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LCJC - Comité permanent

Affaires juridiques et constitutionnelles

 

Délibérations du Comité sénatorial permanent des
Affaires juridiques et constitutionnelles

Fascicule 33 - Témoignages du 9 juin 2015


OTTAWA, le mardi 9 juin 2015

Le Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles, auquel a été renvoyé le projet de loi C-42, Loi modifiant la Loi sur les armes à feu et le Code criminel et apportant des modifications connexe et corrélative à d'autres lois, se réunit aujourd'hui, à 10 heures, pour étudier le projet de loi.

Le sénateur Bob Runciman (président) occupe le fauteuil.

[Traduction]

Le président : Bonjour, chers collègues, chers témoins et chers auditeurs du Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles. Soyez les bienvenus.

Nous entreprenons aujourd'hui l'étude du projet de loi C-42, Loi modifiant la Loi sur les armes à feu et le Code criminel et apportant des modifications connexes et corrélatives à d'autres lois.

Ce projet de loi modifie la Loi sur les armes à feu afin de simplifier le régime de délivrance de permis d'armes à feu aux particuliers et d'y apporter des précisions, de limiter le pouvoir discrétionnaire des contrôleurs des armes à feu et de permettre le partage de renseignements relatifs à l'importation commerciale d'armes à feu. Il modifie également le Code criminel afin de renforcer les dispositions relatives aux ordonnances d'interdiction de possession d'armes, notamment d'armes à feu, en cas de condamnation pour une infraction avec violence familiale. Enfin, il définit l'expression « arme à feu sans restriction » et confère au gouverneur en conseil le pouvoir de désigner par règlement une arme à feu comme étant une arme à feu sans restriction. Enfin, il étend la portée du pouvoir du gouverneur en conseil de désigner par règlement une arme à feu comme étant une arme à feu à autorisation restreinte.

Pour entreprendre notre étude du projet de loi, nous accueillons de nouveau l'honorable Steven Blaney, C.P., député, ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile. Il est accompagné des représentants de son ministère, qui seront à ses côtés, MM. John Ossowski, sous-ministre délégué et Lyndon Murdock, directeur de la Division des armes à feu et de la politique opérationnelle. De plus, une fonctionnaire de Justice Canada, Mme Julie Besner, avocate-conseil par intérim à la Section de la politique en matière de droit pénal, sera dans la salle.

Avant de commencer, je rappelle à mes collègues que la séance d'aujourd'hui ne durera qu'une heure, pour entendre le ministre, puis leur permettre de le questionner. Les fonctionnaires de la Sécurité publique reviendront demain après-midi pour répondre à vos éventuelles questions techniques.

Monsieur le ministre, commençons par écouter votre déclaration préliminaire.

L'honorable Steven Blaney, C.P., député, ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile : Merci, sénateur. Mesdames et messieurs les sénateurs, je suis très heureux de vous revoir pour parler de ce projet de loi qui modifie significativement une loi adoptée il y a de nombreuses décennies.

Pour commencer, permettez-moi, vu que nous sommes à la fin du processus, de dire que la Loi visant la délivrance simple et sécuritaire des permis d'armes à feu est la première modification substantielle apportée au régime des permis d'armes à feu depuis sa création il y a 20 ans. Après tant de temps, nous avons certainement besoin de ces actualisations dictées par le bon sens.

Je tiens d'abord à remercier la sénatrice Beyak d'avoir bien voulu parrainer le projet de loi en le déposant au Sénat. Dans les observations qu'elle a formulées dans la salle du Sénat jeudi dernier, elle a exprimé on ne peut plus clairement ma pensée. Je n'aurais pas pu faire mieux. Je l'en remercie. Le projet de loi accroît sûrement la sécurité publique au pays et il simplifie la loi tout en montrant du respect pour les chasseurs et les tireurs sportifs dont vous faites partie.

Vous ignoriez peut-être que la sénatrice Beyak est une amatrice d'une activité appelée Cowboy Action Shooting. Alors je vous l'annonce. C'est une sorte de concours de tir avec trois modèles d'armes à feu qui replonge les concurrents dans des situations historiques. L'un des aspects des plus intéressants de ce sport est l'apparition de personnages et de pseudonymes. Celui de la sénatrice serait « Buttercup ». Il lui convient tout à fait, vu ses manières toujours aimables.

C'est ce que j'ai découvert dans ce dossier est que, au bout de deux ans, il s'est formée une communauté dynamique et active, des valeurs certainement bien canadiennes.

[Français]

Alors, pourquoi avons-nous présenté le projet de loi? C'est d'abord et avant tout, bien sûr, dans une optique de sécurité publique et afin de démontrer notre respect pour l'une des grandes valeurs canadiennes liées à notre héritage. Le tir sportif ainsi que la chasse sont une partie importante de cet héritage.

[Traduction]

Les activités trouvent toujours à se diversifier en nombreux sous-ensembles, comme la chasse du gros gibier ou de la sauvagine, le tir de précision au fusil, le tir au noir ou le tir au pigeon d'argile, entre autres.

En fait, les chasseurs, les pêcheurs à la ligne et les autres pêcheurs sont les meilleurs agents de conservation au Canada.

[Français]

Les chasseurs et les pêcheurs sont en contact avec la nature d'une manière intime et développent une compréhension de nos écosystèmes, autant du règne végétal qu'animal, pour être en mesure d'atteindre leurs objectifs. On l'a vu, par exemple, dans le cas de l'organisme Canards Illimités Canada, qui est devenu l'un des plus grands protecteurs et défenseurs de la faune canadienne.

[Traduction]

Bien sûr, toutes ces activités exigent un attirail différent. Personne ne devrait être traité comme un criminel pour trouver du plaisir dans un passe-temps et dans une activité qui, comme je viens de le dire, fait partie de notre héritage canadien.

Voici un exemple d'attitude avec laquelle nous devons en finir. Vous connaissez peut-être Keith Beasley. C'est l'une des vedettes de l'émission télévisée Canada in the Rough. Voici une anecdote qu'il m'a contée, dernièrement, au sujet de son fils.

Dans une expédition de chasse dans le nord de la Colombie-Britannique, M. Beasley avait tué un gros orignal. Il a rapporté à son fils la douille de la cartouche qu'il avait tirée. Tout fier qu'il était, son fils a voulu la montrer à des amis, à l'école. Cela lui a valu une suspension.

Soyons clairs. Cet objet inerte de métal apporté à l'école, qui n'enfreignait aucune loi canadienne, on l'a perçu comme si dangereux et si violent que l'élève devait être puni.

De toute évidence, il y a eu malentendu.

[Français]

Cette vision selon laquelle, d'une certaine façon, les Canadiennes et les Canadiens qui pratiquent les sports de chasse, de tir et de pêche sont des citoyens de seconde classe doit être combattue et corrigée. Elle est beaucoup trop répandue et elle dépeint une attitude parfois méprisante envers les propriétaires d'armes à feu que, trop souvent, nous avons tendance à traiter comme des criminels.

C'est pour cela que ce projet de loi est important. Il vise à restaurer le respect envers les Canadiens et les Canadiennes qui s'adonnent à des activités traditionnelles. J'ai affirmé plusieurs fois que nos politiques visant les armes à feu doivent être raisonnables et sécuritaires, et c'est l'objectif d'atteindre cet équilibre que nous visons dans le cadre du projet de loi dont vous êtes saisis.

J'aimerais d'abord vous décrire les mesures pour ce qu'elles sont, et non les rumeurs et les légendes urbaines qui ont été véhiculées, afin de détruire certains mythes à l'égard de ce projet de loi, maintenant que nous arrivons au terme du processus législatif.

D'abord, nous allons renforcer les interdictions pour celles et ceux qui pourraient être condamnés pour violence conjugale. Ces individus se verront dépossédés de leurs armes à feu à vie. Toute personne qui se verra reconnue coupable de violence conjugale, par voie de mise en accusation, se verra automatiquement départie à vie de son permis de possession et d'acquisition d'armes à feu, et ce, parce qu'un comportement adopté dans le passé est sûrement la meilleure façon de prédire les résultats futurs, et que les armes à feu ne devraient pas être présentes dans les situations domestiques instables.

Deuxièmement, nous souhaitons rendre obligatoires les cours de maniement sécuritaire d'armes à feu pour les nouveaux propriétaires. Tous auront ainsi une compréhension commune des pratiques permettant de manier les armes à feu de façon sécuritaire, dans un environnement civil.

[Traduction]

Vous savez peut-être que j'ai suivi le cours canadien de sécurité dans le maniement des armes à feu à autorisation restreinte. Je l'ai trouvé instructif et pratique. J'avais beaucoup à apprendre. Encore une fois, il m'a permis de voir le respect que démontrent les utilisateurs d'armes à feu pour nos lois et nos règlements. Seulement pour vous en donner un exemple : comment franchir une clôture quand on porte un fusil. J'y suis parvenu. Je pourrais vous montrer comment, mais j'aurais peut-être besoin d'un petit cours de recyclage.

De plus, le projet de loi améliorera la communication de renseignements entre la GRC et l'Agence des services frontaliers du Canada, l'ASFC. La troisième mesure concerne ces deux organismes. Je suis venu vous dire que la main gauche du gouvernement doit savoir ce que fait la main droite. C'est exactement ce que vise l'obligation de communiquer des renseignements entre ces deux organismes dont l'un est chargé de superviser l'importation des armes à feu. Nous limiterons et réduirons le risque d'importation d'armes à feu illégales dans notre pays.

Ces trois mesures énergiques sont prévues dans le projet de loi.

Nous rationaliserons aussi le processus pour les honnêtes citoyens. Il ne s'agit pas tant de sécurité publique que de réduction de la paperasse et de la nécessité de changer certaines attitudes. Permettez-moi de citer des exemples.

Nous avons l'intention d'unifier le permis de possession seulement et le permis de possession et d'acquisition. Cette conversion accordera le droit à 500 000 à 600 000 propriétaires expérimentés d'armes à feu de s'en procurer de nouvelles. Ils n'ont pas pu en profiter depuis les 20 dernières années, depuis l'adoption de la loi. Ces chasseurs consommés possèdent une longue expérience des armes à feu. L'unification des permis simplifiera le processus.

Nous avons aussi l'intention de limiter et d'uniformiser le pouvoir des contrôleurs des armes à feu de prendre des décisions arbitraires. La Loi sur les armes à feu est fédérale. On ne devrait pas greffer sur une loi fédérale un ensemble hétéroclite de règles et de procédures de chaque province.

[Français]

De plus, nous allons accorder une période de grâce de six mois à l'expiration d'un permis de cinq ans. Ainsi, un propriétaire d'arme à feu dont le permis a expiré le 8 avril et qui se retrouve à l'extérieur du pays le 9 avril — comme les militaires en déploiement — est passible d'une peine criminelle de trois à cinq ans, étant donné que, en vertu du Code criminel, il est en possession d'une arme illégale. La période de grâce de six mois évitera au propriétaire d'une arme à feu dont le permis a expiré d'être accusé d'infraction en vertu du Code criminel. Toutefois, pendant cette période, il ne pourra pas utiliser son arme à feu ni acheter de munitions. Cette mesure permettra au propriétaire d'une arme à feu de régler sa situation.

Nous allons mettre fin à la paperasse inutile liée aux autorisations de transport des armes à feu restreintes et prohibées. Ces dernières feront partie intégrante du permis des personnes qui se qualifient pour la possession d'armes à autorisation restreinte. Nous avons adopté ces mesures, parce que cette autorisation de transport ne comporte aucun avantage sur le plan de la sécurité publique, puisque cette information n'est pas transmise aux autorités policières et qu'elle crée une lourdeur administrative inutile.

Nous allons donner à nos élus le pouvoir de corriger les erreurs de classification du Programme canadien des armes à feu. L'automne dernier, nous avons été témoins de décisions arbitraires concernant la classification des armes. En me basant sur l'avis d'experts, j'ai l'intention de procéder à la reclassification de deux armes, soit le modèle CZ-858 et les carabines Swiss Arms, puisque nous nous sommes retrouvés dans une situation très embarrassante. Des citoyens canadiens respectueux des lois, qui avaient acquis une arme à feu de bonne foi depuis plusieurs années, se sont retrouvés dans une situation illégale, ce qui est tout à fait inacceptable. En tenant compte des avis d'experts, nous mettrons en place un mécanisme pour corriger les erreurs qui pourraient survenir dans la classification et la reclassification des armes à feu.

Voici en quoi consiste le projet de loi. Il y a eu, bien sûr, des faussetés véhiculées à son sujet.

[Traduction]

Par exemple, on a fait circuler sur le projet de loi des faussetés. Il importe, pour des motifs de sécurité publique, de démentir ces déclarations frivoles.

Le Parti libéral du Canada a prétendu, dans des publicités à des fins de financement, que le projet de loi autoriserait le port d'armes de poing dans les épiceries et les patinoires de hockey. Complètement ridicule! Totalement faux! Cette déclaration est vraiment scandaleuse. Bien au contraire, des règles rigoureuses régissent le transport des armes à feu à autorisation restreinte, et aucune n'est abrogée. Je le répète : le projet de loi ne modifie pas les règles sur la manutention des armes à feu, à autorisation restreinte ou sans restriction.

Ensuite, certains ont affirmé que les exigences pour suivre un cours de sécurité seront excessives pour les ruraux et les habitants des régions éloignées. Comme il faut être présent en personne pour subir l'examen, il faut se déplacer de toute manière. Je crois que l'avantage pour la santé publique est évident.

Enfin, certains ont laissé entendre que le nouveau pouvoir qu'auront les élus d'abaisser le niveau de classement des armes à feu autoriserait le classement des armes à feu automatiques dans la catégorie des armes sans restriction. Ce n'est manifestement pas l'intention de notre gouvernement ni d'aucun autre. Notre rôle est de fonder nos politiques sur la sécurité publique et l'analyse technique. Nous tenons à corriger ces erreurs.

En un mot, voilà ce dont il s'agit. Permettez-moi de conclure en disant ce que nous avons entendu au sujet du National Post à l'autre endroit. Le comité a entendu des chasseurs, des tireurs sportifs, des policiers, des professeurs d'université et d'autres. Je comprends que beaucoup de ces spécialistes s'adresseront aussi à vous. L'équipe des éditorialistes du National Post avait ceci à dire sur le projet de loi :

Le projet de loi C-42, Loi visant la délivrance simple et sécuritaire des permis d'armes à feu, sera bientôt adopté. Voilà une bonne nouvelle pour les propriétaires d'armes à feu responsables et, comme le titre de la loi le dit, pour la simplicité et le bon sens...

Les millions de Canadiens légalement propriétaires d'une arme à feu ne menacent pas le public — voilà pourquoi, dans notre pays, les armes à feu sont de plus en plus rarement employées à des fins criminelles, malgré le nombre important de civils qui en possèdent. Le projet de loi C-42 montre qu'on peut simplifier l'acquisition légale d'une arme à feu sans réduire les contrôles déjà rigoureux pour son propriétaire. Nous saluons son adoption imminente. Honorables sénateurs, avec votre appui et votre aide, je serai plus qu'heureux de répondre à vos questions pour atteindre cet objectif.

Le président : La liste des intervenants est longue. Je rappelle à mes collègues que la séance prendra fin à 10 h 55. J'ai bon espoir que nous pourrons poser toutes les questions au ministre. Monsieur le ministre, j'espère que vous en tiendrez compte dans vos réponses aussi. Commençons par le vice-président du comité, le sénateur Baker.

Le sénateur Baker : Ma question s'adresse peut-être aux fonctionnaires. D'abord, je félicite le ministre. Je suis heureux de le revoir. Il a fait de l'excellent travail pour le gouvernement du Canada, dans le poste qu'il occupe. Ce projet de loi, à première vue, semble excellent.

Ma question pour l'un des fonctionnaires est la suivante : le projet de loi propose de modifier, aux pages 11 et 12, divers articles, 99(1), 99(2), 101 et 102, du Code criminel. Je lis le passage, pour qu'il figure dans le compte rendu :

[...] une arme prohibée, une arme à autorisation restreinte, [...] un dispositif prohibé, des munitions ou des munitions prohibées sachant qu'il n'y est pas autorisé en vertu de la Loi sur les armes à feu, de toute autre loi fédérale ou de leurs règlements.

Le passage critiquable est, je crois, « des munitions ou des munitions prohibées ». Il se répète dans le texte qui modifie les trois articles en question du Code criminel. Tout d'abord, ne serait-il pas plus simple de simplement dire « des munitions »?

Ensuite, la peine obligatoire est une peine minimale de prison, pour un acte criminel. Il me semble qu'on interpréterait cela comme la possession de munitions ou de munitions prohibées.

Les ruraux gardent des munitions chez eux. Ce pourrait être des munitions qui restent de vieilles armes et ainsi de suite. Mais en faire un acte criminel passible d'une peine minimale obligatoire... Je me demande si les fonctionnaires peuvent m'éclairer. Visiblement, je comprends mal. Ça ne peut pas signifier ce que je pense, que la possession de vieilles munitions dépareillées d'un vieux fusil datant de 50 ans, dans sa grange ou chez lui serait un acte criminel. Ça ne peut certainement pas signifier cela. Pourriez-vous, tout d'abord, m'éclairer?

Julie Besner, avocate-conseil par intérim, Section de la politique en matière de droit pénal, ministère de la Justice : Bien sûr. Je crois que l'infraction relève principalement de l'article 91 du Code criminel, qui définit l'infraction de « possession simple », une infraction hybride qui n'est pas sanctionnée par peine minimale. Depuis le milieu des années 1990...

Le sénateur Baker : Je suis désolé, mais le projet de loi parle d'acte criminel. Le paragraphe 23(1), sur les sanctions, nomme l'infraction, tandis que le paragraphe 23(2) précise que son auteur est passible de ceci, de cela et d'une autre peine.

M. Blaney : Si vous me permettez d'intervenir. Je vous remercie pour vos observations. Le genre de question que vous posez vise toujours à concilier la simplification du processus et le maintien, comme priorité, de la sécurité publique.

À Moncton, hier soir, j'ai appris qu'un agent de police a été tué par un membre d'un groupe extrémiste de droite. Dans la situation actuelle, nous devons toujours compter sur la collaboration des propriétaires d'armes à feu, tout en nous assurant, toujours, puisque nous sommes le gouvernement, que notre priorité est d'intenter des poursuites contre les utilisateurs d'armes à feu illégales, sans oublier un seul chef d'accusation, et que la société ne tolère absolument pas l'emploi inapproprié d'une arme à feu.

L'intention du projet de loi, en ce sens, est de s'assurer que l'emploi inapproprié d'une arme à feu entraîne nécessairement l'emploi de munitions. Nous avons essayé, pendant la rationalisation du processus, de toujours être conscients que le Code criminel a une excellente raison pour viser les armes à feu.

Ce serait ma réponse générale. Peut-être que Mme Besner voudra projeter un éclairage plus juridique.

Mme Besner : J'ajouterai seulement que les dispositions auxquelles le sénateur a fait allusion sont modifiées pour qu'on y ajoute la nouvelle expression « arme à feu sans restriction ». C'est leur seule modification substantielle.

J'en reste là. Le ministre a par ailleurs répondu à la question.

La sénatrice Beyak : Le ministre a répondu à ma question dans son exposé. C'était au sujet des petites communautés et de la pénible nécessité de passer l'examen, mais il y a répondu. Je vous remercie, monsieur le ministre. Pourriez-vous cependant en dire un peu plus à ce sujet.

M. Blaney : Si vous parlez de la formation obligatoire pour tous les Canadiens. D'anciens agents de police et soldats m'ont dit qu'ils savaient comment utiliser une arme à feu, qu'ils en connaissaient tous les aspects techniques. Je leur ai répondu par une question : À la chasse, savez-vous comment franchir une clôture en portant une arme à feu? Comme vous êtes maintenant des civils, vous devez apprendre à utiliser une arme à feu comme un civil. Voilà pourquoi le cours est obligatoire pour tous les Canadiens.

Bien entendu, certains Canadiens qui vivent dans des régions éloignées devront se déplacer pour suivre le cours. Nous collaborons avec toutes les fédérations de la faune du pays. Pour obtenir un permis, il faut passer un examen, et pour ce faire, il faut se déplacer.

Nous disons ceci : « Pourquoi ne pas vous déplacer pour suivre le cours et passer l'examen? » Il se peut que les gens doivent passer la nuit là-bas. Je sais que la Cour suprême est d'avis que posséder une arme à feu est un privilège. Je pense que c'est plutôt une responsabilité en plus d'être un privilège. J'ai dit que c'est un droit qui vient avec une responsabilité, mais je ne veux pas commencer un débat avec la Cour suprême. Toutefois, nous nous entendons sur le principe suivant : une personne qui veut obtenir et conserver un permis doit agir de façon responsable. C'est pourquoi le cours obligatoire reçoit un large appui des organisations. Les fédérations de la faune appuient non seulement les mesures relatives à la transmission des connaissances, mais également celles portant sur la responsabilité dont doit faire preuve toute personne qui possède une arme à feu et sur le comportement qu'elle devrait adopter.

Pour répondre à votre question, je dirais que même si une personne vit en région éloignée, il y a plus d'avantages tant à se soumettre à un examen, qu'à suivre le cours.

La sénatrice Beyak : Je suis d'accord avec vous. Merci beaucoup, monsieur le ministre.

La sénatrice Jaffer : Monsieur le ministre, vous savez ce qui s'est passé hier soir à Edmonton. Lorsque je travaille avec des autorités responsables de la sécurité ou des autorités policières, elles me disent que ce qu'elles craignent le plus, c'est d'entrer chez les gens, car elles ne savent pas quel type d'armes à feu peut s'y trouver; et c'est très malheureux. Nous devons penser aux familles qui ont perdu des êtres chers.

Mes dossiers portent sur la violence familiale, et ce sont les femmes qui ont le plus peur lorsque leur conjoint a accès à des armes à feu. Je dois vous féliciter pour les mesures sur l'ordonnance obligatoire d'interdiction de port d'arme et l'aspect discrétionnaire.

Monsieur le ministre, je veux que vous réfléchissiez à ce qui suit, et en particulier votre ministère : la majorité des causes dont je m'occupe ne se rendent même pas à cette étape. Beaucoup d'engagements de ne pas troubler l'ordre public et d'injonctions au civil ne couvrent même pas cela. D'après mon expérience concernant les causes sur la violence familiale, s'il y a condamnation, ce sont des cas extrêmes. Oui, si cela relève du pouvoir discrétionnaire du juge, mais j'aurais aimé voir plus. Qu'arrive-t-il si le tribunal impose un engagement de ne pas troubler l'ordre public? Qu'est-ce que le juge de paix a à sa disposition pour les causes liées aux armes à feu? J'aimerais que vous nous en disiez davantage à cet égard.

Comme l'indique le rapport intitulé Mesure de la violence faite aux femmes de 2013, nous savons que le plus souvent, ce sont des conjoints qui sont les auteurs des crimes violents contre les femmes — 45 p. 100 —; par ailleurs, plus des deux tiers, soit 69 p. 100, des actes violents envers les femmes ont été commis dans des résidences privées.

M. Blaney : Merci, sénatrice Jaffer. Je crois que nous avons tous été bouleversés lorsque nous avons appris la nouvelle du drame qui a eu lieu à Edmonton. Je crois que vous vous joindrez à moi pour dire que nous sympathisons avec la famille de l'agent de police Daniel Woodall, qui a été tué, et avec le sergent Jason Harley, qui a été blessé dans l'exercice de ses fonctions hier soir. Cet événement nous rappelle que nos policiers prennent des risques tous les jours. La semaine dernière, j'étais à Moncton pour la commémoration des événements tragiques de l'an dernier.

Au cours des 10 dernières années, notre gouvernement a probablement adopté les dispositions les plus rigoureuses sur la possession d'armes à feu illégales et sur les crimes commis avec des armes à feu, surtout ce type de crimes horribles. Nous avons présenté des projets de loi. Le taux d'homicides a baissé, mais cela ne justifie rien. Nous devons faire tout ce que nous pouvons pour éviter que d'autres tragédies se produisent.

La semaine dernière, j'étais à Codiac, là où le drame a eu lieu. J'ai assisté à la séance d'information que les agents de police tiennent chaque matin pour se préparer, et ils font face à beaucoup de difficultés. Dans notre société, beaucoup de gens représentent une menace. Ils savent qu'ils sont là. Ils ne peuvent pas nécessairement les arrêter et les accuser, car ils n'ont pas suffisamment de preuves.

C'est pourquoi, comme vous le savez, dans le dossier du terrorisme, et j'ai comparu devant le comité sénatorial à ce sujet, nous abaissons les seuils, de sorte qu'ils sont mieux outillés sur le plan législatif. En outre, comme vous le savez, il est important de s'assurer qu'ils ont le matériel et les ressources voulues. Nous remplissons cet engagement.

Or, sénatrice Jaffer, ils m'ont dit également que, bien sûr, chaque fois qu'ils entrent dans une maison, ils doivent tenir pour acquis qu'il pourrait y avoir une arme à feu quelque part. C'est pourquoi, comme on l'a indiqué, le projet de loi renforce le régime de diverses façons, surtout en ce qui a trait à la violence familiale. Puis-je vous rappeler qu'à ce moment-ci, nous avons également ce que nous appelons « la vérification continue de l'admissibilité ». Il y a une vérification continue, de sorte que si un propriétaire d'arme à feu agit d'une certaine façon, l'agent de police reçoit automatiquement l'information à partir de la base de données. Il s'agit de la vérification continue de l'admissibilité.

Nous devons faire tout ce que nous pouvons pour réduire ces problèmes et nous poursuivrons dans la même voie. C'est la réponse que je vous donne.

La sénatrice Jaffer : Pouvez-vous cependant répondre à ma question...

Le président : Sénateur McIntyre.

[Français]

Le sénateur McIntyre : Merci, monsieur le ministre, d'être parmi nous aujourd'hui. Je comprends que vous avez mené un processus officiel de consultations en vue d'élaborer ce projet de loi, auquel ont participé des représentants de services de police, de communautés autochtones, et cetera. Je comprends également que les représentants de Sécurité publique Canada ont aussi mené des consultations. Pourriez-vous nous en dire davantage sur la nature de ces consultations?

M. Blaney : Merci, sénateur McIntyre. Les premières rencontres que j'ai eues se sont tenues ici, en Ontario, avec l'Ontario Federation of Anglers and Hunters. Je l'ai consultée sur l'approche que nous pouvions adopter. J'ai aussi un comité consultatif sur les armes à feu, qui a pour priorité la sécurité publique. À titre d'exemple, lors de la dernière rencontre, les enjeux liés à la santé mentale étaient l'un des éléments sur lesquels le comité s'est penché. On doit toujours aller de l'avant, et nous nous sommes interrogés sur la façon de repérer, en respectant les lois du pays, les personnes qui auraient une certaine vulnérabilité au niveau de la santé mentale et qui seraient propriétaires d'armes à feu.

C'est pour vous donner une idée à quel point les membres de ce comité consultatif sur le contrôle des armes à feu et les représentants des différentes associations québécoises et canadiennes de chasseurs et de pêcheurs ont un sens aigu des responsabilités. Pourquoi? Parce qu'ils ont souffert et qu'ils souffrent chaque fois qu'un individu commet un crime avec une arme à feu. Toute la communauté est pénalisée; elle est donc extrêmement responsabilisée. Je pense, par exemple, à M. Latraverse, président de la Fédération québécoise des chasseurs et pêcheurs, qui appuie ces mesures. J'espère que vous aurez l'occasion de le rencontrer.

Je vous cite les propos d'un Québécois, qui s'est exprimé ainsi en anglais :

[Traduction]

Ce projet de loi satisfait grandement les chasseurs du Québec puisqu'il simplifie les démarches d'octroi de permis pour les utilisateurs respectueux de la loi, tout en renforçant la sécurité et l'éducation.

C'est donc dire que l'une des priorités des chasseurs et des tireurs sportifs, c'est de renforcer la sécurité publique à l'aide de mesures sensées. Ils appuient le projet de loi.

Nous avons beaucoup consulté l'Association canadienne des policiers. Elle a exprimé son point de vue. Je suis fier de l'appui considérable que le projet de loi a reçu des gens qu'il touche et des gens qui se soucient de la sécurité publique.

[Français]

Le sénateur Joyal : Bienvenue, monsieur le ministre. Vous avez mentionné, dans votre réponse au sénateur McIntyre, que vous aviez mené des consultations. Avez-vous reçu des commentaires de la part des gouvernements provinciaux, en particulier celui du Québec, au sujet des dispositions contenues dans ce projet de loi?

M. Blaney : Oui et non. En fait, nous sommes toujours en contact avec le gouvernement québécois par l'intermédiaire de Lise Thériault. Nous avons eu des échanges au moment du dépôt du projet de loi. Nous avons également l'intention de poursuivre ces échanges, puisque le contrôle des armes à feu, dans certains cas, comme au Québec, est une responsabilité partagée avec le gouvernement provincial. Nous allons veiller à la mise en œuvre de la loi en tenant compte de ce contexte particulier.

Bref, j'ai eu des échanges au niveau provincial. Je pense avoir ressenti quelques inquiétudes, mais je crois avoir été en mesure de dissiper certaines des inquiétudes soulevées par mon homologue.

Le sénateur Joyal : De quelle nature étaient les réserves exprimées par le gouvernement du Québec au sujet du projet de loi?

M. Blaney : Une lettre qui m'avait été envoyée a été amplement médiatisée. Au chapitre du contrôle des armes à feu, il s'agissait de les rassurer qu'il n'y a aucun changement concernant le transport des armes à feu. C'est un domaine assez complexe et, étant néophyte, j'ai eu à me familiariser avec le dossier.

Par exemple, dans le cas des armes non restreintes, il y a des règles qui sont liées au maniement de ces armes. Pour les armes restreintes, c'est encore plus sévère. Toute arme, peu importe son type, doit toujours être déchargée et désactivée par un mécanisme avec serrure, que ce soit au niveau de la gâchette ou d'un coffret sécurisé. C'est obligatoire pour les armes.

En ce qui concerne les armes prohibées, il doit y avoir une double protection, et les règles sont encore plus strictes. En vertu du projet de loi, dans le cas des armes restreintes — par exemple, les armes utilisées par les sportifs —, les chasseurs qui ont un permis de possession restreinte auront l'autorisation de se déplacer : l'arme doit être désactivée, cadenassée, entreposée dans une armoire sécurisée ou un coffret sécurisé et cadenassé, et le propriétaire doit se déplacer uniquement de la résidence vers un club de tir, l'armurier, à la frontière, s'il s'agit d'une activité à l'extérieur du pays ou de la province, ou chez le contrôleur des armes à feu pour des mesures administratives.

Le sénateur Joyal : Vous avez mentionné qu'il y a une application inégale de la loi à travers le Canada et que le projet de loi vise une sorte de normalisation. De quelle façon y a-t-il application inégale de la loi?

M. Blaney : Par exemple, dans le cas de l'autorisation dite ATT — l'autorisation de voyager avec une arme restreinte — les règles ne sont pas les mêmes d'une province à l'autre, alors qu'il s'agit d'une loi fédérale. Dans certaines provinces, les chasseurs doivent demander un permis additionnel chaque fois qu'ils désirent se déplacer avec une arme restreinte, alors que dans d'autres provinces, il n'y a pas de restriction. Nous uniformisons donc le processus en le simplifiant.

Il y a aussi certaines mesures additionnelles qui peuvent être ajoutées par les contrôleurs d'armes à feu. Je dois vous dire que je reçois beaucoup de correspondance de la part de chasseurs qui sont respectueux de la loi, mais qui font face à une forme d'acharnement bureaucratique qui n'a aucune valeur ajoutée pour la sécurité publique. Nous souhaitons créer une loi fédérale qui s'applique en vertu du Code criminel. Nous voulons nous assurer que les agents d'application de la loi respectent la volonté du législateur.

Le sénateur Joyal : Pourrions-nous obtenir une copie de la lettre?

[Traduction]

La sénatrice Batters : J'ai une brève question à ce sujet, mais je vais vous en poser une deuxième également. Ma province d'origine, c'est la Saskatchewan, et je pense que les modifications qui figurent dans le projet de loi y seront bien accueillies.

Tout à l'heure, lorsque vous parliez du cours obligatoire de maniement sécuritaire des armes à feu et du fait d'essayer de trouver des solutions concernant la disponibilité, vous avez dit brièvement avoir travaillé avec des fédérations de la faune. Pouvez-vous nous en dire un peu plus à cet égard? Je sais que les gens de la Saskatchewan seront contents d'en entendre parler.

J'aimerais aussi vous poser une question sur un autre sujet. Le chef du Parti libéral a dit que le projet de loi permettrait aux gens d'apporter des armes à feu à autorisation restreinte n'importe où, y compris dans les épiceries et les arénas. Est-ce exact?

M. Blaney : Non, sénatrice.

Pour répondre à votre première question, je vais citer Greg Illerbrun, président, Armes à feu, et président sortant de la Saskatchewan Wildlife Federation. Voici ce qu'il a dit au sujet du projet de loi :

[...], je comprends qu'il y a de sérieux écarts entre ceux qui utilisent des armes à feu de façon légitime et ceux pour qui la seule mention des mots « arme à feu » évoque une peur profonde injustifiée. Malheureusement, c'est la réalité, qui est continuellement alimentée par une couverture médiatique sensationnaliste et politiquement motivée.

Les mesures à l'étude aujourd'hui représentent des améliorations fondées sur le gros bon sens, et je vous en remercie. Les utilisateurs légitimes d'armes à feu sont prêts à se mettre au travail. Nous allons vous aider à promouvoir la discussion et à créer une loi tout à fait logique qui cessera de criminaliser un style de vie traditionnel, préconisé par les utilisateurs légitimes d'armes à feu au Canada.

Je crois avoir décrit les mesures qui renforcent la sécurité publique : formation obligatoire, retrait du permis en cas de condamnation pour une infraction avec violence familiale, partage de renseignements obligatoire; et amélioration du contrôle de l'importation d'armes à feu légales et illégales par l'établissement de liens entre la GRC et l'ASFC.

Pour revenir à votre autre question, il est un peu décevant que des partis politiques essaient de marquer des points sur l'échiquier politique en induisant les Canadiens en erreur sur des questions de sécurité très importantes. Les Canadiens peuvent être fiers d'avoir un bon régime qui les protège, mais moins fiers d'avoir un système qui impose ouvertement un fardeau administratif à des citoyens respectueux des lois; c'est ce sur quoi porte le projet de loi.

Il y a beaucoup d'incompréhension à l'égard des exigences relatives à la possession d'une arme à feu. Dans mon cas, par exemple, j'ai dû obtenir l'aide de mon épouse, qui se trouve à être la même qu'auparavant, de sorte que je n'ai pas dû fournir un autre nom. Un examen minutieux d'un grand nombre d'éléments est effectué pour quiconque veut posséder une arme à feu.

On ne peut pas aller chez Canadian Tire. Il faut suivre un processus rigoureux, que le cours obligatoire rendra encore plus rigoureux. On ne peut pas simplement passer l'examen. Il faut suivre le cours obligatoire offert par des organismes, comme la Saskatchewan Wildlife Federation, pour bien comprendre la responsabilité qui vient avec la possession d'une arme à feu, de même que l'obligation de s'assurer que toute personne qui fait légalement l'acquisition d'une arme à feu sera une valeur ajoutée à la sécurité de notre pays et ne causera pas d'événements tragiques qui ont une incidence tellement négative et qui créent un climat de méfiance entre les utilisateurs d'arme à feu et les Canadiens qui pratiquent d'autres activités.

Le sénateur White : Encore une fois, nos condoléances à la famille de l'agent d'Edmonton et à tous les agents de la collectivité.

Madame Besner, je vais revenir sur la question des engagements de ne pas troubler l'ordre public, de sorte que nous ne pensions pas qu'un juge ou un juge de paix n'est pas en mesure de restreindre l'accès aux armes à feu à une personne qui fait l'objet d'un engagement de ne pas troubler l'ordre public. Un certain nombre de conditions sont en place. Pourriez-vous les passer en revue pour les gens qui sont peut-être en train de nous écouter?

Mme Besner : Le Code criminel comprend des dispositions qui permettent aux tribunaux d'émettre une ordonnance d'interdiction de façon préventive même si une personne n'a pas été condamnée. Il y a l'article 111 du Code criminel, qui porte sur l'ordonnance d'interdiction préventive. Une demande peut être faite devant le tribunal si l'on craint pour la sécurité d'une personne ou si des menaces ont été proférées.

Dans le contexte d'une audience sur le cautionnement, un juge de paix ou un juge est autorisé à imposer des restrictions sur la possession d'arme à feu et également dans le contexte des engagements de ne pas troubler l'ordre public.

Le sénateur White : Des gens parlent de permis de possession seulement et de permis d'acquisition. Une partie de la population ne comprend pas que concrètement, une personne qui n'a qu'un permis de possession seulement pour un calibre .33 qu'elle utilise pour la chasse avait de la difficulté à acheter des munitions pour pouvoir continuer à chasser avec cette arme sans permis d'acquisition. Il ne s'agissait pas seulement d'acheter plus d'armes, mais des munitions également. Je crois que la population estimerait que — même les gens qui n'appuient pas le projet de loi — qu'il est illogique qu'il soit impossible d'acheter des munitions pour une arme qu'on possède.

M. Blaney : Êtes-vous en train de dire qu'un détenteur de permis de possession seulement ne peut pas acheter de munitions?

Le sénateur White : C'est exact.

M. Blaney : Je ne cesse d'apprendre des choses. Voilà une autre chose ridicule. Une personne possède une arme à feu, mais elle ne peut pas s'acheter des munitions même si elle en possède une légalement. Je vous remercie de l'avoir soulevé, sénateur.

C'est comme un permis qui n'est plus délivré, ce qui remonte à la présentation des mesures législatives. Les gens qui possèdent ce permis sont probablement dans la soixantaine pour la plupart. Les mesures ont été adoptées il y a plus de 20 ans. Il s'agit de gens qui utilisent une arme à feu depuis longtemps et qui connaissent bien toutes leurs responsabilités, mais qui ne pouvaient pas acheter de munitions, comme vous l'avez mentionné. Cette situation met ces gens dans une position délicate.

On me dit que les détenteurs de permis de possession seulement sont autorisés à acheter des munitions.

Le sénateur White : Ils le sont? Oh, alors je m'excuse. Comme j'ai les deux, cela ne me préoccupait pas.

M. Blaney : D'accord. Je remercie mon sous-ministre délégué. Je ne vous donnerai plus de renseignements erronés.

[Français]

Le sénateur Dagenais : Merci beaucoup, monsieur le ministre. En 1990, je répondais à un appel de violence conjugale et j'ai été reçu par une rafale de 13 balles de calibre .303 qui visaient mon auto-patrouille. Vous comprendrez que l'on n'oublie pas une telle expérience. Alors merci, au nom des policiers qui répondent à des appels de violence conjugale et qui peuvent s'avérer très dangereux.

Lorsqu'on parle d'armes à feu, des groupes de pression aussi puissants que le lobby pro-armes veulent se faire entendre. Dans cette loi, on fait apparaître le terme « arme à feu sans restriction ». Pouvez-vous nous dire quelles en sont les implications?

M. Blaney : Essentiellement, on parle de la plupart des armes qui sont en circulation au pays et qui, en quelque sorte, n'ont pas de définition légale. On définissait une arme selon ce qu'elle n'était pas, et non selon ce qu'elle est. Prenons l'exemple de la Winchester que mon grand-père a léguée à mon père et que ce dernier me léguera éventuellement. Je posséderai alors légalement une arme à feu. C'est une arme de chasse et une arme d'épaule, ce qui répond typiquement à la définition d'une arme qui n'est pas automatique, et donc, à la définition d'une arme non restreinte.

Les armes restreintes sont des armes semi-automatiques ou encore des armes de poing. Les armes prohibées sont celles qui ne sont pas en circulation pour la population civile.

La raison pour laquelle nous avons dû procéder ainsi est liée à la reclassification qui s'est faite, il y a déjà quelques mois, dans le cadre de laquelle nous avons classé une arme non restreinte de sorte qu'elle devienne une arme restreinte. Du coup, plusieurs propriétaires d'armes à feu qui n'avaient pas de permis de possession pour arme restreinte se trouvaient en possession illégale d'une arme à feu. C'est pourquoi j'ai instauré une amnistie pour la possession simple de l'arme à feu et son utilisation.

On doit reclassifier l'arme pour deux raisons. Premièrement, pour ces armes, il s'agit d'une erreur de classification. Deuxièmement, même si les gens aujourd'hui sont propriétaires de cette arme de façon légale et peuvent l'utiliser, ils ne peuvent aller nulle part, parce qu'elle est classifiée comme restreinte et est donc assujettie à des règles plus sévères. Ainsi, ils ne peuvent pas s'en servir dans les clubs de tir. C'est la raison pour laquelle il est important d'assurer une classification adéquate des armes à feu en fonction de leurs qualités techniques. C'est pourquoi, aussi, il est devenu nécessaire de donner une dénomination à l'ensemble des armes à feu que l'on retrouve au pays, soit l'arme non restreinte.

[Traduction]

Le sénateur McInnis : Merci. Je suis heureux de vous revoir, vous et vos collaborateurs.

Au Canada, il semble que toute discussion sur les armes à feu provoque la controverse, et des faussetés sont exprimées, en partie par les médias et en partie par des gens qui ne connaissent pas les sports liés à la chasse et aux champs de tir, et cetera.

J'ai lu certaines des observations qui ont été faites à l'autre endroit. On disait que vous alliez retirer à la GRC la responsabilité de la classification des armes, et qu'apparemment, c'est vous qui vous en occuperiez. Comme la sénatrice Batters l'a dit, on disait que les gens allaient se déplacer avec des armes dans les centres commerciaux et n'importe où. On a émis des critiques concernant la période de grâce pour le renouvellement automatique des permis.

Croyez-vous que votre erreur a été d'utiliser le titre « Loi visant la délivrance simple et sécuritaire des permis d'armes à feu »?

M. Blaney : Vous avez raison, sénateur; c'est une question très délicate en raison de la nature même des armes à feu et également du drame dont nous avons été les témoins. Je suis un Québécois et j'ai étudié en génie civil. Je peux certainement comprendre.

[Français]

Il y a une expression selon laquelle il ne faut pas jeter le bébé avec l'eau du bain.

[Traduction]

Le devoir premier de notre gouvernement, c'est de veiller à la sécurité publique. Comme j'ai eu l'occasion de le dire à la sénatrice Jaffer, c'est notre gouvernement qui a mis en place les peines minimales obligatoires pour la possession illégale d'une arme à feu et des peines plus sévères pour toute personne qui commet un crime avec une arme à feu. Le nombre d'homicides commis avec une arme à feu a diminué, mais nous devons toujours renforcer la sécurité publique et c'est pourquoi le projet de loi contient des mesures à cet égard.

Par ailleurs, cela ne veut pas dire que nous devons ostraciser les gens qui ont été touchés par un drame et qui n'ont rien à voir avec ces actes de violence horribles.

Le projet de loi vise à rétablir le respect des citoyens respectueux des lois qui ont été ostracisés depuis bien trop longtemps. Voilà l'objectif du projet de loi — en plus de celui de renforcer la sécurité publique. Voilà pourquoi le projet de loi est le bienvenu.

J'ai cité l'équipe des éditorialistes du National Post et également la Fédération de la faune, qui s'intéresse vivement à la sécurité publique et au maniement sécuritaire des armes à feu. Je crois que vous pourrez comprendre que le projet de loi permettra d'accomplir cela. Il est à espérer que nous allons dans la bonne direction, et nous vous demandons votre appui.

[Français]

La sénatrice Hervieux-Payette : Je ne vois pas pourquoi la GRC n'aurait pas la compétence voulue pour continuer d'être chargée de la classification appropriée des armes, et pourquoi un seul expert, qui se rapporterait à vous et au gouvernement, serait mieux placé pour veiller à ce que les armes soient classifiées de façon appropriée.

M. Blaney : J'ai le plus grand respect pour la Gendarmerie royale du Canada et pour le travail qui est fait quant au contrôle des armes à feu. Comme je l'ai moi-même constaté, il n'y a aucun processus de révision. Alors, il m'apparaît normal que, dans tout système, il y ait un processus de révision, et c'est ce qui est proposé dans la Loi sur l'enregistrement sécuritaire et simple des armes à feu.

Le sénateur Joyal : Pourriez-vous remettre au greffier une copie de la lettre que vous avez reçue du gouvernement du Québec au sujet du projet de loi?

M. Blaney : Je vais vérifier, sénateur Joyal. À ma connaissance, elle a déjà été diffusée au public. Je veux simplement m'assurer qu'il n'y a pas de bris.

Le sénateur Joyal : Ainsi, cela apparaîtra dans le procès-verbal.

M. Blaney : Je le ferai avec plaisir. S'il n'y a aucun bris, je serai heureux de la partager avec les membres du comité.

[Traduction]

Le sénateur Baker : Quand votre carte expirera-t-elle?

M. Blaney : Le jour de mon anniversaire, où j'aurai cinquante et quelques années.

Le sénateur Baker : Oh, c'est donc dans 10 ans.

Le président : Je remercie le ministre, de même que ses collaborateurs que nous reverrons demain d'ailleurs.

Monsieur le ministre, j'imagine que nous vous reverrons peut-être avant le congé d'été.

M. Blaney : Merci. C'est à vous de décider.

(La séance est levée.)


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