Aller au contenu
AGFO - Comité permanent

Agriculture et forêts

 

Délibérations du Comité sénatorial permanent de
l'Agriculture et des forêts

Fascicule no 38 - Témoignages du 2 novembre 2017


OTTAWA, le jeudi 2 novembre 2017

Le Comité sénatorial permanent de l’agriculture et des forêts se réunit aujourd’hui, à 9 heures, afin de poursuivre son étude sur l’impact potentiel des effets du changement climatique sur les secteurs agricole, agroalimentaire et forestier.

[Français]

Le sénateur Maltais : Je vous souhaite la bienvenue à cette réunion du Comité sénatorial permanent de l’agriculture. Je suis le sénateur Ghislain Maltais, du Québec, et je présiderai la réunion d’aujourd’hui. Avant de commencer, j’invite les sénateurs à se présenter, en commençant à ma droite.

[Traduction]

La sénatrice Griffin : Je m’appelle Diane Griffin, sénatrice de l’Île-du-Prince-Édouard.

Le sénateur Doyle : Norman Doyle, de Terre-Neuve-et-Labrador.

Le sénateur Oh : Victor Oh, de l’Ontario.

[Français]

La sénatrice Petitclerc : Chantal Petitclerc, du Québec.

[Traduction]

La sénatrice Bernard : Wanda Thomas Bernard, de la Nouvelle-Écosse.

Le sénateur Woo : Yuen Pau Woo, de la Colombie-Britannique.

[Français]

Le sénateur Pratte : André Pratte, du Québec.

La sénatrice Gagné : Raymonde Gagné, du Manitoba.

La sénatrice Tardif : Claudette Tardif, de l’Alberta.

[Traduction]

Le sénateur Maltais : Nous accueillons aujourd’hui M. Evan Fraser, chaire de recherche du Canada sur la sécurité alimentaire mondiale, Sciences humaines, Université de Guelph.

Bienvenue, monsieur Fraser. Merci d’avoir accepté notre invitation. Je vous demande maintenant de présenter votre exposé.

Evan Fraser, chaire de recherche du Canada sur la sécurité alimentaire mondiale, Sciences humaines, Université de Guelph, à titre personnel : Merci beaucoup de me donner cette occasion vraiment stimulante.

J’ai trois grands messages à vous transmettre aujourd’hui au sujet des changements climatiques et de l’agriculture.

Pour commencer, je vous prie d’adopter des politiques qui donnent aux agriculteurs les moyens de s’adapter aux nouvelles conditions environnementales. L’énorme quantité de recherches auxquelles j’ai participé montrent que, dans certains cas, les agriculteurs ont une grande capacité d’adaptation et ils peuvent composer avec d’immenses variations des pluies et des précipitations tandis que, dans d’autres cas, les systèmes agricoles peuvent être extrêmement sensibles aux moindres perturbations. Je crois que le gouvernement a vraiment un rôle important à jouer afin de créer des mesures incitatives pour promouvoir la résilience.

Permettez-moi d’en dire un peu plus à ce sujet au moyen d’une anecdote personnelle. Dans la ferme de ma famille, à Niagara, lorsque j’étais adolescent, il y a eu une grave sécheresse. Cette année-là, le sol est devenu si sec et grumeleux, que le maïs sucré s’est affaissé parce que les racines ne prenaient pas. Mon grand-père et moi avons amené des tuyaux d’irrigation autour de la ferme et avons renforcé chaque plant, avec nos pieds ou une binette en créant une petite butte de terre autour de chaque plant. Lorsque je suis retourné à la ferme pour aider mon grand-père au moment de la récolte, j’ai été émerveillé de voir que nos champs allaient bien cette année-là. Nous avions fait preuve de résilience et nous nous étions adaptés.

Dix ans plus tard, cependant, une sécheresse similaire a frappé la ferme. Je travaillais à l’obtention de mon diplôme d’études supérieures à l’Université de Toronto, et, à ce moment-là, mon grand-père avait près de 90 ans. Cette année-là, lorsque les plants de maïs sont tombés, personne n’était là pour les ramasser. Il n’y a pas eu de récolte, pas de résilience.

Pour moi, cette petite anecdote illustre le fait que la façon dont les agriculteurs réagissent peut vraiment changer la donne quant à savoir si un problème comme une sécheresse — en d’autres mots, un changement climatique — aura un gros impact ou non.

Heureusement, il y a beaucoup de moyens que peuvent utiliser les décideurs pour renforcer la résilience à l’égard des conditions météorologiques extrêmes. Par exemple, nous pouvons favoriser les programmes de sélection — tant pour les plantes que pour les animaux — qui mettent l’accent sur la tolérance à la chaleur, à la sécheresse et aux ravageurs. Par exemple, ma collègue, Bonnie Millard, a remporté un Prix du gouverneur général pour l’innovation en raison de ses travaux liés à l’élevage des bovins laitiers. Actuellement, Bonnie s’efforce d’identifier les vaches qui peuvent tolérer la chaleur, les conditions sèches, et utilisera ensuite des technologies de génomique de pointe pour transposer ces traits dans nos troupeaux.

Cependant, pour une bonne partie du XXe siècle, nos programmes de sélection visaient seulement à accroître la production aux dépens d’autres choses, comme la résilience. En modifiant les programmes de financement du gouvernement pour soutenir des recherches sur les cultures et le bétail résilient au climat, et en créant ensuite des partenariats privés-publics avec les fournisseurs d’intrants, nous pouvons fournir aux exploitations agricoles les outils génétiques dont ils ont besoin pour s’adapter. Dans un même ordre d’idées, nous pouvons aussi créer des mesures incitatives afin que les agriculteurs soient plus susceptibles d’utiliser des principes agroécologiques qui aideront à améliorer la résilience eux aussi.

La création de mesures incitatives pour encourager la rotation de cultures et des pratiques de conservation peut aider, parce que ces pratiques accroissent la quantité de matière organique dans le sol. C’est important, car cette matière agit comme une éponge qui accumule l’eau lorsque celle-ci est abondante en vue de l’utiliser au moment où ce sera nécessaire.

Par exemple, je sais qu’il pousse dans certains anciens champs de tabac en Ontario des assortiments de vivaces qui fournissent un abondant habitat pour les pollinisateurs, contribuent à enrichir la matière organique de la terre et permettent d’obtenir régulièrement de la viande de bœuf de très haute qualité pour les consommateurs ontariens. Ces fermes ont prouvé qu’elles étaient résilientes et productives même lorsqu’il y a très peu de pluie. Les agriculteurs doivent être incités à faire le changement, dans le cas dont je parle, du tabac à ces autres systèmes. Le programme que j’ai en tête est financé par la Weston Foundation et fournit 150 $ en espèces par hectare aux agriculteurs qui procèdent à ce changement. C’est le genre de mesures stratégiques très précises qu’on peut prendre.

Le premier message que je veux vous transmettre, c’est que je vous demande instamment d’adopter des politiques qui amélioreront la résilience génétique et la résilience agroécologique de nos exploitations agricoles.

Ma deuxième demande, c’est que vous réfléchissiez à la façon dont les changements climatiques peuvent créer des occasions dans le Nord canadien. Nous savons tous que le climat se réchauffe. Cela rendra probablement l’agriculture moins viable dans les régions tropicales, mais profitera probablement au moins au cours des 100 prochaines années, aux régions nordiques canadiennes. C’est ce que nous appelons les frontières agricoles, les zones où il n’y a actuellement pas de culture, mais qui pourraient devenir propres à l’agriculture à l’avenir.

Je sais que l’idée de repousser les frontières a suscité l’intérêt de certains de nos gouvernements territoriaux et de certains représentants de l’industrie, mais je dois faire une mise en garde. Les sols dans le Nord sont très fragiles et sont des grands réservoirs de carbone. Selon certains travaux auxquels j’ai participé, si nous commençons vraiment à cultiver les sols dans le Nord, nous créerons d’immenses quantités d’émissions de carbone qui élimineront la capacité du Canada de respecter ses engagements dans le cadre de l’Accord de Paris. Je ne dis pas que l’agriculture n’est pas possible. Je dis qu’il faut être créatif. Peut-être que, plutôt que d’envisager des champs de blé ou des champs de soya dans le Nord, nous devrions prévoir une importante production de bison ou de caribou qui sera ensuite destinée délibérément à des marchés internationaux avertis.

Le deuxième point, c’est que je vous conseille vivement d’amorcer un processus axé sur la consultation et la participation avec les collectivités autochtones et nordiques ou d’envisager de le faire de façon à imaginer quelle sorte d’aliments pourraient être durablement produits d’une façon appropriée sur le plan culturel à mesure que le Nord se réchauffera.

Mon troisième et dernier message à votre intention, aujourd’hui, est lié à l’occasion de réduire les émissions de gaz à effet de serre dans le secteur canadien à l’aide des technologies. L’agriculture, comme vous le savez, est à l’aube d’une révolution numérique. Les technologies mêmes qui ont donné Internet et qui révolutionnent la médecine sont appliquées dans nos fermes. Ces technologies, qui incluent des tracteurs intelligents qui savent où ils se trouvent dans un champ, plantent les bonnes graines aux bons endroits et épandent la bonne quantité d’engrais, sans perte, sont parfois appelées « agriculture 4.0 ». Ils nous donnent l’occasion de produire plus d’aliments en réduisant les émissions de gaz à effet de serre. Puisque l’agriculture est responsable du tiers des émissions de gaz à effet de serre mondial, c’est vraiment important.

Cependant, en ce moment, l’agriculture 4.0 en est encore à ses balbutiements, tant au Canada qu’à l’échelle internationale. Par exemple, il faut intégrer d’immenses quantités de données. Le tracteur intelligent a besoin de prendre des cartes topologiques; il doit intégrer le tout avec les données des stations météorologiques d’Environnement Canada et il doit utiliser des données de téléobservation de nos satellites et réunir toute cette information. En ce moment, ce genre d’intégration des données ne se fait pas. Par conséquent, nous tous, en tant que société mondialisée et pays ne réalisons pas le potentiel de ces nouvelles technologies. Cependant, je crois qu’il s’agit là de l’occasion idéale pour le Canada de faire preuve de leadership.

La troisième recommandation que je formule à votre intention, c’est de vous assurer que le gouvernement fédéral envisage l’élaboration de protocoles liés à la mise en commun des données, à la cybersécurité, à la propriété des données et à l’intégration des données qui s’appliqueraient à l’ensemble du secteur agroalimentaire et feraient du Canada un chef de file dans la mise au point et l’application des technologies qui nous permettront de produire plus d’aliments en produisant moins d’émissions de gaz à effet de serre.

J’aimerais maintenant conclure en disant qu’il s’agit d’une époque bénie et qu’une occasion en or s’offre à l’agriculture canadienne. Cette occasion a été constatée par Dominic Barton, dans son rapport du Conseil consultatif en matière de croissance économique publié plus tôt cette année.

Je crois que, avec les types de recommandation que je viens d’essayer de formuler dans ce court exposé, le secteur agricole canadien sera en mesure de mieux s’adapter aux changements climatiques et aux conditions météorologiques extrêmes, tout en réduisant les émissions de gaz à effet de serre et en créant de nouveaux marchés d’exportation, en démontrant à nos partenaires commerciaux que nos aliments sont, plus qu’à tout autre endroit dans le monde, produits selon des principes de développement durable, ce qui permettra d’établir la marque du Canada. Dans un même ordre d’idées, je crois que nous pouvons créer des marchés d’exploitation secondaire pour vendre des technologies agricoles adaptées au climat à nos partenaires commerciaux.

Un dernier mot. Même si les changements climatiques créent de réels défis pour le maintien de la sécurité alimentaire mondiale, avec les sortes de propositions que je viens de présenter, je suis assez convaincu que le secteur agroalimentaire canadien sera en mesure de tirer parti de notre occasion et de notre position uniques, et je parle ici de notre abondance de terres et d’eau et de notre main-d’œuvre spécialisée. Je crois vraiment que nous sommes en voie de devenir un chef de file mondial dans la production durable d’aliments dans les années à venir.

Merci beaucoup de m’avoir écouté. Je serai heureux de maintenant répondre à vos questions.

Le sénateur Maltais : Merci beaucoup, monsieur Fraser, de votre exposé.

Le sénateur Doyle : Merci de nous avoir présenté un excellent exposé. Notre comité a fait récemment une tournée. Nous sommes allés au Québec et en Nouvelle-Écosse. Je me souviens en particulier d’une personne de l’Université Memorial qui nous a présenté un exposé. Elle s’appelait Gabriela Sabau. Elle a souligné le fait que nous gaspillons vraiment beaucoup d’aliments au pays. Elle a dit qu’environ 1,1 million de Canadiens, beaucoup d’enfants et de personnes autochtones, vivent actuellement une insécurité alimentaire. Elle a affirmé que le gaspillage d’aliments au Canada se chiffre à environ 30 milliards de dollars par année.

Avez-vous des commentaires à formuler sur la façon dont ce gaspillage influe sur notre environnement? Est-ce que les nouvelles technologies dont vous parlez nous aideront d’une façon ou d’une autre, à l’avenir, à réduire la quantité de gaspillage qu’il y a actuellement dans le domaine alimentaire au Canada?

M. Fraser : Merci de ces excellents commentaires, sénateur Doyle, et de poser des questions intéressantes.

Si je peux fournir quelques statistiques rapides en guise de contexte, environ le tiers des aliments produits dans le monde sont gaspillés. Ce pourcentage est aussi vrai, plus ou moins, au Canada. Au Canada, la majorité du gaspillage d’aliments se produit au niveau des consommateurs et des détaillants. Il n’est pas surprenant que, habituellement, on parle ici de produits périssables, comme des fruits et légumes frais, de la viande, du fromage et des choses du genre. La situation est très différente dans l’hémisphère sud, et nous pouvons en parler, si vous voulez, mais voilà pour ce qui est de la situation canadienne.

Parallèlement, environ un Canadien sur sept est considéré comme vivant une insécurité alimentaire à un moment durant l’année, et on parle d’environ un enfant sur cinq ou sur six. Lorsqu’on passe dans le Nord canadien, le niveau passe à environ la moitié ou un peu plus de la moitié de la population. Nous avons un grave problème d’insécurité alimentaire et un très grave problème de gaspillage d’aliments.

Cependant, c’est difficile de penser que le gaspillage d’aliments qui se produit dans mon réfrigérateur, parce que je n’ai pas mangé mon kale assez vite, est la clé qui permettra de vraiment régler le problème de l’insécurité alimentaire. C’est bien de ne pas oublier que le gaspillage d’aliments et l’insécurité alimentaire au Canada sont en fait deux problèmes très différents, même s’ils sont liés et qu’il y a certaines similitudes.

La réduction du gaspillage d’aliments générera des avantages majeurs pour l’environnement. La pensée que nous gaspillons le tiers des aliments du monde est terrible à elle seule, parce que la plupart de ces aliments finissent, dans les municipalités informées, dans les systèmes de compostage municipaux, mais, dans la majeure partie du pays, ces déchets se retrouvent tout simplement dans des sites d’enfouissement où ils se décomposent souvent de façon anaérobique, en l’absence d’oxygène. Lorsque des déchets végétaux se décomposent de façon anaérobique, ils produisent plus de méthane, qui est un gaz à effet de serre puissant. La réduction du gaspillage alimentaire au Canada aura des répercussions importantes sur les émissions de gaz à effet de serre influant sur les changements climatiques, parce qu’on évitera le processus de décomposition des déchets alimentaires et parce qu’on n’aura pas besoin d’acheter et de produire autant d’aliments puisque nous utiliserons ceux qu’on a plus efficacement. C’est là le réel avantage de la réduction du gaspillage alimentaire.

Pour ce qui est des technologies, oui, elles aideront à réduire le gaspillage des aliments. Si on reconnaît que, au Canada, le gaspillage des aliments se produit principalement du côté des consommateurs, eh bien j’ai des collègues qui travaillent sur des emballages intelligents susceptibles de prolonger la durée de conservation, des systèmes optiques, certains utilisant la lumière, et d’autres, les infrarouges. Ces systèmes aideront, entre autres, à prolonger la durée de conservation des légumes périssables.

Même des choses comme la logistique de la chaîne d’approvisionnement, qui permet de transporter les aliments de façon plus efficiente, permettront de réduire le gaspillage. Il y a beaucoup d’innovations actuellement du côté de la transformation et de la vente au détail des aliments dans la chaîne de valeurs alimentaire, la chaîne de la ferme à la table, qui nous aideront vraiment à réduire le gaspillage d’aliments. Les comportements des consommateurs auront aussi un rôle important à jouer pour réduire le gaspillage des aliments, parce que les consommateurs sont les principaux responsables du gaspillage au Canada.

Le sénateur Maltais : À ce sujet, la sénatrice Bernard avait une question complémentaire. Nous allons revenir à vous, monsieur le sénateur Doyle.

La sénatrice Bernard : J’ai une question complémentaire liée à la question du sénateur Doyle et à votre réponse sur le gaspillage d’aliments.

Avez-vous des recommandations à formuler sur les politiques que pourraient adopter les municipalités et les provinces — il peut même s’agir de politiques nationales — afin de s’attaquer au problème du gaspillage des aliments et d’aider à atténuer la problématique de l’insécurité alimentaire?

M. Fraser : Pour ce qui est du gaspillage des aliments, il y a selon moi un certain nombre de mesures stratégiques très évidentes qui pourraient être prises. Dans un premier temps, il faut changer notre compréhension des dates de péremption. Ces dates sont souvent simplement une indication arbitraire que des aliments peuvent devenir moins frais après une certaine date, mais les consommateurs présument habituellement que, une fois la date de péremption passée, la consommation de l’aliment est dangereuse.

Beaucoup de gaspillage d’aliments au Canada découle de cette date de péremption. Une politique évidente pourrait régler le problème, soit d’exprimer réellement ce en quoi consiste une date de péremption et de ne pas choisir des dates de péremption trop conservatrices. On pourrait travailler avec l’ACIA, l’Agence canadienne d’inspection des aliments; le moment où la consommation d’aliments devient vraiment dangereuse est très différent de la date de péremption de six semaines indiquée sur une boîte de craquelins, par exemple. Si on mange des craquelins sept semaines plus tard, il n’y aura pas vraiment de différence. Il y a beaucoup de choses que nous pouvons faire du point de vue des politiques sur les dates de péremption.

Il y a aussi de toute évidence des choses que nous pouvons faire du point de vue de la sensibilisation et des comportements des consommateurs, comme des programmes d’éducation dans les écoles. C’est quelque chose dont on a discuté dans le cadre du processus d’élaboration de la politique alimentaire nationale. J’ai participé à un certain nombre de discussions au cours des six derniers mois à ce sujet. Je crois que l’éducation des consommateurs doit absolument jouer un rôle.

Une troisième chose évidente qui permettrait de réduire le gaspillage des aliments au Canada est liée aux normes cosmétiques associées à nos légumes. Une très grande quantité d’aliments tout à fait comestibles sont gaspillés parce qu’ils ne respectent pas les normes cosmétiques. Assurément, Loblaws, par exemple, tente de s’attaquer à ce problème grâce à sa gamme de produits « Naturellement imparfaits », qui permet au détaillant de vendre des carottes qui ont un drôle d’air ou des champignons un peu mal formés. Nous pouvons faire beaucoup plus pour changer nos normes cosmétiques afin de ne pas nous débarrasser d’aliments tout à fait comestibles.

Ce sont toutes de très bonnes façons de réduire le gaspillage d’aliments qui, selon moi, pourraient être très bénéfiques pour l’environnement. J’ai un peu plus de difficulté, madame la sénatrice Bernard, à imaginer de quelle façon on pourrait réduire le gaspillage des aliments afin d’atténuer l’insécurité alimentaire. Assurément, la France, par exemple, a essayé d’interdire aux entreprises de jeter des aliments. Ces dernières doivent les donner à des banques alimentaires. C’est une excellente stratégie.

Je repense à ma réponse à la question précédente du sénateur Doyle. L’insécurité alimentaire au Canada découle d’enjeux économiques et sociaux, comme la pauvreté, la marginalisation, des enjeux liés au genre, aux Autochtones et au rôle de mère monoparentale. Ce sont là les facteurs de l’insécurité alimentaire au Canada. Ce n’est pas que nous n’avons pas assez de nourriture. Le problème, c’est que les gens qui vivent une insécurité alimentaire n’y ont pas accès.

Nous pourrions trouver des solutions à court terme — comme on peut mettre un pansement sur une plaie — en transférant les déchets alimentaires vers les banques alimentaires. Je sais qu’il y a un certain nombre de programmes qui le font. C’est louable, mais cela ne s’attaque en aucun cas aux causes profondes de l’insécurité alimentaire au Canada, qui concernent la politique sociale.

[Français]

Le sénateur Maltais : Avant de continuer, je demanderais aux sénateurs de poser des questions courtes et précises, et à notre invité de donner des réponses courtes et précises, puisque nous sommes nombreux ce matin à vouloir poser des questions, et tout le monde doit avoir la chance de le faire.

[Traduction]

La sénatrice Griffin : Merci de participer à la réunion d’aujourd’hui par vidéoconférence.

Je viens d’une province où l’agriculture est la principale industrie. Et au sein de cette industrie, bien sûr, c’est la pomme de terre qui est la culture principale. À de nombreux égards, c’est parfait, mais le problème de la production des pommes de terre, c’est qu’elle exige beaucoup d’intrants, comme de grandes quantités d’engrais et de pesticides, ce qu’on appelle aussi des phytoprotecteurs.

Vous avez dit une chose qui m’a intriguée lorsque vous avez parlé des mesures incitatives pour promouvoir la résilience et l’adaptation. Le gouvernement de l’Île-du-Prince-Édouard le fait à son niveau, mais la province utilise aussi des instruments réglementaires, comme la rotation des cultures, la législation sur les obligations en ce qui concerne les achats et l’interdiction de faire pousser des pommes de terre dans des terrains dont la pente est supérieure à 9 p. 100.

Puisque le gouvernement fédéral contrôle deux genres d’instruments, les instruments réglementaires et les instruments financiers, j’aimerais que vous nous disiez quelles sont, selon vous, les mesures réglementaires que le gouvernement fédéral pourrait prendre pour atteindre les objectifs d’une agriculture durable.

M. Fraser : C’est une merveilleuse question, madame la sénatrice Griffin.

Je viens moi-même, dans une certaine mesure, d’un milieu agricole. Je sais, comme nous le savons tous, que les agriculteurs n’aiment pas être réglementés. Je n’ai pas vu beaucoup de mesures réglementaires fonctionner aussi efficacement dans le secteur agricole que les mesures financières. En général, d’après ma lecture de la littérature, les incitatifs financiers sont plus efficaces que la réglementation pour obtenir les résultats désirés, mais, si les incitatifs financiers ne fonctionnent pas, des procédures réglementaires sont de toute évidence nécessaires.

Il y en a quelques-unes qui me viennent à l’esprit. L’Ontario a mis en place le programme des plans agroenvironnementaux. C’est un programme volontaire et un système fondé sur la réglementation. Il est évident que certains grands détaillants et grands transformateurs utilisent la gouvernance d’entreprise pour établir des règlements. Par exemple, si A&W veut s’approvisionner en bœuf, le fournisseur doit avoir une accréditation quelconque précisant qu’il n’utilise pas d’antibiotiques; c’est là un système de réglementation corporatif.

Pour être efficaces, ces structures réglementaires doivent être associées aussi à un certain type d’incitatifs financiers. C’est ce qu’A&W fait. Si vous voulez faire des affaires avec A&W, vous devez respecter ses règlements. C’est une possibilité que le milieu des affaires a et que le gouvernement n’a pas nécessairement.

Il y a beaucoup d’exemples, et je serai heureux, madame la sénatrice Griffin, de vous en parler directement, si vous voulez, mais j’essaie d’être bref.

La sénatrice Griffin : Je vais suivre la règle du président et l’être moi aussi. Merci.

Le sénateur Woo : Merci, monsieur Fraser. Je veux revenir sur ce que vous avez dit au sujet de la révolution des données et le besoin d’intégrer des données diversifiées provenant de diverses sources et d’une diversité de plateformes. Je me demande de quelle façon on peut y arriver, et quelles mesures incitatives il faut mettre en place.

Pour commencer, pouvez-vous nous donner une idée globale de la mesure dans laquelle les ressources sont disparates? Je soupçonne qu’elles le sont et j’imagine qu’il est très difficile de les réunir.

De quelle façon pourrait-on y arriver? Un partenariat public-privé? S’agit-il d’une initiative privée, ou faut-il s’attendre à ce que le gouvernement le fasse?

Qu’en pensez-vous, s’il vous plaît?

M. Fraser : C’est vraiment une question merveilleuse, et c’est un sujet auquel je réfléchis beaucoup actuellement.

Vous avez tout à fait raison : les sources de données sont disparates et très complexes. Ce n’est pas quelque chose que le secteur public fera seul. Il doit y avoir un arrangement public-privé.

Par exemple, les deux tiers des fermes laitières du Canada utilisent des systèmes de traite robotisée, un genre de technologie extrêmement complexe. Ces systèmes utilisent beaucoup de données; ils sont très riches en données. Il y a deux entreprises qui exploitent ces systèmes de traite robotisée : DeLaval et Lely. On ne peut pas réunir et intégrer les données de ces deux entreprises.

Un autre exemple anodin — qui ne l’est pas, en fait —, c’est le cas d’un agriculteur qui a une moissonneuse John Deere et un épandeur d’engrais Case. Il est quasiment impossible d’intégrer les données des deux systèmes qui sont utilisés sur la même terre. Si nous voulons réaliser le plein potentiel de la révolution numérique dans le milieu agricole, il faut aller dans cette direction. Je ne crois pas que le secteur privé a les incitatifs ni la capacité de le faire seul. Case et John Deere n’ont pas de raison de le faire. Pour être honnête, ils veulent être propriétaires de leurs données. C’est ainsi que j’interprète la situation.

J’ai parlé à des représentants d’Agriculture et Agroalimentaire Canada. À l’Université de Guelph, nous tentons d’assumer un rôle de leadership dans ce dossier afin d’aider à créer un partenariat public-privé qui permettra d’établir des normes en matière de données et de régler les questions de cybersécurité et d’interopérabilité tout en prenant en considération la myriade de sujets intégrés qui permettront d’y arriver.

Si nous pouvons faire preuve de leadership à l’échelle nationale, nous serons un chef de file mondial dans ce domaine, parce que tous les pays et toutes les administrations du monde sont aux prises avec ce problème actuellement.

Le sénateur Woo : De quelles mesures incitatives avez-vous besoin à l’Université de Guelph pour aller de l’avant et réaliser ce projet pilote?

M. Fraser : Il y a, déjà, le financement, et le mandat d’établir des règlements sur l’interopérabilité. En fait, nous avons besoin de la réglementation.

Pour revenir à ce qu’a dit la sénatrice Griffin, c’est un domaine où la réglementation est probablement essentielle et nécessaire. Nous devons dire : « Si vous voulez recueillir des données, il faut les recueillir de telle ou telle façon et dans tel ou tel format. Voici les lois en matière de gouvernance et de propriété, et voici le répertoire où l’information sera stockée. »

Tous les différents éléments sont là, mais il n’y a pas un seul organisme qui s’est vu attribuer le mandat de passer à l’action. C’est le mandat que l’Institut des aliments Arrell, que je dirige à l’Université de Guelph, aimerait beaucoup avoir. Nous avons mis sur pied un projet pilote avec IBM et Soy Canada, pour procéder à une validation de principe à cet égard. Nous nous pencherons la semaine prochaine sur ce projet. Nous en sommes vraiment au tout début et nous nous tournons vers le gouvernement fédéral pour obtenir son soutien.

La sénatrice Tardif : Merci, monsieur Fraser, de nous avoir présenté un exposé très intéressant et instructif. J’ai été surprise de votre commentaire selon lequel les agriculteurs sont submergés de données et qu’il faut s’attendre à une grande révolution des données dans le domaine de l’agriculture. Certains témoins que nous avons rencontrés nous ont plutôt dit qu’il n’y avait pas assez de données, surtout en ce qui a trait à la cartographie pédologique, par exemple. Ils ont affirmé qu’il fallait réaliser plus de recherches pour aider les agriculteurs à atténuer les répercussions des changements climatiques.

De quelle façon voyez-vous la situation?

M. Fraser : C’est une excellente question. Même si je n’ai pas entendu les commentaires des témoins précédents à ce sujet, j’ai l’impression que les agriculteurs ont accès à une immense quantité de données, mais ils n’ont pas de façon d’interpréter ces données.

Par exemple, un groupe d’agriculteurs avec lesquels je travaille possède des systèmes de capteurs de rendement. Essentiellement, lorsque la moissonneuse se déplace dans les champs durant la récolte, la récolte de soya, par exemple, toutes les trois secondes, le système mesure combien de soya a été récolté, son pourcentage d’humidité et, peut-être, sa teneur en protéines. On obtient des données toutes les trois secondes grâce à un tel système de mesure du rendement.

Si on procède ainsi chaque année pendant 10 ans, on aura accès à des millions d’éléments de données sur le disque dur du véhicule. Disons qu’on sauvegarde ces données sur une clé USB qu’on lance dans le cendrier de la camionnette. Et ensuite, qu’est-ce qu’on fait avec ces données? C’est la question que les agriculteurs se posent : « Qu’est-ce que je fais avec toutes ces données? » C’est au niveau des fermes qu’on est submergé par les données.

Pour ce qui est des données sur l’écosystème plus général dans lequel les agriculteurs œuvrent, nous n’en avons probablement pas assez. Nous avons des cartes pédologiques passables, mais elles ne sont pas excellentes. Afin de pouvoir interpréter les données sur le rendement, il faut les associer aux données pédologiques.

Environnement Canada a d’assez bonnes données sur la météo et des choses du genre. De plus en plus, grâce à nos partenariats avec l’Agence spatiale canadienne et la NASA, nous obtenons des données de télédétection dont la qualité s’améliore constamment. C’est bien, mais il reste encore beaucoup de recherches à faire pour réunir tout ça, calibrer les données et faire des choses de cette nature.

Selon moi, le goulot d’étranglement ou l’embâcle se trouve au niveau de l’interprétation des données et de l’utilisation des données que nous avons déjà. Je sais aussi que, probablement, pour ce qui est des sols et, plus particulièrement, la biodiversité, nous n’avons, en fait, pas beaucoup de données. Pour ce qui est de l’hydrologie, de la métrologie, de l’utilisation des terres, de la télédétection et des récoltes, je crois que nous en avons beaucoup.

La sénatrice Tardif : Je vais m’arrêter ici pour l’instant. Merci.

M. Fraser : Merci beaucoup.

La sénatrice Petitclerc : Merci beaucoup de nous avoir présenté votre exposé. Je vais aller dans la même direction que les deux derniers sénateurs, mais je vais parler peut-être un peu plus de technologie.

La raison pour laquelle je veux vous en parler, c’est que votre troisième message clé m’a rappelé une situation d’il y a neuf ans. C’est anecdotique, mais j’étais en tournée et j’ai visité 12 fermes au Canada dans le cadre d’un projet. J’ai rencontré des milliers d’agriculteurs. Je me souviens que, il y a neuf ans, la technologie et ce que vous appelez l’agriculture 4.0 étaient déjà un sujet à la mode, et son importance était enseignée partout au pays.

La préoccupation existait déjà, à l’époque, et vous nous dites qu’elle est encore d’actualité. De toute évidence, on ne l’a pas dissipée totalement. Vous avez parlé beaucoup des données, mais j’en viens à me demander s’il n’y a peut-être pas de la résistance.

Y a-t-il de la résistance qui vient des agriculteurs eux-mêmes, ou est-ce que les défis viennent d’ailleurs? Surtout lorsqu’il est question de s’attaquer aux changements climatiques et aux émissions de gaz à effet de serre, croyez-vous qu’il y a de la résistance?

M. Fraser : C’est une excellente question, madame la sénatrice Petitclerc. Merci.

Je veux commencer par fournir quelques renseignements contextuels. Je dirais qu’on a vu ces technologies être adoptées dans le secteur laitier. Les producteurs laitiers sont ceux qui sont les plus avancés en ce qui a trait à la pose d’étiquettes d’identification par radiofréquence pour les vaches et l’utilisation de systèmes de traite robotisée. Les étiquettes d’identification par radiofréquence permettent de fournir une ration très précise, qui est adaptée à chaque animal. La technologie utilise des accéléromètres — des FitBit pour les vaches — pour savoir quand la vache entre dans un cycle œstral, afin qu’on n’ait pas à déclencher l’ovulation avec des hormones. Toutes ces technologies sont de plus en plus adoptées à grande échelle. Je dirais que l’industrie laitière est en tête de peloton.

Selon moi, l’industrie de l’horticulture de plein champ, à l’exception de l’industrie des serres, est celle qui est le plus en retard. Tous les autres secteurs de l’économie agricole sont quelque part entre les deux.

Le dernier recensement canadien montre que les agriculteurs adoptent rapidement ces technologies et qu’il y a eu une augmentation radicale au cours des 10 dernières années. Certains agriculteurs qui étaient les premiers à adopter les technologies utilisaient déjà des systèmes d’autoguidage, des tracteurs autoconduits, il y a 10 ans, mais ce n’était qu’un petit pourcentage. Maintenant, ils le font presque tous.

Il se passe beaucoup de choses, dont le roulement de l’équipement agricole. Il faut se débarrasser de l’ancien tracteur avant de pouvoir en acheter un nouveau. On parle ici d’une longue période. L’âge des agriculteurs joue aussi pour beaucoup. Les agriculteurs plus âgés ont tendance à moins accepter les nouvelles technologies, et le milieu agricole est âgé. En moyenne actuellement, les agriculteurs arrivent à la fin de la cinquantaine.

À mesure que la nouvelle génération remplace l’ancienne, il y a beaucoup de choses qui changent, pour le mieux et pour le pire. L’une des choses qui changent, c’est l’acceptation des technologies. L’adoption des technologies se fait plutôt lentement. Cela crée des obstacles, mais le processus d’adoption s’accélère actuellement beaucoup.

Il y a aussi un enjeu plus important, soit le fait qu’un grand nombre de ces technologies n’ont pas encore démontré leurs bienfaits pour les agriculteurs. Si un agriculteur peut recueillir toutes ces données, mais qu’il ne peut pas les utiliser, pourquoi devrait-il être emballé? Les intervenants de l’industrie laitière ont constaté les avantages concrets des technologies, alors ils les ont adoptées. Les autres industries n’ont pas encore pu constater les avantages. L’une des raisons pour lesquelles ils n’ont pas encore pu voir les avantages, c’est le problème de l’intégration des données. Nous n’avons tout simplement pas utilisé les données que nous avons produites.

Comme je l’ai dit, je ne sais pas si nous sommes sur la ligne de départ ou si nous sommes sur le point d’y être, même si vous avez raison. Dans une certaine mesure, ces technologies existent depuis environ 10 ans.

Le sénateur Oh : Merci, monsieur, de nous fournir ces renseignements. Durant ma visite dans quelques fermes de la région de Niagara, presque toutes les personnes que j’ai rencontrées m’ont dit que, il y a 30 ans, elles savaient exactement quelle allait être la météo du lendemain, mais ce n’est plus le cas aujourd’hui en raison des événements extrêmes.

Par exemple, durant la nuit, jeudi dernier, la température a soudainement chuté sous le point de congélation. Parfois, les agriculteurs perdent des récoltes en raison d’événements soudains. Des agriculteurs installent actuellement un ventilateur mis au point par le professeur Shaw, de l’Université Brock. Cette technologie pourrait aider à sauver les deux tiers de leur récolte.

Ma question est la suivante : y a-t-il d’autres technologies, actuellement, à part le ventilateur, qui ont été mises au point et qu’on peut utiliser dans le secteur agricole ou relativement à d’autres cultures un peu partout au pays?

M. Fraser : C’est une excellente question. Les technologies dont vous parlez, ces ventilateurs, servent probablement à maintenir un courant d’air autour des pommes et des fruits fragiles lorsque les arbres sont en floraison. En cas de gel alors que les arbres sont en fleurs, mais n’ont pas encore été pollinisés, on peut perdre toute la récolte, et c’est, essentiellement, ce qui est arrivé à l’industrie pomicole de l’Ontario en 2012. Le mois de mars avait été bizarrement chaud. Tous les pommiers avaient bourgeonné. Puis, il y a eu un gel en avril, et environ 90 p. 100 de la récolte de pommes de l’Ontario a été détruite.

Les agriculteurs se sont adaptés en installant des ventilateurs. Je ne sais pas si c’est un fait anecdotique ou non, mais j’ai entendu dire que certains agriculteurs avaient loué des hélicoptères pour maintenir des courants d’air dans les vignobles de la région de Niagara, cette année-là, afin que le froid n’endommage pas les vignes.

C’est un très bon point. Il y a beaucoup de choses que les agriculteurs peuvent faire pour s’adapter. Assurément, pour ce qui est du gel tardif, tout ce qu’on peut faire pour assurer la circulation de l’air sera bénéfique, parce que cela empêche les bourgeons de geler.

Comme je l’ai dit dans ma déclaration, il y a beaucoup de choses que nous pouvons faire au niveau génétique pour produire des cultures et du bétail qui résistent mieux à la sécheresse, au froid et aux ravageurs.

Je vais parler un peu plus du travail de Bonnie Millard. Elle a un outil qui lui permet d’identifier les vaches laitières et les vaches de boucherie qui sont particulièrement résistantes aux conditions chaudes et sèches. En utilisant des outils de génomique très perfectionnés, elle peut transposer ces traits dans les troupeaux beaucoup plus rapidement qu’au moyen de l’amélioration génétique traditionnelle. Comme je l’ai dit, elle a gagné le prix du gouverneur général pour l’innovation cette année pour une partie de ces travaux. C’est le genre de choses où il faut aller de l’avant sans perdre de temps, sénateur Oh, afin de préparer nos systèmes pour les conditions météorologiques extrêmes.

La dernière chose que je dirais, c’est que la création d’incitatifs, pour des choses comme la rotation des cultures et le genre de choses dont j’ai parlé avec les sénatrices Bernard et Griffin plus tôt, permettra aussi de renforcer la capacité de production malgré des conditions météorologiques bizarres au niveau des fermes elles-mêmes.

Les gelées tardives ont des effets dévastateurs sur l’industrie des fruits fragiles, et il y a eu de mauvaises récoltes certaines années en raison de ce problème.

[Français]

Le sénateur Dagenais : Ma question concerne les changements de comportement des consommateurs. Monsieur le professeur, vous savez que les épiciers ont posé des gestes en ne fournissant plus de sacs de papier ou de plastique. Économiquement, c’est peut-être plus avantageux pour eux que pour le consommateur qui doit transporter ses achats. C’était peut-être une décision qui était facile à prendre. Par contre, quelles innovations pourraient être offertes aux épiciers en ce moment pour qu’il y ait de meilleurs emballages et pour conserver les aliments de sorte à prolonger leur durée de vie, tout en étant écologiques?

[Traduction]

M. Fraser : C’est une excellente question, sénateur Dagenais. Vous cernez l’une des vraies tensions au sein du système de production alimentaire moderne.

D’un côté, l’utilisation d’une pellicule de plastique jetable pour emballer les aliments est très hygiénique. Mes collègues de la salubrité des aliments et de l’ACIA aiment vraiment cette méthode, parce qu’elle réduit les problèmes d’origine alimentaire, mais elle crée beaucoup de déchets non biodégradables.

Il y a un certain nombre de choses qui, selon moi, peuvent se produire. Pour commencer, il y a le fait qu’il faut sensibiliser les consommateurs afin qu’ils utilisent seulement des emballages pour des raisons de salubrité et misent plutôt sur des emballages réutilisables dans les autres cas. Beaucoup de mesures réglementaires peuvent être utilisées au niveau institutionnel. En outre, on peut offrir des programmes d’éducation dans les écoles pour que la société utilise les emballages alimentaires de façon plus nuancée et parcimonieuse. Arrêtons d’utiliser des sacs Ziploc et recommençons à utiliser des contenants Tupperware pour les dîners. De telles choses peuvent sembler banales, mais elles peuvent vraiment changer la donne.

Du point de vue de l’innovation et de la science, il y a deux choses qui peuvent se produire. Nous pouvons utiliser ce qu’on appelle des emballages intelligents, comme des emballages munis de codes QR, qui racontent au consommateur tout ce qu’il y a à savoir sur l’aliment, quand il faut le manger et la façon dont il faut le manipuler. C’est quelque chose qu’on commence à faire dans l’industrie des fruits de mer, en particulier.

Il y a aussi des emballages qui peuvent en fait absorber l’oxygène et conserver les produits dans un environnement sans oxygène plus longtemps, ce qui prolonge la durée de conservation.

Selon moi, nous avons beaucoup, beaucoup de travail à faire. En effet, je participe à certains de ces travaux liés aux plastiques biodégradables. Nous pouvons créer ces choses, et je crois que nous devrions jouer un rôle de leadership dans la bioéconomie biodégradable en utilisant les matières organiques non désirées, en utilisant ces flux de déchets pour en faire des plastiques biodégradables extrêmement sanitaires. Certains des collègues avec qui je travaille à l’Université de Guelph travaillent sur ces produits.

Par exemple, notre dernière découverte concerne les dosettes de café entièrement biodégradables pour les contenants de café à usage unique. Nous pouvons débattre de la question de savoir si ces dosettes de café à usage unique sont une bonne idée ou non, mais, si on reconnaît que beaucoup de personnes les utilisent, grâce au travail réalisé à l’Université de Guelph sur les plastiques biodégradables, il y a maintenant des dosettes de café complètement biodégradables vendues chez Loblaws. Nous pouvons faire des progrès dans ce genre de domaines.

[Français]

Le sénateur Dagenais : Merci beaucoup.

La sénatrice Gagné : Merci, monsieur Fraser, de votre excellente présentation et de votre série de vidéos très intéressante sur la sécurité alimentaire. C’est amusant, et cela transmet d’excellents messages.

Ma question concerne l’importance de décloisonner les politiques publiques relatives à l’adaptation aux changements climatiques, politiques qui concernent à la fois la sécurité alimentaire, la santé, la nutrition, la démographie, le sous-emploi, la pauvreté, l’économie et les ressources naturelles. Comment fait-on pour traiter de la question du changement climatique et de l’ensemble des politiques qui s’y rattachent dans le but d’assurer une transition vers des systèmes alimentaires durables et adaptés au climat?

[Traduction]

M. Fraser : C’est le sujet de cours entiers. Merci de me permettre d’aborder cette question. Si je devais condenser mes préoccupations en un seul élément, je dirais qu’il faut être créatif et réfléchir à la façon d’appliquer la tarification du carbone dans le système alimentaire, que ce soit une taxe ou un système de plafonnement et d’échange. L’agriculture est responsable du tiers des émissions de gaz à effet de serre à l’échelle mondiale. Même si j’adore le steak et la crème glacée, je reconnais qu’une très grande quantité d’émissions de gaz à effet de serre vient du secteur de l’élevage.

Il y a beaucoup de sources de protéines à faible émission de carbone. Je sais qu’il y a un grand nombre d’entreprises et d’entrepreneurs qui mettent actuellement sur pied des entreprises de protéines de rechange : des protéines à base de végétaux, d’insectes et de champignons. Il y a une grande possibilité d’innovations liée au fait de fournir aux consommateurs des choix de protéines qui génèrent peu de carbone. Nous créerons toute une vague de mesures incitatives à l’innovation si nous commençons à payer le coût intégral de nos aliments, ce qui exige de payer pour le carbone généré pour les produire.

Je vous encourage à faire preuve de créativité et à réfléchir sérieusement à ce qu’on peut faire pour appliquer un genre de mécanisme de tarification du carbone dans notre système alimentaire. Cela aura des conséquences majeures sur le fonctionnement du système. Ces conséquences ne seront pas faciles. Il y aura de sérieux défis et beaucoup de travail à faire en collaboration avec l’industrie pour obtenir l’adhésion des gens. On ne parle pas ici d’un projet à court terme. C’est un projet à long terme. Pour la durabilité future de la planète et en raison du fardeau sur la santé publique — parce que nous ne mangeons pas particulièrement bien —, nous devons entamer cette conversation.

La sénatrice Bernard : J’aimerais qu’on revienne sur votre deuxième recommandation au sujet de la consultation auprès des collectivités autochtones et nordiques.

Pour commencer, savez-vous si de telles consultations ont lieu actuellement dans la collectivité, y aurait-il des universités qui font ce genre de travail? Y a-t-il quelque chose qui se passe en ce moment ou parlez-vous de nouvelles initiatives qu’il faudrait réaliser?

M. Fraser : Je vous remercie de me permettre d’approfondir ce sujet un peu plus, madame la sénatrice Bernard. C’est apprécié. Absolument, il y a un certain nombre de consultations menées actuellement sur les systèmes alimentaires autochtones. D’une certaine façon, ces activités sont incluses plus implicitement qu’explicitement dans le processus de vérité et réconciliation. Par exemple, la Colombie-Britannique a créé un groupe de travail sur la souveraineté alimentaire autochtone. J’ai accueilli la présidente de ce programme, Dawn Morrison, sur mon campus la semaine dernière. Nous avons organisé un groupe de discussion pour l’émission Ideas de la CBC, et Dawn en a parlé.

Il y a un important groupe dirigé par des Autochtones qui s’intéresse à la question de la sécurité alimentaire. J’ai parlé avec ces gens. Certains de mes collègues travaillent en collaboration avec des communautés inuites et autochtones dans le Nord du Québec sur ce à quoi les systèmes alimentaires autochtones pourraient ressembler. Il y a beaucoup d’initiatives ponctuelles. Je les décrirais comme étant des initiatives locales qui ne sont pas coordonnées à l’échelle nationale.

C’est ici que je suis un peu plus préoccupé. Parallèlement, la possibilité de cultiver le Nord suscite beaucoup d’intérêt. Le gouvernement des Territoires du Nord-Ouest vient de publier une stratégie alimentaire et agricole, qui compte beaucoup de très bons éléments, mais elle inclut l’idée qu’on puisse cultiver beaucoup de terres dans le Nord. Il faut faire attention, ici. Si nous procédons à des travaux de conversion des terres à grande échelle — pour transformer la forêt boréale du Nord canadien en champs de soya —, nous nous retrouverons avec un grave problème d’émissions de carbone. Il faut faire preuve de plus de créativité et consulter davantage les Premières Nations et les communautés autochtones tandis qu’on réfléchit aux changements climatiques et aux occasions que cela crée. Assurons-nous de bien faire les choses. Un peu de leadership fédéral aiderait dans ce dossier.

La sénatrice Bernard : C’est très bon à savoir. Y a-t-il des initiatives similaires pour les collectivités noires dans l’Est? En Nouvelle-Écosse, par exemple, il y a 43 communautés noires dont l’établissement remonte aux années 1700. Beaucoup d’entre elles ont survécu grâce à l’agriculture de subsistance. Lorsque l’industrie agricole est devenue davantage une industrie technologique, ces communautés ont été tenues à l’écart en raison du racisme systémique. Franchement, ils se trouvent sur certaines des pires terres de la province. C’est un miracle qu’ils aient survécu.

Au sein du comité, nous avons entendu parler d’une organisation qui s’appelle Perennia et qui travaille auprès des communautés noires. L’organisation a son siège social à Truro, en Nouvelle-Écosse. Elle tente de réintégrer la communauté noire dans le milieu agricole industriel, ce qui semble être très difficile. Je ne sais pas s’il y a quelqu’un d’autre qui se penche sur cette question. Bon nombre de ces régions sont considérées comme des déserts alimentaires, et beaucoup de personnes sont victimes d’insécurité alimentaire en raison des problèmes systémiques que vous avez cernés.

Y a-t-il quelqu’un d’autre à l’échelle du pays qui s’intéresse à ce qui arrive à la communauté noire de Nouvelle-Écosse et qui le ferait de façon similaire à ce qu’on fait pour les Autochtones?

M. Fraser : C’est très intéressant, madame la sénatrice Bernard. La réponse courte à votre question, c’est non, je ne suis au fait d’aucun groupe qui travaille à l’échelle nationale pour tenter de créer une synergie concernant — à défaut d’une façon plus éloquente de le dire — les communautés marginalisées et leurs problèmes de sécurité alimentaire. Sécurité alimentaire Canada serait très intéressée par ce dossier. Il s’agit d’une coalition d’ONG dont le siège social est à Montréal. S’il y a qui que ce soit d’autre qui pourrait faire ce genre de choses à l’échelle nationale, ce serait Diana Bronson, directrice générale de Sécurité alimentaire Canada. Après la téléconférence, je serais heureux de vous mettre en contact avec elle, et nous pourrions faire certaines recherches.

J’ai parlé à certains membres de la famille McCain, le conseil de direction de la compagnie de frites. Des membres de la famille participent à un programme de jardins communautaires et d’éducation alimentaire communautaire sur la côte Est. Ils ont réalisé des activités d’extension auprès des membres de la communauté noire marginalisée sur la côte Est. J’ai dîné, dimanche, avec l’épouse de Scott, Lesley McCain, qui gère ce programme.

C’était du nouveau, pour moi, mais, de toute évidence, c’était dans la mire de certaines familles très riches de la côte Est.

La sénatrice Bernard : Je vais peut-être communiquer avec votre bureau pour obtenir de plus amples renseignements.

M. Fraser : Je serais heureux de parler avec vous.

Le sénateur Pratte : Je veux revenir sur l’idée de la tarification du carbone, un sujet que nous avons abordé avec beaucoup de témoins qui ont comparu ici. Les témoins de l’industrie agricole sont très préoccupés par le fait qu’on puisse leur imposer la tarification du carbone, surtout les producteurs qui misent beaucoup sur l’exportation. Ils aimeraient plutôt être exemptés de toute forme de tarification du carbone, l’idée étant qu’ils veulent rester compétitifs.

Selon vous, s’agit-il d’un bon argument? S’ils veulent être concurrentiels avec le marché américain, devrait-on les exempter? Ils sont exemptés ou, du moins, partiellement exemptés du système de tarification du carbone en Colombie-Britannique.

M. Fraser : Monsieur le sénateur Pratte, vous soulevez certains enjeux fantastiques, et il n’y a pas de réponse facile. J’aimerais dire très clairement que nous sommes dans une situation où il faut faire beaucoup de concessions et de compromis, c’est sous-entendu dans tout ce que je m’apprête à dire.

Je vais citer Michael McCain, chef de la direction des Aliments Maple Leaf, avec qui je travaille souvent. Il réoriente les Aliments Maple Leaf pour en faire une entreprise de protéines et il a dit que, à l’avenir, on mangera moins de viande, mais qu’elle sera de meilleure qualité. J’espère que je ne déforme pas ses propos. Je le connais assez bien, alors je ne crois pas que ce soit le cas.

Dans un même ordre d’idées, je vais reprendre la phrase clé du rapport du Conseil consultatif en matière de croissance économique de Dominic Barton, publié au début de l’année, dans lequel on mentionne que le Canada devrait s’efforcer de devenir le fournisseur fiable de la planète en matière d’aliments sûrs et durables.

Je crois que nous avons un rôle à jouer et une décision à prendre. Ce n’est pas une décision entre deux possibilités, mais il y a une dynamique sous-jacente à cette décision. Voulons-nous être un producteur de grande quantité de marchandises vendues sans discernement, ou voulons-nous devenir ce dont Dominic Barton a parlé, c’est-à-dire le fournisseur fiable de la planète en matière d’aliments sûrs et durables?

En d’autres mots, pouvons-nous créer une marque canadienne et prospecter des marchés d’exportation fondés sur cette marque dans lesquels on ne miserait pas seulement sur le prix? C’est en partie une question idéologique ou stratégique. J’espère que je n’ai pas l’air trop naïf. Je ne crois pas que MM. Barton et McCain soient naïfs lorsqu’ils parlent d’affaires, mais ils savent qu’une réorientation est nécessaire.

L’un des marchés d’exportation de l’Ontario qui affiche la croissance la plus rapide est lié à ce qu’on appelle le soya à identité préservée, c’est-à-dire du soya sans OGM, qui est vendu dans des marchés japonais très avertis de fèves edamame. L’industrie canadienne du soya offre certaines garanties liées à la façon dont le soya est produit, d’où il vient, quelles en sont les caractéristiques génétiques, de quelle façon il est géré et de quelle façon on le traite au sein de la chaîne alimentaire. Les producteurs sont récompensés pour ce produit de première qualité.

Nous sommes un grand pays, et les approches universelles ne s’appliquent pas. Des exemptions peuvent être nécessaires dans certains secteurs de l’économie, ou il faut peut-être prévoir des exemptions à durée déterminée durant la transition. Je suis d’accord avec MM. McCain et Barton pour dire que l’avenir consiste à produire des produits à plus grande valeur ajoutée pour des marchés avertis qui acceptent de payer un peu plus parce que nos aliments sont sûrs et durables. Cela signifie que, dans le cadre de nos activités commerciales, nous devons prouver la validité des affirmations sur le carbone, le bien-être des animaux, les sols, les travailleurs et la main-d’œuvre, les Autochtones et la souveraineté alimentaire et miser sur ces choses. Nous devons créer une marque Canada qui témoigne de ces affirmations.

Le sénateur Pratte : Il faudra beaucoup d’efforts pour que le milieu agricole adhère à ce dont vous parlez.

M. Fraser : Je suis d’accord avec vous, mais j’ajouterai qu’il y a aussi beaucoup de champions dans le secteur des nouvelles technologies et des entreprises en démarrage qui ont hâte d’offrir de nouveaux produits de consommation de rechange aux consommateurs.

Permettez-moi de répéter ce que j’ai dit au début : ces transitions sont difficiles, et il y aura beaucoup de concessions et de compromis. Il ne fait aucun doute selon moi que nous sommes confrontés à des enjeux très difficiles.

[Français]

Le sénateur Maltais : Monsieur Fraser, le consommateur canadien a l’impression que les transformateurs alimentaires et les épiciers n’ont pas de plan précis pour protéger l’environnement. Je vais vous donner un exemple précis. On a aboli l’usage des sacs de papier, étant donné qu’on abattait trop d’arbres. Les sacs de papier étaient de qualité, tout en étant biodégradables et recyclables. On a remplacé le papier par du plastique, qui provient du pétrole. Puis, on s’est aperçu que cela n’avait aucun sens. Les sacs en plastique ont été remplacés par des sacs de coton plastifié. Maintenant, on dit que les sacs de coton plastifié sont remplis de microbes. De plus, le consommateur se retrouve avec des sacs de coton plastifié remplis de plastique. Presque tous les aliments, les légumes, et cetera, sont emballés dans du plastique. Le consommateur se demande ce qui arrivera avec tout ce plastique, alors qu’il y a 25 ans on utilisait des sacs de papier, qui étaient biodégradables et recyclables. Le plastique pose un grand problème en ce qui a trait à la protection de l’environnemental. Le consommateur y perd son latin. Que pouvez-vous répondre au consommateur aujourd’hui?

[Traduction]

M. Fraser : Je comprends le sens de votre commentaire. Vous avez raison, nous, les scientifiques, n’avons pas très bien réussi — si je peux m’exprimer ainsi — à nous mettre de la partie pour communiquer de façon utile avec le grand public. Il ne fait aucun doute qu’il s’agit d’un grand défi.

Pour ce qui est des consommateurs canadiens, je dirais qu’il faut réduire notre utilisation partout où c’est possible. Pour ce qui est des emballages alimentaires, il faudrait les réutiliser le plus possible.

Il est évident qu’on conseille actuellement aux consommateurs d’utiliser des sacs de tissu. Surtout lorsqu’on les utilise pendant plus de six mois, ces sacs utilisent moins d’énergie que le nombre de sacs de plastique équivalents et ils ne s’accumulent pas. À cet égard, de bonnes directives sont données aux consommateurs. Les marchés de détail de Loblaws, de Sobeys et ainsi de suite, ont commencé à prendre le relais et à en parler. Je constate un important changement générationnel entre mes grands-parents, mes parents, moi et mes enfants en ce qui a trait, par exemple, à la relation avec les sacs de plastique et la façon de les utiliser.

Tandis que nous allons de l’avant et que nous réutilisons et recyclons davantage des emballages alimentaires, je suis préoccupé par le fait que nous ne devons pas compromettre la salubrité des aliments. Je sais que beaucoup d’intervenants de l’Agence canadienne d’inspection des aliments et des laboratoires sur la salubrité des aliments de l’Université de Guelph sont très préoccupés par ce problème. C’est là que la science et l’innovation ont joué un rôle important en créant des plastiques biodégradables. Selon moi, il faudra à la fois miser sur des emballages réutilisables et les plastiques biodégradables dans les cas où la salubrité des aliments est en jeu. Si nous pouvions faire preuve de créativité et créer une stratégie de communication publique sur ces deux principes, je serais très heureux.

[Français]

Le sénateur Maltais : Merci beaucoup, monsieur Fraser. Le temps est déjà écoulé. C’était très intéressant. Je vous remercie d’avoir pris le temps de nous écouter.

(La séance est levée.)

Haut de page