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Débats du Sénat (Hansard)

1re Session, 42e Législature
Volume 150, Numéro 184

Le mardi 27 février 2018
L’honorable George J. Furey, Président


LE SÉNAT

Le mardi 27 février 2018

La séance est ouverte à 14 heures, le Président étant au fauteuil.

Prière.

[Traduction]

Les travaux du Sénat

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, sachez qu’il y a eu des consultations et qu’il a été convenu d’admettre un photographe sur le parquet du Sénat pour qu’il puisse photographier la présentation du nouveau sénateur.

Est-ce d’accord, honorables sénateurs?

Des voix : D’accord.

(1410)

[Français]

Nouveau sénateur

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, j’ai l’honneur d’informer le Sénat que le greffier a reçu du registraire général du Canada le certificat établissant que Robert Black a été appelé au Sénat.

Présentation

Son Honneur le Président informe le Sénat que le sénateur attend à la porte pour être présenté.

L’honorable sénateur suivant est présenté, puis remet les brefs de Sa Majesté l’appelant au Sénat. Le sénateur, en présence du greffier, prête le serment prescrit et prend son siège.

L’honorable Robert (Rob) Black, de Centre Wellington, en Ontario, présenté par l’honorable Peter Harder, C.P., et l’honorable Frances Lankin, C.P.

Son Honneur le Président informe le Sénat que l’honorable sénateur susmentionné a fait et signé la déclaration des qualifications exigées prescrite par la Loi constitutionnelle de 1867, en présence du greffier du Sénat, commissaire chargé de recevoir et d’attester cette déclaration.

[Traduction]

L’honorable Peter Harder (représentant du gouvernement au Sénat) : J’ai le plaisir, à titre de représentant du gouvernement au Sénat, de souhaiter la bienvenue à notre nouveau collègue, l’honorable Robert (Rob) Black, qui représentera la province d’où il vient, l’Ontario.

[Français]

Le sénateur Black s’est dévoué au service public à titre de fonctionnaire au sein du gouvernement provincial, de politicien au niveau municipal, et de leader et bénévole dans de nombreux organismes communautaires.

[Traduction]

Les racines du sénateur Black sont bien ancrées dans la riche région agricole du sud-ouest de l’Ontario. Pour ceux qui l’ignoreraient, c’est près de Niagara et presque aussi agréable comme région, mais pas tout à fait.

Le sénateur Black a consacré sa carrière à faire en sorte que les enjeux propres aux régions rurales reçoivent l’attention qu’ils méritent. Il a notamment assumé différentes fonctions au sein du conseil d’administration et de l’équipe de direction de l'Ontario Soybean Growers et du Centre for Rural Leadership.

Je tiens à souligner tout particulièrement le leadership que Rob Black a exercé durant des dizaines d’années au sein des clubs 4-H. Cet organisme, qui est presque aussi vieux que le Sénat du Canada, défend les causes chères à la population des régions rurales, en plus de favoriser le leadership chez les enfants et les jeunes.

[Français]

Souhaitons la bienvenue au sénateur Black, qui se présente ici avec une riche expérience dans le domaine de l’engagement communautaire, provincial et national.

[Traduction]

Sénateur Black, je crois que vous constaterez que le Sénat est un terreau fertile pour les nouvelles idées et qu’il offre toutes les occasions dont on puisse rêver pour les porter à maturité et les faire fructifier. Je n’irai pas plus loin dans les allusions à ce que vous pourrez trouver d’autre en ces murs.

Votre leadership est le bienvenu et il sera apprécié à sa juste valeur. Soyez le bienvenu au Sénat du Canada.

Des voix : Bravo!

L’honorable Larry W. Smith (leader de l’opposition) : Honorables sénateurs, j’aimerais moi aussi me joindre à mes collègues pour souhaiter la bienvenue au plus récent membre de notre assemblée, l’honorable Robert (Rob) Black.

Soit dit en passant, sénateur, c’est merveilleux de voir les membres de votre famille et vos amis. Vous avez beaucoup de parents et d’amis. Nous souhaitons donc la bienvenue au Sénat du Canada au nouveau sénateur, aux membres de sa famille et à ses amis.

Je souhaite la meilleure des chances au sénateur Black alors qu’il commence à assumer ses nouvelles responsabilités ici aujourd’hui. Comme toujours, nous sommes impatients de faire la connaissance d’un nouveau collègue et de sensibiliser le sénateur Black au rôle important que jouent les sénateurs conservateurs et tous les autres sénateurs au sein du gouvernement du Canada.

Comme nous l’avons appris, le sénateur Black fera profiter le Sénat de sa longue expérience professionnelle dans les domaines de l’agriculture et des affaires rurales. Le sénateur Harder a parlé des 4-H, un mouvement qui est présent dans plus de 50 pays. Créée il y a près de 100 ans, durant les années 1920, l’organisation visait à l’origine à assurer le développement des jeunes dans le secteur de l’agriculture. En anglais, le mouvement 4-H signifie « head » — la tête —, « heart » — le cœur —, « hands » — les mains — et « health » — la santé. Bien entendu, je félicite le sénateur Black de son implication dans ce mouvement. Il ne fait aucun doute que cette expertise lui sera utile au cours des prochaines années, car les enjeux touchant l’agriculture font souvent partie du discours politique, dans le cadre notamment du commerce mondial ou national, de la santé, de la sécurité et de bien d’autres questions.

C’est un honneur incroyable d’être nommé sénateur. Je suis toujours sensible à cet honneur après sept ans au Sénat, et j’espère que c’est aussi le cas pour tous mes collègues.

Sénateur Black, bienvenue au Sénat. Les sénateurs d’allégeance conservatrice et tous les autres sénateurs vous présentent leurs meilleurs vœux, à vous et à votre famille, alors que vous entamez un nouveau chapitre de votre vie ici, au Sénat du Canada.

Des voix : Bravo!

[Français]

L’honorable Yuen Pau Woo : Chers collègues, c’est pour moi un honneur et un privilège, au nom du Groupe des sénateurs indépendants, d’accueillir aujourd’hui au Sénat le sénateur Robert Black.

(1420)

[Traduction]

Le sénateur Robert Black est seulement le cinquième sénateur à être originaire du comté de Wellington, dans le sud-ouest de l’Ontario, et le premier depuis 1951. Il est un résidant de longue date de ce comté. Comme nous l’avons appris ce matin seulement, sa famille est installée dans la région depuis le début des années 1800.

À l’heure actuelle, le sénateur Black est directeur général du Rural Ontario Institute, un groupe qui contribue au développement de leaders dans les collectivités rurales et les localités du Nord de l’Ontario. Il est également conseiller pour le comté de Wellington depuis 2014. Il est président du comité de l’information, du patrimoine et des aînés du comté et membre du comité des services sociaux. Il a occupé différents postes au ministère de l’Agriculture, de l’Alimentation et des Affaires rurales de l’Ontario.

Comme on vous l’a déjà mentionné, il a été directeur exécutif — le premier, en fait — des 4-H de l’Ontario. Il a également été directeur général de l’Ontario Soybean Growers et directeur exécutif du Centre for Rural Leadership.

Ses intérêts étant variés et ses racines dans la collectivité bien ancrées, le sénateur Black a été actif au sein d’organismes comme la Wellington County Historical Society, le Fergus Scottish Festival and Highland Games et la Fondation Trillium de l’Ontario. Ce n’est probablement qu’une question de temps avant qu’il y ait une compétition de lancer de tronc sur la pelouse avant de l’édifice du Centre.

Nous nous réjouissons à la perspective de travailler avec notre nouveau collègue et de faire appel à sa vaste expérience et à son bagage de connaissances.

Sénateur Black, soyez le bienvenu à la Chambre haute du Canada.

Des voix : Bravo!

L’honorable Joseph A. Day (leader des libéraux au Sénat) : Chers collègues, je suis ravi de me joindre à vous pour souhaiter la bienvenue à un autre nouveau sénateur, le sénateur Robert (Rob) Black, de l’Ontario.

Monsieur le sénateur, vous vous joignez à nous à un moment fort intéressant. À l’heure actuelle, en plus de s’acquitter de son rôle traditionnel de Chambre de second examen objectif, le Sénat traverse une période de renouveau et de modernisation. Vous-même avez été désigné dans le cadre d’un nouveau processus de nomination, qui s’inscrit dans ce mouvement de changement.

Vous n’êtes pas étranger à la politique, puisque vous avez servi à titre de conseiller du secteur no 5 au sein du conseil du comté de Wellington, mais vous constaterez vraisemblablement qu’une certaine période d’adaptation à la réalité du Sénat et d’apprentissage s’impose. Je vous invite à prendre le temps nécessaire pour découvrir la Chambre rouge et faire connaissance avec vos nouveaux collègues. Je vous assure que nous nous ferons un plaisir de vous donner des conseils amicaux et de vous encourager au fur et à mesure que vous vous adapterez à vos nouvelles fonctions.

Pour notre part, nous attendons votre contribution avec impatience, particulièrement compte tenu de votre expérience dans le milieu agricole. Le Comité sénatorial permanent de l’agriculture et des forêts étudie diverses questions importantes, notamment les répercussions du changement climatique sur l’agriculture, l’accès aux marchés, la tuberculose bovine et mon enjeu de prédilection, l’incontournable question de la santé des abeilles pour la production alimentaire durable.

Il va sans dire que le comité pourrait bénéficier de votre sagesse et de votre expérience.

Je suis persuadé que, grâce à votre arrivée dans cette Chambre, les Ontariens et les Canadiens de toutes les régions rurales auront désormais une voix très forte au Parlement.

Sénateur Black, au nom de mes collègues libéraux indépendants du Sénat ― un groupe de petite taille, mais de grande influence dans cette enceinte ―, je vous souhaite la bienvenue au Sénat, et j’envisage avec enthousiasme la perspective de travailler avec vous.

Des voix : Bravo!


DÉCLARATIONS DE SÉNATEURS

Le prix Tuck Walters

Les lauréats de 2018

L’honorable Norman E. Doyle : Honorables sénateurs, Wayne Ledwell et Julie Huntington, du groupe Whale Release and Strandings ont récemment reçu à St. John’s, à Terre-Neuve, le prix Tuck Walters pour 2018. M. Ledwell et Mme Huntington se consacrent depuis longtemps à la protection de la faune de Terre-Neuve-et-Labrador, et à la sensibilisation de la population à l’histoire naturelle et à l’appréciation de la nature. Le prix Tuck Walters a été créé pour honorer le travail d’avant-garde de M. Leslie Tuck, premier agent terre-neuvien du Service fédéral de la faune, après la Confédération, et du capitaine Harry Walters, directeur de la Newfoundland Rangers Force.

Wayne Ledwell et Julie Huntington ont été le premier couple à recevoir cette reconnaissance prestigieuse dans l’histoire du prix. Le programme de sauvetage des baleines prises au piège a été lancé en 1979 sous le leadership novateur de M. Jon Lien, de l’Université Memorial. La technique et l’approche fondamentales étaient fermement fondées sur le principe selon lequel les pêcheurs et leurs collectivités doivent toujours participer pleinement à chaque étape du processus de sauvetage.

De garde 365 jours par année à leur résidence de St. Philips, dans la baie Conception, on estime que, au cours des 30 dernières années, Wayne et Julie ont pris part, directement ou indirectement, au sauvetage de plus de 400 baleines dans toutes les zones côtières de la province.

Un récent article paru dans le Telegram reprenait les propos de M. Bill Montevecchi, président du comité du prix Tuck Walters, qui disait qu’ils essaient de choisir des lauréats dont les travaux ont un effet à long terme, et que Huntington et Ledwell ont défendu le sauvetage de baleines à travers le monde :

Ils ont réussi à maintenir en vie beaucoup de baleines qui, autrement, seraient mortes. Certaines d’entre elles vivent plus longtemps que nous. Ainsi, on pense […] aux vies qu’ils ont sauvées […] Dans cette optique, il s’agit d’un prix intemporel. Chaque fois qu’ils sauvent une baleine — et ils en ont sauvé beaucoup —, les effets positifs se poursuivent pendant des décennies […] [sur le plan] de l’intérêt généré, de la biologie, du tourisme, et donc, les effets sont véritablement assez profonds.

Le Telegram a également cité Doug Ballam, président de Nature NL, qui a dit que les travaux du couple surviennent à un moment périlleux pour de nombreuses espèces de baleine, en particulier la baleine noire de l’Atlantique Nord. Il a dit qu’Huntington et Ledwell :

[…] sont vraiment des héros de la conservation, non seulement pour Terre­Neuve, ou même pour le Canada, mais aussi pour l’Amérique du Nord et le monde.

Félicitations et merci pour vos infatigables efforts, Wayne Ledwell et Julie Huntington.

Le Mois de l’histoire des Noirs

Les domestiques noires

L’honorable Wanda Elaine Thomas Bernard : Honorables sénateurs, je vais souligner aujourd’hui le Mois de l’histoire des Noirs. Étant donné que le thème cette année est « Femmes noires canadiennes », j’aimerais partager avec vous des histoires de force, de courage et de vision vécues par un segment invisible de notre société, les domestiques noires. Je suis l’héritière de ces femmes.

Dans la foulée de la Seconde Guerre mondiale, les femmes de la classe privilégiée ont été en mesure de rentrer sur le marché du travail en raison de l’existence des domestiques noirs. Je voudrais attirer votre attention sur deux catégories de femmes en particulier : les femmes des Caraïbes d’origine africaine ayant émigré au Canada dans le cadre du programme de personnel domestique et les Néo-Écossaises d’origine africaine qui étaient domestiques ou femmes de ménage.

C’est en 1910-1911 que le premier programme de personnel domestique des Caraïbes a été mis en place, assurant ainsi l’arrivée au Canada de 100 Guadeloupéennes sans leurs enfants, pour répondre à la demande en main-d’œuvre bon marché au Québec. Au fil du temps, de plus en plus de femmes ont été recrutées pour venir au pays effectuer des tâches laborieuses, dans des conditions de travail déplorables ̶  avec des salaires insignifiants et de longues heures de travail ̶ , où elles étaient traitées avec peu de considération et de manière irrespectueuse.

En 1911, les chambres de commerce occidentales ont fait pression sur le gouvernement fédéral pour empêcher les domestiques « de couleur » de s’installer au Canada. Les domestiques noires étaient considérées comme quantité négligeable. Aujourd’hui, plusieurs des éminents professionnels noirs, hommes et femmes, au Canada sont les descendants de familles qui ont eu à leur tête des travailleuses domestiques noires.

(1430)

Avant les années 1960, les Néo-Écossais d’origine africaine avaient un système d’éducation séparé qui ne dépassait pas la huitième année. La plupart des familles n’avaient pas les moyens d’envoyer leurs enfants dans des écoles secondaires intégrées. Les seuls emplois disponibles aux femmes de cette communauté étaient ceux de domestiques. Elles étaient généralement payées en espèces, 5 $ par jour, et ne bénéficiaient ni d’avantages sociaux ni de protection. Elles étaient régulièrement victimes de racisme et de sexisme dans leur milieu de travail.

Domestiques le jour, beaucoup de ces femmes étaient de véritables meneuses au sein de leurs communautés le soir venu. Elles ont lutté pour des changements sociaux et des réformes des droits de la personne dont tous les Néo-Écossais ont bénéficié.

Ma mère, la regrettée Marguerite Thomas Parent, fut l’une de ces travailleuses domestiques. Il y en a beaucoup d’autres. Ma mère nous a appris l’importance du travail acharné et montré comment nous battre pour nos droits.

Honorables sénateurs, aujourd’hui, je remercie les incroyables domestiques noires, des femmes fortes, courageuses et visionnaires. Nous devons beaucoup aux domestiques noires qui ont contribué à transformer leurs communautés. Je suis qui je suis grâce à elles.

Visiteur à la tribune

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, je vous signale la présence à la tribune d’Alice Nderitu, lauréate du prix Jack P. Blaney de 2018. Elle est accompagnée de Grace Lee, Shauna Sylvester et Shaheen Nanji. Elles sont les invitées de l’honorable sénateur Woo.

Au nom de tous les honorables sénateurs, je vous souhaite la bienvenue au Sénat du Canada.

Des voix : Bravo!

R. c. Gerald Stanley

L’honorable David Tkachuk : Honorables sénateurs, comme vous le savez tous, Gerald Stanley a été acquitté des accusations qui pesaient contre lui relativement à la mort de Colten Boushie, un Autochtone de la Saskatchewan. M. Stanley est Blanc. Il a fait l’objet d’une enquête, a été accusé de meurtre, a été traduit en justice devant un jury composé de ses pairs et a été reconnu non coupable. La colère des amis et de la famille de M. Boushie à l’égard du verdict était palpable et compréhensible.

Peu de temps après que le verdict a été rendu, le premier ministre a fait une déclaration malheureuse. La ministre de la Justice a également fait une déclaration, qui laissait entendre que M. Stanley aurait dû être reconnu coupable.

Je ne me trouvais pas dans la salle du tribunal, mais la ministre n’y était pas non plus. Il était tout à fait inacceptable de la part de la ministre de la Justice d’agir de la sorte. Elle devrait démissionner. Elle s’est ingérée dans le processus, ce qui ne rend pas service aux amis et aux proches de MM. Boushie et Stanley.

C’est une histoire tragique. Aucun sénateur ne se trouvait dans la salle du tribunal. Les jurés, eux, s’y trouvaient. Ils ont entendu la preuve. Ils ont écouté la poursuite. Le procureur est l’un des plus expérimentés de la province. Les jurés ont écouté les arguments de l’avocat de la défense. Ils ont écouté le juge, qui est juge en chef de la Cour du Banc de la Reine de la Saskatchewan. Ils ont délibéré pendant 15 heures.

Le premier ministre et la ministre de la Justice laissent entendre que justice n’a pas été rendue, que le verdict aurait été différent si les jurés avaient tous été Autochtones ou s’il y avait eu une proportion égale d’Autochtones et de Blancs, ce qui suppose du racisme sur toute la ligne.

Il ne fait aucun doute qu’il y a du racisme partout, mais il n’y en a pas davantage en Saskatchewan qu’ailleurs. Le système de justice est conçu pour que les jurés se concentrent sur les éléments de preuve d’une cause. Je suis convaincu que c’est ce qu’ils ont fait en l’espèce.

En tant que législateurs, lorsque nous formulons des commentaires sous le coup de l’émotion en fonction de renseignements plus sommaires que ceux dont disposaient les jurés, parce que le verdict qui a été rendu n’est pas celui auquel nous nous attendions, nous minons le système. De plus, nous jetons de l’huile sur le feu au lieu de désamorcer une situation qui est déjà explosive. Lorsqu’une telle situation se produit, il faut faire preuve de maturité. Le travail des législateurs, c’est de veiller au calme lorsque les émotions se bousculent afin que la raison l’emporte. Au Canada, les jurés ne peuvent pas se défendre eux-mêmes. Ils méritent mieux.

Je voudrais vous citer les propos qu’un autre politicien a affichés sur Twitter après qu’on lui a demandé de commenter la décision :

1. Il serait irresponsable d’émettre une déclaration qui risque de modifier les perspectives dans l’éventualité d’un appel, qui me semble inévitable.

2. De plus, il existe une séparation entre le pouvoir judiciaire, le pouvoir législatif et le pouvoir exécutif au Canada. Il s’agit de systèmes parallèles et chacun devrait, dans la mesure du possible, rester dans sa propre voie. C’est important.

3. Il existe déjà un clivage. En exprimant ma pensée et en formulant mes propres observations, je ne contribuerai qu’à empirer ce clivage, sans rien accomplir, à part faire ressortir mes propres mérites.

Ce politicien, c’est Aaron Paquette. Il est conseiller municipal à Edmonton. Il est Cri et Métis. Voilà le genre de propos que nous attendions de la part du gouvernement, le genre de propos que les Canadiens méritent.

Visiteur à la tribune

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, je vous signale la présence à la tribune de Megz Reynolds. Elle est l’invitée de l’honorable sénatrice Batters.

Au nom de tous les honorables sénateurs, je vous souhaite la bienvenue au Sénat du Canada.

Des voix : Bravo!


[Français]

AFFAIRES COURANTES

L’étude sur la perspective des Canadiens au sujet d’une modernisation de la Loi sur les langues officielles

Dépôt du septième rapport du Comité des langues officielles auprès du greffier pendant l’ajournement du Sénat

L’honorable René Cormier : Honorables sénateurs, j’ai l’honneur d’informer le Sénat que, conformément aux ordres adoptés par le Sénat le 6 avril 2017 et le 15 février 2018, le Comité sénatorial permanent des langues officielles a déposé auprès du greffier du Sénat, le 16 février 2018, son septième rapport (intérimaire) intitulé La modernisation de la Loi sur les langues officielles - la perspective des jeunes Canadiens.

[Traduction]

Affaires sociales, sciences et technologie

Préavis de motion tendant à autoriser le comité à siéger en même temps que le Sénat

L’honorable Art Eggleton : Honorables sénateurs, je donne préavis que, à la prochaine séance du Sénat, je proposerai :

Que le Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie soit autorisé à se réunir le mardi 20 mars 2018, à 19 heures, même si le Sénat siège à ce moment-là, et que l’application de l’article 12-18(1) du Règlement soit suspendue à cet égard.


PÉRIODE DES QUESTIONS

Les affaires étrangères

Le voyage du premier ministre en Inde

L’honorable Larry W. Smith (leader de l’opposition) : J’ai une question pour le leader du gouvernement. Je débute par un court préambule, car il s’agit d’une question vraiment importante. Soyez indulgents à mon égard; je serai bref.

Dimanche, le Times of India a rapporté ceci :

Dans l’histoire récente de la diplomatie indienne, peu de visites ont été aussi catastrophiques que celle du premier ministre canadien Justin Trudeau.

Lorsqu’on a appris qu’un homme reconnu coupable de terrorisme avait été invité à faire partie de la délégation canadienne en Inde, le blâme a d’abord été jeté sur le haut-commissariat, puis sur un député libéral. Maintenant, plus choquant encore, c’est l’Inde elle-même qui est blâmée. En effet, Global News a révélé hier que, durant une séance d’information organisée par le cabinet du premier ministre, un employé haut placé de la fonction publique non partisane avait affirmé ce qui suit :

[…] Jaspal Atwal, le terroriste que les libéraux ont invité à Bombay, a pu être placé là par le gouvernement indien ou par des organismes de sécurité indiens ou peut-être par certaines factions au sein du gouvernement indien.

Le gouvernement du Canada confirmera-t-il ou niera-t-il ces graves allégations contre le gouvernement de l’Inde qui ont été communiquées aux médias par le conseiller à la sécurité nationale, à la demande du cabinet du premier ministre? S’il confirme ces allégations, quelles preuves le gouvernement possède-t-il pour les étayer?

L’honorable Peter Harder (représentant du gouvernement au Sénat) : Encore une fois, je remercie l’honorable sénateur de sa question. Je tiens à répéter que l’homme en question n’aurait jamais dû recevoir une invitation. Dès que cela a été porté à l’attention du gouvernement et des fonctionnaires compétents, l’invitation a été retirée et le député qui a inclus cette personne assume la pleine responsabilité de ses actes, comme l’a dit le premier ministre.

(1440)

Le sénateur Smith : Je ne suis pas certain que cela réponde nécessairement à la question posée. Quoi qu’il en soit, contrairement aux accusations graves portées contre l’Inde, CTV News nous apprenait hier que le gouvernement indien avait demandé qu’on lui communique les noms figurant sur la liste d’invités à des fins de vérification, mais qu’on lui en avait refusé l’accès.

Pourquoi le gouvernement du Canada a-t-il refusé à l’Inde l’accès à la liste d’invités? S’agissait-il d’un ordre du cabinet du premier ministre?

Le sénateur Harder : Encore une fois, je remercie le sénateur de sa question. Ce que je peux dire, c’est que, comme l’a indiqué le ministre de la Sécurité publique à l’autre endroit hier, le niveau de coopération entre les organismes de sécurité était extraordinairement élevé et conforme aux procédures en vigueur.

Le sénateur Smith : Si vous pouviez poser la question et trouver, plus précisément, qui était là, ce serait utile. Cela répondrait à la question.

Le sénateur Harder : Je tenterai certainement de m’informer, sénateur.

L’honorable David Tkachuk : Ma question s’adresse également au représentant du gouvernement au Sénat. Sénateur Harder, je sais que, après la question du sénateur Smith, vous avez entendu parler des vacances que le premier ministre a prises en Inde, et des photos de sa famille et lui dans divers costumes exotiques à diverses activités exotiques.

Lorsqu’il ne jouait pas à se costumer, le premier ministre invitait ses amis de la Colombie-Britannique et diplomates assortis à un dîner au haut-commissariat. Ce dîner a été préparé par le chef Vikram Vij, un partisan libéral qui ne s’en cache pas, jadis membre du soi-disant Comité consultatif indépendant sur les nominations au Sénat. D’ailleurs, il a peut-être appuyé la nomination de certains d’entre nous ici.

Affaires Mondiales Canada dit avoir couvert les frais d’hébergement et de voyage de M. Vij, pour qu’il contribue à l’élaboration du menu et à la préparation du repas servi à la réception du Canada. On l’a fait se déplacer pour un seul repas. On nous affirme que c’est une pratique acceptée dans les missions canadiennes d’inviter des chefs cuisiniers du Canada afin de mettre en valeur la cuisine et les produits du Canada.

Sénateur Harder, pourriez-vous nous dire combien de fois l’actuel ou l’ancien gouvernement ont fait venir un chef par avion privé durant un voyage du premier ministre afin qu’il contribue au menu et à la préparation d’un seul repas? J’aimerais aussi savoir combien a coûté le voyage de ce chef cuisinier vedette, y compris les frais d’avion et d’hôtel et d’autres charges diverses.

Le sénateur Harder : Je remercie l’honorable sénateur de sa question. Avant de répondre précisément à cette question spécifique, je tiens à assurer à tous les sénateurs que cette visite, à laquelle ont participé les plus hauts dirigeants du gouvernement et une délégation de PDG et de chefs d’entreprise du Canada, a été cruciale pour tisser des liens personnels et commerciaux et établir une relation entre les deux peuples.

Je ne parlerai pas des ententes commerciales bilatérales représentant 1 milliard de dollars qui ont été conclues, à raison de 750 millions dans un sens et 250 millions dans l’autre, mais force est d’admettre, honorables sénateurs, que nous cherchons tous à établir des échanges bilatéraux, car ceux-ci soudent des liens qui contribuent à une croissance économique continue.

Pour ce qui est du chef cuisinier dont parle le sénateur, je répète que même le Sénat du Canada a reconnu l’importance de la diplomatie culturelle. Je souligne que des travaux sont en cours sur cette question précise. En général, la culture, la promotion des talents culinaires et la diplomatie d’influence sont perçues par beaucoup de pays comme des façons importantes d’exprimer leur politique et leur participation étrangères. C’est ce dont il s’agit ici. Le haut-commissaire pour l’Inde, Nadir Patel, est à l’avant-garde en matière de diplomatie d’influence, et on me dit que l’événement a été une grande réussite.

Le sénateur Tkachuk : Sénateur Harder, pourriez-vous aussi ajouter à l’information que j’ai demandée, au sujet du chef, combien de costumes de couturier le premier ministre et sa famille ont commandés pour leur voyage en Inde, qui les a payés et combien tous les costumes et accessoires ont coûté au total?

Le sénateur Harder : Je vais m’efforcer de trouver les réponses.

Les finances

Le système de paie Phénix

L’honorable Terry M. Mercer (leader adjoint des libéraux au Sénat) : Honorables sénateurs, j’aimerais que, tous, nous considérions avec attention la question que je m’apprête à poser. Quand vous voulez acheter une nouvelle voiture, que faites-vous? Vous faites un peu de recherche, en ligne surtout, sur ce que vous voulez, comment vous voulez la payer. Si vous convoitez une voiture d’occasion, vous vérifiez l’historique de la voiture, si elle a été impliquée dans des accidents et ainsi de suite. Ce faisant, si vous découvrez qu’un véhicule a été impliqué dans un accident, l’achèterez-vous? Peut-être pas.

Je pose cette question au représentant du gouvernement au Sénat pour une raison bien précise, que je juge importante. Nous savons que l’Australie a appris à ses dépens que le système de paie Phénix avait des lacunes; pourtant, on dirait que le gouvernement, sous le premier ministre Stephen Harper, n’en savait rien. Il est quand même allé de l’avant et a octroyé un contrat à IBM pour construire notre système de paie Phénix.

Le représentant du gouvernement pourrait-il nous dire comment cela a seulement pu se produire, et si le gouvernement savait dans quoi il s’embarquait?

L’honorable Peter Harder (représentant du gouvernement au Sénat) : Je remercie le sénateur de poser cette question. Permettez-moi de dire simplement que, lorsque le gouvernement est arrivé au pouvoir, la transition vers le système Phénix était bien entamée. Malheureusement, la décision avait été prise, avant son arrivée au pouvoir, de renvoyer un grand nombre de commis au traitement de la paie du gouvernement du Canada, au motif que le nouveau système serait assez efficient et efficace pour être facilement mis en ligne.

Oui, c’est vrai qu’il y a eu quelques pépins pendant que le gouvernement cherchait à remédier à la situation. Comme elle l’a annoncé, la ministre responsable en a fait sa grande priorité. Le gouvernement du Canada y a affecté beaucoup de ressources : il a fait revenir au travail plus de 600 conseillers en rémunération, il a investi dans des moyens technologiques qui permettent d’accélérer les mesures correctives et il suit les choses de très près. La situation est inacceptable, mais elle est le résultat de mesures prises par l’ancien gouvernement, et le gouvernement actuel cherche à la corriger.

Le sénateur Mercer : Des pépins, c’est peu dire, Votre Honneur. Pour les fonctionnaires fédéraux dont la paie a été interrompue à cause du mauvais système qui a été mis en œuvre par l’ancien gouvernement, ce ne sont pas de simples pépins, mais tout un sac d’os.

Honorables sénateurs, il semble que le gouvernement ait acheté un citron. Il dépense maintenant des centaines de millions de dollars pour corriger un problème qu’il aurait dû prévoir. Une simple petite recherche sur Internet concernant le système de rémunération Phénix aurait permis de constater les problèmes que ce système a déjà causés ailleurs dans le monde. Maintenant que ce désastre a été refilé au nouveau gouvernement du premier ministre Trudeau, que prévoit-on faire pour récupérer les fonds qui servent à régler un problème qui ne semble pas avoir de solution? Quand le gouvernement poursuivra-t-il IBM?

Le sénateur Harder : Je remercie l’honorable sénateur de sa question. Comme il le sait, le gouvernement a fait des annonces officielles et il voit à ce que les obligations du contrat soient respectées. Nous nous en tenons au contrat. Si certaines conditions ne sont pas respectées, nous suivrons ce que stipule le contrat en cas de non-respect des dispositions.

La santé

Le projet de loi sur le cannabis—Les règlements

L’honorable André Pratte : Ma question s’adresse au représentant du gouvernement au Sénat. Il y a une semaine, le Comité des affaires juridiques et constitutionnelles a entendu le témoignage de la présidente du Comité de la drogue au volant de la Société canadienne des sciences judiciaires, Mme Amy Peaire.

Je la cite :

Par le passé, il y avait des variétés de marijuana dont la teneur en THC était de 2 à 3 p. 100, alors qu’elle est maintenant régulièrement entre 20 et 40 p. 100. On constate également de plus en plus la présence de concentrés de THC […] dont la teneur va de 70 à 90 p. 100 […]

Les responsables de la santé sont inquiets parce que ce cannabis à forte teneur en THC a des effets beaucoup plus puissants, et ils craignent que ces effets méconnus n'aient de graves répercussions sur la santé.

(1450)

Étant donné que de nombreux experts recommandent de limiter la concentration de THC des produits de cannabis qui pourront être vendus légalement au Canada, le sénateur Harder pourrait-il demander au gouvernement s’il a l’intention de préciser les concentrations maximales dans la réglementation qui sera publiée au cours des prochaines semaines?

L’honorable Peter Harder (représentant du gouvernement au Sénat) : Je remercie le sénateur de sa question. Avant d’y répondre, je voudrais souhaiter un bon retour dans cette enceinte au sénateur Dean, qui a accompli une somme colossale de travail dans ce dossier.

Des voix : Bravo!

Le sénateur Harder : Honorables sénateurs, je peux vous confirmer que le gouvernement est en train d’étudier les approches qui pourraient être employées pour réglementer la concentration de THC dans les produits de cannabis. Le gouvernement a l’intention de prendre des dispositions réglementaires ayant pour effet de normaliser la concentration de THC dans les produits de cannabis et d’obliger les fournisseurs à indiquer clairement cette concentration sur l’étiquette de leurs produits.

Par conséquent, les consommateurs pourront choisir en toute connaissance de cause les produits qu’ils consommeront.

Comme le sénateur le sait, le gouvernement se conforme ainsi aux recommandations faites par le groupe de travail et à son document de consultation intitulé Approche proposée en matière de la réglementation du cannabis, qui a été publié en novembre dernier et qui parle de la concentration maximale de THC dans les produits comme l’huile de cannabis, par exemple.

Le sénateur Pratte : Merci beaucoup pour cette réponse. C’est très intéressant. Évidemment, il y a une différence entre donner de l’information sur l’emballage et établir une concentration maximale de THC.

Le projet de loi C-45 repose sur une approche de santé publique. Je crois que, selon beaucoup d’experts — dont je commence à partager l’avis —, le danger pour la santé publique est important au-delà d’une certaine concentration, c’est-à-dire à plus de 40 ou 50 p. 100. Ces experts seraient contre l’approche du gouvernement de permettre la production et la vente de produits dont la concentration dépasserait une certaine limite. C’est pourquoi je demanderais de nouveau au représentant du gouvernement d’insister pour que le gouvernement précise les limites dans la réglementation avant que nous passions au vote final sur le projet de loi C-45.

Le sénateur Harder : Je transmettrai le point de vue du sénateur au gouvernement, sans faute. Je tiens à lui dire, et à dire à tous les sénateurs, que le régime réglementaire envisagé prévoit l’établissement de limites.

Les ressources naturelles

L’oléoduc Trans Mountain

L’honorable Douglas Black : Avant de poser ma question, je souhaite, en ma qualité de sénateur Black, de l’Alberta, souhaiter la bienvenue au sénateur Black, de l’Ontario et dire à mes collègues que, bien que nous n’ayons aucun lien de sang, nous avons en commun notre amour du Canada et notre désir d’accomplir un travail exemplaire ici, au Sénat du Canada.

La question que je souhaite poser au leader porte sur l’oléoduc Trans Mountain. La semaine dernière, le gouvernement de la Colombie-Britannique a indiqué qu’il demanderait aux tribunaux de la province de se prononcer sur la constitutionnalité de l’oléoduc interprovincial entre l’Alberta et la Colombie-Britannique. Sachant que cette manœuvre du gouvernement provincial vise à causer des retards, que la Colombie-Britannique perdra sûrement en cour et qu’elle demandera ensuite à la Cour suprême du Canada d’entendre l’appel, pourriez-vous nous confirmer, monsieur le leader, que vous recommanderez à vos collègues du gouvernement du Canada de confier immédiatement ce dossier à la Cour suprême du Canada?

L’honorable Peter Harder (représentant du gouvernement au Sénat) : Encore une fois, je remercie l’honorable sénateur de sa question et de l’attention qu’il porte à cet enjeu crucial. Je peux confirmer, comme je l’ai déjà fait, que le gouvernement accorde une importance prioritaire à ce projet et qu’il est déterminé à le voir réussir. Quant à savoir si le gouvernement du Canada envisage de procéder comme le sénateur le recommande, je transmettrai cette question à l’équipe ministérielle appropriée.

[Français]

Les affaires étrangères

Le voyage du premier ministre en Inde

L’honorable Jean-Guy Dagenais : Ma question s’adresse au représentant du gouvernement au Sénat. Rarement a-t-on vu une telle unanimité pour dénoncer le voyage en Inde du premier ministre Trudeau et de sa famille, qui étaient accompagnés d’une délégation injustifiée et d’un chef cuisinier. Ce voyage a entraîné bien d’autres dépenses inacceptables dont les contribuables font les frais, sans mentionner les changements de costume, qui rappellent le festival Juste pour rire et les spectacles d’Arturo Brachetti où celui-ci change de vêtements toutes les 20 secondes. C’est honteux. On a ri du premier ministre, non seulement au Canada, mais dans plusieurs autres pays. À cela s’ajoutent ses amitiés douteuses et surtout non expliquées avec le monde des terroristes. Je me demande si le représentant du premier ministre approuve ce genre de comportement. Aussi, j’aimerais qu’il nous donne, sur une échelle de 1 à 5, une note d’appréciation pour ce voyage que les Canadiens ont payé.

[Traduction]

L’honorable Peter Harder (représentant du gouvernement au Sénat) : Je vais répondre à la question en assurant d’abord au Sénat que, d’après le gouvernement, ce voyage était très important, et la délégation qui accompagnait le premier ministre s’est employée très activement à renforcer les relations commerciales et les échanges culturels.

Vous saurez que 20 initiatives et 6 protocoles d’entente ont été approuvés dans certains domaines comme la propriété intellectuelle, les sciences et la technologie en matière d’énergie nucléaire civile, l’éducation, la coproduction audiovisuelle et les sports.

Les projets viseront également à promouvoir l’autonomisation des femmes, ainsi que les travaux de recherche pour la dépollution de plans d’eau et l’amélioration des conditions environnementales.

Le gouvernement a annoncé un financement de 7,9 millions de dollars pour Grands Défis Canada et de 11,5 millions de dollars pour l’Initiative pour un bon départ, en plus de lancer la campagne « She shall Grow », de Nutrition International.

Pour ce qui est du sous-entendu dans la question, il importe de dire que le Canada et l’Inde ont réaffirmé leur engagement à l’égard du Cadre de coopération en matière de lutte contre le terrorisme et l’extrémisme violent afin d’assurer une collaboration efficace entre les organismes de sécurité et d’application de la loi et les spécialistes du droit et des politiques.

C’était une visite extrêmement importante, à l’instar d’autres visites effectuées précédemment par le premier ministre.

[Français]

Le sénateur Dagenais : Lors d’une entrevue accordée au Globe and Mail la semaine dernière, M. Atwal a affirmé qu’il entretenait une relation amicale avec le premier ministre Trudeau et qu’ils avaient eu une conversation privée dans son Hummer. Le leader du gouvernement peut-il nous dire si cela est vrai ou faux?

[Traduction]

Le sénateur Harder : Je peux confirmer ce que le premier ministre a déjà affirmé publiquement, soit que le premier ministre ne connaît pas la personne en question. Comme je l’ai souligné plus tôt, lorsque le gouvernement a été informé de la situation, l’invitation a été retirée.

Les finances

Le système de paie Phénix

L’honorable Jane Cordy : Ma question vise à faire un suivi de la question posée par le sénateur Mercer au sujet du système de paie Phénix. Je me demande, sénateur Harder, si vous pourriez vous adresser aux autorités responsables à l’autre endroit afin d’obtenir et de déposer le contrat que le gouvernement précédent a conclu avec IBM, notamment en ce qui concerne les services de suivi à l’égard du système de paie.

L’honorable Peter Harder (représentant du gouvernement au Sénat) : Je m’engage à le faire.

Les affaires étrangères

Le voyage du premier ministre en Inde

L’honorable Claude Carignan : Ma question porte sur la définition du mot « ami ».

[Français]

Ma question s’adresse au leader du gouvernement au Sénat. La semaine dernière, le premier ministre Trudeau a invité M. Jaspal Atwal à quelques réceptions officielles lors de son voyage en Inde. M. Atwal est un terroriste reconnu coupable de tentative de meurtre. Ce dernier a confié à des journalistes qu’il connaissait bien Justin Trudeau et qu’il l’avait rencontré à plusieurs reprises au cours des 15 dernières années. M. Atwal a également affirmé qu’il était un ami de M. Trudeau, ce que nie le Bureau du premier ministre.

Dans un rapport du commissaire à l’éthique au sujet du voyage de M. Trudeau chez l’Aga Khan, qui a été publié en décembre dernier, il est mentionné que M. Trudeau a affirmé être un ami de l’Aga Khan, qu’il le connaissait bien et qu’il l’avait rencontré à plusieurs reprises depuis une quinzaine d’années, ce que nie le commissaire à l’éthique.

Le leader du gouvernement au Sénat peut-il nous préciser quelle est la définition du terme « ami », selon le premier ministre? Pourquoi l’Aga Khan est-il rapidement devenu un ami de M. Trudeau lors de l’enquête menée par le commissaire à l’éthique, alors que M. Atwal a soudainement été rayé de la liste de ses amis la semaine dernière?

[Traduction]

L’honorable Peter Harder (représentant du gouvernement au Sénat) : Je remercie mon honorable ami de sa question. J’ai trouvé ses propos amusants.

Le sénateur Neufeld : Vous êtes bien le seul.

Le sénateur Harder : C’est probablement vrai.

Je le répète : le premier ministre ne connaît pas M. Atwal et, quand le gouvernement a su que ce dernier avait été invité à dîner, l’invitation a été retirée.

[Français]

Le sénateur Carignan : Je répète ma question. Quelle est la définition du terme « ami » pour le premier ministre du Canada?

(1500)

[Traduction]

Le sénateur Harder : Je devrai prendre la question en délibéré, comme mon honorable collègue l’a suggéré.

La justice

La santé

Le projet de loi sur le cannabis

L’honorable Serge Joyal : Le leader du gouvernement peut avoir l’assurance que ma question ne porte pas sur le carnaval indien.

L’honorable Peter Harder (représentant du gouvernement au Sénat) : Quel soulagement!

[Français]

Le sénateur Joyal : Dans une lettre du 23 février dernier adressée à la ministre fédérale de la Justice et à la ministre fédérale de la Santé, le ministre québécois Jean-Marc Fournier, responsable des Relations canadiennes et de la Francophonie canadienne, a soulevé la nécessité de régler au préalable le différend qui existe entre les deux gouvernements quant à la capacité d’une province, notamment du Québec, d’interdire dans son projet de loi no 157 la culture à domicile de quatre plants de cannabis.

[Traduction]

Le leader du gouvernement peut-il s’engager à confirmer que les deux sous-ministres fédéraux concernés communiqueront avec leurs homologues du Québec dans les semaines à venir pour régler, de façon définitive, ce différend avant le vote final sur le projet de loi C-45? Ainsi, la mesure législative ne serait pas contestée devant les tribunaux par le Québec dans les jours qui suivront, ce qui éviterait de créer de l’incertitude chez les forces policières responsables de son application.

Le sénateur Harder : Je remercie l’honorable sénateur de sa question. Je m’engage à le faire.

Cela dit, permettez-moi d’ajouter que le gouvernement, comme vous devez vous en douter, suit avec grand intérêt le débat au Québec et il s’engage à étudier les conclusions de l’Assemblée nationale, alors que les députés y discutent de leur rôle ou de son intégration.

Comme vous le savez, conformément au projet de loi C-45, les provinces et les territoires pourront imposer des restrictions supplémentaires à la culture de plants pour usage personnel. Comme la ministre de la Justice l’a dit, il y a toutefois des limites à l’adaptation des règles aux circonstances d’une province ou d’un territoire.

Je signale également que le premier ministre du Québec a accueilli favorablement la prévisibilité offerte par le calendrier législatif que le Sénat a adopté pour le projet de loi C-45. Je sais que le gouvernement du Québec souhaite ardemment que la mise en œuvre se déroule sans heurts, et le différend que vous avez soulevé devra être réglé pour que ce soit possible.

Le sénateur Joyal : En fait, ne serait-il pas préférable d’amender le projet de loi C-45 afin de reconnaître que les provinces ont le droit d’interdire, pendant un certain temps, la culture de quatre plants de cannabis dans les résidences privées ou dans les habitations? Cela permettrait de dissiper toute trace d’incertitude, qui pourrait avoir des conséquences très négatives et, en fait, entraîner la création d’un marché parallèle de cannabis illicite qui serait en concurrence directe avec la vente de cannabis licite dans les magasins du gouvernement.

Le sénateur Harder : Je remercie de nouveau le sénateur de sa question. Je pense que le débat qui portera sur les amendements éventuels aura bientôt lieu. Je serai ravi à ce moment-là de faire rapport au Sénat de la position du gouvernement du Canada sur les divers amendements qu’approuvera ou non le Sénat.

Je dirai simplement que le gouvernement du Canada accueille favorablement l’engagement du Sénat à l’égard de ce projet de loi d’envergure et que je suis heureux que le sénateur Dean soit de retour pour nous aider à gérer le débat de manière efficace.

Le cabinet du premier ministre

Le processus de nomination au Sénat et aux bureaux fédéraux

L’honorable Denise Batters : Le gouvernement Trudeau a annoncé en grande pompe la semaine dernière qu’il avait apporté des améliorations au processus soi-disant non partisan et indépendant de nomination au Sénat. Des candidatures peuvent être soumises à l’année. Elles peuvent être envoyées sur leur site web. On peut se porter candidat soi-même. On peut soumettre les candidatures d’amis. Les groupes d’intérêts spéciaux peuvent soumettre la candidature des gens qu’ils veulent. Le gouvernement dit que les demandes seront examinées par des comités consultatifs au Sénat indépendants et non partisans. Il en existe un pour chaque province ou territoire.

Le problème est que tous les postes au sein de ces comités consultatifs au Sénat sont vacants, sauf celui de président fédéral, occupé par Huguette Labelle. La présidente doit se sentir bien seule pendant les réunions.

Le gouvernement Trudeau prétend que le processus de nomination au Sénat est ouvert et transparent. En fait, 28 postes sur 29 sont si transparents qu’ils sont invisibles. Il y a 10 jours, le premier ministre a annoncé que nous aurions deux nouveaux collègues sénateurs de l’Ontario. Qui faisait partie du comité qui a décidé de ces nominations, en dehors de Mme Labelle et Gerry Butts?

L’honorable Peter Harder (représentant du gouvernement au Sénat) : Gerry Butts ne fait pas partie du comité.

La sénatrice Batters : Nous attendrons de savoir qui étaient les autres membres du comité.

Le bilan des 28 derniers mois du gouvernement Trudeau en matière de nominations est épouvantable. Il a omis de faire 600 nominations au sein du gouvernement fédéral — un nouveau record —, y compris 63 nominations cruciales au sein de l’appareil judiciaire. Les commissions qui jouent un rôle essentiel, comme la Commission de l’immigration et du statut de réfugié, ne peuvent fonctionner sans membres. Pendant ce temps, le communiqué du gouvernement concernant les nominations au Sénat, publié la semaine dernière, indique ce qui suit :

Pour ce cycle d’examen des demandes, le Comité consultatif examinera les demandes reçues d’ici le 3 avril 2018.

C’est dans un mois.

Le bilan du gouvernement Trudeau en matière de nominations est lamentable. Un seul des 29 postes du comité consultatif est présentement pourvu. Pourquoi le gouvernement libéral s’entête-t-il à faire sciemment des promesses qu’il ne peut pas tenir?

Le sénateur Harder : Je vais prendre les questions une à la fois et tenter d’y répondre.

Ce n’est que récemment que des postes sont devenus vacants au Sénat pour un certain nombre de provinces, qui devront mettre sur pied des comités consultatifs.

Les premiers ministres, comme le savent les honorables sénateurs, peuvent participer, s’ils le désirent, au processus de nomination des membres des comités indépendants provinciaux ou territoriaux. Ce processus, d’après ce que j’ai compris, est déjà en marche de façon à ce que les échéanciers promis puissent être respectés.

Voilà en ce qui concerne le processus indépendant des nominations au Sénat. Je sais que mes collègues sénateurs qui participent à ce processus seront en désaccord avec vous quant à la nature partisane que vous lui conférez.

En ce qui concerne les nominations judiciaires, le gouvernement s’est engagé à faire prévaloir la diversité non seulement pour les nominations qu’il fait, mais aussi dans le cadre du processus menant à ces nominations. C’est pourquoi il lui a fallu du temps pour remettre en place, dans les provinces et territoires, des comités consultatifs qui sont eux-mêmes représentatifs de la diversité souhaitée pour les nominations. Je me réjouis de signaler, comme je l’ai fait à d’autres occasions, que c’est exactement ce qui s’est passé.

L’honorable Percy E. Downe : Manifestement, honorables collègues, le système de nomination du premier ministre est en déclin depuis le départ de Marjory LeBreton. On espère qu’il y aura une remontée à un moment donné. La moitié des gens ne sauraient pas de qui il s’agit, mais poursuivons de toute manière.

Je tiens à remercier le sénateur Harder. Il y a quelques semaines seulement que j’ai soulevé des préoccupations au sujet du processus de nomination au Sénat, du délai et du moment où les gens peuvent présenter leur candidature. Apparemment, on a fait le ménage la semaine dernière. J’ai lu sur le site web que le processus de nomination est maintenant très clair.

Je le répète, j’ai soulevé, il y a à peine quelques semaines, des préoccupations au sujet de la représentation au Sénat, au sujet du fait qu’il n’y a pas de pêcheurs, d’agriculteurs ou d’anciens combattants siégeant au Sénat.

Je suis ravi de voir notre nouveau collègue, le sénateur Black. Seuls les gens provenant de régions rurales au Canada peuvent comprendre la signification de la cravate qu’il a portée aujourd’hui et qui témoigne de ses racines rurales. Il s’agit d’une excellente nomination au Sénat.

Manifestement, une seule nomination, c’est insuffisant. Il y a de nombreux autres postes à pourvoir.

J’ai consulté le site web du Sénat et j’ai constaté que nous avons actuellement 18 sénateurs qui sont avocats de formation. C’est une bonne chose. J’en prends note. Le Président lui-même est avocat de formation. Leur formation juridique est très utile lorsque nous devons étudier des mesures législatives. Il y a 13 professeurs, une dizaine d’hommes et femmes d’affaires, des journalistes, des comptables agréés, des infirmières, des enseignants et ainsi de suite. Toutefois, il manque des voix très importantes.

Nous avons très bien réussi en matière de représentation, puisque nous avons 45 p. 100 de sénatrices, alors qu’il n’y a, à la Chambre des communes, que 27 p. 100 de députées. Il faut toutefois inclure d’autres formes de diversité, notamment des groupes au sein des industries primaires. Il faut inclure des gens du secteur de l’agriculture et de l’agroalimentaire, du secteur de la pêche et des gens qui ont servi leur pays au sein des Forces armées canadiennes.

Pour ce qui est plus particulièrement des questions touchant les anciens combattants, j’exhorte le gouvernement à envisager la candidature de militaires qui ont le grade de colonel ou un grade inférieur. Presque toutes les questions dont nous sommes saisis au sujet des vétérans et de leur famille touchent des militaires de grade inférieur. Les militaires qui ont au moins le grade de colonel semblent être bien pris en charge par le système actuel. Ils ne se plaignent jamais. Toutefois, nous entendons énormément de plaintes de la part de militaires de grade inférieur. Je pense que le gouvernement devrait aussi se pencher sur ces questions.

Comme le sénateur Harder a répondu aux préoccupations que je lui ai communiquées par le passé, je me demande s’il pourrait communiquer mes observations aux autorités compétentes. Nous nous attendons à ce que cette situation soit résolue au cours des prochaines semaines ou des prochains jours.

Le sénateur Harder : Sénateur, je vous remercie de vos commentaires. J’espère que je pourrai faire bouger les choses aussi rapidement. J’ai toutefois remarqué que vous n’avez pas parlé du fait que le Sénat ne compte qu’un ancien chef de cabinet d’un premier ministre. Il me semble qu’il s’agit également d’une lacune à combler.


(1510)

ORDRE DU JOUR

Projet de loi sur le cannabis

Projet de loi modificatif—Deuxième lecture—Suite du débat

L’ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l’honorable sénateur Dean, appuyée par l’honorable sénateur Forest, tendant à la deuxième lecture du projet de loi C-45, Loi concernant le cannabis et modifiant la Loi réglementant certaines drogues et autres substances, le Code criminel et d’autres lois.

L’honorable Richard Neufeld : Honorables sénateurs, j’interviens aujourd’hui à l’étape de la deuxième lecture du projet de loi C-45, qui vise à légaliser et à réglementer le cannabis. C’est l’un de ces projets de loi que l’on ne voit qu’une fois dans une vie.

Malgré les tentatives qui ont été faites par des ministres et d’autres personnes pour me convaincre du contraire, je pense que le projet de loi laisse trop de questions sans réponse et qu’il aura de nombreuses conséquences inattendues.

Le projet de loi a pour objet, conformément à l’article 7, de protéger la santé et la sécurité publiques. Parmi les sept objectifs énumérés, trois ont pour but, premièrement, de restreindre l’accès des jeunes au cannabis, deuxièmement, de réduire le fardeau qui pèse sur le système de justice pénale et troisièmement, de prévenir et de réduire les activités illicites. Je ne pense pas que le projet de loi C-45 soit le moyen d’atteindre ces objectifs. Je dirais même, comme l’ont fait valoir de nombreux experts, qu’il va à l’encontre des fondements de ces objectifs.

Certes, j’admets que le gouvernement Trudeau a le sentiment que son programme de légalisation de la marijuana est progressiste, mais certains éléments du projet de loi m’inquiètent beaucoup. La documentation publiée sur le sujet est vaste. Il faut faire les choses comme il faut. Nous le devons à nos enfants et aux futures générations.

Étant donné le peu de temps dont je dispose, je me limiterai à deux sujets qui doivent, à mon avis, être examinés en détail, je veux parler du travail avec les facultés affaiblies et de l’accès des jeunes à la marijuana.

Je viens du nord-est de la Colombie-Britannique, où le pétrole et le gaz, l’agriculture, l’industrie forestière et l’industrie lourde sont les moteurs de l’économie. Dans ces domaines hautement spécialisés, on utilise de l’équipement lourd dans des milieux parfois dangereux. Nous savons tous que les employeurs sont tenus légalement de garantir un milieu de travail sécuritaire. La plupart du temps, des codes de conduite ou des politiques relatives à la sécurité et à la santé interdisent aux employés de travailler avec les facultés affaiblies par la drogue, mais, aussi bon soit-il, un code de conduite n’est pas toujours infaillible.

L’an dernier, la Canadian Human Resources Professionals Association a publié un rapport intitulé Clearing the Haze : The Impacts of Marijuana in the Workplace. L’association a mené un sondage réservé à ses membres pour relever les préoccupations des employeurs. Voici les cinq principales inquiétudes qui ont été établies : numéro un, les employés qui conduisent des véhicules à moteur; numéro deux, les mesures disciplinaires; numéro trois, la baisse du rendement au travail; numéro quatre, les employés qui utilisent de la machinerie lourde; et, enfin, numéro cinq, l’absentéisme.

La sécurité au travail était la principale préoccupation. Comme le dit le rapport :

La marijuana est déjà la substance la plus souvent détectée lors des tests de dépistage des drogues menés au travail, et son utilisation devrait croître de façon exponentielle à la suite de la légalisation complète.

La question se pose donc : de quels outils les employeurs disposent-ils pour empêcher les employés de travailler avec les facultés affaiblies?

L’association Doctors of BC reconnaît que, contrairement aux niveaux d’alcoolémie, les données scientifiques actuelles ne sont pas suffisantes pour établir un lien entre le taux de THC mesuré dans le sang et l’affaiblissement des facultés. Comme ses membres l’ont souligné, les appareils d’analyse de liquide buccal font encore l’objet de mises à l’essai pour garantir la fiabilité et l’exactitude de leurs résultats. Même si de tels appareils pourraient bientôt être offerts, ils ne le sont pas en ce moment. C’est un problème.

Nous savons tous que des entreprises de nombreux domaines, y compris du secteur pétrolier et gazier, effectuent des tests de dépistage d’alcool et de drogue non aléatoires. Nous savons aussi que beaucoup de sites de travail ont une tolérance zéro, c’est-à-dire qu’il est interdit d’y apporter de l’alcool ou de la drogue. Toutefois, qu’en est-il des contrôles aléatoires? Qu’est-ce qui sera accepté? Penchons-nous sur une décision récente rendue par le tribunal.

Suncor est une grande société pétrolière. L’an dernier, elle a décidé de mener des contrôles aléatoires pour renforcer la sécurité au travail. Unifor a fait valoir que de tels contrôles constitueraient une violation des droits et de la vie privée de ses quelque 3 000 membres. Dans une décision rendue en décembre 2017, le juge a tranché en faveur du syndicat. Déçue par l’injonction du tribunal, Suncor a affirmé ce qui suit :

Il est déraisonnable d’empêcher Suncor de prendre des mesures pour éliminer des dangers connus pour la sécurité, qui sont associés à la consommation de drogues et d’alcool en milieu de travail.

Pour sa part, le syndicat a indiqué que la décision prenait en considération la dignité de la personne au travail et qu’on défendait les droits de la personne.

Je trouve inquiétant qu’on s’oppose à ce qu’un employeur fasse des tests de dépistage aléatoire. Beaucoup de gens travaillent dans un milieu à haut risque, où le contrôle moteur, l’équilibre ou le temps de réaction — toutes des facultés perturbées par la consommation de marijuana — peuvent faire la différence entre la vie et la mort.

L’Association du camionnage de la Colombie-Britannique s’est aussi prononcée sur la question. Elle souscrit à l’idée d’un cadre réglementaire permettant aux employeurs de travailleurs dans des postes critiques pour la sécurité de mener des tests de dépistage des drogues et de l’alcool en milieu de travail.

L’Alliance canadienne du camionnage fait valoir que le projet de loi crée deux nouveaux dangers pour les entreprises de camionnage : primo, le fait qu’il est difficile d’assurer que les conducteurs n’ont pas les facultés affaiblies et, secundo, le fait que les camionneurs affrontent un plus grand danger sur les routes, étant donné que plus de gens conduiront avec les facultés affaiblies.

Selon l’alliance, tant que nous n’aurons pas des preuves claires et les connaissances permettant d’établir quel niveau d’intoxication peut être considéré sans danger, la seule option sécuritaire consiste à adopter une politique de tolérance zéro quant à la présence de marijuana dans l’organisme des conducteurs de camions. Toutefois, sans test de sobriété routier pour mesurer le niveau d’intoxication et sans façon de mesurer l’affaiblissement des facultés en milieu de travail, il est impossible pour les employeurs d’appliquer une politique de tolérance zéro.

Dans un mémoire présenté au Groupe de travail sur la légalisation et la réglementation du cannabis, l’association, qui représente 500 000 employés sous réglementation fédérale des secteurs des transports et des communications, recommande que le gouvernement adopte une loi permettant aux employeurs relevant de la compétence fédérale d’effectuer des tests de dépistage des drogues et de l’alcool, y compris des contrôles aléatoires, pour les postes critiques sur le plan de la sécurité.

Sans être un expert en droit, je soutiens que le projet de loi C-45 créerait un vide juridique en ce qui a trait aux contrôles aléatoires, ce qui entraînerait des litiges et de l’incertitude par rapport à la loi. Je soulève ces questions parce que je crains les conséquences imprévues de la légalisation de la marijuana sur la sécurité en milieu de travail.

Je n’ai pas l’intention de parler des gens qui conduisent avec les facultés affaiblies aujourd’hui, mais il y a malgré tout un parallèle à tracer avec ceux qui vont au travail en étant intoxiqués. Je me contenterai de signaler les résultats d’un sondage mené en mars 2016 auprès de 3 000 Canadiens. On y apprend que, de tous les conducteurs qui conduisent après avoir pris de la drogue, 44 p. 100 estiment que leur conduite ne constitue pas un danger.

La deuxième chose dont je veux parler, ce sont les jeunes. Je crois qu’on peut dire sans craindre de se tromper qu’ils constituent une priorité pour la majorité d’entre nous. Le projet de loi C-45 a pour objectif de garder la marijuana hors des mains des enfants. C’est, hélas, tout le contraire qui se produira.

Selon la Société canadienne de pédiatrie, le projet de loi sur le cannabis aura de profondes répercussions sur la vie et la santé des enfants et des jeunes, et des balises sont nécessaires. Elle est aussi d’avis que, à la lumière des risques pour la santé humaine — physique ou mentale — et des nombreux enjeux juridiques, financiers et sécuritaires en cause, les décideurs doivent continuer à restreindre l’accès au cannabis.

Je suis d’accord avec la Société canadienne de pédiatrie. Nous devons restreindre l’accès des jeunes à la marijuana. Ce n’est pourtant pas ce que fait ce projet de loi.

Selon l'association Doctors of BC, la science actuelle permet de conclure que, plus une personne commence à consommer du cannabis jeune, plus grands seront les risques qu’elle éprouve toutes sortes de problèmes sur le plan social ou de la santé. On parle ici de blessures, de toxicomanie, de problèmes de santé mentale ou de difficultés scolaires.

Comme si ce n’était pas suffisant, les statistiques nous apprennent que 1 personne sur 6 ayant commencé à consommer du cannabis à l’adolescence deviendra dépendante de cette substance. Nous savons aussi que la consommation fréquente et assidue dès le début de l’adolescence est associée à un risque accru d’effets dommageables. Le développement du cerveau peut être compromis jusqu’à l’âge de 25 ans et peut-être même au-delà, comme l’ont déjà signalé certains de mes collègues.

Cela étant dit, j’ai des réserves au sujet de l’article 8 du projet de loi, qui permet essentiellement aux jeunes de posséder et de distribuer cinq grammes ou moins de cannabis séché ou son équivalent. Les jeunes qui se feront prendre avec une telle quantité ne seront pas poursuivis et ils n’auront pas de casier judiciaire. Pour ceux qui se feront prendre avec plus de cinq grammes, c’est la Loi sur le système de justice pénale pour les adolescents qui s’appliquera. À titre d’information, je signale qu’un joint contient généralement entre 0,33 et 1 gramme de marijuana sèche et que, de ce fait, les enfants pourraient avoir en leur possession, en tout temps, entre 5 et 15 joints.

(1520)

Il est remarquable que les ministres de la Santé et de la Justice déclarent par écrit qu’elles ont incité les provinces et les territoires à créer des infractions interdisant aux jeunes d’être en possession de cannabis, quelle que soit la quantité. Selon la ministre de la Justice, tous les États qui ont adopté une loi sur le cannabis ont établi de telles interdictions.

Le gouvernement affirme que son intention est de mettre la marijuana hors de la portée des jeunes. Si c’est effectivement le cas, pourquoi ne l’a-t-il carrément pas interdite et pourquoi autorise-t-il la possession de cinq grammes de cette substance?

Plusieurs d’entre nous sont grands-parents. Estimons-nous raisonnable que nos petits-enfants aient en leur possession cinq grammes de cannabis séché? L’aîné de mes petits-enfants a 9 ans. Dans quelques années, il pourra se balader avec environ cinq grammes de cannabis sur lui. Je trouve renversant que le gouvernement présente un projet de loi en affirmant qu’il souhaite mettre le cannabis hors de la portée des jeunes, mais qu’il autorise du même souffle un jeune de 12 ans à avoir cinq grammes de cette substance en sa possession. Songeons également à l’influence des pairs à l’école. Aujourd’hui, les jeunes exigent presque d’avoir la bonne marque de jeans pour aller à l’école; exigeront-ils maintenant d’avoir quelques joints dans leurs poches? Je ne veux pas que mes petits-enfants soient confrontés à une telle réalité. Je refuse carrément une telle éventualité.

Je comprends l’objectif qui vise à ne pas judiciariser les jeunes pour possession de petites quantités de marijuana — et j’y souscris —, mais il faut se demander où les jeunes pourraient se procurer du cannabis au départ. En vertu de la loi actuelle et même du projet de loi C-45, il est illégal pour les jeunes d’acheter de la marijuana. La ministre de la Justice a déclaré : « Les jeunes ne devraient avoir en leur possession aucune quantité de cannabis. » Or, le projet de loi qu’elle a présenté autorise la possession chez les jeunes. Voilà toute une contradiction. Comment peut-on l’expliquer? Par surcroît, la ministre a affirmé : « La loi ne permettra pas à une jeune personne d’obtenir du cannabis à des fins récréatives. »

Le marché noir continuera de desservir les jeunes. En fait, je crains qu’ils ne soient sa principale cible. Comme l’a dit le sénateur White :

Manifestement, la légalisation de la marijuana n’aura aucune incidence sur la vente illégale à des jeunes de marijuana provenant du marché noir. Toute affirmation à cet égard de la part du ministre, du premier ministre ou du gouvernement est fausse. 

Je suis d’accord avec lui. De plus, le gouvernement affirme que le projet de loi vise à mettre fin aux activités illégales liées au cannabis. Le ministre Goodale croit que les Canadiens changeront leurs habitudes d’achat et qu’ils se tourneront vers les magasins légaux de marijuana. C’est incroyable. Il me semble que c’est un peu naïf de sa part. C’est vrai pour certains, mais pas pour d’autres. Aux dernières nouvelles, le marché illicite du tabac, qui génère des millions de dollars illégaux, existe toujours.

La culture de quatre plants dans une résidence privée rendra la marijuana beaucoup plus accessible aux jeunes. Comme l’a dit l’Association canadienne des chefs de police : « […] la culture personnelle [est contraire] à l’objectif déclaré du projet de loi de protéger les jeunes [...] ». C’est ce dont j’ai parlé plus tôt.

Je voudrais revenir sur l’un des objectifs sous-jacents du projet de loi, soit celui de tenir la marijuana loin des jeunes. Comme les chefs de police, je crains que le projet de loi puisse entraîner une exposition et une consommation plus importante, ce qui peut créer davantage de cas de dépendance. Certaines personnes ont même dit que la marijuana était une drogue d’introduction. De nombreuses questions restent sans réponse.

Selon moi, la marijuana est une drogue d’introduction. Je peux assurer au Sénat, à l’âge de 73 ans, que je n’ai jamais consommé de drogues illégales, sauf de l’alcool. L’alcool n’est pas illégal. Il est légal.

La sénatrice Lankin : L’était-il quand vous étiez plus jeune?

Le sénateur Neufeld : Je peux vous dire ce qui se passe avec l’alcool. C’est semblable à ce qui se passe avec la drogue. Ce n’est pas avec le whisky que j’ai commencé à boire. Des boissons moins alcoolisées, comme de la bière et du vin bon marché, ont été mon introduction à l’alcool. À cette époque-là, le vin n’était pas cher en Colombie-Britannique. C’était il y a longtemps. On pouvait boire autant qu’on voulait et on finissait par boire des alcools plus forts. Je suis sobre depuis 35 ans. Je suis un alcoolique. Je ne bois pas du tout d’alcool et je n’en ai pas touché depuis un peu moins de 35 ans.

J’estime que la marijuana est comme l’alcool et que la légalisation incitera les jeunes à commencer à en consommer. Je ne me promène plus dans Vancouver autant que j’en avais l’habitude, mais, quand je vais dans le quartier Downtown Eastside et que je vois dans quelles conditions vivent les gens, j’en suis terriblement attristé. Je ne crois pas que ces gens aient commencé par consommer de l’héroïne ou des drogues dures. Je crois que bon nombre d’entre eux ont commencé par consommer de la marijuana.

Le sénateur Tkachuk : Absolument. C’est vrai dans presque tous les cas.

Le sénateur Neufeld : Ils sont passés progressivement aux drogues dures.

Son Honneur la Présidente intérimaire : Sénateur Neufeld, je suis désolée de vous interrompre, mais votre temps de parole est écoulé.

Le sénateur Neufeld : Puis-je demander cinq minutes de plus?

Son Honneur la Présidente intérimaire : D’accord?

Des voix : D’accord.

Le sénateur Neufeld : Merci. Je n’utiliserai pas entièrement les cinq minutes. Il me reste seulement quelques petites choses à dire.

Cet aspect m’inquiète au plus haut point. Je m’inquiète pour les jeunes, notamment mes petits-enfants. Ils vont pouvoir avoir 5 grammes en leur possession. Je trouve cela épouvantable.

L’un des objectifs qui sous-tendent le projet de loi est de garder la marijuana à l’écart des jeunes. Comme les chefs de police, je crains en fait que le projet de loi ne mène à une exposition et à une consommation accrues. Une dépendance pourrait s’ensuivre. Comme je l’ai dit, certains considèrent que la marijuana est une drogue qui entraîne la consommation d’autres drogues. De nombreuses questions demeurent sans réponse.

En conclusion, bien que j’aie souligné quelques points qui me préoccupent, il en reste beaucoup d’autres dont il faut tenir compte. Par exemple, le dépistage non fiable et non scientifique de drogue, la formation des forces de l’ordre, le partage des revenus avec les municipalités, la vente et l’accessibilité de produits comestibles, et ainsi de suite.

Je suis convaincu que les comités chargés d’étudier le projet de loi C-45 feront un travail exhaustif. J’espère qu’ils tiendront compte de tous les points litigieux qui ont été soulevés par les sénateurs au cours du débat à l’étape de la deuxième lecture.

Selon moi, ce projet de loi est incompatible avec les objectifs du gouvernement. Voilà pourquoi je ne l’appuierai pas. Je vous remercie.

Son Honneur la Présidente intérimaire : Sénateur Neufeld, accepteriez-vous de répondre à une question?

L’honorable Tony Dean : Sénateur Neufeld, je vous remercie d’avoir présenté certaines des questions que nous avons au Sénat à propos du projet de loi C­45. La santé des jeunes nous préoccupe tous. La santé et la sécurité au travail nous préoccupent tous.

Actuellement, l’une des choses dont je me réjouis est le fait que nous discutions ouvertement de ces enjeux à la suite de la présentation du projet de loi dont nous sommes saisis. Ce sont tous des enjeux qui datent d’avant la présentation de la mesure législative. Je pense qu’il est bon pour les enfants et pour la santé publique au Canada que nous en discutions maintenant.

J’ai des interrogations par rapport à deux éléments : la première porte sur la soi-disant quantité de cinq grammes permise aux jeunes âgés de 12 à 17 ans. Je suis heureux que vous l’ayez mentionnée. Le projet de loi C­45 énonce clairement qu’il est possible de permettre la possession d'une telle quantité et qu’il laisse aux provinces et aux territoires la possibilité de supprimer cet aspect s’ils le souhaitent. Je me demande si vous savez qu’une grande majorité des provinces et des territoires — en fait, la totalité — qui ont élaboré des plans de mise en œuvre et ont adopté une loi ont supprimé tout accès à une quantité permise de cinq grammes. De plus, aucun jeune âgé de moins de 18 ou de 19 ans n’a un accès légal à du cannabis ou n’a de passe-droit. Par conséquent, cette possibilité de posséder cinq grammes est, ni plus ni moins, éliminée dans l’ensemble des provinces et des territoires.

J’ai une autre question pour vous. En ce qui concerne l’âge limite de 18 ou 19 ans, je me demande si vous êtes au courant que, alors que le gouvernement fédéral a établi l’âge minimum à 18 ans, il a donné la compétence aux provinces et aux territoires d’établir une limite d’âge supérieure s’ils le souhaitent. Toutes les provinces qui ont prévu des plans — et c’est la vaste majorité des provinces — ont fixé l’âge limite à 18 ou 19 ans. Je me demande si vous savez également que, en ce qui concerne l’âge limite de 18 ou 19 ans, l’Association canadienne de santé publique, la Société canadienne de pédiatrie, le Centre canadien de lutte contre les toxicomanies, le Centre de toxicomanie et de santé mentale, l’Association canadienne des centres de santé pédiatriques, les Directeurs de pédiatrie du Canada, l’Association canadienne pour la santé mentale, des infirmières et infirmiers autorisés et l’Institut national de santé publique ont tous fixé…

(1530)

Son Honneur la Présidente intérimaire : Sénateur Dean, pourriez-vous en venir au fait?

Le sénateur Dean : … l’âge à 18 ans.

Son Honneur la Présidente intérimaire : Quelle est la question?

Le sénateur Dean : C’est cela, la question. J’aimerais savoir si le sénateur est au courant du fait que les provinces et les territoires sont en train d’éliminer la quantité de cinq grammes.

Son Honneur la Présidente intérimaire : Honorables sénateurs, le temps de parole est écoulé. Je suis désolée, mais le temps de parole du sénateur Neufeld est écoulé.

Sénateur Neufeld, voulez-vous demander plus de temps?

Le sénateur Neufeld : Oui, je pourrais donner une courte réponse.

Son Honneur la Présidente intérimaire : Sommes-nous d’accord, honorables sénateurs?

Des voix : D’accord.

Le sénateur Neufeld : En ce qui concerne vos questions au sujet des jeunes — et c’est sur quoi je vais me concentrer —, le projet de loi a pour objet :

a) de protéger la santé des jeunes en restreignant leur accès au cannabis;

Pourquoi le gouvernement fédéral a-t-il laissé aux provinces le soin de s’occuper de cela, alors qu’il a prévu dans le projet de loi que des enfants âgés de 12 ans peuvent en avoir en leur possession? Pourquoi n’a-t-il pas fait ce qu’il avait dit vouloir faire? Pourquoi les provinces doivent-elles s’occuper de cela? C’est un projet de loi fédéral et une loi fédérale. Le gouvernement fédéral aurait dû s’en occuper plutôt que de dire aux provinces : « C’est à vous de jouer. Faites ce que vous voulez. » Fort heureusement, les provinces ont eu la présence d’esprit et l’intelligence nécessaire pour dire : « Nous allons remédier à cette situation ridicule. » On peut se réjouir qu’ils l’aient fait, puisque le gouvernement fédéral n’a pas su prendre la situation en main.

L’honorable Betty Unger : Honorables sénateurs, le projet de loi du gouvernement libéral fera du Canada le premier pays développé à légaliser la marijuana, ce qui devrait nous inciter à prendre le temps de réfléchir.

Alors, qu’est-ce qui fait de cette plante, de cette herbe, une substance vilipendée dans tous les autres pays démocratiques? Quelles sont les raisons pour lesquelles le Canada ne devrait absolument pas envisager la légalisation?

Pourquoi les organismes canadiens dont il a été question, soit l’Association médicale canadienne, l’Association des psychiatres, la Société canadienne de pédiatrie et le Centre canadien sur les dépendances et l’usage de substances, ont-ils tous exprimé des craintes concernant les effets nocifs du cannabis?

Posons-nous la question : qui a l’oreille du gouvernement Trudeau et qui le conseille?

Voyons les faits. La principale substance psychoactive que les consommateurs recherchent aujourd’hui et qui provoque la plupart des effets intoxicants s’appelle le THC, ou delta 9-transtétrahydrocannabinol.

Lorsqu’une personne fume de la marijuana, le THC entre dans ses poumons et est rapidement absorbé dans le sang, qui le transporte jusqu’au cerveau, où il commence à en perturber le fonctionnement.

La structure chimique du THC est remarquablement semblable à celle de l’anandamide, une substance chimique qui est naturellement présente dans le cerveau et qui sert de neurotransmetteur, transmettant des signaux chimiques entre les neurones et un peu partout dans le système nerveux. La similitude des structures permet au THC de se substituer à l’anandamide, d’altérer les communications dans le cerveau et d’être reconnu par l’organisme.

Toutefois, le THC est beaucoup plus fort que l’anandamide et il peut avoir des effets très nocifs, comme la réduction de la capacité de raisonner, d’apprendre et d’effectuer des tâches complexes. Il perturbe le fonctionnement des zones du cerveau qui gèrent l’équilibre, la coordination et le temps de réaction, pour ne nommer que celles-là.

Bref, si quelqu’un essayait de refaire les connexions du système électrique complexe, délicat et soigneusement conçu de votre automobile, vous en seriez inquiet et probablement fâché, parce que vous sauriez que votre automobile risquerait de ne plus jamais fonctionner comme il faut. Or, c’est un peu ce qui se passe dans le cerveau en cours de développement qu’on soumet à la marijuana.

Les effets du THC sont presque immédiats. La personne se sent euphorique et détendue. Or, ces sensations agréables sont loin d’être universelles. Chez d’autres personnes, ces effets prendront la forme d’angoisse, de panique, de paranoïa ou de peur, ce qui peut se produire quand la teneur en THC est plus élevée que prévu, la consommation excessive ou l’usager peu habitué.

Les cas de psychose aigüe avec délire et hallucinations sont possibles quand la dose de THC est très élevée, mais ces réactions temporaires sont distinctes des dommages permanents — surtout au cerveau — découlant d’une consommation régulière sur une longue période. De nombreuses études ont démontré que le THC cause des dommages irréversibles sur la structure du cerveau des jeunes.

Chez les enfants et les jeunes — ceux de moins de 25 ans —, la consommation régulière de marijuana modifie de façon permanente le volume, la structure et le fonctionnement du cerveau et amoindrit la connectivité des fibres du cerveau.

On associe l’usage régulier chez les enfants et les jeunes de moins de 25 ans à une diminution du rendement scolaire, à des taux de décrochage scolaire plus élevés, à une baisse considérable et irréversible du QI, à un risque plus élevé de troubles psychotiques et à une diminution ultérieure de l’esprit d’initiative qui se répercute sur ce que la personne accomplira dans sa vie. Qui plus est, il est bien établi que la marijuana prédispose à l’usage d’autres drogues.

Outre le fait qu’il est plus puissant que l’anandamide, le THC demeure dans les tissus adipeux du corps plus longtemps. La raison en est qu’il est liposoluble. Après avoir été rapidement absorbé dans le sang, le THC peut se lier aux dépôts adipeux — et y rester entreposé — et avoir un effet sur le fonctionnement du cerveau pendant une période d’une durée impossible à déterminer.

Or, les méfaits ne s’arrêtent pas là. Le THC entreposé dans les graisses corporelles peut être de nouveau libéré dans le sang par l’exercice, le jeûne ou un traumatisme, par exemple. Lorsqu’il réintègre le courant sanguin, il se rend de nouveau au cerveau et peut provoquer un effet d’euphorie une deuxième fois. Cet effet, même s’il est moins intense, a les mêmes répercussions négatives.

Les conséquences sont multiples. En voici quelques exemples : les chercheurs nous disent qu’il est possible que du THC libéré une seconde fois dans le système sanguin puisse atteindre des niveaux suffisants pour causer des déficits cognitifs liés au cannabinoïde. Une quasi-collision pourrait provoquer la libération de THC dans le système sanguin d’une personne ayant fumé un joint la semaine précédente, et entraîne possiblement l’affaiblissement des facultés de la personne en question.

Les gros consommateurs de marijuana sont connus pour avoir des échantillons urinaires positifs 77 jours après leur dernière consommation de cette drogue. Cela complique considérablement les choses si on veut faire du dépistage de drogues dans le cadre d’un emploi ou pour établir si une personne a les facultés affaiblies.

La marijuana n’est cependant pas préjudiciable aux enfants et aux jeunes adultes seulement. L’exposition à la marijuana pendant la grossesse résulte en un poids moins élevé à la naissance, un risque accru de problèmes comportementaux et des difficultés neurocognitives en ce qui concerne la mémoire à court terme.

L’anandamide est responsable du développement du cerveau du fœtus et la consommation de marijuana pendant la grossesse, même à de faibles doses, interfère avec ce processus.

(1540)

De plus, un article publié en 2009 dans le Journal of Toxicology dit ceci :

En raison de la consommation de cannabis [...] de leurs mères, il se peut que les bébés qui allaitent présentent des effets physiologiques comme la sédation, un tonus musculaire réduit et d’autres effets néfastes.

En outre, bien qu’il semble que la marijuana aide à réduire la nausée, la consommation intensive de cette substance peut entraîner des vomissements violents et des douleurs abdominales, une affectation connue sous le nom de syndrome d’hyperémèse. À une époque, ce syndrome était considéré comme assez rare. Cependant, selon une étude publiée le mois dernier dans le journal Basic & Clinical Pharmacology & Toxicology, plus du tiers des personnes qui consomment fréquemment de la marijuana présentent des symptômes du syndrome d’hyperémèse.

Chers collègues, le temps ne me permet pas d’essayer d’énumérer les nombreux autres effets négatifs de la consommation de marijuana sur la santé, mais ils sont réels et nombreux. La question est de savoir ce qu’on peut faire.

Le meilleur moyen de réduire le préjudice causé par la marijuana et toute drogue illégale est d’en réduire la consommation. La légalisation aura l’effet contraire. Au lieu de réduire la consommation, la légalisation l’augmentera. La légalisation normalise une drogue dangereuse qui change des vies, ce qui réduit la perception des risques.

Selon la Drug Enforcement Agency du département de la Justice des États-Unis, des décennies d’observations ont permis aux chercheurs de constater que tout assouplissement des attitudes antidrogue entraîne une hausse de la consommation de drogue dans les années qui suivent.

La Drug Enforcement Agency dit également ceci :

La perception d’un adolescent à l’égard des risques associés à la consommation d’une substance est un important facteur déterminant lorsqu’il s’agit de savoir s’il consommera cette substance [...] les jeunes qui jugent qu’il existe un risque de préjudice élevé sont moins susceptibles de consommer des drogues que ceux qui jugent que le risque de préjudice est faible.

Les données historiques le montrent clairement.

Si on examine l’historique de la consommation de marijuana chez les jeunes, on remarque que, au cours des 50 dernières années, le taux de consommation a suivi une ligne de tendance presque identique aux États-Unis et au Canada. Au début des années 1970, le taux de consommation a commencé à augmenter rapidement jusqu’en 1978, où il a atteint un sommet d’environ 35 p. 100 au Canada et de 37 p. 100 aux États-Unis.

Ensuite, le taux de consommation a commencé à chuter — progressivement, puis rapidement — pendant les 13 années qui suivirent, jusqu’à ce qu’il atteigne un creux de près de 12 p. 100 en 1992. Cette tendance à la baisse s’est arrêtée en 1993, lorsque le taux de consommation chez les jeunes s’est remis à augmenter assez rapidement et, en 2015, il a atteint environ 22 p. 100 aux États-Unis et 24 p. 100 au Canada. Ces données proviennent de Statistique Canada.

La question est la suivante : pourquoi la situation a-t-elle changé?

L’American Society of Addiction Medicine s’est penchée sur cette question en 2012 et a découvert que, au cours des 40 dernières années, la consommation chez les jeunes a fluctué au même rythme que la perception du risque de dangers. Lorsque les jeunes perçoivent qu’il y a moins de dangers, le taux de consommation augmente; lorsqu’ils perçoivent que c’est plus dangereux, le taux de consommation diminue. Lorsqu’on reporte les données sur un graphique, les lignes sont presque symétriques. Vous pourrez consulter les graphiques en question. On vous les enverra par courriel.

Donc, quelle est la cause de la chute du taux de consommation des années 1980 et du début des années 1990? Les chercheurs ont remarqué que la baisse a coïncidé avec l’émergence du « mouvement des parents » aux États-Unis. On reconnaît que ce mouvement a changé l’attitude du public à l’égard de la marijuana, ce qui a entraîné une modification de la politique gouvernementale sous le président Reagan.

Les parents inquiets ont travaillé d’arrache-pied pour sensibiliser leurs enfants et le gouvernement aux dangers de la consommation de pot. La marijuana a été dénormalisée, et on a perçu davantage de dangers liés à la consommation de cette drogue. Ce qu’on a appelé le « mouvement des parents » a duré de 1978 à environ 1992. Cette période coïncide avec la plus importante chute du taux de consommation de marijuana chez les jeunes de l’histoire, étant donné que les jeunes obtenaient de l’information au sujet des dangers et des risques liés à la consommation.

Le gouvernement fédéral des États-Unis n’a pas encore légalisé la marijuana; dans les États où elle est permise, l’âge minimal à partir duquel la consommation est autorisée a été fixé à 21 ans.

Par conséquent, des changements s’imposent. Depuis quelque temps, le Canada se soucie beaucoup des commotions cérébrales. Un peu partout dans le monde, de nombreux protocoles stricts sur ce grave problème sont mis en œuvre dans les organisations sportives. Pourtant, la plupart des lésions causées par les commotions cérébrales finissent par guérir et n’altèrent pas irrémédiablement le cerveau. Pourtant, voilà que nous, sénateurs, semblons prêts à satisfaire le gouvernement Trudeau en acceptant la légalisation de cette herbe nocive qui, comme on le sait, cause des dommages permanents et irréversibles chez les plus vulnérables : les enfants et les jeunes adultes.

Pourquoi faudrait-il acquiescer, alors que les données obtenues au moyen de l’imagerie par résonance magnétique, la scintigraphie cérébrale et les autopsies prouvent les conséquences irréversibles de la consommation de cannabis?

La sénatrice Galvez a dit dernièrement qu’elle avait beaucoup de questions à poser au gouvernement. Tous les sénateurs devraient aussi avoir beaucoup de questions à poser. Honorables sénateurs, je vous rappelle que nous représentons 30 millions de Canadiens.

Chacun de nous devrait avoir des dizaines de questions à poser au gouvernement et exiger des réponses. Nous, les quelques personnes choisies pour effectuer un second examen objectif des projets de loi, ne devrions pas même songer à accepter cet infâme projet de loi avant d’avoir obtenu toutes les réponses, dans l’intérêt des Canadiens. Selon moi, il faudrait mener une campagne intensive de sensibilisation d’au moins quatre ans avant qu’un gouvernement ou un autre envisage d’adopter la moindre mesure législative en ce sens. Comme nos voisins américains l’ont démontré, lorsque les gens — quel que soit leur âge — connaissent tous les faits, ils disent non à la drogue. Je vous remercie.

Son Honneur la Présidente intérimaire : Sénatrice Unger, le sénateur Pratte voudrait vous poser une question, mais votre temps de parole est écoulé.

La sénatrice Unger : Puis-je avoir plus de temps pour répondre à une question?

Son Honneur la Présidente intérimaire : Honorables sénateurs, lui accordez-vous cinq minutes de plus?

Des voix : D’accord.

L’honorable André Pratte : Accepteriez-vous de répondre à une question?

La sénatrice Unger : Oui.

Le sénateur Pratte : Sénatrice, vous avez mentionné, dans votre allocution fort intéressante, que le pourcentage d’usagers variait au fil du temps, mais il y a une chose que vous avez omis de mentionner. C’est que cette évolution n’a pas du tout été influencée par le régime d’interdiction et que, par exemple, même si le nombre d’arrestations au Canada a parfois diminué, parfois augmenté, au fil des ans, le pourcentage d’usagers, lui, n’a pas du tout changé. C’est ce qui explique d’ailleurs que nous en soyons à vouloir remplacer un régime d’interdiction inefficace.

Conviendrez-vous que le régime d’interdiction, à tout le moins, n’a pas permis de réduire le nombre d’usagers et que nous devrions envisager une autre solution?

La sénatrice Unger : Sénateur Pratte, je n’ai pas parlé de condamnations ou de peines, mais je sais pertinemment que légalisation veut dire normalisation. Des enfants qui n’auraient peut-être jamais songé à consommer de la marijuana vont en faire l’expérience, maintenant que c’est légal et que le gouvernement a dit qu’il n’y avait pas de mal à le faire. Je pense donc que ce qu’il faut, comme aux États-Unis, ce sont des campagnes de sensibilisation, non pas après, mais avant l’adoption de cette mesure législative. Autrement, je n’ai rien à ajouter.

Des voix : Bravo!

(1550)

[Français]

L’honorable Lucie Moncion : Honorables sénateurs, mon propos d’aujourd’hui portera sur le projet de loi C-45, Loi concernant le cannabis et modifiant la Loi réglementant certaines drogues et autres substances, le Code criminel et d’autres lois. Ce projet de loi concerne une question sensible et complexe qui changera le portrait social et culturel du pays.

Parler de légalisation et de décriminalisation de la marijuana est une chose, mais discuter de ses effets et de la façon d’aider nos jeunes qui sont âgés de 10 à 17 ans en est une autre. À mon avis, cet aspect n’est pas suffisamment abordé dans l’étude de ce projet de loi et se retrouve au cœur de nos préoccupations.

Ce projet de loi n’offre aucune solution quant à la consommation précoce de marijuana et au développement probable de problèmes de santé mentale qui peuvent en découler.

[Traduction]

Nombre d’entre nous croient que les programmes d’éducation, de prévention et de sensibilisation sur la marijuana sont inadéquats, et que les investissements envisagés à ce chapitre sont insuffisants. Cela vaut aussi pour les investissements dans la recherche sur les effets nuisibles de la marijuana et dans la mise en œuvre de programmes de lutte contre la dépendance.

Selon un article du site web de la BBC sous la rubrique « Santé », la période de l’adolescence s’étend maintenant de l’âge de 10 ans à l’âge de 24 ans. Cette étape de la vie consacrée à l’exploration et à l’aventure est celle où le jeune tente de définir l’adulte qu’il deviendra, où il se croit invincible et à l’abri du danger. Le désir de vivre tout ce que la vie peut lui offrir est exaltant. Les jeunes veulent essayer le sexe, la drogue, la cigarette; ils recherchent les sensations fortes. C’est la nature même des jeunes qui vivent cette période passionnante de la vie.

Pour ces raisons, comme nous l’avons vu, c’est rêver en couleurs que de croire à l’élimination de la consommation du cannabis chez les jeunes.

[Français]

Mon propos à l’étape de la deuxième lecture vise à apporter une contribution complémentaire à celle de mes collègues qui se sont déjà exprimés sur les aspects qui les préoccupent relativement au projet de loi C-45. Cette contribution, je l’espère, permettra aux membres des comités qui étudieront cette question de mieux comprendre les aspects pour lesquels nous cherchons à obtenir l’assurance que rien n’aura été négligé dans l’étude de cet important projet de loi.

[Traduction]

Je vais mettre l’accent sur les questions clés concernant le cadre réglementaire du projet de loi C-45, notamment les multiples catégories de permis qui seront délivrés, le processus d’obtention d’un permis et l’habilitation de sécurité. Je parlerai brièvement de l’aspect financier du projet de loi, notamment du marché canadien de la production, du prix de vente par once et de la gestion de l’offre et de la demande. Enfin, je formulerai des observations sur le cannabis comestible et la culture non réglementée de plants de marijuana.

[Français]

Le projet de loi C-45 propose l’attribution de onze types de licences ou de permis, dont quatre sont destinés à la culture, deux, à la transformation, trois, aux tests, à la recherche et à l’exportation et, finalement, deux qui se rapportent à la vente de produits destinés à des fins médicales ou récréatives.

L’octroi des licences et des permis vise trois objectifs précis, soit 1) de permettre la mise en place d’une industrie légale, diversifiée et compétitive composée de grands et de petits commerçants dans toutes les régions du pays; 2) de réduire le risque que le crime organisé infiltre le marché des produits légaux; 3) de donner l’assurance que les produits légaux de cannabis répondent à des normes de qualité élevées. L’attribution, le suivi et la gestion de ces licences ou de ces permis et la vérification des antécédents judiciaires seront sous la gouverne du ministère de la Santé du Canada, sauf dans le cas de ceux qui toucheront la vente au détail des produits médicaux et récréatifs qui relèveront des compétences provinciales et territoriales.

Compte tenu de la complexité des opérations qui sera associée à l’émission des licences et des permis ainsi qu’aux infractions possibles, il sera nécessaire d’établir un cadre de travail où la collaboration de la GRC, du ministère de la Justice et des corps policiers du pays sera mieux définie.

[Traduction]

On propose que le ministre puisse, à partir de l’information communiquée par les divers services de police, refuser une autorisation de sécurité à quiconque est associé au crime organisé ou a reçu des condamnations antérieures pour trafic de drogue auprès des jeunes, corruption, blanchiment d’argent, fraude ou infractions avec violence.

On propose également d’exiger de fournir le nom des directeurs et des agents, non seulement des organismes qui font une demande de licence ou de permis, mais aussi de la société mère. Le nom des actionnaires détenant plus de 25 p. 100 des parts devra aussi être fourni, afin d’éviter que les vrais propriétaires se soustraient aux exigences de transparence.

[Français]

De prime abord, la logistique qui sous-tend la culture, la production et la vente de cannabis récréatif sera lourde. Le nombre important de licences et de permis et la réglementation liée au fonctionnement entier de cette nouvelle industrie seront d’autant plus complexes en ce qui concerne le processus d’octroi des licences, le suivi des récoltes et le contrôle de la production et de la chaîne d’approvisionnement. Le gouvernement devra être particulièrement vigilant dans l’attribution de ces licences et de ces permis.

De plus, la mise en place de la réglementation relative à l’industrie du cannabis récréatif nécessitera des suivis et des inspections fréquents de la chaîne de production, du cycle de transformation et des points de vente. Les producteurs seront tenus de faire des tests systématiques de la qualité, de suivre les bonnes pratiques de production et de tenir des rapports à jour concernant le volume de production, les quantités entreposées et la qualité des produits offerts sur le marché.

[Traduction]

Le gouvernement devra mettre en place un système de surveillance de toute la chaîne d’approvisionnement afin d’assurer la qualité des produits et leur conformité aux normes établies en matière de vente de produits de consommation, et pour empêcher le cannabis produit légalement d’être détourné vers le marché illicite.

Les coûts associés à la mise en œuvre de cette nouvelle infrastructure seront élevés et il faudra engager une main-d’œuvre hautement qualifiée pour répondre aux critères de surveillance et de contrôle. Sans pour autant remettre en question les compétences du gouvernement à ce chapitre, des incertitudes demeurent quant à la gestion et à la mise en œuvre de cette nouvelle industrie.

[Français]

Le marché du cannabis représente une excellente occasion d’affaires pour le Canada. Bien que nous puissions ne pas être d’accord avec la légalisation du cannabis, il n’en demeure pas moins que les retombées économiques qui sont associées à cette industrie seront importantes et qu’on verra de plus en plus de pays adhérer à la légalisation de la marijuana. À l’heure actuelle, le Canada est le plus grand producteur de cannabis médical au monde, et la concentration de producteurs la plus dense se trouve en Ontario.

[Traduction]

Une entreprise canadienne spécialisée dans la production de cannabis à des fins médicales a huit centres situés respectivement en Ontario, au Québec et en Saskatchewan. Les directeurs de l’entreprise travaillent à aménager, au Canada, 2,4 millions de pieds carrés supplémentaires pour la production de cannabis à des fins récréatives. Les avantages économiques associés à ce marché et les emplois créés seront importants pour les provinces de Terre-Neuve-et-Labrador, du Nouveau-Brunswick et de la Colombie-Britannique.

Signalons également que cette entreprise a établi des partenariats d’affaires avec d’autres pays, dont la Jamaïque, le Chili, le Brésil, l’Allemagne, l’Espagne, le Danemark et l’Australie. Elle bénéficie donc d’un accès accru aux matériaux bruts et à différentes souches de cannabis.

[Français]

Cela m’amène à aborder le prix de vente et la gestion de l’offre et de la demande du cannabis. L’un des objectifs avoués du gouvernement quant au projet de loi C-45 est de réduire ou même d’éliminer le marché illégal du cannabis. À ce titre, il devient donc essentiel d’étudier la question de la fixation du prix.

[Traduction]

D’après les recommandations formulées dans le rapport du directeur parlementaire du budget, le prix médian d’un gramme de cannabis devrait s’établir à environ 7,50 $ avant taxes. Ce rapport se concentre sur le prix unitaire, donc sur celui d’un gramme de cannabis, et non sur le coût de quantités plus élevées.

Une étude sur le prix du cannabis commandée par le gouvernement fédéral fait état d’un prix de 7,14 $ à 7,69 $ le gramme, selon la qualité du produit. Si le gouvernement souhaite affaiblir le marché noir du cannabis, il devra tenir compte des habitudes d’achat actuelles des consommateurs réguliers, qui achètent des quantités supérieures à un gramme.

Trois quantités sont particulièrement populaires sur le marché illicite. Les gens achètent souvent sept grammes pour environ 50 $. Une once, qui contient 28 grammes, se vend entre 120 $ et 190 $, et un quart de livre, soit quatre fois 28 grammes, se vend environ 400 $. Selon la quantité achetée, le prix au gramme se situe donc entre 3,57 $ et 7,14 $. Cela m’amène à remettre en question le prix unitaire établi par le gouvernement. Comment un prix unitaire de 10 $ le gramme peut-il aider l’État à faire concurrence au marché illégal?

(1600)

[Français]

Selon les recommandations du Groupe de travail sur la légalisation et la réglementation du cannabis, une limite de 30 grammes serait permise à des fins de possession personnelle de cannabis séché non médical en public. À quel prix seront vendus ces 30 grammes? 300 $?

On aura beau dire que les produits légaux sont de meilleure qualité et mieux contrôlés en matière de THC et de CBD, il n’en demeure pas moins que le prix du marché légal est élevé, ce qui nous porte à croire que les gains du marché licite seront moins importants qu'on l'a anticipé.

[Traduction]

Le pourcentage de THC dans le cannabis sera également un facteur important qui distinguera les deux marchés. Le marché illégal offre une concentration allant jusqu’à 30 p. 100, alors que le projet de loi C-45 parle d’une concentration de moins de 10 p. 100.

Selon les recommandations du Groupe de travail sur la légalisation et la réglementation du cannabis, la concentration ne devrait pas dépasser les 15 p. 100. Cet aspect mérite d’être étudié plus attentivement. D’une part, un cannabis avec une concentration de 10 p. 100 serait meilleur pour la santé et la sécurité de la population. D’autre part, ce pourcentage est trop faible pour attirer les consommateurs réguliers.

[Français]

Finalement, comment sera gérée l’offre du marché licite? Qu’arrivera-t-il si la production de cannabis licite est trop grande pour la demande du marché? Est-ce que le prix sera à la baisse? Est-ce que le gouvernement demandera aux producteurs de détruire les excès de leur production? Les excédents de production seront-ils récupérés par le gouvernement pour être transmis aux organisations qui font de la recherche sur le cannabis? À l’opposé, si l’offre est insuffisante pour la demande, où allons-nous chercher la production pour combler le déficit? Qu’arrivera-t-il au prix?

Passons maintenant aux produits comestibles contenant du cannabis qui ne seront disponibles que 12 mois après la mise en place du projet de loi C-45. Cette période de 12 mois sera essentielle pour que le gouvernement puisse se préparer adéquatement et sensibiliser la population aux spécificités des produits comestibles.

[Traduction]

Les produits comestibles contenant du cannabis sont offerts sous différentes formes, qu’il s’agisse d’aliments comme des huiles de cuisson et des boissons, d’onguents, d’extraits, de crèmes et de concentrés. Avec la légalisation du cannabis, nous trouverons des milliers de nouveaux produits de cette nature.

L’expérience du Colorado nous démontre que ces produits sont très populaires. Cependant, leurs effets sont moins connus que ceux de la fumée de cannabis, et, comme il est plus difficile de contrôler la quantité de THC consommée, il y a un risque de surconsommation. Alors que, en moyenne, les effets de la fumée de cannabis se font sentir neuf minutes après la consommation, les effets des produits comestibles apparaissent plus tard. Il faudra fournir au consommateur des renseignements et des instructions sur la quantité maximale qu’il peut consommer sur une période donnée.

[Français]

L’expérience du Colorado nous fait voir le danger que représente le cannabis comestible pour les enfants en matière de consommation accidentelle. Les incidents impliquant des enfants de moins de 8 ans ont plus que doublé à la suite de la légalisation des produits comestibles.

La période de 12 mois d’écart entre la légalisation du cannabis et celle des produits dérivés comestibles doit servir à sensibiliser les consommateurs aux dangers que représentent ces produits.

[Traduction]

Le Groupe de travail sur la légalisation et la réglementation du cannabis recommande d’interdire tout produit jugé attrayant pour les enfants, y compris les produits qui ressemblent à des aliments familiers ou les imitent, dont l’emballage ressemble à celui de bonbons, qui sont de couleur vive ou qui plaisent aux enfants.

Le groupe de travail a également recommandé que l’emballage soit opaque, refermable et à l’épreuve des enfants. Les produits comestibles pourraient même être mis dans des contenants scellés et difficiles à ouvrir, comme on le fait actuellement avec certains produits pharmaceutiques, des produits hautement toxiques ou des poisons.

[Français]

Quant aux emballages, ils devront préciser les informations relatives à leur confection et la quantité maximale de THC et de CBD par portion, et ils devront contenir un texte de mise en garde en matière de sécurité pour les enfants et pour les dangers associés à leur consommation.

Le dernier élément de mon exposé concerne la sécurité encadrant la production individuelle de plants de cannabis. Ce que l’on sait, c’est que le projet de loi permettra la culture de quatre plants dans une « maison d’habitation ». Des mesures de sécurité raisonnables devront être prises pour prévenir le vol et l’accès qu’auront les jeunes à ces plants.

La culture à petite échelle du cannabis à la maison n’est pas sans risques, surtout lorsqu’il est question de la sécurité des enfants. La version actuelle du projet de loi ne prévoit pas de restrictions quant aux espaces de culture verrouillables pour la production à l’intérieur et aux zones sécurisées pour la production en plein air et pour la visibilité des plantes depuis la rue ou les habitations adjacentes.

Son Honneur la Présidente intérimaire : Sénatrice, votre temps de parole est écoulé. Désirez-vous cinq minutes de plus?

La sénatrice Moncion : Oui, s’il vous plaît.

Des voix : D’accord.

La sénatrice Moncion : Merci.

Malgré le fait qu’il n’est pas prévu que ce type de culture soit nécessairement très populaire, il n’en reste pas moins qu’une réglementation adéquate doit être élaborée et mise en place afin de protéger les personnes vulnérables.

[Traduction]

Pour terminer, je tiens à parler de la nécessité de légaliser le cannabis. Depuis la fin des années 1960, des milliers de Canadiens consomment du cannabis en toute liberté. Le crime organisé tire plus de 4 milliards de dollars par année de la vente de cette substance.

Qu’on soit en faveur ou non de la légalisation du cannabis à des fins récréatives, il n’en demeure pas moins que ce produit est disponible sur le marché illicite et que les consommateurs y ont facilement accès. En légalisant la consommation du cannabis à des fins récréatives, nous permettons la création d’une industrie réglementée qui respecte des normes de qualité élevées et sur laquelle nous exerçons un certain contrôle. Je dis bien « un certain contrôle ». Nous fournissons aux Canadiens des produits normalisés qui répondent à des normes précises d’inspection. De plus, nous les informons des effets néfastes de la consommation de cannabis sur la santé mentale et physique, et nous leur permettons ainsi de prendre une décision éclairée.

Je vous remercie de votre attention.

L’honorable David Tkachuk : Honorables collègues, comme nous avons pu le constater à plusieurs reprises, que ce soit dans les propositions de réforme fiscale du ministre des Finances, dans les initiatives de maintien de la paix du ministre de la Défense ou dans le projet de loi sur le cannabis dont nous sommes actuellement saisis, le gouvernement ne porte pas une grande attention aux détails.

Comme l’a écrit Kelly McParland dans le National Post :

Le gouvernement montre l’étendue de sa capacité à créer des échecs : l’échec de la réforme électorale, l’échec de l’enquête sur les femmes disparues ou assassinées, l’échec de la politique concernant l’achat d’avions de chasse neufs […]

Si le gouvernement est incapable d’organiser correctement un voyage du premier ministre en Inde, comment peut-on lui faire confiance alors qu’il élabore un cadre pour la légalisation et la vente de marijuana?

Fidèle à son habitude, le gouvernement actuel ne semble pas avoir bien réfléchi aux conséquences des mesures qu’il propose. Ce qui importe pour lui, c’est la partie superficielle de son message — imposer les riches, le Canada est de retour —, pas l’établissement de politiques adéquates.

C’est l’évidence même : si vous n'êtes pas prêt, votre politique ne sera pas prête non plus. S’il y a bien un projet de loi qui mérite une analyse approfondie et un second examen objectif, c’est bien le projet de loi C-45. Si l’objectif est de légaliser la marijuana, alors il faut bien cerner toutes les lacunes qui existent et véritablement chercher à les corriger.

Les Canadiens connaissent le régime actuel depuis des décennies, alors quelle est l’urgence? Je suis certain que nous sommes en mesure d’attendre un peu plus afin de voir à maintenir la sécurité du public.

Tamara McCarron, candidate au doctorat en sciences de la santé à l’Université de Calgary, et Fiona Clement, professeure adjointe à cette même université, ont récemment écrit ce qui suit :

Selon nous, la réglementation de la consommation de marijuana au Canada est un projet qui pourrait prendre jusqu’à 10 ans. Certaines questions doivent être réglées de toute urgence avant la légalisation plus tard cette année, par exemple celles entourant la vente en ligne et la santé et sécurité au travail.

Ces femmes sont des scientifiques, elles sont des spécialistes. Voilà en plein le genre de personnes que le gouvernement actuel, sous le prétexte d’axer ses politiques sur des données probantes, a promis d’écouter.

Et elles ne sont pas les seules. J’ai reçu des dizaines de courriels, comme beaucoup d’entre vous, de personnes exprimant leurs inquiétudes légitimes quant à la légalisation accélérée de la marijuana. Je suis certain que le reste d’entre vous aussi.

Voici un extrait de l’un de ces courriels :

S’il y a une mesure législative qui nécessite manifestement un second examen objectif, c’est bien le projet de loi visant à légaliser la possession et la distribution de marijuana, selon moi. Parmi les nombreux experts médicaux qui nous avertissent que c’est préjudiciable non seulement à court terme, mais aussi à long terme se trouvent Santé Canada et l’Association médicale canadienne. Je vous prie d’agir pour que nos jeunes ne grandissent pas avec des capacités mentales réduites à cause de la consommation de marijuana. Par ailleurs, d’autres pays qui ont légalisé cette drogue sont arrivés à la conclusion que sa consommation est à l’origine d’un nombre plus élevé d’accidents de voiture. Non seulement les consommateurs, mais aussi tous les conducteurs sur nos routes courent un risque accru en raison de la présence de conducteurs aux facultés affaiblies. Protégez-nous de ce danger… La légalisation de la consommation de la marijuana, c’est s’engager sur l’effroyable voie de la mort et de la perdition.

(1610)

Voici une autre citation d’un homme qui a décrit certaines de ses inquiétudes. Il a cité des sources d’information réputées et a fourni des liens vers celles-ci. Voici comment il a résumé la situation :

Je ne suis pas nécessairement contre la décriminalisation ou la légalisation, mais il faudra que des études adéquates soient menées pour éclaircir les risques pour la santé. Il me semble que le gouvernement est imprudent d’aller de l’avant sans ces renseignements d’importance capitale. Quel mal y a-t-il à retarder la légalisation d’un an environ ou à prévoir assez de temps pour que des recherches adéquates soient effectuées […]. Il me semble que, à cette étape, seul le Sénat dispose du pouvoir nécessaire pour ralentir le processus et pour exiger qu’on prenne le temps de réaliser des recherches appropriées pour répondre aux préoccupations des citoyens canadiens. Je vous demande, en votre qualité de membre du Sénat canadien, de prendre une mesure peut-être impopulaire et difficile, soit aider le Sénat à remplir son mandat, qui consiste à procéder à un « second examen objectif » du projet de loi C-45.

Ces courriels sont différents de ceux que nous recevons habituellement dans le cadre d’une campagne bien organisée d’un groupe d’intérêt qui envoie des lettres types. Ces courriels sont envoyés par des Canadiens qui sont inquiets, non pas parce qu’ils sont contre la légalisation du cannabis, mais parce que, comme moi, ils estiment que le gouvernement ne s’est pas suffisamment préparé et qu’il n’a pas assez étudié les conséquences de la légalisation.

Une étude sur la légalisation menée au Colorado a révélé que le nombre de jeunes âgés de 12 à 17 ans qui avaient consommé de la marijuana au cours du dernier mois avait augmenté de 20 p. 100 pendant une période moyenne de deux ans depuis que cet État a légalisé la marijuana à usage récréatif, comparativement à une période moyenne de deux ans précédant la légalisation. À l’échelle nationale, le nombre de jeunes qui avaient consommé de la marijuana au cours du dernier mois a diminué de 4 p. 100 au cours de la même période.

Le Sénat n’est-il pas l’endroit idéal pour effectuer ce travail, puisqu’il dispose d’un pouvoir de second examen objectif dont il vante tant les mérites? Les sénateurs nommés par Justin Trudeau n’arrêtent pas de nous dire que c’est la raison d’être du Sénat, n’est-ce pas? Ce projet de loi n’arrive-t-il pas à point nommé pour procéder à un tel examen?

Pour un grand nombre de Canadiens, l’une des questions les plus épineuses, c’est celle de la sécurité en milieu de travail. Quant à moi, c’est la sécurité des transports. Certaines personnes affirment qu’il n’y a rien à craindre. Par exemple, lorsqu’un article publié dans Maclean's a mentionné l’importance de faire des recherches plus poussées sur les effets de la marijuana en milieu de travail, un observateur politique que nous connaissons tous a affirmé ce qui suit sur Twitter :

Pouvons-nous nous cesser cela? On ne consomme pas d’alcool en milieu de travail, et l’alcool est légal. Pourquoi serait-ce différent pour la marijuana?

Il a peut-être oublié l’affaire du pilote de Sunwing qui a été arrêté il y a un an alors qu’il était aux commandes d’un avion. Il avait consommé de l’alcool. Comment les autorités l’ont-elles appris? Ce n’est pas au moyen d’un contrôle aléatoire, puisque cela n’existe pas au Canada. C’est parce que le pilote était inconscient dans le poste de pilotage avant le décollage. Le taux d’alcool dans son sang était trois fois plus élevé que la limite permise pour conduire une voiture, et c’est sans parler d’un avion chargé de passagers.

Ce n’est pas une anomalie. D’après des chiffres de l’administration fédérale de l’aviation des États-Unis, un pilote par mois a échoué aux tests de dépistage d’alcool et de drogue sur une période de cinq ans, et, au total, 64 pilotes ont échoué aux tests de dépistage de 2010 à 2015. Pour des gens comme nous, qui prenons l’avion deux fois par semaine lorsque le Sénat siège, cela donne à réfléchir.

Nous ajoutons maintenant une autre substance à la liste. Ce n’est pas que la marijuana n’a pas été aussi largement disponible que l’alcool auparavant, mais, comme elle deviendra légale, le gouvernement doit intervenir. Il incombe au gouvernement de prendre toutes les mesures nécessaires pour assurer la sécurité en milieu de travail et la sécurité des transports.

Voici un passage de l’article que j’ai mentionné plus tôt et qui a paru dans Maclean's :

Ce qui est étonnant, c’est le peu d’éléments de preuve qui existent au sujet des répercussions de la marijuana en milieu de travail et le manque de cohérence des données existantes.

Une recherche de pointe doit être effectuée dans les plus brefs délais pour que l’on puisse mieux comprendre les effets de la marijuana en milieu de travail. Il faut également des tests précis permettant de mesurer le degré d’intoxication des personnes sur les lieux de travail au Canada.

Il est facile de rester assis tranquillement et d’affirmer qu’il n’y a aucune raison de s’inquiéter. Voici, par exemple, un message publié sur Twitter : « Vous ne consommez pas d’alcool au travail bien que l’alcool soit légal. Pourquoi les choses seraient-elles différentes quand il est question de fumer? » À peine une semaine plus tard, deux policiers de Toronto ont dû appeler des renforts parce qu’ils avaient mangé des produits comestibles contenant de la marijuana pendant leurs heures de travail. Ils n’avaient pas fumé, au moins.

D’après un sondage de Santé Canada, seulement la moitié des répondants considèrent que la consommation de marijuana a une incidence sur la capacité de conduire un véhicule. Près de 20 p. 100 sont convaincus que le cannabis n’a aucun effet sur les facultés du conducteur. Selon un sondage de l’Association canadienne des automobilistes, 1 p. 100 des répondants sont d’avis qu’une personne qui a consommé de la marijuana conduit mieux qu’une personne sobre.

Les policiers canadiens craignent à juste titre que la légalisation de la marijuana n’entraîne une augmentation des cas de conduite avec facultés affaiblies. C’est ce qui s’est produit dans l’État de Washington et au Colorado. Les experts en toxicomanie sont aussi du même avis. Je vous garantis que, si les gens croient être en mesure de conduire une voiture après avoir consommé de la drogue, ils penseront aussi pouvoir conduire un train ou piloter un avion après en avoir consommé.

J’ai rencontré plusieurs personnes qui œuvrent dans des secteurs où la sécurité en milieu de travail est un enjeu de taille, et elles sont toutes grandement préoccupées. Elles nous encouragent vivement à voir à ce que le gouvernement, avant de faire adopter ce projet de loi, fasse d’abord adopter une loi qui rendra obligatoire le dépistage d’alcool et de drogue dans les postes sous réglementation fédérale où la sécurité est importante.

Cela pourrait retarder l’adoption du projet de loi à l’étude, certes, mais je pourrais m’en accommoder. Par contre, je regretterais amèrement, comme tout le monde ici, je crois, d’avoir voté en faveur de ce projet de loi et de voir des règlements s’ajouter plus tard non pas pour concrétiser la mesure adoptée, mais en réaction à une tragédie.

[Français]

L’honorable Éric Forest : Honorables sénateurs, je désire partager avec vous mes principales préoccupations au sujet du projet de loi C-45, qui aura un impact important sur notre société.

Il y a déjà eu beaucoup d’interventions en Chambre au sujet de la légalisation du cannabis, et certains des points soulevés m’interpellent particulièrement. D’emblée, j’aimerais remercier les sénateurs Joyal et Pratte, qui font un excellent travail pour mettre en relief les problèmes très préoccupants reliés à la capitalisation des compagnies de production de cannabis. Garder cet enjeu sur la scène publique est impératif.

Il serait parfaitement incohérent pour nous, comme parlementaires, de prétexter la légalisation en raison de la volonté de sortir la criminalité de la distribution illicite du cannabis, pour ensuite lui donner l’occasion d’entrer par la porte arrière en finançant les compagnies de production légales. J’appuierai donc les modifications à la loi en ce sens, le cas échéant.

D’entrée de jeu, je suis en faveur de la légalisation du cannabis pour une raison fort simple : toute quantité que nous réussirons à extirper du marché noir en offrant une alternative légale, avec des produits certifiés et contrôlés, est en soi un gain pour notre société, compte tenu du constat actuel de la consommation au Canada.

Je souscris aux objectifs du gouvernement, y compris celui d’extirper la production et la distribution du cannabis des milieux criminels. Je suis aussi d’accord avec l’évaluation selon laquelle la politique publique de criminalisation et de prohibition du cannabis n’a pas fonctionné, loin de là.

Je suis également en faveur de la planification des travaux qui a été négociée au cours des derniers jours avec les différentes directions, afin de reporter la mise en œuvre de la loi après le 1er juillet 2018, pour deux raisons. Premièrement, il semble clair, sur le terrain, que la date du 1er juillet provoquait énormément d’anxiété et d’inquiétude. Tant qu’à faire un changement aussi radical, aussi bien le faire adéquatement. Je fais écho à la ministre déléguée à la Santé publique du Québec, Lucie Charlebois, qui se dit favorable à l’idée de reporter la mise en œuvre de la loi. Deuxièmement, c’est notre mission d’améliorer ce projet de loi. On devra prendre le temps nécessaire pour le faire, et je suis persuadé que c’est ce que nous ferons.

Mon intervention comportera deux axes aujourd’hui. Dans un premier temps, j’aimerais revenir sur un point que j’entends régulièrement lors des différentes allocutions sur le projet de loi C-45. Comme je ne siège pas au Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie, qui étudiera vraisemblablement le projet de loi, j’aimerais soulever certains points de réflexion qui, je l’espère, sauront nourrir le débat lors de cette étude.

Notre collègue, ma voisine de pupitre, la sénatrice Galvez, s’est exprimée en cette Chambre de la façon suivante lors de son discours :

Le projet de loi C-45 supprime les interdictions sous toutes leurs formes sans pour autant les remplacer par une réglementation adéquate. Il transfère la majeure partie des responsabilités aux provinces, qui les rejettent à leur tour sur les municipalités. Nous devrions envisager de garder davantage de mécanismes de contrôle au gouvernement fédéral.

(1620)

Certes, en ce qui a trait au Code criminel, nous sommes obligés de respecter la primauté du gouvernement fédéral. Cependant, nous sommes contraints de vivre aujourd’hui avec un modèle de répartition des compétences selon une Constitution qui date du XIXe siècle.

Le principe établi selon lequel le gouvernement fédéral hérite d’une compétence qui n’a pas été explicitement désignée comme étant autre que fédérale m’agace. L’Union européenne existe depuis 1957 selon le principe de la subsidiarité, qui donne à l'ordre de gouvernement le plus efficace les moyens de faire la prestation de services ou de réglementer adéquatement dans ce champ de compétence.

Dans cette perspective, et sachant que l’enjeu de la légalisation du cannabis se vivra au quotidien dans la cour des municipalités, Ottawa doit s’assurer que les communautés auront les moyens législatifs, techniques et financiers nécessaires pour assumer pleinement ces lourdes responsabilités. Cette réflexion doit être faite en concertation avec les provinces, les territoires et le monde municipal.

[Traduction]

Chaque collectivité vit une réalité différente. Pensons, par exemple, à l’excellent discours dans lequel mon collègue, le sénateur Patterson, a décrit les préoccupations que le projet de loi suscite parmi les maires de son territoire.

[Français]

Chacun des maires avait des préoccupations différentes. Des solutions fédérales à taille unique à des problèmes locaux ne me semblent pas une façon efficace d’élaborer des politiques publiques. Nous sommes en train d’écrire une page de l’histoire avec la légalisation du cannabis. Non seulement faut-il réussir à produire un cadre réglementaire et une loi qui atteignent les objectifs, mais pourquoi ne pourrions-nous pas profiter de cette occasion pour adopter un modèle de mise en œuvre différent? Donnons aux communautés locales les pouvoirs d’adapter la réglementation à leurs réalités.

Je crois que nous avons déjà fait un bon pas en avant grâce à la décision du ministre des Finances de redonner 75 p. 100 des revenus de la taxe d’accise aux provinces. Il serait relativement aisé de copier, pour le cannabis, le modèle du fonds de la taxe d’accise sur l’essence. Il s’agit d’un financement stable, prévisible et directement injecté dans les communautés qui font la prestation des services.

[Traduction]

En fait, le gouvernement fédéral travaille rarement sur le terrain. Il y a parmi nous d’anciens maires et d’anciens chefs de police qui comprennent très bien de quoi je parle. C’est sur le terrain que l’on pourra voir les conséquences des décisions que nous prenons en cette enceinte.

[Français]

J’aimerais que cette avenue soit examinée lors de la mise en œuvre du cadre réglementaire. Le gouvernement fédéral a certainement les fonds nécessaires, mais pas nécessairement la solution à tous les maux. Dans un deuxième temps, j’aimerais simplement énoncer faire part d'une certaine piste de réflexion que le Comité sénatorial des affaires sociales pourrait envisager d’étudier lorsque le projet de loi lui sera transmis. Ce sont des préoccupations qui me sont régulièrement exprimées et que je partage, et je crois qu’elles méritent d’être analysées sérieusement.

Tout d’abord, la Norvège semble avoir le taux de consommation de cannabis le plus bas au monde, et ce, même si le gouvernement norvégien n’a décriminalisé son usage que très récemment, en décembre 2017. Recevoir des représentants de l’administration du gouvernement norvégien à cet égard pourrait nous être utile pour qu’ils puissent nous parler de leurs expériences et que nous puissions nous inspirer de leurs bonnes pratiques.

Par ailleurs, je suis très préoccupé par le phénomène psychologique de la banalisation de la substance, particulièrement chez nos jeunes, surtout compte tenu de l’option qui permettrait aux jeunes d’avoir en leur possession moins de cinq grammes de cannabis. Les exemples très probants de la consommation d'alcool et de cigarette chez nos jeunes devraient nous inciter à redoubler de prudence et à faire en sorte que le régime de prévention et de sensibilisation s’adressant aux jeunes soit parmi les plus solides et soit doté des moyens financiers nécessaires qui permettront d’atteindre ces objectifs.

D’autre part, la légalisation de la consommation du cannabis peut être interprétée comme une banalisation de la consommation, ce qui peut se traduire par une augmentation de cette dernière. Soyons donc doublement prudents. Le but n’est pas d’encourager la consommation. Le projet de loi doit donner des directives claires aux provinces en ce qui concerne la distribution et la mise en marché. À mon avis, le marketing et la promotion visant à encourager la vente doivent être interdits. De plus, nous devons nous assurer que le taux de THC sera clairement et facilement repérable et qu’il sera indiqué sur tous les produits mis en vente, afin que les consommateurs puissent faire un choix éclairé quant à leurs achats. Ici, la compétence fédérale doit être uniforme dans l’ensemble du pays.

Quant à l’épineuse question de la conduite avec facultés affaiblies par le cannabis, comme celle de se présenter au travail dans cet état, nous devons être clairs et nous inspirer de nos lois qui traitent de l’alcool. Dans ces domaines, d’une part, la législation devra être ferme et précise pour appuyer celles et ceux qui auront la responsabilité de la faire respecter. D’autre part, ces personnes devront avoir la formation et les outils adéquats pour remplir efficacement leur mandat. Toute la question qui entoure les lieux de consommation autorisés sera cruciale, à mon avis. Je suis persuadé que l’étude qui est en cours à l’heure actuelle sur le projet de loi C-46 fera la même chose pour la conduite avec facultés affaiblies par la consommation de cannabis.

Nous aurons l’obligation de réviser, dans quelques années, dans quelle mesure nous aurons réussi à atteindre les objectifs poursuivis par la loi. Pour y arriver, les indicateurs devront être très clairs : le pourcentage de la population qui consomme, le nombre de cas d’infraction à la loi devant la justice, et le nombre d’accidents sur nos routes. J’enjoins à cet effet nos institutions publiques et privées à être diligentes dans leur collecte de données. Ces informations seront particulièrement précieuses afin de déterminer si les objectifs du projet de loi ont été atteints.

Pour terminer, le Canada s’apprête à faire un pas important en termes de politiques publiques. Il ne faudra pas avoir peur de l’avouer de façon responsable si certains aspects de la légalisation, telle que nous l’aurons adoptée, ne se déroulent pas comme prévu, et si certains aspects, particulièrement en ce qui a trait à la protection des jeunes, n’atteignent pas leur objectif. Notre mandat en cette Chambre est de faire de notre mieux en analysant tous les aspects de cette loi si importante afin de prendre les meilleures décisions dans l’intérêt suprême des Canadiennes et des Canadiens. En conclusion, j’espère sincèrement que les intérêts personnels, corporatifs ou partisans n’entraveront pas nos échanges, qui seront déterminants pour l’avenir de notre pays. Je vous remercie.

Son Honneur la Présidente intérimaire : Sénateur Forest, acceptez-vous de répondre à quelques questions?

Le sénateur Forest : Avec plaisir.

L’honorable Serge Joyal : Sénateur Forest, si mes renseignements sont exacts, vous avec été président de la Fédération des municipalités du Québec à une certaine époque. Dans l’Ottawa Citizen de ce matin, le chef du Service de police d’Ottawa, M. Bordeleau, soutenait que, pour la seule force policière d’Ottawa, il en coûterait, selon son évaluation, 6,2 millions de dollars au cours de la première année de la légalisation du cannabis. Si nous essayons de projeter l'évaluation des coûts de la police d’Ottawa sur l’ensemble des différentes municipalités au Canada, je crois que le montant nécessaire aux services de police municipaux dans le cadre de la mise en œuvre des projets de loi C-45 et C-46 dépassera les 75 p. 100 de ce que le gouvernement récupérera avec la taxe sur la vente de produits du cannabis dans les différents points de vente ou de distribution.

Lorsque vous étiez à la Fédération des municipalités, avez-vous eu l’occasion d’évaluer l’impact global que le projet de loi aura sur le budget des municipalités, en relation avec les coûts additionnels que le projet de loi imposera aux services de police?

Le sénateur Forest : Je vous remercie de votre question. Je présidais l’Union des municipalités du Québec, qui représentait environ 80 p. 100 de la population du Québec. Toutefois, la fédération est un excellent regroupement également au niveau des municipalités.

(1630)

À l’époque, on n’avait pas évalué l’impact. Toutefois, selon mon expérience, je peux vous affirmer que les municipalités auront la tâche de faire respecter au quotidien les règles qui guideront la légalisation du cannabis. Un premier pas a été franchi lorsque le ministre Morneau a décidé de remettre 75 p. 100 des redevances aux provinces plutôt que 50 p. 100. L’histoire nous dit toutefois que ces redevances, même si elles sont versées aux provinces, n’iront pas automatiquement aux municipalités, qui géreront ce dossier au quotidien. Pour répondre à votre question, je dirais que, à ce sujet, il n’y a pas eu d’évaluation. Des coûts importants seront rattachés à la formation et à l’achat d’équipement pour les forces policières. Ces coûts seront absorbés par les municipalités. Il faut se rappeler que la structure financière des municipalités est axée sur la taxe foncière. Or, cette taxe est tout à fait dépassée pour un enjeu aussi capital que celui de la réglementation du cannabis.

Le sénateur Joyal : Compte tenu de son expérience en affaires municipales, l’honorable sénateur ne pourrait-il pas tenter de s’enquérir auprès de ses collègues de la Fédération des municipalités pour voir quelles projections raisonnables il pourrait y avoir? Comme il le dit, finalement, les coûts réels de la mise en application de la loi se répercuteront sur les contribuables des municipalités par le biais de la taxe foncière, dont la marge est très limitée. D’ailleurs, on a vu ce qui s’est produit récemment à la Ville de Montréal.

Pourrait-on...

Son Honneur la Présidente intérimaire : Je m’excuse, sénateur Forest, mais votre temps de parole est écoulé. Désirez-vous encore cinq minutes?

Le sénateur Forest : S’il vous plaît.

Son Honneur la Présidente intérimaire : Le consentement est-il accordé, honorables sénateurs?

Des voix : Oui.

Le sénateur Joyal : Sénateur Forest, pouvez-vous nous fournir des chiffres qui nous donneraient une idée de l’ampleur de ce dont on parle ici? D’un point de vue pratique, j’ai l’impression qu’on se trouve dans un monde d’angélisme, car aucune donnée ne nous a été fournie quant à l’impact financier de ce projet de loi sur les forces de l’ordre, qui auront la responsabilité de mettre la réglementation en application.

Le sénateur Forest : C’est avec plaisir que je vais m’enquérir auprès de mes anciens collègues. Je présume qu’il existe une évaluation sur l’ampleur des enjeux en cause.

La sénatrice Moncion : J’ai une courte question. La marijuana n’est pas encore légale. Toutefois, les policiers sont déjà formés en conséquence. De quel ordre seraient les coûts supplémentaires que l’on prévoit?

Le sénateur Forest : La marijuana, en effet, n’est pas encore légale. Bien souvent, ce ne sont pas seulement les corps policiers municipaux qui interviennent, mais aussi la police provinciale et la GRC. Les coûts seront liés à l’achat d’appareils de dépistage pour conduite avec facultés affaiblies et aux contrôles routiers. On devra aussi prévoir de la formation, car les municipalités ont peu de personnel formé à ces fins. Les corps policiers, de façon unanime, s’entendent pour dire que la formation est un enjeu et qu’il faut acquérir l’équipement nécessaire.

[Traduction]

L’honorable Carolyn Stewart Olsen : Chers collègues, je prends la parole aujourd’hui pour participer à notre débat sur le projet de loi C-45 — ou la Loi sur le cannabis vue sous un nouvel angle. J’aimerais remercier tous mes collègues qui ont pris part au débat d’avoir soulevé des points très importants auxquels nombre d’entre nous n’avaient peut-être pas pensé. C’est également une excellente occasion de voir le Sénat en action, discutant et débattant avec civilité pour tenter d’accomplir le travail nécessaire dans ce dossier. Je vous en remercie.

En tant que sénatrice, mon travail consiste à représenter les habitants du Nouveau-Brunswick. À cette fin, une des meilleures choses que je puisse faire est de souligner les préoccupations soulevées dans la province, qui se rapprochent de mes propres doutes en ce qui concerne ce projet de loi sur le cannabis, en tant que sénatrice et en tant qu’ancienne professionnelle de la santé.

Le gouvernement du Nouveau-Brunswick a indiqué qu’il appuyait la façon de procéder d’Ottawa. Cependant, dans le cadre de ses consultations et de mes propres rencontres avec les politiciens municipaux, il est ressorti certains points qui posent problème et doivent être étudiés de près, car, d’après ce que je peux voir, les choses vont trop vite pour les provinces.

L’Assemblée législative du Nouveau-Brunswick a mis sur pied un comité chargé de consulter la population de la province pendant l’été 2017. Le comité a présenté son rapport en septembre, soulignant que le gouvernement provincial n’avait aucun choix en ce qui concerne cette mesure législative. Voici ce qu’on peut lire dans son rapport :

[…] la légalisation du cannabis à des fins récréatives ne rapportera aucune recette aux provinces sans détaillant; cependant, ces dernières seront tout de même responsables des questions au chapitre de la santé et de la sécurité publiques en lien avec la légalisation du cannabis.

Je vous rappelle que ce rapport date de 2017.

On ne s’étonnera donc pas que, comme l’a souligné la ministre Petitpas Taylor lorsqu’elle s’est présentée devant le comité plénier, les provinces pressent le gouvernement fédéral de leur accorder plus de temps.

Il ne s’agit pas d’une nouvelle préoccupation. À l’automne, un représentant du ministère de la Justice de la Saskatchewan a comparu devant le Comité de la santé de la Chambre des communes et a indiqué que le ministère a été obligé de se presser :

Nous devons déroger à nos règles de pratique habituelles pour pouvoir respecter l’échéance, en juillet 2018. Bien que nous fassions de notre mieux pour y arriver, nous ne pouvons pas garantir que nous parviendrons à respecter l’échéancier fixé par le gouvernement fédéral.

[...] Si nous avions disposé de 12 à 18 mois après la sanction royale, le délai aurait été facile à respecter [...]

[...] Le gouvernement fédéral a imposé beaucoup de responsabilités aux provinces, sans leur donner beaucoup de temps pour se préparer [...]

Le temps nécessaire pour établir des règlements appropriés est un facteur critique dont nous tenons compte dans nos démarches actuelles. Nous mettons un produit nocif dans les mains des gens et leur donnons l’impression qu’il peut être consommé sans danger. Au bout du compte, et peu importe ce que le gouvernement affirme au sujet de ses plans de sensibilisation, la légalisation représente une permission.

Comme l’a indiqué l’Association canadienne de la gestion de l’approvisionnement pharmaceutique, en pratique, le Colorado a légalisé le cannabis il y a trois ans et ce n’est que maintenant qu’il peut satisfaire convenablement à la demande. Le Nevada a légalisé le cannabis en juillet. Cependant, en raison d’une mauvaise planification, il a manqué de cannabis après moins de deux semaines et a dû prendre des mesures d’urgence pour garantir l’approvisionnement.

Les Canadiens s’attendent à mieux. À l’approche de la légalisation, nous ne voulons pas répéter l’expérience américaine. À l’échelle nationale, les policiers partagent ces préoccupations. Les corps policiers ne seront tout simplement pas prêts à temps. C’est ce que m’ont dit des politiciens municipaux du Nouveau-Brunswick, qui travaillent déjà avec les corps policiers locaux qui sont aux prises avec d’importantes contraintes budgétaires. De nombreuses régions du Nouveau-Brunswick dépendent déjà entièrement de la GRC, qui peut à peine répondre à la demande et qui a désespérément besoin de ressources et de formation supplémentaires si le gouvernement s’attend à ce qu’elle gère ces responsabilités additionnelles à l’interne.

Dans un mémoire présenté au Comité de la santé de la Chambre des communes, l’Association canadienne des chefs de police fait écho à ces préoccupations :

Les services de police canadiens ne seront pas équipés pour fournir aux agents la formation et les ressources nécessaires afin de faire respecter le nouveau régime dans les délais prévus actuels.

L’empressement avec lequel le gouvernement a fait progresser ce projet de loi s’ajoute à la confusion réglementaire qui s’empare de plus en plus de l’industrie.

Comme l’a déclaré l’avocate ottavienne Tina Fraser à une journaliste de l’Ottawa Citizen :

Quelqu’un devrait inventer l’application « Suis-je en train d’enfreindre la loi? » pour aider les Canadiens à s’y retrouver une fois que le cannabis sera légal.

Mme Fraser fait remarquer qu’il n’y aura pas deux provinces qui auront le même cadre législatif et réglementaire. Autrement dit, les gens auront bien du mal à savoir comment se procurer de cette substance et en consommer sans enfreindre la loi. La confusion est telle qu’elle s’étend aussi au secteur du chanvre.

Comme l’a fait remarquer la sénatrice Griffin, le projet de loi C-45 pourrait avoir de graves répercussions sur la culture du chanvre. Le gouvernement n’a encore aucun texte réglementaire à soumettre aux producteurs de chanvre, même provisoire. Que doivent-ils faire, en attendant que la loi soit adoptée, pour savoir ce qui est permis ou non? Comment les forces de l’ordre et les organismes de réglementation pourront-ils faire la distinction entre le chanvre légal, le cannabis qu’on fait pousser légalement à l’intérieur, et le cannabis illégal qui est cultivé à l’extérieur? Je vous le demande derechef : comment pourra-t-on faire la différence?

(1640)

L’un des principaux arguments avancés afin de justifier le fait de respecter un échéancier aussi serré pour la légalisation de la marijuana, ce sont les dizaines d’années de rapports consignés qui recommandent la légalisation ou la décriminalisation de cette drogue. Le sénateur Dean a mentionné spécifiquement la commission Le Dain de 1969-1972, le Comité spécial du Sénat sur les drogues illicites de 2002 et, bien sûr, le plus récent Groupe de travail sur la légalisation et la réglementation du cannabis de 2016.

La commission Le Dain est l’examen le plus exhaustif sur l’interdiction du cannabis qui n’a probablement jamais été fait. La commission a parcouru plus de 80 000 kilomètres, elle a tenu des audiences dans 27 villes et 23 universités, mais, surtout, elle a effectué une analyse systémique de tous les ouvrages scientifiques connus à l’époque portant sur la consommation de cannabis.

La commission s’est abstenue de recommander la légalisation complète que nous envisageons actuellement, mais il n’en demeure pas moins qu’elle a recommandé fortement la décriminalisation.

On peut se demander pourquoi, alors, Pierre Trudeau n’a jamais donné suite aux recommandations de la commission et pourquoi ses travaux sont demeurés sur les tablettes pendant plus de 30 ans. On ne peut qu’avancer des hypothèses, mais la réponse réside peut-être dans les recherches que la commission a découvertes. À l’époque, on en savait peu au sujet du cannabis et de ses effets. Or, le rapport final faisait mention de médecins signalant le lien entre la consommation chronique de cannabis et les troubles mentaux comme la schizophrénie. Même à l’époque, les commissaires étaient en mesure de constater que le cannabis avait fort probablement un effet néfaste sur le processus de maturation. C’était il y a 30 ans.

À l’époque, la commission Le Dain n’était pas la seule initiative gouvernementale en vue d’étudier le cannabis de manière exhaustive.. Aux États-Unis, la commission Shafer, de l’administration Nixon, a clairement indiqué comment ces rapports devaient être perçus au fil des ans :

Des médias, d’éminents politiciens, des éducateurs et des chefs religieux considèrent que ce rapport véhicule l’idée que [le cannabis] n’est pas dangereux. Une lecture attentive [du rapport] […] indique que la commission ne recommande pas de légaliser [le cannabis] […]

Nous sommes d’avis, au contraire, que les effets sociaux et médicaux néfastes [du cannabis] qui ont déjà été signalés par la commission [sur le cannabis] et qui apparaissent dans la littérature médicale antérieure et actuelle ne justifient pas la légalisation du cannabis, où que ce soit dans le monde.

L’incidence de cette déclaration est renforcée par le fait que le cannabis a changé radicalement depuis que ces commissions ont présenté leurs rapports, il y a plus de 40 ans.

Comme l’a signalé l’Association médicale canadienne au Comité de la santé de la Chambre des communes, depuis le début des années 1980, le cannabis est devenu 10 fois plus puissant.

Nous savons que la consommation du cannabis n’est peut-être pas sans danger. Selon le Centre canadien sur les dépendances et l’usage de substances, le seul organisme du Canada mandaté par la loi afin de réduire les méfaits de la drogue sur les Canadiens :

La consommation de cannabis affecte le cortex préfrontal, qui continue à se développer jusqu’à la mi-vingtaine. Cette partie du cerveau est cruciale aux processus cognitifs supérieurs, comme le contrôle des impulsions, la mémoire à court terme, la prise de décisions, la planification, la résolution de problèmes et la régulation des émotions. La consommation régulière à long terme de cannabis qui a commencé à l’adolescence est liée à des troubles à long terme de l’attention, de la mémoire et de l’apprentissage verbal.

Les données recueillies par l’Institut canadien d’information sur la santé montrent que la situation devrait nous préoccuper. Il y a eu une augmentation des séjours à l’hôpital en raison de troubles liés aux cannabinoïdes. On parle d’une hausse 44 p. 100 entre 2006 et 2011, et cela ne représente que les cas qui ont été signalés.

Le groupe de travail établi en 2016 a abordé la légalisation du cannabis d’une façon un peu différente. Lors d’une séance d’information tenue en novembre et destinée aux parlementaires, l’honorable Anne McLellan, présidente du Groupe de travail sur la légalisation et la réglementation du cannabis établi par le gouvernement, a dit que le groupe de travail n’avait pas abordé la question en se demandant « si » l’on devrait réglementer le cannabis, mais en se demandant « comment » le réglementer, ce qui illustre la mentalité du gouvernement, à l’époque. Donc, on n’a pas dû examiner les dangers possibles pour en arriver — peut-être — à une recommandation différente. Néanmoins, le groupe de travail a aussi souligné que davantage de sensibilisation et de consultations sont nécessaires.

Honorables sénateurs, le gouvernement n’a tout simplement pas démontré le bien-fondé de la légalisation du cannabis. Les lacunes dans la recherche, la nature nuisible du cannabis et la confusion absolue quant à la réglementation sécuritaire et à la surveillance de cette substance comme produit de consommation sont des thèmes qui reviennent dans les débats sur le cannabis depuis plus de 40 ans. J’ai entendu nos collègues traiter de ces questions, mais je ne suis toujours pas convaincue. De plus, je pense que les Canadiens ne sont toujours pas convaincus non plus. Même si certains sondages indiquent que les Canadiens sont en faveur de la légalisation du cannabis, d’autres sondages indiquent que, en général, les Canadiens ne font pas confiance à l’industrie du cannabis lorsqu’il s’agit de la sûreté du produit.

Des centaines, voire des milliers de Canadiens nous ont écrit personnellement ou ont écrit à notre bureau au Sénat pour exprimer leurs préoccupations au sujet des répercussions de la légalisation pour eux et pour leur collectivité.

En présentant un tel projet de loi, le gouvernement contribue davantage à établir une culture de permissivité à l’égard des drogues et d’autres substances toxiques. Le gouvernement présente ces propositions en disant qu’il cherche à réduire le taux d’incarcération, mais, en réalité, il veut imposer d’énormes changements sociaux aux Canadiens.

Son empressement est incompréhensible. En l’espace d’un an, nous sommes passés des débats sur l’injection d’héroïne supervisée à ceux sur la consommation de cannabis à l’échelle du pays. Je ne suis pas convaincue que le Canada et les Canadiens veulent être connus pour leurs lois libérales sur la consommation de drogue. D’une certaine façon, ce virage représente une forme d’ingénierie sociale, en ce sens qu’il a des conséquences sur la perception que les autres ont de nous et sur celle que nous avons de nous-mêmes.

Nous devons penser aux Canadiens et bien les représenter, en prenant le temps qu’il faut pour examiner pleinement et avec la diligence raisonnable requise le projet de loi C-45.

Son Honneur le Président : Les honorables sénateurs sont-ils prêts à se prononcer?

Des voix : Le vote!

L’honorable Yonah Martin (leader adjointe de l’opposition) : Je pense que la sénatrice Eaton voulait prendre la parole à ce sujet. Je propose l’ajournement du débat.

(Sur la motion de la sénatrice Martin, le débat est ajourné.)

[Français]

Projet de loi sur la radiation de condamnations constituant des injustices historiques

Projet de loi modificatif—Deuxième lecture—Suite du débat

L’ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l’honorable sénateur Cormier, appuyée par l’honorable sénatrice Petitclerc, tendant à la deuxième lecture du projet de loi C-66, Loi établissant une procédure de radiation de certaines condamnations constituant des injustices historiques et apportant des modifications connexes à d’autres lois.

L’honorable Marc Gold : Honorables sénateurs, je prends la parole en faveur du projet de loi C-66, Loi établissant une procédure de radiation de certaines condamnations constituant des injustices historiques et apportant des modifications connexes à d’autres lois. Les discours puissants et émouvants de la sénatrice Pate et du sénateur Cormier ont déjà largement décrit le projet de loi, ses objectifs et sa portée. Aujourd’hui, je tiens à expliquer brièvement pourquoi j’appuie ce projet de loi en principe et à présenter les questions qui, je l’espère, seront étudiées par le comité.

Dans son essai intitulé Les Identités meurtrières, le réputé auteur franco-libanais Amin Maalouf nous rappelle le danger de miser sur une seule facette de notre personnalité pour symboliser ce que nous sommes en tant que personne. En réalité nous avons de multiples identités, qu’il s’agisse de notre profession ou de notre métier, de notre religion, de notre sexe, de notre idéologie politique, de notre état civil, de notre orientation sexuelle ou, encore, de notre origine nationale. La liste fluctue au rythme de la diversité humaine.

[Traduction]

Pour reprendre les paroles du grand poète américain Walt Whitman, nous contenons des multitudes. Voilà où le bât blesse.

(1650)

L’injustice dont ont été victimes les membres de la communauté LGBTQ2 consistait à ne tenir compte que d’une seule dimension de leur identité, c’est-à-dire leur orientation sexuelle. La loi les considérait exclusivement sous cet angle, qu’il s’agisse de leur travail, de leurs loisirs, de leur vie publique ou de leur vie privée, chez eux. Et la loi était sévère. Des carrières ont été détruites et des vies ont été ruinées. Pourquoi? Simplement pour avoir aimé quelqu’un et pour avoir aimé d’une certaine manière.

Aucune excuse ne saura effacer ce qui s’est passé et aucune loi ne pourra éliminer la souffrance endurée par ceux qui ont été condamnés en vertu de lois que nous considérons aujourd’hui comme inconstitutionnelles. Toutefois, en tant que parlementaires, nous avons la possibilité de remédier à cette injustice et nous devrions profiter de l’occasion qui se présente à nous de le faire.

Honorables sénateurs, nous répétons régulièrement, à l’intention de nos collègues et d’autres personnes, que, en notre qualité de sénateurs, nous devons veiller à ce que les lois respectent les valeurs enchâssées dans la Constitution ainsi que les droits des minorités. Autrement dit, notre travail est de nous assurer que nos lois sont justes ou, à tout le moins, qu’elles ne sont pas injustes. Lorsque nous pouvons corriger une injustice historique, je crois que nous avons l’obligation constitutionnelle de le faire.

Sur le plan personnel, je considère ce projet de loi comme particulièrement digne de mon appui, parce que je suis ainsi fidèle à certains éléments importants de ma propre identité. L’idéal de l’égalité, comme composant fondamental de la justice, était au cœur de ma carrière de constitutionnaliste. Il est aussi au cœur de la tradition religieuse à laquelle j’appartiens et qui est incarnée par le Deutéronome, où la quête de la justice est définie comme un devoir fondamental.

[Français]

Honorables sénateurs et sénatrices, le projet de loi C-66 n’est pas parfait. En effet, il s’est attiré des critiques virulentes de la part d’un groupe d’historiens. Ces derniers perçoivent le projet de loi comme le produit de l’opportunisme politique et soutiennent qu’il comporte des failles au regard de plusieurs aspects importants.

Certains des problèmes qu’ils soulignent ont déjà été abordés par le sénateur Cormier et la sénatrice Pate. Je ne répéterai donc pas leurs propos. D’ailleurs, je m’attends à ce que le comité qui étudiera le projet de loi convoque ces historiens à titre de témoins et évalue leurs recommandations visant à améliorer le projet de loi.

Je tiens toutefois à aborder certains points. L’une de leurs principales critiques à l’égard du projet de loi est qu’il n’inclut pas tous les crimes commis envers les membres de minorités sexuelles. Il restreint plutôt les crimes à ceux qui enfreignent la Charte canadienne des droits et libertés. Les détracteurs du projet de loi estiment que la liste des crimes devrait être élargie pour inclure les lois régissant les maisons de débauche, les actions indécentes, l’obscénité et le vagabondage.

[Traduction]

Je comprends cette critique et j’y suis sympathique. Cependant, j’accepte aussi les raisons que le gouvernement fait valoir pour mettre l’accent sur les crimes qui ont été injustement reprochés à ces personnes. De plus, le projet de loi C-66 est une première étape pour réparer les injustices causées par l’application des lois pénales aux membres de la communauté LGBTQ2, mais ce n’est pas nécessairement la dernière et ce n’est pas non plus une mesure à minimiser. Le projet de loi C-66 prévoit la radiation des casiers judiciaires de centaines, voire de milliers de Canadiens qui, dans notre regard actuel, ont été condamnés à tort. Voilà qui est juste et bon. N’oublions pas que le mieux est l’ennemi du bien.

Cela étant dit, certaines critiques vis-à-vis du projet de loi semblent mériter une étude plus approfondie de la part du comité. Je vais aborder deux d’entre elles.

Tout d’abord, on a fait valoir que les casiers judiciaires ne devraient pas être détruits, mais plutôt conservés à titre de dossiers historiques. Selon moi, cette idée vaut la peine d’être étudiée. Par conséquent, j’encourage le comité à considérer la possibilité de réaliser les objectifs de la loi tout en conservant les dossiers historiques à des fins de recherche et d’enseignement.

Le comité devrait également se pencher sur les dispositions du projet de loi posant comme critère que les participants à l’activité visée par la condamnation maintenant jugée inconstitutionnelle étaient âgés de 16 ans au moment de l’activité. Comme certains détracteurs l’ont souligné, l’âge de consentement aux activités hétérosexuelles analogues était 14 ans jusqu’en 2008. N’est-ce pas là une forme de discrimination fondée sur l’orientation sexuelle? Ne renforce-t-on pas ainsi l’idée selon laquelle les personnes appartenant à une minorité sexuelle sont une menace pour les enfants? Le comité devrait étudier cette question avec attention.

Honorables sénateurs, notre rôle à l’étape de la deuxième lecture est de débattre du projet de loi afin d’en examiner le principe. Je vais conclure sur ce point.

Je ne crois pas que le projet de loi C-66 soit motivé par l’opportunisme politique. Je ne le vois pas comme une offrande à l’autel de la rectitude politique. Au contraire, je suis d’avis que le projet de loi C-66 est issu du principe voulant que le gouvernement et les lois doivent chercher à remédier aux injustices lorsque c'est possible de le faire.

En ce qui concerne le Sénat, je crois qu’il revient aux sénateurs de prendre des mesures afin de réparer une injustice historique indéniable perpétrée contre des concitoyens canadiens en raison d’une seule et unique facette de leur identité.

Honorables sénateurs, le projet de loi C-66 représente un important pas en avant. J’en appuie le principe et je vous exhorte à faire de même.

(Sur la motion de la sénatrice McPhedran, le débat est ajourné.)

Projet de loi sur les sanctions non liées au nucléaire contre l’Iran

Troisième lecture—Suite du débat

L’ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l’honorable sénateur Tkachuk, appuyée par l’honorable sénateur Carignan, C.P., tendant à la troisième lecture du projet de loi S-219, Loi visant à dissuader l’Iran de parrainer des actes constituant du terrorisme, de l’incitation à la haine et des violations des droits de la personne.

L’honorable Yonah Martin (leader adjointe de l’opposition) : Honorables sénateurs, cet article en est au 14e jour. J’en ai discuté avec la sénatrice Cools. Avec votre consentement, je demande que le débat soit ajourné à mon nom.

(Sur la motion de la sénatrice Martin, le débat est ajourné.)

Projet de loi sur le cadre fédéral relatif à l’état de stress post-traumatique

Deuxième lecture—Suite du débat

L’ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l’honorable sénateur White, appuyée par l’honorable sénateur Enverga, tendant à la deuxième lecture du projet de loi C-211, Loi concernant un cadre fédéral relatif à l’état de stress post-traumatique.

L’honorable Joseph A. Day (leader des libéraux au Sénat) : Honorables sénateurs, je me joins au débat avec mes collègues pour appuyer le projet de loi C-211, qui demande l’élaboration d’un cadre global relatif à l’état de stress post-traumatique. Je tiens à remercier le sénateur Housakos d’avoir été le parrain de ce projet de loi indispensable et la sénatrice Bernard des observations réfléchies qu’elle a présentées plus tôt sur le sujet.

Je n’ai pas l’intention de parler longtemps aujourd’hui, mais je voulais attirer votre attention et insister sur le travail qui a déjà été fait dans ce dossier au Sénat et, en particulier, par le Sous-comité des anciens combattants du Comité sénatorial permanent de la sécurité nationale et de la défense.

Lorsque j’étais président de ce sous-comité en 2014, celui-ci a commencé une étude exhaustive sur les répercussions médicales, sociales et opérationnelles des problèmes de santé mentale dont sont atteints des membres actifs et des membres retraités des Forces armées canadiennes. Entre autres problèmes, mentionnons les blessures de stress opérationnel, que l’on appelle parfois BSO, comme l’état de stress post-traumatique, ou ESPT. Notre étude avait pour objet d’examiner les programmes et services, tant publics que privés, offerts aux militaires actifs et aux anciens combattants des Forces armées canadiennes et de la Gendarmerie royale du Canada souffrant de blessures de stress opérationnel. Nous voulions aussi nous documenter sur les nouvelles technologies et les nouveaux traitements utilisés pour surmonter les problèmes de santé mentale.

(1700)

Nous avons commencé par entendre des représentants des Forces armées canadiennes et de la GRC, des fonctionnaires, des experts en santé mentale et des fournisseurs de soins. Nous avons beaucoup appris sur la prévalence de l’état de stress post-traumatique et sur les programmes et services offerts à l’époque. Nous avons appris, en particulier, que l’état de stress post-traumatique est l’une des blessures opérationnelles les plus souvent associées au service militaire. Ainsi, selon le Dr Greg Passey, qui travaille à la clinique de traitement des traumatismes liés au stress opérationnel de la Colombie-Britannique, la recherche montre qu’entre 5 et 15 p. 100 — voire plus — de militaires qui reviennent de théâtres d'opérations sont en état de stress post-traumatique. Nous nous sommes documentés sur les composantes du traitement — traitement clinique, tel que la thérapie comportementale, accompagné ou non de médication, et appui psychologique offert, par exemple, par la famille et les collègues.

Nous avons également beaucoup appris sur la recherche relative aux blessures de stress opérationnel qui englobent tous ces différents symptômes. De concert avec le Collège militaire royal du Canada à Kingston, l’Institut canadien de recherche sur la santé des militaires et des vétérans, qui a été fondé il y a un peu plus de sept ans à l’Université Queen’s, est un leader dans cette recherche. Je peux vous dire, honorables collègues, que 43 universités du Canada et d’ailleurs collaborent à cette recherche. Outre les partenariats formés dans chacune de ces universités, il y a littéralement des centaines de chercheurs œuvrant dans ce domaine. Nous devrions être très fiers de l’œuvre de pionnier accomplie dans ce domaine par l’institut, qui a connu un essor très rapide.

Les Forces armées canadiennes et Anciens Combattants Canada travaillent beaucoup avec l’Institut canadien de recherche sur la santé des militaires et des vétérans.

Enfin, nous avons reçu beaucoup d’information de représentants de haut niveau des Forces armées canadiennes, de la Défense nationale, de la GRC ainsi que d’Anciens Combattants Canada sur divers programmes et services qu’ils fournissent à leurs membres en service et aux anciens combattants souffrant de blessures de stress opérationnel. Nous avons entendu parler de ce qui a bien fonctionné, mais aussi des obstacles bien réels à la collaboration entre les services. Bien que le sous-comité ait constaté de grands progrès, il reste encore beaucoup de travail à faire.

En juin 2015, après 13 audiences, nous avons déposé un rapport provisoire décrivant les conclusions du sous-comité. Je vous le recommande. C’est un excellent document d’information.

Aujourd’hui, près de trois ans plus tard, un article paru récemment dans le National Post nous rappelle que le problème persiste. Selon la Défense nationale, le nombre de membres des Forces armées canadiennes qui ont fait une demande de prestations d’invalidité à long terme a augmenté de 60 p. 100 au cours des cinq dernières années.

Comme le savent de théâtres d'opérations sénateurs, les symptômes de l’état de stress post-traumatique apparaissent souvent de nombreuses années après le traumatisme. C’est ce que nous commençons à voir, et ce que nous avons observé chez les anciens combattants de la guerre d’Afghanistan, un conflit où certaines personnes commencent tout juste à comprendre certains des symptômes que ces hommes et ces femmes ignoraient avoir.

Une autre facette de ce problème est extrêmement pénible. Les sénateurs se souviennent du nombre de décès annoncé chaque jour et qui ne cessait de grimper au moment de la présence du Canada en Afghanistan. Au total, 158 soldats sont morts dans des opérations pendant les années que nous avons passées en Afghanistan, mais, honorables sénateurs, on estime à près de la moitié de ce chiffre ceux qui sont morts par suicide depuis qu’ils sont rentrés d’Afghanistan, soit plus de 71 jusqu’à maintenant. Ce sont 71 anciens combattants de la guerre en Afghanistan qui sont morts parce qu’ils ne pouvaient pas supporter l’état de stress post-traumatique. C’est énorme. C’est près de la moitié. Nous avons souvent vu l’autre chiffre, mais nous ne voyons pas assez souvent ce deuxième chiffre pour comprendre que nous avons là un défi colossal.

Honorables sénateurs, selon le ministère, l’augmentation du nombre de demandes de prestations d’invalidité de longue durée est en partie attribuable à une sensibilisation et à une prise de conscience accrues à l’égard de ce problème, et c’est peut-être vrai. Les chiffres augmenteront à mesure que nous perfectionnerons les méthodes de diagnostic, car nous posons maintenant un diagnostic qui n’existait pas auparavant.

Voici ce que dit un article récent :

Depuis longtemps, des spécialistes nous préviennent qu’il faudra attendre des années avant de bien saisir l’ampleur des coûts psychologiques associés à la guerre en Afghanistan, puisqu’on s’attend à ce que bien d’autres anciens combattants demandent de l’aide après avoir participé à des missions [dans ce pays].

J’aimerais également souligner que le trouble de stress post-traumatique est un problème qui n’est pas seulement associé aux forces armées et au service militaire. Selon le Dr Passey, dont j’ai parlé plus tôt, le taux de trouble de stress post-traumatique et de suicide est même plus élevé chez les premiers intervenants, les ambulanciers, les pompiers et les policiers que chez les militaires et les anciens combattants qui ont combattu en Afghanistan. Il nous a dit également que le taux de trouble de stress post-traumatique est plus élevé chez les membres de la GRC que chez les membres des Forces armées canadiennes. Il y a donc un taux plus élevé chez les agents de la GRC et les premiers intervenants que chez les militaires, et nous savons déjà que le taux observé chez les militaires est inacceptable.

Natalie Harris, une ambulancière paramédicale qui a témoigné devant le Comité permanent de la santé à l’autre endroit, a raconté en détail comment elle a souffert du trouble de stress post-traumatique. Voici ce qu’elle a dit :

Nous pensions être suffisamment forts, mais personne n’est à l’abri. La force ne se mesure pas en fonction du nombre de décès que nous constatons. Elle se mesure par le nombre de décès dont nous acceptons de parler pour pouvoir dormir la nuit. Les premiers intervenants sont des gens extraordinaires, mais accepter d’en devenir un ne signifie pas qu’on accepte d’avoir le cœur brisé.

C’est tout à fait vrai. J’espère que la mise en place d’un cadre sur l’état de stress post-traumatique aidera tous les Canadiens qui, comme Mme Harris, souffrent de ce problème. C’est l’objectif de ce projet de loi.

(1710)

Notre bon ami, l’ancien sénateur et lieutenant-général Roméo Dallaire, m’a rappelé récemment que le 100e anniversaire du décès du lieutenant-colonel et député Samuel Sharpe serait célébré ce printemps.

Vous le savez peut-être, le colonel Sharpe était député et il a servi en tant que soldat dans la bataille de la crête de Vimy, ainsi qu’à Passchendaele. Il est aussi, malheureusement, le premier politicien canadien qui, après être rentré de son service à l'étranger, s'est enlevé la vie en raison de troubles du stress post-traumatique. Je crois qu’il est tout à fait à propos que nous débattions de ce projet de loi à l’approche de cet anniversaire. J’appuie sans réserve le projet de loi C-211, et j’espère que vous ferez de même.

(Sur la motion de la sénatrice McPhedran, le débat est ajourné.)

Projet de loi sur la Semaine de l’égalité des sexes

Deuxième lecture—Suite du débat

L’ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l’honorable sénateur Dawson, appuyée par l’honorable sénateur Joyal, C.P., tendant à la deuxième lecture du projet de loi C-309, Loi instituant la Semaine de l’égalité des sexes.

L’honorable Yonah Martin (leader adjointe de l’opposition) : Je souhaite ajourner le débat pour le reste du temps de parole dont je dispose.

Son Honneur le Président : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion?

Des voix : D’accord.

(Sur la motion de la sénatrice Martin, le débat est ajourné.)

L’étude sur l’élaboration d’une stratégie pour faciliter le transport du pétrole brut vers les raffineries de l’Est du Canada et vers les ports situés sur les côtes atlantique et pacifique du Canada

Sixième rapport du Comité des transports et des communications et demande de réponse du gouvernement—Suite du débat

L’ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l’honorable sénateur MacDonald, appuyée par l’honorable sénateur Patterson,

Que le sixième rapport du Comité sénatorial permanent des transports et des communications, intitulé Des pipelines pour le pétrole : protéger notre économie, respecter notre environnement, qui a été déposé auprès du greffier du Sénat le 7 décembre 2016, soit adopté et que, conformément à l’article 12-24(1) du Règlement, le Sénat demande une réponse complète et détaillée du gouvernement, le ministre des Ressources naturelles ayant été désigné ministre chargé de répondre à ce rapport, en consultation avec les ministres des Transports et des Pêches, des Océans et de la Garde côtière canadienne.

L’honorable Joseph A. Day (leader des libéraux au Sénat) : Honorables sénateurs, cet article en est au 15jour. J’ai réfléchi à certaines observations, mais je ne suis pas encore prêt à faire mon exposé. Avec le consentement du Sénat et nonobstant l’article 4-15(3) du Règlement, je demande que le débat soit ajourné à mon nom.

Son Honneur le Président : Le consentement est-il accordé, honorables sénateurs?

Des voix : D’accord.

Son Honneur le Président : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion?

Des voix : D’accord.

(Sur la motion du sénateur Day, le débat est ajourné.)

[Français]

L’étude sur les questions techniques et réglementaires liées à l’arrivée des véhicules branchés et automatisés

Adoption du neuvième rapport du Comité des transports et des communications et de la demande de réponse du gouvernement

Le Sénat passe à l’étude du neuvième rapport du Comité sénatorial permanent des transports et des communications, intitulé Paver la voie : technologie et le futur du véhicule automatisé, déposé auprès de la greffière du Sénat le 29 janvier 2018.

L’honorable Dennis Dawson propose :

Que le neuvième rapport du Comité sénatorial permanent des transports et des communications, intitulé Paver la voie : technologie et le futur du véhicule automatisé, qui a été déposé auprès de la greffière du Sénat le 29 janvier 2018, soit adopté et que, conformément à l’article 12-24(1) du Règlement, le Sénat demande une réponse complète et détaillée du gouvernement, le ministre des Transports étant désigné ministre chargé de répondre à ce rapport, en consultation avec les ministres suivants :

a)Innovation, Sciences et Développement économique;

b)Défense nationale;

c)Sécurité publique et Protection civile;

d)Emploi, Développement de la main-d’œuvre et Travail.

— Honorables sénateurs, j’aimerais profiter de l’occasion pour remercier mes collègues du Comité sénatorial permanent des transports et des communications. Comme vous le savez, le rapport a été déposé pendant la période de relâche.

[Traduction]

Je tiens à dire au sénateur Black que, comme c’est sa première journée, je ne vais pas parler longtemps, parce que je ne veux pas m’interposer entre lui et sa famille.

Je remercie mes collègues du comité. Je vois le sénateur Boisvenu devant moi. Il m’a beaucoup aidé. Je vois aussi la sénatrice Bovey. Je remercie le président du Comité des transports, qui m’a donné l’occasion de présenter ce rapport. Je tiens également à remercier les analystes et les gens de Direction des communications.

Si vous n’y voyez pas d’inconvénient, je propose que le rapport soit adopté.

[Français]

Son Honneur le Président : Les honorables sénateurs sont-ils prêts à se prononcer?

Des voix : Le vote!

Son Honneur le Président : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion?

Des voix : D’accord.

(La motion est adoptée, et le rapport est adopté.)

[Traduction]

Le travail législatif du Sénat

Interpellation—Suite du débat

L’ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur l’interpellation de l’honorable sénatrice Bellemare, attirant l’attention du Sénat sur le travail législatif qu’a accompli le Sénat de la 24e à la 41e législature et concernant des éléments d’évaluation.

L’honorable Yonah Martin (leader adjointe de l’opposition) : Honorables sénateurs, j’ai discuté avec la sénatrice Andreychuk et je sais qu’elle abordera cette question après les semaines de relâche. Nous en sommes au 14e jour, et je constate qu’elle a déjà demandé qu’on reprenne le compte des jours à zéro. Je voudrais donc, avec le consentement du Sénat, ajourner le débat à son nom.

Son Honneur le Président : Le consentement est-il accordé, honorables sénateurs?

Des voix : D’accord.

Son Honneur le Président : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion?

Des voix : D’accord.

(Sur la motion de la sénatrice Martin, au nom de la sénatrice Andreychuk, le débat est ajourné.)

Le Sénat

Son rôle de protection dans la représentation des régions et des minorités—Interpellation—Suite du débat

L’ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur l’interpellation de l’honorable sénatrice Seidman, attirant l’attention du Sénat sur son rôle de protection dans la représentation des régions et des minorités.

L’honorable Yonah Martin (leader adjointe de l’opposition) : Honorables sénateurs, cet article en est lui aussi au 15e jour. Je n’ai même pas eu l’occasion d’amorcer le débat. J’ai déjà demandé qu’on reprenne le compte des jours à zéro à quelques reprises. Je ne sais pas si d’autres sénateurs souhaitent prendre la parole. C’est la sénatrice Seidman qui avait lancé cette interpellation.

Avec le consentement du Sénat, j’aimerais proposer l’ajournement du débat.

L’honorable Jane Cordy : Pouvez-vous nous dire combien de fois vous l’avez déjà ajourné?

La sénatrice Martin : Ce serait probablement la troisième fois.

La sénatrice Cordy : C’est beaucoup.

La sénatrice Martin : Je sais. C’est pourquoi, si cela ne dérange personne, j’aimerais proposer l’ajournement du débat à mon nom, avec le consentement du Sénat.

Son Honneur le Président : Le consentement est-il accordé, honorables sénateurs?

Des voix : D’accord.

Son Honneur le Président : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion?

Des voix : D’accord.

(Sur la motion de la sénatrice Martin, le débat est ajourné.)

La pertinence de l’objectif du plein-emploi

Interpellation—Suite du débat

L’ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur l’interpellation de l’honorable sénatrice Bellemare, attirant l’attention du Sénat sur la pertinence du plein-emploi au XXIe siècle dans une économie globalisée.

L’honorable Ratna Omidvar : Honorables sénateurs, je propose que le débat soit ajourné à la prochaine séance du Sénat au nom de la sénatrice Petitclerc.

Son Honneur le Président : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion?

Des voix : D’accord.

(Sur la motion de la sénatrice Omidvar, au nom de la sénatrice Petitclerc, le débat est ajourné.)

Agriculture et forêts

Motion tendant à autoriser le comité à étudier les questions concernant l’agriculture et les forêts—Ajournement du débat

L’honorable Diane F. Griffin, conformément au préavis donné le 26 février 2018, propose :

Que le Comité sénatorial permanent de l’agriculture et des forêts, conformément à l’article 12-7(10) du Règlement, soit autorisé à examiner, afin d’en faire rapport, les questions qui pourraient survenir occasionnellement concernant l’agriculture et les forêts;

Que le comité fasse rapport au Sénat au plus tard le 30 juin 2019.

—Je propose l’adoption de la motion inscrite à mon nom.

Son Honneur le Président : Quelqu’un souhaite-t-il débattre de la motion ou poser une question?

L’honorable Carolyn Stewart Olsen : Accepteriez-vous, sénatrice, de répondre à une question?

La sénatrice Griffin : Certainement.

(1720)

La sénatrice Stewart Olsen : Je lis : « Que le Comité [...] soit autorisé à examiner, afin d’en faire rapport, les questions qui pourraient survenir occasionnellement concernant l’agriculture et les forêts […] ».

Pourriez-vous en dire un peu plus sur ce que vous étudierez?

La sénatrice Griffin : Certainement. Le comité demande un mandat plutôt général, parce que cette formule semble bien fonctionner pour plusieurs autres comités. L’ordre de renvoi au Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie en est un exemple.

Le Comité de l’agriculture et des forêts aurait ainsi l’occasion de réagir rapidement s’il survenait un dossier urgent justifiant notre attention. Cela pourrait ne prendre qu’une petite partie du calendrier du comité et déboucher, ou non, sur un rapport complet au Sénat.

L’important est d’avoir la flexibilité d’étudier toute question qui relève du mandat du comité. De toute évidence, ce mandat porte sur l’agriculture et les forêts, au sens le plus large. Toutefois, il englobe également des politiques du gouvernement fédéral, en particulier pour tout ce qui se rapporte aux forêts, et pas nécessairement les forêts situées sur des terres de la Couronne ou provinciales seulement. Pensons par exemple à la responsabilité fiduciale envers les Autochtones, à la protection des espèces en voie de disparition, aux oiseaux migrateurs, aux eaux navigables, aux pêches, à l’évaluation environnementale ainsi qu’à la recherche et aux technologies forestières associées à l’exploitation, sans oublier les questions liées à la conservation et au bien-être des régions rurales du Canada.

Comme vous pouvez le constater, c’est un mandat plutôt large. Vous comprendrez donc pourquoi le comité demande cet ordre de renvoi général. Il pourra ainsi réagir rapidement aux dossiers importants.

La sénatrice Stewart Olsen : Merci, sénatrice. Je comprends votre raisonnement, mais je ne suis pas très chaude à cette idée. Il me semble que vous auriez le temps de demander le consentement du Sénat pour étudier un nouveau dossier.

J’aime savoir ce que font les comités. Bien que je doive m’en remettre au reste des sénateurs, je m’interroge sur le vaste mandat du comité. Il n’indique pas clairement ce que vous devez étudier et il vous permet de vous pencher sur ce que vous voulez, comme des coûts que le Sénat n’a pas encore examinés ou d’autres choses du genre.

Je me pose des questions à ce sujet. Je ne sais pas si j’aime cette idée, mais je m’en remets aux sénateurs. Merci.

Son Honneur le Président : Sénatrice Griffin, voulez-vous répondre?

La sénatrice Griffin : Oui, merci.

Je comprends ce que vous dites. Vous ne voulez pas que les comités courent dans toutes les directions et étudient tout et n’importe quoi au point où ils nuisent aux travaux les uns des autres. Ce n’est pas notre intention. Le comité fait attention de rester en communication avec les autres comités, comme le Comité des affaires étrangères, afin d’éviter de nuire à leurs travaux.

Pour préciser, je vais prendre comme exemple le projet de loi C-45, que j’appelle la Loi sur la marijuana. Certains des problèmes qu’il pose touchent à l’agriculture, notamment à l’utilisation des terres. Le comité n’aurait pas un grand rôle à jouer dans ce dossier, mais il aurait la marge de manœuvre nécessaire pour l’étudier et faire part de son avis aux comités qui examinent les dispositions les plus importantes du projet de loi C-45. Ce n’est qu’un exemple.

Je ne crois pas que cela prendrait beaucoup de temps. En fait, ce serait peut-être même une façon de déterminer si nous voulons réaliser une étude sur un sujet quelconque. L’objectif du comité ne serait pas de faire une étude. Il nous aiderait plutôt à décider si nous voulons effectivement aller plus loin et faire une étude complète, auquel cas nous nous tournerions vers le Sénat dans son ensemble pour obtenir un ordre de renvoi lié à l’étude.

L’honorable Scott Tannas : Sénatrice Griffin, d’après ce que j’ai pu comprendre, beaucoup de comités disposent d’un ordre de renvoi général. Est-ce que votre comité en a un, ou est-ce ce que vous tentez de faire au moyen de cette motion?

La sénatrice Griffin : Je vous remercie de votre question. En effet, beaucoup de comités disposent d’un ordre de renvoi général, mais pas le nôtre. Nous tentons donc d’en obtenir un.

L’honorable Yonah Martin (leader adjointe de l’opposition) : Je n’ai pas de question. Étant donné le débat qui vient d’avoir lieu, je pense qu’il serait sage de réfléchir à cette question. En conséquence, je demande que le débat soit ajourné à mon nom.

(Sur la motion de la sénatrice Martin, le débat est ajourné.)

[Français]

Les défis de l’alphabétisation et des compétences essentielles au vingt et unième siècle

Interpellation—Ajournement du débat

L’honorable Diane Bellemare (coordonnatrice législative du gouvernement au Sénat), ayant donné préavis le 13 février 2018 :

Qu’elle attirera l’attention du Sénat sur les défis de la littératie et des compétences essentielles au 21e siècle pour le Canada, les provinces et les territoires.

— Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd’hui pour attirer l’attention du Sénat sur les défis du Canada en matière de littératie et de compétences essentielles au XXIe siècle.

[Traduction]

J’aimerais d’abord remercier les sénateurs qui se sont exprimés sur cette question, que ce soit récemment ou il y a plus longtemps. Je pense tout particulièrement aux sénatrices Fairbairn, Callbeck, Hubley, Cordy, Griffin, Hartling et Ringuette, ainsi qu’aux sénateurs Demers et McIntyre. J’espère n’avoir oublié personne.

En 1987, un sondage intitulé « Broken Words » a révélé que plus de 5 millions d’adultes canadiens, soit environ 24 p. 100 de la population en âge de travailler, étaient des analphabètes fonctionnels. Cinq millions. Comme vous le savez, de nos jours, pour pouvoir tirer son épingle du jeu dans notre monde complexe, il ne suffit plus de savoir lire, écrire et compter. Le Canada est-il vraiment prêt à s’adapter aux nouvelles technologies comme l’intelligence artificielle et à en tirer profit?

[Français]

Au cours des quelques minutes qui me sont imparties, j’aborderai trois questions. Quels constats peut-on dresser des statistiques officielles sur le niveau d’alphabétisation et de compétences essentielles des Canadiens et des Canadiennes? Est-il important de s’en préoccuper? Peut-on faire mieux?

Commençons par définir ce qu’on entend par l’alphabétisation et les autres compétences de base. En d’autres mots, quelles compétences essentielles doit détenir une personne qui désire travailler et vivre décemment au XXIe siècle?

Le Bureau de l’alphabétisation et des compétences essentielles distingue neuf compétences essentielles, comme l’a fait remarquer le sénateur Harder. Il s’agit de la lecture, de l’utilisation de documents, du calcul, de la rédaction, de la communication orale, du travail d’équipe, du raisonnement informatique et de la formation continue. De son côté, l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) s’intéresse plus particulièrement à la littératie, à la numératie et à la capacité de résoudre des problèmes dans un environnement technologique. L’OCDE définit la littératie comme étant un concept plus large que celui de la lecture, soit l’aptitude à comprendre et à utiliser l’information écrite dans la vie courante, à la maison, au travail et dans la collectivité, en vue d’atteindre des buts personnels et d’élargir ses connaissances et ses capacités.

Ces compétences de base ne sont pas toutes simples à mesurer. C’est pourquoi les organismes de recherche, comme l’OCDE et Statistique Canada, utilisent des données d’enquête qui s’appuient sur des tests auprès de la population en âge de travailler. Ces tests mesurent trois groupes de compétences : la littératie, la numératie et la résolution de problèmes dans des environnements à fortes composantes technologiques.

Les résultats dont je vais parler proviennent de la dernière enquête internationale menée par l’OCDE, avec la participation du Canada, des États-Unis et d’autres pays. Elle s’intitule Programme pour l’évaluation internationale des compétences des adultes, et elle est connue sous l’acronyme PEICA. Cette enquête s’est déroulée de 2011 à 2012. Les provinces et les territoires y ont participé, ainsi que 24 autres pays. En 2015, d’autres pays se sont ajoutés à cette enquête internationale.

(1730)

PEICA est donc la source officielle la plus à jour sur le sujet de l’alphabétisation, de la numératie et de la résolution de problèmes dans des univers technologiques. Quels en sont les principaux constats pour le Canada? Premièrement, les résultats en matière d’alphabétisation, de numératie et de résolution de problèmes dans un univers technologique indiquent que, en moyenne, le Canada performe moyennement bien à l’échelle internationale.

[Traduction]

Pour ces trois compétences, le Canada a obtenu un résultat supérieur à la moyenne des pays du G7, mais il est arrivé loin derrière le Japon et divers autres pays ne faisant pas partie du G7, comme la Finlande, les Pays-Bas, l’Australie, la Suède, la Norvège et j’en passe. Pour tout dire, le Canada ne s’est même pas classé parmi les 10 meilleurs pays pour les compétences essentielles.

[Français]

Les compétences de base des Canadiens sont susceptibles d’amélioration. Sur une échelle de 0 à 5, le score moyen des Canadiens n’atteint pas le niveau 3. À l’instar du Conference Board, je dirais, comme ancienne enseignante, que c’est un C.

Voyons de plus près le chapitre de l’alphabétisation. Près d’un Canadien sur cinq âgé de 16 à 65 ans, soit 17 p. 100 de la population en âge de travailler, montre un très faible niveau de compétence en littératie, soit le niveau 1 et moins. En nombre de personnes, on parle de 4,1 millions de personnes qui ont de sérieux problèmes de littératie. Ces personnes ont de la difficulté à lire un texte simple et à y repérer des renseignements identiques. Elles ont besoin d’aide. On peut penser que le Canada a fait peu de progrès depuis 1987.

Près de 49 p. 100 des Canadiens ont obtenu un résultat en deçà du niveau de compétence souhaité pour bien fonctionner dans la société, soit le seuil de niveau 3 dont je vous parlais. Donc, 49 p. 100 des Canadiens n’ont pas atteint le seuil de niveau 3. Il s’agit de 11,8 millions de personnes qui sont âgées de 16 à 65 ans. Selon les dires de l’OCDE, ces personnes n’ont pas le minimum de compétences souhaitées pour obtenir un diplôme d’études secondaires et se trouver un emploi convenable. Souvent, ces personnes ont des diplômes, mais, lorsque vient le temps de passer les tests, parce qu’elles sont âgées ou qu’elles ont des problèmes, elles ne respectent pas les exigences d’aujourd’hui pour obtenir un emploi décent, selon les données statistiques.

Au chapitre de la numératie, 55 p. 100 de la population en âge de travailler atteint un niveau se situant sous le niveau 3 sur 5, soit le niveau minimal attendu pour fonctionner sur le marché du travail. Quant à la capacité d’évoluer dans un univers technologique, 64 p. 100 des Canadiens se situent entre 0 et 1 sur une échelle de 0 à 3.

Pourtant, les Canadiens font bonne figure au chapitre de la scolarisation. À l’échelle internationale, nous sommes très bien cotés sur le plan des diplômés des écoles secondaires, des collèges et des universités. Bref, nous sommes peut-être très scolarisés, mais nous pourrions être plus compétents.

Deuxièmement, les résultats de cette enquête internationale indiquent que, au Canada, la moyenne ne veut rien dire. Autrement dit, il existe au Canada une plus grande proportion de personnes qu’ailleurs dans le monde qui ont très peu de compétences et de personnes qui sont au sommet.

[Traduction]

Autrement dit, ces résultats font ressortir d’importantes disparités, ou inégalités, dans la distribution des compétences au Canada.

[Français]

Les écarts entre les provinces sont inquiétants. Au chapitre de l’alphabétisation, c’est en Alberta et à l’Île-du-Prince-Édouard qu’on retrouve les scores les plus élevés, et ces deux provinces sont suivies du Yukon et de la Colombie-Britannique. Par contre, c’est au Nunavut que les problèmes sont les plus graves, avec une proportion de 24 p. 100 des personnes dont le niveau de compétences est inférieur à 1 et où 56 p. 100 de la population a des compétences inférieures au niveau 3. Je vous rappelle que c’est la base minimale requise aujourd’hui pour obtenir un emploi décent.

Le Québec, ma province, la deuxième province la plus peuplée, affiche des résultats inférieurs à la moyenne de l’OCDE et à celle du Canada. Le Québec est en 9e position sur 13 lorsqu’on inclut les provinces et les territoires. En littératie, par exemple, 53 p. 100 des Québécois en âge de travailler n’ont pas atteint le niveau minimal souhaité. C’est plus de la moitié des Québécois et des Québécoises en âge de travailler, soit 2,5 millions de personnes, selon le Conseil supérieur de l’éducation du Québec.

[Traduction]

En fait, si on y regarde de plus près, on constate des écarts importants entre un certain nombre de groupes démographiques, comme les immigrants, les Autochtones, les personnes handicapées, les personnes sans emploi ou qui n’ont jamais occupé d’emploi rémunéré, les aînés et les personnes peu instruites. Il y a peu de différence entre les hommes et les femmes, sauf dans le cas de la numératie, où les hommes font meilleure figure.

La troisième et dernière observation a de quoi surprendre. En fait, selon une étude publiée en novembre 2017 par C.D. Howe à partir des données officielles de l’OCDE, même si les Canadiens demeurent plus instruits qu’auparavant, les niveaux de littératie et de numératie au sein de la population canadienne ont décliné de 2003 à 2012.

[Français]

En effet, les niveaux de littératie et de numératie ont diminué de 2003 à 2012 pour les Canadiens nés au pays, et ce dans toutes les catégories d’âge, à l’exception des personnes âgées de plus de 55 ans, dont les performances sont déjà faibles. Les scores ont diminué également pour tous les niveaux d’éducation, même pour les Canadiennes et les Canadiens qui ont fait des études universitaires. La question du déclin des niveaux de compétences de base mérite qu’on s’y attarde. Pourquoi remarque-t-on une augmentation des problèmes d’alphabétisation, de numératie et de compétences numériques pour les adultes nés au Canada, et ce, même s’ils sont plus instruits? Les services d’éducation sont-ils de moins bonne qualité? Est-ce que la rapidité des changements technologiques y est pour quelque chose? Est-ce que l’arrivée d’Internet et des ordinateurs nous rend paresseux? Ou est-ce un défaut de mesure et d’enquête? Il faudra que des chercheurs s’y attardent.

Les Canadiens sont-ils prêts à relever les défis sociaux et économiques du XXIe siècle? Chers collègues, vous avez déjà deviné la réponse courte. Si plusieurs sont aptes à s’adapter facilement, une très forte proportion ne l’est pas et pourrait être laissée pour compte si la société ne s’occupe pas de cette situation. C’est pourquoi nous devons agir impérativement.

[Traduction]

Si nous ne voulons pas priver une portion substantielle de la population des bienfaits des nouvelles technologies, comme l’intelligence artificielle, nous devons nous attaquer dès maintenant aux obstacles à surmonter dans les domaines de la littératie, de la numératie, des compétences numériques et des autres compétences nécessaires de nos jours, et je ne parle pas seulement des compétences requises obtenir un bon emploi, mais aussi pour fonctionner comme citoyen, consommateur et utilisateur.

[Français]

L’acquisition de compétences de base permet aux personnes de se développer dans la vie. Elle tire aussi l’économie vers le haut. Cette problématique est à la fois sociale et économique.

[Traduction]

Des économistes de Statistique Canada ont réalisé une étude approfondie du rôle de l’alphabétisation dans la croissance économique. Voici ce qu’ils ont constaté :

[…] l’investissement dans le capital humain, c’est-à-dire dans l’éducation scolaire et la formation professionnelle, est trois fois plus important pour la croissance économique à long terme que l’investissement dans le capital physique, comme les machines et le matériel. On observe également que les mesures directes du capital humain fondées sur les résultats en littératie donnent, lorsqu’il s’agit d’expliquer la croissance de la production par habitant et par travailleur, de meilleurs résultats que les indicateurs axés sur les années de scolarité.

(1740)

[Français]

À partir de ces travaux, un collectif d’économistes, y compris l’économiste québécois bien connu Pierre Fortin, a déterminé que chaque hausse d’un point de pourcentage du taux de littératie globale au Canada entraînerait une augmentation de la productivité de 2,5 p. 100, soit une augmentation du revenu national de plus de 32 milliards de dollars par année.

Une étude publiée la semaine dernière par l’économiste Pierre Langlois et réalisée pour le compte de la Fondation pour l’alphabétisation et du Fonds de solidarité FTQ a évalué que, si le Québec rattrapait l’Ontario en matière d’alphabétisation, le PIB du Québec croîtrait de 1,4 p. 100 par année.

Son Honneur le Président : Sénatrice, votre temps de parole est écoulé. Désirez-vous cinq minutes de plus?

La sénatrice Bellemare : Oui, s’il vous plaît.

Son Honneur le Président : Le consentement est-il accordé, honorables sénateurs?

Des voix : D’accord.

La sénatrice Bellemare : Merci.

L’arrivée de technologies comme l’intelligence artificielle augmentera les inégalités de revenus et de classes si près de la moitié des Canadiens ne peuvent les utiliser. Certaines provinces et certains territoires assisteront au déclin économique de leur région si une forte proportion de leur population est incapable de s’adapter aux changements.

Si on se demande si l’on devrait faire mieux que ce que l’on fait déjà, la réponse est encore oui, mais que faire?

[Traduction]

Ce n’est pas une question facile, mais les Canadiens doivent au moins être au courant de la situation qui prévaut au Canada, et nous avons un rôle à jouer à cet égard. Nous devons en être conscients et nous devons examiner les pratiques exemplaires.

[Français]

L’examen des pratiques adoptées ailleurs indique plusieurs voies, et j’y reviendrai d’ailleurs dans le cadre d’une autre interpellation. L’Union européenne offre des choix très intéressants, ainsi que l’Australie, la Suède et les autres pays nordiques qui affichent de meilleurs résultats; eux aussi offrent des résultats à l’échelle du pays.

Toutefois, j’aimerais terminer en précisant que le cas de l’Australie est particulièrement intéressant pour le Canada, parce que, comme nous, il s’agit d’une fédération où les États jouent un rôle majeur dans le domaine de la formation et de l’éducation. Voyons brièvement ce que fait l’Australie, et notez qu’elle réussit mieux que nous.

Premièrement, les États et le gouvernement central, soit l’ensemble des gouvernements australiens, se sont concertés pour adopter une stratégie nationale en matière de développement des compétences de base dans un contexte de formation continue. C’est un objectif national partagé. Deuxièmement, cette stratégie vise des objectifs concrets, notamment que les deux tiers de la population en âge de travailler atteignent des niveaux de compétences supérieurs à 3 d’ici 2022. Troisièmement, cette stratégie implique l’ensemble des acteurs économiques et sociaux, comme les institutions d’enseignement, les ONG, les entreprises et les syndicats. Enfin, cette stratégie signifie la mise en place d’outils communs à travers le pays pour favoriser non seulement la formation formelle, mais aussi la formation informelle, ainsi que la reconnaissance des compétences acquises tout au long de la vie.

En conclusion, les Canadiens affichent des niveaux de compétences de base insuffisants pour répondre aux défis du XXIe siècle. Une stratégie canadienne de développement des compétences de base et de la formation continue issue d’une concertation avec les provinces et tous les acteurs concernés s’impose de manière urgente. C’est aussi le message du dernier rapport du Comité consultatif en matière de croissance économique, qui est présidé par M. Dominic Barton. Le rapport s’intitule Un pays qui apprend : outiller la main-d’œuvre du Canada avec les compétences de l’avenir. Ce rapport soutient ce qui suit, et je cite :

[Traduction]

Le moment est venu de repenser fondamentalement notre façon d’utiliser les Canadiens pour la dynamique de travail de l’avenir. Afin de relever ce défi, il faudra une approche englobant tout le système et une collaboration active entre les employeurs, les citoyens, les établissements d’enseignement et les gouvernements. Essentiellement, nous devons élaborer des mécanismes qui soutiennent les Canadiens durant les parcours d’apprentissage continus, tout au long de leur vie.

[Français]

Chers collègues, je vous remercie de m’avoir écoutée. Je vous invite à participer au débat sur cette interpellation. Je reprendrai plus tard ce sujet qui est, selon moi, extrêmement important pour l’avenir du Canada, des Canadiens et des Canadiennes.

(Sur la motion de la sénatrice Gagné, le débat est ajourné.)

(À 17 h 45, le Sénat s’ajourne jusqu’à 14 heures demain.)

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