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Débats du Sénat (Hansard)

Débats du Sénat (hansard)

1re Session, 38e Législature,
Volume 142, Numéro 49

Le mercredi 13 avril 2005
L'honorable Daniel Hays, Président


 

 

LE SÉNAT

Le mercredi 13 avril 2005

La séance est ouverte à 13 h 30, le Président étant au fauteuil.

Prière.

[Traduction]

VISITEURS DE MARQUE

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, avant que nous n'entreprenions nos travaux d'aujourd'hui, j'ai le grand plaisir de vous signaler la présence à notre tribune d'un groupe de visiteurs de la Malaisie. Il s'agit de l'honorable Tan Sri Dato' Seri Dr Abdul Hamid Pawanteh, président du Sénat de la Malaisie, accompagné de son collègue, l'honorable sénateur Tuan Wong Foon Meng, président adjoint du Sénat, de l'honorable sénateur Dato' Benedict Bujan Tembak, de l'honorable sénateur Tuan Osman bin Bungsu, de l'honorable sénateur Puan Nosimah binti Hashim et de l'honorable Datuk Zamani Sulaiman, secrétaire du Sénat, ainsi que de Encik Salleh bin Abas, secrétaire de la délégation.

Je suis également heureux de vous signaler la présence de Son Excellence Dennis Ignatius, ambassadeur de la Malaisie au Canada.

Je vous souhaite la bienvenue au Sénat.

Des voix : Bravo!


DÉCLARATIONS DE SÉNATEURS

LA SEMAINE NATIONALE DE L'ACTION BÉNÉVOLE

L'honorable Terry M. Mercer : Honorables sénateurs, en tant que président de l'Association of Fundraising Professionals Foundation for Philanthropy in Canada, je suis honoré de voir que la semaine prochaine, le gouvernement fédéral célébrera la Semaine nationale de l'action bénévole. C'est l'occasion pour tous les Canadiens d'honorer leurs bénévoles et de reconnaître que ce don de soi aide à faire de notre pays un endroit où il fait mieux vivre.

Plus de 6,5 millions de Canadiens font activement du bénévolat dans leurs collectivités. Tous les Canadiens reconnaissent que l'aide apportée aux gens dans le besoin est le fondement d'une société compatissante. Les bénévoles aident à façonner le paysage culturel de notre nation, mais ils tirent également de nombreux avantages de l'interaction sociale qui se produit.

Honorables sénateurs, collectivement, les bénévoles donnent plus de deux milliards d'heures de leur temps annuellement, ce qui équivaut à un million d'emplois à temps plein. C'est une force essentielle que nous devons célébrer et encourager. Cependant, il ne faut pas tenir pour acquis cette générosité canadienne. Nous devons promouvoir davantage la valeur du bénévolat et encourager un plus grand nombre de Canadiens à jouer ce rôle.

La Semaine nationale de l'action bénévole donne la possibilité à tous les Canadiens de reconnaître l'importance du bénévolat. Cependant, nous ne devrions pas simplement célébrer ce phénomène la semaine prochaine, mais toutes les semaines de l'année, car manifestement, ce qui importe dans le bénévolat, c'est vraiment la façon dont les Canadiens unissent leurs efforts pour bâtir des collectivités et pour travailler dans l'intérêt de la population. C'est vraiment l'histoire de la façon dont les Canadiens se définissent eux-mêmes.

Honorables sénateurs, je suis sûr que vous allez vous joindre à moi pour remercier et féliciter tous les bénévoles du Canada pour leur travail acharné et leur dévouement.

LE DÉCÈS DU PAPE JEAN-PAUL II

HOMMAGE

L'honorable John Buchanan : Honorables sénateurs, j'interviens pour parler brièvement du regretté pape Jean-Paul II.

J'ai eu le grand honneur et le privilège d'accueillir le pape en Nouvelle-Écosse en 1984. Avant la messe à grand déploiement célébrée sur le terrain communal de Halifax, je l'ai rencontré une deuxième fois et puis je lui ai adressé la parole également au moment où il quittait Halifax et nous avons pu lui faire nos adieux.

Quelques brèves anecdotes sont de mise. Avant l'arrivée du pape, monseigneur Hayes, archevêque de Halifax, avait fait savoir que le pape parlait couramment sept langues et pouvait mener une conversation dans trois ou quatre autres. Par conséquent, comme je l'avais déjà fait pour de nombreux visiteurs de la Nouvelle-Écosse, je l'ai accueilli à sa descente d'avion en lui disant ceci : « Welcome to Nova Scotia, bienvenue en Nouvelle-Écosse, cias mile failte. » Le sénateur Kirby se souviendra que c'était ma formule habituelle de bienvenue.

Alors, immédiatement, Sa Sainteté a répliqué : « En premier, c'était de l'anglais, et puis ensuite du français. » J'ai alors cru qu'il allait me demander quelle langue était la troisième, mais il a ajouté : « La troisième langue était le gaélique. » Il connaissait la langue gaélique. Comme je l'ai dit à Steve Murphy à la télévision la semaine dernière, « L'archevêque Hayes avait tout à fait raison, mais je ne pense pas qu'il savait que le pape connaissait également le gaélique. »

Le pape nous a rencontrés avant la messe à grand déploiement sur le terrain communal de Halifax, où 100 000 personnes s'étaient rassemblées sous la pluie et le vent. Mon épouse Mavis et moi-même étions assis à l'avant, devant l'immense estrade construite grâce à l'aide et à l'argent de la province de la Nouvelle-Écosse. Tout juste avant de monter sur l'estrade, le pape m'a demandé depuis combien de temps j'étais premier ministre. « Votre Sainteté, lui ai-je répondu, je suis premier ministre depuis six ans. J'ai été élu en 1978. » Et lui, l'œil pétillant et le sourire complice, m'a répondu en me regardant : « Je suis pape depuis six ans et j'ai été élu en 1978. »

(1340)

Le pape avait un grand sens de l'humour. À son départ, quelques personnes dont moi-même s'étaient mises en ligne pour lui dire au revoir à l'aéroport de Shearwater. Il a offert à ma femme un beau chapelet de perles et à moi, une croix en étain. J'ai dit : « J'espère que votre court séjour en Nouvelle-Écosse vous a plu, Votre Sainteté. » Il a commencé à s'éloigner après avoir serré des mains, puis il s'est retourné brusquement vers moi et m'a dit : « Monsieur le premier ministre, le temps, toute cette pluie et ce vent, qui en est responsable, vous ou moi? » J'ai immédiatement répondu : « Votre Sainteté, c'est moi qui suis à blâmer. » Le pape a embarqué dans l'avion. Le regretté évêque Power d'Antigonish s'est tourné alors vers moi et m'a dit : « Dieu merci, vous avez répondu ce qu'il fallait! »

[Français]

LA JOURNÉE MONDIALE DE LA SANTÉ

L'honorable Rose-Marie Losier-Cool : Honorables sénateurs, le 7 avril dernier marquait la Journée mondiale de la santé, sous le thème « Donnons sa chance à chaque mère et à chaque enfant ». Ce thème rappelle à quel point il y a encore, sur notre planète, trop de mères et de jeunes enfants dont la mort pourrait être évitée. Quatre-vingt-dix- neuf pour cent des décès surviennent en Afrique subsaharienne et en Asie, à raison d'une mort par minute.

Le Canada a aussi ses problèmes. Notre pays a un bon système de soins de santé et sa population est généralement instruite et aisée. Selon l'Agence de santé publique du Canada, les taux de mortalité maternelle et infantile ont considérablement baissé depuis 1920, mais le taux de maladies graves chez les mères reste encore élevé, à près de cinq femme malades pour 1 000 accouchements. Il meurt encore plus de cinq enfants de moins d'un an pour 1 000 accouchements, soit 85 p.100 des décès chez les enfants de moins de cinq ans.

En 2002, les principales causes de mortalité chez les nourrissons étaient les affections périnatales, le syndrome de mort subite du nourrisson, les anomalies congénitales et les blessures. Les décès par blessures sont causés par les moyens de transport, les noyades et les homicides. Le tabagisme et la consommation d'alcool demeurent préoccupants. Quatorze pour cent des mères canadiennes fumaient en 2003; quatorze pour cent ont consommé de l'alcool pendant leur grossesse. Et les inégalités sociales affectent 10 p. 100 des familles canadiennes dont les enfants naissent souvent avant terme et sont plus susceptibles de souffrir de blessures.

Les risques de complications à la grossesse et de problèmes de santé chez les nourrissons sont plus élevés chez les Autochtones. Le taux de mortalité infantile demeure environ deux fois plus élevé chez les nouveaux-nés des Premières nations que dans la population canadienne en général.

Heureusement, il y a de bonnes nouvelles pour nos enfants car l'amélioration et la spécialisation des soins de santé qui leur sont réservés ont substantiellement réduit leur taux de mortalité tant à la naissance qu'avant l'âge de cinq ans. Cependant, les problèmes demeurent pour nos femmes : les mères enfantent de plus en plus tard, avec les risques que nous connaissons pour leur grossesse; le recours accru à la procréation assistée engendre un taux croissant de naissances multiples et des problèmes en découlent. L'obésité est devenue une épidémie et affecte de plus en plus les grossesses; le taux de séropositivité chez les femmes est en hausse, passant de 12 p.100 en 1985 à 25 p. 100 en 2002. Il nous reste donc bien du chemin à parcourir pour la santé de nos mères et de nos enfants.

Je vous invite donc à vous impliquer dans ce dossier, à vous familiariser avec les dix interventions très simples que propose l'Agence de santé publique du Canada dans son tout récent rapport et à promouvoir ces interventions.

[Traduction]

LE BUDGET DE 2005

INTERPELLATION—LES PROPOS DU SÉNATEUR TKACHUK

L'honorable David Tkachuk : Honorables sénateurs, le 22 mars, dans un discours à cet endroit, j'ai parlé de la corruption. Le 23 mars, le leader du gouvernement au Sénat, dont le parti a plus qu'une vague connaissance du sujet, a gracieusement signalé une erreur que j'avais faite.

C'est la première occasion que j'ai de répondre à cela dans le cadre d'une déclaration, étant donné la relâche parlementaire et les hommages rendus hier au regretté pape Jean-Paul II.

Les libéraux sont très ferrés en matière de corruption, honorables sénateurs. Je leur rappelle humblement toutes les affaires ayant trait à leur pratique de la chose. J'ai fait une erreur en toute honnêteté. J'ai mal interprété le titre d'un article de journal qui disait ceci, et je cite : « Le scandale des commandites place le Canada au 12e rang sur une liste de 146 pays les plus corrompus. »

Vu les comptes rendus quotidiens émanant de la Commission Gomery, j'ai naturellement supposé que cette manchette signifiait que le Canada se classait au 12e rang parmi les pires pays. J'aurais dû être plus avisé. J'aurais dû savoir qu'il y a de nombreux pays dans le monde sous la direction de despotes cruels auxquels le gouvernement libéral peut se comparer avantageusement. Il est seulement dommage que ce gouvernement ne puisse se comparer à d'autres démocraties riches comme la Finlande, la Nouvelle- Zélande, le Danemark, l'Islande, la Suède, la Suisse, la Norvège, les Pays-Bas, l'Australie ou le Royaume-Uni, autant de pays qui se classent devant nous dans ce rapport.

Je m'excuse auprès des Canadiens des propos que j'ai tenus. Il semble toutefois qu'en la matière, j'ai eu une prémonition. Je vais laisser David Kilgour, ex-député libéral aux longs états de service, parler en mon nom. Pour avoir déjà été secrétaire d'État responsable de l'Amérique latine et de l'Afrique, M. Kilgour connaît bien la corruption qui sévit dans les pays du tiers monde. Voici ce qu'il a déclaré la semaine dernière à la suite des révélations récentes issues de la Commission Gomery :

[...] le Parti libéral passe maintenant « pour avoir regardé la confiance du public comme un vautour regarde un veau à l'agonie » [...]. « Le Canada, un pays du G7, se comporte comme une république bananière du Nord. Y a-t-il un pays qui semble davantage souffrir de corruption politique que le nôtre, à l'heure actuelle? »

Quel pays, en effet? Tout de même, j'aurais dû examiner de plus près le rapport d'où le journal tenait sa manchette. Dans cet esprit et en guise d'acte de contrition pour mon interprétation erronée, je me permets de lire un extrait du rapport où il est question du Canada.

L'année 2003-2004 aura marqué les esprits essentiellement pour l'onde de choc provoquée par la publication du rapport de la Vérificatrice Générale le plus accablant qui soit, où il est fait état d'affaires de détournement et d'utilisation abusive des deniers publics au sein du ministère des Travaux publics.

Le rapport se poursuit ainsi :

Mme Sheila Fraser a retrouvé peu de documents pour justifier la plupart des dépenses effectuées et a conclu que jusqu'à 100 millions de dollars canadiens (77,4 millions de dollars américains) avaient été détournés au profit d'agences publicitaires (certaines ayant des connexions politiques avec les pouvoirs publics) via des combines telles que les surfacturations, les fausses factures, les contrats factices et d'autres formes d'abus et de malversations.

Honorables sénateurs, Mme Fraser n'avait même pas découvert la moitié des faits.

L'ÎLE-DU-PRINCE-ÉDOUARD

CHARLOTTETOWN—LE CENT CINQUANTIÈME ANNIVERSAIRE

L'honorable Percy Downe : Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd'hui pour féliciter la ville de Charlottetown, qui célèbre le cent cinquantième anniversaire de sa constitution.

La magnifique petite ville de Charlottetown a une histoire longue et fascinante, de l'époque où elle fut baptisée en l'honneur de la reine Charlotte jusqu'à sa désignation en tant que capitale de l'Île-du- Prince-Édouard par le capitaine Samuel Holland en 1765. Charlottetown a été constituée officiellement en personne morale en 1855, il y a 150 ans.

La ville de Charlottetown recèle une foule d'histoires savoureuses et captivantes, que l'on pense aux pirates américains qui l'envahirent en 1775 et volèrent le Grand Sceau de l'Île-du-Prince-Édouard ou à la célèbre auteure, Lucy Maud Montgomery, native de cette province, qui fréquenta ses écoles.

Charlottetown est également reconnue pour avoir accueilli des visiteurs de marque au fil des ans, notamment l'écrivain irlandais Oscar Wilde ou, plus récemment, le prince Charles et sa première femme, la princesse Diana.

Cependant, les visiteurs les plus célèbres qu'a reçus Charlottetown sont sans doute les Pères de la Confédération qui, comme des historiens canadiens l'ont dit, parcoururent la rue Great George à Charlottetown et écrivirent les pages de l'histoire du Canada.

Les principes fondateurs de notre pays furent établis lors de la Conférence de Charlottetown, tenue en 1864, puis adoptés officiellement à celle de Québec. Ce sont dans nos deux villes fondatrices, Charlottetown et Québec, qu'eurent lieu les réunions ayant mené à la création du Canada.

Au fur et à mesure que notre pays a grandi au fil des ans, l'importance de la Conférence de Charlottetown a été reconnue à de nombreux égards. Province House, où se réunirent les Pères de la Confédération à Charlottetown, constitue aujourd'hui un lieu historique national. Chaque année, des visiteurs des quatre coins de monde viennent voir l'emplacement même où le Canada fut fondé.

(1350)

Juste à côté se trouve le Centre des arts de la Confédération et monument national en mémoire des Pères de la Confédération. On trouve également à Charlottetown la Salle des fondateurs, musée interactif qui fait ressortir le rôle important de la Conférence de Charlottetown dans la création du Canada.

Les Canadiens ont parfois tendance à critiquer les pays étrangers, mais nous pouvons cependant tirer des leçons utiles et importantes, notamment leur célébration des villes historiques importantes et le respect qu'ils leur témoignent.

Une formidable occasion s'offre au gouvernement du Canada de faire mieux comprendre aux Canadiens comme aux visiteurs comment le Canada est né. Je recommanderais que Charlottetown et Québec fassent partie du mandat élargi de la Commission de la capitale nationale. La CCN devrait se voir confier de nouvelles responsabilités afin de mettre en valeur Ottawa, Charlottetown et Québec en tant que capitale nationale et villes fondatrices. Cette commission au mandat élargi ne ferait pas que mettre en valeur ces trois importantes villes historiques; elle enrichira les connaissances des Canadiens et des visiteurs au sujet de notre pays.

Le 150e anniversaire de Charlottetown serait une occasion idéale pour le gouvernement du Canada d'explorer cette possibilité qui s'offre de promouvoir l'unité canadienne. Je vais transmettre cette suggestion directement au premier ministre et aux ministres responsables.

En conclusion, j'aimerais féliciter le maire de Charlottetown, Clifford Lee, les conseillers municipaux et les habitants de Charlottetown à l'occasion du 150e anniversaire de l'incorporation de leur ville.


AFFAIRES COURANTES

LE COMITÉ INTÉRIMAIRE DE PARLEMENTAIRES SUR LA SÉCURITÉ NATIONALE

DÉPÔT DU COMMUNIQUÉ DE PRESSE ET DE LA FICHE D'INFORMATION CONCERNANT LE RAPPORT

L'honorable Bill Rompkey (leader adjoint du gouvernement) : Honorables sénateurs, j'ai l'honneur de déposer, dans les deux langues officielles, une copie du communiqué de presse intitulé « La vice-première ministre annonce le modèle du comité de parlementaires sur la sécurité nationale proposé par le gouvernement » ainsi que la fiche d'information concernant le Rapport du comité intérimaire de parlementaires sur la sécurité nationale.

LA LOI SUR LE PARLEMENT DU CANADALA LOI SUR LES TRAITEMENTS

PROJET DE LOI MODIFICATIF—PREMIÈRE LECTURE

Son Honneur le Président annonce qu'il a reçu des Communes un message accompagné du projet de loi C-30, Loi modifiant la Loi sur le Parlement du Canada, la Loi sur les traitements et d'autres lois en conséquence.

(Le projet de loi est lu une première fois.)

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, quand lirons- nous le projet de loi une deuxième fois?

L'honorable Bill Rompkey (leader adjoint du gouvernement) : Honorables sénateurs, avec la permission du Sénat et nonobstant l'alinéa 57(1)f) du Règlement, je propose que la deuxième lecture du projet de loi soit inscrite à l'ordre du jour de la prochaine séance.

Son Honneur le Président : La permission est-elle accordée?

Sénateur Rompkey, pourriez-vous nous donner des explications, s'il vous plaît? Une demande en ce sens a été faite.

Le sénateur Rompkey : Honorables sénateurs, les deux côtés ont discuté du projet de loi ce matin et ont décidé que c'était probablement la meilleure solution. Je crois savoir que les deux côtés se sont entendus pour procéder de cette façon.

Son Honneur le Président : La permission est-elle accordée?

Des voix : D'accord.

Son Honneur le Président : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?

(La motion est adoptée.)

LE GROUPE INTERPARLEMENTAIRE CANADA-JAPON

LA 11E CONFÉRENCE DES PARLEMENTAIRES DE L'ASIE- PACIFIQUE SUR L'ENVIRONNEMENT ET LE DÉVELOPPEMENT, DU 17 AU 20 AOÛT 2004—DÉPÔT DU RAPPORT

L'honorable Marie-P. Poulin : Honorables sénateurs, j'ai l'honneur de déposer, dans les deux langues officielles, le rapport du Groupe interparlementaire Canada-Japon sur la 11e Conférence des parlementaires de l'Asie-pacifique sur l'environnement et le développement, qui s'est tenue à Korolevu, Fidji, du 17 au 20 août 2004.

L'ORGANISATION INTERPARLEMENTAIRE DE L'ANASE—VINGT- CINQUIÈME ASSEMBLÉE GÉNÉRALE, DU 12 AU 17 SEPTEMBRE 2004—DÉPÔT DU RAPPORT

L'honorable Marie-P. Poulin : Honorables sénateurs, j'ai l'honneur de déposer, dans les deux langues officielles, le rapport du Groupe interparlementaire Canada-Japon, qui s'est réuni après la 25e assemblée générale de l'Organisation interparlementaire de l'ANASE tenue à Phnom Penh, au Cambodge, du 12 au 17 septembre 2004.

AFFAIRES SOCIALES, SCIENCES ET TECHNOLOGIE

AVIS DE MOTION VISANT À AUTORISER LE COMITÉ À SIÉGER DURANT L'AJOURNEMENT DU SÉNAT

L'honorable Michael Kirby : Honorables sénateurs, je donne avis que, à la prochaine séance du Sénat, je proposerai :

Que, en conformité avec l'article 95(3)a) du Règlement, le Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie soit autorisé à se réunir le lundi 25 avril et le mardi 26 avril 2005 pour les fins de son étude de la santé mentale et la maladie mentale, même si le Sénat est ajourné à ce moment pour une période de plus d'une semaine.


PÉRIODE DES QUESTIONS

LA JUSTICE

LA LIBERTÉ DE RELIGION—LA COMMISSION ALBERTAINE DES DROITS DE LA PERSONNE—LE MARIAGE ENTRE PERSONNES DE MÊME SEXE—LA PROMOTION DU POUVOIR DE COERCITION

L'honorable Gerry St. Germain : Honorables sénateurs, ma question s'adresse au leader du gouvernement au Sénat. L'évêque catholique romain de Calgary, Fred Henry, pourrait faire l'objet d'une enquête de la Commission albertaine des droits de la personne parce qu'il a préconisé, dans une lettre envoyée à ses fidèles, que l'État devrait « utiliser son pouvoir de coercition pour interdire » l'homosexualité dans l'intérêt de la société.

Il dit, dans une déclaration adressée au Globe and Mail :

Si la Commission des droits de la personne a gain de cause, elle m'empêchera d'exprimer mes opinions et la position de l'Église catholique romaine.

J'en ai déjà discuté ici avec l'honorable leader du gouvernement au Sénat, qui m'avait assuré avec grandiloquence que la liberté de religion n'était pas menacée. S'agit-il d'une promesse en l'air?

L'honorable Jack Austin (leader du gouvernement) : Honorables sénateurs, la composition de cette question a dû prendre bien du temps au sénateur St. Germain.

Comme il le sait bien, un tribunal compétent de la province d'Alberta est saisi d'une demande visant à déterminer si la promotion de l'utilisation du pouvoir de coercition constitue un abus de notre système démocratique. Je ne sais pas si la réponse à cette question est affirmative ou négative. Je ne connais pas les faits et je n'irai pas me joindre à un gang de lynchage. Je laisse au sénateur Tkachuk la direction de ce genre de gang.

Le sénateur St. Germain : Honorables sénateurs, le sénateur Tkachuk vous a répété ce que le pape Jean Paul II a enseigné au monde entier. Dites la vérité, bande de corrompus!

Des voix : Oh, oh!

Le sénateur St. Germain : Je le maintiens : le gouvernement libéral est corrompu.

L'honorable Jerahmiel S. Grafstein : J'invoque le Règlement.

Son Honneur le Président : À l'ordre, je vous prie, honorables sénateurs.

Le sénateur Grafstein : L'honorable sénateur est-il en train de m'accuser de corruption? Je le prie de retirer ses paroles.

Son Honneur le Président : Je tiens à rappeler aux sénateurs qu'un recours au Règlement, comme ce que le sénateur Grafstein viendrait de faire, doit intervenir à la fin des affaires courantes et avant l'ordre du jour. Pour l'instant, nous en sommes à la période des questions. Je crois que le sénateur Austin avait pris la parole pour répondre à une question du sénateur St. Germain.

Le sénateur Grafstein : J'invoque le Règlement!

Son Honneur le Président : Sénateur Grafstein, en vertu du Règlement, il n'est pas permis d'invoquer le Règlement à ce stade. Si vous devez le faire, il faut que ce soit après les affaires courantes et avant l'ordre du jour.

Le sénateur Austin : Honorables sénateurs, nous venons d'entendre le sénateur St. Germain, qui s'est adressé aux sénateurs d'en face en les qualifiant de : « Bande de corrompus ». Ce type de langage est inacceptable au Parlement et constitue probablement une atteinte aux privilèges de cette enceinte. Comme j'ai c'est la première occasion qui se présente à moi pour le faire, je demanderai à Son Honneur d'examiner la question et de déterminer si ce langage est conforme aux règles de bienséance dans le débat dans cette enceinte et si le sénateur St. Germain a, en fait, abusé des privilèges dont bénéficient les sénateurs.

Je tiens à lui répondre ceci.

(1400)

Nous avons l'enquête Gomery, dont le mandat consiste à recueillir les faits pour faire rapport aux Canadiens. Le premier ministre lui a confié ce mandat. Le premier ministre a dit qu'il voulait que ce processus aille au fond des choses. Le premier ministre a dit que tous ceux qui ont commis un acte criminel contre le gouvernement du Canada et contre les Canadiens seront inculpés et poursuivis.

Le premier ministre a mis en place une enquête policière à cet effet. Le premier ministre a mis en place une procédure de récupération des fonds injustement acquis.

De toute évidence, le sénateur St. Germain s'excite et veut se joindre à un gang de lynchage pour pendre haut et court l'accusé avant même que le juge ait rendu sa décision. Il doit penser que c'est dans l'intérêt du Parti conservateur. Si c'est ainsi, allez-y.

Le sénateur St. Germain : Honorables sénateurs, soyons clairs. C'est lui qui a commencé, pas moi, en parlant de mentalité de gang de lynchage. Le lynchage n'est pas dans la mentalité de notre pays. Cependant, la corruption est profondément enracinée au sein de notre gouvernement; nous devons faire toute la lumière à son sujet, mais cela n'a aucun rapport avec ma question. Vous n'avez pas répondu à ma question. Celle-ci avait trait aux libertés religieuses dans notre pays. Vous avez choisi de vous reporter à la déclaration du sénateur Tkachuk, en dérogeant grandement, à mon avis, à votre intégrité et à votre façon de faire habituelle, monsieur.

Le sénateur Austin : Honorables sénateurs...

Le sénateur St. Germain : J'ai toujours la parole.

Le sénateur Austin : Continuez de parler. Vous servez notre cause.

Le sénateur St. Germain : Honorables sénateurs, voici ma question complémentaire. Elle se rapporte à celle que j'ai posée sur l'évêque Henry. Celui-ci éprouve le sentiment que ses libertés religieuses ou sa liberté d'exprimer ses croyances religieuses sont menacées. J'ai déjà parlé aux sénateurs du fait que les libertés religieuses pouvaient facilement être mises en péril par ce qui se passe dans les provinces en ce moment.

Le gouvernement fédéral a décidé de se conformer aux décisions de tribunaux provinciaux en ce qui concerne le mariage homosexuel. Le premier ministre, il y a moins d'un an et demi, affirmait clairement que le mariage était l'union entre un homme et une femme. En raison de l'activisme judiciaire qui s'est alors manifesté au niveau provincial, les libertés religieuses se retrouvent soudainement en péril. C'est à ce sujet que je veux une réponse, et non pas au sujet de l'intervention du sénateur Tkachuk.

Le sénateur Austin : Cela va de soi, vous ne souhaitez pas que je me reporte aux déclarations scandaleuses du sénateur Tkachuk. Les sénateurs sont censés mettre en avant des faits et non pas des arguments politiques.

Mais je vais tout de même vous parler de l'évêque Henry. Il bénéficie de l'entière protection de la Charte des droits et personne ne peut l'en priver. Aucune clause dérogatoire ne le privera de cette protection, parce qu'aucun parti politique au Canada ne privera de leurs droits les citoyens canadiens, qu'il s'agisse des droits en matière de libertés religieuses ou des droits à l'égalité devant la loi.

Pour revenir au fait que j'aurais invoqué un argument qui n'a rien à voir avec la question, je vous fais remarquer que le sénateur Tkachuk est celui qui, le premier, a parlé de corruption et qui a lancé un débat à ce sujet. J'ai un peu honte que, en présence de délégués de la Malaisie, nous ayons à essuyer des affirmations fallacieuses et à voir brosser un portrait ridicule du Canada, un pays où règne l'honnêteté, que le monde entier admire pour son intégrité.

Le sénateur Tkachuk : Pauvre ami. Je vous en prie!

Son Honneur le Président : À l'ordre, s'il vous plaît.

Il est peut-être temps que je rappelle notre Règlement aux honorables sénateurs en ce qui concerne la période des questions. Cette période est l'occasion où, après un bref préambule, on pose une question au leader du gouvernement, à un ministre ou à la présidence d'un comité qui, après un bref préambule, y répond. Ce n'est pas une période de débat.

LA CITOYENNETÉ ET L'IMMIGRATION

LE RETARD DANS LE PROCESSUS DE RECONNAISSANCE DES TITRES DE COMPÉTENCES ÉTRANGERS

L'honorable Consiglio Di Nino : Honorables sénateurs, j'ai presque peur de prendre la parole. Voilà un intéressant débat, mais je poserai une question pour changer le rythme.

Honorables sénateurs, dans un rapport qu'il a publié le mois dernier, Statistique Canada nous a appris que, en 2017, soit dans 12 ans à peine, les minorités visibles représenteront la majeure partie de la population de nos plus grandes agglomérations comme conséquence de l'immigration. On a souvent répété, ici au Sénat et à l'autre endroit, que les personnes qui immigrent au Canada ont rarement la possibilité de mettre à profit ici l'enseignement et la formation qu'ils ont reçus, en raison de la lenteur et de la complexité de notre processus de reconnaissance des titres de compétence étrangers. Malgré toute sa complexité, ce problème doit être examiné sérieusement, et dès maintenant, tel que le démontrent les chiffres publiés récemment par Statistique Canada. Quel est, en fait, le plan du gouvernement fédéral en ce qui concerne l'amélioration du processus de reconnaissance des professionnels et des diplômes d'études étrangers?

L'honorable Jack Austin (leader du gouvernement) : Honorables sénateurs, le gouvernement a entrepris une étude visant à apporter des changements concernant l'acceptation des titres de compétence des professionnels ayant fait leurs études à l'étranger. Nous avons un secrétaire parlementaire qui est précisément saisi de cette question, et nous discutons actuellement avec les provinces et certaines associations professionnelles afin de nous entendre sur une façon d'accélérer tant la formation que l'acceptation des titres de compétence.

Le sénateur Di Nino : Sauf tout le respect que je dois aux honorables sénateurs, on entend parler de ce dossier depuis très longtemps. C'est d'ailleurs une question dont je m'occupe depuis de nombreuses années.

On a appris par les médias que le gouvernement ne cessait de retarder l'annonce d'un plan visant à accélérer ce processus. Ces retards se produisent malgré le fait que, dans les deux derniers discours du Trône, on promettait d'intervenir rapidement pour accélérer le processus.

Le leader du gouvernement au Sénat pourrait-il envoyer un message d'espoir aux milliers de personnes qui attendent, pour pouvoir décrocher un emploi et apporter une importante contribution au Canada, que leurs titres de compétences soient reconnus? À quel moment peuvent-ils s'attendre à ce que le gouvernement arrête de faire des promesses et pose des gestes concrets?

Le sénateur Austin : Honorables sénateurs, je tiens à remercier le sénateur Di Nino de soutenir cette politique. Nous espérons qu'il continuera de le faire lorsqu'il sera temps de traiter avec les provinces, dont relève la question des titres de compétences, ainsi qu'avec certaines associations professionnelles, dont relève également cette question en vertu des lois provinciales.

Il y a toutefois consensus quant au principe, et c'est un pas de géant qui a été franchi. Le gouvernement actuel a fait preuve d'initiative en franchissant ce pas. Je dois également indiquer aux honorables sénateurs que la collectivité à laquelle bénéficiera l'amélioration du processus de reconnaissance des titres de compétences a également pris l'initiative. D'après ce que j'en sais, cette collectivité semble croire que le dossier progresse considérablement.

LES PÊCHES ET LES OCÉANS

LA RENCONTRE DES SOUS-MINISTRES VISANT À EXAMINER L'ORDRE DU JOUR DE LA PROCHAINE RÉUNION DES MINISTRES—LE DÉSACCORD AVEC LES REPRÉSENTANTS DE L'ÎLE-DU-PRINCE-ÉDOUARD

L'honorable Gerald J. Comeau : Honorables sénateurs, ma question s'adresse au leader du gouvernement au Sénat. La semaine dernière, les sous-ministres des Pêches des provinces étaient à Ottawa pour discuter de l'ordre du jour d'une réunion avec les ministres des Pêches devant se tenir à la fin du mois. Nous venons d'apprendre que les sous-ministres de l'Île-du-Prince-Édouard ont été expulsés de la réunion sous prétexte, semble-t-il, que l'Île-du-Prince-Édouard et Pêches et Océans Canada sont parties à une poursuite en justice. Le ministre ne convient-il pas que cette poursuite est assez irresponsable et ne fait qu'aggraver les relations fédérales- provinciales au lieu de les améliorer?

(1410)

L'honorable Jack Austin (leader du gouvernement) : Honorables sénateurs, je ne suis pas au courant de la question que vient de soulever le sénateur Comeau. Je vais certainement tenter de déterminer ce qui s'est produit, pourquoi cela s'est produit et si cela s'est vraiment produit, comme le prétend le sénateur. Je déterminerai ensuite quelle position les provinces ont adoptée à cet égard. J'assure au sénateur Comeau que je lui ferai part du résultat de mes recherches dès que possible.

Le sénateur Comeau : J'ai une question complémentaire. Je vais adresser au ministre un exemplaire du Charlottetown Guardian du 7 avril. Une fois que le leader du gouvernement aura lu l'article, j'aimerais bien savoir s'il est d'accord avec moi pour dire que les différends et les mésententes sont assez fréquents entre les fonctionnaires fédéraux et provinciaux et se produisent assez régulièrement. Le ministre ne convient-il pas que, plutôt que de recourir à l'intimidation, le gouvernement fédéral devrait agir au niveau de la haute direction et non à celui des fonctionnaires, et demander à ces derniers de ne plus recourir à des tactiques d'intimidation, notamment en ce qui concerne la plus petite province du Canada, qui s'efforce, sans une représentation conservatrice correcte de l'Île-du-Prince-Édouard, de faire entendre son point de vue ici, à Ottawa?

Le sénateur Austin : Honorables sénateurs, je ne peux que répéter que je vais examiner les questions soulevées par le sénateur Comeau. Une chose qu'il a dite m'intrigue : « sans une représentation conservatrice correcte de l'Île-du-Prince-Édouard ». Peut-être que mes recherches vont me révéler le sens profond de ces mots.

LES RELATIONS CANADO-AMÉRICAINES

LA COMMISSION MIXTE INTERNATIONALE—LE MANITOBA—L'EFFET DE L'OUVERTURE DE LA DÉCHARGE DE DEVIL'S LAKE, AU DAKOTA DU NORD

L'honorable Janis G. Johnson : Honorables sénateurs, il reste maintenant moins de 90 jours avant l'ouverture prévue de la décharge de Devil's Lake, au Dakota du Nord. On commencera à déverser vers le nord, jusqu'au Manitoba et dans le lac Winnipeg, une eau polluée qui contient de nombreux biotes inconnus.

Le leader du gouvernement au Sénat aurait-il l'obligeance de faire le point sur les efforts déployés par le gouvernement pour imposer un examen international de ce projet, examen qui serait confié à la Commission mixte internationale? J'ai déjà parlé de cette question au Sénat. Le Dakota du Nord résiste depuis de longues années, et il a dit qu'il ne donnerait suite à aucune recommandation de la CMI.

Le leader du gouvernement pourrait-il nous mettre au courant des dernières informations?

L'honorable Jack Austin (leader du gouvernement) : Je remercie madame le sénateur Johnson de ce qui me semble une très importante question. Le problème touche à la fois le Manitoba, le Canada et nos relations avec les États-Unis et, de surcroît, il remet en cause la valeur de la Commission mixte internationale.

Comme les honorables sénateurs le savent peut-être, le Dakota du Nord a entrepris, à sa propre initiative et à ses propres frais, de creuser une tranchée de déversement qui, une fois terminée, normalement en juillet, fera s'écouler l'eau de Devil's Lake vers le nord, dans le réseau hydrographique de la Saskatchewan en passant par la Rouge.

Or, il y a dans ce lac et au Dakota du Nord des espèces étrangères à celles qui se trouvent dans le réseau hydrographique du Manitoba. Elles peuvent donc causer un tort considérable aux espèces indigènes.

Le gouvernement du Canada a demandé aux États-Unis d'accepter un ordre de renvoi à la Commission mixte internationale. Si, par l'entremise du département d'État, les États-Unis accèdent à cette demande, l'ordre conférera l'autorisation voulue à cet organe binational qui a été créé par le Traité des eaux limitrophes de 1909. Les honorables sénateurs sont au courant d'un certain nombre de causes qui ont été arbitrées par cette commission.

Le département d'État n'a pas encore réagi, mais nous avons fait des demandes répétées, y compris par la personne du premier ministre, qui a soulevé la question au ranch de Crawford et a demandé au président des États-Unis de s'occuper de cette question avec célérité. Je crois que la question fait l'objet d'un examen on ne peut plus urgent aux États-Unis.

Si les États-Unis n'acceptent pas un renvoi à la Commission mixte internationale, et si on permet que les eaux coulent vers le Nord, le Canada intentera une demande en dommages-intérêts contre les États-Unis pour tout dommage causé au Canada par suite de cette mesure unilatérale de la part de l'État du Dakota du Nord.

Le sénateur Johnson : J'ai une question complémentaire. Je sais que le Canada a travaillé fort dans ce dossier; l'ambassadeur McKenna lui-même m'a appelé à propos de cette question. Nous y travaillons depuis 15 ans au Manitoba. Des représentants de notre province et le premier ministre se sont également rendus à Washington.

Dans quelle situation nous retrouverons-nous, car le temps commence à manquer? Si les choses devaient se passer sans renvoi à la Commission mixte internationale, et c'est ce que le Dakota du Nord affirme qu'il va faire, cela ira l'encontre du précédent et menacera l'existence même du Traité des eaux limitrophes de 1909. Est-ce que le leader du gouvernement a d'autres informations?

En outre, si toutes les avenues que le gouvernement explore sont épuisées, est-ce que le leader du gouvernement au Sénat a une idée des options qui nous restent pour empêcher la dérivation de ces eaux, parce que le Dakota du Nord refuse de respecter ces traités? Le risque est énorme pour ma région du monde et pour le Canada.

Il existe d'autres précédents. Il y a un cas en Colombie- Britannique aussi, qui est inverse. Quelles options nous restera-t-il une fois qu'elles auront toutes été épuisées? Est-ce que nous serons simplement laissés à nous-mêmes pour tenter d'endiguer ces eaux? Cela a des incidences sur le transfert des eaux de tous les bassins versants partout en Amérique du Nord.

Le sénateur Austin : Pour compléter la première réponse que j'ai donnée, honorables sénateurs, nous sommes d'avis que les États- Unis vont réagir de manière positive. En cas de réponse positive pour ce qui concerne un renvoi à la Commission mixte internationale, les tribunaux fédéraux recevraient alors une demande d'injonction contre la poursuite des travaux du Dakota du Nord jusqu'à ce que la question soit réglée aux termes du Traité des eaux limitrophes de 1909.

Si les États-Unis ne consentent pas à un renvoi et s'ils sont déterminés à suivre une démarche unilatérale et permettant que le fossé de dérivation soit achevé et que l'eau coule au nord de la frontière, le recours qui nous reste est alors celui du droit international, à savoir une demande en dommages-intérêts, d'État à État, pour des dommages occasionnés au Canada. Cette procédure sera probablement celle que nous voudrons soumettre à un tribunal international.

L'honorable Pat Carney : J'aimerais poser une question complémentaire sur ce sujet auquel nous nous intéressons tous les deux. Le leader du gouvernement pourrait-il nous indiquer en vertu de quelle autorité le Canada pourrait réclamer et percevoir des dommages-intérêts dans cette affaire mettant en cause la Commission mixte internationale? Je crois comprendre que les États-Unis n'acceptent généralement pas de telles demandes d'indemnisation. En vertu de quelle autorité cela pourrait-il se faire? Une note diplomatique ne règlera pas le problème.

Le sénateur Austin : Je remercie madame le sénateur de sa question. La Commission mixte internationale peut attribuer des dépens si elle dispose d'un renvoi conjoint. S'il n'y a pas d'ordonnance de renvoi et que les États-Unis doivent procéder unilatéralement, on peut alors avoir recours au recueil de droit international qui prévoit les droits des États à la non-ingérence de la part de leurs voisins. Il y a un recueil de droit international qui porte sur les droits et les responsabilités des riverains.

Pour ce qui est de la Voie maritime du Saint-Laurent, par exemple, au cours des années 1920, les États-Unis ont prétendu qu'une digue en aile construite sur le côté canadien détournait le cours des eaux, ce qui endommageait des jetées et des propriétés privées de leur côté. Le Canada a accueilli cette demande parce qu'il avait l'obligation de le faire en droit international, et une indemnisation a été versée.

(1420)

De même, comme madame e sénateur Carney le sait bien, dans une cause similaire, les États-Unis ont fait une demande d'indemnisation pour des dommages causés à des vergers et autres propriétés de l'État de Washington en raison de la pollution de l'air causée par une fonderie de Trail, en Colombie-Britannique. Cette cause d'arbitrage est devenue célèbre, et le Canada a accepté l'arbitrage dans ce cas en se basant sur des principes semblables à ceux adoptés par la Commission mixte internationale. Il y a aussi d'autres illustrations, mais le Canada ne resterait certainement pas sans rien faire dans une affaire de ce genre.

Le sénateur Carney : Le leader a souligné que le Canada a respecté ses obligations internationales dans cette affaire. J'aimerais qu'il me dise ce qui me prouve que les Américains en feraient autant? Il ne s'agit pas là d'une question hypothétique. Le leader a affirmé que, selon les dispositions de la Commission mixte internationale, il doit y avoir un renvoi conjoint, ce qui pourrait ne pas être le cas. Sur quelle tribune, dans quel pays et en vertu de quelle autorité le Canada pourrait-il alors demander une injonction à l'égard de ce projet?

Le sénateur Austin : En ce qui concerne la première partie de la question de l'honorable sénateur, les États-Unis ont intenté une action et le Canada y a répondu. Dans cette affaire, le précédent invoqué par les États-Unis pour faire valoir ses prétentions vaut aussi pour le Canada. Quand le Parlement était saisi du Traité des eaux limitrophes en 1909, sir Wilfrid Laurier, alors premier ministre du Canada, a dit que si les États-Unis insistaient sur leur droit de détourner les eaux du lac Michigan vers le bassin du fleuve Mississippi au moyen du canal de drainage de Chicago, le Canada pourrait alors revendiquer le même droit sur la rive canadienne. L'action serait réciproque. C'est sur ce principe que les deux pays se sont fondés pour traiter de telles questions.

Il serait inutile de demander une injonction au Canada étant donné qu'aucun tribunal canadien n'a le pouvoir de rendre une injonction contre une entité relevant de la compétence des États- Unis. Cependant, il serait possible de déposer une demande auprès d'un tribunal fédéral qui a compétence dans l'État du Dakota du Nord.

LES TRAVAUX PUBLICS ET LES SERVICES GOUVERNEMENTAUX

LE PROGRAMME DE COMMANDITES—LE RÔLE DES MINISTRES

L'honorable Marcel Prud'homme : Ma question s'adresse au leader du gouvernement au Sénat. Pourrait-il donner au Sénat l'assurance qu'aucun ministre n'était au courant des activités qui font actuellement l'objet de la Commission Gomery ou n'y a joué quelque rôle?

L'honorable Jack Austin (leader du gouvernement) : Honorables sénateurs, le premier ministre a veillé à ce que le processus d'examen des candidatures de parlementaires pressentis pour devenir ministres écarte tous ceux qui ont participé aux événements auxquels le sénateur Prud'homme fait référence.

Le sénateur Prud'homme : L'honorable leader sait-il si certains ministres étaient au courant des activités qui ont mené à cette enquête?

Le sénateur Austin : L'honorable sénateur peut être certain qu'aucun ministre de l'actuel gouvernement n'était au courant de quelque fraude ou crime visés dans les allégations.

LA JUSTICE

L'ATTENTAT À LA BOMBE CONTRE L'AVION D'AIR INDIA—L'ENQUÊTE JUDICIAIRE VISANT L'ENQUÊTE POLICIÈRE

L'honorable A. Raynell Andreychuk : Honorables sénateurs, hier soir, les députés de la Chambre ont voté en faveur d'une motion d'opposition demandant la tenue d'une enquête judiciaire sur l'attentat à la bombe commis contre un avion d'Air India, le 23 juin 1985. Cela a été la plus grande tuerie de l'histoire du Canada. Les familles et les amis des victimes et tous les Canadiens méritent d'obtenir des réponses. Nous savons que le gouvernement ne respecte pas toujours la volonté de la Chambre des communes, mais, dans ce cas-ci, la volonté de la population, exprimée par un vote de la majorité à l'autre endroit, devrait certes être respectée.

La question que je pose au leader du gouvernement au Sénat est la suivante : le gouvernement prendra-t-il les mesures qui s'imposent et créera-t-il une commission d'enquête sur l'attentat contre l'avion d'Air India? Nous devons connaître les détails de la catastrophe d'Air India, mais aussi en tirer des enseignements. Tous les agents du SCRS et de la GRC et tous les fonctionnaires judiciaires chargés de l'enquête méritent de savoir si leurs pratiques et leurs méthodes étaient satisfaisantes ou si d'autres mesures devraient être prises ou exigées du gouvernement, par voie de mesure législative, de politique ou de plan d'action. Il est temps de mener une enquête.

L'honorable Jack Austin (leader du gouvernement) : Madame le sénateur Andreychuk pose des questions pertinentes et valables. Le gouvernement a pris note du vote qui a eu lieu à l'autre endroit et prend les mesures habituelles pour déterminer quelles questions sont demeurées sans réponse et n'ont pas été communiquées à la population.

La vice-première ministre a annoncé que l'on chargerait une personne experte en la matière d'examiner les documents publics, les questions restées sans réponses et les questions qui ne sont pas encore du domaine public et auxquelles une enquête pourrait donner suite. Dès que ce processus sera terminé, nous saurons si une enquête publique sera déclenchée.

Le sénateur Andreychuk : Le choix d'une personne experte serait approprié dans une autre situation. Toutefois, dans le cas qui nous occupe, le gouvernement ne peut pas nommer une personne à qui il confierait le mandat d'examiner certaines questions et de lui faire rapport. Ce serait inacceptable. Cela irait à l'encontre de la volonté des familles, qui réclament la tenue d'une enquête indépendante. Elles ne veulent pas nécessairement qu'on leur dise de nouveau que des erreurs ont été commises, elles veulent que l'on jette un nouveau regard sur l'affaire. Elles veulent que l'on sache que les pratiques exemplaires sont suivies car, comme certaines des victimes l'ont dit, elles ne voudraient pas que d'autres Canadiens vivent la même situation. La nomination d'une personne experte pour faire les choses mentionnées par le leader est superflue, ce n'est qu'une manœuvre dilatoire. Une enquête s'impose.

Le sénateur Austin : Honorables sénateurs, de prime abord, madame le sénateur Andreychuk et moi-même sommes en désaccord au sujet de ce qu'il faut faire concernant cette affaire. Une enquête se justifierait s'il était démontré qu'elle peut éclairer le public de façon utile. Il ne saurait y avoir d'objections sérieuses à ce qu'un expert procède à un examen et à une analyse des résultats possibles d'une enquête. Autrement dit, la tenue d'une enquête doit être justifiée par une prétention à première vue qu'il reste des faits obscurs.

La question est intéressante. La catastrophe d'Air India a eu lieu en 1985. Les enquêtes des agences de sécurité et de la police ont eu lieu entre 1985 et 1993 sous le précédent gouvernement.

[Français]

RÉPONSES DIFFÉRÉES À DES QUESTIONS ORALES

L'honorable Bill Rompkey (leader adjoint du gouvernement) : Honorables sénateurs, j'ai l'honneur de présenter trois réponses différées à des questions orales, soit une première réponse à une question orale posée au Sénat le 9 mars 2005 par le sénateur Comeau, concernant les services de laboratoire judiciaire de la Gendarmerie royale du Canada.

[Traduction]

J'ai une deuxième réponse à une question orale du sénateur Atkins, posée au Sénat le 23 mars 2005, concernant les activités criminelles liées à la fraude hypothécaire et au vol d'identité. J'ai une troisième réponse à des questions orales du sénateur Carney, posées au Sénat le 22 mars 2005, concernant le rapport de l'ACIA sur la grippe aviaire (problèmes concernant les compétences et questions de biosécurité).

LA GENDARMERIE ROYALE DU CANADA

LA FERMETURE DU LABORATOIRE JUDICIAIRE D'EDMONTON

(Réponse à la question posée le 22 mars 2005 par l'honorable Gerald J. Comeau)

Comment ces laboratoires composeront-ils avec la charge de travail accrue alors qu'ils ont déjà un arriéré? Comment composeront-ils avec la fermeture du laboratoire d'Edmonton?

Il n'y a pas d'arriéré dans le traitement des échantillons d'ADN prélevés sur les lieux de crime aux Services de laboratoire judiciaire (SLJ), ni dans le traitement des échantillons prélevés sur les condamnés dans la Banque nationale de données génétiques.

Les SLJ traitent tous les cas urgents dans un délai de 15 jours tandis que le Groupe de la réception des dossiers de cas négocie le délai de traitement des cas non urgents avec l'enquêteur.

Fermeture du site d'Edmonton des SLJ

La fermeture du site d'Edmonton des SLJ n'augmentera pas la charge de travail des SLJ.

La fermeture du site d'Edmonton ne réduira pas le nombre ou le type de services offerts aux organismes d'application de la loi canadiens. Les services actuellement offerts au site d'Edmonton seront transférés vers les cinq autres sites des SLJ au Canada. Il en va de même pour le personnel et l'équipement.

Les SLJ sont un service national; quel que soit l'endroit où sont soumis les cas, le Groupe de la réception des dossiers de cas concerné les distribue au site des SLJ le mieux placé pour procéder à l'analyse. Les SLJ se sont engagés à maintenir le Groupe de la réception des dossiers de cas à Edmonton (à un endroit différent) et en ouvriront un autre à Calgary. Cela devrait améliorer le processus de présentation des cas en Alberta.

Le site d'Edmonton fournit des services en matière d'analyse d'éléments de preuve, d'examen de documents, de rapports biologiques, ainsi que dans le cadre du programme d'éthyloscopie. Il n'effectue pas d'analyses biologiques (et ce sont ces analyses qui incluent le traitement scientifique des échantillons prélevés sur les lieux de crime afin d'en tirer des profils d'ADN), lesquelles sont actuellement faites à Vancouver et Ottawa.

Le gouvernement a-t-il l'intention d'accélérer la communication des résultats en recourant à des laboratoires privés pour faire le travail qu'effectuaient auparavant les laboratoires publics?

Les SLJ de la GRC ont conclu une convention d'offre à commandes avec un laboratoire privé agréé pour les analyses biologiques. Les SLJ recourent aux services de ce laboratoire pour gérer les fluctuations imprévues de la charge de travail qui excèdent leur capacité à fournir une réponse convenable aux enquêteurs.

Les SLJ vérifient la qualité des services fournis par le laboratoire privé.

Le gouvernement du Canada n'a pas l'intention de démanteler les SLJ au profit des laboratoires privés.

LA JUSTICE

LA CRIMINALITÉ EN MATIÈRE DE FRAUDE HYPOTHÉCAIRE ET DE VOL D'IDENTITÉ

(Réponse à la question posée le 23 mars 2005 par l'honorable Norman K. Atkins)

Le Code criminel renferme actuellement des dispositions visant à protéger toute personne contre la fraude hypothécaire par usurpation d'identité. En effet, commet une infraction de supposition de personne quiconque, frauduleusement, se fait passer pour une personne, vivante ou morte, avec l'intention d'obtenir un avantage pour lui-même ou pour une autre personne. En outre, garantir une hypothèque à laquelle une personne n'aurait autrement pas droit constitue un « avantage » protégé par la loi. De plus, quiconque, par supercherie, mensonge ou autre moyen dolosif frustre le public ou toute personne de quelque bien, service, argent ou valeur peut être reconnu coupable de fraude. Si une prise de contrôle d'une hypothèque par supposition de personne comporte le fait d'avoir sciemment utilisé des documents contrefaits pour convaincre la banque que l'auteur de l'acte criminel est quelqu'un d'autre, les éléments d'emploi d'un document contrefait pourraient aussi être applicables. Les personnes déclarées coupables de tels actes criminels (pourvu que le montant de la fraude soit supérieur à cinq mille dollars) sont passibles d'un emprisonnement de dix ans.

Le ministère de la Justice examine actuellement les dispositions du Code criminel afin de déterminer les limites des dispositions législatives actuelles en ce qui concerne l'usurpation d'identité et a proposé différents moyens de les éliminer. Le travail effectué par le ministère a mis à contribution les renseignements reçus d'autres ministères fédéraux, des ministères provinciaux et territoriaux, des organismes d'applications de la loi et des intervenants. L'ensemble de ce travail aidera le ministère aux fins de la formulation de tout changement qui s'impose pour assurer la protection de la population contre la fraude hypothécaire par usurpation d'identité.

Le dédommagement des frais juridiques des victimes d'actes criminels ne relève pas de la compétence du gouvernement fédéral. Le sénateur voudra peut-être transmettre ses préoccupations à ce sujet aux autorités provinciales ou territoriales appropriées responsables de l'administration de la justice dans le ressort en question.

LA SANTÉ

L'AGENCE CANADIENNE D'INSPECTION DES ALIMENTS—L'ÉPIZOOTIE D'INFLUENZA AVIAIRE EN COLOMBIE- BRITANNIQUE—LES PROBLÈMES DE COMPÉTENCE

(Réponse à la question posée le 22 mars 2005 par l'honorable Pat Carney)

Agriculture et Agroalimentaire Canada collabore avec le ministère de l'Agriculture, de l'Alimentation et des Pêches de la Colombie-Britannique ainsi qu'avec le comité de la volaille de la Colombie-Britannique à élaborer et à mettre en oeuvre des protocoles en matière de biosécurité qui s'appliquent aux exploitations avicoles et à ceux qui font affaire avec elles. Les protocoles visent à minimiser les risques d'infection d'une exploitation par un virus et sa propagation à d'autres exploitations comme cela a été le cas dans la région d'Abbotsford en 2004.

Lorsque des lieux sont déclarés contaminés et sont mis en quarantaine, l'ACIA est tenue de s'acquitter de ses obligations en matière de santé et de sécurité prescrites dans le Code canadien du travail. L'Agence veille à ce que ses employés et tout travailleur contractuel reçoivent une formation, des consignes sur le travail sécuritaire et les pratiques hygiéniques, et de l'équipement de protection individuelle. Ces mesures se fondent sur les conseils prodigués par Santé Canada, ministère chargé d'agir comme conseiller en matière de santé des fonctionnaires fédéraux. Dans le cas de l'épizootie d'influenza aviaire de 2004, des hygiénistes du travail ont exercé une surveillance pour faire en sorte que l'équipement de protection individuelle soit utilisé à bon escient.

L'Agence a également offert des séances d'information collective aux producteurs pour les sensibiliser davantage aux risques et aux mesures pertinentes de biosécurité requises.

Les producteurs sont responsables de la sécurité des membres de leur famille et des travailleurs agricoles présents dans leur exploitation conformément aux compétences provinciales et aux codes du travail pertinents.

Les plans d'intervention d'urgence de l'ACIA comportent désormais des exigences uniformes relativement à l'équipement de protection individuelle pour le personnel de l'ACIA et les membres de la population qui travaillent à court terme pour l'Agence. En outre, l'élaboration de plans de soutien de l'éradication des maladies animales exotiques (PSEMAE) avec les provinces contribuera également à régler les questions de biosécurité. L'industrie s'emploie actuellement à mettre au point et à appliquer des mesures de biosécurité sous l'égide de l'ACIA. Ces dernières comporteront des lignes directrices sur les mesures de sécurité que doivent prendre tous ceux qui pourraient être exposés à des lieux contaminés. Comme les PSEMAE sont approuvés individuellement par province, les autorités provinciales devront tenir compte des conseils techniques formulés par l'ACIA ainsi que les autorités en matière de santé publique de leur province afin de déterminer les mesures à prendre pour protéger les familles et travailleurs agricoles.

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, le sénateur Grafstein souhaite invoquer le Règlement.

RECOURS AU RÈGLEMENT

L'honorable Jerahmiel S. Grafstein : Honorables sénateurs, je voudrais soulever la question de privilège. J'espérais avoir mal entendu les propos de l'honorable sénateur St. Germain au cours du débat. Mais d'après ce que j'ai compris, il a parlé des sénateurs de ce côté-ci en les traitant de bande de corrompus. Ce sont les paroles que je l'ai entendu prononcer.

(1430)

Or, voici ce que dit l'article 43 du Règlement :

43(1) Il incombe à chaque sénateur de préserver les privilèges du Sénat.

Je ne lirai pas l'article au complet, mais on y dit que toute question de privilège doit être soulevée à la première occasion.

Qu'on me pardonne si j'ai mal compris l'honorable sénateur. Je m'en remets rapidement à mes ouvrages de référence parce que je n'ai pas eu suffisamment de temps pour faire des vérifications approfondies. À la page 522 de La procédure et les usages de la Chambre des communes, par Robert Marleau et Camille Montpetit, on peut lire ce qui suit sous le titre « Critiques de la Chambre et du Sénat ». J'espère que je ne cite pas cet extrait hors contexte, parce que c'est une réaction rapide. Voici en tout cas ce qui est écrit :

Son Honneur le Président : Je suis désolé de vous interrompre, sénateur Grafstein. Je ne sais pas si les autres sénateurs ont remarqué, mais le son est plutôt mauvais. Vous pourriez peut-être essayer un autre microphone.

L'honorable Noël A. Kinsella (leader de l'opposition) : Le sénateur aura besoin de la permission du Sénat pour prendre la parole d'un autre siège que le sien.

Son Honneur le Président : Faisons un essai pour voir si nous pouvons mieux vous entendre au moyen d'un autre microphone.

Le sénateur Grafstein : Les honorables sénateurs trouveront le passage suivant à la page 522 :

Les remarques irrévérencieuses au sujet du Parlement, ou de la Chambre et du Sénat, ne sont pas permises. Cette règle protège également les députés et sénateurs.

Plus loin, il est écrit :

... et il n'est pas acceptable de mettre en doute l'intégrité, l'honnêteté ou la réputation d'un sénateur.

Je sais que mon honorable ami est un honorable gentleman. J'espère que si, dans le feu de l'action, ses paroles ont dépassé sa pensée, il voudra bien les retirer pour que nous considérions l'affaire comme close. Sinon, j'espère que Son Honneur donnera suite à mon intervention en traitant la question comme un rappel au Règlement et une question de privilège.

Son Honneur le Président : Je rappelle aux honorables sénateurs que, lorsqu'il y a recours au Règlement, la personne qui a invoqué le Règlement est aussi la dernière à avoir la parole. J'aimerais que nous limitions les interventions à une par sénateur. Je vais maintenant donner la parole à d'autres sénateurs puis, en dernier lieu, je reviendrai au sénateur Grafstein. Je devrais normalement alterner d'un côté à l'autre.

Étant donné que le Règlement a été invoqué par le côté du gouvernement, je vais commencer par l'opposition, puis ce sera le tour du côté du gouvernement. Si le sénateur Austin avait invoqué le Règlement, je lui aurais donné la parole en premier à titre de leader du gouvernement au Sénat, mais c'est le leader de l'opposition qui se lève. J'ai donné la parole à un membre du gouvernement, alors je vais maintenant la donner à un membre de l'opposition.

Le sénateur Kinsella : Honorables sénateurs, j'aimerais que l'on me dise précisément si c'est un recours au Règlement ou une question de privilège qui est présenté au Sénat. Ainsi, je saurais à quelle partie des ouvrages de procédure me reporter.

Son Honneur le Président : C'est une question pertinente, qui n'implique aucune décision.

En vertu de notre Règlement, nous devons prévoir un préavis de trois heures pour la présentation d'une question de privilège. Il serait peut-être utile de se reporter à la sixième édition de Beauchesne, qui précise ceci, au commentaire 485, page 147, sous le titre « Expressions non parlementaires » :

L'utilisation d'expressions non parlementaires peut être signalée à la Chambre par le président ou par n'importe quel député. Le député qui en prend l'initiative doit invoquer le Règlement et non soulever une question de privilège.

Parfois, la situation est confuse et nous ne savons plus exactement où nous en sommes dans le déroulement de nos délibérations. J'espère que les honorables sénateurs trouveront cette information utile.

Le sénateur Kinsella : Je remercie Son Honneur pour cette explication.

Je ne pense pas que notre collègue, le sénateur Grafstein, ait invoqué le Règlement. Je tiens seulement à rappeler aux honorables sénateurs que nous avons discuté très longuement, il y a quelques mois, de la culture de corruption, alors je ne pense pas que le mot « corruption » en soi puisse être considéré comme une expression non parlementaire. Il y a eu un long débat au Sénat sur la question de la culture de corruption, un débat auquel les honorables sénateurs ont été nombreux à participer. Je suis donc d'avis que la suggestion selon laquelle le terme « corruption » à lui seul constitue une infraction au Règlement ne tient pas.

L'honorable Jack Austin (leader du gouvernement) : Honorables sénateurs, concernant l'argument que le sénateur Kinsella vient de présenter, l'expression utilisée était « bande de corrompus ». Il n'était pas question d'une « culture de corruption » au Parlement; c'était plutôt une remarque s'adressant directement aux sénateurs siégeant de ce côté-ci et concernant leur intégrité.

De plus, le sénateur St. Germain a fait un commentaire personnel sur mon intégrité et j'ignore si je dois invoquer le Règlement ou soulever la question de privilège. Il a mis mon intégrité en doute. Je n'ai pas ses paroles exactes, aussi n'essaierai-je pas de le citer. Cependant, il a remis mon intégrité en doute et je lui demande de retirer ses paroles.

L'honorable Gerry St. Germain : Étant donné le respect que j'ai pour notre institution, honorables sénateurs, je suis prêt à réfléchir à cette requête. Le leader du gouvernement au Sénat et ministre a dit que nous avions une mentalité de gang de lynchage. C'est ce qu'il a dit. Il a déclaré que nous avions une mentalité de gang de lynchage. Il a attaqué le sénateur Tkachuk et a laissé entendre que, de ce côté- ci, nous avions une mentalité de gang de lynchage. S'il accepte de retirer ces paroles, je retirerai le mot « corrompu ».

Le sénateur Austin : Il n'en est pas question, honorables sénateurs. Une attaque politique est une chose, mais une attaque personnelle contre l'intégrité d'un sénateur est autre chose.

Son Honneur le Président : Nous discutons d'un rappel au Règlement. Un rappel au Règlement vise à savoir si nous respectons les règles et les pratiques de la procédure parlementaire que nous acceptons tous. Ce n'est pas le moment de tenir un débat. Je rappelle aux honorables sénateurs que nous voulons déterminer — et c'est moi qui vais trancher — si nous avons enfreint une règle du Sénat ou une de nos pratiques établie par la coutume, ce que nous vérifions dans nos textes de référence, comme je l'ai déjà fait. Se lancer dans un échange comme celui auquel nous assistons n'aide pas du tout à déterminer si le rappel au Règlement soulevé par le sénateur Grafstein est justifié.

L'honorable Tommy Banks : Honorables sénateurs, Son Honneur vient de mentionner le Règlement du Sénat et je voudrais donc attirer l'attention sur les articles 51, 52 et 53 de ce Règlement.

Selon l'article 51, les propos vifs, offensants ou accusateurs sont proscrits. Selon l'article 52, un sénateur qui s'estime offensé — comme c'est mon cas, puisque, je le dis entre parenthèses, j'étais visé par l'expression « bande de corrompus » — ou injurié dans la salle du Sénat, dans une salle de comité ou dans un local quelconque du Sénat, peut s'adresser au Sénat pour obtenir réparation, ce que je fais maintenant. Au paragraphe 52(2), on lit que, lorsqu'un sénateur a tenu des propos répréhensibles, c'est-à-dire des mots qui pourraient être offensants pour certaines personnes, et omet de se justifier, de se rétracter ou de présenter des excuses jugées satisfaisantes par ses pairs, le Sénat prendra à son égard les mesures qu'il jugera opportunes.

Honorables sénateurs, je pense que ce serait une bonne idée que de se reporter à ces trois articles du Règlement aux fins du présent débat.

L'honorable Terry Stratton (leader adjoint de l'opposition) : Dans le cadre de son examen de ce rappel au Règlement, Son Honneur devrait peut-être revoir le hansard depuis le début de la séance. Le sénateur Tkachuk a fait une déclaration; nous sommes passés à la période des questions, et le sénateur Austin s'en est pris à cette déclaration. J'inviterais Son Honneur à lire ce que le sénateur Austin a dit, en ce qui a trait aux attaques personnelles à l'endroit du sénateur Tkachuk.

(1440)

Le sénateur Austin : Le sénateur Tkachuk n'a pas fait l'objet d'attaques personnelles.

L'honorable Marcel Prud'homme : Ce n'est peut-être pas le bon moment pour le sénateur Austin de demander au sénateur St. Germain de retirer ce que celui-ci aurait déclaré à son sujet, étant donné que le sénateur Austin ne peut dire exactement quel mot il veut que le sénateur St. Germain retire. S'il souhaite une rétractation complète, je me demande bien ce que l'on demande au juste au sénateur St. Germain de retirer.

Le sénateur Austin voudra peut-être laisser cette question de côté jusqu'à demain, afin que nous puissions lire les mots offensants qu'il veut que le sénateur St. Germain retire. Ce serait plus clair que de dire, pour paraphraser le sénateur Austin : « Je ne sais pas exactement quel mot le sénateur St. Germain a employé. » Normalement, on demande le retrait d'un mot ou d'une accusation qui constitue une insulte. Une rétractation complète ne serait pas appropriée à ce stade-ci.

Votre Honneur, j'espère avoir pu vous aider dans votre réflexion.

Le sénateur Austin : Honorables sénateurs, pour expliquer au sénateur Prud'homme, je parle de l'expression que le sénateur St. Germain a utilisée pour mettre en doute mon intégrité.

Son Honneur le Président : Comme aucun autre sénateur ne souhaite intervenir, je vais donner la parole au sénateur Grafstein pour une dernière observation.

Le sénateur Grafstein : Pour en revenir à ma citation précédente de la page 523 du Marleau, il est inacceptable de mettre en doute l'intégrité, l'honnêteté ou la réputation de quelqu'un.

Honorables sénateurs, je siège dans cette enceinte depuis plus de deux décennies et je comprends que certaines choses peuvent se passer dans le feu de l'action, mais cela dit, j'ai essayé de ne jamais remettre en question l'intégrité personnelle d'un sénateur même dans le feu de l'action. Lorsque j'ai tenu des propos excessifs, je les ai retirés.

J'espère que l'honorable sénateur St. Germain réfléchira à nouveau à cela. Je ne parle pas des observations adressées au sénateur Austin, car il doit protéger ses propres intérêts. C'était une observation générale qui ternissait l'image de tous les sénateurs de ce côté-ci et j'espère que notre collègue pensera à cela et retirera ses paroles.

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, il y a eu un certain nombre d'interventions pour lesquelles je remercie les honorables sénateurs. Je vais examiner la transcription du sujet du recours au Règlement du sénateur Grafstein. J'examinerai également les ouvrages de référence et je transmettrai le plus tôt possible une décision ou une observation, selon ce qui convient, relativement à la question soulevée par le sénateur Grafstein.

L'honorable J. Michael Forrestall : Honorables sénateurs, je soulève un autre rappel au Règlement. Je ne voudrais pas que Son Honneur et les honorables sénateurs quittent notre Chambre aujourd'hui sans que notre éminent collègue de l'Île-du-Prince-Édouard ne soit absolument certain des observations tout à fait louables qu'il a faites au sujet de la formation de notre nation. Il a tout à fait raison; nos estimés pères fondateurs se sont réunis ici à Ottawa. Ils ont eu des discussions pendant des années, comme la plupart d'entre nous le savent. Cependant, ce groupe s'est également réuni à Halifax, en Nouvelle-Écosse, comme tout le monde ici le comprend, j'en suis persuadé. C'est à l'hôtel Queen, à Halifax, que la décision de fonder la Confédération a été prise.

Honorables sénateurs, j'invoque le Règlement pour signaler simplement que c'est là que notre nation est née. Des rencontres se sont tenues ensuite à l'Île-du-Prince-Édouard simplement parce que les autorités de l'hôtel Queen ne pouvaient supporter le bruit. Nous avons donc envoyé les Pères de la Confédération à l'Île-du- Prince-Édouard, où ils ont réglé quelques détails. Ils se sont rendus ensuite à Québec, le second coeur de notre grande nation, pour mettre la dernière main au projet.

Je suis d'accord pour dire qu'on devrait reconnaître le rôle de l'Île- du-Prince-Édouard. La plupart d'entre nous sommes conscients du fait que l'Île-du-Prince-Édouard a besoin de toute l'aide possible. Au fil des ans, j'ai toujours voulu aider cette province, mais je me dois de mettre les choses au point.

Son Honneur le Président : L'intervention du sénateur Forrestall ressemble davantage à une mise au point qu'à un recours au Règlement. Son intervention contribue grandement à aplanir les divergences d'opinions qui peuvent exister entre lui et le sénateur Downe.

Nous passons maintenant à l'ordre du jour.


ORDRE DU JOUR

LA LOI SUR LA STATISTIQUE

PROJET DE LOI MODIFICATIF—TROISIÈME LECTURE—SUITE DU DÉBAT

L'ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Rompkey, C.P., appuyée par l'honorable sénateur Losier- Cool, tendant à la troisième lecture du projet de loi S-18, Loi modifiant la Loi sur la statistique.

L'honorable Wilfred P. Moore : Honorables sénateurs, je suis heureux de vous entretenir aujourd'hui du projet de loi S-18, modifiant la Loi sur la statistique.

Je comprends que le gouvernement désire adopter ce projet de loi, mais j'estime également devoir exprimer mon opinion et participer au débat à cet égard. Comme nous l'avons entendu, cette modification figure à l'ordre du jour depuis le 27 octobre 1998. Cependant, les activités qui ont entouré cette question depuis lors n'ont pas dissipé les doutes soulevés dans cette Chambre.

Le recensement vise à présenter un portrait précis d'un pays et de sa population à une certaine période, d'où des recensements tous les cinq ans. On y analyse les caractéristiques de la population. Dans un pays comme le Canada, les recensements servent de façon plus pratique à établir les limites des circonscriptions électorales et à assurer l'exactitude des paiements de transfert.

En 1666, Jean Talon, gouverneur de la Nouvelle-France, a effectué le premier recensement que notre continent a connu. Avant la Confédération, les gouvernements de l'Amérique du Nord britannique procédaient également à des recensements. Après la Confédération, le Canada a fait des recensements tous les dix ans jusqu'en 1956, puis tous les cinq ans.

Au Canada, la tradition qui consiste à faire des recensements remonte à une époque lointaine. L'élément essentiel de cette tradition est la promesse du gouvernement du Canada selon laquelle les renseignements communiqués ne seront divulgués à personne, à l'exception de Statistique Canada. Autrement dit, à cette exception près, les renseignements communiqués seront tenus secrets et le droit des citoyens à la protection des renseignements qu'ils ont communiqués sera respecté.

Cette tradition de longue date est remise en question avec cette modification. L'enjeu est la divulgation publique des relevés des recensements faits après 1901. Les données des recensements de 1891 et de 1901 ont été mises à la disposition du public en 1983 et en 1993 respectivement. Celles du recensement de 1906 ont été rendues publiques en 2003, parce que ce recensement portait sur les provinces des Prairies et était tenu pour renfermer des renseignements moins secrets.

Pour réaffirmer ce secret, le ministère de la Justice a présenté en 1985 un avis juridique selon lequel les recensements réalisés à partir de 1911 sont survenus après que l'on eut apporté des modifications législatives garantissant la confidentialité des données recueillies.

En 1999, l'honorable John Manley a créé le Comité d'experts sur l'accès aux dossiers historiques du recensement et l'a chargé de trouver des solutions à ce problème. Le comité n'a pas tenu de séances publiques. Les groupes intéressés ont été invités à participer de leur plein gré. Toutefois, le comité a reçu 3 555 lettres, télécopies et courriels au cours des sept mois qu'a duré son étude, ainsi que quelque 95 mémoires provenant de sociétés de généalogie, d'histoire et d'archives. Comme notre collègue, madame le sénateur Milne, qui est membre du comité, peut l'attester, une vaste étude a été menée.

Après ses délibérations, le comité a conclu que les dossiers de recensement en question devraient être rendus publics. Voici ce qu'indique son rapport :

Le comité est fermement convaincu que la diffusion des dossiers du recensement présente des avantages. Il estime qu'au fil du temps, les inquiétudes relatives à la protection de la vie privée s'apaiseront et que le délai de 92 ans permettra d'éliminer ces préoccupations. Nous sommes persuadés que personne n'a eu l'intention d'imposer une obligation de confidentialité perpétuelle à l'égard des renseignements personnels recueillis dans le cadre du recensement. Nous croyons que la mention du transfert aux Archives nationales laisse également entendre que les dossiers finiront par être du domaine public; c'est pourquoi nous estimons que le fait de procéder à des modifications législatives à cette fin ne constituerait pas une rupture de promesse envers les répondants. Nous sommes d'avis que les précédents historiques et internationaux viennent pleinement appuyer cette position. Le comité est également conscient de la valeur du recensement et des autres travaux de Statistique Canada et ne désire nullement formuler des recommandations susceptibles de nuire à son travail. C'est pourquoi nous recommandons que soient diffusés après une période de 92 ans les dossiers des recensements tenus avant 1918 et après 2001, tout en conseillant au gouvernement de faire preuve de circonspection quant aux mesures législatives qui pourraient s'avérer nécessaires aux fins de la diffusion des dossiers des recensements tenus entre 1921 et 2001.

(1450)

Le débat ne devrait pas être axé principalement sur la nature délicate de l'information. La question est plutôt de savoir si un gouvernement ne devrait pas être tenu de respecter des normes plus élevées, par exemple, si une promesse faite à la population était ensuite brisée par un gouvernement subséquent.

D'aucuns ont affirmé qu'aucune disposition n'avait jamais restreint la divulgation des données de recensement. Je me permettrai d'attirer votre attention sur les passages suivants de la Loi sur la statistique de 1918 :

15.(1) Nul rapport individuel, non plus qu'aucune partie d'un rapport individuel, fait, et nulle réponse à des questions posées, pour les fins de la présente loi, sauf de la manière ci- après énoncée, ne doivent être publiés sans le consentement préalable, par écrit, de la personne ou de celui qui est alors propriétaire de l'entreprise à l'égard de laquelle le rapport a été fait ou la réponse a été donnée et, sauf pour les fins de poursuite en vertu de la présente loi, une personne non employée à un travail connexe au recensement ne doit pas être autorisée à prendre connaissance de ce rapport individuel ou de cette partie d'un rapport individuel.

(2) Sauf la matière susdite, nul rapport, sommaire de statistiques ou autre publication relevant de la présente loi ne doit contenir de détails compris dans un rapport individuel disposés de façon à permettre à qui que ce soit de s'assurer que des détails ainsi publiés sont des détails relatifs à un particulier ou à une affaire particulière.

Il me semble, honorables sénateurs, qu'en incluant ces dispositions dans la Loi sur la statistique, le Parlement cherchait manifestement à donner, par voie législative, aux personnes qui remplissent un questionnaire de recensement l'assurance que les renseignements qu'elles fournissent ne seront communiqués ou divulgués, par l'entremise de Statistiques Canada, à qui que ce soit, hormis les personnes chargées de traiter les données.

Notre collègue, le sénateur Lynch-Staunton, a cité les engagements en matière de confidentialité pris en 1918, 1948, 1971 et 1981. On comprend difficilement comment des engagements pris à tant d'occasions différentes puissent être interprétés aujourd'hui comme ayant un sens moins fort que celui qui s'en dégage clairement. Il n'y est pas expressément question de perpétuité, mais il n'y est pas question non plus de rendre ces renseignements publics à quelque moment que ce soit. Il convient assurément de pécher par excès de prudence dans le cas qui nous occupe.

Il y avait également des divergences d'opinion au sein du comité d'experts constitué par le ministre Manley. Nul autre que le commissaire à la protection de la vie privée de l'époque, M. Bruce Phillips, a déclaré en termes non équivoques qu'il s'opposait à la divulgation des données de recensement en question. L'ancien commissaire à la protection de la vie privée a soutenu qu'un engagement législatif à la confidentialité, pris en 1905, empêchait la divulgation de ces données. Il a déclaré : « La diffusion de renseignements recueillis dans le cadre du recensement viole le principe voulant que les renseignements recueillis à une fin ne devraient servir à aucune autre fin sans le consentement des intéressés. » Voilà la question de protection de la vie privée qui est en jeu ici. Comment est-il possible d'obtenir le consentement de ceux qui sont décédés? C'est impossible. Voilà qui devrait clore la discussion.

Dans une présentation au comité d'experts constitué par le ministre Manley, Statistique Canada exprime sa préoccupation de voir diminuer le taux de participation si le public avait moins confiance dans la capacité de l'organisme d'assurer la confidentialité des résultats de recensement. Le comité a rejeté cette préoccupation. Il a cité à cet égard un comité du Congrès américain qui s'est penché sur la question, et a déclaré que rien ne permettait d'établir un lien entre la divulgation de données de recensement et une baisse de la participation aux recensements. Cependant, il n'est peut-être pas aussi utile qu'on pourrait le croire d'utiliser les États-Unis comme exemple pour montrer que les taux de participation ne chuteront pas. Selon Statistique Canada, 96 p. 100 des Canadiens ont répondu au questionnaire du recensement en 1991 et en 1996, alors que seulement 63 p. 100 des Américains ont répondu au questionnaire de recensement de 1990. Ces chiffres doivent être mentionnés dans le cadre de la présente discussion.

La question qui nous occupe, c'est rien de moins que la rupture du lien de confiance entre le gouvernement et ses citoyens. Nous, parlementaires actuels, devons respecter la promesse faite par un autre gouvernement aux citoyens canadiens, peu importe le temps qui s'est écoulé depuis. Ce serait créer un dangereux précédent que de rompre d'une manière ou d'une autre, comme s'il n'avait aucune valeur, un engagement pris par le gouvernement à l'endroit de ses citoyens, sous prétexte que le temps a passé. Comme l'a dit le sénateur Plamondon, nous nous exposerions à perdre la confiance de nos concitoyens. Nous ne pouvons nous attendre à ce qu'ils nous gardent leur confiance, même si la mesure que nous envisageons d'adopter nous semble parfaitement inoffensive.

Dans la tradition politique canadienne, la rétroactivité n'a jamais été le mode de fonctionnement privilégié. C'est une façon controversée de régler des questions. Les citoyens qui ont rempli leur formulaire de recensement au cours des années en question ne s'attendaient pas à ce qu'on change les choses par la suite. On ne leur a jamais laissé entendre, ni dans les lois de l'époque ni en leur rendant visite, qu'un futur gouvernement modifierait les dispositions en vigueur en matière de confidentialité.

Le changement radical que comporte cette modification est inquiétante. Nous devons envisager avec davantage de soin les conséquences éventuelles des gestes que nous posons. Et, dans cet esprit, nous devons nous inspirer de l'histoire de notre pays pour rejeter le recours à une mesure législative qui aurait un effet rétroactif. Comme l'a dit le sénateur Plamondon, on range le Canada parmi les pays les mieux considérés au monde. Notre société est fondée sur la règle de droit et sur la stabilité de notre droit. Nous n'avons pas acquis et fait reconnaître cette stabilité en adoptant des lois rétroactives. Modifier ces règles en cours de route porterait atteinte à notre réputation bien établie sur le plan international et entacherait une tradition qui est bien implantée chez nous et qui a été extrêmement favorable à notre société.

Ceux qui envisagent de passer outre à cette promesse — formulée sans équivoque, selon moi, dans la Loi sur la statistique de 1918 — estiment que les intéressés n'en subiraient aucun préjudice. Or, à mon avis, il existe un danger très réel que les deux parties concernées en souffrent. D'abord, les citoyens à l'égard desquels le gouvernement s'est engagé à ne pas divulguer les renseignements qu'ils ont fournis lors d'un recensement : ceux-ci n'auraient plus aucun respect pour l'obligation de participer à un nouveau recensement. On aurait manqué à cet engagement.

Deuxièmement, le gouvernement de notre pays serait également compromis. La confiance est au cœur des relations entre le public et le gouvernement; la confiance que le gouvernement traitera ses citoyens avec équité et honnêteté et que lorsque le gouvernement fait une promesse à ses citoyens, cette promesse sera tenue. Ce n'est pas une question d'impôt. Ce n'est pas une question de changement de circonstances. Le changement des circonstances ne peut pas avoir une influence sur les engagements pris. Je pose la question : comment le passage de 92 années peut-il justifier la rupture d'une promesse?

Permettez-moi de citer l'honorable David Emerson, ministre de l'Industrie et ministre responsable de Statistique Canada, dans le communiqué de son ministère publié le 2 novembre 2004 et portant sur la présentation de ce projet de loi. Voici ce qu'il a dit :

Le consentement éclairé à l'utilisation de ses propres renseignements personnels est une question de protection fondamentale de la vie privée. Les Canadiens et les Canadiennes devraient avoir le droit de décider eux-mêmes s'ils veulent que leurs dossiers personnels du recensement soient rendus publics plus tard [...]

Il n'y a rien à redire au sujet de la disposition de ce projet de loi relative au consentement actif. Il s'agit d'un élément formidable de l'amendement. Permettre aux Canadiens de choisir si les données de recensement les concernant seront rendues publiques après 92 ans est une disposition juste et appropriée.

(1500)

Le message du ministre porte sur le droit fondamental à la vie privée et donne aux Canadiens le pouvoir de prendre eux-mêmes une décision à ce sujet. On mentionne encore une fois le droit fondamental à la vie privée. Qui peut se prévaloir de ce droit? Être en vie est-il une condition préalable?

Pourquoi notre génération croit-elle si fermement qu'elle possède une sagesse qui faisait défaut aux gouvernements qui l'ont précédée? Croyons-nous vraiment que ces précédents gouvernements n'ont pas étudié attentivement la situation sous tous ses angles et que leur engagement envers la protection de la vie privée de leurs citoyens était moindre que le nôtre? Je ne pense pas. De plus, l'appui du ministre à la protection de la vie privée est-il moins approprié ou significatif aujourd'hui que dans le passé? Je ne le pense pas.

Qu'en est-il des personnes qui ont rempli les formulaires de recensement à partir de 1906? Qui parlera en leur nom? Ces personnes ne peuvent pas se faire entendre. Elles ne peuvent pas faire valoir leur point de vue. Je crois que, puisque ces Canadiens ont participé aux recensements en tenant pour acquis que leurs droits à la protection des renseignements personnels seraient protégés, et puisqu'ils ont confié ces renseignements au gouvernement, qui leur a promis d'en préserver le secret, nous n'avons pas le droit d'agir dans le sens contraire, en leur nom ou au nom du gouvernement qui a pris cet engagement à leur égard.

Je crois que quelque 77 000 Canadiens encore en vie seront directement touchés par l'adoption de ce projet de loi, qui propose de divulguer des données de recensement recueillies entre 1906 et 1911. Je présume que ces personnes seront consultées avant que les données de recensement qui les concernent ne soient divulguées. Sinon, le projet de loi permettra-t-il tout simplement la divulgation de ces renseignements, sans en aviser au préalable les intéressés et sans obtenir leur consentement? C'est une question très sérieuse.

Ces citoyens seront-ils réduits à intenter des poursuites contre le gouvernement du Canada, leur propre gouvernement, pour l'empêcher de divulguer des renseignements personnels qu'ils ont fournis dans les formulaires de recensement? Que dire de l'anxiété qu'éprouveront les survivants âgés et leurs familles, et les familles des personnes décédées qui ont participé aux recensements? Qui paiera leurs frais? Je ne doute pas que les participants aux recensements, qui sont visés par le projet de loi, aimeraient savoir à quoi s'en tenir. Ils y ont droit.

Son Honneur la Présidente intérimaire : Honorable sénateur Moore, votre temps de parole est écoulé. Voulez-vous demander la permission de continuer?

Le sénateur Moore : Je demande la permission de continuer.

Le sénateur Rompkey : Comme le veut l'usage, vous disposerez de cinq minutes.

Des voix : D'accord.

Le sénateur Moore : J'aurai terminé d'ici là, honorables sénateurs.

Selon un autre avis juridique, puisque rien n'indique de façon précise pendant combien de temps ces documents doivent être gardés secrets, et compte tenu du transfert de ces données aux Archives nationales du Canada, il est justifié de rendre ces renseignements publics. J'ai lu le compte rendu des débats sur la question, et je crois comprendre qu'il n'est nulle part question de secret perpétuel. Toutefois, il est expressément indiqué que l'information ne doit pas être communiquée à une partie qui ne participe pas à la cueillette des données et au recensement, ni au public. Ces renseignements sont suffisamment précis pour que nous n'en soyons pas réduits à devoir deviner les intentions du gouvernement qui a adopté la loi initiale.

Honorables sénateurs, l'aspect crucial de cette question réside dans la nécessité de maintenir un rapport de confiance étroit entre tout gouvernement et ses citoyens. En soutenant qu'il arrive un moment dans ce rapport où, avec le passage du temps, il devient possible de ne pas respecter une promesse d'un gouvernement, on risque de créer un précédent très dangereux.

Le peuple canadien nous a confié, à titre de sénateurs, la responsabilité de défendre les droits de tous les citoyens du pays. Je prétends pour ma part que cela englobe tous ceux qui nous ont précédés. Assumons-nous nos responsabilités et méritons-nous leur confiance en nous soustrayant à un engagement pris avec nos ancêtres?

Certains ont souligné le caractère inoffensif de la divulgation de ces dossiers du recensement. On nous dit que, à partir d'un certain moment, le caractère de moins en moins sensible de l'information, combiné au passage du temps, 92 ans en l'occurrence, finit par dissiper tout enjeu de protection de la vie privée. C'est l'aspect qui doit nous inspirer une grande prudence comme législateurs. Doit-on axer le débat sur les données elles-mêmes ou sur la qualité de notre bonne gestion de ces données? Nous devons considérer que la mesure législative implique la rupture d'un accord conclu entre nos arrière-grands-parents, nos grands-parents ou nos parents et le gouvernement de l'époque. Il ne me semble pas sage de le faire et j'estime que cela ne correspond ni à nos pouvoirs ni à notre mandat.

Je vous demande de vous rappeler qui vous êtes, la charge que vous exercez et votre rôle en tant que défenseur des droits des Canadiens. Si l'on décide d'abroger cette entente, alors nous devons à tout le moins prendre conscience des graves répercussions que cela pourrait avoir et du fait que nous ne pourrons en exiger davantage des sénateurs qui nous succéderons.

L'honorable Gerald J. Comeau : Le sénateur accepterait-il de répondre à deux questions très brèves?

Le sénateur Moore : Oui.

Le sénateur Comeau : Le sénateur savait-il que la Cour fédérale, dans une affaire de demande de publication de dossiers historiques de recensement, avait établi en 2004 que c'était le statisticien en chef qui avait la garde et le contrôle des documents relatifs au recensement de 1911, et des recensements ultérieurs bien entendu, et que, par conséquent, tout projet visant à rendre public le recensement devait être autorisé en vertu de mesures législatives? En d'autres termes, jusque-là, on avait soutenu que le statisticien en chef n'avait pas l'obligation d'assurer la garde des données mais que, en fait, la Cour fédérale avait statué qu'il en était le gardien.

Voici ma deuxième question : on a dit que les dossiers du recensement renfermeraient des renseignements extrêmement précieux sur nos antécédents médicaux familiaux ou, autrement dit, de l'information permettant d'identifier des maladies ou des problèmes médicaux de famille. Par conséquent, il pourrait s'avérer utile de consigner toute cette information dans les dossiers, de sorte que des gens puissent consulter ces derniers pour en savoir plus long sur le passé médical de leur famille. Néanmoins, c'est là une lame à double tranchant. Si l'on permet à des personnes d'effectuer des recherches sur leurs antécédents médicaux, qu'il s'agisse de santé mentale ou physique, les compagnies d'assurances pourront faire de même. Si les compagnies d'assurances commencent à fouiller dans notre passé médical, cela ne pourra-t-il pas avoir des répercussions sur le type d'assurances auxquelles nous pourrons souscrire?

Le sénateur Moore : Je tenterai de répondre à ces deux questions.

En ce qui concerne la première question, je n'étais pas au courant de la décision de la Cour fédérale, mais cette décision me paraît indéniablement conforme aux dispositions de la Loi sur la statistique de 1918. Rien dans les cahiers de législation ne va à l'encontre des dispositions de cette loi.

L'honorable sénateur évoquait la possibilité que d'autres personnes utilisent ces renseignements personnels pour desservir leurs propres intérêts. Tout cela vient simplement confirmer la nécessité absolue de préserver la confidentialité des données.

Il y a une affaire actuellement aux États-Unis — la Gazette de Montréal en faisait état dans son édition du 9 avril — où des renseignements de ce genre sont puisés dans les dossiers du gouvernement par l'Église des Mormons concernant des citoyens juifs américains. Cette Église célèbre des baptêmes par procuration de braves gens qui sont décédés et qui avaient été des victimes de différents camps de concentration. C'est un cas extrême, mais c'est ce qui pourrait se produire.

(Sur la motion du sénateur Lynch-Staunton, le débat est ajourné.)

(1510)

LA LOI SUR LES BREVETS

PROJET DE LOI MODIFICATIF—ADOPTION DU RAPPORT DU COMITÉ

Le Sénat passe à l'étude du huitième rapport du Comité sénatorial permanent des banques et du commerce (projet de loi C-29, Loi modifiant la Loi sur les brevets, avec des propositions d'amendements), présenté au Sénat le 12 avril 2005.

L'honorable Jerahmiel S. Grafstein propose : Que le rapport soit adopté.

— Honorables sénateurs, j'ai eu l'honneur de présenter hier le huitième rapport du Comité sénatorial permanent des banques et du commerce sur le projet de loi C-29, Loi modifiant la Loi sur les brevets. Il est clairement ressorti durant l'étude en comité que deux amendements techniques importants devaient être apportés pour pallier une erreur de rédaction survenue dans la loi précédente. Conformément à l'article 99 du Règlement, je vous expliquerai brièvement les amendements que propose le comité.

Le premier amendement consiste à ajouter quatre annexes à la Loi sur les brevets, comme le prévoyait à l'origine la Loi modifiant la Loi sur les brevets et la Loi sur les aliments et drogues (engagement de Jean Chrétien envers l'Afrique), chapitre 23 des Lois du Canada (2004). Comme je l'ai déjà indiqué, cet amendement vise à corriger une erreur de rédaction survenue dans la loi précédente et à faire en sorte que les annexes fassent maintenant partie de la Loi sur les brevets.

Cet amendement concerne la partie de la Loi sur les brevets qui porte sur l'utilisation des brevets à des fins humanitaires pour s'attaquer à des problèmes de santé publique. Cette partie établit le cadre quant à la façon de s'y prendre. Les annexes font partie intégrante de ce cadre, et les amendements font en sorte qu'elles se trouvent maintenant en bonne et due forme dans la Loi sur les brevets.

Le deuxième amendement a trait à l'entrée en vigueur des articles visés dans le projet de loi C-29. Les deux articles qui concernent la Loi modifiant la Loi sur les brevets et la Loi sur les aliments et drogues (engagement de Jean Chrétien envers l'Afrique) entreront en vigueur à la date d'entrée en vigueur de cette loi.

L'autre article, qui concerne les taxes réglementaires à payer pour dédommager les titulaires de brevets et les demandeurs touchés par le jugement de la Cour d'appel fédérale dans l'affaire Dutch Industries Ltd. c. Le commissaire aux brevets, Barton No-Till Disk Inc. et Flexi-Coil Ltd., entrera en vigueur à la date fixée par décret du gouverneur en conseil.

Honorables sénateurs, ces amendements de nature technique ont pour but de garantir que cette initiative appuyée par tous les partis, ce qui a été le cas à l'étape de l'étude en comité, puisse être mise en œuvre comme prévu. J'exhorte tous les sénateurs à appuyer ces amendements pour qu'on puisse renvoyer rapidement ce projet de loi à l'autre endroit.

Son Honneur le Président : Comme aucun sénateur ne prend la parole, les honorables sénateurs sont-ils prêts à se prononcer?

Des voix : Le vote!

Son Honneur le Président : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?

(La motion est adoptée, et le rapport est adopté.)

TROISIÈME LECTURE

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, quand lirons- nous le projet de loi une troisième fois?

L'honorable Jerahmiel S. Grafstein : Maintenant.

Son Honneur le Président : Y a-t-il débat?

L'honorable Terry Stratton (leader adjoint de l'opposition) : Le projet de loi est-il si urgent? Ne pourrait-il pas attendre jusqu'à la prochaine séance du Sénat? Est-ce normal de procéder ainsi?

Le sénateur Grafstein : Cela pourrait attendre, honorables sénateurs. À la lumière de ce qui se passe à l'autre endroit, je crois qu'il conviendrait peut-être de terminer l'étude de cette mesure le plus rapidement possible. La raison de cela est l'aide humanitaire dont l'Afrique a désespérément besoin. Il faudrait que nous terminions l'étude de cette mesure le plus rapidement possible.

Il s'agissait d'une erreur de forme. La façon d'y remédier a été approuvée par tous les partis, et elle a été approuvée à l'unanimité par le comité. Les objections concernaient des questions de forme. Je ne vois pas pourquoi nous ne pourrions pas faire avancer le projet de loi.

Le sénateur Stratton : Dans des circonstances exceptionnelles, nous de ce côté-ci sommes toujours coopératifs. Cependant, nous sommes en train de conjecturer sur ce qui arrivera à l'autre endroit. C'est pourquoi je demanderais que nous fassions demain la troisième lecture du projet de loi. Il faut que les circonstances soient exceptionnelles pour que nous dérogions à la procédure normale.

Son Honneur le Président : La permission n'est pas accordée.

(Sur la motion du sénateur Grafstein, la troisième lecture du projet de loi est inscrite à l'ordre du jour de la prochaine séance.)

PROJET DE LOI SUR LA MISE EN QUARANTAINE

ADOPTION DU RAPPORT DU COMITÉ

Le Sénat passe à l'étude du onzième rapport du Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie (projet de loi C-12, Loi visant à prévenir l'introduction et la propagation de maladies transmissibles, avec des amendements), présenté au Sénat le 12 avril 2005.

L'honorable Wilbert J. Keon : Honorables sénateurs, je propose : Que le rapport soit adopté.

Son Honneur le Président : Souhaitez-vous prendre la parole, sénateur Keon?

Le sénateur Keon : Non.

[Français]

L'honorable Lucie Pépin : Honorables sénateurs, lors de l'étude article par article du projet de loi, le 23 mars dernier, j'ai proposé des amendements au projet de loi C-12. Par mégarde, la version française d'un des amendements proposés a omis une modification requise dans la version anglaise du projet de loi. Je propose donc de remédier à cette omission par la présente motion.

MOTION D'AMENDEMENT

L'honorable Lucie Pépin : Honorables sénateurs, je propose, appuyée par le sénateur Keon :

Que le onzième rapport du Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie ne soit pas maintenant adopté mais qu'il soit modifié, par adjonction, à l'amendement no 2, après les mots, « article 62.2 : » de ce qui suit :

« a) substituer de la version anglaise, la ligne 15 par ce qui suit :

[Traduction]

« being laid before each House of Parliament if the'' et

b) ».

Son Honneur le Président : Comme aucun sénateur ne prend la parole, les honorables sénateurs sont-ils prêts à se prononcer sur l'amendement?

Des voix : Le vote!

Son Honneur le Président : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion d'amendement?

Des voix : D'accord.

Son Honneur le Président : Nous en sommes maintenant au rapport sur le projet de loi amendé. Quelqu'un désire-t-il prendre la parole?

Des voix : Le vote!

Son Honneur le Président : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion modifiée?

(La motion est adoptée, et le rapport est adopté.)

TROISIÈME LECTURE

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, quand ce projet de loi sera-t-il lu une troisième fois?

(Sur la motion du sénateur Keon, la troisième lecture du projet de loi est inscrite à l'ordre du jour de la prochaine séance.)

(1520)

[Français]

LE CODE CRIMINEL

PROJET DE LOI MODIFICATIF—RAPPORT DU COMITÉ—AJOURNEMENT DU DÉBAT

Le Sénat passe à l'étude du sixième rapport du Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles (projet de loi S-11, Loi modifiant le Code criminel (loteries), avec des amendements et des observations), présenté au Sénat le 12 avril 2005.—(L'honorable sénateur Bacon)

L'honorable Lise Bacon : Honorables sénateurs, je propose l'adoption de ce rapport.

Son Honneur le Président : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion ?

[Traduction]

L'honorable Terry Stratton (leader adjoint de l'opposition) : Madame le sénateur Bacon prendra-t-elle la parole aujourd'hui?

Le sénateur Bacon : Oui.

[Français]

Le sénateur Bacon : Honorables sénateurs, le sixième rapport du Comité permanent des affaires juridiques et constitutionnelles recommande certains amendements au projet de loi S-11. Ce projet de loi apporte des modifications au Code criminel concernant l'exploitation des appareils de loterie vidéo. Le projet de loi vise aussi à limiter la présence des ALV dans certains endroits, comme les hippodromes, les casinos, les salles de paris, et ce à l'exclusion de tout autre endroit. Actuellement, toutes les provinces autorisent la présence des ALV dans les bars et d'autres lieux, sauf l'Ontario, la Colombie-Britannique et un territoire, le Yukon.

Le projet de loi S-11, que parraine le sénateur Lapointe, vient mettre un terme à cette pratique. Après avoir entendu de nombreux témoins sur cette question, les membres de votre comité sont arrivés, avec dissidence, — parce qu'un membre du comité n'était pas d'accord— à la conclusion suivante : l'objectif poursuivi par le projet de loi nous apparaît légitime et l'opportunité des mesures proposées outrepasse les inconvénients qu'elle entraîne dans leur mise en oeuvre. Votre comité a donc décidé de renvoyer le projet de loi à cette Chambre, avec des amendements, de façon à atténuer les difficultés de sa mise en oeuvre.

Dans un premier temps, nous avons procédé à l'amendement de forme, ce qui ne diminue en rien la portée du projet de loi et évite toute possibilité de confusion. Dans le premier article, nous avons été plus précis, suite aux commentaires du ministère de la Justice. Nous ne parlons plus de jeux, moyens, systèmes, dispositifs ou opérations, mais simplement de jeux qui sont exploités par un appareil de loterie vidéo ou un appareil à sous. La raison d'être du projet de loi n'est d'aucune façon affectée par ces changements de pure forme.

L'article 2 du projet de loi est remplacé par une autre disposition. Le projet de loi prévoyait l'entrée en vigueur de la loi 180 jours après la date de sa sanction. L'amendement adopté par le comité prévoit quant à lui l'entrée en vigueur de la loi à la date fixée par décret au plus tard trois ans après la date de sa sanction.

Le gouvernement du Canada doit par ailleurs offrir aux gouvernements provinciaux et territoriaux l'occasion de participer à des consultations portant sur la mise en œuvre de la loi. Cette précaution est importante car nous sommes en présence de deux ententes fédérales-provinciales, soit celle de 1979 et celle de 1985, exposant la politique du Canada sur le jeu. Le projet de loi S-11 déroge à ces ententes, mais étant donné la pleine compétence du Parlement fédéral sur le Code criminel, nous avons la légitimité constitutionnelle nécessaire pour aller de l'avant. Toutefois, pour éviter des changements brusques ou des surprises, il semble incontournable de consulter les provinces et territoires sur les changements proposés.

Comme vous le savez probablement, Entente-cadre sur l'union sociale au Canada, adoptée en 1999, prévoyait à son quatrième volet que lors d'un changement majeur à une politique qui aurait une incidence importante sur un autre gouvernement, les gouvernements conviennent de se donner un préavis et de se consulter avant la mise en œuvre du changement. Voilà les motifs qui ont conduit le comité à retenir les amendements suggérés.

Nous sommes d'avis qu'une période de trois ans donne suffisamment de temps pour les consultations entre les gouvernements et pour que, dans l'optique où on souhaite procéder avant, le projet de loi peut être mis en vigueur à une date fixée par décret.

Nous avons cru approprié de joindre à ce rapport des observations qui rendent compte principalement de l'état d'esprit dans lequel se trouvait le comité lors de l'étude de cette question. La majorité des membres du comité ont davantage retenu les importants ravages sociaux et la détresse psychologique qu'entraînent les appareils de loterie vidéo sur trop de Canadiens que les autres aspects. La grande majorité des intervenants qui ont comparu devant le comité ont soutenu que les effets néfastes des ALV sur la population outrepassaient largement les bénéfices qu'on pouvait en tirer.

(Sur la motion du sénateur Stratton, au nom du sénateur Eyton, le débat est ajourné.)

[Traduction]

LE BUDGET DE 2005

INTERPELLATION—SUITE DU DÉBAT

L'ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur l'interpellation de l'honorable sénateur Kinsella, attirant l'attention du Sénat sur le budget présenté par le ministre des Finances à la Chambre des communes le 23 février 2005.—(L'honorable sénateur Di Nino)

L'honorable Consiglio Di Nino : Honorables sénateurs, je suis heureux de participer au débat sur la motion du sénateur Kinsella relativement au budget déposé par le ministre des Finances le 23 février.

Le budget présente un programme ambitieux d'augmentation des dépenses, puisque les déboursés visant divers programmes sont censés grimper à 36 milliards de dollars au cours des cinq prochaines années, grâce à une augmentation subite des recettes de 42 milliards de dollars. En dépit d'une modeste réduction des impôts, le gouvernement s'attend à percevoir, en 2009, 35 p. 100 de plus en impôts sur le revenu des particuliers qu'il ne l'a fait l'an dernier. Les recettes tirées de l'impôt des particuliers augmentent plus rapidement que toute autre catégorie de recettes.

Compte tenu que le gouvernement touchera des recettes aussi élevées, les Canadiens doivent-ils croire qu'une baisse d'impôt de 16 $ par mois, ou 53 cents par jour, soit même pas assez pour s'acheter un café de nos jours, constitue le meilleur allégement fiscal que le gouvernement puisse leur offrir?

La catégorie de recettes qui arrive au deuxième rang de celles où la croissance est la plus forte est la TPS. En effet, on s'attend à ce que les recettes nettes de la TPS augmentent de 8 milliards de dollars, soit quelque 27 p. 100, au cours des cinq années à venir. Ai-je dit TPS? Les libéraux n'ont-ils pas promis de la supprimer?

Honorables sénateurs, de toutes les mesures prises par l'ancien gouvernement progressiste-conservateur, la TPS est sans doute la plus controversée, et les libéraux s'y sont opposés de façon catégorique. Jean Chrétien a dit qu'il l'a remplacerait, dans les deux ans, par une taxe plus équitable qui produirait autant de recettes. Il a promis d'abolir cette taxe honnie. Paul Martin, alors qu'il était candidat à la direction de son parti, a promis aussi de la supprimer. Cependant, ils se sont vite rendu compte qu'il était plus facile de faire une telle promesse que de la respecter — cela n'a rien de nouveau — et que la TPS était en fait une initiative fort sensée. La TPS a remplacé l'ancienne taxe de vente fédérale, qui était cachée. Largement connue comme taxe sur les ventes des manufacturiers, cette taxe était trop complexe et présentait un grand nombre de lacunes, ce qui nuisait à notre économie et à la compétitivité de nos exportations. Le remplacement de la taxe de vente fédérale par la TPS a réduit le coût des immobilisations et a cessé de désavantager les biens produits au Canada par rapport aux importations, ce qui a non seulement aidé le Canada à devenir plus compétitif, mais a contribué à stabiliser l'assiette du revenu. Je soupçonne que les libéraux le savaient parfaitement bien, mais qu'ils ont dit le contraire aux Canadiens pour gagner aux élections.

(1530)

Je vais donner aux honorables sénateurs des exemples de leur opposition à la TPS. À l'époque, les futurs sénateurs Callbeck, Harb, Maheu, Robichaud et Rompkey, qui étaient alors députés à l'autre endroit, ont tous prononcé des discours contre la TPS. Le 29 novembre 1990, le sénateur Corbin a pris la parole ici pour dire : « La TPS n'est qu'un acte de panique, un vol de grand chemin et un moyen d'aller chercher de l'argent dans la poche des contribuables canadiens. » Le sénateur Kirby avait longuement soutenu que la TPS était injuste pour les Canadiens à faible revenu, injuste pour le Canada atlantique, ajoutant : « Il y a d'autres moyens d'agir s'il est nécessaire d'éliminer la taxe de vente des fabricants et d'augmenter les recettes. » Nous attendons toujours que le sénateur Kirby nous décrive ces autres moyens. Le sénateur Watt a dit que la TPS nuirait au Nord. Le sénateur Grafstein a affirmé qu'il ne pouvait pas accepter les preuves présentées à l'appui de la TPS. Les sénateurs Austin et Kenny ont déposé des pétitions pour retarder le débat. Quant à madame le sénateur Fairbairn, elle était profondément préoccupée par le fait que la TPS s'appliquerait aux livres. Le 30 octobre 1990, elle a déclaré au Sénat que la TPS « introduirait une taxation punitive d'ouvrages qui jouent un rôle fondamental dans notre progrès futur, des ouvrages qu'il aurait fallu rendre plus accessibles et non moins accessibles ». Elle a ajouté : « La TPS, appliquée sans mesures de soutien aux produits culturels canadiens, y compris les imprimés, pourrait bien les rendre tellement inaccessibles que les Canadiens perdraient de vue, une fois de plus, leur propre expression créative. » Madame le sénateur Fairbairn parlait ainsi en faveur d'un amendement libéral au projet de loi sur la TPS qui aurait exempté les livres. Dans ces conditions, pourquoi a-t-elle, avec le reste de ses collègues, voté contre le projet de loi S-10, qui proposait justement de faire ce qu'elle avait préconisé alors? Pourquoi les sénateurs de l'autre côté ont-ils voté contre l'amendement proposé par le sénateur Oliver au projet de loi C-70 sur l'harmonisation de la TPS, qui proposait d'exempter les livres de la TVH ou taxe de vente harmonisée? Une taxe de 7 p. 100 sur les livres était excessive quand les libéraux étaient dans l'opposition, mais une taxe harmonisée de 15 p. 100 ne pose aucun problème quand ils sont au pouvoir.

Honorables sénateurs, la TPS avait été délibérément conçue pour avoir une vaste assiette, comprenant cependant des exemptions pour de nombreux articles de base comme l'alimentation, les loyers et les frais de santé et d'éducation. De même, les universités, les écoles et les bibliothèques ont été exemptées de l'imposition de la TPS sur leurs services. Les auteurs de la taxe avaient également prévu un crédit d'impôt pour les Canadiens à faible revenu, afin de leur donner les moyens de payer des choses telles que les livres. Toutefois, il restait possible de modifier la TPS à l'avenir. Madame le sénateur Fairbairn l'a reconnu, au cours du même débat sur la TPS que j'ai mentionné il y a quelques instants, lorsqu'elle a cité le premier ministre d'alors, Brian Mulroney : « Une fois que la taxe aura été appliquée d'une façon générale pendant un certain temps, le gouvernement voudra en examiner les répercussions, peut-être la réviser et la modifier plus tard, après sa mise en place. » L'ancien gouvernement avait clairement dit qu'il suivrait les répercussions de la TPS sur un certain nombre de domaines, y compris les livres.

L'analphabétisme est un problème sérieux au Canada, surtout parmi les Canadiens à faible revenu. Au cours de l'examen en comité du projet de loi visant à exempter les livres de la TPS, d'éminents Canadiens, des étudiants, des libraires, des éditeurs, des bibliothécaires et bien d'autres membre de la Don't Tax Reading Coalition nous ont dit et répété que cet aspect de la TPS nuit énormément aux efforts d'alphabétisation déployés au Canada. Pourtant, nos collègues d'en face ont tous votés contre les projets de loi ultérieurs.

L'exemption des livres de la TPS aiderait beaucoup les étudiants dont les frais ne cessent d'augmenter. Il est malheureux que le gouvernement ait encore une fois manqué une occasion de tenir l'une de ses promesses. Il est peut-être temps de déposer un projet de loi exemptant les livres de la TPS. Espérons que les sénateurs d'en face l'appuieront cette fois-ci. Madame le sénateur Fairbairn, qui a fait beaucoup pour l'alphabétisation, sait fort bien que la présence de lecture à la maison joue un rôle capital dans le développement intellectuel des enfants. Ce domaine a besoin de changer parce que les libéraux ont oublié tout ce en quoi ils croyaient lorsqu'ils étaient dans l'opposition.

La réforme de la taxe de vente n'est que l'une des mesures prises pour faire du Canada un endroit plus dynamique et plus compétitif pour les affaires. En 1980, les libéraux ont introduit le Programme énergétique national, empoisonnant du même coup les relations entre l'Est et l'Ouest et paralysant le développement énergétique et l'économie de l'Ouest du Canada. Madame le sénateur Carney, alors ministre de l'Énergie au cours du premier mandat du gouvernement conservateur, a démantelé le Programme énergétique national, dans le cadre d'une série de mesures destinées à rétablir la confiance des investisseurs.

Il n'est guère difficile de comprendre pourquoi tant de Canadiens de l'Ouest se sont alarmés face au Protocole de Kyoto, qui promettait de les mener sur une voie semblable à celle qu'on avait voulu leur faire emprunter il y a un quart de siècle. Le budget ne présente aucun plan réel visant à atteindre les objectifs de Kyoto, mais contient un texte intitulé « Un cadre d'évaluation des propositions fiscales relatives à l'environnement », qui occupe un chapitre entier. Nous devrions demander à M. Indécis s'il y aura une taxe sur les combustibles fossiles.

Les libéraux ont également créé une Agence d'examen de l'investissement étranger qui a cherché à faire obstacle à l'investissement étranger au Canada, empêchant la création de nouveaux emplois et de nouvelles perspectives. Le gouvernement précédent avait éliminé ces obstacles en remplaçant l'AEIE par Investissement Canada, organisme chargé d'encourager l'investissement étranger, qui a réussi à atteindre son objectif. Notre régime d'imposition des sociétés n'était pas compétitif avant le budget et, compte tenu de tous les facteurs, y compris les règles sur l'amortissement et la taxe provinciale de vente sur les intrants d'entreprise, il demeure peu compétitif. Le budget ne fait pas grand- chose pour les entreprises canadiennes. Nous devons en faire davantage pour encourager les Canadiens à investir au Canada. Nous espérons que les récentes nouvelles selon lesquelles les Canadiens ont directement investi quelque 88 milliards de dollars dans les paradis fiscaux étrangers vont réveiller le gouvernement. Nous sommes une nation marchande qui compte sur un accès garanti aux marchés. Le sénateur Kelleher et le sénateur Carney ont tous deux joué un rôle de premier plan dans la conclusion de l'Accord de libre-échange avec les États-Unis. Et les mêmes gens qui s'étaient battus contre la TPS en ont fait de même avec l'ALE, luttant avec acharnement contre les politiques qu'ils ont adoptées aujourd'hui. La plupart des arguments avancés contre l'Accord de libre-échange Canada-États-Unis, devenu plus tard l'ALENA, se sont révélés faux. La frontière n'a pas disparu. Il n'y a pas eu de délocalisation massive des emplois en faveur du Mexique. En fait, il y a des Américains qui se plaignent de la délocalisation d'emplois des États-Unis au Canada. Si l'assurance-maladie risque d'être compromise, c'est parce que le premier ministre Paul Martin a réduit les fonds affectés aux soins de santé et non à cause de l'ALENA. La culture canadienne est aussi dynamique que jamais. Les Grands Lacs n'ont pas été vidés pour donner à boire à une Amérique qui a soif. Au lieu de dépérir, notre industrie vinicole s'est adaptée, prospère et remporte des prix. Nous sommes aussi souverains que jamais. L'ALENA a entraîné une énorme augmentation de nos échanges avec les États-Unis et le Mexique, et la plupart des décisions prises en cas de différend ont été en notre faveur. Oui, nous souffrons encore des problèmes de l'ESB et du bois d'oeuvre résineux, mais plus de 80 p. 100 de notre commerce ne connaît aucun problème. Et Dieu merci, je n'entends plus aucun de mes amis d'en face préconiser de dénoncer l'ALENA. Pourtant, si on analyse ce budget, on constate qu'il ne contient pratiquement rien pour renforcer notre capacité d'exportation.

Honorables sénateurs, il faut rendre justice aux libéraux d'avoir retenu beaucoup des politiques de l'ancien gouvernement, ce qui a permis d'engendrer de la croissance économique qui, à son tour, a provoqué une hausse rapide des recettes de l'État.

Lorsque nous avons introduit la TPS, le gouvernement progressiste-conservateur avait promis aux Canadiens que cette taxe ne servirait qu'à payer le service de la dette et à rembourser celle-ci. Paul Martin et Jean Chrétien avaient alors dit qu'ils s'en débarrasseraient au plus tôt. Ils ne s'en sont pas débarrassés puisqu'elle est encore là et qu'elle rapporte près du double de ce qu'elle rapportait en 1993. D'ici 2010, elle permettra de recueillir 8 milliards de dollars de plus que cette année-ci et 23 milliards de plus qu'au moment où les libéraux ont été élus.

Dans son interpellation prébudgétaire, le sénateur Kinsella avait recommandé au gouvernement de concevoir son budget de façon à consacrer deux septièmes des recettes nettes de la TPS à la réduction de la dette. Cela représenterait près de 9 milliards de dollars par an. Le Canada doit réduire plus rapidement le niveau de sa dette pour avoir la latitude financière qui sera essentielle pour satisfaire aux besoins d'une population vieillissante dans les années à venir.

Honorables sénateurs, le gouvernement actuel profite aujourd'hui du fruit des efforts de l'ancien gouvernement progressiste- conservateur qui a introduit la TPS et a négocié l'ALE puis l'ALENA. L'énorme hausse des recettes qui en a résulté a permis au gouvernement de réduire les impôts pour aider les nombreux Canadiens qui se débattent pour faire face au coût de la vie. Elle a donné au gouvernement la possibilité d'aider les étudiants dont les frais ne cessent de grimper. Cette augmentation des recettes donnait au gouvernement l'occasion de réduire la dette, qui hypothèque l'avenir de tous nos petits-enfants. Elle lui donnait la possibilité de tenir sa promesse d'éliminer la TPS sur les livres et autres publications. Mais il n'a rien fait. On viendra nous parler de compassion pour le Canadien moyen. Je dirais que le budget de cette année est en fait une belle occasion qu'on aura laissé passer.

(Sur la motion du sénateur LeBreton, le débat est ajourné.)

(1540)

LE SÉNAT

MOTION VISANT À MODIFIER L'ARTICLE 32 DU RÈGLEMENT—LES INTERVENTIONS AU SÉNAT—AJOURNEMENT DU DÉBAT

L'honorable Eymard G. Corbin, conformément à l'avis du 24 février 2005, propose :

Que le Règlement du Sénat soit modifié à l'article 32 par substitution de ce qui suit :

32. (1) Un sénateur qui désire prendre la parole au Sénat doit se lever du siège qu'il occupe habituellement avant de s'adresser aux autres sénateurs.

(2) Tout sénateur qui prend la parole au Sénat doit s'adresser dans l'une des langues officielles.

(3) Nonobstant le paragraphe (2), un sénateur qui désire s'adresser à la Chambre en inuktitut doit en aviser le greffier du Sénat au moins 4 heures avant le début de la séance du Sénat.

(4) Le greffier du Sénat prend les dispositions nécessaires afin d'obtenir l'interprétation des paroles prononcées en inuktitut dans les deux langues officielles.

(5) Les paroles prononcées en inuktitut seront publiées dans les Débats du Sénat dans les deux langues officielles, avec mention dans les Journaux du Sénat qu'elles ont été prononcées en inuktitut. »

— Honorables sénateurs, même si nos collègues les sénateurs Watt, Adams et Sibbeston sont absents aujourd'hui, j'ai décidé d'entamer le débat sur la motion que j'ai proposée.

J'aimerais, pour commencer, offrir mes excuses à mes collègues qui ont demandé à ce qu'on s'abstienne de lire la motion, mais je me suis dit qu'il serait utile que la Chambre connaisse le but que j'essaie d'atteindre. Cela m'aurait dispensé de la lire moi-même. Les honorables sénateurs trouveront le texte de cette motion à la page 11 du Feuilleton d'aujourd'hui.

Les paragraphes clés de la motion visent à modifier le Règlement du Sénat. Il s'agit des paragraphes 3, 4 et 5. Ils contiennent les modifications que je cherche à faire adopter.

Il y a de nombreuses années que j'ai l'intention de présenter cette motion et j'ai eu de nombreuses discussions avec nos collègues qui représentent le Grand Nord de notre pays, soit le sénateur Watt et le sénateur Adams. J'ai mentionné plus tôt le nom du sénateur Sibbeston parce qu'il vient d'une région du pays où ils n'ont pas seulement deux langues officielles. Je ne me souviens plus du chiffre précis, mais les travaux de leur assemblée se déroulent en sept ou huit langues officielles.

Vous avez tous été témoins, honorables sénateurs, du fait que le sénateur Adams, à diverses occasions, s'est levé en cette Chambre et s'est effectivement exprimé en inuktitut. Son collègue assis à ses côtés, le sénateur Watt, traduisait ce qu'il disait en anglais, puis les interprètes du Sénat traduisaient de l'anglais au français. À mon avis, c'est une façon bien entortillée de procéder.

Nous parlons de la langue d'un des premiers peuples à occuper, et qui occupe toujours, ce territoire qu'on appelle le Canada. J'ai toujours été impressionné par le fait que les premiers missionnaires à fouler ces vastes espaces nordiques ont eu la discipline nécessaire d'apprendre la langue de leurs habitants. Ils ne leur ont pas immédiatement imposé le français, l'anglais ou une autre langue. Ils ont décidé d'eux-mêmes d'apprendre la langue de ceux qu'ils voulaient vraisemblablement christianiser. Au tout début du régime français, c'était la même chose, qu'il s'agisse de Champlain, de Frontenac ou de La Tour. Ils n'ont pas imposé leur langue aux Autochtones. Ils ont appris celle des Autochtones. Ils ont signé des traités avec eux. Ils les ont négociés dans la langue que les Autochtones pouvaient comprendre.

J'estime aussi que l'inuktitut est un trésor mondial qui mérite d'être préservé. Beaucoup de langues sont mortes dans de nombreux pays du monde, et le phénomène se répète encore aujourd'hui.

Si un Inuit est nommé au Sénat, on s'attend à ce qu'il y contribue à ses travaux et qu'il représente les habitants de son territoire, la terre sur laquelle il vit, les coutumes et la culture de ce peuple, et quelle meilleure façon de le faire que d'utiliser sa propre langue? C'est de cela dont il est question. J'ai parlé au sénateur Watt à de nombreuses reprises et, comme vous le savez sans doute, il parle couramment l'inuktitut. Il me dit qu'il a beaucoup de mal à prendre la parole en anglais en cette enceinte, et nous savons tous que le sénateur Adams en a encore plus. Ils sont donc, en quelque sorte, empêchés d'exprimer avec aisance leurs pensées, leurs émotions et leurs croyances quand ils veulent nous faire part de ce qui les préoccupe.

L'intention de la motion n'est pas compliquée. Peut-être y a-t-il d'autres moyens plus simples de réaliser ce que je tente de réaliser, c'est-à-dire permettre à ces personnes de s'exprimer dans leur langue maternelle. Nous leur devons au moins cela. Il s'agit d'une question de respect fondamental. Ils sont nommés au Sénat du Canada. Ils s'expriment mieux dans leur langue maternelle et je pense que nous devrions faire en sorte qu'ils puissent le faire. Après tout, il est arrivé que nous offrions des services de ce genre à des sénateurs sourds ou qui ne pouvaient s'exprimer. Je ne donnerai pas de détails, mais c'est déjà arrivé. De la même façon que nous avons prévu des outils pour nous permettre de nous exprimer en français ou en anglais, je crois que nos collègues du Nord méritent bien que nous leur fournissions les outils dont ils ont besoin pour faire un bon travail ici.

(1550)

Je sais que les sénateurs Watt, Adams et Sibbeston voudront intervenir dans ce débat. Je ne cherche pas à exercer des pressions sur qui que ce soit afin que cette proposition soit adoptée aveuglément ou à la hâte. Si mes commentaires ne permettaient que de susciter une réflexion à ce sujet, ce serait déjà un progrès. Toutefois, j'aimerais que mes collègues des deux côtés réfléchissent sérieusement à cette question. Cela permettrait d'accroître la qualité des discussions au Sénat. Je le répète, je ne veux pas pointer qui que ce soit du doigt, mais je suis persuadé que tous mes collègues ont déjà eu une expérience personnelle à l'égard de ce que je viens de soulever.

Honorables sénateurs, la motion est sur le bureau. Je sais que d'autres sénateurs souhaitent prendre la parole dans ce débat. Je suis désolé d'aller de l'avant en l'absence des sénateurs Watt, Adams et Sibbeston aujourd'hui, mais je crois qu'ils comprendront que je ne peux plus attendre, en toute bonne conscience, et que j'aimerais que cette affaire soit menée à bien de la façon dont le Sénat en décidera.

L'honorable Jack Austin (leader du gouvernement) : Puis-je poser une question au sénateur Corbin?

Le sénateur Corbin : Certainement.

Le sénateur Austin : Cette mesure s'appliquera-t-elle à un sénateur qui n'est à l'aise dans aucune de nos deux langues officielles ou à un sénateur qui est à l'aise dans une troisième langue du Canada et qui désire s'exprimer dans cette langue?

Le sénateur Corbin : Si je comprends bien l'essentiel de sa question, le sénateur Austin veut savoir si l'adoption de cette motion pourrait indiquer que nous ferions de même à l'égard des langues autochtones. Il n'est pas question d'ajouter des langues européennes au compte rendu. Je veux simplement faire en sorte que l'on reconnaisse, de façon équitable, le droit ancestral des sénateurs autochtones de s'exprimer dans leur langue maternelle.

J'aurais pu ajouter que j'ai discuté de cette question dans le passé avec feu le sénateur Twinn et avec mon très bon ami, le sénateur à la retraite Leonard Marchand. Je leur ai demandé si les gens qu'ils représentaient aimeraient jouir de l'avantage que je propose pour l'inuktitut. Ils m'ont répondu que la plupart des Autochtones s'exprimaient en anglais ou en français et se sentaient à l'aise dans ces langues. De plus, il serait difficile de contenter tout le monde puisque les langues autochtones varient beaucoup d'un océan à l'autre.

Voilà pourquoi j'ai décidé de me concentrer sur l'inuktitut, qui a un caractère particulier. Je ne nie pas que d'autres langues méritent d'être préservées. C'est bien certain. Cependant, si nous ne faisons pas un premier pas, comment pourrons-nous avancer dans cette direction? Je propose simplement que nous remédiions à ce qui m'a semblé être une omission dans le rapport de la Commission B et B. La commission avait étudié la question, mais n'avait fait aucune recommandation particulière à ce sujet. Nous en sommes toujours au même point aujourd'hui.

Le sénateur Austin : Le sénateur Corbin a parlé des sénateurs Adams et Watt, ce qui soulève une question dans mon esprit. Est-il en train d'essayer d'améliorer la situation particulière d'un sénateur? Il a parlé ensuite de la nécessité de préserver les langues autochtones, mais je ne sais pas dans quelle mesure il veut poursuivre cet objectif- là.

Je ne faisais pas référence aux langues parlées à l'extérieur du Canada, et ma question ne porte pas sur elles. La motion vise-t-elle à permettre que les Autochtones qui deviennent sénateurs puissent s'exprimer dans leur langue ou ne vise-t-elle que la situation d'un sénateur?

Le sénateur Corbin : En l'occurrence, je parle d'environ deux sénateurs, et il se peut qu'un troisième présente des arguments et participe au débat plus tard. J'ai une grande ouverture d'esprit en ce qui concerne la reconnaissance et le respect des langues parlées par les Autochtones du Canada. Si, un jour, le premier ministre ou l'électorat veut que soit nommé au Sénat un membre d'une Première nation qui parle couramment sa langue maternelle et qui veut l'utiliser ici, pourquoi ne pas lui permettre de le faire? Le Sénat pourrait ainsi donner l'exemple et encourager de manière très louable l'ouverture aux autres cultures.

Nous disons tellement souvent que le Canada a un caractère multiculturel, que nous avons ouvert nos portes aux immigrants et ainsi de suite. N'oublions pas les premiers habitants de notre pays. Nous les avons tenus à l'écart et nous avons bafoué leurs droits pendant trop longtemps. Voilà ce dont il est question. Personnellement, je pense qu'on a trop tardé à agir, mais il faut toujours faire un premier pas dans la bonne direction. Je pense que nous pourrions miser sur cette initiative de manière constructive en ouvrant notre coeur et notre esprit et en faisant preuve de bonne volonté.

[Français]

L'honorable Fernand Robichaud : Honorables sénateurs, j'aimerais appuyer la motion de l'honorable sénateur Corbin, mais je propose que la suite du débat soit reportée à la prochaine séance du Sénat.

(Sur la motion du sénateur Robichaud, le débat est ajourné.)

AFFAIRES JURIDIQUES ET CONSTITUTIONNELLES

ADOPTION DE LA MOTION VISANT À AUTORISER LE COMITÉ À REPORTER LA DATE DE LA PRÉSENTATION DE SON RAPPORT FINAL SUR L'ÉTUDE SUR LE STATUT BILINGUE DE LA VILLE D'OTTAWA

L'honorable Lise Bacon, conformément à l'avis du 12 avril 2005, propose :

Que, nonobstant l'ordre du Sénat adopté le jeudi 2 décembre 2004, la date de présentation du rapport final du Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles sur les pétitions déposées durant la troisième session de la trente-septième législature, demandant au Sénat de déclarer Ottawa ville bilingue et d'examiner le bien-fondé de modifier l'article 16 de la Loi constitutionnelle de 1867, soit reportée du 30 avril au 27 octobre 2005.

(La motion est adoptée.)

[Traduction]

Son Honneur le Président : C'est maintenant le moment d'ajourner.

Comme il est 16 heures, conformément à l'ordre adopté le 2 novembre 2004, je déclare le Sénat ajourné.

(Le Sénat s'ajourne au jeudi 14 avril 2005, à 13 h 30.)


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