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Langues officielles

 

Délibérations du Comité sénatorial permanent des
Langues officielles

Fascicule 13 - Témoignages du 19 novembre 2012


OTTAWA, le lundi 19 novembre 2012

Le Comité sénatorial permanent des langues officielles se réunit aujourd'hui, à 17 h 5, pour faire une étude sur les obligations de CBC/Radio-Canada en vertu de la Loi sur les langues officielles et de certains aspects particuliers de la Loi sur la radiodiffusion.

Le sénateur Maria Chaput (présidente) occupe le fauteuil.

[Français]

La présidente : Je souhaite à tous la bienvenue à cette réunion du Comité sénatorial permanent des langues officielles. Je me présente, Maria Chaput, sénateur du Manitoba, présidente du comité. J'invite maintenant les membres du comité à se présenter et je commencerai à ma gauche avec la vice-présidente.

Le sénateur Champagne : Bonjour, Andrée champagne, de Saint-Hyacinthe au Québec.

Le sénateur Poirier : Rose-May Poirier, sénateur du Nouveau-Brunswick.

Le sénateur Fortin-Duplessis : Suzanne Fortin-Duplessis, sénateur, de la ville de Québec.

Le sénateur McIntyre : Paul McIntyre, sénateur du Nouveau-Brunswick.

Le sénateur De Bané : Pierre De Bané, sénateur du Québec.

Le sénateur Robichaud : Fernand Robichaud, sénateur de Saint-Louis-de-Kent au Nouveau-Brunswick

Le sénateur Mockler : Percy Mockler, sénateur du Nouveau-Brunswick.

La présidente : Merci beaucoup. Avant de présenter les témoins qui comparaissent aujourd'hui, j'aimerais souligner l'importance du mois de novembre pour le Comité sénatorial permanent des langues officielles. C'est ce mois-ci, il y a 10 ans, que le comité tenait sa première réunion. En effet, le 5 novembre 2002, le comité tenait une réunion d'organisation et c'est le lundi 18 novembre de cette même année qu'il débutait ses travaux. Le comité était alors présidé par le sénateur Losier-Cool, maintenant à la retraite. Le vice-président du comité était alors le sénateur Keon, également à la retraite.

Je profite de l'occasion pour non seulement souligner les 10 ans de travaux de ce comité, mais également remercier les honorables sénateurs qui y ont siégé lors de ces 10 ans et qui ont contribué aux travaux.

Nous poursuivons aujourd'hui, notre étude sur les obligations de CBC/Radio-Canada en vertu de la Loi sur les langues officielles et de certains aspects particuliers de la Loi sur la radiodiffusion. Nous accueillons aujourd'hui, des représentants de trois organismes qui œuvrent dans les communautés francophones en situation minoritaire de l'Ontario, soit M. Denis Vaillancourt, président de l'Assemblée de la francophonie de l'Ontario, qui est accompagné de M. Peter Hominuk, directeur général, ainsi que Mme Marie Ève Chassé, présidente de l'Alliance culturelle de l'Ontario, qui est accompagnée de Mme Nathalie McNeil, directrice générale de l'Alliance des producteurs francophones du Canada. Nous accueillons également, par vidéoconférence, Mme Nicole Larocque, présidente de S.O.S. CBEF, qui est accompagnée de M. Karim Amellal, vice-président.

Au nom des membres du comité, je vous remercie de prendre le temps de nous présenter votre point de vue dans le cadre de notre étude et de répondre à nos questions. J'invite maintenant l'Assemblée de la francophonie de l'Ontario à prendre la parole. Elle sera suivie de l'Alliance culturelle de l'Ontario et de S.O.S. CBEF. Les sénateurs suivront avec des questions.

Denis B. Vaillancourt, président, Assemblée de la francophonie de l'Ontario : Honorables sénateurs, merci de nous accueillir. Votre travail rejoint en grande partie les préoccupations dont nous voulons faire part au CRTC. J'entrerai donc dans le vif du sujet.

CBC/Radio-Canada célèbre cette année son 75e anniversaire. On sait qu'en 2012, plus particulièrement, le radiodiffuseur public doit faire face à de nombreux défis que vous connaissez sans doute : compressions budgétaires, développement de nouvelles technologies, réalité du marché concurrentiel en milieu minoritaire avec émergence d'empires médiatiques intégrés de plus en plus puissants.

En tant que communauté franco-ontarienne, nous faisons des pressions en ce qui concerne le respect de ces exigences en matière de langue et de reflet de notre diversité régionale en Ontario. Il reste essentiel pour nous que Radio-Canada doit avoir les moyens et le cadre qui lui permettront de répondre adéquatement à ces exigences.

Fragilisé déjà par les compressions de 115 millions de dollars, et la perte du 40 millions de dollars du Fonds pour l'amélioration de la programmation locale, le FAPL, dont la disparition avait été dénoncée par l'AFO, le diffuseur public fait de son mieux pour protéger les services régionaux. On rappel que le FAPL permettait à Radio-Canada de maintenir son empreinte régionale et offrait aux producteurs indépendants francophones, notamment dans notre province, des moyens pour produire du contenu local et francophone, touchant les réalités de notre communauté. C'était pour nous, le début d'un nouvel ancrage régional qui bénéficiait quand même à l'Ontario.

Sur les questions inscrites dans le cadre de votre étude, l'offre des services dans les deux langues, la qualité équivalente des services et le reflet de la diversité régionale sont trois aspects dans la Loi sur la radiodiffusion qui touchent aussi le respect des langues officielles sur la couverture d'une qualité équivalente dans les deux langues officielles, et par le biais de toutes les plateformes de sociétés d'État.

J'aimerais rappeler que notre communauté en Ontario représente plus de 50 p. 100 de la population francophone vivant à l'extérieur du Québec. Notre province est grande et les concentrations de francophones sont dispersées sur notre territoire.

Au niveau télévisuel, notre communauté a accès à deux stations régionales de Radio-Canada et, au niveau radiophonique, on compte trois stations en Ontario. Trois stations régionales de Radio-Canada font généralement un très bon travail et notre communauté le reconnaît. Les réalisateurs, animateurs, journalistes et administrateurs entretiennent de bonnes relations avec notre communauté. De façon générale, la couverture est assez satisfaisante. Or, il reste des faiblesses encore significatives pour une juste représentation de nos enjeux et pour avoir du contenu francophone de haute qualité reflétant notre identité culturelle et linguistique franco-ontarienne. Il faut l'admettre, par exemple à Ottawa, au Téléjournal, notre communauté franco-ontarienne et nos activités restent trop souvent dans l'ombre des nouvelles du Québec. En fait, nous devenons une minorité dans la région.

Nous avons des questionnements pour l'avenir alors que Radio-Canada a déjà annoncé son intention de revoir son rôle en ce qui a trait à certains partenariats artistiques et culturels. À ce titre, l'AFO rejoint les inquiétudes des membres de l'Alliance professionnelle de la chanson et de la musique, l'APCM, le Réseau Ontario et l'Alliance culturelle de l'Ontario. Mes collègues ici présenteront certainement ce sujet un peu plus tard.

Pour ce qui est des autres plateformes, avec les compressions annoncées le 4 avril, la régionalisation et d'Espace musique restent incomplets. Pour le Web et les autres plateformes multimédia, si on reprend le dernier plan quinquennal de la société d'État, Partout, Pour tous, Radio-Canada annonçait le lancement de microsites Web et hyperlocaux pour mieux couvrir les régions mal desservies. On comprend mal qu'on commence les expériences de sites hyperlocaux dans deux centres où la dualité linguistique n'est pas compromise, soit sur la Rive-Sud et la Rive-Nord de Montréal. N'aurait-il pas été mieux de faire l'expérience dans un autre milieu que dans un milieu où la majorité règne? On sait que dans un environnement médiatique Web 2.0, les défis relevés sont énormes. En corollaire, il existe un manque flagrant de présences de nos francophones sur le Net. La Génération C, ou les Digital Natives, est différente dans sa manière de consommer des contenus et de s'informer.

La société doit assumer son rôle de porteur d'identité et d'adhésion pour assurer la pérennité des réseaux linguistiques et culturels francophones en Ontario et dans l'ensemble du pays. Il reste essentiel de lui donner les moyens et le cadre qui permettront de mener à bien ce rôle.

Le plus grand enjeu de l'heure reste la présence de notre communauté dans les émissions réseau. C'est un constat : les choses doivent être faites autrement. Nous avons besoin de trouver notre reflet sur les ondes de Radio-Canada tant au niveau régional que national. Actuellement, notre présence au niveau national est tout à fait sporadique; un phénomène qui continue d'entretenir une méconnaissance de nos réalités par le public québécois. Il devient urgent que le contenu de nos stations régionales soit mieux repris en réseau national. L'AFO se réjouit de voir que le CRTC se penche sur cet aspect lors du renouvellement de la licence de la société d'État. Actuellement, au réseau national, la société offre une vision à travers un prisme montréalais et québécois non représentatif de nos réalités francophones, du moins celles de l'Ontario.

Revenons maintenant sur le respect par Radio-Canada des exigences de la Loi sur les langues officielles. La société d'État CBC/Radio-Canada, en tant qu'institution fédérale, doit prendre des mesures positives pour l'épanouissement des communautés de langue officielle en situation minoritaire et la promotion de la dualité linguistique.

Sur le premier point, il est évident que si CBC/Radio-Canada était un intervenant clé pour favoriser une meilleure compréhension et pour établir des liens entre les Canadiens de langue française et ceux de langue anglaise, la réalité est tout autre. En Ontario, force est de constater que pour la CBC, notre communauté est totalement inexistante. Il faut que les choses changent.

Enfin, un débat persiste actuellement à savoir si les obligations qui relèvent de la Loi sur les langues officielles s'appliquent aux activités de programmation du radiodiffuseur public. Le commissaire aux langues officielles, Graham Fraser, croit pour sa part que les obligations linguistiques de la société s'étendent aux décisions qui concernent la programmation. Cela va de soi pour nous. À ce titre, j'aimerais vous rappeler le cas de CBEF Windsor, et mes collègues de Windsor vous en parleront certainement. Les émissions du matin dans cette région, par exemple Bonjour le monde, Grands Lacs café et Au détroit de la nuit, permettaient une identité locale. La perte des émissions locales a grandement nui à l'épanouissement de cette communauté.

Un recours a été intenté par le commissaire aux langues officielles devant la Cour fédérale à l'été 2010. En juin 2012, la Cour fédérale a indiqué que le CRTC devra examiner la demande de renouvellement de la licence de CBC/Radio- Canada et de sa station de radio francophone de Windsor en Ontario, en tenant compte de l'incidence de compressions budgétaires effectuées par la société, en 2009, sur la communauté francophone de la région. On souhaite le retour de cette station à notre communauté.

Pour les Franco-Ontariens, Radio-Canada est incontournable pour l'appropriation des ondes. Il reste donc essentiel pour nous que la société d'État réintègre mieux les besoins identifiés par notre communauté dans ces prises de décision, et pour cela, elle a un devoir de consultation. L'AFO se rallie ici à la position de la FCFA, la Fédération des communautés francophones acadiennes. Il est nécessaire de mettre en place un mécanisme formel au niveau national, doublé d'instances de consultation formelles au niveau régional, qui favoriserait une reddition de comptes où la société démontrerait comment elle a pris en considération les besoins et les priorités exprimés par les communautés francophones et acadiennes. L'actuel panel des régions ne répond pas adéquatement à nos attentes.

Je vais conclure en rappelant que la vocation de la société d'État est clairement de créer du lien social et j'ajouterais de créer et promouvoir la dualité linguistique, caractéristique, à notre point de vue, fondamentale dans notre pays.

Dans un univers multimédia, interactif et encombré de réseaux, le diffuseur public national aura demain un rôle encore plus important qu'hier. Il s'agit d'un enjeu extrêmement important et seul le soutien public d'un diffuseur national lui permettra de remplir cette mission et de garder sa pertinence pour les citoyens francophones, et notamment dans notre province.

Pour les années à venir, l'AFO et ses membres attendent de la Société Radio-Canada un engagement sans failles pour un rayonnement plus grand de notre Francophonie ontarienne dans le système de radiodiffusion canadien national, et ce, pour maintenir une francité canadienne et valoriser l'identité culturelle franco-ontarienne. Il importe donc d'accorder à la Société Radio-Canada les fonds et la latitude nécessaires pour maintenir une force de frappe et pour rester le diffuseur public national qui est essentiel à notre communauté francophone en Ontario, pour ne pas dire nationale.

Je vous remercie. Nous serons prêts à répondre à vos questions plus tard.

La présidente : Je vous remercie, monsieur Vaillancourt.

Marie Ève Chassé, présidente, Alliance culturelle de l'Ontario : Au nom de l'Alliance culturelle de l'Ontario, de ses membres et de nos partenaires ici représentés par Nathalie McNeil, directrice générale, Alliance des producteurs francophones du Canada, je vous remercie de bien vouloir nous permettre de vous adresser la parole. Je suis ici à titre de présidente de l'Alliance culturelle de l'Ontario.

L'Alliance culturelle de l'Ontario est un organisme provincial de service aux arts qui agit comme forum d'échange et de collaboration entre tous les intervenants artistiques et culturels de l'Ontario français. Elle agit à tous les niveaux décisionnels pour assurer le positionnement de l'ensemble du secteur des arts et de la culture dans la société. Elle appuie le développement et favorise l'actualisation des arts et de la culture par des initiatives de rayonnement, de recherche et de communication.

Radio-Canada est une institution incontournable pour le milieu artistique et culturel franco-ontarien. Elle permet de transmettre à la population, à chaque citoyen, des informations de qualité. Elle suscite des réflexions et des discussions et contribue à l'élargissement de l'espace francophone en sensibilisant la communauté à l'importance des arts en Ontario français. Radio-Canada est un agent de l'identité collective, elle agit comme un véritable passeur culturel et alimente le vivre ensemble qui caractérise la société canadienne. Elle est la principale source d'information et de divertissement disponible en français dans les communautés franco-ontariennes.

En mars 2010, dans le cadre de la réalisation du plan stratégique communautaire mené par l'Assemblée de la francophonie de l'Ontario, l'Alliance culturelle de l'Ontario avait mis de l'avant les grands défis du milieu artistique et culturel franco-ontarien. Parmi ces derniers, les défis en termes de diffusion ont été très clairement énoncés. L'Alliance culturelle de l'Ontario s'est efforcée de mettre en exergue la faiblesse des relais médiatiques et l'importance de maintenir et bonifier ceux qui existent. L'absence de média de masse est au cœur de la problématique de la mise en marché de la production franco-ontarienne et de son rayonnement.

À une époque où tout passe par la communication, la communauté franco-ontarienne se trouve, en effet, pratiquement démunie de ses institutions et une structure comme Radio-Canada est indispensable au développement de la communauté artistique franco-ontarienne. À travers ce mémoire, nous souhaitons donc réitérer la place primordiale qu'occupe Radio-Canada au sein du milieu artistique culturel franco-ontarien.

L'autre important allié médiatique des Franco-Ontariens est évidemment TFO, mais les mandats de Radio-Canada et de TFO ne sont pas exactement similaires. En effet, Radio-Canada a un mandat national qui permet davantage aux cultures francophones d'un océan à l'autre de communiquer.

D'autre part, TFO a récemment procédé à une révision de ses objectifs et insiste dorénavant plus sur une programmation jeunesse. Bien que ce soit primordial, cela ne répond pas à l'ensemble des besoins en matière de radiodiffusion et de médiatisation des arts et de la culture.

Nous croyons que la SRC contribue au développement et au rayonnement des arts et de la culture en Ontario français car elle travaille de concert avec l'ensemble du milieu afin de promouvoir des activités artistiques et culturelles de la province. Radio-Canada multiplie les partenariats avec le milieu en signant notamment des ententes importantes avec des organismes tels que le Regroupement des éditeurs canadiens-français, l'Association des auteures et auteurs de l'Ontario français, l'Association des professionnels de la chanson et de la musique, Réseau Ontario et Théâtre Action.

Ces partenariats ont permis d'assurer le rayonnement d'événements ou d'activités comme le Gala Trille Or, le Contact ontarois ou le Prix des lecteurs. Par ailleurs, des artistes franco-ontariens tels que Damien Robitaille ou Andréa Lindsay doivent en partie leur succès au travail de promotion orchestré notamment par Radio-Canada.

Nous soutenons la nouvelle orientation issue de la stratégie 2015, Partout, Pour tous, car elle se veut être une programmation encore plus distinctive et plus régionale, s'adressant à toutes les communautés francophones du pays et nous espérons que ce souhait se réalisera en communication avec les représentants des différentes communautés.

Le virage numérique que Radio-Canada a entrepris est bien accueilli par la communauté artistique pourvu qu'il ne fasse pas obstacle au mandat de Radio-Canada, à savoir offrir une programmation accessible à tous.

La réception de bande passante dans certaines régions de l'Ontario pose de nombreux défis et nous espérons que l'offre médiatique et culturelle proposée sera disponible à toutes les communautés en milieu urbain tant qu'en milieu rural.

De façon générale, on peut affirmer que Radio-Canada s'acquitte de son mandat. Toutefois, nous tenons aussi à nuancer ce constat et à signifier certains défis ou manquements afin de fournir un regard critique dont il devra tenir compte dans le nouvel encadrement de la SRC.

Nous souhaitons souligner l'importance pour Radio-Canada de proposer une programmation qui reflète pleinement les disparités régionales en allant chercher des témoignages, des informations partout au pays.

Il existe encore aujourd'hui, une tendance à privilégier les informations provenant du Québec, et en particulier de Montréal, au détriment de nombreuses communautés francophones hors Québec, notamment en Ontario. Le milieu artistique et culturel et les nombreux joueurs qui le composent sont prêts à soutenir Radio-Canada afin de développer une offre médiatique reflétant aussi la créativité et la réalité des communautés francophones ici, en Ontario.

Nous tenons à souligner que globalement la couverture artistique et culturelle offerte par les stations régionales de l'Ontario de Radio-Canada est excellente, mais les plus récentes compressions ont nui à la présence de la SRC et nous craignons une baisse de partenariat et de la couverture médiatique des événements en région.

Nous réitérons donc la nécessité que ces postes aient les moyens d'assumer leur plein mandat. Elles sont des piliers incontournables de la vitalité artistique culturelle et médiatique des différentes communautés.

L'alliance pense qu'il y a place à l'amélioration pour faire en sorte que les préoccupations, les talents artistiques et les enjeux culturels des communautés francophones soient davantage présentés et pris en compte au réseau national de la SRC. Il est, en effet, très important que la SRC soit le reflet des communautés dans les émissions du réseau, et ce, tant au niveau local qu'au niveau national.

Nous aspirons à un niveau de représentativité plus haut, notamment pour la télévision de Radio-Canada. La francophonie ontarienne ne bénéficie pas encore du niveau d'accès aux arts et à la culture souhaité sur les ondes du diffuseur public national.

L'abolition du Fonds pour l'amélioration de la programmation locale n'a fait qu'empirer les craintes du milieu. Nous avons déjà mentionné que la SRC s'engage dans la diffusion de bon nombre d'événements artistiques rassembleurs de la communauté artistique franco-ontarienne. Par contre, depuis l'annonce de l'abolition du fonds et les réductions budgétaires printanières, nous craignons que les diffusions, notamment en région, soient de moins en moins nombreuses. Nous souhaitons que la SRC puisse augmenter les diffusions interrégionales et nationales de ces événements aux heures de grande écoute.

L'Alliance culturelle de l'Ontario est inquiète du rôle néfaste que pourrait avoir la compression des ressources de CBC/Radio-Canada. Nous espérons que les restrictions budgétaires n'affaibliront pas la qualité de l'information transmise. L'approche des diffuseurs privés, exclusivement basée sur les cotes d'écoute, rend la voix des groupes minoritaires pratiquement inexistante sur les ondes. Le mandat de CBC/Radio-Canada est aussi de donner la parole à ces groupes numériquement plus restreints.

Aussi, nous souhaitons que les conditions imposées à la Société Radio-Canada lui laissent la flexibilité dont elle a besoin pour rester concurrentielle dans ce temps où la fragmentation des auditoires et la concentration des médias sont des enjeux importants.

Nous tenons à préciser qu'il est complexe d'assurer un équilibre entre accorder une flexibilité et prescrire des conditions nécessaires afin de s'assurer que la SRC respecte pleinement ses obligations et assume davantage les responsabilités découlant de son mandat en ce qui a trait aux communautés de langue officielle en situation minoritaire.

Il est indispensable que l'esprit de la Loi sur les langues officielles et de la Loi sur la radiodiffusion soit respecté, ce qui favorisera l'essor des arts et de la culture de la francophonie ontarienne et de la vitalité de nos communautés ici, en Ontario et partout au pays.

Je vous remercie pour votre écoute et je serai disposée à répondre à vous questions tout à l'heure.

La présidente : Merci beaucoup, madame.

La parole est maintenant à Mme Nicole Larocque, que nous accueillons par vidéoconférence.

Nicole Larocque, présidente, S.O.S. CBEF : Bonsoir, honorables sénateurs, honorables sénatrices. Je m'appelle Nicole Larocque, je suis présidente du comité S.O.S. CBEF, et je vous présente mon collègue, M. Karim Amellal.

Nous représentons le comité S.O.S. CBEF ce soir. Pour ceux d'entre vous qui n'ont jamais visité la région de Windsor, j'ai apporté une photo. Vous pouvez voir sur cette photo les gratte-ciel de Windsor. Juste en face, nous avons la ville de Détroit.

Je vous montre cette photo pour vous démontrer à quel point nous sommes voisins des États-Unis et qu'il y a une grande influence américaine ici, à Windsor, et aussi pour vous montrer l'importance du Canada pour les communautés de langue officielle en milieu minoritaire.

J'ai grandi ici, à Windsor, et je peux vous dire qu'il y a une grande influence américaine dans notre région. La plupart des gens écoutent des stations de radio et de télévision américaines et plusieurs font du magasinage et des sorties aux États-Unis.

L'influence est si grande que les gens parlent de la température en degrés Fahrenheit au lieu des degrés Celsius. Malgré ces faits, la région est riche en histoire, surtout en ce qui a trait à la Francophonie. Notre région a été fondée par un francophone, il y a plus de 300 ans, et si vous vous promenez à Windsor, vous verrez que plusieurs rues ont des noms de francophones tels que Ouellette, Pelissier, Marentette, Goyau, Lauzon, et cetera. Il y a plusieurs villages francophones aux alentours de Windsor tels que Rivière-aux-Canards, Belle-Rivière, Saint-Joachim et Pointe-aux- Roches.

Je vais prendre deux minutes pour partager notre histoire personnelle en ce qui a trait à Radio-Canada et pour vous donner une idée du rôle que la SRC a joué dans notre vie, ici à Windsor et dans le sud-ouest ontarien.

Je viens d'une famille exogame. Même si mes deux parents proviennent de familles francophones, il n'y a que mon père qui parle français. Mes parents m'ont donc élevée en anglais et j'ai appris le français, la langue de mes ancêtres, à l'école.

Je voulais devenir enseignante dans les écoles de langue française, mais je devais améliorer la qualité de mon français. J'ai donc décidé, alors que j'étais à la faculté de l'éducation, de commencer à écouter la radio de Radio- Canada chaque matin. Nous avons la station CBEF ici, à Windsor, que j'écoutais chaque matin. Rapidement, je me suis familiarisée avec la musique. Je peux apprécier la présentation des artistes parce que je ne connaissais pas la musique en français. J'ai donc commencé à connaître les artistes, j'ai élargi mon vocabulaire, j'ai corrigé certains des anglicismes, et j'ai pu me connecter à la communauté francophone de la région et à la culture francophone.

Le sud-ouest ontarien compte environ 35 000 francophones et encore plus de personnes ayant une connaissance du français.

Cependant, c'est une région ayant un des taux d'assimilation les plus élevés dans la province, et je vois cette assimilation tous les jours. Je vois ma mère qui ne parle pas la langue de sa mère, mes cousins qui ne peuvent pas s'adresser à mes grand-parents dans leur langue maternelle. Je suis directrice d'une école de langue française et souvent j'inscris des enfants qui viennent d'une famille francophone mais dont les parents ont perdu la langue. C'est notre réalité.

La Société Radio-Canada joue un rôle primordial pour les francophones en milieu minoritaire, comme la SRC a joué un grand rôle dans ma vie pour garder la langue et la culture de mes ancêtres et de pouvoir travailler dans cette langue. Cela permet aux francophones ici d'entendre les nouvelles locales en français. Radio-Canada leur permet d'apprendre le vocabulaire pour discuter des actualités en français. Cela leur permet de rester connectés à la communauté francophone de la région. C'est également un outil de transmission de la culture canadienne, ce qui reflète évidemment les deux peuples fondateurs de notre merveilleux pays.

La station CBEF existe depuis 1970. Il y a plusieurs années, il y avait des émissions le matin, le midi, l'après-midi et la fin de semaine. En 2009, déjà plusieurs compressions avaient été faites. En 2009, on était rendu avec seulement une émission matinale, de six heures à neuf heures, du lundi au vendredi, une contribution à une émission le samedi matin et à une émission produite la nuit du dimanche, comme M. Vaillancourt l'a souligné dans sa présentation.

Puisqu'on avait déjà subi tellement de compressions jusqu'à ce point, lorsque Radio-Canada a annoncé, en 2009, qu'elle allait procéder à encore d'autres compressions à Windsor, la communauté était vraiment surprise. La décision était d'éliminer toutes les émissions produites localement à la station de Windsor.

J'aimerais également souligner que CBEF Windsor était la seule station au pays à perdre toutes les émissions produites localement. Tout ce qui restait alors était une émission diffusée le matin et provenant de Toronto. Toronto est à quatre heures de chez nous. Alors imaginez ce que penseraient les gens d'Ottawa s'ils devaient écouter le matin une émission de Toronto plutôt que d'Ottawa. Ce n'est pas du tout la même réalité. Et à l'intérieur de cette émission matinale provenant de Toronto, on avait des petites fenêtres de contenu local provenant de Windsor, des fenêtres d'environ cinq ou dix minutes, pour un total de 20 minutes chaque matin.

C'est à ce moment que la communauté du sud-ouest ontarien s'est regroupée et a formé le comité CBEF Windsor. On tentait de renverser cette décision et de faire valoir l'importance de la SRC dans une communauté comme la nôtre.

Depuis ce temps, on a fait plusieurs démarches. Initialement, on a été en Cour supérieure afin d'obtenir une injonction pour suspendre la décision en attendant que le commissaire aux langues officielles complète son enquête. On a envoyé plusieurs plaintes au commissaire aux langues officielles. Vous avez peut-être pris connaissance du fait qu'il y a eu 876 plaintes et que le commissaire a publié un rapport à ce sujet. Présentement, nous sommes en Cour fédérale pour régler ces questions.

Nous avons également communiqué avec plusieurs membres des gouvernements fédéral et provincial et nous participerons aux audiences publiques du CRTC la semaine prochaine. Nous tentons par tous les moyens d'avoir les services qui étaient si importants pour nous à Windsor. Nous sommes restés en contact avec Radio-Canada depuis les compressions. Nous avons tenté de travailler avec eux pour mettre de la pression afin d'améliorer la situation, et il y a eu une légère amélioration. Nous avons maintenant une petite émission de 90 minutes par jour.

Il y a encore plusieurs lacunes. Les nouvelles locales sont maigres, car il ne reste que trois employés à la station. Plusieurs segments proviennent de Toronto, ce qui est moins intéressant ou pertinent pour les gens de notre région, et il y a un grand manque par rapport aux activités culturelles, entre autres. Bref, la qualité des services de CBEF n'est pas équivalente aux services auxquels ont droit les anglophones à CBC à Windsor, et plusieurs francophones de notre région se sont tournés vers les médias anglophones depuis les compressions afin d'avoir une couverture plus complète de l'actualité dans notre région.

L'impact des compressions à CBEF a contribué et continue à contribuer à l'assimilation des francophones dans notre région. La SRC joue un rôle de protecteur et de promotion de notre culture canadienne. Nous croyons qu'elle devrait prendre les mesures positives pour contribuer à l'épanouissement de la langue et de la culture françaises. Si nous voulons contrer l'assimilation des francophones en milieu minoritaire, tous les partenaires doivent travailler ensemble.

J'aimerais ajouter que si les membres de S.O.S. CBEF luttent depuis trois ans pour dénoncer les compressions à notre seul station de radio française dans la région, c'est parce que nous sommes parmi les plus grands défenseurs de la langue et de la culture françaises, et c'est parce que la SRC a joué un rôle important dans nos vies personnelles en tant que francophone qui vivent en milieu minoritaire.

Je vous remercie de l'attention que vous portez à notre dossier et nous serons heureux de répondre à vos questions.

La présidente : Merci beaucoup. Nous allons maintenant procéder aux questions. Honorables sénateurs, veuillez, je vous prie, indiquer le nom de la personne ou de l'organisme à qui s'adresse votre question.

Le sénateur Fortin-Duplessis : Ma question s'adresse à tous les témoins. En tout premier lieu, je tiens à vous remercier et à vous féliciter pour les mémoires que vous venez de nous présenter.

Je voudrais que vous nous parliez des mécanismes actuels de consultations utilisés par la SRC pour les communautés francophones ainsi que leur taux de participation.

M. Vaillancourt : Je suis président de l'Assemblée de la francophonie depuis octobre 2010, et bien qu'on ait eu des rencontres avec les deux directeurs régionaux de Radio-Canada ici en Ontario, parce que l'Ontario est drôlement divisée, c'est une autre question, mais je ne peux pas vous dire qu'on s'est rencontré pour certains partenariats, mais à ma connaissance on n'a pas eu de structure de consultation formelle, et d'ailleurs c'est un peu un reproche qu'on a fait aux directeurs de leur dire de parler à la communauté avant de poser des gestes. À un moment donné, il y a eu un tollé, lorsque CBEF a fait l'annonce. C'est une des choses que mon prédécesseur avait dites à savoir que si vous nous aviez parlé à l'avance, il y aurait peut-être eu des solutions. Il ne reste pas moins que nous sommes derrière CBEF Windsor. Vous avez entendu de la part de cette communauté la problématique. On n'a jamais eu, à ma connaissance, dans les trois ou quatre dernières années, de forum de consultation formel.

Il y a un comité régional, qui ne représente pas notre communauté nécessairement, formé d'individus qui ne sont pas nécessairement branchés avec les organismes et les réseaux officiels, ce qui fait que les messages ne se rendent pas. C'est mon opinion.

Peter Hominuk, directeur général, Assemblée de la francophonie de l'Ontario : Dans le mémoire que nous avons présenté au CRTC, l'AFO, a demandé au CRTC d'exiger de la société qu'elle procède à la mise en place de mécanismes formels de consultations avec les communautés francophones en situation minoritaire, notamment celles de l'Ontario. L'AFO serait prête à y participer activement.

Nous croyons que c'est un manque pour notre communauté et nous exigeons la mise en place d'une structure de ce genre.

Le sénateur Fortin-Duplessis : C'est un gros manque.

M. Hominuk : C'est un très gros manque.

Nathalie McNeil, directrice générale, Alliance des producteurs francophones du Canada, Alliance culturelle de l'Ontario : L'APFC, tout comme l'AFO, n'est pas conviée à quelques comités que ce soit. Cela dit, je sais qu'il y a un comité qui s'appelle Le Panel des régions, qui est mis en place par Radio-Canada, et sur lequel siège la Fédération culturelle canadienne française et qui, par ailleurs, passera aux audiences du CRTC mercredi prochain.

Effectivement, il serait très important que les organismes, comme l'APFC qui représente les producteurs, mais surtout que les citoyens vivant en région soient conviés à ces comités pour donner un point de vue éclairé et porter les préoccupations de leur organisme à l'attention de ces panels de consultation.

Karim Amellal, vice-président, S.O.S. CBEF : Ni le comité S.O.S. CBEF ni notre communauté francophone du sud de l'Ontario n'ont été consultés par Radio-Canada. Ils sont venus ici nous rendre visite pour nous annoncer la mauvaise nouvelle, ce qui était vraiment inacceptable. Comme M. Vaillancourt l'a dit, si on nous avait consultés avant d'effectuer des compressions, peut-être qu'on aurait trouvé des solutions. Or, ils ne l'ont pas fait depuis des années.

Comme Mme Larocque l'a souligné, ce n'est pas la seule coupure qui a eu lieu. Il y en a eues avant, et la communauté n'a jamais été consultée. Finalement, le directeur, Hubert Lacroix, est venu nous rendre visite. Je puis vous dire que le comportement arrogant de cette société est inacceptable. On nous dit que les coupures auront lieu, peu importe, et que l'on va vous fournir un nouveau format. C'est vraiment nous manquer de respect.

Le sénateur Fortin-Duplessis : On peut en conclure que vous n'êtes pas consultés, d'après ce que je peux voir. Or, ce serait important de l'être.

M. Vaillancourt : Oui.

Mme Chassé : Oui.

Le sénateur Fortin-Duplessis : À votre avis, y a-t-il eu des choses positives avec la CBC/Radio-Canada, qu'il s'agisse d'un contexte ou d'un programme, quelque chose qui a été bon et que vous aimeriez voir et garder?

M. Vaillancourt : Dans un premier temps, des changements ont eu lieu cette année. On parle, par exemple, de ce qu'on a appelé l'intégration locale pour les nouvelles. Le réseau cède sa place aux stations locales, à Ottawa ou Toronto. Windsor n'est pas de la partie, mais il y a CBON à Sudbury. La station locale peut intégrer plus de nouvelles locales avec des chaînons nationaux. Cette belle initiative mérite d'être moussée davantage.

Au cours des dernières années, nonobstant le manque de consultation, on a noté des participations intéressantes de Radio-Canada dans des événements et activités. À l'Assemblée de la Francophonie, on a fêté un 100e anniversaire. Radio-Canada était présent et a collaboré. Ce n'est pas de la consultation, mais des partenariats qui se sont faits. On se demande, avec les compressions et la disparition du FAPL, ce que nous réserve l'avenir. Il est important que la société soit le miroir de cette dualité linguistique.

J'aime le dire, car on le voit sur des affiches : mon Canada est un Canada où la dualité linguistique est acceptée et promue par les instances fédérales en premier lieu. Or, on s'inquiète, dans les structures et le financement proposés ou que l'on retire, de la capacité.

Mme Chassé : Lorsqu'on parle des ententes, les partenariats qui ont eu lieu entre les organismes et Radio-Canada sont très importants dans nos communautés. Ils ont permis de faire rayonner nos artistes et nos artisans d'un océan à l'autre. La perte potentielle de ces ententes pourrait mettre en péril plusieurs de nos activités. Nombre de nos organismes membres ont mentionné cet élément crucial dans le développement de leur communauté.

Mme Larocque : Je n'aimerais pas que vous ayez l'impression que, pour nous, Radio-Canada est une chose de négative. Au contraire, si nous sommes là, c'est parce que cet élément est d'une grande importance. Je parle du rôle positif que Radio-Canada peut jouer en milieu minoritaire. Voilà le service que nous avions avant. Lorsqu'on avait une salle de nouvelles, on avait des employés et plusieurs émissions. Nous avions non seulement des minutes de programmation, mais aussi la présence et les partenariats dans la région. Comme l'a dit M. Vaillancourt, c'était l'effet miroir. On se voyait, on s'entendait à Radio-Canada, qui était un pilier dans notre communauté.

On peut donc voir l'immense contribution que Radio-Canada peut avoir. Notre frustration vient du fait qu'on a enlevé tellement et on en sent le manque.

Le sénateur Champagne : Il est facile pour nous, des communautés francophones et des communautés culturelles, de penser que, pour une raison ou pour une autre, lorsque Radio-Canada a dû subir des compressions à son budget, nous avons été les plus touchés, on nous a vraiment visés. Tous les organismes et toutes les institutions qui recevaient des sommes du fédéral ont vu leur budget coupé de 10 p. 100. Ce n'est pas drôle, mais on m'a convaincue que c'était nécessaire.

Je vous donne un autre exemple. La voix du Canada, la voix francophone et la voix anglophone du Canada à l'étranger s'appelle RCI, Radio Canada international. On parle d'une compression de 10 p. 100. Or, le budget de RCI a été coupé de 80 p. 100. Par conséquent, tout ce que RCI faisait pour faire connaître nos artistes à l'étranger a subi beaucoup de dommages. Depuis quelques années, et ce n'est peut-être pas si récent, on note la disparition de tous les disques que RCI produisait. On ne parle plus de tous les prix que des artistes canadiens ont gagnés à l'étranger, suite à des disques qui avaient été produits ici, au Canada, par RCI et qui avaient été distribués par nos ambassadeurs un peu partout.

Par contre, à une certaine époque, il y avait à Montréal, entre les réseaux français et les réseaux anglais, neuf demi- heures chaque semaine où on présentait des artistes — et je ne vous parle en ce moment que de musique classique. On retrouvait des émissions pour les jeunes, comme Banc d'essais et Jeunes artistes. On retrouvait des émissions mettant en vedette des gens connus, qui présentaient soit leur dernier concert ou le programme de leur prochain concert. Ces choses ont disparu. Ces éléments font partie du mémoire que j'ai envoyé au CRTC, que vous avez peut-être lu et que j'irai défendre mercredi, lorsque ce sera mon tour.

Juste pour me rendre mal à l'aise, quand je suis sortie de la gare et que je suis rentrée chez moi, j'ai ouvert la télé, et sur Artv était diffusée une émission extraordinaire. Pour une fois, elle portait bien son nom. L'émission nous amenait à Venise et parlait d'un pianiste canadien qui aime jouer sur un Fazioli. On parlait des Fazioli, comment ils sont construits à Venise et ainsi de suite. Je me suis dit, on nous a vus venir. Ils ont réalisé le genre d'émission que Artv devrait nous présenter constamment.

Vous parliez de présence sporadique dans vos nouvelles. C'est sans doute vrai. Quand entend-on parler de nouvelles qui viennent d'un peu partout quand il se produit un meurtre ou un accident épouvantable? On a vu en Estrie, il y a un an, un très gros accident où des enfants ont perdu la vie. Radio-Canada a dépêché des reporters de Montréal pour nous décrire la scène, alors qu'un nombre de journalistes très compétents se trouvaient juste à côté, à Sherbrooke. Mais ce sont des gens de l'extérieur. C'est la minorité, surtout à Sherbrooke, où les anglophones sont souvent minoritaires.

Ce sont des choses que je m'apprête à soumettre mercredi. Je crois que le danger pour nous tous, que ce soit vous qui êtes ici ou les gens de Windsor et d'ailleurs en Ontario, le danger est de dire qu'on nous en veut en tant que francophones en situation minoritaire ou parce que nous ne sommes que des artistes et que, pour eux, ce n'est pas important.

Je vous écoute avec tout mon cœur et toute ma bonne volonté et j'ose espérer que nous arriverons, en travaillant ensemble, à faire en sorte qu'on tourne la poignée un peu et qu'on ouvre la porte, que les gens qui sont à la tête de Radio-Canada se rendent compte que ce n'est pas contre eux qu'on en a et qu'on s'attend à ce qu'ils n'en aient pas contre nous. On veut ouvrir la porte. Sachez bien qu'en ce qui me concerne, ainsi que mes collègues de ce comité, c'est ce à quoi nous travaillons.

Si vous lisez ce que j'ai envoyé, je crois que vous allez voir que oui, d'accord, j'ai parlé surtout d'affaires culturelles, je veux bien, mais je ne veux pas non plus qu'on coupe les heures consacrées à nos artistes, qu'ils soient francophones ou anglophones, qu'ils soient de chez vous, de chez moi ou d'ailleurs. Je ne veux pas qu'on coupe cela par exemple pour ramener la publicité à Espace Musique.

Je conduis beaucoup entre chez moi et Ottawa, et j'écoute beaucoup la radio, dont une émission où on offre de la musique sur disque. Oublions la musique en direct, il n'y en a plus depuis des années. J'en ai fait des émissions avec de la musique sur disque. Je choisissais mon thème et j'allais chercher mes disques à la discothèque de Radio-Canada. À ce moment, on utilisait les gros microsillons, c'était le support de l'époque. Cela pesait des tonnes. J'écrivais mes textes, je faisais mon minutage. Quand venait le temps de faire l'émission, j'étais en studio toute seule comme une grande fille. Dans la salle de contrôle, il y avait le réalisateur ou la réalisatrice et un technicien. Aujourd'hui, ils sont 14 apôtres : les webmestres, les aides-webmestres, les recherchistes, les aides-recherchistes, les techniciens et les aides-techniciens. J'en ai compté 14, l'autre jour, pour une émission où tout ce que l'on faisait était de faire jouer quelques disques.

Le 10 p. 100 de compressions, je ne sais pas comment vous le voyez, mais je me dis que ce serait peut-être un bel endroit pour en enlever un peu. Si on pouvait le faire à trois il y a 10 ans — bien qu'on n'était pas sur Internet —, ont- ils besoin d'être 14 maintenant? Le cabaret du soir qui penche n'était pas supporté par 14 apôtres. Aujourd'hui, Jacques Languirand a-t-il vraiment besoin de 14 personnes pour faire son émission? On crée sans doute des emplois, mais on laisse les artistes de côté.

Je m'excuse, j'ai beaucoup parlé alors que je devrais vous poser des questions, mais j'aurai peut-être fait une chose : si j'ai pu vous assurer que vous n'êtes pas seuls dans la lutte, j'aurai gagné mon pain aujourd'hui.

Mme McNeil : J'aimerais réagir parce que je trouve fort intéressants vos commentaires sur la musique classique et la programmation, sur ce que l'on met en ondes ou non, que c'est éminemment une question de choix éditoriaux. Évidemment, qu'on défend Radio-Canada, évidemment, qu'on aime Radio-Canada et qu'il est très important pour nous, mais je crois qu'actuellement, il y a trois constats majeurs qui vont dans le sens de vos propos, madame le sénateur, c'est-à-dire, premièrement, la mise en œuvre des compressions budgétaires, deuxièmement, la fin du Fonds d'amélioration à la programmation locale, le FAPL, et troisièmement, malheureusement ce qu'on appelle le syndrome de la « montréalisation » des ondes ou « québécisation » — désolée pour les néologismes — des ondes qui sont nécessaires et qui sont dues au fait d'avoir de la publicité pour avoir de bonnes cotes d'écoute. Tout cela mis ensemble fait que les contenus issus des communautés francophones en situation minoritaire, contenus produits par des producteurs francophones, contenus faits par des créateurs, des corps de métiers, des individus qui restent en Ontario, à Moncton ou au Manitoba, peu importe, ces contenus sont de moins en moins présents en ondes et on subit de plein fouet toutes ces compressions et cette ingénierie de mise en œuvre pour que Radio-Canada puisse continuer d'exister. C'est un peu, je crois, ce qu'on dénonce ici, tout en appuyant Radio-Canada et tout en regrettant les compressions, bien évidemment.

Le sénateur Champagne : Je parlais de l'émission merveilleuse que j'ai vue hier soir où Louis Lortie jouait sur un Fazioli tout en nous amenant à Venise. Il y a de bons côtés. Si on revient à Singing Stars of Tomorrow, nos futures étoiles, on se tourne vers le privé où on fabrique des vedettes de rock qui ne chantent jamais en français de toute façon.

Mme Larocque : Je voulais juste mentionner que nous, on fait l'émission comme dans le bon vieux temps. On a seulement deux animateurs; pas 14. En fait, un animateur et une réalisatrice font notre émission de 90 minutes par jour.

Il ne s'agit pas d'une compétition pour savoir qui est la pire victime des compressions de Radio-Canada. On se sent vraiment ciblés ici à Windsor. Radio-Canada a soumis un tableau dans le cadre du renouvellement des licences. Ils ont souligné le nombre d'heures accordées aux stations périphériques et aux stations principales au Canada. Évidemment, nous, à Windsor, on est considérés comme une région périphérique plus éloignée où il y a moins de francophones.

Je n'ai pas remarqué si toutes les autres stations périphériques au Canada ont vu leur nombre d'heures diminué ou augmenté. La station de Windsor est passée de 36,5 heures à cinq heures. La situation ici est différente du reste du pays. Je sympathise pour tous ceux qui ont subi les effets des compressions, car je comprends le rôle important de Radio- Canada, mais je veux juste faire remarquer que la situation a vraiment été extrême à Windsor.

M. Amellal : Il faudrait que le gouvernement réalise l'impact de ces coupures sur une communauté francophone en milieu minoritaire. C'est un désastre. C'est vraiment une assimilation parfaite. J'ai deux filles parfaitement bilingues grâce à Radio-Canada; elles écoutaient CBEF tous les matins. Je pense aux générations futures. C'est à ce Canada qu'on doit penser. C'est brimer le droit des francophones en milieu minoritaire. Sommes-nous en train de mettre une étiquette monétaire sur une culture francophone? C'est dur à avaler. Comme vous le disiez, il faudrait un débat, il faudrait réfléchir en tant que Canadiens, francophones ou anglophones, à l'avenir des francophones en milieu minoritaire au Canada dans les années futures.

Comme Mme Larocque l'a dit, nous ne nous posons pas en victimes. Notre région a été ciblée, on nous a enlevé un outil principal qui nous permettait de fonctionner.

Le sénateur Champagne : C'est Radio-Canada, et non le gouvernement, qui a décidé de diminuer le nombre d'heures de diffusion d'émissions locales ou régionales de la station de Windsor de 36,5 à 5. Le gouvernement a coupé le budget de 10 p. 100, mais laisse Radio-Canada prendre ses propres décisions en ce qui concerne le côté journalistique, par exemple.

Le gouvernement ne dit pas où il faut couper. Non. S'il en était ainsi, il nous serait plus facile d'émettre notre opinion. Je trouve extrêmement dommage qu'une région comme la vôtre soit touchée à ce point. C'est pour cette raison que j'ai commencé mon intervention en faisant le lien avec ce qui se passe du côté de Radio Canada international, qui est la voix du Canada en français et en anglais à l'étranger. Or, leur budget a été coupé de 80 p. 100. C'est la décision de Radio-Canada et non celle du gouvernement. Il ne faut pas mêler les pommes et les oranges.

M. Amellal : Je voudrais soulever un dernier point. Peu importe d'où provient l'argent, est-ce qu'on peut laisser une société décider de l'avenir d'une communauté francophone sans la consulter?

Le sénateur McIntyre : Tout d'abord, j'aimerais vous remercier pour votre présentation.

Ma question s'adresse à tout le groupe. J'aimerais aborder le sujet de la programmation hors Québec au Téléjournal de Radio-Canada.

Récemment, deux études ont été menées sur la faible couverture du Téléjournal de Radio-Canada en ce qui concerne les actualités hors Québec. La première, demandée par la Société nationale de l'Acadie, est celle de Marie-Linda Lord. La deuxième étude est celle d'un professeur de l'Université de Carleton, faite à la demande du sénateur De Bané.

Selon moi, les deux études arrivent sensiblement à la même conclusion, soit celle d'une faible visibilité de la communauté francophone hors Québec au Téléjournal, à l'heure de grande écoute.

Cela dit, nous venons de recevoir une bonne nouvelle. Michel Cormier, un Acadien d'origine, vient tout juste d'être nommé directeur général des services de l'information du réseau français de Radio-Canada. De plus, on apprend qu'il vient tout juste d'annoncer la création de deux postes de journalistes nationaux, l'un à Edmonton et l'autre à Moncton, au Nouveau-Brunswick. Selon moi, il s'agit d'un geste concret de la part de Michel Cormier, geste susceptible d'améliorer — si je peux m'exprimer ainsi — la couverture de l'actualité régionale hors Québec.

Selon vous, est-ce qu'un tel poste devrait être créé en Ontario?

M. Vaillancourt : La question ne se pose pas. Quand 50 p. 100 de la population francophone hors Québec est en Ontario, il va de soi qu'il devrait y avoir un ou deux journalistes, à l'intérieur de la station, affectés à cela. Mais il est clair, sénateur McIntyre, que si on peut nommer quelqu'un en Acadie, en Ontario ou dans l'Ouest canadien, il est fondamentalement important que la masse critique que nous incarnons soit dûment représentée de cette façon.

Il y a 580 000 Franco-Ontariens, ce n'est pas à négliger. Je vis dans la municipalité de Rockland et j'écoute fidèlement Radio-Canada, mais je n'entends jamais parler de l'Ontario. Il faut que j'aille à Sudbury pour en entendre parler, ou à Toronto.

Mais le problème à Toronto est que l'on retrouve Radio-Canada français sur la bande AM alors que les émissions anglophones sont sur le FM. Il y a certains problèmes de cette nature qui se posent.

Pour répondre précisément à votre question, il est inconcevable qu'il n'y ait aucun journaliste attitré à la couverture de l'Ontario.

Le sénateur McIntyre : Comme vous savez, la Société Radio-Canada est aujourd'hui devant le CRTC, à Gatineau, dans le cadre du renouvellement de ses licences. Avez-vous des attentes à ce sujet? Le cas échéant, lesquelles?

M. Vaillancourt : On s'attend à de l'amélioration. On y fera justement une présentation mercredi.

Nos attentes, en ce qui concerne l'amélioration quant à cette situation, sont clairement inscrites dans notre mémoire. Nous demandons également au CRTC d'obliger Radio-Canada à être plus fidèle à son mandat quant à la dualité linguistique, et également d'être plus présent auprès de la Francophonie hors Québec, que la Francophonie ontarienne et celle du reste du Canada soient mieux connues.

J'ai souvent l'occasion de voyager dans le corridor Ottawa-Montmagny. Lorsque je suis à Québec et que je syntonise CBC, ils ont leurs actualités. Mais à Montmagny, je marche dans la rue et les gens trouvent étrange que je parle français bien que je vienne de l'Ontario. On ne me reconnaît pas comme peuple. Il y a quelque chose d'anormal.

Une de nos attentes est que Radio-Canada devrait être la vitrine, pour les Québécois, des autres Francophonies. Et CBC devrait aussi être une vitrine.

Bernard St-Laurent, que vous connaissez peut-être, fait une excellente émission le samedi, mais ses points de référence sont la Francophonie de la Colombie-Britannique. Il y a toute une Francophonie qui est négligée. Il fait un bon travail mais il faudrait que ce soit pancanadien. Il faudrait que l'on parle de l'Ontario français — vous comprendrez que j'ai un préjugé favorable pour l'Ontario français — autant que de l'Ontario anglophone. Même si on fait miroiter cette dualité linguistique, il faut créer le réflexe francophone. Il faut que ce soit un réflexe et non pas une obligation.

Je crois que l'attente que j'aurais par rapport à la Société Radio-Canada est qu'elle soit cette vitrine qui fait la grande promotion active de la dualité linguistique et qui fait connaître le peuple.

Comme que je franchis parfois la clôture, je peux affirmer que CBC a réussi cela. Une des émissions clés est Cross- Canada Checkup. Je rêve d'avoir une version francophone de cette émission, une émission où la Francophonie se parlerait une fois par semaine. Il faut se parler mais on ne le fait pas. Ce sont des choses auxquelles je m'attends de Radio-Canada.

Mme McNeil : L'APFC présente également son mémoire la semaine prochaine et je vous dirais que la plus grande des attentes devant le CRTC est évidemment que les licences de Radio-Canada soient renouvelées.

Ceci étant dit, on souhaite que Radio-Canada soit sensible à la notion d'équilibre et d'équité. Ils le disent mais ils devraient également l'appliquer. Donc, en conséquence, nous souhaitons que nos contenus, nos artistes et créateurs soient plus présents en ondes, que ce soit en région ou sur le réseau national.

Le sénateur Poirier : Merci pour vos présentations. J'aimerais toucher un point. On a entendu à plusieurs reprises dernièrement que Radio-Canada ne répond pas nécessairement aux attentes que les gens ont quant aux actualités régionales. On dépend de plus en plus de nos radios communautaires francophones pour avoir les nouvelles de nos régions.

J'aimerais savoir si vous avez des radios communautaires francophones dans vos régions.

Deuxièmement, est-ce qu'ils ont repris le rôle que jouait Radio-Canada auparavant? Est-ce qu'ils offrent un peu des nouvelles dans vos régions? Et croyez-vous que c'est ce à quoi on peut s'attendre dans l'avenir? Ma question s'adresse à tous.

M. Vaillancourt : Je vais demander à mon directeur général, qui a une grande expérience des radios communautaires, de commenter cette question. Quant à moi ce n'est pas la réponse. La radio communautaire est une partie de la réponse mais ce n'est pas une raison pour Radio-Canada de se retirer.

M. Hominuk : Merci, sénateur Poirier. Vous le savez, les radios communautaires au Nouveau-Brunswick sont très populaires et reçoivent beaucoup de soutien de la part du gouvernement du Nouveau-Brunswick, chose qu'on n'a pas en Ontario. Oui, nous avons des radios communautaires, le réseau de l'Ontario en a seulement six. Elles sont situées à Toronto, Ottawa, Penetanguishene, Cornwall, Hearst et Kapuskasing. Ce sont des stations de radio qui couvrent des petits territoires, et une grande partie de l'Ontario n'est pas couverte.

Elles font du bon travail, mais elles ont très peu de moyens. Les radios communautaires en Ontario sont très fragilisés en ce moment et n'ont pas la force des radios communautaires au Nouveau-Brunswick. Il y a un manque de financement; entre autres, le commissaire des services en français de l'Ontario, François Boileau, a récemment publié un rapport sur la situation des radios communautaires en Ontario, dans lequel il encourageait le gouvernement de l'Ontario à soutenir les radios communautaires de façon financière. Les radios communautaires ne reçoivent aucun financement de base, ni du fédéral ni du provincial, et vivent de prélèvements des fonds et de vente de publicité.

Je pense que votre question est bonne. Les radios communautaires jouent un rôle très actif dans les communautés, elles sont bien écoutées, mais au niveau des nouvelles elles n'ont pas de ressources. La majorité des radios communautaires en Ontario ont un journaliste à temps partiel, quand seulement elles en ont un; certaines n'en ont pas du tout. Il y a quand même un service de nouvelles provinciales diffusées dans l'ensemble des radios, mais là encore, c'est un service deux ou trois fois par jour. Il y a donc du travail à faire.

Je pense qu'il pourrait y avoir des partenariats, entre autres entre Radio-Canada et des radios communautaire. Radio-Canada n'est pas nécessairement dans des régions où il y a des radios communautaires. On pourrait même avoir des partenariats pour aider à développer du contenu. Différents modèles pourraient être envisagés, mais de loin, c'est la meilleure solution pour les nouvelles régionales. Dans le monde dans lequel nous vivons, les nouvelles locales deviennent de plus en plus rares. Même les grandes chaînes, que ce soit de télévision ou de radio, même les chaînes de journaux, coupent de plus en plus les ressources locales. Donc, les nouvelles locales, surtout pour les Franco-Ontariens, deviennent une chose de plus en plus rare. L'AFO a créé, dans les dernières années, une table des médias francophones pour essayer de voir de quelle façon on pouvait travailler ensemble avec les médias. Nous avons autour de la table les médias de l'APF, TFO, Radio-Canada, les radios communautaires, et cetera. On a essayé de trouver des solutions communes à des problèmes ou de voir s'il y avait des façons de faire de l'entraide. Nous en sommes vraiment à nos débuts; on pense que cela va amener du bien, en fin de compte, mais les solutions ne sont pas nécessairement évidentes. Et on ne pense pas que des solutions vont arriver du jour au lendemain sans les investissements qui vont peut-être venir d'ailleurs.

Ce qui manque vraiment au niveau des nouvelles, dans la province de l'Ontario, et M. Vaillancourt en a parlé tantôt, c'est qu'on a très peu de nouvelles qui nous parviennent de façon interrégionale. Les francophones du sud, qui reçoivent des nouvelles malgré tout correctes en provenance de Toronto, ne savent pas ce qui se passe dans la région de Sudbury, dans le Nord, ni dans la région de l'Est, et réciproquement. C'est très difficile de créer, de tisser des liens entre nos communautés et nos diverses régions francophones de l'Ontario si on n'a pas ce partage d'information d'une région à l'autre. C'est très difficile. Entre autres, on a lancé récemment l'idée d'un journal provincial franco-ontarien, justement pour essayer de trouver des solutions à ça. Mais Radio-Canada devrait être une grande partie de la solution à cette problématique.

Mme Larocque : Je voulais simplement partager. Vous avez peut-être déduit de ma réponse à Peter Hominuk que nous n'avons pas de radio communautaire à Windsor et que CBEF était vraiment la seule station de radio française ici à Windsor. Pour la population francophone ici, pour avoir des nouvelles locales, si on écoute la radio en français, c'est vraiment un compromis parce qu'il faut écouter le français et avoir les nouvelles de Toronto au lieu d'entendre les nouvelles locales de Windsor qu'on pourrait avoir si on se tournait vers les médias anglophones. Donc, malheureusement on n'a pas d'autres options.

Le sénateur Poirier : Le partage dont vous parliez plus tôt, le voyez-vous plus dans vos communautés anglophones avec CBC? Savez-vous ce qui se passe d'une communauté à l'autre, d'une province à l'autre dans les communautés anglophones de l'Ontario comparativement aux communautés francophones?

M. Hominuk : Justement, je crois que la communauté francophone se tourne vers les médias anglophones pour avoir ce partage-là, car il n'existe pas en français, il n'est pas là. La seule façon de l'avoir, c'est au niveau anglophone, mais ça ne nous le donne pas au niveau francophone.

Le sénateur De Bané : Madame McNeil, au moins une bonne nouvelle : les permis, les licences de Radio-Canada et de CBC, évidemment, vont être renouvelées, parce que le radiodiffuseur public national est créé en vertu d'une loi. Alors, le CRTC peut imposer des conditions, et j'espère qu'il va penser à Windsor comme une des conditions qu'il pourrait imposer, ainsi qu'aux différentes questions que vous avez soulevées.

Monsieur Vaillancourt, une chose m'a étonné; vous avez parlé des francophones en Ontario qui sont de langue maternelle française. Suivant les statistiques de Statistique Canada — et je vous donne les chiffres du recensement de 2006, parce que je n'ai pas étudié ceux qui viennent d'être publiés — ceux qui sont de langue maternelle française en Ontario, c'est bel et bien 578 040. À ces 578 040, il faut ajouter un million de personnes qui parlent français. Donc vous n'êtes donc pas seulement 578 040, mais également un autre million. Alors vous êtes nombreux.

Il y a une chose sur laquelle j'aimerais avoir l'avis de ceux qui voudront bien commenter cela. Il s'agit d'un commentaire de Marie-Linda Lord, qui est une ancienne journaliste elle-même et qui aujourd'hui est vice-recteur à l'université acadienne de Moncton. Elle a dit quelque chose qui m'a saisi, car vous avez parlé de votre tristesse de voir que les minorités francophones acadiennes ne sont pas assez présentes sur le réseau pancanadien. Elle a dit : « Ce qu'on ne comprend pas, c'est que, pour nous qui vivons en milieu minoritaire, le fait de voir d'autres francophones qui vivent dans les provinces anglophones, cela nous donne un appui moral. »

Je n'avais jamais pensé à cela, au fait que de voir que le gars en Ontario qui voit un francophone du Manitoba ou de Colombie-Britannique, ça l'aide au point de vue moral. Je n'avais pas remarqué cela.

Qu'est-ce que vous pensez de l'argument de Radio-Canada qui, en gros, est le suivant : « oui, c'est vrai ce que vous dites, que vous n'êtes pas assez présents dans les émissions nationales, mais vous l'êtes dans les émissions régionales ». Qu'est-ce que vous répondez à cet argument, que l'on entend trop souvent, disant « on a des émissions régionales juste pour vous, chez vous? »

M. Vaillancourt : D'abord, je vous remercie de me le rappeler, la francophilie ontarienne a fait en sorte qu'il y a quand même une masse critique fort intéressante. Toute cette question que vous soulevez en est une de construire notre identité comme peuple et comme société et citoyens qui contribuent à la vitalité de notre pays. C'est la notion de se voir régionalement. Vous entendez Windsor dire qu'ils s'entendent cinq heures par semaine — je regrette, mais cinq heures par semaine ne créent pas le réflexe ni la fierté nécessaires pour s'assumer.

Si on se voit sur la chaîne nationale, c'est comme cela qu'on va construire l'identité et la fierté des deux côtés. Je suis un partisan de la dualité linguistique.

D'ailleurs, pour ceux d'entre vous qui ont lu le document de la Feuille de route pour la dualité linguistique canadienne, le premier ministre lui-même dit bien que la dualité linguistique est une valeur nationale. Alors le diffuseur national devrait faire en sorte de faire voir sa Francophonie, pas seulement sur le plan régional : que les gens de Sudbury se voient et s'entendent et tous les autres. Les gens de l'est de l'Ontario, je suis désolé, mais ils ne se voient pas. Nous sommes une minorité dans la Francophonie de l'est. Comment résoudre ce problème? Je n'ai pas la solution.

Le bureau d'Ottawa a un mandat extraordinaire. Il doit servir la population de Gatineau, les Franco-Ontariens et aussi la scène nationale. Mais c'est une autre question. Il est important, et je souscris à ce que la professeure Lord vous a inspiré, et c'est un fait, que lorsqu'on se voit et qu'on réalise qu'on porte attention, cela nous construit et nous permet de nous affirmer. Cela nous donne le goût de parler français et, au plan national, valorise l'autre langue à l'autre peuple. C'est un incontournable si on parle de dualité linguistique et de construction identitaire.

Au Canada, si on veut maintenir la dualité linguistique, il y a une langue qui n'est pas menacée, mais il y en a une autre qui l'est, et nos institutions doivent travailler en ce sens pour maintenir cet héritage qui nous différencie de l'État américain au sud de nous.

Le sénateur De Bané : Y a-t-il d'autres commentaires à formuler sur cette réponse de Radio-Canada? Il y a des émissions régionales où vous pouvez vous voir, vous entendre et échanger.

M. Amellal : Il faudrait poser des questions sur les émissions régionales. Le mot-clé est vraiment le contenu local. Je parle de nos jeunes qui écoutent notre radio. On veut qu'ils écoutent notre radio. Comment attirer les jeunes qui sont toujours sur iPod et sur iPad, sous l'influence des dernières technologies? Qu'on arrête de me dire que les plateformes numériques sont le futur. Il y a une influence des plateformes numérique, mais la radio a encore sa place. Quand vous conduisez, que vous êtes à la maison en train de prendre votre douche, de déjeuner en famille, la radio a encore sa place. Qu'on ne me parle pas des plateformes numériques. Le contenu local est très important, parce que c'est comme cela qu'on va aller chercher nos communautés. C'est en faisant des activités, en parlant de leurs exploits sportifs, culturels, scolaires ou autres, les faire venir au microphone parler que leur grand-mère ou leur grand-père les écoutent à la radio. C'est toute une fierté culturelle des francophones. C'est de cela qu'on parle, ce n'est pas juste le fait que Radio- Canada va me dire : « vous avez des émissions régionales ». De quoi on parle lorsqu'on parle d'émissions régionales? Les besoins sont là, on n'est pas en train de créer les besoins. Venez consulter les communautés francophones en milieu minoritaire et vous allez constater les besoins. Lorsque les fonds sont restreints — Mme le sénateur a dit que ce n'était pas le gouvernement qui décidait de la répartition —, Radio-Canada doit, en tant que gestionnaire, répartir cet argent où les besoins sont les plus criants pour ne pas voir disparaître une Francophonie tout entière.

M. Hominuk : L'aspect régional est important, mais si on ne peut pas promouvoir nos artistes et ce qui se passe dans nos régions, les gens se sentent très isolés. Enlever ce sens d'isolement est très important. Je pense particulièrement à la situation à Windsor ou dans le sud de l'Ontario, où il y a une population très minoritaire à l'intérieur d'une masse anglophone. Il y a une station qui est seulement sur la chaîne AM et déjà les gens ont moins tendance à écouter Radio- Canada sur le AM. C'est encore plus important d'avoir accès et de faire ce partage national.

Le sénateur De Bané : C'est précisément ce point qui m'intéresse, M. Hominuk et Mme McNeil. Que se passe-t-il dans la tête d'un Franco-Ontarien quand le dimanche soir il voit Guy A. Lepage dont tous les invités, à 99,9 p. 100, sont du Québec?

M. Hominuk : Ce n'est pas notre télévision.

Le sénateur De Bané : Il y a un journaliste de l'Acadie Nouvelle qui a écrit un très bel article là-dessus disant qu'il était temps qu'on élargisse l'horizon et que c'est bien beau de ne présenter que des artistes de Montréal.

Lorsque vous écoutez cette émission, le dimanche soir, vous y pensez. Pourquoi ne choisit-on pas d'inviter des artistes de chez vous ou provenant des autres provinces francophones?

Mme Chassé : C'est certain que ce n'est pas le même plan. On parlait de construction identitaire, oui, c'est une chose, on peut construire son identité en tant que Franco-Ontarien, mais aussi en tant que Franco-Canadien et même Canadien plus largement. Cela doit passer par la reconnaissance et par le rassemblement aussi. Il est sûr que si on agit toujours en vase clos sans s'ouvrir aux autres, on risque de finir en petite autarcie. C'est sûr que cette reconnaissance chez l'autre est importante et il y a une forme d'éducation également. On est en milieu minoritaire, donc c'est important que la majorité également entende parler de nous et sache qu'on existe. Si on parle toujours à Tout le Monde en parle des Québécois, c'est sûr qu'on oublie parfois que certains de leurs invités sont Franco-Ontariens, mais on ne le dit même pas. Parfois ce n'est pas méchant ou ce n'est pas de la mauvaise volonté, mais c'est souvent une méconnaissance.

Si on agit toujours en vase clos, on ne réglera jamais cette question. C'est vraiment important pour nous, parce que oui, on a besoin de s'entendre et de se voir, mais on a aussi besoin de se reconnaître et de constater les enjeux des autres francophones partout au pays, et de sentir qu'on fait partie d'un tout, d'agrandir finalement l'espace francophone pour tous faire partie tous ensemble de la même société.

Mme Larocque : Sénateur De Bané, vous touchez une corde sensible, et j'espère que je vais pouvoir m'exprimer clairement.

Je vous ai dit que je venais d'une famille francophone, mais que j'ai été élevée en anglais. Selon Statistique Canada, je ne suis pas francophone, mais dans mon cœur, je suis francophone. Quand je vais au Québec, j'ai toujours hâte de pouvoir parler en français. Je vais dans les magasins, dans les restaurants et je m'adresse au personnel en français. La majorité du temps, on me répond en anglais. Et cela me brise le cœur, parce qu'ils entendent un accent différent, ils pensent que j'ai de la difficulté à parler français, ce qui n'est pas le cas. En fait, je travaille en français. Cela me démontre justement que les francophones partout au Canada ne sont pas connus par les autres francophones parce que s'ils nous connaissaient, ils me répondraient en français et ils verraient que nous sommes unis.

Alors, si on veut que le Canada garde sa dualité linguistique, on a besoin d'avoir une vision.

On ne peut pas seulement mettre des pansements tout le temps sur la situation. On ne peut pas justifier les compressions par un manque à gagner, car selon moi, ce n'est pas une question d'argent, mais une question de priorité. Et nous, les citoyens, devons avoir cette vision. Radio-Canada est notre outil pour rendre réelle cette vision. J'espère que cela alimente un peu la réflexion.

La présidente : En effet, merci.

Mme McNeil : Ma collègue a dit ce que je voulais dire. Je voudrais en profiter pour dire au sénateur De Bané que je n'avais pas terminé mon intervention quant au renouvellement de licence de Radio-Canada. Je n'avais pas précisé qu'il y avait des conditions que l'APFC émettait très clairement de manière quantifiable ou qualifiable en termes de licence évidemment.

Le sénateur De Bané : Bravo.

Le sénateur Robichaud : Merci d'être venus nous parler. On parle de compressions budgétaires. Mme Larocque vient juste de dire qu'il ne s'agissait pas seulement d'une question d'argent. Je me questionne. Un moment donné, pour donner des services, il faut quand même des sous.

Est-ce qu'on doit s'attendre à ce que Radio-Canada, dans la situation actuelle, puisse rencontrer nos attentes en tant que diffuseur national, en tant que société qui doit, comme Mme Larocque l'a dit, connecter à toute la communauté francophone du Canada? Est-ce seulement une question de priorités mal choisies à Radio-Canada? Pouvez-vous m'éclairer?

M. Vaillancourt : Je vais aventurer un début de réflexion. Si c'est une question d'argent, je suis d'accord avec Mme Larocque, il y a un élément de priorité. Mais s'il y avait un véhicule de consultation, on aurait pu faire partie des solutions pour arriver à rejoindre les aspirations très bien articulées par Mme Larocque.

Lorsqu'une société se présente dans une communauté en disant qu'ils ont pensé à la solution et qu'on n'a plus rien à dire, c'est là que le bât blesse. Lorsqu'on entend la question de priorité versus le budget, s'il y avait eu des consultations et si on a à cœur le mandat national, peut-être que les priorités seraient articulées différemment dans la perspective de mettre des priorités devant dans ce lien national.

Il est clair pour moi que s'il y avait eu des conversations continues, on aurait pu et on pourrait peut-être, dans un contexte de restriction budgétaire, rejoindre les aspirations de la communauté ou des communautés et se faire voir nationalement. Cela revient beaucoup à des principes, mais lorsqu'on est d'accord avec le principe, il y a moyen de faire la priorisation différemment. Ce serait une perspective de démarrage.

Mme McNeil : Oui, c'est un constat personnel, mais chaque fois qu'il y a des compressions, ce sont toujours les minorités qui écopent en premier malheureusement.

De la manière dont la Société Radio-Canada a opérationnalisé ses compressions budgétaires, on peut les questionner d'un côté comme de l'autre. Par contre, la très grande crainte, comme je l'ai exprimé il y a peut-être une heure, est que la solution soit d'en faire moins parce qu'on a moins d'argent; donc de proposer moins de contenu francophone, que ce soit du contenu télévisuel ou numérique, bien qu'il y ait presque une absence de contenu numérique en provenance de nos communautés francophones et même d'avoir des compressions à la radio qui est un dossier que je maîtrise moins bien. C'est vraiment malheureux, mais on souhaiterait mieux comprendre la logique qu'il y a derrière tout cela parce que la grosse machine montréalaise semble très peu réduite, à mon sens. Donc, on aurait aimé être consultés en effet.

Mme Larocque : Oui, j'ai dit que ce n'est pas une question d'argent, mais une question de priorité. Il est vrai qu'il faut de l'argent pour faire rouler la machine. Je comprends cela évidemment. Cependant, nous avons subi de graves compressions ici à Windsor et d'autres investissements ont été faits par la suite, des investissements sur Internet, à Espace musique et l'ouverture de stations ailleurs au Canada. On voit des compressions d'un côté, des investissements de l'autre côté et c'est de là d'où vient mon commentaire de priorités.

Un peu plus tôt ce soir, on a parlé d'émissions où il y a 14 animateurs en comparaison à des émissions où il y a deux animateurs. On voit des injustices et c'est vrai que les compressions se font en milieu minoritaire, là où les besoins sont les plus grands.

M. Hominuk : Vous avez posé la question sénateur Robichaud sur les coupures et les priorités. Les gens de Radio- Canada vous diront qu'ils ont coupé seulement 11 p. 100 en région, et 89 p. 100 à Montréal. C'est probablement vrai, mais la raison pour laquelle ils n'ont pas coupé plus en région, c'est qu'il n'y avait rien à couper de plus. Quand il n'y a rien en région, il n'y a rien à couper. Il faut un minimum pour faire une programmation locale et lorsque nous faisons des coupures, il ne reste plus rien.

Les gens à Windsor ont subi des coupures locales. Quand on regarde tout cela, cela veut dire qu'il n'y avait rien en région. Bien qu'on puisse utiliser l'excuse des coupures pour ne pas faire plus en région. Radio-Canada a quand même eu de bonnes années au cours des 20 dernières années. Ils auraient pu mettre des choses en place dans les régions pour arriver à une meilleure programmation qui allait mieux répondre aux besoins des gens dans les régions francophones de l'Ontario.

La présidente : Le sénateur Champagne aimerait apporter une précision.

Le sénateur Champagne : J'ai dû bien mal m'exprimer, madame Laroque, si vous avez compris qu'il y avait 14 animateurs. Non, il n'y a qu'un seul animateur, mais ils sont 12 ou 14 dans le contrôle à s'occuper de Internet et la recherche.

Mme Larocque : Juste pour clarifier, nous en avons seulement deux en tout.

Le sénateur Robichaud : Je pensais que Mme Larocque voulait s'exprimer.

La présidente : C'était seulement une précision.

Le sénateur Robichaud : Vous avez dit que Radio-Canada a quand même connu de bonnes années. Y avait-il plus de consultations dans ce temps-là?

M. Hominuk : Non.

M. Vaillancourt : Non.

Mme McNeil : Non.

Mme Chassé : Non.

Le sénateur Robichaud : Cela n'a jamais été une obligation ou un sentiment pour eux qu'il fallait consulter les communautés en milieu minoritaire?

M. Vaillancourt : Ce n'est pas ma perception que c'était le cas. Je dois dire qu'on a vu des exemples de partenariat ponctuel intéressant, mais de dire consulter pour une stratégie pour appuyer cette dualité linguistique et les communautés minoritaires hors Québec, je ne suis pas conscient qu'il y en ait eu.

Mme Chassé : Non.

M. Hominuk : Même dans les bonnes années, j'ai travaillé à TFO autrefois, des fois on mettait en place des activités avec des communautés, des spectacles en région et des fois, on voyait même dans des commandites ou dans la publicité des événements, que Radio-Canada se voyait vraiment comme un compétiteur et souvent, demandait l'exclusivité de promotions ou de diffusion de certaines activités. Le sentiment de vouloir travailler au bénéfice de la communauté n'est pas toujours là.

Le sénateur Robichaud : Vous questionnez vraiment certaines décisions qui ont été prises. On a parlé des gens à Montréal.

Vous avez parlé d'émissions hyperlocales. Vous avez aussi dit qu'on est allé dans une région où la couverture était quand même assez bonne?

M. Vaillancourt : Ma réaction à cela, monsieur le sénateur, c'est que si un des rôles de la Société Radio-Canada est de soutenir la dualité linguistique et qu'on a de nouveaux modèles à tester, ne serait-il pas plus avantageux de le faire dans un milieu minoritaire?

Autour de l'île de Montréal, la langue française n'est pas menacée. Certains disent qu'elle l'est, mais je crois qu'il s'agit là d'un autre débat. Pourquoi ne pas expérimenter au moins une des initiatives hors Québec? Et si Radio-Canada nous dit être présente dans les régions du Québec, elle ne l'est certainement pas dans les régions du Canada.

Le sénateur Robichaud : Je comprends bien ce que vous dites.

Mme McNeil : Oui. Nous à l'APFC, avons toujours fait la distinction entre les régions et les régions à l'extérieur du Québec parce qu'on ne s'identifie pas dans le moins. Cela étant dit, cela semble être un langage, lorsqu'on l'emploie, que la Société Radio-Canada comprend tout à fait. Alors oui, Moncton n'est pas Québec, Winnipeg n'est pas Québec et pourtant, Radio-Canada utilise Québec et certaines régions du Québec pour se définir et définir son action en région.

Il y a de très bonnes choses qui se font, mais on aimerait être plus présents. Et je ne peux que regretter que ce qui se fait en Ontario ne soit pas vu à Moncton et que ce qui se fait à Moncton ne soit pas vu en Colombie-Britannique, et que tout cela ne soit pas vu à Montréal. Je ne peux pas croire que cela n'intéresse pas les Québécois de voir ce qui se fait en termes de production à Vancouver, à Winnipeg ou à Ottawa.

C'est inimaginable. Ce sont des contenus de qualité qu'on confine à une espèce d'ethnocentrisme que l'on ne peut que critiquer, malheureusement.

Le sénateur Robichaud : Madame Larocque, vous dites avoir remarqué que les gens de Windsor se tournaient vers CBC anglais et qu'à cause de cela, vous perdrez beaucoup d'auditeurs. Vous n'avez qu'un certain temps pour réagir et pour regagner ces auditeurs. Est-ce que vous croyez que ça pourrait être difficile à faire?

Mme Larocque : Non seulement ils se tournent vers CBC anglais, mais ils se tournent beaucoup vers des stations américaines parce qu'il y en a tellement. Nous avons déjà perdu beaucoup d'auditeurs et ce sera très difficile de les regagner. Notre espoir, c'est d'offrir un service de qualité et d'être présents au sein de notre communauté et d'en faire la publicité. Ce serait vraiment un grand succès pour notre communauté. Il y aurait une célébration et les gens voudraient revenir. Disons que ce serait mon souhait. Mais le dommage est fait, oui, mais je crois qu'on peut renverser la situation.

Le sénateur Robichaud : Mes souhaits vous accompagnent.

Le sénateur Mockler : Mon collègue le sénateur Robichaud me convainc encore davantage. Madame Larocque, continuez de partager votre vision parce qu'il faudra toujours participer à ce grand débat. Comme vous dites, le débat ne se fait pas seulement à Québec et au Nouveau-Brunswick, il se fait à travers nos provinces et avec la même vision nationale.

Ma question représente à la fois une solution. Monsieur Vaillancourt, vous dites que c'est flagrant, intolérable et inacceptable de ne pas avoir été consulté. Comme vient de le dire Nathalie McNeil, le constat est là.

L'autre pièce de solution, c'est que les radios communautaires ont un rôle à jouer, notamment en partageant la programmation ou en en faisant partie. Aussi, il faut vite rencontrer M. Michel Cormier. Je crois que vous aurez l'occasion de le faire la semaine prochaine, à Gatineau. D'ailleurs, je dois dire que j'ai eu l'occasion de parler à des gens qui font partie de la Francophonie yukonnaise.

J'ai également eu l'occasion de parler à des gens qui tenaient une réunion générale, ici, dans la capitale nationale. La rencontre avait pour thème Santé en français. Le sénateur Robichaud et moi-même avons partagé de l'information concernant le rôle de Michel Cormier.

Je crois que nous avons un agent qui est prêt à nous écouter. Je crois que vous désirez aussi faire partie de cette consultation afin de trouver une solution. Parce que je suis certain que si vous aviez fait partie des consultations, vous auriez aussi été partie prenante de la solution. J'aimerais qu'on se serve de ce manque de consultation pour ouvrir la porte.

Comme le disait madame le sénateur Champagne, il faut ouvrir la porte à nos radios communautaires, être à l'écoute et partager de l'information de Michel Cormier. Ma question est la suivante : avez-vous spécifié le rôle que jouent les stations radiophoniques régionales au sein de nos communautés francophones de pair avec Radio-Canada?

M. Vaillancourt : On peut peut-être parler du rôle qu'on souhaiterait qu'elles jouent. Mais si on me demande de spécifier le rôle des stations régionales, je dois avouer que pendant mon mandat, je n'ai pas vu de documents qui mentionnaient leur rôle. Par contre, je peux dire qu'à titre de président de l'Assemblée de la Francophonie, j'ai eu des échanges avec les deux directeurs régionaux de l'Ontario.

Il y a deux nouveaux directeurs et on s'apprête justement à organiser des rencontres avec les membres de nos communautés, qu'elles soient artistiques ou sur le plan du développement communautaire. On provoque des conversations justement dans le but d'amener de nouvelles idées. Et M. Cormier figurera certainement sur cette liste. Et s'il le faut, on va se rendre à Montréal pour faire des représentations.

Il est clair que dans le cas de l'Assemblée de la Francophonie, nous y allons pour demander, mais nous sommes prêt à assumer le rôle et à faire partie des solutions. On l'a toujours dit et c'est un langage courant que j'utilise lorsque je parle avec mon premier ministre. Les Franco-Ontariens demandent des choses, mais on veut être partie prenante des solutions. Votre suggestion a été bien entendue et nous nous apprêtons à parler à M. Cormier, en plus de dialoguer avec les directeurs régionaux au sujet des nouvelles annonces.

La présidente : Honorables sénateurs, en votre nom et en mon nom, j'aimerais remercier très sincèrement les six témoins qui ont comparu devant nous cet après-midi. Mesdames et messieurs, je vous remercie pour vos présentations et pour vos réponses très complètes aux questions posées par les sénateurs.

Merci de votre intérêt qui est ressorti à travers ce que vous avez dit pour faire de la Société Radio-Canada une société qui répond encore plus à nos besoins et qui reflète encore plus notre réalité. Comme vous l'avez constaté, tous les membres du comité veulent en arriver à des solutions qui feraient en sorte que ce serait un vrai reflet de ce que nous sommes au Canada.

Encore une fois, mesdames et messieurs, merci beaucoup.

(La séance est levée.)


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