Aller au contenu

Délibérations du comité sénatorial permanent des
Banques et du commerce

Fascicule 20 - Témoignages


OTTAWA, le mercredi 24 octobre 2001

Le Comité sénatorial permanent des banques et du commerce se réunit aujourd'hui à 15 h 45 pour examiner le projet de loi S-31, Loi mettant en oeuvre des accords, des conventions et des protocoles conclus entre le Canada et la Slovénie, l'Équateur, le Venezuela, le Pérou, le Sénégal, la République tchèque, la République slovaque et l'Allemagne, en vue d'éviter les doubles impositions et de prévenir l'invasion fiscale en matière d'impôts sur le revenu.

Le sénateur E. Leo Kolber (président) occupe le fauteuil.

[Traduction]

Le président: Bon après-midi. Nous sommes réunis aujourd'hui pour discuter du projet de loi S-31, Loi mettant en oeuvre des accords, des conventions et des protocoles conclus entre le Canada et la Slovénie, l'Équateur, le Venezuela, le Pérou, le Sénégal, la République tchèque, la République slovaque et l'Allemagne, en vue d'éviter les doubles impositions et de prévenir l'invasion fiscale en matière d'impôts sur le revenu.

Nos témoins sont M. John McCallum, député et secrétaire parlementaire du ministre des Finances et, du ministère des Finances, M. Brian Ernewein et M. David Senecal.

M. McCallum, vous avez la parole.

[Français]

M. John McCallum, député, secrétaire parlementaire auprès du ministre des Finances: Monsieur le président, c'est un plaisir et un privilège de comparaître devant votre comité pour la première fois depuis que je suis député. Ma première comparution était en ma qualité d'économiste.

[Traduction]

M. McCallum: À ce que je sache, cette question porte sur huit conventions fiscales: trois d'entre elles sont des mises à jour de conventions antérieures avec la République slovaque, la République tchèque et l'Allemagne; les autres sont de nouvelles conventions conclues avec la Slovénie, l'Équateur, le Venezuela, le Pérou et le Sénégal.

Les conventions fiscales ont deux objets. Le premier est de supprimer les obstacles au commerce et à l'investissement transfrontaliers et ceci, bien entendu, est particulièrement important pour nous parce que nous sommes tellement exposés au commerce extérieur. L'élimination de cette incertitude à l'égard des impôts présente un énorme avantage pour le succès commercial du Canada.

Ces conventions font plusieurs choses. Elles déterminent le droit d'imposition entre deux pays, et elles prévoient aussi des moyens de résoudre les conflits. De plus, les conventions traitent aussi des obligations d'éliminer la double imposition, et comportent des engagements de non-discrimination et des engagements de préavis pour mettre fin à un arrangement. L'exclusion ou l'élimination de la double imposition est clairement l'une des plus importantes caractéristiques des conventions.

En ce qui concerne la retenue d'impôt, en l'absence de conventions fiscales, ceux-ci sont formellement établis à 25 p. 100, et avec ces traités, les taux de retenue d'impôt sont inférieurs. Ils se situent aux environs de 5 à 15 p. 100, selon la convention.

Le deuxième but de ces conventions est d'empêcher les conséquences fiscales imprévues, ce qui signifie, en termes plus crus, l'évasion fiscale. Cela se fait de plusieurs façons. La convention promet aux autorités fiscales de traiter directement l'une avec l'autre pour résoudre les problèmes de prix de transfert internationaux. Elle permet de convenir de solutions mutuellement satisfaisantes relativement aux préoccupations soulevées par le régime fiscal et les contribuables. Les autorités fiscales sont autorisées à effectuer des vérifications exhaustives et à engager d'autres pourparlers visant à améliorer l'application de l'impôt.

Le dernier élément se rapporte précisément à la convention entre le Canada et l'Allemagne. C'est la seule qui prévoit un aide mutuelle au titre de la perception des impôts en souffrance. Nous avons de telles ententes avec d'autres grands pays, y compris les États-Unis et les Pays-Bas, mais nous tendons à ne pas avoir de pareilles attentes avec de plus petits pays.

En somme, les avantages de ces conventions fiscales sont les suivants: un réseau simplifié de conventions fiscales; un contexte plus stable pour les investisseurs et les commerçants; et l'élimination de la double imposition qui, autrement, causerait beaucoup de problèmes.

Comme je ne veux pas prendre trop de temps, ceci termine mes commentaires.

[Français]

Le sénateur Meighen: Monsieur McCallum, en tant qu'ancien Montréalais comme vous, je vous souhaite la bienvenue. Vous êtes maintenant député de Toronto et je suis résident de Toronto: les Montréalais sont un peu partout dans le pays. Félicitations pour votre nomination.

[Traduction]

Lors d'une audience antérieure du Comité sénatorial au sujet de ces conventions, la question a été soulevée relativement aux antécédents de ces pays particuliers en matière de respect des droits de la personne. Au ministère des Finances, est-ce tenu en compte avant ou pendant les négociations visant de telles conventions?

M. McCallum: Je pense que le ministère des Finances ne porte pas de jugements sur la situation des droits de la personne dans les divers pays. C'est le rôle du ministère des Affaires étrangères. Ce n'est pas notre rôle de commenter là-dessus, mais ils ont convenu que, bien que tout ne soit pas parfait, les droits de la personne étaient suffisamment respectés pour qu'il y ait des conventions fiscales.

Le sénateur Meighen: Est-ce que je peux en déduire que si un pays a, de l'avis du ministère des Affaires étrangères, de piètres antécédents en matière de respect des droits de la personne, il demanderait au ministère des Finances de ne pas poursuivre la négociation d'une telle convention?

M. McCallum: Je pense que c'est ainsi.

M. Brian Ernewein, directeur, Division de la législation de l'impôt, Direction de la politique de l'impôt, ministère des Finances: Il est peut-être injuste d'entraîner le secrétaire parlementaire sur ce terrain, parce que certaines discussions se rapportent à un débat tenu auparavant avec le Comité sénatorial sur le projet de loi antérieur sur les conventions fiscales. La réponse la plus simple à cette question est que nous obtenons l'avis du ministère des Affaires étrangères sur la possibilité de négociations relativement à une convention fiscale et s'il convient de conclure une convention avec un autre pays, et l'avis du ministère peut être fondé sur divers facteurs, dont le niveau d'activité d'investissement qui est prévu et, bien sûr, les droits de la personne. Je ne me rappelle pas que nous ayons eu une situation où le ministère des Affaires étrangères nous ait avisé ou recommandé de ne pas conclure une convention fiscale en raison de préoccupations au titre des droits de la personne et que nous soyons allés de l'avant sans en tenir compte.

Le sénateur Meighen: Est-ce que le ministère est au courant des négociations que vous menez?

M. Ernewein: Très certainement.

Le sénateur Meighen: Connaît-il l'identité des pays avec lesquels vous négociez?

M. Ernewein: Certainement.

Le sénateur Meighen: Évidemment, ces conventions n'entrent pas en vigueur tant qu'elles n'ont pas été ratifiées par les deux pays. Y a-t-il une procédure? Qui signe en premier, et comment est-ce déterminé? Qui est le premier à ratifier la convention?

M. Ernewein: Souvent, c'est une question de circonstances fortuites. Ce projet de loi sur les conventions porte sur huit conventions.

Ce sont les conventions qui ont été signées depuis la présentation du dernier projet de loi sur la mise en oeuvre des conventions fiscales. D'après le processus parlementaire il était, nous l'avons pensé, pratique de le proposer à la session parlementaire de l'automne. Le processus de certains de ces autres pays aura été à divers stades d'avancement et ainsi, si leur processus est assez semblable au nôtre, la convention avec le Canada peut avoir été leur huitième convention, et aura été signée un an après l'entrée en vigueur de la dernière loi. Par conséquent, elle peut avoir été ratifiée auparavant.

Bref, il se peut que nous ratifiions avant eux; il arrive aussi qu'ils ratifient avant nous. De toute évidence, nous essayons de rester en contact pour nous tenir au courant d'où en sont les processus de ratification dans les deux pays, soit l'autre pays et le nôtre.

Le sénateur Meighen: M. McCallum a dit que certaines de ces conventions mettent à jour des conventions déjà existantes? Est-ce vrai?

M. McCallum: Il y a trois conventions dans ce cas. Je pense que les conventions avec les républiques slovaque et tchèque ont été reformulées pour indiquer qu'il s'agit désormais de deux pays. Dans le cas de l'Allemagne, il y a eu quelques changements. La clause d'assistance mutuelle est nouvelle. La convention avec l'Allemagne a été améliorée, et celle de la République slovaque et de la République tchèque ont été scindées en deux entités.

[Français]

Le sénateur Poulin: Monsieur McCallum, si ma mémoire m'est fidèle, le modèle avait été développé en 1966 par l'OCDE, et le projet de loi à l'étude est vraiment une confirmation de négociations qui ont déjà eu lieu .Les négociation savec tous les pays énoncés dans le projet de loi sont-elles conclues, les ententes ont-elles étés acceptées par les deux parties?

M. McCallum: Il y a un modèle standard pour ces négociations produites par l'OCDE. On commence avec ce modèle standard ou prototype et on fait des changements selon les négociations en ce qui a trait au taux de taxation «the rate of withholding tax» et cetera. Je pense que ces négociations sont très nouvelles. C'est un modèle très standard qu'on a utilisé beaucoup dans le passé.

[Traduction]

M. Ernewein: J'aimerais ajouter quelques commentaires. Le premier est que nous respectons un modèle général. C'est en fait le modèle de convention fiscale que propose l'Organisation de coopération et de développement économiques, avec quelques variations relativement au taux de retenue d'impôt, et cetera. Toutes les négociations sont calquées sur un modèle.

La deuxième chose que je veux dire, c'est qu'il s'agit ici d'une convention que le gouvernement du Canada a déjà signée. Par conséquent, s'il fallait la changer, nous devrions conclure une convention différente avec l'autre pays. Nous ne la modifierions pas unilatéralement.

Les conventions n'entrent pas en vigueur tant qu'elles ne sont pas approuvées par le Parlement. C'est la raison d'être du projet de loi sur la mise en oeuvre des accords, et la raison de notre présence ici aujourd'hui.

Le sénateur Poulin: Le processus est-il le même dans chaque pays? Autrement dit, est-ce que les ententes doivent également être ratifiées par leur Parlement avant leur entrée en vigueur?

M. Ernewein: Ils s'apparentent très souvent, mais pas toujours. La meilleure chose que je puisse faire c'est de vous donner l'exemple que je connais le mieux. Il ne porte pas sur un traité qui figure sur la liste aujourd'hui. Je sais qu'aux États-Unis la signature d'une convention fiscale ou d'autres traités exige une certaine ratification, qui fait appel non pas à l'approbation des deux Chambres du Congrès mais plutôt à celle du Comité sénatorial des relations extérieures et qui est suivie d'un vote du Sénat lui-même. Le processus comporte des différences même si en grande partie on y retrouve le processus de signature et un certain processus de ratification.

Le sénateur Fitzpatrick: Monsieur McCallum ou peut-être renverrez-vous cette question à vos fonctionnaires, et cette question n'a pas à voir précisément avec les nouvelles parties à ce traité. J'ai écouté vos observations sur la double imposition et les retenues fiscales. Pourriez-vous me renseigner au sujet de l'entente actuelle en ce qui a trait aux artistes et aux sportifs entre le Canada et les États-Unis? Quels sont les accords fiscaux?

Cette question s'est posée il y a environ un an en ce qui a trait aux artistes qui venaient au Canada pour tourner un film. Il avait été proposé qu'ils produisent des déclarations tant au Canada qu'aux États-Unis. L'industrie cinématographique en Colombie-Britannique représente un milliard de dollars et je crois que cette question reviendra sur le tapis. Cette exigence est certes très néfaste pour l'industrie. Compte tenu de tous les autres obstacles qui semblent se dresser au commerce, je me demande si vous pouvez me dire ce qu'i en est à l'heure actuelle et si l'on songe à un allégement fiscal pour que l'industrie cinématographique en Colombie-Britannique puisse maintenir le rythme auquel elle produisait des films au cours des dernières années?

M. McCallum: C'est une bonne question. C'est une question à laquelle je demanderai à mes hauts fonctionnaires de répondre.

M. Ernewein: La réponse c'est que l'imposition des artistes étrangers qui viennent travailler au Canada ne relève d'aucune des conventions fiscales dont il est question dans le projet de loi que vous examinez. Il s'agit strictement du niveau d'impôt canadien exigé de ce groupe de non-résidents.

En ce qui a trait à ce qui a été fait avec les artistes non résidents, je vais faire le point. Les artistes non résidents ont été assujettis aux règles qui s'appliquent aux autres non-résidents qui exercent des activités au Canada. C'est-à-dire que leur revenu provenant de sources canadiennes est assujetti à l'impôt canadien. En pratique, toutefois, ces artistes seraient assujettis aux ententes relatives aux retenues d'impôt prévues dans le régime fiscal canadien, c'est-à-dire un taux d'imposition de 15 p. 100. On n'exigeait pas en général qu'ils remplissent une déclaration d'impôt des particuliers de sorte qu'ils ne sont pas tenus de payer quelque niveau de taxe que cela pourrait entraîner.

Cette façon de procéder était quelque peu insatisfaisante vu que, même si la pratique avait pu sembler exercer un certain attrait, elle n'était pas considérée comme respectant nécessairement la stricte lettre de la loi. Nous nous sommes demandé comment nous pourrions améliorer cette situation sans créer un problème au niveau du taux d'imposition exigé de ce groupe de non-résidents, qui pourrait avoir un effet néfaste sur l'industrie cinématographique canadienne.

Après plus d'un an de consultations entre les ministères provinciaux du revenu, le ministère des Finances, les groupes touchés et les représentants de l'industrie cinématographique, nous en sommes venus à une entente dont l'annonce a été faite à la fin de l'année dernière. Cette entente a permis de fixer un taux d'imposition qui s'applique précisément aux artistes non-résidents qui se livrent à des activités au Canada. En vertu de cette entente, le taux de retenues d'impôt est passé de 15 à 23 p. 100. D'après nous, ce taux de 23 p. 100 était une estimation raisonnable des taux d'imposition réels que ce groupe, surtout américain, d'artistes qui exercent des activités au Canada, pourraient payer sur une base nette de leur revenu aux États-Unis. Par conséquent, en imposant un taux de 23 p. 100 au Canada, nous ne prélevions pas plus d'un groupe que le montant qu'il aurait versé à l'égard de ce revenu aux États-Unis ni ne transférions simplement le revenu fiscal au Trésor américain comme cela aurait été le cas si nous avions fixé le taux plus bas parce que l'avantage aurait simplement été grugé par le taux américain.

Le président: Obtiennent-ils un crédit lorsqu'ils retournent aux États-Unis?

M. Ernewein: Oui, du moins au niveau fédéral. Certains États ont des systèmes fiscaux différents, mais au niveau fédéral et dans la plupart des États un crédit serait accordé pour l'impôt canadien. En fait, je crois que le crédit fédéral américain est tout ce qui importe étant donné que le taux d'imposition canadien ne déborderait pas du cadre de l'impôt fédéral américain aux fins du crédit.

Nous avons prévu et réglé le problème du taux d'imposition que nous avons établi. Cela semble être confirmé par l'expérience des huit ou 10 derniers mois.

Le sénateur Fitzpatrick: Croyez-vous qu'il s'agira du statu quo et qu'aucun autre changement ne sera apporté à cette approche vu qu'il n'y a rien de nouveau sur la planche à dessin du ministère du Revenu ou du ministère des Finances à cet égard.

M. Ernewein: C'est exact. Nous croyons que le système est efficace. Le taux de 23 p. 100 a été adopté par voie législative en juin 2001. Comme je le dis, nous croyons que tout marche rondement.

Le président: Dans vos notes d'information, on dit:

En règle générale, une compétence exclusive est conférée à l'État de résidence du contribuable ou à l'État de la source du revenu. Ainsi, les revenus de biens immobiliers, les bénéfices d'entreprises, les revenus d'artistes ou de sportifs et les rémunérations à titre d'un emploi salarié ne sont imposables que dans l'État de la source du revenu.
C'est légèrement trompeur si vous leur consentez un meilleur taux qu'un Canadien obtiendrait dans la même situation.

M. Ernewein: Je crains que vous nous placiez dans une position désavantageuse parce que nous ne sommes pas sûrs de la note d'information à laquelle vous faites allusion.

Le président: Les notes préparées par la Bibliothèque du Parlement.

M. Ernewein: Cela nous facilite la tâche pour les critiquer.

Le président: Je vais vous les remettre. Cela ne rime à rien de passer au travers maintenant. Envoyez-moi une note pour me dire si ce qu'on y dit est exact.

M. Ernewein: Je peux vous dire rapidement que nous disposons de trois façons pour diviser l'impôt sur le revenu. L'impôt pourrait être conféré exclusivement à l'État de la source du revenu, ce qui est rare. Plus fréquemment, le pouvoir d'imposition incombe exclusivement à l'État de résidence. Le plus souvent, les pouvoirs en matière fiscale sont partagés entre les deux pays. L'État de la source percevra sur l'impôt sur le revenu d'emploi, à tout le moins un revenu d'emploi à plus long terme et sur les profits d'entreprises, lorsque les affaires sont menées dans le cadre d'établissement stable ou une base fixe. L'État de la source aura le droit d'imposer l'État de résidence du contribuable ou l'autre État sera tenu d'accorder un crédit pour l'impôt de l'État de la source. Nous serons heureux de vous donner plus de précisions.

Le président: Si le président Clinton vient à Montréal pour prononcer un discours et qu'on lui verse 100 000 $. Est-ce que ces 100 000 $ seront imposés?

M. Ernewein: Il faudrait que vous me disiez si vous pensez que le président Clinton est un acteur ou non.

Le président: J'abandonne.

M. Ernewein: À supposer qu'il ne l'est pas. Ce montant ne serait imposé que dans l'État de résidence aux États-Unis.

Le président: Même s'il gagne cet argent ici?

M. Ernewein: C'est exact. Dans la plupart des cas, sauf pour les artistes et les sportifs, les services personnels à court terme ne sont imposables que dans l'État de résidence.

Le sénateur Fitzpatrick: Je vous remercie de la réponse que vous m'avez donnée et j'ai entendu ce que vous avez dit. Vous avez indiqué que les taux d'imposition varient d'un État à l'autre. Pouvez-vous me dire si cette entente a été acceptée par l'État de la Californie ou est-ce que cela poses problème pour ces artistes? Il me semble qu'un problème se posait en ce qui concerne l'État de la Californie.

M. Ernewein: Je crois que vous avez raison. Il y a eu un problème avec l'État de la Californie et on se demandait s'il était disposé à accorder un crédit pour l'impôt aux Canadiens payable par les artistes sur leur revenu provenant d'activités exercées au Canada. Cependant, le système que nous avons mis en place ne repose pas sur le règlement de ce problème. Je veux dire par là que le taux que nous avons mentionné est un taux qui peut faire l'objet d'un crédit sans qu'il soit nécessaire que la Californie soit d'accord.

Le sénateur Kroft: J'aimerais revenir sur ce que vous avez dit dans votre commentaire à propos de l'accord en instance avec l'Allemagne et du fait qu'il traite d'assistance mutuelle. Vous avez dit que c'était une meilleure solution.

Si je me souviens bien, d'après un principe de la common law, les pays n'appliquent pas les lois fiscales des uns des autres. En quoi la situation a-t-elle évolué? Je reviens quelque 40 ans en arrière, mais en quoi l'aide apportée à d'autres pays a-t-elle évolué? S'agit-il d'une aide dans le domaine de l'enquête, de la collecte de renseignements ou d'une action devant nos tribunaux? Pouvez-vous me donner une idée du fonctionnement de cette aide mutuelle?

M. Ernewein: Votre question dépasse l'aide pour la perception des impôts, car elle porte également sur les dispositions relatives à l'échange de renseignements, qui font partie de nos traités depuis de nombreuses années. Vous avez raison de dire qu'il est interdit en vertu du droit international qu'un pays applique la politique fiscale d'un autre pays, en fonction du principe de souveraineté. C'est pourquoi l'article 2 relatif à l'aide pour la perception des impôts crée, dans des circonstances limitées, une exception à cette règle générale.

L'aide que nous apportons pour l'application, et cetera, découle en général de l'article relatif à l'échange de renseignements. Si un pays considère qu'il a besoin de renseignements que l'autre pays possède à propos des investissements de ses propres contribuables dans le premier pays, ou vice versa, il peut demander au pays visé des renseignements pour essayer de parvenir à son propre avis d'imposition. C'est l'objet des dispositions relatives à l'échange de renseignements.

La deuxième partie traite d'une situation où un pays en arrive à la conclusion qu'il y a assujettissement à l'impôt et que, en outre, tout différend ou appel de cet avis a été réglé, et que le contribuable a épuisé tous les droits dont il disposait pour contester cet avis d'imposition. Par conséquent, que peut faire ce pays pour faire payer ce qui est maintenant un impôt à payer à l'égard de cet autre pays ou de biens situés dans l'autre pays? En général, je le répète, un pays ne peut pas faire payer les impôts de l'autre pays. L'article relatif à l'aide pour la perception des impôts propose de permettre, dans des circonstances limitées, à un pays, par exemple l'Allemagne, de demander à un autre pays, par exemple le Canada, de chercher à faire payer l'impôt allemand comme si c'était un montant d'impôt en souffrance au Canada.

Là encore, il ne s'agit pas de vérifier l'impôt à payer, mais plutôt d'arriver à la conclusion que l'impôt à payer allemand est dû; l'aide apportée par le Canada doit par ailleurs être proportionnée à l'aide que nous obtenons de l'Allemagne également, en ce qui concerne la perception de son impôt de notre part.

Le sénateur Kroft: La plupart des Canadiens considèrent que les renseignements figurant dans leurs déclarations de revenus servent à l'Agence des douanes et du revenu du Canada et que ces renseignements ne sont pas mis à la disposition d'autres entités. Je n'ai pas examiné la future loi pour voir s'il existe des circonstances qui permettent d'aller à l'encontre de cela.

En ce qui concerne la nature des renseignements qui seraient partagés, pourrait-on dire qu'il s'agit d'une extension de l'agence? Pourrait-on dire qu'il s'agit d'un autre service du gouvernement qui recherche des renseignements? Je me demande quel est le degré de confidentialité que respectent les gouvernements dans ce processus?

M. Ernewein: De nouveau, je vais donner deux réponses: l'une portant sur l'échange des renseignements et l'autre sur l'aide pour la perception des impôts. Je vais traiter de la dernière en premier lieu, car elle est plus facile. L'aide pour la perception des impôts n'entraîne aucun échange de renseignements. L'exemple de l'Allemagne et du Canada illustre la nature des renseignements échangés: si l'Allemagne juge que le contribuable doit payer des impôts alors que le contribuable ou ses biens se trouvent au Canada, les seuls renseignements échangés visent le montant réel de l'impôt à payer. L'Allemagne demanderait au Canada de l'aider à recouvrir cet impôt à payer.

La question qu'il faudrait se poser au préalable est la suivante: quels renseignements pourrions-nous demander à l'Allemagne - si la situation était inversée - si nous voulions évaluer les impôts en souffrance que doit un contribuable canadien? Comme nous pensons que le contribuable a des investissements en Allemagne qui produisent des revenus, nous demandons à l'Allemagne des renseignements pour le vérifier.

En pareil cas, les renseignements que nous demandons à l'Allemagne ne peuvent être utilisés que pour l'administration et l'application de nos impôts et pour rien d'autre. Cela fait partie de nos accords actuels en matière d'échange de renseignements avec l'Allemagne et avec la plupart des autres pays. Cela n'est pas modifié par la disposition relative à l'aide pour la perception des impôts.

Le sénateur Hervieux-Payette: J'ai trois questions rapides. Je remarque que vous avez maintenant 72 conventions en vigueur. Certaines sont signées et ne sont pas en vigueur encore, tandis que d'autres font l'objet de négociations. Quel est le processus des négociations? Qui a l'autorité finale, s'agit-il du ministère des Finances ou de celui des Affaires étrangères? Autant que je sache, ce n'est pas une grande équipe. Sur près de 200 pays, pourquoi avons-nous un nombre si peu élevé de pareilles conventions? Pour les gens d'affaires canadiens, cette convention est certainement un avantage. Je me pose des questions à ce sujet. Qu'est-ce qui nous empêche d'aller plus vite à cet égard? Pourquoi sommes-nous bloqués pour tant d'entre elles.

M. McCallum: Ce chiffre peut sembler peu élevé, mais il l'est plus que pour la plupart des autres pays du monde. Peut-être les fonctionnaires pourraient mieux vous informer à ce sujet.

M. David Senecal, agent principal de la politique de l'impôt, Conventions fiscales, Division de la législation de l'impôt, Direction de la politique de l'impôt, ministère des Finances: Le problème auquel vous faites allusion n'est pas unique au Canada. La plupart des autres pays se trouvent dans la même situation que nous. Souvent, nous sommes prêts à aller de l'avant contrairement à eux; ils ont des problèmes de ressources également.

Vous avez fait mention de la situation avec l'Australie. Cela a pris du temps, à cause de la pénurie des ressources dans ce pays et en raison de ses autres priorités. L'Australie a travaillé à une vaste réforme fiscale et les négociateurs y étaient affectés. Les retards à propos de ce pays en particulier ne sont pas de notre fait et ne s'expliquent pas par un manque de ressources au Canada. Je vous dirais d'ailleurs aujourd'hui que ces négociations sont maintenant terminées.

Le sénateur Hervieux-Payette: La responsabilité complète revient-elle aux Finances et nullement aux Affaires étrangères? Les Affaires étrangères interviennent-elles, suivent-elles ou acceptent-elles les conventions? Quel est le mécanisme du processus? Quel ministère a le dernier mot à propos de ces conventions? Est-ce toujours le ministère des Finances?

M. Ernewein: La recommandation de signer un traité est une recommandation conjointe du ministre des Finances et du ministre des Affaires étrangères. Pour ce qui est du contenu de la convention fiscale qui relève du ministre des Finances, il n'est probablement pas surprenant de savoir que la plupart du contenu de la convention est fixé par le ministre des Finances, en consultation avec des représentants de l'Agence des douanes et du revenu du Canada, vu que ceux-ci participent aux discussions.

Les Affaires étrangères participent aux discussions, mais pas toujours. Ce ministère intervient au début pour savoir s'il vaut la peine de lancer des discussions, et à la fin, pour savoir s'il vaut la peine de recommander l'approbation de la convention.

Le sénateur Hervieux-Payette: J'ai suivi de plus près la convention avec l'Allemagne. Son adoption a pris pas mal de temps et maintenant nous réexaminons cette même convention qui était censée être approuvée plus tôt cette année. Cela a pris quatre ou cinq ans.

M. Ernewein: Pour le meilleur ou pour le pire, le processus semble souvent prendre des années plutôt que des mois. Il y a des exceptions, puisque nous sommes parfois en mesure de conclure un accord dès les premières rondes de discussion et lorsque nous tombons au bon moment. Il arrive parfois qu'une convention soit mise en vigueur au bout d'une année ou même dès que l'on songe à entamer des discussions à cet égard. En général toutefois, cela prend du temps, ce qui semble être la nature des relations internationales.

Par ailleurs, ce n'est pas simplement le nombre de conventions qui est nécessairement l'objectif visé. Je ne suis pas sûr que nous voulions 200 conventions fiscales. Certains pays n'ont pas de régime fiscal, si bien que nous n'aurions aucun avantage à négocier une convention fiscale avec eux. Même s'il n'est pas prouvé qu'un nombre inférieur vaut mieux qu'un nombre plus élevé, je cite à titre d'exemple, que les États-Unis ont moins de conventions fiscales que nous.

Diverses approches permettent de fixer le bon nombre de conventions fiscales ainsi que de déterminer les pays avec lesquels vous voulez conclure de telles conventions.

Le sénateur Hervieux-Payette: Vous avez dit que l'État négocie, mais certainement pas au nom des provinces. Qu'arrive-t-il en matière fiscale dans nos provinces ou dans les Länder en Allemagne? Nous venons juste de résoudre le problème au palier fédéral. Les provinces doivent-elles négocier elles-mêmes?

M. Ernewein: Je ne peux pas me prononcer au sujet des régimes fédéraux d'autres pays. En ce qui concerne notre régime, vous avez absolument raison de dire que nous ne pouvons que lier le palier fédéral à propos des conventions fiscales que nous concluons. Cela ne veut pas dire que les provinces vont conclure des conventions fiscales de la même façon. Souvent, ce que nous négocions vise exclusivement l'impôt fédéral. C'est ce qui relève de notre compétence exclusive.

Les provinces suivent les conventions fiscales presque entièrement. À toutes fins pratiques, je dirais que même si certainement nous indiquons à nos partenaires réels ou éventuels que nous ne pouvons pas lier les provinces, nous leur disons également que la convention est respectée au palier fédéral comme au palier provincial.

Le sénateur Meighen: Je n'ai pas ici les documents qui me permettraient de vous donner les détails, mais une de mes connaissances, un ressortissant allemand résidant en Ontario, crée des trusts immobiliers visant à attirer des investissements allemands. Il me dit qu'il se trouve défavorisé par rapport aux Américains qui essaient d'attirer les mêmes fonds d'investissement aux États-Unis.

C'est en général ce que l'on me dit. Lorsque vous négociez une convention avec un autre pays, prenez-vous en considération la position dans laquelle cela va nous mettre par rapport à notre plus grand partenaire commercial, les États-Unis, et si, une fois cette convention conclue, ce sera à notre avantage lorsque nous traiterons avec la République d'Allemagne ou si nous serons désavantagés par rapport aux Américains?

M. Ernewein: Oui, nous le prenons en considération, autant en ce qui a trait aux conditions de nos négociations qu'en ce qui a trait à la politique fiscale nationale. Il faudrait rechercher nous-mêmes cette information, mais une autre façon de procéder à cet égard consisterait à annoncer toutes les négociations de conventions à venir. Par exemple, dans le cas de la nouvelle négociation de la convention Canada-Allemagne, les gens auraient la possibilité de signaler ces genres de préoccupations et nous aurions la possibilité d'envisager l'opportunité de faire un tel changement.

Le sénateur Meighen: Quand et comment cette annonce est-elle faite?

M. Senecal: Dès qu'un accord a été conclu avec un autre pays, nous entreprenons ces négociations. Notre ministre publie un communiqué annonçant les négociations et invitant le public à faire des commentaires au sujet de tout problème, que ce soit dans le cadre d'une convention actuelle, s'il s'agit d'une nouvelle négociation, ou dans le contexte d'une éventuelle convention qui n'a pas encore été conclue. Nous prenons toutes ces choses en compte.

Le sénateur Meighen: Vous n'avez aucune idée du temps que cela prend pour conclure ces négociations? Quand cette annonce a-t-elle été faite?

M. Senecal: Il y a trois ou quatre ans peut-être. Toutefois, le secteur privé et les conseillers de ce secteur ont intérêt à ce que les problèmes soient envisagés de très près au cours des négociations. Je reçois des appels téléphoniques toutes les heures de la part de personnes qui souhaitent connaître notre position par rapport à certains pays comme l'Allemagne. Nous les informons assez régulièrement et, dans la mesure du possible, leur signalons les points de divergence. Comme nous avons connu des problèmes et des retards pour la convention Canada-Allemagne, nous avons essayé d'en rendre certains des effets rétroactifs au 1er janvier 2001.

Le sénateur Hervieux-Payette: En Allemagne, les Länder ont leur mot à dire et participent donc au processus. C'est la raison pour laquelle cela a pris quatre ans. Au Canada, le gouvernement fédéral se charge des négociations, si bien que nous n'avons pas à assurer la coordination avec d'autres partenaires et à demander leur appui. Il y a plus de dix Länder en Allemagne, si bien que la négociation a pris du temps.

Le sénateur Meighen: Y en a-t-il plus que dix?

Le sénateur Hervieux-Payette: Oui, il y a 26 ou 30 Länder.

Le sénateur Callbeck: J'aimerais revenir sur un point qui a été soulevé il y a quelques instants. M. Clinton, ancien président des États-Unis, a fait un discours pour lequel il a reçu 100 000 $. Il devra payer de l'impôt sur le revenu aux États-Unis. La société qui l'a invité ici pour faire ce discours défalque-t-elle cette dépense de 100 000 $ au Canada?

M. Ernewein: Si la société dont vous parlez est une société canadienne pour laquelle il s'agit d'une initiative de profit, nous imposerions le profit réalisé. Toutefois, pour ce qui est des honoraires versés au conférencier, l'ancien président Clinton dans cet exemple, je ne vois pas pourquoi ce ne serait pas une charge à déduire.

Le sénateur Callbeck: En d'autres termes, les Américains qui viennent travailler peu de temps pour une société au Canada paient leurs impôts aux États-Unis.

M. Ernewein: Dans cet exemple, oui.

Le sénateur Callbeck: Et c'est une charge à déduire pour la société canadienne.

M. Ernewein: C'est la même chose que pour l'achat de biens américains ou étrangers dont le coût serait une charge à déduire pour la personne qui achète les biens ici et qui serait inclus uniquement dans le revenu du contribuable étranger. C'est exact.

Le sénateur Fitzpatrick: Pour les membres du comité que cela intéresserait, monsieur le président, le président Clinton va prononcer un discours à Vancouver le 9 novembre et je crois que les billets coûtent à partir de 5 000 $.

Le président: C'est beaucoup moins cher à Montréal et c'est pour un organisme de bienfaisance.

Sénateurs, vous plaît-il de procéder à l'examen article par article du projet loi S-31?

Des voix: D'accord.

Le président: Le projet de loi S-31, Loi mettant en oeuvre des accords, des conventions et des protocoles conclus entre le Canada et la Slovénie, l'Équateur, le Venezuela, le Pérou, le Sénégal, la République tchèque, la République slovaque et l'Allemagne, en vue d'éviter les doubles impositions et de prévenir l'évasion fiscale en matière d'impôts sur le revenu.

Les honorables sénateurs ont-ils l'intention de proposer des amendements?

Le titre est-il réservé?

Des voix: D'accord.

Le président: L'article 1, soit le titre abrégé, est-il réservé?

Des voix: D'accord.

Le président: La partie 1, soit les articles 2 à 7, est-elle adoptée?

Des voix: D'accord.

Le président: La partie 2, soit les articles 8 à 13, est-elle adoptée?

Des voix: D'accord.

Le président: La partie 3, soit les articles 14 à 19, est-elle adoptée?

Des voix: D'accord.

Le président: La partie 4, soit les articles 20 à 25, est-elle adoptée?

Des voix: D'accord.

Le président: La partie 5, soit les articles 26 à 31, est-elle adoptée?

Des voix: D'accord.

Le président: La partie 6, soit les articles 32 à 37, est-elle adoptée?

Des voix: D'accord.

Le président: La partie 7, soit les articles 38 à 43, est-elle adoptée?

Des voix: D'accord.

Le président: La partie 8, soit les articles 44 à 47, est-elle adoptée?

Des voix: D'accord.

Le président: Les annexes 1 à 8, sont-elles adoptées?

Des voix: D'accord.

Le président: L'article 1, soit le titre abrégé, est-il adopté?

Des voix: D'accord.

Le président: Le titre est-il adopté?

Des voix: D'accord.

Le président: Le projet de loi est-il adopté?

Des voix: D'accord.

Le président: Dois-je faire rapport du projet de loi?

Des voix: D'accord.

Le président: Merci de nouveau aux témoins.

La séance est levée.


Haut de page