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SOCI - Comité permanent

Affaires sociales, sciences et technologie

 

Délibérations du Comité sénatorial permanent des
Affaires sociales, des sciences et de la technologie

Fascicule 31 - Témoignages


SASKATOON, le mardi 16 octobre 2001

Le Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie se réunit aujourd'hui à 9 h 02 pour étudier le système de soins de santé au Canada.

Le sénateur Michael Kirby (président) occupe le fauteuil.

[Traduction]

Le président: Nous sommes ravis d'être à Saskatoon pour la première journée d'hiver. Il faisait froid dans l'Est, mais pas tout à fait autant. Cependant, j'ai fait une agréable promenade, ce matin, et le temps était magnifique.

Les deux premiers témoins que nous entendrons ce matin sont June Blau, présidente de la Saskatchewan Registered Nurses' Association, et Bob Layne, vice-président, Planification et relations gouvernementales, région de l'Ouest, des Infirmières de l'Ordre de Victoria.

Nous sommes ravis de vous compter parmi nous. Je sais que vous nous avez remis certains mémoires. Nous aimerions que vous preniez quelques minutes au début pour en souligner les points saillants, puis nous allons vous poser des questions.

Mme June Blau, présidente, Saskatchewan Registered Nurses' Association: Mesdames et messieurs, bonjour. Je suis moi aussi ravie que le comité ait pu réorganiser son horaire pour me permettre d'être ici tôt ce matin. Vous m'avez été fort utiles. Merci également de l'occasion que vous me donnez de m'adresser à vous au nom des infirmières de la Saskatchewan.

Vous avez lu dans mes pensées. En venant de Regina en voiture, ce matin, je me suis dit que j'allais m'en tenir aux points saillants et aux grands titres, après quoi nous discuterons. Le programme me convient parfaitement.

Le président: Je dois vous dire que, il y a probablement une vingtaine d'années maintenant, j'ai, à l'occasion de ma première visite en Saskatchewan, fait le trajet en sens inverse, mais j'ai délibérément emprunté la vallée de la Qu'Appelle, et donc opté pour un trajet plus long. C'était à peu près à cette époque-ci de l'année et à ce moment-ci de la journée, quand la sensation de l'automne est absolument parfaite. Au moins, vous avez eu du beau temps pour faire la route.

Mme Blau: Oui, c'est certain. Permettez-moi d'abord de vous dire un mot au sujet de notre association. Ces renseignements figurent dans le mémoire que nous vous avons soumis. Je m'en tiendrai donc aux points saillants. Nous représentons quelque 9 000 infirmières accréditées, soit la totalité des infirmières accréditées de la Saskatchewan. Nous tenons à féliciter le comité de l'approche qu'il a adoptée et du souci d'exhaustivité avec lequel il a jusqu'ici abordé la question à l'étude. Nous sommes encouragés par l'exhaustivité du processus, et nous tenions à ce que vous le sachiez. Nous constatons que vous mettez l'accent sur le public, et c'est aussi ce que nous préconisons.

Notre association a été créée en 1917 au moyen d'une loi de l'assemblée législative provinciale. Nous faisons à la fois office d'organisme de réglementation et d'association professionnelle des infirmières de la province. Les normes qui nous régissent sont définies dans la loi, et nous avons pour mandat d'assurer le maintien et le respect de ces normes. Notre vision est celle d'infirmières accréditées qui font partie intégrante d'une société saine et éclairée. Nous nous sommes donné pour mission d'assurer aux résidents de la Saskatchewan des soins infirmiers humains et compétents.

Nous croyons à une approche des soins de santé axée sur les citoyens. Nous pensons que les citoyens doivent intervenir à toutes les étapes du processus décisionnel. Nous reconnaissons également les aspects fondamentaux de la santé - la paix, le logement, l'éducation, l'alimentation, le revenu - que vous avez présentés en détail dans votre rapport. À l'intérieur de ces paramètres, nous tenons à souligner trois aspects qui, à notre avis, sont essentiels à la survie du système de soins de santé du Canada.

Le premier a trait au modèle de prestation des soins de santé primaires. Le deuxième concerne la stabilité et la qualité au fil des modifications apportées. Le troisième renvoie à la gestion des ressources humaines en santé: jusqu'ici, on s'est contenté d'une sorte de gestion empirique, et on devra accorder à cette question une attention beaucoup plus grande.

Cela dit, je vais maintenant passer à la dernière page de notre mémoire et étudier les recommandations avec vous. Si vous suivez, il s'agit en fait de la page 7.

Nous pensons que le besoin de changement fait l'objet d'une certaine urgence, mais, en même temps, nous devons demeurer soucieux du maintien de la stabilité pendant que les changements se déroulent. Nous invitons notre gouvernement provincial à ne plus tergiverser. Nous voulons que des changements intervien nent, mais nous tenons à ce qu'il s'agisse de changements planifiés, les citoyens étant invités à intervenir à toutes les étapes du processus.

Nous sommes en faveur d'un système de soins de santé primaires solide et exhaustif comme pierre d'angle de la stratégie générale de la santé de la Saskatchewan, et c'est aussi ce que nous recommandons pour le Canada.

Nous recommandons l'établissement de centres d'excellence en soins de santé primaires. Pour ce faire, il suffirait d'opérationnali ser, d'ici le printemps 2002, deux projets pilotes entrepris dans la province dans le domaine des soins primaires, un en milieu rural et l'autre en milieu urbain. Nous tenons à ce qu'on accorde une attention toute particulière à la santé des Autochtones et des femmes, qui représentent des groupes vulnérables au sein de notre population. Nous constatons avec plaisir que vous avez consacré un certain temps à l'étude de la santé des Autochtones, et il est certain que nous approuvons cette démarche.

On devrait établir un conseil national de la qualité des soins au sein duquel les citoyens bénéficieraient d'une forte représentation. On peut envisager un tel conseil sous différents angles. On peut y associer quelques citoyens et un grand nombre de fournisseurs de soins de santé. On peut aussi procéder à l'inverse et opter pour un comité ou un conseil de citoyens, les fournisseurs et d'autres intervenants étant invités à y siéger à titre de conseillers. Nous vous laissons le soin de soupeser les deux possibilités et de définir celle qui convient le mieux. Le conseil en question devrait rendre des comptes au gouvernement et aux citoyens du Canada. Je crois savoir qu'il s'agit de croyances que vous avez dit partager.

Le comité a convenu que les infirmières font partie intégrante d'un système de soins de santé primaires de qualité et que les ressources humaines en nursing et dans d'autres domaines de la santé sont en crise. Vous avez défini certaines stratégies à court terme pour remédier à certains des problèmes mentionnés ci-dessus, y compris des milieux de travail sains et sûrs, les outils nécessaires pour assurer des soins infirmiers de qualité et, enfin, la prise de mesures de façon à faciliter l'équilibre des obligations professionnelles et familiales et à rendre le travail suffisamment intéressant pour attirer les infirmières.

Bien que notre association soit favorable à cesrecommandations, nous sommes cependant d'avis qu'elles ne suffisent pas pour répondre au but que représentent le recrutement et le maintien en emploi des infirmières. De façon plus précise, on doit, pour répondre à l'urgence de la situation, adopter des solutions concrètes et non s'en remettre aux récompenses inhérentes à la profession.

À notre avis, la solution passe par l'augmentation du nombre de sièges en nursing financés dans les programmes éducatifs du Canada. Ce nombre est passé de 10 000 en 1990 à4 000 aujourd'hui.

Le président: Que voulez-vous dire par «sièges en nursing financés»?

Mme Blau: Je veux parler des places offertes dans les universités. Je fais référence au nombre de places réservées pour la formation et l'éducation des futures infirmières.

Le président: Voulez-vous dire que les écoles de nursing limitent le nombre d'étudiantes qu'elles peuvent accepter?

Mme Blau: Oui. Elles limitent le nombre de places en fonction du financement réservé à l'éducation.

Le sénateur Pépin: Pour les étudiantes?

Mme Blau: Pour les étudiantes. En Saskatchewan, nous sommes actuellement limités à 260 places. Il nous en faut au moins 400. À titre d'exemple, la Colombie-Britannique a toujours formé 50 p. 100 ou moins des infirmières dont elle a besoin parce qu'elle mise sur le recrutement dans d'autres provinces. Par conséquent, nous formons des infirmières, et cette province les utilise. La même philosophie s'applique depuis que je suis devenue infirmière.

Le président: Pardonnez-moi de vous avoir fait dévier. Je tenais à être certain de bien comprendre l'idée.

Mme Blau: C'est l'attitude qu'il faut avoir.

Il y a également la question de l'aide accordée aux étudiantes en nursing pour les frais de scolarité. Ce que nous constatons, c'est qu'il arrive souvent que les étudiantes en nursing interrom pent leurs études. Elles ne bénéficient donc pas du même accès aux programmes de prêts aux étudiants que les jeunes qui sortent tout juste de l'école secondaire.

Récemment, une étudiante m'a appris qu'on lui avait refusé l'accès à de nouveaux prêts aux étudiants pour les frais de scolarité et les livres - il s'agissait d'un prêt, d'une somme qu'elle était prête à rembourser - sous prétexte qu'elle était mariée et que d'autres options s'offraient à elle. Comme si elle devrait aller travailler chez McDonald's après ses cours. Elle était mariée et avait une famille. On lui a également suggéré de recourir à une séparation de corps. Ainsi, elle serait déclarée admissible à un nouveau prêt aux étudiants.

Le président: Je ne devrais pas rire.

Mme Blau: Si vous ne riez pas, vous allez pleurer. Voilà où nous en sommes.

Nous avons besoin d'aide pour des programmes de mentorat à l'intention des étudiants qui effectuent la transition de l'école au travail ainsi que d'une compensation concomitante - ce n'est pas facile à prononcer - pour les infirmières chevronnées qui agissent à titre de mentors. L'un des détails à prendre en compte ici a trait au soutien du mentorat d'étudiantes autochtones. Nous disposons d'un très bon programme de soutien par les pairs ici, à Saskatoon, le Native Access Program to Nursing, qui, offert en collaboration avec l'école de nursing de l'Université de la Saskatchewan, a donné des résultats tout simplement phénomé naux. Nous sommes favorables à la mise en branle d'un projet analogue à Regina.

Nous recommandons le financement de programmes visant à établir des milieux de travail de qualité. Je fais ici référence aux «hôpitaux aimants», terme qui a vu le jour aux États-Unis. Il désigne les établissements capables d'attirer et de retenir des infirmières et peut-être, suivant la même logique, d'autres professionnels de la santé, ce qui leur permet d'assurer de très bons résultats à leurs patients. Lorsque des milieux de travail de qualité attirent et conservent en place des employés de qualité, les clients obtiennent des résultats de niveau supérieur.

Notre association parraine actuellement, grâce à une aide financière du gouvernement provincial, un projet pilote de milieu de travail de qualité à Moose Jaw. Nous commençons par une des unités médicales de la ville. La réaction des intéressés a été extraordinaire. Nous avons conclu un partenariat avec la Health Services Utilization and Research Commission pour mettre au point notre outil d'évaluation. Nous aidons l'unité à mettre en place un programme répondant à ses besoins. Cette dernière doit d'abord définir ce qu'elle fait bien et les aspects où il y a place à amélioration. Puis elle arrête les moyens d'améliorer la situation. Nous effectuons du travail en ce sens et comptons sur l'établissement de nouveaux sites de projet.

Le soutien financier de la profession d'infirmière doit être concurrentiel par rapport à celui dont bénéficient les profession nels d'autres secteurs, et il en va de même au chapitre du perfectionnement professionnel et de l'apprentissage continu.

Nous sommes convaincus que le gouvernement continuera de faire preuve du leadership voulu pour rajeunir notre système national de soins de santé, les besoins des citoyens venant au premier rang des préoccupations.

M. Bob Layne, vice-président, Planification et relations gouvernementales (région de l'Ouest), Infirmières de l'Ordre de Victoria: Je suis heureux de l'occasion qui m'est donnée de témoigner devant vous. Nous allons nous en tenir à certaines des idées générales énoncées dans le rapport, puis faire quelques commentaires additionnels qui, à notre avis devraient y être inclus.

Parmi les options qu'envisage actuellement le Comité sénato rial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie, les Infirmières de l'Ordre de Victoria du Canada appuient sans réserve les suivantes et recommandent fortement leur inclusion dans le document final.

La première option a trait à l'établissement d'un programme national de soins à domicile qui donnerait aux Canadiens l'assurance de recevoir chez eux des soins uniformes et appropriés lorsqu'ils en ont besoin. La deuxième concerne l'engagement pris par le gouvernement fédéral de financer des systèmes d'information qui s'appliqueraient jusqu'au secteur des soins communautaires et des soins à domicile, de façon à permettre la production d'information fiable et opportune sur le patient-client. Cette technologie améliorera la continuité et la qualité des soins tout au long du continuum, permettra la réalisation de gains d'efficience et entraînera une réduction des coûts du système de soins de santé dans son ensemble. La troisième option concerne une augmentation du financement fédéral de la recherche ciblant le secteur communautaire du système de santé du Canada. La quatrième porte sur l'engagement pris par le gouvernement fédéral d'élaborer des programmes et des politiques qui reconnaissent et soutiennent les soignants officieux. À l'heure actuelle, ce sont les parents, les amis et les voisins qui fournissent l'essentiel des soins aux personnes de la collectivité qui leur sont chères.

Ces enjeux sont définis clairement dans le mémoire écrit que nous avons soumis au comité en mai 2001. Nous sommes assurément disposés à en discuter avec vous aujourd'hui, mais vous devez déjà avoir la documentation sous la main.

Au nom de notre association, j'aimerais aujourd'hui faire ressortir un des enjeux absents du rapport intitulé «Questions et options», c'est-à-dire la reconnaissance par les gouvernements provinciaux et fédéral de la valeur du travail que les organismes sans but lucratif accomplissent dans le cadre du système de santé ou à l'appui de celui-ci. Nous soulevons cette question au nom des organismes sans but lucratif du Canada qui offrent des programmes et des services de soutien bénévoles à ceux qui n'ont pas les moyens de s'offrir des programmes payants, ne sont pas admissibles aux programmes financés par le gouvernement ou ont besoin de soins de santé ou de services de soutien qui ne font pas partie du mandat gouvernemental actuel.

En cette Année internationale des volontaires, on honore les bénévoles du monde entier et on reconnaît l'immense contribution qu'ils apportent à la société. Notre association est fortement d'avis que le grand contingent de bénévoles présents dans le système de soins de santé du Canada doit bénéficier d'un appui officiel. Nous recommandons à tous les ordres de gouvernement du Canada de reconnaître la valeur des organismes sans but lucratif au moyen de politiques qui soutiennent, encouragent et favorisent la collaboration, la coopération et le partenariat entre organismes de bénévoles.

Nous arrivons ainsi à la conclusion de la brève introduction de cinq minutes à laquelle on nous a demandé de nous en tenir. J'aimerais inviter deux autres personnes à la table pour la période de questions et de réponses. Il s'agit de Brenda Smith, présidente du conseil d'administration de la section des Prairies, et Lois Clark, directrice générale de la section de la Saskatchewan du Nord et du Centre.

Le président: C'est bien.

Au bénéfice des témoins et de l'auditoire, je vais maintenant vous présenter mes collègues. Vous aurez tôt fait de constater que je suis le seul à ne rien connaître du système de santé.

Le sénateur Lucie Pépin, assise à ma gauche, fait de la politique depuis longtemps, mais elle est infirmière de profession.

À côté d'elle se trouve le sénateur Yves Morin, du Québec, ex-doyen de la faculté de médecine de l'Université Laval.

À ma droite se trouve le sénateur Wilbert Keon, qui vient tout juste de cesser de pratiquer la chirurgie cardiaque, mais agit toujours à titre de directeur général de l'Institut de cardiologie de l'Université d'Ottawa.

Je suis le seul à n'avoir aucun antécédent dans le domaine de la santé. C'est pour cette raison que je suis juché ici, je suppose.

Le sénateur Pépin: Je suis très heureuse de vous souhaiter la bienvenue à tous. Il suffit de jeter un coup d'oeil en ma direction pour constater que le nursing mène à tout.

À vous entendre et à entendre ce que disent d'autres infirmières, je comprends que nous ne pouvons étudier l'amélio ration au système de santé sans faire quelque chose pour les infirmières. C'est important parce que vous êtes l'épine dorsale du système de santé.

Je tiens à être bien certaine de comprendre ce que vous avez dit au sujet des places en nursing. Il s'agit bien ici d'étudiantes en nursing. Où font-elles leurs études - à l'école ou à l'université? Elles ne suivent pas de cours de nursing dans un hôpital comme je l'ai fait n'est-ce pas?

Mme Blau: Non.

Le sénateur Pépin: Lorsque vous faites état du nombre insuffisant du nombre de places en nursing, voulez-vous parler des étudiantes en nursing? Vous ai-je mal comprise?

Mme Blau: Dans notre province et ailleurs, les universités offrent un certain nombre de places aux étudiantes. Au cours des dix dernières années, on a décidé - nous ne savons trop à quel niveau - de réduire le financement des études en sciences infirmières.

Le sénateur Pépin: Celles qui veulent se spécialiser?

Mme Blau: Non, je parle des étudiantes au niveaufondamental. Nous sommes passés de quelque 300 à 260. Dans d'autres provinces, la diminution a été de plus de moitié. Au départ, une place vous garantissait un poste au moment de l'obtention de votre diplôme. À l'heure actuelle, nous diplômons 6 000 infirmières de moins qu'en 1990. C'est le résultat, mais le phénomène s'explique par une diminution du financement du programme d'études en nursing.

Le président: Vous avez dit 6 000?

Mme Blau: Une diminution de 6 000. On est passé de10 000 infirmières obtenant leur diplôme en 1990 à 4 000 l'année dernière.

Le sénateur Pépin: C'est incroyable.

Mme Blau: L'Association des infirmières et des infirmiers du Canada a ces statistiques en main, et vous pourrez les obtenir en vous adressant à elle.

Le sénateur Pépin: Il semble s'agir d'un problème de taille. À vous entendre, je comprends que, pour devenir infirmière, on doit avoir une place à l'université, au contraire des étudiantes de ma génération et peut-être de certaines de votre génération: nous étudiions le nursing à l'hôpital et mettions en pratique ce que nous avions appris. Nous avions deux heures de cours chaque jour, après quoi nous travaillions à l'hôpital. Si nous revenions à un système analogue, nous disposerions tout au moins de plus d'infirmières.

Nous formions une équipe avec les médecins, et nous travaillions tous ensemble. À voir comment le travail est aujourd'hui divisé, on comprend que l'approche est très différen te. Comme vous l'avez indiqué, nous sommes très au courant des questions touchant la qualité du milieu de travail et le nombre de postes vacants.

Nous nous proposons de formuler certaines recommandations, mais imaginons que nous envisagions de nouvelles façons de proposer une solution. Je ne sais pas si vous avez eu le temps de jeter un coup d'oeil au rapport, dans lequel nous affirmons queles infirmières feraient partie de l'équipe: les infirmières accueilleraient les patients, détermineraient le genre de soins dont ils ont besoin, le type de médecins qu'ils devraient consulter, et ainsi de suite. Croyez-vous que les infirmières pourraient travailler dans cette direction? Sinon, comment organiseriez-vous les choses?

Mme Blau: Oui, c'est tout à fait conforme à notre vision, et je vais reprendre à mon compte l'analogie que vous avez établie avec le travail d'équipe. Je suis moi aussi issue d'un hôpital d'enseignement des sciences infirmières. À cette époque-là, les hôpitaux étaient pratiquement le seul endroit où les infirmières travaillaient, mis à part quelques-unes qui oeuvraient dans le domaine de la santé publique.

Aujourd'hui, les sciences infirmières sont très différentes, et je pense qu'un retour à ces hôpitaux d'enseignement des sciences infirmières serait moins adapté à la situation que des établisse ments d'enseignement des sciences de la santé, ou des infirmières, des médecins, des infirmières psychiatriques, des travailleurs sociaux et des pharmaciens pourraient suivre des cours de base communs à l'ensemble de ces disciplines - les sciences de la vie, ce genre de choses.

Le sénateur Pépin: C'est la même chose au Québec.

Mme Blau: Il faut que les professionnels de la santé soient formés ensemble: lorsqu'ils seront appelés à collaborer, ils sauront comment s'y prendre. Ils seront au courant de ce que les autres ont appris, et ils sauront également ce dont chacun est capable. C'est le mode de fonctionnement que nous préconisons, et nous pensons que la démarche doit débuter au niveau de la formation, au niveau universitaire.

Cette démarche doit également s'étendre à l'ensemble des équipes de soins primaires, dans lesquelles des infirmières, des médecins, des travailleurs sociaux des nutritionnistes et tous les intervenants travaillent de concert. La personne qui voit le patient dans la collectivité est celle qui est la mieux placée pour répondre à ces besoins. Dans de nombreux cas, une infirmière effectuera le tri, mais, selon un modèle de mieux-être ou de soins primaires, le travailleur social ou un autre intervenant capable de contribuer au financement pourra constituer le premier point de contact. Souvent, la santé financière impose sa loi aux autres formes de santé. À ce sujet, nous sommes sur la même longueur d'onde.

Le sénateur Pépin: De la même façon, un patient se sentira beaucoup plus à l'aise, sachant que toutes ces personnes veillent sur lui.

Vous avez dit que les infirmières vieillissent et qu'elles sont épuisées. Comment vous y prendriez-vous pour recruter de jeunes candidates?

Mme Blau: Sénateur Pépin, il n'y a pas de problème en Saskatchewan. Nous avons refusé 170 candidates qualifiées faute de place pour elles. Certaines d'entre elles sont allées en Alberta; certaines n'ont pu trouver de place nulle part. D'autres encore s'orienteront peut-être vers une autre discipline, et elles seront perdues pour la profession. C'est très triste parce que nous pourrions compter sur 170 infirmières dans trois ans et demi.

Le sénateur Pépin: Oui, parce que nous sommes conscients du besoin que nous avons d'elles. Vous avez beaucoup de chance, parce que, dans d'autres provinces, on aimerait bien être en position de refuser des candidates. Les jeunes femmes ne s'intéressent plus aux sciences infirmières. Je connais au moins une province où cette situation pose un grave problème.

Mme Blau: Nous n'avons pas de problème ici pour le moment, et nous n'en avons pas eu par le passé. Il y a peut-être eu une ou deux années au cours desquelles nous avons été tout près, où nous avons eu le nombre voulu de candidates, mais pas beaucoup plus. Cependant, au cours des deux ou trois dernières années, nous avons refusé des candidates qualifiées faute de places.

En raison de la diminution de la taille des hôpitaux et du nombre d'hôpitaux en Saskatchewan, nous avons éprouvé des difficultés au chapitre des placements cliniques. La question d'une expérience pratique pour les infirmières est devenue problémati que, et nous avons dû faire preuve de beaucoup de créativité pour régler cette question.

Le sénateur Pépin: J'aimerais que les autres témoins, qui travaillent aux Infirmières de l'Ordre de Victoria nous disent quelle est leur principale difficulté? Est-ce le financement? Avez-vous assez d'instruments? Quelle est la principale difficulté à laquelle vous souhaiteriez que nous nous attaquions?

M. Layne: Permettez-moi d'abord de faire un commentaire initial, après quoi mes collègues pourront aussi intervenir. La difficulté que nous rencontrons est la même que celle que June a définie, à savoir le besoin d'un grand nombre de professionnels de la santé qualifiés. Franchement, le problème ne se pose pas que chez les infirmières; il se fait sentir dans l'ensemble de la structure. De toute évidence, nous prévoyons que la situation va se détériorer considérablement au cours des prochaines années, avec les changements démographiques et culturels qui intervien nent, nous le savons bien, dans le système canadien. Nous aurons besoin de plus de ressources humaines.

En outre, je pense qu'on doit procéder à une certaine forme de remaniement stratégique, centrée sur des systèmes d'information de meilleure qualité et une meilleure utilisation des ressources actuelles. Dans votre rapport, vous faites allusion aux réformes que vous envisagez. À l'évidence, nous sommes tout à fait d'accord pour dire qu'on doit adopter, dans l'ensemble du système de santé, une approche collective intégrée. Certes, on a besoin de plus de ressources; je ne pense pas que quiconque puisse le nier. Cependant, on pourrait tirer des avantages tout à fait considérables de la mise en commun des divers intervenants et de la collaboration des médecins avec les infirmières, les pharmaciens et tous les intervenants du système de santé. Nous pensons qu'il s'agirait là d'une amélioration sensible de l'utilisa tion des ressources dont on dispose aujourd'hui.

Le sénateur Pépin: Vous allez dans la bonne direction.

Le sénateur Morin: Mme Blau, il ne fait aucun doute que la profession d'infirmière est au coeur de toute réforme souhaitée du système de soins de santé au pays. La commission Fyke et la commission Clair au Québec ont recommandé, par exemple, le recours à des équipes de soins primaires. Je connais mieux la scène québécoise. Tout le monde s'est dit d'accord, mais à la surprise générale, la mesure, au départ, était assortie d'un coût financier assez considérable. Il y a le coût du recrutement des infirmières et de la constitution de telles équipes, et ainsi de suite.

Avez-vous une idée de l'aspect financier des choses? Si on veut bien faire les choses, on doit se doter d'une bonne équipe. Quels sont les coûts associés à la constitution d'une bonne équipe? Je sais que des projets-pilotes sont en cours en Saskatchewan. Avez-vous une idée du coût, pour une collectivité donnée, du passage d'un système fondé sur la rémunération à l'acte à un système fondé sur des équipes de professionnels de la santé, y compris les infirmières et la profession d'infirmière? C'est ma première question.

Ma deuxième question est connexe. L'année dernière, une étude canadienne a montré que la qualité du milieu de travail des infirmières en milieu hospitalier présentait un grave problème, d'un océan à l'autre. Je pense qu'il s'agit de l'une des principales raisons qui expliquent pourquoi la profession d'infirmière s'est désagrégée au fil des ans. Une fois de plus, avons-nous une idée de ce qu'il en coûterait pour remédier à la situation?

Je sais qu'on a recommandé diverses réformes. Vous avez fait allusion aux centres «aimants» aux États-Unis. Avez-vous une idée du coût, par exemple, d'un hôpital de 500 lits qui passerait d'un système à l'autre? S'agit-il d'une proposition très coûteuse ou d'une simple question de réorganisation?

Je sais que l'une des principales raisons qui font que des infirmières s'établissent aux États-Unis, outre l'écart salarial, tient aux conditions de travail et aux possibilités de perfectionnement en cours d'emploi. C'est l'une des raisons qui nous ont été données par l'Association des infirmières et des infirmiers du Canada à Ottawa.

Si j'ai de si nombreuses questions, c'est que je suis convaincu de l'importance de la question du nursing.

J'ai été frappé par l'exode d'infirmières que vous vivez ici. Ai-je raison de penser qu'il s'agit de 285 infirmières par année? C'est un nombre élevé pour la province de la Saskatchewan. Le départ des infirmières s'explique-t-il principalement par des raisons salariales ou les conditions de travail? Y a-t-il une autre raison? Je sais que la plupart d'entre elles partent pour l'Alberta et que certaines se dirigent vers les États-Unis, selon ce que vous nous avez dit. Le phénomène s'explique-t-il par l'échelle salariale? Le cas échéant, devrions-nous envisager une échelle salariale pour l'ensemble du Canada? Sinon, les infirmières vont aller d'une province à l'autre selon les endroits où les conditions sont plus favorables, et je ne pense pas que nous pourrons effectuer de planification à long terme si les choses se poursuivent ainsi.

Enfin, j'aimerais que vous disiez un mot de la santé des Autochtones. À mes yeux, il s'agit à l'heure actuelle du principal enjeu pour le système de santé du Canada. Le sénateur Kirby, notre président, rappelle sans cesse que l'état de santé des Autochtones est une honte nationale, et il est clair que nous devrions faire quelque chose à ce sujet. Nous avons discuté de la situation, mais il est difficile de mettre le doigt sur ce qui devrait être fait. Bien entendu, nous pouvons améliorer le logement, la situation économique et les conditions de vie. Cependant, il est difficile de mettre le doigt sur ce qui peut être fait dans le système de soins de santé.

Je pense que la Saskatchewan se trouve à cet égard dans une situation très particulière, étant donné que c'est dans cette province qu'on retrouve, proportionnellement, le plus grand nombre d'Autochtones. Si je ne m'abuse, les Autochtones, dans un certain nombre d'années, seront majoritaires. Par conséquent, il s'agit d'un enjeu tout particulier pour la province.

J'ai également le sentiment que la profession d'infirmière est au coeur de la solution. Il est évident qu'un chirurgien cardiologue ne peut régler ce problème, pas plus qu'un ancien doyen d'une faculté de médecine. Je pense que c'est la profession d'infirmière qui est vraiment au coeur de la solution du problème. Je ne sais pas exactement quelle est la solution. D'une certaine façon, il s'agit d'une invitation que je vous lance, en tant que représentants de la profession d'infirmière en Saskatchewan, de vous attaquer au problème. Vous n'êtes pas assis dans un bureau à Ottawa: vous êtes au beau milieu de l'action. Et c'est de là que la solution devrait venir.

Vous ne pourrez pas le faire aujourd'hui, naturellement, mais, au moment où tous s'attaquent à ce grave problème au niveau national, je pense que vous pourriez peut-être proposer une solution issue de la base. J'espère que vous y réfléchirez et que, plus tard, vous pourrez faire parvenir vos observations au comité, au moment où nous travaillerons à notre rapport final.

Je m'excuse d'être aussi long, mais cela témoigne de l'intérêt que je porte à cette cause.

Monsieur Layne, j'aimerais vous poser encore une brève question. Je pense que le point que vous avez soulevé au sujet des organismes bénévoles est très important. J'ignore si le sénateur Keon a vécu la même expérience, mais j'ai essayé, dans une autre vie, à l'époque où j'effectuais du travail clinique, de constituer un certain nombre de groupes de bénévoles, et nous avons éprouvé toutes sortes de difficultés avec les syndicats: «Qui est ce bénévole qui veut me voler mon travail?» J'ai véritablement éprouvé des difficultés, et j'ai dû mettre en frein à certaines des tâches effectuées par des bénévoles auprès des patients hospitali sés en raison des pressions syndicales. Cette question les irritait au plus haut point.

Il s'agit peut-être d'un détail, mais je me demandais si la situation n'existe qu'au Québec, où nos syndicats sont peut-être plus dynamiques qu'ailleurs.

Je suis tout à fait favorable à l'idée de venir en aide aux organismes de bénévoles, cela ne fait aucun doute. Je me demandais si vous pouviez proposer des méthodes pratiques grâce auxquelles nous pourrions leur venir en aide et que nous pourrions recommander dans notre rapport pour l'ensemble du pays.

Mme Blau: Vous allez devoir me rappeler les questions. J'en ai noté deux. Je vais commencer par celle qui porte sur le milieu rural et les Autochtones.

Le sénateur Morin: La première a trait au coût des soins primaires.

Mme Blau: Le coût de l'équipe de soins primaires, c'est vrai.

Le sénateur Morin: Je ne vous demande pas un chiffre exact, mais plutôt une idée du coût estimatif de l'amélioration de la qualité du milieu de travail des infirmières dans un hôpital donné.

Mme Blau: Je n'ai pas de réponse à donner au sujet du coût. Dans la province, il y a des cliniques qui fonctionnent un peu comme des centres de santé communautaire du Québec, c'est-à- dire les CLSC, où des équipes multidisciplinaires travaillent auprès d'une population donnée. Nous avons mis sur pied un projet de petite taille dans le cadre duquel un médecin et une infirmière chevronnée travaillent ensemble et mettent à profit les ressources des collectivités avoisinantes. En Saskatchewan, il ne sera pas possible d'établir une équipe de soins de santé primaires ailleurs que dans quelques centres, et nous devrons trouver des moyens novateurs d'en faire profiter la population dans des régions plus rurales. Il nous faudra un certain temps.

Vous avez probablement raison d'affirmer que les coûts seront probablement plus élevés au départ. Chaque fois qu'on réorganise des ressources humaines, on crée des inefficiences, lesquelles entraînent des coûts. Cependant, je pense qu'il en résultera de meilleurs services communautaires et le maintien en emploi des médecins et des infirmières. À mon avis, certains avantages seront réalisés immédiatement. L'augmentation de la qualité sera probablement supérieure à nos attentes, même à court terme. À long terme, la nouvelle façon de faire se révélera véritablement efficace.

À notre avis, certaines des mesures qui se traduiront par une amélioration de la qualité du milieu de travail ne coûteront rien du tout. Par exemple, un changement d'attitude vis-à-vis des infirmières serait des plus utiles. Je tiens à revenir sur le commentaire que vous avez fait au sujet de l'exode. L'une des différences qu'on observe aux États-Unis a trait au respect dont jouissent les infirmières et les sciences infirmières, lequel n'est pas fréquent au Canada. Les infirmières ne jouissent pas du respect de leurs collègues d'autres disciplines, ce qui crée un problème majeur. L'infirmière devient en quelque sorte comme la mère toujours présente et qu'on apprécie qu'une fois qu'elle est partie.

Le sénateur Pépin: Et qui veille sur tout le monde.

Mme Blau: Ce qu'on entend aujourd'hui, c'est: «Mon Dieu, nous devons régler maintenant le problème des infirmières», parce que, auparavant, on ne les remarquait pas. Certains éléments de réponses ne coûteront rien du tout. Il s'agit d'une simple question de reconnaissance et de respect.

Certaines mesures entraîneront des coûts, par exemple le perfectionnement professionnel, puisqu'on devra remplacer les infirmières qui s'absentent du travail pour parfaire leur éducation. Ainsi, ces dernières sauront que leurs collègues ne vont pas s'épuiser simplement pour venir à bout du travail à effectuer.

Nous avons besoin de possibilités d'avancement assorties d'un programme de mentorat. En sciences infirmières, nous ne bénéficions pas de ce dont la médecine profite peut-être depuis toujours.

À la fin de la période de paie de deux semaines, nous n'avons pas droit à la récompense pécuniaire dont bénéficient les membres d'autres professions, et il s'agit là d'un problème majeur. Il faudra dépenser de l'argent pour créer un milieu de travail de qualité. On devra adopter une stratégie nationale pour éviter que les infirmières ne passent d'une province à l'autre.

À l'heure actuelle, j'estime que le principal facteur qui explique le mouvement de nos diplômées est financier. Elles sortent de l'école avec des prêts pour étudiants, et elles tiennent à les rembourser le plus rapidement possible pour passer à autre chose et vivre leur vie. La situation est également plus complexe. Il y a d'autres facteurs.

Certaines infirmières qui déménagent aux États-Unis y restent parce que l'environnement leur plaît, mais certaines autres reviennent parce qu'elles n'aiment pas les répercussions sur les coûts pour les patients. Elles sont très mal à l'aise à l'idée de documenter le moindre article qu'elles utilisent pour leur patient.

Le sénateur Pépin: Comme dans un cabinet d'avocats.

Mme Blau: Elles consacrent plus de temps à accomplir des formalités administratives qu'à dispenser des soins aux patients. J'ai le sentiment d'avoir répondu à trois de vos questions.

Notre association est très sensible à la question de la santé des Autochtones. Nous exerçons des pressions sur le gouvernement provincial et les universités pour qu'ils créent un centre d'excellence pour la santé en milieu rural et la santé des Autochtones. Ce dont nous avons besoin de la part du gouvernement fédéral - parce qu'il y aura des avantages pour l'ensemble du Canada - ce sont des fonds de recherche. Nous savons de quel problème il s'agit. Nous savons que nous faisons face à un problème, mais nous n'en saisissons pas encore toutes les nuances. Nous avons besoin de fonds de recherche pour les mettre à jour. Si, à condition que les universités et le gouvernement provincial montrent de l'intérêt, nous pouvons mettre un projet en branle ici, les recherches et leurs résultats s'appliqueront probablement au reste du Canada.

Le sénateur Pépin: Y a-t-il de nombreuses infirmières qui siègent au conseil d'administration des hôpitaux? Il y a quelques années, peut-être huit, j'ai discuté avec des infirmières et des médecins, puis recommandé qu'une infirmière siège au conseil d'administration parce que, si vous décidez d'effectuer de compressions dans un service et que vous réorganisez l'hôpital d'une certaine façon, sans qu'une infirmière vous informe de l'impact des mesures, vous allez commettre des erreurs. Je dois avouer que très peu d'infirmières siégeaient aux conseils d'administration. Je me demandais si vous êtes plus sage dans cette région du pays et que vous nommez des infirmières aux conseils d'administration des hôpitaux.

Mme Blau: Nous ne sommes pas plus sages. Dans certains cas, des infirmières ont posé leur candidature. En Saskatchewan, nous avons maintenant des conseils d'administration élus, et certaines infirmières ont manifesté leur intention de poser leur candidature. Cependant, elles représentent une infime minorité.

Notre association préférerait que le conseil consultatif médical, qui exerce de vastes pouvoirs au niveau des districts, soit remplacé par un comité consultatif professionnel représentant tous les groupes professionnels travaillant dans un district donné. Les médecins auraient leur mot à dire, mais les infirmières, les travailleurs sociaux, les physiothérapeutes et les pharmaciens, autant de représentants de disciplines qui avaient peu voix au chapitre - la situation est mauvaise pour les infirmières, mais elle est bien pire pour d'autres groupes - pourraient aussi intervenir. Je pense que c'est ce que prévoient les dispositions législatives ontariennes. On s'est débarrassé du comité consultatif médical au profit d'un comité consultatif professionnel qui regroupe l'ensemble des professions. J'ignore si l'organisme fonctionne ou dans quelle mesure il fonctionne, mais nous pensons qu'il s'agit d'une avenue intéressante, préférable en tout cas à la représentation de groupes d'intérêts particuliers au sein de conseils d'administration qui devraient plutôt représenter les propriétaires, c'est-à-dire les citoyens.

Le sénateur Pépin: Je ne me suis pas très bien exprimée. Je pense qu'il s'agit d'une situation analogue à celle que vous avez décrite.

Mme Blau: Analogue, d'accord. Oui, nous sommes d'accord.

M. Layne: Sénateur Morin, j'aimerais répondre d'abord à votre deuxième question, celle qui portait sur les moyens pratiques de venir en aide aux organismes de bénévoles, puis je répondrai à votre autre question.

Je pense qu'il y a de nombreuses mesures pratiques qu'on peut prendre, lesquelles évolueront au fil du temps. Cependant, la toute première étape consisterait à reconnaître la valeur de ces organismes pour le système de santé actuel. Par la suite, chacun voudra entendre ce qu'ils ont à dire.

À l'heure actuelle, lorsqu'un problème se pose, ces divers organismes tiennent des discussions sporadiques - dans certains cas, les médias sont alertés, dans d'autres, non -, mais il n'y a pas de mécanisme officiel et légitime qui permette à ces personnes de faire rapport au système public. Je pense que ce que vous faites ici est très positif et que vos activités jouent un rôle très important au niveau stratégique. Cependant, au-delà de ce que vous faites, nous devons reconnaître sans cesse et quotidienne ment la valeur de ces organismes. Je veux dire par là qu'on devrait établir des mécanismes officiels qui permettent à ces organismes de s'adresser au système de soins de santé public.

Comme l'a indiqué le sénateur Pépin, le secteur institutionnel prend des décisions au sujet des sciences infirmières sans consulter les infirmières. On prend des décisions au sujet de l'ensemble du système de santé, des moyens de le structurer, de le centraliser et de le remanier, sans consulter ces organismes. Parfois, on les invite à participer de façon sporadique, mais, pour l'essentiel, il n'y a pas de mécanisme légitime qui permette à des organismes comme le nôtre de se prononcer sur ces questions. Il ne devrait pas s'agir d'un mécanisme officiel comme celui-ci, qui n'intervient que de loin en loin. Il devrait s'agir d'un mécanisme permanent et quotidien auquel on ferait appel lorsque les intéressés prennent des décisions.

Par exemple, nous avons vu que les responsables des quatre coins du pays se sont approprié les soins infirmiers par l'intermédiaire de leur propre système de prestation - c'est peut-être une bonne façon de faire, nous ne dirons rien de positif ni de négatif à ce sujet. Cependant, le commentaire que nous tenons à faire, c'est qu'il n'y a pas eu de consultation. Dans de nombreux endroits, on s'est contenté de prendre des décisions, lesquelles ont peut-être été prises pour de très bonnes raisons, mais les intervenants n'ont pas été invités à participer.

Le sénateur Pépin: Ce sont des décisions opérationnelles prises sans égard au fait que nous avons également affaire à des personnes.

M. Layne: Exactement, et de nombreuses personnes sont touchées. Il est donc très important d'établir ce genre de dialogue. À titre d'exemple, notre organisme compte 15 000 bénévoles et 8 000 employés, et nous ne sommes qu'un organisme parmi d'autres. Sur le terrain, il y a des dizaines de milliers d'organismes qui possèdent des connaissances et pourraient apporter une contribution. Il est essentiel d'élaborer une structure dans laquelle ces organismes pourront, jour après jour, fournir de l'information d'une façon constructive.

Le sénateur Keon: Je pense qu'il s'agit de l'un des plus importants enjeux auxquels le système de santé du Canada devra s'attaquer dans un proche avenir.

Je vais commencer avec vous, madame Blau. Ce qui m'intéresse, ce sont les soins primaires et les raisons qui font que nous ne sommes pas parvenus à régler le problème. Au cours des dernières années, il y a eu dans chacune des provinces une commission royale ou l'équivalent, et toutes ont recommandé que nous évitions d'axer le système sur les grandes institutions centrales et que nous renforcions le secteur des soins primaires, mais nous en avons été incapables. Que nous ayons fait appel à la régionalisation ou à un autre modèle, nous n'y sommes pas parvenus. À mon avis, cet échec s'explique par notre incapacité de décentraliser les pouvoirs et les soins. Nous ne sommes pas parvenus à transformer en soins à domicile les soins offerts pas de grandes institutions. Nous ne sommes pas non plus arrivés à décentraliser les pouvoirs au sein du système de soins à domicile que nous cherchions à organiser. Par conséquent, comme le sénateur l'a déclaré, les modèles que nous avons mis au point se sont révélés trop coûteux et sont morts d'inanition.

Je vais vous poser une question très difficile. Dans la profession médicale, on s'est montré extrêmement réticent à l'idée de renoncer à la rémunération à l'acte - je vais plus tard revenir avec vous à la question des soins à domicile, M. Layne - et je ne pense pas qu'on puisse établir un modèle axé sur les soins primaires si les médecins membres de l'équipe sont rémunérés à l'acte. Je ne vois pas comment cela pourrait marcher.

J'aimerais entendre ce que vous avez à dire à ce sujet, et je comprends qu'il ne s'agit pas pour vous d'une question facile.

Il ne fait aucun doute que nous faisons face à une formidable pénurie de personnel infirmier, mais, lorsqu'on examine l'écono mie de la santé du système, on constate, me semble-t-il que les médecins et les infirmières doivent être disposés à faire preuve de plus de leadership et à accepter de confier à d'autres une bonne part des tâches pratiques qu'ils effectuent actuellement. On pourrait y parvenir - je vais revenir à M. Layne plus tard, parce qu'il a soulevé cette question - au moyen de bons systèmes d'information et de communication. Je vais en discuter avec vous plus tard, M. Layne, mais je vais en rester là pour le moment.

J'aimerais beaucoup entendre ce que vous avez à dire au sujet de l'élaboration d'un modèle axé sur les soins primaires dont ferait partie une équipe médicale entièrement intégrée, au sein de laquelle les médecins et les infirmières seraient adéquatement rémunérés. Feraient ainsi partie de cette équipe d'autres profes sionnels de la santé en mesure d'assurer une bonne part des services à des coûts nettement moindres, les infirmières et les médecins mettant à profit leur leadership.

Je vais même aller un peu plus loin. Je pense qu'on doit remanier les programmes d'éducation pour les rendre conformes à ces nouveaux systèmes. Dans le domaine de la médecine, nous perpétuons depuis un certain nombre d'années une terrible erreur, c'est-à-dire que nous formons nos médecins appelés à offrir des soins primaires dans des hôpitaux qui prodiguent des soins tertiaires, de sorte qu'environ 75 p. 100 de ce qu'ils apprennent est inutile. Progressivement, nous corrigeons la situation et nous faisons en sorte que les médecins interviennent dans la collectivité, mais nous ne sommes pas encore allés assez loin.

À mes yeux, la profession d'infirmière doit jouer un rôle de premier plan dans les soins primaires, tout comme la médecine, me semble-t-il, devra continuer de jouer un rôle de premier plan dans la science médicale. Par conséquent, j'ai le sentiment qu'on doit adapter les programmes d'éducation au programme de prestation de soins de santé.

Maintenant que j'ai fini de maugréer, j'aimerais entendre ce que vous avez à dire au sujet d'un modèle de soins primaires assorti d'une équipe de salariés qui soit entièrement intégrée. J'aimerais savoir ce que vous avez à dire au sujet du personnel nécessaire à l'établissement d'une équipe efficace. Dites-moi enfin ce que vous pensez de l'éducation du nouveau personnel dont on aura besoin pour garnir cette équipe.

Mme Blau: Je vais commencer par l'éducation parce que je suis d'accord avec vous pour dire que nous devons initier les intéressés aux rôles qu'ils joueront au travail. C'est l'éducation qui, dans une grande mesure, détermine les attentes professionnel les. Par ailleurs, nous devons apporter certaines modifications au système puisque, à supposer qu'on redéfinisse le système d'éducation et qu'on crée des attentes trop différentes des conditions de travail réelles, on ne fera que susciter une frustration sans fin parce que le reste du monde ne sera pas au même point que nous.

Nous établissons une distinction entre les soins primaires et les soins de santé primaires. Nous utilisons la définition de l'Organisation mondiale de la santé des soins de santé primaires, qui comprennent les aspects sociaux, économiques et autres, c'est-à-dire la santé optimale et non la seule absence de maladie.

Nous devrions avoir d'excellents soins primaires, en vertu desquels les cinq principes de la Loi canadienne sur la santé s'appliqueraient aux personnes malades. Cependant, nous devons aller plus en amont et veiller à ce que notre environnement, notre système social, notre système économique et tout le reste habilitent les citoyens à gérer de façon autonome leur propre santé.

Une équipe des soins de santé primaires pourrait s'inscrire dans un tel courant parce que la tâche des infirmières consiste pour une bonne part à dire aux gens ce qu'ils doivent faire pour se sentir bien. Il en va de même pour les médecins. La tâche des médecins consiste déjà à fournir des conseils de santé aux gens. Seulement, le lien entre eux est insuffisant parce que nous sommes assis dans un cabinet de médecin à Regina ou à Saskatoon tandis que les gens vivent à Meadow Lake. Nous devons faire en sorte que ce groupe, quelle qu'en soit la composition, rejoigne les gens là où ils vivent.

Je pense que deux raisons expliquent notre échec. La première, c'est que la profession médicale exerce de formidables pouvoirs et que, lorsqu'un médecin ouvre la bouche, les citoyens ont tendance à s'incliner. Je me contente d'énoncer un fait. C'est la réalité.

Deuxièmement, nous n'avons pas assez fait au chapitre du développement communautaire. Nous n'avons pas rejoint les gens - nous avons fait le travail pour eux au lieu de leur indiquer ce qu'ils pouvaient faire pour eux-mêmes, et c'est un échec cuisant. J'ai vu le gouvernement de la Saskatchewan agir précisément de la sorte.

Le ministère de la Santé est convaincu de faire du bon travail dans l'établissement de ces centres de soins de santé primaire. C'est faux parce qu'il fait le travail pour la collectivité au lieu de se rendre dans la collectivité pour aider cette dernière à s'aider elle-même. C'est un échec considérable. Les gens fonctionnent mal dans un système qu'on leur a imposé. C'est peut-être ce que souhaitent certaines personnes, mais la vaste majorité des gens tient à jouer un rôle dans son propre développement: «Voici ce que nous voulons pour notre collectivité. Voici pourquoi nous en avons besoin. Voici combien cela coûtera. Maintenant que ce que nous voulons est en place, nous disposons de telle ou telle somme, et voici les options qui revêtent plus d'importance pour nous, c'est par là que nous allons commencer, et c'est ainsi que nous allons procéder.» Voilà donc les deux échecs.

Les médecins ont beaucoup de pouvoir et ne souhaitent pas renoncer au système de rémunération à l'acte. Ils craignent de faire les frais de l'opération. Je ne pense pas que quiconque comprenne la quantité de travail que les médecins effectuent chaque semaine. J'ai une fille qui est médecin de famille, et je suis probablement plus sensible que quiconque à cette question. Quand on décidera de faire des médecins des salariés, le cas échéant, on devra leur laisser un salaire très conséquent.

Nous devons reconnaître les infirmières de la même façon. Nous devons nous débarrasser de la hiérarchie: les médecins ne sont pas supérieurs aux infirmières, les infirmières ne sont pas supérieures aux infirmières auxiliaires, et les infirmières auxiliai res ne sont pas supérieures aux aides. On a affaire non pas à une hiérarchie, mais bien plutôt à une équipe. Chacune des profes sions a des fonctions qui lui sont exclusives, d'autres qui recoupent celles d'autres groupes, et nous devons travailler dans le cadre d'une équipe qui tire le mieux possible avantage de toutes ces ressources et réaliser les gains d'efficience qui en découlent. Dans la situation actuelle, chacun travaille dans un silo, et on traite les maladies dans des silos, au lieu de tenir compte de l'ensemble des paramètres de la santé.

Ai-je à peu près réussi à répondre à votre question?

Le sénateur Keon: Vous vous êtes plutôt bien tiré d'affaire. Je vais maintenant me tourner vers M. Layne - je reviendrai peut-être à vous - parce que je veux m'intéresser à l'autre morceau du casse-tête.

Je vais vous ramener directement aux enjeux que vous avez soulevés à propos des systèmes d'information et de communica tion. Pour vous mettre sur la piste, je vais me permettre de pontifier un peu.

Dans mon autre vie, je travaille actuellement avec le ministère des Sciences et de l'Industrie à l'élaboration d'une carte santé, qui sera comme une carte bancaire et que tous les Canadiens porteront sur eux. Ce sera leur dossier de santé. Ce dossier leur appartiendra, ils auront le contrôle sur lui et divulgueront les renseignements qu'ils souhaitent divulguer et retiendront ceux qu'ils veulent garder confidentiels. Je ne crois pas que nous puissions jamais nous doter d'un système d'information et de communication efficace tant que nous n'en serons pas là. Je pense que l'échec effroyable de nos systèmes d'information et de communication, comme Mme Blau vient tout juste de le déclarer, tient au fait que nous avons tenté de dire aux gens ce dont ils ont besoin plutôt que de les traiter comme des citoyens libres qui tiennent à exercer une mainmise sur les renseignements qui les concernent, leur vie privée, leur destin et ainsi de suite.

Sur le plan technologique, c'est réalisable. Ce qui est également réalisable sur le plan technologique et, en réalité, assez bon marché, ce sont des systèmes de communication de l'image et de la voix grâce auxquels un organisme comme les Infirmières de l'Ordre de Victoria pourrait communiquer régulièrement avec tous les patients figurant sur sa liste.

Ce qui arrive à grands pas, ce sont également des senseurs, des puces et des écrans de petite taille qui fourniront l'essentiel des renseignements vitaux d'un patient sur le plan de la biochimie, de l'hémodynamique et ainsi de suite.

La technologie a pris son essor: nous n'avons tout simplement pas été en mesure de l'exploiter. Nous avons trop tendance à viser le grandiose. J'ai consacré quelques années de ma vie à un des comités fédéraux où il était question du «portrait d'ensemble», sans résultat. Le projet dort sur les tablettes et ne verra jamais le jour parce qu'il était trop ambitieux.

Cependant, un organisme comme le vôtre pourrait facilement, pour peu que vous puissiez convaincre quelqu'un de vous accorder les fonds nécessaires et mettre la main sur des experts-conseils compétents, établir un système qui fournirait un dossier santé et un système d'information et de communication pour tous vos patients.

Permettez-moi de vous conduire un peu plus loin. Si vous disposiez d'un tel système, vos infirmières n'auraient plus à rendre chaque jour visite à tous leurs patients, mais il faudrait peut-être créer une nouvelle catégorie de professionnels de la santé qui, eux, devraient se rendre auprès des patients tous les jours. Il pourrait s'agir d'auxiliaires familiales ou de physiothéra peutes. Je ne sais pas de qui il pourrait s'agir, mais vous pourriez assurer la coordination à partir d'un point central.

J'aimerais entendre vos commentaires à tous trois à ce sujet. Avec la permission du président, je reviendrai ensuite à Mme Blau.

Le président: Nous n'avons plus de temps, je le sais bien, mais nous allons poursuivre parce que la discussion est fascinante. Je tiens à avoir le temps de poser une question, moi aussi.

M. Layne: Sénateur Keon, je pense que vous avez soulevé certains points très valables. La technologie existe. On en retrouve des éléments disséminés çà et là dans l'économie, et il s'agit à coup sûr d'intégrer ces éléments et d'en faire quelque chose d'utile.

Notre organisme serait très intéressé à participer à des projets comme ceux dont vous avez fait état, lesquels nous permettraient de colliger de l'information sur un client, d'établir un dossier de santé interne et de communiquer avec nos employés. Il est certain que nous avons, dans de nombreux cas, étudié cette question d'un point de vue spécifique. L'un des problèmes et, me semble-t-il, des obstacles auxquels nous avons été confrontés tient au fait que le processus devrait être légitimé dans une perspective plus large. Il arrive très souvent que nous instituions un système, qu'un autre organisme en institue un autre et qu'un autre encore s'engage dans une voie tout à fait différente, et nous nous retrouvons face à trois systèmes différents, et il faut tout recommencer.

L'autre volet de l'argumentation est le suivant: lorsqu'on aborde un système de très haut, il arrive qu'on soit de fait très haut et qu'on perde de vue les détails. Dans ce cas, les efforts restent lettre morte.

J'aimerais proposer une intégration à deux niveaux. J'entends par là une orientation supérieure à une commission comme la vôtre ou que le gouvernement national peut prendre pour fixer certains vastes paramètres de très haut niveau. On ne réglerait pas ainsi tous les problèmes. À défaut, on se contenterait de définir les paramètres et les attentes à différents niveaux. Puis, vous les communiqueriez aux organismes, par exemple les Infirmières de l'Ordre de Victoria, et nous prendrions part au processus. Nous saurions alors que ce que nous faisons s'inscrit dans la situation d'ensemble et que, une fois tous les détails arrêtés, nous disposerons d'un mécanisme légitime de transmission.

Lorsque de telles entreprises meurent, il n'y a pas, souvent, un tel processus de reconnaissance. À votre retour à la table, vous dites: «Savez-vous quoi, mesdames et messieurs? Nous possédons un système qui fonctionne.» Puis, quelqu'un d'autre déclare: «Eh bien, le mien est meilleur.» C'est alors que se pose ce genre de problèmes.

Je pense que le leadership du gouvernement national pourrait jouer un rôle très utile dans la définition des grands paramètres généraux auxquels doivent satisfaire tous les projets pilotes. Il suffirait par la suite de les diffuser auprès d'organismes comme le nôtre et de bien d'autres aux quatre coins du pays.

Le sénateur Keon: Mme Blau, Je suis convaincu qu'on peut concevoir des serveurs qui, aujourd'hui, permettent l'intégration électronique de l'information. Si un tel système était conçu et que vous déteniez les rênes du pouvoir en Saskatchewan quelles catégories de personnel intégreriez-vous au système, si vous deviez arrêter l'organisation des soins primaires.

Mme Blau: C'est une bonne question. J'y mettrais à coup sûr les infirmières, mais vous l'aurez deviné, parce que je suis partiale. Cependant, je sais aussi que les infirmières constituent l'appareil circulatoire. Elles sont le système nerveux de tout système de santé. À l'heure actuelle, elles sont suffisamment initiées au principe du mieux-être pour faire du bon travail à ce sujet, tout en veillant sur les malades.

Les infirmières sont au coeur de l'action, et je pense que ce sont elles qui sont les mieux placées pour évaluer les besoins du client et déterminer si le recours à un travailleur social, à un physiothérapeute ou à un conseiller s'impose. Il y a aussi toutes les personnes à qui nous pensons normalement, puis il y a les conseillers financiers, de même que les municipalités rurales ou urbaines qui s'occupent de l'environnement et des dangers pour la santé. Désormais, nous sommes tous conscients de la qualité de l'eau, alors que, auparavant, nous n'avions pas à nous en soucier autant. J'ai grandi sur une ferme où la qualité de l'eau était vérifiée chaque année. J'ai donc grandi avec le souci de l'innocuité de l'eau, puis je n'ai pas eu à y penser pendant des années.

Les pivots de l'équipe seraient les infirmières ou, dans les petites localités, une infirmière, ayant accès à un médecin pour les soins médicaux et à d'autres professionnels de la santé pour d'autres besoins en santé. Les infirmières auraient également la possibilité d'orienter des clients vers les agents financiers et de s'attaquer aux questions environnementales de concert avec la municipalité rurale ou urbaine. Les équipes iraient bien au-delà de ce que nous considérons aujourd'hui comme les soins aux malades

Je pense que les infirmières jouent un rôle central. Selon le cas, elles auraient besoin d'accéder à d'autres personnes.

Le sénateur Keon: Je me rends compte que la question était un peu injuste, mais je pense qu'il s'agit d'un domaine fascinant auquel nous devons tous nous intéresser.

Le président: À l'époque où mon épouse a fait ses études d'infirmière, et je suppose qu'il en va de même pour le sénateur Pépin, la formation se donnait dans les hôpitaux, et non à l'université. Soit dit en passant, je pense qu'on peut probablement en dire tout autant pour vous. Il a suffi de quelques années pour qu'un certain nombre d'associations provinciales d'infirmières adoptent pour position que les infirmières accréditées devaient être titulaires d'un diplôme universitaire.

En réalité, ma question fait suite à celle du sénateur Keon à propos de la formation des personnes au niveau dont elles ont véritablement besoin. Vous avez vous-même mentionné qu'il y a les infirmières auxiliaires autorisées, puis un autre niveau, puis les infirmières autorisées, puis les infirmières praticiennes et ainsi de suite. Soit dit en passant, et pour être tout à fait franc, je précise que le nombre de places à l'université qui ont été supprimées au cours des dix dernières années s'établit à 60 000, c'est-à-dire à peu près le nombre d'infirmières qui manquent actuellement au pays - il s'agit simplement d'une observation intéressante. Les gouvernements provinciaux sont eux-mêmes à l'origine de ce problème. D'ailleurs, ils ont également réduit le nombred'inscriptions dans les écoles de médecine. Vous n'êtes donc pas les seuls.

Ma question est la suivante: comment des personnes comme nous, qui tentons de formuler des recommandations relatives aux ressources humaines, pouvons-nous éviter la surqualification? Les infirmières doivent-elles toutes être titulaires d'un diplôme universitaire? Par exemple, l'office régional de la santéd'Edmonton - que nous entendrons demain - tenteactuellement une expérience dans le cadre de laquelle on s'efforce de former 1 000 ou 1 200 infirmières, si je me rappelle bien, dans le cadre d'un programme intensif d'une durée de 18 mois offert entièrement dans un hôpital. De ce fait, nous revenons 30 ou 40 ans en arrière. Croyez-moi, à titre d'ancien professeur, je n'ai strictement rien contre l'éducation, mais je pense que nous devons nous interroger sur la formation additionnelle dont les travailleurs ont généralement besoin pour répondre aux exigences d'un poste donné puisque, comme vous l'avez vous-même affirmé, il y a des degrés à l'intérieur de ces postes.

Comment aborder cette question?

Mme Blau: On ne peut ramener la profession d'infirmière à une série de tâches, et c'est pourquoi les infirmières doivent posséder une éducation universitaire générale.

Environ 90 p. 100 de nos patients d'aujourd'hui ont étudié à l'université. Ces jours-ci, rares sont les personnes qui n'ont pas à tout le moins un diplôme de premier cycle. Si nous revenions aux anciennes méthodes, ces personnes seraient traitées par une infirmière formée pour exécuter des tâches précises et qui ne possèdent peut-être pas les compétences générales liées à la résolution de problèmes et à la connaissance de la vie qu'une éducation universitaire favorise.

Notre association s'est penchée avec beaucoup de soins sur les besoins actuels. Pour en revenir à la situation de demain, les hôpitaux ont changé, au même titre que la médecine elle-même, les médicaments sont plus complexes, et on doit procéder à une évaluation intégrée des besoins psychosociaux et physiques des patients. Si on ramène la profession d'infirmière à l'exécution de ces tâches, on prive l'infirmière de la capacité de décider si la tâche qu'elle effectue se justifie. La profession d'infirmière ne se résume pas qu'à cela. On doit tenir compte du patient, de sa famille et de sa situation et se dire: «Tels sont les facteurs que je dois prendre en considération, et c'est à la lumière de ces facteurs que je chercherai à convaincre le patient d'opter pour tel ou tel plan d'action.»

En Saskatchewan, nous avons tenté une expérience dans le cadre de laquelle des infirmières ont suivi un programme technique d'une durée de deux ans. Pour avoir travaillé avec elles et avec d'autres infirmières titulaires d'un baccalauréat, je ne voudrais jamais revenir en arrière. Elles effectuent leurs tâches avec compétence, mais elles mettent beaucoup plus de temps à se faire une idée générale de la situation. Elles acquerront cette capacité, mais elles mettront cinq ans à le faire, tandis que l'infirmière formée à l'université, même si elle a quelques lacunes relativement à des tâches, possédera des capacités analytiques larges et des compétences générales en résolution de problèmes.

Le président: Si je comprends bien, vous voyez une infirmière qui, pour reprendre l'expression du sénateur Keon, joue un «rôle de leadership», tandis que les infirmières auxiliaires autorisées ou d'autres se chargeraient de ce que vous appelez les tâches. Est-ce le modèle que vous envisagez?

Mme Blau: Pas nécessairement parce que l'infirmière, pendant qu'elle exécute la tâche, procède à une évaluation et se fait un portrait de la situation d'ensemble. Ce qu'on recherche, ce n'est plus une infirmière qui, assise derrière un bureau, dirige des fantassins. En fait, l'infirmière doit effectuer des tâches pratiques.

Nos mains nous enseignent beaucoup plus de choses que nos yeux. Nous faisons confiance à nos mains, à nos yeux, à notre nez et à nos tripes parce qu'ils nous donnent une idée générale du patient et de sa situation.

Les infirmières ont fait des progrès au chapitre de la délégation, et de la délégation bien faite, des tâches qui peuvent l'être, mais je ne vois pas les infirmières cantonnées dans des rôles de leadership se contentant de diriger la prestation des soins. À mes yeux, les infirmières doivent participer directement. On doit donc conserver les deux aspects.

Le sénateur Pépin: Vous avez fait allusion à la dynamique de la vie, et j'ai peut-être mal compris en raison de la barrière de la langue, mais, pour moi, on apprend la dynamique de la vie non pas en restant solitaire, mais bien plutôt en travaillant avec d'autres. Y a-t-il aujourd'hui un âge minimum pour devenir infirmière?

Mme Blau: À ma connaissance, il n'y a pas d'âge minimum pour s'inscrire à un programme d'éducation.

Le sénateur Pépin: Nous devions avoir 18 ans avant de commencer notre formation.

Mme Blau: C'est vrai, mais on nous interdisait aussi d'être mariée. Si nous nous mariions pendant notre formation, on nous mettait à la porte. Il y a beaucoup de choses auxquelles je ne tiens pas à revenir.

Le président: Soit dit en passant, maintenant que vous le dites, ma femme a perdu deux camarades de classe qui se sont mariées en cours de formation.

Le sénateur Pépin: Ainsi, il leur suffit d'avoir terminé leur formation collégiale?

Mme Blau: Oui, elles doivent avoir terminé leur 12e année en Saskatchewan.

Le président: M. Layne, vous avez souligné qu'il serait souhaitable qu'on mette sur pied un programme de soins à domicile, et il ne fait aucun doute que c'est une option que nous allons inclure dans notre rapport. Nous avons également évoqué la possibilité d'établir un programme national d'assurance-médica ments. Cependant, nous avons ramené cette option à ce que j'appellerais un «module». Le problème, c'est essentiellement qu'il y a un certain nombre de personnes pour qui, même si elles bénéficient d'un régime d'assurance-médicaments, le coût des médicaments devient franchement prohibitif. Dans la version anglaise du rapport, nous avons parlé de coûts «catastrophiques». Nous avons ici affaire à un module, c'est-à-dire qu'on pourrait débuter par l'établissement d'un programme national pour les cas d'une ampleur catastrophique. D'abord, nous ne voulons pas prendre à notre charge l'ensemble des programmes administrés par les employeurs. Ils font du très bon travail.

Nous ne disposions pas d'une information assez précise en ce qui concerne les soins à domicile. Vous n'avez peut-être pas la réponse aujourd'hui, mais, si vous pouviez consulter vos collègues du pays et nous venir en aide à ce sujet, votre contribution nous serait très utile.

Si on voulait s'occuper de l'aspect «catastrophique» des soins à domicile - et le sénateur Keon se plaît à mentionner que, dans de nombreux cas, le terme s'applique très bien aux soins aux personnes en fin de vie - par quel module susceptible de nous mettre sur la route d'un éventuel programme national pourrions- nous commencer? Nous pourrions tout au moins nous attaquer aux cas terribles dans lesquels des personnes sombrent dans la déchéance et font faillite parce que, en dehors du milieu hospitalier, elles doivent faire face à des coûts, particulièrement à la fin de leur vie.

J'aimerais entendre vos commentaires à ce sujet, mais peut-être pourriez-vous soumettre la question à votre organisme national. Dites à vos membres que nous avons vraiment besoin d'aide pour déterminer quelle est la première et la plus importante étape que nous devrions franchir pour tenter de soulager le fardeau des soins à domicile pour les Canadiens. Comme je l'ai indiqué, je songe en particulier aux personnes en fin de vie.

M. Layne: De toute évidence, nous sommes favorables à une approche modulaire. Nous en avons déjà parlé en réponse à un de vos commentaires, sénateur Keon. Lorsqu'on a des ambitions démesurées, rien ne se fait.

Notre organisme a déjà discuté des soins à domicile parce que ces derniers font l'objet d'un besoin criant. On a aussi besoin d'un programme national de soins palliatifs. Il y a au pays des personnes qui connaissent des moments très difficiles dans les dernières décennies et même dans les dernières semaines, les derniers mois ou les derniers jours de leur vie. Il s'agit pour elles, les membres de leur famille et les proches qui font partie de leurs réseaux d'une période des plus difficile. Dans de nombreux cas, les problèmes qui existent ne sont pas d'une très grande qualité. On procède à la pièce. Les soins sont presque exclusivement réservés aux institutions. Dieu merci, nous nous éloignons de ce modèle, mais à pas de tortue. Les gens ne vivent pas dans une institution, ils vivent dans leur foyer, et bon nombre de personnes que nous voyons expriment le désir de vivre chez elles les derniers jours ou les dernières heures de leur vie.

Si nous pouvions laisser une suggestion à cette table - et il est certain que nous y reviendrons -, c'est que, à notre avis, la mise sur pied d'un programme national de soins palliatifs s'impose. De toute évidence, nous serions disposés à piloter un tel programme en partenariat avec l'Association canadienne de soins et services à domicile, l'Association canadienne des soins palliatifs et d'autres organismes qui s'occupent de ce groupe de clients. Je pense que ce serait là une première étape des plus positives.

Notre organisme a examiné la question et a le sentiment qu'il s'agit d'un projet tout à fait réalisable. Je pense qu'il aurait un impact marqué sur les perceptions changeantes des soins de santé. Bon nombre de Canadiens ont assisté à d'innombrables débats au fil des ans, mais ils attendent aujourd'hui de voir les mesures arrêtées qui auront un véritable effet. Nous pensons que c'est précisément ce que ferait un programme national de soins palliatifs.

Le sénateur Pépin: Je ne sais pas si vous le savez, mais il y a un nouveau secrétariat des soins palliatifs à Ottawa. Il a publié un rapport. Pourrais-je vous en envoyer un exemplaire pour avoir votre avis à son sujet?

M. Layne: Je vous en prie.

Le sénateur Pépin: Nous sommes dotés d'un nouveau secrétariat, et nous allons tous les ans mettre à jour toutes nos recommandations. Je vais vous en envoyer un exemplaire puisqu'il s'agit d'une question très importante.

Le sénateur Morin: Je pense qu'il est très important que les fonctionnaires d'Ottawa examinent cette question, mais je prie instamment votre organisme de s'intéresser aussi à la question. Si vous entendez recommander la création d'un programme national de soins palliatifs, ce avec quoi je suis entièrement d'accord, vous devriez tenir compte des aspects financiers. Le problème, c'est qu'on recommande de nombreux programmes sans avoir la moindre idée de leur coût. Je vous invite à aller de l'avant, mais aussi à tenir compte du volet financier: quelles seraient les économies réalisées, ou à combien se chiffreraient les ressources additionnelles nécessaires? Je pense que cela est très important et que votre organisation est idéalement placée pour effectuer ce genre de travail. Vous êtes également idéalement placés pour vous occuper du problème de la santé des Autochtones.

Le président: L'un des points que je souhaitais soulever, c'est qu'il existe, à mon avis, une différence entre un programme national et un programme universel. Un programme national est offert partout; un programme universel est accessible à tous les Canadiens. Si j'ai parlé d'un programme modulaire, c'est parce que je ne pense pas qu'on puisse débuter par un programme qui s'applique soudainement à l'ensemble des Canadiens. Il doit plutôt s'appliquer à tous les Canadiens qui ont véritablement besoin de cette aide.

Là où vous pourriez vraiment nous être d'un grand secours, c'est en nous donnant une idée du moyen d'identifier les personnes qui ont véritablement besoin d'aide et de celles qui peuvent financer elles-mêmes une bonne partie des services. Il ne s'agit pas d'un simple interrupteur marche-arrêt. Certaines personnes pourraient avoir droit à l'ensemble du programme sans verser un sou, certaines pourraient devoir assumer elles-mêmes la totalité des coûts, et on pourrait attribuer une sorte d'échelle mobile pour celles qui se trouvent quelque part au milieu. Par rapport à nous qui devons nous contenter d'examiner des macro-données sur les revenus, et c'est essentiellement tout ce que nous avons en main, vous avez sans doute une bien meilleure idée concrète de la façon de définir ces «couches», si vous voulez. Toute aide que votre organisme pourra nous apporter sera grandement apprécié.

Permettez-moi maintenant de remercier les témoins. Je sais que nous avons largement dépassé le temps qui nous était alloué.

Vous souhaitez faire un dernier commentaire? J'ai eu l'impres sion que vous étiez sur le point d'intervenir?

M. Layne: Nous n'avons pas répondu à la question du sénateur Morin au sujet des syndicats.

Le sénateur Morin: Je me suis dit que vous ne vouliez pas y toucher.

Mme Brenda Smith, membre du conseil d'administration national, représentante de la Saskatchewan, Infirmières de l'Ordre de Victoria: Je voulais faire un commentaire à ce sujet parce que je représente la province au sein du conseil des Infirmières de l'Ordre de Victoria, mais je suis également une infirmière qui travaille dans le domaine de la gériatrie.

Nous faisons face à un problème en ce qui a trait aux bénévoles, et je pense qu'il importe de consulter les syndicats et d'obtenir leurs commentaires avant de commencer - et peut-être l'avez-vous fait. Notre établissement est doté d'un important organisme de bénévoles, et la question est plutôt de savoir ce que les bénévoles peuvent faire, les employés étant si sollicités qu'ils n'ont plus le temps de tout faire. Si on procède de la sorte - et il importe de le faire en continu, me semble-t-il, les syndicats ne s'opposent pas autant aux bénévoles. En fait, ils les acceptent. Si on se contente de décider soudainement que les bénévoles vont effectuer telle ou telle tâche, les choses ne se passent pas aussi bien - c'est le constat que nous avons fait. Comme les infirmières et tous les autres manquent de temps, il y a, à mon avis, des tâches que les bénévoles peuvent accomplir, notamment au chapitre du travail effectué auprès des familles. Ce sont des choses que les infirmières ne sont pas en mesure de faire actuellement. C'est peut-être là que réside la clé du problème.

Le président: Je vous remercie tous de votre présence. Comme vous êtes à même de le constater, nous apprécions au plus haut point votre témoignage.

Notre prochain témoin est Mme Kathleen Storrie, vice-présidente, Association des services des soins de santécommunautaires (Saskatoon). Mme Ingrid Larson, directrice des relations avec les membres, l'accompagne.

Nous avons également avec nous le Dr John Bury, qui comparaît à titre personnel. Médecin à la retraite vivant ici, en Saskatchewan, il a, si je comprends bien, joué un rôle crucial dans la mise sur pied d'un certain nombre de cliniques communautaires et d'autres établissements. Il est depuis longtemps associé à la réforme des soins de santé en Saskatchewan.

Bienvenue à tous. Mme Storrie, nous allons débuter par vous, puis nous allons entendre le Dr Bury. Comme vous le savez, nous ne sommes pas à court de questions.

Mme Kathleen Storrie, vice-présidente, Association des services des soins de santé communautaires (Saskatoon): Je vous remercie de l'occasion qui m'est donnée de comparaître devant le comité du Sénat.

J'ajoute que le Dr Bury a été médecin à la clinique communautaire que je représente pendant 22 ans. Il a dirigé le groupe médical pendant sept ans. Si les sénateurs y consentent, Ingrid et moi, à supposer que nous ne nous sentions pas entièrement compétentes pour répondre à une question, allons peut-être nous tourner vers le Dr Bury à titre de témoin supplémentaire, même si, quand son tour viendra, il comparaîtra à titre personnel.

Malheureusement, notre administrateur, M. Patrick LaPointe, ne peut être parmi nous ce matin. Il assiste à Regina à une réunion du Cabinet provincial. M. LaPointe est également présidentdu Regroupement canadien des associations de centrescommunautaires de santé. Je suis donc certaine qu'il aurait été d'un grand secours pour le comité. Le sort en a voulu autrement.

À la lecture de notre mémoire, vous constaterez que nous nous intéressons à quatre enjeux principaux. Par souci de brièveté, je vais résumer ces points. J'espère que vous allez pouvoir suivre au fur et à mesure. Pendant mon exposé, je vais préciser où j'en suis dans le mémoire.

À titre d'association, nous sommes favorables à un système de soins de santé public complet accessible à tous les Canadiens, et l'établissement d'un système à deux vitesses suscite chez nous de vives préoccupations. Nous nous opposons à un système à deux vitesses, et j'ai énuméré toutes les raisons de notre opposition. Essentiellement, nous considérons que les systèmes à but lucratif sont en eux-mêmes plus coûteux. Un système à deux vitesses aurait d'autres effets négatifs, que vous connaissez déjà, j'en suis certaine, par exemple des frais d'administration plus élevés, les problèmes liés aux listes d'attente, et ainsi de suite.

La proposition de conférer au secteur public un temps égal dans le cadre d'un système à deux vitesses nous plonge dans la perplexité. Si vous vous inquiétez de l'utilisation des ressources, nous pensons qu'il y a d'autres avenues à explorer, et nous sommes d'avis que l'établissement de soins primaires multidisci plinaires et intégrés représentent une solution possible.

Nous soulevons un point, souvent passé sous silence, au sujet du coût pour le trésor public des subventions aux régimes d'assurance privés. Je fais référence au troisième point centré sous 1.a. dans mon mémoire. Lorsque des employeurs assument les coûts d'une assurance-santé au nom de leurs employés, la dépense est déductible d'impôt et non imposable pour les employés. En fait, nous renonçons chaque année à des recettes fiscales de l'ordre de 3 à 4 milliards de dollars par année. Je me contente simplement de souligner qu'il s'agit d'une importante subvention publique aux assurances privées dont on ne tient pas toujours compte.

J'ai l'impression - et c'est une opinion personnelle - que le comité du Sénat est relativement pessimiste à propos des moyens d'accroître l'efficience du système public. Ma question est la suivante: l'impression de pessimisme que j'ai est-elle ancrée dans la réalité? On a l'impression que vous risquez d'invoquer le motif des profits pour rendre un système plus efficace et réduire la surutilisation des ressources. Si tel était le cas, on se demande pourtant pourquoi le système américain est tellement plus onéreux que le nôtre.

Nous croyons qu'il y a des solutions aux problèmes systémi ques auxquels nous faisons face. Par exemple, au bas de la page 1, je m'attaque au problème des longues listes d'attente. Même si je ne les ai pas tous lus, je n'ai pas vu dans vos rapports d'allusions au fait que les longues listes d'attente s'expliquent peut-être non pas par le manque de ressources, mais bien plutôt par des problèmes systémiques.

À la page 2, nous nous intéressons au reciblage. Nous vous félicitons d'avoir reconnu que nous devons réaligner notre système sur un modèle plus holistique bénéfique pour la santé de tous les Canadiens.

Nous passons ensuite aux soins primaires. Nous avons été ravis d'entendre les infirmières, qui nous ont précédés, aborder cette question. Ce que nous allons dire ici se révélera peut-être redondant, mais nous tenons à soulever certains points. Nous sommes heureux que le gouvernement fédéral consacre 800 mil lions de dollars à la réforme des soins primaires. Nous constatons que votre comité appuie fermement la prestation de soins de santé primaires offerts par des équipes multidisciplinaires de profession nels.

Notre clinique de Saskatoon effectue ce genre de travail depuis près de 40 ans ici dans la province. La clinique a ouvert ses portes en juillet 1962. Nous offrons des services à quelque 25 000 patients. Nous avons également une clinique du côté est et du côté ouest, région où habite une population composée en grande partie d'Autochtones.

Dans notre mémoire, nous énumérons ensuite les caractéristi ques de la clinique communautaire de Saskatoon. Nous mettons en relief le développement communautaire, et nous associons nos patients et nos membres à la prise de décisions. Si vous consultez le bas de la liste, vous verrez que nous sommes un organisme communautaire sans but lucratif, que nous établissons de solides partenariats avec nos utilisateurs et nos fournisseurs et que nous préconisons une approche multidisciplinaire des soins. Tous les membres de notre personnel sont salariés. Nous répondons aux besoins 24 heures sur 24, sept jours sur sept, et nous participons activement à des partenariats conclus avec d'autres organismes de santé. Nous travaillons également avec d'autres organismes d'autres secteurs.

Nous recommandons vivement un tel modèle, ainsi que notre mémoire l'indique.

Nous avons remarqué que, dans votre rapport, vous avez fait mention du modèle des cliniques commentaires, sans toutefois le situer dans le contexte des économies. C'est un point que je tiens à souligner. En fait, le ministère de la Santé de la Saskatchewan a, au début des années 80, mené une enquête sur le coût pour le trésor public de 200 médecins rémunérés à l'acte travaillant en milieu urbain par rapport à celui des cliniques communautaires. Le rapport a été préparé en 1983. Pour des raisons politiques, il n'a été rendu public que des années plus tard.

La recherche a montré que les cliniques coûtent, en moyenne, 17 p. 100 de moins que les médecins agissant à titre privé. Les économies sont liées des frais moins élevés au titre des médicaments d'ordonnance, à une utilisation moindre des services et à des taux inférieurs d'hospitalisation des patients.

Le ministère de la Santé de la Saskatchewan continue de surveiller les coûts différentiels: les coûts des cliniques commu nautaires, d'une part, et les coûts de la pratique privée, d'autre part. Les cliniques demeurent plus efficaces, même si notre effectif comprend de nombreux professionnels et que nous avons un budget général. Les différences ne sont pas grandes parce que, en général, les coûts des hospitalisations ont diminué, ce qui a une incidence sur le coût des médecins qui exercent dans le privé. Le nombre de personnes hospitalisées a diminué et, si je ne m'abuse, les séjours à l'hôpital durent moins longtemps.

Nous pensons également que l'approche multidisciplinaire est, pour de multiples raisons, beaucoup plus viable. L'une de ces raisons est que nos professionnels salariés consacrent beaucoup plus de temps aux patients et, par conséquent, répondent à leurs besoins sociaux et affectifs. Par exemple, ils peuvent aiguiller les patients qui ont des besoins sociaux vers des travailleurs sociaux ou ceux qui ont des problèmes de diète vers un nutritionniste. Les infirmières vous en ont parlé plus tôt.

Nous sommes également très soucieux de la reddition de comptes. Nous accordons une importance tout particulière aux indicateurs de résultats, aux protocoles de soins et aux évaluations externes.

En novembre 1997, la clinique de Saskatoon a été la première clinique communautaire au Canada à avoir été agréée par le Conseil canadien d'agrément des services de santé. Nous en sommes très fiers. L'agrément a été renouvelé cette année pour une période additionnelle de trois ans.

Une fois de plus, nous recommandons ardemment au gouverne ment fédéral d'appuyer un tel modèle.

Nous sommes d'accord avec l'expansion des services de santé publique, en particulier les soins à domicile, les soins palliatifs et les médicaments d'ordonnance.

Nous avons été incapables d'obtenir votre chapitre 8. Nous ne sommes donc pas en mesure de nous prononcer en détail sur les options que vous y proposez. À la lecture du rapport intérimaire, nous en sommes toutefois venus à la conclusion que nous appuierions à coup sûr l'initiative nationale d'assurance-médica ments et un programme national de soins à domicile.

Dans ce secteur, nos employés font sans cesse face à de véritables problèmes. Par exemple, en ce qui concerne les médicaments d'ordonnance, nous savons que des personnes se retrouvent à l'hôpital simplement parce qu'elles n'ont pas les moyens de se procurer certains médicaments. Les soins palliatifs représentent un autre enjeu de taille - particulièrement pourmoi -, et j'ai été heureuse d'entendre les infirmières aborder cette question un peu plus tôt.

Je passe maintenant à la page 4 pour vous dire un mot de la santé de la population. Au sein de la collectivité, notre association intervient avec vigueur dans nombre de dossiers liés à la santé et aux questions sociales. Nous considérons notre clinique comme un modèle ou un moyen de prendre effectivement en compte les déterminants sociaux de la santé. Du côté ouest, en particulier, nous proposons de nombreux programmes pour tenter de répondre aux problèmes de nos clients. Comme l'indique notre mémoire, nous misons sur des groupes qui effectuent toutes sortes de travaux. Nous avons un groupe de défense des intérêts qui s'occupent des droits des locataires. Nous avons des cuisines communautaires et toutes sortes de programmes de soutien, en particulier pour les clients atteints de diabète. Nous offrons également des cours de soutien des parents et sur l'art d'être parent, sans oublier des groupes prénatals.

Nos Autochtones ont eu la possibilité de faire valoir leur leadership. Par exemple, nous avons un groupe d'aînés. Les grands-mères y jouent un rôle clé.

Nous considérons le côté ouest comme un bon modèle d'établissement de soins primaires apportant une aide extraordi naire aux Autochtones et aux résidents de la région en général. On réussit à mettre en valeur le leadership des résidents eux-mêmes.

Nos autres recommandations vont essentiellement dans le même sens que vos remarques sur la protection et la promotion de la santé de même que sur le mieux-être, comme le précise votre rapport.

Nous effectuons beaucoup de travail dans le domaine de la promotion de la santé. Notre unité de promotion de la santé participe à toutes sortes de programmes, par exemple des programmes de lutte contre le tabagisme et d'autres. Si vous le souhaitez, nous vous fournirons plus de détails à ce sujet.

En ce qui concerne le rôle du gouvernement fédéral vis-à-vis des Autochtones, nous formulons certaines recommandations relativement directes au sujet de stratégies, en particulier dans le domaine de la coordination. À nos yeux, ce genre d'approche coopérative et multidisciplinaire correspond très bien aux valeurs des Autochtones et au mode de fonctionnement des Autochtones eux-mêmes.

Enfin, à la page 5, nous recommandons au gouvernement fédéral de réinvestir le domaine du logement social. Personnelle ment, je pense que le retrait du gouvernement fédéral de ce secteur a été un désastre absolu. La plupart des provinces ont emboîté le pas. L'absence de participation fédérale et provinciale dans le domaine du logement social a entraîné des coûts importants.

Le Dr John Bury, témoignage à titre personnel: Honorables sénateurs, mon exposé sera sensiblement différent.

Le président: Selon notre expérience, il est toujours plus facile d'entendre les deux exposés pour ensuite poser des questions à tous les témoins.

Le Dr Bury: Depuis la commission royale de 1964, il y a eu de multiples enquêtes provinciales, sans parler de la présente enquête, des modifications apportées à la Loi canadienne sur la santé, et il y a aujourd'hui la Commission sur l'avenir des soins de santé au Canada, présidée par M. Roy Romanow. Le problème, me semble-t-il, c'est que nous n'avons jamais mis la profession médicale au défi de réfléchir sérieusement à son comportement et à la façon dont elle prodigue des soins médicaux.

Nous avons discuté des preuves de pratiques médicales inappropriées, inutiles et inefficaces, et vous avez laissé entendre que même l'apport de correctifs ne suffirait pas à compenser le manque à gagner. Vous êtes donc à la recherche, comme vous le laissez entendre dans votre rapport, de nouvelles sources de financement. Ce faisant, vous confortez la population dans le point de vue véhiculé selon lequel la seule solution consiste à injecter davantage d'argent dans le système. En ces temps de récession économique où notre société fait face à des menaces extérieures, les gouvernements doivent consacrer les liquidités dont ils disposent à d'autres priorités. Il me semble que l'occasion est particulièrement bien choisie pour l'ensemble des profession nels de la santé d'examiner ce qu'ils font et l'incidence de leurs actions sur les coûts des soins de santé.

Bien que je sois un ardent partisan de ce que vous appelez un éventail de services, à l'exemple de ce qu'a proposé la commission Fyke et de ce que vous évoquez dans votre propre rapport, vous êtes confrontés au fait que la plupart des coûts de la santé sont imputables aux actions des médecins. Ce sont eux qui sont les moteurs de l'appareil.

L'expansion moderne de la technologie ajoute aux coûts. La technologie s'est accompagnée de la volonté de l'utiliser chaque fois qu'on a cru qu'elle pouvait avoir un effet bénéfique, mais, après un certain temps, on s'est rendu compte qu'elle ne réglait pas toujours les problèmes. Entre-temps, nous y avons consacré des sommes considérables.

Permettez-moi de vous donner un exemple. Lorsque, dans le domaine de l'obstétrique, nous avons introduit les moniteurs foetaux, le nombre de césariennes a augmenté de façon considérable. Dans certains établissements, la hausse a atteint de 20 à 30 p. 100. Nous ne comprenions pas vraiment la technolo gie. Nous nous rendons aujourd'hui compte que nous pouvons mieux utiliser cette technologie, et le nombre de césariennes a diminué pour se rapprocher des niveaux d'avant l'avènement de la technologie. On croyait qu'il s'agissait d'une amélioration, mais, en réalité, la technologie a porté préjudice à de nombreuses femmes qui ont subi des césariennes dont elles n'avaient pas vraiment besoin. Il s'agit d'un exemple très simple. La technologie est une maîtresse exigeante.

Je pense qu'il est temps que la profession médicale elle-même se penche sérieusement sur cette question. J'ai parfois l'impres sion que le capitaine du navire, qui commande le paquebot des soins de santé, a été relégué sur un petit canot qu'on remorque, d'où il contemple avec rancoeur la poupe du bateau «commission gouvernementale». C'est ce qui s'est passé, à mon avis, et jamais on n'a invité la profession à monter à bord. Le moment est venu de le faire parce que, me semble-t-il, il y a assez de bonne volonté et de compréhension au sein de la profession et que beaucoup de travail a déjà été accompli. On peut donc poser aux médecins les questions suivantes: «Ce que nous faisons est-il toujours approprié?» Pouvons-nous faire mieux? Y a-t-il des choses que nous ne faisons pas et que nous devrions faire? Y a-t-il des choses que nous avons cessé de faire et que nous devrions continuer de faire? Faute de faire partie de la solution, les médecins feront partie du problème.

Voilà tout ce que j'avais à dire. Si vous vouliez bien inclure mes commentaires dans votre rapport, peut-être un autre organisme, la Commission sur l'avenir des soins de santé au Canada, par exemple, pourrait-il les reprendre à son compte.

Le sénateur Morin: Le travail que vous avez effectué est extrêmement intéressant. La réputation de votre clinique s'étend jusqu'à la ville de Québec. J'établirais un parallèle entre ce que vous faites et ce que font les CLSC du Québec. C'est pourquoi nous savons autant de choses à propos de vos activités.

Votre rapport est des plus intéressants. Il est clair. Vous ne faites pas de compromis, et c'est parfait.

Ma première question est la suivante: y a-t-il un pays qui, à votre avis, pourrait servir, du moins en partie, de modèle au Canada? Vous recommandez un certain nombre de modifications. Je me rends compte que deux modèles ne peuvent être absolument identiques, puisqu'il existe des différences, histori ques, culturelles et autres, mais y a-t-il un pays qui, à votre avis, pourrait servir de modèle au Canada au moment où nous envisageons de telles modifications?

Ma deuxième question porte sur la recommandation d'un système universel entièrement financé par le gouvernement. Certaines personnes risquent de s'y opposer et de souligner les dangers de l'établissement d'un monopole. La présence d'un monopole n'est pas sans inconvénient. En Suède, en Grande-Bretagne, en France et dans de nombreux autres pays, on s'oriente vers ce qu'on appelle un marché interne, dans lequel divers fournisseurs se font concurrence, le gouvernement agissant à titre de payeur unique. L'avantage, c'est qu'il y a concurrence entre divers fournisseurs, lesquels peuvent être tous des fournisseurs gouvernementaux ou encore des fournisseurs privés mêlés à des fournisseurs gouvernementaux. Vous opposeriez-vous à une telle forme de fonctionnement?

En ce qui concerne les listes d'attente, je ne fais nullement la promotion du système américain, mais avez-vous étudié le phénomène des listes d'attente aux États-Unis? Je sais que les citoyens américains ne toléreraient pas d'avoir à attendre 24 heures dans quelque système que ce soit. Ce n'est pas une simple question d'organisation. Je pense que c'est aussi une question de ressources. Voilà ce que je voulais dire.

Y a-t-il, dans vos cliniques, un système de capitation? Êtes-vous responsable d'une collectivité donnée? Y a-t-il un système de contrôle? À ma connaissance, l'équipe et le programme de soins primaires doivent passer par la capitation, une collectivité ou un nombre de citoyens donnés et la responsabilité des services totaux. Est-ce ainsi que vous fonction nez? D'après ce que j'ai entendu, ce ne serait pas le cas.

Bien entendu, vous avez entendu parler du contrecoup essuyé par les OSSI des États-Unis, où tous les médecins étaient salariés. On a là des preuves de sous-utilisation. La charte des droits, qui est à l'étude devant le Congrès américain et a été approuvée, aborde le problème de la sous-utilisation des services offerts par les OSSI, où les médecins sont salariés et où, pour diverses raisons, on n'a pas proposé la liste de services offerts aux patients. Il y a là un problème distinct.

Enfin, j'aimerais aborder le problème de la santé des Autochtones. Je suis tout à fait conscient du fait qu'il s'agit d'une honte nationale, et je sais que la province dans laquelle nous nous trouvons fait plus que toute autre pour y faire face. L'une de nos recommandations est que nous devrions veiller à la santé des Autochtones. Le gouvernement fédéral consacre 7,3 milliards de dollars par année à la santé des Autochtones, sans compter ce que versent les provinces. Cela signifie donc que ce sont les Autochtones qui, par habitant, reçoivent le plus d'argent pour la santé au Canada et, probablement, dans le monde. Je ne pense pas que le problème soit imputable à des ressources insuffisantes; en fait, il y a peut-être trop de ressources. Je ne vais pas entrer dans ces considérations. Avez-vous des solutions au problème?

Une dernière brève question: en 1983, la différence entre les médecins rémunérés à l'acte et les médecins salariés était de 17 p. 100. À combien se chiffre aujourd'hui cet écart? Vous avez dit qu'il s'amenuisait.

Mme Storrie: Pour répondre à votre première question, je dois souligner que je ne suis pas une spécialiste de la santé. Je suis une bénévole qui siège à un conseil d'administration communautaire. Je suis sociologue de formation, et j'ai étudié le système de santé à l'époque où j'enseignais, et je continue de m'y intéresser. Je pense que les sénateurs connaissent probablement mieux que moi la situation internationale.

Je ne connais pas d'autre pays qui pourrait servir de modèle. Je crois comprendre que la Nouvelle-Zélande avait un système de santé efficient et très bien administré, que finançait le secteur public. Puis, on a fait un virage spectaculaire à 180 degrés, et le pays a adopté un modèle hautement privatisé, ce qui a entraîné toutes sortes de conséquences, non seulement du point de vue de la santé, mais aussi des autres aspects sociaux.

Franchement, je pense que le Canada s'est extrêmement bien tiré d'affaire par rapport à la plupart des pays confrontés au même genre de problèmes. Je pense que nos problèmes sont pour une large part systémiques, et je pense qu'ils ont trait au genre de problèmes soulevés par le Dr Bury.

En ce qui concerne la question du monopole par rapport à la concurrence, je crois comprendre que la concurrence entre hôpitaux a eu certaines conséquences plutôt négatives. Les hôpitaux de la Grande-Bretagne, à titre d'exemple, consacrent des sommes colossales aux plus récentes technologies simplement parce que l'hôpital voisin l'a fait. Les hôpitaux et d'autres services de santé, j'imagine, finissent par être des générateurs de fonds plutôt que des utilisateurs de fonds. Il s'agit d'un modèle d'entreprise privée non applicable au secteur de la santé qui, à mon avis, devrait être financé par l'État. On ne devrait pas traiter la santé comme un produit.

En ce qui concerne les listes d'attente, j'ai une idée de certaines des mesures qui ont été prises aux États-Unis. Je suis certaine que vous avez accès à ces renseignements. Ils ont consenti des efforts majeurs à la modification de la méthode d'administration des listes d'attente. Ils ont adopté une approche davantage axée sur la coordination et la coopération, et les listes d'attente se sont considérablement raccourcies, particulièrement celles qui, aux États-Unis, ont trait aux programmes sans but lucratif.

J'ai bien peur de n'avoir rien à dire au sujet des médecins salariés sous-utilisant le système. Je suis certaine que le Dr Bury pourra en dire un mot. Si tel est le cas, je pense qu'il s'agit pour une bonne part d'un problème de pression exercée par les pairs, d'éducation des pairs, de protocoles et d'autres paramètres mis en place.

À titre de vice-présidente de la clinique, ce qui me plaît, dans le salariat, c'est que les médecins ne seraient plus incités à générer toutes sortes de tests et de services ni à suggérer des visites de suivi à leurs patients. Nos médecins ne le font pas. Il suffit que le résultat d'un test dénote la présence d'un problème, et le médecin communiquera avec le patient par téléphone. S'il n'y a pas de problème, il ne téléphone pas. Pour la plupart des patients, cette façon de faire est acceptable. Peut-être Ingrid pourrait-elle ajouter quelque chose à ce sujet. Est-ce acceptable?

Mme Ingrid Larson, directrice des relations avec les membres, Association des services des soins de santé commu nautaires (Saskatoon): Oui.

Mme Storrie: La situation est très nette. Quand vous recevez un coup de fil de votre médecin, cela veut naturellement dire qu'il y a lieu de s'inquiéter. Par ailleurs, les économies de temps et d'efforts sont énormes.

Je suis au fait des dépenses colossales qu'on consacre aux peuples autochtones. Je songe simplement, cependant, aux problèmes fondamentaux que, bien entendu, vous connaissez tous très bien. C'est une question de déterminants sociaux. Le niveau de pauvreté, de désorganisation communautaire, les toxicomanies et ainsi de suite sont à l'origine des difficultés des Autochtones.

Je pense que la mise en valeur de l'idée d'une communauté ou d'une coopérative dans les réserves et les centres urbains où les Autochtones sont majoritaires constituerait un moyen de venir en aide aux Autochtones. On peut alors les associer à la prise de décisions, aux programmes d'éducation, et ainsi de suite.

Peut-être Ingrid pourrait-elle ajouter quelque chose à ce sujet.

Le sénateur Morin: Vous n'avez pas répondu à la question de la capitation.

Mme Storrie: Pardonnez-moi, elle m'avait échappé. Nos médecins sont salariés et ne sont pas rémunérés en fonction d'un territoire géographique. Nous traitons simplement toutes les personnes qui se présentent à notre clinique. Nos patients sont donc répartis sur l'ensemble de la ville.

Voulez-vous ajouter quelque chose à propos de l'aspect de la West Side Clinic?

Mme Larson: En ce qui concerne la West Side Clinic, nous avons principalement affaire à une clientèle d'Autochtones vivant en milieu urbain, et les problèmes auxquels nous faisons face sont des déterminants sociaux de la santé. Là, nos infirmières effectuent du travail d'approche et de développement communau taires. Elles savent très bien que les problèmes auxquels la communauté fait face ne se résument pas qu'à des problèmes de santé physique. Nous nous intéressons alors aux questions touchant le logement, la nutrition et tous les enjeux connexes qui ont un impact considérable sur le mieux-être des gens. Le moment venu d'assurer des services à ce segment de la population, on doit aller au-delà de la santé. On aura affaire à certains problèmes très complexes, qui doivent tous être abordés.

Mme Storrie: Je suis d'accord avec les infirmières pour dire qu'elles jouent un rôle absolument essentiel et, en réalité, critique. Elles doivent effectuer du très bon travail dans un tel cadre multidisciplinaire.

À titre d'ex-travailleuse sociale, j'ai peut-être un préjugé qui me fait croire que les travailleurs sociaux représentent un groupe dont, dans le domaine médical, on méconnaît justement l'apport. Avant de devenir sociologue, j'ai reçu une formation de travailleuse sociale hospitalière à l'Université de Londres. Les travailleurs sociaux effectuent une quantité énorme de tâches invisibles, préventives et constructives. À titre de travailleuse sociale hospitalière, je sais que j'ai apporté une formidable contribution. J'ai mis des patients en relation avec toutes les ressources communautaires capables de les aider à mettre au point un véritable plan pour faire face à leurs problèmes. C'est particulièrement le cas dans le domaine des soins palliatifs. Très souvent, le travailleur social est la personne qui a la situation bien en main.

Le Dr Bury: Puis-je dire quelque chose au sujet des OSSI?

Le président: Oui.

Le Dr Bury: Certains médecins des États-Unis ont discuté avec nous des problèmes des OSSI. Si une OSSI dépend d'une compagnie d'assurance et que cette dernière souhaite réaliser un profit pour ses actionnaires, des pressions inhérentes s'exercent pour que les services soient réduits. Il semble bien qu'il s'agisse de l'une des raisons les plus déterminantes des problèmes qu'on a éprouvés.

Le sénateur Morin: Je me permets de vous interrompre. Prenons l'exemple de la plus importante, à savoir Kaiser Permanente, qui est sans but lucratif. L'élément relatif au profit n'entre pas en ligne de compte.

Le Dr Bury: Vous vous demandez si l'organisation a été touchée par ce problème?

Le sénateur Morin: Oui. La question de savoir s'il y a sous-utilisation des services repose sur une appréciation subjecti ve. Je pense qu'il y a peut-être un ressac anti-OSSI. Un témoin américain nous a affirmé que le réseau des OSSI était en voie d'effondrement, qu'il ne constituait pas le réseau préférentiel de fournisseurs. Si, aux États-Unis, on met de côté le réseau des OSSI, qu'il s'agisse d'organisation à but lucratif ou sans but lucratif, c'est que les patients ont le sentiment qu'il y a sous-utilisation des services offerts par ce réseau. C'est la principale raison qui explique l'adoption de toutes ces dispositions législatives et réglementaires. Je me rends bien compte du fait que les patients américains ne sont pas des patients canadiens. Je me rends compte qu'on a affaire à une population différente. C'est la principale raison qui explique l'adoption de toutes ces dispositions législatives et réglementaires. Je voulais simplement soulever cette possibilité.

Bien entendu, la sous-utilisation pose un problème du point de vue de la rémunération à l'acte, mais on doit comprendre que la possibilité de sous-utilisation existe également en vertu du régime de salariat. Je ne dis pas que c'est le cas dans votre clinique. Je me contente simplement de mentionner qu'il s'agit là d'une solution de rechange.

Le Dr Bury: J'ai eu une petite pratique privée en Angleterre. Les patients de ces organisations étaient nettement moins bien traités que mes patients ordinaires parce que je me sentais coupable à l'idée de facturer un sou de plus si je devais faire une autre visite à domicile. J'ai travaillé sous le régime de la capitation, et j'ai travaillé à salaire. Il n'y a pas de système parfait. Nous n'appliquons pas d'honoraires fixés par tête aux médecins, aux infirmières et à de nombreux professionnels. Nous ne rémunérons pas les pompiers en fonction du nombre d'incendies qu'ils éteignent. Bien entendu, il y a toujours des paresseux dans tout système. Je ne crois pas que les médecins soient différents du reste de la société. Je pense qu'ils font un travail honnête en contrepartie d'un salaire honnête, à condition qu'on leur en donne la possibilité.

En vertu du système de rémunération à l'acte, on doit toutefois faire quelque chose pour toucher de l'argent. Il en a certes résulté certains abus. Le système n'a rien de parfait.

Le sénateur Morin: Je suis entièrement d'accord avec vous sur ce point, docteur Bury.

Le sénateur Keon: Mme Storrie, j'ai remarqué que, dans votre mémoire, vous vous intéressez, relativement à la santé de la population, à trois domaines principaux: la protection de la santé, la prévention et le mieux-être. Depuis le dépôt du rapport Lalonde, je suis convaincu que le secret de la santé optimale des Canadiens de même que celui de la prestation de soins de santé optimaux à ces derniers repose sur la surveillance continue de la santé de la population, une rétroaction et des mécanismes adéquats qui permettent de régler les problèmes qui se posent à cet égard.

En ce qui concerne la santé de la population, il y a toutefois un quatrième élément, et c'est l'élimination des maladies qui nuisent à la santé de la population, qu'on peut cibler et traiter de façon efficace. Au Canada, c'est ce que nous avons fait dans le domaine de la tuberculose, par exemple. J'admets que nous avons eu de la chance et découvert deux ou trois antibiotiques valables en cours de route, mais l'infrastructure sanitaire et les autres mesures que nous avons prises se sont révélées des plus efficaces. Je pense que nous nous sommes également attaqués de façon très efficace au problème du sida.

Avez-vous des commentaires à ce sujet? Je pense qu'il y a un chaînon manquant. Quelle que soit l'entité qui s'occupe de cette question, qu'il s'agisse d'un organisme régional, provincial, national ou même d'un service de santé communautaire, on doit se pencher sur les problèmes qui nuisent à la santé de la population et y remédier. Je suis tout à fait d'accord avec les trois propositions que vous faites, mais le quatrième élément manque à l'appel.

Il y a un autre chaînon manquant, et ce sont les soins à domicile. Je pense que le principal échec de notre système s'explique par les lacunes qu'on y retrouve. Que les soins soient organisés au niveau régional ou provincial ne change rien à l'affaire. Si votre clinique communautaire est tout à fait louable et a effectué un travail remarquable, je pense que les soins à domicile qui ne sont pas offerts par votre clinique constituent le chaînon manquant.

Vous avez des commentaires à ce sujet?

Docteur Bury, nous aurons sous peu une discussion intéressante que j'attends avec impatience.

Mme Storrie: En ce qui concerne les maladies précises, je pense qu'on a affaire à un enjeu lié à la protection de la santé puisque la première étape à franchir consiste à éviter que les citoyens ne contractent la maladie. Je suis d'accord avec vous. Peut-être devrait-on mettre un accent plus précis sur cette question.

Je ne suis pas une spécialiste de la santé de la population. Je sais que l'Université de la Saskatchewan compte quelques unités très actives dans ce domaine, et il aurait été intéressant que vous les entendiez sur ce point particulier. Je suis assez âgée pour me rappeler la tuberculose. Je travaillais comme travailleuse sociale hospitalière à London, en Ontario. À mon arrivée là-bas, j'avais été, dans ma naïveté, consternée de me rendre compte qu'il n'y avait pas de logement social à London, en Ontario. S'il en était ainsi, c'est parce qu'on a le sentiment qu'il n'y avait pas de besoin en ce sens; en réalité, le besoin existait bel et bien. L'un des principaux arguments que nous avons invoqués, en tant que groupe de travailleurs sociaux, pour justifier le logement social, c'était le fait que la tuberculose était toujours présente. Toute la question du logement social et des autres mesures que nous pouvons prendre pour favoriser la santé des citoyens suppose une stratégie majeure.

Nous pouvons nous inspirer de l'expertise de groupes de bénévoles comme la Société d'arthrite et l'Associationpulmonaire le moment venu d'établir comment faire face à ces maladies particulières. C'est peut-être un secteur auquel nous devrions accorder plus d'importance.

En ce qui concerne les soins à domicile, je me permets de souligner que notre administrateur, Patrick LaPointe, a été l'un des membres fondateurs des soins à domicile dans la province. Si je me souviens bien, un groupe de bénévoles, une organisation non gouvernementale, a commencé à souligner le besoin de soins à domicile.

Cette question relève du gouvernement provincial et, bien entendu, des agents de santé du district. Nous travaillons avec eux. À ma connaissance, il ne s'agit toutefois pas d'un service que nous aurions pu commencer à offrir. Nous offrons nos services sur la foi d'une enveloppe budgétaire globale, et nous devons négocier avec le ministère de la Santé ce que nous faisons et ne faisons pas.

Je suis d'accord avec vous pour dire que les lacunes dans les soins à domicile ou l'absence d'intégration de ces derniers constitue un grave problème. C'est un domaine dans lequel nous devons investir plus de ressources.

John, vous aviez des commentaires sur ce que j'ai dit?

Le Dr Bury: Dans les années 60, on offrait à Regina et à Saskatoon certains services de soins à domicile. À Saskatoon, il y avait un service de soins de santé mentale à domicile. À Regina, c'était des services infirmiers généraux offerts par les Infirmières de l'Ordre de Victoria sur la foi d'un contrat conclu avec le gouvernement provincial. Nous ne nous sommes jamais occupés de cette question, en partie parce que les services avaient déjà été mis sur pied. À partir de cette date on a considéré, dans la province, qu'il s'agissait d'un aspect du système de santé dont on allait s'occuper plus tard et qui constitue aujourd'hui, de fait, une responsabilité. Comme vous le savez, on a, dans ce district de santé particulier, transféré des fonds considérables, et on a, grâce aux soins à domicile, réalisé des économies au titre des jours-lits. On offre ici des services. Ils ne sont pas aussi bons qu'ils devraient l'être, mais ils existent, et ils sont offerts par le système de santé du district.

Nous n'avons jamais senti que la responsabilité de tels services nous incombait, même si un grand nombre de médecins offraient des soins à domicile. Les infirmières se rendaient à domicile, au même titre que des professionnels ou des techniciens de la santé qui se rendaient dans les foyers pour prélever des échantillons. On continue de le faire encore aujourd'hui. Cependant, nous n'avons jamais véritablement offert de services à domicile, de services ménagers, et ainsi de suite.

Le sénateur Keon: Il me semble que la confusion entre intégration et propriété constitue l'un des importants problèmes auxquels nous faisons face. L'intégration n'est pas synonyme de propriété. L'intégration est synonyme de coopération. Pour de nombreuses personnes, intégration rime avec propriété. Lorsque nous discutons avec vous des lacunes et du fait que vous n'offrez pas de soins à domicile, vous ne devriez pas tout de suite comprendre que c'est à vous qu'il incombe d'offrir de tels services. Ce que vous devez faire, c'est collaborer avec les responsables des soins à domicile, qui qu'ils soient, de façon que, ensemble, vous puissiez fournir les services de santé nécessaires pour avoir un effet sur la santé de la population dont vous vous occupez.

Mme Storrie: C'est exactement ce que je comprends. Nos médecins assument la responsabilité de leurs patients qui ont besoin de soins à domicile. Il en va de même pour les travailleurs sociaux et d'autres professionnels.

Mme Larson: D'autres professionnels, par exemple les ergothérapeutes, participeront au travail de ce que nous appelons le service d'évaluation coordonnée, soit le service, qui, dans le district de Saskatoon, s'occupe des soins à domicile.

Tous nos travailleurs de la santé ont pour tâche soit de défendre les soins à domicile, soit d'aider à trouver aux gens une place dans le système de soins à domicile.

Le sénateur Keon: Docteur Bury, parlons de la profession médicale. Je suis très fier de ma profession et j'ai eu une merveilleuse carrière comme médecin. Je viens d'accrocher mon stéthoscope il y a quelques semaines; aujourd'hui, je suis administrateur et sénateur.

Je suis très désolé du fait que notre profession n'ait pas apporté à la situation la contribution dont elle est capable. Durant ma carrière, j'ai fait partie de pratiquement tous les organes qui représentent notre profession, dont le Conseil de recherches médicales, le Collège royal des médecins et chirurgiens et des associations provinciales.

Je ne sais pas pourquoi les médecins hésitent à se lever et à pontifier sur le problème global de la santé de notre pays, de notre province, de notre collectivité. Quelle en est la raison, selon vous?

Le Dr Bury: Je ne sais vraiment pas.

Je vais vous parler un peu de la médecine de famille en Angleterre en remontant aux années 50, 60 et 70. Quand le Health Service en était à ses débuts, on avait l'impression que les médecins recevaient trop d'argent; néanmoins, ils en demandaient toujours plus. Puis, la British Medical Association a commencé à parler de la responsabilité de fournir de bons soins et est devenue le défenseur public de bons soins médicaux et d'un bon service de santé. Subitement, l'attitude des gens a changé. Cela peut se faire. On a renversé la vapeur. Je ne sais pas très bien pourquoi, mais la Grande-Bretagne s'est certes retenue, jusqu'au moment de réaliser qu'elle avait la responsabilité d'aider à concevoir un «service de santé nationale, ou «National Health Service».

À l'heure actuelle, les habitants du Canada ont l'impression que les médecins reçoivent trop d'argent et ainsi de suite. Tout de même, je crois que la relation entre les médecins et les malades demeure très bonne, même s'il faut s'adonner à cette pratique horrible qui consiste à faire du porte à porte d'hôpital en hôpital pour obtenir le service le plus économique possible pour son patient, afin de pouvoir acheter d'autres choses. C'est une situation assez déplorable.

Je ne saurais vous dire, Dr Keon, pourquoi nous n'avons pas agi. Je n'ai jamais fait partie de «la profession» et j'ai tendance, en tant que professionnel, à être situé en marge. Nous avons eu des rapports assez orageux avec «la profession» à la clinique communautaire. Une des raisons qui explique cela, c'est que nous avons été les premiers à exercer la médecine de groupe à Saskatoon. En fait: nous avions des médecins, des spécialistes, des omnipraticiens qui travaillaient ensemble. Ils nous en ont voulu. Bien sûr, nous étions en faveur de l'assurance-maladie à une époque où d'autres médecins ne l'étaient pas. Nous étions des employés salariés. L'idée d'un système de soins de santé primaires s'est heurtée à une certaine résistance. J'ai toujours observé cela depuis la marge.

J'ai eu à faire avec des médecins qui ont essayé d'examiner rigoureusement le système. Je me souviens d'avoir participé à des études, à l'époque où j'était médecin au City Hospital. Une étude dont je me souviens particulièrement se rapportait au fait qu'un grand nombre de nos patients tombaient en bas du lit. Nous siégions, un spécialiste de la médecine interne et moi-même, au comité pour la qualité des soins. Nous avons effectué une étude qui nous a permis de constater que les malades qui prenaient beaucoup d'hypnotiques tombaient en bas du lit, ce qui n'était pas le cas des autres. Une fois nos conclusions publiées, il n'a pas été étonnant de voir que les prescriptions d'hypnotiques ont été limitées et que les gens ont cessé de tomber en bas du lit. Les médecins peuvent examiner ce qu'ils font et rectifier le tir.

Je sais que les professeurs invités spécialistes en pharmacologie visitent les sociétés médicales de district. Nous publions des bulletins pour décrier ce qui semble être une utilisation mal avisée de certains médicaments. Il y a eu une réaction à cela.

Toutefois, nous n'avons jamais participé collectivement à ce genre d'activités en tant que professionnels.

Je crois que lorsque les médecins seront renseignés sur les faits de cette nature, ils changeront.

J'ai préparé mon exposé parce que je croyais que nous devrions demander aux médecins de faire un examen de conscience. Je crois que le moment est bien choisi pour mettre les médecins au défi. Les médecins observent encore ce qui se passe. Je sais qu'ils ont l'impression d'être manipulés par les commissions. Ils sont manipulés par les administrateurs. Nous en avons parlé plus tôt aujourd'hui. Les bâtards de Voltaire, voilà une réalité qui s'applique aux soins de santé comme elle s'applique partout ailleurs en société.

Le sénateur Keon: Permettez-moi d'aborder une autre question, quoique le sénateur Morin en ait déjà parlé. Il me semble que ce soit toujours «tout l'un tout l'autre» quand vient le temps de discuter de la rémunération des médecins. Pour ma part, j'ai l'impression que nous devrions étudier un spectre de système qui comporterait divers régimes de rémunération convenant à des situations particulières et éviter les déclarations catégoriques du genre «les médecins devraient être salariés» «les médecins devraient être rémunérés à l'acte». Qu'en pensez-vous?

Le Dr Bury: J'ai bien aimé ce que vous avez dit tout à l'heure quand vous vous adressiez aux infirmières. Vous avez dit qu'un salaire convenait nettement mieux que le paiement à l'acte aux centres de soins primaires.

Je crois que, dans le cas des soins spécialisés, la rémunération à l'acte peut demeurer convenable, à condition qu'il y ait une surveillance nettement plus grande des activités.

Tout de même, j'estime qu'il nous faut des médecins chefs salariés dans nos hôpitaux. Quand j'ai travaillé à la University Hospital, nous avions un très bon chef d'obstétrique qui surveillait ce que nous faisions et qui ne nous laissait aucun répit. Cela a été une expérience merveilleuse. Nous avions un très bon pédiatre au City Hospital - un pédiatre de l'ancienne mouture qui surveillait comme un aigle ce que les médecins faisaient aux malades. S'il estimait que vos actes ne convenaient pas, il vous en faisait part. Si vous croyiez pouvoir les justifier, cela donnait lieu à un débat clinique intéressant. Je crois que les postes de ce genre devraient être salariés.

Le sénateur Pépin: Les infirmières nous ont dit que les médecins sont les grands patrons de l'affaire, qu'ils n'aiment pas qu'on les remette en question. Ils ne se considèrent certes pas comme étant sur le même pied que les infirmières. Vont-ils accepter d'être mis à salaire et peut-être d'adopter un rôle nouveau? Croyez-vous qu'ils vont s'adapter au partage de la responsabilité ou croyez-vous qu'il faudra attendre une nouvelle génération de médecins?

Le Dr Bury: Je ne sais rien du système canadien d'études en médecine, ayant été formé en Grande-Bretagne. Toutefois, à l'époque où j'était interne ou résident, j'ai bien appris que les infirmières jouaient un rôle tout à fait capital dans la profession. Si ne m'accordais pas avec la soeur au pavillon, j'étais fait comme un rat.

Par ailleurs, quand nous faisions une tournée en compagnie de nos chefs, il y avait toujours le chef lui-même, le résident, l'interne, la soeur et le travailleur social. En tant qu'étudiants en médecine, nous faisions partie de l'équipe, et c'est ce que préféraient les chefs. De fait, à l'hôpital où je travaillais, la seule personne qui pouvait donner son congé à un malade, c'était l'interne. Lord Brain - je me trouvais être l'interne de Russell Brain - ne pouvait donner leur congé à ses propres malades parce qu'il n'était pas là tous les jours. Nous avions un système hiérarchique, et à l'intérieur de ce système hiérarchique, il y avait une certaine coopération, chacun étant conscient du rôle qu'il devait jouer.

Le sénateur Pépin: Je dois dire que ma formation à moi était modelée sur la même approche. Nous avons toujours travaillé en équipe avec le médecin et le travailleur social; je comprends donc ce que vous êtes en train de décrire.

Madame Storrie, une de vos recommandations consisterait à s'assurer que les Autochtones ont accès à de bons services de santé. Le sénateur Morin a parlé des sommes d'argent que les autorités provinciales et fédérales versent aux Autochtones. Croyez-vous que nous appliquons la bonne approche? Pourquoi est-il si difficile de les engager dans la démarche, malgré tout l'argent que nous investissons? Est-ce que nous devrions modifier notre approche?

Mme Storrie: Je ne suis pas spécialiste dans ce domaine, et ayant beaucoup observé la situation, ayant lu et ayant parlé à de nombreuses femmes autochtones à l'université, j'ai l'impression que les femmes autochtones détiennent un grand nombre de clés à cet égard. Malheureusement, que cela nous plaise ou non, certains chefs autochtones ont une attitude patriarcale. Je ne dis pas que tous les hommes autochtones sont comme cela, je dis seulement que certains d'entre eux ont une attitude patriarcale. Les femmes doivent se battre pour faire valoir leur pont de vue. Elles sont certainement bien au fait des besoins de leur communauté, et je crois que le soutien des groupes de femmes autochtones est l'une des voies que peuvent emprunter les collectivités.

Comme je l'ai dit, à la West Side Clinic, on profite certainement de l'expérience des femmes aînées autochtones et on leur accorde certainement une place de choix. C'est sous cet aspect que la West Side Clinic fonctionne bien. C'est une voie possible.

Plutôt que d'adopter un modèle de développement communau taire, je crois que nous devrions adopter ce genre de modèle collectif où il y a intégration, c'est-à-dire qu'il s'agit de travailler avec les gens et non pas d'agir à la manière d'un supérieur. Vous les faites participer aux décisions et vous écoutez ce qu'ils ont à dire.

Il y a beaucoup d'éducation à faire, bien sûr, en ce qui concerne le syndrome d'alcoolisme foetal et ainsi de suite. C'est un vrai scandale. La même chose vaut pour le spina bifida. Le spina bifida serait évitable dans 80 p. 100 des cas, mais il faut que ces jeunes femmes ingèrent de l'acide folique avant même de devenir enceintes. C'est le genre d'approche pratico-pratique que les femmes, il me semble, pourraient s'approprier si on leur en donnait l'occasion.

Le sénateur Pépin: Je suis d'accord avec vous. Je sais que lorsqu'elles vivent une situation difficile, elles font toujours part de leurs émotions et de leurs sentiments à l'intérieur d'un cercle de guérison. Cela doit faire partie des soins de santé. Nous pourrions même adopter ce système nous aussi.

Vous avez parlé d'un groupe de grands-mères. De quoi s'agit-il?

Mme Larson: Kathy a parlé du groupe des grands-mères autochtones. Nous avons également des programmes qui s'adres sent aux personnes âgées qui se situent plutôt dans la classe moyenne, à Saskatoon. Toutefois, notre projet pour grands-mères autochtones s'adresse à des femmes aînées autochtones.

Le sénateur Morin: Madame Larson, comme vous travaillez auprès de la population autochtone, pourriez-vous prendre quelques minutes afin de mettre par écrit quelques recommanda tions à notre intention. Cela nous aiderait beaucoup. Comme je l'ai dit plus tôt, c'est un sujet que nous ne maîtrisons pas. Nous voulons entendre le point de vue de gens qui, comme vous, travaillent sur le terrain auprès des populations en question et ont des recommandations concrètes à formuler. Nous avons entendu le témoignage d'organisations officielles et de Santé Canada et de tous ces gens, mais nous n'avons pas entendu les gens qui, quotidiennement, travaillent auprès de ces gens sur le terrain.

Mme Larson: Je le ferai tout de même en consultant les travailleurs de la santé qui oeuvrent directement auprès d'eux. Je serai heureuse de le faire.

Le sénateur Morin: À condition que ce ne soit pas des bureaucrates.

Mme Larson: Non, ce sont des médecins, des infirmières, des nutritionnistes et des travailleurs sociaux.

Le président: Autrement dit, du vrai monde.

Mme Larson: Nous avons aussi des groupes de bénévoles que nous consulterions.

Le président: J'avais l'intention de poser une question semblable; je vais donc y ajouter un peu. Vous avez dit une chose qui m'a intrigué. Vous avez dit qu'à la West Side Clinic, vous vous occupez de logement social et toutes sortes d'autres choses. Dites-vous que vous vous occupez non pas seulement de la santé, mais aussi des déterminants de la santé?

Mme Larson: Tout à fait.

Le président: Du point de vue de la politique fédérale en la matière, étant donné l'obligation du gouvernement fédéral à l'égard des Autochtones, comment pouvons-nous composer avec les besoins des Autochtones en matière de logement?

Le sénateur Morin en a parlé à quelques reprises et, comme nous le disons dans le rapport, l'état de santé des Autochtones est un tel scandale que si les Canadiens en étaient conscients, la plupart seraient profondément gênés. Et en même temps, le ministère fédéral des Affaires indiennes et du Nord, le MAINC, nous dit, avec une fierté non négligeable qu'il en est rendu au point où 57 p. 100 des habitations sur les réserves sont conformes aux normes. Autrement dit, 43 p. 100 seulement sont en dessous des normes. Il y a de quoi être fier, j'imagine, puisque c'est une amélioration. Mais est-il étonnant d'apprendre qu'il y a un problème du point de vue de la santé là où 43 p. 100 des habitations sont en deçà des normes?

Vous êtes la première personne à qui nous en avons parlé et qui semble essayer d'intégrer tout cela. Pouvez-vous nous suggérer des façons concrètes et pratiques d'y arriver? Il ne faut pas oublier le fait que cela supposera probablement une certaine réorganisa tion à Ottawa. C'est un problème que nous pouvons affronter nous-mêmes. Il nous faut savoir à quoi la structure doit ressembler pour que nous puissions faire exactement ce que vous faites.

Vous pourriez y réfléchir pendant le mois qui s'amène, puis nous envoyer une liste des recommandations les plus précises que vous arrivez à formuler. Nous vous en saurions gré.

Mme Larson: Nous serions très heureux de le faire.

Le président: Permettez-moi de remercier tout le monde d'être venu. La discussion a été très intéressante.

Sénateurs, nous accueillons un dernier témoin avant le repas du midi. Il s'agit de M. Stephen Foley, président du Conseil de la santé, Syndicat de la fonction publique, SCFP, en Saskatchewan.

Comme vous partez, je tiens à vous dire que vous êtes les premiers témoins, parmi ceux que nous avons entendus, qui envisagent vraiment la question dans son ensemble, plutôt que seulement la question de la santé, la question du logement et tout le reste.

Mme Larson: C'est tout intégré à l'intérieur de notre organisation.

Le président: C'est tout à fait la raison pour laquelle nous en sommes ébahis.

Monsieur Foley, comme vous le savez, nous avons en main votre mémoire. Nous aimerions consacrer la plus grande part du temps que nous avons aux questions. Je vous demande donc de nous résumer les points importants de votre mémoire, puis nous passerons à la période de questions.

M. Stephen Foley, président, Conseil de la santé, Syndicat canadien de la fonction publique (SCFP) de la Saskatchewan: D'abord, je tiens à vous remercier de me donner l'occasion de comparaître devant le comité ce matin. Je vais présenter rapidement les gens qui m'accompagnent. Le Conseil de la santé du SCFP de la Saskatchewan représente quelque 14 000 travail leurs de la santé. Je suis accompagné du représentant national du SCFP, M. John Welder; et de M. Tom Graham, président de la division de la Saskatchewan du SCFP, qui représente environ 23 000 travailleurs de la santé en Saskatchewan.

Pour faire une économie de temps, nous allons présenter une courte introduction, puis ouvrir la période de questions.

Comme vous le savez probablement, le Syndicat canadien de la fonction publique, le SCFP, est le plus grand syndicat canadien de travailleurs de la santé avec près de 480 000 membres. En Saskatchewan, le SCFP représente quelque 23 000 travailleurs du secteur public. Parmi ces 23 000 travailleurs du secteur public, 14 000 travaillent en première ligne dans le domaine de la santé.

À titre de travailleurs de première ligne, nous portons un intérêt marqué à l'orientation de notre système de santé. Comme vous le savez probablement, notre province vient de parachever un examen du système de santé. Cet examen a été réalisé par Kenneth Fyke. Notre conseil provincial de la santé s'est prononcé en faveur des recommandations générales énoncées dans le rapport Fyke, surtout parce que l'accent y est mis sur l'élaboration d'un modèle de soins de santé primaires. Nous allons approfondir un peu cette question.

Un examen national des soins de santé et du rôle que joue le gouvernement fédéral nous donne toutefois l'occasion, l'ouverture nécessaire pour discuter des questions relatives aux soins de santé dans un contexte beaucoup plus large. Nous sommes d'avis que le gouvernement fédéral doit jouer un rôle important dans le financement des divers aspects des soins de santé et dans la protection du système contre une privatisation de plus en plus grande.

De façon générale, nous sommes d'accord avec les cinq rôles que le Comité sénatorial désigne comme appartenant au gouver nement fédéral. Nous en ajouterions même deux. C'est-à-dire le renforcement de la Loi canadienne sur la santé, puis la protection des soins de santé publics contre les accords de commerce internationaux.

Les gouvernements provinciaux peuvent faire preuve d'innova tion, comme cela a été le cas en Saskatchewan, le berceau de l'assurance-maladie. De même, les orientations des gouverne ments provinciaux peuvent miner notre système de santé national, comme l'Alberta l'a fait, selon nous, en adoptant une loi qui encourage l'établissement de cliniques privées.

Le rôle du gouvernement fédéral quant il s'agit de faire respecter les cinq principes de Loi canadienne sur la santé, revêt une importance capitale, à la lumière de la promotion idéologique de la privatisation à laquelle s'adonnent certaines provinces.

Par ailleurs, avec la mise en place accélérée des accords de commerce internationaux ces derniers temps, il est impératif que le parlement fédéral écarte notre système de santé public de leur champ de mire et le protège contre toute menace possible provenant des accords commerciaux.

Aujourd'hui, nous allons exposer brièvement nos préoccupa tions et nos recommandations pour ce qui est d'un système de santé national.

Les recommandations énoncées aujourd'hui à l'intention du Comité sénatorial dans notre mémoire ne constituent pas une réponse approfondie au rapport détaillé préparé par le Comité sénatorial des affaires sociales, des sciences et de la technologie. Plutôt, nous avons regroupé nos recommandations en quatre grandes rubriques, dont chacune englobe plusieurs recommanda tions. Nos recommandations répondent aux options présentées dans votre rapport, mais l'ordre n'est pas le même.

M. John Welden, coordonnateur de la santé, Conseil de la santé, Syndicat canadien de la fonction publique (SCFP) de la Saskatchewan: La toute première recommandation, c'est que le gouvernement fédéral renforce le régime d'assurance-maladie par un accroissement de la portée et du nombre de services de santé couverts dans le système de santé public. Cela engloberait, sans toutefois s'y limiter, l'élaboration d'un système national de soins à domicile, la création d'un programme national d'assurance-mé dicaments et le renforcement de la prestation publique des soins prolongés.

La deuxième recommandation consiste à réduire le niveau de privatisation des soins de santé et à s'assurer que tout futur projet de privatisation est rejeté. Nous avons la conviction que le système de santé public présente un rapport coût-efficacité nettement supérieur à celui du système privé ainsi qu'à celui d'un système mixte public-privé.

La troisième recommandation, c'est que le gouvernement fédéral exclut les soins de santé de tout accord commercial.

La quatrième recommandation, c'est que le gouvernement fédéral finance et soutienne les projets de réforme des soins de santé primaires. Cela comprendrait l'élimination de la rémunéra tion à l'acte des médecins, qui recevraient alors un salaire. Toutefois, d'autres options peuvent aussi être envisagées. De même, le gouvernement fédéral viendrait soutenir la création d'équipes pluridisciplinaires de soignants, améliorer les conditions de travail des soignants et renforcer le rôle des soignants dans le système de santé. Le dernier paragraphe de la recommandation dit que le gouvernement fédéral devrait mettre en place des politiques économiques et sociales qui auraient pour effet d'améliorer l'état de santé des Canadiens en général.

M. Tom Graham, président, Syndicat canadien de la fonction publique (SCFP) de la Saskatchewan: La santé figure parmi les programmes sociaux les plus chéris au Canada, si ce n'est pas le plus chéri entre tous. Je crois qu'il nous distingue de la majeure partie du reste du monde.

Les cinq principes affirmés dans la Loi canadienne sur la santé constituent le fondement du système de santé public. Nous entrevoyons nombre de menaces qui pèsent sur notre système public et nous incitons vivement le Comité à rejeter catégorique ment les options de privatisation qui sont présentées, car nous croyons qu'elles ne feront que mettre davantage en péril notre régime d'assurance-maladie public.

Le rapport provisoire propose des options de privatisation, par exemple l'impartition de services de santé à des établissements privés à but lucratif; la création de comptes d'épargne médicaux; l'application d'un ticket modérateur; une réduction des cotisations au régime d'assurance-maladie; des crédits d'impôts et des partenariats privés-publics appliqués aux médicaments d'ordon nance. Nous rejetons toutes ces mesures. Nous croyons que toute solution qui a pour effet de réduire le coût pour l'individu et la collectivité plutôt que pour nous dans l'ensemble, est à proscrire.

Nous tenons à souligner également que nous craignons le lien qui sera fait entre les soins de santé et les accords commerciaux qui existent de nos jours. Nous invitons vivement le comité à tenir compte dans son rapport final de toute conséquence à cet égard des accords commerciaux.

Le président:Puis-je vous remercier, tous les trois, de soulever la question des accords commerciaux? C'est une question à laquelle, pour être franc, nous ne nous sommes pas attardés, comme vous l'avez souligné. C'est une question qui, certes, si je la comprends bien, comporte des conséquences qu'il est difficile de saisir exactement. Soulever la question est utile.

Le sénateur Morin: C'est la première fois que le sujet est abordé. Vous pourriez nous faire part de tout autre renseignement dont vous disposez à ce sujet. C'est une question importante.

Ce qu'il y a d'intéressant dans votre rapport très détaillé, c'est qu'il n'y a pas de doute sur votre position. Cela ne fait aucun doute, vous êtes en faveur d'un système à payeur unique et à fournisseur unique que le gouvernement soutient et que le gouvernement contrôle.

Quelle est votre position sur l'assurance pour frais dentaires? Croyez-vous que cela devrait être financé par le gouvernement comme dans d'autres pays? Qu'en est-il de l'assurance pour frais d'optométrie? Devrions-nous suivre l'exemple britannique?

Qu'en est-il des médicaments en vente libre? Comme vous le savez, la tendance en Amérique du Nord, comme en Europe, c'est de faire passer les médicaments en nombre plus grand de la catégorie des médicaments d'ordonnance à celle des médicaments en vente libre. À mesure que le public canadien se renseigne sur le coût des médicaments, je crois que la tendance à favoriser les médicaments en vente libre se confirmera.

Enfin, quelle est votre position en ce qui concerne les produits naturels? De nombreux Canadiens en font un élément essentiel de leurs soins de santé. Comme vous le savez, le coût des produits naturels pour les Canadiens est à la hausse, suivant une évolution qui est beaucoup plus marquée que dans le cas des médicaments d'ordonnance. Ce coût s'accroît de plus de 20 p. 100 par année. Comme nous formons un pays qui se caractérise par une certaine diversité culturelle, une bonne part de notre population fait de ces produits son système de soins primaires. Je songe à la médecine chinoise. Nous devons respecter cela. Le gouvernement devrait-il jouer à cet égard le rôle qu'il joue pour ce que nous appelons la «médecine occidentale»? Voilà ma première question.

Ma deuxième question a trait au fait qu'il y a, en Europe, de nombreux gouvernements sociaux-démocrates. Certains d'entre eux sont, de manière générale, beaucoup plus à gauche que les gouvernements que nous avons eus au Canada. Je songe aux pays scandinaves et à l'Allemagne, par exemple. Pourquoi aucun de ces pays - qui ont des programmes sociaux nettement «plus progressifs», pour employer ce terme, que ceux que nous avons au Canada - n'a-t-il choisi la voie que vous recommandez? Je pense surtout à la Suède. Vous recommandez qu'il n'y ait qu'un seul payeur, un seul fournisseur, et que le système soit soutenu par le gouvernement et entièrement contrôlé par le gouvernement. Dans ces pays, il n'est pas question, même de la part des partis les plus gauchistes, d'aller dans cette voie.

M. Welden: Je procéderai par ordre inverse et répondrai à la première question que vous avez posée, pour que nous puissions parler des différents produits que vous avez mentionnés.

Les produits naturels devraient-ils être couverts par la Loi canadienne sur la santé et, ensuite, par les lois provinciales sur la santé? Notre réponse à cette question: jusqu'à un certain point.

À une certaine époque, il n'y avait ni médecins ni dentistes. Celui qui voulait se faire enlever une dent allait chez le barbier, qui prenait ses pinces, vous installait dans une chaise et vous arrachait la dent. Si vous aviez une maladie quelconque, vous vous rendiez chez le chaman du coin ou quelque autre personne. Au fil du temps, nous avons mis au point une forme perfectionnée de soins de santé.

Nous avons également constaté, à mesure que la technologie a gagné en importance et que notre compréhension de la maladie et du bien-être s'est accrue, que nous n'avions pas toutes les réponses. Malgré cela, certains prétendent avoir une réponse. Cela crée un conflit entre les paradigmes. Les professionnels de la médecine peuvent adopter le point de vue suivant: «Je devrais connaître toutes les réponses, car j'ai toute cette technologie à ma disposition, mais ce n'est pas le cas; et cette personne a la réponse à la question, mais je ne veux pas le reconnaître.»

Il doit y avoir fusion des deux schèmes de pensée en un seul processus de soins de santé. Cela voudrait dire que certains éléments de la discipline naturopathique devraient relever du système de santé et être régis par les règles officielles. De même, je crois qu'il faut insister sur la santé et le mieux-être, plutôt que chercher à dire qui a raison et qui a tort.

C'est toute une tâche, car certaines personnes, pour être très franc, un très grand nombre de personnes sont cantonnées dans leurs positions. Si nous ne transcendons pas les lignes de démarcation entre les disciplines de la santé pour envisager celle-ci et la maladie dans leur sens le plus général, si nous ne travaillons pas à fusionner les deux systèmes, les gens abandonne ront l'un ou l'autre et en souffriront.

Je crois que certains cas devraient relever du régime d'assurance-maladie, y compris, pour être très franc, les produits. Je crois qu'il existe de nombreux produits dont on prétend qu'ils font échec à une panoplie de maladies, alors qu'en réalité, celui qui les utilise souffre. Par exemple, à Saskatoon, il y avait un enfant qui avait le cancer des os; malgré les hauts cris de la profession médicale, les parents ont favorisé le système naturopa thique dans une certaine mesure. Cela ne veut pas dire que c'était un bon ou un mauvais choix. Le problème, c'est que les deux systèmes étaient en conflit, et, de ce fait, après plusieurs procès et toutes sortes de procédures juridiques, l'enfant a rendu son dernier souffle. Si les deux systèmes avaient été mieux fusionnés, il y aurait peut-être eu un meilleur résultat.

J'aborderai maintenant la question des médicaments d'ordon nance. Les coûts des médicaments d'ordonnance sont parmi ceux dont la croissance est la plus rapide et la plus importante dans l'industrie des soins. Les fabricants de médicaments en vente libre offrent maintenant toutes sortes de prescriptions avantageuses pour le public nord-américain. Comme nous formons un public qui consomme, si une pilule fait échec au rhume, nous allons l'acheter. Si je peux l'acheter en vente libre, sans ordonnance de la part d'un médecin, alors j'ai la capacité de me traiter moi-même. Ajoutez à cela Internet et le Web, et les gens déterminent eux-mêmes leur diagnostic et leur traitement.

Je crois qu'il devrait y avoir un processus qui permet non pas d'arrêter les choses, mais plutôt de les ralentir pour que nous puissions regarder à nouveau certains des produits qui sont offerts et déterminer pourquoi ils sont offerts.

On me pose souvent la question suivante: «Pourquoi n'arrive-t- on pas à trouver un moyen pour enrayer le rhume?» C'est une industrie qui vaut de nombreux milliards de dollars: si vous trouvez une façon d'enrayer le rhume, tout tomberait au point mort.

Le sénateur Morin: Excusez-moi, vous parlez de réglementa tion, et c'est là une chose différente. Je parle d'appui financier. Dois-je comprendre que vous dites, en ce qui concerne les produits naturels, que vous êtes en faveur d'un contrôle? Je suis tout à fait d'accord avec cela. En outre, ces produits devraient-ils bénéficier d'une forme de soutien financier?

M. Welden: Oui.

Le sénateur Morin: Dites-vous la même chose pour les médicaments en vente libre?

M. Welden: Non. Je crois que, dans le cas des médicaments en vente libre - si je veux acheter de l'aspirine, j'ai les moyens de me procurer de l'aspirine. Est-ce que le gouvernement devrait payer pour cela? Non. Nous ne sommes pas d'accord avec ce concept. Je crois que nous nous soucions de la réglementation de ces produits plutôt que de l'achat de ces produits en question.

Les médicaments d'ordonnance, c'est tout autre chose. Nous croyons qu'il devrait y avoir un certain soutien de la part du gouvernement à cet égard.

Le sénateur Morin: Et qu'en est-il des services de dentisterie et d'optométrie?

M. Welden: La Saskatchewan, c'est l'un des endroits où il y a eu un régime de soins dentaires dans les écoles. À l'époque de l'administration Devine, le programme a été annulé. Il reposait sur une idéologie bien plus que sur une vision pratique des services. Il a été loué dans le monde entier. Il a été mis en place dans certains pays, en Europe et ailleurs, et il a été démontré qu'il permet de réduire de manière générale les coûts liés à la santé. J'y crois. Toute la panoplie devrait-elle être couverte, financée par le gouvernement? Ma réponse est la suivante: non, pas forcément. Devrions-nous établir des programmes, par exemple un program me scolaire de soins dentaires, qui a une incidence sur la santé des enfants? Oui, je crois que le gouvernement devrait être actif à ce chapitre parce que cela favorise la santé à l'âge adulte.

Le sénateur Morin: Pourquoi ne pas aller jusqu'au bout? La Grande-Bretagne applique une assurance dentaire à la population entière, et il y a aussi un régime pour les frais d'optométrie, pour les lunettes, qui est couvert par le gouvernement. Pourquoi n'êtes-vous pas en faveur de cela?

M. Welden: Ce n'est pas que ne sois pas en faveur de cela. C'est plutôt que je me pose la question suivante: le gouvernement est-il prêt à soumettre ces industries, aussi, à une réglementation plus sévère? Quand vous décidez de financer une industrie, êtes-vous prêt, sur le plan politique, à mettre en place les règles nécessaires pour réglementer l'industrie en question?

Le sénateur Morin: Je crois que la profession de dentiste est déjà bien réglementée, même s'il peut y avoir des problèmes. Par contre, il n'y a pas de problème ici en ce qui concerne la réglementation.

M. Welden: J'aurais tendance à n'être pas d'accord avec vous.

Le sénateur Morin: Disons que nous réglementons la profession de dentiste. Iriez-vous jusqu'au bout en décidant qu'il y aurait un financement public à cet égard?

M. Welden: Oui.

Le sénateur Morin: La même chose pour l'optométrie?

M. Welden: La même chose pour l'optométrie, oui.

Le sénateur Morin: Mon autre question a trait aux pays d'Europe.

M. Welden: Pourquoi ne l'ont-ils pas fait?

Le sénateur Morin: Oui. Il y a des pays sociaux-démocrates qui sont très avancés, et qui sont nettement plus progressifs que le Canada en ce qui concerne les programmes sociaux. Nous n'avons jamais eu de gouvernement social-démocrate au Canada. Aucun de ces pays n'a recommandé ce que vous recommandez ce matin.

M. Welden: Avant 1962, il n'y avait pas d'assurance-maladie. Personne ne l'avait recommandée. De fait, personne n'en avait parlé. L'innovation provient de gens qui proposent des idées nouvelles et des concepts nouveaux. Peut-être n'y ont-ils jamais pensé. Je ne saurais vous dire pourquoi, car je ne viens pas de l'un de ces pays.

Est-ce une idée de la gauche? Je ne crois pas que ce soit une question de gauche ou de droite. Je crois que c'est une idée qui soulève la question suivante: les gens passent-ils avant les profits? Si c'est là un principe de la gauche, alors vous devriez peut-être le voir comme étant une idée de la gauche. Faut-il un gouvernement social-démocrate pour adopter cela? Je ne crois pas qu'il faille que ce soit un gouvernement social-démocrate. À mon avis, il faut que ce soit un gouvernement qui se soucie de ses citoyens plus qu'il ne s'en fait pour les grandes sociétés et les desseins des grandes sociétés.

Ce n'est pas parce que personne ne l'a fait avant qu'il ne faut pas le faire. Le système actuel ne fonctionne pas, alors quels sont les éléments qu'il faut corriger? Quels éléments importe-t-il de corriger pour que le système fonctionne? Le remplace-t-on simplement par une chose dont on sait qu'elle ne fonctionne pas aussi bien? Les gens peuvent vanter autant qu'ils veulent les vertus du système américain, mais il demeure qu'il ne fonctionne pas si bien.

Le sénateur Morin: Je suis d'accord avec vous.

M. Welden: Si cela ne fonctionne pas, alors nous devrions peut-être envisager quelque chose de tout à fait différent. C'est ce que nous proposons.

Le sénateur Morin: Merci beaucoup. Vous êtes très clair.

Le sénateur Pépin: J'aborderai la question d'un autre point de vue. Si vous le permettez, je serai l'avocat du diable. Une de vos recommandations consiste à mettre sur pied des équipes pluridis ciplinaires de soignants. Vous dites, et je suis d'accord avec vous, que les équipes pluridisciplinaires sont essentielles au modèle de soins primaires.

Je sais que vous avez un syndicat qui est très fort. Je suis originaire d'une province où les syndicats sont très forts. Je suis d'accord avec la recommandation. J'appuie également votre façon de soutenir les travailleurs, par exemple les infirmières. J'ai toujours soutenu les infirmières au moment où elles faisaient la grève pour obtenir de meilleures conditions de travail.

De votre point de vue, en tant que syndicat, si nous avons tous ces gens qui travaillent ensemble... comment allez-vous organiser cela et comment allez-vous être capable de vous assurer qu'ils travaillent tous dans de bonnes conditions? À l'heure actuelle, ils travaillent dans de plus petites équipes. Je suis sûre que vous y avez pensé. Est-ce que cela sera facile pour tous ces gens qui travaillent ensemble - les patrons, les dirigeants et les travailleurs?

M. Welden: Je suis infirmer de métier et depuis le tout début de ma carrière, je suis membre du SCFP. Je n'ai jamais fait partie du SUN, l'organisation, le syndicat qui représente le personnel infirmier en Saskatchewan.

Là où j'ai travaillé, le syndicat représentait tout le monde sauf l'administrateur. S'il y avait un médecin, le médecin était représenté. S'il y avait un psychiatre ou un psychologue, il était représenté, lui aussi. L'unité de négociations englobait tout le monde.

Ce n'est qu'au moment où je suis devenu délégué du SCFP et que j'ai commencé à travailler dans le secteur de la santé que j'ai pris conscience du fait q'il y avait une hiérarchie dans le domaine de la santé. Je ne m'étais jamais rendu compte du fait qu'il y avait les médecins, puis ensuite les infirmières et ensuite les techniciens et, enfin, le reste de la plèbe. Je ne peux comprendre cela. Je ne peux comprendre comment un système peut s'établir en fonction des études et des fonctions et de la supériorité. Il n'est pas étonnant de voir qu'il ne fonctionne pas.

À l'endroit où je travaillais auparavant, personne ne s'estimait supérieur à celui qui se trouvait à ses côtés. Il pouvait s'agir d'une aide diététicienne, d'une aide-ménagère ou d'un psychologue. Quand les membres de l'unité se réunissaient, tous étaient présents. Si l'unité n'était pas nettoyée correctement, cela avait une incidence sur les résidents. Si l'aspect diététique ne fonctionnait pas convenablement, cela avait une incidence sur la santé des résidents. Si le reste de l'équipe n'en était pas conscient ou ne l'était qu'en partie, cela avait une incidence sur la santé des résidents.

Une des modifications qu'il faut apporter aux soins afin que ceux-ci fonctionnent mieux et aboutissent à un meilleur traitement des malades, des consommateurs et des résidents, c'est que les équipes doivent mettre de côté la hiérarchie et commencer à travailler ensemble à partir de fondements plus égalitaires. Aucun élément de l'équipe des soins ne peut faire cavalier seul. S'il n'y a pas de cuisinier, il n'y a pas de repas servis. Chaque discipline fait partie intégrante de l'ensemble. Par contre, nous devons prévoir une certaine coordination à des tâches. Comment? Voilà la question qu'il faut impérativement régler.

Le sénateur Pépin: Je suis sûre que vous y pensez. Vous avez le syndicat d'un côté et l'administration de l'autre. Vous allez être très puissant.

Le sénateur Keon: Je tiens à vous remercier aussi de venir comparaître devant le comité.

Monsieur Welden, vous proposez un concept intéressant qui a été proposé déjà à maintes reprises, soit que l'universalité des soins s'applique à la série complète des soins de santé qui seraient financés par le gouvernement. Je crois que c'est ce que vous avez dit.

Bien sûr, comme vous le savez, à l'heure actuelle, le financement des soins de santé provient de l'État à raison de 70 p. 100 environ, et du secteur privé, dans une proportion d'environ 30 p. 100. Cela représente à peu près 5,8 p. 100 de notre PIB. D'autres personnes ont déjà fait cette proposition, et quand nous leur avons demandé quelles en seraient les consé quences financières, leurs réponses se résumaient plus ou moins au fait que la mise en place d'une telle proposition ferait augmenter jusqu'à 12 p. 100 la proportion du PIB dont il est question et que cela ferait doubler les sommes d'argent que verse actuellement le gouvernement.

Croyez-vous que cela serait politiquement acceptable au Canada?

M. Welden: Si les choses sont faites correctement, oui. Je ne crois pas qu'on puisse affirmer que la population canadienne, par la voie des impôts qu'elle verse au gouvernement, prendra en charge subitement les soins de santé et les financera entièrement. Il doit y avoir une analyse exhaustive du système de santé et une définition réelle des soins de santé. Si vous posez à 30 millions de Canadiens la question suivante: que sont les soins de santé? Vous allez probablement obtenir 30 millions de réponses diffé rentes. Ce que nous essayons de faire valoir, c'est que les soins de santé ne représentant pas en eux-mêmes un système. Il s'agit de plus que d'une simple visite à l'hôpital ou chez le médecin.

Prenons un exemple: en Saskatchewan, 30 p. 100 des gens qui recourent à la banque alimentaire de Regina sont des enfants. Si vous ne réglez pas ce problème, vous n'allez pas régler les problèmes qu'ils vivent en ce qui concerne la santé.

Quand nous parlons d'un système de santé complet à financement intégral, nous soulignons qu'il faut envisager l'état de santé du pays dans son ensemble, phénomène encore plus global.

Peut-on faire cela du jour au lendemain? Nous ne le croyons pas. Peut-on le faire tout court? Je crois que c'est possible. L'élément qui nous distingue du reste de l'Amérique du Nord, c'est le fait que nous prenons soin de nos voisins. Nous nous soucions de nos voisins. C'est une question de volonté politique, et je crois que la population suivra le mouvement. Je ne sais pas si j'ai répondu à votre question.

Le sénateur Keon: Non, vous ne l'avez pas fait. Je ne vous jette pas la pierre. Je crois que si vous me l'aviez posée à moi, je n'y aurais pas répondu moi non plus.

C'est un phénomène très intéressant. Les gens ne cessent de préconiser cette solution générale, et il serait intéressant d'en exposer simplement les éléments et que quelqu'un cherche à se faire élire en affirmant: Je vais porter les dépenses en santé à 12 p. 100 du PIB et de vais doubler le financement gouverne mental dans le domaine de la santé.

M. Foley: Je vous demanderais de vous reporter au premier paragraphe de la page 6, où nous établissons une comparaison des coûts entre le Canada et les États-Unis.

Cela dit, Tom est prêt - il va essayer de répondre à votre question. Si John ne veut pas y répondre, peut-être que Tom le fera.

M. Graham: Je crois qu'il est politiquement possible de vendre aux gens le projet dont vous venez de parler. Quand nous parlons de soins de santé, nous parlons du fait que le gouvernement n'a pas les moyens de financer entièrement les soins de santé. Puis, nous disons qu'il faut mettre cela entre les mains du secteur privé. Les gens vont obtenir des soins de santé, d'une façon ou d'une autre. Ils vont vendre leur maison ou ils vont se rendre à la banque pour contracter un emprunt. S'ils sont obligés d'aller dans une clinique privée, par exemple, une clinique à l'américaine, ils vont faire ce qu'il faut pour assumer les frais du service donné.

Je crois que l'essentiel, c'est de commencer à l'expliquer. Il me semble qu'il y a ici un manque de logique. Nous n'avons pas les moyens de nous payer des soins de santé, si bien que nous allons privatiser. Nous allons mettre cela entre les mains du secteur privé. Qui, alors, sont les gens qui achètent les soins dans le secteur privé?

Je crois qu'il faut aborder cette question avec un peu plus d'honnêteté. Ce qu'il faut dire, c'est que la facture, c'est nous qui la payons - les citoyens individuels du pays. Est-ce que nous la payons collectivement? Sinon, est-ce que nous espérons ne pas devenir malades ou devoir déclarer faillite si jamais cela arrive, parce qu'il n'y a pas de système public?

Le coût des soins de santé viendrait au premier rang parmi les causes de faillites aux États-Unis. Les gens deviennent malades, mais ils n'ont pas l'assurance qu'il faut. Ils vendent leur maison, ils s'endettent, puis ils font faillite.

Je crois que le message doit être communiqué un peu plus clairement. Il est politiquement possible de faire cela, de dire qu'il faut payer des impôts un peu plus élevés. Il n'y a pas un très grand nombre de personnes qui ne se procureraient pas une assurance habitation dans l'éventualité d'un incendie ou d'un autre incident. Bien sûr, les gens paieraient pour cela. Vous n'allez peut-être jamais en avoir besoin, mais vous le payez parce qu'il est plus facile de verser 600 $ par année en assurance-habitation, que de verser 100 000 $ pour une nouvelle maison, parce que vous n'aviez pas d'assurance.

Nous concevons donc les impôts que nous versons pour financer les soins de santé comme, certainement, des primes d'assurance. Voilà peut-être la réponse politique à la question.

Oui, je crois que cela est possible. Cela n'est pas possible si on envisage ce qui est prévu avec le projet de loi 11 en Alberta. Si on le dit clairement: les consommateurs vont payer pour les soins d'une manière ou d'une autre, alors il faut se demander: pourquoi ne pas coopérer? C'est alors un projet qui se vend bien sur le plan politique.

M. Welden: Je serais disposé à être le candidat qui fait valoir ce projet si vous pouvez trouver un parti qui est prêt à l'inscrire à son programme.

Le président: Je vous remercie tous d'être venus. Nous apprécions le temps que vous prenez pour vous joindre à nous. Nous accueillons ainsi plusieurs de vos collègues, comme vous pouvez l'imaginer, pendant nos pérégrinations.

Honorables sénateurs, notre prochain témoin est Mme Jodi Blackwell, directrice de la recherche et des opérations à la Chambre de commerce de Saskatoon. Cela nous réjouit d'accueil lir un groupe du monde des affaires.

Je vous demanderais de présenter vos deux collègues, de citer les points saillants de votre exposé, puis nous aurons le plaisir de discuter avec vous.

M. Kent Smith-Windsor, directeur général, Chambre de commerce de Saskatoon: Monsieur le président, si vous le permettez, je vais m'occuper des présentations. Ensuite, avec votre permission, je tirerai ma révérence pour aller assister à une autre conférence médiatique. Toutefois, je serai probablement revenu à temps pour la séance de questions.

Avant que je ne présente mes collègues, permettez-moi de vous remercier, au nom de notre organisation, de l'occasion que vous nous offrez de présenter nos vues à votre comité aujourd'hui.

Permettez-moi de présenter d'abord M. Dave Dutchak, président de la Chambre de commerce de Saskatoon, notre président-directeur général, qui est élu. Dans la vie de tous les jours, M. Dutchak, outre le fait de consacrer une part importante de son temps et de ses moyens au mouvement de la chambre de commerce, fait valoir les projets d'amélioration de la situation relativement à son travail chez MD Ambulance.

Permettez-moi de présenter Mme Jodi Blackwell, notre directrice de la recherche et des opérations. Son exposé repose sur un projet dans lequel la chambre investit depuis trois ans: nous discutons de la façon de changer la mentalité des gens en ce qui concerne les possibilités du domaine de la santé au Canada. Merci beaucoup.

Mme Jodi Blackwell, directrice de la recherche et des opérations, Chambre de commerce de Saskatoon: D'abord, j'aimerais, à l'instar de M. Smith-Windsor, vous remercier de l'occasion qui nous est offerte de nous adresser à votre comité et de vous faire part d'idées, d'efforts et d'aspirations qui occupent en partie la Chambre de commerce de Saskatoon.

Premièrement, nous souhaitons vous féliciter des efforts que vous déployez pour relever le niveau du débat autour de la question, en examinant le système de santé canadien. Comme vous le savez très bien, j'en suis sûre, les citoyens de la Saskatchewan on une grande passion pour cette question, que nous avons véritablement à c9ur.

Comme nous l'indiquons dans notre mémoire, notre chambre reconnaît les occasions importantes qui se présentent à nous dans le domaine de la recherche sur la santé et a réuni un groupe de personnes dévouées, passionnées et novatrices provenant de divers horizons. En travaillant ensemble, nous avons pris conscience de la nécessité d'élaborer un modèle dynamique fondé sur des partenariats stratégiques afin d'encourager une culture propice au changement qui permet d'échafauder des stratégies pour tirer parti des occasions remarquables qui se présentent avec l'évolution rapide des technologies de la santé et l'essor incroyable des connaissances sur la santé.

Au Canada, nous nous trouvons devant une occasion d'agir tout à fait incroyable; nous devons prendre les devants et aspirer d'être à nouveau des chefs de file mondiaux dans le domaine de la santé.

De même, nous faisons face à un choix très important - et il y a bel et bien un choix que nous devons faire à cet égard: nous devons être soit des consommateurs de la recherche médicale, des services médicaux et des possibilités médicales, ce qui suppose certaines dépenses, soit des producteurs des services, recherches et occasions en question. Et cela comporte des avantages et des profits. La décision nous appartient, et le temps de décider est venu. Dans l'arène mondiale, la vitesse compte vraiment.

Grâce aux efforts du comité des possibilités dans le domaine de la santé de la Chambre de commerce de Saskatoon, sous la direction de M. Dutchak, nous avons réussi à conscientiser les gens et à débattre de diverses questions liées à la santé.

La raison d'être principale du comité est de signaler et de favoriser les possibilités en ce qui concerne les services commerciaux, l'éducation, la R-D des services de santé et la place de ceux-ci, pour Saskatoon.

Un des instruments que nous avons employés pour atteindre ce but, est la 2020 Health Vision Conference. Nous avons organisé cette conférence pour la première fois l'an dernier. La deuxième conférence annuelle aura lieu les 19 et 20 novembre, ici à Saskatoon. Nous proposons un programme complet de conféren ciers locaux, nationaux et internationaux qui mettront en lumière les possibilités de développement économique que présente le secteur de la santé.

J'ai apporté à votre intention certains renseignements sur la conférence. Je crois que nous avons adressé une invitation aux membres du comité pour qu'ils puissent assister à la prochaine conférence, et nous serions très heureux de vous y voir.

Pour ce qui est du comité chargé des possibilités dans le domaine de la santé, eh bien, le comité lui-même se compose de membres de notre chambre de commerce, du Saskatoon District Health, de l'Université de la Saskatchewan, de la Regional Economic Development Authority et d'entreprises locales. Ces gens poursuivent les occasions possibles d'élaborer de nouveaux modèles de partenariat. Nous sommes à la recherche de modèles qui soient adaptables et dynamiques, de modèles qui profiteront aux Canadiens aujourd'hui comme à l'avenir.

En recherchant de nouveaux modèles de partenariat, nous avons accompli des progrès considérables dans l'édification de relations mutuellement bénéfiques avec notre communauté autochtone. La Saskatchewan se trouve avoir une occasion importante, avec une population autochtone en croissance, et nous nous engageons à travailler de concert avec les Autochtones et les organisations autochtones à nous assurer qu'ils jouissent de perspectives réjouissantes dans notre province.

Nous allons travailler de concert avec les leaders autochtones, qui souhaitent être inclus dans l'élaboration des systèmes de prestation de santé pour leur peuple.

À la chambre de commerce, nous sommes tout à fait convaincus que la structure modifiable des partenariats dans le domaine de la santé constituera le fondement sur lequel nous pourrons cultiver de solides relations. Nous devons fournir le leadership qui permet de reconnaître l'évolution du système de prestation des soins de santé et tirer parti des nombreuses occasions qui se présentent. Ce n'est pas en continuant d'accroître le financement que nous allons y arriver. Nous devons aspirer au changement.

Pour atteindre ce noble objectif, objectif réalisable à notre avis, nous devons travailler ensemble. L'union fait la force.

Nous recommandons la création d'un cadre d'action qui encourage et favorise les partenariats solides à l'intérieur comme à l'extérieur des systèmes actuels. Nous devons respecter le fait que les Canadiens soient en faveur de soins de santé financés grâce aux fonds publics; toutefois, en même temps, nous devons adopter une approche proactive, et non pas réactive.

Nous devons avoir le courage d'aller de l'avant et de créer des modèles plus adaptables, qui ont la capacité de changer avec la croissance marquée des connaissances en matière de santé qui s'amène.

Nous sommes prêts à répondre à toutes vos questions.

Le président: Je vais commencer; j'ai deux questions. La première se rapporte en quelque sorte à un fait. L'autre est une question d'interprétation.

Nous avons eu droit hier à un exposé très intéressant de la part de M. Friesen, qui dirige un comité au nom du ministre responsable de Diversification de l'économie de l'Ouest.Participez-vous à cette démarche? Faites-vous partie de ce groupe?

Mme Blackwell: Nous arrivons justement d'une réunion tenue ce matin. Nous avons un groupe très informel de gens qui se réunissent et qui sont très passionnés à ce sujet, y compris des gens de DEO - comment vous l'expliquer?

M. Smith-Windsor: Notre groupe informel participe très activement au modèle Friesen. En fait, les travaux de Jodi l'amènent à s'occuper des discussions qui se tiennent à Saskatoon.

Un des points de décision auxquels nous faisons face - au moment où se présente l'occasion, très prometteuse, de construire un noeud de réseaux de recherche dignes de ce nom, si vous me permettez d'employer le terme, partout dans l'Ouest du Canada -, c'est qu'il faut la patience nécessaire pour cultiver les relations en question. Dans un contexte où la vitesse prime, une partie du travail du groupe informel consiste à déterminer comment Saskatoon se structure pour être favorable aux partenariats et être prête quand les autres seront prêts.

Nous avons déjà entamé une partie de ce travail, et je soupçonne que Jodi, pour une assez grande part, en sera l'auteur.

Le président: Peut-on conclure que vous appuyez sans réserve le projet de M. Friesen? Nous essayons simplement d'obtenir des échos. Nous avons eu droit à un excellent exposé de sa part. Vous faites partie des groupes dont il souhaite, je présume, avoir l'appui. Appuyez-vous ce qu'il fait?

M. Smith-Windsor: Je pourrais demander à M. Dutchak de répondre à la question, avec son propre niveau d'enthousiasme.

M. Dave Dutchak, président, Chambre de commerce de Saskatoon: L'automne dernier, j'ai assisté à une conférence qui était parrainée en partie par DEO, la conférence de Kansai, sur un processus de réseautage pour le domaine de la santé. La ville de Kobe, au Japon, a pris des mesures énergiques et a créé un «parc de la santé», et collabore, comme Kent l'a mentionné, aux dimensions de la recherche, de la clinique et du commerce. Ces trois éléments sont ce qui motivent notre démarche. Notre vision, c'est qu'il existe de nombreuses occasions qui peuvent être offertes partout dans le monde, occasions que d'autres entrevoient comme réalisables, et les soins de santé représentent un élément économique et non seulement une fonction qui consiste à protéger et à servir les gens.

M. Smith-Windsor: Oui, nous débordons d'enthousiasme.

Le président: «Partenariat», voilà le mot à la mode au tournant du XXIe siècle; il sert dans toutes sortes de contexte. J'ai remarqué que vous avez employé le terme à plusieurs reprises. Vous parlez de partenariats dans le domaine de la santé; vous parlez d'une vision fondée sur le partenariat.

Pouvez-vous expliquer cela pour que cela ne soit non plus un slogan, mais quelque chose que je peux saisir concrètement?

M. Smith-Windsor: En ce moment même, il y a un exemple patent qui fait l'objet de négociations entre Saskatoon District Health et le collège médical de l'Université de la Saskatchewan. Des relations semblables sont envisagées pour Calgary et Edmonton, et on commence maintenant à parler de la manière d'aller même au-delà de cela.

Ce sont des discussions très fragmentaires. Ce que nous essayons de démontrer, c'est une chose que le monde des affaires met à contribution, la compréhension de relations axées sur la collaboration. Nous explorons la situation pour voir s'il est possible d'établir des avantages réciproques.

Je crois que c'est là l'ingrédient que nous mettons dans la sauce. Je vous en ai donné un exemple. Il en existe plusieurs.

Le président: Quand vous faites cela, quelqu'un doit avoir le dernier mot. Est-ce l'entreprise qui a le dernier mot, est-ce l'université qui a le dernier mot ou encore est-ce la clinique communautaire?

M. Smith-Windsor: Tout le monde gagne. Cette équipe n'a pas de capitaine, car tout le monde à un rôle à jouer.

Prenez pour exemple un orchestre symphonique. Le nôtre, toutefois, n'a pas de chef d'orchestre. Tout ce que nous savons, c'est que nous voulons faire de la musique. Nous savons que les trombones mènent le bal une fois de temps en temps, et ensuite que les violons prennent le relais. Nous savons qu'il faut disposer les chaises d'une bonne façon et que personne ne peut être la vedette tout le temps.

J'estime que notre rôle s'apparente à celui du régisseur au théâtre. Le comité des possibilités dans le domaine de la santé s'inscrit, de fait, dans la structure de la Chambre de commerce de Saskatoon, mais j'estime que nous sommes le régisseur de la chose, plutôt que le capitaine de l'équipe.

M. Dutchak: Il y a trois ans, à l'époque où M.D. Ambulance est entré en jeu?

Le président: Permettez-moi de vous interrompre pour un instant. Votre entreprise fournit le service d'ambulance à la Saskatoon Regional Health Authority, n'est-ce pas?

M. Dutchak: Au Saskatoon Health District, oui, c'est un travail à contrat. Et c'est cette culture fondée sur le partenariat, cette compréhension du fait qu'un partenaire doit apporter des avantages de part et d'autre pour être justifié et exister, qui, selon moi, est apparue à la table au moment où j'ai commencé mon travail à la chambre de commerce.

Le processus, en ce moment - c'est une excellente question parce qu'il s'agit d'une culture très virtuelle en ce moment. La culture du partenariat croît d'une façon tout à fait innocente et très saine.

Le partenariat doit-il se résumer à autre chose qu'à une structure à un moment donné? Peut-être que oui, peut-être que non. Par contre, les trois entités, aux échelons les plus élevés, notamment celui de président de l'Université, doivent se réunir et dire: «Créons cette chose.» C'est encore une «chose», puisque nous sommes en train de la définir.

Nous voulons créer des services de santé de calibre internatio nal. Nous voulons ouvrir nos portes. Dans le contexte de la Loi canadienne sur la santé, nous voulons que la santé devienne un moteur économique, et non seulement un élément pour protéger et soutenir les gens, là où nous pouvons et au moment où nous pouvons le faire.

Voilà notre mission, nous allons rechercher de par le monde les idées qui permettront de la concrétiser, de déterminer notre place dans cette équation. Du fait de la relation virtuelle dont je parlais, il y a de très bonnes choses qui se passent, et nous sommes respectueux de cette culture.

Le sénateur Morin: J'ai parcouru votre document, qui traite du comité des possibilités dans le domaine de la santé et expose certains objectifs clairs, mais d'après ce que j'ai vu, vous n'avez pas encore de programme précis. Ai-je raison de tirer cette conclusion?

Avant de répondre, permettez-moi de vous poser une deuxième question.

Nous avons tous été impressionnés par l'exposé de M. Friesen. Je connaissais déjà son travail parce qu'il m'avait transmis des renseignements sur l'établissement de centres d'excellence partout dans l'Ouest du Canada, non seulement pour la recherche fondamentale, mais aussi pour les essais cliniques et la recherche sur les systèmes de santé, pour être sûr que la prestation des soins de santé s'améliore - en mettant l'accent davantage, et à juste titre, sur les systèmes d'information sur la santé, là où se pose l'une des difficultés les plus importantes auxquelles nous faisons actuellement face en ce qui concerne notre propre système de santé.

Dans l'Ouest du Canada, il y a tout un mouvement à cet égard, qui pourrait certainement profiter au reste du pays, qui accentue la commercialisation de toutes les découvertes et innovations.

Ce que je n'arrive pas à comprendre, c'est pourquoi vous ne poussez pas dans le même sens, dans le sens des travaux de M. Friesen, plutôt d'opter pour un chemin différent. Cela me semble être un programme à ce point prometteur, programme qui profitera à tout l'ouest du Canada aussi bien qu'au reste du pays. Il fera 9uvre de pionnier et servira de modèle au reste du pays. Les questions que vous avez mises en lumière pour nous hier sont des questions auxquelles fait face le reste du pays. Personne ne s'y attache actuellement avec autant de clarté et de fermeté que le groupe que nous avons entendu hier matin.

M. Smith-Windsor: Pour ce qui est du travail lié au projet Friesen, nous avons collaboré de près à cela et avons essayé de nous faire les défenseurs des relations en question. Il y a un autre terme qui est souvent employé, celui de «silos». Construire des «silos poreux», voilà une activité à laquelle excellent les entreprises; ce n'est pas toujours le cas des établissements.

Nous les avons aidés à mettre en place une culture qui leur permet de traiter avec des expériences tout à fait novatrices en ce qui concerne la structure. La question qui se pose est la suivante: comment édifier un système de santé de calibre international dans les limites conceptuelles de la Loi canadienne de la santé, dans un monde qui connaît une évolution importante en ce qui concerne la technologie et les attentes des Canadiens en matière de santé? Par conséquent, oui, le modèle Friesen est important.

Nous avons des exemples précis à donner. Avec le concours du gouvernement fédéral et du gouvernement provincial, et un excellent leadership de la part de l'Université de la Saskatche wan... je veux évoquer le projet de synchrotron. Notre toute première conférence sur la santé a débouché sur un protocole d'entente conclu entre les responsables du synchrotron SPring-8, à Kobe, et les responsables du synchrotron CLS de l'Université de la Saskatchewan. L'importance de cela, c'est qu'il y a trois noeuds qui aspirent à exploiter les possibilités du synchrotron pour ce qui est de l'imagerie médicale - un au Japon, un à Grenoble, en France, et un ici, à Saskatoon.

Les gens de SPring-8 sont venus ici parce qu'il y avait la conférence sur les possibilités dans le domaine de la santé qui a été convoquée sous notre direction. Les gens de Grenoble sont venus ici une semaine plus tard; ils ne pouvaient assister à la conférence. Il y a là une occasion importante.

Nous étudions actuellement la possibilité d'établir des liens en Angleterre, pour une occasion semblable. C'est un territoire que nous pouvons occuper pour l'Amérique du Nord, si nous choisissons de le faire. Ce n'est qu'un exemple.

M. Dutchak est très canadien: il a de la difficulté à vanter ses propres mérites. Il était à Kobe pour s'occuper d'une technologie dernier cri prévue pour les interventions en situation d'urgence - une technologie sans fil pour les protocoles en matière de santé. Il explorait les possibilités de partenariats en rapport avec cette technologie.

Nous avons eu hier après-midi une réunion avec les gens de TRLabs pour parler d'un projet qui pourrait être transféré en Asie. Il s'agit ici de possibilités mondiales que nous essayons d'exploiter. Par contre, le monde bouge rapidement, et l'occasion en Asie n'attendra pas Saskatoon ou la Saskatchewan ou les avis réfléchis du groupe Friesen.

Si nous attendons que les structures apparaissent, nombre des occasions dont il est question seront proposées à quelqu'un d'autre.

Le sénateur Morin: Les exemples que vous donnez sont très importants; il est dommage qu'ils n'aient pu faire partie du rapport. J'avais l'impression que tout cela était théorique, je suis donc heureux de constater que c'est là.

La question du synchrotron est très importante. Soit dit en passant, le Canada est extrêmement faible dans le domaine de l'imagerie et des technologies de ce genre. Il n'y a presque rien qui se passe de ce côté-là au Canada. Je suis donc très heureux de voir que vous décidez de prendre les rênes de l'affaire ici, et avec raison. Je suis très heureux de voir que Saskatoon prend les rennes de l'affaire ici.

Dans votre mémoire, sous la rubrique concernant lespartenariats avec la communauté autochtone, la partie III... avez-vous quelque chose de précis à dire à ce sujet?

M. Smith-Windsor: Faire que la confiance s'accroisse. Vous voulez que je vous parle d'un projet précis, mais il s'agit ici de relations assez fondamentales.

Notre premier vice-président s'appelle Lester Lafond, qui travaille à la chambre depuis un très grand nombre d'années. M. Lafond a couru des risques énormes en sortant de la communauté pour pressentir le monde des affaires, le nôtre. Il a participé - aux côtés de Ron Kocsis, de Kocsis Transport, qui fait également partie de notre conseil d'administration - à l'établissement du Saskatoon Aboriginal Employment and Busi ness Opportunities Partnership. Nous détestons le nom, mais il a l'avantage de décrire ce que fait le groupe.

C'est ce genre de relations qui doit être établies. Vous entendez dire que des gens, étant donné certains éléments qui caractérisent la santé de la communauté autochtone, aspirent à faire de la recherche. Avons-nous même abordé les aspirations de la communauté autochtone pour ce qui est de leur participation aux systèmes de santé en question?

M. Dutchak a travaillé dur pour structurer les relations en fonction de la sécurité des protocoles de formation dans le cadre d'un partenariat tout à fait novateur entre lui-même et le Conseil tribal de Saskatoon. Tout se construit sur les mêmes fondements: la confiance.

M. Dutchak: À la suite de notre conférence, l'an dernier, l'établissement d'un centre de santé et de services de néphrologie dans notre communauté a été annoncé. Du côté de la recherche sur les reins et les greffes, la grande majorité des problèmes et des greffes concerne les communautés autochtones. Pendant que nous construisons ce centre d'excellence mondial dans les diverses disciplines en question, la composante rénale peut être un chef de file mondial pour cette recherche et pour la communauté autochtone.

Une fois le train parti dans une direction particulière, en tant que partenaire à bord du train, nous constatons qu'il y a des occasions de charger ce qui doit être expédié. Toutefois, si les partenaires ont quitté le train, il n'est pas possible de tirer parti de ces occasions. C'est ce que nous avons mis en 9uvre depuis notre conférence. Notre travail local a consisté à ainsi cultiver les projets et faire des annonces.

Le sénateur Keon: Monsieur Dutchak, j'ai remarqué que vous avez utilisé l'expression «parc de la santé». Faisiez-vous allusion à un parc des sciences de la santé ou à un parc industriel des sciences de la santé comme ceux que nous avons d'abord vus autour d'Oxford et de Cambridge, en Angleterre - il y en a aussi qui ont été établis en Amérique, et il y en a quelques-uns au Canada - où, essentiellement, les scientifiques de facultés de médecine et d'hôpitaux s'associent à des partenaires industriels du monde des affaires, qui fournissent les parcs industriels en question pour la mise en marché des produits et ainsi de suite?

Est-ce la contribution à une sorte d'alliance occidentale des sciences de la santé que vous envisagez? J'essaie seulement de cerner un peu votre projet.

M. Dutchak: Je vais d'abord répondre, puis mon collègue peut ajouter quelque chose à ce que j'aurai dit.

Les deux éléments sur lesquels nous devons insister sont les suivants: avoir le courage d'aller de l'avant dans le dossier de la santé et comprendre la marque. Quels sont les éléments de la marque de la santé qui peuvent présenter des occasions mondialement, donner aux gens des solutions provenant du Canada, de la Saskatchewan, de Saskatoon?

Les dispositions des cultures et des parcs de la santé sont des éléments intégraux de la mondialisation du projet. Quand les gens de l'extérieur jettent un coup d'oeil et disent: «Y a-t-il là tous les joueurs qui devraient faire partie de l'équipe et la culture nécessaire pour que les choses se fassent?» nous devons être en mesure de répondre «oui». Nous ne pouvons avoir une mentalité des ligues mineures.

C'est un concept dont nous avons parlé pas plus tard que ce matin. Nous avons bien le courage qu'il faut pour essayer d'entrevoir la signification de cela pour notre communauté, élément de la scène canadienne. Nous n'avons pas encore bien défini cela, mais nous avons cherché énergiquement à le faire dans le contexte de partenariats.

M. Smith-Windsor: Quand notre chambre de commerce a commencé à traiter de la santé, nous étions en train de refaire notre plan stratégique en tant que chambre de commerce, du fait que le monde change rapidement et qu'il nous faut impérative ment déterminer comment nous allons changer rapidement nous aussi.

Le défi qui a été présenté à notre groupe, c'est que si nous nous trouvions à Baltimore, nous devions parler de l'hôpital de l'université Johns Hopkins comme étant un facteur économique clé. Comme nous avons un système de santé grâce aux deniers publics, nous, dans le monde des affaires, avons tendance à privilégier le côté «coût» de l'équation plutôt que d'explorer les autres occasions possibles. Un parc de la recherche, un centre intégré des sciences de la santé, fait-il partie des occasions en question? Tout à fait. Tout de même, ce n'est pas la seule solution.

Nous voyons aussi en Saskatchewan des possibilités importan tes qui s'articulent autour de projets comme celui du synchrotron, par exemple la Veterinary Infectious Disease Organization et les sociétés de produits nutriceutiques bien réelles qui font des profits ici. Nous croyons que, dans 20 ans, la convergence représentera une occasion importante pour Saskatoon.

Nous souhaitons établir un pont de convergence du savoir pour le XXIe siècle. S'il faut un bâtiment pour cela, ainsi soit-il.

Le sénateur Keon: Le plus grand succès connu dans ce domaine est probablement celui du projet de médecine industrielle à Minnesota, où les responsables ont mené à bien leur projet sans parc industriel. C'est simplement devenu un complexe médical industriel tentaculaire. Je ne crois donc pas que le parc industriel soit une nécessité; tous ne se sont d'ailleurs pas révélés fructueux.

M. Dutchak: À la conférence, l'an dernier, MÊME. Cal Stiller et Bernstein ont parlé de l'idée que nous nous positionnions pour faire partie d'un réseau national. Le Canada a encore devant lui la possibilité d'être un chef de file mondial, tout comme c'était le cas dans les années 60.

Cette année, nous allons accueillir des conférenciers du Medical Alley et de la clinique Mayo à notre conférence. Ils vont traiter des éléments d'un centre de santé de calibre international et nous parler de la collaboration avec nos partenaires nationaux, nos voisins.

Le président: Si je comprends bien, outre le fait d'encourager efficacement le gouvernement fédéral à faire décoller le projet Friesen, non pas au rythme bureaucratique habituel, mais à un rythme nettement plus rapide, vous ne demandez aucune modification particulière de la politique fédérale. Vous avez vraiment le catalyseur sur le terrain; vous dites que cela doit être dirigé localement, ce qui a du sens. Cela doit être assez grand pour couvrir plus d'une province, comme vous le dites, mais la réalité, c'est que vous ne cherchez à obtenir rien de particulier du gouvernement fédéral, sinon pour plus tard, si jamais DEO s'y engage pour aider à réaliser l'infrastructure d'une organisation multiprovinciale. Il n'y a rien de particulier dont vous avez besoin de la part du gouvernement fédéral, n'est-ce pas? Est-ce que je comprends bien?

M. Smith-Windsor: Nous reconnaissons que le taux de changement dans ce domaine sera presque impossible à connaître, de sorte que les structures, à l'avenir, devraient être conçues autour d'un principe: elles doivent être malléables et dynamiques, et non pas rigides. Je crois que c'est là un principe de fonctionnement qu'il faut adopter. Certes, le modèle Friesen le prévoit. Comment susciter des partenariats qui perdureront? Voici la réponse: il faut des gens et de la souplesse, plutôt que des structures rigides.

Le sénateur Morin: S'il existe un domaine dans lequel le gouvernement fédéral peut apporter de l'aide, je crois, c'est la recherche. Comme vous le savez, la part du gouvernement fédéral dans le financement du collège médical n'est pas ce qu'elle devrait être - il n'y a aucun doute là-dessus - et le collège ne vient pas au premier rang parmi les bénéficiaires de fonds. C'est le moins que l'on puisse dire.

Comme vous le savez, il existe une différence régionale de programmes. Certains programmes fédéraux, par exemple les IRSC, comportent un bon volet régional; ce n'est pas le cas d'autres, comme la FCI. Le Programme des chaires de recherche du Canada se situe entre les deux. Étant originaire de Québec, j'appuie vivement les programmes régionaux. Le gouvernement pourrait peut-être aider le secteur de la recherche en ayant des programmes régionaux plus forts. Saskatoon en bénéficierait certainement.

M. Smith-Windsor: Ce sont les meilleurs collaborateurs qui remporteront la palme. Au Canada, les impératifs régionaux sont importants pour bâtir le pays, et nous ne devrions pas les oublier, mais nous devons penser à ceux qui peuvent s'adapter à d'autres cultures, aux occasions qui se présentent en Asie et au Japon.

Un des principaux points forts des Canadiens, c'est le style de négociation plus conciliant, si on le compare à celui de nos bons amis du Sud. Nous devons saisir cette occasion. Si cela veut dire qu'il y aura des projets interrégionaux ou purement régionaux, c'est merveilleux. Tout de même, si nous pensons uniquement au Canada, nous passons à côté de toutes sortes d'occasions.

M. Dutchak: Je crois que le Canada, les partenaires, les gouvernements, fédéraux et provinciaux, doivent envisager le domaine de la santé comme étant un verre à moitié plein, et non pas à moitié vide, et qui coûte beaucoup d'argent et où les dépenses deviennent excessives. Nous n'avons pas encore traité avec une population vieillissante, la technologie, les médicaments et ainsi de suite. Le Japon, par exemple, a habilité ses collectivités: «Préparez-vous à proposer des solutions, et nous allons vous appuyer.» Elles obtiennent des appuis du côté de la R-D, pour les aider à concevoir des solutions dans le domaine de la santé.

Le gouvernement doit dire que le Canada peut devenir un partenaire chef de file mondial des modèles de prestation de services de santé, de la recherche, et nous allons appuyer cette initiative. Nous avons besoin de cet appui, de cette culture qui fait dire: «Allez, fonce.» Nous avons vu cela au Japon, où l'on dispose du plus grand synchrotron qui se trouve dans le monde. De fait, ils en ont un de la taille du nôtre, le petit frère de leur gros. Quand ils concluent avec nous des protocoles d'entente sur l'énergie médicale, voilà quelque chose d'intéressant. Si nous ne profitons pas de cette occasion, nous allons passer à côté. Ce n'est là qu'un exemple.

Le gouvernement doit faire savoir que nous sommes capables de faire cela. Il doit dire: «Proposons des solutions mondiales; soyons prêts à faire des affaires.» Nous avons besoin de ces avantages dont profiteraient nos collectivités, sur le plan financier et clinique, et la recherche aussi, bien sûr.

Le président: Pour terminer, puis-je poser simplement une question de profane? Qu'est-ce que cela fait, un synchrotron?

M. Smith-Windsor: C'est un très bon microscope.

Le président: Merci. C'est le niveau de compétence technique que je suis en mesure de saisir.

Le sénateur Morin: C'est le seul au pays. Y en a-t-il dix dans le monde entier?

M. Smith-Windsor: Il y en a environ quatre, de cette génération. Il existe plusieurs synchrotrons, mais au fil de l'évolution de chaque technologie nouvelle, on se retrouve avec la deuxième, la troisième, la quatrième génération.

Le sénateur Morin: C'est un instrument très unique et très puissant. Qu'il se trouve à Saskatoon, c'est très stimulant.

Le président: Est-il en marche?

M. Smith-Windsor: Il le sera, à compter de 2004. On explore déjà des partenariats. La vitesse compte dans ce domaine. Les gens au Japon font l'expérience de modèles portatifs de synchrotron s aux fins de l'imagerie médicale.

M. Dutchak: Le synchrotron va remplacer l'IRM, tout comme l'IRM a remplacé le tomodensitomètre.

Le sénateur Morin: Mais il coûte plus cher.

M. Dutchak: Bien sûr. Tout de même, voilà la nouvelle génération, et nous en avons un. Je suis sûr que le comité adorerait - et je peux fournir l'ambulance pour s'y rendre - aller à notre université pour y faire une visite guidée.

M. Smith-Windsor: Cela n'est qu'une dimension. Ce projet d'imagerie ne représente que l'une des 40 occasions qui sont associées au synchrotron, dont chacune est à l'avant-garde. Nous n'avons pas parlé du projet de nanotechnologie. Il existe certainement un mouvement en faveur de l'utilisation de la cristallographie (pour les protéines), pour la création demédicaments sur mesure à l'avenir.

Les applications possibles dans le domaine de la santé dépassent l'entendement, et on ne parle encore que de 10 p. 100 du potentiel de ce «très bon microscope».

M. Dutchak: Sony - et j'oublie l'autre qui était là.

M. Smith-Windsor: Kawasaki en a un.

M. Dutchak: Sony faisait des tests au Japon au moment où j'y étais, du côté commercial. Il y a donc d'autres applications, outre la santé.

Le président: Merci d'être là. Je dois dire que votre enthousiasme se communique merveilleusement. Bonne chance.

M. Dutchak: J'aimerais dire qu'en revenant de l'assemblée générale annuelle de la Chambre de commerce du Canada, nous avons lu un de vos articles qui se trouve là, et c'était rafraîchissant d'entendre parler de ce dont nous avons discuté ce jour-là avec nos collègues de tout le Canada.

Le président: Merci beaucoup.

Sénateurs, notre prochain groupe de témoins compteMme Sherry McKinnon, directrice exécutive de la Société d'Arthrite de la Saskatchewan, et Randy Goulden, qui représente l'Association canadienne des loisirs et des parcs également.

Mme Sherry McKinnon, directrice exécutive, Sociétéd'Arthrite de la Saskatchewan: D'abord, au nom de la Société d'Arthrite, je tiens à vous faire part de notre reconnaissance et de vous remercier de me permettre de venir faire part aujourd'hui, ici, de mes observations.

Aujourd'hui, j'aimerais exposer brièvement certaines questions qui touchent l'arthrite, c'est-à-dire les suivantes: le fait que l'arthrite représente une maladie coûteuse et grave; l'importance d'une action rapide quant au diagnostic et à l'éducation, et la mise en oeuvre d'un traitement de la maladie et d'un programme d'adaptation; l'accès aux professionnels de la médecine qui traitent l'arthrite; et l'accessibilité et le coût des médicaments.

Pour commencer, je vais vous donner quelques renseignements sur l'arthrite. Aujourd'hui, plus de 4 millions de Canadiens souffrent de l'une des cent formes d'arthrite qui existent. Une personne sur dix souffre d'arthrose, ce qui représente 2 930 000 Canadiens. Une personne sur 100 souffre depolyarthrite rhumatoïde, ce qui représente 819 000 Canadiens. Une personne sur 1 000 souffre d'arthrite juvénile, ce qui donne 6 300 enfants qui souffrent d'arthrite.

L'arthrite vient au troisième rang pour les médicaments d'ordonnance au Canada. En 1992, les médecins canadiens ont rédigé presque 29 millions d'ordonnances de médicaments contre l'arthrite. L'arthrite vient au deuxième rang pour les médicaments en vente libre. L'arthrite est l'une des raisons qui motivent le plus souvent la consultation d'un médecin au Canada. L'arthrite est la cause d'invalidité la plus courante au Canada.

L'arthrite et les affections musculo-squelettiques figurent parmi les quatre maladies les plus coûteuses au Canada, tout juste derrière les maladies cardiovasculaires et bien en avant, du point de vue des coûts, du cancer et des blessures. L'arthrite et les autres affections musculo-squelettiques coûtent 17,8 milliards de dollars.

L'arthrite est un problème grave et un phénomène en croissance. L'arthrite figure dans les premiers comme cause de maladie, d'invalidité et de recours aux soins de santé. Le taux de fréquence de l'arthrite au sein de la population vieillissante du Canada est sur le point de devenir une question d'une importance capitale.

Honorables sénateurs, le moment est venu de cesser de traiter l'arthrite comme une simple douleur et d'en faire un élément important de notre programme d'action en matière de santé.

La Société d'Arthrite reconnaît l'importance du diagnostic précoce, du traitement et de la mise en oeuvre d'un programme de gestion thérapeutique, et l'impact majeur qu'ils ont sur le fonctionnement et la qualité de vie de personnes souffrant d'arthrite. Une part importante des dommages occasionnés aux articulations par l'arthrite rhumatoïde ont lieu au cours des deux premières années de la maladie, ce qui explique pourquoi le diagnostic précoce et le traitement rapide sont cruciaux. Ces facteurs peuvent contribuer à prévenir des dommages irréparables et d'importantes pertes économiques.

Le président: Au lieu de lire les cinq ou six prochaines pages, pourriez-vous nous présenter les points saillants, car j'aimerais m'assurer que nous aurons le temps de poser des questions.

Mme McKinnon: Certainement.

Le système de soins de santé doit reconnaître l'importance du diagnostic précoce de l'arthrite.

Je tiens à lire les prochains paragraphes, car je crois qu'ils résument une grande partie de ce que j'aimerais dire.

La Société d'Arthrite rêve d'un système de soins de santé où l'on ne renvoie pas une personne chez elle sans lui préciser de quel type d'arthrite elle souffre, et où on ne lui dit pas qu'il n'y a rien à faire. Nous aimerions voir un système où les travailleurs du secteur des soins de santé primaires utilisent une approche proactive et intégrée qui procure au patient l'information et les services de soutien dont il a besoin pour devenir un participant actif du traitement de l'affection.

On ne saurait trop insister sur l'importance de changer l'attitude des fournisseurs de soins de santé primaires. Ils sont aux premières loges, et ils jouent un rôle clé dans le diagnostic précoce de la maladie. Nous devons convaincre ces travailleurs que l'arthrite est un grave problème et qu'il faut réagir avec vigueur.

Il est essentiel d'apprendre aux patients arthritiques à se charger de leur traitement. Compte tenu du fait qu'on s'attend à ce que le nombre de personnes souffrant d'arthrite double au cours des 20 prochaines années, nous devons payer pour résoudre le problème maintenant, ou en assumer les conséquences plus tard.

Le diagnostic précoce influe de façon importante sur les progrès de la maladie, et c'est un point clé. Le repérage rapide permet à un patient de prendre part à un programme de gestion thérapeutique, ce qui est tout à son avantage. Nous savons que la détérioration des articulations peut être évitée si une personne est bien informée sur sa maladie et participe rapidement à un programme de gestion thérapeutique.

Il est important de changer la philosophie actuelle en matière de soins de santé selon laquelle l'arthrite n'est qu'une douleur, et qu'on s'en préoccupera lorsqu'elle deviendra plus grave. Il est important de reconnaître qu'on peut réagir dès maintenant.

En ce qui concerne les services spécialisés, mentionnons, par exemple, que, en Saskachewan, la liste d'attente pour une arthroplastie de la hanche est de 61 semaines.

Nous devons former un plus grand nombre de spécialistes pour traiter l'arthrite, soit des rhumatologues, des chirurgiens orthopé distes, des ergothérapeutes et des physiothérapeutes. L'âge moyen des rhumatologues canadiens est de 50 ans, de sorte que nous devrons composer avec l'usure de l'effectif dans cette spécialité. Le Canada produit environ dix rhumatologues par année. Nous savons que le nombre de personnes souffrant d'arthrite doublera entre maintenant et 2031. Les Canadiens auront donc besoin d'avoir accès à des personnes qui traitent l'arthrite.

Sur le sujet des médicaments, je tiens à signaler que les Canadiens doivent avoir accès aux nouveaux traitements et médicaments pour l'arthrite. Ils permettent d'éviter les blessures aux articulations et des pertes économiques, et ils réduisent les coûts liés aux soins de santé en aidant les gens à jouir d'une bonne qualité de vie et à la maintenir.

J'aimerais aussi parler de la Société d'Arthrite. La société exerce ses activités en Saskatchewan depuis 1949. Notre mandat s'assortit des trois objectifs suivants: trouver une cure pour l'arthrite; aider dès aujourd'hui les personnes qui souffrent d'arthrite et leur famille; et créer des programmes de prévention afin de sensibiliser les gens au lien entre l'arthrite et, disons, les blessures sportives.

Parmi les programmes que nous offrons, nous avons un programme d'autotraitement de l'arthrite. Nous offrons des programmes d'exercice liés à l'arthrite. Nous sommes dotés d'un service d'aide téléphonique et d'un service d'information et de renvoi, de centres de documentation, de groupes de soutien et d'un site Web. Nous avons élaboré plus de 60 dépliants, car il existe 100 différentes formes d'arthrite. Nos dépliants parlent des différents types d'arthrite, des méthodes d'adaptation et des médicaments.

La Société d'Arthrite ne touche pas de financement gouverne mental. Notre société est financée à 100 p. 100 par le public; nous sommes soutenus par la population de la Saskatchewan.

Le président: Merci. Puisque j'ai lu votre mémoire, je crois que vous avez couvert toutes vos grandes questions.

Mme Randy Goulden, directeur exécutif, Associationcanadienne des parcs et loisirs: Laissez-moi commencer par vous féliciter du travail impressionnant que votre comité a fait jusqu'à maintenant. Au nom de l'Association canadienne des parcs et loisirs, je tiens à vous remercier de l'occasion qui m'est offerte de témoigner cet après-midi.

L'Association canadienne des parcs et loisirs est la voix nationale d'un réseau populaire et très dynamique. Nous dirigeons au moyen de partenariats. Nous unissons des gens qui bâtissent des collectivités saines et actives, et nous influons sur le quotidien de tous les Canadiens.

Le mandat de l'ACPL consiste à bâtir des collectivités saines et à améliorer la qualité de vie et l'environnement de tous les Canadiens au moyen d'une collaboration entre nos membres et nos partenaires.

À cette fin, l'ACPL bâtit et maintient des partenariats, et fait la promotion des loisirs à titre d'élément essentiel de la santé et du bien-être des particuliers, des familles et des collectivités. Nous communiquons et mettons en valeur les avantages des parcs et des loisirs, et nous réagissons aux besoins divers et changeants de nos membres.

Au Canada, le secteur des loisirs fonctionne au moyen d'un réseau communautaire de bénévoles engagés qui entretient des liens avec l'ACPL, puisque nos valeurs et nos membres sont les mêmes. L'ACPL joue un rôle directeur clé au sein de ce réseau, car elle sert de lien national entre les collectivités canadiennes et le secteur des loisirs, et elle constitue une voix collective au chapitre des loisirs et des parcs au Canada.

Il est intéressant de signaler le partenariat de l'ACPL avec nos 13 associations provinciales et territoriales des loisirs et des parcs, ainsi que nos 3 200 membres communs, qui sont des directeurs, des gestionnaires et des responsables de la programma tion de ministères des parcs et des loisirs, qui sont des dirigeants clés dans le secteur de l'éducation et dans les secteurs privé et bénévole.

De plus, l'APCL est très fière de ses initiatives stratégiques et alliances avec la Coalition de la vie active, l'Alliance nationale pour les enfants, l'Initiative sur le secteur bénévole et communau taire, la Fédération canadienne des municipalités, Active Living for Canadians with a Disability, et le Centre national de prévention du crime.

Dans le résumé de votre rapport intitulé «Volume quatre - Questions et options», vous énoncez cinq rôles distincts du gouvernement fédéral en matière de santé et de soins de santé. Notre exposé mettra l'accent sur le rôle du gouvernement au chapitre de la santé de la population, car cet aspect est directement lié à notre mandat.

Le gouvernement fédéral affirme qu'un bon système de soins de santé n'est qu'un des nombreux facteurs qui contribuent à la santé des Canadiens. Le modèle relatif à la santé de la population, soutenu par le gouvernement fédéral, est un autre élément clé de notre système de soins de santé permettant d'assurer la santé et le dynamisme des Canadiens et de leurs collectivités.

L'ACPL est un ardent promoteur de l'approche fondée sur la santé de la population. Nous croyons que tous les Canadiens, quels que soient leur âge, leur sexe, leur capacité, leur lieu de résidence ou leur situation socio-économique, devraient jouir d'un accès égal à des activités récréatives et des loisirs de qualité et sécuritaires, qui favorisent la vie active. Les Canadiens qui travaillent, offrent bénévolement leurs services ou participent d'une autre façon dans les domaines des loisirs, des sports, de l'activité physique, des arts, de la culture ou des parcs savent que l'activité ou le programme auquel ils prennent part n'est qu'un moyen d'atteindre des fins plus importantes.

L'ACPL, ses membres et ses partenaires accordent beaucoup d'importance aux avantages qu'une vie active peut offrir à tous les Canadiens. Ses avantages ont été recensés dans une publication que nous avons commandée, qui a été élaborée avec nos partenaires provinciaux et territoriaux, qui s'intitule «Le catalogue des avantages». Je vous ai apporté une version française et une version anglaise du catalogue, à titre de référence, et je les ai remises au greffier. Il est possible d'obtenir des exemplaires supplémentaires auprès du bureau national de l'ACPL.

Le Catalogue des avantages cite des recherches, menées au Canada et ailleurs dans le monde, qui montrent clairement l'impact de la participation à des activités de loisirs, de sports, des activités physiques, artistiques et culturelles et d'autres activités de loisirs thérapeutiques, ainsi que dans les parcs, sur les particuliers et les collectivités. Le catalogue distingue quatre grandes catégories d'avantages que les habitudes de vie et l'environnement perpétuent: les avantages personnels, sociaux, économiques et environnementaux. Ce catalogue s'inspire des meilleures recherches disponibles sur le travail que les gens de notre domaine peuvent faire pour favoriser la santé des particuliers, des familles, des collectivités, des économies et de l'environnement, et regroupe cette information au moyen de 44 énoncés d'avantages ou de résultats.

Ces 44 énoncés s'articulent autour de huit messages clés et ont été élaborés en fonction d'une approche fondée sur la santé des populations. Il s'agit des huit messages suivants: les loisirs et la vie active sont essentiels à la santé personnelle, sont un facteur déterminant de l'état de santé; les loisirs sont essentiels au développement équilibré de l'humain et aident les Canadiens à exploiter leur plein potentiel; les loisirs et les parcs sont essentiels à la qualité de vie, les loisirs réduisent les comportements autodestructeurs et antisociaux, les loisirs et les parcs favorisent le renforcement de familles solides et de collectivités saines; on peut payer maintenant ou payer davantage plus tard, car les loisirs réduisent les coûts liés aux soins de santé, aux services sociaux, aux services policiers et à la justice; les loisirs et les parcs sont des moteurs économiques importants dans vos collectivités. Les parcs, les grands espaces et les zones naturelles sont essentiels à la survie écologique.

Le volume énorme de données et de résultats au chapitre de la santé qui appuient ces énoncés d'avantages témoigne de l'importance et de la mesurabilité d'un mode de vie et d'un environnement sains et peut être utilisé notamment par les principaux décideurs et les artisans des politiques, pour étudier la question.

Le président: Puis-je vous suggérer de ne pas lire les trois exemples, car nous pouvons le faire nous-mêmes, aussi vite que vous pouvez les lire.

Mme Goulden: Le Catalogue des avantages offre aussi des preuves concernant plus spécifiquement les tendances dérangean tes énoncées dans la section 12.2 de votre rapport. Parce qu'il offre des données mesurables, comme des statistiques et des faits sur l'impact d'un mode de vie qui intègre les loisirs, cet outil peut aider les décideurs à élaborer des programmes et des politiques qui seront utiles aux Canadiens et à leurs collectivités.

Nous croyons fermement que les personnes qui, au bout du compte, tireront avantage des politiques et des programmes doivent participer à leur élaboration. Les professionnels du secteur des parcs et des loisirs sont des chefs de file dans cette approche de développement et d'exécution des politiques, des programmes et des services axés sur le développement communautaire. De plus, nous sommes très habiles pour mobiliser et motiver les Canadiens à être actifs et à mener une vie saine, et nous entretenons des liens avec toutes les collectivités du Canada.

Au bout du compte, le secteur des parcs et des loisirs et ses réseaux connexes servent de catalyseur pour promouvoir notre vision pour des personnes et des collectivités en santé. Le Catalogue des avantages est un outil clé qu'utilisent l'ACPL et ses alliés pour repositionner, promouvoir et dispenser des services qui vont au-delà des services classiques en matière de soins de santé. On reconnaît, de plus en plus, que le travail de l'ACPL et des ses alliés est vraiment essentiel à l'amélioration de la santé de tous les Canadiens.

Nous croyons que les résultats énoncés dans le Catalogue des avantages appuient notre conviction selon laquelle les loisirs et l'activité physique contribuent de façon importante à la saine croissance des Canadiens. Cependant, dans la société actuelle, de nombreux facteurs personnels, sociaux et économiques empêchent un grand nombre de Canadiens, surtout les enfants et les jeunes, de jouir des nombreux avantages de la participation à de telles activités.

L'ACPL encourage votre comité et le gouvernement fédéral à continuer d'examiner l'approche axée sur la santé de la population et l'impact de l'activité physique et des loisirs sur la prévention et la gestion des maladies.

Nous recommandons que le gouvernement fédéral fasse des investissements significatifs pour soutenir la prestation de ce type de services essentiels aux Canadiens.

L'infrastructure fédérale et provinciale habituelle des soins de santé est, en effet, très complexe. Toutefois, nous croyons, et le Catalogue des avantages en fait la preuve, qu'un investissement dans cette approche réduirait considérablement le coût des soins de santé au fédéral et au provincial et améliorerait l'état de santé des Canadiens. Nous encourageons le gouvernement fédéral à reconnaître la nécessité d'une approche préventive en matière de soins de santé.

L'ACPL fait appel à une distribution de fonds qui accroîtrait les ressources consenties aux systèmes de prévention en matière de santé, ce qui comprendrait le secteur des parcs et des loisirs.

Le travail de notre secteur constitue un moyen et le Catalogue des avantages de l'ACPL constitue un outil qui pourrait offrir au gouvernement un point de départ pour une recherche qui appuierait et favoriserait l'adoption d'une approche fondée surla santé des populations, en particulier par ceux qui sont responsables de mesurer les résultats en matière de soins de santé.

L'ACPL travaille actuellement avec ses partenaires afin d'élaborer un mémoire plus complet. Nous avons hâte de le présenter, au cours des prochaines semaines. En attendant, si vous avez besoin de renseignements supplémentaires, veuillezcommuniquer avec notre bureau national.

Au nom de l'Association canadienne des parcs et loisirs, je remercie les membres du Comité de m'avoir accordé cette occasion de témoigner cet après-midi.

Le sénateur Morin: J'aimerais adresser mes questions àMme McKinnon. À ma connaissance, votre association est le premier organisme bénévole du secteur de la santé à venir témoigner. Cela constitue une bonne occasion de féliciter, bien sûr, la Société d'Arthrite, mais aussi de reconnaître le travail extraordinaire des organismes bénévoles au pays.

Ce sont des cas de réussite uniques et typiques du Canada. Je suis conscient du fait qu'il existe des organismes bénévoles dans d'autres pays, mais la combinaison de soutien à la recherche en santé, d'éducation et de soins présente un caractère tout à fait canadien. Un autre aspect purement canadien tient aux centaines de milliers de bénévoles de partout au pays qui consacrent leur temps et leur argent à tous ces organismes. Il est important de reconnaître cela. Je ne sais pas si nous le soulignerons de nouveau dans notre rapport, mais je crois que nous devrions le souligner.

J'ai quelques questions, dont une qui porte spécifiquement sur la question de l'arthrite. Vous affirmez que, dans votre province, le délai d'attente pour une arthroplastie de la hanche est de 61 semaines, c'est-à-dire. un peu plus d'un an. Est-ce que cela est comparable au délai d'attente dans les autres provinces? Ensuite, si on convient d'emblée que le délai d'attente idéal est nul, quel serait, selon vous, un délai d'attente raisonnable? Pour nous situer un peu, que devrions-nous viser?

Mon autre question porte sur les organismes de santé bénévoles en général. Je sais qu'il est peut-être injuste de vous poser cette question, car vous êtes le seul organisme de ce genre à subir mon interrogatoire.

Comme vous le savez, il s'agit d'une consultation fédérale; nous n'examinons pas de questions relevant des provinces. Cela dit, comment, selon vous, le gouvernement fédéral peut-il contribuer à soutenir les divers organismes bénévoles? Vous n'êtes pas obligé de répondre sur-le-champ, vous pouvez nous faire parvenir un document écrit. Je comprends que vous représentez un organisme provincial et qu'il n'est peut-être pas facile pour vous de répondre à cette question, mais je la pose quand même, car, jusqu'à maintenant, nous n'avons pas entendu le témoignage d'organismes bénévoles, et ces organismes sont si importants au système de soins de santé du Canada. Je crois qu'il est injuste que nous n'ayons pas entendu leurs témoignages. Nous avons reçu un certain nombre de recommandations, mais - à moins que vous ne soyez disposé à les formuler sur-le-champ - qu'est-ce que le gouvernement fédéral pourrait faire pour aider ces organismes à poursuivre le travail extraordinaire qu'ils font pour notre pays?

Mme McKinnon: La liste d'attente est de 61 semaines en Saskatchewan, c'est le plus long délai d'attente au Canada. Cela correspond au double du délai provincial le plus proche, et je soupçonne que cela tient à un manque de ressources.

Il est difficile de déterminer quel devrait être le délai d'attente moyen. Il faudrait évaluer la gravité de l'état du patient afin de déterminer le niveau de priorité pour la chirurgie. Il est certain que le délai d'attente devrait être beaucoup plus court que 61 semaines.

Les personnes qui attendent une intervention chirurgicale ressentent souvent des douleurs, certaines subissent des pertes économiques et risquent d'endommager d'autres articulations qui tentent de compenser la faiblesse de l'articulation atteinte. Ce qui se produit, bien souvent, c'est qu'au moment où la personne obtient son arthroplastie de la hanche, elle a besoin d'une arthroplastie du genou.

La Société d'Arthrite ne veut pas exercer ses activités dans l'isolement. Nous voulons travailler avec les organismes gouver nementaux et les établissements du système de soins de santé. Nos programmes et services s'intègrent très bien. Nous voulons faire partie de la solution. À cet égard, nombre des services offerts par notre organisme peuvent être utiles au système de soins de santé. A titre d'exemple, mentionnons notre site Web, qui offre des renseignements importants. Nous ne voulons pas travailler dans l'isolement.

Pour ce qui est de la contribution éventuelle des organismes bénévoles à long terme, c'est une question à laquelle je voudrais probablement réfléchir et répondre à une date ultérieure.

Le sénateur Morin: Et vous pourriez aussi nous dire en quoi le gouvernement fédéral pourrait aider les organismes bénévoles à faire leur travail extraordinaire.

Mme McKinnon: L'arthrite doit être à l'avant-plan. Nous devons adopter une approche proactive à l'égard de cette maladie, reconnaître qu'il ne s'agit pas uniquement d'une petite douleur. Ce qui est une petite douleur aujourd'hui, reviendra plus tard dans le système de soins de santé et coûtera très cher. Le meilleur traitement pour l'arthrite est le diagnostic précoce. Je ne saurais trop insister là-dessus. Voila pourquoi l'arthrite doit être considé rée comme une priorité dans le domaine des soins de santé. La philosophie du gouvernement fédéral doit consister à mettre l'accent sur la maladie, même dans les fonds accordés à la recherche. Au bout du compte, si on découvre de meilleurs traitements, si nous trouvons une cure, les économies seront énormes.

Le président: Pouvez-vous nous dire quelle province offre le délai d'attente le plus court pour l'arthroplastie de la hanche? À défaut de nommer la province, pouvez-vous vous souvenir du délai d'attente?

Mme McKinnon: Je crois qu'il s'agit d'un délai de 25 à 30 semaines.

Le président: Donc, la plupart des provinces affichent un délai d'attente d'environ six mois, sauf la vôtre, où le délai correspond au double.

Le sénateur Pépin: Vous affirmez que les gens découvrent trop tard qu'ils souffrent d'arthrite. Cette situation découle-t-elle d'un manque de sensibilisation et de programmes de prévention? Ou peut-être est-ce en raison d'un manque de diagnostic précoce? Vous avez aussi fait référence à une pénurie de rhumatologues. Pourquoi les personnes découvriraient-elles trop tard qu'elles souffrent d'arthrite? Y a-t-il une autre raison?

Mme McKinnon: Cela tient en partie à la sensibilisation. Nous devons sensibiliser les gens aux signes avant-coureurs de l'arthrite. De plus, nous devons souligner aux travailleurs qui dispensent des soins de santé primaires toute l'importance du diagnostic précoce de l'arthrite. J'ai souvent entendu parler de personnes qu'on avait renvoyées chez elles et qui s'étaient fait dire que leur douleur n'était que de l'arthrite. On ne leur dit pas de quel type d'arthrite elles souffrent, on se contente de dire à ces personnes qu'elles souffrent d'arthrite, et on les renvoie chez elles.

J'aimerais qu'on renvoie ces personnes à la Société d'Arthrite, afin que nous puissions les informer et leur montrer des méthodes d'adaptation. Elles pourraient participer à un programme d'autotr aitement; elles peuvent obtenir de l'information sur le soulage ment de la douleur et sur des exercices à faire. Nous pouvons leur présenter des méthodes de traitement et de l'information sur la protection de leurs articulations.

Le mémoire que nous vous avons présenté renferme de l'information sur un programme de sensibilisation aux ressources sportives que nous offrons en Saskatchewan. Par l'entremise de ce programme, nous tentons de sensibiliser les jeunes athlètes, les entraîneurs et les parents aux blessures aux articulations liées à un sport. Il y a un lien entre les blessures qui ne sont pas convenablement traitées et un risque plus élevé d'arthrite plus tard. Il est important de fournir cette information au public.

Nous voulons sensibiliser les gens aux signes avant-coureurs de l'arthrite. Ainsi, ils pourront en parler à leur médecin et obtenir un diagnostic précoce. Nous pouvons informer les gens au sujet de la prévention, même en milieu de travail, et aider celles qui souffrent de cette maladie à maintenir leur qualité de vie.

Le sénateur Pépin: Dans votre mémoire, vous affirmez queles médecins de famille touchent plus d'argent que lesrhumatologues. Cela m'étonne. Pourquoi les rhumatologues, qui sont des spécialistes, touchent-ils moins d'argent?

Mme Joy Tappin, membre du conseil d'administration, Société d'Arthrite de la Saskatchewan: Je crois que les rhumatologues sont non seulement des médecins, mais aussi des conseillers. Ils consacrent une part considérable de temps à établir un diagnostic, à formuler des conseils concernant des programmes d'exercice, à informer le patient, et ainsi de suite. Les médecins généralistes, bien souvent, ne consacrent pas autant de temps à un patient. Souvent, ils n'ont qu'à effectuer un bref examen et remplir une ordonnance. Par conséquent, un médecin généraliste peut voir beaucoup plus de patients qu'un rhumatologue au cours d'une journée.

Le sénateur Pépin: Ils sont payés selon le nombre de services dispensés, n'est-ce pas?

Mme Tappin: Oui. Un rhumatologue n'est pas comme un médecin ou un chirurgien, capable de toucher des milliers de dollars pour une procédure qui ne dure qu'une heure. Le rhumatologue cumule de nombreuses fonctions: conseiller,médecin, diagnostiqueur. Ensuite, il y a le suivi. Il faut mettre beaucoup de temps pour traiter l'arthrite. Les patients reviennent constamment pour dire: «J'ai mal. Vous devez soulager cette douleur.» Le rhumatologue prescrit ensuite des médicaments. Je parle en connaissance de cause. Je souffre d'arthrite, et je sais qu'un rhumatologue consacre beaucoup de temps à un patient.

Le sénateur Pépin: Je comprends. Vous constaterez que l'une de nos propositions concerne le versement d'un salaire au médecin. Cela permettra peut-être de résoudre certains problèmes des rhumatologues.

Madame Goulden, je crois que ce que vous avez dit sur les parcs et les loisirs est très important, et puisqu'une part importante de notre population approche d'un âge sédentaire, l'exercice et les loisirs seront très importants. Si j'ai bien compris, vous voulez que le gouvernement tienne compte d'une association comme la vôtre. Vous prônez la prévention, d'une certaine façon. C'est une façon d'enseigner la prévention et d'informer les gens sur ce qu'ils doivent faire s'ils ne veulent pas être malades en vieillissant.

C'est la première fois que je vois un organisme comme le vôtre présenter un mémoire sur l'amélioration de la santé. Cela pourrait s'inscrire dans l'aspect prévention que nous aimerions présenter dans notre rapport.

Mme Goulden: Merci beaucoup de reconnaître cela. De plus, nous insistons beaucoup sur le rôle que nous jouons auprès de nos jeunes, qui sont les citoyens de demain. Compte tenu de l'obésité que nous constatons chez les jeunes à l'heure actuelle, ainsi que de la tendance à la hausse du tabagisme dans ce groupe, nous croyons avoir un rôle important à jouer afin de sensibiliser nos jeunes à adopter un mode de vie sain et actif, à faire des choix de vie qui, à long terme, réduiront les coûts des soins de santé.

Le sénateur Keon: Madame Goulden, je vous félicite d'être venue ici. Vous représentez une dimension très importante de la santé. Il y a un besoin réel d'intégrer davantage vos activités et les activités du domaine de la santé, en particulier dans le secteur public des soins de santé. Je ne vous poserai plus de questions, car je suis d'accord avec votre mémoire. Je m'en tiendrai à cela.

Madame McKinnon, je crois que l'arthrite est un problème de longue date au Canada, qu'il crée un fardeau économique énorme et que nous ne faisons rien pour résoudre le problème. À la lumière de mon expérience avec les patients qui souffrent d'arthrite, je crois vraiment que nous ne leur donnons pas l'attention qu'ils méritent.

J'espère que votre organisme trouvera un moyen de collaborer avec les autorités gouvernementales et de simplifier lesinstallations de diagnostic et de traitement, afin que les gens jouissent d'un traitement optimal - en particulier sur le plan des installations préventives primaires et secondaires et des services de counselling. Des gens qui pourraient prolonger lefonctionnement de leurs articulations pendant des années et des années ne le font pas parce qu'elles n'ont pas été bien informées.

Avec une approche concertée, la gestion de cette maladie pourrait être améliorée d'une façon importante. De plus, cela atténuerait le fardeau économique au Canada.

Je salue tous vos efforts. Les organismes bénévoles et caritatifs font un travail formidable dans tous les domaines.

Mme McKinnon: Merci beaucoup. Je suis d'accord avec votre commentaire selon lequel il faut cibler l'arthrite. Il faut adopter une approche plus proactive dans le système de soins de santé, et favoriser une collaboration avec les organismes sans but lucratif et notre organisme en ce qui concerne l'éducation, le pouvoir de l'éducation et l'habilitation du patient dans l'autotraitement. De telles mesures joueraient un rôle énorme pour ce qui est d'alléger le fardeau du système de soins de santé et de l'ensemble de la collectivité.

Encore une fois, merci beaucoup de m'avoir laissé témoigner aujourd'hui.

Le président: Je tiens à remercier tous les témoins d'avoir pris le temps de nous rencontrer aujourd'hui.

Honorables sénateurs, notre dernier témoin pour aujourd'hui est M. Gerald Morin, président du Ralliement national des Métis.

Monsieur Morin, je viens de terminer la lecture de votre mémoire et je suis heureux de dire qu'il était très intéressant. Vers la fin, vous avez répondu très directement à notre demande spécifique de nous fournir des conseils sur ce que nous devrions faire pour que le gouvernement fédéral réponde adéquatement à vos besoins. Par conséquent, je vous invite à faire un survol de votre mémoire et à mettre un accent particulier sur votre réponse à notre question.

Laissez-moi seulement vous poser une question, et vous pourrez improviser une réponse à la fin.

Compte tenu de l'accent que vous faites porter sur le besoin de s'attacher non seulement à la santé, mais aux facteurs détermi nants de la santé - on peut parler non seulement de symptômes, mais de causes profondes -, peut-on avancer que, en ce qui concerne le rôle du gouvernement fédéral, le domaine de la santé des Autochtones devrait relever du même ministère que tous les autres services destinés aux Autochtones, au lieu de relever du ministère de la Santé? Je ne fais que poser la question, je n'en connais pas la réponse.

À un moment donné, j'aimerais entendre votre point de vue à cet égard.

M. Gerald Morin, président, Ralliement national des Métis: D'accord, monsieur le président.

Je suis accompagné de M. Don Fidler, nouveau coordonnateur du Ralliement national des Métis en matière de santé. Il me prêtera main-forte pendant l'exposé.

J'insisterai sur certains grands points soulevés dans notre mémoire, que vous avez devant vous.

D'abord, laissez-moi vous remercier de cette occasion de comparaître, encore, devant votre comité. Je tiens à vous féliciter de vos efforts. Nous avons examiné les recommandations formulées dans votre rapport, à la lumière de témoignages présentés à l'occasion d'audiences antérieures, y compris des témoignages de notre organisme. Nous sommes heureux de constater que vous avez adopté une position solide en ce qui concerne la promotion de la santé des Autochtones canadiens, et nous nous réjouissons du fait que vous avez souligné le besoin d'adapter des solutions spécifiques à l'égard des Métis. Vous faites aussi remarquer qu'en matière de compétences gouverne mentales, notre peuple se retrouve dans une zone grise, car le gouvernement fédéral ne prend pas les Métis en charge, comme c'est le cas avec les autres peuples autochtones.

La discrimination touche divers domaines. Nous pouvons parler de toute la question des droits et des revendications territoriales, ce qui revient à votre question relative à des solutions globales pour tous ces enjeux. Nous en subissons les contrecoups à cet égard, mais nous sommes aussi affectés par l'incapacité de bénéficier de programmes et services. Nous sommes incapables de tirer avantage des milliards de dollars de programmes et services offerts aux Premières nations et aux Inuits.

Cela nous rend la vie très difficile. Dans mon rapport, je signale l'incapacité du gouvernement fédéral de comprendre la réalité des Métis au Canada. Au bout du compte, du point de vue de tous les gouvernements depuis la Confédération, les Métis n'ont aucun statut juridique au Canada. Nous n'avons aucun droit, et le gouvernement fédéral n'a aucune responsabilité de résoudre nos problèmes. C'est dans ce type de cadre de compétence et de cadre législatif que les gouvernements fonctionnent au Canada, de sorte que nous ne sommes reconnus par personne.

Sur le plan des droits, nous ne sommes capables ni d'établir des assises territoriales et financières, ni d'accéder aux ressources afin d'adopter un certain mode de vie et de favoriser la prospérité et le développement économiques de nos collectivités. Cela, en soi, crée de nombreux problèmes en ce qui concerne le cadre auquel je fais référence.

Parlons maintenant des programmes et services. Le gouverne ment fédéral offre des programmes et services dans de nombreux domaines. Il y a les soins de santé, il y a le développement économique, il y a les questions judiciaires - bref, l'ensemble des activités humaines, car notre nation a le droit à l'autonomie gouvernementale. En raison de ce déni, nous ne sommes pas capables d'accéder à ces programmes et services.

Je crois qu'il suffit d'envisager notre situation pour constater qu'il faut mener des recherches portant plus spécifiquement sur les Métis. Une partie du problème tient à notre incapacité d'accéder à ce type de ressources. De façon générale, nous vivons dans la même situation de pauvreté, dans les mêmes circonstances socio-économiques que les autres peuples autochtones; or, en raison de la discrimination et d'un manque de reconnaissance, nous sommes incapables d'obtenir quoi que ce soit du gouverne ment canadien, en ce qui concerne les droits, les compétences ou les programmes et services, qui permettraient de composer avec ces très graves problèmes qui affligent les citoyens et les collectivités métisses. Les peuples autochtones doivent composer avec de nombreux problèmes et défis dans le domaine de la santé. Les statistiques montrent une incidence élevée du VIH, de l'hépatite C, d'itinérance, d'éclatement de familles, de pauvreté, de faible scolarité, et cetera. La liste est très longue. Les Métis sont affectés de la même façon par tous ces problèmes, mais nous n'avons pas la possibilité de les résoudre.

Voilà pourquoi, dans notre exposé - et je suis heureux que votre rapport en parle. Vous demandez instamment au gouverne ment fédéral de se pencher sur ces questions, d'offrir un accès équitable aux Métis et d'examiner les questions liées à la santé. Vous insistez aussi sur le fait que le gouvernement fédéral doit réagir d'une façon étendue afin de veiller à ce qu'on examine ces autres enjeux. Si seulement un ministère adopte la bonne approche, disons - même si ce n'est pas le cas, Santé Canada, et les autres ministères ne suivent pas son exemple, le résultat ne serait que superficiel. On ne pourrait pas dire que le gouverne ment s'attaque au problème de front. Ce serait comme lancer de l'argent par les fenêtres, car, au bout du compte, cela ne réglerait rien pour notre peuple.

Je crois qu'il y a beaucoup de bonne volonté. Soyez certain que je suis très heureux du contenu de votre rapport. Au cours des trois ou quatre dernières années, divers secteurs du gouvernement fédéral affichent une compréhension et un soutien croissants à l'égard de notre position. Il y a une reconnaissance croissante du fait que nous sommes là, que nos problèmes sont légitimes et qu'il faut trouver des solutions.

De nombreuses solutions existent déjà. Les contribuables canadiens ont versé 60 millions de dollars pour qu'on étudie tous les peuples autochtones, dans le cadre de la Commission royale sur les peuples autochtones. Le rapport de la Commission s'assortit de recommandations et de solutions qui pourraient contribuer largement à résoudre les problèmes que j'ai signalés, si le gouvernement décidait de les mettre en oeuvre.

Au fil des ans, j'ai présenté de nombreux témoignages devant les deux ordres de gouvernement. Cela est parfois décourageant, car nous n'avons pas l'impression de faire suffisamment de progrès.

De bons rapports ont été présentés. Mentionnons, par exemple, le rapport du Sénat sur les anciens combattants autochtones, il y a deux ans. Ce rapport présentait des recommandations fantastiques à l'égard de problèmes touchant d'anciens combattantsautochtones qui étaient partis à la guerre pour notre pays. Le rapport a été déposé et mis sur une tablette, et, maintenant, il dort sous la poussière. Le gouvernement fédéral ne semble pas vraiment réagir d'une façon sérieuse à tous ces problèmes.

La même chose pourrait se produire maintenant. Nous pourrions présenter tous les bons arguments, et on rédigerait un rapport merveilleux qui explique le bien-fondé de telle ou telle mesure. Toutefois, si les gens au pouvoir n'écoutent pas et ne changent pas leurs politiques, et s'il n'y a ni leadership ni volonté politique, alors nous aurons l'impression que tout notre travail n'était que du vent.

Je ne prétends pas que votre comité, dont le mandat consiste à examiner les enjeux en matière de santé au Canada, peut nécessairement trouver toutes les solutions ou apporter les changements qui s'imposent. Cependant, à un moment donné, quelqu'un doit se lever pour dire: «Écoutez, il est temps de changer les chose, il est temps de résoudre ces problèmes. Voici nos recommandations. Nous avons dépensé telle ou telle somme d'argent sur le rapport. Voici ce que nous disons. Faisons-le. Faisons preuve de volonté politique et changeons les choses.»

Nous sommes en communication avec Ralph Goodale,représentant du gouvernement fédéral auprès des Métis, qui fait un travail raisonnablement bon. On peut certainement affirmer qu'il fait sa part au sein du gouvernement fédéral. Il doit composer avec nombre des obstacles et contraintes auxquels les dirigeants métis doivent faire face, lorsque vient le temps de convaincre le Cabinet, le Cabinet du premier ministre, toutes les instances du gouvernement fédéral, y compris l'appareil adminis tratif, qui a beaucoup de pouvoir. Il est certain que l'opinion des avocats du ministère de la Justice a beaucoup de poids au sein du gouvernement fédéral.

Ma question est la suivante: comment pouvons-nous favoriser le changement? À l'occasion de mon dernier témoignage, il y a quelques mois, j'avais signalé que nous élaborerions une stratégie en deux volets sur la nation métisse. D'une part, la stratégie traite de la fourniture de programmes et services et de l'accès équitable pour notre peuple à l'égard d'un grand nombre des enjeux touchant Santé Canada qui ont été soulevés ici. D'autre part, elle apporte les questions, plus difficiles, des droits des Métis, des droits légaux et des questions touchant les compétences.

Nous éprouvons un peu de frustration lorsque nous tentons de franchir les obstacles, en particulier pour que le gouvernement fédéral reconnaisse légalement notre existence comme peuple, que nos droits soient enchâssés dans la Constitution du Canada, pour qu'on lance des processus permettant de mener des négociations constructives pour commencer à respecter ces droits. Nous avons peut-être sous-estimé, dans une certaine mesure, toutes les difficultés que nous allions éprouver pour franchir ces obstacles. Je crois que c'est ce que nous constatons.

Notre mémoire présente beaucoup de faits et de bons arguments. On y trouve un certain nombre de graphiques et de données. Je le répète, je crois que, finalement, tout est question de leadership et de volonté politique.

À cet égard, puisque vous avez pour mandat d'examiner les questions touchant la santé - et j'ai signalé ce point à Ralph Goodale à l'occasion de notre dernière rencontre -, un certain nombre de ministères se sont améliorés. Par exemple, depuis six ou sept ans, Développement des ressources humaines Canada a attribué des sommes conséquentes à nos cinq organismes membres des Prairies, de l'Ontario et de la Colombie-Britannique pour la prise de mesures de formation et d'emploi dans nos collectivités. Je crois que nous touchons, collectivement, de 40 à 50 millions de dollars par année.

C'est une percée considérable lorsqu'on tient compte des antécédents que je vous ai décrits. C'est encourageant. Cela comporte des défis, il y a des problèmes permanents, mais nous tentons de les résoudre, et nous connaissons généralement du succès lorsque nous offrons ces programmes à notre peuple.

D'autres ministères, surtout depuis la réponse du gouvernement fédéral dans «Rassembler nos forces», ont réalisé des progrès, mais rien de comparable à ceux de DRHC. De fait, nous avons conclu un accord national, par l'entremise du RNM, avec DRHC, concernant l'attribution de responsabilités à nos organismes membres concernant les programmes et services dans le domaine de la formation et de l'emploi. Certains autres ministères responsables ont bougé un peu.

Santé Canada est probablement - si on devait préparer un bulletin, Santé Canada serait au dernier rang en ce qui concerne sa réaction aux Métis. Nous avons de la difficulté à obtenir une rencontre avec le ministre pour aborder ces questions. Je ne l'ai pas rencontré depuis au moins trois ans, je crois. Pour le diabète, on a versé plusieurs millions de dollars aux peuples autochtones.

Le président: Dans votre rapport, vous décrivez les nombreux comités dont vous faites partie.

M. Morin: Certainement.

Le président: Ils sont tous dominés par Santé Canada.

M. Morin: Nous recevons annuellement 100 000 $ pour régler cette question. Nous ne recevons pas les cinq milliards de dollars par année des Affaires indiennes pour embaucher du personnel de base qui serait chargé d'effectuer des recherches dans le domaine de la santé. Nous recevons 100 000 $, et cela nous permet de payer le salaire et les frais de déplacement d'une personne. Je suis certain que le problème de diabète est aussi grave dans nos collectivités que dans les collectivités des Premières nations et des Inuits. Si votre rapport incite Santé Canada à nous écouter, cela constituerait un progrès.

Le président: C'est grâce à nos audiences, où j'entends vos discours improvisés, que j'arrive à comprendre. On ne doit surtout pas douter de la valeur de nos audiences. Nous pouvons toujours lire le rapport. Les audiences nous permettent d'entendre vos commentaires spontanés, qui nous sont très utiles.

Avant de céder la parole au sénateur Morin, j'aimerais vous demander de clarifier quelque chose. Concernant le protocole d'entente que vous avez conclu avec DRHC, vous avez fait référence à «cinq membres». Pourriez-vous nous expliquer de quoi il s'agit?

M Morin: Le Ralliement national des Métis est constitué de cinq organismes provinciaux.

Le président: Et c'est ce que vous vouliez dire par cinq membres. D'accord.

Savez-vous pourquoi vous avez réussi à négocier une entente avec DRHC? Avez-vous connu des problèmes avec un ministre particulier, ou avez-vous seulement eu affaire à un SMA régional particulièrement sympathique?

M. Morin: C'est une très bonne question. En réalité, je ne suis pas certain. Je ne peux que vous parler de mon expérience personnelle. Ces discussions ont été amorcées pendant le règne des Conservateurs, dans les années 80. J'oublie le nom du ministre de l'époque, mais nous avons lancé les discussions au cours des années 80. Je ne suis pas certain que le ministère s'appelait DRHC à l'époque.

Le président: Il s'agissait peut-être du ministère de la Main-d'oeuvre et de l'Immigration.

M. Morin: Quoi qu'il en soit, c'est à cette époque que nous avons lancé les discussions sur cette idée de confier les programmes de formation et d'emploi aux peuples autochtones. Le conseil en place était très panautochtone. Nous avons lutté juste pour assurer une représentation équitable des Métis par les Autochtones participant au processus, et pour obtenir une juste part des ressources. Cela constituait une lutte en soi. Mais nous avons relevé le défi.

Au cours des années 90, ces programmes de formation ont été confiés à divers organismes autochtones de partout au pays, soit des organismes représentant les Premières nations, les Métis et les Inuits. Cette situation a duré pendant plusieurs années et, vers 1995, je crois, le RNM a signé - je ne me souviens pas du nom officiel - un accord national avec DRHC sur le développement des ressources humaines, selon lequel DRHC confiait officielle ment son budget pour ses programmes de formation et d'emploi au RNM et à ses organismes membres.

L'entente a pris fin en 1999, et nous avons signé une entente similaire, en vigueur jusqu'en 2004. Nous commençons à travailler sur la négociation d'une nouvelle entente qui, en 2004, succédera à l'entente actuellement en vigueur.

Mais c'est une lutte constante. Nous avons entendu des commentaires officieux selon lesquels, par exemple, certaines personnes au sein du gouvernement fédéral croient que DRHC n'aurait jamais dû conclure une telle entente avec les Métis, car nos attentes se sont accrues. Certains avancent que cela crée un précédent, que cela constitue une admission de la compétence fédérale, que le gouvernement fédéral permet aux Métis de faire valoir qu'ils relèvent de la compétence fédérale. Certains disent que la position adoptée depuis longtemps par le gouvernement fédéral au chapitre du statut juridique des Métis et des compétences du gouvernement a été compromise. De fait, en raison de cette position de longue date, certains conseillent de ne pas renouveler ces ententes avec les Métis à compter de 2004.

Je tiens à souligner un autre aspect qui, je sais, ne s'inscrit pas nécessairement dans votre mandat, mais qui témoigne de certains problèmes. J'ai parlé du rapport de la Commission royale sur les peuples autochtones, un rapport complet qui se penchait sur tous les aspects touchant la vie des Autochtones au Canada, y compris les Métis. Le rapport était vaste et s'assortissait d'environ 440 recommandations. On a consacré un chapitre entier aux Métis, et ce chapitre contenait des recommandations très, très positives.

En janvier 1998, le gouvernement fédéral répondait au moyen d'un document intitulé «Rassembler nos forces». De plus, des engagements publics supplémentaires ont été pris par des ministres fédéraux, par Ralph Goodale et d'autres représentants. Il y a donc eu des engagements verbaux et écrits. Le gouvernement fédéral a respecté un certain nombre de ces engagements.

Laissez-moi vous fournir un exemple. La nation métisse comprend au moins 300 000 personnes au Canada, je dirais. Nous sommes le Ralliement national des Métis, et nous cherchons à promouvoir les intérêts des Métis, à l'échelle nationale et internationale. Avant «Rassembler nos forces», nous touchions environ 250 000$ par année de financement de base pour faire fonctionner notre siège d'Ottawa et promouvoir les intérêts de la nation métisse au Canada. L'un des engagements énoncés dans «Rassembler nos forces» était l'augmentation du financement de base visant à permettre aux organismes autochtones de jouir d'une capacité accrue de représenter leurs peuples respectifs. Notre financement de base est donc passé de 250 000 $ à 450 000 $.

C'est un enjeu mineur lorsqu'on envisage toute l'affaire, mais c'est un enjeu très important pour nous, car la capacité de représenter notre peuple et finalement de promouvoir ses intérêts, et cetera. est très importante. Nous avons entendu, il y a quelques jours seulement que l'engagement annoncé dans «Rassembler nos forces» prend fin le 31 mars, et que Patrimoine Canada ne compte pas s'adresser au Conseil du Trésor ou au Cabinet, quiconque est responsable, pour obtenir un renouvelle ment de ce niveau de financement de base accru.

Ainsi, si le financement accru n'est pas renouvelé, notre financement de base tombera de 450 000 $ à 250 000 $. Je suppose que le gouvernement fédéral peut faire valoir qu'il a respecté l'engagement qu'il a énoncé dans «Rassembler nos forces» d'accroître le financement de base des organismes autochtones, ce qui n'aura duré que trois ans.

C'est décourageant. Pour parler franchement, les événements qui se produisent actuellement sur la scène internationale nous touchent. Les gens commencent à comprendre cela davanta ge. En raison des événements du 11 septembre, la pression est plus forte pour qu'on dépense davantage pour la sécurité et la défense nationale. Dans de telles circonstances, les Canadiens ont tendance à moins se préoccuper du sort des peuples autochtones et d'autres questions nationales.

On peut donc affirmer avec raison que beaucoup de gens sont préoccupés, et je l'ai constaté à l'occasion de mes voyages et des discussions que j'ai eues avec les gens de notre peuple. On a stimulé nos attentes. Nous avons amorcé un mouvement, et nous espérons poursuivre dans cette direction. Néanmoins, denombreuses personnes craignent que nous ne perdions notre élan.

Le sénateur Morin: Merci beaucoup, monsieur Morin, de nous avoir rencontrés de nouveau afin d'aborder ce problème très important.

Vous n'avez pas répondu à la question du sénateur Kirby concernant le transfert éventuel de responsabilités en matière de soins de santé pour les Autochtones de Santé Canada aux Affaires indiennes. Je crois qu'il s'agit là d'une question très importante, et qu'il est important d'y répondre. Plusieurs arguments justifie raient un tel transfert.

Le deuxième point que j'aimerais soulever concerne la recherche. Vous insistez sur le fait que la recherche est très importante en ce qui concerne la santé des Autochtones. Vous déclarez ce qui suit: «La recherche devrait être liée aux besoins de la collectivité autochtone et être menée avec sa pleine coopération et son assentiment.»

Je ne sais pas si vous vous souvenez d'un exposé présenté par l'Institut de la santé des Autochtones, mais je crois que vous y étiez. Le directeur est Jeff Reading, qui est un Mohawk. Je crois que le comité consultatif de l'Institut est constitué d'une majorité d'Autochtones. L'institut bénéficie d'un bon financement - il n'est peut-être pas suffisant, et ça, c'est une autre question; il faudrait peut-être envisager de lui consentir plus de finance ment. En passant, le site Web de l'Institut permet de consulter des comptes rendus des travaux, des rapports et des procès-verbaux des réunions.

On peut y accéder par l'entremise du site Web des IRSC. D'après ce que j'ai lu, il semble que le comité soit entièrement constitué d'Autochtones. Il est doté d'un plan stratégique, élaboré d'après ce que je vois par les Autochtones. Peut-être êtes-vous critique à l'égard d'une telle démarche, et si vous l'êtes, je serais très intéressé à connaître votre réaction.

De nombreuses personnes espèrent que cela permettrait vraiment de résoudre le problème que vous avez soulevé dans votre mémoire.

M. Morin: En ce qui a trait à la question posée par le sénateur Kirby, un tel transfert ne constituerait pas, selon nous, une solution, car le mandat du ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien ne concerne que les Premières nations et les peuples inuits du Canada, principalement les peuples des Premières nations qui vivent en réserve. Les gens des Premières nations qui vivent hors réserve se plaignent de ne pas bénéficier de services convenables et d'être victimes de discrimination. Le mandat du MAINC consiste uniquement à résoudre les problèmes des Premières nations et des peuples inuits du Canada. Des quelque cinq milliards de dollars versés annuellement au ministère, rien n'est réservé aux Métis. Par conséquent, un transfert de responsabilité n'est pas une solution à notre problème.

En raison de cette politique de non-reconnaissance de notre peuple par le gouvernement, qui a toujours eu cours, ce dernier ne possède pas la capacité et n'a pas apporté les changements institutionnels nécessaires pour résoudre nos problèmes de façon adéquate. C'est un gros problème.

Je crois, sénateur Morin, que vous parliez de l'Association nationale de la santé des Autochtones?

Le sénateur Morin: Non, je faisais référence aux Instituts de recherche en santé du Canada, dont fait partie l'Institut de la santé des Autochtones. À l'occasion de votre dernier témoignage, vous avez été suivi de M. Jeff Reading, chercheur bien connu. Com me je l'ai déjà dit, M. Reading est un Mohawk. Il a présenté un très bon exposé sur les soins de santé aux Autochtones. L'Institut mène des recherches sur le domaine des soins de santé destinés aux Autochtones. L'Institut jouit d'un bon financement. La plupart des personnes à l'Institut sont Autochtones. Si vous vous rendez au site www.cihr.ca, vous trouverez une liste des instituts. C'est à cet endroit que vous pourrez accéder à de l'information sur l'Institut de la santé des Autochtones.

M. Reading est très accessible. Nous avons conversé au téléphone à plusieurs reprises. Il sera heureux de vous rencontrer personnellement.

Le président: Je crois que c'est une bonne idée.

Le sénateur Pépin: Je dois vous dire que les Métis ont une porte-parole au Sénat et qu'elle est reconnue pour son franc-parler. Depuis deux ans, le sénateur Chalifoux, qui est une Métisse, défend les intérêts des Métis. Elle a un bureau à Morinville, en Alberta.

Le sénateur Morin: Un très bon nom.

Le sénateur Pépin: Le sénateur Chalifoux parle pour les Métis.

Comme vous l'avez dit, vous n'avez pas accès à la recherche et d'autres choses du genre. Je n'ai pas assisté à votre exposé, mais je suis d'accord, j'appuie l'opinion du sénateur Morin selon laquelle le gouvernement fédéral doit vraiment faire quelque chose.

Il est plutôt intéressant d'apprendre que vous n'avez pas rencontré le ministre de la Santé en trois ans.

M. Morin: Bien, nous essayons encore.

Le sénateur Pépin: Nous pourrions peut-être vous donner un coup de main à cet égard.

M. Morin: Je vous en saurais gré.

J'aimerais maintenant demander à mon collègue, M. Fidler, s'il a quelque chose à ajouter.

M. Don Fidler, directeur, Soins de santé, Ralliement national des Métis: Je tiens aussi à vous remercier de nous accorder l'occasion de témoigner. La question de la recherche est importante et, effectivement, certains secteurs effectuent des recherches, en particulier dans le domaine des soins de santé aux Autochtones. Notre problème, en ce qui a trait aux besoins, c'est qu'une part importante des fonds destinés à la recherche sont encore consentis aux chercheurs. Beaucoup de chercheurs sont dirigés, essentiellement, par Santé Canada. On porte très peu d'attention au type de recherche dont les Métis ont besoin. On ne prête pas une grande attention à la question du renforcement des capacités de recherche. Nous représentons une communauté très dispersée, et je crois que vous conviendrez que, pour réussir à répondre aux besoins des Autochtones canadiens en matière de soins de santé, il faut qu'on donne aux Autochtones canadiens l'occasion de le faire. Pour y parvenir, il faut être en mesure de recueillir de l'information. Plus souvent qu'autrement, cette information doit être recueillie à l'échelon communautaire.

En raison de la nature de la recherche au Canada, plus ou moins déterminée par des bureaucraties qui fixent les limites de la recherche, les chercheurs des grandes universités touchent l'essentiel du financement. Par exemple, le CRSH dirigebeaucoup de recherches au Canada. Bien souvent, les chercheurs communautaires sont exclus. Néanmoins, le CRSH a lancé un programme, s'inscrivant dans les ARUC, qui est essentiellement un programme de recherche communautaire. C'est un program me prometteur. Nous devrons trouver des moyens d'obtenir des fonds de recherche afin d'examiner les besoins de notre peuple selon notre point de vue. Nous devons aussi être capables de renforcer la capacité. Pour ce faire, il faut créer des partenariats avec les collectivités et les chercheurs afin que les recherches servent les intérêts non pas de ceux qui les dirigent, mais bien ceux qui sont concernés et les aident.

L'un des grands problèmes des peuples autochtones c'est qu'en matière de recherche, nous menons notre vie en vase clos.Beaucoup de gens ont fait beaucoup d'argent. De plus, les chercheurs se sont forgé de solides réputations en effectuant des recherches sur les peuples autochtones, mais ces derniers ont tiré très peu de chose de ces recherches. Je crois que nous devrions envisager d'autres façons de mener des recherches. Je crois que nous devons envisager la possibilité que les universitaires ne sont peut-être pas les seuls à pouvoir mener des recherches valables, et que les collectivités devraient aussi être capables d'examiner les questions qui sont importantes à leurs yeux.

Le sénateur Keon: Je ne vous poserai pas de question, monsieur Morin, votre exposé est très clair. Je comprends votre point de vue, et je l'appuie totalement. Je peux vous assurer que notre comité se penchera sérieusement sur votre situation difficile. Je vous souhaite bonne chance et j'espère que vous verrez bientôt la lumière au bout du tunnel. Je tiens à ce que vous sachiez que je suis disposé à fournir mon aide, à titre de citoyen, de membre du comité, ou de membre du Sénat.

M. Morin: Merci.

Le président: Je vous remercie d'avoir témoigné. Comme l'indique notre rapport, vos témoignages antérieurs nous ont grandement influencés.

M. Morin: Oui.

Le président: J'aimerais seulement revenir sur le point soulevé par le sénateur Keon. Certains d'entre nous travaillent sur la question autochtone depuis longtemps, dans mon cas, 20 ans, et je comprends le dilemme auquel les Métis ont toujours été confrontés. Franchement, nous serions très heureux de faire tout ce que nous pouvons pour faire avancer cette question, non seulement ici, mais devant d'autres instances. Vous avez tout à fait raison, les politiques du gouvernement fédéral appliquent une certaine forme de non-reconnaissance, mais, puisque j'ai participé aux négociations constitutionnelles, je peux vous affirmer qu'on vous a reconnus. Le débat revient toujours à la question «l'êtes-vous ou ne l'êtes-vous pas?»

Par conséquent, je vous invite à communiquer avec nous si nous pouvons vous aider à faire avancer les choses. Vous n'avez qu'à nous téléphoner, nous serons heureux de vous aider.

M. Fidler: J'aimerais seulement répondre à une question, posée plus tôt, sur Santé Canada. L'une des choses que nous reprochons à Santé Canada est la position officielle du ministère selon laquelle son mandat ne prévoit que la prestation de services aux Premières nations et aux Inuits. Par conséquent, toute discussion visant à obtenir quelque chose qui ressemble à une prestation de services équitable mène à un refus, car, disent-ils, l'absence de mandat en ce sens les empêche de le faire.

Le président: Nous examinerons cette question. Cette position ne m'étonne pas, mais elle va à l'encontre de certainespositions gouvernementales à l'égard des Métis sur d'autres questions. C'est cette incohérence qui complique les choses.

M. Morin: J'aimerais seulement terminer en vous remer ciant. Nous en sommes à notre deuxième témoignage devant votre comité, et, votre rapport montre que vous nous avez écouté la première fois. Nous aimons le rapport et ses recommanda tions. Je vous remercie de nous avoir écoutés, et j'espère que votre prochain rapport saura convaincre le gouvernement fédé ral. Je vous souhaite bonne chance dans vos travaux.

Le président: Merci. Nous continuerons de pousser.

La séance est levée.


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