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APPA - Comité permanent

Peuples autochtones

 

Délibérations du Comité sénatorial permanent des
Peuples autochtones

Fascicule 28 - Témoignages du 28 novembre 2012


OTTAWA, le mercredi 28 novembre 2012

Le Comité sénatorial permanent des peuples autochtones se réunit aujourd'hui, à 18 h 50, afin d'examiner, pour en faire rapport, la reconnaissance juridique et politique de l'identité des Métis au Canada.

Le sénateur Vernon White (président) occupe le fauteuil.

[Traduction]

Le président : J'aimerais souhaiter la bienvenue à tous les honorables sénateurs et à tous les membres du public qui suivent les débats du Comité sénatorial permanent des peuples autochtones sur la chaîne parlementaire CPAC ou sur Internet.

Je suis le sénateur White, de l'Ontario, et j'assume la présidence du comité, lequel a le mandat d'examiner les mesures législatives et les questions qui concernent les peuples autochtones du Canada de façon générale. Aujourd'hui, nous allons poursuivre notre étude de questions touchant les Métis, plus particulièrement celles ayant trait à l'évolution de la reconnaissance juridique et politique de l'identité collective et des droits des Métis au Canada.

Au cours de la réunion de ce soir, nous allons entendre des représentants de deux organisations, à savoir le Conseil des peuples autochtones du Nouveau-Brunswick et la Red Sky Métis Independent Nation.

Avant de céder la parole aux témoins, j'aimerais profiter de l'occasion pour présenter les membres du comité qui sont parmi nous ce soir, à savoir le sénateur Nick Sibbeston des Territoires du Nord-Ouest; le sénateur Sandra Lovelace Nicholas, du Nouveau-Brunswick, le sénateur Larry Campbell, de la Colombie-Britannique; le sénateur Charlie Watt, du Québec; le sénateur Dennis Patterson, du Nunavut; le sénateur Salma Ataullahjan, de l'Ontario; le sénateur Nancy Greene Raine, de la Colombie-Britannique; et enfin, le sénateur Jacques Demers, du Québec.

Chers collègues, je vous prie de vous joindre à moi pour souhaiter la bienvenue aux représentants du Conseil des peuples autochtones du Nouveau-Brunswick, à savoir Kim Nash-McKinley, cheffe et présidente, et Ron Swain, vice- chef national, de même qu'aux représentants de la Red Sky Métis Independent Nation, à savoir Troy DeLaRonde, chef métis, et John Edmond, conseiller juridique. Sont également parmi nous, à l'arrière, Donelda DeLaRonde, directrice exécutive, et Susan Blekkenhorst, coordonatrice des consultations, qui répondront, au besoin, aux questions des membres.

Mesdames et messieurs, nous avons hâte d'entendre vos exposés. Nous passerons ensuite aux questions des sénateurs. Merci beaucoup de vous être présentés ici à une heure si tardive.

Je demanderai d'abord aux représentants du Conseil des peuples autochtones du Nouveau-Brunswick de bien vouloir nous présenter leur exposé.

Kim Nash-McKinley, cheffe et présidente, Conseil des peuples autochtones du Nouveau-Brunswick : Bonsoir, monsieur le président. Bonsoir, mesdames et messieurs les membres du comité. Nous avons l'honneur et le plaisir de nous adresser à vous pour vous parler des droits des Métis et du recensement de la population du territoire traditionnel des peuples algonquins. Je suis cheffe et présidente du Conseil des peuples autochtones du Nouveau-Brunswick. Je suis membre de la Première Nation Malécite, et le totem de ma famille est l'ours. Je suis accompagnée du vice-chef national du Congrès, M. Ron Swain, qui a été élu récemment à ce poste.

Le conseil est une organisation qui représente les peuples autochtones vivant sur les terres ancestrales situées à l'extérieur des réserves créées au titre de la Loi sur les Indiens dans ce lieu que l'on appelle aujourd'hui, le Nouveau- Brunswick. Le territoire traditionnel micmac s'étend sur ce que l'on appelle les Maritimes, et comprend des parties du Maine et du Québec. Le conseil est affilié au Congrès des peuples autochtones, l'organisation qui nous représente à l'échelle nationale.

Notre communauté est dispersée dans des villages, des villes et des régions rurales un peu partout dans la province. Notre population est la plus jeune du Canada, et celle qui croît le plus rapidement au pays. Le conseil joue le rôle de porte- parole politique et de défenseur des droits de quelque 28 000 Autochtones, y compris des titulaires de droits autochtones et de droits issus de traités, des Indiens inscrits, des Indiens non inscrits et des membres de peuples autochtones sans territoire qui ont fait du Nouveau-Brunswick leur lieu de résidence.

Le conseil vise également à faire la promotion de la culture, de la tradition, de l'économie et des conditions de vie générales des peuples autochtones qui vivent hors réserve au Nouveau-Brunswick. Ses membres sont des Autochtones sur le plan tant biologique que culturel. Toutefois, selon les lois canadiennes, quelques-uns d'entre nous ne possèdent pas ce statut.

Lorsque le gouvernement du Canada a décidé de procéder à l'inscription de tous les Autochtones, un nombre considérable d'entre eux ont décidé de ne pas s'inscrire. Certains d'entre eux ne savaient pas qu'ils devaient s'inscrire, ne comprenaient pas le processus ou craignaient d'assumer leur ascendance. Quant aux autres, les représentants du gouvernement ont délibérément choisi de les écarter.

Comme le gouvernement l'a reconnu, le recensement est un élément de base de l'autonomie gouvernementale des Métis et des Autochtones vivant hors réserve. Par conséquent, il s'agit de la clé de voûte du renouvellement de la relation entre le Canada et les peuples autochtones. Pour vous aider à comprendre de quelle façon le dénombrement et les catégories imposées en ce qui a trait à l'identité autochtone se sont traduits par le déni de droits, j'aimerais vous présenter un bref aperçu de l'évolution du terme « Métis ».

Les peuples autochtones, les représentants du gouvernement, les historiens et les universitaires n'ont pas utilisé, au fil du temps, une terminologie uniforme pour décrire ou désigner les Autochtones de diverses ascendances, et la terminologie continue d'évoluer. Les Métis sont des personnes d'ascendance autochtone, britannique et française. Il est difficile de donner une définition générale de ce qu'est un Métis, et cette difficulté découle des différentes réalités historiques qui caractérisent les populations métisses de l'ensemble du Canada. Parmi les nombreux termes qui ont été employés au fil du temps pour désigner les Métis, mentionnons, entre autres, le terme anglais « country-born » et les expressions « demi-sang » et « sang-mêlé ». Le gouvernement fédéral a recouru à l'expression « Indien non inscrit », qui figure dans la Loi sur les Indiens. Les Indiens non inscrits ont accès à des services comparables à ceux offerts aux Métis. Pour cette raison, il est important de garder présent à l'esprit que la population métisse englobe les Indiens non inscrits.

Bien avant la fondation du Canada, il n'existait aucune définition fixe permettant de cerner les Métis ou de les distinguer des Indiens. Les Métis et les Indiens étaient considérés comme constituant une seule et même entité. Par exemple, les Métis faisaient partie des récipiendaires des cadeaux que distribuait le gouvernement impérial britannique pour renforcer les alliances entre la Couronne britannique et les peuples autochtones.

À la fin de la guerre de Sept Ans, qui a opposé la Grande-Bretagne et la France et dont l'enjeu était le contrôle l'Amérique du Nord, la Proclamation royale de 1763 a créé un important précédent en reconnaissant aux populations autochtones certains droits sur les territoires qu'elles occupaient. Les nations autochtones ont joué un rôle de premier plan durant cette guerre, et la conclusion d'alliances avec elles ont été un élément décisif de son issue. La Proclamation royale était fondée sur le respect mutuel, et garantissait la reconnaissance des droits des peuples autochtones sur les territoires qu'ils occupaient dans le cadre de pourparlers futurs. En 1867, le Canada a hérité de ces obligations.

Le terme « Indiens » n'était pas défini dans la Loi constitutionnelle de 1867. C'est dans le cadre de Loi sur les Indiens de 1876 qu'ont été instaurées les diverses catégories d'Indiens. Avant cette loi, les Métis étaient considérés comme des Indiens. Toutefois, il est possible de déterminer si les rédacteurs de la Constitution considéraient les Métis comme des Indiens en examinant les lois créées plus ou moins à la même époque, par exemple la Loi sur le Manitoba de 1870.

Le gouvernement a cédé des parcelles de terres aux Métis auparavant désignés sous l'appellation de « demi-sang » à la condition qu'ils acceptent l'abolition de leur titre indien. Cela indique clairement que, pour les rédacteurs de la Constitution, le terme « Indiens » englobait les Métis, car autrement, ils n'auraient pas eu à demander aux Métis de renoncer à leur titre indien.

La Cour suprême du Canada a statué que les Inuits — que l'on désignait à l'époque sous l'appellation d'« Esquimaux » — étaient des Indiens aux termes de la Loi constitutionnelle de 1867. Dans cette affaire, la Cour a examiné des documents historiques antérieurs à la Confédération afin d'établir le contexte entourant l'utilisation du terme « Indiens ». D'après les documents examinés, avant et après la Confédération, le terme était employé de façon générique pour désigner tous les Autochtones, y compris les Métis. Il est logique et réaliste de conclure que, pour les rédacteurs de la Constitution, le terme « Indiens » englobait tous les Autochtones assujettis à l'autorité centrale, et ne servait pas à catégoriser les différentes nations autochtones. Cette intention originale doit être respectée. Les droits à l'égalité prévus par l'article 15 de la Charte des droits et libertés s'appliquent aux Métis. Le Parlement est obligé de traiter les Métis et tous les peuples autochtones de la même façon qu'il traite les Indiens inscrits au moment d'exécuter ses programmes et de fournir ses prestations.

La Commission royale sur les peuples autochtones soutient l'idée selon laquelle le gouvernement fédéral doit assumer ses responsabilités à l'égard des peuples autochtones. Selon le rapport découlant de cette commission, la mise en pratique de l'ensemble des recommandations formulées exigerait un maximum de 20 ans. Hélas, le gouvernement n'a toujours pas donné suite à la moindre recommandation contenue dans ce rapport.

Les droits des Métis sont reconnus et confirmés dans la Loi constitutionnelle de 1982. L'article 35 de la Loi constitutionnelle de 1982 est rédigé en ces termes :

35. (1) Les droits existants — ancestraux ou issus de traités — des peuples autochtones du Canada sont reconnus et confirmés.

(2) Dans la présente loi, « peuples autochtones du Canada » s'entend notamment des Indiens, des Inuits et des Métis du Canada.

L'article 37 de cette loi prévoyait que les premiers ministres devaient tenir une conférence pour clarifier et définir les droits autochtones énoncés à l'article 35. L'article 37 a été abrogé après trois conférences, celles de 1984, de 1985 et de 1987. En définitive, il s'est révélé trop difficile pour le gouvernement d'établir et de cerner les droits des Métis.

En général, les Métis ne peuvent pas exercer les droits qui leur sont reconnus par les lois fédérales, vu qu'ils ne sont pas considérés comme des Indiens par la Loi constitutionnelle de 1867. Parmi ces droits, mentionnons ceux liés à la propriété foncière, à la chasse et à la pêche, à la taxation, aux programmes et services, à la protection des droits autochtones, à la consultation et au dénombrement.

Le gouvernement fédéral soutient que les Métis ne sont pas englobés par la définition d'« Indiens » énoncée dans la Loi constitutionnelle de 1867. Pourtant, en 1873, les Métis ont été dénombrés dans le cadre du Traité 3, conclu pour le compte de la Couronne par Alexander Morris, négociateur en chef du gouvernement fédéral. Il est possible que le gouvernement dispose de documents qui mentionnent les bénéficiaires du traité ou les auteurs de revendications territoriales. Le cas échéant, on serait en mesure d'identifier et de dénombrer ces gens. Toutefois, on ne sait pas avec certitude si ces documents sont entièrement exacts.

J'aimerais citer un exemple de bande ne possédant pas de terres ayant fait l'objet d'un dénombrement. L'une des organisations affiliées du Congrès des peuples autochtones, la Première nation Mi'kmaq des Qalipu — anciennement connue sous le nom de Fédération des Indiens de Terre-Neuve — a mené une lutte afin d'obtenir la reconnaissance du gouvernement fédéral du Canada, et a obtenu gain de cause. Cette nation est à présent une bande ne possédant pas de terres et est inscrite au titre de la Loi sur les Indiens. Le gouvernement fédéral a approuvé les critères d'adhésion de la Première nation Mi'kmaq des Qalipu. Il s'attendait à ce que cette nation compte environ 15 000 membres; à ce jour, selon les critères établis par le gouvernement, environ 23 000 membres ont été dénombrés, et approximativement 7 000 autres demandes d'adhésion doivent être évaluées et traitées. De toute évidence, le gouvernement a sous-estimé le nombre de membres. Il s'agit là d'un exemple qui illustre de façon probante la nécessité de mettre en place une meilleure méthode de dénombrement afin d'éviter d'autres inexactitudes.

Pour conclure, j'aimerais souligner que la population autochtone est en croissance rapide, ce qui accroît considérablement la responsabilité fiduciaire du gouvernement. Il est beaucoup plus profitable de mener des pourparlers que de s'en remettre aux tribunaux, lesquels statueront que les gouvernements doivent respecter les droits des Autochtones. On doit lancer un processus de négociation en vue de définir les droits des Autochtones, et mettre en œuvre une stratégie ayant fait l'objet d'un accord et visant le dénombrement des Métis et des Indiens non inscrits. Il ne sera pas possible de mener des pourparlers relatifs à l'autonomie gouvernementale tant qu'un processus de négociation adéquat et acceptable pour le Canada et les organisations autochtones du pays n'aura pas été institué.

Il est important d'établir et de cerner les droits des Métis aux fins du dénombrement. Pour toutes les parties concernées, il s'agit là d'une étape difficile, mais nécessaire pour que nous puissions aller de l'avant. Il est approprié pour les gouvernements et les organisations autochtones de se réunir et de régler les injustices du passé en ce qui concerne le déni des droits des Autochtones.

Merci.

Le président : Monsieur Swain, avez-vous des commentaires à formuler?

Ron Swain, vice-chef national, Conseil des peuples autochtones du Nouveau-Brunswick : Non, je suis ici pour prêter main-forte, au besoin, à ma collègue.

Le président : Merci. Nous allons donc passer à M. DeLaRonde.

Troy DeLaRonde, chef Métis, Red Sky Métis Independent Nation : Bonsoir. Je vous remercie de nous avoir invités à vous parler de l'intérêt particulier que présente pour nous l'évolution de la reconnaissance juridique et politique de l'identité collective et des droits des Métis au Canada.

Je m'appelle Troy DeLaRonde, et je suis chef Métis. Je représente la Red Sky Métis Independent Nation, ou RSMIN. Notre communauté est singulière et importante sur le plan historique, et doit faire l'objet d'une attention particulière au moment où l'on procède à des modifications de la structure en place au Canada.

À ce moment-ci, j'aimerais énoncer les principaux sujets que j'aborderai durant mon exposé, à savoir le fait que la RSMIN est exclue des autres nations métisses et Premières nations; la définition, le dénombrement et l'inscription des Métis; l'accessibilité des programmes fédéraux, et la mise en vigueur des droits des Métis et des Autochtones, y compris ceux qui peuvent être liés aux terres et aux récoltes. Enfin, je formulerai des recommandations.

Tout d'abord, il convient de souligner que la RSMIN est distincte des autres nations métisses : elle est composée de descendants des 84 demi-sang qui, avec l'assentiment des Premières nations, ont été reconnus comme bénéficiaires et titulaires de rentes au titre du Traité Robinson-Supérieur de 1850. Cela dit, la RSMIN se distingue des peuples des Premières nations par ses territoires traditionnels, ses traditions, ses coutumes et ses pratiques.

Nous formons une nation sans équivalent au Canada et revendiquons les droits issus de traités. Nous exerçons des droits et bénéficions d'avantages découlant du traité mentionné. Ainsi, nous représentons peut-être l'unique nation métisse inscrite dans un traité au Canada. Les frontières de notre territoire sont mentionnées dans le traité. Nous partageons une culture et des traditions avec d'autres organisations métisses, mais nous sommes des descendants des personnes qui faisaient le commerce des fourrures dans les postes de traite établis dans la région du Lac Supérieur au XVIIe siècle. Selon le Traité Robinson, les régions où nos ancêtres se sont installés étaient si sauvages que nul ne pourrait jamais s'y établir, à l'exception de quelques sociétés minières. Les Métis de la région du Lac Supérieur se distinguent des autres Métis du simple fait de leur isolement géographique. Le fait qu'ils aient survécu jusqu'à aujourd'hui, et que leur culture et leurs traditions aient été préservées témoigne des épreuves qu'ils ont vécues, des défis qu'ils ont relevés, de l'influence qu'ils ont exercée et des mesures d'adaptation qu'ils ont dû prendre pour survivre.

Il est peut-être difficile de formuler une définition qui englobe tous les Métis du Canada, mais en ce qui a trait au dénombrement, la RSMIN dispose d'une définition et de critères clairs. Tous les membres de la RSMIN possèdent un lien ancestral prouvé et documenté avec les personnes désignées comme des demi-sang dans les listes de distribution des rentes de la région visée par le Traité Robinson-Supérieur. Toute personne qui possède des éléments probants attestant qu'elle est une descendante directe d'au moins un des 84 demi-sang mentionnés dans le Traité Robinson-Supérieur de 1850 peut présenter une demande afin d'être inscrite à titre de membre de la RSMIN.

La Charte protège les droits individuels, mais les droits des Autochtones sont de nature collective. Si l'on confère à un groupe les droits prévus par la Charte ou la Constitution, l'appartenance au groupe en question revêt une importance primordiale au moment où l'exercice de ces droits est contesté. À cet égard, les processus d'affiliation de la RSMIN facilitent les choses pour les représentants du gouvernement. Nous ne nous efforçons pas d'identifier tous les Métis. Nous pouvons identifier clairement les membres de notre nation, et ce, sans aucun doute, conformément aux critères énoncés dans l'arrêt Powley.

Voici deux questions qui nous préoccupent et auxquelles il faudrait réfléchir : l'établissement d'une définition nationale du terme « Métis » pourrait porter atteinte à l'histoire, aux pratiques et aux droits en matière d'autonomie gouvernementale propres à chaque communauté métisse, et il faudrait rendre transparents les registres communautaires dont dispose Affaires autochtones et Développement du Nord Canada de manière à ce que l'on puisse vérifier que les registres d'inscription des Premières nations et des Métis ne se recoupent pas.

En ce qui concerne l'accessibilité des programmes fédéraux, je mentionnerai que de nombreuses demandes soumises par la RSMIN afin d'accéder à du financement, des programmes et des services du gouvernement fédéral ont été rejetées ou sont restées lettre morte. Les membres de la RSMIN ont présenté des demandes pour accéder à du financement, des programmes et des services à l'intention des Autochtones, et la plupart d'entre elles ont été rejetées, par exemple celles soumises par la Fondation nationale des réalisations autochtones — la FNRA — en vue d'obtenir du financement lié aux études postsecondaires.

La RSMIN est une organisation dirigée par des bénévoles. Son chef et son conseil travaillent bénévolement. Elle possède un centre de renseignements qui offre de l'information et des services d'aiguillage en matière de santé communautaire, de services sociaux, de formation professionnelle, d'emploi, de logement et d'éducation. Le financement continu de projets lui permet de fournir des services communautaires très nécessaires qui renforcent notre communauté, orientent nos jeunes et renseignent nos membres sur la protection de leurs intérêts dans le cadre de projets envisagés sur notre territoire.

Je vais maintenant parler de la mise en vigueur des droits des Métis et des Autochtones, y compris ceux pouvant être liés aux terres et aux récoltes. Les droits des membres de la RSMIN ont été violés à de nombreux égards de façon injustifiée, bien que cela soit compréhensible en raison de la nature inédite de nos revendications et de notre situation singulière.

Si l'on remédie au caractère flou de la définition de « Métis » et du statut de la RSMIN en tant que nation métisse inscrite, et si Affaires autochtones reconnaît la RSMIN en tant que communauté visée par un traité, cela réduira le risque de violation, et des ministères et des particuliers, y compris le MRN, les autorités en matière de commerce de détail et les autorités frontalières pourront reconnaître nos droits en tant qu'Autochtones et nos droits issus de traités en se fondant sur les pièces d'identité des membres de notre communauté.

La préservation de nos ressources naturelles fait partie intégrante de notre identité. Cela comprend la protection de nos ressources contre toute violation et la collaboration avec le MRN pour créer un système permettant le recours à des pratiques traditionnelles afin de préserver ces ressources pour les générations futures. Par exemple, la consommation de produits de la terre est une pratique historique protégée des Métis de la région visée par le Traité Robinson-Supérieur.

Le MRN s'attend à ce que nos membres obtiennent une Carte Plein air et les permis appropriés pour chasser et pêcher sur leur territoire traditionnel; cela constitue une violation de nos droits autochtones protégés par la Constitution. Le processus de dénombrement et d'inscription des membres de la RSMIN est une preuve plus que suffisante du fait qu'une personne est titulaire d'un droit autochtone et — cela va sans dire — d'un droit issu de traités. Les pièces d'identité attestant l'appartenance à la RSMIN devraient être considérées comme une preuve de la possession de droits d'exploitation des ressources fauniques.

Je vais maintenant formuler nos recommandations. Le fait de remédier à l'ambiguïté entourant la définition de « Métis » réduira les risques de violation, et permettra aux ministères et aux particuliers, y compris le MRN, les autorités responsables du commerce de détail et les autorités frontalières de reconnaître, au moyen des pièces d'identité des membres de notre communauté, nos droits autochtones et nos droits issus de traités. Le gouvernement fédéral devrait considérer le processus d'inscription de la RSMIN comme une preuve suffisante du fait qu'une personne est descendante de Métis inscrits. Le gouvernement fédéral doit ajouter la RSMIN au nombre des communautés reconnues par Affaires autochtones et Développement du Nord Canada, et il doit reconnaître officiellement la RSMIN à titre de communauté autochtone et métisse inscrite au titre d'un traité, conformément aux critères énoncés dans l'arrêt Powley. Affaires autochtones et Développement du Nord Canada devrait entreprendre des pourparlers avec la RSMIN en vue de lui verser le financement de base dont elle a besoin pour mener ses activités et pour l'aider à recueillir et à compiler des données sur ses connaissances traditionnelles.

Nous devons veiller à ce que les politiques des grandes organisations tiennent compte des besoins des petites organisations. Nous devons mener une campagne d'information qui permette de régler quelques-uns des problèmes liés à la discrimination, de corriger des erreurs de nature historique, de sensibiliser le public et de promouvoir de manière positive la participation des Autochtones dans l'ensemble du pays. L'histoire des Métis du Canada n'a été racontée que de manière partielle, et il s'agit d'une histoire riche et diversifiée.

Toutes les communautés qui, pour toutes sortes de raisons pertinentes et justifiables, ont besoin d'accéder à du financement et à des programmes, devraient être en mesure de le faire. L'accès à ce financement et à ces programmes devrait être orienté par des éléments redditionnels comme l'ouverture et la transparence.

L'une des principales activités de notre organisation a consisté en la collecte de renseignements de nature historique sur notre communauté. Notre objectif est d'élaborer un document détaillé racontant notre histoire. Pour recueillir ces renseignements, nous avons notamment participé aux activités de consultation menées dans la région visée par le Traité Robinson-Supérieur de 1850. Les consultations auprès des promoteurs du projet nous ont donné l'occasion de recueillir des renseignements sur les connaissances traditionnelles propres aux zones concernées par le projet. Les communautés métisses doivent obtenir le financement dont elles ont besoin pour recueillir des renseignements sur leur histoire et leurs connaissances traditionnelles. Cela contribue au processus de consultation et renforce l'identité métisse au sein d'une communauté.

L'incertitude qui entoure les droits des Métis inscrits que possèdent les membres de la RSMIN a créé une situation où les communautés des Premières nations peuvent compter des membres ayant une ascendance métisse et vivant selon les coutumes et les pratiques métisses, mais qui se désignent eux-mêmes comme membres d'une Première nation. Il est extrêmement important que l'on conçoive un système qui permette de déterminer clairement si une personne appartient à une nation métisse ou à une Première nation, dans les cas où cette personne répond aux critères liés au dénombrement au sein de l'une ou l'autre de ces nations.

Cela met fin à mon exposé. Nous allons vous soumettre ultérieurement un mémoire. Nous y avons mis la dernière main aujourd'hui, mais je ne sais pas s'il a été traduit. Nous allons également vous transmettre une bibliographie, que vous pourrez consulter si vous en éprouvez le besoin. Merci de votre temps.

Le président : Merci beaucoup. Votre mémoire n'a pas été traduit. Une fois que ce sera fait, il sera transmis aux membres du comité.

Le sénateur Sibbeston : Merci. Je tiens à remercier les témoins qui se sont présentés ici ce soir. Le comité a entrepris une étude sur les Métis. Il s'agit d'une nation qui est très bien connue dans l'Ouest du Canada. Il y a de vastes groupes de Métis qui sont des descendants de Louis Riel et des commerçants de fourrures de la baie d'Hudson. Il s'agit là de l'origine des Métis. Ce sont des gens tout à fait uniques. Ils sont indépendants, ils possèdent leur propre culture, leur propre langue, et ainsi de suite.

Il est intéressant de rencontrer des Métis qui proviennent d'autres régions du pays. On dirait qu'ils surgissent de nulle part. C'est beau à voir. C'est également encourageant. Je vous souhaite bonne chance.

Je vais m'adresser à Mme Nash-McKinley. D'après ce que vous avez dit, je crois comprendre que votre organisation consiste essentiellement en un regroupement de peuples autochtones qui vivent non pas dans des réserves, mais dans des villes. Ainsi, vous représentez un amalgame d'Autochtones. Je présume que votre organisation compte donc, entre autres, des Indiens inscrits, des Indiens des traités, des Indiens non inscrits et des personnes de sang-mêlé. J'aimerais que vous confirmiez cela.

Je sais que votre organisation est membre du Congrès des peuples autochtones du Canada, et qu'elle est donc affiliée à cet organisme national. Pourriez-vous nous parler de cela, de la façon dont vous vous définissez et de la manière dont vous entrevoyez votre avenir?

Mme Nash-McKinley : C'est une question vaste. Merci.

Notre organisation est constituée de divers peuples autochtones. Quelques-uns de nos membres sont des personnes qui se sont installées dans la province pour une raison ou une autre. Notre organisation compte des Métis, des Ojibways, des Cris et des Malécites, des Mi'kmaq et des Pescomodys vivant sur les territoires ancestraux traditionnels de leur nation. Le gouvernement de notre province ne reconnaît pas le territoire des Pescomodys; selon lui, le territoire de cette nation est situé dans l'État du Maine.

Comme nous le faisons depuis 43 ans, nous collaborons avec le gouvernement pour faire en sorte que les Autochtones qui s'installent dans la province puissent accéder à des programmes et à des services adaptés à la culture. Parmi ces Autochtones, il y a des Indiens inscrits qui n'ont pas de lien avec une réserve du Nouveau-Brunswick, de sorte qu'ils ont besoin de programmes et de services appropriés.

Ce processus visant à garantir l'accès à des programmes et à des services adaptés à la culture est en cours. Il est bien connu que les Autochtones ne sont pas en mesure d'accéder aux programmes et aux services courants parce que le processus d'accès se caractérise par beaucoup de racisme et d'autres problèmes. Ils ne parviennent tout simplement pas à accéder à ces programmes et services.

Le sénateur Sibbeston : J'aimerais vous poser la question suivante : que vous réserve l'avenir? Bon nombre de peuples autochtones, à coup sûr dans l'Ouest du Canada, ont présenté des revendications liées, entre autres, aux terres et aux ressources. Quelles mesures prenez-vous pour survivre, croître et vous assurer un avenir radieux? Outre le simple fait que vous formez un peuple autochtone et que vos droits sont protégés par la Constitution, avez-vous formulé des revendications juridiques ou des revendications liées à vos droits autochtones?

Mme Nash-McKinley : En fait, l'ensemble du Nouveau-Brunswick est un territoire non cédé. La province, les réserves et le gouvernement fédéral ont conclu un accord tripartite en vue d'entreprendre des pourparlers visant le règlement des revendications territoriales et de créer des tables de négociation de traités. À ce moment-ci, le Conseil des peuples autochtones travaille à l'élaboration d'une proposition ayant pour but d'assurer que les bénéficiaires, les héritiers et les descendants des Mi'kmaq, des Malécites et des Pescomodys visés par les traités, mais non inscrits, soient pris en compte dans le cadre de ce processus.

Nous déployons des efforts en vue d'acquérir l'autonomie gouvernementale. Nous déployons des efforts en vue d'obtenir l'égalité d'accès et le partage des bénéfices découlant de nos terres et de nos ressources. Nous cherchons à faire en sorte que tous les membres de ces trois nations soient pris en compte dans le cadre du processus de revendications territoriales et du processus de partage des bénéfices découlant de nos terres et de nos ressources.

Le sénateur Demers : Merci beaucoup de votre exposé. Je vais vous poser trois brèves questions. Combien de membres votre organisation compte-t-elle? Quels sont les critères d'adhésion à votre organisation? Délivrez-vous des cartes de membre?

Mme Nash-McKinley : D'après Statistique Canada, il y a 28 260 Autochtones qui vivent hors réserve au Nouveau- Brunswick. Notre organisation compte environ 1 500 membres. Environ 500 ou 600 personnes attendent actuellement de le devenir; leur demande d'adhésion n'a tout simplement pas encore été traitée. Nous avons établi des critères d'adhésion, qui sont fondés sur des décisions de tribunaux rendues dans d'autres régions du Canada et des règlements de revendications territoriales qui ont été conclus un peu partout au pays. L'un des critères tient à ce que la personne doit vivre au Nouveau-Brunswick pendant six mois. En outre, le demandeur doit être âgé d'au moins 16 ans. L'adhésion confère le droit de participer aux activités politiques de l'organisation et d'accéder à certains programmes et services. J'oublie sûrement des choses.

Le sénateur Demers : Délivrez-vous des cartes de membre?

Mme Nash-McKinley : Oui. Pour l'obtenir, une personne doit établir son ascendance autochtone; elle doit identifier un ancêtre, et fournir des documents pour établir les liens qui l'unissent à lui. Bon nombre de personnes fournissent une preuve fondée sur le recensement de 1861, qui indique que telle ou telle personne recensée était un « Sauvage » ou un « Indien »; il s'agit là du lien. Les gens nous fournissent parfois des certificats de mariage qui datent d'une époque reculée; certains documents sont très vieux.

Le sénateur Demers : Vous avez répondu à mes trois questions. Merci beaucoup.

Le président : Je vais demander à M. DeLaRonde de répondre à la même question.

M. DeLaRonde : Notre mémoire contient des renseignements détaillés à ce sujet. Selon notre répertoire, nous comptons actuellement 5 000 membres, mais il y a environ 3 000 autres personnes qui attendent de le devenir — cela reste à vérifier. Notre processus d'adhésion prévoit que le demandeur prouve qu'il est un descendant des 84 demi-sang mentionnés dans le Traité Robinson-Supérieur. C'est de cette façon que cela fonctionne. Bien sûr, certaines personnes se désignent elles-mêmes comme membres de notre nation du simple fait qu'elles ont grandi sur notre territoire. La plupart des gens ont de nombreux points en commun, par exemple en ce qui concerne leur éducation, ce qui amène bien des gens à se désigner eux-mêmes comme Métis. Une multitude de personnes ont grandi en croyant simplement que leur identité métisse allait de soi, jusqu'à ce qu'elles en apprennent un peu plus à propos de leur histoire et en arrivent à se dire : « J'imagine que je suis Métis. »

Nous délivrons des cartes de membre. Nous sommes en train de mettre à jour notre répertoire. Il date des années 1990, et nous voulons qu'il se conforme aux normes actuelles en matière de confidentialité, et nous assurer que tout est en ordre. En outre, nous sommes en train de numériser notre processus généalogique ainsi que nos cartes, et nous produisons une véritable carte d'identité officielle en plastique avec photo. Toutes ces mesures visent à ce que nous puissions répondre aux normes d'aujourd'hui.

Le sénateur Demers : Vous avez 5 000 membres, et 3 000 personnes attendent de le devenir, ce qui fait un total de 8 000?

M. DeLaRonde : Nous estimons à 8 000 notre nombre de membres.

Le sénateur Watt : J'ai quelques autres questions à vous poser sur le même sujet que celles qui vous ont été adressées par mon collègue d'en face. Vous avez mentionné qu'une personne devait être âgée d'au moins 16 ans afin de pouvoir devenir membre de votre organisation. Pourriez-vous nous fournir quelques précisions à ce sujet? Votre réponse pourrait être sujette à interprétation. Que se passe-t-il si une personne a moins de 16 ans? Elle ne possède pas l'identité métisse? J'aimerais obtenir des éclaircissements là-dessus.

Mme Nash-McKinley : Si vous êtes membre du CPANB et que vous avez de jeunes enfants, ils sont essentiellement visés par votre demande, mais lorsqu'ils atteignent l'âge de 16 ans, ils doivent présenter une demande pour obtenir leur propre carte de membre. Certaines personnes décident de le faire, et d'autres, non. Nous laissons toujours le choix aux gens. Si l'on exige un âge minimal de 16 ans, c'est de manière à ce que ces personnes puissent participer à nos activités de nature politique et voter durant nos réunions.

Notre organisation est répartie dans sept zones, qui comptent en tout 15 communautés locales différentes. Chaque zone possède son propre directeur, et ces sept directeurs composent notre conseil d'administration. Il n'y a pas d'âge minimal pour devenir membre d'une communauté locale, mais la participation aux activités politiques du conseil et la présentation d'une demande d'adhésion relèvent d'un processus différent de celui des communautés locales. Là encore, ces personnes doivent, en substance, fournir de l'information par l'entremise de leurs parents et établir leur lien avec eux de cette façon.

Le sénateur Watt : Je pense que cela éclaircit les choses.

Le sénateur Campbell : La semaine dernière, nous avons reçu deux témoins du Québec. Le message que j'ai retenu, c'est que toute l'histoire des Métis a commencé au Québec. Je vois que tout le monde se fâche. Cela ne veut pas dire que vous n'êtes pas Métis. Ce que nous essayons de déterminer, c'est ce qui caractérise l'identité métisse.

J'aime l'histoire. Les deux témoins parlaient des années 1700, époque à laquelle ils font remonter l'histoire des Métis. Jehan Denys était au Canada en 1654. Chose intéressante, Pierre Denys, qui était un DeLaRonde, ce qui est votre nom de famille, fait son apparition dans cette histoire en 1655. Je me demandais si en fait l'histoire des Métis n'avait pas commencé au Québec, où ils avaient une culture distincte des Premières nations; ils étaient des sang-mêlé; et ils ont étendu leur territoire jusqu'à l'endroit où se trouve votre nation et jusqu'à la rivière Rouge. Croyez-vous qu'il soit possible que la population métisse ne vienne que d'un seul endroit?

Nous avons reçu d'autres témoins qui nous ont dit que la communauté métisse vivait aux alentours de la rivière Rouge. Ne serait-il pas tout aussi sensé qu'il y ait eu une migration, qui serait alors au cœur même d'une culture différente? Elle n'est pas apparue un beau jour par enchantement. C'est une culture distincte qui s'est installée. J'aimerais savoir ce que vous avez à dire là-dessus, parce que c'était la première fois que j'arrivais à comprendre la chose dans une certaine mesure. En examinant de plus près la descendance de Jehan Denys, je vois que les DeLaRonde sont partout. Je me demande si, plutôt que de commencer au Traité Robinson — et, en fait, le Traité Robinson est intervenu près de 200 ans après que nous avons vu cela. Pourriez-vous me dire ce que vous en pensez?

Monsieur Edmond, vous n'avez pas beaucoup parlé jusqu'à maintenant. Si quelqu'un pouvait me dire quelque chose là-dessus, j'en serais reconnaissant.

M. DeLaRonde : J'aimerais dire quelque chose à ce sujet. Jehan Denys est mon ancêtre de la quinzième génération.

Dans le cadre de tous les travaux de recherche que nous faisons depuis 20 ans, nous essayons de regrouper toutes ces données, et, en grande partie, ce à quoi j'ai participé consiste essentiellement en un très long projet d'histoire. Ce que nous aimerions faire, entre autres, c'est en gros de faire notre récit de la façon dont les choses se sont passées, et vous avez tout à fait raison de faire remonter cette lignée jusqu'à l'Acadie.

Quant à la rivière Rouge et aux Français, deux choses différentes se sont produites. La Compagnie de la Baie d'Hudson et la Compagnie du Nord-Ouest entretenaient une rivalité, et il y a assurément des frontières qui ont été déplacées à plusieurs reprises, surtout dans le Nord de l'Ontario, où se trouve notre région. Je pense qu'il y a assurément un héritage distinct qui remonte à une période antérieure à ce traité.

Nos critères découlant de ce traité sont fondés sur ces droits issus de traités particuliers et sont davantage axés là- dessus, mais vous avez tout à fait raison de présumer que les droits autochtones des Métis sont antérieurs, même si beaucoup de collectivités qui peuvent être des collectivités de Premières nations, sur les berges du lac Supérieur ont été peuplées par ces petites communautés de Métis en cours de route. Simplement, la façon dont l'histoire fonctionne, la façon dont les collectivités sont bâties et la façon dont tout s'est déroulé font partie de l'assimilation, par le biais des partis pris naturels de l'époque et de la façon dont les gens envisageaient les Métis, les Indiens ou les Premières nations et tous ces divers éléments. Il y avait beaucoup de préjugés, et c'est en partie ce qui a fait que les gens se sont en quelque sorte dispersés, comme nous le savons bien, mais c'est assurément un bon point d'origine.

Le sénateur Campbell : Où se trouve Muskegon?

M. DeLaRonde : Au Michigan.

Le sénateur Campbell : Est-ce que c'est en face de chez vous, de l'autre côté de la frontière? Il y a beaucoup de gens qui vivent à Muskegon et qui font partie de ce groupe, alors est-ce qu'ils feraient partie de la nation métisse de Red Sky?

M. DeLaRonde : Cela dépend de leurs ancêtres. Nous utilisons des critères généalogiques très précis. Le cinquième petit-fils de Jehan a construit le premier voilier ayant navigué sur le lac Supérieur à Sault Ste. Marie, et il s'occupait aussi du fort au Wisconsin, de l'autre côté. Ses navires faisaient l'aller-retour pour les mines d'argent.

Le sénateur Campbell : Quel est le nom du groupe du Québec qui était ici la semaine dernière? Vous devriez parler à ces gens; vous devriez vraiment leur parler. Ce sont de vrais historiens, et la greffière pourra vous donner le nom de l'organisation.

M. DeLaRonde : J'aimerais beaucoup l'avoir.

Le sénateur Campbell : C'était la Nation Métis Québec.

Le sénateur Patterson : J'aimerais vous remercier des exposés que vous nous avez présentés. Les deux étaient axés sur l'histoire, et j'ai trouvé le résumé de l'histoire constitutionnelle récente présentée par Mme Nash-McKinley très utile. J'aimerais poser deux questions, d'abord, à M. DeLaRonde et à ses collègues.

Comme le sénateur Sibbeston l'a dit, je pense que l'étude que nous menons est la première de ce genre, à tout le moins la première que le comité ait entreprise, et peut-être même le gouvernement fédéral, et nous obtenons beaucoup de réactions positives de la part des témoins à l'égard de ce que nous faisons, ce qui est gratifiant.

Vous avez formulé un nombre assez important de recommandations. Je ne vais pas revenir sur chacune d'elles, mais je les ai notées. Elles m'ont incité à me demander à quel moment nous allons commencer à reconnaître qu'il sera nécessaire de formuler des recommandations et, bien sûr, le comité devra probablement réfléchir à ce qui est réaliste. Nous avons toujours pensé que nous formulons des recommandations fondées sur la probabilité que le gouvernement fédéral, dans sa grande sagesse, réagisse et les applique.

De toutes les recommandations que vous avez faites, vous semblez penser, surtout d'après votre réponse aux excellentes et très pertinentes questions du sénateur Campbell, que le fait de colliger les faits historiques et le savoir traditionnel est à la base de tout le reste, si je vous ai bien compris.

Si vous deviez établir un ordre de priorité et souhaitiez que nous recommandions une première étape réalisable, plutôt que d'essayer de régler tous les problèmes que vous avez décrits de façon éloquente, quelle serait votre priorité?

M. DeLaRonde : Dans notre cas, ce qui nous serait le plus utile, ce serait qu'on précise et que l'on comprenne ce qu'est un Métis inscrit et qu'on débatte, pour s'en faire une idée, de la façon dont les Métis pourraient être visés par les traités. C'est un facteur clé pour nous. Si on jette un coup d'œil sur la situation générale des Métis dans l'ensemble du Canada, il y a beaucoup de choses. Ce que vous avez devant vous est en fait une courte liste; nous avions un document de 20 pages plus tôt ce matin, et je l'ai ramené à ce que je vous ai présenté.

En discutant avec les gens des collectivités et en me documentant, j'ai constaté que je travaillais en collaboration très étroite avec des personnes en quête de savoir traditionnel. J'ai appris énormément de choses. On ne se rend pas compte à quel point on sait des choses et combien on en tient pour acquises avant de se faire poser quelques questions au sujet de son bagage. Ce sont simplement les petites choses concernant l'enfance d'une personne qu'elle a depuis longtemps oubliées qui sont un facteur très important. Je pense que c'est un bon processus à suivre pour toute collectivité, parce qu'on en apprend beaucoup sur sa population et que le fait de laisser ces données se perdre est criminel. Nous essayons de documenter ces choses. Il a fallu entre autres que j'apprenne à utiliser un logiciel d'information géographique pour que nous puissions documenter tout cela adéquatement. C'est l'un des facteurs clés de cette démarche, et j'en parle dans deux ou trois passages, et je pense également que le mémoire en parle un peu aussi.

En général, pour ce qui est de la recommandation globale, je pense que ce serait pour les Métis, mais pour nous en particulier, simplement le fait d'envisager l'idée et d'explorer l'idée de Métis inscrits; c'est très important à nos yeux.

Le sénateur Patterson : Merci. Je pourrais peut-être poser la même question au New Brunswick Aboriginal Peoples Council, monsieur le président. Je pense que la recommandation que vous nous avez faite, c'était de lancer un processus de négociations dans le but de définir les droits autochtones. J'ai eu le privilège d'assister aux trois rencontres des années 1980 que vous avez décrites, et je ne recommanderais pas que nous procédions encore une fois de la même façon. S'il s'agit de votre recommandation principale, je vous pose la même question : que voudriez-vous que nous recommandions en priorité? Je me demande si vous pouviez nous dire comment exactement les négociations pourraient se dérouler selon vous. Rassembler plein de premiers ministres et d'Autochtones dans une salle, comme le sénateur Watt le sait et s'en souvient sans doute, a été une expérience assez frustrante pour toutes les personnes concernées. Ça a été un bon processus d'apprentissage et quelque chose de fascinant, mais ça n'a débouché sur rien.

Le président : Avez-vous une question sénateur Patterson?

Le sénateur Patterson : Je croyais avoir été clair.

Et si vous aviez une recommandation à nous faire — et je pensais que ce serait peut-être le processus de négociation, mais à vous de voir — quelle serait-elle? Si c'est le processus de négociation, comment devrait-il se dérouler selon vous?

Mme Nash-McKinley : Ce serait en fait dans le cadre de négociations. Il y a des plans, des politiques et des choses en place pour régler ce genre de choses. Les droits autochtones et issus de traités sont protégés par la Constitution du Canada. Cette définition englobe les Métis, les Indiens et les Inuits. Ce serait de procéder à des consultations et de prendre des mesures d'accommodement. Les consultations sont un élément extrêmement important.

Notre organisation au Nouveau-Brunswick doit consulter les Autochtones qu'elle représente, de façon à ce que nous sachions qui ils sont et de quelle façon ils s'identifient en les consultant. Le processus existe. Vous pourriez commencer dans chacune des provinces et dans chacun des territoires et demander aux organisations de recueillir cette information. J'imagine que ce pourrait être un point de départ. La plupart des organisations ont probablement déjà l'information.

Le sénateur Patterson : Avec qui négocieriez-vous?

Mme Nash-McKinley : Le gouvernement fédéral a une obligation fiduciaire envers tous les Autochtones, peu importe le statut ou la résidence. Au Nouveau-Brunswick, il a tendance à exclure les gens qui vivent en dehors des réserves, les Indiens non inscrits, et donc à s'occuper des réserves.

Il est très difficile de suivre l'évolution du vocabulaire, parce qu'il change constamment. Au départ, lorsqu'on parlait de « nations », dans notre province, c'était les Mi'kmaq, les Malécites et les Pescomodys, alors, au Nouveau-Brunswick, il y a trois nations. Il y a 15 réserves et, maintenant, le gouvernement les appelle Premières nations. Le vocabulaire est source de confusion, c'est le moins qu'on puisse dire, et il change tout le temps.

On ne nous consulte pas pour savoir quel nom nous donner. Nous n'avons pas la possibilité de nous identifier comme étant citoyens de ces nations. Essentiellement, on nous dit que nous sommes dans notre province. Les fonctionnaires provinciaux, par exemple, nous considèrent grosso modo comme des Néo-Brunswickois et nous disent que nous avons accès aux programmes et services offerts à la population en général. Il y a de graves problèmes là-bas dans tous les domaines. C'est une question très fondamentale.

Les Autochtones, en général, sont étudiés à mort. Je suis presque sûre que peu importe le projet de recherche que vous cherchez sur les Autochtones, vous pourrez le trouver. Il y a une application pour cela. Est-ce que j'ai répondu à votre question?

Le sénateur Lovelace Nicholas : Merci, et bienvenue.

Est-ce que vous vous auto-identifiez comme étant Métis? Nous avons reçu des témoins de l'Ouest, et eux s'auto- identifient comme étant Métis.

Mme Nash-McKinley : Au Nouveau-Brunswick, il faut que les gens prouvent leur identité. On peut s'auto-identifier, et je sais que tous les gens qui regardent à la maison savent que je vais dire qu'on peut s'auto-identifier, mais, à moins que votre communauté ne vous accepte — et vous ne pouvez pas prouver qui vous êtes. L'habit ne fait pas le moine. On peut s'auto-identifier, mais il y a aussi la communauté, l'histoire, la culture, les traditions qui forment les éléments de preuve à l'appui de l'identité d'une personne.

Le sénateur Lovelace Nicholas : Il n'y a pas du tout de lien entre vous et les Métis de l'Ouest? Devrais-je vous qualifier de Métis?

Mme Nash-McKinley : Non, nous sommes le Conseil des peuples autochtones du Nouveau-Brunswick. C'est un organisme de représentation hors réserve de la province du Nouveau-Brunswick.

Le sénateur Lovelace Nicholas : D'accord. Je connais votre identité. Que pensez-vous des gens qui s'auto-identifient comme étant Métis et non Autochtones? Je trouve que c'est un peu ironique.

Mme Nash-McKinley : Je ne peux vraiment pas vous dire comment ils envisagent leur façon de s'identifier. Essentiellement, en un sens, je suis d'accord pour dire qu'ils sont d'origine autochtone, ce qui leur permet de se prévaloir des droits autochtones. Lorsqu'on est à la fois Cri et Français, ou encore Ojibway, Français et Anglais, ce sont les origines autochtones qui permettent qu'on fasse valoir ces droits autochtones.

Le sénateur Lovelace Nicholas : C'est ce qui rend l'étude que nous menons unique, car certaines personnes veulent être Métis alors que d'autres veulent être reconnues comme était Autochtones. C'est assez déroutant.

Recevez-vous des fonds de la part du gouvernement provincial ou du gouvernement fédéral?

Mme Nash-McKinley : Du gouvernement fédéral.

Le sénateur Raine : Bonsoir, et merci beaucoup d'être ici. La discussion est intéressante, je dois dire et les deux groupes abordent l'ensemble des éléments du problème que nous avons devant nous. Personnellement, j'ai vraiment pris conscience de l'histoire des Métis et de leur influence sur la colonisation ou en réalité du fait que ce sont eux les colons de l'Ouest, ainsi que des racines importantes de leur histoire dans l'union d'Autochtones et de non Autochtones dans l'Est du Canada également. Les Métis ont contribué à bâtir notre pays.

Je pense que nous savons tous qu'il n'y a pas de source inépuisable d'argent pour régler les problèmes de tout un chacun. Si vous deviez recommander un soutien quelconque, de quelle nature serait-il?

Monsieur DeLaRonde, en particulier : comment vous débrouillez-vous maintenant que votre communauté compte 8 000 membres? Je pense que ceux-ci sont dispersés dans une région très vaste.

M. DeLaRonde : Oui.

Le sénateur Raine : J'ai emprunté le chemin qui longe la rive Nord du lac Supérieur cet été. Les paysages là-bas sont incroyablement beaux, mais c'est une région immense. Je n'arrive pas à imaginer qu'on puisse traverser cela en canot.

Les 8 000 membres de votre communauté vivent-ils tous encore ensemble, ou sont-ils partis vers des prés plus verts, tout en continuant d'entretenir un lien?

M. DeLaRonde : Je ne sais pas exactement combien de gens demeurent — j'utilise la base de données d'informations géographiques, naturellement, pour déterminer le nombre exact de gens et l'endroit où ils se trouvent.

Il y a beaucoup de petites collectivités un peu partout dans la région visée par le Traité Robinson-Supérieur, qui correspond au bassin versant du lac Supérieur. Notre peuple occupait toute cette région. Il y a des gens qui se sont installés ailleurs, par exemple dans le sud de l'Ontario, où ils mènent leur vie et leur carrière, mais ils gardent effectivement un certain lien avec le Nord.

Les membres des nouvelles générations s'installent de plus en plus loin, et il est donc important aux yeux des gens plus âgés de notre communauté de continuer d'investir dans la jeunesse et d'essayer de continuer de penser à eux. Les jeunes qui grandissent au sein de ces vastes populations urbaines l'oublient en quelque sorte.

Il y a beaucoup de gens chez nous qui font venir leurs enfants dans le Nord pour qu'ils puissent le découvrir, en traversant la région, comme vous le disiez.

L'autre chose dont je voulais parler, c'est le financement. Beaucoup du travail qui est fait au sein de notre organisme est fait par des bénévoles. Les postes de chef et de conseil sont des postes occupés par des bénévoles. Je travaille moi- même gratuitement, et mon père a fait la même chose. Si le conseil et les membres voient le besoin de réaliser un projet, il est parfois possible d'obtenir du financement pour certains projets, mais le financement est très limité, versé dans le cas de contrats et propre aux besoins cernés.

Notre organisme fonctionne de manière traditionnelle. Nous essayons de créer des liens avec l'organisme sans but lucratif et de trouver du financement. Dès qu'il y a des questions d'argent, les choses sont biaisées, dans certains cas, alors nous avons créé une entité, le conseil d'exploitation de la nation métisse indépendante de Red Sky et l'avons chargée de gérer les fonds. Ce conseil est très objectif. Un projet est mis sur pied, l'argent est reçu, puis, il est versé. Le conseil rend des comptes de façon très précise, il s'occupe seulement de la gestion des fonds, de façon à ce que la nation puisse être dirigée de manière traditionnelle.

L'élection des chefs se fait par l'intermédiaire de l'Ordre de la ceinture fléchée. Je discute avec beaucoup de gens qui pourraient occuper le poste. Il faut assurer la continuité pour ce qui est des questions importantes, de la nature de nos revendications et de toutes les choses de ce genre. Si le gouvernement qui nous représente change rapidement, cela ne se prête pas à notre poste. Traditionnellement, c'est ainsi que les choses fonctionnaient; c'est en quelque sorte la progression naturelle de la façon dont les choses fonctionnent, et la communauté participe au quotidien. Je parle avec beaucoup de gens tous les jours. Nous recevons continuellement des suggestions de la part des membres de la communauté, et, si les gens s'intéressent à quelque chose, nous leur demandons immédiatement de devenir bénévole et de devenir responsable du dossier qui les intéresse. À bien des égards, cela fonctionne très bien, puisque les gens qui souhaitent sincèrement réaliser quelque chose — et non simplement se remplir les poches — agissent et font des choses.

Nous utiliserions l'argent pour payer les frais juridiques et toutes ces choses différentes qui ont trait à l'établissement de notre identité, ainsi que pour essayer de mettre sur pied une structure économique pouvant favoriser l'épanouissement de notre communauté à long terme. Nous essayons de créer une structure de développement économique qui nous permettra de devenir autonomes.

Toutefois, dans l'intervalle, nous devons quand même mener tous ces programmes et ces choses de tous les jours, essayer de nous mettre à l'abri, et ainsi de suite.

Voilà donc en gros notre situation. Nous essayons de combler une partie du manque à gagner sur le plan de nos dépenses et de nous adapter pour ce qui est de l'endroit où vont nos dons et les autres choses, du loyer au fait d'essayer de payer les frais juridiques.

Le sénateur Raine : Vous avez consulté les représentants de l'industrie dans votre région. Avez-vous reçu un règlement de leur part, ou est-ce qu'ils veulent simplement connaître vos idées?

M. DeLaRonde : Pouvez-vous préciser?

Le sénateur Raine : Je vois qu'il y a un projet d'expansion d'Hydro One dans le Nord-Ouest. Avez-vous un territoire traditionnel défini?

M. DeLaRonde : Le territoire traditionnel que nous revendiquons couvre toute la région visée par le Traité Robinson- Supérieur, y compris les collectivités de cette région. Cela donne lieu à une confusion encore plus grande. Je suis vraiment désolé de vous laisser démêler tout cela, mais c'est là l'effet réel de ce que nous cherchons à faire.

Le sénateur Raine : Est-ce que le Traité Robinson-Supérieur de 1850 se limitait seulement au Canada, ou est-ce qu'il s'étendait aussi aux États-Unis et à la rive Sud du lac Supérieur?

M. DeLaRonde : C'est une bonne question. Il faudrait que je me penche là-dessus. Nous nous concentrons davantage sur le côté canadien, mais je pense que la région s'étendait plus loin.

Le sénateur Raine : Le traité a été conclu entre la Couronne britannique et les 84 sang-mêlé qui vivaient là-bas, en plus des groupes des Premières nations? Sont-ils tous visés par le traité?

M. DeLaRonde : Il était documenté dans le rapport d'Alison Gale ou dans un autre rapport que, pour les 84 sang- mêlé, il y avait un nombre total de personnes visées par le traité, mais que des listes de versement distinctes ont été tenues pour les Métis, et ce, pendant un certain temps. Les préjugés et l'assimilation ont fait que ces gens se sont répartis dans les autres groupes, qu'ils avaient été considérés comme étant des Indiens ou des membres des Premières nations ou qu'ils sont passés à l'autre collectivité. Ils se sont dispersés et ont peut-être migré vers l'Ouest, vers les régions du Manitoba. Tout cela fait partie de l'évolution naturelle du cours des choses à cette époque.

Pour en revenir à ce que vous disiez — je me perds dans les détails de l'histoire...

Le président : Il y a deux ou trois sénateurs qui veulent poser des questions.

Le sénateur Sibbeston : J'imagine que c'est le deuxième tour. J'allais demander à M. DeLaRonde, à propos du Traité Robinson-Supérieur, si ce document qui avait été signé par les sang-mêlé et les Indiens de la région était ensuite devenu un traité entre ces gens et le gouvernement fédéral.

M. DeLaRonde : Je crois qu'il y a eu deux tentatives de faire en sorte que le Traité Robinson-Supérieur ne soit pas signé par les chefs parce que les petites tribus métisses n'étaient pas visées par ce traité. Je n'ai pas toute cette information organisée de façon claire devant moi. J'essaie de monter un dossier là-dessus depuis un certain temps et j'ai fait beaucoup de recherches sur le sujet, et en particulier sur ce cas précis.

Toutefois, de mémoire, je vous dirais que c'est le fondement du traité. Il y avait des listes de versement distinctes dans celui-ci. Nous avons beaucoup de documentation là-dessus que je serais très heureux de vous fournir.

Le sénateur Sibbeston : C'est peut-être le seul document et traité que les sang-mêlé ont signé avec le gouvernement fédéral. Je pense que la pratique en vigueur, lorsque le gouvernement avait affaire aux Autochtones, aux Indiens et aux sang-mêlé dans l'Ouest, c'était de conclure des traités avec les Indiens et d'y inscrire la mention « céder et abandonner tous leurs droits sur les terres et y renoncer ». Dans le cas des Métis, il y avait un processus de certificat. Ce n'était ni un traité ni un document volumineux. J'ai vu les documents que les Métis signaient dans les Territoires du Nord-Ouest — un formulaire d'une page qui dit qu'en le signant, ils renoncent à leurs droits sur les terres en tant qu'Indiens. Il se trouve que les sang-mêlé ont fini par être traités plutôt distinctement des Indiens.

John Edmond, conseiller juridique, Red Sky Métis Independent Nation : C'est la province du Canada qui a conclu ces deux traités en 1850; c'était la province du Canada à cette époque. Le gouvernement fédéral n'existe que depuis 1867, alors c'était la province du Canada.

Je voulais saisir l'occasion que le sénateur Campbell m'a offerte tout à l'heure.

Le président : Une question pour vous deux, madame Nash-McKinley : est-ce que les collectivités de votre région respectent les critères Powley pour l'identification des Métis?

Mme Nash-McKinley : Je crois que les gens qui ont demandé à devenir membres de notre organisation ont prouvé leurs origines autochtones et pourraient respecter les critères. À l'occasion, il faut parfois revenir sur la chose lorsqu'on découvre de l'information nouvelle, comme on le fait dans n'importe quel cas. Nous avons un comité de bénévoles, et il y a beaucoup de travail à faire, alors il arrive parfois que des choses passent inaperçues, mais elles sont corrigées par la suite.

Le président : Utilisez-vous les critères de façon officieuse?

Mme Nash-McKinley : Je vous dirais que les tribunaux du Nouveau-Brunswick utilisent ces critères. Nous nous assurons que nos membres le savent, parce que, lorsque nous représentons des Autochtones dans la province, il est très important que nous nous assurions de pouvoir prouver nos origines autochtones. Dans le cas des Indiens non inscrits, il y a habituellement des poursuites devant les tribunaux.

Par ailleurs, pour ce qui est des enjeux liés aux Métis, à l'heure actuelle, il y a une affaire relativement à laquelle le Congrès des Peuples Autochtones attend une décision. Il s'agit de l'affaire Harry Daniels. Pour ceux qui ne connaissent pas Harry Daniels, c'était un chef métis qui a représenté les Autochtones à l'échelon local et international pendant des années. C'était une figure importante dans le processus d'inclusion des Métis et des Inuits dans les pourparlers constitutionnels à l'époque où Jean Chrétien était ministre des Affaires autochtones.

Les trois principaux arguments du Congrès des Peuples Autochtones sont que les Métis et les Indiens non inscrits sont des Indiens aux termes de l'article 91.24 de la Constitution, que la Couronne a envers les Métis et les Indiens non inscrits l'obligation fiduciaire qu'elle a envers les Autochtones et que le Canada doit négocier avec les représentants choisis par les Métis et les Indiens non inscrits et les consulter en ce qui concerne leurs droits, leurs intérêts et leurs besoins en tant qu'Autochtones.

Je veux simplement le mentionner parce que la décision doit être rendue sous peu. L'affaire est devant les tribunaux depuis une vingtaine d'années. Nous attendons la décision, et ce sera de l'information utile pour le comité.

Le président : Merci beaucoup. Monsieur DeLaRonde, j'aimerais vous adresser la même question au sujet des critères Powley.

M. DeLaRonde : J'en ai parlé, en fait. Les dix critères de l'affaire Powley figurent dans notre mémoire. J'aborde chacun d'entre eux par rapport à ce que vous disiez.

Le président : À notre décharge, nous ne l'avons reçu qu'avant la réunion, alors nous n'avons pas eu le temps de le consulter.

M. DeLaRonde : Je comprends.

Le président : Merci beaucoup.

Le sénateur Patterson : Ma question s'adresse au Conseil des peuples autochtones du Nouveau-Brunswick. Vous êtes membre du CPA, et vous avez parlé de négociations. Le Congrès des Peuples Autochtones a négocié des accords en matière d'élaboration de politiques relatives à la propriété coopérative avec le gouvernement du Canada. Je crois qu'un accord a été conclu en 2005, et qu'il y a eu ensuite le Protocole avec la nation métisse en 2008, dans le cadre duquel les parties ont convenu de discuter de diverses questions.

Pouvez-vous me dire ce qu'il advient de ces discussions jusqu'à maintenant d'après ce que vous savez? Ont-elles lieu, et ont-elles eu des répercussions qui ont touché le Conseil des peuples autochtones du Nouveau-Brunswick?

Mme Nash-McKinley : Le président me permettrait-il de demander au vice-chef national, qui est parmi nous, de répondre à la question?

Le président : Oui.

M. Swain : Merci de la question. Le Congrès des Peuples Autochtones a en fait conclu divers accords politiques avec le gouvernement fédéral. C'est drôle que vous en ayez parlé. Nous sommes en train de renégocier cet accord politique. Nous venons tout juste de recevoir une lettre de réponse de la part du premier ministre Harper et du ministre des Affaires autochtones, John Duncan. Nous sommes en fait en train de reprendre les négociations pour faire de l'accord un document plus évolutif.

Le dernier accord a été signé par Harry Daniels, dont ma collègue a parlé. Malheureusement, cet accord a été rédigé puis, mis sur les tablettes, et il manquait de force sur le plan politique. Nous avons demandé au gouvernement fédéral de renégocier un accord qui sera un vrai document évolutif doté de contenu, de façon à nous permettre de régler beaucoup des problèmes en question.

Pendant que j'ai la parole, je voulais mentionner l'affaire Harry Daniels. Ce sera une décision importante. L'affaire est devant la Cour fédérale depuis 13 ans, et nous pensons que la décision sera rendue sous peu. Si elle est positive, les trois points mentionnés vont vraiment changer le contexte pour ce qui est des Métis et des Indiens non inscrits au Canada.

Malheureusement, lorsqu'il s'agit d'enjeux liés aux Métis et aux Indiens non inscrits, il semble que nous ayons toujours à nous adresser aux tribunaux avant de pouvoir commencer à négocier. Ma collègue a mentionné qu'elle croit vraiment que la création d'un mécanisme de négociation des diverses questions est essentielle, et nous demandons au comité sénatorial de bien y réfléchir dans ses délibérations et d'inclure cela dans ses recommandations.

Vous avez parlé des trois processus constitutionnels dans le cadre desquels il y a eu beaucoup de discussions et qui ont été frustrants parce qu'ils n'ont pas été ratifiés. Je peux vous parler du processus de Charlottetown puisque j'étais membre de la Métis Nation of Ontario à l'époque et que j'ai signé l'Accord relatif à la nation métisse. Qu'est-ce qui était important dans ces processus constitutionnels? Tous les gouvernements du pays y souscrivaient, y compris le gouvernement fédéral et les gouvernements provinciaux, et ils ont été ratifiés par ces gouvernements. Malheureusement, ils ont ensuite été rejetés à l'issue du référendum qui a eu lieu au pays. Toutefois, les gouvernements qui ont participé aux négociations étaient quand même d'accord.

Comme je l'ai dit, la population du pays a rejeté le référendum, mais nous avons fait quelques progrès. Nous avons fait des progrès à l'égard des trois questions mentionnées en faisant en sorte que des décisions soient prises. On ne peut revenir en arrière. Ces choses ont été négociées et étaient là, et, malheureusement, les pourparlers constitutionnels ne sont plus à l'ordre du jour, et les gens évitent le sujet. Il n'y aura probablement pas de pourparlers constitutionnels au cours de notre vie. Toutefois, je veux insister sur le fait que les négociations demeurent un processus important.

Le président : Merci beaucoup. C'est un excellent point, en fait.

J'aimerais vous remercier tous des exposés que vous avez présentés. Ils étaient excellents. Comme toujours, c'est bien de pouvoir entendre les points de vue différents des gens des diverses régions du pays. Merci à tous d'être venus ici ce soir. Je vais mettre fin à la séance pour aujourd'hui.

(La séance est levée.)


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