Délibérations du comité sénatorial spécial sur
l'Antiterrorisme
Fascicule 1 - Témoignages du 26 mars 2012
OTTAWA, le lundi 26 mars 2012
Le Comité sénatorial spécial sur certains projets de loi gouvernementaux, auquel a été renvoyé le projet de loi S-7, Loi modifiant le Code criminel, la Loi sur la preuve au Canada et la Loi sur la protection de l'information, se réunit aujourd'hui à 13 heures, pour examiner le projet de loi.
Le sénateur Hugh Segal (président) occupe le fauteuil.
[Traduction]
Le président : Honorables sénateurs et membres du public, il s'agit de la première réunion du Comité sénatorial spécial sur certains projets de loi gouvernementaux tenue pendant la première session de la 41e législature du Canada. Aujourd'hui, nous avons l'honneur d'accueillir l'honorable Robert Nicholson, dont le ministère a produit la loi qui nous est soumise. Il est ministre de la Justice et procureur général du Canada.
M. Nicholson est accompagné par Glenn Gilmour, avocat à la Section de la politique en matière de droit pénal au ministère de la Justice.
Le projet de loi S-7, Loi sur la lutte contre le terrorisme, est un document de 30 articles qui vise à modifier le Code criminel, la Loi sur la preuve au Canada et la Loi sur la protection de l'information pour mieux protéger les Canadiens contre les activités terroristes. Le projet de loi a été lu en deuxième lecture au Sénat du Canada où il a été déposé le 8 mars, et il arrive devant le comité pour la première fois.
Le ministre, qui a d'autres obligations cet après-midi, restera avec nous environ une heure. M. Gilmour pourra ensuite répondre aux questions que le ministre n'aura pas eu le temps d'examiner. Je suppose qu'au besoin, nous pourrons demander au ministre de revenir ultérieurement, à un moment où ses compétences nous seront extrêmement utiles.
Monsieur le ministre, nous vous demandons de bien vouloir nous présenter le projet de loi.
L'honorable Robert Nicholson, C.P., C.R., député, ministre de la Justice et procureur général du Canada : Merci beaucoup. Je suis ici aujourd'hui pour présenter le projet de loi S-7 et réitérer la détermination du gouvernement de protéger la sécurité nationale du Canada.
La menace terroriste ne disparaîtra pas dans un avenir prévisible, et nous devons donner aux responsables de l'exécution de la loi les moyens de prévoir les actes de terrorisme et d'y réagir efficacement.
Le projet de loi rétablit dans le Code criminel l'audience d'investigation et l'engagement assorti de conditions, en y ajoutant des mesures pour protéger les droits et les libertés des Canadiens.
Il apporte également d'autres améliorations au Code criminel, à la Loi sur la preuve au Canada et à la Loi sur la protection de l'information.
Vous le savez, l'audience d'investigation et l'engagement assorti de conditions ont figuré dans le Code criminel de la fin de 2001 jusqu'à leur expiration, le 1er mars 2007. Ce projet de loi vise à rétablir les mêmes pouvoirs. Les dispositions du projet de loi S-7 reflètent celles qui étaient contenues dans l'ancien projet de loi C-17 au moment de sa première lecture, lors de la législature précédente.
La disposition sur l'audience d'investigation permettrait aux tribunaux, à la demande d'un agent de la paix, d'obliger une personne qui possède de l'information sur une infraction de terrorisme passée ou future à se soumettre à un interrogatoire. Ces audiences auraient pour but de réunir de l'information sur les infractions de terrorisme et non pas de porter des accusations contre un témoin ni de le déclarer coupable.
La disposition sur l'engagement assorti de conditions permettrait à un agent de la paix, avec l'autorisation du tribunal, d'obliger quelqu'un à témoigner devant un juge afin de prévenir une activité terroriste.
Le recours à l'audience d'investigation et à l'engagement assorti de conditions serait strictement assujetti à des conditions bien définies et à de nombreuses précautions procédurales, notamment l'exigence d'obtenir le consentement du procureur général.
Le projet de loi propose de créer de nouvelles infractions substantielles qui criminalisent le fait de quitter ou d'essayer de quitter le Canada dans le but de collaborer sciemment à l'activité d'un groupe terroriste dans le but d'accroître la capacité d'un quelconque groupe terroriste de faciliter ou d'exécuter une activité terroriste, le fait de faciliter sciemment une activité terroriste, le fait de commettre une infraction criminelle dans l'intérêt d'un groupe terroriste et le fait de commettre une infraction criminelle qui constitue également une activité terroriste.
Le gouvernement demeure inflexible dans sa volonté de protéger les Canadiens et d'appuyer la lutte mondiale contre le terrorisme. C'est pourquoi nous collaborons étroitement avec nos partenaires internationaux pour combattre le terrorisme et ses auteurs.
Les nouvelles infractions proposées auraient un effet dissuasif très net, elles renforceraient la position des services d'exécution de la loi pour atténuer les menaces et elles alourdiraient les peines qui sanctionnent ce type de comportement.
Outre la création de nouvelles infractions, le projet de loi propose de modifier l'infraction d'hébergement actuellement définie à l'article 83.23 du Code criminel. Il porterait la peine maximale de 10 à 14 ans lorsque l'activité terroriste visée constitue une infraction de terrorisme pour laquelle la personne est passible de la prison à perpétuité. Dans tous les autres cas, la peine maximale prévue par cet article demeurerait de 10 ans.
Un changement similaire serait apporté à l'article 21 de la Loi sur la protection de l'information, soit le fait d'héberger ou de cacher quelqu'un qui commet une infraction aux termes de cette loi.
Le document propose également des modifications de la Loi sur la preuve au Canada pour refléter le jugement prononcé par la Cour fédérale dans l'affaire Toronto Star Newspapers Ltd. c. Canada, publié le 5 février 2007. Dans cette affaire, la cour a limité certaines dispositions de façon à ce que dans ce contexte l'obligation de confidentialité s'applique uniquement aux audiences ex parte.
Finalement, le document propose de ramener de 15 à 10 ans la période de validité du certificat du procureur général délivré en vertu de l'article 38.13 de la Loi sur la preuve au Canada. La Loi sur la preuve au Canada autorise le procureur général du Canada à délivrer un certificat interdisant la divulgation de l'information à des fins précises. La proposition contenue dans le projet de loi constitue une réponse à la recommandation 35 publiée dans le rapport du comité à la Chambre des communes chargé de l'examen de la Loi antiterroriste, en 2007.
En outre, le procureur général du Canada peut délivrer un fiat pour prendre la relève et diriger lui-même toute poursuite où sont communiqués des renseignements délicats ou préjudiciables, suivant la définition donnée dans la Loi sur la preuve au Canada. Dans sa recommandation 37, le sous-comité de la Chambre des communes chargé de l'examen de la Loi antiterroriste demandait que la Loi sur la preuve au Canada soit modifiée afin d'exiger du procureur général du Canada qu'il dépose un rapport annuel sur les recours aux dispositions relatives au fiat et au certificat. Le projet de loi donne suite à cette recommandation.
Je me dois de mentionner, monsieur le président, que le projet de loi propose également un certain nombre de modifications techniques, dont certaines répondent à des recommandations contenues dans les rapports de 2006 et de 2007 sur l'examen parlementaire de la Loi antiterroriste.
Monsieur le président, il est essentiel de souligner certaines des mesures de protection ajoutées à l'engagement assorti de conditions et à l'audience d'investigation. Ces dispositions ont fait l'objet d'une étude approfondie dans le cadre de l'examen parlementaire de la Loi antiterroriste. Quand le Comité sénatorial spécial sur l'antiterrorisme a révisé l'ancien projet de loi S-3, le gouvernement a accepté d'harmoniser les dispositions concernant l'engagement assorti de conditions avec l'arrêt de la Cour suprême du Canada dans l'affaire R. c. Hall. Par ailleurs, en ce qui concerne les audiences d'investigation, le projet de loi prévoit dans tous les cas qu'un juge devra être convaincu de la nécessité d'une audience d'investigation en se fondant sur les efforts raisonnables déjà déployés pour obtenir l'information d'autres façons. Par le passé, cette mesure s'appliquait uniquement aux infractions de terrorisme futures ou éventuelles, et non pas aux infractions passées.
Finalement, le projet de loi propose, en application de l'article 707 du Code criminel, de limiter la période de détention d'une personne placée sous garde en vue d'une audience d'investigation. Cet aspect manquait de précision ou pouvait être interprété de diverses façons dans la dernière version du projet de loi, alors nous l'avons aligné sur les dispositions actuelles du Code criminel.
Monsieur le président, le gouvernement est déterminé à protéger la sécurité nationale et les droits et libertés des Canadiens. Le Parlement a pris connaissance de nombre de ces mesures et il en a débattu. Notre approche constitue un équilibre approprié.
Merci de votre attention.
Le président : Merci beaucoup, monsieur le ministre. Avant de demander au vice-président de commencer à poser des questions, j'aimerais remercier le gouvernement d'avoir tenu compte de décisions judiciaires et de recommandations formulées dans l'autre endroit et par notre comité pour modifier ce projet de loi. Nous vous en sommes reconnaissants. J'ai une seule question à vous poser.
Lors de l'examen des versions antérieures du document, et notamment de celle de l'administration Chrétien, qui est morte au Feuilleton et qui a été déposée à nouveau, nous avons constaté que le gouvernement de l'époque jugeait les dispositions conformes à la Charte, mais diverses décisions judiciaires ont révélé la présence de certaines difficultés. Je constate avec satisfaction que le gouvernement fait écho à certaines de ces décisions judiciaires dans la version actuelle. Est-ce que cela signifie que le gouvernement de Sa Majesté considère ce projet de loi comme entièrement conforme à la Charte des droits et libertés?
M. Nicholson : Le gouvernement de Sa Majesté est d'avis qu'il est conforme à la Charte et à la Déclaration canadienne des droits.
Le sénateur Joyal : Cela est parfois facile à dire, monsieur le ministre, mais les choses sont très différentes quand on s'adresse aux tribunaux et qu'un tribunal doit se prononcer sur la véracité d'une affirmation selon laquelle un projet de loi est irréprochable.
M. Nicholson : Nous avons d'excellents avocats qui défendront notre position le cas échéant, monsieur le sénateur.
Le sénateur Joyal : Les recueils des arrêts de la Cour suprême du Canada pullulent de cas où le gouvernement, et pas seulement celui d'aujourd'hui, des gouvernements antérieurs de toutes les couleurs, soutenait qu'un projet de loi était parfaitement conforme, mais pourtant des dispositions antiterroristes, en particulier, ont été jugées contraires à la Charte des droits et libertés.
Ce n'était pas ma première question, mais je vais poursuivre. Le projet de loi crée de nouvelles infractions aux articles 6, 7 et 8, entre autres le fait d'avoir quitté le Canada pour participer à l'activité d'un groupe terroriste ou pour faciliter une activité terroriste.
M. Nicholson : Ou le fait de tenter de quitter le pays.
Le sénateur Joyal : Ma première question porte sur l'article 6 de la Charte des droits et libertés. Vous le savez, les Canadiens sont libres de sortir du pays quand ils le veulent, et le gouvernement du Canada n'exerce aucun contrôle sur ces départs. Avant de prendre l'avion à destination de l'étranger, par exemple, vous n'avez pas à le déclarer au gouvernement, et le gouvernement ne compile pas les allées et venues des Canadiens. Pourquoi pensez-vous que ces dispositions ne seront pas contestées en vertu de l'article 6 de la Charte canadienne des droits et libertés?
M. Nicholson : Monsieur le sénateur, ces affaires sont toujours liées au fait et à la preuve. Si une personne a l'intention criminelle de participer à une activité terroriste ou à un camp de formation terroriste à l'étranger, il suffit d'établir hors de tout doute raisonnable qu'il avait l'intention de commettre ce crime.
Le sénateur Joyal : Comment pouvez-vous empêcher quelqu'un de quitter le Canada lorsqu'il n'y a aucun contrôle sur ces départs? Tout citoyen canadien est libre d'aller où bon lui semble.
M. Nicholson : C'est toujours une question de preuve, comme vous le savez. Si les agents d'exécution de la loi possèdent des renseignements au sujet d'une personne qui a fait des plans et que ces plans indiquent ce qu'elle a l'intention de faire, où et pour quelles raisons, il faut dans chaque cas le prouver.
Le sénateur Joyal : Oui, mais encore. Vous dites qu'il faut prouver l'intention criminelle, mais il ne suffit pas de deviner les intentions de la personne. Comment pouvez-vous savoir que quelqu'un quitte le Canada avec l'intention d'aller suivre un camp de formation au Pakistan, au Yémen ou ailleurs?
M. Nicholson : Sénateur, vous et moi pourrions trouver une douzaine de façons d'établir que c'est bien ce que la personne fait. Il y aurait des preuves concernant ses intentions et sa destination. Vous le savez, pour toutes les infractions à caractère criminel, tous les éléments de l'infraction doivent être prouvés. Il faut les prouver hors de tout doute raisonnable. Il s'agit simplement de recueillir l'information. Il n'y a pas que le départ du pays; il y a aussi la tentative de quitter le pays. Si les agents d'exécution de la loi apprennent qu'un individu s'apprête à quitter le pays pour participer à une quelconque activité terroriste ou à un camp de formation, cet article entrera en jeu.
Le sénateur Joyal : Avez-vous eu l'occasion d'examiner les causes de la Cour suprême qui se rapportent à l'article 6 de la Charte?
M. Nicholson : Nous examinons toutes les décisions de la Cour suprême.
Le sénateur Joyal : L'avez-vous fait personnellement?
M. Nicholson : Je suis régulièrement informé de tous les aspects du système judiciaire dans notre pays, n'ayez crainte.
Le sénateur Joyal : Vous a-t-on dit que c'est l'un des articles de la Charte qui ont très rarement été contestés au cours des 10 dernières années?
M. Nicholson : Je le répète, monsieur le sénateur, d'après l'analyse de cette question et les conseils et la rétroaction que j'ai reçus, je suis convaincu que cela est parfaitement conforme et protégera mieux les Canadiens.
Le sénateur Joyal : Vous avez déposé le projet de loi en affirmant que — et je crois que ce sont vos paroles — le gouvernement veut prévoir. Le comité, dans sa version antérieure, a entendu diverses sources d'information sur l'importance de la menace à la sécurité du Canada. Pourriez-vous nous dire qu'actuellement vous avez des renseignements privilégiés qui forcent le gouvernement à déposer ce genre de projet de loi ou à ressusciter les audiences d'investigation ou les arrestations préventives sur la foi de nouveaux renseignements obtenus après que le comité a entendu les témoignages du SCRS sur ce type de menace et l'ampleur de la menace au Canada?
M. Nicholson : Vous le savez, le rapport 2009-2010 du Service canadien du renseignement de sécurité établit selon moi très clairement que la menace potentielle du terrorisme se ne diminue pas, sénateur, et c'est quelque chose qui inquiète tous les Canadiens. Personnellement, j'entends très souvent des gens exprimer leurs préoccupations au sujet de cette situation. Quand je parle à mes homologues de l'étranger, je sais qu'ils sont également inquiets de cette menace terroriste. Nous aimerions tous que cette menace n'existe pas, mais comme le disent les rapports, dans le cadre de la stratégie antiterroriste du Canada le rapport public du SCRS continue de montrer que le terrorisme est une menace très réelle pour les Canadiens.
Le sénateur Joyal : Monsieur le ministre, je ne dis pas que la menace terroriste n'existe pas. Tous la reconnaissent. Ma question est plus précise. Avez-vous de nouveaux renseignements indiquant que le niveau de la menace au Canada a augmenté depuis que le comité a entendu les témoins et les représentants du SCRS parler de l'importance et de l'imminence de la menace au Canada?
M. Nicholson : Je le répète, vous dites avoir interrogé le SCRS. Dans son rapport, l'organisme affirme que cela demeure une importante menace, ici et dans le monde.
Le sénateur Frum : Évidemment, il est difficile de ne pas songer aux événements récents qui sont survenus en France. Dans ce cas, le terroriste avait été formé à l'étranger.
M. Nicholson : Cela ne disparaîtra pas, madame le sénateur. Vous avez raison.
Le sénateur Frum : Dans un cas semblable, au Canada, si quelqu'un quitte le pays pour aller suivre une formation de terroriste, est-ce que cela constitue actuellement un crime en vertu du Code criminel?
Glenn Gilmour, avocat, Section de la politique en matière de droit pénal, ministère de la Justice Canada : Oui, cette infraction est prévue à l'article 83.18 du Code criminel, qui traite de la participation ou de la contribution à l'activité d'un groupe terroriste dans le but d'accroître la capacité d'un quelconque groupe terroriste pour faciliter ou commettre une infraction de terrorisme.
Logiquement, cette infraction pourrait être commise outre-mer. L'article 7 du Code criminel contient une disposition qui permet au tribunal d'établir une compétence extraterritoriale dans de tels cas.
L'infraction prévue à l'article 83.18 consiste à participer sciemment aux activités d'un groupe terroriste ou à y contribuer. Il y a aussi un paragraphe qui précise ce qui constitue une contribution ou une participation à l'activité d'un groupe terroriste. Cette définition englobe la formation, et l'activité peut avoir lieu au Canada ou à l'étranger.
À l'article 7 du Code criminel, une disposition traite de la capacité d'un tribunal d'établir une compétence extraterritoriale relativement à un certain nombre d'infractions de terrorisme commises à l'étranger. Si les critères sont satisfaits dans une cause donnée, alors évidemment, même si l'infraction a été commise à l'étranger — disons que quelqu'un a suivi un camp de formation terroriste —, les tribunaux canadiens auraient compétence pour juger de cette infraction.
Je songe entre autres au paragraphe 7(3.74) du Code criminel, qui stipule que :
Malgré toute autre disposition de la présente loi ou toute autre loi, quiconque commet à l'étranger un acte — action ou omission — qui, s'il était commis au Canada, constituerait une infraction de terrorisme...
... autre que certaines infractions de terrorisme non visées ici —
— est réputé commettre l'acte au Canada si, selon le cas :
a) il a la citoyenneté canadienne;
b) il n'a la citoyenneté d'aucun État et réside habituellement au Canada;
c) il est un résident permanent...
Par exemple, si un citoyen canadien va à l'étranger pour commettre l'infraction de participer ou de contribuer sciemment aux activités d'un groupe terroriste, par exemple en allant suivre une formation comme le prévoit la définition donnée à l'article 83.18, alors nos tribunaux ont compétence pour juger de cette infraction, à condition que ce critère soit satisfait.
Le président : Cela s'applique à un citoyen canadien ou à un résident permanent, n'est-ce pas?
M. Gilmour : Ou à quelqu'un qui n'est citoyen d'aucun État, mais qui réside habituellement au Canada.
L'infraction ne serait pas commise à l'étranger. Les nouvelles infractions que nous proposons visent les cas où quelqu'un s'apprête à quitter le Canada. Cette personne est déjà ici, au Canada — physiquement. Donc, les tribunaux auraient automatiquement compétence pour la poursuivre pour cette raison.
M. Nicholson : Cela s'ajoute à la disposition existante. Nous voulons ainsi saisir toute l'activité, ou l'activité possible, afin de ne pas devoir attendre que quelque chose se produise.
M. Gilmour : La différence notable, c'est que nous criminalisons le fait de quitter ou d'essayer de quitter le Canada dans le but de mener certains types d'activités terroristes et nous avons prévu une peine plus appropriée pour cette infraction.
Le président : Puis-je supposer, donc, que si ce crime constitue une nouvelle infraction dans le Code criminel la conspiration dans le but de commettre ce crime est également considérée comme une infraction?
M. Gilmour : La disposition du Code criminel portant sur la responsabilité criminelle s'appliquerait probablement. Il incomberait aux tribunaux de déterminer, selon les circonstances propres à chaque affaire, si l'on élargit trop le droit pénal pour en faire une infraction inchoative.
Le sénateur Frum : La tentative d'aller participer à un camp de formation serait considérée comme une infraction de terrorisme, n'est-ce pas?
M. Gilmour : La définition d'infraction de terrorisme qui figure à l'article 2 du Code criminel fait spécifiquement mention non seulement des infractions de terrorisme elles-mêmes, mais aussi du complot ou de la tentative et de l'incitation à commettre l'infraction ainsi que de la perpétration comme telle.
Le sénateur Frum : Est-ce que la formation s'inscrit dans cela?
M. Gilmour : Quelqu'un qui essaie d'aller participer à un camp de formation terroriste à l'étranger satisferait à la définition de « chercher à participer ou à contribuer aux activités d'un groupe terroriste ». La nouvelle infraction vise quelqu'un qui tente de quitter ou qui quitte le Canada afin de commettre une infraction qui existe déjà — « participer sciemment ».
Avec cette nouvelle infraction, la personne peut être poursuivie et est passible d'un maximum de 10 ans de prison, alors qu'auparavant elle ne s'exposait qu'à un maximum de cinq années d'emprisonnement si elle était jugée coupable d'avoir tenté de commettre l'infraction consistant à participer sciemment ou à contribuer aux activités d'un groupe terroriste.
Je m'excuse, j'espère que vous avez pu suivre cela.
Le sénateur Frum : Oui. Merci.
Le sénateur Marshall : Monsieur le ministre, monsieur Gilmour, merci d'être venus aujourd'hui. Je veux parler des articles qui portent sur la responsabilité à l'égard du Parlement, et en particulier les articles 11 et 24. L'article 11 modifie le Code criminel, plus précisément les exigences imposées aux ministres en matière de rapports. L'article 24 modifie la Loi sur la preuve au Canada en ce qui concerne les rapports à soumettre.
Monsieur le ministre, pourriez-vous nous expliquer la raison de ces changements? En vertu de l'article 11, le procureur général du Canada et le ministre de la Sécurité publique doivent tous les deux présenter un rapport distinct au Parlement, mais il y a maintenant de nouvelles exigences. Pourriez-vous nous en donner les raisons?
M. Nicholson : À mes yeux, c'était une proposition raisonnable. Les deux chambres du Parlement ont tenu un certain nombre d'audiences, vous le savez sans doute, madame le sénateur, et ces recommandations nous ont été adressées. La recommandation 17 du comité sénatorial spécial le suggère. Je le répète, c'est ce que j'ai fait au fil des ans lorsque des propositions raisonnables ont été présentées par l'une ou l'autre chambre, nous les étudions toujours très soigneusement. Comme vous pouvez le constater, elles sont intégrées ici.
Je crois qu'il est approprié que moi-même et le ministre de la Sécurité publique présentions annuellement un rapport sur la question. Comme vous le voyez, il y a une disposition de réexamen dans cinq ans, et cela correspond à une autre partie de votre question.
Je le répète, il me semble approprié que les parlementaires examinent régulièrement ces dispositions et voient s'il convient de les maintenir.
Le sénateur Marshall : Et pour ce qui est de l'article 24, celui qui modifie la Loi sur la preuve au Canada?
M. Nicholson : Je croyais que c'était celui qui portait sur la présentation d'un rapport annuel.
Le sénateur Marshall : Il y a deux rapports annuels.
M. Nicholson : Il a été recommandé que le procureur général soit tenu de produire un rapport sur l'utilisation des certificats et des fiats mentionnés à l'article 38. Le fiat permet au procureur général de mener lui-même une poursuite. Cela est conforme à d'autres types actuels de poursuites au fédéral. Il s'agit là aussi d'une modification appropriée.
Le président : Cela vise à informer le Parlement du nombre exact de ces instruments qui ont été utilisés par la Couronne ainsi que des circonstances de chacune de ces utilisations.
M. Nicholson : Il est évident que cela améliore la transparence en ce qui concerne le recours à ces dispositions, et je crois que cela est très bien.
Le sénateur Marshall : Est-ce qu'il y a une échéance, des dates limites, ou est-ce simplement à la fin de l'exercice financier? Je pense aux amendements eux-mêmes.
M. Nicholson : Il n'y a pas de date précise, madame le sénateur.
Le sénateur Marshall : Il s'agit simplement d'un rapport annuel, n'est-ce pas?
M. Nicholson : Oui, c'est un rapport annuel.
Le sénateur Andreychuk : J'ai trois questions à poser. Je pense que le sénateur Joyal et moi-même — et je ne sais plus si le sénateur Day était déjà là quand nous avons commencé nos travaux, en 2001 — nous nous souvenons de ces audiences d'investigation que le gouvernement de l'époque proposait comme une mesure moins envahissante que les solutions adoptées par d'autres gouvernements. Nous avons étudié le modèle américain, le modèle français, et d'autres encore. Même si les audiences d'investigation s'inscrivaient mal dans notre droit pénal dans les cas que nous avons examinés, nous pensions qu'elles représentaient un compromis acceptable à l'époque, entre la protection des citoyens contre l'activité terroriste et le maintien d'une certaine responsabilité dans le système.
Croyez-vous encore que les audiences d'investigation constituent la meilleure solution? Je le dis dans le contexte où, selon moi, il est excellent que les tribunaux aient commenté la question et que vous ayez réagi, parce que personne n'avait de réponse en 2001. À l'époque, nous essayions de trouver un juste milieu. Dans ce contexte, pensez-vous toujours que l'audience d'investigation est préférable à toute autre solution que vous avez étudiée?
M. Nicholson : Elle est certainement conforme à ce que font un certain nombre de nos alliés et les pays dont nous nous inspirons généralement. Les Américains ont depuis longtemps un système de grand jury pour obtenir l'information, c'est un peu comme une audience d'investigation.
Selon certains, par exemple, le modèle britannique d'audience d'investigation serait beaucoup plus strict et limité que le modèle canadien quand il s'agit de protéger les droits des particuliers. Les audiences d'investigation sont utilisées en Australie et en Afrique du Sud. Un certain nombre de pays les utilisent. Quand nous examinons des propositions de ce genre, nous comparons toujours notre position à celle de pays aux vues similaires, et cela est certainement cohérent et raisonnable si l'on songe aux régimes en place à l'étranger.
Le sénateur Andreychuk : Prenons ce nouvel article qui porte sur le fait de quitter ou de tenter de quitter le Canada dans le but de commettre, par acte ou par omission, une infraction à l'extérieur du Canada. Je pense à ceux qui devront appliquer cette loi. Je m'inquiète que nous parlions d'abord de quitter le pays puis de commettre l'infraction. Dans nombre des articles du Code criminel, vous définissez d'abord l'infraction, puis vous envisagez la possibilité que la personne s'esquive, mais ici vous mettez l'accent sur le départ. Il me semble que les responsables à la frontière risquent de se demander pourquoi les gens partent plutôt que d'intervenir à la suite d'enquête et de dire : « Nous surveillons cette personne parce que nous croyons qu'elle va commettre une infraction », et ensuite vous vous occupez du départ.
Je me demande s'il ne faudrait pas revoir le libellé. Comme je l'ai dit, j'ai fait mes devoirs, les gens reçoivent de la formation, puis ils prennent de l'expérience sur le tas, et c'est parfois là que les problèmes surgissent.
M. Nicholson : Je connais quelqu'un, à votre droite, qui a beaucoup d'expérience en matière d'enquêtes, et c'est le sénateur Dagenais.
Le sénateur Andreychuk : Autrefois, je jugeais les affaires qu'il avait préparées.
M. Nicholson : Je suis certain qu'elles étaient très systématiques.
Quoi qu'il en soit, comme l'a indiqué M. Gilmour, cela vient compléter les dispositions existantes du Code criminel qui portent sur la participation à des activités terroristes à l'étranger.
Cela dit, bien sûr, l'information au sujet des intentions d'une personne peut être obtenue dans le cadre d'une audience d'investigation ou d'un engagement assorti de conditions, s'il y a des preuves. Évidemment, il existe d'autres façons de recueillir la preuve, mais il me semble que nous corrigeons une lacune dans les lois de notre pays pour intercepter une personne qui, selon notre information, s'apprête à participer à un camp de formation terroriste, par exemple. Je ne pense pas que l'un précède l'autre. Vous savez, ce ne sont que des outils que nous donnons aux organismes d'exécution de la loi, avec la supervision judiciaire appropriée, et cela forme un tout.
Le sénateur Andreychuk : Je crains qu'un préposé qui fait fonctionner un dispositif à l'aéroport ne trouve quelque chose qu'un citoyen ne transporte pas normalement. Qui, alors, déterminera si cette personne peut partir à ce moment- là? Je comprends parfaitement les cas où vous avez réuni l'information et assuré un suivi. Toutefois, je pense à cette affaire du Nigérien. Le père avait averti les autorités compétentes et le gouvernement était au courant, mais la personne a quand même réussi à partir. À l'époque, on disait qu'elle n'aurait jamais dû pouvoir partir; elle aurait dû être interceptée. J'imagine que c'est le genre de chose dont vous parlez.
M. Nicholson : Je ne veux pas parler de cas précis, mais si vous me demandez comment nous réunissons la preuve, cela dépend de ce qui parvient aux autorités. Si quelqu'un arrive à l'aéroport et s'apprête à participer à une activité criminelle, nous avons des dispositions en place actuellement — si vous faites le trafic de drogues, par exemple —, avec les scanneurs. Nous avons des mesures qui permettent d'intercepter ces personnes et de veiller à ce qu'elles fassent l'objet de poursuites en conséquence. Dans le cas de cette disposition que le projet de loi vient ajouter, nous disons que s'il y a des preuves, elles peuvent prendre diverses formes. Vous avez raison, il est difficile pour les responsables de la frontière de prendre ces décisions, et nous ne prétendons pas que ce soit des choses simples, mais s'il y a des preuves et qu'ils s'en aperçoivent, alors les enquêtes et procédures appropriées seront mises en œuvre.
Le sénateur Andreychuk : Envisagez-vous de modifier le protocole à la frontière?
M. Nicholson : De telles mesures relèveraient de Sécurité publique, mais c'est une autre modification du Code criminel qui devrait être appliquée en même temps que d'autres changements des lois pénales.
Le sénateur Andreychuk : La question du dépôt d'instruments a été soulevée par le passé. De nombreux groupes réclament de savoir à quelle fréquence vous utilisez les instruments prévus par la loi, et vous avez donc fourni des réponses à la Chambre des communes et au Sénat à ce sujet. C'est le droit du public de savoir, mais on a beaucoup discuté du fait que la simple menace d'utiliser ces sections peut constituer un abus de pouvoir. Êtes-vous convaincu que cela ne s'est pas produit, que vous allez aussi loin que possible en matière de transparence?
M. Nicholson : Chaque fois que vous modifiez la loi pénale du pays, vous espérez que la mesure aura un effet dissuasif et qu'il y aura des conséquences graves à assumer lorsqu'on participe à une quelconque activité criminelle. C'est certainement ce que nous espérons dans ce cas-ci. Cela dit, nous savons que le terrorisme est une menace constante pour le Canada et pour d'autres pays. Ici, entre autres, nous voulons doter les agences d'exécution de la loi des outils nécessaires pour intercepter ou pour poursuivre les individus qui se livrent à ce genre d'activité. Alors oui, j'en suis convaincu.
Le sénateur Mitchell : Ma question reflète probablement une préoccupation de nombreux Canadiens, et vous la partagez certainement, monsieur le ministre. Je crains que les gens ne deviennent indifférents à ce genre de pouvoirs spéciaux. Ils sont oubliés. Ils empiètent de plus en plus sur nos droits, de façon extrêmement insidieuse, et il faut prévoir des protections. Il a été dit à maintes reprises que la solution à certains de ces problèmes était souvent pire que le mal.
Si je comprends bien, les ministres présenteront des rapports au Parlement, aux deux chambres, mais est-ce qu'il y aura un examen externe, un organisme public ou un comité précis du Parlement qui remplira précisément cette fonction? Je sais que la chose avait été recommandée, il y a quelques années, mais cela semble avoir été écarté. Je sais que dans certaines compétences un organisme indépendant présente la question et que cela offre diverses façons de calmer la préoccupation que j'ai décrite. Ce que je veux dire, c'est qu'on peut recourir plus souvent à ces pouvoirs. On peut commenter les cas où les pouvoirs ont été utilisés de façon abusive, quand les autorités sont allées trop loin. On peut continuellement faire valoir un point de vue objectif. Je ne dis pas que le gouvernement ne serait pas honnête, mais il aura bien sûr toujours sa perspective particulière.
D'un autre côté, on pourrait intervenir pour rappeler constamment aux gens que ces pouvoirs existent et qu'il ne faut pas les tenir pour acquis. Nous ne devons pas nous habituer à les voir, parce qu'ils risquent d'éroder certains de nos droits et libertés fondamentaux, comme vous l'avez souvent dit, des droits et libertés que les hommes et les femmes du monde doivent quotidiennement défendre avec la dernière énergie.
M. Nicholson : Je ne crois pas que cela constitue un empiétement insidieux sur les droits individuels. Je suis convaincu que vous constaterez dans votre étude que l'intervention et la supervision judiciaires sont constamment assurées. De fait, cette disposition particulière doit faire l'objet d'un examen quinquennal obligatoire. Nous faisons constamment des exceptions au Code criminel, et en l'occurrence, le fait que deux ministres soient tenus de présenter des rapports annuels au Parlement et qu'un examen quinquennal obligatoire soit prévu de toute façon constitue vraiment une exception. Il y a une solide supervision.
Rien n'empêche le comité de mener un examen avant la fin de cette période de cinq ans, lorsque le ministre de la Sécurité publique et le procureur général déposeront leurs rapports. Vous êtes maîtres de votre programme, alors allez- y, examinez cela. Vous pouvez l'étudier chaque année si vous le voulez. Nous espérons que la menace terroriste ne nous obligera jamais à les utiliser, mais les outils sont là si nous en avons besoin.
Le sénateur Mitchell : Pourquoi hésiteriez-vous à confier précisément cette fonction à un comité dont les membres pourraient par exemple avoir une habilitation de sécurité très élevée? Parce que les comités parlementaires n'ont pas une habilitation de sécurité au niveau voulu, alors ils ne peuvent pas examiner nombre de questions, même s'ils le veulent.
Pour ce qui est de l'examen judiciaire, quelqu'un doit avoir de l'argent pour intenter une procédure, et qui le fait?
M. Nicholson : Bien des gens, de fait, effectuent des examens judiciaires, et ils présentent régulièrement des rapports au bureau du procureur général. Cela dit, il me semble qu'il était raisonnable de demander à deux ministres de déposer des rapports annuels et de prévoir un examen quinquennal. Cela me semblait raisonnable et, surtout, c'est généralement ainsi que l'on procède à la suite de changements.
Regardez le projet de loi, vous constaterez qu'il prévoit une surveillance judiciaire et des mesures de protection. Nous avons apporté les précisions qui nous étaient recommandées, il semble donc que notre approche soit très raisonnable. Comme vous le dites, il y a d'autres façons de procéder, mais celle-ci me semblait raisonnable.
[Français]
Le sénateur Dagenais : Ce que je dois comprendre, c'est que si un officier de police avait des motifs raisonnables de croire qu'un individu aurait des informations qui pourraient mener à un acte terroriste susceptible de nuire à la sécurité des citoyens, l'officier de police pourrait obtenir un mandat qui obligerait l'individu à se soumettre à un interrogatoire. Dans un tel cas, qui, durant cet interrogatoire, pourra poser des questions? Est-ce que ce sera un juge, un procureur de la couronne, un agent du SCRS ou l'avocat de la personne interrogée?
[Traduction]
M. Gilmour : J'imagine que ce serait un procureur. Le pouvoir d'arrestation n'intervient que dans des situations bien précises. Par exemple, si nos renseignements indiquent que quelqu'un s'apprête à prendre la fuite avant l'audience d'investigation.
Comme quelqu'un l'a mentionné, l'arrestation sans mandat figurait dans la version initiale du projet de loi, en 2001, pour l'audience d'investigation. Nous avons ajouté au projet de loi un renvoi à l'article 707 du Code criminel, pour qu'il soit bien clair qu'une personne arrêtée en vertu de ce mandat ne peut pas être détenue indéfiniment. Elle serait traitée comme tout autre témoin, comme un témoin qui cherche à s'enfuir alors qu'il doit témoigner à un procès criminel. C'est une autre précaution que nous avons ajoutée.
La disposition concernant l'audience d'investigation énonce en outre clairement que la personne a droit à l'assistance d'un avocat pendant les procédures. Elle contient aussi quelques mesures préventives supplémentaires, dont plusieurs se trouvaient dans le projet de loi initial, en 2001. Je pense en particulier à la garantie que rien de ce que la personne peut dire ou de ce que l'on peut déduire de ses propos ne peut être retenu contre cette personne, sauf en cas de parjure ou de témoignage contradictoire
Lorsque l'audience d'investigation a été contestée devant la Cour suprême du Canada, en 2004, la majorité a statué qu'en raison de cette protection particulière, le droit de ne pas s'auto-incriminer n'était pas violé. La cour signalait également que cette protection, parce qu'elle était assortie de l'immunité contre l'utilisation de la preuve dérivée, était plus forte dans la loi sur l'audience d'investigation que dans l'actuelle common law. C'est une protection très solide qui a été intégrée à la loi régissant l'audience d'investigation. Ces protections viennent s'ajouter à d'autres, que le ministre a mentionnées, et elles sont maintenues dans le présent projet de loi.
Le sénateur Day : J'ai deux ou trois précisions à demander, quelques points que vous n'avez peut-être pas relevés. Quelqu'un a notamment attiré notre attention sur l'article 12, les nouvelles dispositions de temporisation pour les audiences d'investigation et les arrestations sans mandat.
Au paragraphe 83.32(1.1), il est dit dans l'anglais qu'il y aura — « shall be » — un examen mené par le comité compétent de la Chambre des communes et du Sénat, alors que le français mentionne qu'il y aura « peut-être » un examen. Est-ce que quelqu'un vous a fait remarquer cette incohérence et avez-vous l'intention de proposer un amendement pour la corriger? Est-ce que j'interprète mal le français?
M. Gilmour : Merci d'attirer mon attention sur ce point, parce que l'examen est obligatoire, comme le dit l'anglais...
Le sénateur Day : À la ligne 27, il est écrit « peut ».
M. Gilmour : Nous allons certainement vérifier cela.
Le sénateur Day : Vous pourriez peut-être communiquer le résultat de cette vérification à la greffière.
M. Gilmour : Certainement, la politique est certainement obligatoire, et c'est un aspect que nous allons examiner.
Le sénateur Day : Merci.
Pour ce qui est de l'examen, il y a un article semblable dans le projet de loi. Je lis le paragraphe 83.3(10), à la page 10. J'examine les diverses interdictions.
Si quelqu'un est arrêté sans mandat et que toutes les formalités sont terminées dans les 72 heures, le juge peut imposer des conditions pour une période de 12 mois. Si je comprends bien, cela est prévu ici. Aux lignes 13 et 14, il me semble intéressant que l'on mentionne spécifiquement les arbalètes. Est-ce qu'on n'entre pas vraiment dans le détail quand on peut interdire à quelqu'un de posséder, non pas un arc et des flèches, mais bien une arbalète ou un lance- pierre? Est-ce qu'il y a un cas spécifique que vous vouliez intégrer dans ce passage?
M. Gilmour : Non, sénateur. Si un détail comme l'arbalète figure dans ce texte, c'est parce que lorsque ces dispositions ont été créées, en 2001, elles reprenaient le libellé de dispositions existantes du Code criminel sur l'engagement de ne pas troubler l'ordre public. Ce sont des dispositions utilisées par exemple lorsqu'une personne craint de subir des blessures graves et s'adresse au tribunal pour demander qu'un tel engagement soit exigé de l'individu qui la menace.
Le sénateur Andreychuk : Il y a eu une affaire à l'époque qui explique ce détail.
Le sénateur Day : C'est pour cette raison que l'on a ajouté ce détail.
Le sénateur Andreychuk : Cela a été intégré au Code criminel et repris ici. C'était une affaire terrible.
M. Gilmour : C'est pour cette raison. Nous l'avons emprunté des dispositions du Code criminel qui visent l'engagement de ne pas troubler l'ordre public et qui avaient sans doute été modifiées pour mentionner spécifiquement l'arbalète.
Le sénateur Joyal : Vous vous en souvenez, nous avons entendu cela en 2001.
Le sénateur Day : Non, je ne m'en souviens pas, mais il me semble qu'on aurait pu utiliser des termes plus généraux pour couvrir les armes à feu.
Le sénateur Andreychuk : Lisez la décision.
Le président : À l'époque où le sénateur Day est arrivé au Sénat, il n'y avait que des arbalètes; les armes à feu n'existaient pas.
Le sénateur Day : Est-ce que vous avez une liste de ce qui peut et ne peut pas être fait dans le cas d'une personne assujettie à une telle ordonnance pour une période de 12 mois? Comment saurons-nous si on peut, par exemple, prélever les empreintes digitales de cette personne? Est-ce que les empreintes digitales de cette personne seront prélevées? Laissez-vous tout cela entièrement à la discrétion du juge ou établirez-vous une liste pour que l'avocat puisse dire : « Vous ne pouvez pas faire ceci » ou « Vous pouvez faire cela »...?
M. Gilmour : Je ne sais pas quels autres témoins vous avez convoqués, mais c'est peut-être quelque chose qui vous sera signalé. Pour l'instant, nous avons décidé que le principe général à appliquer ici est que le juge peut imposer toute condition raisonnable. Le caractère raisonnable de la condition serait fonction des faits et des circonstances de l'affaire.
Le président : Il n'y a pas de jurisprudence sur ce qui est « raisonnable », comme le disent les deux côtés.
M. Gilmour : J'imagine qu'il existe une jurisprudence et d'autres dispositions sur les engagements qui permettront de déterminer ce qui est raisonnable en l'occurrence; mais, contrairement à certains autres pays, nous n'avons pas une longue liste de conditions qui peuvent être imposées. Le Royaume-Uni, dans son ancien régime d'ordonnances de contrôle, avait une longue liste ouverte de conditions — 16, je crois — qui pouvaient être imposées. Depuis, la loi a été modifiée pour limiter cela radicalement, mais nous pensions que le principe général était ce qui importait ici, la condition raisonnable, et il incombera au juge d'en décider.
Le juge pourrait décider qu'une personne ne doit pas communiquer avec quelqu'un, par exemple, mais c'est au juge de déterminer cela, en se fondant sur les faits.
M. Nicholson : C'est ce que l'on a fait par le passé. C'est ce que nous demandons.
Le sénateur Day : Nous comprendrons mieux quand nous serons plus avancés.
J'ai deux autres points dans la même veine. Les paragraphes 83.3(11) et (12) et le passage « de la condition » suscitent des préoccupations. Cela figure aussi dans la version anglaise du paragraphe (10), mais ce « de la » est souligné, ce qui selon moi doit signifier que l'expression « de la condition » englobe ces conditions en tout ou en partie.
Ma dernière question porte sur le paragraphe (13). J'aimerais bien que vous puissiez répondre à mes deux questions, mais sinon nous y reviendrons ultérieurement. Le paragraphe (13) mentionne « le juge », et à mon avis cela signifie que vous devez revenir devant le juge qui a fixé les conditions, alors que dans d'autres articles de la loi il est question du juge ou d'un autre juge du même tribunal. Dans ce cas-ci, est-ce qu'il faut effectivement retourner devant le même juge?
M. Gilmour : Le libellé semble indiquer cela, mais c'est un élément que nous pourrions vérifier.
Le sénateur Day : Je pense que vous devriez le revoir.
Le président : Je remercie le ministre d'avoir pris le temps de venir. Nous poursuivrons notre deuxième ronde avec les représentants du ministère. Si nous avons d'autres questions à poser au ministre, nous trouverons un autre moment pour accueillir à nouveau le ministre.
Merci encore, monsieur le ministre.
Le sénateur Joyal : Je suis désolé que le ministre doive partir parce que je voulais attirer son attention — et je vais en parler avec M. Gilmour — sur la recommandation 17 du comité, celle qui porte sur l'obligation, pour le ministre de la Sécurité publique et le procureur général, de présenter un rapport annuel au Parlement. Cela correspond seulement à la moitié de la recommandation. La deuxième moitié de la recommandation visait l'établissement d'un comité permanent de la sécurité nationale du Parlement qui serait chargé de recevoir et d'examiner ces rapports et de prendre des mesures en conséquence. De fait, le président de notre comité, le sénateur Segal, et moi-même, à l'invitation du haut commissariat de Grande-Bretagne, avons eu l'occasion de rencontrer les membres du comité parlementaire britannique sur la sécurité nationale, qui existe depuis 1994. On nous a avisés que l'une des façons les plus efficaces d'entretenir le niveau de sensibilisation du public et des parlementaires à l'égard des questions de sécurité était de pouvoir non seulement recevoir les rapports mentionnés aux articles 11, 12 et 24 de la Loi mais aussi d'autres rapports d'agences gouvernementales du secteur de la sécurité — la GRC, le SCRS, Transports Canada, Affaires étrangères, et cetera —, de sorte que la perception de la sécurité soit maintenue pendant toute la durée de la législature. Le comité américain existe depuis 1973 et il a donc beaucoup d'expérience. C'est dans cet esprit que nous recommandions au gouvernement de déposer à nouveau l'ancien projet de loi C-81, qui a été présenté à la 38e législature avec l'appui unanime de tous les partis au Parlement, et c'est une recommandation permanente de notre comité depuis sa première itération, en 2001.
Personnellement, je demeure convaincu — et je ne sais pas si le président partage mon opinion — que cela devrait figurer dans le projet de loi que nous examinons aujourd'hui, parce que ce sont des aspects complémentaires de ces rapports. C'est bien joli d'avoir des rapports, mais s'ils restent sur les étagères du greffier et que personne n'en prend connaissance, ils sont inutiles, du moins pour les parlementaires.
Je suis absolument convaincu que l'article qui avait été inscrit dans l'ancien projet de loi C-81 à la suite d'une recommandation unanime et permanente du comité devrait figurer dans le projet de loi S-7, la loi que nous examinons aujourd'hui.
Comme je l'ai dit, il y a des précédents dans d'autres compétences, en particulier à Westminster, en Grande- Bretagne. Je crois que le président peut le confirmer. À mes yeux, c'est un élément clé pour sensibiliser le public aux questions de sécurité et pour assurer la visibilité de ces questions dans les débats parlementaires. Je continue de penser, personnellement, que le comité devrait faire partie de la structure permanente du Parlement et qu'il y a suffisamment d'expérience quant à la composition de ce comité pour pouvoir assurer une continuité et qu'il y ait un haut niveau de sécurité parmi ses membres. Nous en avons discuté avec nos homologues britanniques, et je me dois d'insister encore sur cette recommandation, qui effectivement figurait aux articles 11, 12 et 24 et qui est seulement à moitié suivi. Je crois encore que le gouvernement devrait revoir cela, d'autant plus que nous sommes au Sénat et que ce projet de loi émane du Sénat. Nous pouvons envisager d'amender le projet de loi en ce sens.
Le président : Monsieur Gilmour, pourriez-vous commenter? Comme fonctionnaire, cette question doit vous intéresser?
M. Gilmour : Je vais simplement vous remercier de ces commentaires et je vais certainement attirer l'attention du ministre sur ce point. J'ai bien peur de ne pouvoir rien dire de plus.
Le sénateur Joyal : Il y avait une autre recommandation, monsieur Gilmour. Elle est peut-être plus technique, mais je crois que vous pourriez nous en parler. Il s'agit d'une autre recommandation antérieure de notre comité, et elle correspond aux amendements que vous avez apportés à la Loi sur la preuve au Canada aux articles 38 et 38.16. Nous recommandions qu'avant la tenue d'une audience à huis clos ou l'examen d'une demande d'interdiction de divulgation, un avocat spécial soit désigné pour participer à la procédure afin que les droits de la personne concernée soient protégés. Pourquoi avez-vous décidé d'écarter cette recommandation du comité?
Le président : Pourquoi pensez-vous que le gouvernement a décidé de ne pas la suivre?
M. Gilmour : Le gouvernement, comme vous le savez, a créé un régime d'avocats spéciaux pour les certificats de sécurité dans la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés, et je crois que nous aimerions mieux vérifier si ce régime donne de bons résultats avant d'envisager de l'étendre à d'autres secteurs. C'est essentiellement tout ce que je peux en dire pour l'instant.
Le président : Alors, vous nous dites qu'il ne s'agissait pas d'une décision explicite d'écarter le processus de recours à un avocat spécial. Vous nous dites que ce régime est en place pour les certificats ministériels et qu'il faut l'évaluer avant de décider de son élargissement. Est-ce que c'est bien l'esprit de votre réponse?
M. Gilmour : Oui, c'est ma réponse.
Le président : Merci beaucoup.
Le sénateur Joyal : Est-ce que vous n'êtes pas en outre préoccupé par les risques de contestation judiciaire, parce que la fonction d'avocat spécial n'existait pas auparavant, comme vous le savez?
M. Gilmour : En effet, le régime d'avocats spéciaux fait actuellement l'objet d'une contestation devant les tribunaux. J'imagine qu'un jour nous connaîtrons les décisions des tribunaux relativement à cette procédure.
Le sénateur Joyal : Si je vous comprends bien, vous ne vous opposez pas par principe à l'inclusion d'un avocat spécial dans cette procédure. Vous vous y opposez parce que le statut et le rôle de l'avocat spécial n'ont pas encore été entièrement confirmés par les tribunaux. Vous préférez attendre que les tribunaux se prononcent.
M. Gilmour : Non, je ne pense pas, sénateur. Je dis que le gouvernement a instauré un régime d'avocats spéciaux pour les certificats de sécurité en vertu de la LIPR. Que l'on élargisse ou pas ce régime de certificat de sécurité ou qu'on l'applique d'autre façon, par exemple avec l'amicus curiae, c'est au gouvernement d'en décider. Pour ce faire, il faudrait notamment pouvoir réfléchir sur l'efficacité du régime d'avocats spéciaux de la LIPR.
Le président : Monsieur le sénateur, pouvons-nous passer au sénateur Andreychuk? Nous reviendrons à vous lors d'une troisième série de questions.
Le sénateur Joyal : Je regardais le sénateur Andreychuk parce que je ne veux pas l'embarrasser — et je prie M. Gilmour de m'excuser. Je me souviens parfaitement des discussions que nous avons eues lors de réunions de notre ancien comité à ce sujet.
Le président : Vous lui avez certainement indiqué l'orientation qu'elle pouvait prendre.
Le sénateur Joyal : Non, non, je ne veux pas l'influencer.
Le sénateur Andreychuk : Nous avons parlé de l'avocat spécial ou de l'amicus curiae, quel que soit le mécanisme que vous voulez créer, pour qu'une enquête privée soit assujettie à un certain examen. Essentiellement, le processus est confidentiel, et en régime démocratique le système doit être supervisé autant que les personnes elles-mêmes. Le régime d'avocats spéciaux présentait toutefois de nombreux problèmes. Qui est inscrit à la liste des avocats spéciaux? Comment cela limite-t-il votre activité? Certains avocats y trouvaient nettement à redire et ils ont exercé des pressions.
Y a-t-il d'autres façons dans ce système, sans compter l'examen dont vous parliez, pour s'assurer que le système fonctionne comme le prévoit la loi?
M. Gilmour : D'après le libellé actuel, je dirais que non. L'examen parlementaire obligatoire prévu dans le projet de loi serait le principal mécanisme pour évaluer l'efficacité et la nécessité de l'engagement assorti de conditions et de l'audience d'investigation.
Le sénateur Andreychuk : Il y a longtemps que je ne me suis pas penchée sur la question des témoins qui comparaissent devant les tribunaux. Est-ce que la personne convoquée à une audience d'investigation est dans une situation similaire à celle du témoin? Elle a droit à l'assistance d'un avocat, n'est-ce pas? Ici, cela ne serait pas le cas.
M. Gilmour : La disposition concernant l'audience d'investigation précise que la personne a droit à l'assistance d'un avocat. Cette mesure a été instaurée en 2001. Elle est énoncée clairement, avec d'autres mesures de protection des droits de l'intéressé.
Par exemple, cette personne n'est pas tenue de divulguer d'information qui pourrait être régie par la loi sur le privilège ou toute loi se rapportant à la non-divulgation d'information. Cela est également précisé en rapport avec l'audience d'investigation. Il y a des garanties relativement solides pour protéger les personnes interrogées dans le cadre d'une audience d'investigation.
Le sénateur Andreychuk : Cette personne saurait à quelles fins l'information pourrait être utilisée, et notamment qu'elle ne peut pas être utilisée contre elle, et cetera, dans le cadre d'une procédure judiciaire.
M. Gilmour : C'est exact. Comme je l'ai dit, une disposition très claire interdit d'utiliser les réponses fournies par une personne lors d'une audience d'investigation contre cette personne dans le contexte d'une procédure pénale. Je l'ai dit, la Cour suprême a élargi la portée de cette disposition en 2004, dans l'affaire Air India, pour englober les audiences d'extradition et de déportation. Par ailleurs, tout ce qui est dérivé de l'information que la personne fournit ne peut pas être utilisé contre cette personne lors d'une procédure pénale ni d'une audience d'extradition ou de déportation.
La seule exception prévue dans la loi est en cas de parjure ou de témoignage contradictoire, parce qu'il faut pouvoir protéger l'intégrité du système de justice pénale.
Le sénateur Andreychuk : Je voulais aussi parler des libérations conditionnelles, qui devraient être décidées par le même juge. Il me semble que c'est ce que vous voudriez faire, parce que ce juge reçoit une grande quantité d'information, dont certaines viennent de sources qu'il faut protéger. Vous voudriez que tout amendement ou changement des conditions de libération soit présenté à ce juge — à moins que le juge ne soit pas disponible, parce qu'il est malade ou pour une autre raison —, pour assurer ainsi une continuité dans l'intérêt du public et de la personne concernée. Je pense à divers cas où cela s'est produit. Vous avez été un peu vague. Est-ce que vous vouliez que la libération soit décidée par le juge initial ou par n'importe quel juge? J'aimerais avoir des précisions à ce sujet.
M. Gilmour : Actuellement, d'après le libellé, il est clair que vous reviendriez devant le même juge, c'est pour cela que le texte précise « le juge ». La proposition visait à élargir la disposition pour que la personne puisse se présenter devant ce juge ou un autre juge du même tribunal.
Le sénateur Andreychuk : Vous avez pris du recul et vous avez regardé cela. Je veux savoir dans quelle direction vous alliez, parce que moi je préférerais qu'on retourne devant le premier juge.
M. Gilmour : Je présenterai les deux possibilités à mes collègues et nous en discuterons.
Le sénateur Joyal : Je ne crois pas que vous nous avez donné une réponse définitive à ce sujet.
Le sénateur Andreychuk : Réfléchissez-y.
Je suis désolée, sénateur Joyal, vous aviez une question.
Le président : Je me demande si mes collègues m'autorisent à poser deux ou trois questions. Je reprendrai ensuite les questions en commençant par le sénateur Joyal.
Si le sénateur Dallaire, qui est membre du comité, était ici aujourd'hui, il vous demanderait des garanties concernant le lien entre cette loi et ce que nous avons vu dans la presse. Selon certains rapports, par exemple, des jeunes d'une communauté particulière ont participé à des activités terroristes quelque part dans le centre de l'Afrique ou ils sont allés là-bas dans ce but. Évidemment, cette loi viserait précisément les personnes qui envisageraient d'agir ainsi.
Si quelqu'un est placé sous garde parce que l'on croit qu'il était en train de commettre ou qu'il a commis une infraction criminelle, s'il n'est pas majeur, sera traité comme un jeune contrevenant dans le cours normal du Code criminel. Si je comprends bien, il n'y a pas de limite imposée aux tribunaux, sauf ce que stipule le Code criminel, dans le cas d'un adolescent qui participerait à ce genre d'activité illégale?
M. Gilmour : La Loi sur le système de justice pénale pour les adolescents a préséance sur toute autre loi du Parlement de sorte qu'un adolescent — une personne qui a plus de 12 ans mais moins de 18 ans — doit être traité aux termes de cette loi et les procédures...
Le président : Selon vous, rien dans cette loi ne modifie cette disposition élémentaire?
M. Gilmour : C'est ainsi que je le comprends. Regardez le paragraphe 14(1) de la Loi sur la justice pénale pour les adolescents — et j'espère en citer le titre correctement... Il est clair que cette loi a préséance sur toute autre loi du Parlement. Le paragraphe 14(1) établit une compétence exclusive et précise :
Malgré toute autre loi fédérale, mais sous réserve de la Loi sur les contraventions et de la Loi sur la défense nationale, le tribunal a compétence exclusive pour toute infraction qu'une personne aurait commise au cours de son adolescence; la personne bénéficie alors des dispositions de la présente loi.
Ils seraient traités dans ce régime.
Le président : Merci de cette précision, monsieur Gilmour.
J'ai une autre question qui, en fait, recoupe la première question de mon collègue le sénateur Joyal. Elle porte sur l'exécution de la loi. J'imagine que lorsqu'une loi comme celle-là est envisagée et que de nouvelles dispositions sont présentées, les services de la sécurité publique et les diverses organisations policières et autres songent également à la façon dont ses dispositions seront appliquées. Il y aurait des dispositions concernant, par exemple, la collecte d'information liée à une activité criminelle dans le but de déposer des accusations; c'est un aspect. Il y a aussi l'aspect prévention, c'est-à-dire les éléments d'une loi qui visent à empêcher quelque chose de se produire, nombre de Canadiens considèrent que cela devrait être l'objectif de nos lois sur le terrorisme.
Nous n'exerçons aucun contrôle sur les sorties, comme le faisait remarquer le sénateur Joyal. Alors est-ce que le ministère a songé à l'aspect de l'exécution qui porte sur la prévention pour accompagner ce projet de loi ou est-ce que cette question devrait être réglée d'autres façons avec des collègues de Sécurité publique Canada, de la GRC et de l'Agence des services frontaliers du Canada, dans le cadre des audiences que nous consacrons à ce projet de loi?
M. Gilmour : Je vous répondrai en deux temps. Premièrement, il serait sans doute utile que vous convoquiez des représentants de Sécurité publique Canada et de la GRC pour discuter des mesures préventives qu'ils adoptent.
L'un des dossiers auxquels j'ai travaillé, tout comme d'autres non seulement à Justice mais aussi dans d'autres ministères, relève des relations avec les communautés. Vous le savez probablement, il existe une organisation appelée table ronde interculturelle sur la sécurité, qui a été créée en 2005. Elle est formée de 15 représentants de divers groupes ethnoculturels et religieux du Canada. Ces dernières années, elle a été très active. Les membres de la table ronde participent à des activités d'information dans diverses communautés. J'ai eu l'occasion et la chance de participer en 2011 à six manifestations d'information qui avaient été organisées par la table ronde et qui ciblaient non seulement les nouveaux arrivants au Canada, mais aussi, dans une certaine mesure, les jeunes. De fait, il y a deux ou trois semaines, j'ai participé à deux activités d'information à Hamilton et à St. Catharines avec des membres des communautés musulmanes que nous avions visitées en octobre et qui nous ont invités à nouveau. Si j'ai une minute, je vais vous décrire ces activités.
Le président : Je vous en prie.
M. Gilmour : Des représentants de diverses organisations y étaient, notamment Justice Canada, l'Agence des services frontaliers, le SCRS et la GRC. C'était une occasion pour les jeunes et les adultes de rencontrer des représentants de ces organisations et de poser des questions sur leurs activités, leurs rôles et leurs responsabilités ainsi que d'exprimer les préoccupations éventuelles de la communauté.
Les récentes manifestations tenues à Hamilton et à St. Catharines ont permis à des jeunes et à des adultes de s'engager activement. Pour le ministère de la Justice, par exemple, un collègue et moi-même avons présenté un bref questionnaire sur la loi canadienne, avec des questions générales sur la Constitution du Canada et la Charte et quelques questions sur la Loi antiterrorisme. Nous avons constaté, entre autres, lors de certaines de ces activités, que les participants avaient parfois des idées préconçues concernant les pouvoirs que certains organismes peuvent exercer, dont le fait que le SCRS a le pouvoir d'arrêter des gens, ce qui est faux. La GRC a aussi, de son côté, participé à un programme national d'information sur la sécurité.
Je crois qu'il est important de continuer à prendre part à des initiatives de ce genre, parce que ce sont des moyens utiles non seulement de diffuser l'information dans les communautés, mais aussi de connaître les préoccupations des communautés relativement à ses lois. Elles servent à promouvoir la confiance dans des communautés qui se sentent peut-être aliénées.
Le président : Ou injustement ciblées, selon les cas.
M. Gilmour : Oui, ou injustement ciblées. La majorité de ces séances d'information nous ont semblé fort réussies.
Le sénateur Joyal : Je vais enchaîner là-dessus.
Monsieur le président, vous vous souvenez peut-être que le comité a recommandé dans un de ses rapports des mesures que le gouvernement et tous les ministères responsables de la sécurité devraient prendre pour superviser les politiques afin de prévenir le profilage racial.
Si vous me permettez de faire valoir deux fois le même objectif, je crois qu'un comité permanent de la sécurité nationale pourrait surveiller le genre de politiques que vous décrivez et qui vous semblent utiles pour mobiliser les communautés. Des représentants du SCRS et des forces policières du pays — les policiers de Montréal, de Vancouver, de Toronto, d'Ottawa — nous ont dit, et le président s'en souvient certainement, qu'il est important d'engager les communautés pour faire mieux comprendre le principe de la primauté du droit au Canada et expliquer que les citoyens ont le devoir de contribuer à la paix et à la sécurité au pays. D'après moi, ce que vous nous dites montre clairement qu'un comité permanent permettrait d'exercer une surveillance régulière, en collaboration avec divers ministères fédéraux, pour que l'expérience que vous avez vécue à Hamilton ou ailleurs au Canada soit répétée dans d'autres localités. Je pense notamment à certaines communautés qui ont le sentiment qu'elles sont plus fragiles ou plus vulnérables au genre de discours ou de messages qui poussent les gens à opter pour l'extrémisme. On nous a répété à maintes reprises que c'était la principale menace au Canada — pas une menace importée, mais une menace née ici même au Canada, dans les communautés.
Je suis encore fermement convaincu que cette initiative contribuerait à promouvoir ce que vous considérez comme utile pour maintenir le genre de coopération que nous souhaitons.
M. Gilmour : Si vous me permettez, je dirais qu'un des témoins que vous devriez peut-être entendre serait la présidente actuelle de la table ronde interculturelle sur la sécurité, Mme Myrna Lashley, de Montréal. Elle pourrait vous parler de la table ronde ainsi que de ses initiatives d'information et de ses travaux jusqu'à maintenant.
Le sénateur Day : J'ai une précision à demander. J'ai remarqué une disposition qui prévoit le droit à l'assistance d'un avocat pour les audiences d'investigation, mais je ne vois rien de disposition similaire — et vous pouvez peut-être m'aider à trouver cela — pour l'engagement assorti de conditions.
M. Gilmour : Il n'y en a pas, parce que c'est une variante de la reconnaissance assortie de conditions qui figure dans le Code criminel, aux articles 810 et 810.01. Il n'y a pas de mention précise du droit à l'assistance d'un avocat. Je crois que l'on a simplement emprunté ces dispositions pour les transposer ici.
Le sénateur Day : Est-ce que vous ne craignez pas que puisque la clause est précisée relativement aux audiences d'investigation mais non pas pour les arrestations sans mandat, quelqu'un pourrait soutenir ce droit n'est pas prévu dans le deuxième cas?
M. Gilmour : Je n'y avais pas songé, sénateur, mais je vais certainement y réfléchir.
Le sénateur Day : Vous avez parlé des preuves dérivées des audiences d'investigation. À la page 6, vers la ligne 23, il est dit « aucun élément de preuve découlant de la preuve obtenue ». Est-ce que ce passage a fait l'objet d'une interprétation? Le terme « découlant » est plutôt général. Y a-t-il des interprétations sur lesquelles nous pouvons nous appuyer?
M. Gilmour : J'espère que vous ne m'en voudrez pas, sénateur, si ma réponse est un peu longue, car je vais citer un jugement. J'ai mentionné l'arrêt pris en 2004 par la Cour suprême du Canada, qui maintenait la constitutionnalité de l'audience d'investigation. Il y a deux paragraphes que j'aimerais citer en partie pour nous aider. Ces deux citations sont tout ce que j'ai à vous offrir.
Le sénateur Day : Dans quelle affaire?
M. Gilmour : Il s'agit de l'affaire intitulée Demande fondée sur l'article 83.28 du Code criminel (Re), [2004] 2 R.C.S. 248, 2004 CSC 42. L'arrêt est facile à trouver en ligne sur le site Web de la Cour suprême du Canada.
Je cite en partie les paragraphes 72 et 73 de l'arrêt. La cour examinait ce paragraphe particulier qui porte sur l'immunité contre l'utilisation de la preuve et de la preuve dérivée. La cour dit, au début du paragraphe 72 :
Le paragraphe 83.28(10) accorde à la personne visée par une ordonnance autorisant la recherche de renseignements l'immunité contre l'utilisation de la preuve ainsi que l'immunité contre l'utilisation de la preuve dérivée. L'alinéa 83.28(10)a) prévoit que la réponse donnée ou la chose remise par une personne ne peut être utilisée ou admise contre elle dans des poursuites criminelles, sauf dans le cas de poursuites pour parjure ou pour témoignage contradictoire. L'immunité contre l'utilisation de la preuve dérivée est prévue à l'al. 83.28(10)b). En fait, la protection accordée par l'al. b) déborde les exigences de la jurisprudence et confère une immunité absolue contre l'utilisation de la preuve dérivée, de sorte que la preuve émanant du témoignage livré à l'investigation judiciaire ne peut être produite contre le témoin dans d'autres poursuites, même si le ministère public est en mesure d'établir, selon la prépondérance des probabilités, qu'il aurait inévitablement découvert cette preuve par d'autres moyens.
C'est une garantie très solide. Et au paragraphe 73 :
L'analyse qui précède montre clairement que les garanties procédurales dont l'appelant peut se prévaloir en ce qui concerne l'investigation judiciaire sont équivalentes et, dans le cas de l'immunité contre l'utilisation de la preuve dérivée, supérieures à celles dont jouissent les témoins contraints à témoigner dans d'autres procédures, comme les procès criminels, les enquêtes préliminaires ou les audiences de commissions.
Je ne peux pas vous donner plus d'information concernant le sens de « dérivé » dans le contexte jurisprudentiel.
Le sénateur Day : Cela confirme mon impression que l'on peut interpréter très largement cette disposition et que c'est une immense protection pour quiconque participe ou doit participer à une audience d'investigation.
M. Gilmour : La Cour suprême du Canada en a donné une très large interprétation.
Le sénateur Day : Mon autre question vous aidera. Vous avez reconnu la valeur de l'article dans « le juge », et nous examinions l'arrestation sans mandat, à la page 10, paragraphe 1.3, « le juge peut ». J'ai aussi mentionné qu'un peu plus haut dans la loi que nous examinons, le projet de loi S-7, autre disposition utilise l'expression « le juge » pour désigner le juge qui a prononcé l'ordonnance ou un autre juge de la même instance, et cela se trouve à la page 5, paragraphe 7, tout au bas de la page :
Le juge qui a rendu l'ordonnance ou un autre juge du même tribunal peut modifier les conditions de celle-ci.
L'une modifie les conditions relatives aux audiences d'investigation, et l'autre porte sur l'arrestation sans mandat. Si j'en ai parlé, c'est pour attirer votre attention sur la question de l'intégrité de la loi.
M. Gilmour : Merci beaucoup, sénateur.
Le sénateur Joyal : Le fait est qu'un juge qui participe à la procédure reçoit lors de l'audience toutes sortes de renseignements auxquels un autre juge n'aura peut-être pas accès. C'est pour cette raison que je vois une nuance entre les deux. Mon interprétation est peut-être erronée, mais elle me semble raisonnable : le juge qui continue la procédure devrait posséder exactement la même connaissance de tous ses aspects depuis le début. Cela vise à protéger les droits de l'intéressé.
M. Gilmour : Je le répète, je vous remercie infiniment de ces commentaires. J'y réfléchirai.
Le président : Ils seront repris dans la foule d'amendements que Sa Majesté voudra peut-être présenter au comité d'ici la fin de nos délibérations, si j'ai bien compris.
M. Gilmour : Les éventuels amendements.
Le président : Les éventuels amendements, d'accord.
Le sénateur Joyal : J'ai deux autres questions. La première porte sur l'article 2 du projet de loi. Pourquoi avez-vous décidé de modifier la définition d'« activité terroriste » dans le Code criminel pour englober la mention très précise d'« installation utilisée pour la navigation aérienne »? Pensiez-vous que la définition actuelle ne suffisait pas?
M. Gilmour : Vous parlez de l'article 2?
Le sénateur Joyal : Oui.
M. Gilmour : C'est parce que la loi initiale contenait certaines erreurs. Elle ne renvoyait pas, par exemple, si je me souviens bien, à l'alinéa g), et c'est simplement pour harmoniser les textes.
Le sénateur Joyal : Cela n'élargit pas la définition.
M. Gilmour : Cela ne vise pas à élargir la définition; c'est simplement pour corriger une lacune. D'après mes souvenirs, je crois qu'à la suite d'un amendement un paragraphe a été éliminé par inadvertance. Si vous voulez bien, j'ai quelque chose ici qui pourrait m'aider à l'expliquer. Il me faut juste un instant.
Le sénateur Joyal : Pendant que vous cherchez dans vos papiers, je vais en profiter pour faire quelques commentaires, parce que depuis le début notre comité a de la difficulté à cerner la signification du terme « terrorisme » — qu'est-ce que le terrorisme et qu'est-ce qui constitue une activité terroriste. Quand j'ai vu cela dans la disposition, je me suis demandé si quelque chose nous avait échappé, si un domaine d'activité avait été oublié, ou si c'était parce que vous vouliez être plus précis afin que l'infraction puisse être définie plus clairement et qu'il soit plus facile d'intenter des poursuites. Je ne sais pas exactement pourquoi vous êtes revenu là-dessus.
M. Gilmour : Les amendements garantissent simplement que les renvois appropriés aux infractions prévues à l'article 77 du Code criminel figurent dans la nouvelle loi. Pour une raison quelconque, les renvois à la section 77 étaient erronés, c'était un oubli dans la loi et nous corrigeons simplement cet oubli.
Le sénateur Joyal : Est-ce que cela modifie la définition ou élargit la définition du code?
M. Gilmour : Non, pas du tout. Le paragraphe 7 porte essentiellement sur la compétence extraterritoriale, mais il n'influe pas sur la définition d'activité terroriste. Il n'influe pas sur la définition de toute infraction de terrorisme.
Le sénateur Joyal : Vous savez sans doute qu'un incident s'est produit en France la semaine dernière. Un terroriste a tué sept policiers et des enfants dans une synagogue. Le Président français a fait une déclaration que je vais lire, si vous le voulez bien, pour demander des modifications du Code criminel français. Il a réclamé deux modifications précises du Code criminel. Voici la première, que je vous fais la lecture : Toute personne qui consultera de manière habituelle des sites Internet qui font l'apologie du terrorisme ou qui appellent à la haine ou à la violence sera punie pénalement.
[Français]
Toute personne qui consultera de manière habituelle des sites Internet qui font l'apologie du terrorisme ou qui appellent à la haine et à la violence sera punie pénalement.
[Traduction]
Autrement dit, quiconque consulte des sites Internet qui prônent le terrorisme, la haine et la violence sera puni comme prévu au Code criminel.
Êtes-vous d'avis qu'actuellement le Code criminel canadien couvre ce genre d'activité, si par exemple quelqu'un consulte régulièrement des sites Internet qui encouragent la violence, si quelqu'un a l'habitude de visiter des sites qui préconisent la violence et les activités terroristes?
M. Gilmour : Je crois que tout est fonction des faits. Comme je l'ai dit, le fait de participer sciemment ou de contribuer aux activités d'un groupe terroriste pour améliorer la capacité d'un groupe terroriste de mener ou de faciliter une activité terroriste constitue une infraction.
Il y a eu une affaire, au Québec, appelée R. c. Namouth, où quelqu'un participait à l'activité d'une organisation qui constituait essentiellement le volet propagande d'Al-Qaïda. Il a été reconnu coupable d'avoir encouragé le terrorisme. Je suis désolé, je crois qu'il a aidé le groupe en affichant de l'information sur un site Web des jihadistes. Le juge a statué que le groupe qu'il aidait était un groupe terroriste au sens du Code criminel. La personne a été reconnue coupable d'avoir en partie participé ou contribué sciemment à l'activité d'un groupe terroriste. Ce sont les faits qui permettent de déterminer si l'on peut prouver hors de tout doute raisonnable que la personne a contribué ou participé sciemment à l'activité d'un groupe terroriste dans le but d'améliorer la capacité d'un quelconque groupe terroriste de mener des activités terroristes.
C'est vraiment tout ce que je peux vous dire. Ce sont les faits de l'affaire qui permettent de déterminer si les activités d'une personne relèvent de cette disposition particulière du Code criminel.
Le sénateur Joyal : Je comprends. Dans l'affaire que vous décrivez, il y a un lien entre la personne qui visite les sites et un groupe terroriste étranger. Toutefois, si quelqu'un utilise son ordinateur pour simplement visiter régulièrement des sites qui préconisent le terrorisme, la haine ou la violence, est-ce que cette personne pourrait être jugée coupable aux termes du Code criminel d'une activité liée au terrorisme?
M. Gilmour : Si les faits ne prouvent pas hors de tout doute raisonnable que cette personne participait ou contribuait sciemment aux activités d'un groupe terroriste dans le but d'améliorer la capacité d'un groupe terroriste quelconque de faciliter ou d'exécuter une activité terroriste, alors elle ne serait pas considérée comme ayant commis cette infraction de terrorisme particulière. Je ne peux hélas pas vous en dire plus à ce sujet.
Le président : J'ai une dernière question, si vous me le permettez, et c'est la question qui est toujours posée, quel que soit le gouvernement en place ou le moment où ce genre de loi est présentée. C'est une question très difficile, mais je vous donne la chance d'y répondre.
Si l'audience d'investigation avait souvent été utilisée au cours des cinq dernières années, il y aurait des gens qui parleraient d'une utilisation excessive de cet instrument. Si elle n'a pas été utilisée, et c'est le cas ici, même si la loi est en vigueur depuis 2001, il s'en trouvera pour affirmer que comme la disposition n'a pas été utilisée par le passé, on n'en aura sans doute pas besoin à l'avenir. C'est une situation où le gouvernement est toujours perdant. Je ne vous demande pas un point de vue politique — cela serait injuste puisque vous êtes fonctionnaire —, mais je vous demande de fournir au comité un avis technique. Selon vous, est-ce que les circonstances qui rendaient l'audience d'investigation nécessaire et appropriée lorsque la recommandation en a été faite pour la première fois ont suffisamment changé pour justifier de modifier cette approche? Connaissez-vous des circonstances qui seraient venues modifier les exigences relatives à l'exécution de la loi et à la protection du public entre le moment où les premiers efforts ont été faits et le point où nous en sommes aujourd'hui? Je ne veux pas vous dicter votre réponse, j'essaie de formuler une question.
M. Gilmour : Sénateur, comme l'a mentionné le ministre Nicholson, le rapport annuel du SCRS et l'évaluation de la menace qui s'inscrit dans la stratégie antiterroriste qui a récemment été utilisée indiquent que le terrorisme constitue toujours une menace au Canada. Par conséquent, je soutiens que ces outils demeurent nécessaires. Vous avez raison : si vous ne les utilisez pas, on vous dira qu'ils ne sont pas nécessaires. Par contre, j'imagine que c'est un peu comme une police d'assurance ou le fait de garder un extincteur dans la maison. Vous espérez que vous ne toucherez jamais l'argent de l'assurance et que vous n'utiliserez pas votre extincteur. On ne sait jamais ce qui peut arriver — quand surviendra une situation d'urgence — et ces pouvoirs seront alors nécessaires pour prévenir un acte terroriste ou collaborer à l'enquête sur une infraction de terrorisme.
Le président : Monsieur Gilmour, merci de nous avoir consacré tout ce temps et de nous avoir fourni des réponses claires. Nous vous sommes reconnaissants d'être venu aujourd'hui.
Chers collègues, vous avez devant vous un rapport d'un paragraphe qui résume simplement ce que nous avons dit lors de notre première réunion : le comité ne sera pas appelé Comité sénatorial spécial sur certains projets de loi gouvernementaux, ce titre quelque peu kafkaïen semble fait pour cacher nos activités. Nous recommandons plutôt dans notre premier rapport que le comité soit baptisé Comité sénatorial spécial sur l'antiterrorisme.
Le sénateur Tkachuk : C'était l'ancien nom.
Le président : Il n'y a aucun changement, et cela est conforme à notre dernière discussion. Si nos collègues du Sénat acceptent notre rapport, nous serons appelés Comité antiterroriste et nous ferons notre travail comme par le passé.
Le sénateur Day : Est-ce que nous devrions ajouter le numéro deux?
Le sénateur Joyal : Non, le numéro six.
Le président : J'ai une motion sur la table. Est-ce que mes collègues du comité m'appuient?
Des voix : D'accord.
Le sénateur Andreychuk : Avez-vous consulté les deux leaders au Sénat?
Le président : Oui, et ils n'ont pas d'objection.
Le sénateur Day : Si cela est proposé, ils ne s'y opposeront pas.
Le président : Précisément.
Le comité directeur et du programme se réunira. Nous avons de nombreuses recommandations à examiner concernant les témoins. Nous essayerons de produire un calendrier pour poursuivre notre examen du projet de loi et entendre les divers témoins qui seront convoqués. Pour nos collègues qui n'ont pas pu présenter de suggestion concernant les témoins et ceux qui nous écoutent et qui ont des idées, n'hésitez pas, tout cela est très apprécié.
Le sénateur Andreychuk : J'aurais aimé parler des protocoles avec les services de la frontière. Je m'inquiète de l'aspect administratif. Quitter l'aéroport ne devrait pas constituer une infraction criminelle. J'aimerais savoir comment la formation sera dispensée et quels protocoles sont envisagés pour les aéroports, et cetera.
Le sénateur Joyal : Il faudrait aussi savoir comment ces nouveaux articles seront interprétés et quel type de circulaire d'information sera diffusé.
Le président : C'est juste, et quel protocole d'exécution sera présenté aux corps policiers provinciaux et fédéraux ainsi qu'aux services frontaliers pour appliquer les dispositions du projet de loi?
Le sénateur Andreychuk : C'est très important. Ce n'est pas tant l'intention du gouvernement qui compte, c'est la façon dont cela sera appliqué.
Le sénateur Tkachuk : Nous n'avons pas pris de décision quant au jour des réunions, n'est-ce pas?
Le président : Nous n'avons pris aucune autre décision au sujet du calendrier. Je dois vous avouer que je n'ai pas réussi à obtenir l'appui des whips des deux parties pour les mardis.
Le sénateur Joyal : Je peux vous faire part de notre première réaction, de ce côté-ci, sénateur Tkachuk. Il y a déjà cinq comités qui se réunissent le mardi, et la capacité maximale du Sénat est de cinq réunions par jour.
Le président : Il y a les greffiers et tous les autres intéressés.
Le sénateur Joyal : Je ne suis pas en mesure de commenter la réponse, mais c'est ce qu'on m'a dit. Nous devrions peut-être revoir ce point.
Le sénateur Andreychuk : Pour ceux d'entre nous qui viennent de loin, si vous décidez que les réunions se feront le lundi, tenez compte du temps de déplacement. C'est impossible ces jours-là, et les choses semblent empirer.
Le président : Je comprends. Vous pensez qu'il vaudrait mieux commencer plus tard dans l'après-midi.
Le sénateur Tkachuk : Sinon, il faudra arriver le dimanche soir.
Le président : C'est juste.
Le sénateur Joyal : Je suis prêt à accepter bien des solutions, monsieur le président. J'ai beaucoup de sympathie pour nos collègues qui viennent de loin. Nous, qui venons de Montréal ou de Toronto, nous n'avons guère de problème, mais pour les autres, les choses sont plus compliquées.
Le président : Nous en tiendrons compte et nous essayerons de dresser un calendrier qui convient à tous.
Le sénateur Andreychuk : Le mardi soir est également hors de question, avec les cinq comités. N'est-ce pas?
Le président : Je n'ai pas de réponse à cela. J'ai de la difficulté à faire avancer les choses pour ce qui est du mardi, et je n'ai pourtant pas ménagé mes efforts.
Le sénateur Day : Le lundi après-midi, le Comité de la défense et de la sécurité commence sa réunion à 16 heures et celui des langues officielles, à 17 heures.
Le président : Est-ce que nous pourrions choisir 13 h 45?
Le sénateur Tkachuk : Cela m'irait.
Le sénateur Andreychuk : Vous pourriez commencer sans nous.
Le président : Nous ne voulons pas commencer sans qui que ce soit.
Le sénateur Tkachuk : Treize heures, cela serait bien. Plus tard que ça, c'est trop tard.
Le président : Nous allons voir ce que nous pouvons faire.
(La séance est levée.)