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APPA - Comité permanent

Peuples autochtones

 

Délibérations du Comité sénatorial permanent des
Peuples autochtones

Fascicule 6 - Témoignages du 28 mai 2014


OTTAWA, le mercredi 28 mai 2014

Le Comité sénatorial permanent des peuples autochtones se réunit aujourd'hui, à 18 h 52, pour poursuivre son étude sur les problèmes liés à l'infrastructure dans les réserves des Premières Nations.

Le sénateur Dennis Glen Patterson (président) occupe le fauteuil.

[Traduction]

Le président : Bonsoir. Je souhaite la bienvenue à tous les sénateurs et à tous ceux qui suivent nos délibérations, ici dans cette salle, sur CPAC ou sur Internet.

Je m'appelle Dennis Patterson, et je viens du Nunavut. Nous avons pour mandat d'examiner les lois et les enjeux qui intéressent les peuples autochtones du Canada, de façon générale. Ce soir, nous allons entendre des témoignages sur le dossier plus précis dont nous avons été saisis, à savoir la proposition de solutions aux problèmes liés à l'infrastructure dans les réserves, notamment le logement et les infrastructures communautaires, d'options de financement novatrices et de stratégies de collaboration plus efficaces.

Aujourd'hui, nous accueillons des représentants de la Siksika Housing Administration, de la nation des Siksika, qui regroupe une population de 7 000 membres, dans le sud de l'Alberta. Sur les 7 000 membres, 4 000 vivent dans la réserve.

Avant de donner la parole au témoin, je vais inviter les membres du comité à se présenter à tour de rôle.

Le sénateur Moore : Bonsoir. Je suis le sénateur Wilfred Moore, de la Nouvelle-Écosse.

Le sénateur Sibbeston : Je m'appelle Nick Sibbeston, et je viens des Territoires du Nord-Ouest.

Le sénateur Watt : Charlie Watt, du Nunavik.

Le sénateur Tannas : Scott Tannas, de High River, en Alberta.

Le sénateur Wallace : John Wallace, du Nouveau-Brunswick.

La sénatrice Beyak : Lynn Beyak, de l'Ontario.

Le sénateur Runciman : Bob Runciman, de l'Ontario, Mille-Îles et lacs Rideau.

Le sénateur Ngo : Thanh Hai Ngo, de l'Ontario.

Le sénateur Meredith : Don Meredith, de l'Ontario.

Le président : Chers collègues, je vous invite à vous joindre à moi pour souhaiter la bienvenue à Stewart Breaker, gestionnaire de secteur de service du logement de la Siksika Housing Administration.

Monsieur Breaker, je crois que vous avez une déclaration liminaire, et nous avons hâte de vous entendre. Ensuite, les sénateurs vous poseront des questions. Vous avez la parole.

Stewart Breaker, gestionnaire de secteur de service, Siksika Housing Administration : Je suis né et j'ai grandi dans la réserve de la nation des Siksika. J'en suis le gestionnaire du logement depuis 2007, après avoir travaillé dans le secteur de l'énergie électrique, chez TransAlta et chez ENMAX, sur le territoire de la ville de Calgary.

J'ai été recruté par la tribu parce qu'elle cherchait un gestionnaire parlant couramment pied-noir pour pouvoir aider les aînés, et en plus, j'avais de l'expérience dans la construction. Quand j'ai commencé à travailler pour la tribu, j'ai essayé de me familiariser avec tous les projets en cours et de comprendre la situation financière dans laquelle elle se trouvait, dans le contexte de la Loi nationale sur l'habitation de 1996. Pendant les 20 années qui ont suivi l'adoption de cette loi, l'application de ses dispositions a produit de bonnes choses mais aussi des moins bonnes.

Comme vous le voyez, notre réserve s'étend sur à peu près 50 milles. En moyenne, elle fait à peu près 5 milles de long, parfois un peu plus. Dieu merci, elle n'occupe plus que le tiers de son territoire initial, mais elle abrite 18 communautés et, comme vous l'avez dit, une population de 7 000 habitants.

Je crois que la majorité habite dans la réserve pour que les enfants puissent aller à l'école. Il y en a qui habitent en dehors de la réserve, mais c'est généralement pour des raisons économiques, car il y a plus de travail à Calgary. Nous avons beaucoup de jeunes de moins de 30 ans, et il y a plus de 450 noms sur notre liste d'attente.

Je vais vous parler des inondations de juin 2014, car nous allons nous aussi être affectés.

À l'heure actuelle, nous avons 929 unités de logement, dont 441 appartiennent à la bande. Quand je dis « appartiennent à la bande », je veux dire qu'elles ont été construites avec des ressources de la bande. Comme je l'expliquais aux personnes avec qui je parlais avant la réunion, ça remonte à la cession de 1910. Depuis l'adoption de la Loi nationale sur l'habitation, nous avons construit 466 logements locatifs.

Nous avons 36 projets, dont quatre ont été complètement remboursés. Il y a 39 unités de logement dans la réserve — j'y reviendrai tout à l'heure —, et 29 logements locatifs qui ont été construits avec les ressources de la bande; il y a aussi bien sûr les logements qui ont été endommagés par l'inondation. Il y en a 80. On les appelle les « rouges ».

Le gouvernement de l'Alberta a établi un système de marquage des logements inondés, selon lequel « rouge » signifie que le panneau électrique du sous-sol a été inondé, et « noir », que l'eau est montée jusqu'au sous-plancher. Nous avons 46 logements désignés « noirs ». Ce sont ceux-là qui vont être démolis et reconstruits. À l'heure actuelle, il y en a 25 en construction depuis 2010, dans le cadre du programme qui est prévu à l'article 95.

Permettez-moi de vous faire un bref historique de notre nation. Au début, nous faisions partie du Traité no 7, signé en 1877. On nous a donné des terres s'étendant de l'est des montagnes Rocheuses jusqu'au barrage Bassano, sur une superficie d'environ 180 000 acres. On nous a également donné la concession forestière « C », qui fait l'objet d'une revendication territoriale. Elle devait nous fournir le bois nécessaire à la construction de nos logements.

En 1962, la nation a créé la REA, ce qui nous a amené l'électricité. En 1966, elle a commencé à construire des maisons équipées de sous-sols complets et d'un système de chauffage à air pulsé. En 1969, elle a introduit les systèmes de plomberie intérieurs, et dans les années 1970, elle a commencé le programme de l'article 10. Je crois que pour la plupart des Premières Nations, c'était la seule option. Ça marchait avec un programme de prêts. Mon père a obtenu un de ces logements, et il l'occupe toujours.

En 1972, la bande a créé la Blackfoot Housing Society, une société à but non lucratif, pour pouvoir emprunter dans le cadre du programme de la SCHL. À l'époque, il n'y avait que 14 logements. La bande avait calculé ce chiffre à partir d'une formule présentée à AINC. Ça a marché pendant trois ans, mais après, ils n'ont plus voulu construire les 60 autres logements, alors on en est resté là.

Pour en revenir à l'article 10, le programme d'accession à la propriété, ça a plutôt bien marché. Ils ont payé leur hypothèque et tout allait bien jusqu'au jour où ils ont ajouté une clause dans l'entente disant qu'il fallait un quart de section, mais le conseil a décidé qu'il ne pouvait pas accepter. Au départ, les aînés de l'époque, ceux qui ont signé le traité, voulaient des terres communales. Ils ne voulaient pas exproprier des terres, comme l'avaient fait d'autres tribus et comme certaines le font encore, et ils ont donc remboursé ces hypothèques. Cela a choqué certains propriétaires de logements, comme mon père. Ils ont transformé ces logements en logements de la bande. C'est un peu difficile à comprendre, mais je vais essayer de vous expliquer comment ça s'est passé.

En 1983, ils ont mis en place le programme de logements dans les réserves, avec des Garanties d'emprunt ministérielles, les GEM. En 1985, la société a décidé d'utiliser le programme de l'article 95, uniquement pour des logements sociaux. Étant donné que c'était le seul programme disponible, ceux qui avaient un emploi ont commencé à emménager dans ces logements, ce qui a causé d'autres problèmes plus tard. Par exemple, il y a eu des catastrophes naturelles. En 2005, ils ont commencé à avoir des problèmes d'inondation à cause de la rivière Bow. Cette rivière a souvent débordé dans le passé, notamment en 1928 et en 1948, mais ça n'a jamais été aussi pire que l'an dernier.

En 2009, notre nation a utilisé, et c'était la première fois qu'elle le faisait pour des logements, le fonds de fiducie de la nation des Sitsika, établi à la suite de la revendication territoriale de 2001. Ça provenait du règlement Bassano. En 2009, le Plan d'action économique du Canada a été vraiment utile, mais nous n'avons pu rénover que 1 p. 100 des anciens logements qui avaient été construits dans les années 1960. Enfin, il y a eu l'inondation du 21 juin 2013, qui a sinistré 200 maisons et jeté 800 personnes à la rue.

Y a-t-il des questions avant que je passe aux défis?

Le président : Si vous voulez parler des défis, je recommande que nous attendions la fin de votre déclaration pour vous poser des questions.

M. Breaker : D'accord.

Je vais revenir sur la concession forestière du mont Castle. Je n'ai pas eu assez de temps pour préparer ce mémoire. J'ai eu des difficultés à obtenir des informations auprès de mes dirigeants au sujet des revendications territoriales, car elles sont encore en négociation. Je vais donc vous donner des informations à caractère général.

C'est en 1910 qu'ils ont eu l'idée d'utiliser l'addendum de la concession forestière « C » pour la construction de logements, afin de remplacer les tipis et de lutter contre la tuberculose et la coqueluche. Ils voulaient construire des maisons en rondins, mais ils ont eu du mal à faire venir les rondins du mont Castle, qui se trouve à environ 60 milles à l'ouest de Calgary, car à l'époque, les membres de la nation devaient avoir un permis pour quitter la réserve. Ils ne pouvaient pas la quitter pendant plus de 72 heures, si bien qu'ils n'avaient pas le temps de convoyer les billots sur la rivière. Au bout de 72 heures, le permis expirait, et ils étaient obligés de retourner à la GRC pour en obtenir un autre. Ça leur était difficile, parce qu'ils devaient prouver qui ils étaient, et en plus, les propriétaires fonciers les empêchaient de traverser leurs terres pour accéder à la rivière. C'est ainsi qu'un grand nombre de billots ont été récupérés par les colons.

Je dirai, grosso modo, qu'à peine une vingtaine de maisons en rondins ont été construites aux alentours de 1922. Ça aurait vraiment pu nous aider à résorber les pénuries que nous avions. Nous sommes toujours en négociation avec Parcs Canada, la province et le fédéral, au sujet du mont Castle. Ça fait partie de la liste de nos souhaits.

Dans les années 1960, nous avons construit des maisons avec nos propres ressources, du mieux que nous pouvions, mais il n'y avait ni code du bâtiment ni inspecteur. Certains de ces logements font toujours partie de notre inventaire. Nous essayons de les externaliser en collaborant avec le Southern Alberta Institute of Technology, qui donne des formations en menuiserie et en plomberie. Les maisons de cette époque n'étaient pas bien construites, et elles étaient surpeuplées, si bien que toutes les maladies qui sévissaient avant continuaient de sévir après.

Excusez-moi, mais je sais que vous vouliez avoir des précisions sur les conclusions de la CRPA et des études sociologiques qui ont été faites pour les Premières Nations et les Autochtones au Canada et en Amérique du Nord. À propos des 52 p. 100 qui nécessitent de gros travaux de rénovation, je peux vous dire que c'est encore le cas, mais que nous faisons notre possible pour essayer d'améliorer la situation.

Bien souvent, nous ne tirons pas suffisamment de revenus du capital de la bande. Nous avons beaucoup dépensé depuis les années 1980, quand nous avions des revenus pétroliers et gaziers. D'après nos calculs, nous avons investi environ 200 millions de dollars dans les infrastructures, le logement, et les programmes sociaux et sanitaires. Les allocations-logement et le coût des services publics ont toujours été un problème pour nous. Il y a aussi celui du développement des capacités des membres de la nation.

Nous essayons de planifier, mais nous sommes tributaires du financement. C'est plutôt de la gestion de crise que nous faisons. En tout cas, c'est ce que je constate depuis toutes ces années que je travaille pour la tribu. Et dans les autres Premières Nations de l'Alberta, c'est le même problème. Le financement est trimestriel, et il est difficile de faire de la construction en hiver. Or, quand le financement finit par arriver, l'hiver est arrivé lui aussi.

Les changements apportés par le gouvernement dans le domaine du développement social ont aussi eu un impact sur les opérations, surtout au niveau de l'aide sociale. Au départ, l'article 95 s'appliquait aux logements sociaux, mais les loyers ne sont pas les mêmes dans les réserves et en dehors des réserves. Nous trouvons cela un peu discriminatoire. Il faudrait faire quelque chose, mais j'y reviendrai plus tard.

La faible valeur de revente des maisons situées sur les terres des Premières Nations est un autre problème. Ils nous ont dit qu'avec la nouvelle initiative des logements du marché, cette valeur était nulle. Je me demande donc comment ils s'imaginent qu'on va pouvoir utiliser ce programme. Voilà la position du ministère. Il va quand même falloir que nous trouvions le moyen d'attribuer une valeur à ces logements, afin que les gens puissent emprunter pour pouvoir devenir propriétaires de ces logements du marché.

Vous pouvez planifier tout ce que vous voulez, mais si notre service des travaux publics ne reçoit pas un financement adéquat pour développer ces infrastructures, vous perdez votre temps et votre argent. En plus, si les infrastructures ne sont pas construites, ils vous reprennent votre argent.

Avant, il y avait une bonne planification, les lots étaient viabilisés, mais le financement est toujours un problème. Les Premières Nations constatent qu'il est de plus en plus difficile d'obtenir des hypothèques pour ces projets, à cause des garanties, étant donné que la plupart d'entre elles utilisent le programme de l'article 95. À l'heure actuelle, nous avons un déficit de 17 millions de dollars pour ces projets. C'est vrai qu'il était de 26 millions lorsque je suis arrivé, en 2007. Nous avons donc fait des progrès, mais c'est extrêmement difficile de faire une nouvelle demande. La seule option que nous avons, c'est l'article 95. Nous avons cessé de nous en servir car ça accroît notre déficit, vu les modalités des ententes d'exploitation qui concernent la réserve de remplacement. En fait, nous avons dû utiliser le fonds de fiducie communautaire pour régler le problème. C'est indiqué dans la lettre des vérificateurs à la direction. Je ne sais pas comment les autres Premières Nations s'en sortent, mais nous sommes au bord du gouffre. Pour le moment, nous surnageons encore.

En ce qui concerne les Garanties d'emprunt ministérielles, nous essayons de les éviter le plus possible, mais chaque fois qu'il y en a une qui doit être renouvelée, nous retombons dans le même engrenage. Je suppose que c'est comme ça que le système a été conçu dans la Loi nationale sur l'habitation.

Nous avons d'autres problèmes au niveau de l'application de la loi. La GRC n'est pas habilitée à intenter des poursuites en cas de vandalisme ou d'incendie volontaire. Nous avons bien un tribunal provincial et un juge provincial, mais comme les infractions sont fédérales, elles sont la plupart du temps rejetées. Nous ne pouvons pas obtenir de dédommagement. Pourtant, nous avons une quarantaine d'unités qui sont condamnées à cause d'actes de vandalisme ou d'incendies volontaires. Nous sommes donc obligés de puiser dans nos propres ressources pour essayer de couvrir au moins la franchise de l'assurance. La plupart du temps, ce n'est pas possible, si bien que les maisons restent condamnées pendant deux ans. En attendant, on ne perçoit pas de revenus de loyers mais on doit quand même payer des assurances pour des unités qui ne sont pas occupées.

Nous avons bien des stratégies que nous essayons d'utiliser au mieux, mais sans la police, c'est peine perdue.

La croissance démographique est également un sujet de préoccupation. Je travaille avec mon frère cadet. Il est PDG des services d'aide à la famille de la nation des Siksika. Nous avons essayé de faire des choses novatrices. Nous avons demandé des financements provinciaux pour la construction de logements abordables. Nous avons reçu 6,1 millions de dollars. C'est comme ça que nous avons créé la SORAH, la Siksika Off-Reserve Affordable Housing, il y a deux ans et demi. Nous avons 40 seuils de portes, soit quatre immeubles d'appartements dans la ville de Calgary. Nous voudrions développer ce concept de logements abordables, car des changements vont survenir dans le domaine du développement social. D'ici à 2017, le régime d'aide au développement social va réduire ses prestations aux moins de 30 ans. C'est pour ça que nous mettons l'accent sur le développement des capacités. S'il n'y a pas d'emplois dans la réserve, les gens doivent aller travailler en dehors de la réserve, et c'est pour ça que nous essayons de prendre les devants du mieux que nous pouvons. Vous ne me croirez peut-être pas, mais l'inondation va peut-être nous aider à résorber notre pénurie de logements actuelle.

Les subventions nous posent aussi des problèmes depuis 1994. J'ai essayé de rassembler les informations les plus précises possible, mais votre préavis était court. Je n'ai été informé que jeudi, alors que j'étais à Hawaï, et j'ai donc demandé aux employés de vous faire parvenir les informations antérieures à 1997, parce qu'à partir de 1997, les formules sont différentes dans les ententes d'exploitation. C'est très compliqué, mais nous faisons de notre mieux pour nous y retrouver.

Nous avons du mal à obtenir auprès des services d'aide à la famille les formulaires de vérification du revenu qui sont exigés pour les loyers établis en fonction du revenu, même si nous avons avec eux une excellente relation de travail. C'est beaucoup de travail, et les travailleurs sociaux font tout leur possible pour nous fournir ces informations.

La liberté de l'information nous pose aussi des problèmes. Là encore, il y a un chevauchement des compétences entre le niveau provincial et le niveau fédéral, même dans le secteur des services.

La maintenance de toutes les infrastructures nous pose d'énormes problèmes. Nous avons à peu près 500 km de routes à entretenir, et elles sont en très mauvais état. C'est la même chose pour les immeubles et les usines d'épuration et de traitement de l'eau. La dernière inondation a endommagé nos usines de traitement de l'eau, qui sont situées près de la rivière. Les ingénieurs des années 1970 et 1980 n'avaient pas pensé qu'il pourrait y avoir une inondation. Aujourd'hui, c'est nous qui nous retrouvons avec le problème. Si nous devons déplacer ces usines plus en hauteur, nous allons aussi devoir déplacer les communautés. Il n'y a pas d'autre solution. Je crois qu'il y a cinq communautés qui sont situées en bas, près de la rivière.

Enfin, lorsque la Loi nationale sur l'habitation a été présentée, il n'y a pas eu suffisamment de consultation. J'ai fait des recherches sur certains de nos aînés qui ont travaillé sur le dossier. Il y en a qui occupaient des postes de direction, mais ils ne comprenaient pas grand-chose à l'article 95. Tout ce qu'ils savaient, c'est qu'ils pourraient emprunter, un peu comme avec l'article 10, et qu'il n'y aurait pas de problème. Mais ils n'avaient pas compris comment seraient établies les formules de calcul pour la vérification des revenus et l'allocation-logement. Tous ces problèmes ont été mis de côté, si bien que chaque année, la tribu doit se démener pour réussir à s'en sortir. Tout ça est dû, à mon avis, à une planification communautaire inadéquate. C'est l'argument principal de ma déclaration. Mais maintenant, je vais vous proposer des solutions.

Je ne vous parle que du logement, mais il faudrait que vous convoquiez des représentants des services de développement social, de l'éducation, de la santé et de la justice. Je ne sais pas si vous êtes prêts à le faire. Vu le court préavis que j'ai eu, j'ai averti la greffière que je n'avais pas eu le temps d'ajouter des notes en bas de page, et que j'aurais voulu présenter un document qui couvrait les autres types de services. Je vous prie de m'en excuser.

L'une des solutions consiste à revoir complètement les ententes de transfert fédérales, car elles ne prévoient qu'un ajustement annuel de 2 p. 100. On m'a donné des chiffres et des dates différentes, disons que ça remonte à l'an 2000, mais moi je pense que ça remonte à 1996. Je propose de renégocier la formule de financement de l'allocation-logement pour les prestataires d'aide sociale habitant dans les réserves. Depuis 1996, le gouvernement n'utilise plus un taux du marché équitable. C'est discriminatoire. Dans les réserves, c'est 300 $, et hors des réserves, je crois que ça monte à 1 100 $.

La nation des Siksika pourrait fort bien créer son propre établissement de crédit afin d'offrir des prêts ou des hypothèques à ses membres. Elle devrait, je pense, les offrir aux taux du marché. Comme il n'y aura pas de Garantie d'emprunt ministérielle, ça devrait simplifier les choses. Personnellement, je ne demanderai plus d'autres allocations à la SCHL, à part le LAAA, pour les handicapés, et les formations qu'elle offre. Nous envisagerons peut-être un partenariat avec Habitat pour l'humanité, pour mettre en place un programme de garanties. C'est ce que nous essayons de faire avec les services de développement social.

Je ne savais si je devais vous le dire, mais nous envisageons aussi un partenariat avec les services d'aide à l'enfance des Siksika, pour créer des foyers collectifs. Nous en avons déjà créé un avec l'organisation Henry Three Suns, et nous voulons voir ce que ça va donner, si ça va nous aider à, premièrement, rapatrier nos jeunes et, deuxièmement, à atténuer le problème du surpeuplement des logements de communautés. Car ce problème de surpeuplement, je ne peux pas le régler vu le nombre limité de logements dont nous disposons.

J'ai parlé de la SORAH tout à l'heure. Ce serait peut-être une solution pour nous, si nous pouvons avoir accès à des capitaux dès le début de la période de construction, en avril, jusqu'à octobre, et pas sur une base trimestrielle, car ça ne marche pas.

C'est à peu près tout ce que je voulais vous dire, mesdames et messieurs.

Le président : Je vous remercie beaucoup, monsieur Breaker, d'avoir préparé cette déclaration avec un si court préavis. Vous nous avez donné une foule d'informations sur l'histoire passionnante de la nation des Siksika, et sur les défis auxquels vous êtes confrontés. Je vous remercie également d'avoir proposé quelques solutions.

Le sénateur Tannas habite dans votre région, ou à peu près, et il est donc approprié que je lui donne la parole en premier.

Le sénateur Tannas : Merci, monsieur Breaker.

Vous avez parlé des routes. Quand je dois aller à Brooks ou à Medicine Hat, je passe par Milo et ensuite je prends la One Gun Trail, c'est bien comme ça qu'on l'appelle?

M. Breaker : Oui.

Le sénateur Tannas : Elle m'amène jusqu'à votre réserve, je sais donc où elle se trouve. Vous avez parlé des maisons condamnées, et cela a piqué ma curiosité. Quand on arrive à Cluny, il y en a plusieurs qui sont condamnées depuis pas mal de temps.

Je vais vous poser deux ou trois questions pour savoir ce que vous en pensez. Vous avez parlé du droit au logement que vous confèrent les traités, et vous avez dit que c'est un point de vue que partagent beaucoup de membres de la nation des Siksika. Quelle influence cela a-t-il sur les loyers? Vous avez à peu près un millier de logements, et j'aimerais savoir combien d'occupants paient un loyer?

M. Breaker : À l'heure actuelle, il y en a environ 30 p. 100 qui payent un loyer. Il y en a aussi 30 p. 100 dont les salaires ont été saisis; ce sont des gens qui ont un emploi, mais c'est comme si on leur arrachait une dent.

J'ai été très surpris, quand je suis arrivé, de voir que les membres de la nation payaient un loyer. Ce n'est pas fréquent en Alberta — je ne sais pas ce qu'il en est en Saskatchewan, au Manitoba et en Colombie-Britannique. Mais en tout cas, ils savent qu'ils doivent payer un loyer. L'entente du mont Castle et le droit au logement qui est conféré par le traité ont toujours été des textes de référence. Nos dirigeants disaient que, si on nous avait donné les ressources nécessaires à l'époque, nous n'aurions plus à nous préoccuper du logement. Malheureusement, nous sommes toujours en négociation, et en attendant, il faut payer les hypothèques.

La nation s'est toujours très bien comportée depuis la signature du traité. Nous avons toujours assumé la responsabilité acceptée par Crowfoot et le chef Old Sun d'acquitter ce que nous devions payer en vertu des traités.

Le sénateur Tannas : C'est toujours à peu près 60 p. 100?

M. Breaker : C'est à peu près ça.

Le sénateur Tannas : Bien.

Vous ne pourrez peut-être pas me répondre, mais quel est le taux d'emploi des habitants de la réserve, approximativement?

M. Breaker : Le taux d'emploi — mais encore une fois, nos statistiques ne sont peut-être pas très à jour — est d'environ 60 p. 100. C'est une chose que j'ai oublié de vous dire : nous n'avons pas de base de données. Ce n'est pas parce que nous n'avons pas essayé. Celle que nous avons et qui marche le mieux est sans doute celle de Santé Canada, parce qu'elle est suffisamment financée.

Nous allons enfin avoir un système de cartographie, croyez-le ou non. Jusqu'à présent, on utilisait un programme Paint, je ne me souviens plus exactement du nom. Ça remonte aux années 1970.

Le sénateur Tannas : J'aimerais maintenant vous poser une question au sujet des CP. Vous avez dit que les dirigeants de votre communauté avaient décidé de ne pas emprunter cette voie.

Le président : Vous parlez des certificats de possession.

Le sénateur Tannas : C'est exact. Il s'agit en quelque sorte d'une réplique du droit à la propriété individuelle d'une maison, ce qui permet d'attribuer à la maison une valeur commerciale car elle constitue un bien aliénable; vous reconnaissez donc qu'un individu puisse avoir un droit sur une propriété.

Étant donné qu'il y a pas mal de gens, maintenant, qui travaillent, qui gagnent un salaire et qui voudront peut-être faire construire leur propre maison, pensez-vous que la situation va évoluer?

M. Breaker : À mon avis, le plus tôt sera le mieux, car c'est en devenant propriétaire de ma maison que je suis revenu dans la réserve. J'ai pris une hypothèque. Je l'ai fait construire, comme les autres membres de ma famille. Vous savez, nous sommes une famille d'agriculteurs depuis les années 1920.

Pour en revenir à la question de la propriété foncière, quand j'ai dit que nos dirigeants traditionnels estimaient que la terre n'appartenait à personne, ça voulait dire qu'elle devait être utilisée par tous, qu'elle devait être partagée. C'est l'un des principes des traités, à savoir le partage des ressources.

À mon avis, le concept d'allotissement, simplement pour les maisons, serait tout à fait applicable à condition qu'il n'y ait pas de défaut de paiement sur les hypothèques. Il y aura toujours des problèmes, à la suite de divorces ou d'autres difficultés sociales, c'est dans l'ordre des choses, mais je pense que la majorité des gens sont prêts à devenir propriétaires d'une maison. Je crois que c'est ce qui est prévu, mais encore une fois, il faut que nous ayons suffisamment d'argent pour le faire correctement. Parfois, nous sommes obligés de planifier sans savoir.

À propos, je connais High River, j'y ai travaillé.

Le sénateur Tannas : Nous en discuterons tout à l'heure.

Le sénateur Watt : J'aimerais poser une question supplémentaire. Dans votre document, vous dites que « la faible valeur de revente peut dissuader... » et que « l'accès à la propriété intéresse peu les membres de la nation ». C'est ce que vous dites dans le document que vous nous avez fait parvenir. Pouvez-vous nous donner des précisions? Parce qu'à la question qui vient de vous être posée, vous avez dit que le plus tôt serait le mieux, et qu'il y avait de bonnes chances qu'on s'oriente dans cette direction. Je voudrais donc savoir pourquoi vous dites, dans votre document, que l'accès à la propriété intéresse peu les membres de la nation.

M. Breaker : C'est parce qu'il y a deux camps. Les aînés continuent de revendiquer le droit au logement qui est conféré par les traités. Ceux qui ont moins de 40 ans préfèrent posséder quelque chose plutôt que de recevoir l'aumône. C'est un changement de mentalité.

Le sénateur Watt : Pensez-vous que le changement va se faire à temps?

M. Breaker : Je pense que oui, du moment que nous planifions bien les choses. On ne peut pas demander à une communauté de changer au coup par coup, en fonction des aumônes et des programmes de formation qui sont offerts ici et là, mais sans résultat précis. Pourquoi leur donne-t-on une formation s'il n'y a pas d'emplois, s'il n'y a pas de développement économique dans la réserve? Ça ne sert à rien.

Le sénateur Watt : Vous avez dit aussi : « à condition que nous ayons suffisamment de capitaux ». Mais d'où va venir cet argent? Du fonds de fiducie privée que vous avez constitué à la suite de la cession de 1910?

M. Breaker : Oui, c'est une solution. Il y a plusieurs revendications territoriales en cours. Nous tablons sur l'initiative des logements du marché. Si ça marche, le plan d'action est prêt. Je pense qu'il faudra organiser un référendum au sujet du régime foncier. Je crois qu'on prévoit de procéder par lots.

Le sénateur Watt : Selon l'emplacement et le coût réel du logement, il peut être difficile d'obtenir une hypothèque. En plus, il faut payer des assurances, des taxes municipales... Je me demande si les gens ont suffisamment de revenus pour assumer tout ça. Je suppose que vous vous posez aussi la question?

M. Breaker : Oui. Cela me préoccupe beaucoup car c'est essentiellement un problème de planification et d'accès à ce fonds.

Le sénateur Watt : Pourriez-vous envisager d'utiliser plusieurs fonds à la fois, notamment des fonds privés en plus des fonds du gouvernement?

M. Breaker : C'est ce que nous avons fait avec la SORAH.

Le sénateur Watt : Et qu'est-ce que ça a donné?

M. Breaker : Notre demande a été approuvée. Nous avons versé un acompte, de 15 p. 100 je crois, de notre département du trésor, et notre demande a été approuvée pour 4,5 millions de dollars.

Le sénateur Watt : Et ça a marché?

M. Breaker : Oui.

Le sénateur Watt : Et qu'est-ce qui arrivera à l'échéance?

M. Breaker : Nous n'en sommes qu'à l'étape de la planification. Mon frère cadet est le PDG, et moi je suis le vice- président. Nous referons alors une demande aux affaires municipales, une fois qu'ils auront vu que ça marche. C'est une option.

Le sénateur Watt : Vous avez dit les affaires municipales?

M. Breaker : Oui.

Le sénateur Watt : Vous voulez dire le ministère provincial des affaires municipales?

M. Breaker : Oui.

Le sénateur Watt : Donc, vous discutez déjà avec la municipalité, avec le gouvernement provincial?

M. Breaker : Oui.

Le sénateur Watt : Bravo. Merci.

Le sénateur Meredith : Monsieur Breaker, j'ai bien écouté votre déclaration, et à la page 4 de votre document, vous parlez des conditions socio-économiques de la nation. Vous dites que les niveaux de scolarité sont inférieurs à la moyenne nationale; que le revenu moyen est inférieur à la moyenne nationale; que le taux de dépendance à l'aide sociale est élevé; que le taux de chômage est élevé; que le taux de criminalité et de vandalisme est élevé; et que les ressources et infrastructures sont limitées en raison de l'éloignement de la communauté.

Pourriez-vous nous décrire les conditions dans lesquelles vivent les membres de la nation, y compris les 2 600 jeunes de moins de 17 ans qui habitent dans la réserve?

M. Breaker : Ça varie d'une communauté à l'autre et selon les services de soutien qui sont organisés. Les jeunes qui nous posent des problèmes sont ceux qui n'ont pas grand-chose à faire ou qui ont décroché à l'école. Là encore, nous n'avons pas l'argent nécessaire pour donner à ces jeunes une formation dans un métier spécialisé. Ils pourraient quitter la réserve, mais c'est difficile pour eux. Où pourraient-ils aller vivre avec le peu qu'ils touchent de l'aide sociale? Il y en a beaucoup qui essaient de trouver un emploi à la ville. Ils font du covoiturage. Il y a quatre ans environ, nous avions essayé d'organiser des transports par autobus pour les emmener sur leurs lieux d'emploi et de formation. Ça a marché pendant quelque temps, mais pour les jeunes couples ou les parents célibataires, les pressions étaient grandes de rester à la maison.

C'est difficile pour eux, surtout s'ils ne savent pas se débrouiller tous seuls. Bien souvent, ils ont à peine terminé l'école secondaire qu'ils ont déjà des enfants. Ils vivent dans un logement surpeuplé, avec leurs parents au sous-sol. Je connais des maisons où ils sont 16 dans le même logement.

Le sénateur Watt : Seize?

Le sénateur Meredith : Seize personnes dans la même maison?

M. Breaker : Dans une maison de 1 100 pieds carrés, oui. Le taux d'occupation national est de huit personnes. C'est la norme pour ce type de logements.

Je vous prie de m'excuser, j'aurais dû inclure ces chiffres dans ma déclaration. Mais je vais le faire.

C'est difficile pour eux. En plus, il y a les problèmes d'addiction, qui sont un vrai fléau. Je n'ai pas apporté les statistiques de Santé Canada, mais je sais que le ministère finance des programmes pour lutter contre les addictions. Il y a une initiative du gouvernement fédéral qui s'appelait Rassembler nos forces. Je ne sais pas ce que ça a donné. J'ai essayé de demander des fonds pour agrandir des logements afin d'atténuer le problème de surpeuplement. Nous faisons tout ce que nous pouvons pour agrandir certains de ces logements, mais il y a toujours des problèmes sociaux.

Le sénateur Meredith : Avec 16 personnes qui vivent dans le même logement?

M. Breaker : Ils sont parfois quatre couples, avec des enfants.

Le sénateur Meredith : À notre époque, au XXIe siècle, au Canada, c'est parfaitement inconcevable que des gens vivent dans de telles conditions. Manifestement, vous faites du mieux que vous pouvez avec le peu de ressources dont vous disposez.

Vous avez dit qu'il y avait encore à peu près 800 personnes sans abri, à la suite de l'inondation de 2013?

M. Breaker : Nous avons trois abris d'urgence, dans des structures ATCO. C'est la province de l'Alberta qui paye pour ça. Ça faisait partie des 83 millions de dollars dont vous avez certainement entendu parler. Près de l'administration, il y en a une centaine. Il y en a à Crowfoot, à côté de l'école de Crowfoot dont parlait le sénateur Tannas, le long de cette route, et il y a une autre structure à Poor Eagle qui abrite une soixantaine de personnes. Il y en a aussi qui sont encore logées à l'hôtel, mais plus beaucoup. Peut-être une dizaine de familles. Je crois qu'il y en a deux qui vivent à Calgary.

Le sénateur Meredith : C'est la province qui paie pour le logement de ces personnes?

M. Breaker : Oui. Je n'en suis pas sûr, mais je suppose que le ministère va la rembourser.

Le sénateur Meredith : À propos de l'article 95 et des loyers, vous avez dit que c'était 1 100 $ en dehors de la réserve, et 300 dans la réserve; 600 d'un côté, et 600 par mois de l'autre. Que pensez-vous faire pour augmenter les revenus que vous tirez des loyers dans la réserve? Le chef et le conseil ont-ils préparé une stratégie pour que le ministère modifie cette politique et que vous puissiez sortir plus rapidement de cette crise?

M. Breaker : C'est ce que nous avons prévu dans nos plans, mais tout dépend de la fermeté des dirigeants. Des gestionnaires ont déjà essayé par le passé d'augmenter le loyer, mais aujourd'hui, c'est vraiment devenu une nécessité. Les audits financiers qui ont été faits, les lettres à la direction qui les ont suivis, recommandaient d'augmenter les loyers. Je pense que nous saurons d'ici septembre si notre projet d'augmenter les loyers va se concrétiser. Ça se fera par paliers.

Nous avons mis au point une stratégie de remboursement de la dette. Le ministère et la SCHL se préoccupent peu de la façon dont nous allons nous y prendre, du moment que nous y parvenons. Ils ne nous donnent pas d'orientation à suivre. Ils disent simplement : « vous avez besoin d'augmenter les loyers ». D'accord, mais c'est vous qui nous avez mis dans cette situation. Vous auriez dû nous expliquer, en 1996, lorsque nous avons signé les Garanties d'emprunt ministérielles, que c'était le risque que nous courions si nous n'augmentions pas les loyers.

Il y a aussi l'allocation-logement. Nous essayons de limiter le nombre de locataires qui reçoivent une aide sociale, à cause des disparités causées par les formules de calcul qui n'ont pas été renégociées depuis 1996.

Le sénateur Meredith : Mais ça crée un autre problème; où vont ces gens-là?

M. Breaker : Ils retournent dans les logements surpeuplés.

L'inondation sera peut-être un mal pour un bien, parce que nous devons remplacer certains de ces logements. Je pense qu'il y en a près de 174. Ça sera déjà ça. La province nous a offert les caravanes utilisées après l'incendie du lac des Esclaves. Le ministère nous a donné des fonds pour les acheter. Mais ça nous pose un autre problème : nous ne voulons pas de caravanes, car elles exigent beaucoup d'entretien. Il m'a fallu trois ans pour m'en débarrasser, parce qu'elles exigent énormément d'entretien. Et elles ne sont même pas conformes aux codes du bâtiment. Nous avons notre propre code du bâtiment, que nous avons élaboré à partir de l'article 9 du Code national du bâtiment. Nous essayons de nous y conformer du mieux que nous pouvons, mais si nous sommes obligés de prendre ces caravanes, nous n'aurons pas le choix.

Le sénateur Meredith : Monsieur Breaker, donnez-moi des précisions sur les ressources dont vous disposez. Vous avez parlé de partenariats, d'un foyer collectif pour rapatrier des enfants de la communauté. Je suppose que c'est parce qu'ils sont partis en ville ou que la province les a retirés de la communauté, et vous voulez avoir les structures nécessaires pour pouvoir les rapatrier dans la réserve.

Donnez-moi des précisions sur les ressources dont vous disposez, et sur celles que vous espérez attirer. Je veux parler, par exemple, des entreprises canadiennes qui pourraient venir s'installer dans votre réserve, dans le cadre d'un partenariat PPP, pour créer de l'activité économique, ce qui vous apporterait les capitaux dont vous avez besoin pour construire des logements et des infrastructures.

M. Breaker : Ce sont simplement des premières discussions que nous avons eues, mon frère et moi. C'est tout à fait par accident que nous avons offert des services d'aide à l'enfance à la locataire de l'une des unités. Conformément à l'entente conclue avec les services d'aide à l'enfance de l'Alberta, la personne devait avoir un logement pour pouvoir récupérer ses enfants, mais elle n'était pas admissible.

Par exemple, avec le concours de la SCHL, nous avons organisé une formation sur l'entretien d'une maison, et 450 personnes l'ont suivie. Mais cette personne-là n'était pas au courant, car elle habitait en ville. Nous l'avons installée dans un logement locatif, et il s'est trouvé que les services à l'enfance de la réserve avaient ce programme créé par feu Henry Three Suns, l'ancien PDG des services à la famille de la nation des Siksika. Ça marche bien.

Nous attendons de voir quelle orientation les services d'aide à l'enfance vont prendre, parce que la tendance est nettement au retour des enfants autochtones dans les réserves.

Il faudrait avoir plus de foyers d'accueil pour pouvoir en accueillir davantage. Mais ce n'est pas possible car c'est une organisation à but non lucratif. Nous essayons de mettre sur pied une coentreprise avec une entité quelconque, une entreprise de construction, par exemple. Nous en avons déjà parlé avec ATCO.

Mais là encore, il faut que ce soit les dirigeants qui décident. Nous avons beau préparer des plans, ce sont finalement les actionnaires, c'est-à-dire le chef et le conseil, qui doivent les approuver. Mais c'est une option.

Il y a beaucoup de jeunes couples qui veulent démarrer dans la vie, mais ils font face aux mêmes problèmes. Comment trouver des garanties? C'est difficile pour eux. Il n'y a pas d'activité économique dans la réserve. Alors comment vont-ils payer leur hypothèque? Il y a une option, l'huile de coude, ou bien nous pouvons essayer de voir avec les services d'aide à l'enfance si on peut placer les enfants.

Le président : À ce sujet, monsieur Breaker, vous avez dit qu'il y avait un problème avec les programmes d'aide sociale. Il y a des différences entre les gens qui habitent dans la réserve et ceux qui habitent en dehors pour ce qui est des loyers et des programmes de soutien du revenu, et vous estimez que c'est discriminatoire. Pourriez-vous revenir un peu là-dessus et nous faire des suggestions sur la façon dont ça devrait fonctionner?

M. Breaker : Pour ce dossier-là, je crois que le problème principal vient du fait qu'on a ajouté les services publics. La formule qui existait au départ dans la loi, pour l'aide sociale, ne comprenait pas les services publics. Ils ont ajouté ça avant mon arrivée.

Le président : De quelle loi voulez-vous parler?

M. Breaker : De la loi albertaine sur le développement social.

Le président : Une loi albertaine?

M. Breaker : Oui. Je ne me souviens pas exactement quand le gouvernement fédéral s'est déchargé sur la province du dossier du développement social. Il faudrait que vous le vérifiiez. Mais je me souviens que la formule initiale était fondée simplement sur le loyer, et pas sur les services publics. Ça a dû être ajouté aux alentours de l'an 2000. Ce n'était pas intégré dans la formule initiale. C'est là que le fossé a commencé à se creuser. Nous avons essayé de surnager grâce aux loyers, mais ça n'est plus possible. Maintenant, ils ont ajouté les services publics. Je ne sais pas comment ça va marcher. Il faudrait avoir d'autres discussions avec la province et le gouvernement fédéral.

Je sais que ma réponse est un peu confuse, mais c'est tout ce que je peux vous dire.

Le président : C'est utile quand même.

Le sénateur Moore : Je vous remercie, monsieur Breaker, de comparaître devant notre comité. J'aimerais revenir au début.

À la signature du Traité numéro 7, en 1877, vous avez reçu des terres d'une superficie de 350 000 acres dans la Confédération des Pieds-Noirs, plus la concession forestière « C », et un total de 26 milles carrés. Est-ce que ces 26 milles carrés englobent les 350 000 acres et la concession forestière, ou est-ce qu'il s'agit de deux lots séparés?

M. Breaker : Le territoire occupé actuellement par la réserve n'est plus que le tiers de ce qu'il était.

Le sénateur Moore : Je sais, je vais y venir.

M. Breaker : Les 26 milles carrés n'en font pas partie. C'est un lot qui a été ajouté après le traité, après 1877.

Le sénateur Moore : Autrement dit, ce qu'on voit sur la carte que vous nous avez fait distribuer correspond au tiers des 350 000 acres que vous avez obtenues au départ, c'est ça?

M. Breaker : Oui.

Le sénateur Moore : Qu'est-il advenu des deux autres tiers, et comment se fait-il que vous vous soyez retrouvés sur des terres inondables?

M. Breaker : Vous voyez la ligne du CP, en pointillé? Elle devait être temporaire.

Le sénateur Moore : La ligne de chemin de fer, oui.

M. Breaker : Ce n'est pas la ligne originale. Il y en a une plus en hauteur, mais c'est de cette façon que le gouvernement fédéral et le CP ont scindé la réserve. Avant, la réserve se trouvait beaucoup plus au nord, d'après les premiers plans d'arpentage. C'est à peu près la même superficie. La partie méridionale correspond à la cession illégale de 1910.

Le sénateur Moore : Donc, le tiers du territoire que vous avez cédé se trouvait au nord, sur cette carte, mais il a été coupé par la ligne de chemin de fer.

M. Breaker : Oui.

Le sénateur Moore : Pourtant ils n'avaient pas besoin de toute cette terre pour la ligne de chemin de fer. C'est ce qu'ils ont pris?

M. Breaker : Oui, et les colons sont venus s'installer.

Le sénateur Moore : Et pour le tiers méridional, vous estimez que le peuplement était illégal?

M. Breaker : Oui. Ça fait partie des revendications territoriales.

Le sénateur Moore : Depuis quand?

M. Breaker : Depuis 1877.

Le sénateur Moore : Et vous essayez de régler cela depuis 1877?

M. Breaker : La partie méridionale a été vendue en 1910.

Le sénateur Moore : Vendue?

M. Breaker : Oui.

Le sénateur Moore : À qui?

M. Breaker : Au Canada, je suppose, aux colons.

Le sénateur Moore : Comment ont-ils fait?

M. Breaker : De façon illégale. Ils se sont servis des enfants. N'oubliez pas qu'il suffisait d'un X pour signer. Tout ce qu'ils avaient à faire, c'était prendre une plume pour écrire un X. C'est comme ça qu'ils ont signé la plupart des traités. Avec un X.

Le sénateur Moore : Je comprends, monsieur Breaker.

Donc, le tiers qui vous revient, celui du centre, si je peux m'exprimer ainsi, correspond aux terres inondables?

M. Breaker : Oui. Vous voyez sur la carte, à l'extrême droite, le barrage de Bassano. C'est le point le plus bas.

Le sénateur Moore : Et vous dites que vous allez sans doute devoir déplacer la communauté.

Donc, en 1910, vous avez obtenu cette concession forestière. Vous avez dit — mais je n'ai pas bien compris — que le gouvernement imposait alors un système de permis qui interdisait aux membres de la nation de quitter la réserve pendant plus de 72 heures. Qu'est-ce que c'est que ça? Qui l'a imposé? Pourquoi ne pouvaient-ils pas quitter la réserve pendant plus de 72 heures?

M. Breaker : C'est une loi que le ministre des Affaires indiennes de l'époque, un certain Scott — je ne me souviens plus de son nom — avait fait adopter, et qui obligeait les membres de la réserve à demander un permis pour pouvoir quitter la réserve. Ça a duré jusqu'en 1948.

Le sénateur Moore : À quelle distance les terres de la réserve se trouvent-elles du mont Castle, où il y a la concession forestière?

M. Breaker : À partir de Calgary, qui se trouve à 45 minutes à l'ouest de la réserve, il faut compter encore 45 minutes pour se rendre à Banff. C'est là que se trouve le mont Castle.

Le sénateur Moore : Autrement dit, les hommes qui voulaient aller chercher des billots dans la concession devaient faire l'aller-retour en 72 heures?

M. Breaker : Ils ne le pouvaient pas, c'est impossible.

Le sénateur Moore : C'est tout à fait impossible. En a-t-on des preuves? C'est tout à fait impossible. C'est inhumain. Je ne comprends pas.

M. Breaker : C'est tout expliqué dans les documents déposés à l'appui de la revendication territoriale. Il faut attendre que ces documents soient validés et incorporés au rôle des causes judiciaires.

Le sénateur Moore : Depuis 1910 et 1877, vous continuez d'essayer d'obtenir un règlement? Est-ce que vous vous rencontrez régulièrement? Comment vous y prenez-vous?

M. Breaker : Il y a un processus de revendications territoriales en cours depuis... En 1960, nous avons présenté trois grandes revendications territoriales : celle de Bassano, celle de Castle et la revendication touchant les terres manquantes. Il y en a, je crois, huit autres, de moindre importance. En tout, je crois qu'il y en a 11. Ça dure depuis 1960. Une seule a été réglée, celle de Bassano.

Nous en avons discuté tout à l'heure, pendant le dîner, et j'espère qu'on trouvera un autre mécanisme pour partager des ressources, entre autres. Il faut trouver une autre solution.

Le sénateur Moore : J'aimerais revenir sur la question posée par le sénateur Tannas. Vous avez un peu plus de 900 logements, et 60 p. 100 sont des logements locatifs. Le loyer mensuel est-il de 600 $ pour tous ces logements?

M. Breaker : Non. Le loyer est de 430 $ pour les clients de l'aide sociale, et de 307 $ pour ceux qui ont un emploi. C'est pour ces derniers que nous voulons hausser progressivement le loyer jusqu'à 600 $. Je crois que c'est sur trois ans.

Le sénateur Moore : À l'heure actuelle, les revenus que vous tirez de ces loyers représentent au moins 2 millions de dollars par an?

Le sénateur Watt : De l'aide sociale ou de...

Le sénateur Moore : Je prends les chiffres qui sont ici et je les multiplie en fonction du nombre de locataires. Vous avez dit que vous étiez obligés d'utiliser le fonds de fiducie communautaire. Est-ce que ce fonds est alimenté par les revenus pétroliers et gaziers?

M. Breaker : Non. Ce fonds a été constitué à la suite du règlement de la revendication territoriale de Bassano.

Le sénateur Moore : Quelles sont les autres sources de revenus de la nation des Siksika?

M. Breaker : Nous nous en sommes servis pour rembourser les dettes dont je vous ai parlé.

Le sénateur Moore : Vous n'avez donc pas de ressources internes...

M. Breaker : Nous avons des baux agricoles, qui doivent représenter — je n'ai pas les chiffres exacts en tête — près de 10 p. 100 des revenus totaux. Nous avons du bétail, mais pour ce qui est du pétrole et du gaz naturel, les revenus se sont taris. Il y a des puits qui sont bouchés. Nous avons des gisements un peu plus loin, mais personne ne veut les exploiter tant que les revendications territoriales ne sont pas réglées.

Le sénateur Moore : Vous avez parlé du problème des addictions en disant, et c'est le terme que vous avez employé, que c'était un vrai fléau. Pouvez-vous nous donner des précisions? Qu'est-ce qu'on fait et qu'est-ce qu'on peut faire pour lutter contre ce fléau? Est-ce que c'est une cause de suicides, de dépressions, de problèmes sociaux connexes?

M. Breaker : Comme je le disais tout à l'heure, je n'ai pas de statistiques là-dessus. Je vous invite à poser ces questions au ministère de la Santé.

Tout ce que je peux vous dire, c'est que la tragédie des pensionnats a été un véritable calvaire pour nous. J'en ai fait l'expérience. Ça été très difficile, même si j'ai quitté la réserve en 1974 pour y revenir en 2007. Ceux qui sont restés, ils ont sombré dans l'alcoolisme, ils ont divorcé, et j'en passe. Mais c'est la même chose chez les non-Autochtones. J'ai travaillé à l'extérieur, aussi, et j'essaie de garder contact avec mes collègues de travail.

Ce sont toujours les enfants qui finissent par trinquer. C'est triste, surtout dans ma position, car je dois faire face à toutes sortes de problèmes sociaux, à des logements surpeuplés, à des demandes d'aide, et cetera. C'est la réalité, mais ça rend ma tâche difficile. Avec l'âge, je suis devenu beaucoup plus compatissant. Quand j'étais plus jeune, je savais dire non quand il fallait dire non, mais maintenant je réponds que je vais essayer de voir ce qu'on peut faire.

Le sénateur Moore : J'ai l'impression que vous ne vous occupez pas uniquement de logement, monsieur Breaker.

M. Breaker : En effet, je sers de conseiller matrimonial, de conseiller en toxicomanie, tout ce que vous voulez. Je fais de mon mieux.

L'une des raisons pour lesquelles je suis revenu dans la réserve était le désir de retrouver ma culture d'origine. Par exemple, je suis le gardien des calumets et des rouleaux sacrés. Jamais je n'aurais pensé faire ça un jour, mais j'en suis le gardien avec ma femme.

Le sénateur Moore : Bravo. Merci.

Le sénateur Meredith : J'aimerais poser une petite question supplémentaire au sujet du règlement des revendications territoriales. Pourquoi cela prend-il autant de temps? Quels sont les obstacles?

M. Breaker : Le principal obstacle à franchir est d'obtenir une décision du négociateur fédéral.

Le président : À propos d'une revendication territoriale en particulier?

M. Breaker : Oui.

Le président : Qui fait partie du groupe de revendications?

M. Breaker : Oui. Je crois qu'il y en a une à 150 millions de dollars. Au-dessus de ce seuil, les revendications territoriales sont beaucoup plus difficiles à régler. En dessous, c'est un peu plus facile, mais là encore, nous négocions avec l'Alberta et le fédéral. Il faudrait vous adresser à la commission des revendications territoriales pour avoir davantage d'informations.

Le sénateur Wallace : Monsieur Breaker, vous nous avez bien expliqué les problèmes auxquels vous êtes confronté. D'autres témoins nous en ont longuement parlé aussi.

Pour aborder la question sous un angle différent, je dirai qu'il y a des contentieux importants, qui remontent à il y a longtemps, et qu'il est temps de régler. Notre comité se prépare à faire des recommandations dans le but d'améliorer sensiblement les conditions de logement des Premières Nations.

Vous avez parlé des difficultés que vous posent certains programmes du gouvernement fédéral, dans le domaine du logement. Le problème du financement est récurrent, on dirait qu'il n'y en a jamais assez.

Mais au final, comment la nation des Siksika s'y prend-elle pour informer le gouvernement fédéral des problèmes que lui causent certains programmes? Est-ce que vous le faites? Pour votre propre nation ou par l'entremise d'un groupe plus important comme l'APN?

J'ai l'impression que c'est par là qu'il faut commencer. Ce sont des problèmes que connaissent les autres nations, et il va falloir que certains programmes, sinon tous, soient modifiés plus ou moins radicalement. Mais de votre côté, comment vous y prenez-vous pour demander ces changements, pour plaider votre cause? Et quel genre de réponses vous donne-t-on?

M. Breaker : Ce n'est pas compliqué, sénateur. J'ai parfois l'impression que le gouvernement n'intervient que lorsqu'il y a une crise. Avant l'inondation, les seules interactions qu'on avait, c'était des rapports quinquennaux, assez vagues, sans planification précise. On nous demandait simplement ce qu'on avait fait de l'argent qui nous avait été donné dans le cadre de l'entente de transfert fédéral.

Pour le logement, nous recevons 1,3 million de dollars par an. Les trois quarts servent à financer l'allocation- logement. Pour le reste, il n'y a pas grand-chose à déclarer, si ce n'est qu'on a fait quelques petites réparations, comme l'exigent vos normes de santé et de sécurité.

Mais qui établit les normes de santé et de sécurité? Nous ou le ministère? Ils ne sont jamais venus voir les logements où s'entassent 16 personnes.

Il faut repartir à zéro et déterminer précisément quels sont les besoins. Ils avaient fait des évaluations avant 1996, mais j'ai l'impression qu'elles ont été reléguées aux oubliettes — les codes du bâtiment, les normes pour les infrastructures et les eaux usées. On en revient toujours à la gestion de crise. La solution est simple : il faut faire une bonne planification.

On entend toujours parler des tragédies qui se produisent dans les autres Premières Nations. Elles attirent l'attention sur elles, et certaines s'en sortent bien, mais il n'en reste pas moins que nous avons besoin d'une bonne planification. Nous avons besoin de professionnels pour le faire.

Je ne suis pas architecte, mais la plupart d'entre nous savons user de notre bon sens. Ceux qui font de la gestion immobilière trouvent ça dur quand les dirigeants n'osent pas prendre des décisions, comme celle d'augmenter les loyers. L'essentiel, donc, c'est de bien planifier et de bien exécuter.

On fait trop de planification et pas assez d'exécution. C'est ce que je constate. On a des milliers de pages de planifications en tout genre. J'en ai par-dessus la tête. Ce n'est pas réaliste. Tout ça s'entasse au ministère. Maintenant ils commencent à se rendre compte, à cause de l'audit négatif de la SCHL, qu'il y a quelque chose qui cloche. Le directeur, Dan Gaspé, va venir inspecter certains logements. J'ai envoyé une lettre au chef pour qu'il lui fasse visiter ces logements, j'espère qu'il va le faire car ce n'est pas tout à fait mon rôle. Ce sont des maisons dont on assume l'hypothèque depuis 20 ans, et j'aimerais qu'ils les intègrent dans le programme d'accession à la propriété. Seriez-vous prêts à vivre dans ces maisons?

C'est simple : si les loyers ne rentrent pas, comme il n'y a pas de réserve d'appoint, il faut puiser dans les ressources de la bande pour combler le trou.

Ensuite, il faut se poser la question dont on parlait tout à l'heure : est-ce que je veux vraiment être propriétaire de ce logement? Non, ça ne m'intéresse pas. Qui va s'occuper de son entretien? Heureusement que nous donnons des cours de formation sur la façon d'entretenir une maison. J'ai demandé à des employés d'animer ces cours. C'est une initiative incroyable pour des Premières Nations. Je crois que nous sommes l'une des rares à y avoir fait participer 450 personnes.

J'espère que cela répond à votre question.

Le sénateur Wallace : Je pense que vous avez répondu du mieux que vous pouviez. Je vous remercie.

Le sénateur Runciman : Je n'ai peut-être pas bien compris, mais dans votre document, vous dites que 25 unités de la SCHL visées par l'article 95 sont en cours de construction depuis 2010. Voulez-vous dire que 25 maisons sont en construction depuis quatre ans?

M. Breaker : Oui. Je vais revenir un peu en arrière.

Nous en avions fait la demande en 2009. Je crois qu'il faut verser un acompte de 15 p. 100, d'après l'article 95. Donc, vous faites une demande. Ils les appellent les 310. Il y a ensuite la vérification des revenus. Nous avons essayé de séparer les bénéficiaires de l'aide sociale et les travailleurs rémunérés. Mais à l'époque, nous avions reçu un audit assez négatif du cabinet Meyers Norris Penny, si bien que nous avons décidé de ne plus accepter d'allocations de la SCHL. Je vous ai dit tout à l'heure que les fonds sont débloqués par phases. Le programme régi par l'article 95 prévoit sept phases de construction. On ne reçoit pas de financement pour démarrer le projet, on doit puiser dans le capital de la bande pour ça. Le financement n'arrive pas avant septembre, si bien qu'il faut tenir pendant quatre mois.

Il faut viabiliser le terrain, faire venir l'électricité. Pour ça, il faut payer, même si les lignes ne sont installées qu'un an plus tard. Une fois les travaux d'excavation et la pose des fondations terminés, on a franchi la phase 1. Il faut tout faire en même temps, faire venir l'inspecteur de la SCHL qui valide les travaux et envoie une confirmation à la SCHL. Ensuite, il faut attendre quatre à six semaines pour recevoir le financement de la phase 2, qui correspond à la charpente de la maison. Et ainsi de suite.

Ce qui se produit depuis 1994, c'est que la nation fait une demande pour un nouveau projet d'habitation afin de pouvoir financer la dernière phase du projet précédent, à cause des dépassements de budget dus, comme je vous l'ai dit, à du vandalisme ou à des incendies volontaires, entre autres. On a déjà du retard sur la perception des loyers. Le coût des assurances pour la construction est trois fois plus élevé que l'assurance hypothécaire normale. Lorsque le conseil de l'époque avait fait sa demande, il ne pensait pas que ça se passerait ainsi.

Imaginez la situation. On en est au projet 35, on a du mal à achever la dernière phase, alors on utilise le premier versement du projet 36 pour la financer. Ensuite il ne reste rien. Ils insistent alors pour qu'on fasse une demande pour un projet 37, mais on n'en veut pas parce qu'on doit préparer un plan de redressement financier. C'est ce que veulent les dirigeants, tout comme le Conseil du Trésor.

Donc, on se retrouve au beau milieu de l'hiver, et on n'en est qu'à la phase 2. La charpente est construite, mais il y a du vandalisme et des incendies volontaires, alors comment voulez-vous que tous ces logements soient prêts en même temps? C'est pour ça que ça dure depuis quatre ans.

Le président : Et ils ne sont pas poursuivis parce que ça relève de la compétence fédérale?

M. Breaker : Oui.

Le sénateur Runciman : C'est justement l'autre question que je voulais poser. J'ai du mal à comprendre pourquoi. Vous dites qu'en l'absence de policiers autochtones, c'est pratiquement une zone de non-droit. Je ne comprends pas ce conflit de compétence. Si quelqu'un commet une infraction, la GRC a le devoir d'intervenir dans la réserve. Je ne comprends pas pourquoi vous dites qu'elle fait preuve d'un certain laxisme face à des actes de vandalisme et à des incendies volontaires. C'est renversant.

M. Breaker : C'est vrai, ils ne donnent pas suite.

Le sénateur Runciman : Déposez-vous des plaintes? Il existe une commission des plaintes contre la police, pourquoi les dirigeants de la réserve ne s'adressent-ils pas à elle?

M. Breaker : C'est ce que nous avons fait. En 2003, quand je siégeais au conseil — j'étais le seul à la commission —, ils nous ont supprimé les services de police à la suite d'un audit négatif. Nous avons essayé de les récupérer. Ce que nous voulions, c'est un tribunal indépendant — mais ils n'en voulaient pas — pour juger les méfaits commis par le policier, parce que le long de la voie ferrée, c'est un véritable terrain d'entraînement.

Depuis que je suis là, nous avons eu une dizaine d'incendies volontaires et près d'une vingtaine d'actes de vandalisme. Eh bien les coupables n'ont été appréhendés que dans un seul cas. Nous avons essayé d'obtenir une restitution auprès de certains mineurs. Il y en avait 20.

Le sénateur Runciman : C'est à se demander qui pourrait vouloir habiter là, ça me paraît très dangereux.

M. Breaker : Ce n'est pas facile. Tous ces lotissements, les gens hésitent beaucoup à s'y installer, car il y a maintenant des gangs, j'ai oublié de vous en parler.

Le sénateur Watt : Est-ce que ce sont des gangs qui se forment à l'intérieur des lotissements ou est-ce qu'ils viennent de l'extérieur?

M. Breaker : Généralement, ils viennent de l'extérieur.

Le sénateur Watt : C'est plus grave.

M. Breaker : Mais c'est pire dans d'autres communautés. Chez nous, ce sont des gangs juniors. Mais ils causent des problèmes pareil. Il y a trois semaines, ils ont incendié notre décharge pour la deuxième fois en trois ans. Aucunes poursuites. Alors, où allons-nous entreposer nos déchets? Nous n'avons qu'un camion à ordures.

Ça m'amène d'ailleurs à un autre problème : les infrastructures. Mon cousin, Keon Doore, a toutes sortes de difficultés parce qu'il manque de ressources pour entretenir son équipement. L'hiver dernier a été très rigoureux. Volker Stevin, qui travaillait sur les sites inondés — qu'on appelle d'ailleurs les nouveaux quartiers provisoires —, nous a aidés à dégager les routes. C'était difficile.

Le sénateur Meredith : Monsieur Breaker, vous avez bien dit que la GRC ne donnait pas suite aux actes criminels qui sont perpétrés dans votre réserve?

M. Breaker : Oui.

Le sénateur Meredith : Quand vous les appelez, ils ne viennent pas?

M. Breaker : Non, seulement s'il y a un abus d'alcool en cause, par exemple un automobiliste en état d'ivresse — alors là ils se démènent —, ou encore un excès de vitesse. C'est à peu près tout. Ce sont les seuls cas où ils se déplacent.

Il y a quelques années, il y avait un policier qui était très efficace. Je crois qu'il était d'origine asiatique, mais il était excellent. Après son départ, le service s'est complètement détérioré. On n'entend pas beaucoup parler d'eux, si bien que nous sommes pratiquement laissés à nous-mêmes. Un de nos sites de construction a été vandalisé six fois en quatre ans.

La seule fois qu'ils ont attrapé quelqu'un, c'est lorsque Clark Builders était là pour faire des travaux après l'inondation. Les unités de l'entreprise avaient été badigeonnées à la peinture. L'auteur des méfaits a été inculpé. C'est donc un peu discriminatoire. Ils ont réussi à attraper le coupable, mais encore une fois, ça a une incidence sur nos primes d'assurance.

C'est une chose dont je n'ai pas encore parlé. Depuis que je suis arrivé, nos primes d'assurances ont augmenté de 40 p. 100. La franchise est de 30 000 $, aujourd'hui. Comment est-on censés payer une telle somme? Avec les ressources de la bande. C'est la raison pour laquelle les maisons sont condamnées, car ça grignote toutes nos ressources. Ce n'est vraiment pas facile.

Le sénateur Watt : Nous entendons toutes sortes de témoignages qui nous rendent perplexes. Parfois, c'est dur à croire, quand on entend des choses pareilles, surtout venant d'une personne comme lui, la façon dont il présente les choses. Nous vous en remercions.

Vous avez dit tout à l'heure que vous étiez en négociation. Vous pourriez peut-être envisager — vos membres, vous- même et vos dirigeants, je suppose — de demander à négocier directement avec le gouvernement provincial et le gouvernement fédéral, puisque vous êtes déjà en négociation.

Qu'est-ce que notre comité pourrait recommander pour faire avancer les négociations? Pouvons-nous faire quelque chose pour qu'ils trouvent une solution à la crise que vous connaissez? À mon avis, la seule solution pour régler vraiment le problème, une fois pour toutes, c'est de faire participer le gouvernement provincial à des négociations tripartites. Est-ce que cela vous serait acceptable?

M. Breaker : À moi, oui, mais peut-être pas aux dirigeants.

Le sénateur Watt : Pourriez-vous proposer aux membres de votre communauté d'accepter que les sénateurs qui examinent tout ce dossier, c'est-à-dire la crise dans laquelle vous vous trouvez, exercent des pressions sur le gouvernement fédéral et sur le gouvernement provincial pour qu'ils trouvent une solution, avec un échéancier précis?

M. Breaker : Bien sûr.

Le sénateur Watt : Si vous continuez de négocier sans échéancier, vous n'aboutirez à rien, vous continuerez de négocier indéfiniment. Il faut donc avoir un échéancier, quoi qu'on fasse. Vous avez parlé des services d'électricité, et je pense que vous vous êtes fait avoir. Vous devriez avoir une compensation. En plus, il y a tous les dégâts causés par l'inondation, entre autres.

Vous avez de bons arguments, si vous voulez vous donner la peine de les défendre. Je pense que le comité peut essayer de son côté d'encourager les gouvernement fédéral et provincial à s'attaquer sérieusement au problème. C'est peut-être ça qu'il faudrait faire. C'est ce que j'ai dû faire, au Québec, comme vous le savez. Si vous avez des réticences à discuter avec le gouvernement provincial, vous pouvez toujours négocier des garanties. Et vous avez intérêt à profiter des services qu'il offre, car il a les structures en place, le savoir-faire, l'argent, les infrastructures, le capital. Vous avez intérêt à collaborer avec lui et à profiter de ses ressources.

Le président : Merci du conseil, sénateur Watt.

Vous aviez quelque chose à dire, monsieur Breaker?

M. Breaker : Oui. À l'époque du premier ministre Klein, nous avions signé un protocole d'entente. Donc, ce n'est pas nouveau. Mais depuis, nous avons changé de dirigeants, et les nouveaux n'ont pas donné suite. C'est des deux côtés. Le protocole portait sur l'éducation et la police, et également sur le logement et les revendications territoriales. En fait, les revendications territoriales figuraient en priorité, notamment celle du mont Castle. Klein a joué un rôle important dans la préparation de ces protocoles d'entente, surtout en ce qui concerne les services de police. Après son départ, personne n'y a donné suite. Donc, je suis d'accord avec vous.

La sénatrice Beyak : Je vous remercie infiniment, monsieur Breaker, de votre franchise et de votre perspicacité. Ça fait du bien d'écouter votre témoignage, qui est par ailleurs très instructif.

J'habite dans le nord-ouest de l'Ontario, dans une belle région parsemée de lacs, près de Kenora, à Dryden. Thunder Bay est une ville qui attire énormément de jeunes, ainsi que Winnipeg.

Vous avez parlé du changement de mentalité entre les générations, et vous avez dit que les jeunes voulaient être propriétaires de leur maison, contrairement aux aînés qui, eux, sont tout à fait satisfaits que leur maison appartienne à la bande. Est-ce que c'est ce que vous constatez dans votre réserve? C'est un régime qui existe depuis une centaine d'années, mais il est peut-être temps de le réformer, en fonction de ce que les jeunes ont à dire. Qu'en pensez-vous?

M. Breaker : Nous n'avons pas assez de temps pour que je vous explique la pensée traditionnelle des aînés, la vision que les Pieds-Noirs ont du monde, et la notion selon laquelle la famille est un cercle. Ici on dit que c'est Turtle Island, mais pour nous, l'élément fondateur, c'est plutôt le bison. Le concept selon lequel il faut garder ses enfants auprès de soi, du sein maternel jusqu'à la tombe, ce concept est en train de changer, probablement depuis les années 1990.

L'éducation est un facteur de progrès. C'est indéniable. Les jeunes se rendent compte que les débouchés sont ailleurs. En tant qu'administrateurs, nous essayons de profiter de toutes les initiatives qui se présentent, sur les médias sociaux ou sur Internet. Nous faisons une demande, même si elle n'aboutit pas. Peu importe, du moment qu'on fait une demande. Il faut la faire dans l'intérêt des enfants, pour les faire sortir de la réserve, car les débouchés sont ailleurs.

J'ai deux fils. Ils savent qu'ils vont devoir partir. Ils connaissent mon histoire, mais ils savent que j'ai eu beaucoup de chance. C'est grâce au sport que j'ai réussi à partir. Mais la majorité des jeunes d'aujourd'hui sont pris entre deux mondes. Je pense qu'ils essayent de faire plaisir à leurs parents et à leurs grands-parents en disant qu'ils resteront dans la réserve pour s'occuper d'eux, pour les soigner. Les avantages et les droits issus de traités sont en constante diminution. Je pense que les parents et les grands-parents commencent à se rendre compte que leurs enfants et petits- enfants auront plus de débouchés en allant ailleurs qu'en restant dans la réserve.

Je pense à mes neveux qui ont toutes sortes de problèmes sociaux. L'un d'entre vous a parlé des services d'aide à l'enfance. C'est la réalité. J'ai obtenu mon diplôme de l'université en novembre dernier, et j'ai donc compilé beaucoup de statistiques sur les services d'aide à l'enfance. C'est une véritable pépinière pour le système pénal autochtone, quand on voit le nombre de jeunes qui sont incarcérés.

Je reçois chaque mois une cinquantaine de lettres de jeunes gens qui se disent souvent désespérés parce qu'ils ne peuvent pas obtenir de l'aide à l'extérieur de la réserve. Ils touchent à peu près 800 $ par mois, mais comme le loyer est de 1 100 $, ils sont obligés de partager le logement avec d'autres locataires. Encore heureux quand ils ne se disputent pas. J'essaie bien de les aider à partir s'installer en ville, c'est à 45 minutes de la réserve, mais, étant donné le prix de l'essence, ce n'est pas facile. Les choses changent, donc.

Nous avons de la chance parce que nous ne sommes pas loin de Calgary, mais pour les autres Autochtones qui habitent dans des communautés où il n'y a aucune activité économique, ce n'est vraiment pas facile.

Bien sûr que nous devons planifier notre développement. J'ai rencontré, dans des conférences, des Autochtones qui habitent dans des communautés éloignées, et ils m'ont demandé : « comment faites-vous pour faire telle ou telle chose? Est-ce qu'on devrait participer au programme de l'article 95? ». Je leur réponds toujours que oui, mais qu'ils doivent faire attention de ne pas devenir une tierce partie. Il y a plusieurs communautés en Alberta qui se sont retrouvées avec un statut de tierce partie.

À mon avis, l'accès à la propriété immobilière est la seule solution. C'est ce qu'il va falloir faire. J'espère que cela répond à votre question.

La sénatrice Beyak : Merci beaucoup.

Le président : Monsieur Breaker, nous avons abordé énormément de questions ce soir, et je sais que les membres du comité vous en sont infiniment reconnaissants. Avant de conclure nos travaux, j'aimerais vous parler de deux choses.

La nation des Siksika a fait parler d'elle lorsqu'elle a mis en place un programme d'entretien des maisons, dont vous nous avez fait une brève description. Est-ce que ce programme est encore donné? Est-ce que ça marche bien? Est-ce que c'est quelque chose que vous recommanderiez aux autres Premières Nations, pour améliorer l'entretien des maisons? Votre réserve est très vaste. Pourriez-vous nous donner plus de précisions là-dessus?

M. Breaker : Oui.

Je profite de l'occasion pour remercier encore une fois la SCHL. Tout ce qu'elle fait n'est pas négatif, ses programmes de formation sont le nec plus ultra. Nous avons essayé d'en profiter au maximum, notamment le programme d'entretien des maisons. Je crois que nous sommes l'une des rares Premières Nations de l'Alberta à avoir organisé cette formation. Nous sommes quatre à la donner aux membres de notre nation.

Nous avons dû aller jusqu'à Big Stone, dans le nord. C'était une épreuve. Je n'y suis pas allé, mais mon neveu et un jeune administrateur y sont allés. Ils ont rencontré les membres de la bande, à l'occasion d'une réunion publique, et si vous n'avez jamais assisté à ce genre de réunion, je peux vous dire que c'est un véritable forum. Ils étaient censés leur faire un topo sur la construction des bâtiments, comment conserver la chaleur et la fraîcheur, le rôle des fenêtres, enfin des notions de construction tout à fait élémentaires, mais ça leur a pris une demi-journée. Les gens ont voulu parler de la politique d'habitation, ce qui n'avait bien sûr rien à voir avec le programme d'entretien d'une maison, mais ils avaient besoin de se défouler.

Si votre comité envisage de se rendre dans les régions, il va devoir écouter les habitants de ces communautés. Il faut les laisser s'exprimer. C'est ça la consultation, la recherche d'un compromis, le défoulement. J'y suis habitué. Si vous devez vous rendre dans les régions, ne manquez pas d'aller les écouter. Pour eux, ça fait partie du processus de guérison.

Ce qui est étonnant, c'est que ce sont surtout les femmes qui se sont intéressées au programme d'entretien des maisons. Elles formaient la majorité des participants. Elles font maintenant leurs propres vérifications d'entretien, notamment pour le calfeutrage, et elles sont capables de dire si l'entrepreneur a bien fait son travail ou non. Elles voient tout de suite s'il n'a pas utilisé le bon produit. La façon de planter des clous et les codes sont aussi des sujets qui les intéressent. Certaines d'entre elles ont même lu le Code national du bâtiment. C'est pour vous dire l'intérêt que cela suscite. Quand ces jeunes auront une maison, ils sauront quoi faire pour l'entretenir, au lieu de se comporter comme leurs aînés et de dire : « donnez-moi une maison mais je vais continuer d'appeler le service du logement pour faire les réparations ». Ça, c'est fini.

Nous avons en effet cessé de réparer les fenêtres cassées. Comme c'est du vandalisme, nous l'avons indiqué clairement dans nos politiques. Les dirigeants me le reprochent beaucoup. C'est pour ça que, lorsque vous traversez notre réserve en voiture, vous voyez beaucoup de fenêtres condamnées, c'est parce que nous ne payons plus les réparations. Nous en laissons la responsabilité aux propriétaires, ou plutôt aux occupants du logement.

J'espère que cela répond à votre question.

Le président : C'est parfait. Je suis content d'entendre des nouvelles positives.

Pour terminer, j'aimerais parler de la planification et de la formation, dont vous avez amplement souligné les besoins. Des témoins nous ont parlé du Fonds pour les logements du marché destinés aux Premières Nations, et de son Programme de développement des capacités qui, d'après ce qu'on nous a dit, a pour objectif d'aider les communautés admissibles à développer leur parc de logements du marché. Avez-vous songé à faire une demande dans le cadre de ce programme? Sinon, pourquoi?

M. Breaker : Oui, nous le faisons depuis 2011. Nous avons quatre gestionnaires de projet, trois gestionnaires immobiliers et une personne qui va bientôt obtenir son diplôme de travailleuse sociale. Tout ça concerne le logement. Je ne comprends pas pourquoi les autres départements de services n'en profitent pas, étant donné que ce programme offre des financements. Je suppose qu'il faut tout simplement le vouloir. Il faut que le personnel soit dévoué à la cause.

J'ai des collaborateurs exceptionnels. J'ai mis tout le temps qu'il fallait pour les former, et aujourd'hui, la seule chose qui nous manque, c'est une base de données. Je pourrais trouver les équipements nécessaires ainsi que les commis pour s'en occuper, mais ce sont les logiciels qui changent tout le temps. Il faudrait que les autres départements de services soient d'accord pour participer à l'achat, afin d'avoir une seule base de données. À l'heure actuelle, ce sont les services de santé qui ont la majorité des données, en raison de la législation sur l'eau. Je suppose que les agents d'hygiène du milieu ont la responsabilité de veiller à la qualité de l'eau. Nous utilisons ce fonds, il nous est très utile.

Le président : Avant de clore la séance, je voudrais encore une fois vous remercier, au nom des membres du comité, de votre franchise, de vos connaissances historiques, de votre description des différents problèmes qui se posent à vous, ainsi que des solutions que vous avez proposées. Nous suivrons vos conseils lorsque nous nous rendrons dans les régions, nous irons rencontrer des gens pour leur parler, sur place. C'est ce que nous avons fait dans la région de l'Atlantique la semaine dernière, et nous avons l'intention de nous rendre dans d'autres régions du Canada

J'aimerais informer les membres du comité qu'aujourd'hui, nous avons été saisis par le Sénat d'un nouveau projet de loi qui concerne la nation Qalipu Mi'kmaq et qui est parrainé par le sénateur Wallace. Nous mettrons de côté notre étude sur le logement pour examiner ce projet de loi dès la semaine prochaine.

Le sénateur Moore : Qu'en est-il du projet de loi sur les parcs?

Le président : Il a été renvoyé au Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie, mais ne me demandez pas pourquoi.

Je vous remercie, chers collègues.

Une dernière observation, monsieur Breaker?

M. Breaker : Je voudrais vous demander de m'envoyer vos communiqués, parce que le dernier ne m'est pas parvenu. Je crois que le premier remonte à janvier. Si je l'avais reçu, j'aurais pu mieux me préparer et apporter les documents nécessaires. J'ai de bons contacts avec les autres gestionnaires, et pour un dossier comme celui-ci, c'est important. Je vous prie de m'excuser, mais c'est là toute la documentation que j'ai pu rassembler en si peu de temps.

Le président : Vous avez fait un excellent travail, malgré le court préavis. Je vais demander à notre greffière intérimaire de voir avec vous comment on peut améliorer nos systèmes de communications.

M. Breaker : D'accord. Elle a mon adresse courriel.

(La séance est levée.)


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