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Délibérations du comité sénatorial permanent
des finances nationales

Fascicule 1 - Témoignages du 18 février 2004


OTTAWA, le mercredi 18 février 2004

Le Comité sénatorial permanent des finances nationales auquel le projet de loi C-212, Loi concernant les frais d'utilisation, a été renvoyé, se réunit aujourd'hui à 18 h 30 pour examiner le projet de loi.

Le sénateur Lowell Murray (président) occupe le fauteuil.

[Traduction]

Le président: Honorables sénateurs, nous avons devant nous le projet de loi C-212, Loi concernant les frais d'utilisation. Vous vous rappellerez que nous avons examiné ce projet de loi l'automne dernier. Le comité a tenu deux séances pour examiner le projet de loi, soit les 28 octobre et 4 novembre, sous la présidence du président suppléant, le sénateur Day.

Nous recevons deux témoins ce soir. Le premier est le président du Conseil du Trésor, l'honorable Reg Alcock. Il sera suivi de l'auteur du projet de loi, M. Roy Cullen, député. Ensuite, je vous demanderai si vous voulez procéder à l'examen et de quelle façon vous voulez le faire.

M. Alcock est député à la Chambre des communes depuis 1993. Il a été secrétaire parlementaire du ministre des Affaires intergouvernementales et il s'est peut-être encore plus démarqué en tant que président de divers comités de la Chambre des communes, notamment d'un comité assez nouveau, le Comité permanent des opérations gouvernementales et des prévisions budgétaires, au cours de la dernière session. Depuis le 12 décembre, il est président du Conseil du Trésor et ministre responsable de la Commission canadienne du blé. Ces nominations étant assez récentes, nous vous en félicitons et nous vous souhaitons pour la première fois la bienvenue en tant que ministre. Bonne chance dans vos nouvelles responsabilités importantes.

Je dois dire que nous nous entendions très bien avec votre prédécesseur, Mme Robillard, et avec les hauts fonctionnaires du Conseil du Trésor. Nous avons toujours eu de très bons rapports avec eux et je suis certain que cela continuera d'être le cas.

Quoi qu'il en soit, j'invite maintenant le ministre à faire une déclaration liminaire au sujet du projet de loi C-212, avant de passer à une période de questions et de commentaires.

L'honorable Red Alcock, président du Conseil du Trésor: Sénateur Murray, je voudrais m'excuser d'être arrivé en retard. J'étais à la Chambre et nous étions saisis d'une question de privilège que nous venons tout juste de conclure; je suis venu tout de suite ici, en faisant un petit détour par le neuvième étage.

Je vous remercie de l'occasion qui m'est donnée de venir vous parler. C'est un peu inhabituel que je vienne parler d'un projet de loi qui ne vous a pas été présenté par l'auteur du projet de loi. Il s'agit essentiellement d'un projet de loi d'initiative parlementaire. Cependant, on a pensé qu'étant donné que vous aviez déjà examiné le projet de loi avant la prorogation, il serait peut-être utile que j'apporte quelques petits éclaircissements au sujet du processus et que je vous fasse part de la position du Conseil du Trésor à ce sujet.

Je ne peux m'empêcher de saisir l'occasion pour faire une petite publicité. Je sais que vous n'allez pas aborder d'autres questions, mais je veux dire tout simplement une chose. Les députés de la Chambre des communes se font constamment dire par les médias, les universitaires et d'autres que si seulement nous pouvions faire le même travail détaillé rigoureux que fait votre comité, nous atteindrions un niveau supérieur. Vous avez la réputation de prendre tout cela très au sérieux. Le sénateur Murray le sait, et je lui en ai parlé à d'autres occasions, car je m'intéresse profondément au fonctionnement, à la structure et aux opérations du gouvernement. J'aimerais à un moment donné venir rencontrer le comité pour parler du processus d'examen des dépenses, du nouveau comité du cabinet et du travail qu'accomplit ce dernier. Franchement, j'aimerais que votre comité participe à ces travaux, car il a beaucoup d'information sur la façon de gérer le changement au sein de grandes organisations.

Nous avons ici un projet de loi qui a été proposé par un député de la Chambre des communes. Ce député a beaucoup travaillé, tant avec des gens dans les communautés d'intérêt qu'avec ses collègues et il a réussi à convaincre ses collègues à la Chambre d'appuyer son projet de loi. Le projet de loi a été présenté. On peut dire que mon prédécesseur au Conseil du Trésor et que les hauts fonctionnaires du Conseil du Trésor avaient d'importantes préoccupations relativement à ce projet de loi. Le terme «importantes»est peut-être trop fort; il y avait des changements dans le libellé qui les préoccupaient. Il s'agit là d'une mesure assez énergique, n'est-ce pas? Le fait d'avoir une surveillance parlementaire des augmentations des dépenses semble être comme si on disait aucune imposition sans représentation, mais cela correspond un peu à cette catégorie.

Lorsque je suis devenu président, M. Cullen est venu me voir avec son projet de loi et m'a demandé d'examiner certaines des préoccupations. J'ai rencontré les membres du personnel du Conseil du Trésor et je dois dire qu'ils ont été fantastiques. Ils ont fait un travail absolument superbe pour dissiper les préoccupations de M. Cullen et les leurs. Je crois qu'ils en sont arrivés à un point où tant le Conseil du Trésor que M. Cullen sont maintenant plus à l'aise avec certains des amendements qui pourraient être présentés et discutés ici.

Il y a peut-être un point ou deux, disons, sur lesquels le consensus n'est peut-être pas aussi fort que nous aimerions qu'il le soit, et c'est là où je vous demanderais de nous aider à résoudre ces problèmes, car votre comité a énormément de connaissances sur ces questions.

En principe, j'appuie le projet de loi. Je félicite M. Cullen pour le travail qu'il a accompli. Je félicite la communauté pour le travail qu'elle a accompli dans ce dossier. Beaucoup de temps et d'énergie et de réflexion y ont été consacrés. C'est une rupture importante par rapport aux pratiques antérieures dans ce domaine.

Je voudrais par ailleurs féliciter Mylène Bouzigon et Ruth Dantzer, toutes deux cadres supérieures du Conseil du Trésor. Elles ont travaillé longtemps et très fort à ce dossier avec leurs collègues afin de déterminer les conséquences du projet de loi: Quelles sont ces conséquences? Comment est-ce qu'il nous touche? Nous voulons avoir une idée de ces conséquences avant d'adopter une nouvelle loi. Elles sont convaincues que le projet de loi sera tout à fait acceptable.

Je ne présente pas le projet de loi. Normalement, je viendrais ici dire que c'est le projet de loi, mais que ce n'est pas le mien. C'est le projet de loi de M. Cullen. Je veux cependant vous rassurer au sujet du projet de loi. Il s'agit à notre avis d'une approche intéressante et nous sommes prêts à appuyer le projet de loi, sous réserve de certains amendements qui seront présentés ici et dont M. Cullen et certains honorables sénateurs vous parleront.

Le président: Dois-je comprendre que la déclaration que vous aviez préparée et que vous n'avez absolument pas lue doit être jointe et considérée comme ayant été lue?

M. Alcock: Nous devrions la déposer, monsieur le président, et vous pourrez la lire lorsque vous serez prêt.

Le président: Elle est assez courte et je pense qu'avec l'approbation des membres du comité, elle peut être jointe aux procès-verbaux à ce moment-ci. Je voudrais attirer l'attention des collègues plus particulièrement à la page 3 où le ministre fait ressortir six points à faire valoir. Un ancien sénateur maintenant décédé, qui s'appelait Allister Grosart, qui a passé toute sa vie en politique et qui a été directeur national du Parti conservateur où il recevait beaucoup de courrier me disait toujours que s'il recevait une longue lettre, ou une dissertation, il regardait toujours l'avant-dernier paragraphe, car c'est là que les gens vous disent ce qu'ils veulent.

Honorables sénateurs, vous voudrez peut-être regarder l'avant-dernier paragraphe dans lequel M. Alcock dit que le gouvernement est favorable à l'orientation générale du projet de loi et que même si les points soulevés doivent faire l'objet d'un examen plus minutieux et d'une discussion plus approfondie, il croit sincèrement que des modifications permettront de les régler avec succès. Je crois que c'est là l'essentiel.

M. Alcock: Je pense, sénateur Murray, que vous avez saisi l'essentiel.

Le président: Merci.

Le sénateur Comeau: Lorsque M. Cullen a comparu devant notre comité, j'ai soulevé le fait que lorsque ces barèmes tarifaires étaient considérés comme ayant été déposés à la Chambre des communes, ils ne seraient renvoyés que devant la Chambre des communes et que le Sénat n'aurait pas son mot à dire sur ces barèmes tarifaires. Ce que j'ai dit à l'époque, c'est que si nous avons déjà suffisamment de travail, il aurait peut-être convenu de faire en sorte que ces rapports soient considérés renvoyés au Sénat également.

En votre qualité de ministre, avez-vous songé à cette possibilité?. Je pense que c'est là une possibilité qui mérite examen.

M. Alcock: M. Cullen et moi-même en avons brièvement parlé plus tôt cette semaine. Monsieur le président, je demande votre indulgence et je vous remercie de votre aide, franchement, avec cette lettre, car comme vous vous en doutez, cette question me préoccupe quelque peu.

À cet égard, je ne crois absolument pas que l'intention soit de discréditer le Sénat, monsieur. Il serait peut-être utile que le Sénat nous donne des conseils quant au rôle qu'il aimerait jouer.

Le problème, c'est qu'il existe une procédure pour déposer ces majorations de tarif auprès des divers comités et leur allouer un certain temps, et s'ils choisissent de ne pas les examiner, alors les majorations sont considérées comme ayant été approuvées. Nous pourrions les déposer exactement au même moment au Sénat de façon à ce que le Sénat puisse les examiner également. Si cela dissipe vous préoccupations à ce sujet, alors je ne pense pas que cela nous pose un problème. Est-ce que cela répond à votre question?

Le sénateur Comeau: Oui, cela répond très bien à la question.

Encore une fois, ce n'est pas que nous ayons besoin de travail supplémentaire, nous avons déjà suffisamment de pain sur la planche, et nous n'en avons pas besoin de plus. Cependant, c'est tout simplement une chose à laquelle nous devrions songer au cas où nous voudrions le faire.

La deuxième préoccupation, que j'ai déjà soulevée, concerne la question du coût pour mettre en place un genre d'organisme qui réglerait les différends entres les utilisateurs et le gouvernement. Le Conseil du Trésor a-t-il calculé ce coût?

Je ne veux pas vous ennuyer avec ce point, mais par le passé, il y a eu des problèmes relativement au calcul des coûts de la part du gouvernement. Si je mentionne le contrôle des armes à feu, je ne le fais qu'en passant. Nous devons en tenir compte et s'il y a un coût qui s'y rattache, il serait bien de la connaître à l'avance de façon à ce que nous puissions critiquer plus tard s'il y a des dépassements de coût.

M. Alcock: Après avoir consulté votre comité sur la façon dont nous pouvons apporter des corrections en système d'information financière convenable, j'imagine que vous ne serez plus obligé de nous critiquer pour les dépassements de coût.

Entre temps, cependant, je travaille à résoudre le problème du coût du registre des armes à feu qui s'élève à 62 millions de dollars par an et dont le coût total atteint environ 814 millions de dollars. C'est un exemple qui montre bien qu'il s'agit essentiellement d'un service partagé. Il y a recouvrement des coûts.

Je ne veux pas parler pour M. Cullen. Cependant, nous fournissons à l'heure actuelle des ressources en vue d'élaborer la politique qui établit les frais, c'est-à-dire — les ressources qui existent au sein des ministères. Je pense que M. Cullen est d'avis que l'industrie devrait également payer une partie des coûts.

Le sénateur Comeau: Cela répond à ma question. Il n'y aurait pas de coût additionnel pour le contribuable autre que le service régulier que les hauts fonctionnaires du Conseil du Trésor fournissent régulièrement de toute façon.

M. Alcock: Si vous vous inquiétez également du gaspillage de 65 000,00 $, je serais prêt à en parler avec vous également.

Le sénateur Comeau: Cela pourrait être un bon sujet lors d'une séance future.

Le sénateur Ringuette: J'ai pris connaissance de l'exposé du ministre et des éléments du projet de loi qu'il a soulignés comme points à faire valoir et à modifier. Je suis certainement d'accord avec les questions que le ministre a fait ressortir. J'ai l'intention, plus tard au cours de cette séance, de présenter des amendements pour répondre aux questions qui ont été signalées par le ministre, et aux questions également qui ont été soulevées précédemment lorsque le sénat a débattu du projet de loi en cause.

Je comprends les préoccupations du sénateur Comeau en ce qui a trait au rapport du ministre et aux conséquences pour le Sénat. Je présenterai au comité des amendements au projet de loi en vue de répondre à ces préoccupations.

Le président: Vous voudriez peut-être les distribuer maintenant, sénateur Ringuette.

Je demanderais aux membres du comité si, avec votre permission, vous voudriez passer à l'étude article par article du projet de loi ce soir, une fois que nous aurons entendu M. Cullen.

Monsieur le ministre, vous avez dit dans votre déclaration écrite que l'un des problèmes à résoudre était notamment les définitions de «ministre» et d'«organisme de réglementation» pour s'assurer que son libellé exclut les sociétés d'État et les autres organisations non gouvernementales. Il y a deux questions ici. Je constate dans le projet de loi que M. Cullen appliquerait la loi à tous les frais d'utilisation, etc., y compris ceux établis par un ministère au sens de l'article 2 de la Loi sur la gestion des finances publiques. Il y en a d'autres. M. Cullen n'est pas ici, mais je pense qu'il a une liste d'organismes et de ministères qui seraient visés par le projet de loi. Connaissez-vous cette liste, monsieur le ministre?

M. Alcock: Oui.

Le président: Êtes-vous à l'aise avec cette liste?

M. Alcock: Oui.

En raison de la nature du projet de loi, lorsque M. Cullen viendra vous parler, Mme Bouzigon sera ici pour répondre aux questions qui pourraient être posées.

Franchement, l'objectif consiste à s'appuyer sur une initiative prise par de simples députés de la Chambre des communes pour fournir le plus possible un avis d'expert relativement à ces préoccupations et à d'autres, pour laisser ensuite le comité prendre ces décisions finales en toute sagesse.

Le président: Pour revenir aux organisations auxquelles cela s'appliquera, NavCan est l'une de celles qui se sont plaintes par le passé au sujet du projet de loi. Vous connaissez NavCan. Cette organisation s'est plainte en disant qu'elle était une société du secteur privé et qu'elle ne devrait pas être visée. Qu'en pense le gouvernement?

M. Alcock: On en a discuté avec M. Cullen et un amendement sera apporté en vue de les rayer de la liste.

Le président: Nous en parlerons alors avec lui.

M. Alcock: Puis-je faire une dernière observation, monsieur le président?

Le président: Oui.

M. Alcock: Je souhaite répéter ce que j'ai dit au début: il y a beaucoup de travail à faire pour régler certains des problèmes liés à la gestion d'un système très grand et très complexe. Je demanderai à votre comité de nous aider à examiner certains de ces problèmes et je lui demanderai conseil, non seulement en ce qui a trait à l'examen du projet de loi, mais j'aimerais également vous poser d'autres questions.

Les lois doivent constamment évoluer. Nous nous engageons sur une nouvelle voie ici. Je pense qu'il y a des gens qui ont des craintes à ce sujet. Cependant, n'est-il pas vrai que de bonnes décisions sont prises par des gens avertis qui se fondent sur leur expérience, et que l'on acquiert de l'expérience lorsqu'on prend une mauvaise décision? Au cours du processus, si nous constatons qu'il y a un problème, c'est nécessaire de trouver une solution, je n'ai pas d'inconvénient à ce que nous revenions en arrière et le fassions. Ce projet de loi établit un nouveau processus. Il établit une nouvelle norme pour le Parlement en ce qui a trait à sa participation dans l'important domaine de l'établissement des frais. Il établit quelque chose de nouveau pour les ministères en ce sens qu'il y a des pénalités qui sont imposées si les ministères n'atteignent pas les normes qu'ils se sont fixées. C'est une rupture par rapport aux pratiques passées. Nous serons tous intéressés à voir comment cela va se passer. Nous voudrons peut-être réexaminer la question après quelques années d'expérience avec ce nouveau processus.

Le président: Très bien.

Permettez-moi de dire que nous sommes en communication avec votre cabinet pour tenter d'organiser une première séance avec vous pour discuter du Budget principal des dépenses qui sera déposé dans quelques semaines. Parmi les questions que je voudrais aborder avec vous, il y a notamment le processus d'examen des dépenses, que vous avez déjà mentionné, la fonction de contrôle, les changements au niveau de la surveillance financière et les changements au niveau des responsabilités générales dans la fonction publique. Qu'est-ce qui est resté au Conseil du Trésor? Qu'est-ce qui a été transféré au ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux? Qu'est-ce que cette nouvelle agence au Conseil privé? L'automne dernier, nous avons adopté le nouveau projet de loi sur la fonction publique. C'est un domaine qui nous intéresse tous beaucoup.

M. Alcock: Ce serait très bien, monsieur le président. Je reviendrai dès qu'on pourra organiser cette réunion. Une telle discussion me semblerait en effet très utile.

Le président: Merci beaucoup. Nous nous reverrons donc.

Merci également aux fonctionnaires.

Le président: M. Cullen, parrain de ce projet de loi, a comparu devant le comité à l'automne dernier, honorables sénateurs, quand nous avons été saisis du projet de loi. Vous le connaissez donc, il est député depuis 1996. Il a été secrétaire parlementaire du ministre des Finances et, ce qui intéresse beaucoup notre comité, président du Sous-comité sur le renouveau de la fonction publique du Comité permanent des opérations gouvernementales et des prévisions budgétaires ainsi que président du Comité permanent des finances de la Chambre des communes.

Monsieur Cullen, vous avez entendu le ministre et vous avez eu l'occasion de lui parler. Je suppose que vous êtes au courant des amendements que proposera le sénateur Ringuette.

Sénateur Ringuette, avez-vous fait circuler ces amendements?

Le sénateur Ringuette: On est en train de les imprimer dans les deux langues officielles.

[Français]

M. Roy Cullen, député d'Etobicoke nord: Honorables sénateurs, je vous remercie. Il me fait grand plaisir d'être parmi vous ce soir.

[Traduction]

Je remercie le sénateur Ringuette de parrainer ce projet de loi au Sénat et de prendre le temps de passer en revue ce projet de loi d'initiative parlementaire. Je vous ai à une autre occasion parlé du projet de loi et je ne pense pas qu'il soit nécessaire de revenir à nouveau sur tous les détails.

[Français]

Ce soir j'aimerais surtout souligner les principaux objectifs du projet de loi C-212.

[Traduction]

J'aimerais revenir sur certains des grands principes, puis discuter de certains des enjeux abordés par le président du Conseil du Trésor et voir comment nous pourrions procéder.

Je tiens à remercier le président du Conseil du Trésor d'avoir bien voulu collaborer avec moi. Je crois que les amendements dont vous êtes saisis amélioreront ce projet de loi et permettront de régler certains des problèmes que vous aviez soulevés lors de ma dernière comparution.

Je voudrais aussi remercier les fonctionnaires du Conseil du Trésor, Mme Ruth Dantzer et Mme Mylène Bouzigon, ainsi que le personnel du ministre, qui se sont efforcés avec moi de parvenir à un consensus sur ce qui serait, du point de vue du gouvernement, nécessaire pour faire avancer le projet de loi.

Nous avons un nouveau premier ministre et un nouveau gouvernement et je dois dire que j'apprécie particulièrement la collaboration du nouveau président du Conseil du Trésor. Il ne fait aucun doute qu'auparavant le Conseil du Trésor n'était pas tellement passionné par mon projet de loi.

Le président: Passionné, si, mais pas favorablement.

M. Cullen: Oui, c'est plutôt cela.

Je trouve donc encourageant de travailler avec ce nouveau président dans la nouvelle atmosphère qui règne à propos de ce genre de questions.

J'ai pensé qu'il serait bon que je rappelle aux sénateurs les diverses questions dont traite ce projet de loi. Notamment, la nécessité de relier les frais d'utilisation à la capacité d'un ministère ou d'un organisme d'atteindre certaines normes convenues de rendement; la nécessité d'accroître la participation des intervenants au processus suivi pour calculer ces frais; la nécessité d'analyser plus à fond l'incidence sur les intervenants et les questions de concurrence lorsque l'on envisage de nouveaux frais d'utilisation ou une majoration de ces frais; une plus grande transparence quant à la raison d'être de tels frais; quant aux frais demandés; quant aux coûts que l'on estime recouvrables; aux avantages privés conférés et quant à savoir si les normes de rendement sont atteintes.

Il est par ailleurs nécessaire que les frais d'utilisation correspondent à ce qui est pratiqué dans le reste du monde. Enfin, il est nécessaire que le Parlement ait un meilleur droit de regard lorsque l'on adopte ou modifie des frais d'utilisation.

[Français]

La nécessité d'un processus de règlement des différends est important afin de régler les plaintes ou les greffes des payeurs de frais d'utilisation; et la nécessité d'un rapport annuel indiquant tous les frais d'utilisation en vigueur.

[Traduction]

J'ai présenté ce projet de loi parce que j'estime que les frais d'utilisation, qui ne sont pas considérés comme des impôts, ressemblent fortement à des impôts qui sont établis par des monopoles. Si le système fonctionnait bien, mon projet de loi n'aurait pas été nécessaire. En 2000, le Comité des finances de la Chambre des communes a procédé à un examen majeur. Nous avons par la suite fait un certain nombre de recommandations d'application très large. Très franchement, j'ai été assez découragé par le manque d'action du gouvernement à ce sujet. C'est la raison pour laquelle j'ai décidé de présenter un projet de loi d'initiative parlementaire.

Le projet de loi, comme l'a indiqué le ministre, a été adopté par la Chambre des communes à toutes les étapes à l'unanimité. J'en ai été aussi ahuri que tout le monde parce que c'est un projet de loi important, en toute modestie; cela montre en tout cas combien la Chambre y est favorable.

Je sais que beaucoup de sénateurs s'intéressent également beaucoup à ce projet de loi qu'ils appuient.

Mon problème est une question de temps. Nombre d'entre vous connaissent le règlement. Supposons, par exemple, que ce projet de loi ait l'appui du Sénat, avec certains amendements. Vous avez peut-être certains de vos propres amendements, je ne sais pas, et peut-être que vous n'appréciez pas les amendements que j'ai préparés avec le sénateur Ringuette et le Conseil du Trésor. Supposons un instant que l'on puisse s'entendre. Le projet de loi retournerait à la Chambre des communes pour deux heures de débat. Il retomberait tout en bas du Feuilleton et je pourrais négocier qu'il remonte afin que nous ayons une autre heure de débat. Ainsi, avec des élections que l'on nous annonce sans arrêt au printemps, et donc la dissolution du Parlement, mon projet de loi disparaîtrait. Il faudrait que je recommence à zéro à la Chambre des communes. Voilà trois ans que j'y travaille. Cela ne vous inquiète peut-être pas, mais je voulais vous le signaler parce que le temps presse.

Je travaille avec le président du Conseil du Trésor et son personnel pour essayer de régler les problèmes qu'ils ont soulevés. Je dois dire que certains sont les mêmes que ceux que vous avez soulevés. Je n'entrerai pas dans les détails de tous les amendements parce que je sais qu'à la Chambre des communes, c'est interdit tant que les amendements n'ont pas encore été déposés. On ne peut parler que de concepts.

Le président: Sentez-vous bien libre d'expliquer les choses.

M. Cullen: Je le ferai donc, si vous le permettez.

Par exemple, on s'inquiétait que la portée du projet de loi s'applique aux sociétés d'État. Je sais que cela préoccupait de nombreuses sociétés d'État. Mon premier projet de loi les englobait. Lorsque j'ai apporté des amendements à la Chambre des communes, après les réactions que j'avais eues, j'avais supprimé les sociétés d'État si bien que l'on devait savoir qu'elles n'étaient plus touchées par le projet de loi. Néanmoins, il semble que le libellé soit resté quelque peu ambigu. Sur l'avis du Conseil du Trésor, nous avons un libellé qui limite essentiellement la portée du projet de loi aux ministères et organismes qui sont visés par les annexes de la Loi sur la gestion des finances publiques — autrement dit, les ministères et organismes proches qui se trouvent dans les diverses annexes, que j'ai ici, monsieur le président. Il s'agit des annexes I, I.1, et II.

Le président: Doivent-elles faire partie du projet de loi? Il s'agit d'annexes de la Loi sur la gestion des finances publiques (LGFP).

M. Cullen: Oui, mais l'amendement que nous proposons en précise la portée. Il indique quels organismes et ministères seraient visés par le projet de loi et il s'agit des annexes I, I.1 et II de la LGFP. Il y a un gros document ici qui décrit cela. Le projet de loi s'appliquerait à ces ministères et organismes et non pas aux autres.

Par exemple, NAV CANADA ne serait pas touchée. Des sociétés d'État comme la Banque de développement du Canada (BDC), Exportation et développement Canada (EDC) et la Corporation commerciale canadienne (CCC) ne seraient touchées par le projet de loi.

J'avais d'abord pensé que les sociétés d'État, étant donné qu'elles doivent avoir une orientation commerciale, ne devraient peut-être pas incluses. Ce qui m'inquiétait, c'était que les ministères ou organismes qui voudraient essayer de faire preuve d'une certaine créativité et ne pas être assujettis à mon projet de loi pourraient être tentés de mettre sur pied divers organismes indépendants pour échapper aux dispositions du projet de loi.

Toutefois, je pourrais certainement accepter que les sociétés d'État échappent à l'application de ce projet de loi.

Le président: NAV CANADA n'est pas une société d'État.

M. Cullen: En effet.

Le président: Pourquoi l'exclure?

M. Cullen: En fait, à mon avis, il n'a jamais été question qu'elle soit visée.

Le président: Pourquoi?

M. Cullen: C'est une excellente question. J'ai eu une rencontre avec des représentants de NAV CANADA. En fait, ils sont là derrière nous. Je leur ai demandé s'ils se considéraient comme un monopole. J'espère que je vais rapporter correctement ce qu'ils m'ont dit, à savoir qu'ils sont un monopole. Je leur ai alors expliqué que l'objet de mon projet de loi était de protéger les utilisateurs contre des frais imposés par les monopoles. Je leur ai demandé s'ils convenaient que de tels frais devraient être concurrentiels et qu'il ne devait s'agir que de recouvrer certains coûts précis; que des avantages privés devraient être conférés; qu'il devrait y avoir des normes de rendement; qu'il devrait y avoir un moyen de régler les différends. Ils ont déclaré qu'ils acceptaient tous ces principes. Je leur ai alors demandé ce qui les inquiétait à propos de mon projet de loi. Ils ont répondu qu'ils ont avec l'Office des transports du Canada un autre processus de règlement des différends.

J'ai jugé que cela se défendait. Je leur ai demandé une lettre du secteur aérien — vous en avez peut-être reçu photocopie — indiquant qu'ils n'avaient pas besoin de la protection de mon projet de loi. Je crois que ce secteur, par l'intermédiaire de l'administration canadienne du transport aérien, nous a remis des lettres indiquant qu'ils n'avaient pas besoin de cette protection du projet de loi C-212. C'est donc un exemple.

Le président: Est-ce le seul? Il s'agit essentiellement d'une société privée à qui l'on a donné le droit — je suppose par voie législative — d'imposer des frais. C'est bien cela? Il s'agit d'un monopole constitué par voie législative.

Madame Bouzigon, est-ce que NAV CANADA est unique en son genre? Existe-t-il à votre connaissance d'autres sociétés privées qui se trouvent dans la même situation?

Mme Mylène Bouzigon, avocate générale principale, Direction des services juridiques, Conseil du Trésor: Je n'en vois pas d'autre. Je ne suis toutefois pas spécialiste des sociétés d'État. Il y a là diverses dispositions. NAV CANADA est régie par un régime complexe précisé dans sa loi constituante. Les méthodes et formules sont différentes selon les organisations. Le Conseil de sécurité nucléaire, qui pourrait être couvert par le projet de loi, est régi par une loi qui contient certaines dispositions à cet effet. Il y a tout un éventail de formules.

M. Cullen: En examinant les sociétés d'État et organismes, j'ai en effet constaté qu'il y a toute une gamme d'organisations plus ou moins liées. NAV CANADA est assez indépendante. Je n'ai jamais eu l'intention par ce projet de loi de couvrir les secteurs sous réglementation fédérale. Il y a des entreprises comme Bell Canada qui s'inquiétaient que mon projet de loi s'applique à elles. Je n'en ai jamais eu l'intention. Elles sont clairement exemptées dans mon libellé.

Récemment, on a beaucoup parlé des frais imposés par des organismes tels que les administrations aéroportuaires. Le projet de loi ne les couvrirait pas parce qu'il s'agit d'administrations tout à fait indépendantes du gouvernement. Dans tout ce genre de choses, il faut bien préciser jusqu'où l'on veut aller quand il s'agit de sociétés d'État et d'organismes. Il y a une certaine zone grise. Ces amendements précisent que ces organismes et sociétés sont définis dans les annexes I, I.1 et II de la Loi sur la gestion des finances publiques.

Je me ferai un plaisir de vous remettre cette liste pour que vous voyiez vous-même quels sont les sociétés d'État, organismes et ministères qui seraient visés et ceux qui ne le seraient pas.

Le sénateur Comeau: Ces annexes entreront-elles dans le projet de loi? Avec votre amendement, évidemment, le projet de loi préciserait ces annexes, n'est-ce pas?

M. Cullen: Elles ne feront pas partie du projet de loi mais elles y seront indiquées. Cela renvoie à la Loi sur la gestion des finances publiques et aux sociétés d'État et organismes qui figurent en annexe de la loi. Les annexes ne feront pas partie du projet de loi mais seront mentionnées.

Le sénateur Comeau: En d'autres mots, il est possible que le projet de loi renvoie aux annexes sans que celles-ci fassent partie du projet de loi. Je ne pense vraiment pas que ce soit nécessaire.

M. Cullen: Absolument.

Le sénateur Comeau: Je mentionne cela car si nous constatons que ce projet de loi dépasse les attentes de tout le monde et si NAV CANADA demandait soudainement à être incluse en raison de la réaction positive à ce projet de loi, serait-il possible de modifier celui-ci en modifiant les annexes?

Mme Bouzigon: Si vous me le permettez, sénateur, les annexes de la Loi sur la gestion des finances publiques peuvent être modifiées par décret; cependant, avant qu'un organisme puisse être ajouté à l'une des annexes, il doit remplir certaines conditions.

Le sénateur Comeau: Un instant. Par décret?

Mme Bouzigon: Je parlais de modifications à la Loi sur la gestion des finances publiques, pas à ce projet de loi.

Le sénateur Comeau: Oui, mais moi je parlais du projet de loi.

Mme Bouzigon: Le projet de loi peut toujours être modifié pour y ajouter d'autres critères en plus de ceux qui sont proposés et qui se trouvent dans les annexes.

Le sénateur Comeau: Est-ce assez facile à faire?

M. Cullen: Oui.

Mme Bouzigon: Il s'agirait d'une simple modification législative.

M. Cullen: Vous pourriez le faire vous-même. Ce projet de loi mentionne les sociétés d'État et les ministères, au sens des annexes I, I.1 et II de la Loi sur la gestion des finances publiques.

Le président: Allez-vous nous expliquer ces amendements? En avez-vous une copie?

M. Cullen: Oui, j'en ai une copie. J'allais vous en parler d'une façon générale, mais si vous voulez entrer dans les détails, je veux bien.

Le président: Connaissez-vous ces amendements?

Mme Bouzigon: Oui, monsieur. Simplement, je ne sais pas lesquels ont déjà été proposés.

Le président: Aucun amendement n'a encore été proposé, mais nous avons tous reçu les copies des amendements du sénateur Ringuette.

M. Cullen: Oui, c'est l'ensemble des amendements.

Le sénateur Oliver: Les actionnaires ont-ils également reçu ces amendements?

M. Cullen: Oui, j'ai fait parvenir les amendements à la Coalition des entreprises sur le recouvrement des coûts. Il y a un amendement un peu litigieux dont j'aimerais vous parler.

Le président: Très bien. Lequel?

M. Cullen: Voulez-vous que nous les présentions un par un?

Le premier est celui dont nous discutions à l'instant. Il vise à réduire la portée du projet de loi en précisant qu'il ne s'applique pas aux sociétés d'État mais uniquement aux organismes visés par les annexes I, I.1 ou II de la Loi sur la gestion des finances publiques.

Le sénateur Oliver: Êtes-vous à la première page? Est-ce qu'il s'agit de l'amendement qui remplacerait la ligne 25 à la page 1?

M. Cullen: Oui.

M. Cullen: J'ai demandé que les conseillers juridiques m'accompagnent. Le personnel et le président du Conseil du Trésor vous ont dit que certains amendements visent uniquement à améliorer le libellé. J'en suis très heureux, mais ils sont assez compliqués.

L'amendement à la page 2 prévoit que le projet de loi C-212, à l'article 2, soit modifié par une substitution aux lignes 17 à 22. Je croyais que cela se trouvait déjà dans mon projet de loi, mais les conseillers juridiques ne partageaient pas mon avis. Les fonctionnaires du Conseil du Trésor m'ont dit que cette disposition n'était pas assez claire. Je n'ai jamais voulu que mon projet de loi s'applique aux frais, services ou produits pour lesquels il existe d'autres choix.

Par exemple, pour avoir accès à un parc fédéral, il faut payer des droits d'entrée, on n'a pas le choix. Cependant, vous avez le choix d'apporter votre propre bois à brûler ou de l'acheter sur place. Je n'ai jamais eu l'intention que mon projet de loi s'applique au bois à brûler. Je voulais qu'il s'applique uniquement aux produits et services pour lesquels les Canadiens n'ont pas d'autres choix. On n'a pas le choix lorsqu'on veut faire approuver un médicament au Canada. On n'a pas de choix lorsqu'on veut obtenir un passeport. Ce nouveau libellé précise cela.

À la page 3, il y a un amendement pour modifier l'article 3 par une substitution aux lignes 4 à 13.

Mme Bouzigon: Cela correspond à un autre amendement que nous avons déjà vu. Il définit l'organisme de réglementation comme nous en avons déjà discuté au sujet de l'exclusion des sociétés d'État. Ce libellé est plus simple puisqu'il précise que le projet de loi s'applique aux «frais d'utilisation établis» plutôt qu'aux frais établis par A, B, C et D.

Le président: Honorables sénateurs, vous avez bien compris? Alors, continuons.

M. Cullen: Le prochain amendement est un peu plus litigieux. J'y travaille avec le ministre et le ministère, mais nous n'avons pas encore trouvé la solution. Je ne sais pas si vous, ce comité ou le Sénat, avez d'autres idées, mais permettez- moi de vous expliquer le contexte.

Certains ont dit — et j'en ai parlé aux sénateurs lors de ma dernière comparution — que le projet de loi pourrait devenir litigieux. À cause de ce projet de loi, le gouvernement pourrait faire l'objet de poursuites judiciaires pour diverses raisons. Je comprends cette crainte. Le gouvernement a proposé un amendement selon lequel il serait impossible d'imposer de nouveaux frais d'utilisation ou d'augmenter les frais existants à moins de répondre à un certain nombre de critères. Parmi ceux-ci, mentionnons un processus de consultation, un avantage privé, un processus indépendant de règlement des différends, des normes de rendement.

Le gouvernement craignait que quelqu'un conteste les frais d'utilisation en invoquant chacun de ces critères un après l'autre. Par exemple, quelqu'un pourrait invoquer A. Si cette contestation était rejetée par le tribunal, il pourrait alors invoquer B, et ainsi de suite et bloquer indéfiniment l'application de ces frais. Je comprends cette crainte. Toutefois, le libellé qu'a proposé le gouvernement — et je ne suis pas sûr que nous puissions l'améliorer — me préoccupe. L'amendement prévoit que «les frais d'utilisation ne sont pas invalides au motif que les exigences de la présente loi n'ont pas été observées». Cela m'inquiète un peu.

Le ministre et le ministère ont proposé un autre libellé pour l'article 4 afin de souligner de nouveau la nécessité d'avoir une norme de rendement et un processus indépendant de règlement des différends. Ce que je crains, c'est qu'un sous-ministre ou un dirigeant d'organisme qui hésite à établir une norme de rendement ou qui n'a pas vraiment envie de créer un processus indépendant de règlement des différends puisse se servir de ces amendements pour contourner les dispositions du projet de loi.

Je ne sais pas quelle est la solution. C'est pourquoi je m'en remets à votre grande sagesse. Nous n'avons pas pu trouver un libellé satisfaisant. Le principe même de mon projet de loi est qu'il y ait des conséquences si un ministère ou un organisme ne respecte pas la norme de rendement: leurs frais d'utilisation seront réduits.

Lorsque je lis ce projet de loi avec l'amendement qui est proposé, je crains qu'un ministère ou un organisme ne prétende que malgré ses meilleurs efforts, il ait été incapable de respecter la norme de rendement ou qu'il a de la difficulté à établir un processus indépendant de règlement des différends. Ce rapport serait déposé à la Chambre des communes et au Sénat qui convoqueraient des témoins. Toutefois, cet amendement permettrait à l'organisme de continuer à percevoir des frais d'utilisation même si son rendement est inférieur à la norme et même s'il n'a pas établi de processus indépendant de règlement des différends.

Le président: Pardonnez-moi, monsieur Cullen, d'après mon interprétation, les frais resteraient valides même si la Chambre des communes adoptait une résolution visant leur rejet ou leur modification. Est-ce que cela veut dire que l'organisme pourrait continuer à les percevoir, malgré l'adoption par la Chambre des communes d'une résolution recommandant leur rejet ou modification?

M. Cullen: Nous pouvons également passer à cette question.

Le président: J'adresse la question à la fonctionnaire.

Mme Bouzigon: Cette question touche à l'objectif même du projet de loi. Le projet de loi, avec les amendements que vous avez devant vous, contient des dispositions très fermes et prévoit une surveillance parlementaire avec un examen en comité; des instructions claires au sujet des rapports qui doivent être présentés au comité de la Chambre, non seulement en ce qui concerne le genre de rapport, mais également la manière de le préparer et les éléments qu'il doit contenir, tel que décrit par M. Cullen. Le projet de loi prévoit en outre un processus d'examen et de renvoi à la Chambre.

Même en tenant compte des amendements proposés, ce projet de loi ne donne pas aux tribunaux le pouvoir de contrôler le processus. C'est ce que nous souhaitons éviter, conformément aux instructions des fonctionnaires du Conseil du Trésor. On nous a fixé comme objectif, notamment, de renforcer le rôle de surveillance du Parlement à l'égard des frais proposés.

Le président: Que veut dire le terme «invalides»dans cet amendement? Je croyais que ce projet de loi devait permettre au Parlement, s'il le souhaite, de réduire ou de révoquer des frais d'utilisation dans certaines circonstances. Est-ce que le projet de loi ne permet pas au Parlement de faire cela, suite à la recommandation d'un comité, par exemple?

M. Cullen: Permettez-moi de vous rappeler l'histoire de ce projet de loi. Dans la première version, j'utilisais l'expression «déposé au Parlement». Puis, j'en ai débattu longuement avec le conseiller législatif qui m'a dit que je devais être plus précis. J'ai ensuite consulté certains sénateurs qui m'ont dit qu'à leur avis il n'était pas nécessaire que le Sénat ait un rôle à jouer. Le rapport aurait pu être déposé en même temps au Sénat et à la Chambre des communes. Pour ma part, je n'y vois aucun problème.

Le président: Vous ne répondez pas à ma question.

M. Cullen: Je sais, mais j'y arrive. Dans la première version du projet de loi, avant que je le modifie à la Chambre des communes, le comité de la Chambre des communes et la Chambre avaient un droit de veto. Si le comité de la Chambre des communes jugeait que les frais d'utilisation ne devaient pas s'appliquer parce qu'ils ne répondaient pas à tous les critères, le gouvernement n'aurait pas eu d'autre choix que de déposer une motion à la Chambre des communes pour rejeter la recommandation. Le parti ministériel et des universitaires se sont fortement opposés à cela en raison de l'impact sur ce qu'ils appellent «l'appareil gouvernemental» et sous prétexte que les ministres seraient privés de leur capacité de prendre des décisions sur ces questions. C'est pourquoi j'ai amendé le projet de loi à la Chambre des communes.

Lorsque j'ai comparu la dernière fois, j'ai mentionné que ce projet de loi est moins centré sur la Chambre des communes. La proposition des frais d'utilisation serait déposée à la Chambre; le comité pourrait dans son rapport indiquer que les frais d'utilisation ne respectent pas les critères et ne devraient donc pas s'appliquer. Cependant, ni la Chambre ni le gouvernement ne seraient obligés de respecter cette décision.

Or, comme j'ai enlevé le droit de veto, j'ai ajouté une disposition, adoptée par la Chambre des communes, qui prévoit que les frais d'utilisation seront réduits si le ministère ou l'organisme ne respecte pas la norme de rendement. Cette disposition se trouve dans le projet de loi dont vous avez été saisis. Au lieu d'un droit de veto pour le Parlement, il y a une réduction automatique des frais d'utilisation lorsque le ministère ou l'organisme n'atteint pas la norme de rendement.

Nous avons maintenant un amendement qui précise plus clairement dans quelles circonstances cette disposition s'appliquera.

Le président: L'amendement prévoit le rejet des frais d'utilisation.

M. Cullen: Oui. Cela s'applique à une nouvelle proposition de frais d'utilisation déposée à la Chambre des communes et au Sénat. Supposons que la Chambre des communes renvoie la question au Comité des pêches parce qu'il s'agit de frais d'utilisation dans ce secteur. Le Comité des pêches indique dans son rapport à la Chambre qu'il estime que les frais d'utilisation ne respectent pas les critères: il n'y a pas eu suffisamment de consultations, les coûts ne sont pas assez clairement établis, il n'y a aucun mécanisme de règlement des différends, aucun avantage privé, et cetera. Le comité peut recommander que les frais d'utilisation soient rejetés, mais il n'a pas de droit de veto. Il ne peut rien faire de plus.

Le président: Que voulez-vous dire? Cet amendement prévoit la possibilité que la Chambre des communes adopte une résolution rejetant les frais. Je pense que cela veut dire leur élimination.

Le sénateur Comeau: Les frais d'utilisation ne sont pas invalides.

Le président: Comment est-ce possible?

Le sénateur Comeau: C'est bien ça son problème.

M. Cullen: C'est pourquoi je n'aime pas ce libellé, monsieur le sénateur, car il dit essentiellement que même si la Chambre des communes et le Sénat disent que les frais d'utilisation ne respectent pas les critères, rien n'empêche un sous-ministre ou un administrateur d'organisme de les appliquer quand même.

Le sénateur Comeau: Votre projet de loi n'a plus aucun effet.

Le président: Madame Bouzigon, qu'avez-vous à dire maintenant?

Mme Bouzigon: Je pense que le libellé est peut-être mauvais et que les rédacteurs législatifs trouveront peut-être le moyen de l'améliorer.

Le sénateur Oliver: C'est contradictoire, ce n'est pas juste et cela n'a pas l'effet que vous dites.

Mme Bouzigon: Nous pensions qu'il s'agissait de créer un processus d'examen parlementaire. On pense que le comité, qui a le droit de convoquer des témoins, y compris les ministres et les sous-ministres, a le pouvoir et les moyens de se prononcer et d'influer sur la décision de modifier ou non un projet de frais d'utilisation. J'ai cru comprendre, et c'est ce que M. Cullen a expliqué, que l'objectif du projet de loi était de donner un rôle aux parlementaires dans le processus d'établissement des frais d'utilisation afin que celui-ci ne soit pas laissé à l'entière discrétion de l'administration. Cet objectif est atteint.

Cette disposition confirme qu'il appartiendra au Parlement, ou à la Chambre, de rendre une décision et non pas aux tribunaux. Cela étant dit...

Le président: Je ne suis pas d'accord. Je suis désolé. Le projet de loi prévoit que le Parlement, la Chambre des communes et le Sénat, je suppose, pourraient abolir des frais d'utilisation. Mais cet amendement dit que même si c'est fait, l'organisme pourrait continuer à percevoir les frais.

Le sénateur Downe: Monsieur Cullen, en tant que parrain de ce projet de loi, êtes-vous d'accord avec cet amendement ou souhaiteriez-vous une modification?

M. Cullen: J'appuie tous les amendements, sauf celui-ci, car nous n'avons pas encore trouvé un libellé acceptable.

L'ennui, c'est qu'il n'y a pas beaucoup de temps. D'après ce que le président m'a dit, si les honorables sénateurs améliorent le libellé et si le projet de loi est renvoyé à la Chambre après son adoption par le Sénat, le gouvernement l'appuiera aux Communes si ces amendements sont acceptables. C'est le compromis qui est proposé.

Je ne sais pas si cette condition s'applique à chacun des amendements, mais c'est le défi auquel je dois faire face. Si ces amendements sont modifiés, je devrai demander au président s'il appuiera quand même le projet de loi à la Chambre des communes. Si le Sénat modifie le projet de loi et si le gouvernement rejette les amendements, je pense...

Le président: Je ne voudrais pas être obligé de défendre cet amendement au Sénat, encore moins à la Chambre des communes.

Le sénateur Downe: Je partage la préoccupation de M. Cullen au sujet de l'échéance, mais je crains que cet amendement n'ait pour effet de neutraliser votre projet de loi car je vous ai entendu dire tout à l'heure qu'il privait le ministre de la capacité de prendre certaines décisions et nous avons entendu le président du Conseil du Trésor parler de l'aube d'un nouveau jour plein de promesses. On pourrait peut-être restreindre le pouvoir décisionnel des ministres et refléter vos préoccupations.

M. Cullen: Merci.

Le président: Continuons. Je pense que nous ne réglerons rien. Pardon, monsieur Cullen, vouliez-vous ajouter quelque chose?

M. Cullen: Non, si une autre formulation peut améliorer le texte...

Le sénateur Oliver: Le Conseil du Trésor est-il prêt à retirer cet amendement parce que le libellé est contradictoire? Cela n'a aucun sens, et on pourrait facilement régler le problème en retirant cet amendement.

Le président: Je ne crois pas que la représentante du ministère puisse répondre à cette question.

Le sénateur Oliver: Nous pouvons lui demander.

M. Cullen: À vrai dire, chaque minute compte. Le président du Conseil du Trésor insiste pour que la loi qui sera adoptée n'entraîne pas une multiplication de poursuites. Je comprends cela. Je lui ai dit que je comprends son point de vue et que je suis prêt à faire des compromis, mais je crains que le libellé proposé ne permette l'imposition de frais d'utilisation même dans les cas où l'organisme de réglementation ne satisfait pas aux critères. Si vous trouviez une façon de répondre à la fois à mes préoccupations et à celles du président du Conseil du Trésor, je vous en saurais gré.

Le président: Poursuivons, alors, si vous le voulez bien. Nous ne sommes pas ici pour adopter ces modifications, de toute façon. Nous voulons simplement que vous nous les expliquiez.

M. Cullen: L'article 4 du projet de loi C-212 comporte deux ou trois éléments. Certains ont prétendu que mon projet de loi ne décrivait pas assez clairement le fonctionnement du processus indépendant de règlement des différends. C'est expliqué dans cet article du projet de loi. Un conseil consultatif serait mis sur pied. Un peu plus tôt, une question a été posée sur les coûts. Ce comité consultatif serait habilité à examiner les coûts et, dans les cas de plaintes frivoles, à exiger de l'utilisateur qu'il assume les dépens.

Le sénateur Comeau: Il n'y aura donc plus de processus indépendant de règlement des différends, mais bien un comité consultatif. N'est-ce pas là un changement radical?

M. Cullen: Non, sénateur. J'ai oublié à quel article ça se trouve, mais dans une autre disposition, il est question d'un processus indépendant de règlement des différends. Ici, je décris l'application de ce processus.

Le sénateur Comeau: Je vois.

M. Cullen: Cet article décrit aussi comment seraient comparés les frais d'utilisation à ceux d'un de nos grands partenaires commerciaux, parce que cela est parfois pertinent. Cet amendement vise à inclure l'expression «autres pays avec lesquels une comparaison est pertinente.»Si Tombouctou n'impose pas de frais d'utilisation, ou si les frais d'utilisation imposés au Canada ne constituent pas un problème, rien ne sert de les comparer à ceux qui prévalent en Europe, par exemple. Voilà pourquoi nous avons prévu ici le mot «pertinente.»

À la page suivante, vous trouverez l'amendement proposé à la ligne 29. Ces paragraphes décrivent le processus en détail. Vous voudrez peut-être l'étudier. Quand j'ai déposé ce projet de loi, je ne pensais pas devoir inclure tous ces détails; je croyais qu'il serait établi par règlement. Or, le projet de loi est maintenant structuré de façon telle qu'un règlement ne sera pas véritablement nécessaire, ce qui est avantageux.

Le sénateur Oliver: J'aimerais revenir au comité consultatif indépendant. Dans sa déclaration, le ministre a fait mention de la nécessité de prévoir «une nouvelle clause précisant les procédures d'établissement de l'organe indépendant qui donnera des conseils et formulera des recommandations lorsqu'il y aura mésentente entre les parties en matière de frais.» À plusieurs autres reprises, lors de son témoignage, il a fait mention des intervenants. Ce projet de loi est censé être axé sur les besoins de toutes les parties.

Où, dans ce projet de loi, décrit-on en détail ce fameux «organe indépendant»et les intervenants en constituent-ils la majorité? Si ce n'est pas prévu dans ce projet de loi, y aura-t-il des lignes directrices ou autre chose qui préciseront les attributions des intervenants? Je ne vois rien ici.

M. Cullen: Selon ce que j'avais envisagé, et je crois que le libellé du projet de loi le traduit bien, si on reçoit une plainte...

Le sénateur Oliver: Combien de personnes composeront ce comité consultatif et quelle proportion d'entre eux seront des intervenants?

M. Cullen: On y dit que l'organisme de réglementation et le plaignant choisissent chacun un membre du comité et que ces deux membres choisissent le troisième. Par conséquent, il y a un représentant du gouvernement...

Le sénateur Oliver: La troisième personne pourrait être un intervenant ou non.

M. Cullen: On peut tenir pour acquis que le plaignant est lui-même un intervenant. S'il s'agit de droits sur les services maritimes, par exemple, et que le plaignant n'est pas satisfait de la façon dont le gouvernement impose ces droits, il choisit quelqu'un pour le représenter au sein du comité, le gouvernement choisit son représentant et ces deux membres choisissent le troisième.

Le sénateur Oliver: Selon vous, ce projet de loi répond-t-il aux besoins des usagers?

M. Cullen: Oui. J'ai examiné certains de ces amendements, en fait, presque tous, avec la Coalition des entreprises sur le recouvrement des coûts, le principal représentant des usagers, qui s'est dite satisfaite de ce libellé.

Le sénateur Oliver: C'est ce que je voulais entendre.

Le sénateur Comeau: Au lieu de créer un organisme indépendant de règlement des différends, il n'y aura plus qu'un comité consultatif, ce qui est tout un changement. Qui ce comité conseillera-t-il?

M. Cullen: Sénateur, j'ai toujours envisagé un organe aux fonctions purement consultatives. Cette formulation est conforme à ma pensée initiale. Au début du projet de loi, on mentionne un processus indépendant de règlement des différends. Ce comité consultatif est l'incarnation de ce processus.

Le sénateur Comeau: Dès le départ, vous prévoyiez un comité consultatif plutôt qu'un organisme de règlement des différends?

M. Cullen: Oui. C'était peut-être mal formulé dans la version d'origine, mais je n'ai jamais cru que le gouvernement serait contraint de mettre en oeuvre les recommandations du comité consultatif.

Le sénateur Comeau: C'était votre intention dès le départ?

M. Cullen: Oui, c'était là mon intention.

Le président: Passons à l'article suivant.

M. Cullen: Il est proposé que l'article 5 soit modifié par substitution, à la ligne 34, de ce qui suit: «Des frais d'utilisation et présentés à la». C'est une modification de forme.

Mme Bouzigon: C'est une modification conséquente au changement apporté à la définition de «frais d'utilisation».

Le président: Nous avons maintenant un amendement de fond plutôt intéressant concernant la réduction automatique des frais d'utilisation.

M. Cullen: Ça s'applique à l'article du projet de loi voulant que les frais d'utilisation soient réduits d'un pourcentage équivalent à l'insuffisance du rendement, lorsque le rendement d'un organisme de réglementation est inférieur aux normes de rendement établies dans une proportion dépassant 10 p. 100. Cet amendement décrit comment cela se ferait. Pour établir ce processus, j'ai collaboré avec des représentants du Conseil du Trésor et des députés pour voir comment les parlementaires pourraient faire une étude plus utile des prévisions budgétaires et des documents sur les plans et les priorités. Ces documents comprennent une partie traitant des frais d'utilisation, décrivant les augmentations de ces frais et dans quelle mesure les ministères ont atteint leurs normes de rendement. Cet amendement dit tout simplement que, dans un rapport, soit les prévisions budgétaires ou le document sur les plans et priorités, l'organisme ou le ministère sera tenu d'indiquer quel a été son rendement par rapport à ces normes. Si son rendement est inférieur aux normes dans une proportion de plus de 10 p. 100, les frais d'utilisation réduits s'appliqueront à partir du jour du dépôt du rapport annuel de cette année financière, aux termes du paragraphe 8(1), jusqu'au jour du dépôt du rapport annuel suivant. Le fonctionnement du mécanisme y est expliqué. Si, dans le rapport suivant, le ministère indique avoir atteint ces normes de rendement, les frais d'utilisation seront fixés à leur niveau antérieur.

Le président: La note parfaite serait de 100 p. 100.

Le sénateur Oliver: La pire note serait de 50 p. 100.

Le président: Si votre note est de 85 p. 100, vous êtes mis à l'amende ou vos frais sont réduits.

M. Cullen: Oui, de 15 p. 100.

Le président: Ou de 5 p. 100.

M. Cullen: Si la norme est de 100 p. 100 et que votre rendement est de 85 p. 100, vous avez dépassé la limite de 10 p. 100 et les frais que vous imposez seront réduits de 15 p. 100. Pour le calcul, un écart de 10 p. 100 est acceptable, mais au-delà, mon projet de loi prévoit des conséquences. Cet article-ci précise l'application de cette disposition.

Le président: Est-ce que nous pouvons continuer?

M. Cullen: Je travaille avec le ministre et le ministère sur l'article 6. J'avais proposé 40 jours de séance, mais les fonctionnaires prétendent que 40 jours donnent un trop grand nombre de semaines et de mois. Ils ont proposé 15 jours et depuis un jour ou deux, j'essaie de les convaincre d'augmenter à 20 ou 25. Manifestement, ils n'ont pas jugé que c'était la chose à faire. Quinze jours de séance m'inquiètent. Certains de mes collègues à la Chambre des communes m'ont dit qu'il était trop difficile de le faire en 15 jours à cause des engagements pris à l'égard de projets de loi et de diverses études. Lorsqu'une question de frais d'utilisation leur est confiée, ils pourraient éprouver de la difficulté à l'accepter, mais ne peuvent examiner la question. Dans ce cas, dans les 15 jours, rapport est fait comme si tout était parfait. Franchement, je pense que 15 jours, c'est un peu serré. Je serais plus heureux de 20 ou 25 jours, mais pour moi, ce n'est pas la fin du monde.

Le président: Chers collègues, y a-t-il d'autres questions pour M. Cullen ou Mme Bouzigon?

M. Cullen: Voici le genre de rapport que devrait préparer le ministère ou l'agence. En fait c'est tout.

Le président: Merci, monsieur Cullen. Je vous félicite d'être parvenu jusqu'ici avec ce projet de loi. Nous allons prendre vos bons conseils et ceux du ministre et voir si nous pouvons apporter quelques améliorations.

J'ai changé moi-même d'idée à plusieurs reprises, mais comme toujours, je me plierai à vous désirs. La semaine dernière, je vous ai proposé qu'après ce soir, lorsque nous recevrons les amendements, nous pourrions prendre quelques jours pour les examiner, et donc j'attendrai jusqu'à mardi matin prochain pour passer à l'étude article par article, si vous ne voulez pas entendre d'autres témoins.

Plus tôt ce soir, j'ai constaté qu'il semblait y avoir une telle entente sur les amendements entre le gouvernement et le parrain que peut-être nous pourrions procéder à l'étude article par article ce soir. J'en viens maintenant à la conclusion qu'il y a au moins un amendement ici que...

Le sénateur Oliver: C'est l'article 3.1 qui cause problème.

Le président: À moins que quelqu'un veuille dire quelque chose, ce dont je doute, je pense qu'il vaudrait mieux que nous y réfléchissions pendant quelques jours.

Le sénateur Oliver: Je partage votre avis, monsieur le président.

Le sénateur Ringuette: Dois-je comprendre qu'on a déposé les amendements proposés?

Le président: Ils ont été déposés, oui.

Le sénateur Ringuette: Puis-je ajouter encore trois amendements à ceux que vous avez déjà reçus?

Le président: Voulez-vous les distribuer?

Le sénateur Ringuette: Oui. J'en ai des copies.

Le sénateur Oliver: Est-ce qu'ils donnent des éclaircissements sur l'article 3.1?

Le sénateur Ringuette: Ils ajoutent quelque chose au sujet des rapports déposés au Sénat. Voilà le sujet de ces amendements. Il est proposé que le projet de loi C-212, au paragraphe 4(2), soit modifié par substitution à la ligne 3 de ce qui suit «La Chambre des communes et le Sénat, une proposition qui»; que le paragraphe 8(1) soit modifié par substitution à la ligne 22, de ce qui suit: «Chambre des communes et le Sénat, dans les 15»; et que le paragraphe 8(2) soit modifié par substitution, à la ligne 27, de ce qui suit «La Chambre et le Sénat, renvoient au comité le rapport». Cela permettrait au Sénat, s'il le souhaite, de renvoyer une question ou un rapport au Comité des finances pour que nous puissions l'examiner, si le Sénat le souhaite.

Le sénateur Oliver: Avez-vous également mentionné l'article 6 où il y a deux références à la Chambre des communes?

Le sénateur Ringuette: Non.

Le sénateur Oliver: Vous allez simplement laisser la Chambre des communes?

Le sénateur Ringuette: Pour faire l'examen?

Le sénateur Comeau: C'est l'habitude.

Le sénateur Ringuette: Oui, je le pense.

Je pense que c'est la possibilité de déposer au Sénat les rapports du ministre sur les frais d'utilisation, les normes, les augmentations, etc., qui donne vraiment la possibilité au Sénat de décider si le Comité des finances nationales doit examiner ou non la question, selon...

Le sénateur Oliver: Mais c'est le problème des 40 jours de M. Cullen. On dit 15 maintenant, mais si c'est renvoyé au Sénat, au moins un comité du Parlement aurait peut-être l'occasion d'en faire l'examen. Sinon, la disposition qui prévoit l'entrée en vigueur s'applique.

Le sénateur Ringuette: Il ne faut pas oublier je crois la possibilité qu'un comité de la Chambre peut toujours créer un sous-comité pour examiner n'importe quelle question. Par conséquent, on peut très bien respecter le délai des 15 jours en créant un sous-comité et en faisant alors rapport au comité plénier.

Je comprends qu'il faut limiter le temps, sinon, au début d'un exercice financier, nous pourrions toujours être en train d'examiner les frais d'utilisation de l'exercice précédent. Il faut imposer des limites de temps afin d'exercer une certaine discipline.

L'un des objectifs de ce projet de loi c'est justement d'imposer une discipline dans ce genre de cas — une discipline que doivent s'imposer les ministères et ceux qui déterminent les frais d'utilisation du point de vue des normes, du recouvrement des coûts, etc. Par ailleurs, il faut une certaine discipline à la Chambre des communes et en comité pour examiner ces questions et ne pas reporter, reporter et reporter.

Je partage l'avis du ministre qu'il nous faut faire preuve de discipline si nous voulons que cela fonctionne. Je pense que tous, sur la colline du Parlement, veulent que ce projet de loi donne des résultats. Si nous constatons, plus tard, qu'il est impossible de respecter certains délais, alors peut-être pourrons-nous y revenir et apporter des amendements. Au départ toutefois, il s'agit de s'imposer une certaine discipline et de respecter les objectifs. Si tout le monde fait preuve de discipline et si, avec mes amendements proposés, le Sénat souhaite revoir et faire enquête pour déterminer si le processus fonctionne, eh bien en déposant les rapports au Sénat, nous aurons la souplesse voulue pour le faire.

Le sénateur Comeau: En ce qui concerne le point soulevé par le sénateur Oliver, le paragraphe 6(1), il n'est pas prévu que le Sénat approuve, rejette ou modifie les recommandations. J'appuie l'exclusion du Sénat dans ce cas, car je crois qu'il faut que cette procédure relève de la Chambre des communes.

Toutefois, en ce qui concerne les amendements — s'ils sont adoptés — tout comité pourra examiner les frais sans être obligé de les rejeter ou de les modifier. J'aime tout particulièrement l'exemple donné par M. Cullen voulant que le Comité des pêches pourrait vouloir examiner les frais d'utilisation — je parle du Comité permanent du Sénat sur les pêches et des océans — sans nécessairement vouloir les modifier. On pourrait vouloir transmettre l'information à la Chambre des communes qui pourrait entreprendre les démarches nécessaires pour modifier les frais. Je n'ai aucune difficulté à accepter cela.

Le président: Merci, sénateur. Voulons-nous attendre à mardi matin pour faire l'étude article par article du projet de loi? À moins que quelqu'un ne puisse proposer un libellé pour résoudre les petits problèmes soulevés, je pense que c'est la chose à faire.

Le sénateur Comeau: J'aimerais m'en remettre à M. Cullen. Il a souligné qu'il y avait un problème de temps. À chaque jour qui passe — je ne voudrais pas qu'on nous accuse d'avoir inutilement retardé encore pendant quelques jours pour constater — préférez-vous faire cela ce soir?

M. Cullen: Merci, sénateur. Le problème, c'est qu'en ce qui concerne le président du Conseil du Trésor, la disposition qui me cause problème a beaucoup d'importance pour lui. Je serais heureux d'attendre que vous y réfléchissiez et que nous réexaminions le libellé, parce que si le projet de loi est renvoyé à la Chambre des communes avec des amendements que le gouvernement n'appuie pas, je vais vraiment être coincé pour le temps.

Le sénateur Oliver: Comme l'a dit le sénateur Murray, le paragraphe 3(1) dans sa forme actuelle n'est peut-être pas défendable, même au Sénat.

Le président: Indépendamment du gouvernement — je ne crois pas que ce paragraphe, sous cette forme, plairait aux députés. C'est ce que je serais porté à croire.

Le sénateur Chaput: J'aimerais ajouter quelque chose. Il faut que cette disposition soit définie. Il faut que nous la comprenions clairement. Si nous ne comprenons pas comment cette disposition peut être appliquée, alors personne ne le comprendra. Si, comme vous l'avez dit, l'intention est d'éviter d'être submergé de demandes de frais d'utilisation, ce n'est pas ce que j'en déduis à la lecture de cet article.

M. Cullen: Cela m'a échappé.

Le sénateur Chaput: Il faut définir l'article 3.1. Si l'intention visée est d'éviter l'engorgement, alors il faut retravailler cette disposition, parce qu'à mes yeux, ce n'est pas le message qui s'en dégage.

M. Cullen: Je comprends que le gouvernement veuille éviter toute une série de poursuites. Cependant, je crains que ce libellé soit tellement excessif qu'il fournisse une échappatoire aux ministères ou aux organismes. Par conséquent, j'espère que nous pourrons arriver à un certain compromis.

Le sénateur Ringuette: Je ne suis pas juriste, mais d'après mon interprétation de cet amendement, indépendamment du processus d'examen qui est établi, pendant toute la période où ce processus est en vigueur et que le groupe responsable saisi de la demande, conformément aux amendements qui ont été déposés, les frais d'utilisation établis et acceptés ne sont pas éliminés. C'est la façon dont j'interprète cet amendement.

Mon interprétation du libellé proposé au paragraphe 3.1(1), c'est que si une plainte est déposée dans le cadre du système, cela ne signifie pas que des frais d'utilisation cessent d'être imposés pendant la période requise pour examiner une proposition et en faire rapport à la Chambre, au ministre, etc.

Le président: Autrement dit, l'organisation ou le particulier qui paie les frais d'utilisation ne pourront pas les récupérer, qu'ils ne sont révoqués qu'à partir de ce moment-là.

Le sénateur Ringuette: Non. Les frais d'utilisation se rattachent à différents services et produits. Si une augmentation est proposée et qu'une personne intéressée présente une plainte, le processus exige qu'un comité examine les frais d'utilisation. C'est la façon dont j'interprète cet amendement, c'est-à-dire que tout au long de l'examen et des autres procédures, les frais d'utilisation antérieurs ne sont pas éliminés.

J'appuie l'amendement parce qu'il ne peut pas y avoir de période au cours de laquelle aucun frais d'utilisation n'est en vigueur.

Le président: Ce n'est pas la façon dont je l'interprète. D'après mon interprétation, même si le Parlement décide de révoquer les frais d'utilisation, le gouvernement peut continuer à les percevoir. Mon interprétation est peut-être erronée.

M. Cullen: Lorsque j'ai d'abord examiné la question, je pensais qu'il s'agissait plutôt d'une question de délai ou de transition, mais ce n'est pas le cas à mon avis. Le paragraphe 4(1) du projet de loi prévoit une «consultation obligatoire». Il prévoit qu'une consultation est obligatoire avant l'établissement ou l'augmentation des frais d'utilisation.

Le gouvernement craint qu'une personne intente une poursuite en invoquant le fait qu'une étude d'impact n'a pas été effectuée. S'ils n'obtenaient pas gain de cause, ils passeraient alors au niveau suivant, et nous aurions une série de procès. Je ne suis pas sûr que c'est ainsi que les choses se dérouleraient dans la pratique, il faudrait qu'il s'agisse de frais d'utilisation très élevés.

Quoi qu'il en soit, même si les frais ne satisfont pas à ces exigences, ils n'en demeurent pas moins valides.

Le président: Même si le Parlement les révoque, ils n'en demeurent pas moins valides. C'est ce que dit cet article et je ne peux pas imaginer que les députés ou les sénateurs acceptent ce genre de disposition, si c'est effectivement le sens qu'on lui donne.

Je crois que le gouvernement essaie de dire que le Parlement devrait assumer un rôle consultatif à cet égard. Ce n'est pas ce qu'indique le projet de loi de M. Cullen.

Est-ce que je me trompe?

M. Cullen: En fait, le projet de loi initial prévoyait un droit de veto qui a été remplacé dans mon projet de loi amendé par cette diminution des frais d'utilisation si les objectifs en matière de rendement ne sont pas atteints. Selon cet amendement, par exemple, si un ministère ou un organisme a de la difficulté à établir une norme de rendement et s'adresse au Sénat et à la Chambre des communes pour expliquer qu'après s'être débattu avec cette question, ils n'arrivent pas à établir une norme de rendement appropriée, cela pourrait un argument suffisant pour leur permettre de continuer à imposer des frais d'utilisation.

Le président: L'article 5 du projet de loi se lit comme suit:

Le comité peut examiner une proposition reçue aux termes du paragraphe 4(4), relative à des frais qui visent des services qui sont réglementés par le gouvernement et fournis exclusivement par lui, et présenter à la Chambre des communes un rapport faisant état de ses recommandations quant aux frais d'utilisation appropriés, sous réserve des dispositions de l'article 5.1.

Puis on passe aux dispositions sur la réduction des frais d'utilisation, et cetera.

Vous n'avez pas modifié l'article 5 du projet de loi, n'est-ce pas?

M. Cullen: À l'aide des amendements présentés à la Chambre des communes, j'ai abandonné une disposition prévoyant qu'un ministre ou l'administrateur d'un organisme ne peut établir ou augmenter des frais d'utilisation si le comité de la Chambre des communes a recommandé le contraire à moins que le gouvernement ait présenté une motion et que la recommandation du comité ait été rejetée à la Chambre des communes. Le projet de loi prévoyait un droit de veto, ce que ne prévoit pas la version amendée du projet de loi. À la place, j'ai ajouté l'article 5.1, qui est un pouvoir de recommandation. Il s'agit d'une condition absolue. Si vous n'atteignez pas vos objectifs de rendement, les frais sont réduits, un point c'est tout.

Le président: Le paragraphe 6(1) du projet de loi se lit comme suit:

La Chambre des communes peut, par résolution, approuver, rejeter ou modifier les recommandations du comité visées à l'article 5.

Il me semble que si le comité recommande la révocation de frais d'utilisation et que la Chambre des communes adopte une résolution pour approuver cette recommandation, les frais d'utilisation seraient par conséquent révoqués.

Mme Bouzigon hoche la tête. Je crois que c'est là le problème, n'est-ce pas? Le gouvernement propose que le rôle, non seulement du comité mais aussi du Parlement, soit un rôle consultatif à cet égard; qu'une telle résolution n'aurait aucune incidence sur les frais d'utilisation. C'est la façon dont j'interprète cette disposition.

Mme Bouzigon: Une résolution est par définition consultative.

Le sénateur Comeau: Plus j'examine cette disposition, plus je suis préoccupé. Je trouve étonnant qu'un projet de loi prévoie qu'indépendamment de la volonté des députés, si les représentants du gouvernement décident d'imposer certains frais, ils les imposeront.

Le président: Mme Bouzigon fait valoir un bon argument. La situation n'est pas la même que dans le cas du budget où on propose une réduction de certains éléments du budget ou l'élimination de la totalité du budget. Cela est possible et fait l'objet d'un vote officiel. L'argument que présente Mme Bouzigon c'est que par définition une résolution parlementaire saura exprimer notre opinion quant à une mesure qui devrait être, et qu'elle n'entraînerait pas directement la réduction ou la révocation des frais d'utilisation.

Le sénateur Comeau: À moins que nous ajoutions le terme «projet de loi»ou quelque chose du genre.

Le président: Je propose que nous en restions là et que nous réfléchissions à ce que nous voulons faire. Vous pourrez décider d'approuver ou non cette disposition. Tous ceux qui s'intéressent à cette question pourront y réfléchir au cours des prochains jours et travailler avec la greffière du comité et les conseillers juridiques afin de déterminer si vous voulez proposer un libellé plus approprié.

Le sénateur Downe: Je pars aussi du principe que le président du Conseil du Trésor et M. Cullen vont réfléchir à un libellé qui pourrait être acceptable.

M. Cullen: C'est ce que nous avons essayé de faire et nous poursuivrons nos efforts en ce sens.

Le sénateur Downe: J'ai mentionné plus tôt les commentaires que le président du Conseil du Trésor a fait circuler. Il s'agit de paroles très positives dont nous devrions tâcher de rendre compte par voie de résolution. On y parle de remettre le Parlement au centre du débat national et de la prise de décision. L'un des éléments clés est de donner aux députés un rôle accru dans l'élaboration de lois. Je crois que le comité considère que la disposition proposée ne permet pas d'atteindre cet objectif. Il faudrait que le président du Conseil du Trésor présente une résolution qui reflète ces paroles.

Le président: Il s'agit de déterminer si le Parlement devrait avoir le droit de réduire les frais d'utilisation. C'est essentiellement ce dont il s'agit, et je crois que c'est la question à envisager. Si un comité, puis la Chambre même, deviennent irresponsables et commencent à réduire les frais d'utilisation à tort et à travers, les répercussions sont évidences. Si un organisme n'arrive pas à compenser son manque à gagner en imposant des frais d'utilisation, il devrait s'adresser au Parlement, ce qui aurait une incidence au niveau des impôts, etc. Je crois que les comités parlementaires et le Parlement même doivent faire preuve d'une certaine prudence.

Je tiens à vous remercier, madame Bouzigon et monsieur Cullen.

La séance est levée.


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