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Débats du Sénat (Hansard)

Débats du Sénat (hansard)

1re Session, 37e Législature,
Volume 139, Numéro 97

Le jeudi 14 mars 2002
L'honorable Dan Hays, Président


LE SÉNAT

Le jeudi 14 mars 2002

La séance est ouverte à 13 h 30, le Président étant au fauteuil.

Prière.

LA SANCTION ROYALE

AVIS

Son Honneur le Président informe le Sénat qu'il a reçu la communication suivante:

RIDEAU HALL

Le 13 mars 2002

Monsieur le Président,

J'ai l'honneur de vous aviser que la Très honorable Adrienne Clarkson, Gouverneure générale du Canada, se rendra à la Chambre du Sénat, le 21 mars 2002, à 15 heures, afin de donner la sanction royale à certains projets de loi.

Veuillez agréer, Monsieur le Président, l'assurance de ma haute considération.

Le secrétaire du Gouverneur général,
Barbara Uteck

L'honorable
        Le Président du Sénat
                Ottawa


[Traduction]

DÉCLARATIONS DE SÉNATEURS

QUESTION DE PRIVILÈGE

AVIS

L'honorable Anne C. Cools: Honorables sénateurs, conformément au paragraphe 43(7) du Règlement du Sénat, je donne avis que je prendrai la parole plus tard au cours de la journée pour soulever une question de privilège relativement à certaines mesures prises et certains mots utilisés au cours des débats du Sénat du mercredi 13 mars 2002, lesquels violent les privilèges du Sénat.

Honorables sénateurs, je demanderai au Président du Sénat de décider si cette question de privilège est fondée à première vue. Dans l'affirmative, je suis disposée à proposer la motion nécessaire dans cette affaire.

Honorables sénateurs, conformément au paragraphe 43(3) du Règlement, j'ai donné plus tôt aujourd'hui un avis écrit au greffier du Sénat, l'informant que j'avais l'intention de soulever cette question de privilège.

LE MOIS DU REIN

L'honorable Yves Morin: Honorables sénateurs, 12 personnes apprennent chaque jour que leurs reins ne fonctionnent plus. Plus de 23 000 personnes vivent actuellement grâce à la dialyse ou à une transplantation rénale et on prévoit que le nombre de personnes qui auront besoin d'une telle thérapie doublera au cours des dix prochaines années. Au total, plus de 2 millions de Canadiens souffrent d'une maladie des reins ou d'affections connexes.

Le mois de mars est le mois du rein au Canada, le mois au cours duquel nous devons penser à ceux qui souffrent d'une maladie du rein et à ceux qui y sont prédisposés. Les personnes qui font de l'hypertension risquent fort de souffrir d'une maladie des reins et c'est également le cas de ceux qui souffrent de diabète, c'est-à-dire un Canadien sur 13. Les risques sont particulièrement élevés dans le cas des autochtones diabétiques et des personnes âgées.

[Français]

Si nous avons accompli de grands progrès dans le domaine des maladies du rein, c'est aussi grâce à l'oeuvre de pionniers remarquables comme l'a été le docteur Yves Warren, qui a mis sur pied un des premiers systèmes d'hémodialyse et de transplantation rénale au pays à l'Hôtel-Dieu de Québec. Il a réussi à former progressivement une équipe enthousiaste de néphrologues impliqués non seulement dans les soins aux malades, mais aussi dans l'enseignement et la recherche. J'aimerais rendre un hommage particulier au docteur Warren de même qu'à tous ces pionniers à qui nous devons tellement dans le domaine des maladies du rein.

[Traduction]

La Fondation canadienne du rein finance près de la moitié des 10 millions de dollars dépensés chaque année au Canada pour la recherche dans ce domaine. Il est intéressant de noter que les maladies chroniques comme les maladies du rein, les maladies cardiovasculaires et le diabète ont des mécanismes communs, des facteurs de risque prédisposants, des stratégies de prévention et de traitement semblables et le même genre de répercussions sur les services et les systèmes de santé.

La Fondation canadienne du rein a formé un partenariat avec les Instituts de recherche en santé du Canada par l'intermédiaire de l'Institut de la nutrition, du métabolisme et du diabète, sous l'habile direction du Dr Diane Finegood. Ce partenariat finance des programmes de recherche multidisciplinaire portant sur les aspects communs et apparentés de la maladie des reins.

[Français]

C'est dans ce genre de collaboration que nous trouverons l'espoir d'apporter une aide définitive à tous les Canadiens qui souffrent de maladies rénales.


(1340)

[Traduction]

AFFAIRES COURANTES

LE BUDGET DES DÉPENSES DE 2001-2002

PRÉSENTATION DU RAPPORT DU COMITÉ DES FINANCES NATIONALES SUR LE BUDGET SUPPLÉMENTAIRE DES DÉPENSES (B)

L'honorable Lowell Murray: Honorables sénateurs, j'ai l'honneur de présenter le onzième rapport du Comité sénatorial permanent des finances nationales sur le Budget supplémentaire des dépenses (B) de 2001-2002.

(Le texte du rapport figure à l'annexe A, p. 1297, des Journaux du Sénat d'aujourd'hui.)

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, quand étudierons-nous ce rapport?

(Sur la motion du sénateur Murray, l'étude du rapport est inscrite à l'ordre du jour de la prochaine séance.)

[Français]

LE BUDGET DES DÉPENSES DE 2001-2002

PRÉSENTATION DU RAPPORT DU COMITÉ DES FINANCES NATIONALES

L'honorable Lowell Murray: Honorables sénateurs, j'ai l'honneur de présenter le douzième rapport du Comité permanent des finances nationales portant sur le Budget des dépenses pour l'exercice se terminant le 31 mars 2002.

(Le texte du rapport figure à l'annexe B, p. 1303, des Journaux du Sénat d'aujourd'hui.)

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, quand étudierons-nous ce rapport?

(Sur la motion du sénateur Murray, l'étude du rapport est inscrite à l'ordre du jour de la prochaine séance.)

[Traduction]

LA LOI SUR LA COMPENSATION ET LE RÈGLEMENT DES PAIEMENTS

PROJET DE LOI MODIFICATIF—RAPPORT DU COMITÉ

L'honorable Richard Kroft, an nom du sénateur E. Leo Kolber, président du Comité sénatorial permanent des banques et du commerce, présente le rapport suivant:

Le jeudi 14 mars 2002

Le Comité sénatorial permanent des banques et du commerce a l'honneur de présenter son

QUATORZIÈME RAPPORT

Votre Comité, auquel a été déféré le projet de loi S-40, Loi modifiant la Loi sur la compensation et le règlement des paiements, a, conformément à l'ordre de renvoi du mardi 12 mars 2002, étudié ledit projet de loi et en fait maintenant rapport sans amendement.

Respectueusement soumis,

Le président,
E. LEO KOLBER

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, quand lirons-nous ce projet de loi une troisième fois?

(Sur la motion du sénateur Wiebe, la troisième lecture du projet de loi est inscrite à l'ordre du jour de la prochaine séance.)

[Français]

LA CÉRÉMONIE DE LA SANCTION ROYALE

AVIS DE MOTION AUTORISANT LA DIFFUSION EN CHAMBRE

L'honorable Fernand Robichaud (leader adjoint du gouvernement): Honorables sénateurs, je donne avis que mardi prochain, le 19 mars 2002, je proposerai:

Que les caméras de télévision soient autorisées dans la Chambre pour la diffusion de la cérémonie de la sanction royale, prévue le 21 mars 2002, en dérangeant le moins possible les travaux de la Chambre.

LE GROUPE INTERPARLEMENTAIRE CANADA-JAPON

DÉPÔT DU RAPPORT DE LA DÉLÉGATION CANADIENNE À LA RÉUNION DE LA VINGT-DEUXIÈME ASSEMBLÉE GÉNÉRALE

L'honorable Marie-P. Poulin: Honorables sénateurs, j'ai l'honneur de déposer, dans les deux langues officielles, le rapport de la 22e Assemblée générale du Groupe interparlementaire Canada-Japon, qui s'est tenue à Bangkok, en Thaïlande, du 2 au 7 septembre 2001.

DÉPÔT DU RAPPORT DE LA DÉLÉGATION CANADIENNE SUR LA VISITE ANNUELLE DU PRÉSIDENT AUX MEMBRES DE LA DIÈTE

L'honorable Marie-P. Poulin: Honorables sénateurs, j'ai l'honneur de déposer, dans les deux langues officielles, le rapport du Groupe interparlementaire Canada-Japon sur la visite annuelle du Président aux membres de la Diète, qui s'est tenue à Tokyo du 17 au 22 novembre 2001.

L'ASSEMBLÉE PARLEMENTAIRE DE LA FRANCOPHONIE

DÉPÔT DU RAPPORT DE LA SECTION CANADIENNE À LA RÉUNION TENUE DU 10 AU 13 FÉVRIER 2002

L'honorable Rose-Marie Losier-Cool: Honorables sénateurs, en vertu de l'article 23(6) du Règlement, j'ai l'honneur de déposer, dans les deux langues officielles, le rapport de la section canadienne de l'Assemblée parlementaire de la Francophonie, ainsi que le rapport financier y afférent. Le rapport a trait à la réunion de la Commission de l'éducation, de la communication et des affaires culturelles de l'APF, qui s'est tenue au Caire et à Alexandrie, en Égypte, du 10 au 13 février 2002.

[Traduction]

LE HALIFAX GAZETTE

AVIS DE MOTION VISANT LA CÉLÉBRATION DE SON DEUX CENT CINQUANTIÈME ANNIVERSAIRE

L'honorable B. Alasdair Graham: Honorables sénateurs, je donne avis que mardi prochain, le 19 mars 2002, je proposerai:

Que le Sénat du Canada célèbre avec toute la population le 250e anniversaire du premier quotidien à voir le jour au Canada, le Halifax Gazette. La parution du premier exemplaire, le 23 mars 1752, marque le début de l'industrie des journaux au Canada, une industrie qui contribue énormément à la vigueur et à la constance des traditions démocratiques au Canada.

[Français]

PÊCHES

AVIS DE MOTION AUTORISANT LE COMITÉ À ÉTUDIER DES QUESTIONS RELATIVES AUX OCÉANS ET AUX PÊCHES

L'honorable Gerald J. Comeau: Honorables sénateurs, je donne avis que, le mardi 19 mars 2002, je proposerai:

Que le Comité sénatorial permanent des pêches soit autorisé à étudier, afin de présenter un rapport, sur des questions relatives aux océans et aux pêches;

Que les mémoires reçus et les témoignages entendus sur la question dans la première session de la trente-septième législature soient déférés au Comité;

Que le Comité fasse son rapport final au plus tard le 30 juin 2003; et

Que le Comité soit autorisé, nonobstant les pratiques habituelles, à déposer des rapports auprès du greffier du Sénat si le Sénat ne siège pas, et que ledit rapport soit réputé avoir été déposé au Sénat.


[Traduction]

PÉRIODE DES QUESTIONS

LES AFFAIRES ÉTRANGÈRES

LES RELATIONS AVEC LES ÉTATS-UNIS

L'honorable W. David Angus: Honorables sénateurs, je suis inquiet — et je pense que nous devrions tous l'être — de ce qui semble être un climat de plus en plus froid entre le Canada et nos bons voisins au sud, notre principal partenaire commercial. Qu'il s'agisse de questions de sécurité à notre frontière non protégée, acclamée internationalement depuis tant d'années, ou de questions de sécurité dans nos ports, ou encore du rôle de nos forces en Afghanistan ou je ne sais quoi, il semble y avoir un refroidissement des relations entre nos deux pays. Il y a des signes de mécontentement relativement à notre position sur les élections générales au Zimbabwe et à ce que nous pourrions faire relativement à l'Iraq. Nous ne semblons pas être d'accord avec notre plus important allié et nos divergences d'opinions sont maintenant étalées au grand jour.

On peut lire maintenant dans la presse nationale et internationale que par ses actes, M. Chrétien contribue peut-être à ce refroidissement des relations. Hier, nous avons lu dans la presse que les fonctionnaires de la Maison-Blanche ont donné à notre premier ministre un surnom qui en dit long sur la détérioration de nos relations dont je viens de parler. Ils l'appellent «Dino le dinosaure». En tant que Canadien, cette situation me préoccupe beaucoup. Cela a maintenant éclaté au grand jour.

Ma question au leader du gouvernement au Sénat est la suivante: quand le gouvernement va-t-il faire une déclaration claire et sans équivoque pour appuyer notre meilleur ami et voisin et notre plus important partenaire commercial?

L'honorable Sharon Carstairs (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, je veux me dissocier de tout ce qui vient d'être dit par l'honorable sénateur.

Des voix: Bravo!

Le sénateur Carstairs: Si nous voulons parler de nos relations avec les États-Unis, que pourrait-il y avoir de mieux que de savoir qu'à l'heure actuelle, le premier ministre du Canada et le président des États-Unis se rencontrent? Ils discutent de questions qui nous préoccupent mutuellement.

Des voix: Bravo!

(1350)

Le sénateur Carstairs: Comment peut-on parler d'un refroidissement des relations entre nos deux pays alors que nous participons avec nos voisins américains à une guerre contre le terrorisme en Afghanistan?

Des voix: Bravo!

Le sénateur Carstairs: Peut-on parler de refroidissement de nos relations alors que nous avons signé la semaine dernière encore un accord au sujet de la sécurité de nos ports et de l'inspection douanière conjointe des conteneurs dans ces ports du Canada?

Je tiens à dire que nos relations avec les États-Unis sont très positives, et elles devraient continuer de l'être.

Des voix: Bravo!

Le sénateur Carstairs: Honorables sénateurs, est-ce à dire que nous serons toujours d'accord avec tous les propos et toutes les interventions des États-Unis? La réponse est non. Nous sommes un pays souverain et nous le demeurerons.

Des voix: Bravo!

Le sénateur Angus: Je remercie madame le leader du gouvernement de cette déclaration, qui est vraiment loin d'être claire, mais où se déroule aujourd'hui la rencontre entre le premier ministre et le président des États-Unis? Selon un sénateur, ce pourrait être dans un musée où habitent les autres dinosaures. Je n'en connais pas le lieu, mais je sais qu'elle n'est pas prévue au ranch familial du président des États-Unis, où le président de la Russie et d'autres dirigeants mondiaux et tous les dirigeants des pays de l'OCDE sont invités, sauf notre premier ministre, qui est considéré présentement comme un citoyen de deuxième classe. Je suis perturbé — et nous devrions tous l'être — par cette situation.

Je posais plus tôt cette semaine des questions concernant le rapport du Comité sénatorial permanent de la sécurité nationale et de la défense, qui évoque la nécessité de faire quelque chose. J'ai posé des questions au leader du gouvernement, et on nous a dit que nous obtiendrions d'autres renseignements plus tard. Toutefois, il y a maintenant de l'information supplémentaire à ce sujet. Les Américains enverront des agents des ports pour prêter main forte dans le cadre des activités de contrôle douanier et de sécurité dans les ports, mais ils seront obligés de laisser de côté leur arme à feu. Lorsqu'ils accomplissent le même travail dans les ports américains, ils sont armés.

Honorables sénateurs, quand allons-nous harmoniser nos mesures avec celles de nos homologues du sud de la frontière et contribuer à favoriser plutôt qu'à gêner le règlement de ces problèmes de sécurité? Quand placerons-nous des agents à bord des aéronefs et quand collaborerons-nous à l'effort international de lutte contre le terrorisme au lieu de continuellement mettre des bâtons dans les roues?

Le sénateur Carstairs: Je ne peux dire à l'honorable sénateur exactement où aura lieu la rencontre de cet après-midi. Toutefois, je suppose que ce sera dans le Bureau ovale, qui est le bureau du président des États-Unis. C'est là l'endroit exact où devraient se dérouler les rencontres entre les chefs de deux pays importants de la planète. Ces rencontres n'ont pas à se dérouler dans des ranchs du Texas. Elles n'ont pas à avoir lieu à bord de navires. Elles doivent se dérouler là où les décisions sont prises. Je ne sais pas où le sénateur Angus s'occupe de ses activités, mais je mène les miennes dans mon bureau et je m'attends à ce que le président des États-Unis et le premier ministre du pays s'acquittent aussi de leurs activités dans leurs bureaux.

Des voix: Bravo!

L'honorable Terry Stratton: Honorables sénateurs, je constate que madame le leader du gouvernement au Sénat est dans d'excellentes dispositions cet après-midi, et je m'en réjouis car les élèves qui font partie de l'auditoire pourront apprécier sa prestation.

La question de la souveraineté me préoccupe. Du jour au lendemain, le Canada renonce à sa souveraineté. Pourquoi? On a beau le lire, on a peine à le croire. Comme l'a dit le sénateur Angus, des douaniers américains seront postés dans des ports canadiens. Que se passe-t-il donc? Ne pouvons-nous pas inspecter nous-mêmes nos installations portuaires? Pourquoi faut-il faire appel à des douaniers américains? Que faisons-nous de notre souveraineté? Pourquoi devons-nous subitement céder la direction de nos ports aux Américains?

Le sénateur Robichaud: C'est ce que le sénateur Angus voulait faire.

Le sénateur Stratton: Si la protection de notre souveraineté est une source de préoccupation, nous y renonçons.

Le sénateur Carstairs: J'espère que tous ces merveilleux élèves qui se trouvent dans la tribune auront une opinion favorable de leur professeur. En fait, ayant moi-même enseigné en onzième et douzième années pendant de nombreuses années, je tiens à leur dire que des enseignants qui passent à d'autres professions peuvent y faire de l'excellent travail.

J'aimerais que nos vis-à-vis fassent preuve d'une certaine cohérence. Le sénateur Angus voudrait que nous renoncions à notre souveraineté. Il propose que nous permettions à nos agents d'être armés au Canada comme leurs homologues le sont aux États-Unis. J'ai défendu ardemment le projet de loi sur le contrôle des armes à feu au Canada, et je ne tiens nullement à voir au Canada des agents américains porter des armes comme ils le font aux États-Unis. C'est une question de souveraineté.

Quant à sa question, je présume que le sénateur Stratton s'est, comme nous tous d'ailleurs, déjà prêté au précontrôle douanier par des agents américains au Canada. Cette procédure a été instaurée pour faciliter les choses aux voyageurs canadiens. C'est la raison pour laquelle nous nous y prêtons.

En ce qui concerne l'intérêt du sénateur Stratton pour les ports, nous avons pris cette mesure conjointe pour faire en sorte qu'un conteneur qui est transporté du Canada aux États-Unis soit inspecté une seule fois au lieu de deux. Cette mesure vise à faciliter le commerce, et je suis convaincue que le sénateur Stratton et le sénateur Angus sont tout à fait en faveur de cela.

Le sénateur Stratton: Je réserve mes munitions à la question des armes à feu. C'est le leader du gouvernement au Sénat qui a soulevé cette question, pas moi. Combien dépensons-nous actuellement pour le contrôle des armes à feu? Précisément 689 millions de dollars. Combien de policiers ont été tués ou blessés ces trois derniers mois dans l'exercice de leurs fonctions? Et madame le leader prétend que le contrôle des armes à feu fonctionne? C'est une plaisanterie, et elle le sait.

Le sénateur Carstairs: Je suis en désaccord avec l'honorable sénateur. Heureusement, je fais partie des 80 p. 100 environ de Canadiens qui pensent eux aussi que notre loi sur le contrôle des armes à feu est une manière fort valable de manifester notre souveraineté.

L'honorable Laurier L. LaPierre: Ma question s'adresse à madame le leader du gouvernement au Sénat. Est-elle au courant que le seul président américain qui ne se soit pas mis en colère contre le Canada est le président Roosevelt du temps du premier ministre Mackenzie King? Le président Kennedy a tenu des propos diffamatoires sur le premier ministre Diefenbaker. Le président Johnson a presque étranglé le premier ministre Pearson. Des méchancetés ont été dites au sujet du premier ministre Trudeau par les divers présidents de l'époque; je ne les répéterai pas ici car il y a des jeunes à la tribune, et je ne veux pas offenser leurs innocentes oreilles.

J'ignore si on a dit des méchancetés sur M. Mulroney qui, comme on le sait, était en très bons termes avec les habitués de Newport Beach.

Enfin, je dirais du Texas que la nourriture y est exécrable.

Le sénateur Carstairs: Je ne pense pas que le sénateur LaPierre sera surpris d'apprendre que, ayant enseigné l'histoire canadienne pendant 20 ans, je suis au courant de tous ces échanges entre présidents américains et premiers ministres canadiens. Pour moi, cela est important pour comprendre qui nous sommes et que nous ne devrions jamais devenir trop coopératifs avec les États-Unis ni être trop souvent perçus comme étant de connivence avec les États-Unis. L'idée que j'ai de moi-même en tant que Canadienne a certainement été rehaussée par les trois années que j'ai passées aux États-Unis, après quoi je suis rentrée dans mon pays avec un sentiment de profonde gratitude du fait que c'est le pays souverain que nous connaissons.

Des voix: Bravo!

LE COMMERCE INTERNATIONAL

LES ÉTATS-UNIS—LA RECONDUCTION DE L'ACCORD SUR LE BOIS D'OEUVRE

L'honorable Lowell Murray: Honorables sénateurs, parlant des relations entre le Canada et les États-Unis, cela me rappelle que je voudrais poser au leader du gouvernement au Sénat une question au sujet des négociations sur le bois d'oeuvre. Le gouvernement s'attend-il à ce que, dans le cadre d'un accord provisoire avec les États-Unis, le Canada soit tenu de mettre fin aux actions en justice qu'il a intentées et qui ont toutes abouti, par le passé, à une victoire du Canada?

(1400)

L'honorable Sharon Carstairs (leader du gouvernement): Je remercie le sénateur de sa question. Comme il le sait, le bois d'oeuvre est l'une des questions dont le premier ministre et le président doivent s'entretenir cet après-midi. Si je comprends bien, il est possible que l'on arrive à un accord non pas «provisoire», mais permanent.

Le sénateur Murray: Peut-être est-ce le voeu qui guide la pensée.

Madame le leader du gouvernement au Sénat peut-elle garantir au Sénat que, quelle que soit la nature de l'accord — provisoire ou permanent — le Canada ne sera pas tenu de renoncer aux actions en justice qu'il a intentées dans ce dossier en vertu de divers accords commerciaux?

Le sénateur Carstairs: La question du sénateur est hypothétique dans la mesure où aucun accord n'a encore été conclu. Néanmoins, que le sénateur soit rassuré, je ferai part de son message à mes collègues du Cabinet.

L'AGENCE DES DOUANES ET DU REVENU DU CANADA

LA FORMATION DES AGENTS DES DOUANES

L'honorable Ethel Cochrane: Honorables sénateurs, ma question s'adresse au leader du gouvernement au Sénat. Au cours des derniers jours, divers médias ont abordé les questions de la dotation et de la formation à l'Agence des douanes et du revenu du Canada. Les Canadiens ont notamment appris qu'en période de pointe, ce sont surtout des étudiants qui sont chargés de la protection de nos frontières.

Je conviens que j'ai vu différents chiffres à ce sujet. Selon l'agence Presse canadienne, les étudiants représentent environ 25 p. 100 de la main-d'oeuvre. Selon l'émission The World at Six d'hier soir du réseau anglais de Radio-Canada, pendant l'été, presque la moitié des agents des douanes sont des étudiants. Le leader du gouvernement au Sénat pourrait peut-être me donner des précisions sur ces chiffres.

Peu importe les chiffres, nous savons que des étudiants ne reçoivent que deux ou trois semaines de formation de base alors que les agents réguliers suivent un cours intensif de neuf semaines à Rigaud, à l'ouest de Montréal, afin d'être bien au fait des 70 lois fédérales qu'ils sont chargés de faire respecter. Cela signifie que ces étudiants reçoivent une formation plus que deux fois plus courte que la formation régulière avant d'entrer en fonction. Ils travaillent lorsque les agents et les inspecteurs des douanes réguliers sont en vacances. En d'autres termes, ces étudiants, qui ont une formation moindre, travaillent lorsqu'il y a nettement moins d'agents chevronnés sur place qui sont en mesure de fournir des conseils et de l'appui. Le syndicat représentant les agents des douanes du Canada soutiennent qu'il s'agit d'un problème.

Officiellement, l'Agence des douanes et du revenu du Canada affirme que le programme de remplacement estival fonctionne depuis les années 60 et qu'il n'y a aucun motif d'inquiétude. De toute évidence, depuis les attentats du 11 septembre, cet argument s'avère pour le moins incroyablement faible. À mon avis, c'est honteux et cela ne nous rassure absolument pas en tant que Canadiens.

Que fait le gouvernement pour s'assurer que tous les agents à nos frontières possèdent la formation nécessaire pour répondre aux exigences de leur poste, suite aux attentats du 11 septembre?

L'honorable Sharon Carstairs (leader du gouvernement): Je remercie madame le sénateur de sa question. Puisqu'elle a aussi été enseignante, je ne pense pas qu'elle aimerait que sa question soit interprétée comme étant un souhait de voir limiter le nombre de possibilités d'emploi d'été pour les jeunes au sein du gouvernement du Canada.

Quant à sa question, oui, on continuera d'embaucher des étudiants. Ceux-ci bénéficieront d'une période de formation réduite, car la période complète couvrirait toute la durée de leur emploi d'été. Bien sûr, on leur confiera aussi des responsabilités réduites. Ces étudiants ne travaillent que sous la supervision d'agents des douanes ayant reçu une formation complète.

Ils n'ont pas le pouvoir de faire appliquer le Code criminel. Ils doivent renvoyer à un agent des douanes qualifié toute personne qu'ils trouvent ayant contrevenu au Code criminel.

Le sénateur Cochrane: Honorables sénateurs, je crois savoir que certains de ces étudiants sont en première ligne. Loin de moi l'idée de ne pas appuyer le travail des étudiants. Je me suis levée à maintes reprises pour défendre le travail d'été pour les étudiants. En fait, je suis déçue de voir que nombre d'entre eux n'ont pas réussi à se trouver un emploi.

Je crois savoir que ces étudiants sont en première ligne. Ils devraient pouvoir travailler, certes, mais peut-être dans des emplois de bureau ou des emplois semblables où ils n'auraient pas de telles décisions à prendre et où des agents expérimentés seraient là pour intervenir en cas de problème, une menace terroriste par exemple. Cela n'est pas impensable. Cela pourrait très bien devenir un problème à nos frontières.

Après les attentats du 11 septembre, le gouvernement a engagé 54 millions de dollars sur six ans pour l'embauche de 300 nouveaux agents. Afin que les objectifs puissent être atteints, le centre de formation de Rigaud devra former 700 nouveaux agents l'année prochaine. C'est une hausse importante du nombre de diplômés quand on pense que la moyenne était de 200 dans les années passées. Avec 400 diplômés cette année, ce nombre a doublé, et il doublera encore l'an prochain pour atteindre 700.

Quels changements seront faits, particulièrement au plan des ressources pédagogiques, en vue de former adéquatement ces agents? Comment pouvons-nous avoir l'assurance, depuis septembre dernier surtout, que nos frontières sont surveillées non seulement par un nombre adéquat d'agents mais aussi par des agents bien formés et bien outillés?

Le sénateur Carstairs: Comme madame le sénateur le sait, le budget de décembre a alloué des montants précis pour le genre de développement de la formation dont elle parle. Ce développement de la formation est en cours à l'heure actuelle.

L'honorable Michael A. Meighen: Honorables sénateurs, je crois savoir que la période de formation pour les étudiants est généralement d'environ deux semaines, tandis que la période de formation pour les employés à temps plein est d'environ huit semaines. Franchement, j'ai du mal à comprendre que six semaines puissent faire la différence entre une personne complètement formée et une personne dont la formation est sérieusement déficiente, comme on l'a souvent dit dans le cas de ces étudiants. Ou bien les employés à temps plein ne sont pas suffisamment formés en six semaines, ou bien les étudiants qui l'ont été en deux semaines sont au moins un tiers aussi bien formés que les employés à temps plein et devraient être considérés comme tels.

Est-ce que la différence de six semaines ne pourrait pas être comblée au cours de la période d'emploi d'été des étudiants, ou a-t-on l'intention d'allonger la période de formation pour les employés à temps plein?

Le sénateur Carstairs: La durée de la formation à l'intention des agents des douanes est à l'étude, tout comme l'initiative et le programme de formation. Seul le temps dira ce qui en résultera.

Puisque l'honorable sénateur Cochrane a dit que les étudiants sont placés en première ligne, je tiens à répéter que, lorsqu'ils font vérifier un passeport ou autre document par l'ordinateur et qu'un problème est signalé, ce ne sont pas eux qui s'occupent du problème. Voilà pourquoi ils ne sont pas tenus d'avoir une formation de même durée.

Le sénateur Meighen: L'honorable leader pourrait également, dans le cadre de l'examen du programme de formation, prendre en considération le fait que de nombreux agents des douanes, après avoir bénéficié de six semaines de formation, sont encore tenus de travailler seuls. Que des agents des douanes non armés — ce que j'approuve, soit dit en passant — travaillent seuls à des postes isolés, voilà qui cause des inquiétudes à ces agents, de même qu'à ceux d'entre nous qui ont eu l'occasion d'examiner la situation.

Le sénateur Carstairs: Voilà une question très importante. Dans le cadre de cet examen, je porterai le message de l'honorable sénateur à l'attention du ministre responsable.

LA DÉFENSE NATIONALE

LA GUERRE EN AFGHANISTAN—L'OPÉRATION HARPON—DEMANDE DE MISE À JOUR

L'honorable J. Michael Forrestall: Ma question s'adresse à madame le leader du gouvernement au Sénat. Madame le ministre peut-elle faire le point sur le succès du groupe du bataillon du Princess Patricia dans l'opération Harpon?

L'honorable Sharon Carstairs (leader du gouvernement): Pour répondre à cette question du sénateur Forrestall — je répondrai ensuite à une question qu'il a posée hier — au sujet du déroulement de l'opération jusqu'ici, tout ce que je sais, c'est que les choses se déroulent bien. Cependant, comme je l'ai dit hier dans une note préliminaire dont le sénateur a sûrement pris connaissance, la tâche n'est manifestement pas facile. Nous nous sommes informés. Ils sont au milieu des combats et, de toute évidence, nous devons penser à eux et prier pour leur sécurité.

(1410)

Hier, le sénateur Forrestall a posé une question au sujet des prestations. Il avait posé une question semblable le 7 novembre 2001. Nous avons répondu à cette question le 22 novembre 2001. Cependant, je vais la répéter, car il s'agit là d'une question importante, et d'autres sénateurs veulent peut-être en connaître la réponse:

Le Décret du c.p. 1989-583 met tous les militaires de la Force régulière et de la Réserve en service actif lorsque ceux-ci se trouvent l'extérieur du Canada. Ce décret est toujours en vigueur aujourd'hui. En se fondant sur des avis juridiques, il a été décidé de mettre fin à la pratique consistant à promulguer des décrets portant uniquement sur une opération car il y aurait redondance entre ces derniers et le décret précédemment mentionné.

Le sénateur Forrestall: Je suis fort reconnaissant de cette réponse, mais je dois dire à la ministre que, autant que je sache, je n'ai pas reçu la réponse le 22 novembre. C'est important et, bien sûr, nous prions pour ces soldats et leurs familles.

À propos de la transparence et de la quantité de renseignements que nous obtiendrons sur cette campagne, voici ma question à la ministre: est-ce la procédure qui exige que chaque matin, entre 8 h 30 et 9 heures, un directeur principal des communications du cabinet du premier ministre ait une conférence téléphonique ou une rencontre quelconque, au cours de laquelle les représentants des ministères de la Défense nationale et des Affaires étrangères se font dire quels renseignements ils peuvent diffuser sur la lutte antiterroriste? Est-ce que cela se fait régulièrement?

Le sénateur Carstairs: Honorables sénateurs, je ne sais pas s'il y a chaque jour une telle séance d'information. Le sénateur connaît le dossier encore mieux que moi. Cependant, il est à noter que le ministère de la Défense nationale a tenu une conférence de presse et un point de presse hier, à 12 h 30. De telles séances d'information se poursuivront régulièrement, sauf en ce qui concerne nos troupes d'élite de la FOI 2. Pour des raisons de sécurité, nous ne diffuserons aucun renseignement sur leurs activités précises.

Le sénateur Forrestall: Je lirai la réponse de la ministre à cette question, parce que la transparence est capitale. Il est de la plus haute importance à ce moment-ci que les familles et les Canadiens en général soient tenus au courant.

LE REMPLACEMENT DES HÉLICOPTÈRES SEA KING—LES SPÉCIFICATIONS DES BESOINS RELATIFS AU VÉHICULE DE BASE EN MATIÈRE DE VOL AUX INSTRUMENTS

L'honorable J. Michael Forrestall: Honorables sénateurs, ma question s'adresse au leader du gouvernement. Je voudrais revenir à notre sujet de dispute favori. Selon la nouvelle ébauche des spécifications des besoins relatifs au véhicule de base pour l'hélicoptère maritime, on demande que l'aéronef puisse faire un vol de convoyage aux instruments pendant une heure. Cela signifie que, lors d'un vol de convoyage aux instruments par mauvais temps, le nouvel hélicoptère pourrait difficilement faire le trajet de Saint John, au Nouveau-Brunswick, à Shearwater, par exemple. La distance n'est pas très grande et ce serait un peu inutile. Combien de temps faudrait-il pour traverser le pays de cette façon et aller de Shearwater à Pat Bay, en Colombie-Britannique?

Madame le ministre pourrait-elle nous expliquer pourquoi cette réduction de la capacité de l'hélicoptère maritime? Que se passerait-il s'il fallait que le nouvel hélicoptère maritime fasse du convoyage, comme je l'ai dit, de Shearwater jusqu'à la côte ouest ou à partir des régions où les hélicoptères sont embarqués avec la flotte permanente de l'OTAN?

L'honorable Sharon Carstairs (leader du gouvernement): Le projet de l'hélicoptère maritime est sans contredit un sujet favori dans les échanges entre l'honorable sénateur et moi. Je m'étonne un peu du fait qu'il n'a prononcé aucune parole flatteuse à l'endroit des Sea King, dont le rendement dans le cadre de l'opération Apollo est fantastique. Ils remportent un franc succès et ont suscité d'excellentes recommandations touchant leurs activités non seulement par le Canada, mais aussi par les États-Unis et par nos autres partenaires.

Cependant, en ce qui concerne la question précise du sénateur Forrestall au sujet du projet de l'hélicoptère maritime — et je suis convaincue qu'il est tout aussi heureux que moi de voir que ce projet arrive à terme, pour ce qui est de la date de présentation des offres finales et de la prise de décision finale —, je dois préciser que les spécifications techniques dans l'énoncé des besoins opérationnels n'ont pas changé. Les exigences n'ont absolument pas été réduites.

Le sénateur Forrestall: Honorables sénateurs, selon les exigences actuelles, l'appareil ne sera pas tenu de pouvoir voler aux instruments pendant plus d'une heure. N'est-ce pas là une diminution des exigences? Si ce n'est pas le cas, je m'excuse. Je crois que madame le ministre m'a donné de fausses informations ou des informations inexactes. Je ne l'accuse pas d'avoir imaginé ces données dans sa réponse; je sais qu'elles lui ont été fournies par d'autres.

LA GUERRE EN AFGHANISTAN—L'OPÉRATION APOLLO—LE REMPLACEMENT DES MOTEURS DES HÉLICOPTÈRES SEA KING

L'honorable J. Michael Forrestall: Honorables sénateurs, je pose une dernière question à madame le ministre: peut-elle se renseigner pour me dire, mardi prochain, quand je poserai à nouveau la question, combien de moteurs ont utilisés nos Sea King jusqu'à maintenant durant l'opération Apollo? Vous pouvez tirer vos propres conclusions et comprendre pourquoi je ne pose pas la question tous les jours.

L'honorable Sharon Carstairs (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, il est bien malheureux que le sénateur Forrestall ne pose pas la question tous les jours car la réponse rendrait hommage aux forces armées qui, dans des circonstances très difficiles, ont effectué des vols avec des appareils qui doivent être remplacés, comme nous le savons et comme nous l'avons toujours admis. Cela ne fait aucun doute. Voilà pourquoi nous avons amorcé tout ce processus. Tout aussi importants que les équipages de bord sont les équipages d'entretien, qui ont maintenu les appareils au maximum de leurs capacités pour qu'ils puissent fonctionner aussi bien dans le cadre des opérations.

Je ne sais pas si les informations précises demandées par le sénateur Forrestall sont disponibles. Cependant, je vais m'informer pour lui.

Le sénateur Forrestall: Honorables sénateurs, ces données sont affichées sur le site Web. Si madame le leader prend la peine de le consulter, ou si elle demande à son personnel de le faire pour elle, elle pourra peut-être répondre à la question.

[Français]

LES FINANCES

LES CONSÉQUENCES DES PROPOS DU VICE-PREMIER MINISTRE SUR LE DOLLAR

L'honorable Roch Bolduc: Honorables sénateurs, je vois dans le Ottawa Citizen d'aujourd'hui:

[Traduction]

«Manley parle et la valeur du dollar baisse.»

[Français]

Cela inquiète-t-il le leader du gouvernement?

[Traduction]

L'honorable Sharon Carstaqirs (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, le vice premier-ministre a clairement expliqué pourquoi le Canada, par l'entremise du gouvernement, a adopté une stratégie de l'innovation. Il est évident que notre productivité à long terme nous préoccupe, même si les nouvelles que nous avons eues aujourd'hui sont rassurantes. Selon les plus récentes statistiques, la productivité a progressé de 2 p. 100. Il reste toutefois beaucoup de travail à faire. Hier, le dollar canadien a fluctué, comme toutes les autres devises, exception faite du dollar américain.

[Français]

Le sénateur Bolduc: Le gouvernement vient de déclarer, après huit ans au pouvoir, qu'il y aura une nouvelle stratégie d'innovation. Le ministre Manley a été ministre de l'Industrie, pourquoi ne l'a-t-il pas fait à ce moment si c'était si important?

[Traduction]

Le sénateur Carstairs: Je répondrai bien franchement que l'honorable Allan Rock et l'honorable Brian Tobin ont eu le plaisir d'annoncer des mesures qu'avait planifiées l'honorable John Manley.

[Français]

VISITEURS DE MARQUE

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, j'aimerais signaler la présence à la tribune de participants au Forum pour jeunes Canadiens.

[Traduction]

Au nom de tous les sénateurs, je vous souhaite la bienvenue au Sénat du Canada.

Des voix: Bravo!

[Français]

RÉPONSE DIFFÉRÉE À UNE QUESTION ORALE

L'honorable Fernand Robichaud (leader adjoint du gouvernement): Honorables sénateurs, j'ai l'honneur de déposer une réponse différée à une question orale du sénateur Gauthier, posée le 19 février 2002, concernant les droits linguistiques.

LA JUSTICE

LA DÉCISION DE LA COUR FÉDÉRALE—LE MAINTIEN DES DROITS LINGUISTIQUES—L'INTENTION DU GOUVERNEMENT

(Réponse à la question posée le 19 février 2002 par l'honorable Jean-Robert Gauthier)

En dépit des efforts déployés par le ministère de Justice, il ne sera pas possible de modifier à temps ni conformément aux exigences établies dans le jugement les ententes intervenues entre le gouvernement fédéral et l'Ontario et les ententes de transfert conclues entre la province et les municipalités.

Le délai initialement fixé par la cour ne prenait pas en considération les difficultés d'ordre administratif que soulevait le transfert aux municipalités de la responsabilité des poursuites pour des infractions aux lois fédérales et provinciales.

Dans une lettre adressée au sous-ministre de la Justice, le sous-procureur général adjoint de l'Ontario a déclaré officiellement que l'Ontario était déterminé à poursuivre ses efforts afin que ces ententes soient conclues. Par conséquent, le ministère de la Justice présentera à la cour fédérale une requête en vue d'obtenir un prolongement de la période qui avait été fixée par la cour pour terminer la tâche.

La commissaire aux langues officielles et l'Association des juristes d'expression française de l'Ontario qui étaient parties à la cause ont été avisées de la requête.

Les ententes entre le ministère de la Justice et les villes d'Ottawa et de Mississauga portant sur le traitement des contraventions de stationnement en Ontario ont été modifiées de façon à être conformes au jugement et elles seront vraisemblablement signées avant le 23 mars 2002.


(1420)

[Traduction]

ORDRE DU JOUR

PROJET DE LOI SUR LA SANCTION ROYALE

TROISIÈME LECTURE—MOTION D'AMENDEMENT—SUITE DU DÉBAT

L'ordre du jour appelle:

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Carstairs, c.p., appuyée par l'honorable sénateur Rompkey, c.p., tendant à la troisième lecture du projet de loi S-34, Loi relative à la sanction royale des projets de loi adoptés par les Chambres du Parlement;

Et sur la motion d'amendement de l'honorable sénateur Grafstein, appuyée par l'honorable sénateur Ferretti Barth, que le projet de loi ne soit pas maintenant lu une troisième fois, mais qu'il soit modifié, à l'article 3, par l'adjonction au paragraphe 2 de ce qui suit:

3(3) Dans le cas où l'octroi de la sanction royale s'effectue par déclaration écrite, plus d'un membre de chaque Chambre du Parlement peut être présent.

L'honorable Jerahmiel S. Grafstein: Honorables sénateurs, le projet de loi S-34 a suivi une trajectoire fort curieuse. Comme les honorables sénateurs le savent, la sanction royale fait l'objet de discussions depuis plus de 20 ans. En 1991, le sénateur Lynch-Staunton, chef de l'opposition au Sénat, a présenté un projet de loi avec l'appui du gouvernement. Sa proposition n'a pas pu recueillir un large consensus des deux côtés de la Chambre. Néanmoins, le gouvernement a jugé bon de le présenter de nouveau, sous le numéro S-34, en octobre 2001. Le texte présenté en première lecture, qui en somme est identique au projet de loi précédent, ne tient aucun compte des réserves exprimées par des sénateurs des deux côtés de la Chambre.

Le Comité sénatorial permanent du Règlement, de la procédure et des droits du Parlement a fait une étude approfondie du projet de loi S-34. Il a été éclairé par les opinions de tous les membres du comité, de M. John Aimers, de la Ligue monarchiste du Canada et de M. David Smith, professeur à l'Université de la Saskatchewan. J'ai déposé un certain nombre de projets d'amendement pour provoquer un débat approfondi sur la cérémonie la sanction royale, qui est au coeur de notre Constitution, et la réunion de la «triade sacrée» que sont la Couronne, les Communes et le Sénat transformant nos mots en loi.

Cependant, dans sa réponse au projet de loi amendé par le comité, enrichi d'innovations et d'indications, le sénateur Lynch-Staunton a déclaré:

Je suis surpris par le nombre de témoins et de collègues qui ont résisté si fort à ce modeste ajout à une cérémonie qui existe et qui, en soi, est vide de sens, soit dit avec tout le respect que je dois à l'obligation constitutionnelle.

Pour que tous les sénateurs sachent quelles sont les origines et l'historique de la sanction royale, il est manifestement nécessaire, honorables sénateurs, de citer ici le témoignage remarquable que le professeur Smith a présenté devant le comité lorsque, faisant écho aux propos de l'éminent constitutionnaliste W.P.M. Kennedy, il a déclaré que la sanction royale était l'aboutissement de l'édification d'une loi qui a franchi les diverses lectures et qui a été décortiquée en comité. M. Smith a dit: «La Couronne n'est pas une décoration. Elle est le coeur de la démocratie parlementaire du Canada. Par le Parlement, elle incarne les valeurs qui unissent les Canadiens.»

À propos de la sanction royale, il a ensuite expliqué ce que cela veut vraiment dire lorsque la Reine légifère en son Parlement, lequel, a-t-il dit: «... personnifie la nation; le Sénat incarne le principe fédéral; et la Chambre des communes représente le peuple par l'intermédiaire de leurs représentants.»

M. Smith a décrit comme suit le rôle constitutionnel distinct que la Couronne joue au Canada, comparativement à la Grande-Bretagne ou à l'Australie:

Le Canada est une fédération composée de provinces mais possédant deux langues officielles, le multiculturalisme officiel et une dimension autochtone émergente. Les rouages du Parlement [la Reine au Canada et le Sénat représentant les régions] sont pour les Canadiens le miroir de la structure fondamentale de leur Constitution [...] Renouveler la cérémonie de sanction royale, comme le propose le gouvernement dans le projet de loi S-34, aurait pour effet de submerger aussi bien le gouverneur général que le Sénat.

Honorables sénateurs, j'attire votre attention sur deux recommandations importantes contenues dans le rapport du comité et que celui-ci a adoptées à l'unanimité:

Le Comité est d'avis que la présence du gouverneur général et du premier ministre aux occasions où une cérémonie coutumière de sanction royale a lieu à la salle du Sénat manifeste aux yeux du public canadien l'essence même du Parlement dans ses fonctions législatives tout en exprimant une adhésion publique à la Constitution du Canada, en vertu de laquelle la participation de la Reine et des deux chambres du Parlement sont des conditions préalables à l'acte de légiférer au Canada.

Les membres du comité se sont aussi dits d'avis que les sénateurs devraient reconnaître que leur présence est importante pour ce qui est de conforter la Couronne en Parlement ainsi que leur rôle en tant que représentants des Canadiens dans le processus législatif.

À propos de la sensibilisation de la population, voici ce qui est recommandé, au cinquième paragraphe du rapport:

Afin de mettre en valeur davantage la cérémonie de la sanction royale, le Comité croit que la cérémonie coutumière à la Chambre du Sénat devrait être télévisée et que les images devraient être offertes pour télédiffusion et sur Internet.

Honorables sénateurs, le rapport se termine sur cette recommandation, au paragraphe 9:

Étant donné que la sanction royale vise en partie à informer le public de l'adoption d'une nouvelle loi par le Parlement, il est essentiel de prendre des initiatives en vue de renseigner davantage le public sur l'importance et le contenu des projets de loi en élaborant des stratégies de sensibilisation et de communication à cet effet. Le Sénat devrait veiller à ce que l'émission destinée à être diffusée englobe des segments éducatifs et informationnels appropriés au sujet des projets de loi qui reçoivent la sanction royale.

Honorables sénateurs, une importante lettre que le leader parlementaire à la Chambre, l'honorable Ralph Goodale, et le leader du gouvernement au Sénat, l'honorable sénateur Carstairs, ont adressée au président du comité est annexée au rapport. J'attire votre attention sur deux paragraphes de cette lettre:

Le gouvernement reconnaît, comme le Comité, que la cérémonie de la sanction royale est une importante tradition du Parlement et qu'il faudrait prendre des mesures pour veiller à ce qu'elle demeure un élément important du processus législatif.

La lettre poursuit:

Le gouvernement est également disposé à appuyer toute décision du Sénat de télédiffuser les cérémonies de sanction royale prévues. Une décision en ce sens contribuerait à sensibiliser davantage la population aux processus et aux institutions du Parlement.

Le gouvernement appuie les orientations très intéressantes et novatrices approuvées par le comité et le Sénat.

Honorables sénateurs, après de longues délibérations au sein du comité, nous avons un projet de loi sur la sanction royale rénovée, qui prévoit un processus de sanction royale amélioré, avec au moins deux cérémonies publiques télévisées en entier tous les ans. Le Sénat et les Communes auraient ainsi une occasion en or d'expliquer leur travail et l'essence des projets de loi adoptés. La sanction royale étant télévisée, cela permettra en outre de sensibiliser davantage le public non seulement aux rôles de la Reine au Parlement — la Couronne au Parlement, les Communes et le Sénat —, mais encore à l'essence d'importantes questions législatives dont il est rarement fait état ou qui sont rarement expliquées en détail par les médias. Cela permettra de faire mieux connaître au public le public au sujet Parlement, et plus particulièrement le Sénat et sa fonction d'élaboration des lois.

Honorables sénateurs, mon modeste amendement ferait en sorte que suffisamment de parlementaires soient présents à toute sanction royale sans cérémonie pour signifier l'approbation du Parlement.

Nous voudrions remercier le sénateur Lynch-Staunton des efforts qu'il a déployés pour attirer l'attention du Sénat sur la sanction royale et la nécessité de l'améliorer. De toute évidence, je ne suis pas d'accord avec lui pour dire que la sanction royale est dénuée de sens. Honorables sénateurs, elle n'est pas dénuée de sens si elle rappelle à Son Excellence et aux deux Chambres que l'essence, l'exercice de la souveraineté est au coeur de la démocratie et que le respect de la primauté du droit aux termes de notre Constitution est à la fois mesuré et significatif. Ainsi, un processus de sensibilisation proactif relatif à la sanction royale fera la jonction entre symbolisme et réalité.

Honorables sénateurs, nul n'est censé ignorer la loi. C'est un principe — un canon — de notre droit. La sanction royale en est une manifestation. La pratique et les principes vont mieux quand ils convergent. Le Sénat sera vu jouant son rôle vital, mais peu connu, en vertu de la Constitution.

Honorables sénateurs, je vous exhorte à adopter mon modeste amendement.

(Sur la motion du sénateur Pépin, au nom du sénateur Joyal, le débat est ajourné.)

LA LOI DE 2001 MODIFIANT LE DROIT CRIMINEL

TROISIÈME LECTURE—SUITE DU DÉBAT

L'ordre du jour appelle:

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Pearson, appuyée par l'honorable sénateur Poy, tendant à la troisième lecture du projet de loi C-15A, Loi modifiant le Code criminel et d'autres lois, tel que modifié.

L'honorable A. Raynell Andreychuk: Honorables sénateurs, je veux vous entretenir du projet de loi C-15A. Le Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles a traité des questions contenues dans le projet de loi C-15A, et j'aimerais aborder trois de ces questions.

L'honorable Anne McLellan, l'ancienne ministre de la Justice, a comparu devant le comité. Elle a indiqué que le paragraphe 5(3), portant sur la distribution de pornographie juvénile, serait très utile dans la lutte contre ce fléau. Je suis d'accord avec la ministre pour dire qu'il faut empêcher toute personne au Canada de promouvoir, vendre, rendre accessible ou exporter de quelque façon de la pornographie juvénile, et que l'on doit prendre ce problème au sérieux.

(1430)

Cependant, j'appuie l'amendement selon lequel ce paragraphe, bien qu'il était certainement destiné à attirer l'attention sur ce problème et à faire obstacle à ceux qui distribuent de la pornographie juvénile, pourrait aussi vraisemblablement frapper les responsables de systèmes informatiques. En d'autres termes, il pourrait s'appliquer aux fournisseurs de moyens et de dispositifs de télécommunication.

La ministre a déclaré que le gouvernement n'a jamais eu l'intention d'inclure ces gens dans la définition de ceux qui «transmettent» de la pornographie juvénile. Je dis qu'on ne doit pas se contenter des intentions exprimées par la ministre, même si celle-ci affirme que ces intentions priment sur les termes génériques employés dans le paragraphe en question. Il est bien différent de «transmettre» ou de «fournir» du matériel pornographique. Les intentions de la ministre peuvent présenter une certaine valeur, mais elles ne sont pas utiles en l'absence de précisions comme celles que fournissent l'amendement proposé et accepté par la majorité des membres du Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles.

Le Code criminel sera appliqué de façon indépendante. Il ne s'agit pas simplement ici de tenir compte de l'intention de la ministre. Une fois le projet de loi adopté, quelque chose d'aussi explosif que la pornographie juvénile conduira les procureurs, les policiers, les citoyens informés et les groupes d'action à chercher, avec raison, tous les moyens possibles de s'en prendre aux amateurs de pornographie juvénile. Le paragraphe proposé du Code criminel dit: «Quiconque transmet, rend accessible[...]». Nous n'aurons pas affaire à des policiers, des juges, des procureurs ou d'autres intervenants du système judiciaire qui sont aussi informés des concepts de télécommunications qu'ils devraient l'être ou qu'ils le seront à l'avenir.

Honorables sénateurs, beaucoup d'entre nous ici ne comprennent parfaitement bien ni les systèmes de télécommunications, ni la responsabilité d'un fournisseur qui ne fait que fournir le matériel informatique et qui ne peut donc pas être tenu responsable du contenu. Ce paragraphe, que la ministre a inclus dans le projet de loi sans l'amendement visant à le clarifier, pourrait amener le système de justice à en venir à la conclusion que ceux qui fournissent le matériel informatique pourraient être tenus responsables.

Par conséquent, l'amendement est vraiment nécessaire. Ce n'est pas une bonne façon de légiférer que de dire simplement que l'industrie des télécommunications sait de quoi il s'agit. Il ne serait pas juste de mettre cette industrie dans la position de devoir se défendre. Je ne crois pas non plus que ce soit une bonne façon de légiférer que de mettre les juges, les procureurs et les policiers à tous les niveaux de gouvernement d'un bout à l'autre du Canada, tant dans les petites localités que dans les grands centres, dans la position de devoir faire cette distinction subtile et d'avoir la compréhension nécessaire, qui viendra peut-être avec le temps, comme ce fut le cas pour ce qui est de nos compagnies de téléphone. Par conséquent, l'amendement était justifié et est toujours justifié.

L'amendement que nous avons apporté ne visait aucunement à permettre à des fournisseurs de pornographie de commettre une véritable infraction liée à la pornographie juvénile sans avoir à en subir les conséquences. En fait, s'ils sont très conscients de ce qui est transmis ou s'ils transmettent eux-mêmes de la pornographie juvénile, ils se feront prendre en vertu de la disposition proposée concernant la transmission de pornographie en toute connaissance de cause. L'amendement ne fait que voir à ce qu'une personne ne soit pas considérée comme ayant commis une infraction en ne faisant que fournir le matériel.

Honorables sénateurs, il s'agit ici d'un domaine très explosif. Je crois que l'indignation qui accompagne un cas de pornographie juvénile pourrait amener les gens à voir à ce que des accusations soient portées rapidement. Par conséquent, la précision est justifiée, et l'amendement est donc justifié.

Je voudrais m'arrêter sur un autre sujet de préoccupation. Il s'agit de savoir s'il devrait y avoir une commission indépendante ou si les modifications prévues dans le projet de loi sont suffisantes pour s'occuper de ceux qui sont condamnés injustement.

Le pouvoir discrétionnaire de la ministre existe dans notre système depuis un certain temps pour permettre d'en appeler au ministre, lorsque tous les recours ont été épuisés, pour qu'il examine le cas afin de déterminer si la personne n'en est pas moins innocente malgré qu'elle ait été trouvée coupable en application de la loi. La ministre savait fort bien, lorsqu'elle a témoigné devant le comité, qu'il y avait eu beaucoup d'erreurs judiciaires même si le système fait de son mieux.

Nous savons que nous sommes dans un système qui évolue et, en conséquence, des erreurs peuvent se produire. Malgré tous les efforts des responsables du système, ces erreurs ont conduit à la condamnation de gens innocents.

La ministre ne voulait pas entendre parler d'une commission indépendante comme celle qui existe en Grande-Bretagne. De nombreux experts considèrent le système britannique comme un modèle à suivre, après avoir longuement étudié la question. Je crois que beaucoup de ces experts se trouvent au Canada.

Je veux parler des deux meilleurs témoins, selon moi, qui ont comparu devant le comité. M. Melvyn Green est un membre du conseil d'administration de l'Association in Defence of the Wrongly Convicted et Mme Dianne Martin, professeur qui participe au projet Innocence de la Osgoode Hall Law School.

Ces deux témoins ont dirigé des projets dans le cadre desquels on a examiné d'innombrables cas d'erreurs judiciaires. Selon eux, nous devrions retarder les choses car il y a des enquêtes indépendantes en cours qui pourraient nous permettre d'obtenir de bons renseignements sur la façon de structurer le projet de loi. La ministre ne semblait pas vouloir attendre.

Ces deux témoins étaient tout à fait en faveur d'une commission indépendante, mais pas la ministre. Je voudrais me reporter au témoignage de Mme Dianne Martin. Elle a déclaré devant le comité:

L'idée que les condamnations pour meurtre sont toujours fondées et que des recours sont accordés en appel lorsque des erreurs se produisent est tout simplement fausse.

Une hypothèse encore plus troublante a été exprimée aujourd'hui par la ministre avec la plus grande sincérité, à savoir l'idée que son ministère s'occupe des autres cas, et rien n'est plus fallacieux. Cette question a été étudiée plus d'une fois au Canada. J'ai participé à la révision de plus de 100 cas de condamnations injustifiées et les ai analysés pour le compte de l'enquête Kaufman. Nous avons dégagé des causes communes ainsi que des erreurs communes que commettent les policiers. Le Canada ressemble à l'Angleterre en tous points. Des motifs nobles, la corruption, l'idée que la fin justifie les moyens lorsque nous nous empressons de porter un jugement pour élucider un crime terrible, ce qui est la recette idéale pour une condamnation injustifiée, on a vu tout cela ici, tout comme en Grande-Bretagne.

Nous avons également étudié le système que nous avons en vertu de l'article 690. Un étudiant de deuxième cycle avec qui je travaille à l'Université Simon Fraser a analysé les effets produits par l'article 690 au cours des 90 dernières années. Le dossier est accablant parce qu'il ne révèle pas tous les cas de vraie justice. D'après les preuves réunies, on a surtout cherché à écarter ces cas.

Mme Martin poursuit:

Cette perspective étant établie, vous ne serez pas du tout surpris d'apprendre que les commissions royales au Canada ont conclu, que les commissions d'enquête au Royaume-Uni ont conclu, que diverses institutions aux États-Unis ont conclu, et des instances semblables en Australie en ont conclu qu'il arrive parfois qu'on se trompe. Il ne s'agit pas d'erreurs en droit; c'est parce qu'on s'est trompé.

On ne peut pas partir d'un point de vue accusatoire. C'est l'un des trois points où je suis tout à fait en désaccord avec cette proposition qui modifie l'apparence...

Du rafistolage, voilà comment elle juge notre travail sur ce projet de loi.

...de l'article 690 en offrant ce recours aux auteurs d'infractions condamnés à une peine d'emprisonnement maximale de six mois[...]

Et elle continue:

On ne réglera pas ce problème avec des ajustements superficiels et des détails de procédure comme «Désormais, le formulaire sera accessible au public».

On règle ce problème en soustrayant ce processus à la personne qui a pour fonction justement de faire respecter la loi. Je veux un ministre de la Justice qui défendra notre système de justice; c'est un système merveilleux — qui n'est pas meilleur que les autres pays où l'on se trompe, mais qui est de loin supérieur à plusieurs autres dans le monde. Je veux qu'elle défende notre système de justice, mais je ne veux pas la voir prétendre qu'elle peut faire l'impossible et rendre justice tout en faisant preuve de miséricorde.

(1440)

Vous avez entendu la ministre. Dans son esprit, le fait d'annuler la condamnation d'un innocent est un acte de miséricorde. Ce n'est pas du tout un acte de miséricorde; c'est un acte de justice fondamentale et un besoin. La justice doit être équitable, objective et neutre. Il faut partir d'un point de vue de neutralité.

Par conséquent, son point de vue est mauvais.

Honorables sénateurs, la personne qui a probablement consacré le plus de temps à examiner les condamnations injustifiées au Canada, en l'occurrence le professeur Martin, estime que la ministre ne peut faire partie d'un système dans lequel elle se juge elle-même ainsi que le système judiciaire. Il doit y avoir apparence de justice et donc une réévaluation neutre. Par conséquent, il faut recourir à une commission indépendante.

À mon avis, honorables sénateurs, nous devrions adopter ce projet de loi avec les amendements techniques que nous y avons apportés, y compris celui du sénateur Joyal, qui estime qu'il serait utile que des juges retraités aident le ministre. Je ne crois pas que cela soit satisfaisant. J'estime que ce ne sont pas seulement les juges, les avocats retraités et les intervenants du système judiciaire qui peuvent aider le ministre, mais aussi le grand public, dont le bon sens et l'intelligence devraient également prévaloir. Toutefois, même cette addition ne passe pas le test de la parfaite neutralité.

Tant que le Canada ne comptera pas une commission indépendante, nous n'aurons pas un système judiciaire juste et équitable pour ceux qui ont été injustement condamnés. Honorables sénateurs, il suffit de jeter un coup d'oeil aux causes Marshall et Milgaard. Je ne crois pas que le système judiciaire ait erré en tant que tel, parce qu'en fait nous avons l'un des meilleurs systèmes au monde. Néanmoins, comme nous avons affaire à des humains, la seule façon de nous assurer que la justice fondamentale est rendue est d'avoir un système neutre doté d'une commission indépendante.

Je suis extrêmement déçue que nous n'ayons pas vu chez la ministre précédente ou chez le ministre actuel le désir d'aller aussi loin que les systèmes britannique et australien. De ce fait, nous avons des motifs de craindre qu'il n'y ait de nouveau des cas Milgaard et Marshall dans notre système judiciaire, ce qui ne fera qu'ajouter à son discrédit.

Si je prends la parole aujourd'hui, c'est parce que le système judiciaire, surtout en Saskatchewan, fait de nos jours l'objet d'un examen approfondi de la part de la population en général et de la communauté autochtone en particulier. Je défends et j'appuie le système de la Saskatchewan car il fonctionne bien. Toutefois, il est nécessaire que le système s'améliore et surmonte ses difficultés. Il ne peut le faire qu'au moyen d'enquêtes indépendantes menées par des commissions indépendantes.

Tant que nous ne nous serons pas assurés qu'il s'agit d'un examen indépendant et que le système peut résister à un examen de cette nature, le nombre des détracteurs du système l'emportera sur celui de ses partisans.

Je tenais à faire ces remarques. Je demande au gouvernement et au nouveau ministre de repenser la prémisse selon laquelle le projet de loi C-15A n'est que le début d'un processus. Notre système de justice laissera à désirer tant que nous ne lui aurons pas vraiment fait subir un examen indépendant.

(Sur la motion du sénateur Cools, le débat est ajourné.)

LA LOI SUR LES MISSIONS ÉTRANGÈRES ET LES ORGANISATIONS INTERNATIONALES

PROJET DE LOI MODIFICATIF—TROISIÈME LECTURE—AJOURNEMENT DU DÉBAT

L'honorable B. Alasdair Graham propose: Que le projet de loi C-35, Loi modifiant la Loi sur les missions étrangères et les organisations internationales, soit lu une troisième fois.

— Honorables sénateurs, je suis heureux d'intervenir aujourd'hui au Sénat au sujet du projet de loi C-35, Loi modifiant la Loi sur les missions étrangères et les organisations internationales.

Le Comité sénatorial permanent des affaires étrangères a examiné en détail cette mesure législative et adopté le projet de loi sans proposition d'amendement. La Loi sur les missions étrangères et les organisations internationales, adoptée par le Parlement en 1991, prévoit que les représentants de pays étrangers et d'organisations internationales au Canada jouiront d'un statut juridique spécial. Elle met en vigueur au Canada les dispositions des conventions de Vienne sur les relations diplomatiques et consulaires et de la Convention sur les privilèges et immunités des Nations Unies.

Ces conventions internationales ont pour but de promouvoir les relations bilatérales et multilatérales entre les pays en accordant aux représentants d'un État un certain nombre de privilèges et d'immunités qui leur permettront de défendre et de protéger les intérêts de leur pays sans crainte d'être punis ou persécutés.

Lorsqu'il a examiné le projet de loi C-35, le Comité des affaires étrangères a eu l'occasion de discuter des propositions avec le ministre des Affaires étrangères, qui a fait ressortir l'importance de moderniser cette mesure législative à une époque où il est crucial que notre pays fasse preuve de leadership sur la scène internationale dans des dossiers revêtant une grande importance pour le Canada et les Canadiens.

Je conviens avec le ministre que le Canada a été et doit demeurer un chef de file dans le processus visant à trouver des solutions à des problèmes mondiaux endémiques. La voie multilatérale demeure garante de la résolution de bon nombre des phénomènes mondiaux, qu'il s'agisse de pauvreté, de terrorisme et de criminalité transnationale, de dégradation environnementale, ou de sécurité humaine et internationale.

Les principales propositions figurant dans le projet de loi permettront au Canada de jouer un rôle de chef de file au sein de la diplomatie internationale et multilatérale, de s'acquitter de ses obligations comme hôte du prochain Sommet du G-8, ainsi que de continuer à présenter le Canada comme étant un excellent endroit où établir le siège social d'organisations gouvernementales internationales.

Honorables sénateurs, dans la présente mesure législative, la définition de «organisations internationales» a été interprétée de façon à permettre la prise de décrets en vertu de la loi uniquement dans le cas d'organisations internationales constituées par traité, comme c'est le cas des Nations Unies. Ce projet de loi nous permettra d'accorder à des réunions importantes comme le Sommet du G-8 le même traitement qu'à des organisations internationales comme les Nations Unies et l'Organisation de l'aviation civile internationale, ou OACI.

Cette modification de la définition d'«organisations internationales» est nécessaire parce que, comme le veut la pratique diplomatique moderne, d'importantes questions d'ordre gouvernemental, international et multilatéral sont de plus en plus souvent abordées à l'occasion de conférences internationales auxquelles participent des organisations internationales n'ayant pas nécessairement été constituées par traité, comme le G-8 ou l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe, ou OSCE.

Une autre proposition du projet de loi prévoit un fondement législatif pour assurer la sécurité des conférences gouvernementales internationales se déroulant au Canada. Grâce à cette proposition, la police bénéficiera d'un fondement législatif clair pour prendre les mesures de sécurité nécessaires à l'occasion du futur Sommet du G-8 à Kananaskis, en Alberta.

De plus, en accordant l'immunité voulue aux inspecteurs internationaux qui se présentent au pays pour s'assurer que le Canada respecte ses engagements concernant les armes chimiques ou l'interdiction des essais nucléaires, le gouvernement permet au Canada de respecter la Convention sur les armes chimiques et l'accord avec la Commission préparatoire pour l'organisation du traité d'interdiction complète des essais nucléaires.

Une autre proposition du projet de loi reconnaît les missions permanentes accréditées auprès d'organisations internationales au Canada en leur accordant des privilèges fiscaux correspondant à leur situation. Il convient de souligner que plus de 40 missions sont accréditées auprès de l'Organisation de l'aviation civile internationale sans bénéficier des privilèges auxquels elles devraient avoir droit. Le projet de loi C-35 corrige cette anomalie.

Enfin, le projet de loi C-35 précisera que le décret concernant une organisation ou une rencontre internationale exclut l'obligation du ministre de délivrer un permis pour permettre l'entrée au Canada d'une personne faisant partie des catégories inadmissibles en vertu de la Loi sur l'immigration.

(1450)

Je peux assurer à tous les honorables sénateurs que cet amendement n'élimine pas le soigneux processus de contrôle mis en place par le ministère des Affaires étrangères, Citoyenneté et Immigration Canada, la GRC et le SCRS pour les délégations étrangères qui assistent à des conférences internationales au Canada. Un décret du conseil concernant les organisations internationales et leurs réunions prévoit l'immunité relativement aux restrictions de l'immigration, mais non aux formalités d'immigration.

Toutefois, ce changement signifie que si un dirigeant étranger, comme Nelson Mandela, par exemple, vient au Canada pour assister à une conférence internationale couverte par un décret pris en vertu de cette loi, il n'a plus besoin d'un permis du ministre pour entrer au Canada même si, en principe, il est inadmissible à cause de son casier judiciaire.

Honorables sénateurs, le Comité des affaires étrangères a, au cours de ses délibérations, reçu le témoignage de représentants d'Amnistie internationale. Ces représentants craignent qu'en accordant l'immunité à des organisations internationales non régies par des traités et à leurs réunions, on crée un climat d'impunité pour les dirigeants accusés d'avoir commis des crimes de guerre ou des crimes contre l'humanité.

En adoptant la Loi sur les crimes contre l'humanité et les crimes de guerre, le Parlement a clairement décidé que personne ne peut revendiquer l'immunité contre l'arrestation ou l'extradition au Canada s'il fait l'objet d'une demande de remise de la Cour pénale internationale ou d'un tribunal formé par résolution du Conseil de sécurité des Nations Unies nommé dans l'annexe de la Loi sur l'extradition, soit actuellement le Tribunal pénal international pour l'ancienne Yougoslavie et le Tribunal pénal international pour le Rwanda.

À cette fin, l'article 48 de la Loi sur les crimes contre l'humanité et les crimes de guerre l'emporte sur un décret pris en vertu de la Loi sur les missions étrangères et les organisations internationales. L'article 48 est ainsi libellé:

Par dérogation à toute autre loi ou règle de droit, quiconque fait l'objet d'une demande de remise présentée par la Cour pénale internationale, ou par tout tribunal pénal international établi par résolution du Conseil de sécurité des Nations Unies et dont le nom figure à l'annexe, ne peut bénéficier de l'immunité qui existe en vertu du droit statutaire ou de la common law relativement à l'arrestation ou l'extradition prévue par la présente loi.

J'appuie de tout coeur la position des témoins d'Amnistie internationale qui insistent pour que le Canada maintienne sa vigilance au sujet des normes relatives aux droits de la personne que nous nous sommes fixées nous-mêmes et qu'a fixées la communauté internationale. Le Canada contribue énormément au développement des normes internationales relatives aux droits de la personne, que nous nous efforçons très consciencieusement de respecter chez nous comme sur la scène internationale.

L'adoption de ce projet de loi favorise clairement la réalisation de cet objectif en créant les mécanismes appropriés pour le bon fonctionnement des organisations internationales non régies par un traité. Il envisage même la possibilité qu'à certaines occasions, pour promouvoir la justice et la paix dans le monde, il soit nécessaire pour le Canada d'avoir des contacts avec les représentants de régimes accusés d'avoir agi en violation des normes internationales relatives aux droits de la personne.

Honorables sénateurs, le Comité des affaires étrangères a porté une attention particulière aux préoccupations de M. Borovoy, de l'Association canadienne des libertés civiles. M. Borovoy s'est inquiété de l'étendue des pouvoirs policiers accordés par le projet de loi pour assurer le déroulement sans heurt des conférences gouvernementales internationales tenues au Canada.

Je suis satisfait de la réponse que le gouvernement a donnée à ce sujet. La réponse indique que cette proposition clarifie dans la loi la responsabilité qu'a la police d'assurer le bon déroulement des rencontres internationales. Elle montre également que la disposition a été soigneusement libellée à la lumière de la common law et des responsabilités conférées à la police en vue de maintenir la paix et de protéger les personnes, y compris les personnes jouissant d'une protection internationale et les personnes qui participent à des manifestations légales.

En effet, cette proposition ne change rien au fait que toute mesure de sécurité prise par la police sera assujettie à la Charte et devra être jugée raisonnable dans les circonstances. Autrement dit, toute mesure policière qui limite un droit garanti par la Charte, par exemple la liberté d'expression ou la liberté de réunion, doit pouvoir être justifiée dans une société libre et démocratique. Le droit de manifester pacifiquement est un élément essentiel de la démocratie canadienne. La proposition est conçue pour protéger ce droit tout en permettant au Canada de continuer à accueillir avec succès ces importantes rencontres internationales.

Je conclus, honorables sénateurs, en soulignant que l'objectif clair du projet de loi C-35 est de moderniser la Loi sur les missions étrangères et les organisations internationales. Le projet de loi a pour but d'assurer le succès du Canada lorsqu'il accueille d'importantes conférences internationales.

Le projet de loi reconnaît des organisations internationales telles que l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe, le G-8, le G-20 et d'autres qui ne sont pas issues d'un traité et qui, par conséquent, ne sont pas actuellement couvertes par la Loi sur les missions étrangères et les organisations internationales.

Le projet de loi propose également de créer un environnement sûr pour le déroulement du processus diplomatique dans les rencontres et les organisations internationales. C'est certes un projet de loi important et opportun puisque le Canada doit accueillir le Sommet du G-8 en Alberta dans quelques mois. Il est essentiel que le projet de loi soit adopté pour assurer ce genre de sécurité.

Je remercie tous les honorables sénateurs qui ont participé à la discussion sur le projet de loi et qui continueront à participer au débat. Je voudrais tout particulièrement remercier les témoins qui ont comparu devant le Comité sénatorial permanent des affaires étrangères pour exposer leur point de vue.

L'honorable Eymard G. Corbin: Honorables sénateurs, le projet de loi C-35, Loi modifiant la Loi sur les missions étrangères et les organisations internationales, propose des additions au régime de privilèges et immunités prévu dans la loi actuelle. Il confère également des pouvoirs policiers extraordinairement étendus pour assurer la sécurité lorsque des organisations internationales tiennent des réunions de haut niveau au Canada.

L'article 5, qui confère ces pouvoirs, est vraiment problématique. En ces temps de deuil, mais aussi de réactions hystériques excessives qui ne semblent pas s'apaiser, cette disposition prépare en fait la voie à une limitation radicale du droit démocratique de protester.

Avant d'aller plus loin, je veux dire les choses très clairement: je suis totalement opposé à toute forme de protestation violente. Quand je parle du droit de protester, je suppose toujours que la protestation en question est pacifique. Compte tenu des moyens accordés par le projet de loi pour limiter de façon discrétionnaire le droit de protester, moyens qui se traduiront par des pouvoirs discrétionnaires sans limite pour la police, je suis d'avis que cette préoccupation distincte aurait dû faire l'objet d'un projet de loi distinct et d'un examen approfondi de ses répercussions. Mais non, il faut se presser, il faut tout bousculer, il faut aller vite. On s'en fiche.

Ce nouveau cas d'extension des pouvoirs de la police signifie pour moi qu'il est temps de présenter un projet de loi complet énonçant les différents pouvoirs que le Parlement est disposé à reconnaître à la police fédérale et à ceux qui y sont associés dans certaines circonstances.

L'article 5 autorise la GRC à «prendre les mesures qui s'imposent [...] dans la mesure et selon les modalités raisonnables dans les circonstances» pour assurer la sécurité au cours de rencontres internationales. Quand des pouvoirs discrétionnaires illimités de ce genre sont conférés à la police, ils peuvent nuire au droit démocratique à la protestation pacifique pour deux raisons. D'abord, il y a un conflit d'intérêts inhérent à permettre à la police d'improviser ses propres initiatives de mise en vigueur de la loi. Souvenons-nous de Vancouver. Deuxièmement, et c'est peut-être encore plus important, le droit de manifester est menacé. L'intimidation et les comportements excessifs de la police ne doivent pas être tolérés s'ils visent à empêcher des manifestations avant même qu'elles n'aient lieu.

(1500)

Le rôle de la police est d'exécuter les ordres et non de les donner. Le gouvernement, sur l'avis et avec l'approbation du Parlement, a l'ultime responsabilité d'appliquer les politiques et de décider de ce qui est raisonnable. Ce rôle n'est certes pas celui de la police et certainement pas celui des tribunaux après le fait. Je crois qu'il est extrêmement risqué de déléguer des pouvoirs qui équivalent à permettre à la police d'établir de façon ponctuelle et sous la pression des événements, des politiques qui concordent avec son évaluation subjective d'événements, de personnes, de groupes ou d'actions. Réprimer maintenant, expliquer plus tard n'est jamais rassurant, quel que soit le contexte.

Honorables sénateurs, le droit de manifester est un droit primordial. On mesure la santé d'une démocratie au respect de ce droit. L'article 5 du projet de loi avalise discrètement l'idée insensée que toutes les manifestations sont des activités méprisables, douteuses et pouvant être dangereuses. La Charte garantit la liberté d'expression, de réunion pacifique et d'association; ces libertés ne peuvent être restreintes que par une règle de droit, dans des limites qui soient raisonnables — le mot raisonnable revient encore une fois — et dont la justification puisse se démontrer dans le cadre d'une société libre et démocratique.

À quoi servent ces garanties si, lorsqu'elles sont invoquées, elles perdent toute valeur face à une utilisation excessive de l'intimidation et de la force? Il est censé exister un équilibre entre les libertés et la prise de mesures nécessaires, raisonnables et mesurées dans les circonstances. Comment peut-on assurer cet équilibre si l'évaluation subjective de ce qui est nécessaire, raisonnable et mesuré dans des circonstances données est laissée entièrement à une police qui a des intérêts contraires à ceux des manifestants? La police doit être assujettie à des limites dans l'exercice des pouvoirs discrétionnaires qui lui sont conférés. Dans sa forme actuelle, le projet de loi ne prévoit aucune limite.

M. Alex Neve, secrétaire général de la Section canadienne d'Amnistie internationale, partage cet avis. Voici ce qu'il déclarait à une question que je lui ai posée au comité:

Nous avons mis l'accent sur les articles traitant de l'immunité, mais l'article qui a trait à la sécurité des conférences intergouvernementales n'a pas manqué d'attirer notre attention. Notre organisation ne fait pas de manifestations. Elle émet des revendications en dehors de toute violence. Jamais nous n'inciterons ni n'autoriserons nos membres à s'engager dans des manifestations violentes et nous dénonçons, critiquons et condamnons les actes de violence commis par d'autres dans toute manifestation.

Parallèlement, nous avons, au fil des années, en liaison avec un certain nombre de manifestations associées à des conférences de ce type, ...

— le genre de conférences dont il est question dans le projet de loi —

... présenté des recommandations au gouvernement, aux forces policières et aux organismes chargés de la sécurité en insistant sur l'importance de recourir, face aux manifestations qui ont lieu lors de ces conférences, à des mesures policières qui respectent pleinement les normes internationales en matière de droits de la personne et qui protègent suffisamment le droit de manifester en dehors de toute violence. Il faut aussi, dans ce cadre, que l'on protège les manifestants pacifiques contre ceux qui ne le sont pas, parce que cette préoccupation existe elle aussi, et que l'on s'assure par ailleurs que le droit de protester des manifestants pacifiques ne soit pas indûment brimé par les forces policières.

Cet article en particulier confère de toute évidence une large latitude à la GRC, qui peut «prendre les mesures qui s'imposent, notamment en contrôlant, en limitant ou en interdisant l'accès à une zone dans la mesure et selon les modalités raisonnables ...

— encore ce mot-là —

... dans les circonstances.»

Nous surveillerons de près l'application de cette disposition aux conférences internationales qui se tiendront au Canada. Si j'avais une recommandation à faire, je dirais qu'il conviendrait de formuler cette disposition de manière à préciser clairement qu'il va de soi que ce qui est raisonnable dans les circonstances englobe les normes internationles applicables en matière de droits de la personne.

Honorables sénateurs, le droit de protester est aussi fragile qu'il est fondamental. En cette époque d'opportunisme politique, la protestation est souvent minimisée, voire même ridiculisée, comme étant le fait de fanatiques ou de fous. En réalité, manifester est parfois le dernier recours, et le plus important, dont disposent les gens ordinaires mais concernés qui veulent exprimer leur désaccord. La qualité et la cohérence de notre démocratie sont mises en péril quand la dissidence est découragée ou étouffée. Pour ces raisons, l'article 5 du projet de loi C-35 me laisse perplexe et insatisfait, mais j'ai dit ce que j'avais à dire.

Honorables sénateurs, je prédis que nous reviendrons sur ces questions. J'ajouterais que les nouvelles initiatives controversées prises par le gouvernement aux termes de ce projet de loi posent de graves problèmes. Elles soulèvent des défis graves sur le plan moral pour tous les gens bien intentionnés qui passent leur vie à oeuvrer en faveur d'une plus grande justice pour tous. Ce projet de loi est peut-être du domaine de la haute diplomatie pour certains, mais il n'obtient pas mon appui.

L'honorable Terry Stratton: Honorables sénateurs, j'aimerais demander l'ajournement du débat en mon nom, étant entendu que, même si j'ai convenu que le sénateur Corbin pourrait prendre la parole après moi et si le deuxième intervenant dispose normalement de 45 minutes, l'opposition se réserve le droit, avec l'accord des honorables sénateurs, de parler pendant 45 minutes de la question, si elle en décide ainsi.

(Sur la motion du sénateur Stratton, le débat est ajourné.)

[Français]

(1510)

LANGUES OFFICIELLES

ÉTUDE DU SEPTIÈME RAPPORT DU COMITÉ MIXTE—SUITE DU DÉBAT

L'ordre du jour appelle:

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Gauthier, appuyée par l'honorable sénateur Callbeck, tendant à l'adoption du septième rapport du Comité mixte permanent des langues officielles intitulé «Les bonnes intentions ne suffisent pas», déposé au Sénat le 21 février 2002.

L'honorable Shirley Maheu: Honorables sénateurs, c'est avec fierté que je prends la parole aujourd'hui afin de discuter du dépôt du rapport intitulé «Les bonnes intentions ne suffisent pas» sur les services offerts par Air Canada, soit le septième rapport du Comité mixte permanent des langues officielles.

Je suis membre de la délégation canadienne de l'OTAN qui participait à une réunion et je n'ai malheureusement pas eu la possibilité de vous présenter ce rapport le 21 février dernier. Heureusement, le sénateur Gauthier s'est fait un plaisir de le déposer et de le présenter à ma place.

[Traduction]

Au cours des dix mois qui ont précédé le dépôt de ce rapport, le Comité mixte permanent des langues officielles a mené une étude approfondie sur le dossier d'Air Canada. Comme il est souligné dans le rapport, bon nombre de commissaires des langues officielles ont déjà signalé les problèmes d'Air Canada en ce qui touche le respect de la Loi sur les langues officielles.

Par suite de la privatisation de 1998, il est évident qu'Air Canada et ses filiales n'ont pas eu de très bons résultats au chapitre des langues officielles. J'irais même jusqu'à dire que les manquements d'Air Canada remontent à plus loin encore, c'est-à-dire à un moment où le gouvernement du Canada n'était pas très exigeant dans ce domaine. Même après une étude approfondie de la mesure législative ainsi qu'un examen du faible pourcentage de personnel francophone et du nombre relativement élevé de plaintes, la situation ne s'est pas améliorée au fil des ans.

[Français]

Le comité a conclu qu'Air Canada devra faire de plus grands efforts pour respecter les deux langues officielles de notre pays. Pour ce faire, le comité a pris les moyens d'inclure dans le rapport une présentation de l'organisation, un rappel historique, des obligations linguistiques, des comptes rendus des témoignages, des observations, seize recommandations de notre comité, des questions adressées au gouvernement, ainsi que plusieurs annexes où nous avons eu la possibilité d'inclure des opinions dissidentes.

[Traduction]

J'aimerais ajouter que le comité mixte cherchait à améliorer le taux de satisfaction de la clientèle d'Air Canada. Nous avions donc pour mandat d'aider Air Canada à améliorer son service en demandant au gouvernement de préciser certaines lois qui s'appliquaient à Air Canada et à ses filiales.

Pendant ce temps, le président-directeur général d'Air Canada, Robert Milton, semble se préoccuper au plus haut point de la situation de la compagnie, et je suis persuadée qu'il profitera de l'occasion pour améliorer la situation linguistique et, nous pouvons l'espérer, pour voir à ce que les services d'Air Canada soient disponibles dans les deux langues officielles en tout temps.

Enfin, j'aimerais me pencher sur l'une des préoccupations soulevées par le sénateur Gauthier, dans son discours du 7 mars dernier. Le sénateur Gauthier a dit:

Selon le processus normal et logique à observer, quand un comité sénatorial ou un comité mixte de la Chambre des communes et du Sénat rédige un rapport, nous devrions recevoir une réponse exhaustive du gouvernement, expliquant ce qu'il pense des propositions qui lui ont été faites.

Je comprends la déclaration du sénateur Gauthier, qui affirme que ce genre de procédure devrait exister ici. En fait, le Comité mixte permanent des langues officielles a demandé d'obtenir une réponse du gouvernement à ce rapport.

(Sur la motion du sénateur Robichaud, le débat est ajourné.)

[Français]

LE SEPTIÈME RAPPORT DU COMITÉ MIXTE—MOTION VISANT À TRANSMETTRE UN MESSAGE À LA CHAMBRE DES COMMUNES POUR EXPRIMER NOTRE OPPOSITION À LA DÉCISION D'ANNEXER UNILATÉRALEMENT UNE OPINION DISSIDENTE—SUITE DU DÉBAT

L'ordre du jour appelle:

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Gauthier, appuyée par l'honorable sénateur Lapointe,

Que soit envoyé à la Chambre des communes un message d'objection à la décision qu'elle a prise le 21 février 2002 d'annexer unilatéralement une opinion dissidente au septième rapport sur les langues officielles, passant outre ainsi aux droits légitimes du Sénat dans une affaire de comité mixte.

L'honorable Shirley Maheu: Honorables sénateurs, en réponse à la motion que propose le sénateur Jean-Robert Gauthier, que soit envoyé à la Chambre des communes un message d'objection à la décision qu'elle a prise, le 21 février 2002, d'annexer unilatéralement une opinion dissidente au septième rapport du Comité mixte des langues officielles, passant outre ainsi aux droits légitimes du Sénat dans une affaire de comité mixte, j'aimerais apporter quelques éclaircissements.

Il est évident que le sénateur Gauthier fait mention d'un problème de fond qui a trait aux règles touchant les comités mixtes du Sénat et de la Chambre des communes. La Chambre des communes possède une règle, soit l'alinéa 108(1)a). Le Sénat n'a aucune règle comparable qui autorise ladite Chambre à accepter une opinion dissidente. Plusieurs sénateurs ont déjà discuté de ce problème. Par exemple, les sénateurs MacEachen et Gauthier, au mois de novembre 1994, ont fait ressortir ce manquement à nos règles et procédures.

Comme vous pouvez le constater au document no 1 que je vous ai distribué, la règle 90 du Sénat ne fait aucune mention des opinions dissidentes, ce qui suggère qu'il est tout à fait possible d'inclure des rapports au Sénat aussi. Autrement dit, ce qui n'est pas défendu par les règles et les procédures du Sénat sous-entend qu'on a le droit d'y avoir recours. Encore une fois, je vous renvoie à des exemples concrets où on a accepté des rapports dissidents au Sénat. C'est le document no 9. Je vous ai indiqué quatre rapports. Je dis bien «rapports» parce qu'une opinion représente quelques paragraphes, et un rapport, plusieurs pages.

[Traduction]

Quant à moi, je considère que ce n'est pas un problème nouveau et qu'il n'a malheureusement jamais été complètement résolu.

Le sénateur Gauthier a ajouté dans son intervention que ce rapport dissident n'avait jamais fait l'objet de discussion au Comité mixte permanent des langues officielles et n'avait pas été inclus dans le rapport du Comité mixte des langues officielles par M. Bélanger à la Chambre des communes ou par lui-même au Sénat. Or, le comité avait effectivement discuté de la possibilité d'accepter une opinion dissidente et l'avait acceptée le 18 février 2002.

Dans le procès-verbal, le comité avait ajouté ceci:

Conformément à l'alinéa 108(1)a) du Règlement, le Comité autorise l'impression des opinions dissidentes ou complémentaires des membres du Comité en annexe à ce rapport, immédiatement après la signature des coprésidents, [pourvu] que les opinions dissidentes ou complémentaires soient envoyées au cogreffier du Comité de la Chambre des communes dans les deux langues officielles, le ou avant le mardi 19 février 2002 à 17 heures.

Je ferai remarquer que le rapport dissident de M. Reid a été présenté et ensuite accepté pour être déposé à la Chambre des communes. Le terme «annexé» n'a jamais été utilisé. Par conséquent, le rapport, tel que soumis par le député Bélanger et le sénateur Gauthier, incluait seulement une opinion dissidente, celle du député Godin.

Les greffiers au Bureau ou le service des Journaux, pour une raison ou une autre, ont décidé d'annexer le rapport de M. Reid. Le Président de la Chambre examine actuellement la question pour voir comment on en est arrivé à employer le terme «annexer» plutôt que les termes «déposer» ou «présenter».

Lorsque M. Reid a parlé de son opinion dissidente, il a signalé que l'avion à bord duquel il prenait place avait subi un incendie de matériel électrique et que le vol avait par conséquent été retardé. Voilà pourquoi il n'avait pu soumettre son rapport dissident à temps. J'estime qu'il s'agit là de circonstances atténuantes.

(1520)

Bien qu'il soit vrai que le Comité des langues officielles n'a pas autorisé la présentation du rapport dissident le 21 février, la Chambre des communes, qui est responsable de ses propres décisions, a décidé de l'accepter à l'unanimité. Je présume que, avant de tenter de présenter son rapport, Scott Reid ignorait qu'il aurait dû s'adresser au Sénat.

Quoi qu'il en soit, lorsqu'il a tenté de le présenter, on a fait remarquer qu'il n'était pas traduit. Comme il est obligatoire de faire traduire les rapports, il a dû attendre jusqu'au 21 février, lorsque les deux traductions ont été terminées.

[Français]

Le sénateur Gauthier mentionne que la Chambre des communes a outrepassé son autorité en acceptant d'annexer unilatéralement l'opinion dissidente de M. Reid. Je réponds à cela que la Chambre des communes, comme le Sénat, peut faire ce que bon lui semble avec un consentement unanime.

Considérant toutes ces allégations, je peux affirmer avec certitude que le Comité mixte permanent des langues officielles n'a pas le pouvoir ni même la légitimité de changer les règles et les procédures de la Chambre des communes ni celles du Sénat. Les règles actuelles ne sont pas parfaites, mais elles sont ce qu'elles sont.

[Traduction]

À mon avis, il semblerait peu opportun d'envoyer un message à la Chambre des communes, pour les raisons que je viens de mentionner. J'affirme que nous ne devrions pas envoyer ce message.

Je remercie les honorable sénateurs de leur attention.

Son Honneur le Président: Madame le sénateur Maheu veut-elle répondre à une question du sénateur Gauthier?

Le sénateur Maheu: Oui.

L'honorable Jean-Robert Gauthier: Honorables sénateurs, je ne veux pas poursuivre ce débat indéfiniment. Cependant, je crois qu'il faudrait répondre à certaines questions. M. Reid, un député de la Chambre, n'est pas le seul membre du parti de l'Alliance. S'il n'a pu être présent à la Chambre des communes le 18 février, date à laquelle le rapport a été accepté, et il a admis avoir été retardé, un autre député de son parti aurait pu agir à sa place. Il a même lu dans le compte rendu la date et l'heure, soit le 19 février à 17 heures, où ni un rapport ni une opinion dissidente ne seraient acceptés.

Madame le sénateur sait-elle que M. Reid a lu cela dans le compte rendu et qu'il faisait erreur? Il importe peu qu'il ait été retardé. Le rapport n'a pas été déposé au moment opportun. Mais laissons cela.

Le sénateur Maheu a dit qu'il devrait être acceptable de passer outre au Règlement. Je ne suis pas d'accord. Il est interdit de contourner le Règlement. Des gens ont rédigé des ouvrages à ce sujet. Voici ce que dit le Précis de procédure parlementaire de Beauchesne:

[Français]

Si un membre n'approuve pas certains passages d'un rapport, ou l'ensemble du rapport, il peut faire consigner sa désapprobation au moyen d'un vote par appel nominal sur les passages contestés ou sur l'ensemble du rapport, selon le cas.

[Traduction]

Les honorables sénateurs trouveront la même règle dans le Document d'accompagnement du Règlement du Sénat du Canada. Il y a une grande différence entre un rapport minoritaire et une opinion dissidente. Il n'y a rien de tel au Sénat. Je connais bien la procédure de l'autre endroit, où j'ai passé une vingtaine d'années. C'est une pratique dans l'autre endroit. On peut annexer une opinion dissidente à un rapport. Je suis d'accord avec cela.

Nous n'observons pas cette pratique au Sénat. Je signale au sénateur que la Chambre des communes a donné son consentement unanime pour qu'une opinion dissidente soit annexée. Le point est inscrit dans les Journaux de cette date ainsi que dans le compte rendu officiel.

[Français]

Les Journaux de la Chambre des communes indiquent que l'opinion dissidente a été annexée au rapport numéro 7 du Comité mixte des langues officielles. C'est un fait. Ce qui me déplaît, c'est que le travail sérieux du Sénat sur cette question n'a pas été reconnu. Que toute la procédure défende à une personne d'annexer ou de faire annexer une opinion dissidente à un rapport déposé par un comité mixte n'est pas acceptable.

L'honorable sénateur peut-elle me dire qui a signé le rapport? Elle n'était pas ici aujourd'hui. J'ai présenté le rapport, mais je ne l'ai pas signé.

[Traduction]

Le sénateur Maheu: Honorables sénateurs, en réponse à la dernière question du sénateur Gauthier, je n'ai pas vu le rapport depuis qu'il a été déposé. Le sénateur a dit que des députés de l'Alliance auraient pu déposer le rapport. Le député était à bord d'un avion dans la matinée du 19 février. Il y a eu un feu dans l'avion. Le député ne pouvait pas sortir de l'aéroport, si bien qu'il n'a pu remettre son rapport à qui que ce soit. S'il avait quitté l'aéroport, il aurait pu déposer ce rapport le 19 février à 17 heures.

En ce qui concerne le Règlement, j'ai entendu tellement de fois dans cette enceinte ce que nous «ne pouvons pas» et «ne devrions pas» faire. Honorables sénateurs, nous pouvons faire tout ce que nous souhaitons au Sénat, que ce soit prévu au Règlement ou pas, en obtenant le consentement unanime. C'est ce que nous faisons tout le temps.

Le sénateur Gauthier: Non, ce n'est pas le cas.

Le sénateur Maheu: Je n'argumenterai pas avec le sénateur.

Le sénateur Gauthier a parlé des Journaux qui indiquent qu'un rapport dissident était annexé au rapport du comité. On a demandé le consentement unanime de la Chambre pour présenter un rapport. Le Président a demandé à la Chambre si elle accordait son consentement pour que M. Reid «dépose» un rapport, et soudainement ce rapport était assorti d'une annexe. On peut déposer ou présenter un rapport. Cela signifie-t-il qu'il peut être «en annexe»? La mention «en annexe» n'a jamais été utilisée. Je me demande ce que font les greffiers au Bureau dans pareille situation.

Permettez-moi de lire un extrait du procès-verbal de la réunion que le Comité mixte permanent des langues officielles a tenue le 18 février. Voici:

Conformément à l'alinéa 108(1)a) du Règlement, le Comité autorise l'impression des opinions dissidentes ou complémentaires des membres du Comité en annexe à ce rapport, immédiatement après la signature des coprésidents, que les opinions dissidentes ou complémentaires soient envoyées au cogreffier du Comité de la Chambre des communes dans les deux langues officielles, le ou avant le mardi 19 février 2002 à 17 heures.

Je reconnais que M. Reid a eu tort. Il n'avait pas le rapport dans les deux langues officielles. Le pauvre homme était coincé dans un avion en feu. Je suis pratiquement convaincue que le Sénat aurait donné son consentement unanime aussi.

Le sénateur Gauthier: Qui a signé ce rapport? Est-ce que le sénateur Maheu l'a signé?

Le sénateur Maheu: Je n'ai même pas vu ce rapport. Celui-ci a été présenté en mon nom, mais je ne l'ai pas vu.

(Sur la motion du sénateur Robichaud, le débat est ajourné.)

(1530)

QUESTION DE PRIVILÈGE

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, nous en sommes à la fin du Feuilleton. Le sénateur Cools peut donc maintenant présenter sa question de privilège.

L'honorable Anne C. Cools: Honorables sénateurs, j'interviens pour traiter de cette question de privilège. Je demanderai à Son Honneur de se prononcer et de déterminer qu'il y a matière à question de privilège. Si Son Honneur en décide ainsi, je présenterai une motion qui redressera la situation et corrigera le problème.

Avant tout, je voudrais dire que le Règlement du Sénat nous indique que la première fonction d'un sénateur est de défendre nos privilèges. Le paragraphe 43(1) dispose que:

Il incombe à chaque sénateur de préserver les privilèges du Sénat. Une atteinte aux privilèges d'un sénateur touche aux privilèges de tous les sénateurs et à la capacité du Sénat de s'acquitter des fonctions que lui confère la Loi constitutionnelle de 1867. Les mesures nécessaires pour assurer cette protection ont priorité sur toute autre question au Sénat.

Je tiens aussi à rappeler aux sénateurs que le rôle du Président du Sénat, lorsqu'il détermine s'il y a, à première vue, matière à question de privilège, n'est pas de trancher la question, mais bien de dire si la motion devrait avoir priorité sur toute autre question; il n'a pas à se prononcer sur le fond de la question. Dans notre système et selon notre procédure, il appartient à la Chambre en entier de se prononcer sur une question de privilège.

En outre, je voudrais dire aux sénateurs que l'ordre et le décorum sont des caractéristiques nécessaires et même essentielles du Parlement. Le comportement parlementaire et non parlementaire, ainsi que sur le langage parlementaire et non parlementaire sont profusément documentés. En notre qualité de parlementaires, nous profitons d'un phénomène puissant que l'on appelle les privilèges du Parlement, le plus puissant de ces privilèges étant la liberté de parole durant les travaux du Parlement. Ce privilège a été acquis grâce aux sacrifices de plusieurs générations successives. Je tiens jalousement à tous ces privilèges, comme le Sénat d'ailleurs. C'est la tradition.

Honorables sénateurs, certains événements survenus récemment en cette Chambre m'attristent. Il est très déplorable que la qualité des débats ait dégénéré au point où ils ne sont plus que des débordements enfantins qui ne contribuent en rien à l'analyse du sujet, un sujet qui, en l'occurrence, est probablement le plus important dont cette Chambre ait été saisie, à savoir, l'objet, la signification et le droit du mariage. Comme nous le savons, le mariage est un élément fondamental du tissu social de notre société.

Honorables sénateurs, j'ai écouté le débat sur le projet de loi S-9 au Sénat. J'estime que ce que j'ai entendu est blasphématoire envers l'Église catholique et le Sénat.

Le mercredi 6 mars 2002, intervenant dans le débat au Sénat, le sénateur LaPierre nous a parlé du:

[...] sort qui est réservé aux femmes dans toutes les Églises et toutes les religions possibles et imaginables, qui toutes ont été créées par des hommes en jupe. Les talibans, qui eux aussi portent une jupe, ne faisaient que suivre les dictats de la tradition.

Le sénateur LaPierre a enchaîné, nous disant que, après tout, l'Église avait lancé une campagne horrible «qui a coïncidé assez bizarrement avec ce qui est devenu l'obsession toute puissante de la plupart des religions: l'antisémitisme». À propos de mon projet de loi, il s'en est pris au Sénat, disant ceci:

[...] le Sénat se ferait conspirateur en refusant à une partie de la société un droit qu'il accorde à tous les autres.

Le sénateur LaPierre a conclu que le projet de loi était «inutile, discriminatoire et injuste».

Honorables sénateurs, j'en arrive à ma question de privilège. J'ai été troublée de constater que le Sénat semblait submergé par les grandes déclarations et les emportements égocentristes et complaisants qui semblent avoir remplacé les arguments solides et bien raisonnés. Le cabotinage juvénile, le théâtralisme puéril et le cirque l'ont emporté sur la logique, l'expression rationnelle et la démarche de la raison. Pareil comportement me semble nuire au débat, au Sénat, aux sénateurs, aux homosexuels, à toutes les personnes justes et à tous les Canadiens. C'est déplacé, indigne. C'est aussi antiparlementaire.

Honorables sénateurs, le premier devoir de tout député, sénateur ou ministre, dans notre régime, est de faire respecter et de défendre la loi. En 2000, le Parlement a adopté le projet de loi C-23, Loi sur la modernisation de certains régimes d'avantages et d'obligations, dont l'article 1.1 dispose ceci:

Il demeure entendu que les modifications que la présente loi apporte ne changent pas le sens du terme « mariage », soit l'union légitime d'un homme et d'une femme à l'exclusion de toute autre personne.

Dans le même ordre d'idées, il y a moins d'un an, pendant la session en cours, nous avons adopté le projet de loi S-4, Loi d'harmonisation no 1 du droit fédéral avec le droit civil, dont l'article 5 dit ceci:

Le mariage requiert le consentement libre et éclairé d'un homme et d'une femme à se prendre mutuellement pour époux.

Le projet de loi S-9 appuie la position du Sénat, celle adoptée par le gouvernement, la position que le procureur général a fait valoir relativement à trois contestations de la Charte survenues dans notre pays, ainsi que la position adoptée par le juge Ian H. Pitfield, de la Cour suprême de la Colombie-Britannique.

Je voudrais aussi ajouter, honorables sénateurs, que le commentaire 479 de la 6e édition de l'ouvrage intitulé Jurisprudence parlementaire de Beauchesne prévoit ceci:

Il est interdit à tout député de critiquer quelque décision de la Chambre s'il n'a pas l'intention de faire suivre ses observations d'une motion portant annulation de la décision.

Le sénateur LaPierre a fait une réflexion sur le Sénat, ses votes et ses décisions et il n'a pas procédé comme il se doit pour persuader cet endroit d'adopter ou d'accepter une proposition contraire ou opposée.

Honorables sénateurs, le premier devoir d'un sénateur, c'est de faire respecter la Constitution du Sénat. Or, selon la Constitution du Sénat, le Sénat ne saurait adopter une proposition contraire ou opposée à une autre qu'il a adoptée en avril dernier, au cours de la même session. Le sénateur ne semble pas comprendre que toute décision du Sénat sur la question du mariage nous lie tous, lui y compris.

Mon projet de loi S-9, Loi visant à préciser le sens de «mariage», réitère simplement les modalités et les dispositions législatives actuelles et il met de l'ordre dans tout cela.

Honorables sénateurs, j'estime que mes privilèges à titre de sénateur ont été enfreints de la façon suivante. Je veux revenir tout particulièrement sur les Débats du Sénat d'hier.

Hier, pendant le débat sur le projet de loi S-9, alors que j'essayais de poser certaines questions à notre collègue, le sénateur Wilson, qui avait participé au débat sur le projet de loi S-9, je me suis trouvée dans une situation étonnante: j'avais du mal à m'exprimer.

Honorables sénateurs, je ne veux pas répéter l'échange qui a eu lieu entre le sénateur LaPierre et moi-même. Je voudrais toutefois dire qu'une partie de cet échange figure dans les Débats du Sénat d'hier. Pour être précise, j'ai été piquée au vif par deux déclarations du sénateur LaPierre qui parlait derrière moi. J'ai offert de lui céder la parole. Ce qui a retenu mon attention lorsqu'il m'aiguillonnait, c'est qu'il a fait certaines déclarations au sujet d'un juge, le juge Ian Pitfield.

Honorables sénateurs, si vous examinez le compte rendu d'hier, vous constaterez que j'ai dit ceci:

Honorables sénateurs, je pourrais peut-être céder la parole au sénateur LaPierre, qui semble vouloir intervenir dans le débat.

Le compte rendu fait dire ceci au sénateur LaPierre:

Honorables sénateurs, je disais simplement au sénateur Cools que les juges peuvent errer.

C'est ce qu'on peut lire dans le compte rendu, mais ce n'est pas ce que le sénateur LaPierre a dit, derrière moi. Derrière moi, il a parlé plus spécifiquement du juge Pitfield.

Son Honneur semble être intervenu tout de suite. À ce moment-là, le sénateur LaPierre a insisté de façon très agressive, beuglant: «Asseyez-vous, asseyez-vous!» Puis, le compte rendu rapporte une partie de l'échange. On peut lire dans le compte rendu d'hier que j'ai dit ceci:

J'invoque le Règlement. J'exige des excuses de la part de cet homme.

Je croyais alors qu'on me devait des excuses. L'affaire aurait été close si le sénateur LaPierre s'était levé et m'avait présenté ses excuses.

Le débat s'est poursuivi. Le compte rendu ne rapporte pas la plupart des observations du sénateur LaPierre.

Honorables sénateurs, je tiens à dire que, à mon sens, on a porté atteinte à mes privilèges de sénateur. On l'a fait de trois façons et je vais les décrire. D'abord, on a porté atteinte au droit d'un sénateur, en l'occurrence moi-même, de participer aux délibérations du Sénat. Hier, lorsque j'ai pris la parole pour participer au débat sur le projet de loi S-9, le sénateur, derrière moi, m'a crié des paroles désagréables et irrespectueuses.

(1540)

Je crois que ces paroles visaient expressément à insulter, à embarrasser, à marginaliser et à réduire au silence. Les remarques désobligeantes qui sont proférées ne portent pas toutes atteinte aux privilèges des parlementaires; je ne voudrais donc pas que les sénateurs me croient trop sensible. C'était pourtant le cas, parce que ces paroles retentissantes, répétitives, continues étaient aggravées par ce que je considérais comme une insulte à un juge d'une cour supérieure, et c'est pourquoi, honorables sénateurs, je soulève la question. Je ne suis pas particulièrement sensible, mais n'oublions pas qu'aucun juge d'une cour supérieure ne siège au Sénat. Il ne peut intervenir ni répondre. Cette association, ce lien visait clairement à réduire au silence. Quand je me lève pour participer à un débat, je ne m'attends pas, pas plus d'ailleurs qu'un autre sénateur, à faire l'objet de ce genre d'insulte parlementaire, de harangue ou de cris distrayants, offensants — agressifs. C'est de la provocation.

J'en arrive maintenant à mon argument central, honorables sénateurs. Comme on le sait et comme je l'ai dit hier, il y a eu trois contestations judiciaires au Canada concernant la signification du mariage. Ces contestations ont eu lieu en Colombie-Britannique, en Ontario et au Québec. Comme je l'ai dit hier, la première décision a été rendue en Colombie-Britannique, et les motifs qui sous-tendaient ces contestations étaient des allégations de la part de couples homosexuels, selon lesquelles la loi sur le mariage faisait une discrimination à leur endroit. Invoquant la Charte, ils avaient demandé au juge de déclarer la loi sur le mariage invalide et nulle.

Honorables sénateurs, M. le juge Pitfield, de la Cour suprême de la Colombie-Britannique, a rendu sa décision en octobre 2001. Cette décision fait maintenant partie de la jurisprudence canadienne. Comme je viens de le dire, l'obligation première des sénateurs est de faire respecter la loi et la Constitution du Sénat, la loi du Parlement, ou lex parliamenti. Les plus hauts tribunaux du pays, de même que le Parlement et le Cabinet, sont tous des éléments de la Constitution. Le respect de la Constitution et l'équilibre de la Constitution sont d'importants principes qui font partie du lex parliamenti. Voilà une notion particulièrement importante à retenir, surtout lorsqu'il est question, dans le cadre d'un débat, du rôle de magistrat et d'arbitre d'un juge d'une cour supérieure. Le privilège parlementaire fait en sorte que, lorsque je fais allusion au Sénat à des magistrats, à leurs fonctions ou à des décisions qu'ils ont rendues, les sénateurs doivent se montrer respectueux envers ces magistrats et observer le décorum.

C'est la tradition ici, honorables sénateurs. Selon le paragraphe 1 du commentaire 493 de la 6e édition de l'ouvrage intitulé Jurisprudence parlementaire de Beauchesne:

[...] sont considérées comme non parlementaires les allusions aux magistrats et aux tribunaux, lorsqu'elles revêtent le caractère d'une attaque personnelle ou d'un blâme [..]

La sortie malheureuse du sénateur LaPierre contre le juge Pitfield, son comportement déplacé et les remontrances qu'il m'a faites constituent une atteinte aux privilèges de cette noble Chambre.

Les honorables sénateurs doivent comprendre que, aux termes de la Loi constitutionnelle de 1867, le Parlement du Canada se doit de faire respecter l'article 96 concernant les juges. Le Parlement a donc le devoir de protéger les juges qui jouent un rôle d'arbitre. Il doit les protéger en raison du rôle juridique qui leur incombe, il ne faut pas l'oublier. Les magistrats doivent jouir de cette protection lorsqu'ils jouent leur rôle de juge, et celui-là seulement. C'est la fonction de juge qui est l'élément clé.

Honorables sénateurs, c'est en sa qualité de magistrat que j'ai cité le juge Pitfield hier. Les déclarations du sénateur LaPierre à l'endroit du juge Pitfield étaient odieuses et empreintes de mépris. Le Sénat et tous les sénateurs ont le droit de connaître la vérité, la loi et les faits. C'est leur droit, car ils représentent la plus haute instance du Parlement.

Honorables sénateurs, quand j'ai pris la parole pour ajourner le débat le 13 juin 2001, M. le juge Pitfield n'avait pas encore rendu de décision dans l'affaire EGALE Canada Inc. et al. c. le Procureur général du Canada et al. En fait, mon projet de loi S-9 a précédé ces contestations judiciaires. Si le juge Pitfield avait rendu une décision à ce moment-là, j'en aurais parlé dans mon discours et j'aurais fait état de ce jugement et de cette information découlant de la première contestation judiciaire relative à la Charte. Lorsque le sénateur LaPierre a pris la parole le 6 mars 2002, il avait le devoir d'informer le Sénat de la décision du juge Pitfield. Faire autrement serait manquer de franchise.

Honorables sénateurs, je dois être honnête. Hier, j'ai été outrée par le traitement que le sénateur LaPierre a réservé au juge Pitfield. J'ai été outrée par le fait que l'on puisse faire ce genre de déclaration parce qu'il y a une autre façon de faire. Le juge Pitfield mérite des excuses pour avoir été déshonoré au Sénat hier. J'ai l'intention de le proposer au cours de mon discours aujourd'hui.

Honorables sénateurs, il a en outre été porté atteinte à mon privilège par le phénomène de la calomnie. En plus d'être en désaccord avec moi, le sénateur a calomnié mes initiatives, accusant le projet de loi S-9 et le Sénat lui-même de discrimination. Le sénateur LaPierre a même, de façon grotesque, lié mon projet de loi et le Sénat à l'antisémitisme, aux talibans et à une série d'atrocités. Je proteste énergiquement. Un vieux principe de la liberté de parole au Parlement veut que les accusations que l'on porte doivent être fondées et prouvées. Le privilège parlementaire comprend notre droit exclusif de donner et de recevoir de telles preuves. Il a été porté atteinte au privilège parce que le sénateur en cause n'a donné aucune preuve au Sénat attestant que le projet de loi S-9 est discriminatoire. Je lui demande d'étayer son accusation et de prouver ses dires. Jusqu'à ce qu'il le fasse, il devrait se contenter d'exprimer son désaccord et éviter de me calomnier ou de dénigrer les décisions et avis du Sénat. On peut certes exprimer son désaccord avec quelqu'un, mais ce désaccord ne doit pas se transformer en calomnie, à mon avis.

Avant de conclure, honorables sénateurs, je veux que l'on comprenne bien le sens de mes propos d'hier au sujet du juge Pitfield, propos qui ont entraîné cette situation que j'ai trouvée un peu pénible. Le juge Pitfield de la Cour suprême de la Colombie-Britannique a indiqué ce qui suit au paragraphe 212 de son jugement, maintenant que le mariage est l'union d'un homme et d'une femme:

À mon avis, la question devant la cour n'a rien à voir avec la valeur de la personne, que sa préférence aille à une personne du même sexe ou du sexe opposé. La question est de déterminer s'il faut faire du mariage quelque chose qu'il n'est pas, afin qu'il consacre d'autres relations.

Le juge Pitfield dit également ceci, au paragraphe 200:

Selon mon interprétation, la loi n'autorise pas le recours à la Charte pour modifier la rubrique de compétence, au paragraphe 91(26), afin de faire du mariage quelque chose qu'il n'était pas lorsque les divers champs de compétence législative ont été divisés entre le Parlement et les provinces.

En conclusion, honorables sénateurs, je propose un moyen de dénouer la situation.

(1550)

Honorables sénateurs, je sais bien que le sénateur LaPierre est tout nouveau au Sénat. Je ne suis pas sans savoir non plus que c'est un homme passionné. Ce que je propose, honorables sénateurs, c'est que l'on règle le problème en présentant une motion qui offrirait essentiellement des excuses au juge Pitfield. Je demande au Président de rendre une décision afin que l'on propose une telle motion.

Je précise que je n'ai pas demandé au Président et que je ne vais pas lui demander de juger la conduite du sénateur LaPierre de quelque façon que ce soit. Comme je l'ai dit auparavant, s'il s'était gardé d'accuser le juge Pitfield d'être dans l'erreur dans ses autres commentaires, j'aurais fait passer son intervention sur le compte d'une mauvaise journée. Toutefois, avec tout ce qu'il a dit sur ce magistrat, il me semble que le Sénat devait et devrait réagir, car je suis certaine que le juge Pitfield a eu vent de ses propos, parce que les nouvelles vont vite.

Honorables sénateurs, je vais répéter ce point. Je comprends que le sénateur LaPierre est nouveau ici. Je l'accepte. Je demande à Son Honneur non de porter un jugement sur lui personnellement, mais de permettre, parce qu'il est établi qu'il y a une question de privilège qui paraît fondée à première vue, que cette motion soit proposée à la Chambre. Je devrais peut-être informer la Chambre de la nature et du texte de cette motion. Je proposerais donc:

Que le Sénat du Canada convienne que les observations malheureuses d'un sénateur particulier au sujet d'un juge de la Cour supérieure, l'honorable Ian Pitfield, étaient indésirables, sans fondement et antiparlementaires et qu'elles ne reflétaient pas l'opinion du Sénat du Canada; et que le Sénat convient d'exprimer à l'honorable juge ses regrets en ces termes:

Le Sénat du Canada exprime son profond regret à l'honorable juge Ian H. Pitfield, de la Cour suprême de la Colombie-Britannique, pour tout affront, insulte ou préjudice, réels ou perçus, qui peuvent avoir été occasionnés aux hautes fonctions judiciaires de l'honorable juge par les remarques inconsidérées et irréfléchies d'un sénateur particulier s'adressant au Sénat.

De plus, que le Sénat ordonne que ces excuses soient communiquées à l'honorable juge Pitfield par lettre portant la signature du greffier du Parlement, le greffier du Sénat, M. Paul Bélisle.

Honorables sénateurs, j'espère que tout cela est clair. Le paragraphe 44(1) du Règlement, qui traite de cette question de privilège, dit ceci:

Sur décision qu'une question de privilège paraît fondée à première vue, le sénateur qui a soulevé la question peut proposer une motion pour demander au Sénat soit d'intervenir, soit de soumettre la question au Comité permanent des privilèges, du Règlement et de la procédure, pour étude et rapport.

Je ne propose pas de recourir à un comité. Je propose, honorables sénateurs, que le Sénat soit autorisé à débattre cette motion particulière qui propose de présenter des excuses à un honorable juge. À ce stade, la question pourrait faire l'objet d'un débat car, honorables sénateurs, il y a une grande confusion ici au sujet du rôle du Président dans les questions de privilège qui paraissent fondées à première vue. En fait, le vrai débat devrait porter sur la motion proposée.

Honorables sénateurs, c'est à mon sens une façon parlementaire appropriée de résoudre un problème particulier en ce sens que le jugement du Sénat devrait porter sur le fond de la motion elle-même.

L'honorable Lowell Murray: Honorables sénateurs, j'espère être parmi les premiers à insister sur le maintien de la règle et de la saine tradition d'après laquelle les députés et les sénateurs ne doivent pas manquer de respect envers les juges, en fait, envers qui que ce soit, mais surtout envers les juges, qui sont soumis à de très sévères contraintes quand ils veulent se défendre. Cela étant dit, si le sénateur LaPierre a manqué de respect envers un juge, comme le sénateur Cools l'affirme, il ne l'a pas fait en public. Je crois que le sénateur Cools l'a admis elle-même. Je ne l'ai pas lu dans son discours précédent.

Cela étant, je ne vois pas, d'abord, comment Son Honneur peut être saisi de remarques irrespectueuses alléguées quand elles n'ont pas été faites en public, et encore moins comment le Sénat peut être appelé à présenter des excuses au juge en question pour de telles remarques.

En deuxième lieu, je tiens à souligner qu'aussi choquante qu'ait pu être pour le sénateur Cools l'intervention précédente du sénateur LaPierre ou ses interruptions, elle doit être en mesure, me semble-t-il, de concilier ses objections avec les déclarations fort éloquentes qu'elle a déjà faites au sujet de la nécessité de protéger la liberté d'expression dans cette Chambre.

Enfin, quant à ce qui peut constituer une déclaration insultante pour des juges, je voudrais attirer son attention sur une déclaration faite par l'ancien premier ministre du Canada, le très honorable Pierre Elliott Trudeau, dans laquelle il a dénoncé la majorité des juges de la Cour suprême du Canada pour l'une des décisions historiques de notre époque, à savoir le renvoi relatif au rapatriement de la Constitution canadienne du début des années 80. Il avait dit — et je crois que je le cite presque mot pour mot — que la majorité des juges de la Cour suprême du Canada avaient adopté une certaine position pour donner à leurs conclusions l'apparence de la «feuille de vigne de la légalité». Comment trouvez-vous cela?

Le sénateur Cools: Je remercie le sénateur Murray de ses observations réfléchies. Je me souviens très bien de ce discours particulier qui, je crois, avait été prononcé à l'inauguration de la bibliothèque juridique Bora Laskin à Toronto.

Je dois dire que les propos que vient de rapporter le sénateur Murray comptaient parmi les plus aimables que M. Trudeau ait tenus.

Le sénateur Murray: Madame le sénateur s'y oppose-t-elle?

Le sénateur Cools: Si je m'y oppose? Non, je ne m'y oppose pas. Je suis d'accord avec ce qu'il a dit. Le fait demeure qu'on peut faire des déclarations au sujet des juges, qu'on peut condamner des juges ou qu'on peut agir de différentes manières. Il faut quand même le faire d'une façon conforme à notre histoire et à nos pratiques constitutionnelles. Oui, les mêmes propos que le sénateur LaPierre a prononcés l'auraient pu être à une autre occasion, mais il aurait fallu le faire d'une façon différente.

Quant au deuxième point abordé par le sénateur Murray, soit la liberté d'expression et la question des déclarations publiques, je crois qu'il s'agit d'arguments valides. Le compte rendu montre que lorsqu'il a été appelé à répéter ce qu'il avait dit en sourdine ou ce qu'il avait dit dans mon dos, le sénateur visé n'a pas répété les mêmes paroles. Il avait dit auparavant que ce juge particulier avait tort, mais quand il a pris la parole, il a dit: «Honorables sénateurs, je disais simplement au sénateur Cools que les juges peuvent errer.» Je crois que nous savons tous que les juges peuvent avoir tort et, en fait, qu'ils ont souvent tort. Mon objection...

Des voix: Oh, oh!

(1600)

Le sénateur Cools: Madame le sénateur Raynell Andreychuk a fait tout à l'heure un discours très important dans lequel elle a cité une avocate très célèbre de Toronto, Dianne Martin, au sujet du bilan en matière de condamnations injustifiées sur lequel cette avocate avait fait des recherches. Ainsi, je tiens à dire aux honorables sénateurs qu'en fin de compte, la réponse est oui. Là où je voulais en venir, c'était la longue tradition que nous avons voulant que, lorsque nous formulons des critiques à l'égard de juges, elles sont censées s'inscrire dans ce type de cadre procédural. Elles ne sont pas censées être formulées de façon accessoire durant un autre débat.

Mon dernier point au sujet de la liberté d'expression est le suivant: je veux que les honorables sénateurs ici soient assurés que je crois fermement dans la liberté d'expression. En fait, de nombreux honorables sénateurs savent que, lorsque le sénateur LaPierre est arrivé dans cette Chambre, il a eu des difficultés avec certains sénateurs durant les premiers jours et je me suis portée à sa défense pour le protéger de toute attaque. La liberté d'expression est très importante.

Le point essentiel, c'est que j'ai soulevé cette question car il ne s'agissait pas simplement de piquer quelqu'un comme on le fait d'habitude. Il est amusant de chahuter quelqu'un, et cela peut être fait de façon intelligente et être stimulant sur le plan intellectuel, mais il était question ici d'une combinaison de ce que je jugeais être une agression d'un parlementaire à l'égard d'un autre, tout cela marqué au coin de l'intimidation dans une certaine mesure. Il se trouve simplement qu'une déclaration particulière au sujet d'un juge donné faisait partie de tout cela. Si j'ai soulevé cette question, c'est pour m'assurer que, si possible, les deux choses soient séparées afin que la question puisse être traitée comme il se doit, c'est-à-dire qu'elle fasse l'objet d'un débat dans cette Chambre. Si l'on n'y parvient pas, eh bien soit.

Cependant, en même temps, je pense que les honorables sénateurs savent que je suis libre de présenter la même motion à n'importe quel moment en donnant un préavis. J'ai juste pensé qu'il serait bon que nous commencions à nous excuser au juge Pitfield avant qu'il n'entende trop parler de cela ou qu'il ne le lise peut-être dans les journaux. C'était ma façon de penser.

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, avant que je ne donne la parole au sénateur LaPierre, le sénateur Lapointe veut également intervenir. J'invite tous les autres sénateurs qui veulent formuler des observations à le faire et je donnerai ensuite au sénateur Cools la possibilité de répondre. C'est après tout le sénateur LaPierre qui fait l'objet de la question soulevée par le sénateur Cools. Je suis désolé de ne pas lui avoir donné la parole plus tôt.

[Français]

L'honorable Laurier L. LaPierre: Honorables sénateurs, j'aimerais d'abord m'excuser d'avoir causé problème sans trop savoir pourquoi je l'ai fait. Deuxièmement, j'aimerais savoir si je subis présentement un procès parce que si c'est le cas, j'aurais besoin de quelques avocats. Mon collègue, le sénateur Day, qui me défend constamment, n'est pas ici présentement. Si je suis en procès, peut-être que le sénateur Stratton pourrait me protéger et me défendre.

Honorables sénateurs, j'aimerais faire quelques remarques qui pourraient peut-être expliquer les affirmations du sénateur Cools. Je ne parlerai pas...

[Traduction]

... de mes points touchant le projet de loi sur le mariage.

[Français]

Je crois que le sénateur Cools a abusé de la patience des honorables sénateurs en réinventant ses arguments en faveur du projet de loi S-9. Je ne voudrais pas me placer dans cette position car j'aurai, à un autre moment, l'occasion de le faire.

[Traduction]

Une voix: Honorables sénateurs...

Le sénateur LaPierre: Je regrette, mais c'est moi qui ai la parole. Le Sénat a diverses règles que je pourrais citer, à ce propos. Il y en a environ 17. Je les citerai, si les honorables sénateurs le désirent, mais je ne veux pas empiéter sur votre temps pour le faire.

Deuxièmement, je voudrais préciser que si j'ai dit hier que les juges pouvaient errer, c'est essentiellement parce qu'elle citait de mémoire ce qu'avait dit le juge Pitfield. J'avais devant les yeux la déclaration du juge Pitfield et j'en ai conclu que certains passages avaient été omis — c'était sans aucun doute mon erreur car je ne comprends pas très bien l'anglais — et donc, j'ai dit que les juges pouvaient errer. J'ai dit ce que tout le monde d'autre dit, à savoir que les juges peuvent errer.

L'autre chose que j'ai dite au sénateur a été de s'asseoir, car dès le début, elle m'a appris deux choses. Elle m'a appris que les gens peuvent dire ce qu'ils veulent quand ils veulent. Or, elle était debout quand Son Honneur était debout. Je sais qu'elle connaît parfaitement les règles et surtout qu'elle les comprend. Je voulais donc lui rappeler le paragraphe 18(5) du Règlement qui dit que quand le Président se lève, tous les autres sénateurs demeurent assis ou reprennent leurs places. C'est donc pour l'empêcher d'enfreindre le Règlement qui lui tient tant à coeur que je lui ai dit de s'asseoir.

Voilà ce qui s'est passé, honorables sénateurs. Pour moi, l'affaire est close. Je n'ai pas l'intention de m'excuser auprès de Dieu ou en fait de qui que ce soit d'autre — à moins, que Son Honneur ne m'en donne l'ordre, auquel cas j'obéirai. Deuxièmement, je n'ai pas l'intention de prendre part à cette discussion que, loin de trouver humiliante, je trouve intéressante.

[Français]

L'honorable Jean Lapointe: Honorables sénateurs, une remarque a été faite par le sénateur Cools à l'effet que le Sénat devrait s'excuser pour les paroles prononcées par le sénateur LaPierre au sujet de l'honorable juge Pitfield. Je ne pense pas que ce soit le cas. Si quelqu'un doit s'excuser, s'il y a matière à excuse, je pense que ce doit être de la part du sénateur LaPierre.

Honorables sénateurs, vous connaissez mon impatience chronique à l'égard des pertes de temps au Sénat. Honnêtement, je dois vous dire que je commence à en avoir assez.

Le sénateur Cools connaît le Règlement du Sénat mieux que quiconque au Sénat et possède une intelligence au-dessus de la moyenne. Toutefois, je constate que les questions relatives au Règlement sont la plus grande source de perte de temps au Sénat, du moins depuis que j'y siège.

Honorables sénateurs, bien que je ne sois pas en mesure de donner de conseils à qui que ce soit, je suggère aux sénateurs Cools et LaPierre d'aller prendre un verre ensemble et de régler leurs différends de façon à ce que le Sénat n'ait plus à subir ces querelles absolument inutiles dont la Chambre peut se passer.

À cause de ces discussions, on reporte l'étude de plusieurs projets de loi et de motions chaque jour. Je pense qu'on en sauterait moins si certains sénateurs cessaient de prendre le temps du Sénat pour montrer leur savoir et leurs connaissances. Ceci étant dit, je pense qu'il y a des choses plus importantes à faire au Sénat que de se chamailler entre sénateurs.

Peut-être ai-je tort de prendre la parole et de dire ce que je pense. Il est vrai que je ne prends pas souvent la parole, mais lorsque je le fais, j'ai l'intention de dire des choses que je crois importantes. Il était temps que quelqu'un se lève pour dire qu'il en a assez de ces pertes de temps.

[Traduction]

Son Honneur le Président: Avant que je ne donne la parole au sénateur Cools, je me demande s'il y a d'autres sénateurs qui désirent intervenir.

L'honorable Terry Stratton: Je serai très bref, mais je voudrais au moins expliquer ce qui s'est passé entre le sénateur LaPierre et moi. Il y a un problème au Sénat relativement à cette disposition du Règlement, problème qui ne fait qu'empirer jusqu'à ce que Son Honneur se lève et dise: «Mesdames et messieurs les sénateurs, veuillez vous asseoir lorsque je suis debout.» Il n'applique pas assez souvent cette disposition du Règlement. Cela se produit tout le temps. Lorsque le Président se lève pendant que des sénateurs débattent une question, ces derniers sont censés s'asseoir. C'est dit très clairement dans le Règlement du Sénat.

(1610)

Je n'ai fait que signaler à quelqu'un de s'asseoir. J'ai cru observer que le sénateur Cools reste très souvent debout lorsque le Président se lève. Je suis allé parler au sénateur LaPierre pour lui dire qu'il pourrait peut-être rappeler au sénateur Cools que le paragraphe 18(5) du Règlement, à la page 18, dit ce qui suit:

Lorsque le Président se lève, tous les autres sénateurs demeurent assis ou reprennent leurs places.

J'ai essayé de rappeler poliment au sénateur Cools de s'asseoir lorsque le Président parlait. Voilà ce qui s'est passé essentiellement. À ce que je sache, c'est exactement ce que le sénateur LaPierre a fait.

Son Honneur le Président: Le sénateurs Cools peut maintenant faire sa conclusion.

Le sénateur Cools: Honorables sénateurs, je voudrais faire quelques observations. Je remercie le sénateur Stratton d'avoir essayé de donner un ton plus léger à ce débat.

En ce qui concerne la réponse du juge Pitfield, je ne doute pas le moindrement du bien-fondé de mes observations d'hier. J'avais sous les yeux la réponse du juge Pitfield et je l'ai encore aujourd'hui ici. Je n'ai pas le moindre doute quant à la teneur de son jugement, car j'en ai lu très attentivement l'intégralité.

Quant à l'autre question soulevée, je pensais que le sénateur LaPierre aurait présenté des excuses et que l'affaire aurait été close. Il n'a pas voulu le faire. Je suis convaincue que nous en entendrons parler et que nous recevrons du courrier au sujet de cette affaire. On verra bien le moment venu.

Honorables sénateurs, d'une certaine façon, je trouve regrettable que le sénateur LaPierre estime dénué d'intérêt et fastidieux le débat d'aujourd'hui et certaines des questions sur lesquelles il porte. Je l'invite à revenir sur sa position et peut-être à réfléchir sur les principes constitutionnels importants qui sont en jeu dans ce débat. C'est particulièrement important pour ce qui concerne l'équilibre à rechercher dans la Constitution et la collaboration entre le Parlement et la magistrature ainsi que pour l'importante mission de protection des juges qui a été imposée au Parlement du Canada.

Finalement, de nouveau sur la question de fond, parce que, pour en revenir à Lapointe...

Le sénateur Lapointe: Au sénateur Lapointe.

Le sénateur Cools: C'est ce que j'ai dit. J'ai dit «pour en revenir au sénateur Lapointe.» J'ai peut-être fait une omission. Qu'avez-vous dit?

Le sénateur Lapointe: Vous m'avez appelé Lapointe.

Le sénateur Cools: D'accord, pour en revenir au sénateur Lapointe.

Le sénateur Lapointe: Merci.

Le sénateur Cools: Pour en revenir à l'honorable sénateur, je l'invite à apprendre quelque chose au sujet des importants principes que j'ai soulevés aujourd'hui, particulièrement au chapitre de ce que nous appelons «courtoisie constitutionnelle». J'invite l'honorable sénateur à faire un petit effort et à supporter encore un peu de cet ennui pour être en mesure d'aborder certaines de ces questions.

Quoi qu'il en soit, j'ai essentiellement dit ce que j'avais à dire. Je n'accepte pas un seul instant l'explication fournie par le sénateur Stratton. En fait, je sais ce qu'on m'a dit hier. Je connais les attitudes qui étaient communiquées et j'ai conscience de la force et de l'agressivité qui étaient exprimées. Je n'ai absolument aucun doute.

Je le répète, toutefois, ce qui est triste, ce n'est pas que le sénateur LaPierre m'ait attaquée, car j'avais déjà la parole lorsque tout cela est arrivé. En fait, je lui ai moi-même cédé la parole. Par conséquent, l'observation du sénateur Stratton ne vaut absolument pas, car j'avais la parole lorsque c'est arrivé. J'ai jeté un coup d'oeil et j'ai dit que je pourrais peut-être céder la parole au sénateur LaPierre, qui semblait vouloir intervenir dans le débat. On devrait peut-être s'en tenir à cela. L'explication du sénateur Stratton est absolument inacceptable pour moi.

Je sais très bien comment ces choses-là fonctionnent. Cela étant dit, honorables sénateurs, je crois qu'il y a bel et bien atteinte prima facie. Si Son Honneur estime que ce n'est pas le cas, il n'y a absolument aucun problème. Tout sénateur a le droit à tout moment de donner avis d'une motion. La seule différence entre le prima facie et l'avis, très franchement, c'est deux ou trois jours.

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, nos interventions ont été longues et je voudrais examiner le compte rendu avant de rendre un jugement, ce que je ferai à la première occasion.

[Français]

L'AJOURNEMENT

Permission ayant été accordée de revenir aux avis de motion du gouvernement:

L'honorable Fernand Robichaud (leader adjoint du gouvernement): Honorables sénateurs, avec la permission du Sénat et nonobstant l'article 58(1)h) du Règlement, je propose:

Que, lorsque le Sénat s'ajournera aujourd'hui, il demeure ajourné jusqu'à mardi prochain, le 19 mars 2002, à 14 heures.

Son Honneur le Président: Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.

(La motion est adoptée.)

(Le Sénat s'ajourne au mardi 19 mars 2002, à 14 heures.)


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