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AGFO - Comité permanent

Agriculture et forêts

 

Délibérations du Comité sénatorial permanent de
l'Agriculture et des forêts

Fascicule no 8 - Témoignages du 21 avril 2016


OTTAWA, le jeudi 21 avril 2016

Le Comité sénatorial permanent de l'agriculture et des forêts se réunit aujourd'hui, à 8 heures pour étudier les priorités pour le secteur agricole et agroalimentaire canadien en matière d'accès aux marchés internationaux.

Le sénateur Terry M. Mercer (vice-président) occupe le fauteuil.

[Traduction]

Le vice-président : Honorables sénateurs, je constate que nous avons le quorum. Je déclare la séance ouverte.

Je vous souhaite la bienvenue à cette séance du Comité sénatorial permanent de l'agriculture et des forêts. Je suis le sénateur Terry Mercer, de Nouvelle-Écosse, vice-président du comité. J'aimerais d'abord demander à mes collègues sénateurs de se présenter.

La sénatrice Beyak : Sénatrice Lynn Beyak, de l'Ontario.

La sénatrice Tardif : Claudette Tardif, de l'Alberta.

Le sénateur Oh : Sénateur Oh, de l'Ontario.

La sénatrice Unger : Sénatrice Unger, de l'Alberta.

Le sénateur Dagenais : Sénateur Jean-Guy Dagenais, du Québec.

Le sénateur Ogilvie : Kelvin Ogilvie, de Nouvelle-Écosse.

Le vice-président : Le comité poursuit aujourd'hui, son étude des priorités pour le secteur agricole et agroalimentaire canadien en matière d'accès aux marchés internationaux.

Le secteur agricole et agroalimentaire joue un rôle important dans l'économie canadienne. En 2013, un travailleur sur huit au pays (soit plus de 2,2 millions de personnes) était employé dans ce secteur qui a d'ailleurs contribué à près de 6,7 p. 100 de notre produit intérieur brut.

Au niveau international, le secteur agricole et agroalimentaire canadien a été à l'origine de 3,6 p. 100 des exportations mondiales de produits agroalimentaires en 2014. Toujours en 2014, le Canada a été le cinquième plus important exportateur de produits agroalimentaires au monde.

Le Canada s'est engagé dans plusieurs accords de libre-échange. Onze accords de libre-échange sont actuellement en vigueur, l'Accord économique et commercial global, le Partenariat transpacifique et l'Accord de libre-échange Canada-Ukraine ont été conclus, et huit négociations d'accord de libre-échange sont en cours.

Le gouvernement fédéral a de plus entrepris des discussions préliminaires avec la Turquie, la Thaïlande, les Philippines et les États membres du Mercosur, soit l'Argentine, le Brésil, le Paraguay et l'Uruguay.

Nos deux témoins pour ce matin sont M. Jim Everson, directeur exécutif de Soy Canada, et M. Phil de Kemp, directeur exécutif du Conseil de l'orge du Canada.

Merci d'avoir accepté notre invitation à comparaître. Je tiens à signaler que la valeur des exportations canadiennes de soya a dépassé un milliard de dollars en 2013, et que le Canada a exporté plus de 1,4 million de tonnes d'orge en 2012.

J'invite maintenant nos témoins à nous présenter leurs exposés qui seront suivis d'une période de questions. Chaque sénateur disposera de cinq minutes pour poser ses questions. Comme la période de questions se prolongera tant qu'il restera du temps, les sénateurs n'ont pas à se presser pour poser toutes leurs questions en même temps. Je demanderais aux sénateurs qui posent leurs questions ainsi qu'aux témoins qui y répondent d'être brefs et précis.

Jim Everson, directeur exécutif, Soy Canada : Merci beaucoup, monsieur le président, et merci à tous de vous être présentés. Voilà une façon fort chaleureuse de nous accueillir.

Merci pour le temps que vous nous consacrez aujourd'hui, et pour l'intérêt que vous accordez à la question de l'accès aux marchés. Étant donné l'importance de ces enjeux pour l'industrie du soya, nous sommes très heureux d'avoir l'occasion d'en discuter avec vous.

Permettez-moi d'abord de vous dire quelques mots au sujet de Soy Canada. Soy Canada est l'association nationale représentant l'ensemble de la chaîne de valeur du soya au Canada. Nous comptons parmi nos membres tous les producteurs de soya au pays, que l'on retrouve principalement en Ontario, au Québec et au Manitoba, mais aussi en Saskatchewan et dans le Canada atlantique. Nous représentons également les entreprises qui conçoivent des semences novatrices pour les producteurs, les exportateurs, les transformateurs et différents autres secteurs qui appuient notre industrie.

L'industrie du soya connaît une croissance rapide au Canada. Nous en sommes d'ailleurs à une huitième année consécutive de croissance record de notre production. Entre 2005 et 2015, la superficie consacrée à la culture du soya a augmenté de 87 p. 100 pour se situer maintenant à plus de 5 millions d'acres. Les niveaux de production atteignent désormais 6,2 millions de tonnes métriques. Les recettes agricoles pour les producteurs se chiffrent à 2,3 milliards de dollars. Depuis 2005, les exportations de soya ont augmenté d'environ 250 p. 100.

Dans un tel contexte d'accroissement de la production et de recours accru au soya dans le cycle de rotation des récoltes, la question de l'accès aux marchés est vraiment primordiale pour l'industrie du soya qui est à la recherche de marchés d'exportation accessibles de façon prévisible.

L'industrie contribue à notre PIB annuel à hauteur de 5,6 milliards de dollars et est à l'origine de 54 000 emplois équivalents temps plein directs et indirects. Nous nous réjouissons de la croissance de l'industrie, car c'est le grand objectif de notre association.

Je vais vous dresser la liste de nos sept priorités en matière d'accès aux marchés. Je pourrai vous en dire davantage en réponse à questions.

Du point de vue de Soy Canada, la libéralisation du commerce est la première priorité. Le président a glissé tout à l'heure un mot au sujet des ententes commerciales dans lesquelles le Canada s'est engagé. Nous estimons essentiel de ratifier et mettre en œuvre l'accord commercial avec l'Europe ainsi que le Partenariat transpacifique. Nous appuyons ces deux ententes importantes qui vont grandement faciliter les choses pour l'industrie du soya.

Nous nous intéressons également de près aux nouvelles possibilités qui pourraient s'offrir du côté de la Chine. Les médias ont formulé de nombreuses hypothèses quant aux prochaines mesures que devrait prendre le Canada dans ses relations avec la Chine. La Chine représente un marché important, et il y en a plusieurs autres en Asie de l'Est où nous souhaiterions exporter davantage de soya. Ce sont des marchés qui nous intéressent beaucoup.

L'industrie du soya est en pleine croissance au Canada, mais ne compte toujours que pour une très faible proportion des échanges internationaux en la matière. Les États-Unis sont responsables d'environ 39 p. 100 de la production mondiale de soya. Le Brésil n'est pas très loin derrière. La production canadienne ne représente que 2 ou 3 p. 100 du total.

Les accords commerciaux permettent d'établir un ensemble commun de règles prévisibles pour les échanges internationaux. Nous avons besoin de règles semblables pour pouvoir soutenir la concurrence sur un marché dominé par quelques joueurs principaux.

L'application de règles et de politiques fondées sur des données scientifiques est notre deuxième priorité. Dans un secteur aussi marqué par l'innovation et les progrès scientifiques, il faut absolument que nous puissions fonder nos décisions et nos politiques sur des données probantes.

Le cadre stratégique pour l'agriculture mis en place par le gouvernement du Canada constitue notre troisième priorité. Nous sommes en plein cœur de la période de cinq ans visée par Cultivons l'avenir 2, le cadre stratégique actuellement en vigueur. Le ministère de l'Agriculture vient d'entreprendre les négociations avec les provinces en vue de l'établissement d'un troisième cadre stratégique pour l'agriculture qui entrera en vigueur en 2018.

Ces cadres stratégiques contribuent grandement à harmoniser les efforts du gouvernement fédéral, des provinces, des groupes de producteurs et de l'industrie à l'égard de différents enjeux, y compris l'accès aux marchés et les politiques commerciales. Nous nous réjouissons de voir le gouvernement entreprendre des négociations et des consultations à ce sujet, et nous espérons bien avoir notre mot à dire dans ce processus.

Notre quatrième priorité réside dans l'accès aux approbations des produits biotechnologiques sur les marchés internationaux. Les variétés génétiquement modifiées de soya comptent pour environ 65 p. 100 de la production canadienne. Nous devons faire approuver ces nouvelles technologies et semences utilisées par nos agriculteurs pour pouvoir exporter le soya. Cela peut poser parfois d'importantes difficultés, surtout avec l'Union européenne. Nous sommes actuellement en attente d'une approbation pour certaines de ces innovations, et il est important pour nous que cela puisse se faire sans trop tarder.

Dans le même contexte, il faut considérer la question d'une présence fortuite d'une très faible concentration d'éléments génétiquement modifiés, lorsqu'elle est jugée sans risque par une évaluation de la sécurité sanitaire du Codex, dans les expéditions de produits à l'étranger. C'est un sujet brûlant d'actualité dans le commerce international du grain. Le Canada a été l'un des chefs de file dans l'élaboration d'une nouvelle politique réglementaire en la matière. C'est une question qui va continuer de revêtir une importance capitale pour nous.

Notre sixième priorité concerne les ressources consacrées par le gouvernement du Canada aux services favorisant l'accès aux marchés. Nous comptons énormément sur le soutien que peuvent nous offrir des instances publiques comme l'Agence canadienne d'inspection des aliments, le Secrétariat à l'accès aux marchés d'Agriculture Canada et le ministère des Affaires mondiales. Les délégués commerciaux travaillant dans nos ambassades à l'étranger nous sont aussi d'une aide très précieuse dans nos efforts pour trouver et développer des marchés.

Je note tout particulièrement que l'Agence canadienne d'inspection des aliments (ACIA) a un double mandat. Elle doit non seulement protéger les Canadiens du point de vue de la salubrité des aliments destinés à la consommation humaine et animale, mais aussi contribuer à régler les problèmes d'ordre réglementaire et scientifique qui pourraient entraver nos exportations. Il est de plus en plus fréquent que nous nous heurtions à un obstacle de la sorte en voyant un pays importateur nous poser des difficultés du point de vue sanitaire ou phytosanitaire. Il est alors essentiel que nous puissions compter sur une agence réglementaire efficace s'appuyant sur de bonnes bases scientifiques, comme c'est le cas de l'ACIA, pour nous aider à régler ces questions et à négocier avec les organisations de protection des végétaux partout dans le monde. Avec la disparition progressive des droits de douane, ces enjeux deviennent d'autant plus complexes et pertinents.

Le transport ferroviaire est notre septième priorité. Je veux surtout que vous compreniez qu'il y a augmentation de la production dans tous les secteurs agricoles au Canada. Notre objectif est de poursuivre l'accroissement de la production et des exportations de soya. Les secteurs du canola, de l'orge, du lin et des céréales vont aussi augmenter leur production en cherchant à faire en sorte que chaque acre de terrain soit aussi productive que possible. Pour atteindre cet objectif, il faut que nos produits puissent se rendre jusqu'aux marchés visés, et le transport ferroviaire est le moyen que nous utilisons au Canada pour ce faire. Il est donc essentiel que notre infrastructure ferroviaire demeure capable de transporter vers les marchés des volumes de grain de plus en plus considérables.

Le vice-président : Merci, monsieur Everson.

Phil de Kemp, directeur exécutif, Conseil de l'orge du Canada : Merci beaucoup, monsieur le président. Lors de ma dernière comparution devant ce comité, vous souligniez le départ du sénateur Robichaud. Les sénateurs ont alors eu la gentillesse de lui permettre de présider la séance. Malheureusement, il ne pourra pas profiter de sa retraite cette année pour suivre le parcours des Canadiens de Montréal en séries éliminatoires.

Le vice-président : Voulez-vous bien cesser de taquiner le sénateur Robichaud?

M. de Kemp : Le Conseil de l'orge du Canada a été mis sur pied il y a trois ans lorsque plusieurs groupes de l'industrie ont décidé de conjuguer leurs efforts à la suite de l'abolition de la Commission canadienne du blé. Le mandat du conseil s'articule autour de trois ou quatre piliers. Il y a assurément le développement des marchés, la recherche et l'innovation, l'agronomie et la rentabilité des exploitations, et les politiques en matière de commerce international et d'accès aux marchés.

Le conseil se distingue du côté du grain en suivant en quelque sorte le modèle du Conseil canadien du canola. Notre conseil d'administration compte 14 membres, 7 représentant les producteurs, et 7 l'industrie. Nous représentons les différentes organisations de producteurs en Colombie-Britannique, en Alberta, en Saskatchewan, au Manitoba, en Ontario, au Québec et dans l'Atlantique.

Du côté de l'industrie, on retrouve le secteur du maltage qui en est l'une des composantes importantes, Bière Canada, certaines entreprises céréalières, des groupes de recherche, des concepteurs de semences et le secteur de l'alimentation bovine où l'orge fourragère joue un rôle de premier plan.

Comme vous l'avez indiqué, monsieur le président, les exportations d'orge se chiffrent en moyenne à environ 1,4 million de tonnes métriques. C'est seulement pour le produit de base sans valeur ajoutée. À titre de président du secteur du maltage depuis 25 ans, je peux vous dire du point de vue de la valeur ajoutée que nous sommes le deuxième plus important exportateur de malt au monde. Nous nous échangeons en fait le deuxième et le troisième rang avec l'Australie. Vous pouvez ajouter à cela 800 000 tonnes d'orge brassicole seulement pour l'exportation. Nous en achetons environ 1,1 million de tonnes métriques, mais il y en a une partie qui est destinée au marché canadien.

Pour ce qui est des quatre éléments que vous souhaitiez approfondir, je pourrais certes vous parler des attentes et des préoccupations des différents intervenants. Dans le secteur de l'orge, la priorité principale de nos membres est la ratification du Partenariat transpacifique. Nous n'ignorons pas que le comité du commerce de la Chambre des communes est actuellement en déplacement dans l'ouest du pays pour examiner cette question.

Pour le secteur de l'orge, c'est une entente commerciale qui procurerait d'énormes avantages, notamment via l'élimination complète des droits de douane sur l'orge fourragère au Japon, la réduction des quotas sur le malt au Japon et l'élimination des droits de douane au Vietnam.

Si cet accord est ratifié, il se traduira, principalement pour les producteurs d'orge de l'Ouest canadien, car c'est là où se font la plus grande partie des récoltes, par pas moins de 400 000 à 500 000 tonnes supplémentaires d'orge exportées au Japon seulement sous différentes formes, que ce soit le malt ou à l'intérieur de produits alimentaires — pas autant qu'on le souhaiterait, parce que les Japonais continuent de protéger leur industrie à valeur ajoutée. Cela se ferait en grande partie par l'entremise de l'industrie bovine ou porcine. Si je ne m'abuse, le Conseil canadien du porc a indiqué qu'il faudrait quelque chose comme 1,2 million de porcs supplémentaires pour satisfaire à la demande sur ce marché. Pour leur part, les éleveurs de bœuf pourraient certes vous parler d'une production à valeur ajoutée qui doublerait pour atteindre peut-être 40 000 tonnes. C'est énorme pour l'Ouest canadien.

C'est un outil de plus à la disposition des agriculteurs qui peuvent ainsi commencer à comparer les prix pour déterminer la rotation de leurs récoltes, qu'ils optent pour le blé, le canola, le soya, au Manitoba, ou encore l'orge ou l'orge brassicole. C'est devenu pour nous une absolue nécessité, d'autant plus que l'Australie a déjà conclu un accord de libre-échange avec le Japon.

Pour ce qui est de nos attentes quant à la suite des choses, le gouvernement a signalé tout au moins la possibilité que l'on envisage les perspectives du côté de la Chine. La Chine est actuellement un énorme marché pour l'orge. Les brasseurs chinois ont acheté entre 700 000 et 800 000 tonnes d'orge brassicole cette année, un sommet par rapport aux années précédentes. Nous entrevoyons désormais aussi de nombreuses possibilités pour l'orge fourragère, surtout parce qu'elle est non génétiquement modifiée. Il n'existe pas de semences génétiquement modifiées pour l'orge. La Chine commence à se pencher sur quelques-uns des problèmes découlant de l'utilisation du maïs. Nous constatons ainsi un recours accru à l'orge fourragère.

L'apport en protéine constitue un avantage que nous nous efforçons d'exploiter en faveur du Canada. Notre orge fourragère a une teneur en protéine plus élevée que celle cultivée en Australie, le pays qui détient la plus grosse partie de ce marché actuellement. Nous pourrions ainsi produire de 500 000 à 1 million de tonnes si la superficie cultivable nous le permettait. Nous allons voir ce que nous pouvons faire à ce chapitre.

Comme Jim l'indiquait tout à l'heure, la question du transport est préoccupante pour l'avenir. Elle est d'ailleurs revenue souvent sur le tapis au cours des dernières années, surtout pour ce qui est du transport du grain. Il est bien certain que le rapport Emerson qui a été présenté au ministre des Transports est un bon point de départ. Ce n'est pas seulement le secteur de l'orge qui est touché. Dans le cadre des délibérations du Groupe de travail sur la logistique du transport des récoltes, il n'y a pas un seul secteur agricole qui n'a pas signalé de graves lacunes. Si le ministre et l'OTC ne parviennent pas à apporter les correctifs nécessaires, nous serons de retour à la case départ.

Vous en viendrez sans doute à vous intéresser en priorité à cette problématique qui touche non seulement l'agriculture, mais aussi des secteurs comme les produits forestiers et les engrais. Toutes les marchandises doivent transiter par les ports. Nous dépendons tellement du commerce que, très sincèrement, même avec l'examen de la Loi sur les transports au Canada... Je crois d'ailleurs qu'Emerson l'a reconnu parce que nous avions demandé à ce que cela soit inclus, et que le préambule d'une loi ou d'un règlement sert justement à expliquer sa raison d'être. Il serait donc important que le Canada reconnaisse, et indique dans ce préambule qu'il en va de notre sécurité économique nationale — et c'est nous qui le disons, et non pas Emerson — du fait de la situation actuelle d'oligopole avec seulement deux compagnies ferroviaires. Si nous n'arrivons pas à expédier rapidement nos marchandises vers les ports, nos clients vont nous en faire payer le prix. C'est ce qui est arrivé il y a deux ans avec notre hiver très froid. Je me souviens d'avoir participé à l'époque à une rencontre avec nos clients japonais et le ministre Ritz. Nous leur avons indiqué que nous ferions le nécessaire et que nous avions des lois nous permettant d'agir. Les Japonais n'étaient pas très heureux, et il est bien certain qu'ils peuvent toujours s'approvisionner ailleurs.

Il va être primordial pour tous les secteurs, et notamment celui de la foresterie en Colombie-Britannique, de voir à ce que leurs produits se rendent jusqu'aux marchés. Vous verrez la teneur des recommandations qui seront formulées. Il sera important que vous évaluiez bien les éléments à inclure dans cette loi, car c'est un effort qui a été entrepris il y a 20 ans ou 30 ans déjà avec le rapport Estey et les travaux de Kroeger. C'est vraiment notre dernière chance de faire les choses comme il se doit.

Comme vous le savez sans doute, le secteur agricole n'a pas cessé d'accroître ses exportations de façon exponentielle au cours des trois dernières décennies, à un taux de croissance supérieur à celui de l'économie en général. Les groupes de producteurs sont donc nombreux à pouvoir affirmer qu'ils ont déjà fait leurs preuves et qu'ils seront en mesure de tirer parti des possibilités que peut offrir un accord de libre-échange.

Il faut bien le dire, l'industrie a su joindre le geste à la parole. Il suffit de regarder du côté des exportations. Elles ne sont pas en train de diminuer; l'industrie est encore en pleine croissance. Nous avons recours à l'agronomie, à la génétique, à la géolocalisation et à tout ce qui est disponible. L'industrie a vraiment été à la hauteur des attentes de tous les Canadiens en matière de croissance économique.

Par ailleurs, la Table ronde canadienne sur les cultures durables vient d'amorcer ses travaux en vue de l'établissement, d'ici trois ou quatre ans, de protocoles pour une agriculture durable, de la ferme jusqu'à l'assiette, pour ainsi dire. La table ronde réunit quelque 45 membres du côté de la production. Vous avez sans doute entendu parler des efforts déployés dans le secteur du bœuf par les McDonald, Walmart et Nestlé. Tous les maillons de la chaîne d'approvisionnement se concertent pour en arriver en quelque sorte à un plan de développement durable que nous pourrons présenter au reste du monde. Tous sauront ainsi non seulement que notre industrie est viable, mais que nous connaissons également notre empreinte carbone. Nous serons au fait de toutes ces considérations. Nous pourrons montrer à tout le monde que notre industrie est viable à long terme, ce qui est déjà le cas à mon avis.

Je voudrais aborder en terminant l'importante question de la capacité concurrentielle et de la rentabilité du secteur. Comme je l'ai mentionné précédemment, Bière Canada est l'un des membres du Conseil de l'orge du Canada et constitue — avec le secteur du maltage — l'une des composantes importantes de l'industrie. Nous comptons pour près de 60 p. 100 à 65 p. 100 des achats d'orge brassicole.

Avant que j'en parle, voici un fait intéressant que nous commençons à dire à tout le monde: l'industrie de la bière canadienne achète environ 300 000 tonnes d'orge de brasserie que nous maltons ici au Canada. On parle d'environ 75 millions de dollars pour un produit auquel nous ajoutons de la valeur; 75 millions de dollars d'orge. Au moment où le produit se retrouve dans un magasin de bière, peu importe la province, les taxes d'accise fédérale et provinciales auront dépassé nettement 5 milliards de dollars. Selon les données du Conference Board du Canada, il s'agit de 5,8 milliards de dollars, mais je crois que cela inclut également les taxes que paient les employés sur leurs charges sociales, et ainsi de suite.

Dans aucune industrie au Canada, 75 millions de dollars sur un montant de 5 milliards de dollars ne vont au gouvernement fédéral et aux provinces année après année.

Je le mentionne parce que sur le plan de la compétitivité, en 2013, l'industrie de la bière avait commencé à discuter de la révision de ce qu'elle appelle ses normes de composition. Cela n'avait pas été fait depuis le début des années 1980. L'industrie de la bière a changé, et nous parlons de compétitivité. Après tout, elle fait 50 p. 100 de tous les achats d'orge de brasserie dans le monde.

Lorsque des représentants de l'industrie ont comparu devant le comité de l'agriculture de la Chambre des communes, ils ont dit qu'il fallait changer les normes de composition et que des brasseries artisanales voulaient ajouter quelque chose de différent — un peu de piquant — parce que c'est ce que voulait le consommateur. Le comité a convenu que c'était important, tellement important qu'un engagement figurait dans le budget de 2014 à cet égard.

Depuis, l'ACIA a terminé ses consultations. Tout ce que nous voulions faire, c'était demander à votre comité que ces examens, recommandations et modifications soient étudiés par le gouvernement actuel cette année. Il s'agit d'une question non seulement de compétitivité, mais aussi d'innovation, car ils doivent faire concurrence à tous les gens dans le monde.

Mis à part ce que Jim a dit au sujet des données scientifiques, vous entendrez bien davantage parler des limites maximales de résidus et de présence de faibles quantités, car ce seront les nouveaux mots à la mode concernant les barrières non tarifaires.

Je vous remercie beaucoup de votre attention.

Le vice-président : Merci, messieurs de Kemp et Everson. Merci de votre témoignage. Nous allons maintenant vous poser des questions.

La sénatrice Unger : Monsieur Everson, le soya est intéressant. Le cultive-t-on en Alberta?

M. Everson : Pas en grande quantité. Certains agriculteurs essaient des choses en Alberta. Le problème — nos chercheurs travaillent très fort pour produire des variétés à croissance plus rapide qui conviendraient au climat de la province. Nous serions emballés d'y augmenter la production, mais le soya a toujours été cultivé dans le Sud de l'Ontario et du Québec.

Les entreprises de semences ont créé des variétés qui conviennent à d'autres types de climats. Dans l'Est de l'Ontario, d'où je viens, on trouve maintenant une quantité impressionnante de soya, et il est produit au Manitoba. Il se déplace lentement vers l'ouest, vers la Saskatchewan.

La production de soya en Alberta n'est pas très importante, mais je sais que le ministère de l'Agriculture de la province travaille d'arrache-pied à l'établissement de la culture du soya au Canada et fait les recherches qu'il faut à ce chapitre. Nos chercheurs y travaillent très fort.

La sénatrice Unger : Quelles sont les répercussions sur le sol? S'agit-il d'une culture de rotation?

M. Everson : Oui, la rotation se fait très bien. Pour un producteur, c'est l'un des aspects les plus intéressants du soya — à savoir, la possibilité de cultiver du blé et du canola et de passer au soya. La rotation des cultures est très bénéfique pour le sol.

La sénatrice Unger : Je trouve également intéressant que les Pays-Bas importent une grande quantité de soya. Comment l'utilise-t-on dans ce pays?

M. Everson : Les Pays-Bas représentent un très grand marché pour nous — peut-être le troisième ou quatrième marché en importance pour le soya canadien. Le soya est utilisé principalement pour deux choses différentes. La graine de soya contient des protéines, à 80 p. 100, et de l'huile, à 20 p. 100. Il s'agit donc de triturer les graines, et 20 p. 100 du produit est de l'huile végétale qui peut être intégrée dans le marché de l'huile végétale. Cependant, la majeure partie est destinée aux aliments pour animaux. C'est excellent pour les bovins et les porcs. La majeure partie du produit exporté en Europe est destinée au marché des aliments pour animaux.

Or, nous avons également une très bonne industrie de soya de qualité alimentaire, presque exclusivement en Ontario et au Québec. Nous produisons du soya non génétiquement modifié destiné au marché de l'alimentation partout dans le monde. On l'utilise pour le tofu, le lait de soya et des sauces de soya. De plus, une assez bonne partie est exportée aux Pays-Bas et en Europe.

Le Canada se distingue des autres pays en ce sens qu'il produit du soya génétiquement modifié qui est destiné à l'industrie des aliments pour animaux partout dans le monde, et il fait concurrence aux Américains et aux Brésiliens, par exemple, à cet égard; et il a aussi cette industrie de très grande valeur, soit celle des aliments non génétiquement modifiés.

La sénatrice Unger : Vous avez tous les deux parlé du transport ferroviaire et vous avez dit à quel point il est important pour mettre toutes ces cultures sur le marché; nous savons qu'en raison des problèmes qui touchent les pipelines, ils devraient enlever une bonne partie du fardeau, si l'on veut — ou ce produit mis en marché —, des chemins de fer, et le bitume pourrait être acheminé par d'autres moyens.

Je sais que vous en avez parlé, monsieur de Kemp, mais j'aimerais avoir votre point de vue à tous les deux — c'est vraiment un facteur déterminant également. Comment le problème peut-il être résolu, à votre avis?

M. de Kemp : Je vais commencer si possible, Jim. Je veux dire deux ou trois choses. Tout d'abord, à l'heure actuelle, le gouvernement est encore saisi du projet de loi C-30 et il doit déterminer s'il veut allonger la limite d'interconnexion, qui est de 160 kilomètres. Nous entendons dire qu'il y a une certaine réticence. Nous savons que cela a donné, assurément aux compagnies ferroviaires, d'après ce que nous comprenons, de meilleurs moyens de négocier les taux. C'est ce que dit également l'industrie forestière.

En ce qui concerne l'interconnexion à l'heure actuelle, les wagons, pour le pétrole brut ou le grain, ou autre chose, la capacité existait même avant le projet de loi C-30. Ils disent que le problème, c'était que compte tenu du temps froid, les freins des locomotives ne fonctionnaient pas. La solution consistait simplement à ajouter une locomotive au milieu. Le problème concernait les réserves et le pouvoir, comme ils le disent.

Je vais faire attention à ce que je dis, mais il y a eu des réductions importantes sur le plan des infrastructures dans le cas de certains chemins de fer. Ce n'est pas le cas de tous, mais c'est le cas d'un en particulier. Je pense que tout le monde comprend de quoi je parle.

À titre d'exemple, dans le transport aérien, sur le plan de la capacité, si l'on prend du retard en raison de chutes de neige, ou je ne sais trop quoi, les gens restent coincés dans un aéroport pendant un jour ou un jour et demi, avec tout ce que cela comporte en Amérique du Nord. En deux ou trois jours, tout le monde revient là où il est censé être. Le secteur a cette capacité d'avoir des avions supplémentaires. Si l'industrie des transporteurs aériens de passagers devait être gérée de la même façon que celle des chemins de fer, les gens resteraient dans un aéroport pendant trois mois parce qu'il n'y aurait qu'un nombre limité d'avions pour tout le monde.

On peut dire que la capacité est là. Les gains d'efficience sont là. Les entreprises céréalières sont passées de 3 000 silos, ou 2 800 silos, à un peu plus de 300. Elles se sont réellement dotées d'une grande capacité, 100 places de wagons. L'efficacité est là. Elles peuvent adapter les choses en 24 heures. La question est de savoir si la marchandise va pouvoir se rendre à temps par voies ferrées. On semble pouvoir le faire pour l'industrie de l'automobile et pour la livraison juste à temps des pièces automobiles. Nous aimerions que ce soit la même chose pour nous.

Le sénateur Oh : Merci, messieurs. L'exposé sur le marché du soya était très intéressant.

Je me rappelle qu'il y a 30 ou 40 ans, mon ami venait à Tillsonburg, en Ontario, pour acheter du soya.

M. Everson : Cela se fait encore.

Le sénateur Oh : Le soya est très utilisé sur le marché asiatique. Tous les jours, sur la table, il y a du soya.

Le soya canadien contribue-t-il à donner forme à la stratégie relative à la marque du Canada?

M. Everson : C'est une excellente question. Nous nous penchons plus sérieusement sur notre capacité de créer la marque du soya canadien dans les marchés étrangers. Je pense que le Canada a vraiment une excellente réputation. Quand nous travaillons au Japon, en Corée du Sud et dans d'autres marchés, nous constatons que les gens tiennent le Canada en très haute estime. Je pense que le Canada les intéresse beaucoup du point de vue de la salubrité alimentaire. Les gens reconnaissent que le Canada a une agence de réglementation très solide et que nous avons des normes très élevées en matière de qualité des aliments. C'est une préoccupation dans certains marchés.

Nous ne vendons pas un produit final; nous vendons un ingrédient qui entre dans un produit. Il est donc plus difficile de créer une marque parce qu'on ne dit pas que c'est du lait de soya canadien, par exemple, ou du tofu canadien; on dit que c'est du tofu fabriqué avec du soya canadien. Nous nous penchons là-dessus et nous sommes enthousiasmés par les possibilités qui s'offrent.

Le sénateur Oh : Qu'en est-il de l'orge?

M. de Kemp : La situation de l'orge est intéressante. Il y a deux ou trois marchés différents. Nous commençons à créer une marque. Le site web du Conseil de l'orge du Canada comporte un élément appelé gobarley.com. On y trouve les normes nutritionnelles et les allégations santé qui sont maintenant approuvées concernant la réduction du taux de cholestérol. Nous avons des recettes. Nous mettons en œuvre un programme très coûteux afin de créer la marque de l'orge alimentaire canadienne de qualité. En plus, nous avons une entreprise qui produit environ 75 000 tonnes d'orge alimentaire au Japon, en ce moment. Nous travaillons à la création de la marque relative à cela.

En ce qui concerne l'orge brassicole, on reconnaît généralement partout dans le monde que l'orge brassicole canadienne est un peu plus coûteuse. Dans certains cas, nous obtenons une petite prime. Cela s'explique par la composition chimique des bêta-glucanes. Pour les brasseurs à l'échelle du monde, c'est presque comme un sherry de cuisson. Il va bien avec tout. Les brasseurs l'utilisent pour le mélanger à des produits de moindre qualité, particulièrement en Australie. C'est l'une des choses que nous faisons.

J'ai mentionné la Chine, tout à l'heure. Nous espérons commencer cet automne à cerner les endroits où des débouchés existent pour l'orge fourragère étant donné que la Chine s'éloigne un peu du maïs en ce moment. La teneur en protéines de l'orge fourragère au Canada est habituellement de 13 p. 100. En Australie, elle est de 9 p. 100. Les Chinois sont venus au Canada visiter certaines provenderies, vers la fin de l'automne dernier. Nous avons parlé de l'orge alimentaire et ils ont posé la question de la teneur en protéines: ils sont presque tombés de leurs chaises. Ils ont ouvert leurs ordinateurs portatifs et se sont mis à évaluer le prix en fonction des normes de composition pour l'orge fourragère, particulièrement pour le marché du canard. Nous voyons donc un débouché, et nous allons vouloir essayer de fonder la marque sur l'aspect de la teneur en protéines. Vous comprenez cela: presque tout est banalisé. Cependant, toute l'orge n'est pas créée égale, et c'est la même chose pour le soya. Si vous pouvez vous forger un créneau grâce aux caractéristiques du produit et que vous êtes capable de créer une marque, cela vous aide un peu à faire en sorte qu'on ne traite pas de la même manière toute l'orge ou tout le blé. C'est un bon point.

[Français]

Le sénateur Dagenais : Ma première question s'adresse à M. Everson. En vous écoutant, je constate que votre industrie se porte bien. Toutefois, sur l'échiquier mondial, vous avez mentionné être marginal, derrière les États-Unis et le Brésil.

Dans le cadre des accords de libre-échange, entre autres ceux qui seront conclus avec l'Europe et l'Asie, quels sont vos objectifs d'exportation? J'aimerais aussi que vous nous parliez de votre stratégie de mise en marché.

[Traduction]

M. Everson : Notre stratégie se concentre vraiment sur les marchés où nous estimons avoir des possibilités réelles de gain.

En ce qui concerne le marché alimentaire, nous sommes dominants depuis de nombreuses années au Japon. Le Japon est un marché d'une très grande importance pour nous. Pour ce marché, nous allons chaque année au Japon et rencontrons les gens des diverses associations de l'industrie afin de nous assurer qu'ils comprennent le développement de notre culture, les aspects qualitatifs de notre culture et ce que nous faisons sur le plan du développement de nouvelles variétés pour répondre à leurs préoccupations. Alors c'est un aspect.

En ce qui concerne notre nouvelle production, nous sommes aussi intéressés aux marchés de l'Asie de l'Est, qui peuvent être très différents. Ce sont pour notre industrie de nouveaux marchés où nous ne sommes jamais allés avant et où le flux des échanges commerciaux peut être différent. Nous faisons pour cela des études de marché afin de mieux comprendre ces marchés et d'en apprendre la structure. Les pays comme le Vietnam, l'Indonésie et Taiwan sont des marchés nouveaux pour l'industrie canadienne du soya. Nous savons qui sont les principaux participants, quel est le paysage concurrentiel et quelle est la structure de l'industrie. La prochaine étape serait d'aller dans ces marchés et de participer à des missions là-bas, de manière à rencontrer les gens, à établir des contacts et à entreprendre des discussions avec eux sur les besoins particuliers de ces pays.

En février, nous sommes allés en Corée du Sud. C'était la première fois en tant qu'association industrielle représentant l'industrie du soya canadien. Nous misons dans une grande mesure sur l'accord de libre-échange conclu avec la Corée du Sud, qui a créé un contingent spécial pour le soya canadien. Nous essayons donc d'exploiter ce contingent et d'apprendre des Sud-Coréens quels sont leurs intérêts particuliers pour le soya sur le plan des caractéristiques de qualité et du profil d'utilisation du soya dans ce marché. Il y a de très nombreux usages pour le soya. Nous voulons connaître leurs principaux besoins.

J'ajouterais qu'au début, quand j'ai parlé de ma liste, c'était le cadre stratégique pour l'agriculture. L'une des choses que le cadre stratégique pour l'agriculture du gouvernement du Canada et des provinces fait, c'est d'harmoniser les provinces et le gouvernement fédéral et de donner un soutien financier dont le coût est partagé avec notre industrie pour le travail de développement de marchés. Cela nous est très précieux, surtout avec les énormes budgets de commercialisation qu'ils ont aux États-Unis.

[Français]

Le sénateur Dagenais : J'ai une autre question qui s'adresse à nos deux témoins. Le Canada impose des normes de qualité, alors que d'autres pays sont moins rigoureux en ce sens. Ces normes exercent-elles une influence sur le prix du soya et de l'orge qui sont destinés à l'exportation?

[Traduction]

M. Everson : Je crois que la qualité est un facteur essentiel du prix, à l'échelle internationale. J'ai mentionné notre marché de produits de qualité alimentaire. Il y a un supplément pour la qualité du soya canadien, et nous utilisons cela dans notre commercialisation à l'étranger.

Nous parlons de notre qualité et de notre programme d'assurance d'une qualité que nous estimons supérieure, c'est-à-dire la structure réglementaire qui entoure l'assurance de la qualité au Canada, avant l'exportation. Nous parlons de cela, et je suis convaincu que cela se traduit par un supplément dans certains marchés; il arrivera un point où le prix sera en jeu. Mais nos marchés d'exportations aiment la qualité des produits canadiens.

M. de Kemp: C'est le cas pour l'orge brassicole et le malt. Comme je l'ai mentionné précédemment, on paie davantage parce que l'orge est mélangée à des produits de qualité inférieure.

Nous étions en Chine, l'année passée, pour discuter de COFCO, et ils revenaient constamment sur les prix du beurre qui étaient supérieurs à ceux de l'Australie en particulier. Ils voulaient que nous envisagions de l'abaisser au plus faible dénominateur commun, ce qu'ils appellent la qualité additif alimentaire, qui se situe juste au-dessus de celle des aliments pour animaux. Nous avons refusé parce que nous ruinerions nos marchés actuels, en particulier ceux de l'Amérique du Nord, du Japon et de la Corée, et cela n'en vaut pas la peine.

Les Australiens ont pris beaucoup d'expansion de cette façon, mais nous ne pouvons plaire à tout le monde. C'est ce qui nous distingue, pour l'orge et le malt.

En ce qui concerne l'orge fourragère, encore là, nous voyons des possibilités, en particulier en Chine. La question de la teneur en protéines est venue de nulle part. Nous ne nous étions pas rendu compte de cela. Précisons que l'orge fourragère n'était pas au programme de la Chine avant non plus, mais ils ont des problèmes concernant leurs importations de maïs et les OGM, et l'orge n'est pas un OGM.

Pour créer la marque, nous allons nous concentrer là-dessus. Le printemps dernier, nous avons signé avec l'Université de l'agriculture de Chine un protocole d'entente visant à travailler ensemble, à un moment donné, à des essais de l'orge fourragère et, peut-être, à des services de formation selon lesquels des étudiants à la maîtrise viendraient étudier au Canada, par exemple, à l'Université de Saskatoon. Nous essayons de faire cela, en particulier dans certains des nouveaux marchés parce que tout le monde reconnaît qu'on ne peut pas tout simplement aller là-bas et dire un prix, qu'il soit fondé sur la qualité ou sur autre chose; en Asie, il faut créer des liens et les développer, et cela prend du temps. Vous pouvez bien avoir le meilleur prix et la meilleure qualité; s'ils ne vous connaissent pas, ils ne vont pas acheter de vous — pas tant que vous n'ayez pas établi cette relation.

La sénatrice Tardif : Je vous félicite du succès de vos industries. Comme vous l'avez dit, monsieur de Kemp, vous avez contribué à la croissance de l'industrie et à celle de l'économie canadienne.

J'aimerais revenir à la question de la modification génétique. Monsieur Everson, vous avez dit que vous avez du soya modifié génétiquement et du soya non modifié génétiquement. Si je comprends bien, l'orge n'est pas génétiquement modifiée. Vous avez aussi dit que « limites maximales de résidus » et « présence de faibles concentrations » sont des expressions que nous allons entendre souvent.

Est-ce que ce sont des obstacles non tarifaires, et dans quelle mesure cela restreint-il votre accès au marché européen?

M. Everson : En ce qui concerne la biotechnologie, le problème, c'est que tous les pays, y compris le Canada, ont une tolérance zéro pour les OGM qui ne sont pas approuvés. Autrement dit, pour qu'on puisse entrer sur le marché, l'agence de réglementation du pays importateur doit faire un examen scientifique de la semence et l'approuver.

Le problème, avec cet examen, c'est qu'il se fait assez rapidement dans certains pays, alors qu'il faut plus de temps dans d'autres pays. Une semence sera donc approuvée dans un pays, ce qui donne à son concepteur le droit de la commercialiser dans ce pays; cependant, il n'y a pas d'approbation dans un marché d'exportation. Nos grains sont fongibles. Les producteurs apportent leurs grains: tout va dans un seul système et tout est exporté, alors il est difficile et compliqué de séparer les grains GM des autres, parce que tout va dans un seul système, essentiellement. Au Canada, nous avons un système très segmenté pour le soya GM et le soya qui n'est pas GM.

Cependant, la difficulté avec l'exportation de marchandises, c'est que si vous n'avez pas l'approbation dans chacun de vos grands marchés, vous ne pouvez pas commercialiser le produit parce qu'on craint que la contamination non autorisée aboutisse dans un seul marché.

En Europe, il y a des cas d'entreprises qui présentent une demande à l'échelle mondiale. Le Canada donne son approbation et mène un examen scientifique qui prend deux ans; l'approbation est accordée après un examen très approfondi et solide. Les États-Unis et le Japon font cela.

Puis, règle générale, nous constatons que l'Union européenne prend plus de temps. Alors nous attendons l'approbation du produit pour le donner aux agriculteurs canadiens, qui le veulent vraiment, parce que c'est une innovation et un nouvel outil. Malgré cela, nous ne pouvons pas le fournir à un producteur canadien parce qu'un seul pays n'a pas approuvé la technologie. Notre gouvernement est très conscient de cela et travaille avec nous à résoudre cette situation.

Pour ce qui est des limites maximales des résidus, cela s'applique qu'il s'agisse d'un OGM ou pas: c'est lié aux produits agricoles. Le problème, c'est que la situation est chaotique. Les pays partout dans le monde dressent leur propre liste de limites maximales des résidus, ce qui fait que les limites sont toutes différentes et qu'elles peuvent être différentes des limites établies au Canada. Un agriculteur canadien peut se fier à la limite maximale des résidus d'un produit au Canada et produire en fonction de ce degré de tolérance, mais dans le marché d'importation, la limite pourrait être inférieure. Cela pourrait causer un problème d'ordre commercial.

Que les restrictions au commerce soient délibérées ou causées par l'absence d'un ordre international, l'essentiel est d'essayer d'obtenir l'harmonisation entre les pays et de les faire travailler ensemble à résoudre ces problèmes sur la base d'une approche scientifique.

La sénatrice Tardif : Monsieur de Kemp, aimeriez-vous dire quelque chose?

M. de Kemp : L'orge n'est pas GM parce que, si vous regardez à l'échelle mondiale, ce n'est pas financièrement réalisable, d'après moi, pour les entreprises qui veulent se lancer dans ce domaine.

Jusqu'à l'UPOV, en 1991, les agriculteurs pouvaient réutiliser leurs semences à volonté. Dans certaines industries comme celle de la bière et du malt, nous demandons des semences certifiées chaque année, ce qui aide au développement. En gros, je pense aux rétrocroisements de l'orge.

Je viens d'une ferme de maïs et de soya, ici, à Nepean, dans l'ouest d'Ottawa. Le problème à cet endroit, c'est que vous ne pouvez pas réutiliser vos semences à volonté à cause du gène terminateur, peu importe comment on l'appelle. Vous pouvez utiliser la semence de maïs une fois; après, vous ne pouvez pas récolter les semences et les utiliser.

Du côté du malt et de l'orge, il n'y a pas d'OGM parce que c'est la préférence des consommateurs et, surtout, parce que les brasseurs ont dit qu'ils n'en veulent pas. Nous avons réussi jusqu'à maintenant à soutenir la création de variétés sans cela.

La sénatrice Tardif : Pourquoi choisiriez-vous de ne pas produire que du soya non génétiquement modifié?

M. Everson : Le producteur peut choisir ce qu'il veut produire. Les OGM lui donnent toutes sortes de nouvelles capacités de lutte contre les mauvaises herbes. Avec les OGM, vous réduisez le travail que vous devez faire comme producteur. Cela change vos pratiques agricoles. Vous pouvez cultiver moins et lutter très efficacement contre les mauvaises herbes. Les semences GM ont permis à l'agriculteur d'épargner de l'argent, et cela a un effet sur ses résultats. Il est donc prêt à payer le prix de cette technologie, de cette innovation, parce que cela améliore sa rentabilité.

La sénatrice Tardif : Lorsque vous produisez du lait de soya ou du tofu, utilisez-vous du soya GM ou non GM pour la consommation humaine?

M. Everson : Nous utilisons surtout du soya non GM, mais si les consommateurs l'acceptaient, il serait parfaitement acceptable d'utiliser également du soya GM. Lorsqu'il s'agit de l'utilisation du produit, il n'y a aucune différence entre le soya traditionnel et le soya GM. Cela dépend de la préférence du consommateur.

La sénatrice Tardif : Est-il étiqueté?

M. Everson : Il est étiqueté dans de nombreux pays. L'étiquetage est obligatoire.

La sénatrice Tardif : Au Canada?

M. Everson : Au Canada, l'étiquetage n'est actuellement pas obligatoire; il y a une norme sur l'étiquetage volontaire. Il s'ensuit que les entreprises qui souhaitent préciser que leur produit est non GM sur l'étiquette peuvent le faire, mais en ce moment, l'étiquetage n'est pas obligatoire au Canada.

La sénatrice Beyak : Je vous remercie de votre exposé.

Ce que vous nous avez dit au sujet du nouveau cadre de 2018 pour Cultivons l'avenir m'intéresse. J'aimerais savoir si vous exercez une certaine influence lors de ces discussions et si les intervenants font face aux préoccupations et aux défis que vous avez soulevés. Il s'agissait d'excellents exemples.

M. Everson : Le ministère de l'Agriculture mène des consultations sur la plupart des sujets. Nous collaborons étroitement avec ce ministère. Un groupe d'intervenants s'efforce actuellement d'élaborer un cadre stratégique pour l'agriculture, ainsi que les thèmes qui le formeront. Ils mèneront de nombreuses consultations dans les provinces et dans les groupes de producteurs, et ils nous consulteront également. À mon avis, c'est un bon processus.

La sénatrice Beyak : Puis-je également poser cette question à M. de Kemp? Je partage votre préoccupation au sujet de la prospérité économique nationale de nos chemins de fer. Un grand nombre des comités dont je fais partie entendent les mêmes préoccupations. Le rapport Emerson était un bon rapport, mais je ne crois pas qu'il décrivait l'urgence de la situation.

J'aimerais connaître votre avis à cet égard. Je ne crois pas qu'on se rend compte de l'importance du transport ferroviaire et de celle de nos ports.

M. de Kemp : Puisque j'ai vu cela deux fois auparavant, c'est-à-dire dans le rapport Kroeger et dans le rapport Estey — j'ai obtenu mon diplôme de l'Université de Guelph en 1981 et j'ai travaillé pour Cargill —, que je suis déjà passé par là et que j'ai eu connaissance de tous les défis qui se posaient à l'époque, je crois vraiment que c'est notre dernière chance d'arranger les choses. Manifestement, il y aura des problèmes liés à l'infrastructure. Ces problèmes seront causés par l'encombrement des ports, et ce n'est pas seulement à cause des grains et d'autres produits. Toutefois, il y a urgence. Si vous souhaitez construire quelque chose ou si vous devez prévoir votre situation dans cinq ou six ans, il vaut mieux le faire maintenant.

Les wagons-trémies représenteront un énorme problème dans l'industrie céréalière, car ils seront essentiellement mis à la retraite. De nos jours, il faut attendre environ trois ans pour commander un nouveau wagon-trémie. Les intervenants de l'industrie céréalière se sont réunis pour discuter du problème. Nous savons ce qu'il faut faire et nous connaissons les causes des problèmes. Nous savons ce qu'il faut améliorer pour les résoudre. De nombreux autres groupes sont très impressionnés de voir les intervenants de l'industrie céréalière travailler ensemble comme nous l'avons fait pour résoudre ce problème. L'urgence est bien réelle. Bien sûr, nous avons réussi à surmonter cet obstacle pour le moment, mais le problème des arriérés pourrait se reproduire dans le secteur céréalier. Il n'est pas uniquement causé par une augmentation de la production. En effet, si la température se refroidit, il faut disposer de cette capacité d'alimentation en énergie. Nous avons les données nécessaires. Nous savons combien de temps il faut pour commander le wagon. Nous savons ce qui est efficace et ce qui ne l'est pas. Lorsqu'on fonctionne avec des oligopoles, toutes les exportations dépendent du transport par chemin de fer aux ports. C'est la raison pour laquelle je soutiens que c'est vraiment dans l'intérêt de notre prospérité économique nationale, et non uniquement dans celui de l'industrie céréalière.

M. Everson : J'aimerais ajouter un commentaire. Je suis d'accord, et je pense que votre question liée à la prospérité économique nationale soulève un très bon point. C'est vraiment un point essentiel de la question sur le principe posée plus tôt par la sénatrice Unger. Les problèmes liés au transport des grains présentent un nombre considérable de détails, mais le principe, c'est la question de la responsabilisation en matière de rendement réciproque. Tous les participants de la chaîne de valeur soutiendront qu'il doit être possible d'infliger des pénalités lorsqu'une compagnie de chemin de fer réserve un wagon pour un exportateur et que ce dernier n'est pas en mesure de s'en tenir au nombre de jours ou au temps imparti pour le remplir, et cetera. L'exportateur encourt ces pénalités. Si la situation inverse se produit, notre industrie soutiendra qu'il est impossible de veiller à ce que les compagnies de chemin de fer respectent les mêmes normes. Je crois que le gouvernement doit jouer un rôle à cet égard, car ce secteur ne dépend pas vraiment du marché. Le gouvernement doit veiller à ce qu'on exerce une responsabilisation en matière de rendement réciproque.

Le vice-président : Messieurs, je vous remercie de vos exposés. Je m'en voudrais de ne pas vous rappeler que si vous expédiez vos marchandises à partir du port d'Halifax, dans de nombreux cas, vous êtes plus près de vos consommateurs, notamment ceux de nombreuses régions de la Chine et de l'Inde, si vous passez par le canal de Suez. C'était une annonce politique payée par le sénateur Ogilvie et moi-même, car nous sommes des sénateurs de la Nouvelle-Écosse. Nous vous encourageons à inciter les intervenants de l'industrie à envisager d'utiliser le port d'Halifax.

Quelqu'un a mentionné les problèmes de main-d'œuvre. Il n'y a pas eu de pénurie de main-d'œuvre dans le port d'Halifax depuis 1972.

M. de Kemp : C'est exact.

Le vice-président : Si vous cherchez la stabilité, vous pouvez compter sur nous.

M. de Kemp : Je vous remercie de le lui rappeler, car cela a toujours été un gros problème.

Le vice-président : Et voilà. Vous voyez? Nous sommes là pour vous aider. Messieurs, nous vous remercions d'avoir comparu aujourd'hui. Nous vous en sommes très reconnaissants.

Nous accueillons maintenant le prochain groupe de témoins. J'aimerais rappeler à chaque intervenant d'être bref, que ce soit lors des questions ou des réponses, lorsque nous passerons aux questions.

J'aimerais donc accueillir Stephen Laskowski et Jennifer Fox, de l'Alliance canadienne du camionnage. Si je ne me trompe pas, M. Laskowski est vice-président principal, Affaires économiques, et Mme Fox est vice-présidente, Sécurité et douanes.

Après votre exposé, les sénateurs vous poseront des questions. Je demande encore une fois à tout le monde d'être bref.

Stephen Laskowski, vice-président principal, Affaires économiques : Je vais tout d'abord lire notre exposé, qui dure de cinq à sept minutes, pour le compte rendu, et nous serons ensuite heureux de répondre à vos questions.

J'encourage les sénateurs à saisir cette occasion pour poser des questions à Jennifer. Elle est l'une des grandes spécialistes, sinon la plus grande spécialiste, des questions relatives au transport terrestre à la frontière et aux douanes, que ce soit pour entrer au Canada ou pour y revenir après un passage aux États-Unis. J'encourage donc les sénateurs à profiter de son expertise.

Cela dit, je vais lire notre exposé pour le compte rendu. Nous avons hâte de participer à la discussion qui suivra.

L'Alliance canadienne du camionnage est une fédération d'associations provinciales de camionnage qui représente quelque 4 500 transporteurs, propriétaires exploitants et fournisseurs de l'industrie de partout au Canada. Nous avons des membres dans chaque province.

Le camionnage est le moyen le plus utilisé pour transporter des produits agroalimentaires du Canada aux États- Unis. En 2015, 66,5 p. 100 des marchandises visées par l'ALENA ont été transportées par camion, et il continue d'être le moyen de transport le plus utilisé pour transporter des marchandises vers et depuis les pays partenaires de l'ALENA. Les camions ont été utilisés pour l'importation de marchandises d'une valeur de 28,4 milliards de dollars américains sur un total de 44,6 milliards de dollars américains et pour l'exportation de marchandises d'une valeur de 26,4 milliards de dollars américains sur un total de 37,9 milliards de dollars américains.

Même si les produits agricoles n'occupent pas le premier rang en terme de valeur en ce qui concerne les marchandises qui traversent la frontière, ils jouent un rôle important dans les échanges commerciaux entre le Canada et les États-Unis et dans l'industrie du camionnage. J'aimerais ajouter au compte rendu qu'ils représentent habituellement le cinquième secteur en importance, mais en raison de leur valeur générale moins élevée comparativement aux pièces d'auto ou aux machines, ils occupent un rang moins élevé. Toutefois, le nombre d'expéditions est probablement similaire, et c'est ce qui accroît la valeur de ce secteur.

Le système agricole et agroalimentaire du Canada forme une chaîne d'approvisionnement complexe et intégrée à laquelle participent des fournisseurs d'intrants et de services, des producteurs primaires, des transformateurs d'aliments et de boissons, des détaillants et grossistes en alimentation et des fournisseurs de services alimentaires. Les activités de cette chaîne d'approvisionnement génèrent des retombées économiques importantes à l'échelle nationale et provinciale.

Les services de camionnage représentent un élément essentiel de cette chaîne d'approvisionnement. En 2013, le secteur agroalimentaire a généré 106,9 milliards de dollars, à savoir 6,7 p. 100 du PIB du Canada. En 2014, 89 p. 100 de ces marchés dans l'industrie de la transformation alimentaire au Canada ont été expédiés aux États-Unis. La grande majorité de ces envois ont été effectués par camion.

En ce qui concerne la partie réglementaire, je vais maintenant parler de la Loi sur la salubrité des aliments au Canada de l'ACIA. Afin de protéger les familles canadiennes des aliments potentiellement insalubres, le gouvernement du Canada a déposé, le 7 juin 2012, la Loi sur la salubrité des aliments au Canada. La Loi sur la salubrité des aliments au Canada, à l'époque le projet de loi S-11, a été adoptée au Sénat le 17 octobre 2012, et à la Chambre des communes en novembre 2012. Elle a reçu la sanction royale le même mois.

La nouvelle Loi sur la salubrité des aliments au Canada regroupe les pouvoirs prévus dans la Loi sur l'inspection du poisson, la Loi sur les produits agricoles au Canada, la Loi sur l'inspection des viandes et les dispositions relatives aux aliments de la Loi sur l'emballage et l'étiquetage des produits de consommation.

La Loi sur la salubrité des aliments au Canada rend les aliments aussi sécuritaires que possible pour les familles canadiennes, protège les consommateurs en ciblant les pratiques non sécuritaires, impose des sanctions plus sévères pour les activités compromettant la santé et la sécurité, assure un meilleur contrôle des importations, établit un système d'inspection plus cohérent à l'égard de tous les produits alimentaires et renforce la traçabilité des aliments.

Même s'ils ne sont pas directement touchés par ces règlements, nos membres ont dû prendre des mesures de contrôle préventif pour travailler avec les expéditeurs. En résumé, l'élaboration des règlements ne tient peut-être pas compte des entreprises de camionnage du Canada, mais ils ont des répercussions importantes sur les activités de nos transporteurs.

Je vais maintenant aborder la partie américaine de l'équation, c'est-à-dire le règlement de la Food Safety Modernization Act de la FDA, qui régit le transport salubre des aliments destinés aux humains et aux animaux. C'est un tout nouveau règlement qui vient d'être terminé ce mois-ci.

Le nouveau règlement est maintenant terminé, et il fait progresser les efforts de la FDA visant à éviter la contamination des aliments pendant leur transport de la ferme à la table. Au plus tôt, certaines entreprises devront se conformer au règlement un an après sa publication dans le Federal Register des États-Unis. Des entreprises de camionnage devront donc s'y conformer d'ici un an si elles transportent des produits vers les États-Unis.

Le règlement fait partie de sept règlements fondamentaux proposés aux États-Unis depuis janvier 2013 afin de créer un cadre moderne axé sur le risque pour la salubrité alimentaire. L'objectif de ce règlement est d'éviter les pratiques qui posent des risques pour la salubrité alimentaire pendant le transport, par exemple lorsque les aliments ne sont pas réfrigérés de façon appropriée, lorsque les véhicules ne sont pas nettoyés adéquatement entre les chargements et lorsque les aliments ne sont pas protégés de façon appropriée. Le règlement s'appuie sur des mesures de protection prévues dans un projet de loi adopté en 2005. En raison d'éclosions de maladies liées à la contamination des aliments destinés aux humains et aux animaux pendant leur transport et d'incidents liés à des pratiques de transport insalubres, il était nécessaire de prendre ces règlements.

Voici les exigences principales du règlement liées aux véhicules et à l'équipement de transport en ce qui concerne le transport par camion vers les États-Unis. Lors de la conception et de l'entretien des véhicules et de l'équipement de transport, on doit s'assurer de ne pas compromettre la salubrité des aliments transportés. Par exemple, l'équipement doit être conforme à l'usage auquel il est destiné et il doit pouvoir être nettoyé adéquatement après cet usage. Il doit également être en mesure de maintenir les températures nécessaires au transport sécuritaire des aliments.

Je vais maintenant aborder les activités relatives au transport, c'est-à-dire les mesures prises pendant le transport pour assurer la salubrité des aliments, par exemple contrôler adéquatement la température, éviter la contamination des aliments prêts à la consommation par des aliments crus, protéger les aliments de la contamination par des produits non alimentaires qui se trouvent dans la même cargaison ou qui proviennent de cargaisons précédentes, et protéger les aliments de la contamination croisée. Cela signifie que lorsque les transporteurs chargent leurs camions, ils doivent savoir ce qu'ils font.

C'est pourquoi je vais parler de la formation du personnel du transporteur, des pratiques sanitaires en matière de transport et de la documentation de la formation. Cette formation est exigée lorsque le transporteur et l'expéditeur conviennent qu'un transporteur est responsable des conditions sanitaires pendant le transport. Je peux vous assurer que dans la plupart des cas, les expéditeurs s'assurent que nos transporteurs assument cette responsabilité.

On exige également que les transporteurs tiennent des registres sur les ententes de procédures écrites pendant la formation. La période de conservation de ces registres dépend du moment de leur création, mais on exige habituellement de les conserver pendant 12 mois. Cela signifie que les conducteurs ne sont plus seulement des conducteurs de camions qui doivent conduire un véhicule sécuritaire, mais qu'ils doivent maintenant avoir les connaissances et les compétences nécessaires pour manipuler des produits alimentaires.

Qu'a fait l'ACC à cet égard? Il y a presque 10 ans, l'ACC, avec l'aide d'un comité consultatif formé de transporteurs, d'associations provinciales et d'associations nationales de l'industrie alimentaire, a élaboré un programme de salubrité alimentaire. Nous savions que cette situation allait se produire. En 2005, l'ACC et une entreprise appelée Kasar Canada limitée — qui s'appelle depuis peu Iron Apple —, une entreprise privée d'experts-conseils de la Nouvelle- Écosse, ont signé un protocole d'entente en vue d'élaborer un programme de sécurité alimentaire pendant le transport par camion qui intégrerait les processus de base de l'ADMPC pour résoudre les problèmes liés à la salubrité alimentaire. Ce protocole d'entente a été signé avant la prise anticipée de règlements sur la salubrité alimentaire qui ont des répercussions sur tous les intervenants de la chaîne d'approvisionnement alimentaire au Canada et aux États-Unis. Essentiellement, cela permet aux gens, aux entreprises de camionnage et à leurs conducteurs qui suivent ce programme de se conformer aux règlements américains et canadiens.

Parlons maintenant des problèmes. L'industrie du camionnage est vaste et complexe. Les problèmes que nous éprouvons pendant le transport des produits alimentaires vers et depuis les destinations internationales reflètent ces attributs. L'ACC invite les membres du comité à lui poser des questions sur la reconnaissance de son programme — le programme dont je viens de parler — par les gouvernements américains et canadiens et par les membres de la chaîne d'approvisionnement. Nous aimerions que les gouvernements canadien et américain reconnaissent notre programme par l'entremise d'une campagne de sensibilisation, afin de veiller à ce que les expéditeurs ne créent pas une autre série de programmes, ce qui obligerait nos transporteurs à se conformer à 20 différents programmes au lieu d'un seul.

Parlons maintenant du cabotage. Dans la grande majorité des cas, il est interdit aux entreprises de camionnage canadiennes d'effectuer des livraisons d'un point à un autre aux États-Unis. Cela vaut également pour les transporteurs américains sur le territoire canadien. Il est également interdit aux entreprises canadiennes de repositionner l'équipement de camionnage ou de changer de conducteur lors du transport de la même cargaison, à moins qu'il fasse partie d'une équipe. Pour cette raison, l'ensemble de l'industrie du camionnage — y compris les transporteurs de bétail — doit faire face à une série de défis liés à l'efficacité. L'ACC fait du lobbying à Washington depuis plus de deux décennies pour que des changements soient apportés dans ce domaine.

Parlons maintenant des heures d'ouverture des agences d'inspection des aliments à la frontière. Les postes frontaliers sont ouverts 24 heures par jour, sept jours par semaine. Toutefois, les agents américains et canadiens qui s'occupent de l'inspection des aliments à la frontière ne suivent pas cet horaire. Cela cause une série de problèmes aux transporteurs. Les gouvernements américain et canadien doivent moderniser les heures d'ouverture de ces agences à la frontière.

C'est ce qui m'amène à parler des droits d'inspection perçus à la frontière. Le 29 octobre 2015, le service d'inspection sanitaire des animaux et des plantes de l'USDA, l'APHIS, a publié la version finale d'un règlement qui apporte des rajustements aux droits imposés par le gouvernement américain et qui servent à récupérer les coûts liés aux inspections sur la quarantaine agricole menées aux points d'entrée américains. L'ACC est d'avis que ces frais sont illégaux et que le gouvernement du Canada devrait indiquer au gouvernement américain qu'il faut les éliminer.

Règles et inspection pour ce qui est des matériaux d'emballage en bois: les exigences relatives à l'importation des matériaux d'emballage en bois sont des lignes directrices strictes mises en place pour protéger les écosystèmes canadiens contre l'introduction de ravageurs non indigènes. L'ACIA n'a pas expliqué comment elle entendait régler la question de l'élimination de l'exemption de la NIMP no 15. Ce serait assurément une question pour ma collègue Jennifer. En ce qui a trait aux matériaux d'emballage en bois en provenance du Canada et des États-Unis, nous nous posons plusieurs questions. Qui en assumera les coûts? De quelle façon les examens seront-ils gérés? Y aura-t-il des inspections éclair? Seront-elles aléatoires?

Transport du bétail et adoption des registres électroniques: au Canada, on prévoit que d'ici 2018-2019, les registres papier seront éliminés du secteur du camionnage à longue distance. L'Alliance canadienne du camionnage avait exercé des pressions en ce sens et, par conséquent, elle appuie fortement cette politique. Les registres électroniques peuvent toutefois créer des problèmes relativement à la planification de l'eau ou du fourrage pour les transporteurs de bétail dans certains couloirs au pays et à l'étranger. L'ACC collaborera avec le gouvernement du Canada afin de trouver des solutions potentielles à ces problèmes.

Exigences de l'ACIA concernant les marchandises qui transitent par le Canada: l'ACIA a récemment établi de nouvelles exigences qui s'appliquent aux marchandises provenant de l'extérieur du Canada qui sont destinées à l'exportation. On a mené très peu de consultations avec l'industrie jusqu'à présent, en dépit de la mise en œuvre de ces exigences en janvier 2016. Depuis qu'on a pris ces mesures, des camions se sont déjà vu refuser l'accès aux États-Unis. L'ACIA est encouragée par les autorités américaines, ce qui signifie que les transporteurs vont subir des inspections en double. De plus, l'ACIA demande de l'information que les transporteurs ne possèdent pas. L'ACC est consciente qu'il faut protéger les espèces indigènes. Cependant, nous nous opposons aux méthodes draconiennes qui ont été adoptées pour y parvenir. L'ACC rencontrera l'ACIA très bientôt afin de trouver des moyens moins intrusifs de réaliser les objectifs du gouvernement canadien, sans nuire au rôle du Canada à titre de plaque tournante du commerce international.

Initiative du guichet unique: les États-Unis et le Canada se sont engagés dans l'initiative du guichet unique, qui permet aux importateurs de fournir de l'information à l'avance aux organismes de réglementation qui ont établi les exigences relatives à l'importation de biens. L'ACC appuie ces efforts, mais a tout de même certaines réserves. Les gouvernements devraient s'assurer qu'il y a des limites quant aux données recueillies, de manière à ne pas multiplier les demandes de données des organismes. De plus, il faudrait miser sur une approche axée sur le périmètre pour s'assurer que l'ACIA et l'USDA mènent une seule inspection, dont le résultat serait accepté de part et d'autre de la frontière.

Enfin, le port maritime de la Colombie-Britannique et le service de traversier: bien que ce ne soit pas un problème exclusivement lié au camionnage, à l'agriculture et à l'alimentation, les membres de l'ACC ont du mal à expédier des produits alimentaires à partir de ce port, en raison du système de réservation des conteneurs maritimes. Parmi les problèmes, mentionnons la disponibilité des conteneurs, la difficulté de planifier des réservations consécutives pour la collecte et le dépôt des conteneurs ainsi que les frais imposés pour les réservations de jour.

Monsieur le président, voilà qui met fin à notre déclaration. Merci.

Le vice-président : Merci beaucoup. Nous allons maintenant enchaîner avec la période de questions, mais tout d'abord, j'aimerais rappeler à mes collègues qu'avant de partir, nous devrons discuter brièvement d'une question d'ordre administratif. Par conséquent, je vous demanderais d'être indulgents et de bien vouloir rester à votre place à la fin de la période de questions. Merci beaucoup.

[Français]

Le sénateur Dagenais : Ma première question s'adresse à M. Laskowski. En ce qui concerne le transport des aliments, il faut toujours s'assurer de maintenir la qualité des produits qui sont entreposés pendant quelques jours dans les camions. Quelles sont les mesures de contrôle qui sont mises en œuvre en matière de transport de produits réfrigérés qui permettent d'assurer une température adéquate des aliments entre le point A et le point B? Deuxièmement, le contrôle est-il plus sévère pour les véhicules qui traversent la frontière que pour ceux qui voyagent à l'intérieur du pays?

[Traduction]

M. Laskowski : Merci pour votre question. En ce qui a trait au transport des aliments et des produits réfrigérés, différentes normes sont en place, notamment les normes HACCP. Nous avons également un programme de salubrité des aliments avec Iron Apple, puis il y a les normes exigées par les clients. Comme c'est le cas partout, les normes sont établies par le gouvernement et ne s'adressent pas à la grande majorité des entreprises, que ce soit des expéditeurs ou des transporteurs, parce que les bonnes entreprises savent ce qu'elles ont à faire. Les règles sont habituellement instaurées pour celles qui ne sont pas au courant ou qui choisissent de ne pas y adhérer.

Les normes établies par l'ACIA et la FDA se conforment à des lignes directrices strictes imposées par les fabricants et les organismes gouvernementaux. Les transporteurs eux-mêmes doivent les appliquer. Ils ont des unités réfrigérées. Ils ont des normes à respecter pendant le transport, le chargement et le déchargement. En vertu des nouvelles règles, il faut également tenir un registre pour indiquer que l'on a bien respecté ses engagements.

Les règles au Canada et aux États-Unis sont très semblables et nous aimerions qu'elles le demeurent. Notre plus grande préoccupation n'est pas tant une question gouvernementale — même s'il serait bon que le gouvernement défende notre programme —, mais tient au fait qu'il y a de nombreux transporteurs réfrigérés et certaines nuances entre les programmes. À mesure que les règles de l'ACIA et de la FDA sont plus nombreuses et rigoureuses, nous ne voudrions pas que la chaîne d'approvisionnement commence à s'en écarter. Par exemple, un transporteur pourrait desservir 10 clients et, tout d'un coup, il devrait composer avec 10 programmes — il s'agit d'un grand manque d'efficience. Évidemment, ce n'est pas un problème de salubrité des aliments; ces lignes directrices, nous y adhérons tous, et elles sont sensiblement les mêmes pour tout le monde. Ce sont plutôt les autres aspects.

Lorsqu'on établit des règles, il faut être clair, et il faut qu'il y ait harmonisation et communication. Je pense que c'est le cas au Canada et aux États-Unis.

[Français]

Le sénateur Dagenais : Ma deuxième question s'adresse à Mme Fox. On entend souvent des critiques ou des doléances de la part des transporteurs en ce qui concerne les retards à la frontière. J'imagine, monsieur Laskowski, que votre industrie a sans doute déjà discuté de ces retards. Quelles recommandations pourrions-nous insérer à notre rapport pour améliorer la situation des retards aux frontières pour les transporteurs routiers?

[Traduction]

Jennifer Fox, vice-présidente, Sécurité et douanes, Alliance canadienne du camionnage : De combien de temps disposons-nous?

Le vice-président : Vous avez quelques minutes. Si vous n'avez pas le temps de terminer votre réponse, vous pourriez nous la transmettre par écrit.

Mme Fox : Ce serait un long document.

M. Laskowski : En effet, ce serait un document très volumineux.

Mme Fox : Il y a toute une série de recommandations que nous pourrions formuler concernant les améliorations à la frontière, mais en ce qui a trait aux questions que nous avons soulevées aujourd'hui, dans le cadre du plan d'action Par- delà la frontière, on s'intéresse au concept d'inspection unique et d'admission double. Autrement dit, tout ce qui entre au Canada, en provenance de l'étranger ou des États-Unis, qui a fait l'objet d'une inspection à la frontière ou au périmètre par un organisme serait accepté par l'autre organisme.

Ce n'est pas ce qui se passe à l'heure actuelle, et cela ne s'est pas produit non plus dans le cadre du projet pilote. On a constaté que le Canada et les États-Unis ont des normes d'inspection différentes. Ce qui est acceptable pour un pays ne l'est pas nécessairement pour l'autre. Même si on déploie beaucoup d'efforts pour harmoniser les normes des deux pays en ce qui a trait aux produits agroalimentaires — tous les produits, mais particulièrement les produits agricoles et les produits alimentaires —, cela n'est pas suffisant.

Nous devons en arriver à un point où les examens et les inspections sont reconnus par l'autre pays — où les normes canadiennes sont reconnues aux États-Unis et vice versa. Autrement, on risque de ralentir les choses au 49e parallèle, qu'il s'agisse de biens importés au Canada ou destinés à l'exportation, ou de marchandises qui arrivent de l'étranger et qui transitent par un port canadien pour ensuite être acheminées aux États-Unis.

Les examens et les inspections en double constituent un problème majeur pour notre industrie, mais il y a tellement de choses que nous pourrions faire.

J'aimerais également parler brièvement de la disponibilité des inspecteurs et des examens. Nous n'avons pas encore adhéré au concept d'inspection unique et d'admission double, et nous devons y arriver.

De plus, il faudrait également avoir un endroit où les inspections sont menées en tout temps. Le commerce, la chaîne d'approvisionnement et la logistique fonctionnent 24 heures sur 24, mais malheureusement, ce n'est pas le cas des services offerts par l'ACIA et l'USDA. Par conséquent, les transporteurs de détail ou ceux qui transportent de la viande ou certains produits sont retardés et doivent trouver le moyen de décharger leurs produits dans un établissement sûr, ce qui entraîne des coûts supplémentaires. Souvent, ils doivent dévier de leur trajet et effectuer des détours pour se rendre à un endroit où il y a des inspecteurs ou des installations pour mener ces inspections.

Ce sont les deux principales questions que je voulais aborder. Il y a une panoplie de mesures qui pourraient être prises pour accélérer le processus et réduire les délais d'attente à la frontière.

La sénatrice Tardif : Vous avez soulevé de nombreuses questions — et bon nombre dont je n'étais pas au courant.

Vous avez parlé de la question du cabotage et des difficultés que cela posait à l'industrie du camionnage. Pourriez- vous nous en dire davantage à ce sujet?

M. Laskowski : Bien sûr. Je vais surtout parler des États-Unis, mais en fait, cela s'applique aux deux côtés de la frontière. Les règles sont équitables dans une certaine mesure.

Dans le secteur du camionnage, si on transporte un chargement vers les États-Unis en provenance de n'importe où au Canada et qu'on en décharge le contenu aux États-Unis, lorsque la remorque est rechargée ou qu'on va chercher une autre remorque pour la ramener au Canada, ce camion doit revenir au Canada. On n'est pas autorisé à effectuer des livraisons de marchandises d'un point à un autre aux États-Unis par souci d'efficacité. Par conséquent, si on transporte du bétail ou des aliments, on doit tout de suite retourner au Canada.

Ce n'est pas du tout efficace. C'est un problème de longue date et on considère que cela a une incidence sur les emplois.

Pour ce qui est de l'autre aspect de cette question — l'industrie du camionnage fonctionne de la façon suivante: j'ai une remorque, et conformément au régime qui prescrit les heures de service, mon temps est compté. Je dois charger et décharger le plus rapidement possible, car le temps presse. Il serait plus efficace d'avoir un stationnement pour les remorques. Si l'on passe près d'une installation de chargement, on peut voir les nombreuses remorques qui se trouvent à l'arrière. Parfois, ces remorques sont repositionnées, parce qu'il y a un certain type de remorque qui convient à certains produits et à certains chargements. Les gens déplaceront ces remorques entre les installations.

Il est illégal pour une entreprise canadienne de faire ça aux États-Unis — c'est-à-dire de repositionner l'une de ses remorques vides entre deux destinations. Aux États-Unis, il est illégal, par exemple, pour un transporteur de bétail en provenance du Canada de changer de tracteur routier. Pour des raisons d'abreuvement et d'alimentation et pour des questions liées aux heures de service, cela devient compliqué.

On se retrouve donc avec un tracteur haut-le-pied, c'est-à-dire un camion qui n'est pas attelé à une remorque. Dans certains cas, il peut donc être préférable qu'un autre chauffeur vienne chercher cette remorque avec son tracteur haut- le-pied afin que l'autre chauffeur puisse aller récupérer un autre chargement. Ainsi, on peut nourrir et abreuver le bétail, et cetera, parce qu'il faut respecter les heures de service. Et on se retrouve avec deux fois plus de travail.

La sénatrice Tardif : Pourquoi en est-il ainsi?

M. Laskowski : C'est une question de protection d'emplois.

Si je ne me trompe pas, la loi qui interdit cela aux États-Unis a été adoptée tout de suite après la guerre de Sécession.

La sénatrice Tardif : Oh, mon Dieu.

M. Laskowski : Il s'agit donc d'une habitude qui est très bien implantée.

La sénatrice Tardif : En est-il de même au Canada?

M. Laskowski : Oui. Cependant, comme pour n'importe quelle règle, le problème réside dans l'application. Aux États-Unis, on applique cette règle. Si on décide de ne pas en tenir compte, il y a de fortes chances qu'on doive en payer les conséquences. Au Canada, ce n'est pas le cas.

La sénatrice Tardif : Est-ce que vous transportez des produits ailleurs dans les Amériques? Est-ce que vous vous rendez au Mexique, par exemple?

M. Laskowski : Pour ce qui est du transport au Mexique, il y a 12 ou 15 ans, on entrevoyait cette possibilité. Maintenant, je dirais qu'on peut le faire dans une certaine mesure, pourvu que ce soit dans le cadre d'un accord intercompagnies, ce qui signifie que les Canadiens peuvent transporter une remorque quelque part au Texas, près de la frontière, et la laisser à un transporteur mexicain. Le transporteur mexicain va repartir avec la remorque canadienne, étant donné que c'est une zone de libre-échange, puis se rendra au Mexique pour ensuite la retourner au Canada.

La sénatrice Unger : J'aimerais maintenant aborder un autre sujet, c'est-à-dire la main-d'œuvre qualifiée.

Lors de la réunion annuelle 2016 du Technology and Maintenance Council, certains conférenciers ont souligné la difficulté pour le secteur de recruter des chauffeurs malgré les salaires relativement élevés, de l'ordre de 70 000 à 80 000 $, qui sont offerts. Il y a aussi la question de l'élimination des registres papier et de la formation supplémentaire qui est requise. Il me semble que les camionneurs doivent avoir de plus en plus de connaissances et qu'ils ont davantage de travail à faire.

Pourquoi éprouvez-vous de la difficulté à recruter des chauffeurs routiers? Mis à part ce que vous faites déjà, que peut-on faire pour surmonter ces problèmes?

M. Laskowski : Je crois qu'il y a deux aspects dont il faut tenir compte. Il y a des responsabilités qui reviennent aux transporteurs et d'autres au gouvernement. Je vais commencer par parler des transporteurs.

Tout d'abord, nous vivons dans une société en évolution. Lorsqu'on travaille dans le secteur du camionnage à longue distance, évidemment, on sait qu'on ne verra pas sa famille autant que si on travaillait dans une usine ou dans un bureau. C'est donc un problème avec les jeunes d'aujourd'hui: veulent-ils vraiment ce mode de vie? Le camionnage est un mode de vie. C'est un aspect dont il faut tenir compte.

Et c'est sans compter la situation démographique. Nous avons la main-d'œuvre qui compte le plus de personnes âgées de plus 55 ans au Canada. Par conséquent, la pénurie découle également de cette réalité.

Par ailleurs, au niveau fédéral, malgré nos efforts constants de lobbying, le camionnage n'est pas considéré comme une profession spécialisée. Conformément au code de la CNP, on ne peut pas faire venir les travailleurs qualifiés dont on a besoin. Évidemment, c'est un problème du point de vue de l'immigration. Nous allons continuer de travailler avec le gouvernement fédéral pour y remédier. Nous croyons également qu'il nous incombe en partie de prendre certaines mesures. De nombreuses associations provinciales exercent des pressions auprès des assemblées législatives provinciales, avec divers degrés de succès, afin d'exiger une formation initiale pour les camionneurs. La plupart des provinces considèrent qu'un camionneur n'a besoin que d'un permis de conduire de classe « G ». Elles ne voient pas l'aspect professionnel. Nous voulons que cela change et nous voulons hausser la barre pour tout le monde. Ce n'est pas n'importe qui qui peut être au volant d'un véhicule de 80 000 livres. Il s'agit d'une profession spécialisée qui requiert de la formation. Nous nous en rendons compte. Nous voulons que les gouvernements travaillent avec nous à cet égard, de sorte que les camionneurs soient considérés comme des travailleurs qualifiés, au même titre que les mécaniciens de locomotive ou les conducteurs de bâtiments.

Voilà notre objectif. Je pense qu'il faudra aussi compter sur chaque entreprise pour reconnaître la nouvelle génération et s'adapter. Au bout du compte, l'adaptation reste difficile, parce qu'il sera toujours impossible de raccourcir la distance entre Calgary et Vancouver. L'industrie du camionnage n'est pas la seule à se heurter à cette difficulté. Mais je pense que nous avons un bon plan et que, en nous associant aux gouvernements des provinces et au gouvernement fédéral, nous pouvons améliorer la situation.

La sénatrice Unger : J'ai une deuxième question concernant la suppression des fiches journalières en papier des conducteurs. Vous dites que les fiches électroniques peuvent créer des problèmes de planification et des problèmes pour l'abreuvement et l'alimentation des animaux. D'une certaine manière, elles introduisent plus de complexité que les fiches de papier. Les fiches électroniques semblent comporter des problèmes.

M. Laskowski : J'ai voulu rester très poli.

La sénatrice Unger : D'accord.

M. Laskowski : Disons que les fiches de papier permettent une certaine créativité, que ne permettent pas les fiches électroniques.

En ce qui concerne les produits de consommation, les règlements visent la sécurité des conducteurs. Officiellement, je tiens à souligner que nous sommes absolument d'accord; en fait, c'est notre groupe qui a mené l'offensive pour les fiches électroniques. Nous sommes absolument pour. Cela étant dit, il se présente des situations, particulièrement avec le bétail, qu'il faut examiner. Les bovins ou les porcins, il faut les abreuver, leur accorder un repos convenable. Selon la voie où on circule, cela, parfois, ne correspond pas aux règles sur les heures de service qu'il faut respecter pour les besoins de la sécurité. Les fiches électroniques le noteront. Ce n'est pas comme transporter un appareil de télévision, qui n'a pas besoin de repos. Ça dépend aussi de la voie.

L'un des principaux problèmes que nous éprouvons au Canada, contrairement aux États-Unis, concerne ces endroits où les camionneurs s'arrêtent pour nourrir, abreuver et soigner les animaux. Au Canada, c'est épouvantable. Aux États-Unis, c'est mieux. En conséquence, ça cause moins un problème quand on utilise des fiches électroniques, parce qu'on peut respecter toutes les règles. Mais si les distances entre les arrêts pour abreuver et faire reposer les animaux au Canada sont plus longues, ça cause des difficultés avec les fiches électroniques. Une analyse s'impose ici, parce que personne ne préconisera de réduire la sécurité routière, mais nous devons respecter les droits des animaux que nous transportons. Il faut concilier les deux. Il faut examiner la situation.

Comme vous l'avez justement fait remarquer, ça ajoute de la complexité, mais ça élimine la créativité et le jugement. Ça dit simplement ce qu'il faut faire. Les choses sont tirées au clair entre l'organisme de réglementation, celui qui fait respecter la loi et le camionneur. Nous allons nous conformer à ces règles dans ces voies. Ça peut fonctionner.

La sénatrice Unger : Ces lieux où on permet aux animaux de se reposer, à quoi ressemblent-ils? Faut-il les faire descendre des camions puis les y faire remonter?

M. Laskowski : Oui.

La sénatrice Unger : Comment les conducteurs se tirent-ils d'affaire?

M. Laskowski : Ce sont des conducteurs spécialisés, en partie éleveurs et en partie camionneurs professionnels. Ils doivent connaître les deux métiers. C'est malheureux, parce que certains expéditeurs qui les embauchent ne respectent pas vraiment le bagage de compétences qu'ils apportent.

Cela étant dit, effectivement, ces lieux ressemblent vraiment à de petites fermes. Aux États-Unis, particulièrement, ils sont très propres, hygiéniques. Il y en a au Canada, qui se trouvent dans un état épouvantable, et il faut s'attaquer à ce problème.

Le vice-président : Je vais résister à la tentation de digresser. J'ai passé deux jours, cette semaine, à Toronto, à une conférence du Conference Board du Canada sur les véhicules sans conducteur, y compris les camions de transport sans conducteur et les conséquences de cette technologie. Je n'en dirai pas davantage, mais je voulais attirer votre attention sur cette manifestation, si cela devait vous intéresser.

La sénatrice Beyak : Ma petite sœur, maintenant à la retraite, a conduit des camions à 18 roues pendant de nombreuses années avec un ami. Ils formaient une équipe. Ils adoraient cela. Je vous remercie pour votre professionnalisme, vos merveilleuses équipes et le service que vous fournissez.

Votre exposé a été excellent, y compris sur les difficultés actuelles et vos recommandations. J'espère sûrement que notre comité pourra vous aider.

Ma question, Jennifer, j'espère que vous la comprendrez, parce que, comme pour la sénatrice Tardif, le sujet est très nouveau pour moi. L'Agence des services frontaliers du Canada est présente, partout au pays, à tous les postes frontaliers. L'Agence canadienne d'inspection des aliments, comme vous l'avez dit, n'est pas présente en permanence à de nombreux postes. Est-il possible de former certains des agents des services frontaliers pour assurer une présence permanente à chaque poste frontalier? Je m'en remets à votre expertise.

Mme Fox : À ce que je sache, les agents de l'ASFC sont désignés, par l'ACIA, pour effectuer des inspections en son nom et ils sont formés à cette fin. C'est comme les douanes américaines; elles font des inspections au nom du ministère de l'Agriculture des États-Unis. Des agents particuliers des deux agences des deux pays sont désignés pour faire des inspections au nom de l'organisme national respectif.

Les problèmes découlent du fait que, à la frontière, les inspecteurs faisant les inspections de l'ACIA agissent conformément à l'ACIA, mais leurs actions pourraient ne pas être reconnues par l'USDA ou la FDA. Voilà où commencent les difficultés.

De plus, ce n'est pas le mandat premier de l'ASFC. Il pourrait survenir, mais je ne dis pas que c'est le cas, des difficultés découlant d'un mandat qui n'est pas le mandat premier de l'organisme. Je ne dis pas non plus que ces agents ne prennent pas leur travail au sérieux, mais il incombe à l'ACIA de s'assurer que ces discussions sur la réciprocité aient lieu avec l'APHIS et l'USDA. Il n'incombe pas à l'ASFC ni au CBP de s'assurer de l'harmonisation de leurs examens et de leurs heures de service.

La sénatrice Beyak : Pourriez-vous entrevoir un rôle pour l'USDA, l'ACIA et l'ASFC, pour créer entre eux une organisation plus efficace?

Mme Fox : Absolument. Je pense que c'est l'objectif vers lequel nous devons tendre. Il a été troublant d'entendre la réaction de l'ACIA, quand, récemment, elle a annoncé ses exigences concernant les marchandises transitant par le Canada et qu'elle en a discuté avec l'Alliance canadienne du camionnage. Quand nous lui avons demandé si elle avait approché les douanes américaines pour s'assurer qu'on n'oubliait pas de tenir compte des exigences de l'APHIS et de l'USDA, elle a répondu que la question était hors de propos, que c'était un sujet de discussion entre le gouvernement du Canada et celui des États-Unis et que, pour le moment, ça ne faisait pas partie de ses sujets de préoccupation.

C'est malheureux, parce que c'est dès le début qu'on devrait organiser ces discussions, alors qu'on cherche de nouvelles initiatives et qu'on risque d'ériger des obstacles au commerce.

Le sénateur Oh : Merci pour votre exposé intéressant sur l'industrie du camionnage.

Ma question concerne la reconnaissance du programme de l'alliance par le gouvernement américain, le gouvernement canadien et la chaîne logistique. Qui dirige ce programme? Quelle est sa longueur? Est-ce qu'un collège communautaire le dirige?

M. Laskowski : Je vais vous en donner un aperçu et peut-être que Jennifer pourra vous donner plus de détails sur le programme Iron Apple.

Il a été organisé par l'industrie du camionnage, d'autres membres de la chaîne logistique et l'ACIA il y a une dizaine d'années. Sa grande qualité est d'être évolutif, et il vise à aider les entreprises de camionnage à se conformer à ce que nous prévoyions être les règles à venir sur les questions sanitaires et sur celles de transport et de réfrigération — au Canada comme aux États-Unis.

Jennifer, peut-être pourriez-vous donner des explications sur le programme lui-même.

Mme Fox : Nous avons élaboré le programme Iron Apple en collaboration avec les transporteurs routiers. Le programme a été élaboré par notre alliance et ceux de nos membres qui, actuellement, transportent des aliments et des produits alimentaires. Nous l'avons soumis à l'examen de l'ACIA, pour nous assurer qu'il respectait tous les règlements, recommandations ou politiques qu'elle recommanderait sous le régime de la Loi sur la salubrité des aliments au Canada. Il reposait aussi sur les discussions préliminaires de l'agence avec les États-Unis pour déterminer que nous ferions notre part du travail et que nous nous assurerions de faire le nécessaire pour que les transporteurs répondent à toutes les attentes exprimées à leur égard par les expéditeurs.

Nous avons élaboré le programme, mais il est offert et administré par l'entremise d'Iron Apple. Nous n'avons tout simplement pas les ressources pour le faire à l'interne. Même si nous l'avons élaboré, il en est le propriétaire, il l'administre et il l'offre aux transporteurs routiers. Cela répond-il à votre question?

Le sénateur Oh : Oui.

Est-ce que l'industrie du camionnage affrontera une pénurie de main-d'œuvre si les nouveaux accords commerciaux entrent en vigueur, par exemple le Partenariat transpacifique? Comment entrevoyez-vous l'aide éventuelle des travailleurs temporaires de l'étranger?

M. Laskowski : Ces dernières années, la question des travailleurs étrangers temporaires s'est intégralement posée à nous tous. Notre industrie utilise effectivement les services du Programme pour l'embauche de travailleurs étrangers temporaires. Ses utilisateurs sont dispersés partout au pays. Nous avons été en mesure de trouver une solution de compromis concernant l'accessibilité permanente de ce programme.

La réponse à votre question est oui, l'industrie et certains de ses participants voudraient conserver un accès au programme. C'est important, et, pour certains transporteurs, c'est indispensable, selon l'endroit où ils se trouvent, selon la disponibilité du personnel, et cetera.

Nous voudrions notamment que s'installe un processus évolutif entre le programme et le statut de résident permanent. Le camionnage est, comme nous l'avons dit, une profession spécialisée. Si vous et moi avions chacun notre entreprise de camionnage, la formation que vous donneriez à vos employés et les produits que vous transporteriez seraient différents des miens. Si un de mes excellents employés allait travailler pour vous, il lui faudrait quand même de six à huit mois pour comprendre vos systèmes, vos procédés et connaître vos clients. Dans le cadre du Programme pour l'embauche de travailleurs étrangers, qui est bisannuel, vous ne disposeriez que pendant un an d'un employé digne de confiance, que vous pourriez envoyer sur la route sans inquiétude.

Ce que les entreprises de camionnage et, j'en suis sûr, beaucoup d'autres voudraient, c'est la possibilité d'une douce transition entre le travailleur étranger temporaire et le résident permanent, parce que, pendant cette année, le travailleur et l'employeur peuvent déjà être fixés. Le travailleur peut avoir l'intention de rester au Canada, de remplir les formalités qui restent pour devenir citoyen canadien. L'employeur peut vraiment apprécier le travailleur et peut vouloir qu'il reste. Mais il se demande quoi faire. C'est alors qu'ils sont pris entre des services qui se renvoient la balle. Il y a tels formulaires à remplir, telles et telles périodes à respecter.

De bonnes personnes, sûrement, travaillent dans les bureaux chargés des travailleurs étrangers temporaires et dans ceux qui sont chargés des résidents permanents, mais c'est pour des ministères différents qui emploient des processus différents. Nous voudrions un processus continu, qui fonctionnerait presque comme un oléoduc, avec facilité et douceur. Le Canada alors y gagnerait.

Que voulons-nous? Nous savons de source sûre que les personnes qui s'intègrent dans la société et qui sont rapidement rentables pour le Canada, grâce à l'emploi qu'ils occupent, sont les travailleurs étrangers temporaires, parce qu'ils ont un emploi, qu'ils connaissent le système et qu'ils ont vécu ici.

Ce serait une belle occasion à saisir, et notre industrie réserverait certainement un bon accueil à un programme pilote qui faciliterait cette transition harmonieuse entre le travailleur étranger temporaire et le citoyen canadien, en passant par le résident permanent.

Le sénateur Oh : C'est important. Très bien. Merci.

Le vice-président : Madame Fox et monsieur Laskowski, je vous remercie d'avoir été ici. J'ai une question qui n'a pas été posée. Quand vous avez parlé des véhicules qui descendent jusqu'au Texas où quelqu'un du Mexique prend en charge la cargaison, pourquoi ne poursuivent-ils pas jusqu'au Mexique?

M. Laskowski : C'est une question de sécurité et de santé.

Le vice-président : C'est ce que j'avais laissé entendre à mon collègue.

M. Laskowski : Je tiens cette histoire d'un de nos membres. Nous en rions maintenant, 15 ans plus tard. Il avait essayé de descendre jusqu'au Mexique. Il a perdu de très nombreuses pièces d'équipement en cours de route. Il y a deux ou trois ans, il y retourne, en vacances, et il aperçoit l'un de ses camions passer devant lui.

C'est, actuellement, peut-être la meilleure chose à faire. Pour sa sécurité et sa santé.

La sénatrice Unger : J'ai une petite question supplémentaire. Pour entrer au Mexique et en sortir, faut-il respecter un ensemble différent de règles? Faut-il tout recommencer à zéro?

M. Laskowski : Jennifer, peut-être voudriez-vous parler de l'immigration. C'est très compliqué.

Mme Fox : Pour entrer au Mexique et en sortir, les règles sont différentes, mais nos membres ne sont pas obligés de passer par là, parce qu'ils ne se rendent pas au Mexique. Différents ensembles de règles régissent le transport entre le Canada et les États-Unis et, à elles seules, elles sont extrêmement lourdes et irritantes. Nous recevons continuellement des appels de nos chauffeurs, nouveaux et anciens, qui nous interrogent sur leur séjour aux États-Unis et leur retour au Canada ou vice versa. Ils veulent savoir comment faire. La réponse prendrait des journées. Il faut un cours pour comprendre, parce que ce n'est pas une mince tâche. Il y a tellement de règlements et une absence très réelle d'harmonisation entre les deux pays, pour le camionnage du Canada vers les États-Unis et de retour au Canada. Les exigences sont très différentes. Ce n'est facile à comprendre par aucun chauffeur.

La sénatrice Unger : Est-ce encore plus compliqué au Mexique?

Mme Fox : Oui, si un transporteur voulait aller du Canada aux États-Unis puis de ce pays au Mexique. C'est un troisième ensemble d'exigences. Effectivement, cela ajouterait des complications de plus.

Le vice-président : Madame Fox, monsieur Laskowski, merci beaucoup. Votre prestation a été très intéressante, très instructive. Vous avez apporté beaucoup à notre étude. Nous vous en sommes reconnaissants. Nous vous remercions d'avoir été ici.

Chers collègues, nous allons rapidement passer à un autre sujet.

M. Laskowski : Je tiens à remercier votre personnel. Merci à vous tous, à vous aussi, manifestement. Nous avons eu, avant d'entrer, une mini crise à régler, et votre personnel s'est révélé d'une aide tellement extraordinaire. Je tenais seulement à vous le dire à tous. Nous y avons été très sensibles.

Le vice-président : Eh voilà. Nous savions que ce sont des gens exceptionnels.

Chers collègues, vous vous souviendrez que M. Jim Goetz, de l'Association canadienne des boissons, est venu témoigner devant le comité il y a quelques jours. M. Goetz nous a fait parvenir une lettre, au sénateur Maltais et moi, président et vice-président du comité. J'aimerais vous la lire aux fins du compte rendu. Je demanderai ensuite au sénateur Ogilvie d'intervenir. Je ne crois pas qu'il soit nécessaire par la suite de débattre de la lettre ou d'en discuter.

M. Goetz commence par nous remercier. Il enchaîne ensuite en disant ceci :

J'aimerais revenir sur des commentaires formulés dans le cadre de la période des questions de la séance du 12 avril 2016, puisque comme toutes les délibérations des comités, ces commentaires seront publiés.

À la page 11 des délibérations de ladite séance, il est écrit qu'en référence à un rapport publié récemment par le Sénat sur l'obésité, notamment à une des recommandations formulées, j'aurais dit : « Ce qui est intéressant au sujet de ce rapport, c'est que la taxe sur le sucre s'appliquerait à des produits qui ne contiennent pas de sucre ni de calories. Cette boisson que j'ai ici est une boisson gazeuse, mais elle ne contient ni sucre ni calories... » La boisson à laquelle je faisais référence était une boisson gazeuse diète.

En réponse à ce commentaire, on peut lire dans les délibérations (toujours à la page 11) que le sénateur Ogilvie a dit: « Je suis l'auteur de ce rapport, et ce que vous dites est totalement faux. Nous recommandons d'imposer une taxe sur les boissons sucrées, les boissons gazeuses, et tout ce qui est riche en sucre. » Il poursuit, un peu plus loin, en ajoutant: « [...] nous recommandons uniquement une taxe sur les boissons sucrées. Nous ne recommandons pas de taxer autre chose. » Finalement, le sénateur Ogilvie déclare: « J'aimerais que le témoin lise bien le rapport [...]. »

À la suite de cette intervention du sénateur Ogilvie, d'autres sénateurs ont pris la parole pour poser leurs questions.

Je tiens à souligner humblement que la Recommandation 3 qui figure à la page 24 du rapport du Comité sénatorial permanent des Affaires sociales, des sciences et de la technologie intitulé L'obésité au Canada: Une approche pansociétale pour un Canada en meilleure santé dit ceci :

Le comité recommande au gouvernement fédéral :

[...] d'évaluer les mesures fiscales envisageables en vue de mettre en place une nouvelle taxe sur les boissons sucrées/édulcorées, de même que les boissons contenant des édulcorants de synthèse [...].

Le libellé de la recommandation est clair: une telle taxe s'appliquerait également aux boissons ne contenant ni sucre ni calories, comme je l'ai souligné lors de ma comparution.

Au nom de l'Association canadienne des boissons et de ses membres, je demande respectueusement que le comité prenne les mesures nécessaires pour corriger le compte rendu officiel afin de souligner que mon commentaire était exact. Nous demandons à ce que la présente soit lue aux fins du compte rendu lors de la prochaine séance du comité à titre de correction officielle.

Comme toutes les associations commerciales, l'Association canadienne des boissons tire beaucoup de fierté de la crédibilité dont elle jouit auprès de ses membres. Nous ne pouvons pas laisser passer cette fausse accusation et cette erreur.

Puisque nous avons déjà convenu qu'aucun compte rendu ne serait modifié, le compte rendu de la séance concernée ne sera pas modifié. Toutefois, j'ai lu la lettre afin qu'elle figure au compte rendu de la présente séance. Je vais maintenant laisser la parole au sénateur Ogilvie quelques instants, après quoi nous poursuivrons.

Le sénateur Ogilvie : Chers collègues, ceux d'entre vous qui étaient là se souviendront que le témoin parlait d'une taxe qui s'appliquerait à plusieurs produits contenant du sucre, y compris, notamment, les confitures.

J'aimerais dire deux choses au sujet de ma déclaration sur une taxe applicable aux produits contenant du sucre. Premièrement, j'ai émis ce commentaire en réponse à la position du témoin sur la taxation d'une variété de produits contenant du sucre. Dans ce contexte, notre rapport recommande uniquement une taxe sur les boissons sucrées en tant que produit sucré.

Deuxièmement, une taxe sur le sucre, si c'est le terme que vous souhaitez employer, ne peut s'appliquer que sur des produits contenant du sucre.

Nous avons également recommandé une taxe applicable aux boissons contenant des édulcorants de synthèse. Dans l'ensemble, nous recommandons au gouvernement fédéral d'évaluer diverses mesures fiscales possibles en vue de mettre en place une nouvelle taxe sur les produits sucrés et les boissons contenant des édulcorants de synthèse.

S'il s'agit d'une taxe sur le sucre, elle ne s'appliquerait qu'aux produits contenant du sucre. S'il s'agit d'une taxe sur les boissons sucrées, elle s'appliquerait également aux boissons contenant des édulcorants de synthèse.

Monsieur le président, je crois que cela précise l'intention derrière le rapport du comité des affaires sociales. Cela explique également mes réponses aux commentaires formulés par le témoin.

Le vice-président : Merci, sénateur Ogilvie. Je crois que c'est très clair. Je vous remercie de ces précisions et de votre coopération.

La séance est levée jusqu'à notre prochaine réunion qui aura lieu dans deux semaines.

(La séance est levée.)

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