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AGFO - Comité permanent

Agriculture et forêts

 

Délibérations du Comité sénatorial permanent de
l'Agriculture et des forêts

Fascicule no 20 - Témoignages du 20 novembre 2014


OTTAWA, le jeudi 20 novembre 2014

Le Comité sénatorial permanent de l'agriculture et des forêts se réunit aujourd'hui, à 8 h 2, pour étudier les priorités pour le secteur agricole et agroalimentaire canadien en matière d'accès aux marchés internationaux.

Le sénateur Percy Mockler (président) occupe le fauteuil.

[Traduction]

Le président : Bienvenue à cette réunion du Comité sénatorial permanent de l'agriculture et des forêts.

[Français]

Je m'appelle Percy Mockler, je suis sénateur du Nouveau-Brunswick et président du comité. Je demanderais dès maintenant aux sénateurs de se présenter.

[Traduction]

La sénatrice Beyak : Sénatrice Lynn Beyak, Ontario.

La sénatrice Merchant : Pana Merchant, Saskatchewan.

[Français]

Le sénateur Robichaud : Fernand Robichaud, de Saint-Louis-de-Kent, au Nouveau-Brunswick.

La sénatrice Tardif : Claudette Tardif, de l'Alberta.

Le sénateur Maltais : Ghislain Maltais, du Québec.

[Traduction]

Le sénateur Oh : Le sénateur Oh, Ontario.

Le sénateur Enverga : Tobias Enverga de l'Ontario.

[Français]

Le sénateur Dagenais : Jean-Guy Dagenais, du Québec

[Traduction]

Le président : Je remercie nos témoins d'avoir accepté notre invitation afin que nous puissions profiter de leurs opinions et de leur professionnalisme.

Le comité poursuit son étude sur les priorités pour le secteur agricole et agroalimentaire canadien en matière d'accès aux marchés internationaux. Le secteur agricole et agroalimentaire canadien joue un rôle important dans l'économie canadienne. En 2012, un travailleur sur huit au pays, représentant plus de 2,1 millions de personnes, était employé dans ce secteur qui a contribué à près de 6,7 p. 100 au produit intérieur brut.

[Français]

À l'échelle internationale, le secteur agricole et agroalimentaire canadien était responsable de 3,6 p. 100 des exportations mondiales de produits agroalimentaires en 2012. De plus, en 2012, le Canada s'est classé cinquième plus important exportateur de produits agroalimentaires au monde.

[Traduction]

Nous accueillons aujourd'hui d'Agriculture et Agroalimentaire Canada, M. Frédéric Seppey, sous-ministre adjoint intérimaire, Direction générale des services à l'industrie et au marché.

[Français]

De plus, nous accueillons Gilles Saindon, sous-ministre adjoint délégué, Direction générale des sciences et de la technologie.

[Traduction]

De l'Agence canadienne d'inspection des aliments, nous accueillons M. Tony Ritchie, directeur exécutif, Politique stratégique et affaires internationales.

Merci d'avoir accepté notre invitation. Je demanderais à nos témoins de faire leur déclaration liminaire après quoi nous passerons aux questions. M. Seppey a la parole après quoi nous entendrons M. Ritchie.

[Français]

Frédéric Seppey, sous-ministre adjoint intérimaire, Direction générale des services à l'industrie et aux marchés, Agriculture et Agroalimentaire Canada : Je vous remercie, monsieur le président et honorables sénatrices et sénateurs. Nous sommes reconnaissants de l'occasion qui nous est offerte de vous adresser la parole dans le contexte de l'étude que vous menez actuellement sur les priorités en matière d'accès aux marchés internationaux pour le secteur canadien de l'agriculture et de l'agroalimentaire.

Comme vous le savez, un ambitieux programme commercial représente un volet important des efforts particuliers que le gouvernement consacre à la création d'emplois et à la croissance économique. Le commerce compte pour 6,7 p. 100 de notre PIB et pour un emploi sur cinq. Pour orienter ses efforts, le gouvernement a créé le Plan d'action sur les marchés mondiaux. Dans le cadre de ce plan, les efforts sont concentrés sur les marchés les plus prometteurs pour les entreprises canadiennes. Notre attachement à une promotion énergique du commerce et à l'application d'une politique commerciale ambitieuse aide notre secteur agricole et agroalimentaire. Comme le Canada exporte près de la moitié de sa production agricole totale, le potentiel de croissance soutenue du secteur repose sur sa capacité d'élargir ces marchés internationaux. Les exportations agricoles et alimentaires du Canada suivent une courbe de croissance depuis un certain nombre d'années. Ainsi, pour 2013, les exportations canadiennes de produits agroalimentaires et de produits de la mer ont atteint un sommet historique de plus de 50 milliards de dollars.

Le commerce et l'accès aux marchés constituent l'une des principales priorités d'Agriculture et Agroalimentaire Canada. Nous travaillons de très près avec l'Agence canadienne d'inspection des aliments ainsi qu'avec nos collègues du ministère des Affaires étrangères, du Commerce et du Développement à maintenir les marchés pour les secteurs de l'agriculture, à les élargir et à en conquérir de nouveaux. Nous travaillons aussi en étroite collaboration avec les provinces et l'industrie.

Les efforts internationaux du ministère sont principalement orientés vers trois objectifs stratégiques. Tout d'abord, cibler nos efforts sur les marchés prioritaires qui offrent les plus grandes possibilités économiques. Il s'agit notamment des États-Unis, du Mexique, de l'Union européenne, du Japon, de la Chine et de l'Inde.

Le deuxième objectif consiste à définir clairement les problèmes particuliers d'accès aux marchés et à nous engager à y trouver des solutions avec nos partenaires et intervenants, ce dont je traiterai plus en profondeur tout à l'heure.

Le troisième objectif est d'harmoniser les objectifs scientifiques et commerciaux d'Agriculture et Agroalimentaire Canada pour tirer le maximum des ressources du ministère.

Cette approche nous aide à assurer la cohérence et l'intégration de nos actions non seulement au sein du ministère, mais également avec nos partenaires fédéraux, les gouvernements provinciaux et territoriaux, ainsi que les intervenants clés. Collectivement, nous nous évertuons à utiliser tous les leviers à notre disposition pour influencer et faire avancer le programme international. L'un de ces leviers est le Secrétariat de l'accès aux marchés. Cet organisme a été créé il y a cinq ans et travaille en collaboration avec les gouvernements et l'industrie afin de mieux cerner et de régler les problèmes d'accès aux marchés, et ce, pour améliorer de manière vigoureuse et stratégique la compétitivité et les débouchés commerciaux du secteur.

Le Secrétariat de l'accès aux marchés a contribué à trouver des solutions à un certain nombre d'obstacles au commerce bilatéral dans les secteurs clés, dont ceux du bœuf, du porc et du canola. Au-delà de l'élimination des obstacles commerciaux urgents, nos spécialistes travaillent sain relâche pour veiller à ce que le secteur continue de bénéficier d'un accès ininterrompu à des marchés importants.

Dans le cadre de nos efforts, nous négocions de façon énergique des accords de libre-échange avec un certain nombre de partenaires commerciaux et nous obtenons des résultats importants. Depuis 2009, huit accords de libre- échange ont été conclus avec 38 pays. De plus, le Canada poursuit actuellement la négociation d'accords commerciaux avec plus de 32 autres pays.

Aujourd'hui, le Canada a signé des accords commerciaux avec des pays qui représentent près de la moitié des marchés agricoles et agroalimentaires du monde; soit 44 p. 100 du marché mondial est couvert par nos accords de libre- échange. Le potentiel commercial est plus du double lorsqu'on tient compte des pays avec lesquels nous poursuivons des négociations des négociations, à l'heure actuelle. Une fois que les négociations en cours seront conclues, le Canada aura accès à environ deux tiers du marché des importations agricoles. Cela comprend les accords avec l'Europe et la Corée. L'entente avec l'Europe conclue récemment représente l'initiative la plus ambitieuse du Canada et sa portée est plus vaste que celle de l'Accord de libre-échange nord-américain. Nous intervenons aussi présentement dans le contexte multilatéral du Partenariat transpacifique et de l'Organisation mondiale du commerce.

Au-delà des accords commerciaux officiels, notre ministère consacre également d'importants efforts à prôner bilatéralement et multilatéralement l'adoption de normes internationales, de règles et de règlements commerciaux fondés sur la science. Tous les efforts que nous déployons en faveur de l'accès aux marchés visent à maximiser les débouchés pour nos exportateurs. Nous voulons les aider à lancer leurs produits sur les marchés étrangers les plus lucratifs. À cette fin, nous avons créé un certain nombre d'outils pour aider nos intervenants.

[Traduction]

Le premier de ces outils est le système de soutien à l'accès au marché qui a été créé afin d'établir l'ordre des priorités des questions d'accès au marché pour le secteur canadien de l'agriculture et de l'agroalimentaire et pour permettre l'affectation des ressources appropriées. L'outil nous permet d'évaluer les questions d'accès au marché en fonction d'un certain nombre de facteurs prédéterminés, en consultation avec l'industrie. Le classement par ordre de priorité qui en résulte est communiqué chaque trimestre à l'industrie à des fins d'information et de validation continues.

Les intervenants de l'industrie et les représentants provinciaux et fédéraux se réunissent une fois l'an pour discuter des priorités en matière d'accès au marché et pour harmoniser nos objectifs pour l'année. Cette réunion annuelle a eu lieu précisément hier et les discussions ont été nourries.

L'un de nos principaux points forts est notre équipe de 12 délégués commerciaux pour l'agriculture en poste à l'étranger. Ils sont nos yeux et nos oreilles dans des marchés clés à l'étranger et ils se consacrent à promouvoir et à élargir le commerce agricole canadien. Ces postes, financés par AAC complètent l'effectif du service des délégués commerciaux du ministère des Affaires étrangères, du Commerce et du Développement. Ensemble, ils appuient notre secteur dans chaque région du monde.

De plus, des experts techniques de l'ACIA, notamment des vétérinaires, sont affectés à l'étranger afin de rendre possible une intervention rapide sur le terrain en cas de problèmes concernant l'accès aux marchés. En outre, le ministère continue d'aider l'industrie à poursuivre des débouchés commerciaux dans le cadre d'un certain nombre de programmes et d'activités, que je vais citer maintenant.

Tout d'abord, le programme Agri-marketing prévoit 341 millions de dollars pour aider les associations nationales et les petites et moyennes entreprises à procéder à des activités de promotion et de développement des marchés dans des marchés traditionnels et nouveaux.

Deuxièmement, les renseignements sur les marchés, comme les données commerciales et la recherche axée sur les clients aident à éclairer les décisions prises par les membres de l'industrie en ce qui concerne les nouveaux débouchés.

Troisièmement, la promotion des produits canadiens dans les nouveaux marchés contribue à faire connaître notre industrie. Nous mettons de l'avant la marque Canada, ce qui aide à distinguer les produits alimentaires canadiens de leurs concurrents, accroît leur visibilité et contribue à soutenir les ventes du secteur.

En outre, nous jouons un rôle de chef de file pour ce qui est de favoriser la coordination et la concertation de tous les efforts de développement des marchés tout en veillant à ce que l'industrie récolte les avantages d'une approche commune en matière de promotion du Canada et des produits canadiens. Ainsi, nous appuyons notamment huit expositions commerciales de prestige dans plusieurs pays étrangers et nous produisons des rapports d'étude de marchés ciblés. Ces salons de l'alimentation, comme le SIAL à Paris, qui a eu lieu au mois d'octobre dernier, offrent aux entreprises canadiennes d'énormes possibilités de mieux se faire connaître et d'accroître leurs ventes.

Dans le cadre de l'initiative Cultivons l'avenir 2, les provinces et les territoires bénéficient d'une plus grande marge de manœuvre pour adapter les programmes de promotion commerciale et de développement des marchés aux besoins locaux et sont bien placés pour jouer un rôle plus concret à cet égard.

Comme je l'ai mentionné, je suis accompagné de mon collègue, Gilles Saindon, sous-ministre adjoint délégué à la Direction générale des sciences et de la technologie du ministère. J'aimerais prendre un moment pour souligner le lien important entre nos deux secteurs.

La Direction générale des sciences et de la technologie suit une approche fondée sur les partenariats avec l'industrie, les universités et collèges et d'autres fournisseurs de services scientifiques dans le but de réaliser des progrès scientifiques et des innovations qui améliorent la résilience du secteur, favorisent de nouveaux débouchés et contribuent à la compétitivité du secteur, tant au Canada que sur les marchés mondiaux.

Par exemple, en ce qui a trait à l'accès aux marchés, les équipes scientifiques de la Direction des sciences et de la technologie travaillent, souvent en collaboration avec des experts d'autres pays, à des enjeux tels que la façon d'améliorer les possibilités de croissance des exportations de canola grâce à un accroissement du rendement des cultures à moindre coût et à une réduction de l'épandage de pesticides en leur substituant des agents de lutte biologique. Il s'agit d'une initiative pertinente étant donné que l'Union européenne a décidé d'abaisser les limites maximales acceptables de résidus de pesticides.

En ce qui a trait aux États-Unis, nos scientifiques collaborent aux questions de lutte antiparasitaire et d'emploi de pesticides et ils aident à améliorer l'accès des agriculteurs au marché mondial des nouveaux outils, plus efficaces, de lutte antiparasitaire. Ils travaillent à l'échelle mondiale à des solutions à des problèmes liés à la salubrité des aliments, problèmes qui peuvent limiter l'accès aux marchés, une des solutions étant la réduction de la contamination des céréales par les mycotoxines.

Aujourd'hui, notre réseau de 19 centres de recherche couvre des écozones agricoles variées à l'échelle du pays. Chacun de nos centres compte une masse critique d'expertise et d'installations spécialisées qui contribuent au succès international de l'agriculture canadienne. Par exemple, au Centre de recherches sur l'agriculture des Prairies semi- arides, situé à Swift Current, en Saskatchewan, les programmes de recherche sur le blé dur et de printemps contribuent grandement à fournir aux agriculteurs canadiens des variétés de blé qui peuvent rivaliser sur les marchés mondiaux. Le travail du centre portant sur le blé illustre comment l'investissement scientifique d'AAC apporte aux agriculteurs des avantages en matière de rendement, des bénéfices agronomiques et des attributs de qualité qui sont reconnus dans de nombreux marchés du monde.

Un autre exemple est celui du Centre de recherches sur les cultures abritées et industrielles, situé à Harrow, en Ontario. Le ministère favorise l'accès aux marchés dont bénéficie le soja canadien de qualité alimentaire grâce à son programme de recherche et de mise au point de variétés.

À l'heure actuelle, l'industrie dirige deux projets visant à aider le secteur, notamment celui des producteurs, des transformateurs et des exportateurs, à satisfaire de manière concurrentielle et rentable aux exigences des marchés internationaux en matière de qualité.

Le Centre de recherche et de développement sur les aliments de Saint-Hyacinthe, au Québec, favorise l'accès aux marchés dont bénéficie le porc canadien grâce à son programme de recherche sur la qualité de la viande. Les chercheurs collaborent à la mise au point d'outils et de produits qui aident expressément le secteur canadien du porc à accéder au marché japonais.

Voilà quelques exemples précis de notre travail. Toutefois, de façon générale, la direction générale préconise une approche sectorielle pour aider l'industrie à relever les principaux défis scientifiques auxquels fait face l'agriculture du XXIe siècle : accroître la productivité agricole, rehausser le rendement environnemental, améliorer les attributs pour les utilisations alimentaires et non alimentaires, et lutter contre les menaces à la chaîne de valeur agricole et agroalimentaire.

Un mécanisme clé à l'appui de ce travail est le programme d'innovation en agriculture qui s'inscrit dans le cadre agricole fédéral-provincial-territorial Cultivons l'avenir 2. Il s'agit d'un programme quinquennal qui dispose d'un budget pouvant atteindre 698 millions de dollars. De ce montant, 468 millions de dollars sont destinés au financement de projets, selon les demandes présentées par des intervenants de l'industrie.

Le financement de la recherche-développement dirigée par l'industrie dans le contexte des grappes et des projets agroscientifiques aide directement à répondre aux besoins scientifiques du secteur qui sont dictés par les marchés intérieurs et internationaux. Les grappes ont pour but de mobiliser et de coordonner une masse critique d'expertise scientifique dans l'industrie. Les projets agroscientifiques visent un seul projet ou un ensemble restreint de projets scientifiques qui n'atteindraient pas la taille d'une grappe et qui peuvent être de portée nationale, régionale ou locale.

On peut constater que dans le contexte de notre planification stratégique de la science, nous cherchons à trouver des solutions pour le secteur, en adoptant une approche globale dans le cadre de nos collaborations avec nos partenaires afin que nos efforts de recherche, de développement et de transfert des connaissances s'inscrivent dans les fonctions d'autres fournisseurs de services scientifiques afin de donner suite aux priorités scientifiques du secteur.

[Français]

En conclusion, monsieur le président, j'aimerais vous donner quelques exemples de résultats concrets de notre démarche à ce jour. À la suite d'une longue négociation avec Taiwan, un accord a été signé en février dernier pour que le pays ouvre son marché au bœuf canadien non désossé et à d'autres produits du bœuf provenant d'animaux âgés de moins de 30 mois.

L'industrie canadienne du bœuf s'attend à ce que le marché du bœuf non désossé provenant d'animaux de moins de 30 mois s'élève à plus de 3 millions de dollars l'an prochain. À terme, elle prévoit atteindre 10 millions de dollars par année.

De plus, l'accord de libre-échange conclu récemment avec la Corée offrira d'importants avantages aux agriculteurs en raison de la suppression des droits de douane sur une grande variété de produits agricoles. À cet effet, l'Alliance canadienne du commerce agroalimentaire estime que cet accord pourrait accroître les exportations agroalimentaires canadiennes vers la Corée de plus de 800 millions de dollars par année.

En Chine, nos efforts intenses continuent de porter leurs fruits. Ce mois-ci seulement, nous avons signé une entente d'accès permanent au chapitre des exportations de cerises fraîches. Les exportations de cerises fraîches de la Colombie- Britannique se sont chiffrées, en 2014, à près de 7 millions de dollars. L'industrie estime que les exportations pourraient atteindre à l'avenir 20 millions de dollars par année.

Nous avons également signé une entente de coopération visant l'expédition de bleuets à l'essai pour la saison de 2015. L'industrie estime que l'accès pourrait atteindre 65 millions de dollars par année.

Un accord conclu récemment avec l'Union européenne sera pleinement mis en œuvre; 95 p. 100 des droits de douane de l'Union européenne applicables aux produits agricoles seront éliminés, y compris nos produits d'exportation comme les viandes, les céréales, les oléagineux, les fruits, les légumes et les aliments transformés.

Encore une fois, l'Alliance canadienne du commerce agroalimentaire estime que, lorsque l'accord sera finalisé, les exportations canadiennes annuelles vers l'Union européenne devraient croître de plus de 1,5 milliard de dollars.

Vous pouvez vous-mêmes constater les efforts concrets que nous déployons en faveur de notre secteur agricole et de notre économie. J'aimerais souligner que nous travaillons en étroite collaboration avec nos collègues du gouvernement fédéral, les membres de l'industrie et les gouvernements provinciaux. Tous nos efforts réunis assureront l'obtention des meilleurs résultats possible pour le secteur agricole et agroalimentaire canadien.

Nous sommes heureux d'avoir l'occasion d'être ici aujourd'hui et de répondre à vos questions. Je demanderais à mon collègue, Tony Ritchie, de faire le point sur les efforts de l'Agence canadienne d'inspection des aliments dans le cadre de l'initiative commerciale du gouvernement.

Le président : Je vous remercie, monsieur Seppey, des précisions que vous avez apportées.

Tony Ritchie, directeur exécutif, Politiques stratégiques et affaires internationales, Agence canadienne d'inspection des aliments : Je vous remercie. Je suis heureux d'être ici devant le comité ce matin.

[Traduction]

Accroître la compétitivité canadienne et les débouchés commerciaux figure parmi les priorités du gouvernement du Canada. Comme vous le savez, les producteurs agricoles canadiens œuvrent dans un environnement commercial extrêmement concurrentiel. La capacité de ce secteur à soutenir la concurrence sur la scène internationale repose largement sur la stabilité et la sécurité des systèmes de salubrité des aliments et de la santé des animaux domestiques et des végétaux au Canada ainsi que sur un environnement commercial international fondé sur des principes scientifiques.

L'ACIA joue un rôle clé à cet égard. Étant l'organisme de réglementation à vocation scientifique le plus important au Canada, l'agence dirige la participation du Canada au sein du comité sur les mesures sanitaires et phytosanitaires de l'Organisation mondiale du commerce, de l'Organisation mondiale de la Santé animale et de la Convention internationale sur la protection des végétaux et elle collabore avec Santé Canada au Codex Alimentarius.

Nous participons à des forums internationaux afin d'influencer l'élaboration de règles et de normes fondées sur des principes scientifiques et nous encourageons l'harmonisation avec des pays aux vues similaires sur des questions relatives à la salubrité des aliments, la vie et la santé des animaux et des végétaux, ainsi que la protection des consommateurs.

Nous faisons régulièrement des démarches auprès d'autres organismes de réglementation étrangers afin de résoudre les problèmes techniques liés à l'accès au marché en vue d'établir des exigences relatives à l'importation de produits canadiens. L'ACIA prend également part à des mécanismes bilatéraux officiels établis en vertu d'ententes et d'accords internationaux afin de faire progresser les activités de coopération réglementaires.

[Français]

L'ACIA joue également un rôle important dans la négociation des chapitres sanitaires et phytosanitaires des accords de libre-échange pour que les intérêts du gouvernement fédéral soient pris en compte et qu'ils trouvent leur expression dans l'avancement de son programme commercial ambitieux.

[Traduction]

Pour de nombreux pays, l'agriculture constitue un secteur national névralgique. Dans le contexte d'accords internationaux marqués par le démantèlement des tarifs douaniers frappant les produits agricoles, les pays posent souvent des obstacles commerciaux aux produits canadiens en imposant des conditions sanitaires et phytosanitaires d'importation qui ne sont ni nécessaires ni justifiés scientifiquement afin de protéger leur propre secteur agricole.

Nous avons également constaté que lorsque les économies émergentes modernisent leurs réglementations et leurs infrastructures liées à la santé des animaux, la protection des végétaux et la salubrité des aliments, elles peuvent élaborer des conditions d'importation et de nouvelles réglementations sans commune mesure avec les risques qui sont gérés, ce qui a des répercussions sur les exportations canadiennes.

Ces obstacles au commerce et ces conditions d'importation qui ne sont pas scientifiquement fondées varient d'un pays et d'un produit à l'autre.

L'ACIA fait des démarches auprès d'organismes de réglementation d'autres pays afin de défendre et de rechercher des solutions scientifiques pour protéger les intérêts de l'industrie canadienne. L'agence négocie des conditions techniques d'exportation et planifie la logistique des visites d'organismes de réglementation étrangers qui sont nécessaires à la vérification des systèmes canadiens avant de régler la question de l'accès. La négociation de conditions d'importation et d'exportation constitue une tâche complexe. Elle implique des évaluations de risques ou la réalisation de questionnaires et exige que les partenaires commerciaux aient une bonne compréhension du système réglementaire canadien. L'efficacité du système réglementaire canadien pour la santé des animaux, la protection des végétaux et la salubrité des aliments constitue la base de l'argumentation des experts de l'ACIA qui négocient les conditions d'importation et d'exportation.

Mon collègue vous a décrit les efforts concertés et couronnés de succès de l'ACIA et d'AAC et leur aboutissement à l'ouverture de marchés. Il a évoqué l'accès élargi du marché Canada-Taiwan de la viande bovine canadienne non désossée et il a donné certains autres exemples.

[Français]

L'ACIA joue un rôle important dans la certification de la conformité aux exigences d'exportation et l'émission de certificats, dans l'analyse des produits avant l'exportation telle que le demande le pays importateur, et dans la surveillance des maladies animales ou d'organismes nuisibles afin de démontrer ou de maintenir le statut de zoonitaire.

[Traduction]

L'effort mené conjointement par l'ACIA et AAC, lequel s'est révélé extrêmement efficace dans la résolution de problèmes liés à l'accès au marché, a également contribué à atténuer l'impact des perturbations non prévues sur le marché. L'embargo russe sur l'exportation des aliments du Canada cet été a fait en sorte que l'ACIA et AAC, de concert avec l'industrie, ont travaillé à déterminer rapidement les marchés où le Canada répond aux exigences.

Je voudrais maintenant souligner certaines mesures législatives de l'ACIA. En décembre 2013, le gouvernement a déposé des modifications aux sept lois agricoles administrées par l'ACIA et il s'agit du projet de loi C-18, Loi sur la croissance agricole. Les modifications proposées soutiennent le commerce international des produits agricoles et elles aideront à appuyer nos agriculteurs canadiens sur la scène internationale.

Voici trois exemples de modifications qui figurent dans ce projet de loi axé directement sur le soutien au commerce : modifications à la Loi sur la protection des obtentions végétales visant à soutenir l'industrie agricole du Canada dans l'accès aux nouvelles variétés végétales; modifications à la Loi relative aux aliments du bétail et à la Loi sur les engrais permettant la délivrance de permis et l'enregistrement des exploitants et des installations d'engrais et d'aliments du bétail qui importent ou vendent des produits au-delà des frontières provinciales ou internationales, et ce, dans le but d'harmoniser la législation canadienne avec celle des partenaires commerciaux clés et d'aider nos industries d'engrais et d'aliments du bétail à préserver leur marché d'exploitation; modifications du pouvoir conféré au ministre d'émettre des certifications d'exportation pour de nombreux produits agricoles afin d'aider nos agriculteurs et l'industrie agricole à démontrer qu'ils répondent aux exigences nationales et étrangères.

En résumé, l'ACIA maintient des liens avec les agences de réglementation et les autorités d'autres pays au niveau bilatéral et par l'intermédiaire de forums multilatéraux internationaux pour promouvoir un environnement commercial fondé sur la science. Grâce à une telle approche, l'ACIA peut défendre avec confiance son propre cadre d'importation assurant ainsi la protection et la viabilité continues de notre base de ressources nationales, tout en défendant les objectifs de l'accès au marché que le gouvernement poursuit au bénéfice de l'économie canadienne.

[Français]

Le président : Vous avez joué votre rôle complémentaire à ce qui a été présenté par M. Seppey.

La sénatrice Tardif : Merci de vos présentations très informatives. Compte tenu du grand nombre d'ententes commerciales qui ont été signées et du nombre d'accords qui sont en voie d'être signés, il est évident que la demande de produits canadiens augmentera.

La question de la sécurité des aliments est une question importante si nous voulons nous assurer que nos produits canadiens maintiennent la qualité et les standards auxquels attendus.

Comment vous assurez-vous que ce standard sera respecté? Il y a toute la question, évidemment, de l'inspection des aliments. Est-ce que vous avez les ressources nécessaires pour veiller à ce qu'il y ait une inspection suffisante pour protéger la sécurité des aliments, qui est si importante?

[Traduction]

M. Ritchie : Merci beaucoup de la question. Il est extrêmement important de protéger notre base de ressources nationale. Comme je l'ai indiqué en effet et comme le laisse entendre votre question, le fait de ne pas protéger cette base nationale nuit à notre capacité d'échanges internationaux.

L'ACIA s'est dotée d'un cadre d'importation très progressiste qui se fonde sur des dispositions législatives et réglementaires et qui permet à l'agence de prendre les mesures qui s'imposent. Pour protéger le Canada au mieux, nous procédons par étapes multiples. Avant toute chose, nous établissons des liens avec les autres pays pour comparer les régimes de réglementation afin d'établir si nous pouvons intervenir à l'étranger avant qu'un produit n'arrive au Canada, si les circonstances l'exigent. Il arrive que nous concluions des accords avec des pays étrangers concernant la possibilité d'approbation préalable moyennant quoi nous pouvons procéder à une inspection du produit en terre étrangère avant qu'il ne soit expédié au Canada. Ainsi nous avons l'assurance que lorsque le produit arrive au Canada, il est salubre.

Il y a également des interventions à la frontière. C'est alors que nous travaillons en étroite collaboration avec l'Agence des services frontaliers du Canada pour garantir que les produits qui entrent au pays respectent les exigences canadiennes. Il y a une série d'étapes à franchir. Nous nous assurons du respect des exigences d'importation et nous faisons des vérifications ponctuelles à la frontière.

Une fois le produit sur le marché, l'ACIA applique un programme très progressif de surveillance des aliments, et nous appliquons les exigences de protection des végétaux et de la santé des animaux.

Nous faisons des enquêtes. Nous suivons de près les conditions du marché. Au besoin, nous procédons à des inspections. Si nous constatons des situations où il n'y a pas conformité, nous avons recours à une gamme d'outils qui varient suivant le risque d'une activité donnée.

Nous disposons d'un cadre robuste pour ce qui est des importations et cela nous permet de compter sur toute l'assurance nécessaire pour ce qui est de la salubrité des ressources que nous protégeons.

[Français]

La sénatrice Tardif : J'ai une question à poser à M. Seppey. Si je comprends bien, selon votre rapport concernant le Programme d'accès aux marchés, vous avez un budget de 211,5 millions de dollars, et ce budget devrait diminuer d'environ 16 p. 100 au cours des deux prochaines années. Comment le gouvernement fédéral entend-il favoriser le développement des marchés malgré la baisse prévue du budget des dépenses?

M. Seppey : En ce qui a trait au développement des marchés, il est vrai que nous avons eu à revoir la manière de mener nos activités de développement des marchés internationaux. Si rôle du gouvernement fédéral diminue, il y a moyen, par contre, de maintenir l'efficacité de l'effort en travaillant plus efficacement en partenariat avec les autres intervenants. C'est pour cela que j'ai fait référence aux différents outils à notre disposition. Il y a certains outils fédéraux comme le programme Agri-marketing, qui compte encore, sur une période de cinq ans, 351 millions de dollars qui peuvent être versés à des associations nationales ou à des PME.

D'autre part, plus tôt cette année, nous avons mis en œuvre le deuxième volet de programmes dans le cadre de l'initiative Cultivons l'avenir 2, le cadre fédéral, provincial et territorial de politiques agricoles et agroalimentaires. Dans ce cadre de politiques, qui comporte de nombreuses enveloppes budgétaires à frais partagés et qui offre plus de flexibilité, l'accent a été mis sur les activités de développement des marchés. Cela donne donc la possibilité aux provinces de jouer un rôle accru. En plus de ces ressources qui existent au Canada, nous avons tout le réseau des délégués commerciaux agricoles propres au ministère de l'Agriculture, qui en compte 12 à travers le monde dans les principaux marchés agricoles, ainsi que l'ensemble des délégués commerciaux que le ministère des Affaires étrangères a à l'étranger.

Il faut dire aussi que l'entreprise privée est souvent la mieux placée pour juger de la façon de développer les possibilités d'exportations dans les marchés étrangers. Le secteur privé consacre aussi de plus en plus de ressources pour obtenir des représentants dans les pays clés. Nous croyons qu'avec l'ensemble de cette nouvelle répartition entre les partenaires du gouvernement fédéral, des gouvernements provinciaux et de l'industrie, nous sommes en mesure de maintenir une grande efficacité des activités de développement des marchés.

La sénatrice Tardif : Bonne chance.

Le sénateur Maltais : Bienvenue, messieurs. Bravo pour le travail que vous faites. Il est impressionnant de voir que le Canada est présent dans tous les contrats et les ententes de libre-échange. C'est un dossier qui progresse, et on pense que le Canada est une terre d'avenir en matière de production agricole pour nourrir une partie de la planète.

Ce qui me chicote un peu, ce n'est pas nos exportations, car elles sont en croissance. Cependant, nos importations sont en croissance aussi, et cela représente de nombreux emplois qui pourraient se retrouver au Canada. Je vois dans la section alimentaire que l'on importe près de 50 p. 100 des produits manufacturés alimentaires des États-Unis. Est-ce qu'il y a un effort à faire pour manufacturer davantage ou est-ce protégé dans le cadre des ententes de l'ALENA?

M. Seppey : Merci, sénateur, pour cette question. Il n'y a rien dans les accords de libre-échange qui nous empêche d'améliorer notre capacité manufacturière. Vous parliez particulièrement de la transformation alimentaire. À vrai dire, nous avons une industrie extrêmement riche et qui est très concurrentielle dans plusieurs segments. Le Canada est l'un des rares pays au monde à être à la fois l'un des principaux pays exportateurs — vous mentionniez notre rang très élevé en matière d'exportations agricoles —, mais nous figurons également parmi les six premiers importateurs de produits agricoles et agroalimentaires au monde. J'ai tendance à voir cette situation comme étant riche et positive, parce qu'elle montre que nous sommes bien intégrés dans les chaînes de valeurs mondiales.

Le Canada est doté par mère Nature d'une incroyable ressource en matière de biomasse. Nous produisons nettement plus de produits agricoles que notre capacité de les absorber dans le marché. Par conséquent, il est très important d'être pleinement intégré dans les chaînes de commerce mondial. Ceci étant dit, nous avons très peu de barrières tarifaires dans des secteurs comme la transformation alimentaire ou dans les produits de base, à l'exception de la gestion de l'offre. Cette stratégie nous sert énormément et, à vrai dire, c'est l'un des éléments les plus prometteurs dans le cadre de l'accord de libre-échange avec l'Union européenne où les tarifs sur les produits transformés sont traditionnellement très élevés en Europe et très complexes selon le pourcentage d'intrants basés sur les céréales, le sucre; sur les produits laitiers, les tarifs peuvent varier énormément.

Grâce à l'accord conclu, une fois qu'il sera mis en œuvre, dès le premier jour, le Canada ne fera plus face à des tarifs au sein du marché de l'Union européenne. Nous serons le seul pays développé à bénéficier de cet avantage, à part les pays voisins de l'Union européenne comme la Suisse. Par conséquent, nous aurons un énorme avantage.

Je crois que, dans un contexte nord-américain — vous parliez de l'intégration du marché nord-américain des produits transformés —, cela offrira peut-être davantage d'opportunités de prévoir plus d'investissements au Canada dans le domaine de la transformation alimentaire, parce que cela pourrait servir de plateforme pour les entités nord- américaines d'exporter vers le plus grand marché agricole au monde, qui est celui de l'Union européenne.

Le sénateur Maltais : Merci beaucoup de vos explications. Vous avez dit, en ce qui concerne les accords de libre- échange ou les marchés que nous sommes en train d'ouvrir avec la Chine, le Japon, et cetera, qu'il y a tout de même un marché de près d'un milliard de personnes sur lequel on ne s'est pas encore beaucoup penché au Canada, et il s'agit de l'Inde. On sait que l'Inde a vraiment besoin de produits alimentaires. Est-ce que le Canada peut entrer sur ce marché? À quelles conditions? Ce sont tout de même presque un milliard de personnes qui ont faim. Est-ce que le Canada peut avoir des portes ouvertes sans conclure un traité de libre-échange et, le cas échéant, à quel coût pour nos producteurs?

M. Seppey : Vous soulevez une question très importante. L'Inde est effectivement un marché important non seulement par sa taille, mais aussi par la modification des conditions démographiques. Il y a une classe moyenne qui est en pleine expansion, et toutes les analyses montrent qu'une classe moyenne en expansion amène des changements dans la diète alimentaire, soit une consommation de produits à valeur ajoutée plus élevée. C'est pour cela que l'Inde fait partie des six pays prioritaires du Programme d'accès aux marchés du ministère.

Cela représente deux volets : tout d'abord, il faut bâtir des relations, il faut maintenir une présence et faire des missions commerciales. À ce titre, le ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire, l'honorable Gerry Ritz, a visité l'Inde au cours des derniers mois, en septembre, et a rencontré presque une dizaine de ministres et de cadres supérieurs pour discuter des possibilités d'affaires. Il a rencontré le ministre de l'Agriculture, le ministre de l'Industrie et de la Transformation alimentaire, et le ministre des Pêches. Tous ces efforts permettent de bâtir une relation, d'aider à ouvrir des portes à nos entreprises et à travailler à long terme.

En plus de ces efforts, je dois souligner que nous négocions présentement un accord de libre-échange avec l'Inde. Or, c'est une négociation qui pose un certain nombre de défis, parce que l'Inde n'a pas l'habitude de conclure des accords de libre-échange bilatéraux. Le Canada est l'un des rares pays avec lesquels l'Inde négocie un accord de libre-échange. Nous en sommes à presque 10 rondes de négociations à ce jour. C'est une négociation intensive, qui vise justement à créer des occasions uniques d'accès aux marchés et à nous permettre de prendre de l'avance sur nos concurrents internationaux.

Le sénateur Maltais : Merci beaucoup.

[Traduction]

La sénatrice Merchant : Ma question porte sur l'AECG, l'accord conclu avec l'Union européenne. Les tarifs seront progressivement éliminés sur une période de sept ans, si je ne m'abuse, mais je pense que nos agriculteurs peuvent commencer dès maintenant à exporter le maïs. Ils s'inquiètent toutefois de l'attitude des Européens à l'égard des OGM. Ont-ils raison? Que faites-vous pour aplanir cette difficulté?

M. Seppey : Vous avez tout à fait raison, car en vertu de l'accord avec l'Union européenne, la vaste majorité des tarifs sera abolie immédiatement après l'entrée en vigueur de l'accord.

À l'exception de quelques produits sur lesquels l'Union européenne n'est pas à l'aise, c'est-à-dire le porc, le bœuf et le maïs, la libéralisation se fera sur sept ans, moment auquel l'accès sera élargi. Les exportations de maïs seront en franchise de droit. Par la suite, le tarif de la nation la plus favorisée s'appliquera.

Les organismes génétiquement modifiés sont un sujet névralgique en Europe. Notre organisme n'a pas signalé cela comme étant un problème, car, surtout dans le secteur de la viande rouge, ils estiment que les débouchés du point de vue volumes et accès justifient des méthodes de production libres d'hormones dans le cas de la viande rouge, c'est-à- dire sans OGM.

Nous avons examiné sur quoi se fondait l'Union européenne pour établir sa réglementation des OGM. Ce n'était pas toujours des données scientifiques, mais plutôt d'autres facteurs. Étant donné le résultat et les engagements que nous avons obtenus avec l'accord de libre-échange Canada-Europe, nous continuons d'intervenir auprès des organismes de réglementation de l'inspection des aliments et aussi auprès des scientifiques pour faire mieux comprendre les avantages de la biotechnologie. Étant donné les défis qu'il faut relever à l'échelle mondiale pour garantir l'approvisionnement en nourriture, nous ne pouvons pas ignorer les progrès de la technologie. Ce n'est pas une panacée, mais cela fait partie des solutions aux défis que nous devons relever à l'échelle mondiale.

La sénatrice Merchant : Monsieur Ritchie, vous avez parlé ce matin, et d'autres témoins l'ont fait également, de l'embargo russe. Comment les choses se sont-elles passées?

M. Ritchie : En première partie de ma réponse, je vous parlerai du partenariat. Nous travaillons en partenariat avec l'industrie et nos collègues d'Agriculture et Agroalimentaire Canada et du ministère des Affaires étrangères et du Commerce international.

L'embargo pose dans certains cas un problème quand les produits sont déjà en route. Dans le cas de la Russie, dans un premier temps, nous aurions demandé aux autorités russes d'accepter le produit déjà en route ou arrivé tout près des côtes. Ce serait là la première intervention. Nous aurions tenté de négocier avec les autorités russes. Advenant qu'elles refusent les produits, et ce fut le cas en l'occurrence, nous aurions travaillé rapidement avec l'industrie pour trouver des marchés d'appoint. L'industrie a déjà commencé le travail nécessaire et a une bonne idée des marchés nécessaires.

En outre, nous sommes en train de négocier toute une gamme de marchés dans divers pays pour nos produits canadiens. Étant donné les renseignements que nous possédons, nous et l'industrie, nous pouvons ensemble identifier rapidement des marchés d'appoint à des distances économiquement viables. Les pays concernés s'entendront avec nous pour que les conditions d'embarcation soient respectées. De notre côté, nous pourrons émettre les certificats d'exportation valides pour obtenir l'acceptation de la part de ces marchés. C'est alors que les produits déjà en route seront réacheminés vers les marchés d'appoint.

Tout produit qui n'aurait pas quitté le Canada n'aboutirait pas à destination. Toutefois, des négociations seront menées avec les marchés qui acceptent d'accueillir les produits déjà en route afin de leur offrir un volume supplémentaire. Tout produit qui n'aurait pas quitté le Canada trouverait ainsi automatiquement un marché d'appoint.

La seule façon de réaliser cela de façon efficace et dans les temps est de procéder par partenariat. À la vérité, nous devons être reconnaissants à l'égard de l'industrie pour le travail accompli jusqu'à présent par l'intermédiaire du Secrétariat de l'accès au marché pour ce qui est de l'identification des marchés prioritaires. Dans l'industrie, le dialogue est ouvert et transparent et on y trouve des renseignements que nous n'avons pas. Les intéressés savent quels marchés ils souhaitent voir s'ouvrir à eux. Les rapports que nous avons avec eux nous ont bien servi en nous permettant de déployer nos ressources suivant un meilleur ordre prioritaire et d'intervenir rapidement face à une telle perturbation.

[Français]

Le sénateur Dagenais : Merci à nos trois invités. Je voudrais revenir sur la gestion de l'offre. La gestion de l'offre est un engagement du gouvernement actuel envers les producteurs, mais on sait que, parfois, elle peut créer des irritations chez nos partenaires mondiaux. Parlez-nous des difficultés que cela peut engendrer dans le développement des exportations. J'aimerais que vous nous disiez s'il serait possible d'apporter des amendements au principe de la gestion de l'offre, qui pourraient aider davantage les producteurs de chez nous.

M. Seppey : Tout d'abord, en ce qui concerne le premier élément de votre question quant à l'impact sur nos efforts d'exportations, nous préconisons — et je pense que vous avez entendu le témoignage du président de la Fédération canadienne de l'agriculture, M. Bonnett, plus tôt, dans le cadre de vos délibérations — le fait que le Canada adopte une position équilibrée, c'est-à-dire que notre secteur agricole soit extrêmement diversifié, de sorte qu'il soit très dynamique en matière d'exportations. Nous avons également le secteur de la gestion de l'offre qui est davantage axé sur le marché intérieur. Cette caractéristique ne nous a pas empêchés de négocier les accords de libre-échange conclus jusqu'à maintenant.

Dans le cas de l'Union européenne, cela posait un certain nombre de défis compte tenu de l'intérêt très marqué des Européens envers les fromages. Cela ne nous a pas empêchés d'atteindre un résultat qui préserve le système de gestion de l'offre.

Il faut noter qu'une grande partie de l'intérêt de nos partenaires commerciaux pour le marché canadien en matière de gestion de l'offre découle indirectement du système de gestion de l'offre lui-même, qui garantit un revenu adéquat aux producteurs, mais qui fait en sorte également que le marché comporte un niveau de prix qui soit supérieur aux prix mondiaux. C'est ce qui rend le marché canadien attrayant pour nos partenaires commerciaux internationaux.

Dans cet esprit, lorsque nos homologues étrangers nous parlent davantage de l'accès aux marchés canadiens dans les secteurs de la volaille et des produits laitiers, nous nous faisons un devoir de leur rappeler le fait que le marché canadien est intéressant, parce qu'il y a justement un système de gestion de l'offre. Donc, il est certain que cela suscite énormément d'intérêt de la part de certains de nos partenaires commerciaux. Nous pensons à nos partenaires transpacifiques, qui comprennent la Nouvelle-Zélande et l'Australie, qui sont de grands exportateurs de produits laitiers, et qui ont donc un intérêt très marqué. De notre côté, nous avons des intérêts très marqués dans d'autres pays pour la viande rouge et les céréales. Chaque participant a ses intérêts qui lui sont plus sensibles.

La position du gouvernement est extrêmement claire. Nos instructions en tant que négociateurs viennent des orientations gouvernementales. La gestion de l'offre couvre une portion très limitée du commerce et un nombre très limité de nos lignes tarifaires. Sur l'ensemble des autres lignes tarifaires, le Canada est extrêmement ouvert. Nous sommes en mesure de développer un rapport de négociation très intéressant qui nous permet, justement, de faire avancer les intérêts de nos exportateurs tout en préservant un système qui a bien fonctionné pour les producteurs jusqu'à maintenant.

Le sénateur Dagenais : Merci beaucoup.

Le sénateur Robichaud : Je ne peux m'empêcher d'enchaîner sur la question de la gestion de l'offre. Lorsque vous dites que vous avez protégé le système de la gestion de l'offre, vous avez une interprétation différente de celle que je peux avoir. La gestion de l'offre restera en place aussi longtemps que nous la protégerons; la protéger, c'est ne pas admettre de produits, comme nous l'avons fait avec l'Union européenne, c'est-à-dire laisser 18 000 tonnes de fromages entrer au pays. Vous avez parlé de je ne sais combien de litres de lait qui ne seront pas produits par les producteurs canadiens. Alors, il ne faudrait pas dire que vous protégez entièrement le système. Vous essayez de le protéger. Si la gestion de l'offre tombe, c'est que nous lui tirerons tranquillement un petit tapis par-ci, et un petit tapis par-là. Vous comprenez d'où je viens? Je comprends votre position et vous devez défendre la position du gouvernement.

Mais là n'était pas ma question. Des témoins ont comparu mardi, dont M. Pomerleau, président de Canada Porc International. Ils ont défendu les efforts du gouvernement, et c'était quelque chose à entendre.

M. Pomerleau a fait part de ses préoccupations à propos d'une agence qui avait changé ses structures. Selon lui, cela peut représenter une menace pour la marque du Canada, qui est reconnue partout dans le monde et qui est fondée sur notre système efficace de surveillance. L'agence en question était l'Agence canadienne d'inspection des aliments. Alors, monsieur Ritchie, ma question s'adresse à vous. M. Pomerleau est inquiet du fait qu'il n'y a plus de recrutement. D'après lui, les inspecteurs ne sont pas des personnes qui peuvent recevoir une formation directement d'une maison de formation ou de collèges communautaires. Il y a une formation à suivre sur place. Ils étaient tout à fait extraordinaires, les gens qui y travaillaient, de par leur expertise. Toutefois, aucun recrutement n'est fait, et cela le préoccupe beaucoup, n'est-ce pas, monsieur le président? Pouvez-vous nous rassurer, en nous affirmant que le recrutement se fera?

[Traduction]

M. Ritchie : Merci beaucoup de cette question.

Comme vous le savez, l'agence procède à une modernisation d'envergure de ses activités. Cela se fait à plusieurs niveaux. Nous examinons notre cadre législatif et réglementaire afin de le rendre le plus moderne possible. La Loi sur la salubrité des aliments pour les Canadiens en est un exemple tout indiqué. Nous examinons également la façon de moderniser nos activités d'inspection. Par exemple, nous voulons nous assurer que nos inspecteurs sont bien formés. Nous avons fixé des exigences pour la formation et à l'avenir nous seront en mesure de les moderniser pour les rendre progressistes et au diapason de ce qui se fait dans d'autres pays. Nous veillons, grâce à une structure organisationnelle appropriée et l'orientation que nous donnons à ces inspecteurs, à ce qu'il y ait cohérence dans la façon dont ces derniers interprètent notre régime réglementaire si bien que les entités réglementées puissent avoir l'assurance d'une application cohérente quel que soit l'endroit où elles opèrent au pays.

En outre, pour ce qui est de la gestion du risque, nous veillons à ce que nos inspecteurs soient affectés aux secteurs et aux produits qui présentent les risques les plus élevés au Canada. Nous adoptons donc une approche axée sur le risque et redéfinissons notre façon de procéder.

Pour le moment, grâce à ces efforts de modernisation, les pratiques de l'ACIA sont tout à fait comparables à celles de nos partenaires internationaux progressistes et, dans certains cas, elles sont même supérieures. Nous avons un cadre très solide dans lequel nous allons pouvoir continuer à bâtir et à moderniser. Lorsque nous aurons besoin de recruter des inspecteurs, nous le ferons, et ces inspecteurs recevront la formation nécessaire et seront déployés en fonction du risque.

[Français]

Le sénateur Robichaud : Vous avez fait le tour de la question, monsieur Ritchie. Vous n'avez pas du tout soulevé la question de la compétence des inspecteurs. La façon de faire de l'ACIA n'est pas remise en question non plus, parce que des contrôles sont exercés un peu partout. M. Pomerleau s'inquiète du fait que le recrutement nécessaire n'est pas fait pour veiller à ce que l'expertise soit toujours en place. Vous m'avez dit qu'il y aura du recrutement. Est-ce que c'est le cas en ce moment?

[Traduction]

M. Ritchie : Permettez-moi de revenir un peu en arrière. Dans le budget de 2014, l'agence a reçu des ressources pour un certain nombre de secteurs en particulier. Nous avons obtenu quelque 390 millions de dollars sur cinq ans pour renforcer notre système d'assurance de la salubrité des aliments afin de mieux protéger les familles canadiennes. Nous avons reçu des ressources pour déterminer les meilleurs moyens d'empêcher l'entrée d'aliments insalubres au Canada et pour maintenir certains programmes très importants. Cet investissement de la part du gouvernement du Canada nous permet de recruter des inspecteurs là où nous en avons besoin, selon les risques et les activités. Alors effectivement, grâce à l'intervention du gouvernement, nous avons la capacité de donner suite aux mesures annoncées dans le budget de 2014 — et nous avons fait des progrès à cet égard.

Comme toujours, il y a des inspecteurs qui nous quittent, qui partent à la retraite, par exemple, et l'agence, comme tout autre organisme, doit prendre des décisions pour les remplacer et prendre des mesures de dotation pour répondre à nos exigences et aux besoins et aux risques de ces postes qui deviennent vacants.

Bien sûr, nous recrutons au besoin et, en fait, nous donnons suite aux annonces budgétaires du gouvernement qui sont accompagnées de fonds additionnels pour l'agence. Dans ces cas en particulier, effectivement, nous recrutons lorsqu'il le faut.

[Français]

Le sénateur Robichaud : Vous me dites que, à l'heure actuelle, le recrutement n'est pas nécessaire?

[Traduction]

M. Ritchie : Pour ce qui est du recrutement, nous en faisons, comme je l'ai dit. Si un poste devient vacant et que c'est un poste que nous jugeons important et qui se trouve dans un secteur de l'agence où nous estimons que le risque est élevé, bien sûr, nous allons le doter. Le recrutement des inspecteurs est déterminé au cas par cas. Comme je l'ai déjà dit, lorsque le gouvernement juge bon, au moyen de divers crédits budgétaires, de financer de nouveaux secteurs prioritaires, nous renforçons nos effectifs.

[Français]

Le sénateur Robichaud : J'espère que cette réponse répondra aux attentes de M. Pomerleau. Je suis sûr que l'industrie continuera de vous encourager à garder les services de l'ACIA au plus haut niveau, parce qu'il s'agit d'un élément clé de nos échanges commerciaux.

Vous avez mentionné qu'il y a eu des ajustements dans les budgets, c'est-à-dire moins d'argent, et que vous avez trouvé une façon de travailler plus efficacement avec vos partenaires, soit les gens de l'industrie et les provinces. À l'heure actuelle, les provinces sont confrontées à des déficits opérationnels considérables. À ce qu'on nous dit, le gouvernement fédéral est à la veille de générer d'importants surplus dont il ne saura que faire. Comme le dit l'expression, est-ce qu'on met la charrue devant les bœufs en comptant sur les provinces pour combler le vide, alors qu'elles n'en ont pas les moyens? Le gouvernement fédéral se retire graduellement, alors qu'il dispose de moyens. C'est une question politique, et vous ne pourrez sans doute pas me répondre. Mais, moi, j'ai exprimé mon point de vue.

Le président : Sans y répondre, je n'ai aucun doute, monsieur Seppey, que le sénateur Robichaud prendra part aux réunions à venir du comité.

Le sénateur Robichaud : Je vais envoyer mes questions par écrit.

Le président : On peut toujours compter sur votre présence, honorable sénateur Robichaud. Maintenant, je donne la parole au sénateur Oh.

[Traduction]

Le sénateur Oh : Merci, messieurs, d'être venus aujourd'hui. Vos exposés étaient tout simplement merveilleux. Je tiens à dire qu'AAC et l'ACIA ont tous les deux fait un travail remarquable pour aider le Canada à exporter ses produits agroalimentaires dans le monde entier. Je dirais qu'il n'y a aucun autre gouvernement que celui-ci, ce gouvernement fédéral, qui a autant aidé les agriculteurs canadiens à exporter leurs produits agroalimentaires partout dans le monde.

J'ai eu l'honneur d'accompagner le premier ministre Harper en Chine juste la semaine dernière et j'ai assisté à la signature de l'accord nous donnant accès au marché des cerises et des bleuets en Chine. Vous avez mentionné que nous exportons chaque année en Chine pour 20 millions de dollars de cerises et 65 millions de dollars de bleuets frais. Est-ce que ces fruits viennent de la Colombie-Britannique ou de diverses régions du Canada?

M. Ritchie : Les cerises proviennent principalement de la Colombie-Britannique. Elle produit aussi beaucoup de bleuets. On en trouve aussi dans d'autres régions du Canada. Je crois que les Maritimes, d'ailleurs, ont une assez grande production de bleuets.

Le sénateur Robichaud : Et le Québec.

M. Ritchie : Et le Québec et l'Ontario aussi, oui.

Le sénateur Oh : Très bien. Est-ce qu'on négocie encore une augmentation des exportations de bœuf vers la Chine?

M. Ritchie : Absolument. Ces négociations se poursuivent, et aussi avec plusieurs autres pays dont on essaie d'ouvrir l'accès pour notre bœuf.

Le sénateur Oh : Il y a maintenant un plafond. C'est, je crois, 30 mois?

M. Ritchie : C'est exact. La Chine impose certaines conditions à notre accès à ce marché. Beaucoup de ces exigences ne sont pas nécessairement conformes aux normes internationales de l'OIE. La Chine, comme bien d'autres pays, impose ses propres conditions. Notre point de vue, à cet égard, c'est que ces conditions ne sont pas conformes à celles de l'OIE et elles ne sont pas fondées sur des faits scientifiques, et c'est pourquoi nous poursuivons ces discussions.

Le ministre ne s'est pas ménagé, en Chine. Nous sommes très productifs. Nous avons mis sur pied un groupe de travail sur la santé animale, composé de représentants de l'ACIA et de la Chine, et une bonne part de ces débats portent sur ces obstacles techniques que dresse la Chine, dans le but de lui démontrer que les conditions qu'elle impose ne sont pas justifiées scientifiquement et que nous devrions pouvoir ouvrir ce marché à un accès accru du bœuf.

Le sénateur Oh : Un témoin, hier, nous disait que le bétail est exporté en Chine ou ailleurs, il y a plus de valeur ajoutée sur le marché international que sur le marché national. Par exemple, les langues se vendent beaucoup plus cher. Le prix est donc augmenté de 30 $ par vache pour les exportations vers l'étranger.

Pour terminer, je tiens à remercier l'ACIA et AAC pour l'excellent travail qu'ils ont fait. Merci.

La sénatrice Tardif : J'ai une autre question dans la même veine que celle du sénateur Robichaud, sur le programme d'inspection. C'est intéressant, parce que chaque fois qu'on entend les termes « modernisation » et « efficiences du cadre » ça signifie aussi qu'il y a eu des coupes budgétaires. Ces expressions semblent être celles utilisées dans ce genre de situation.

Je me souviens de la crise du rappel de viande, avec Maple Leaf, il y a trois ou quatre ans. À l'époque, je ne sais pas si c'est parce qu'il y avait plus d'inspecteurs, mais il est certain que la surveillance était plus rigoureuse. À ce que j'ai compris, par la suite, les budgets ont été réduits et, dans la foulée, le nombre d'inspecteurs. Je parle ici de l'industrie de la viande. Combien avez-vous d'inspecteurs actuellement? Combien en aviez-vous il y cinq ans? Où en sommes-nous?

M. Ritchie : Je n'ai pas ces chiffres avec moi aujourd'hui, alors je ne saurais vous répondre.

La sénatrice Tardif : Pourriez-vous les envoyer au comité? J'aimerais savoir le nombre d'inspecteurs qu'il y a eu ces cinq dernières années.

Le président : Monsieur Ritchie, pourriez-vous transmettre ces renseignements au greffier?

M. Ritchie : Oui, certainement.

La sénatrice Tardif : Merci. Pouvez-vous me dire combien de recommandations découlant du rapport du groupe présidé par Sheila Weatherill ont été exécutées?

M. Ritchie : Toutes ces recommandations sont maintenant en vigueur.

La sénatrice Tardif : C'est en vigueur. Je vous remercie.

Le sénateur Enverga : Je vous remercie pour votre exposé. Je sais que vous avez travaillé très fort sur ces accords de libre-échange. Tandis que nous tentons de commercialiser nos produits d'un pays à un autre, nous exposons aussi le marché à certaines pressions. Nous avons entendu la dernière fois les témoignages de producteurs laitiers au sujet de l'AECG, et cet accord commercial leur pose problème. Est-ce que vos organisations ont des solutions à proposer à cela? Comment pouvez-vous soutenir le secteur? Combien d'autres industries du Canada est-ce que vous aidez? Avez- vous des détails?

M. Seppey : Je peux vous donner une certaine idée. Il est clair que toute négociation commerciale est une espèce de contrat. Pour obtenir quelque chose de l'autre côté, il faut traiter de ce qui l'intéresse. Dans notre cas, en agriculture, nous avons un marché très ouvert. Ce n'est que pour les quelques produits assujettis à la gestion de l'offre qui sont plus dirigés, et pour lesquels le système impose des contrôles des importations, que nous sommes un peu moins ouverts.

Dans ce contexte, c'est ce que traduisait l'annonce du premier ministre en octobre 2013, quand cet accord de principe a été conclu, et j'entends par là les grandes lignes des accords. Ils seront faits pour l'accès aux marchés du fromage. Il était clair que cela aurait une incidence sur l'industrie laitière du Canada, tant pour les producteurs de lait que pour les producteurs de fromage et les transformateurs des produits laitiers. Comme il le reconnaissait, le premier ministre, lorsqu'il a annoncé cet accord de principe, s'est engagé à ce que le gouvernement travaille en étroite collaboration avec l'industrie et fasse un suivi minutieux de la mise en œuvre de l'accord et si celui-ci devait avoir une incidence, il s'est engagé à indemniser les producteurs directement touchés. L'engagement est maintenu. C'est un engagement solennel du premier ministre.

Depuis 2013, tout au long des négociations, nous avons consulté de près l'industrie, et particulièrement les producteurs de lait et les transformateurs de produits laitiers. Depuis un an, j'ai rencontré de nombreuses compagnies, des agriculteurs, des organisations agricoles à l'échelle nationale et provinciale. Vous avez entendu le témoignage de l'Association des transformateurs laitiers du Canada et d'autres intéressés. J'ai rencontré tous ces gens depuis un an à diverses occasions, et même pas plus tard que la semaine dernière, dans le but de comprendre ce que nous pouvons faire pour les aider à s'ajuster.

Il est important de souligner que l'accord comprend un engagement d'accès aux marchés pour 17 700 tonnes de fromage. Il commencera à arriver dès l'entrée en vigueur de l'accord, soit d'ici un an et demi ou deux ans. Nous ne verrons pas d'augmentation des importations avant 2017. Ce sera graduel. Dix-sept mille sept cents tonnes ne vont pas débarquer du jour au lendemain. Ce sera sur une période de sept ans. Pendant ce temps-là, le gouvernement peut faire bien des choses, et ce n'est pas que le gouvernement fédéral qui peut agir dans ce domaine, mais tant le gouvernement des provinces que le gouvernement fédéral, ainsi que le secteur laitier, qui a plusieurs outils en main pour trouver des solutions.

Si vous le permettez, pour revenir sur ce que disait le sénateur de Saint-Louis-de-Kent tout à l'heure au sujet des 170 millions de litres de lait qui ne pourraient plus être produits, je ne crois pas qu'il y ait une garantie que cela se passe ainsi, parce que le secteur laitier a lui-même reconnu qu'il est très difficile d'évaluer l'incidence réelle, comme c'est toujours le cas des éléments économiques. Le secteur pourrait très bien s'ajuster à la réalité. Il y a croissance de la consommation de produits laitiers — pas une croissance énorme — en raison de la croissance de la population. La consommation de produits laitiers par habitant au Canada est inférieure à celle d'autres pays développés. On a entamé un virage au moyen de la commercialisation, de diverses innovations et du perfectionnement de l'expertise des fromagers artisans du Canada en prenant appui sur les excellents actifs que nous avons dans le domaine laitier. Par exemple, nous avons l'une des meilleures génétiques laitières du monde. Ces éléments pourraient contribuer à atténuer l'incidence de l'accord. Cela ne veut pas dire qu'ils élimineront complètement les effets négatifs, mais il y a des possibilités. L'industrie et le gouvernement disposent de divers outils pour atténuer ces effets.

Le sénateur Enverga : Évidemment, vous leur ouvrez le marché. Est-ce exact? Ils auront accès à un marché plus important. C'est plutôt comme si vous leur donniez les outils. Est-ce votre façon de faire? Y a-t-il plus d'information sur d'autres marchés?

M. Seppey : Pour ce qui est de l'accès au marché, il est vrai qu'en vertu de l'entente avec l'Europe, tous les tarifs douaniers européens seront éliminés dès que l'accord prendra force de loi. Cela dit, ces tarifs ne sont qu'un élément qui bloque l'accès; il y en a d'autres. L'industrie devra s'organiser afin de créer les conditions pour pouvoir profiter de cette occasion, si elle le désire. Je crois que vous avez entendu les témoignages des éleveurs laitiers et des transformateurs laitiers, qui ont parlé du fait qu'il leur était difficile en vertu du système actuel, de profiter pleinement de ces opportunités d'exportations. Je réitère que notre secteur de gestion de l'offre est géré principalement par les provinces, qui sont aussi responsables de la réglementation. Donc, notre secteur est surtout réglementé par les provinces et par le secteur, et non par le gouvernement fédéral.

Le sénateur Enverga : J'ai une autre question, si vous le voulez bien, sur l'Agence canadienne d'inspection des aliments. Il n'y a pas si longtemps, nous avons étudié les abeilles et les faibles concentrations de néonicotinoïdes. Cet accord aura-t-il une incidence sur notre secteur apicole? Est-ce une préoccupation pour ce secteur?

M. Seppey : Il n'y a pas de lien direct entre l'accord de libre-échange et ces éléments, parce qu'en vertu de l'accord de libre-échange, on codifie les mesures tarifaires, les conditions d'accès au marché et les principes sanitaires et phytosanitaires. Votre comité a étudié cette question pendant un certain temps, vous savez donc qu'il y a des discussions intenses entre les autorités réglementaires et les secteurs industriels à cet égard.

Il n'y a rien dans l'accord qui empêcherait le Canada d'exporter des produits provenant de semences traitées avec ces produits. Il revient au Canada et aux Canadiens de décider comment réglementer ce genre de substances. Cela peut se faire de la façon jugée appropriée par le Canada, tout en étant conforme aux principes contenus dans les accords de libre-échange.

La sénatrice Merchant : J'ai une question supplémentaire qui porte sur la gestion de l'offre. Vous avez parlé avec l'industrie. Vous semblez être au fait des enjeux. Vous admettez qu'on devra accorder des réparations. Savez-vous quel serait un montant approprié en compensation? Quel montant exige le secteur? Est-ce qu'ils vous ont dit quelles seraient les conséquences? On verra comment les choses se dérouleront, et quels seront les débouchés, mais vous avez sûrement eu des discussions plus substantielles avec le secteur n'est-ce pas?

M. Seppey : Absolument. L'une des raisons pour lesquelles nous les avions rencontrés après que les dispositions de l'accord ont été dévoilées était pour leur demander quelles en seraient, d'après eux, les conséquences. Ainsi, le gouvernement aurait une meilleure idée des mesures à prendre pour aider le secteur.

Pour ce qui est de la compensation, il est presque impossible d'arriver à un chiffre avant de constater les impacts sur le secteur à cause de l'augmentation des importations. Il y a tellement de facteurs qui entrent en ligne de compte.

Un des indicateurs qu'on peut utiliser pour calculer l'impact est l'effet des importations sur le volume des produits ou vendus aux transformateurs. Le producteur laitier, lui, étant donné qu'il aura du temps pour s'adapter, pourrait donc décider de faire une plus grande promotion de divers produits laitiers, ou il pourrait plutôt choisir d'adapter certains éléments du système afin d'accroître la production, s'il s'attend à ce que la demande pour les fromages canadiens baisse au profit d'autres produits laitiers, tels le yaourt, les nutraceutiques et d'autres produits davantage en demande.

La question de l'indemnisation doit être fondée sur les conséquences observées et d'autres éléments peuvent être pris en compte. Nous ne pourrons pas observer les éventuelles conséquences tant que l'accord ne sera pas en vigueur ce qui sera fait progressivement pour ce qui est de l'accès au marché, c'est-à-dire sur une période de sept ans.

La sénatrice Beyak : Merci beaucoup, messieurs. Le secteur agricole et agroalimentaire canadien est entre d'excellentes mains avec vous. Vous êtes professionnels et tout à fait au courant de la situation. Ce qui est très important est votre attitude. Étant donné les changements dans la conjoncture, je ne peux pas songer à une meilleure utilisation des deniers publics. Vous n'avez pas dit qu'il vous fallait faire davantage avec moins de ressources, mais que vous faites mieux avec moins de ressources et je vous en suis reconnaissante.

Vous avez répondu à l'essentiel de mes questions lors de votre déclaration liminaire. Des témoins nous ont parlé de la pénurie de main-d'œuvre. Discutez-vous de ce problème avec d'autres ministères? Quelle pourrait être la solution?

M. Seppey : C'est certainement un problème dont nous parlent nos clients. Nous avons mis en place des mécanismes qui nous permettent d'engager un dialogue avec l'industrie, et des tables rondes sur la chaîne de valeur se réunissent régulièrement pour discuter du secteur de la viande, de la transformation des aliments, des céréales et des semences et c'est l'occasion de discuter de l'importance de la compétitivité, de la durabilité et de l'innovation dans ces secteurs.

Dans tous les secteurs, mais à des degrés divers, il y a un problème d'accès à des travailleurs compétents, temporaires ou saisonniers. Je vais vous en donner deux exemples. Le secteur de la transformation de la viande ne peut tout simplement pas opérer sans l'aide de travailleurs temporaires. Cela tient aux conditions de travail et aux réalités économiques. Nous connaissons tous, surtout au Québec et en Ontario, le fait que les travailleurs étrangers prêtent main-forte au secteur des fruits et légumes. Dans le secteur horticole, par exemple, les défis à relever sont semblables à ceux du secteur des pêches avec des périodes où le travail est intense, pendant de longues heures, et des périodes où le travail est en veille, car c'est ainsi que mère nature fonctionne.

Nos clients nous parlent beaucoup de cette situation. À cet égard, il y a bien des discussions avec d'autres ministères qui ont une autre vocation, comme par exemple Citoyenneté et Immigration Canada et Ressources humaines et Développement des compétences Canada. En effet, nous tentons ainsi de trouver des solutions qui puissent répondre aux besoins des secteurs tout en respectant l'orientation d'ensemble du gouvernement et en tâchant de répondre aux défis que posent les modifications proposées au programme. C'est ce que nous faisons.

J'ai évoqué la réunion annuelle sur l'accès au marché que nous tenons avec les intéressés. Nous y discutons de tout, de la volaille, du bétail et du bœuf. À l'occasion de cette réunion, certaines personnes qui sont venues témoigner au comité ont soulevé ce problème précisément. Les arguments ont été entendus et nous allons tâcher d'aider l'industrie. Agriculture et Agroalimentaire Canada a la responsabilité de tenir compte des enjeux préoccupants du secteur et d'apporter sa participation pour influencer l'élaboration des politiques et règlements qui viennent en aide au secteur sur le plan de la compétitivité. Effectivement, nous travaillons avec d'autres ministères.

La sénatrice Beyak : Je suis sûre que vous trouverez une solution étant donné l'attitude positive dont vous avez fait preuve face aux autres difficultés. Merci.

[Français]

Le sénateur Robichaud : Ma question porte encore sur la gestion de l'offre. En réponse à une question d'un honorable sénateur, vous avez dit qu'il y avait des points de contrôle aux frontières du pays lorsque ces produits arrivaient sur notre territoire. Si je comprends bien, et si cela n'a pas changé, ce sont d'abord les agents de l'agence frontalière qui inspectent ce qui rentre au pays, n'est-ce pas? Ce sont eux qui avisent l'agence s'il doit y avoir une autre inspection? Est-ce que c'est le cas?

M. Ritchie : Oui, c'est le cas.

Le sénateur Robichaud : On a entendu le témoignage de producteurs de volailles, selon lesquels il entrait au pays, en provenance des États-Unis, plus de poulet de transformation qui, en réalité, était produit aux États-Unis, ce qui voulait dire qu'il y avait du poulet autre que du poulet de transformation qui entrait de cette façon.

D'ailleurs, c'est la même chose pour le fromage. Lorsqu'on envoie une préparation pour une pizza, on fait entrer du fromage au pays, mais il n'est pas considéré comme du fromage. Est-ce qu'on est en train d'examiner cette question? Parce que pour ces producteurs, cela représente tout de même une certaine activité économique qui ne leur donne pas d'avantages.

M. Seppey : Merci, sénateur. Vous soulevez la question du poulet de réforme? C'est connu sous différentes appellations.

Le deuxième point que vous soulevez, c'est celui de la préparation de pizza. La réponse courte est oui, le gouvernement examine ces questions dans le cadre de discussions étroites avec l'industrie.

En ce qui concerne le poulet de réforme, nous travaillons étroitement avec les Producteurs de poulet du Canada, l'Agence canadienne d'inspection des aliments, ainsi que l'Agence des services frontaliers du Canada pour voir comment nous pourrions traiter de cette question. À la base, il y a deux éléments : de tout temps, il y a eu une certaine importation de poulet de réforme qui servait d'intrant important pour l'industrie de la transformation alimentaire.

Certains segments de la population aiment le goût plus relevé de ces produits. C'est un intrant très important pour la transformation alimentaire, pour la préparation de soupe au poulet, par exemple, qui compte une grande partie du poulet de réforme importé. Il y a toujours eu de l'importation, et les producteurs de poulet le reconnaissent.

Par contre, le problème est lié au fait qu'il semble y avoir une grande quantité de poulet de réforme étiqueté comme tel, qui n'est donc pas soumis au contrôle des importations qui entrent, alors qu'il s'agirait peut-être de poulet standard. C'est justement sur cet aspect où on entre dans un domaine qui relève peut-être davantage de pratiques d'étiquetage qui ne sont pas conformes aux règles, et donc qui peut soulever des problèmes de fraude. C'est sur cet aspect en particulier que nous travaillons, étroitement, non seulement avec les Producteurs de poulet du Canada, mais avec les autorités américaines pour déterminer comment nous pourrions traiter de cette question. C'est une question complexe; nous travaillons dans la durée.

En ce qui concerne les préparations de pizza, un amendement au tarif des douanes a été adopté l'an dernier essentiellement pour clarifier le traitement tarifaire de ces produits, parce que, visiblement, il s'agit d'un vide juridique qui était exploité. Je n'utilise pas le terme de façon péjorative, mais il était utilisé par certains importateurs pour importer quelque chose qui était essentiellement du fromage. La correction a été apportée au tarif des douanes. Elle fait partie des amendements législatifs suivant la Loi de mise en œuvre du budget de 2013, donc cela a été fait l'an dernier. Le problème est résolu, parce que, maintenant, ces produits sont considérés comme étant essentiellement similaires à des fromages et ils sont donc assujettis au même contrôle frontalier que les produits fromagers.

Le sénateur Robichaud : Pour le poulet de réforme, il y a tout de même un certain temps que les producteurs nous ont parlé de cette situation. Quand est-ce que cela va se régler? Pendant que le problème n'est pas réglé, il y a du poulet qui entre, et ce n'est certainement pas à l'avantage de nos producteurs.

M. Seppey : Vous avez raison. Cependant, le défi est de départager les importations légitimes de celles qui le sont moins. Toute la question est de trouver une solution qui permette de ne pas jeter le bébé avec l'eau du bain. C'est ce qui est très important, parce que si on a une approche trop large, on va se retrouver avec une situation qui peut vraiment faire très mal à l'industrie de la transformation alimentaire. C'est une problématique que les producteurs de poulet comprennent parfaitement. C'est pourquoi nous travaillons avec eux pour trouver une solution. Les producteurs ont proposé un certain nombre d'approches innovatrices pour faire cette distinction. Le travail se poursuit assez intensément et de façon collaborative.

Le sénateur Maltais : Les histoires de poulet, il y en a beaucoup. Il m'en est arrivé une dernièrement. Je suis allé chez mon épicier m'acheter un poulet. C'était indiqué « poulet frais du Canada ». Mais il y avait beaucoup d'autres poulets sur l'étalage. J'ai demandé au jeune homme au comptoir si mon poulet était frais, car c'était un produit du Canada, et si les autres étaient gâtés, pourris, et dans ce cas, pourquoi on les laissait sur l'étagère. Si celui-ci est frais et que les autres ne le sont pas, pourquoi les garder? Le jeune homme ne le savait pas. Il est allé voir le propriétaire qui m'a donné des explications.

Laissons la gestion de l'offre pour examiner la gestion de la demande. On a un produit non exploité dans le golfe du Saint-Laurent, près du Nouveau-Brunswick, de la Nouvelle-Écosse, du Québec, de Terre-Neuve-et-Labrador, de l'Île- du-Prince-Édouard, que les Européens ont exclu de l'entente de libre-échange. C'est tout de même une ressource extraordinaire, en viande et en protéine, qui s'appelle le phoque.

Est-ce que, dans vos efforts pour signer des traités de libre-échange avec d'autres pays, il y aurait moyen de mettre cela en évidence pour donner une chance à nos pêcheurs? Le Canada pourrait alors augmenter facilement ses quotas de pêche au phoque puisqu'il y en a, et qu'on ne sait pas quoi en faire. Ils sont en train de détruire d'autres ressources halieutiques. Je pense qu'on pourrait peut-être faire une percée en dehors de l'Europe. Les Européens ne se rappellent pas qu'ils en ont mangé pendant les deux guerres mondiales et qu'ils aimaient cela. Est-ce qu'il y aurait moyen de faire une offensive pour la vente des produits du phoque?

M. Seppey : Dans le cadre des accords de libre-échange, le traitement tarifaire de ces produits n'est guère différent de celui des autres produits. Le problème n'est pas à ce niveau. Il y a deux types de mesures qui peuvent affecter le commerce de ces produits. Ce sont, d'une part, les questions sanitaires et, d'autre part, les mesures techniques qui peuvent avoir une incidence sur le commerce. C'est particulièrement cet élément qui pose problème à l'Union européenne indépendamment de la salubrité alimentaire du produit ou de la santé de l'animal ou des mammifères aquatiques. L'Union européenne a adopté des mesures qui ne sont pas fondées sur la science et qui relèvent davantage des préoccupations des consommateurs par rapport à toute une série de questions qu'ils jugent comme étant éthiques. Le Canada a porté plainte contre l'Union européenne sur ce type de mesures, jugeant qu'elles étaient incompatibles avec l'Organisation mondiale du commerce sur les obstacles techniques au commerce. Du point de vue du Canada, ce type de restriction est déjà incompatible avec les règles commerciales existantes. Quant au différend que nous avions avec les Européens, le groupe spécial qui a été établi pour traiter de cette question a rendu une décision qui ne répondait pas à tous nos arguments et qui n'allait pas dans la direction de nos arguments. Nous en sommes fort déçus. Dans le cadre des accords de libre-échange, je ne vois pas vraiment ce que nous pourrions faire de plus pour faire cette promotion.

Le sénateur Maltais : Je vous comprends. Il y a deux facteurs qui sont bien importants à établir. D'abord, nos phoques sont les mieux nourris au monde; ils ne mangent que du saumon et de la morue. Ils sont aussi de meilleure qualité. Il y a 500 millions d'Européens, mais laissons l'Europe de côté et allons offrir ce produit sur les grands marchés. On peut les emmener vivants, en boîte, congelés, de toutes les façons possibles. Faisons une offensive sur les marchés et oublions l'Europe et la communauté européenne, étant donné qu'ils sont toujours engagés dans des procès en ce qui concerne ce dossier. Ne perdons pas de temps avec cela, et allons voir d'autres marchés. C'est là que l'offensive de marketing doit être faite. Je ne nommerai pas les pays, mais vous les connaissez.

M. Seppey : En ce qui concerne le développement des marchés, nous pouvons examiner la question avec nos partenaires domestiques, les industries et les provinces. Par exemple, le comité fédéral-provincial sur le développement des marchés permet de cerner les marchés prioritaires et de coordonner nos actions en ce sens, si des industries et des provinces qui disposent de ressources manifestent un intérêt pour la promotion de ces produits. Donc, il s'agit définitivement d'un élément que nous pouvons intégrer aux stratégies de développement des marchés.

Le sénateur Maltais : Cependant, pour vendre des produits, il faut être en mesure de les offrir. Il y a tout de même plusieurs milliards de personnes qui ne connaissent pas la qualité et la douceur des produits du phoque. Alors, si on allait leur en offrir et leur en faire goûter, peut-être qu'ils en achèteraient. Par exemple, si on ne diffusait pas de publicités pour la bière au Canada, peut-être qu'on en vendrait moins. Il faut faire connaître les produits du phoque. Les « Bardot burgers » fonctionnent au Québec, et ils pourraient fonctionner ailleurs aussi. Il faut faire une offensive de marketing de ces produits ailleurs que sur le marché européen, qui est un petit marché pour le phoque. Il y a d'autres personnes à l'échelle de la planète qui veulent sans doute consommer des aliments de qualité comme la viande de phoque.

Le président : Pouvez-vous transmettre cette recommandation du sénateur Maltais?

M. Seppey : Oui. On le fera.

Le président : Je vous remercie.

Le sénateur Robichaud : La question du sénateur Maltais illustre bien comment certains pays peuvent dresser des barrières au commerce qui n'ont rien à voir avec les données scientifiques liées au phoque. Dans le cas des néonicotinoïdes, un moratoire existe dans certains pays de l'Union européenne. De quelle façon pourrait-on se défendre, à l'aide d'autres raisons que celles qui sont fondées sur la science, pour faciliter l'accès de certains produits à l'Union européenne, parce qu'on fait l'utilisation de ces néonicotinoïdes?

M. Seppey : Il y a plusieurs volets. Le Canada dispose d'une politique très ferme et de longue date fondée sur des critères scientifiques. C'est extrêmement important, parce que nos importations en souffrent. La stratégie pour contrer ce genre de comportement se mène à plusieurs niveaux. J'ai mentionné que le Canada est extrêmement actif au sein des organisations qui établissent des normes internationales. M. Ritchie a mentionné celles qui constituent le corpus au niveau des produits agricoles, notamment le code alimentaire, l'Organisation internationale des épizooties et la Convention sur la protection des plantes. Le Canada doit être extrêmement actif pour s'assurer que les normes internationales sont bien définies et reposent sur la science.

Dans le cadre des accords de libre-échange, il faut aussi tenir compte des principes qui reposent sur la science et qui permettent — s'il y a une allégation de violation de la part du Canada — d'avoir recours à un mécanisme indépendant de règlement des différends. On ne gagne pas toujours, mais parfois, oui. Prenons l'exemple d'un obstacle au commerce aux États-Unis, soit l'étiquetage obligatoire dans le pays d'origine; on a déjà gagné trois fois.

Le sénateur Robichaud : On gagne, mais on finit par perdre quand même.

M. Seppey : Cela place le gouvernement des États-Unis dans une position délicate. Le secrétaire américain à l'Agriculture a reconnu hier, pour l'une des premières fois, que la législation pose problème et qu'on ne peut résoudre cette incompatibilité avec l'OMC uniquement par voie réglementaire. Cela nous permet de mettre en valeur nos arguments.

Le troisième et dernier élément est de travailler sur la défense des intérêts. Une grande partie de nos efforts, notamment à Bruxelles, mais aussi ailleurs, et de plus en plus en Chine, c'est d'avoir, par l'entremise de nos ambassades, des représentants auprès de ceux qui prennent des décisions réglementaires. Ces décisions sont souvent appuyées, comme c'est le cas à Bruxelles, par le personnel de l'Agence canadienne d'inspection des aliments qui est placé à l'étranger. Le personnel peut discuter de façon technique, sur place, au quotidien, avec, entre autres, la direction générale des affaires sanitaires, de la santé et des affaires des consommateurs au sein de l'Union européenne pour essayer d'atténuer cette incompréhension de notre cadre réglementaire. Ce sont les outils dont nous disposons pour minimiser l'occurrence de ces pratiques non fondées sur la science dans les autres pays.

Le sénateur Robichaud : Je vous encourage à continuer vos efforts.

M. Seppey : On n'a pas le choix.

Le président : J'aurais une question, étant donné que vous soulevez la question de l'étiquetage. Vous venez de dire que le secrétaire d'État aux États-Unis commençait à reconnaître les problèmes que pose la législation. Monsieur Seppey, pouvez-vous décrire au comité les moyens que le gouvernement fédéral adoptera face à l'application de ce que vient de faire l'OMC?

M. Seppey : Il y a deux pistes : le processus juridique à l'OMC et nos efforts pour travailler avec nos alliés aux États- Unis, autant au niveau de l'industrie que du Congrès pour influencer une modification législative au Congrès. Ce sont nos deux stratégies. En ce qui concerne l'OMC, elle avait confirmé, le mois dernier, que les mesures prises par les États- Unis l'année dernière pour rendre la réglementation plus conforme aux obligations internationales des États-Unis n'étaient toujours pas conformes.

Voilà où nous en sommes avec l'OMC. Les États-Unis ont désormais la possibilité de faire appel de cette décision, qui leur a été défavorable le mois dernier. Tout le monde s'attend à ce qu'ils portent la décision en appel. Ils ont encore quelques semaines pour le faire. Si c'est le cas, nous allons, définitivement, ainsi que le Mexique, qui fait également partie du différend commercial, présenter et élaborer nos arguments. Nous allons présenter nos éléments, mais en ce qui concerne les étapes juridiques, la prochaine étape, c'est que le Canada — si les États-Unis persistent à ne pas se conformer aux obligations de l'OMC — risque d'imposer des représailles sous forme de tarifs supplémentaires sur les importations américaines, soit l'équivalent en valeur commerciale de l'impact négatif que cela a sur le Canada. Pour ce faire, il faut obtenir l'autorisation de l'Organisation mondiale du commerce et avoir épuisé les recours juridiques. Pour ce qui est du dernier recours juridique, c'est un appel possible de la part des États-Unis à la dernière décision qui leur a été défavorable.

On se prépare à une telle éventualité. C'est important aussi étant donné que la solution ne se situe pas à Genève ni par l'entremise des mesures de représailles. La solution est vraiment liée à la modification de la loi aux États-Unis. Or, on sait qu'il y a eu les élections de mi-mandat qui ont eu lieu récemment aux États-Unis. Dès janvier, il y aura un renouvellement de la dynamique à la Chambre des représentants et au Sénat. Donc, nous travaillons étroitement sur cet aspect pour continuer de promouvoir une modification législative auprès de l'ensemble des membres du Congrès. Bon nombre d'intervenants aux États-Unis ont un problème avec l'étiquetage du pays obligatoire pour les produits de viande. C'est un aspect qui pose énormément de problèmes aux États-Unis. Il y a des républicains et des démocrates qui sont des deux côtés du débat. L'important, c'est d'aller chercher le nombre suffisant pour adopter une modification législative nécessaire.

Le président : Je n'ai aucun doute que, lors de notre visite, au début de février 2015, ce sera un sujet de discussion. Y a-t-il une limite du nombre de fois qu'un pays peut faire appel à l'OMC?

M. Seppey : Oui, et essentiellement, je crois qu'on épuise l'appel des États-Unis. S'ils décident d'interjeter appel, nous allons ensuite demander le pouvoir d'imposer des mesures de représailles. Les États-Unis pourront se défendre quant à la légitimité d'accorder au Canada le droit de représailles. Cependant, compte tenu du fait que les États-Unis ont perdu leur cause en première instance et en appel, nous avons de bons arguments pour pouvoir imposer les mesures de représailles. Cependant, encore une fois, les mesures de représailles ne représentent pas une solution idéale. Les mesures de représailles visent à influencer; elles ne peuvent constituer un remède pour nos producteurs de porc et de bœuf.

[Traduction]

Le président : Monsieur Ritchie ou monsieur Seppey, de novembre 2012 à janvier 2013, le gouvernement fédéral a tenu des consultations en vue d'établir une politique nationale sur la gestion des importations de produits GM à faible teneur. Des témoins nous ont dit que cela constituait un défi pour les exportateurs canadiens, surtout ceux qui exportent vers l'Union européenne.

Comment les produits GM à faible teneur sont-ils gérés actuellement au Canada? En l'occurrence, où en est la politique nationale proposée qui, selon vous, aurait une incidence sur les marchés émergents?

M. Seppey : Je vais laisser M. Ritchie vous parler des produits à faible teneur au Canada et je pourrai répondre à votre question sur la politique.

M. Ritchie : À cet égard, au Canada, on fait une évaluation très intensive de la salubrité des organismes génétiquement modifiés dans le cas d'une nouvelle plante ou d'un nouveau produit. Cette évaluation de la salubrité se fait en collaboration avec Santé Canada pour garantir que le nouveau produit est salubre et propre à la consommation humaine et qui ne comporte pas de conséquences négatives. En outre, on fait une évaluation de la salubrité quand il s'agit d'aliments pour animaux et on mesure l'impact environnemental. Une fois que le Canada a déterminé qu'un produit est salubre, nous ne faisons pas de différence entre un tel produit et un produit qui n'est pas génétiquement modifié.

S'agissant de la faible teneur, on constate que dans la plupart des secteurs, on cherche à obtenir l'homologation de tout nouveau produit dans plusieurs pays, afin qu'il n'y ait pas d'entraves au commerce. Le Canada a approuvé la majorité des produits GM qui sont actuellement sur le marché. Toujours à propos de la faible teneur, il se peut que des produits homologués pour usage dans un autre pays soient introduits au Canada alors qu'il n'avait jamais été question qu'ils soient mis en marché. Le fait qu'ils atteignent le marché est accidentel.

Quant à nous, étant donné qu'une vaste majorité de produits GM échangés actuellement ont été homologués au Canada, s'il arrive que nous soyons en présence d'un tel produit, il y a de fortes chances qu'il ait été homologué ici et sa présence serait fortuite. Dans l'ensemble, le risque est très faible. Je reviens à la façon dont nous déployons nos ressources. Au besoin, nous interviendrions dans de telles situations pour prévenir le risque et nous procéderions à un exercice de surveillance. Fort probablement, nous en conclurions qu'il s'agit d'un faible risque, ce qui dicterait notre réaction.

Le président : Merci.

M. Seppey : Je vais confirmer ce que M. Ritchie vient de dire, car il y a eu un incident dans le cas du lin. On a trouvé de faibles traces d'OGM dans une cargaison de lin et immédiatement, l'Union européenne a stoppé tout commerce de ce produit. Cela prouve que ce genre de problèmes pourrait surgir à l'avenir et étant donné que le Canada est un gros exportateur de céréales et d'oléagineux, nous avons jugé important d'encourager les autres pays à adopter des solutions pratiques pour ce qui est des faibles teneurs.

Il est important de signaler que les faibles teneurs correspondent toujours à d'infimes traces d'OGM homologués au moins dans un pays, pour usage alimentaire. Par conséquent, cela ne porte pas atteinte à la salubrité des aliments, car au moins un pays a donné son approbation pour usage alimentaire. Comme l'a dit M. Ritchie, il s'agit ici de gérer le risque. Par exemple, une cargaison de céréales destinée à l'Europe par bateau représente 28 millions de kilogrammes et la présence de 0,2 p. 100 d'OGM non autorisés toucherait environ 3 000 kilogrammes de cette cargaison. Quand on sait comment se font les transports et la manutention des céréales, le niveau de 0,2 p. 100 est facilement atteint.

Voilà pourquoi grâce aux experts de l'Agence canadienne d'inspection des aliments, de Santé Canada et d'Environnement Canada, nous élaborons une politique nationale même si nous ne sommes pas un gros importateur de céréales. Nos clients pensent que si le Canada donne l'exemple et élabore des politiques pratiques, cela encouragera les autres pays à adopter des politiques semblables. Nous avons demandé à notre expert-conseil de préparer une politique en 2012 et nous en avons analysé les résultats en 2013. Nous sommes en train d'améliorer certains éléments de cette ébauche de politique. Nous avons l'intention d'ici quelques mois d'annoncer une ébauche de politique révisée, en tenant compte des commentaires émis et de l'analyse supplémentaire effectuée. Ensuite, nous procéderons à une nouvelle consultation auprès de nos clients canadiens et de nos clients internationaux, car, dans le cas de la première ébauche, nous avions sollicité des commentaires d'autres pays.

Étant donné que le sujet est complexe, l'élaboration n'est pas terminée. Toutefois, cette politique est très importante pour notre secteur des céréales et des oléagineux.

Le sénateur Enverga : Il y a une demande d'autres pays et nous en tenons compte. Comment protégeons-nous notre propre approvisionnement local. J'achète beaucoup de cerises et je constate qu'elles sont toujours californiennes alors que nous exportons plus de cerises vers la Chine. Comment protégeons-nous notre approvisionnement local étant donné tous ces accords de libre-échange que nous avons conclus?

M. Ritchie : C'est un très bon argument. Comme je l'ai dit, notre approvisionnement national nous permet de nous adonner à des activités d'exportation robustes. C'est ainsi que la protection de notre approvisionnement national devient extrêmement important. Nous nous servons alors de notre cadre d'importation. Comme d'autres pays, le Canada peut imposer des conditions d'importation pour garantir que nos produits ne sont pas contaminés par les produits importés qui contiennent des parasites ou des maladies indésirables qui auraient une incidence sur nos ressources nationales. Cela se fait par l'intermédiaire d'organes qui fixent des normes internationales.

Nous avons évoqué le rôle de l'OIE, du Codex et de la CIPV. C'est au niveau de ces organes internationaux que nous travaillons en collaboration avec nos partenaires pour garantir que nous disposons d'un programme d'échange qui repose sur des données scientifiques. Ainsi, quand nous fixons nos conditions d'importation, nous faisons en sorte qu'elles reposent sur des normes internationales. Si tous les pays en faisaient autant, alors le commerce se ferait rondement. Comme nous l'avons dit, il y a des cas où certains pays n'adhèrent pas aux normes. Quant à nous, nous travaillons intensément avec nos collègues internationaux pour établir ce genre de normes. Une fois cela fait, nous travaillons de façon bilatérale avec nos principaux partenaires commerciaux de sorte que nous pouvons conclure des accords et fixer des conditions appropriées qui répondent à nos exigences d'importation de même qu'aux exigences d'exportation des autres pays.

Si une zone présente un risque particulièrement élevé, nous pouvons dans certains cas faire intervenir une clause que l'on pourrait appeler une autorisation préalable à la mise en marché. Nous pouvons faire appel aux autorités du pays concerné pour veiller à ce qu'elles comprennent les exigences d'importation du Canada et qu'elles donnent une attestation qu'elles sont respectées en ce qui concerne les produits qu'on envisage d'introduire ici. C'est un travail de sensibilisation, car nous devons faire œuvre éducative auprès d'elles. En outre, dans certains cas, nous pouvons compter sur des mécanismes plus officiels grâce à la présence à l'étranger de quelqu'un qui attesterait que les produits importés répondent aux exigences et ont été légitimement approuvés pour exportation vers le Canada. Il y a donc des modalités qui nous permettent d'avoir l'assurance que les produits importés sont salubres.

Ici même au Canada, nous avons nos propres façons de procéder à des vérifications et à une évaluation du risque pour ces produits. En terre canadienne, nous exerçons une surveillance active sur toute une série de produits et d'activités. Nous travaillons également en collaboration avec les provinces qui elles aussi ont une capacité de surveillance et la possibilité d'imposer des mesures de contrôle. Ainsi nous travaillons avec elles pour instaurer un régime global à l'échelle du pays.

Le président : Monsieur Ritchie, monsieur Seppey et monsieur Saindon, merci beaucoup d'être venus témoigner et d'avoir donné au comité des renseignements sur Agriculture et Agroalimentaire Canada.

Je déclare la séance ajournée.

(La séance est levée.)


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