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Débats du Sénat (Hansard)

Débats du Sénat (hansard)

1re Session, 37e Législature,
Volume 139, Numéro 14

Le mardi 13 mars 2001
L'honorable Dan Hays, Président


 

LE SÉNAT

Le mardi 13 mars 2001

La séance est ouverte à 14 heures, le Président étant au fauteuil.

Prière.

[Traduction]

NOUVEAUX SÉNATEURS

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, j'ai l'honneur d'informer le Sénat que le greffier a reçu du registraire général du Canada les certificats établissant que les personnes suivantes ont été appelées au Sénat:

Yves Morin, M.D., O.C.

Elizabeth M. (Libbe) Hubley

Jim Tunney

PRÉSENTATION

Son Honneur le Président informe le Sénat que des sénateurs attendent à la porte pour être présentés.

Les honorables sénateurs suivants sont présentés, puis remettent les brefs de Sa Majesté les appelant au Sénat. Les sénateurs, en présence du greffier, prêtent le serment prescrit et prennent leur siège.

L'honorable Yves Morin, de Québec, au Québec, présenté par l'honorable Sharon Carstairs et l'honorable Lise Bacon.

L'honorable Elizabeth M. (Libbe) Hubley, de Kensington, en Île-du-Prince-Édouard, présentée par l'honorable Sharon Carstairs et l'honorable Catherine Callbeck.

L'honorable Jim Tunney, de Grafton, en Ontario, présenté par l'honorable Sharon Carstairs et l'honorable Isobel Finnerty.

Son Honneur le Président informe le Sénat que chacun des honorables sénateurs susmentionnés a fait et signé la déclaration d'aptitude prescrite par la Loi constitutionnelle de 1867, en présence du greffier du Sénat, commissaire chargé de recevoir et d'attester cette déclaration.

(1420)

L'honorable Sharon Carstairs (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, j'ai l'honneur d'accueillir aujourd'hui parmi nous trois nouveaux sénateurs. Je vous demande, à mesure que je vous présente nos honorables collègues, de leur réserver le même accueil que vous avez réservé à tous nos collègues par le passé.

[Français]

Permettez-moi de prendre la parole pour souhaiter la bienvenue à notre nouveau collègue au Sénat, le Dr Yves Morin.

[Traduction]

Nous avons l'honneur d'accueillir aujourd'hui parmi nous un distingué collègue. La nomination du Dr Morin au Sénat est l'aboutissement d'une longue et remarquable carrière consacrée à la recherche scientifique. Le Dr Morin a également fait une importante contribution à l'enseignement médical au Canada.

[Français]

Le Dr Morin est reconnu dans le monde entier pour ses travaux en médecine interne et en cardiologie. Il a obtenu son baccalauréat et son doctorat en médecine de l'Université Laval avec grande distinction. Il a publié plus de 300 articles scientifiques. Le Dr Morin a occupé des postes de prestige au sein du milieu médical canadien, le plus souvent au Québec. Il a été le recteur du département de médecine et doyen de la Faculté de médecine de l'Université Laval, directeur de l'Institut de cardiologie de Québec, chef de la cardiologie au Centre hospitalier universitaire de Québec, président du Conseil de recherches médicales du Québec et vice-président du Conseil de recherches médicales du Canada.

[Traduction]

Pour ses nombreuses réalisations et contributions dans les domaines médical et scientifique, le Dr Morin a été fait officier de l'Ordre du Canada en 1991. Il est aussi officier de l'Ordre national du Québec et a été honoré par la France, qui en a fait un chevalier de l'Ordre national du mérite.

[Français]

En ma qualité de leader du gouvernement au Sénat, je vous souhaite la bienvenue au Sénat, docteur Morin. Je ne doute pas un instant que vos réalisations exceptionnelles apporteront une contribution précieuse à vos collègues sénateurs et aux travaux de cette Chambre.

[Traduction]

J'ai aussi le plaisir d'accueillir aujourd'hui au Sénat l'honorable Elizabeth Hubley. Madame le sénateur Hubley a pour la première fois été élue à l'Île-du-Prince-Édouard en 1989. En sa qualité de députée de l'Assemblée législative de l'Île-du-Prince-Édouard, elle représentait la circonscription de Fourth Prince. Après avoir obtenu de nouveau son siège de députée, elle a été nommée au poste de vice-présidente de la législature. Le sénateur Hubley est un membre actif de bon nombre de comités permanents, y compris ceux du développement économique et du tourisme, de la santé et des services sociaux, des pêches et de l'aquaculture, ainsi que de l'agriculture.

[Français]

Le sénateur Hubley s'est dévouée pendant longtemps pour l'avancement du milieu culturel de l'Île-du-Prince-Édouard. Elle est fondatrice du «Stepping Out Studio», où l'on enseigne des danses traditionnelles de l'île. Elle est directrice artistique du studio, mais elle a également travaillé à de nombreux postes au nom de la communauté culturelle de l'île.

[Traduction]

Le sénateur Hubley a exercé les diverses fonctions suivantes: membre du Conseil des Arts de l'Île-du-Prince-Édouard; coordinatrice des formes de danse traditionnelles de l'île, ou Tanzfest, présidente de la Société des violonistes de l'Île-du-Prince-Édouard, présidente de la Fondation culturelle Kensington et coordinatrice des spectacles des violoneux Prince County Fiddlers et de la troupe de danse Lady Slipper Step Dancers.

Le sénateur Hubley a vécu non seulement à l'Île-du-Prince-Édouard, mais également dans d'autres provinces, dont l'Alberta, le Québec et la Nouvelle-Écosse. L'expérience du sénateur Hubley comme députée à l'assemblée législative, ses antécédents dans le domaine de l'incomparable culture canadienne et sa compréhension de la diversité provinciale et régionale du pays constitueront un apport sans pareil aux travaux du Sénat. Au nom de tous mes collègues, je vous souhaite la bienvenue au Sénat, sénateur Hubley.

Honorables sénateurs, l'honorable Jim Tunney a été nommé au Sénat en raison de sa vaste expérience du domaine de l'agriculture dans la province de l'Ontario. C'est un agriculteur de la quatrième génération du comté de Northumberland et il a travaillé dans sa propre exploitation agricole familiale pendant 30 ans. Il a aussi représenté d'autres agriculteurs et défendu des dossiers agricoles dans le cadre de discussions internationales. Sa connaissance de l'industrie agricole et laitière au Canada et son expérience à l'étranger profiteront au Sénat et à ses collègues sénateurs.

[Français]

Le sénateur Tunney a été administrateur des Producteurs laitiers du Canada pendant 18 ans et du Bureau laitier du Canada pendant huit ans. Il a également siégé à la Commission ontarienne de commercialisation du lait, où il représentait les agriculteurs de six comtés dont celui de Northumberland, en Ontario, d'où il est originaire.

[Traduction]

Le sénateur Tunney a mis à profit son expérience de l'agriculture canadienne en Russie et en Ukraine, où il a travaillé comme consultant pendant cinq ans. Il a notamment contribué à l'établissement et aux opérations de commercialisation agricole et à la création d'offices de commercialisation. Il a également été conférencier invité au Collège des techniques agricoles et laitières de Kharkov.

Le sénateur Tunney a également siégé au conseil des écoles séparées du district de Peterborough, Victoria, Northumberland et Clarington.

Sénateur Hubley, sénateur Morin et sénateur Tunney, les honorables sénateurs sont impatients de travailler avec vous. Apprenez à nous connaître et n'hésitez pas à jouer un rôle actif et à partager vos connaissances avec nous. Nous sommes certains que votre compétence et votre expérience collectives seront très profitables au Sénat.

L'honorable John Lynch-Staunton (chef de l'opposition): Honorables sénateurs, je suis heureux de me joindre au leader du gouvernement pour souhaiter la bienvenue à nos trois nouveaux collègues.

[Français]

La nomination du Dr Morin apporte au Sénat une connaissance et une expérience qui nous seront sûrement très utiles, voire enrichissantes, alors que le débat sur la santé vient toujours au premier plan. Le Sénat a été favorisé par la participation de grands noms de la médecine canadienne. Je pense, par exemple, au très regretté Paul David et à notre collègue Wilbert J. Keon. Je suis persuadé que le sénateur Morin saura aussi nous faire tirer profit des vastes connaissances qu'il a dans ce domaine.

[Traduction]

Avec l'arrivée de madame le sénateur Hubley, nous comptons maintenant dans nos rangs deux récents membres de l'Assemblée législative de l'Île-du-Prince-Édouard, et non les moindres. Il convient de rappeler que le Sénat est d'abord et avant tout, malgré les critiques dont il fait l'objet, habituellement de la part de ceux qui persistent à ignorer ce qu'il fait, un organe essentiel du Parlement, dont le rôle principal consiste à évaluer les mesures législatives gouvernementales. L'expérience acquise par madame le sénateur Hubley, qui était un membre actif de l'assemblée législative de sa province, représente un apport précieux pour le Sénat. Je signale en passant que sa connaissance de la danse lui sera particulièrement utile puisqu'elle se joint à un caucus qui, selon des sources autorisées, ne se laisse pas toujours mener facilement.

L'industrie agricole canadienne traverse sa pire crise depuis la crise économique des années 30. Aussi, la nomination d'une personne ayant une connaissance directe de l'agriculture arrive-t-elle à point nommé. S'il y a un sujet où l'esprit partisan n'a pas sa place, c'est bien la situation pénible que connaissent de nombreux agriculteurs confrontés à la hausse des coûts et à la baisse des denrées. Le sénateur Tunney est connu comme un porte-parole efficace des agriculteurs et j'espère qu'il parlera haut et fort en leur nom.

Bienvenue au Sénat à nos trois nouveaux collègues.

[Français]

Tous nos meilleurs voeux de succès.


[Traduction]

(1430)

DÉCLARATIONS DE SÉNATEURS

LA JUSTICE

L'EXTRADITION DE CRIMINELS PASSIBLES DE LA PEINE DE MORT DANS LE PAYS OÙ LE CRIME A ÉTÉ COMMIS

L'honorable Serge Joyal: Honorables sénateurs, vendredi dernier, M. Norm Maleng, procureur public du comté de King, dans l'État de Washington, a adressé une lettre au ministère de la Justice américain. Dans sa lettre, il assurait que les citoyens canadiens Burns et Rafay ne risqueraient pas la peine de mort s'ils étaient reconnus coupables aux États-Unis du meurtre des parents et de la soeur de M. Rafay.

Le procureur général du Canada avait sollicité cet engagement dans la foulée de la décision unanime rendue par la Cour suprême du Canada le 15 février. Cette décision concluait que le principe du «droit à la vie, à la liberté et à la sécurité de la personne», garanti par l'article 7 de la Charte canadienne des droits et libertés, avait préséance sur tout pouvoir ou toute restriction discrétionnaire.

La décision du procureur de l'État de Washington a fait taire la peur exprimée dans cette Chambre à l'effet que le Canada pourrait devenir un «refuge sûr» pour les criminels. Il a été répété à maintes reprises au cours du débat que nous avons eu sur le projet de loi C-40 que le refus d'extrader des criminels susceptibles d'être passibles de la peine de mort leur permettrait d'échapper à toute poursuite en se réfugiant au Canada.

On a dit que l'affirmation qu'un tel engagement serait toujours honoré «était quelque peu naïve». Il n'en demeure pas moins que la lettre du procureur Maleng confirme une fois de plus la réalité de l'engagement. Dans sa lettre, le procureur dit:

L'idée qu'un gouvernement étranger puisse restreindre l'application des dispositions législatives de notre État visant les crimes commis à l'intérieur de nos frontières me trouble.

Toutefois, il m'importe que ces hommes soient traduits devant un tribunal et que la justice suive son cours.

Honorables sénateurs, nous voilà au coeur de la question.

Devant la perspective que des criminels présumés puissent éviter des poursuites, les procureurs de la Couronne, qui servent avant tout les intérêts de la justice, prennent toujours les mesures qui s'imposent: premièrement, pour que l'accusé comparaisse devant un tribunal; deuxièmement, pour qu'il soit reconnu coupable; troisièmement, pour qu'une sentence adéquate lui soit imposée, et cela même s'il faut renoncer à l'imposition de la peine de mort. Autrement dit, les intérêts de la justice auront préséance sur le choix de la sanction.

La Cour suprême du Canada précise justement dans son jugement unanime:

Peu importe si le fugitif est renvoyé vers un pays étranger où il risque soit la peine de mort soit la mort en prison de causes naturelles, il ne peut, dans un cas comme dans l'autre, utiliser le Canada comme un «refuge sûr».

Honorables sénateurs, j'ai la ferme conviction que l'article 44 du projet de loi C-40 doit être amendé de manière à conférer au ministre de la Justice du Canada l'obligation de rechercher l'assurance que le principe inaliénable du caractère sacré de la vie sera respecté.

[Français]

LA COMMISSION CANADIENNE DES DROITS DE LA PERSONNE

LE RAPPORT SPÉCIAL SUR LA PARITÉ SALARIALE

L'honorable Lucie Pépin: Honorables sénateurs, comme l'a si bien fait le sénateur Erminie Cohen, le 20 février dernier, je prends aujourd'hui la parole pour vous entretenir du rapport spécial sur la parité salariale de la Commission canadienne des droits de la personne intitulé: «Le temps d'agir». Ce rapport, qui se veut une évaluation des mesures législatives prises sur le sujet depuis près de 20 ans, mérite qu'on s'y attarde.

Ce rapport nous permet de mieux comprendre cette épineuse question de la parité salariale et nous propose d'intéressantes pistes à explorer afin d'éliminer cette discrimination qui va à l'encontre de l'égalité et de la dignité des Canadiens et des Canadiennes.

On apprend à la lecture de ce rapport que, malgré l'existence d'instruments législatifs visant à rétrécir le fossé salarial qui sépare les femmes de leurs collègues masculins, nous sommes encore loin d'être sorties de l'auberge. En ce qui a trait à la discrimination, nous sommes réellement dans une impasse. Le constat est implacable.

À en croire les conclusions du rapport, le problème proviendrait du système actuel. L'approche du système repose principalement sur la formule de dépôt des plaintes. Ce système constitue une difficulté majeure et a démontré ses limites. Plusieurs raisons justifient ces lacunes. Permettez-moi de vous en énumérer quelques-unes.

D'une part, les plaintes sont inappropriées pour combattre la discrimination faite de manière subtile et parfois intentionnellement. Les plaintes traînent en longueur et plusieurs années peuvent s'écouler avant que les tribunaux ne puissent statuer définitivement. La plainte déposée par les employées de Bell Canada en 1988 est un exemple assez révélateur de cette problématique. Depuis douze ans, après d'innombrables péripéties et batailles juridiques, aucune décision ou jugement n'a été rendu.

D'autre part, le manque de clarté de certaines normes et concepts intégrés dans les dispositions prises par la loi est aussi source de difficulté.

La Commission des droits de la personne suggère une actualisation des mesures législatives. Une telle proposition me paraît plus que légitime puisque les dispositions fédérales n'ont pas été revues depuis 1977. Il est temps que l'on fasse une révision. J'espère que le gouvernement agira rapidement.

La Commission suggère la création d'un modèle proactif dont la particularité ne soit pas fondée sur le dépôt des plaintes, mais sur des critères mieux établis, afin de corriger les problèmes que connaît le système. Pour ce faire, il nous faudrait établir un organisme indépendant chargé de la mise en application des dispositions législatives, demander une implication plus soutenue des employés et des syndicats dans le processus d'établissement de la parité salariale, et, finalement, éduquer et former les différentes parties concernées.

Si toutes ces conditions sont remplies, nous pourrons alors dire qu'il n'existe plus de place pour la discrimination dans notre beau pays et enfin parler de «salaire égal pour un travail d'égale valeur».

[Traduction]

LE SOMMET DES AMÉRIQUES

LE TRAITEMENT ÉQUITABLE DES INVITÉS ET DES MANIFESTANTS

L'honorable Lois. M. Wilson: Honorables sénateurs, je m'exprime à la fois à titre de sénateur et de vice-présidente de l'Association canadienne des libertés civiles. Lors d'une réunion récente de l'Association, une préoccupation a été soulevée à propos des plans que les gouvernements fédéral et québécois sont en train d'élaborer en prévision du Sommet des Amériques qui se tiendra en avril. Selon la presse, «le dispositif de sécurité lié à cette rencontre sera l'un des plus importants de toute l'histoire du Canada.»

Je comprends ce qui dicte les plans du gouvernement étant donné ce qui s'est produit lors de conférences précédentes sur le commerce, à savoir que certains des manifestants ont eu recours à la violence. Le gouvernement canadien a donc pris des mesures de précaution.

L'Association canadienne des libertés civiles a toutefois demandé à son avocat général, Alan Borovoy, d'écrire une lettre au solliciteur général du Canada afin de soulever les points suivants, sur lesquels je suis d'accord. À titre d'information, je vais citer des extraits de cette lettre.

Comme il est important de veiller à la sécurité lors du Sommet, il est tout aussi important de protéger la viabilité des manifestations. Dans certains cas, les manifestants ont été tenus tellement à l'écart des conférences qu'il leur était impossible de communiquer efficacement leur message. Les manifestants doivent être suffisamment près du lieu de la conférence de sorte qu'ils puissent manifester leur désaccord et que les participants au Sommet soient en mesure de les voir et d'entendre certains de leurs points de vue. C'est-à-dire que les manifestants doivent avoir une occasion raisonnable de faire part aux participants de leurs critiques de nature politique et sociale.

Nous, de l'Association des libertés civiles, espérons donc que, dans les plus brefs délais, vous rendrez publique la façon dont les autorités comptent protéger la collectivité et les participants à la conférence des manifestants potentiellement violents ET du même coup assurer l'intégrité des manifestations non violentes.

Il sera aussi important pour le gouvernement d'assurer au public qu'il n'y aura pas plus d'arrestations que ne l'exigera la nécessité d'appliquer la loi et de protéger la collectivité. Il serait utile pour le gouvernement de distribuer aux agents présents de la GRC des lignes directrices leur rappelant les restrictions légales et d'assurer au public que les agents exécuteront leurs tâches conformément à la loi. Nous demandons que de telles lignes directrices soient rendues publiques.

Nous espérons donc que le gouvernement arrivera à trouver le juste équilibre qui s'impose ici. Nous aimerions croire que le Canada nous donnera un exemple de la façon dont une démocratie peut offrir l'hospitalité à ceux qu'elle invite à la table de conférence ET à ceux qui manifestent dans les rues. Nous devons viser la justice pour TOUS.

L'Association canadienne des libertés civiles a demandé qu'on lui réponde sans délai.

L'ALBERTA

MORINVILLE—LE TROISIÈME BAL ANNUEL DES SÉNATEURS

L'honorable Thelma J. Chalifoux: Honorables sénateurs, c'est avec beaucoup de plaisir que j'aimerais annoncer la tenue du troisième bal annuel du Sénat qui se tiendra à Morinville, en Alberta, le 7 avril 2001.

La célébration de cette année sera tout à fait spéciale. Morinville est devenue une ville militaire puisque l'une des plus importantes bases militaires est située dans notre comté. Lorsque nos Casques bleus partent en mission en Bosnie, le drapeau de l'OTAN flotte dans notre ville. Cette année, nous célébrons la rentrée du drapeau de l'OTAN. Nous avons invité le Loyal Edmonton Regiment à venir battre le tambour en l'honneur de nos anciens combattants et nous espérons également recevoir le groupe des tambours des Premières nations.

Le maire et le conseil de la ville ainsi que les dirigeants militaires se joindront à moi pour cette importante célébration. Un orchestre de danse composé de 15 à 20 musiciens du Loyal Edmonton Regiment divertira les participants. Le Crystal Hall de La Maison à Morinville est un excellent endroit pour danser.

J'exhorte tous les honorables sénateurs à trouver le temps pour participer à cette grande occasion. Toutefois, s'il leur était impossible d'y assister, un généreux don de 50 $ de leur part permettrait à un ancien combattant d'assister à la célébration à leur place.


[Français]

(1440)

AFFAIRES COURANTES

L'AJOURNEMENT

L'honorable Fernand Robichaud (leader adjoint du gouvernement): Honorables sénateurs, avec la permission du Sénat et nonobstant l'article 58(1)h) du Règlement, je propose:

Que, lorsque le Sénat s'ajournera aujourd'hui, il demeure ajourné jusqu'à demain, le mercredi 14 mars 2001, à 13 h 30;

Que, à 15 h 30 demain, si le Sénat n'a pas terminé ses travaux, le Président interrompe les délibérations pour ajourner le Sénat;

Que, si un vote est différé à 17 h 30 demain, le Président interrompe les délibérations à 15 h 30 pour suspendre la séance jusqu'à 17 h 30 pour la mise aux voix du vote différé; et

Que tous les points figurant à l'Ordre du jour et au Feuilleton des avis, qui n'ont pas été abordés, demeurent dans leur ordre actuel.

(La motion est adoptée.)

[Traduction]

Son Honneur le Président: La permission est-elle accordée, honorables sénateurs?

Des voix: D'accord.

(La motion est adoptée.)

PROJET DE CHARTE DU DROIT À LA VIE PRIVÉE

PREMIÈRE LECTURE

L'honorable Sheila Finestone présente le projet de loi S-21, visant à garantir le droit des individus au respect de leur vie privée.

(Le projet de loi est lu une première fois.)

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, quand lirons-nous ce projet de loi une deuxième fois?

(Sur la motion du sénateur Finestone, la deuxième lecture du projet de loi est inscrite à l'ordre du jour de la séance d'après-demain.)

L'ASSOCIATION PARLEMENTAIRE CANADIENNE DE L'OTAN

LA RÉUNION DU COMITÉ DE LA DÉFENSE ET DE LA SÉCURITÉ TENUE DU 30 JANVIER AU 6 FÉVRIER 2001—DÉPÔT DU RAPPORT DE LA DÉLÉGATION CANADIENNE

L'honorable Bill Rompkey: Honorables sénateurs, j'ai l'honneur de déposer le premier rapport de l'Association parlementaire canadienne, qui représentait le Canada à la réunion du Comité de la défense et de la sécurité de l'Association des parlementaires de l'OTAN, qui s'est tenue à Washington (D.C.) et à Colorado Springs du 30 janvier au 6 février 2001.

PEUPLES AUTOCHTONES

AVIS DE MOTION AUTORISANT LE COMITÉ À PERMETTRE LA DIFFUSION DE SES DÉLIBÉRATIONS

L'honorable Thelma J. Chalifoux: Honorables sénateurs, je donne avis que, le mercredi 14 mars 2001, je proposerai:

Que le Comité sénatorial permanent des peuples autochtones soit habilité à permettre le reportage de ses délibérations publiques par les médias d'information électroniques, en dérangeant le moins possible ses travaux.

AVIS DE MOTION AUTORISANT LE COMITÉ À ENGAGER DU PERSONNEL

L'honorable Thelma J. Chalifoux: Honorables sénateurs, je donne avis que, le mercredi 14 mars 2001, je proposerai:

Que le Comité sénatorial permanent des peuples autochtones soit habilité à retenir les services de conseillers, techniciens, employés de bureau ou autres éléments nécessaires pour examiner les projets de loi, la teneur des projets de loi et les prévisions budgétaires qui lui ont été déférés.

[Français]

LE SÉNAT

AVIS DE MOTION VISANT À MODIFIER L'ARTICLE 90 DU RÈGLEMENT

L'honorable Jean-Robert Gauthier: Honorables sénateurs, je donne avis, conformément à l'article 57(1) du Règlement, que, jeudi le 15 mars 2001, je proposerai:

Que le Règlement du Sénat soit modifié par l'adjonction, après l'article 90, de l'article suivant:

90(1) Dans les 90 jours suivant le dépôt du rapport d'un comité particulier, le gouvernement dépose, à la demande du comité, une réponse globale.

[Traduction]

LA SITUATION DE L'AIDE JURIDIQUE AU CANADA

AVIS D'INTERPELLATION

L'honorable Catherine S. Callbeck: Honorables sénateurs, je donne avis que mardi prochain, le 20 mars 2001, j'attirerai l'attention du Sénat sur la situation de l'aide juridique au Canada et les difficultés qu'éprouvent de nombreux citoyens à faible revenu à obtenir une aide juridique satisfaisante, tant au criminel qu'au civil.


PÉRIODE DES QUESTIONS

LE CONSEIL DU TRÉSOR

LE CANADA ATLANTIQUE—DEMANDE DE RENSEIGNEMENTS SUR LE PROGRAMME D'INFRASTRUCTURE

L'honorable J. Michael Forrestall: Honorables sénateurs, ma question s'adresse à madame le leader du gouvernement au Sénat. J'attendrai à demain pour l'interroger sur une récente décision de la Cour fédérale concernant le projet des hélicoptères, mais j'ai quelques questions pour elle aujourd'hui au sujet des infrastructures.

Avant les élections, le gouvernement du Canada avait promis au Canada atlantique beaucoup d'argent, plus de 100 millions de dollars pour l'infrastructure. L'année dernière, le Canada atlantique — soit quatre provinces — a reçu 19 millions de dollars. C'est toute une différence. Même le whip est d'accord avec moi.

Nous avons entendu les annonces et les grandes déclarations ad nauseam et à maintes reprises. Je pose la question: où est le boeuf? Quand arrivera-t-il?

L'honorable Sharon Carstairs (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, je remercie le sénateur de sa question. Je suis étonnée qu'il ait demandé où est le boeuf et non où est le poisson.

En ce qui a trait à la concrétisation de la promesse faite pendant la campagne électorale, je dois demander au sénateur d'être patient. Les plans vont bon train et les programmes sont amorcés. Les engagements qui ont été pris envers le Canada atlantique — cette région du pays que lui et moi aimons passionnément — feront en sorte que la population se réjouira bientôt à nouveau d'avoir un gouvernement libéral.

Le sénateur Forrestall: J'invite les sénateurs à réfléchir à ce que le gouvernement entend par «Bientôt», «immédiatement» ou «soyez patients». Qu'on dise cela aux marins de Shearwater.

LES ANCIENS COMBATTANTS

LES ANCIENS COMBATTANTS DE LA MARINE MARCHANDE—LE VERSEMENT DES INDEMNITÉS—L'ÉTAT DU DEUXIÈME VERSEMENT

L'honorable J. Michael Forrestall: Honorables sénateurs, l'autre aspect que je voudrais soulever est tout aussi grave. Le gouvernement avait promis d'indemniser les anciens combattants de la marine marchande pour le manque de respect dont ils ont été victimes après la guerre. Cependant, le gouvernement, fidèle à lui-même, n'a versé aux anciens combattants que la moitié de l'indemnité promise. Elle a été divisée en deux versements différents.

(1450)

Honorables sénateurs, madame le leader du gouvernement au Sénat pourrait-elle expliquer ce qu'il advient du second versement de l'indemnité promise aux anciens combattants de la marine marchande et quand ces derniers peuvent espérer recevoir leur chèque, ou est-ce que le gouvernement serait à court d'argent?

L'honorable Sharon Carstairs (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, je remercie l'honorable sénateur de sa question. La question est très sérieuse en effet. L'annonce faite aux anciens combattants de la marine marchande se faisait attendre depuis longtemps.

L'honorable sénateur devrait s'attribuer une grand part du mérite de ce que le gouvernement ait pris cette décision. Je suis convaincue que ses interactions constantes au Sénat ont beaucoup contribué à assurer une mesure de justice pour ces anciens combattants.

Honorables sénateurs, le problème vient du fait que le gouvernement a versé une indemnité à plus de 6 600 anciens combattants de la marine marchande jusqu'à présent. Il avait annoncé en février 2000 qu'il faudrait 50 millions de dollars à cet effet. En octobre, on a découvert que ce chiffre avait été sous-estimé et que beaucoup plus de membres de la marine marchande méritaient de recevoir l'indemnité. Un montant supplémentaire de 20 millions de dollars a été prévu. Un montant additionnel de 35 millions de dollars sera nécessaire et je puis assurer au sénateur que ce montant sera bientôt débloqué.

Jusqu'à présent, on a reçu 13 928 demandes d'indemnité; 6 713 requérants ont été jugés admissibles. Ces requérants ont reçu, avec le premier chèque, 60 p. 100 de l'indemnité maximale, pour un total de 48,3 millions de dollars. Environ 2 400 décisions initialement négatives font actuellement l'objet d'une révision. On s'attend à ce que tout le processus de révision puisse se terminer avant la fin du mois.

LES AFFAIRES INDIENNES ET LE NORD CANADIEN

LE PROGRAMME DE TRAITEMENT DES ENFANTS AUTOCHTONES DE DAVIS INLET

L'honorable Bill Rompkey: Honorables sénateurs, je désire signaler au leader du gouvernement au Sénat la situation des enfants Innu du Labrador qui sont présentement logés dans l'ancien hôpital Grace de Saint John's, à Terre-Neuve. Ils s'y trouvent, comme elle le sait sans doute, à la suite d'une requête de la nation Innu du Labrador. Cet établissement a été réouvert pour accueillir les enfants.

Des bruits courent que les enfants ne reçoivent pas l'attention dont ils ont besoin ou qu'ils méritent. Nous avons bien présentes à l'esprit les images des enfants de Davis Inlet en train de renifler de la colle. Je sais que tous les honorables sénateurs sont intéressés à connaître la situation et à savoir si les enfants reçoivent le meilleur traitement qu'on puisse leur accorder. D'après certains reportages, les programmes fédéraux dont pourraient bénéficier ces enfants ne seraient pas mis à leur disposition aussi rapidement qu'ils le pourraient.

Madame le leader du gouvernement pourrait-elle intervenir auprès du ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien pour voir à ce que le gouvernement fédéral fasse tout ce qui est possible, et qu'il le fasse sans délai?

L'honorable Sharon Carstairs (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, je remercie l'honorable sénateur pour sa question. Il a parfaitement raison. Les photos d'enfants qui semblent n'avoir aucun espoir ni avenir ont marqué l'esprit et le coeur de tous les Canadiens. Ces enfants ont mis la confiance qu'ils avaient dans les vapeurs de colle. Il est évident que ces enfants ont besoin d'aide.

Si les reportages sont exacts et que ces enfants ne sont pas traités, et j'espère bien qu'ils ne sont pas exacts, je ferai de mon mieux pour que le gouvernement comprenne que le traitement ne doit pas se faire attendre.

J'irai au-delà de ce que l'honorable sénateur demande aujourd'hui. Je suis convaincue que, si ces enfants retournent dans leurs collectivités pour y retrouver les mêmes conditions de vie, sans que d'autres activités ne soient prévues, le succès qu'ils auront connu à l'hôpital deviendra rapidement un échec au sein de la collectivité. Je vais en discuter avec le ministre également.

LA SOCIÉTÉ DE DÉVELOPPEMENT DU CAP-BRETON

DEMANDE DE RENSEIGNEMENTS SUR L'ÉTAT D'AVANCEMENT DE LA VENTE

L'honorable John Buchanan: Honorables sénateurs, j'ai une question à poser à madame le leader du gouvernement au Sénat. Pourrait-elle nous renseigner sur l'état d'avancement de la vente de l'actif de la Devco à la Oxbow Corporation, société américaine établie en Floride?

L'honorable Sharon Carstairs (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, je remercie l'honorable sénateur de sa question. Je regrette de ne pas avoir ces renseignements pour l'instant. J'espère les obtenir au plus tôt car je sais que cette affaire intéresse plusieurs sénateurs d'en face, dont l'honorable sénateur Murray.

Le sénateur Buchanan: Quand madame le leader se renseignera, pourrait-elle aussi déterminer l'état de la nouvelle mine Donkin? La Oxbow Corporation est-elle prête à acquérir la mine Donkin? En outre, y a-t-il des négociations avec le groupe du Cap-Breton qui a proposé il y a quelques années de mettre en valeur la mine Donkin?

Le sénateur Carstairs: Je remercie le sénateur de cette question. Je m'informerai donc aussi au sujet de la mine Donkin, des participants américains et du groupe de la Nouvelle-Écosse qui a proposé un plan.

LA JUSTICE

LE COÛT DE L'ENREGISTREMENT DES ARMES À FEU

L'honorable Terry Stratton: Honorables sénateurs, ma question s'adresse au leader du gouvernement au Sénat. Le Comité des finances a siégé ce matin pour étudier le Budget supplémentaire des dépenses. À cette occasion, nous avons découvert que le coût du système d'enregistrement des armes à feu approche les 500 millions de dollars.

La dernière fois que j'ai posé une question à ce sujet, le coût se chiffrait à 400 millions de dollars. La fois précédente, il était de 300 millions de dollars. À l'origine, le ministre avait promis que l'enregistrement ne coûterait que quelque 65 millions de dollars.

Madame le leader du gouvernement peut-elle nous dire où tout cela s'arrêtera? Sommes-nous arrivés au chiffre final ou est-ce que l'enregistrement coûtera 100 millions de dollars par année?

L'honorable Sharon Carstairs (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, je remercie le sénateur de sa question. Il importe de noter que le processus d'attribution des permis, qui est plus ou moins terminé, a fait qu'un grand nombre de personnes ont demandé un permis de possession d'armes à feu. L'étape suivante est l'enregistrement de ces armes à feu.

Honorables sénateurs, j'ai parlé à la ministre McLellan à ce sujet. Elle m'assure que les responsables travaillent promptement pour veiller à ce que tout soit fait de la façon la plus efficace et la plus efficiente possible, non seulement en ce qui concerne les coûts, mais aussi en ce qui concerne la prestation des services aux personnes dont les demandes de permis sont claires et complètes. Ceux qui présentent des demandes simples devraient pouvoir enregistrer leurs armes au moyen de la formule abrégée et cela pourra se faire à un coût réduit.

Le sénateur Stratton: Honorables sénateurs, nous approchons des 500 millions de dollars et nous ne savons pas si les sommes accrues versées à la GRC sont incluses dans ce montant. La charge de travail imposée à la GRC qui doit gérer cet enregistrement a été considérable. Ceux qui se sont rendus comme moi dans les centres commerciaux pour obtenir une formule d'enregistrement par la poste sauront que les files d'attente sont longues. La GRC a été surchargée de travail.

Je demande encore une fois au leader du gouvernement de nous dire quel sera le coût final, y compris les sommes versées à la GRC. Je ne crois pas que les coûts des services de la GRC soient inclus dans le chiffre de 500 millions de dollars. Madame le leader pourrait-elle demander au ministre de répondre à cette question?

Le sénateur Carstairs: Je pense que le sénateur a raison. Les coûts engagés par la GRC ne seraient pas inclus dans le processus de délivrance de permis jusqu'à maintenant. Le coût de ce processus ne serait pas compris non plus. Je vais me renseigner pour savoir si les deux coûts sont inclus. Selon les informations que j'ai actuellement, ce chiffre ne comprend pas les coûts supplémentaires engagés par la GRC pour ce processus.

(1500)

L'ENREGISTREMENT DES ARMES À FEU—LE NOMBRE D'ARMES À FEU À ENREGISTRER

L'honorable David Tkachuk: Honorables sénateurs, quand le ministre a présenté le projet de loi C-68, il a dit que 5 millions d'armes à feu devaient être enregistrées. Je crois savoir que le gouvernement, pour pouvoir atteindre le pourcentage élevé d'enregistrements qu'il s'est fixé, a réduit ce nombre à 2 millions. Quelles sont les estimations du gouvernement?

L'honorable Sharon Carstairs (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, selon les estimations du gouvernement, 2,4 millions d'armes à feu doivent être enregistrées. Les estimations initiales étaient plus élevées, semble-t-il. Les estimations de 2,4 millions d'armes à feu ont été, soit dit en passant, établies par un comité indépendant qui a fait un sondage pour déterminer le nombre d'armes à feu à enregistrer. Selon le taux de succès obtenu jusqu'à maintenant, plus de 2 millions de propriétaires d'armes à feu ont enregistré leurs armes à feu ou ont obtenu un permis. Il reste encore quelque 300 000 armes à feu à enregistrer. Quelque 100 000 personnes ont choisi de rendre leurs armes. Cela s'est toutefois traduit par une diminution du nombre d'armes pour lesquelles un permis doit être délivré.

Le sénateur Tkachuk: Nous en sommes aujourd'hui à 2,4 millions d'après une étude indépendante. Sur quoi le ministre s'est-il basé pour avancer ces autres chiffres élevés, lorsqu'il a présenté le projet de loi?

Le sénateur Carstairs: D'après une évaluation sommaire du nombre des armes à feu en circulation, le nombre approchait les 5 millions. Nous savons toutefois aujourd'hui que les armes à feu ne sont pas aussi nombreuses qu'on l'avait cru. Cela étant, j'avoue que j'en suis parfaitement ravie.

L'ENVIRONNEMENT

LES ÉMISSIONS DES CENTRALES DE L'ONTARIO POWER GENERATION INC.—LE RÉACTION À LA LETTRE DES PROCUREURS GÉNÉRAUX DES ÉTATS DE NEW YORK ET DU CONNECTICUT

L'honorable Mira Spivak: Honorables sénateurs, les procureurs généraux des États de New York et du Connecticut ont invoqué la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale pour demander au ministre de l'Environnement de procéder à une évaluation environnementale des trois centrales thermiques à charbon de l'Ontario Power Generation. Ils soutiennent que des recherches effectuées pour le compte du gouvernement des États-Unis ont révélé «de façon concluante» que les émissions de ces centrales nuisent considérablement à la faune et à la santé des Américains. L'importante hausse des cas d'asthme, les décès prématurés, les pluies acides — des problèmes qui nous viennent d'ailleurs. Bien entendu, nous avons également à régler la question du Traité sur l'assainissement de l'air entre le Canada et les États-Unis.

Madame le leader du gouvernement sait-elle quelle a été la réaction du gouvernement aux allégations contenues dans la lettre du 31 janvier 2001 des procureurs généraux Blumenthal et Spitzer? Le ministre de l'Environnement acquiescera-t-il à leur demande?

L'honorable Sharon Carstairs (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, comme on se l'imagine, je ne connais pas la réaction à la lettre du 31 janvier 2001 des procureurs généraux du Connecticut et de New York. J'essaierai d'obtenir cette réaction. Le plus important, c'est que le Traité sur l'assainissement de l'air a été signé. Il impose des obligations mutuelles aux États-Unis et au Canada. Aucun de nos deux pays n'est sans reproche. On constate des deux côtés de la frontière un désir d'assainir l'air et l'environnement.

LA RECONNAISSANCE DE LA RÉGLEMENTATION AMÉRICAINE CONCERNANT LES ÉMISSIONS

L'honorable Mira Spivak: Honorables sénateurs, la semaine dernière, la Cour suprême des États-Unis a rejeté à l'unanimité le recours présenté par les compagnies d'électricité américaines contre la réglementation de l'EPA visant à réduire les émissions productrices de smog. Ainsi, la réduction de ces émissions dans le Midwest américain sera bénéfique pour la population de l'Ontario. Les niveaux d'ozone au nord de la frontière pourraient diminuer de 20 p. 100. J'espère que lorsqu'elle posera la question au ministre de l'Environnement, le leader du gouvernement usera de ses bons offices pour s'assurer que l'Ontario rendra effectivement la politesse aux Américains qui respirent les émissions que nous leur envoyons.

L'honorable Sharon Carstairs (leader du gouvernement): L'honorable sénateur pose une question intéressante. Cette évidence doit être rappelée aux Canadiens, bien sûr, mais aussi aux Américains: l'air et l'eau se déplacent sans tenir compte des frontières internationales. Le sénateur Johnson s'inquiète sérieusement de l'eau qui coule vers le nord, des États-Unis vers le Canada, et je partage son inquiétude. L'autre sénateur du Manitoba a soulevé un grave problème: lorsqu'un complexe industriel au Canada ou aux États-Unis pollue l'air, cet air ne reste pas dans la région de ce complexe, mais circule vers le nord ou le sud. Je serai heureuse d'aborder ces questions avec le ministre de l'Environnement.

[Français]

LA SANTÉ

L'ABSENCE DE COORDINATION DES POLITIQUES EN MATIÈRE DE SOINS PALLIATIFS—RÉPONSE AUX RECOMMANDATIONS DU COMITÉ SÉNATORIAL SPÉCIAL

L'honorable Eymard G. Corbin: Honorables sénateurs, ma question s'adresse au leader du gouvernement. Elle se souviendra que le 31 janvier dernier, je lui ai demandé si le gouvernement allait répondre de façon globale au rapport du comité spécial qu'elle présidait sur les soins palliatifs au Canada.

À ce moment-là elle m'a informé qu'elle en avait parlé au ministre de la Santé, mais qu'aucun engagement ferme selon lequel nous aurions une réponse détaillée n'avait été obtenu. Un mois et demi s'est écoulé depuis. Je me demande si, aujourd'hui, le leader du gouvernement est en mesure de nous dire si cette Chambre, selon le voeu qu'elle a formellement exprimé au moment de l'adoption de ce rapport, peut effectivement s'attendre à une réponse globale.

Une revue médicale canadienne contient un article sur l'absence de coordination des politiques des gouvernements en matière de soins palliatifs au pays, ce qu'elle regrette énormément. Sur cette question, je donne avis que demain je prendrai la parole au moment du débat sur l'Adresse en réponse au discours du Trône.

Je crois, honorables sénateurs, que le temps presse et qu'il faut maintenant passer à l'action.

[Traduction]

L'honorable Sharon Carstairs (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, je remercie l'honorable sénateur de sa question. Je n'ai obtenu aucun engagement de réponse de Santé Canada aux recommandations du Sénat sur les soins palliatifs. Le ministre de la Santé est dans l'impossibilité de s'acquitter de ses responsabilités depuis cinq semaines en raison de sa convalescence à la suite d'une intervention chirurgicale. Je n'ai mis aucune pression sur le ministre ou, en son absence, sur le ministère pour obtenir un plan complet.

Cependant, je tiens à ce que les honorables sénateurs sachent que quelques initiatives très intéressantes sont prises dans le domaine des soins palliatifs. Le ministre de la Santé du Manitoba a décidé d'inscrire le rapport du Sénat à l'ordre du jour de la prochaine réunion des ministres provinciaux de la Santé. D'autres ministres appuient M. Chomiak et notre rapport sera inscrit à l'ordre du jour de la réunion. Je trouve cette initiative très positive.

Je trouve également positive l'initiative annoncée dans le discours du Trône pour garantir la sécurité d'emploi et le soutien financier nécessaire au parent dont un enfant reçoit des soins palliatifs.

Des progrès sont accomplis. Cependant, j'exercerai des pressions dès que le ministre de la Santé aura repris ses fonctions afin d'obtenir une réponse à nos recommandations précises.

L'honorable Lowell Murray: Honorables sénateurs, je suis convaincu que c'est déjà de notoriété publique, mais pour le compte rendu, le leader du gouvernement pourrait-il nous dire qui est le ministre de la Santé intérimaire?

L'honorable Sharon Carstairs (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, le ministre de la Santé intérimaire est l'honorable Herb Gray.

[Français]

LE FINANCEMENT DES SOINS PALLIATIFS

L'honorable Roch Bolduc: Honorables sénateurs, dois-je comprendre que le leader du gouvernement a moins d'influence auprès du ministre de la Santé qu'un grand nombre de députés de l'autre endroit qui, depuis quelque temps, reçoivent des subventions de tous bords tous côtés? Si ce n'est pas pour le diabète, c'est pour les maladies du cœur.

(1510)

Je suis toujours impressionné par la série de subventions qui sont accordées. La semaine passée, c'était la semaine de l'Ontario, qui a reçu au moins deux milliards de dollars de subventions réparties dans différents domaines. Cette semaine, le ministre de la Santé distribuait des subventions ici et là pour des affaires très ponctuelles à travers le pays. Je ne sais pas s'il récompense à l'avance des gens qui s'occuperont de sa prochaine campagne électorale. De toute façon, ces gens me semblent avoir plus d'influence que la ministre, et cela me gêne. J'aimerais recevoir les commentaires du leader du gouvernement au Sénat sur ce point.

[Traduction]

L'honorable Sharon Carstairs (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, j'espère que ce ne sera pas le cas. Les honorables sénateurs doivent savoir qu'une partie de cet argent est consacrée aux soins palliatifs. On a annoncé récemment que des ressources seront accordées à l'Université de l'Alberta pour des recherches sur les soins palliatifs. C'est un début, et je suis persuadée qu'on injectera encore plus d'argent dans ce domaine.

Je n'ai pas oublié la question que le sénateur a posée plus tôt concernant un calendrier du Sénat. Nous avons maintenant un modèle de calendrier. Je vais le communiquer aux dirigeants d'en face, et il est à souhaiter que, avant notre congé d'avril, le sénateur pourra faire ses plans pour le reste de 2001.

RÉPONSES DIFFÉRÉES À DES QUESTIONS ORALES

L'honorable Fernand Robichaud (leader adjoint du gouvernement): Honorables sénateurs, j'ai les réponses différées à trois questions, celle que le sénateur Cohen a posée le 20 février 2001 au sujet du projet de loi S-11, celle que le sénateur Cochrane a posée le 21 février 2001 au sujet du plan de gestion du parc national du Gros-Morne et du financement des plans de gestion des parcs nationaux, et enfin celle que le sénateur Robertson a posée le 20 février 2001 au sujet de l'administration aéroportuaire de Moncton.

LA LOI CANADIENNE SUR LES DROITS DE LA PERSONNE

LES MODIFICATIONS POUR INCLURE LA CONDITION SOCIALE COMME MOTIF DE DISTINCTION ILLICITE—LA POLITIQUE DU GOUVERNEMENT

(Réponse à la question posée le 20 février 2001 par l'honorable Erminie J. Cohen)

Le gouvernement fédéral admet les principes et la complexité des enjeux légaux et de politique entourant la «condition sociale». Par conséquent, la ministre de la Justice a dit lors du débat sur le projet de loi S-11 que le motif de la «condition sociale» serait examiné par le Comité de révision de la Loi canadienne sur les droits de la personne lors de la révision de la loi.

Comme vous le savez, la révision est maintenant terminée et un rapport intitulé: «La Loi canadienne sur les droits de la personne» (La promotion de l'égalité: une nouvelle vision) a été rendu public en juin 2000.

Le rapport renferme 165 recommandations touchant diverses questions dont le processus des plaintes et l'inclusion de nouveaux motifs de discrimination, comme celui de la «condition sociale».

Cette recommandation, tout comme bien d'autres contenues dans le rapport, a de multiples facettes en ce sens qu'elle pourrait avoir des répercussions sur les mandats de plusieurs ministères. Les fonctionnaires du ministère de la Justice, en collaboration avec les autres ministères fédéraux, font actuellement un examen approfondi du rapport et s'interrogent donc par le fait même sur le motif de la condition sociale.

Il s'agit de la toute première révision détaillée et complète de la Loi canadienne sur les droits de la personne depuis plus de 20 ans. Le gouvernement a besoin de temps pour revoir attentivement le rapport afin de lui donner toute l'importance qu'il mérite et ce, tout en consultant étroitement les autres ministères fédéraux.

LE PATRIMOINE

LE PLAN DE GESTION DU PARC NATIONAL DU GROS-MORNE—LE FINANCEMENT DES PLANS DE GESTION DES PARCS NATIONAUX

(Réponses aux questions posées le 21 février 2001 par l'honorable Ethel Cochrane)

QUESTION:

Quand prévoyez-vous déposer au Parlement le plan directeur du parc national du Canada du Gros-Morne?

RÉPONSE:

Comme les honorables sénateurs le savent bien, la Loi sur les parcs nationaux du Canada a été promulguée le 19 février 2001.

Tel que la ministre du Patrimoine canadien mentionnait lors de la promulgation de la loi, le parc national du Canada du Gros-Morne sera créé formellement lorsque la réglementation afin de pourvoir aux activités traditionnelles des résidents des communautés avoisinantes sera en vigueur.

Certains éléments de l'ébauche du plan directeur du parc national du Canada du Gros-Morne font l'objet d'une revue par des résidents des communautés avoisinantes et des intervenants. Parcs Canada se propose de soumettre pour approbation un plan directeur révisé d'ici la fin de l'année.

Lorsque le plan directeur sera approuvé par la ministre du Patrimoine canadien, le document sera déposé au Parlement en vertu de la Loi sur les parcs nationaux du Canada.

QUESTION:

Est-ce que le gouvernement va fournir un financement adéquat pour la mise en oeuvre des plans directeurs?

RÉPONSE:

En conformité avec la Loi sur les parcs nationaux du Canada, les plans directeurs énoncent les orientations stratégiques pour la gestion des parcs nationaux — y compris les interventions pour le maintien ou le rétablissement de l'intégrité écologique.

Il existe un programme pour les plans directeurs que Parcs Canada continue de mettre en oeuvre.

LES TRANSPORTS

LA PRIVATISATION DE L'AÉROPORT DE MONCTON

(Réponse à la question posée le 20 février 2001 par l'honorable Brenda M. Robertson)

Une réponse en bonne et due forme sera adressée à la Greater Moncton Airport Authority (GMAA) lorsque les arguments qu'elle a présentés lors de cette réunion auront fait l'objet d'un examen approfondi.

Une décision quant au besoin de renégocier l'accord pour la cession de l'aéroport de Moncton sera prise uniquement lorsque le ministère aura examiné des accords similaires à l'échelle du pays.


ORDRE DU JOUR

LE SÉNAT

MOTION TENDANT À MODIFIER L'ARTICLE 86 DU RÈGLEMENT—AJOURNEMENT DU DÉBAT

L'honorable Fernand Robichaud (leader adjoint du gouvernement), conformément à l'avis donné le 20 février 2001, propose:

Que l'article 86 du Règlement du Sénat soit modifié

1. par la suppression de l'alinéa 86(1)h) et son remplacement par ce qui suit:

h) Le comité sénatorial des affaires étrangères, composé de douze membres, dont quatre constituent un quorum, auquel sont renvoyés, s'il y a motion à cet effet, les projets de loi, messages, pétitions, interpellations, documents et autres matières concernant les relations étrangères et les relations avec le Commonwealth en général, y compris:

(i) les traités et accords internationaux; (ii) le commerce extérieur; (iii) l'aide à l'étranger; (iv) les affaires territoriales et côtières.

2. par la suppression de l'alinéa 86(1)m) et son remplacement par ce qui suit:

m) Le comité sénatorial des affaires sociales, des sciences et de la technologie, composé de douze membres, dont quatre constituent un quorum, auquel sont renvoyés, sur ordre du Sénat à cet effet, les projets de loi, messages, pétitions, interpellations, documents et autres matières concernant les affaires sociales, les sciences et la technologie en général, y compris:

(i) les affaires des Indiens et des Inuits; (ii) les affaires culturelles et les arts; (iii) les affaires sociales et ouvrières; (iv) la santé et le bien-être; (v) les pensions;(vi) le logement; (vii) la condition physique et les sports amateurs; (viii) l'emploi et l'immigration; (ix) les affaires des consommateurs; et (x) les affaires de la jeunesse.

3. par l'insertion, immédiatement après l'alinéa 86(1)q), des nouveaux alinéas 86(1)r) et 86(1)s):

r) Le comité sénatorial de la défense et de la sécurité, composé de neuf membres, dont quatre constituent un quorum, auquel peuvent être renvoyés, sur décision du Sénat, les projets de loi, messages, pétitions, interpellations, documents et autres matières concernant la défense et la sécurité en général, y compris les affaires des anciens combattants.

s) Le comité sénatorial des droits de la personne, composé de neuf membres, dont quatre constituent un quorum, auquel peuvent être renvoyés, sur décision du Sénat, les projets de loi, messages, pétitions, interpellations, documents et autres matières concernant les droits de la personne en général.

L'honorable Sharon Carstairs (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, cette motion fait suite au désir d'établir deux nouveaux comités à cet endroit: un comité permanent de la défense et de la sécurité ainsi qu'un comité permanent des droits de la personne. Il y a un vaste historique concernant la motion dont le Sénat est saisi. Je voudrais revenir là-dessus avec vous afin que vous compreniez bien les origines de cette motion.

Nous travaillons à la réforme et à la restructuration des comités depuis au moins 1994. Certains sénateurs me disent que cette question date de plus longtemps encore, mais j'ai participé activement à une bonne partie des discussions concernant cette réforme depuis cette année-là. Sous l'excellente direction des sénateurs Robertson, Maheu et Austin, nous nous sommes livrés à de nombreux exercices de restructuration du système des comités.

Tout le processus a débuté avec l'envoi d'un questionnaire à tous les sénateurs sous la présidence du sénateur Robertson en 1994. Au cours des sept dernières années, le comité s'est réuni à plusieurs reprises pour examiner les résultats de ce questionnaire. On a également fait faire des recherches et des analyses par le personnel de la Bibliothèque du Parlement et par celui de notre propre Direction des comités. Au fil des discussions, de nombreux sénateurs ont présenté des propositions globales de restructuration.

Je me souviens que, en 1998, par exemple, des propositions détaillées avaient été présentées par le sénateur Maheu et par le sénateur Kenny, ainsi que par moi-même. Une série de rencontres ont eu lieu pour que nous puissions discuter de toutes ces propositions. Un sous-comité a été établi pour examiner les propositions. Donc, au cours des sept dernières années, on a discuté, réfléchi, examiné et réexaminé. Une seule recommandation du Comité du Règlement s'est dégagée de ce débat sur la restructuration, et elle concerne la création de deux nouveaux comités.

Deux rapports distincts ont recommandé la création de deux nouveaux comités permanents, un sur les droits de la personne et un sur la défense. En juin 1999 et encore une fois en juin 2000, le Sénat a été saisi de rapports recommandant la création de tels comités. Les deux ont été présentés vers la fin de la session et sont morts au Feuilleton parce que nous ne les avons pas examinés assez rapidement.

Nous, de ce côté-ci de la Chambre, ne voyons pas cette motion comme une initiative ministérielle. Nous la voyons comme une initiative du Sénat. Ayons un vote libre sur cette question. Laissons le Sénat décider, mais n'attendons pas plus longtemps. Certains suggéreront que la question soit de nouveau renvoyée au comité, et je ne peux que leur demander pourquoi. Après tout, notre Comité du Règlement a fait deux fois une recommandation à cet égard. Décidons une fois pour toutes si nous allons accepter ou rejeter cette recommandation.

D'autres diront que nous faisons de la restructuration à la pièce avec cette motion, et cette remarque est juste. Cependant, honorables sénateurs, je ne vois personnellement pas d'autre façon de faire. Nous avons essayé l'autre façon pendant sept ans et avons été incapables de prendre des décisions et de mettre en oeuvre des changements. Cette question a été débattue et analysée en profondeur. À mon avis, les sénateurs n'ont plus besoin de l'étudier ou d'y réfléchir davantage. Ils sont maintenant en mesure de prendre une décision éclairée. Faisons-le dès maintenant.

Bref, aux personnes qui soutiendraient qu'il s'agit ici d'un débat partisan, je dirai ceci en conclusion: j'ai participé à une séance du Comité du Règlement où un grand nombre de sénateurs d'en face, avec l'appui de nombreux sénateurs de notre côté, ont préconisé que l'on crée un comité des droits de la personne. Pour ce qui est d'un comité de la défense, c'est l'inverse qui s'est produit. Une majorité de sénateurs de notre côté a proposé la création d'un tel comité avec l'appui de nombreux sénateurs d'en face. La création de ces deux comités est souhaitée par un grand nombre de sénateurs des deux côtés qui veulent travailler dans ces domaines. S'agit-il d'une majorité de sénateurs? Je ne le sais pas. Mettons enfin la question aux voix et voyons une fois pour toutes si les sénateurs veulent en majorité que ces deux comités soient créés! Laissons le Sénat en décider!

L'honorable Sheila Finestone: Honorables sénateurs, à l'instar de la plupart des sénateurs, je crois, je suis ravie que nous soyons saisis aujourd'hui d'une motion prévoyant la création d'un comité permanent des droits de la personne. En ce nouveau millénaire où nous sommes plus que jamais interconnectés, les humains de toute la Terre ont l'occasion de réfléchir à leur destin commun. Il suffit de songer aux changements apportés par la technologie et par Internet.

Bien que les avantages de la mondialisation semblent évidents — la croissance, l'éducation, une meilleure qualité de vie et des possibilités accrues — une réaction indésirable d'inégalité semble se dessiner avant même que ces avantages soient distribués également.

(1520)

D'une façon plus particulière, les groupes de protection des droits de la personne doivent relever un certain nombre de défis importants, étant donné que les gens sont de plus en plus conscients des injustices et des atrocités commises dans le monde. Honorables sénateurs, je vous donne un exemple au niveau international de préoccupations qui semblent étranges, mais qui sont réelles. Lors de la 165e séance de l'Union interparlementaire, tenue à Berlin, le président du comité des droits de la personne des parlementaires a dit qu'il fallait se pencher sur des cas d'abus à l'endroit de 200 parlementaires dans 33 pays de toutes les régions du globe. C'est là une question très importante. La démocratie a besoin de droits et elle a besoin que ces droits soient manifestes.

Honorables sénateurs, si nous prônons l'élimination des disparités énormes au niveau de la richesse, si nous nous efforçons d'améliorer les conditions misérables dans lesquelles plus d'un milliard de personnes vivent, si nous appuyons la protection de notre environnement naturel et que nous dénonçons les conflits, nous ne pouvons fermer les yeux sur le besoin impérieux de protéger ceux qui sont vulnérables, de faire respecter les droits de la personne et de s'assurer que les atteintes graves ne restent pas impunies.

Le dossier du Canada n'est pas sans tache; toutefois, nous nous distinguons parmi les nations du monde. Il faut soulever ces questions, examiner les circonstances et se faire entendre clairement. Nous devons nous faire entendre relativement aux questions pertinentes et nous devons nous pencher sur ces questions afin que ce que nous évaluons reflète nos valeurs. Améliorer nos politiques équivaudrait à développer une sensibilité et une perceptibilité accrues aux fins du processus.

Honorables sénateurs, nous sommes confrontés au besoin urgent d'encourager et d'appuyer les valeurs universelles que sont le respect des droits de la personne et la promotion des institutions et des pratiques démocratiques, tant ici qu'outre-mer, selon la définition de la Déclaration universelle des droits de l'homme des Nations Unies et de la Convention internationale sur les droits civils et politiques.

J'espère que le comité sénatorial permanent qui est proposé se verra confier la tâche de contrôler les abus, d'identifier les coupables et de surveiller le respect des traités sur les droits de la personne, tant au niveau national qu'international.

Je tiens à souligner qu'il y a au Canada un exemple qui a été porté à notre attention récemment, dans le cadre d'une initiative des deux Chambres du Parlement, par Irwin Cotler et le sénateur Wilson à l'occasion d'un déjeuner de travail tenu le lundi 26 février. Bon nombre de sénateurs ont participé à cette rencontre au cours de laquelle a été formé le nouveau groupe parlementaire non partisan sur les droits de la personne. De nombreux membres d'ONG ainsi que des représentants de la société civile ont participé à cette rencontre. Le conférencier extérieur était à cette occasion le professeur Guy S. Goodwin-Gill, qui a fait une allocution sur la mise en oeuvre du droit international au Canada, en mettant en particulier l'accent sur la Convention de 1951 concernant le statut des réfugiés. Je souligne aux honorables sénateurs que le Canada a joué un rôle important dans l'ébauche de ce document.

Le professeur Goodwin-Gill a analysé les obligations juridiques internationales du Canada, et il a mis en relief le cas des réfugiés, la lenteur que nous mettons à leur accorder le statut d'immigrant ayant obtenu le droit d'établissement et la situation difficile qui en découle. Nous avons entendu le témoignage très émouvant d'une charmante jeune femme. Elle avait toute notre sympathie. Elle représentait environ 10 000 réfugiés aux prises avec un dilemme particulier. Le professeur Goodwin-Gill a constaté que les pratiques du Canada concernant les documents d'identité des réfugiés au sens de la convention, ainsi que le refus du ministère de l'Immigration d'accorder des documents de voyage à des réfugiés sans papiers, vont à l'encontre des articles 25, 27 et 28 de la convention de 1951.

J'espère que le comité proposé du Sénat sur les droits de la personne sera en mesure d'analyser cette question et des problèmes similaires ainsi que d'évaluer les pratiques du Canada et leurs conséquences. Comme je l'ai dit auparavant, la façon dont nous agissons témoigne des valeurs qui nous sont chères.

Un comité sénatorial sur les droits de la personne ne devrait pas être perçu comme une activité humanitaire. Il ne devrait pas être restreint en raison des chiffres. Il doit être perçu comme un investissement dans notre avenir et dans celui de nos enfants, ainsi que comme une expression tangible du devoir moral que ressentent sincèrement toutes les personnes qui ont parlé de cette question.

L'honorable David Tkachuk: Honorables sénateurs, j'ai une question pour l'honorable sénateur. Y a-t-il des questions qui ne peuvent être abordées dans nos autres comités?

Le sénateur Finestone: Selon mon expérience, honorables sénateurs, les comités analysent comme il convient les responsabilités qui leur sont confiées, mais ils ne se penchent pas vraiment sur d'autres questions. Ces questions sont vitales et importantes. Dans le cas des droits de la personne, comme dans celui d'autres droits fondamentaux, on adopte une certaine approche axée sur les délibérations. Ils correspondent à des responsabilités différentes de celles de certains autres de nos comités.

Le sénateur Tkachuk: Honorables sénateurs, je ne sais pas très bien si j'appuie ou non cette résolution. Quand nous avons posé des questions au sujet de la Chine, j'ai remarqué que le premier ministre et les sénateurs de l'autre côté croyaient dur comme fer que le commerce pouvait continuer et nous avons envoyé là-bas le capitaine Canada malgré les violations des droits de la personne dont étaient notamment victimes plusieurs groupes chrétiens en Chine. Ce comité se pencherait-il dorénavant sur ces questions, ce qu'aucun autre comité n'était prêt à faire il y a de cela plusieurs mois?

Le sénateur Finestone: Honorables sénateurs, si nous avons fait l'erreur de ne pas nous pencher sur ces questions auparavant, c'est honteux. Si nous faisons deux fois la même erreur, alors c'est doublement honteux.

À mon avis, la question des obligations internationales relatives aux droits de la personne est une question sérieuse. Quand j'étais dans l'autre endroit, on m'avait demandé de constituer un sous-comité pour examiner certaines de ces questions.

Il y a beaucoup d'autres questions importantes. Ces questions semblent rester dans l'oubli. À mon avis, les questions comme celles concernant le Falun Gong et d'autres problèmes dans le monde nécessitent une étude et des efforts spéciaux. Ici même, au Canada, il y a des questions qui doivent être sérieusement examinées.

[Français]

L'honorable Jean-Robert Gauthier: Honorables sénateurs, serait-ce possible d'inclure les mots «la Francophonie» dans ce libellé? Ou bien nous excluons le mot «Commonwealth» et nous laissons toute la question devant le Sénat, mais que l'on n'utilise pas exclusivement les mots: «au Commonwealth». La Francophonie est tout aussi importante que le Commonwealth. Il y a quelque 50 pays dans la Francophonie, et elle est importante pour le Canada. Je me demande si le leader adjoint du Sénat a compris mon intervention d'il y a deux semaines, s'il y a réfléchi et s'il accepterait un amendement qui incluerait la Francophonie explicitement ou implicitement dans la motion?

[Traduction]

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, pour être sûr que nous nous en tenons à la procédure, je passe la parole au sénateur Finestone. Les sénateurs lui posaient des questions. Le sénateur Gauthier a posé une question à un autre sénateur, le sénateur Robichaud. Pour y répondre, le sénateur Robichaud doit avoir la permission du Sénat.

La permission est-elle accordée, honorables sénateurs?

Des voix: D'accord.

Son Honneur le Président: Sénateur Robichaud, désirez-vous faire des commentaires?

[Français]

(1530)

L'honorable Fernand Robichaud (leader adjoint du gouvernement): Honorables sénateurs, comme la question du sénateur Gauthier ne traite pas d'un sujet qui est devant nous actuellement, je préférerais attendre le moment propice, où je serai alors certainement consentant et plus qu'heureux d'en discuter. Le sénateur Gauthier a les meilleures intentions du monde, et puisque le sujet traité concerne la Francophonie, je n'ai aucun problème à me joindre à son équipe.

[Traduction]

L'honorable Bill Rompkey: Honorables sénateurs, je souscris à la motion surtout du fait qu'elle s'applique à la défense. Nous en avons débattu au printemps dernier et j'espérais que, l'automne venu, nous aurions suffisamment réfléchi pour passer à l'action, mais ce ne me semble pas être le cas.

Il y a trois semaines, j'assistais à Bruxelles à des réunions de l'OTAN. J'ai téléphoné chez moi, comme je fais d'habitude. Quand j'ai demandé à ma femme de me donner des nouvelles du pays, elle m'a dit que le quotidien The Ottawa Citizen avait publié un article de Tim Naumetz au sujet des comités sénatoriaux, vantant la qualité de leur travail. J'ai demandé de me répéter l'information, ce qu'elle a fait. Effectivement, le journal avait publié un article de Tim Naumetz qui louait l'excellence du travail accompli par les comités du Sénat. L'article commençait par citer le sénateur Grafstein qui avait déclaré que les comités du Sénat étaient plus efficaces que ceux de la Chambre des communes. M. Naumetz s'est ensuite adressé à trois députés, lesquels ont convenu que les comités du Sénat sont effectivement plus efficaces. Je n'ai rien à ajouter à cela.

Le bilan des comités du Sénat est excellent. Ces comités peuvent faire du bon boulot. Ils méritent d'exister et c'est reconnu. Voilà mon premier argument.

À mon retour de Bruxelles, j'ai entendu le discours de M. Tony Blair, qui, à mon avis, a été excellent. J'ai entendu les discours de nombreux chefs d'État et le sien m'a paru exceptionnel. Il m'a le plus impressionné quand il a déclaré que cela apportait toujours un certain soulagement de savoir que les Canadiens étaient de la partie. Il a dit a peu près ceci: «Lorsque le Canada fait une chose, il le fait bien.»

Ceux qui ont voyagé à l'étranger n'en ont pas été étonnés car telle est la réputation du Canada.

Ce même après-midi, j'ai assisté à la conférence des associations de la défense, à l'hôtel Château Laurier. Trois sénateurs s'y trouvaient, le sénateur Pépin, le sénateur Molgat et moi. S'y trouvaient également des députés des Communes. Cette semaine-là, aucune des deux Chambres ne siégeait, pourtant, les sénateurs étaient aussi nombreux que les députés à cette réunion.

J'ai mentionné que le sénateur Gil Molgat était présent à cette conférence. Je n'ai pas fait son éloge funèbre en même temps que les autres. Je veux simplement rappeler qu'il était présent ce jour-là. Il était venu parce qu'il croyait en l'action de ces associations. Il était un défenseur de longue date de l'armée et surtout du Royal Winnipeg Rifles. Il y est allé parce qu'il y croyait. Je le savais depuis un bon moment.

Je me souviens de l'examen de la défense nationale que le sénateur De Bané et moi avons effectué en 1993. J'avais découvert, en tant que député de la Chambre des communes, que les sénateurs disposaient de budgets de recherche qu'ils pouvaient utiliser pour mener des recherches sur toutes sortes de sujets. J'ai rencontré le sénateur Molgat à l'époque, et il a immédiatement accepté de nous aider à effectuer notre recherche en utilisant le budget de son bureau. C'est le genre d'homme qu'il était. Il saisissait toutes les occasions qu'il pouvait pour apporter de l'aide.

L'an dernier, quand le sénateur Molgat occupait le poste de Président, il invitait de temps à autre certains d'entre nous, dont les sénateurs Forrestall et Wiebe, pour discuter de la politique en matière de défense, de ce qui se passait et surtout de la réserve, qui nous intéressait particulièrement. Il a invité M. John Fraser à un dîner au cours duquel nous pourrions passer en revue son rapport sur la réserve à l'intention du ministre de la Défense nationale et discuter des conclusions que nous pouvions en tirer et de ce que nous pourrions faire pour aider. Il a organisé cette rencontre parce que cela lui tenait à coeur et non pas parce qu'il voulait sermoner, mais bien pour fournir une tribune où nous pourrions discuter d'une question importante.

Je tiens à me rappeler le sénateur Molgat aujourd'hui en raison des contributions qu'il a apportées tout au long de sa carrière, en particulier au monde militaire.

Je reviens à la réunion de l'association de défense. J'ai entendu le discours qu'a prononcé Tony Blair le matin, dans lequel il expliquait qu'on voulait que le Canada soit à la table. J'ai ensuite écouté les commentaires des soldats et des anciens aviateurs et officiers de marine. Ils ont vécu de durs moments; ils ont été en difficulté. Par exemple, ils ont expliqué qu'ils devaient partager des uniformes, car il n'y en avait pas suffisamment. Cela n'est pas nouveau. En 1993, en Bosnie — le sénateur Forrestall y était —, des soldats partageaient des gilets pare-éclats. Les choses n'ont pas changé depuis 1993. Nous demandons à des soldats d'aller en Éthiopie et de défendre la frontière avec l'Érythrée alors qu'ils sont déjà au bout du rouleau.

Il existe tout un contraste entre M. Blair, qui affirme le matin qu'on veut le Canada à la table et les exposés de l'après-midi, qui nous apprennent que nos forces armées sont en difficulté. De nombreux articles ont été publiés récemment sur ce sujet. Le Globe and Mail a publié en février un article de Sunil Ram, qui affirme que les réductions dans les forces aériennes démontrent que les forces canadiennes demeurent sous-financées au sein de l'OTAN. Seul le Luxembourg dépense moins. M. Ram souligne que nos forces armées manquent de personnel et de matériel, sont sous-payées et, pire que tout, sont mal dirigées.

Je ne suis pas d'accord avec sa dernière observation, à savoir que nos forces sont mal dirigées. J'ai beaucoup d'estime pour le général Maurice Baril. Le général Baril vous dira, comme il l'a fait sur les ondes de Radio-Canada l'autre soir, que lorsqu'il est entré en fonctions il a eu beaucoup à faire pour reconstruire à partir de ce dont il a hérité. Je lui reconnais tout le crédit, en tant que dirigeant, pour avoir entamé ce processus important.

Le reste des observations de M. Ram est en grande partie fondé. Nous aurons beaucoup à faire pour revoir notre politique de défense. Nous devons veiller à ce que les personnes qui ont aidé à façonner notre pays durant la Seconde Guerre mondiale et avant aient leur juste place dans notre société. Nos militaires doivent être bien rémunérés et bien équipés. Ils doivent avoir les ressources nécessaires pour bien faire leur travail.

C'est pourquoi nous devons avoir un comité de la défense au Sénat. Nous devons disposer d'une tribune. Il y a des sénateurs qui savent quelles questions poser. Tout ce qu'il nous faut, c'est un comité où poser ces questions.

Je demande aux honorables sénateurs de ne pas laisser la «perfection» être l'ennemie du «bien». Comme le disait le sénateur Carstairs, nous parlons de ce sujet depuis sept ans. Nous voulons atteindre la perfection en ce qui concerne la taille des comités, leur composition et leur nombre. Nous voulons que le système soit le meilleur possible, mais ne laissons pas la perfection être l'ennemie du bien. Nous avons la possibilité de créer un comité de la défense et un comité des droits de la personne. L'occasion nous en est donnée maintenant. Saisissons-la. Saisissons l'occasion et faisons le travail qui doit être fait, non seulement pour les forces armées mais pour les personnes qu'elles servent, nos concitoyens.

L'honorable David Tkachuk: Honorables sénateurs, je signale que le sénateur Carstairs, qui a dit que la question devait être réglée au Sénat et non pas en comité, a quitté la salle immédiatement après son discours. Je propose donc l'ajournement du débat.

Son Honneur le Président: J'ai sur ma liste un autre sénateur qui désire prendre la parole.

Le sénateur Tkachuk: Je propose l'ajournement du débat.

Des voix: Oh, oh!

Son Honneur le Président: La motion ne peut faire l'objet d'un débat. Le sénateur Tkachuk propose...

[Français]

L'honorable Fernand Robichaud (leader adjoint du gouvernement): Honorables sénateurs, ce ne serait que simple courtoisie de permettre aux sénateurs qui le désirent de s'exprimer sur ce sujet. Après quoi, nous pourrions traiter de la motion d'ajournement, laquelle serait tout à fait à l'ordre.

Pour répondre à l'affirmation du sénateur Tkachuk concernant le fait que le leader de gouvernement au Sénat se soit absenté, bien qu'il ne soit pas dans l'ordre de faire de telles remarques, je lui répondrai que le sénateur Carstairs a dû nous quitter pour assister à un comité du Cabinet.

[Traduction]

Le sénateur Tkachuk: Très bien.

Son Honneur le Président: Puis-je donner la parole au sénateur Wilson?

Le sénateur Tkachuk: Si d'autres sénateurs désirent prendre la parole, je retirerai ma motion.

(1540)

L'honorable Lois M. Wilson: Honorables sénateurs, mon intervention sera probablement plus courte qu'un débat sur une motion d'ajournement.

Je désire parler en faveur de la motion que le gouvernement a présentée et qui a notamment pour objet de créer deux nouveaux comités. J'aimerais parler plus particulièrement de la création du comité des droits de la personne. J'espère que ce comité aidera le Canada à honorer les engagements qu'il a pris au nom de notre pays dans le cadre de la convention internationale des Nations Unies à cet égard.

Premièrement, les législateurs ont une obligation spéciale à cet égard, car le Canada a également ratifié ces commissions et ces conventions de l'ONU. Cela veut dire que nous devons adopter les mesures législatives nécessaires pour faire respecter au Canada les droits qui y sont énoncés. Nous sommes en position de le faire.

Deuxièmement, les conventions sur les droits de la personne renferment des éléments fédéraux et provinciaux. Étant donné que les sénateurs viennent des diverses régions du Canada, nous sommes dans une excellente position pour examiner ces éléments. Souvent, quand nous allons à l'ONU, il n'y a pas d'entente entre les gouvernements fédéral et provinciaux. Les sénateurs peuvent faire quelque chose à ce sujet.

Les comités permanents officiels sont un instrument grâce auquel nous, les parlementaires, pouvons examiner les questions, recevoir des témoignages de la société civile et formuler des projets de loi. Le processus de rapport sur les conventions ne prévoit pas de comité pour le faire. Aucun comité existant n'a cela pour mission.

Honorables sénateurs, je me réjouis de cette proposition, et j'espère que le comité des droits de la personne comblera cette lacune. J'espère qu'il sera indépendant pour s'acquitter de cette tâche.

(Sur la motion du sénateur Tkachuk, le débat est ajourné.)

LE DISCOURS DU TRÔNE

MOTION D'ADOPTION DE L'ADRESSE EN RÉPONSE—SUITE DU DÉBAT

L'ordre du jour appelle:

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Cordy, appuyée par l'honorable sénateur Setlakwe, relative à l'Adresse à son Excellence la Gouverneure générale en réponse au discours qu'elle a prononcé lors de l'ouverture de la première session de la trente-septième législature.—(Conformément à l'ordre adopté le 1er mars 2001 — Il reste sept jours de séances.)

MOTION D'AMENDEMENT

L'honorable Noël A. Kinsella (leader adjoint de l'opposition): Honorables sénateurs, je propose, appuyé par l'honorable sénateur DeWare:

Que le texte suivant soit ajouté à l'Adresse:

Nous soumettons respectueusement à Votre Excellence que le discours du Trône aurait captivé les citoyens et citoyennes du Canada s'il avait contenu les mots suivants:

«Les Canadiens et les Canadiennes sont aujourd'hui les citoyens les plus remarquables de notre communauté mondiale. Notre citoyenneté commune trouve de multiples expressions et nous donne des occasions sans pareilles de nous battre pour la liberté et la dignité que mérite chacune des personnes avec qui nous partagerons notre planète Terre au cours du vingt et unième siècle.

Mon gouvernement reconnaît que le Canada est une terre bénie aux paysages et aux ressources naturelles et humaines incomparables. Notre sens de la liberté, de la paix et du civisme est profondément ancré dans notre histoire. Le Canada a toujours été une terre rêvée pour ceux et celles qui sont en quête d'une autre chance et qui ont soif de justice et de sécurité.

Malgré ces points forts, encore valables aujourd'hui, nombre d'entre nous se trouvent exclus du rêve canadien. Le monde évolue très rapidement autour de nous, tandis que nous faisons face à un avenir incertain, chargé de défis, sans pouvoir nous appuyer sur aucun plan. De plus en plus, nous avons l'impression de nous être égarés.

Nous nous devons de retrouver une aspiration commune pour le pays, de retrouver l'impression que nous travaillons ensemble dans l'intérêt de toute la collectivité; nous devons aussi encourager le genre d'actions volontaristes qui ont défini le Canada et qui, dans le passé, nous ont permis de progresser dans des temps difficiles.

Le plan de mon gouvernement est un plan pour renforcer les collectivités, bâtir une économie dynamique, et garantir l'intégrité du gouvernement.

Renforcer les collectivités canadiennes

Les Canadiens croient que notre tissu collectif et institutionnel s'est considérablement affaibli au cours des dernières années.

La foi que les Canadiens avaient dans leur système de soins de santé a été ébranlée. Les compressions dans ce domaine ont provoqué la fermeture de milliers de lits d'hôpital, l'encombrement des salles d'urgence et la création de listes d'attente qui sont intolérables dans le cas de services et de traitement critiques.

À cause de la réduction du financement de l'éducation, les frais de scolarité des collèges et des universités ont augmenté et les étudiants doivent assumer des dettes inadmissibles. L'accès à l'enseignement supérieur est maintenant une chose du passé, même si l'économie du savoir privilégie plus que jamais les qualifications de niveau supérieur.

Alors que les Canadiens se sentent de moins en moins en sécurité dans leurs collectivités, la GRC s'est fait couper les vivres. Pendant ce temps, le programme d'enregistrement des armes à feu coûte des centaines de millions de dollars aux Canadiens et les propriétaires respectueux de la loi sont traités en criminels.

Les Canadiens veulent retrouver leur valeur commune dans les programmes sociaux du Canada: l'autonomie et la responsabilité personnelle, d'un côté, et la compassion, l'investissement dans une population saine et instruite, des collectivités sûres et une responsabilité financière, de l'autre.

Les Canadiens veulent que leur gouvernement national fasse preuve de leadership en matière de protection de l'environnement.

Le plan de mon gouvernement pour assurer l'avenir du Canada couvre ces enjeux et vise à bâtir un pays plus fort grâce à des collectivités plus fortes.

Mon gouvernement:

- ramènera immédiatement à leurs niveaux de 1993-1994 les versements au titre du Transfert canadien en matière de santé et de programmes sociaux. Ce faisant, nous retrouverons exactement le niveau des transferts à la santé et à l'éducation postsecondaire d'avant les coupures.

- ajoutera, par voie de législation, un sixième principe à l'assurance-maladie, celui d'un financement stable garanti et prévisible à long terme. Désormais, jamais plus aucun gouvernement ne sera en mesure de retirer des milliards de dollars aux soins de santé.

- augmentera le crédit d'impôt pour les fournisseurs de soins, en consultation avec les groupes représentant les personnes âgées et les personnes handicapées.

- changera les conditions de remboursement du Programme canadien de prêts aux étudiants pour que le remboursement corresponde à un pourcentage du revenu net d'impôt, le premier paiement n'étant exigé que 12 mois après l'obtention du diplôme.

- instaurera un crédit d'impôt pour les étudiants du niveau postsecondaire qui remboursent des emprunts en vertu du Programme canadien de prêts aux étudiants. Sous réserve que l'intéressé travaille au Canada, ce crédit annuel équivaudra à 10 p. 100 au maximum du montant principal et sera consenti pendant les dix premières années suivant l'obtention du diplôme.

- défiscalisera les bourses accordées aux étudiants des collèges et des universités.

- assurera à la GRC un financement stable et lui demandera, en priorité, de lutter contre le crime organisé, surtout contre le blanchiment d'argent, contre le trafic d'êtres humains et la contrebande, et contre la fraude et le crime informatique.

- remplacera la Loi sur les jeunes contrevenants par une nouvelle mesure qui reflétera les principes de protection du public, de dissuasion et de dénonciation, de même que les principes de réinsertion et de recours accru au concept de justice réparatrice.

- abrogera l'actuel système d'enregistrement des armes d'épaule et confirmera et renforcera les dispositions régissant l'utilisation dangereuse et criminelle des armes à feu.

- fera de la santé de nos enfants une priorité explicite en légiférant dans le domaine de l'environnement par le biais d'une loi sur la salubrité des eaux et d'une loi sur la salubrité de l'air.

Bâtir une économie plus forte

Aujourd'hui, le Canadien moyen voit partir 47 p. 100 de son revenu dans des taxes et des impôts qui, parce qu'ils sont très élevés, grugent son niveau de vie. À cause de cette lourde fiscalité, nos entreprises sont moins concurrentielles. Qui plus est, nos jeunes professionnels et entrepreneurs partent à l'étranger dans l'espoir d'y trouver de meilleurs cieux.

Les Canadiens sont conscients que l'équilibre budgétaire et la croissance économique d'aujourd'hui n'ont été réalisés que parce qu'ils se sont sacrifiés et qu'ils ont travaillé fort. Ils veulent que la prospérité du Canada profite à tous, mais ils exigent un fardeau fiscal équitable et moins lourd.

Les Canadiens savent par ailleurs que, pour réussir dans le monde d'aujourd'hui, nous devons être compétitifs par rapport à nos partenaires commerciaux et que la nouvelle économie exige qu'on récompense l'investissement, l'innovation et la créativité.

Les Canadiens veulent que le fardeau de la dette nationale — qui est maintenant de 560 milliards de dollars — ne vienne pas reposer sur les épaules de leurs enfants.

Les Canadiens réclament des investissements stratégiques qui soient fonction de leurs priorités.

Mon gouvernement:

- réduira les impôts de tous les Canadiens en faisant passer l'exemption personnelle de base de 7 231 $ à 12 000 $ en 2005. Cette réduction permettrait de défiscaliser 2,3 millions de Canadiens à faible revenu — c'est-à-dire ceux qui sont le moins en mesure de payer des impôts. Il accordera aussi un allégement fiscal général qui pourrait atteindre 1 100 $ (impôts fédéral et provincial) dans le cas des contribuables moyens.

- portera à 12 000 $ d'ici 2005 l'exemption de marié ou l'équivalent. Quand cette mesure aura été mise en oeuvre, une famille à salaire unique ne paiera plus d'impôt sur le revenu tant qu'elle ne franchira pas la barre des 24 000 $ par an.

- adoptera une exemption d'impôt pour enfants de 1 176 $ pour aider les familles canadiennes. Cela donnerait lieu à une réduction fiscale de 200 $ par enfant.

- éliminera immédiatement l'impôt sur les gains en capital, ce qui permettrait de débloquer du capital-risque, de récompenser l'initiative personnelle et d'enrayer l'exode des cerveaux en encourageant les entrepreneurs à bâtir leur avenir au Canada.

- supprimera la taxe d'accise sur l'essence, sur les carburants diesel et sur le mazout domestique afin d'alléger le fardeau associé à l'augmentation des prix de l'énergie.

- éliminera, sur 25 ans, la dette nationale — qui hypothèque l'avenir de nos enfants — et remboursera 25 milliards de dollars de cette dette au cours des cinq prochaines années.

- adoptera un «budget des formalités administratives» annuel où l'on estimerait le coût total associé à chaque règlement envisagé par le fédéral, y compris les coûts liés à l'application de la réglementation et les coûts de conformité pour les citoyens et les entreprises.

- s'affairera à élargir ses relations commerciales avec d'autres pays, tout en veillant à promouvoir les droits de la personne et le respect de l'environnement, et à protéger notre culture.

- instaurera un Fonds fédéral de stabilisation agricole (FFSA), qui sera un programme national exhaustif de sécurité du revenu comportant un fonds régulièrement alimenté de secours en cas de catastrophe et un volet de stabilisation des revenus.

- travaillera avec la communauté internationale à la protection des pêches transfrontalières contre les pratiques de prélèvement non durables sur nos côtes Est et Ouest.

Gouverner avec intégrité

Notre vision s'entend d'une démocratie forte.

La réussite ou l'échec des gouvernements démocratiques dépend de la mesure dans laquelle la population est prête à accepter ou à appuyer les décisions qu'ils prennent en son nom. Pour prospérer, il faut être riche et, pour gouverner, il faut avoir la confiance de la population. Or, Ottawa n'a plus cette confiance.

L'intolérance face à toute dissidence légitime a considérablement affaibli le rôle des députés. Nous ne parviendrons pas à attirer les éléments les plus valables de la société pour leur confier des charges publiques si ces gens savent qu'ils n'auront plus droit à la parole et qu'ils perdront toute influence après leur élection.

Mon gouvernement restaurerait l'intégrité du gouvernement national en exigeant que celui-ci ait, du point de vue démocratique, davantage de comptes à rendre au Parlement.

Mon gouvernement:

- renforcera le rôle des députés en permettant la tenue d'un plus grand nombre de votes libres à la Chambre des communes. Les députés doivent pouvoir représenter le point de vue de ceux qui les ont élus.

- donnera au Parlement le pouvoir d'examiner les pratiques de dépenses des ministères fédéraux, quand bon lui semblera.

- déposera une loi complète sur les «dénonciateurs».

- augmentera les dépenses annuelles de la défense au cours des cinq prochaines années afin de lui permettre de maintenir ses capacités à un niveau adéquat, pour améliorer la qualité de vie du personnel des Forces armées et pour financer l'achat de nouveaux équipements.

Un plan prudent et équilibré

Le plan que mon gouvernement propose pour le Canada est prudent et équilibré; il vise à redonner une inspiration et une orientation à notre pays pour que nous réussissions dans l'avenir, dans un monde en pleine évolution.

Nos chiffres parlent d'eux-mêmes. Dans le plan quinquennal de notre gouvernement:

- nous insistons — avec plus de 55 milliards de dollars — sur la réduction des taxes et des impôts afin de laisser plus d'argent dans les poches des Canadiens et des Canadiennes. Cet argent est le leur et nous voulons qu'ils puissent en disposer pour l'économiser, le dépenser ou l'investir à loisir.

- notre régime de remboursement obligatoire de la dette permettra d'éliminer l'hypothèque que nous transmettrions autrement à nos enfants dans 25 ans. Le plan de mon gouvernement réduira la dette fédérale de 25 milliards de dollars en cinq ans. Suivant ce plan, nous réaffecterons 1,3 p. 100 du budget annuel de programme à la réduction de la dette.

- nous avons dégagé de nouveaux investissements ciblés dans nos programmes pour un total de 7,4 milliards de dollars.

Membres de la Chambre des communes,

Vous serez appelés à voter les crédits nécessaires à la prestation des services et des dépenses autorisées par le Parlement.

Honorables membres du Sénat et de la Chambre des communes,

Puisse la Divine Providence vous guider dans vos délibérations.»

Honorables sénateurs, voilà le discours qui aurait dû être prononcé à l'ouverture de cette trente-septième législature, et c'est l'amendement que je propose, avec l'appui du sénateur DeWare.

Des voix: Bravo!

L'honorable Shirley Maheu (Son Honneur le Président suppléant): Honorable sénateur Kinsella, je vous prierais de demander à un autre sénateur d'appuyer votre motion. Le sénateur DeWare n'est pas à la Chambre.

Le sénateur Kinsella: Sénateur Rossiter.

Son Honneur le Président suppléant: L'honorable sénateur Kinsella, appuyé par l'honorable sénateur Rossiter, propose... cela suffit-il?

Le sénateur Graham: Suffit!

Le sénateur Kinsella: Suffit!

Son Honneur le Président suppléant: Plaît-il aux sénateurs d'adopter la motion?

Des voix: Non.

Son Honneur le Président suppléant: Le Sénat est-il prêt à se prononcer?

L'honorable B. Alasdair Graham: Honorables sénateurs, je suis impatient d'entendre les observations que présentera le sénateur Di Nino dans le cadre du présent débat.

Honorables sénateurs, je tiens tout d'abord à féliciter les motionnaires de l'Adresse en réponse au discours du Trône. Les sénateurs Cordy et Setlakwe ont tous deux abordé des questions qui ont des répercussions régionales et nationales.

Je félicite aussi les autres sénateurs qui ont participé à cette partie très importante de notre programme parlementaire.

Son Honneur le Président a un dossier parlementaire exceptionnel. Sa grande expérience, son jugement sûr et son sens de la justice serviront les intérêts supérieurs de tous les sénateurs.

Je suis ravi de pouvoir saluer publiquement la nomination des leader et leader adjoint du gouvernement, les sénateurs Carstairs et Robichaud. Ces amis de longue date ont une telle expérience du Parlement qu'ils sauront fort bien relever les défis et assumer les responsabilités que l'avenir leur réserve.

Le sénateur Mercier saura s'acquitter avec son charme habituel des lourdes responsabilités qui sont celles du whip en chef du gouvernement.

Je suis on ne peut plus ravi de revoir l'équipe des chef, chef adjoint et whip de l'opposition, un trio que j'ai fort bien connu à une autre époque que je qualifierai de fort agréable au Sénat. Même si elle n'est pas destinée à remporter la coupe Stanley, la première ligne composée du sénateur Lynch-Staunton, de son adjoint, le sénateur Kinsella, et du whip compétent qu'est le sénateur DeWare est vraiment formidable et renforce grandement l'opposition au Sénat.

Je tiens également à souhaiter la plus cordiale des bienvenues aux trois nouveaux sénateurs arrivés aujourd'hui, soit les sénateurs Morin, Hubley et Tunney. La gamme variée de compétences et la somme d'expérience que vous apportez au Sénat dans vos domaines respectifs sera indéniablement un atout pour le Sénat et l'aidera à relever les défis et à saisir les possibilités de sa tâche législative.

Honorables sénateurs, dans le dernier discours du Trône, le gouvernement a saisi les éléments essentiels de ce que l'on pourrait appeler «la façon de faire canadienne». Nous avons entendu qu'il faut viser le succès simultanément sur le plan économique et sur le plan social et que nous ne pouvons pas innover et mettre de l'avant de nouvelles idées sans des citoyens en santé et en sécurité. En outre, nous ne devons pas faire avancer nos intérêts dans le monde sans renforcer notre culture et nos valeurs distinctes ici, au Canada. On nous a dit que le gouvernement, qui a déjà jeté de solides fondations pour assurer notre succès dans la nouvelle économie et qui a mis en place des bases économiques parmi les meilleures au monde, a pris très au sérieux ses responsabilités dans l'approfondissement et le renforcement du tissu social de notre grande démocratie.

(1600)

L'idée que nous devons faire en sorte que chaque province, chaque région et chaque personne puissent contribuer à l'édification de notre pays et que le gouvernement doit faire en sorte que toutes leurs voix soient entendues a des résonances toutes particulières chez moi. Le gouvernement a adopté une approche pragmatique et logique pour élaborer et faire avancer de nombreuses politiques fondées sur les principes fondateurs de notre société. Dans cette approche, il reconnaît clairement que l'épanouissement de notre riche culture civile est un rempart contre les forces négatives de la mondialisation qui, si elles ne sont pas contenues, menacent les valeurs et l'identité chères au coeur des Canadiens.

Pour diverses raisons, l'une des principales étant l'impact de la série Le Canada: Une histoire populaire, présentée à Radio-Canada, cette identité intéresse de plus en plus les Canadiens depuis quelque temps. Le nombre de téléspectateurs fidèles à cette émission a dépassé toutes les attentes. Lorsqu'on réfléchit au discours du Trône de 2001 en cette enceinte, il serait bon de songer aux racines de l'adresse au souverain qui s'inscrit dans une magnifique histoire de plus de quatre siècles, l'histoire du Canada.

Honorables sénateurs, je vous invite à reculer dans le temps et à songer à une époque bien antérieure à celle du gouvernement responsable et de l'ère épique de la Confédération; je vous demande de penser aux premiers aventuriers qui ont décidé d'aller explorer un nouveau continent et de décrire son potentiel inimaginable et ses espaces infinis. Songez à la rencontre des esprits et des cultures et au patrimoine créé sur une frontière sans fin. Songez à l'origine des installations qui grandiraient avec chaque vague de nouveaux immigrants au fil des siècles. Avancez dans le temps en traversant l'histoire et vous verrez l'esprit du Canada prendre forme.

[Français]

Prenons comme exemple l'extraordinaire alliance de Robert Baldwin et de Louis-Hippolyte Lafontaine qui a donné une alliance historique dans l'Assemblée du Canada uni en 1841.

[Traduction]

Ces deux personnes particulièrement douées venues respectivement du Canada anglais et du Canada français, avec le talentueux Joseph Howe de ma province, la Nouvelle-Écosse, ont partagé une passion pour le gouvernement parlementaire et la liberté. En 1848, ces hommes d'État, pères du gouvernement responsable, ont veillé à ce que le transfert des pouvoirs se fasse paisiblement entre les élites coloniales et le peuple du Canada, créant ainsi l'une des plus anciennes démocraties du monde.

Durant cette lutte, Lafontaine a décrit sa vision du Canada. Je cite l'un de ses premiers écrits où il disait:

Les autorités ne pourront nous empêcher de réussir (à instaurer le gouvernement responsable) qu'en détruisant l'égalité sociale qui caractérise une grande partie des populations du Haut-Canada et du Bas-Canada. Cette égalité sociale doit nécessairement nous apporter la liberté politique [...] il ne peut exister, au Canada, de classe privilégiée supérieure à la masse de ses habitants.

La foi dans l'égalité sociale et l'intérêt public, la confiance dans les gens et les principes de la modération, de la tolérance et de l'inclusion faisaient tous partie de la constellation sous laquelle notre pays a vu le jour. Il faut nous souvenir. Honorables sénateurs, nous devons examiner les liens entre notre histoire et notre riche société civile. Comment faire pour continuer d'affirmer notre identité canadienne et maintenir vivant l'esprit du Canada dans le cadre de la mondialisation?

L'économiste canadien Thomas J. Courchene a récemment rédigé un document provisoire en réponse à ces questions capitales. Dans un énoncé de mission présenté en une seule phrase et dont la teneur et le ton ont peut-être agréablement surpris certains proches observateurs, il a expliqué que le défi consiste

«[...] à concevoir une infrastructure soutenable, socialement englobante et internationalement concurrentielle qui garantit l'égalité d'accès à tous les Canadiens, afin qu'ils puissent acquérir des compétences et développer le capital humain au Canada, les améliorer et les utiliser pour devenir ainsi des citoyens à part entière dans cette société canadienne et mondiale à l'ère de l'information.»

Son message concernant l'inclusion sociale et l'égalité d'accès s'appuie sur les idéaux fondamentaux de la culture canadienne. Ces idéaux ont été exprimés à une autre période de grand changement dans notre pays. Lorsque Robert Baldwin a mis ses concitoyens en garde contre les conséquences qui pourraient s'ensuivre si l'on n'arrivait pas à obtenir des institutions parlementaires et la reconnaissance des «premiers principes» de la démocratie et de la justice, il parlait des idéaux qui ont fait de ce pays bien plus que la somme de ses composantes.

Ces premiers principes traduisent l'identité canadienne, honorables sénateurs. Ces premiers principes n'ont pas changé et ne changeront pas. Le rôle du gouvernement, que ce soit en 1848 ou en 2001, est fondamentalement le même. Il consiste à nourrir, à fortifier et à renouveler un pacte fondé sur la liberté, l'égalité et l'intérêt public. En 1848, les Canadiens sont devenus autonomes politiquement, et les citoyens ont repris les pouvoirs de l'ancien Pacte de famille. En 2001, le défi permanent consiste à bâtir une démocratie axée sur le savoir et fondée sur le principe selon lequel l'accès de toutes les collectivités et régions, qu'elles soient rurales ou éloignées, et l'accès de tous les Canadiens au pouvoir de la connaissance est un droit inné de tous.

Honorables sénateurs, je répète, de tous les Canadiens. Voilà pourquoi le discours du Trône insiste tant sur l'idée d'inclusion sociale dans la nouvelle économie. Le gouvernement a promis d'accroître les fonds du Programme de la prestation nationale pour enfants au cours des quatre prochaines années, expliquant qu'«il s'agit sans contredit du plus important programme social mis en place au Canada depuis ... les années 60». Le gouvernement a étendu la portée du Programme d'aide préscolaire aux autochtones, ainsi que des programmes à l'intention des apprenants adultes et des personnes handicapées.

Le gouvernement reconnaît qu'un pays où il y a des gens qui ont l'occasion d'acquérir des connaissances tandis que d'autres n'ont pas cette chance, où l'accès à l'information est offert à certains mais pas à d'autres, n'est plus un véritable pays. En fait, l'avenir de notre grand pays sera très étroitement lié à la création d'une société juste axée sur l'équité en matière d'accès à l'information — une véritable démocratie, une démocratie axée sur le savoir, où tous les Canadiens auront la liberté de se brancher à l'inforoute et de naviguer en première classe.

Honorables sénateurs, les grandes aventures dans lesquelles s'est lancé le gouvernement ont contribué et contribueront encore à façonner l'une des démocraties les plus sages et les plus érudites du monde entier. Grâce à Rescol canadien, par exemple, toutes nos écoles et nos bibliothèques sont branchées à Internet. Nous sommes sur le point de créer 10 000 portails d'accès communautaire pour permettre aux enfants d'âge préscolaire de naviguer sur Internet.

Il nous faut travailler avec acharnement pour relever le défi et préserver le Canada tout en maintenant le même niveau d'énergie que les Canadiens. En tant qu'habitant du Cap-Breton, je suis fier de dire qu'un vent de changement souffle sur notre région, où la transition à partir d'une économie fondée sur l'acier et le charbon a représenté pour les familles et les collectivités un défi grandiose. Les habitants de cette région très spéciale ont su relever le défi en faisant l'acquisition du pouvoir que procure le savoir. Sur l'île du Cap-Breton seulement, le nombre d'entreprises dans le secteur de la technologie de l'information a augmenté de plus de 50 p. 100 ces dernières années.

(1610)

Dans toute la province de la Nouvelle-Écosse, nos talentueux nouveaux «Netoyens» du XXIe siècle sont comme les constructeurs de bateaux et les marins du XIXe siècle en ce sens qu'ils peuvent vivre et prospérer n'importe où.

Honorables sénateurs, aujourd'hui, au moment où les Néo-Écossais entament les premières années du siècle nouveau, les ressources en gaz naturel de l'île de Sable ont fourni un espoir et une prospérité économique renouvelés dans la région. Le potentiel des champs de gaz à l'est et au nord de la province serait encore plus grand que celui de l'île de Sable. Par exemple, on dit que le champ laurentien au large de la côte nord du Cap-Breton, entre la Nouvelle-Écosse et Terre-Neuve, contiendrait entre 8 et 9 billions de pieds cubes de gaz naturel récupérable, ce qui est presque trois fois plus que les réserves de l'île de Sable. En outre, il y a entre 600 et 700 millions de barils de pétrole récupérables dans le bassin laurentien. Oui, la région peut espérer une nouvelle vie après l'ère du charbon. Tout indique que la Nouvelle-Écosse et d'autre provinces atlantiques vont devenir la nouvelle réserve nationale de pétrole et générer des dizaines de milliards de dollars en recettes au cours des prochaines années.

Honorables sénateurs, comme les temps changent.

Son Honneur le Président: Avant que vous ne poursuiviez, je dois vous signaler que votre temps de parole est écoulé. Demandez-vous la permission de continuer?

La permission est-elle accordée?

Des voix: D'accord.

Le sénateur Forrestall: Le fait de ne pas donner la permission entraînerait de graves conséquences.

Le sénateur Graham: J'espère que l'on a noté ce que vient de dire le sénateur Forrestall, parce qu'il m'a demandé de prendre la défense des droits des Néo-Écossais. Il va constater que c'est précisément ce que je m'efforce de faire. Cela fait partie du travail d'un sénateur que de représenter sa région.

Honorables sénateurs, je vais illustrer mon point de vue en racontant une histoire qui va rassurer le sénateur Forrestall quant aux points que je veux faire valoir et aussi quant à mes intentions.

Au milieu ou à la fin des années 70, j'ai effectué une tournée en Alberta à titre de président du Parti libéral du Canada. J'avais été invité à prendre la parole au cours d'un déjeuner au centre-ville de Calgary, qui n'est certainement pas un bastion libéral. On me l'a rappelé lors de ma participation à une tribune téléphonique radiodiffusée tôt le matin. Le premier interlocuteur m'a salué par ces mots: «C'est donc vous le président du Parti libéral du Canada.» «Oui, monsieur», hasardai-je timidement. «Et vous êtes en Alberta pour une réunion avec tous les libéraux», poursuivit-il. «Oui, monsieur», lui répondis-je poliment, attendant qu'il m'assène le dernier coup. Il me dit alors: «Et où tenez-vous vos réunions, dans la cabine téléphonique? Je pouvais percevoir son large sourire à l'autre bout du fil. «Oui, monsieur», admettai-je encore une fois. «Mais n'oubliez pas qu'il y a 168 973 cabines téléphoniques en Alberta — et toutes valent la peine d'un appel.»

En passant, c'était exactement le nombre de voix qu'avait remportées le Parti libéral en Alberta aux élections fédérales précédentes.

«Touché, dit-il en riant, et bienvenue en Alberta.»

Honorables sénateurs, je reviens à l'histoire du déjeuner qui n'était pas un déjeuner politique. En tant que président d'un important parti politique, on m'avait invité pour donner mon avis, si l'on peut dire, sur l'état de la nation. On me présenta comme un habitant des Maritimes, plus précisément un Néo-Écossais. À la fin de mes remarques, le président fit savoir que j'accepterais volontiers de répondre à quelques questions. La voix que j'entendis alors venait de l'autre bout de la salle.

«Nous en avons assez de nourrir les Maritimes», gronda ce monsieur, au grand embarras de plusieurs personnes dans l'audience. Avant de faire des commentaires, je lui demandai s'il m'autorisait à lui poser une question. «Allez-y», me dit-il. «Êtes-vous né en Alberta?», lui demandai-je poliment. «Quel rapport avec vos commentaires?», me lança-t-il. «Répondez», cria quelqu'un. «En fait, non» répondit-il. «Depuis combien de temps vivez-vous ici?» lui demandai-je. Un autre silence. «Répondez», dit quelqu'un d'autre. «Cela fait 12 merveilleuses années que je vis dans cette belle province», dit-il d'un ton fanfaron. «Et de quelle région des Maritimes êtes-vous originaire,» ai-je demandé. Après un nouveau silence, la réponse est enfin venue: «Du Nouveau-Brunswick.» Ce sur quoi j'ai dit: «Je suppose que vous êtes né au Nouveau-Brunswick et que vous y avez été élevé et que vous avez reçu votre formation à l'école de droit de Dalhousie, en Nouvelle-Écosse.» «Bravo!» fut la réponse venant d'un autre coin de la salle.

J'ai convenu que l'Alberta est une des plus belles régions du pays et que les citoyens de l'endroit comptent parmi les plus hospitaliers au monde. Je lui ai dit que je ne voulais pas l'insulter, mais que je trouvais regrettable qu'après seulement 12 brèves années il ait oublié ses racines. Je ne me suis pas permis de parler de la Grande Crise et du fait que pendant cette période les gens des Maritimes ont travaillé très fort en vue d'expédier des aliments et des vêtements dans l'ouest du Canada.

Honorables sénateurs, ce sont là des leçons qui ne devraient jamais se perdre. Il est important pour l'avenir de notre pays que chacune des générations comprenne et apprécie l'aide apportée et les nombreux sacrifices consentis hier et aujourd'hui par les gens d'une région du pays pour venir en aide à ceux d'autres régions du Canada, en période faste comme en période difficile.

C'est là la façon dont ce grand pays a été construit. C'est là la façon dont ce grand pays doit continuer de fonctionner.

Honorables sénateurs, ces histoires de «gagnant-perdant» et d'égoïste débridé n'ont rien à voir avec le Canada. L'histoire du Canada en est une de tolérance, de compassion et de vision d'un monde meilleur. Nous devons être unis parce que nous avons des promesses à respecter.

J'ai réfléchi en profondeur aux promesses que nous avons faites à toutes nos régions, à toute la population et à la collectivité mondiale. J'ai pensé à ces promesses il y a plusieurs années à l'occasion d'un voyage à Québec, peu de temps après le référendum de 1995. Durant mon séjour, je me suis demandé comment je pourrais arriver à convaincre un plus grand nombre de mes concitoyens canadiens à visiter cette ville magnifique qui symbolise tous les événements et toute la passion de notre passé.

Honorables sénateurs, comme je l'ai mentionné à une autre occasion en cette Chambre, je me suis promené dans la neige le long des plaines d'Abraham. Une petite plaque a attiré mon regard. J'ai enlevé la neige afin de mieux être en mesure de lire ce qui était écrit. Surpris d'y voir les mots «Ô Canada», j'ai poursuivi ma lecture.

[Français]

Notre hymne national, écrit sur des vers de sir Adolphe Routhier et sur une musique de Calixa Lavallée, a été chanté pour la première fois au Congrès catholique canadien-français, le 24 juin 1880, jour de la fête de Saint-Jean-Baptiste.

[Traduction]

Combien de nos concitoyens savent et comprennent que notre hymne national, rédigé et composé par un Canadien français, a été interprété la première fois en français à Québec à l'occasion de la fête de la Saint-Jean-Baptiste? Je me suis demandé bien des fois ce qu'il faudrait pour que ce grand événement survenu il y a 121 ans se répète. Je me suis demandé comment nous pourrions renouveler et alimenter le genre de confiance, cette foi et ce respect simple entre chacune des régions du pays, qui ont ravivé le désir de nos ancêtres il y a longtemps d'unir leurs voix dans un hommage émouvant à la terre de nos aïeux, à un pays qui appartient à chacun d'entre nous.

Honorables sénateurs, le Canada est une démocratie issue du courage des premiers explorateurs et de la sagesse de nos Premières nations, une démocratie constituée de régions qui se font entendre bruyamment et d'une multitude de voix de partout dans le monde qui chantent, parlent, discutent et s'entendent au sein d'un grand État-nation, une démocratie au sein de laquelle le règlement des différends a été et a toujours été la règle et non l'exception. J'aime voir les choses de cette façon. Tout au long de notre histoire, on a établi des frontières qui nous divisent en provinces et en territoires, mais, en tant que Canadien, je veux me sentir chez moi dans toutes les régions du pays.

(1620)

En réfléchissant aux racines et aux origines des idéaux qui sous-tendent le discours du Trône — et la riche culture civique qui nous unit — nous voyons que nous devons avoir une meilleure compréhension de l'aventure fascinante qu'est notre pays. Nous devons comprendre comment ce pays a été bâti. Nous devons comprendre les rêves des premiers explorateurs. Nous devons nous souvenir des sacrifices, de la persistance, de la détermination et de la force des générations de Canadiens qui ont tracé les frontières d'une collectivité spéciale sur un vaste territoire. Oui, tous ceux qui ont tracé nos limites géographiques, que leur motivation ait été d'ordre politique, spirituel ou régional, étaient habités de l'esprit de découverte qui a caractérisé, qui caractérise et qui caractérisera toujours le Canada.

Nous devons nous souvenir des vagues d'immigration consécutives qui ont fait du Canada un monde dans un pays, un endroit où l'on venait, laissant derrière soi les vieux mondes de la realpolitik et de l'égoïsme partagé. Oui, nous devons nous souvenir de tous ces étrangers aux portes de la liberté, tous ceux qui ont vu de loin la lumière d'un endroit meilleur, tous ceux qui ont voyagé de longs jours et de longues nuits afin de bâtir une vie meilleure pour eux-mêmes, pour leur famille et pour leurs descendants.

Oui, honorables sénateurs, nous devons nous souvenir de tout cela. Chacun de nous doit se sentir chez lui partout au Canada parce que tout ce beau pays nous appartient à tous. Les forêts et les sommets majestueux de nos montagnes Rocheuses nous appartiennent à tous. Les côtes historiques de la Colombie-Britannique et de Terre-Neuve et la riche culture du Cap-Breton nous appartiennent à tous. Nos milliers de lacs miroitants et la beauté de nos érables qui murmurent nous appartiennent à tous. L'énorme ciel bleu au-dessus des Prairies et les champs de blé dorés qui se perdent à l'horizon nous appartiennent à tous. Nos plages et nos merveilleuses falaises de l'Atlantique et les érablières du Québec nous appartiennent à tous. La nuit qui tombe lentement sur les rues du Vieux-Montréal et la magnifique diversité de Toronto et de Vancouver nous appartiennent à tous. Les trésors que sont le Nunavut, le Yukon et les Territoires du Nord-Ouest, toutes nos régions arctiques, le caractère majestueux de nos grandes voies navigables et de nos parcs nationaux, tout cela nous appartient à tous. Nous devons tous prendre le temps, comme on encourage tous les Canadiens à le faire dans le discours du Trône, de découvrir ces trésors, de les redécouvrir et de les faire nôtres.

Il semble que, de temps en temps, notre fédération se soulève et vienne bien près d'éclater sous le coup de tensions intolérables, de craintes déraisonnables, de désaccords diaboliques et de mythes malicieux. Nos régions progressent ou périclitent avec les années, mais nous finissons toujours par nous reprendre et par voir que nous continuons de grandir. Oui, malgré tous les obstacles, toutes les difficultés et les vicissitudes, nos citoyens talentueux et courageux ont toujours su faire preuve de détermination et de volonté pour garder intact notre pays.

Aujourd'hui, en l'an 2001, à l'aube de ce nouveau siècle, nous réfléchissons ensemble aux frontières de notre citoyenneté et elles nous apparaissent toujours bien nettes. Les frontières de notre citoyenneté, nos lignes de démarcation, nos limites, sont les étendues infinies de notre géographie spirituelle et les valeurs qui façonnent notre unité. Elles expriment la puissance d'une grande nation conçue dans l'aventure de la création d'un monde meilleur. Elles évoquent un voyage sans fin sur le chemin de la liberté, la magie d'être Canadien. Pour chacun d'entre nous, la magie est la même.

L'honorable J. Michael Forrestall: Honorables sénateurs, je suis toujours ému lorsque le sénateur Graham parle du discours du Trône. Si je suis encore ici dans quatre ou cinq ans, peut-être que je l'entendrai parler du discours lui-même.

Honorables sénateurs, je tiens à transmettre mes plus sincères félicitations à l'auteure de la motion et à celui qui l'a appuyée, surtout à la première parce que nous habitons dans la même ville.

Je souhaite la bienvenue à nos trois nouveaux sénateurs. Comme il a été souligné, ils enrichiront nos travaux et nos activités. Je sais qu'ils seront très actifs.

Je tiens d'abord à dire que le discours du Trône m'a amèrement déçu. J'ai trouvé extrêmement offensant que seulement deux phrases aient été consacrées aux Forces canadiennes. Nous voyons sortir de la Chambre des cadets de l'air qui ont assisté au débat. Je suis heureux qu'ils aient entendu les propos du sénateur Graham, qu'ils aient écouté ce qu'il avait à dire, et non les paroles décevantes de mon gouvernement.

Je citerai deux phrases dans le discours du Trône:

Le gouvernement poursuivra ses efforts de maintien de la paix, qui font la fierté des Canadiens. Dans son budget de 2000, le gouvernement a alloué plus d'argent aux Forces canadiennes afin de les aider à être équipées et prêtes à répondre rapidement aux demandes d'aide provenant du Canada et de l'étranger.

J'ai eu quelques semaines pour réfléchir à ces deux observations et à l'état de nos forces armées en général. Rappelons-nous les propos de William Pitt concernant les défaites subies par la Grande-Bretagne au cours de la guerre de sept ans avant 1757 quand il a résumé le passé en disant: «Ce sont les principes de notre gouvernement qui se sont pervertis, pas ceux de nos concitoyens.» Le gouvernement actuel, que ce soit de façon intentionnelle ou par simple négligence, est l'artisan du démantèlement des Forces armées canadiennes.

C'est ce même gouvernement qui a adressé des avis d'expulsion à des familles de militaires un vendredi soir afin qu'elles n'aient personne à qui s'adresser pour se plaindre. C'est ce même gouvernement qui permet que nos gardiens de la paix reviennent de mission atteints de quelque maladie non identifiée et qui ne fait rien pour leur venir en aide. C'est ce même gouvernement qui, au retour de nos gardiens de la paix, nos jeunes soldats de la réserve notamment, ne leur fournit aucun service de counselling, ce qui est pourtant nécessaire. Nombre de sénateurs m'ont déjà entendu soulever pareilles préoccupations.

C'est ce même gouvernement qui abandonne nos soldats sur des pistes d'atterrissage de Macédoine après une mission de maintien de la paix. Le gouvernement accorde une augmentation de salaire aux militaires, puis il leur annonce une hausse de leur loyer et du coût de leurs rations. C'est ce même gouvernement qui les envoie en mission vêtus de vêtements d'occasion ou d'uniformes élimés. Comme notre collègue le sénateur Rompkey l'a dit aujourd'hui, c'est pourquoi nous avons besoin d'un comité sénatorial de la défense. C'est ce gouvernement qui permet que nos militaires s'échangent des gilets de protection parce qu'il n'y en a pas pour tout le monde. Compte tenu de ma taille, la seule partie de mon corps qui soit protégée par un gilet de protection, ce sont mes aisselles.

(1630)

C'est ce gouvernement qui, après plusieurs années de discussion, dit aux jeunes hommes et femmes de 18 et 19 ans rassemblés au manège militaire, qui s'intéressent à la vie militaire et veulent servir leur pays, qu'ils devront attendre pendant deux ou trois autres années d'évaluation avant de savoir si leurs unités vont survivre ou non.

C'est ce gouvernement qui dépense des millions de dollars, sinon des milliards, pour mettre à niveau les destroyers TRUMP, surtout le NCSM Huron, puis les amarre au quai parce que les Forces canadiennes ne comptent pas l'effectif nécessaire pour fournir un équipage à nos navires et à nos nouveaux sous-marins.

C'est ce gouvernement qui se cache derrière des questions d'équité pour choisir l'équipage des sous-marins. Comme les sénateurs le savent, il fut un temps où l'on se portait volontaire pour faire partie de l'équipage d'un sous-marin, mais maintenant, les deux sexes seront appelés à servir à bord du sous-marin de catégorie Victoria.

C'est ce gouvernement qui pousse un effectif de moins de 51 200 personnes aux extrêmes limites de sa capacité et de la capacité de ses chefs pour lui faire remplir le mandat que lui a confié le pays. À mon avis et selon des méthodes de calcul raisonnables, l'effectif des Forces canadiennes se rapproche davantage de 46 000 que de 51 200.

C'est ce gouvernement qui laisse 10 p. 100 du matériel de son armée coincé en haute mer.

C'est ce gouvernement qui prévoit retirer une brigade complète à l'armée.

C'est ce gouvernement qui a ruiné l'armée canadienne à un point tel que nos fameux soldats du maintien de la paix affirment qu'ils sont incapables de participer à une guerre.

C'est ce gouvernement qui offre des «marines» au Timor oriental pour découvrir ensuite que nous n'avons pas de soldats d'infanterie de marine dans les Forces canadiennes.

Honorables sénateurs, M. Pitt aurait considéré qu'ils étaient en bonne posture en 1757 s'il avait pu voir l'état des Forces canadiennes d'aujourd'hui.

Si mon parti avait été élu, nous aurions pris bon nombre de mesures pour aider les Forces canadiennes.

Un gouvernement progressiste-conservateur aurait engagé des sommes pour assurer un effectif adéquat, il aurait pris des initiatives pour améliorer la qualité de vie et fournir du nouveau matériel aux Forces canadiennes.

Un gouvernement progressiste-conservateur aurait immédiatement fourni au ministère de la Défense nationale un financement annuel supplémentaire pour les cinq prochaines années afin de maintenir les capacités courantes et de mettre en oeuvre les programmes d'immobilisation à long terme.

Un gouvernement progressiste-conservateur donnerait à nos leaders militaires une idée générale de l'orientation qu'il voudrait leur faire prendre tout en leur accordant le pouvoir nécessaire pour prendre des décisions opérationnelles stratégiques.

Un gouvernement progressiste-conservateur ferait l'acquisition d'hélicoptères maritimes modernes et efficaces en fonction d'un énoncé des exigences approuvé par le ministère. Il organiserait un processus d'appel d'offres équitable et transparent, à la recherche du meilleur matériel pour l'argent des contribuables et non du soumissionnaire le moins disant.

Mais revenons aux Sea King pour un instant, honorables sénateurs. L'état de notre flotte de Sea King et le programme de remplacement mal conçu du gouvernement auraient de quoi nous faire pleurer. Tout ce projet sent mauvais. Cela nous fait penser à Sam Hughes et à ses propositions radicales.

Honorables sénateurs, rappelons-nous l'époque où nous disions «bientôt» au Sénat et où les libéraux disaient «immédiatement» dans le livre blanc de 1994. Par «immédiatement», il semble que les libéraux voulaient dire six ans. Vous pouvez vous-mêmes compter le nombre de jours. J'entends encore notre illustre ministre de la Défense nationale nous dire sans cesse que la flotte de Sea King serait remplacée d'ici 2005. Nous savons maintenant qu'aucune date limite n'a été prévue. Nous pourrions très bien apercevoir dans les cieux les Sea King jusqu'en 2008 et non 2005, contrairement à ce qui nous a été promis.

Selon certaines estimations, le coût de l'annulation dépasserait le milliard de dollars. Nous avons appris aujourd'hui que 500 millions de dollars seraient gaspillés pour l'enregistrement des armes à feu. Cette somme nous aurait permis d'acheter les hélicoptères nécessaires pour compléter notre flotte.

Pourquoi cela coûtera-t-il plus de 1 milliard de dollars? Parce que l'appareil EH-101 est probablement le seul hélicoptère qui sera disponible en assez grand nombre d'ici 2005 pour remplacer nos Sea King. Si un malheur devait arriver à l'équipage d'un Sea King parti en mission, le gouvernement devra en assumer les conséquences, tout comme les sénateurs et les députés qui choisissent de garder le silence.

Honorables sénateurs, à mon avis, le gouvernement a bien mal géré le dossier du remplacement des Sea King. Pendant la campagne électorale de 1993, le chef de l'opposition de l'époque, Jean Chrétien, déclarait: «Je prendrai ma plume et j'écrirai: Aucun hélicoptère, Chrétien, et «Personne ne mourra à cause des hélicoptères.»

Dieu merci, aucun malheur ne s'est produit avec un Sea King, mais nous nous rappelons tous de l'accident tragique mettant en cause un Labrador. Ce n'est que grâce à l'intervention divine que les Sea King ont pu éviter jusqu'à maintenant de tels accidents.

Lorsqu'il a pris le pouvoir en 1993, M. Chrétien a annulé, comme il l'avait promis, le contrat d'achat d'hélicoptères EH-101 et nous a lancés sur la voie du scandale et d'un possible désastre. Cet acte irresponsable et ce cynisme électoraliste ont beaucoup nui à l'efficacité opérationnelle de nos forces maritimes et, du même coup, ont coûté cher à notre pays. Ces actes retombent maintenant sur le gouvernement actuel.

Nous savons tous que des hélicoptères maritimes opérationnels et efficaces sont un complément nécessaire à nos destroyers et frégates modernes; du moins les bâtiments qui ne sont pas bloqués dans les ports, faute d'équipage.

Le Canada possède l'une des flottes de surface les plus modernes et les plus efficaces au monde, construites à coup de milliards de dollars. Les bâtiments de notre flotte ne pourront cependant pas déployer tout leur potentiel si nous ne remplaçons pas les hélicoptères Sea King par des hélicoptères maritimes modernes, efficaces et robustes. En termes simples, depuis l'annulation du contrat en 1993, les Sea King ont vieilli et ne sont plus fiables parce qu'ils ont été poussés à la limite de leur vie utile.

Au cours des deux dernières années, nous avons été témoins de plusieurs défaillances opérationnelles remarquées du Sea King. Je pense notamment aux exercices avortés de l'OTAN, à l'échec des évacuations médicales en mer et à l'échec de l'arraisonnement en haute mer du GTS Katie, dont nous nous souvenons tous. La non-fiabilité du Sea King nuit à l'efficacité opérationnelle de notre marine, et cela malgré les vaillants efforts des équipages d'entretien. C'est un scandale, une situation dont nous n'avons pas à être fiers.

Jusqu'en juin de cette année, six ans d'échecs, six ans de risques, le gouvernement Chrétien a paralysé le programme Sea King, si important pour notre marine, nos équipages aériens et leurs familles. Mais le pire restait à venir. Je rappelle, par exemple, que le processus d'approvisionnement prévoit quatre contrats distincts, tous indépendants les uns des autres, pour l'acquisition d'appareils de base, de systèmes de mission intégrés, du soutien pour les appareils de base et du soutien pour les systèmes de mission intégrés, au coût de 2,9 milliards de dollars.

Le gouvernement a limité la valeur des 28 appareils de base à 925 millions de dollars et a pris cette décision en fonction du critère de la soumission conforme offrant le plus bas prix. Cette décision a eu deux effets immédiats. Premièrement, peu importe quel aéronef est proposé, même s'il n'est que marginalement efficace, il sera choisi pour peu qu'il respecte l'énoncé des exigences et que son prix soit le plus bas. Il sera choisi de préférence à un autre aéronef plus efficace mais légèrement plus coûteux.

(1640)

Autre conséquence, il ne sera pas tenu compte du jugement professionnel militaire. Si un concurrent marginalement opérationnel propose un prix inférieur de un dollar à celui d'un hélicoptère qui a une capacité opérationnelle de 100 p. 100 supérieure, c'est le dollar d'économie qui sera déterminant. Cela va à l'encontre des lignes directrices du Conseil du Trésor, et il nous suffit de considérer la décision rendue par la Cour suprême du Canada vers la fin de la semaine dernière pour comprendre ce qu'elle pense du processus d'appel d'offres. Elle le qualifie de «manifestement politisé». C'est l'avis que j'ai aussi exprimé il y a deux ou trois semaines. Compte tenu des lignes directrices du Conseil du Trésor et de la règle du prix le plus bas pour une offre conforme, le EH-101 est pour ainsi dire éliminé avant même que le processus ne soit entamé.

Les fabricants du EH-101 ont décroché le marché pour remplacer l'hélicoptère de recherche et sauvetage Labrador, en 1998, parce qu'il représentait la meilleure valeur pour le contribuable canadien. C'était très gênant pour le gouvernement actuel. À une époque, j'étais pourtant disposé à donner au premier ministre tout mon appui parce qu'il avait enfin avoué son erreur et fait le bon choix.

Son Honneur le Président: Honorable sénateur, votre temps de parole est écoulé. Demandez-vous à poursuivre?

Le sénateur Forrestall: Oui.

Des voix: D'accord.

Le sénateur Forrestall: Honorables sénateurs, le coût de l'hélicoptère de recherche et sauvetage est d'environ 550 millions de dollars pour 15 EH-101 d'un modèle complètement dépouillé. Il est facile de constater que EH Industries aura du mal à fournir 28 appareils pour 925 millions de dollars afin de remplacer les Sea King.

De plus, les règles sur les lettres d'intérêt empêchent la présentation du nouveau S-92 de Sikorsky. Bien sûr, cette société nous fournit des hélicoptères depuis ma jeunesse, avant même que je puisse voter. Selon les lignes directrices du concours, les hélicoptères proposés doivent avoir été certifiés avant que ne soit octroyée, à l'été 2001, la partie du contrat qui porte sur le véhicule même. On savait pertinemment, dans les milieux gouvernementaux, que le S-92 ne serait pas certifié avant l'été 2002. Par conséquent, le S-92 sera éliminé avant même que le concours ne débute. C'est là une condition sans précédent: exiger la certification d'un appareil trois ans avant la date prévue pour sa livraison, par des entreprises de réputation internationale, comme Sikorsky.

Le seul groupe qui n'ait pas été défavorisé par le concours est Eurocopter, avec son Cougar MK2, l'appareil le meilleur marché, dont la technologie et la conception remontent aux années 70. En fait, le Cougar vient d'être exclu d'un concours des quatre pays scandinaves pour trouver un hélicoptère qui puisse fonctionner dans le redoutable environnement de la mer du Nord et de l'océan Arctique, des régions qui ressemblent tellement, au plan opérationnel, à notre partie froide et dangereuse de l'Atlantique nord. Ce n'est pas un hélicoptère naval éprouvé, mais c'est le moins cher. Sous la direction du présent gouvernement, nous allons acquérir un hélicoptère maritime qui sera davantage fait pour la recherche et le sauvetage que pour le combat. Nous aurons le EH-101 pour les opérations de recherche et de sauvetage et le Cougar MK2 pour les opérations de combat. Pourquoi, demanderez-vous? J'ai mon idée là-dessus, mais peut-être devriez-vous demander aux ministres Gray, Eggleton et Gagliano et peut-être au premier ministre lui-même pourquoi le Cougar était le seul hélicoptère à ne pas être défavorisé par ce concours. C'est pour le moins scandaleux, sans parler du fait que le processus d'acquisition biaisé — frauduleux, à mon sens — s'est déroulé sans les ministères et sans recommandation du MDN.

Honorables sénateurs, d'autres faits sont à noter. Le véhicule de base ou hélicoptère vert sera acheté séparément du système de mission. Qu'arrivera-t-il si les deux sont incompatibles à cause, peut-être, d'anomalies magnétiques et d'émissions électroniques? Selon des entreprises aérospatiales, il faudra prévoir une hausse de 70 p. 100 du programme de 2,9 milliards de dollars.

Qu'arrive-t-il à l'attestation de navigabilité lorsqu'on perce de grands trous dans la cellule, pour un sonar, par exemple, ou lorsque l'équilibre est modifié par l'intégration de systèmes de mission à l'appareil?

Comme il y a quatre contrats séparés, aucun entrepreneur civil principal n'exercera de pressions pour que le projet soit bel et bien réalisé. Le gouvernement devient par défaut l'entrepreneur principal, et qui paie la différence? Le contribuable canadien, bien sûr.

Ce n'est pas ainsi qu'il faut acquérir du matériel de défense avec lequel la Marine sera coincée pendant 40 ans si l'on doit se fier au calendrier de remplacement des Sea King. Par-dessus tout, il n'est question nulle part dans le discours du Trône du plus important programme d'approvisionnement militaire du gouvernement actuel — pas un mot sur l'état des forces. Je rappelle aux sénateurs d'en face que, lorsque nous étions au pouvoir, nous avions une véritable brigade en Allemagne. Nous pouvions dépêcher trois navires dans le golfe Persique et il leur fallait seulement quelques jours, pas des semaines, avant d'appareiller. N'essayez pas de nous dire à quel point les forces armées sont meilleures de nos jours. Nous n'avons pas évincé des familles de militaires de leurs logements familiaux comme l'a fait le gouvernement actuel — un gouvernement libéral. Ce que le discours du Trône a dit aux membres des Forces armées, à leur famille, aux Canadiens qui les appuient et à moi, c'est tout simplement ceci: plus d'argent, plus un cent. Le gouvernement va simplement payer les déficits d'exploitation et d'entretien au moyen de budgets supplémentaires, et ce sera tout pour vous jusqu'à l'an prochain. Vous n'obtiendrez pas le milliard de dollars supplémentaire dont vous avez besoin cette année et l'an prochain au titre des dépenses d'immobilisations pour éviter que le matériel ne se détériore indûment.

Voilà ma réponse au discours du Trône au nom de ceux qui, au Canada, sont en faveur de Forces armées solides et efficaces. Un autre grand dirigeant britannique, Oliver Cromwell, a dit un jour ceci: «Je n'ai pas de bijoux scintillants ni de plumes à mon chapeau qui incitent les gens à me regarder ou à s'agenouiller devant moi, mais j'ai le pouvoir et la détermination qui font trembler mes ennemis.»

L'honorable Thelma J. Chalifoux: Honorables sénateurs, je félicite nos trois nouveaux collègues et je leur souhaite la bienvenue à cette illustre Chambre. Je suis certaine qu'ils trouveront la tâche qui les attend remplie de défis, enthousiasmante et intéressante.

Honorables sénateurs, je suis heureuse de prendre aujourd'hui la parole en réponse au discours du Trône. Les Canadiens ont confié au gouvernement un troisième mandat. Dans le cadre de ce mandat, le gouvernement veut bâtir un Canada plus fort et plus englobant et garantir une meilleure qualité de vie à tous les Canadiens. Je vais parler des engagements que le gouvernent a pris dans le discours du Trône à l'égard des nations autochtones du Canada.

Le mot «autochtone» n'est pas pleinement défini. Le gouvernement accepte-t-il la définition du paragraphe 35(2) de la Loi constitutionnelle qui est ainsi libellée: «Dans la présente loi, «peuples autochtones du Canada» s'entend notamment des Indiens, des Inuit et des Métis du Canada»?

Dans le discours du Trône, il n'est fait mention ni des Inuit ni des Métis. Il y a de nombreux Inuits qui ne vivent pas au Nunavut — qui vivent un peu partout dans le Nord, dans le nord du Québec, au Labrador et dans certaines parties du Manitoba. Tous les membres des premières nations signataires d'un traité ne vivent pas dans des réserves — ils vivent dans des villages, des localités et des villes du Canada. Les Métis vivent aussi dans des villages, des localités et des villes du Canada, tant dans le Nord que dans le Sud. Ils ont eu peu de possibilités de se prévaloir des programmes et services offerts aux autres groupes autochtones.

Les membres non inscrits des premières nations sont vraiment exclus. Je pense par exemple à cette femme de cinquante ans d'un village du nord de l'Alberta qui est Crie et qui a vécu toute sa vie de la façon traditionnelle de son peuple. Toutefois, elle n'a pas droit aux prestations parce qu'elle n'est pas inscrite. Elle a ramassé toutes sortes de bouts de bois pour se construire une cabane. Elle s'est servie de boîtes de carton pour l'isoler. Lorsque les dirigeants de la communauté ont essayé de lui faire obtenir une roulotte, ils ne sont pas allés très loin parce qu'ils ne sont pas inscrits non plus. Ils ne répondent pas aux critères.

(1650)

Il est dommage de constater que cela n'a rien d'inhabituel. Cela se passe un peu partout au Canada dans les collectivités inuit, métisses et les collectivité non inscrites.

De par la Metis Settlements Act de 1990, l'Alberta est la seule province à avoir inscrit dans sa loi une définition du terme métis et prévu un droit foncier. Je répète. L'Alberta est la seule province au Canada à avoir prévu des terres pour les Métis.

Les anciens Métis de l'ouest du Canada remontent dans les dossiers généalogiques à la Terre de Rupert et au gouvernement provisoire de Riel. Mais où s'inscrivent-ils dans l'engagement du gouvernement fédéral face aux peuples autochtones? L'engagement du gouvernement de travailler avec les peuples autochtones pour assujettir leurs compétences entrepreneuriales et commerciales a remporté beaucoup de succès. Bon nombre d'institutions financières ont été mises sur pied. Je pense entre autres aux banques de développement pour les autochtones, à la Inuit Financial Agency, aux Métis Business Services et à la Settlement Sooniyaw Corporation pour les établissements métis de l'Alberta. Il est intéressant de souligner cependant que si vous vivez sur la réserve, une résolution du conseil de bande vous donne accès aux banques. Si vous ne vivez pas sur la réserve, vous n'avez pas accès aux banques ni au crédit. Le gouvernement fait ce qu'il peut pour respecter ses engagements, mais il y a toujours des autochtones qui sont oubliés et qui ne peuvent profiter de ces programmes.

Le gouvernement s'est engagé à appuyer le programme d'accès communautaire et le réseau Rescol. Ces programmes sont essentiels pour remettre les collectivités autochtones rurales et éloignées à égalité avec celles du sud du Canada. Jusqu'à maintenant, beaucoup d'écoles du Nord ont été raccordées au Rescol spécialement pour l'enseignement des sciences, grâce au Musée canadien de la Nature et avec le concours de l'un des principaux fournisseurs de matériel informatique et de logiciels au Canada. Il est intéressant de voir que nous pouvons fournir cette technologie à nos écoles du Nord, alors que les enfants continuent d'aller à l'école au moyen de véhicules tirés par des chevaux. Les localités n'ont pas d'infrastructure, mais les écoles disposent de canalisations d'eau et d'égout. Entre-temps, nos vieux doivent encore marcher difficilement dans les bancs de neige pour aller à la toilette.

Le discours du Trône mentionne uniquement les premières nations quand il parle de renforcer la gouvernance. C'est un merveilleux engagement, mais qu'en est-il des Inuits qui vivent à l'extérieur du Nunavut, des Métis et des établissements métis de l'Alberta? Les établissements métis soutiennent que la loi albertaine de 1990 sur les établissements métis leur donne le droit existant à la protection. Le Conseil général des établissements métis est en train d'élaborer un modèle de gouvernance qui doit être reconnu par notre gouvernement fédéral.

Le Programme d'aide préscolaire aux autochtones est un des meilleurs programmes pour nos enfants, mais, encore une fois, le programme a mis davantage l'accent sur les réserves, même si la majeure partie des Autochtones habitent dans les villes et les localités isolées. Tous les enfants devraient connaître leur histoire, leur culture et leur patrimoine.

Les Métis ont leur propre langue, leur propre histoire, leur propre culture et leur propre patrimoine. Les Inuits ont leur propre langue, leur propre histoire, leur propre culture et leur propre patrimoine. Toutes les premières nations se différencient par leur langue, leur culture et leur histoire. Tous les enfants devraient avoir l'occasion de participer à ce programme pour connaître leur propre identité singulière et être fiers de ce qu'ils sont en tant qu'autochtones et en tant que Canadiens.

Les problèmes de santé, dont le syndrome d'alcoolisme foetal, le diabète, le sida et la tuberculose sont de très graves problèmes auxquels font face toutes les communautés autochtones. Je suis encouragée de voir que le gouvernement accorde une grande priorité à ce domaine. En formant des autochtones en sciences de la santé, nous ferons des gains. J'ai été impressionnée d'entendre un professeur de l'Université de l'Alberta dire qu'il y avait 20 étudiants autochtones qui étudiaient pour devenir médecins. Les étudiants des premières nations reçoivent des fonds pour cela, les Métis non. Voilà encore un autre exemple de la disparité dont souffrent les Métis.

Le discours du Trône mentionne qu'une forte proportion d'autochtones ont des démêlés avec la justice. Le gouvernement cherche une solution et tâche d'en élaborer une pour remédier à cette tragique réalité; elle existe cependant depuis plus de 50 ans. Il faut assurer plus de justice et mettre au point plus de solutions de prévention.

Lorsque chaque enfant grandira dans un foyer où l'on ne connaît pas la pauvreté, où les parents ont des emplois rémunérés, où il peut compter sur un environnement stable et où il a un sens profond de son identité, à ce moment-là, toutes les premières nations, les Métis et les Inuit pourront être fières. Pour cela, nous abordons cette question primordiale.

Tous les autochtones, sans égard à leur statut ou à leur appartenance politique, doivent être entendus. Tous doivent avoir un accès équitable aux services. Le discours du Trône aborde de nombreuses questions qui touchent la vie des peuples autochtones, mais nous devons reconnaître les trois nationalités autochtones distinctes, de manière à ce que tous les autochtones décrits dans la Constitution de 1982 aient accès à tous les services.

Comme le disaient nos grands-mères, «la route est difficile, la bataille à livrer est grande, mais nous survivrons et deviendrons prospères grâce à notre bonne humeur et à notre confiance».

L'honorable Mira Spivak: Honorables sénateurs, le discours du Trône renferme quelques bonnes propositions d'ordre environnemental. L'une d'entre elles porte sur l'établissement de normes visant les substances toxiques et les autres polluants qui tiendront compte de la vulnérabilité particulière des enfants.

C'est un pas qui va dans le sens de la motion adoptée unanimement par le Sénat il y a quelque 15 mois, pressant le gouvernement de créer un bureau d'hygiène de l'environnement des enfants. Nous ne connaissons pas encore les plans du gouvernement à cet égard, à savoir s'il créera le bureau que nous avons recommandé, s'il reverra la Loi canadienne sur la protection de l'environnement ou s'il compte mettre en place un autre mécanisme. J'espère que les détails de ces plans seront annoncés dès que possible.

Le discours du Trône aborde aussi la question des eaux canadiennes et assure que le gouvernement guidera l'élaboration de lignes directrices nationales plus strictes sur la qualité de l'eau, qu'il financera l'amélioration des réseaux municipaux d'aqueducs et d'égouts et qu'il investira dans la recherche-développement. Dans le sillage de Walkerton, nous savons à quel point il est urgent de nous doter d'un meilleur système de gestion de l'eau douce et de meilleurs moyens de protection des consommateurs. La question reste ouverte quant à savoir si des lignes directrices nationales plus strictes accroîtront vraiment le niveau de protection.

D'autres pays, comme les États-Unis, ont des normes légalement exécutoires en matière de qualité de l'eau. Il importe de savoir quelles lois et quelles mesures seront adoptées à l'appui de ces initiatives. Il est également capital de savoir quel niveau de financement sera consenti pour le traitement des eaux usées et des eaux municipales. Dans le budget de 2000-2001, le gouvernement a engagé 2,65 milliards de dollars sur six ans pour tous les types de projets d'infrastructure municipaux. La Fédération canadienne des municipalités, toutefois, a fixé à 16,5 milliards de dollars — plus de six fois le montant engagé — le montant nécessaire pour remplacer ou réparer uniquement les réservoirs d'eau principaux et les usines de traitement de l'eau.

Les promesses que le gouvernement a faites dans le discours du Trône comprennent-elles le financement des besoins déterminés?

En outre, l'engagement à investir dans la R-D pour protéger les eaux de surface et les eaux souterraines est certainement une bonne nouvelle. À combien s'élèveront ces investissements? Quels sont les mécanismes d'investissement? Une partie de ces investissements sera-t-elle canalisée vers nos chercheurs dans le domaine de l'eau douce, qui ont été privés de fonds pendant des années? Le Canada peut compter sur des scientifiques de renommée mondiale dans le domaine de l'eau douce, mais ces derniers ont abandonné tout espoir d'accomplir du bon travail dans notre pays à cause de la conception de nos programmes de subventions. Leur travail ne sert pas les intérêts des partenaires commerciaux et, sans partenaires au portefeuille bien garni, les chercheurs dans le domaine de l'eau douce ne sont pas admissibles au soutien fédéral.

Le Dr David Schindler, notre spécialiste aquatique le plus connu, a proposé une solution simple et sensée. Qu'on laisse les chercheurs recevoir des subventions selon une formule de partenariat avec Environnement Canada, avec le ministère des Pêches et des Océans ou avec des organismes provinciaux ou fédéraux. Ne faisons pas du parrainage d'entreprises privées une condition préalable au soutien fédéral. J'espère que le gouvernement du Canada finira par accepter ces suggestions quand il déterminera comment il répartira son budget de recherche.

D'autres engagements sont pris dans le discours. Il y a la promesse de mise en oeuvre rapide de l'entente canado-américaine sur la réduction du smog. Il y a celle de l'investissement dans de nouveaux parcs et de la restauration écologique de parcs existants. Il y a une nouvelle particulièrement réjouissante pour les Manitobains qui attendent depuis des années la création du parc national des basses terres du Manitoba ainsi que pour les Manitobains qui s'inquiètent du parc national du Mont-Riding, un des dix parcs nationaux du Canada les plus menacés.

(1700)

Le discours du Trône promet également d'adopter une loi destinée à protéger les espèces en péril et des mesures pour réduire les émissions de gaz à effet de serre. À première vue, qui pourrait demander mieux. Malheureusement, il nous a été prouvé de façon répétée que les apparences sont trompeuses.

Madame le leader du gouvernement nous a rappelé que le discours du Trône n'a pas pour objet de donner une liste précise des textes de loi qui seront présentés. Pour de plus amples détails, elle nous a recommandé de consulter le livre rouge.

Pour ce qui concerne l'environnement, je suis humblement d'avis que les livres rouges successifs se sont révélés une source constante de déception. Si le gouvernement avait tenu ses premières promesses publiées dans ces livres, le Canada serait aujourd'hui sur le point de réduire de 20 p. 100 les émissions de gaz à effet de serre. Au lieu de cela, les émissions augmentent régulièrement.

Si les engagements pris dans le livre rouge avaient été honorés, notre réseau de parcs nationaux aurait été achevé l'année dernière, et l'intégrité écologique de nos parcs plus anciens n'aurait pas été compromise. Or nous sommes loin d'avoir atteint cet objectif.

Si les premières promesses avaient été tenues, nous aurions disposé aujourd'hui d'un échéancier pour l'élimination progressive des substances toxiques. Les normes relatives à la prévention de la pollution auraient été plus rigoureuses. Les instruments économiques auraient été plus puissants pour favoriser la protection de l'environnement. Or nous n'avons rien eu de tout cela dans les huit années qui ont suivi la publication des promesses du livre rouge.

Pourtant, nous vivons dans l'espoir que les choses iront mieux. En fait, le gouvernement prend des dispositions dont il n'est pas fait état dans le discours du Trône ou dans les livres rouges. L'une de ces dispositions concerne notamment le problème urgent des exportations d'eau douce. Un projet de loi a été présenté pour interdire le captage et l'exportation des eaux des rivières et des lacs limitrophes du Canada et des États-Unis. C'est un premier pas, mais cela ne suffit pas. Les provinces doivent se concerter pour protéger d'autres sources potentielles d'exportation d'eau.

Qu'est-ce que le gouvernement peut raisonnablement faire de plus pour protéger l'environnement? Il peut prendre une page — plusieurs pages — d'un autre livre de campagne électorale, que les groupes environnementaux considèrent comme très importantes. Le programme du Parti progressiste-conservateur accordait également la priorité à l'assainissement de l'air et à la salubrité de l'eau. La différence réside dans les moyens pour parvenir à ces fins. Le programme du parti va au-delà des lignes directrices volontaires pour protéger l'eau potable. Des normes obligatoires et exécutoires devraient être insérées dans une loi sur l'eau potable, dit la politique. On reconnaît également que des activités à proximité de puits municipaux et l'entreposage de produits dans les environs posent des problèmes. Il faudrait établir des normes sur ces activités et les harmoniser avec celles des gouvernements provinciaux et territoriaux.

J'ajouterais qu'il faut examiner de toute urgence le lien qui existe entre les fermes constituées en société — les énormes porcheries, par exemple — et la qualité de l'eau.

Le programme du Parti progressiste-conservateur promettait également de mettre à jour les lois sur les pesticides, qui remontent à 30 ans, et promettait aussi de mettre en oeuvre des programmes de sensibilisation aux pesticides, pour réduire l'utilisation à des fins cosmétiques de produits chimiques sur les gazons et dans les jardins.

En ce concerne les lois sur les espèces en péril, le programme du Parti progressiste-conservateur promettait de présenter un projet de loi qui aurait laissé les scientifiques, et non les politiciens, décider du moment où des espèces devraient être inscrites dans la liste des espèces à protéger. Cette approche n'empêche pas le gouvernement de tout faire — ou de ne rien faire — pour protéger une espèce menacée. Cependant, l'approche scientifique laisse savoir aux Canadiens à quel moment les scientifiques sonnent l'alarme. La LEP révisée qui a été proposée le mois dernier adopte une approche quelque peu différente et prévoit la publication de la liste dressée par les scientifiques, mais le Cabinet déciderait toujours de la liste définitive. Les gouvernements qui ont adopté cette approche ont omis de dresser la liste des espèces menacées.

La vision qu'a le Parti progressiste-conservateur d'une bonne loi sur les espèces comprend également l'indemnisation des propriétaires fonciers, de sorte que le fardeau ne soit pas assumé par les quelques personnes dont les terres sont l'habitat d'espèces en péril.

Honorables sénateurs, j'espère sincèrement que le gouvernement du Canada envisagera d'apporter des amendements au projet de loi, pendant son étude en comité, à l'autre endroit.

Le programme du Parti progressiste-conservateur contenait d'autres propositions, comme une loi sur l'eau potable, une mesure fiscale pour encourager les conducteurs à acheter des carburants à faible taux de soufre, et des ententes anti-pollution avec les industries qui seraient obligatoires et exécutoires. Personne n'a l'exclusivité sur ces propositions. Je suis sûre que personne ne s'opposerait à ce que le gouvernement les adopte.

L'énoncé de principe du Parti progressiste-conservateur est peut-être bon — il est difficile de s'en souvenir puisque les élections sont passées depuis longtemps —, mais il n'a pas le monopole des bonnes idées. Sur la question du changement climatique, par exemple, le Pembina Institute for Appropriate Development a offert un plan concret pour respecter l'engagement pris à Kyoto et surveillé les résultats du programme facultatif du gouvernement. En 1998, la dernière année sur laquelle nous disposons de données, les émissions de gaz à effet de serre au Canada étaient 13 p. 100 plus élevées qu'au début de la dernière décennie. Afin de respecter l'engagement pris à Kyoto, il faudra réduire de 26 p. 100 les niveaux d'émission que l'on pourrait avoir si on observait le statu quo. Nous avons gaspillé dix ans à ne rien faire.

Le dernier livre rouge affirmait que, depuis 1997, le gouvernement avait engagé plus d'un milliard de dollars dans des programmes relatifs au changement climatique et à l'efficacité énergétique, mais l'augmentation des émissions indique non seulement qu'il n'y a pas eu de progrès, mais que la situation se détériore.

Le Pembina Institute a signalé en octobre que les sociétés industrielles, qui sont responsables de plus de 60 p. 100 des émissions totales, avaient augmenté leurs émissions de 13 p. 100 en moyenne. Il y a eu des exceptions notables. Ainsi, la société DuPont du Canada a diminué ses émissions de 52 p. 100. EPCOR, Hydro-Ontario et d'autres producteurs d'électricité ont suivi le chemin inverse. L'augmentation des émission d'EPCOR s'est élevée à 149 p. 100.

Un mois plus tôt, l'institut a commenté la performance des gouvernements provinciaux. Toutes les provinces ont reçu une mauvaise note. La Colombie-Britannique est celle qui a obtenu la meilleure note, soit un pauvre 30 p. 100.

La Plan d'action du gouvernement pour l'an 2000, annoncé en octobre dernier, permettra au Canada, s'il est appliqué intégralement, de réduire ses émissions du tiers seulement de ce qui avait été convenu à Kyoto, et un tiers de cette réduction sera attribuable à des mesures prises au Canada. Le reste dépendra des allocations pour les puits de carbone et l'échange de droits d'émission.

Or, les mesures pratiques et abordables recommandées par le Pembina Institute rapprocheraient le Canada de son objectif. L'institut recommande une réduction de la consommation de carburant, l'expansion des moyens de transport autres que la voiture et la recherche d'une plus grande efficience énergétique. Il recommande également d'imposer une taxe spéciale sur l'essence, bien que personne ne voudra accepter cela, de passer du charbon au gaz naturel et à d'autres sources d'énergie pour produire de l'électricité, de mettre sur pied un système d'échange de droits d'émission qui limite les émissions industrielles et les incitatifs, d'élaborer des règles et de favoriser l'économie d'énergie. Ce sont là des mesures pratiques et sensées.

La qualité de l'air est une priorité pour le gouvernement du Canada et on s'en remet à l'accord canado-américain pour lutter contre le smog. Cependant, le plan du Canada ne fait rien contre les émissions de soufre, une composante majeure du smog. Les fabricants d'automobiles réclament depuis des années que le gouvernement raffermisse les normes applicables à l'essence. Aujourd'hui, certaines essences vendues en Ontario et au Québec ont une teneur en soufre 23 fois supérieure à ce qui est permis en Californie. Les raffineries devront réduire le contenu en soufre de l'essence à 150 ppm d'ici 2002, mais elles ne seront tenues d'atteindre la norme des 30 ppm qu'en 2005. À ce moment-là, d'autres États auront adopté des normes encore plus rigoureuses.

Ne serait-il pas temps, honorables sénateurs, de laisser aux consommateurs la possibilité de se prononcer en leur offrant un incitatif financier? Une réduction de taxe de 4 cents le litre pour les essences à faible teneur en soufre contribuerait beaucoup à améliorer la qualité de l'air.

Les mesures du gouvernement sur le changement climatique et la réduction du smog sont restées en grande parties inefficaces, pourtant, d'excellentes suggestions ont été faites au Canada. En décembre, une nouvelle coalition a été formée par les sociétés pétrolières et les environnementalistes. Cette coalition, appelée Clean Air Renewable Energy, ou CARE, a recommandé au ministre des Finances deux mesures qui auraient permis de lutter contre les changements climatiques et le smog tout en créant une industrie des énergies renouvelables prospère au Canada.

Cette coalition, qui regroupe des entreprises comme Suncor, Shell Canada, BP Canada, TransAlta et des groupes de protection de l'environnement comme Pollution Probe, le Pembina Institute et les Ami(e)s de la Terre, a demandé au ministre de consacrer les crédits non attribués à la lutte contre les changements climatiques. Ils ont demandé des crédits d'impôts pour les consommateurs qui achètent de l'électricité produite par des centrales éoliennes et solaires ou à partir de la biomasse. Ils ont demandé des crédits d'impôt plus généreux pour la recherche et le développement de sources d'énergie écologiques, mais rien de cela ne se retrouvait dans le discours du Trône. Rien du tout là-dessus.

J'espère que le prochain budget du ministre contiendra des stimulants pour mettre le Canada sur la voie de l'énergie verte.

Honorables sénateurs, je voudrais maintenant aborder une autre question. Elle est liée à l'engagement pris dans le premier livre rouge en faveur de l'exécution de nos lois et règlements de protection de l'environnement. Nous pourrions bien adopter la meilleure loi de protection de l'environnement du monde, mais si nous ne l'appliquons pas, cela ne donnera rien.

Son Honneur le Président: Je regrette d'informer le sénateur Spivak que le temps dont elle dispose est écoulé. Demande-t-elle la permission de continuer?

Le sénateur Spivak: Oui, je demande la permission de continuer.

Son Honneur le Président: Est-ce d'accord, honorables sénateurs?

Des voix: D'accord.

(1710)

Son Honneur le Président: La permission est accordée, mais avant que je m'assoie, par respect pour le sénateur Spivak, qui présente ses observations, je rappelle aux honorables sénateurs qu'il faudrait éviter de converser pendant l'intervention d'un sénateur. Sans nommer personne, je ferai remarquer que même les plus distingués sénateurs oublient cette courtoisie à l'occasion.

Le sénateur Spivak: L'an dernier, honorables sénateurs, 32 inspecteurs faisaient respecter les lois fédérales à 27 000 sites. En moyenne, ces installations pourraient s'attendre à une inspection tous les 36,8 ans. En 1998, il y avait moins d'un inspecteur à plein temps pour surveiller 800 sociétés de produits chimiques et de biotechnologie. Les sociétés de produits chimiques responsables ont demandé au gouvernement de multiplier les inspections. On a allégué que plus de 175 sociétés fabriquaient et importaient de nouveaux produits contrevenant aux règles fédérales. Que s'est-il passé? Très peu.

Aujourd'hui, nous avons à peine 150 agents sur place pour faire respecter nos lois sur l'environnement et la faune. D'ailleurs, les responsables d'Environnement Canada estiment qu'il en faudrait deux fois plus pour faire du bon travail. Une nouvelle loi sur les espèces en péril, de nouvelles normes pour les substances toxiques ou toute nouvelle mesure ne valent rien si nous ne prenons pas les dispositions nécessaires pour assurer leur application.

Permettez-moi de citer le récent rapport du vérificateur général. Ce dernier s'est reporté dix ans en arrière et a conclu ce qui suit:

Des progrès ont été accomplis, mais il reste d'importants défis à relever. Ainsi, le gouvernement doit mieux gérer les nouveaux produits chimiques toxiques, le smog urbain et la contamination des eaux souterraines. Comparativement à d'autres pays, notre consommation d'énergie et d'autres ressources naturelles par habitant est très élevée. Le Canada demeure également un important pollueur et producteur de déchets.

Dans un article paru récemment dans The National Post, le vérificateur général a ajouté en guise de directive:

Enfin, le gouvernement doit remplir ses promesses en matière d'environnement. Depuis plusieurs décennies, il y a un manque de coordination au sein du gouvernement fédéral, ainsi qu'entre le gouvernement fédéral et les provinces.

On a l'habitude de promettre beaucoup, mais de ne pas assez tenir ses promesses. Comme c'est le cas dans les autres programmes, on ne dresse pas de bons rapports des résultats.

[Français]

L'honorable Marie-P. Poulin: Honorables sénateurs, je suis heureuse d'avoir aujourd'hui le privilège de répondre au discours du Trône prononcé par Son Excellence la Gouverneure générale.

En félicitant nos trois nouveaux collègues, les sénateurs Morin, Hubley et Tunney, je tiens à les inviter à lire le discours du Trône.

Il s'agit d'abord et avant tout d'un discours pour tous les Canadiens et toutes les Canadiennes, sans égard à leur situation sociale. C'est un programme de travail édifiant pour cette première législature du millénaire. Les mots utilisés dépeignent éloquemment quel pourra être l'avenir du pays.

Dans le discours du Trône, il est fait mention d'une société au sein de laquelle tous et toutes ont la chance de se réaliser pleinement; d'une nation qui est à l'écoute des plus désavantagés et qui leur tend la main; d'un pays qui favorise et récompense le succès; d'un pays qui partage ses richesses; d'un pays qui exprime une confiance profonde en la personne et qui reconnaît les immenses possibilités qui s'offrent à nous si nous unissons nos efforts pour réaliser un rêve commun.

On nous invite à participer à une vision de l'avenir, une vision qui n'est pas seulement une notion vague, mais qui comporte des buts clairement définis pour que le Canada se réalise pleinement grâce à une confiance sûre en lui-même et surtout en sa population.

On nous invite à relever un défi, celui de contribuer à un effort national, de répondre à un cri de ralliement, demandant à tous les Canadiens et à toutes les Canadiennes du secteur public, du secteur privé et aux bénévoles de s'unir pour le bien de tous. Il ne fait aucun doute qu'en misant sur la population, le gouvernement s'assure que le Canada continuera d'être un pays que d'autres voudront imiter.

Honorables sénateurs, l'engagement et la confiance du gouvernement envers la population trouvent leur expression la plus forte dans le message qu'il envoie à nos jeunes, les bâtisseurs du Canada de demain. Dans sa réponse au discours du Trône, le premier ministre a dit qu'en cette ère de mondialisation, de haute technologie, de recherche et de développement, ce sont les plus rapides qui gagnent. J'entends les jeunes Canadiens et Canadiennes nous dire qu'ils sont assez rapides pour gagner la course. Le discours du Trône a toutefois identifié la multitude d'outils, d'opportunités et de programmes qui seront à leur disposition afin que chaque enfant puisse développer son plein potentiel et ainsi contribuer au mieux-être de sa famille, de sa communauté et de son pays.

Honorables sénateurs, la plate-forme exposée dans le discours du Trône nous offre des assises solides sur lesquelles nous pouvons bâtir l'avenir du Canada avec nos jeunes. Nous retrouvons ces assises dans les domaines de la santé, de l'éducation, de la recherche et du développement, de la famille, de l'environnement, du revenu disponible, de la stimulation économique, du commerce international, de la culture, du patrimoine, de la sécurité, de l'accès à l'information, des liens quotidiens grâce à la radio et la télévision publiques et privées, de la presse écrite et électronique et de l'Internet. C'est un plan de travail inclusif dans sa pensée, ses valeurs, ses données et ses populations cibles.

[Traduction]

Honorables sénateurs, l'attention qu'il porte à ses responsabilités au pays n'a toutefois pas détourné le gouvernement de ses responsabilités internationales. Les valeurs du Canada continuent d'être avancées sur le plan mondial au chapitre de la paix, de la tolérance, du partage, de la coopération, de la sécurité, de la stabilité, du respect pour la démocratie, des droits de la personne et de la primauté du droit. Pour atteindre les objectifs énoncés dans le discours du Trône, que ce soit chez-nous ou à l'étranger, le Canada a besoin non seulement d'une forte volonté politique et de buts clairs, mais aussi de professionnels dévoués. Je cite un passage du discours du Trône:

Pour aider le gouvernement à s'acquitter de ses responsabilités, le Canada doit pouvoir compter sur une fonction publique dont l'excellence est reconnue et qui possède les compétences requises dans une économie et une société fondées sur le savoir. C'est dans cette optique que le gouvernement se mettra à la recherche de jeunes, hommes et femmes, qui se distinguent déjà par leur talent et leur dynamisme et qui sont prêts à relever le défi de servir leur pays au sein de la fonction publique fédérale. Il est déterminé à aller au bout des réformes nécessaires pour que la fonction publique du Canada continue d'évoluer et de s'adapter. Innovation et dynamisme, tels seront les attributs d'une fonction publique à l'image de la diversité canadienne. Elle sera ainsi en mesure d'attirer et de développer les talents nécessaires pour servir les Canadiens au XXIe siècle.

Voici la réponse à ce passage qu'a donnée le premier ministre le 31 janvier:

De ce côté-ci de la Chambre, nous croyons qu'un gouvernement peut contribuer activement au mieux-être de la société. Pour ce faire, il doit pouvoir compter sur une fonction publique de haut niveau. Je suis fier de notre fonction publique. Le gouvernement prendra toutes les mesures nécessaires pour que la fonction publique continue de disposer des talents dont elle a besoin dans sa poursuite de l'excellence. Nous procéderons aussi aux réformes qui s'imposent pour moderniser la fonction publique en vue des besoins du XXIe siècle.

Oui, honorables sénateurs, on nous invite à veiller à ce que tous les jeunes Canadiens, d'un océan à l'autre, aient la possibilité non seulement de profiter des objectifs énoncés dans le discours du Trône, mais aussi de contribuer à leur réalisation.

(Sur la motion du sénateur Bolduc, le débat est ajourné.)

(1720)

AGRICULTURE ET FORÊTS

AUTORISATION AU COMITÉ D'ENGAGER DU PERSONNEL

L'ordre du jour appelle:

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Gustafson, appuyé par l'honorable sénateur Banks:

Que le Comité sénatorial permanent de l'agriculture et des forêts soit habilité à retenir les services de conseillers, techniciens, employés de bureaux ou autres éléments nécessaires pour examiner les projets de loi, la teneur de projets de loi et les prévisions budgétaires qui lui ont été renvoyés; et

Que le Comité soit autorisé à se déplacer à travers le Canada et à l'étranger aux fins de tels examens.—(L'honorable sénateur Robichaud, c.p.)

L'honorable Jack Wiebe: Honorables sénateurs, après de très brèves explications, je voudrais proposer un amendement à cette motion.

La motion a été présentée par le sénateur Gustafson, appuyé par le sénateur Banks. Elle concerne la création d'un comité sénatorial de l'agriculture et des forêts. Cette motion comporte deux volets distincts. Au cours d'une conversation, ce matin, avec le président du Comité de l'Agriculture, le sénateur Gustafson, nous avons jugé préférable de séparer les deux paragraphes. C'est pourquoi nous voudrions soumettre une autre motion concernant les dépenses et le budget du Comité de l'agriculture.

MOTION D'AMENDEMENT

L'honorable Jack Wiebe: Par conséquent, honorables sénateurs, en collaboration avec le sénateur Gustafson, je propose:

Que la motion soit amendée par suppression du mot «et» à la fin du premier paragraphe et par suppression du paragraphe final.

Son Honneur le Président: Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion d'amendement?

L'honorable Noël A. Kinsella (chef adjoint de l'opposition): Honorables sénateurs, pour plus de clarté, l'auteur de la motion propose-t-il que le point virgule qui suit le mot «renvoyés» soit remplacé par un point et que toute la suite du texte soit supprimée?

Le sénateur Wiebe: Oui, honorable sénateur, c'est exact. Je n'ai pas voulu inclure cela dans mon amendement, pour ne pas trop étirer les choses.

Son Honneur le Président: Dois-je comprendre, honorable sénateur Wiebe, que vous acceptez d'apporter à votre amendement la modification proposée par l'honorable sénateur Kinsella?

Le sénateur Wiebe: Oui.

Son Honneur le Président: Les honorables sénateurs donnent-ils leur autorisation de faire ce changement?

Des voix: D'accord.

(La motion d'amendement est adoptée.)

Son Honneur le Président: Je vais maintenant mettre la motion principale aux voix.

L'honorable sénateur Wiebe, appuyé par l'honorable sénateur Banks, propose que le Comité sénatorial permanent de l'agriculture et des forêts soit habilité à retenir les services...

Une voix: Suffit!

Son Honneur le Président: Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion amendée?

Des voix: D'accord.

(La motion amendée est adoptée.)

LE MOIS DE L'HISTOIRE DES NOIRS

L'ALLOCUTION DEVANT L'ASSOCIATION DU BARREAU CANADIEN—INTERPELLATION-AJOURNEMENT DU DÉBAT

L'honorable Anne C. Cools, ayant donné avis le 20 février 2001:

Qu'elle attirera l'attention du Sénat sur la célébration du Mois de l'histoire des Noirs au Canada et le dîner qui a été donné par l'Association du Barreau canadien-Ontario le 1er février 2001, au cours duquel, en sa qualité de conférencière principale elle a prononcé une allocution sur le thème de «Chambre avec vue: Le point de vue d'une sénatrice noire sur le Sénat canadien».

— Honorables sénateurs, le mois de février était le Mois de l'histoire des Noirs et, partout au pays, il y a eu de nombreuses activités au cours desquelles on a fréquemment mentionné mon nom pour souligner que j'étais la première Noire à être nommée au Sénat du Canada. Mon rôle en ma qualité de sénateur est important pour les Noirs et pour tous les Canadiens. La majorité des Canadiens savent que je prends toujours position sur les questions et que je ne m'appuie jamais sur ma race ou sur mon sexe. D'après l'expérience politique que j'ai acquise, la couleur de ma peau n'a jamais été un facteur dans l'obtention du soutien du public. Le soutien du public dont je bénéficie est important. Je suis honorée qu'un si grand nombre de Canadiens de chacune des provinces du pays croient profondément en moi. Il va de soi qu'il existe des racistes, des fanatiques, et des personnes entretenant des préjugés raciaux et autres. Toutefois, ces personnes, où qu'elles puissent se trouver, demeurent une minorité au sein de notre population. Elles peuvent être et sont effectivement oppressives et déplacées étant donné qu'elles soumettent de nombreux Noirs à des mesures visant à les diminuer, à les vexer et à leur faire endurer diverses privations. Toutefois, j'estime que cette minorité embarrasse la majorité des Canadiens.

Honorables sénateurs, je vous parlerai aujourd'hui de l'allocution que j'ai prononcée le 1er février 2001 à l'occasion du dîner offert à Toronto pour l'Association canadienne du Barreau-Ontario pour marquer le Mois de l'histoire des Noirs. L'histoire du Canada et de ses habitants noirs est fort différente de l'histoire américaine, et même contraire à celle-ci. La principale différence tient à la notion de la Couronne et de la reine. Au Canada, à la différence des États-Unis, il n'y a pas eu de guerre civile et aucun Noir n'y a jamais été lynché. Cela ne s'est pas produit par accident. Cela tient au phénomène puissant, dominant, systémique et mystique connu sous l'appellation de Couronne, qui comprend la reine et le Parlement. Cela tient au lien d'allégeance unique que prévoit la Constitution entre la reine et ses sujets, avec sa corollaire, la paix de la reine. La paix de la reine, le précepte constitutionnel selon lequel la vie de tout sujet est inviolable et sacrée, et selon lequel tout sujet a le droit à la protection de la reine, était une partie de l'âme et de la conscience nationales du Canada. Par conséquent, le lynchage de Noirs était inconnaissable et inconnu au Canada.

Honorables sénateurs, il y a quelques mois, le criminaliste torontois John Rosen, qui présidait le dîner auquel j'assistais, m'avait demandé de prononcer une allocution devant cette association du barreau sur le thème «Chambre avec vue: le point de vue d'un sénateur noir sur le Sénat canadien». Ce soir-là, j'ai été touchée d'être accueillie aussi chaleureusement et intimement par ce public trié sur le volet. J'ai été ravie de rencontrer nos juges noirs, le juge Keith A. Hoilett de la Cour supérieure de l'Ontario; le juge Vibert A. Lampkin et le juge Gregory Regis, tous deux de la Cour de justice de l'Ontario. J'ai croisé les criminalistes Walter fox, Cynthia Wasser et le conseiller du Barreau du Haut-Canada Gary Lloyd Gottlieb. Mon ancienne collègue, le sénateur Marian Maloney, dont l'époux est juge, prenait place à mes côtés et aux côtés des juges. L'auditoire comprenait entre autres de nombreux avocats et étudiants en droit de race blanche et de race noire. Les avocats torontois Vusumzi Msi et Michelle Hamilton m'ont présentée à l'auditoire et m'ont remerciée.

(1730)

Honorables sénateurs, j'ai commencé par citer sir Lyman Duff, juge en chef de la Cour suprême du Canada de 1933 à 1944 dans le discours qu'il avait livré à l'occasion du dîner annuel de la Société du Barreau du Haut-Canada en mai 1925. Sir Lyman avait entretenu son auditoire au sujet du Conseil privé et des grands avocats qui étaient devenus députés, hommes publics, grands chanceliers et juges, particulièrement sir George Bessel, solliciteur général sous le premier ministre libéral William Gladstone au XIXe siècle.

Sir Lyman a dit:

Là, vous verrez le nom de Jessel, le fils juif d'un marchand de poisson. Il a obtenu un siège à la Chambre des communes, fait quelques discours politiques qui ont attiré exactement l'attention qu'ils méritaient, soit aucune. Toutefois, un jour une question légale s'est posée qui intéressait beaucoup M. Gladstone, qui était alors premier ministre. Jessel fit un discours à ce sujet et, un poste s'étant libéré peu après au sein du cabinet du solliciteur général, Jessel y fut nommé immédiatement à la demande du premier ministre lui-même. Le grand chef libéral avait coutume de dire que Jessel, lorsqu'il parlait d'une question légale à la Chambre des communes, avait l'accent d'un ange alors qu'en politique, il était incapable de dire quoi que ce soit, si ce n'est de se perdre en lieux communs qui dénotaient un esprit partisan. M. Gladstone n'aimait pas particulièrement les avocats. Il disait toujours que les salaires des juges étaient trop élevés. Il était horrifié de voir les honoraires que se faisaient les conseillers juridiques de la Couronne. Il disait d'un ton jovial, en regardant ces honoraires, que les avocats qui faisaient partie de la vie publique souffraient d'une terrible infirmité, ils ne pouvaient s'empêcher de mettre les mains dans le tiroir-caisse, à une exception, Jessel, le juif. Jessel était le chouchou des avocats. Il expédiait les affaires judiciaires avec une telle rapidité que c'en était miraculeux. On dit qu'il s'est abstenu de se prononcer une seule fois dans sa carrière. Je crois qu'on n'a jamais cassé un de ses jugements.

Cela a bien amusé l'auditoire. John Rosen et d'autres ont ri à gorge déployée. Je me suis adressée aux plus jeunes avocats noirs et j'ai souligné le fait que Jessel, qui allait plus tard devenir le premier juge juif en Angleterre, fut ensuite nommé avocat de la Couronne, non pas parce qu'il était juif, mais parce qu'il connaissait le droit et qu'il était juste. J'ai exhorté ces avocats, jeunes et moins jeunes, à connaître le droit, à faire la distinction entre le droit, la politique et les intérêts, en particulier les intérêts personnels, et à rechercher la vertu.

Honorables sénateurs, j'ai parlé de l'ancien premier ministre libéral Pierre Elliott Trudeau, du fait qu'il m'a nommée au Sénat en 1984 et de nombreuses questions, notamment le divorce, l'importance tant du père que de la mère dans la vie des enfants, et du monde sans père qui est institutionnalisé et légalisé. J'ai dit aux avocats que tant les hommes que les femmes sont capables d'actes bons et mauvais, que la vertu et le vice sont des traits de l'humanité et qu'ils n'ont rien à voir avec le genre. J'ai été chaudement applaudie. J'ai aussi parlé du Sénat et de son rôle dans la Constitution.

Honorables sénateurs, j'ai mentionné le nom de William Wilberforce en me disant qu'aucun Mois de l'histoire des Noirs ne pouvait s'écouler sans que l'on fasse mention de ce grand député qui a siégé à la Chambre des communes du Royaume-Uni de 1780 à 1825. M. Wilberforce, qui était un anglican évangéliste, et d'autres ont lutté durant 40 ans au Parlement afin de faire abolir la traite des esclaves et l'esclavage. Ils ont réussi. Un autre abolitionniste, John Wesley, qui était ministre anglican et qui a fondé l'Église méthodiste en mars 1791, quelques jours à peine avant sa mort, a écrit une lettre à William Wilberforce, qui est reproduite dans un ouvrage publié en 1868 par Samuel Wilberforce et intitulé The Life of Wilberforce. Cette lettre dit:

Je ne peux voir comment vous pouvez poursuivre votre glorieuse entreprise en vous opposant à cette exécrable infamie qu'est le scandale de la religion, de l'Angleterre et de la nature humaine. À moins que Dieu ne vous ait créé à cette fin précise, vous allez être épuisé par l'opposition des hommes et des démons. Mais si Dieu est avec vous, qui peut être contre vous? [...] Allez de l'avant, au nom de Dieu et fort de sa puissance, jusqu'à ce que l'esclavagisme américain, le plus vil jamais vu, disparaisse. Que Celui qui vous a guidé depuis la plus tendre enfance continue de vous soutenir dans cette entreprise comme dans toute chose. C'est la prière de votre serviteur affectueux, JOHN WESLEY.

Le révérend Wesley a fait une mise en garde à Wilberforce, lui disant qu'il ne suffisait pas d'avoir confiance en sa propre droiture et en sa propre valeur. En tant que sénateur, je comprends trop bien que, même avec la vérité, la droiture et la sagesse de son côté, et même avec des arguments sensés et le pouvoir de l'éloquence de son côté, la victoire et la justice sont incertains et nous échappent souvent pour des raisons profondément humaines. La psyché et la nature humaine sont habiles. La fragilité, la faiblesse, la lâcheté, la vanité et la médiocrité de l'homme auront raison du bien et justifieront même une multitude d'erreurs. L'insuffisance humaine est renversante et donne vraiment à réfléchir.

Honorables sénateurs, les avocats présents savaient que j'étais le premier sénateur de race noire au Canada, la première femme de race noire à être membre du Parlement du Canada, la doyenne parmi les sénateurs de sexe féminin et le premier membre de race noire du caucus libéral. Ils étaient impatients d'entendre mes expériences en tant que personne de race noire au Sénat, au sein du Parti libéral et en politique.

Je leur ai parlé de mon expérience en tant que candidate aux élections générales fédérales de 1979 et de 1980 dans la circonscription de Rosedale, à Toronto. Je leur ai parlé du grand respect et de la profonde admiration que le regretté Pierre Elliott Trudeau et moi-même avions l'un pour l'autre. Je leur ai dit que j'avais été l'un de ses loyaux candidats aux élections générales très meurtrières de 1979, où M. Trudeau et ses libéraux avaient été défaits et où M. Trudeau avait été presque détruit sur le plan politique et personnel. Je leur ai dit que, en tant que personne de race noire, c'était quelque chose de nouveau que je brigue l'investiture libérale dans la circonscription de Rosedale, à Toronto, en 1978.

Certains libéraux ont été choqués. Certains libéraux ne se sont pas gênés pour dire, en public et en privé, que je n'étais pas la personne idéale pour cette importante circonscription. Tout cela avait à voir avec la couleur de ma peau. Fait révélateur, l'appui du public à mon égard était plus que considérable, particulièrement dans Rosedale, et c'est encore le cas aujourd'hui.

Les assemblées d'investiture sont des batailles de nombres. J'avais une armée de partisans. Cette assemblée d'investiture, où il n'y avait que deux candidats, prenait une telle ampleur que le personnel du Parti libéral avait eu de la difficulté à trouver un local assez grand. En fait, cette assemblée d'investiture a été reportée plusieurs fois, chaque fois parce qu'on cherchait un local plus grand, et elle a finalement eu lieu au printemps, le 6 avril 1978.

Honorables sénateurs, aucune assemblée de mise en candidature n'avait jamais réuni autant de participants, en fait des milliers de personnes. On en a beaucoup parlé. Dans un geste sans précédent et en fait inhabituel, le premier ministre Trudeau y est venu en personne, après le décompte des votes. M. Trudeau a assisté à cette manifestation largement publicisée dans les médias car, par un heureux hasard, tombait ce jour-là son dixième anniversaire en tant que dirigeant du Parti libéral.

Même si j'ai perdu cette nomination en faveur de John Evans, à l'époque président de l'Université de Toronto, ce processus de mise en candidature s'est imposé à la population comme allant désormais de soi. La présentation des candidats de Rosedale et ces événements ont transformé la politique canadienne à jamais.

En passant, l'Office national du film a réalisé un reportage documentaire sur cette mise en candidature et ma personne. Basé sur les préoccupations éprouvées par certains libéraux quant à l'opportunité de ma candidature, l'Office national du film a baptisé ce court métrage The Right Candidate for Rosedale.

Honorables sénateurs, tout de suite après cette spectaculaire réunion de mise en candidature à Rosedale et d'autres manifestations qui ont révélé les manipulations politiques secrètes et autres faiblesses des libéraux, la bonne fortune des libéraux s'est étiolée du jour au lendemain. Leur cote de popularité a connu un revirement dramatique jusqu'à l'automne où ils ont subi une défaite déconcertante lors des élections partielles d'octobre, perdant 13 candidats sur 15. À Toronto, certains candidats libéraux ont perdu par une marge de deux contre un, y compris à Rosedale. Ce déclin s'est terminé par la défaite du Parti libéral aux élections générales de 1979, auxquelles j'étais candidate, ayant réussi à faire accepter ma candidature pour Rosedale.

Lors des élections de 1979, j'ai été témoin des comportements humains les plus vils, et j'ai vu des gens littéralement cracher sur d'autres, notamment des libéraux. J'ai tenu bon devant les actions méprisables anti-Trudeau. J'ai porté son flambeau. Beaucoup de jeunes avocats noirs étaient étonnés de voir que chaque fois que mes pancartes étaient défigurées par l'inscription du mot «nègre», ou autre expression désobligeante, à l'époque, comme aujourd'hui, je n'en faisais pas cas en public. J'agissais de façon à protéger mon chef, mon parti et mon équipe. Nous nous contentions d'enlever ces pancartes vandalisées et de les remplacer par d'autres.

J'étais déterminée à faire en sorte qu'aucune question raciale ou d'un autre ordre n'entache la réputation de M. Trudeau. Cette responsabilité m'avait été attribuée par des libéraux étourdis. J'ai réussi à éviter les conséquences négatives qu'auraient eu pour M. Trudeau et le Parti libéral les réflexions irraisonnables et dénuées de perspicacité de certains libéraux sur le bon et le mauvais de la couleur noire de ma peau et sur le fait qu'il n'était pas convenable qu'une personne noire, par surcroît une femme, soit candidate libérale dans Rosedale. J'ai appris très tôt que ma vie au sein du Parti libéral allait être difficile et que j'allais devoir me tenir au-dessus de mes détracteurs.

Honorables sénateurs, j'ai parlé aux avocats à propos du fait que j'étais un sénateur de race noire, consciente que bien des Canadiens se demandent pourquoi, en tant que sénateur de longue date bénéficiant d'un appui important au sein du public, je n'ai jamais occupé de postes supérieurs au Parlement. J'ai expliqué à mon auditoire que la nature humaine est imparfaite et que, par conséquent, les dirigeants de la société le sont aussi. Il est impératif que ces dirigeants aspirent à des idéaux et à des principes qui dépassent leur propre nature humaine et leurs propres besoins. Autrement, leur leadership sera fondé sur leurs intérêts, leurs envies, leur vanité et leur ambition personnels. C'est ce que saint Augustin appelait la libido dominandi, c'est-à-dire la soif de la domination et du pouvoir personnel. J'ai dit que le racisme et l'étroitesse d'esprit à l'égard des races sont réels, mais qu'ils peuvent être admirablement surmontés et qu'ils le seront. J'ai avoué que dans les corridors du Parlement, le racisme et le sectarisme sont des sujets épineux. Les humains ont du mal avec leurs propres préjugés et leurs propres insuffisances. Pour faire ressortir cet argument, j'ai cité Benjamin Franklin qui a dit, entre autres, au cours du Congrès américain d'étude de la Constitution de 1787:

(1740)

Lorsque vous réunissez un certain nombre d'hommes pour tirer profit de leur sagesse commune, vous réunissez inévitablement en même temps leurs préjugés, leurs passions, leurs erreurs de jugement, leurs intérêts locaux et leurs opinions égoïstes.

Cela nous donne une certaine idée de la condition humaine, de la faiblesse du comportement humain, particulièrement au sein des organisations de la vie publique et politique. Cela éclaire également un peu l'ensemble particulier de relations et de dynamique humaines réuni dans l'entité sociale que forment les caucus parlementaires des partis politiques. De plus, la faiblesse de l'homme ressort d'autant plus dans le contexte des caucus de partis que ces caucus sont secrets et que le secret admet de par sa nature même une grande part d'obscurité.

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, je regrette d'interrompre le sénateur, mais son temps de parole est terminé. Madame le sénateur désire-t-elle demander la permission de continuer?

Le sénateur Cools: Oui, Votre Honneur.

Son Honneur le Président: Est-ce d'accord, honorables sénateurs?

Des voix: D'accord.

Le sénateur Cools: Je vous remercie, honorables sénateurs.

Les caucus sont impitoyables, et le secret permet d'accroître et de masquer cette nature impitoyable. Il arrive souvent que le secret imposé au caucus masque bon nombre de mauvais traitements, puisque certains dissimulent leurs actes derrière la politique ou la discipline du parti, même lorsqu'il n'y a aucun bien politique ou public en cause. Souvent, les vraies forces humaines agissantes sont la cupidité, la recherche du pouvoir, la jalousie et toutes ces autres passions que Benjamin Franklin a énumérées. L'appartenance au caucus d'un parti repose sur le principe rigoureux du tout ou rien, qu'on peut décrire comme la résistance totale aux assauts ou l'abandon total, lorsqu'on cède tout le terrain à l'assaillant.

Les groupes parlementaires sont devenus un lieu d'échanges rudes et brutaux où les membres se voient infliger épreuves et préjudices dans les seules limites de leur capacité à les encaisser. Souvent, ces préjudices ne sont pas réprimés par les chefs, qui vont même parfois jusqu'à les appuyer. Les groupes parlementaires utilisent de nombreuses techniques de préjudice et de mauvais traitement. On s'y emploie notamment à humilier, discréditer, contrecarrer, miner, embarrasser, calomnier, isoler, tromper, faire preuve de malveillance et déployer d'autres procédés négatifs. Le groupe parlementaire oeuvre sous le sceau du secret et au-dessus des lois. J'y ai connu une grossièreté effrénée. Le phénomène et les pratiques du groupe parlementaire en tant qu'unité sociale de relations humaines a besoin d'un examen introspectif, critique et fondé sur les principes, de même que d'un renouveau et d'un changement éclairés.

Honorables sénateurs, j'ai dit aux juristes qu'on a constamment évité de reconnaître mon ancienneté et ma préséance de sénateur chevronné. Je leur ai dit par exemple qu'on n'a jamais permis au sénateur chevronné que je suis de présider un seul comité sénatorial. En passant, beaucoup se sont demandé pourquoi on n'avait pas fait appel à mes services pour présider le Comité spécial mixte du Sénat et de la Chambre des communes de 1998 chargé d'étudier la question de la garde et du droit de visite des enfants. Si ce n'avait été de l'appui du public, le fait est qu'il n'était même pas certain qu'on m'aurais permis de faire partie du comité. J'ai expliqué que même si l'ancienneté et la préséance dictent que les sénateurs chevronnés devraient avoir le premier choix des comités, il n'en avait pas été ainsi dans mon cas et que j'avais été exclue de certains comités de mon choix. L'année dernière, après en avoir été exclue durant des années, on m'a enfin permis de siéger à un certain comité sénatorial. Chose intéressante, le Sénat a été saisi d'un projet de loi que j'avais étudié à fond. Le projet de loi aurait dû être renvoyé à ce comité. On l'a plutôt renvoyé à un nouveau comité spécial, auquel je n'avais pas été nommée, spécialement constitué pour étudier exclusivement ce projet de loi. Cela a évidemment eu pour résultat de m'empêcher de participer en tant que membre votant à l'étude que ce comité a consacrée au projet de loi.

De même, ces dernières années, j'ai forcé le Sénat à modifier trois projets de loi ministériels. À trois reprises, la possibilité parlementaire de proposer officiellement des modifications à ces trois projets de loi m'a été refusée, et elle n'a pas été consignée au compte rendu et ne passera pas à l'histoire — rappelons-nous que février est le Mois de l'histoire des Noirs, honorables sénateurs. Fait inhabituel, dans un geste sans précédent, pour un de ces projets de loi, la possibilité parlementaire qui m'avait été refusée a été accordée à un sénateur conservateur de l'opposition, et cela, même après que quelques sénateurs libéraux eurent parlé publiquement aux médias de leur intention de m'expulser du comité en cause. J'ai parlé de ma condition au caucus libéral du Sénat, de ma condition sénatoriale. Consciente du fait que ce qui se dit au caucus est secret, je n'ai parlé que de ce qui n'est pas secret. Dans le lexique de l'existentialisme, j'ai dit à mon auditoire qu'au sein de mon propre caucus j'étais une étrangère, une exilée. Une relation juste avec mon caucus m'est inconnue.

Honorables sénateurs, je passe maintenant à la question du leadership moral. J'ai présenté à mon auditoire du barreau, aux avocats, les principes judéo-chrétiens qui sont le fondement de notre société. Je leur ai parlé de la poursuite de la vertu. Je leur ai parlé de l'indulgence, de la patience et de la persévérance face à l'adversité. Quand je leur ai dit que je savais que certains de mes collègues libéraux m'avaient qualifiée de «garce noire», ils ont été surpris de mon indulgence et de ma magnanimité. J'ai dit aux Noirs qu'ils ne devraient pas se laisser démonter, que pour tout acte de racisme dirigé contre eux, il y avait dix possibilités, et qu'ils devraient en profiter. Je leur ai donné l'assurance que la majorité des Canadiens sont de leur côté et que la plupart des Canadiens sont profondément embarrassés par leurs compatriotes racistes, bornés et intolérants. Je leur ai dit de faire la sourde oreille à tous les affronts et à toutes les insultes de ceux qui sont tyrannisés par leurs propres préjugés. J'ai invité les jeunes avocats noirs à rejeter tous les préjugés ainsi que toutes les notions d'infériorité, de barrière, d'insuffisance et de restriction. Je leur ai dit d'aspirer à ce qu'il y a de meilleur et de plus noble, et à participer à la vie politique et aux affaires du pays. Je leur ai dit que la vertu devrait être leur objectif et que la vertu était l'objectif suprême.

En incitant mon auditoire à rechercher la vertu, j'ai dit que le fait de ne pas la rechercher équivalait à rechercher plutôt l'intérêt personnel, à être dominé par l'ambition pure et la cupidité. Je leur ai dit que la loi devrait promouvoir la vertu. J'ai cité saint Thomas d'Aquin, qui a écrit dans son oeuvre maîtresse, Summa Theologia:

La planification pour le bien général appartient au peuple dans son ensemble ou à quelqu'un qui le représente, car ceux qui poursuivent un but doivent planifier en conséquence. Le but d'une loi, selon Aristote, est de promouvoir la vertu.

Lorsque j'ai eu terminé mon discours, l'auditoire composé de membres du barreau m'a fait une très longue ovation debout.

En conclusion, honorables sénateurs, je vais parler de certaines formes particulières de sensibilisation raciale, des stéréotypes raciaux chez les Noirs et de la dynamique entre les stéréotypés et les stéréotypeurs. Cette dynamique repose sur deux élans: l'élan protecteur, soit la tendance à une bienveillance protectrice, et l'élan hostile, c'est-à-dire la tendance à l'antagonisme et l'instinct d'opposition. Cette forme de sensibilisation raciale est la subordination politique et intellectuelle des Noirs et la ségrégation qui en résulte.

Au cours d'une audience du Comité judiciaire du Sénat américain de 1991, le juge Clarence Thomas a défini le phénomène. Il a qualifié de «choquant» qu'on s'attende à ce que les Noirs se conforment à certains stéréotypes. De nombreux Noirs ne correspondent absolument pas aux stéréotypes établis concernant la race noire parce que, comme tous les gens, ils ont des personnalités différentes. Leur comportement, leur cadre conceptuel, leur façon de parler, leurs vues politiques et intellectuelles ne correspondent pas nécessairement aux stéréotypes. Cette non-conformité, cette différence entre eux et les stéréotypes dérange les tenants de ces stéréotypes concernant le comportement des Noirs qui, par ressentiment, réagissent souvent en affichant un certain antagonisme, un élan d'hostilité, par rapport à l'élan protecteur fondé sur la reconnaissance par la couleur seulement, et non par le mérite. Les professionnels accomplis de race noire connaissent ces formes de sensibilisation raciale et leurs conséquences. Elle mènent en bout de ligne à l'exclusion, à la séparation — une sorte d'apartheid — des Noirs, dont la contribution intellectuelle et professionnelle se trouve empêchée. Cet empêchement systématique d'une pleine participation, cette absence persistante de contribution de la part des Noirs, habituellement sans discussion et parfois accompagnée d'un antagonisme intense et persistant, est de la sensibilisation raciale, et c'est une forme particulière de racisme.

(1750)

En terminant, honorables sénateurs, je voudrais dire que le racisme est bien réel et existe. La forme de racisme que je viens de décrire en est une que je connais très bien pour l'avoir souvent vécue.

Cependant, je suis maintenant au Canada, un pays magnifique. J'adore le Canada. J'ai beaucoup de soutien ici. Je dis aux Canadiens que je les aime tous. Je suis avec eux. Je suis un soldat et je continuerai la lutte.

(Sur la motion du sénateur Kinsella, le débat est ajourné.)

PÊCHES

AUTORISATION AU COMITÉ DE PERMETTRE LA DIFFUSION DE SES DÉLIBÉRATIONS PAR LES MÉDIAS ÉLECTRONIQUES

L'honorable Gerald J. Comeau, conformément à l'avis donné le 1er mars 2001, propose:

Que le Comité sénatorial permanent des pêches soit habilité à permettre la diffusion de ses délibérations publiques par les médias d'information électroniques, en dérangeant le moins possible ses travaux.

(La motion est adoptée.)

Autorisation au comité d'étudier des questions relatives à l'industrie de la pêche

L'honorable Gerald J. Comeau, conformément à l'avis donné le 1er mars 2001, propose:

Que le Comité sénatorial permanent des pêches soit autorisé à étudier, afin de présenter un rapport, des questions relatives à l'industrie des pêches;

Que les mémoires reçus et les témoignages entendus sur la question dans la deuxième session de la trente-sixième législature soient déférés au Comité;

Que le Comité fasse son rapport final au plus tard le 31 mars 2002; et

Que le Comité soit autorisé, nonobstant les pratiques habituelles, à déposer des rapports auprès du greffier du Sénat si le Sénat ne siège pas, et que ledit rapport soit réputé avoir été déposé au Sénat.

(La motion est adoptée)

AUTORISATION AU COMITÉ D'ENGAGER DU PERSONNEL

L'honorable Gerald J. Comeau, conformément à l'avis donné le 12 mars 2001, propose:

Que le Comité sénatorial permanent des pêches soit habilité à retenir les services de conseillers, techniciens, employés de bureau ou autres éléments nécessaires pour examiner les projets de loi, la teneur de projets de loi et les prévisions budgétaires qui lui ont été déférés.

(La motion est adoptée.)

(Le Sénat s'ajourne au mercredi 14 mars 2001, à 13 h 30.)


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