Délibérations du Comité sénatorial permanent des
Transports et des communications
Fascicule 6 - Témoignages du 15 février 2012
OTTAWA, le mercredi 15 février 2012
Le Comité sénatorial permanent des transports et des communications se réunit aujourd'hui, à 18 h 45, dans le cadre de son étude sur les nouveaux enjeux qui sont ceux du secteur canadien du transport aérien.
Le sénateur Dennis Dawson (président) occupe le fauteuil.
[Français]
Le président : Honorables sénateurs, je déclare cette séance du Comité sénatorial permanent des transports et des communications ouverte.
[Traduction]
Ce soir, nous poursuivons notre étude du secteur canadien du transport aérien. Nous avons avec nous M. Barry Rempel, président et directeur général de l'Administration aéroportuaire de Winnipeg
J'aimerais rappeler à nos auditeurs ainsi qu'aux membres du comité qu'au cours de la deuxième heure de réunion, nous entendrons l'honorable Maxime Bernier, ministre d'État, Petite entreprise et Tourisme, qui a été retardé en raison d'un vote en Chambre.
Monsieur Rempel, vous avez la parole, et après votre témoignage, nous passerons aux questions.
Barry Rempel, président et directeur général, Winnipeg Airports Authority : Monsieur le président et honorables sénateurs, je suis honoré d'avoir cette occasion de comparaître devant vous aujourd'hui.
Tout d'abord, avant d'entrer dans le vif du sujet, j'aimerais prendre quelques instants pour remercier certains sénateurs du Manitoba, et plus particulièrement l'ancien membre du comité, le sénateur Plett, pour ses intéressantes discussions pendant les dernières années, concernant la construction de notre nouveau terminal.
Je suis très heureux d'avoir la chance de pouvoir partager certaines réflexions sur ce qui est, certainement pour moi, et de toute évidence pour vous, une question essentielle pour notre avenir. Afin que le Canada prospère, afin que nous réussissions à créer des occasions de réussite pour la génération qui nous suivra, nous devons obtenir des résultats concrets de vos efforts ici. Je suis conscient que je suis peut-être en train de prêcher à des convertis, mais une nation qui prospère demande qu'il y ait des liens entre nous et, puisque nous ne sommes pas une île, avec le reste du monde. Pour le Canada, un ancien chef de file en la matière, il en a toujours été ainsi.
La meilleure façon pour nous d'y arriver est en fait au cœur de votre réflexion. Là où nous nous concentrons, est là où nous nous rendrons. Si l'attention est centrée sur ce que, d'après tout le monde, n'est pas bon, nous passerons à côté de ce qui pourrait l'être. C'est toujours la voie facile, mais la volonté de réparer ce que la dernière personne n'a pas réussi n'aidera pas à comprendre quels sont les besoins des gens que nous servons, ni à savoir comment créer un environnement propice à l'atteinte de cet objectif.
Permettez-moi de prendre un moment pour vous expliquer d'où proviennent mes réflexions. Je préférerais ne pas prendre de temps pour parler de moi, mais lorsque les gens s'adressent à vous, il est important que vous connaissiez en partie cet historique pour savoir comment les préjugés que j'entretiens pourraient influencer ce que vous entendez.
Depuis un certain temps, il y a très peu à voir au sein de notre industrie. En fait, pour ce qui est des aéroports et des compagnies aériennes, j'ai parfois l'impression de me retrouver dans une vieille chanson de Joni Mitchell — d'ailleurs, je ne vous la chanterai pas. Certains d'entre vous se souviennent peut-être du sujet de la chanson : « J'ai vu la vie des deux côtés, ses jours de gloire, de vérité, et c'est bien triste de penser, que je n'ai rien appris, du tout. »
Mais retournons à ma vision quelque peu unique des choses, et je pense que j'ai été très chanceux dans ma carrière. Comme vous le savez, je suis le PDG de l'administration aéroportuaire de Winnipeg. Nous sommes le huitième aéroport en importance au pays par rapport au nombre de passagers embarqués, mais considérablement plus important lorsque l'on prend l'ensemble de nos activités. Nous suivons un modèle qui comprend l'élaboration de choix de diversification des revenus et une concentration, mal comprise dans beaucoup de secteurs, sur le développement de notre port intérieur et du fret. Aujourd'hui, nous sommes également le troisième plus grand aéroport au Canada quant au mouvement du fret et le premier quant à la fréquence des mouvements d'avion de fret spécialisé.
On me demande souvent comment je me suis rendu où je suis aujourd'hui, à mon poste de PDG depuis 10 ans. Bien, j'ai eu la chance de passer quelque 38 années en aviation, dont 27 du côté des transporteurs aériens, en commençant par la maintenance dans une petite entreprise profitable en croissance qui évoluait dans un environnement réglementé. J'ai été directeur du marketing pendant une période où certains parlaient de la fin de l'industrie à l'air de la déréglementation, puis cadre supérieur responsable de Canadian North, qui exploitait 10 avions de transport de fret ou de fret et de passagers dans l'Extrême Arctique. En outre, j'ai été cadre supérieur d'un transporteur mondial de fret aérien, et je me suis retrouvé ensuite vice-président du plus important transporteur au Canada. J'en suis maintenant où j'ai commencé mes observations, c'est-à-dire au poste de PDG à Winnipeg.
J'aimerais faire un retour sur cette chanson pour un instant. J'aime les paroles pour une autre raison, parce qu'elles représentent bien notre industrie. La chanson donne une voix à une génération et à une industrie qui ont grandi dans une période aux prises avec d'incroyables changements. Nous continuons de vivre ces changements. Elle rassemble la voix du cynisme et la voix de la fatigue, mais également la voix de l'espoir, de la lutte de l'esprit qui veut reconquérir l'émerveillement perdu. C'est à la fois la voix de notre défaite et la voix de notre renouveau.
Afin de nous aider à comprendre ce qu'est l'occasion pour le renouveau, je crois que nous devons commencer par une bonne compréhension de ce qu'est réellement le transport aérien. Avec une vision claire, nous pourrons revenir à ce que l'industrie n'est pas aujourd'hui.
Foncièrement, l'aviation est tout sauf une simple partie de la chaîne d'approvisionnement de la prestation de services au client. Elle joue un rôle de facilitateur et elle a la responsabilité de répondre à des besoins très importants. Vous avez entendu de nombreux témoignages récemment et chaque témoin propose une solution. C'est une question de perspective, de compréhension des rôles des intervenants et de l'effet qu'a chaque perspective.
L'histoire de notre industrie est très intéressante. Le développement de cette industrie est étroitement lié au gouvernement, plus que la plupart des autres. Mondialement, l'aviation et l'élaboration de ses politiques ont été traitées comme ce que j'appelle un « outil de l'empire ». Et pour la majeure partie, les transporteurs eux-mêmes ont été les outils des gouvernements et ont été protégés par ceux-ci. Au Canada, c'est le cas depuis sa formation et l'histoire de la propriété directe dans pratiquement toute la chaîne d'approvisionnement du transport.
J'ai parlé de l'héritage. Le cadre de réglementation présent aujourd'hui et les conséquences de cette ancienne propriété continuent avec les héritages involontaires de présenter les transporteurs comme étant uniques et comme ayant besoin de protection.
J'ai eu l'occasion de lire certains des témoignages précédents présentés au comité, et j'ai été étonné par la quantité de chiffres qui vous ont été lancés quant à la contribution de divers intervenants et sociétés à l'économie. Je me demande comment vous pouvez garder un suivi de tous ces chiffres et de l'étroite perspective des joueurs individuels dans la chaîne d'approvisionnement.
Pour ce qui est du premier point, je veux simplement dire que peu importe le chiffre que vous choisissiez de croire, la réalité demeure que l'aviation joue un rôle essentiel dans la société canadienne et pour nos succès futurs. Son rôle de relier et de faciliter va beaucoup plus loin que les chiffres liés au PIB ou à l'emploi.
Pour le deuxième point, personne au comité ne devrait être surpris de l'existence de tensions au sein de la chaîne d'approvisionnement, ou d'occasionnels conflits. Pour que l'intérêt du consommateur demeure une priorité, il doit y avoir une certaine tension. Il est important de se rappeler qui nous servons.
Personne ne se réveille un matin d'hiver glacial et se dit : « Je voudrais bien avoir le siège 13E sur tel transporteur », tout comme personne ne se réveille en se disant : « Je voudrais bien être dans la file d'attente à la sécurité de l'aéroport de Winnipeg ». Ils se disent plutôt qu'ils voudraient être ailleurs. En passant, en ce moment à Winnipeg, la destination tendance, c'est Cancun.
La même chose peut être dite des hommes d'affaires ou des colis ou produits qui doivent être expédiés.
L'histoire de la chaîne d'approvisionnement en aviation nous informe des différents besoins des partenaires. Elle est là pour nous montrer qu'un grand nombre de groupes sont nécessaires pour garantir une chaîne d'approvisionnement efficace. Il est évident, du moins selon moi, que les tensions de la chaîne d'approvisionnement sont bonnes puisqu'elles concernent différents partenaires et qu'elles évoluent à mesure que ceux-ci travaillent ensemble ou même se font concurrence pour satisfaire les demandes des clients. Il doit être clair qu'aucun membre de la chaîne d'approvisionnement ne possède le client à lui seul. La concurrence et le choix donnent aux clients le pouvoir d'exiger des changements.
Les objectifs à court terme des transporteurs aériens sont menés par l'évaluation boursière et l'imposition adéquate de mesures de reddition de comptes, de même que par la nécessité de démontrer ce qui a été fait. Avec des actifs très mobiles et très peu de marge, les transporteurs peuvent s'adapter rapidement dans les marchés qu'ils desservent.
De leur côté, les aéroports doivent prendre des décisions qui auront des effets pendant 40 ans. Si quelque chose ne fonctionne pas, je peux vous dire qu'il n'est pas possible de tout simplement déplacer l'actif. Se tromper a de graves conséquences auxquelles on ne peut remédier facilement.
Le Canada a choisi un modèle unique. Ce modèle a peut-être paralysé les aéroports relativement à la concurrence mondiale, mais il a tout à fait comblé le désir du gouvernement de l'instant de trouver une façon de fournir une infrastructure essentielle à un moment où le gouvernement n'avait pas les ressources nécessaires pour investir.
Jusqu'à présent, vous avez entendu de nombreuses fois dire que les aéroports ont des monopoles. Si on simplifie et que l'on ne s'intéresse qu'à une ville en particulier, cela tiendrait peut-être la route.
Cependant, dans notre industrie, rien n'est plus faux. Le secteur aéroportuaire est très compétitif. La concurrence est présente pour l'accès aux ressources d'un transporteur qui facilite la croissance des collectivités et des entreprises. Les aéroports sont aujourd'hui ceux qui demeurent pour favoriser les collectivités locales, et la concurrence vient de tous les autres aéroports et de leur collectivité hôte.
J'aimerais aussi ajouter qu'aucun aéroport pivot n'est visé par des règlements ou lois statuant son droit d'exister. Si c'était le cas, Winnipeg serait le plus important aéroport pivot au pays, suivi de Gander. Je dirais même que cela s'applique également à tous les transporteurs, en ce qui concerne ce présumé droit pour un transporteur d'exister.
Alors, quel rôle le gouvernement doit-il jouer pour permettre le développement de notre pays? Voilà la question qui vous intéresse.
J'ai dit plus tôt que nous devrions également comprendre ce que l'aviation n'est pas. Vous aurez remarqué que je fais toujours référence à l'industrie de l'aviation. C'est tout simplement parce que la chaîne d'approvisionnement nécessaire pour répondre aux besoins des clients et aux aspirations des collectivités n'est pas l'œuvre d'un seul secteur. Du point de vue du client, il n'y a pas d'industrie du transport aérien. En fait, il n'y a pas non plus d'industrie aéroportuaire. C'est la première négation importante qui permet l'existence d'un avenir excitant.
Je vous dirais que le présent comité pourrait rendre un grand service au Canada en se concentrant sur la meilleure façon d'encourager les Canadiens à mieux communiquer les uns avec les autres, ainsi qu'avec le reste du monde. Se concentrer sur les relations des partenaires de la chaîne d'approvisionnement, c'est un peu comme faire de la moto en se concentrant sur les nids de poule. Ouvrir les espaces aériens, permettre aux transporteurs d'avoir accès au capital disponible sur les marchés internationaux et fournir un environnement compétitif à l'échelle mondiale au sein duquel les commerces canadiens peuvent fonctionner en s'assurant que les politiques et les règlements sont axés sur les clients, voilà ce dont nous avons besoin.
J'en arrive maintenant au dernier « n'est pas ». L'industrie de l'aviation n'est pas un « péché » qui doit être taxé ou réglementé par simple intérêt dans un environnement de concurrence mondiale. C'est une industrie clé qui peut faciliter le développement de collectivités fortes et d'un pays fort. Ce n'est pas, comme certains le disent, une vache à lait.
L'industrie doit être traitée de la même façon que les autres moyens de transport. Je ne fais pas uniquement allusion aux taxes, même s'il y a de nombreux exemples comme la taxe de sécurité, la taxe sur les carburants et les frais d'aéroport, mais je parle aussi des coûts cachés du gouvernement par l'entremise des exigences envers les aéroports de fournir des infrastructures fédérales dans nos établissements sans frais, alors que ces mêmes services sont fournis à d'autres modes de transport sans frais supplémentaires.
Mais laissez-moi revenir aux côtés positifs de travailler ensemble afin de construire notre pays en utilisant les atouts existants et la volonté des autres d'investir dans l'avenir.
La sécurité et la protection sont primordiales; il est fondamental qu'on ait des règlements qui les garantissent. Laissez les membres de la chaîne d'approvisionnement de l'aviation s'occuper de répondre aux attentes de leurs clients; certains gagneront et d'autres perdront, mais le client aidera éventuellement dans cette décision, et des emplois seront créés dans le processus et nos collectivités s'épanouiront. Le Canada sera à nouveau un chef de file.
Merci de m'avoir alloué ce temps. Je serais heureux de répondre à vos questions.
Le président : Si vous me le permettez, avant de passer aux questions, j'aimerais présenter les membres du comité.
Le sénateur Doyle siège depuis peu au comité; il vient de Terre-Neuve-et-Labrador.
[Français]
Le sénateur Verner, qui vient de la belle ville de Québec; le sénateur Maltais, qui vient de l'Est du Québec.
[Traduction]
Nous avons le sénateur Manning de, Terre-Neuve-et-Labrador; le sénateur Eggleton, de Toronto; le sénateur Mercer, de la Nouvelle-Écosse; le sénateur Merchant, de la Saskatchewan, votre coin de pays; et finalement, de Winnipeg, le sénateur Zimmer, qui va poser la première question.
Voici le vice-président, le sénateur Greene, de la Nouvelle-Écosse. Il aime se faire remarquer.
Le sénateur Zimmer : Monsieur Rempel, je suis ravi de vous revoir. Je profite de l'occasion pour vous féliciter du merveilleux aéroport que vous avez maintenant à Winnipeg. Vous en aviez vraiment besoin. Vous vous êtes surpassé et nous sommes fiers de vous.
M. Rempel : Merci.
Le sénateur Zimmer : On dit qu'il y a beaucoup de Canadiens qui préfèrent prendre l'avion aux États-Unis pour aller à l'étranger parce que ça coûte moins cher. Pensez-vous que ce phénomène a un impact sur le trafic aérien à Winnipeg?
M. Rempel : Sans aucun doute.
D'ailleurs, je suis abasourdi par le nombre de personnes qui me disent ces jours-ci qu'ils sont passés par des aéroports américains. Je les comprends, même si ça ne me fait pas plaisir. J'aimerais que ces passagers prennent l'avion au Canada.
Au Manitoba, par exemple, près de 180 000 personnes sont passées par l'aéroport Grand Forks. Pour vous faire comprendre ce que cela signifie, sachez qu'il s'agit de gens de notre zone de rayonnement qui, normalement auraient dû passer par l'aéroport international Richardson.
Pas besoin de faire un calcul compliqué pour dire qu'il y a 180 000 personnes, et 180 personnes par vol. Plus généralement, dans le cas de Winnipeg, notre moyenne est de 80 passagers par vol pour ces vols. En faisant un bref calcul, cela représente environ 2 000 vols. Sur ces 2 000 vols, chaque vol hebdomadaire dans notre collectivité crée 40 emplois supplémentaires.
Cela a certainement des répercussions. Ce n'est pas quelque chose que je vois, du moins pour le moment, comme un facteur essentiel de réussite ou d'échec, mais c'est quelque chose qui, si nous ne nous penchons pas sur cette question précise, aura des répercussions considérablement plus importantes si nous effectuons cette consultation dans un an.
Le sénateur Zimmer : Selon vous, quelles sont les répercussions des loyers que doivent payer les aéroports ainsi que des frais qu'ils doivent assumer sur la compétitivité et la rentabilité du secteur canadien du transport aérien?
Je sais qu'il y a quelques années, lorsqu'on allait à un aéroport, Transports Canada chargeait un employé de recueillir 10 $. Par la suite, lorsque les choses se sont corsées, ils ont malheureusement forcé les compagnies aériennes à recueillir ce montant. Quelles répercussions cela a-t-il eu, selon vous, sur le secteur du transport aérien?
M. Rempel : Les frais constituent un élément important dans ce secteur. Le Canada a choisi de mettre en place un modèle fondé sur le principe d'utilisateur-payeur. Je pense que l'idée derrière tout cela est une bonne chose. Je pense que les aéroports, pour ce qui est de la mise en place d'infrastructure, ce qui était nécessaire à ce moment-là, ont fait un excellent travail.
En fait, selon le Forum économique mondial, le Canada a la meilleure infrastructure aérienne du monde. Cependant, c'est cyclique. Généralement, on investit dans les aéroports selon les cycles de 40 ans. La dernière fois que l'on a investi dans les aéroports du Canada, c'était dans les années 1960, avant que des administrations aéroportuaires n'entrent en jeu. Et devinez quoi, dans les années 2000, nous avons soudainement besoin d'infrastructure, et nous les obtenons.
Le processus qui nuit à la compétitivité du Canada peut s'observer dans un certain nombre de domaines. L'un d'entre eux, je pense, c'est que la structure qui est en place veut que ce soit des sociétés sans capital-actions qui gèrent les aéroports. Cela signifie qu'aujourd'hui, demain et plus tard, les usagers devront payer pour assumer le coût des infrastructures, plutôt que de voir ces dernières faire l'objet d'un investissement destiné à réaliser des bénéfices. C'est certainement un de ces domaines.
Pour ce qui est de l'autre domaine, c'est un peu plus sournois, et cela rejoint mon observation selon laquelle le Canada se sert du secteur comme d'une vache à lait. J'ai déjà entendu d'anciens membres de Transports Canada, dont certains sont maintenant à la retraite, me dire que seuls des riches prenaient l'avion, et qu'ils pouvaient donc se permettre ce genre de pratique. Cela n'est pas le cas. Le transport aérien est un élément essentiel de notre réussite et il ne s'adresse pas qu'aux riches.
Le sénateur Zimmer : Je ne sais pas à quelle heure vous prenez l'avion demain, mais je pars à 6 h30, ce qui me donnera la possibilité de voir de nouveau ce magnifique aéroport. C'était très agréable de vous revoir. Merci.
Le sénateur Eggleton : J'aimerais faire suite à la question du sénateur Zimmer. Vous nous avez parlé de Grand Forks et de tous les gens qui s'y rendent, de la perte d'emplois et de tout le reste. Ce phénomène s'observe partout au pays lorsque l'on est proche de la frontière américaine. À Toronto, ou dans les alentours de la région de Niagara, les gens se déplacent vers Buffalo pour obtenir des vols à prix beaucoup plus bas qu'au Canada.
Quelle est la solution à cela, ou quelles seraient des solutions possibles?
M. Rempel : Je ne crois pas, sénateur Eggleton, qu'un seul problème soit à l'origine de tout cela. Je pense qu'il y en a plusieurs.
Si l'on regarde ce qui se passe au pays aujourd'hui, je dirais que nous n'avons pas de transporteur à faible coût au Canada. Pourquoi? Il y en a pourtant en Europe et partout aux États-Unis. La raison de cela, c'est que dans ces pays, je pense qu'on a ouvert l'environnement réglementaire afin de créer un environnement propice à l'investissement. En Europe, on peut être un transporteur italien et appartenir aux Britanniques; cela n'a pas d'importance. Cela a facilité l'accès au capital, créant ainsi un environnement réglementaire qui offre différents choix au transporteur, et qui donne aux collectivités la possibilité de chercher un transporteur pour les desservir. Cela a vraiment favorisé la concurrence sur ces marchés, ce que l'on ne voit pas dans la même mesure au Canada. Nous avons tout simplement suivi un modèle différent.
Je pense que de nombreuses personnes veulent que nous étudiions le modèle australien pour voir comment il aurait fonctionné dans notre pays. Je ne connais pas ce modèle aussi bien que je le voudrais, mais je crois comprendre que les collectivités reçoivent des services bien meilleurs qu'auparavant, même si ceux-ci ne sont pas nécessairement entre les mains d'une compagnie australienne.
Le sénateur Eggleton : La taille de la population n'est-elle pas problématique? Le Canada a une faible densité de population, ce qui n'est pas le cas aux États-Unis, d'où la concurrence qui permet d'avoir de faibles prix chez nos voisins du Sud.
M. Rempel : Oui, si on se compare aux États-Unis, c'est tout à fait vrai. Aussi, les États-Unis ont choisi un modèle différent, ce qui explique que leur système fonctionne mieux pour les aéroports. Aux États-Unis, les divers ordres de gouvernement financent principalement les aéroports, qu'il s'agisse du système de navigation ou autre. Les Américains ont choisi un modèle différent. À plusieurs égards, ils considèrent toute la chaîne d'approvisionnement d'aviation comme étant une infrastructure essentielle qui nécessite ce genre d'investissement pour que le pays soit concurrentiel.
Nous avons choisi un modèle axé sur l'utilisateur. C'est la raison pour laquelle je préfère prendre l'exemple du modèle australien. Ce pays est vaste et a une faible densité de population un peu comme le Canada. L'Australie compte même de petits villages qui dépendent fortement du secteur minier et d'autres éléments de cette nature, et c'est probablement de ce modèle qu'il faut s'inspirer.
Le sénateur Greene : J'aimerais que nous parlions des loyers aéroportuaires et surtout des loyers fonciers. Nos recherches indiquent que les loyers fonciers représentent un pourcentage des recettes : ainsi, pratiquement aucun droit n'est perçu pour la première tranche de 5 millions de dollars en recettes nettes; 1 p. 100 est perçu sur la deuxième tranche de 5 millions de dollars; 5 p. 100 sur la tranche de 15 millions de dollars qui s'ajoute, pour atteindre 12 p. 100 sur tout montant s'élevant à plus de 250 millions de dollars. Pouvez-vous commenter ce système? Cela ne ressemble pas à un loyer, mais plutôt à une commission. Pouvez-vous me dire si cette échelle d'imposition n'existe qu'à Winnipeg ou si les autres aéroports ont un système de la sorte ou similaire? Comment ce système a-t-il été créé et quelles sont ses répercussions sur la planification de vos activités?
M. Rempel : C'est une excellente question. Je n'ai jamais entendu quiconque comparer le système à une commission, mais c'est à peu près ce que c'est. Le système de loyer actuel comporte certains problèmes. Tout d'abord, il traite tous les aéroports sur un pied d'égalité. L'état et la valeur des diverses installations qui ont été déléguées aux autorités aéroportuaires variaient considérablement d'un aéroport à l'autre. Je ne pense pas que ce soit très juste.
Je vais revenir à votre comparaison avec les commissions parce que je la trouve perspicace. Le système de loyer pose problème parce qu'il dépend en effet de toutes les recettes engendrées par les autorités aéroportuaires. Comme nous sommes des sociétés sans capital-actions, nous n'avons pas de partenaires en capitaux propres qui investissent dans des installations et en tirent un profit. Les profits reviennent aux banques parce qu'il s'agit de dettes.
Quand on a ce genre de dettes et qu'aucune autre option ne s'offre à nous, on doit s'endetter davantage que ce qu'il nous en coûterait pour bâtir à cause de la formule de loyer. Dans notre cas, il faut payer les 8 p. 100 supplémentaires parce que tout est réputé être des recettes.
Je crois que le loyer ne devrait pas dépasser les actifs transférés et leurs valeurs parce que c'est ce à quoi le contribuable s'attendrait. Au lieu de cela, c'est devenu une source de revenus fondée sur toutes les recettes qu'on peut dénicher. Plus la dette est importante, plus il faut engendrer des recettes et plus le loyer coûte cher.
Mais ça va encore plus loin. Et comme vous l'avez dit, il s'agit d'une formule compliquée. Dans le cas de l'Administration aéroportuaire de Winnipeg, les transporteurs aériens assument environ 83 p. 100 de nos coûts pour les pistes d'atterrissage et autres installations. Ça ne doit pas changer parce que nous nous sommes dotés d'une politique pour garantir que nos taux et nos frais sont similaires à ceux des autres aéroports. C'est une bonne politique. Selon nous, il s'agit d'une question de concurrence parce que nous voulons que notre collectivité soit traitée au même type que les autres.
Cependant, il faut donc que nous trouvions d'autres façons de faire de l'argent — avec des dividendes ou un autre moyen — pour compenser ce que nos taux et nos frais ne défraient pas. À Winnipeg, nous avons très bien réussi à atteindre cet objectif. Par contre, puisque nous investissons dans d'assez nombreuses compagnies, celles-ci sont des sociétés entièrement imposables. Après avoir payé les impôts et une fois que les recettes de ces sociétés sont regroupées avec celles de la société mère, nous devons payer les 8 p. 100 supplémentaires à cause de la formule de calcul du loyer. Cela ne devrait pas influencer la façon dont nous versons de l'argent au gouvernement quand des actifs sont transférés.
Le sénateur Mercer : Merci d'être venu monsieur Rempel. Vous avez parlé du modèle de l'Australie, pays qui a une faible densité de population et un vaste territoire, mais qui ne se situe pas juste à côté d'un pays dont la population est 10 fois plus importante. Je ne pense pas que la comparaison tienne la route.
Vous avez dit que, chaque année, 180 000 personnes se rendent à Grand Forks. C'est votre estimation?
M. Rempel : C'est le chiffre de l'an dernier, oui.
Le sénateur Mercer : Il existe deux raisons évidentes pour lesquelles les gens se rendent à Grand Forks : c'est pratique de s'y rendre en voiture et les prix y sont plus faibles. Qu'est-ce qu'on peut faire pour changer la situation? Vous avez mentionné les coûts des services de police et de maintien de sécurité de 2,2 millions de dollars payable à la ville de Winnipeg, d'impôts fonciers de 1,8 million de dollars, de charges sociales s'élevant à 250 000 $ et du loyer de 5,9 millions de dollars versés à Transports Canada; puis, vous avez formulé un argument très intéressant — qui vaudrait la peine d'être examiné en profondeur dans le cadre de notre étude — voulant que les autres moyens de transport ne se voient pas imposer les mêmes droits. Si on est propriétaire d'une compagnie d'autobus ou d'un service de transport par voie terrestre, on n'a pas à débourser les frais imposés aux aéroports. Le gouvernement construit des routes pour les camionneurs et, un peu comme le système ferroviaire, les compagnies de camionnage ne seront pas frappées des mêmes droits.
Comment pouvons-nous rectifier le tir? Je n'ai jamais compris pourquoi les aéroports doivent payer pour le service policier. D'autres groupes — des entreprises de la collectivité — qui ont pignon sur rue au centre-ville d'Halifax ou de Winnipeg paient pour leurs services policiers par l'entremise de leurs taxes.
M. Rempel : Très juste.
Le sénateur Mercer : Vous devez payer pour vos services de police séparément. Je trouve que c'est curieux. Si vous pouviez éliminer certaines de ces entraves, comment feriez-vous profiter les voyageurs de ces épargnes? Présentement, vous avez une dette importante que vous avez amortie sur un nombre x d'années. J'ai l'impression que si on pouvait faire disparaître nombre de ces obstacles du jour au lendemain, vous devriez toujours rembourser votre dette. L'un de nos objectifs est de nous assurer que les passagers paient le meilleur prix qui soit. Comment y parvenir?
M. Rempel : C'est une excellente question. Pour ces choses-là, je me demande toujours d'où viendra l'argent pour les payer. Vous avez dit que les FAA sont l'un des problèmes, mais aussi que nous avons une lourde dette.
Dans notre cas, les frais d'améliorations aéroportuaires servent en totalité à rembourser la dette de la nouvelle aérogare. À ce propos, vous avez soulevé la question du traitement équitable. Environ 30 p. 100 de tout l'espace alloué dans notre nouvelle aérogare, un projet d'environ 600 millions de dollars, est réservé gratuitement pour divers ministères du gouvernement. Le meilleur exemple en serait l'Agence des services frontaliers du Canada, l'ASFC. Nous entretenons d'excellentes relations avec l'ASFC, mais l'Agence paie elle-même les installations de ses points frontaliers routiers. Nous, nous devons lui offrir ces installations gratuitement, y compris le matériel électronique et tout le matériel connexe dans le bâtiment. Cette exigence correspond aux baux qui ont été signés.
Nous sommes une corporation sans capital-actions. Lorsque nos coûts diminuent, les frais que nos locataires paient diminuent en conséquence. Dans notre cas, si les coûts de l'aérogare diminuent, nous répartissons le coût total du terminal, à la fin de chaque année, entre les différents transporteurs, selon l'utilisation qu'ils en font. Chez nous, le calcul se fonde sur le nombre de sièges en partance. Ces chiffres sont communiqués aux transporteurs, qui les examinent, et cela correspond au loyer pour l'année à venir.
Si nous obtenions un loyer sur ces 30 p. 100 d'espace, par exemple, les transporteurs en bénéficieraient directement, car cela se traduirait par une diminution correspondante de ce qu'ils doivent payer.
Le sénateur Mercer : Vous avez parlé de l'Agence des services frontaliers du Canada. Vous avez raison, l'ASFC doit effectivement payer ces installations aux passages à niveau publics, sur les ponts et sur les routes.
Le seul poste frontalier privé que je connaisse est aussi le plus fréquenté du pays, c'est-à-dire le pont Ambassador à Windsor. Pour l'avoir entendu dans différents témoignages précédents devant notre comité, je sais que l'ASFC doit payer ces installations sur ce pont privé. C'était une parenthèse.
J'ai l'impression que les différents aéroports du pays devraient se doter d'un plan uniforme, afin qu'il n'y ait pas un plan uniquement pour Winnipeg et un autre pour Toronto, Halifax, Montréal ou Vancouver. Nous devons analyser les répercussions à l'échelle nationale. J'ai toujours l'impression que nous obtenons des bribes d'information, mais que personne ne nous a fourni de tableau d'ensemble. Ce tableau d'ensemble est probablement assez intense si l'on tient compte de tous ces éléments, si, dans une ventilation par région, nous pouvons savoir combien coûtent les aéroports de St. John's, de Gander et de Deer Lake comparativement à ceux de Halifax, de Charlottetown et d'autres partout au pays.
En fin de compte, il doit y avoir correspondance entre ces coûts et le prix que les consommateurs paient leurs billets. Vous avez raison, ce ne sont pas seulement les riches qui prennent l'avion, mais plutôt ceux qui doivent aller d'un endroit vers un autre. Pour la plupart, ces gens ne sont pas riches, pas dans mon quartier, en tout cas.
Comment pouvons-nous obtenir ces données collectives, pas seulement à l'aéroport Richardson, mais pour tous les aéroports du pays?
M. Rempel : Je suis d'accord avec ce que vous dites. Cela revient à ce que je disais au sujet des frais et des droits, et les tarifs du transport aérien, en général, sont des tarifs au sujet desquels le transport aérien, les associations d'hôteliers et les chambres de commerce s'entendent tous. Dans ce contexte, il ne s'agit pas simplement des aéroports.
Au cours des dernières années, nous avons travaillé de concert, toute l'industrie — pas seulement les transporteurs aériens, non plus que les aéroports, mais toute l'industrie — pour dire que nous sommes aux prises avec un problème. Si nous voulons être des chefs de file dans un marché de concurrence globale, nous allons devoir modifier nos méthodes.
Vous avez tout à fait raison; de nos jours, ce ne sont pas seulement les riches qui prennent l'avion. Les familles nucléaires sont éparpillées partout sur la planète, pas seulement dans le pays. Nous devons trouver un moyen de faire participer notre industrie, l'industrie canadienne, à un marché de concurrence mondiale.
Nous devons commencer par les mesures qui peuvent être prises dès maintenant. Certaines ont à voir avec les taxes que j'ai mentionnées. Nous devons considérer l'industrie comme un facilitateur.
Le sénateur Mercer : Mais nous devons également nous rendre compte que si le gouvernement élimine certains de ces obstacles, ces taxes, alors le gouvernement doit aussi voir le revers de la médaille, c'est-à-dire qu'il se privera de ces recettes. Il va falloir pouvoir prouver qu'en prenant ces mesures, les 880 000 personnes qui passent par Grand Folks passeront désormais par Winnipeg, et qu'il en résultera d'autres recettes fiscales par le truchement des salaires, de l'impôt sur le revenu payé par les employés et de tous les autres revenus indirects, en plus de diminuer le prix payé par les consommateurs.
M. Rempel : Si l'aéroport international Richardson pouvait offrir des prix concurrentiels à Allegiant Air, un transporteur économique — c'est celui qui se rend à Grand Forks — je suis persuadé que ce transporteur préférerait utiliser notre aéroport. Nous devons offrir des prix compétitifs. Et ce n'est pas vrai seulement des États-Unis, mais aussi du reste du monde.
Comparativement aux autres pays, notre secteur du tourisme se porte mal, et ce depuis plusieurs années déjà.
Le président : Nous allons entendre le ministre d'État au Tourisme après vous, dans quelques minutes. Il nous reste encore cinq ou six minutes.
Le sénateur Merchant : Je pourrais peut-être vous poser la question. Pour commencer, je viens de Regina, et j'aimerais bien que mes vols puissent toujours passer par Winnipeg. Les horaires font en sorte que les correspondances vers Ottawa ou d'autres endroits ne sont pas toujours faciles.
J'ai lu l'autre jour dans les nouvelles que votre aéroport fait partie de ceux dans lesquels on pourra désormais utiliser nos cartes NEXUS. Je ne sais pas si c'est une bonne chose ou une mauvaise chose pour vous. Je sais que pour moi, la file d'attente est un peu plus courte, mais je ne sais pas si cela accélère le traitement. Est-ce que cela vous coûte de l'argent? Est-ce que c'est votre aéroport qui a dû payer le scanner corporel que vous avez installé, et transférez-vous ce coût au client?
M. Rempel : Dans le cas de l'équipement spécialisé, nous travaillons en étroite collaboration avec l'ACSTA, l'Administration canadienne de la sûreté du transport aérien. L'ACSTA paie l'équipement et nous devons fournir l'infrastructure pour l'installer. Les frais sont à peu près divisés de cette façon.
Dans le cas de NEXUS, c'est à mon avis une initiative qui accélère vraiment le traitement. NEXUS permet de retirer des files d'attente les gens qui voyagent très souvent et de leur faire passer la barrière beaucoup plus rapidement, comparativement aux personnes qui ne voyagent qu'une ou deux fois par année.
D'après notre expérience à Winnipeg, NEXUS a permis d'accélérer le processus. Et tout le monde en bénéficie, même les voyageurs qui ne prennent l'avion qu'une ou deux fois par année et qui n'utilisent pas la file de NEXUS, puisqu'il y a moins de gens ainsi dans leur propre file d'attente.
Je vous sais gré de votre commentaire; nous serions ravis que vous passiez par Winnipeg plus souvent. Cela m'a effectivement fait réfléchir. C'est une question que nous n'avons pas abordée lorsque nous avons cherché des solutions. Le problème, c'est le régime bilatéral au Canada.
L'une des raisons pour lesquelles vous ne pouvez pas obtenir une correspondance à Winnipeg aussi facilement que vous le souhaiteriez, c'est que nos accords bilatéraux ne sont pas véritablement des accords ciel ouvert. Je vais utiliser l'exemple des Philippines, car nous avons une importante communauté de Philippins au Manitoba. En raison de l'accord bilatéral qui l'autorise seulement à atterrir à Vancouver ou à Toronto, Philippine Airlines n'a pas le droit de venir à Winnipeg. Si les collectivités étaient libres de fonctionner dans un régime véritablement « ciel ouvert », l'aéroport qui offre la meilleure correspondance et celui qui vous ferait sentir que vous êtes un client important est celui que vous choisiriez. Aujourd'hui, ce n'est pas possible.
Le président : J'ai encore trois sénateurs sur ma liste. Monsieur Rempel, comme le ministre attend, je vais leur demander de poser leurs questions et vous répondrez aux trois en même temps lorsqu'ils auront terminé.
Le sénateur Greene : J'ai une question qui fait suite à celle que j'ai posée sur les loyers. Est-ce que vous pourriez nous donner une estimation — et si vous ne pouvez pas le faire maintenant, vous pourrez nous envoyer la réponse plus tard — de ce que vous auriez payé en vertu d'une cession de biens traditionnels, comparativement à ce que vous payez maintenant étant donné l'échelle que nous constatons.
Le sénateur Doyle : J'aimerais que vous commentiez pour moi une partie de votre exposé où vous parlez des coûts cachés à cause de l'obligation de fournir une infrastructure fédérale sans que cela coûte quoi que ce soit au gouvernement. Est-ce que le gouvernement contribue d'une manière ou d'une autre à votre coût en capital?
Le sénateur Zimmer : La mienne est une question un peu facile, mais s'il y avait quelque chose que nous pourrions changer ou que vous pourriez faire, quelle serait votre priorité pour que votre vie à Winnipeg soit encore meilleure?
M. Rempel : Tout d'abord, en réponse à la question du sénateur Greene, je ne peux pas vous donner ce chiffre tout de suite, mais je serais heureux de faire le calcul. Je peux vous dire que la valeur comptable des biens au moment de la cession était inférieure à 1 million de dollars et que nous payons plus que cela chaque année en loyer, mais je vais vous envoyer plus d'information à ce sujet.
À la question du sénateur Doyle au sujet des coûts cachés imposés par le gouvernement, aucun ordre de gouvernement ne participe à nos coûts en capital. Nous ne recevons aucun fonds, de quelque manière que ce soit, de quelque ordre de gouvernement à cet effet.
Il y a peut-être une exception que je devrais mentionner. Je crois que les aéroports de Québec et de Halifax ont reçu de l'argent dans le cadre du programme fédéral de financement des infrastructures qui n'avait aucun rapport direct avec leurs activités normales. Dans le cas de Halifax, c'est parce qu'il fait partie de la porte d'entrée de l'Atlantique et qu'on voulait faire avancer les choses.
Je suis ravi pour eux. Cependant, je suis déçu pour Winnipeg, car nous avons présenté une demande en vertu du même programme d'infrastructure pour un port intérieur, mais elle a été rejetée puisque nous sommes une administration aéroportuaire et que nous n'avons pas le droit de recevoir d'argent du gouvernement.
Je vais examiner la question de plus près et je vais en discuter avec Tom Ruth, de Halifax, pour savoir ce qui s'est passé. Pour ce qui est de Winnipeg, aucun gouvernement ne nous fournit d'argent.
Ce qu'on aurait pu faire différemment, si nous avions un modèle différent permettant les partenariats en capitaux propres, ce serait d'avoir un associé qui aurait assumé les coûts des installations, quelles qu'elles soient, dans le cadre d'une coentreprise. Au lieu de percevoir des frais d'améliorations aéroportuaires, comme nous le faisons maintenant, pour récupérer cette mise de fonds, nous aurions simplement payé la valeur de l'investissement au fil du temps.
Sénateur Zimmer, si je devais énoncer un seul élément qui nous faciliterait la vie, je reviendrais à mon plaidoyer formulé à la fin de ma déclaration d'ouverture, c'est-à-dire de libérer l'industrie, de sorte qu'elle puisse agir dans l'intérêt des consommateurs et répondre à leurs besoins. Donnez-nous l'occasion de satisfaire leurs véritables besoins, soit de bonnes correspondances, tant au pays qu'à l'étranger. Cette notion sous-tend bien des éléments, et elle a beaucoup d'incidences, mais elle nous permettra sans doute d'aller loin au cours du nouveau millénaire et, plus important, elle permettra au Canada de devenir un véritable chef de file.
Nous devrions tirer avantage de notre emplacement géographique, car nous sommes juste à côté du plus grand marché au monde. Permettez à l'industrie de trouver une façon de se libérer des contraintes pour répondre aux besoins des consommateurs et prendre les mesures qui s'imposent à cet égard.
Le président : Je vous remercie chaleureusement, monsieur Rempel. Je sais que par le passé, vous avez suivi nos délibérations. Tout d'abord, j'aimerais que vous soumettiez quelques réponses au greffier. Si vous continuez de suivre les délibérations du comité et que vous estimez avoir des renseignements additionnels à nous transmettre, n'hésitez pas à le faire. Nous en tiendrons compte à l'étape du rapport. Merci beaucoup.
J'invite les membres du comité à demeurer assis pendant que le ministre prend place.
[Français]
Pour la deuxième moitié de cette réunion, nous avons le plaisir de recevoir, d'Industrie Canada, l'honorable Maxime Bernier, ministre d'État, Petite Entreprise et Tourisme, ainsi que Marie-Josée Thivierge, sous-ministre adjointe, Services axés sur le marché, le tourisme et la petite entreprise, Industrie Canada.
Soyez les bienvenus. Je vous remercie d'avoir pris le temps de venir discuter avec des perspectives, des initiatives et des préoccupations du ministère au sujet de l'industrie du transport aérien.
[Traduction]
Nous allons commencer par écouter votre déclaration liminaire, puis les sénateurs vous poseront des questions.
[Français]
L'honorable Maxime Bernier, C.P., député, ministre d'État, Petite Entreprise et Tourisme : Je suis très heureux d'être ici avec vous, merci de l'invitation. Je comprends le sens de votre étude et mon témoignage aura peut-être un impact mineur sur elle puisque je suis, comme vous le savez, ministre d'État à la petite entreprise et au tourisme. L'industrie touristique comprend, effectivement, les aéroports, et, à ce que je comprends, votre préoccupation première est que les aéroports canadiens soient le plus compétitifs possible.
Cela relève plutôt de la juridiction de mon collègue Denis Lebel, ministre des Transports; je vais néanmoins pouvoir répondre à vos questions lorsque j'aurai l'information, sinon j'inviterai le ministre Lebel à y répondre. En ce qui me concerne je vais plutôt brosser un portrait plus global de l'industrie touristique et de son impact sur l'économie canadienne.
Notre gouvernement a lancé une stratégie pour l'industrie touristique au mois d'octobre dernier. C'est la première fois dans l'histoire d'un gouvernement au Canada que nous avons une stratégie nationale pour le secteur touristique. Cette stratégie a été approuvée par l'ensemble des intervenants. Maintenant c'est à nous, au gouvernement, de mettre en œuvre notre stratégie. Elle comporte plusieurs volets dont un important, qui vous intéresse peut-être plus, le volet de l'accès, autrement dit faire en sorte qu'on ait plus de visiteurs étrangers qui puissent venir au Canada.
Le rôle du ministre d'État à la petite entreprise et au tourisme, c'est de travailler avec la Commission canadienne du tourisme pour faire la promotion du Canada à l'étranger. La Commission canadienne du tourisme a un budget qu'elle gère de façon indépendante, en consultation avec l'industrie, et elle choisit des créneaux pour faire la promotion de notre pays. Actuellement, dans son plan stratégique, la publicité que la commission va faire dans les prochains mois de façon plus agressive va se faire dans les pays émergents comme le Brésil, la Chine ou l'Inde, sans délaisser toutefois des pays traditionnels comme les États-Unis ou l'Angleterre.
La commission travaille avec l'industrie touristique pour promouvoir le Canada. J'ai eu la chance de faire ma première tournée avec la commission en Chine et en Corée du Sud, il y a quelques mois. J'ai alors pris part à certaines tables rondes avec des intervenants de l'industrie touristique locale. Des gens de l'Inde étaient présents avec nous, des gens de l'industrie touristique de la Chine et de la Corée du Sud.
Ils nous ont parlé de la problématique qu'ils vivent et de leur désir de faire en sorte qu'il y ait plus de visiteurs qui viennent au Canada.
La première problématique est que, dans certains pays, le Canada oblige ses ressortissants à avoir des visas.
Si un Brésilien veut venir au Canada, il doit obtenir un visa selon un certain processus. En collaboration avec Jason Kenney, le ministre de l'Immigration, nous travaillons actuellement sur la mise en place d'un système visant à délivrer des visas de façon plus efficace et productive.
Depuis un an maintenant, vous savez probablement que le Canada est une destination touristique approuvée par le gouvernement chinois. Les ressortissants chinois qui désirent voyager en groupe au Canada n'ont plus besoin d'un permis de sortie, mais de notre visa seulement.
Notre premier ministre est en Chine actuellement pour lancer la nouvelle campagne de publicité de la Commission canadienne du tourisme. Le nombre d'habitants en Chine est impressionnant et plusieurs visiteurs viennent au Canada, non seulement à Vancouver, mais aussi dans la région de Toronto, Québec, et cetera. Nous travaillons donc pour faire la promotion de notre pays. D'ailleurs, le ministre Kenney a annoncé dernièrement, dans le cadre de notre stratégie nationale du tourisme, la création de nouveaux centres d'étude des demandes de visa. Si ma mémoire est bonne, notre cible est de 150 centres de visas dans les pays ciblés par la Commission canadienne du tourisme. Nous en avons actuellement 60. Donc, d'ici les prochaines années, on va plus que doubler le nombre de centres pour attirer de nouveaux visiteurs au pays.
Cela dit, nous devons voir aux coûts des aéroports. Au Canada, le système de financement des aéroports a été privatisé. Il s'agit d'un dispositif d'utilisateur payeur. D'ailleurs, je lève mon chapeau au ministre libéral de l'époque qui a mis en place cette idéologie. J'utilise le terme « privatisé », mais il s'agit de conseils d'administration indépendants, qui paient un loyer au gouvernement pour l'utilisation des terres et leur emplacement. Également, le système de contrôle aérien est privatisé. Nous sommes donc dans une situation très différente des États-Unis et de certains pays européens qui subventionnent leurs aéroports avec des fonds publics, alors que nous demandons plutôt aux entreprises privées d'être autosuffisantes. À l'époque où cette philosophie a été lancée, le gouvernement fédéral était dans une période de restriction budgétaire et n'avait pas les moyens d'investir dans des infrastructures; il a donc privatisé et donné des possibilités aux gens qui savent mieux qu'un fonctionnaire à Ottawa comment faire fonctionner un aéroport à Toronto, Montréal ou Vancouver. Il leur a donné les moyens d'agir en ce sens.
En 2005, le gouvernement a changé son modèle de perception des loyers afin d'en diminuer les coûts. Le gouvernement fédéral perçoit environ 250 millions de dollars en frais de loyer de tous les aéroports à travers le Canada. Cela représente environ 1 p. 100 du prix des billets d'avion. Cela a un impact sur le coût du billet d'avion et sur la compétitivité des aéroports, mais de façon quand même assez marginale. C'est pour cela que je vais attirer l'attention du gouvernement et du ministre des Transports sur les recommandations que vous allez faire.
Je tiens à vous dire que je suis très fier d'être ministre canadien et de faire la promotion de notre pays. Les gens veulent venir au Canada. D'ailleurs, notre marque de commerce, Explorons sans fin le Canada, a été considérée comme étant la meilleure par un groupe indépendant bien connu dans l'industrie touristique, Future Brand. La crédibilité du Canada à l'étranger ne fait pas de doute. Les étrangers veulent venir au Canada, veulent connaître notre pays. Pourquoi? Pour nos ressources naturelles, bien entendu, mais aussi pour la réputation des Canadiens.
Je suis très fier d'être Canadien, parce que nous avons une bonne réputation. Les Canadiens sont accueillants. Le pays a beaucoup à offrir. C'est facile pour moi de faire la promotion du Canada et des Canadiens. Le Canada a une marque de commerce bien connue et il s'agit de faire une publicité explicite dans les pays qui nous connaissent un peu moins pour donner envie à tous ces gens de venir visiter notre pays.
En terminant, j'aimerais vous transmettre quelques données sur notre industrie touristique. L'industrie du tourisme a généré 73,4 milliards de dollars en 2006 et cela constitue 2 p. 100 du PIB canadien. C'est important. Le tourisme international a rapporté 14,4 milliards de dollars, soit environ 23 p. 100 du commerce international de service du Canada. Le Canada accueille en moyenne 24 millions de voyageurs internationaux. Près de 30 p. 100 d'entre eux sont arrivés par avion, plus de 60 p. 100 par voie terrestre et un peu plus de 4 p. 100 par voie maritime. Votre étude sur les aéroports a donc une certaine importance, puisque 30 p. 100 des étrangers arrivent au pays par la voie aérienne.
Depuis la signature d'une entente avec le gouvernement chinois pour approuver le Canada comme destination, l'année dernière, l'affluence des touristes chinois a augmenté de 24 p. 100.
L'industrie va bien, mais demeure quand même un défi. L'un de ces défis actuellement, c'est la force du dollar canadien. Cette situation encourage moins les Américains à venir nous visiter que par le passé. Cependant, je fais confiance aux entrepreneurs de l'industrie touristique pour renverser la situation, et je suis sûr que le passé est garant de l'avenir en ce qui concerne cette industrie.
Je vous remercie beaucoup, monsieur le Président, et je suis prêt à répondre à vos questions.
Le président : Merci beaucoup, monsieur le ministre.
[Traduction]
Le sénateur Mercer : Monsieur le ministre, je vous souhaite la bienvenue. Nous sommes heureux que vous soyez des nôtres et que vous fassiez la promotion du tourisme un peu partout dans le monde. Je viens de la Nouvelle-Écosse, le « paradis maritime du Canada », et j'attends avec impatience de recevoir davantage de touristes dans ma province.
Ce soir, nous avons entendu Barry Rempel, PDG de l'administration aéroportuaire de Winnipeg. Vou avez parlé des discussions que vous avez eues avec le ministre de l'Immigration et le premier ministre en ce qui a trait à la coordination de nos efforts pour optimiser les avantages présentés par les touristes qui viennent au Canada.
M. Rempel a soulevé un problème intéressant et immédiat, car nous venons tout juste d'en parler, mais qui est également courant dans d'autres localités du pays ayant les mêmes caractéristiques.
La ville de Winnipeg, tout comme le Manitoba en entier, jouit de l'apport économique d'une communauté importante et dynamique de Philippins. Or, la compagnie Philippine Airlines n'a le droit d'atterrir qu'à Toronto ou à Vancouver. Pourtant, j'ai l'impression que c'est à Winnipeg qu'on trouve la plus grande communauté philippine du Canada.
Similairement, nous avons tous entendu parler de la querelle publique au sujet des Émirats arabes unis et du fait qu'ils voulaient accroître leur droit d'atterrissage au Canada.
Si on tient réellement à soutenir le tourisme, nous devons éliminer ces restrictions. Air Canada présente des arguments bidon en affirmant vouloir protéger le marché. Cette société ne travaille pas dans l'intérêt du marché. Elle essaie de mettre des bâtons dans les roues des touristes potentiels qui veulent visiter le Canada et dépenser leur argent ici. Elle les force à atterrir dans certains aéroports malgré eux. Je n'ai rien contre l'aéroport de Vancouver, mais les Philippins ne veulent pas aller à Vancouver, ils veulent aller à Winnipeg. Nous devrions leur faciliter la tâche pour qu'ils puissent y dépenser le plus d'argent possible et ainsi contribuer à l'économie canadienne.
[Français]
M. Bernier : Vous savez que la priorité est de négocier des ententes à ciel ouvert — ou de ciel bleu. C'est une priorité pour le ministre des Transports. Plusieurs pays sont couverts. Vous avez raison de dire qu'il serait important de faire en sorte que les compagnies aériennes, qui veulent desservir le Canada, puissent y venir. C'est une priorité. On le fait avec le Brésil, où le gouvernement a dernièrement signé une entente de liberté économique, et on va le faire avec d'autres pays.
En ce qui concerne précisément les Philippines, vous m'informez de cette situation aujourd'hui et je peux vous assurer que votre préoccupation sera transmise au ministre des Transports.
J'aimerais aussi vous dire qu'en 2006, les ententes de ciel bleu couvraient 60 pays. C'est sûr qu'il reste encore d'autres pays à couvrir. Je crois à la compétition. Je suis en politique pour la liberté économique, et la compétition est saine.
Vous avez parlé d'Air Canada. Air Canada est une compagnie privée qui doit opérer et être compétitive avec les autres. Personnellement, je n'ai pas de préférence de compagnie aérienne, l'important est qu'on puisse desservir le territoire canadien de la meilleure façon. La meilleure façon de le faire et d'apporter la compétition, c'est de signer des ententes. Ces ententes de ciel ouvert donnent habituellement aux compagnies aériennes des possibilités de venir atterrir à Toronto, à Montréal ou à Vancouver. Dans ces ententes, habituellement, on mentionne le nombre de vols qu'une compagnie peut effectuer au Canada et vice versa.
Le défi que nous avons est de signer encore plus d'ententes avec plus de pays pour amener plus de transporteurs qui sont intéressés à venir au Canada. S'ils sont intéressés à venir, il y a plus de tourisme et de gens d'affaires, et c'est positif pour le pays. C'est un défi que nous avons et nous sommes prêts à le relever.
Je vous remercie de votre préoccupation précise sur les Philippines. Je vais faire part de ce cas au ministre des Transports pour qu'il en soit bien conscient. J'imagine que cela fera peut-être partie des recommandations du rapport que vous allez déposer dans les prochains mois.
Le sénateur Boisvenu : Monsieur le ministre, félicitations pour la brochure, elle est de très grande qualité. Je l'ai parcourue comme on le fait quand on est enfant, j'ai d'abord regardé les images. Cela donne vraiment le goût de revisiter son pays; c'est vraiment un pays magnifique.
Tout en regardant les images, j'ai lu quelques chiffres. Il est inscrit que 83 p. 100 des touristes rentrent au Canada par la voie aérienne. Cela représente 95 p. 100 des revenus des compagnies aériennes. C'est presque colossal. Est-ce que l'industrie aérienne a été consultée au sujet de votre stratégie?
M. Bernier : L'industrie a été consultée. Lorsqu'on a rendu notre stratégie publique, l'industrie a dit qu'il restait encore bien des choses à améliorer au Canada : les visas, la compétitivité des aéroports, le fait d'avoir un accès encore plus grand à notre pays, entre autres. Cependant, on n'a pas de réponse à toutes ces problématiques. On a dit à l'industrie qu'on allait créer un forum. Le tourisme touche plusieurs ministères, que ce soit le ministère des Transports, le ministère des Finances ou le ministère de la Citoyenneté et de l'Immigration. Nous avons créé une table de consultation avec les sous-ministres adjoints et des membres de l'industrie touristique. C'est ce que ces derniers ont aimé. Pour la première fois, on leur a dit : « Tous les sous-ministres adjoints qui ont une certaine responsabilité en matière de tourisme seront devant vous et vous pourrez leur poser des questions. »
J'ai eu une première rencontre avec ces gens-là la semaine dernière, si ma mémoire est bonne, on a commencé le processus. Cela va très bien. Ce que l'industrie aime aussi, c'est qu'on a dit qu'on allait rendre public notre plan d'action. Cela force donc les politiciens et les fonctionnaires à trouver des solutions aux préoccupations de l'industrie. Le dépôt du premier rapport annuel sur notre plan stratégique est prévu en 2013, si ma mémoire est bonne. Si on a consulté pendant un an, qu'on a trouvé des solutions et qu'on les présente dans ce rapport, c'est sûr qu'on va avoir l'appui de l'industrie touristique. Cependant, cela exerce une pression sur les collègues autour de la table; une pression qui est saine et qui permettra d'avoir des réponses aux préoccupations de l'industrie touristique.
Une des réponses, c'est de faire en sorte qu'il y ait plus de Canadiens qui puissent venir ici puisque que l'industrie touristique est une industrie d'exportation. Ce que je veux dire, c'est que ce sont des dollars de l'étranger qui viennent ici, ce qui est donc bénéfique pour l'économie canadienne. On va travailler ensemble pour s'assurer qu'on puisse régler les problématiques dont ils nous ont parlé depuis quelques mois déjà.
Le sénateur Boisvenu : Et qu'ils nous ont sans doute soumises ici.
M. Bernier : Oui.
Le sénateur Boisvenu : Un autre dossier qui est très récent, très chaud, et il faut féliciter le premier ministre Harper là-dessus, c'est l'entente avec la Chine; l'ouverture que le Canada a manifestée pour le tourisme chinois. On parle d'une augmentation de 50 p. 100 d'ici 2015. C'est énorme quand on regarde l'ampleur de la Chine. Je calculais cela grosso modo, si on attirait le un centième de 1 p. 100 des Chinois, c'est 150 000 touristes de plus.
Est-ce que cela va obliger le Canada à avoir des accords particuliers pour ouvrir le territoire à des compagnies aériennes chinoises?
M. Bernier : Bonne question. Vous avez raison de dire que les touristes chinois qui viennent ici ne restent pas seulement une journée ou deux. Ils dépensent beaucoup lorsqu'ils viennent. Normalement, ils vont vouloir visiter le Canada dans son ensemble et les agents touristiques leur expliquent que c'est peut-être bien de passer beaucoup de temps dans la région de Vancouver, mais qu'il y a d'autres endroits à visiter. Habituellement, ces voyageurs ne restent pas dans une région, ils vont voyager et dépenser leur argent. Quatre-vingt-dix pour cent des entreprises dans l'industrie touristique sont des petites et moyennes entreprises. C'est très sain qu'on en ait beaucoup, et ces personnes de la Chine dépensent beaucoup.
Le Canada a augmenté le nombre de vols au Canada. J'étais à Vancouver en septembre dernier pour le vol inaugural d'une compagnie chinoise qui va offrir le service à Vancouver une fois par semaine, de façon plus régulière. Il est question d'aller à Toronto. Oui, nous sommes ouverts et nous négocions actuellement avec le gouvernement chinois pour s'assurer que les compagnies puissent desservir les grandes villes chinoises et aussi les grandes villes canadiennes. On est ouvert à avoir plus d'ententes avec les compagnies aériennes chinoises. D'ailleurs, la capacité n'est pas encore toute utilisée. Quand je parle de capacité, c'est que ces compagnies peuvent venir à Toronto ou à Vancouver, mais elles n'ont pas encore exploité cette possibilité.
Je pense qu'à l'avenir, étant donné qu'on va avoir plus de voyageurs chinois, plus de compagnies aériennes chinoises vont desservir le Canada. Les statistiques que vous avez mentionnées, ce sont effectivement nos prévisions, et je pense bien qu'elles vont se réaliser.
Le sénateur Boisvenu : Les Chinois sont de grands utilisateurs du train. On connaît la liaison Paris-Pékin, une liaison ferroviaire très prisée par les Européens. Je comprends que vous n'êtes pas ministre des Transports, mais est-ce qu'on aura une stratégie particulière pour développer les services de Via Rail qui dessert d'un océan à l'autre et qui peut représenter un produit magnifique, à mon avis, pour les touristes chinois?
M. Bernier : C'est un bon point. Comme vous venez de le dire, cela relève plutôt de la juridiction de M. Lebel, le ministre des Transports. Je sais que VIA Rail produit au Parlement un rapport annuel. Je n'ai pas en tête leurs priorités corporatives, mais on veut mieux desservir des grandes liaisons comme Montréal-Toronto, Montréal-Ottawa. Cela fait en sorte que si on a un meilleur service, cela peut aussi être utile pour les étrangers.
Pour répondre précisément à votre question, je vais m'informer auprès de M. Lebel.
Le sénateur Merchant : Bonsoir, monsieur le ministre, excusez-moi, je vais parler avec vous en anglais parce que c'est beaucoup plus facile pour moi de m'exprimer en anglais.
M. Bernier : Mais vous parlez quand même très bien français.
Le sénateur Merchant : Je comprends très bien le français, mais je ne le parle pas assez bien.
[Traduction]
À plusieurs reprises au cours de notre étude, on nous a parlé de l'hémorragie des passagers vers les aéroports américains. J'aimerais savoir si le gouvernement fédéral pourrait intervenir pour contribuer à corriger le problème.
[Français]
M. Bernier : Oui, vous avez raison, c'est un fait, des gens prennent l'avion à Burlington, près de Montréal, au lieu de le prendre à Montréal. Il faut faire en sorte que les aéroports soient compétitifs. C'est un défi pour les gestionnaires des aéroports au Canada.
Comme je l'expliquais plus tôt, la politique du ministère des Transports en ce qui concerne les aéroports en est une de non-subvention directe, une politique d'utilisateurs-payeurs. Cela fait en sorte que ces entreprises doivent pouvoir se développer. Seulement à Montréal et à Toronto, beaucoup de dépenses ont été effectuées pour les pistes, les rénovations et les terminaux. Cet argent, contrairement à d'autres pays, ne vient pas de subventions du gouvernement, mais de capitaux du secteur privé. Il y a des frais d'intérêt, des frais pour pouvoir apporter ces améliorations et ils sont facturés à l'utilisateur. Vous avez raison de dire qu'en fin de compte, c'est l'individu qui doit payer ces frais et ces frais sont inscrits dans les billets. Cela peut faire en sorte que c'est un peu moins compétitif.
Pour ce qui est de notre contrôle en tant que gouvernement, c'est le loyer aéroportuaire dont je parlais tout à l'heure, les droits pour la sécurité des passagers du transport aériens, des droits que les gens paient dans leur billet d'avion pour tous les systèmes de sécurité dans les aéroports, la TPS ou la taxe de vente harmonisée, la taxe d'accise fédérale sur le carburant. Cela touche directement le gouvernement fédéral, là où nous avons un rôle à jouer.
Depuis le 11 septembre 2011, la demande des mesures pour la sécurité a augmenté. Les coûts de sécurité ont augmenté et le gouvernement a mis en place certaines solutions. On a créé l'Administration canadienne de sécurité du transport aérien après septembre 2011. Les droits pour la sécurité des passagers ont augmenté, mais cela permet d'avoir des aéroports qui sont très bien cotés. Si ma mémoire est bonne, Toronto et Vancouver ont gagné l'an dernier et l'année précédente des prix pour être les aéroports les mieux gérés.
La portion de la rente pour les aéroports en 2010 équivalait à 2,50 $ par passager. Pour payer le frais que le gouvernement fédéral facture en loyer, c'est 2,50 $ par passager. Que les aéroports canadiens doivent être compétitifs n'est pas un fait nouveau. En 2005, une revue a débuté pour vérifier ce loyer. Cette revue a permis de diminuer le loyer payable de l'ensemble des aéroports au Canada de 13 milliards de dollars à 5 milliards de dollars sur une période plus longue. Vous savez que ce sont des baux que nous signons à long terme avec les aéroports. Le gouvernement a pris une action pour diminuer le coût sur les loyers. Les loyers ne vont pas au ministère des Transports, mais directement dans le fonds consolidé du gouvernement du Canada, le fonds général du gouvernement. La façon directe de diminuer et d'aider les aéroports à diminuer leurs coûts serait de diminuer les loyers et les taxes, mais ces taxes s'appliquent aussi à l'ensemble des autres secteurs industriels, pas seulement au secteur des aéroports ou du transport.
Actuellement, le ministre des Transports, avec tous les partenaires, les municipalités et les gens des aéroports, regarde de façon globale comment être compétitif au Canada non seulement en ce qui a trait à l'industrie aérienne, mais aussi le transport ferroviaire, le transport par autobus, et cetera. Il s'agit d'une consultation puisque c'est de juridiction municipale, provinciale et fédérale, donc on veut tout le monde autour de la table. C'est le but pour y arriver. Avec le rapport que vous allez soumettre, il y aura sûrement de bonnes idées pour améliorer la compétitivité des aéroports en gardant à l'esprit que les aéroports doivent continuer avec le même système d'utilisateurs-payeurs. Ce système qui a fait ses preuves, fonctionne bien et fait en sorte qu'on croit aux gestionnaires de ces aéroports. Ils ont dû investir beaucoup dernièrement, mais ils peuvent amortir sur plusieurs années. L'industrie et ses aéroports devraient être plus compétitifs dans le futur.
Pour rectifier ce que j'ai dit tout à l'heure, c'est Ottawa qui a gagné le premier prix d'aéroport en Amérique du Nord et Halifax est arrivé en troisième place. On peut être fier de nos aéroports ainsi que de leurs gestionnaires.
Le sénateur Verner : Bonsoir, monsieur le ministre, et merci d'être parmi nous ce soir. J'aimerais revenir au tourisme. Mon collègue, le sénateur Boisvenu, a bien raison, c'est une très belle brochure. Cela donne le goût de voyager à travers le pays, c'est sûr.
À la page 19 de votre document, on comprend que vous faites un constat que l'accès et le déplacement des touristes à travers le pays est un critère très important dans une stratégie de tourisme. Je comprends également que 83 p. 100 des visiteurs, qui viennent d'ailleurs que des Etats-Unis, arrivent par avion. Bref, il y a des chiffres et le transport aérien est une donnée importante dans une stratégie de tourisme.
Je comprends également qu'il y a des consultations avec les principaux acteurs de l'industrie du transport. Avez- vous consulté les touristes canadiens et étrangers, ceux qui sont les consommateurs du transport aérien puis ceux qui pratiquent le tourisme dont on a tellement besoin, quand vous avez élaboré cette stratégie? Y a-t-il une façon de consulter ces touristes pour savoir comment ils trouvent notre transport aérien lorsqu'ils viennent chez nous?
M. Bernier : C'était la responsabilité de la Commission canadienne du tourisme. Lorsque la Commission canadienne du tourisme établit son plan stratégique pour établir les sommes d'argent qu'elle va dépenser dans des marchés cibles, elle fait justement des groupes de consultation. Elle s'occupe de regarder pourquoi les gens veulent venir visiter le Canada. Ils veulent venir visiter le Canada pour la beauté géographique du pays, mais aussi pour avoir des expériences touristiques. La commission a lancé, il y a déjà quelques mois, son concours pour les petits entrepreneurs québécois, canadiens, pour faire en sorte que ceux qui ont une expérience à offrir à l'étranger, que cela puisse se faire sur la vitrine de la Commission canadienne du tourisme. Quelqu'un qui veut faire de l'équitation, par exemple, dans les Rocheuses, il y a des petites firmes, petites entreprises familiales qui vont offrir une ballade pendant deux, trois jours d'équitation avec camping et tout. C'est le genre d'expérience que les gens veulent avoir pour découvrir le Canada.
Lorsque la Commission canadienne du tourisme fait la promotion ou la publicité du Canada, elle fait aussi la promotion et la publicité de ces petites entreprises qui offrent différentes expériences, que ce soit le rafting dans la région de Québec ou autres. Donc ces gens ont une vitrine internationale par l'entremise de la Commission canadienne du tourisme.
Lorsque j'étais en Chine, les gens me disaient vouloir découvrir les beautés du Canada et avoir des expériences. On le sait à cause des études de la Commission canadienne du tourisme.
Pour répondre à votre question, avant de faire le plan stratégique, on essaie de voir ce que les gens recherchent. On sait qu'ils recherchent la beauté des paysages et de nouvelles expériences. Suite à cela, la commission a lancé, avec l'industrie touristique, cette collection d'expériences qui est sur le site Internet de la commission et dont elle se sert pour faire la promotion dans différents pays.
Jusqu'à maintenant, cette façon de faire fonctionne. La réputation du Canada, ou le branding de la commission est : « Explorer sans fin ». C'est ainsi que la commission vend le Canada, en utilisant la phrase « Explorer sans fin ». Dieu sait qu'il y a au Canada beaucoup de choses à explorer. En tant que ministre du Tourisme, j'ai du pain sur la planche pour visiter plusieurs sites touristiques. J'aimerais que les étrangers puissent le faire. Avec la participation de la commission, le marketing est bon et les choses vont bien.
Le sénateur Boisvenu : Une question m'est venue à l'idée, suite à la visite des gestionnaires d'aéroports qui sont venus nous présenter leurs doléances.
Le président américain vient d'annoncer, il y a quelques mois, un investissement massif. Je ne vous parle peut-être pas en tant que ministre du Tourisme, mais comme ministre du gouvernement dont je fais partie. Le président Obama a annoncé des investissements, par le biais des subventions pour les aéroports, de l'ordre de 40 milliards de dollars pour les prochaines années afin de rendre les aéroports compétitifs. On sait combien cette initiative a nui à certains aéroports du Canada, dont ceux de Montréal et de Toronto, étant donné la proximité des aéroports américains. Certains gestionnaires d'aéroports, dont celui de Montréal, nous ont dit que les grands aéroports n'avaient pas accès à l'aide gouvernementale pour améliorer leur équipement, alors que les petits aéroports ont accès à cette aide du gouvernement.
Compte tenu du fait que la majorité des touristes arrivent par les grands aéroports, le gouvernement ne devrait-il pas considérer un soutien économique plus important aux grands aéroports pour qu'ils puissent développer leur infrastructure et leur permettre d'être plus compétitif avec leurs concurrents américains?
M. Bernier : Vous avez raison de dire que le gouvernement américain et ceux d'autres pays d'Europe subventionnent leurs aéroports avec des montants assez faramineux.
Pour les grands aéroports au Canada, nous ne l'avons pas fait depuis plusieurs années. Cela n'a pas empêché ces aéroports de se moderniser. Vous avez raison de dire que dans le cadre de notre programme de stimulation économique, qui a pris fin le 31 mars 2011, des sommes ont été allouées à des petits aéroports pour allonger ou élargir des pistes. Ces initiatives se sont faites en collaboration avec les trois paliers de gouvernements. Comme vous le savez, le programme était partagé avec la municipalité concernée — habituellement, ces aéroports appartiennent à des petites municipalités — un tiers venait du gouvernement du Québec et l'autre tiers du gouvernement du Canada.
Il a pu arriver, par l'entremise du plan de stimulation de l'infrastructure pour stimuler l'économie, qui a pris fin en 2011, que de petits aéroports aient pu bénéficier de certaines sommes. La stratégie nationale du gouvernement du Canada pour les grands aéroports consiste à ne pas subventionner directement, bien que les Américains le fassent. On ne veut pas déclencher une guerre de subventions. Nous voulons examiner avec l'industrie des façons de diminuer les coûts. On l'a fait avec les loyers, comme je l'ai indiqué plus tôt. D'autres choses pourraient être faites en ce sens. Je crois que le gouvernement sera disposé à examiner les recommandations de ce comité.
J'ai rencontré les représentants des aéroports du Canada. M. Lebel a également eu une rencontre avec eux. Nous sommes au courant des préoccupations dont ils vous ont fait part. Ces préoccupations sont légitimes. Toutefois, dans un contexte de restrictions budgétaires, comme vous le savez, il faut revenir à l'équilibre budgétaire le plus rapidement possible. Les aéroports ne s'attendent pas à ce qu'on affecte des sommes énormes dans le prochain budget à titre de subventions directes. Ils s'attendent à ce qu'on examine le modèle et des façons de les rendre plus compétitifs, et nous sommes disposé à le faire, mais sans toucher au fondement même du modèle canadien.
Le président : Monsieur ministre, je tiens à vous remercier de votre présence et de votre présentation. Comme vous avez pu le constater, les membres du Comité sénatorial des transports sont accueillants et chaleureux. Je demanderais au ministre, s'il est disponible au cours des prochaines semaines, de revenir comparaître devant notre comité. Ce sera un plaisir pour nous de l'accueillir à nouveau.
M. Bernier : J'en prends bonne note. Pour mon information personnelle, votre comité termine ses travaux quand?
Le président : Notre rapport préliminaire sur les aéroports paraîtra dans les prochains mois. Toutefois, une étude plus globale sur l'aviation en général pourra inclure le Grand Nord et la compétition internationale. Au printemps, un rapport préliminaire portera, entre autres, sur la notion de gouvernance des aéroports et les frais.
M. Bernier : Mon collègue, M. Lebel, d'ici le printemps...
Le président : Nous pourrons certainement trouver du temps pour l'accueillir, s'il le désire. Monsieur le ministre, merci encore une fois.
[Traduction]
Je tiens à rappeler aux honorables sénateurs et à notre public que notre prochaine séance aura lieu le mardi 28 février en matinée. Nous recevrons M. Garth Atkinson, PDG de l'administration aéroportuaire de Calgary, ainsi que M. Larry Berg, PDG de l'administration aéroportuaire de Vancouver.
(La séance est levée.)