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AGFO - Comité permanent

Agriculture et forêts

 

Délibérations du Comité sénatorial permanent de
l'Agriculture et des forêts

Fascicule no 2 - Témoignages du 18 février 2016


OTTAWA, le jeudi 18 février 2016

Le Comité sénatorial permanent de l'agriculture et des forêts se réunit aujourd'hui, à 8 heures, pour étudier les priorités pour le secteur agricole et agroalimentaire canadien en matière d'accès aux marchés internationaux.

Le sénateur Donald Neil Plett (président suppléant) occupe le fauteuil.

[Traduction]

Mark Palmer, greffier par intérim du comité : Honorables sénateurs, il y a quorum. En tant que greffier par intérim de votre comité, il est de mon devoir de vous informer de l'absence forcée du président et du vice-président, et de présider à l'élection d'un président suppléant.

Je suis prêt à recevoir une motion à cet effet.

[Français]

Le sénateur Dagenais : Je propose que le sénateur Plett préside la réunion.

[Traduction]

M. Palmer : L'honorable sénateur Dagenais propose que l'honorable sénateur Plett soit président du comité. Consentez-vous, honorables sénateurs, à adopter cette motion?

Des voix : D'accord.

M. Palmer : Je déclare la motion adoptée.

Le sénateur Donald Neil Plett (président suppléant) occupe le fauteuil.

Le président suppléant : Je vous souhaite tous la bienvenue à la présente réunion du Comité sénatorial permanent de l'agriculture et des forêts. Je suis Don Plett, du Manitoba, et je serai votre président suppléant durant au moins une partie de la matinée. Je vais commencer par demander à tous les sénateurs de se présenter.

Le sénateur Moore : Wilfred Moore, de la Nouvelle-Écosse.

La sénatrice Merchant : Pana Merchant, de la Saskatchewan.

La sénatrice Beyak : Lynn Beyak, de l'Ontario.

Le sénateur Oh : Victor Oh, de l'Ontario.

[Français]

Le sénateur Dagenais : Sénateur Jean-Guy Dagenais, du Québec.

[Traduction]

Le sénateur McIntyre : Paul McIntyre, du Nouveau-Brunswick.

La sénatrice Unger : Betty Unger, de l'Alberta.

Le sénateur Ogilvie : Kelvin Ogilvie, de la Nouvelle-Écosse.

Le président suppléant : Aujourd'hui, le comité continuera son étude, commencée durant la dernière législature, sur les priorités pour le secteur agricole et agroalimentaire canadien en matière d'accès aux marchés internationaux.

Le secteur agricole et agroalimentaire canadien joue un rôle important dans l'économie du pays. En 2013, le secteur comptait pour un emploi sur huit au Canada, employant plus de 2,2 millions de personnes, et générait près de 6,7 p. 100 du produit intérieur brut du Canada. À l'échelle internationale, le secteur agricole et agroalimentaire canadien était responsable de 3,6 p. 100 des exportations mondiales de produits agroalimentaires en 2014. Toujours en 2014, le Canada arrivait au cinquième rang des principaux exportateurs de produits agroalimentaires à l'échelle mondiale.

Le Canada est partie à plusieurs accords de libre-échange. Actuellement, 11 accords de libre-échange sont en vigueur. L'Accord économique et commercial global Canada-Union européenne, le Partenariat transpacifique et l'Accord de libre-échange Canada-Ukraine ont été conclus, et des négociations relativement à huit autres accords sont en cours. Le gouvernement fédéral a entrepris des discussions préliminaires avec la Turquie, la Thaïlande, les Philippines et les États membres du Mercosur — l'Argentine, le Brésil, le Paraguay et l'Uruguay.

Comme premiers témoins, nous accueillons M. Robin Horel, président-directeur général du Conseil canadien des transformateurs d'œufs et de volailles, et Robert DeValk, directeur exécutif, et Ian Hesketh, vice-président, de l'Association canadienne des surtransformateurs de volailles.

Merci d'avoir accepté notre invitation à comparaître. J'invite maintenant les témoins à prendre la parole. Je vous demande de présenter des exposés précis qui vont droit au but. Je demande aussi aux sénateurs de faire de même pour leurs questions.

La parole est à vous.

Robin Horel, président-directeur général, Conseil canadien des transformateurs d'œufs et de volailles : Je vous remercie beaucoup de m'avoir invité.

Le Conseil canadien des transformateurs d'œufs et de volailles est une organisation professionnelle nationale représentant les transformateurs canadiens de poulets et de dindes, les couvoirs de poussins d'un jour à griller, de poussins et de dindonneaux pondeurs et les classificateurs et les transformateurs d'œufs. Créé il y a 66 ans, notre conseil compte des entreprises membres dans toutes les provinces du Canada.

En plus de représenter les intérêts de plus de 170 transformateurs de volailles, classificateurs et transformateurs d'œufs et couvoirs, nos membres incluent plus de 50 partenaires de l'industrie à l'échelle nationale et internationale, qui se sont joints à nous en tant que membres associés. Représentant certaines des plus importantes sociétés agroalimentaires au Canada, nos entreprises membres traitent plus de 90 p. 100 des poulets, dindes, œufs et œufs d'incubation au Canada. Cette activité économique génère plus de 5 milliards de dollars par année en ventes au détail. Pour y arriver, nos membres ont investi 1,5 milliard de dollars dans leurs usines et équipements et emploient directement plus de 20 000 travailleurs canadiens.

En ce qui a trait au système de gestion de l'offre de la volaille et des œufs, les membres du CCTOV respectent le système de gestion de l'offre pour les poulets, les dindes, les œufs et les œufs d'incubation de poulet à chair. Le CCTOV et ses membres appuient le système, et nous sommes « déterminés à bonifier la compétitivité à long terme de l'industrie de la volaille au Canada. Notre plus grande priorité est de moderniser le système de gestion de l'offre afin de nous assurer de l'appui constant des consommateurs, d'atténuer les risques chez les transformateurs et de mieux réagir aux pressions du marché et à l'environnement concurrentiel. » C'est tiré de notre plan stratégique.

Les exportations et les importations sont deux composantes très importantes du système de gestion de l'offre pour la volaille et les œufs au Canada. C'est le même message que nous avons communiqué aux membres du comité en décembre 2014.

Pour ce qui est du poulet, on répond à la demande des Canadiens, qui préfèrent les poitrines et les ailes, en important des pièces supplémentaires pour compléter la production canadienne assujettie aux limites du contingent. De plus, les programmes d'exportation dans le secteur de la volaille permettent d'exporter les cuisses et les pilons excédentaires.

Pour ce qui est de la dinde, nous constatons des préférences similaires chez les consommateurs. En outre, plus de la moitié du marché de la dinde consiste en des produits transformés. La grande majorité de ces produits contiennent de la viande de poitrine. Toujours au sujet de la dinde, presque toutes nos importations sont de la viande de poitrine, tandis que la majeure partie de nos exportations sont des pièces résiduelles, c'est-à-dire des pilons, des ailes, des queues, des carcasses et ainsi de suite.

Quant aux œufs, nos importations servent principalement à assurer l'équilibre au sein du marché durant les périodes d'accroissement de la demande ou de production inférieure. Nous sommes des importateurs nets d'œufs en coquille et nous sommes à la fois importateurs et exportateurs d'ovoproduits transformés.

Passons aux œufs d'incubation de poulet à chair. Comme c'est le cas pour les œufs de table, nous utilisons nos importations pour assurer l'équilibre sur le marché durant les périodes de demande nationale accrue ou de production nationale inférieure. Nos engagements à l'échelle internationale en matière d'œufs d'incubation de poulet à chair font en sorte que nos importations répondent à environ 20 p. 100 de la demande nationale, ce qui fait de nous un important importateur net.

De plus, parmi ses membres, le CCTOV compte quelques entreprises génétiques qui se spécialisent en reproduction primaire. Dans le secteur de la dinde et de la ponte, ces entreprises approvisionnent le marché intérieur, mais elles exportent aussi des œufs ou des poussins ou des dindonneaux d'un jour vers un certain nombre de pays. Pour ces entreprises, les exportations sont une partie primordiale de leurs activités et sont cruciales. Elles ne pourraient pas mener leurs activités au Canada sans ces exportations.

Les principaux points à retenir de ces aperçus de haut niveau des importations et des exportations de la production des entreprises membres du CCTOV sont les suivants : premièrement, même si nous sommes un importateur net dans nos secteurs — sauf dans le cas de la dinde, où nous sommes un exportateur net sur le plan de la quantité, mais un importateur net du point de vue de la valeur, et des œufs transformés, où nous sommes un exportateur net, même si nous sommes globalement un importateur net d'œufs — les exportations sont importantes pour les secteurs en général et les entreprises membres du CCTOV en particulier.

Ensuite, les exportations et les importations sont deux composantes cruciales des systèmes de gestion de l'offre touchant la volaille et les œufs. Ces systèmes sont utilisés pour assurer l'équilibre du marché national en satisfaisant aux préférences des consommateurs canadiens et en compensant les périodes d'accroissement de la demande ou de réduction de la production.

Les exportations de certains produits, comme les œufs ou les oisillons d'un jour des entreprises génétiques ou des ovoproduits transformés de certains de nos transformateurs d'œufs sont non pas des produits résiduels, mais des produits à valeur ajoutée importants.

Ce qui précède était en fait une vue d'ensemble concise de ce que j'avais mentionné en décembre 2014, mais il y a eu un certain nombre de nouveautés dans le secteur de la volaille et des œufs canadien depuis notre dernière comparution devant le comité. Aujourd'hui, je veux mettre l'accent sur la signature du Partenariat transpacifique, puisqu'il s'agit probablement de l'événement le plus important des 14 derniers mois.

Au Canada, les transformateurs de poulets, de dindes et d'œufs, les classificateurs d'œufs et les couvoirs seront touchés par l'accès supplémentaire au marché accordé dans cet accord s'il est adopté par le Canada. Malgré tout, le CCTOV reconnaît l'importance de cet accord pour l'économie canadienne générale. Le CCTOV a assisté aux discussions commerciales du PTP en fin de processus et a apprécié le soutien du gouvernement canadien et des négociateurs pour conclure les négociations. Le processus fournira des précisions sur l'avenir de la gestion de l'offre.

Depuis, nous avons rencontré des représentants du gouvernement pour discuter de mesures d'atténuation sous la forme de contrôles à la frontière et de programmes de soutien aux transformateurs, qui ont été annoncés parallèlement aux détails sur l'accord du PTP. Ces deux types de mesures sont très importantes pour l'industrie canadienne et sont cruciales pour les membres du CCTOV.

En ce qui concerne les mesures d'atténuation, au moment d'annoncer l'accord du PTP, le gouvernement s'est engagé à intensifier « les mesures anticontournement qui renforceront ses contrôles frontaliers. Ces mesures consisteront, entre autres, à exiger la certification de la volaille de réforme, à empêcher les importateurs de contourner les contingents d'importation en ajoutant des sachets de sauce aux produits de poulet et à exclure les produits sous gestion de l'offre du Programme d'exonération des droits du gouvernement du Canada ». Le CCTOV et ses entreprises membres soutiennent ces trois « mesures d'atténuation » annoncées, et, durant de récentes réunions avec des représentants du gouvernement, nous avons souligné notre soutien et le besoin d'agir le plus rapidement possible.

De leur côté, les représentants du gouvernement ont reconnu que ces mesures pouvaient être mises en place avant l'adoption du PTP. Je sais que le comité et des témoins précédents ont déjà discuté de ces programmes, et donc, par souci de brièveté, je ne vais pas les décrire en détail, mais je serai heureux de répondre à vos questions à leur sujet.

Pour ce qui est des programmes liés à la transformation, en annonçant que le Canada avait accepté le PTP à Atlanta, le gouvernement canadien a mentionné certains programmes proposés supplémentaires pour les agriculteurs et les transformateurs dans les secteurs soumis à la gestion de l'offre.

Deux programmes ont été annoncés pour les transformateurs : le Programme de modernisation de la transformation, un programme de 450 millions de dollars, qui « offrira une aide aux transformateurs pour accroître leur compétitivité grâce à des investissements dans les immobilisations et à des capacités techniques et gestionnelles. »

Le deuxième programme est l'Initiative de développement des marchés, initiative de 15 millions de dollars pour « aider les industries sous gestion de l'offre à conserver, à développer et à élargir leurs parts de marché au Canada et à l'étranger ».

Le CCTOV a eu l'occasion de consulter des représentants du gouvernement concernant ces programmes proposés au niveau du personnel, et, récemment, des représentants d'AAC ont rencontré nos membres des secteurs du poulet, de la dinde et des œufs durant nos réunions sectorielles pour décrire l'objectif des programmes proposés et répondre à toutes les questions auxquelles ils pouvaient répondre à ce moment-là.

Nous croyons savoir que les programmes, s'ils sont adoptés, seront offerts aux transformateurs dans les secteurs des produits laitiers, du poulet, de la dinde et des œufs, et nous discutons actuellement avec Agriculture Canada au sujet de l'applicabilité de ces programmes aux couvoirs. Nous croyons aussi savoir que, si les programmes pour les producteurs sont fondés sur une indemnisation, les programmes pour les transformateurs sont fondés sur un rajustement.

Le CCTOV et ses membres sont ravis de l'annonce relative à ces programmes pour les transformateurs et, s'ils sont adoptés par le gouvernement actuel, nous demanderons au gouvernement d'envisager de les appliquer aux secteurs de la volaille et des œufs.

En conclusion, nos membres exploitent des chaînes de valeur assujetties à la gestion de l'offre. Ces systèmes ont des avantages, et nos membres les ont appuyés en reconnaissant que nous devons trouver des gains d'efficience lorsque cela est possible et tenter d'accroître la compétitivité. Les importations et les exportations sont importantes au maintien des systèmes et pour nos membres. Les transformateurs de volaille, les classificateurs et les transformateurs d'œufs et les couvoirs ne seront pas compétitifs à l'échelle internationale si on ouvre l'accès au marché canadien sans procéder à un réalignement structurel du système.

Le CCTOV et ses membres ont besoin que le gouvernement du Canada continue de promouvoir des accords commerciaux fondés sur des règles. Le CCTOV et ses membres ont dit officiellement qu'ils soutenaient l'accord du Partenariat transpacifique, si les mesures d'atténuation et les programmes à l'intention des transformateurs annoncés parallèlement aux détails sur le PTP par le gouvernement canadien sont mis en place le plus rapidement et le plus efficacement possible.

Je serai heureux de répondre à toutes vos questions au moment approprié.

Robert DeValk, directeur exécutif, Association canadienne des surtransformateurs de volailles : Mesdames et messieurs les sénateurs, bonjour. Je suis heureux d'être ici à nouveau pour représenter notre association et parler de cet important sujet. La semaine dernière, nous avons participé à une autre réunion à Ottawa dans le cadre de laquelle nous avons essayé de discuter de la façon dont nous pouvons, en tant qu'industrie alimentaire au Canada, faire comprendre au gouvernement l'importance de notre secteur, comparativement à certains autres secteurs qui attirent beaucoup d'attention, comme le secteur automobile, le bois d'œuvre et l'aérospatiale. Pour une raison quelconque, on oublie l'alimentation, et je suis heureux qu'ici, au Sénat, vous tentiez de mieux faire connaître le secteur. En outre, vous faites de l'excellent travail en ce qui concerne les priorités que nous devons établir. Par conséquent, nous sommes reconnaissants que vous nous donniez la possibilité d'être ici.

Je suis le directeur exécutif de l'ACSV, et je vais tenter de vous proposer certaines pistes de réflexion. Je suis accompagné d'Ian Hesketh, notre vice-président. Il est un véritable surtransformateur en ce sens qu'il travaille sur le terrain. J'ai tendance à m'occuper des questions administratives, mais il est sur le terrain chaque jour; il s'occupe d'exportations et d'importations et gère les problèmes et les enjeux au quotidien des intervenants du secteur. J'espère qu'il pourra répondre à certaines questions au sujet de ces activités, parce que, lorsqu'il s'agit de déterminer ce que nous devrions faire, ce que devraient être nos priorités et la façon dont les gouvernements pourraient améliorer le contexte de l'industrie alimentaire, ce sont souvent les personnes sur le terrain qui auront les réponses à ces questions.

L'ACSV est un peu différente du groupe de M. Horel. Elle a été créée en raison du système de gestion de l'offre. La gestion de l'offre, comme vous l'avez peut-être compris grâce à l'exposé que vous avez entendu, était associée à des défis liés à l'offre. Par conséquent, d'autres transformateurs ont besoin des produits des membres de M. Horel. Nous en avons besoin pour fabriquer des produits surtransformés, comme du poulet à la Kiev ou des repas au poulet. Il s'agit de produits qui sont transformés. En d'autres mots, les produits font l'objet d'une transformation plus poussée que le simple plumage ou une simple éviscération. Ce que nous faisons, c'est les désosser — et c'est une interprétation libérale de la notion de « surtransformation » —, les faire mariner, les préparer en portions et les transformer de façon à ce que les consommateurs puissent les rapporter à la maison et les consommer facilement sans avoir trop de travail supplémentaire à faire. C'est souvent là qu'une croissance est possible. Les consommateurs manquent de temps et ils aiment la facilité, et nous avons très certainement réagi à cette demande en tant qu'industrie en créant ces produits qui sont prêts à consommer et prêts à utiliser très rapidement.

Il y a un vaste éventail de produits du genre, et l'offre est de plus en plus variée. C'est la raison pour laquelle la situation devient intéressante du côté de l'offre : nous avons besoin de plus d'ailes que nous n'en produisons au Canada. C'est ici que nos tendances en matière d'échanges commerciaux sont très importantes.

Les surtransformateurs participent au processus d'établissement de l'offre au Canada dans le cadre du système de gestion de l'offre parce que nous siégeons au conseil de l'Office de commercialisation du poulet et nous en sommes des administrateurs. En fait, M. Hesketh est un administrateur du volet du poulet. Pour ce qui est de la dinde, nous sommes aussi un administrateur et nous siégeons au comité consultatif sur les œufs d'incubation. De plus, nous faisons aussi partie du comité consultatif du ministre d'Affaires mondiales Canada, et nous conseillons le ministre sur l'administration des importations.

Une des choses intéressantes au sujet du récent accord du PTP, c'est que le chapitre sur l'administration des importations a été rédigé par le Canada. Cette situation nous plaît beaucoup, parce que ce que nous faisons, c'est de proposer à l'échelle internationale l'adoption de règles qui, selon nous, ont très bien fonctionné au Canada. Puisque le Canada a des antécédents aussi uniques en matière d'administration des importations, les autres pays ont dit que, vu que nous avions l'expérience en la matière, nous devions rédiger ce chapitre.

Une bonne partie des choses que nous proposons par l'intermédiaire du comité consultatif ont maintenant été proposées dans le chapitre du PTP. Nous vous recommandons d'examiner le chapitre sur les limites du contingent, parce qu'il contient beaucoup de bonnes choses qui, selon le Canada, ont très bien fonctionné.

Cette situation nous encourage parce que, comme M. Horel l'a dit, nous aimons que l'approche internationale soit axée sur des règles. Pour ce qui est des limites du contingent, de plus en plus de pays adoptent ce genre de mesures. S'ils peuvent adopter les approches que nous utilisons, le monde sera plus convivial pour nous. C'est important.

Nous avons aussi besoin d'accès. M. Horel a mentionné que les échanges commerciaux sont importants pour notre secteur. En tant que surtransformateurs, souvent, nous ne pouvons pas rentabiliser notre équipement sans production supplémentaire, et cela n'est pas possible sur le marché canadien. Le marché canadien a tendance à être trop petit. Je suis sûr que vous avez entendu d'autres personnes vous le dire à l'occasion. Nous avons besoin des économies d'échelle supplémentaires que nous pouvons obtenir grâce aux marchés d'exportation et grâce au travail supplémentaire que nous pouvons faire, ici, au Canada. Les programmes d'importation et d'exportation sont très importants pour nous et nous permettent de réaliser des économies d'échelle.

Nous apprécions l'accès supplémentaire que nous offre le PTP. Comme vous le savez, le marché change rapidement — la question de la production sans antibiotique et d'autres préoccupations sont à l'ordre du jour. Puisque le marché change rapidement, nous avons parfois besoin d'importations supplémentaires pour réagir aux changements parmi les consommateurs, avant de renforcer la capacité de notre industrie à y répondre. Les importations peuvent être très utiles pour qui veut s'adapter aux marchés en évolution. Cet accès supplémentaire que le PTP nous fournira sur une période de 18 ans sera très important pour les surtransformateurs.

Vous remarquerez que le gouvernement, dans toute sa sagesse, a négocié un accès supplémentaire au moyen d'une disposition selon laquelle 10 p. 100 devraient être mis de côté en cas de pénurie. Cette mesure découle de l'expérience du gouvernement relativement au système mondial de quotas dans le cadre de l'accord du GATT, et les 10 p. 100 sont là pour gérer le type de choses dont je parle. Lorsqu'il y a une pénurie de quoi que ce soit au Canada, le ministre n'a pas à prendre la décision difficile d'accorder un permis d'importation supplémentaire, parce qu'il a accès à des quotas supplémentaires.

En tant que surtransformateurs, nous sommes très intéressés — c'est le moins qu'on puisse dire — à voir la façon dont on gérera cette situation, et, selon nous, c'est assurément quelque chose que notre secteur doit prendre en considération. Par conséquent, nous n'aimerions pas, par exemple — comme certains d'entre vous l'ont peut-être déjà entendu — que les producteurs, d'une certaine façon, déterminent où ces importations supplémentaires vont aller. Nous ne croyons pas que c'est une bonne façon de procéder. Ce devrait être l'industrie, comme c'est le cas aujourd'hui, qui réalise des importations à l'échelle mondiale. L'industrie devrait avoir accès à ces importations.

De plus, vous remarquerez aussi dans le PTP que la procédure administrative dit clairement que les producteurs ne devraient pas avoir accès aux quotas d'importation. C'est écrit noir sur blanc. C'est le Canada qui l'a proposé, alors je crois qu'il est important d'en tenir compte.

Pour ce qui est de l'accès, vous avez aussi entendu précédemment des témoins vous dire qu'il y a certains engagements parallèles au PTP selon lesquels le gouvernement améliorera diverses choses à la frontière. Nous sommes d'accord en partie avec certaines des choses prévues, mais nous sommes aussi fortement en désaccord avec quelques- unes des suggestions formulées. Je veux vous l'expliquer, parce que c'est capital.

Le président suppléant : Vous devez faire vite, parce que nous avons toute une liste de sénateurs qui veulent poser des questions.

M. DeValk : Bien sûr.

Les trois sujets dont vous avez entendu parler sont les mélanges définis de spécialité, les programmes de report des droits et la viande de volaille. Pour ce qui est de la viande de volaille, nous sommes d'accord. Il se passe des choses dans le domaine qu'il faut régler. De la viande de poulet à griller est peut-être importée comme étant de la viande de volaille, et nous avons travaillé en collaboration avec l'industrie américaine pour mettre en place un système d'enregistrement ou de vérification qui peut maintenant être utilisé et consulté par le gouvernement du Canada pour que l'on puisse s'assurer que c'est bien de la volaille qui entre. Selon nous, c'est la meilleure façon de gérer ce problème précis, et nous sommes tout à fait d'accord. Nous pourrons discuter plus longuement de la façon dont cela pourrait fonctionner.

Pour ce qui est des MDS, les mélanges définis de spécialité, il a été suggéré d'adopter l'approche de l'OMC plutôt que l'approche actuelle décrite au chapitre 16. Je vous ai exposé ces deux possibilités dans mes notes d'allocution. Vous pouvez voir la différence, mais il y a de très graves problèmes liés à la modification de la définition pour adopter celle de l'OMC. Nous ne croyons pas que cette modification sera conforme à nos obligations internationales à cet égard, et nous sommes totalement contre ce genre de changement. Nous croyons que cela réduira notre compétitivité.

Pour ce qui est du Programme d'exonération des droits, nous croyons que les programmes actuels — des programmes d'importation pour réexportation — sont offerts par Affaires mondiales —, et il y a l'exonération des droits par l'intermédiaire de l'ASFC et du ministère des Finances du Canada. Ce dernier élément fonctionne bien pour beaucoup de nos membres, et ils ont demandé au ministère de vérifier de quelle façon ce programme devrait être administré, parce que l'accusation formulée, c'est qu'il est possible, d'une manière ou d'une autre, de substituer un produit canadien au produit importé. Ce n'est pas le cas. Le ministère administre le programme d'une façon qui rend cela impossible.

Par conséquent, il y a beaucoup d'emplois en jeu. Si vous deviez, par exemple, recommander d'interdire le programme de report des droits aux marchandises assujetties à la gestion de l'offre, cela aurait un impact sur les emplois au niveau de la surtransformation, et cela nous préoccupe vraiment.

Merci.

Le président suppléant : Merci.

Nous allons commencer la période de questions. Je prie les sénateurs de poser des questions brèves et je demande aux témoins d'être le plus concis possible dans leurs réponses. Nous avons un peu de retard.

La sénatrice Unger : J'ai écouté vos exposés, et honnêtement, je suis encore plus confuse. Mes questions concernent le fait que nous semblons importer beaucoup de poulets. Si nous sommes un pays exportateur, alors pourquoi nos producteurs n'augmentent-ils pas leur production pour exporter davantage et importer moins de poulets?

En tant que question complémentaire, pouvez-vous me préciser le coût total de la gestion de l'offre pour le gouvernement? Il y a plein de chiffres ici sur les exportations totales et les importations, mais quel est le coût du système de gestion de l'offre pour le gouvernement?

M. Horel : Pour ce qui est de la première question sur les importations et les exportations et la raison pour laquelle nous ne pouvons pas exporter davantage et peut-être importer moins — je serai bref, comme on nous l'a suggéré —, la situation est liée au système de gestion de l'offre, cela et la nature de notre production. Par exemple, il est très difficile d'exporter des œufs en coquille ailleurs que sur de très courtes distances. De façon générale, les exportations dans le domaine des œufs sont des produits transformés. Nous importons des œufs en coquille des États-Unis. Même si, une fois l'accord en place, s'il est signé par tout le monde, les œufs pouvaient théoriquement venir de 12 pays différents, ils continueront de venir des États-Unis en raison de la proximité.

Les États-Unis sont un pays où la production est moins coûteuse en raison de certaines questions géographiques et météorologiques, mais aussi en raison du système de gestion de l'offre. Les conditions font en sorte que le prix à la ferme au Canada est plus élevé qu'aux États-Unis, au Brésil et dans d'autres pays. Ce n'est pas seulement le cas des œufs; il en va de même pour le poulet, la dinde et ainsi de suite.

Par conséquent, si nous devons utiliser un système de gestion de l'offre au Canada pour garantir aux producteurs un revenu raisonnable au fil du temps, sauf s'il y a des anomalies sur le marché, nous ne serons pas des producteurs à faible coût à l'échelle internationale. C'est le programme que nous soutenons depuis 40 ans au Canada. C'est le programme que mes membres soutiennent dans la mesure où il est aussi approprié pour les transformateurs.

Au bout du compte, nous exporterons des produits — et je veux souligner jusqu'à quel point c'est important — pour équilibrer le marché dans le cas de certains produits à valeur ajoutée que nous produisons. Nous nous améliorons dans ce domaine. Nous trouverons de nouveaux pays et de nouvelles occasions qui découlent de ces produits.

Quatre-vingts pour cent des produits transformés à base de poulet et de dinde sont produits par des membres du CCTOV, les grands intégrateurs. Nous sommes de grands producteurs de produits transformés aussi, et nous examinerons ces marchés. Si nous pouvons pénétrer dans certains d'entre eux, nous le ferons, mais, tant qu'il y aura un système de gestion de l'offre, nous serons probablement des importateurs nets de poulet et de dinde.

Pour ce qui est de votre deuxième question au sujet du coût total pour le gouvernement, cela dépendra de la façon dont vous voulez le mesurer ou le définir. Mes « confrères » assujettis à la gestion de l'offre vous diraient qu'il n'y a pas de coûts, que c'est le consommateur qui paye. C'est vrai que les consommateurs paient pour ces coûts s'ils achètent de la nourriture; il n'y a pas de subventions ni de coûts pour le gouvernement.

Je ne sais pas si j'ai répondu à votre question ou s'il y a autre chose.

La sénatrice Unger : Je n'aime pas la réponse selon laquelle ce sont les consommateurs qui assument davantage les coûts. Cela explique simplement pourquoi les gens qui vivent le long de la frontière vont chez nos voisins du sud pour acheter ce genre de choses.

M. Horel : Mais, pour être honnête, dans bon nombre d'autres administrations du monde, y compris aux États- Unis, les consommateurs en assument les coûts là-bas aussi. C'est simplement que les coûts viennent d'ailleurs. Par conséquent, si on utilise des aliments pour animaux subventionnés pour obtenir des produits de volaille, il y a un coût que quelqu'un paie. Si on offre un programme de repas à l'école, il y aura un coût pour le gouvernement. Quelqu'un paiera.

La sénatrice Unger : En Alberta, nous avons été confrontés à de nombreux défis. Les prix du pétrole ont chuté, et l'objectif du gouvernement n'est pas d'en faire plus pour nous, mais d'éliminer des obstacles au marché. Nous n'avons aucune protection du revenu, alors nous devons chercher de façon proactive à faire des gains d'efficience.

Croyez-vous que la ratification de l'accord du PTP sera une occasion pour les exploitations agricoles canadiennes de devenir plus efficientes et de réduire leurs coûts de production afin d'assurer la compétitivité du Canada?

M. Horel : Je ne veux pas monopoliser la discussion — je veux aussi laisser les représentants de l'ACSV parler —, mais je crois assurément que, bien sûr, ce sera une occasion d'accroître la production d'une façon ou d'une autre, peu importe la discussion que nous venons d'avoir au sujet des importations et des exportations.

Je crois que l'autre avantage, cependant, c'est que nous savons à quoi nous attendre pendant un certain temps — une décennie. J'ai entendu certaines personnes parler d'une génération. C'est peut-être un peu long, mais cela nous donne un certain niveau de certitude.

De temps en temps, au cours des dernières années — vous en avez été témoin — on accuse le système de gestion de l'offre d'être un obstacle à la négociation d'accords commerciaux et ce genre de choses. Que ce soit vrai ou non — personnellement, je ne le crois pas — on n'en entendra plus parler. Il ne devrait plus y avoir de problème à cet égard. Les accords sont signés, car les parties présument que le PTP sera signé. Il n'y a pas d'obstacles là. Cela devrait être bon pour tous les Canadiens, mais très certainement pour les Albertains.

M. DeValk : Une des choses qui sont intéressantes et dont on ne parle pas beaucoup relativement au PTP, c'est qu'il semble que le secteur de la volaille canadien aura accès au marché mexicain. Actuellement, le marché mexicain ne nous est pas accessible parce que nous n'avons pas négocié de tarifs dégressifs ni de réductions tarifaires au moment de la signature de l'ALENA en 1995. Le Canada n'y a pas touché. Le marché mexicain a été une excellente occasion de croissance pour le secteur de la volaille américain.

Grâce au PTP, il semble que le Mexique nous sera totalement ouvert, et ce pays veut commercer avec nous aussi. Cela pourrait nous donner accès à un marché aussi gros que le Canada, voire plus grand, pour notre industrie de la volaille. Très certainement, en tant que surtransformateurs, nous demandons au gouvernement de bien examiner cette question et de s'assurer que c'est bel et bien le cas et d'éliminer tous obstacles non commerciaux restants afin que nous puissions avoir accès à ce marché. Cela signifie que nous pourrions doubler la production de dindes au Canada. C'est une possibilité. Nous devrions nous pencher sur cette question et ne pas détourner le regard.

Le sénateur Oh : Croyez-vous que la grande distance entre le Canada et certains pays signataires du PTP limite les possibilités d'exportation de produits frais vers ces pays? Les principales exportations dans les marchés asiatiques sont des produits surgelés à faible valeur ajoutée. Croyez-vous que l'éloignement de cette région est un obstacle à l'exportation de produits canadiens à valeur ajoutée? Et de quelle façon vos secteurs relèveront-ils ce défi et bénéficieront-ils des marchés du PTP?

M. Horel : La distance est certainement un problème pour ce qui est des produits frais. Je viens de mentionner les œufs en coquille parce que je crois que c'est un exemple évident, mais la distance est aussi problématique pour le poulet frais et la dinde fraîche. La distance et les produits frais ne font pas bon ménage.

Pour ce qui est de votre question sur les produits à faible valeur ajoutée et votre question complémentaire sur la façon dont nous pouvons surmonter ce défi, dans le domaine des produits surtransformés, la distance est de moins en moins un facteur pour les produits surtransformés de haute valeur. La composante du transport n'a pas à être un aussi gros problème dans l'équation finale. Si nous sommes innovateurs et si nous trouvons de bons créneaux — et nous avons une excellente réputation à l'échelle internationale sur le plan de la qualité — il n'y a aucune raison, à part les coûts de base, dont j'ai discuté avec la sénatrice Unger, pour laquelle nous ne pouvons pas exporter davantage de produits à valeur ajoutée, et nous le ferons. Je dirais que la distance est moins problématique pour les projets à valeur ajoutée que pour les produits frais. Pour les produits frais, le problème est vraiment évident.

[Français]

Le sénateur Dagenais : Je remercie nos invités d'avoir accepté notre invitation. Revenons au Partenariat transpacifique. Cet accord ouvrira des débouchés supplémentaires au marché canadien. Il permettra aussi de donner aux pays membres accès à nos produits. Monsieur Horel, votre secteur a-t-il prévu de mettre en place des mesures pour favoriser l'accès au marché transpacifique? Je présume que cela vous permettra d'augmenter votre production?

[Traduction]

M. Horel : Nous attendons avec impatience la signature et les nouvelles occasions de vente de nos produits. Tout dépendra des produits, dans une certaine mesure.

Pour le poulet, franchement, je crois que, si les trois mesures d'atténuation que le gouvernement a promis de mettre en place sont appliquées, il y a plus de gains possibles liés à ces trois mesures sur le marché canadien que je n'en vois à court terme en ce qui a trait au potentiel d'augmentation des exportations. Je crois que cela aura pour effet de baliser le marché national et de compenser très avantageusement l'accès supplémentaire que nous allons consentir. Il y a plus de valeur là.

Pour ce qui est des ovoproduits, il pourrait y avoir de nouvelles occasions d'exportation de produits surtransformés. Nous n'allons pas exporter d'œufs en coquille, nous allons continuer à en importer.

Donc, vous voyez, monsieur le sénateur Dagenais, tout dépend du produit.

Le président suppléant : Je veux simplement demander à M. DeValk s'il a quelque chose à ajouter.

M. DeValk : Comme on l'a déjà dit, nous faisons déjà beaucoup d'échanges commerciaux à l'échelle internationale relativement à certains produits. En fait, le Canada importe de la viande cuite de Thaïlande régulièrement à l'intention des surtransformateurs. Il y a beaucoup d'exemples dans le monde entier qui montrent que le secteur de la volaille peut s'adonner à des échanges commerciaux internationaux et surmonter certains des problèmes liés à la distance mentionnés par le sénateur Oh.

Le Canada n'est pas différent. Le Canada a un avantage concurrentiel dans le secteur des céréales. Il est évident que nous sommes l'un des rares pays à produire plus de nourriture qu'il n'en consomme. C'est le cas de la volaille et des œufs. Nous en produisons plus que nous en consommons. Nous devons tirer profit de cet état des choses. Le PTP nous donne l'occasion de le faire.

La rapidité avec laquelle nous pourrons accroître notre production dépendra beaucoup de ma capacité et de celle de Robin de montrer — par l'intermédiaire de nos associations — que nous sommes convaincus que les marchés auxquels nous aurons accès à l'échelle internationale, que ce soit au Mexique ou ailleurs, sont des marchés sur lesquels nous pouvons compter afin que, lorsque nous augmentons notre production au Canada, nous ne soyons pas en butte aux mêmes problèmes que les industries porcines et bovines. Souvent, on constate que l'augmentation de la production est suivie d'une diminution en raison d'un événement qui survient sur le marché international. Il faudra convaincre le secteur soumis à la gestion de l'offre que les débouchés sont bien réels et durables. Je crois que le PTP jette les bases de ce processus.

[Français]

Le sénateur Dagenais : Dans le cadre des témoignages que nous avons entendus la semaine dernière, certains producteurs de poulet ont souligné qu'il y avait un excédent d'importation de volaille de réforme en provenance des États-Unis, ce qui a un impact sur leur marché. J'aimerais entendre vos commentaires sur cette situation, parce qu'il semble que cela influe sur notre marché. Le marché américain, pour sa part, est très agressif, et il excède parfois les exportations.

[Traduction]

M. DeValk : Merci de poser la question. C'est quelque chose qui trotte dans la tête de bien des gens.

Le premier point, c'est qu'au Canada, puisque la volaille de réforme ne figurait pas sur la liste des marchandises d'importation contrôlées, ce produit était déjà échangé librement. En tant que surtransformateurs, nous avons acquis une expertise sur la façon d'utiliser la volaille pour produire des produits à base de poulet à faible coût pour les Canadiens. Nous ne pouvions pas le faire avec de la volaille régulière, mais, puisque cette volaille de réforme coûte moins cher, nous avons pu mettre au point beaucoup de produits comme des croquettes et des soupes. Nous sommes devenus des experts à l'échelle internationale. Nous avons acquis une telle maîtrise que nous exportons maintenant des produits de volaille dans 34 pays différents. Le Canada est le seul pays où la consommation de volaille par habitant augmente. La viande de volaille est une composante très importante et essentielle de l'offre au Canada.

Certaines personnes ont utilisé la situation de la volaille de réforme à leur avantage en important de la viande de poulet à chair et en la faisant passer pour de la volaille de réforme. Nous croyons fermement que c'est tout à fait inadmissible, et cela nuit à notre industrie. Cette situation a été réglée, et il y a eu certaines enquêtes. Nous croyons savoir que la GRC s'est penchée sur divers aspects de cette question. Nous n'avons pas beaucoup de détails parce que le gouvernement n'en parle pas.

L'année dernière, le marché nous a été très favorable. Nous avons produit plus de poulets que jamais et à un prix plus élevé que dans le passé. Nous croyons que la situation a été un peu atténuée — il y a eu des réductions en raison de cette activité. Malgré tout, nous croyons que c'est encore le cas.

Nous avons communiqué avec les États-Unis et avons mis en place un système de surveillance sous la forme d'une méthode en vertu de laquelle le département américain de l'agriculture a travaillé en collaboration avec notre ministère et a dit : « Nous allons mettre au point pour vous un système de vérification de la volaille afin que vous soyez convaincus que, lorsque la cargaison arrive à la frontière, c'est bien de la volaille ». C'est un service auquel nous avons accès volontairement, ce qui fait en sorte que nous pouvons, en tant qu'acheteurs, demander une attestation du système de vérification automatisé et la présenter à la frontière.

Nous pouvons demander à notre gouvernement de mettre en place un type d'approche semblable au programme NEXUS en vertu de laquelle nous pouvons dire : « Si vous présentez une cargaison de volailles à la frontière et que vous avez ce certificat des États-Unis qui prouve qu'il s'agit bel et bien de volailles des États-Unis, alors nous sommes convaincus que tout est beau et nous accepterons la cargaison. Si vous n'avez pas de certificat, attendez : nous devons retenir le chargement une minute parce que nous avons besoin de plus d'information. » Nous pourrions utiliser l'approche des Producteurs de poulet du Canada qui font des tests d'ADN; il s'agit, selon moi, d'une option viable.

Le président suppléant : Je suis désolé, mais nous manquons de temps. Il reste trois sénateurs qui veulent poser des questions, et nous avons un autre groupe de témoins par la suite. Nous devons poursuivre.

Le sénateur McIntyre : Merci, messieurs, de nous avoir présenté vos exposés.

Monsieur Horel, j'attire votre attention à la page 4 de votre mémoire, où vous abordez la question des programmes de transformation. Comme vous l'avez indiqué, si l'accord du PTP est ratifié, les transformateurs recevront 450 millions de dollars sur sept ans dans le cadre du Programme de modernisation de la transformation pour les aider à accroître leur compétitivité.

D'après ce que j'ai compris de votre exposé, ce type de programme est justifié. Croyez-vous que le financement est suffisant? Et à part les propositions fédérales d'aide pour le secteur de la gestion de l'offre, quel autre type d'aide aimeriez-vous recevoir?

M. Horel : Nous sommes très heureux, évidemment, de l'annonce liée au Programme de modernisation de la transformation. Nous étions aussi très heureux que des représentants participent la semaine dernière à nos réunions pour en parler à nos membres. Il y a beaucoup d'excitation dans les coulisses. Nos membres ont des projets très intéressants qui, non seulement aideront à accroître l'efficience et la production, mais, en plus, assureront le bien-être des animaux et dissiperont d'autres préoccupations, ce qui nous permettra de demeurer à l'avant-plan.

Est-ce que cela suffit? Il est vraiment difficile de répondre à cette question. Je crois que cela suffira. Il s'agit d'une œuvre généreuse, dans la mesure où nous nous assurons que tous les secteurs obtiennent leur part. Par exemple, il ne faut pas tout donner au secteur des produits laitiers, car il faut aussi en distribuer pour les autres marchandises.

Je crois que cela répond à votre question.

M. DeValk : J'ai quelque chose à ajouter, rapidement. L'un des défis, dans notre secteur, tient au fait que les membres de notre industrie de la surtransformation ne sont pas tous en mesure de fournir des produits cuits. Quelques- uns de nos membres n'ont toujours pas d'installations de cuisson. Une chose que nous pourrions faire, si nous avions accès à du capital, serait d'utiliser ce capital pour mettre en place des installations de cuisson. Ce serait très utile.

La sénatrice Beyak : Merci, messieurs. La plupart des questions complexes que je voulais poser ont trouvé réponse dans les exposés et dans les réponses données aux autres sénateurs.

J'ai maintenant une question purement pratique, à l'intention des nombreux spectateurs qui suivent les audiences de notre comité; elle concerne l'industrie des ailes de poulet. Pourriez-vous me dire si la situation est bonne ou mauvaise pour le Canada et en quoi? Cette industrie a pris tellement d'expansion, au cours des dernières années; avons-nous été en mesure d'en tirer profit?

M. Horel : C'est extraordinaire. Ça me donne beaucoup de cheveux gris. Je travaillais autrefois comme représentant pour Canada Packers, le prédécesseur de Maple Leaf Poultry, et je me souviens de l'époque où les ailes de poulet étaient le produit le moins cher de ma liste. Aujourd'hui, à certaines époques de l'année, les ailes de poulet se vendent encore plus cher sur le marché du gros que les poitrines de poulet désossées, ce qui me renverse. Voilà un exemple qui montre qu'une idée lancée quelque part — en l'occurrence il s'agit des ailes de poulet Buffalo — peut changer l'industrie. Les pépites de poulet avaient déjà changé l'industrie et, de la même façon, les ailes Buffalo transforment l'industrie.

Je sais que cela ne répond pas tout à fait à votre question, mais cela nous ramène à certaines des questions précédentes : si un jour un Canadien peut mettre au point la prochaine innovation, cet accord du Partenariat transpacifique procurera toutes les occasions possibles d'en tirer profit. Cela ne peut pas être mieux, c'est extraordinaire.

M. DeValk : Cela a été fantastique pour notre secteur de la surtransformation et notre secteur des services alimentaires, cela ne fait aucun doute.

Toutefois, c'est intéressant, car, quand on pense à cette histoire des ailes, on peut voir à quel point il serait très utile d'assurer l'équilibre, dans notre marché, entre les quotas d'importation et la production. Aux États-Unis, s'ils veulent davantage d'ailes, ils vont devoir mettre au point un tout nouveau volatile. Au Canada, étant donné que nous avons des contrôles en matière d'importation, nous pouvons nous contenter d'importer tout un chargement d'ailes et équilibrer le marché de cette façon. Nous n'avons pas restreint la demande des consommateurs pour les ailes, d'aucune façon, mais nous avons été capables de le faire de telle sorte que les prix de gros, au Canada, ont été plus élevés, tout en nous permettant de faire face à ce défi. Cela a été fantastique.

Le sénateur Moore : Merci aux témoins d'être venus ici.

L'un d'entre vous, messieurs, a parlé des débouchés d'aujourd'hui, au Mexique. Avons-nous la capacité de tirer parti de ce que vous considérez comme des débouchés accrus dans le domaine de l'importation?

M. DeValk : Comme je l'ai dit plus tôt, le Canada est un des pays du monde qui arrive à produire davantage d'aliments qu'il peut en consommer. C'est le cas pour le poulet, la dinde, les œufs et les produits laitiers. Nous pouvons produire davantage, ici, mais nous n'allons pas produire davantage uniquement pour répondre à une commande passée une semaine donnée. Nous avons plutôt tendance à ne produire davantage que si nous pouvons prévoir un marché durable.

Comme je l'ai dit, la question n'est pas : « Pouvons-nous le faire? » La réponse, c'est « Oui, nous le pouvons. » Nous avons la matière première, l'infrastructure, le savoir et la technologie. La question est la suivante : « Pouvons-nous avoir accès à un marché et à des marchés durables, comme le Mexique, puis mettre en place la capacité nécessaire pour élever ces poulets supplémentaires et les exporter? »

Le sénateur Moore : Vous devrez construire davantage d'installations pour répondre à cette demande.

M. DeValk : C'est juste, oui.

Le sénateur Moore : Monsieur Horel, avez-vous quelque chose à dire?

M. Horel : Brièvement, nous avons cette capacité. Nous avons beaucoup d'espace et beaucoup de ressources naturelles, même si nous devrons construire quelques installations; mais nous avons la capacité. Toutefois, nous devons faire preuve de réalisme. Ce sera l'occasion pour les entreprises membres de notre conseil de mettre tout en œuvre pour en profiter.

Le plus grand exportateur de dindes au Mexique, c'est, et de loin, les États-Unis. En fait, le Mexique est le plus grand consommateur de dinde des États-Unis, ce qui fait que le marché sera compétitif et sensible au prix. Nous devons faire preuve de réalisme dans ce dossier.

Le sénateur Moore : Dans les programmes de transformation, comme celui qui vise la modernisation et est associé à un budget de 450 millions de dollars, est-il dit quelque part, dans l'accord du PTP, que nous ne ferons pas l'objet d'une réclamation, au titre de l'ALENA, parce que le gouvernement subventionne ces installations améliorées de transformation avec cette enveloppe de 450 millions de dollars? Est-ce que c'est écrit, dans ce document?

M. Horel : Je n'ai pas cherché à savoir si c'était écrit dans le document. Je suppose, et le verbe « supposer » est mal choisi, que cette question a dû être abordée. Il s'agit d'un document commercial qui sera signé par 13 pays. Étant donné que l'ALENA inclut le Mexique et les États-Unis, qui sont partie à ce document commercial, je ne peux pas imaginer qu'il y aurait une contestation.

Le sénateur Moore : Nous pensions la même chose, au sujet d'autres produits, également. J'aimerais m'assurer que cela y est écrit.

M. Horel : Nous vérifierons.

M. DeValk : J'ai découvert un aspect intéressant, dans l'accord du PTP, où l'on dit que, pour recourir aux mécanismes de règlement des différends, il faut qu'un pays décide s'il s'appuiera sur l'ALENA ou sur l'accord du PTP. Il sera impossible de s'appuyer sur les deux documents ou d'utiliser un des documents contre l'autre. Je crois que la question a été abordée, d'une manière ou d'une autre.

Le sénateur Moore : Monsieur DeValk, je crois que vous avez dit que 10 p. 100 des quotas pouvaient être réservés pour les situations de pénurie. Vous avez ensuite dit que ce secteur — que vous représentez — plutôt que les producteurs devrait avoir accès à ce quota. Qui sont les producteurs? Qui sont ces gens?

M. DeValk : Les producteurs sont les agriculteurs, et, en ce qui concerne la gestion de l'offre, il s'agirait des organismes nationaux.

Le sénateur Moore : Vous êtes exclusivement des négociants? Je suis un peu perdu, sur la question des producteurs. Je pensais que certains parmi vous étaient également producteurs.

M. DeValk : Non. Au-delà de la ferme, nous nous appelons des intervenants.

Le sénateur Moore : Oui. Vous êtes l'organisme de mise en marché.

M. DeValk : Oui.

Le sénateur Moore : Donc, vous ne voulez pas que les agriculteurs aient un rôle à jouer, même si ce sont eux qui devront augmenter leur capacité de production. C'est ce qui me rend un peu confus.

M. Horel : Je crois que l'explication la plus simple de notre rôle dans la chaîne d'approvisionnement, est celle-ci : il y a les agriculteurs, ceux qui ont comparu devant vous il y a une semaine et demie — les éleveurs de poulets, les éleveurs de dindes, les producteurs d'œufs, et, en ce qui nous concerne, les producteurs des œufs d'incubation de poulet à chair —, c'est-à-dire les membres de mon conseil, et il y a ensuite les transformateurs primaires, qui achètent à la ferme les produits de ces agriculteurs pour en faire des produits frais et des produits surtransformés. Nous vendons une partie des produits frais aux membres de l'association de Robert, qui en font alors des produits surtransformés. Les transformateurs et les producteurs, au Canada, dans la gestion de l'offre, correspondent aux agriculteurs.

Je comprends la question; je participe aux réunions du Conseil international des volailles. Les producteurs, ailleurs dans le monde, sont des producteurs car ils ont tout intégré, de la ferme jusqu'aux installations de transformation. Mais, dans notre cas, les producteurs sont des agriculteurs, et le secteur de la transformation et de la surtransformation constitue le maillon suivant, dans cette chaîne.

Le président suppléant : J'ai été tellement sévère avec tout le monde qu'il nous reste deux ou trois minutes, alors nous pouvons laisser la sénatrice Unger poser une dernière question, dans la deuxième série.

La sénatrice Unger : Monsieur Horel, dans votre exposé, vous dites ceci :

... parmi ses membres, le CCTOV compte quelques entreprises génétiques qui se spécialisent en reproduction primaire. Dans le secteur de la dinde et de la ponte, ces entreprises approvisionnent le marché intérieur, mais elles exportent aussi des œufs ou des poussins ou des dindonneaux d'un jour vers un certain nombre de pays.

Pourriez-vous me dire ce que nous exportons exactement et quels pays achètent ces produits?

M. Horel : Merci de poser la question, madame la sénatrice.

Les entreprises de génétique primaire, dans notre secteur, comprennent par exemple Hybrid Turkeys, et Lowman, dans le secteur des œufs. Elles dominent la pyramide des entreprises génétiques, et leurs produits sont distribués en tant qu'œufs d'incubation, qui, une fois éclos, deviennent des dindons de reproduction, lesquels se reproduisent et donnent encore plus de dindons qui, eux, se retrouvent à la ferme. Il y a donc les industries de génétique primaire, puis les produits d'élevage-multiplication et, enfin, le produit qui nous est offert.

Les entreprises de génétique primaire exportent soit des œufs d'incubation, soit des poussins et des dindonneaux d'un jour. La différence entre un poussin et un dindonneau, c'est que l'un devient un poulet, l'autre, un dindon.

Ces entreprises exportent partout dans le monde, mais elles ont beaucoup d'installations. Elles en ont au Canada, mais aussi dans d'autres pays. Elles décideront quels pays vont exporter vers quels autres pays. Elles étalent leur risque. Elles ont des installations au Canada et ailleurs dans le monde, sur d'autres continents, de façon que, si une épidémie de grippe aviaire ou un autre problème de santé animale se présente, ou si des obstacles au commerce s'élèvent, elles ne seront pas complètement coupées du marché. Le marché d'exportation qu'elles choisiront, du point de vue du Canada, changera selon la situation et selon les problèmes de santé animale.

La sénatrice Unger : Il s'agit donc en quelque sorte de super-dindons?

M. Horel : Ce sont les arrière-arrière-arrière-grands-parents. Est-ce plus clair?

Le président suppléant : Monsieur Hesketh, désiriez-vous faire un dernier commentaire?

Ian Hesketh, vice-président, Association canadienne des surtransformateurs de volailles : Pour répondre à cette question, nous possédons également une industrie secondaire, dans la région de London. Nous sommes l'un des plus grands exportateurs mondiaux de dindonneaux d'un jour destinés à l'exploitation commerciale; Robert ne l'avait pas mentionné. Cette industrie exerce ses activités et essaie de prospérer dans un marché très compétitif, aux côtés de tous les pays qui, dans le monde, produisent des œufs destinés à l'exploitation commerciale. Nous utilisons non seulement le modèle de la génétique primaire, mais également le modèle de la multiplication, qui est très efficace, dans un environnement compétitif, en Ontario.

Le président suppléant : Messieurs, au nom du comité, je vous remercie sincèrement d'avoir pris le temps, ce matin, de venir ici et de présenter ces excellents exposés. Nous l'apprécions.

Nous allons maintenant entendre le prochain témoin, M. James Laws, directeur général du Conseil des viandes du Canada; puis, quelques minutes plus tard, Troy Warren, vice-président, optimisation viande rouge, des Aliments de consommation Maple Leaf. Il est présentement dans un taxi. Comme nous l'avons vu, les rues ne sont pas très belles, aujourd'hui, mais il devrait être ici sous peu.

Nous vous remercions d'avoir accepté notre invitation à comparaître aujourd'hui devant notre comité. Je vais demander à M. Laws de présenter son exposé. Avec un peu de chance, l'autre témoin, M. Warren, sera arrivé avant que vous ayez terminé. Cela ne vous oblige pas à continuer de parler jusqu'à son arrivée, mais, si nous devons improviser, nous le ferons.

[Français]

James Laws, directeur général, Conseil des viandes du Canada : Bonjour, tout le monde. Mon nom est James Laws. Je suis le directeur général du Conseil des viandes du Canada, dont le siège est ici, à Ottawa. Le Conseil des viandes du Canada est l'association nationale qui représente les abattoirs et les usines de transformation de viande agréés au fédéral. Regroupant 50 membres réguliers et 90 membres associés, le Conseil des viandes du Canada est le porte-parole de l'industrie de la viande au Canada depuis 1919.

[Traduction]

Merci de me donner la possibilité de faire connaître le point de vue de l'industrie de la viande au sujet de votre étude sur les priorités pour le secteur agricole et agroalimentaire canadien en matière d'accès aux marchés internationaux. L'industrie de la viande est, de loin, la plus grande des industries du secteur de la transformation agroalimentaire du Canada. Elle génère des ventes de 23,6 milliards de dollars et des exportations de 5,6 milliards de dollars, et elle procure 65 000 emplois en assurant le développement économique des collectivités urbaines et rurales de toutes les régions du Canada.

Il est absolument essentiel que le secteur du bétail et de la viande du Canada soit présent sur les marchés internationaux. La dure réalité, pour les producteurs de bétail de même que pour les conditionneurs et les transformateurs de viande, c'est que les industries du bœuf et du porc canadiens seraient décimées s'il n'y avait pas de marché d'exportation. Les exportations comptent pour plus de 50 p. 100 de la production de bœuf canadien et pour plus de 60 p. 100 de la production de porc canadien. En outre, le secteur du bétail et de la viande est un marché vital pour les producteurs de grains du Canada.

Les exportations de viande du Canada ont beaucoup augmenté au cours des 15 dernières années. Les exportations de bœuf sont passées de 100 000 tonnes en 1990 à près de 322 000 tonnes, en 2015, pour une valeur de 2,2 milliards de dollars. Les exportations de porc ont augmenté de 200 000 tonnes en 1990 pour passer à 1,17 million de tonnes, en 2015, pour une valeur de 3,2 milliards de dollars.

Il est évident que nous sommes partisans d'un marché international libre et ouvert. Nous saluons toutes les initiatives du gouvernement touchant la négociation d'accords de libre-échange.

Nos voisins du Sud demeurent notre plus important marché; en 2015, le Canada a exporté aux États-Unis pour 1,49 milliard de dollars de porc et pour 1,57 milliard de dollars de bœuf. Nous avons été emballés, il y a quatre ans, lorsque le Canada et les États-Unis ont annoncé la création du Conseil de coopération mixte en matière de réglementation et le lancement de l'initiative Par-delà la frontière, qui nous permettait de mieux harmoniser nos systèmes de réglementation et de stimuler le commerce et la compétitivité dans toute l'Amérique du Nord.

Toutefois, nous éprouvons toujours de la frustration, parce que le projet pilote de dédouanement des expéditions de viande vers les États-Unis, qui aurait dû commencer en septembre 2012, a été bloqué par les lobbyistes protectionnistes américains. En moyenne, il y a 77 chargements complets de camions qui traversent la frontière américaine tous les jours de l'année. Tous ces camions sont d'abord inspectés par les agents de sécurité à la frontière, comme tous les camions, mais après, ils doivent se rendre à l'un des centres d'inspection du département de l'Agriculture des États-Unis, qui n'en compte que 10 le long de la frontière canado-américaine, avant de se rendre à leur destination finale. Il faut beaucoup plus de temps et cela suppose des frais supplémentaires, imposés par les établissements d'inspection de l'USDA, ce qui fait en sorte que les produits canadiens sont inutilement détenus aux frontières américaines et, lorsque le produit ne peut être livré à temps, cela frustre nos clients américains.

Le Canada ne traite pas la viande importée des États-Unis de la même façon. Tous les camions contenant de la viande en provenance des États-Unis — et il y en a environ 50 par jour, en moyenne, tous les jours de l'année, qui traversent la frontière canadienne — sont d'abord inspectés par les agents frontaliers du Canada. À ce moment-là, on leur dit s'ils font partie des 10 p. 100 des camions qui doivent faire l'objet d'une inspection plus poussée. Cela se fait non pas à la frontière, mais dans l'un des 125 établissements agréés par l'Agence canadienne d'inspection des aliments, c'est-à-dire les établissements nationaux autorisés à le faire.

Nous espérons que le gouvernement du Canada et, en particulier, notre nouveau ministre de l'Agriculture et notre nouvelle ministre du Commerce international, seront beaucoup plus engagés et joueront un rôle de chef de file pour régler les divers problèmes liés aux obstacles techniques et aux écarts de réglementation qui font en sorte que le commerce de la viande avec les États-Unis n'est pas équitable. Il est temps que nos deux pays suivent les mêmes règles, tout comme le font l'Australie et la Nouvelle-Zélande, au chapitre de la viande.

Nous sommes très heureux que les négociations, en 2014, aient débouché sur la conclusion de l'Accord économique et commercial global Canada-Union européenne. Jusqu'ici, le bœuf et le porc canadiens avaient difficilement accès à l'Europe, et l'AECG ouvre de nouveaux débouchés importants aux transformateurs de viande du Canada. Lorsqu'il sera mis en œuvre en entier, l'accord permettra d'exporter vers l'Europe pour 1 milliard de dollars de viande de bœuf, de veau, de porc et de cheval.

Mais, ce qui revêt le plus d'importance, pour l'industrie de la viande, c'est l'accord auxiliaire touchant les mesures sanitaires. Ces mesures avaient pour but d'assurer que les systèmes d'inspection de la viande et les technologies de transformation de la viande du Canada et de l'Europe étaient considérés comme étant équivalents. Le Japon, les États- Unis, le Mexique, la Corée, l'Australie, la Nouvelle-Zélande, le Chili, la Colombie et des dizaines d'autres pays reconnaissent déjà que notre système d'inspection de la viande et nos processus de contrôle sanitaire et de contrôle des agents pathogènes sont sûrs et qu'ils sont fondés sur des données scientifiques solides.

Les Européens devraient faire la même chose. Nous sommes inquiets à l'idée que, malgré les nombreuses réunions que les représentants du gouvernement ont déjà tenues, la question de l'équivalence en matière de viande ne serait pas acceptée par les Européens. Nous avons besoin de cette équivalence pour avoir un accès commercial significatif en Europe, avant l'entrée en vigueur de cet accord.

Maintenant que le Canada a signé l'accord du Partenariat transpacifique, nous devons poursuivre sur cette lancée, le faire ratifier par le Parlement et le mettre en vigueur. L'accord du Partenariat transpacifique permettra à l'industrie de la viande du Canada de maintenir la parité au chapitre de l'accès aux marchés avec les autres signataires; il permettra au secteur du bétail et de la viande d'augmenter sa production en augmentant la rentabilité des agriculteurs canadiens. Il renforcera la compétitivité en matière d'exportations et de commerce international pour l'industrie de la viande en augmentant le nombre d'emplois et en favorisant la croissance économique du Canada.

Le PTP comprend 12 pays, et il représente un marché de près de 800 millions de consommateurs, pour un PIB combiné de 28,5 billions de dollars. Ces nations comptent déjà pour 40 p. 100 de la production économique mondiale, mais en outre, elles absorbent 77 p. 100 des exportations de viande du Canada.

On s'attend à ce que d'autres pays se joignent un jour au PTP. Les modalités de cette participation seront définies par les membres initiaux de ce partenariat, y compris le Canada. Donc, si, par exemple, la Corée du Sud voulait s'y joindre, le Canada pourrait insister pour qu'elle accélère la réduction des tarifs, par rapport au calendrier prévu dans l'Accord de libre-échange Canada-Corée, de façon que cette réduction corresponde à ce qui se fait selon l'accord de libre-échange Corée-États-Unis. Cela réglerait tout de suite un de nos grands problèmes, qui vient du fait que nous avons signé des années après les États-Unis un accord de libre-échange avec ce pays.

Cette entente donne aux participants au PTP, dont le Canada, un accès privilégié au marché du Japon, un des marchés les plus importants et les plus rentables pour les produits du porc, du bœuf et de la volaille, en assurant une véritable compétitivité avec les États-Unis, notre plus grand concurrent sur ce marché. Le Japon est le plus important importateur de porc du monde, et il arrive en outre au troisième rang pour ce qui est des importations de bœuf. L'an dernier, les exportations de produits de viande du Canada vers le Japon étaient évaluées à 1,1 milliard de dollars. Le Japon était le deuxième client étranger en importance après les États-Unis pour ce qui est du porc, et le quatrième marché d'exportation du bœuf, après les États-Unis, la Chine et le Mexique.

Si le Canada n'avait pas signé l'accord du PTP, les pertes d'accès compétitif au marché japonais critique auraient été dévastatrices pour les agriculteurs, les conditionneurs de viande, les travailleurs et toutes les collectivités rurales de toutes les régions du Canada, d'un océan à l'autre. Le Canada bénéficiera désormais d'importants avantages liés à l'accès aux marchés, car il pourra vendre au Japon, par rapport à d'autres exportateurs de porc qui ne participent pas au PTP, par exemple l'Union européenne et le Brésil.

Le Japon n'est pas le seul pays du PTP qui ait de l'importance pour le secteur canadien du bétail et de la viande. L'an dernier, les exportations de produits de viande du Canada vers la Malaisie, Singapour et le Vietnam ont atteint 2,2 millions, 8,5 millions et 1,7 million respectivement. Comme c'est le cas du Japon, on prévoit que les exportations de viande du Canada vers ces pays augmenteront également de façon notable après la mise en œuvre de l'accord de libre- échange du Partenariat transpacifique. Le Vietnam, qui compte plus de 90 millions d'habitants, a accepté de réduire progressivement ses tarifs touchant le bœuf, le porc et la volaille, pour les éliminer complètement sur une période de 2, de 9 et de 12 ans respectivement.

Je vais maintenant laisser la parole à mon collègue, qui est probablement très près d'arriver.

Le président suppléant : Merci beaucoup de cet exposé, monsieur Laws. Nous allons peut-être interrompre les questions pour donner quelques minutes à M. Warren lorsqu'il sera arrivé.

J'en profite pour présenter deux de nos collègues qui devaient présenter un exposé à une autre réunion au nom de notre comité, plus tôt ce matin; il s'agit de notre président, le sénateur Maltais, du Québec, et du vice-président, le sénateur Mercer, de la Nouvelle-Écosse. Ils sont donc arrivés, et nous en sommes heureux.

Nous allons commencer la série de questions en donnant la parole au vice-président du comité, le sénateur Mercer.

Le sénateur Mercer : Monsieur Laws, merci beaucoup d'être venu ici aujourd'hui; j'ai bien hâte d'entendre M. Warren, s'il peut se dépêtrer des problèmes de circulation et de taxi que connaît périodiquement la ville d'Ottawa.

Vous avez donné plus tôt des chiffres impressionnants. Vous parliez de milliards pour le porc, et j'ai dû demander à mon collègue si je vous avais bien compris, comme je le crois.

Pourriez-vous expliquer aux membres du comité pourquoi les exportations de porc ont connu une augmentation si soudaine?

M. Laws : Nous avons connu, ces 15 dernières années, une importante augmentation au chapitre des exportations de porc qui est le fruit d'efforts très concertés des intervenants de nombreuses régions du Canada. Pensons au Manitoba et à la Saskatchewan. Le Québec est un grand producteur de porc, l'Ontario également, et beaucoup d'installations ont été construites il y a 10 ou 12 ans. Ce sont là d'excellentes occasions pour le Canada. Nous avons construit les installations dans des régions isolées, pour les protéger des maladies. Il y a beaucoup de céréales au Canada, beaucoup d'aliments pour animaux. Le Canada jouit sans aucun doute d'un avantage concurrentiel au chapitre de l'élevage du porc et du bœuf, de plus, et nous disposons assurément de bonnes et solides possibilités de croissance accrue.

Le sénateur Mercer : Le risque est contenu dans une expression que vous venez juste d'employer : « les protéger des maladies », et je crois que nous en sommes tous conscients et nous sommes tous, de toute évidence, d'accord.

Un des problèmes auxquels les Canadiens font face, c'est qu'ils sont, à bien des égards, malheureusement honnêtes. Si nous nous reportons à la crise de l'ESB d'il y a quelques années, le signalement des cas nous a causé des problèmes inconnus jusque-là, en particulier pour les producteurs de bœuf ou les intervenants de la mise en marché du bœuf. Si je me souviens bien, à l'époque, le premier ministre Klein de l'Alberta, a dit cette phrase maintenant célèbre, mais qui aurait probablement donné de bons résultats si on l'avait appliquée : « Une tuerie, une tombe, puis taisez-vous. » Mais nous n'agissons pas ainsi, au Canada. Au Canada, nous nous conformons aux règles, même si c'est parfois à notre détriment.

Je suis vraiment content de voir que, comme bien d'autres, vous avez hâte que le PTP soit mis en œuvre et que vous y voyez l'occasion d'élargir nos marchés du bœuf et du porc, en particulier, mais je suis préoccupé. Êtes-vous convaincu, sans arrière-pensée, que nous sommes capables de maintenir les mêmes niveaux en ce qui concerne la sécurité et l'hygiène, la qualité du produit et la santé des animaux afin de respecter les normes internationales?

Nous savons que certains de nos consommateurs sont capricieux. Le meilleur des consommateurs va lui-même, parfois, quand ça l'arrange, devenir très préoccupé au sujet de la santé et de nos produits, étant donné que, dans bien des cas, nos produits sont également ses produits.

M. Laws : Merci de poser la question.

Oui, nous sommes convaincus de pouvoir gérer la situation, et l'une des raisons pour lesquelles nous comptons un si grand nombre de clients dans les autres pays, c'est que nous voulons prévoir le coup au cas où un pays fermerait sa frontière. Rappelez-vous, il y a quelques années : la Russie avait fermé ses frontières, au milieu de l'année 2014. Elle l'a fait pour des motifs politiques. Cette année-là, le marché aurait pu atteindre les 500 millions de dollars. Nous avons eu la très grande chance de pouvoir rediriger les nombreux conteneurs qui naviguaient toujours vers des ports européens. Je crois que l'on avait évalué que plus de 500 conteneurs de ces produits étaient bloqués quelque part en mer. Nous avons travaillé en étroite collaboration avec le gouvernement du Canada afin de leur trouver une nouvelle destination. Heureusement, le monde entier connaissait une forte demande pour le porc, à l'époque. C'est un aspect de la question : il faut s'assurer d'avoir de nombreux clients différents et d'avoir une clientèle diversifiée.

En ce qui concerne le contrôle des maladies, nous avons beaucoup appris. Nous avons beaucoup d'installations. En ce qui concerne le porc, en particulier, dans la plupart des cas une douche à l'arrivée et à une douche à la sortie sont obligatoires; ces installations appliquent donc de très bonnes mesures de contrôle des maladies.

Le sénateur Mercer : Au sein du PTP, quel pays sera notre principal compétiteur pour le marché du porc et du bœuf, mais du porc en particulier?

M. Laws : Pour le porc, notre principal compétiteur sera les États-Unis.

Le sénateur Mercer : Les États-Unis ont-ils la capacité de répondre à une augmentation importante de la demande?

M. Laws : Leurs capacités sont également très bonnes. Heureusement, à bien des égards, nous sommes certes des compétiteurs, mais nous travaillons en Amérique du Nord de bien des façons. Les animaux et la viande traversent librement les frontières, ce qui fait que nous pouvons travailler de concert avec eux pour ouvrir de nouveaux marchés.

En ce qui a trait aux marchés qui s'ouvriront grâce au PTP, le Vietnam pourrait être un immense marché. Le pays va abaisser considérablement ses tarifs, et c'est pourquoi je crois que le Canada et les États-Unis auront les coudées franches s'ils veulent approvisionner ces marchés en croissance.

Le sénateur Mercer : Nous parlons encore des exportations de bœuf et de porc, et cetera, mais nous ne parlons pas beaucoup de la transformation. Vous parlez de viande non transformée, je présume; ou est-ce que vous parlez de viande transformée? Je dis cela parce que la transformation de la viande permet d'offrir de nombreux emplois à l'extérieur des exploitations agricoles, et c'est là une bonne nouvelle pour les Canadiens qui vivent par exemple à Winnipeg, où il y a une industrie de la transformation.

M. Laws : Les ententes englobent en effet les viandes transformées, non pas seulement la viande intacte, la viande coupée. L'entente conclue avec l'Europe concerne les produits énumérés au chapitre 16, tous les produits transformés, qui seront exemptés des droits de douane. L'accord du Partenariat transpacifique donnera les mêmes possibilités.

[Français]

Le sénateur Dagenais : Dans le cadre de rencontres subséquentes à celles de notre comité, certains témoins ont précisé qu'il y avait une pénurie de main-d'œuvre qualifiée pour travailler dans les abattoirs. Avec le Partenariat transpacifique, vous dites qu'il y a une progression constante. Ce problème a-t-il été réglé, ou est-il toujours difficile de trouver une main-d'œuvre qualifiée pour les abattoirs canadiens?

M. Laws : C'est une bonne question, et mon collègue va en parler. Oui, c'est encore un défi pour l'industrie de la viande au Canada. On embauche 65 000 employés chaque année. Si vous visitez le site web du gouvernement consacré aux emplois, vous verrez que nous avons environ 1 000 postes à pourvoir dans les abattoirs et les usines de transformation partout au Canada, en particulier dans les abattoirs qui sont situés en régions rurales, par rapport à ceux qui se trouvent dans les grandes villes.

Alors, oui, c'est encore un défi. Le travail est difficile physiquement. Il se fait dans un environnement où il fait froid. Il n'est pas facile de trouver des personnes pour combler ces postes.

Le sénateur Dagenais : J'ai habité dans une région rurale, près d'un abattoir, où j'ai remarqué que plusieurs travailleurs venaient de l'étranger. Le gouvernement pourrait-il faire quelque chose? J'imagine que vous engagez aussi de la main-d'œuvre étrangère. Le gouvernement pourrait-il favoriser l'accès à cette main-d'œuvre, parce qu'elle est très difficile à trouver au Canada? On ne sait pas pourquoi, mais, souvent, il faut aller à l'extérieur pour trouver de la main- d'œuvre. Le gouvernement pourrait-il mettre en place des mesures pour faciliter l'entrée de ces travailleurs au pays?

M. Laws : Absolument. Nous avons exprimé notre déception face aux changements apportés au Programme des travailleurs étrangers temporaires. Auparavant, on pouvait faire travailler des ouvriers temporaires pour une période de deux ans. Ceux-ci pouvaient ensuite obtenir le statut d'immigrant au Canada ou retourner dans leur pays. Cette initiative a donné de bons résultats. Par la suite, le gouvernement a affirmé que bon nombre de jeunes étaient sans emploi et qu'il fallait attirer la main-d'œuvre parmi tous les Canadiens disponibles. Nous avons donné une présentation dans le cadre des séances du gouverneur général, lorsqu'il était question d'accueillir des réfugiés au Canada. Nous avons évoqué les possibilités d'emplois. À notre avis, la création d'emplois à temps plein et permanents est le meilleur moyen de favoriser l'intégration des réfugiés au Canada.

Le sénateur Dagenais : Espérons que cela s'améliorera.

M. Laws : On l'espère.

[Traduction]

Le président suppléant : J'aimerais poser une question supplémentaire, qui suit la question du sénateur Dagenais.

Au Manitoba, nous avons une grande entreprise de transformation canado-manitobaine appelée HyLife. La main- d'œuvre comprend beaucoup de gens des Philippines. J'imagine que cela est dû non pas seulement au fait que l'entreprise n'arrive pas à trouver des travailleurs canadiens. Ces travailleurs étrangers sont nombreux à posséder une certaine expertise. Pourriez-vous faire un commentaire?

M. Laws : Oui, c'est vrai. C'est un très bon exemple. HyLife est une excellente entreprise qui possède des exploitations agricoles et une usine de transformation. Elle possède même quelques exploitations agricoles en Chine, pays où elle exporte également sa viande. Vous avez raison de dire qu'elle fait venir des gens qualifiés. En même temps, l'industrie de la viande va offrir une formation en cours d'emploi de façon que les gens puissent gravir les échelons et, c'est à espérer, travailler assez longtemps pour l'entreprise.

Nous ne voulons vraiment pas de travailleurs étrangers temporaires; nous voulons des travailleurs permanents, des gens qui resteront et qui s'engageront dans cette carrière, car il ne s'agit pas d'un travail saisonnier. Ces installations sont en activité toute l'année.

Le président suppléant : L'entreprise a fait de l'excellent travail, et les gens qu'elle a fait venir ont en grande partie façonné la ville de Neepawa ainsi que nous la connaissons aujourd'hui.

Le sénateur McIntyre : Merci, monsieur Laws, de votre exposé.

Nous savons tous que, à partir du moment où l'accord du PTP sera ratifié, il pourrait se passer n'importe quoi, par exemple une fermeture des frontières ou une éclosion de maladie. S'il s'agit d'une éclosion de maladie, on pense tout de suite à ce qui s'est passé entre le Canada et la Corée en février 2015. Si nous nous souvenons bien, l'Accord de libre- échange Canada-Corée est entré en vigueur en janvier 2015. La Corée du Sud a suspendu ses importations de bœuf canadien en février, après la découverte d'un cas d'ESB. Elle a levé l'interdiction temporaire en décembre 2015.

À votre avis, dans quelle mesure les accords de libre-échange protègent-ils le maintien des échanges commerciaux advenant une éclosion de maladies? Et dans quelle mesure les produits agroalimentaires sont-ils vulnérables en cas de fermeture des frontières, malgré l'existence d'accords de libre-échange?

M. Laws : Ce sont là de très bonnes questions.

Nous estimons qu'un accord est nécessaire et que nous devons mettre en place un cadre assorti d'un calendrier de réduction des tarifs. Mais ce n'est pas tout; ces nouveaux accords vont souvent renvoyer à des normes internationales en matière de commerce, par le truchement du groupe international qui s'occupe de santé animale, de façon que les gens soient tous assujettis à un ensemble commun de règles internationales touchant la santé animale.

Dans le cas de la Corée, c'était particulièrement inhabituel, étant donné que les conditions imposées par la Corée sont beaucoup plus sévères que ne le prévoient les règles internationales en la matière. La Corée a été beaucoup plus loin qu'elle n'aurait dû, en réalité, dans ce dossier.

Voici ce que le Canada devrait faire. Le Canada est un pays relativement petit, au chapitre de l'activité mondiale, mais, s'il peut toujours s'adresser à des organismes internationaux, il pourra régler certains problèmes. Malheureusement, ces choses-là prennent du temps.

Pour en revenir à ce que je disais, nous devons disposer de nombreux marchés de façon à pouvoir rediriger nos produits; nous ne voulons pas devoir compter sur quelques clients seulement.

Le sénateur McIntyre : Ce qui s'est passé en Corée, si j'ai bien compris, c'était relativement mineur, il y avait une vache touchée par l'ESB. Mais les médias en ont fait une grosse affaire, et c'est ce qui a causé quelques problèmes au secteur canadien du bœuf.

M. Laws : Je m'en souviens. J'étais en Corée lorsque le ministre du Commerce international s'y est rendu avec une délégation pour célébrer l'entrée en vigueur de l'accord commercial. Quand je suis revenu au Canada, j'ai appris ce qui s'était passé en débarquant de l'avion.

Le sénateur Oh : Le sénateur McIntyre a posé la question que je voulais poser. Je crois que le marché visé par le PTP est immense et que les produits canadiens ont acquis une bonne réputation dans les pays de l'ANASE, de même qu'en Chine, en Corée et au Japon. Voilà une belle occasion dont on peut profiter pour exporter vers l'Asie.

M. Laws : Tout à fait. Lorsque mon collègue sera arrivé, il vous expliquera comment, à notre avis, le Canada devrait entamer des discussions sur le libre-échange avec la Chine. Dans le cas du bœuf, l'an dernier, la Chine était un marché important. L'Australie a désormais un accord avec la Chine, et nous devons pénétrer ce marché, car les débouchés sont considérables.

La sénatrice Unger : Monsieur Laws, merci des renseignements que vous nous avez donnés.

J'aimerais que vous nous parliez de l'Alberta. Je sais qu'il existait en Alberta une grande usine de transformation, qui a fini par quitter la province. Je ne sais pas si l'Alberta compte encore des installations de transformation. Je ne crois pas qu'il pourrait y avoir une pénurie de personnel, étant donné ce qui se passe du côté de notre ressource principale.

Vous avez parlé plus tôt des écarts au chapitre de la réglementation du Canada et des États-Unis. Est-ce que ces écarts vont bientôt être réglés? Le seront-ils jamais? Pourquoi le problème se présente-t-il constamment?

En dernier lieu, pourriez-vous me dire si l'étiquetage indiquant le pays d'origine a été complètement éliminé, de même que tous ses tentacules et, le cas échéant, si nous allons pouvoir aller de l'avant avec notre bœuf?

M. Laws : Merci de me poser ces questions.

Premièrement, oui, il y a de grandes installations de transformation en Alberta. Une entreprise appelée JBS, dont le siège social se trouve au Brésil, a acheté XL Foods, de Brooks, en Alberta, et elle fait véritablement du bon travail, elle a une très grande expertise internationale. Dans ces installations, il est possible de transformer 3 500 animaux par jour. Il y a d'autres installations de transformation du bœuf, au sud de Calgary, à High River, en Alberta; il s'agit encore une fois d'installations d'excellente qualité. Il y a également Olymel, une grande installation de transformation du porc à Red Deer. Maple Leaf possède une installation de transformation du porc à Lethbridge. Il y a aussi une plus petite installation de transformation du bœuf à Lacombe de même que d'autres installations de transformation de la viande agréées par le gouvernement fédéral ailleurs en Alberta. Oui, c'est une bonne nouvelle, nous avons toujours cette capacité.

En ce qui concerne notre réglementation et celle des États-Unis, nous avons vraiment été emballés lorsque le président Obama, puis le premier ministre Harper ont pris la même position et annoncé que les choses se feraient. Toutefois, nous n'avons pas encore trouvé l'impulsion nécessaire pour que l'uniformisation des règlements devienne une réalité. Nous ne devrions pas avoir à insister là-dessus.

Il y a eu deux ou trois occasions où il aurait été possible de le faire, par exemple lorsque le Canada a adopté certains règlements ou même dans le dossier de l'étiquetage nutritionnel. Nous nous sommes dit : « Excellent! Voilà une bonne occasion pour les pays de travailler de concert. » Mais nous avons encore besoin que quelqu'un de très haut placé au Canada fasse pression pour que les Américains agissent.

En ce qui concerne l'étiquetage indiquant le pays d'origine, oui, ils ont supprimé la disposition législative. Nous avons travaillé très fort pendant toutes ces années, et, lorsque cela s'est produit, c'est comme si rien ne s'était passé, mais, oui, cette règle n'est désormais plus en vigueur. Il n'est plus nécessaire pour les détaillants d'indiquer la provenance de la viande, le lieu de naissance de l'animal, le lieu où il a grandi et où il a été abattu. Cela ne se fait plus.

La sénatrice Unger : Est-ce que cela s'applique également à la viande transformée?

M. Laws : Pas dans le cas des viandes transformées, mais cette règle touchait la viande de porc et de bœuf, les volailles et les agneaux, vendus au détail aux États-Unis.

La sénatrice Unger : Merci.

Le président suppléant : M. Troy Warren vient d'arriver.

Nous savons, monsieur, que, ces derniers jours, la circulation était vraiment problématique. J'ai vu les files aux stations de taxis. Nous tenons compte des problèmes que vous avez dû surmonter ce matin. Nous vous remercions d'être venu.

M. Warren représente Les Aliments de consommation Maple Leaf.

Monsieur Warren, vous pouvez si vous le voulez prendre quatre ou cinq minutes pour présenter un bref exposé; nous reprendrons ensuite les questions, si cela vous convient.

Troy Warren, vice-président, optimisation viande rouge, Les Aliments de consommation Maple Leaf : Excellent. Merci. Veuillez accepter mes excuses. J'ai visité des secteurs d'Ottawa où je n'avais jamais mis les pieds auparavant, avec mon chauffeur de taxi, ce matin. Je crois qu'il a aggravé le problème, car il n'a pas suivi la voie d'accès normale vers la ville. Vous avez reçu beaucoup de neige, c'est certain, et les routes secondaires n'avaient pas encore été bien déneigées.

Merci de nous avoir permis, à Jim et à moi, de venir discuter avec vous aujourd'hui.

Je m'appelle Troy Warren. Je suis premier vice-président et trésorier du Conseil des viandes du Canada. Je suis aussi vice-président, optimisation viande rouge, pour Les Aliments de consommation Maple Leaf.

Maple Leaf, comme la plupart d'entre vous le savent, est la principale entreprise de viande de consommation emballée au Canada; son siège social est situé à Toronto, en Ontario. Nous sommes cotés en bourse, à la Bourse de Toronto. Nous fabriquons des aliments de grande qualité, délicieux, nutritifs et novateurs sous des marques reconnues comme Maple Leaf, Prime de Maple Leaf et Natural Selections Maple Leaf et sous des marques sœurs populaires, notamment Schneiders, Schneiders Country Naturals et Mina.

Nous avons 19 installations de transformation de la viande et 3 entrepôts frigorifiés au Canada. Nous exportons nos produits à base de protéines de haute qualité dans plus de 20 marchés mondiaux, entre autres les États-Unis et l'Asie.

Nous employons environ 12 000 Canadiens et, en 2014, nous avons exporté dans 24 pays pour environ 634 millions de dollars de porc et de viande transformée.

J'ai mis les chiffres à jour en date de 2015. Nos ventes internationales se seraient élevées à 670 millions de dollars, et, encore une fois, les produits ont été exportés dans 24 pays.

Nous appuyons sans réserve l'objectif du Conseil des viandes du Canada de donner à la viande canadienne un accès compétitif à tous les pays du monde. Nous sommes particulièrement ravis de voir le rapport publié le mois dernier par le Conseil canadien des affaires, qui concluait que la négociation d'un accord de libre-échange Canada-Chine augmenterait les investissements, stimulerait les exportations et créerait au Canada des emplois de grande valeur. La Chine compte 1,38 milliard d'habitants, sa classe moyenne est en croissance, tout comme la demande de viande de consommation.

Cette étude signale également que l'Australie, qui, comme le Canada, a une économie fondée sur les ressources, a entamé en 2005 des discussions au sujet du libre-échange et que cette entente a fini par entrer en vigueur à la fin de l'année dernière, le 20 décembre 2015. Cette entente permettra d'éliminer 95 p. 100 des tarifs de ces deux pays, au cours de la prochaine décennie, et on prévoit que l'activité économique accrue, en Australie, devrait représenter 18 milliards de dollars australiens.

Le Canada ne peut pas être laissé de côté, dans un marché d'exportation de produits agricoles clés qui est en croissance, comme la Chine. Toutefois, une nouvelle entente commerciale, même si elle nous donnait des avantages si nous étions les premiers, par exemple l'AECG ou l'accord de libre-échange avec la Chine, n'est qu'un élément parmi tant d'autres dans l'équation qui vise à nous donner un accord commercial durable et fructueux pour l'agriculture canadienne. Pour les entreprises, cela signifie des chaînes d'approvisionnement compétitives, y compris des usines modernes de calibre mondial, des produits et des services innovateurs, la disponibilité d'une main-d'œuvre qualifiée et semi-qualifiée, des institutions financières ciblant le monde entier, et ainsi de suite.

Pour le gouvernement, cela veut dire des institutions commerciales très compétentes qui travaillent en étroite collaboration avec les entités économiques et réglementaires nationales dont les décisions quotidiennes influent sur le potentiel du Canada au chapitre du commerce et des investissements. Cela veut dire une infrastructure moderne de transport et de télécommunications, une main-d'œuvre qui peut les utiliser en toute fiabilité, et cela veut dire aussi la promotion des marchés d'exportation et des programmes de financement qui équivalent au moins à ceux de nos compétiteurs.

L'éventualité d'une grave pénurie de bouchers et de découpeurs de viande dans notre industrie fait partie des plus grandes menaces pour l'avenir du secteur canadien du bétail et de la viande. Le premier choix des usines de transformation de la viande canadienne est d'embaucher des Canadiens, y compris les chômeurs, les jeunes, les nouveaux immigrants, les Autochtones et les réfugiés.

Les usines de transformation de la viande canadiennes effectuent un recrutement dynamique et persistant dans toutes les régions du pays. Nos entreprises membres versent des salaires plus élevés que nos homologues américains et offrent d'importants avantages sociaux négociés avec les syndicats, investissent considérablement dans la formation et offrent du soutien financier pour les déménagements.

Tous ces efforts ne sont toujours pas suffisants. Aujourd'hui, dans l'industrie de la viande du Canada, on dénombre plus de 1 000 postes à pourvoir. Jour après jour, le Guichet emplois du ministère de l'Emploi et du Développement social du Canada présente des pages et des pages d'employeurs à la recherche de bouchers et de découpeurs de viande. Au sein de notre organisation, un seul employeur pourrait rechercher jusqu'à 100, 200, voire 250 travailleurs que nous devons trouver afin de pourvoir les postes dans nos usines.

Je peux parler plus précisément du cas de notre exploitation à Brandon. Nous sommes actuellement à la recherche d'un nombre allant de 100 à environ 150 bouchers qualifiés.

Les emplois offerts dans les usines de transformation de la viande sont à temps plein, pas temporaires. Comme il n'y a pas suffisamment de bouchers et de découpeurs de viande au pays, les usines de transformation de la viande se privent d'occasions de production de produits rentables à valeur ajoutée, ce qui réduit notre volume d'exportations et entraîne une perte de rentabilité cruciale, de compétitivité et de durabilité commerciale. En conséquence, une moins grande quantité de bétail canadien est transformée au Canada, et des emplois, du bétail et de l'activité économique sont exportés à l'étranger, principalement aux États-Unis.

Il faut permettre à l'industrie canadienne de la viande, au besoin, de compléter les effectifs canadiens par des travailleurs étrangers. Nous croyons que le programme Entrée express mis en place par Citoyenneté et Immigration Canada le 1er janvier 2015, ne devrait pas être limité aux emplois hautement qualifiés, mais qu'il devrait s'étendre également aux emplois importants, comme ceux de bouchers et de découpeurs de viande afin que nous puissions pourvoir nos postes vacants.

Du point de vue de la durabilité, nos agriculteurs canadiens et l'industrie alimentaire sont bien placés pour répondre aux besoins de la population mondiale croissante. Nous sommes un pays exportateur d'aliments. Nous possédons une grande quantité de terres arables. Nous employons une technologie de pointe et appliquons des techniques agricoles d'échelle. Ces éléments sont nos meilleurs alliés dans la lutte contre les changements climatiques et nous procurent un avantage concurrentiel important. L'agriculture d'échelle, qui permet de convertir de façon efficiente les aliments pour animaux en protéines animales, est la voie à suivre pour nourrir davantage de gens tout en réduisant notre impact environnemental, mais nous devons nous améliorer, être plus intelligents et en faire plus.

À Maple Leaf, nous sommes déterminés à réduire notre empreinte environnementale de 50 p. 100 d'ici 2025. Nous croyons qu'il s'agit de l'un des plus ambitieux buts de toutes les entreprises alimentaires en Amérique du Nord. Il comporte trois volets où nous avons la plus grande incidence environnementale concrète : notre impact sur les changements climatiques, notre utilisation de l'eau et les déchets que nous générons.

Nous avons récemment procédé à des vérifications complètes de l'utilisation des services publics et de l'eau dans nos 13 installations, et le reste sera effectué cette année. Nous avons découvert — ce qui est courant lorsqu'on étudie la consommation d'énergie et d'eau — qu'il y avait des gains financiers et environnementaux concrets à réaliser grâce à l'augmentation de notre efficience et à la réduction des déchets que nous produisons. Ce qui est bon pour l'environnement est également bon pour les affaires.

Pour ce qui est de la compétitivité et de la rentabilité, nous continuons à être aux prises avec certains problèmes structurels. Le simple fait qu'il coûte encore plus cher de produire une livre de porc au Canada qu'aux États-Unis est révélateur. Les coûts liés à notre main-d'œuvre, à la construction de nos installations, à nos services publics et au traitement de nos eaux usées sont tous plus élevés. Les coûts de la réglementation à laquelle nous sommes soumis et, en raison de notre taille, nos frais de transport sont également plus élevés.

Nous travaillons avec une infrastructure vieillissante. Au cours des dernières années, moins de fermes ont été construites au Canada, et la plupart de nos fermes actuelles, surtout dans l'Ouest du Canada, devront bientôt être remplacées. En comparaison, un plus grand nombre de fermes ont probablement été construites dans les États du Minnesota et de l'Iowa au cours de la dernière année que dans l'Ouest du Canada au cours des cinq dernières années.

Même si notre exploitation de Brandon, au Manitoba, est une installation d'échelle à la fine pointe de la technologie, elle est actuellement sous-utilisée par rapport aux États-Unis. Il s'agit d'une conséquence de la diminution de l'approvisionnement en porc dans l'Ouest du Canada provoquée par une réglementation environnementale qui met notre industrie dans une position désavantageuse par rapport à nos concurrents américains. Nous devons nous mettre sur un pied d'égalité afin que toutes les parties des exploitations de notre industrie de la viande puissent croître et prospérer.

Toutefois, certains facteurs ont joué en notre faveur au cours des 12 derniers mois. Le dollar canadien, à son plus bas niveau depuis six ans, nous a fait vivre tout un revirement de situation. Nous espérons qu'aucune hausse n'est prévue pour bientôt, mais le gouverneur de la Banque du Canada laisse entendre que le dollar restera faible pour un certain temps. Comme notre industrie exporte plus de la moitié de sa production et que la majeure partie est vendue aux États-Unis, nous devrions continuer de profiter de la faiblesse du dollar canadien. Il s'agit d'un avantage important que Maple Leaf met à profit. Nous obtenons de nouveaux contrats aux États-Unis et recherchons activement de nouveaux débouchés.

Le Canada présente un avantage environnemental naturel qui réduit la maladie animale, ce qui, associé à un élevage avancé, propulse notre progrès en réduisant et en éliminant le recours aux antibiotiques. Encore une fois, il s'agit d'une autre occasion de croissance pour Maple Leaf. Nous travaillons en étroite collaboration avec nos partenaires producteurs et sommes à présent le premier producteur de porc élevé sans antibiotique en importance en Amérique du Nord. Il s'agit d'un domaine où notre pays peut acquérir un avantage concurrentiel.

Enfin, la mention « produits d'élevage canadiens à 100 p. 100 » est maintenant une preuve de qualité importante pour les menus canadiens. Nous nous réjouissons de la tendance relative à l'achat de produits cultivés au Canada et au rapatriement vers le Canada de porcs produits aux États-Unis et vendus au Canada. Nous disposons de la qualité, de la salubrité alimentaire, de l'environnement et des exigences réglementaires strictes nécessaires pour en faire un facteur distinctif solide.

Merci.

Le président suppléant : Merci, monsieur Warren. Comme je viens du Manitoba, je sais très bien ce que fait Maple Leaf dans notre province. Nous apprécions certainement la présence d'une excellente entreprise là-bas, tant à Brandon que dans les nombreuses fermes du sud-est du Manitoba, d'où je viens.

Nous allons maintenant poursuivre la période de questions.

Le sénateur Ogilvie : Monsieur Warren, dans votre dernier commentaire, vous avez touché le fondement de ma question. J'attendais que vous arriviez parce que je voulais vous poser ma question à ce sujet à tous les deux.

La réalité du monde d'aujourd'hui est que nous entrons dans une ère post-antibiotiques. L'OMS a déclaré qu'il s'agissait d'une pandémie mondiale en raison de l'inefficacité croissante des antibiotiques actuels pour ce qui est de traiter les infections bactériennes partout dans le monde. Aujourd'hui, nous avons beaucoup discuté de l'étape de la production primaire à la transformation, puis à la mise en marché. En conséquence, vous avez la plus grande incidence potentielle parmi toutes les organisations en ce qui a trait aux habitudes des producteurs primaires.

Je voudrais que vous nous en disiez plus sur l'exemple que vous avez donné, monsieur Warren, concernant l'industrie de la production porcine. Quels rôles envisagez-vous d'éliminer relativement à l'utilisation sans discernement et tous azimuts des antibiotiques dans la production primaire de la viande et afin de revenir à une utilisation exclusivement vétérinaire des antibiotiques? Je ne veux pas laisser entendre que les antibiotiques sont sans importance pour la santé des animaux, mais j'essaie de faire distinction entre l'utilisation nécessaire pour le traitement de problèmes de santé réels et une utilisation sans discernement qui, au fil du temps, a contribué à la situation dans laquelle nous nous trouvons aujourd'hui, en général. Pourriez-vous répondre?

M. Warren : Je peux parler précisément des exploitations de Maple Leaf. Nous avons éliminé l'utilisation des antibiotiques sous-thérapeutiques dans l'ensemble de nos exploitations. Il s'agit d'une chose que nous contrôlons grâce aux normes que nous établissons.

Avec l'industrie, nous nous sommes engagés à nous attaquer — je crois que c'est ce que nous disons — aux quatre catégories d'utilisation des antibiotiques du point de vue de leur importance pour les humains. De nos jours, l'industrie porcine utilise un antibiotique au niveau critique : la première catégorie. En tant qu'industrie, nous devons trouver une solution concernant la façon dont nous allons éliminer graduellement cette utilisation des antibiotiques dans notre production de porc.

Nous ne connaissons pas toutes les réponses, mais nous passons à l'utilisation sous-thérapeutique, et nous l'avons fait à l'interne. Nous allons étudier la possibilité de l'imposer en tant que norme à nos producteurs contractuels, que nous ne possédons et n'exploitons pas. Nous faisons une promotion dynamique de l'expansion du simple fait de ne pas utiliser d'antibiotique du tout. Les animaux finissent par tomber malades. Dans notre cas, leur bien-être l'emporte encore sur un programme visant à produire du porc sans antibiotique. Si un animal est malade, nous le retirons pour le traiter.

Comme je l'ai mentionné dans mes commentaires, au Canada nous jouissons de certains grands avantages en raison de la densité de nos animaux ainsi que de notre climat. En fait, le froid est avantageux, surtout dans l'Ouest du Canada, pour la production de ce type de porc. En tant qu'industrie, nous pouvons nous distinguer à l'échelle planétaire en tant que chef de file dans ce domaine.

Je dirais que nous ne connaissons pas toutes les réponses pour le moment, mais que nous nous engageons sur la bonne voie. Nous savons que nous devons prendre les devants face à ce problème et réduire de façon importante l'utilisation des antibiotiques dans les fermes.

Le président suppléant : Il nous reste encore quelques questions à poser et auxquelles répondre, alors faisons en sorte qu'elles restent courtes et précises.

[Français]

Le sénateur Maltais : J'aimerais parler brièvement de la Chine. Ce marché représente de nouveaux débouchés et une clientèle nombreuse. Le sénateur Oh et moi avons rencontré des exportateurs canadiens, entre autres la Canada Beef. Nous n'avons pas été impressionnés par leur présentation, parce qu'ils représentent un marché haut de gamme, soit les viandes préparées que l'on retrouve dans les épiceries fines. Ces viandes ne sont pas accessibles à tous. Ils se sont concentrés sur les produits haut de gamme, ce qui est un bon marché en soi.

En ce qui concerne le porc, monsieur Warren, si vous avez l'intention de percer le marché de la Chine, allez-vous vous concentrer sur les produits haut de gamme ou sur les viandes préparées qui sont accessibles à l'ensemble de la population chinoise?

[Traduction]

M. Warren : Les deux, probablement.

Comme dans toutes les parties du monde, les gens n'ont pas tous les moyens de se payer la même chose. Certes, en tant qu'entreprise, nous recherchons des marchés haut de gamme au pays, dans le domaine de notre porc frais et de nos viandes transformées. Puis, il y a tout de même un segment important de la population dont le budget est plus limité, alors nous produisons un type de porc plus générique.

Nous commençons à offrir sur le marché de la Chine notre porc élevé sans antibiotique. Il coûte plus cher, mais un segment de cette population est prêt à payer le prix. En Chine, il y a encore une clientèle importante qui est prête à ne payer qu'un prix de base pour le produit.

L'industrie a l'occasion de se démarquer en Chine parce que le Canada jouit d'une excellente réputation partout dans le monde en ce qui a trait à la propreté et à la salubrité ainsi qu'à une production de grande qualité. Sur le marché comme celui de la Chine, notre produit peut être vendu à un prix élevé — même seulement notre produit générique — en raison des normes canadiennes et de la confiance et de la foi des consommateurs à l'égard du porc canadien par rapport, dans certains cas, à leur produit national.

Le sénateur Maltais : Bonne chance.

La sénatrice Merchant : Je vais dire un mot sur la question de la Chine parce que le sénateur Oh et moi-même revenons tout juste de ce pays. Les Chinois mentionnent assez fréquemment le fait qu'ils ont conclu des accords commerciaux avec l'Australie et qu'ils font beaucoup d'affaires, et ils demandent pourquoi le Canada ne conclut pas ce genre d'accord. Qu'en pensez-vous? Est-ce important pour votre industrie?

M. Warren : Certainement. Cela constituera un avantage important pour nous. Actuellement, les deux marchés avec lesquels nous sommes en concurrence pour accéder à la Chine sont les États-Unis et l'Union européenne. Si nous devions conclure une entente et que nous avions l'avantage d'être les premiers arrivés, devant ces deux principales régions productrices de porc, cela aiderait grandement notre industrie en ce qui a trait à la création d'une valeur plus importante pour les principales usines de transformation, ce qui finirait par avoir des retombées sur les éleveurs. Ces accords auraient assurément une importance capitale pour nous, en tant qu'industrie.

La sénatrice Beyak : Merci, messieurs. Vos exposés étaient excellents.

Vous avez mentionné la frustration liée aux files d'attente à la frontière — je comprends très bien cela —, et on étudie ce problème depuis longtemps sans trouver de solutions. À qui avez-vous parlé? Et, dans son rapport, notre comité sénatorial peut-il faire quoi que ce soit pour vous aider?

Monsieur Warren, les produits préemballés Prime de Maple Leaf contiennent de la poitrine et de la dinde, mais, à l'échelon local, je me fais poser des questions quant à la raison pour laquelle ils ne contiennent pas de porc et de bœuf et si c'est seulement là où nous nous trouvons, entre Thunder Bay et Winnipeg, sur l'autoroute Transcanadienne, ou bien si vous n'en offrez pas encore? S'agit-il d'un bon produit d'exportation?

M. Laws : Je vais commencer.

Il est certain que nous parlons avec nos représentants canadiens à l'ambassade de Washington. Nous avons assisté à des réunions où des gens des hautes sphères du gouvernement ont présenté des plans de travail mixtes sur la collaboration réglementaire au-delà de la frontière. Ils connaissent nos préoccupations. Nous avons participé à l'émission Power & Politics de la CBC afin de débattre de la question avec nos homologues américains. Nous ne militons pas en faveur de l'absence d'inspections; nous voulons seulement qu'elles aient lieu au-delà de la frontière. Le plan s'appelle justement : « Par-delà la frontière ». C'est vraiment très frustrant.

M. Warren : Je me fais l'écho des commentaires de Jim. C'est très frustrant d'expédier du porc à notre plus important partenaire de libre-échange; il n'est plus facile d'envoyer des expéditions aux États-Unis. Les maisons d'inspection, plus particulièrement, semblent intensifier l'inspection de nos produits qui entrent dans ce pays, malgré que nos deux pays soient supposés travailler sur un pied d'égalité. Nous ne faisons pas de même pour leurs produits, et le fait que le bœuf et le porc que les Américains exportent au nord de la frontière ne soient pas assujettis aux mêmes inspections rigoureuses nous coûte cher en tant qu'industrie.

Pour ce qui est du porc Prime, nous avons tenté à quelques reprises de promouvoir la vente au détail de notre porc de marque Prime. Malheureusement, nous n'avons pas connu le même succès que dans le cas de notre volaille — le poulet et la dinde.

Dans la plupart des cas, nos exploitations appuient la marque de nos clients. Nous sommes le fournisseur de pratiquement tous les détaillants canadiens : Loblaws, Sobeys, Walmart maintenant, Federated Co-op, dans tout l'Ouest canadien, Safeway et des entreprises de ce genre. Dans l'ensemble, notre produit porte leur marque. Ils n'ont pas été aussi accueillants que nous l'aurions souhaité dans le cas de notre porc frais de marque Prime, mais nous comprenons.

Cette situation s'explique en partie par le fait que la catégorie du poulet est beaucoup plus grande au pays du point de vue des quantités consommées et qu'elle peut se permettre d'offrir plus de choix. Dans la plupart des cas, la consommation de porc est actuellement la plus petite des trois catégories du point de vue de la vente au détail. Ainsi, elle n'offre pas une importante sélection aux consommateurs.

Nous ne produisons aucun bœuf. Je pense que Cargill et, maintenant, JBS, ne m'appuieraient probablement pas si je voulais créer une marque pour leurs produits. Ils ont établi leur propre genre de programmes afin de créer leur marque, alors cela ne fonctionnerait pas. Cela dit, je vous suis reconnaissant de votre soutien.

Le sénateur Moore : Je vous remercie de votre présence, messieurs. Je veux revenir sur les questions posées par les sénatrices Beyak et Unger concernant notre relation avec les États-Unis.

Monsieur Laws, je pense que vous avez dit qu'il y a 10 points de contrôle pour les produits canadiens qui vont aux États-Unis, et 125 installations semblables au Canada pour recevoir leurs marchandises qui entrent au pays, est-ce exact?

M. Laws : C'est exact. En fait, un grand nombre d'établissements canadiens enregistrés à l'échelon fédéral — les installations de transformation — sont approuvés en tant que points d'inspection. Nous croyons que les Américains devraient faire exactement la même chose que nous.

Le sénateur Moore : En ce qui concerne l'étiquetage indiquant le pays d'origine et la loi américaine qui a été promulguée en décembre dernier dans le but de l'éliminer, nous avons rencontré, au cours d'une année antérieure, le secrétaire du président du comité de l'agriculture américain à la Chambre des représentants. Il nous a fait comprendre très clairement qu'aucune loi ne serait adoptée si le Canada n'avait pas dressé une liste de mesures de rétorsion. Les Américains le comprendraient et réagiraient. Ce genre de processus est-il envisagé dans votre situation actuelle?

M. Laws : C'est une bonne question.

Le sénateur Moore : Est-ce que cela vous nuirait ou vous avantagerait? Nous effectuons beaucoup d'échanges commerciaux, jour après jour. Alors, comment peut-on les obliger à prendre des mesures réciproques?

M. Laws : C'est une bonne question. Nous avons abordé le ministère des Affaires étrangères — maintenant, Affaires mondiales Canada — et avons posé exactement la même question aux responsables : ne pouvons-nous pas donner plus de mordant à l'Accord de libre-échange nord-américain et signaler le problème lié au fait que les Américains nous imposent ces contraintes supplémentaires et qu'ils ne devraient pas le faire? Nous n'avons pas encore reçu de réponse complète de la part du ministère à ce sujet.

Nous nous sommes même adressés aux Américains pour leur dire : « Vous faites face à des contraintes budgétaires absolument incroyables. Pourquoi ne voulez-vous pas faire passer l'inspection au-delà de la frontière et faire faire le travail par les inspecteurs qui se trouvent déjà dans vos autres installations de transformation de la viande qui reçoivent notre viande canadienne? » Mais leur syndicat est assez puissant.

Lors des réunions tenues à Washington, nous leur avons également proposé de faire comme nous le faisons à Ottawa et d'établir des mesures de précontrôle. Pourquoi ne pas intégrer un inspecteur de l'USDA dans les grandes installations comme celles de Brandon — nous allons payer pour cela — et demander à un inspecteur de l'USDA d'examiner la viande, ou bien pourquoi ne pas étudier la proposition faite par l'une de nos entreprises situées à Neepawa, au Manitoba? Compte tenu de la technologie dont nous disposons, si une entreprise accepte, pourquoi ne pas installer une caméra web? Nous allons vous donner accès à la caméra web. Vous pourrez nous surveiller en tout temps. Nous n'avons rien à cacher. Pourquoi ne faites-vous pas cela?

Nous essayons de repousser les frontières. Les Américains devraient se concentrer sur des aspects beaucoup plus importants que la réinspection de la viande dans la boîte d'un camion. C'est insensé.

Le sénateur Moore : Notre Groupe interparlementaire Canada-États-Unis a prévu d'effectuer une visite du Congrès en mars, à Washington, où nous allons frapper à la porte de gens qui, selon nous, peuvent améliorer notre relation. S'il y a des gens qui, selon vous, pourraient nous être utiles et à qui nous devrions nous adresser, vous devriez nous le faire savoir. Nous tenons habituellement une séance d'information à l'ambassade, puis nous nous mettons au travail pendant quelques jours. Cela a fonctionné dans le cas de l'étiquetage indiquant le pays d'origine. C'est vrai, et cela pourrait fonctionner dans ce cas-ci.

M. Laws : Merci beaucoup. Nous allons accepter votre offre.

Le président suppléant : Je vais demander au sénateur Mercer de formuler des commentaires de conclusion dans une seconde, mais je veux vous remercier personnellement de votre présence ce matin.

Monsieur Warren, je sais que vous avez eu beaucoup de difficultés, mais nous sommes heureux que vous ayez pu venir.

Chers sénateurs, merci beaucoup de votre collaboration.

Je vais céder la parole au sénateur Mercer.

Le sénateur Mercer : Monsieur Warren, la semaine prochaine, vous serez à Disneyland. Cette semaine, c'était le réseau de transport d'Ottawa. Vous pourriez peut-être effectuer un examen des deux, et peut-être que la Ville d'Ottawa devrait commercialiser la folie de son réseau de transport en tant que processus de divertissement.

La raison pour laquelle je voulais prendre la parole est que je veux proposer que, pour les deux prochaines séances — celles du mardi 23 février et du jeudi 25 février — le sénateur Plett conserve la présidence. Le sénateur Maltais et moi-même serons tous deux absents en raison d'autres activités parlementaires. Nous serons en déplacement.

Le sénateur Ogilvie : À Disneyland?

Le sénateur Mercer : Eh bien, en fait, il ne s'agit pas tout à fait de Disneyland, mais cela sera intéressant. Le sénateur Maltais et moi-même avons déjà accepté de tenir certaines discussions sur l'agriculture pendant notre absence.

Monsieur le président, si je pouvais proposer cette motion, cela faciliterait le bon fonctionnement du comité. Je suis revenu après la séance que nous avons tenue plus tôt afin de pouvoir surveiller le travail du sénateur Plett et de m'assurer qu'il était à la hauteur de la tâche, et je pense que nous pouvons nous entendre pour dire qu'il peut se débrouiller pour présider deux séances en notre nom.

Le président suppléant : D'accord?

Des voix : D'accord.

Le président suppléant : Merci à tous.

(La séance est levée.)

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