Délibérations du comité sénatorial permanent des
Banques et du commerce
Fascicule 1 - Témoignages du 25 février 2004
OTTAWA, le mercredi 25 février 2004
Le Comité sénatorial permanent des banques et du commerce se réunit aujourd'hui, à 16 h 15, pour étudier le projet de loi C-13 visant à modifier le Code criminel (fraudes sur les marchés financiers et obtention d'éléments de preuve).
Le sénateur Richard H. Kroft (président) occupe le fauteuil.
[Traduction]
Le président: Je déclare ouverte cette séance du Comité sénatorial permanent des banques et du commerce.
Dans le cadre de notre examen du projet de loi C-13, nous recevons aujourd'hui des hauts fonctionnaires du ministère de la Justice.
Vous pouvez y aller, monsieur Piragoff.
M. Donald K. Piragoff, sous-ministre adjoint par intérim, Division de la politique en matière de droit pénal et de justice communautaire, ministère de la Justice du Canada: Honorables sénateurs, nous nous réjouissons de comparaître devant vous à ce sujet, parce que votre comité possède déjà une connaissance approfondie du large éventail de questions touchant la crise de confiance actuelle des investisseurs, non seulement au Canada, mais aussi sur l'ensemble du continent, ainsi que des différents moyens d'améliorer la situation.
La gamme des questions en cause est clairement présentée dans votre rapport de juin 2003. Celui-ci a d'ailleurs été rendu public quelques jours seulement après que le projet de loi C-46, l'ancienne version du présent texte de loi, a été introduit au cours de la dernière session.
Vous reconnaissez dans votre rapport à quel point il peut être complexe de réglementer le système financier qui relève de plusieurs sphères de compétence — un contexte qui sert de toile de fond aux mesures prévues dans le projet de loi C-13.
Comme vous le savez, ce sont les gouvernements provinciaux qui sont responsables de la réglementation des industries des valeurs mobilières, des conditions régissant l'émission de valeurs mobilières par des sociétés dans la province, des règles à suivre, le cas échéant, et de la création de commissions des valeurs mobilières pour enquêter et entreprendre des poursuites lorsque ces règles sont enfreintes.
La responsabilité particulière du gouvernement fédéral dans le secteur des valeurs mobilières est un sujet controversé, qui fait actuellement l'objet de discussions à différents paliers. En décembre, le Comité de personnes averties a rendu public son rapport qui préconisait la création d'un poste de responsable national de la réglementation en matière de valeurs mobilières. Des discussions à ce sujet se poursuivent sur d'autres tribunes.
À la différence de la question complexe de la compétence législative en matière de valeurs mobilières, le droit pénal continue de relever de l'autorité des législateurs fédéraux. Le texte de loi que vous examinez aujourd'hui, le projet de loi C-13, est la réponse du gouvernement fédéral à la baisse de confiance des investisseurs du strict point de vue du droit pénal. Les propositions qu'il renferme visent à rendre les autorités policières et judiciaires mieux aptes à faire enquête et à intenter des poursuites dans les cas de fraude sur les marchés financiers et à restaurer ainsi la confiance des Canadiens et des investisseurs étrangers dans l'intégrité de nos marchés.
Le projet de loi C-13 contient un ensemble de mesures législatives venant renforcer une initiative fédérale d'application de la loi, qui fait de la détection de la fraude financière et des sanctions afférentes une priorité réelle et concrète. Le budget 2003 a accordé jusqu'à 30 millions de dollars par année sur une période de cinq ans pour la création d'équipes intégrées d'application de la loi dans le marché (EIALM) dans quatre centres financiers clés. Ces équipes seront constituées d'enquêteurs de la GRC, d'avocats fédéraux et de juricomptables, qui travailleront de concert avec les responsables de la réglementation en matière de valeurs mobilières et les autorités policières locales, pour mettre au jour les principaux cas de fraude touchant les marchés financiers à l'échelle nationale. Trois de ces équipes ont récemment amorcé leurs activités, une à Vancouver et deux à Toronto.
Le projet de loi C-13, la branche législative de cette stratégie, comporte plusieurs volets et concerne quatre secteurs distincts du droit pénal dont je vais vous entretenir brièvement. Le projet de loi C-13 prévoit d'abord de nouvelles infractions. Notre examen du Code criminel nous a permis de constater que nous disposions déjà de lois rigoureuses et efficaces pour traiter les cas de fraude financière, notamment au niveau des sanctions, de l'entrave à la justice, du dépôt de prospectus fallacieux et de la falsification de documents de toutes sortes. Nous avons toutefois décelé dans la loi deux lacunes que nous cherchons à combler grâce au projet de loi C-13.
Les délits d'initiés sont interdits par les lois provinciales en matière de valeurs mobilières, mais pas par le Code criminel. Les délits d'initiés peuvent causer d'importants dommages, tant aux investisseurs individuels qu'à la société dont les valeurs sont échangées, en plus d'ancrer les investisseurs dans leur conviction que les transactions financières sont inéquitables. Compte tenu de sa valeur symbolique et des sanctions plus sévères qu'il permet, le recours au droit pénal semble s'imposer comme mesure additionnelle de dissuasion pour ce genre de méfait corporatif.
L'autre nouvelle infraction concerne la protection des dénonciateurs, un sujet suscitant beaucoup d'intérêt par les temps qui courent. Les dispositions du projet de loi C-13 concernent une forme très ciblée et très précise de la protection des dénonciateurs qu'il convient de ne pas confondre avec des questions et des solutions plus vastes, qui sont actuellement débattues dans ce dossier. Les nouvelles dispositions offrent, au moyen de la dissuasion, une certaine forme de protection aux employés en rendant coupables d'une infraction les employeurs qui profèrent des menaces liées à l'emploi ou qui prennent des mesures disciplinaires contre des employés, pour les empêcher de fournir aux autorités policières des informations sur des agissements illégaux.
Il convient de noter qu'il n'y a pas infraction lorsque l'employé veut révéler des renseignements au sujet d'une activité qui n'est pas illégale, comme de l'information à propos d'une mauvaise gestion financière ou lorsque l'employé veut révéler les renseignements à n'importe qui d'autre qu'aux autorités policières, aux médias par exemple. Il s'agit donc d'une infraction très ciblée qui vise uniquement la divulgation d'activités criminelles et la protection des employés à ce chapitre.
Le projet de loi prévoit également des sentences plus rigoureuses. Il propose d'augmenter les sanctions pour les fraudes financières et certains crimes commis dans le monde des affaires en général, afin de les porter au niveau des crimes graves prévus par nos lois. Il propose ainsi de faire passer de 10 à 14 ans la peine d'emprisonnement maximale pour la principale infraction de fraude visée à l'article 380 du Code criminel, et de 5 à 10 ans pour les manipulations frauduleuses d'opérations boursières visées à l'article 382. Il faut signaler qu'un emprisonnement maximal de 14 ans est la peine la plus forte prévue au Code criminel, à l'exception de l'emprisonnement à vie. Le projet de loi vise également à mieux guider les juges dans la détermination de la peine en précisant certaines circonstances aggravantes, comme un nombre élevé de victimes ou l'exploitation de la situation de confiance d'une personne au sein de la collectivité, des facteurs qui exigent une dénonciation plus vigoureuse et des peines plus sévères.
La troisième composante du projet de loi propose d'accorder au gouvernement fédéral le pouvoir d'intenter des poursuites en même temps que les provinces dans les cas de fraude ou d'infractions connexes. L'application des ressources fédérales en matière de poursuites dans ce domaine sera restreinte à une gamme étroite de cas qui menacent l'intérêt national et l'intégrité de nos marchés financiers et minent sérieusement la confiance des investisseurs dans des institutions qui sont essentielles à l'économie canadienne.
Cette modification permettrait au gouvernement fédéral d'injecter les ressources nécessaires pour que ces poursuites puissent se dérouler efficacement dans tous les cas. Le gouvernement fédéral n'a pas l'intention de remplacer les provinces ou de se substituer aux compétences provinciales en matière de poursuite, mais plutôt de les compléter. C'est là un point très important, honorables sénateurs. Nous voulons travailler de concert avec les provinces, et non pas les supplanter.
Les fonctionnaires du ministère de la Justice travaillent actuellement avec les responsables provinciaux afin d'établir des protocoles de poursuite qui garantiront une mise en oeuvre coordonnée et efficace de la compétence provinciale dans une forme satisfaisante pour toutes les parties en cause. Ces protocoles réaffirmeront la primauté provinciale en la matière, à commencer par un droit de premier refus dans chacun des cas et une approche de partenariat dans tous les dossiers.
Le dernier élément du projet de loi C-13 est la création d'outils améliorés pour l'obtention d'éléments de preuve, non seulement dans les cas de fraude mais pour toutes les infractions criminelles. Depuis plusieurs années, les forces policières demandent l'ajout de pouvoirs liés à une ordonnance de communication dans le Code criminel, et le projet de loi C-13 accordera cet outil à tous les agents responsables de l'application de la loi. Considérant qu'un mandat de perquisition permet à la police de fouiller un certain lieu pour y trouver des éléments de preuve, une ordonnance de communication obligerait une personne à produire les renseignements pertinents, même s'ils se trouvent à l'extérieur du Canada. La personne visée devrait fournir ces renseignements à la police dans un délai fixé. Il convient de noter que ces ordonnances de communication ne seraient servies qu'aux personnes en possession de preuves qui ne font pas elles- mêmes l'objet de l'enquête — c'est-à-dire qu'elles seraient servies à des tiers, et non aux suspects eux-mêmes.
Le projet de loi crée deux types d'ordonnance de communication. Premièrement, une ordonnance générale, à laquelle on peut recourir dans les cas où on aurait normalement recours à un mandat; une telle ordonnance serait fondée sur les mêmes normes générales et protégée par les mêmes garanties constitutionnelles. Deuxièmement, une ordonnance de communication spécifique qui a été conçue comme un outil d'enquête préliminaire dont l'application serait limitée à des renseignements particuliers pour lesquels les attentes en matière de vie privée sont moindres. Un juge ou un juge de la paix devra être convaincu qu'il existe des motifs raisonnables de soupçonner que l'information en question pourrait être utile dans le cadre d'une enquête sur un crime.
En particulier, compte tenu de la portée étroite de l'ordonnance de communication de renseignements spécifiques, celle-ci viserait uniquement des renseignements de base liés à des comptes bancaires, comme le nom, l'adresse et le numéro de compte ou la date à laquelle un compte a été ouvert, mais ne viserait ni les transactions effectuées dans le compte ni les sommes qui s'y trouvent.
Par conséquent, on fait une distinction entre des renseignements pour lesquels les attentes en matière de vie privée sont élevées ou réduites.
Encore là, les deux types d'ordonnance de communication pourront servir lors d'enquêtes relatives à toute infraction criminelle, mais elles seront particulièrement précieuses pour la collecte efficiente et efficace de renseignements financiers d'importance capitale dans les enquêtes sur les cas de fraude sur les marchés financiers.
Sénateurs, ce sont là les principales caractéristiques du projet de loi. Alliée à l'injection de ressources supplémentaires pour les équipes intégrées d'exécution de la loi sur le marché, cette mesure contribuera à dissuader et à sanctionner les activités frauduleuses qui entachent les marchés de capitaux et à restaurer la confiance, ici et à l'étranger, dans l'intégrité de nos marchés financiers.
Merci beaucoup, honorables sénateurs. Nous sommes maintenant prêts à répondre à vos questions.
Le sénateur Baker: Honorables sénateurs, ce qui me préoccupe, c'est que cette mesure de nature générale vise non seulement les infractions que vous souhaitez cibler, mais toutes les infractions criminelles. Cela représente un changement important aux nouvelles dispositions proposées de l'article 487 du Code criminel concernant les mandats, mais en l'occurrence, on les appelle des ordonnances de communication.
Dans un arrêt récent, la Cour suprême de la Colombie-Britannique a annulé l'article 492.2 du Code criminel, qui porte sur le mandat pour les enregistreurs de numéro, l'ayant jugé inconstitutionnel. La Cour suprême de la Colombie- Britannique a déclaré avoir fondé sa décision sur le fait que dans de nombreuses affaires, la Cour suprême du Canada avait jugé qu'il devait y avoir à tout le moins un motif raisonnable de croire que l'on obtiendrait ainsi une preuve relative à une infraction spécifique.
Autrement dit, si l'on considère toutes les dispositions concernant les mandats figurant actuellement dans le Code criminel, le juge doit avoir des motifs raisonnables de croire ou de soupçonner — ou encore un juge de paix, selon la partie en cause —, que l'on recueillerait ainsi des preuves concernant une infraction particulière identifiée dans le mandat. En l'occurrence, on modifie cet article du Code criminel pour conférer ce pouvoir à un juge ou un juge de paix — voilà, les deux sont mentionnés — au motif que ce juge ou ce juge de paix soupçonne qu'il existe des éléments de preuve susceptibles d'être utiles dans le cadre d'une enquête.
À votre avis, est-ce constitutionnel?
M. Normand Wong, avocat, Section de la politique en matière de droit pénal, ministère de la Justice du Canada: Honorables sénateurs, le cas dont la Cour suprême de la Colombie-Britannique a été saisie récemment portait sur un mandat assujetti à l'article 492.2, c'est-à-dire un mandat d'enregistreur de numéro. Cette affaire a donné lieu à des faits intéressants. En effet, les autorités policières ont été en mesure d'obtenir les registres d'appels pour divers numéros de téléphone qui ne faisaient pas l'objet de soupçons dans le cadre de l'enquête. Pour cette raison, le juge a décrété que le mandat avait une portée excessive puisqu'il avait mis au jour des renseignements qui n'auraient pas dû l'être.
Le sénateur Baker a aussi mentionné que le juge avait évoqué des cas examinés par la Cour suprême, cette dernière ayant précisé qu'il faut avoir des motifs raisonnables de croire en l'utilité de cette démarche lorsque sont en cause des renseignements personnels ou assortis d'attentes en matière de vie privée. La Cour suprême a également précisé dans de nombreux cas que si les attentes en matière de vie privée sont réduites, le critère des motifs raisonnables n'est pas tenu d'être respecté, que les exigences à cet égard sont moindres.
Notre but, en élaborant cette disposition, était de conserver le statu quo. À l'heure actuelle, de nombreuses forces policières au Canada entretiennent de bonnes relations avec les institutions financières ou d'autres institutions où elles peuvent obtenir ces renseignements préliminaires. Dans bien des cas, elles n'ont pas besoin de mandat pour obtenir ces renseignements. Cette information est cruciale pour lancer une enquête et pour la poursuivre dans le but d'obtenir un mandat de perquisition ou tout autre type de mandat exigeant des motifs raisonnables de croire.
Si l'on complique le travail des policiers en leur imposant un seuil plus élevé pour obtenir ces renseignements, on bloquera tout dès le départ. Ils ne seront pas en mesure d'obtenir cette information et, par conséquent, de faire enquête.
Le sénateur Baker: Deux questions viennent à l'esprit. Premièrement, à l'heure actuelle, on ne peut obtenir le numéro de compte bancaire de quelqu'un ou identifier le numéro de quelqu'un sans mandat. Cela va à l'encontre de l'article 8 de la Charte. Un policier ne peut téléphoner à une banque en disant: «Je veux savoir le numéro de compte de telle ou telle personne.»
En ce moment, pour obtenir ce renseignement, il faut avoir un mandat en vertu des articles 487, 487.1 ou 487.01. Il y a d'autres mandats que l'on peut obtenir, mais ce sont les deux principaux. L'article 487.01 a été adopté en 1996, alors que je siégeais à la Chambre des communes et au Comité de la justice. Il y est précisé que ce mandat peut être émis uniquement s'il ne peut l'être en vertu d'une autre loi du Parlement ou du Code criminel; est-ce exact, monsieur Wong?
M. Wong: C'est exact.
Le sénateur Baker: Si l'on a modifié le Code criminel à cette époque, c'est pour permettre au juge, pourvu qu'il ait de bonnes raisons de le faire, d'émettre un mandat particulier qu'il n'aurait pas été possible d'émettre en vertu d'un autre article du Code, advenant que vous cherchiez à obtenir des renseignements bancaires ou encore les relevés de comptes de téléphone de quelqu'un. Permettez-moi de vous donner un exemple.
Supposons que vous voulez obtenir des renseignements d'une compagnie de téléphone à Montréal et que vous êtes en Ontario. Le juge autoriserait un mandat valable pour deux mois, qui serait émis par un juge de paix ou un juge du Québec et ce, pour une fois seulement. Ce serait une situation spéciale qui vous permettrait d'obtenir ce mandat.
Si vous vous prévalez de cet article, le juge devrait avoir des motifs raisonnables de soupçonner qu'il existe des preuves qu'un crime a été perpétré. Autrement dit, des preuves qui pourraient être utiles dans le cadre d'une enquête. Dans le contexte de cette disposition, je comprends maintenant pourquoi on ne peut recourir à l'article 487.01.
Avez-vous consulté des associations d'avocats de la défense au Canada ou l'Association du Barreau canadien? Se sont-ils prononcés au sujet de ce nouvel article que l'on se propose d'ajouter au Code criminel? La Cour suprême de la Colombie-Britannique a décidé d'annuler l'article 491.2, au motif qu'il allait à l'encontre de la Constitution.
Le président: Sénateur Baker, pour votre information, nous accueillons demain des représentants du Conseil canadien des avocats de la défense et de la Criminal Lawyers Association.
Le sénateur Baker: Je me demande ce qu'ils leur ont dit.
Le président: Nous pouvons faire des suppositions; le témoin est libre de parler, mais nous pouvons entendre directement ce qu'ils ont à dire.
Le sénateur Baker: Ne convenez-vous pas qu'en janvier, la Cour suprême de la Colombie-Britannique a annulé des mandats émis en vertu de l'article 492.2 parce qu'ils contrevenaient à l'article 7 de la Charte? À mon avis, c'est parce que cet article était inconstitutionnel et non pas, comme vous l'avez laissé entendre, parce que les renseignements obtenus ne se limitaient pas aux renseignements découlant du numéro de téléphone ciblé, mais qu'ils englobaient tous les numéros de téléphone visés par des appels effectués en provenance ou à destination du téléphone cible, avec les noms et les adresses des interlocuteurs, ce qui serait de toute façon contraire à l'article 492.2. Cependant, l'article 492.2 a été annulé parce qu'il était contraire à la jurisprudence telle qu'établie par la Cour suprême du Canada, n'est-ce pas?
M. Piragoff: L'article 492.2 porte sur tout autre chose. Il s'agit d'une disposition concernant la collecte de renseignements utiles pour l'avenir, une disposition relative à une ordonnance d'enregistreur de numéro, à la capacité de faire la collecte de numéros de téléphone pendant une certaine période, à compter d'aujourd'hui et après.
Dans le cas mentionné par l'honorable sénateur, à la suite d'une telle ordonnance, on a recueilli plus que des numéros de téléphone. Voilà pourquoi la cour a jugé que puisqu'il en était ainsi, cette disposition était inconstitutionnelle.
Or, la disposition qu'examinent les honorables sénateurs ne fait pas état de preuves futures. Il est question de registres qui existent déjà. Ce n'est pas une disposition en vertu de laquelle la banque est tenue de divulguer certains renseignements dans les 90 jours qui suivent. On demande plutôt: «Avez-vous des renseignements concernant un titulaire de compte en particulier?» Autrement dit, on veut savoir s'il a un compte. Essentiellement, c'est ce qu'on veut savoir. Il s'agit d'une ordonnance étroite et spécifique. Le juge — et non seulement la police — a des motifs raisonnables de soupçonner que la banque est en possession de renseignements susceptibles de faciliter l'enquête. En l'occurrence, il s'agit de savoir si l'individu visé a un compte dans cette banque et, dans l'affirmative, son numéro.
Rien de plus. On ne peut obtenir au moyen de cette ordonnance le solde du compte ou les transactions qui y ont été effectuées. Pour ce faire, il faut obtenir un mandat ou une ordonnance de communication générale, deux documents qui sont assujettis à des exigences plus élevées.
Comme je l'ai indiqué, le système se fonde sur la différence entre des renseignements assortis d'attentes élevées en matière de vie privée, comme les sommes et les transactions figurant dans un compte, et des renseignements assortis d'attentes réduites en matière de vie privée, comme la simple existence d'un compte bancaire.
Le sénateur Kelleher: Je vais poser des questions beaucoup moins pointues puisque je ne suis pas familier avec ces dispositions du Code criminel. Cela dit, je connais bien le Code criminel ainsi que les questions liées aux valeurs mobilières, aux fraudes en valeurs mobilières, etc.
Je vous félicite de présenter cette nouvelle mesure. Par certains côtés, elle constitue le pendant de ce que font dans ce domaine nos amis Américains. À mon avis, la législation actuelle est déjà solide, même sans ce nouveau projet de loi, ce qui est formidable. Aux États-Unis, on porte des accusations, on obtient des condamnations, on sort les uniformes orange et les coupables se retrouvent en prison.
Étant donné que vous travaillez pour la Couronne, vous pourriez peut-être m'expliquer pourquoi nous ne semblons pas aller chercher de nombreuses condamnations? Franchement, même si des gens sont reconnus coupables, personne ne va jamais en prison. Je ne comprends tout simplement pas cela.
Je crois fermement aux uniformes orange. Cela dit, je ne pense pas que les choses vont beaucoup changer ici au Canada. Dieu sait que nous avons eu notre part de scandales au pays. Personne n'a même jamais été accusé dans l'affaire Bre-X.
Quel est le problème ici? Pourquoi n'intentons-nous pas des procès dans ces affaires? Et lorsque c'est le cas, pourquoi notre appareil judiciaire ne semble-t-il pas considérer ces crimes aussi sérieux que d'autres et n'envoie-t-il pas les coupables en prison?
Peut-être pourriez-vous m'expliquer quel est notre problème si l'on compare notre situation à la feuille de route aux États-Unis? Je ne dis pas que les États-Unis ne poussent pas un peu loin — sans doute. Cependant, nous pourrions certainement faire mieux qu'à l'heure actuelle.
M. William Bartlett, avocat principal, Section de la politique en matière de droit pénal, ministère de la Justice du Canada: Je conviens avec vous que la feuille de route des États-Unis semble meilleure pour ce qui est de la rapidité avec laquelle on porte des accusations et on résout de telles affaires, que ce soit à la suite d'une reconnaissance de culpabilité ou d'un procès. Il ne fait aucun doute qu'aux États-Unis, le système de détermination de la peine est beaucoup plus sévère.
Il existe certains nombres de différences avec le Canada, y compris en ce qui a trait à l'approche en matière de détermination de la peine. Nous n'avons tout simplement pas les peines maximales très sévères et les peines minimales relativement sévères qu'il y a là-bas, particulièrement au niveau fédéral. Les dispositions américaines en matière de détermination de la peine prévoient des fourchettes de peines. Vous avez pu le constater en regardant n'importe quelle émission de télévision. Les autorités policières emmènent l'inculpé au Bureau du procureur de district et c'est là qu'on lui dit: «Pour votre crime, vous purgerez de 6 à 12 ans de prison.» Ces peines sont issues d'une grille. Ajoutez à cela quelques facteurs, et vous avez à la fois un plancher et un plafond pour ce qui est des peines.
L'expérience a connu un succès mitigé aux États-Unis. De nombreux États américains abandonnent maintenant leurs barèmes de peines pour diverses raisons, notamment le fait qu'ils ne peuvent construire de prisons assez vite. Ils doivent remettre des détenus en liberté avant l'expiration de leur peine, y compris des détenus violents, tout simplement parce qu'ils n'ont pas suffisamment de place dans leurs prisons, même en les entassant à quatre par cellule.
Le système américain est différent. Au Canada, la détermination de la peine relève du juge qui prononce la peine. Étant donné sa sévérité, je l'avoue, le système de détermination de la peine américain motive énormément les inculpés à plaider coupable et à fournir des renseignements sur d'autres assez rapidement.
Au Canada, cela serait considéré comme une contrainte abusive. On me dit que Law & Order présente un portrait assez fidèle des négociations de plaidoyers aux États-Unis. Le fait que l'inculpé sache ce que lui réserve la grille de détermination de la peine est un incitatif puissant à collaborer ou à reconnaître sa culpabilité.
J'aimerais expliquer comment nous allons fonctionner à cet égard au Canada. Le projet de loi aborde la question de la détermination de la peine, mais sans préciser de peine minimale car d'après notre expérience, l'imposition d'une peine minimale ne fonctionne pas bien. Cela a plutôt pour effet de fausser la donne. Les peines en question deviennent des plafonds plutôt que des seuils. Elles se transforment en peines maximales au lieu d'être des peines minimales. Les juges n'acceptent tout simplement pas qu'on limite ainsi leur pouvoir discrétionnaire en matière de détermination de la peine et, en vérité, ils trouvent divers moyens de contourner cela.
La mesure porte la peine maximale pour fraude de 10 à 14 ans. Il s'agit là de la plus longue peine maximale prévue au Code criminel, l'emprisonnement à perpétuité mis à part. À cela, nous ajouterions certains facteurs aggravants et non atténuants, qui amèneront les magistrats à imposer des peines plus sévères dans tous les cas majeurs de fraude, et non seulement de fraude touchant les marchés financiers. Nous devrions ainsi voir des peines qui reflètent mieux le caractère sérieux de ces cas.
Cela dit, les coupables au Canada se voient imposer de lourdes peines d'emprisonnement. On en fait moins de cas dans les médias qu'aux États-Unis — les peines ne sont pas du même ordre —, mais des peines de prison de cinq à neuf ans ne sont pas rares. Les données concernant les peines sont plutôt fragmentaires, mais chose certaine, il arrive que de telles peines soient imposées.
Le programme d'accompagnement, qui prévoit un effort d'exécution de la loi intensif mené à bien par des équipes intégrées dans tous les grands centres financiers, l'injection de ressources importantes dans la GRC, de même que le recrutement de conseillers juridiques et d'effectifs accrus pour la Couronne nous permettra d'accorder la priorité à ces affaires, tant au niveau de l'enquête que des poursuites. On veut ainsi s'assurer que les enquêtes se fassent avec la plus grande célérité, que des accusations soient portées lorsque cela s'impose et que les poursuites soient engagées aussi efficacement et rapidement que possible.
Certaines garanties constitutionnelles, y compris la communication de la preuve mandatée par la Constitution, imposent certains défis lors de tels procès. Il s'agit de procès très complexes.
Il est difficile de mener à bien ces procès dans un court laps de temps, mais on peut certes les rendre plus efficients et efficaces. Nous espérons que la mesure, qui intervient tant sur le plan législatif qu'opérationnel, nous permettra d'améliorer la situation.
Le sénateur Kelleher: Aura-t-on suffisamment de fonds pour financer ces ressources et avoir les effectifs voulus pour poursuivre en justice les fraudeurs? Ayant déjà été solliciteur général, je ne suis pas un néophyte dans le domaine, et je sais qu'il n'y a pas tellement d'argent alloué à la lutte contre la fraude au Canada. Je crains simplement qu'il ne se passe pas grand-chose si nous ne pouvons compter sur des effectifs accrus pour traiter ces cas. Pour être franc, je suis assez déçu de nos magistrats, qui ne sont pas disposés à imposer de lourdes peines d'emprisonnement, ni même quelque peine que ce soit.
J'aimerais que vous commentiez mes propos.
M. Bartlett: Sénateur, dans le cadre du programme d'équipes intégrées d'exécution de la loi dans le marché, on prévoit l'allocation de ressources pour embaucher des procureurs fédéraux. Il ne sera pas facile de conclure des arrangements à l'amiable avec les autorités provinciales pour permettre le recours à ces procureurs fédéraux, mais on a prévu des fonds pour en embaucher d'autres.
Le programme prévoit des fonds pour aider les provinces à absorber certains coûts inhabituels. Celles-ci craignent, par ailleurs, que cette mesure n'empiète sur leur champ de compétence. Nous réalisons toutefois des progrès sur ce front. Nous espérons que des ressources spécialisées additionnelles seront effectivement consacrées aux poursuites.
Le sénateur Kelleher: On a l'impression — et j'insiste là-dessus — que l'appareil judiciaire ne tient pas à incarcérer les coupables. Nous n'aimons pas critiquer l'appareil judiciaire, mais cette question ne m'a jamais préoccupé dans le passé.
M. Bartlett: Si l'on se fie aux décisions qui ont été rendues, notamment au cours des dernières années, les tribunaux reconnaissent que la fraude à grande échelle, surtout aux échelons supérieurs, est une infraction grave qui doit faire l'objet d'une peine d'emprisonnement aux fins de dissuasion, et qui doit être dénoncée. Les dispositions relatives à l'aggravation de la peine maximale et aux facteurs qui doivent être pris en compte lors de la détermination de la peine devraient, entre autres, permettre aux procureurs de démontrer aux tribunaux que l'intention du Parlement est très claire, à savoir que ces délits doivent être assortis de peines plus sévères. Si des peines plus sévères ne sont pas imposées, les cours d'appel pourront être appelées à définir ce qu'est l'intention claire du Parlement dans ce domaine.
[Français]
Le sénateur Hervieux-Payette: Il est question dans l'article de protéger les employés. Cependant, des gens qui obtiennent des informations sur des transactions, lors de réunions de familles ou d'amis, par exemple, et qui répandent ces informations, n'ont que deux options. D'une part, ils ne disent rien et achètent les actions ou, d'autre part, ils portent plainte. J'aimerais savoir où ces personnes détenant une information privilégiée portent plainte. Est-ce à l'ancienne Commission des valeurs mobilières du Québec — qui a changé de nom —, à la Bourse de Montréal ou au poste de police? Je ne pense pas que porter plainte au poste de police serait très utile. Je ne parle pas d'un employé, mais d'une personne qui détiendrait une information interne qui ne devrait pas circuler et qui pourrait avoir une influence énorme sur le cours de la bourse.
En ce qui concerne le téléphone arabe, dans le cas de la Bourse, c'est une personne qui détient l'information, pourtant, le lendemain, 90 personnes peuvent être au courant. C'est alors que nous avons une réaction en chaîne. Alors je le répète: où doit-on porter plainte?
[Traduction]
M. Bartlett: Sénateur, il n'y a rien de changé à cet égard: la personne qui sait qu'un acte criminel a été commis doit et devrait le signaler à la police. La personne qui sait qu'un délit d'initié a été commis peut maintenant déposer une plainte auprès d'une commission des valeurs mobilières. Le délit d'initié, s'il est considéré comme une infraction en vertu du Code criminel, doit être rapporté à la police.
L'infraction qui est créée vise les employés, parce que leur situation est souvent très précaire lorsqu'ils dénoncent une conduite illégale au sein de l'entreprise. Toutefois, la personne en possession de renseignements peut s'adresser soit à la commission des valeurs mobilières, soit à l'organisme de réglementation de la province, si elle pense qu'il s'agit d'une infraction provinciale ou d'une question de réglementation. S'il s'agit d'un acte de fraude, d'un délit d'initié ou d'une autre infraction pénale, elle peut certainement transmettre ces renseignements à la police.
On peut, dans les quatre grands centres financiers, signaler l'acte de fraude ou le délit d'initié aux équipes intégrées d'application de la loi dans les marchés, aux agents de la GRC qui font partie de ces équipes.
Le sénateur Hervieux-Payette: Le Québec et l'Ontario sont desservis par des corps policiers différents — c'est-à-dire des forces de police provinciales, et non pas la GRC. Existe-t-il un programme de formation spécial pour les corps policiers de ces deux provinces? Est-ce que les agents de la GRC en poste dans les différentes régions du pays vont avoir droit à une formation spéciale?
M. Bartlett: Les agents de la GRC qui vont participer au programme vont être sélectionnés avec soin et bénéficier d'une formation spéciale. Je sais que les enquêteurs qui font partie de l'escouade des crimes économiques de la PPO, et de son pendant au sein de la Sûreté du Québec, sont très expérimentés et bien formés.
Les équipes intégrées d'application de la loi dans les marchés vont s'efforcer de coordonner leurs activités avec celles des corps policiers existants — la PPO, la Sûreté, les forces de police municipales, comme la force policière ou la brigade de la fraude de la Communauté urbaine de Toronto — afin de s'assurer qu'elles travaillent effectivement en collaboration, qu'elles sont au courant, dans la mesure du possible, de ce que font les autres, qu'elles connaissent les outils mis à leur disposition, outils qu'elles utiliseront avec efficacité.
Le sénateur Hervieux-Payette: Vous les avez donc consultées? Elles appuient la nouvelle loi?
M. Bartlett: La Sûreté ne nous a pas fait part de ses commentaires. Nous avons discuté de la question avec des représentants de l'escouade des crimes économiques de la PPO et de la brigade de la fraude de la Communauté urbaine de Toronto. Ils appuient l'initiative.
Le sénateur Prud'homme: En avez-vous discuté avec la Sûreté?
M. Bartlett: Non, nous ne l'avons pas fait.
Le sénateur Prud'homme: Donc, vous n'avez pas reçu de commentaires de sa part.
M. Bartlett: Le projet de loi existe déjà depuis un bon moment, mais, non, nous n'en avons pas discuté avec la Sûreté.
Le président: Qui est responsable des équipes intégrées d'application de la loi dans les marchés?
M. Bartlett: Les équipes vont être dirigées par la GRC. Toutefois, l'unité va être gérée par un comité mixte formé de représentants de la GRC, du service fédéral des poursuites, qui s'occupera de détacher les conseillers juridiques, les policiers, les procureurs généraux qui ont été affectés au programme. Ils travailleront tous en collaboration. Des intervenants de l'industrie viendront peut-être s'ajouter au groupe. Toutefois, ils ne participeront pas aux discussions lorsque des questions de nature délicate seront abordées. Ils le feront lorsque certaines stratégies seront examinées. L'équipe de gestion qui chapeautera ces unités sera diversifiée. Elle sera présidée par la GRC. Les enquêtes elles-mêmes seront menées par des agents de la GRC, ou encore par des membres des forces de police provinciales ou municipales affectés aux unités chargées de faire enquête.
Le sénateur Massicotte: Honorables sénateurs, j'ai quelques questions à poser. J'insiste, tout comme l'a fait le sénateur Kelleher, sur l'importance de cette mesure législative, sur la nécessité d'intervenir dans ce domaine. Les commissions des valeurs mobilières de même que les infractions qui sont commises ne font pas l'objet d'une surveillance suffisamment rigoureuse.
Mes amis au sein de la GRC vont dire que ce n'est pas l'absence d'une loi qui pose problème, mais plutôt le manque de ressources pour même trouver et poursuivre les contrevenants — sans parler de les emprisonner. Je pense, moi aussi, qu'il y a un manque de visibilité. Si vous voulez que ces mesures aient un effet dissuasif, il faut qu'une peine d'emprisonnement soit imposée. Nous devons effectivement trouver un moyen de leur donner un tel effet. Autrement, elles ne serviront pas à grand-chose.
Je voudrais vous poser deux questions. La loi Sarbanes-Oxley précise que le directeur des finances et le chef de la direction doivent signer une déclaration attestant que les rapports financiers reflètent fidèlement la situation de la société. La loi prévoit des peines d'emprisonnement si cette déclaration est jugée inexacte.
Il n'est aucunement question de cela dans le projet de loi. L'OSCE a imposé la même exigence récemment. Le projet de loi, lui, n'en fait pas mention. Pourquoi?
M. Bartlett: Cette question relève du règlement sur les valeurs mobilières. À l'heure actuelle, le règlement est appliqué par les commissions des valeurs mobilières provinciales et territoriales. Il tombe sous le coup des lois qui régissent les valeurs mobilières dans les provinces et les territoires. On en compte treize. On a déjà proposé de créer un organisme national de réglementation des valeurs mobilières. Le ministère des Finances a demandé à un comité des sages de se pencher là-dessus. Le comité a recommandé, il y a quelques mois, qu'un tel organisme soit mis sur pied. Toutefois, plusieurs provinces s'y opposent. Je ne sais pas si cet organisme de réglementation va finir par voir le jour, mais il reste encore beaucoup de points à discuter. Toutefois, cette question ne relève pas du droit pénal.
Aux États-Unis, la compétence au niveau fédéral, notamment, est très partagée. En fait, le gouvernement fédéral n'exerce pas de compétence directe sur le droit criminel. Il adopte des lois pénales, et ce pouvoir s'ajoute à ceux qu'il possède déjà. Dans ce cas-ci, il a le pouvoir de légiférer dans le domaine du commerce entre États, et cela englobe les valeurs mobilières, puisque celles-ci intéressent invariablement tous les États. La loi Sarbanes-Oxley comprend un grand nombre de dispositions réglementaires qui sont assorties de sanctions. Au Canada, cette question relève uniquement de la compétence des provinces. Elle n'a rien à voir avec le Code criminel.
Le sénateur Massicotte: N'y aurait-il pas fraude s'il s'avérait que la déclaration est fausse ou erronée? Est-ce cet acte ne relèverait pas de la loi?
M. Bartlett: Le Code criminel contient des dispositions sur les faux documents. L'article 397, par exemple, porte sur le dépôt de documents avec l'intention de frauder. Donc, oui, si une déclaration dans l'intention de frauder était soumise, des sanctions seraient appliquées en vertu du Code criminel.
Ce qui nous manque, ce sont des dispositions qui exigent le dépôt d'un rapport financier et qui prévoient l'application de sanctions en cas de non-présentation d'un rapport ou en cas de non-présentation d'un rapport selon les règles établies ou dans les délais prévus, ou une disposition réglementaire qui ne se limite pas uniquement à la falsification de documents avec l'intention de frauder.
Le sénateur Massicotte: Concernant la dénonciation, je crois comprendre que l'employé, lorsqu'il dénonce une infraction qui se traduit par la mise en accusation de l'employeur, bénéficie d'une protection. Toutefois, si, pour une raison ou pour une autre, qu'elle soit bonne ou mauvaise, l'employeur n'est pas accusé, est-ce que l'employé bénéficie quand même d'une protection?
M. Barlett: L'employé est protégé grâce à l'effet dissuasif de la loi pénale. Toutefois, la loi pénale ne peut, par exemple, exiger que l'employé réintègre son poste, puisque cette question relève du domaine civil. Or, c'est le genre de chose que le gouvernement fédéral prévoit proposer dans le cadre d'une politique générale sur la dénonciation, et peut- être d'une loi sur la dénonciation qui protégerait, dans les faits, la situation d'emploi du fonctionnaire.
Le Code criminel peut dissuader ce genre de comportement en transformant celui-ci en infraction et en sanctionnant les employeurs pris en défaut.
Le sénateur Massicotte: Je ne sais pas si j'ai bien compris. Vous dites que l'employé bénéficie d'une protection s'il est prouvé qu'une infraction a été commise. Toutefois, il n'a droit à aucune protection si, pour une raison ou pour une autre, l'infraction n'a été démontrée. Est-ce bien cela?
M. Barlett: Tous les employés bénéficient d'une protection dans la mesure où, si un employé est menacé ou que des mesures disciplinaires sont prises à son endroit, l'employeur est coupable d'un acte criminel. La loi pénale tente de dissuader quiconque de poser un tel geste, compte tenu des conséquences que cela entraîne. Si vous voulez savoir si nous pouvons intervenir et empêcher l'employeur de poser un tel geste, la réponse est non, car la loi pénale nous empêche de le faire. Cette question relève du droit civil quoique. Toutefois, si le geste posé par l'employeur est assimilé à un acte criminel, cela peut avoir un impact sur les recours en matière civile que peut exercer un employé.
Le sénateur Massicotte: Je ne sais pas si j'ai bien compris.
Si un employé accuse son employeur d'avoir commis une infraction, et que, pour une raison ou pour une autre, le tribunal rejette l'accusation, est-ce que l'employeur peut renvoyer l'employé? Un oui ou un non suffira.
M. Barlett: Oui. Et l'employeur peut renvoyer l'employé même si le tribunal juge qu'il y a eu infraction. Toutefois, l'employeur, à ce moment-là, serait passible d'une sanction.
Le sénateur Massicotte: Et s'il n'y a pas eu d'infraction commise, il n'y a pas de recours?
M. Piragoff: S'il n'y a pas eu d'infraction commise, sénateur, ce que dit essentiellement le tribunal dans ce cas-là, c'est que l'employeur a droit à la présomption d'innocence. Chacun, y compris l'employé, est présumé innocent jusqu'à preuve du contraire. Si la poursuite ne peut prouver que l'employé est coupable, alors l'employé est innocent.
D'après M. Bartlett, cette question ne relève pas du code civil ou du code du travail. Il est question ici de la responsabilité criminelle de l'employeur. L'employeur qui a commis une infraction peut faire l'objet de poursuites. Cela ne veut pas dire que l'employé ne peut être renvoyé — il peut l'être. Toutefois, si l'employeur, en le renvoyant, commet un crime, il peut faire l'objet de sanctions ou de mesures disciplinaires, sauf que cela n'a pas pour effet de réintégrer l'employé licencié.
Le sénateur Massicotte: Je ne suis pas avocat, mais je pense que la réponse est non, n'est-ce pas?
M. Piragoff: C'est cela.
Le sénateur Fitzpatrick: Ce projet de loi constitue un pas dans la bonne direction. Toutefois, je me demande s'il n'y a pas lieu de prendre d'autres mesures.
Ce qui me préoccupe, c'est le commerce transfrontalier et la possibilité que des délits d'initié soient commis à l'étranger. D'abord, savez-vous si les délits de ce genre sont fréquents? Cela doit être assez difficile à dire. Le processus est compliqué, à cause des prête-noms, des banques, du système SDC. Toutefois, les dénonciateurs ne sont-ils pas les seuls à pouvoir signaler les délits d'initié commis à l'étranger? Si vous arrivez à trouver les coupables, comment pouvez- vous intenter des poursuites contre eux et leur imposer des sanctions?
M. Piragoff: Ce qu'il surtout retenir, c'est que cette mesure législative s'appliquerait aux gestes posés au Canada. La question qu'il faut se poser est la suivante: dans quelle mesure ces gestes doivent-ils avoir été posés au Canada?
Selon les règles de common law établies par les tribunaux, la Cour suprême du Canada, les tribunaux canadiens peuvent exercer leur compétence dans le cas d'agissements illicites transfrontaliers si l'existence de liens significatifs avec le Canada est démontrée. Les tribunaux peuvent examiner la transaction en question, et évaluer l'importance des liens.
Il est question ici de personnes au Canada qui ont accès à certains renseignements au Canada, mais qui ont joué à la Bourse de New York, par exemple. Les tribunaux pourraient être saisis de l'affaire. Il y a eu, par exemple, des cas de fraude où des Canadiens, par téléphone, ont créé de fausses impressions ou donné de faux prétextes à des investisseurs aux États-Unis. Les tribunaux canadiens ont affirmé qu'ils avaient compétence en la matière. Ils vont examiner les agissements illicites transfrontaliers.
Le sénateur Fitzpatrick: Vous avez parlé des États-Unis. J'imagine qu'il y a beaucoup de transactions qui s'effectuent, qu'il s'agisse de transactions intéressées ou autres, sous forme d'échanges transfrontaliers avec l'Europe. Si j'ai bien compris, cette mesure législative ne peut pas forcément être appliquée en Europe. Par conséquent, une personne qui veut commettre un délit d'initié, qui possède des renseignements et qui ne veut pas se faire prendre peut effectuer cette transaction à l'étranger, n'est-ce pas?
M. Piragoff: J'ai utilisé les États-Unis comme exemple.
Le fait est que si l'existence de liens significatifs avec le Canada est démontrée, les tribunaux peuvent exercer leur compétence, peu importe le pays en cause. Ils pourraient le faire à l'autre bout du monde. Si l'existence de liens significatifs avec le Canada est démontrée, les tribunaux peuvent exercer leur compétence en la matière.
Le sénateur Fitzpatrick: À votre avis, est-il plus difficile de prouver un délit d'initié si l'acte est commis à l'étranger et non au Canada? Il est très difficile d'obtenir des renseignements sur les comptes bancaires dans certains pays d'Europe. Existe-t-il un mécanisme qui vous permet d'obtenir ces renseignements à un coût raisonnable?
M. Piragoff: Oui. Il n'y a pas vraiment de problème sur le plan juridique. Il est très difficile de recueillir des éléments de preuve auprès des autorités étrangères. Nous avons conclu des traités d'entraide juridique avec plusieurs pays, traités qui nous permettent de leur demander si nous pouvons utiliser leur appareil judiciaire pour obtenir des banques des renseignements pour une enquête menée au Canada, et vice-versa. Nous pouvons, par exemple, exécuter des mandats de perquisition auprès des banques canadiennes afin qu'elles fournissent des renseignements qui peuvent aider à faire avancer une enquête menée à l'étranger.
Le sénateur Harb: Vous avez donné deux réponses contradictoires au sénateur Prud'homme. Pouvez-vous être plus précis? Il vous a demandé si vous aviez consulté la Sûreté. Vous avez d'abord dit «oui», et ensuite, «non». Est-ce oui ou non?
Le sénateur Prud'homme: C'est non.
M. Bartlett: Nous n'avons pas encore discuté avec la Sûreté.
Le sénateur Harb: Ma question recoupe celle du sénateur Massicotte. Avez-vous dit que vous ne pouviez offrir des garanties aux dénonciateurs?
M. Bartlett: Si vous parlez des garanties en vertu du code du travail, le droit pénal ne nous le permet pas. Le gouvernement fédéral étudie actuellement le projet de loi sur les dénonciateurs, qui accorderait exactement le même genre de garanties aux fonctionnaires fédéraux en protégeant leurs emplois.
Les provinces disposeraient certes de ce droit, et le gouvernement fédéral pourrait posséder certains pouvoirs pour intervenir de cette façon à l'égard des industries relevant de ses compétences. Cependant, le droit criminel ne nous le permet pas.
Le sénateur Harb: Dans un projet de loi qui portait sur la Loi sur la concurrence, nous avions présenté une mesure pour modifier la loi afin de viser précisément les dénonciateurs, lorsqu'il s'agissait de fixation ou de manipulation des prix. Connaissez-vous cet aspect de la Loi sur la concurrence?
M. Bartlett: Oui, nous sommes certes au courant des dispositions de la Loi sur la concurrence portant sur la fixation des prix et plusieurs autres questions connexes.
Le sénateur Harb: Cette loi comporte un mécanisme assurant la protection des dénonciateurs. Êtes-vous au courant qu'un mécanisme de protection est proposé afin d'imposer non seulement des pénalités mais également des sanctions pénales à l'employeur qui prend des mesures contre un employé qui a dévoilé une fixation ou une manipulation des prix?
M. Bartlett: La Loi sur la concurrence joue sur plusieurs tableaux. Ses dispositions portent non seulement sur le droit criminel mais également sur le droit civil et administratif. Le Code criminel ne porte que sur le droit criminel, et ne peut traiter de questions administratives ou civiles.
Le sénateur Harb: Votre projet de loi porte surtout sur des pénalités. Prévoit-on y ajouter des mesures préventives comme l'éducation, la conscientisation, etc.? Le cas échéant, quand ces mesures seront-elles intégrées?
M. Bartlett: Le programme des équipes intégrées d'application de la loi dans les marchés, qui est un programme d'application de la loi, repose essentiellement sur l'intégration des responsables de l'application du droit criminel, des intervenants au sein de l'industrie et des responsables de l'application de la loi en matière de valeurs mobilières. Les agents de la GRC ayant participé à la création des équipes intégrées ont tenu de nombreuses séances de consultation avec les responsables en matière de valeurs mobilières. Nous avons rencontré ces responsables, l'Association canadienne des courtiers en valeurs mobilières et, particulièrement, les responsables de l'application de la loi dans ce domaine. Cet exercice de coordination équivaudra aux mesures de sensibilisation dont vous parlez.
L'industrie se préoccupe beaucoup de ce genre de crimes commis en son sein. Elle a mis en oeuvre des programmes à cette fin. Dans le cadre de cette initiative générale, on essaiera de faire coordonner les programmes de l'industrie avec les mesures prises par les autorités policières.
Le sénateur Meighen: Monsieur Bartlett, pour parler le plus simplement possible, nous dirons que l'un des principaux éléments du projet de loi vise à imposer une sanction pénale pour les délits d'initié, une sanction qui n'existe pas encore, n'est-ce pas?
M. Bartlett: C'est exact, sénateur.
Le sénateur Meighen: Je me permets le commentaire suivant: je pense que la plupart des Canadiens seraient grandement surpris d'apprendre qu'il n'existe aucune sanction pénale pour les délits d'initié.
Nous ajouterons une sanction pénale pour les fraudes et porterons de 10 à 14 ans la peine maximale, ce qui signifierait que quiconque est déclaré coupable et reçoit la peine maximale serait admissible à la libération conditionnelle après quatre ans au lieu de trois, si la règle du tiers s'appliquait. À mon avis, il ne s'agit pas d'un changement important.
Sur le plan des poursuites au criminel, pouvez-vous me dire pourquoi, d'après vous — et je pense que la simple connaissance du système permet de répondre à cette question —, aucune accusation criminelle n'a été portée dans la si flagrante affaire Bre-X? Y avait-il une lacune législative? Est-ce en raison d'un manque de ressources? Est-ce à cause d'un manque de preuves?
M. Bartlett: Je ne peux pas réellement formuler d'observations sur ce cas précis. Je ne peux que répondre qu'une enquête exhaustive a eu lieu.
Le sénateur Meighen: N'est-il pas vrai qu'on a dit que quelque chose existait alors que ce n'était pas le cas?
M. Bartlett: Sénateur, je dirais que ce serait effectivement le cas.
Le sénateur Meighen: Pour parler le plus simplement possible, il semble s'agir d'un cas assez évident de fraude, n'est- ce pas?
M. Bartlett: Cela semblerait certainement être le cas, sénateur.
Le sénateur Meighen: Je pose de nouveau ma question: Pourquoi aucune accusation criminelle de fraude n'a-t-elle été portée?
M. Piragoff: Honorables sénateurs, c'est aux autorités provinciales, aux procureurs généraux provinciaux, qu'il incombe d'engager des poursuites au criminel pour les cas de fraude en vertu du Code criminel. Nous ne savons absolument rien sur l'enquête, sur sa pertinence ou sur les motifs susceptibles d'amener le procureur général d'une province à engager des poursuites dans l'intérêt public.
Le projet de loi donnerait au gouvernement fédéral des pouvoirs analogues à ceux des provinces, lui permettant d'engager des poursuites pour les fraudes graves. Le gouvernement fédéral pourrait le faire dans certains cas où une province serait dans l'impossibilité de le faire.
Quant à savoir si le gouvernement fédéral engagerait de telles poursuites ou non, nous participons, comme nous l'avons indiqué auparavant, à la négociation des protocoles avec les provinces, parce qu'il s'agit d'un domaine de compétence relevant traditionnellement des provinces.
Nous avons dit au tout début que le projet de loi offrirait des pouvoirs qui viendraient compléter ceux des provinces et non pas s'y ajouter. Certaines provinces n'ont pas les ressources permettant de mener les enquêtes ou de poursuivre les personnes accusées de fraude, en raison de la complexité des affaires et du travail administratif à accomplir. Le gouvernement fédéral a offert à ces provinces ses ressources et ses procureurs. D'autres provinces disposent de procureurs et d'enquêteurs spécialisés dans les cas de fraude. Elles seraient en mesure de s'attaquer à un cas complexe de fraude.
Je ne peux pas parler du passé. Je ne peux pas parler des raisons pour lesquelles une enquête particulière a été efficace ou inefficace. Je peux tout simplement dire que le projet de loi offrirait une solution de rechange pour s'attaquer aux cas complexes de fraude, lorsqu'une province ne serait pas en mesure d'engager des poursuites, faute de ressources.
Le sénateur Meighen: Serait-ce un préalable absolu? Devraient-elles prouver qu'elles n'ont pas les ressources nécessaires ou pourraient-elles simplement le demander?
M. Piragoff: Nous négocions des protocoles avec les provinces sur les modalités nous permettant de leur venir en aide et d'intervenir à leur demande. Nous ne voulons pas intervenir lorsque nous croyons que nous devrions le faire. Nous voulons nous assurer que nous ne leur marchons pas sur les pieds. Nous participons à des négociations avec les provinces en respectant leur primauté, tout en nous assurant cependant que nous pouvons garantir que les Canadiens sauront que, si les provinces n'engagent pas ou ne peuvent pas engager les poursuites pertinentes dans ces affaires, le gouvernement fédéral appliquera une norme nationale et que les Canadiens auront confiance dans nos marchés.
Le sénateur Meighen: La première partie de votre réponse est celle à laquelle je m'attendais. La deuxième partie me donne du moins un certain espoir.
Est-ce vous, monsieur Bartlett, qui avez signalé que le projet de loi contenait des dispositions régissant les ressources qui permettent d'embaucher des procureurs ou qu'un autre texte législatif comportait de telles dispositions? Pouvez- vous nous donner une idée de l'ampleur de ces ressources?
M. Bartlett: Il ne s'agit pas du projet de loi en cause. Le financement de l'ensemble du programme des équipes intégrées d'application de la loi dans les marchés a été annoncé dans le budget de 2003. Il s'agissait d'un montant maximal de 30 millions de dollars par année, pour notamment les enquêtes, les poursuites par le fédéral et certains montants réservés aux provinces aux prises avec des coûts exceptionnels en matière de poursuites.
Le sénateur Meighen: Il est difficile de juger si un montant de 30 millions de dollars fera bouger les choses ou non.
M. Bartlett: De toute évidence, on n'a jamais assez de ressources. C'est 30 millions de dollars de plus que ce dont on disposait auparavant, et ces ressources visent certains aspects, ce qui est essentiel, selon moi. Les ressources visent un domaine où seront mises à contribution ces équipes intégrées qui pourront également donner des conseils juridiques. Si le tout fonctionne comme nous l'espérons, les procureurs pourraient s'attaquer d'emblée à ces affaires et ils acquerront certaines compétences spéciales à cet égard. Le fait d'affecter les ressources à un problème particulier entraînera peut- être un effet plus considérable que la simple attribution de ressources supplémentaires au sein d'un système déjà en place.
Le sénateur Meighen: Espérons-le.
Le sénateur Prud'homme: Ma question fait suite à celle du sénateur Meighen: vous avez dit qu'il incombe aux provinces d'entamer des poursuites dans ces affaires. J'ai bien réussi mes cours de droit criminel à l'université, mais je n'ai jamais exercé le droit criminel. Dites-vous que le Code criminel ne contient actuellement aucune disposition permettant au gouvernement fédéral d'intervenir si une province n'engage pas de poursuites dans une affaire impliquant un tel désastre financier?
M. Bartlett: Même si le gouvernement fédéral détient tous les pouvoirs constitutionnels lui permettant d'engager des poursuites pour une infraction pénale relevant de ses compétences, notamment en vertu du Code criminel, la constitution accorde encore aux provinces le pouvoir d'engager des poursuites en vertu du Code criminel aux fins de l'administration de la justice, et la définition de «procureur général» à l'article 2 du Code criminel attribue au procureur général provincial les pouvoirs nécessaires à l'égard de la plupart des infractions en vertu du Code criminel.
Au cours des dernières années, le Parlement a donné des pouvoirs analogues au procureur général fédéral à l'égard de certaines infractions liées aux organisations criminelles et des nouvelles infractions créées aux termes du projet de loi C-36 en matière de terrorisme.
Le sénateur Prud'homme: C'est là où je voulais que vous en veniez.
M. Bartlett: Cependant, en vertu de cette définition, c'est aux procureurs généraux provinciaux qu'incombent la plupart des responsabilités sur le plan du Code criminel. Le projet de loi modifierait cette définition en ce qui concerne les fraudes et les autres infractions liées aux marchés.
Le sénateur Prud'homme: Il est plus important de modifier le Code criminel pour permettre au gouvernement de poursuivre les Hells Angels plutôt que les cols blancs qui commettent des fraudes, ce qui frappe davantage les esprits, je suppose?
M. Piragoff: Le projet de loi donnerait de tels pouvoirs, sénateur.
Le sénateur Prud'homme: Oui, je l'ai lu.
M. Piragoff: Le projet de loi reconnaît que certains aspects relèvent de l'intérêt national, notamment la lutte contre le terrorisme et contre le crime organisé. Ces crimes ne sont pas de nature locale, mais de nature nationale, et le projet de loi reconnaît que le gouvernement fédéral devrait participer aux poursuites engagées. Le projet de loi ajoute la fraude sur les marchés financiers à la liste des infractions contre l'État plutôt que contre la personne.
Le sénateur Baker: Je présume que la majeure partie de cet argent serait affectée à la GRC pour lui permettre d'embaucher des comptables judiciaires aux fins des enquêtes.
M. Bartlett: C'est exact.
Le sénateur Baker: Naturellement, la GRC porterait les accusations et exécuterait les enquêtes.
M. Bartlett: C'est exact.
Le président: Vous me permettrez de remercier les témoins de leurs exposés.
Je demanderais aux membres du comité de ne pas quitter les lieux afin de régler deux questions administratives, dont la dernière sera étudiée à huis clos.
Vous avez devant vous le projet de budget qui sera soumis à l'approbation du Bureau de régie interne.
Le sénateur Prud'homme: Je propose l'adoption du budget.
Le président: Les honorables sénateurs sont-ils d'accord?
Des voix: D'accord.
Le président: Le budget est adopté. Nous nous réunissons maintenant à huis clos.
La séance se poursuit à huis clos.