a déjà souligné, des renseignements qui se trouvent à la page 2 de votre passeport.

Bref, honorables sénateurs, je boucle la boucle en revenant à mon point de départ. Le projet de loi C-21 nous rendra mieux à même de veiller à la sécurité nationale. Il concrétise un engagement que le Canada a pris il y a sept ans envers son voisin du Sud et il harmonise nos pratiques à celles de nos alliés démocratiques. Qui plus est, il accomplit tout cela sans compromettre notre droit à la protection de nos renseignements personnels, un droit constitutionnel. C’est pourquoi j’appuie ce projet de loi et je vous invite à l’appuyer pour qu’il soit renvoyé au comité et soumis à un examen approfondi. Merci.

[Français]

L’honorable Pierre J. Dalphond : On n’aura jamais autant entendu parler de douanes dans une même journée. Un sujet fort intéressant, sans doute.

Honorables sénatrices et sénateurs, comme mon collègue, le sénateur Gold, je prends la parole aujourd’hui pour appuyer, à l’étape de la deuxième lecture, le projet de loi C-21, Loi modifiant la Loi sur les douanes, et pour vous demander de le transmettre au Comité sénatorial permanent de la sécurité nationale et de la défense, où il fera l’objet d’une étude détaillée.

J’ai lu attentivement ce projet de loi, j’ai assisté à la réunion d’information des représentants de l’Agence des services frontaliers du Canada, et j’ai pris connaissance de l’analyse préparée par la Bibliothèque du Parlement ainsi que de celle de la Coalition pour la surveillance internationale des libertés civiles.

Honorables sénatrices et sénateurs, à la fin de cet exercice, il est indéniable que ce programme apporte des améliorations à l’égard de notre système intégré de protection de la sécurité de l’espace nord-américain, comme l’ont indiqué la sénatrice Coyle et le sénateur Gold.

En effet, s’il est adopté, le projet de loi permettra à l’Agence des services frontaliers du Canada de recueillir des renseignements sur les personnes qui quittent le pays, y compris les citoyens canadiens. Il donne ainsi effet à un autre aspect de l’entente intervenue en 2011 entre le premier ministre Harper et le président Obama.

J’aimerais, pour ma part, vous faire part de quelques autres effets positifs de l’adoption de ce projet de loi qui ne sont pas liés à la sécurité nationale.

Chers collègues, il y a plusieurs années, alors que j’étais juge dans une affaire familiale à la Cour supérieure du Québec, j’ai été très surpris d’apprendre que le Canada était l’un des rares pays dans le monde qui ne recueillait pas d’information sur les sorties hors du pays de ses citoyens, que ce soit par une route pour les États-Unis ou par un avion qui décolle d’un aéroport canadien. On m’a alors indiqué que si le père — auquel je proposais d’accorder la garde des enfants les fins de semaine et pendant quelques semaines l’été, à la condition que les enfants ne quittent pas la province de Québec — décidait tout de même de quitter le Canada avec les enfants, le système frontalier ne serait pas en mesure de l’en empêcher. La mère craignait donc qu’il en profite pour les amener dans son pays d’origine, où toute la famille paternelle résidait, un pays non signataire de la Convention de La Haye du 25 octobre 1980 sur l’enlèvement international d’enfants. En d’autres mots, si les enfants quittaient le Canada, il ne serait pas possible de forcer leur rapatriement si la famille de monsieur les retenait dans un autre pays.

Cette triste réalité a été confirmée par le témoignage de M. Martin Bolduc, vice-président, Direction générale des programmes de l’Agence des services frontaliers du Canada, devant le Comité permanent de la sécurité publique et nationale, où il a déclaré ce qui suit, et je cite :

Même au Canada, il y a eu des cas où des parents ont appelé la police ou l’ASFC parce qu’ils craignaient que leurs enfants prennent l’avion pour se rendre en Turquie ou en Syrie. Notre capacité d’agir et d’empêcher de tels départs est très limitée, à moins que nous ayons des détails très précis sur le lieu et le moment du départ. Si le projet de loi reçoit la sanction royale, nous pourrons faire une recherche et voir si une personne prévoit de prendre un vol particulier.

Si le projet de loi C-21 est adopté, cela pourrait changer. En effet, les représentants de l’agence m’ont indiqué qu’il est possible de faire enregistrer dans leur système les jugements qui imposent des restrictions sur la sortie d’enfants du Canada. Il en ira de même lorsqu’une alerte AMBER est émise. La GRC pourra alors aviser l’agence et demander la diffusion d’un avis de surveillance pour l’enfant disparu. Dans ces circonstances, l’ASFC pourra faire en sorte que l’on mette en place des mesures pour prévenir l’enlèvement d’enfants.

Voilà, à mon avis, une nette amélioration par rapport au système actuel.

[Traduction]

Le troisième avantage de ce projet de loi, selon moi, c’est qu’il nous procurera des renseignements qui pourront servir à améliorer l’intégrité des programmes sociaux et du système d’immigration.

Les données de sortie permettront aux agents de l’Agence des services frontaliers du Canada d’accroître l’efficacité de leurs activités.

À titre d’exemple, une personne qui fait l’objet d’une mesure de renvoi peut très bien choisir de quitter le pays de son propre gré. Si nous n’avons pas de données indiquant qu’elle a quitté le pays, les autorités risquent toutefois de continuer à mobiliser des ressources pour tenter de la retrouver.

(1540)

À cet égard, on peut lire ceci dans un rapport publié en 2015 par le Comité sénatorial permanent de la sécurité nationale et de la défense:

À l’heure actuelle, la base de données des mandats d’arrestation de l’ASFC renferme de l’information sur quelque 44 000 personnes interdites de territoire qui ne se sont pas conformées aux mesures de renvoi prises contre elles, bien que l’Agence ne sache pas combien de ces personnes sont encore au Canada.

Le projet de loi C-21 offre une solution à ce problème en fournissant à l’agence des renseignements sur les personnes quittant le Canada — sans toutefois régler la question des personnes qui ont déjà quitté le Canada.

De plus, en l’absence de données sur les sorties, il peut être difficile d’appliquer les obligations en matière de résidence contenues dans divers programmes d’avantages sociaux ainsi que la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés. Songeons, par exemple, à l’assurance-emploi, qui exige que les prestataires demeurent au Canada en tout temps, à moins de circonstances exceptionnelles.

Pour l’heure, les agents du ministère de l’Emploi et de l’Immigration se fient aux renseignements que fournissent les prestataires pour confirmer l’admissibilité de ces derniers. Je suis certain que la majorité des prestataires disent la vérité. Néanmoins, je crois que ce serait une bonne chose que les agents soient en mesure de confirmer l’exactitude des réponses fournies.

Le projet de loi n’ajoute pas de conditions d’admissibilité aux programmes d’avantages sociaux. De même, il ne change pas les obligations en matière de résidence de ceux qui cherchent à conserver leur statut de résident permanent ou à obtenir la citoyenneté canadienne. Tout ce qu’il fait, c’est d’offrir un nouvel outil pour assurer le respect des obligations.

[Français]

Par une question fort pertinente posée à la sénatrice Coyle lors de sa présentation du projet de loi à l’étape de la deuxième lecture, le sénateur Joyal s’est interrogé sur l’impact qu’aurait le projet de loi sur le droit à la mobilité, prévu à l’article 6 de la Charte des droits et libertés.

J’aimerais aujourd’hui le rassurer, de même que tous les Canadiens, quant au fait que le projet de loi ne prévoit pas la création de postes de contrôle des sorties dans les aéroports internationaux ou à la frontière canado-américaine, comme cela se fait dans beaucoup de pays ailleurs dans le monde.

En effet, le projet de loi autorise la collecte d’information sur les Canadiens qui sortent du Canada. Pour ceux qui voyagent en avion, les renseignements seront recueillis directement par le transporteur aérien, puis transmis à l’agence. Pour ceux qui traversent la frontière terrestre, les renseignements seront recueillis directement par les agents de l’agence américaine de la sécurité des frontières, au moment de l’entrée aux États-Unis.

En d’autres mots, les Canadiens n’auront pas à subir une formalité additionnelle à celles qui existent actuellement pour entrer aux États-Unis ou pour prendre un vol international. Leur liberté de mouvement ne sera nullement entravée.

Finalement, je vous souligne que le projet de loi, tel qu’il a été amendé à l’étape de la troisième lecture par la Chambre des communes, a reçu l’appui de presque tous les partis politiques. Cela me semble indiquer un large consensus sur le bien-fondé des principes généraux du projet de loi C-21.

Pour tous ces motifs, honorables sénateurs et sénatrices, je vous invite à adopter sans plus tarder, à l'étape de la deuxième lecture, le projet de loi C-21 afin qu’il soit renvoyé à un comité pour y faire l’objet d’une analyse détaillée.

Je vous remercie de votre attention.

(Sur la motion de la sénatrice Martin, le débat est ajourné.)

[Traduction]

Projet de loi sur les épaves et les bâtiments abandonnés ou dangereux

Deuxième lecture

L’ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l’honorable sénateur Campbell, appuyée par l’honorable sénatrice Bovey, tendant à la deuxième lecture du projet de loi C-64, Loi concernant les épaves, les bâtiments délabrés, abandonnés ou dangereux et les opérations d’assistance.

L’honorable Fabian Manning : Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd’hui au sujet du projet de loi C-64, Loi concernant les épaves, les bâtiments délabrés, abandonnés ou dangereux et les opérations d’assistance. Mes collègues du Parti conservateur et moi appuyons l’adoption du projet de loi.

L’origine du projet de loi C-64 remonte au projet de loi C-695, présenté lors de la législature précédente. Le projet de loi C-695 était un projet de loi d’initiative parlementaire rédigé par John Weston, un ancien député conservateur. M. Weston a créé une vaste coalition en faveur du projet de loi parmi tous les partis. Je tiens à profiter de l’occasion pour féliciter M. Weston du succès qu’il a obtenu après des années de dur labeur et le remercier de s’être attaqué au problème.

Chers collègues, le projet de loi C-64 est un excellent exemple de l’appui bipartite dont jouissent les solutions sensées. Depuis toujours, c’est un manque de responsabilité personnelle qui est à la base du problème des épaves et des bâtiments abandonnés au Canada. Parfois, le coût de l’élimination d’un vieux navire est supérieur à sa valeur de récupération. Lorsque cela se produit, il est moins coûteux et plus facile pour le propriétaire de simplement l’abandonner dans un port canadien ou de le laisser partir à la dérive dans l’océan, sans tenir compte des conséquences.

Les gens ont tendance à seulement abandonner les bateaux en très mauvais état, qui commencent alors à pourrir et à gîter encore plus. Ces bateaux peuvent causer des dommages à l’environnement en déversant des polluants et en devenant un danger marin pour les autres embarcations. Les bâtiments abandonnés offrent un spectacle hideux qui ternit la beauté des paysages marins.

Malheureusement, il arrive souvent que des embarcations soient abandonnées au Canada. L’Administration portuaire Vancouver-Fraser a dit à l’autre endroit qu’elle avait dépensé 2 millions de dollars en cinq ans pour enlever 144 bateaux abandonnés de son secteur seulement. Pour un grand organisme bien financé comme le port de Vancouver, les navires abandonnés causent des nuisances, mais, pour les petites collectivités côtières, le problème est énorme, car elles n’ont tout simplement pas l’argent nécessaire pour les faire enlever.

Prenons, par exemple, le Farley Mowat, un navire abandonné que vous avez peut-être vu aux informations récemment. En 2014, le propriétaire du navire l’a amené dans le port de Shelburne, en Nouvelle-Écosse, à la faveur de la nuit et l’a abandonné. Au cours des trois années qui ont suivi, Shelburne a été obligée de débourser des centaines de milliers de dollars en raison du Farley Mowat. La ville a été obligée de payer des entrepreneurs pour pomper l’eau et les boues toxiques du bateau et d’embaucher des avocats pour intenter des poursuites contre le propriétaire.

La ville a subi une perte de revenu, car la place qu’occupait le Farley Mowat ne pouvait pas être offerte à d’autres bateaux en échange de droits de quai. Enfin, en 2017, le navire a été remorqué et envoyé à la ferraille.

Je crois que tous les sénateurs sont probablement d’accord pour dire que la situation du Farley Mowat n’était pas du tout juste pour les contribuables de Shelburne. Or, il a fallu trois ans pour résoudre le problème, et le propriétaire du navire n’a pas subi de réelles conséquences pour ses gestes.

Hélas, le même scénario s’est déroulé sur une période encore plus longue à Bridgewater, en Nouvelle-Écosse. En effet, le Cape Rouge, un bateau de pêche abandonné qui avait servi de décor à l’émission de télévision Haven, et son bâtiment frère, le Hannah Atlantic, y ont pollué le fleuve LaHave pendant une dizaine d’années. Le Cape Rouge a fini par couler à quai en mars 2014 et, selon une réclamation soumise auprès de la Caisse d’indemnisation des dommages dus à la pollution par les hydrocarbures causée par les navires, il en coûterait un peu plus de 360 000 $ pour le renflouer en veillant à contenir et à en extraire le pétrole et le carburant.

En 2016, Transports Canada disposait d’une ordonnance d’immobilisation au port de Bridgewater à l’égard du Cape Rouge et de son bâtiment frère.

J’ai moi-même dû composer avec des navires abandonnés. En effet, lorsque j’étais député d’Avalon, à Terre-Neuve-et-Labrador — j’ai occupé cette fonction de 2006 à 2008 —, on m’a chargé de trouver le moyen, y compris sur le plan financier, de faire retirer du port de Bay Roberts, à Terre-Neuve, deux chalutiers lithuaniens, le Sekme et le Treimani, que leurs armateurs avaient laissés rouiller et pourrir, arrimés au quai de ce magnifique village pittoresque.

Les efforts colossaux de nombreuses personnes et de tous les ordres de gouvernement pour communiquer avec les propriétaires afin qu’ils versent une compensation pour l’enlèvement, le nettoyage et l’élimination de ces deux horreurs n’ont rien donné. Nous avions les mains liées puisqu’il n’existait aucun mécanisme d’application.

Le projet de loi C-64 en fait beaucoup pour régler le problème que représentent des navires comme le Farley Mowat, le Sekme et le Treimani, notamment en tenant les propriétaires responsables de leurs actes. L’article 110 proposé prévoit des peines d’emprisonnement pouvant aller jusqu’à trois ans et des amendes pouvant atteindre 4 millions de dollars pour les propriétaires qui abandonnent un navire de manière irresponsable.

J’espère sincèrement que l’ajout de peines aussi sévères empêchera les propriétaires d’abandonner leurs navires en ruines. Ces peines reflètent adéquatement le coût financier et environnemental entraîné par les navires abandonnés pour les collectivités côtières.

Chers collègues, je dois souligner que, bien que notre parti appuie ce projet de loi en principe, nous allons suivre de près la réglementation qui en découlera. À l’autre endroit, les fonctionnaires de Transports Canada n’ont pas été en mesure de répondre à bon nombre des questions qui leur ont été posées. Par exemple, on leur a demandé ce qu’ils pensaient de la proposition du gouvernement de mettre en place des mesures pour que ce soit les propriétaires qui financent l’enlèvement des navires à l’avenir. Les fonctionnaires ont répondu qu’ils étudiaient différents modèles et que, dans le cas des grands navires en particulier, ils n’étaient pas en mesure de dire quel pourrait être le modèle de financement.

(1550)

La réponse à cette question n’est pas sans importance pour moi et pour Terre-Neuve-et-Labrador. Comme je l’ai mentionné plus tôt, avec les exemples que je vous ai donnés, la plupart des gros navires abandonnés au Canada le sont dans les provinces de l’Atlantique. Il va sans dire qu’il est plus coûteux et difficile de s’en débarrasser adéquatement que de petits vaisseaux.

La Convention internationale de Nairobi rend l’assurance obligatoire seulement pour les navires de plus de 300 tonnes. Pour les sénateurs qui sont peu au fait de ces questions, je précise qu’un navire de moins de 300 tonnes peut être très, très gros. En vertu du projet de loi C-64, le ministre peut prendre des règlements pour les navires de moins de 300 tonnes. Nous examinerons de près ces règlements lorsqu’ils seront prêts. Notre objectif collectif devrait être que les contribuables canadiens n’aient pas à assumer le coût de l’enlèvement de navires, quelle que soit leur taille ou leur forme.

Enfin, chers collègues, j’aimerais saluer la participation d’un grand vétéran canadien, le capitaine Paul Bender, au projet de loi C-64. Cet ancien combattant de la Seconde Guerre mondiale fait campagne depuis des années pour les sépultures de guerre marines du Canada, alléguant qu’elles devraient être protégées par une loi canadienne. Le Comité des transports de l’autre endroit a trouvé son témoignage tellement convaincant qu’il a décidé à l’unanimité d’étudier cette question. Il a d’ailleurs produit un rapport que je vous encourage tous à lire et qui s’intitule Les sépultures de guerre marines du Canada.

Selon le capitaine Bender, les eaux canadiennes comptent 19 épaves de navires qui seraient la dernière demeure de 480 marins. La latitude et la longitude de tous les navires de la Marine royale canadienne ayant fait naufrage durant la Seconde Guerre mondiale ont été rendues publiques. Or, aucune loi canadienne ne protège ces épaves. Des preuves indiquent que des chercheurs de trésor ont récemment perturbé l’épave d’un navire canadien qui a fait naufrage au large de l’Irlande. La même chose pourrait se produire dans nos propres eaux.

J’aimerais que le capitaine Bender sache que nous souhaitons tous que les sépultures de guerre marines, ici et à l’étranger, soient protégées contre ce genre d’activités. Nous veillerons à ce que sa mission visant à protéger la dernière demeure de nos marins connaisse une issue favorable.

Le projet de loi C-64 se fait attendre depuis longtemps. Bien qu’il ne règle pas tous les problèmes entourant les bâtiments abandonnés au pays, je suis convaincu qu’il constitue un pas important dans la bonne direction.

La protection de notre environnement terrestre et maritime devrait toujours être une priorité.

J’exhorte mes collègues à appuyer le projet de loi C-64.

L’honorable Percy Mockler : Le sénateur accepterait-il de répondre à une question?

Le sénateur Manning : Volontiers.

[Français]

Le sénateur Mockler : Honorables sénateurs, je m’associe certainement à l’esprit du projet de loi C-64.

[Traduction]

Je pense que l’esprit du projet de loi C-64 constitue un pas dans la bonne direction. Je pense aussi que le Canada a un rôle important à jouer dans ces situations particulières d’un bout à l’autre du pays afin de protéger ses voies navigables et la qualité de vie de ses citoyens. Vous avez une grande expérience en tant que parlementaire, sénateur Manning, et je sais que, lorsque vous parlez de ce projet de loi, cela vient du cœur.

Pourriez-vous parler de la Convention internationale de Nairobi au Sénat du Canada et aux Canadiens en général en ce qui a trait au projet de loi C-64, et expliquer ce que vous demandez essentiellement au Sénat d’étudier?

Le sénateur Manning : Je remercie le sénateur de sa question.

La Convention internationale de Nairobi est très détaillée. Je vais fournir quelques explications afin que tout le monde sache exactement de quoi il est question.

La Convention internationale de Nairobi sur l’enlèvement des épaves a été adoptée par une conférence internationale organisée au Kenya en 2007. La convention permet aux États de disposer d’un mandat juridique pour enlever, ou faire enlever, les épaves susceptibles de porter atteinte à la sécurité des personnes, des marchandises et des biens en mer, ainsi qu’au milieu marin.

Par ailleurs, la convention comble une lacune du régime juridique international actuel en établissant le premier ensemble de règles internationales uniformes destinées à garantir l’enlèvement rapide et efficace des épaves qui se trouvent au-delà de la mer territoriale.

La convention comporte également une clause facultative permettant aux États signataires d’appliquer certaines dispositions sur leur territoire, y compris leurs eaux territoriales.

Afin d’éclairer les honorables sénateurs, je vais citer quelques articles de la convention. Un des articles couvre les mesures visant à faciliter l’enlèvement des épaves, y compris les droits et obligations d’enlever les navires et les épaves dangereux, qui indiquent à quel moment le propriétaire du navire est responsable de l’enlèvement de l’épave et à quel moment l’État peut intervenir.

Par ailleurs, la convention couvre la responsabilité du propriétaire en ce qui concerne les frais de localisation, de signalisation et d’enlèvement des navires et des épaves. Cela signifie que le propriétaire inscrit est tenu de contracter une assurance obligatoire ou une autre garantie financière pour couvrir sa responsabilité en vertu de la convention. La convention couvre aussi le règlement des différends.

Au fond, cela mettrait de la viande autour de l’os pour permettre de redresser la situation.

Si nous revenons sur ce que j’ai dit, j’ai donné trois exemples aujourd’hui, deux en Nouvelle-Écosse et un à Terre-Neuve-et-Labrador. Il y a des dizaines d’exemples au Canada qui ont coûté des millions de dollars aux contribuables canadiens, même si quelqu’un d’autre aurait dû en prendre la responsabilité. On dirait que le Canada devient un dépotoir pour les navires de partout dans le monde, et je pense que le projet de loi C-64 permettra de résoudre une partie de la situation dangereuse à laquelle nous sommes confrontés.

Son Honneur le Président : Les honorables sénateurs sont-ils prêts à se prononcer?

Des voix : Le vote!

Son Honneur le Président : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion?

Des voix : D’accord.

Le sénateur Plett : Avec dissidence.

La sénatrice Martin : Avec dissidence.

(La motion est adoptée et le projet de loi est lu pour la deuxième fois, avec dissidence.)

Renvoi au comité

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, quand lirons-nous le projet de loi pour la troisième fois?

(Sur la motion du sénateur Harder, le projet de loi est renvoyé au Comité sénatorial permanent des transports et des communications.)

[Français]

Adoption de la motion

L’ajournement

L’honorable Diane Bellemare (coordonnatrice législative du gouvernement au Sénat), conformément au préavis donné le 17 octobre 2018, propose :

Que, lorsque le Sénat s’ajournera après l’adoption de cette motion, il demeure ajourné jusqu’au mardi 23 octobre 2018, à 14 heures.

Son Honneur le Président : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion?

Des voix : D’accord.

(La motion est adoptée.)

Le Sénat

Adoption de la motion concernant la période des questions de la séance du 23 octobre 2018

L’honorable Diane Bellemare (coordonnatrice législative du gouvernement au Sénat), conformément au préavis donné le 17 octobre 2018, propose :

Que, pour permettre au Sénat de recevoir un ministre de la Couronne au cours de la période des questions tel qu’autorisé par le Sénat le 10 décembre 2015, et nonobstant ce que prévoit l’article 4-7 du Règlement, lorsque le Sénat siégera le mardi 23 octobre 2018, la période des questions commence à 15 h 30, toutes les délibérations alors en cours au Sénat étant interrompues jusqu’à la fin de la période des questions, qui sera d’une durée maximale de 40 minutes;

Que, si un vote par appel nominal coïncide avec la période des questions tenue à 15 h 30 ce jour-là, ce vote soit reporté et ait lieu immédiatement après la période des questions;

Que, si la sonnerie d’appel pour un vote retentit à 15 h 30 ce jour-là, elle cesse de se faire entendre pendant la période des questions et qu’elle retentisse de nouveau à la fin de la période des questions pour le temps restant;

Que, si le Sénat termine ses travaux avant 15 h 30 ce jour-là, la séance soit suspendue jusqu’à 15 h 30, heure de la période des questions.

Son Honneur le Président : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion?

Des voix : D’accord.

(La motion est adoptée.)

[Traduction]

La Loi sur les aliments et drogues

Projet de loi modificatif—Message des Communes—Motion d’adoption des amendements des Communes—Ajournement du débat

Le Sénat passe à l’étude du message de la Chambre des communes concernant le projet de loi S-228, Loi modifiant la Loi sur les aliments et drogues (interdiction de faire de la publicité d’aliments et de boissons s’adressant aux enfants) :

1.Préambule, pages 2 et 3 :

a)à la page 2, remplacer la ligne 32, de la version anglaise, par ce qui suit :

“Whereas it is widely acknowledged that market-”

b)à la page 3, ajouter, après la ligne 2, ce qui suit :

« qu’il est nécessaire de surveiller et d’examiner l’efficacité de la présente loi, notamment compte tenu des nouvelles formes de publicité;

que les personnes âgées d’au moins treize ans et qui n’ont pas encore atteint l’âge de dix-sept ans sont également vulnérables aux publicités commerciales et susceptibles de voir leurs préférences alimentaires influencées par ces publicités et qu’il est également nécessaire de surveiller et d’examiner la publicité des aliments et des boissons qui leur est destinée, »

2.Article 2, page 3 : remplacer la ligne 10 par ce qui suit :

« enfants Personnes âgées de moins de treize ans. (chil- »

3.Article 4, page 4 : ajouter, après la ligne 2, ce qui suit :

« 7.3 Avant le cinquième anniversaire de la date d’entrée en vigueur des articles 7.1 et 7.2, ces articles sont soumis à l’examen de leur effet — notamment sur l’augmentation, le cas échéant, de la publicité d’aliments mauvais pour la santé de manière que la publicité s’adresse principalement aux personnes âgées d’au moins treize ans et qui n’ont pas encore atteint l’âge de dix-sept ans — par un comité soit du Sénat, soit de la Chambre des communes, soit mixte, constitué ou désigné à cette fin. »

L’honorable Judith G. Seidman : Votre Honneur, je propose que le Sénat agrée aux amendements de la Chambre des communes au projet de loi S-228, Loi modifiant la Loi sur les aliments et drogues (interdiction de faire de la publicité d’aliments et de boissons s’adressant aux enfants), et qu’un message soit transmis à la Chambre des communes pour l’en informer.

Son Honneur le Président : L’honorable sénatrice Seidman, avec l’appui de l’honorable sénateur Boisvenu, propose que le Sénat agrée les amendements apportés... Puis-je me dispenser de lire la motion?

Des voix : Suffit!

Son Honneur le Président : Nous passons au débat. La sénatrice Seidman a la parole.

La sénatrice Seidman : Honorables sénateurs, je suis sincèrement ravie d’intervenir au Sénat pour parler des amendements apportés par la Chambre des communes au projet de loi S-228. Je parle au nom de notre bonne amie et collègue, la sénatrice Nancy Greene Raine, qui a pris sa retraite en juin. Nous espérions tous qu’elle puisse intervenir aujourd’hui pour parler une dernière fois d’une mesure législative qui lui tenait beaucoup à cœur et sur laquelle elle a travaillé avec énormément de dévouement. Au fil des ans, la sénatrice Greene Raine et moi avons travaillé en étroite collaboration sur des enjeux touchant la santé des enfants, dont certains étaient liés intrinsèquement aux travaux réalisés par le Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie, en particulier l’étude qu’il a menée sur l’obésité.

(1600)

Je précise, d’entrée de jeu, que j’ai parlé à la sénatrice Greene Raine récemment et qu’elle m’a demandé de féliciter de sa part la légiste Suzie Seo, qui l’a aidée à rédiger le projet de loi S-228. La sénatrice Raine a mené de vastes consultations pour son projet de loi, que ce soit ici ou aux États-Unis, notamment par l’entremise de la campagne pour une enfance sans publicité.

Le projet de loi S-228, Loi sur la protection de la santé des enfants, a vu le jour ici, le 5 octobre 2016. C’est ce jour-là que notre collègue, la sénatrice Nancy Greene Raine, en a saisi le Sénat. Il a été étudié, amendé et adopté à l’unanimité par le Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie en juin 2017. Après le débat à l’étape de la troisième lecture, le Sénat l’a adopté le 28 septembre 2017, près d’un an après sa présentation.

Je signale que la version du projet de loi qui a été adoptée par le Sénat aurait interdit les publicités qui font la promotion d’aliments et de boissons nocifs pour la santé et qui s’adressent aux enfants âgés de moins de 17 ans.

Prenons un instant pour revenir un peu en arrière et expliquer d’où vient ce seuil. Dans la première version du projet de loi, c’est-à-dire celle qui a été étudiée à l’étape de la deuxième lecture, il était question des enfants âgés de moins de 13 ans. Ce seuil avait survécu à une contestation devant la Cour suprême de la loi québécoise adoptée dans les années 1980, alors il s’imposait de lui-même. La Cour suprême avait été sans équivoque : la publicité destinée aux enfants est « en soi manipulatrice ».

Toutefois, de plus en plus de données probantes indiquaient que le cerveau des adolescents est, lui aussi, très sensible aux effets des campagnes de publicité persuasives. Appuyée par de nombreux organismes travaillant dans le domaine de la prévention de l’obésité, la sénatrice Greene Raine a proposé un amendement, lors des réunions du Comité des affaires sociales en juin 2017, qui ferait passer l’âge de 13 à 17 ans. L’amendement a été approuvé par le comité.

Passons maintenant à l’autre endroit. Après le débat à l’étape de la deuxième lecture, en juin dernier, le projet de loi S-228 a été renvoyé au Comité de la santé. Il a été modifié pour rétablir la limite d’âge initiale, soit 13 ans. Le député Doug Eyolfson, le parrain de la mesure législative à la Chambre des communes, a présenté l’amendement. Il a expliqué que, même s’il reconnaissait l’importance de protéger les enfants jusqu’à 17 ans en principe, il craignait qu’une contestation fondée sur la Charte n’invalide l’ensemble du projet de loi. Le Dr Eyolfson a conclu que la limite initiale de 13 ans, basée sur la loi du Québec, était la meilleure façon d’obtenir des résultats positifs grâce au projet de loi.

Le Dr Eyolfson a ensuite présenté un autre amendement pour qu’un examen parlementaire soit mené dans un délai de cinq ans afin d’évaluer les conséquences imprévues éventuelles, en particulier une augmentation de la publicité d’aliments malsains destinée aux enfants âgés de 13 à 17 ans. Cet examen, conçu ou créé à cette fin, doit être mené par les deux Chambres dans les cinq années suivant l’entrée en vigueur de la loi.

La sénatrice Greene Raine appuie ces deux amendements qui ont été adoptés à l’autre endroit.

Honorables sénateurs, je vous rappelle que ce projet de loi découle de l’étude entreprise par le Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie en raison de l’augmentation du taux d’obésité au Canada. Le taux d’obésité a triplé au pays depuis 1980. De plus, un enfant sur trois âgé de 5 à 17 ans est en surpoids ou obèse. Les données démontrent de graves conséquences pour les enfants en surpoids, qui sont beaucoup plus à risque de développer des maladies chroniques une fois adultes.

Les recherches ont démontré que les causes de l’obésité sont multiples. Il n’en demeure pas moins, comme l’a conclu le comité sénatorial au terme de son étude, que la publicité destinée aux enfants qui fait la promotion de boissons et d’aliments mauvais pour la santé a des effets très néfastes. Pendant son étude du projet de loi S-228, le comité a entendu des témoins qui — mis à part les représentants des industries des aliments et de la publicité — appuyaient unanimement l’adoption de mesures de contrôle aussi rigoureuses que possible au sujet de la publicité destinée aux enfants qui fait la promotion de boissons et d’aliments mauvais pour la santé. À la lumière de ces témoignages, le comité a recommandé que le gouvernement fédéral interdise complètement la publicité d’aliments et de boissons destinée aux enfants. Il emboîterait ainsi le pas au Québec, qui interdit toute publicité destinée aux enfants depuis les années 1980.

La loi du Québec est relativement efficace, mais elle ne cible que la publicité imprimée ou diffusée par les médias. Comme on pouvait s’y attendre, après l’entrée en vigueur de la loi, les autres formes de publicité destinée aux jeunes ont connu un essor. Je me réjouis de voir que la Coalition Poids, une coalition du Québec, appuie le projet de loi S-228. La coalition Arrêtons la pub destinée aux enfants, qui regroupe 12 organismes importants du domaine de la santé sous la direction de la Fondation des maladies du cœur et de l’AVC et de la Childhood Obesity Foundation, affirme aussi haut et fort, depuis le tout début, qu’elle appuie ce projet de loi.

Honorables sénateurs, durant le débat sur le projet de loi C-45, certains ont exprimé la préoccupation que les enfants sont ciblés par de nombreuses formes de marketing. Lorsqu’on interdira les publicités de malbouffe ciblant les enfants de moins de 13 ans, est-ce qu’on se servira de l’argent qui leur est actuellement consacré pour cibler les adolescents? Pour cette raison, je suis heureuse que le projet de loi S-228 ait été amendé pour inclure un examen quinquennal des possibles conséquences non désirées sur les adolescents. Les spécialistes du marketing d’aujourd’hui comprennent que les adolescents peuvent être ciblés au moyen de messages qui suscitent des émotions précises, surtout à l’aide des médias sociaux. Quand un adolescent choisit de manger des aliments à forte teneur en sel, en sucre et en gras et de boire des boissons gazeuses et des boissons à forte teneur en caféine, cela peut l’amener à adopter de mauvaises habitudes alimentaires pendant le reste de sa vie.

Toutes formes de marketing incluses, la quantité de publicités de produits malsains visant les enfants et les adolescents au Canada a considérablement augmenté au fil des ans. La raison en est simple : les experts à l’origine de ces campagnes de marketing savent très bien qu’elles fonctionnent.

De nos jours, il existe bien des moyens d’inciter les enfants à choisir des boissons et des aliments malsains, y compris les commandites, les recommandations publicitaires et les cadeaux promotionnels. Nous savons que les campagnes de marketing réussies se servent efficacement des technologies les plus récentes et tirent avantage de la portée d’Internet.

Si le projet de loi visant à modifier la Loi sur les aliments et drogues a trait à l’objectif général et au cadre général, les détails figureront dans le règlement, qui pourra être mis à jour pour s’adapter aux nouveaux modes de marketing. La sénatrice Greene Raine est certaine que les nombreux groupes luttant contre le problème de l’obésité parmi les enfants surveilleront la situation et feront en sorte que la réglementation élaborée à la suite de la sanction royale du projet de loi S-228 soit conforme à l’objet du projet de loi.

Honorables sénateurs, je vous demande d’examiner attentivement les bonnes conséquences que le projet de loi S-228 peut avoir sur la santé des enfants. Tout comme la sénatrice Greene Raine, j’appuie les amendements que l’autre endroit a apportés pour protéger les enfants de moins de 13 ans des publicités sur les aliments malsains et pour garantir que toute nouvelle donnée probante recueillie au cours des cinq prochaines années sera prise en compte de manière à tenir la loi à jour et pertinente.

L’objectif du projet de loi demeure, comme on l’a toujours souhaité, la protection de la santé des enfants. Je vous exhorte à approuver le projet de loi S-228 tel qu’amendé à l’autre endroit. Je vous remercie de votre attention et serai heureuse de répondre à vos éventuelles questions.

L’honorable Peter Harder (représentant du gouvernement au Sénat) : Chers collègues, je serai bref, mais je tiens à manifester, au nom du gouvernement, l’appui que celui-ci accorde à ce projet de loi, particulièrement dans sa version modifiée. Il s’agit d’une initiative importante lancée au Sénat par notre ancienne collègue, la sénatrice Nancy Greene Raine, avec l’excellent appui de la sénatrice Seidman. À la Chambre des communes, le député Eyolfson s’est assuré que tous les partis appuient le projet de loi.

(1610)

Il s’agit d’un véritable exemple de complémentarité dans le leadership du Sénat et de collaboration avec la Chambre des communes. Dans ce cas-ci, nous ne modifions pas notre projet de loi. Ce sont les députés de l’autre endroit qui l’ont modifié. On nous demande maintenant de donner notre consentement aux amendements si bien décrits par la sénatrice Seidman.

Je veux simplement encourager tous les sénateurs à appuyer le projet de loi, tel que modifié. Ce faisant, nous reconnaitrons les efforts déployés par la sénatrice Greene Raine au fil des ans et la remercierons de ces efforts, et nous remercierons le Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie de son travail dans l’étude sur l’obésité, qui a permis d’orienter le débat, et des riches discussions qui ont eu lieu sur le sujet avant que le projet de loi soit renvoyé à l’autre endroit. Il s’agit d’une question qu’il est enfin temps de régler. Je vous demande de bien vouloir procéder rapidement à l’adoption du projet de loi.

(Sur la motion du sénateur Mercer, le débat est ajourné.)

Projet de loi visant à mettre fin à la captivité des baleines et des dauphins

Projet de loi modificatif—Troisième lecture—Motion d’amendement—Report du vote

L’ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l’honorable sénateur Sinclair, appuyée par l’honorable sénateur Gold, tendant à la troisième lecture du projet de loi S-203, Loi modifiant le Code criminel et d’autres lois (fin de la captivité des baleines et des dauphins), tel que modifié.

Et sur la motion d’amendement de l’honorable sénateur Tannas, appuyée par l’honorable sénatrice Batters,

Que le projet de loi S-203, tel que modifié, ne soit pas maintenant lu une troisième fois, mais qu’il soit modifié :

a)par adjonction, après l’article 6 (ajouté par décision du Sénat le 26 avril 2018), de ce qui suit :

« Exemption

7(1) L’article 445.2 du Code criminel, l’article 28.1 de la Loi sur les pêches et l’article 7.1 de la Loi sur la protection d’espèces animales ou végétales sauvages et la réglementation de leur commerce international et interprovincial ne s’appliquent pas aux personnes dont le nom figure à l’annexe de la présente loi.

(2) S’il l’estime dans l’intérêt public, le gouverneur en conseil peut, par décret, ajouter des noms à l’annexe ou en retirer.

(3) Pour déterminer s’il est dans l’intérêt public d’ajouter le nom d’une personne à l’annexe ou de le retirer, le gouverneur en conseil tient compte du fait que la personne, selon le cas :

a) mène des recherches scientifiques relativement à des cétacés;

b) fournit des soins à des cétacés ou assure leur réadaptation. »;

b)par adjonction, à la fin du projet de loi, de l’annexe suivant :

« ANNEXE

(article 7)

Personnes désignées

The Ocean Wise Conservation Association (Aquarium de Vancouver) ».

Son Honneur le Président : Les honorables sénateurs sont-ils prêts à se prononcer?

Des voix : Le vote!

Son Honneur le Président : En amendement, l’honorable sénateur Tannas, avec l’appui de l’honorable sénatrice Batters, propose que le projet de loi S-203, tel que modifié, ne soit pas lu pour la troisième fois, mais qu’il soit modifié... Puis-je me dispenser de lire la motion?

Des voix : Suffit!

Son Honneur le Président : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion?

Des voix : Oui.

Des voix : Non.

Son Honneur le Président : Que les sénateurs qui sont en faveur de la motion veuillent bien dire oui.

Des voix : Oui.

Son Honneur le Président : Que les sénateurs qui sont contre la motion veuillent bien dire non.

Des voix : Non.

Son Honneur le Président : À mon avis, les non l’emportent.

Et deux honorables sénateurs s’étant levés :

Son Honneur le Président : Y a-t-il entente au sujet de la sonnerie?

Conformément à l’article 9-10 du Règlement, le vote est reporté à la prochaine séance du Sénat, à 17 h 30. La sonnerie retentira pendant 15 minutes à compter de 17 h 15.

[Français]

Projet de loi interdisant l’importation de nageoires de requin

Projet de loi modificatif—Troisième lecture—Suite du débat

L’ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l’honorable sénateur MacDonald, appuyée par l’honorable sénateur Tkachuk, tendant à la troisième lecture du projet de loi S-238, Loi modifiant la Loi sur les pêches et la Loi sur la protection d’espèces animales ou végétales sauvages et la réglementation de leur commerce international et interprovincial (importation de nageoires de requin), tel que modifié.

L’honorable Lucie Moncion : Honorables sénatrices et sénateurs, mon propos aujourd’hui portera sur le projet de loi S-238, interdisant l’importation de nageoires de requins.

Ce projet de loi est au Feuilleton depuis un certain temps et il est jumelé au projet de loi qui vise à mettre fin à la captivité des baleines et des dauphins, soit le projet de loi S-203. Lorsque nous nous serons entendus sur le vote de l’un, nous voterons donc aussi sur l’autre.

Il serait peut-être temps, chers collègues, que nous mettions fin à nos débats quant à l’adoption de ces deux projets de loi et que nous les approuvions afin de les transmettre à la Chambre des communes. Ces projets de loi sont importants pour la protection des espèces marines, qu’il s’agisse de dauphins, de baleines ou de requins. Nous avons suffisamment tardé, et il est temps d’agir.

L’an dernier, nous avons tous reçu une copie du film Sharkwater, réalisé par le biologiste Rob Stewart. Ce passionné des requins a créé un film qui met en évidence le massacre associé aux ailerons de requins et le commerce illicite et ultra-lucratif qui y est associé. Mondialement, plus de 100 millions de requins sont tués tous les ans. Ce massacre crée un déséquilibre dans nos océans et menace la survie de notre planète.

Dans un second film intitulé Sharkwater Extinction, Rob Stewart nous fait voir de façon encore plus percutante l’ampleur de ce commerce et l’urgence que nous devons y accorder afin de mettre fin au massacre de ces grands prédateurs de la mer.

Vous vous souviendrez que, entre 1973 et 1987, quatre films avaient été produits qui ont eu pour effet d’influencer plusieurs générations quant aux préjugés et à l’indifférence envers les requins. Il s’agit des films Jaws, en 1975; Jaws 2, en 1978; Jaws 3-D, en 1983; et, enfin, Jaws: The Revenge, en 1987. Avec ces films, Steven Spielberg a faussement créé l’image des dangers que représentent les requins pour les humains. Ces prédateurs devaient être éliminés à tout prix, puisqu’ils représentaient une menace pour les humains. Il n’aura jamais été question de l’importance du rôle des requins dans l’équilibre de la terre et de la mer.

Je vous invite à visionner les deux films qui ont été produits sur les requins par Rob Stewart : Sharkwater et Sharkwater Exinction. Ils changeront votre perception des requins, et vous comprendrez pourquoi il est si important d’agir afin de protéger cette espèce menacée.

Le sénateur MacDonald, lors de son discours sur le sujet, a éloquemment présenté tous les éléments entourant les défis et l’importance que nous devons accorder aux requins. Je ne répéterai pas ce qu’il a dit, mais je vous invite toutefois à relire son discours.

J’aimerais prendre quelques instants afin de vous parler du réalisateur des films Sharkwater et Skarkwater Extinction. Ces informations, issues du site Internet www.sharkwater.com, concernent Rob Stewart, et je cite :

[Traduction]

Natif de Toronto, au Canada, où il a grandi, Stewart a fait ses premières photographies sous-marines à l’âge de 13 ans. À l’âge de 18 ans, il était devenu moniteur de plongée, puis il a obtenu un baccalauréat ès sciences en biologie après des études en Ontario, en Jamaïque et au Kenya.

Avant de faire Sharkwater (2007), Stewart a passé quatre années à parcourir le monde à titre de photographe principal des magazines de la Fédération canadienne de la faune. Stewart a dirigé des expéditions dans les coins les plus reculés de la planète et a effectué des milliers d’heures de plongée en se servant des plus récentes technologies en matière de caméras et d’appareils de respiration à circuit fermé. Les clichés hautement prisés de Stewart ont été publiés sous presque toutes les formes de médias de la planète.

Lorsqu’il était en affectation pour photographier des requins dans les îles Galapagos, Steward a été témoin pour la première fois de la pêche illégale à la palangre, qui tue de façon aveugle les requins dans la réserve marine. Il a tenté de sensibiliser le public dans les médias écrits, mais, comme le public ne répondait pas à ses appels, il a décidé de faire un film pour que les gens comprennent mieux les requins. À l’âge de 22 ans, il a laissé tomber sa carrière pour s’embarquer dans un périple de 4 ans qui l’a amené dans 12 pays et a débouché sur la production du film à grand spectacle Sharkwater.

Lorsque Stewart a monté à bord du navire de Sea Shepherd, Sharkwater est passé d’un documentaire sous-marin à un drame humain incroyable où se mélangent corruption, espionnage, accusations de tentative de meurtre et cercles mafieux; Stewart et son équipe ont été mêlés malgré eux à l’histoire. Pendant le tournage, Stewart a dû faire face à des obstacles mettant sa vie en danger, notamment à des maladies comme la fièvre du Nil occidental, la tuberculose, la dengue et la maladie dévoreuse de chair.

Sharkwater a connu un grand succès. Sa première a eu lieu au Festival international du film de Toronto, où il a été sélectionné dans le palmarès des 10 meilleurs films de l’année au Canada. De plus, Sharkwater a marqué l’histoire en générant les meilleures recettes pour sa fin de semaine de sortie de tout documentaire canadien. Il a également été le documentaire le plus primé de l’année, remportant plus de 35 prix lors de prestigieux festivals partout dans le monde.

Pourquoi est-ce que je vous parle de Rob Stewart et de son œuvre? C’est parce qu’il est décédé le 21 janvier 2017 dans l’archipel des Keys, en Floride, durant une expédition cinématographique. Il était âgé de 37 ans. Il mettait la dernière main à son nouveau film, Sharkwater Extinction. Il n’a jamais pu l’achever, et cette tâche a été confiée à d’autres personnes : ses parents, Brian et Sandy Stewart. La sortie de Sharkwater Extinction a eu lieu au Festival international du film de Toronto, il y a quelques semaines.

(1620)

J’ai eu le privilège de rencontrer Brian et Sandy Stewart avant la projection du film Sharkwater Extinction ici même, à Ottawa. J’ai vu à quel point ils étaient résolus à préserver l’héritage de leur fils. J’ai été renversée par le puissant impact de ce film. Après la projection, Brian et Sandy Stewart ont répondu volontiers à des questions du public.

Un des spectateurs s’est demandé pourquoi le projet de loi tardait tant à être adopté au Sénat et pourquoi il n’avait pas encore été renvoyé à la Chambre des communes. Ce soir-là, le public n’a pas été très impressionné de constater que le Sénat bloquait l’adoption du projet de loi. Après le film, j’ai remercié Brian et Sandy de leur dévouement envers la mémoire de leur fils.

J’espère que leur peine sera atténuée et qu’ils sauront trouver paix et réconfort en sachant que le travail et l’héritage de leur fils permettront de protéger les requins et le monde qu’il a laissé derrière lui. Je remercie très sincèrement le sénateur MacDonald de son dévouement envers ce projet de loi et de l’invitation qu’il m’a transmise. J’ai adoré le film et je vous invite tous à aller le voir dans un cinéma au pays. Le film prendra l’affiche demain, 19 octobre. Sharkwater Extinction est un très bon film.

[Français]

Mon intervention aujourd’hui vise à nous inciter, chers collègues, à mettre fin à nos différends, à les mettre de côté, et à voter afin que ce projet de loi, ainsi que celui qui traite de la captivité des dauphins et des baleines, se rende à la Chambre des communes. Pour ce grand Canadien qu’aura été Rob Stewart, pour ses parents qui poursuivent son travail empreint d’amour et d’héritage, et afin que nous puissions contribuer à créer un environnement sécuritaire pour les requins et à protéger nos océans et nos mammifères marins, je vous exhorte à porter le projet de loi S-238 et le projet de loi S-203 au vote.

Merci de votre attention.

(Sur la motion du sénateur Pratte, le débat est ajourné.)

[Traduction]

La Loi sur le ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux

Projet de loi modificatif—Deuxième lecture—Ajournement du débat

L’honorable Diane F. Griffin propose que le projet de loi C-354, Loi modifiant la Loi sur le ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux (utilisation du bois), soit lu pour la deuxième fois.

— Honorables sénateurs, je parraine le projet de loi C-354, Loi modifiant la Loi sur le ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux (utilisation du bois).

Ce projet de loi a été présenté à la Chambre des communes par Richard Cannings, le député d’Okanagan-Sud—Kootenay-Ouest, en avril de l’an dernier. Il est bref et simple. Il ne renferme qu’un article, que voici :

Dans l’élaboration des exigences visant la construction, l’entretien ou la réparation d’ouvrages publics, de biens réels fédéraux ou d’immeubles fédéraux, le ministre tient compte de toute réduction potentielle des émissions de gaz à effet de serre et de tout autre avantage pour l’environnement et peut autoriser l’utilisation du bois ou de toute autre chose, notamment de matériel, de produits ou de ressources durables, qui offre pareil avantage.

Honorables sénateurs, ce qu’il faut retenir ici, c’est la possibilité. Il y aura toujours divers facteurs à prendre en compte, mais si les planificateurs de projets fédéraux commencent à envisager la possibilité d’utiliser du bois, et s’ils en utilisent ne serait-ce que de petites quantités, cela pourrait avoir d’importantes retombées. La vaste majorité des députés conservateurs se sont opposés à ce projet de loi à l’autre endroit, considérant qu’il allait à l’encontre des principes du marché libre. Ce n’est toutefois pas le cas. Si, après analyse, on conclut que le bois n’est pas le produit le mieux adapté ou le plus efficace par rapport aux coûts, on ne l’utilisera pas. Cette mesure législative aiguille les décideurs vers un processus favorable à l’environnement et à l’entreprise locale.

Je vais parler de la récente visite des membres du Comité sénatorial de l’agriculture et des forêts à la résidence universitaire Brock Commons de l’Université de la Colombie-Britannique. Je dois dire que nous avons été très impressionnés par cet édifice.

Brock Commons est le plus grand bâtiment en bois massif au monde. Forestry Innovation Investment Ltd., qui est tenue de rendre des comptes au ministère de l’Emploi, du Commerce et de la Technologie de la Colombie-Britannique, souligne que :

Brock Commons est une structure hybride composée de 17 étages en bois massif qui reposent sur un étage de béton et de deux escaliers de béton qui desservent tous les étages.

Je vais expliquer les trois principaux avantages de la construction en bois.

Premièrement, ce genre de bâtiment est étonnamment rapide à construire et nécessite relativement peu de main-d’œuvre. Pierre Lapointe, président et PDG de FPInnovations, un carrefour d’innovation en foresterie qui rassemble des membres de l’industrie forestière canadienne, le gouvernement fédéral et les gouvernements de la Colombie-Britannique et du Québec, a dit au Comité de l’agriculture et des forêts, en mai 2017, que le bâtiment avait été bâti par neuf personnes en trois mois. Cela semble exagéré, mais ce n’est pas le cas. Les édifices en bois d’ingénierie sont incroyablement rapides à construire.

Deuxièmement, le bois est une ressource renouvelable. La construction de Brock Commons a nécessité l’utilisation de 2 233 mètres cubes de produits de bois d’ingénierie. Pour mettre les choses en perspective, les forêts des États-Unis et du Canada produisent cette quantité de bois en six minutes.

Troisièmement, comme le bois dont sont faits les bâtiments de ce type ne finit ni par être brûlé ni par se décomposer, le carbone y demeure emmagasiné. L’ancien ministre des Ressources naturelles, Jim Carr, a d’ailleurs affirmé au Comité de l’agriculture et des forêts que Brock Commons « change la donne dans le domaine de l’environnement, car il stocke près de 1 600 tonnes métriques de dioxyde de carbone ».

Étant donné, d’une part, le carbone qui reste emmagasiné dans le bois et, d’autre part, celui que l’on évite d’émettre en ne recourant pas à des matériaux énergivores, Forestry Innovation Investment Ltd. estime que le bilan carbone total de cet unique projet pourrait représenter un bénéfice de 2 432 tonnes métriques de dioxyde de carbone. C’est comme si on retirait 511 voitures de la circulation durant un an.

Lorsqu’il est question de construire avec du bois, il est normal de redouter les risques d’incendie. Or, les techniques de construction en bois ont progressé à pas de géants au cours des dernières décennies, surtout pour les grands bâtiments. En cas d’incendie, le bois massif calcine en surface tout en conservant sa solidité et en ralentissant la combustion, ce qui laisse davantage de temps pour évacuer le bâtiment.

(1630)

La résidence Brock Commons a été conçue de manière à répondre aux exigences pour ce type d’immeuble, c’est-à-dire qu’ils doivent avoir un indice de résistance au fer de 1 et de 2 heures. Cette norme est supérieure à ce qui est exigé pour les structures de béton ou d’acier.

Les structures de bois dépassent les normes exigées pour l’acier et le béton, alors nul besoin de craindre les construction en bois d’ingénierie.

Les retombées de ce projet de loi se feraient sentir d’un bout à l’autre du pays. Davantage de projets fédéraux auraient recours au bois; la preuve serait alors faite que les constructions en bois sont avantageuses tant sur le plan fiscal qu’environnemental. Le secteur privé pourrait lui aussi être davantage tenté d’investir dans les projets de construction en bois lorsqu’il verra le succès obtenu par les projets publics.

Les projets menés au Canada pourraient par ailleurs favoriser l’emploi du bois en construction dans le reste du monde. Plus il y aura d’immeubles en bois d’ingénierie, plus il y aura de carbone séquestré. Les mesures qui aident le Canada à réduire son incidence sur les changements climatiques pourraient aussi faire diminuer l’empreinte carbone de nos partenaires commerciaux.

La croissance du marché du bois d’ingénierie, que ce soit ici ou ailleurs sur la planète, constituerait une bonne nouvelle pour l’industrie forestière, à qui les barrières commerciales ont causé énormément de tort. La création de bons emplois dans le secteur des ressources renouvelables serait elle aussi la bienvenue. Le gouvernement a l’occasion de se démarquer dans le dossier des changements climatiques, et je suis persuadée que, si les ministères étaient obligés d’envisager de recourir au bois pour leurs futurs projets, ils choisiraient plus souvent cette option.

Avant de terminer, je m’adresse directement aux honorables sénateurs des Maritimes, et en particulier du Nouveau-Brunswick, en attirant leur attention sur le fait que notre région possède un vaste et dynamique secteur forestier. J’encourage vivement les sénateurs des Maritimes et les autres sénateurs à appuyer ce projet de loi. Actuellement, les représentants du secteur forestier cherchent à faire adopter un projet de loi semblable dans les provinces maritimes, qui permettrait de donner la priorité aux produits du bois locaux et d’appuyer ainsi l’environnement. Ce projet de loi serait semblable à celui qui a été adopté en Colombie-Britannique et au Québec.

Le projet de loi C-354 jouit de l’appui du secteur forestier des Maritimes. Je tiens par ailleurs à souligner que, à l’occasion des entretiens que j’ai eus avec mon personnel, j’ai appris que ce projet de loi ne susciterait, en ce qui a trait aux échanges commerciaux avec les États-Unis, aucune inquiétude chez les représentants du secteur forestier dans les Maritimes. À l’autre endroit, on a très peu débattu des avantages que ce projet de loi pourrait apporter aux Maritimes.

Honorables sénateurs, je demande votre appui afin de renvoyer ce projet de loi au comité afin qu’on puisse entendre les témoignages des parties prenantes des Maritimes.

Le projet de loi prévoit un modeste changement stratégique qui pourrait avoir des ramifications intéressantes. Si, grâce à l’adoption de ce projet de loi, un immeuble est construit avec du bois d’ingénierie, cela permettra de capturer des milliers de tonnes de carbone. Les avantages se multiplieraient de manière exponentielle. Nous avons besoin de nombreuses stratégies semblables à celle-ci si nous voulons pallier les effets des changements climatiques.

Je vous prie de vous joindre à moi pour appuyer ce projet de loi d’initiative parlementaire qui a été présenté à l’autre endroit par un député de la Colombie-Britannique et qui s’avère être une modeste contribution propice à la santé de la planète. Merci.

L’honorable Yonah Martin (leader adjointe de l’opposition) : J’ai une question pour la sénatrice Griffin.

La sénatrice Griffin : Oui.

La sénatrice Martin : Sénatrice, c’est une question plus ou moins liée au sujet du débat, mais j’estime qu’elle est pertinente. Elle porte sur le Code national du bâtiment, qui touche les codes du bâtiment provinciaux et les dispositions municipales connexes.

Des pompiers ont porté un problème à notre attention, et je suis sûre que d’autres en ont également entendu parler. Lors de leurs visites annuelles sur la Colline du Parlement, ils expriment le souhait de participer à la révision des codes du bâtiment afin que l’on tienne compte de la sécurité des pompiers, car, selon le type de bâtiment et la présence de bois, il peut y avoir différents degrés d’inflammabilité, et cela suscite des inquiétudes pour la sécurité des pompiers. Je crois comprendre que la mention de la sécurité des pompiers a été retirée du Code du bâtiment par inadvertance.

Encore une fois, je pense que c’est une question beaucoup plus complexe. Cependant, êtes-vous au courant, entre autres, des craintes exprimées par les pompiers, et des aspects de ce projet de loi qui les concernent?

La sénatrice Griffin : Oui. Probablement pas au même degré que vous, peut-être, si vous avez eu une discussion approfondie avec eux, mais j’ai certainement eu de la rétroaction de la part de pompiers.

L’ameublement dans le bâtiment est le principal problème. Le bois ou tout matériau utilisé dans la fabrication des meubles pose un plus grand risque à la sécurité des pompiers que le bois d’ingénierie utilisé dans la construction du bâtiment, comme pour la résidence Brock Commons à l’Université de la Colombie-Britannique.

Le comité a visité ce bâtiment et a appris plein de détails à son sujet à cette occasion, y compris le fait que la structure principale est hautement ignifuge. L’ameublement représente un risque plus sérieux pour la santé humaine que l’enveloppe comme telle du bâtiment.

Cela dit, vous me donnez l’occasion de dire autre chose, soit que, lorsque je suis entrée dans la résidence Brock Commons, j’ai été émerveillée par l’atmosphère du bâtiment et le sentiment qui s’en dégage. Il donne une impression très humaine et les étudiants y semblaient très — je ne veux pas dire calmes, ce n’est pas le bon mot. Les étudiants ne sont jamais tout à fait calmes.

Le sénateur Harder : Peut-être hier.

La sénatrice Griffin : Ils l’étaient peut-être hier, c’est vrai. L’atmosphère était très paisible, c’est le mot que je cherchais.

L’utilisation du bois offre de multiples avantages outre une possible réduction des coûts. Pensons par exemple, d’un point de vue plus général, au développement durable et aux retombées sociales, environnementales et économiques. Je dirais aussi que mes conversations avec les pompiers ont été positives en général.

Vous avez mentionné les codes du bâtiment. Ils sont en cours de mise à jour, et cet aspect recevra toute l’attention requise. J’ai vraiment très hâte que le projet de loi soit renvoyé au comité et que des pompiers viennent témoigner. Nous pourrons tous beaucoup apprendre de leur témoignage.

La sénatrice Martin : Je vous remercie de ces précisions.

L’honorable Terry M. Mercer (leader adjoint des libéraux au Sénat) : Très rapidement, Votre Honneur, j’attire l’attention de notre collègue sur un rapport précédent du Comité sénatorial permanent de l’agriculture et des forêts qui fait suite à une vaste étude que nous avons menée sur l’utilisation du bois. Nous sommes allés à d’autres endroits en Colombie-Britannique, y compris à l’anneau olympique de Richmond, qui a servi lors des Jeux olympiques de 2010.

Dans ce rapport, on trouve des témoignages de pompiers. Je ne peux pas me souvenir de tous, car cela remonte à plusieurs années, mais ces témoignages étaient très favorables à l’utilisation du bois et, comme l’a dit la sénatrice Griffin, ce sont les meubles qui posent problème, et non le bois de la charpente. C’était une bonne question, mais le Comité de l’agriculture et des forêts y a déjà répondu. Vous n’avez qu’à consulter ce rapport.

La sénatrice Martin : Si je puis me permettre, j’aimerais dire quelques mots. Je demanderai ensuite l’ajournement du débat pour le reste du temps de parole dont je dispose.

L’anneau de Richmond est un magnifique projet associé aux Jeux olympiques d’hiver de 2010. C’est une superbe structure, et j’espère que tous les sénateurs auront la chance de la voir en personne.

Lorsque j’ai parlé des pompiers, je voulais faire valoir qu’il y a aussi des inquiétudes par rapport au plancher. Il s’agit de la sécurité globale des pompiers et des codes du bâtiment qui s’appliquent. En tant que Britanno-Colombienne et sénatrice qui a siégé au comité pendant l’étude sur l’importance de l’industrie et de l’utilisation du bois dans les structures, je suis très favorable au projet de loi.

Quoi qu’il en soit, je remercie la sénatrice Griffin, le sénateur Mercer et les membres du comité qui ont mené l’étude précédente et je propose l’ajournement du débat pour le temps de parole qu’il me reste.

(Sur la motion de la sénatrice Martin, le débat est ajourné.)

(1640)

Le Sénat

Motion donnant instruction à l’Administration du Sénat de retirer des serveurs du Sénat le site web de l’honorable sénatrice Lynn Beyak et de cesser tout soutien pour tout autre site web connexe jusqu’à ce que le processus d’enquête mené par le conseiller sénatorial en éthique soit conclu—Motion d’amendement—Suite du débat

L’ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l’honorable sénatrice Pate, appuyée par l’honorable sénateur Marwah,

Qu’il soit donné instruction à l’administration du Sénat de retirer des serveurs du Sénat le site Web de l’honorable sénatrice Beyak et de cesser tout soutien pour quelconque site Web de cette dernière jusqu’à ce que le processus mené par le conseiller sénatorial en éthique à la suite d’une demande d’enquête présentée en vertu du Code régissant l’éthique et les conflits d’intérêts des sénateurs portant sur le contenu du site Web de la sénatrice Beyak et sur ses obligations au titre du Code soit conclu, que ce soit par suite du dépôt de la lettre de détermination préliminaire ou du rapport d’enquête du conseiller sénatorial en éthique, de la présentation d’un rapport du Comité permanent sur l’éthique et les conflits d’intérêts des sénateurs ou d’une décision du Sénat sur la question.

Et sur la motion d’amendement de l’honorable sénateur Pratte, appuyée par l’honorable sénatrice Coyle,

Que la motion ne soit pas maintenant adoptée, mais qu’elle soit modifiée :

1.par substitution des mots « Qu’il soit donné instruction à l’administration du Sénat de retirer des serveurs du Sénat le site Web de l’honorable sénatrice Beyak et de cesser tout soutien pour quelconque site Web de cette dernière » par le mot « Que, »;

2.par adjonction, immédiatement après le mot « question » de ce qui suit :

« , instruction soit donnée à l’administration du Sénat de :

a)retirer les 103 lettres de soutien datées du 8 mars 2017 au 4 octobre 2017 du site Web de la sénatrice Beyak (lynnbeyak.sencanada.ca) et de tout autre site Web hébergé par un serveur du Sénat;

b)ne pas fournir de soutien, y compris le soutien technique et le remboursement des dépenses, pour tout site Web de la sénatrice qui contient une ou plusieurs de ces lettres d’appui ou qui contient un lien vers une ou plusieurs de ces lettres ».

L’honorable Yonah Martin (leader adjointe de l’opposition) : Je constate que cet article en est à son 14e jour au Feuilleton. Je propose l’ajournement du débat pour le temps de parole qu’il me reste.

(Sur la motion de la sénatrice Martin, le débat est ajourné.)

[Français]

Les travailleurs saisonniers au Nouveau-Brunswick

Les défis continus—Interpellation—Suite du débat

L’ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur l’interpellation de l’honorable sénatrice Poirier, attirant l’attention du Sénat sur les défis continus auxquels font face les travailleurs saisonniers au Nouveau-Brunswick.

L’honorable René Cormier : Honorables sénateurs, je propose que le débat soit ajourné jusqu’à la prochaine séance du Sénat pour le temps de parole qu’il me reste.

(Sur la motion du sénateur Cormier, le débat est ajourné.)

Langues officielles

Autorisation au comité de déposer son rapport sur la perspective des Canadiens au sujet d’une modernisation de la Loi sur les langues officielles auprès du greffier pendant l’ajournement du Sénat

L’honorable René Cormier, conformément au préavis donné le 16 octobre 2018, propose :

Que le Comité sénatorial permanent des langues officielles soit autorisé, nonobstant les pratiques habituelles, à déposer auprès du greffier du Sénat, au plus tard le 31 octobre 2018, son rapport provisoire sur la modernisation de la Loi sur les langues officielles : la perspective des communautés de langue officielle en situation minoritaire, si le Sénat ne siège pas, et que ledit rapport soit réputé avoir été déposé au Sénat.

Son Honneur le Président : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion?

Des voix : D’accord.

(La motion est adoptée.)

Énergie, environnement et ressources naturelles

Autorisation au comité de siéger en même temps que le Sénat

L’honorable Rosa Galvez, conformément au préavis donné le 16 octobre 2018, propose :

Que le Comité sénatorial permanent de l’énergie, de l’environnement et des ressources naturelles soit autorisé à se réunir le mardi 23 octobre 2018, à 17 heures, même si le Sénat siège à ce moment-là, et que l’application de l’article 12-18(1) du Règlement soit suspendue à cet égard.

Son Honneur le Président : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion?

Des voix : D’accord.

(La motion est adoptée.)

Sécurité nationale et défense

Autorisation au comité de tenir occasionnellement des réunions à huis clos

L’honorable Jean-Guy Dagenais, au nom de la sénatrice Boniface, conformément au préavis donné le 17 octobre 2018, propose :

Que, nonobstant l’article 12-15(2) du Règlement, le Comité sénatorial permanent de la sécurité nationale et de la défense soit habilité à tenir des séances à huis clos, de façon occasionnelle, pour entendre des témoignages et recueillir des informations particulières ou délicates dans le cadre de son étude.

Son Honneur le Président : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion?

Des voix : D’accord.

(La motion est adoptée.)

[Traduction]

Affaires juridiques et constitutionnelles

Autorisation au comité de tenir occasionnellement des réunions à huis clos concernant l’étude du projet de loi C-58

L’honorable Serge Joyal, conformément au préavis donné le 17 octobre 2018, propose :

Que, nonobstant l’article 12-15(2) du Règlement, le Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles soit habilité à tenir des séances à huis clos, de façon occasionnelle, pour entendre des témoignages et recueillir des informations particulières ou délicates dans le cadre de son étude, autorisée par le Sénat le 6 juin 2018, sur le projet de loi C-58, Loi modifiant la Loi sur l’accès à l’information, la Loi sur la protection des renseignements personnels et d’autres lois en conséquence.

Son Honneur le Président : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion?

Des voix : D’accord.

(La motion est adoptée.)

Agriculture et forêts

Autorisation au comité de siéger en même temps que le Sénat

L’honorable Diane F. Griffin, conformément au préavis donné le 17 octobre 2018, propose :

Que le Comité sénatorial permanent de l’agriculture et des forêts soit autorisé à se réunir le mardi 23 octobre 2018, à 17 heures, même si le Sénat siège à ce moment-là, et que l’application de l’article 12-18(1) du Règlement soit suspendue à cet égard.

Son Honneur le Président : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion?

Des voix : D’accord.

(La motion est adoptée.)

Pêches et océans

Autorisation au comité de siéger en même temps que le Sénat

L’honorable Fabian Manning, conformément au préavis donné le 17 octobre 2018, propose :

Que le Comité sénatorial permanent des pêches et des océans soit autorisé à se réunir le mardi 23 octobre 2018, à 17 heures, même si le Sénat siège à ce moment-là, et que l’application de l’article 12-18(1) du Règlement soit suspendue à cet égard.

Son Honneur le Président : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion?

Des voix : D’accord.

(La motion est adoptée.)

(À 16 h 47, le Sénat s’ajourne jusqu’au mardi 23 octobre 2018, à 14 heures.)

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