Délibérations du Comité sénatorial permanent de
l'Énergie, de l'environnement et des ressources naturelles
Fascicule 29 - Témoignages du 26 mai 2015
OTTAWA, le mardi 26 mai 2015
Le Comité sénatorial permanent de l'énergie, de l'environnement et des ressources naturelles, devant lequel a été renvoyé le projet de loi C-46, Loi modifiant la Loi sur l'Office national de l'énergie et la Loi sur les opérations pétrolières au Canada, se réunit aujourd'hui, à 17 h 3, afin d'étudier le projet de loi.
Le sénateur Richard Neufeld (président) occupe le fauteuil.
[Traduction]
Le président : Je vous souhaite la bienvenue à cette réunion du Comité sénatorial permanent de l'énergie, de l'environnement et des ressources naturelles. Je m'appelle Richard Neufeld. Je représente la province de la Colombie- Britannique au Sénat et je préside ce comité.
Permettez-moi de souhaiter la bienvenue aux honorables sénateurs ainsi qu'à tous les membres du public présents dans cette salle, et à tous les téléspectateurs du pays qui nous suivent à la télévision. Je rappelle que les audiences de ce comité sont non seulement ouvertes au public mais également transmises en direct en webdiffusion sur le site sen.parl.gc.ca. Vous pouvez aussi trouver davantage de détails concernant la programmation des comparutions de témoins sur le site web, sous la rubrique « Comités du Sénat ».
Je vais à présent demander aux sénateurs siégeant autour de la table de bien vouloir se présenter, et je commencerai par présenter moi-même le vice-président assis à ma droite, le sénateur Paul Massicotte, du Québec.
Le sénateur MacDonald : Michael MacDonald, Nouvelle-Écosse.
Le sénateur Black : Doug Black, Alberta.
Le sénateur Patterson : Dennis Patterson, Nunavut.
Le sénateur Boisvenu : Pierre-Hugues Boisvenu, Québec.
La sénatrice Seidman : Judith Seidman de Montréal, Québec.
Le président : Permettez-moi de vous présenter également notre personnel, en commençant par la greffière, Lynn Gordon, assise à ma gauche, ainsi que nos deux analystes de la Bibliothèque du Parlement, Sam Banks et Marc LeBlanc, assis à ma droite.
Le projet de loi C-46, Loi modifiant la Loi sur l'Office national de l'énergie et la Loi sur les opérations pétrolières au Canada — également connu sous le titre abrégé de Loi sur la sûreté des pipelines —, a été amendé par la Chambre des communes et adopté en troisième lecture le 6 mai 2015. Après avoir été lu pour la première fois au Sénat le 6 mai 2015, il a été renvoyé devant notre comité le 14 mai.
Nous commençons aujourd'hui l'examen de ce projet de loi et j'ai le plaisir, à cette occasion, d'accueillir pour la première portion de nos délibérations les représentants de Ressources naturelles Canada. Bienvenue, donc, à Jeff Labonté, directeur général, Direction de la sûreté énergétique et sécurité, Secteur de l'énergie, ainsi qu'à Terence Hubbard, directeur général, Direction des ressources pétrolières, Secteur de l'énergie, à Christine Siminowski, directrice, Direction de la sûreté énergétique et de la sécurité, Secteur de l'énergie, et enfin à Joseph McHattie, conseiller juridique.
Je vous remercie d'avoir pris le temps de venir nous exposer le projet de loi, alors que vous êtes certainement très occupés. Je crois savoir que vous avez une déclaration liminaire, qui sera suivie des questions posées par les sénateurs et de vos réponses.
Jeff Labonté, directeur général, Direction de la sûreté énergétique et sécurité, Secteur de l'énergie, Ressources naturelles Canada : Monsieur le président, nous vous remercions de nous donner l'occasion de proposer un aperçu de ce projet de loi — qui revêt une grande importance pour notre ministère et pour l'ensemble du gouvernement.
En présentant récemment le projet de loi C-46, connu sous le nom de Loi sur la sûreté des pipelines, le gouvernement du Canada prend des mesures pour démontrer son engagement quant à la protection de la sécurité de la population canadienne et de l'environnement. Cet engagement continu envers la protection de la sécurité et de l'environnement s'inscrit dans le plan du gouvernement sur le développement responsable des ressources, qui prend déjà en compte d'autres textes législatifs régissant le secteur énergétique au Canada.
J'aimerais débuter en fournissant quelques renseignements généraux concernant la sûreté des pipelines en général, et notamment le concept de systèmes de sécurité de classe mondiale. Si vous le permettez, j'aimerais ensuite m'appuyer sur une présentation PowerPoint pour illustrer certains des faits saillants, puis nous nous ferons un plaisir de répondre à vos questions.
[Français]
J'ai le grand plaisir de vous présenter un petit survol de ce projet, et je suis heureux de cette occasion qui m'est offerte de vous parler et de répondre à vos questions cet après-midi.
[Traduction]
S'agissant de la sûreté des pipelines au Canada, il importe de les situer géographiquement, d'en décrire la réglementation et de passer en revue leurs antécédents en matière de sécurité. Le Canada compte un réseau de pipelines d'environ 825 000 kilomètres. Le gouvernement fédéral est chargé d'environ 73 000 kilomètres de ces pipelines, principalement ceux qui franchissent les frontières internationales ou provinciales, de même que les pipelines de dimensions plus importantes et capables d'acheminer de plus grands volumes — sans oublier qu'il existe, dans certaines provinces, des pipelines de fort diamètre faisant partie de ces 825 000 kilomètres et pour lesquels la compétence est partagée.
Notre réseau de pipelines est essentiel à notre vie quotidienne, car il permet d'acheminer les ressources énergétiques depuis les zones de production jusqu'aux marchés de consommation, y compris les marchés d'exportation. Chaque année, ils acheminent environ 1,3 milliard de barils de pétrole brut et de produits pétroliers, auxquels s'ajoutent 5 billions de pieds cubes de gaz transportés par gazoduc.
C'est la Loi sur l'Office national de l'énergie qui régit la manière dont l'office édicte ses réglementations, et qui fait l'objet des amendements proposés dans la Loi sur la sûreté des pipelines. L'examen des antécédents en matière de sécurité révèle que 99,999 p. 100 des produits de pétrole et de gaz acheminés entre 2008 et 2014 à travers les pipelines réglementés par les autorités fédérales du Canada sont parvenus sans encombre à destination.
J'aimerais dire quelques mots concernant les systèmes de sécurité de classe mondiale et me ferai un plaisir de répondre à d'éventuelles questions sur ce sujet.
S'il est vrai que nous avons un palmarès impressionnant en matière de transport et de livraison, dans des conditions sécuritaires, d'importants volumes de produits énergétiques, nous n'en devons pas moins essayer de faire mieux encore et de parvenir à zéro incident. Le projet de loi C-46 met en œuvre ce que le Canada considère comme un système de sûreté des pipelines de classe mondiale reposant sur trois piliers : la prévention, la préparation et l'intervention, et enfin la responsabilité et l'indemnisation. La prévention vise à empêcher les incidents; la préparation et l'intervention à s'assurer que les entreprises sont prêtes à intervenir et capables de le faire en cas d'incidents; enfin, la responsabilité et l'indemnisation à veiller à ce que la population canadienne n'ait pas à prendre en charge les coûts et les dommages à la suite d'un incident.
Nous pensons que le projet de loi C-46 garantit le maintien d'un système de sûreté de classe mondiale, permettant l'acheminement sécurisé des produits énergétiques à travers le pays ainsi que la protection de l'environnement.
Permettez-moi de passer rapidement en revue la présentation PowerPoint. Je crois, honorables sénateurs, qu'elle vous a déjà été distribuée, et si tel n'est pas le cas, nous ne manquerons pas de le faire.
Le projet de loi sur la sûreté des pipelines propose des amendements à la Loi sur l'Office national de l'énergie et à la Loi sur les opérations pétrolières au Canada. Ces deux textes législatifs relèvent principalement de la compétence du ministre des Ressources naturelles, même s'il convient de préciser que le ministre des Affaires autochtones et du Développement du Nord exerce certaines responsabilités pour les activités se déroulant au nord du 60e parallèle dans les régions territoriales du Canada.
La quatrième diapositive illustre certaines des modifications proposées, telles que les nouvelles dispositions axées sur la prévention et visant à réduire les possibilités d'incidents.
Permettez-moi de vous les énumérer : le pouvoir d'édicter des normes spécifiques en matière de surveillance de pipelines et de prise de dispositions en cas d'urgence; des amendements maintenant la prévention des dommages, de même que les règlements autorisant les activités sur les sites, ainsi que leurs environs, où sont installés les pipelines à travers le pays; la clarification des pouvoirs d'audit et d'inspection dévolus à l'Office national de l'énergie; enfin, les lignes directrices en matière de sanctions judiciaires en cas d'incident, mais aussi à titre de facteur de dissuasion.
S'agissant de la préparation et des interventions décrites à la cinquième diapositive de l'exposé PowerPoint, on y voit que les sociétés pipelinières devront détenir des ressources financières suffisantes pour couvrir les coûts éventuels liés à un incident se produisant sur les principaux oléoducs, soit un plafond de 1 milliard de dollars pour ces oléoducs principaux et des montants inférieurs pour tous les autres pipelines installés dans le pays. Je précise que ces sociétés devront avoir un montant minimum de ressources financières sous une forme immédiatement utilisable. Une autre disposition prévoit que l'ONE pourra prendre la direction des opérations à titre exceptionnel, si une société devait se révéler incapable ou non désireuse d'intervenir en cas de déversement. Par ailleurs, l'ONE est autorisé à rembourser les particuliers et les pouvoirs publics des coûts encourus pour faire face à un déversement ou à un incident.
La diapositive no 6 traite de la responsabilité et des dédommagements. En effet, le projet de loi se réfère de façon expresse aux principes du paiement par le pollueur tel qu'il existe en common law et qui sera, de la sorte, consacré dans la loi écrite. Il introduit la notion de responsabilité absolue, ou hors-faute, en prescrivant un montant automatiquement imputé aux sociétés impliquées, que l'on retienne ou non la faute ou la négligence contre elles. Dans ce dernier cas, une fois la faute ou la négligence prononcée, elle est illimitée. S'agissant des grands pipelines, le plafond de la responsabilité absolue est fixé à 1 milliard de dollars. L'ONE est autorisé à recouvrer un montant également illimité auprès du secteur de l'énergie au cas où il serait obligé de prendre les opérations en main à l'occasion d'un incident. Il est précisé que les sociétés pipelinières conservent la responsabilité des pipelines abandonnés jusqu'à ce que ces derniers aient été retirés du terrain. Par ailleurs, ils donnent aux procureurs des paliers fédéral et provincial la possibilité de poursuivre en vue d'une indemnisation en cas de dommages à l'environnement au titre de ce que l'on appelle la perte de la valeur de non-usage.
Le projet de loi comprend un certain nombre d'amendements d'application, de moindre importance et dont je vous épargne le détail. Je propose, monsieur le président, de m'arrêter là et que nous passions aux questions et aux réponses que nous nous efforcerons d'apporter aux sénateurs concernant ce projet de loi.
Le président : Merci beaucoup, monsieur Labonté. Nous passons donc aux questions.
[Français]
Le sénateur Massicotte : Merci beaucoup d'être parmi nous. Le projet de loi a beaucoup de mérite, mais il suscite aussi plusieurs questions.
La Chambre des communes a proposé deux amendements qui ont été adoptés. Le premier prévoyait les dommages encourus par les Autochtones. L'autre concernait l'Office national de l'énergie. Le mot « shall », en anglais, a été remplacé par le mot « devrait », en français. En d'autres mots, ils devraient être remboursés pour les frais encourus, mais ne le seront pas nécessairement.
Êtes-vous d'accord avec ces deux modifications? Dans l'affirmative, pourquoi n'avaient-elles pas été prévues au départ?
M. Labonté : Je vous remercie de ces bonnes questions. J'aimerais souligner quelques éléments quant à ces deux amendements qui ont été proposés et qui ont reçu l'approbation de la Chambre des communes et du Comité des ressources naturelles.
La première partie concerne le recouvrement des coûts pour les communautés autochtones.
[Traduction]
En l'occurrence, les dispositions antérieures définissaient un corps dirigeant autochtone comme étant une entité particulière. La Loi stipule que l'office peut ordonner à une société de rembourser une partie des coûts engagés. En l'occurrence, une fois de plus, le corps dirigeant autochtone n'avait pas été inclus, d'où l'amendement qui a été proposé et adopté par le comité de la Chambre.
Initialement, la disposition du projet de loi n'excluait pas le corps dirigeant autochtone; cependant, pour plus de précisions, cela a été ajouté à la demande des membres du comité et accepté par le gouvernement.
Le deuxième amendement propose qu'advenant un incident sur un pipeline à l'occasion duquel le gouverneur en conseil désignerait une société incapable de faire face à un incident, l'ONE prenne la situation en main et assume la responsabilité des opérations, dont le nettoyage. Auparavant, le texte législatif disposait qu'une fois les règlements adoptés, l'ONE pourrait recouvrer les coûts auprès du secteur énergétique; on a proposé un amendement aux termes duquel l'office devrait, de façon impérative, obtenir ces fonds auprès de l'ensemble des opérateurs du secteur.
On voit donc que, en convergence avec un certain nombre de dispositions du projet de loi, le cours des événements est mieux fixé pour le cas où l'ONE se verrait enjoindre d'agir au nom de la société pipelinière, et que le remboursement des coûts se ferait de façon obligatoire.
[Français]
Le sénateur Massicotte : Du point de vue des Autochtones, rien dans le projet de loi ne vous empêchait de prévoir le remboursement des dommages encourus. Cette disposition ne figurait pas au projet de loi. En d'autres mots, ce n'était pas là votre intention de façon systématique. Or, vous me donnez l'impression que le gouvernement est d'accord avec ces changements. Il s'agit tout de même d'un secteur important.
Qu'est-ce qui a changé dans votre position entre le moment où vous avez préparé le projet de loi et où il a été adopté? Est-ce un changement de position ou de la souplesse de votre part?
[Traduction]
M. Labonté : Je ne crois pas que l'amendement propose nécessairement un changement d'approche du projet de loi. Je crois surtout qu'il précise et qu'il garantit le cours des choses, pour ainsi dire. Plusieurs autres parties du projet de loi traitent de façon spécifique des corps dirigeants autochtones alors que cette disposition ne contient pas de référence spécifique. L'amendement a été proposé et adopté à des fins d'éclaircissement, mais la possibilité avait été traitée dans plusieurs autres articles du projet de loi.
On trouve cela sous la rubrique « Définitions » du projet de loi, à la première page en fait, à l'article 15 plus précisément :
« corps dirigeant autochtone » Conseil, gouvernement ou autre entité autorisé à agir pour le compte :
a) soit d'une bande au sens du paragraphe 2(1) de la Loi sur les Indiens;
b) soit d'une première nation, d'un peuple autochtone ou de tout organisme autochtone qui est partie à un accord sur des revendications territoriales...
Le projet de loi définit avec précision cet aspect particulier, qui n'est pas incorporé de façon spécifique par le processus autorisant l'office à ordonner le remboursement. Cependant, d'autres articles du projet de loi énumèrent de façon effective les corps dirigeants autochtones. Cet amendement a été proposé afin de mieux garantir cette possibilité, et il a été adopté par le comité.
[Français]
Le sénateur Massicotte : À l'alinéa 48.12(i), on définit les types de dommages qui s'appliquent aux fins de la loi. Dans le passé, bien souvent, lorsqu'il était question de dommages environnementaux, on faisait référence à ces termes en particulier. Or, ici, ce n'est pas le cas. Y a-t-il une différence entre les dommages qui ont été décrits et définis et l'expression « dommages environnementaux »?
[Traduction]
M. Labonté : Avec votre permission, je voudrais répondre et, au besoin, demander à mon conseil juridique d'apporter des précisions supplémentaires.
Je crois que la notion de dommages à l'environnement concerne un domaine du droit qui reste encore mieux défini par la common law, je veux dire en termes plus généraux. On y introduit la notion évoquée au c), celle de perte de la valeur de non-usage, qui est conforme à d'autres lois fédérales. Nous incluons ce volet de définition de la valeur de non- usage dans le but de rester en phase avec différents textes de loi fédéraux qui traitent tant de l'environnement que de l'énergie. Je crois qu'il existe une définition plus large du concept de dommages à l'environnement, qui répertorie certaines composantes et en donne une description plus précise.
En l'occurrence, nous voulions mieux définir cette composante particulière et la rendre conforme à l'ensemble du cadre législatif fédéral.
Je sais que des instances ont été présentées à propos de la notion de dommages à l'environnement. Nous pensons qu'il s'agit d'une démarche similaire sur le fond, et afin de maintenir une certaine homogénéité, on garde l'expression de valeur de non-usage, qui est employée dans d'autres lois fédérales.
[Français]
Le sénateur Massicotte : Êtes-vous d'accord, monsieur?
Joseph McHattie, conseiller juridique, Ressources naturelles Canada : J'aimerais simplement confirmer ce que M. Labonté a dit. Il n'y a pas de définition arrêtée de l'expression « dommages environnementaux » par rapport aux autres dommages dans l'usage. Il s'agit d'un choix de mots. Dans ce cas-ci, il s'agissait d'établir une constance entre ce projet de loi et les autres lois qui ont déjà été adoptés.
Le sénateur Boisvenu : Bienvenue à nos témoins. J'ai trouvé votre présentation très intéressante.
J'ai quelques questions techniques. Où le Canada se situe-t-il par rapport au nombre d'accidents qui surviennent par kilomètre de pipeline? Je crois que c'est ainsi qu'on calcule la performance d'un réseau. Où se situe-t-on, par exemple, par rapport aux Américains?
Ma deuxième question est un peu plus technique et se rapporte au volume de gaz et de pétrole. Est-ce que le nombre d'incidents par volume est comparable à celui des États-Unis, où les accidents semblent être un peu plus fréquents qu'au Canada?
M. Labonté : Je vous remercie pour la question. Vous avez posé des questions très importantes en ce qui concerne les comparaisons à établir avec les autres pays. Mes collègues de l'Office national de l'énergie ont fait des études de comparaison entre l'Europe, les États-Unis et le Canada. En général, le Canada affiche un bilan plus positif que celui des autres pays. Mes collègues pourraient vous répondre avec plus de précision à ce sujet.
De notre côté, lorsque nous examinons les faits, nous estimons que, au cours des cinq prochaines années, il pourrait y avoir en moyenne six ou sept incidents liés au pétrole brut par année en ce qui concerne les pipelines fédéraux. Le volume qui est dispersé dans l'environnement se chiffre à environ 1 700 barils de pétrole brut, et environ 96 p. 100 de ce volume est récupéré par les activités de nettoyage. En général, le coût lié à ces incidents est d'environ 3,7 millions de dollars.
Donc, en règle générale, le Canada est très stable et a un bilan très positif, mais pour nous, six ou sept incidents, c'est plus que zéro, qui est notre cible. C'est donc positif, mais il y a encore du travail à faire.
Le sénateur Boisvenu : Vous parlez des pipelines fédéraux. Cela veut donc dire qu'il y a des pipelines qui relèvent de la compétence provinciale et d'autres qui sont de compétence fédérale?
M. Labonté : C'est bien cela.
Le sénateur Boisvenu : Quelle est la proportion des pipelines au Canada qui relèvent des provinces par rapport à ceux qui relèvent du gouvernement fédéral?
M. Labonté : Il y a 73 000 kilomètres de pipelines sous juridiction fédérale. Il y a 825 000 kilomètres de pipelines en général, mais cela comprend des pipelines de grand diamètre. Il y a donc des pipelines de gaz naturel résidentiels, et il y a aussi des pipelines consacrés à des transferts plus importants entre les provinces ou les frontières internationales. C'est très différent.
Généralement, on en trouve davantage dans l'Ouest, où il y a plus grande production d'énergie, mais on trouve des pipelines à peu près partout au pays.
Le sénateur Boisvenu : Est-ce que le projet de loi actuel a pour objectif d'harmoniser la réglementation avec celle des provinces ou s'agit-il vraiment d'une réglementation tout à fait distincte?
M. Labonté : C'est tout à fait séparé, mais un aspect de notre travail est la prévention. Il y a des activités acceptables qui diffèrent d'un gouvernement à l'autre. À l'heure actuelle, nous tenons des discussions avec les provinces pour harmoniser nos normes liées à ces activités.
Par exemple, nous avons expliqué, dans le projet de loi, la responsabilité en ce qui concerne les appels ou la confirmation des activités liées aux pipelines par les propriétaires de terrains où se trouvent ces pipelines, puisque les activités dans le sous-sol sont limitées.
[Traduction]
Des dommages ou des déplacements d'éléments du terrain au-dessus du pipeline.
[Français]
Dans ce cas, les normes diffèrent, et nous voudrions le plus possible harmoniser les activités avec les provinces pour simplifier le processus et améliorer le niveau de santé et de sécurité en établissant une norme commune pour le pays.
Le sénateur Boisvenu : Le Canada est souvent critiqué, sur le plan environnemental, lorsqu'il adopte des règlements plus sévères que ceux de ses voisins américains. On nous dit que le Canada applique des règles différentes d'un pays à l'autre pour des questions de concurrence. Vous avez tout de même consulté des gens dans le cadre de ce projet de loi. Quelle a été la réaction des entreprises qui gèrent les pipelines en ce qui concerne la réglementation des autres pays par rapport à la nôtre, qui m'apparaît tout de même plus sévère?
M. Labonté : C'est une très bonne question. J'espère que mes collègues du ministère de l'Industrie pourront y répondre avec un peu plus de précision. Nous avons tenu des discussions avec de nombreuses compagnies de pipelines du Canada.
[Traduction]
À n'en pas douter, certaines sociétés ont pensé qu'il s'agissait de changements plus sévères et plus profonds. D'autres y voyaient plutôt des éléments d'amélioration importants et nécessaires au système de sûreté des pipelines. Il est probable qu'un certain nombre de petites entreprises se préoccupent davantage que leurs consœurs plus importantes.
Nous avons eu de vastes échanges à l'échelle internationale à propos de notre travail, notamment avec les États-Unis mais aussi avec nos collègues britanniques et ceux des provinces canadiennes, notamment dans l'Ouest. Ils se sont intéressés de près à nos activités visant à assurer la sûreté des pipelines en adoptant des paramètres de classe mondiale pour ce qui est de la prévention et de la préparation. Peut-être d'autres vont-ils nous emboîter le pas, mais toujours est- il que la sensation prévaut indubitablement que, s'agissant des pipelines à réglementation fédérale, les mesures proposées ici garantissent davantage aux Canadiens que les sociétés pipelinières s'attacheront à faire de leur mieux pour passer de six à sept incidents par an à zéro incident.
Le sénateur Black : Je commencerai par remercier l'ensemble de votre délégation de comparaître aujourd'hui, et je tiens à souligner que le travail que vous accomplissez est essentiel pour la prospérité du Canada. Je suis un sénateur de l'Alberta, et vous ne vous étonnerez donc pas que je m'implique beaucoup dans le secteur de l'énergie.
S'agissant de l'accès aux débouchés énergétiques sur la côte Ouest, j'en arrive à penser, après réflexion, que l'opposition provenant des peuples autochtones est axée sur la capacité de nettoyage après un déversement, car il faut bien s'attendre à des problèmes dans ce domaine.
Tel est mon point de vue, et, si vous voulez, ce qui va inspirer mes questions.
S'agissant du projet de loi qui nous est soumis, je voudrais vous en proposer une synthèse, et vous laisser ensuite me dire si, selon vous, ma perception est exacte ou erronée.
Dans les grandes lignes, les grandes sociétés assujetties à la réglementation fédérale doivent déposer une caution d'un montant de 1 milliard de dollars afin de garantir qu'en cas d'incident, ce montant sera disponible pour les opérations de nettoyage. Est-ce bien cela?
M. Labonté : Oui, dans les grandes lignes.
Le sénateur Black : Est-ce qu'il s'agit d'une responsabilité absolue?
M. Labonté : C'est exact.
Le sénateur Black : Tout cela est excellent, et je m'en félicite. Est-ce bien là la source de l'autorité législative en matière de nettoyage après déversement? De manière concrète, en cas d'incident, est-ce bien dans ces documents qu'un juriste trouvera tous les textes législatifs nécessaires à la réglementation, à la surveillance et à l'attribution de responsabilités découlant d'un incident, ou y a-t-il d'autres textes de loi régissant ce domaine?
M. Labonté : Je dirais que nous avons là l'ensemble du corpus en vigueur — même si j'ai pris un moment de réflexion à propos du volet législatif-réglementaire. À titre d'exemple, aux termes de la législation actuelle, l'ONE a le pouvoir d'ordonner aux sociétés pipelinières d'intervenir. En vertu du processus réglementaire d'approbation, il est habilité à examiner les plans d'intervention établis par une société suite à un incident. Et très certainement, si une question d'attribution de responsabilité devait découler d'un événement ou d'un incident, le projet de loi C-46 désignerait très clairement qui devrait en porter la responsabilité ainsi que l'étendue de la responsabilité de telle ou telle entreprise.
Le sénateur Black : Parfait. Je voudrais poser deux questions spécifiques et faire une observation à propos de laquelle j'aimerais recueillir votre avis.
Pour revenir à la discussion concernant la consultation, pourriez-vous, nous décrire le niveau de consultation entrepris avec les groupements autochtones de la côte Ouest du Canada?
M. Labonté : Bien volontiers. Avec votre permission, je vais prendre le temps de définir le mot « consultation » car il a une signification très précise. Nous avons, tout comme le gouvernement fédéral, l'obligation constitutionnelle de procéder à des consultations. Afin de bien couvrir l'ensemble du concept, vous me permettrez d'employer les mots « action sociale » — « Outreach » en anglais —, « discussions », « exposés », « ateliers » et « dialogue » en même temps que « consultation ».
Permettez-moi à présent de me tourner vers mon collègue Terence Hubbard, car c'est lui qui dirige ce volet de nos activités et il va pouvoir vous les décrire.
Terence Hubbard, directeur général, Direction des ressources pétrolières, Secteur de l'énergie, Ressources naturelles Canada : On peut dire avec certitude qu'au cours des deux ou trois dernières années, le gouvernement fédéral a déployé de grands efforts pour dialoguer avec les communautés des Premières Nations, tout particulièrement en Colombie- Britannique, à propos des priorités à retenir en vue de la diversification du marché de l'énergie. Aussi bien les sous- ministres que les ministres intéressés se sont rendus sur place afin d'entendre ces communautés exprimer leurs préoccupations en matière de mise en valeur des ressources et d'installation des réseaux de pipelines.
Douglas Eyford a été nommé représentant spécial du gouvernement fédéral pour les consultations avec les Premières Nations, et chargé de faire des recommandations en vue du développement de l'infrastructure énergétique. La sûreté des pipelines a occupé une place de premier plan dans son rapport. Plus récemment, le gouvernement fédéral a créé, au sein de Ressources naturelles Canada, ce que nous appelons notre cellule de gestion des grands projets de l'Ouest, laquelle est munie du mandat spécifique d'établir un dialogue avec les Premières Nations de la Colombie-Britannique sur les questions liées à la mise en valeur de l'infrastructure énergétique.
Le sénateur Black : Je vous remercie beaucoup de cette réponse détaillée.
Imaginons un instant que se produise un incident qui n'affecte pas le réseau de pipelines mais plutôt un pétrolier, ou quelque chose d'analogue à ce qui s'est produit dans le port de Vancouver voici deux ou trois semaines. Est-ce que de tels incidents seraient couverts par le projet de loi que nous étudions?
M. Labonté : La réponse est non.
Le sénateur Black : Quelle serait donc la législation pertinente?
M. Labonté : S'agissant du cas du pétrolier, je pense que ce serait la Loi sur la marine marchande du Canada, mais je le dis sous réserve de vérification. La question serait du ressort du ministre des Transports.
Le sénateur Black : Je vous pose la question à tout hasard, mais savez-vous s'ils ont établi le même genre de plafond de responsabilité, je veux parler de la responsabilité absolue à hauteur de 1 milliard de dollars, ou peut-être plus, pour ce genre d'incident?
M. Hubbard : Il existe un régime analogue pour les cas de déversement de pétrole en mer. Comme l'a dit Jeff, ce sont nos collègues de Transports Canada qui s'en occupent. S'agissant des expéditions maritimes, il existe des conventions internationales, que le Canada a ratifiées.
Le domaine est régi par des règles internationales et il existe un fonds commun d'assurance d'environ 1,4 milliard de dollars sur lequel le Canada peut tirer afin de répondre à un déversement d'hydrocarbures en mer. Transports Canada, de son côté, a présenté des amendements législatifs afin de permettre au gouvernement d'augmenter la mise, si vous voulez, en cas de déversement catastrophique qui rendrait ce fonds insuffisant.
Le sénateur Black : Comment en est-on arrivé à ce chiffre de 1 milliard de dollars?
M. Labonté : Disons que plusieurs paramètres ont contribué à établir ce chiffre. Nous avons commencé, à titre de comparaison, par étudier les chiffres correspondants de par le monde. Les États-Unis, par exemple, imposent un droit sur chaque baril de pétrole produit, acheminé, reçu ou échangé aux États-Unis, quel que soit le mode de transport, y compris par pipeline. Ce fonds de dédommagement est plafonné à 1 milliard par incident, et il doit être mis à disposition dans le cas où la société pipelinière ne réagirait pas de façon appropriée à l'incident. Par ailleurs, le groupe d'experts de Northern Gateway, après avoir passé en revue ce projet de pipeline, a proposé une enveloppe de 950 millions de dollars pour la caution, l'assurance et les ressources financières disponibles. Enfin, nous avons planché sur un chiffre raisonnable à présenter, et nous sommes parvenus à 1 milliard de dollars.
Le sénateur Black : Formidable, voilà qui m'éclaire considérablement et je vous en remercie.
La sénatrice Seidman : Merci beaucoup, monsieur Labonté. J'aimerais vous interroger sur le volet de prévention que comportent les amendements proposés à ce projet de loi au titre de la sûreté. À la quatrième page de votre exposé, vous mettez en relief les amendements au régime de prévention des dégâts, afin d'en harmoniser les dispositions avec les systèmes provinciaux. Pourriez-vous expliquer quels amendements il convient d'apporter au régime de prévention des dégâts?
M. Labonté : Ces amendements se trouvent dans le projet de loi et, si vous le souhaitez, je vais vous indiquer leur emplacement.
Il s'agit surtout des perturbations apportées au terrain. À cette fin, on détermine ce qui est autorisé comme travaux à proximité et au-dessus des pipelines. En règle générale, lorsque les pipelines sont approuvés, cela s'accompagne de servitudes et de droits de passage d'une certaine largeur. Dans plusieurs régions du pays, ces servitudes imposent aux propriétaires de terrains privés des restrictions et stipulations sur les portions de terrain affectées par le pipeline.
Au plan fédéral, nous avons déterminé le degré d'intervention autorisée dans ce que l'on appelle la zone de sécurité. Imaginez que vous disposiez de trois acres et que le pipeline traverse votre terrain en occupant une bande de 25 mètres de large. Donc, si vous souhaitez y creuser à plus de 30 centimètres de profondeur, vous vous engagez à en informer la société pipelinière à l'avance, afin qu'elle puisse identifier l'emplacement exact du droit de passage occupé par le pipeline et veiller à ce que les travaux d'excavation n'entraînent pas de risque.
De la sorte, les choses sont plus claires, ce qui renforce la protection des gens comme des biens. Dans certains cas, les pipelines passent dans des zones urbaines ou semi-urbaines, et il peut être nécessaire, lorsqu'une équipe municipale doit effectuer des travaux de creusement, qu'elle localise avec précision le pipeline, ce qui pourrait entraîner l'obligation d'appeler et de consulter qui existe bien souvent dans les zones urbaines.
Nous avons analysé la situation dans les différentes provinces afin de déterminer, à des fins d'harmonisation, la profondeur à laquelle ce mécanisme est déclenché. Ainsi, cette profondeur est identique en Colombie-Britannique, en Alberta, en Saskatchewan et en Nouvelle-Écosse, et notre but était d'étendre l'harmonisation. Certaines provinces donnent des chiffres précis, d'autres pas, et nous, nous voulions éviter les disparités, avec 30 centimètres d'un côté, 10 de l'autre et ailleurs 40 centimètres, afin que tout soit clair et uniforme à travers le pays.
La sénatrice Seidman : Au paragraphe suivant, on parle de préciser les pouvoirs de vérification et d'inspection de l'office pour les pipelines et les lignes de transport d'énergie relevant de sa compétence. De quels éclaircissements s'agit- il?
M. Labonté : Il s'agit ici de la responsabilité de l'office en matière d'inspection et d'audit des pipelines. Dans ce domaine, l'autorité des agents de l'office a été renforcée, afin de mieux préciser que les sociétés pipelinières sont dans l'obligation de leur donner accès aux documents, aux informations et aux capacités.
Nous proposons certains libellés afin de préciser quelles sont les capacités auxquelles s'appliquent ces activités, et nous y incluons les lignes de transport d'énergie, puisque le trafic interprovincial est du ressort de l'office.
Ces démarches découlent de l'intention du gouvernement de donner des ressources supplémentaires à l'Office national de l'énergie afin qu'il augmente le nombre d'audits et d'inspections, tel qu'annoncé dans le budget 2012. Cela donne l'occasion — surtout lorsqu'on a affaire à un texte législatif comme la Loi sur l'Office national de l'énergie, qui a été rédigée à la fin des années 1950 — de lui donner la précision qui convient à notre monde moderne, ainsi que les pouvoirs correspondant à ses responsabilités concrètes.
La sénatrice Seidman : En effet, le Plan d'action économique 2012 prévoyait le financement supplémentaire permettant à l'Office national de l'énergie d'augmenter de 50 p. 100 le nombre d'inspections annuelles des oléoducs et des gazoducs. Quel en était le nombre au départ, et quel en est le nombre aujourd'hui, après cette augmentation?
M. Labonté : Je vais laisser mes collègues vous répondre avec plus de précision, madame la sénatrice, mais laissez- moi vous dire tout d'abord ce que je sais : on est passé, à partir d'un chiffre initial d'une centaine d'inspections par an, à 150 après l'adoption du Budget 2012, 169 en 2013 et 230 en 2014.
La sénatrice Seidman : Le financement supplémentaire accordé en 2012 a également doublé le nombre d'audits. Avec quels résultats?
M. Labonté : Le nombre des audits est passé de trois à six par an.
La sénatrice Seidman : Vous voulez dire trois audits de sociétés ou de pipelines différents?
M. Labonté : Cela pourrait concerner trois systèmes différents. À titre d'exemple, vous pouvez avoir Enbridge avec un système qui est géré à partir d'un centre de contrôle situé, je crois, à Calgary. Ils ont fait, là-bas, un audit de l'ensemble du système, lequel comporte des milliers de kilomètres de conduites à travers le pays.
Les inspections diffèrent des audits en ce sens qu'elles fournissent davantage de certitude dans un domaine spécifique. L'audit ne porte pas sur un pipeline en particulier mais englobe une entreprise, ses activités, ses projets ou ses protocoles.
Je précise que 99 entreprises sont assujetties à la réglementation de l'Office national de l'énergie.
La sénatrice Seidman : Le troisième paragraphe, au titre de la prévention, concerne le pouvoir du gouverneur en conseil d'appliquer des normes homogènes pour la surveillance des pipelines et l'action en cas d'urgence. Comment définissez-vous ces « normes » et d'où proviennent-elles? On parle de normes homogènes, mais de quelles normes s'agit-il?
M. Labonté : Il y a, au Canada, un éventail d'organismes qui émettent des normes applicables au fonctionnement des pipelines. Il y a les normes générales canadiennes, les normes internationales qui traitent des matériaux employés tels que certains métaux en particulier, et puis il y a les normes qui régissent les protocoles d'action en cas d'urgence. Les dispositions du projet de loi confèrent le pouvoir d'édicter des règlements, en fixant par exemple des normes minimales ou des protocoles spécifiques au niveau gouvernemental.
Aujourd'hui, ces normes sont généralement élaborées à l'échelle internationale. Elles existent donc, mais nous sommes libres, si nous le souhaitons, de les améliorer, voire d'exécuter une norme plus spécifique au Canada. Et nous aurions ainsi, pour ce faire, le pouvoir d'édicter des règlements.
Je pense qu'il y a, à l'échelle du pays et notamment entre les provinces et d'autres acteurs, un échange assez intense concernant les normes qui s'imposent, par exemple pour les différents types de produits énergétiques. Ces dispositions pourraient donc nous permettre, au besoin, de renforcer l'harmonisation et l'homogénéité.
Là encore, c'est un domaine qui présente une grande diversité juridictionnelle, et le projet de loi précise dans quelle mesure nous pourrons exercer ce pouvoir.
Le président : Je vais à présent passer au deuxième tour de questions mais, auparavant, je voudrais prolonger un peu les questions de la sénatrice Seidman.
Vous dites que les inspections ont atteint, l'an dernier, le chiffre de 260?
M. Labonté : 230.
Le président : Pouvez-vous me dire ce que comprend une inspection? Dans la province d'où je viens, nous avons des milliers de kilomètres de pipelines. Alors s'agit-il de l'inspection d'une station de compression, d'une installation de raclage ou encore d'une inspection du pipeline tout entier? J'apprécie ce chiffre de 230, mais j'aimerais savoir ce qu'il recouvre.
Il y a, dans l'ensemble du Canada, un grand nombre de pipelines et d'installations qui ont besoin d'être inspectés. Pourriez-vous m'éclairer s'il vous plaît?
M. Hubbard : Nos collègues de l'Office national de l'énergie pourront vous répondre de façon plus précise, mais je crois que cela couvre toute une gamme d'inspections, depuis les stations de compression, où un contrôle d'intégrité, ou encore l'inspection du chantier de construction ou une amélioration au système, par exemple.
Cela couvre donc un éventail d'activités d'inspection, certaines annoncées, d'autres sans préavis.
Le président : Donc, sur ces 230 inspections, certaines pourraient simplement comporter la visite d'une station de compression. Pourriez-vous me dire comment on décide de la nature d'une inspection? Je poserai également la question aux représentants de l'ONE, mais je crois qu'il n'est pas inutile que vous aussi me décriviez comment on décide de ce que va comporter une inspection, parce qu'après tout, la visite d'une petite station de compression ne prend guère de temps.
M. Labonté : J'en conviens. Toutefois, avant d'en venir à cette question, permettez-moi d'ajouter une petite chose. Sans nul doute, les inspections représentent un volet de la surveillance qui permet de déterminer la structure opérationnelle et l'intégrité des systèmes de pipeline, de même que la façon dont ils sont exploités par les sociétés pipelinières. Cela dit, l'approbation des pipelines est assortie de certaines conditions, qui précisent souvent les éléments du système qu'il convient d'inspecter. Il faut donc se conformer à certaines conditions.
Vous n'êtes pas sans savoir, sénateur, compte tenu de votre connaissance du domaine, que pour être autorisé, un pipeline doit correspondre à une catégorie donnée, qui est déterminée par les autorités réglementaires. Il s'agit plutôt, dans ce cas, de la catégorie des approbations préalables, à la différence des inspections, qui concernent des ouvrages existants.
Pour répondre à la question au sens le plus simple, « les critères sont basés sur la notion de risque ». On prend donc en compte les antécédents de la compagnie, la catégorie de pipeline, l'activité concernée, l'historique des événements et des facteurs tels que l'âge et les caractéristiques du pipeline. Tels sont, selon moi, les facteurs qui conduisent à la décision.
Je pense que mes collègues pourront vous donner une réponse plus convaincante.
Le président : Encore une question, si vous le permettez, qui ne concerne pas les inspections. Au cours de l'élaboration du projet de loi, vous avez, bien entendu, consulté les opérateurs du secteur et toutes les personnes concernées. Pourriez-vous me dire quelles catégories de propriétaires vous avez consultées? Je ne pense pas spécialement aux propriétaires de maisons, mais plutôt aux agriculteurs dont les terres peuvent être traversées par des pipelines. J'aimerais donc savoir qui vous avez contacté pour vous faire une idée de leurs opinions, de leurs besoins ou de leurs souhaits.
M. Labonté : Je vous remercie de cette question fort pertinente et je vais vous donner deux ou trois exemples, que mes collègues pourront éventuellement compléter.
Tout d'abord, l'Office national de l'énergie a lancé l'Initiative de consultation relative aux questions foncières, groupe de travail composé de propriétaires et d'associations de propriétaires; ce groupe réunit donc des agriculteurs, des exploitants du secteur agricole et des habitants des zones rurales du pays. Cela leur permet de maintenir un dialogue constant à propos des questions foncières, lesquelles ne manquent pas, comme vous l'imaginez, de donner lieu à des débats très vivants, étant donné que cela concerne leurs terres et les touche donc de très près tant au niveau du cœur que du portefeuille.
Ce groupe de travail nous permet de suivre l'évolution des choses et de rester à l'écoute. Ainsi, nous avons un tableau des problèmes au fur et à mesure qu'ils se présentent.
Il existe par ailleurs, dans le pays, des groupements de propriétaires terriens dont certains à l'échelon provincial et d'autres d'envergure nationale. Nous ne manquons pas de les consulter à propos de tel ou tel projet et, bien souvent, ils nous prodiguent conseils et recommandations, soit par lettre, soit par le biais d'échanges et de présentations de mémoires.
Nous avons pris en compte tous ces éléments lorsque nous avons présenté nos propositions à travers le projet de loi, et je crois bien que nous avons reflété assez fidèlement leurs intérêts. Je pense en particulier au problème majeur que représente l'abandon des pipelines, mais aussi à la prévention des dommages et à l'harmonisation, et il y a certainement bien d'autres questions.
M. Hubbard : J'ajouterais tout simplement que nous avons accès à une véritable mine d'informations grâce aux consultations portant sur des projets spécifiques. Nous avons ainsi entendu beaucoup de témoignages de propriétaires terriens au cours des années, s'agissant par exemple de la sûreté ou de l'abandon des pipelines, mais aussi des questions touchant l'arbitrage.
Le président : En résumé, vous n'avez pas eu de contacts directs lors de l'élaboration du projet de loi; vous vous en êtes remis pour cela à l'ONE et à son expérience en matière de contacts avec les propriétaires terriens. Est-ce bien cela?
M. Labonté : Nous avons utilisé les deux filières, à savoir les audiences et les associations qui dialoguent avec l'ONE, mais nous avons également eu des entretiens directs avec...
M. Hubbard : Il s'agit de la Canadian Association of Energy and Pipeline Landowner Associations.
M. Labonté : Plusieurs de ces groupements nous ont écrit pour donner leur point de vue à propos du projet de loi et nous avons également communiqué avec eux par conférence téléphonique.
Le président : Je vous remercie. J'ai deux sénateurs inscrits pour le deuxième tour de questions.
Le sénateur Black : Monsieur le président, je vous remercie mais je pense que ma question concerne plus directement le prochain groupe de témoins.
Le sénateur Massicotte : Je voudrais revenir à la question posée précédemment afin de me faire confirmer les chiffres : vous avez parlé de six audits par an, ce que je voudrais placer en perspective par rapport au nombre d'inspections. Si je comprends bien, une inspection est une intervention ponctuelle concernant un élément précis d'un système, tandis qu'un audit comporte un examen plus large. Pouvez-vous le confirmer?
M. Labonté : C'est exact.
Le sénateur Massicotte : J'aimerais savoir quelle est la portée d'un audit, avec quelques exemples si possible.
M. Labonté : Je vais laisser mes collègues de l'Office national de l'énergie vous répondre de façon plus précise, mais je voudrais dire que le centre d'opérations et d'exploitation de système des pipelines Enbridge a fait l'objet d'un audit qui a duré plusieurs semaines d'affilée et qui a donné lieu à la publication d'un rapport d'audit assorti de recommandations et de prescriptions à la société.
Le sénateur Massicotte : Si je comprends bien, la loi élargit leurs pouvoirs et on augmente leurs crédits afin qu'ils conduisent davantage d'audits; n'est-ce pas?
M. Labonté : Le projet de loi élargit leurs pouvoirs tout en les précisant.
Quant au budget, il s'agit d'une rubrique distincte faisant l'objet d'une dotation annuelle par le Parlement.
Le sénateur Massicotte : Par ailleurs, vous avez bien dit que votre responsabilité s'étend à 989 sociétés?
M. Labonté : Notre mandat couvre 99 sociétés, dont certaines sociétés mères avec leurs filiales, si bien que le nombre réel est inférieur à 99 et se rapproche plutôt de 70 entités différentes.
Le sénateur Massicotte : En d'autres termes, cela veut dire une société tous les 17 ans?
M. Labonté : Disons que c'est une façon de voir les choses. On peut adopter comme optique que certaines sociétés n'ont qu'un siège, un seul pipeline sur une distance très courte, si bien qu'elles feront l'objet d'inspections régulières et beaucoup plus approfondies, tandis que certaines autres couvrent des milliers de kilomètres et exploitent un système beaucoup plus complexe. Là encore, c'est une démarche basée sur l'évaluation cohérente du risque.
Le président : À moins qu'il n'y ait d'autres questions, je voudrais remercier l'ensemble de la délégation pour l'exposé présenté et pour les réponses aux questions.
J'ai à présent le plaisir d'accueillir, pour la deuxième partie de notre réunion et par vidéoconférence à partir de Calgary, la délégation de l'Office national de l'énergie, représentée par Robert Steedman, spécialiste en chef, Environnement, et Jonathan Timlin, directeur, Approches de réglementation.
Messieurs, merci d'être des nôtres aujourd'hui. Je sais que vous avez une déclaration liminaire, qui sera suivie de la période de questions-réponses.
Jonathan Timlin, directeur, Approches de réglementation, Office national de l'énergie du Canada : Bon après-midi, honorables sénateurs et merci, monsieur le président. Je m'appelle Jonathan Timlin et je suis directeur de l'équipe Approches de réglementation de l'Office national de l'énergie. Je suis accompagné de M. Rob Steedman, spécialiste en chef, Environnement, de l'ONE, et c'est un grand honneur pour nous d'être invité à comparaître devant votre comité pour vous entretenir du projet de loi C-46, Loi sur la sûreté des pipelines.
L'ONE est un organisme indépendant quasi judiciaire créé par le Parlement en 1959 pour réglementer les pipelines et la mise en valeur des ressources énergétiques dans l'intérêt public.
Notre mandat émane de plusieurs lois, dont la Loi sur l'Office national de l'énergie, la Loi sur les opérations pétrolières au Canada, la Loi fédérale sur les hydrocarbures et la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale. Nous ne pouvons réglementer en dehors du champ d'application de ces lois qui nous régissent.
L'ONE n'a aucun lien de dépendance par rapport au gouvernement, mais il doit rendre compte au Parlement par l'entremise du ministre des Ressources naturelles. Notre rôle consiste à appliquer — non pas à définir — les politiques établies par les lois fédérales.
[Français]
En 2012, le Parlement a adopté la Loi sur l'emploi, la croissance et la prospérité durable, qui a apporté à la Loi sur l'Office national de l'énergie certaines des modifications les plus importantes depuis son adoption initiale en 1959. Cette loi accorde à l'ONE au plus 15 mois pour effectuer ses examens réglementaires, ce qui donne au public une plus grande certitude en ce qui a trait aux instances réglementaires et à l'étude des projets par l'office.
En outre, grâce au nouvel outil de conformité et d'exécution mis à sa disposition, appelé « sanctions administratives pécuniaires », l'office peut désormais imposer des pénalités financières aux sociétés et aux particuliers qui contreviennent à la réglementation sur la sécurité et l'environnement.
[Traduction]
L'office a dernièrement comparu devant ce comité en janvier, pendant l'examen législatif du projet de loi C-22, soit la Loi sur la sûreté et la sécurité en matière énergétique, ce qui a reçu la sanction royale en février. La nouvelle loi modifie la Loi sur les opérations pétrolières au Canada et donne à l'office de nouveaux moyens de réglementer les activités pétrolières et gazières dans le Nord.
Et nous voici maintenant à la Loi sur la sûreté des pipelines, soit le projet de loi C-46.
Nous sommes réceptifs aux mesures qui peuvent renforcer nos lois et ajouter à nos outils de protection de l'environnement et du public. Si le projet de loi C-46 reçoit la sanction royale, certaines de ces mesures comprennent les suivantes : un régime de responsabilité absolue qui s'appliquera à tous les pipelines réglementés par l'ONE et de nouvelles exigences relatives aux ressources financières qui garantiront que les sociétés pourront payer le nettoyage des déversements; une clarification des audits et des pouvoirs accrus d'exécution afin d'émettre des ordonnances d'arrêt des travaux dans le Nord; un pouvoir accordé à l'office de prendre en charge le contrôle d'un pipeline qu'on a cessé d'exploiter si la société ne se conforme pas aux ordonnances de l'office; une clarification de la compétence de l'office sur les pipelines qu'on a cessé d'exploiter; le pouvoir pour l'ONE de prendre le contrôle d'un incident lorsque le gouverneur en conseil détermine que la société ne pourra payer ou ne se conforme pas aux ordonnances de l'office.
L'ONE fera preuve d'efficacité et d'efficience pour appliquer rapidement les changements adoptés par le Parlement.
[Français]
Ces changements législatifs surviennent à un moment où le secteur énergétique canadien se retrouve en plein cœur d'une tempête parfaite. Le dialogue sur la mise en valeur des ressources énergétiques au Canada cherche à concilier sécurité et protection de l'environnement, développement économique, droit des Autochtones et divers intérêts et besoins locaux. Le débat qui en découle n'est pas simple et suscite des opinions tranchées. L'office se retrouve dans l'œil du cyclone. Nous sommes cernés par des intérêts opposés et de plus en plus soumis à l'examen du public.
[Traduction]
La Loi sur l'Office national de l'énergie stipule que nous devons entendre les personnes et groupes sur qui l'acceptation ou le rejet de la demande aura des répercussions directes. La population n'a jamais souhaité autant participer aux audiences sur l'énergie.
Avant l'été 2010, l'ONE était assez peu connu du public. La plupart des Canadiens en ignorait l'existence ou presque. En 2006, l'examen d'une demande de Trans Mountain concernant un projet de doublement d'ancrage dans le Parc national Jasper a attiré huit intervenants.
En mars 2010, l'ONE a rendu publique sa décision sur le projet Keystone XL, qui a suscité relativement peu d'émoi, au terme d'un processus qui a attiré 29 intervenants seulement. Comparons cela avec aujourd'hui : le projet d'agrandissement du réseau de Trans Mountain attire plus de 400 intervenants et de 1 300 auteurs d'une lettre de commentaires. Nous avons reçu presque 2 300 demandes de participation à l'audience sur le projet Énergie Est.
Un élément important du travail de l'office consiste à étudier et évaluer les demandes portant sur des projets et, en se basant sur les éléments de preuve qu'il reçoit au cours d'une audience, à déterminer si un projet envisagé est ou non dans l'intérêt public. Il s'agit toutefois là d'un élément seulement — et à peine du début — de notre rôle. Notre surveillance réglementaire couvre toute la durée de vie du projet — depuis la conception jusqu'à la cessation d'exploitation.
Il ne fait aucun doute que tous les Canadiens se soucient de la sûreté de l'infrastructure énergétique et de la protection de l'environnement.
[Français]
Une fois le projet réalisé, l'ONE a recours à des outils comme des audits, des inspections, des réunions sur la conformité et des exercices sur le terrain pour tenir les sociétés responsables d'une exploitation sans danger, qui assure la protection du public, des travailleurs et de l'environnement.
[Traduction]
L'office est déterminé à prendre toutes les mesures à sa disposition pour protéger la population canadienne et l'environnement. Les activités non autorisées menées près des pipelines et les manquements à respecter les exigences concernant la prévention des dommages mettent en péril la population et l'environnement. L'office exige que les sociétés assujetties à sa réglementation visent un objectif de zéro incident, tout en étant conscient que la prévention des dommages est l'affaire de tous, aussi bien les sociétés qui exploitent des pipelines que les gens qui travaillent à proximité de ceux-ci.
L'office exige des sociétés pipelinières qu'elles veillent à ce que tous les travaux, d'excavation ou de construction, par exemple, réalisés près des pipelines le soient de façon sécuritaire.
En décembre 2014, ce comité a produit un rapport intitulé CREUSER EN TOUTE SÉCURITÉ : Les systèmes d'appels uniques et la prévention des dommages aux infrastructures souterraines du Canada, qui a appuyé les systèmes d'appels uniques au Canada.
Nous appuyons et préconisons aussi l'utilisation de ces centres d'appel unique pour favoriser une communication, nous appuyons aussi l'utilisation de systèmes d'appels uniques qui assurent une communication efficace en temps opportun entre ceux qui planifient une activité près d'un pipeline et la société pipelinière, comme nous l'avons indiqué lors de notre comparution devant vous au cours de cette étude importante.
[Français]
Outre notre programme de prévention des dommages, nous avons un programme complet de conformité et d'exécution pour veiller à ce que les sociétés agissent comme elles doivent le faire. Chaque année, l'office mène des activités de vérification de la conformité ciblées, dont six audits exhaustifs et au moins 150 inspections de sociétés réglementées. À cette activité s'ajoutent plus de 100 réunions techniques et exercices chaque année.
[Traduction]
En 2014, l'office a pris les mesures d'exécution suivantes : 302 avis de non-conformité, ANC, et promesses de conformité volontaires; trois ordres d'inspecteur par lesquels des agents désignés peuvent exiger que les parties redressent la situation de non-conformité et, dans certains cas, leur ordonnent de le faire; cinq ordonnances de sécurité, qui sont des ordonnances limitant les activités d'une société et six sanctions administratives pécuniaires qui, comme je l'ai dit un peu plus tôt, est un nouvel outil d'application mis à la disposition de l'ONE dans le cadre de la Loi sur l'emploi, la croissance et la prospérité durable.
Une des activités très importantes de l'ONE est de promouvoir la participation du public. L'ONE s'est engagé à mobiliser les Canadiens au-delà du processus d'audience officielle. En janvier, le président de l'ONE, Peter Watson, a lancé une initiative de mobilisation qui vise à être à l'écoute de ce que les Canadiens pensent en matière de sécurité des pipelines et, au besoin, à ajuster les pratiques et les programmes de l'office en conséquence.
Au début de juin, nous tiendrons aussi un forum sur la sécurité des pipelines à Calgary. Les participants y débattront de questions bien précises afin d'améliorer la sécurité des installations réglementées. Le forum aura les objectifs suivants : l'ouverture pendant les échanges d'information sur les questions techniques liées aux pipelines, l'amélioration de la compréhension des préoccupations des parties prenantes et les occasions qui s'offrent à l'industrie et aux organismes de réglementation pour améliorer les résultats en matière de sécurité, afin de protéger les personnes et l'environnement. L'information réunie à la suite de l'initiative de mobilisation et du forum sera compilée dans un rapport qui sera dévoilé plus tard en 2015.
Je vous remercie de nouveau de nous avoir donné l'occasion de nous adresser à vous aujourd'hui au sujet du travail important de l'office ainsi que ce nouveau projet de loi, surtout dans le contexte de nos trois priorités stratégiques, soit Être actif dans le domaine de la sécurité, Montrer la voie de l'excellence en matière de réglementation et Se rapprocher des Canadiens.
[Français]
Nous sommes réceptifs aux mesures qui peuvent renforcer nos lois et ajouter à nos outils de protection de l'environnement et de la population canadienne. Si le projet reçoit la sanction royale, nous travaillerons fort pour mettre en œuvre rapidement les changements qui en découleront.
Nous sommes maintenant prêts à répondre à vos questions.
[Traduction]
M. Steedman et moi serons heureux de répondre à vos questions.
[Français]
Le sénateur Massicotte : Je vous remercie de votre disponibilité pour étudier le projet de loi avec nous. J'aimerais parler de façon plus générale. Malgré vos efforts, les gens sont un peu cyniques en ce qui concerne la supervision des compagnies de pipelines. Les gens craignent que le dossier soit plus politisé et non fondé sur la science et les faits. Je crois que votre programme médiatique est très nécessaire. Il y a eu quelques expériences récemment au Québec et dans l'Ouest du Canada. La population en générale a une réticence assez importante.
Nous avons entendu les représentants du gouvernement, et nous savons que vous faites en moyenne six vérifications par année auprès de plus de 60 compagnies en vertu de la loi sur les pipelines. Six sur un total de 99, cela ne semble pas beaucoup. Il faut en moyenne 17 ans pour faire le tour de toutes les compagnies. Lorsque je constate le cynisme de la population canadienne et son manque de confiance, je me demande pourquoi le nombre de vérifications n'est pas plus élevé.
[Traduction]
M. Timlin : Merci beaucoup pour cette question, sénateur. C'est une question très importante, parce qu'elle renvoie au travail que fait l'office pour garantir le respect de ses règlements et de ses responsabilités.
Je vais remettre la question dans un contexte plus large et parler de toute la série d'activités que l'ONE entreprend au cours d'une année par rapport à la conformité. Je me référerai à 2014, car j'ai les données sous les yeux.
Je tiens à souligner que l'ONE a réalisé plus de 350 mesures d'observation en 2014. Ce nombre inclut les 230 inspections que M. Labonté a mentionnées précédemment, 13 exercices d'urgence, 19 examens du manuel des mesures d'urgence, 64 réunions sur la conformité, six audits opérationnels — celles dont vous avez parlé, sénateur — et 21 examens de rapports. Je le répète, le but de ces activités vise essentiellement à garantir que nos exigences réglementaires sont respectées, que l'environnement est protégé et que la sécurité du public est assurée.
[Français]
Le sénateur Massicotte : Je vous remercie de votre réponse, mais le défi est énorme. Il y a eu le projet du pipeline de l'Est, au Québec, qui a été modifié récemment. Le public est très cynique quant à la préparation et à la compétence de ces compagnies.
Mais changeons de sujet. Le projet de loi établit des échéanciers fixes pour l'approbation des permis d'exportation de produits du pétrole. Je crois que le maximum est de six mois. Pourquoi cette nécessité? Pourquoi a-t-on établi cela? Est-ce parce qu'il fallait plus de six mois dans le passé pour obtenir une approbation? Quel est le problème? Quelle est la raison d'être de cet amendement?
[Traduction]
M. Timlin : Le point que vous soulevez est une question de politiques. Il est certain qu'en sa qualité d'expert en réglementation, l'office n'est pas en mesure d'expliquer pourquoi le gouvernement a choisi de promouvoir certaines mesures stratégiques dans le cadre de sa législation.
Dans un contexte plus large, je pourrais indiquer un certain nombre de délais fixés par la loi. Par exemple, les articles 52 et 58 de la Loi sur l'Office national de l'énergie accordent à l'ONE 15 mois pour examiner les demandes.
Je ne veux pas me prononcer sur la raison d'être de ce changement apporté par le gouvernement, mais je dirais que la notion de délai est cohérente avec d'autres éléments du processus d'examen de la Loi sur l'Office national de l'énergie.
[Français]
Le sénateur Massicotte : Comme vous le savez, la loi proposée demande une sécurité d'un milliard de dollars et impose toutes sortes de procédures en ce sens.
Évidemment, les contribuables canadiens veulent s'assurer que, dans le cas d'un déversement qui cause des dommages, les pollueurs, les compagnies pétrolières paient pour les dommages encourus. Pouvez-vous me citer un exemple qui aurait eu lieu au cours des 10 dernières années où le public aurait été pris et n'aurait pas eu le choix de supporter les frais des dommages causés par les pipelines?
[Traduction]
M. Timlin : Sénateur, je ne suis au courant d'aucune circonstance de ce genre. J'aimerais dire quelques mots sur ce milliard de dollars. J'ai écouté ce qui s'est dit à ce sujet et je pense qu'il serait utile d'apporter des éclaircissements sur cet élément du projet de loi.
Le plafond de responsabilité absolue de 1 milliard de dollars s'appliquerait aux sociétés qui ont la capacité de transporter plus de 250 000 barils de pétrole par jour. Cette limite de responsabilité absolue d'un milliard est prévue dans le projet de loi que vous avez sous les yeux. Comme je l'ai indiqué dans ma déclaration préliminaire, c'est certain qu'il y aura des limites de responsabilité absolue applicables aux autres sociétés pipelinières réglementées par l'ONE ou à celles qui transportent moins de 250 000 barils par jour, tout comme aux compagnies qui transportent d'autres types de marchandises.
Je voudrais aussi faire remarquer que le projet de loi exige que les sociétés maintiennent les ressources financières minimales nécessaires pour respecter leur obligation, leur obligation de responsabilité absolue. Il existe différentes façons de garantir la disponibilité de ces fonds. Il pourrait exister des règlements qui définissent en quoi peuvent consister ces ressources, ou des ordonnances de l'ONE.
Le sénateur Black : Je vous remercie tous deux pour votre présence et pour le travail que vous faites.
En cas de déversement provenant d'un pétrolier, qui réglemente la situation?
M. Timlin : C'est une bonne question et je voudrais y répondre clairement. J'insisterai peut-être un peu sur les responsabilités réglementaires de l'ONE. En d'autres mots, si un déversement était attribuable à un pipeline réglementé par nous, il est clair que nous jouerions un rôle de premier plan dans la gestion de la situation. Si le déversement provenait d'un pétrolier, ce n'est pas à l'ONE qu'il incomberait de gérer la situation, mais bien, je crois, à la Garde côtière.
Le sénateur Black : Si le déversement se produit pendant le transfert du pipeline au pétrolier, qui a compétence là- dessus?
M. Timlin : S'il se produisait au terminal, par exemple?
Le sénateur Black : Oui, au terminal ou au quai de chargement.
M. Timlin : Exact. J'aimerais faire quelques commentaires avant de donner la parole à M. Steedman qui complétera la réponse à votre question.
La compétence de l'office s'arrête là où le tuyau finit. Le transport entre le terminal et le navire-citerne relèverait de de la compétence de l'office. Mais dans l'éventualité d'un incident, le plus important est que les différents organismes concernés travaillent ensemble pour assurer une intervention coordonnée. C'est pour cette raison que nous travaillons en étroite collaboration avec la Garde côtière et que nous menons des activités visant à nous assurer qu'une situation comme celle que vous décrivez ne souffrirait d'aucune lacune sur le plan de la responsabilité ou de la surveillance.
Le sénateur Black : Je sais que tout le monde fait de son mieux, mais ce n'est pas à cela que je veux en venir. Le but de mon propos est le suivant : dans l'éventualité d'un déversement, qu'il provienne directement d'un pétrolier ou qu'il survienne durant le transfert — ce qui, selon vos données, est beaucoup plus susceptible de se produire qu'un déversement ou une fuite de pipeline —, qui serait tenu responsable? C'est la seule chose que je veux savoir. Si je dois poser ma question à quelqu'un d'autre, je n'ai aucune objection.
M. Timlin : Dans un cas similaire, je dirais que là où la Loi sur l'Office national de l'énergie s'applique, les plafonds de responsabilité prévus par la loi, de même que les exigences de la loi, s'appliquent aussi. La question est donc de savoir où la Loi sur l'Office de l'énergie s'applique.
Le sénateur Black : Merci beaucoup. Il faudra que je fasse quelques recherches pour comprendre en quoi consiste exactement cette responsabilité de 1 milliard de dollars qui, d'ailleurs, me satisfait. En tant qu'avocat, je ne vois là rien d'autre que des occasions d'insinuer que l'incident s'est produit dans un autre contexte. Êtes-vous d'accord avec ça?
M. Timlin : Je suis sûr qu'en sa qualité d'avocat, le sénateur appréciera que je ne me prononce pas sur des situations hypothétiques.
Le sénateur Black : C'est bien beau.
J'ai une question pour M. Steedman. Il y a peut-être quelque chose qui m'échappe, mais pour dire les choses simplement, j'apprends qu'il n'existe encore nulle part au monde une technologie pour nettoyer du pétrole sur l'eau. La seule technologie que nous avons sert à le disperser. Pouvez-vous expliquer cela?
Robert Steedman, spécialiste en chef, Environnement, Office national de l'énergie : Merci pour cette remarque. Je répondrai au meilleur de ma connaissance des systèmes.
Chaque déversement de pétrole sur l'eau est un incident unique en soi. Il rassemble une combinaison unique de circonstances comme le lieu, la nature du produit déversé, les conditions météorologiques, la force des vagues, la température, et cetera. Tous ces facteurs sont importants.
Il existe une variété de techniques pour récupérer le pétrole qui flotte à la surface de l'eau. Mentionnons, entre autres, des dispositifs qu'on appelle des écrémeurs et qui généralement sont plus efficaces en eaux relativement calmes et dans des zones de déversement relativement concentrées. Les écrémeurs soulèvent, littéralement, les hydrocarbures de la surface pour les stocker dans des tambours rotatifs à bord d'un navire-citerne. Ce pétrole récupéré est ensuite pompé dans des réservoirs ou des navires auxiliaires.
Il existe d'autres méthodes, comme les matelas absorbants fréquemment utilisés. Ces matelas seraient indispensables dans le cas que vous avez donné en exemple, un déversement au terminal. C'est une situation relativement facile à circonscrire, parce que le pétrole est clairement visible, qu'on s'en occupe sans délai en plaçant des matelas sur tout le périmètre du navire et que les responsables et les opérateurs sont prêts à intervenir dans ce genre de situation.
La nappe de pétrole, qui comme toute huile a tendance à se répandre à la surface de l'eau, se trouve confinée à l'intérieur du périmètre de matelas. Certains types de matelas sont récupérés puis remplacés après avoir absorbé le pétrole.
Si le déversement se produit dans une région éloignée — et cela a été testé dans l'Arctique, où les hydrocarbures sont souvent confinés par les glaces —, il suffit d'enflammer le pétrole pour le brûler sur place. Une technique similaire a également été utilisée dans le golfe du Mexique. Il existe diverses techniques.
On peut généraliser et dire, sans risque de se tromper, que le pétrole n'est jamais complètement récupéré. La rapidité à laquelle la récupération est amorcée est un élément important de l'intervention globale. Évidemment, dès que le pétrole flotte à la surface, ses caractéristiques commencent à changer. Il s'épaissit ou s'évapore, tout dépend de la nature du produit. Les techniques de récupération d'hydrocarbures flottants jouent un rôle primordial. Les agents dispersants sont utilisés seulement si une analyse des avantages nets pour l'environnement, fondée sur le degré de préparation d'une telle intervention, semble indiquer que la méthode procure un avantage net. La principale différence entre les deux techniques est que le dispersant, s'il fonctionne, fractionne la nappe de pétrole en gouttelettes qu'il met en suspension dans toute la hauteur de la colonne d'eau. Cela peut permettre de réduire la quantité de pétrole qui atteint le rivage ou touche la faune vivant à la surface de l'eau, comme les oiseaux de mer. Le dispersant augmente la superficie de la zone touchée par le pétrole. Le pétrole brut est une substance biodégradable et de très nombreuses preuves scientifiques confirment qu'une fois les hydrocarbures dispersés dans la colonne d'eau, ils sont très rapidement dégradés par les processus microbiens.
Cette méthode comporte toutefois l'inconvénient que les hydrocarbures dispersés se retrouvent temporairement en quantité beaucoup plus grande dans l'eau.
Le sénateur Black : J'ai entendu parler de ça. J'essaie seulement d'explorer, de vérifier ce qu'on m'a dit, mais en qui concerne l'incident de la plateforme Deepwater Horizon de BP et celui de la marée noire de l'Exxon Valdez en Alaska, j'ai appris que moins de 20 p. 100 du pétrole a été récupéré ou brûlé. Le reste a été dispersé et continue, encore aujourd'hui, à causer du tort à la faune marine et à échouer sur les plages de l'Alaska. C'est ce qu'on m'a dit. Avez- vous quelque chose à dire à ce sujet?
M. Steedman : Mes connaissances en la matière se fondent principalement sur les documents déposés en preuve aux audiences de l'ONE, comme l'acte de procédure du projet d'oléoduc Northern Gateway. Je pense que la quantité approximative de pétrole récupéré concorde avec cette conception générale.
Dans le cas de la plateforme Deepwater Horizon, on a injecté du dispersant à la source même du déversement, au fond de la mer, et une grande partie du pétrole s'est dispersée dans la colonne d'eau. La nappe de pétrole à la surface était aussi très vaste.
Le golfe du Mexique n'a pas gardé de traces de cet incident, quoique dans ce cas comme dans celui de l'Exxon Valdez, on trouve du pétrole sur certaines plages rocheuses où le pétrole a pénétré et est demeuré coincé, enterré, privé de l'exposition à l'air, aux microbes et à l'eau. On peut encore trouver du pétrole sur certains types de plages. À ma connaissance, cette situation est habituellement attribuable aux causes que j'ai évoquées, car dans un cas comme dans l'autre, les hydrocarbures ne sont plus en circulation dans l'environnement. Un article sur le golfe du Mexique a récemment été publié dans une revue scientifique.
Le pétrole se biodégrade rapidement. Il s'évapore. Il se disperse. Il coule au fond de l'eau. Cela ne veut pas dire qu'il n'en reste plus du tout, mais il a tendance à disparaître complètement de l'environnement au bout de quelques mois ou de quelques années.
Le sénateur Seidman : Monsieur Timlin, dans votre exposé vous avez parlé des mesures d'exécution qui ont été prises en 2014 et vous en avez nommé plusieurs. Voici ma question : faites-vous une vérification de suivi pour confirmer le respect des exigences? Avez-vous un moyen de vous assurer que l'observation volontaire d'une ou des parties correspond effectivement à vos exigences?
M. Timlin : Oh, oui, absolument. Nous faisons le suivi de chaque mesure d'exécution imposée afin de nous assurer que les bonnes mesures correctives ont été mises en œuvre.
Le sénateur Seidman : Lors de séances du comité de la Chambre, certaines préoccupations ont été soulevées quant à la capacité de l'ONE à réglementer les pipelines et à gérer les responsabilités qui lui sont assignées. Avez-vous les ressources nécessaires pour vous acquitter des responsabilités supplémentaires décrites dans le projet de loi C-46? Mettrez-vous en place des mécanismes de suivi que vous pourrez utiliser pour vous assurer que vous parviendrez à répondre adéquatement à tous les points qui ont été soulevés par rapport à vos nouvelles responsabilités?
M. Timlin : Je crois que M. Labonté, dans son exposé, a également fait mention du Plan d'action économique 2015 en vertu duquel l'Office national de l'énergie recevra 80 millions de dollars sur cinq ans à compter de l'exercice 2015- 2016. Ces ressources ont été expressément attribuées dans le but de mettre l'accent sur la sécurité, la protection de l'environnement et la mobilisation des Canadiens. Bien sûr, les coûts de ce financement seront recouvrés auprès de l'industrie.
L'Office se réjouit de ces fonds supplémentaires qui lui sont alloués. Nous ne ménagerons aucun effort pour nous assurer que ces fonds sont utilisés de manière efficiente et efficace et qu'ils sont affectés aux secteurs précis auxquels ils sont destinés.
J'aimerais également souligner le fait que l'ONE a toujours fait preuve de transparence quant à la façon de dépenser son argent. Comme tout autre ministère, nous publions nos dépenses et, parce que nous sommes financés au moyen du recouvrement des coûts, nous sommes tenus de produire et de communiquer publiquement des états financiers très détaillés.
Le sénateur Seidman : Lors d'une récente rencontre avec les gens du ministère, nous avons parlé des audits et des inspections, ainsi que du nombre accru d'audits et d'inspections que vous réalisez avec les nouvelles ressources que vous avez reçues en 2012. Nous avons parlé de six audits. Selon vous, ce nombre est-il approprié? Qu'est-ce qu'un audit couvre, exactement?
M. Timlin : Je vais commencer par répondre à cette question du point de vue de la direction, puis je laisserai la parole à M. Steedman qui décrira plus en détail sur quoi portent les audits. Je ferai remarquer que l'audit est un des nombreux outils que nous utilisons pour nous assurer que nos exigences réglementaires sont respectées et que les sociétés se comportent comme nous le demandons. Comme je l'ai dit, les six audits s'inscrivent harmonieusement dans l'ensemble des 350 mesures de conformité que nous avons prises en 2014.
En ce qui concerne la façon de réaliser un audit et ce qu'il couvre exactement, je renvoie la question à mon collègue.
M. Steedman : Merci beaucoup pour cette question. Je souligne d'emblée que des 100 entreprises réglementées par l'Office national de l'énergie, un sous-ensemble relativement restreint est responsable de la grande majorité des kilomètres de pipelines. Ce sont de grosses sociétés qui exploitent des gazoducs à la grandeur du pays. Les plus petites entreprises exploitent plutôt de petits pipelines interprovinciaux. Ce détail est important dans la mesure où on se demande si six audits sont suffisants.
Nous décrivons nos audits comme étant des vérifications des systèmes de gestion. Le Canada et l'Office national de l'énergie utilisent un régime de réglementation très efficace et unique au monde. C'est un système de gestion axé sur les objectifs et le rendement. Contrairement au système américain — je simplifie un peu — où, par exemple, on ordonne aux entreprises d'inspecter leurs pipelines à intervalles fixes, le régime canadien de sécurité des pipelines demande aux entreprises de comprendre, d'évaluer et de documenter les risques que comporte chacun des volets de leurs activités. Si elles ne sont pas en mesure d'éliminer ces risques par l'apport d'améliorations dans la conception même des pipelines, elles sont tenues de concevoir des systèmes de gestion qui anticipent, gèrent et atténuent ces risques.
Cette méthode axée sur les systèmes de gestion est une façon très complète d'assurer l'exploitation sécuritaire des pipelines. C'est donc à l'entreprise qu'il incombe de bien comprendre son système et d'indiquer à l'Office national de l'énergie comment elle compte anticiper et gérer ces risques. Nous vérifions les systèmes de gestion au regard des engagements que les sociétés ont pris envers nous; nous vérifions tous leurs documents ainsi que les volets formation et rendement. C'est pour cette raison qu'un audit est une entreprise colossale, qui exige souvent la participation d'équipes de 10 à 20 personnes pendant presque un an et nécessite de longues visites sur le terrain de la société. Cette mesure constitue le fondement de l'évaluation de la qualité et de l'envergure d'une compagnie, ainsi que du respect de ses engagements envers l'ONE, par exemple sur le plan des approbations, des certificats et des ordonnances réglementaires.
Nous recourons aux inspections pour évaluer comment les systèmes de gestion sont appliqués sur le terrain. Les inspections et les audits vérifient différents éléments du système, de manière complémentaire. Les constatations d'un audit, par exemple, peuvent indiquer exactement en quoi et comment une inspection peut être optimisée de manière à déceler toute situation de non-conformité et permettre à une entreprise de fournir un meilleur rendement. D'autre part, les inspections permettent de vérifier que les principes et les détails d'un système de gestion, de même que les documents et les besoins en formation qu'il nécessite, sont pleinement mis en œuvre sur le terrain et que, par exemple, les opérateurs de machinerie lourde sont suffisamment respectueux des mesures de protection environnementale pendant la construction. Ce sont donc deux activités vraiment complémentaires.
Pour en revenir à ce dont vous parliez tout à l'heure avec les représentants de Ressources naturelles Canada, ce ministère cible d'autres volets des activités des sociétés et les vérifications qu'il effectue sont différentes des nôtres.
Le sénateur Seidman : Bien sûr, le point principal de l'exposé de M. Labonté et de notre discussion porte sur la prévention, car en fin de compte, c'est ce qui nous préoccupe. Notre but est de pouvoir prévenir les déversements plutôt que d'être confronté à la difficile tâche de les nettoyer. Les audits et les inspections contribuent fortement à assurer l'application des règlements sur la sécurité. C'est ce que je comprends. Est-ce que je me trompe?
M. Steedman : Oui, c'est exact.
Le sénateur Mitchell : Messieurs, je vous remercie. Vous avez évoqué l'idée que l'ONE prenne contrôle des pipelines abandonnés. Qui assumera les frais alors? La compagnie qui en était propriétaire a-t-elle créé un fonds fiduciaire? Existe-t-il une sorte de fonds commun au sein de l'industrie ou est-ce que la facture pour les éventuels travaux de réparation de ces pipelines abandonnés sera refilée aux contribuables?
M. Timlin : Pour le moment, lorsqu'une compagnie veut mettre fin à l'exploitation d'un pipeline, elle doit obtenir l'autorisation de l'office, conformément à l'article 74 de la Loi sur l'Office national de l'énergie. Elle devra satisfaire à certaines conditions avant que l'office émette une ordonnance de cessation d'exploitation, comme le prévoit l'article 74. Cette modification législative permettrait à l'ONE de fixer des conditions qui s'appliqueraient après l'émission d'une ordonnance de cessation d'exploitation. Ainsi, si le pipeline abandonné pose un problème, il reviendra à la compagnie de le régler et non au propriétaire foncier, par exemple.
Vous avez également mentionné dans votre question que si jamais un pipeline abandonné posait problème, ce ne serait pas aux contribuables ni à l'agriculteur propriétaire du terrain de payer la note. Depuis 2010 environ, l'office a engagé des consultations auprès des propriétaires fonciers dans le but d'évaluer les coûts potentiels d'une cessation d'exploitation et de s'assurer que chaque compagnie se constitue une réserve suffisante d'argent pour être en mesure, si elle cesse d'exploiter un pipeline, de le faire en toute sécurité et d'assurer son maintien lorsque le pipeline en question est enfoui.
Par ailleurs, je voulais souligner que l'office prend des mesures pour s'assurer que les compagnies mettent suffisamment d'argent de côté et aussi que les modifications législatives conféreront à l'ONE le pouvoir de rendre des ordonnances après une cessation d'exploitation. Ce sont là des mesures complémentaires qui feront en sorte que ni le contribuable, ni le propriétaire foncier, ni les citoyens qui vivent à proximité d'un pipeline abandonné seront tenus responsables de quoi que ce soit si jamais un pipeline abandonné nécessitait des réparations.
Le sénateur Mitchell : Il y a quelques années, lorsque nous avons entrepris une étude majeure sur le transfert par pipeline parmi d'autres modes de transport de produits pétroliers, nous avons entendu le témoignage d'un agriculteur représentant un groupe préoccupé par ces questions. Il nous a parlé du risque qu'un pipeline abandonné soit attaqué par l'érosion et s'effondre au passage de son tracteur, posant ainsi un danger pour le conducteur et le passager. Selon votre expérience, s'agit-il là d'un risque important et est-il nécessaire de remplir les pipelines abandonnés pour éviter qu'ils s'effondrent au passage d'un tracteur ou de quelqu'autre véhicule lourd?
M. Timlin : Votre question est très pertinente. Je vous fais remarquer qu'avant d'émettre une ordonnance de cessation d'exploitation, l'ONE prend toutes les précautions possibles pour s'assurer que le pipeline peut être abandonné en toute sécurité et que le problème que vous venez d'évoquer ne surviendra pas.
Par ailleurs, j'ajoute que ce projet de loi offre un nouvel outil à l'office pour éviter ce problème, en l'autorisant à ordonner à la compagnie d'exécuter les travaux nécessaires pour remettre le pipeline abandonné dans un état sécuritaire.
Le sénateur Mitchell : Merci. Vous avez pertinemment et gentiment fait référence à notre rapport Appelez avant de creuser, je tiens à vous en remercier, et qu'on devra bientôt intituler Cliquez avant de creuser. Ce rapport est un autre gage de l'excellent travail accompli par le Sénat.
Je sais que l'ONE s'intéresse vivement à tout ce processus et que vous y participez et en faites la promotion, mais disposez-vous de tous les outils dont vous avez besoin pour encourager les provinces à commencer à légiférer?
Pour le moment, l'Ontario est la seule province à s'être dotée d'une loi vraiment rigoureuse, et c'est ce qu'il faut faire dans l'ensemble du pays.
M. Timlin : Comme vous l'avez dit, sénateur, l'idée de cliquer ou d'appeler avant de creuser est d'une importance capitale pour garantir la sécurité des pipelines. Lorsque nous sommes témoins d'incidents impliquant des pipelines, nous constatons qu'ils sont souvent causés par des travaux exécutés à proximité, des travaux qui ne sont pas exécutés dans les règles de l'art.
Le rapport du comité sénatorial et le travail que nous accomplissons visent directement la sécurité des pipelines. Vous constaterez que le projet de loi propose des changements fondamentaux à notre régime de prévention des dommages; nous avons effleuré la question lors de nos discussions avec des représentants de Ressources naturelles Canada.
La voie que nous continuons de suivre et qui est maintenue dans ce projet de loi consiste à obliger les compagnies à participer à un réseau ou un centre d'appel unique lorsqu'il en existe un dans la province. Nous demanderons également aux gens de communiquer avec le centre d'appel unique avant d'exécuter des travaux à proximité d'un pipeline.
Notre dernier objectif est de nous assurer que le contact est établi; que le centre d'appel est averti et que les travaux sont exécutés en pleine connaissance de l'endroit où est enfoui le pipeline.
Concernant le régime et la réglementation que les instances choisiront de mettre en place, notre but est vraiment de nous assurer que les pipelines sont les plus sécuritaires possibles et nous encourageons toute mesure qui répondra à cet objectif.
Le sénateur Mitchell : J'ai été impressionné par les chiffres que vous avez fournis démontrant l'empressement du public à s'engager à fond et à présenter des demandes de participation aux processus d'examen. Je salue vos efforts pour aller vers les citoyens et engager leur participation.
J'ai une théorie pour expliquer pourquoi vous attirez tant de gens à ces audiences publiques. C'est parce qu'ils ont nulle part autre où aller parler de leurs préoccupations au sujet de l'environnement et de la politique environnementale. Avez-vous réfléchi à d'autres mécanismes ou d'autres façons de lancer un débat public sur cette question, à part vos interventions auprès de la communauté et vos audiences publiques qui ne sont pas vraiment structurées en fonction de cela, mais qui sont la seule tribune offerte aux gens?
M. Timlin : Personnellement, j'ai eu la chance de participer à la récente initiative de mobilisation lancée par le président, sur l'île de Vancouver. J'ai été fasciné par ce que j'y ai vu. Beaucoup de citoyens sont très au courant du travail que nous accomplissons dans le cadre de nos examens des pipelines, mais ils ne savent pas toujours que notre mandat couvre toute la durée d'un projet. Je pense qu'il est très important que les gens comprennent que notre rôle n'arrête pas lorsque le gouverneur en conseil approuve un projet. Lorsqu'un projet est en construction, nous sommes là pour inspecter. Lorsqu'un projet entre en opération, nous inspectons, nous faisons des vérifications et toute autre activité requise pour assurer la conformité, et ce, jusqu'à la cessation de l'exploitation du pipeline et potentiellement au-delà, si jamais ce projet de loi reçoit la sanction royale.
Pour revenir à votre question, sénateur, il est vraiment important que nous fassions passer ce message et que nous engagions la participation des Canadiens afin qu'ils comprennent comment nous réglementons et travaillons pour eux pour garantir la sécurité des réseaux pipeliniers et protéger l'environnement.
Le président : Vous avez glissé un mot sur les pipelines abandonnés en réponse à la question du sénateur Mitchell. Avant ce projet de loi, les pipelines abandonnés, du moins d'après l'information que nous avons obtenue, étaient laissés sous la responsabilité des provinces et des propriétaires terriens. C'était un méli-mélo. En vertu de ce projet de loi, lorsqu'il sera mis en place, l'Office national de l'énergie demeurera responsable des pipelines abandonnés aussi longtemps qu'ils seront enfouis. Nous espérons que la compagnie qui en est propriétaire prendra ses responsabilités; en outre, un fonds orphelin est actuellement créé pour financer ce genre de choses, si jamais la compagnie était à court d'argent. C'était vraiment une bonne nouvelle à entendre.
Le sénateur MacDonald : Messieurs, merci d'être avec nous aujourd'hui.
Vers la fin de votre exposé, monsieur Timlin, vous avez dit que vous êtes favorable à toute mesure qui renforcera notre loi et qui enrichira votre trousse d'outils pour mieux vous aider à protéger les Canadiens et l'environnement. Bien entendu, ce n'est pas vous qui rédigez les lois et les règlements; vous les faites respecter et vous les appliquez. Si vous étiez chargés de rédiger les lois et les règlements, y a-t-il un enjeu évident, et qui devient de plus en plus impératif aux yeux de l'office, qui échappe peut-être à l'attention du ministère fédéral?
M. Timlin : J'ai eu le plaisir de comparaître devant un comité de la Chambre des communes et on m'a posé une question très similaire. Au risque de me répéter, je vais vous donner la même réponse que je leur ai donnée.
Comme vous l'avez fait remarquer, notre responsabilité consiste à nous assurer que les lois et les politiques établies par le Parlement sont mises en œuvre de manière efficiente et efficace. À cet égard, nous mettons l'accent sur la sécurité et la protection de l'environnement. Il ne revient pas à l'organisme de réglementation de formuler des avis ou des commentaires sur la façon dont les lois doivent être modifiées au besoin.
Le sénateur MacDonald : Je vous remercie pour votre réponse. Pour un gars de l'Office national de l'énergie, vous êtes un sacré bon politicien. Si jamais j'ai l'occasion de vous parler en privé un jour, vous aurez une réponse différente à me donner, mais je vous remercie quand même.
J'ai encore quelques questions à poser. Je n'ai pu m'empêcher de remarquer la forte hausse de la participation depuis 2010, alors que seulement 29 intervenants s'étaient présentés aux audiences sur le pipeline XL comparativement à un total de 1 700 pour le projet TransCanada. Et vous êtes actuellement en train d'étudier 2 300 demandes de participation aux audiences sur le projet Énergie Est.
Comment expliquez-vous une aussi forte augmentation? Pouvez-vous nous dire quelle est la différence entre un intervenant et un commentateur? Sur quels critères vous appuyez-vous pour décider qui vous entendrez et qui vous n'entendrez pas? Avec 2 300 demandes et un échéancier serré pour entendre tout le monde, j'imagine que vous vous appuierez sur des critères objectifs pour déterminer qui sera entendu ou non. Pouvez-vous préciser votre façon de procéder et, peut-être, nous en dire plus long à ce sujet?
M. Timlin : Avec un immense plaisir. Je vais commencer par votre première question. Concernant le nombre d'intervenants, comme je l'ai mentionné au sujet du premier doublement d'ancrage de l'oléoduc Trans Mountain, qui traversait le parc national de Jasper, il y a eu huit intervenants. Nous en recevons 400 au sujet de l'agrandissement du réseau de Trans Mountain.
Divers facteurs pourraient expliquer ce phénomène. D'aucuns diraient que c'est le déversement dans la rivière Kalamazoo survenu au Michigan. D'autres diraient peut-être que c'est l'explosion survenue au puits Macondo dans le golfe du Mexique dont nous avons parlé antérieurement. Différents enjeux ont éveillé l'intérêt et la vigilance du public relativement aux projets pipeliniers. Je dirais que ces exemples ont contribué à sensibiliser davantage la population au transport d'énergie et à la sécurité des réseaux énergétiques.
En ce qui concerne le processus des audiences, l'office est tenu d'entendre les citoyens directement touchés par un projet. Pour chaque audience, nous invitons des citoyens à présenter une demande de participation. Ce faisant, les gens s'identifient au groupe d'experts de l'office qui dirigera l'audience concernant une demande de projet donnée. Les gens présentent leur demande et indiquent pourquoi ils pensent qu'ils seront directement touchés, quel sujet ils souhaitent aborder et quel est le lien avec les questions figurant à la liste que le groupe d'experts examinera.
Le groupe d'experts examine ensuite chaque demande de participation et prend une décision fondée sur les mérites de chacune.
Comme je l'ai déjà mentionné, ce processus est conforme au paragraphe 55(2) de notre loi qui oblige l'office à entendre toutes les personnes directement touchées par un projet.
Un intervenant jouit d'un statut à part entière lors de l'examen d'un projet. Autrement dit, il peut demander de l'information sur le promoteur et les autres intervenants qui présentent des éléments de preuve. Tout cela est rendu public. Quant au commentateur, il dispose d'une seule occasion pour présenter ses réflexions et son point de vue sur la demande et pour livrer un témoignage plus précis qui est également consigné au compte-rendu.
La véritable différence entre un intervenant et un commentateur, c'est que l'intervenant a de multiples occasions d'évaluer les témoignages par le biais des demandes d'information, de l'argumentation orale ainsi que de l'exposé écrit, tandis que le commentateur présente une lettre à l'office et celle-ci tient lieu de témoignage. M. Steedman voudrait peut-être ajouter quelque chose.
M. Steedman : Non.
Le président : Concernant les oléoducs, l'ONE est-il responsable des inspections dans les stations de pompage?
M. Timlin : Notre loi définit le terme « pipeline » comme étant la canalisation elle-même ainsi que toute installation le long de cette canalisation; cela inclut les stations de pompage.
Le président : Je suppose que cette définition englobe également les stations de compression et les raffineries de gaz. J'aimerais revérifier cela avec vous. Ai-je raison?
M. Steedman : Oui, en Colombie-Britannique, nous réglementons la raffinerie de gaz de Pine River, par exemple. C'est probablement un cas unique dans le réseau de collecte et de traitement de cette province. Oui, nous réglementons cette usine. Quant à la déshydratation et à la désulfurisation du gaz naturel, il existe deux règlements distincts, le règlement sur les usines de traitement qui porte sur ces questions, et le règlement sur les pipelines terrestres.
Le président : Êtes-vous responsables des inspections des usines de Fort Nelson et de Fort St. John? Vous avez déjà parlé de celle de Pine River.
M. Steedman : Je ne peux vous le confirmer parce que je ne connais pas bien cette description, mais il s'agit des installations sur le réseau de collecte Spectra sur la côte Ouest.
Le président : Si j'ai bien compris, l'ONE est responsable de 73 000 kilomètres de pipeline. Cela veut dire combien de stations de pompage, de stations de compression et d'usine de gaz?
M. Timlin : Nous serions très heureux de fournir ces données au comité par l'entremise de votre greffier.
Le président : Je dirais qu'il doit y en avoir des centaines. J'ai demandé cette information aux administrateurs centraux et ils m'ont répondu que vous seriez mieux placé pour me répondre : en 2014, vous avez effectué 230 inspections. Comment avez-vous déterminé comment et quoi inspecter? S'il y a 73 000 kilomètres de pipeline et, je suppose, des centaines de stations de pompage et de stations de compression, en fait, toutes ces installations que vous avez la responsabilité d'inspecter. Comment prenez-vous ces décisions, quoi inspecter, quand et où?
M. Steedman : Je vous remercie pour votre question, sénateur Neufeld. Pour répondre à votre question précédente, je dirais que grosso modo les stations de compression sur les gazoducs et les stations de pompage sur les pipelines de liquides sont distantes d'environ 50 à 100 kilomètres, en fonction du terrain et d'autres facteurs; la distance est très approximative et elle varie.
L'Office national de l'énergie utilise un outil d'aide à la décision fondé sur le risque pour déterminer où et quand mener des inspections ainsi que sur des données fournies par le personnel, sur les connaissances et les observations sur le rendement d'une compagnie, sur des observations découlant des audits et des inspections, ainsi que sur un système de modélisation semi-quantitatif qui tient compte de l'emplacement du pipeline, de sa taille, du produit transporté et des spécifications relatives au fonctionnement du pipeline.
D'autres facteurs sont pris en compte dans le plan annuel de vérification de la conformité, par exemple, les facteurs environnementaux, l'intégrité du pipeline, les interventions en cas d'urgence et la sécurité. Différentes équipes sont affectées à chacune de ces grandes catégories de risque. Un autre volet du plan concerne les compagnies où nous n'avons pas effectué de vérification ni rencontré le personnel ou visité les installations; en général, il s'agit de très petites compagnies et nous veillons à en inclure quelques-unes dans notre plan annuel de vérification de la conformité.
Le président : J'aimerais revenir sur les 230 inspections. Si les inspecteurs se rendent dans une station de compression pour vérifier comment les choses se passent, comment déterminez-vous que l'inspection est suffisante? Je me demande comment vous faites cela. Je ne vais pas prétendre savoir comment déterminer qu'une inspection est complète. Pour être honnête avec vous, je trouve que ce nombre d'inspections est plutôt faible par rapport au nombre de kilomètres de pipeline et à tout l'équipement connexe qui en assure le bon fonctionnement, comme les stations de pompage et tout le reste.
Avez-vous une équipe prête à aller sur le terrain, à survoler un pipeline et à l'inspecter du haut des airs? Utilisez-vous des racleurs ingénieux pour déterminer cela? Aidez-moi afin que je puisse me sentir à l'aise.
M. Steedman : Bien sûr, sénateur Neufeld. Comme je l'ai mentionné tout à l'heure, nous demandons aux compagnies de connaître les risques et les dangers associés à toutes leurs installations et activités. Par exemple, il est très courant pour les compagnies de survoler l'emprise d'un oléoduc ou d'un gazoduc pour vérifier s'il y a empiétement sur les terres, si les gens érigent des clôtures ou des constructions ou, dans de très rares cas, s'il y a des traces de fuites le long d'un pipeline. Le personnel peut aussi parcourir le tracé à pied avec des chiens renifleurs. Il existe une foule de techniques utilisées par les patrouilles régulières de surveillance de l'emprise d'un pipeline. Nous les obligeons à faire cela. Elles ont leurs propres inspecteurs.
J'ai dit que nous effectuons des audits de leurs systèmes de gestion. Nous cherchons à savoir si les compagnies mettent en place des systèmes exhaustifs et prennent des mesures pour réduire les risques qu'elles ont décelés et que nous aussi nous avons décelés.
Notre connaissance de leurs systèmes de gestion et d'exploitation, de leurs activités sur le terrain et des bons résultats obtenus, ajoutée aux données sur les incidents ou les quasi-accidents comme nous les appelons, sont quelques aspects de notre travail. Si, à un moment ou un autre, l'office a l'impression qu'une compagnie n'est pas assez vigilante en matière de protection de l'environnement et des riverains d'un pipeline, nous prenons des mesures immédiates. Par exemple, nous pouvons demander à un inspecteur d'ordonner la cessation de la construction jusqu'à la mise en place de mesures qui auront reçu son approbation. En cas de doutes quant à l'intégrité d'une canalisation, l'office peut ordonner une restriction de pression. Ces ordonnances offrent une très bonne marge de sécurité et permettent de trouver la source du problème d'intégrité ou de performance. Au besoin, nous ordonnerons la fermeture du pipeline.
Grâce à toutes ces mesures, à la surveillance constante que nous exerçons, à notre connaissance de la culture de la compagnie, de ses systèmes d'exploitation et de sa performance sur le terrain, nous pouvons utiliser nos ressources de manière optimale au cours d'une année donnée et assurer une surveillance constante des systèmes, surtout sur les zones et les systèmes les plus susceptibles de présenter des risques.
Le président : Messieurs, merci beaucoup d'avoir été avec nous aujourd'hui et de nous avoir fourni tous ces renseignements.
(La séance est levée.)