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Debates of the Senate (Hansard)

Débats du Sénat (hansard)

2e Session, 40e Législature,
Volume 146, Numéro
57

Le mardi 6 octobre 2009
L'honorable Noël A. Kinsella, Président


LE SÉNAT

Le mardi 6 octobre 2009

La séance est ouverte à 14 heures, le Président étant au fauteuil.

Prière.

[Traduction]

DÉCLARATIONS DE SÉNATEURS

Question de privilège

Avis

L'honorable Joan Fraser : Honorables sénateurs, conformément à l'article 43(3) du Règlement, je donne avis qu'aujourd'hui, je soulèverai une question de privilège concernant la réunion du Comité permanent des affaires juridiques et constitutionnelles du 1er octobre 2009 et la conférence de presse subséquente animée par le ministre de la Justice et procureur général, l'honorable Rob Nicholson, c. p., au cours de laquelle il a été porté atteinte aux travaux du Sénat et de son comité.

Conformément à l'article 43(7) du Règlement, je suis prête à proposer une motion demandant au Sénat de soumettre la question au Comité permanent du Règlement, de la procédure et des droits du Parlement si la présidence conclut que la question de privilège est fondée à première vue.

La Loi sur l'abolition de l'esclavage

Le Cent soixante-quinzième anniversaire

L'honorable Donald H. Oliver : Honorables sénateurs, le 2 décembre 2008, j'ai pris la parole au Sénat pour souligner la Journée internationale pour l'abolition de l'esclavage, un jour commémoratif institué par l'Assemblée générale des Nations Unies il y a 60 ans.

J'interviens aujourd'hui pour souligner le 175e anniversaire de la loi du 1er août 1834, qui abolissait l'esclavage dans l'Empire britannique, aussi connue sous le nom de Loi d'émancipation , une mesure historique qui a ouvert la voie à la libération de millions d'enfants, de femmes et d'hommes noirs. Ce fut un point tournant dans l'histoire de toutes les personnes d'ascendance africaine dans le monde. L'honorable Percy Paris, ministre des Affaires afro-néo-écossaises et seul député afro-néo-écossais de l'assemblée législative provinciale, a dit ce qui suit en l'honneur de cet anniversaire bien spécial :

C'est avec des sentiments partagés que nous soulignons cet anniversaire. Nous pleurons le sort de nos ancêtres qui ont été réduits à l'esclavage et celui de leurs descendants qui ont souffert des répercussions de cette période.

Toutefois, nous célébrons également le fait que nous sommes toujours là, que nous prenons soin de nos familles et de nos collectivités et que nous contribuons à l'activité économique, sociale et politique.

Cette journée nous rappelle une période sombre de l'histoire de l'humanité, particulièrement pour les Noirs. Tout au long du mois d'août, les Noirs ont célébré cet anniversaire très important dans plusieurs parties du pays. Le 1er août, l'Ontario a souligné le Jour de l'émancipation , qui était reconnu pour la première fois à l'échelle provinciale. Toute une série d'événements ont été organisés partout dans la province, à Toronto, Owen Sound et Windsor. En fait, ce n'est qu'en décembre dernier que le gouvernement provincial de l'Ontario a adopté le projet de loi 111, qui reconnaissait la journée du 1er août comme Jour de l'émancipation dans la province. Lorsque ce projet de loi a été présenté, c'était la première fois de l'histoire de Queen's Park que deux députés de partis différents coparrainaient un projet de loi.

Plus près de chez moi, la communauté noire de la Nouvelle-Écosse a également organisé des événements spéciaux. La 26e édition du rassemblement annuel d'Africville a eu lieu à Halifax en août dernier. Africville était une petite collectivité africaine qui a été rasée par la ville de Halifax dans les années 1960. Ce rassemblement annuel est une occasion de revivre le passé, de célébrer le présent et de se tourner vers l'avenir. Une rue de Halifax a été rebaptisée Africville dans le cadre des célébrations.

Le 1er août, le port de Halifax a accueilli le schooner de la liberté Amistad à l'occasion des célébrations entourant le 175e anniversaire de l'abolition de l'esclavage. Cela a permis à dix groupes de jeunes de races et d'ethnies différentes de participer à des ateliers portant sur le leadership, la richesse de la diversité et la célébration de la liberté.

D'autres événements commémoratifs ont également eu lieu à Amherst et à Birchtown, en Nouvelle-Écosse, au mois d'août dernier.

Honorables sénateurs, en l'honneur du 175e anniversaire de la Loi sur l'abolition de l'esclavage, je vous demande à tous de vous élever contre l'esclavage, une abomination qui a toujours cours de nos jours, sous diverses formes, dans bien des parties du monde.

Willard S. Boyle

Félicitations au récipiendaire du prix Nobel

L'honorable James S. Cowan (leader de l'opposition) : Honorables sénateurs, nous avons appris ce matin que Willard S. Boyle, originaire de la Nouvelle-Écosse, avait reçu le prix Nobel de physique de 2009. Il partage ce prix avec George E. Smith et Charles Kao.

L'Académie royale des sciences de Suède a qualifié les trois hommes de « pères de la fibre optique et de l'imagerie numérique ». L'académie a récompensé MM. Boyle et Smith pour avoir inventé la première technologie d'imagerie à l'aide d'un capteur numérique du nom de dispositif à couplage de charge, ou CCD. La technologie CCD utilise l'effet photoélectrique, théorisé pour la première fois par Albert Einstein, théorie pour laquelle il avait d'ailleurs reçu le prix Nobel en 1921.

Willard Boyle est né à Amherst, en Nouvelle-Écosse, en 1924. À l'âge de trois ans, il déménage avec sa famille dans une ville forestière du Québec. Sa mère, qu'il considère comme un de ses mentors, lui enseigne à la maison jusqu'à sa neuvième année. Il fréquente ensuite le Lower Canada College, à Montréal, puis l'Université McGill, où il se voit décerner un baccalauréat en sciences, une maîtrise en sciences, puis, en 1950, un doctorat en physique. Après ses études doctorales, M. Boyle travaille un an à un laboratoire canadien de recherche sur la radiation, puis enseigne la physique pendant deux ans au Collège militaire royal de Kingston, en Ontario. En 1953, il est embauché par Bell Labs, au New Jersey, où il rejoint George Smith. Ils conçoivent ensemble un capteur pouvant transformer la lumière en un grand nombre de points lumineux, ce que nous appelons aujourd'hui des pixels. Les appareils photos numériques, qui sont si répandus de nos jours qu'on en trouve même dans les téléphones cellulaires, doivent leur existence aux travaux de MM. Boyle et Smith. Ils ont révolutionné la photographie et, comme le Comité du prix Nobel l'a souligné, ils ont jeté les bases de la société en réseaux d'aujourd'hui.

Bien que nous jouissions tous de cette technologie dans notre vie quotidienne quand nous capturons des instants mémorables, M. Boyle a ressenti son plus grand sentiment d'accomplissement lorsque les premières images de Mars ont été transmises vers la Terre à l'aide de caméras numériques. « Nous avons vu la surface de Mars pour la première fois », a-t-il déclaré. « Cela n'aurait pas été possible sans notre invention. »

Quand Willard Boyle a pris sa retraite de Bell Labs en 1979, il est retourné en Nouvelle-Écosse. Néo-Écossais un jour, Néo-Écossais toujours. De retour au Canada, il a été membre du Conseil de recherche de l'Institut canadien de recherches avancées et du Conseil des sciences de la Nouvelle-Écosse.

Honorables sénateurs, dans la section du site Internet science.ca qui lui est consacrée, M. Boyle donne un précieux conseil qui, je crois, mérite d'être cité :

Sachez juger quand il faut persévérer et quand il faut s'arrêter. Si vous faites quelque chose, faites-le bien. Il n'est pas nécessaire d'être le meilleur de tous, mais vous devriez faire du mieux que vous pouvez.

Willard Boyle, lui, a bel et bien été le meilleur de tous. Sincères félicitations à Willard Boyle et à ses corécipiendaires, George E. Smith et Charles Kao.

(1410)

La visite du dalaï-lama

L'honorable Consiglio Di Nino : Honorables sénateurs, dimanche dernier, le 4 octobre 2009, j'ai eu le privilège de rencontrer, en compagnie de l'honorable Jason Kenney, ministre de la Citoyenneté, de l'Immigration et du Multiculturalisme, l'un des citoyens honoraires du Canada, Sa Sainteté le dalaï-lama. Sa Sainteté a participé au Sommet de la paix, à Vancouver, du 27 au 29 septembre dernier. Des milliers de personnes se sont rendues à Vancouver pour entendre Sa Sainteté, les lauréats du prix Nobel de la paix, Mairead Maguire, Betty Williams et Jody Williams, de même que le maître spirituel Eckhardt Tolle.

Sa Sainteté s'est aussi arrêtée à Edmonton, où plus de 15 000 personnes ont assisté au discours qu'elle a livré à l'Université de Calgary. À Montréal, Sa Sainteté a livré un discours intitulé « Éducation du cœur : la puissance de la compassion «, devant un auditoire de 13 000 personnes, au Centre Bell.

Dimanche matin, le ministre Kenney et moi avons eu l'insigne honneur d'avoir un entretien avec Sa Sainteté afin de parler des efforts et des projets de l'Association des parlementaires amis du Tibet à l'appui d'un dialogue fructueux entre le gouvernement chinois et les représentants de Sa Sainteté. Nous avons aussi parlé de l'appui de l'Association des parlementaires amis du Tibet à l'égard d'une véritable autonomie du Tibet et du peuple tibétain. Nous avons aussi discuté de la possibilité que des représentants de l'Association des parlementaires amis du Tibet se rendent en Chine et à Dharamsala, en Inde, au printemps 2010.

Honorables sénateurs, je me sens toujours aussi modeste devant cet authentique ambassadeur de la paix, un homme dont les enseignements influencent des millions de personne sur la planète. Au Sommet de la paix, à Vancouver, Sa Sainteté a dit, et je cite :

Le véritable changement commence en soi-même, puis au sein de la famille, puis de la collectivité [...] il est nécessaire que nous acceptions l'idée que « nous » sommes le monde entier.

Je suis convaincu que c'est une idée que tous les sénateurs peuvent accepter.

[Français]

La Journée mondiale des enseignantes et des enseignants

L'honorable Rose-Marie Losier-Cool : Honorables sénateurs, hier, le 5 octobre, était un lundi tout à fait spécial puisqu'il marquait la Journée mondiale des enseignantes et des enseignants.

Posons-nous la question. Sans les enseignants, où serions-nous? Que saurions-nous? Que ferions-nous? Puisque le savoir est la plus importante des clés du succès et que ce savoir ne peut être transmis que par les enseignants, prenons un moment aujourd'hui pour remercier en pensée et en paroles celles et ceux qui nous ont enseigné et grâce à qui nous sommes devenus qui nous sommes aujourd'hui.

Pour marquer cette journée si importante, le thème retenu cette année par la Fédération canadiennes des enseignantes et des enseignants est le suivant : La paix, je la vis, je l'enseigne.

[Traduction]

On ne saurait trouver un meilleur thème à une époque où la guerre sévit à peu près partout et chaque jour. Qui, mieux que les enseignants, peut condamner la guerre et promouvoir la paix auprès des enfants d'aujourd'hui de manière à leur éviter de devenir les soldats de demain?

Je garde un bon souvenir des quelque 30 années pendant lesquelles j'ai enseigné au secondaire. Combien me manquent toutes ces années où je pouvais faire changer les choses sur une base quotidienne. Heureusement, j'ai la chance de pouvoir faire changer les choses — différemment — aujourd'hui. Pourtant, mon cœur rayonne toujours lorsque je rencontre d'anciens élèves ou que je parle à d'anciens collègues.

[Français]

J'en profite ici pour dire un bonjour tout spécial à mes amis de l'Association des enseignants francophones du Nouveau-Brunswick. Je salue leur engagement quotidien en faveur de l'éducation et de la

paix dans les écoles et dans les collectivités de ma province. L'association a tout mon respect.

Honorables sénateurs, les enseignants sont, avec les parents et les amis, l'un des trois piliers qui élèvent et soutiennent chacun des adultes qu'étaient nos enfants. Ne l'oublions pas et montrons notre gratitude à nos enseignantes et à nos enseignants.

[Traduction]

Les Prix du premier ministre pour l'excellence en éducation de la petite enfance

L'honorable Carolyn Stewart Olsen : Honorables sénateurs, hier, j'ai assisté à la remise des Prix du premier ministre pour l'excellence en éducation de la petite enfance. Ce fut spécialement un honneur pour moi de rencontrer et de féliciter Suzanne Bélanger, une récipiendaire de ma province, le Nouveau-Brunswick.

Les Prix du premier ministre rendent hommage aux éducateurs exceptionnels et novateurs de la petite enfance qui excellent dans l'art de favoriser le développement et la socialisation des jeunes enfants qui leur sont confiés et dans l'art d'aider les enfants à acquérir les connaissances de base dont ils auront besoin au cours de leur vie. Parmi les critères de sélection, on compte un soutien marqué au développement de l'enfant, l'innovation, un engagement auprès des parents, des familles et de la collectivité ainsi qu'un engagement dans le domaine et le fait d'avoir fait preuve de leadership dans ce dernier.

Mme Bélanger, qui a choisi de travailler dans le cadre du Programme Bon départ de la Première nation de Madawaska Maliseet, à Edmundston, a non seulement répondu à ces critères, elle les a élargis et rehaussés. Elle passe ses journées avec ces jeunes dirigeants de demain, encourageant et entretenant leur culture, leur permettant de donner libre cours à leur créativité et d'ouvrir leur esprit aux merveilles de l'éducation. Ce fut un honneur pour moi de rencontrer Suzanne Bélanger.

Je les félicite, elle et tous les récipiendaires, d'avoir reçu ce prix bien mérité en reconnaissance de leur dévouement et de leur excellente contribution à l'essor de nos enfants.

[Français]

Le Tribunal pénal international pour le Rwanda

L'honorable Roméo Antonius Dallaire : Honorables sénateurs, il y a 15 ans, l'Organisation des Nations Unies a créé un le Tribunal pénal international, qui avait pour mandat de juger les génocidaires du Rwanda. Depuis ce temps, plusieurs accusés ont été traduits en justice. L'objectif était de réduire, par l'exemple, l'impunité dans un monde où des gouvernements ou des groupes non gouvernementaux non structurés abusent massivement des droits des individus.

L'objectif n'était pas uniquement de ramasser les pots cassés et d'atténuer l'impunité, mais de prévenir les circonstances dans lesquelles on retrouve un chaos humanitaire au-delà de tout ce qui peut être imaginé par l'être humain.

[Traduction]

La semaine dernière, le Groupe parlementaire multipartite pour la prévention du génocide et autres crimes contre l'humanité a tenu un forum pour appuyer un rapport examinant comment nous pouvons prévenir les échecs catastrophiques de l'humanité. Le rapport, intitulé Mobiliser la volonté d'intervenir : Leadership et action pour la prévention des atrocités de masse, a été préparé par l'Institut montréalais d'études sur le génocide et les droits de la personne. Le rapport faisait un examen des recommandations concernant notre pays — une puissance intermédiaire de premier plan — et sa capacité de participer à la prévention. Le but ultime est d'opérationnaliser le concept de la responsabilité de protéger, concept créé par le Canada, dans les cas où des violations massives des droits de la personne sont perpétrées par un pays. En tant que puissance intermédiaire de premier plan, nous avons la responsabilité, de concert avec d'autres pays, d'intervenir et de mettre fin à ces violations par tous les moyens, et non uniquement par des moyens militaires. Le rapport a reçu un certain appui politique, mais ne jouit pas encore d'une pleine reconnaissance.

Une évaluation intéressante a été préparée par Tom Flanagan. Je cite :

[...] ce ne sont pas des idéalistes à l'eau de rose obsédés par le pouvoir discret. Ils savent que, dans un monde brutal, l'usage de la force est souvent nécessaire. Ils veulent marier la notion libérale d'intervention humanitaire et la conception conservatrice de l'intérêt national.

J'ajouterai un dernier commentaire montrant l'appui des parlementaires qui participent aux travaux du groupe interparlementaire et de ceux qui continueront d'y participer. Dans un courriel, le sénateur Hugh Segal a dit ceci :

Cette question va bien au-delà de l'esprit partisan. C'est une occasion de réfléchir ensemble aux préparatifs nécessaires pour que les gouvernements puissent agir de façon compétente et avoir à leur disposition des outils efficaces qui peuvent empêcher les tragédies et atrocités qui coûtent la vie à des milliers de personnes et souillent la réputation de toute l'humanité.

Honorables sénateurs, nous avons des outils pour empêcher la destruction massive de vies humaines. Il nous incombe d'assumer...

Willard S. Boyle

Félicitations au récipiendaire du prix Nobel

L'honorable Kelvin Kenneth Ogilvie : Honorables sénateurs, je prends la parole pour vous demander de vous joindre à moi pour célébrer les réalisations d'un grand Canadien. Même si mon distingué collègue d'en face l'a fait avant moi, je crois que ce Canadien mérite qu'on reconnaisse ses réalisations plus d'une fois.

Ce distingué Canadien est Willard Boyle, un des maîtres de la lumière, un Néo-Écossais de naissance qui est retourné vivre dans cette province à sa retraite. Aujourd'hui, il est lauréat du prix Nobel.

Cette année, le prix Nobel de physique est remis aux personnes à qui on doit deux réalisations scientifiques qui ont aidé à jeter les fondements des sociétés réseautées d'aujourd'hui. Elles sont à l'origine de nombreuses innovations pratiques pour la vie de tous les jours et ont fourni de nouveaux outils pour l'exploration scientifique.

(1420)

En 1966, Charles K. Kao a fait une découverte qui a permis une percée dans le domaine de la fibre optique. Il a calculé soigneusement la façon de transmettre la lumière sur de longues distances au moyen de fibres optiques en verre. De nos jours, la fibre optique représente le système circulatoire qui alimente notre société de communication. Une part importante de l'information transmise sur la fibre optique est composée d'images numériques, et c'est là la deuxième réalisation qui a valu son prix au lauréat.

En 1969, Willard S. Boyle et George E. Smith ont inventé la première technologie réussie d'imagerie numérique. Ils ont été en mesure de transformer la lumière en signaux électriques. Cette invention a révolutionné la photographie puisque la lumière pouvait désormais être captée électroniquement, plutôt que sur pellicule.

Le dispositif qu'ils ont créé est l'œil électronique de l'appareil photo numérique. La forme numérique facilite le traitement et la distribution des images.

La photographie numérique est devenue un outil irremplaçable dans beaucoup de domaines de recherche, y compris dans un grand nombre d'applications médicales comme la prise de vues de l'intérieur du corps humain à des fins de diagnostic et de microchirurgie.

Willard Boyle est une personne exceptionnelle, un merveilleux Néo-Écossais et un grand Canadien. J'ai eu le privilège de travailler avec lui au sein d'un comité clé de la Nouvelle-Écosse à la fin des années 1980 et au début des années 1990. Il est membre du temple de la renommée du Discovery Centre en Nouvelle-Écosse.

Je suis sûr que les sénateurs se joindront à moi pour féliciter ce grand Canadien d'avoir remporté le prix Nobel et afin de partager notre fierté, en tant que Canadiens, pour ses réalisations.

[Français]

Visiteurs à la tribune

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, je tiens à signaler la présence à la tribune des participants au Programme d'études des hauts fonctionnaires parlementaires.

Au nom de tous les sénateurs, je vous souhaite la bienvenue au Sénat du Canada.


[Traduction]

AFFAIRES COURANTES

Le commissaire à la protection de la vie privée

Dépôt du rapport annuel de 2008 sur la Loi sur la protection des renseignements personnels et les documents électroniques

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, j'ai l'honneur de déposer, dans les deux langues officielles, le rapport annuel du Commissariat à la protection de la vie privée du Canada sur la Loi sur la protection des renseignements personnels et les documents électroniques pour la période s'échelonnant du 1er janvier au 31 décembre 2008.

[Français]

La Loi sur le Bureau du surintendant des institutions financières

Projet de loi modificatif—Première lecture

L'honorable Pierrette Ringuette présente le projet de loi S-241, Loi modifiant la Loi sur le Bureau du surintendant des institutions financières (cartes de crédit et de débit).

(Le projet de loi est lu pour la première fois.)

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, quand lirons- nous le projet de loi pour la deuxième fois?

(Sur la motion du sénateur Ringuette, la deuxième lecture du projet de loi est inscrite à l'ordre du jour de la séance d'après- demain.)

La Loi canadienne sur les paiements

Projet de loi modificatif—Première lecture

L'honorable Pierrette Ringuette présente le projet de loi S-242, Loi modifiant la Loi canadienne sur les paiements (systèmes de paiement par carte de débit).

(Le projet de loi est lu pour la première fois.)

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, quand lirons- nous le projet de loi pour la deuxième fois?

(Sur la motion du sénateur Ringuette, la deuxième lecture du projet de loi est inscrite à l'ordre du jour de la séance d'après- demain.)

L'Assemblée parlementaire Canada-Europe

La réunion d'hiver de l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe, tenue du 19 au 20 février 2009—Dépôt du rapport

L'honorable Consiglio Di Nino : Honorables sénateurs, j'ai l'honneur de déposer, dans les deux langues officielles, le rapport de la délégation parlementaire canadienne de l'Assemblée parlementaire Canada-Europe, concernant sa participation à la huitième réunion d'hiver de l'Assemblée parlementaire de l'OSCE, tenue à Vienne, en Autriche, du 19 au 20 février 2009.

[Traduction]

Dépôt du rapport de la réunion du Comité des parlementaires de la région arctique, tenue les 27 et 28 mai 2009

L'honorable Lorna Milne : Honorables sénateurs, j'ai l'honneur de déposer, dans les deux langues officielles, le rapport de la délégation parlementaire canadienne de l'Association parlementaire Canada- Europe concernant sa participation à la réunion du Comité permanent des parlementaires de la région arctique, tenue à Ilulissat, au Groenland, les 27 et 28 mai 2009.


PÉRIODE DES QUESTIONS

Les ressources humaines et le développement des compétences

L'aide aux femmes

L'honorable Mobina S. B. Jaffer : Honorables sénateurs, ma question s'adresse au leader du gouvernement au Sénat. Dans un rapport publié récemment par le Conference Board du Canada et intitulé How Canada Peforms : a Report Card on Canada, on examine des secteurs clés dans lesquels le Canada est en train de perdre le combat contre la pauvreté. Le rapport présente des chiffres alarmants sur des enjeux cruciaux, comme l'âge des enfants qui travaillent et la pauvreté chez les personnes âgées.

L'organisme impartial Make Poverty History, fondé en 2005 et dont le siège social est situé à Ottawa, a également indiqué que le Canada était en train de perdre sa bataille contre la pauvreté. Selon cet organisme, en 2007, un enfant sur six au Canada vivait dans la pauvreté. Le taux de pauvreté infantile au Canada est de 15 p. 100, soit trois fois plus que la Suède, la Norvège et la Finlande. Chaque mois, plus de 770 000 Canadiens utilisent les banques d'alimentation.

Malheureusement, honorables sénateurs, 40 p. 100 de ces Canadiens sont des enfants. Selon un rapport publié par le Conference Board, le taux de pauvreté infantile est passé de 12,8 p. 100 au milieu des années 1990 à 15,1 p. 100 au milieu des années 2000. Au cours de cette même période, le taux de pauvreté au sein de la population d'âge actif est passé de 9,4 p. 100 à 12,2 p. 100, et le taux de pauvreté chez les personnes âgées a lui aussi augmenté, passant de 2,9 p. 100 à 5,9 p. 100.

Ce rapport donne au Canada la note de B et le place au neuvième rang parmi 17 pays, derrière, entre autres, les Pays-Bas, l'Autriche, la Suisse et la Belgique.

Honorables sénateurs, la pauvreté est directement liée à la capacité des gens à se trouver un emploi, ce qui est particulièrement difficile pour les femmes. Le troisième rapport du gouvernement sur la mise en œuvre de son Plan d'action économique souligne les nombreux emplois qu'il a créés et qu'il va créer, emplois qui favorisent de manière disproportionnée les hommes.

Actuellement, 7 p. 100 des travailleurs de la construction sont des femmes; 7 p. 100 des travailleurs dans les métiers et dans le secteur du transport sont des femmes; et seulement 22 p. 100 des ingénieurs qui travaillent dans leur domaine sont des femmes.

Une voix : C'est honteux!

Le sénateur Jaffer : Ma question s'adresse au leader du gouvernement au Sénat. Que fait le gouvernement pour aider les femmes à se trouver un emploi en cette période difficile?

(1430)

L'honorable Marjory LeBreton (leader du gouvernement et ministre d'État (Aînés)) : Je remercie madame le sénateur de sa question, mais il me faudrait toute la période des questions pour y répondre en énumérant la totalité des initiatives prises par le gouvernement pour aider les Canadiennes à obtenir des emplois dans cette période de ralentissement économique.

Pour ce qui est de la pauvreté, honorables sénateurs, le gouvernement soutient les familles à faible revenu. Le Plan d'action économique du Canada relève le plafond de revenu au- delà duquel le supplément de la Prestation nationale pour enfants destiné aux familles à faible revenu et la Prestation fiscale canadienne pour enfants ne sont plus versés. Cette initiative assurera une prestation pouvant atteindre 436 $ aux familles à faible revenu ayant deux enfants.

Comme le sénateur le sait sans doute, les nouvelles prestations fiscales à la famille sont entrées en vigueur le 1er juillet. Nous avons doublé les allégements fiscaux accordés dans le cadre de la prestation fiscale pour le revenu du travail, ou PFRT, qui avait été établie dans le budget de 2007 pour aider les Canadiens et les Canadiennes à faible revenu à franchir ce qu'on appelle le « mur du bien-être social » et à accéder à l'emploi.

Notre Plan d'action économique prévoit en outre d'importants investissements dans le logement social afin d'aider les Canadiens à faible revenu, les personnes handicapées et les aînés. Ces investissements s'ajoutent à l'aide que nous accordons aux familles depuis l'introduction de la prestation universelle pour la garde d'enfants dans le budget de 2006 et la prestation fiscale pour enfants dans le budget de 2007. Grâce à la prestation universelle pour la garde d'enfants, le gouvernement verse chaque année plus de 2,4 milliards de dollars pour aider plus de 2 millions d'enfants.

Pour ce qui est de l'emploi des femmes, le gouvernement participe à de nombreux programmes, y compris le Programme de travail partagé, qui ont remporté un énorme succès. Grâce à ce programme particulièrement réussi, les entreprises peuvent garder leurs employés, hommes et femmes. Cette initiative a créé un climat de cohésion dans beaucoup de sociétés où les gens, pour la première fois de leur vie, ont commencé, à cause du partage du travail, à s'intéresser les uns aux autres et à s'entraider dans une période économique difficile.

Des voix : Bravo!

L'aide aux femmes réfugiées et immigrantes

L'honorable Mobina S. B. Jaffer : Je remercie madame le leader de sa réponse. Elle voudra peut-être nous fournir une réponse écrite détaillée sur ce que le gouvernement fait pour les femmes.

J'ai une autre question à poser. Malheureusement, quand il s'agit d'accéder à l'emploi, la situation des femmes réfugiées et immigrantes est encore pire. Selon l'organisation A Commitment to Training and Employment for Women, six mois après leur arrivée au Canada, seulement 32 p. 100 des femmes ont un emploi par rapport à 54 p. 100 des hommes. En 2001, les immigrantes avaient un taux de chômage de 8,1 p. 100 par rapport à 7 p. 100 pour les femmes nées au Canada et 6,8 p. 100 pour les hommes immigrants.

Que fait le gouvernement, non pour les familles, mais pour les femmes réfugiées et immigrantes, afin de les aider à trouver du travail?

L'honorable Marjory LeBreton (leader du gouvernement et ministre d'État (Aînés)) : Je remercie madame le sénateur de sa question. Il est intéressant d'examiner les chiffres du chômage causé par le ralentissement économique mondial. Même si la crise a touché aussi bien les hommes que les femmes, les femmes — qui travaillent souvent dans des domaines tels que l'enseignement, les soins infirmiers et les services de santé — ont été moins touchées dans certaines régions du pays que les hommes du secteur manufacturier.

Toutefois, le sénateur s'interroge au sujet des immigrants, et particulièrement des immigrantes. Je serai heureuse de fournir au sénateur Jaffer la longue liste des programmes mis en œuvre par le gouvernement pour aider les néo-Canadiens qui ont perdu leur emploi ou qui essaient d'entrer dans la population active. Je serai heureuse de fournir une longue réponse écrite, comme l'a demandé l'honorable sénateur.

Les aînés

Le Supplément de revenu garanti

L'honorable Sharon Carstairs : Honorables sénateurs, ma question s'adresse au leader du gouvernement au Sénat. Je voudrais commencer par remercier madame le leader d' avoir déposé la réponse du gouvernement au rapport final du Comité sénatorial spécial sur le vieillissement. Je sais que tous les membres de ce comité liront très soigneusement cette réponse, comme je l'ai fait.

Ma question porte sur la pauvreté parmi les aînés, c'est-à-dire parmi ces membres vieillissants de notre société. Nous savons que beaucoup d'aînés vivent mieux qu'ils ne l'ont jamais fait auparavant. Ils ont un revenu sensiblement supérieur à ce qu'ils touchaient dans le temps. Il reste cependant des groupes d'aînés qui

vivent bien en deçà du seuil de la pauvreté. Honorables sénateurs, je parle des aînés qui vivent seuls ainsi que des Autochtones âgés, des immigrants âgés et des femmes âgées.

Est-ce que madame le leader du gouvernement peut nous expliquer pourquoi le gouvernement n'a pas offert un supplément au Supplément de revenu garanti afin de mettre ces aînés à l'abri de la pauvreté? Comme madame le ministre le sait, notre rapport recommandait le versement d'un tel supplément, comme l'a fait sa propre commission sur les aînés.

Pourquoi le gouvernement n'a-t-il pas donné suite à ces recommandations?

L'honorable Marjory LeBreton (leader du gouvernement et ministre d'État (Aînés)) : Je voudrais remercier madame le sénateur Carstairs de sa question. Comme elle le sait, le nombre des aînés vivants en deçà du seuil de la pauvreté a beaucoup baissé ces dernières années. Bien entendu, cela ne diminue en rien l'importance du fait que beaucoup d'aînés se situent encore au-dessous de ce seuil.

Puisque madame le sénateur a lu le rapport, elle sait que le gouvernement a pris un certain nombre de mesures pour aider les aînés vivant en deçà du seuil de la pauvreté, notamment en augmentant la pension de vieillesse et le montant du SRG. Nous avons fait d'importants efforts pour prendre contact avec les aînés difficiles à joindre afin de nous assurer qu'ils profitent de tous les programmes auxquels ils ont droit.

Dans le Plan d'action économique du Canada, nous avons également réservé d'importantes sommes au logement pour les aînés à faible revenu. Nous nous sommes efforcés, dans le rapport que j'ai déposé au nom du gouvernement, de répondre à chacune des recommandations du rapport. Je crois que le gouvernement a exposé au Sénat et au comité, avec force détails, ce qu'il a fait pour aider les aînés, et surtout ceux qui se situent en deçà du seuil de la pauvreté.

Cette question a également été soulevée à la récente réunion fédérale-provinciale-territoriale à laquelle j'ai assisté à Edmonton. C'est un domaine dans lequel les provinces, les territoires et le gouvernement fédéral ont travaillé ensemble pour essayer, dans la mesure du possible, d'améliorer la qualité de vie de tous les aînés, et surtout de ceux qui ont un revenu limité.

Le sénateur Carstairs : Honorables sénateurs, la triste réalité, c'est que les aînés vivant en deçà du seuil de la pauvreté doivent choisir entre acheter à manger ou acheter les médicaments que leur médecin leur a prescrits. Nous sommes au Canada. Ces gens ne devraient pas avoir à faire un tel choix. Nous avons parlé des milliards que nous dépensons pour stimuler l'activité économique. La stimulation qui résulterait du versement d'un montant supplémentaire aux aînés qui vivent dans la pauvreté serait immédiate. On ne pourrait pas faire une dépense plus rapide.

Je voudrais encore une fois demander à la ministre de nous dire pourquoi son gouvernement refuse de porter le Supplément de revenu garanti à un niveau suffisant pour qu'aucun aîné n'ait à vivre en deçà du seuil de la pauvreté.

Le sénateur LeBreton : Il n'y a pas de doute que le gouvernement fédéral, les provinces et les territoires se débattent avec cette situation difficile. Il est cependant important de dire clairement ce que le gouvernement a fait, comme nous l'avons noté dans le rapport.

Ces derniers temps, nous avons considérablement augmenté les investissements destinés aux aînés, comme madame le sénateur le sait. Depuis janvier 2006, le Supplément de revenu garanti a augmenté de 7 p. 100, à part l'indexation trimestrielle. Cela représente un investissement de 2,7 milliards de dollars sur cinq ans. De plus, en 2008, l'exemption par rapport aux prestations de SRG a été majorée à 3 500 $, alors que le gouvernement précédent l'avait fixée à 500 $. De la sorte, les prestataires du SRG qui touchent d'autres revenus peuvent gagner un montant supérieur sans que soient réduites leurs prestations de SRG. Grâce à cette hausse de 500 $ à 3 500 $, les prestataires du SRG qui travaillent peuvent garder 1 500 $ de plus sur leurs prestations.

(1440)

Le sénateur signale que des aînés à faible revenu doivent choisir entre acheter de quoi manger et acheter leurs médicaments d'ordonnance. C'est une question à laquelle les provinces, qui sont responsables du système de soins de santé, travaillent fort avec divers groupes. À notre époque, étant donné les montants que le gouvernement fédéral transfère aux provinces pour les soins de santé, il ne devrait pas arriver que des aînés à faible revenu soient réduits à faire ce choix, du moins je l'espère.

Je vais demander davantage de renseignements au sénateur sur cette question précise. À la réunion fédérale-provinciale-territoriale, nous avons discuté de la question, et tous les ministres chargés des aînés se sont entendus pour dire qu'ils avaient accompli de grands progrès en vue d'atténuer le problème des aînés qui ne reçoivent pas les médicaments dont ils ont besoin.

Le sénateur Carstairs : Dernière question complémentaire. Le Supplément de revenu garanti n'a rien à voir avec les provinces, ni avec les territoires. Il s'agit d'un programme fédéral. Pourquoi madame le ministre n'accepte-t-elle pas sa responsabilité de ministre chargée des aînés et n'intervient-elle pas pour que le SRG soit majoré?

Le sénateur LeBreton : Honorables sénateurs, je crois avoir expliqué clairement ce que le gouvernement fédéral avait fait au sujet du Supplément de revenu garanti. Par exemple, il suffit maintenant de présenter une seule demande. Si j'ai parlé des provinces et des territoires, c'est parce que, dans sa question, madame le sénateur a signalé expressément la question des médicaments d'ordonnance.

Comme madame le sénateur le sait, la prestation des services de soins de santé relève des provinces et des territoires. J'ai simplement pris acte des opinions des ministres, qui se sont exprimés à la conférence, au sujet du coût des médicaments d'ordonnance. Visiblement, j'ai échoué, mais j'essayais de faire comprendre que les provinces et les territoires estiment avoir beaucoup progressé dans leurs efforts visant à ce que les aînés à faible revenu ne soient pas privés des médicaments dont ils ont besoin.

Quant au Supplément de revenu garanti, je sais fort bien, honorables sénateurs, qu'il s'agit d'un programme fédéral. Je suis prête à défendre le bilan du gouvernement à cet égard et je soutiens qu'il a fait plus de ce côté, depuis qu'il a été élu, que tout autre gouvernement par le passé.

Les affaires étrangères

Les armes nucléaires en Iran

L'honorable Hugh Segal : Honorables sénateurs, j'ai une question à poser au leader du gouvernement au Sénat. Selon des reportages qui ont paru dans la presse américaine et britannique, le premier ministre d'Israël se serait rendu dans la capitale de la Russie le 7 septembre pour informer les dirigeants russes de renseignements solides qui confirment la présence de scientifiques et d'experts de l'énergie nucléaire en Iran pour aider ce pays à se doter de l'arme nucléaire. Selon d'autres informations qui circulent, l'Agence internationale de l'énergie atomique aurait des données qui

permettent de croire que l'Iran est non seulement plus avancé qu'on ne le pensait, mais qu'il possède peut-être assez de matériaux fissiles pour fabriquer une bombe. Madame le leader du gouvernement pourrait-elle dire au Sénat et aux Canadiens où en est le gouvernement du Canada à ce sujet, au sujet des risques accrus, de notre appui aux alliés et aux partenaires commerciaux du Canada, notamment le Conseil de coopération du Golfe et Israël?

L'honorable Marjory LeBreton (leader du gouvernement et ministre d'État (Aînés)) : Je tiens à remercier le sénateur Segal de cette question qui porte sur un enjeu grave.

Le gouvernement estime que la révélation des installations iraniennes cachées d'enrichissement de l'uranium est complètement renversante. C'est inacceptable. Le gouvernement a condamné l'Iran parce que, continuellement et délibérément, il refuse de tenir compte des résolutions du Conseil de sécurité de l'ONU et des exigences de l'AIEA.

Cela dit, nous reconnaissons le fait que l'Iran a accepté d'autoriser l'AIEA à se rendre dans toutes ses installations, et nous comptons que les Iraniens lui offriront une coopération complète. Nous nous attendons à ce qu'il y ait une enquête exhaustive.

Comme le sénateur le sait, le Canada a mis en place des restrictions qui limitent les relations avec l'Iran dans le cadre d'une politique resserrée d'engagement contrôlé. Nous collaborons activement avec l'AIEA, le G8 et d'autres instances pour exhorter l'Iran à respecter à la lettre ses obligations en matière de non- prolifération des armes nucléaires.

Le sénateur Segal : Madame le ministre prendrait-elle note d'une question? Le Canada prépare-t-il, oui ou non, un régime de sanctions? Accepterait-il au besoin de déployer des forces dans la région si l'ONU ou nos alliés de l'OTAN sollicitaient son appui pour garder le détroit d'Ormuz ouvert à la navigation internationale?

Le sénateur LeBreton : J'espère que cette question est un peu prématurée. Comme le sénateur le sait, le premier ministre, le président Obama, le premier ministre Brown, le président Sarkozy et nos autres alliés, tous savent que le Canada appuiera toute mesure nécessaire pour lutter contre cette menace, une menace grave à la paix et à la sécurité internationales. Pour le moment, honorables sénateurs, je crois que le gouvernement s'en tiendra à la voie diplomatique. Nous pouvons espérer que l'Iran se conformera aux exigences de l'AIEA, de sorte que nous n'aurons pas à envisager un scénario comme celui évoqué par le sénateur.

L'adhésion d'Israël au Traité de non-prolifération

L'honorable Marcel Prud'homme : Honorables sénateurs, j'ai une question complémentaire à poser. Je vais certainement prononcer un discours sur cette question avant mon départ.

Madame le ministre pourrait-elle, en faisant les démarches proposées par le sénateur Segal, demander aussi au premier ministre, afin d'alléger les tensions au Moyen-Orient, d'inviter Israël à signer le Traité de non-prolifération, ce qui ferait comprendre dans la région que tout le monde est traité de la même manière?

L'honorable Marjory LeBreton (leader du gouvernement et ministre d'État (Aînés)) : Je tiens à remercier le sénateur de ses observations. Je vais transmettre son idée au gouvernement.

Je ne peux rien dire de plus pour l'instant. La situation quiprévaut en Iran est grave, et je me ferai un plaisir de transmettre le point de vue du sénateur au premier ministre et au ministre des Affaires étrangères.

Les affaires indiennes et le Nord canadien

Les allégements fiscaux et la création d'emplois

L'honorable Charlie Watt : Honorables sénateurs, ma question s'adresse au leader du gouvernement au Sénat. Sénateurs, le Plan d'action économique du Canada prévoit un montant de 6,2 milliards de dollars sur deux ans pour stimuler l'économie et appuyer la création d'emplois en allégeant l'impôt sur le revenu des particuliers, ce qui laissera aux Canadiens le soin de choisir la meilleure façon de dépenser leur argent.

Quelle initiative précise le gouvernement propose-t-il aux habitants du Nord, en matière d'allégement fiscal? Comment va-t- il appuyer la création d'emplois pour les Inuits au Canada, notamment dans les quatre régions visées par des revendications territoriales inuites?

L'honorable Marjory LeBreton (leader du gouvernement et ministre d'État (Aînés)) : Je remercie le sénateur Watt de sa question. Le premier ministre et son gouvernement s'intéressent beaucoup au Nord. Le premier ministre a justement parlé de mettre en place dans le Nord un régime de développement qui sera bénéfique pour ceux qui habitent dans cette région.

Comme le sénateur le sait, le Plan d'action du Canada prévoit 200 millions de dollars en éducation pour la construction de dix nouvelles écoles. L'éducation est la chose la plus importante pour faciliter la création d'emplois à l'intention des habitants du Nord et des Inuits.

(1450)

D'importantes rénovations ont été faites dans trois autres écoles, et dans le cadre du plan Chantiers Canada, nous avons consacré 103 millions de dollars sur trois ans à la construction de huit nouvelles écoles et à des projets de rénovation, notamment dans la Première nation de Red Earth, en Saskatchewan, qui, évidemment, n'est pas située dans le Nord.

Le Plan d'action économique prévoit également l'investissement de 100 millions de dollars sur trois ans dans le Partenariat pour les compétences et l'emploi des Autochtones, et 75 millions de dollars sur deux ans dans le Fonds d'investissement stratégique pour les compétences et la formation des Autochtones.

Le 2 avril, le ministre Strahl et Mary Simon, présidente d'Inuit Tapiriit Kanatami, ont signé l'Accord sur l'éducation des Inuit, qui prévoit la création d'un comité national chargé de l'élaboration d'une stratégie sur les résultats scolaires des élèves inuits. Nous avons également conclu des accords tripartites historiques dans d'autres provinces qui conféreront aux collectivités des Premières nations un plus grand pouvoir en matière d'éducation.

Le fait est que le gouvernement estime que les développements dans le Nord ne peuvent avantager seulement les habitants du Sud. Ils doivent avantager les gens qui vivent dans le Nord. Voilà pourquoi le gouvernement a entrepris de nombreuses initiatives dans le Nord pour y renforcer notre souveraineté. Plus important encore, le premier ministre et le gouvernement estiment que les populations du Nord doivent prendre davantage en main leur propre avenir en devenant des partenaires à part entière et en participant au développement du Nord, et il est déterminé à ce que cela se produise.

Les anciens combattants

Les prestations aux conjoints survivants

L'honorable Rod A. A. Zimmer : Honorables sénateurs, ma question s'adresse au leader du gouvernement au Sénat. Il n'est pas

facile pour les épouses des membres des forces armées, qui restent à la maison et qui s'occupent du foyer et des enfants, d'avoir un emploi stable, de toucher des avantages sociaux et d'assurer leur indépendance financière. Il est encore plus difficile pour les veuves d'avoir à rapidement faire la transition du rôle d'épouse dépendante financièrement à celui de conjointe survivante indépendante, compte tenu qu'elles ne reçoivent que la moitié de la pension de leurs époux décédés.

Anciens Combattants Canada permet à certaines veuves qui ne peuvent subvenir à leurs besoins de toucher l'allocation aux anciens combattants, qui représente au plus 1 273 dollars par mois. Nous savons tous qu'une personne seule touchant un tel revenu mensuel vit dans la pauvreté.

Madame le ministre, que fait le gouvernement pour aider ces personnes à ne pas finir leur vie dans la pauvreté en raison de leur choix de soutenir la décision de leurs conjoints, nos héros, de défendre notre pays?

L'honorable Marjory LeBreton (leader du gouvernement et ministre d'État (Aînés)) : Je veux remercier le sénateur Zimmer de cette excellente question fort judicieuse. J'apprécie qu'on me la pose. Comme les sénateurs le savent, le problème s'accentue parce que nous avons maintenant plus de militaires qui font du service outremer, plus de décès et de blessures, plus de personnes à la maison qui doivent composer soit avec le décès de leur conjoint soit avec le retour d'un conjoint gravement blessé physiquement ou mentalement. Le ministère de la Défense nationale et le ministère des Anciens Combattants ont travaillé fort pour trouver le moyen de combler les besoins des familles de nos soldats. La liste des mesures qu'ils sont en train de prendre est passablement longue. Je me ferai un plaisir de la fournir au sénateur dans une réponse différée.

[Français]

Les ressources humaines et le développement des compétences

La pauvreté chez les enfants

L'honorable Lucie Pépin : Honorables sénateurs, ma question s'adresse au leader du gouvernement. Nos données sur la pauvreté infantile sont intolérables. Derrière ces statistiques, des enfants souffrent. La hausse des prestations fédérales pour les enfants est un pas dans la bonne direction, mais encore trop insuffisant pour plusieurs familles. Il nous faut une action mieux coordonnée.

Madame le leader peut-elle nous dire pourquoi il est si difficile pour son gouvernement d'élaborer un plan d'action avec des objectifs clairs et des échéanciers dans le but de réduire la pauvreté chez les enfants?

[Traduction]

L'honorable Marjory LeBreton (leader du gouvernement et ministre d'État (Aînés)) : Je crois que la pauvreté chez les enfants et la pauvreté en général sont inacceptables, peu importe qui forme le gouvernement. Tous les gouvernements sont aux prises avec ce problème, quelle que soit leur allégeance politique.

Je n'accepte pas la prémisse du sénateur selon laquelle notre gouvernement n'a pas de plan ou ne prend pas cette question au sérieux. C'est tout le contraire. J'ai énuméré un certain nombre de choses que le gouvernement a faites en vue de lutter contre ce problème avec les familles touchées et aussi avec les provinces et les territoires. Il est toutefois injuste de laisser entendre que notre gouvernement n'a pas de plan ou qu'il reste indifférent à ce problème.

J'ai parlé de certaines choses que le gouvernement a faites dans ce domaine. Je ne veux absolument pas dire qu'il existe une solution facile. Il n'y en a pas. S'il existait une solution facile, nous n'aurions pas ce problème.

Je n'accepte pas l'affirmation du sénateur selon laquelle nous n'avons pas de plan et négligeons cette importante réalité dans notre société. Je serai heureuse de donner plus d'information au sénateur sur tous les programmes de tous nos ministères, parce qu'il n'y a pas qu'un ministère en cause. Beaucoup de ministères luttent contre ce problème, comme le ministère des Affaires indiennes et du Nord, le ministère de la Santé et, bien sûr, celui des Finances. Des composantes des programmes destinés à alléger le problème se trouvent aussi réparties dans plusieurs ministères, comme Ressources humaines et Développement des compétences.

Je serai heureuse de donner plus de détails à madame le sénateur, mais je veux qu'il soit bien clair que je n'accepte pas qu'elle dise que nous n'avons pas de plan et que nous restons indifférents devant les difficultés de ces gens.

[Français]

Réponse différée à une question orale

L'honorable Gerald J. Comeau (leader adjoint du gouvernement) : Honorables sénateurs, j'ai l'honneur de déposer une réponse différée à une question orale posée par le sénateur Rivest, le 22 avril 2009, concernant les ressources naturelles et l'industrie forestière.

Les ressources naturelles

L'industrie forestière

(Réponse à la question posée le 22 avril 2009 par l'honorable Jean- Claude Rivest)

L'Équipe spéciale Canada-Québec sur le secteur forestier a été mise sur pied comme un moyen pour les ordres de gouvernement fédéral et provincial de travailler davantage en concertation pour accélérer la mise en œuvre des mesures offertes aux collectivités et aux travailleurs du secteur forestier.

Notre gouvernement est ouvert à la mise sur pied de solutions pouvant permettre d'améliorer la coordination des programmes entre le gouvernement fédéral et les provinces. Le gouvernement fédéral travaille en partenariat avec toutes les provinces et œuvre en étroite collaboration avec elles pour trouver des moyens d'appuyer les collectivités et les travailleurs touchés par le ralentissement mondial des activités liées au secteur forestier.

À titre d'exemple, par l'entremise du Fonds d'adaptation des collectivités de 1 milliard de dollars, notre gouvernement, par l'entremise des agences de développement régional, collabore avec les gouvernements provinciaux afin d'atténuer les effets à court terme du ralentissement économique sur les collectivités canadiennes.

Dans ce cadre, le Nouveau-Brunswick s'est vu alloué environ 28 millions de dollars et l'Ontario près de 349 millions de dollars. De l'enveloppe totale dédiée au Nouveau-Brunswick, en date du 10 septembre 2009, plus de la moitié (soit 15,5 millions de dollars) a été allouée à diverses initiatives, incluant 9 millions de dollars pour des projets reliés au secteur forestier. En Ontario, plus du tiers (soit 131,5 millions de dollars) de l'enveloppe totale réservée à la province

a été engagé en date du 10 septembre 2009, incluant une aide substantielle pour des projets forestiers.

Dépôt d'une réponse à une question inscrite au Feuilleton

Le Conseil du Trésor—L'équité en matière d'emploi

L'honorable Gerald J. Comeau (leader adjoint du gouvernement) dépose la réponse à la question no 17 inscrite au Feuilleton — par le sénateur Mitchell.


[Traduction]

ORDRE DU JOUR

La Loi sur le tabac

Projet de loi modificatif—Troisième lecture

L'honorable Gerald J. Comeau (leader adjoint du gouvernement) propose que le projet de loi C-32, Loi modifiant la Loi sur le tabac, soit lu pour la troisième fois.

L'honorable Jane Cordy : Honorables sénateurs, je suis heureuse de prendre la parole aujourd'hui à l'étape de la troisième lecture du projet de loi C-32, Loi modifiant la Loi sur le tabac.

Après l'étude du projet de loi par le Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie, je maintiens mon appui à ce projet de loi sans amendement. Peut-être est-ce parce que je suis allergique à la fumée de cigarette et que je serais heureuse si tout le monde arrêtait de fumer.

Il y a toujours trop de jeunes qui fument au Canada et le projet de loi C-32 fait un pas dans la bonne direction pour empêcher que les campagnes de marketing éhontées de produits du tabac de l'industrie des produits du tabac ne ciblent les jeunes. Les petits cigares ou cigarillos et les feuilles d'enveloppe sont parfumés aux fruits, notamment au raisin, à la cerise, à la pêche, à la banane royale et au punch tropical. Ils contiennent des additifs, comme des vitamines et des sucres, qui goûtent comme les bonbons, ce qui les rend plus attrayants pour les jeunes.

L'objet du projet de loi C-32 est de protéger les enfants et les jeunes contre les pratiques de commercialisation de l'industrie des produits du tabac qui les encouragent à consommer des produits du tabac. Ces pratiques de marketing s'appuient notamment sur l'utilisation de ces parfums et de ces additifs qui facilitent la consommation de ces produits du tabac et, par conséquent, les rendent plus attrayants pour les jeunes.

Le projet de loi C-32 met fin à l'exception permettant la publicité des produits du tabac dans les publications dont au moins 85 p. 100 des lecteurs sont des adultes. Il interdit l'emballage, l'importation pour la vente, la distribution et la vente de petits cigares et de feuilles d'enveloppe, sauf dans des emballages en contenant d'au moins vingt. Nous savons que le rapport prix/quantité est un facteur très important pour les enfants.

J'appuie sans réserve le projet de loi C-32 sans propositions d'amendement et je crois qu'il présente des mesures importantes pour réduire le nombre de jeunes qui commencent à fumer au Canada. Toutefois, bon nombre de mes préoccupations sont demeurées entières après les témoignages entendus dans le cadre de l'étude du projet de loi C-32 par le Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie.

(1500)

Au cours de cette étude, plusieurs témoins ont soulevé la question de la contrebande des cigarettes. En 2008 au Canada, on a vendu 3 milliards de cigarettes de contrebande de plus qu'en 2007; ce qui signifie que les jeunes Canadiens avaient accès à 3 milliards de cigarettes de plus.

Les cigarettes de contrebande entraînent une perte de recettes de près de 2,4 milliards de dollars par année pour le gouvernement du Canada. La disponibilité des produits du tabac de contrebande sur le marché canadien constitue le principal problème dans la lutte contre le tabagisme chez les jeunes au Canada. Certaines études révèlent que, en Ontario, 48,6 p. 100 des mégots trouvés sur les terrains de jeu sont des cigarettes de contrebande. Les jeunes achètent ces cigarettes 6 $ la cartouche à des vendeurs qui font leurs ventes illégales dans les stationnements, un sac de sport à l'épaule. Voilà comment de nombreux jeunes se procurent leurs cigarettes et comment ils finissent par développer une dépendance au tabac.

J'estime que le projet de loi C-32 constitue un premier pas dans la bonne direction pour lutter contre le tabagisme chez les jeunes parce qu'il impose le retrait des tablettes des produits du tabac aromatisés. Ces produits sont présentés dans des emballages attrayants pour les enfants. Cependant, la loi canadienne interdit actuellement aux propriétaires de magasins de vendre ces produits à des mineurs et on sait que les enfants ne se procurent pas leurs cigarettes dans les tabagies.

Le projet de loi C-32 comme moyen de lutter contre le tabagisme chez les jeunes aura une efficacité limitée. Ce qu'il faut vraiment, c'est que le gouvernement cesse de fermer les yeux sur la contrebande de tabac et qu'il mette en place des politiques musclées pour cibler directement le marché de la contrebande du tabac. Outre ces politiques, le gouvernement doit faire preuve de leadership et de vision avant de pouvoir vraiment dire qu'il lutte contre le tabagisme chez les jeunes.

Il faut rendre les cigarettes inintéressantes pour que les jeunes n'aient pas envie d'en faire l'essai et, surtout , les produits du tabac ne doivent plus être accessibles aux jeunes Canadiens.

Lors des audiences du comité, on a soulevé une autre de mes grandes préoccupations. Il s'agit de l'idée que le gouvernement se fait de la consultation des parties intéressées dans le cadre de l'élaboration du projet de loi C-32. Or, quand les membres du comité ont interrogé les représentants du gouvernement à ce sujet, il est clairement ressorti que la consultation ne figurait pas en tête de liste des priorités du gouvernement. Les uns après les autres, les témoins ont déclaré que le gouvernement n'avait pas répondu à leurs demandes de consultation.

Je vais citer Paul Glover, sous-ministre adjoint à la Direction générale de la santé environnementale et de la sécurité des consommateurs de Santé Canada, qui a comparu devant le comité le 17 septembre. Voici la réponse qu'il a donnée lorsqu'on lui a demandé si Santé Canada avait consulté l'industrie du tabac et d'autres intervenants pendant l'élaboration du projet de loi C-32 :

En ce qui concerne la consultation, il s'agissait en quelque sorte d'un engagement se retrouvant dans la plate-forme électorale, auquel le processus électoral a donné une grande visibilité auprès de l'ensemble des Canadiens.

J'ai été très surprise de voir un haut fonctionnaire parler de la plate-forme électorale d'un parti politique pendant sa comparution devant un comité, surtout en qualifiant cet engagement de consultation.

La citation suivante est typique des réponses données par les témoins à des questions sur le degré de participation des intervenants pendant l'élaboration du projet de loi C-32. Au sujet des audiences du comité de l'autre endroit, Laurie Karson, directrice générale de l'Association Frontière Hors Taxes, a déclaré :

Quand on a demandé aux représentants de Santé Canada lors de ces audiences s'ils avaient consulté l'Association frontière hors taxes plus particulièrement, une question qui a été posée par Joyce Murray, ils ont répondu qu'ils l'avaient fait. Je ne suis pas d'accord. J'ai communiqué par la suite avec la ministre de la Santé pour la rencontrer directement, ce qui m'a été refusé. J'ai contacté Leah Canning à deux reprises et je me suis vu refuser un entretien. Vous conviendrez assurément qu'en tant qu'industrie, nous estimons qu'il y a un manque de consultation, et c'est très désolant.

J'espère vraiment que l'absence de consultation avec les intervenants n'est pas la politique officielle du gouvernement au moment de l'élaboration de projets de loi. La communication ouverte et les suggestions des Canadiens et des intervenants sont essentielles pour élaborer des projets de loi efficaces sur ces enjeux. La consultation avec les intervenants permet de minimiser toute possibilité de conséquence négative et non souhaitée qui pourrait découler d'un projet de loi.

En terminant, je réitère mon appui au projet de loi C-32, Loi modifiant la Loi sur le tabac, qui vise à réduire l'attrait des produits du tabac pour les jeunes Canadiens. Nous sommes tous d'accord pour dire que l'usage du tabac et la santé des enfants continuent d'être une importante source d'inquiétude pour les Canadiens. Je me félicite de l'intention louable de ce projet de loi.

J'espère que le gouvernement s'emploiera davantage à présenter des politiques issues de consultations avec les parties intéressées, car de telles consultations permettraient de s'attaquer activement au problème de la contrebande du tabac au Canada, qui demeure la principale source d'approvisionnement en tabac chez les jeunes.

Son Honneur le Président : Les honorables sénateurs sont-ils prêts à se prononcer?

Des voix : Le vote!

Son Honneur le Président : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?

(La motion est adoptée et le projet de loi, lu pour la troisième fois, est adopté.)

La Loi sur la Banque du Canada

Projet de loi modificatif—Deuxième lecture—Suite du débat

L'ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Grafstein, appuyée par l'honorable sénateur Pépin, tendant à la deuxième lecture du projet de loi S-230, Loi modifiant la Loi sur la Banque du Canada (agence de notation).

L'honorable Donald H. Oliver : Honorables sénateurs, je suis heureux de parler du projet de loi S-230, qui propose de modifier la Loi sur la Banque du Canada afin de prévoir la constitution d'une agence de notation par la Banque du Canada.

Plus précisément, le projet de loi propose que la Banque du Canada crée, en vertu de la Loi canadienne sur les sociétés par actions, une société chargée d'exercer les activités d'une agence de notation. La société ne serait pas une société d'État ni un mandataire de Sa Majesté. Les vérificateurs chargés de vérifier les comptes de la Banque du Canada effectueraient également la vérification des comptes de la société, qui ferait l'objet de vérifications par la vérificatrice générale. La loi modifiée n'entrerait pas en vigueur tant que les fonds nécessaires n'auraient pas été affectés.

Pour connaître les implications d'un tel changement, il importe de connaître les grandes fonctions de la Banque du Canada telles qu'elles sont énoncées dans la Loi sur la Banque du Canada. La Banque du Canada est responsable des aspects suivants : la politique monétaire canadienne, la monnaie canadienne, la gestion du système financier canadien ainsi que le rôle d'agent financier du gouvernement canadien et de gestionnaire des fonds publics. La gestion de l'agence de notation irait au-delà du mandat de la banque.

Avant de me pencher sur certains des problèmes que pourrait engendrer la constitution d'une filiale chargée de fournir directement des notations, j'aimerais parler des agences de notation et de ce qu'elles font. Je veux tout d'abord, honorables sénateurs, remercier le sénateur Grafstein d'insister sur la nécessité d'agir afin de résoudre la crise économique que nous traversons, à l'instar de nombreux autres pays, et sur la nécessité de nous assurer que les instruments financiers dont nous disposons, en particulier ceux qui sont complexes, fassent l'objet d'une notation appropriée.

(1510)

De toute évidence, l'absence de notation appropriée de certains instruments financiers et le fait que certains investisseurs n'ont pas fait preuve de rigueur dans l'administration de leurs affaires semblent avoir contribué à la crise financière mondiale actuelle.

Les sénateurs ne seront pas surpris de m'entendre affirmer qu'une intervention du secteur public est nécessaire dans certains cas. En règle générale, ma préférence va aux entreprises du secteur privé plutôt qu'à celles du secteur public. Aussi, je voudrais maintenant insister davantage sur le besoin de supervision, de transparence et de responsabilisation en ce qui a trait aux agences de notation plutôt que sur l'objet précis du projet de loi S-230, qui obligerait la banque, comme je le disais, à constituer une société sous le régime de la Loi canadienne sur les sociétés par actions chargée d'exercer les activités d'une agence de notation.

Je devrais peut-être commencer par expliquer pourquoi les agences de notation existent et ce qu'elles font, puis comparer cela à ce que la banque est tenue de faire. En bref, leurs analyses et leurs évaluations permettent de réduire le caractère asymétrique des renseignements fournis par les prêteurs et les investisseurs d'une part, par les émetteurs d'autre part, au sujet de la solvabilité des émetteurs de titre de créance. Essentiellement, ce qu'elles font n'a rien à voir avec la liquidité mais avec la solvabilité.

C'est ce que d'aucuns appellent le problème d'asymétrie de l'information, et d'autres, le problème de l'agent principal. Il est important de reconnaître aussi que le dispositif-cadre de Bâle II incorpore les cotes attribuées par les agences de notation de crédit dans les règles servant à pondérer les risques de crédit. Une faible cote signifie que des taux d'intérêt plus élevés pourraient être exigés en raison du risqué plus élevé, et les cotes peuvent influer sur l'admissibilité des instruments financiers à inclure dans les portefeuilles de certains investisseurs institutionnels assujettis à des restrictions quant à la nature et à l'importance des investissements dans des instruments à caractère spéculatif, c'est-à-dire les compagnies d'assurances et les agences de fiducie, entre autres. Leurs possibilités sont souvent limitées et elles doivent attendre de voir ce que les agences de notation diront d'un instrument donné.

Évidemment, même si la science n'est pas exacte, et peut-être justement pour cette raison, il est arrive récemment que le travail de

ces agences soit remis en question. Des noms tels que WorldCom, Enron et Parmalat, ainsi que la crise mexicaine et la crise asiatique, nous sont tous familiers. Ce sont les exemples qui nous viennent à l'esprit, outre la crise économique actuelle.

Pour situer mes observations en contexte, je devrais signaler que, à l'heure actuelle, les agences de notation de crédit, ou ANC, ne sont pas assujetties au régime réglementaire officiel de surveillance au Canada. Aucune agence ou organisation ne les réglemente. Par conséquent, des allégations selon lesquelles les cotes plutôt élevées attribuées par les ANC à des instruments financiers dits complexes, cotes que d'aucuns estiment résulter de conflits d'intérêt, auraient joué un rôle dans la crise financière actuelle, n'ont rien d'étonnant pour certains observateurs. Chose certaine, la valeur de certains des instruments auxquels on avait attribué une cote élevés est aujourd'hui considérablement inférieure à leur prix d'achat initial.

Plusieurs organisations ont plaidé en faveur de l'établissement d'un cadre réglementaire à l'intention des ANC. Les propositions avancées englobent généralement des éléments tels que des codes de déontologie et l'obligation de divulguer les renseignements ayant servi à prendre les décisions relatives aux cotations. Avant d'aborder les propositions qui ont été faites, j'aimerais d'abord faire état de ce qui s'est dit, au cours des derniers mois, au sujet des ANC au Canada et à l'étranger.

Honorables sénateurs, voici quelques observations provenant de trois sources : les témoignages entendus par le Comité permanent des finances de la Chambre des communes, les déclarations publiques de deux représentants de la Banque du Canada et le point de vue des autorités canadiennes en valeurs mobilières.

Pour comprendre le contexte dans lequel se situent ce qui se passe et ce qui se dit au Canada, il faut savoir que les investisseurs canadiens ayant acheté du papier commercial adossé à des actifs, ou PCAA, semblent s'être fiés largement aux cotes de crédit attribuées par Dominion Bond Rating Service, ou DBRS, lorsqu'ils ont évalué les risques associés à leurs investissements. Dans le sillage de la crise du PCCA canadien non bancaire, on s'est demandé dans quelle mesure les agences de notations du Canada avaient été incapables d'évaluer adéquatement le risque de ces instruments financiers complexes et avaient ainsi contribué à la crise.

Le professeur Ian Lee, qui a témoigné devant le Comité des finances de l'autre endroit à titre personnel, mais qui est également directeur du programme de maîtrise en administration des affaires à la Sprott School of Business de l'Université Carleton, a déclaré ceci : « Il y a des cotes de crédit frauduleuses. » Le Comité des finances a aussi entendu DBRS le même jour que les chefs d'État du G20 discutaient de la crise financière et préparaient leur propre communiqué, dont je vais parler plus tard.

Honorables sénateurs, je crois qu'il faut souligner que DBRS fournit des services de notation concernant 99 p. 100 des émetteurs de papier commercial au Canada et 98,6 p. 100 du marché des valeurs mobilières adossées à des actifs, selon l'Organisme canadien de réglementation du commerce des valeurs mobilières.

Le représentant de DBRS a dit ceci au comité de la Chambre des communes :

[...] DBRS est déterminé à garantir l'objectivité et l'intégrité de ses cotes, l'indépendance de son personnel d'analyse et la transparence de ses activités.

Le représentant, Peter Bethlenfalvy, a ajouté qu'un code de conduite avait été adopté conformément aux normes de l'Organisation internationale des commissions de valeurs, ou Code de l'OICV, dont je reparlerai tout à l'heure. Selon lui :

[...] le Code de l'OICV est toujours une base solide pour une surveillance réglementaire prudente dans toutes les administrations [...].

Il a également indiqué au comité qu'au cours des 18 mois précédents, DBRS avait amélioré la qualité et la transparence de ses mécanismes d'attribution des cotes de crédit, de manière à rétablir la confiance des gens à l'égard des cotes de crédit.

Enfin, il a indiqué au comité que DBRS n'avait pas prévu la crise mondiale des liquidités. DBRS se concentrait sur la qualité du crédit. Voici ce qu'il a dit en particulier à ce sujet :

Nous acceptons notre part de responsabilité pour les cotations, pour toutes les cotations que nous faisons. Ce sont des opinions. Elles sont fondées sur des méthodologies publiques [...] Nous acceptons donc la responsabilité telle qu'elle s'inscrit dans le contexte d'événements imprévus survenus sur le marché mondial.

Il importe de rappeler qu'une cote de crédit est une évaluation du risque que présente le crédit , de la possibilité que les actifs puissent financer le capital et les intérêts compte tenu des conditions rattachées à une dette précise. Il ne s'agit pas de la mesure de la liquidité du titre, ce qui s'appelle le « risque de liquidité », ou du prix auquel le titre peut être vendu sur le marché, ce qui s'appelle le « risque du marché « .

Dans un discours qu'il a prononcé en avril 2008, le sous- gouverneur de la Banque du Canada, David Longworth, a déclaré ceci :

Cette quête de rendements élevés a [également] eu pour effet de fortement stimuler la demande — et la création — de produits financiers structurés plus complexes...

... tels que les produits dérivés.

Ces instruments financiers complexes étaient évalués par les agences de notation du crédit à l'aide de la même échelle que celle qui s'appliquait aux titres de dette ordinaires des sociétés. Certains vendeurs insistaient sur le fait que ces produits avaient une note de crédit élevée — beaucoup étaient cotés AAA — mais passaient sous silence leurs autres caractéristiques.

Comme leurs liquidités.

Bon nombre d'investisseurs ont failli à leur devoir d'analyse et de diligence raisonnable et se sont fiés exagérément aux notes de crédit en tant qu'indicateurs du risque ultime associé à ces instruments d'emprunt complexes [...] ils ont négligé de prendre en considération d'autres risques, comme le risque de liquidité. Dans bien des cas, la complexité de ces produits les rendait opaques, et trop souvent les investisseurs ont placé leur argent et leur confiance dans des instruments qu'ils ne comprenaient pas entièrement.

Il a ajouté que les agences de notation se sont rendu compte tardivement des problèmes de qualité que présentaient ces produits et cela a conduit à un déclassement de certains produits structurés.

À mon avis, M. Longworth a dit quelque chose de très important. Il est clair que des produits financiers opaques soulèvent des questions et que certaines agences de notation et certaines pratiques suscitent des préoccupations, mais le manque de diligence des investisseurs eux-mêmes est également un problème. M. Longworth l'explique très bien lorsqu'il affirme qu'une plus grande transparence des instruments financiers ne suffit pas et que les

investisseurs doivent aussi savoir comment interpréter l'information.

(1520)

Il a également fait preuve d'une grande perspicacité lorsqu'il a dit :

Cependant, étant tributaires de leur réputation, elles [les agences de notation] sont fortement incitées à améliorer le contenu informatif des cotes qu'elles attribuent aux instruments financiers complexes, à veiller à ce que tout renseignement important soit divulgué de manière rapide et concise, et à résoudre la question des conflits d'intérêts inhérents au processus de notation. Elles se sont montrées désireuses et capables de tirer des leçons de leurs erreurs, et elles s'emploient continuellement à affiner leurs méthodes de notation. Cela ne veut pas dire pour autant que les investisseurs peuvent se fier uniquement au jugement d'autres personnes. En définitive, ce sont eux qui doivent assumer la responsabilité de comprendre et de gérer le risque de crédit associé à leurs portefeuilles.

La notion de responsabilité des investisseurs a été réitérée par un autre sous-gouverneur de la Banque du Canada, Pierre Duguay, en janvier 2009, lorsqu'il a dit :

[...] les investisseurs de toutes catégories — même les plus avisés — ne connaissaient ou ne comprenaient pas toujours les produits dans lesquels ils investissaient. Leur quête de rendement effrénée en a conduit bon nombre à supposer que les autres savaient ce qu'ils faisaient et que le risque avait été évalué adéquatement. Ces investisseurs ont substitué le jugement des agences de notation et d'autres acteurs financiers à leur propre devoir de diligence raisonnable.

Les Autorités canadiennes en valeurs mobilières, ou ACVM, ont aussi examiné plusieurs questions se rapportant aux agences de notation. En décembre 2007, les ACVM ont annoncé la création d'un groupe de travail chargé d'examiner les questions de réglementation des valeurs mobilières dans le sillage de la crise du crédit et de formuler des recommandations quant aux mesures à prendre au chapitre de la réglementation. En octobre 2008, les ACVM ont publié un document de consultation qui contenait les propositions du groupe de travail.

En ce qui a trait aux agences de notation, le groupe de travail a proposé la mise en œuvre d'un cadre réglementaire s'appliquant aux agences de notation qui a) les obligerait à se conformer à la disposition du Code de conduite pour les agences de notation récemment modifié de l'Organisation internationale des commissions de valeurs (OICV) en vertu de laquelle il faut « se conformer ou expliquer » et (b), donner aux organismes de réglementation le pouvoir d'exiger des changements aux pratiques et procédures des agences de notation.

Le groupe de travail a également souligné qu'il se pencherait sur l'opportunité d'exiger la divulgation de tous les renseignements fournis par un émetteur à une agence de notation et utilisés par cette dernière pour établir et contrôler les notations. De plus, on devait étudier la possibilité de réduire la dépendance envers les notations dans les lois régissant les valeurs mobilières au Canada.

Honorables sénateurs, il n'est pas étonnant de constater que, sur la scène internationale, les leaders des pays du G20 se préoccupent également de la question des agences de notation et ont discuté de ces préoccupations au cours de bon nombre de leurs récentes rencontres, la plus récente ayant eu lieu aux États-Unis. Ils ont exprimé leur opinion à cet égard dans un communiqué le 2 avril 2009.

Honorables sénateurs, je crois que leur opinion est assez importante pour que je lise en entier les parties importantes, et je demande votre indulgence à cet égard.

Le 2 avril, les pays membres du G20 ont dit dans leur communiqué :

Nous nous sommes entendus sur la nécessité d'une surveillance plus efficace des activités des agences de notation, qui sont des participants essentiels du marché. En particulier, nous avons convenu que :

toutes les agences de notation dont les cotes sont utilisées à des fins de réglementation devraient être assujetties à un régime de surveillance réglementaire qui comprend l'enregistrement. Ce régime devrait être mis en place d'ici la fin de 2009...

C'est-à-dire octobre.

... et respecter les principes fondamentaux du code de conduite de l'Organisation internationale des commissions de valeurs (OICV); l'OICV devrait exercer un rôle de coordination pour assurer une conformité complète;

les autorités nationales veilleront à la mise en conformité et exigeront des changements aux pratiques et aux procédures qu'utilisent les agences de notation pour gérer les conflits d'intérêts et assurer la transparence et la qualité du processus de notation. Les agences de notation devraient, entre autres choses, distinguer les cotes des produits structurés et divulguer dans leur intégralité leurs cotes antérieures ainsi que les renseignements et les hypothèses qui sous-tendent le processus de notation.

C'est là un élément clé, honorables sénateurs, « les cotes des produits structurés et divulguer dans leur intégralité leurs cotes antérieures », c'est-à-dire le niveau de précision de leurs prédictions, « ainsi que les renseignements et les hypothèses qui sous-tendent le processus de notation. »

Le cadre de surveillance doit être harmonisé entre les divers pays et être soutenu par un échange d'informations adéquat entre les autorités nationales, y compris par l'intermédiaire de l'OICV;

le Comité de Bâle doit faire avancer son examen du rôle des cotes externes dans la réglementation prudentielle et déterminer si des mesures d'incitation indésirables doivent être supprimées.

Honorables sénateurs, je pense que ces pays devraient vérifier, et qu'ils vont effectivement vérifier, dans quelle mesure les agences de notation qui exercent leur activité sur leur territoire respectent ces points de vue, et je crois aussi qu'ils vont, au besoin, prendre des mesures correctives. De toute évidence, les leaders du G20 sont d'avis que des changements doivent être apportés relativement aux agences de notation.

En terminant, honorables sénateurs, permettez-moi de dire que j'appuie sans réserve la notion selon laquelle il importe d'exercer une surveillance plus étroite sur les agences de notation. Ces agences jouent un rôle important au sein du système financier. Dans son projet de loi, le sénateur Grafstein propose que la Banque du Canada soit tenue de constituer une société chargée d'exercer les activités d'une agence de notation. Même si le fait qu'il s'agirait, somme toute, d'une agence de notation publique est intéressant pour ceux qui font davantage confiance aux entités publiques qu'aux institutions du secteur privé, certaines questions clés ne sont

toujours pas réglées, notamment le coût de la nouvelle entité, la mesure dans laquelle celle-ci ferait concurrence aux institutions du secteur privé en vertu de règles du jeu équitables, et la valeur précise que cette entité ajouterait au secteur, si je puis m'exprimer ainsi.

Je me demande si la solution à nos difficultés actuelles, en ce qui a trait aux agences de notation, ne repose pas davantage sur un meilleur cadre réglementaire pour les agences existantes et futures du secteur privé que sur la création d'une nouvelle entité par la Banque du Canada.

L'exploitation d'une agence de notation est contraire à la tendance internationale et au fait que les banques centrales doivent se concentrer sur leur mandat de base. Je signale qu'il pourrait y avoir des conflits possibles entre l'exploitation d'une agence de notation et la poursuite du mandat de base de la banque centrale. L'exploitation d'une agence de notation contraindrait la banque centrale à publier des évaluations du crédit pour des entités individuelles. Cette exigence pourrait gêner l'affectation efficace de ressources dans l'économie, étant donné que les investisseurs privés pourraient accorder une trop grande confiance aux points de vue de la banque centrale, ce qui minerait leur volonté de faire preuve de diligence raisonnable, ou de solliciter le point de vue d'autres agences de notation.

Une agence de notation centrale pourrait aussi décourager la concurrence dans le secteur de la notation, ce qui aurait pour effet d'empêcher les investisseurs d'avoir accès à différents points de vue sur la solvabilité d'entités et d'effets de commerce. En outre, compte tenu que la Banque du Canada fait partie du Comité de surveillance des institutions financières, les investisseurs pourraient croire que les notations d'institutions financières vont bénéficier de l'accès interne à des renseignements détenus par le comité de surveillance, ce qui pourrait nuire à la surveillance efficace des institutions financières réglementées.

Si la banque devait exploiter une agence de notation, il se pourrait que, à titre d'agence du gouvernement fédéral, elle expose le gouvernement au risque d'être tenu publiquement responsable des notations financières faites par sa filiale. Autrement dit, le gouvernement pourrait être tenu responsable.

Les notations exigent évidemment une bonne dose de jugement. Or, ce jugement pourrait exposer le gouvernement au risque d'être tenu publiquement responsable de toute erreur de notation faite par une agence de notation qui appartiendrait à la banque centrale.

Les agences de notation jouent un rôle important sur les marchés financiers en évaluant et en disséminant des renseignements sur la solvabilité des titres et d'émetteurs tels que les gouvernements, les institutions financières et lessociétés. Nous sommes tous conscients du fait que la crise économique actuelle a fait ressortir des lacunes dans le secteur de la notation financière.

Bref, ce qui importe, c'est de s'assurer que le secteur de la notation fonctionne correctement et qu'il fasse l'objet d'une surveillance appropriée, compte tenu des conflits d'intérêts inhérents qui existent au sein de l'industrie.

Comme le Conseil de stabilité financière le mentionne dans son rapport d'avril 2008 sur les façons d'améliorer la résilience des marchés et des institutions, les piètres évaluations de crédit faites par les agences ont contribué à provoquer toute la série d'événements qui ont débuté en 2007 et qui ont frappé le marché du crédit.

Honorables sénateurs, vous devriez maintenant être conscients des conflits qui pourraient surgir si la Banque du Canada était tenue de créer et d'exploiter une agence de notation.

(1530)

Par ces temps extraordinaires, nous croyons tous qu'il est essentiel de laisser la Banque du Canada s'occuper de ses obligations de base sans lui imposer le fardeau supplémentaire d'une fonction nouvelle et incertaine, surtout si l'exploitation d'une agence finit par constituer un obstacle majeur aux opérations actuelles de la Banque. Je dois rappeler aux sénateurs qu'une telle agence peut exposer le gouvernement à des risques accrus.

Enfin, en créant une agence de notation sous contrôle fédéral, le Canada irait à l'encontre de la tendance établie chez nos partenaires du G20, ce qui mettrait en cause son engagement à coopérer avec ces partenaires pour régler la crise économique actuelle.

Je vous remercie, honorables sénateurs, de m'avoir donné l'occasion de présenter quelques observations sur ce projet de loi.

L'honorable Jerahmiel S. Grafstein : Honorables sénateurs, je voudrais d'abord remercier le sénateur pour son analyse approfondie et équilibrée de mon projet de loi. Lui et moi sommes d'accord : les agences de notation ne sont soumises à aucune surveillance, et tout le monde s'entend pour dire qu'elles sont responsables de cette lacune fondamentale de notre système économique. Tout le monde est d'accord là-dessus.

J'apprécie en outre le fait que le sénateur a attiré notre attention sur le Feuilleton en citant des extraits de la Déclaration sur le renforcement du système financier du Sommet de Londres. Les extraits cités, qui se trouvent aux pages 19 et 20 du Feuilleton , ont servi de base à la proposition que je formule dans ce projet de loi particulier. Je suis également d'avis, comme le sénateur, qu'il y a un conflit entre le rôle de cette agence et le mandat de la banque.

J'ai une seule question à lui poser. La déclaration fixe une échéance. Le G20 a convenu de mettre en place un mécanisme de surveillance d'ici la fin de l'année. Le sénateur n'a pas précisé si le Canada a honoré ou non cet engagement. S'il l'a fait, de quelle façon?

Le sénateur Oliver : Honorables sénateurs, nous n'avons pas encore atteint la fin de l'année. Nous n'avons pas encore honoré cet engagement, mais le Canada, en tant que membre important du G20, l'examine très sérieusement. Le gouvernement a jusqu'à la fin de l'année. Nous sommes encore au mois d'octobre.

Le sénateur Grafstein : Dans ces conditions, honorables sénateurs, je propose d'ajourner le débat. Je répondrai...

Son Honneur le Président : Nous reviendrons peut-être plus tard au sénateur. Je crois qu'il a déjà prononcé un discours dans le cadre de ce débat.

L'honorable Lowell Murray : Honorables sénateurs, oui, je doute que le sénateur Grafstein, qui a ouvert le débat à l'étape de la deuxième lecture, puisse maintenant en proposer l'ajournement.

Quoi qu'il en soit, ma question — si le sénateur Oliver accepte d'y répondre — concerne ses intentions et celles du gouvernement quant à ce projet de loi. Je respecte l'opposition du sénateur Oliver à la principale disposition de cette mesure. Je suppose qu'il parlait au nom du gouvernement. Je voudrais cependant savoir si le sénateur peut nous donner l'assurance que la partie gouvernementale n'essaiera pas de bloquer le projet de loi à l'étape de la deuxième lecture et d'en empêcher le renvoi au comité pour étude.

Comme le sénateur le sait, c'est la pratique quasi invariable du Sénat, quand il s'agit de projets de loi d'initiative parlementaire, de les adopter à l'étape de la deuxième lecture et de les renvoyer au comité compétent, sans pour autant qu'aucun sénateur ne s'engage à les appuyer en fin de compte.

J'ai été plutôt déconcerté l'autre jour lorsque le gouvernement a essayé de bloquer le projet de loi d'initiative parlementaire du sénateur Lapointe. Je demande donc au sénateur Oliver s'il peut me donner l'assurance, au nom du gouvernement, que son côté permettra l'adoption du projet de loi à l'étape de la deuxième lecture et n'essaiera pas d'empêcher son renvoi au comité.

Le sénateur Oliver : Je remercie le sénateur de sa question. Les sénateurs ont entendu le sénateur Grafstein dire que lui et moi nous entendions sur un certain nombre de points. Premièrement, il y a une crise économique. Deuxièmement, les pays membres du G20 s'intéressent très sérieusement aux agences de notation. Troisièmement, nous croyons que ces agences ont une certaine responsabilité dans le ralentissement économique qui a commencé à se manifester à l'automne 2007. Quatrièmement, ce n'est pas seulement le G20 qui examine la question des agences de notation. D'autres organismes le font aussi.

Le sénateur Grafstein a soulevé, dans ce projet de loi, plusieurs questions économiques et financières importantes qui méritent d'être débattues au Sénat. Je ne parle pas au nom du gouvernement. Je parle en mon nom personnel. Ici, c'est le sénateur Comeau qui parle au nom du gouvernement. Je crois personnellement que ce projet de loi est très important et qu'il mérite un débat plus approfondi.

Le sénateur Murray : Je suppose que mon collègue n'empêchera pas le renvoi du projet de loi au comité.

Le sénateur Oliver : Je donne au sénateur Murray ma parole que je ne le ferai pas.

L'honorable Stephen Greene : Je propose l'ajournement du débat.

Son Honneur le Président : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?

(Sur la motion du sénateur Greene, le débat est ajourné.)

Projet de loi sur les langues autochtones du Canada

Deuxième lecture—Ajournement du débat

L'honorable Serge Joyal propose que le projet de loi S-237, Loi visant la promotion des langues autochtones du Canada ainsi que la reconnaissance et le respect des droits linguistiques autochtones, soit lu pour la deuxième fois.

— Honorables sénateurs, je voudrais vous rappeler que ce projet de loi a pour titre : Loi visant la promotion des langues autochtones du Canada ainsi que la reconnaissance et le respect des droits linguistiques autochtones.

La première chose que j'ai faite avant de déposer ce projet de loi a été d'envoyer une ébauche à nos sénateurs autochtones. Beaucoup ont répondu par écrit pour faire des observations à l'appui de cette mesure. D'autres m'ont répondu verbalement, également pour exprimer leur appui et formuler des commentaires.

J'ai également pris l'initiative d'envoyer la première ébauche aux représentants des Premières nations, à l'Inuit Tapiriit Kanatami, au Ralliement national des Métis, au Conseil des Mohawks, au secrétariat des Inuits du Labrador et du Québec et à d'autres groupes qui portent un intérêt professionnel aux langues autochtones. Je l'ai donc fait avant qu'un sénateur non autochtone ne prenne l'initiative de déposer un tel projet de loi.

Je dois informer les sénateurs que les groupes que je viens de mentionner ont tous donné leur appui de principe au projet de loi et qu'ils souhaitent tous qu'il soit débattu et finalement adopté par le Parlement.

Avant de passer à la substance du projet de loi, je voudrais rappeler aux sénateurs que cette mesure nous invite à réfléchir à l'histoire de notre pays. Le premier obstacle auquel se sont heurtés les colons européens à leur arrivée au Canada au XVIe et au XVIIe siècles a été celui de la langue. Les colons parlaient le français et l'anglais. Ils ont dû apprendre à communiquer avec les peuples autochtones. Ils ne sont pas entrés dans le pays comme des conquérants, ils y sont arrivés comme colons. Ils ne voulaient pas imposer leur présence par les armes. Ils souhaitaient négocier leur établissement. C'est ce qu'a fait Jacques Cartier à son arrivée à Gaspé. C'est ce qu'a fait Champlain lorsqu'il a débarqué en Acadie. Ils ne sont pas allés là à la tête de milliers de soldats. Ils sont venus au Canada de bonne foi pour essayer de coloniser la terre. Très tôt, la langue est devenue le principal obstacle à la réalisation de leurs vœux. Qu'ont-ils fait? Les Autochtones étaient bien trop fiers pour essayer d'apprendre la langue des nouveaux venus. Les colons ont donc dû apprendre les langues des Autochtones pour communiquer avec eux. Ils n'ont pas appris aux Autochtones l'anglais ou le français.

(1540)

Le contraire était la règle à l'époque. Les missionnaires étaient les mieux équipés pour apprendre les langues autochtones.

Le premier dictionnaire et la première grammaire sont l'œuvre du père Jean de Brébeuf. Mon collègue, le sénateur Nolin, se souviendra d'avoir vu cet ouvrage lorsqu'il était à l'école, pendant sa jeunesse. Le père Brébeuf est le premier auteur d'un dictionnaire et d'une grammaire hurons. Les Hurons formaient les tribus qui occupaient l'emplacement de Québec, de même que les Algonquins. Le ministère des Colonies, en France, a bientôt commencé à se plaindre que les Autochtones n'apprenaient pas le français, mais que c'était les Français qui apprenaient les langues autochtones. Les Autochtones occupaient une position dominante. Les ressources que les Français voulaient exploiter étaient sous leur emprise. Les colons étaient, d'une certaine manière, à la merci des peuples autochtones et devaient apprendre leur langue. Cette relation a duré plus de deux siècles.

Les Autochtones avaient tant de pouvoir qu'en 1700, lorsque le gouvernement français a voulu signer des traités de paix avec tous les groupes autochtones du Canada, le gouverneur de Montréal a envoyé cinq missionnaires, cinq jésuites, qui pouvaient chacun s'exprimer couramment dans l'une des langues autochtones, soit l'iroquois, l'abénaquis, l'algonquin ou le huron. Il les a envoyés comme interprètes et diplomates parce qu'ils étaient capables de parler les langues de ces nations.

Lorsqu'ils se sont tous réunis à Montréal, en août 1701, les négociations se sont déroulées en langue autochtone, et non en français. Les participants parlaient uniquement les langues autochtones. Lorsqu'ils ont signé le traité, ils n'ont pas signé leur nom en français. Ils ont signé leur nom avec le dessin emblématique de leur tribu : la souris, le loup, l'écureuil, l'orignal, l'ours et le lièvre. Si les sénateurs jettent un coup d'œil sur les anciens traités, ils n'y verront pas des noms, mais bien des dessins. Il est clair que, pendant 200 ans, la langue des affaires au Canada était la langue des Autochtones. C'est dans cette langue qu'on pouvait acheter des fourrures aux nations indiennes de l'Ouest canadien et de la région des lacs Supérieur et Huron.

Cet équilibre n'a changé qu'au début du XIXe siècle, lorsque l'économie du Canada s'est transformée, que le commerce de la fourrure s'est effondré et que le bois a remplacé la fourrure à titre de principale ressource du Canada. Il fallait couper le bois. C'étaient les colons, et non les Autochtones, qui coupaient et exploitaient le bois.

Autrement dit, une fois que les Canadiens du XIXe siècle n'ont plus eu besoin de traiter avec les peuples autochtones pour profiter des terres et des ressources naturelles, ils ont cessé d'apprendre les langues autochtones et l'équilibre s'est rompu, au point où une loi a été adoptée en 1857 par l'Assemblée législative des provinces unies du Canada. Les sénateurs se souviendront qu'au milieu du XIXe siècle, les provinces de l'Ontario et du Québec formaient un parlement, le Parlement des provinces unies du Canada. En juin 1857, ce parlement a adopté une loi pour tenter d'assimiler les peuples autochtones et les amener à délaisser l'usage de leurs langues.

Cette loi avait pour titre « Acte pour encourager la Civilisation graduelle des Tribus Sauvages en cette Province, et pour amender les Lois relatives aux Sauvages ». Il faut se rappeler que cela se passait en 1857. Le premier alinéa du préambule de la mesure législative est ainsi libellé :

Attendu qu'il est souhaitable d'encourager la civilisation graduelle dans les tribus sauvages de cette province, de même que la suppression graduelle de toute distinction juridique entre les Indiens et les autres citoyens canadiens de Sa Majesté...

Plus loin dans la loi, il est question de la nomination d'un commissaire :

... lorsque ces commissaires auront fait rapport par écrit au gouvernement à l'effet qu'un Indien de sexe mâle d'au moins vingt-cinq ans démontre la capacité et la volonté de parler, de lire et d'écrire dans la langue française ou anglaise, qu'il possède un minimum d'instruction, qu'il jouit d'une bonne moralité et qu'il est exempt de dettes, il relèvera de la compétence du gouverneur de produire un avis dans la Gazette officielle de cette Province à l'effet que ledit Indien est émancipé en vertu de cette Loi...

C'était là une mesure qui encourageait les Autochtones à délaisser leur langue ancestrale et à se tourner vers le français ou l'anglais pour tirer profit de la loi qui avait été adoptée, notamment de tous les avantages liés à la propriété foncière.

Lorsque la Confédération a vu le jour en 1867 et que les Indiens sont devenus la responsabilité du gouvernement fédéral, la Loi sur les Indiens a été adoptée. Les sénateurs se souviendront de ce que nous avons entendu et appris lorsque nous avons accueilli des représentants autochtones dans cette enceinte, il y a deux ans, à la suite des excuses officielles du gouvernement pour sa politique concernant les pensionnats autochtones. À l'époque, nous avons appris que l'un des principaux objectifs de cette politique était de supprimer l'indianité de l'Indien. Qu'est-ce que l'indianité? C'est la langue et la culture.

De jeunes enfants autochtones furent arrachés à leur famille et à leur collectivité, emmenés à 100 kilomètres de chez eux et forcés à abandonner l'usage de leur langue maternelle dans un cadre punitif et privatif, sous le nouveau régime d'apprentissage du français ou de l'anglais. Il est ahurissant de lire les récits des peuples autochtones du Canada de cette époque. Permettez-moi de relater ce que nous a dit un témoin lors des audiences concernant les pensionnats indiens. Un ancien élève a révélé qu'on l'avait mis en punition, à genoux, dans un coin de la classe, pour avoir parlé en ojibway. Un autre se faisait laver la bouche avec du savon chaque fois qu'il s'exprimait dans sa langue. Le châtiment était l'essence de cette politique. C'était une politique adoptée délibérément par le gouvernement afin d'éliminer la distinction que représente le fait d'être Autochtone. Nous savons tous — nous l'avons entendu en cette enceinte — combien il est émouvant d'entendre décrire comment cette politique a mené directement à l'abandon par les Indiens de leurs langues autochtones.

Nous avons entendu un des chefs nationaux mentionner que, des 55 langues autochtones qui étaient parlées au Canada, seulement trois ont survécu, soit l'inuktitut, langue de notre collègue, le sénateur Watt, le cri et l'ojibway. Les 52 autres langues sont toutes plus ou moins éteintes pour la simple raison que la langue ne s'est pas transmise de la mère aux enfants au fil des générations. Les Autochtones ont perdu jusqu'à la connaissance élémentaire de leur propre langue.

La Commission royale sur les peuples autochtones fut établie par l'ex-premier ministre Mulroney. Dans la conclusion du rapport de la Commission royale Erasmus-Dussault, en 1996, on dit ceci :

La langue est le principal véhicule de la transmission de la culture. Sa revitalisation est donc, de l'avis de la commission, la clé du rétablissement des Premières nations, des Inuits et des Métis et du renouvellement de leur culture.

Honorables sénateurs, il ne fait aucun doute —- et je cite ici Mme Leitch — que :

Les langues autochtones se trouvent indéniablement au cœur de la quiddité indienne.

(1550)

Les francophones ont maîtrisé la langue française et le patrimoine que la culture transmet d'une nation à l'autre. Les anglophones ont maîtrisé la langue anglaise ainsi que la culture qui l'appuie et lui permet de s'épanouir. Les Autochtones qui ne parlent pas la langue de leur nation ne peuvent exprimer leurs traditions, leur religion, leurs sentiments ou leurs convictions. Ils doivent plutôt emprunter la langue d'autrui, ce qui ne leur permet pas d'exprimer leur identité si profondément ancrée.

Il y a deux ans, le chef Phil Fontaine prononçait ces paroles au Sénat en réponse aux excuses présentées par le gouvernement :

Nous réclamons un traitement équitable. Il serait déjà bien tragique de voir disparaître une seule de nos langues autochtones, mais nous sommes confrontés à la disparition progressive de 52 langues autochtones. La catastrophe nous attend. Il faut absolument faire quelque chose pour redresser la situation.

Honorables sénateurs, je ne me prononce pas au sujet d'un projet de loi tombé du ciel. Ce projet de loi est plutôt le résultat de deux grandes études. La première est celle du Groupe de travail sur les langues et les cultures autochtones, créé par le gouvernement fédéral. En juin 2005, ce groupe a présenté son rapport, intitulé Le début d'un temps nouveau : Premier rapport en vue d'une stratégie de revitalisation des langues et des cultures des Premières nations, des Inuits et des Métis. Le rapport recommande notamment :

Que le Canada adopte une loi visant à reconnaître, à protéger et à promouvoir les langues des Premières nations, des Inuits et des Métis en leur qualité de premières langues du Canada. Cette loi, qui sera élaborée avec la collaboration des Premières nations, des Inuits et des Métis, doit reconnaître le statut de nos langues au sein de la Constitution, affirmer qu'elles constituent un des fondements nationaux des peuples des Premières nations, des Inuits et des Métis.

Les peuples autochtones ont participé à la rédaction de ce rapport avec l'appui de Patrimoine canadien. Ils soulignent leur conviction profonde selon laquelle il faut poser un geste pour accorder un statut à leurs langues.

Honorables sénateurs, les Premières nations ont préparé une ébauche de projet de loi qui a été présentée à la réunion nationale de l'Assemblée des Premières Nations qui s'est tenue à Halifax en juillet

2007. Cette mesure s'intitulait Stratégie nationale pour les langues des Premières Nations et Loi constituant la Fondation des langues autochtones. Comme il s'agit d'un projet de loi, il serait assujetti aux règles concernant les mesures législatives pouvant être présentées au Sénat. Comme les sénateurs des deux côtés le savent déjà, le Sénat ne peut présenter aucun projet de loi ayant une incidence financière. Cette règle semble complexe pour certains nouveaux venus au Sénat, mais elle est facile à comprendre. Le Sénat ne peut présenter un projet de loi qui forcerait le gouvernement à dépenser de l'argent. Ce genre de mesure législative peut uniquement être présenté à l'autre endroit.

Le projet de loi S-237 n'exige pas de dépenses gouvernementales. Il incite plutôt le ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien à reconnaître les langues autochtones et à en faire la promotion. L'article 6 de ce projet de loi expose très clairement cet objectif. Le projet de loi S-237 reconnaît officiellement que les langues autochtones font partie du patrimoine linguistique du Canada. Certains sénateurs qui se rappellent du débat de 1981 sur la Charte des droits et libertés reconnaîtront l'article 22 de la Charte, qui dit ceci :

Les articles 16 à 20 n'ont pas pour effet de porter atteinte aux droits et privilèges, antérieurs ou postérieurs à l'entrée en vigueur de la présente charte et découlant de la loi ou de la coutume, des langues autres que le français ou l'anglais.

En termes clairs, cela veut dire que la Charte des droits et libertés ne change rien au droit coutumier de parler une langue autre que le français et l'anglais qui aurait pu exister avant l'adoption de la Charte. Il est évident que les langues autochtones étaient parlées au Canada avant l'arrivée des Européens et la colonisation qui a suivi. Ces langues ont un statut et font partie du patrimoine qui contribue à la diversité du Canada.

Je soumets le projet de loi S-237 à l'attention des sénateurs. Tous les sénateurs autochtones en ont reçu un exemplaire il y a quelques mois et plusieurs ont répondu par écrit avec des commentaires et des suggestions et pour appuyer le principe du projet de loi. De plus, tous les groupes autochtones nationaux ont reçu des exemplaires du projet de loi et ils aimeraient qu'il soit étudié et débattu par le comité compétent en temps et lieu. En tant que Canadien francophone en situation de minorité, je sais ce que cela signifie de ne pas pouvoir parler sa propre langue dans le contexte de la diversité canadienne.

[Français]

Je crois sincèrement que c'est un élément extrêmement important de la nature du Canada que nous reconnaissions le statut des langues autochtones et que, dans nos lois, nous reconnaissions la valeur et l'importance que le Canada accorde à la présence autochtone, au statut des peuples autochtones et au fait que, dans la diversité canadienne, les langues autochtones ont leur place et qu'elles font partie de notre identité.

(Sur la motion du sénateur Comeau, le débat est ajourné.)

[Traduction]

La Loi de l'impôt sur le revenu

Projet de loi modificatif—Deuxième lecture—Suite du débat

L'ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Mitchell, appuyée par l'honorable sénateur Lovelace Nicholas, tendant à la deuxième lecture du projet de loi S- 213, Loi modifiant la Loi de l'impôt sur le revenue (crédit d'impôt pour compensation de carbone).

L'honorable Consiglio Di Nino : Honorables sénateurs, le projet de loi S-213 traite de questions importantes et complexes qui exigent beaucoup d'attention et de recherche. Je n'ai pas encore terminé mon travail sur le projet de loi et, par conséquent, je propose l'ajournement du débat pour pouvoir poursuivre mon intervention à un autre moment.

(Sur la motion du sénateur Di Nino, le débat est ajourné.)

[Français]

La Loi sur la Bibliothèque et les Archives du Canada

Projet de loi modificatif—Deuxième lecture—Suite du débat

L'ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Grafstein, appuyée par l'honorable sénateur Pépin, tendant à la deuxième lecture du projet de loi S-201, Loi modifiant la Loi sur la Bibliothèque et les Archives du Canada (Musée national du portrait).

L'honorable Terry Stratton : Honorables sénateurs, le projet de loi du sénateur Grafstein propose de changer le nom du Musée du portrait du Canada afin qu'il devienne le Musée national du portrait et que cette modification soit inscrite dans la Loi sur la Bibliothèque et les Archives du Canada. Mais qu'y a-t-il dans un nom? Selon moi, il s'agit d'une question importante. Je m'explique :

Le Programme de la coordination de l'image de marque du gouvernement du Canada stipule que le nom d'un établissement constitue un élément clé de son identité.

(1600)

Les mots qui figurent dans ce nom permettent de définir et de positionner l'établissement, et le choix d'un nom relève d'une décision importante. C'est tout particulièrement le cas lorsqu'il s'agit de communiquer au public le rôÎle et le mandat d'un établissement et de s'assurer que le public retienne facilement le nom.

Lorsque nous appliquons cette façon de penser à un organisme culturel, nous nous trouvons au cur même de notre identité culturelle. Nos établissements culturels distincts créent une palette unique qui permet d'exprimer nos croyances, nos coutumes et nos caractéristiques. Le nom des établissements met en lumière les identités et les rôÎles distincts dans la vie d'un pays. Le choix d'un nom peut donc influer sur la mesure dans laquelle le public s'intéresse à l'établissement et y participe.

Prenons le Conseil des Arts, par exemple. Lorsqu'il a été créé en 1957 par la Loi sur le Conseil des Arts du Canada, l'appellation anglaise ne comprenait pas les mots « for the arts ». Ils ont été ajoutés en 1997, année de son 40e anniversaire. Pourquoi cet ajout? Parce que ces mots reflètent les objectifs de ce conseil, qui doit favoriser et promouvoir l'étude et la diffusion des arts ainsi que la production d'œuvres d'art.

Considérons le Musée du portrait du Canada. Il est bien vivant et se porte bien. Il est respecté et reconnu dans tout le Canada sous ce nom en raison de ses programmes et de ses expositions. Son nom a été choisi avec soin, et pour cause.

Le Musée des beaux-arts du Canada est déjà bien connu des Canadiens. Le Musée du portrait du Canada s'en distingue par son nom et par son rôle. Le seul nom de Musée du portrait du Canada renseigne l'amateur immédiatement sur le type d'œuvres d'art qu'il y trouvera, c'est-à-dire des portraits de toute nature : peintures, dessins, photos, sculptures, et cetera.

Si on l'appelait Musée national du portrait, il risquerait d'être confondu avec le musée bien connu de Londres; ou encore avec celui de Canberra, en Australie, de Washington ou d'Édimbourg. Comment le retrouverait-on sur le Web, premier point de départ de la génération des cybernautes? Tapez le nom « musée national du portrait » dans votre moteur de recherche pour voir à quelle confusion cette requête donne lieu. Les utilisateurs n'auraient pas forcément assez de patience pour vérifier toutes les inscriptions jusqu'à trouver celle du musée du Canada.

Le Musée du portrait du Canada se trouve du reste en excellente compagnie, auprès de grandes institutions comme le Musée canadien des civilisations, le Musée canadien de la nature, le Musée des beaux-arts du Canada, et cetera. En appelant l'institution Musée du portrait du Canada, nous soulignons que les portraient appartiennent au Canada et à tous les Canadiens.

Le Canada a une belle tradition, celle de placer son nom dans le titre de ses institutions, et la tradition donne de bons résultats. À l'ère des communications planétaires, le nom du pays aide également à distinguer nos institutions de celles d'autres pays. Je ne crois pas que modifier le nom de ce musée soit la meilleure façon de servir l'institution ni les Canadiens eux-mêmes.

Je me demande quelle amélioration peut apporter un changement de nom. Nous avons déjà une organisation culturelle innovatrice, Bibliothèque et Archives du Canada. La Loi sur la Bibliothèque et les Archives du Canada donne assez de liberté et de latitude pour établir des liens entre les Canadiens et leur patrimoine par divers moyens, dont le Musée du portrait du Canada.

Il n'a jamais été nécessaire de nommer le programme, Musée du portrait du Canada, dans le texte de la loi. L'actuel musée du portrait, avec ses programmes originaux et innovateurs, a déjà transcendé la notion de locaux physique pour accéder à une conception plus souple de l'espace : une approche sans restrictions des expositions et des programmes qui permettra de voir ces portraits d'un bout à l'autre de notre pays.

Honorables sénateurs, le Musée du portrait du Canada existe. Il est actif et dynamique. Les Canadiens ont accès à la collection, et cet accès sera encore meilleur à l'avenir. Le nom de l'institution ne fait pas problème. Il n'y a rien à corriger.

C'est une modification du nom qui provoquerait un problème. Permettez-moi de donner un exemple. L'une des entreprises les plus fructueuses du Musée du portrait du Canada a fait appel à l'un des plus beaux musées du monde et aux œuvres des Quatre rois indiens. Elle a fait grandir notre réputation au Canada et à l'étranger.

Remontons dans le temps. En 1710, quatre représentants de la Confédération iroquoise ont été amenés à Londres par les dirigeants coloniaux pour la signature d'une alliance contre les Français. Pour commémorer leur visite, la reine Anne a commandé leurs portraits au peintre de la cour, John Verelst. Ces portraits sont maintenant considérés comme un trésor mondial et ils comptent parmi les premiers portraits jamais peints pour illustrer la vie autochtone. Ces œuvres rares, qui font partie de la collection de Bibliothèque et Archives Canada, appartiennent à tous les Canadiens.

Grâce à des expositions itinérantes et à des programmes de vulgarisation du Musée du portrait du Canada, des collections uniques comme celle-là peuvent être vues partout au Canada et à l'étranger. Grâce à un prêt, les Quatre rois indiens sont devenus l'une des grandes attractions de l'exposition Between Worlds, à la National Portrait Gallery de Londres, représentant la composante nord-américaine de l'exposition. Des milliers de personnes ont vu ces œuvres. Et des milliers ont lu le texte qui disait que les portraits venaient du Musée du portrait du Canada.

C'est l'une des façons, pour le Canada, d'acquérir une stature internationale. Imaginez à quel point il serait étrange qu'on dise que les oeuvres ont été prêtées par le Musée national du portrait au Musée national du portrait. Curieux. Il aurait fallu ajouter le nom du Canada entre crochets pour dissiper la confusion. Ce serait bizarre, n'est-ce pas? Et le Canada ne serait pas reconnu. C'est un simple exemple parmi d'autres.

S'associant au Théâtre de la Photographie et de l'Image Charles Nègre de Nice, en France, le Musée du portrait a monté une exposition extrêmement populaire des photographies de Yousuf Karsh. Des auditoires européens ont donc appris à connaître un artiste canadien de renom et la Galerie du portrait du Canada. Notre pays a acquis une visibilité nouvelle. Chaque fois que des œuvres d'art sont déplacées sous la protection du Musée du portrait du Canada, elles donnent la possibilité de mieux faire reconnaître l'art canadien et de renforcer le sentiment d'identité nationale.

De la même façon, dans le musée virtuel du Musée du portrait du Canada, le nom de l'institution figure sur chaque page du site. Ainsi, la nouvelle se répand rapidement : le Canada a un musée du portrait exceptionnel, et il appartient à tous les Canadiens.

De nos jours, il faut faire l'usage le plus judicieux des ressources publiques. Toutefois, il faut aussi inspirer de l'enthousiasme aux Canadiens en période de difficulté. Une façon de le faire est de continuer à favoriser tout ce qui est canadien et à en tirer de la fierté. Cette fierté tient aussi bien au nom de l'institut qu'au contenu de ses collections.

Honorables sénateurs, la mission du Musée du portrait du Canada n'a pas changé depuis sa création, en 2001 : présenter des portraits de personnes de toutes conditions sociales qui ont contribué au développement du Canada et de celles qui continuent de le faire. L'institution a été conçue comme un mécanisme pour rallier les Canadiens au moyen d'expositions contemporaines ou historiques et de nouveaux médias accessibles en personne et en ligne.

Le Musée du portrait du Canada s'est toujours acquitté de cette mission. C'est ainsi que l'institution a été comprise, depuis Chemainus jusqu'à Charlottetown, par ceux qui ont pu admirer cette exposition itinérante et l'exposition virtuelle d'avant-garde. L'institution est parvenue à cet équilibre dans les programmes en cours et ceux qui sont prévus pour le musée.

(1610)

Notre gouvernement a récemment annoncé des investissements de 3,5 millions de dollars par an dans le Musée du portrait du Canada. Ce montant servira à établir des partenariats avec des collectivités afin de partager les collections du Musée. Il permettra de veiller à ce que le plus grand nombre possible de Canadiens puissent avoir accès à leur patrimoine, en tirent des leçons, s'en inspirent et soient fiers des hommes et des femmes qui ont modelé et continuent de modeler notre pays. Il permettra de financer d'autres expositions itinérantes et virtuelles qui mettront la collection de portraits à la portée de tous les Canadiens, un peu partout au pays.

Le Musée du portrait du Canada invite aussi les Canadiens à célébrer le 50e anniversaire de Yousuf Karsh dans le contexte du festival Karsh, organisé de concert avec le Musée canadien des sciences et la technologie et une vingtaine d'autres partenaires. Entre 2010 et 2012, le musée et ses partenaires familiariseront les

Canadiens avec Karsh grâce à une exposition itinérante nationale. Les Canadiens pourront également regarder l'œuvre de Karsh en consultant un site web spécial. Ils seront invités à déposer leurs propres photos de Karsh sur Flicker, ce qui étendra encore plus les contacts des Canadiens utilisant les nouveaux médias sociaux.

Le Musée du portrait du Canada envisage en outre de participer en 2010 aux Jeux olympiques de Vancouver grâce à diverses expositions telles que Space BC, série de portraits vidéo créés par des adolescents en collaboration avec Cinémathèque pacifique, et Athlètes dans la rue.

Les Canadiens ont également appris à connaître le musée grâce au premier programme jamais réalisé de commandes de portraits, avec Portraits sur la glace, Portraits dans la rue, En pleine face et d'autres programmes couronnés de succès qui ont déjà été mentionnés.

Le succès du musée s'est fondé non seulement sur l'innovation de programmes particuliers, mais aussi sur sa réputation. Il a fallu quelques années pour la bâtir mais, maintenant qu'elle est établie, changer le nom du musée n'aurait que des effets négatifs sur les relations culturelles et les ententes entre Canadiens et entre les organisations artistiques et d'autres musées.

Ce sont des relations de ce genre qui ont déjà produit des résultats extrêmement positifs, sous forme d'une plus grande sensibilisation du public et d'un plus grand intérêt pour notre patrimoine visuel : augmentation des programmes et des moyens interactifs, meilleure compréhension de l'expérience canadienne, occasions d'apprentissage et possibilité pour chaque Canadien d'établir un contact émotif avec d'autres Canadiens présents ou passés et de se voir dans un vaste contexte historique.

Honorables sénateurs, tout cela a été réalisé avec le nom de Musée du portrait du Canada.

L'honorable Jerahmiel S. Grafstein : J'ai une question à poser au sénateur. Quel pourcentage de la collection totale...

Le sénateur Stratton : Si vous me l'aviez demandé, j'aurais dit oui.

Son Honneur la Présidente intérimaire : Sénateur Stratton, acceptez-vous de répondre à une question?

Le sénateur Stratton : Oui.

Le sénateur Grafstein : Je m'excuse, sénateur Stratton. J'ai cru vous voir hocher la tête.

Quel pourcentage de la collection totale de peintures et de photos détenue par les Archives a été exposé dans le cadre du programme dont vous nous avez parlé?

Le sénateur Stratton : Je ne crois pas qu'il soit possible de répondre à cette question au moyen de pourcentage. C'est un nouveau média. Je crois que, partout au pays, d'un océan à l'autre, les Canadiens peuvent accéder au Musée du portrait du Canada d'une façon nouvelle et agréable. Je crois que c'est l'intention et l'idée de départ. Chaque fois que cela se produit, nous faisons de la publicité pour le Musée du portrait du Canada.

Le sénateur Grafstein : Je propose que le projet de loi soit lu pour la deuxième fois.

L'honorable David Tkachuk : Je propose l'ajournement du débat.

Son Honneur la Présidente intérimaire : L'honorable sénateur Tkachuk, avec l'appui de l'honorable sénateur Mockler, propose que le débat soit ajourné à la prochaine séance du Sénat.

Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?

Des voix : D'accord.

Des voix : Non.

Son Honneur la Présidente intérimaire : Que tous ceux qui sont en faveur de la motion veuillent bien dire oui.

Des voix : Oui.Son Honneur la Présidente intérimaire : Que tous ceux qui s'y opposent veuillent bien dire non.

Des voix : Non.

Son Honneur la Présidente intérimaire : À mon avis, les oui l'emportent.

Et deux honorables sénateurs s'étant levés :

Son Honneur la Présidente intérimaire : Y a-t-il entente avec les whips sur la durée de la sonnerie? C'est une sonnerie d'une heure. Le vote aura lieu à 17 h 15.

Convoquez les sénateurs.

La présidence peut-elle quitter le fauteuil?

Des voix : D'accord.

(1710)

(La motion, mise aux voix, est adoptée.)

POUR
LES HONORABLES SÉNATEURS

Andreychuk Mockler
Angus Nancy Ruth
Brown Neufeld
Carignan Nolin
Cochrane Ogilvie
Comeau Oliver
Di Nino Patterson
Dickson Plett
Duffy Prud'homme
Eaton Raine
Frum Rivard
Gerstein St. Germain
Greene Segal
Housakos Seidman
Johnson Stewart Olsen
Lang Stratton
LeBreton Tkachuk
MacDonald Wallace
Manning Wallin—39
Meighen

CONTRE
LES HONORABLES SÉNATEURS

Banks Losier-Cool
Callbeck Lovelace Nicholas
Campbell Mahovlich
Cordy Mercer
Cowan Merchant
Dallaire Milne
Dawson Mitchell
Day Moore
Eggleton Munson
Fairbairn Pépin
Fox Peterson
Fraser Poulin
Furey Ringuette
Grafstein Robichaud
Hervieux-Payette Smith
Hubley Tardif
Jaffer Watt
Joyal Zimmer—37
Kenny  

ABSTENTIONS
LES HONORABLES SÉNATEURS

Aucune.

(1720)

Les travaux du Sénat

L'honorable Ethel Cochrane : Honorables sénateurs, j'aimerais que nous revenions aux motions.

Le sénateur Day : C'est l'article no 15?

Le sénateur Cochrane : Non. Je demandais la permission qu'on revienne aux motions. Honorables sénateurs, avec votre permission, pourrions-nous revenir aux motions?

Des voix : D'accord.

Des voix : Non.

Son Honneur le Président : Il n'y a pas consentement unanime. Nous passons donc au prochain article à l'ordre du jour.

La Loi sur la citoyenneté

Projet de loi modificatif—Deuxième lecture—Suite du débat

L'ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Segal, appuyée par l'honorable sénateur Brown, tendant à la deuxième lecture du projet de loi S-225, Loi modifiant la Loi sur la citoyenneté (serment de citoyenneté).

L'honorable Hugh Segal : Honorables sénateurs, cette question sera retirée du Feuilleton parce que, vendredi, à la Chambre des communes, le gouvernement a présenté une loi d'exécution du budget qui contient déjà largement les dispositions de ce projet de loi.

Je remercie les sénateurs d'en face de leur soutien. Aussi, je tiens à remercier le Comité permanent des finances nationales, le sénateur Day et d'autres responsables.

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, si je me souviens bien, le sénateur Segal a déjà parlé de ce projet de loi. Pour la gouverne des sénateurs, je dois préciser que s'il prononce un autre discours, cela aura pour effet de clore le débat.

Je tiens à obtenir des précisions de la part des sénateurs, car je n'ai pas tout entendu à cause du bruit. J'aimerais profiter de l'occasion pour signaler aux sénateurs que, s'ils veulent prendre part à des conversations, il serait préférable qu'ils le fassent derrière la barre ou à l'extérieur du Sénat.

L'honorable Gerald J. Comeau (leader adjoint du gouvernement) : Comme nous en sommes à la 14e journée, nous disposons d'une autre journée pour débattre cette question. J'aurai alors l'occasion de discuter avec le sénateur Segal du sort final du projet de loi.

J'espère obtenir l'indulgence du Sénat pour reprendre l'examen de cet article demain, à l'occasion de la 15e journée.

Une voix : Non.

Le sénateur Comeau : Je n'ai pas besoin du consentement unanime des sénateurs.

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, le sénateur Comeau a pris la parole au sujet de ce projet de loi, et je crois comprendre qu'il propose l'ajournement du débat.

(Sur la motion du sénateur Comeau, le débat est ajourné.)

La Loi canadienne sur la protection de l'environnement (1999)

Projet de loi modificatif—Deuxième lecture—Suite du débat

L'ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Banks, appuyée par l'honorable sénateur Day, tendant à la deuxième lecture du projet de loi C-212, Loi modifiant la Loi canadienne sur la protection de l'environnement (1999).

L'honorable Hector Daniel Lang : Honorables sénateurs, ce projet de loi en est à son 15e et j'ai pris la liberté de parler à son parrain. Je suis en train de compiler mes notes. Je pourrai le commenter très bientôt.

Je demande à tous les sénateurs si nous pouvons prolonger l'ajournement du débat sur le projet de loi afin que je puisse utiliser mon temps de parole la prochaine fois qu'il sera à l'étude.

(Sur la motion du sénateur Lang, le débat est ajourné.)

Régie interne, budgets et administration

Adoption du neuvième rapport du comité

Le Sénat passe à l'étude du neuvième rapport du Comité permanent de la régie interne, des budgets et de l'administration (budget d'un comité—législation), présenté au Sénat le 1er octobre 2009.

L'honorable George J. Furey : Je propose l'adoption du rapport inscrit à mon nom.

Son Honneur le Président : De quel article s'agit-il?

Le sénateur Furey : De l'article no 1, Votre Honneur.

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, l'article no 1 a été appelé. J'ai entendu quelqu'un demander que le débat soit reporté. J'ai vu que des sénateurs se consultaient.

Avons-nous le consentement unanime du Sénat pour revenir à l'article no 1, sous la rubrique « Rapports de comités »?

Des voix : D'accord.

Le sénateur Furey : Merci, Votre Honneur. Je propose l'adoption du rapport inscrit à mon nom.

Le sénateur Comeau : Contrairement à ceux d'en face, nous sommes disposés à revenir sur la question.

(La motion est adoptée, et le rapport est adopté.)

Agriculture et forêts

Budget et autorisation de se déplacer—L'étude sur l'état actuel et les perspectives d'avenir du secteur forestier—Adoption du sixième rapport du comité

Le Sénat passe à l'étude du sixième rapport du Comité sénatorial permanent de l'agriculture et des forêts (budget—déblocage additionnel de fonds (étude sur l'état actuel et les perspectives d'avenir du secteur forestier au Canada)—autorisation de se déplacer), présenté au Sénat le 1er octobre 2009.

L'honorable Percy Mockler propose que le rapport soit adopté.

Son Honneur le Président : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?

(La motion est adoptée, et le rapport est adopté.)

(1730)

[Traduction]

Le Sénat

Motion tendant à demander la préservation des artefacts du patrimoine du Canada—Suite du débat

L'ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Joyal, C.P., appuyée par l'honorable sénateur Grafstein :

Que,

Attendu que des objets d'art et artefacts historiques, dont des pièces d'orfèvrerie offertes lors du mariage du duc de York (plus tard le roi George V) et un service de porcelaine décoré de scènes de guerre par l'artiste canadienne des Maritimes Alice Hagen, autrefois en usage à Rideau Hall, résidence du Gouverneur général du Canada, mais entreposés depuis quelques années, ont été vendus récemment en ligne par les soins du ministère des Travaux publics;

Attendu qu'il ne semble pas y avoir de politique adéquate qui gère le statut des œuvres et objets qui ont été en usage à Rideau Hall;

Attendu qu'il est urgent de prévenir que d'autres objets soient ainsi dispersés sans égard à leur caractère historique et à l'enrichissement du patrimoine du Canada,

Il est proposé que cette Chambre :

  • déplore que des objets décoratifs reliés à l'histoire du Canada et autrefois à Rideau Hall aient été vendus dans le public sans égard à leur importance particulière comme partie du patrimoine canadien;
  • s'étonne qu'aucune politique de gestion du patrimoine en vigueur à Rideau Hall ne prévienne de telles dispersions;
  • demande que le contenu des salons et pièces réservées aux fonctions officielles à Rideau Hall soit dorénavant géré par une autorité indépendante des occupants de la résidence afin d'en préserver le caractère historique;
  • que les autorités de la Commission de la capitale nationale soient vigilantes dans la gestion des objets d'art et artefacts qui ont été en usage à Rideau Hall;
  • que, dans l'éventualité où des objets mobiliers ou œuvres d'art décoratif soient déclarés excédentaires, ils soient d'abord offerts au Musée canadien des civilisations, à Bibliothèque et Archives Canada, ou encore à des musées canadiens reconnus pour leur rôle et leur mission dans la préservation et la mise en valeur du patrimoine historique de notre pays.—(L'honorable sénateur Oliver)

L'honorable Donald H. Oliver : Honorables sénateurs, je suis heureux de participer à cet important débat visant à demander la préservation des artefacts du patrimoine du Canada. En raison des récents événements soulignés la semaine dernière par le sénateur Murray, j'ai du revoir considérablement ma position.

Comme le savent les honorables sénateurs, cette motion a été présentée au Sénat, le 9 juin, après que Sun Media eut rapporté que le Centre de distribution des biens de la Couronne, une division de Travaux publics et Services gouvernementaux Canada, avait vendu des artefacts historiques de valeur. Il faut comprendre d'entrée de jeux que la vente de ces objets n'était pas une initiative du gouvernement. Le gouvernement conservateur n'avait rien à voir avec cette vente, pas plus que le ministère du Patrimoine canadien.

Les questions soulevées dans la motion renvoient à l'essence même du Canada. La motion porte sur les objets propres au Canada : nos joyaux, nos artefacts, les choses que nous devrions préserver et celles que nous devrions protéger. Bref, il touche la culture et le patrimoine du Canada.

Ayant étudié l'histoire dans les années 1950, j'éprouve depuis longtemps un vif intérêt pour tout ce qui est canadien. Pendant toute ma vie, les membres de ma famille et moi avons participé à la vie culturelle du Canada. Je mentionnerai la contribution à la culture canadienne de ma regrettée tante Portia White, une contralto renommée, et également mon propre intérêt pour tout ce qui est canadien. Pour ces raisons, je ne voudrais pas laisser passer l'occasion de me prononcer sur l'importance de la préservation des trésors historiques nationaux.

La sauvegarde et la protection de l'art canadien sont importantes et je remercie le sénateur Joyal de nous donner l'occasion de discuter du sujet. S'il doit y avoir un débat sur la question, je ne peux imaginer meilleur endroit pour l'amorcer que le Sénat. Nous faisons un deuxième examen objectif des choses. Nous sommes ceux qui ont le temps et le talent requis pour analyser rigoureusement les questions aussi sensibles que la préservation de notre héritage national.

Cela dit, je ne suis pas convaincu que nous devrions aborder la question au moyen d'une motion. Il y a encore beaucoup de choses que nous ignorons au sujet des événements. Comment cela a-t-il commencé? Où le dérapage s'est-il produit? D'autres sénateurs auront peut-être d'autres questions semblables à poser. Ces questions méritent des réponses et davantage de recherche devrait être effectuée avant que le Sénat soit appelé à discuter de la motion.

Honorables sénateurs, ce serait merveilleux si nous pouvions trouver un mécanisme nous permettant d'examiner plus à fond la question en pouvant convoquer des témoins et des experts et en poussant les recherches plus à fond. Je crois que ce serait dans

l'intérêt des Canadiens et aussi du patrimoine canadien. J'en aurai davantage à dire sur un tel comité plus tard.

En me préparant à intervenir dans le débat d'aujourd'hui, j'ai discuté de l'incident avec des fonctionnaires. J'ai appris que diverses mesures correctives avaient déjà été prises, sans même qu'il faille adopter une motion comme celle dont nous discutons.

Comme l'a un jour déclaré le ministre Moore : « Notre gouvernement sait à quel point la culture et le patrimoine sont essentiels à notre société, à notre identité et à notre économie », et le gouvernement a agi en conséquence.

Beaucoup de choses se sont passées cet été et ces derniers jours. Chaque semaine, de nouveaux faits sont révélés. Permettez-moi de présenter, le plus succinctement possible, ce qui s'est passé, ou, comme on dit en droit : quels sont les faits?

Le 23 mai, Sun Media a rapporté que des articles de valeur historique avaient été vendus aux enchères sur Internet à la demande de Rideau Hall. D'après certains reportages, certains des articles auraient appartenu à la Commission de la capitale nationale, et d'autres à la famille royale. Quelqu'un m'a dit que Rideau Hall, la CCN et les biens de la Couronne n'ont pu ni déterminer avec certitude à qui appartenaient tous les articles ni dresser une liste précise de ceux-ci.

Voici certains des artefacts qui ont été vendus sur le site Internet : trois paniers de fleurs ornés en argent sterling; de l'argenterie à thé et à café de la marque Birks; et 10 tasses de thé en porcelaine de l'artiste haligonienne Alice Egan Hagen, datant des années 1910.

Ces trois lots et d'autres objets de valeur historique ont été mis en vente sur le site Internet de vente des biens excédentaires du gouvernement du Canada. Ce site permet aux acheteurs de voir les biens excédentaires mis en vente par le gouvernement fédéral, de faire une offre et de les acheter. On peut trouver des articles divers comme des bureaux, des fauteuils de bureau et des filières sur le site.

Un fonctionnaire m'a dit que les articles en question avaient été désignés, à tort, comme étant excédentaires par Rideau Hall. On n'était pas censé s'en débarrasser. Isabelle Serrurier, porte-parole à Rideau Hall, a dit qu'à partir du moment où des articles sont déclarés comme étant excédentaires, ils doivent être envoyés au service de liquidation du gouvernement. Pour reprendre ses propos : « Aux termes de la loi, c'est ce que nous devions faire et c'est ce que nous avons fait. » Mme Serrurier, s'adressant à la presse, a dit que Rideau Hall avait demandé à la Commission de la capitale nationale si une autre résidence officielle avait besoin des articles en question.

Fort heureusement, quatre lots qui avaient été mis en vente sur le site ont été remis à Rideau Hall avant qu'une offre n'ait été faite; les articles pourront donc demeurer dans la collection de la Couronne canadienne.

Toujours en mai, six lots contenant des articles patrimoniaux ont été vendus sur le site. Le ministre Moore a affirmé à l'autre endroit, mardi dernier, que les transactions ont été faites « à l'insu du gouvernement et de mon ministère ».

Comme on l'a signalé la semaine dernière, les six articles ont été vendus au prix de 3 934,37 $.

Par exemple, les trois paniers susmentionnés ont été vendus 532 $, le 18 mai, sur le site web, à un résidant de Luskville, au Québec. Dans un article publié en mai, la journaliste Elizabeth Thompson mentionne que certains experts croient que la valeur actuelle de chacun des paniers est d'environ 10 000 $, en raison de leur lien avec la famille royale.

Ces trois paniers avaient été offerts au duc de York, qui allait devenir le roi George V, et à sa femme, la princesse Victoria Mary de Teck, comme cadeau lors de leur mariage, en juillet 1893. Qui plus est, ces paniers ont été utilisés dans la Chambre de Sa Majesté la reine Elizabeth II lorsqu'elle a visité Rideau Hall, ce qui ajoute à leur valeur historique.

Heureusement, tous les articles qui avaient été vendus sur le site web de Travaux publics ont été récupérés par le gouvernement et rachetés par Rideau Hall.

Ce sont les faits tels que je les connais.

La motion dont nous sommes saisis est intéressante parce qu'elle renferme plusieurs dispositions visant à protéger et à préserver les objets qui font partie du patrimoine de notre nation. Elle propose que cette Chambre :

[...] déplore que des objets décoratifs reliés à l'histoire du Canada et autrefois à Rideau Hall aient été vendus dans le public sans égard à leur importance particulière comme partie du patrimoine canadien;

La motion demande aussi trois choses. La première est :

[...] que le contenu des salons et pièces réservées aux fonctions officielles à Rideau Hall soit dorénavant géré par une autorité indépendante des occupants de la résidence afin d'en préserver le caractère historique;

Honorables sénateurs, je suis d'avis que nous devrions entendre des témoins à ce sujet. La deuxième demande est :

[...] que les autorités de la Commission de la capitale nationale soient vigilantes dans la gestion des objets d'art et artefacts qui ont été en usage à Rideau Hall;

La troisième demande est :

[...] que, dans l'éventualité où des objets mobiliers ou œuvres d'art décoratif soient déclarés excédentaires, ils soient d'abord offerts au Musée canadien des civilisations, à Bibliothèque et Archives Canada, ou encore à des musées canadiens reconnus pour leur rôle et leur mission dans la préservation et la mise en valeur du patrimoine historique de notre pays.

Un comité sénatorial devrait aussi entendre des témoins relativement à cette demande.

La dernière disposition ferait en sorte que nos trésors nationaux restent entre les mains d'institutions dont le mandat consiste à préserver et à mettre en valeur notre patrimoine. Par exemple, les 10 tasses à thé d'Alice Hagen seraient un très bel ajout à la galerie d'art de la Nouvelle-Écosse. Alice Hagen fait partie des nombreux artistes de la Nouvelle-Écosse dont les œuvres font partie de la collection permanente du musée, à Halifax.

Comme je l'ai mentionné plus tôt, je suis heureux de dire aux honorables sénateurs que les démarches nécessaires ont déjà été faites par notre gouvernement et les parties concernées afin de mettre en oeuvre les quatre mesures suivantes : premièrement, remédier à la situation; deuxièmement, améliorer les politiques et procédures actuelles; troisièmement, mettre à jour l'inventaire des biens de l'État; quatrièmement, protéger notre patrimoine canadien — tout cela sans l'adoption de la motion dont nous sommes saisis aujourd'hui.

(1740)

Le ministère des Travaux publics, Rideau Hall, la CCN et Patrimoine Canada ont gardé les voies de communication ouvertes.

Ils ont exprimé leur préoccupation au sujet de cette question et veulent éviter toute autre confusion.

Premièrement, comme les sénateurs l'ont peut-être déjà appris, la CCN, le Centre de distribution des biens de la Couronne et Rideau Hall ont coordonné leurs efforts dans l'espoir de récupérer ces biens historiques. Le 4 juin, le ministre du Patrimoine canadien et des Langues officielles, l'honorable James Moore, a assuré aux Canadiens que le gouvernement agirait. Comme notre gouvernement l'a promis, nous avons agi en vue de corriger cet incident regrettable.

Je suis heureux de rapporter que tous les articles, à l' exception d'un seul, qui avaient été vendus sur le site web du Centre de distribution des biens de la Couronne ont été récupérés. Le gouvernement a volontairement permis à un acheteur de garder une partie d'un article.

Le Bureau du Secrétaire du Gouverneur général a payé pour faire évaluer tous les articles. Il a également payé le prix de rachat des articles vendus, soit 95 150 $.

Contrairement à ce que la députée libérale Martha Hall Findlay a dit, il ne s'agit pas d'un « gaspillage épouvantable de l'argent des contribuables ». Puis-je rappeler aux sénateurs que cet incident s'est produit indépendamment du gouvernement, mais que c'est le gouvernement conservateur qui est intervenu et qui a agi de manière à corriger la situation?.Nous ne croyons pas que le fait de protéger nos trésors nationaux historiques et culturels soit un gaspillage de l'argent des contribuables. Il fallait récupérer ces articles et c'est précisément ce que nous avons fait. Le gouvernement a veillé à ce que ces articles soient réintégrés dans notre collection nationale.

Deuxièmement, contrairement à ce que dit la motion, nous nous sommes déjà dotés de politiques adéquates en matière de gestion des œuvres d'art et des objets historiques qui se trouvent à Rideau Hall. Il a déjà été signalé à maintes reprises que ces articles avaient été désignés à tort comme excédentaires. Comme Lucie Caron, une porte-parole de Rideau Hall. l'a dit : « Il est maintenant clair qu'un problème est survenu dans le processus interne. »

Une porte-parole de la CCN a aussi dit que la commission disposait déjà d'une politique régissant les pièces aménagées pour les fonctions d'État à Rideau Hall et la manière dont les 7 000 artefacts qui font partie de la collection de la Couronne dans les résidences officielles sont censés être traités. Comme elle l'a dit, la CCN prend « très au sérieux » la vente de ces articles.

J'ai été informé par les représentants du gouvernement que les ministères du Patrimoine canadien et des Travaux publics tentent de travailler avec Rideau Hall pour mettre à jour et améliorer les politiques et les procédures actuelles visant à éviter la vente inappropriée d'objets d'importance historique et d'objets généreusement donnés par le public.

Le ministre du Patrimoine canadien a dit ce qui suit.

Nous revoyons actuellement le processus de conservation des biens patrimoniaux. Nous nous assurerons que de telles erreurs ne se reproduisent pas.

Comme notre collègue, le sénateur Comeau, l'a dit au Sénat la semaine dernière, le gouvernement :

[...] fera ce qu'il faut pour que ce genre d'incident ne se reproduise pas en rendant obligatoire l'évaluation des objets uniques ou attrayants.

Troisièmement, la CCN et Rideau Hall travaillent ensemble pour inclure des listes concises et à jour de tous les articles dans leurs bases de données respectives.

J'ai été informé par des sources gouvernementales que la CCN examine actuellement les objets sur la liste de Rideau Hall. Elle a l'intention de comparer cette liste avec son propre inventaire et ses descriptions des objets afin de déterminer lesquels figurent dans l'inventaire de la CCN.

En même temps, Rideau Hall examine également son inventaire par rapport à ceux de la CCN et du Centre de distribution des biens de la Couronne. Cette série de mesures nous permettra d'avoir des renseignements détaillés et pertinents sur les milliers d'artefacts qui figurent dans la collection de la Couronne.

Enfin, le gouvernement est déterminé à s'assurer que ce type d'événements ne se reproduise plus. Le ministre Moore a affirmé que le processus d'aliénation des biens de la Couronne sera modifié. Il dit qu'on le modifiera pour que les musées canadiens aient le premier droit de refus sur ces objets afin que ce genre de choses ne se reproduise plus. Le gouvernement veut s'assurer que le patrimoine artistique et historique national demeure au Canada et entre les mains d'institutions publiques pour que tout le monde puisse l'admirer et l'apprécier.

Bien que le gouvernement n'ait pas été impliqué dans la vente de ces objets d'importance historique, il fait ce qu'il peut, avec l'aide de la CCN et de Rideau Hall, pour remédier à cette malheureuse situation.

Honorables sénateurs, la motion dont nous sommes saisis est une motion louable contenant beaucoup de dispositions importantes. Comme le sénateur Murray l'a dit, elle contient « certaines formules intéressantes ».

Honorables sénateurs, peut-être serait-il prématuré de notre part d'adopter cette motion. Il serait peut-être utile de la renvoyer à un comité permanent du Sénat. Selon un article publié par Sun Media, le 29 septembre, le sénateur Joyal, parrain de cette motion, souhaite aussi renvoyer cette motion à un comité parlementaire.

Son Honneur le Président : À l'ordre, s'il vous plaît. Je regrette d'informer le sénateur que les 15 minutes qui lui étaient imparties sont écoulées.

Le sénateur demande l'autorisation de parler cinq minutes de plus. Est-ce d'accord?

Des voix : D'accord.

Le sénateur Oliver : Merci, honorables sénateurs.

Des témoins importants, des experts et des responsables de Rideau Hall, des Travaux publics et de la CCN pourraient venir commenter au comité les pratiques et les politiques actuelles. Nous pourrions alors mieux comprendre comment cette « erreur » s'est produite. La Bibliothèque du Parlement pourrait nous aider à approfondir la question.

Le comité pourrait aussi présenter au Parlement en temps voulu un rapport détaillé accompagné de recommandations destinées à ces organisations pour qu'elles y réfléchissent quand elles mettront à jour leurs bases de données et leurs politiques actuelles.

Si cette motion était envoyée à un comité, les honorables sénateurs auraient alors accès à toute l'information disponible, ce qui leur permettrait de prendre une décision judicieuse avant de voter sur cette motion.

Cette motion soulève une autre question valable. À quel comité devrait-on la renvoyer? Comme les honorables sénateurs le savent, le Comité permanent du Règlement, de la procédure et des droits du Parlement est en train de mener une étude sur le système de comités du Sénat, conformément à l'article 86. Nous cherchons à déterminer le nombre, la taille et le mandat des comités, entre autres choses. Nous n'avons pas de comité sur la culture. Nous n'avons pas de comité sur le patrimoine. Le Sénat du Canada a peut-être besoin d'un comité du patrimoine canadien semblable à celui qui existe à l'autre endroit.

Les honorables sénateurs s'en souviennent sûrement, ils ont reçu un questionnaire sur le système de comités du Sénat en mai. Au total, 50 sénateurs y ont répondu. Certains des résultats sont très pertinents dans le cadre de notre discussion actuelle. Cinquante-sept pour cent des répondants croient qu'on devrait changer la structure des comités, mais qu'elle reste organisée autour de domaines d'intervention. Certains sénateurs ont également demandé quel comité serait responsable des arts.

En réponse à la question leur demandant si, à leur avis, on devrait créer de nouveaux comités afin de traiter des domaines particuliers, 66 p. 100 des sénateurs interrogés ont répondu par l'affirmative. De plus, cinq sénateurs ont proposé précisément qu'on créé un comité sénatorial permanent de la culture, du patrimoine et des arts.

Un tel comité pourrait être chargé de se pencher sur des questions comme celle dont nous sommes saisis aujourd'hui, c'est-à-dire la motion tendant à demander la préservation des artefacts du patrimoine du Canada. Le comité pourrait avoir le pouvoir d'étudier en détail et en profondeur des questions concernant notre patrimoine. Nos leaders peuvent décider où ils voudraient renvoyer la motion afin qu'elle soit étudiée en profondeur.

En conclusion, honorables sénateurs, comme le ministre Moore l'a déclaré mardi dernier :

Le gouvernement possède un bilan sans précédent et irréprochable à l'égard de la défense et de la protection du caractère national ainsi que de la culture et du patrimoine canadiens et il veille à ce que les biens nationaux soient traités avec tout le soin nécessaire. Nous sommes en train de modifier le processus. Ce qui est arrivé ne se reproduira pas parce que nous prenons les mesures qui s'imposent.

(Sur la motion du sénateur Andreychuk, le débat est ajourné.)

Pêches et océans

Autorisation au comité de siéger en même temps que le Sénat

L'honorable Ethel Cochrane : Honorables sénateurs, avec la permission du Sénat, je propose que le Comité sénatorial permanent des pêches et des océans soit autorisé à siéger en ce moment, et ce, même si le Sénat siège.

Son Honneur le Président : Êtes-vous d'accord, honorables sénateurs, pour que le Comité sénatorial permanent des pêches et des océans soit autorisé à siéger en même temps que le Sénat?

(La motion est adoptée.)

(1750)

Affaires étrangères et commerce international

Autorisation de siéger en même temps que le Sénat

L'honorable Consiglio Di Nino : Honorables sénateurs, avec la permission du Sénat et nonobstant l'article 58(1)a) du Règlement, je propose que le Comité sénatorial permanent des affaires étrangères et du commerce international, qui doit se réunir en ce moment même, soit autorisé à siéger même si le Sénat siège.

Son Honneur le Président : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?

Des voix : D'accord.

L'honorable Marcel Prud'homme : Honorables sénateurs, même si je reconnais l'importance de l'étude sur l'émergence de la Chine, de l'Inde et de la Russie, j'hésite à accorder à tout comité la permission de siéger en même temps que le Sénat. Un de ces jours, tellement de comités auront reçu une telle permission que nous n'aurons peut- être même plus le quorum. Je vais bien entendu appuyer la motion, honorables sénateurs, mais je le fais avec réticence.

L'honorable Tommy Banks : Honorables sénateurs, le sénateur Prud'homme soulève un point intéressant, au sujet duquel j'aimerais obtenir l'avis de Son Honneur. Par le passé, si je me souviens bien, lorsqu'un comité souhaitait obtenir la permission de siéger en même temps que le Sénat, il était courant qu'un des partis demande pourquoi cela était nécessaire. On répondait généralement que l'horaire d'un ministre ou d'autres personnes devant témoigner devant ce comité l'imposait.

Dans le cas des deux comités qui demandent une permission aujourd'hui, ni moi ni aucun autre sénateur n'a posé une telle question. Y aurait-il une nouvelle pratique à cet égard au Sénat?

Son Honneur le Président : Le sénateur a parfaitement raison. Nous pouvons faire tout ce que nous voulons avec le consentement unanime des sénateurs.

L'honorable Anne C. Cools : Non, nous le pouvons pas.

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, en règle générale, la façon correcte de procéder est de revenir en arrière et de présenter la motion. Ce n'est pas ce que nous avons fait. Le consentement unanime a été demandé, accordé, et ces deux comités ont obtenu la permission du Sénat. Nous n'avons pas traité cette affaire de la façon normale, et c'est bon de le mentionner.

Honorables sénateurs, êtes-vous d'accord pour que nous passions à l'article suivant du Feuilleton?

Des voix : D'accord.

(La motion est adoptée.)

Le Règlement du Sénat

Motion tendant à modifier l'article 28(3.1) du Règlement—Suite du débat

L'ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Banks, appuyée par l'honorable sénateur Day,

Que l'article 28(3.1) du Règlement du Sénat soit modifié comme suit :

Que les mots « l'augmentation de ces frais ou la prolongation de leur imposition, » soient ajoutés après les mots « dépose un document dans lequel est proposée l'imposition de frais d'utilisation, »;

Que les mots « à condition que ce comité ait été dûment constitué avec l'autorisation du Sénat, et » soient ajoutés après

« désigné au Sénat à cette fin par le leader du gouvernement au Sénat ou le leader adjoint du gouvernement au Sénat, ».

L'honorable Tommy Banks : Honorables sénateurs, je suis désolé, car j'ai accepté que le sénateur Di Nino et moi collaborions avec le bureau du Président à examiner cette question une fois de plus pour déterminer la meilleure manière de régler le problème. Je ne l'ai pas encore fait et je propose donc l'ajournement du débat pour le reste de mon temps de parole.

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, comme le sénateur Banks, qui a présenté la motion, a pris la parole, le sénateur Moore pourrait participer maintenant au débat et ajourner le débat à son nom pour le reste de son temps de parole.

L'honorable Joseph A. Day : Je serais heureux de prendre la parole sur cette motion et d'ajourner le débat à mon nom pour le reste de mon temps de parole.

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, l'honorable sénateur Day, avec l'appui de l'honorable sénateur Moore, propose que le débat soit ajourné à la prochaine séance au nom du sénateur Day, pour le reste de son temps de parole. Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?

Des voix : D'accord.

(Sur la motion du sénateur Day, le débat est ajourné.)

[Français]

L'Assemblée parlementaire de l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe

Motion tendant à appuyer la Résolution sur la gestion de l'eau dans l'espace géographique de l'OSCE—Suite du débat

L'ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Grafstein, appuyée par l'honorable sénateur Banks,

Que le Sénat appuie la Résolution suivante, adoptée par l'Assemblée parlementaire de l'OSCE lors de sa 17e session annuelle, tenue à Astana, Kazakhstan, du 29 juin au 3 juillet 2008 :

RESOLUTION SUR LA GESTION DE L'EAU DANS L'ESPACE GEOGRAPHIQUE DE L'OSCE

1. Réitérant l'importance fondamentale de l'aspect environnemental de la sécurité de l'OSCE,

2. Reconnaissant le lien entre les problèmes de ressources naturelles et les différends et conflits au sein des États et entre eux,

3. Signalant les possibilités offertes par les initiatives de gestion des ressources qui tiennent compte des problèmes environnementaux courants, notamment les programmes de prise en charge locale et sous-régionale et la coopération entre les gouvernements, et qui favorisent les processus de consolidation de la paix,

4. Rappelant le rôle de l'OSCE consistant à favoriser les politiques de développement durable axées sur la paix et la stabilité, en particulier l'Acte final d'Helsinki de 1975, le Document de clôture de 1990 de la Conférence de la CSCE sur la coopération économique en Europe (Document de Bonn), la Charte de sécurité européenne de 1999 adoptée au Sommet d'Istanbul, le Document stratégique de l'OSCE de 2003 pour la dimension économique et environnementale (Stratégie de Maastricht), les autres décisions et documents de l'OSCE concernant des questions environnementales, et les résultats de tous les forums économiques et environnementaux précédents, qui ont établi une base pour l'action de l'OSCE dans le domaine de l'environnement et de la sécurité,

5. Reconnaissant l'importance vitale de l'eau pour la vie humaine et le fait que c'est un élément du droit de l'homme à la vie et à la dignité,

6. Signalant la gravité des problèmes de gestion de l'eau et la rareté des ressources en eau dans bon nombre des pays de l'espace géographique de l'OSCE particulièrement touchés par les activités économiques et sociales non réglementées, notamment le développement urbain, l'industrie et l'agriculture,

7. S'inquiétant de l'impact des mauvais systèmes de gestion de l'eau sur la santé humaine, l'environnement, la durabilité de la biodiversité et des écosystèmes terrestres et aquatiques, qui nuit au développement politique et socio-économique,

8. S'inquiétant du fait que plus de 100 millions de personnes dans la région paneuropéenne n'ont toujours pas accès à de l'eau potable ni à un assainissement adéquat,

9. S'inquiétant des zones et peuples de la région nord- américaine de l'espace géographique de l'OSCE qui n'ont pas accès à de l'eau potable ni à un assainissement,

10. S'inquiétant du risque d'aggravation des problèmes de gestion de l'eau si les options pour régler le problème ne sont pas dûment considérées et appliquées,

11. Reconnaissant l'importance d'une bonne gouvernance environnementale et d'une gestion responsable de l'eau par les gouvernements des États participants,

12. Saluant les travaux de l'atelier préparatoire au 10ème Forum économique de l'OSCE qui s'est tenu à Belgrade en 2001 et qui portait sur la gestion des ressources en eau et la promotion de la coopération régionale en matière d'environnement dans le sud-est de l'Europe,

13. Saluant les travaux du 15ème Forum économique et environnemental de l'OSCE et de ses réunions préparatoires sur les principaux défis pour assurer la sécurité environnementale et le développement durable dans l'espace géographique de l'OSCE — gestion de l'eau, à Zaragoza, en Espagne,

14. Saluant la Déclaration de Madrid de l'OSCE sur l'environnement et la sécurité, adoptée au Conseil ministériel de 2007, qui attire l'attention sur la gestion de l'eau comme étant un risque environnemental pouvant avoir un impact majeur sur la sécurité dans l'espace géographique de l'OSCE et qu'on pourrait peut-être mieux régler dans le cadre d'une coopération multilatérale,

15. Exprimant son soutien pour les efforts déployés jusqu'à présent par plusieurs États de l'OSCE pour régler le

problème, notamment l'atelier sur la gestion de l'eau organisé par le Centre de l'OSCE à Almaty, en mai 2007, pour les experts de l'Asie centrale et du Caucase,

L'Assemblée parlementaire de l'OSCE

16. Demande aux États participants de l'OSCE d'entreprendre une saine gestion de l'eau en accord avec les politiques de développement durable;

17. Recommande aux États participants de l'OSCE de prendre les mesures nécessaires pour mettre en œuvre la Déclaration de Madrid de 2007 sur l'environnement et la sécurité;

18. Recommande que ces activités de gestion de l'eau et de surveillance comprennent des initiatives nationales, régionales et locales de coopération qui réunissent les meilleures pratiques et prévoient de l'entraide entre les États;

19. Recommande aux États participants de l'OSCE d'adopter, dans leur réglementation nationale, régionale et locale, une approche à barrières multiples pour protéger l'eau potable, et en particulier la nappe phréatique, afin de s'assurer que la population vivant dans l'espace géographique de l'OSCE a accès à de l'eau potable;

20. Recommande aux États participants de l'OSCE d'envisager la mise au point d'approches plus efficaces aux niveaux national, infranational et local en matière de saine gestion de l'eau qui soient axées sur les résultats, pragmatiques et diversifiées;

21. Encourage les États participants de l'OSCE à poursuivre leur travail avec d'autres institutions et organisations régionales et internationales en ce qui concerne la gestion de l'eau, en prenant les mesures voulues pour créer des commissions d'arbitrage supranationales auxquelles les États délégueraient des pouvoirs décisionnels.—(L'honorable sénateur Fraser)

L'honorable Claudette Tardif (leader adjoint de l'opposition) : Honorables sénateurs, cette motion portant sur la Résolution sur la gestion de l'eau dans l'espace géographique de l'OSCE est une motion importante qui mérite davantage d'attention. Je propose donc l'ajournement.

(Sur la motion du sénateur Tardif, le débat est ajourné.)

[Traduction]

Motion tendant à appuyer la résolution sur la lutte contre l'antisémitisme—Suite du débat

L'ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Grafstein, appuyée par l'honorable sénateur Carstairs, C.P.,

Que le Sénat appuie la Résolution suivante, adoptée par l'Assemblée parlementaire de l'OSCE lors de sa 17e session annuelle, tenue à Astana, Kazakhstan, du 29 juin au 3 juillet 2008 :

RESOLUTION SUR LA LUTTE CONTRE L'ANTISEMITISME, NOTAMMENT SES MANIFESTATIONS DANS LES MEDIAS ET LES MILIEUX UNIVERSITAIRES

1. Rappelant que l'Assemblée parlementaire a joué un rôle exemplaire en attirant et en ciblant davantage l'attention des États participants, depuis la session annuelle de 2002 à Berlin, sur les questions liées aux manifestations d'antisémitisme,

2. Soulignant en particulier la décision du Conseil ministériel réuni à Porto en 2002 qui condamnait « les incidents antisémites dans la région de l'OSCE, en reconnaissant le rôle qu'a joué l'antisémitisme dans l'histoire en tant que danger majeur pour la liberté «,

3. Se référant aux engagements pris par les États participants au cours des précédentes conférences de l'OSCE tenues à Vienne (2003), Berlin (2004), Bruxelles (2004) et Cordoue (2005) au sujet des efforts juridiques, politiques et pédagogiques visant à lutter contre l'antisémitisme,

4. Se félicitant de tous les efforts que les parlements des États participants de l'OSCE consacrent à la lutte contre l'antisémitisme, notamment l'enquête parlementaire multipartite sur l'antisémitisme au Royaume-Uni,

5. Notant avec satisfaction toutes les initiatives prises par des organisations de la société civile qui s'emploient à lutter contre l'antisémitisme,

6. Reconnaissant que les incidents liés à l'antisémitisme se produisent dans tout l'espace de l'OSCE et ne sont pas propres à un pays déterminé, ce qui exige une fermeté inébranlable de la part de tous les États participants en vue de faire disparaître cette tache noire de l'histoire de l'humanité,

L'Assemblée parlementaire de l'OSCE

7. Apprécie les travaux entrepris par l'OSCE et le Bureau des institutions démocratiques et des droits de l'homme (BIDDH) de l'OSCE par l'intermédiaire de son programme en faveur de la tolérance et de la non- discrimination et souscrit à l'idée de continuer à organiser des réunions d'experts sur l'antisémitisme et les autres formes d'intolérance en vue de renforcer la mise en œuvre des engagements de l'OSCE en la matière;

8. Apprécie l'initiative lancée par M. John Mann, membre du Parlement (Royaume-Uni), en vue de créer une coalition interparlementaire mondiale pour la lutte contre l'antisémitisme et incite les parlements des États participants de l'OSCE à soutenir cette initiative;

9. Prie les États participants de présenter des rapports écrits sur leurs activités en matière de lutte contre l'antisémitisme et les autres formes de discrimination lors de la session annuelle de 2009;

10. Rappelle aux États participants la nécessité d'améliorer les méthodes de suivi et de rendre compte des incidents antisémites et des autres crimes de haine au Bureau des institutions démocratiques et des droits de l'homme (BIDDH) en temps opportun;

11. Reconnaît l'importance des instruments du BIDDH pour améliorer l'efficacité de la réaction des États à l'antisémitisme, par exemple les matériels pédagogiques sur l'antisémitisme et le programme de formation des

agents de la force publique du BIDDH destiné à aider les forces de police des États participants à mieux identifier et combattre les incitations à l'antisémitisme et aux crimes inspirés par la haine, et à renforcer la capacité de la société civile à lutter contre l'antisémitisme et les crimes inspirés par la haine, notamment par la constitution de réseaux et de coalitions avec les communautés musulmane, rom, d'ascendance africaine et les autres communautés qui luttent contre l'intolérance, etrecommande que les autres États fassent usage de ces instruments;

12. Se félicite de l'engagement de dix pays — Allemagne, Croatie, Danemark, Espagne, Fédération de Russie, Lituanie, Pays-Bas, Pologne, Slovaquie et Ukraine — à élaborer conjointement avec le BIDDH et la Maison d'Anne Frank des matériels pédagogiques sur l'histoire des Juifs et l'antisémitisme en Europe, et encourage tous les autres États participants de l'OSCE à adopter ces matériels pédagogiques dans leurs langues nationales respectives et à en faire usage;

13. Encourage les États participants à adopter dans leurs langues nationales respectives le guide à l'intention des enseignants intitulé « Aborder l'antisémitisme : pourquoi et comment? «, élaboré par le BIDDH en coopération avec Yad Vashem, et à en faire usage;

14. Prie les gouvernements de créer et d'utiliser des programmes d'études qui iront au-delà de l'enseignement sur l'Holocauste en traitant de la vie, de l'histoire et de la culture juives;

15. Condamne l'apparition constante de stéréotypes antisémites dans les médias, y compris les bulletins d'information, les commentaires sur l'information et les commentaires diffusés par des lecteurs;

16. Condamne l'utilisation de deux poids, deux mesures dans la façon dont les médias traitent d'Israël et de son rôle dans le conflit du Moyen-Orient;

17. Invite les médias à s'entretenir de l'incidence de la langue et des images sur le judaïsme, l'antisionisme et Israël et des conséquences qui en découlent pour l'interaction entre les communautés dans les États participants de l'OSCE;

18. Déplore la diffusion constante de contenus antisémites par le biais d'Internet, y compris les sites Web, les blogs et le courrier électronique;

19. Prie les États participants d'accroître leurs efforts en vue de contrecarrer la propagation de contenus antisémites, y compris la diffusion par le biais d'Internet, dans le cadre de leur législation nationale;

20. Prie les directeurs de publication de s'abstenir de diffuser des matériels antisémites et d'élaborer un code d'éthique autorégulé pour traiter de l'antisémitisme dans les médias;

21. Invite les États participants à empêcher la diffusion de programmes de télévision et d'autres médias qui privilégient les opinions antisémites et encouragent les crimes antisémites, s'agissant notamment, mais pas exclusivement, de la télédiffusion par satellite;

22. Rappelle aux États participants les mesures visant à lutter contre la diffusion de matériels racistes et antisémites par le biais d'Internet qui ont été suggérées lors de la réunion de l'OSCE de 2004 sur la relation entre la propagande raciste, xénophobe et antisémite sur Internet et les crimes de haine et qui appellent notamment à :

- poursuivre des stratégies parallèles et complémentaires,

- initier les enquêteurs et les représentants du parquet à la façon d'aborder sur Internet les crimes à motivation tendancieuse,

- appuyer la mise en place de programmes visant à

- apprendre aux enfants à reconnaître les expressions à motivation tendancieuse qu'ils sont susceptibles de rencontrer sur Internet,

- promouvoir l'établissement de codes de conduite pour les industries,

- recueillir des données relatives à l'ampleur de la diffusion des messages de haine antisémite sur Internet;

23. Déplore l'intellectualisation permanente de l'antisémitisme dans les milieux universitaires, en particulier au moyen de publications et de réunions publiques dans les universités;

24. Suggère que des normes et directives soient élaborées sur la responsabilité qu'ont les autorités universitaires d'assurer la protection des étudiants juifs et des étudiants d'autres communautés minoritaires contre le harcèlement, la discrimination et les mauvais traitements en milieu universitaire;

25. Prie tous les participants à la conférence de suivi de Durban, qui se tiendra prochainement à Genève, de s'assurer que les questions urgentes de racisme dans l'ensemble du monde seront correctement évaluées et que la conférence ne sera pas utilisée de façon abusive comme tribune pour favoriser l'antisémitisme;

26. Suggère que les délégations des États participants de l'OSCE tiennent une réunion la veille de la conférence de suivi de Durban en vue d'examiner et d'évaluer le processus de suivi de Durban.

L'honorable Claudette Tardif (leader adjoint de l'opposition) : Honorables sénateurs, cet important sujet mérite une étude plus approfondie. Je propose donc l'ajournement du débat à mon nom, pour le temps de parole qu'il me reste.

(Sur la motion du sénateur Tardif, le débat est ajourné.)

Question de privilège

Report de la décision du Président

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, il est maintenant temps de passer à la question de privilège dont le sénateur Fraser a donné préavis plus tôt aujourd'hui.

L'honorable Joan Fraser : Honorables sénateurs, ma question de privilège a trait à l'étude du projet de loi C-25, Loi modifiant le Code criminel (restriction du temps alloué pour détention sous garde avant prononcé de la peine), par le Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles. La

question de privilège a trait plus précisément aux événements survenus avant, pendant et après la réunion que le comité a tenue à 10 h 45, le jeudi 1er octobre, ainsi qu'à d'autres événements liés au travail de comité sur le projet de loi.

Selon l'article 43(1) du Règlement , les questions de privilège doivent être soulevées à la première occasion. Cependant, pour des raisons qui apparaîtront clairement au fil de non intervention, il m'a été impossible d'aborder la question jeudi après-midi parce que je n'avais pas tous les faits à ma disposition. Plus particulièrement, j'ai jugé qu'il était important de consulter le compte rendu des délibérations du comité, qui n'était pas encore disponible jeudi après-midi. Ce n'est qu'aujourd'hui que j'ai eu l'occasion de lire le compte rendu.

Je crois pouvoir établir de façon satisfaisante que la question de privilège porte sur un sujet directement lié aux privilèges du Sénat ou, plus précisément, de ses comités. Je soulève la question de privilège pour obtenir un correctif véritable que le Sénat est en mesure d'apporter et pour qu'il soit remédié à une atteinte grave à mes privilèges.

En soulevant la question, j'ai à l'esprit la décision rendue le 17 juin 2009 par le Président, qui portait sur une conférence de presse tenue sur un projet de loi qui n'avait pas encore été présenté au Parlement. Je parlerai notamment d'une conférence de presse qui a eu lieu la semaine dernière. Dans sa décision, le Président déclare qu'il faut faire une distinction entre les étapes préparlementaires de l'étude d'un projet de loi et ses étapes parlementaires, c'est-à-dire ce qui vient avant et après qu'un projet de loi ait été présenté au Parlement. Le Sénat a bien entamé les étapes parlementaires de l'étude du projet de loi C-25, ce qui mérite d'être précisé clairement.

(1800)

Je tiens également compte du fait que Son Honneur a souligné, dans sa décision, le lien avec les cas d'outrage au Royaume-Uni et en Australie. Pour que ces gens prennent note de ces plaintes, il faut prouver que l'outrage abusif a porté atteinte de manière importante aux travaux parlementaires. Je crois que tel est le cas.

Je vais expliquer comment les choses se sont passées. Cela prendra un peu de temps, mais il est important d'établir la chronologie des faits, honorables sénateurs.

Pendant la pause estivale, le comité de direction du Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles planifiait son étude du projet de loi C-25. Le programme du comité étant bien rempli, nous voulions éviter de faire traîner indûment les choses. Nous avons donc convenu de tenir des audiences intensives sur ce projet de loi pendant les trois premières séances du comité, après la rentrée parlementaire. Nous avons prolongé nos heures de séances pour y parvenir. Nous avons également convenu de la date de l'étude article par article.

Son Honneur le Président : Je suis désolé d'interrompre le sénateur Fraser, mais je dois signaler aux sénateurs qu'il est 18 heures.

L'honorable Gerald J. Comeau (leader adjoint du gouvernement) : Honorables sénateurs, les deux côtés se sont consultés, et si Son Honneur demandait l'avis du Sénat, il constaterait que nous sommes en faveur de ne pas tenir compte de l'heure.

Son Honneur le Président : Vous plaît-il, honorables sénateurs, de ne pas tenir compte de l'heure?

Des voix : D'accord.

Le sénateur Fraser : Merci, honorables sénateurs.

Le comité de direction a aussi convenu de procéder à l'étude article par article du projet de loi C-25 le matin du jeudi 1er octobre. Le comité en a été informé le 17 septembre. Le fait que nous allions procéder à l'étude article par article du projet de loi ce jour-là n'avait donc rien de secret.

Or, le 22 septembre, j'ai reçu à mon bureau une lettre du bureau du vice-président du comité indiquant que le sénateur LeBreton et le sénateur Wallace, qui est le parrain du projet de loi, avec l'approbation du ministre de la Justice, souhaitaient que le comité entende les ministres de la Justice et les procureurs généraux de l'Ouest.

Dans ce cas, comme c'est toujours le cas, d'ailleurs, tous les membres du comité se sont conduits, comme d'habitude, de façon appropriée. Tous les membres du comité aiment l'esprit de collaboration dans lequel les sénateurs des deux côtés ont l'habitude de travailler au sein du comité.

Le comité de direction croyait qu'il était tout à fait approprié d'entendre des ministres de la Justice provinciaux. La seule modification que nous avons apportée à la demande, c'est que nous inviterions tous les ministres de la Justice des provinces et des territoires, pas seulement les quatre ministres des provinces de l'Ouest.

Afin de pouvoir entendre les ministres de la Justice, nous devions reporter à la prochaine séance l'étude article par article du projet de loi. Les ministres de la Justice ont été convoqués pour le 1er octobre. Plusieurs d'entre eux ont choisi d'envoyer des mémoires, mais deux ont accepté notre invitation à comparaître jeudi matin, la semaine dernière. Il s'agit de l'honorable Dave Chomiak, ministre de la Justice et procureur général du Manitoba, et de l'honorable Alison Redford, ministre de la Justice et procureure générale de l'Alberta. Aucun autre témoin n'a été invité à comparaître ce jour-là.

Les témoignages des ministres ont été extrêmement intéressants et utiles aux travaux du comité. Les membres du comité avaient d'innombrables questions à poser aux ministres, et la comparution des témoins, fort intéressante, s'est déroulée dans le plus grand sérieux. À 11 heures 59 minutes et 53 secondes précisément, sept secondes avant midi, Mme Redford, la ministre de l'Alberta, a dit :

Je vous prie de nous excuser. Le greffier nous a dit que nous en aurions pour une heure.

Je peux revenir sur ce point plus tard si les sénateurs le désirent. Elle a ajouté :

Le problème, c'est que puisque nous sommes des ministres de l'Ouest, nous avons pris des dispositions pour notre retour en avion. Le ministre Chomiak doit être présent à l'Assemblée cet après-midi.

J'ai dit que je comprenais la situation et je leur ai demandé si nous pouvions leur poser nos dernières questions de manière à ce qu'ils puissent nous répondre par écrit, ce à quoi Mme Redford a répliqué :

Je serais ravie de le faire. J'aimerais bien pouvoir continuer, mais nous devons rentrer dans l'Ouest.

Après leur avoir posé les questions auxquelles ils avaient accepté de répondre par écrit, la réunion a pris fin. Elle a été ajournée. À la fin de la réunion, j'ai été troublée d'apprendre — de façon indirecte et non officielle, toutefois — que les ministres avaient dû quitter la réunion non pas pour se rendre à l'aéroport, mais bien pour assister à une conférence de presse. Je répète que j'ai appris cela de façon indirecte et non officielle. Toutefois, j'ai demandé à mon personnel de vérifier les faits.

Par la suite, j'ai appris que, la veille, donc le 30 septembre, à 17 h 41, le cabinet du ministre de la Justice avait diffusé un avis aux médias annonçant la tenue d'une conférence de presse de l'honorable Rob Nicholson, ministre de la Justice du Canada, accompagné de son secrétaire parlementaire, M. Daniel Petit, ainsi que de M. Chomiak et de Mme Redford. Cette conférence de presse devait avoir lieu à midi, le jeudi 1er octobre. Les sénateurs ne reçoivent évidemment pas les avis aux médias; ils s'informent auprès de la Tribune de la presse.

Le 1er octobre, le jour même de l'audience du comité, à 7 heures, un deuxième avis a été envoyé aux médias pour leur rappeler qu'une conférence de presse devait avoir lieu à midi. À 11 h 55, pendant que le comité siégeait pour entendre les deux ministres, le cabinet du ministre de la Justice a émis un communiqué de presse dans lequel le ministre, MM. Petit et Chomiak et Mme Redford pressaient les sénateurs d'adopter le projet de loi C-25 sans amendement. M. Nicholson y priait instamment l'opposition au Sénat de faire en sorte que le projet de loi C-25 « devienne loi sans tarder et sans amendement ».

Je rappelle aux sénateurs que, si l'étude article par article du projet de loi n'était pas terminée au moment où le communiqué de presse a été diffusé, c'était uniquement parce que nous l'avions reportée afin d'entendre des témoins que le ministre lui-même jugeait utile que nous entendions.

Force est de présumer — la politique étant ce qu'elle est — qu'une conférence de presse avait été convoquée à des fins de couverture de presse. Et couverture de presse il y eut, dans divers journaux et probablement aussi dans les médias électroniques aussi, d'un bout à l'autre du pays, notamment dans le Vancouver Sun et dans le Winnipeg Free Press. Dans le Prince George Citizen, on rapportait que M. Nicholson aurait dit ceci :

Des murmures de mécontentements nous parviennent du Sénat. Il semblerait que le projet de loi ne plait pas aux sénateurs et que des amendements et des retards seraient possibles. Cela est inacceptable.

Il aurait également dit ceci :

Nous exhortons le Sénat à s'atteler à la tâche et à adopter cette mesure législative. Elle jouit d'un important appui partout au pays. Je somme une fois de plus (le chef libéral) Michael Ignatieff d'exercer une certain influence et un certain contrôle sur la moitié de son groupe parlementaire qui siège au Sénat afin d'accélérer l'adoption du projet de loi.

Je n'ai trouvé, dans aucune de ces déclarations publiques...

Le sénateur Mockler : La tâche pourrait être confiée à Denis Coderre.

Le sénateur Fraser : ... quelque admission que ce soit de la cause du retard dans l'étude article par article du projet de loi.

Autrement dit, que s'est-il passé? Il s'est passé plusieurs choses.

Premièrement, Mme Redford a induit le comité en erreur quant aux raisons pour lesquelles elle a mis fin à son témoignage.

Le sénateur Comeau : Oh, oh!

Le sénateur Fraser : On pourrait affirmer que son prétexte n'était pas, en substance, une faute particulièrement grave. Si elle avait informé le comité à l'avance qu'elle voulait assister à une conférence de presse, nous aurions probablement grogné un peu, mais nous nous serions adaptés. Cependant, lorsqu'elle a quitté le comité, nous avions la nette impression qu'elle et M. Chomiak devaient partir prendre leur avion pour l'Ouest. C'est la seule raison qui nous a été donnée.

Induire un comité en erreur est une faute grave. Les travaux du Parlement en entier sont fondés sur l'idée que nous pouvons croire ce qu'on nous dit, et c'est encore plus vrai lorsque les témoins sont ministres. Cette question ne doit pas être prise à la légère.

À la page 725 de la 23e édition de son ouvrage, Erskine May écrit ceci : « Faire un faux témoignage devant un comité est un acte punissable comme outrage. »

Le sénateur Comeau : Traînez-la devant les tribunaux.

(1810)

Le sénateur Fraser : Voici ce qu'on peut lire à la page 862 du Marleau et Montpetit :

[...] un témoin, assermenté ou non, qui refuse de répondre à des questions ou qui ne donne pas des réponses véridiques pourrait être accusé d'outrage à la Chambre.

Il est vrai que nous ne lui avons pas demandé si elle allait à une conférence de presse. Pourtant, garder le silence revient à faire un faux témoignage, et il me semble que c'est une faute grave.

J'ai hésité un certain temps avant de soulever cette question qui concerne des ministres...

Le sénateur Comeau : Vous auriez dû suivre votre instinct.

Le sénateur Fraser : ... mais l'affaire est désormais tellement connue du public que je n'ai d'autre choix que de soulever la question de privilège au Sénat.

Deuxièmement, M. Nicholson et les deux ministres provinciaux ont entravé la conduite des travaux du comité en les interrompant pour assister à une conférence de presse. Je répète : nous n'avions pas terminé de questionner les ministres, il n'y avait pas d'autres témoins à venir et la séance du comité devait se terminer à 12 h 30. En mettant fin à la séance pour assister à une conférence de presse, ces trois ministres nous ont essentiellement dit que les conférences de presse étaient plus importantes que les travaux des comités parlementaires. Le Parlement n'est certainement pas de cet avis. Je cite Marleau et Montpetit, à la page 52 :

[...] même si elle ne porte atteinte à aucun privilège particulier, toute conduite qui cause préjudice à l'autorité ou à la dignité de la Chambre...

— selon moi, un tel préjudice s'est produit —

...est considérée comme un outrage au Parlement. L'outrage peut être un acte ou une omission. Il n'est pas nécessaire de faire réellement obstacle au travail de la Chambre ou d'un député; la tendance à produire un tel résultat suffit.

Selon moi, tronquer les audiences du comité sur un projet de loi aussi important aura tendance à donner de tels résultats.

Enfin, le troisième incident qui s'est produit, comme je l'ai mentionné, c'est que M. Nicholson a attaqué les travaux du comité en laissant entendre que nous étions en train de retarder le projet de loi. Je crois avoir démontré qu'il s'agissait là d'une affirmation trompeuse de sa part. L'étude article par article aurait été complétée avant la conférence de presse si les membres ministériels du comité ne nous avaient pas demandé de la reporter.

Je vais finalement attirer l'attention des sénateurs sur le fait que, bien que ce ne soit peut-être pas de votre ressort, Votre Honneur, il

est probablement méprisant à l'égard de cette assemblée de laisser entendre que quiconque peut nous soumettre à son contrôle et nous forcer à voter d'une façon différente de nos intentions. L'ancien Président Hays a rendu la décision suivante le 11 juin 2002 :

En effet, il est important d'éviter de laisser entendre, de quelque manière que ce soit, même par inadvertance, qu'une des chambres du Parlement peut être indûment influencée ou manipulée. Les deux chambres, le Sénat et la Chambre des communes, sont parfaitement indépendantes et autonomes. S'il est vrai que des intérêts de nature politique et partisane jouent un rôle dans nos délibérations, cela ne signifie pas pour autant que l'une ou l'autre des chambres peut être assujettie à la volonté d'un ministre.

Ou, à mon avis, du chef de l'opposition officielle à l'autre endroit.

Il me semble clair, Votre Honneur, qu'il y a eu entorse à nos privilèges. Il y a eu entorse aux privilèges du comité et, par conséquent, aux privilèges de tous les sénateurs.

Je suis disposée à présenter une motion pour renvoyer cette question au Comité permanent du Règlement, de la procédure et des droits du Parlement. Cette motion ne proposerait pas de mesure extrême à l'égard des ministres concernés, comme leur arrestation, elle demanderait simplement au Comité du Règlement de se pencher de près sur la situation et de présenter des explications et des lignes directrices claires visant la conduite attendue des témoins qui comparaissent devant les comités du Sénat, la conduite de tous les pParlementaires aux audiences des comités du Sénat,;et la compréhension que devraient avoir les témoins à propos du comportement qui est attendu d'eux durant les réunions ainsi que les mesures que peut prendre le Sénat en cas de violation des règles et des attentes.

Je vous remercie, Votre Honneur.

L'honorable John D. Wallace : Honorables sénateurs, j'aimerais attirer l'attention des sénateurs non sur des opinions, mais bien sur des faits liés à la question soulevée par le sénateur Fraser.

En tant que parrain du projet de loi C-25 au Sénat, j'ai suivi son cheminement de près. Je suis membre du Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles. Je connais les circonstances dont a parlé madame le sénateur Fraser. Comme elle, je siégeais au Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles le matin du 1er octobre, quand les ministres Redford et Chomiak ont témoigné.

J'aimerais signaler aux sénateurs des faits très importants qui, à mon avis, influent considérablement sur toute la question. L'allégation, ou peut-être l'insinuation, soulevée à propos du ministre provincial de la Justice et du ministre fédéral est très grave. Il y a lieu de prendre très au sérieux toute allégation de « manquement grave » constituant un outrage éventuel mettant en cause des ministres, qu'ils soient fédéraux ou provinciaux. Évidemment, avant de se lancer sur une telle voie, il faut être absolument sûr des faits à l'appui d'une telle allégation ou insinuation.

J'aimerais vous renvoyer — je suis conscient de me répéter, à ce que disait le ministre Fraser.

Le sénateur Stratton : Madame le sénateur Fraser n'est pas ministre; ne la promouvez pas.

Le sénateur Fraser : Vous m'en voyez flattée.

Le sénateur Wallace : Sérieusement, j'ai du mal à trouver l'humour dans tout cela; je vous demande donc d'excuser mon lapsus.

Le sénateur Cools : Moi de même.

Le sénateur Wallace : Comme le sénateur Fraser l'a souligné, le comité a transmis des invitations à tous les ministres provinciaux de la Justice. Seulement deux d'entre eux ont fait savoir qu'ils seraient présents, soit la ministre Redford, de l'Alberta,et le ministre Chomiak, du Manitoba. Je crois qu'il est juste de dire que les membres du comité étaient heureux de leur présence.

Le comité a également reçu des observations écrites des ministres de plusieurs autres provinces, dont la Colombie-Britannique, la Nouvelle-Écosse et le Nouveau- Brunswick ainsi que leYukon.

Comme l'a souligné le sénateur Fraser, et on peut le trouver à la page 2 du compte rendu des audiences du 1er octobre « Nous nous estimons chanceux de vous avoir parmi nous ».

Honorables sénateurs, je suis persuadé que le sénateur Fraser estimait que le comité avait eu de la chance, compte tenu du cours préavis donnée aux ministres Redford et Chomiak et du fait qu'ils avaient pu modifier leur horaire aussi rapidement.

Je ne commencerai pas à parler des points positifs de ce projet de loi, mais je me contenterai de dire que les questions sur lesquelles porte le projet de loi C-25 ont toujours été et continuent d'être extrêmement importantes pour les ministres provinciaux de la Justice. Comme l'a dit le sénateur Fraser, nous avons été très chanceux de les avoir parmi nous.

(1820)

Les ministres Chomiak et Redford ont commencé leur exposé devant le comité en tant que groupe. Si je me souviens bien, ils ont commencé à témoigner vers 10 h 30 ou 10 h 45. Comme l'a souligné le sénateur Fraser, la ministre Redford a pris la parole juste avant midi, vers 11 h 50 ou 11 h 55, comme on peut le voir à la page 18 des délibérations du comité :

Je m'excuse. Le greffier nous avait dit que nous en aurions pour une heure. Le problème, c'est que venant de l'Ouest, nous avons des réservations d'avion pour retourner dans l'Ouest. Le ministre Chomiak doit être à l'assemblée législative cet après-midi.

Cela après avoir témoigné pendant environ une heure et 20 minutes. La ministre a dit :

Le greffier nous a dit —

Il s'agit donc du greffier de notre comité.

... que nous serions ici pendant une heure [...] nous avons pris des dispositions pour prendre l'avion et retourner dans l'Ouest. Le ministre Chomiak doit être à l'assemblée législative cet après-midi.

D'après cette déclaration, il est évident que la ministre Redford sentait qu'elle faisait du temps supplémentaire. Elle avait dépassé l'heure qu'elle avait prévue pour la comparution. Ce que je viens de vous lire représente tout ce qui a été consigné quant à la raison pour laquelle les ministres Redford et Chomiak estimaient devoir mettre fin à leur témoignage et s'en aller.

Après avoir entendu la ministre Redford prononcer ces paroles, le sénateur Fraser a répondu :

Nous comprenons. Je pense qu'il y a encore des questions. Pour ma part, j'aimerais vous poser des questions si vous pouviez revenir à une date ultérieure.

Ce à quoi la ministre Redford a répondu :

Je serais heureuse de le faire. Il serait bon de pouvoir continuer, mais nous devons retourner dans l'Ouest.

Aucune autre question n'a été posée à la ministre Redford ou au ministre Chomiak pour connaître l'heure de départ de leur avion ou pour savoir s'ils avaient d'autres choses à faire avant leur départ. On ne le leur a pas demandé et ils n'ont rien dit à ce sujet. Elle a simplement déclaré qu'on leur avait dit qu'ils en auraient pour une heure, et après une heure et 20 minutes, elle a dit : « Nous devons partir. »

Pour éviter de nuire aux travaux du comité et de limiter les témoignages, comme je l'ai dit, elle s'est engagée, tout comme l'a fait le ministre Chomiak, à fournir ultérieurement des réponses écrites à toutes les autres questions des sénateurs.

Je ne vais pas les passer en revue, mais par la suite, les sénateurs Fraser, Nolin, Baker, Joyal et Watt ont posé des questions aux ministres Redford et Chomiak. On m'a également offert la possibilité de le faire puisque j'avais indiqué que j'avais une question complémentaire à leur poser. Les deux ministres se sont engagés à répondre par écrit aux questions ultérieures des sénateurs.

Au moment de lever la séance, madame le sénateur Fraser a dit :

Bon voyage, monsieur et madame les ministres.

La ministre Redford a répondu :

Merci beaucoup.

Ce sont là les faits. Lorsque j'entends cela, je n'entends rien qui ressemble un tant soit peu à un outrage.

Le sénateur Fraser laisse entendre que la ministre Redford, ministre de la Justice et procureure générale de l'Alberta, a menti au comité au sujet des raisons de son départ.

Des voix : Oh, oh!

Le sénateur Wallace : Je ne vois rien dans ce que je vous ai lu plus tôt, et qui a aussi été lu par le sénateur Fraser, qui indique qu'elle a trompé le comité.

Alléguer qu'une personne trompe un comité est chose grave. Lorsque l'allégation vise un ministre provincial de la Justice, c'est peut-être encore plus grave. Comme dit le sénateur Fraser, ce n'est pas à prendre à la légère.

Puis madame le sénateur Fraser a renchéri sur l'allégation selon laquelle la ministre Redford a peut-être menti au comité et, d'une certaine façon, cela pourrait constituer un outrage. Selon moi, rien n'est beaucoup plus grave que cela. À mon avis — et je crois que le compte rendu le confirme —, il n'y a rien eu de trompeur et ni le ministre Chomiak ni la ministre Redford n'ont commis d'outrage.

Le sénateur Fraser a aussi allégué que le ministre Nicholson avait entravé les travaux du comité en interprétant les éléments de preuve, puis en y faisant allusion lors d'un point de presse, et que, d'une certaine façon, cela était un affront à l'autorité et pourrait constituer un outrage à notre comité. Je pense qu'il convient de rappeler que le ministre Nicholson a comparu devant notre comité, lui a livré un témoignage et, a, sans l'ombre d'un doute, et le mot est faible, un vif intérêt pour cette mesure législative et a donc suivi de près les témoignages présentés à notre comité.

Je crois que le fait qu'il ait exprimé une opinion ou un point de vue sur l'importance de ces travaux, l'importance de ce projet de loi, l'importance que littéralement tous les gouvernements provinciaux et les ministres provinciaux de la Justice accordent à cette mesure législative ne constitue certainement pas de l'ingérence dans nos travaux, pas plus qu'une manipulation de ces travaux.

(1830)

Encore une fois, si l'on regarde les faits, le dossier et ce qui s'est dit, je crois que rien ne vient appuyer les allégations soulevées et les insinuations formulées à l'endroit du ministre Nicholson et de la ministre Redford, la procureure générale de l'Alberta.

J'imagine que les allégations touchent également, directement ou indirectement, le ministre Chomiak.

Le sénateur Duffy : A-t-il déjà été, à un moment ou à un autre, en désaccord avec le ministre albertain?

Le sénateur Wallace : Honorables sénateurs, mis à part les faits — et, de toute évidence, il doit y avoir des faits pour appuyer ce genre d'allégations ou d'insinuations, et selon moi, il n'y en a pas —, j'aimerais partager avec vous quelques citations. Celles-ci viennent s'ajouter à celles présentées par le sénateur Fraser.

Premièrement, à la page 168 de la 33e édition du Parliamentary Practice d'Erskine May, on peut lire :

Une affaire prétendument survenue en comité, mais non rapportée par celui-ci, ne peut généralement pas faire l'objet d'une plainte à la Chambre pour atteinte au privilège.

Encore une fois, on dit « non rapportée par celui-ci », pour faire référence, évidemment, au comité; le texte dit « non rapportée par le comité ».

Deuxièmement, le commentaire 107, à la page 28 de la sixième édition de la Jurisprudence parlementaire de Beauchesne, dit :

La Chambre seule connaît des atteintes au privilège commises en comité. Par exemple, si un témoin refuse de comparaître ou de témoigner, la situation doit être portée à l'attention de la Chambre, qui décide des mesures à prendre.

Enfin , au chapitre 23, page 128, de La procédure et les usages de la Chambre des communes de Marleau et Montpetit, on peut lire :

La présidence a toujours eu pour politique, sauf dans des circonstances extrêmement graves, de n'accueillir des questions de privilège découlant de délibérations de comités que sur présentation, par le comité visé, d'un rapport traitant directement de la question et non lorsqu'elles étaient soulevées à la Chambre par un député.

Honorables sénateurs, j'avance sans équivoque que ni les règles qui régissent les activités du Sénat, ni celles qui régissent les activités de nos comités, ni les faits avancés dans ce dossier ne justifient ou n'appuient d'aucune façon une motion tendant à ce que la question soit renvoyée au Comité du Règlement pour y être examinée, comme le propose le sénateur Fraser, afin d'établir des règles à l'intention de tous les futurs témoins. Les faits, la loi et les règles de procédure n'appuient pas une telle motion.

Des voix : Bravo!

L'honorable Anne C. Cools : L'honrable sénateur Wallace accepterait-il de répondre à une question?

Son Honneur le Président : Je suis disposé à écouter les observations des sénateurs. Quand j'en aurai assez entendu, je prendrai une décision.

Le sénateur Cools : Votre Honneur, en vertu des articles 43 et 44 du Règlement du Sénat du Canada, si un sénateur n'est pas absolument sûr d'avoir bien compris ce qui a été dit, il convient de poser des questions au sénateur. Je ne crois pas qu'il existe de règle stricte stipulant que je ne peux pas poser de question à Son Honneur. Il existe peut-être une nouvelle règle que je ne connais pas. Toutefois, j'ai déjà pris part à d'innombrables débats de ce genre, et des questions ont été posées au cours du processus.

À moins que nous ne manquions de temps, j'aimerais pouvoir prendre la parole au cours de ce débat. Cependant, je pense que si je pouvais poser une question ou deux à l'honorable sénateur Wallace, on pourrait éclaircir bien d'autres choses.

Son Honneur le Président : Allez-y, sénateur.

Le sénateur Cools : Le sénateur Wallace a parlé avec beaucoup de conviction, de même que le sénateur Fraser. Comme le sénateur Wallace semble connaître un peu les faits, je me demande s'il aurait l'obligeance de nous expliquer l'objet de la visite des ministres à Ottawa. Était-ce pour assister à la conférence de presse ou pour témoigner devant le comité?

Le sénateur Wallace : Honorables sénateurs, je ne connais pas toutes les raisons pour lesquelles les ministres Redford et Chomiak sont venus à Ottawa. Tout ce que je sais, c'est qu'ils sont venus pour témoigner devant le Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles au sujet du projet de loi C-25 parce que la greffière de notre comité les avait invités à être présents à la réunion du 1er octobre, à 10 h 30.

L'honorable Claudette Tardif (leader adjoint de l'opposition) : Honorables sénateurs, je pense que le sénateur d'en face fait fausse route. Il importe peu que le comité n'ait pas demandé l'heure de départ des vols des ministres. Ce qui importe, c'est que les ministres ont invoqué l'excuse d'être en retard pour leur vol respectif afin d'aller assister à la conférence de presse.

Je suis d'accord avec madame le sénateur Fraser lorsqu'elle affirme que le comportement des témoins devant le Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles le 1er octobre 2009 a porté atteinte aux privilèges parlementaires en nuisant au comité dans son étude du projet de loi C-25. Selon moi, ce qui s'est passé établit un précédent dangereux, qui aura pour effet de réduire la capacité de nos comités d'étudier les projets de loi de manière efficace à l'avenir.

Les conférences de presse ne devraient pas avoir la priorité sur les affaires des comités. Les Canadiens s'attendent à ce que les sénateurs examinent attentivement les mesures législatives proposées par le gouvernement. L'incident du 1er octobre constituait non seulement un manque de respect à l'égard des membres du comité, mais il nuisait également à la capacité du comité de respecter son ordre de renvoi, à savoir étudier le projet de loi C-25 et en faire rapport.

Votre Honneur, à la page 131 de la 21e édition d'Erskine May Parliamentary Practice, on indique ce qui suit :

Toute conduite visant à dissuader des témoins éventuels de témoigner devant l'une ou l'autre des Chambres ou devant un comité constitue un outrage.

De plus, à la page 132 du même volume, dans la même édition, on indique que « toute tentative [...] d'empêcher toute personne de comparaître ou de présenter un témoignage constitue une atteinte au privilège ».

L'organisation d'une conférence de presse pour les témoins au même moment où ils étaient censés comparaître devant le comité a empêché ces derniers d'être présents pendant toute la réunion du comité. Autrement dit, cela a nui à la capacité des témoins de participer à la réunion du comité et, par conséquent, a empêché certains membres du comité de les questionner en personne.

(1840)

Votre Honneur, cette situation est inacceptable. Le gouvernement lui-même a dû demander que le comité retarde la séance durant laquelle il devait procéder à l'étude article par article du projet de loi afin de pouvoir entendre d'autres témoins. Le comité a accédé à cette demande, mais la réunion a été abrégée puisque les témoins sont allés rejoindre le ministre de la Justice pour participer à une conférence de presse visant à critiquer le Sénat pour avoir retardé le projet de loi en question.

J'appuie la question de privilège du sénateur Fraser, et je crois que cette question devrait être examinée par notre Comité permanent du Règlement, de la procédure et des droits du Parlement.

L'honorable Pierrette Ringuette : Honorables sénateurs, tandis que j'écoutais nos collègues débattre de cette question, je n'ai pas pu m'empêcher de penser que cette institution a beaucoup de chance d'avoir des membres si compétents.

Le sénateur Wallace a signalé que le comité en entier devait présenter la question de privilège au Sénat. Je rappelle à l'honorable sénateur que cela n'a pas été le cas lorsque le sénateur Wallin a soulevé une question de privilège relativement à une situation au Comité sénatorial permanent de la sécurité nationale et de la défense.

Le sénateur Cools : Honorables sénateurs, je suis ce débat avec un vif intérêt. Je dois dire que je trouve la situation triste et tragique. Lorsque j'écoutais le sénateur Fraser, j'ai détecté un sentiment de déception et de perte de bonne foi. Le comité a retardé l'étude article par article du projet de loi et il a décidé d'entendre ces témoins. J'imagine qu'il a agi avec empressement et avec toute la sincérité du monde. Ce serait certainement une gifle que d'ouvrir le Calgary Herald du 2 octobre 2009 et de lire le grand titre qui dirait : « Un ministre de l'Alberta s'embarque dans la lutte contre le crédit accordé pour le temps passé en détention préventive. Des pressions sont exercées sur le Sénat à majorité libérale. »

Je suis également sensible à l'invocation de la règle de droit par le sénateur Wallace, mais j'aimerais ajouter quelques faits à ceux qu'il a présentés. Il se trouve que j'ai ici avec moi une copie des délibérations du comité, que j'ai lues pendant que les deux sénateurs s'exprimaient.

Premièrement, je crois que le sénateur Wallace a dit que les deux procureurs généraux avaient commencé à témoigner à 10 h 30 et qu'ils ont été là durant une heure et demie. Si je me fie aux délibérations du comité, la séance a débuté à 10 h 50. C'est le premier point que je veux souligner.

Deuxièmement, le sénateur Wallace a cité la réponse de la présidente du comité, dans laquelle elle dit comprendre que ceux-ci ont des vols à prendre pour retourner dans l'Ouest canadien. Je veux aussi souligner que ce point a été mentionné à quelques reprises dans les minutes qui ont suivi. Par suite de la réaction du sénateur Fraser lorsque la ministre Redford a mentionné pour la première fois qu'ils avaient pris des dispositions pour prendre des vols les ramenant dans l'Ouest, et que le ministre Chomiak devait être présent à l'assemblée cet après-midi-là, la présidente a dit :

[...] J'aurais des questions à poser si vous pouviez vous engager à revenir plus tard.

Ce à quoi la ministre Redford a répondu :

Je serai heureuse de le faire. Ce serait bien d'avoir l'occasion de poursuivre, mais nous devons vraiment retourner dans l'Ouest.

La présidente a ensuite ajouté :

La nécessité d'attraper un avion, c'est quelque chose que nous connaissons bien ici.

Plus tard, la ministre Redford a dit :

Heureusement, même si j'avais plus de temps, je voudrais probablement prendre le temps d'examiner cela avant de répondre.

La ministre refuse de répondre, d'abord parce qu'elle n'a pas assez de temps, ensuite parce qu'elle a besoin de se préparer.

Nous pourrons vous donner la réponse à ces questions du point de vue de l'Alberta. Je m'en charge.

On peut douter qu'il y ait atteinte aux privilèges ici, mais il y a une atteinte quelconque. Ne nous y trompons pas.

Le sénateur Comeau : Une atteinte aux sentiments. C'est de l'orgueil blessé.

Le sénateur Cools : Ce n'est pas qu'une question d'ego. Je distingue assez rapidement les cas de sentiments blessés ou d'ego froissé des cas d'atteinte aux privilèges.

Honorables sénateurs, je veux faire valoir que, quelle que soit la façon dont on présente la situation, il s'est passé quelque chose d'inacceptable. De toute évidence, la présence des ministres à cette conférence de presse était prévue et organisée. Il n'y a aucun doute là-dessus.

Nous savons aussi, honorables sénateurs, que les procureurs généraux ne sont pas des ministres ordinaires. Il faut comprendre que les procureurs généraux sont attornatus rex, les procureurs du roi, et que leur histoire remonte très loin en arrière. Le procureur du roi était si important dans l'histoire du Canada que, peu de temps après la Confédération, sir John A. Macdonald, alors premier ministre, s'est attribué le rôle de procureur général à lui-même parce qu'il savait à quel point l'histoire de ce poste avait été compliquée dans les provinces, entre autres.

Nous devons bien comprendre qu'un procureur général doit, plus que tout autre, honorer la Constitution, le système et son serment, et qu'il a aussi le devoir de ne pas se montrer trop partisan et de mettre son allégeance de côté sur bien des questions de l'heure. C'est un rôle que la plupart des procureurs généraux semblent en voie d'oublier. Nous savons que j'ai eu bien des face-à-face avec des procureurs généraux de notre régime fédéral au fil des ans.

Quelle que soit la façon dont on présente la situation, le fait est que les membres du comité ont été amenés à croire, d'après ce que la ministre leur a dit, quelque chose qui était bien loin de la réalité. Quelle que soit la façon dont on présente la situation, quels que soient les propos qu'a tenus la ministre, les membres du comité ont compris quelque chose qui s'est avéré bien différent de la vérité. Si nous voulons nous en tenir aux faits, nous devons tenir compte de cet autre fait. Ces procureurs généraux, y compris le procureur général que nous avons ici, à Ottawa, avaient le devoir de s'assurer qu'un tel malentendu ne se produise pas.

(1850)

C'est un principe bien établi en common law : on ne peut pas permettre que des personnes doivent fonctionner sous le coup de la suspicion ou de l'incompréhension. Certains diront que c'est trompeur. Il reste que ce sont des principes bien établis depuis longtemps.

Ce sont là des questions qu'il faut aborder prudemment et délicatement en raison de la position que les procureurs généraux occupent dans notre système juridique. C'est l'une des situations où je voudrais que nous ayons encore l'ancien système de privilège : nous pouvions régler la question ici et sur-le-champ, sur le parquet du Sénat, avec l'échange de quelques excuses, et l'affaire était classée. L'ancien système de privilège avait du bon; les opinions de tous les sénateurs pouvaient s'exprimer et les sénateurs prenaient directement la décision.

Peu importe comment on considère l'affaire, honorables sénateurs, il s'est passé quelque chose de répréhensible, quelque chose qui ne respire pas la vérité et la bonne intention. S'il s'agit simplement de malentendu, il serait bien que ce soit établi. Je dois dire que, à première vue, il semble y avoir quelque chose qui cloche. Quelle que soit l'issue, il faut convenir que, de prime abord, quelque chose de répréhensible s'est passé.

Je sais que Son Honneur peut compter dans l'exercice de ses fonctions sur de solides compétences et de grandes connaissances, mais il serait bien que nous puissions régler ce problème par un meilleur moyen qu'un simple renvoi au comité, car je ne peux m'empêcher de penser que les conséquences ne peuvent être qu'embarrassantes et négatives. Je le pense sincèrement. Si nous pouvions trouver dans nos cœurs et nos têtes, à l'intérieur de ce système, le moyen de régler le problème ici même, ce serait préférable pour tous les intéressés. Je suis de ceux qui ne croient pas, qui ne peuvent pas croire que quiconque décide de mentir exprès et avec malveillance, et je ne suis pas prête à m'engager dans cette voie.

Son Honneur est doué de créativité. Si nous pouvions trouver le moyen de régler cette affaire sans jeter ces deux témoins dans un immense embarras, nous rendrions un grand service au système. J'ai l'habitude, je sais, de parler souvent en me plaçant du point de vue d'une minorité d'une seule personne, mais je souhaiterais que nous parvenions à une solution, car cela n'augure rien de bon pour le système dans son entier. Ces personnes devraient avoir la possibilité de présenter des excuses, ou bien quelqu'un pourrait en présenter en leur nom.

Je lance cette idée. Certains sénateurs seront peut-être portés à se dire que ce qui se passe n'est pas sain, que ce n'est sain pour aucun d'entre nous. Je suis bien consciente que le sénateur Fraser prend sa présidence extrêmement au sérieux. Si on lit les délibérations, il ressort clairement que son esprit suit un fil conducteur quand ces mots sont dits.

Je ne sais pas quoi dire d'autre. Il fut un temps où ces débats étaient pris beaucoup plus au sérieux, mais il arrive que nous devions trouver de meilleurs moyens de régler ces questions. Il y a quelque chose qui ne va pas.

Des voix : Bravo!.

L'honorable Bert Brown : Honorables sénateurs, toute cette discussion prend des proportions excessives. Des accusations graves ont été portées contre des personnes importantes. Selon moi, toute la question de privilège se résume à un fait : les procureurs généraux se sont entendus sur une certaine période, selon le témoignage du sénateur Wallace. Par exemple, si la demande avait porté sur 12 heures, ou six heures ou huit heures de témoignage, ou même sur deux ou trois heures, ces personnes n'auraient pas accepté

de venir témoigner ce jour-là. De toute évidence, elles avaient autre chose au programme, mais le facteur contraignant a toujours été l'heure de l'avion qui les ramènerait dans l'Ouest.

Ce que les procureurs généraux ont fait avant de se rendre à leur avion n'a rien à voir. Ils n'avaient aucunement à expliquer pourquoi ils voulaient aller à une conférence de presse avant de prendre leur avion. L'heure de départ de leur avion était le facteur ultime dans leurs activités, dans ce qu'ils avaient décidé de faire. Peu importe s'ils voulaient aller manger un hamburger chez McDonald's ou s'ils avaient besoin d'aller aux toilettes. Ils avaient honoré leur engagement d'une heure, et ils ont décidé que c'est tout ce qu'ils pouvaient accorder.

Le sénateur Wallace : Merci, honorables sénateurs.

Je conviens avec ma savante collègue qu'il devrait y avoir un moyen plus modéré, plus délicat d'aborder cette question, car les allégations sont si graves et, comme je l'ai déjà dit, elles sont mal inspirées.

Il a été affirmé que les faits montraient que, de prime abord, il y avait ici quelque chose de répréhensible. Il n'en est rien. Il est évident que ce n'est pas le cas.

Je ne vais pas répéter tout ce que j'ai déjà dit, mais le point essentiel, comme le sénateur Brown le signale, c'est que la ministre Redford — et, avec elle, le ministre Chomiak — croient vraiment qu'ils ont honoré leur engagement préalable à comparaître pendant une heure devant le comité. Ils l'ont fait.

La ministre Redford a dit que des dispositions avaient été prises pour prendre l'avion et rentrer dans l'Ouest, ce que, de toute évidence, les témoins ont fait. Je ne crois pas qu'il y ait lieu de s'étonner que, entre le moment où les témoins ont quitté le comité et celui où ils ont pris l'avion, ils ont peut-être eu autre chose à faire. Je ne crois pas que cela ait traversé l'esprit de quiconque. Ils n'ont pas été interrogés à ce sujet. Nous serions sans doute renversés s'ils n'avaient pas autre chose à faire, si, en quittant le comité, ils s'étaient précipités vers l'aéroport.

Le sénateur Comeau : Ce ne sont pas nos affaires.

Le sénateur Wallace : Parfaitement. Ce ne sont pas nos affaires. Cela ne regarde qu'eux. Pourquoi les ministres de la Justice de l'Alberta et du Manitoba devraient-ils rendre des comptes à un comité et lui dire ce qu'ils vont faire après avoir quitté le comité? On ne peut pas envisager que cela soit exigé d'eux.

Nous avons entendu parler d'une conférence de presse. De toute évidence, les ministres sont de fervents défenseurs et partisans du projet de loi C-25. Il n'y a là rien de neuf. Cela n'étonne personne. Depuis des mois, voire des années, ils réclament vigoureusement la présentation de ce projet de loi ou d'un projet de loi de même nature.

Sommes-nous en train de dire que, en quelque sorte, ils ne devraient pas s'exprimer pour le bien de ceux qu'ils représentent dans leur province, de ceux qui comptent sur eux pour agir en leur nom et appuyer fermement un projet de loi qu'ils appuient eux- mêmes?

(1900)

Ils sont venus à Ottawa, ils ont témoigné à une tribune publique, puis ils ont décidé de parler publiquement de leur témoignage. Est-ce répréhensible que les ministres ne soient pas autorisés à parler de questions importantes à la population de leur province, de parler d'un projet de loi et de se prononcer publiquement en faveur d'un projet de loi que d'autres pourraient ne pas appuyer, et que, parce qu'ils l'ont fait et qu'ils ont parlé publiquement de leur témoignage, on dise qu'ils ont agi de façon inappropriée, méprisante et trompeuse?

Il n'y a rien qui prouve que ce comportement frôlerait même le mépris. Ce qui a été dit est la vérité. Ils croyaient s'être engagés à être présents durant une heure. Ils avaient un avion à prendre à un moment donné cette journée-là. Voilà.

Je reviens à ce que madame le sénateur a dit, c'est-à-dire qu'en raison de la nature de ces allégations — et je suis entièrement d'accord avec elle —, nous devrions trouver une façon de les examiner de manière ouverte et mettre cette question de côté afin d'évaluer les mérites du projet de loi C-25, qui importe vraiment finalement.

Le sénateur Fraser : Comme les membres du comité le savent, nous allons étudier le projet de loi article par article demain après- midi.

Je suis d'accord avec le sénateur Cools. Quelque chose a mal tourné. Selon moi, il s'agit là à tout le moins d'un outrage, voire d'une atteinte aux privilèges du Sénat. Il reviendrait toutefois à Son Honneur de déterminer si, à première vue, c'est bien le cas.

En ce qui concerne les faits et la chronologie des événements, j'aimerais rectifier mes propos et ceux du sénateur Wallace. J'ai déclaré plus tôt que le comité siégeait habituellement jusqu'à 12 h 30. C'est plutôt 12 h 45, nous allons souvent légèrement au-delà, comme les pauvres membres du comité le savent. Il est assez courant que nous siégions jusqu'à 13 heures, voire 13 h 15.

Je remercie le sénateur Cools de nous avoir rappelé que, ce jour-là, les délibérations du comité ont débuté à 10 h 50 et non à 10 h 45. Donc, pour ce que cela vaut, le comité a siégé pendant un peu moins d'une heure et dix minutes — sept secondes de moins qu'une heure et dix minutes, pour être précis — avant qu'on nous annonce que les ministres souhaitaient partir.

Quant à déterminer s'il est possible de soulever une question de privilège au sujet des délibérations des comités, tout comme le sénateur Ringuette, je pense à un précédent que je trouve très pertinent et qui s'est produit pendant la présente session. Il s'agit d'une question de privilège, soulevée par le sénateur Wallin, que Son Honneur a prise en considération. Je crois que c'est la façon de procéder.

Le sénateur Duffy a demandé si M. Chomiak avait dit quelque chose à propos de l'article qui a été cité à de nombreuses reprises pendant les délibérations. Non, il n'a rien dit. Autant que j'aie pu voir, il suivait attentivement les délibérations mais il n'a pas participé aux échanges.

Enfin, quant au fait que les procureurs généraux de l'Alberta et du Manitoba se seraient mis d'accord sur un certain emploi du temps, point qui a été soulevé par les sénateurs Wallace et Brown, je ne sais pas qui a dit à Mme Redford qu'on leur demanderait de ne comparaître que pendant une heure. Selon le compte rendu écrit que j'ai, on nous a demandé si la ministre aurait le temps d'attraper son avion à 14 h 30. On a répondu à son personnel que, pour que la ministre prenne l'avion de 14 h 30, elle devrait quitter la Colline à 13 h, ce qui ne devait pas être un problème puisque nous avions jusqu'à 12 h 45.

Je suis désolée de devoir m'appesantir sur les détails des échanges entre les greffiers au Bureau et le personnel de la ministre.

Le sénateur Comeau : On comprend pourquoi.

Le sénateur Fraser : Malheureusement, comme la question a été soulevée, j'au cru devoir le préciser.

Enfin, comme j'ai tenté de le dire quand je présentais un peu plus tôt la longue série d'événements, même s'ils avaient à voir avec les délibérations du comité, j'estime qu'il y a non seulement outrage au comité, mais également outrage au Sénat. Selon moi, il était opportun de soumettre la question à l'examen de notre assemblée et de Son Honneur.

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, je voudrais tous vous remercier pour vos interventions. Il s'agit d'une question importante. Nous examinerons toutes les références aux règles de procédure qui ont été faites, le compte rendu et le reste et nous prendrons une décision à cet égard le plus tôt possible.

(Le Sénat s'ajourne au mercredi 7 octobre 2009, à 13 h 30.)


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