Délibérations du comité sénatorial permanent des
Transports et des communications
Fascicule 30 - Témoignages (séance du 29 mai)
OTTAWA, le mercredi 29 mai 2002
Le Comité sénatorial permanent des transports et des communications se réunit aujourd'hui à 17 h 30 pour examiner les enjeux stratégiques touchant l'industrie du transport interurbain par autocar.
Le sénateur Lise Bacon (présidente) occupe le fauteuil.
[Traduction]
La présidente: Honorables sénateurs, nous accueillons ce soir nos témoins de l'Association canadienne du transport urbain, organisme national qui représente l'ensemble du secteur du transport public urbain au Canada.
Bien que notre mandat touche tout particulièrement le transport interurbain par autocar, les réseaux de transport public urbain représentent un élément important du secteur du transport public et leur rôle et celui de l'industrie du transport interurbain par autocar se chevauchent par moments. Par conséquent, nous souhaitons nous renseigner davantage sur les préoccupations des responsables des réseaux urbains.
Pour la gouverne de nos témoins, je vais me permettre de vous expliquer brièvement les raisons pour lesquelles on nous a demandé de faire une étude sur l'industrie du transport interurbain par autocar. Essentiellement, le problème de l'industrie du transport interurbain par autocar, c'est que sa clientèle est en baisse progressive depuis plusieurs dizaines d'années. Ce déclin est d'autant plus troublant que ce moyen de transport constitue un élément important du réseau de transport des voyageurs. Les autocars coûtent cher, mais ils présentent l'avantage de pouvoir aller n'importe où et de respecter l'environnement.
Ce déclin peut s'expliquer de plusieurs façons. Il est possible que les gens aient actuellement plus de moyens et qu'ils peuvent donc se permettre de prendre leur propre voiture; il est également possible que plus de gens habitent les grandes villes; une autre hypothèse serait que la réglementation gouvernementale est excessive, ou encore qu'elle varie trop d'une province à l'autre.
Ainsi au cours des semaines et mois à venir, nous espérons approfondir la situation. Je cède donc tout de suite la parole à nos témoins, soit M. Michael Roschlau et M. Leck de l'Association canadienne du transport urbain.
M. Michael Roschlau, président-directeur général, Association canadienne du transport urbain: Merci beaucoup, madame la présidente, de nous avoir invités à comparaître devant le comité cet après-midi.
Notre association, l'ACTU, est une société à but non lucratif qui existe depuis presque une centaine d'années. L'ACTU représente les intérêts du secteur du transport en commun à l'échelle du Canada, y compris une centaine d'agences de transport en commun municipales et régionales, plusieurs centaines d'entreprises qui sont les fournisseurs de l'industrie du transport en commun, et d'autres associations et organismes qui sont affiliés au secteur du transport en commun.
En ce qui concerne votre mandat touchant l'industrie du transport interurbain par autocar qui est à l'origine de cette étude, il est certain que les intérêts de l'ACTU par rapport à cette étude sont d'une nature périphérique, puisque notre principal domaine d'intérêt est celui des transports urbains et régionaux. Il existe, toutefois, la possibilité de chevauchement entre nos sphères d'opération, ainsi que la possibilité d'impact dans la mesure où le gouvernement fédéral déciderait d'agir dans ce domaine, et surtout d'adopter une loi ayant pour éventuel résultat de déréglementer le secteur du transport extraprovincial par autocar.
Pour faire un peu l'historique de la question, il convient de signaler que les services de transport en commun urbain sont de plus en plus appelés à répondre à une gamme d'intérêts différents, c'est-à-dire d'élargir le choix des modes de transport pour favoriser la mobilité urbaine, d'assurer l'accès aux personnes handicapées afin qu'elles puissent se déplacer librement autour des zones urbaines, d'améliorer la capacité des citadins de se déplacer efficacement et rapidement, d'aider à régler nos problèmes environnementaux en persuadant de plus en plus de citoyens à opter pour les transports en commun au lieu de se déplacer seuls dans leurs véhicules personnels, et de trouver une façon plus efficace d'assurer la mobilité en transportant plus de citoyens tout en occupant moins de place sur les routes, un facteur particulièrement important dans le contexte de l'expansion de nos villes.
De toute évidence, l'attirance qu'éprouvent les clients actuels et potentiels — surtout ceux qui recourent actuellement à une forme de transport personnel privé — pour le transport en commun dépend de la rapidité et de la facilité des déplacements, du degré de confort, de la réduction minimum des correspondances, de la facilité avec laquelle les clients peuvent opter pour l'une ou l'autre méthode de paiement, et de la simplicité d'accès et de recours aux services. Pour cela, il faut être en mesure d'offrir aux citoyens un réseau de services aussi intégrés que possible, de sorte que les clients puissent se rendre facilement à leur destination, que ce soit un trajet entre la maison et le travail, entre la maison et l'école, des services de loisirs ou des établissements de soins, etc.
Pour que les services soient vraiment intégrés, ils doivent être coordonnés et assurés dans le cadre d'un véritable réseau, que cela prenne la forme d'une série d'itinéraires d'autocars qui sont liés les uns aux autres au moyen de correspondances continues ou de collaboration étroite entre les services d'autocar et ferroviaires, comme c'est le cas à Toronto pour le métro ou dans des villes dotées de réseaux de services de train et d'autocar de banlieue qui assurent des liaisons directes selon un horaire qui permet aux voyageurs d'arriver facilement à leur destination sans avoir à payer de multiples tarifs.
Cela dit, la principale préoccupation de l'Association du transport urbain touche les conséquences involontaires de la déréglementation si elle devait se concrétiser à la suite de l'adoption d'une loi et la possibilité que les entreprises extraprovinciales de transport puissent, dans un environnement déréglementé, assurer des services indépendants concurrentiels en milieu urbain qui annuleraient les avantages d'un réseau de services de transport public urbain.
Voilà donc ce que je voulais vous dire au sujet de l'historique de la question et je vais maintenant céder la parole à mon collègue, Brian Leck, qui va vous entretenir des éventuelles répercussions juridiques.
M. Brian Leck, conseiller juridique honoraire, Association canadienne du transport urbain: Bien que les préoccupations de l'ACTU sont bien spécifiques, elles sont sérieuses étant donné que les conséquences pour le secteur du transport urbain pourraient être considérables. Nos préoccupations portent essentiellement sur la possibilité qu'on modifie la législation en vue de déréglementer les services de transport interurbain et interprovincial au Canada.
Le point de départ fondamental de toute exploration de la question est le constat que les entreprises extraprovinciales de transport relèvent de la responsabilité du gouvernement fédéral. La jurisprudence relative aux articles 91 et 92 de la Loi constitutionnelle de 1867 établit le droit du gouvernement fédéral d'adopter des mesures dans ce secteur d'activité. Or, aux termes de la Loi sur les transports routiers, ce pouvoir, explicité aux articles 4, 5 et 6, est délégué aux provinces.
Ce que cela signifie essentiellement, c'est que même si cette question relève de la responsabilité des autorités fédérales, les provinces peuvent adopter des lois touchant les entreprises extraprovinciales de transport. Du fait de la délégation de ce pouvoir aux provinces, s'agissant d'itinéraires d'autocars intraprovinciaux, qu'il s'agisse de services interurbains au sein d'une province ou en milieu urbain, les pouvoirs délégués aux provinces dans ce domaine leur permettent de contrôler les services de transport public interurbain au niveau municipal. C'est d'ailleurs ce qui s'est produit dans la plupart des provinces. En Ontario — et j'en parle justement dans notre mémoire — il y a essentiellement deux façons d'atteindre cet objectif: premièrement, en adoptant une loi provinciale qui crée une situation de monopole en accordant à une agence ou commission la responsabilité exclusive d'assurer les services de transport public dans une zone urbaine précise. La Loi no 2 sur la Ville de Toronto en est un bon exemple: elle accorde à la Toronto Transit Commission le pouvoir exclusif d'assurer des services de transport public urbain dans la zone relevant de la responsabilité de la Ville de Toronto.
L'autre façon d'atteindre ce même objectif consiste à passer par une loi ontarienne d'ordre général, soit la Loi sur les municipalités, qui permet aux villes, de par l'adoption de règlements administratifs, d'accorder aux divers ministères qui relèvent de leur responsabilité le pouvoir exclusif d'assurer les services de transport en commun. Cela donne en réalité de très bons résultats car, pour les raisons évoquées par M. Roschlau, il faut éviter de créer une situation où six, sept ou huit entreprises rivales dans une même ville choisissent des itinéraires qui les intéressent le plus et offrent par conséquent des services concurrents et incompatibles.
Le problème découle du fait que certains groupes d'intérêt préconisent la déréglementation et souhaitent que les principales sinon les seules exigences s'articulent autour de la sécurité. L'Association canadienne du transport urbain n'est pas en désaccord avec ce concept, si ce n'est pour une chose: il faut que le pouvoir des provinces de régir les services de transport en commun soit maintenu. C'est tout à fait critique. Si ce pouvoir n'est pas maintenu, il est possible, et à mon avis, même probable, que la province perde la capacité de réglementer les opérations intraprovinciales. Ainsi une entreprise pourrait s'implanter et desservir certains itinéraires interprovinciaux tout en desservant certains autres itinéraires dans une ville. La loi provinciale serait considérée inopérante en ce qui concerne les activités des entreprises extraprovinciales de transport.
La logique qui sous-tend tout cela, c'est que le gouvernement fédéral donnerait l'impression d'avoir un régime de réglementation qui se limite à toutes fins utiles à des mesures de sécurité. Ce serait considéré ou perçu comme une tentative de la part de la province de réglementer certaines activités qui relèvent de la responsabilité du fédéral.
Face à cette contradiction selon le principe de la suprématie, c'est la loi fédérale qui l'emporterait. Dans ce cas, il pourrait arriver que des entreprises extraprovinciales de transport en exploitation concurrencent directement des sociétés de transport public urbain dans les différentes villes du Canada, et ce au niveau fédéral.
Voilà une situation que nous préférons éviter à l'avenir. C'est cet argument juridique que quelqu'un pourrait faire valoir devant un tribunal si, pour une raison ou une autre, cette délégation de pouvoirs aux provinces par le gouvernement fédéral n'est pas adéquatement protégée ou prise en compte dans toute loi future.
La présidente: Plusieurs initiatives fédérales visant à examiner le secteur des transports urbains sont actuellement en cours. Transports Canada vient de publier trois études qui touchent le transport urbain. Quelles sont les principales difficultés dans ce secteur de nos jours? Est-ce surtout celle du financement, ou y a-t-il d'autres problèmes importants?
M. Roschlau: Il y a de nombreux problèmes. À l'heure actuelle, celui du financement est sans doute le problème central, étant donné que les municipalités canadiennes ont de plus en plus de mal à maintenir l'appui financier qu'elles accordent aux services de transport public, surtout que le nombre d'utilisateurs augmente. En même temps, on demande aux services de transport public de remplir plusieurs mandats — par exemple, d'aider à réduire les encombrements et la pollution tout en rehaussant de façon générale la mobilité des gens vivant en milieu urbain. De toute évidence, la question du financement est tout à fait critique, et il en va de même pour la modernisation de l'infrastructure, l'amélioration de la qualité du service et des mesures accélérées pour permettre aux services de transport public d'assurer l'accessibilité aux personnes handicapées.
La présidente: Un grand nombre de transporteurs, d'universitaires et de représentants gouvernementaux sont d'avis que les systèmes de transport public ont tendance à s'élargir et à éliminer les transporteurs interurbains privés qui pourraient en réalité offrir une plus vaste gamme de services non subventionnés. Qu'en pensez-vous?
M. Roschlau: De façon générale, c'est assez rare. Cela pourrait être le cas dans les banlieues de grandes villes où certains itinéraires sont desservis par des transporteurs privés ou l'ont déjà été. À mesure que la zone de desserte des sociétés de transport public s'élargit, les autorités provinciales, municipales ou régionales peuvent décider de fusionner tous ces services pour créer un réseau intégré de transport régional. GO Transit dans la région de Toronto serait un exemple de ce genre de réseau.
Par contre, rien n'empêcherait les autorités régionales ou locales de travailler ave un transporteur privé pour assurer ce service ou de conclure une entente contractuelle en vertu de laquelle le transporteur privé assurerait un certain service au nom de l'administration municipale ou régionale. Il y a déjà plusieurs exemples de collaboration de ce genre.
La présidente: Certains intervenants clés revendiquent la déréglementation des services de transport interurbain par autocar afin de renverser la tendance actuelle à la baisse en ce qui concerne l'utilisation des services de ce type. Avez- vous pris position là-dessus?
M. Roschlau: Nous sommes tout à fait en faveur de mesures qui permettraient d'accroître l'utilisation des services de transport interurbain par autocar. Il ne fait aucun doute qu'il s'agit là d'un moyen de transport à la fois économique et écologique.
Pour ce qui est de savoir comment on pourrait redynamiser le secteur du transport interurbain par autocar, je dois dire que nos préoccupations en matière de déréglementation concernent surtout l'éventuelle incidence de cette dernière sur les services en milieu urbain. Nous n'avons donc pas de position sur l'impact que cela pourrait avoir sur les transporteurs interurbains.
Le sénateur Spivak: Monsieur Leck, pour ma gouverne et peut-être pour celle des autres membres du comité, pourriez-vous expliquer encore une fois quels sont les pouvoirs des autorités fédérale, provinciales et municipales en ce qui concerne le transport interurbain par autocar et le transport urbain par autobus? Je sais que le gouvernement fédéral délègue certains pouvoirs; mais je n'ai pas bien suivi votre argument en ce qui concerne l'incidence de la déréglementation sur les pouvoirs délégués aux provinces. Pourriez-vous répéter votre explication?
M. Leck: À l'heure actuelle, étant donné que le gouvernement fédéral délègue certains pouvoirs aux provinces, les sociétés de transport urbain et les municipalités n'ont pas de souci à se faire. Étant donné les pouvoirs qui leur sont délégués par les autorités fédérales, les provinces peuvent, sans craindre de violer la Constitution par l'entremise de lois municipales ou de la Loi sur la Ville de Toronto, à titre d'exemple, déterminer que dans la ville de Toronto, la Toronto Transit Commission aura le pouvoir exclusif d'exploiter des véhicules de transport public, tels que les autobus, les métros, etc. Ainsi si une entreprise extraprovinciale de transport voulait à la fois desservir le corridor Toronto-Québec et concurrencer la TTC en assurant le service pour certains itinéraires le long des rues Yonge et Eglington, par exemple, en prétendant que ces services font partie intégrante de ses activités, activités qui sont autorisées par le fédéral, les provinces seraient en mesure de contester cette action. De par les pouvoirs qui leur sont délégués par le gouvernement fédéral, les provinces peuvent décréter qu'une entreprise de transport n'a pas le droit de faire ce genre de chose.
Le problème se pose lorsqu'il est question de déréglementer les activités de transport interprovincial afin d'atteindre un objectif qui émane de certains groupes d'intérêt. À ce moment-là, les autorités fédérales pourraient se dire: «Il existe toutes sortes de régimes de réglementation concurrents et contradictoires dans les diverses provinces. Ces régimes sont incompatibles les uns avec les autres et donnent lieu à des injustices. Tout le monde n'est pas sur un pied d'égalité. Ces régimes entraînent de la confusion et présentent des obstacles économiques pour les entreprises. Par conséquent, nous ferions mieux d'axer notre régime de réglementation sur des évaluations du bilan de sécurité des intéressés, l'obligation d'avoir des assurances et des véhicules sécuritaires, etc. Ainsi il convient de supprimer le pouvoir des provinces de compliquer le régime de réglementation en y greffant des mesures de réglementation provinciales concurrentes et contradictoires.» Selon cette logique, le fédéral déciderait d'éliminer complètement la délégation des pouvoirs aux provinces.
Le problème, c'est que des provinces comme l'Ontario ont un régime de réglementation qui limite le droit d'autres transporteurs, extraprovinciaux ou intraprovinciaux, de desservir des zones urbaines. Voilà l'argument qu'ils feront valoir: nous sommes une entreprise extraprovinciale de transport, et le gouvernement fédéral a décidé qu'aucune autre réglementation — et certainement pas provinciale — nous visera, si ce n'est celle qui porte sur la sécurité; par conséquent, vous, les autorités ontariennes et votre désir de réglementer notre entreprise extraprovinciale de transport, est incompatible avec la volonté fédérale. Étant donné le principe de la suprématie des lois fédérales, la législation provinciale deviendrait à mon avis inopérante et ne pourrait donc viser cette entreprise extraprovinciale de transport.
Le sénateur Spivak: Vous soulevez un point important. Pour le moment, nous avons effectivement un ensemble de normes différentes. Nous n'avons pas de normes nationales, même si cela relève de la responsabilité du fédéral. Je ne pensais pas que ça concernait uniquement la sécurité. Quoi qu'il en soit, le fait est qu'il existe des régimes différents dans les diverses provinces.
Ce que vous proposez comme solution, si cet objectif nous semble souhaitable, ce serait de ne pas déréglementer ce secteur. Peut-être que le gouvernement fédéral devrait envisager de reprendre ses pouvoirs intraprovinciaux. Qu'arriverait-il à ce moment-là?
M. Leck: Je crois pouvoir affirmer au nom de l'Association canadienne du transport urbain que nous ne sommes pas opposés à la déréglementation. C'est-à-dire que nous ne sommes ni pour ni contre.
Le sénateur Spivak: C'est justement ça que je ne comprends pas.
M. Leck: Notre seule préoccupation s'articule autour de cette question de délégation de pouvoirs aux provinces.
Le sénateur Spivak: Oui, mais c'est bien important.
M. Leck: Ce qui pourrait rester, ce serait une délégation générale de pouvoirs de réglementation, mais il faut au moins que la province ait le pouvoir de contrôler les activités d'une société de transport urbain. Il y a peut-être d'autres types de règlements que les provinces peuvent faire.
Le sénateur Spivak: Serait-il possible de déréglementer le secteur intraprovincial et de faire en sorte que les autorités provinciales puissent continuer d'être responsables du transport urbain?
M. Leck: C'est l'une des options que nous proposons.
Le sénateur Spivak: Donc, vous n'êtes pas contre la déréglementation du réseau de transport intraprovincial.
M. Leck: Non.
Le sénateur Spivak: Vous dites que vous acceptez le fait qu'il existe un ensemble de normes et de règlements disparates à l'heure actuelle — ce qui touche les camions m'intéresse tout particulièrement — et qu'à votre avis, il n'y a pas lieu de prendre des mesures pour corriger la situation. C'est bien ça?
M. Leck: Non. Écoutez, sénatrice, il y a deux façons de protéger les intérêts des services de transport urbain. La première consiste à maintenir la loi actuelle, et notamment les articles 4, 5 et 6 de cette loi, qui prévoit une délégation générale de pouvoirs, créant ainsi cet ensemble de mesures disparates. Nous ne sommes ni pour ni contre cette réalité. Voilà qui permettrait de protéger les intérêts des services de transport urbain.
Une deuxième façon d'y parvenir — et il en est question à la page 2 de notre mémoire, vers le bas de la page — serait de proposer que toute nouvelle loi incorpore les dispositions de l'actuelle Loi sur les transports routiers, et plus précisément les articles 4, 5 et 6 de cette loi, de façon à maintenir le statu quo et de protéger ainsi les services de transport urbain, ou encore — et ce serait le strict minimum à notre avis — de faire en sorte que toute nouvelle loi précise qu'aucune restriction ne vise le pouvoir d'une province ou de plusieurs provinces de réglementer les entreprises extraprovinciales de transport lorsqu'elles mènent des activités dans une municipalité ou zone urbaine contiguë, que ces zones urbaines se trouvent dans une même province ou dans plusieurs provinces. Ainsi la situation de villes comme Ottawa serait couverte.
Le sénateur Spivak: Je ne comprends toujours pas pourquoi vous êtes si neutres sur la question de la réglementation ou de la déréglementation.
Peut-être que je prends trop de temps et je devrais céder la parole à un autre sénateur.
M. Roschlau: Je pourrais peut-être ajouter un complément de réponse à la question posée par le sénateur Spivak concernant cet ensemble de mesures disparates au Canada. Le fait est que les règlements qui existent actuellement — du moins ceux qui visent les entreprises de transport urbain public — établis par suite de l'adoption de lois municipales dans chaque province, sont en réalité très semblables. Il y a peu de variations.
Le sénateur Spivak: Je parle de ceux qui visent le transport interprovincial.
M. Roschlau: Oui, je comprends.
Le sénateur Phalen: J'ai une question à poser au sujet de l'historique que vous nous avez fait tout à l'heure. Vous dites que les services de transport public urbain favorisent la mobilité des personnes handicapées, soit par l'entremise d'un service parallèle spécialisé ou des améliorations technologiques qui leur permettent d'avoir accès aux autobus et aux services ferroviaires.
Pourriez-vous m'expliquer de quoi il s'agit au juste? Je crois savoir de quoi vous parlez, et j'imagine que ça concerne l'accessibilité par les gens qui sont en fauteuil roulant. Mais j'aimerais savoir dans quelle mesure ces services sont vraiment accessibles. Et qu'entendez-vous par «service parallèle spécialisé»?
M. Roschlau: Normalement, il y a deux types de services de transport public urbain qui sont accessibles aux personnes handicapées. Le premier est ce qu'on appelle un service de transport public spécialisé. Ce service est assuré de porte à porte mais exclusivement à ce segment de la population. Le nom qu'on lui donne varie d'une collectivité à l'autre. À Ottawa, ce service est désigné par le nom Para Transpo; à Toronto, c'est Wheel Trans, et à Vancouver, HandyDART. Il s'agit typiquement d'un petit autobus dont le plancher est proche du sol et muni d'une rampe ou d'un monte-charge qui facilite l'accès d'une personne en fauteuil roulant. Il faut normalement réserver sa place à l'avance.
Le sénateur Phalen: C'est ça le service spécialisé dont vous parlez?
M. Roschlau: Oui, depuis plusieurs années, ce que nous appelons les services de transport public principaux ou classiques — c'est-à-dire les grands autobus et les trains dans certaines villes — sont également devenus plus accessibles. Ce qui a tout changé, ce fut l'introduction il y a sept ou huit ans d'un autobus à plancher surbaissé, c'est-à- dire un autobus qui fait 35 ou 40 pieds de long mais dont le plancher se trouve presque au niveau du trottoir. Il n'y a donc pas de marches à l'intérieur de l'autobus. Une rampe se déplie, de sorte qu'une personne en fauteuil roulant peut monter dans l'autobus. Les autobus deviennent progressivement plus accessibles à mesure que les services de transport en achètent. Tous ceux qu'ils achètent ont des planchers surbaissés.
Le sénateur Phalen: Quelle est la capacité de ces autobus?
M. Roschlau: Deux personnes handicapées normalement. Un autobus articulé peut en prendre plus.
Le sénateur Phalen: À votre avis, les fourgonnettes ont-elles un rôle à jouer dans le secteur des transports publics?
M. Roschlau: Dans certains cas, les fourgonnettes peuvent certainement jouer un rôle utile, notamment dans les zones à faible densité et où la demande n'est pas suffisante pour justifier de gros autobus. Là je songe surtout à des villes comme Calgary et Vancouver, qui ont toutes les deux adopté le concept des navettes communautaires.
Le sénateur Phalen: C'est un service qui est offert entre les différentes localités?
M. Roschlau: Entre les différentes zones résidentielles à faible densité. Normalement ces navettes assurent un service de raccordement avec le réseau de métro léger ou de liaison régionale par autocar, et ce afin de réaliser des économies d'échelle et de créer un réseau complet. Calgary, Edmonton et Vancouver sont les trois villes auxquelles je songe qui assurent un service de navette communautaire au moyen de plus petits véhicules qui alimentent ensuite les principaux itinéraires d'autobus. Encore une fois, comme tous ces services font partie d'un réseau intégré, les horaires sont établis de façon à assurer des liaisons directes et un service sans discontinuité.
Le sénateur Callbeck: Monsieur Roschlau, vous avez certaines préoccupations concernant la déréglementation du secteur du transport urbain, mais vous ne voulez pas prendre position concernant l'industrie du transport interurbain. Vous dites que vous êtes en faveur de mesures visant à accroître la clientèle. À votre avis, quelles mesures s'imposent?
M. Roschlau: Le secteur du transport interurbain n'est pas celui que nous représentons et ne fait pas partie du mandat de l'Association canadienne du transport urbain. Il y a d'autres associations qui représentent l'industrie du transport interurbain par autocar, et je suis sûr que vous avez dû recevoir leurs témoignages dans le cadre de vos délibérations. Je vous dis simplement que nous sommes en faveur du recours accru aux services de transport interurbain par autocar, bien que notre association n'ait pas pris position sur cette question précise, étant donné qu'elle ne fait pas partie de notre mandat.
La sénatrice Callbeck: Avez-vous une opinion sur les mesures qu'il convient d'envisager?
M. Roschlau: Non, nous n'avons pas vraiment réfléchi à cette question précise, étant donné qu'elle est étrangère à notre mandat et à notre sphère d'activité.
Le sénateur Callbeck: Avez-vous fait des études sur la déréglementation de l'industrie du transport par autobus? Je sais que vous avez examiné la question du point de vue du transport en milieu urbain.
M. Roschlau: C'est-à-dire que nous nous sommes penchés sur la question en vue de déterminer l'éventuel impact, d'un point de vue juridique, de propositions précédentes sur les services en milieu urbain, mais c'est tout.
Le sénateur Callbeck: Vous avez donc fait des études là-dessus? Je suppose que vous avez examiné la question en profondeur.
M. Roschlau: Nous avons fait une étude de l'éventuel impact de propositions antérieures sur les services de transport urbains et régionaux.
Le sénateur Callbeck: Sur votre site Web, vous indiquez qu'un de vos objectifs consiste à sensibiliser la population à l'importance des enjeux essentiels touchant les services de transport urbains, et ce afin de créer et de maintenir une image positive de votre secteur d'activité. Comment faites-vous cela?
M. Roschlau: Par l'entremise d'une série d'initiatives, dont certaines consistent à préparer des documents expliquant le rôle des transports publics en milieu urbain et les avantages qui découlent d'une utilisation accrue des transports en commun. À l'heure actuelle, l'industrie participe à une campagne de sensibilisation du public à l'échelle à la fois nationale et internationale, puisque nous collaborons avec notre pendant américain pour faire mieux comprendre les avantages des transports publics par rapport aux transports personnels, et ce qu'il est possible de faire en intensifiant le recours aux services de transport par autobus, par train ou par métro au lieu de voyager seul dans sa propre voiture. Il s'agit de faire mieux comprendre les avantages du point de vue de la réduction des gaz à effet de serre et de l'amélioration de la qualité de l'air et de la qualité de la vie dans nos collectivités respectives, de l'espace requis pour construire des routes et des terrains de stationnement, des investissements que doivent faire les municipalités et d'autres autorités pour entretenir les routes les autoroutes, et du fait que l'utilisation accrue des transports en commun peut améliorer notre qualité de vie à tous ces différents égards.
Le sénateur Callbeck: Et comment faites-vous pour communiquer ce message au public?
M. Roschlau: Il y a des brochures sur la question. De plus, au cours des derniers mois, il y a eu des publicités à la télévision, et nous avons aussi cherché à communiquer ce message par le biais de nos membres à l'échelle locale ou nationale. Nos membres sont les responsables de services de transport publics dans les villes et régions de l'ensemble du Canada; par le biais de leurs municipalités ou de leurs administrations régionales, ils nous servent de points de contact locaux et peuvent aussi diffuser ce message.
Le sénateur Callbeck: Donc, pour revenir sur la question du transport interurbain par autocar, vous n'avez pas d'opinion sur le degré de services de transport interurbain par autocar au Canada?
M. Roschlau: Non; nous nous intéressons surtout aux services de transport urbains et régionaux, qui correspondent à notre mandat.
Le sénateur LaPierre: Je voudrais m'assurer de comprendre quelque chose. Ai-je raison de croire que vous représentez les responsables des services de transport urbain?
M. Roschlau: Oui.
Le sénateur LaPierre: Autrement dit, vos services sont entièrement régis par les provinces, par suite de la Loi constitutionnelle de 1867, qui accorde la responsabilité des municipalités aux provinces, n'est-ce pas?
M. Leck: Je ne crois pas me tromper en vous disant que toutes les sociétés de transport locales — que ce soit OC Transpo, la TTC ou la London Transit Commission — sont créées par suite de lois provinciales. On considère généralement que c'est une question qui relève des autorités locales d'une province.
Le sénateur LaPierre: Est-ce que le gouvernement fédéral a quelque chose à voir là-dedans?
M. Leck: Non.
Le sénateur LaPierre: Donc, ça relève uniquement de la responsabilité des provinces. Assurez-vous des services interurbains ou êtes-vous présents uniquement dans la nouvelle Ville de Toronto, par exemple, plutôt qu'à Mississauga?
M. Leck: M. Roschlau est mieux placé que moi pour vous parler d'autres régions, mais en ce qui concerne Toronto, le mandat de la TTC ne touche que la Ville de Toronto. Cependant, nous avons le pouvoir de conclure des ententes avec d'autres municipalités ou régions municipales pour assurer le service transfrontalier. Par exemple, il se peut que des véhicules de la TTC quittent la ville de Toronto, par exemple, pour se rendre à Mississauga ou dans d'autres zones, mais cela ne se produit pas souvent. Il s'agit simplement d'assurer une liaison entre diverses régions urbaines.
Le sénateur LaPierre: On peut donc supposer que le réseau de Mississauga amène les clients jusqu'à un certain point, après quoi la TTC les prend et les amène jusqu'à Toronto, n'est-ce pas?
M. Leck: C'est exact.
M. Roschlau: L'intérêt de cette formule, c'est qu'elle permet de fournir le service le plus commode et intéressant possible au client. Généralement les clients se préoccupent peu de ce que le trajet entre la maison et le travail les force à traverser une limite municipale. Dans des villes comme Toronto ou Montréal, où plusieurs réseaux municipaux coexistent, on s'efforce de coordonner les services.
Par exemple, dans le cas du réseau de Laval, l'autobus traverse le pont et s'arrête directement au terminus, à la station Henri-Bourassa. Le Réseau de transport de Longueuil traverse le pont Champlain et s'arrête au terminus du centre de Montréal. À Mississauga, le système de transport en commun sillonne tout Toronto mais le service s'arrête à la dernière station de métro. Ces liaisons, qu'elles soient assurées par le service municipal ou en collaboration avec un réseau régional, comme GO Transit dans la RGT ou le réseau parallèle de Montréal, permettent d'intégrer des réseaux locaux qui offrent un service de train de banlieue, par exemple, comme celui exploité par GO, de même que des tarifs intégrés.
Le sénateur LaPierre: Je suis tout à fait en faveur de ce genre de formule. Par contre, on ne peut pas dire que les services qu'ils assurent sont des services de transport interurbains. Ils se contentent de prévoir des liaisons.
[Français]
Pour faire débarquer les gens, les rembarquer, en fait les transporter.
M. Roschlau: Il est important de bien comprendre la question du transport interurbain et intermunicipal. En réalité, on existe dans un monde de régions urbanisées qui comprennent plusieurs municipalités.
[Traduction]
Il existe de nombreuses zones urbaines au Canada qui englobent diverses municipalités, comme la Région du Grand Toronto, une zone économique composée à la fois d'administrations municipales et régionales. La Ville d'Ottawa et la Ville de Gatineau assurent beaucoup de services de transport entre les deux rives; ainsi le système de transport en commun de la Ville d'Ottawa coordonne ses services avec ceux de la STO en traversant la rivière et en prévoyant des liaisons directes. Montréal regroupe de nombreuses municipalités, moins qu'auparavant mais encore beaucoup, si bien qu'il faut coordonner les services là où les déplacements intermunicipaux et intraurbains sont nombreux. Le terme «intermunicipal» s'applique aux déplacements entre les municipalités mais dans une même zone urbaine.
Le sénateur LaPierre: Oui, je comprends. Mais quand les membres du comité parlent de transport interurbain par autocar, nous parlons essentiellement de trajet entre Ottawa et Kingston, par exemple, et non entre Ottawa et Gatineau. Donc, pourquoi notre décision de déréglementer ce secteur vous inquiéterait, puisque cela ne vous regarde pas du tout?
Est-ce correct de poser cette question au témoin, madame la présidente?
La présidente: Pas vraiment, mais je pense que le témoin peut répondre.
M. Roschlau: Votre question est non seulement justifiée mais va au coeur du sujet. Il est possible, si le secteur du transport interurbain par autocar est déréglementé et que le régime déréglementé vise une entreprise désignée extraprovinciale, que cette dernière puisse décider, par suite de cette déréglementation, de desservir un itinéraire le long de la rue Albert à Ottawa, étant donné qu'aux termes de la loi, cette mesure de déréglementation fédérale l'emporterait sur les lois provinciales ou municipales en vigueur.
Le sénateur LaPierre: Est-ce possible? Et est-ce vraiment probable?
M. Roschlau: C'est tout à fait possible.
Le sénateur LaPierre: Dans ce cas, il convient d'en tenir compte.
Le sénateur Phalen: Comment se fait-il que vous n'ayez pas d'opinion sur la déréglementation par opposition à la réglementation?
Le sénateur LaPierre: Si j'ai bien compris, le témoin nous dit qu'il ne faut pas recommander la déréglementation parce qu'elle risque de leur causer de graves préjudices.
La présidente: Sénateur LaPierre, il faudrait permettre au témoin de répondre.
M. Roschlau: Oui, à moins qu'on ne prévoie une dérogation qui nous protège contre certaines éventuelles conséquences fortuites.
Le sénateur Spivak: Autrement dit, il vous importe peu — étant donné que ceci ne fait pas partie de votre mandat — qu'il y ait plus ou moins de concurrents assurant le service interurbain, c'est-à-dire entre les villes, à condition qu'il n'y en ait pas dans les villes. C'est çà?
M. Roschlau: À condition que les zones urbaines puissent maintenir un réseau intégré, bien planifié et coordonné de services qui relève d'une seule structure.
Le sénateur Spivak: Je comprends. J'essaie d'approfondir les principes qui sous-tendent votre position. Vous dites qu'il ne doit pas y avoir de concurrence dans les zones urbaines, mais qu'il vous importe peu qu'il y en ait en dehors. Peut-on donc en conclure que pour vous, la concurrence peut s'exercer dans le secteur du transport public urbain, à condition que ce soit dans le contexte d'un réseau intégré? C'est çà? Mon questionnement n'est pas directement lié au transport interurbain proprement dit, mais je voudrais quand même comprendre.
M. Roschlau: Oui, je comprends, sénatrice, que vous cherchez à démêler les divers aspects de la situation, et votre question me paraît tout à fait valable. Mais pour y voir plus clair, il conviendrait que je revienne sur certains principes, si vous me permettez.
Le point de départ est la nature des déplacements dans les zones urbaines. Au Canada, nous vivons dans une société qui est très semblable à celle des États-Unis et d'autres pays européens où beaucoup de gens possèdent leurs propres véhicules et où le moyen de transport le plus utilisé dans les zones urbaines est l'automobile. Si nous voulons que les administrations de transport en commun jouent un rôle plus important pour ce qui est d'assurer la mobilité des citadins, pour toutes les raisons que j'ai déjà évoquées, les services doivent être structurés de façon à attirer plus d'utilisateurs, à assurer et à faciliter l'accès à un réseau bien intégré et facile à comprendre. Tant qu'autant de citadins posséderont des automobiles, un transporteur privé ne sera pas à même de rentabiliser des services de transport publics, ni même de rentrer dans ses frais, que la concurrence s'exerce ou non.
Le sénateur Spivak: Bon, je comprends.
M. Roschlau: Il est bien possible qu'un transporteur privé puisse faire de gros bénéfices en desservant un itinéraire le long de la rue principale d'une grande ville, mais il ne pourra pas rentabiliser un réseau complet qui dessert l'ensemble d'une zone urbaine.
Le sénateur Spivak: C'est l'argument classique du service public par opposition à la propriété privée. Maintenant je comprends. Merci.
La présidente: Monsieur Leck, vous avez signalé que dans le contexte d'éventuelles modifications législatives, il convient de maintenir le pouvoir des provinces de réglementer les services de transport public urbain. Puisque tous ces services sont subventionnés par les provinces et les municipalités, pourquoi ce pouvoir réglementaire est-il encore nécessaire? Comme ces services sont subventionnés, on peut supposer que les responsables de ces services doivent faire ce qu'on leur dit de faire.
M. Leck: Le fait que certaines entreprises de services d'autobus soient subventionnées ne signifie pas nécessairement qu'elles ont un avantage concurrentiel par rapport à d'autres, parce qu'il y a un certain nombre d'itinéraires qui sont rentables et qui sont fortement utilisés. Il existe également un réseau d'autres itinéraires qui ne sont pas très rentables, mais le genre de réseau qui est dans l'intérêt du public, selon l'ACTU, serait un réseau intégré et complet qui réponde de façon optimale aux besoins des habitants d'une région donnée.
Revenons maintenant sur la possibilité de modifications législatives. Si l'on supprime le pouvoir, délégué aux provinces, de contrôler ou de réglementer les activités d'entreprises extraprovinciales de services d'autobus ou d'autocar, une entreprise extraprovinciale pourrait s'implanter sur ce marché, décider de desservir seulement les itinéraires les plus rentables, piquer les clients des autres et chambarder complètement le réseau de transport public d'une ville. Cela aurait pour résultat de faire monter les tarifs pour les utilisateurs et les dépenses pour les contribuables qui financent le réseau.
Ces entreprises pourraient dire: «Écoutez, nous sommes des entreprises régies par la réglementation fédérale et vous, le conseil municipal ou la province de l'Ontario, n'avez pas le droit de nous empêcher de desservir certains itinéraires dans tel environnement urbain.»
La présidente: Quelle est la population minimale requise pour qu'une municipalité soit en mesure de viabiliser un réseau de transport en commun? Le savez-vous?
M. Roschlau: Il faut généralement une population se situant entre 20 000 et 25 000.
La présidente: Si une petite localité n'a pas de réseau de transport public, la loi permet-elle qu'un exploitant privé assure des services de transport? À votre avis, la situation actuelle est-elle adéquate ou faut-il changer des choses?
M. Roschlau: Normalement, une localité qui n'est pas assez grande pour viabiliser un réseau de transport public, aussi simple et rudimentaire soit-il, n'aurait pas une demande de services suffisante pour permettre à un exploitant privé de rentabiliser un tel réseau. Aucun exemple d'une telle situation ne me vient à l'esprit pour le moment.
Me permettriez-vous, madame la présidente, d'élucider un élément de votre question antérieure? Cela concerne ce que vous disiez à propos de la concurrence. Il y a d'autres façons de s'assurer que la concurrence s'exerce dans le contexte actuel du transport public urbain.
Nous avons plusieurs exemples de municipalités ou d'administrations régionales au Canada ayant mis sur pied un réseau de transport en commun, qui ont procédé à un appel d'offres pour structurer les opérations. L'établissement des itinéraires, des horaires et du niveau de service relève d'une administration centrale, mais la prestation des services est sous-traitée à des exploitants privés, en fonction de la meilleure soumission. Dans certains cas, c'est la municipalité qui possède et fournit les véhicules; dans d'autres, c'est l'entrepreneur privé qui fournit les véhicules. Nous en avons un exemple ici à Ottawa: Para Transpo a toujours été administré par un exploitant privé au nom de la Ville d'Ottawa.
La présidente: Merci beaucoup messieurs. À présent nous sommes mieux informés qu'avant la réunion.
La séance est levée.