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SOCI - Comité permanent

Affaires sociales, sciences et technologie

 

Délibérations du comité sénatorial permanent des
affaires sociales, des sciences et de la technologie

Fascicule 3 -- Témoignages


Ottawa, le mardi 14 mai 1996

Le comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie, auquel a été renvoyé le projet de loi C-11, Loi constituant le ministère du Développement des ressources humaines et modifiant ou abrogeant certaines lois, se réunit aujourd'hui, à 9 h 30, pour en faire l'examen.

Le sénateur Mabel M. DeWare (présidente) occupe le fauteuil.

[Traduction]

La présidente: Honorables sénateurs, nous avons avec nous ce matin trois représentants du ministère: Peter Harrison, sous- ministre délégué et vice-président; Gordon McFee, directeur général intérimaire de la Politique d'assurance, Assurance et Robert Cook, avocat général des Services juridiques.

Messieurs, vous avez la parole.

M. Peter Harrison, sous-ministre délégué et vice-président, ministère du Développement des ressources humaines: Honorables sénateurs, le projet de loi C-11 constitue officiellement le ministère du Développement des ressources humaines. Il s'agit manifestement d'une étape marquante pour le ministère. Le ministère du Développement des ressources humaines du Canada a été créé en 1993 par suite d'un examen fondamental du fonctionnement du gouvernement.

Le ministère a été créé afin de regrouper au sein d'un seul organisme national et intégré l'ensemble des programmes et des activités liés à la mise en valeur des ressources humaines. Le projet de loi devant vous aujourd'hui concrétise cette démarche puisqu'il prévoit la fusion de l'ancien ministère de l'Emploi et de l'Immigration et du ministère du Travail ainsi que des programmes de développement social des anciens ministères de la Santé et du Bien-être social et du Secrétariat d'État. Il réunit tous ces programmes au sein d'un seul ministère.

[Français]

La première partie du projet de loi établit le ministère du Développement des ressources humaines et prévoit la nomination d'un ministre, d'un sous-ministre et des sous-ministres délégués. Elle établite le mandat du ministère. On y prévoit également la nomination facultative d'un ministre du Travail qui utiliserait les services et installations du ministère.

Cette disposition assurera que le gouvernement puisse continuer à porter une attention particulière au dossier du travail. L'honorable Alfonso Gagliano a été nommé ministre du Travail en janvier 1996.

La partie II du projet de loi maintient la Commission de l'emploi et de l'immigration du Canada, sous le nom de Commission de l'emploi et de l'assurance du Canada. Les pouvoirs de la commission demeurent les mêmes.

La partie III maintient les fondements législatifs du programme d'adaptation pour les travailleurs ågés, qui existent présentement dans la loi sur le ministère du Travail.

La quatrième partie énumère un certain nombre de dispositions transitoires et conditionnelles qui résultent du fusionnement des anciens ministères.

[Traduction]

Je pourrais peut-être exposer brièvement les objectifs du nouveau ministère. Développement des ressources humaines Canada est responsable des programmes d'adaptation au marché du travail, des activités nationales en matière de travail, des programmes d'assurance-emploi et d'assurance-chômage, des paiements aux provinces pour le financement de l'enseignement postsecondaire, des prêts aux étudiants et des programmes de développement social, des programmes de sécurité du revenu tels que la Sécurité de la vieillesse, le Supplément du revenu garanti et le Régime de pensions du Canada, et du programme national d'alphabétisation.

Les objectifs du ministère sont énoncés à l'article 6 du projet de loi C-11. Ces objectifs sont les suivants: élaborer, promouvoir et mettre en oeuvre des politiques et des programmes sociaux favorisant l'épanouissement, la participation et le bien-être des membres de la société canadienne; promouvoir et accroître la sécurité du revenu des personnes ågées, des personnes handicapées, des survivants et des migrants; promouvoir la croissance et la flexibilité économiques en procurant un revenu temporaire aux travailleurs au chômage y ayant droit, en vertu de la Loi sur l'assurance-chômage, sans imposer de fardeau excessif aux particuliers, aux groupes et aux régions; favoriser et maintenir des relations industrielles stables, ainsi que la sécurité, la justice et l'équité en milieu de travail. Enfin, le ministère veut intensifier et faciliter l'utilisation des ressources humaines au Canada afin de promouvoir la croissance économique et le bien-être de la société.

En ce qui concerne brièvement les rôles et responsabilités, le ministre du Développement des ressources humaines est responsable de toutes les questions qui se rapportent aux objectifs énoncés par ce projet de loi. En outre, à l'heure actuelle, le secrétaire d'État à la formation et à la jeunesse, qui relève du ministre, s'occupe des questions ayant trait à la jeunesse, à la formation, aux intérêts des personnes handicapées et aux affaires autochtones. Le ministre responsable de l'alphabétisation relève également du ministre du Développement des ressources humaines et exerce des pouvoirs délégués en matière de financement du Secrétariat national à l'alphabétisation.

Comme l'indique le projet de loi qui se trouve devant vous, le ministre du Travail est responsable du Code canadien du travail et des questions ayant trait aux relations industrielles, et de promouvoir la sécurité, la justice et l'équité en milieu de travail.

Enfin, en ce qui concerne les rôles et les responsabilités, la Commission de l'emploi et de l'assurance du Canada relèvera du Parlement par l'entremise du ministre du Développement des ressources humaines. Les deux commissaires, qui représentent l'un les travailleurs et l'autre les employeurs, sont chargés de formuler des recommandations concernant les politiques et les programmes, les modifications à apporter aux règlements et d'autres questions qui touchent les programmes d'emploi et d'assurance.

[Français]

Le projet de loi C-11 n'accroît, ni ne réduit les pouvoirs du ministre ou du gouvernement fédéral en ce qui touche la main-d'oeuvre et les programmes sociaux. Il vise uniquement à regrouper et à fusionner les pouvoirs statutaires déjà prévus par les lois des anciens ministères. Le projet de loi C-11 permet essentiellement de faire le ménage, en établissant une assise législative unifiée qui précise le mandat et le pouvoir du ministère sans rien ajouter de neuf à ses pouvoirs.

Comme je vous l'ai déjà dit, l'article 6 énonce clairement et simplement les objectifs, et je cite:

...d'améliorer le marché de l'emploi et de promouvoir l'égalité et la sécurité sociale.

Ce mandat n'accroît pas les pouvoirs du ministère, ni ne les réduit. Le projet de loi C-11 établit les assises nécessaires. Merci, madame la présidente. Il nous fera plaisir de répondre à vos questions.

[Traduction]

La présidente: J'aimerais commencer par une question. Est-il exact que le projet de loi ne présente aucune nouvelle mesure, aucun nouveau programme, ni aucune nouvelle réduction?

M. Harrison: C'est exact.

La présidente: Je crois comprendre que vous serez désormais chargé de surveiller le programme de la sécurité de la vieillesse, le supplément du revenu garanti et le Régime de pensions du Canada mais que les décisions concernant ces programmes particuliers seront prises par le ministre des Finances et non par le ministre du Développement des ressources humaines.

M. Harrison: En ce qui concerne le Régime de pensions du Canada, madame la présidente, une consultation est en cours, parrainée par le ministre des Finances. Le ministre du Développement des ressources humaines est responsable des programmes qui se rattachent au Régime de pensions du Canada.

La présidente: Quelles que soient les décisions prises, le ministre est responsable de leur exécution?

M. Harrison: C'est exact et ces changements seraient présentés dans un prochain projet de loi.

Le sénateur Rompkey: Le sénateur Cohen a peut-être déjà soulevé cette question et c'est une question qui a été soulevée à la Chambre.

Est-ce que Condition féminine Canada fera partie du nouveau ministère? Dans la négative, pourquoi? Pouvez-vous nous expliquer pourquoi ce programme en particulier n'a pas été transféré au nouveau ministère? Il me semble que ce serait assez logique puisqu'il s'agit d'un programme d'action positive, essentiellement un programme d'évaluation et d'appui, tout comme les programmes à l'intention des étudiants ou des travailleurs ågés ou de catégories semblables. Pourquoi le programme de la condition féminine n'a-t-il pas été transféré au nouveau ministère?

Ma deuxième question porte sur l'alphabétisation. Le ministre responsable de l'alphabétisation relève du ministre. Que fait-on pour promouvoir l'alphabétisation dans l'ensemble du pays? C'est une question qui me préoccupe. Que fait notre pays pour remédier au problème de l'analphabétisme? De nombreuses initiatives dans ce domaine sont en train d'être transférées aux administrations provinciales. On constate une nette tendance à cet égard. Nous allons peut-être nous retirer de la formation. Pourriez-vous nous expliquer plus en détail le rôle futur du gouvernement fédéral dans le domaine de la formation?

Ce qui m'inquiète le plus, c'est l'absence d'appui envers l'alphabétisation, qui est une condition fondamentale. Nous pouvons parler d'enseignement postsecondaire, de recyclage des travailleurs, de l'acquisition de nouvelles aptitudes mais si vous ne réglez pas le problème de l'analphabétisme, tous ces programmes ne rimeront pas à grand chose.

À l'heure actuelle, le taux d'analphabétisme dans notre pays est d'environ 30 p. 100. Cela signifie qu'environ 30 p. 100 de nos citoyens sont incapables de lire correctement un article de journal. Quarante-cinq pour cent des Canadiens sont incapables de calculer, c'est-à-dire qu'ils sont incapables d'additionner et de soustraire correctement. C'est vraiment un constat éloquent à propos du système d'enseignement secondaire, qui d'ailleurs n'est pas une responsabilité fédérale mais provinciale.

Il m'inquiète de constater que le taux d'analphabétisme augmente au fur et à mesure qu'on se dirige d'ouest en est. Ma propre province occupe la première place à ce chapitre, je crois. Il faut bien que nous soyons les premiers en quelque chose.

Le sénateur Phillips: Je pensais que vous étiez les premiers dans pratiquement tout.

Le sénateur Rompkey: Merci, sénateur. Cependant, ma province est la moins en mesure de s'attaquer à ces problèmes. Le budget qui sera présenté jeudi apportera des changements assez radicaux. Les choses s'amélioreront peut-être dans quelques années mais pour l'instant, la province est au bord du gouffre. Nous nous trouvons dans une situation très difficile. Par exemple, aucune immobilisation n'est prévue pour la construction de routes dans notre province.

Je souligne ce point simplement pour renforcer cette idée. Le gouvernement fédéral peut transférer des responsabilités et dire à Terre-Neuve, devant la diminution des paiements de transfert, qu'elle disposera alors d'une plus grande marge de manoeuvre. Oui, nous pouvons jongler avec moins d'argent et en consacrer une partie à l'alphabétisation, si c'est ce que nous décidons. Par contre, il n'existe pas non plus de véritable programme d'alphabétisation à l'échelle nationale. Le budget pour ce programme -- corrigez-moi si je me trompe -- est aux alentours de deux millions de dollars. C'est loin d'être suffisant pour s'attaquer à un problème national d'analphabétisme de 30 p. 100.

À mon avis, l'alphabétisation est essentielle. Or, je ne constate l'existence d'aucun plan national de lutte contre l'analphabétisme. Ce n'est pas une critique du secrétariat ni de la ministre, loin de là. La ministre voulait se charger de cette cause, ce qu'elle a fait avant de devenir ministre. Lorsqu'elle était sénateur, c'est une cause qu'elle a défendue et je tiens à reconnaître le travail qu'elle accomplit. Mon intention est plutôt de souligner ce problème.

Le sénateur Bonnell: Je croyais que vous vouliez poser une question.

Le sénateur Rompkey: C'est mon préambule. Voulez-vous que je le reprenne? Avez-vous compris tout ce que j'ai dit?

Le sénateur Bonnell: Allez-y.

Le sénateur Rompkey: C'est un problème qui m'inquiète. Les provinces pauvres en particulier n'ont pas vraiment la possibilité de s'attaquer à ce problème fondamental. Je ne constate l'existence d'aucun plan national pour remédier à ce problème. Pourriez-vous faire des commentaires à ce sujet?

M. Harrison: Sénateur, en ce qui concerne la condition féminine au Canada, vous avez tout à fait raison, elle n'est pas touchée par ce projet de loi. Le processus d'examen des programmes entrepris par le gouvernement a essentiellement réuni trois programmes clés qui intéressent les femmes. Le Secrétariat d'État à la condition féminine a été créé. Ces programmes relèvent de ce secrétariat, qui est distinct de notre ministère.

Je peux uniquement présumer que la décision prise par le gouvernement donne une plus grande visibilité à ces programmes mais le projet de loi qui est devant vous aujourd'hui n'apporte aucun changement à cet égard.

Le sénateur Rompkey: Le Secrétariat d'État responsable des programmes de promotion de la femme relève aussi d'un autre ministre. S'agit-il du ministre de la Santé?

Le sénateur Cohen: Du Patrimoine.

Le sénateur Rompkey: En ce qui concerne la visibilité, le ministre n'est qu'un second qui relève d'un autre ministre. La même chose aurait pu être accomplie dans le cadre de l'emploi.

M. Harrison: Je ne suis pas en mesure de discuter du raisonnement.

Le sénateur Rompkey: À qui devrions-nous poser cette question?

M. Harrison: Je crois que vous pourriez poser cette question aux représentants du ministère du Patrimoine lorsqu'ils comparaîtront devant votre comité. Je tiens à préciser, sénateur, que nous accordons une grande attention aux questions qui intéressent les femmes et que notre ministère travaille très étroitement avec le reste du gouvernement sur ces questions.

En ce qui concerne l'alphabétisation, le projet de loi qui se trouve devant vous ne touche pas les programmes d'alphabétisation. Cela dit, le Budget des dépenses de notre ministère, pour ce qui est des dépenses consacrées directement au programme d'alphabétisation au cours du présent exercice, s'élève à 22,3 millions de dollars. C'est ce qui est indiqué dans le Budget des dépenses.

Je tiens également à indiquer que le ministère et le ministre s'occupent très directement des questions et des programmes qui intéressent les jeunes. Bien que des décisions n'aient pas encore été prises ni présentées, l'alphabétisation est directement liée aux questions qui intéressent les jeunes et à l'employabilité des jeunes.

Le sénateur Cohen: Est-il exact que nous pourrions faire une recommandation, avant d'adopter le projet de loi ou au moment de l'adopter, pour que le gouvernement du Canada envisage de mettre sur pied un programme national d'alphabétisation réellement efficace? J'appuie fermement les propos du sénateur Rompkey et j'aimerais proposer que nous formulions cette recommandation au moment de l'adoption du projet de loi.

Le sénateur Phillips: Je suis d'accord.

Le sénateur Rompkey: Moi aussi.

Le sénateur Phillips: Lorsque le témoin a énuméré les responsabilités du ministère, il a parlé des prêts aux étudiants. Cela comprend-il l'octroi et le recouvrement de prêts?

M. Harrison: C'est exact, cela inclut ces deux aspects.

Le sénateur Phillips: Auparavant, le recouvrement était une responsabilité du ministère du Revenu national, n'est-ce pas?

M. Harrison: Je pourrais me renseigner auprès de mes collaborateurs à propos du ministère du Revenu national, mais il existe un programme de recouvrement au sein du programme canadien de prêts aux étudiants à notre ministère.

Nous ne sommes pas au courant des dispositions prises par Revenu Canada, mais il ne fait aucun doute que notre ministère exerce cette fonction.

Le sénateur Phillips: Je ne suis pas sûr de vous avoir bien compris. Avez-vous dit que le Secrétaire d'État relevait du ministre du Développement des ressources humaines en ce qui concerne les affaire autochtones?

M. Harrison: Dans la mesure où il existe un programme au sein du portefeuille du Développement des ressources humaines, c'est exact. Comme vous le savez sans doute, monsieur le sénateur, au cours des ans, notre ministère s'est occupé de la question de l'employabilité des autochtones. Un programme qui a pris fin à la fin du dernier exercice financier, appelé Les chemins de la réussite, a été remplacé par un programme destiné essentiellement aux autochtones. Il fait partie des programmes du ministère.

Le secrétaire d'État de la formation et de la jeunesse relève directement du ministre pour les questions concernant ce programme au sein du ministère du Développement des ressources humaines.

Le sénateur Phillips: Avez-vous des contacts avec le ministère des Affaires indiennes? Il me semble que les responsabilités de ce dernier se trouvent plutôt dispersées dans différents ministères. L'emploi relève maintenant du Développement des ressources humaines. Or, nous sommes sensés leur accorder la priorité à certains égards. Je trouve étrange que ce programme ne soit pas resté sous la responsabilité des Affaires indiennes. En ce qui me concerne, tous les programmes touchant les autochtones devraient relever des Affaires indiennes. Ce nouveau ministère s'occupera d'un grand nombre de Canadiens et, à mon avis, les autochtones n'auront pas une très grande place parmi eux.

M. Harrison: Pour répondre à votre question, sénateur, nous travaillons de près avec le ministère des Affaires indiennes. Les programmes mis sur pied par le Développement des ressources humaines s'adressent à un plus grand nombre d'autochtones que ce ne serait le cas en vertu du mandat des Affaires indiennes. Nous travaillons en étroite collaboration pour faire en sorte que nos programmes se complètent et ne se trouvent pas en concurrence, si vous voulez, avec ceux offerts par le ministère des Affaires indiennes.

Cela nous amène à nous poser quelques questions au sujet du mandat des Affaires indiennes, mais pas au sujet de celui du ministère du Développement des ressources humaines si l'on se fie au projet de loi dont vous êtes saisis.

Le sénateur Rompkey: J'aimerais poser une question au sujet de l'éducation. Le sénateur Bonnell a déposé au Sénat une question sur l'enseignement postsecondaire. Nous attendons cette réponse avec impatience, car c'est un sujet important. Quel rôle compte jouer le ministère dans la coordination d'une stratégie nationale en matière d'éducation?

Nous avons 12 compétences différentes qui sont responsables des universités, des établissements d'enseignement, ainsi de suite. Il y a un conseil des ministres. Toutefois, de nombreux organismes au Canada tentent maintenant, par l'entremise d'un système de réseaux, d'unir leurs efforts dans le domaine de l'éducation. La Grande-Bretagne a une stratégie nationale. Même les États-Unis, un État fédéral, ont un secrétariat national de l'éducation. Il n'existe rien de tel au Canada. Ce nouveau ministère est ce qui se rapproche le plus de ce concept. Il se peut que les attentes à votre égard, à l'égard du gouvernement fédéral, soient très grandes.

Je songe ici à une stratégie nationale. Avez-vous un mandat en ce sens, ou le ministère a-t-il pour tåche de favoriser l'élaboration d'une stratégie nationale en matière d'éducation? Je parle de l'enseignement secondaire et postsecondaire.

M. Harrison: L'éducation relève des provinces. Le ministère participe donc depuis toujours, en tant que partenaire, aux diverses tribunes, y compris le conseil des ministres, où il est question d'éducation.

Nous rencontrons régulièrement les provinces pour discuter des liens qui existent entre l'employabilité, l'apprentissage, la formation et l'éducation. Donc, dans une certaine mesure, et conformément au mandat du ministère concernant l'employabilité, nous travaillons à une stratégie de concert avec les provinces.

Toutefois, à strictement parler, il serait faux de dire que nous avons le mandat de prévoir une stratégie nationale en matière d'éducation, comme vous le décrivez. Il s'agit d'une compétence essentiellement provinciale.

Le sénateur Rompkey: Votre ministère est ce qui se rapproche le plus de ce concept et il n'a pas le mandat, aucune agence du gouvernement du Canada n'a le mandat ou la responsabilité de coordonner ou d'élaborer une stratégie nationale en matière d'éducation. C'est bien ce que vous dites?

M. Harrison: Oui.

Le sénateur Losier-Cool: Quels rapports entretenez-vous avec les ministres...

[Français]

... le Conseil des ministres de l'Éducation Canada.

M. Harrison : Le Conseil des ministres de l'Éducation du Canada. Nous sommes impliqués dans les discussions et nous sommes des fonctionnaires. Si je ne me trompe pas -- je dois le vérifier --, je crois que le ministre est invité. Mais cela n'est pas un conseil qui est créé ni dirigé par le fédéral, puisque c'est le rôle des provinces.

[Traduction]

Le sénateur Bosa: Je n'ai pas eu l'occasion de suivre le débat sur le projet de loi C-11 à la Chambre des communes. A-t-on critiqué le projet de loi ou les mesures proposées par le ministère?

M. Harrison: On s'est demandé, si je ne m'abuse, si ce projet de loi ne créait pas de nouveaux mandats ou ne modifiait pas le rôle du ministère. La réponse à cette question est non, il s'agit d'un projet de loi d'ordre administratif.

La question que votre collègue a posée au sujet de Condition féminine et des rapports hiérarchiques a été soulevée au Sénat. Il y a peut-être eu d'autres questions. Il faudra vérifier le hansard. Ce sont essentiellement ces questions qui ont été débattues.

[Français]

Le sénateur Lavoie-Roux: On a soulevé l'article 20 du projet de loi soulevé à la Chambre des communes ou au comité de la Chambre des communes, j'ignore à quel endroit. Il se lit comme suit:

En vue de faciliter la formulation, la coordination et l'application des politiques et programmes relatifs aux attributions énoncées à l'article 6, le ministre peut conclure un accord avec une province, un groupe de provinces, un organisme public provincial,...

L'organisme public provincial doit rendre compte au gouvernement de sa province.

...une institution financière ou toute personne ou organisme de son choix.

Sans la connaissance du gouvernement des provinces, je vois un peu plus loin dans le débat que cela existait et existe toujours. Mais parce que cela existait, cela ne veut pas dire que c'était bien. Nous savons que le gouvernement fédéral se sert toujours de son pouvoir de dépenser, dans un sens plus restreint, pour se mettre le nez un peu partout et souvent même venir en contradiction avec les initiatives prises par le gouvernement provincial parce qu'il décide de donner de l'argent à quiconque. Je pense que c'est bon pour le patronage, mais pour la logique des choses et la coordination des actions, je ne suis pas sûr que ce soit une très bonne formule.

M. Harrison: Si je peux répondre à la question, le ministère a des arrangements et des accords déjà, comme vous le dites, avec toute une série d'institutions soit au niveau de la province, soit au niveau des agences. Je vais vous donner un exemple de ce fonctionnement. Parfois, les provinces créent des institutions qui ne sont pas des ministères mais qui sont plutôt des agences de la Couronne de la province.

Le sénateur Lavoie-Roux: Je suis d'accord.

M. Harrison: Nous entrons avec eux sur la compensation pour les ouvriers blessés. Mais nous avons toute une série de liens avec des associations et des groupements. Par exemple, dans le secteur privé, nous avons aidé à créer ces institutions, des conseils sectoriels. Dans ce sens, cela donne la possibilité au ministre de travailler avec ces groupes.

Le sénateur Lavoie-Roux: D'accord, nous parlons de groupe, mais cela peut être un organisme ou deux au provincial, une institution financière, ou toute personne ou organisme de son choix. C'est une porte ouverte: n'importe qui vient demander des subventions sans que l'on soit assuré d'une coordination avec les politiques de ladite province, quelle que soit la province. C'est très large. N'importe qui peut venir et le gouvernement peut décider de subventionner n'importe qui aussi.

M. Harrison: C'est l'interprétation de beaucoup d'alinéas de ce projet de loi, y compris l'article 20. Ils sont assujettis aux autres lois qui règlent l'activité du ministre et du ministère.

Je crois que notre interprétation ne serait pas de dire: suite à l'article 20, le ministre pourrait faire n'importe quoi avec n'importe qui. Cela lui donne simplement l'autorité selon les autres lois d'avoir des accords avec ces personnes et ces autres groupes.

Le sénateur Lavoie-Roux: Je veux bien prendre votre parole. Nous parlions tout à l'heure d'analphabétisme. L'argent du fédéral est distribué pour des mesures d'alphabétisation dans toutes les provinces. Je sais qu'il y en a eu au Québec. Mais encore là, c'est au bon vouloir du ministre fédéral de décider s'il va mettre tant d'argent. Je vais parler des provinces que je connais. La province de Québec se plaint -- et ce n'est pas une question de bataille constitutionnelle -- de l'intrusion du gouvernement dans -- si c'est son bon vouloir -- une espèce de programme parallèle d'alphabétisation, sans tenir compte de ce que peuvent être en alphabétisation les priorités de la province. Enfin, c'est un irritant pour le fonctionnement des deux gouvernements. Je vois que l'on continue dans la même veine; on n'a pas de repentir.

M. Harrison: Les programmes de l'alphabétisation que vous avez mentionnés sont mis en place selon les normes décidées par le Conseil des ministres. Les normes définissent des critères de financement.

Une politique du gouvernement dans le discours du Trône encadre la programmation de notre ministère. Gråce à ces moyens et à nos partenaires, l'esprit de discussion que vous mentionnez est exprimé dans le projet de loi. Ce projet de loi met simplement en place un ministère, mais il ne donne pas une autorité à des programmes spécifiques.

Le sénateur Lavoie-Roux: L'alphabétisation, c'est quand même l'éducation. C'est un domaine où il faut être particulièrement prudent. Je ne porte aucun jugement négatif, au contraire, sur les actions que tout bon fonctionnaire pourrait poser en ayant pour objectif d'améliorer l'alphabétisation du peuple. Cela vous donne le pouvoir d'intervenir à peu près avec n'importe quel groupe ou n'importe quel individu.

Comment se fait la coordination entre les politiques d'un gouvernement provincial et celles du ministère fédéral en ce qui a trait à l'alphabétisation? On a entendu des critiques à ce sujet. Vous êtes sans doute au courant. Est-ce que l'on perpétue ce système ou si l'on n'aurait pas dû ajouter une certaine contrainte où le ministère peut conclure un accord avec une province, un groupe de provinces ou tout autre organisme de son choix... après consultation du gouvernement de ladite province. On peut aller dans différentes directions. Prenons l'alphabétisation. On pourrait prendre d'autres domaines également. Il ne sert à rien de perpétuer ou même d'ouvrir des brèches qui peuvent donner lieu à des disputes souvent inutiles ou stériles, mais qui néanmoins ouvrent un terrain pour que celui qui veut le faire puisse engager ce genre de dispute ou controverse.

Je me dis que l'article 20 devrait être un peu plus circonscrit ou y mettre un bémol. Si l'on disait: «...financière ou toute personne ou organisme de son choix après consultation avec le gouvernement de la province en question». C'est qu'il n'y a pas de limite. Remarquez bien que je n'en ferai pas une question de principes. Il s'agit de ne pas créer pas inutilement des litiges dont certains abusent pour faire valoir des idées ou les idéologies qui sont les leurs.

M. Harrison: L'article 20 doit être lu avec l'article 6. L'article 6 énumère les attributions du ministre, et il est dit:

...à tous les domaines de compétence du Parlement liés au développement des ressources humaines au Canada ne ressortissant pas de droit à d'autres ministres,...

Ce qui m'amène à dire que le ministre n'entrerait pas dans des accords, soit avec des provinces, soit avec des institutions, soit avec d'autres personnes dans les domaines où il n'a pas la compétence.

Le sénateur Lavoie-Roux: Oui, sauf que dans votre article 6, auquel vous référez, vous dites:

...ne ressortissant pas de droit à d'autres ministres, ministères ou organismes fédéraux...

Il y a des organismes provinciaux, des ministères provinciaux dans le même domaine d'action. Je suis d'accord. On n'embarque pas dans les autres ministères; c'est seulement le nôtre. Il n'y a aucune référence.

[Traduction]

Le sénateur Rompkey: L'alinéa 7b) précise ce qui suit:

collaborer avec les autorités provinciales en vue de coordonner les efforts visant à maintenir ou à améliorer le développement des ressources humaines.

Le sénateur Lavoie-Roux: Bien entendu, cette disposition met l'accent sur l'esprit de collaboration, mais ne limite pas le pouvoir conféré au ministre en vertu de l'article 20.

Le sénateur Rompkey: Ils doivent être lus ensemble. Lequel est le plus important, l'article 7 ou l'article 20?

Le sénateur Lavoie-Roux: Ce n'est pas clair. Si je soulève ce point, c'est dans le seul but d'éviter les querelles inutiles.

M. Harrison: Si je puis me permettre, sénateur, le projet de loi n'a pas pour but de créer des querelles.

Le sénateur Lavoie-Roux: Je suis certaine que tel n'est pas son but.

M. Harrison: Comme je l'ai indiqué, la façon dont le ministre et autres instances exerceront leurs pouvoirs et attributions, autres que ceux mentionnés dans le projet de loi, dépendra manifestement des autres lois que le gouvernement a adoptées ou adoptera.

L'esprit de l'alinéa 7b) --

[Français]

b) collaborer avec les autorités provinciales en vue de coordonner les efforts visant à maintenir ou à améliorer le développement des ressources humaines.

Cela joue dans ce sens.

[Traduction]

Le sénateur Lavoie-Roux: Je conviens avec vous que cette disposition permet de freiner les «ambitions» d'un ministre, mais elle ne répond qu'en partie à l'objection que j'ai soulevée concernant l'article 20. Toutefois, si personne d'autre ne pense comme moi, eh bien, soit. Lorsque les problèmes se poseront, je vous rappellerai l'objection que j'ai soulevée.

Le sénateur Cohen: Pour revenir à Condition féminine, lors de l'étape de la deuxième lecture au Sénat, le sénateur Kinsella a indiqué que le nouveau ministère a pour mission de favoriser le développement des ressources humaines au Canada, de répondre aux besoins de tous les Canadiens. À son avis, puisque les femmes sont victimes de discrimination sur le plan salarial, il trouve normal que Condition féminine Canada relève de ce ministère. Nous parlons ici des personnes ågées, des étudiants et des autochtones, qui comprennent tous les éléments humains de la société canadienne.

Or, Condition féminine est renvoyée d'un côté à l'autre. Je préférerais qu'elle relève de ce ministère-ci plutôt que de Parcs Canada. Je crois que ce serait tout à fait naturel.

Si je dis cela, c'est tout simplement pour appuyer les propos du sénateur Rompkey et pour faire en sorte que la déclaration du sénateur Kinsella soit inscrite au compte rendu.

Le sénateur Lavoie-Roux: Que pensez-vous du fait que Condition féminine Canada relève de Parcs Canada?

M. Harrison: Je suis mal placé pour répondre à cette question. Toutefois, je peux vous dire que les questions touchant l'égalité des sexes et l'accès des femmes à nos programmes sont prises en compte dans l'élaboration et la prestation de nos programmes. Je suis donc mal placé pour vous donner mon opinion là-dessus.

Le sénateur Cohen: Vous collaborez avec d'autres ministères comme Condition féminine Canada et les Affaires indiennes et du Nord canadien. Est-ce que cela s'apparente à des partenariats?

M. Harrison: Nous travaillons sous une forme ou une autre avec tous les ministères du gouvernement fédéral. Nous collaborons de près avec les ministères provinciaux qui ont des mandats identiques, et nous concluons régulièrement des ententes avec eux. Nous travaillons en étroite collaboration avec le secteur privé en vue de créer des partenariats.

C'est dans un esprit de partenariat que nous organisons nos activités et que nous interprétons le mandat confié au ministre et au ministère.

Le sénateur Losier-Cool: Lorsque Condition féminine a été incorporée au ministère du Patrimoine, je faisais partie du Conseil consultatif sur la situation de la femme du Nouveau-Brunswick. On nous a annoncé que toutes les questions touchant les femmes relèveraient dorénavant de chacun des ministères.

En ce qui concerne les dispositions du projet de loi qui portent sur la Loi nationale sur la formation et la Loi sur la sécurité de la vieillesse, est-ce que quelqu'un au sein du ministère a effectué une analyse de l'impact des programmes sur les hommes et les femmes, comme on a dit qu'on allait le faire et comme on l'a fait avec le budget?

M. Harrison: Oui. Il y a, au sein du ministère, un bureau de la main-d'oeuvre féminine qui a pour mandat, entre autres, d'analyser les activités du ministère et l'incidence de nos programmes sur, entre autres, les femmes. Ces analyses sont importantes.

Le sénateur Cohen: Je trouve dommage qu'on n'en parle pas dans le projet de loi. Sinon, je n'aurais pas soulevé la question. J'aurais été satisfaite. Les femmes qui vont lire ce projet de loi ne sauront pas qu'il y a un bureau au sein du ministère du Développement des ressources humaines qui s'occupe de toutes les questions touchant à l'égalité des sexes.

Le sénateur Lavoie-Roux: Vous dites que vous avez le mandat de vous occuper des questions intéressant les femmes. Il est peut-être injuste de vous poser cette question aujourd'hui puisque allez sans doute revenir devant le comité pour discuter du projet de loi sur l'assurance-emploi. Beaucoup de témoins affirment que cette mesure -- et je ne veux pas trop entrer dans les détails --, pénalise les femmes. On laisse entendre que les personnes qui seront les plus touchées par le projet de loi sur l'assurance-emploi sont les femmes parce que la majorité d'entre elles travaillent à temps partiel.

Est-ce le genre de question qui relèverait de votre mandat, compte tenu de votre responsabilité en ce qui a trait à la situation de la femme, l'égalité des sexes, ainsi de suite? Est-ce qu'on vous consulterait à ce sujet?

M. Harrison: Si je puis me permettre, je pense que la question de fond en ce qui concerne le projet de loi sur l'assurance-emploi est effectivement reliée à ce projet de loi.

Toutefois, je tiens à dire que la Loi sur l'équité en matière d'emploi, qui a été adoptée récemment par le Parlement, relève du ministre du Développement des ressources humaines, qui a délégué cette responsabilité au ministre du Travail en raison des nombreuses questions qui touchent le milieu de travail. Le ministère, et le ministre du Travail en particulier, est directement responsable des questions touchant l'équité en matière d'emploi, par le truchement de la Loi sur l'équité en matière d'emploi.

Le sénateur Rompkey: Le sénateur Lavoie-Roux a soulevé la question du projet de loi C-12 qui, à mon avis, est pertinente: nous allons examiner ce projet de loi de même que l'incidence qu'il a sur les femmes. En fait, il aura sans doute un effet positif sur celles-ci. La mise en place d'un régime fondé sur les heures, par exemple, permettra à un plus grand nombre de femmes de toucher des prestations. Du moins, c'est ce que l'on prévoit.

Je pense que l'éducation est importante en ce qui concerne la situation de la femme. En fait, elle contribue pour beaucoup à améliorer la situation de la femme. Il en est question dans le projet de loi C-12. Ce qu'il faut maintenant chercher à savoir, c'est pourquoi la responsabilité de la situation de la femme n'a-t-elle pas été confiée au nouveau ministère. Après tout, l'objectif était de réunir plusieurs fonctions qui étaient auparavant séparées mais qui ont maintenant été regroupées dans le but de faciliter la coordination et la collaboration. Je fais allusion ici aux questions touchant l'emploi, le Régime de pensions du Canada et la sécurité de la vieillesse. Si l'on juge important de confier à un seul ministère la coordination des questions touchant les jeunes, les personnes ågées, les travailleurs déplacés et l'alphabétisation, pourquoi la situation de la femme ne fait-elle pas partie de cette catégorie?

M. Harrison: Avec tout le respect que je vous dois, sénateur, une fois de plus, je ne peux résumer ce que pense le gouvernement en agissant ainsi.

Cela dit, à ce que je sache, le regroupement de plusieurs programmes au sein de Condition féminine Canada découle de l'examen des programmes et a donc été revu par les ministres. Je dois supposer qu'on y a alors soupesé le pour et le contre.

Le sénateur Rompkey: Il y a peut-être une bonne raison pour cela; nous ne la connaissons tout simplement pas.

Le sénateur Lavoie-Roux: C'est étrange que l'on ait confié à cet autre ministère la responsabilité de la condition féminine. Ce n'est pas une décision très logique.

La présidente: Honorables sénateurs, nous allons mettre fin à notre séance. Je remercie les hauts fonctionnaires d'être venus aujourd'hui.

Honorables sénateurs, le projet de loi que nous examinons comporte 107 articles. Les hauts fonctionnaires nous ont dit qu'il n'y a rien de nouveau dans ce projet de loi. Plaît-il aux honorables sénateurs d'adopter maintenant le projet de loi?

Le sénateur Rompkey: Madame la présidente, je propose que nous fassions rapport du projet de loi sans modification. Nous avons soulevé ici aujourd'hui des préoccupations légitimes. Il serait peut-être approprié que nous assortissions le projet de loi d'une recommandation disposant que le gouvernement examine le transfert au nouveau ministère de la responsabilité de la condition féminine. Cependant, je ne crois pas que nous devrions retarder pour autant l'adoption du projet de loi. Je dis cela parce que presque toute notre attention devrait se porter sur le projet de loi C-12. Essentiellement, le projet de loi qu'examine le comité n'est pas si controversé. Il s'agit simplement d'un projet de loi d'ordre administratif.

La présidente: Je crois comprendre que les personnes chargées de la condition féminine n'ont pas demandé à comparaître devant le comité.

Le sénateur Rompkey: Il y aurait peut-être des explications que je ne connais pas.

La présidente: Je reconnais qu'une recommandation devrait être jointe à notre rapport.

Le sénateur Rompkey: Je propose que nous fassions rapport du projet de loi sans modification mais que nous y ajoutions une recommandation portant que le gouvernement étudie la possibilité de confier la responsabilité de la condition féminine au nouveau ministère.

La présidente: Les honorables sénateurs sont-ils d'accord?

Le sénateur Lavoie-Roux: Je désire m'abstenir de voter à l'égard de cette motion, madame la présidente. Ma raison pour ce faire est évidente. Je n'ai pas eu suffisamment de temps pour prendre connaissance de toute la documentation. Je ne veux pas adopter quelque chose qui pourrait me faire dire dans un an: «Est-ce que j'ai accepté cela?»

Je ne m'oppose pas à la motion; je m'abstiens tout simplement de voter. C'est la première fois de ma vie que j'agis de la sorte.

La présidente: Honorables sénateurs, pourrait-on voter à main levée en ce qui concerne la motion du sénateur Rompkey?

Le sénateur Cohen: Désirez-vous inclure également une recommandation concernant l'alphabétisation?

Le sénateur Rompkey: Non.

La présidente: Je vois que sept honorables sénateurs appuient la motion. Je déclare donc la motion adoptée.

Le sénateur Lavoie-Roux: Il y a également une abstention, madame la présidente.

La présidente: Un sénateur vote contre la motion et il y a une abstention.

Le comité poursuit ses travaux à huis clos.


Ottawa, le mardi 14 mai 1996

Le comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie, auquel a été renvoyé le projet de loi C-3, Loi modifiant le Code canadien du travail (entreprises nucléaires) et une autre loi en conséquence, se réunit aujourd'hui, à 16 h 20, pour en faire l'examen.

Le sénateur Mabel M. DeWare (présidente) occupe le fauteuil.

[Traduction]

La présidente: Honorables sénateurs, nous poursuivons l'examen du projet de loi C-3. Au besoin, nous pourrons bénéficier des conseils des hauts fonctionnaires présents aujourd'hui.

Le sénateur Lavoie-Roux: Plusieurs groupes qui sont venus témoigner, ainsi que le ministère du Travail de la Saskatchewan, ont soulevé des questions au sujet du paragraphe projeté 121.2(5). Ils ont demandé que le mot «consultation» soit remplacé par une disposition exigeant que les deux gouvernements en viennent à une entente, parce que la consultation ne crée pas d'obligation. La consultation n'empêche pas d'agir à son gré. Si le mot «consultation» était remplacé par le mot «entente», tout le monde se sentirait beaucoup plus en sécurité.

Il ne faut pas oublier qu'il est question ici de relations de travail. Nous savons tous à quel point il est facile de faire une interprétation qui engendre des conflits, parfois fort inutilement.

J'estime qu'il faut déployer tous les efforts possibles pour enlever toute ambiguïté à cette exigence, sans pour autant modifier l'objectif de la loi. Je ne souhaite pas entraver l'adoption du projet de loi. À ce stade-ci, de toute façon, je suppose que nous ne pouvons que faire des recommandations. Si le ministre ne veut pas y donner suite, qu'il en assume les conséquences. Toutefois, je fais cette proposition en vue d'améliorer l'application de la loi.

La présidente: Le ministre a fait une observation à ce sujet. Si j'ai bien compris, on a préféré le mot «consultation» au mot «entente» parce que, étant donné que cette loi vise quatre provinces différentes, soit le Nouveau-Brunswick, le Québec, l'Ontario et la Saskatchewan, il faudrait conclure une entente distincte avec chacune d'entre elles en rapport avec les négociations collectives entre l'industrie de l'énergie atomique et les provinces.

Le sénateur Lavoie-Roux: Il n'est pas impossible de conclure quatre ententes. On le fait constamment avec les diverses provinces. Ces ententes peuvent varier d'une province à l'autre. Les divers ministères doivent tenir compte de facteurs propres à chacune. Le ministre a peut-être dit cela, mais nous ne sommes pas toujours obligés de le croire.

La présidente: Nous délibérons de la différence entre la consultation des provinces et la conclusion d'une entente avec elles.

M. Warren Edmonsdon, directeur général, Service fédéral de médiation et de conciliation: Un arrêt rendu par la Cour suprême a permis d'établir que les entreprises fédérales dont l'activité est en rapport avec l'approvisionnement en énergie nucléaire sont de compétence fédérale. Nous tentons de faire en sorte qu'il y ait une certaine uniformité d'exploitation en Ontario et au Québec ainsi que, dans le cas du Québec et du Nouveau-Brunswick, de combler le vide qu'a créé cette décision de la Cour suprême.

Le moyen choisi dans la loi consiste à incorporer par renvoi les lois provinciales, indépendamment du fait que nous conservons notre compétence fédérale.

S'il faut collaborer avec une des quatre provinces visées, il faut connaître plus ou moins à fond la loi que nous tentons d'incorporer par renvoi. Il faut que nous soyons capables de la modifier au besoin pour faire en sorte qu'elle s'applique aux entreprises actuellement réglementées par le gouvernement fédéral. Nous n'y parviendrons que si les deux gouvernements, après d'intenses consultations, sont capables de conclure, par voie de réglementation, des protocoles d'entente qui précisent comment s'appliqueront les lois.

Aux termes de l'entente, nous rédigerions des projets de règlement qui tiendraient compte des lois du travail que nous incorporons par renvoi, puis nous tiendrions des consultations détaillées avec les provinces pour décider de la manière dont ces lois s'appliqueraient.

Le ministre Gagliano, dans les engagements qu'il a pris à l'égard des provinces, a dit essentiellement qu'il ne faut pas y voir une tentative en vue de renvoyer certaines lois de nouveau à la province. En fait, la loi servirait à consulter les provinces et à décider, par voie de réglementation, comment s'appliquera toute la législation du travail que la province souhaite faire appliquer.

Sans pareilles consultation et coopération, ce sera impossible.

M. Robert Cook, avocat, ministère du Développement des ressources humaines: Nous sommes en train de discuter avec de hauts fonctionnaires du gouvernement de l'Ontario à ce sujet. Pour que la loi soit efficace, il faudra que les parties à cet arrangement particulier signent un protocole d'entente. Dans les faits, il y aura donc des pourparlers et il faudra signer un protocole d'entente.

Le sénateur Lavoie-Roux: Il pourrait donc y avoir un protocole d'entente avec chaque province, alors?

M. Cook: C'est exact.

Le sénateur Lavoie-Roux: Je persiste à ne pas comprendre pourquoi vous ne voulez pas insérer le mot «entente». Si vous êtes disposé à rédiger un additif, pourquoi refusez-vous de dire «après entente entre le ministre et le ministre provincial intéressé», ce qui est beaucoup plus clair que «consultation»? Vous savez ce que signifient les consultations dans tous les aspects de la vie sociale. Le mot «entente», plus clair, permettra de réaliser le même objectif que le mot «consultation», que vous avez vous-même décrit comme étant des pourparlers qui aboutiraient vraisemblablement à un additif pour chacune des provinces.

M. Cook: Du point de vue constitutionnel, le ministre du Travail fédéral est celui qui a la responsabilité ultime des relations de travail dans ces entreprises particulières. C'est peut-être l'une des raisons pour lesquelles on a choisi le mot «consultation». Le ministre assumerait la responsabilité ultime, mais avant d'incorporer par renvoi des lois provinciales, il consulterait les provinces et tiendrait compte de leur opinion.

Le sénateur Bosa: Si j'ai bien compris, il n'existe pas de situation analogue en ce qui concerne ces consultations ou ententes. Vous devez disposer d'une marge de manoeuvre pour régler les cas distincts. Vous ne pouvez conclure une entente uniforme avec toutes les provinces. Je ne me souviens pas des mots exacts employés par le ministre, mais il nous a expliqué que c'était la raison pour laquelle on avait choisi le mot «consultation» plutôt qu'«entente».

Le sénateur Lavoie-Roux: Le paragraphe projeté 121.2(5) dit que:

Le règlement pris en vertu du paragraphe (2) qui incorpore le texte est, après consultation par le ministre du ministre provincial intéressé, mis en application par la personne ou l'autorité qui est responsable...

Par conséquent, l'emploi du mot «entente» donnerait le même résultat et serait, selon moi, beaucoup plus sûr que le mot «consultation».

Le sénateur Bosa: On nous a expliqué le sens de ce mot en long et en large. On peut l'étudier ad nauseam, mais cela n'y changera rien. Pour moi, c'est clair.

Le sénateur Lavoie-Roux: Plusieurs groupes ont fait valoir la même préoccupation. Ils ont étudié cette question plus en détail que moi et en savent probablement plus au sujet des lois du travail de leurs provinces respectives que moi. Comme ils ont soulevé le point, leurs préoccupations doivent être légitimes.

Le sénateur Bosa: Ils ne sont pas les seuls à en avoir parlé. Nous avons nous-mêmes soulevé le point et reçu une explication des hauts fonctionnaires et du ministre.

Le sénateur Lavoie-Roux: L'explication n'était pas très satisfaisante, cependant.

Vous en avez vous-même parlé, sénateur Bosa. Vous avez dit:

Des représentants syndicaux qui, je crois, comparaîtront devant notre comité, ont exprimé certaines réserves à l'égard du paragraphe 121.2(5) du projet de loi, qui se lit comme suit:

Le règlement pris en vertu du paragraphe (2) qui incorpore le texte est, après consultation par le ministre du ministre provincial intéressé, mis en application par la personne ou l'autorité qui est responsable de l'application du texte.

Avez-vous constaté des difficultés à cet égard?

M. Gagliano: J'ignore le genre de difficultés auxquelles vous faites allusion. Nous n'avons reçu aucune information de la sorte. Le projet de loi crée simplement le cadre dans lequel chaque province pourra négocier avec le gouvernement fédéral le mécanisme de transfert de compétence. C'est ce à quoi fait allusion le paragraphe proposé.

La présidente: Des réserves ont été exprimées au sujet de ce paragraphe. Faut-il prendre des mesures?

Le sénateur Lavoie-Roux: Je propose que nous remplacions le mot «consultation» par «entente».

La présidente: Que tous ceux qui sont en faveur de remplacer le mot «consultation» par «entente» dans le paragraphe (5) projeté veuillent bien lever la main.

Que ceux qui sont contre veuillent bien lever la main.

Le sénateur Lavoie-Roux: De toute évidence, nous avons perdu.

La présidente: Le sénateur Lavoie-Roux a aussi des réserves à un autre sujet.

Le sénateur Lavoie-Roux: Je m'excuse de vous ennuyer ainsi, mais la période de transition était également préoccupante. Certains témoins ne jugeaient pas que leurs intérêts dévolus étaient suffisamment protégés et ils s'inquiétaient du code qui s'appliquerait durant la période de transition. La Saskatchewan l'a fait valoir très clairement, selon moi.

En a-t-il également été question lorsque le ministre a comparu?

La présidente: Je n'en suis pas trop sûre.

Le sénateur Gigantès: À la page 3 du projet de loi, on peut lire, au paragraphe 121.4(5) projeté:

Les droits, avantages ou obligations acquis au titre de la présente partie par l'unité de négociation, l'agent négociateur, l'employeur ou les employés avant la prise du règlement sont réputés avoir été acquis à titre du règlement à la date de leur acquisition.

Ces intérêts sont donc entièrement protégés. Naturellement, ils s'inquiètent trop, et je les comprends; j'en ferais autant dans pareille situation. Cependant, le projet de loi est clair.

Le sénateur Lavoie-Roux: Êtes-vous sûr que les dispositions sont à toute épreuve?

Le sénateur Gigantès: Rien ne l'est. Quand le genre humain entre en jeu, rien ne l'est.

Le sénateur Lavoie-Roux: Nous essayons de faire en sorte qu'il n'y ait pas de problème.

Le sénateur Cohen: Nous voulons que les dispositions soient le plus possible à l'épreuve de tout.

Le sénateur Gigantès: C'est ce qui se rapproche le plus d'une protection absolue.

La présidente: On a dûment attiré notre attention sur la question. Je vous remercie, sénateur.

Nous aimerions qu'une motion soit faite en vue de faire adopter le projet de loi.

Le sénateur Bosa: Je fais une proposition à cet effet.

La présidente: Le sénateur Bosa a proposé qu'il soit fait rapport du projet de loi au Sénat, sans amendement.

Le sénateur Lavoie-Roux: Selon d'autres témoins, par souci de clarté, il serait avantageux de préciser que le droit de procédure provincial est adopté de concert avec le droit positif.

La présidente: Pourriez-vous nous faire des observations à cet égard?

M. Cook: Il est question je crois d'appliquer la procédure provinciale en cas de poursuite. Le projet de loi a été rédigé de telle façon qu'il prévoit, si une infraction a été commise, qu'il s'agit d'une infraction à cette loi-ci. Nous croyons savoir que, par conséquent, dans le cadre de toute poursuite, il faudrait se conformer à la procédure prévue au Code criminel.

Le sénateur Lavoie-Roux: Voilà qui me rassure. Je pose ces questions parce que j'ignore les réponses et que je veux que ceux qui ont soulevé ces points sachent que nous avons bel et bien tenu compte de leurs observations.

Le ministre du Travail de la Saskatchewan a déclaré:

... les hauts fonctionnaires du ministère se demandaient particulièrement à quelle instance il faudrait demander une révision judiciaire des décisions rendues par les tribunaux provinciaux quand elles sont prises en vertu d'un règlement d'application du Code. Nous croyons que, puisque le tribunal, par exemple le Saskatchewan Labour Relations Board, est habilité par le Code à entendre des causes ayant trait à des employés relevant de la compétence exclusive du gouvernement fédéral, c'est à la Cour fédérale qu'il faudra s'adresser.

Le fait que la question soit tranchée non pas par leur propre tribunal, mais par le tribunal fédéral leur cause des difficultés.

M. Cook: Manifestement, leurs avocats examineront la jurisprudence dans ce domaine. Cependant, certains jugements prévoient que, si le tribunal a été établi par une loi provinciale, la procédure de révision judiciaire de la province s'applique. Je soupçonne que, lorsqu'ils étudieront les causes entendues dans ce domaine particulier, la situation s'éclaircira.

Le sénateur Lavoie-Roux: Avez-vous lu le mémoire du Québec?

M. Cook: J'ignore à quels documents vous faites allusion, mais nous sommes conscients des observations faites par la Saskatchewan.

La présidente: Plaît-il aux membres d'adopter la motion du sénateur Bosa?

Le sénateur Lavoie-Roux: Avec opposition.

La présidente: Je propose que nous fassions le rapport que voici au Sénat:

Le Sous comité du programme et de la procédure du comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie a l'honneur de présenter son

PREMIER RAPPORT

Votre sous-comité s'est réuni à huis clos, le mardi 14 mai 1996, à 15 h 20, pour examiner les points à l'ordre du jour concernant son budget sur les mesures législatives et les propositions de communications.

Personnes présentes: Les honorables sénateurs Bosa, DeWare et Rompkey (3).

Votre sous-comité recommande:

1. Que, parmi les trois propositions de communications soumises au comité, la proposition Newman soit retenue à un prix réduit de 500 $ par jour;

2. Que le budget consacré aux mesures législatives soit adopté comme suit:

Vous avez tous en main le budget et les changements qui y ont été apportés.

Je le soumettrai respectueusement en tant que présidente du comité directeur. Les seuls changements apportés concernent les communications. Vous remarquerez que le montant prévu à cette fin a été augmenté.

Le sénateur Lavoie-Roux: Je ne voterai donc pas en faveur de ce budget.

La présidente: Le montant initial a trait au projet de loi C-12. L'augmentation de 5 000 $ viserait le reste de notre mandat durant la présente session de la législature.

Le sénateur Lavoie-Roux: Quelle entreprise se chargera des communications?

La présidente: Newman Communications.

Le sénateur Lavoie-Roux: Je préférais la proposition Humphreys.

La présidente: C'est vrai, mais le comité directeur recommande Newman Communications après avoir fait baisser leur proposition de 9 600 $ à 5 000 $.

Le sénateur Bosa: Je propose que le budget soit adopté.

Le sénateur Lavoie-Roux: Je persiste à croire que le montant prévu pour les communications est trop élevé.

Le sénateur Cohen: À la fin de l'exercice, nous serons en mesure de juger du genre de relations publiques que nous en aurons obtenues. Le produit vaudra peut-être chaque cent que nous y aurons consacré.

La présidente: Plaît-il aux membres d'adopter la motion?

Des voix: Adoptée.

La présidente: Nous ferons rapport du projet de loi C-3 demain. Nous ferons aussi rapport, demain, du projet de loi C-11, en y incluant une recommandation au sujet de la situation de la femme. Nous ferons enfin rapport de notre budget. Nous avons décidé, ce matin, de télédiffuser certaines délibérations, mais nous ne pourrons pas en demander l'autorisation au Sénat tant que le projet de loi ne nous aura pas été renvoyé.

A-t-on d'autres questions à soumettre au comité?

Le sénateur Bosa: Le sénateur Haidasz a présenté une requête concernant la publicité de son projet de loi. Si ma mémoire est bonne, nous avons décidé de régler cette situation lorsque le comité en aura été saisi. Pour l'instant, il s'agit d'une situation hypothétique.

La présidente: C'est exact.

Le sénateur Rompkey: Nous devrions donner au sénateur Haidasz l'engagement que le comité fera autant de publicité qu'il le pourra au sujet de son projet de loi.

La présidente: Dans les limites des ressources dont nous disposons.

La séance est levée.


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