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RAPPORT DU COMITÉ

Le mercredi 11 décembre 2002

Le Comité sénatorial permanent des transports et des communications 

a l'honneur de déposer son

TROISIÈME RAPPORT


Votre Comité, qui a été autorisé par le Sénat le mercredi, 30 octobre 2002 à étudier pour en faire rapport les enjeux stratégiques touchant l'industrie du transport interurbain par autocar, dépose maintenant son rapport intitulé Le transport par autocar au Canada, qui est joint.

Respectueusement soumis,

La présidente,
JOAN FRASER


LE TRANSPORT PAR AUTOCAR AU CANADA

Le Comité sénatorial permanent des transports et des communications

Présidente: L’honorable Joan Fraser
Vice-président: L’honorable Leonard Gustafson

TROISIÈME RAPPORT

Décembre 2002


MEMBRES  

L’honorable sénateur Joan Fraser, présidente  
L’honorable sénateur Leonard Gustafson, vice-président  

et  

Les honorables sénateurs :

Willie Adams

B. Alasdair Graham, C.P.

Michel Biron

Janis G. Johnson

Catherine S. Callbeck

Laurier L. LaPierre

* Sharon Carstairs, C.P. (ou Fernand Robichaud, C.P.)

* John Lynch-Staunton (ou Noël Kinsella)

Joseph A. Day

Gerard A. Phalen

J. Trevor Eyton

Mira Spivak

* Membres d’office  

L’honorable sénateur Bacon était présidente du Comité au cours de la première session de la trente-septième Législature, et l’honorable sénateur Oliver était vice-président.  Les honorables sénateurs Adams, Atkins, Baker, P.C., Biron, Callbeck, Carstairs, C.P. (ou Robichaud, C.P.), Comeau, Eyton, Forrestall, Gustafson, Jaffer, LaPierre, Lawson, Lynch-Staunton (ou Kinsella), Maheu, Phalen, Spivak et Watt étaient membres du Comité ou ont participé à ses travaux sur cette étude au cours de cette session.

Personnel de recherche :

Martin Brennan, conseiller spécial du Comité
Joseph P. Dion, division de la recherche parlementaire, Bibliothèque du Parlement

Nota : Michel Patrice et Richard Maurel étaient greffier du Comité à différents moments au cours de la première session de la trente-septième Législature.

Le greffier du Comité
Till Heyde


ORDRE DE RENVOI  

Extrait des Journaux du Sénat du mercredi 30 octobre 2002 : 

L'honorable sénateur Fraser propose, appuyée par l'honorable sénateur Lapointe,  

Que le Comité sénatorial permanent des transports et des communications soit autorisé à examiner pour en faire rapport les enjeux stratégiques touchant l'industrie du transport interurbain par autocar; 

Que le Comité présente son rapport final au plus tard le vendredi 20 décembre 2002; et  

Que les mémoires reçus et les témoignages entendus sur la question par le Comité au cours de la première session de la trente-septième législature soient déférés au Comité. 

La motion, mise aux voix, est adoptée.  

Le greffier du Sénat  
Paul Bélisle

 

NOTA : À l’exception du dernier paragraphe, qui n’était pas inclus dans la version originale, cet ordre de renvoi est identique à celui que le Sénat a approuvé le mercredi 26 septembre 2001, en adoptant le cinquième rapport du Comité (présenté le mardi 25 septembre 2001), pour autoriser cette étude au cours de la première session de la trente-septième Législature.


TABLE DES MATIÈRES

Avant-propos de la Présidente

 

 

 

Liste des recommandations

 

 

 

1.   Introduction

 

 

 

2.   Contexte

 

      2.1       La réglementation économique de l’autocar

 

                  Réglementation et déréglementation économiques du transport

      2.2       La politique nationale des transports

 

      2.3       Le secteur

 

      2.4       Tentatives de convenir d’une politque

 

      2.5       La sécurité

 

 

 

3.   Les audiences du Comité

 

 

 

4.   Enjeux

 

      4.1       Les chiffres

 

      4.2       Achalandage et perspectives

 

      4.3       La politique nationale des transports

 

      4.4       La réglementation, l’interfinancement et la déréglementation

 

      4.5       Autocars, fourgonnettes et dessertes rurales

 

      4.6       Les subventions

 

      4.7       Les passagers handicapés

 

      4.8       La sécurité des autocars

 

      4.9       La concentration de la propriété

 

      4.10     Les autocars nolisés

 

      4.11     Le consensus sur la déréglementation est-il possible?

 

      4.12     Les questions écologiques

 

                  Impact écologique de l’autocar

 

 

 

5.   Options pour l’avenir

 

      5.1       Options réglementaires

 

      5.2       Options pour les dessertes éloignées

 

      5.3       Options pour la sécurité

 

      5.4       Options financières

 

      5.5       Options écologiques

 

 

 

6.   Recommandations

 

      6.1       Réglementation économique

 

      6.2       Garanties de desserte des petites localités et des régions rurales

 

      6.3       Passagers handicapés

 

      6.4       La sécurité

 

      6.5       Questions plus larges concernant l’autocar

 

      6.6       Consensus sur la réglementation des autocars

 

 

 

Annexe A: Lettre de l’honorable David Collenette, C.P., député, à l’honorable sénateur Lise Bacon

 

Annexe B: Article cinq de la Loi sur les transports au Canada

 

Annexe C: Bibliographie choisie

 

Annexe D: Structures du secteur

 

Annexe E: Frais d’utilisation et Agence des routes

 

Annexe F: Témoins

 


AVANT-PROPOS DE LA PRÉSIDENTE

Ce rapport est déposé au Sénat à la deuxième session de la trente-septième Législature, mais le lecteur doit savoir que presque tout le travail préparatoire a eu lieu durant la session précédente.

            Cette étude a été déclenchée suite à une lettre reçue du Ministre des Transports au milieu de 2001. Ce sont les sénateurs qui étaient membres du Comité durant la première session de la trente-septième Législature qui ont tenu la plupart des audiences sur ce sujet et qui ont étudié le dossier en détail. Lorsque le Sénat a demandé au Comité de terminer l’étude durant la nouvelle session, les membres nouvellement nommés ont profité de la sagesse et du savoir acquis par leurs prédécesseurs.

            Notre rapport est le produit du Comité actuel, même s’il n’aurait pas vu le jour sans le précieux travail de nos prédécesseurs dont il s’inspire. C’est donc le Comité actuel qui est seul responsable de son contenu.

            Au nom de tous mes collègues du Comité, je désire donc reconnaître notre lourde dette envers les sénateurs qui ont participé de façon si diligente à cette étude, à la présente session et surtout à la session précédente. Je tiens à saluer particulièrement le travail du sénateur Lise Bacon, présidente du Comité durant la session précédente, et du sénateur Donald Oliver, qui en était vice-président. Le nom des autres sénateurs qui ont participé à l’étude durant l’une ou l’autre session figure à la première page contenue dans ce rapport.   

L’honorable Joan Fraser  
Présidente du Comité
   


LISTE DES RECOMMANDATIONS

1.                  Le Comité recommande que la réglementation économique du transport extraprovincial par autocar soit modifiée et impose au plus une inversion du fardeau de la preuve pour l’accès au marché, à la manière du régime instauré pour le camionnage en 1987, et qu’on évalue après cinq ans la pertinence de poursuivre la déréglementation par un examen formel.

Ce régime de fardeau de preuve inversé, adéquatement assorti d’exigences en sécurité et responsabilité, devrait comporter un moyen de dissuader les contestations frivoles faites à l’encontre de demandeurs de permis.

2.         Le Comité recommande un modeste programme de subvention, peut-être de l’ordre de 30 millions de dollars par année, pendant la période de transition. Le programme, qui serait soumis à l’évaluation quinquennale formelle, servirait à créer des dessertes locales en région, avec de petits véhicules, à la condition de pouvoir en prouver le besoin et d’avoir l’aide de la collectivité, du gouvernement provincial ou d’une entreprise locale.

3.         Le Comité recommande que le fédéral et les provinces examinent sérieusement les problèmes des handicapés qui se déplacent en autocar, pour s’assurer que les dispositions de l’énoncé de politique de la Loi sur les transports au Canada sont respectées.

4.         Le Comité recommande que le fédéral et les provinces examinent le Code national de sécurité afin que les petits autobus et les fourgonnettes susceptibles d’être utilisés pour le transport public soient visés par le Code et que les critères d’entretien, les normes de formation des chauffeurs et d’autres aspects essentiels de la sécurité soient largement annoncés et puissent être appliqués.

5.         Le Comité recommande que le gouvernement fédéral et les provinces envisagent une collaboration pour trouver comment le Canada pourrait bénéficier davantage des avantages écologiques de l’autocar, en particulier dans le contexte du Protocole de Kyoto sur le changement climatique. Le Comité recommande également une étude plus large des coûts et bénéfices propres aux divers modes de transport.

6.                  Le Comité recommande que le gouvernement fédéral réévalue la nécessité d’un consensus entre tous les gouvernements et les intervenants avant de donner suite à une politique sur l’autocar.


1.  INTRODUCTION 

Le présent rapport concerne les autocars : pas les autobus que les Canadiens prennent tous les jours pour se rendre au travail, mais bien les véhicules interurbains qui leur permettent d’aller visiter des parents, de commencer un nouvel emploi, de retourner à l’école, de partir en vacances ou de se faire soigner. Les autocars transportent environ 14 millions de passagers par an au Canada.  

Au départ, il faut reconnaître que les autocars sont un moyen de transport essentiel dans notre pays. Pour de nombreux Canadiens, en particulier les jeunes, les aînés, les moins nantis et les habitants des régions éloignées, l’autocar est l’un des moyens de transport les plus disponibles, voire le seul. Dans bien des cas, ceux qui doivent voyager n’ont tout simplement pas accès à une auto.  

L’autocar, comme on l’a dit au Comité dessert des milliers de localités de toute taille au pays, contrairement au train qui s’arrête dans quelques centaines de gares et à l’avion qui se pose dans quelques dizaines d’aéroports. Le réseau d’autocar est comme une toile reliant les localités du Canada, des petits villages aux grandes villes. Il fait en sorte que tous les Canadiens, autant les ruraux qui veulent aller en ville que les citadins qui souhaitent se rendre à la campagne, profitent d’une mobilité à la grandeur du pays et peuvent profiter de toutes ses possibilités. L’autocar est relativement bon marché; il est rapide, commode et écologique.  

Au fil des ans, l’autocar a vu sa part de marché et son achalandage diminuer. Cela est lié à divers facteurs : hausse des revenus et de la propriété de l’automobile (taux de motorisation); urbanisation; expansion des réseaux de transport en commun urbain hors des villes; système de réglementation qui date des années 1930. Le Comité a été invité à considérer ces facteurs et à trouver des façons d’assurer la survie et la prospérité de ce moyen vital de transport public dans l’avenir.  

Le Comité a examiné des questions comme les effets de la participation de l’État au transport par autocar, pour savoir si la réglementation aide ou nuit au secteur, et s’il lui est nécessaire de continuer à réglementer pour maintenir certaines dessertes parmi les moins achalandées.  

Les membres du Comité ne sont pas tous d’accord sur ce point, mais la majorité conclut que l’État devrait se retirer graduellement de la réglementation des tarifs et permettre à terme que les normes de service et les prix soient régis par la concurrence. En même temps, le Comité au complet craint beaucoup que cela laisse des routes non desservies, généralement dans les régions même du pays qui ont le plus besoin de l’autocar.  

Le Comité présente donc des recommandations qui visent à encourager les promoteurs à prendre leur place avec des véhicules convenant au service, comme des mini-fourgonnettes, afin de prouver ce qu’ils peuvent faire. Le rapport recommande également des subventions en régions rurales pour faciliter l’adaptation durant la transition.  

Nous formulons également des avis sur les problèmes éprouvés par les voyageurs handicapés, et une recommandation à leur intention. La propriété des compagnies, la sécurité et les politiques nationales sur le transport sont également abordés dans le rapport.  

Le Comité a eu de la difficulté à élaborer des suggestions sur la façon que les Canadiens pourraient pleinement profiter des avantages écologiques de l’autocar. Même si l’autocar est un moyen efficace de transport des personnes, la plupart des Canadiens font leurs déplacements interurbains en auto. La commodité, le confort et l’intimité de l’auto rendent très difficile de persuader les usagers de laisser leur voiture à la maison.  Le Comité n’a pas entendu suffisamment de témoignages au sujet des options comme la facturation des routes pour pouvoir formuler des recommandations précises, mais nous retenons que cette idée appelle une étude plus poussée.  

Le rapport donne le contexte de l’autocar et offre des références à ceux qui voudraient approfondir le sujet. Notre rapport est donc à la fois une introduction pour ceux qui sont intéressés au développement du potentiel de ce moyen de transport – usagers, écologistes et citoyens préoccupés par le monde rural – et un guide qui aidera ceux qui ont des responsabilités dans le domaine – le fédéral, les provinces, les territoires et les compagnies – à réaliser le plein potentiel des autocars.  


2.  CONTEXTE  

            En mai 2001, le Ministre des Transports l’honorable David Collenette, a demandé à la présidente du Comité sénatorial permanent des transports et des communications à l’époque, l’honorable Lise Bacon, que le Comité examine les facteurs qui conditionnent le transport par autocar, afin d’intervenir sur ce dernier et d’aboutir à une situation saine, efficace et concurrentielle dans ce secteur.[1]  Le Ministre a fourni au Comité un document d’orientation de Transports Canada sur le transport par autocar au Canada, daté de mars 2001.[2]  

            En juin 2001, le Ministre a rencontré le Comité pour expliciter sa demande.  L’étude qu’il suggérait couvrirait l’autocar interurbain et l’autocar nolisé, notamment les services qui transportent des passagers sur des distances moyennes et longues.  Il a affirmé que jusqu’à 1987, l’autocar longue distance transportait davantage de passagers au Canada que les compagnies aériennes – en effet, en 1970, il avait assuré 46 millions de voyages, plus que l’avion et le train combinés.  En 2001, le nombre de voyages était tombé à 14 millions, l’automobile particulière accaparant aujourd’hui plus de 90 % des déplacements interurbains.

Le Ministre a souligné que l’autocar est un moyen de transport utile, écologique, souple et très disponible, mais qu’il perd constamment du terrain face à la concurrence.  Il a posé au Comité deux grandes questions : quelles sont les possibilités d’inverser le déclin à long terme dans l’achalandage de l’autocar et quelle devrait être la place de l’autocar dans la stratégie globale du Canada pour contrer les problèmes écologiques causés par les transports?

Le Ministre a ensuite fourni d’autres informations, en particulier sur la réglementation économique, abordée dans ce chapitre du rapport.  Il a souligné que, lors des tentatives précédentes de corriger la situation, le gouvernement fédéral a fait clairement savoir qu’il n’avait nullement l’intention de changer les règles économiques régissant l’autocar tant qu’il n’y aura pas consensus parmi les provinces et les entreprises.  Il a ensuite posé plusieurs questions plus précises qu’il aimerait voir abordées par le Comité :  

·                    Les différences entre les régimes provinciaux qui sont apparues au cours des ans, ont-elles nui au transport par autocar et au public voyageur?

·                    Dans l’affirmative, comment pourrait-on corriger la situation?

·                    Quelles sont les conséquences stratégiques possibles de la concentration du secteur depuis dix ans?

·                    La réglementation économique de l’industrie est-elle encore un outil approprié?

·                    L’autocar traditionnel, à horaire fixe, est-il encore le meilleur moyen de transport en commun en région et vers les petites localités? Quelles sont les autres options possibles?

Le Ministre a résumé en demandant au Comité de  prescrire une « ordonnance » pour soigner les maux du transport par autocar au Canada, moyen de transport utile affligé d’un long déclin.  

Ce rapport ne contient pas énormément de détails à ce chapitre, car la majeure partie de l’information est facilement disponible ailleurs.  Par exemple, Transports Canada produit un rapport annuel très riche en information sur les divers modes de transport.[3]  Ce rapport contient des renseignements sur la structure de l’industrie, les revenus et l’historique de l’achalandage par segment et donne la liste des principaux transporteurs et leurs résultats financiers.  

            Le document d’orientation de mars 2001 de Transports Canada est également accessible au public et détaille des éléments comme la structure de l’industrie, sa situation financière, l’achalandage des autres modes de transport, les données écologiques sur les véhicules et la réglementation.

            Plusieurs études importantes et autres publications disponibles permettent de dresser un tableau de l’industrie du transport en autocar.  Elles couvrent la période récente au Canada et portent également sur la déréglementation économique du transport longue distance par autocar en Grande-Bretagne et aux États-Unis.  L’Annexe C contient les titres de bon nombre de ces études et rapports.  

            Les prochaines parties de cette section abordent certaines questions clé qui ont rapport avec l’industrie du transport par autocar.  

2.1       La réglementation économique de l’autocar  

Il est à noter que la réglementation économique et la réglementation de la sécurité sont deux choses complètement différentes.[4]  Dans la présente étude, personne ne propose quelque allégement que ce soit  à la réglementation de la sécurité.  Néanmoins, le Comité a quelques observations à faire sur ce sujet plus loin.

            Il est question de la réglementation économique du transport. Il s’agit essentiellement pour le gouvernement de fixer des règles sur la manière dont les affaires peuvent être conduites. Dans le cadre de discussions stratégiques sur le transport, le terme « réglementation économique » est souvent assimilé à « réglementation ».  Mais soyons clairs – il n’est pas question de la sécurité.  

            La réglementation n’a pas à être blanche ou noire.  À un extrême, on trouve la réglementation stricte comportant l’interfinancement, à l’autre, un régime où l’accès est déréglementé, où un transporteur peut offrir le service qu’il veut, à la condition qu’il respecte les normes de sécurité et d’assurance. 

            En déréglementant le camionnage extraprovincial par la Loi de 1987 sur les transports routiers, le gouvernement fédéral a modifié les règles afin de permettre aux provinces de réglementer le camionnage extraprovincial uniquement en utilisant l’inversion du fardeau de la preuve.  Dans ce système, tout transporteur souhaitant obtenir un permis peut en faire la demande à l’office provincial.  Des tiers peuvent s’y opposer à condition de prouver que le service serait contraire à l’intérêt public.  Si cette preuve n’est pas faite, l’office provincial est tenu de délivrer le permis.  


            Cela est très différent d’une situation où le fardeau de la preuve incombe au demandeur, formule employée aujourd’hui pour les transporteurs dans les régimes réglementés.  Dans le cas des camions, la mesure de 1987 a été prise à titre provisoire sur la voie d’une déréglementation économique complète qui devait suivre dans les cinq ans.

            Dans les années 1950, les tribunaux ont établi que la réglementation économique des transporteurs dont les autocars franchissent les limites provinciales et la frontière (appelée parfois autocars extraprovinciaux) était de responsabilité fédérale, même dans les cas où la compagnie n’avait qu’une partie de ses opérations à l’extérieur de sa province d’attache.[5]  Toutes les activités de la compagnie étaient visées par la réglementation économique fédérale.  

Cependant, le gouvernement fédéral du jour, mal préparé pour assumer cette responsabilité, a décidé de la déléguer aux provinces, qui disposaient du personnel et des institutions pour s’en charger.  Pour ce faire, il a adopté la première Loi sur les transports routiers, en 1954.  Des changements apportés à cette loi, les plus récents en 2001, ont maintenu cette délégation.  Les provinces sont donc entièrement libres de contrôler ou non les tarifs des autocars et les conditions d’accès au marché. 

Cette situation pourrait changer par simple mesure législative, comme ce fut le cas en 1987, lorsque le Canada a entrepris la déréglementation économique du camionnage extraprovincial.  

            Certaines provinces maintiennent la réglementation économique de certains aspects du transport par autocar, de sorte que l’autocar demeure dans ces provinces le seul moyen de transport interurbain, tant de passagers que de marchandises, dont l’État contrôle les tarifs.   

            La réglementation peut consister à poser les conditions de démarrage d’une entreprise : le promoteur doit alors justifier la nécessité de ses services devant un office. D’autres exploitants qui desservent déjà ces routes peuvent fort bien contester une demande.  Le permis accordé au demandeur peut être assorti de limites sur les tarifs, la fréquence du service et les conditions d’abandon des routes accordées.  L’interfinancement entre les routes rentables et les routes non rentables peut également être une condition de l’octroi d’un permis, et le tarif exigé peut correspondre à l’attente de revenu total et au rendement financier convenu pour l’entreprise en cause.  

            Dans d’autres provinces, les autocars ne sont pas sujets à la réglementation économique, et la seule condition nécessaire pour offrir un service est que le demandeur dispose d’un autocar sécuritaire et d’une assurance adéquate.  Les compagnies sont alors libres d’établir leurs tarifs et leur horaire.  On dit parfois alors que le demandeur est « prêt, apte et disposé » à offrir le service.

 

            L’Île-du-Prince-Édouard, les Territoires du Nord-Ouest et le Nunavut ont entièrement déréglementé les tarifs, les routes et l’accès au marché; la Colombie-Britannique, la Saskatchewan, le Manitoba, le Québec et la Nouvelle-Écosse exercent une réglementation économique importante.  Il reste relativement peu de contrôles économiques en Ontario, en Alberta, au Nouveau-Brunswick, à Terre-Neuve et Labrador et au Yukon.  Il en résulte un régime inégal d’un bout à l’autre du pays.


2.2       La politique nationale des transports 

            La principale loi régissant le transport au Canada est la Loi sur les transports au Canada de 1996.  Elle s’applique avant tout aux aspects économiques de l’exploitation des chemins de fer et des compagnies aériennes et précise les attributions de l’Office des transports du Canada, organe fédéral de réglementation économique, qui ne participe pas directement à l’établissement des tarifs pour les marchandises et les passagers d’avion, aujourd’hui déréglementés au Canada.

            L’article 5 de la Loi, qui traite de la politique nationale des transports, est particulièrement pertinent pour cette étude et s’applique à tous les modes de transport de responsabilité fédérale. Cet énoncé est reproduit à l’Annexe B du rapport.  Citons en partie le premier paragraphe : « la mise en place d’un réseau sûr, rentable et bien adapté de services de transport viable et efficace…est essentielle à la satisfaction des besoins des expéditeurs et des voyageurs » et « ces objectifs sont plus susceptibles de se réaliser en situation de concurrence de tous les transporteurs, à l’intérieur des divers modes de transport ou entre eux… »  

2.3       Le secteur  

Le transport par autobus et autocar compte trois segments : l’autocar interurbain, le transport scolaire et le transport en commun urbain, mais ce Comité a étudié presque exclusivement l’autocar.  Ce segment comprend des sous-segments, comme les autocars nolisés et d’excursion, mais c’est le service interurbain qui transporte des passagers payants qui nous intéresse avant tout dans cette étude.  En juin 2001, quand il s’est adressé au Comité, le Ministre a souligné que le réseau interurbain dessert des petites localités et bon nombre des régions éloignées du pays, et il a qualifié le réseau de « fragile ».

 

L’autocar à horaire fixe existe dans toutes les provinces et territoires à l’exception du Nunavut. Les dessertes sont essentiellement régionales.[6]  Il existe un réseau national exploité par les compagnies de Laidlaw dont Greyhound, Grey Goose et Voyageur Colonial. Ces compagnies exploitent un réseau à partir de Montréal et du sud de l’Ontario jusqu’au Pacifique, ainsi que des services locaux et régionaux considérables en Ontario, au Manitoba, en Alberta et en Colombie-Britannique. Elles vont également aux États-Unis. Dans son mémoire soumis au Comité à l’appui de sa comparution le 26 mars 2002 à Calgary, Greyhound Canada Transportation Corporation a indiqué que Greyhound Canada détenait alors 40 % de l’achalandage de l’autocar à horaire fixe au Canada et que la part du marché total du groupe Laidlaw était inférieure à 45 %.

D’autres compagnies ont des opérations plutôt provinciales ou régionales : Orléans Express au Québec, Coach Canada en Ontario et Pacific Western, basé en Alberta.  

Laidlaw a établi sa position dominante assez récemment à la suite d’une restructuration et une consolidation qui a lieu depuis 10 ans.[7]  Elle a acquis en 1997 la Canadian Greyhound Transportation Corporation, important transporteur, puis US Greyhound en 1998.  En 2000, elle se portait acquéreur du reste de Penetang-Midland, aboutissement d’une opération entamée en 1998. Il résulte de ces transactions une concentration de propriété sans précédant dans le secteur.  

Laidlaw a déclaré de grosses pertes en 1999 et 2000. En juin 2001, elle a déposé des demandes volontaires de réorganisation en vertu du code de la faillite aux États-Unis et de la Loi sur les arrangements avec les créanciers de compagnies, au Canada. Les informations récentes concernant la situation financière de la compagnie, avec les revenus, le passif et l’actif au Canada et aux États-Unis, figurent au rapport trimestriel de la compagnie daté du 31 mai 2002.[8]  

            Le document d’orientation de Transports Canada indique que le transport par autocar à horaire fixe a généré des revenus de 236  millions de dollars en 1999; les revenus d’exploitation des autocars nolisés se sont élevés à 305 millions de dollars. Les revenus des services à horaire fixe oscillent entre 235 millions et 270 millions de dollars depuis 10 ans, mais les revenus du secteur des autocars nolisés sont en hausse.  

Le ratio d’exploitation est une mesure courante du rendement d’une compagnie de transport. C’est le rapport entre les dépenses d’exploitation et les revenus, exprimé en pourcentage; moins le ratio est élevé, meilleur est le rendement. Dans son rapport annuel de 2000, Transports Canada indique un ratio d’exploitation de 85,1 % pour l’autocar, ce qui, de l’avis du Ministère, représente un bon rendement financier et constitue une amélioration par rapport aux 91,6 % de 1994.[9]

 

2.4       Tentatives de convenir d’une politique  

Depuis 12 ans, on a tenté à plusieurs reprises de convenir d’une nouvelle orientation pour l’autocar.  Les changements apportés à la Loi sur les transports routiers en 1987 n’ont rien fait pour l’autocar, mais ont amorcé la déréglementation économique du camionnage longue distance et amené certaines provinces à déréglementer volontairement l’autocar.  

Des groupes fédéraux-provinciaux-sectoriels se sont rencontrés à plusieurs reprises vers 1995; ils se sont entendus sur la déréglementation du transport par autocar nolisé, mais non sur celle du service à horaire fixe.[10]  Tout récemment, en mars 1999, le projet de loi C-77 (1ère session, 36ème Législature) proposait de changer la Loi de 1987 sur les transports routiers pour retirer aux provinces le pouvoir de réglementer les routes interprovinciales et internationales. Mais ce projet de loi a été abandonné à cause des objections de plusieurs provinces.  Les détails de ces discussions se trouvent en bonne partie dans les publications énumérées à la bibliographie de l’Annexe C.  

Notre Comité a été invité à entreprendre cette étude en partie au moins parce qu’il avait beaucoup examiné les modifications apportées en 2001 à la Loi de 1987 sur les transports routiers en matière de sécurité, et parce qu’on pensait qu’une institution étrangère au débat sur la déréglementation économique pourrait fournir de nouvelles perspectives et rapprocher les parties d’une entente.

 

2.5       La sécurité  

Au Canada, les normes de construction des véhicules à moteur, dont les normes de sécurité, sont de responsabilité fédérale; une fois le véhicule sur la route cependant, sa sécurité est régie avant tout par le code de la route de la province.  

Afin de coordonner la sécurité partout au pays, et motivés par les préoccupations pour la sécurité au début de la déréglementation du camionnage, les ministères des Transports fédéral et provinciaux ont rédigé un Code national de sécurité pour les véhicules commerciaux en 1987.  

Le Code est un recueil de règlements et normes préparé conjointement sous le parrainage du Conseil canadien des administrateurs en transport motorisé.[11]  Il vise à uniformiser davantage la réglementation de la sécurité.  Il contient 15 normes sur des questions comme les permis de conduire, les tests des chauffeurs, les normes médicales, le chargement, l’entretien des véhicules, l’inspection routière et les audits des installations.  La norme 14 couvre la mesure du respect de l’ensemble du code par les transporteurs.  

Les changements apportés récemment à la Loi de 1987 sur les transports routiers ont donné force de loi Code national de sécurité.[12]  Lorsque les nouvelles dispositions seront en vigueur, elles permettront d’incorporer les règlements provinciaux au Code par référence à la Loi.  Celle-ci permet également au Ministre des Transports de passer des accords de sécurité avec les provinces afin de permettre à des fonctionnaires d’établir la cote de sécurité des transporteurs extraprovinciaux.  Les transporteurs en infraction peuvent à terme perdre leur cote de sécurité et devoir cesser leurs opérations.  Le Code s’applique également aux compagnies d’autocar extraprovincial.  

En septembre 2001, le Ministre a annoncé un fonds de 17,8 millions de dollars pour aider les provinces et les territoires à mettre le Code en œuvre.  Cela favorisera l’harmonisation et contribuera à l’application de la loi sur les routes, qui est du ressort des provinces et des territoires.


3.  LES AUDIENCES DU COMITÉ 

Le Comité a choisi de recueillir les commentaires de trois grands groupes intéressés par le transport interurbain par autocar : les utilisateurs, les transporteurs et les agences de réglementation. Des audiences ont été tenues à Ottawa et dans de grandes villes du pays. De plus, le Comité a entendu les avis de trois universitaires reconnus comme experts du domaine.  

Pour se faciliter la tâche, le Comité a produit un document d’information contenant diverses questions et divers enjeux qu’il a mis sur Internet.  Ce document avait pour but de guider les témoins afin qu’ils puissent préparer leur présentation.  Les questions suggérées ne se voulaient pas exhaustives, car le Comité s’attendait à ce que beaucoup d’autres soient soulevées avant la fin de l’étude, ce qui s’est avéré.  

Un effort particulier a été déployé pour entendre les usagers de l’autocar. Les usagers, réputés être moins nantis financièrement, sont en grande partie les étudiants, les autres jeunes et les aînés.  Pour cette raison, le Comité a invité les groupes d’aînés, les groupes d’étudiants, les associations représentant les personnes pauvres et les représentants des municipalités de toutes les régions du pays à participer.  Les organismes fédéraux intéressés par les questions régionales et les personnes âgées ont également été invités.  Les aînés étaient particulièrement désireux de participer, mais les organisations étudiantes semblaient avoir des préoccupations plus pressantes et davantage liées aux études.  

Les usagers et leurs représentants estiment généralement que le service d’autocar est important et que le service pourrait être amélioré.  Ils craignent que le service ne se détériore, soit en raison des tendances démographiques et économiques, soit à cause d’une modification du régime réglementaire.  De nombreux témoins de ces groupes estiment que la réglementation économique est nécessaire pour permettre l’interfinancement des routes à faible densité.  Beaucoup ont été impressionnés par une étude de KPMG commandée par l’industrie de l’autocar en 1998.[13]  Certains intervenants qui avaient profité de services novateurs, notamment le service de mini-fourgonnettes dans les Maritimes, voyaient l’avenir avec plus d’optimisme.  

Les transporteurs sont partagés au sujet de la réglementation économique. Certains transporteurs relavant d’agences réglementaires limitant l’arrivée de nouveaux acteurs font valoir que le statu quo, loin d’être idéal, est relativement bon et que tout changement serait un saut dans l’inconnu. Certains transporteurs frustrés dans leurs tentatives d’étendre leurs activités ont plaidé vigoureusement en faveur d’une libéralisation du marché. Des associations de transporteurs et l’association des avocats spécialisés dans le domaine du transport ont refusé de prendre position, étant donné que leurs clients comptent aussi bien des tenants que des adversaires de la réglementation et de la déréglementation.  

Des représentants de trois gouvernements provinciaux ont comparu et huit autres ont fait parvenir des mémoires. Certains préconisent la déréglementation ou l’ont déjà réalisée. D’autres prônent la prudence face à d’éventuels changements. Peu de gouvernements, voire aucun n’a défendu le statu quo. Cela peut s’expliquer par le fait que ces mêmes gouvernements tentent depuis dix ans d’harmoniser leurs régimes.  

Les observateurs du milieu du savoir ont présenté un vigoureux plaidoyer pour la déréglementation. Pour eux, ses avantages économiques sont clairs et les bienfaits supposés d’un régime réglementé sont imaginaires, les véritables conséquences étant l’appauvrissement du service et la léthargie du secteur.  


4.  ENJEUX  

            De nombreux enjeux sont apparus au cours de l’étude.  Voici les principaux, suivis d’une brève analyse. Les conclusions du Comité figurent ici.  Les recommandations du Comité sont présentées à la section six de ce rapport.

 

4.1       Les chiffres  

            Les rapports annuels de Transports Canada depuis cinq ans et le document d’orientation mentionné au début du rapport indiquent que l’achalandage du transport interurbain par autocar est passé de 32 millions de passagers en 1980 à 14 millions environ aujourd’hui, avec stabilisation depuis quatre ans.  Les chiffres semblent conformes à ceux qui indiquent les autocars-kilomètres,[14] l’utilisation de l’équipement et d’autres paramètres.

Le rapport de la Commission royale sur le transport des voyageurs au Canada, publié en 1992, concluait à des baisses substantielles de l’achalandage des autocars au cours des années précédentes et un groupe fédéral-provincial de sous-ministres en est arrivé à une conclusion semblable dans un rapport produit en 1996.[15]  Beaucoup de témoins ont affirmé avoir craint des abandons de routes au début des années 90 et même des transporteurs ont parlé d’un « déclin » durant cette période.[16]  

Dès le début de l’étude, les transporteurs ont été mal à l’aise avec les chiffres fournis.  Ils affirment qu’il n’y a pas vraiment de diminution d’achalandage sur les routes interurbaines, et que la confusion provient de la façon dont les passagers d’autocar étaient comptés dans les années 70, alors que l’on comptabilisait des parcours d’à peine 5 kilomètres comme déplacements interurbains.  Selon eux, les fusions municipales et la croissance du transport en commun urbain ont rendu les comparaisons bancales.  

Les données produites au fil des ans peuvent présenter certains problèmes; Statistique Canada l’admet et améliore ses méthodes de cueillette.  Pour sa part, le Comité reconnaît qu’il y a eu diminution de l’achalandage et accepte les données fournies par le Ministre des Transports, en reconnaissant qu’il s’agit d’une bonne approximation de la réalité.

Cette diminution n’était pas inattendue.  Il y a eu des changements marqués dans la répartition de la population du pays au fil des ans : l’urbanisation s’est accentuée, le taux de motorisation a progressé radicalement et le niveau de vie a également augmenté.  Pour ce qui est de notre étude, une des questions est de savoir si d’autres facteurs, comme le maintien de la réglementation économique d’une bonne partie du transport par autocar, peuvent également avoir joué un rôle dans la diminution.  

            Pour compléter ce tableau, Transports Canada indique dans son rapport 2000 que le train (à l’exclusion du train de banlieue) a transporté environ 4 millions de passagers en 1999 et l’avion, près de 27 millions sur les vols intérieurs.  Quant à l’automobile, les chiffres concernent tout le transport, y compris les déplacements de banlieue, mais il n’est pas fourni de données sur les voyages interurbains.  Cependant, des études antérieures révèlent que 85 % des voyages interurbains de moins de 500 kilomètres sont faits en voiture, proportion qui donne la mesure modeste des modes de transport publics.  À cause de ce déséquilibre, une réduction modeste du nombre de personne voyageant en automobile aurait un effet relatif très important  pour les moyens de transport publics.  

CONCLUSION 

Après avoir diminué pendant quelques dizaines d’années, l’achalandage de l’autocar semble s’être stabilisé à quelque 14 millions de voyageurs par année depuis quatre ans.[17]  La diminution est due à plusieurs facteurs : augmentation de l’utilisation de la voiture, urbanisation de la population, diminution du prix des billets d’avion sur certains trajets, conditions économiques nouvelles et peut-être un cadre réglementaire qui ne favorise pas l’innovation.

 


 

4.2       Achalandage et perspectives  

            Les aînés et les étudiants sont les groupes cibles que la plupart des témoins ont identifiés devant nous comme la clientèle principale de l’autocar.[18]  Il est reconnu que les usagers de l’autocar à horaire fixe comptent parmi les usagers les moins fortunés du transport en commun.  Le Comité dispose de chiffres de 1994 qui révèlent que plus de la moitié des passagers en autocar dans le corridor Québec-Windsor disposent d’un revenu familial annuel inférieur à 40 000 dollars et que 32 % disposent de moins de 20 000 dollars.  Une étude plus récente citée par l’Association canadienne de l’autobus établit à plus de 60 % la part des passagers « moins nantis » et à 42 % la part de voyageurs au seuil ou sous le seuil de la pauvreté.[19]

            Néanmoins, des personnes plus fortunées choisissent l’autocar quand il est rapide et commode.  En se rendant d’Ottawa à Montréal par autocar au début des audiences, les membres du Comité ont été surpris de voir combien de personnes descendaient à Dorval pour pendre l’avion.  Le service entre Edmonton et Calgary est lui aussi très populaire auprès de la clientèle d’affaires.  

            Le Comité a examiné les tarifs. Ceux-ci sont-ils demeurés élevés à cause de la réglementation et y a-t-il des gens qui prendraient l’autocar s’il coûtait moins cher? Les témoins ne se sont pas plaints de tarifs trop élevés, mais certains, en Nouvelle-Écosse par exemple, ont quand même affirmé qu’ils étaient plus élevés que pour les fourgonnettes.[20]  L’interfinancement, là où il existe, gonfle certainement les tarifs sur les routes achalandées, et l’absence de concurrence sur beaucoup de routes réglementées (et sur certaines qui ne le sont pas) contribue probablement à maintenir les tarifs élevés et à freiner les mesures novatrices de marketing.

 

CONCLUSION

 

L’autocar répond certainement à un besoin.  La plupart de ses clients, mais pas tous, font partie des moins nantis de la société.  Comme peu de choses ont changé depuis longtemps dans le transport par autocar et son encadrement, et que tous les facteurs responsables de la baisse de l’achalandage agissent encore, il n’y a pas de raison de prévoir l’inversement de la tendance dans les années à venir, à moins de changements au cadre institutionnel ou de mesures destinées à encourager l’usage de l’autocar.

 

 

 

4.3       La politique nationale des transports  

La section 2.2 de ce rapport a déjà indiqué que la Loi sur les transports au Canada encadre la politique fédérale sur les transports, fondé essentiellement sur la concurrence.  On trouve une autre référence à cette politique au paragraphe 3(1) du projet de loi S-3, adopté en 2001, qui modifie la Loi de 1987 sur les transports routiers.[21]  Ce paragraphe indique que l’une des objectifs de la Loi de 1987 sur les transports routiers est de réaliser la politique nationale des transports, formulée à l’article 5 de la Loi sur les transports au Canada, à l’égard des transporteurs extraprovinciaux.  Cela dit, on peut affirmer que la Loi de 1987 sur les transports routiers, qui permet la réglementation économique assez stricte de plusieurs provinces, se contredit en ce qui concerne les autocars.

Ces dernières années, la plupart des modes de transport ont été déréglementés au Canada.  Cela fait partie d’une tendance mondiale.  La déréglementation du transport ferroviaire de marchandises est aujourd’hui complète, et ni les tarifs, ni l’accès au marché pour l’avion ne sont réglementés au Canada, même s’il existe des restrictions à la propriété des transporteurs.  Le transport maritime n’a jamais été beaucoup réglementé. 


La déréglementation du camionnage a commencé avec la Loi de 1987 sur les transports routiers, et a imposé l’inversion du fardeau de la preuve pour l’accès au camionnage extraprovincial comme mesure de transition à la déréglementation complète.  Le camionnage intraprovincial a été déréglementé à la faveur de l’Accord sur le commerce intérieur de 1994; le lien législatif entre le camionnage extraprovincial et intraprovincial dans la Loi de 1987 sur les transports routiers a été supprimé en janvier 2000.  

            Par conséquent, si on laisse de côté les autobus urbains, qui appartiennent généralement aux municipalités et sont très subventionnés, la réglementation qui s’applique aux autocars pourrait être considérée comme une anomalie.  C’est le seul secteur à être protégé de la concurrence dans une grande partie du pays.  

            Plusieurs témoins ont parlé de la nécessité d’une stratégie nationale visant les passagers qui fournirait un cadre à la réglementation des autocars.[22]  D’autres ont affirmé que la Loi sur les transports au Canada contient un énoncé clair et non équivoque,[23] même si certains ont affirmé que le gouvernement fédéral lui-même ne respecte pas toujours ce qu’il prêche, en subventionnant VIA Rail par exemple.  


      CONCLUSION
 

Certains témoins ont réclamé une politique de l’autocar, mais la Loi sur les transports nationaux de 1996 contient un énoncé clair de politique fédérale visant tous les modes de transport qui relèvent du Parlement fédéral.  Il est difficile d’envisager une politique unique sur les autocars si cet énoncé contredit les principes énoncés dans la loi existante.

 

 

4.4       La réglementation, l’interfinancement et la déréglementation

La réglementation du transport a commencé à la fin du XIXe siècle pour les chemins de fer et s’est élargie dans les années 1920 et 1930 au transport routier commercial.  Elle a été instaurée pour protéger les consommateurs des prix usuraires et de la discrimination et empêcher la concurrence destructrice entre transporteurs. 

 

Les compagnies devaient justifier leurs tarifs ou hausses de tarif devant une commission ou un tribunal qui utilisait souvent leur rendement financier comme critère pour les autoriser.  Les concurrents étaient souvent exclus pour stabiliser un marché.  La fréquence du service et son abandon étaient également réglementés, de même que l’équipement utilisé.

On mettait comme condition à la desserte d’une route rentable celle d’une route non rentable, dont les pertes soient épongées partiellement par les profits de la route rentable.  C’est ce mécanisme qu’on appelle l’interfinancement.  

Ce genre de réglementation existe toujours dans certaines provinces pour l’autocar, avec l’acceptation implicite du gouvernement fédéral en vertu de la Loi de 1987 sur les transports routiers.  Lors de ses déplacements, le Comité a notamment entendu parler du régime de réglementation strict du Québec et de la Colombie-Britannique et du régime un peu plus flexible de la Nouvelle-Écosse et de l’Ontario.  

Plusieurs témoins, et la plupart des compagnies d’autocar, sont d’accord avec le régime actuel.[24]  Les usagers, surtout en région, reconnaissent que le service actuel n’est pas idéal, mais craignent qu’un changement de réglementation ne donne lieu à l’abandon de certaines routes interfinancées, entraînant la perte de mobilité des habitants de la région visée.[25]  Ils ont indiqué qu’une certaine forme d’indemnisation serait justifiée si cela se produisait. 

Il est difficile d’établir l’importance de l’interfinancement.  Un témoin de l’Association canadienne de l’autobus a indiqué au Comité qu’environ 10 % de ses revenus servent à cette fin.[26]  Le document d’orientation fourni par le Ministre suggère que, dans le corridor Québec-Windsor, 15 % des passagers se déplacent depuis ou vers de petites localités et forment le groupe profitant le plus de l’interfinancement.


            Les critiques de la réglementation stricte font valoir qu’elle étouffe la concurrence, maintient les tarifs à des niveaux plus élevés que nécessaire, élimine une bonne partie de la volonté dont naît l’innovation, tend à prévenir l’emploi du matériel le mieux adapté comme les petites fourgonnettes, et garantit la rentabilité même des compagnies les plus léthargiques.[27] 

            En utilisant les données des compagnies, Transports Canada a tenté d’établir une relation entre les dessertes à achalandage fort et faible et l’interfinancement.  

Catégories de parcours d’autocars et clientèle en 1998

Catégories de parcours (rentabilité et densité de clientèle)

nombre de parcours

% de parcours

Trajets (millions)

% of voyages

Parcours les plus rentables, à très forte densité

 

15

 

11

 

2,8

 

40

Parcours rentables, à densité moyenne

 

42

 

32

 

2,7

 

38

Parcours marginaux, à faible densité

41

31

1,2

17

Parcours non rentables, à très faible densité

 

34

 

26

 

0,4

 

5

 

 

 

 

 

Totaux

132

100

7.1

100

Source :  Document d’orientation de Transports Canada de mars 2001, p. 15, d’après une étude de KPMG, Les incidences de la déréglementation sur le transport interurbain par autocar, décembre 1999.  Ce tableau contient des renseignements provenant de six autocaristes.

            Transports Canada conclut ce qui suit :

Ces données font voir que le nombre de voyageurs à faible revenu susceptibles d’être touchés par des changements dans les services à faible densité est bien inférieur à celui des voyageurs à faible revenu au sujet desquels on pourrait supposer qu’ils paient des tarifs plus élevés sur les parcours profitables pour permettre de maintenir les services interfinancés.[28]

De plus, la réglementation a un impact hors de la province.  Le transporteur d’une province réglementée peut envahir librement le marché de la juridiction non-réglementée voisine, mais l’inverse n’est pas vrai.  Le premier transporteur est donc avantagé injustement.  Un représentant de l’Alberta nous a même affirmé que sa province serait prête à une déréglementation complète sans les pratiques restrictives de la Colombie-Britannique.[29]  Les transporteurs ontariens ont parlé de problèmes résultant de réglementation légère de leur province comparée à la réglementation stricte du Québec.[30]

 

CONCLUSION 

D’un bout à l’autre du pays, la réglementation économique est assez variée, stricte dans certaines provinces, assez faible dans d’autres et inexistante dans certaines.  Cela cause des problèmes entre provinces étant donné l’avantage injuste dont jouissent certains transporteurs offrant des services dans la province voisine déréglementée, sans qu’il n’y ait réciprocité.

 

Dans les provinces strictement réglementées, l’interfinancement est courant.  Les compagnies obtiennent un permis pour les routes rentables à condition qu’elles desservent des routes non rentables.  Cette mesure répond à un besoin, mais il s’agit d’un outil assez grossier pour maintenir les dessertes en région, qui entraîne des tarifs plus élevés que nécessaire sur les routes rentables, limite la concurrence sur celles-ci et dépend d’une réglementation complexe.  Un témoin a affirmé que l’interfinancement fait en sorte que les pauvres subventionnent les pauvres.[31]

 

Beaucoup d’usagers de l’autocar en milieu rural s’inquiètent de l’effet de la déréglementation sur les routes interfinancées.  Ils craignent une perte généralisée de service et doutent des gains d’efficience promis face au danger de l’abandon complet des dessertes.  Nul doute que, s’il y avait perte de service, on réclamerait à cor et à cri l’intervention de l’État et le rétablissement du service.  Le Comité croit que, dans plusieurs cas, les petits exploitants occuperaient le créneau avec du matériel différent dans bien des cas, mais il pense également que le gouvernement devrait être prêt à financer modestement l’établissement de services d’autocar communautaires ou d’autres solutions acceptables.

 

Le Comité voit un certain mérite à une déréglementation partielle, avec inversion du fardeau de la preuve, pour les nouveaux postulants, analogue à la formule de déréglementation du camionnage en 1987.  Cela offre certains avantages de la déréglementation tout en maintenant un peu d’interfinancement.  Après une période d’essai de l’inversion du fardeau de la preuve (cinq ans pourrait être raisonnable), on pourrait l’évaluer et décider de maintenir le système ou de pousser plus loin la déréglementation.

 

 

4.5       Autocars, fourgonnettes et dessertes rurales  

En français, un autocar est un autobus qui sert au déplacement interurbain de voyageurs qui ont payé leur passage d’une façon ou une autre.  Chacun connaît l’autobus urbain et l’autobus scolaire jaune, qui sont d’autres modes de transport routier en commun.  Notre étude s’intéresse essentiellement aux autocars qui voyagent entre les zones urbaines, et qui pourraient être des services à horaire fixe ou nolisés.

 

L’autocar est généralement un véhicule assez confortable de 40 sièges ou plus.  Les gouvernements et le public sont moins portés à accepter les petits véhicules qui transportent des passagers entre les villes ou le long de routes rurales relativement peu fréquentées, même s’il est relativement facile d’exploiter une mini-fourgonnette de 5 ou 7 passagers (assimilée à un véhicule privé, un taxi ou un autocar).[32]

 

            Aux fins de la réglementation économique, il n’y a pas de définition fédérale de l’autocar.  Le paragraphe pertinent de la Loi de 1987 sur les transports routiers traite simplement des situations où la loi provinciale exige un permis pour une entreprise d’autocar, sans définir le véhicule.  La loi provinciale donne cependant des définitions.  Le Code de la route ontarien définit autobus : véhicule automobile conçu pour le transport de 10 passagers ou plus et utilisé pour transporter des personnes.  La loi albertaine sur le transport motorisé définit l’autobus comme un véhicule destiné à transporter plus de 12 personnes, mais permet à la Commission du transport motorisé de la province de désigner tout autre véhicule comme autobus, au besoin.

              Par conséquent, pour notre propos, un autobus ou autocar peut être ce qu’en fait la province, et on peut présumer que la définition inclut les mini-fourgonnettes dans certaines situations.  

            Les fourgonnettes ont attiré l’attention du Comité en Nouvelle-Écosse : il y en a beaucoup, comptant jusqu’à 9 sièges, qui servent au transport à horaire fixe dans différentes régions.[33]  La Nouvelle-Écosse a une réglementation assez stricte mais ces véhicules y échappent ainsi qu’à la réglementation économique, tout en étant légaux  Ils offrent une souplesse impossible aux gros autocars.  Les témoins de la province ont indiqué qu’on prévoit de nouveaux règlements pour soumettre les fourgonnettes à une norme de sécurité plus élevée que lorsqu’il s’agit d’un véhicule privé, mais qu’on ne désire pas imposer de réglementation économique des services qu’elles offrent.  Ils ont affirmé que les fourgonnettes sont très populaires et qu’il y aurait une levée de boucliers si on tentait de limiter le service.

 

            Dans d’autres provinces comme l’Ontario, des fourgonnettes offrent parfois un transport à moindre tarif que l’autocar.  Contrairement à la situation en Nouvelle-Écosse, il faut l’approbation de l’organe de réglementation; à défaut de l’obtenir, les exploitants ne s’occupent guère de sécurité non plus.

Voilà un dilemme de la réglementation.  Elle peut encourager les opérations illégales à offrir des services en matière de transport avec peu, sinon aucun, contrôle de la qualité et de la sécurité.  Si la réglementation économique permettait un accès plus facile au marché, les transporteurs auraient peut-être intérêt à améliorer l’entretien des véhicules et à les doter de meilleurs chauffeurs, et leurs prix demeureraient fort probablement moins chers que ceux des grands autocars.  Plusieurs témoins ont fait valoir ce point devant le Comité.[34]

CONCLUSION 

Les autobus et autocars sont définis dans les codes de la route des provinces, mais la définition du plus petit véhicule n’est pas toujours uniforme.  Il existe clairement d’autres options pour certaines dessertes que l’autocar de 40 places ou plus.  Les petites fourgonnettes utilisées en Nouvelle-Écosse et en Alberta par certaines petites entreprises sont l’exemple d’une approche différente au transport interurbain.  Il convient de porter une attention accrue à la définition de l’autocar et l’inclusion des petits véhicules dans le Code national de sécurité est nécessaire.

 

Le Comité ne peut qu’envisager les fourgonnettes et les minibus comme une option réaliste sur les routes éloignées aujourd’hui desservies par des autocars interfinancés.  Il serait également sans doute possible de combler un vide de cette façon, en offrant un transport communautaire dans des régions éloignées aujourd’hui non desservies.  Ce qui semble faire défaut c’est une réglementation appropriée, peut-être un incitatif économique et un mode d’application de règles de sécurité pour écarter les exploitants dangereux et non qualifiés.

 

 

 

4.6       Les subventions

Les subventions font partie de l’histoire des transports au Canada, mais depuis dix ans elles ont sensiblement baissé ou disparu, bien que certaines existent toujours.  Au cours de l’exercice 2000-2001, le gouvernement fédéral a subventionné directement l’exploitation des traversiers dans les provinces de l’Atlantique à hauteur de près de 70 millions de dollars et a fourni 231 millions de dollars à VIA Rail.[35]   

Il n’y a pas de subventions fédérales aux autocars, mais le Comité a appris qu’il y a quelques petites subventions provinciales pour l’autocar au Québec, et un témoin à Montréal a décrit un programme provincial de rabais sur le carburant.[36]  

Dans le rapport annuel de Transports Canada, le total des subventions fédérales directes et ce qu’on qualifie de « subventions et contributions » a totalisé 609 millions de dollars durant l’exercice 2000-2001.  Cela inclut les sommes précitées ainsi que des versements aux aéroports et pour la location de wagons-trémies servant au transport de céréales par chemin de fer.  Les subventions et contributions sont surtout des paiements aux provinces en vertu des accords sur les routes et totalisent environ 152 millions de dollars par an.  D’importantes subventions sont versées au transport en commun urbain partout dans le pays par les provinces et les municipalités.  Là où la desserte entre en compétition avec celles des autocars, les exploitants de ces derniers pourraient avoir des problèmes.

L’examen de nouvelles mesures, comme des minibus communautaires pour compenser l’impact d’une déréglementation de l’autocar, soulève le problème des sources et du niveau du financement.  Il est difficile d’évaluer de façon précise ce que coûterait un programme d’aide communautaire.  Une possibilité serait de subventionner l’exploitation.  C’est ce que fait le fédéral actuellement pour VIA Rail et les traversiers, bien que les gouvernements préfèrent souvent verser des montants forfaitaires en capital plutôt que de contribuer en permanence à l’exploitation.  

Statistique Canada a évalué le revenu total du transport par autocar à horaire fixe à 236 millions de dollars en 1999.[37]  La desserte des régions éloignées représenterait environ 15 % de l’achalandage total.  Comme on l’a déjà mentionné, un exploitant a dit au Comité qu’environ 10 % des revenus sont consacrés au financement des dessertes en région éloignée.  Cependant, beaucoup de régions rurales sont actuellement dépourvues de service et il faudra davantage d’études pour déterminer l’ampleur de la demande nationale à ce chapitre.  

 

CONCLUSION 

Il y a conflits entre les exploitants d’autocars et ceux qui offrent des services subventionnés, le plus souvent l’État.  Un conflit oppose des exploitants d’autocars à VIA Rail, qui leur fait concurrence dans certaines régions.  D’autres surgissent là où le transport en commun subventionné, comme le train GO dans la région torontoise, se rend bien en dehors de la zone urbaine et enlève une partie de sa clientèle à l’autocar. Étant donné l’achalandage des autocars et l’importance des dessertes rurales à faible densité en régime d’interfinancement, on pourrait défendre l’idée d’un modeste programme de subventions destinées à promouvoir des dessertes rurales par autocar correctement structurées, afin d’atténuer les problèmes éventuels d’une déréglementation nationale accrue.

 

 

4.7       Les passagers handicapés

Il est question des déplacements des handicapés dans l’énoncé de principe de l’article 5 de la Loi canadienne sur les transports et la Commission royale sur le transport des voyageurs au Canada a examiné des questions connexes en 1992.  La Commission royale a recommandé que l’on aspire à donner à tous les voyageurs un accès sûr, raisonnablement confortable et digne aux transports en commun, sans égard à leur état physique ou mental.

 En réponse à une recommandation analogue, l’Office des transports du Canada œuvre depuis 10 ans à la réalisation de cet objectif.  Les témoignages présentés au Comité laissent entendre que tous les transporteurs souhaitent assurément que ce but soit atteint et qu’ils ne ménagent pas les efforts pour l’atteindre.  En revanche, il se dégage aussi clairement des témoignages de handicapés qu’il reste encore beaucoup de chemin à faire.[38]  

Le Comité a entendu des handicapés lui expliquer les problèmes qu’ils éprouvent sur les autocars.  Des autocars sont équipés pour accueillir les fauteuils roulants mais tous les autocars de toutes les routes ne le sont pas. Les voyageurs en fauteuil roulant ont moins de choix pour leurs déplacements.  Les terminus urbains sont habituellement accessibles en fauteuil roulant mais de nombreux arrêts ruraux ne le sont pas, ce qui est un autre obstacle aux voyages en autocar.

CONCLUSION 

Étant donné les réalités économiques du secteur de l’autocar, certains exploitants peuvent avoir du mal à offrir le service à tous les passagers, notamment aux handicapés. Quoi qu’il en soit, il s’agit d’une politique nationale en matière de transport; si elle n’est pas réalisée dans le secteur de l’autocar, il faudra prendre des mesures pour le faire à l’avenir.  

Le sort des voyageurs handicapés appelle des correctifs. Ces derniers ne devraient pas être obligés de prendre un seul autocar quand plusieurs sont disponibles, un jour donné, et il faudrait que même les petites gares routières offrent les installations de base pour leur mobilité et leur hygiène.

 

 

 

4.8       La sécurité des autocars  

La sécurité a été abordée au point 2.5.  Le Comité n’a pas entendu beaucoup de doléances au sujet de la sécurité des autocars aux audiences.  

Les témoins ont affirmé que les accidents d’autocar sont rares.  Il arrive malheureusement des accidents tragiques qui entraînent la mort de 10 ou 20 personnes; cependant, la plupart des années, le nombre de passagers tués dans des autocars n’atteint pas 10.  En imposant le Code national de sécurité aux autocars, comme cela devrait se faire quand entreront en vigueur les modifications de 2001 à la Loi de 1987 sur les transports routiers, établies par le projet de loi S-3 de la première session de la trente-septième Législature, on ne pourra qu’améliorer la situation.  

Le Comité n’est pas aussi sûr lorsqu’il s’agit de petits autocars et de mini-fourgonnettes utilisées pour le transport interurbain.  En soi, ces petits véhicules sont moins sécuritaires, mais la plupart des accidents mortels qui les mettent en cause résultent du mauvais entretien ou du manque d’expérience ou de compétences des chauffeurs.  Cette question exige de l’attention, et le Comité note que certaines provinces sont intéressées à améliorer les normes de ces véhicules.  

CONCLUSION 

Les normes de sécurité sont généralement bonnes dans le transport par autocar, et les changements relatifs à la sécurité introduits par les modifications récentes à la Loi de 1987 sur les transports routiers, ainsi que l’application du Code national de sécurité amélioreront les choses.  Devant la prolifération des services fondés sur de petits autocars et des fourgonnettes, les provinces ont le devoir de réexaminer leurs procédures de sécurité à leur endroit et, comme on l’a dit ailleurs, il faudrait revoir et réviser le Code national de sécurité pour y définir la mini-fourgonnette ou d’autres véhicules pouvant servir au transport en commun interurbain.

                                  

 

4.9       La concentration de la propriété  

Même s’il existe un niveau important de concentration de la propriété dans les mains d’une seule compagnie, Laidlaw, aucun témoin n’y a vu un grave problème.  Les témoins du Bureau de la concurrence y ont fait référence, mais le Bureau semble prêt à vivre avec la situation et à intervenir si elle dégénère.  

CONCLUSION 

Il y a concentration de propriété dans le transport par autocar, en grande partie sous le contrôle du groupe Laidlaw, qui représente presque 45 % de l’achalandage de l’autocar à horaire fixe.  Cela ne semble pas gêner les témoins qui ont comparu devant nous.  Le Comité considère qu’il appartient au Bureau de la concurrence d’examiner cette question comme il le juge bon et quand il en décidera.

 

 

 

4.10     Les autocars nolisés  

Un autocar nolisé est simplement un autocar qu’un groupe réserve en entier de la même façon que les agents de voyages le font pour des avions complets à destination de lieux de villégiature.  Le service nolisé peut amener des gens en vacances, transporter un groupe local à un match de hockey ou même amener les travailleurs à un site industriel.  Le Comité en a eu des exemples lors des audiences.  

Le secteur de l’autocar nolisé est en croissance et semble en bonne santé financière au Canada.  Il est réglementé dans certaines provinces de la même façon que l’autocar à horaire fixe.  

L’autocar nolisé n’est pas le principal objet de la présente étude, mais il y est relié de plusieurs façons.  Les mêmes véhicules servent souvent au transport nolisé et au transport à horaire fixe.  Le critère du rendement financier utilisé pour approuver un tarif d’autocar à horaire fixe dans un contexte réglementé inclut parfois le rendement financier des opérations nolisées, qui est comptabilisé dans le calcul de l’interfinancement.

On a proposé au Comité de déréglementer en premier l’autocar nolisé si la déréglementation entrait progressivement en vigueur.  Cependant, des témoins ont fait remarquer qu’un transporteur nolisé déréglementé, avec des billets vendus par un agent de voyages, pourrait faire concurrence à un transporteur réglementé à horaire fixe longue distance en empêchant ce dernier d’abaisser son tarif pour réagir au tarif inférieur du transporteur nolisé.

CONCLUSION 

Aux fins de la déréglementation, le Comité estime qu’il faut traiter l’autocar nolisé de la même façon que l’autocar à horaire fixe.  Le calcul de l’interfinancement fait parfois intervenir le transport nolisé : un transporteur nolisé déréglementé risque de concurrencer les services à horaire fixe.  Il ne serait pas pertinent de déréglementer isolément l’autocar nolisé si on ne déréglementait pas également les services à horaires fixes.

 

 

4.11     Le consensus sur la déréglementation est-il possible?  

Devant le Comité en juin 2001, le Ministre des Transports a indiqué que le gouvernement a toujours affirmé n’avoir aucune intention de changer les règles au niveau fédéral à moins d’un consensus parmi les provinces et les transporteurs sur les changements éventuels.  

Le Comité ne voit ni consensus, ni même une vague perspective d’y parvenir.  La plupart des transporteurs sont fermement en faveur de la réglementation, et certaines provinces ne sont pas pressées de changer la situation.  En outre, beaucoup de groupes d’usagers s’inquiètent des effets de la déréglementation et préfèreraient probablement que les choses restent comme elles sont.  Au moins une province et quelques exploitants aimeraient que la déréglementation devienne rapidement réalité.[39]

            Pour que des changements se produisent, il se peut que le gouvernement doive prendre l’initiative, comme ce fut le cas pour le camionnage et d’autres modes de transport après 1987.  Cet argument a été présenté au Comité par plus d’un témoin.  

CONCLUSION 

À l’heure actuelle, une entente est improbable entre tous les intervenants du transport par autocar sur ce qu’il faut faire au sujet de la déréglementation.  Les opinions sont trop tranchées et trop éloignées.  Si le gouvernement fédéral veut agir, il devra prendre l’initiative et non suivre.

 

 

 

4.12     Les questions écologiques[40]  

Les chiffres de Transports Canada indiquent que l’autocar est de loin le moyen le plus écologique pour transporter des personnes, qu’on calcule les émissions de gaz à effet de serre par voyageur-kilomètre ou les voyageurs-kilomètres par litre de carburant.  À cet égard, on obtient souvent 110 voyageurs-kilomètres par litre, ce qui correspond en mesures impériales à environ 300 milles par gallon par passager.  Selon Transports Canada à nouveau, on constate – peut-être avec étonnement – que l’autocar fait mieux que le train, car les trains de longs parcours sont très lourds et rarement pleins.

            En théorie, plus il y a de gens qui voyagent par autocar, plus on économise d’énergie, en supposant bien sûr que ces passagers auraient voyagé par un autre moyen de transport, notamment par celui qui consomme le plus d’énergie par passager, la voiture particulière.

Les nouvelles technologies, comme les piles à combustible, pourraient également avoir un impact positif. Une autre approche serait de rendre la voiture plus coûteuse ou l’autocar meilleur marché.  Comme la plupart des autocars de long parcours roulent au diesel, une réduction relative des taxes du diesel pourrait être envisagée.  Cela aurait des conséquences pour le camionnage et n’avantagerait pas les fourgonnettes, de sorte qu’il vaudrait peut-être mieux abaisser la taxe sur le carburant destiné à tout le transport en commun interurbain.  On peut prétendre qu’il y a d’autres façons de réduire les tarifs de l’autocar.  Certains témoins nous ont affirmé que la déréglementation ferait augmenter la clientèle et que la concurrence favoriserait une meilleure mise en marché qui attirerait elle aussi plus de passagers.  

Tant la Commission royale sur le transport national des passagers de 1992 que le rapport de 2001 du Comité d’examen de la Loi sur les transports au Canada soulèvent la question des frais aux usagers de la route.  Les deux études ont suggéré qu’il serait peut-être temps d’introduire un mode de péage reflétant l’utilisation réelle des ressources par les véhicules particuliers.  Transports Canada n’a pas encore répondu aux recommandations du Comité d’examen de la Loi sur les transports au Canada.  Comme le sujet est au-delà du mandat de notre étude, nous ne commenterons pas ici un changement aussi fondamental de l’offre d’infrastructure.  Cependant, le Comité reconnaît que la question est complexe et nécessite une étude.[41]

 

CONCLUSION 

L’autocar est le moyen de transport de personnes le plus économe d’énergie et pourtant cela n’est guère reconnu par des allégements fiscaux ou d’autres mesures comme la priorité ou des emprises réservées sur les routes.  Son principal concurrent est l’automobile qui consomme beaucoup plus d’énergie mais dont les coûts de carburant et les privilèges sur la route sont comparables.  Le Comité voit ici le besoin urgent d’une étude sur les moyens d’encourager l’usage de l’autocar et d’améliorer encore leur rendement écologique.

 


[1]               Cette lettre, en date du 16 mai 2001, est jointe en Annexe A.

[2]               Transports Canada, L’industrie canadienne du transport par autocar : Document d’orientation, mars 2001.

[3]               Voir, par exemple, Transports Canada, Les transports au Canada 2001 : Rapport annuel.

[4]               Voir l’encadré sur la page suivante qui contient une analyse de la réglementation et de la déréglementation économiques du secteur du transport.

[5]               Voir la décision en date du 22 février 1954 du Comité judiciaire du Conseil privé dans le cas Procureur général de l’Ontario c. Winner [1954] A.C. au sujet d’un appel d’une décision de la Cour suprême du Canada (voir Winner c. S.M.T. (Eastern) [1951] R.C.S., décision rendu le 22 octobre 1951). Cette question est examinée dans le rapport final de la Commission royale sur le transport des voyageurs au Canada (Directions : Le rapport final de la Commission royale sur le transport des voyageurs au Canada, 1992, volume 4, chapitre 16, pp 1367-1472, analyse du secteur de l’autocar interurbain à horaire fixe au Canada, Annexe A).

[6]               Voir le tableau dans l’annexe D intitulé « Services d’autocars réguliers canadiens représentatifs/dessertes 1999 ».

[7]               Voir le tableau dans l’annexe D intitulé « Restructuration de l’industrie après 1988 ».

[8]               Le rapport est affiché au site www.laidlaw.com.

[9]               Transports Canada, Les transports au Canada en 2000 : Rapport annuel, p. 184.

[10]             Groupe de travail canadien sur les autocars, Rapport au Conseil des ministres responsables des transports et de la sécurité routière, octobre 1996.

[11]             Le Conseil canadien des administrateurs en transport motorisé est une association de fonctionnaires fédéraux et provinciaux chargés des routes et du transport routier.

[12]             Le projet de loi S-3, Loi modifiant la Loi de 1987 sur les transports routiers et d’autres lois en conséquence, a reçu la sanction royale le 14 juin 2001 (Lois du Canada (2001), chapitre 13), mais n’a pas encore été proclamé.  En plus des ses mesures concernant le Code, l’article 1 changera le nom de la Loi de 1987 sur les transports routiers à la Loi sur les transports routiers.

[13]             Cette étude, intitulée Les incidences de la déréglementation sur le transport interurbain par autocar, a été préparée pour l’Association canadienne de l’autobus.  La version originale en anglais est en date de décembre 1998 et la version française est en date de décembre 1999.

[14]             Les autocars-kilomètres sont une mesure de l’utilisation des véhicules qui intéressent donc les exploitants alors que les voyageurs-kilomètres mesurent l’achalandage des autocars.

[15]             Voir le rapport final de la Commission royale sur le transport des voyageurs au Canada, Directions : Le rapport final de la Commission royale sur le transport des voyageurs au Canada, 1992, volume 4, chapitre 16, pp 1465-1472, analyse du secteur de l’autocar interurbain à horaire fixe au Canada, Annexe A; et Conseil des ministres responsables de transports et de la sécurité routière, Rapport au Conseil des ministres responsables des transports et de la sécurité routière, octobre 1996.

[16]             Voir W.D. Haire, Background Report on the Substantial Relaxation of the Bus Economic Regulatory Framework, décembre 1994.

[17]             Selon le rapport annuel de Transports Canada de 1996, le chiffre équivalent pour 1950 était de 72 millions de passagers. Voir Les transports au Canada en 1996 : Rapport annuel, pp. 101-103.

[18]             Voir, par exemple, les témoignages du Comité, le 11 février 2002 (Douglas Norris).

[19]             Voir l’étude de KPMG du décembre 1999 intitulée Les incidences de la déréglementation sur le transport interurbain par autocar, aux pp. 33 et 35.

[20]             Témoignages du Comité, le 21 février 2002 (Olive Bryanton).

[21]             Comme déjà signalé, le projet de loi S-3 a été adopté au cours de la première session de la trente-septième Législature, mais les changements à la Loi de 1987 sur les transports routiers qu’il prévoit n’ont pas encore été proclamés.

[22]             Témoignages du Comité, le 20 février 2002 (Sylvain Langis, Brian Crow, Romain Girard et Roger Gervais).

[23]             Témoignages du Comité, le 12 février 2002 (Michael Colborne).

[24]             Voir, par exemple, les témoignages du Comité, le 20 février 2002 (Hugo Gilbert et Normand Parisien) et le 26 mars (Roger Pike)

[25]             Voir, par exemple, les témoignages du Comité, le 20 février 2002 (Martine Rioux) et le 25 mars 2002 (Hans Cunningham).

[26]             Témoignages du Comité, le 20 février 2002 (Sylvain Langis).

[27]             Témoignages du Comité, le 25 mars 2002 (Bill Waters) et le 26 mars 2002 (Barry E. Prentice).

[28]             Document d’orientation de mars 2001 de Transports Canada, p. 15.

[29]             Témoignages du Comité, le 26 mars 2002 (Peter Dawes).

[30]             Témoignages du Comité, le 28 mars 2002 (James Devlin).

[31]             Témoignages du Comité, le 26 mars 2002 (Barry E. Prentice).

[32]             Témoignages du Comité, le 17 avril 2002 (Donna Mitchell).  Le Secrétariat rural (un organisme fédéral chargé de veiller à ce que les politiques nationales soient bénéfiques pour les collectivités rurales) fait une distinction utile entre trois catégories de collectivités rurales : celles qui sont adjacentes à une grande ville, celles qui sont situées au Canada profond et celles qui sont éloignées.  Chaque catégorie a ses besoins distincts dans le domaine des transports et des transports en commun.

[33]             Témoignages du Comité, le 21 février 2002 (Don Stonehouse).

[34]             Voir, par exemple, les témoignages du Comité, le 25 mars 2002 (Bill Waters) et le 26 mars 2002 (Barry E. Prentice).

[35]             Transports Canada, Les transports au Canada, 2001 : Rapport annuel, p. 10.

[36]             Témoignages du Comité, le 20 février 2002 (Romain Girard).

[37]             Voir le document d’orientation de Transports Canada de mars 2001, pp 20-21.

[38]             Voir, par exemple, les témoignages du Comité, le 20 février 2002 (André Leclerc et Johanne St-Martin) et le 28 mars 2002 (Stephen Little).

[39]             Témoignages du Comité, le 26 mars 2002 (Peter Dawes) et le 12 février 2002 (Michael Colborne) et le 25 mars 2002 (Sheldon Eggen).

[40]             Voir l’encadré sur la page suivante qui contient une analyse de l’impact écologique de l’autocar.

[41]             Voir à ce sujet l’Annexe E.


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