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Débats du Sénat (Hansard)

Débats du Sénat (hansard)

3e Session, 40e Législature,
Volume 147, Numéro 76

Le jeudi 9 décembre 2010
L'honorable Noël A. Kinsella, Président


LE SÉNAT

Le jeudi 9 décembre 2010

La séance est ouverte à 13 h 30, le Président étant au fauteuil.

Prière.

DÉCLARATIONS DE SÉNATEURS

L'Université de Victoria

Le programme CanAssist

L'honorable Sharon Carstairs : Honorables sénateurs, il y a deux semaines, j'ai eu l'immense privilège de visiter CanAssist à l'Université de Victoria. Les membres de cet organisme merveilleux travaillent très fort pour améliorer la qualité de vie des handicapés, jeunes ou vieux, grâce à un partenariat extraordinaire avec l'université.

J'ai rencontré le personnel affecté à ce projet, y compris des ingénieurs et des techniciens en informatique qui travaillent en étroite collaboration en vue de créer et de fournir des dispositifs et des outils technologiques d'assistance fabriqués sur mesure. J'aimerais vous parler de certains des projets que j'ai vus.

Un iPod a été perfectionné pour permettre aux personnes ayant subi des lésions au cerveau de fonctionner par elles-mêmes en leur donnant des indices sur la façon de remplir certaines tâches. Par exemple, comment utiliser la cafetière — consulter le iPod; comment faire le café — consulter le iPod; comment se rendre au bureau — consulter le iPod; comment se rendre au gymnase — consulter le iPod.

J'ai vu un iPod identique qui avait été adapté pour être utilisé par des quadraplégiques qui n'avaient qu'à froncer les sourcils pour choisir la musique qu'ils voulaient écouter. Dans ce cas, la personne doit porter un joli bandeau muni de capteurs invisibles pour les autres, mais tellement sensibles qu'ils peuvent détecter un simple sourcillement.

J'ai aussi vu un autre dispositif qui permettait à un homme grandement handicapé de jouer à la balle avec son chien. Il lui suffisait d'un seul mouvement pour activer un mécanisme placé sur le côté de son fauteuil roulant et lancer la balle à 100 mètres.

J'ai aussi vu un projet qui a permis à une dame de 90 ans qui ne connaissait absolument rien aux ordinateurs d'utiliser le programme Skype en appuyant tout simplement sur l'image de la personne avec laquelle elle voulait communiquer, lui donnant ainsi la possibilité de rester en contact avec sa famille et ses amis. Ses proches peuvent également la rejoindre de la même manière.

La technologie fait de plus en plus partie de notre quotidien. Quel plaisir de voir comment on peut adapter ces technologies pour venir en aide aux personnes handicapées en fabriquant des produits qui permettent à ces Canadiens de vivre comme les autres.

Je félicite l'Université de Victoria et le groupe CanAssist.

Le commissaire du Yukon

M. Douglas George Phillips

L'honorable Daniel Lang : Honorables sénateurs, j'aimerais souligner la nomination de M. Douglas George Phillips à titre de 29e commissaire du Yukon. Le premier ministre Harper a rencontré le commissaire Phillips après sa nomination, la semaine dernière. Il a fait l'annonce de la nomination à Ottawa. L'assermentation officielle du commissaire aura lieu à Whitehorse, le 17 décembre.

À titre d'information pour les sénateurs qui ne le sauraient pas, je dirai que le poste de commissaire du Yukon est semblable à celui de lieutenant-gouverneur dans les provinces. Le commissaire Phillips entre dans ses nouvelles fonctions avec un bagage impressionnant. C'est un amant de la nature et son engagement dans la vie publique le rend sympathique aux yeux de tous les Yukonnais.

M. Phillips, qui habite le Yukon depuis sa naissance, a été député de l'Assemblée législative du Yukon et ministre au sein du gouvernement du Yukon.

Il est bien connu pour son travail auprès de la fondation de l'hôpital du Yukon, dont il est le cofondateur. C'est un protecteur de l'environnement et il n'hésite pas à donner du temps pour des causes communautaires utiles. Je sais que le commissaire Phillips fera un très bon travail.

Je profite de l'occasion pour féliciter Geraldine Van Bibber, la commissaire sortante, de son dévouement infatigable. Elle a représenté la reine et le gouverneur général de façon exceptionnelle. Cela est à son honneur, à celui du Yukon et de tous les Yukonnais. Honorables sénateurs, je salue ces deux grands Yukonnais.

Le décès de M. Jay Roberts

L'honorable Jim Munson : Honorables sénateurs, j'interviens aujourd'hui pour rendre hommage à mon bon ami, Jay Roberts, qui est décédé en octobre. Pour les Canadiens, il est avant tout le légendaire ailier rapproché des Rough Riders d'Ottawa qui a aidé son équipe à remporter la coupe Grey à deux reprises à la fin des années 1960.

Mon amitié avec Jay remonte aux années 1970, après qu'il eut pris sa retraite du sport professionnel et entrepris sa carrière dans la fonction publique fédérale et son travail avec plusieurs groupes autochtones. Le samedi, nous étions une bande d'amis qui nous réunissions pour jouer au touch-football, puis pour boire une bière ou deux après le match.

Jay était un homme doux et humble. Il aimait rire, avoir du bon temps et s'occuper de sa famille et de ses amis. Son fils, Jed, est né avec une déficience auditive grave qui l'a contraint à porter un appareil acoustique dans chaque oreille. Ces appareils étaient gros et gênants et, en grandissant, Jed se faisait beaucoup taquiner par ses amis.

C'est Jay qui a aidé Jed à passer par-dessus sa douleur et à réaliser ses rêves. Lorsque Jed a décidé de tenter sa chance au football, Jay l'a appuyé sans défaillir jusqu'à ce qu'une remarquable coupe Grey vienne couronner sa carrière avec les Eskimos d'Edmonton. Les noms du père et du fils sont gravés un au-dessus de l'autre sur la coupe, Jay en 1968 et Jed en 1993.

Mon propre fils, Jamie, a dû porter des appareils acoustiques et, lorsqu'il était plus jeune, il me déplaisait de constater qu'il détestait ces appareils. J'ai alors demandé conseil à Jay.

Il a organisé une rencontre entre Jamie, Jed et moi. C'était à Montréal, il y a 12 ou 13 ans, au stade Molson, après une partie entre les Alouettes et les Eskimos. Je me souviens d'avoir traversé le terrain avec mon fils en direction de ce joueur imposant. Jed a enlevé son casque, nous a accueillis avec un sourire puis a tout naturellement mis ses appareils acoustiques en place.

Voir cela a changé la vie de Jamie. Il a alors compris qu'il n'était pas seul et qu'un appareil acoustique n'était qu'un appareil l'aidant à prendre sa place dans le monde. Les choses pouvaient être aussi simples que cela.

La sagesse, l'humilité et la détermination étaient des qualités de mon ami Jay et ces qualités, il les a transmises à son fils Jed. Jed travaille maintenant dans un foyer de groupe d'Edmonton, où il aide les enfants ayant des problèmes de comportement.

(1340)

Après des années de lutte contre la démence, les caillots, des problèmes de circulation et, finalement, le cancer du poumon, Jay— ou Hawk, comme nous l'appelions — est décédé, mais sa volonté d'aider les autres persiste. Il est le premier joueur de la Ligue canadienne de football à avoir donné son cerveau et sa moelle épinière à la recherche médicale pour que les médecins puissent étudier les effets des traumatismes crâniens. Son don à la science sert également à sensibiliser aux commotions cérébrales subies en jouant au football, ce qui, j'en suis certain, aidera beaucoup de gens dans l'avenir.

Mon grand et adorable ami me manquera.

Le décès de Marjorie Kathryn Elliott

L'honorable Yonah Martin : Honorables sénateurs, il y a un endroit à Hope, en Colombie-Britannique, que mon neveu a déjà décrit comme « un petit coin de paradis sur terre ». Même le temps semble y ralentir, dans la mesure du possible, pour respirer l'air pur de la montagne, écouter le chant du ruisseau Silver Creek et, au printemps ou en été, pour s'émerveiller devant les fruits et les fleurs qui poussent librement dans le jardin — roses, lys, tulipes, lycopodes aplatis et forsythias, bergenies, sédum, vignes, pommiers et un prunier.

Dans le modeste ranch qui avait dû être déménagé à la suite du débordement du ruisseau qui avait failli emporter la maison, vivait une jardinière aux multiples talents, la vieille dame de Silver Hope, Marjorie Kathryn Elliott, née Radley.

Ceci est un hommage à Marjorie Kathryn Elliott, la grand-mère maternelle de mon époux, Doug Martin, notre chère Mamie, qui est décédée le 18 novembre 2010, à l'âge de 91 ans.

Mamie est née à Wilton, en Illinois, le 29 mai 1919, à l'époque où son père étudiait pour obtenir sa maîtrise en théologie. Elle était la troisième de cinq enfants : Gladys Scott, qui a maintenant 94 ans et qui est encore en bonne santé, feue Edith Radley, une ancienne infirmière et une missionnaire de l'Église Unie nommée compagnon de l'Ordre du Canada pour son travail en Afrique et Jeannette Wolfe, une résidante d'Ottawa, qui est à la tribune aujourd'hui, en compagnie de ses filles Pamela, Karen et Beverley Wolfe, et son jeune frère Don Radley.

La famille est retournée au Manitoba, le lieu de naissance de la mère de Mamie, où son père était ministre de l'Église Unie du Canada. Mamie, ses sœurs et son frère ont passé leur enfance à jouer et à rêver sous le ciel sans fin des prairies.

Au Manitoba, les enfants ont tous reçu une excellente éducation. Mamie a obtenu son baccalauréat ès arts à l'Université du Manitoba en 1940 et son diplôme en éducation en 1941. Elle a commencé à enseigner à Cardale, au Manitoba, où elle a rencontré son futur époux, Elvin Kingsley « Bud » Elliott. Je devrais aussi mentionner que sa mère était Martha Jane Ireton Elliott, une formidable activiste politique et une dirigeante de la fédération des agricultrices du Manitoba du temps des suffragettes. Elle a également été intronisée au Temple de la renommée agricole du Manitoba.

En 1943, elle s'est mariée à Port Simpson, près de Prince Rupert, en Colombie-Britannique, et le couple s'est installé à Richmond, en Colombie-Britannique, en 1948. Il y a élevé quatre enfants : Merle, Elaine, James et Jeannie. Sa fille la plus âgée, Merle, ma belle-mère, est maintenant décédée. C'est la seule qui a suivi les traces de Mamie et qui est devenue enseignante.

Ma belle-mère m'a dit une fois que sa mère lisait souvent en passant l'aspirateur. Mamie était effectivement une lectrice passionnée. Elle lisait des ouvrages de fiction ou de non fiction. Elle a surtout lu les poètes romantiques, ces célèbres « rebelles romantiques », dont la poésie n'a jamais eu d'égale. Elle avait une mémoire impeccable. Elle pouvait citer de longs passages de Shakespeare, Milton, Keats et Shelley.

Mamie était d'une grande intelligence; c'est ainsi qu'elle a pu conjuguer les verbes irréguliers à tous les temps, en français, jusqu'à la fin de ses jours. Elle brillait dans la conversation, débattait avec effervescence et ne donnait pas sa place au Scrabble — une championne sur toute la ligne. En fait, notre famille tiendra en son honneur le tournoi annuel Mamie le jour de son anniversaire.

M. Johnny May

L'honorable Charlie Watt :

[Note de la rédaction : le sénateur Watt s'exprime en inuktitut.]

Honorables sénateurs, j'aimerais aujourd'hui rendre hommage à Johnny May, premier pilote inuit de l'Est de l'Arctique. Récemment, Johnny a eu le grand honneur d'être intronisé au Panthéon de l'air et de l'espace du Québec.

Sa carrière a débuté lorsque, à 17 ans, il a obtenu sa licence de pilote. Il attribue son succès et sa longue carrière à la connaissance du terrain, des glaces et de la mer. Dans le Nord, il est monnaie courante de devoir défier la mort, sauver des vies et affronter les éléments.

Au fil des ans, il a assuré un service commercial, a piloté un aéronef d'évacuation sanitaire et mené des opérations de recherche et de sauvetage. Il pilote encore, malgré ses 65 ans. On raconte à son sujet des histoires de sorties de nuit en avion sans l'équipement approprié, d'occasions où il s'est extirpé de justesse de l'avion par la fenêtre du poste de pilotage et de nombreuses naissances auxquelles il a assisté.

Lorsque j'étais un jeune home aventureux, j'ai vécu des situations pour le moins intéressantes avec Johnny. Durant les négociations concernant la baie James et le Nord québécois, je comptais sur Johnny pour me sortir d'endroits assez difficiles d'accès. Nous avons connu les décollages et les atterrissages dans les collectivités isolées bien avant que des pistes ne soient aménagées dans le Nord.

Il a toujours été un pilote de brousse hors pair; il n'a jamais hésité à se lever en pleine nuit pour effectuer, dans les conditions les plus difficiles, un vol d'urgence afin de livrer des approvisionnements essentiels à des collectivités éloignées.

Son avion est connu sous le nom de « Santa's sled », ou traîneau du Père Noël, parce que, chaque année, à Noël, Johnny fait tomber du ciel sur les collectivités de Kuujjuaq des bonbons pour les enfants et d'autres étrennes utiles, comme des parkas et d'autres articles d'habillement. Sa présence auprès des Inuits et les services qu'il leur rend depuis 48 ans ont été franchement extraordinaires. Il est un modèle exceptionnel et un ami très cher. J'aimerais aujourd'hui le féliciter et, au nom des Inuits du Nunavik, lui dire un grand merci.

Les recherches sur les lésions médullaires

L'honorable Nancy Greene Raine : Honorables sénateurs, nous nous souvenons tous de ce moment spectaculaire en février dernier, lors des cérémonies d'ouverture des Jeux olympiques d'hiver de Vancouver, lorsque Rick Hansen est entré en fauteuil roulant dans le stade avec la flamme olympique et a été accueilli par une immense foule d'athlètes et de spectateurs venus de partout dans le monde. Cela a été l'un des moments de grande fierté du Canada au cours des Jeux. Personnellement, j'ai eu la chair de poule lorsque j'ai vu Rick arriver de l'autre côté du stade.

Lorsqu'on recule de 25 ans et qu'on songe que Rick Hansen est parti de la Colombie-Britannique pour entreprendre sa tournée mondiale l'Homme en mouvement afin de sensibiliser les gens aux traumatismes médullaires, on se rend compte que cet homme a accompli des choses extraordinaires. Un quart de siècle plus tard, il poursuit son travail avec une nouvelle initiative, soit la création d'un registre mondial pour la recherche sur les lésions médullaires.

Comme les honorables sénateurs peuvent l'imaginer, il existe un grand nombre de laboratoires dans le monde où des chercheurs s'efforcent de trouver une façon de guérir les traumatismes médullaires. Toutefois, ces gens sont isolés les uns des autres, et un grand nombre de centres n'ont pas assez de patients pour mener des études appropriées. Un registre universel aidera à régler ces problèmes et favorisera l'échange des connaissances dans ce domaine. Le fait de partager des études, des théories et des observations sur les traumatismes médullaires élargira les possibilités et nous rapprochera peut-être d'une solution. À l'échelle mondiale, il existe une grande volonté de communiquer les uns avec les autres par le truchement d'un réseau international, et c'est ce que le nouveau registre de Rick va permettre de faire.

Le Rick Hansen Spinal Cord Injury Registry, dirigé par l'institut Rick Hansen, est la base de données du Canada et c'est une précieuse ressource pour les chercheurs, les cliniciens et les administrateurs de la santé.

Les participants au registre vont bénéficier de plus de données uniformisées et d'ensembles de données, ainsi que d'une participation accrue aux projets de recherche internationaux. Ils pourront aussi partager des pratiques exemplaires afin d'améliorer les résultats des soins et des traitements dispensés aux patients, y compris, sans doute, les projets du groupe CanAssist auxquels le sénateur Carstairs a fait allusion plus tôt.

Le registre pour la recherche sur les lésions médullaires, qui est déjà utilisé par plus d'une trentaine d'hôpitaux et d'instituts de recherche, est sur le point de prendre une dimension mondiale. Au cours des deux prochaines années, Rick Hansen va se rendre dans des pays choisis, exactement 25 ans après sa tournée mondiale de l'Homme en mouvement, dans le but cette fois-ci de faire tomber les frontières internationales afin de favoriser la recherche.

Honorables sénateurs, comme les médias l'ont mentionné récemment, le financement accordé à la recherche sur les lésions médullaires est limité. Cela dit, l'institut Rick Hansen a reçu environ 30 millions de dollars de Santé Canada et plus de 30 millions de dollars de plusieurs provinces. Heureusement, les traumatismes médullaires ne sont pas aussi répandus que le cancer et les maladies cardiaques. On estime que 44 000 Canadiens sont touchés et qu'il y a environ 1 500 nouveaux cas à chaque année. Toutefois, étant donné le nombre moins élevé de personnes touchées par ces traumatismes, ceux-ci ne retiennent pas toujours l'attention des gouvernements.

La vision de Rick, qui est certainement influencée par la tournée mondiale qu'il a effectuée il y a 25 ans, consiste à relier les chercheurs du monde entier afin qu'ils collaborent ensemble. Son initiative sera vraiment utile. L'idée de créer un registre mondial a été lancée pour la première fois suite à une conférence tenue à Vancouver, il y a quelques années. Le Centre for International Collaboration on Repair Discoveries de l'Université de la Colombie-Britannique joue un rôle important. Cette recherche donne de l'espoir pour l'avenir. Enfin, il s'agit d'un parfait exemple de tout ce qu'un seul homme peut accomplir.

(1350)

Le décès de Leslie Nielsen, O.C.

L'honorable Tommy Banks : Honorables sénateurs, depuis le tout début, l'industrie cinématographique américaine — ou Hollywood, comme nous en sommes tous venus à l'appeler — a toujours compté énormément de Canadiens.

Plusieurs des premières figures dominantes du milieu, notamment Jack L. Warner et Mack Sennett, étaient des Canadiens. Louis B. Mayer n'était pas né au Canada, mais il avait passé son enfance au Nouveau-Brunswick.

Honorables sénateurs, au nombre des cinématographes canadiens célèbres figurent Norman McLaren, Arthur Hiller, Norman Jewison, David Cronenberg, Jason Reitman, Paul Haggis et, bien sûr, James Cameron et Howard Shore, de Toronto, qui a remporté trois Oscars pour la musique composée pour Le Seigneur des Anneaux.

Parmi les acteurs, signalons notamment Mary Pickford, surnommée « La petite fiancée de l'Amérique », qui est née à Hamilton, Norma Shearer, Marie Dressler, Deanna Durbin, Walter Houston, Raymond Massey, Alexander Knox, Walter Pidgeon, Hume Cronyn, Jack Carson, Glenn Ford — et la liste est encore bien longue. Fay Wray, avec qui King Kong s'est échappé pour la première fois, était née à Lethbridge. Yvonne De Carlo venait de Vancouver. La liste est interminable.

En raison de sa provenance, Leslie Nielsen était peut-être le plus Canadien de ces acteurs. Natif de Regina, il était le fils d'un agent de la GRC. Il a vécu dans le Nord. Il est déménagé à Edmonton — la plus canadienne des villes — où il est allé à l'école, a grandi et s'est distingué en tant qu'acteur classique et dramatique accompli, d'abord au théâtre, puis au cinéma et au petit écran.

Comme premier rôle au cinéma, il a interprété le roi de France aux côtés de Kathryn Grayson dans un film intitulé Le Roi vagabond. Il avait surnommé ce film « Le Dindon vagabond ».

Il était d'abord et avant tout un acteur dramatique et c'est vers la fin de sa carrière qu'il est devenu un acteur comique pince-sans-rire, le meilleur de tous. Il est devenu un maître du genre. Siskel et Ebert l'ont surnommé « l'Olivier de l'humour pince-sans-rire ».

Sa réplique cinématographique la plus citée, en réponse à la question « Sûrement, vous ne pouvez pas être sérieux. », est « Je suis sérieux... et ne m'appelle pas Shirley. »

Leslie Nielsen n'a jamais oublié ses racines à Edmonton et il y venait souvent. J'ai eu l'honneur et le plaisir de travailler souvent avec lui et j'ai été la cible de certaines de ses farces les plus extravagantes.

Il a donné son nom à la Leslie Nielsen School of Communications du Northern Institute of Technology d'Edmonton. On le voyait souvent dans les couloirs de la Victoria School of the Arts, dont lui et le grand metteur en scène Arthur Miller, son célèbre camarade de classe, sont tous deux de distingués diplômés.

Leslie Nielsen est décédé la semaine dernière à l'âge de 84 ans. C'était un véritable gentleman, un farceur invétéré et un acteur célèbre dans le monde entier dont le travail sera étudié et admiré pendant longtemps.

[Français]

Visiteur à la tribune

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, je tiens à signaler la présence à la tribune de l'honorable Marie-Claude Blais, procureure générale et ministre de la Justice et de la Consommation du Nouveau-Brunswick.

Au nom de tous les honorables sénateurs, je vous souhaite la bienvenue au Sénat du Canada.

Des voix : Bravo!


AFFAIRES COURANTES

La vérificatrice générale

Le commissaire à l'intégrité du secteur public—Dépôt du rapport de décembre 2010

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, j'ai l'honneur de déposer, dans les deux langues officielles, un rapport spécial de la vérificatrice générale du Canada, conformément aux dispositions du paragraphe 8(2) de la Loi sur le vérificateur général du Canada.

Le Budget des dépenses de 2010-2011

Le Budget supplémentaire des dépenses (B)—Présentation du septième rapport du rapport du Comité des finances nationales

L'honorable Joseph A. Day, président du Comité sénatorial permanent des finances nationales, présente le rapport suivant :

Le jeudi 9 décembre 2010

Le Comité sénatorial permanent des finances nationales a l'honneur de présenter son

SEPTIÈME RAPPORT

Votre comité, auquel a été référé le Budget supplémentaire des dépenses (B) 2010-2011, a, conformément à l'ordre de renvoi du jeudi 4 novembre 2010, examiné ledit Budget et présente ici son rapport.

Respectueusement soumis,

Le président,
JOSEPH A. DAY

(Le texte du rapport figure à l'annexe A des Journaux du Sénat d'aujourd'hui, p. 1083.)

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, quand étudierons-nous le rapport?

(Sur la motion du sénateur Day, l'étude du rapport est inscrite à l'ordre du jour de la prochaine séance.)

[Traduction]

Visiteurs à la tribune

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, je vous signale la présence à la tribune du premier ministre du Yukon, l'honorable Dennis Fentie.

Au nom de tous les sénateurs, bienvenue au Sénat du Canada.

Des voix : Bravo!

[Français]

Projet de loi d'harmonisation no 3 du droit fédéral avec le droit civil

Présentation du quatorzième rapport du Comité des affaires juridiques et constitutionnelles

L'honorable Joan Fraser, présidente du Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles, présente le rapport suivant :

Le jeudi 9 décembre 2010

Le Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles a l'honneur de présenter son

QUATORZIÈME RAPPORT

Votre comité, auquel a été renvoyé le projet de loi S-12, Loi no 3 visant à harmoniser le droit fédéral avec le droit civil du Québec et modifiant certaines lois pour que chaque version linguistique tienne compte du droit civil et de la common law, a, conformément à l'ordre de renvoi du jeudi 18 novembre 2010, examiné ledit projet de loi et en fait maintenant rapport sans amendement

Respectueusement soumis,

La présidente,
JOAN FRASER

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, quand lirons-nous le projet de loi pour la troisième fois?

(Sur la motion du sénateur Carignan, la troisième lecture du projet de loi est inscrite à l'ordre du jour de la prochaine séance.)

[Traduction]

Régie interne, budgets et administration

Dépôt du dixième rapport du comité

L'honorable David Tkachuk : Honorables sénateurs, j'ai l'honneur de déposer, dans les deux langues officielles, le dixième rapport du Comité permanent de la régie interne, des budgets et de l'administration.

La Loi sur la sécurité de la vieillesse

Projet de loi modificatif—Présentation du quatorzième rapport du Comité des affaires sociales, des sciences et de la technologie

L'honorable Art Eggleton, président du Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie, présente le rapport suivant :

Le jeudi 9 décembre 2010

Le Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie a l'honneur de présenter son

QUATORZIÈME RAPPORT

Votre comité, auquel a été renvoyé le projet de loi C-31, Loi modifiant la Loi sur la sécurité de la vieillesse, a, conformément à l'ordre de renvoi du mardi 30 novembre 2010, examiné ledit projet de loi et en fait maintenant rapport sans amendement.

Respectueusement soumis,

Le président,
ART EGGLETON

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, quand lirons-nous le projet de loi pour la troisième fois?

(Sur la motion du sénateur Eggleton, la troisième lecture du projet de loi est inscrite à l'ordre du jour de la prochaine séance.)

Conflits d'intérêts des sénateurs

Budget et autorisation d'embaucher du personnel—Présentation du deuxième rapport du comité

L'honorable Terry Stratton, président du Comité permanent sur les conflits d'intérêts des sénateurs, présente le rapport suivant :

Le jeudi 9 décembre 2010

Le Comité permanent sur les conflits d'intérêts des sénateurs a l'honneur de présenter son

DEUXIÈME RAPPORT

Votre comité, qui est autorisé, conformément à l'alinéa 86(1)t) du Règlement, à i) à diriger de façon générale, de sa propre initiative, le conseiller sénatorial en éthique; et (ii) assumer, de sa propre initiative, la responsabilité des questions ayant trait au Code régissant les conflits d'intérêts des sénateurs, y compris les formulaires à remplir par les sénateurs aux fins de l'application de ce code, sous réserve de la compétence générale du Sénat, demande respectueusement des fonds pour l'exercice financier se terminant le 31 mars 2011 et qu'il soit autorisé à embaucher tout conseiller juridique et personnel technique, de bureau ou autre dont il pourrait avoir besoin pour examiner les questions qui lui sont renvoyées par le Sénat ou dont il sera saisi en vertu du Code régissant les conflits d'intérêts des sénateurs.

Conformément au Chapitre 3:06, section 2(1)c) du Règlement administratif du Sénat, le budget présenté au Comité permanent de la régie interne, des budgets et de l'administration ainsi que le rapport s'y rapportant sont annexés au présent rapport.

Respectueusement soumis,

Le président,
TERRY STRATTON

(Le texte du budget figure à l'annexe B des Journaux du Sénat d'aujourd'hui, p. 1111.)

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, quand étudierons-nous le rapport?

(Sur la motion du sénateur Stratton, l'étude du rapport est inscrite à l'ordre du jour de la prochaine séance.)

(1400)

[Français]

Projet de loi sur le Monument national de l'Holocauste

Première lecture

Son Honneur le Président annonce qu'il a reçu de la Chambre des communes le projet de loi C-442, Loi visant à ériger le Monument national de l'Holocauste, accompagné d'un message.

(Le projet de loi est lu pour la première fois.)

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, quand lirons-nous ce projet de loi pour la deuxième fois?

(Sur la motion du sénateur Comeau, la deuxième lecture du projet de loi est inscrite à l'ordre du jour de la séance d'après-demain.)

Le Sénat

Avis de motion tendant à autoriser le Sénat à se réunir en comité plénier afin de recevoir le commissaire aux langues officielles et autorisation au comité plénier de faire rapport au plus tard une heure après le début de ses travaux

L'honorable Claudette Tardif (leader adjoint de l'opposition) : Honorables sénateurs, je donne avis que, à la prochaine séance du Sénat, je proposerai :

Qu'à la fin de la période des questions et des réponses différées de la journée de la séance suivant l'adoption de cette motion, le Sénat se forme en comité plénier afin de recevoir le Commissaire aux langues officielles;

Que le comité plénier fasse rapport au Sénat au plus tard une heure après le début de ses travaux.


[Traduction]

PÉRIODE DES QUESTIONS

La santé

Les produits du tabac

L'honorable James S. Cowan (leader de l'opposition) : Honorables sénateurs, ma question s'adresse au leader du gouvernement au Sénat.

Le 18 novembre, moi et quelques autres sénateurs de mon parti avons interrogé le leader à propos de reportages qui disaient que le gouvernement ne suivait pas le plan établi pour mettre à jour les étiquettes de mise en garde apposées sur les paquets de cigarettes. La réponse de madame le leader a été on ne peut plus claire. Elle a dit que le gouvernement n'était pas revenu sur sa position et qu'il n'avait pas annulé le programme.

En réponse au sénateur Merchant, madame le leader a notamment dit ceci :

[...] je trouve carrément insultant de laisser entendre que nous avons sûrement dû céder aux pressions des lobbyistes de l'industrie du tabac simplement parce que le Globe and Mail s'interroge à ce sujet. Cette affirmation scandaleuse ne mérite même pas qu'on y réponde.

Voilà ce que le leader affirmait le 18 novembre.

Honorables sénateurs, l'autre jour, des documents de Santé Canada ont été remis au comité de l'autre endroit, et ils brossent un tout autre portrait de la situation. En septembre 2009, selon ces documents, Santé Canada a tenu une réunion avec des militants antitabac pour les informer de l'avancement des travaux de renouvellement de l'étiquetage. Lors de cette réunion, les fonctionnaires ont présenté aux militants des maquettes-papiers comprenant de plus gros caractères ainsi que des illustrations et des messages plus explicites, maquettes qui avaient été conçues en vue de préparer les dispositions réglementaires à publier au début de 2010.

Ces mêmes documents indiquent que Santé Canada a tenu une série de réunions privées, entre novembre 2009 et avril 2010, pour présenter à l'industrie les nouvelles étiquettes. Vous me suivez?

Le sénateur Comeau : Mon mode de fonctionnement est multitâche.

Le sénateur Cowan : Le mien est en train de le devenir.

Les fabricants de tabac ont évidemment fait des pressions pour que ces mises en garde ne soient pas employées et ont soutenu que le gouvernement devrait se concentrer sur la lutte contre la contrebande de cigarettes. Nous convenons tous, du reste, que c'est une lutte importante.

Il semble maintenant qu'il y ait eu un certain nombre de réunions, soit plus de 80 au total sur une période de deux ans, y compris quatre réunions au cabinet du premier ministre. C'est ce qu'on a pu entendre hier dans le reportage du réseau anglais de Radio-Canada, que le leader a vu, j'en suis certain, compte tenu de son penchant pour les nouvelles de fin de soirée. Les grands fabricants de tabac ont gagné cette bataille.

En mai 2010, ces mêmes documents signalent que Santé Canada a eu avec Imperial Tobacco une réunion au cours de laquelle Imperial Tobacco a été informée du fait que des projets de réglementation étaient mis en veilleuse et que le gouvernement fédéral sévirait contre la contrebande de cigarettes.

Pourquoi, madame le leader a-t-elle dit, le 18 novembre, que le gouvernement n'avait pris aucune décision, alors que, au cours d'une réunion privée, en mai, il a appris à Imperial Tobacco qu'il en avait pris une?

L'honorable Marjory LeBreton (leader du gouvernement) : Je remercie le sénateur de sa question. Je n'ai pas regardé la CBC hier soir. J'étais à la fête de Noël du Parti conservateur, où le premier ministre nous a bien divertis. Ce fut une très belle soirée, et tout le monde a eu beaucoup de plaisir.

J'ai été informée du reportage de la CBC. Je suis désolée de décevoir le sénateur Cowan, mais le reportage de la CBC est tout aussi faux que celui du Globe and Mail.

Honorables sénateurs, la ministre de la Santé et le gouvernement sont déterminés à faire diminuer la consommation de tabac dans l'ensemble de la société et chez les jeunes. Nous aidons les fumeurs à renoncer au tabac et nous nous attaquons, comme le sénateur l'a dit, à la contrebande du tabac. Nous sommes actifs sur de nombreux fronts. Par exemple, le projet de loi C-32, Loi restreignant la commercialisation du tabac auprès des jeunes, qui est entré en vigueur récemment, compliquera la tâche de l'industrie si elle cherche à inciter les jeunes à consommer des produits du tabac. Bien des gens conviendront que les médias sociaux sont probablement un bon endroit où commencer à cibler les jeunes.

Comme je l'ai déjà dit, de nouvelles étiquettes de mise en garde sont toujours à l'étude. On me dit qu'une annonce à ce sujet sera faite très bientôt.

Le sénateur Cowan : Madame le leader veut-elle dire que le gouvernement n'a pas décidé de mettre ce programme en veilleuse?

Le sénateur LeBreton : C'est exactement ce que je dis à l'honorable sénateur.

Le sénateur Cowan : Honorables sénateurs, à propos de ce que le sénateur Comeau a dit il y a un instant du fonctionnement multitâche, madame le leader pourrait-elle m'expliquer pourquoi le gouvernement est incapable de mettre en œuvre les programmes d'étiquetage révisés dont tous les sondages confirment l'efficacité? Pas un seul sondage dont j'ai pris connaissance ou dont on m'a parlé n'indique le contraire.

Pourquoi n'est-il pas possible de mettre en œuvre ces programmes renouvelés, dont l'élaboration a coûté des millions de dollars, mais dont la mise en œuvre sera à la charge des fabricants de produits du tabac et non du gouvernement du Canada, en même temps qu'on renforce et améliore la lutte contre la contrebande du tabac? Si madame le leader peut mener deux tâches de front ici, pourquoi ne peut-elle pas le faire dans cet autre dossier?

Le sénateur LeBreton : Je peux faire mieux qu'une double tâche. Je suis capable de fonctionner en mode multitâche.

Honorables sénateurs, aucun gouvernement ne s'est attaqué plus vigoureusement que celui-ci aux grands de l'industrie du tabac. Il a interdit les paquets pour les jeunes et le tabac aromatisé.

Le reportage de la CBC est erroné. Les nouvelles étiquettes sont toujours à l'étude. Je parle de nouvelles étiquettes, car nous avons déjà des avertissements sur les paquets. Comme je l'ai dit à l'instant, on m'a informée qu'une annonce sera faite bientôt à ce sujet.

(1410)

Je dois signaler encore une fois que, outre les étiquettes sur les paquets de cigarettes, qui sont un excellent moyen d'aider les fumeurs à renoncer au tabac, le gouvernement emprunte d'autres avenues pour s'adresser aux jeunes, notamment les médias sociaux. Il me semble, et ce doit être l'avis de la plupart des gens, que le mieux, c'est éviter que les jeunes ne commencent à fumer. C'est pourquoi les médias sociaux revêtent une telle importance. À l'évidence, les étiquettes sur les paquets de cigarettes sont utiles, mais elles ne peuvent avoir d'influence qu'à partir du moment où le consommateur achète déjà des cigarettes.

Le sénateur Cowan : Dans ce cas, est-il exact que non seulement les reportages de la CBC et du Globe and Mail sont erronés, mais que le sont aussi bien les documents déposés à l'autre endroit l'autre jour, indiquant que cette initiative de renouvellement des étiquettes était mise en veilleuse?

Le sénateur LeBreton : Je répète que les nouvelles étiquettes de mise en garde sont toujours à l'étude. On me dit qu'une annonce à ce sujet viendra bientôt. Voilà tout ce que je peux dire au sénateur.

L'honorable Catherine S. Callbeck : Honorables sénateurs, j'ai une question à poser au leader du gouvernement au Sénat sur le même sujet. Madame le leader est-elle en train de dire que, à la réunion avec les ministres de la Santé des provinces, en septembre, la ministre fédérale de la Santé n'a pas dit que cette initiative avait été abandonnée?

Le sénateur LeBreton : Je n'assistais pas à la réunion et je n'ai pas été mise au courant de ce qui s'y est dit. Je vais prendre note de la question.

Je puis parler aux sénateurs seulement de ce que je sais être véridique : les reportages au sujet du nouvel étiquetage sont erronés et une annonce sera faite bientôt.

Le sénateur Callbeck : Je souhaiterais entendre la réponse du leader à ce que la ministre a dit à cette réunion. Nous avons entendu dire que la ministre a fait savoir à ses homologues que cette initiative avait été abandonnée et qu'on ne ferait rien en matière d'étiquetage.

Madame le leader a dit qu'il y aurait une annonce bientôt. Cela veut-il dire dans une semaine, dans un mois? Dans combien de temps viendra-t-elle?

Dans ce dossier, le Canada était en tête sur la scène internationale. Nous avons été les premiers à mettre des étiquettes explicites sur les paquets de cigarettes. Nous avons été les premiers à appliquer la recommandation de l'Organisation mondiale de la santé voulant que les messages couvrent la moitié de la surface du paquet. Depuis 10 ans, toutefois, nous sommes passés de la toute première place dans le monde à la quinzième. Nous prenons un retard pathétique.

Je voudrais connaître les délais. Le leader affirme que la ministre est en train d'étudier la question et qu'il y aura une annonce bientôt. Combien de temps devrons-nous attendre avant de savoir si le gouvernement prendra des mesures concrètes?

Le sénateur LeBreton : Tout d'abord, honorables sénateurs, c'est un gouvernement conservateur qui, le premier, a imposé des étiquettes de mise en garde sur les produits du tabac.

Deuxièmement, le sénateur Callbeck parle d'une réunion que la ministre de la Santé a eue avec ses homologues provinciaux et territoriaux. On se fie aux ouï-dire pour prétendre que la ministre aurait dit certaines choses à la réunion. Je ne suis pas au courant de cette déclaration, et je n'ai pas de raison de croire qu'elle a été faite. Je ne crois pas que cette déclaration ait été faite de façon officielle.

Je vais demander des précisions à la ministre de la Santé, Mme Aglukkaq, sur les discussions qui ont eu lieu à cette réunion au sujet de la lutte contre le tabagisme.

Que veut dire « bientôt »? Bientôt. Pour paraphraser l'ancien chef du sénateur, ancien premier ministre et héros de Jim Munson, la preuve est la preuve et est toujours la preuve.

Le sénateur Mercer : Il est un héros pour plusieurs d'entre nous.

L'honorable Grant Mitchell : Honorables sénateurs, je veux bien être rassuré, mais je ne veux pas trop m'énerver à propos de cette annonce.

Le leader a déclaré récemment que nous devrions espérer une annonce bientôt au sujet des retraités handicapés de Nortel, et voici qu'on nous dit qu'il y aura « bientôt » une annonce sur un nouvel étiquetage des cigarettes.

Madame le leader peut-elle faire une déclaration officielle dès maintenant au Sénat et confirmer les deux choses pour que, d'abord, nous puissions exiger des comptes quand ces annonces auront lieu ou si elles n'ont pas lieu, et, deuxièmement, que nous n'ayons pas à regarder la CBC pour apprendre ce qui se passe?

Le sénateur LeBreton : Je ne vais pas faire la réponse que je prévoyais. Ce que j'allais dire ne plairait peut-être pas au sénateur Mitchell.

Pour ce qui est des retraités de Nortel, j'ai fait remarquer que le gouvernement s'était engagé, dans le discours du Trône, à étudier la manière dont il pourrait améliorer la situation des retraités qui touchent des prestations d'invalidité de longue durée et dont l'ancien employeur fait faillite.

En ce qui concerne l'annonce sur le tabac, bientôt, c'est bientôt, point à la ligne.

L'industrie

Les prestations d'invalidité à long terme—Les employés de Nortel

L'honorable Art Eggleton : Honorables sénateurs, ma question s'adresse au leader du gouvernement au Sénat. Le projet de loi S-216 a été rejeté, mais le problème n'est pas réglé pour autant. Madame le ministre a parlé de faire quelque chose pour les employés touchant des prestations d'invalidité à long terme, mais, d'après ce que j'ai compris de sa réponse, elle parle au futur. Or, il y a encore 400 employés de Nortel qui espèrent toujours qu'on va conclure un règlement juste et qu'ils pourront vivre leur vie en toute dignité, malgré leur invalidité. Ce sont eux que je représente aujourd'hui, comme ce sont eux que je représentais toute la semaine.

J'ai avec moi la déclaration écrite de Marc Girard. Voici ce qu'il dit :

[...] J'ai 45 ans et ma femme et moi vivons à Blainville, au Québec, avec nos trois adolescents. J'ai reçu un diagnostic de sclérose en plaques en 1998. En 2002, après une crise particulièrement aigüe, j'ai été déclaré totalement invalide et commencé à recevoir des prestations d'invalidité à long terme de mon employeur, Nortel.

Depuis huit ans, j'ai fait plusieurs autres crises, et mon état physique s'est détérioré. J'ai commencé par devoir utiliser une cane, et depuis trois ans, je me déplace en fauteuil roulant. La rapidité avec laquelle mon état s'est dégradé a beaucoup affecté les membres de ma famille. C'est devenu un fardeau psychologique pour ma femme comme pour mes enfants.

En 2002, quand j'ai été déclaré totalement invalide, j'ai cru que ma situation financière serait assurée puisque, selon mon régime d'assurance-invalidité, je devais recevoir des prestations d'invalidité à long terme jusqu'à l'âge de 65 ans, prestations auxquelles je cotisais personnellement, en plus de la portion fournie par Nortel.

Au début de 2010, Nortel m'a informé que le dernier versement de mes prestations aurait lieu en décembre de la même année. Il ne fait aucun doute qu'à compter de janvier 2011, la situation financière de notre famille va devenir très critique. Notre principale source de revenus sera désormais le salaire de ma femme, qui suffira à peine à couvrir les dépenses quotidiennes. Les études de mes enfants vont en pâtir, et rien ne garantit plus qu'ils pourront faire des études supérieures, tout ça parce que mes prestations d'invalidité à long terme cesseront en décembre 2010. J'aurai également beaucoup de mal à payer les services médicaux et les médicaments dont j'ai besoin.

C'est très difficile de vivre avec un handicap et de ne pas pouvoir travailler ni subvenir aux besoins de ma famille; c'est pour cette raison que je dois solliciter l'aide des instances politiques, élues ou nommées, et leur demander de prendre la nécessaire décision de nous aider, moi et tous ceux qui sont dans ma situation.

Je vous remercie de nous aider à corriger cette injustice.

(1420)

Quand on lui a posé des questions similaires, Tony Clement a dit à la Chambre des communes : « Nous prônons des solutions qui vont donner des résultats. » C'est correct. Madame le leader demandera-t-elle à M. Clement de s'asseoir avec les représentants des employés handicapés de Nortel, ainsi qu'avec leurs conseillers financiers et juridiques, afin de pouvoir trouver une solution pour ces personnes avant la fin du mois?

L'honorable Marjory LeBreton (leader du gouvernement) : Honorables sénateurs, comme je l'ai dit chaque fois que le sénateur Eggleton a parlé de l'un de ces tristes cas, personne ne peut minimiser les effets que les gestes de Nortel ont eus sur ces personnes. Nous ne pouvons pas nier le fait que la situation est grave et malheureuse. Les sénateurs des deux côtés de cette enceinte, et tous les gens qui ont rencontré ces personnes, éprouvent de la compassion pour les retraités de Nortel, et plus particulièrement pour les bénéficiaires de prestations d'invalidité de longue durée, qui se trouvent dans une situation difficile.

Le sénateur Eggleton sait fort bien que cette situation n'aurait pas été réglée par l'adoption du projet de loi S-216. Malheureusement, comme le sénateur Greene l'a signalé quand il a parlé de cette question, cette situation résulte d'un accord conclu entre toutes les parties intéressées devant les tribunaux en vertu de la loi en vigueur à l'époque.

La situation des anciens employés de Nortel préoccupe vraiment les Canadiens et fait couler beaucoup d'encre. J'ai dit au sénateur auparavant que le gouvernement prenait au sérieux le sort des retraités, et surtout des bénéficiaires de prestations d'invalidité de longue durée. Pour cette raison, quand le discours du Trône a été prononcé au Sénat plus tôt cette année, le gouvernement s'est engagé à mieux protéger les travailleurs quand les employeurs font faillite.

Le ministre Clement a tout à fait raison de dire que le gouvernement s'évertue, depuis un certain temps déjà, à trouver des solutions efficaces. Le gouvernement continuera de tenter de redresser ces situations fâcheuses. Il n'y a pas grand-chose d'autre à dire.

Pour ce qui est de la question directe du sénateur, beaucoup de personnes qui ont été touchées par la faillite de Nortel ont fait des démarches auprès du gouvernement. Ce dernier est navré de ce qui leur est arrivé et cherchera à prendre des mesures pour mieux protéger les travailleurs confrontés à de telles situations.

Le sénateur Eggleton : La compassion, que ce soit moi, le leader ou quelqu'un d'autre qui l'éprouve, n'aidera pas ces gens-là à obtenir le règlement qu'ils méritent, à se sortir de la pauvreté et à vivre dignement.

Le leader a évoqué l'accord intervenu devant les tribunaux, qui constituait la meilleure solution possible compte tenu des règles actuelles. Même les parties aux négociations du règlement ont affirmé que celui-ci ne permettrait aucunement aux personnes touchant une pension d'invalidité de se sortir de la pauvreté ou de payer leurs factures médicales et autres nécessités. Le règlement est tout simplement insuffisant à cet égard.

Mon projet de loi leur aurait donné satisfaction. Je ne partage pas du tout l'évaluation qu'a faite le leader de mon projet de loi. Des experts en la matière m'ont fait savoir ce qu'une telle mesure devrait comprendre. Le projet de loi S-216 aurait atteint son objectif. Quoi qu'il en soit, il relève du passé. Il reste la compassion, mais celle-ci ne suffit pas.

Le leader a mentionné le passage, dans le discours du Trône, où il est question de la protection accrue des travailleurs et a signalé que le gouvernement tentait de trouver une solution. Je ne sais pas pourquoi cela prend si longtemps. Nous étions saisis de mon projet de loi et de la grande question de la protection des travailleurs le printemps dernier, lorsque je me suis entretenu avec M. Clement. Je n'arrive pas à comprendre pourquoi on tarde tant à trouver une solution.

D'après ce que je comprends de la réponse de madame le leader à ma question, elle a abandonné l'idée de faire quoi que ce soit pour les employés de Nortel. Elle a le regard tourné vers l'avenir au lieu de trouver une façon d'aider ces gens qui seront abandonnés à leur sort à la fin du mois.

Madame le leader demandera-t-elle à M. Clement de s'asseoir avec ces gens afin de trouver une solution non seulement aux problèmes ultérieurs liés à la faillite mais aussi aux problèmes immédiats auxquels sont confrontés les 400 anciens employés de Nortel?

Le sénateur LeBreton : Honorables sénateurs, je demanderais au sénateur Eggleton de ne pas me mettre de mots dans la bouche.

J'ai de la sympathie pour ces victimes, mais nous ne pouvons rien changer à ce qui s'est déjà produit. Nortel a fait faillite et les tribunaux ont imposé un règlement auquel les gens ont participé.

Le sénateur Tkachuk : Vous auriez dû amener votre monde hier. C'est ce que vous auriez dû faire.

Le sénateur LeBreton : Je ne puis m'engager, au nom de mes collègues, à ce qu'ils rencontrent certaines personnes. Je vais donc faire part de la demande du sénateur à mon collègue.

La défense nationale

L'achat des avions F-35

L'honorable Wilfred P. Moore : Honorables sénateurs, ma question s'adresse au leader du gouvernement au Sénat. Hier, deux autres pays ont sonné l'alarme au sujet du programme d'avion d'attaque interarmées. Les Italiens vont annuler une partie de leur commande et le ministre néerlandais de la Défense, Hans Hillen, a fait une mise en garde en notant que le prix unitaire des avions serait plutôt de 121 millions de dollars. C'est presque le triple du prix indiqué à l'origine par Lockheed Martin. Quel prix unitaire garanti le Canada a-t-il obtenu?

L'honorable Marjory LeBreton (leader du gouvernement) : Honorables sénateurs, je crois que le sénateur Moore a été mal informé. Aucun pays n'a annulé sa commande d'avions F-35.

Je vais répondre au sénateur par une autre question. Pourquoi certaines personnes souhaitant former un gouvernement dans ce pays renieraient-elles ainsi un marché dont elles sont à l'origine, compromettant par le fait même les emplois de 80 000 Canadiens?

Le sénateur Moore : Honorables sénateurs, j'aimerais bien obtenir une réponse à ma question.

Écoutons maintenant le sénateur Tkachuk. C'est magnifique. Honorables sénateurs, permettez-moi de citer quelqu'un qui fait maintenant partie de la coalition réformiste-allianciste.

À vrai dire, le Parti réformiste a toujours profité de la situation. Comme tous les partis extrémistes, il pratique la politique des envieux : si les électeurs n'ont pas quelque chose, c'est parce que d'autres l'ont. Nous avons déjà entendu ça, que ce soit à propos des riches, des Juifs ou des multinationales. Les exemples sont nombreux. Il faut trouver un bouc émissaire. Le Parti réformiste envie tous les politiciens, tous ceux qui étaient là avant lui, et s'est adroitement servi des tactiques de propagande si exceptionnellement décrites par Hitler dans le chapitre sur la propagande de son livre Mein Kampf. Il a critiqué l'opulence, le luxe des bureaux, les restaurants subventionnés, la vanité, les salons de barbiers [...]

Et ainsi de suite et ainsi de suite, de la bouche de l'homme qui a tout avalé, David Tkachuk, sénateur.

(1430)

J'aimerais qu'on réponde à la question. J'aimerais savoir quel est le prix garanti...

Le sénateur Tkachuk : Qu'est-ce que cela a à voir avec les avions?

Le sénateur Moore : Cela a à voir avec vous, sénateur, et avec les critiques que vous avez faites auparavant, mais voilà que vous avez tout avalé et que vous croyez que c'est bien.

Des voix : Oh, oh!

Le sénateur Moore : Honorables sénateurs, j'aimerais que le ministre nous dise quel est le prix garanti par unité. J'aimerais connaître le montant des retombées industrielles régionales garanties.

Le sénateur LeBreton : Honorables sénateurs, j'ai des citations absolument savoureuses de ce que des députés du Parti libéral ont dit au sujet d'autres membres de leur propre parti. Si nous jouons à ce jeu, nous pourrions dans cette enceinte...

Le sénateur Tkachuk : Qu'en est-il de ce que vous avez dit à propos du sénateur Cowan?

Le sénateur LeBreton : Cela dit, le sénateur Tkachuk et moi, de même que plusieurs d'entre nous qui ont finalement...

Le sénateur Mercer : Tout avalé!

Une voix : Et qui en sont fiers.

Le sénateur LeBreton : ... réuni notre parti, sont arrivés à la conclusion que c'était urgent, car nous devions sauver le pays du fléau d'un gouvernement libéral.

Des voix : Bravo!

Le sénateur LeBreton : En ce qui concerne la question qu'a posée le sénateur, je vais la prendre en note.

Le sénateur Moore : Le leader peut prendre note de la question et y ajouter ce qui suit, car son parti a promis, lors de la campagne électorale de 2008, qu'il :

[…] profitera de ces augmentations considérables dans la défense pour assurer que de nouveaux emplois de haute technologie soient créés au Canada en combinant l'achat d'équipement fabriqué au Canada et l'assurance que nous bénéficions d'avantages industriels majeurs quand l'équipement est acheté à l'étranger.

Le Pentagone nous a indiqué que le Canada recevra 3,9 milliards de dollars en retombées industrielles et régionales, mais le leader parle de 12 milliards de dollars. Je veux savoir dans quelle mesure nous pouvons avoir la certitude que nous recevrons ces retombées et connaître le prix garanti par avion de combat.

Le sénateur LeBreton : Nous ne sommes pas les seuls à parler de 12 milliards de dollars. C'est aussi ce qu'a déclaré un témoin de la société Lockheed Martin devant un comité de la Chambre des communes.


ORDRE DU JOUR

Projet de loi sur l'équité entre les sexes relativement à l'inscription au registre des Indiens

Troisième lecture

L'ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Brazeau, appuyée par l'honorable sénateur Braley, tendant à la troisième lecture du projet de loi C-3, Loi favorisant l'équité entre les sexes relativement à l'inscription au registre des Indiens en donnant suite à la décision de la Cour d'appel de la Colombie-Britannique dans l'affaire McIvor v. Canada (Registrar of Indian and Northern Affairs).

L'honorable Mobina S. B. Jaffer : Honorables sénateurs, je prends la parole à l'occasion de la troisième lecture du projet de loi C-3, Loi favorisant l'équité entre les sexes relativement à l'inscription au registre des Indiens en donnant suite à la décision de la Cour d'appel de la Colombie-Britannique dans l'affaire McIvor v. Canada.

Le Comité des droits de la personne, dont je suis la vice-présidente, a étudié le projet de loi C-3. Nous avions écouté le ministre John Duncan, qui a déclaré :

Le projet de loi C-3 vise deux objectifs. Premièrement, il devrait permettre de régler les problèmes particuliers de discrimination fondée sur le sexe dans la Loi sur les Indiens signalés par la Cour d’appel de la Colombie-Britannique. Deuxièmement, il respecterait le délai imposé au Parlement par la cour d’appel. L’an dernier, la Cour d’appel de la Colombie-Britannique a statué que deux alinéas de l’article 6 de la Loi sur les Indiens créaient une distinction entre les hommes et les femmes pour ce qui est de l’inscription à titre d’Indien et que, par conséquent, ils violaient les dispositions de la Charte canadienne des droits et libertés.

Malheureusement, pendant que le comité poursuivait son étude, j'ai appris que cette mesure législative n'éliminera pas la discrimination entre les sexes, pas plus qu'elle n'accordera les mêmes droits aux hommes et aux femmes autochtones.

Je suis persuadée qu'un grand nombre d'entre vous connaissent déjà le cas de Sharon McIvor. Toutefois, pour ceux qui ne sont pas au courant, permettez-moi de présenter un bref aperçu de sa bataille contre le gouvernement canadien.

Sharon McIvor a présenté pour la première fois une demande d'inscription au registre des Indiens en 1985. À la suite du processus, Sharon McIvor et ses frères et sœurs ont été inscrits en vertu du paragraphe 6(2) de la loi, alors que ses enfants se sont vu refuser le droit d'être inscrits. Cette situation a poussé Sharon McIvor à entreprendre sa bataille. Dix-sept longues années plus tard, en juillet 2006, Sharon McIvor a reçu une lettre dans laquelle le ministère de la Justice admettait que le registraire avait commis une erreur et qu'elle était autorisée à être inscrite en vertu de l'alinéa 6(1)c) et que son fils était dorénavant inscrit en vertu du paragraphe 6(2).

Cependant, Sharon McIvor n'était pas satisfaite de ce résultat. Même si elle et ses frères et sœurs étaient maintenant tous inscrits en vertu du paragraphe 6(1), les enfants de son frère avaient également été inscrits en vertu du paragraphe 6(1) et ses petits-enfants, en vertu du paragraphe 6(2). Par ailleurs, le fils de Sharon McIvor avait été inscrit en vertu du paragraphe 6(2) et ses petits-enfants n'avaient pas été inscrits du tout.

En dépit du fait que Sharon McIvor et son frère avaient les mêmes parents, son frère se retrouvait dans une meilleure situation qu'elle simplement parce que c'était un homme. Sharon McIvor a exprimé son mécontentement aux membres du comité comme suit :

Il est plutôt étrange que mon frère, qui, comme je l'ai dit, n'a strictement rien fait, se trouve tout d'un coup mieux placé, du simple fait d'être du sexe masculin.

[…] lorsque j'ai cherché à obtenir l'égalité, […] tout d'un coup, mes frères ont joui d'une égalité supérieure à la mienne, ou ont obtenu un meilleur statut que moi, et je ne jouis d'aucune égalité.

En ce qui concerne la question du statut d'Indien en vertu du paragraphe 6(1), je crois que pour vider réellement la question, j'ai droit au statut d'Indien en vertu de l'alinéa 6(1)a) et mon fils a droit au statut en vertu de l'alinéa 6(1)a). C'est la seule possibilité qui puisse amener, dans ma situation, la pleine égalité.

Honorables sénateurs, en vertu du projet de loi C-3, le fils de Sharon McIvor sera inscrit au registre des Indiens en vertu du paragraphe 6(1), comme il se doit. Toutefois, je ne pense pas que Sharon McIvor a mené cette bataille simplement dans ce but.

Après avoir entendu son témoignage sincère, il m'est apparu clairement que Sharon McIvor ne s'est pas battue simplement pour faire respecter le droit de son fils acquis à la naissance. Elle s'est aussi démenée au nom de toutes les femmes autochtones partout au pays qui voient régulièrement leurs droits fondamentaux bafoués.

Dans son témoignage, Sharon McIvor nous a tous exhortés à reconnaître que le projet de loi C-3 ne tenait pas compte des filles illégitimes d'hommes indiens. Elle a expliqué que, dans une cause judiciaire remontant à la fin des années 1950 et au début des années 1960, on avait affirmé qu'un descendant de sexe masculin d'un homme indien avait le droit d'être inscrit, alors que ce n'était pas le cas pour une descendante d'un homme indien. Sharon McIvor a expliqué cette situation en donnant l'exemple suivant :

J'ai une nièce et un neveu. Le garçon est né en avril 1979 et la fille en juin 1980. Leur mère est non-Indienne; le père est Indien inscrit. Mon neveu a eu le statut d'Indien à sa naissance. Ma nièce ne l'a obtenu qu'après le 17 avril 1985, avec le projet de loi C-31. Elle a le statut en vertu du paragraphe 6(2), alors que le garçon a le statut en vertu de l'alinéa 6(1)a). Ils ont les mêmes parents; la seule différence est que l'un est un garçon et l'autre est une fille. Cela ne change pas. La fille ne pourra pas transmettre son statut de son propre droit, au contraire de son frère, du fait de son sexe.

Honorables sénateurs, si le projet de loi C-3 vise à favoriser l'égalité entre les sexes, comment peut-on alors juger cette situation acceptable? Comment peut-on être favorable à un projet de loi qui permet la discrimination fondée sur le sexe? Je sais qu'on reconnaît l'urgence d'adopter le projet de loi. Toutefois, il est important que tous les sénateurs considèrent qu'il a fallu 20 ans à Sharon McIvor pour en arriver là où elle est aujourd'hui. Elle a lutté sans relâche pour que les droits des femmes autochtones soient les mêmes que ceux des hommes.

L'avocat de Sharon McIvor, Gwen Brodsky, a tenu des propos au comité qui continuent de résonner dans ma tête. Il a dit ceci :

Le projet de loi C-3 et l'exercice auquel nous nous adonnons aujourd'hui me font avoir très honte en tant que Canadienne. Il semble que nous soyons en train d'avoir une conversation quant à la question de savoir s'il est acceptable pour le Parlement d'apposer son sceau d'approbation sur une loi discriminatoire. Sommes-nous bien au Canada en 2010?

(1440)

Honorables sénateurs, ce n'est pas le Canada que j'ai appris à aimer. Le Canada est un pays qui s'est fait le champion des droits de la personne. Nous défendons les droits des femmes partout dans le monde. Pourquoi acceptons-nous de laisser des femmes qui vivent à l'intérieur de nos frontières subir une telle discrimination?

Pendant toute ma carrière, j'ai pu me rendre compte avec une grande tristesse que, dans notre pays, les droits des femmes autochtones sont souvent inférieurs aux droits des femmes non autochtones. Cela est inacceptable. Nous ne pouvons pas laisser cette situation se perpétuer. Les droits d'une femme, indépendamment de sa religion, de sa race ou de sa culture, sont toujours égaux à ceux d'un homme. Ce n'est pas seulement une valeur canadienne. C'est une valeur universelle que nous avons le devoir de défendre.

Honorables sénateurs, je vous exhorte tous à ne pas appuyer le projet de loi C-3.

L'honorable George Baker : Honorables sénateurs, j'ai seulement quelques mots à dire de ce projet de loi. Je veux proposer au Sénat de l'adopter avec dissidence pour les raisons suivantes.

Les honorables sénateurs seront intéressés d'apprendre que le projet de loi n'est pas susceptible de modification, d'après une décision rendue par le Président de la Chambre des communes. Le projet de loi avait été étudié par la Chambre, puis avait été modifié en comité. Une fois revenu à la Chambre à l'étape du rapport, le Président a décrété que tous les amendements apportés par le comité étaient irrecevables parce qu'ils ne satisfaisaient pas à deux conditions. Premièrement, le Président a dit que les amendements devaient s'inscrire dans le cadre de la décision rendue par la Cour d'appel de la Colombie-Britannique. Deuxièmement, il a ajouté qu'à cause de cette condition et de la nature restrictive de la décision de la Cour d'appel, le projet de loi ne pouvait pas être modifié de façon à rendre admissibles des personnes autres que celles qui avaient été approuvées au stade de la deuxième lecture à la Chambre des communes.

C'est une décision très intéressante, qui établit un précédent. Elle permettait des changements mineurs au titre du projet de loi et des corrections grammaticales mineures, mais elle interdisait d'élargir la portée du projet de loi au-delà de ce qui avait été approuvé à l'étape de la deuxième lecture à la Chambre des communes.

Les amendements qui avaient bénéficié d'un appui général au comité ont donc été jugés irrecevables pour cette raison particulière. Comme l'orateur précédent et l'auteur de la motion, le sénateur Brazeau, l'ont noté, il s'agit d'une violation de l'article 15 de la Charte fondée sur le sexe.

Honorables sénateurs, c'est une affaire qui a mis 20 ans à être réglée par les tribunaux. Elle découlait d'une modification de la Loi sur les Indiens que nous avions adoptée en 1985. Je m'en souviens très bien. Au début des années 1980, j'étais membre du Comité de la justice de l'autre endroit, qui s'était occupé de l'affaire. Le projet de loi contenait une erreur, comme cela arrive parfois. Comme les honorables sénateurs le savent, nous demandons toujours aux représentants du ministère de la Justice qui assistent aux réunions du comité : « Est-ce que ce projet de loi peut résister à une contestation en vertu de la Charte? » La Charte était entrée en vigueur en 1983, mais la mise en œuvre de l'article 15 concernant la discrimination avait été retardée de trois ans. À l'époque, les juristes avaient dit au Sénat et à la Chambre des communes que les modifications pouvaient résister à une contestation en vertu de la Charte. Ce ne fut pas le cas.

L'affaire est arrivée devant les tribunaux vers 1989. Elle a commencé devant un tribunal inférieur de la Colombie-Britannique. On aurait pu penser, comme l'a dit le sénateur Angus, qu'elle commencerait devant la Cour fédérale qui, comme les honorables sénateurs le savent, est la seule habilitée à s'occuper d'affaires concernant des décisions de ministres ou de personnes désignées par des ministres ou encore des décisions d'organismes quasi judiciaires qui se prononcent sur des mesures législatives fédérales.

L'affaire a donc commencé devant un tribunal inférieur. Bien sûr, le ministère de la Justice représentait le ministre fédéral. Il a essayé de faire de l'obstruction, ce qui est normal. Il a présenté des requêtes en radiation, des motions soutenant que les déclarations sous serment n'étaient pas correctement libellées, des motions affirmant que les documents n'avaient pas été présentés dans les formes et d'autres arguments. L'affaire a donc pris 20 ans avant d'être jugée.

Elle a finalement fait l'objet, en 2007, d'une décision d'un juge de la Cour supérieure de la Colombie-Britannique, décision selon laquelle il y avait une discrimination endémique. Ce sont mes paroles et non celles du juge. Bref, la discrimination était telle que les descendants d'une femme n'avaient pas les mêmes droits que les descendants d'un homme. De l'avis d'une personne raisonnable, la décision du juge de la Cour supérieure de la Colombie-Britannique — texte complexe de quelque 70 pages — s'attaquait au problème général de la loi. Il disait en substance : « Oui, nous sommes d'accord avec Mme McIvor. » Soit dit en passant, honorables sénateurs, quand elle a comparu devant le comité du Sénat et d'autres comités, Mme McIvor n'a pas mentionné le fait qu'elle était elle-même avocate et professeure de droit. Elle n'a pas mentionné qu'elle avait un doctorat. Elle a une très bonne connaissance de la loi, tout comme son avocat, qui s'est présenté devant la Cour suprême du Canada à plusieurs reprises dans des affaires concernant les droits de la personne.

Un juge a donc déclaré qu'il y avait discrimination générale. Ensuite, la Cour d'appel a dit — je ne serai pas très précis ici parce que c'est très compliqué — que, en fin de compte, on ne peut pas se plaindre d'une violation de la Charte à moins d'en être soi-même victime. Autrement dit, on ne peut pas se présenter devant un tribunal et dire : « Les droits garantis à un tel par la Charte ont été violés. » Non, la règle veut qu'on ait été soi-même victime de la violation. Quelles sont les conséquences d'une telle décision?

La Cour d'appel a dit que, pour régler ce cas de discrimination, on pouvait faire un changement mineur. Il n'était cependant pas mineur. Comme l'a dit le sénateur Brazeau, 45 000 personnes bénéficieraient de ce projet de loi s'il était adopté tout de suite. Je suis du même avis que lui à ce sujet, mais c'est le changement qu'il faut faire. Autrement dit, la Cour d'appel a indiqué que nous devons limiter le projet de loi de manière qu'il corrige cette discrimination, mais uniquement en ce qui a trait aux droits de la plaignante, laissant de côté toutes les autres personnes qui ont été victimes de discrimination aux termes de l'article 15 de la Charte. Ce fut la décision de la Cour d'appel.

(1450)

Vient alors le projet de loi faisant suite à la décision de la Cour d'appel, qui avait donné jusqu'à avril dernier au gouvernement pour modifier la loi. Ce délai a été prolongé jusqu'à janvier prochain. Ce projet de loi doit donc être adopté au plus tard en janvier. Nous y voici. Le comité de la Chambre des communes l'a étudié et a dit : « Il y a là un cas de discrimination générale; modifions la mesure législative de façon qu'elle aille au-delà de la déclaration de la Cour d'appel de la Colombie-Britannique et qu'elle respecte les exigences de la Charte. » Le Président a déclaré cette solution irrecevable, en disant que cela ne pourrait pas respecter le Règlement de la Chambre des communes en ce sens que le projet de loi ne peut pas s'écarter des paramètres de la décision de la Cour d'appel de la Colombie-Britannique, et qu'il ne peut donc pas s'appliquer à davantage de cas, par rapport à ce qui a été approuvé à l'étape de la deuxième lecture à la Chambre.

Votre Honneur, vous et moi savons très bien que le Règlement du Sénat n'est pas exactement le même que celui de la Chambre des communes — du moins, son interprétation n'est pas la même. Il y a cependant un hic. Au Comité des droits de la personne, où les sénateurs ont fait un excellent travail, certains ont signalé que, si nous modifions le projet de loi, celui-ci devra retourner à la Chambre pour approbation. La décision ayant déjà été rendue à l'autre endroit, il serait rejeté et le projet de loi nous reviendrait dans sa première version. Le temps aurait passé, et ces 45 000 personnes ne profiteraient toujours pas des bénéfices de cette mesure.

Honorables sénateurs, je crois qu'il convient d'adopter le projet de loi. J'imagine que certains sénateurs de ce côté-ci diront « avec dissidence », mais quelque 45 000 personnes en bénéficieront.

Son Honneur le Président intérimaire : Les honorables sénateurs sont-ils prêts à se prononcer?

Des voix : Le vote!

Son Honneur le Président intérimaire : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?

Des voix : D'accord.

Des voix : Avec dissidence.

(La motion est adoptée et le projet de loi, lu pour la troisième fois, est adopté avec dissidence.)

Projet de loi canadienne sur la sécurité des produits de consommation

Troisième lecture—Suite du débat

L'ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Martin, appuyée par l'honorable sénateur Kochhar, tendant à la troisième lecture du projet de loi C-36, Loi concernant la sécurité des produits de consommation.

L'honorable Joseph A. Day : Honorables sénateurs, nous débattons du projet de loi C-36 à l'étape de la troisième lecture. J'aimerais remercier et féliciter madame le sénateur Martin de l'excellent travail qu'elle a fait sur le projet de loi et de l'avoir parrainé, au nom du gouvernement, à toutes les étapes au Sénat, ainsi qu'au comité. J'aimerais également remercier et féliciter tous les autres membres du comité d'avoir contribué à l'examen de ce projet de loi.

Honorables sénateurs, le projet de loi C-36 est indéniablement une mesure législative importante. Je crois que tous, dans cette Chambre et à l'extérieur de celle-ci, tiennent à protéger les enfants, et que tous conviennent qu'il faut mettre en place des mesures et des directives pour garantir la sécurité des produits que nous achetons et utilisons. Ce n'est donc pas une question partisane et les sénateurs des deux côtés se rallient pleinement au principe fondamental de ce projet de loi.

On nous dit que les mesures et les directives actuellement en vigueur sont désuètes et qu'il faut les remplacer. C'est le discours que tiennent le ministre et son ministère depuis quelque temps déjà. Ils disent que le projet de loi sur la sécurité des produits de consommation doit remplacer la partie I de la Loi sur les produits dangereux. Cependant, comme je l'ai mentionné à l'étape de la deuxième lecture, rien n'indique que ce projet de loi soit nécessaire dans l'immédiat. J'en veux pour preuve que le ministre a attendu quelque six mois après que le projet de loi soit mort au Feuilleton, après la prorogation, pour le présenter à nouveau et trois mois et demi additionnels avant d'en débattre.

Les sénateurs ont entendu parler récemment dans les médias de deux mesures adoptées en vertu de la Loi sur les produits dangereux. La première est une nouvelle disposition réglementaire limitant la quantité de plomb dans les jouets pour enfants. Elle a été annoncée le 29 novembre, c'est-à-dire la semaine dernière. Les sénateurs constateront que la ministre de la Santé a présenté de nouvelles règles sévères limitant la quantité de plomb présente dans les produits destinés aux enfants.

La ministre a souligné que les nouvelles règles accordaient au ministère de la Santé le pouvoir d'empêcher l'importation ou la vente des produits figurant sur une longue liste lorsque leur teneur en plomb dépasse les nouvelles limites. Le ministère de la Santé pourra également retirer du marché tout produit enfreignant cette règle, qui a été adoptée en vertu de la Loi sur les produits dangereux. C'est le genre de droit et le genre de pouvoir que la ministre disait vouloir obtenir en modifiant la loi. C'est ce qu'elle a affirmé dans ses communiqués et dans l'exposé qu'elle nous a fait. Nous savons maintenant que la version actuelle de la loi autorise l'adoption de telles règles.

Honorables sénateurs, une deuxième annonce a eu lieu le 1er décembre 2010, concernant de nouvelles règles applicables aux lits d'enfant, aux berceaux et aux moïses. La ministre fédérale de la Santé, Mme Aglukkaq, a déclaré lors d'une conférence de presse, mercredi dernier, que les exigences du Canada relativement aux lits d'enfant et aux berceaux étaient déjà parmi les plus sévères au monde et qu'elles le seraient encore plus avec ces modifications.

Lors de cette annonce, honorables sénateurs, il a été précisé que les fabricants et les importateurs seraient désormais tenus de conserver dans leurs dossiers pendant au moins trois ans toute l'information sur la vente, la promotion et la mise à l'essai des lits où les enfants dorment sans supervision. Or, la ministre disait avoir besoin de modifier la loi pour pouvoir imposer une telle obligation.

Honorables sénateurs, nous pouvons prendre tout le temps nécessaire pour examiner le projet de loi. Il n'y a pas urgence, et nous pouvons faire le travail que l'on attend normalement de nous dans cette enceinte.

Honorables sénateurs, ce projet de loi propose un nouveau régime de sanctions bureaucratiques ou administratives. Les dispositions proposées s'insèrent dans le droit criminel. Pourtant, au lieu d'avoir recours aux procédures pénales établies, avec les mécanismes habituels pour protéger la personne inculpée, mécanismes que nous connaissons très bien au Canada, ce projet de loi propose une nouvelle procédure administrative. Au lieu de parler d'une infraction, on y emploie le terme « violation ». Honorables sénateurs, voilà pourquoi le projet de loi mérite une étude prolongée et pourquoi il faut le scruter à fond pour éviter que, dans le nouveau régime, il ne soit pas porté atteinte inutilement aux droits individuels et aux libertés fondamentales.

(1500)

Honorables sénateurs, je vais traiter brièvement du projet de loi pour vous aider à comprendre ce qui s'y trouve et ce que nous sommes invités à étudier, car c'est ainsi que nous pourrons voir si le projet de loi va trop loin, si la ministre est allée trop loin, plus loin qu'il ne fallait pour atteindre les objectifs visés.

Je commence par l'article 2. J'attire votre attention sur deux points. Le premier est la définition de l'expression « renseignements commerciaux confidentiels » et le deuxième, la définition du terme « administration ». Ces définitions sont importantes parce que ces termes sont employés dans la suite du texte.

« Renseignements commerciaux confidentiels » — on parle de renseignements commerciaux qui se rapportent à l'entreprise d'une personne ou à ses activités et, à la fois, qui ne sont pas accessibles au public; à l'égard desquels la personne a pris des mesures raisonnables dans les circonstances pour qu'ils demeurent inaccessibles au public; qui ont une valeur économique réelle ou potentielle pour la personne ou l'entreprise.

Il s'agit d'une définition classique de la propriété intellectuelle et des secrets commerciaux, honorables sénateurs. Voilà en quoi consistent les renseignements confidentiels.

Il y a également une définition du terme « administration ». La définition des renseignements confidentiels englobe tout, et celle de l'« administration » a une extension tout aussi grande. Elle comprend l'administration fédérale, toute société mentionnée à l'annexe III de la Loi sur la gestion des finances publiques, toute administration provinciale, tout organisme public constitué sous le régime d'une loi provinciale et tout gouvernement autochtone.

Ce qui m'inquiète, et je veux comprendre pourquoi la question est si importante, c'est que la définition du terme « administration » comprend aussi « toute administration d'un État étranger ou d'une de ses subdivisions ».

Dans bien des pays, une subdivision d'un État étranger, cela peut comprendre les sociétés souveraines. Ce sont les activités commerciales, les entreprises dirigées par l'État. Nous en avions beaucoup et nous les appelions sociétés d'État. Sénateurs, cette partie de la définition m'inquiète si je tiens compte de l'endroit où le terme est employé.

Le sénateur Cordy a parlé dans son récent exposé de l'article 14 de la loi. Je ne vais donc pas m'y attarder. Ceux qui étaient présents ont entendu les préoccupations du sénateur, qui fait du reste partie du comité.

Les articles 15, 16 et 17 traitent du respect des renseignements commerciaux confidentiels et de leur communication par le ministre. Honorables sénateurs, j'estime qu'il faut resserrer ces dispositions pour que nous puissions nous sentir à l'aise devant le fait que le gouvernement peut décider, de son propre chef, de communiquer des renseignements personnels ou commerciaux confidentiels.

L'article 15 dispose : « Le ministre peut communiquer à toute personne ou administration [...] des renseignements personnels [...] »

Nous avons vu la définition du terme « administration » : une entité étrangère, une entité d'une administration étrangère. Nous pouvons songer à ce qui s'est passé récemment à Anciens Combattants Canada, où ont été communiqués des renseignements personnels du colonel Stogran, alors ombudsman pour Anciens Combattants Canada. Il a expliqué comment les divers ministères se servaient des renseignements personnels de celui qui adressait une demande à un ministère donné, mais sans que la personne en cause le sache.

Il faut que la personne le sache. Si elle sait que ses renseignements personnels sont communiqués et si elle a la chance de les rectifier en cas d'erreur ou encore, dans une situation extrême, si elle apprend après coup que ses renseignements personnels ont été mis à la disposition de tous ces ministères ou entités étrangères, le fait de le savoir pourrait probablement assurer un certain équilibre. Toutefois, un amendement à ce sujet n'a pas été accepté, honorables sénateurs.

Trois régimes de communication sont prévus aux articles 15, 16 et 17 : à l'article 15, sans aucun consentement; à l'article 16, avec une entente écrite avec l'entreprise ou l'entité avant la communication des renseignements; à l'article 17, avec obligation d'aviser la personne après coup.

Nous voulions obtenir au moyen d'un amendement une disposition qui assurerait le même équilibre dans chacun des articles. Toutefois, honorables sénateurs, cet équilibre ne se retrouve pas dans le projet de loi. L'amendement a été rejeté.

Je renvoie rapidement les sénateurs à l'article 21, qui porte sur la vérification de la conformité. Cet article permet aux inspecteurs de visiter tout lieu, sans avoir besoin de soupçonner qu'il y a eu manquement, dérogation ou violation de la loi, pour vérifier si les dispositions sont respectées. Toutefois, lorsqu'ils vont faire cette vérification, les inspecteurs peuvent également saisir tout produit ou véhicule pour faire la vérification. Ils peuvent aussi exiger que la personne dont le produit a été saisi le transporte ailleurs à ses propres frais.

Pourquoi faut-il que le projet de loi aille si loin? Pourquoi les inspecteurs ne devraient-ils pas avoir le droit de saisir des échantillons pour faire les vérifications, et s'il y a manquement ou violation, de prendre les mesures nécessaires?

Aucun mandat n'est nécessaire pour visiter un lieu privé. Il n'y a obligation de se munir d'un mandat que pour les maisons d'habitation. Et même là, il s'agit d'une disposition anémique ex parte, ce qui veut dire qu'on peut obtenir le mandat à l'insu de tous, sans que la personne dont la maison va être visitée le sache, sans aucune représentation.

Là encore, nous avons demandé qu'on exige un mandat dans les cas où il est raisonnable d'en avoir un avant de visiter un lieu. Nous avons toujours reconnu que, dans une situation extrême, il se peut que le ministre doive agir rapidement. Dans le cours normal des choses, cependant, il n'y a pas de raison de ne pas appliquer la disposition sur les mandats qui nous est familière et qui s'applique ailleurs, soit qu'il doit y avoir des motifs raisonnables de croire qu'il se passe quelque chose ou qu'il y ait infraction à une disposition de la loi ou du règlement.

Honorables sénateurs, les articles 41 et 59 font ressortir la différence qui existe entre l'approche administrative et l'approche de la cour de justice. L'article 41 dit clairement que, en cas d'infraction, la prise des précautions voulues peut constituer une défense. Le paragraphe 41(2) dispose que la prise de précautions voulues peut être opposée en défense à l'égard d'une infraction. Si quelqu'un a fait tout son possible, s'il a pris des mesures de prévention, s'il avait dans ses programmes toutes les vérifications nécessaires, et si quelque chose s'est tout de même produit, il a pris toutes les précautions voulues, ce qui constitue une défense.

Dans le régime administratif prévu ici pour remplacer le régime judiciaire, c'est le contraire qui se produit. En effet, l'article 59 dispose que ce moyen de défense n'est pas admis s'il y a eu violation et que le régime administratif s'applique. Si ce moyen de défense a été assez bon pendant des siècles pour trouver place dans le droit pénal, comment se peut-il qu'il ne soit pas assez bon dans ce processus administratif? C'est là une autre question que nous avons posée. Nous avons essayé d'amender le projet de loi pour autoriser ce moyen de défense, mais la proposition a été rejetée.

Honorables sénateurs, il y a bien d'autres points que je pourrais vous signaler, par exemple des cas d'éléments en trop, de mots inutiles qui ne devraient pas être là.

(1510)

Nous essayons de faire ce ménage pour éviter que, dans deux, trois ou 10 ans, un avocat futé ne vienne signaler une incohérence qui empêcherait la loi de s'appliquer et la ferait déclarer inconstitutionnelle. Nous devons, dans le cadre de nos fonctions, essayer de prévenir une telle éventualité en vérifiant soigneusement le produit mal équarri qui nous vient de la Chambre des communes, siège d'affrontements partisans, afin de l'affiner, de procéder à notre second examen objectif et de déterminer s'il a des répercussions auxquelles on n'avait pas pensé auparavant. Honorables sénateurs, je ne crois pas que cela a été fait. Le Sénat a dans ce cas manqué à son devoir de chambre du second examen objectif.

Honorables sénateurs, nous avons l'obligation d'étudier soigneusement les mesures législatives qui nous sont soumises. Malheureusement, je n'ai pas l'impression que nous ayons examiné ce projet de loi aussi bien qu'il le mérite ou que nous aurions dû le faire. Le Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie a tenu deux réunions. Les trois quarts des témoins qui ont comparu étaient des fonctionnaires venus nous vanter tous les aspects positifs du projet de loi.

Honorables sénateurs, nous devons veiller à ce que les mesures législatives qui peuvent avoir des répercussions sur le public ne nuisent pas aux gens à qui elles s'appliquent. Nous devons écouter ces Canadiens et, à mon humble avis, nous ne l'avons pas fait aussi bien que nous aurions dû le faire. Honorables sénateurs, immédiatement après la deuxième réunion, au cours de laquelle nous avons accueilli quatre ou cinq témoins de l'extérieur venus nous parler du projet de loi, nous sommes passés à l'étude article par article. Cela a été fait malgré les objections d'un certain nombre de sénateurs, qui ont protesté parce qu'ils estimaient qu'on aurait dû leur laisser le temps de songer aux renseignements qui venaient de leur être présentés.

Pour procéder à l'étude article par article, il était nécessaire de prolonger la séance. Cela s'est fait sans obtenir l'autorisation des deux whips et en dépit des objections de certains sénateurs qui devaient partir parce qu'ils avaient d'autres engagements. Honorables sénateurs, cela vous donne une idée de ce qui s'est passé à cet égard.

Mon bureau a reçu près d'un millier de courriels demandant que le Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie prenne le temps d'entendre des témoins connaissant bien les mesures proposées et d'examiner soigneusement les pouvoirs demandés par le gouvernement pour s'assurer qu'ils sont nécessaires et souhaitables.

M. Shawn Buckley a été recommandé comme témoin possible, mais les sénateurs du côté gouvernemental ont refusé de le recevoir. Je me suis demandé pourquoi. M. Buckley est un constitutionnaliste renommé, qui est hautement qualifié et qui est probablement l'un des plus compétents qu'on puisse trouver au Canada dans le domaine couvert par le projet de loi. Nous avions entendu M. Buckley lors de l'étude de la version précédente de cette mesure, qui s'appelait alors le projet de loi C-6. Nous l'avions alors trouvé très intéressant et très bien renseigné. Naturellement, quand le projet de loi a été déposé de nouveau, c'est le premier témoin que nous avons pensé convoquer pour discuter des changements, des changements qui n'ont pas été faits et nous renseigner sur les points forts et les faiblesses du nouveau projet de loi. Malheureusement, les sénateurs conservateurs se sont prononcés à l'unanimité contre la motion du sénateur Cordy proposant d'inviter M. Buckley à comparaître devant le comité.

Le sénateur Mercer : C'est honteux.

Le sénateur Tardif : Quelle honte!

Le sénateur Day : Honorables sénateurs, j'ai présenté une deuxième motion proposant de tenir une réunion supplémentaire pour entendre quelques autres témoins de l'extérieur. Malheureusement, cette motion aussi a été rejetée à l'unanimité par la majorité conservatrice du comité.

Honorables sénateurs, j'ai reçu 10 mémoires écrits concernant le projet de loi C-36 d'organisations dont le point de vue aurait pu nous être utile. Il s'agissait de l'école de commerce Asper de l'Université du Manitoba, de l'Association canadienne de produits de consommation spécialisés, de la Canadian Consumer Product Safety Coalition, de l'Association canadienne du jouet, de l'Association canadienne du droit de l'environnement, de la Health Action Network Society, de la Natural Health Products Protection Association, de la Fondation David Suzuki, de la Consumer Interest Alliance Inc. et de la société Johnson & Johnson.

Honorables sénateurs, permettez-moi de citer un passage du mémoire de la Health Action Network Society :

On nous a dit que notre organisation ne pourrait pas comparaître devant votre comité au sujet du projet de loi C-36, et on nous a plutôt demandé de vous écrire. Il y a malheureusement quelque chose qui manque quand on ne peut pas se rencontrer face à face, mais voici nos arguments [...]

Honorables sénateurs, cette lettre est représentative des messages que nous avons reçus au sujet du projet de loi. Pour une raison quelconque, on a empêché ces gens de comparaître. Plusieurs d'entre eux auraient dit que le projet de loi avait été amélioré par rapport au précédent, mais qu'il restait d'autres modifications à apporter.

Honorables sénateurs, cela devrait suffire pour prouver que nous n'avons pas fait notre travail dans le cadre de ce projet de loi. Nous avons en même temps offensé un important secteur de la société en précipitant ce processus sans raison valable. Absolument rien ne justifiait cette hâte parce que nous nous étions tous entendus...

Le sénateur Mitchell : Une autre prorogation est toujours possible.

Le sénateur Day : ... sur le principe fondamental. Le principe du projet de loi a été universellement adopté. Il est difficile de comprendre, honorables sénateurs, pourquoi la politique partisane est intervenue pour empêcher que le projet de loi reçoive toute l'attention qu'il mérite.

Des voix : Bravo!

Le sénateur Day : Au lieu d'examiner les motions et les amendements proposés, on nous a accusés de « lambiner », comme s'il n'était pas de notre devoir de veiller à ce que toutes les dispositions du projet de loi soient soigneusement examinées pour que nous ayons le meilleur produit fini possible, dans l'intérêt des Canadiens.

Honorables sénateurs, les projets de loi, et non les rapports d'orientation, constituent la plus grande priorité du Sénat. Il y a quelque chose qui cloche lorsqu'un comité peut consacrer d'innombrables réunions à des études d'orientation et à la rédaction d'un rapport, mais refuse de tenir plus de deux réunions pour étudier un projet de loi qui touchera les Canadiens pour de nombreuses années à venir.

Honorables sénateurs, ce projet de loi a suivi un long parcours. Depuis qu'il a été déposé sous le titre de projet de loi C-52, puis de projet de loi C-6, on y a intégré beaucoup des amendements que nous avons proposés. Nous en remercions le gouvernement. Toutefois, je dois répéter que nous n'avons pas fait de notre mieux, à titre de sénateurs, pour améliorer ce projet de loi en particulier.

J'ai proposé au comité plusieurs amendements qui ont tous été rejetés sans débat, sans discussion et, hélas, sans grande compréhension. Le comité s'est ensuite précipité pour faire l'étude article par article. La réputation du Sénat dépend de ce que nous faisons pour nous acquitter de nos fonctions de sénateurs. En omettant de le faire, nous n'avons pas accordé au projet de loi l'attention qu'il méritait.

Honorables sénateurs, nous avons entendu des discussions ici sur les pratiques et leur importance. Pas plus tard qu'hier, le sénateur Comeau nous en a parlé. Les pratiques se distinguent des règles écrites. Elles reflètent les traditions et les coutumes de cette institution sur le plan du temps accordé et de la courtoisie manifestée envers les sénateurs qui peuvent avoir autre chose à faire. Voilà ce qui permet au Sénat de fonctionner. Honorables sénateurs, ce ne sont pas les règles. Ce sont plutôt toutes les pratiques et traditions et toute la courtoisie que nous manifestons les uns envers les autres.

Je sais qu'il y a une adaptation qui se fait actuellement au Sénat. De ce côté-ci, nous essayons de nous habituer à l'important rôle d'opposition, tandis que l'autre côté s'adapte au rôle tout aussi important du pouvoir majoritaire. Je comprends cela, mais j'ai bien hâte au jour où nous pourrons mettre un terme à cette période de transition et recommencer à faire preuve de courtoisie les uns envers les autres, ce qui est très important, et à faire le travail également très important que nous sommes censés faire au Sénat.

(1520)

L'honorable Jane Cordy : Le sénateur accepterait-il de répondre à une question?

Le sénateur Day : Bien sûr.

Le sénateur Cordy : C'est avec plaisir que j'ai entendu le sénateur Day rapporter comment cela s'était passé au comité au moment des situations difficiles. Nous sommes censés constituer la Chambre du second examen objectif, mais, en effet, ce n'est pas ce qui s'est produit au comité. Il était très frustrant de voir que trois des quatre groupes que nous avons entendus étaient, comme l'a souligné le sénateur, constitués de représentants du gouvernement qui parlaient bien sûr en faveur du projet de loi, puisque c'est ce qu'ils doivent faire. Le dernier groupe, qui représentait le quart des témoins que nous avons entendus, réunissait des gens de l'extérieur du gouvernement. Cela ne me semble pas très équilibré.

Lorsque le sénateur Martin a pris la parole l'autre jour, j'ai parlé du terme « entité étrangère ». Je suis désolée, mais je n'ai pas le texte du projet de loi sous la main et je ne peux donc vous donner le numéro de l'article dans lequel il se trouve. Toutefois, je suis un peu inquiète de voir le terme « entité étrangère » et de lire qu'une « entité étrangère » pourrait déposer une plainte. Il n'y a pas de définition de ce terme dans le projet de loi. Il y en a beaucoup d'autres, mais celle-ci ne s'y trouve pas.

Pour ce qui est de la façon dont une plainte pourrait être faite par un gouvernement étranger, si c'est là la définition que je donne au terme « entité étrangère », je peux l'accepter, parce que les gouvernements devraient collaborer entre eux pour s'assurer que les produits ne sont pas dangereux. Toutefois, dans le groupe de témoins que nous avons entendus qui n'appartenaient pas au gouvernement, deux d'entre eux se sont dits préoccupés à l'idée que le terme « entité étrangère » pourrait s'appliquer à des entreprises commerciales privées étrangères mal intentionnées qui pourraient dire qu'un produit fabriqué au Canada n'est pas sécuritaire, afin que leurs produits aient un meilleur marché au Canada.

Le sénateur a-t-il une meilleure définition à proposer ou une meilleure idée de ce que le terme « entité étrangère » pourrait vouloir dire au sens du projet de loi C-36?

Le sénateur Day : Je remercie le sénateur Cordy de sa question. J'étais présent lorsqu'elle a posé la question au sénateur Martin et j'en ai également parlé un peu plus tôt. Le terme est utilisé à l'alinéa 14(1)d) du projet de loi, où il est précisé que le ministre peut exiger un rappel sur la foi d'un rappel fait par une entité étrangère ou de toute autre mesure prise par elle pour des raisons de santé ou de sécurité humaines. C'est l'un des endroits où ce terme est utilisé.

Madame le sénateur Cordy s'est dite préoccupée du fait qu'une entité pourrait agir de la sorte par malice, en procédant à un rappel mineur afin d'évincer un produit concurrent du marché. Cela est préoccupant, d'autant plus que le terme n'est pas défini et qu'il laisse aux inspecteurs et aux fonctionnaires toute la latitude voulue pour prendre des mesures qu'ils justifieraient ensuite en disant qu'il s'agissait d'une activité menée par une entité étrangère.

La définition du mot « administration » est tellement large qu'elle englobe une variété de sections et d'ordres de gouvernement qui font affaire à l'étranger. Selon moi, on pourrait donner à l'expression « entité étrangère » un sens encore plus large qui engloberait tous les groupes, organisations, compagnies ou entreprises aux quatre coins de la planète. Cela est troublant.

L'honorable Tommy Banks : Je prierais les sénateurs de placer une copie du projet de loi C-36 devant eux, car je vais présenter un amendement. Je veux que les sénateurs voient précisément de quoi je parle.

Avant de présenter cet amendement, je tiens à réitérer certains points que le sénateur Day a abordés. Comme le sénateur Day l'a expliqué, le gouvernement s'engage sur une pente très dangereuse en nommant dorénavant « violations » ce que le Code criminel appelle des infractions. Il s'agirait maintenant de violations aux termes du règlement. En lisant attentivement le projet de loi, on constate que le processus qui mène à l'accusation ne laisse aucune chance aux personnes ayant fait l'objet d'un avis de violation de ne pas être trouvées coupables et ce, sans égard à toutes les représentations, de quel qu'ordre soient-elles, que ces personnes pourraient faire.

Le point soulevé par le sénateur Day est très pertinent à cet égard. Ce qu'on appelle maintenant une « violation » et non plus une « infraction », dans cette mesure, ne peut plus faire l'objet d'une défense en common law. En common law, il a toujours été possible de se défendre contre une accusation d'infraction en invoquant la diligence raisonnable ou en démontrant qu'on a agi pour ce qu'on croyait être des motifs raisonnables. Si ces motifs raisonnables s'avéraient justes, la personne était disculpée. Cela a toujours été possible.

Maintenant, avec les « violations », et non plus les infractions, prévues dans ce projet de loi, il n'est plus possible d'invoquer la défense de diligence raisonnable de la common law ou de faire la démonstration qu'on a agi pour ce qu'on croyait être des motifs raisonnables, processus susceptible de donner lieu à la disculpation de la personne accusée. Nous nous engageons sur une pente dangereuse, honorables sénateurs. J'espère que nous nous ressaisirons.

Il y a autre chose qui me gêne dans la mesure. Je suis désolé d'en avoir parlé si souvent, mais nous sommes habitués à ce que les pouvoirs policiers soient accordés à des gens qui ont montré les capacités, l'expertise, la formation et la compétence nécessaires. On nomme dans le projet de loi des inspecteurs qui ont toutes sortes de droits de perquisition et de saisie et qui sont en mesure d'obtenir des mandats ex parte. Il s'agit de particuliers, pas d'agents de la paix, d'agents de police, de gardes-chasse, d'agents des pêches, d'agents d'immigration, d'agents de douane ou de qui que ce soit d'autre capable de montrer les capacités et l'expertise nécessaires pour s'acquitter du rôle d'« inspecteur », et ces particuliers pourraient pénétrer dans un établissement commercial sans mandat.

Personne ne s'opposerait à ce qu'on pénètre dans un magasin qui vend des marchandises qu'il ne devrait pas vendre. Le projet de loi ne porte pas seulement sur les lits d'enfants et la teneur en plomb des jouets. Il porte sur les produits de consommation. Si quelqu'un vend un produit dangereux, un produit qui rendra les gens malades ou qui leur nuira, nous devrions habiliter quelqu'un à le confisquer sur-le-champ. Personne ne s'oppose à cela.

Cependant, si quelqu'un possède une entreprise qui compte 15 points de vente, ainsi qu'un bureau administratif au 15e étage d'un immeuble où aucun produit n'est vendu, est-il raisonnable qu'un inspecteur puisse pénétrer dans ce bureau sans mandat, saisir toutes les données qui se trouvent dans les ordinateurs, se servir de l'imprimante pour s'imprimer des copies et confisquer le tout? J'estime que cela pose problème.

J'en viens maintenant à mon amendement, auquel le sénateur Day a également fait référence; j'aimerais que tous les sénateurs le lisent.

(1530)

Je vous invite à passer à la page 9 du projet de loi, à l'article 15, intitulé « Communication de renseignements par le ministre ». Il est question de renseignements personnels.

Lisons l'article 15 et l'article 16, en commençant par l'article 16, qui est correct.

Le ministre peut communiquer à toute personne ou administration exerçant des fonctions relatives à la protection de la santé ou de la sécurité humaines ou de l'environnement en ce qui touche un produit de consommation des renseignements commerciaux confidentiels [...]

— qui relèvent de la propriété intellectuelle —

Tout va bien jusque-là. Le problème se trouve dans la suite.

[...] sans obtenir son consentement et sans l'aviser, s'il conclut avec le destinataire des renseignements une entente écrite prévoyant que des mesures seront prises pour assurer leur confidentialité et qu'ils ne seront utilisés que dans le cadre de l'exercice de ces fonctions.

Formidable. L'article circonscrit les renseignements qui peuvent être communiqués — ils doivent porter, d'une façon ou d'une autre, sur le domaine de la consommation — et exige que le gouvernement du Liechtenstein s'engage auprès du ministre à utiliser ces renseignements seulement aux fins visées, ou autrement d'en assurer la confidentialité.

Voyons maintenant le paragraphe 15(1). Nous avons vu, à l'article 16, les protections accordées aux entreprises et aux sociétés, et nous avons noté les limites imposées au genre de renseignements qui peuvent être communiqués. Maintenant, lisons le paragraphe 15(1).

Le ministre peut communiquer à toute personne ou administration exerçant des fonctions relatives à la protection de la santé ou de la sécurité humaines des renseignements personnels [...]

— soit, comme on l'a décrit précédemment, tout ce qui vous concerne —

[...] se rapportant à un individu sans obtenir son consentement, si cela est nécessaire pour établir l'existence d'un danger pour la santé ou la sécurité humaines qui est grave ou remédier à ce danger.

Il n'y a pas d'autres engagements. Le gouvernement qui reçoit les renseignements n'est pas obligé d'en préserver la confidentialité. Quand le ministre décide de fournir des renseignements au gouvernement du Guatemala, ce dernier peut faire ce qu'il veut avec ceux-ci.

J'exhorte les sénateurs à tenir compte du fait que la protection conférée par le type d'engagement dont nous parlons, ainsi que par les engagements que le ministre doit obtenir de la part des entités ou des gouvernements étrangers auxquels ces renseignements sont divulgués, doit être la même pour les citoyens canadiens que pour les entreprises canadiennes. Les citoyens canadiens méritent la même protection que les entreprises canadiennes.

La commissaire à la protection de la vie privée nous a dit que cette question était couverte dans la Loi sur la protection des renseignements personnels, et c'est ce que le sénateur Martin nous a dit plus tôt quand je lui ai posé cette question. C'est vrai, mais ce qui est écrit dans cette loi est tautologique. Voici ce qu'on y dit :

La présente loi a pour objet de compléter la législation canadienne en matière de protection des renseignements personnels relevant des institutions fédérales [...]

Le paragraphe 8(1) de la Loi sur la protection des renseignements personnels stipule que :

Les renseignements personnels qui relèvent d'une institution fédérale ne peuvent être communiqués, à défaut du consentement de l'individu qu'ils concernent, que conformément au présent article.

Le paragraphe 8(2) dit ceci :

Sous réserve d'autres lois fédérales, la communication des renseignements personnels qui relèvent d'une institution fédérale est autorisée dans les cas suivants : [...]

b) communication aux fins qui sont conformes avec les lois fédérales ou ceux de leurs règlements qui autorisent cette communication;

Il n'y a donc pas de protection.

f) communication aux termes d'accords ou d'ententes conclus d'une part entre le gouvernement du Canada ou l'un de ses organismes et, d'autre part, le gouvernement d'une province ou d'un État étranger, une organisation internationale d'États ou de gouvernements, ou l'un de leurs organismes, en vue de l'application des lois ou pour la tenue d'enquêtes licites; [...]

m) communication à toute autre fin dans les cas où, de l'avis du responsable de l'institution :

(i) des raisons d'intérêt public justifieraient nettement une éventuelle violation de la vie privée [...]

Je pourrais continuer, mais j'ai tout lu et c'est redondant. Tout est couvert et, en vertu du projet de loi, on peut donner n'importe quel renseignement à n'importe qui. La Loi sur la protection des renseignements personnels n'offre aucune protection à cet égard.

Motion d'amendement

L'honorable Tommy Banks : Par conséquent, honorables sénateurs, je suis heureux de proposer :

Que le projet de loi C-36 soit modifié à l'article 15, à la page 9, par substitution, aux lignes 14 à 19, de ce qui suit :

« personnels en ce qui touche un produit de consommation se rapportant à un individu sans obtenir son consentement, pourvu que :

a) d'une part, la personne ou l'administration à laquelle ces renseignements peuvent être communiqués consent par écrit à préserver leur confidentialité et à les utiliser seulement dans l'exercice de ces fonctions;

b) d'autre part, cela est nécessaire pour établir l'existence d'un danger pour la santé ou la sécurité humaines qui est grave ou remédier à ce danger.

(2) Le ministre avise au préalable l'individu à qui se rapportent les renseignements personnels de son intention de communiquer ceux-ci, sauf dans le cas où cela représente un danger pour la santé ou la sécurité humaines.

(3) S'il communique des renseignements personnels en vertu du paragraphe (1) sans donner de préavis, le ministre en avise l'individu concerné dans les meilleurs délais et au plus tard six mois après leur communication.

(4) Il est entendu que le présent article a »

Son Honneur le Président : Nous entamons le débat sur l'amendement.

L'honorable Yonah Martin : Je souhaite également proposer un amendement.

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, cette Chambre est saisie de la motion d'amendement et doit maintenant en débattre.

Le sénateur Martin : J'aimerais disposer d'un peu de temps pour examiner l'amendement. Je demande donc que le débat soit ajourné à mon nom.

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, une motion d'ajournement ne peut faire l'objet d'un débat. Le sénateur Martin avait la parole et a proposé la motion d'ajournement.

Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?

(Sur la motion du sénateur Martin, le débat est ajourné.)

Projet de loi sur la protection des enfants contre l'exploitation sexuelle en ligne

Deuxième lecture—Suspension du débat

L'honorable Bob Runciman propose que le projet de loi C-22, Loi concernant la déclaration obligatoire de la pornographie juvénile sur Internet par les personnes qui fournissent des services Internet, soit lu pour la deuxième fois.

— Honorables sénateurs, je suis heureux de prendre la parole aujourd'hui pour appuyer le projet de loi C-22, Loi concernant la déclaration obligatoire de la pornographie juvénile sur Internet par les personnes qui fournissent des services Internet.

Je crois que nous convenons tous que la protection de nos enfants constitue notre plus grande responsabilité. En tant que parlementaires, nous avons le privilège et l'honneur de contribuer au façonnement de la société canadienne pour faire en sorte que nos enfants puissent grandir, apprendre et s'épanouir dans un cadre sûr et sécuritaire.

(1540)

Le cadre canadien de lutte contre la pornographie juvénile est l'un des plus complets dans le monde. Cela dit, nous pouvons, et nous devons, en faire plus encore pour garantir que les enfants soient à l'abri de l'exploitation sexuelle.

Le sénateur Munson : J'aimerais qu'on fasse le silence pour que je puisse entendre ce que dit le sénateur.

Le sénateur Runciman : Internet a créé de nombreuses possibilités positives pour la communauté internationale. Par contre, il a aussi créé de nouveaux moyens pour les délinquants de distribuer et de consommer la pornographie juvénile. L'avènement d'Internet a fait augmenter considérablement le volume de matériel que nous jugerions tous dégoûtant, je crois. Le Centre canadien de protection de l'enfance, par l'intermédiaire de Cyberaide.ca, traite quelque 600 cas par mois d'exploitation sexuelle d'enfants sur Internet. Je le répète, 600 cas par mois.

On faisait comprendre, dans les journaux de ce matin, la nécessité de s'attaquer à ce fléau qu'est l'exploitation sexuelle des enfants aidée et encouragée par Internet. En effet, une enquête sur l'exploitation mondiale des enfants, ouverte par la police au Canada et mettant à contribution les autorités policières de l'Allemagne et du Royaume-Uni, a donné lieu à l'inculpation de 57 hommes, dont 25 Canadiens, sous 218 chefs d'accusation. Selon la police, ce réseau de pervers s'était échangé des centaines de milliers, voire des millions, d'images d'exploitation sexuelle.

Ces photos révoltantes n'ont rien d'abstrait; ce sont des photos de victimes bien réelles. La police a secouru 25 enfants, dont 10 au Canada. Quatre de ces enfants, dont un petit de quatre ans, se trouvaient ici même, à Ottawa.

Honorables sénateurs, la menace est réelle. Le public s'en préoccupe et croit fermement qu'il nous incombe, en tant que législateurs, de donner suite à leur préoccupation en cette matière. Voilà pourquoi la mesure législative fédérale dont nous sommes saisis aujourd'hui s'intéresse principalement à Internet et, plus particulièrement, à la distribution de pornographie juvénile sur le web.

On propose, dans ce projet de loi, d'accroître la capacité du Canada de protéger les enfants contre l'exploitation sexuelle en obligeant les fournisseurs de services Internet à signaler les cas de pornographie juvénile. Cette mesure législative vient renforcer la capacité du Canada de détecter les infractions possibles de pornographie juvénile; elle contribuerait également à réduire l'offre de pornographie juvénile en ligne et aiderait à identifier, à appréhender et à poursuivre les délinquants.

Le plus important, c'est que la loi pourrait aider à identifier les victimes, ce qui permettrait de les sauver des prédateurs sexuels.

Le projet de loi met l'accent sur Internet et sur les fournisseurs d'accès parce que l'usage répandu d'Internet est en grande partie responsable de l'augmentation du nombre de cas de pornographie juvénile au cours de la dernière décennie. Internet a permis aux pédophiles de créer des réseaux où se fait leur révoltant trafic.

Les fournisseurs d'accès Internet sont placés au bon endroit pour découvrir la pornographie juvénile parce qu'ils fournissent aux Canadiens un média servant à commettre ces crimes. La loi les obligera à signaler ce qui pourrait permettre de croire qu'il y a de la pornographie juvénile sur Internet et à en informer les corps policiers tout en conservant les éléments de preuve s'ils estiment que le service qu'ils fournissent a servi à commettre un crime.

Le projet de loi ne vise pas que les fournisseurs de services Internet, c'est-à-dire ceux qui donnent accès à Internet par les câbles et les signaux qui entrent dans nos maisons. Le projet de loi vise également ceux qui fournissent des services de courrier électronique, ceux qui hébergent du contenu Internet et les réseaux sociaux où le public peut télécharger des images et d'autres formes de matériel.

Le projet de loi s'appliquera également à ceux qui fournissent des services Internet complémentaires, comme les cafés Internet, les hôtels, les restaurants et les bibliothèques publiques. Ce large éventail nous permet d'éliminer autant de refuges que possible pour les pédophiles.

La première nouvelle tâche que le projet de loi impose aux fournisseurs de services Internet, c'est de signaler à une agence désignée toute adresse Internet portée à leur attention comme pouvant contenir de la pornographie juvénile. En clair, cela veut dire que les fournisseurs de services Internet doivent rapporter uniquement les adresses Internet. L'agence désignée prendra alors le relais.

L'agence désignée, premièrement, déterminera alors si l'adresse Internet conduit effectivement à de la pornographie juvénile aux termes du Code criminel et, deuxièmement, établira le lieu géographique du serveur web où se trouve le matériel. Lorsque l'agence aura confirmé la nature du matériel et le lieu où il se trouve, elle contactera l'agence d'exécution de la loi compétente afin qu'elle prenne des mesures.

Le deuxième devoir imposé aux fournisseurs de services Internet au public consiste à avertir la police lorsqu'ils ont des raisons de croire qu'une infraction liée à la pornographie juvénile a été commise au moyen d'Internet. Par exemple, un fournisseur de service de courrier électronique qui constaterait en faisant l'entretien régulier de ses serveurs qu'une boîte de courriel contient de la pornographie juvénile serait tenu d'en informer la police.

Le fournisseur de services est obligé de conserver les preuves pendant les 21 jours suivant l'avis donné par les autorités. Cette disposition prévoit un délai raisonnable pendant lequel les policiers pourront obtenir une ordonnance judiciaire relativement à la conservation des preuves pour une plus longue période ou à la production des preuves. À moins que le délai ne soit prolongé en vertu d'une ordonnance de la cour, le fournisseur de services est tenu, après la période de 21 jours, de détruire tout renseignement qui ne serait pas conservé habituellement.

Le projet de loi C-22 vise à favoriser la collaboration avec les administrations provinciales et étrangères qui ont déjà adopté des exigences similaires en matière de déclaration obligatoire. Quatre provinces canadiennes ont déjà adopté de telles dispositions.

Le projet de loi a été conçu pour éviter aux personnes qui, en vertu des lois de la province ou de l'administration où elles exercent leurs activités, sont déjà obligées de signaler la pornographie juvénile, de devoir faire de nouvelles déclarations.

Les travaux du Sénat

Son Honneur le Président intérimaire : Honorables sénateurs, comme il est 15 h 45, conformément à l'ordre adopté hier, la séance est suspendue. Nous reprendrons la séance à 17 heures. La sonnerie retentira pendant 15 minutes avant la reprise des travaux.

D'après ce que je comprends, la suspension a pour but de permettre aux sénateurs d'assister au dévoilement du portrait de Sa Majesté la reine Elizabeth II dans le foyer du Sénat. Le gouverneur général et d'autres dignitaires seront présents. J'invite les sénateurs à assister à cette activité organisée en l'honneur de la reine du Canada.

(La séance est suspendue.)

(1700)

(Le Sénat reprend sa séance.)

Projet de loi sur la protection des enfants contre l'exploitation sexuelle en ligne

Deuxième lecture—Ajournement du débat

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, comme il est 17 heures, nous reprenons la séance, conformément à l'ordre adopté par le Sénat.

L'honorable Bob Runciman : Honorables sénateurs, je ne me plaindrai jamais de me faire interrompre par le gouverneur général.

Le projet de loi C-22 est conçu de sorte que les fournisseurs de service qui sont déjà tenus de déclarer les cas de pornographie juvénile en vertu des lois de la province ou du territoire où ils fournissent leurs services n'ont pas à les signaler deux fois.

Je tiens à préciser que le projet de loi C-22 s'appuie sur le principe fondamental voulant que la loi ne devrait pas contribuer à la consommation de pornographie juvénile ou la propagation de ce matériel abjecte. Le projet de loi stipule clairement qu'il n'a pas pour effet d'autoriser ou d'obliger quiconque à chercher de la pornographie juvénile. Les fournisseurs de services Internet ne seront pas tenus de surveiller leurs réseaux pour trouver de la pornographie juvénile ou d'enquêter sur les activités de leurs utilisateurs. Ils ne seront pas non plus tenus de vérifier l'information relative à une adresse Internet après avoir reçu un signalement anonyme.

Ce projet de loi n'alourdit pas le fardeau des fournisseurs de services Internet. Les principaux fournisseurs du Canada rapportent déjà, sur une base volontaire, les cas de pornographie juvénile lorsqu'ils les découvrent. Ce projet de loi oblige simplement tous les autres fournisseurs à leur emboîter le pas. Le non-respect des obligations énoncées dans le projet de loi constituerait une infraction punissable par procédure sommaire, selon un régime de peines proportionnelles.

Ainsi, pour les particuliers — autrement dit, les personnes physiques — pour la première infraction, l'amende maximale est de 1 000 $, pour la deuxième infraction elle est de 5 000 $ et de 10 000 $ pour chaque récidive subséquente, avec un emprisonnement maximal de six mois. Pour les sociétés et les autres entités, l'amende maximale s'élève respectivement à 10 000 $, 50 000 $ et 100 000 $. Le système à deux niveaux tient compte de la variété de fournisseurs de services Internet au Canada.

Même si certains pourraient dire que ces peines sont trop clémentes, il faut se rappeler que ce projet de loi complète les mesures qui existent déjà pour protéger les enfants contre l'exploitation sexuelle, notamment les peines sévères prévues par le Code criminel pour punir les infractions de pornographie juvénile.

Les lois canadiennes contre la pornographie juvénile sont parmi les plus complètes du monde. Selon l'article 163.1 du Code criminel, il est illégal d'accéder à de la pornographie juvénile ainsi que de produire, distribuer, transmettre, vendre, annoncer, exporter, importer ou posséder de la pornographie juvénile. Le Code criminel contient une définition large de la pornographie juvénile qui s'applique aux représentations photographiques, écrites et verbales de personnes de moins de 18 ans se livrant à des activités sexuelles. Cela englobe les écrits ou les enregistrements qui préconisent ou conseillent une telle activité illicite ou dont la caractéristique dominante est la description d'une telle activité. Le Code criminel impose aussi des peines importantes, y compris des peines minimales obligatoires, pour toutes les infractions liées à la pornographie juvénile. La peine maximale pour une personne reconnue coupable de production et de distribution de pornographie juvénile est de dix années d'emprisonnement.

Il est essentiel d'avoir des lois sévères pour combattre ce fléau, mais ce n'est pas suffisant. C'est pourquoi le gouvernement a renouvelé son engagement à travailler avec ses partenaires dans le cadre de la Stratégie nationale pour la protection des enfants contre l'exploitation sexuelle sur Internet. Au cours des dernières années, cette initiative a contribué à assurer la sécurité des jeunes de plus en plus nombreux qui utilisent Internet et à sévir contre les prédateurs. Le gouvernement investit 71 millions de dollars sur cinq ans pour que la stratégie nationale demeure fructueuse.

Grâce à ces investissements, le gouvernement renforce sa capacité de lutte contre l'exploitation sexuelle des enfants sur Internet par l'intermédiaire du Centre national de coordination contre l'exploitation des enfants, qui travaille en vue de réduire la vulnérabilité des enfants à l'exploitation sexuelle facilitée par Internet.

Le gouvernement soutient aussi le Centre canadien de protection de l'enfance, dans le cadre de l'initiative nationale, qui contribue à protéger les jeunes sur Internet avec des outils comme Cyberaide.ca, une ligne de signalement des cas d'exploitation sexuelle d'enfants sur Internet.

Honorables sénateurs, je veux citer un récent rapport de Cyberaide.ca, qui présente des faits troublants concernant la fréquence de l'exploitation sexuelle des enfants en ligne et le recours croissant à des enfants plus jeunes et à des actes plus violents. Selon le rapport :

Ce qui inquiète le plus, c'est la gravité des abus : plus de 35 % des images analysées montrent des agressions sexuelles graves. En ce qui a trait au groupe d'âge des enfants sur les images, on constate que les enfants de moins de 8 ans sont le plus souvent soumis à des agressions sexuelles. Il est encore plus bouleversant de constater que des agressions sexuelles extrêmes sont commises contre des enfants de moins de 8 ans. Ces statistiques contrastent avec la fausse idée que la pornographie juvénile prend le plus souvent la forme de photographies innocentes et anodines d'enfants nus.

Comme je l'ai mentionné au début de mon intervention, la nouvelle d'aujourd'hui selon laquelle 25 jeunes victimes d'horribles abus sexuels ont été secourues, dont un enfant de quatre ans originaire d'Ottawa, souligne réellement la nécessité que nous fassions tout en notre pouvoir pour arrêter les dégénérés qui commettent ces actes criminels.

Honorables sénateurs, je vous exhorte à appuyer le projet de loi C-22, une mesure législative qui protégera davantage les enfants contre l'exploitation sexuelle.

L'honorable Sharon Carstairs : Le sénateur accepterait-il de répondre à une question?

Le sénateur Runciman : Bien sûr.

Le sénateur Carstairs : Bien que, en général, j'estime que le projet de loi représente un pas dans la bonne direction, je n'ai pas le sentiment qu'il traite adéquatement de la vulnérabilité des enfants par rapport à d'autres enfants.

(1710)

J'ai souvent entendu parler de cas où un enfant persuadait un autre enfant, par exemple, de danser nu devant une caméra web. Disposons-nous d'un programme de sensibilisation national expliquant aux enfants leur vulnérabilité sur Internet et comment ils peuvent se protéger, pas seulement comment ils peuvent être protégés d'autrui? Je pense à des programmes tels que Mon corps, c'est mon corps.

Le sénateur sait-il ce que le projet de loi ou les lois en vigueur prévoient pour favoriser ce genre de programme?

Le sénateur Runciman : Je ne connais aucun programme de ce genre, mais je crois, comme le sénateur, que c'est là une préoccupation valable. J'ai entendu parler de messages envoyés de manière informelle, mais jamais dans le cadre d'un programme officiel. C'est un sujet de préoccupation grandissant parce que de nombreux enfants de moins de 18 ans, surtout ceux en bas âge, sont incités à faire ce que le sénateur Carstairs vient d'évoquer. Ils n'entrevoient pas les conséquences qu'aura la circulation de cette image sur Internet partout dans le monde. La préoccupation est légitime et j'encourage le sénateur Carstairs à la communiquer pendant l'étude en comité. Je partage, avec elle et d'autres sénateurs, cette préoccupation.

L'honorable Jim Munson : Honorables sénateurs, je voudrais que le débat soit ajourné à mon nom. Je suis porte-parole pour le projet de loi C-22, mais j'ai reçu l'avis lundi seulement. Il s'agit d'un bon projet de loi, mais, comme le sénateur Carstairs, j'estime qu'on pourrait en faire davantage en renvoyant le projet de loi à un comité qui pourrait l'étudier, ne serait-ce que brièvement.

Pendant la pause, j'ai rencontré Bernard Lord, de l'Association canadienne des télécommunications sans fil. Cette association est en train de mettre en place une mesure dont les sociétés seraient responsables pour s'attaquer au « sextage ». On parle de sextage quand une jeune personne se livre à des activités déplacées qui aboutissent sur Internet, où tout le monde peut les visionner, y compris un petit ami. Dans le cas en question, une jeune fille de 15 ans s'est suicidée.

C'est un sujet grave. Je n'ai pas de notes, mais je souhaite sincèrement parler du projet de loi et examiner sérieusement la question. Il s'agit d'un bon projet de loi, mais il faudra que j'en parle. D'ici Noël, je ne crois toutefois pas que j'aurai le temps de le faire. Par conséquent, je demande l'ajournement du débat.

L'honorable Gerald J. Comeau (leader adjoint du gouvernement) : Le sénateur Runciman vient de clore son discours sur le projet de loi. En règle générale, nous permettons que des questions soient posées parce qu'il a proposé que le projet de loi soit lu pour la deuxième fois. Le sénateur Munson accepterait-il que d'autres sénateurs posent aujourd'hui des questions au sénateur Runciman? De ce côté-ci du Sénat, nous ne nous opposerons pas à ce que le sénateur Munson demande l'ajournement du débat à son nom.

Le sénateur Munson : Tout à fait.

L'honorable A. Raynell Andreychuk : Honorables sénateurs, je tiens à préciser que le Comité sénatorial permanent des droits de la personne étudie la question de l'exploitation sexuelle et qu'il a recueilli beaucoup d'éléments de preuve. Le comité n'a pas encore présenté son rapport, mais on sait qu'il parlera des enfants qui incitent d'autres enfants à commettre des actes, ainsi que de toute la question des nouvelles technologies et de la façon dont elles rendent les enfants vulnérables. Les éléments de preuve utiles pourront servir au comité qui examinera le projet de loi C-22. Je crois qu'il s'agira du Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles.

De plus, il est très important de sensibiliser les parents aux outils utilisés par leurs enfants. Cyberaide.ca participe à ces efforts.

Il y a plusieurs années, le Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles a étudié un projet de loi. À cette époque, les fournisseurs d'accès Internet ont dit qu'ils ne pouvaient tout simplement pas surveiller leurs propres services et systèmes. Par conséquent, ils n'étaient assujettis à aucune mesure contraignante. Il s'agit surtout d'un régime à participation volontaire. Le projet de loi dont nous sommes saisis oblige davantage les fournisseurs d'accès Internet à assumer certaines responsabilités.

Voici ma question : en quoi consiste une intervention raisonnable de la part des fournisseurs d'accès Internet? S'agit-il d'exercer une diligence raisonnable et, dans l'affirmative, qui en fait la définition? Est-ce que, en fin de compte, la décision sera prise par les tribunaux ou par l'industrie?

Le sénateur Runciman : J'ai l'impression que, en fin de compte, ce sont les tribunaux qui trancheront. Ce projet de loi fournit des directives à l'industrie quant à la façon dont elle doit intervenir. Comme je l'ai indiqué dans mes observations, les fournisseurs d'accès Internet ne sont pas tenus de surveiller le service, mais, s'ils sont informés de choses suspectes ou d'une situation qui est en train de se produire, ils doivent s'acquitter de certaines obligations en vertu du projet de loi.

Si le problème touche leurs propres services, ils seront tenus de communiquer avec la police. Si le problème est d'ordre plus général et touche par exemple un site qui contiendrait des documents illicites, ils devront plutôt s'adresser à l'organisme désigné, c'est-à-dire, fort vraisemblablement, à Cyberaide.ca.

Le sénateur Andreychuk : Malheureusement, il nous faudrait une norme de quelque sorte qui puisse être administrée par l'industrie elle-même. Pour le bénéfice des enfants comme celui des fournisseurs de services Internet, il faut trouver l'équilibre et déterminer ce que les fournisseurs responsables devront faire, car il risque d'y avoir des répercussions sur la scène internationale. J'espère que le comité se penchera sur la question, ainsi que sur celle de la reddition de comptes. On ne peut pas s'attendre à ce que les fournisseurs détectent tous les cas qui leur passeront sous le nez. Il faut également tenir compte de la définition de la pornographie, que les fournisseurs ne peuvent pas être tenus de connaître. Il faut que les normes soient mieux définies et que les gens s'y conforment davantage qu'à l'heure actuelle. Je suis convaincu que c'est ce que le sénateur a voulu dire.

Le sénateur Runciman : Honorables sénateurs, quatre provinces ont adopté des lois plus ou moins similaires. Si je ne m'abuse, ces lois sont déjà en vigueur en Nouvelle-Écosse et au Manitoba, alors qu'elles attendent la proclamation royale en Alberta et en Ontario.

Au Manitoba, elle est en vigueur depuis un an, et, durant cette période, le nombre de signalements liés à cette activité a augmenté de 120 p. 100.

Les résultats obtenus par les lois provinciales en vigueur seront compilés dans un dossier de suivi, lequel nous aidera également à mieux orienter les audiences du comité.

(Sur la motion du sénateur Munson, le débat est ajourné.)

Projet de loi de soutien de la reprise économique au Canada

Deuxième lecture

L'honorable Elizabeth (Beth) Marshall propose que le projet de loi C-47, Loi no 2 portant exécution de certaines dispositions du budget déposé au Parlement le 4 mars 2010 et mettant en œuvre d'autres mesures, soit lu pour la deuxième fois.

— Honorables sénateurs, c'est un plaisir pour moi de proposer que le projet de loi de soutien de la reprise économique au Canada soit lu pour la deuxième fois au Sénat. Permettez-moi de faire un bref résumé de la situation économique au pays.

Je suis convaincue que les sénateurs savent déjà que le gouvernement a été extrêmement occupé à mettre en œuvre la deuxième partie du Plan d'action économique du Canada. Nous avons mis ce plan en place afin de stimuler la création d'emplois et la croissance économique et nous nous sommes montrés, ce faisant, rapides et efficaces. C'est la vérificatrice générale qui l'a dit dans son tout dernier rapport après avoir examiné la manière dont le gouvernement avait géré le Plan d'action économique :

J'accorderais une bonne note au gouvernement [...] Il a été très attentif à la gestion du risque à cet égard, et je pense qu'il faut lui reconnaître un certain mérite pour cela.

1720

Nous avons aussi fourni un modèle à suivre aux autres pays. Pour assurer la reprise économique, le Canada a élaboré un plan efficace à la fois en vue d'affronter la récession, mais aussi d'en sortir.

La baisse de notre production économique a donc été la plus faible de tous les pays du G7. Notre économie vient de connaître cinq trimestres consécutifs de croissance. Nous avons retrouvé tous les emplois qui avaient été perdus pendant la récession et avons créé plus de 440 000 emplois depuis juillet de l'année dernière.

De même, le Fonds monétaire international et l'Organisation de coopération et de développement économiques prévoient que le Canada aura la croissance économique la plus forte des pays du G7 dans les années à venir. Des responsables du Fonds monétaire international ont déclaré que le Canada pouvait se vanter d'avoir la meilleure situation financière de tous les pays du G7 et que « la stratégie budgétaire » du gouvernement comprenait « des mesures de bon aloi et propices à la croissance pour soutenir le potentiel économique à long terme du Canada. »

Honorables sénateurs, voici ce qu'on pouvait lire récemment dans le Wall Street Journal à propos du Canada :

[...] Le pays a mieux surmonté la récession que la plupart des autres pays industrialisés. Son système bancaire est le plus sain et sa reprise économique la plus forte des riches pays du G7.

Cela dit, la reprise demeure fragile, comme le montrent les difficultés auxquelles certains pays européens se heurtent, l'Irlande par exemple. Le Canada n'est pas une île. Tout ce qui se passe hors de nos frontières continuera d'avoir des répercussions sur le Canada. C'est vrai en particulier pour les États-Unis puisque nous y envoyons 75 p. 100 de nos exportations. C'est pour cette raison que la priorité numéro un du gouvernement reste l'économie, à savoir créer des emplois et les préserver et maintenir la stabilité économique et assurer notre sécurité financière.

C'est pour cette raison que nous continuons d'aller de l'avant avec le Plan d'action économique du Canada, par le truchement du projet de loi de soutien de la reprise économique. Le projet de loi, qui inclut des mesures annoncées dans le budget de 2010, est un élément clé du Plan d'action économique du Canada, et il va procurer des avantages réels aux familles, aux consommateurs, aux entreprises et aux contribuables.

La loi proposée inclut des mesures afin d'aider les familles canadiennes à améliorer leur sort en indexant la prestation fiscale pour le revenu de travail, en permettant de transférer le produit d'un régime enregistré d'épargne-retraite à un régime enregistré d'épargne-invalidité avec report de l'impôt, en autorisant un report prospectif sur dix ans des droits à la subvention canadienne pour l'épargne-invalidité et au bon canadien pour l'épargne-invalidité, en mettant en œuvre la réforme des fiducies de soins de santé au bénéfice d'employés, et en améliorant les régimes de pension sous réglementation fédérale.

Le projet de loi prévoit aussi des mesures visant à simplifier les formalités administratives, notamment en mettant en œuvre la réforme du contingent des versements visant les organismes de bienfaisance enregistrés, en permettant aux contribuables de demander des avis en ligne à l'Agence du revenu du Canada et en réduisant les formalités administratives pour certains contribuables.

Le projet de loi C-47 renferme aussi des mesures qui supprimeraient des échappatoires fiscales en ciblant mieux les incitatifs fiscaux liés aux options d'achat d'actions des employés, et il combattrait les stratagèmes de planification fiscale agressive relativement aux comptes d'épargne libres d'impôt.

La loi proposée inclut également des mesures permettant de protéger les consommateurs en améliorant le processus visant les plaintes liées à l'industrie des services financiers.

Enfin, le projet de loi renferme des mesures favorisant la production d'énergie propre en élargissant l'admissibilité à la déduction pour amortissement accéléré au titre de la production d'énergie propre.

Honorables sénateurs, je vais prendre un moment pour souligner quelques-unes des mesures que j'ai mentionnées, en commençant par les améliorations apportées au régime enregistré d'épargne-invalidité.

Il ne faut jamais oublier les personnes les plus vulnérables dans notre société. Nous savons que les Canadiens handicapés apportent une contribution importante à nos collectivités et à notre économie. En mars dernier, le gouvernement a ratifié la Convention des Nations Unies relative aux droits des personnes handicapées. Cette convention prévoit l'inclusion complète des personnes handicapées dans le monde.

Nous appuyons les Canadiens d'un bout à l'autre de notre grand pays, quelles que soient leurs capacités. La création du régime enregistré d'épargne-invalidité, le REEI, annoncée dans le budget de 2007, est l'une des mesures les plus importantes prises par le gouvernement conservateur pour appuyer les personnes handicapées.

Ce régime aide les parents d'enfants gravement handicapés et leurs familles à assurer à ces enfants une sécurité financière à long terme. La mesure législative dont nous sommes saisis renferme deux propositions visant à améliorer le REEI. À l'heure actuelle, le capital accumulé par une personne décédée dans un REER ou dans un FERR peut être transféré à l'abri de l'impôt dans le REER d'un enfant ou d'un petit-enfant dépendant admissible.

Pour donner aux parents et aux grands-parents une souplesse accrue en vue d'assurer la sécurité financière à long terme d'un enfant handicapé, le projet de loi à l'étude aujourd'hui propose de permettre que le produit du REER ou du FERR d'une personne décédée puisse être transféré, à l'abri de l'impôt, dans le régime enregistré d'épargne-invalidité d'un enfant ou d'un petit-enfant infirme financièrement dépendant.

Le projet de loi d'aujourd'hui propose une deuxième amélioration du régime enregistré d'épargne-invalidité, le REEI. Il propose en effet de permettre le report prospectif sur 10 ans des droits à la subvention canadienne pour l'épargne-invalidité et au bon canadien pour l'épargne-invalidité. Ce report prospectif découle de la reconnaissance du fait que les familles ayant des enfants handicapés ne sont pas nécessairement en mesure de contribuer à leurs régimes de façon régulière.

Mme Tina Di Vito, directrice, Stratégies de retraite, BMO Groupe financier, a salué ces changements comme des mesures fantastiques. J'ajouterai que Mme Di Vito a comparu devant le Comité sénatorial permanent des finances nationales mardi matin et que nous avons eu droit à un échange fascinant au sujet des REEI. Elle a ajouté ceci :

Grâce au REEI, le Canada donne l’exemple au monde entier en montrant comment une politique intelligente peut contribuer à la sécurité financière et à l’autonomie des personnes handicapées.

[…] les avantages seront énormes, car un plus grand nombre de personnes handicapées pourront mener une vie plus confortable et plus autonome.

Le régime enregistré d'épargne-invalidité, le REEI, donnera aux familles canadiennes la tranquillité d'esprit dont elles ont besoin en les aidant à économiser pour assurer la sécurité financière à long terme d'un être cher souffrant d'un handicap. Ces deux changements importants nous rapprochent de la réalisation de cet objectif.

Honorables sénateurs, concernant le rôle du gouvernement conservateur pour ce qui est de fournir l'aide nécessaire à ceux qui en ont le plus besoin, tous les parlementaires devraient reconnaître le rôle précieux que jouent les organismes caritatifs dans les collectivités d'un bout à l'autre du Canada.

Depuis 2006, le gouvernement a pris des mesures décisives pour soutenir les organismes caritatifs et faciliter leur excellent travail. En effet, dans notre premier budget, nous avons créé une exemption pour gains en capital associée au don de valeurs mobilières cotées en bourse à des organismes de bienfaisance publics. Dans le budget de 2007, nous avons élargi cette exemption aux dons de valeurs mobilières cotées en bourse à des fondations privées.

Le projet de loi d'aujourd'hui propose une autre réforme importante. Celle-ci concerne le contingent des versements pour les organismes caritatifs. Le contingent des versements instauré en 1976 avait pour but de faire en sorte qu'une partie substantielle des ressources d'un organisme caritatif enregistré soit effectivement consacrée à la bienfaisance.

Bien des observateurs ont noté que le contingent des versements n'avait pas permis d'atteindre l'objectif visé, car il ne tient pas compte des particularités de chacun des organismes caritatifs.

Imaginez que le Canada, par exemple, estime que le contingent des versements impose « un fardeau indûment complexe et coûteux aux organismes de bienfaisance, notamment aux petits organismes ruraux ».

Le projet de loi dont nous sommes saisis aujourd'hui propose d'abolir l'ensemble des exigences du contingent des versements, à l'exception de celles se rapportant à l'obligation de débourser annuellement un montant minimal au titre d'investissements et d'autres actifs ne servant pas directement aux opérations d'un organisme de bienfaisance. L'actualisation de cette exigence rendra les organismes de bienfaisance mieux en mesure de maintenir des réserves pour faire face aux imprévus.

Au cours des dernières années, l'Agence du revenu du Canada a renforcé sa capacité de surveillance des organismes de bienfaisance en adoptant de nouvelles mesures législatives et de nouveaux outils administratifs de conformité. Ces outils aideront l'agence à garantir que les organismes de bienfaisance consacrent effectivement leurs ressources à des fins de bienfaisance. Ces réformes permettront de réduire la complexité administrative et de mieux permettre aux organismes de bienfaisance de consacrer leur temps et leurs ressources à des activités de bienfaisance.

Jusqu'à maintenant, les commentaires que nous avons reçus sur cette mesure sont extrêmement positifs. Par exemple, l'Armée du Salut s'est montrée très enthousiaste et a dit ce qui suit :

« [...] L'abolition d'exigences relatives au contingent procurera à l'Armée du Salut, un des plus importants organismes de bienfaisance au Canada, plus de souplesse... Nous sommes très heureux de cette nouvelle. Les modifications proposées nous permettront de mieux répondre aux besoins des gens que nous servons dans 400 collectivités au Canada.

Après avoir examiné les réformes, Jeffrey McCully est arrivé à la conclusion suivante dans un article d'une édition récente de l'Ottawa Citizen :

En somme, les modifications législatives proposées et l'Agence du revenu du Canada protègent clairement les intérêts des organismes de charité et de leurs donateurs en assurant à la fois la transparence et la reddition de comptes en matière d'activités caritatives.

(1730)

Honorables sénateurs, les Canadiens s'inquiètent toujours de la viabilité à long terme de leurs régimes de retraite. Nous écoutons leurs points de vue sur la façon d'accroître la sécurité des prestations de retraite et de garantir que le cadre soit équilibré et approprié.

Il y a près d'un an, le gouvernement a proposé des réformes touchant les régimes de retraite privés de compétence fédérale. Au début de 2009, le secrétaire parlementaire du ministre des Finances a entrepris une tournée pancanadienne de consultation des Canadiens au sujet des régimes de compétence fédérale.

Si l'on en croit les propos recueillis d'un bout à l'autre du pays, le gouvernement a proposé de bons changements pratiques devant permettre de renforcer notre système de pensions de compétence fédérale. Ces réformes protégeront les retraités en imposant aux sociétés de capitaliser intégralement les prestations à la cessation d'un régime et de rendre les pensions plus stables.

Le projet de loi de soutien de la reprise économique au Canada poursuivra la mise en œuvre de ces changements pour que nous ayons, au Canada, un solide système de pensions.

Compte tenu des difficultés auxquelles doivent faire face les Canadiens, et les aînés en particulier, ceux-ci peuvent être sûrs que le gouvernement conservateur appuie les travailleurs canadiens qui comptent sur leur régime de pension comme source de revenu de retraite stable. Nous prenons les dispositions nécessaires pour que les régimes de pension canadiens restent solides.

Honorables sénateurs, comme je l'ai mentionné au début de mon discours, le gouvernement réduit le fardeau fiscal des familles canadiennes. Dans le budget de 2008, nous avons lancé l'instrument d'épargne personnel le plus important à voir le jour depuis la création du REER, soit le compte d'épargne libre d'impôt, communément appelé CELI. Ce compte enregistré, souple et d'usage général permet à des Canadiens de faire croître leur épargne à l'abri de l'impôt. Il est le tout premier compte du genre dans l'histoire de notre pays. Permettez-moi d'en exposer rapidement les avantages, pour la gouverne des sénateurs qui n'auraient pas encore profité de la possibilité d'ouvrir un tel compte.

Premièrement, les Canadiens peuvent verser jusqu'à 5 000 $ par année dans un compte enregistré d'épargne libre d'impôt, et même davantage, s'ils n'ont pas versé le montant maximum les années antérieures. Deuxièmement, le revenu de placement, y compris les gains en capital, sera libre d'impôt, même si on le retire du compte. Troisièmement, les Canadiens pourront retirer de l'argent du compte à tout moment, sans restriction. Mieux encore, ils pourront utiliser cet argent comme bon leur semble. Enfin, après avoir retiré de l'argent du compte, ils pourront y remettre plus tard un montant égal et ainsi conserver le maximum des cotisations permises.

Les modifications proposées dans le projet de loi qui nous est soumis aujourd'hui visent à résoudre le problème de l'utilisation des comptes d'épargne libre d'impôt dans des manœuvres de planification fiscale. Ainsi, le compte d'épargne libre d'impôt demeurera un outil viable et solide pour les Canadiens aujourd'hui et à l'avenir, mais on évitera les transactions inappropriées pour tirer de ce type de compte des avantages excessifs.

Honorables sénateurs, je termine en disant que nous réduisons les impôts pour les familles canadiennes de manière à créer et à conserver des emplois et de manière à aider les Canadiens qui sont les plus durement touchés par la récession mondiale. Le train de mesures de relance mises en œuvre par le gouvernement est l'un des plus importants et des plus efficaces des pays du G7.

Voici ce qu'on pouvait lire récemment dans un éditorial du Times-Colonist de Victoria :

En fait, le Canada est loin d'avoir besoin qu'on lui fasse la leçon en matière de gestion financière ou de saine politique publique. C'est plutôt lui qui devrait faire la leçon aux autres. Nous ne sommes pas, comme à peu près la moitié de l'Europe, en train de chanceler au bord de la faillite. Nous vivons dans un système où le gouvernement fait face aux problèmes au lieu de les cacher, comme aux États-Unis. [...] Les choses pourraient être différentes une autre fois. Mais, pour l'instant, les faits sont clairs. Notre gestion de la crise économique constitue un exemple à suivre pour le monde.

Néanmoins, comme je l'ai indiqué tout à l'heure, la reprise économique demeure fragile à l'échelle mondiale. C'est pourquoi nous devons garder le cap et mettre en œuvre totalement le Plan d'action économique du Canada, qui nous permettra de maintenir la création d'emplois et la croissance économique partout au pays. C'est pourquoi nous devons adopter le projet de loi de soutien de la reprise économique au Canada.

Honorables sénateurs, je vous invite à vous joindre à moi et à appuyer ce projet de loi.

L'honorable Joseph A. Day : Honorables sénateurs, je félicite madame le sénateur Marshall pour ce discours et je la remercie et la félicite pour le travail qu'elle accomplit au sein du Comité sénatorial permanent des finances nationales. Notre comité est très heureux de l'avoir accueillie dans ses rangs et de pouvoir compter sur son apport très utile.

Honorables sénateurs, nous en sommes à l'étape de la deuxième lecture du projet de loi C-47. Le projet de loi a été renvoyé à la Chambre des communes le 4 novembre et nous l'avons reçu au Sénat le 7 décembre, soit il y a quelques jours.

Normalement, honorables sénateurs, le Sénat devrait faire l'étude du projet de loi à l'étape de la deuxième lecture avant de le renvoyer ensuite à notre comité qui l'étudierait et ferait rapport pour que le Sénat puisse passer à l'étape de la troisième lecture. Toutefois, comme il s'agit là d'un de ces cas pour lesquels nous avions prévu que le document pourrait nous être présenté en retard, avec notre consentement, le sénateur Comeau a pris l'initiative de nous permettre de faire une étude préliminaire de ce projet de loi. Nous avons donc entrepris cette étude préliminaire du projet de loi C-47. Le 16 novembre, nous avons reçu 17 témoins de divers ministères du gouvernement, dont Gérard Lalonde, qui est déjà venu témoigner à plusieurs reprises à notre comité. M. Lalonde nous aide beaucoup parce qu'il s'y connait en matière de politique fiscale. Nous le remercions de son aide.

En plus de spécialistes de la politique fiscale, nous avons également reçu des gens des Ressources humaines de RHDCC et de l'Agence des services frontaliers du Canada, ainsi que des représentants du Bureau du surintendant des institutions financières du Canada. Tous ces gens sont venus nous aider à comprendre les aspects plutôt techniques de ce projet de loi.

Honorables sénateurs, il s'agit presque d'un projet de loi omnibus qui regroupe tous les éléments disparates que nous recueillons de temps à autres. Les fonctionnaires des ministères à vocation financière doivent en garder une liste. C'est donc un projet de loi polyvalent pour ces ministères, mais pas au sein du gouvernement en général. Honorables sénateurs, ce projet de loi porte sur un grand nombre de questions qui ont été passées brièvement en revue par le sénateur Marshall. Je la remercie de nous avoir fait un tel compte rendu. Nous avons également entendu les représentants des services financiers de la Banque de Montréal, comme l'a souligné le sénateur Marshall.

Une fois que ce projet de loi nous sera soumis, ce qui devrait se faire dans les quelques jours à venir, nous serons en mesure d'en faire l'étude article par article et de vous faire rapport de nos constatations.

Il y a plusieurs points en cause. Le sénateur Marshall a parlé du régime enregistré d'épargne-invalidité, sur lequel nous avons recueilli bon nombre de témoignages. Pour accélérer les choses et permettre le renvoi de ce projet de loi au comité, je propose de vous faire part de mes observations quant aux témoignages que nous avons entendus sur le régime enregistré d'épargne-invalidité au cours de notre étude préliminaire à l'étape de la troisième lecture.

Le sénateur Marshall a parlé des œuvres caritatives et des nouvelles initiatives. Je peux vous dire que plusieurs de ces initiatives sont très positives. Certaines d'entre elles viennent peaufiner des programmes qui existent depuis un certain temps. Le compte d'épargne libre d'impôt est en place depuis deux ans. L'argent versé dans le compte a déjà été imposé, mais les revenus engendrés dans le compte ne sont pas imposables. Dans le cas de nouveaux programmes comme celui-là, il est toujours nécessaire de rajuster le tir. En l'occurrence, certaines règles d'évitement fiscal n'avaient pas été appliquées et maintenant l'Agence du revenu du Canada estime qu'elles devraient l'être parce que certaines personnes cotisaient en trop, et ce, délibérément. Les fonctionnaires de l'agence analysent ce que font les gens et décèlent les lacunes afin de les corriger. Honnêtement, il est parfaitement acceptable et normal qu'ils travaillent de cette manière.

(1740)

Honorables sénateurs, ce projet de loi contient beaucoup d'autres éléments. Je me demande pourquoi le gouvernement a raté une belle occasion. Il présente ce projet de loi d'exécution du budget alors que le taux de chômage est de 2 p. 100 supérieur à ce qu'il était pendant les dernières élections, que notre déficit est de 55 milliards de dollars et que nous avons perdu 200 000 emplois à cause de la crise économique.

Le sénateur Marshall a parlé des emplois créés, mais il s'agissait d'emplois à temps partiel et plusieurs d'entre eux ont été perdus par la suite. Le fait est que le taux de chômage est de 2 p. 100 supérieur à ce qu'il était.

Je demande aux sénateurs d'examiner les prévisions et la projection de l'augmentation de notre dette. Le ministre des Finances a dit récemment que nous devrions être en mesure de rectifier la situation afin que nous n'accusions pas un déficit dans quatre ou cinq ans environ. Il faut prêter attention à l'utilisation du mot « environ ».

Si on accepte les chiffres donnés par le gouvernement, cela signifie que la dette augmentera de 150 à 200 milliards de dollars. Les sénateurs peuvent calculer le taux d'intérêt sur cette dette, cela représente beaucoup d'argent — par exemple, un taux d'intérêt de 10 p. 100 est équivalent à 20 milliards de dollars — argent que nous ne pourrons pas investir dans d'autres programmes.

Honorables sénateurs, nous devons travailler ensemble pour mettre en place des programmes qui réduiront le déficit annuel et nous empêcheront de continuer à dépenser trop d'argent sur des choses que nous ne pouvons pas nous permettre, comme les milliards de dollars engloutis dans des campagnes publicitaires, des faux lacs et autres.

C'est le seul problème que je vois dans le projet de loi, honorables sénateurs. Il ne propose pas suffisamment de solutions qui permettraient d'améliorer notre situation actuelle.

Comme le sénateur Marshall l'a signalé, il y a des dispositions relatives à la garde partagée. C'est une bonne idée, mais elle aurait pu être incluse n'importe où. La disposition sur le roulement au régime enregistré d'épargne-invalidité est une bonne idée, mais pourquoi ne met-on pas l'accent sur les solutions qui permettront d'améliorer notre situation actuelle?

On a commis des abus dans le cas d'options d'achat d'actions accordées à des employés, et on tente d'apporter une solution. Je n'ai rien contre cela, mais pourquoi en faire une priorité maintenant? On prévoit une déduction pour amortissement applicable aux boîtes décodeurs pour téléviseur. Une telle déduction est peut-être importante pour les personnes qui achètent des boîtes décodeurs pour téléviseur, mais je m'inquiète du déficit de 55 milliards de dollars que nous avons accusé l'année dernière.

Une voix : Ne sommes-nous pas tous inquiets?

Le sénateur Day : Il y a les avis en ligne et une autre disposition intéressante, ici, qui concerne l'organisme externe de traitement des plaintes à l'égard des banques. Les banques sont tenues d'être membres de ce nouvel organisme, et le gouvernement adoptera des règlements. Cet organisme se penche sur les plaintes à l'égard des banques. Et ce n'est pas tout, le gouvernement dit que l'Agence de la consommation en matière financière surveillera l'organisme de surveillance. Cela me semble pas mal de surveillance dans un domaine particulier. Je ne sais pas d'où vient cet élan, ce besoin de bureaucratie. Nous aborderons cette question une autre fois.

Il y a plusieurs points qu'on a qualifiés de non prioritaires, honorables sénateurs, tels que les paiements de péréquation. Si le régime enregistré d'épargne-études ne sert pas à des fins d'éducation, les intérêts accumulés seront imposables. Une disposition dans ce sens, qui fait plusieurs pages, prévoit que le gouvernement fédéral partage maintenant ces richesses avec les gouvernements provinciaux. C'est parfait.

Une autre disposition concerne les paiements de péréquation. Il y a deux ans environ, le gouvernement a dit : « Grâce à notre nouvelle formule, lorsqu'une province obtiendra moins d'argent au titre de la péréquation qu'au cours des années précédentes, nous comblerons la différence. Des dispositions de la mesure prévoient que nous comblerons la différence pour une autre année, mais n'allez pas croire que nous le ferons éternellement. » Voilà ce que renferme la mesure.

Honorables sénateurs, je voulais que vous puissiez constater vous-mêmes que la mesure prévoit certaines initiatives valables, pour lesquelles nous félicitons le gouvernement, d'ailleurs, mais nous aurions de loin préféré que le gouvernement propose des actions concrètes à l'égard des enjeux bien réels auxquels nous sommes confrontés à l'heure actuelle.

Le sénateur Marshall : Honorables sénateurs, je veux parler de certaines observations du sénateur Day, que je remercie d'ailleurs.

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, nous en sommes à la période de questions et d'observations adressées au sénateur Day. Je crois comprendre que le sénateur Marshall fait une observation qui pourrait mener à une question adressée au sénateur Day.

Le sénateur Marshall : Honorables sénateurs, le sénateur Day souhaite que le gouvernement se concentre davantage sur le déficit et qu'il établisse un plan d'avenir. Nous avons discuté de cela au Comité des finances. Le sénateur n'est-il pas d'avis, selon l'information dont nous disposons, que le gouvernement est dans la bonne voie en ce qui concerne son plan de dépenses?

Le sénateur Mitchell : Non, absolument pas.

Le sénateur Day : Mon collègue me dit que non.

À mon avis, il y a des divergences d'opinions quant à un certain nombre de questions, mais les travaux du Comité des finances nous permettent au moins de les connaître. Je remercie d'ailleurs le sénateur de sa participation pendant les réunions.

Son Honneur le Président : Les honorables sénateurs sont-ils prêts à se prononcer?

Des voix : Le vote!

Son Honneur le Président : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?

Des voix : d'accord.

Une voix : Avec dissidence.

(La motion est adoptée avec dissidence, et le projet de loi est lu pour la deuxième fois.)

Renvoi au comité

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, quand lirons-nous le projet de loi pour la troisième fois?

(Sur la motion du sénateur Day, le projet de loi est renvoyé au Comité sénatorial permanent des finances nationales.)

Projet de loi visant l'élimination des pourriels sur les réseaux Internet et sans fil

Deuxième lecture

L'ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Oliver, appuyée par l'honorable sénateur Cochrane, tendant à la deuxième lecture du projet de loi C-28, Loi visant à promouvoir l'efficacité et la capacité d'adaptation de l'économie canadienne par la réglementation de certaines pratiques qui découragent l'exercice des activités commerciales par voie électronique et modifiant la Loi sur le Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes, la Loi sur la concurrence, la Loi sur la protection des renseignements personnels et les documents électroniques et la Loi sur les télécommunications.

L'honorable Grant Mitchell : Honorables sénateurs, je me vois dans l'obligation d'appuyer ce projet de loi. Lorsque j'ai commencé à le comprendre, je me suis demandé : « Que se passe-t-il? » Je me souviens d'avoir appuyé un autre projet de loi d'initiative ministérielle il y a à peine un an. Je me suis demandé : « Combien de fois cela se passera-t-il? » Puis je me suis rendu compte que, grâce à la prorogation, il s'agit du même projet de loi, alors tout va bien. Je maintiens ma bonne moyenne, qui consiste à ne pas appuyer plus d'une initiative gouvernementale par année.

Une voix : Vous avez seulement fait une erreur dans ce cas.

(1750)

Le sénateur Mitchell : C'est vrai. Cela a été une assez bonne année.

Cependant, je ressens une grande agitation lorsque je dis que je vais appuyer une mesure législative, parce que je suis convaincu que, d'ici quelques jours, le sénateur Tkachuk relira mes propos dans le hansard, pour tenter de prouver un argument obscur, et il dira : « Ma foi, le sénateur appuie une mesure présentée par le gouvernement; elle doit sûrement être bonne. »

Le sénateur Tkachuk : J'ai dû toucher un point sensible. J'en suis désolé.

Le sénateur Mitchell : Toutefois, j'ajouterai que le sénateur Tkachuk aura beaucoup plus de difficulté à trouver mes propos dans le hansard du Sénat que s'il cherchait dans le hansard de l'Alberta, parce que ce dernier a une fonction de recherche. Si seulement nous pouvions avoir une fonction de recherche ici aussi. Enfin, ce n'est pas de cela que je veux parler.

J'ai aimé travailler à ce projet de loi. J'ai reçu une excellente séance d'information organisée par le ministère. J'étais entouré de fonctionnaires très intelligents. Je me suis senti en sécurité parce qu'un représentant politique du bureau du ministre était présent pour veiller à ce que ces fonctionnaires ne me disent pas des choses qu'il ne fallait pas dire. C'était rassurant.

Je dois dire qu'il a été très agréable de travailler avec le sénateur Oliver. Nous avons discuté de quelques questions qui nous semblaient en valoir la peine. En réalité, certaines modifications ont été apportées à cette dernière version du projet de loi parce qu'elles se sont imposées après notre débat sur le projet de loi précédent, il y a un an. Voilà qui fait bien ressortir l'importance du travail du Sénat et le fait que le gouvernement ferait bien d'accepter nos amendements et nos observations peut-être un peu plus souvent qu'il ne le fait. Comme il répugne à le faire, il est agréable de constater que, cette fois-ci, il a accepté de le faire.

Je ne vais pas entrer dans beaucoup de détails. Le sénateur Oliver a donné du projet de loi une explication d'une qualité exceptionnelle.

Le projet de loi vise à protéger le commerce électronique en interdisant l'envoi de messages électroniques commerciaux sans le consentement préalable du destinataire. C'est un projet de loi anti-pourriel. Autrefois, je pensais que le pourriel, c'était tout simplement une surabondance de courriels. Je suis ensuite devenu sénateur, et je recevais tant de courriels que je me suis aperçu que ce ne pouvait être cela. Malgré tout, ma conception du pourriel se limitait aux courriels, mais c'est évidemment bien plus que cela.

L'un des principaux problèmes associés au pourriel est le téléchargement de logiciels non souhaités et parfois dangereux. Le projet de loi aborde la totalité de ce que nous appelons couramment le pourriel.

Il n'est pas exagéré de dire que le pourriel est dangereux pour l'économie et les entreprises. Il perturbe et distrait les entreprises. Il peut mener à une activité criminelle ou en être une. Les conséquences à cet égard sont profondes. Bien entendu, le pourriel peut être une atteinte à la vie privée.

Malheureusement, le Canada est l'un des derniers pays industrialisés de l'Occident — puisqu'il est sauf erreur l'un des trois derniers pays de l'OCDE et le dernier du G8 — à se donner une loi de cette nature. Ce projet de loi a donc beaucoup trop tardé. Nous avons de plus en plus de mal à préserver notre réputation à l'étranger. Ces problèmes s'aggravent encore en ce moment même, car M. Baird, à Cancun, critique sans relâche la Chine, avec laquelle nous espérons avoir un jour de solides relations commerciales, mais elles sont compromises par ce genre d'attitude. Depuis cinq ans, nous avons de plus en plus de difficultés à préserver notre réputation à l'étranger. Voilà au moins un problème que nous pouvons régler. Nous avions la réputation d'être un refuge pour les polluposteurs, mais nous allons surmonter ce problème, je l'espère.

Voici un exemple classique de coopération et de collaboration non partisane ou bipartisane, pour reprendre une expression américaine. Cela tient à un certain nombre de faits.

D'abord, et j'en revendique le crédit au nom du Parti libéral, c'est bien le Parti libéral qui a mis sur pied le Groupe de travail sur le pourriel en 2004, démarche qui a fini par aboutir au projet de loi à l'étude. La démarche a été enrichie, renforcée et améliorée grâce au travail du sénateur Oliver, qui avait travaillé à un certain nombre de projets de loi d'initiative parlementaire, et au travail du sénateur Goldstein, qui n'est plus parmi nous. Le projet de loi est l'aboutissement d'efforts déployés des deux côtés, et j'estime que tous ceux qui ont participé à ces efforts méritent des félicitations.

Il vaut la peine de souligner un certain nombre d'interdictions prévues par le projet de loi C-28. Il interdira l'envoi de messages électroniques commerciaux non sollicités, que ce soit comme je l'ai dit par courriel ou par l'intermédiaire de logiciels. Le projet de loi définit l'expression « non sollicité ». Le terme employé est « consentement ». Le projet de loi exige le consentement exprès des destinataires pour que le message, quel qu'il soit, ne soit pas considéré comme du pourriel. On estime qu'il y a consentement exprès seulement lorsque la personne choisit de recevoir le message ou accepte de recevoir des communications électroniques par courriel.

Le consentement tacite est limité. On ne peut présumer qu'il y a consentement tacite que lorsque s'appliquent des paramètres très limités et restrictifs, ce qui est très bien. Il est prévu pour les relations existantes, commerciales ou non.

Les déclarations fausses ou trompeuses en ligne, y compris sur les sites web et divers autres types d'adresses électroniques, sont interdites. Le projet de loi interdit l'utilisation de systèmes informatiques pour recueillir des adresses électroniques sans consentement. La modification non autorisée des données de transmission, l'installation de programmes informatiques sans consentement et l'accès non autorisé à un système informatique pour recueillir des renseignements personnels sans consentement sont tout à fait interdits également.

Il y a quelques exemptions qui feront que la loi ne devienne pas trop lourde et qu'elle ne soit pas appliquée n'importe comment. Le projet de loi ne couvre que les messages commerciaux non sollicités et n'inclut pas les messages de relations politiques, familiales ou personnelles. Le projet de loi permet également le téléchargement automatique de mises à jour de logiciels légitimes.

Plusieurs autres dispositions du projet de loi méritent d'être mentionnées. Étonnamment, le projet de loi repose sur une approche réglementaire plutôt que pénale. Je m'attends à ce que le gouvernement éprouve un certain malaise parce que son travail n'est pas complètement terminé et qu'il présente un projet de loi prévoyant des peines minimales pour tout ce que les gens ne doivent pas faire en vertu du projet de loi. Cependant, pour l'instant, la raison a prévalu et on a décidé qu'il fallait agir rapidement, ce qui a facilité les choses. Je ne veux pas dire ici que le projet de loi pèche par manque de rigueur dans le montant des amendes. La personne qui enfreint le projet de loi, ou ce qui sera la loi, pourra se voir imposer une amende de 1 million de dollars et, dans le cas d'une entreprise, cette amende pourra être de 10 millions de dollars.

L'approche réglementaire sera coordonnée par le CRTC, le Commissariat à la protection de la vie privée et le Bureau de la concurrence. Le projet de loi créera également un centre de signalement des pourriels où il sera possible d'envoyer les messages Internet dommageables pour enquête par les autorités compétentes. Ce centre conservera et analysera les pourriels et permettra l'accès à sa base de données aux trois organismes d'exécution.

Le projet de loi prévoit également un droit privé d'action qui permettra à un consommateur, à une personne d'affaires, à une entreprise ou à un fournisseur de service Internet d'intenter des poursuites contre les auteurs d'infractions. Le projet de loi prévoit aussi la coordination entre les trois agences d'exécution et les partenaires internationaux.

Une des faiblesses du projet de loi d'il y a un an nous a été signalée par des entreprises comme RIM. Des représentants de RIM m'ont rencontré — et la rencontre est probablement inscrite en vertu de la loi comme étant du lobbying — et cette rencontre a été très instructive. L'entreprise a souligné que l'ancien texte du projet de loi aurait très bien pu permettre de porter des accusations contre elle et de la tenir responsable dans des affaires civiles pour avoir accédé à de l'information sur ce qui serait normalement considéré comme étant des sites web publics utilisés par les auteurs de pourriels. Cependant, les auteurs de pourriels auraient pu exclure ces sites tout simplement en les enregistrant ou en y indiquant que leur consultation n'était pas autorisée à moins d'avoir au préalable une autorisation. Cela rendrait pratiquement impossible à des entreprises comme RIM d'intenter rapidement des poursuites contre les auteurs des pourriels qui pourraient littéralement détruire leur système.

Le gouvernement a compris et s'est engagé à remplacer « non autorisé » par des mots n'excluant que les activités contraires à une loi du Parlement.

C'est un changement apprécié des entreprises comme RIM, Research in Motion, et c'est la preuve que le gouvernement peut réagir de façon sensée, utile et appréciée à ce genre de demande, et aux demandes venant du Sénat.

(1800)

Pour ceux que cela inquiète, parce que certains craignent que cela signifie que des entreprises peuvent rechercher des renseignements personnels, franchir certaines barrières pour accéder à l'ordinateur personnel des gens ou autre chose du genre, ce n'est pas le cas. Cette possibilité demeure limitée, et l'étude que j'ai réalisée m'a convaincu que la protection des renseignements personnels sera assurée et que ce projet de loi, tel qu'il est rédigé, ne peut certainement pas engendrer un tel risque.

Honorables sénateurs, j'ai quelques questions ou préoccupations. Premièrement, pour que ces trois organismes ou agences réussissent à faire en sorte que cela fonctionne, ils auront besoin d'argent. Nous devrons nous assurer qu'ils aient les ressources nécessaires. Je crains qu'ils ne les aient pas. Le gouvernement est exceptionnel pour ce qui est de faire des annonces et d'adopter des projets de loi. Or, ce n'est pas parce que c'est annoncé dans les journaux que cela se fera nécessairement, contrairement à ce que le gouvernement aimerait faire croire aux gens.

Bien sûr, la loi prévoit aussi la création d'un organe de coordination national qui synchronisera les activités de sensibilisation du public et suivra et analysera les tendances, selon les statistiques, et dirigera les activités de surveillance et de coordination des politiques. Cela semble être quelque chose de très bien qu'on pourrait aussi instaurer pour ce qui est des changements climatiques — suivre les tendances, sensibiliser, analyser. Il fallait que je glisse ce message.

Quelles sortes de ressources seront consacrées à cet organe de coordination national? Encore une fois, nous voulons nous assurer, aussi importante que soit cette initiative, que des ressources suffisantes permettront à cette mesure législative de faire son œuvre. Autrement, ce n'est rien de plus qu'un exercice de relations publiques qui n'apaisera pas les inquiétudes des intéressés du monde entier face au Canada et à l'état de la surveillance et de la gestion, si l'on veut, de cet important enjeu relativement à la communication de données électroniques.

Honorables sénateurs, si aucun problème particulier n'est détecté au comité dans ce projet de loi, et si rien d'autre n'est soulevé à l'étape de la troisième lecture, je vais voter en faveur de ce projet de loi.

Son Honneur le Président intérimaire : Suite du débat? Les honorables sénateurs sont-ils prêts à se prononcer?

Des voix : Le vote!

Son Honneur le Président intérimaire : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?

(La motion est adoptée et le projet de loi est lu pour la deuxième fois.)

Renvoi au comité

Son Honneur le Président intérimaire : Quand lirons-nous le projet de loi pour la troisième fois?

(Sur la motion du sénateur Comeau, le projet de loi est renvoyé au Comité sénatorial permanent des transports et des communications.)

[Français]

Le Sénat

Adoption de la motion tendant à suspendre la séance de jeudi aux fins de la motion d'ajournement ou de la réception de messages de la Chambre des communes

L'honorable Gerald J. Comeau (leader adjoint du gouvernement), conformément à l'avis du 8 décembre 2010, propose :

Que lorsque le Sénat aura épuisé l'ordre du jour, les interpellations et les motions le jeudi 9 décembre 2010, la séance soit suspendue, si le leader ou le leader adjoint du gouvernement le demande, jusqu'à nouvelle convocation de la présidence, les cloches retentissant pendant quinze minutes avant la reprise de la séance;

Qu'à la reprise des travaux, il y ait soit ajournement, soit réception de messages de la Chambre des communes.

(La motion est adoptée.)

[Traduction]

Le Code criminel

Projet de loi modificatif—Adoption des amendements de la Chambre des communes

L'ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Frum, appuyée par l'honorable sénateur Mockler :

Que le Sénat approuve les amendements apportés par la Chambre des communes au projet de loi S-215, Loi modifiant le Code criminel (attentats suicides);

Qu'un message soit transmis à la Chambre des communes pour l'en informer.

Des voix : Le vote!

Son Honneur le Président intérimaire : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?

(La motion est adoptée.)

Le Code criminel

Projet de loi modificatif—Troisième lecture

L'ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Banks, appuyée par l'honorable sénateur Day, tendant à la troisième lecture du projet de loi C-464, Loi modifiant le Code criminel (motifs justifiant la détention sous garde).

Son Honneur le Président intérimaire : Les honorables sénateurs sont-ils prêts à se prononcer?

Des voix : Le vote!

Son Honneur le Président intérimaire : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?

(La motion est adoptée et le projet de loi, lu pour la troisième fois, est adopté.)

Régie interne, budgets et administration

Adoption du neuvième rapport du comité

Le Sénat passe à l'étude du neuvième rapport du Comité permanent de la régie interne, des budgets et de l'administration (Politique du Sénat sur les taxis), présenté au Sénat le 7 décembre 2010.

L'honorable David Tkachuk propose que le rapport soit adopté.

Son Honneur le Président intérimaire : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?

Des voix : D'accord.

L'honorable Joseph A. Day : Je suis désolé, mais je ne me rappelle pas avoir obtenu une copie de cette politique révisée ni avoir reçu de l'information à ce sujet. Serait-il possible d'avoir de brèves explications à ce sujet? Est-ce une nouvelle politique sur les taxis?

Le sénateur Tkachuk : Le comité a recommandé que la politique sur les taxis actuellement en vigueur, adoptée par le Sénat le 20 décembre 1989, soit annulée. Nous l'annulons donc et la remplaçons par la politique que nous utilisons actuellement.

Le sénateur Day : Merci, sénateur Tkachuk.

Son Honneur le Président : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?

(La motion est adoptée, et le rapport est adopté.)

(1810)

L'étude de questions ayant trait aux obligations nationales et internationales du Canada en matière de droits de la personne

Quatrième rapport du Comité des droits de la personne—Ajournement du débat

Le Sénat passe à l'examen du quatrième rapport (provisoire) du Comité sénatorial permanent des droits de la personne, intitulé Le Canada et le Conseil des droits de l'homme des Nations Unies : Tracer une nouvelle voie déposé au Sénat le 22 juin 2010.

L'honorable Mobina S. B. Jaffer : Honorables sénateurs, ce rapport du Comité des droits de la personne est intitulé Le Canada et le Conseil des droits de l'homme des Nations Unies : Tracer une nouvelle voie.

Honorables sénateurs, je préparerai une intervention sur ce rapport et j'aimerais reporter le reste de mon temps de parole pour le consacrer à cette intervention la semaine prochaine.

L'honorable Gerald J. Comeau (leader adjoint du gouvernement) : Le Président peut peut-être m'aider en l'occurrence. Je ne suis pas certain si le sénateur Nancy Ruth souhaitait intervenir au sujet de ce rapport. À ma connaissance, si l'ajournement se fait maintenant, celle-ci perdra son droit de parole sur la question lors du débat de la semaine prochaine.

Des voix : Non.

Le sénateur Comeau : Elle conservera le droit d'intervenir.

Des voix : Oui.

Son Honneur le Président intérimaire : L'honorable sénateur Jaffer, avec l'appui de l'honorable sénateur Munson, propose que le débat sur cette question soit ajourné à la prochaine séance du Sénat.

Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?

(Sur la motion du sénateur Jaffer, le débat est ajourné.)

L'étude sur l'émergence de la Chine, de l'Inde et de la Russie dans l'économie mondiale et les répercussions sur les politiques canadiennes

Premier rapport du Comité des affaires étrangères et du commerce international—Ajournement du débat

Reprise du débat sur l'étude du premier rapport (intérimaire) du Comité sénatorial permanent des affaires étrangères et du commerce international, intitulé Le Canada et la Russie : Miser sur les succès d'aujourd'hui pour réaliser les potentiels de demain, déposé au Sénat le 31 mars 2010.

L'honorable Consiglio Di Nino : Honorables sénateurs, ce rapport est lié à l'étude menée par le Comité sénatorial permanent des affaires étrangères et du commerce international sur le Brésil, la Russie, l'Inde et la Chine, qu'on appelle les pays BRIC. Nous étudions le Brésil en ce moment. Nous avons récemment terminé la rédaction du rapport et je n'ai pas eu la possibilité de compléter mes notes pour pouvoir en parler ici. Je voudrais ajourner le débat à mon nom pour le reste de mon temps de parole.

Son Honneur le Président intérimaire : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?

(Sur la motion du sénateur Di Nino, le débat est ajourné.)

Le Sénat

Motion tendant à demander au gouvernement chinois de libérer Liu Xiaobo de prison—Suite du débat

L'ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Di Nino, appuyée par l'honorable sénateur Stewart Olsen,

Que le Sénat du Canada demande au gouvernement chinois de libérer Liu Xiaobo, gagnant du prix Nobel de la paix de 2010.

L'honorable Vivienne Poy : Honorables sénateurs, j'aimerais remercier le sénateur Day de m'avoir cédé la parole. Quand j'en aurai terminé avec mes remarques, je la lui redonnerai.

Hier, j'ai écouté attentivement les discours du sénateur Di Nino et du sénateur Munson au sujet de l'adoption, par le Sénat, d'une motion demandant au gouvernement chinois de libérer Liu Xiaobo, le lauréat du prix Nobel. Le sénateur Day prendra la parole sur cette motion du point de vue du droit international.

Aujourd'hui, je prends la parole en tant que personne qui a baigné dans la culture chinoise et qui comprend l'histoire de ce pays. J'ai toujours pu dire publiquement le fond de ma pensée et je comprends donc à quel point il doit être difficile de se faire museler.

Je tiens à dire, d'entrée de jeu, que la liberté de parole, un élément central des droits de la personne, est importante. Contrairement au sénateur Munson, je n'ai pas rencontré Liu Xiaobo, mais je le respecte énormément et j'apprécie beaucoup son enseignement et ses écrits. Depuis ses débuts comme chargé de cours à l'Université normale de Beijing, il milite ouvertement pour les droits de la personne.

Honorables sénateurs, je ne crois pas que la motion dont nous sommes saisis aujourd'hui permettra à Liu Xiaobo d'être libéré de prison. En fait, si elle était adoptée, elle pourrait lui porter préjudice, ainsi qu'à sa famille et à ses partisans, surtout si la motion est très médiatisée et attire l'attention du gouvernement chinois.

Cette motion pourrait compliquer la vie de Liu Xiaobo et de sa famille. Je sais, en connaissance de cause, que cette motion pourrait, par inadvertance, susciter l'animosité des Chinois, car pour eux, cette motion constitue une ingérence dans les affaires internes de la Chine. En effet, même si les Chinois critiquent leur famille, ils désapprouvent les critiques formulées par quelqu'un de l'extérieur.

Imaginez-vous ce qui se passerait si le Congrès national du peuple adoptait une motion pour dire au gouvernement du Canada comment gérer sa politique interne. Rappelez-vous du tollé qu'a provoqué Charles de Gaulle en 1967 avec son tristement célèbre « Vive le Québec libre ».

Je crois que l'objet de cette motion relève du ministère des Affaires étrangères et du Commerce international et s'inscrit dans le cadre des relations diplomatiques qu'il entretient avec son homologue chinois.

Même si les gouvernements des démocraties occidentales reconnaissent la liberté d'expression, il leur arrive quand même de censurer ou de tenter de faire taire ceux qui ne sont pas du même avis qu'eux. Le plus récent exemple en date remonte à l'année dernière, lorsque le Canada a littéralement empêché celui qui a longtemps été député britannique, George Galloway, d'entrer au Canada, soi-disant pour des raisons de sécurité. Cette décision a par la suite été renversée par un juge de la Cour fédérale, qui a déterminé qu'elle s'appuyait sur des motifs politiques.

Cette année, il y a eu l'annulation de l'allocution que devait prononcer le directeur exécutif national du Congrès islamique canadien, Zijad Delic, devant le ministère de la Défense nationale dans le cadre du Mois de l'histoire islamique. Quoi qu'on puisse penser de ces gens, la preuve est faite que le Canada n'endosse pas la liberté d'expression sous toutes ses formes.

J'ai remarqué que le sénateur Downe avait laissé entendre qu'on devrait dépêcher le sénateur Di Nino en Norvège pour faire des pressions. Je tiens à informer les sénateurs que plusieurs législateurs du Parti démocratique du gouvernement de Hong Kong ont pris la direction de la Norvège hier afin d'y dénoncer l'incarcération de Liu Xiaobo et de demander à Beijing de le remettre en liberté. Ils ont rempli leurs valises des livres, des pamphlets, des photos et des cartes postales de Liu Xiaobo, qu'ils distribueront lors de la cérémonie de remise des prix Nobel, à l'hôtel de ville d'Oslo.

Quand on leur demande ce qu'ils feront ensuite de leurs valises vides, ils répondent qu'ils les rempliraient bien de saumon fumé norvégien.

Comme ces gens viennent de Hong Kong, qui fait partie de la Chine, ils sont probablement les mieux placés pour réussir à influencer les autorités chinoises.

Selon moi, les améliorations aux politiques internes d'un pays doivent venir de l'intérieur, et les démocraties occidentales croient souvent, à tort, qu'elles peuvent transplanter leur gouvernement idéal dans un coin du monde qui est aux antipodes du leur, culturellement et historiquement parlant. Toujours selon moi, la façon la plus efficace de favoriser la démocratisation de la Chine consiste à sensibiliser la jeune génération de Chinois, dont plusieurs font des études dans des pays démocratiques occidentaux, comme le Canada. Ils rapportent — et continueront de rapporter — leurs acquis en Chine. C'est ainsi que le changement va se produire, même si ce n'est pas encore pour demain.

Les sénateurs savent peut-être que, de dictature imposant la loi martiale qu'elle était, Taïwan a réussi à devenir une démocratie en 1987, sans la moindre effusion de sang. Grâce à l'influence de Hong Kong, de Taïwan et des jeunes venus s'instruire en Occident, la Chine va finir par changer. Peut-être pas de mon vivant, mais elle va changer. Mais quand on connaît la notion du temps et de l'histoire des Chinois et qu'on compare les 5 000 ans de civilisation chinoise aux 143 ans d'existence du Canada en tant que pays, on comprend que les Occidentaux s'impatientent que la Chine prenne tant de temps à évoluer.

Je rappelle aux sénateurs quelle est la réponse typique du gouvernement du Canada lorsqu'un de ses citoyens est incarcéré à l'étranger. En règle générale, le Canada respecte la souveraineté des autres pays et l'indépendance de leurs processus judiciaires. Lorsque le Canada a des réserves, il les exprime par l'entremise du ministère des Affaires étrangères et du Commerce international, parce qu'il pourrait perdre la face s'il agissait autrement et que cela pourrait avoir des conséquences négatives. La diplomatie est la meilleure solution.

(1820)

Pour conclure, honorables sénateurs, je voudrais répéter que je ne pense pas que la motion dont nous sommes saisis est un moyen efficace d'exercer une influence sur le gouvernement de la Chine. D'ailleurs, j'estime qu'elle pourrait avoir l'effet pervers d'empirer les conditions de Liu Xiaobo en Chine. Au bout du compte, si la Chine doit poursuivre son évolution en vue de devenir un État démocratique, ce sont les Chinois eux-mêmes qui devront agir, pas des étrangers critiques, aussi bonnes leurs intentions soient-elles.

L'honorable Jim Munson : Madame le sénateur répondrait-elle à une question?

Le sénateur Poy : Oui, bien sûr.

Le sénateur Munson : Je respecte le point de vue du sénateur. Cependant, il arrive parfois, dans la vie d'une institution, que ses éléments constitutifs doivent prendre une décision commune.

Hier, nous avons parlé de M. Liu Xiaobo. Je pense que nous oublions parfois l'importance de ce dossier. Lorsque j'étais journaliste, j'ai suivi le premier ministre Mulroney dans le dossier de l'apartheid en Afrique du Sud. À titre de nation et à titre d'institution, notre pays a pris position collectivement, et non individuellement, pour demander la libération de Nelson Mandela, qui avait passé 27 années en prison.

J'ai aussi suivi ce dossier lorsque j'ai accompagné le premier ministre Mulroney, notamment en Malaisie, où il a tenu tête à Margaret Thatcher et à d'autres qui disaient qu'il fallait que les choses évoluent en Afrique du Sud. Honorables sénateurs, il faut parfois que les institutions interviennent pour que les choses changent.

Dans le cas d'Andrei Sakharov ou d'Alexandre Soljenitsyne, en Russie, il a fallu que les institutions réagissent. Même si je pense qu'il est louable de la part d'un sénateur de se faire entendre, cela n'a pas beaucoup de poids. Par contre, collectivement, en tant qu'institution, nous pouvons accomplir beaucoup.

J'ai mentionné que, lorsque j'étais en Chine, il y avait un professeur qui s'appelait Fang Lizhi. Il n'avait pas la presse internationale de son côté, et le monsieur dont nous parlons ne l'a pas non plus. Toutefois, il arrive parfois que des pays et des institutions doivent réagir et s'interposer.

J'ai suivi les progrès accomplis en Chine, et c'est merveilleux. Toutefois, pour ce qui est des droits de la personne, il arrive un moment où, en tant qu'institution, il faut se demander si, collectivement, nous ne pourrions pas nous porter à la défense d'un homme, d'une voix, qui dit vouloir tout simplement être le reflet de la Constitution de la Chine.

Jetez un coup d'œil à son manifeste. Il ne parle pas de renverser quoi que ce soit.

La question que je pose à l'honorable sénateur est la suivante : pourquoi devrions-nous attendre plus longtemps? Demain est une journée très importante. M. Liu ne sera pas présent. Sa femme non plus. Des millions de Chinois ne sauront même pas que cet événement s'est produit.

Honorables sénateurs, je n'essaie pas de dire que nous devrions changer la Chine. Je dis simplement que nous devrions nous exprimer comme une seule voix, que nous devrions être capables d'avoir une conversation d'adulte sur les droits de la personne sans avoir peur.

Pourquoi le gouvernement de la Chine craint-il tant un homme seul qui croupit en prison? Onze années, c'est long. Onze autres années. Cet homme était présent sur la place Tiananmen. Comme je l'ai mentionné hier, c'est lui qui avait tenté de négocier un règlement pacifique lors des événements survenus à cet endroit.

Il y avait une querelle au sein du gouvernement chinois entre le premier ministre Li Peng et Zhao Ziyang, qui occupait le poste de secrétaire général du Parti communiste. Ils tentaient d'en arriver à une solution. Voici un homme qui a dit : « Tentons de faire quelque chose. » Nous sommes maintenant en 2010.

Le sénateur Poy : Le sénateur a-t-il une question?

Le sénateur Munson : Comme hier, ma question est la suivante : pourquoi ne pouvons-nous pas parler tous ensemble, d'une seule voix?

Le sénateur Poy : Le sénateur a parlé du premier ministre Mulroney. C'était le premier ministre du Canada. C'est différent. Notre premier ministre doit pouvoir dire ce qu'il veut au premier ministre d'un autre pays, ce qu'il a fait. Il s'agit simplement d'une institution; le Sénat est une institution.

Le sénateur a dit que beaucoup de gens peuvent écrire dans la presse. Je pense que cela est efficace. Cependant, en tant qu'institution parlementaire, je crois que nous obtiendrons l'effet inverse que celui qui est prévu. Cela signifie perdre la face.

Effectivement, je ne sais pas comment cela se passe en Russie ou dans d'autres pays, mais je sais certainement comment les choses fonctionnent en Chine. C'est tout ce que je dis. Je ne me trouvais pas comme vous à la place Tiananmen, mais, à l'époque, je suivais les actualités de très près, comme je le fais d'ailleurs tous les jours. J'écoute le réseau AsiaNews et je regarde les nouvelles en chinois. J'ai écouté beaucoup de bulletins de nouvelles et j'ai lu les journaux, alors je sais ce qui se passe.

Je ne pense pas vraiment que ça va marcher. Je pense que ça aura l'effet inverse que celui prévu. C'est ce que j'essaie de dire.

L'honorable Consiglio Di Nino : Honorables sénateurs, tout d'abord, j'aimerais moi aussi souligner que je respecte l'opinion de mes collègues, que je sois du même avis ou non. C'est le principe fondamental de la liberté d'expression. Peu importe de quel côté nous sommes, nous allons toujours défendre ce principe.

Ce n'est pas ce qui se passe en Chine. Cet homme ne peut pas dire ce qu'il pense. Si on croit aux valeurs humaines, il faut que quelqu'un puisse les défendre.

Madame le sénateur sait-elle qu'hier, la Chambre des communes a adopté une résolution semblable à l'unanimité, ce qui inclut le premier ministre, le chef de l'opposition, les chefs des autres partis, ainsi que tous les autres députés? Pas un seul député ne s'y est opposé. Ils ont adopté une résolution similaire à l'unanimité. Madame le sénateur est-elle au courant de cela?

Son Honneur le Président intérimaire : Le temps alloué au sénateur Poy est écoulé. Souhaitez-vous qu'on vous accorde plus de temps?

Le sénateur LeBreton : Cinq minutes.

Le sénateur Poy : Je sais qu'une motion a été adoptée par la Chambre des communes. Je le sais.

Le sénateur Losier-Cool se demandait hier pourquoi ce dossier ne faisait pas l'objet de discussions entre nos deux gouvernements. J'ai une question à poser au sénateur. Que fait notre ministère des Affaires étrangères? Que fait notre ministre des Affaires étrangères dans ce dossier? Je ne sais pas. Je crois vraiment qu'il devrait y avoir des discussions de gouvernement à gouvernement lorsqu'il y a un problème.

Le sénateur Di Nino : Nous différons d'opinions.

Le sénateur Poy : Je crois à la liberté d'expression. C'est ce qui nous permet de donner franchement notre opinion. J'y crois fermement, mais je ne voudrais pas que l'affaire se retourne contre Liu Xiaobo.

Le sénateur Di Nino : Je suis d'accord avec madame le sénateur pour dire qu'elle a le droit de donner son point de vue et que j'ai le droit de donner le mien. En toute honnêteté et en toute sincérité, je respecte ce droit.

(1830)

Mais je suis troublé d'entendre le sénateur Poy comparer, semble-t-il, la Chine au Canada en ce qui a trait à la liberté de presse, la liberté de religion, la liberté de parole, la liberté de circuler dans les rues ou la liberté de tenir une manifestation.

Est-ce que madame le sénateur Poy comparait la Chine au Canada lorsqu'elle a fait ses observations sur ce dossier?

Le sénateur Poy : Dans une certaine mesure, je faisais effectivement une comparaison. Je me demande pourquoi nous ne faisons pas le ménage chez nous, au Canada, avant de pointer du doigt les autres gouvernements. Il n'y a pas que le gouvernement chinois; il y a aussi d'autres gouvernements, mais je ne les nommerai pas pour l'instant.

J'ai de la difficulté à accepter que les gens n'aient pas le droit de s'exprimer ici.

Le sénateur Di Nino : Je remercie le sénateur de sa réponse.

L'honorable Sharon Carstairs : Honorables sénateurs, je suis de l'avis du sénateur Poy. Nous convenons que le Canada doit être exigeant envers lui-même puisqu'il a une tradition démocratique. Lorsque nous semblons ne pas appliquer les pratiques propres à cette tradition, nous devons nous rappeler que nous sommes tenus de respecter des critères plus exigeants qu'un pays comme la Chine, qui ne possède pas cette tradition.

Je suis également sensible à la position du sénateur Poy voulant qu'il soit inapproprié pour le Sénat de s'adresser à des gouvernements. Les gouvernements se parlent entre eux. Peut-être en serait-il autrement si l'on s'adressait au Parlement de la Chine plutôt qu'au gouvernement chinois.

Madame le sénateur Poy aurait-elle préféré une résolution disant que le Sénat du Canada déplore que Liu Xiaobo ne puisse accepter son prix Nobel de la paix en personne? Aurait-elle été plus à l'aise avec cela?

Le sénateur Poy : Oui, en effet, mais cela ne correspond pas à la motion du sénateur Di Nino.

L'honorable Gerald J. Comeau (leader adjoint du gouvernement) : Un certain nombre de mes collègues, qui sont absents de la Chambre pour l'instant, m'ont indiqué qu'ils aimeraient discuter de cette motion. Par conséquent, je propose l'ajournement du débat.

Son Honneur le Président intérimaire : Sénateur Comeau, lorsque madame le sénateur Poy a commencé à parler, elle a dit avoir eu la permission de le faire du sénateur Day, puisque cet article est à son nom, et que lorsqu'elle aura terminé, il reviendra au sénateur Day.

L'honorable sénateur Poy, avec l'appui de l'honorable sénateur Mitchell, propose que le débat soit ajourné au nom du sénateur Day.

Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?

(Sur la motion du sénateur Poy, au nom du sénateur Day, le débat est ajourné)

Projet de loi de crédits no 4 pour 2010-2011

Première lecture

Son Honneur le Président intérimaire annonce qu'il a reçu de la Chambre des communes le projet de loi C-58, Loi portant octroi à Sa Majesté de crédits pour l'administration publique fédérale pendant l'exercice se terminant le 31 mars 2011, accompagné d'un message.

(Le projet de loi est lu pour la première fois.)

Son Honneur le Président intérimaire : Honorables sénateurs, quand lirons-nous le projet de loi pour la deuxième fois?

(Sur la motion du sénateur Comeau, la deuxième lecture du projet de loi est inscrite à l'ordre du jour de la séance d'après-demain.)

La candidature d'Edmonton pour l'Exposition de 2017

Interpellation—Suite du débat

L'ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur l'interpellation de l'honorable sénateur Banks, attirant l'attention du Sénat sur la décision du gouvernement du Canada par rapport à la soumission de la ville d'Edmonton pour être hôte de l'exposition mondiale de 2017.

L'honorable Claudette Tardif (leader adjoint de l'opposition) : Honorables sénateurs, c'est avec grand intérêt que j'ai écouté le discours du sénateur Banks sur l'interpellation concernant le refus du gouvernement d'appuyer la candidature d'Edmonton comme hôte de l'Exposition de 2017. Je partage la déception de mes concitoyens edmontoniens et leur indignation devant la décision du gouvernement de ne pas appuyer la seule candidature canadienne pour cette manifestation d'envergure internationale.

Comme j'ai fait partie du conseil d'administration des Championnats du monde d'athlétisme de l'IAAF de 2001 et des Jeux mondiaux des maîtres de 2005, qui se sont déroulés à Edmonton, j'ai été à même de constater la valeur et l'avantage de telles manifestations pour une ville, une province et un pays. Je ne doute nullement que l'Exposition de 2017 à Edmonton aurait été un franc succès, compte tenu de l'excellente réputation de la ville comme hôtesse de spectaculaires manifestations de calibre mondial qui ne dépassent jamais leur budget.

Le gouvernement a induit les Canadiens en erreur lorsqu'il a dit que les dépenses en matière de sécurité auraient été de l'ordre de centaines de millions de dollars. Dans les faits, des documents obtenus par la chaîne CTV à Edmonton révèlent que la facture totale au chapitre de la sécurité se serait élevée à 91 millions de dollars, la part assumée par le fédéral étant d'environ 11 millions de dollars, ce qui correspond à un neuvième des coûts.

Comme certains semblent l'avoir oublié, Expo 2017 n'est pas le sommet du G8 ou le sommet du G20. Nous avions conclu que l'événement constituerait une faible menace à la sécurité et qu'il ferait bénéficier le Canada de retombées économiques intéressantes. Par ailleurs, comme le sénateur Banks l'a signalé dans son interpellation, la plupart des coûts associés à Expo 2017 n'auraient commencé à être défrayés qu'après 2015, soit l'année où le déficit aura été éliminé, comme l'ont indiqué le premier ministre et son ministre des Finances.

Le gouvernement ne semble pas accorder d'importance à l'aspiration d'Edmonton à être reconnue sur la scène mondiale. En plus d'être une vitrine formidable pour le secteur des sables pétrolifères, Expo 2017 aurait fourni à l'Alberta et au Canada une occasion de renseigner des millions de visiteurs à ce sujet. En n'appuyant pas la candidature d'Edmonton, le gouvernement montre une fois de plus qu'il considère les Albertains comme étant des votes acquis d'avance, un groupe qu'il peut aisément négliger.

Paul Marck, l'éditeur du magazine Alberta Venture, écrit ceci dans son blogue :

[...] le gouvernement fédéral n'a pas prouvé que la candidature d'Edmonton était assortie de coûts de sécurité élevés. Voilà un autre exemple de sa bêtise absolue.

M. Marck n'est pas le seul à penser de la sorte. Dans une série de lettres envoyées au Edmonton Journal, bon nombre d'Edmontoniens expriment leurs frustrations. Voici ce qu'écrit Sylvia Kotler :

Pourquoi Harper et ses conservateurs se soucieraient-ils d'Edmonton alors que nous votons pour eux sans égard à ce qu'ils font ou à ce qu'ils disent?

Ils disposaient d'un excédent faramineux lorsqu'ils ont été élus pour former le gouvernement; ils n'ont pas dépensé tous les fonds du programme de relance, mais le cabinet du premier ministre et son bureau des communications continuent de dépenser de plus en plus d'argent pour faire en sorte que le message des conservateurs passe.

Ils tiennent les Edmontoniens pour acquis.

Les Albertains des collectivités des quatre coins de la province sont blêmes de colère. Stewart Shields, de Lacombe, écrit ceci :

L'Alberta a obtenu exactement ce qu'elle méritait d'un gouvernement fédéral imprévisible qui peut compter sur l'appui de cette province quoi qu'il fasse.

Pourquoi les conservateurs de Harper gaspilleraient-ils des fonds fédéraux pour une province qui ne cessera jamais d'élire des députés conservateurs à Ottawa?

Il vaut mieux pour les conservateurs de consacrer l'argent réclamé par Edmonton pour l'Exposition universelle de 2017 à des régions comme l'Ontario et le Québec, qui pourraient les récompenser d'avoir pensé à elles.

Si l'on se fie à ces lettres, on a de plus en plus l'impression que le gouvernement considère que l'Alberta n'est pas importante. De surcroît, de plus en plus d'Albertains se sentent abandonnés par ce gouvernement, à qui ils ont été exceptionnellement fidèles. Ce sentiment d'abandon peut s'expliquer par la faible représentation d'Edmonton au caucus.

Dans l'édition du 23 novembre de l'Edmonton Journal, le journaliste Gordon Kent fait remarquer que le maire Stephen Mandel :

[...] blâme sans détour la ministre des Travaux publics, Rona Ambrose, la représentante régionale au Cabinet, lui reprochant de ne pas en avoir fait assez pour vendre le projet à ses collègues.

(1840)

Ce genre de situation ne se serait pas produit à l'époque où l'honorable Anne McLellan était au Parlement. Seule députée libérale de l'Alberta à l'époque, elle a servi à titre de vice-première ministre et était la voix de l'Alberta à la table du Cabinet. Comme le sénateur Banks l'a fait remarquer, elle ne disait pas toujours oui, mais elle savait quand dire non.

Durant ses 13 années à la Chambre à titre de députée d'Edmonton-Centre, sa ville et sa province ont directement bénéficié de la présence d'un ardent défenseur à Ottawa. Mme McLellan avait à cœur les préoccupations et les aspirations de l'Alberta et d'Edmonton et obtenait souvent le financement et l'appui du gouvernement pour des événements qui allaient être avantageux pour les villes et la province à long terme.

Honorables sénateurs, ce qui fait le plus mal dans cette décision, c'est qu'on nous a permis, à nous, les Edmontoniens et les Albertains, de rêver à l'Exposition universelle de 2017 et à ce qu'elle apporterait à la ville. On nous a permis d'espérer, puis, tout à coup, on a anéanti nos espoirs, comme on écrase un insecte, sans aucune explication.

Le sénateur Mitchell : Cela les fait rire.

Le sénateur Tardif : Il n'y a pas de quoi rire. On a incité Edmonton à rêver et à investir de l'argent dans un événement qui allait mourir dans l'œuf. Si le gouvernement a refusé d'accorder son appui pour des raisons économiques, il aurait dû avoir le courage d'en informer le comité de candidature au début de ses travaux. Il aurait pu lui dire : « Nous ne pouvons pas vous offrir les 700 millions de dollars que vous demandez, mais nous pouvons aller jusqu'à telle somme. »

Si cela s'était passé ainsi, je suis sûre que le comité de candidature pour l'Expo universelle de 2017 et la Ville d'Edmonton auraient réussi à trouver les fonds manquants. Au lieu de cela, le comité a connu trois années de silence, sans le moindre signe qu'il y avait un problème sur le plan du financement.

Honorables sénateurs, Edmonton, l'Alberta et le Canada avaient beaucoup à gagner de la tenue de cet événement. Le comité organisateur de l'Expo internationale 2017 s'attendait à des retombées économiques majeures. Selon ses estimations, le produit intérieur brut allait augmenter de 2,6 milliards de dollars, plus de 37 000 emplois allaient être créés et la ville allait accueillir plus de 5 millions de visiteurs.

En même temps, l'Alberta aurait pu mettre en valeur l'Ouest d'aujourd'hui et faire connaître ses succès dans le secteur énergétique ainsi que ses solutions innovatrices pour assurer les besoins énergétiques de demain. Malheureusement, ce plan n'était qu'un rêve. Dans ce rêve, on célébrait également le 150e anniversaire du Canada avec le reste du monde.

Honorables sénateurs, la décision du gouvernement de laisser tomber la candidature de la ville d'Edmonton pour la tenue d'Expo 2017 est à la fois exceptionnellement décevante et extrêmement décourageante, tant pour les Albertains que pour les habitants d'Edmonton.

L'honorable Grant Mitchell : Honorables sénateurs, je veux intervenir sur cette interpellation et appuyer les propos du sénateur Banks et du sénateur Tardif. On a l'impression qu'on n'en dira jamais assez pour parvenir à toucher le gouvernement et l'amener à comprendre exactement ce qu'il a fait à Edmonton et à l'Alberta, et combien il a nui aux perspectives que ce projet laissait miroiter pour le Canada.

L'élément le plus troublant pour moi est l'importance des occasions ratées. Le monde sait que ce genre d'exposition marque souvent le début d'une transformation du pays hôte et de la ville hôte. Il suffit de voir ce que cet événement a fait à Vancouver, en 1986. Il a catapulté cette ville sur la scène mondiale. Cette présence accrue dans le monde est déjà, en soi, une occasion ratée pour Edmonton, qui est une ville de classe mondiale, mais dont l'avenir est encore tellement prometteur.

Le dossier de candidature présenté par la Ville d'Edmonton représentait une autre occasion extrêmement importante, illustrée dans son thème de l'énergie à notre époque. Le secteur de l'énergie en Alberta, particulièrement en ce qui concerne l'exploitation de sables pétrolifères, commence à avoir un problème, parce que le monde ne comprend pas bien l'importance que revêt ce projet pour extraire du pétrole de façon sûre et sécuritaire tout en respectant l'environnement.

De bien des manières, le secteur des sables pétrolifères est déjà un chef de file mondial à cet égard. Ce n'est pas suffisant et il y a encore beaucoup de travail à faire. Cette exposition aurait donné à l'Alberta et à Edmonton une occasion de mettre en valeur son secteur de l'énergie d'une façon qu'on ne voit pas souvent dans le monde, c'est-à-dire dans le cadre d'une initiative environnementale solide et avec une volonté de faire davantage pour la renforcer. Une telle occasion ne se présente pas souvent. L'exposition mondiale de 2017 nous aurait permis de saisir une occasion et de promouvoir à la fois ce secteur et le Canada.

J'espère que le gouvernement ne durera pas assez longtemps pour nuire davantage à notre réputation internationale. Cela prendra du temps pour restaurer cette réputation. Une exposition bien structurée — une vitrine sur le monde — attire l'attention de gens du monde entier. Une exposition mondiale tenue au Canada en 2017 aurait grandement contribué à établir notre force, notre présence et notre prestige sur la scène internationale.

Honorables sénateurs, l'exposition de 2017 aurait pu devenir le point d'ancrage des célébrations du 150e anniversaire du Canada. Souvenez-vous de 1967, tandis qu'Expo 67 a rassemblé des Canadiens de tout le pays pour célébrer les réalisations prodigieuses et merveilleuses du Canada. Le 150e anniversaire est tout aussi important et le gouvernement n'a encore rien proposé. Il semble n'y avoir absolument aucun projet à l'étude pour célébrer cet événement de façon significative. L'exposition mondiale de 2017 était une occasion évidente qui aurait pu être le point d'ancrage des célébrations du 150e anniversaire du Canada.

Edmonton, l'Alberta et le Canada ont manqué la chance de concrétiser cette célébration, qui aurait pu transmettre le message que le Canada est un endroit remarquable de façon générale et, plus particulièrement, qui aurait pu démontrer les efforts que nous déployons pour la planète dans le secteur de l'énergie, dans une perspective environnementale. L'événement aurait aussi attiré notre attention sur le Canada et sur l'Alberta, nous aurait encouragés à faire davantage pour protéger l'environnement en veillant à donner à ces ressources énergétiques l'éclairage le plus respectueux possible de l'environnement. Toutes ces occasions sont perdues.

Le gouvernement prétendra que c'est une question d'argent. Si c'est une question d'argent, c'en est une uniquement parce que le gouvernement a géré de façon tout à fait incompétente les finances du pays. Depuis l'arrivée des conservateurs au pouvoir, les dépenses ont augmenté de 80 milliards de dollars. Cela représente une augmentation de 40 p. 100 des dépenses par un gouvernement conservateur assurément de droite, qui avait déclaré qu'il pouvait gérer le gouvernement de manière financièrement responsable. Pourtant, tout pointe vers le contraire. Il dépensera 16 milliards de dollars — il dit 16 milliards, mais nous savons que ce sera plus — pour acheter des avions de combat qu'il a acceptés sans appel d'offres.

Où est la responsabilité financière dans tout cela? Le gouvernement a gaspillé une bonne partie de la somme de 1,3 milliard de dollars qu'ont coûté les sommets du G8 et du G20 parce qu'il ne peut même pas gérer ce genre d'événement. Le gouvernement dépensera des milliards de dollars pour construire des prisons qui n'accroîtront pas notre sécurité, mais la diminueront.

Quel exemple de leadership le premier ministre a-t-il donné devant tout cela? Il a accru le budget de son cabinet de 30 p. 100 en deux ans. Évidemment, de ce côté-là, il fait montre d'un grand leadership.

Le sénateur Mercer : D'où vient-il?

Le sénateur Mitchell : Il est de l'Alberta.

Le sénateur Mercer : Il est de Calgary.

Le sénateur Mitchell : Nous n'irons pas sur ce terrain parce que Calgary est une ville très correcte.

Le premier ministre a assuré un leadership au sein de son cabinet et cela a fait augmenter les dépenses de 16 p. 100. Les sénateurs peuvent voir les conséquences de ce genre de responsabilité financière; et Edmonton, en Alberta, fait les frais d'un gouvernement qui a littéralement dilapidé l'argent.

Je ne puis pas m'empêcher de mentionner les Émirats arabes unis, où 300 millions de dollars ont été perdus en raison d'une incompétence fondamentale en matière de relations internationales. Ces 300 millions de dollars auraient pu faire beaucoup pour soutenir l'obtention de l'exposition mondiale de 2017.

Parlons des fonds effectivement en cause dans le projet. Sept cent millions de dollars auraient été demandés au gouvernement fédéral pour les immobilisations et d'autres mesures de soutien. Le gouvernement fédéral a affirmé que ce chiffre dépasserait 1 milliard de dollars. La différence varie entre 300 et 400 millions de dollars, que le gouvernement attribue au coût des mesures de sécurité. Même si c'était effectivement le coût lié à la sécurité, le gouvernement fédéral ne serait pas le seul à l'assumer. Il serait responsable d'environ 10 p. 100 du coût, mais en fait, il ne s'agit même pas de coûts liés à la sécurité. Ceux-ci sont estimés à 91 millions de dollars, en dollars de 2017, dont la part pour le gouvernement fédéral serait d'environ 11 millions de dollars, ce qui amènerait sa responsabilité et sa contribution financière au projet à un peu plus de 700 millions de dollars.

(1850)

C'est une somme conséquente. Elle l'est d'autant plus quand on constate les sommes gaspillées à cause de l'incompétence financière du gouvernement. Cependant, n'oublions pas que ce n'est pas une somme qu'il faudra débourser l'an prochain; la dépense s'échelonnera sur sept ou huit ans. Cela revient à 100 millions de dollars par année.

Le gouvernement, avec ses 27 députés de l'Alberta qui, penserait-on, seraient en mesure d'obtenir au moins 100 millions de dollars par année pour leur province, a totalement laissé tomber l'Alberta, et Edmonton en particulier, en renonçant à ce projet à cause d'une somme qui n'est pas insurmontable.

Qui plus est, ce n'est que plus tard, de 2015 à 2017, qu'il faudra débloquer la majorité des fonds, et le gouvernement a affirmé qu'il aura équilibré le budget en 2014 ou en 2015. Son hésitation à même envisager la possibilité qu'il ait de l'argent de 2015 à 2017 pour le projet doit-elle être interprétée comme un manque de confiance quant à la projection selon laquelle le gouvernement équilibrerait le budget en 2014 et aurait, je suppose, trois ans d'excédents budgétaires pour financer le projet? Il est surprenant et inquiétant de penser que l'affirmation du gouvernement selon laquelle il compte revenir à l'équilibre budgétaire en 2014 pourrait n'être que paroles en l'air.

Le sénateur Day : Cela ne m'étonnerait pas.

Le sénateur Mitchell : Honorables sénateurs, l'autre élément contrariant est la façon dont les Edmontoniens et les Albertains ont été traités. Le ministre responsable de la région s'est montré très encourageant, notamment auprès des habitants d'Edmonton. Après qu'Edmonton ait cru le gouvernement, notamment M. Moore, sur parole, un groupe solide a été créé et s'est chargé d'élaborer une proposition, sur laquelle on a travaillé pendant plusieurs années. Les Edmontoniens ont dépensé beaucoup d'argent dans le cadre de l'élaboration de la proposition et, sans préavis aucun, ont été avisés que le gouvernement avait refusé de participer ou de contribuer. Pire encore, les membres du comité organisateur et d'autres personnes ont demandé de rencontrer la ministre Ambrose à bon nombre d'occasions sur une longue période de temps et cette dernière n'a jamais même eu la décence de les voir. Comment se fait-il que la ministre n'accepte même pas de rencontrer un groupe de personnes aussi important, chargé d'étudier un projet d'une telle importance? Que lui faut-il d'autre?

Puis, lorsqu'elle a reçu le texte de la proposition, personne n'a demandé à rencontrer les membres de l'équipe pour soulever certaines divergences d'opinions ou parler d'évaluations sur les chiffres présentés afin de trouver des moyens de pouvoir lancer ce projet de l'avant. Non, ce fut un refus arbitraire. Les responsables n'ont même pas eu la décence de s'entretenir avec les gens d'Edmonton, avec le maire d'Edmonton et avec la Ville d'Edmonton, de façon polie et respectueuse et d'essayer à tout le moins de faire preuve d'une certaine compréhension à l'égard des aspirations de cette ville.

Honorables sénateurs, j'entends chahuter du côté du leader, ce qui démontre tout à fait le genre d'attitude à laquelle les gens d'Edmonton ont eu à faire face dans le cadre de ce processus. Pourquoi la ministre Ambrose a-t-elle refusé de rencontrer ces gens? C'est la vérité.

On peut aussi se demander pourquoi les conservateurs ont agi de la sorte. Pourquoi ont-ils fait une telle chose alors que les dépenses prévues n'étaient pas très élevées et qu'en cas de besoin, nous aurions, si nous en croyons les propos du ministre des Finances, l'argent nécessaire pour le faire? Pourquoi ont-ils traité les gens d'Edmonton ainsi? À mon avis, c'est une question purement politique. Les grandes forces de ce gouvernement sont orientées vers la propagande politique, les manigances politiques et la stratégie politique.

Il est très avantageux sur le plan politique pour le premier ministre de dire aux gens d'Edmonton et de l'Alberta que le gouvernement ne donnera pas à Edmonton l'argent dont la ville a besoin. Qu'est-ce qu'une telle décision peut lui rapporter du point de vue politique? Cela permet au gouvernement de dire à tous les Canadiens qu'il surveille les dépenses de très près. C'est une tentative en vue de faire oublier qu'il a dépensé plus d'argent qu'aucun autre gouvernement dans toute l'histoire du pays. Nous avons actuellement le plus gros déficit de toute l'histoire du Canada, mais le gouvernement tente de détourner l'attention, de distraire les gens et d'envoyer un message visant à prouver qu'il tient résolument les cordons de la bourse. C'est ce qu'il fait au détriment des gens d'Edmonton.

Il envoie aussi bien sûr en même temps un message à toutes les autres villes du pays qui pourraient vouloir obtenir une aide du gouvernement fédéral pour la construction d'un aréna.

Honorables sénateurs, permettez-moi de dire que ce dossier n'a rien à voir avec un aréna de hockey. Comme je l'ai dit, nous parlons ici d'aspirations et d'occasions pour les gens d'Edmonton, de l'Alberta et du Canada. Nous parlons d'un projet remarquable qui renforcerait la présence du Canada, de l'Alberta et d'Edmonton sur la scène internationale. Ce projet redorerait notre image dans le monde et il enverrait un message clair quant à l'engagement que nous avons pris de faire appel à des énergies renouvelables et durables dans l'avenir.

Hélas, le gouvernement a sacrifié tout cela, sans invoquer un motif plus noble et sans se préoccuper des sentiments et des aspirations des résidants d'Edmonton et de l'Alberta. Le gouvernement a agi d'une façon brusque, impolie et cavalière qui confirme que ce parti et le premier ministre donnent priorité à leurs intérêts politiques plutôt qu'aux aspirations des gens qu'ils représentent dans cette province. C'est à la fois honteux et très malheureux. J'espère que nous pourrons convaincre le gouvernement de revenir sur sa décision et de prendre la décision qui s'impose pour les gens d'Edmonton, de l'Alberta et du Canada.

Des voix : Bravo!

L'honorable Terry M. Mercer : Honorables sénateurs, je suis mal à l'aise pour les Albertains de toute la province, mais surtout pour ceux du Nord. La rivalité qui existe entre les Stampeders et les Eskimos et entre les Flames et les Oilers a des limites. Or, le premier ministre vient de porter cette rivalité à un nouveau niveau, suite à la présentation de la candidature d'Edmonton pour la tenue d'Expo 2017, à l'occasion du cent cinquantième anniversaire de la Confédération de notre pays. Il a décidé de faire de la petite politique pour punir les gens du Nord de l'Alberta, les gens de la ville d'Edmonton, parce qu'ils n'ont pas toujours été loyaux envers lui, envers son parti, ou envers ceux qui les ont précédés.

Lorsque vous arrivez à Edmonton en voiture, vous voyez un grand panneau qui dit « Edmonton, ville des champions ». C'est la ville des champions, qu'il s'agisse des Eskimos, des Oilers et ainsi de suite. Les gens ont fait des efforts énormes. La collectivité s'est unie pour proposer la candidature de la ville afin de présenter l'Expo 2017.

Tout le monde ici est assez âgé pour se souvenir d'Expo 67. En fait, un bon nombre d'entre nous se sont rendus à Montréal par train, par autocar, par voiture ou par avion, afin de vivre l'euphorie extraordinaire qui caractérisait Expo 67. Des gens de toutes les régions du pays sont venus à Montréal pour célébrer le 100e anniversaire de notre Confédération. C'était une fête pour tous les Canadiens. L'événement avait lieu à Montréal, mais tout le pays participait aux célébrations.

Honorables sénateurs, c'est pour nous tous l'occasion de fêter notre 150e anniversaire et de le fêter à Edmonton, qui est une ville merveilleuse. Je suis atterré que le premier ministre et son gouvernement aient tourné le dos au Nord de l'Alberta.

Très franchement, je sais ce que je dirai aux gens que je rencontrerai un peu partout au pays lors de la prochaine campagne d'un point de vue politique. Je leur dirai : « Ne vous donnez pas la peine de voter pour les conservateurs parce que vous n'obtiendrez rien de toute façon. » À Edmonton, ils ont tous voté pour les conservateurs — à l'exception d'une élue néo-démocrate —, et on les traite de cette manière. Vingt-sept députés sur 28 sont conservateurs et ils font cela aux Albertains. Ils devraient avoir honte. Les Albertains méritent mieux.

Où est passé notre bon ami, le sénateur Bert Brown? Défend-il la candidature d'Edmonton pour l'Exposition de 2017? Les habitants de l'Alberta l'ont « élu » pour qu'il les représente ici, dans cette enceinte. Et voilà pour le sénateur élu de l'Alberta. Je ne le vois pas en train de défendre la candidature d'Edmonton pour l'Exposition de 2017 aux côtés des citoyens de cette ville.

(1900)

Honorables sénateurs, les Albertains sont canadiens. Les habitants du Nord de l'Alberta sont canadiens. Les habitants de la ville d'Edmonton sont canadiens. En tant que Canadiens, nous devons nous montrer solidaires et dire que la candidature d'Edmonton est une bonne idée. Le gouvernement devrait se rallier à nous et respecter et soutenir les citoyens du Nord de l'Alberta.

(Sur la motion du sénateur Peterson, le débat est ajourné.)

Le racisme au Canada

Interpellation—Report du débat

L'ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur l'interpellation de l'honorable sénateur Oliver, attirant l'attention du Sénat sur l'état du pluralisme, de la diversité et du racisme au Canada et, en particulier, sur comment nous pouvons développer de nouveaux outils adaptés au 21e siècle pour lutter contre la haine et le racisme, réduire le nombre de crimes haineux et accroître la tolérance au Canada en matière de race et de religion.

L'honorable A. Raynell Andreychuk : Honorables sénateurs, j'interviens pour dire que je parlerai de cette question, mais le sénateur Oliver a indiqué que des sénateurs d'en face s'y intéressent. Petite précision : les sénateurs peuvent prendre la parole à n'importe quel moment. Je serais ravie de céder ma place et je suis certaine que le débat sera reporté à mon nom.

(Le débat est reporté.)

La réforme parlementaire

Interpellation—Suite du débat

L'ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur l'interpellation de l'honorable sénateur Cowan, attirant l'attention du Sénat sur des questions concernant une réforme du Parlement réaliste et efficace.

L'honorable Jim Munson : Honorables sénateurs, cet article en est au 14e jour. Madame le sénateur Hubley m'a informé qu'elle préparait ses notes et qu'elle aimerait qu'on reprenne le compte à zéro.

(Sur la motion du sénateur Munson, au nom du sénateur Hubley, le débat est ajourné.)

[Français]

Le choix des femmes

Interpellation—Suite du débat

L'ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur l'interpellation de l'honorable sénateur Poy, attirant l'attention du Sénat sur les choix dont disposent les femmes dans tous les aspects de leur vie.

L'honorable Claudette Tardif (leader adjoint de l'opposition) : Honorables sénateurs, le sénateur Pépin m'a demandé que cette interpellation demeure ajournée à son nom. Je propose donc l'ajournement au nom du sénateur Pépin.

Son Honneur le Président intérimaire : Est-ce d'accord, honorables sénateurs?

Des voix : D'accord.

(Sur la motion du sénateur Tardif, au nom du sénateur Pépin, le débat est ajourné.)

[Traduction]

Les Jeux olympiques d'hiver de 2010

Interpellation—Fin du débat

L'ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur l'interpellation de l'honorable sénateur Raine, attirant l'attention du Sénat sur la réussite des Jeux olympiques d'hiver 2010 tenus à Vancouver, Richmond et Whistler du 12 au 28 février, en particulier sur la façon dont la performance des athlètes canadiens aux Jeux olympiques et paralympiques peut inspirer et motiver les Canadiens et surtout les enfants à améliorer leur condition physique et leur santé.

L'honorable Joan Fraser : Honorables sénateurs, j'ai déclaré, il y a 15 jours de séance, que j'avais dit au sénateur Raine que je n'avais pas l'intention de prendre la parole sur cette interpellation. Je ne me sens pas qualifiée pour le faire, même si je l'admire de l'avoir soulevée. J'ai dit que si l'un des sénateurs souhaite prendre la parole à ce sujet, je serais ravie de lui céder la parole. Or, personne ne me l'a demandé. Par conséquent, est-ce que le Sénat souhaite que j'ajourne, encore une fois, le débat à mon nom?

Non.

(Le débat est terminé.)

Les technologies du développement durable

Interpellation—Ajournement du débat

L'honorable Grant Mitchell, ayant donné avis le 21 octobre 2010 :

Qu'il attirera l'attention du Sénat sur l'importance de Technologies du développement durable Canada.

— Honorables sénateurs, à l'intention de ceux qui ne sont pas ici depuis longtemps, je vais revenir sur quelque chose qui avait fait l'actualité pour toutes les bonnes raisons, mais qui risque de tourner au vinaigre si le gouvernement ne prend pas bientôt des mesures concrètes et, je dirais, relativement simples.

Je veux parler aujourd'hui de l'organisme Technologies du développement durable du Canada, fondé en 2002 par le gouvernement libéral comme outil d'intervention permettant de créer, grâce à des investissements judicieux et soigneusement analysés dans les initiatives technologiques vertes du Canada, des répercussions économiques et environnementales intéressantes pour les Canadiens. Depuis huit ans, il a favorisé le développement et la démonstration de toute une variété de solutions technologiques dans divers domaines, comme la qualité de l'air, de l'eau et du sol et, vous l'aurez bien sûr deviné, les changements climatiques.

Technologies du développement durable du Canada mise pour ce faire sur la conclusion de partenariats innovateurs et la mise en œuvre d'une infrastructure technologique du développement durable, qui a d'ailleurs acquis une réputation des plus enviables de par le monde, notamment grâce aux analystes spécialisés en technologies et aux analystes en investissements, à qui l'on doit le bilan plus que reluisant des dernières années. À partir de maintenant, je vais utiliser le sigle TDDC.

TDDC est le proverbial chaînon qui manque bien souvent dans le processus qui permet de transformer une idée innovatrice en un produit ou un service commercialement viable. Entre la recherche et la commercialisation, la chaîne de l'innovation compte de nombreux chaînons. On croit souvent que l'évolution d'un produit se résume à ces deux étapes, mais en réalité, il y en a beaucoup d'autres. Le développement et la démonstration en font partie. Or, traditionnellement, ces deux étapes sont peu financées, mais c'est là qu'entre en scène TDDC, dont le mandat consiste à combler cette lacune et à prendre, souvent littéralement, les technologies en laboratoire et à trouver, directement ou indirectement, les ressources qui permettront de développer les prototypes grandeur nature qui attireront ensuite les autres sources de financement et de soutien nécessaires à la création d'un produit ou d'un processus commercialement viable.

Jusqu'à maintenant, les résultats sont probants. En huit ans, TDDC a reçu 550 millions de dollars du gouvernement fédéral. La majeure partie de ces fonds ont été versés par l'ancien gouvernement libéral. À ce jour, plus de 500 millions de dollars ont été réinvestis dans 195 projets. Depuis, ces projets ont réussi à générer environ l'équivalent du triple en fonds de démarrage du privé. Au total, on parle de projets commerciaux d'une valeur de 17,7 milliards de dollars et de milliers d'emplois. Je tiens à souligner que cet argent a été investi aux quatre coins du pays, ce qui veut dire que des emplois ont été créés d'un océan à l'autre.

(1910)

TDDC agit ainsi sans faire preuve d'interventionnisme dans le sens classique ou plutôt négatif du terme. TDDC a été très soucieux de développer son modèle d'investissement en collaboration avec ses partenaires des secteurs privé, universitaire et public. Comme je l'ai mentionné plus tôt, il exerce un effet de levier énorme favorable aux sociétés qu'il finance dans les marchés des actions du secteur privé. En fait, de nombreuses analyses révèlent que les sociétés financées par TDCC reçoivent beaucoup plus de fonds du secteur privé que les sociétés qui ne le sont pas.

Cela est attribuable en partie au fait que les marchés de capitaux du secteur privé ont énormément confiance dans la capacité de TDDC de choisir des gagnants. À défaut de ne choisir que des gagnants, il choisit au moins de très bonnes technologies et des sociétés qui sont promises à une grande réussite. Dans un sens, TDDC n'a pas à parler de son propre succès. Il est démontré par le secteur privé, qui suit son exemple en investissant dans ces 195 sociétés.

Permettez-moi de parler de deux compagnies albertaines dont les projets tombent à point nommé, compte tenu des débats en cours au sujet des changements climatiques et des sables bitumineux. Titanium Corporation est une société albertaine spécialisée dans l'extraction de minéraux lourds, surtout du zircon — le sénateur Day, qui est ingénieur, sait très certainement ce que c'est — et du bitume, des bassins de résidus. C'est un problème omniprésent dans les médias et dans l'environnement en ce moment même.

Titanium Corporation est en train de mettre au point une technologie qui permettra de résoudre ce problème beaucoup plus rapidement et de façon très économique, en réduisant la quantité d'eau nécessaire dans les bassins de résidus. Il s'agit d'un projet financé par TDDC, qui produit des résultats concrets et qui permettra de régler un problème immense dans ma province, l'Alberta.

Quantiam Technologies Inc., une autre compagnie albertaine, a mis au point un revêtement pour les tubes-foyers utilisés pour produire du plastique à partir d'oléfines, un des produits pétrochimiques les plus énergivores à fabriquer. Ce revêtement permet de prolonger la durée de vie des tubes-foyers et d'abaisser les températures nécessaires pour provoquer des réactions chimiques, ce qui signifie que le four est plus efficace, utilise moins de combustible, coûte moins cher et, par conséquent, réduit les émissions de gaz à effet de serre. L'application est particulièrement flexible, car cette technologie peut être installée dans des fours existants. On estime qu'à l'échelle mondiale, le marché visé par cette technologie est énorme et pourrait représenter jusqu'à 1 milliard de dollars.

J'attire l'attention des sénateurs, surtout ceux du côté du gouvernement, sur l'organisme TDDC, qui a fait de l'excellent travail dans un domaine très important et qui a besoin du soutien du marché des capitaux. TDDC s'est distingué à un point tel qu'on ne peut que souhaiter que chaque organisme gouvernemental en fasse autant, mais l'organisme a fait bien davantage que se distinguer. Dans le secteur privé, on le considère comme un chef de file de l'analyse des possibilités d'investissement qui existent dans le secteur de la haute technologie.

TDDC, c'est vraiment un atout pour le Canada. C'est un gain pour l'économie du Canada, pour les gens qui ont pu obtenir un emploi grâce à l'organisme. En outre, son potentiel d'avenir est immense. Rien ne justifierait que l'organisme réduise ses efforts, rien sauf le fait qu'il n'a pas reçu d'autre financement du gouvernement.

Je soulève tout simplement cette question pour inciter les sénateurs, surtout du côté du gouvernement, à aller voir le premier ministre, le ministre de l'Industrie et le ministre des Finances pour faire en sorte que TDDC reçoive des fonds afin qu'il ne s'ajoute pas aux victimes de l'incapacité du gouvernement de gérer à la fois l'économie et le régime fiscal du Canada.

(Sur la motion du sénateur Day, le débat est ajourné.)

Le Sénat

Motion tendant à instituer la Journée des droits de la personne le 10 décembre de chaque année—Ajournement du débat

L'honorable Mobina S. B. Jaffer, conformément à l'avis du 7 décembre 2010, propose :

Que le Sénat du Canada reconnaisse, chaque année, le 10 décembre comme étant Journée des droits de la personne, tel qu'établie par l'Assemblée générale des Nations Unies le 4 décembre 1950.

— Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd'hui pour vous inciter à appuyer la motion invitant le Sénat à instituer, le 10 décembre de chaque année, la Journée des droits de la personne, telle que l'Assemblée générale des Nations Unies l'a établie le 4 décembre 1950.

Honorables sénateurs, voilà 60 ans que le 10 décembre est reconnu comme la Journée des droits de l'homme par la communauté internationale. La date marque le jour où la Déclaration universelle des droits de l'homme a été établie, il y a de cela 62 ans, soit en 1948. Cette journée de reconnaissance et la déclaration étaient le fruit des efforts d'un certain nombre de visionnaires, dont Eleanor Roosevelt, René Cassin, P.C. Chang, Charles Malik et le Canadien John Humphrey. Ces personnes, ainsi que bien d'autres, avaient été témoins de la destruction et de la souffrance que la Seconde Guerre mondiale et des conflits antérieurs avaient causées dans le monde et voulaient créer un document cadre qui empêcherait que des catastrophes semblables ne se répètent.

La déclaration énonce 30 principes fondamentaux qui confèrent des droits indéniables à tous les êtres humains pour la seule raison qu'ils sont des êtres humains. Il n'y a aucune discrimination. Personne ne fait exception. Comme le proclame le préambule de la déclaration, chacun est digne de ces droits égaux et indéniables, quelle que soit sa nationalité, sa langue ou sa religion. Ces droits s'appliquent à tous. Ils sont universels.

Le 10 décembre de cette année, comme tous les ans depuis 60 ans, des gens de tous les horizons se rassembleront pour célébrer la Déclaration universelle des droits de l'homme et tous les progrès qu'elle a permis de réaliser. En effet, on a accompli beaucoup de progrès depuis sa création. Toutefois, notre monde est encore témoin de bien des abus et j'aimerais souligner deux cas précis.

Premièrement, il y a le cas de Bu Dongwei. En juillet 2008, il a été libéré d'un camp de travail en Chine où il purgeait une peine de 30 mois en raison de ses activités comme membre du mouvement spirituel Falun Gong. Bu Dongwei travaillait à Beijing pour la Fondation pour l'Asie, un organisme américain, quand la police l'a arrêté le 19 mai 2006. Il a été accusé de s'opposer à la mise en œuvre de lois nationales et de perturber l'ordre social. La police a prétendu avoir découvert 80 ouvrages du Falun Gong chez lui, mais sa famille affirme qu'il n'y avait pas plus de huit livres du Falun Gong dans la maison lors de l'arrestation de Bu Dongwei.

En tant que punition, Bu Dongwei a été placé dans un « camp de rééducation par le travail » en Chine. Toutefois, c'est à cause de l'appui continu des défenseurs des droits de la personne partout dans le monde, qui ont demandé sa libération, qu'il a été relâché quatre mois plus tôt que prévu.

Deuxièmement, il y a le cas de Birtukan Mideksa, chef du Parti de l'unité pour la démocratie et la justice de l'Éthiopie. Birtukan Mideksa a été arrêtée pour trahison à la suite des élections éthiopiennes de 2005. Après avoir fait des allégations de fraude électorale, Birtukan Mideksa, à l'instar d'autres parlementaires et politiciens de l'opposition, a été accusée de trahison, jugée et condamnée à une peine d'emprisonnement à perpétuité. Après presque 18 mois en détention, Birtukan Mideksa a obtenu une réhabilitation et a été libérée par le gouvernement après avoir négocié une entente et signé des lettres d'excuses.

En novembre 2008, Birtukan Mideksa a parlé du processus qui avait mené à sa réhabilitation lors d'une réunion publique en Suède. À son retour à Addis-Abeba, le gouvernement a demandé qu'elle se rétracte, mais elle ne l'a pas fait. Le 28 décembre 2008, elle a été arrêtée de nouveau à Addis-Abeba. Peu de temps après, le ministère de la Justice a révoqué la réhabilitation et a rétabli sa peine d'emprisonnement à perpétuité. Cependant, grâce aux pressions internationales exercées par les groupes de défense des droits de la personne et les activistes qui respectent ses droits humains, Birtukan Mideksa a récemment été libérée après avoir purgé 21 mois d'une peine d'emprisonnement à perpétuité.

(1920)

Honorables sénateurs, quand la Déclaration universelle des droits de l'homme a été invoquée pour promouvoir les droits à la liberté d'expression et aux manifestations pacifiques, comme dans les exemples cités, ou le droit à un logement adéquat en Afrique du Sud, ou encore le droit à l'accès égal au marché du travail en Inde, elle a servi de catalyseur pour permettre à tous les peuples de jouir de la liberté, de l'égalité et de la justice.

Nous avons raison de célébrer les progrès réalisés en vue de mettre un terme aux violations des droits de l'homme, mais nous savons tous qu'il y a encore bien du travail à faire. Depuis la proclamation de la Déclaration universelle des droits de l'homme, le monde a été la scène de plusieurs guerres et de nombreux génocides qui ont fait d'innombrables victimes; les taux de pauvreté ont augmenté, non seulement dans le tiers monde, mais partout dans le monde; l'accès facile à la nourriture et à l'eau potable est encore un problème dans certaines régions; un grand nombre de jeunes filles n'ont pas encore accès à une éducation adéquate; les problèmes de mortalité des mères n'ont pas encore été résolus.

J'ai énuméré quelques-uns des problèmes auxquels le monde est confronté. Chacun de ces problèmes correspond à une violation des droits humains pour un individu. Cette personne est quelqu'un à qui on ne garantit pas la jouissance des principes fondamentaux qui lui a été promise. C'est inacceptable.

Je suis persuadée que tous les sénateurs sont au courant de la libération récente d'Aung San Suu Kyi au Myanmar. Cependant, il y a un fait moins largement connu, et c'est qu'un grand nombre de ses partisans à l'intérieur du pays sont encore punis.

Su Su Nway, une activiste membre de la Ligue nationale pour la démocratie, purge actuellement une peine de huit ans et demi pour avoir participé à des manifestations politiques en 2007. Plus précisément, Su Su Nway a participé à un rassemblement pour contester les fortes augmentations du prix du carburant. Elle a échappé de peu à l'arrestation et elle est allée se cacher.

Le 13 septembre 2007, alors qu'elle brandissait une bannière antigouvernementale près de l'hôtel Yangon, où était logé le rapporteur spécial de l'ONU sur les droits de l'homme, les autorités l'ont arrêtée. Un an plus tard, elle a été trouvée coupable de trahison et accusée d'avoir « troublé la paix », une accusation souvent utilisée pour criminaliser la dissension politique pacifique.

Su Su Nway purge maintenant une peine de huit ans et demi dans la prison de Hkamti, où les conditions sont déplorables. Elle ne reçoit pas une nourriture suffisante ni assez d'eau potable, et elle n'a pas droit non plus à des soins médicaux adéquats. Un journaliste a fait savoir en juillet dernier qu'elle est atteinte de la malaria et de la goutte. On écrit aussi qu'on lui impose des périodes d'isolement cellulaire.

Le 6 décembre 2006, l'organisation canadienne Droits et Démocratie a honoré Su Su Nway en lui remettant le prix John-Humphrey pour la liberté « en raison de ses efforts inspirants pour exiger des comptes de la junte militaire qui impose le travail forcé ».

Su Su Nway est une prisonnière de conscience. Elle est détenue uniquement parce qu'elle a exprimé pacifiquement ses convictions, droit qui lui est garanti par la Déclaration universelle des droits de l'homme. Elle ne devrait pas être châtiée.

Honorables sénateurs, nous avons beaucoup entendu parler dans cette enceinte du lauréat du prix Nobel de la paix de cette année, Liu Xiaobo. Depuis des années, M. Liu est un critique en vue du gouvernement chinois. Il exige constamment la protection des droits de la personne, la responsabilisation politique et la démocratisation de son pays, ce qui lui a valu d'être châtié à plusieurs reprises.

Depuis décembre 2008, Liu Xiaobo est détenu parce qu'il a été le cosignataire d'un document intitulé Charte 08, proposition qui prévoit la réforme politique et la démocratisation de la Chine.

Liu Xiaobo purge une peine de 11 ans d'emprisonnement. Nous avons tous entendu les interventions claires et éloquentes des sénateurs Di Nino et Munson décrivant les souffrances de M. Liu.

Vendredi, le prix Nobel de la paix sera présenté à M. Liu pour son travail en Chine, mais il ne sera pas là pour recevoir ce prix. Il sera en prison. On espérait que sa femme, elle-même militante, pourrait peut-être accepter le prix en son nom. Toutefois, depuis l'annonce que son mari a reçu le prix, elle est gardée illégalement en résidence surveillée.

Cette année, à la cérémonie de remise du prix Nobel de la paix, un siège vide symbolisera la présence du plus grand lauréat de cette année dans le domaine des droits de la personne. Honorables sénateurs, vous direz certainement avec moi que nous serons par l'esprit avec M. Liu Xiaobo et sa femme.

Honorables sénateurs, je puis vous garantir que, sans le soutien des militants canadiens des droits de la personne, ma famille et moi n'aurions jamais pu quitter l'Ouganda. Nous sommes arrivés au Canada grâce au travail de ces militants. Je crois que le travail des militants des droits de la personne est efficace, que les protestations adressées aux gouvernements donnent des résultats et qu'il faut poursuivre ce travail.

Honorables sénateurs, il est vrai que le cadre actuel des droits de la personne comporte de nombreuses lacunes. Nous devons le perfectionner. Mais je crois que ce que nous avons en ce moment vaut mieux que rien du tout.

La Déclaration universelle des droits de l'homme a permis d'accomplir de grandes choses jusqu'ici. Par contre, comme je l'ai signalé, nous avons encore beaucoup de chemin à faire. Pour atteindre nos objectifs, il nous faut compter sur la participation de tous les Canadiens.

Partout dans le monde, des gouvernements, des organismes et des personnes soulignent la Journée des droits de l'homme. Ils ont pris les mesures nécessaires dans cet important dossier. Honorables sénateurs, je vous demande votre appui. Notre pays est un champion des droits de la personne à l'échelle de la planète. Je vous demande maintenant votre appui pour que le 10 décembre devienne la Journée des droits de l'homme.

L'honorable Consiglio Di Nino : Honorables sénateurs, je remercie le sénateur Jaffer de sa très bonne présentation. Je puis vous dire qu'en principe, j'appuie sa résolution, mais j'aimerais faire quelques commentaires et m'arrêter sur certains de ses propos. Je sais que d'autres collègues ont aussi indiqué qu'ils souhaitaient intervenir. Je propose donc l'ajournement pour le temps de parole qu'il me reste.

(Sur la motion du sénateur Di Nino, le débat est ajourné.)

[Français]

L'ajournement

Permission ayant été accordée de revenir aux avis de motion du gouvernement :

L'honorable Gerald J. Comeau (leader adjoint du gouvernement) : Honorables sénateurs, avec la permission du Sénat et nonobstant l'article 58(1)h) du Règlement, je propose :

Que, lorsque le Sénat s'ajournera aujourd'hui, il demeure ajourné jusqu'au lundi 13 décembre 2010, à 18 heures, et que l'application de l'article 13(1) du Règlement soit suspendue à cet égard.

Son Honneur le Président : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?

(La motion est adoptée.)

(Le Sénat s'ajourne au lundi 13 décembre 2010, à 18 heures.)


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