Délibérations du Comité sénatorial permanent de
l'Agriculture et des forêts
Fascicule no 22 - Témoignages du 2 février 2017
OTTAWA, le jeudi 2 février 2017
Le Comité sénatorial permanent de l'agriculture et des forêts se réunit aujourd'hui, à 9 h 2, pour poursuivre son étude sur l'acquisition des terres agricoles au Canada et ses retombées potentielles sur le secteur agricole.
Le sénateur Ghislain Maltais (président) occupe le fauteuil.
[Traduction]
Le président : Nous poursuivons notre étude sur l'acquisition des terres agricoles au Canada et ses retombées potentielles sur le secteur agricole.
Ce matin, nous accueillons M. Michael Devanney, analyste principal des politiques au ministère de l'Agriculture du gouvernement de la Nouvelle-Écosse.
Avant d'entamer nos travaux, je demanderais aux sénateurs de se présenter, à commencer par le vice-président.
Le sénateur Mercer : Je suis le sénateur Terry Mercer, de Nouvelle-Écosse.
La sénatrice Beyak : Je suis la sénatrice Lynn Beyak, de l'Ontario.
[Français]
Le sénateur Cormier : Sénateur René Cormier, du Nouveau-Brunswick. Je remplace la sénatrice Bernard.
[Traduction]
Le sénateur Plett : Bonjour. Je m'appelle Donald Plett et je suis du Manitoba.
Le sénateur Woo : Je suis le sénateur Woo, de la Colombie-Britannique.
Le sénateur Oh : Victor Oh, de l'Ontario.
[Français]
Le sénateur Pratte : André Pratte, du Québec.
Le sénateur Dagenais : Bonjour. Jean-Guy Dagenais, du Québec.
[Traduction]
Le sénateur Ogilvie : Kelvin Ogilvie, de la Nouvelle-Écosse.
[Français]
Le président : Mon nom est Ghislain Maltais, et je suis président du comité. Bienvenue.
[Traduction]
La parole est maintenant à vous.
Michael Devanney, analyste principal des politiques, ministère de l'Agriculture, gouvernement de la Nouvelle-Écosse : Merci beaucoup de m'accueillir aujourd'hui pour vous informer du contexte en Nouvelle-Écosse au nom de l'honorable Keith Colwell, ministre de l'Agriculture. Je vais d'abord vous donner un bref aperçu de l'industrie agricole de Nouvelle-Écosse ainsi que de nos terres agricoles.
En 2005, l'industrie agricole de Nouvelle-Écosse a généré des recettes monétaires agricoles de quelque 580 millions de dollars. Environ la moitié de notre industrie est soumise à la gestion de l'offre. Comparativement à la moyenne canadienne, le secteur agricole de Nouvelle-Écosse est relativement modeste et diversifié. Le dernier recensement, celui de 2011, a révélé que nous avions environ 3 900 fermes et que nous étions la seule province au pays dont le nombre de fermes a augmenté depuis le recensement de 2006.
Cependant, si nous prenons certaines de nos banques de données administratives dans la province, nous avons 2 600 fermes enregistrées, dont 70 p. 100 signalent des ventes inférieures à 50 000 $. Précisons que nombre de ces fermes — la vaste majorité en fait — sont de petites installations agricoles.
En ce qui concerne la superficie des fermes, selon le dernier recensement, elle totalise 412 000 hectares. C'est un peu trompeur, car ce nombre englobe les terres boisées et les marécages. Lorsque nous les retranchons, il nous reste environ 135 000 hectares de terres agricoles en tant que telles.
Quant aux terres arables, c'est-à-dire les terres qui pourraient être cultivées, mais qui ne le sont pas nécessairement, elles couvrent environ 30 p. 100 de la masse terrestre totale de la Nouvelle-Écosse. Nos meilleures terres, celles qui sont répertoriées dans l'Inventaire des terres du Canada — les terres CL1 2, car nous n'avons pas de terres CLI 1 dans la province — représentent environ 3 p. 100 de la masse terrestre provinciale.
En conséquence, de ces meilleures terres, c'est-à-dire les CLI 2, 29 p. 100 sont cultivées, 7 p. 100 sont utilisées en zone urbaine, et les autres se trouvent à l'état naturel ou comme forêts cultivées. Comme deux des sénateurs le savent sûrement fort bien, un des avantages de la Nouvelle-Écosse est que notre ville la plus importante, Halifax, est sise, en gros, sur du granit et n'a pas vraiment d'incidence sur les terres agricoles. Une bonne partie de nos meilleures terres se trouvent à moins d'une heure de route d'Halifax et aussi à proximité des autres centres urbains.
Un autre facteur important en Nouvelle-Écosse, surtout quand on tient compte de la politique publique, est que nous avons le deuxième pourcentage le plus élevé de terres privées dans tout le pays après l'Île-du-Prince-Édouard, soit 70 p. 100.
Une bonne partie de nos terres arables et de nos terres agricoles se trouvent près de la côte et auraient un grand attrait pour le développement non agricole. Je vous ai envoyé ces points de discussion ce matin; vous pourrez donc vous reporter à votre guise aux cartes et aux tableaux qu'ils contiennent.
Passons maintenant au mandat du comité dans l'ordre de renvoi, en particulier en ce qui concerne le premier point, les raisons qui expliquent la hausse de la valeur des terres agricoles canadiennes. En Nouvelle-Écosse, la valeur des terres et des bâtiments agricoles augmente depuis les 40 dernières années. Selon le rapport de Financement agricole Canada, que vous connaissez tous, la valeur des terres agricoles de la Nouvelle-Écosse a augmenté de 7 p. 100 en 2014 et de 6,3 p. 100 de plus en 2015. Les terres agricoles néo-écossaises ont pris de la valeur tous les ans au cours de la dernière décennie.
Selon le rapport, on a remarqué une hausse de la valeur des propriétés dans chaque région de la Nouvelle-Écosse, mais particulièrement dans l'Ouest, où se trouve la vallée de l'Annapolis, notre grenier. La concurrence pour les terres était élevée, et les parcelles mises en vente ne restaient pas sur le marché bien longtemps. Les acheteurs allaient des agriculteurs désireux d'élargir leurs opérations aux retraités en quête de propriétés où vivre.
Les renseignements supplémentaires que nous avons recueillis en Nouvelle-Écosse indiquent que les terres qui valent le plus se trouvent dans la vallée de l'Annapolis, où elles se vendent environ 10 000 $ l'acre. Les vignobles établis vont chercher des prix élevés l'acre, bien que les ventes n'aient pas été nombreuses. Les transactions de vignobles établis sont rares. Les coûts d'établissement se situent entre 34 000 $ et 38 000 $ l'acre, ce qui fait vraiment grimper les prix.
Les prix des terres varient grandement selon l'endroit où elles se situent dans la province, la qualité du sol et le climat, et s'il s'agit de terres à bleuets, car les bleuets constituent une part importante de notre industrie. L'industrie a récemment souffert d'un cycle de prix bas — 35 cents la livre —alors que le seuil de rentabilité est d'environ 55 cents la livre. Bien que l'on s'attende à ce qu'il s'agisse d'une question à court terme pour le secteur, il est clair que cela joue sur la valeur des terrains en Nouvelle-Écosse.
Pour réitérer un point auquel j'ai fait allusion plus tôt, les terres agricoles près de la côte peuvent aller chercher des prix plus élevés pour le développement non agricole, les lotissements et les chalets.
La valeur des terres agricoles dépend, bien entendu, des changements aux facteurs relatifs à l'offre et à la demande. Nous ne sommes pas en mesure de prouver objectivement l'importance de chaque facteur, mais voici des observations générales concernant notre province.
Je sais que le comité s'est intéressé aux achats effectués par des acheteurs étrangers. Nous avons jeté un coup d'œil à notre banque de données sur la propriété et avons trouvé 18 propriétés qui ont été achetées par une société d'investissement agricole, totalisant un peu plus de 1 000 acres. Cela semble aussi être un phénomène relativement nouveau, puisque tous les achats datent d'après 2015. Toutes les propriétés se trouvaient dans la vallée de l'Annapolis qui, encore une fois, est notre principale région agricole.
En ce qui concerne la propriété étrangère, nous demandons aussi aux avocats spécialisés en droit immobilier de nous dire si un nouveau propriétaire est un résident de la Nouvelle-Écosse ou pas. Il ne s'agit pas d'un processus vérifié ou réglementé, mais si on en juge par les statistiques dont on dispose concernant cette initiative, on peut voir que si on considère les propriétaires étrangers simplement comme des non-résidents de la Nouvelle-Écosse qui viennent d'ailleurs au Canada, il semble y avoir une hausse des terres agricoles qui ont été achetées par ces acheteurs, comme en témoigne le registre de 42 propriétés vendues, pour un total de quelque 2 000 acres en 2015.
Lorsqu'on considère que les achats étrangers ont été effectués par des acheteurs non canadiens, la tendance est plus difficile à dégager, mais au cours des 10 dernières années, nous avons vendu en moyenne cinq propriétés par année à ces acheteurs, ce qui représente en moyenne 225 acres.
J'ai quelques autres points empiriques à faire valoir. La demande de fermes cherchant à élargir leur assise territoriale ou à accroître leur production est un facteur. Encore une fois, l'essor du secteur du raisin et du vin est un facteur, ainsi que la réinvention de notre secteur de la pomme. On s'est beaucoup efforcé de replanter des variétés à valeur ajoutée comme les pommes Honeycrisp, et une source a estimé qu'un verger de pommes Honeycrisp pourrait se vendre 30 000 $ l'acre. En outre, les terres agricoles sont de plus en plus divisées en lotissements ou utilisées pour le développement non agricole.
En ce qui concerne le deuxième point dans l'ordre de renvoi, celui sur les préoccupations des intervenants du secteur agricole et les défis auxquels ils sont confrontés, je crois que vous avez parlé au président de la Fédération de l'agriculture de la Nouvelle-Écosse, alors il vous l'a peut-être déjà dit, mais la fédération a un énoncé de politique disponible en ligne concernant la protection des terres agricoles. Elle cherche un programme bien rodé pour protéger les terres agricoles, y compris un système de crédits fonciers, aucun impôt sur les terres agricoles, l'accès aux terres de la Couronne à des fins agricoles et du soutien à la relève pour les nouveaux agriculteurs qui achètent des terres et entrent dans le secteur. Le mandat de notre ministère de l'Agriculture compte deux ou trois points se rapportant aussi précisément à la protection et à la conservation des terres agricoles.
Si je devais donner un thème aux préoccupations générales, je dirais qu'elles se rapportent à la capacité des nouveaux agriculteurs et des agriculteurs actuels d'avoir accès aux terres. Bien entendu, les coûts à la hausse représentent un obstacle, ainsi que la capacité de trouver des terres de taille appropriée, et l'accès aux marchés et à l'infrastructure.
Une autre question de la Fédération de l'agriculture concerne les terres agricoles inactives qui bénéficient d'une exonération fiscale. Elle cherche à régler cette question. Il y a aussi la capacité de pouvoir payer l'entretien de notre système de digues. Une bonne partie de nos meilleures terres sont protégées par un système de digues sur la baie de Fundy et, bien sûr, c'est une préoccupation importante en raison des changements climatiques et de l'augmentation du niveau de la mer.
Le dernier point porte sur la perte et la fragmentation générales des ressources des terres agricoles. J'ai des statistiques approximatives là-dessus. Peut-être que je vais laisser tomber, si vous avez des questions. Je sais que la partie présentations de ce comité est censée être relativement courte pour donner aux membres beaucoup de temps pour poser des questions. Si vous êtes intéressés, je peux vous donner des chiffres précis à ce sujet.
En ce qui concerne le troisième point à l'ordre de renvoi, qui porte sur les solutions potentielles, je vais vous donner un peu de contexte en ce qui touche nos politiques actuelles en matière de protection des terres agricoles en Nouvelle- Écosse. Il y en a quatre. Nous avons une déclaration d'intérêt provincial concernant les terres agricoles qui donne à la province un rôle de surveillance lors de l'élaboration et de la finalisation de nouvelles stratégies municipales de planification pour les étudier dans une optique agricole. C'est notre principal outil.
En outre, nous avons une exemption à l'égard de l'impôt foncier sur les terres agricoles, mais pas les bâtiments, ainsi que le potentiel de percevoir un impôt de changement d'usage de 20 p. 100 lorsque les terres cessent d'être utilisées à des fins agricoles. Troisièmement, nous avons des servitudes de conservation agricoles, alors cela se rapporte aux fiducies foncières et aux systèmes de crédit foncier; et quatrièmement, nous avons l'Agricultural Marshland Conservation Act. C'est ce qui se passe actuellement en ce qui touche les politiques de protection des terres agricoles dans la province.
Il est clair que la question de la protection et de la conservation des terres agricoles est dans notre point de mire depuis les 5 à 10 dernières années. Il y a eu deux rapports publics et un rapport interne à ce sujet, dans lesquels ont été formulées 60 recommandations ou possibilités concernant un rôle public de protection ou de conservation de nos terres agricoles. À l'heure actuelle, le député provincial Keith Irving et moi-même examinons ces 60 recommandations pour déterminer lesquelles sont les plus pertinentes et prioritaires.
Enfin, voici les possibilités à l'échelon fédéral, mais pas classées par ordre de priorité : premièrement, une meilleure cartographie fédérale. Un des principaux défis relatifs à la protection des terres agricoles est le simple fait de disposer de bons renseignements. Nous avons des sources décentes, mais pas toutes au niveau que nous aimerions voir. C'est un défi de taille, notamment pour une petite province comme la Nouvelle-Écosse, de consacrer de l'argent et du temps à obtenir ces renseignements, et nous pensons que le gouvernement fédéral pourrait faire preuve de leadership dans ce secteur.
Agriculture et Agroalimentaire Canada a déjà lancé d'importantes initiatives dans ce secteur, bien que, pour autant que je sache, elles ne sont pas tout à fait au niveau que nous pouvons utiliser ici en Nouvelle-Écosse. Il nous serait très utile que l'on affecte plus de ressources à cette question.
Du financement fédéral supplémentaire pour les digues. J'ai mentionné que notre système de digues protège une quantité appréciable de nos meilleures terres agricoles, et il est très difficile de payer l'entretien et les mises à niveau nécessaires pour répondre aux normes en matière de changements climatiques. Aux termes d'une estimation, il coûterait entre 170 millions et 230 millions de dollars pour mettre à niveau notre système de digues selon les normes de 2055, ce qui représente, évidemment, un immense fardeau financier pour notre petite province.
Un programme fédéral de dons écologiques serait aussi très avantageux pour assurer la protection des terres agricoles. Il existe un programme semblable pour les terres importantes au plan écologique au Canada qui a été donné à une fiducie foncière. Le principal avantage de ce programme est qu'il prévoit une période de report du remboursement de taxes étalé sur 10 ans et l'élimination de l'impôt sur les gains en capital lorsque les terres sont données ou inscrites dans une servitude de conservation. Si nous pouvions étendre cet avantage non seulement aux terres importantes au plan écologique, mais aussi au plan agricole, cela permettrait au rôle de servitude de conservation des fiducies foncières/crédits fonciers d'avoir une incidence beaucoup plus marquée sur la protection de nos terres agricoles.
Le financement en général pour les crédits fonciers et les fiducies foncières. Nous avons un crédit foncier agricole qui en est à ses premiers balbutiements en Nouvelle-Écosse. Il s'agit d'un petit organisme qui fait d'importantes avancées, mais pour lequel il est très difficile de trouver les ressources nécessaires pour s'inscrire dans une servitude de conservation, payer les frais juridiques et assurer la surveillance de la servitude. Il serait utile d'affecter du financement à ce secteur.
Ensuite, bien entendu, la meilleure façon de conserver les terres et l'agriculture est, comme vous le savez, de faire en sorte que le secteur agricole soit profitable; bien sûr, le soutien au prochain cadre stratégique joue un rôle de premier plan à cet égard.
C'est tout pour mes points de discussion. Je vais garder le plus de temps possible pour répondre à des questions. Merci.
Le président : Merci beaucoup, monsieur Devanney.
Le sénateur Mercer : Merci de votre présentation, monsieur Devanney. J'ai deux ou trois questions brèves à vous poser. Quel a été l'effet de la vente ou de la fusion — quelle que soit la façon dont vous voulez décrire la chose — des deux principales laiteries de Nouvelle-Écosse sur le plan de l'utilisation des terres, étant donné qu'elles travaillent toutes les deux avec des sociétés à l'extérieur de la province? Quel effet cela a-t-il eu sur l'utilisation des terres?
M. Devanney : Honnêtement, sénateur Mercer, je ne suis pas prêt à me prononcer là-dessus pour l'instant. Ce n'est pas une question sur laquelle je m'étais personnellement penché pour cette réunion. N'hésitez pas à faire un suivi auprès de nous après la réunion, mais je ne suis pas préparé à vous donner de réponse à ce sujet en ce moment.
Le sénateur Mercer : J'aimerais que vous le fassiez à une date ultérieure, si vous le pouvez.
M. Devanney : Oui.
Le sénateur Mercer : Vous avez mentionné le secteur du raisin et du vin, et ceux d'entre nous qui vivons en Nouvelle- Écosse, en particulier près des collectivités agricoles, savons que cette industrie a connu une croissance importante, surtout dans la vallée d'Annapolis, où la culture du raisin se remarque davantage. Quelles cultures remplacent les raisins? La plupart des terres étaient cultivées par le passé. Que remplacent-ils?
M. Devanney : J'ai l'impression que ce serait une question pour notre personnel sur le terrain plutôt que pour moi. Encore une fois, la Nouvelle-Écosse est un secteur agricole très diversifié, alors je pense que vous verriez qu'une gamme de cultures, de vergers et de terres forestières ont été remplacés eux aussi. Nous maîtrisons bien les coûts d'établissement entre 35 000 $ et 38 000 $ l'acre. Cela passerait vraiment par tout le développement des terres en jachère et le remplacement des terres agricoles et des vergers. Je n'ai pas les chiffres exacts à ce sujet, alors je m'en excuse, mais de nombreux secteurs en général.
Le sénateur Mercer : Passons des raisins aux bleuets. Les bleuets représentent une culture importante en Nouvelle- Écosse. A-t-on raison de dire que les terres utilisées pour produire des bleuets ne peuvent servir qu'à ce type de production agricole, car il ne s'agit pas de terres agricoles de première qualité?
M. Devanney : Oui, vous avez raison. Il convient de souligner que, dans le contexte agricole de la Nouvelle-Écosse, on parle généralement de sols convenables de classe 3 ou moins selon l'ITC, alors que les bleuets se développent dans des sols de classe 4 ou de classe supérieure, jusqu'à un certain point. C'est très différent du marché général des cultures. Vous avez tout à fait raison.
Le sénateur Mercer : On a l'impression qu'on peut maintenant faire pousser des choses dans le roc.
Le sénateur Plett : Merci, monsieur Devanney, d'être ici aujourd'hui. Au début de votre exposé, je ne me souviens plus du pourcentage exact, mais vous avez parlé d'une grande superficie qui pourrait être utilisée à des fins agricoles et qui ne l'est pas actuellement. À quoi ces terres servent-elles en ce moment?
M. Devanney : Encore une fois, cela montre la nécessité d'avoir de meilleurs renseignements sur les terres agricoles en général, mais il pourrait s'agir de forêts cultivées ou d'autres terres à vocation naturelle. Étant donné que seulement 30 p. 100 des terres sont agricoles et que 7 p. 100 sont urbaines, je ne voudrais pas donner l'impression que tout le reste se prête à l'agriculture. Cela pourrait être des terres submergées, dans une certaine mesure, des terres fortement inclinées ou situées à des endroits où le climat n'est pas favorable. Une grande partie de cette superficie pourrait ne pas être propice à la production agricole. Comme je l'ai dit, il sera important d'avoir une meilleure idée de l'utilisation exacte de nos terres agricoles au fil du temps.
Le sénateur Plett : Dans votre exposé, vous avez parlé du pourcentage d'agriculture qui se faisait dans le cadre de la gestion de l'offre. Est-ce que les vergers — les raisins, les bleuets et les pommes — sont soumis à la gestion de l'offre?
M. Devanney : Non. La gestion de l'offre vise uniquement les produits laitiers et la volaille.
Le sénateur Plett : C'est comme dans le reste du pays. Merci.
Mon collègue ici vient de la Colombie-Britannique. Nous avons reçu des témoins de cette province qui nous ont parlé de leurs vergers. Je sais que dans la vallée de l'Okanagan, de nombreux vergers appartiennent à des gens qui, à vrai dire, pourraient avoir une belle retraite s'ils pouvaient vendre leurs vergers et transformer leurs terres en propriétés résidentielles, mais ils ne peuvent pas le faire, pour des raisons évidentes. Ils doivent conserver les vergers en Colombie- Britannique. Avez-vous des restrictions de cette nature en Nouvelle-Écosse?
M. Devanney : Non. La Colombie-Britannique et le Québec, bien sûr, sont les chefs de file au Canada au chapitre de la protection des terres agricoles. Nous utilisons le zonage municipal dans la vallée d'Annapolis, ce qui équivaudrait à une réserve de terres agricoles, mais contrairement à la Colombie-Britannique, nous n'avons aucune réserve de terres provinciales.
Le sénateur Plett : Avez-vous des restrictions concernant les acheteurs étrangers? Avez-vous des restrictions qui empêchent les gens des États-Unis, de la Finlande ou d'ailleurs de venir acheter des terres agricoles en Nouvelle- Écosse?
M. Devanney : Non.
Le sénateur Oh : La Fédération de l'agriculture de la Nouvelle-Écosse s'est dite préoccupée par l'expansion urbaine à environ une heure de vos bonnes terres agricoles. Le gouvernement prend-il des mesures concernant l'urbanisation? Est-ce qu'il s'en soucie? Que fait-il pour éviter que les bonnes terres agricoles ne deviennent des terres à vocation industrielle ou des terres urbaines?
M. Devanney : Plusieurs politiques liées à la protection des terres agricoles sont en vigueur à l'heure actuelle. Nous avons la déclaration de principe provinciale, qui se veut notre principale politique et qui nous permet d'exercer un certain contrôle lorsque des stratégies de planification municipale sont modifiées et finalisées.
Nous avons également une politique d'exonération fiscale et une taxe de changement d'usage qui, lorsqu'elles sont appliquées, et soit dit en passant, on nous dit que la taxe de changement d'usage n'est pas appliquée dans tous les cas, mais même dans la majorité des cas, une taxe de changement d'usage de 20 p. 100 découragerait grandement les gens d'utiliser des terres agricoles à des fins autres que l'agriculture.
Nous avons aussi une loi sur la protection des milieux humides, qui limite l'aménagement sur nos marais, car bon nombre sont situés à moins d'une heure de route de Halifax, de même que la Conservation Easements Act. Ce sont les quatre politiques actuellement en place.
Nous examinons activement 60 recommandations, issues des trois rapports dont j'ai parlé plus tôt, pour déterminer si nous pouvons réaliser des progrès au chapitre de la protection des terres agricoles.
Le sénateur Ogilvie : Bonjour, monsieur Devanney. Tout d'abord, dans votre exposé, vous avez parlé — et je n'ai pas de copie papier, alors j'ignore si cela s'y trouve également — de l'importance des digues de la baie de Fundy. En fait, je pense que vous parliez plutôt du bassin des Mines. Je vis au bord de la baie de Fundy, et c'est le bassin des Mines qui s'étend de Wolfville-Kingsport jusqu'à la rivière Avon. C'est là où on trouve les terres endiguées. Je pense que vous vouliez parler des digues de la partie du bassin des Mines.
M. Devanney : Pas tout à fait. Je pense que nous pourrions débattre de la nature même de la baie de Fundy. Je vis moi aussi à l'autre bout de la baie.
Le sénateur Ogilvie : Je conviens qu'il y a une section de la baie de Fundy qui passe par Truro où cela serait possible. Nous n'irons pas plus loin. Seriez-vous d'accord pour dire qu'il y a des digues le long du bassin des Mines et de ses affluents?
M. Devanney : Oui. Pour votre gouverne, sachez qu'il y a des terres endiguées qui s'étendent jusqu'à la baie Sainte- Marie, alors ça couvre toute cette région. Nous avons d'ailleurs des cartes qui le prouvent.
Le sénateur Ogilvie : Très bien. Je vais passer vos cartes en revue pour corriger mes impressions visuelles.
Comme vous le savez, nous n'avons pas de copies papier de votre rapport, alors j'essaie de regarder votre carte à la page 3. Je n'arrive pas à distinguer les différents tons de vert sur mon cellulaire, alors je vais limiter mes questions sur les terres agricoles potentielles à ce qui suit. Vous me pardonnerez si j'ai mal compris votre carte.
Vous montrez une partie importante des terres, dont la plupart se trouvent dans la région côtière de la baie de Fundy, et vous dites que l'on pratique l'agriculture sur des sols de classe 2, 3 et 4. Lorsque vous parlez des terres de ces catégories, est-ce que cela signifie que celles que l'on voit sur la carte sont utilisées à des fins agricoles?
M. Devanney : Oui. Je suis désolé de ne pas vous avoir remis ces documents plus tôt. Je dois admettre que la carte est assez complexe, mais vous avez raison. Vous verrez que dans le comté de Hants, je ne sais pas si vous pouvez le voir sur votre téléphone, mais les couleurs sont plus pâles. Ce sont les sols de classe 2, 3 et 4, selon l'ITC, où il n'y a pas d'agriculture, et les couleurs plus foncées ici, comme vous l'avez indiqué, ce sont les terres arables — de classe 2, 3 et 4 — qui sont utilisées à des fins agricoles. Cette carte repose sur les meilleurs renseignements dont nous disposons, et ils ne sont pas parfaits; c'est d'ailleurs pourquoi nous avons besoin d'aide à ce chapitre.
Le sénateur Ogilvie : Je comprends. Je veux simplement me faire une idée de la situation. Il est possible que mes voyages en Nouvelle-Écosse m'aient montré une réalité différente.
Si on prend le secteur au bas de l'autoroute 215, la rivière Avon, jusque dans le bassin des Mines, on sait que par le passé, il y avait un grand nombre d'exploitations agricoles : des petites exploitations agricoles de 150, 200 et 250 acres sur des terres arables le long de la côte et des terres boisées derrière. Je suppose que les couleurs que l'on voit ici ne montrent pas les terres qui étaient cultivées auparavant et qui ne le sont plus aujourd'hui ou sur lesquelles on trouve désormais des aulnes ou d'autres arbres. Est-ce exact?
M. Devanney : Oui. En fait, ces données datent de 1998, alors cela montre la difficulté que nous avons à obtenir des renseignements à jour. En 1998, on s'était servi de photographies aériennes prises par notre ministère des Ressources naturelles et de renseignements recueillis sur le terrain. Je sais qu'on avait travaillé de concert avec les municipalités et qu'on avait embauché des étudiants pour s'assurer que les terres qui avaient été désignées par le ministère comme étant agricoles l'étaient réellement. Toutes les terres qui ont été cultivées avant 1998, et qui sont aujourd'hui boisées, ne figurent pas sur cette carte.
Le sénateur Ogilvie : J'aurais deux autres brèves questions à vous poser concernant la superficie agricole de la province.
Dans le cadre de la campagne « Sauvons nos fermes », dont vous vous souviendrez sûrement, j'ai été étonné de voir qu'à cette époque, on n'avait pas de chiffres exacts concernant les terres cultivées ou celles qui pourraient l'être. On comprend maintenant pourquoi on n'a pas pu s'appuyer sur des chiffres précis aux fins de ce débat.
Je suis tout de même un peu surpris, avec le Centre of Geographic Sciences, qui se trouve à l'extrémité de la vallée et qui a des techniques et des capacités de cartographie extrêmement modernes, que nous n'ayons pas davantage progressé dans ce domaine. Je considère que c'est essentiel pour nous dans le cadre de nos activités de planification, d'autant plus que le secteur agricole est très précieux dans cette région et pour l'ensemble de la province.
Voici donc ma dernière question : avez-vous l'impression qu'au cours des 10 dernières années, on a énormément modernisé et amélioré nos pratiques agricoles en Nouvelle-Écosse, ainsi que notre capacité de nous adapter rapidement à des cultures de valeur supérieure et à leur rotation, même dans les variétés de pommes et les autres variétés cultivées dans les vergers?
M. Devanney : Dans un premier temps, vous avez tout à fait raison : le Centre of Geographic Sciences du Nova Scotia Community College, à Lawrencetown — je ne me souviens plus de leur nom officiel — a une excellente faculté de technologie qui nous permettrait de recueillir de bons renseignements sur les terres agricoles. En fait, vous constaterez que pour des secteurs précis — les comtés d'Annapolis et de Kings, entre autres —, nous disposons d'excellents renseignements sur les terres agricoles.
Le problème, c'est que cela ne s'étend pas aux autres régions de la province et que ce n'est pas fait de façon régulière. Idéalement, nous aurions des renseignements sur l'ensemble de la province qui seraient mis à jour annuellement, deux fois par année ou peut-être tous les cinq ans. Nous devons absolument nous inspirer de l'Île-du-Prince-Édouard. Même s'il s'agit d'une petite province, à ma connaissance, ce sont eux qui ont les meilleurs renseignements géographiques sur les terres agricoles au pays.
Pour revenir à votre deuxième observation, oui, je suis d'accord avec vous pour dire que l'agriculture est de plus en plus mécanisée et — il s'agit d'une opinion personnelle — je dirais qu'elle est assez résiliente, mais il faut savoir que l'agriculture est une entreprise à très long terme, et je crois que c'est ce qui est au cœur du problème.
J'ai lu le compte rendu de la réunion que vous avez tenue avec les gens de la Colombie-Britannique, et les témoins ont dit, tout comme quelqu'un précédemment, que des propriétaires de vergers pourraient transformer leurs terres en propriétés résidentielles s'ils le souhaitaient. Voilà le problème. L'agriculture est une activité qui s'étale sur une longue période, et il se peut que l'on perde des terres agricoles à tout jamais si, par exemple, quelqu'un achète des terres sans avoir l'intention de les cultiver ou si un agriculteur doit cesser d'exploiter ses terres en raison du contexte économique.
Même si je conviens que l'industrie agricole est plus mécanisée et relativement solide, chaque agriculteur est confronté à différentes difficultés. En ce qui concerne les vergers, nous avons connu beaucoup de succès ici en Nouvelle-Écosse; nous avons réussi à revitaliser notre industrie en adoptant des variétés plus intéressantes comme la Honeycrisp, mais cela prend du temps.
La sénatrice Beyak : Je voulais aborder la question fiscale. Vous en avez parlé à quelques reprises durant votre exposé, et lorsque le président de la Fédération de l'agriculture a comparu, il nous a dit que les municipalités de la Nouvelle-Écosse avaient une politique d'exonération fiscale. Pourriez-vous nous en dire davantage à ce sujet, par exemple si c'est efficace, quel est le but recherché et si d'autres provinces devraient adopter une telle mesure?
M. Devanney : Je vous remercie de votre question. En fait, c'est plutôt difficile d'obtenir de bons renseignements sur ce qui a motivé l'adoption de cette politique au départ. Mais d'après ce que j'ai entendu, le but de cette exemption fiscale sur les terres agricoles était d'alléger le fardeau fiscal des agriculteurs vivant en marge des zones rurales. Vous avez raison de dire qu'il y a une exemption fiscale sur la valeur des terres, alors les municipalités reçoivent un remboursement d'environ 3 $ l'acre de la province pour compenser la perte en impôt foncier. Il y a aussi une taxe de changement d'usage de 20 p. 100 qui est appliquée.
[Français]
Le sénateur Dagenais : Merci, monsieur Devanney. J'aimerais attirer votre attention sur les jeunes. Est-ce que vous pourriez nous parler des résultats qui réussissent à attirer ou à retenir les jeunes dans le giron de l'agriculture en tant qu'investisseurs ou travailleurs? Est-ce que vous avez des conditions, dans la province, qui permettent d'attirer les jeunes vers l'agriculture ou, du moins, de les maintenir dans le domaine de l'agriculture?
[Traduction]
M. Devanney : Je crois que la planification de la relève est d'une importance capitale. Nous prenons des mesures précises en la matière, notamment les programmes THINKFARM et FarmNEXT.
À ma connaissance, le programme THINKFARM a davantage un objectif pédagogique et vise à fournir des renseignements aux futurs agriculteurs sur la manière efficace de démarrer dans l'industrie.
Le programme FarmNEXT diminue le capital d'un prêt provenant de la Nova Scotia Farm Loan Board pour réduire le fardeau que représentent les frais de démarrage et les dépenses d'investissement, qui sont énormes pour les nouveaux agriculteurs. Je crois que le programme permet de réduire de 30 000 $ le capital, et cela permet évidemment d'économiser en frais d'intérêt.
Nous avons donc ces deux politiques en la matière, et nous avons aussi de nombreuses autres initiatives de sensibilisation à l'agriculture qui visent à informer la population et les agriculteurs. Nous avons bien entendu le campus de la faculté d'agriculture de l'Université Dalhousie qui avait à l'époque des liens officiels beaucoup plus étroits avec le gouvernement provincial, mais nous entretenons encore des rapports importants avec le campus.
Tous ces éléments contribuent vraiment à influer sur la capacité des nouveaux agriculteurs de démarrer dans l'industrie, et nous avons déterminé qu'il s'agissait d'un secteur important dont nous devons faire la promotion.
Nous avons également réalisé une étude dans le cadre du programme THINKFARM, dont je viens de parler, pour examiner les obstacles qui nuisent à la croissance des agriculteurs qui démarrent dans l'industrie. Le rapport n'est pas encore terminé; je ne peux donc pas vous parler des résultats.
Bref, cela signifie que nous avons pris l'initiative d'examiner précisément les problèmes qui peuvent miner les efforts des nouveaux agriculteurs à démarrer et à connaître du succès dans l'industrie.
Le sénateur Pratte : Vous avez dit qu'il vous manque de l'information concernant les terres agricoles, et c'est un problème qui a été soulevé par de nombreux témoins au comité. Pouvez-vous nous expliquer les renseignements sur les terres agricoles que vous avez actuellement et les renseignements qui vous font défaut?
M. Devanney : Nous avons reçu des renseignements de diverses sources, dont le recensement de Statistique Canada. La majorité de nos renseignements sur les statistiques agricoles proviennent de Statistique Canada, et nous vous en sommes très reconnaissants. Je siège à un comité fédéral-provincial-territorial sur les statistiques agricoles qui contribue à nous assurer d'avoir en main les statistiques les plus pertinentes et les plus précises.
Toutefois, lorsqu'il est question des terres agricoles — j'ai un peu d'expérience dans les systèmes d'information géographique —, je veux être en mesure de visualiser l'information pour déceler des tendances concernant des changements dans les terres agricoles dans la province et au pays. Nous ne sommes vraiment pas encore rendus là en ce qui a trait à l'information géographique.
Comme je l'ai mentionné, nous avons le Plan d'identification des terres agricoles de 1998. Voilà l'information dont nous avons besoin, mais il y a des problèmes quant à l'exactitude des données. Cela concerne une autre partie de nos renseignements sur les terres agricoles. Notre ministère des Ressources naturelles survole la province et prend des clichés. Cela lui prend 10 ans pour couvrir l'ensemble du territoire. Le problème est évidemment que, lorsqu'il a terminé le sud-ouest, les données concernant le nord-est remontent à 10 ans. Les renseignements provenant de cette source ne sont pas uniformes.
Voici l'autre problème que nous avons. Même si nous avons des images, quelqu'un doit se rendre sur place pour essentiellement tracer une ligne autour des champs, numériser le tout et les identifier comme des terres agricoles. Il faut également un mécanisme pour le vérifier. Il s'agit de la vérification au sol dont j'ai parlé et qui a été réalisée en 1998. Cela prend du temps et coûte de l'argent, et nous n'avons littéralement personne au sein de notre ministère pour réaliser le travail qui doit être fait.
Je constate que passablement de mesures sont prises en ce sens au gouvernement fédéral, en particulier à AAC. Ce ministère concentre ses efforts sur les Prairies, où l'imagerie satellitaire est beaucoup plus facile à utiliser, pour repérer les terres agricoles. Ces grandes parcelles de terre sont différentes de ce que nous retrouvons en Nouvelle-Écosse. Nous pouvons avoir des champs de cinq acres de forme irrégulière au milieu d'une zone forestière. C'est difficile à faire ici, mais les responsables s'engagent dans cette voie. Ils ont les images. Il faut donc des ressources humaines pour numériser l'information et fournir des précisions pour l'appliquer à une petite province hétérogène comme la Nouvelle- Écosse. Cela nous permettrait vraiment de nous donner ce dont nous avons besoin.
Nous avons également des données provenant de sources administratives qui ne sont pas parfaites. Nous avons la Property Valuation Services Corporation en Nouvelle-Écosse qui identifient les terres agricoles, mais l'organisme n'a pas les moyens — c'est encore une fois une question de ressources — de déterminer quand les terres ont arrêté d'être exploitées. Vous êtes à même de vous imaginer le comportement qui en découle. Si je possède des terres agricoles, je profite de l'exemption fiscale dont nous avons parlé plus tôt. Les autorités essaient de mettre en place un processus de vérification, mais officiellement elles n'en ont pas. Elles doivent donc attendre que je vende ou transfère mes terres agricoles à un autre; elles en seront alors informées et pourront vérifier si les terres sont encore exploitées ou non. Autrement, les autorités comptent sur ma bonne volonté en tant que citoyen pour les aviser que je n'exploite plus ces terres et leur demander de bien vouloir commencer à me faire payer mon dû. Je ne crois pas que cela arrive très souvent.
Le sénateur Pratte : Dans votre exposé, vous avez parlé de notre inquiétude de voir des investisseurs institutionnels acheter des terres agricoles. Je crois vous avoir entendu parler de 15 transactions en 2015. Pouvez-vous répéter cette statistique, parce que je ne suis pas certain d'avoir exactement compris le type d'investisseurs qui ont acquis ces terres?
M. Devanney : J'ai dit que nous avons eu un record de 42 propriétés en 2015 qui totalisent 2 000 acres. Cela représente des propriétaires étrangers, soit des propriétaires qui ne sont pas de la Nouvelle-Écosse. Pour ce qui est des véritables acquisitions faites par des non-Canadiens, nous parlons en moyenne de 5 propriétés et de 225 acres sur 10 ans.
Le sénateur Pratte : Merci beaucoup.
Le sénateur Woo : Merci de votre exposé. J'ai deux questions. Ma première question porte sur le système de digues. Je ne veux pas nous lancer dans des débats sur la géographie ou la géomorphologie, mais vous avez sous-entendu que le système de digues est inadéquat pour répondre aux futurs changements environnementaux et climatiques. Je viens d'assister à des réunions sur la gestion des catastrophes et des événements de type cygne noir. Pouvez-vous nous en dire un peu plus au sujet de l'évaluation des risques réalisée concernant le système de digues, des hypothèses visant à déterminer s'il s'agit d'une hausse catastrophique du niveau de la mer qui rend nécessaires ces améliorations au système de digues et des réflexions en cours en vue de savoir à quel point ces préparatifs sont suffisants?
M. Devanney : Avec plaisir. J'ai participé au cours des dernières années à une étude sur les terrains marécageux au cours de laquelle nous avons examiné ces renseignements. Le Bureau de gestion des urgences a déterminé que nos marais endigués étaient une infrastructure essentielle. Nous avons 241 kilomètres de digues qui protègent 17 500 hectares de terres agricoles, et ces terres sont parmi nos meilleures.
J'ai lancé des chiffres plus tôt, et cela coûterait environ 200 millions de dollars pour améliorer le système de digues et tenir compte de la situation qui prévaudra en 2055 en raison des changements climatiques. Nous avons passablement de renseignements sur ce à quoi ressemblera la hausse du niveau de la mer dans ces zones inondables. Nous avons essentiellement déterminé où nous prévoyons que se trouvera la laisse de haute mer en 2055, et nous avons regardé la hauteur de nos 241 kilomètres de digues, dont l'état varie. Certaines n'ont jamais été entretenues; d'autres ne sont pas vraiment beaucoup utilisés pour l'agriculture et ne protègent pas une grande quantité d'infrastructures non agricoles; nous avons également des digues qui ont déjà été améliorées pour tenir compte des changements climatiques et qui protègent des centaines de millions de dollars de biens non agricoles, y compris l'infrastructure publique.
Il vous suffit de conduire de la Nouvelle-Écosse jusqu'au Nouveau-Brunswick et de traverser l'isthme de Chignecto pour constater que la route transcanadienne et les chemins de fer sont protégés, et c'est ce qui nous permet de rester connectés avec le reste du Canada.
Nous avons examiné la hauteur des digues et la hauteur nécessaire pour tenir compte des changements climatiques et nous avons réalisé des évaluations techniques pour déterminer la quantité de remblai nécessaire pour atteindre cette hauteur. L'enrochement est une composante importante du coût, si nous voulons placer d'énormes rochers devant les digues pour retarder leur érosion. Les structures coûtent très cher. Nous avons évalué ce qu'il en coûterait pour chaque digue en fonction de sa hauteur et de la hauteur à atteindre et de la quantité de remblai et d'enrochement nécessaires. Le montant approximatif de 200 millions de dollars est le cumul de ces évaluations.
Le sénateur Woo : Ma question portait plutôt sur le processus d'évaluation des risques que le coût et ce qu'il faut faire pour améliorer le système de digues. Vous n'avez pas besoin de répondre, mais la question est vraiment de déterminer si l'analyse de sensibilité est suffisamment solide compte tenu du rythme accéléré des changements climatiques et de la possibilité que les événements de 2050 ou de 2080 surviennent plus tôt. Il ne s'agit que d'une observation.
M. Devanney : Nous pouvons vérifier le tout, si vous en faites la demande. Nos services de protection des terres seraient mieux placés que moi pour vous répondre, mais je crois que vous avez raison; ce n'est pas fixe. Bref, tout ce que nous pouvons faire, c'est de nous fier aux hypothèses actuelles concernant la hausse du niveau de la mer et les changements climatiques. Cependant, si certains des pires scénarios devenaient réalité, nous pouvons nous attendre à ce que l'évaluation des risques fluctue et à ce que les coûts grimpent.
Le sénateur Woo : Merci.
Le sénateur Mercer : J'aimerais poser une question complémentaire. Les chantiers et les projets hydroélectriques dans la baie du Fundy influeront-ils sur le niveau de la mer? Les marées de la baie de Fundy sont déjà les plus hautes au monde. Les projets hydroélectriques en cours dans la baie auront-ils des effets?
M. Devanney : Vous sortez vraiment de mon champ d'expertise. Je n'ai absolument aucune expérience en ingénierie, mais je ne vois pas comment cela pourrait influer sur la hausse du niveau de la mer. Ce sont littéralement des turbines ou des éoliennes sous l'eau qui sont activées par le courant qui les traverse. Je ne vois pas comment cela pourrait avoir un effet sur le niveau de la mer. Il ne s'agit pas du tout d'un barrage.
Le sénateur Mercer : C'était ce que j'en comprenais également. Je voulais seulement vous entendre le dire aux fins du rapport.
Le sénateur Woo : Mon autre question porte sur la demande dans l'industrie agricole. Pouvez-vous nous parler un peu du rôle des exportations dans la production agricole en Nouvelle-Écosse et surtout nous dire s'il y a un lien entre les investissements étrangers que vous avez constatés dans les terres agricoles et l'utilisation de ces investissements pour exporter des produits vers les marchés étrangers?
M. Devanney : Je vais essayer de vous répondre au meilleur de mes capacités. Les exportations sont certainement une partie essentielle de notre industrie, et elles sont également en croissance. Si je ne m'abuse, selon nos plus récentes statistiques, nos exportations se chiffrent à un peu moins de 300 millions de dollars. Les bleuets sauvages et les légumes congelés représentent une très grande partie de ces exportations, qui proviennent majoritairement d'une même grande entreprise.
Notre industrie agricole exporte également beaucoup de fourrure de vison. L'industrie du vison a connu de graves problèmes au cours des dernières années. L'importance relative des exportations de fourrure a donc diminué, mais cette industrie génère des revenus dans la province. Nous cherchons donc à faire croître ces exportations, ainsi que nos exportations de produits de la mer, qui sont vraiment nos principales exportations.
Nous avons ciblé les exportations en général et surtout les exportations de produits agricoles et de produits de la mer. One Nova Scotia a publié un rapport, soit le rapport Ivany, qui a vraiment reconnu que ces deux industries et en particulier les exportations étaient essentielles à notre viabilité économique future, et nous sommes déjà très près d'atteindre ces objectifs en ce qui a trait aux exportations, en particulier pour les produits de la mer.
En ce qui a trait à la propriété étrangère, comme je l'ai mentionné plus tôt, c'est un phénomène relativement nouveau. Nous savons que 18 propriétés ont été acquises dans la vallée de l'Annapolis en 2015. Nous ne savons donc pas l'utilisation qui en est faite actuellement. Selon ce que j'en comprends, cette entreprise cherche à louer ces terres à des agriculteurs à un taux de rendement fixe. Nous pourrions faire une évaluation sommaire de la situation. Si nous tenons compte que la moitié de notre industrie est soumise à la gestion de l'offre et que l'autre moitié ne l'est pas, nous pouvons présumer que la moitié de ces terres sont peut-être utilisées pour les marchés extérieurs ou intérieurs. Cependant, ce seraient de grandes suppositions.
Le sénateur Woo : Merci.
[Français]
La sénatrice Gagné : Merci, monsieur Devanney. Il est évident que le gouvernement de la Nouvelle-Écosse veut protéger les terres agricoles. Vous avez mentionné tantôt toute la question de la planification de la succession des terres agricoles. Grâce à vos analyses, avez-vous une bonne idée du profil des propriétaires de terres agricoles, de la démographie? En examinant les tendances des 10 dernières années, qu'est-ce qu'on peut entrevoir pour les 10 prochaines années en ce qui a trait au transfert des terres agricoles?
[Traduction]
M. Devanney : Vous posez là une question très importante. Selon les données du dernier recensement, je crois que la moyenne d'âge des agriculteurs en Nouvelle-Écosse est la plus élevée parmi les provinces canadiennes ou, du moins, elle est très près de l'être. Elle se situe à environ 53 ans. La relève est un enjeu important pour l'industrie et la province en général. Notre population est très âgée.
Depuis 10 ans, nous constatons le vieillissement de la population agricole. Nous voyons de plus en plus de jeunes agriculteurs démarrer dans l'industrie, et cela se fait de concert avec le mouvement prônant les aliments locaux. C'est très encourageant. Comme vous n'êtes pas sans le savoir, l'agriculture exige d'énormes investissements, et les frais de démarrage peuvent avoir un effet prohibitif. Voilà pourquoi nous cherchons à mieux comprendre le profil de nos agriculteurs et les obstacles qui compliquent le démarrage dans l'industrie et qui empêchent d'y connaître du succès. Nous dépendons essentiellement de Statistique Canada pour avoir des renseignements à cet égard, mais nous avons également pris l'initiative de réaliser certaines études spéciales.
Tôt ou tard, nous serons forcés d'intervenir de toute façon. Nos vieux agriculteurs expérimentés ne pourront pas continuer éternellement et auront besoin de financer leur retraite. Cette situation a des effets directs sur la question de la protection des terres agricoles. Je présume que la majorité des agriculteurs préféreraient vendre leurs terres à un nouvel agriculteur qui perpétuera la tradition. Cependant, si aucun nouvel agriculteur ne se présente ou qu'aucun n'en a les moyens, ces agriculteurs devront quand même prendre leur retraite et auront probablement besoin d'avoir accès à la valeur nette de leur exploitation. C'est très préoccupant.
La politique en matière de protection des terres agricoles joue un rôle, mais nous devons également nous montrer justes envers les agriculteurs en ne les laissant pas assumer seuls l'ensemble de ce fardeau. Bref, cette question est difficile à répondre.
La sénatrice Gagné : Merci.
[Français]
Le président : J'ai une question qui provient de nombreux enfants du Québec. La Nouvelle-Écosse cultive d'excellents produits de qualité supérieure, dont l'un est prisé par les enfants du Québec. Malheureusement, ce produit n'est pas disponible toute l'année : la fameuse pomme Honeycrisp. Même si elle est dispendieuse, elle est très prisée par les enfants du Québec. Cependant, on ne la retrouve sur le marché que trois ou quatre mois par année. Est-ce que les pomiculteurs envisagent d'en produire davantage pour combler la demande au Québec?
[Traduction]
M. Devanney : Je crois que nous en serions ravis. Dans ce domaine, il serait difficile d'avoir accès à des terres agricoles pour agrandir les vergers. Je déteste parler de « consommateurs », mais les goûts et les préférences des consommateurs évoluent très rapidement de nos jours. Si j'étais pomiculteur et que j'avais réinvesti tout mon argent dans un verger pour y cultiver des Honeycrisp, je présume que je serais très heureux aujourd'hui, étant donné que nous avons, comme vous l'avez souligné, un avantage concurrentiel dans ce secteur. Ce sont des produits de grande valeur, et ce secteur va bien actuellement. Toutefois, je m'inquiéterais personnellement que les goûts des consommateurs évoluent et qu'ils se tournent vers une autre variété, parce qu'il faudrait encore une fois remplacer les pommiers. Cela met en évidence les aspects dont il faut tenir à compte à long terme dans l'industrie agricole en général. Il ne s'agit évidemment pas d'une culture annuelle.
Là où c'est possible de le faire, compte tenu des limites que j'ai mentionnées plus tôt, nous aimerions voir se poursuivre la croissance de cette industrie. C'est certainement un point positif dans l'industrie agricole en Nouvelle- Écosse. Nous sommes fiers des progrès réalisés dans ce domaine, et nous connaissons actuellement du succès.
Le président : Merci beaucoup.
Le sénateur Mercer : J'aimerais poser très rapidement trois questions. Je vais commencer par la question qui est probablement la plus facile. Devrions-nous demander à Statistique Canada d'élargir la portée de son recensement dans les régions rurales lors du prochain recensement pour nous aider à recueillir certaines données qui semblent vous faire défaut? Si vous n'avez pas ces données, je présume que c'est aussi le cas des autres provinces. Cela semble être un problème très facile à régler. Il suffit de demander à Statistique Canada d'élargir la portée de son recensement à l'avenir. Voilà ma première question.
La deuxième question...
M. Devanney : Allez-y. Je peux répondre à toutes vos questions en même temps.
Le sénateur Mercer : Parfait. Ce serait préférable.
Vous n'avez pas mentionné dans votre exposé un élément dont je croyais que vous auriez parlé : le centre de recherche de Kentville du ministère fédéral de l'Agriculture, son importance, l'importance qu'il joue dans l'agriculture au Canada et la manière dont il a aidé les agriculteurs de la Nouvelle-Écosse à s'adapter. Ce centre a réalisé d'excellents travaux en ce qui concerne les bleuets et les pommes. Je ne connais pas les autres produits, mais je suis au courant de certains travaux qu'a réalisés le centre concernant les bleuets et les pommes. Ce centre a-t-il encore une grande importance?
Je vais vous poser ma troisième question, et vous pourrez ainsi répondre aux trois en même temps. À titre informatif pour mes collègues qui ne le savent peut-être pas, le Collège d'agriculture de la Nouvelle-Écosse, qui se situe à Truro, en Nouvelle-Écosse, est récemment devenu la faculté d'agriculture de l'Université Dalhousie. Ce changement a-t-il eu des effets positifs ou négatifs sur la manière de former les jeunes agriculteurs et les recherches réalisées à l'extérieur du centre de recherche de Kentville? Voilà mes trois questions.
M. Devanney : Pour répondre à votre première question, je suis tout à fait d'avis que Statistique Canada peut jouer un rôle très important en ce qui a trait à nos statistiques agricoles, et il le fait certainement déjà.
En ce qui concerne les renseignements sur les terres agricoles, nous devons encore une fois faire la distinction entre les renseignements tirés de sondages que publie souvent Statistique Canada et l'information géographique dont nous avons vraiment besoin, selon moi, pour traiter des questions liées aux terres agricoles. Je le mentionne, parce que je ne souhaite pas réinventer la roue. Statistique Canada est déjà bien au courant de ce qui se fait dans le domaine de la télédétection. Agriculture et Agroalimentaire Canada est actif dans ce domaine, et Statistique Canada en est au courant. Je crois qu'il est possible que ces deux organismes collaborent entre eux et avec les provinces pour s'assurer que les résultats de ces initiatives répondent aux besoins, mais je ne souhaite évidemment pas qu'AAC le fasse et que Statistique Canada le fasse aussi. Je crois que Statistique Canada et AAC devraient collaborer entre eux et avec les provinces pour évaluer le rôle qu'ils pourraient jouer dans ce domaine. Je crois que la responsabilité leur incombe au gouvernement fédéral.
Vos deux autres questions vont passablement de pair. Je pense ici aux grappes agricoles de renseignements. Le centre de recherche de Kentville et le campus de la faculté d'agriculture de l'Université Dalhousie, anciennement le Collège d'agriculture de la Nouvelle-Écosse, jouent un rôle important dans le développement de l'industrie non seulement en Nouvelle-Écosse, mais aussi dans le Canada atlantique, et leur mandat a toujours été le Canada atlantique. Nous sommes très chanceux de les avoir. Le campus de la faculté d'agriculture de l'Université Dalhousie se trouve juste au bout de la rue. Je suis diplômé de cette université; voici mon verre d'eau aux couleurs de l'Université Dalhousie. Nous avons donc des installations très uniques, et la recherche et le développement de l'industrie qui en découle sont d'une importance capitale. Nous voyons d'un très bon œil dans la province l'effet continu et accru de ces établissements sur l'industrie.
Le sénateur Mercer : Vous recevrez une autre lettre de sollicitation de l'Université Dalhousie tout simplement pour avoir montré votre verre à la télévision.
[Français]
Le président : Merci, monsieur Devanney, de votre témoignage. Je suis certain que vous avez pu constater l'intérêt des sénateurs dans ce dossier. Votre témoignage nous aidera à préparer notre rapport qui sera publié au cours des prochains mois. Merci beaucoup et bonne chance dans vos recherches.
Avant de lever la séance, nous devons vous communiquer deux messages très importants. Le premier est une motion obligatoire du sénateur Mercer, alors, sénateur Mercer, à vous la parole.
[Traduction]
Le sénateur Mercer : Je propose :
Que, conformément à l'ordre adopté par le Sénat le 7 décembre 2016, le nombre de membres du Sous-comité du programme et de la procédure soit augmenté par un membre sans droit de vote choisi parmi les sénateurs qui ne sont pas membres d'un parti reconnu, désigné après les consultations d'usage.
Voilà ma motion, et je présume qu'à un certain moment après ma motion quelqu'un proposera une nomination.
[Français]
Le président : Voulez-vous discuter de la motion ou l'adopter? C'est très simple.
La sénatrice Gagné : Je propose la motion.
Le président : La motion est proposée par la sénatrice Gagné et secondée par le sénateur Woo.
La sénatrice Gagné : Non. Je propose que le sénateur Woo soit la personne désignée.
Le président : C'est une motion. Est-ce qu'il y a des gens qui sont contre? La motion est adoptée à l'unanimité. Bravo, sénateur Woo, et bienvenue!
Le deuxième point, c'est que vous avez reçu ou vous recevrez dans les prochains jours une copie du rapport que nous devrons lire et étudier ensemble, le jour de la Saint-Valentin, le 14 février. Vous avez une semaine pour le lire, et si vous avez des annotations, des modifications à proposer, ce sera le temps de les préparer. À la réunion du 14 février, nous l'étudierons et y apporterons des corrections pour pouvoir l'adopter à la fin février. Merci, la séance est terminée.
(La séance est levée.)