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Débats du Sénat (Hansard)

Débats du Sénat (hansard)

2e Session, 37e Législature,
Volume 140, Numéro 29

Le mercredi 11 décembre 2002
L'honorable Dan Hays, Président


LE SÉNAT

Le mercredi 11 décembre 2002

La séance est ouverte à 13 h 30, la Présidente intérimaire étant au fauteuil.

Prière.

DÉCLARATIONS DE SÉNATEURS

LE TREMBLEMENT DE TERREDANS LA PROVINCE DU MOLISE, EN ITALIE

L'honorable Marisa Ferretti Barth: Honorables sénateurs, à l'approche des festivités et à la suite des nombreuses lettres de détresse que j'ai reçues, je ne pouvais passer sous silence le chagrin qui m'afflige à la suite du séisme qui a touché l'Italie.

Comme vous le savez, le 31 octobre dernier, un violent séisme a secoué le centre et le sud de l'Italie, entraînant la mort de 29 personnes, dont 26 enfants. Ces derniers ont été tués à la suite de l'effondrement du toit de leur école de San Giuliano di Puglia alors qu'ils fêtaient l'Halloween.

Honorables sénateurs, permettez-moi de vous situer et de vous décrire cette belle région du Molise. La province de Molise est située au centre-sud de l'Italie et elle est entourée par les provinces voisines, les Pouilles, les Abruzzes, la Campanie et le Latium, mais du côté est, elle s'ouvre sur la mer Adriatique. Cette région est peu connue et pourtant elle mérite d'être découverte, tant pour la splendeur de son paysage que pour la richesse de son histoire.

Le Molise est une très vieille région où les Romains se sont installés pour y bâtir des cités florissantes. Malgré le déclin de cet empire, le Molise a su maintenir sa position stratégique au coeur de la péninsule méridionale et conserver son originalité, ses coutumes et sa beauté.

Aujourd'hui, devant les heures sombres qui s'abattent sur cette région, je suis de tout coeur avec eux. Tout le Molise et ses citoyens pleurent les gens disparus et les villages détruits, d'autant plus que ce séisme a frappé les gens par surprise, le Molise n'étant pas une région propice aux tremblements de terre.

Le Molise est principalement constitué d'imposantes montagnes. Seulement quelques plaines longent le littoral de la mer et des fleuves Biferno et Trigno. Les nombreux villages de cette province semblent accrochés au sommet des montagnes et ils ont conservé l'attrait des cités médiévales. Une promenade dans un de ces villages nous entraîne à l'époque du Moyen-Âge avec ses chevaliers, ses seigneurs et ses belles dames, encore bellissime aujourd'hui.

Honorables sénateurs, malgré que les semaines se sont écoulées, la douleur persiste dans le cœur des résidants du Molise. Il est difficile d'oublier la mort de 26 enfants innocents qui avaient toute la vie devant eux.

En terminant, honorables sénateurs, à l'approche de la période des fêtes, natale e anno nuovo, la souffrance est encore plus profonde. Un message d'amour, d'espoir et de solidarité pourra peut-être consoler les gens éprouvés par cette horrible catastrophe naturelle.

[Traduction]

LE DÉCÈS DE L'HONORABLE HARTLAND DE MONTARVILLE MOLSON, O.C., O.B.E.

HOMMAGE

L'honorable Marcel Prud'homme: Honorables sénateurs, l'homme était un visionnaire, un grand héros de guerre, un sportif et un grand homme d'État.

Les sénateurs auront certainement reconnu la personne à qui j'ai souhaité rendre hommage aujourd'hui — notre regretté sénateur Molson dont le service commémoratif aura lieu demain. Je n'ai pas voulu prendre la parole le jour où on lui a rendu hommage, préférant le faire, comme je l'avais annoncé, la veille de ce service commémoratif.

Les raisons à cette décision sont nombreuses. Premièrement, les sénateurs savent que le sénateur Molson a été nommé au Sénat en 1955. Deuxièmement, ils savent qu'il a toujours siégé à titre d'indépendant. S'il le fallait, je répéterais les propos tenus par le sénateur Meighen au sujet du sénateur Molson quand il a parlé du rôle joué par les sénateurs indépendants dans cette Chambre. Mais il existe d'autres raisons pour lesquelles je souhaite rendre hommage au sénateur Molson. Elles surprendront certains sénateurs.

Les sénateurs savent que le sénateur Molson aurait pu siéger au Sénat jusqu'à sa disparition. Il a cependant toujours affirmé qu'il renoncerait à son siège de sénateur québécois indépendant seulement s'il avait l'assurance d'être remplacé par un autre indépendant. Voilà pourquoi je voudrais que le compte rendu officiel indique que, au matin du 26 mai 1993, le sénateur Molson a annoncé qu'il démissionnait ce jour-là et il a prononcé son discours d'adieu au Sénat dans l'après-midi du même jour. À 16 heures, j'ai été nommé sénateur indépendant pour le remplacer. Que chacun en tire ses propres conclusions. Le sénateur Molson était très heureux, sachant qui le remplacerait. Je m'enorgueillis de dire que j'ai succédé à l'un des plus grands Canadiens de notre histoire, à un homme que j'ai connu pendant plus de 45 ans. Je l'ai connu lorsque j'étais président de l'association des étudiants de l'Université d'Ottawa. Il m'a rendu service et j'espère que de nombreux sénateurs seront présents demain, même si nous sommes à la fin de la session parlementaire.

(1340)

[Français]

À son beau-fils et à sa fille, j'offre mes plus sincères condoléances.

[Traduction]

Pour nous, au Québec, c'est la perte d'un grand homme d'État et d'un Canadien anglais respecté.

[Français]

LE MULTILINGUISME ET LA DIVERSITÉ CULTURELLE

L'honorable Jean-Robert Gauthier: Honorables sénateurs, les données du Recensement de 2001 publiées le 10 décembre 2002, par Statistique Canada démontrent que depuis les cinq dernières années, le Canada profite non seulement du bilinguisme officiel et institutionnel, mais s'enrichit de plus en plus par le multilinguisme et la diversité culturelle.

Les Canadiens et les Canadiennes embrassent de plus en plus la dualité linguistique canadienne et le multilinguisme. Bravo! Nous saurons prendre notre juste part sur la scène internationale, car il est stipulé dans le rapport que les Canadiens et les Canadiennes parlent plus de 100 langues différentes.

Cette capacité de communiquer avec les autres ne menace aucunement le tissu social canadien, mais nous permettra de mieux communiquer avec les autres pays afin de renforcer les échanges culturels, sociaux et économiques.

Le défi auquel font face les communautés francophones vivant en milieu minoritaire est d'assurer que nos jeunes parlent la langue anglaise tout en préservant la leur. Cette coexistence de l'usage régulier au foyer et au travail des deux langues officielles est de bon augure.

[Traduction]

Un élément d'information s'avère inquiétant, en l'occurrence le fait que le bilinguisme chez les jeunes soit à la baisse à l'extérieur du Québec. On ne s'attendait pas à ce phénomène, à la lumière des données antérieures. Certains d'entre nous ont pensé que les jeunes anglophones à l'extérieur du Québec étaient de plus en plus bilingues, mais les données indiquent un recul du bilinguisme chez les jeunes anglophones. Les compressions dans le secteur de l'éducation et les modifications apportées aux programmes au chapitre de l'enseignement des langues secondes dans différentes provinces sont vraisemblablement la cause de ce recul. Le gouvernement fédéral aura de nombreuses occasions au cours de la nouvelle année de se pencher sur cette importante question avec les autorités provinciales.

[Français]

Par coïncidence, le Programme de langue officielle en éducation (PLOE) vient à échéance le 31 mars 2003. Il faut en discuter avec les responsables provinciaux avant de s'engager dans de nouvelles ententes. L'évaluation de l'efficacité de ce programme est en cours.

Par contre, l'évaluation du Programme d'aide aux communautés de langue officielle (PACLO) doit être éffectuée aussi. Elle n'est pas disponible actuellement. L'efficacité de ce programme doit être étudiée sérieusement et améliorée si l'intention du gouvernement de reconduire les ententes est l'enjeu. À ma connaissance, le PACLO n'a jamais été évalué depuis 1970. Il est temps qu'on le fasse.

Il y a un intérêt national dans les langues officielles du Canada. Par conséquent, nous devons prendre toutes les mesures nécessaires pour nous assurer que les ententes conclues avec les provinces portent fruit.

J'aimerais conclure en souhaitant que le Comité sénatorial permanent des langues officielles se penche sur cette question fort importante.

[Traduction]

LA COMMISSION DE LA FONCTION PUBLIQUE

LES PRATIQUES D'EMBAUCHAGE

L'honorable Donald H. Oliver: Honorables sénateurs, je porte à votre attention les pratiques d'embauchage de la Commission de la fonction publique du Canada. Au cours des quarante dernières années, la CFP a appliqué une méthode de recrutement qui limite l'accès à l'emploi dans la fonction publique. Les postes à pourvoir en Colombie-Britannique par exemple ne sont pas offerts aux Canadiens du Canada atlantique. Les résidants de l'Ontario ne peuvent poser leur candidature pour des postes offerts en Nouvelle- Écosse. En vertu du système d'embauchage actuellement en vigueur, les Canadiens désireux d'accéder à des postes de haut niveau au sein de la CFP doivent résider à Ottawa. Or, cette pratique de toute évidence injuste, est parfaitement légale. Une politique reposant sur les codes postaux et les rayons pour établir l'admissibilité à l'emploi n'offre pas un plein accès et ne permet pas de profiter des talents que recèle l'ensemble du Canada. En fait, peu de possibilités d'emploi au gouvernement fédéral sont offertes à tous les Canadiens.

Durant l'exercice 2000-2001, à peine 17 p. 100 du nombre total d'emplois affichés sur le site Web de la Commission de la fonction publique étaient offerts à tous au Canada. Un an plus tard, le nombre d'emplois affichés au niveau national n'était passé qu'à 22 p. 100. Cette année-là, moins de 930 des 4 200 emplois affichés étaient accessibles à tous les Canadiens. Les députés ministériels et de l'opposition à l'autre endroit ont reconnu que les pratiques d'embauche de la CFP laissaient à désirer. Même la direction de la CFP a reconnu que des mesures devaient être prises pour remédier à cette situation. Tant qu'on ne mettra pas un terme à la procédure de sélection limitée utilisée par la CFP, les emplois qui pourraient être comblés par des Canadiens qualifiés et compétents de tous les coins du pays demeureront inaccessibles pour eux. Tous les Canadiens qualifiés et intéressés à une carrière au sein du gouvernement devraient pouvoir poser leur candidature pour des emplois dans la fonction publique dans le cadre d'un système d'embauche juste et équitable. L'adresse des candidats ne devrait pas être le facteur d'admissibilité.

LE DÉCÈS DU PÈRE LES COSTELLO

HOMMAGE

L'honorable Francis William Mahovlich: Honorables sénateurs, j'interviens aujourd'hui pour rendre hommage à un bon ami, le père Les Costello, qui est mort à l'âge de 74 ans.

Né à South Porcupine, en Ontario, il a obtenu son diplôme de la St. Michael's College School à Toronto. Après avoir joué pour les St. Michael's Majors, il a passé trois saisons dans la Ligue américaine de hockey avec les Hornets de Pittsburgh. Durant les éliminatoires, en 1948, il a marqué deux buts et obtenu deux passes en cinq matchs, aidant du même coup les Maple Leafs de Toronto à gagner la Coupe Stanley.

Il aurait pu devenir un grand joueur, mais il avait une plus grande vocation. La saison suivante, il a surpris tout le monde en quittant la LNH pour la prêtrise. Beaucoup sont appelés, mais peu sont choisis. En 1957, il a été ordonné prêtre et, dans les années 80, il est retourné dans le nord de l'Ontario où il a dirigé l'église St. Alphonse dans ma ville, Schumacher. On peut aujourd'hui voir dans cette église quelque chose d'unique. Le père Costello a demandé à un artiste, qui était un mineur de l'endroit, de peindre une fresque un peu comme celle qu'on retrouve dans la chapelle Sixtine à Rome. On y voit deux anges, l'un avec le visage de mon frère et l'autre, le mien.

Le père Costello était surtout célèbre pour son rôle en tant que l'un des membres fondateurs de l'équipe de hockey les Flying Fathers, une équipe de prêtres catholiques qui a parcouru le Canada et les États-Unis et a recueilli plus de 4 millions de dollars pour des organismes caritatifs. Je me rappelle qu'un jour, peu de temps après être allé s'établir dans le Nord, il a prononcé un sermon dans une petite ville minière juste au nord de North Bay. À ce moment-là, le numéro du magasine Time qui venait de paraître affichait un gros point d'interrogation et les mots «Is God Dead?» ou, si vous préférez, «Dieu est-il mort?». Il a commencé son sermon en disant qu'il ne savait même pas que Dieu était malade.

Le père Les Costello avait un grand sens de l'humour. J'adresse nos sincères condoléances à tous les membres de sa famille.

[Français]

LA JOURNÉE INTERNATIONALE DES DROITS DE L'HOMME

L'honorable Gérald-A. Beaudoin: Honorables sénateurs, je voudrais dire quelques mots sur la Déclaration universelle des droits de l'homme de 1948, dont nous fêtions hier le cinquante-quatrième anniversaire.

En ce monde troublé qu'est actuellement le nôtre, il est réconfortant de voir que nous avons des instruments internationaux de très grande importance.

Le grand philosophe britannique Isaiah Berlin, qui vécut de 1909 à 1997, disait du XXe siècle que nous avons vécu qu'il était le siècle le plus violent de l'histoire, avec les deux grandes guerres mondiales. Il avait hélas raison.

Mais ce XXe siècle, ce siècle violent, fut également celui de l'inscription dans les constitutions de plusieurs pays, dont le Canada, de chartes des droits et libertés.

C'est l'un des siècles qui a débuté avec cette bible — si on me permet l'expression — des temps modernes, des grands instruments internationaux, des chartes constitutionnelles des droits et libertés.

Je me réjouis que le Canada, en 1982, ait inscrit dans sa Constitution une Charte des droits qui constitue l'un de nos plus grands héritages. Il me plaît de souligner ce fait et de m'en réjouir grandement.


(1350)

AFFAIRES COURANTES

L'ÉTUDE SUR LES ENJEUX STRATÉGIQUES TOUCHANT L'INDUSTRIE DU TRANSPORT INTERURBAIN PAR AUTOCAR

DÉPÔT DU RAPPORT DU COMITÉ DES TRANSPORTS ET DES COMMUNICATIONS

L'honorable Joan Fraser: Honorables sénateurs, j'ai l'honneur de déposer le troisième rapport du Comité sénatorial permanent des transports et des communications intitulé «Le transport par autocar au Canada».

[Traduction]

PROJET DE LOI SUR L'ABROGATION DES LOIS

PREMIÈRE LECTURE

L'honorable Tommy Banks présente le projet de loi S-12, Loi prévoyant l'abrogation des lois non mises en vigueur dans les dix ans suivant leur sanction.

(Le projet de loi est lu une première fois.)

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, quand lirons-nous ce projet de loi une deuxième fois?

L'honorable John Lynch-Staunton (leader de l'opposition): Honorables sénateurs, cette motion peut faire l'objet d'un débat. S'agit-il d'un projet de loi d'initiative gouvernementale ou d'intérêt privé?

Le sénateur Banks: Honorables sénateurs, c'est un projet de loi d'intérêt public émanant du Sénat. Ce n'est pas un projet de loi d'intérêt privé en ce sens qu'il ne propose pas un changement législatif au nom d'une société.

Le sénateur Lynch-Staunton: Je n'étais pas certain de l'origine du projet de loi en raison de son thème.

(Sur la motion du sénateur Banks, la deuxième lecture du projet de loi est inscrite à l'ordre du jour de la séance d'après-demain.)

LA LOI ÉLECTORALE DU CANADA

AVIS DE MOTION VISANT LA RÉFORME DU FINANCEMENT DES PARTIS POLITIQUES

L'honorable Consiglio Di Nino: Honorables sénateurs, je donne avis que, mardi prochain, le 17 décembre 2002, je proposerai:

Que le Sénat exhorte le gouvernement du Canada à réformer la Loi électorale du Canada et d'autres lois appropriées pour éliminer tous les dons faits à des partis politiques et les remplacer par un système de financement public complet, et pour créer un comité impartial et indépendant chargé de diriger et de surveiller ce système, notamment d'établir et de mettre en oeuvre des normes et des règles de conduite.

[Français]

LANGUES OFFICIELLES

AVIS DE MOTION VISANT À AUTORISER LE COMITÉ À ÉTUDIER LA RADIODIFFUSION DE LANGUE FRANÇAISE DANS LES COMMUNAUTÉS MINORITAIRES FRANCOPHONES

L'honorable Jean-Robert Gauthier: Honorables sénateurs, je donne avis que vendredi, le 13 décembre 2002, je proposerai:

Que le Comité sénatorial permanent des langues officielles soit autorisé à examiner et à faire rapport sur les mesures à prendre pour encourager et favoriser la prestation et l'accès au plus large éventail possible de radiodiffusion de langue française dans les communautés minoritaires francophones du Canada.

[Traduction]

AFFAIRES JURIDIQUES ET CONSTITUTIONNELLES

AUTORISATION AU COMITÉ DE SIÉGER EN MÊME TEMPS QUE LE SÉNAT

L'honorable George J. Furey: Honorables sénateurs, avec la permission du Sénat et nonobstant l'alinéa 58(1)a), je propose:

Que le Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles soit autorisé à siéger à 15 h 30 le mercredi 11 décembre 2002, même si le Sénat siège à ce moment-là, et que l'application du paragraphe 95(4) du Règlement soit suspendue à cet égard.

L'honorable Marcel Prud'homme: Le vote!

Le sénateur Furey: Honorables sénateurs, je crois savoir que le comité entendra des témoins de l'extérieur de la ville.

Le sénateur Prud'homme: Honorables sénateurs, je crains qu'il ne reste plus de sénateurs pour le reste de la séance d'aujourd'hui si nous donnons la permission de se réunir à un trop grand nombre de comités. J'hésite donc à acquiescer à cette demande sans savoir combien de comités présenteront la même. Il pourrait y en avoir autant que cinq, d'après ce que j'ai entendu dire. Y aurait-il toujours quorum si toutes les demandes étaient agréées?

L'honorable John Lynch-Staunton (leader de l'opposition): Les sénateurs savent-ils que le projet de loi C-10A, qui est né de la décision du comité de scinder le projet de loi C-10, n'est plus inscrit au Feuilleton pour être étudié par la Chambre des communes avant l'ajournement? Le projet de loi C-10B pourrait donc devenir superflu.

Le sénateur Furey: Honorables sénateurs, cela n'aura aucun effet sur l'ordre de renvoi du Sénat au comité.

Le sénateur Lynch-Staunton: La Chambre des communes n'a pas approuvé la demande du Sénat sur la division du projet de loi C-10. J'interprète donc son refus d'inscrire le projet de loi C-10A au Feuilleton de la Chambre comme une contestation de la mesure prise par le Sénat. Le sénateur est-il d'avis qu'il est pertinent de poursuivre les précieuses études menées par le comité avant que l'on reçoive une confirmation de la décision de la Chambre dans un sens comme dans l'autre?

Le sénateur Furey: Honorables sénateurs, cela ne relève pas du comité, qui n'a pas ce genre de prérogative. Le comité suit les directives que le Sénat lui transmet. Si le sénateur veut bien présenter une motion pour modifier cette directive, ce pourrait être la meilleure solution. Le comité suit les directives du Sénat.

Le sénateur Lynch-Staunton: Honorables sénateurs, c'est une suggestion que je pourrais retenir et mettre en pratique plus tard.

Son Honneur la Présidente intérimaire: Honorables sénateurs, la permission est-elle accordée?

Des voix: D'accord.

(La motion est adoptée.)

(1400)

L'ÉTUDE DE L'ÉTAT DU SYSTÈME DE SOINS DE SANTÉ

AUTORISATION AU COMITÉ SÉNATORIAL PERMANENT DES AFFAIRES SOCIALES, DES SCIENCES ET DE LA TECHNOLOGIE DE CONSERVER LES POUVOIRS
DE DIFFUSER SON RAPPORT

L'honorable Michael Kirby: Honorables sénateurs, avec la permission du Sénat et par dérogation à l'alinéa 58(1)a) du Règlement, je propose, avec l'appui du sénateur Cook:

Que, par dérogation à l'ordre adopté par le Sénat le mardi 8 octobre 2002, le Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie, autorisé à examiner pour en faire rapport l'état du système de soins de santé au Canada, soit habilité à conserver les pouvoirs nécessaires à la diffusion de ses constatations pendant 120 jours après le dépôt de son rapport.

(La motion est adoptée.)

[Français]

LES DONNÉES LINGUISTIQUES DU RECENSEMENT 2001

AVIS D'INTERPELLATION

L'honorable Jean-Robert Gauthier: Honorables sénateurs, je donne avis que, le vendredi 13 décembre 2002:

J'attirerai l'attention du Sénat sur les données démo- linguistiques du Recensement 2001 traitant du profil des langues au Canada et bien d'autres renseignements utiles et d'intérêt national.


[Traduction]

PÉRIODE DES QUESTIONS

LE CODE CRIMINEL
LA LOI SUR LES ARMES À FEU

LA DIVISION DU PROJET DE LOI—L'ÉTAT DU PROJET DE LOI À LA CHAMBRE DES COMMUNES

L'honorable Terry Stratton: Honorables sénateurs, ma question s'adresse à madame le leader du gouvernement au Sénat et a trait au projet de loi C-10, C-10A ou C-10B. En ce qui a trait à la situation du projet de loi C-10, figure-t-il encore au Feuilleton à l'autre endroit ou en a-t-il été rayé?

L'honorable Sharon Carstairs (leader du gouvernement): Je crois comprendre, honorables sénateurs, qu'il reste inscrit au Feuilleton ou du moins à l'ordre du jour où figurent les mesures qui seront abordées aujourd'hui. Il ne semble pas qu'on ait mis cette mesure en délibération.

Le sénateur Stratton: Madame le leader n'est peut-être pas en mesure de répondre à la prochaine question, mais quelle est maintenant la position du gouvernement à l'égard du projet de loi C-10A? Il semble s'être heurté à un mur à l'autre endroit. Nous avons été forcés de terminer l'étude du projet de loi au Sénat sans avoir eu le temps de tenir des audiences appropriées et complètes. Il serait bon de savoir ce qui se passe, car l'ignorance à cet égard ne fait que retarder l'adoption du projet de loi C-10A et influe également sur le processus selon lequel nous poursuivons l'étude du projet de loi C-10B.

Le sénateur Carstairs: Comme les honorables sénateurs peuvent très bien le comprendre, je ne dis pas au leader du gouvernement à la Chambre comment mener les travaux de la Chambre et il ne me dit pas comment mener les travaux du Sénat. Le Sénat a disposé du projet de loi comme il le jugeait bon. La Chambre des communes doit maintenant entreprendre de faire la même chose. Je crois comprendre que la Chambre siège jusqu'à vendredi prochain; il est donc toujours possible qu'elle dispose du projet de loi avant l'ajournement des Fêtes.

L'honorable Gerry St. Germain: Honorables sénateurs, ne nous a-t- on pas fait croire qu'il fallait adopter le projet de loi C-10A avant le 31 décembre de manière à empêcher que se présentent des situations qui placent nos concitoyens concernés par la Loi sur les armes à feu dans une position où ils s'exposeraient à des poursuites au criminel? N'était-ce pas ce qui avait été entendu avec madame le leader du gouvernement au Sénat?

Le sénateur Carstairs: La question n'est pas de savoir ce que j'ai laissé entendre aux honorables sénateurs; c'est ce que prévoit la mesure législative.

Le sénateur St. Germain: Nous disons donc que si la Chambre des communes refuse d'aller de l'avant à ce moment-ci ou estime qu'il n'y a pas lieu de le faire, les citoyens s'exposeront à des procédures au criminel à compter du 31 décembre. Est-ce là ce que dit le leader?

Le sénateur Carstairs: La loi C-68, soit la mesure législative initiale concernant les armes à feu, précisait que des armes à feu pourraient faire l'objet de poursuites si elles demeuraient entre les mains de Canadiens. La loi habilitante, soit le projet de loi C-10A, si je me rappelle bien, c'est-à-dire le projet de loi C-10 à l'origine, prévoyait une clause de droits acquis dans le cas de bon nombre de ces armes à feu. De toute évidence, si cette loi n'est pas adoptée, cette clause n'existera pas.

Le sénateur Stratton: Si j'ai bien compris le projet de loi C-10A, bien que le Règlement exige toujours l'enregistrement d'ici le 31 décembre de l'année courante, une amnistie est accordée dans le cas des poursuites. Autrement dit, le ministre accorde une prolongation de six mois pour permettre à la bureaucratie de traiter les enregistrements tardifs. Est-ce exact?

Le sénateur Carstairs: La réponse est oui, sénateur, mais vous devez éviter ici de confondre les deux choses. Il y a ici deux choses. Je veux que ce soit très clair. La loi C-68 comprend des dispositions exigeant que les Canadiens soient titulaires d'un permis et aient enregistré leurs armes le 31 décembre 2002. Une période de grâce de six mois a été accordée pour ce qui est de l'application de cet article de la loi C- 68. La situation n'a pas changé. La période de grâce débutera le 1er janvier et s'étendra sur les six mois suivants.

Le projet de loi C-10A, ou C-10 si vous préférez l'appeler ainsi, traite des armes déclarées illégales dans la loi C-68 et leur applique la disposition relative aux droits acquis afin qu'elles puissent être détenues par certains particuliers. Cette disposition a été intégrée dans une loi habilitante pour que ces particuliers puissent s'en prévaloir. Si j'ai bien compris, si nous n'adoptons pas ce projet de loi, cette disposition relative aux droits acquis ne sera pas en vigueur.

Le sénateur Stratton: Qu'arrive-t-il aux particuliers non touchés par cette disposition? Comment sont-ils affectés?

Le sénateur Carstairs: Selon mon interprétation du projet de loi, et l'on peut me corriger si j'ai tort, si cette disposition n'est pas adoptée — et nous avons certes fait tout en notre pouvoir pour qu'elle le soit — ces armes seront alors illégales.

LA JUSTICE

L'APPLICATION DE LA LOI SUR LES ARMES À FEU

L'honorable Lowell Murray: Honorables sénateurs, j'apprécie ce qu'a dit le leader du gouvernement au sujet des dispositions des projets de loi C-68 et C-10A, s'il est toujours nommé ainsi car il semble s'être évaporé là-bas.

J'aimerais poser une question au leader du gouvernement concernant une déclaration que M. Jean Valin, directeur des affaires publiques au Centre canadien des armes à feu, aurait faite il y a quatre ans. Je cite:

Si les provinces rechignent à appliquer les lois du pays [...] elles ont toujours le choix de les interpréter plus ou moins strictement. La loi ne change pas, c'est son application qui est différente. L'application de la loi continue à relever de la police locale [...] et tous les agents de police vous le diront, la manière dont on qualifie une infraction est une question de jugement, c'est une décision qui est laissée à leur discrétion. C'est une bonne nouvelle pour l'Ouest. C'est comme les contraventions pour excès de vitesse [...] la police dispose d'une certaine latitude.

Voici ma question. Comment le Parlement peut-il s'attendre à ce qu'une loi adoptée en vertu du pouvoir du Parlement en matière de droit pénal soit défendable, et ne parlons pas de crédible, si les porte-parole du gouvernement fédéral envisagent un système disparate d'application de la loi dans l'ensemble du pays?

L'honorable Sharon Carstairs (leader du gouvernement): Je remercie l'honorable sénateur de sa question. Clairement, j'estime que ce genre de déclaration est regrettable. Toutefois, il est tout à fait clair que c'est ce qui se passe déjà depuis un certain temps en ce qui concerne la marijuana. Dans beaucoup de nos grandes villes, la simple possession de petites quantités de marijuana ne donne pas lieu à des poursuites. Et pourtant, dans de nombreuses autres localités, c'est l'inverse. Le travail de la police est le travail de la police. C'est aux autorités policières de décider; parfois elles appliquent la loi strictement et parfois elles ne le font pas.

Le sénateur Murray: Juste pour éclaircir et confirmer ce que nous venons d'entendre, ai-je bien compris que mon honorable collègue laisse entendre que les propos de M. Valin, que je viens de citer, reflètent effectivement l'approche disparate du gouvernement fédéral en matière d'application de la loi?

Le sénateur Carstairs: Non, sénateur, je l'ai dit très clairement au début de ma déclaration. Le gouvernement pense qu'une telle affirmation est déplacée, mais je pense que nous devons accepter la réalité de ce qu'est le travail de la police. Le gouvernement fédéral ne contrôle pas le travail de la police, et ne devrait pas le faire. Par conséquent, il y a, dans l'ensemble du pays, une approche quelque peu disparate à l'égard de plusieurs dossiers.

(1410)

LES MODIFICATIONS APPORTÉES AU RÈGLEMENT SUR LES ARMES À FEU—LA PROLONGATION DU DÉLAI DE GRÂCE

L'honorable Charlie Watt: Honorables sénateurs, j'ai une question à poser à madame le leader du gouvernement au sujet du délai de grâce de six mois. Comment procédera-t-on? Le délai commencera- t-il avant Noël ou après les fêtes?

Je voudrais également saisir cette occasion pour dire que le tribunal du Nunavut a rendu sa décision hier et que la loi actuelle exempte les personnes qui chassent pour assurer leur subsistance. Autrement dit, les habitants du Nunavut ont gagné leur cause.

Des voix: Bravo!

L'honorable Sharon Carstairs (leader du gouvernement): Le sénateur a demandé quand le délai de grâce entrera en vigueur. Il entrera en vigueur le 1er janvier 2003, car les propriétaires ne violent manifestement pas la loi en ce moment et ne le feraient pas avant minuit, le 31 décembre 2002. Ce délai de grâce durera six mois et ne concerne que l'enregistrement.

LE CODE CRIMINEL
LA LOI SUR LES ARMES À FEU

LA DIVISION DU PROJET DE LOI—L'ÉTAT DU PROJET DE LOI À LA CHAMBRE DES COMMUNES

L'honorable Herbert O. Sparrow: Honorables sénateurs, en ce qui concerne le projet de loi C-10, je suppose que mon degré de confusion n'a pas beaucoup diminué. Le projet de loi C-10A ne figure nulle part dans le Feuilleton de la Chambre des communes, mais le projet de loi C-10 y figure. Il y est fait mention du projet de loi C-10, d'un amendement au projet de loi C-10. Le Sénat a adopté un projet de loi appelé projet de loi C-10A, qui a été renvoyé à la Chambre des communes. Or, le projet de loi C-10A ne figure pas dans le Feuilleton de la Chambre des communes. Je pose la question: où est le projet de loi C-10A? Le ministre de la Justice aurait déclaré que les Communes n'ont pas retiré le projet de loi, qu'elles ont maintenu le projet de loi C-10A au Feuilleton, mais on ne dit nulle part que cela a été fait.

Le sénateur Lynch-Staunton a demandé plus tôt ce qu'il advient maintenant du projet de loi C-10B. Comment pouvons-nous l'étudier?

L'honorable Sharon Carstairs (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, nous avons traité de cette question plusieurs fois; cependant, permettez-moi de tenter de l'expliquer une fois de plus.

Le Sénat du Canada a ordonné au comité de scinder le projet de loi. Le Sénat a renvoyé le projet de loi au comité avec cette directive. Le Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles, sous la gouverne éclairée du sénateur Furey, a suivi la directive du Sénat et a scindé le projet de loi, nommant une partie, projet de loi C-10A, qui concerne les armes à feu, et l'autre partie, projet de loi C-10B, qui porte sur la cruauté envers les animaux.

Vous me suivez?

Le sénateur Sparrow: Pas tout à fait.

Le sénateur Carstairs: Je poursuis. Ensuite, le Comité des affaires juridiques et constitutionnelles a fait rapport du projet de loi au Sénat. Le rapport du comité contenait deux recommandations: scinder le projet de loi et demander l'accord de l'autre endroit, et adopter une partie du projet de loi, dûment appelée projet de loi C- 10A.

C'est ce que nous avons fait au Sénat. Nous l'avons renvoyé à l'autre endroit. Nous avons renvoyé le projet de loi C-10 au complet. Nous avons renvoyé le projet de loi C-10A après l'avoir adopté. Nous sommes convenus de laisser le projet de loi C-10B au comité pour qu'il en poursuive l'étude. La Chambre des communes a débattu le projet de loi C-10A vendredi dernier. Le Sénat a adopté une motion invitant la Chambre des communes à approuver la décision qu'il avait prise.

Puis, comme l'honorable sénateur l'a indiqué, le projet de loi est en quelque sorte tombé dans l'oubli. En fait, il figure toujours au Feuilleton, où sont inscrits tous les projets de loi d'initiative ministérielle. Il se trouve toujours dans l'autre endroit.

Il m'arrive parfois de souhaiter avoir un peu plus de contrôle sur leur Feuilleton. Ce n'est cependant pas le cas, et la Chambre des communes n'exerce pas non plus de contrôle sur les travaux du Sénat. C'est sans doute mieux ainsi.

Le sénateur Sparrow: Merci beaucoup. Le Feuilleton de la Chambre des communes mentionne le projet de loi C-10, mais pas le projet de loi C-10A. Il n'indique pas qu'une modification a été apportée. Le Sénat a envoyé à la Chambre des communes un message indiquant qu'il avait amendé le projet de loi C-10. Cela ne figure pas au Feuilleton de l'autre endroit.

L'étude est inscrite au nom du ministre de la Justice. Voici ce qu'on peut lire:

Reprise de l'étude des amendements apportés par le Sénat au projet de loi C-10A, Loi modifiant le Code criminel (cruauté envers les animaux) et la Loi sur les armes à feu.

Il n'y est fait nullement mention du renvoi par le Sénat du projet de loi C-10A à l'autre endroit.

Le ministre a déclaré qu'il avait reporté la discussion sur le projet de loi C-10A. Toutefois, pour le moment, le projet de loi C-10A ne se trouve nulle part à la Chambre des communes. Je demande pourquoi.

Le sénateur Carstairs: Honorables sénateurs, il est mentionné dans le message du Sénat du Canada. C'est le message dont il est question. Voilà pourquoi nous avons dû transmettre le projet de loi C-10 en entier, ainsi que le projet de loi C-10A, afin que, lorsque la motion de la Chambre des communes sera adoptée ou que la nôtre sera acceptée, le projet de loi soit scindé et que la partie scindée, la Loi sur les armes à feu, soit adoptée.

L'honorable John Lynch-Staunton (leader de l'opposition): Au risque d'embrouiller davantage toute la situation, je souligne qu'à la page XIII du Feuilleton des Avis d'aujourd'hui pour la Chambre des communes, vous trouverez, sous la rubrique «Motions relatives aux amendements du Sénat à des projets de loi», C-10 — Loi modifiant le Code criminel (cruauté envers les animaux et armes à feu) et la Loi sur les armes à feu, autrement dit le projet de loi original.

Reprise de l'étude de la motion [...] Que, relativement aux amendements apportés par le Sénat [...] la Chambre est d'accord avec le Sénat [...]

Voilà la motion dont la Chambre est maintenant saisie; elle demande à la Chambre d'être d'accord avec la décision que nous avons prise ici.

Honorables sénateurs, écoutez le paragraphe suivant. Votre Honneur, ce texte vous intéressera tout particulièrement:

Que la Chambre, tout en désapprouvant toute atteinte à ses droits et privilèges par l'autre Chambre, renonce dans ce cas-ci à insister sur ces droits et privilèges, étant entendu que cette renonciation ne pourra être interprétée comme un précédent [...]

Par conséquent, le sénateur Sparrow a techniquement tort, mais, en fait, il a raison. L'article est inscrit à l'ordre du jour, mais il n'est pas appelé. Il s'agit donc de savoir pourquoi cet article n'est pas appelé. Selon les ententes entre leaders parlementaires dont nous avons pris connaissance aujourd'hui au sein de tous nos groupes parlementaires, cet article ne sera pas appelé avant l'ajournement pour le congé de Noël.

Le sénateur Carstairs: Au risque de me répéter sans arrêt, je rappelle encore une fois que je ne contrôle pas les travaux de la Chambre des communes.

L'honorable Pierre Claude Nolin: Honorables sénateurs, nous ne demandons pas à madame le leader du gouvernement au Sénat de contrôler, de prendre sous sa responsabilité ou d'influencer les travaux de la Chambre des communes. Cela appartient au gouvernement. Cependant, la motion est présentée par un des ministres collègues de madame le leader au Cabinet. Elle fait partie de ce cabinet. Pourrait-elle nous dire quelle est l'intention de son gouvernement et de son collègue, le ministre de la Justice, dans cette affaire?

(1420)

Le sénateur Carstairs: Dès que je serai au courant, je me ferai un plaisir d'informer les honorables sénateurs.

Le sénateur Nolin: Dois-je déduire que le leader ne sait pas ce que le ministre de la Justice essaie de faire?

Le sénateur Carstairs: Je n'ai pas été informée de ce que font les parlementaires de l'autre endroit.

LES PÊCHES ET LES OCÉANS

LA GARDE CÔTIÈRE—LA RECHERCHE D'UN NAVIRE QUI DÉVERSE DU PÉTROLE EN MER—L'ÉTAT D'UN BÂTIMENT RUSSE DÉSEMPARÉ

L'honorable Gerald J. Comeau: Honorables sénateurs, j'ai une question à poser au leader du gouvernement au Sénat. Il s'agit d'incidents qui se produisent en ce moment au large de la côte est du Canada et qui concernent la Garde côtière.

Au cours des derniers jours, il semblerait que des officiers de la Garde côtière se soient mis à la recherche de navires soupçonnés d'avoir déversé du pétrole au large de Terre-Neuve, car on a trouvé des oiseaux englués de pétrole, y compris des spécimens d'espèces menacées, échoués sur la côte, près de réserves écologiques intactes.

Cette information arrive en même temps qu'une autre selon laquelle un navire de la Garde côtière surveille de près un navire de pêche russe désemparé, à 800 km au nord-est de St. John's. Ce navire de 55 mètres reste immobile depuis que son hélice a été immobilisée par des filets ou des câbles, il y a quelques jours.

L'enquête du gouvernement a-t-elle progressé? A-t-on repéré le navire qui a déversé le pétrole qu'on a trouvé sur ces oiseaux? Quel est l'état du navire russe désemparé?

L'honorable Sharon Carstairs (leader du gouvernement): Je remercie l'honorable sénateur de sa question. Je prends les deux affaires en délibéré, car je n'ai aucune information à lui communiquer pour le moment.

LA GARDE CÔTIÈRE—L'EFFET DE L'INSUFFISANCE BUDGÉTAIRE

L'honorable Gerald J. Comeau: Honorables sénateurs, madame le ministre expliquerait-elle également au Cabinet, au nom d'un grand nombre d'entre nous, que le ministre des Pêches doit accorder un complément budgétaire à la Garde côtière canadienne? Je crois comprendre que son budget est sollicité au maximum. Il faudrait des centaines de millions de dollars pour remettre la Garde côtière dans un état acceptable, aussi bien sur la côte est que sur la côte ouest du Canada.

Je comprends que, sur la côte ouest, la Garde côtière n'est pas en mesure de respecter des accords conclus avec nos alliés américains pour réagir ensemble en cas de déversement de pétrole.

L'honorable Sharon Carstairs (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, je répondrai aux dernières observations du sénateur. Je crois que le sénateur fait allusion à un reportage selon lequel l'accord conclu entre le Canada et les États-Unis ne tient plus. Ce n'est tout simplement pas vrai, pour aucun accord. Nous avons négocié avec nos amis américains un plan d'urgence conjoint en cas de catastrophe environnementale. Cet accord est soumis à l'heure actuelle à l'approbation du département d'État américain.

Je tenais à rassurer le sénateur, car cette question est importante pour nous.

Pour ce qui est de l'établissement des priorités budgétaires, je veillerai à ce que les instances du sénateur soient communiquées au Cabinet.

LE SOLLICITEUR GÉNÉRAL

LA DÉSIGNATION DU HEZBOLLAH COMME ORGANISATION TERRORISTE—L'INCIDENCE SUR LES PARLEMENTAIRES ET LES ASSOCIATIONS PARLEMENTAIRES

L'honorable Marcel Prud'homme: Comme nous le savons tous, honorables sénateurs, le gouvernement a décidé d'interdire tout contact de quelque nature que ce soit avec l'une ou l'autre aile du Hezbollah — soit l'aile politique, ainsi que l'aile caritative, que la plupart des Canadiens acceptaient volontiers. Ainsi le veut désormais la loi canadienne. Toutefois, après avoir écouté attentivement le solliciteur général et le ministre des Affaires étrangères, que je respecte tous deux énormément, j'ai beaucoup de mal à comprendre. J'ai commencé à être un peu confus à midi. Il est extrêmement important qu'on nous réponde avant le congé de Noël.

Tout contact est interdit avec le Hezbollah. Bien. C'est la loi, fort bien. Mais nous avons une association parlementaire très active appelée l'Association parlementaire Canada-Liban. Beaucoup de sénateurs en sont membres. Beaucoup de députés aussi.

Comme ne l'ignorent pas des sénateurs, Hezbollah veut dire «Parti de Dieu». Il a été créé comme mouvement de libération après l'invasion du Liban. Ce parti compte aujourd'hui 12 représentants élus au Parlement libanais. Il compte maintenant 12 députés fédéraux dûment élus sur 128 — dont 64 chrétiens et 64 musulmans de toute culture.

Je crois fermement que les associations parlementaires sont créées pour aller de l'avant et pour faire preuve d'audace. Elles ont pour mandat d'explorer ouvertement de nouveaux sujets de discussion. Que pense madame le ministre des contacts entre des parlementaires du Canada et leurs collègues fédéraux, soit les 12 députés du Hezbollah du Parlement du Liban?

L'honorable Sharon Carstairs (leader du gouvernement): Comme les honorables sénateurs le savent, aujourd'hui, on a ajouté trois entités supplémentaires à celles qui tombent sous le coup des mesures pénales prévues par la Loi antiterroriste que nous avons étudiée à cet endroit sous la forme du projet de loi C-36. Ces organisations qui ont été inscrites sur la liste sont le Parti des travailleurs du Kurdistan, l'Aum Shinnkyo et le Hezbollah.

Je ne lis habituellement pas les documents textuellement, mais je vais lire celui-ci parce que c'est très important:

Le gouvernement du Canada a convenu que ces entités sont reconnues pour leur participation à des activités terroristes. Tout particulier ou groupe inscrit sur cette liste peut voir ses biens saisis et confisqués. Les personnes et les organisations touchées sont passibles de sanctions sévères qui touchent les biens ou le financement des entités inscrites, dont une peine pouvant aller jusqu'à dix ans d'emprisonnement.

Je ne peux imaginer qu'un groupe parlementaire s'occupe du financement ou des biens de groupes figurant dans la liste. Je cite à nouveau le document:

De plus, le fait de participer ou de contribuer sciemment aux activités d'un groupe terroriste ou de les faciliter constitue un crime.

Personnellement, je ne vois aucune contradiction entre les deux questions.

Le sénateur Prud'homme: Honorables sénateurs, je suis au courant des sanctions possibles. Je pense que certaines personnes, peut-être même des gens au Canada, pourraient être en grave difficulté.

Le ministre des Affaires étrangères, que je respecte énormément, subit d'immenses pressions. J'ai dit cela à La Presse la semaine dernière. Le ministre fait cette annonce juste avant un long congé. Mon père a toujours dit d'être vigilant à la fin d'une session parce qu'il y a toujours une surprise. Je m'attendais à une surprise, et nous l'avons eue.

Le ministre a dit qu'on interdirait l'entrée au Canada de ces 12 députés du Parlement libanais. C'est la décision qui a été prise; je respecte les lois du pays. Cependant, je peux me battre pour faire changer les choses. Nous vivons dans une démocratie et une décision a été prise. Je ne suis pas d'accord à propos de cette décision, naturellement. Je me demande si je pourrais exprimer à l'extérieur du Sénat mon profond désaccord par rapport aux mesures qui ont été prises. Je n'en suis pas sûr, mais je vais le découvrir, vous pouvez en avoir la certitude, et tant pis pour les conséquences. Je pense avant tout aux intérêts du Canada.

On interdira à ces parlementaires d'entrer au Canada. Madame le ministre n'est peut-être pas en mesure de répondre à ma question aujourd'hui, mais nous devons obtenir une réponse, car le Parlement ajournera jusqu'à la fin de janvier. Bien des parlementaires sont visés par cela. Je ne suis pas du nombre, car ma santé ne me permet pas de voyager malheureusement. Toutefois, de nombreux parlementaires se rendront au Proche-Orient en janvier et certains d'entre eux iront au Liban.

Ces parlementaires seront-ils visés par cette loi? Leurs homologues libanais ne seront pas autorisés à venir au Canada, comme nous l'avons appris au cours d'une conférence de presse que donnaient ce midi le ministre des Affaires étrangères et le solliciteur général.

Le sénateur Carstairs: Honorables sénateurs, de toute évidence, c'est au gouvernement libanais de déterminer si des parlementaires canadiens peuvent se rendre au Liban. Je ne vois rien dans cette liste qui puisse créer des ennuis aux parlementaires canadiens qui voyagent.

Permettez-moi d'apporter une précision en ce qui concerne une autre déclaration faite par l'honorable sénateur. Le sénateur Prud'homme a dit que d'énormes pressions étaient exercées sur le ministre des Affaires étrangères. Je tiens à signaler aux honorables sénateurs que le pouvoir d'ajouter des noms à cette liste, aux termes de la Loi antiterroriste, est confié non pas au ministre des Affaires étrangères, mais bien au solliciteur général.

(1430)

Le solliciteur général comparaît devant un comité du Cabinet chargé de déterminer si le nom de ces organisations doit être ajouté à la liste. Je peux vous assurer que cela donne lieu a un examen minutieux, fondé sur les moindres renseignements que peuvent nous fournir non seulement nos amis et nos alliés, mais surtout ceux qui, comme le SCRS, mènent des enquêtes sur les organisations criminelles.

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, je regrette de devoir vous informer que la période des questions est terminée.

[Français]

RÉPONSE DIFFÉRÉE À UNE QUESTION ORALE

L'honorable Fernand Robichaud (leader adjoint du gouvernement): Honorables sénateurs, j'ai l'honneur de déposer une réponse différée à une question orale posée par l'honorable sénateur Oliver, le 22 octobre 2002, concernant les nominations de membres de minorités visibles à la magistrature.

LA JUSTICE

LES NOMINATIONS DE MEMBRES DE MINORITÉS VISIBLES À LA MAGISTRATURE

(Réponse à la question posée le 22 octobre 2002 par l'honorable Donald H. Oliver)

Le gouvernement fédéral reconnaît l'importance de nommer des juges qui représentent la diversité de la société canadienne qu'ils servent. Bien que le mérite soit le facteur prépondérant en ce qui concerne la nomination des juges, assurer la représentativité de la magistrature constitue l'un des objectifs que le ministre de la Justice cherche à atteindre lorsqu'il dote des postes précis.

En ce qui a trait aux questions particulières soulevées par l'honorable sénateur Donald Oliver, pour dire les choses brièvement, le gouvernement ne conserve pas ces chiffres. La cueillette de données personnelles relève du Bureau du Commissaire à la magistrature fédérale. Ni le commissaire ni le ministre de la Justice ne conservent de statistiques concernant le profil culturel ou ethnique de la magistrature et certains pourraient remettre en question le bien-fondé de la cueillette de ces données. Tous les renseignements sur les candidats à la magistrature sont confidentiels, donc toute donnée relative à la culture ou à l'origine ethnique devrait être obtenue par déclaration volontaire. Dans de telles circonstances, la fiabilité des données serait douteuse.

Ceci étant dit, le processus fédéral de nomination à la magistrature créé en 1988 a intégré un certain nombre de dispositifs conçus pour favoriser une plus grande hétérogénéité au sein de la magistrature fédérale. Premièrement, des efforts ont été déployés pour rendre le processus applicable aux candidatures ouvert et accessible. Les personnes qualifiées qui désirent voir leur candidature étudiée en vue d'une nomination sont invitées à s'adresser au Commissaire à la magistrature fédérale (CMF). Le CMF communique régulièrement avec tous les barreaux afin de faire connaître les procédures applicables aux candidatures, et le Commissaire fait la promotion active de la procédure parmi les groupes minoritaires, tant au cours de réunions que par écrit. De plus, les membres du milieu juridique et toutes les autres personnes et les organismes intéressés sont encouragés à faire parvenir au CMF le nom des personnes qui, à leur avis, ont les qualités nécessaires pour occuper un poste à la magistrature. Le CMF envoie ensuite à la personne proposée la documentation requise pour qu'elle puisse poser sa candidature.

Les comités consultatifs des provinces et des territoires qui évaluent les titres et qualités de chaque avocat en vue d'une nomination à la magistrature constituent un autre dispositif permettant d'obtenir une magistrature représentative. Lorsqu'il nomme des membres, le ministre de la Justice tente de tenir compte de facteurs pertinents à chaque juridiction, comme la géographie, le multiculturalisme et le sexe. Le Commissaire à la magistrature fédérale transmet au comité concerné toutes les lettres de recommandation appuyant un candidat. Le ministre tient également compte des conseils des groupes intéressés et des personnes bien informées au sujet de nominations précises, spécialement du point de vue de l'obtention d'une magistrature représentative.

[Traduction]

PROJET DE LOI SUR LES ESPÈCES EN PÉRIL

TROISIÈME LECTURE—RECOURS AU RÈGLEMENT—DÉCISION DE LA PRÉSIDENCE

Son Honneur le Président: Avant que nous ne passions à l'ordre du jour, honorables sénateurs, hier, alors que le Sénat s'apprêtait à reprendre le débat en troisième lecture du projet de loi C-5 concernant la protection des espèces sauvages en péril au Canada, le sénateur Kinsella a demandé la parole pour soulever un rappel au Règlement. Essentiellement, le sénateur a remis en question le rapport présenté par le comité le 4 décembre parce que, selon lui, il contenait des observations incompatibles avec la recommandation de faire rapport du projet de loi sans amendement.

Pour appuyer son propos, il a cité des passages de l'autorité parlementaire britannique, Erskine May, page 644 de la 21e édition et page 666 de la 22e édition.

[Français]

À titre de réfutation, le sénateur Robichaud a soutenu qu'on ne pouvait soulever un recours au Règlement puisque le rapport avait été adopté immédiatement après avoir été présenté, puisque le comité n'avait recommandé aucun amendement au projet de loi et que le débat en troisième lecture était déjà bien engagé. D'après lui, il n'était plus temps de soulever un rappel au Règlement au sujet du rapport du comité.

[Traduction]

Plusieurs autres sénateurs sont alors intervenus pour donner leur point de vue concernant les observations du rapport et l'acceptabilité de nos pratiques ayant trait aux observations en général. D'autres sénateurs ont également commenté les délibérations du comité pendant son étude du projet de loi C-5.

[Français]

Je désire remercier tous les sénateurs de leurs interventions. Ils m'ont aidé à mieux comprendre la question en litige en rapport avec le rappel au Règlement. J'ai eu le temps d'étudier les arguments présentés et je suis prêt à rendre une décision.

[Traduction]

Je vais d'abord traiter de la position du sénateur Robichaud. On peut avancer que le Règlement aurait dû être invoqué plus tôt. Le rapport du comité a été déposé le mercredi 4 décembre et la motion tendant à la troisième lecture du projet de loi C-5 a été présentée le jeudi 5 décembre.

Le commentaire 321 de la Jurisprudence parlementaire de Beauchesne, page 100 de la 6e édition, dit ceci:

Tout rappel au Règlement portant sur la procédure doit être soulevé promptement et avant que les délibérations n'aient atteint un point où l'objection ne serait plus pertinente.

Conformément au paragraphe 97(4) du Règlement du Sénat du Canada, lorsqu'un comité fait rapport d'un projet de loi sans amendement, le rapport est considéré comme adopté immédiatement et le sénateur responsable du projet de loi doit indiquer quand sera proposée la troisième lecture. L'adoption automatique du rapport du comité aurait rendu difficile un rappel au Règlement mercredi dernier, mais le recours aurait pu être soulevé jeudi lorsque la troisième lecture du projet C-5 a été proposée.

L'objection du sénateur Robichaud est, en conséquence, valide. Quoi qu'il en soit, je suis disposé à laisser de côté cet élément du rappel au Règlement parce que j'estime qu'il pourrait être utile pour le Sénat de revoir certains aspects de nos pratiques relatives aux observations dans les rapports de comité.

Des observations accompagnent parfois les rapports de comité sur les projets de loi depuis une vingtaine d'années. Elles n'ont pas de réelle importance en procédure. Elles sont utiles, de l'avis de plusieurs sénateurs, en ce qu'elles attirent l'attention du gouvernement sur certains éléments de la loi qu'il pourra aborder quand il étudiera d'autres modifications aux textes législatifs. Certains sénateurs, comme le sénateur Stollery et le sénateur Murray, ont tendance à s'opposer à l'ajout de ces observations, mais elles se sont néanmoins taillé une place dans notre usage. Elles sont d'ailleurs relativement fréquentes, comme l'a souligné le sénateur Milne.

Dans le cas du projet de loi C-5, le sénateur Banks a informé le Sénat que les observations ont été adoptées à l'unanimité. Par conséquent, l'on ne saurait affirmer en l'espèce que les observations représentent les vues d'une minorité des membres du comité. Il est vrai toutefois que, dans certains cas, les observations ont représenté les vues d'une minorité dissidente. Bien entendu, ces différences ne sont d'aucune importance puisque, comme l'a si bien expliqué hier le sénateur Andreychuk, les observations ne font pas partie et n'ont jamais fait partie intégrante des rapports de comité. Voilà pourquoi, quand le Comité de l'énergie, de l'environnement et des ressources naturelles a fait rapport mercredi dernier du projet de loi C-5 sans amendement, le rapport a été adopté immédiatement, conformément au paragraphe 97(4) du Règlement du Sénat.

Ce qui m'amène au cœur de l'argument soulevé par le sénateur Kinsella ainsi que par le sénateur Stratton. Tous deux s'opposent au rapport du comité sur le projet de loi C-5 car, selon eux, les observations, ces déclarations, rendent le rapport invalide sur le plan de la procédure. Comme l'explique le sénateur Kinsella, le rapport présente des difficultés concernant le fond de la question et la procédure employée.

Les sénateurs Kinsella et Stratton ont cité à cet égard Erskine May, qui indique clairement que le rapport du comité ne peut non plus être accompagné d'une contre-déclaration ou d'une note de dissidence ou de protestation de la part d'un ou de plusieurs membres dissidents ou non consentants, et que le comité ne saurait inclure dans son rapport des observations auxquelles ne souscrivent pas la majorité de ses membres.

Il importe de souligner que la citation de l'autorité britannique concerne les rapports minoritaires. Au Royaume-Uni, il est d'usage qu'un rapport de comité reflète uniquement les vues de la majorité. Il ne peut y avoir de rapport minoritaire.

À la page déjà citée, Erskine May dit ce qui suit:

La Chambre souhaite connaître l'opinion du comité en tant que tout, et non de ses membres individuels et, à défaut d'unanimité, les conclusions de la majorité seront tenues pour être celles du comité.

Cette position ne diffère guère de celle que prévoit notre paragraphe 96(2), qui dit que le rapport d'un comité particulier doit comporter des conclusions approuvées par la majorité des membres.

Honorables sénateurs, comme je l'ai déjà souligné, l'usage au Sénat permet depuis près de 20 ans que des observations soient annexées aux rapports, mais elles n'ont jamais été acceptées comme des rapports minoritaires. D'ailleurs, les observations n'ont aucune valeur réelle dans le cadre de notre procédure. Elles peuvent servir à indiquer au gouvernement les vues des membres du comité, comme l'a expliqué le sénateur Andreychuk; elles peuvent même alimenter le débat, mais elles n'ont aucune importance intrinsèque ou poids procédural.

Par conséquent, dans ce contexte, le renvoi à Erskine May n'est pas pertinent, puisque les observations annexées à un rapport de comité du Sénat ne constituent pas un rapport minoritaire.

(1440)

Je ne vois donc pas de question de fond ou de procédure pouvant justifier le rappel au Règlement. Le Sénat peut donc entamer le débat sur la troisième lecture du projet de loi C-5.


[Français]

ORDRE DU JOUR

LES TRAVAUX DU SÉNAT

L'honorable Fernand Robichaud (leader adjoint du gouvernement): Honorables sénateurs, je propose, avec le consentement du Sénat, qu'on appelle en premier lieu, sous la rubrique «Projets de loi» l'article no 2, suivi de l'article no 3, pour ensuite passer à l'article no 1, et reprendre l'ordre du jour proposé au Feuilleton.

[Traduction]

PROJET DE LOI DE CRÉDITS NO 3 POUR 2002-2203

TROISIÈME LECTURE

L'honorable Joseph A. Day propose: Que le projet de loi C-21, Loi portant octroi à Sa Majesté de crédits pour l'administration publique fédérale pendant l'exercice se terminant le 31 mars 2003, soit lu une troisième fois.

L'honorable Anne C. Cools: Honorables sénateurs, je voudrais prendre la parole sur le projet de loi à l'étape de la troisième lecture. Il est de plus en plus difficile de se voir accorder la parole. Il me semble qu'avant de mettre la motion aux voix, la présidence devrait s'assurer que personne ne souhaite prendre la parole.

Son Honneur le Président: Si vous voulez invoquer le Règlement, je vous écoute. Si vous voulez parler sur le projet de loi à l'étape de la troisième lecture, vous avez la parole.

Le sénateur Cools: Honorables sénateurs, c'est une pratique bien établie dans le milieu parlementaire qu'avant de mettre une question aux voix, la présidence s'assure que personne d'autre ne veut prendre la parole.

Honorables sénateurs, je dirai quelques mots sur le projet de loi C- 21, Loi de crédits no 3 pour 2002-2003. Je discutais ce matin avec la présidente du Conseil du Trésor, Mme Lucienne Robillard. Je tiens à souligner sans équivoque que les membres du Comité des finances nationales sont vivement impressionnés par la qualité des témoignages que le Secrétariat du Conseil du Trésor fournit au comité.

Honorables sénateurs, plus particulièrement, je voudrais remercier la présidente du Conseil du Trésor, Mme Lucienne Robillard. En outre, je voudrais remercier les porte-parole du Conseil du Trésor, MM. Richard Neville et David Bickerton, qui comparaissent souvent devant nous et présentent judicieusement au comité l'information dont ils disposent. Ce sont des travailleurs infatigables. Il est important que le Sénat reconnaisse la qualité de ces services. Le gouvernement est bien servi par ces personnes-là.

Le deuxième point que je voulais soulever concerne un éclaircissement. J'aurais voulu que cet éclaircissement soit présenté de manière plus complète. Je serai brève.

On peut voir, à la page 21 du projet de loi C-21, les crédits du ministère de la Justice qui feront sous peu l'objet d'un vote. Les crédits sont répartis entre 1a et 5a. Le crédit 1a s'intitule «Justice — Dépenses de fonctionnement» et le montant est de 62 621 757 $. Le crédit 5a s'intitule: «Justice — Subventions inscrites au budget des dépenses et contributions» et il se chiffre à 44 411 117 $. Honorables sénateurs, ces deux crédits totalisent approximativement 107 millions de dollars.

J'ai déjà soulevé ce point, mais pas relativement au présent projet de loi. Toutefois, pour la postérité, le compte rendu devrait montrer clairement que, à la page 102 du Budget supplémentaire des dépenses (A), ce fameux livre bleu, la somme demandée pour les crédits 1a et 5a est substantiellement différente.

À la page 102 du Budget supplémentaire des dépenses (A), sous Ministère de la Justice, pour le crédit 1a «Justice — Dépenses de fonctionnement», la somme demandée est 125 494 673 millions de dollars et, pour le crédit 5a «Justice — Subventions inscrites au budget des dépenses et contributions», la somme est 53 520 787 $. Quiconque s'intéresse à l'arithmétique constatera qu'il existe une différence notable entre la somme indiquée dans le Budget supplémentaire des dépenses (A) et la somme indiquée dans le projet de loi C-21. Pour les deux crédits ensemble, la différence est approximativement de 72 millions de dollars.

Honorables sénateurs, il devrait être clairement indiqué au compte rendu que ce n'est pas une erreur, qu'il s'agit bien du crédit demandé par le ministère de la Justice et par la ministre Robillard. Tout est exact; il n'y a pas d'erreur. La différence est attribuable à une somme qui a été réduite pendant l'examen des crédits et les débats à la Chambre des communes sur le Budget supplémentaire des dépenses (A).

En consultant la page 2337 des Débats de la Chambre des communes, par exemple, on s'aperçoit que le Président demande des précisions relativement à une motion présentée par un député de l'opposition visant à réduire le Budget supplémentaire des dépenses. Je veux être claire, car le compte rendu doit être clair et précis au sujet de la somme demandée dans ce projet de loi de crédits sur lequel nous sommes appelés à nous prononcer.

Pour revenir à la page 2337 des Débats de la Chambre des communes pour la journée du 5 décembre 2002, M. Peter Mackay, du Parti progressiste-conservateur, a proposé ce qui suit:

Que le Budget supplémentaire des dépenses (A) soit modifié au crédit 1a sous la rubrique Justice par la réduction d'un montant de 62 872 916 $ et au crédit 5a sous la rubrique Justice par la réduction d'un montant de 9 109 670 $ et que les motions des subsides et le projet de loi portant affectation de crédits soient modifiés en conséquence.

Le Président pose ensuite la question suivante:

La Chambre a entendu le texte de la motion. Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?

Les députés ont évidemment donné leur accord et la motion a été adoptée.

Honorables sénateurs, le projet de loi C-21 reflète bien le vote visant à réduire le budget. La réduction de 72 millions de dollars semble être la différence entre la somme indiquée dans le projet de loi et celle qui figurait dans le Budget supplémentaire des dépenses (A). Elle correspond exactement au montant proposée par le député d'opposition, M. Peter MacKay.

Je suis certaine que les sénateurs voudront que la situation soit claire et précise. Nous ne devons jamais nous retrouver dans une situation pouvant donner lieu à des malentendus ou à de fausses représentations.

Il est bon et utile que le compte rendu rapporte nos échanges d'aujourd'hui, que le montant indiqué dans le projet de loi sur lequel nous nous apprêtons à voter soit bien celui que le gouvernement a demandé et que tout soit exact et en ordre.

Cela étant dit, honorables sénateurs, nous pouvons voter en toute conscience et de façon unanime.

(1450)

Le sénateur Day: Honorables sénateurs, je remercie madame le sénateur Cools pour ses observations.

Honorables sénateurs, je crois que nous sommes prêts à nous prononcer sur la question.

Son Honneur le Président: La Chambre est-elle prête à se prononcer, honorables sénateurs?

Des voix: Le vote!

Son Honneur le Président: Plaît-il aux honorables sénateurs d'adopter la motion?

(La motion est adoptée et le projet de loi, lu une troisième fois, est adopté.)

LES TRAVAUX DU SÉNAT

L'honorable Peter A. Stollery: Honorables sénateurs, je voudrais que le Comité sénatorial permanent des affaires étrangères soit autorisé à siéger à 15 h 30 aujourd'hui, même si le Sénat siège à ce moment-là.

J'ai parlé aux partis des deux côtés du Sénat à ce sujet. Je signale rappelle que le comité siège normalement à 15 h 30.

L'honorable Terry Stratton: Honorables sénateurs, au vu de notre ordre du jour chargé d'aujourd'hui, en particulier, et au cours des prochains jours, d'autres comités ont décidé que, si leurs travaux n'avaient rien d'urgent, ils s'abstiendraient tout simplement de siéger.

Les témoins qui sont attendus sont-ils de l'extérieur? Cette réunion est-elle urgente?

Le sénateur Stollery: Honorables sénateurs, le comité prévoit entendre deux groupes de témoins cet après-midi. Bien entendu, il nous a fallu quelques jours pour planifier cette réunion.

Le Comité des affaires étrangères siège normalement le mercredi à 15 h 30. Eu égard à cela, nous avons organisé notre réunion pour 15 h 30 aujourd'hui. J'en ai discuté avec le leader adjoint.

Le sénateur Stratton: Comme je l'ai déjà dit, d'autres comités qui se réunissent à la même heure ont décidé de ne pas le faire aujourd'hui en raison des travaux du Sénat. Qui sont les témoins que le comité souhaite interroger? S'ils sont d'Ottawa, ne pourrait-on pas leur demander de revenir un autre jour?

Le sénateur Stollery: Honorables sénateurs, il est évident que si le comité n'est pas autorisé à siéger à 15 h 30, alors il ne peut siéger à 15 h 30. Je n'ai pas ici de renseignements au sujet des témoins. Je ne me souviens pas si l'un d'eux vient de Toronto ou non. Il s'agirait de la première séance où notre comité étudierait l'ordre de renvoi approuvé par le Sénat.

Honorables sénateurs, je ne peux que demander la permission pour que notre comité siège. Je ne pouvais savoir qu'il serait impossible pour notre comité de tenir une séance aujourd'hui, voilà pourquoi je demande la permission du Sénat, après avoir consulté l'opposition.

Le sénateur Stratton: Honorables sénateurs, au moins trois de nos sénateurs participent activement aux travaux du Comité des affaires étrangères. S'ils doivent quitter le Sénat à un moment critique, je crains que nous ne soyons pas assez nombreux de ce côté-ci, voilà ce qui m'inquiète.

Si la question que doit examiner le comité à sa réunion n'est pas urgente, je demanderais au sénateur d'envisager la possibilité de ne pas tenir de séance. Si la question n'est pas urgente, pourquoi tenir une séance?

Le sénateur Stollery: Honorables sénateurs, si le comité ne se réunit pas aujourd'hui, il ne pourra pas le faire avant le mois de février. J'ai également consulté le vice-président du comité, le sénateur Di Nino, qui n'est pas ici en ce moment. Je viens de lui parler il y a quelques instants et il avait l'impression que notre comité se réunirait à 15 h 30.

Que puis-je dire d'autre, honorables sénateurs? À mon avis, le comité devrait se réunir à 15 h 30. C'est une question importante et très urgente, car elle touche nos problèmes commerciaux avec les États-Unis en ce qui concerne le bois d'oeuvre, la Commission canadienne du blé et un certain nombre d'autres dossiers.

Je voudrais que le comité se réunisse à 15 h 30, honorables sénateurs. Je pense avoir consulté toutes les personnes qu'il faut.

L'honorable John Lynch-Staunton (leader de l'opposition): Honorables sénateurs, il est évident que les témoins n'ont pas été invités à 14 h 30 aujourd'hui pour comparaître à 15 h 30. Voilà qu'on nous demande à 14 h 55 la permission pour qu'un comité se réunisse dans 35 minutes. Les témoins doivent avoir été invités il y a un certain temps déjà. Le comité doit avoir su qu'il voulait se réunir à 15 h 30. Pourquoi cette motion n'a-t-elle pas été présentée hier à l'appel des motions? Je trouve répréhensible qu'on nous demande d'approuver sans discussion ce type de motion 35 minutes avant la convocation d'une réunion, alors que des témoins sont prévus et attendent de comparaître. Ce n'est pas la façon dont notre institution devrait fonctionner.

Le sénateur Stollery: Honorables sénateurs, je suis d'accord avec le leader de l'opposition pour dire que ce n'est pas une bonne façon d'administrer nos affaires. Cependant, je crois que nous avons un arrangement au Sénat voulant qu'un comité puisse se réunir lorsque le Sénat s'ajourne les mardis et mercredis. Je crois comprendre aussi que le mercredi, normalement, le Sénat s'ajournait à 15 h 30 environ de sorte que les comités pouvaient se réunir à ce moment-là. J'ai donc pensé que c'était la bonne façon de procéder.

Je n'ai pas proposé cette motion hier, car j'ai supposé naturellement qu'aujourd'hui, mercredi, nous ferions ce que je croyais que nous nous étions tous entendus pour faire.

Je n'ai découvert que lorsque je suis arrivé au Sénat à 13 h 30 qu'on prévoyait que la séance d'aujourd'hui serait plus longue que normalement. Je l'ignorais jusqu'à ce que j'arrive ici.

Le sénateur Stratton: Honorables sénateurs, étant donné la longueur des discussions au Sénat aujourd'hui, deux autres comités ont décidé de ne pas se réunir. Un troisième comité a demandé le consentement dès le départ, lorsque cela devait être fait. Comment puis-je accepter de me passer d'au moins quatre sénateurs de notre côté lorsque nous discutons de questions comme le Protocole de Kyoto? Comment l'honorable sénateur peut-il me demander cela?

L'honorable Marcel Prud'homme: Honorables sénateurs, tout d'abord, mon honorable collègue a parlé de consulter l'opposition. On devrait peut-être tenir compte de nous, les indépendants, parfois.

Ainsi, je vais aider le Sénat en refusant le consentement.

Son Honneur le Président: La permission n'est pas accordée.

PROJET DE LOI SUR LES PRODUITS ANTIPARASITAIRES

TROISIÈME LECTURE—MOTION D'AMENDEMENT—AJOURNEMENT DU DÉBAT

L'honorable Yves Morin propose: Que le projet de loi C-8, Loi visant à protéger la santé et la sécurité humaines et l'environnement en réglementant les produits utilisés pour la lutte antiparasitaire, soit lu une troisième fois.

L'honorable Wilbert J. Keon: Honorables sénateurs, je suis ravi d'avoir l'occasion de faire quelques observations au sujet du projet de loi C-8.

Premièrement, je tiens à féliciter mon ami et collègue, le sénateur Morin, du temps qu'il a consacré à ce projet de loi et qu'il m'a accordé pour discuter des aspects que je m'apprête à aborder.

D'entrée de jeu, il est important de souligner que le projet de loi C-8 représente une amélioration par rapport à la loi qui l'a précédé il y a 33 ans. Il faut reconnaître que le projet de loi C-8 témoigne de la volonté fervente du gouvernement fédéral de s'attaquer au problème de l'utilisation des pesticides et aux répercussions de ce problème sur l'environnement et, partant, sur la sécurité et la santé de tous les Canadiens, et notamment des citoyens les plus vulnérables de notre société, soit les enfants.

(1500)

Toutefois, il y a encore place à de l'amélioration immédiate. La responsabilité du gouvernement fédéral ne prend pas fin avec l'homologation des produits. Mettons dès maintenant l'accent sur la sécurité et la protection de la santé des gens grâce à un accès approprié à l'information. Je souligne au passage que de nombreux citoyens nous ont fait parvenir des pétitions à ce sujet. À l'occasion d'une autre mesure législative adoptée dans cette enceinte, le sénateur Gauthier a judicieusement souligné que les Canadiens veulent participer directement aux importantes décisions affectant leur vie et celle de leurs enfants. Les honorables sénateurs peuvent- ils me dire comment on peut arriver ainsi à informer suffisamment le public? Peut-on trouver mieux pour aborder cette question qu'une mesure législative qui fournira toute l'information pertinente concernant la composition d'un pesticide?

À l'heure actuelle, aux termes du paragraphe 42(4) du projet de loi, le public n'a accès qu'à l'information qui ne correspond pas à des données d'essais confidentielles ou à des renseignements commerciaux confidentiels. À titre d'exemple, des données d'essais confidentielles contenues dans le registre pourraient être examinées, sur présentation d'une demande, par un médecin ayant besoin de cette information pour poser un diagnostic, fournir un traitement médical ou répondre à une urgence.

Dans sa forme actuelle, les dispositions du projet de loi C-8 concernant l'accès aux données sont indûment restrictives, particulièrement lorsque l'on établit une comparaison avec l'information disponible aux États-Unis, y compris dans le cas de pesticides homologués là-bas par les mêmes sociétés. Il y a lieu d'éclaircir les définitions des expressions «données d'essais confidentielles» et «renseignements commerciaux confidentiels» en indiquant tout d'abord le nom et la teneur des ingrédients actifs; deuxièmement, le nom et la teneur des formules; troisièmement, le nom et la teneur des contaminants; quatrièmement, les résultats des essais afin d'établir les substances que comprend le produit, son efficacité, ainsi que les risques qu'il pose à court et à long termes pour les humains, les animaux, les plantes et l'environnement.

Ces renseignement ne doivent pas être considérés automatiquement comme des renseignements commerciaux confidentiels ou comme des données d'essais confidentielles.

MOTION D'AMENDEMENT

L'honorable Wilbert J. Keon: Honorables sénateurs, rappelons-nous le débat qui a cours actuellement sur la protection de l'environnement, à la lumière duquel nous devons examiner le projet de loi plus attentivement. Je vous prierais donc de prendre en considération l'amendement suivant au projet de loi:

Que le projet de loi C-8 ne soit pas maintenant lu une troisième fois, mais qu'il soit modifié:

a) à l'article 2, à la page 6, par substitution, à la ligne 43, de ce qui suit:

«visés au paragraphe 43(4).»;

b) à l'article 43, à la page 35:

(i) par substitution, aux lignes 22 à 39, de ce qui suit:

«(5) Ne sont pas des renseignements commerciaux confidentiels pour l'application de la présente loi les renseignements qui font état de l'identité ou de la concentration du principe actif, des formulants ou des contaminants d'un produit parasitaire.»,

(ii) par substitution, à la ligne 43, de ce qui suit:

«exigences du paragraphe (4).»;

c) à l'article 67:

(i) à la page 53, par suppression des lignes 44 à 46,

(ii) aux pages 53 à 55, par le changement de la désignation littérale des alinéas o) à z.5) à celle d'alinéas n) à z.4) et par le changement de tous les renvois qui en découlent.

Son Honneur le Président: Plaît-il aux honorables sénateurs d'adopter la motion?

L'honorable Yves Morin: Honorables sénateurs, je remercie mon collègue pour l'intérêt qu'il porte au projet de loi C-8. Il s'agit, selon moi, d'une excellente mesure qui a été remarquablement bien accueillie, au comité, par tous les intéressés, nommément les agriculteurs, l'industrie et les associations environnementales.

En ce qui concerne l'amendement, je crois que le projet de loi C-8 rendra l'homologation des produits antiparasitaires très transparente. Le public pourra participer à toutes les étapes du processus d'homologation, sans compter que le projet de loi crée un comité consultatif constitué de citoyens intéressés qui auront pleinement accès à toute l'information.

Les trois éléments de l'amendement concernent trois types de produits. Les premiers mentionnés sont les principes actifs. L'information concernant les principes actifs est déjà entièrement accessible au public et continuera de l'être. Il n'existe pas de renseignements confidentiels sur les principes actifs, et il en est toujours ainsi aux termes de la loi actuelle, qui remonte à 1969.

En ce qui concerne les formulants et contaminants, également appelés substances inertes, l'information les concernant sera rendue publique si ces produits soulèvent quelque inquiétude que ce soit pour la santé ou l'environnement. C'est précisément le travail des scientifiques de l'Agence de réglementation de la lutte antiparasitaire, qui étudie les produits antiparasitaires pour voir s'ils représentent une menace pour la santé des Canadiens ou pour l'environnement. S'il y a le moindre doute, l'information est immédiatement rendue publique.

Le troisième élément de l'amendement concerne les résultats des tests visant à établir la présence de produits ou de substances. L'amendement vise à rendre publique l'information pertinente. Comme vous le savez, beaucoup de ces tests constituent des secrets commerciaux. En dépit de cela, les Canadiens qui veulent savoir comment les tests sont effectués pourront avoir accès à cette information confidentielle dans une salle de lecture des bureaux de l'agence, après avoir signé les formulaires nécessaires et s'être engagés, sous serment, à ne pas utiliser l'information à des fins commerciales.

En définitive, honorables sénateurs, ce projet de loi est remarquablement transparent en ce qui concerne le processus de réglementation. Il est, sur ce plan, comparable à d'autres lois des pays de l'OCDE. En ce qui concerne l'aspect qu'a soulevé le sénateur dans son discours, la protection des enfants, le projet de loi est à cet égard la mesure la plus efficace de toutes les lois des pays de l'OCDE.

Je recommande vivement aux honorables sénateurs d'appuyer ce projet de loi.

(Sur la motion du sénateur LeBreton, le débat est ajourné.)

(1510)

PROJET DE LOI SUR LES ESPÈCES EN PÉRIL

TROISIÈME LECTURE—SUITE DU DÉBAT

L'ordre du jour appelle:

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Banks, appuyé par l'honorable sénateur Corbin, tendant à la troisième lecture du projet de loi C-5, Loi concernant la protection des espèces sauvages en péril au Canada.

L'honorable Noël A. Kinsella (leader adjoint de l'opposition): Honorables sénateurs, maintenant qu'il y a de l'argent disponible et qu'on en connaît plus long sur les produits antiparasitaires, revenons-en un instant à la troisième lecture du projet de loi C-5. Je voudrais aborder trois questions.

La première concerne l'article 3, à la page 7 du projet de loi. Il dit ceci:

Il est entendu que la présente loi ne porte pas atteinte à la protection des droits existants — ancestraux ou issus de traités — des peuples autochtones du Canada découlant de leur reconnaissance et de leur confirmation au titre de l'article 35 de la Loi constitutionnelle de 1982.

Honorables sénateurs, cette question a déjà retenu une certaine attention au cours des débats du Sénat et du comité. Le rapport et les annexes que nous avons reçus du Comité sénatorial permanent de l'énergie, de l'environnement et des ressources naturelles ne disaient pas clairement si, dans les annexes, il y avait eu une observation qui se rapportait expressément à une disposition de non-dérogation. Je suis sûr que la question a été discutée. Il semblerait que bien des membres du comité estimaient que la notion de protection, qui se trouve maintenant dans l'article 3, devrait disparaître du projet de loi. Bien que le comité ait recommandé l'adoption du projet de loi sans amendement, il a semblé dire en même temps qu'il faudrait faire disparaître cette notion. En un mot, honorables sénateurs, le projet de loi C-5 devrait être amendé.

Je crois comprendre que le comité a communiqué avec le ministre de la Justice à ce sujet. Si j'ai une idée claire de la correspondance entre le président du Comité de l'énergie et le ministre de la Justice, ce dernier aurait donné son accord de principe. Si cet accord existe bel et bien, pourquoi n'a-t-on pas modifié l'article 3? Le comité aurait dû agir.

La deuxième question dont j'aimerais parler concerne la partie du rapport qui porte sur l'inscription automatique — qui ne peut être réévaluée par le gouverneur en conseil — des espèces à l'annexe 1 le jour où cette mesure législative entre en vigueur. Dans l'annexe à son rapport, le comité dit ceci:

La version actuelle de l'annexe comprend les espèces évaluées ou réévaluées par le COSEPAC, jusqu'en novembre 2001. N'y figurent ni les 31 espèces réévaluées par le COSEPAC en mai 2002, ni les deux inscrites d'urgence en octobre 2002, ni les 17 réévaluées en novembre 2002.

Il est dit en outre dans l'annexe qu'on exhorte le ministre «à ajouter ces espèces à l'annexe 1 dès que la loi sera promulguée».

Bonté divine, honorables sénateurs, le message du comité est très clair, à savoir que certaines espèces devraient être ajoutées à l'annexe 1 dès la proclamation de la loi; c'est ce qu'il veut. Dans ce cas, le projet de loi devrait être modifié en conséquence. Je ne comprends pas pourquoi nous n'avons pas d'amendement à cet égard.

Honorables sénateurs, la troisième question que j'aimerais aborder est la question de l'indemnisation. Là encore, le comité donne des conseils aux honorables sénateurs au sujet de l'indemnisation. Il compte que le règlement élaboré en vue d'appliquer les dispositions de la loi tiendra compte de certains principes, et le comité en énumère quatre. Premièrement, «l'indemnité devrait être calculé à la juste valeur marchande». Deuxièmement, «on pourrait offrir d'autres formes d'indemnité, l'indemnité pécuniaire n'étant pas toujours la meilleure forme.»

Honorables sénateurs, cette opinion est exprimée très clairement et des principes directeurs ont été élaborés pour que le règlement reflète l'opinion du comité. De toute évidence, le projet de loi aurait dû être modifié par le comité de manière que le libellé du règlement à venir reflète ces principes.

Honorables sénateurs, ce ne sont là que trois des lacunes relevées par le comité. C'était à lui d'agir car il est très difficile, à l'étape de la troisième lecture, de proposer des amendements à un projet de loi complexe.

MOTION D'AMENDEMENT

L'honorable Noël A. Kinsella (leader adjoint de l'opposition): Par conséquent, honorables sénateurs, je propose, appuyé par l'honorable sénateur Rossiter:

Que le projet de loi ne soit pas maintenant lu une troisième fois, mais qu'il soit renvoyé au Comité sénatorial permanent de l'énergie, de l'environnement et des ressources naturelles pour que soient examinés des amendements au projet de loi qui tiendraient compte des appréhensions soulevées dans le troisième rapport du Comité sur le projet de loi C-5, Loi concernant la protection des espèces sauvages en péril au Canada, présenté au Sénat le 4 décembre 2002.

Son Honneur le Président: Plaît-il aux honorables sénateurs d'adopter la motion?

Des voix: Non.

L'honorable Charlie Watt: Honorables sénateurs, je crois savoir ce que le leader adjoint de l'opposition est en train de faire et j'aimerais aborder cette question parce qu'elle est importante.

C'est presque équivalent à ce que j'ai fait au comité lorsque nous examinions le projet de loi C-10A. Lorsque j'ai présenté une motion, j'ai observé les membres du comité qui se trouvaient autour de moi et j'ai compris à leur mine que ce n'était pas la façon de procéder pour obtenir ce que je voulais, en d'autres termes, pour présenter cette motion. Ainsi, la motion a été rayée.

(1520)

Honorables sénateurs, je soulève une question avant de me pencher sur le projet de loi lui-même. Pour ce qui est de la disposition de non-dérogation, comme je l'ai mentionné au comité et dans cette enceinte, le gouvernement fait une interprétation de ce qu'il énonce dans la Constitution en ajoutant ces trois mots. J'aimerais traiter cette question séparément.

J'estime que ce que nous essayons de dire aux sénateurs commence à porter fruit. Les sénateurs commencent lentement à reconnaître la capacité des peuples autochtones, mais la partie n'est pas encore gagnée. Nous sommes prêts et nous comprenons tous la situation, mais je ne crois pas que ce soit réglé.

Je ne veux pas courir le risque de voir la mesure rejetée en raison de cette disposition de non-dérogation. C'est un point que le ministère de la Justice, de son propre chef, sans aucune indication ou ordre du Parlement, a décidé de...

Son Honneur le Président: Sénateur Watt, je suis désolé de vous interrompre, mais j'aimerais clarifier où nous en sommes. Vous avez le droit de formuler vos commentaires au sujet du projet de loi. Le sénateur Kinsella a présenté une motion et vous vous êtes levé après que l'amendement eut été mis aux voix. Il lui restait alors cinq minutes. Si vous souhaitez lui poser une question, et je crois vous avoir entendu dire que vous souhaitiez le faire, vous n'auriez que quatre ou cinq minutes avant que la période allouée au sénateur Kinsella ne soit écoulée. Cela ne signifie pas pour autant que vous ne pourrez plus intervenir sur le projet de loi après cela.

Parlez-vous du projet de loi ou posez-vous une question?

Le sénateur Watt: Honorables sénateurs, je tentais de faire deux choses en même temps, mais permettez-moi de me reprendre.

Ma question s'adresse au sénateur Kinsella. Le sénateur accepterait-il de retirer cette partie de la question de non- dérogation, de manière à ce que je puisse l'aborder autrement lorsque je parle du projet de loi?

Son Honneur le Président: Voulez-vous répondre, sénateur Kinsella?

Le sénateur Kinsella: Honorables sénateurs, ma motion vise essentiellement à suggérer au comité d'examiner davantage le projet de loi en se penchant sur certaines questions. J'ai mentionné l'article 3 uniquement parce que je savais qu'il en avait été question au comité. Je ne propose pas d'amendement important au projet de loi, car cela est très difficile à faire à l'étape de la troisième lecture avec un projet de loi aussi complexe. Il vaut beaucoup mieux que cela se fasse à l'étape du comité. Selon moi, le comité est plus apte à traiter la question, et j'espère qu'il la réexaminera.

Le sénateur Watt: Je comprends maintenant ce que le sénateur tentait de faire, et je me réserve le droit d'intervenir ultérieurement sur le projet de loi même.

Son Honneur le Président: Proposez-vous l'ajournement du débat, sénateur Watt?

Le sénateur Watt: Non.

Son Honneur le Président: Nous sommes à l'étape de la troisième lecture, sénateur Watt. Si vous souhaitez intervenir, ce serait le moment de le faire.

[Français]

L'honorable Fernand Robichaud (leader adjoint du gouvernement): Honorables sénateurs, nous en sommes à l'étape de la troisième lecture. Si personne d'autre ne veut parler sur cet amendement proposé par le sénateur Kinsella, nous devrions en disposer. Le sénateur Watt a posé une question. Il aurait l'intention de parler plus tard à propos du projet de loi et non de l'amendement.

[Traduction]

L'honorable George Baker: Honorables sénateurs, je voudrais avoir une clarification. Si le sénateur désire prendre la parole, la motion qui a été déposée par le leader adjoint du gouvernement est tellement vague que je suis sûr qu'il peut prononcer son discours et que ce dernier aura un rapport avec le projet de loi et l'amendement que nous rejetterons.

Son Honneur le Président: Aux fins de clarification, je crois comprendre que le Sénat désire traiter de l'amendement dès maintenant.

Des voix: Oui.

Son Honneur le Président: Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion d'amendement?

Des voix: D'accord.

Des voix: Non.

Son Honneur le Président: Que ceux qui sont en faveur de la motion d'amendement veulent bien dire oui.

Des voix: Oui.

Son Honneur le Président: Que ceux qui sont contre la motion d'amendement veulent bien dire non.

Des voix: Non.

Son Honneur le Président: Je crois que les «non» l'emportent. La motion d'amendement est rejetée.

Nous sommes maintenant à la troisième lecture du projet de loi.

Le sénateur Watt: Je crois que je suis finalement au bon article.

Honorables sénateurs, permettez-moi de dire tout d'abord qu'il n'est pas facile de traiter de ce projet de loi, comme c'est le cas de tous les projets de loi qui ont des répercussions sur les gens que nous représentons.

Honorables sénateurs, j'aimerais préciser que j'apprécie le fait que le projet de loi confère aux peuples autochtones un certain droit de regard sur les questions qui doivent être prises en compte relativement à l'inscription sur la liste d'espèces qui pourraient être considérées comme étant en péril, ce qui signifie qu'il y a au moins une possibilité que l'on tienne compte des connaissances traditionnelles dans le cadre de la présente mesure. Je suis heureux que les peuples autochtones puissent participer à ce processus.

Cependant, honorables sénateurs, ce qui s'est passé à propos de la disposition de non-dérogation, telle qu'énoncée dans le projet de loi C-5 lui-même, est gênant pour les Autochtones, pour dire le moins. Cela nous amène certainement, nous les Autochtones, à nous interroger sur le système. À l'époque où nous avons négocié avec la Couronne pour établir nos droits constitutionnels, nous avions l'article 35 et la disposition de non-dérogation. Nous faisions confiance alors, et nous continuons d'essayer de faire confiance au système qui devrait avoir pour devoir de protéger les droits des Autochtones.

Je sais pertinemment qu'on a parfois l'impression qu'il n'est pas nécessaire de protéger les droits des Autochtones, surtout quand on étudie un projet de loi, car on peut facilement donner un tour différent au libellé sans que cela mette en cause la Constitution elle- même. On pourrait changer ces droits et leur donner un sens différent au moyen d'un projet de loi, et c'est exactement ce qui nous inquiète. Voilà notamment pourquoi nous estimons qu'il faudrait supprimer dans la version anglaise la formule «protection provided for» que le ministère de la Justice y a inscrite.

(1530)

Honorables sénateurs, je n'ai absolument aucune hésitation à proposer un amendement sur ce point. Cependant, je ne pense pas que notre chambre soit disposée à accepter l'idée d'apporter un amendement. Je vais dire pourquoi aux honorables sénateurs.

Premièrement, la Chambre des communes a fait savoir très clairement que le projet de loi doit retourner à la Chambre des communes sans amendement. Deuxièmement, tous les honorables sénateurs, moi y compris, sont impatients de rentrer chez eux pour les fêtes. Encore une fois, je suis coincé. J'aurai tort quoi que je fasse.

Honorables sénateurs, si j'interviens cet après-midi, c'est pour faire connaître mon opinion. C'est le moins que je puisse faire. Je ne veux pas courir le risque que les honorables sénateurs votent contre moi. Un jour, mes honorables collègues compteront sur moi, et je compte moi aussi sur eux.

Je m'efforce autant que possible de faire partie de l'équipe, mais c'est parfois impossible. Je viens d'un milieu socio-culturel très différent de celui de la plupart des sénateurs. Ce qui compte le plus pour moi, ce sont les gens que je représente. Ils sont importants pour moi. Je comprends leur mode de vie. Je sais ce qu'ils font. Je sais comment ils fonctionnent. Je sais ce qu'ils font pour nourrir leur famille.

Les habitants du Nord ont très peu de possibilités d'avoir un accès égal au système que le reste du Canada, notamment le Sénat, tient pour acquis. Un jour, j'espère que le pays, et surtout le système, comprendra qu'il ne peut pas continuer — je répète, «continuer» — de traiter les habitants du Nord comme ils sont traités aujourd'hui. On ne peut appliquer une solution unique à tous. J'espère que cela est parfaitement clair.

Je sais que le projet de loi sur les armes à feu a été adopté en 1995. J'ai tenté d'intervenir lorsqu'il a été présenté pour la première fois. J'ai proposé un système à deux volets, un pour le Nord et un pour le reste du Canada. On a répondu que cela était impossible.

Je compte sur tous les sénateurs pour que, un jour, nous comprenions clairement ces questions. Les gens, peu importe où ils habitent, ont le droit à la vie. Ce droit à la vie est clairement exprimé dans la Constitution. Je n'ai pas l'impression que ce droit est honoré et respecté par le système que nous avons actuellement.

Honorables sénateurs, si l'atmosphère était différente, je présenterais une motion d'amendement, qui dirait, aux fins du compte rendu, qu'il est proposé par le sénateur Watt, appuyé par le sénateur Sibbeston:

Que le projet de loi C-5 ne soit pas maintenant lu une troisième fois, mais qu'il soit modifié:

a) à l'article 3, à la page 7, par substitution, à la ligne 26, de ce qui suit:

«pas atteinte aux droits exis-»; —

— ce qui supprimerait ces trois mots.

La motion d'amendement ajouterait ceci au sujet de l'indemnisation:

b) à l'article 64, à la page 35, par substitution, aux lignes 34 et 35, de ce qui suit:

«l'habitat ou les activités d'exploitation ou autres qui y sont désignés comme nécessaires à la survie ou au rétablissement d'une»;

c) à l'article 83, à la page 46, par substitution, aux lignes 19 et 20, de ce qui suit:

«personne exerçant des activités d'exploitation conformes au régime de conservation ou à tout autre régime visant les espèces sauvages.»

C'est la motion d'amendement au projet de loi C-5 que j'aurais présentée.

Comme ne l'ignorent pas les sénateurs, j'ai aussi inclus l'indemnisation parce que nous en avions parlé. Le sénateur Kinsella l'a signalé à juste titre.

Pourquoi ai-je soulevé la question des revendications territoriales? Les revendications territoriales, qui sont de prétendus traités modernes, sont explicites sur les relations avec les autorités gouvernementales. Les rouages et les mécanismes ont déjà été négociés.

Trois mots ont été ajoutés à la disposition de non-dérogation dans le projet de loi, mais cela n'a pas marché.

On peut se demander si cette loi et d'autres qui comportent une disposition de non-dérogation sont bien constitutionnelles. Les sénateurs comprendront que je ne veux pas voir rejeter ma motion d'amendement, car je ne veux pas donner une fausse impression à la Cour suprême du Canada.

Merci, honorables sénateurs, de m'avoir permis de m'exprimer franchement. Je crois parler au nom des sénateurs Sibbeston, Adams et Gill. Cette question est importante pour nous tous.

L'honorable A. Raynell Andreychuk: Honorables sénateurs, le sénateur Watt dit que cette question est importante pour les sénateurs qu'il a nommés. En fait, ces questions devraient être importantes pour chacun d'entre nous. Tout a commencé pour moi lorsque j'ai eu à décider si je devais respecter les droits autochtones ou si je devais m'acquitter convenablement de mes obligations de fiduciaire.

Cela m'attriste d'entendre le sénateur dire aujourd'hui que nous ne réglerons pas cette question parce que nous devons rentrer chez nous à Noël, que la Chambre des communes exerce des pressions sur nous en affirmant qu'elle ne veut pas que le projet de loi soit modifié. Si nous voulons nous acquitter de nos obligations à l'égard des Autochtones, et non à votre endroit, soit dit respectueusement, ne conviendrait-il pas de le faire sans tenir compte du congé de Noël?

Je comprends pourquoi le sénateur ne veut pas proposer l'amendement, et je comprends la position difficile dans laquelle cela pourrait le placer. Cependant, maintenant que nous avons bien exposé la question dans cette enceinte, est-il contre l'idée de réexaminer à quel point cela peut être fondamentalement important pour les Autochtones et pour l'ensemble du Canada? Peut-être qu'un second examen objectif par le comité serait opportun. Le sénateur ne croit-il pas que c'est peut-être maintenant qu'il faut agir, pas demain ou la prochaine fois? En entendant le sénateur, j'ai l'impression qu'il est important de poursuivre le dialogue. Le sénateur dit que les choses évoluent dans ce dossier. De ce côté-ci, je n'ai certainement entendu que des opinions favorables à l'égard de la position adoptée par le sénateur.

Le sénateur Watt: Honorables sénateurs, je crois que c'est maintenant qu'il faut agir. Même si j'estime moi aussi que c'est maintenant qu'il faut agir et malgré toutes les bonnes intentions exprimées par le leader adjoint d'en face, cette question a été examinée au comité. Je ne crois pas me tromper en disant que n'importe quelle motion d'amendement sera rejetée. Nous n'avons pas encore les appuis nécessaires à ce moment-ci. J'espère que nous aurons un jour les appuis nécessaires pour faire adopter le genre d'amendement que je propose. Toutefois, je ne crois pas que nous ayons ces appuis aujourd'hui. C'est une des raisons qui m'ont poussé à prendre cette décision de dernière minute.

(1540)

Honorables sénateurs, ce matin encore, je prévoyais de proposer cet amendement parce que, étant donné ce qui s'était dit hier, j'avais l'impression qu'il y avait une possibilité que certains sénateurs votent en faveur. Je pensais qu'il y avait peut-être une ouverture. Toutefois, plusieurs sénateurs m'ont demandé si j'avais l'intention de les garder ici pour Noël.

Honorables sénateurs, la loi des nombres fait que je ne risque pas de remporter le vote, même si certains sénateurs libéraux se rangeaient dans notre camp.

La question primordiale pour moi aujourd'hui, c'est de ne pas donner le mauvais message à la Cour suprême du Canada sur cette question. Je ne sais pas quelle impression cela laisserait si l'amendement était rejeté. Je ne veux pas courir ce risque.

L'honorable John Lynch-Staunton (leader de l'opposition): Honorables sénateurs, je trouve très démoralisant et décourageant qu'au sujet d'une question aussi importante que le traitement des Autochtones et la reconnaissance de la place spéciale qu'ils ont occupée dans notre pays historiquement et qu'ils occupent actuellement en vivant dans des conditions différentes du reste d'entre nous, un sénateur du parti majoritaire admette publiquement que les autres sénateurs de son camp n'accepteraient même pas d'étudier un amendement ou de renvoyer la mesure à un comité pour qu'il l'étudie. Je trouve cela démoralisant et décourageant, et je sais que d'autres partagent cette impression.

J'aimerais réfléchir sur ce que le sénateur Watt nous a dit aujourd'hui et lire ses observations. Je propose l'ajournement du débat.

Son Honneur le Président: Avant que je ne mette la motion aux voix, le sénateur Baker demande à prendre la parole.

Le sénateur Kinsella: Honorables sénateurs, une motion d'ajournement ne peut être reportée ni faire l'objet d'un débat. Une motion d'ajournement a été présentée.

L'honorable Sharon Carstairs (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, nous avons toujours eu pour politique à cet endroit de laisser l'ajournement au nom du sénateur Lynch-Staunton. Nous n'essayons pas de le priver de cela. Si quelqu'un désire prendre la parole à un certain moment, il faut lui accorder le droit de parler à ce moment-là.

Le sénateur Kinsella: D'accord.

Le sénateur Baker: Honorables sénateurs, le sénateur Watt m'a informé ce matin qu'il avait pris sa décision. J'ai regardé le sénateur Watt, le sénateur Adams et le sénateur Sibbeston — un ancien premier ministre des Territoires du Nord-Ouest — aborder les multiples problèmes que constituent la date limite pour la criminalisation de la possession d'armes à feu, soit le 1er janvier 2003; le projet de loi sur les espèces en péril, qui nuit aux Autochtones pratiquant la chasse aux phoques, et enfin le projet de loi sur la cruauté envers les animaux.

Un honorable sénateur a parlé de l'essence même du projet de loi tout à l'heure, une expression que nous utilisons lorsque nous jugeons l'objet d'un projet de loi.

Honorables sénateurs, seulement cette semaine, 108 chasseurs de phoques ont été accusés de vendre des peaux de phoques et d'en faire le commerce et le troc aux termes d'un règlement fédéral, alors que c'est clairement une question de compétence provinciale. Nous pouvons discuter des articles 18 et 19 de la Constitution. Les cours d'appel de Terre-Neuve et du Québec ont jugé que c'était en fait une compétence provinciale. Cependant, la Cour suprême du Canada a dit que ce n'était pas le cas, parce que l'essence même de la mesure législative veut que, pour contrôler une chose qui est dans l'océan, on pouvait légalement empiéter sur des compétences provinciales. Ainsi, les chasseurs de phoques ont été accusés cette semaine aux termes d'un règlement fédéral.

Les témoins ont dit au comité qu'il fallait apporter des modifications à la Loi sur le contrôle des armes à feu pour permettre aux gens du FBI et de la CIA, qui doivent porter une arme à feu, de passer par les aéroports canadiens. Le gouvernement veut les exempter de toutes les règles et de tous les règlements. À ce moment-là, le sénateur Adams a demandé, et je reprends sa question dans mes propres mots: si on exempte ces gens pour leur permettre de porter des armes à feu parce que c'est leur travail, va-t-on dans ce cas exempter tous les gens de ma région, puisque c'est également leur travail de porter des armes? La question n'a pas été comprise par les experts juridiques qui témoignaient devant le comité.

Honorables sénateurs, le sénateur Watt m'a fait part de sa décision ce matin. Je la respecte. Il a pesé le pour et le contre dans son esprit. Le ministre de la Justice a exercé des pressions sur lui. Des lettres ont été adressées au président du comité. On lui a dit qu'il n'avait pas besoin de s'inquiéter.

Au sujet des espèces en péril, la question de l'indemnisation est l'un des grands points qu'il a abordés au comité. Il a demandé si une indemnisation allait être versée à une personne qui perd son gagne- pain parce que des espèces ont été déclarées en péril. On lui a répondu qu'on n'en savait rien. La définition d'indemnisation dans la loi porte, selon nous, uniquement sur l'habitat, sur la destruction d'un environnement physique. On va indemniser pour cela, mais pas pour la perte d'un gagne-pain.

Toutefois, quand des juristes ont témoigné devant le comité et qu'on leur a demandé ce qu'ils en pensaient, ils ont dit que ces personnes-là seraient indemnisées.

Honorables sénateurs, le sénateur Watt a pris une décision. Il a soupesé toutes ces considérations et en est venu à la conclusion que la meilleure solution pour ceux qu'il représente était, peut-être, de faire ce qu'il a fait aujourd'hui.

Le sénateur Watt a lu une résolution dans laquelle il dit au Sénat ce qu'il aurait ajouté à la loi s'il avait estimé que cela aurait amélioré la situation de son peuple mieux que ce qu'il pourrait obtenir avec son lobbying. Il a pris sa décision.

Honorables sénateurs, telle est l'essence même de ce projet de loi. Le sénateur a lu l'article 3. J'attire personnellement votre attention sur l'article 4, qui propose d'étendre la compétence du Canada au- delà de la zone de 200 milles, ce qui est absolument illégal. Le Canada ne peut pas le faire à moins de ratifier le droit de la mer — ce que le gouvernement canadien n'a pas fait, mais aurait dû faire — et de présenter une demande aux termes de l'article 6 afin d'étendre la compétence canadienne.

Honorables sénateurs, il y a d'ancien premiers ministres dans cette enceinte qui ont adopté des lois échappant complètement à leur compétence. L'ancien premier ministre de la Nouvelle-Écosse, qui est avec nous, a fait adopter une telle loi durant son quatrième mandat au poste de premier ministre. J'ignore combien de mandats il a eus, mais il me fait penser à Joey Smallwood, de Terre-Neuve. Il y a quarante ans, à l'époque où je travaillais au Nouveau- Brunswick, Joey Smallwood et moi nous sommes rencontrés au Lord Beaverbrook Playhouse. Il m'a invité à Terre-Neuve pour travailler avec lui sur les lois de la province. J'ai dit: «Non, je veux m'inscrire à la faculté de droit.» Il a répondu: «Pourquoi aller à la faculté de droit? Nous avons à Terre-Neuve un système dans le cadre duquel tu n'as qu'à faire un stage de trois ans tout en travaillant pour moi.» En réalité, honorables sénateurs, c'est ce que j'ai fait. Je me suis rendu à Terre-Neuve, où notre premier dossier a été de revendiquer la compétence jusqu'à 100 milles de la côte de Terre-Neuve. Nous avons installé une plaque à cet endroit.

(1550)

Je vais vous donner un autre exemple d'un premier ministre ayant agi en toute illégalité. J'ai reçu un jour un appel téléphonique du leader de l'opposition, qui me disait que le premier ministre de la Nouvelle-Écosse venait tout juste de présenter un projet de loi visant à étendre sa zone de compétence à ce qu'il était convenu d'appeler dans les années 1920 «les limites exploitables du plancher océanique». En 1980, cela revenait à saisir tout l'océan Atlantique, y compris la côte africaine. J'ai dit au leader de l'opposition en Nouvelle-Écosse qu'il devrait dire à la population de sa province que le premier ministre est fou, et que cela ne peut se faire. Honorables sénateurs, le leader de l'opposition a suivi mon conseil, et je crois que le premier ministre a été élu pour un quatrième mandat peu après.

Pour en revenir à l'objet de notre discussion, c'est-à-dire à l'essence même du projet de loi à l'étude aujourd'hui, j'ai vu des sénateurs, et notamment le sénateur Sparrow, s'efforcer au comité de convaincre les autorités que certains de leurs propos ne cadraient pas avec la réalité. Ces autorités ont passé des nuits blanches au cours des deux ou trois dernières semaines et elles ont pris une décision. Je respecte leur décision, et je peux vous dire, monsieur le Président, que les sénateurs qui appuient ces honorables sénateurs aujourd'hui les soutiendront encore plus afin de veiller à ce que se concrétise ce qu'ils croient qu'ils peuvent accomplir.

Des voix: Bravo!

L'honorable Jerahmiel S. Grafstein: Honorables sénateurs, le sénateur Baker ne sait peut-être pas qu'au Sénat nous nous interpellons directement, au lieu de nous adresser au Président. Cela étant dit, je ne veux en rien manquer de respect à l'égard du Président. Le sénateur Baker souhaitera peut-être se reporter à l'article 32 du Règlement.

Le sénateur Carstairs: Honorables sénateurs, dans sa conclusion, le sénateur Baker a dit que les sénateurs autochtones auront beaucoup d'appui dans le cadre d'un très important processus que nous avons amorcé en mars de l'année courante, si ma mémoire est exacte. Je veux donner à ces sénateurs l'assurance que je serai au premier rang des personnes qui les appuieront.

Depuis quelques années, la disposition de non-dérogation a suscité des réactions très mitigées. Au départ, cette disposition était libellée d'une certaine façon. Ensuite, sans aucune explication satisfaisante à mes yeux, le libellé en a été modifié. Les sénateurs autochtones se sont demandé comment ils allaient faire pour s'en sortir avec cette disposition. Ces sénateurs croient, comme moi d'ailleurs, que leur protection fondamentale réside dans la Constitution et que les dispositions de non-dérogation ont été ajoutées aux projets de loi pour mieux garantir cette protection. Dans ce cas, pourquoi a-t-on modifié ce libellé? C'est très préoccupant.

Nous avons franchi différentes étapes. L'année dernière, nous avons étudié le projet de loi concernant le Nunavut et, comme des revendications territoriales avaient été accordées et des traités avaient été signés, on avait décidé que la disposition de non- dérogation en serait retirée. Nous avons également étudié un autre projet de loi dont le nom m'échappe, dans lequel nous avons laissé figurer la disposition de non-dérogation avec son nouveau libellé. Aujourd'hui, nous étudions un autre projet de loi dont le libellé diffère de la version originale, et le sénateur Watt et ses collègues ont encore une fois soulevé la question de savoir comment apporter plus de clarté à ce sujet.

Pour cette raison, le sénateur Banks, le président du comité, a écrit d'abord au ministre de l'Environnement, parce que le projet de loi avait été présenté à son initiative, et ensuite au ministre de la Justice. Le Cabinet a décidé que la question devait être réglée. C'est ce qui explique que, dans une lettre adressée au sénateur Banks, le gouvernement a clairement indiqué que, en mars 2003, un projet de loi serait présenté pour établir une fois pour toutes le libellé des dispositions de non-dérogation et préciser les cas où elles ne devraient pas figurer dans les textes de loi, pour régler ce problème de manière définitive.

Cette initiative s'avère cruciale, car on ralentit les choses si l'on procède de manière ponctuelle chaque fois que le problème se présente. Le Sénat doit se saisir de la question et nous devons en débattre de manière exhaustive, non seulement avec les sénateurs autochtones, mais aussi avec la communauté autochtone canadienne comme telle, car, comme nous le savons, différents peuples autochtones sont inscrits dans la Constitution. Les Inuits, les Métis, les Indiens de plein droit et les Indiens non inscrits y figurent et nous devons découvrir ce que tous en pensent.

Je tiens à assurer à mes collègues, et notamment aux sénateurs Watt, Adams, Sibbeston, Gill et Chalifoux, qu'ils peuvent compter sur mon aide; ils peuvent compter sur moi.

Des voix: Bravo!

Le sénateur Watt: Honorables sénateurs, notre leader a ajouté de nouveaux éléments à ce que le ministre a dit vouloir faire en mars.

Ces propos me préoccupent énormément. L'adoption d'une mesure législative indépendante, comme le propose le ministre, constitue une option. Dans sa lettre, le ministre parle de la possibilité de supprimer la disposition de non-dérogation de chaque mesure législative et soutient qu'il n'y aura dorénavant aucun rappel concernant l'absence d'une telle disposition dans les nouvelles mesures législatives

Honorables sénateurs, je crains que cette mesure ne règle pas le problème. J'estime que le ministre doit aller plus loin parce que, de temps à autre, il y vraiment violation des droits autochtones. Comment traitera-t-on cette violation? Si la solution proposée est trop favorable au gouvernement, nous perdrons les acquis que nous pensons avoir négociés et pour lesquels nous pensions avoir une protection en vertu de la Constitution. Il est très risqué d'aller dans cette direction. Sans beaucoup de dépenses, nous pourrions très aisément retirer cette disposition de non-dérogation des cinq lois où elle se trouve, mais nous pourrions quand même inclure une disposition de non-dérogation dans les mesures législatives à venir. À mon avis, c'est nettement plus sensé. Du moins, si nous choisissons cette option, je n'ai pas à m'inquiéter de ce que le ministre peut essayer de faire.

(1600)

Honorables sénateurs, je sais entre autres pertinemment ce qu'il y a dans la Constitution parce que j'ai participé à la signature. J'étais du nombre des intervenants qui ont participé dès le début, c'est pourquoi j'estime savoir ce dont je parle. L'article 25 a été ajouté pour protéger l'article 35.

L'article 35 porte sur diverses ententes, dont la Convention de la Baie James et du Nord québécois, l'accord du Nunavut, l'entente des Gwich'in et l'accord conclu avec le Yukon, qui sont tous des traités contemporains. Toutefois, de temps à autre, le Parlement a le pouvoir de légiférer et peut empiéter sur nos droits. Si la loi n'est pas appliquée comme il se doit, si nous n'avons jamais l'occasion de nous asseoir et de négocier, certains éléments peuvent avoir une incidence sur nous et nous y perdrons en cours de route.

Honorables sénateurs, cela ne doit pas se produire. Nous voulons avoir la possibilité de concevoir un régime qui permette l'enchâssement. S'il s'agit cependant d'un processus unilatéral, auquel nous ne pouvons participer directement, je crains fort que le ministre ne fasse pas ce qu'il a promis de faire.

Le séanteur Carstairs: Honorables sénateurs, en réponse à la question du sénateur Watt, c'est précisément ce que j'ai dit cet après- midi. Comme l'honorable sénateur le sait, car je le lui ai dit hier, j'ai expressément demandé au ministre de soumettre au Sénat un avant- projet de loi plutôt qu'un projet de loi étanche. Nous aurions ainsi plus de liberté pour élaborer cette politique avec tous les sénateurs, et demander également l'opinion de ceux qui se trouvent à l'extérieur de cette enceinte.

Permettez-moi de préciser une chose tout à fait fondamentale, après quoi je crains de ne pouvoir répondre à d'autres questions car je dois me rendre chez la Gouverneure générale. Les droits des peuples autochtones ont été inscrits dans la Constitution. Cette dernière ne peut être modifiée par une simple loi de la Chambre des communes et du Sénat. La Constitution ne peut être modifiée qu'au moyen de la formule d'amendement prévue dans la Constitution, de sorte que les droits existent.

Je crois que ces droits sont protégés mais, et j'insiste sur le mot mais, il est clair, honorables sénateurs, qu'il doit y avoir une certaine clarté. C'est pourquoi j'ai mis tous les pouvoirs limités de ma charge à contribution, pour m'assurer de cette clarté et pour que le ministre de la Justice nous fasse comprendre que non seulement des sénateurs autochtones mais de nombreux autres sénateurs, dont moi, éprouvent des préoccupations sérieuses.

Le sénateur Grafstein: Honorables sénateurs, madame le leader du gouvernement a parlé d'une lettre dont la teneur se rapporte à ce dont parlait le sénateur Watt; il s'agit d'une lettre d'engagement à déposer rapidement un projet de loi pour résoudre la question de la non-dérogation. Madame le leader du gouvernement est-elle disposée à déposer cette lettre pour que nous l'annexions au compte rendu de cette séance?

On m'a signalé qu'il y avait non pas une mais deux lettres, datées respectivement des 27 novembre et 3 décembre. Je n'étais pas membre du comité mais, puisque le leader du gouvernement en a parlé, il serait peut-être utile que ces lettres soient déposées. Je m'en remets au leader du gouvernement et au leader adjoint du gouvernement.

[Français]

Le sénateur Robichaud: Honorables sénateurs, ces lettres ont été présentées à titre d'information au président du Comité de l'énergie, de l'environnement et des ressources naturelles, qui étudiait le projet de loi C-5.

[Traduction]

L'honorable Terry Stratton: Honorables sénateurs, je propose l'ajournement du débat.

[Français]

L'honorable Laurier L. LaPierre: Honorables sénateurs, je voulais participer à ce débat que je trouve absolument nécessaire pour le peuple canadien. Je suis complètement scandalisé de ce qui vient de se passer. Lorsque le peuple canadien va lire dans les journaux ce qui a été dit aujourd'hui, de notre incapacité de rencontrer les besoins des Premières nations de notre population, nous aurons l'air bête. Comme vous avez déjà ajourné le débat, je ne procéderai pas.

(Sur la motion du sénateur Stratton, le débat est ajourné.)

LE CODE DE DÉONTOLOGIE ET LES LIGNES DIRECTRICES EN MATIÈRE D'ÉTHIQUE

MOTION VISANT À RENVOYER LES DOCUMENTS AU COMITÉ PERMANENT DU RÈGLEMENT, DE LA PROCÉDURE ET DES DROITS DU PARLEMENT—SUITE DU DÉBAT

L'ordre du jour appelle:

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Robichaud, c.p., appuyée par l'honorable sénateurCarstairs, c.p.:

Que les documents intitulés «Proposition de modification de la Loi sur le Parlement du Canada (commissaire à l'éthique) et de certaines lois en conséquence» et «Proposition de modification du Règlement du Sénat et du Règlement de la Chambre des communes visant à mettre en œuvre le rapport Milliken-Oliver de 1997», déposés au Sénat le 23 octobre 2002, soient renvoyés au Comité permanent du Règlement, de la procédure et des droits du Parlement;

Et sur la motion d'amendement de l'honorable sénateur Joyal, c.p., appuyée par l'honorable sénateur Losier-Cool, que la motion soit modifiée par adjonction de ce qui suit:

«Que, dans le cadre de son étude, le Comité examine également au même moment, d'une part, le code de déontologie en vigueur au Parlement du Royaume-Uni à Westminster et, d'autre part, des règles établissant des normes auxquelles pourraient être soumis les membres d'une chambre du parlement qui sont nommés, et qui ne peuvent être révoqués que pour cause; et

Que le Comité formule, s'il y a lieu, des recommandations visant l'adoption et la mise en œuvre d'un code de déontologie à l'intention des sénateurs, et les ressources nécessaires à sa mise en application, ainsi que les modifications législatives qu'il serait opportun d'apporter pour y donner effet.»

L'honorable Gérald-A. Beaudoin: Honorables sénateurs, je voudrais dire quelques mots au sujet du projet de code d'éthique qui est devant nous. J'ai pris connaissance des discours de mes collègues, en particulier celui du sénateur Joyal. Il soulève des questions intéressantes et préoccupantes. Ces questions méritent réflexion et, bien sûr, une étude approfondie en comité.

Les privilèges des sénateurs sont en partie écrits et en partie non écrits. L'article 18 de la Loi constitutionnelle de 1867, qui porte sur les privilèges des sénateurs et des députés, fut abrogé en 1875 et remplacé par un nouvel article qui prévoit que le Sénat, la Chambre des communes et les membres de ces deux Chambres possèdent et exercent les pouvoirs et privilèges et jouissent des immunités déterminées par le Parlement dans une loi. Pareille loi, toutefois, ne doit pas conférer des privilèges plus étendus que ceux que la Chambre des communes du Royaume-Uni et ses membres peuvent posséder, exercer ou dont ils peuvent jouir au moment de l'adoption de cette loi.

Il faut lire ce texte avec la Loi sur le Parlement du Canada. En vertu de l'article 5 de cette dernière loi, les privilèges, droits et immunités font partie du droit public du Canada et les juges doivent en prendre connaissance judiciaire.

Le Parlement fédéral, depuis 1949, pouvait modifier l'article 18 de la Loi constitutionnelle de 1867 en vertu du paragraphe 91(1). Ce paragraphe 91(1) est abrogé depuis 1982 et remplacé mutatis mutandis par l'article 44 de la Loi constitutionnelle de 1982.

(1610)

La question des privilèges parlementaires en regard de la Charte canadienne des droits et libertés fut soulevée dans l'arrêt New Brunswick Broadcasting Corp. Le débat, en l'espèce, portait sur la liberté de presse. La question était de savoir si les médias ont le droit de filmer les débats parlementaires avec leurs propres caméras et de contrôler la production et l'utilisation subséquente des films qui en résultent. La pratique, aujourd'hui, veut que l'assemblée législative est responsable de ses caméras et permet aux médias d'utiliser les films qu'elle produit, mais ses films se limitent à la personne qui a la parole et ne reflètent pas l'atmosphère ni les réactions des autres députés lors des débats.

La Cour suprême a statué, dans une pluralité de motifs, que le privilège parlementaire d'exclure des étrangers bénéficiait d'une protection constitutionnelle et ne pouvait, en conséquence, être mis en échec par l'alinéa 2b) de la Charte.

Mon objectif est d'attirer votre attention très rapidement sur le droit à la vie privée.

Honorables sénateurs, le projet de code d'éthique mérite un examen sérieux et attentif, notamment en ce qui a trait à la portée du droit à la vie privée. Comme la Charte des droits de 1982 est notre plus bel héritage depuis l'avènement de la fédération en 1867, je crois qu'il faut, en comité, faire une étude plus approfondie du droit à la vie privée. Il y a des limites à établir dans ce domaine; il y a des limites à une invasion de la vie privée. Un code d'éthique doit respecter le droit à la vie privée qui, en droit constitutionnel, est très difficile à circonscrire. Pour cette raison, cette question devrait être référée le plus rapidement possible au Comité du Règlement, de la procédure et des droits du Parlement afin d'effectuer une étude très approfondie du droit à la vie privée. C'est un des droits les plus importants dans la Charte canadienne des droits et libertés qui, je le répète, fait partie du cœur de la Constitution canadienne.

[Traduction]

L'honorable Jerahmiel S. Grafstein: Puis-je poser une question ou deux au sénateur Beaudoin?

Son Honneur la Présidente intérimaire: Sénateur Beaudoin, acceptez-vous une question?

Le sénateur Beaudoin: Oui.

Le sénateur Grafstein: Le sénateur Beaudoin a soulevé une question intéressante au sujet de la règle concernant toute tentative du Parlement de limiter les pouvoirs et les privilèges aux termes de la Constitution. En ce qui concerne les propositions déposées par le gouvernement, le sénateur voit-il l'institution d'un haut fonctionnaire du Parlement, qui aurait un plus grand devoir redditionnel à l'égard de la Chambre des communes que du Sénat, comme une réduction des pouvoirs et des privilèges des sénateurs?

Le sénateur Beaudoin: Comme je l'ai dit au début de mon intervention, la question est préoccupante. Le droit à la vie privée est un droit fondamental. La Cour suprême du Canada l'a soutenu, appuyé et confirmé. Elle a rendu plus de 400 décisions dans des causes faisant intervenir la Charte des droits et libertés. Elle se montre très généreuse à l'égard des droits fondamentaux comme le droit d'expression et l'égalité devant la loi. Un de ces droits fondamentaux est le droit à la vie privée.

Plusieurs sénateurs ont soulevé un certain nombre de points. À première vue, je conclus qu'une restriction des droits fondamentaux est probablement inconstitutionnelle. C'est ainsi que je réagis à la question du sénateur Grafstein. Le sujet est complexe et fascinant. Toutefois, c'est avec les experts et les sénateurs au sein d'un comité que nous pourrons juger s'il y a atteinte au droit à la vie privée, au droit d'expression, au droit à l'égalité devant la loi, et cetera.

Avec tous les privilèges qui lui reviennent, l'organe législatif de l'État jouit d'une latitude que même la Cour suprême respecte. Leurs Seigneuries le font et je les en félicite. Le comité d'experts devrait certainement entreprendre une étude complète et intensive sur la question. Je ne peux donner trop de précisions parce que nous pourrions en parler pendant des heures et des heures.

La restriction de la liberté qui est précisée très clairement dans la Charte des droits et libertés, et la liberté qui est interprétée de façon si généreuse par la Cour suprême, exige une certaine prudence et un examen. Le seul fait qu'il pourrait y avoir invasion de ces droits est de prime abord inconstitutionnel. Toutefois, aux termes de l'article 1 de la Charte, nous pouvons dire que la restriction est acceptable dans une société libre et démocratique. Le fardeau de la preuve incombe aux législateurs. Je ne saurais être plus précis. Nous devons étudier chacun des cas individuellement.

(Sur la motion du sénateur Comeau, le débat est ajourné.)

LE PROTOCOLE DE KYOTO SUR LES CHANGEMENTS CLIMATIQUES

MOTION DE RATIFICATION—MOTION D'AMENDEMENT—SUITE DU DÉBAT

L'ordre du jour appelle:

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Carstairs, c.p., appuyée par l'honorable sénateur Banks:

Que le Sénat demande au gouvernement de ratifier le protocole de Kyoto sur les changements climatiques;

Et sur la motion d'amendement de l'honorable sénateur Lynch-Staunton, appuyée par l'honorable sénateur Murray, c.p., que la motion soit amendée par l'ajout de ce qui suit avant le point placé après le mot «climatiques»:

«, mais seulement si, après que le Sénat aura recueilli les témoignages en Comité plénier de tous les représentants des gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux qui souhaitent témoigner, le Sénat détermine qu'il existe un accord substantiel entre le fédéral et les provinces au sujet d'un plan de mise en œuvre.»

L'honorable A. Raynell Andreychuk: Honorables sénateurs, bien que cette motion soit inscrite à mon nom, je cède la parole à mon collègue le sénateur Eyton et je propose de parler après son intervention s'il c'est possible.

L'honorable J. Trevor Eyton: Honorables sénateurs, le réchauffement de la planète n'est pas encore devenu un sujet de conversation courant dans les familles canadiennes, mais je suis persuadé que cela va changer au fur et à mesure que les Canadiens seront sensibilisés, grâce à l'accord de Kyoto, à leur environnement et à l'importance qu'il revêt pour les Canadiens et leur mode de vie.

Le Protocole de Kyoto touche essentiellement un seul aspect de notre environnement, à savoir comment réduire la quantité de gaz à effets de serre relâchés dans l'atmosphère dans le cadre d'une initiative mondiale. À l'heure actuelle, les gens n'ont qu'une idée vague des détails et, malheureusement, cela inclut notre propre gouvernement fédéral. Ce flou n'est pas surprenant étant donné la nouveauté du sujet et l'évolution quotidienne de la position du gouvernement fédéral sur les divers éléments de l'accord.

(1620)

Pour remettre les choses dans leur contexte, les honorables sénateurs se souviendront sans doute que c'est en 1988 que les Nations Unies et l'Organisation météorologique mondiale ont créé le Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat. Ce groupe avait pour mandat d'étudier une variété de questions liées aux changements climatiques, y compris le sujet alors relativement inconnu du réchauffement de la planète.

Du travail de ce comité est issue la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques. En 1992, cette convention a été ratifiée par plus de 100 pays en dépit du fait que les données scientifiques étayant cette convention étaient alors et demeurent encore incertaines et controversées.

Cinq ans plus tard, le Canada et quelque 150 autres pays se sont rendus au Japon et ont signé ce que nous appelons maintenant l'accord de Kyoto. Au coeur de cet accord se trouve l'engagement des pays signataires de réduire les émissions de gaz à effet de serre.

Les réductions des émissions négociées en vertu de l'accord de Kyoto doivent être mises en oeuvre en deux étapes. Par souci de brièveté, on les appellera jusqu'en 2012 et après 2012. La première étape, qui couvre la période allant jusqu'en 2012, s'applique à ce qu'on appelle les pays visés à l'annexe I. Ce sont les pays développés, soit, dans l'hémisphère occidental, uniquement le Canada et les États-Unis.

Au premier abord, le Protocole de Kyoto exige des 38 pays visés à l'Annexe I qu'ils réduisent leurs émissions de gaz à effet de serre d'environ 5 p. 100 par rapport au niveau de 1990, et ce, d'ici 2012. L'idée déclarée est que les pays développés sont en grande partie responsables du problème et qu'ils devraient donc prendre l'initiative de le régler. La raison sous-jacente, à mon avis, est que les pays en voie de développement risquaient simplement de ne pas signer s'ils n'étaient pas exemptés pendant une période au cours de laquelle ils auraient la possibilité d'attirer des investissements favorisant leur croissance économique, et ce, aux dépens des pays développés. Autrement dit, c'est pour eux l'occasion de faire du rattrapage, rattrapage qui comprend un transfert de richesse des pays développés aux pays en voie de développement.

Par conséquent, jusqu'en 2012, les pays en voie de développement, y compris des pays immenses comme la Chine, l'Inde et le Pakistan, sont exemptés des cibles obligatoires de réduction, et ce, en dépit du fait que ces pays sont responsables de près de 50 p. 100 des émissions actuelles de gaz à effet de serre, pourcentage qui ne manquera pas d'augmenter.

Il faut noter toutefois que ces pays en développement sont libres de fixer des cibles volontairement s'ils le désirent. Quelle sont les chances de voir ces pays agir ainsi? Je laisserai aux honorables sénateurs le soin d'en juger eux-mêmes. De toute façon, les pays en développement ont été invités à ratifier l'accord pour montrer qu'ils appuient le principe, et notamment l'avantage concurrentiel qu'ils pourraient en retirer.

Nous caressons tous l'espoir que, lorsque ces pays en développement verront les nations industrialisées signer l'accord et réduire les émissions, ils seront incités à suivre l'exemple au cours de la deuxième phase de Kyoto qui devrait commencer en 2013. Je répète que ce n'est pas obligatoire, mais que nous espérons vivement qu'il en sera ainsi. Toutefois, avant que Kyoto ne soit mis en oeuvre, il faudra satisfaire à deux critères principaux. Le premier exige que 55 nations parties à la convention ratifient l'accord. Le deuxième exige qu'au moins six pays de l'Annexe I, qui produisaient au moins 55 p. 100 des émissions totales de gaz à effet de serre en 1999, ratifient aussi l'accord.

Jusqu'à maintenant, plus de 90 pays ont signé le Protocole de Kyoto. Même la Russie et la Chine ont récemment indiqué qu'elles le signeraient. Seul le temps nous dira ce que valent ces déclarations étant donné les économies fort peu transparentes de ces pays.

Là ou le bât blesse pour le moment, c'est que les signataires de l'Annexe I qui ont ratifié l'accord ne représentent que 37 p. 100 des émissions totales de l'Annexe I produites en 1999. Il y a donc encore du chemin à faire. La principale difficulté vient des États-Unis qui, pendant l'année de base, ont produit 36 p. 100 des émissions totales mentionnées à l'Annexe I. Or, l'administration Bush a annoncé que les États-Unis n'allaient pas ratifier le protocole.

Les Américains ont donné diverses raisons pour ne pas ratifier l'accord, la plus convaincante à leurs yeux étant que Kyoto n'atteindra pas ses objectifs alors que les obligations qu'il créera placeraient les États-Unis dans une position concurrentielle défavorable. En outre, les États-Unis croient pouvoir atteindre les objectifs de Kyoto grâce à des initiatives élaborées et mises en oeuvre à l'intérieur du pays, qui sont conformes à ses propres besoins et à ses propres valeurs.

Ailleurs sur le continent, le Mexique a ratifié l'accord, mais ne réduira pas immédiatement ses émissions du fait de son statut de pays en développement.

Il reste donc le Canada, qui est responsable de 3,3 p. 100 des émissions de l'Annexe I. Notre pays produit un peu moins de 2 p. 100 des émissions totales de la planète. Étant donné cette situation, Kyoto nous obligera à ramener nos émissions de gaz à effet de serre à des niveaux de 6 p. 100 inférieurs à ceux de 1990 d'ici l'an 2012. Autrement dit, nous nous sommes engagés à réduire nos émissions de 240 mégatonnes au cours des neuf prochaines années.

Cela doit se faire, comme il a déjà été dit, en deux étapes, la première étant une réduction de 180 mégatonnes d'ici 2012, ce qui est en deçà de notre engagement de Kyoto, et la seconde, une réduction de 60 mégatonnes, représentant notre déficit à venir.

Pour que nous puissions atteindre notre cible de Kyoto, les grands pollueurs industriels vont devoir réduire leurs émissions de 15 p. 100 d'ici 2012. Les fabricants de voitures vont devoir améliorer l'efficacité énergétique de leurs voitures de 25 p. 100. Les particuliers vont devoir diminuer leur production personnelle de dioxyde de carbone de 20 p. 100 par l'utilisation de voitures à haut rendement énergétique et un plus grand recours aux transports publics, notamment.

Un problème évident avec ce scénario, c'est qu'il ne tient pas compte ce qui s'est produit durant la dernière décennie, ou de ce qui se produira au cours de la suivante. Par cela, je veux dire qu'entre 1990, lorsque nous avons commencé à parler de la question, et aujourd'hui, nos émissions de gaz à effet de serre ont augmenté de quelque 15 p. 100 — eh oui! Au cours de la prochaine décennie, cette tendance se maintiendra sans doute à mesure que croîtront notre population, notre économie et notre consommation énergétique.

En conséquence, il est prévu qu'en 2012 nous devrons réduire nos émissions de gaz à effet de serre de 25 à 30 p. 100 pour pouvoir remplir nos engagements de Kyoto; nous sommes donc loin des 6 p. 100. De toute évidence, cela aura des répercussions non négligeables tant sur les consommateurs que sur les entreprises. Plus particulièrement, les petites et grandes entreprises devront rectifier leurs stratégies d'investissement et de création d'emplois, afin de pouvoir remplir nos engagements de Kyoto. Les grandes entreprises devront prendre des décisions déchirantes relativement à l'utilisation de nouvelles technologies, à l'installation et à l'amélioration de leur infrastructure essentielle et à leur engagement envers les programmes de développement durable, entre autres.

Il y a quelques semaines, le gouvernement fédéral a reconnu que la ratification du Protocole de Kyoto pourrait entraîner la perte de pas moins de 240 000 emplois et des coûts de 13,5 milliards de dollars sur dix ans. Ce sont des chiffres alarmants auxquels il faut réfléchir sérieusement, s'ils sont exacts, avant de donner suite à la ratification. Rappelez-vous, honorables sénateurs, que ce sont les mêmes gens qui ont créé le programme relativement simple de l'enregistrement des armes à feu qui a coûté dix fois plus que prévu.

Malgré ce que d'aucuns peuvent croire, je suis en faveur de toutes les mesures raisonnables visant à protéger l'environnement, à condition qu'elles aient été précédées d'une étude approfondie et qu'elles ne pénalisent pas injustement un groupe ou une catégorie de gens en particulier. Cependant, nous ne devrions jamais adopter à la va-vite une mesure donnée sans vraiment en saisir les conséquences à court et à long termes. J'estime que c'est le cas du Protocole de Kyoto.

Rappelez-vous, honorables sénateurs, même si nous réussissons à respecter les engagements que nous avons pris à Kyoto, nous, les Canadiens, contribuons pour moins de 2 p. 100 de la pollution mondiale totale, de sorte que la moindre réduction canadienne de la pollution perd toute importance comparée aux augmentations considérables venant des pays en développement exemptés dont la pollution même maintenant s'approche de la moitié de la pollution mondiale totale. Gardons cela à l'esprit et voyons un instant les répercussions futures pour le Canada et les Canadiens.

D'après les prévisions de Kyoto, les gros émetteurs industriels comme les usines pétrochimiques, les sociétés minières et les grandes sociétés manufacturières seront responsables de près de la moitié des émissions du Canada en l'an 2010. Beaucoup de ces entreprises travaillent déjà activement à réduire leurs émissions. Cependant, en vertu du Protocole de Kyoto, elles devront plus que doubler leurs réductions actuelles pour atteindre les objectifs que le Canada a acceptés en 1997.

Pour ce faire, elles devront faire de nouvelles dépenses d'équipement importantes, acquérir de nouvelles sources d'énergie plus propres, acheter des outils de compensation intérieurs ou des permis internationaux d'émission de dioxyde de carbone et ainsi de suite. Est-ce que ces entreprises sont prêtes à respecter ces exigences et capables de le faire? Par exemple, est-ce que nos sociétés minières, qui éprouvent déjà des difficultés, sont en mesure de faire les investissements additionnels requis? Si ces entreprises ne peuvent pas le faire, que devrions-nous faire pour les aider de manière à garder les emplois et les investissements au Canada?

Le gouvernement fédéral a reconnu qu'il pourrait y avoir des circonstances où une entreprise ne réussit pas à respecter ses engagements pour quelque raison que ce soit, et il en tient compte pour combler l'écart pouvant exister après 2012, chose encore une fois non prévue dans nos engagements de Kyoto.

Cela suffit-il? Le problème, honorables sénateurs, c'est que les répercussions sur l'industrie sont inconnues. Le gouvernement fédéral dit qu'il prévoit continuer à discuter avec l'industrie afin d'établir plus en détail la façon dont les entreprises canadiennes pourront atteindre les objectifs prévus dans le Protocole Kyoto. En effet, pas plus tard que cette semaine, le gouvernement fédéral a annoncé qu'il songerait à plafonner les coûts occasionnés aux entreprises en mettant les montants excédents à la charge des contribuables — toute une solution, et illimitée à part cela. Est-ce bien là la bonne façon de procéder?

Le monde des affaires éprouve un grand malaise devant le manque de précision dont le gouvernement a fait preuve jusqu'à présent dans ses déclarations et dans ses décisions.

(1630)

Le gouvernement ne semble pas s'être engagé à respecter un plan d'action précis, sauf pour ce qui est des objectifs eux-mêmes, qui ont d'ailleurs été négociés essentiellement par des étrangers, sans égard pour les besoins des Canadiens et les défis que cela pourrait représenter et surtout sans égard pour le vaste territoire peu peuplé qu'occupe le Canada et pour toute l'énergie propre que le Canada exporte vers les États-Unis dans le cadre de leur programme de réduction des émissions de gaz à effet de serre.

Nombreux sont ceux qui ont l'impression que les considérations politiques ont trop d'incidence sur le processus. Cela rend bien des gens mécontents. Ainsi, la société Canadian Natural Resources, qui oeuvre dans le secteur de l'exploitation des sables bitumineux, a récemment réaffecté une somme de 100 millions de dollars, réservée à l'origine à un projet d'exploitation devant être mené en Alberta, à un projet similaire en Afrique. Selon le chef de projet, cette décision a été prise parce que les conditions auxquelles son entreprise aurait eu à se plier en raison de l'application du Protocole de Kyoto n'étaient pas assez claires. Autrement dit, bien que les principaux objectifs du Protocole de Kyoto soient louables, les répercussions inconnues de son application ont porté l'entreprise à juger imprudent d'investir au Canada dans un mégaprojet qui aurait duré plusieurs décennies quand d'autres occasions plus intéressantes se présentaient ailleurs.

Ce n'est pas seulement dans le secteur de l'énergie que les gens sont préoccupés. L'inquiétude gagne tout le milieu des affaires, notamment les gestionnaires responsables de grands investissements dans des projets à long terme qui nécessitent des garanties maximales. Il n'y a pas longtemps, Perrin Beatty, à titre de président des Manufacturiers et Exportateurs du Canada, a bien résumé l'avis de nombreux gens d'affaires à propos du Protocole de Kyoto: «Les Canadiens, disait-il, méritent qu'on leur communique un plan détaillé qui fasse état des coûts réels et des dispositions que l'industrie et les particuliers devront prendre pour atteindre les objectifs [du Protocole de Kyoto].» Ou, pour reprendre les propos de Nancy Hughes Anthony, présidente de la Chambre de commerce du Canada, qui représente plus de 200 000 entreprises canadiennes, «les objectifs et les délais prévus dans le Protocole de Kyoto représenteront des défis pour l'industrie, et le gouvernement n'a pas calculé combien la mise en oeuvre du protocole coûtera aux contribuables, aux consommateurs et aux entreprises».

Honorables sénateurs, en ratifiant le Protocole de Kyoto, le Canada sera tenu légalement de réduire ses émissions de gaz à effet de serre. Avant de signer, nous devrions savoir exactement les coûts auxquels nous nous exposons. Il nous faut savoir ceci, par exemple: combien nous coûteront les permis d'émission de dioxyde de carbone sur le marché international; combien coûteront les crédits d'émission au Canada; quand les nouvelles technologies permettront de réduire nos émissions ou d'exploiter à grande échelle des sources d'énergie de remplacement; comment le Canada réussira à réduire ses émissions de 60 mégatonnes, dans un second temps, tel qu'il est prévu dans le protocole, et, à plus court terme, quels seront les effets de l'exemption du Mexique et de la décision des États-Unis de ne pas ratifier Kyoto sur les investissements au Canada, étant donné qu'environ 90 p. 100 de nos échanges commerciaux et de nos accords d'investissements se font avec nos partenaires de l'ALENA. La semaine dernière, nous avons eu une indication des effets que cette mesure pourrait avoir lorsque Michael Grimaldi, le président de GM du Canada, a prévenu que la ratification de Kyoto risquerait d'entraîner la création de normes de fabrication d'automobiles différentes de celles qui sont en vigueur aux États-Unis, ce qui pourrait avoir, selon ses propres paroles, une «incidence considérable» sur les opérations du constructeur automobile au Canada. M. Grimaldi a fait remarquer qu'à l'heure actuelle plus de 80 p. 100 des voitures et des camions construits par GM au Canada sont expédiés aux États-Unis, un marché dont dépendent des centaines de milliers d'emplois essentiels pour le Canada et les Canadiens au sein d'une industrie nord-américaine intégrée. Double gaffe!

Autrement dit, honorables sénateurs, nous ne devrions pas nous lancer aveuglément dans cette aventure. Nous devons nous renseigner davantage.

Le gouvernement fédéral lui-même doit d'abord déterminer, et ensuite expliquer plus clairement, les répercussions qu'aura le Protocole de Kyoto sur les gens et les entreprises au Canada. Il n'est absolument pas nécessaire d'adopter cette motion avant la pause de Noël. C'est un délai bien trop court, vu l'importance et la complexité de la question. Le Canada se trouverait à être le seul de tous les pays développés de l'hémisphère occidental à devoir réduire ses émissions de gaz à effet de serre, conformément au régime de Kyoto. Puisque nos deux partenaires au sein de l'ALENA, les États- Unis et le Mexique, ne seront pas assujettis aux conditions de Kyoto dans un proche avenir, nous serons certainement désavantagés au plan de la concurrence par rapport à ces très importants partenaires commerciaux.

Honorables sénateurs, les gens investissent là où ils obtiendront le meilleur rendement sur leur investissement et où les conditions de marché sont prévisibles. Kyoto aura une incidence très concrète sous ce rapport. Ce sont là des faits concernant les activités commerciales, et non des racontars pessimistes. Pendant que nous nous imposons des handicaps et des restrictions, d'autres nations, surtout les nations en développement, accentueront le problème des émissions de gaz à effet de serre et continueront volontiers de faire des affaires comme à l'habitude, à l'abri des restrictions imposées par Kyoto.

Son Honneur la Présidente intérimaire: Je suis désolée d'interrompre le sénateur, mais je dois l'informer que son temps de parole est écoulé.

Le sénateur Eyton: J'ai presque terminé.

Son Honneur la Présidente intérimaire: La permission est-elle accordée, honorables sénateurs?

Des voix: D'accord.

Le sénateur Eyton: Honorables sénateurs, je ne m'oppose pas aux objectifs de l'accord de Kyoto. Je suis un ardent défenseur de l'efficacité énergétique et d'un environnement plus propre et plus sain, y compris, entre autres, de la réduction des émissions de gaz à effet de serre et, en outre, du SO2 et d'autres substances qui dégradent notre air et notre eau. Dans le monde réel, des sociétés comme Noranda prennent des engagements sérieux et soutenus pour assainir l'environnement et assurer un développement durable. Il y a d'autres exemples à suivre, comme celui de la Californie ou de sociétés californiennes, des modèles dont nous devrions nous inspirer.

Ce n'est pas l'objectif d'une intendance plus intelligente de l'environnement qui m'inquiète. C'est la structure et les moyens particuliers que nous proposons pour le faire. Bref, nous ne devrions pas ratifier l'accord de Kyoto maintenant. Nous devons avoir un plan de mise en oeuvre qui soit largement acceptable aux provinces et à l'industrie du Canada, dans l'intérêt du bien-être politique et économique du Canada et des Canadiens. Nous pouvons tous convenir que nous voulons un environnement plus propre et plus sain d'une manière durable. Nous devrions peut-être trouver une solution purement nord-américaine, une solution qui serait examinée à fond et fondée sur les réalités économiques et environnementales nord-américaines.

Honorables sénateurs, il m'apparaît évident que, avant de ratifier ce traité, nous devons obtenir un large consensus, comprendre plus parfaitement les coûts et d'autres conséquences de l'accord de Kyoto et les solutions de rechange éventuelles, et avoir une bien meilleure idée de la façon dont nous atteindrons les objectifs. Compte tenu de cela — et à ce moment-là seulement — les Canadiens de tous les horizons appuieront massivement les objectifs vraiment louables qui sous-tendent l'accord de Kyoto.

Honorables sénateurs, j'exhorte chacun de vous à voter contre la ratification du Protocole de Kyoto pour l'instant, pour la très simple raison que c'est ce que nous devons faire en tant que chambre de réflexion. Votre vote contre la ratification sera un vote en faveur des provinces, des territoires, des régions et des secteurs qui composent notre magnifique pays et dont les voix n'ont pas été entendues clairement jusqu'ici. Il s'agit assurément d'une responsabilité qui incombe au Sénat.

Des voix: Bravo!

L'honorable Ione Christensen: Honorables sénateurs, je prends la parole pour appuyer la motion sans amendement. J'ai écouté avec intérêt les exposés pour et contre, et tous les arguments sont excellents.

Des questions ont été soulevées à propos des conséquences internationales de la signature de cet accord, de l'impossibilité de rallier toutes les provinces et de l'absence de plan d'action clair, détaillé et universellement accepté. Tous les arguments ont été éloquents, mais je voudrais faire quelques simples observations qui n'ont rien de compliqué. Il s'agit de quelques faits qui expliquent pourquoi j'estime que l'accord de Kyoto est un catalyseur et devrait être mis en oeuvre.

Il est vrai que les émissions d'hydrocarbures sont des gaz mortels. Ils sont nocifs et on ne les respire pas de façon intentionnelle.

Il est vrai que, au Canada, nous en produisons des mégatonnes chaque année.

Il est vrai que ces gaz polluent non seulement l'atmosphère du Canada, mais aussi le reste de la planète comme le font d'autres gaz semblables venant des pays industrialisés. C'est le grand partage.

Il est vrai que, s'il n'y a pas un catalyseur quelconque, personne, et l'industrie encore moins, ne prendra volontairement des mesures qui risquent de coûter un peu d'argent.

Nous en arrivons à Kyoto. Avec toutes les informations recueillies par les scientifiques du monde entier, il est difficile de nier le réchauffement de la planète. Pourtant, lorsque vient le temps d'agir, le débat est toujours vif.

Le débat est-il politique? Le débat porte-t-il sur les emplois ou le financement? S'agit-il de savoir qui produira les statistiques les plus convaincantes? Comme dans la plupart des débats, la réponse dépend du parti pris de chacun.

Il s'agit effectivement de politique, il s'agit de faire valoir un point de vue qui séduira les électeurs. Oui, il s'agit d'emplois. Des emplois qui ne seront peut-être pas créés et de ceux qui le seront. Oui, il s'agit de financement. Pour l'industrie et les gouvernements territoriaux et provinciaux, il s'agit de ce que le gouvernement fédéral voudra bien offrir pour couvrir le coût associé à la mise en oeuvre de l'accord. Il faut aussi se demander dans quelle mesure l'industrie et les provinces seront disposées à partager la richesse qui découlera peut-être des nouvelles possibilités industrielles. Et, ne vous leurrez pas, des possibilités, il y en aura. Des pétrolières profitent aujourd'hui de ces possibilités.

(1640)

Oui, il s'agit bien de statistiques, et nous savons tous qu'on peut faire dire n'importe quoi aux statistiques. Il faut un plan qui reflète les attentes et les besoins de toutes les régions de notre pays. Qui sera gagnant et qui sera perdant, et comment arriverons-nous à équilibrer cette équation? Cela n'est possible que si nous échangeons au lieu de nous dire mutuellement quoi faire. C'est là une des raisons pour lesquelles je rejette la modification. Je crois que nous ferions alors seulement nous dire quoi faire les uns aux autres. Il importe que nous débattions de la façon de résoudre le problème.

Honorables sénateurs, pour la première fois de l'histoire, nous vivons dans une économie mondialisée. Je vous le demande: ces quatre dernières années, comment s'est comporté votre portefeuille d'investissements bien planifié? Est-il réaliste de demander à un gouvernement de produire un plan financier de dix ans pour la réduction de gaz à effet de serre que nous ne pouvons pas voir? Le Protocole de Kyoto exige beaucoup de bonne foi de la part de tous les intervenants. Il le faut, car les enjeux sont élevés.

Comme l'économie mondialisée, les gaz à effet de serre produits par les pays industrialisés intéressent tout le monde. Les gaz d'échappement de ma voiture peuvent aboutir en Australie, en Inde ou en Afrique. Les émissions industrielles de la Russie, de l'Allemagne et de la Chine nuisent au Nunavut, au Chili et à l'Espagne. Si nous ne faisons rien, que devrons-nous payer en soins de santé? Quelles seront les conséquences pour le secteur agricole? Serons-nous en mesure de nous assurer un approvisionnement alimentaire? Que dire de l'exploitation forestière? Quelle incidence cela aura-t-il sur les pêches du monde entier? Qu'arrivera-t-il aux très précieux 5 p. 100 des eaux terrestres dont disposent maintenant tous les êtres vivants?

Il existe des preuves que notre planète se réchauffe. Il existe un cycle naturel dans lequel des périodes de réchauffement alternent avec des périodes de refroidissement, mais le réchauffement marqué auquel nous assistons aujourd'hui est le fait de l'activité humaine. Aucune autre espèce ni aucun autre phénomène n'en est responsable. Nous, consommateurs d'énergie, sommes les coupables. C'est à cause du style de vie des pays industrialisés que les émissions de gaz à effet de serre atteignent aujourd'hui leur niveau le plus élevé.

À la Conférence des Nations Unies sur l'environnement et le développement, qui s'est tenue à Rio de Janeiro en 1992, nous nous sommes engagés à ramener, en l'an 2000, nos émissions de gaz à effet de serre à leurs niveaux de 1990. En 1997, le Canada et plus de 160 pays se sont réunis à Kyoto afin de réitérer leur engagement à réduire leurs émissions et de s'entendre sur les réductions en question. Le Canada s'est donné comme objectif de ramener ses émissions à 6 p. 100 sous leurs niveaux de 1990 vers la fin de la période allant de 2008 à 2012. Quel que soit le plan que nous mettrons en oeuvre, ce sera un plan conçu au Canada. Nous fixerons le taux de réduction des émissions et nous nous emploierons tous ensemble à élaborer le plan qui nous permettra d'atteindre ces objectifs.

Le processus est déjà amorcé depuis 10 ans. Nous n'avons pas atteint les objectifs de l'an 2000, loin de là. En 1997, le Canada a été désigné comme l'un des trois pays ayant affiché les plus fortes augmentations de ses émissions depuis le sommet de Rio de 1992. Cela n'est pas nouveau; les gouvernements et l'industrie sont tous au courant de notre engagement à réduire nos émissions depuis 10 ans. Certains font maintenant valoir qu'on n'a pas suffisamment de temps et que tout se fait de manière précipitée. Ils auraient besoin d'un délai les menant à 2020 ou même à 2050. Ils auraient besoin d'au moins 20 bonnes années. Eh bien, devinez quoi? De 1992 à 2012, c'est une période de 20 ans. C'est un peu comme lorsqu'on était étudiant et que le professeur nous demandait de faire un travail qu'on ne commençait pas avant la veille de l'échéance. Nous avons peut-être effectivement un problème. Devrions-nous demander maintenant une prolongation? Les gaz à effet de serre vont-ils rester en attente pendant que nous tournons en rond? Je ne le pense pas.

Dans le Nord, les effets du réchauffement se font sentir peut-être encore plus qu'ailleurs. Nos agriculteurs canadiens éprouvent également des difficultés. On observe une baisse du niveau de l'eau dans nos aquifères et nos réseaux hydrographiques; des changements dans la migration des poissons, comme cela s'est produit cette année en Colombie-Britannique, où le saumon n'avait que des criques à sec pour frayer; des étés plus frais et des hivers plus chauds dans le Nord, où il pleuvait hier à Whitehorse et où il n'a pas encore neigé; des étés plus chauds et des niveaux plus élevés de smog dans les centres urbains du Sud; plus de sécheresses, plus d'inondations et des tempêtes de verglas sans précédent; la fonte de la calotte polaire; et la fonte des glaciers de la côte ouest, que je survole en avion au moins une fois par année depuis 1945. Les montagnes sont de plus en plus rongées par la fonte des glaces. Certaines d'entre elles ont complètement disparu. Nous voyons aussi des insectes et des animaux dans des régions où ils n'ont jamais été présents, et des caribous qui perdent leurs petits avant de pouvoir atteindre les terrains de mise bas parce que la glace des rivières se brise trop tôt. Il y a quelques semaines, le réseau anglais de Radio-Canada a parlé d'une étude au Yukon qui donnait des preuves que la hausse des températures était attribuable à la révolution industrielle. Des carottes prélevées sur les glaciers au sommet du mont Logan, le plus haut sommet au Canada, nous donnent une idée de la quantité de neige qui est tombée depuis 300 ans. Les données indiquent que les précipitations sur la montagne sont en hausse depuis environ 1850. Les scientifiques lient l'augmentation des précipitations à la hausse des températures, car l'air plus chaud peut transporter plus d'humidité vers les plus hautes altitudes du mont Logan.

Dans le reportage du réseau anglais de Radio-Canada, Gerald Holdsworth, chercheur à l'Université de Calgary, dit ceci:

Nous constatons une augmentation depuis 1850 environ et cette augmentation correspond au début de la révolution industrielle, ce que confirment les carottes de glace.

Il poursuit:

Le phénomène est de plus en plus marqué depuis quelques dizaines d'années. Il se manifeste depuis 150 ans et aujourd'hui il s'amplifie un peu plus rapidement.

Pourquoi devrions-nous ratifier le Protocole de Kyoto si d'autres n'en font rien? Nous contribuons de près au problème et nous devrions contribuer de près à sa solution. De l'avis de certains, si les États-Unis — le plus gros émetteur de gaz à effet de serre — ne ratifient pas le protocole, pourquoi le Canada devrait-il le faire? À leur décharge, les États-Unis ont beaucoup investi dans le développement d'une énergie plus propre. En outre, différents États américains se sont engagés à stabiliser leurs émissions de gaz à effet de serre. Bien que leur engagement ne soit pas officiel, il est notoire qu'ils ont mis au point des technologies de réduction des émissions de gaz à effet de serre. Or, le Canada doit demeurer compétitif.

L'efficacité énergétique n'est pas un concept de création récente. Lors de la crise de l'énergie des années 70, on a développé de nombreuses technologies nouvelles. Il y a eu le Programme de la maison R-2000, les pompes à chaleur air-air, les fourneaux à bois à combustion catalytique, l'énergie éolienne, les panneaux solaires, les véhicules à gazogène, l'hydroélectricité en ligne et même le thermohygrographe — je vous signale cette petite boîte de verre au milieu de cette enceinte — qui était utilisé exclusivement dans les musées et les centres d'archivage et qui est devenu un instrument utile et d'usage courant pour contrôler l'étanchéité des maisons à haut rendement énergétique R-2000. On voulait s'assurer alors de bien contrôler les températures et les niveaux d'humidité dans les bâtiments. La technologie employée au Canada pour la construction domiciliaire était pointue. Nous donnions l'exemple au monde entier avec notre façon de construire des maisons sous des climats froids.

C'était, à l'époque, une question d'argent et d'offre. Or, aujourd'hui, l'enjeu est la santé des générations à venir et la survie de la planète qui doit subvenir à nos besoins. Pourquoi avoir si peu de foi en nous-mêmes et en nos capacités? Nous avons réussi, il y a 30 ans, pour des questions d'argent. Nous pouvons certainement réussir aujourd'hui pour des questions de survie.

(1650)

Le sénateur Andreychuk: Honorables sénateurs, je ferai d'abord quelques observations préliminaires au sujet du Protocole de Kyoto et du processus en cause. Nous avons entendu des sénateurs, des scientifiques et d'autres appuyer ou réfuter les preuves du réchauffement planétaire. La question du réchauffement planétaire n'est pas vidée par les scientifiques, et il y a des arguments convaincants dans les deux camps.

Le débat n'a guère évolué depuis les années 80 lorsque le Programme des Nations Unies pour l'environnement a fini par déposer son premier rapport, qui a donné lieu à la conférence de Rio et à la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques, qui ont à leur tour mené au Protocole de Kyoto. À l'époque, au sein du Programme des Nations Unies pour l'environnement, on disait que si nous joignions notre voix aux sceptiques pour nier le réchauffement planétaire, il pourrait nous en coûter la planète. On disait aussi que si nous nous rangions dans le camp de ceux qui croyaient que la planète se réchauffe et que ceux-ci se trompaient, il en coûterait un détournement de ressources, mais que l'environnement en bénéficierait de toute façon. La protection de l'environnement est primordiale et de bonnes pratiques doivent être observées. On a donc choisi le deuxième camp.

L'enjeu, qui n'a pas changé depuis, consiste à n'utiliser les ressources existantes que raisonnablement, à n'utiliser que notre juste part de manière à respecter les droits des générations à venir. Le protocole de Rio établissait donc qu'il n'existait pas de bonnes pratiques environnementales et que de telles pratiques étaient nécessaires en vue de contrer les effets du changement climatique.

Le Protocole de Kyoto étend le concept de juste part à la dégradation environnementale à la manière dont chaque pays doit faire sa juste part. Je n'ai pas assez de temps pour aborder cette question, mais je tiens à dire que le concept de juste part entre pays n'est pas favorable au Canada et qu'il ne sera pas favorable aux pays en développement dans l'avenir. Honorables sénateurs, voilà le sujet d'un autre débat.

Comme dernière observation, je dirai que les actions du gouvernement jusqu'à maintenant sont fallacieuses, déroutantes et ne favorisent pas le dégagement d'un consensus honnête chez les Canadiens, pas plus qu'il ne s'agit, selon moi, d'une bonne politique d'intérêt public. Que le ministre de l'Environnement qualifie la ratification du Protocole de Kyoto d'événement «historique» ne facilite pas les choses. Même si le Canada mettait complètement en application cet accord, à cause du retard mis à le faire et des effets mitigés que son application aurait sur l'environnement, il est trompeur de recourir au qualificatif historique.

À l'instar de quelques autres, je crains que les Canadiens aient le sentiment que nous avons sauvé l'environnement. Ce Protocole de Kyoto n'est qu'un petit pas sur le chemin à parcourir. De plus, dire que c'est un plan bien canadien pour réduire le réchauffement de la planète, c'est mal comprendre ou présenter de manière inexacte l'élaboration des traités internationaux. S'il y a un plan bien canadien pour réduire les gaz à effet de serre et d'autres mesures pour combattre l'effet des changements climatiques, le ministre devrait alors présenter cette stratégie nationale ou ce plan et aller de l'avant. La ratification du Protocole de Kyoto signifie simplement qu'on souscrit à un plan international, qui n'est peut-être pas le meilleur accord possible pour le Canada et qui ne reflète pas tout ce que le Canada doit faire.

Aujourd'hui, je voudrais surtout parler, honorables sénateurs, de l'élaboration de traités et du processus désuet du Canada à cet égard. Deux choses sont inaltérables, selon moi. Tout d'abord, il n'est pas question de prétendre que le rôle de l'exécutif de signer et de ratifier des traités internationaux au niveau fédéral doit être modifié, notamment par l'entremise de la Constitution. C'est le pouvoir discrétionnaire qui revient à juste titre au gouvernement fédéral et à son exécutif. En outre, comme le sénateur Beaudoin l'a signalé en parlant de la jurisprudence, le gouvernement fédéral ne peut empiéter sur des droits provinciaux de quelque façon que ce soit lorsqu'il met en oeuvre des traités.

Cependant, il semblerait que le processus du Canada n'ait pas suivi la tendance croissante à élaborer des traités internationaux dans ce monde planétaire, ou encore l'importance de le faire. Nous savons que de nombreuses questions qui avaient précédemment une portée nationale ont maintenant une portée internationale. Étant donné que les lois internationales et nationales sont liées de façon inextricable et étant donné la nécessité d'élaborer un régime démocratique plus mature, il n'est plus acceptable de maintenir la pratique qui nous a conduits à la confusion et aux difficultés à ce stade-ci dans le processus de Kyoto.

Le Canada a fait peu pour moderniser et démocratiser ses systèmes de mise en oeuvre des traités, alors que d'autres pays comme la Grande-Bretagne et surtout l'Australie ont complètement réformé les leurs. Il n'y a pas eu de processus semblable au Canada.

Il faut noter que la Convention de Vienne sur le droit des traités, à laquelle le Canada a adhéré, prévoit que lorsqu'un pays signe un traité, il a alors l'obligation de ne pas priver ce traité de son objet et de son but avant son entrée en vigueur, comme on le stipule l'article 18 de cette convention. Ainsi, le pays n'est pas lié par les termes du traité, mais ne peut priver ce traité de son objet et de son but.

Cependant, si la ratification d'une loi internationale a lieu, non seulement alors on ne doit pas priver un traité de son objet ou de son but, mais cela devient un engagement obligatoire en droit. L'article 26 de la Convention de Vienne dit que tout traité en vigueur lie les parties et doit être exécuté par elles de bonne foi.

L'article 27 de la Convention de Vienne précise qu'une partie ne peut invoquer les dispositions de son droit interne pour justifier la non-exécution d'un traité.

Honorables sénateurs, que signifie tout cela pour le Canada? Cela veut dire que le gouvernement fédéral peut signer tout traité par l'entremise de l'exécutif sans la moindre consultation, exhaustive ou abrégée, parce qu'il détient le pouvoir exclusif d'agir de la sorte. Après avoir pris la décision de ratifier un accord, le gouvernement fédéral doit agir de bonne foi et chercher à inscrire ses obligations dans les lois du pays.

Bon nombre de ces obligations sont de compétence provinciale, et jusqu'à maintenant, dans beaucoup de procédures d'élaboration de traités, lorsqu'on lui reproche des lacunes sur le plan provincial, le Canada a souvent indiqué qu'il n'a pas le droit d'intervenir et, en réalité, il s'adresse aux provinces afin d'obtenir des explications. Ainsi, dans bien des cas, le gouvernement fédéral s'est abstenu de sanctionner les conventions dans une loi habilitante et a tout simplement déclaré qu'elles étaient conformes aux normes des traités. Il a souvent même été jusqu'à dire que les normes canadiennes sont supérieures à celles que stipulent les traités et que, par conséquent, les lois en vigueur sont suffisantes.

Il va sans dire que ce sont toujours les vues du gouvernement fédéral et que ceux qui veulent le contester ont peu de recours sur les plans international ou national pour faire valoir un point de vue différent. Cela vaut aussi pour les provinces, si je peux me permettre de l'ajouter.

Dans d'autres pays, le processus est plus démocratique, ouvert, axé sur la consultation, utile et orienté sur l'établissement d'un consensus. À titre d'exemple, le modèle australien, adopté en 1996, continue de prévoir dans la structure constitutionnelle le droit exclusif de l'exécutif de signer et de ratifier des traités, mais l'exécutif a mis en place les cinq mesures suivantes. Premièrement, les traités doivent être déposés au Parlement au moins 15 jours avant que le gouvernement n'adopte une mesure exécutoire, ce qui signifie signer ou ratifier le document.

Deuxièmement, l'exécutif dépose au Parlement une analyse de l'intérêt national expliquant pourquoi le pays devrait être partie au traité en question. L'analyse de l'intérêt national doit décrire les conséquences socioéconomiques et culturelles, les obligations imposées par le traité, les coûts financiers directs pour le pays, la façon dont le traité sera mis en oeuvre à l'intérieur du pays et les consultations ayant eu lieu pendant les négociations. Si nous disposions de ce processus au Canada, parlerions-nous aujourd'hui sur le même ton du Protocole de Kyoto?

Troisièmement, l'Australie a établi un comité mixte permanent du Parlement chargé d'étudier les traités déposés et d'autres questions connexes et de faire rapport au gouvernement à leur sujet. Ce comité effectue des analyses approfondies et des sommaires des propositions publiques et sert de baromètre de l'opinion publique.

(1700)

Quatrièmement, dans leur système, des conseils de traité présidés par le premier ministre, rien de moins, servent d'organe de consultation auprès des gouvernements au sujet des traités qui revêtent une importance particulière pour ces États. Si seulement un tel mécanisme avait été prévu dans le processus entourant la ratification du Protocole de Kyoto par le Canada!

Enfin, il y a la création sur le Web d'une bibliothèque virtuelle des traités australiens. Je n'ai pas le temps d'entrer dans les détails, mais cette bibliothèque fournit de l'information régulière aux parlementaires sur l'état d'avancement des négociations et précise leur incidence sur le Parlement, les États et les citoyens.

Je ne propose certainement pas de reproduire intégralement le modèle australien, mais il constitue un exemple de modernisation et de prise en compte de la nécessité de tenir, en temps opportun, des négociations et des discussions réalistes et complètes, avant de prendre une décision définitive.

Examinons maintenant la situation entourant la ratification du Protocole de Kyoto au Canada. Quand le gouvernement a-t-il conseillé le Parlement d'une façon ou d'une autre ou lui a-t-il confié un rôle dans le processus de ratification du Protocole de Kyoto, avant cette résolution? Comment le Parlement peut-il donner des conseils informés et raisonnables en l'absence d'étude, de documentation et d'audiences publiques ou d'un autre type de consultation?

Le Sénat, en particulier, a pour rôle de protéger la Constitution, d'assurer un équilibre entre les besoins, les opinons et les régions. Il doit en outre prendre en compte, de façon équitable, les intérêts des minorités. Or, on demande au Sénat de s'acquitter de sa tâche en procédant à un débat expéditif, pas à la dernière minute, mais bien à la dernière seconde. Certes, cette façon de faire tourne en dérision non seulement le principe de bonne gouvernance, mais aussi le rôle du Parlement.

Avons-nous vraiment, au cours de ce débat, analysé à fond les questions d'intérêt public pertinentes? Avons-nous examiné les droits des Autochtones et l'incidence qu'auront la ratification et la mise en oeuvre du Protocole de Kyoto sur ces droits? Disposons- nous d'un plan de mise en oeuvre définitif et assez détaillé pour qu'il soit possible de tirer des conclusions éclairées? De toute évidence, un processus politique adéquat aurait dû être mis en place immédiatement après la signature de la convention et le Parlement, les provinces et les autres intervenants auraient dû y prendre part.

De plus, il y a quelque chose qui ne fonctionne vraiment pas dans cette résolution du gouvernement qui dicte au Parlement ce qu'il devrait répondre au gouvernement. C'est certainement là une usurpation du rôle du Parlement. Une résolution adéquate et respectueuse du rôle du Parlement aurait demandé au Parlement de tenir un débat informé, critique et stratégique sur les besoins, les problèmes, les coûts et la stratégie de mise en oeuvre entourant le Protocole de Kyoto. On aurait dû prévoir une plus grande participation des Canadiens, par l'intermédiaire du Parlement.

On ne peut s'attendre qu'à un rôle de marionnette dans cette résolution, compte tenu du rôle de ventriloque joué par le gouvernement. Conjointement avec l'amendement du sénateur Lynch-Staunton, la résolution aurait pu demander au Sénat d'approuver le principe de la ratification par le gouvernement du Protocole de Kyoto sur les changements climatiques. Toutefois, le fait d'exhorter le gouvernement à le faire, de lui ordonner de le faire, revient à remettre en question les pouvoirs exécutifs de même que l'intégrité parlementaire et l'indépendance du Parlement.

Le fait qu'une bonne partie de ce qui doit être ratifié et mis en oeuvre repose sur les provinces constitue un élément critique pour le Canada au chapitre des traités internationaux. Là encore, un processus plus moderne aurait engagé la participation des provinces, demandant leur opinion avant l'étape de la signature, au début des négociations, et les plans de mise en oeuvre auraient dû être élaborés bien avant la ratification.

S'il y a eu des discussions entre le gouvernement fédéral et les provinces, il est peu raisonnable de demander aux provinces de réagir à un plan rédigé à la hâte le mois dernier. Les Canadiens ont le droit de tenir les provinces responsables de la mesure législative portant sur la mise en oeuvre. Toutefois, cela ne sera possible que si le gouvernement fédéral met sur pied un processus juste, raisonnable et à propos prévoyant la participation des provinces.

Nous avons appris de l'expérience de Kyoto qu'il n'est pas suffisant de discuter. Ce n'est que lorsqu'on peut présenter des mesures concrètes que les provinces peuvent être forcées de répondre et ce, de bonne foi. Si cela ne se produit pas, comme l'ont souligné les experts, en dernier recours, le gouvernement fédéral a la responsabilité exclusive de la ratification. Je dois dire que non seulement les provinces n'étaient pas au courant du fait que le protocole devrait être ratifié aussi rapidement, mais bon nombre des ministres du gouvernement ne le savaient pas non plus. Tout cela a causé un grand cafouillis et on ne peut certainement pas parler de bonne gestion.

Son Honneur la Présidente intérimaire: Honorables sénateurs, je regrette d'informer le sénateur que son temps de parole est écoulé.

Le sénateur Andreychuk: J'aimerais demander la permission de poursuivre.

Son Honneur la Présidente intérimaire: Est-ce d'accord, honorables sénateurs?

Des voix: D'accord.

Le sénateur Andreychuk: Une autre observation au sujet du processus de Kyoto, qui ne va pas de pair avec une bonne gouvernance moderne: si nous adoptons cette résolution qui demande au gouvernement de ratifier le protocole, nous n'aurons d'autre choix, du moins moralement, que d'accepter la loi de mise en oeuvre dont le gouvernement canadien saisira le Parlement, sans parler des dépenses qui s'ensuivront. Par conséquent, alors que beaucoup ont fait remarquer que le droit des traités laisse peu de place à la consultation ou à la participation du Parlement, nous renoncerons à notre pouvoir d'adopter une loi habilitante. Si nous invitons le gouvernement à ratifier immédiatement le Protocole de Kyoto, sans savoir quel genre de loi de mise en oeuvre il entend présenter, nous perdons ce droit en adoptant cette résolution, et notre situation sera encore moins enviable qu'elle ne l'est aujourd'hui.

De nombreux spécialistes estiment qu'il est déjà très tard pour saisir le Parlement d'une loi habilitante, parce que les traités ont déjà été signés et ratifiés. Dans le cas actuel, cependant, je crois que si nous adoptons cette résolution ordonnant au gouvernement de ratifier le protocole, nous perdrons même le droit, du moins moralement, sinon du point de vue constitutionnel ou juridique, de commenter la loi de mise en oeuvre. Je dirais même que nous irons jusqu'à déléguer nos responsabilités à l'exécutif.

Enfin, les provinces pourraient se trouver en situation de contravention à l'accord de Kyoto, dans la mesure où elles sont responsables de l'application de l'accord de Kyoto sur leurs territoires respectifs. Dans le passé, le gouvernement a souvent constaté, lorsqu'il y avait omission de la part d'un gouvernement provincial, que nos lois internes ne permettent pas au gouvernement canadien d'intervenir, sauf par voie de persuasion ou d'encouragement. Les traités passés étaient souvent de pieuses invocations comportant très peu d'obligations redditionnelles et de responsabilités. Les traités internationaux modernes sont beaucoup plus détaillés, exhaustifs et contraignants.

Il y a un problème dont on n'a pas tenu compte et qui est exacerbé par le fait que nous ne disposons pas d'un processus moderne de ratification de traités qui nous permette de nous ajuster à cette nouvelle réalité. C'est que le gouvernement canadien doit agir de bonne foi et s'efforcer d'avoir une loi de mise en oeuvre et une loi habilitante sur son propre territoire, mais sans empiéter sur la compétence des provinces. Toutefois, comme je le faisais remarquer plus tôt, le droit interne ne peut être invoqué comme excuse, selon la Convention de Genève. Comment la communauté internationale interprétera-t-elle toute réticence, de la part des premiers ministres provinciaux, à saisir leurs assemblées législatives d'un projet de loi habilitant? Lorsqu'on évaluera la détermination ou l'incapacité du Canada de se conformer, tiendra-t-on compte de l'équité dont le gouvernement fédéral doit faire preuve à l'égard des provinces? Ces questions, qui demeurent sans réponse, auraient facilement pu être évitées si on avait eu recours à de bonnes pratiques en matière de politique gouvernementale. Par exemple, est-ce qu'on ne pourrait pas considérer que le gouvernement fédéral agit de mauvaise foi en ne présentant pas de plan approprié de mise en oeuvre bien avant la ratification? Ce n'est qu'un exemple des nombreux efforts ingénieux que l'on pourra faire plus tard pour presser le Canada de respecter pleinement ses engagements. Nous sommes en terrain inconnu et le résultat reste à voir.

Que dire des mesures contre les provinces? Nous voilà en terrain encore plus inconnu. Je me contenterai de dire, d'après ce que je connais, que les Canadiens auront pour opinion, je suppose, qu'il importe peu que cela relève de la compétence provinciale ou de la compétence fédérale, le Canada a contracté une obligation à laquelle il devrait se conformer.

Si nous avions eu un système de conclusion de traités mis à jour, modernisé et vraiment remanié, nous saurions alors qui paie, combien, et quel avantage en attendre.

(1710)

Au lieu de cela, nous n'avons pas assisté à un exercice d'établissement de consensus, nous avons plutôt vu un camp ou l'autre s'employer à choquer les citoyens ou à leur faire peur pour les amener à prendre position. Au bout du compte, le succès du Protocole de Kyoto réside dans la présentation aussi bien que dans la loi elle-même.

La façon dont nous gérons le processus, la façon dont nous obtenons la participation des citoyens et la façon dont nous respectons la Constitution sont importantes. Étant donné le gouvernement actuel, il est devenu de plus en plus important d'examiner le plan de mise en oeuvre. Le Protocole de Kyoto n'est pas différent. Par conséquent, je crois que beaucoup de citoyens, sinon tous, accepteraient que l'on ratifie le Protocole de Kyoto si l'on avait suivi un processus juste et équitable.

Si le Sénat acceptait l'invitation à demander au gouvernement de ratifier le protocole, cela pourrait être à mon avis anticonstitutionnel et certainement pas une bonne pratique à suivre pour le Sénat. En fait, cela créerait un mauvais précédent.

Si elle est adoptée, cette résolution du Sénat ne fera qu'ajouter aux mauvaises pratiques du gouvernement. Par conséquent, je ne crois pas que le Sénat, qui est indépendant, doive adopter la résolution.

Honorables sénateurs, il y a deux possibilités, si nous voulons corriger cette résolution. L'une est d'adopter l'amendement proposé par le sénateur Lynch-Staunton, ce qui donnerait au moins une chance équitable aux provinces et à d'autres intéressés de se faire entendre. L'autre possibilité est de ratifier le principe plutôt qu'ordonner la ratification sans que de bonnes pratiques soient proposées.

Son Honneur la Présidente intérimaire: Acceptez-vous de répondre à des questions, sénateur Andreychuk?

Le sénateur Andreychuk: Oui.

L'honorable Jerahmiel S. Grafstein: J'ai écouté très attentivement les observations du sénateur au sujet des pouvoirs du Sénat, en ce qui concerne cette résolution. Madame le sénateur ne convient-elle pas que la résolution n'a pas force de loi? Elle n'est que consultative. Il s'agit d'une opinion donnée par le Sénat à un moment donné et elle n'empêche aucunement le Sénat de scruter avec grand soin la loi de mise en oeuvre.

Le sénateur Andreychuk: Honorables sénateurs, j'essayais de résumer mon intervention. On m'excusera de ne pas avoir donné toute mon argumentation.

Je ne soutiens certainement pas qu'il s'agit d'autre chose qu'une résolution consultative, si on veut employer ces termes. Toutefois, dans la pratique, lorsque nous demandons à l'exécutif de ratifier le Protocole de Kyoto sans avoir de documentation sous les yeux, et lorsque le premier ministre déclare qu'il ratifiera l'accord avant le 31 décembre, nous nous prononçons simplement parce que, en notre qualité propre, nous estimons que c'est une bonne idée. Nous n'avons pas procédé à l'analyse critique dont nous sommes coutumiers. Le Sénat n'a pas évalué ni étudié ses responsabilités à l'égard des autochtones, des régions, des minorités, des citoyens et de l'intérêt national. En d'autres termes, nous n'avons jamais vu la monde analyse des effets du protocole sur le Canada.

Si nous succombons aux pressions et ratifiions le Protocole de Kyoto immédiatement, sans aucune analyse, quelle sera la réaction du gouvernement, si une partie quelconque de la loi de mise en œuvre qui suivra nous déplaît? Le gouvernement nous force à nous prononcer sur le Protocole de Kyoto rapidement. Il y a encore place pour un certain débat et pour une étude des aspects administratifs. Néanmoins, sur le plan moral, nous sacrifions l'indépendance qui nous permettrait d'examiner la loi de mise en oeuvre sans aucune entrave.

Le sénateur Grafstein: Honorables sénateurs, je n'entends pas débattre la question, mais ce n'est pas ainsi que je comprends le pouvoir conféré par la résolution. Le pouvoir conféré par cette résolution est purement consultatif. Sur le plan de mes droits et de mes pouvoirs en tant que sénateur, je ne m'abstiens aucunement d'examiner attentivement le projet de loi de mise en œuvre. Si un tel projet de loi n'est pas compatible avec les objectifs de l'accord de Kyoto ou s'il a des conséquences non voulues qui n'ont pas été bien examinées, ce processus ne m'empêchera pas, ni aucun autre sénateur, de l'examiner attentivement.

Nous l'avons fait auparavant. Nous avons suivi un processus semblable au sujet de l'ALENA. Nous avons examiné le projet de loi. On nous a dit qu'il fallait trancher, mais, de toute évidence, d'autres observations ont été faites à ce propos. Certaines de ces observations n'étaient peut-être pas satisfaisantes aux yeux de certains d'entre nous.

Honorables sénateurs, je considère clairement qu'il n'est pas approprié que je doive présumer que, ayant voté en faveur de cette résolution, ce que j'entends faire, je dois m'abstenir ou renoncer à mes responsabilités en tant que sénateur d'examiner le processus de mise en oeuvre dans la mesure où il concerne ma province. Ma province n'a pas adopté de position directe sur ce projet de loi. C'est compréhensible. Par conséquent, cela m'autorise à l'examiner dans l'intérêt supérieur de ma région.

Le sénateur Andreychuk: Honorables sénateurs, le Sénat a certes examiné suffisamment l'Accord de libre-échange nord-américain. Je propose que le sénateur revoie les dossiers pour constater à quel point le Sénat a examiné la question en profondeur et à quel point les provinces ont participé. Le Sénat a examiné le projet de loi habilitant à la lumière de tous les autres facteurs.

Nous ne disons pas que nous n'examinerons pas la question de savoir si la ratification est une bonne ou une mauvaise chose, nous disons simplement que le gouvernement devrait le faire. À défaut d'analyse et de renseignements, notre ratification n'a aucune crédibilité. Si le Sénat décide que le gouvernement devrait ratifier le Protocole de Kyoto après un examen très superficiel des renseignements, nous perdons la crédibilité morale pour dire au gouvernement que nous avons le savoir-faire voulu pour contester la loi de mise en oeuvre.

Si nous appuyons la ratification à ce stade-ci, nous disons simplement que nous ne voulons pas examiner le processus de ratification du gouvernement, car nous estimons qu'il fonctionne bien.

Le sénateur n'a peut-être pas le même dilemme que moi. Cependant, j'aurai bien du mal à appuyer ce que le gouvernement veut faire un jour, puis, le lendemain, à exiger que nous puissions examiner attentivement toutes les nuances d'un projet de loi pour déterminer si le gouvernement agit comme il convient. Le sénateur Grafstein n'aura peut-être pas d'objection et il aura peut-être même l'occasion de découvrir dans quelle mesure il est à l'aise avec cette démarche. Cependant, je n'aime pas le précédent que nous sommes en train de créer au Sénat. Je n'aime pas que nous nous privions d'une occasion d'effectuer le travail minutieux pour lequel nous sommes reconnus et que nous excluions les opinions des citoyens qui voudraient nous les présenter.

Nous nous devons de trouver un équilibre entre les droits et les intérêts de chacun. Divers sénateurs nous ont fait part de leurs intérêts contradictoires, mais, contrairement à nos habitudes, nous n'avons pas réussi à établir par consentement l'équilibre tant recherché.

Je n'ai eu ni le temps ni l'occasion de réfléchir davantage à la question, mais je tenais à dire que ce genre de résolution me met très mal à l'aise. Je préférerais dire en principe que le gouvernement devrait procéder à la ratification.

Honorables sénateurs, il n'est pas de notre devoir d'ordonner au gouvernement de ratifier l'accord lorsque nous n'avons pas étudié la question et ne pouvons justifier notre appui à la ratification. Un tel précédent n'incitera personne à prendre au sérieux notre second examen objectif quand notre premier examen fut aussi superficiel.

Le sénateur Grafstein: Honorables sénateurs, je partage tout à fait l'avis de madame le sénateur qui semble dire, et je suis du même avis, que, dans une telle situation, chacun des sénateurs se voit dans l'obligation d'examiner encore plus attentivement chaque élément du processus de mise en oeuvre, surtout si nous entretenons certaines réserves.

L'honorable Mira Spivak: Honorables sénateurs, pensez au précédent de la ratification de la Convention sur la diversité biologique, qui s'est faite sans que les provinces aient été consultées. La Chambre des communes et le Sénat n'en ont pas été saisis. Il a ensuite fallu dix ans de consultations avec les provinces et avec les citoyens avant que la loi de mise en oeuvre ne soit proposée. Il s'agit du projet de loi sur les espèces en péril.

(1720)

On peut dire tout ce qu'on veut de cette mesure législative, mais le processus a certainement séparé la ratification de la mesure législative de mise en oeuvre. Le gouvernement a simplement ratifié, mais après, deux gouvernements successifs ont été si prudents et si scrupuleux au sujet de la mesure législative de mise en oeuvre que ça leur a pris 10 ans et des consultations sans fin avec les provinces. Je me demande si c'est un précédent.

Le sénateur Andreychuk: Je pense que c'est un précédent que nous devrions éviter. Le processus canadien relatif aux traités est dépassé. Cela vaut tant pour la biodiversité que pour Kyoto. Le dilemme ici est qu'il y a eu des consultations.

J'ai eu un peu à voir avec la biodiversité en tant que représentante permanente auprès du Programme des Nations Unies pour l'environnement. Il y a eu des consultations et des mesures ont été prises. Je ne pense pas que nous ayons le temps maintenant de parler des raisons de la longueur du processus de mise en oeuvre, mais Kyoto est pour moi un exemple frappant du fait que nous ne pouvons continuer sur cette voie; en effet, on a attendu 10 ans la Loi sur les espèces en péril et Kyoto a été assemblé beaucoup trop rapidement et n'est pas mis en oeuvre correctement.

Il est temps de revoir entièrement le processus relatif aux traités internationaux. Ce ne sera pas la dernière fois que nous nous retrouvons dans cette situation si nous ne réfléchissons pas soigneusement aux responsabilités fédérales-provinciales et à la nécessité de remanier le processus relatif aux traités. Je ne fais pas de distinction entre les deux traités. Le processus est faussé et il est temps que le gouvernement envisage un nouveau processus de manière à ce que nous ne nous retrouvions pas dans un tel pétrin.

Le sénateur Spivak: Peut-être n'ai-je pas bien posé ma question. Madame le sénateur Andreychuk suggère-t-elle que le même genre de consultations devraient avoir lieu avant la ratification, même si c'est la prérogative de l'exécutif, et avant l'adoption de la mesure législative de mise en oeuvre? Je vois les deux comme étant séparées. Le processus suggéré demanderait pas mal de consultations avant la ratification.

Le sénateur Andreychuk: Je pense que, dans notre monde complexe, on doit savoir ce qu'on va faire. On doit savoir quelles seront les répercussions sur tout le monde, quels seront les résultats, en quoi consistera la mise en oeuvre, quels seront les coûts et quelles seront les ramifications sociales et culturelles. On devrait répondre à ces questions bien avant de participer à des négociations internationales, car nous savons que nous n'obtenons pas tout ce que nous voulons des consultations et des négociations internationales. Toutefois, nous devrions partir d'un plan détaillé. Si nous sommes obligés de dévier de ce plan pendant les négociations internationales, nous savons avec quoi nous nous retrouverons. Si nous n'avons aucune idée de la direction à prendre, de la mise en oeuvre, des coûts ou des conséquences, comment saurons-nous à un moment donné où nous allons?

Les temps changent, nous ne devons pas l'oublier. Le processus que je défends interpellera tout le monde en permanence. C'est la seule façon de dégager un consensus et il semble que les autres pays souscrivent à ce processus pour les mêmes raisons.

[Français]

L'honorable Roch Bolduc: Honorables sénateurs, le sénateur semble d'accord sur le fait qu'il s'agit d'une prérogative du gouvernement. Celui-ci négocie et conclut un traité. Le sénateur prétend qu'il faudrait ensuite adopter l'attitude de l'Australie et soumettre l'idée à la Chambre pendant une quinzaine de jours.

Dans la réalité des choses, c'est l'équivalent du «fast-track authorities» aux États-Unis: l'exécutif négocie et on ne peut pas en discuter, cela fait partie de la Constitution. Ils n'en débattent pas du tout. Lorsque le processus est terminé, on le soumet à un vote, mais à la fin, on ne peut rien changer. Il faut simplement dire si on est d'accord ou pas. Mon point de vue est le suivant.

[Traduction]

Son Honneur le Président: Je regrette, sénateur Bolduc, mais un sénateur demande la parole pour invoquer le Règlement.

L'honorable Eymard G. Corbin: Je crois que le sénateur Bolduc pose une question au sénateur qui avait déjà posé une question au sénateur Andreychuk. Il me semble que cette façon de faire n'est pas conforme au Règlement. Je pourrais me tromper, mais j'ai cru comprendre qu'il posait une question au sénateur Spivak.

Son Honneur le Président: Le sénateur Corbin affirme que nous en sommes maintenant à la période où les sénateurs posent au sénateur Andreychuk des questions concernant son discours. Les sénateurs Grafstein et Andreychuk ont posé les questions un peu plus tôt. Le sénateur Corbin a tout à fait raison.

Sénateur Bolduc, votre question s'adresse-t-elle au sénateur Andreychuk?

Le sénateur Bolduc: Oui.

Le sénateur Corbin: À qui vous adressez-vous?

Le sénateur Bolduc: Je pose des questions au sénateur Andreychuk au sujet de son discours.

[Français]

Si vous ne voulez pas m'entendre et si vous n'aimez pas mes propos, je vais m'asseoir. Je vais partir.

[Traduction]

L'honorable Douglas Roche: Honorables sénateurs, les arguments pour et contre le Protocole de Kyoto sur les changements climatiques sont bien connus et je ne propose pas d'entretenir longuement le Sénat des effets de Kyoto. Cependant, puisque je suis de l'Alberta, je crois devoir préciser ma position à ce sujet.

Je respecte ceux qui s'opposent à Kyoto, mais je ne partage pas leur avis. Je voterai en faveur de la motion portant ratification de l'accord. Kyoto n'est peut-être pas la solution parfaite au réchauffement de la planète, mais les preuves scientifiques montrent clairement que, sans Kyoto, nous ne pourrons pas arrêter le réchauffement.

La dégradation de l'environnement est le principal obstacle au développement durable. Nous, habitants des pays développés, devons comprendre que nous avons le double devoir de protéger l'environnement et d'aider les pays en développement à mettre en oeuvre leurs propres programmes de développement économique et social.

Le Protocole de Kyoto ne devrait pas être considéré comme une mesure punitive imposée aux pays développés, mais plutôt comme un pas dans la bonne direction pour le bien commun. Je crois parler au nom des Albertains qui veulent que le Canada joue un rôle important dans le développement équitable et la préservation de la planète.

Pour moi, le principe de Kyoto est clair, mais la façon dont la motion a été présentée au Sénat est certainement obscure. Bien qu'on ait consulté les provinces, je trouve inquiétante l'absence d'un programme économique clairement défini pour la mise en oeuvre de Kyoto. Les gouvernements provinciaux sont vivement préoccupés par cela, tout comme le leader de l'opposition, qui a présenté un amendement demandant que le Sénat entende, en comité plénier, tous les représentants des gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux qui souhaiteraient témoigner. Cette requête m'apparaît raisonnable.

Pourquoi le Sénat, la Chambre de réflexion, n'entendrait-il pas des spécialistes venant de partout au pays? Pourquoi le gouvernement est-il si prompt à rejeter cette requête? Nous savons tous que le premier ministre a déclaré qu'il voulait ratifier Kyoto d'ici la fin de l'année. Cependant, le dossier de Kyoto est resté sur les tablettes du gouvernement pendant cinq ans avant cette course finale. L'amendement est raisonnable et je vais voter en sa faveur.

Bien que le processus de ratification du Protocole de Kyoto n'ait rien d'édifiant, le principe à l'origine de cet accord demeure. Je pense que le Canada doit emboîter le pas aux 100 nations qui ont déjà ratifié l'accord.

(Sur la motion du sénateur Buchanan, le débat est ajourné. )

(1730)

LA LOI SUR L'HYMNE NATIONAL

PROJET DE LOI MODIFICATIF—DEUXIÈME LECTURE—SUITE DU DÉBAT

L'ordre du jour appelle:

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Poy, appuyée par l'honorable sénateur Banks, tendant à la deuxième lecture du projet de loi S-3, Loi modifiant la Loi sur l'hymne national afin d'englober tous les Canadiens et Canadiennes.—(L'honorable sénateur Spivak).

L'honorable Mira Spivak: Honorables sénateurs, je suis heureuse de participer au débat sur le projet de loi S-3. Je serai brève parce qu'il y a déjà eu un débat considérable au cours de la dernière session parlementaire sur les principes sous-jacents du projet de loi. Vous avez entendu à peu près tout ce qu'il était possible d'entendre.

Lorsque la teneur du projet de loi a été présentée dans le cadre d'une interpellation, j'ai parlé en faveur du changement petit, mais important que le projet de loi à l'étude propose d'apporter à notre hymne national. Ce ne sont pas tous les Canadiens qui voient la nécessité d'apporter ce changement, mais ceux qui le souhaitent le plus sont ceux qui se sentent exclus à cause du libellé actuel. Les jeunes femmes les meilleures et les plus brillantes de notre pays veulent que notre hymne national englobe explicitement tout le monde.

Le projet de loi à l'étude sous-tend le principe de l'inclusion, un principe important dans l'histoire de notre pays. Ce principe est important aujourd'hui et il le demeurera dans l'avenir. Ce ne sont pas la langue, la religion ni la race qui déterminent qui est Canadien et qui ne l'est pas.

Depuis la fondation de notre pays, nous avons accueilli de nouveaux Canadiens et célébré la richesse issue de la diversité. Les femmes ont toutefois dû lutter plus longtemps pour être incluses dans notre société, que ce soit en obtenant le droit de vote ou la reconnaissance complète de leur statut sur le plan juridique ou en obtenant l'équité en matière d'emploi. À l'extérieur de cette enceinte, il y a une merveilleuse statue qui rappelle la célèbre affaire «personne» — celle qui a permis à des femmes d'acquérir un statut, grâce à leur lutte pour obtenir le droit d'être nommées au Sénat.

Honorables sénateurs, le moment est donc venu d'apporter un changement mineur à une autre tradition. Le moment est venu de remplacer l'expression «thy sons» par des mots qui disent clairement aux jeunes femmes qu'elles ont autant la nationalité canadienne et qu'elles sont aussi importantes que leurs homologues masculins. Le moment est venu de les inclure. Nous avons abondamment discuté des principes, et je pense que le moment est maintenant venu de renvoyer la question à un comité pour qu'il l'étudie en détail. J'espère que cela ne tardera pas.

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, le sénateur Poy demande à prendre la parole. C'est sa motion qui est à l'étude. Je dois informer les honorables sénateurs que si le sénateur Poy prend maintenant la parole, son discours aura pour effet de clore le débat.

(Sur la motion du sénateur Stratton, le débat est ajourné.)

[Français]

RÉGIE INTERNE, BUDGETS ET ADMINISTRATION

LE SIXIÈME RAPPORT DU COMITÉ—AJOURNEMENT DU DÉBAT

Le Sénat passe à l'étude du sixième rapport du Comité permanent de la régie interne, des budgets et de l'administration (prévisions budgétaires du Sénat pour 2003-2004), présenté au Sénat le 10 décembre 2002.—(L'honorable sénateur Bacon).

L'honorable Lise Bacon: Honorables sénateurs, le budget proposé du Sénat pour l'exercice 2003-2004, s'élève à 67 032 050 $, soit une augmentation de 3 131 200 $ par rapport au Budget principal des dépenses de 2002-2003, qui était de 63 900 850 $.

[Traduction]

Le Budget principal des dépenses a été établi en fonction des politiques annoncées par le gouvernement dans le discours du Trône. Le gouvernement a d'ailleurs profité de ce discours pour mettre en garde les différents ministères et services gouvernementaux, et les inviter à se montrer prudents et à vivre selon leurs moyens. Il en a également profité pour dire qu'il réaffectera ses ressources en fonction de ses priorités les plus importantes et de nouveaux objectifs.

Les sénateurs conviendront que le message est clair: les nouveaux besoins devront être financés à partir des crédits existants, après réaffectation des ressources. Dans la mesure du possible, ce budget reflète les attentes du gouvernement. On a procédé à une certaine réaffectation des ressources internes, même si les ressources du Sénat nous laissent une faible marge de manoeuvre.

En fait, nous avons besoin de 90 p. 100 des crédits disponibles pour nos dépenses qui sont courantes, certes, mais qui, surtout, continuent de grimper. Je songe aux indemnités versées aux sénateurs, à la rémunération des employés, aux cotisations aux régimes de pension et autres régimes d'indemnisation, au coût des transports et des communications, et au coût des services des chercheurs et autres services professionnels auxquels nous faisons appel. Les 10 p. 100 restants servent à payer l'acquisition de machines, d'équipements et de fournitures, à payer des réparations, des services de maintenance, et à verser des subventions et autres contributions.

[Français]

Honorables sénateurs, je voudrais revenir brièvement sur les réalisations du Sénat au cours des derniers mois. Le Sénat a produit des rapports exhaustifs sur des questions très importantes pour les Canadiens.

[Traduction]

Je songe aux rapports de certains comités, notamment à l'étude sur le système de soins de santé au Canada réalisée par le Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie, aux rapports du Comité sénatorial permanent de la sécurité nationale et de la défense, d'une part, sur l'état de préparation du gouvernement sur les plans de la sécurité et de la défense et, d'autre part, sur le financement du secteur militaire, au rapport du Comité sénatorial spécial sur les drogues illicites, à l'étude préalable approfondie entreprise par un autre comité sénatorial spécial sur le projet de loi C-36, la mesure législative antiterroriste du gouvernement, et au rapport sur les réacteurs nucléaires du Canada présenté par le Comité sénatorial permanent de l'énergie, de l'environnement et des ressources naturelles.

[Français]

Ces rapports et d'autres rapports de comité sénatoriaux ont contribué à rehausser la qualité des débats sur ces questions importantes et ont fait en sorte que le Sénat reçoive toute l'attention qu'il mérite.

[Traduction]

En effet, au Sénat, le niveau d'activité est intense. Le Sénat a siégé plus souvent que la majorité des assemblées législatives provinciales. Toutefois, bien que le Sénat ait siégé 80 jours, les comités sénatoriaux ont siégé 120 jours. Par surcroît, au cours du dernier exercice financier, le travail des comités a considérablement augmenté, et a dépassé la moyenne des cinq années précédentes. Les comités ont tenu 544 séances, ce qui représente une augmentation de 33 p. 100 et ont siégé pendant 1 117 heures, soit une augmentation de 39 p. 100. Nous devrions tous être fiers de notre rendement.

[Français]

Honorables sénateurs, la situation à laquelle nous faisons face vous ayant été présentée et l'information pertinente ayant été fournie, il est recommandé que le Sénat propose une augmentation de 3 131 200 $, qui sera utilisée en entier pour financer des besoins non discrétionnaires qui ne pourraient être financés à l'interne.

[Traduction]

Toutefois, compte tenu des mesures d'austérité touchant l'ensemble du gouvernement, de nombreuses demandes ne seront pas financées. Je félicite l'administration d'avoir relevé le défi des restrictions, et je compte que mes collègues sénateurs relèveront eux aussi ce défi.

Honorables sénateurs, pour que nous puissions poursuivre notre bon travail, je vous demande d'appuyer l'adoption du rapport.

(1740)

L'honorable Ione Christensen: J'ai une question à poser à la présidente du comité, mais avant de le faire, je voudrais remercier le comité de son travail assidu et de son excellent rapport.

Si on examine la partie du budget qui concerne les comités, on constate qu'il est proposé une hausse de 65 000 $, soit 0,1 p. 100. Or, nous recommandons la création de trois nouveaux comités. Il y a maintenant 17 comités et il est certainement nécessaire d'en créer un autre pour la culture et le patrimoine.

Il semble que nous n'arrivons même pas à répondre aux besoins de nos comités. Comment en êtes-vous venus au montant de 65 000 $ pour répondre aux besoins des comités?

Nos comités font de l'excellent travail non seulement en examinant les mesures législatives, mais encore en faisant les études qui lui sont demandées.

Le sénateur Bacon: Le montant de 65 000 $ est destiné aux associations parlementaires, et non aux comités.

Le sénateur Christensen: N'est-il pas destiné aux comités et aux associations parlementaires?

Le sénateur Bacon: Non, seulement aux associations.

L'honorable Tommy Banks: Honorables sénateurs, j'ai une question à poser à la présidente du comité, madame le sénateur Bacon, et je répète ce que le sénateur Christensen vient de dire. Je pense que c'est le sénateur Bacon qui a la tâche la plus difficile, parce qu'elle entend toutes les demandes de fonds des sénateurs et leurs lamentations quand elle les leur refuse.

Cependant, comme le sénateur Bacon l'a dit, les éloges que reçoit maintenant le Sénat sont largement attribuables au travail de ses comités. Il n'y a pas de hausse substantielle dans le budget des comités; en fait, je pense qu'il n'y a pas à proprement parler de hausse du budget des comités dans la motion proposée.

Comme madame le sénateur l'a dit, à cause des restrictions, nombre de demandes et de besoins impératifs ne seront pas financés.

La présidente du comité a expliqué soigneusement la politique de rigueur énoncée dans le discours du Trône. D'autres considérations sont-elles entrées en ligne de compte dans l'établissement de cette augmentation qui, à ma connaissance, devrait être de 4,9 p. 100 environ, soit de 63 900 $ à 67 000 $ et 32 000 $? Ne serait-il pas toujours plus prudent de faire en sorte que le Sénat rattrape son retard dans le financement des comités?

Je me demande si madame le sénateur a entendu comme moi ce qui a été dit au caucus national, cette semaine...

Le sénateur Stratton: Oups, attention!

Le sénateur Banks: Je vous demande pardon. Manifestement pas. Madame le sénateur devrait peut-être lire le Globe and Mail.

Le sénateur Lynch-Staunton: Que n'a-t-elle pas dit?

Le sénateur Banks: J'ai des raisons de croire que l'autre endroit verra ses demandes de financement de ses comités acceptées et que les députés qui auront besoin de plus d'argent pour mener leurs recherches s'en verront accorder.

La somme dont dispose l'autre endroit comme budget de base s'est accrue avec les années par l'ajout de certaines dépenses d'établissement qui, une fois ajoutées, continuent de faire partie du budget de base. Il y a une énorme différence entre le travail que fait cet endroit et celui qui est accompli à l'autre endroit. Comme dans le cas des hausses salariales, il n'y a pas de bon moment pour soulever la question; aucun moment où cela serait plus opportun ou moins évident. J'estime que c'est justement à tous les comités sénatoriaux, et non seulement à ceux que le sénateur a cités à juste titre, que le Sénat accomplit une partie de son travail le plus important. Ce travail a certes considérablement amélioré l'image du Sénat ces dernières années.

Madame le sénateur et son comité ont-ils tenu compte de cela lorsqu'ils ont établi un budget qui ne prévoit pour ainsi dire aucune hausse de dépenses pour le travail des comités?

Cela m'amène à ma seconde question, qui est très précise. Au chapitre D de la documentation qui nous a été remise hier soir, il est question d'une somme de 700 000 $ pour financer des recherches additionnelles des bureaux de sénateurs. Cela veut-il dire que chacun d'entre nous recevra plus ou moins 7 000 $ à ajouter au budget général de son bureau?

Le sénateur Bacon: Honorables sénateurs, je dois dire que les sommes affectées aux divers comités en début d'exercice ne sont habituellement pas totalement dépensées. Environ 70 p. 100 des budgets des comités sont épuisés en fin d'exercice, ce qui fait que 30 p. 100 des sommes ne sont pas dépensées. C'est pour cette raison que nous avons demandé que l'on réaffecte ces crédits aux comités qui en auraient besoin pour terminer leurs études.

Je dois prendre note de la deuxième question du sénateur afin de lui fournir une réponse adéquate dès que possible.

J'ajoute que je ne compare pas le Sénat à la Chambre des communes. Je crois que nous faisons de notre mieux en fonction de nos moyens, comme nous avons toujours fait. Nous méritons des félicitations pour les travaux et les rapports de nos comités.

Je pense que nous pouvons faire du bon travail avec les ressources que nous avons. L'année prochaine sera difficile pour tous, et j'espère que les sénateurs comprendront que nous devrons parfois rejeter leur demande de crédits supplémentaires dans un souci de compression des dépenses.

Son Honneur le Président: La période de 15 minutes allouée au sénateur Bacon est écoulée.

L'honorable John Lynch-Staunton (leader de l'opposition): Je comptais intervenir, mais je vais demander au sénateur de réfléchir à mes suggestions.

[Français]

Je voudrais féliciter la présidente du comité, sinon lui offrir mes condoléances pour avoir accepté la présidence du Comité sénatorial permanent de la régie interne, des budgets et de l'administration. Ce n'est pas le comité le plus facile et je félicite tous les membres du comité qui ont accepté d'en faire partie dans le passé et ceux qui acceptent d'y œuvrer avec l'honorable sénateur Bacon. Je crois qu'ils sont sur la bonne voie.

[Traduction]

J'aimerais faire quelques commentaires sur le budget. Il se peut que je répète des choses que j'ai déjà dites à ce sujet. J'espère que le comité sera plus disposé à écouter ce que moi et d'autres avons affirmé, c'est-à-dire que nous devrions resserrer la discipline du processus budgétaire portant sur les comités. Nous avons reçu un grand nombre de propositions d'études spéciales, mais notre budget est très limité.

(1750)

Nous aimerions consentir à toutes, mais nous devrons en décevoir certains. Nous devrons faire preuve de plus de discipline et peut-être même nous montrer durs. Je suggère qu'avant le début de chaque exercice financier, les comités qui veulent faire une étude au cours du prochain exercice, et pas au-delà, transmettent leurs propositions au Comité de la régie interne. Puis, on en choisirait seulement une, deux ou trois, en tirant au sort ou en demandant au comité de trancher. À l'heure actuelle, il arrive qu'il y ait jusqu'à sept études qui soient menées en même temps, parfois par le même comité. Nous grevons nos ressources et notre budget. Bon nombre de ces comités demandent à remettre leur rapport dans des délais de un à trois ans. Nous engageons donc les ressources du Sénat pour une longue période, sans même savoir si elles seront disponibles.

Ma principale suggestion est que les comités aillent devant le Comité de la régie interne pour présenter leur budget, dont ils ne peuvent pas dévier, avant de faire approuver un mandat au Sénat. Une fois qu'ils auraient obtenu l'approbation du Comité de la régie interne, ils pourraient faire approuver un mandat au Sénat. De cette façon, le Sénat connaîtrait de façon exacte les coûts, les délais et les buts visés. Actuellement, nous approuvons les mandats d'abord. Par exemple, le sénateur Day propose une étude sur les médias. Je vais voter contre cette proposition parce que je n'ai pas assez d'information au sujet des coûts de cette étude d'ici mars prochain et que je n'ai pas d'idée de ce que cela coûtera l'année suivante. Même si j'avais ces chiffres, je ne sais pas si notre budget peut absorber ces coûts. Cette raison suffit à elle seule pour que je n'appuie pas cette proposition, en dépit de la validité de l'étude. Je voudrais qu'on accorde plus d'importance à la question monétaire avant l'approbation des mandats plutôt qu'après.

Honorables sénateurs, je suis également préoccupé par le fait que de plus en plus de comités demandent à embaucher des consultants en communications, des éditeurs et des recherchistes de l'extérieur, à différents taux, même si je ne vais pas aborder la question des taux. Il fut un temps où nous pouvions répondre à ces besoins à l'interne, mais nous semblons maintenant faire appel de plus en plus souvent à des gens de l'extérieur. La Bibliothèque du Parlement a toujours été, et est encore, une source extraordinaire pour la recherche, et nous avons aussi un service des communications. Je ne sais pas très bien ce qu'il fait, mais j'aimerais voir un plus grand nombre de ces consultants sur la liste de nos employés permanents afin qu'ils aient une meilleure connaissance de ce que fait le Sénat et de la façon dont fonctionnent les comités. De cette façon, nous serions capables de faire passer notre message de façon constante.

Actuellement, notre message ne sort que lorsque le rapport est prêt à être déposé, et c'est là que les consultants en communications et les médias interviennent. Puis tout s'estompe à nouveau. Il existe une lacune au niveau de la connaissance du travail qui mène au résultat, et non au niveau de la connaissance du résultat. Je voudrais voir un système où nous pourrions informer le public de façon constante au sujet des travaux de nos comités et non seulement au sujet des résultats de certaines études.

Enfin, il y a un point qui n'a pas été proposé faute de fonds: «La mise en oeuvre d'un service armé». Je vais vous lire la proposition:

Comme l'a approuvé le Comité de la régie interne, des budgets et de l'administration en juin 2000 et en octobre 2001, le service de protection avait été autorisé à créer une branche armée.

C'est un changement radical dans la sécurité de notre institution. Même si le Comité de la régie interne appuie cela, j'espère qu'aucune autre mesure ne sera prise tant que tous les sénateurs n'auront pas donné leur opinion là-dessus. Cette suggestion est loin d'être unanime. Je suis ouvert là-dessus.

[Français]

Dans mon caucus, les opinions sont partagées. De l'autre côté, je n'en sais rien.

[Traduction]

Le fait est que dans l'ordre du jour de la réunion du Comité de la régie interne l'autre jour, ce point est indiqué non pas pour cette année, mais peut-être pour une année future.

Le sénateur Bacon: Nous n'avons pas encore pris une décision ferme sur le fait d'armer les gardes au Sénat. Nous discutons de sécurité, mais aucune décision n'a été prise à ce sujet.

En ce qui concerne les autres sujets, j'accueille avec plaisir les suggestions du leader de l'opposition. Je dois dire que nous avons eu une bonne discussion mardi dernier sur la modernisation de nos procédures. J'entends travailler en étroite collaboration avec les membres du Comité du Règlement pour modifier le Règlement afin que les présidents de comité nous soumettent leurs propositions de financement avant de chercher à obtenir leur mandat du Sénat. Si nous n'avons pas les fonds, les comités devront simplement attendre une autre année. Cela fait partie de nos discussions constantes au niveau du comité.

Le sénateur Lynch-Staunton: La note 13, dans la partie de l'ordre du jour portant sur les prévisions budgétaires, dit:

En conséquence, des gardes armés, en civil, seraient déployés à toutes les principales entrées du Sénat, aux audiences publiques des comités et aux postes de garde et escorteraient les hautes personnalités à l'intérieur de l'enceinte du Sénat.

Si c'est une suggestion, c'est une chose, mais après avoir lu cela, c'est plus qu'une suggestion, c'est une décision déjà prise par le Comité de la régie interne.

Le sénateur Banks: Honorables sénateurs, je constate que l'opposition s'est reportée à des documents, que je n'ai pas vus. Quels sont ces documents? D'où viennent-ils? Puis-je les avoir?

Le sénateur Lynch-Staunton: Honorables sénateurs, le document auquel je me reporte est l'ordre du jour de la réunion du 10 décembre 2002 du Comité de la régie interne. Je communique peut- être une information confidentielle, mais il se trouve que le comité a approuvé la présence de gardiens armés. S'il ne l'a pas approuvée, pourquoi les chiffres figurent-ils dans un document que je ne devrais peut-être pas être en train de lire? Je m'en excuse, mais je ne vois pas de mention «confidentiel» sur le document.

Le sénateur Banks: Honorables sénateurs, le leader de l'opposition peut-il nous dire si des documents venant d'un comité du Sénat pourraient être secrets pour les sénateurs?

Le sénateur Lynch-Staunton: Sénateur Banks, tout sénateur peut participer à toute réunion d'un comité et recevoir tous les documents qui y circulent, qu'il en soit membre ou non.

Le sénateur Banks: Si je demandais ce document au président d'un comité, aurais-je le droit de l'obtenir?

Le sénateur Lynch-Staunton: Les leaders et leaders adjoints des deux côtés de la Chambre sont membres d'office des comités, de sorte qu'ils reçoivent automatiquement l'ordre du jour. Un sénateur qui n'est pas membre du comité doit se rendre sur place si le document est confidentiel. Ce document porte la mention «à huis clos», mais il ne porte pas la mention «confidentiel». Si c'est un document public, nous avons tous le droit de l'obtenir.

L'honorable Joan Fraser: J'ai une question s'adressant au leader de l'opposition. J'ai énormément de sympathie pour son point de vue selon lequel nous devrions analyser les moyens à notre disposition avant de prendre des décisions. Lorsque je suis arrivée au Sénat, j'ai été étonnée de constater le mode de fonctionnement du système. Toutefois, comme nous l'avons constaté dans le cadre des travaux des comités pendant la dernière année, il semble fonctionner de façon remarquable.

J'ai été déçue d'apprendre que l'honorable leader de l'opposition votera contre l'étude portant sur les médias simplement parce que, si j'ai bien compris ce qu'il a dit, le Comité des transports suit le Règlement existant: obtenir un ordre de renvoi du Sénat; faire approuver un budget par le comité; se présenter devant le Comité de la régie interne afin d'obtenir des fonds. Je suis ravie d'entendre le sénateur Bacon dire qu'elle aimerait ajuster le système, mais cela prend aussi du temps. Ai-je mal compris? Avez-vous dit que nous ne devrions pas suivre les règles au Comité des transports?

(1800)

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, il est 18 heures. Vous plaît-il de ne pas tenir compte de l'heure?

L'honorable Noël A. Kinsella (leader adjoint de l'opposition): Je donnerais mon consentement afin de pouvoir terminer l'étude de cette affaire.

Son Honneur le Président: Un accord conditionnel est donné de ne pas tenir compte de l'heure, pour que nous puissions terminer l'étude de l'affaire en cours. Le Sénat est-il d'accord?

Des voix: D'accord.

Le sénateur Lynch-Staunton: Pour répondre au sénateur Fraser, j'ai cru comprendre, pendant les discussions sur le budget, que nous ne disposons pas, pour l'année financière en cours, de fonds pour des études supplémentaires ou quelque autre activité qui sort de l'ordinaire. Par ailleurs, quand viendra le moment de débattre la proposition comme telle, j'aurai de nombreuses questions à poser au sujet de sa formulation. Ce sera cependant l'objet d'un débat ultérieur. Mon propos porte actuellement sur les priorités et la disponibilité de fonds, et je crois savoir que nous n'avons pas de fonds pour des études spéciales.

Son Honneur le Président: Avez-vous des questions, sénateur Stratton?

L'honorable Terry Stratton: Non. Je voudrais faire une brève déclaration au sujet du budget.

Son Honneur le Président: Sénateur LaPierre, une question?

L'honorable Laurier L. LaPierre: Je désire participer au débat. Est- ce possible, ou est-il terminé?

Son Honneur le Président: Nous entendrons le point de vue de tous.

L'honorable E. Leo Kolber: Puis-je demander l'autorisation de présenter les motions inscrites en mon nom?

Son Honneur le Président: Nous pourrions y venir. Il est plutôt inhabituel d'avoir un consentement conditionnel, mais les règles nous le permettent, pourvu que la demande de consentement soit claire et bien comprise.

Lorsque j'ai demandé si les honorables sénateurs acceptaient de ne pas tenir compte de l'heure, j'ai compris, de la réponse du sénateur Kinsella, qu'il était d'accord pour que nous procédions de la sorte afin de terminer l'étude de cette affaire. Est-ce bien cela, sénateur Kinsella?

Le sénateur Kinsella: C'est ce que j'ai dit, honorables sénateurs, mais uniquement parce que le gouvernement nous a témoigné une courtoisie que nous avons beaucoup appréciée lorsque nous avons tenu notre fête de Noël; nous essayons de lui rendre la pareille. Si toutefois il y a un problème, je m'empresserai de retirer la condition que j'ai posée. Je m'en remets au leader adjoint du gouvernement.

[Français]

L'honorable Fernand Robichaud (leader adjoint du gouvernement): Honorables sénateurs, je suis pris entre la mer et l'eau douce. Nous devrions traiter de certains articles, entre autres, des budgets des comités, qui sont inscrits au Feuilleton depuis un certain temps. Certains sénateurs me demandent si nous siégerons longtemps. J'aimerais terminer l'article présentement à l'étude et faire ce qui est le plus important le plus rapidement possible. J'espère obtenir votre coopération. Nous ferons face au même problème demain. Je propose de ne pas voir l'horloge et de terminer le plus tôt possible.

Le sénateur LaPierre: Honorables sénateurs, est-ce que cela signifie que nous devrons étudier tout l'ordre du jour? Devrons-nous passer à travers toutes les pages de cet ordre du jour? Nous en sommes à la page 11 et nous continuerons jusqu'à la page 22. Nous pourrons discuter de tous les articles inscrits à ces pages si nous le désirons? Pourquoi les autres membres du Sénat n'auraient-ils pas le droit de parler?

[Traduction]

Son Honneur le Président: La question met en relief l'une des difficultés de ne pas avoir une réponse par oui ou par non. L'échange entre les deux sénateurs responsables en premier lieu des travaux du Sénat, à savoir les leaders adjoints, donnent l'impression qu'ils comprennent, par exemple, le problème du sénateur Kolber, qui attend de pouvoir proposer ses motions.

Il y a accord pour aller de l'avant, c'est-à-dire pour ne pas tenir compte de l'heure, pour traiter de l'affaire dont débattent les sénateurs. Toutefois, je ne suis pas trop sûr de la manière dont nous pourrions expédier toutes les affaires inscrites au Feuilleton sans procéder article par article. Peut-être serait-il utile aux leaders que les sénateurs qui ont l'intention d'intervenir au sujet des articles inscrits au Feuilleton le disent maintenant pour qu'ils sachent combien de temps ça va prendre.

L'honorable Herbert O. Sparrow: Je pensais que le leader adjoint de l'opposition avait convenu de ne pas tenir compte de l'heure au sujet de cette affaire. Je crois que le Sénat a donné son accord. Et voici que nous changeons cette décision, quelle qu'en soit la raison, et peut-être est-elle importante. Son Honneur vient de demander aux sénateurs de dire s'ils ont l'intention d'intervenir au sujet des articles inscrits au Feuilleton. Je ne crois pas que cela figure dans le Règlement du Sénat et je ne donne pas l'autorisation. Toutefois, si nous prolongeons la séance, tous les sénateurs qui désirent intervenir devraient pouvoir le faire. Cela a toujours été le cas.

Son Honneur le Président: Je suppose que cela répond à la question, honorables sénateurs. L'autorisation est accordée seulement pour l'article dont le Sénat débat actuellement. Le sénateur Sparrow a résolu le problème pour nous.

Le sénateur Kinsella: D'accord.

L'honorable Eymard G. Corbin: Je pensais que le sénateur Kinsella avait un peu battu en retraite. Nous avons tous entendu le sénateur Kolber demander l'autorisation du Sénat. Je ne suis pas certain qu'elle ait été accordée, mais il semble que ce soit ce que le sénateur Robichaud appelait «une question importante». Pourquoi, Votre Honneur, ne pas demander au Sénat de permettre au sénateur Kolber de proposer sa motion maintenant, à la suite de quoi nous pourrions peut-être nous entendre pour que tous les autres articles restent inscrits au Feuilleton?

Son Honneur le Président: J'aimerais pouvoir accéder à la requête du sénateur Corbin, mais il y a un sénateur qui dit que soit nous accordons l'autorisation, soit nous ne l'accordons pas, si j'ai bien compris le sénateur Sparrow. L'autorisation ne peut être accordée que si personne n'est en désaccord et j'ai entendu quelqu'un exprimer son désaccord.

Le sénateur Corbin: Son Honneur pourrait-il poser la question de nouveau?

Son Honneur le Président: Oui. Si je comprends bien, et le sénateur Sparrow pourra me corriger si j'ai tort, on reproche au Président de s'ingérer dans les travaux du Sénat en voulant déterminer ce qu'il nous reste à faire aujourd'hui. Le sénateur a raison de dire que cela n'est pas prévu au Règlement. J'aurais tort de m'immiscer davantage dans le débat.

Le sénateur Sparrow est un de nos collègues et si, comme je le pense, il refuse de donner au Sénat la permission d'étudier d'autres affaires après celle dont nous sommes saisis, alors je dois tenir compte de son objection et cela met fin le débat.

Je crois avoir bien saisi la position du sénateur Sparrow. Est-ce bien cela?

Le sénateur Sparrow: Nous pourrions régler la question si, à son tour, le sénateur Kolber demandait la permission de présenter sa motion. Je donnerais au Sénat la permission d'étudier cette motion, mais cette motion seulement, si le leader adjoint de l'opposition a annulé son vote, ce qu'il n'a pas le droit de faire, je pense, mais je lui accorderai ce droit dans les circonstances.

Son Honneur le Président: Pour que nous comprenions tous la situation, honorables sénateurs, je me demande si nous pourrions compléter l'étude de l'affaire dont nous sommes saisis et ne pas tenir compte de l'heure. Ensuite, lorsque l'étude de cette affaire sera terminée, je demanderai de nouveau au Sénat la permission de ne pas tenir compte de l'heure. S'il n'y a pas d'objection, le sénateur Kolber pourrait à son tour demander la permission du Sénat pour ne pas tenir compte de l'heure et traiter de ses questions. La permission est-elle accordée, honorables sénateurs, de procéder de cette façon?

Le sénateur LaPierre: Je voudrais conclure en proposant l'ajournement de ce débat en mon nom. Je désire aborder cette question. Toutes ces règles et tous ces règlements me brouillent un peu les idées. Je ne crois pas qu'il soit juste que nous choisissions qui peut prendre la parole et qui ne peut le faire.

(1810)

Une voix: C'est contraire au Règlement!

Le sénateur LaPierre: Qu'est-ce qui est contraire au Règlement? Que je m'assoie? Je suis debout. Je répète ce que j'ai dit: je propose d'ajourner cet article en mon nom.

Son Honneur le Président: L'honorable sénateur LaPierre, appuyé par l'honorable sénateur Hubley, propose que le débat soit ajourné jusqu'à la prochaine séance du Sénat. Honorables sénateurs, vous plaît-il d'adopter la motion?

Des voix: Non.

Son Honneur le Président: Que les sénateurs qui sont en faveur de la motion d'ajournement veuillent bien dire oui.

Des voix: Oui.

Son Honneur le Président: Que les sénateurs qui sont contre la motion veuillent bien dire non.

Des voix: Non.

Son Honneur le Président: À mon avis, il y a égalité, honorables sénateurs. Je dois donc poser la question à nouveau: Que les sénateurs qui sont en faveur de la motion d'ajournement veuillent bien dire oui.

Des voix: Oui.

Son Honneur le Président: Que les sénateurs qui sont contre la motion veuillent bien dire non.

Des voix: Non.

Son Honneur le Président: À mon avis, les oui l'emportent.

(La motion est adoptée avec dissidence.)

LES TRAVAUX DU SÉNAT

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, vous pouvez maintenant demander que l'on ne voit pas l'heure, afin que l'on puisse étudier un autre article.

L'honorable E. Leo Kolber: Je demande que l'on ne voit pas l'heure pour présenter mes trois motions.

Son Honneur le Président: La permission est-elle accordée, honorables sénateurs?

Des voix: D'accord.

Son Honneur le Président: Un sénateur semble ne pas vouloir accorder la permission.

L'honorable Fernand Robichaud (leader adjoint du gouvernement): J'accepte d'accorder la permission. Cependant, il doit être entendu que les autres articles seront reportés et garderont leur place au Feuilleton. Ils ne devraient pas être assujettis au compte des jours depuis lesquels ces articles figurent au Feuilleton.

Son Honneur le Président: Est-ce d'accord, honorables sénateurs,?

Des voix: D'accord.

BANQUES ET COMMERCE

BUDGET—ADOPTION DU RAPPORT DU COMITÉ SUR L'ÉTUDE DE LA SITUATION ACTUELLE DU RÉGIME FINANCIER CANADIEN ET INTERNATIONAL

Le Sénat passe à l'étude du troisième rapport du Comité sénatorial permanent des banques et du commerce (Budget—étude sur le régime financier canadien et international), présenté au Sénat le 9 décembre 2002.—(L'honorable sénateur Kolber).

L'honorable E. Leo Kolber propose: Que le rapport soit adopté.

(La motion est adoptée, et le rapport est adopté.)

BUDGET—ADOPTION DU RAPPORT DU COMITÉ SUR L'ADMINISTRATION ET L'APPLICATION DE LA LOI SUR LA FAILLITE ET L'INSOLVABILITÉ
ET DE LA LOI SUR LES ARRANGEMENTS AVEC LES CRÉANCIERS DES COMPAGNIES

Le Sénat procède à l'étude du quatrième rapport du Comité sénatorial permanent des banques et du commerce (Budget—étude de la Loi sur la faillite et l'insolvabilité), présenté au Sénat le 9 décembre 2002.—(L'honorable sénateur Kolber).

L'honorable E. Leo Kolber propose: Que le rapport soit adopté.

(La motion est adoptée, et le rapport est adopté.)

BUDGET—ADOPTION DU RAPPORT DU COMITÉ SUR LES RÉPERCUSSIONS EN MATIÈRE D'INTÉRÊT PUBLIC DE LA FUSION DES GRANDES BANQUES

Le Sénat passe à l'étude du cinquième rapport du Comité sénatorial permanent des banques et du commerce (Budget—étude sur les répercussions en matière d'intérêt public de la fusion des banques), présenté au Sénat le 9 décembre 2002.—(L'honorable sénateur Kolber).

L'honorable E. Leo Kolber propose: Que le rapport soit adopté.

(La motion est adoptée, et le rapport est adopté.)

LES TRAVAUX DU SÉNAT

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, comme il est 18 heures, conformément au Règlement du Sénat du Canada, le Sénat ajourne automatiquement ses travaux, si je comprends bien.

[Français]

L'honorable Fernand Robichaud (leader adjoint du gouvernement): Honorables sénateurs, ayant eu la permission de reporter à la prochaine séance tous les points qui n'ont pas été abordés, je propose l'ajournement du Sénat.

Son Honneur le Président: Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.

(La motion est adoptée.)

(Le Sénat s'ajourne au jeudi 12 décembre 2002, à 13 h 30.)


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