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AGFO - Comité permanent

Agriculture et forêts

 

Délibérations du Comité sénatorial permanent de
l'Agriculture et des forêts

Fascicule no 63 - Témoignages du 4 avril 2019


Ottawa, le jeudi 4 avril 1019

Le Comité sénatorial permanent de l’agriculture et des forêts se réunit aujourd’hui, à 8 h 5, pour étudier la manière dont le secteur alimentaire à valeur ajoutée peut être plus compétitif sur les marchés globaux

La sénatrice Diane F. Griffin (présidente) occupe le fauteuil.

[Traduction]

La présidente : Bonjour. Je suis la sénatrice Diane Griffin, je viens de l’Île-du-Prince-Édouard et suis présidente du comité. Aujourd’hui, le comité poursuit son étude sur la manière dont le secteur alimentaire à valeur ajoutée peut être plus compétitif sur les marchés mondiaux.

Avant que nous n’entendions nos deux témoins d’aujourd’hui, j’ai quelques tâches à accomplir. Je dois premièrement demander aux sénateurs s’ils acceptent que la séance soit filmée. Êtes-vous d’accord avec cela? Très bien. Vous pourrez nous regarder plus tard à la télévision de Fergus.

Deuxièmement, j’aimerais demander aux sénateurs de se présenter, à commencer par le vice-président.

[Français]

Le sénateur Maltais : Sénateur Ghislain Maltais, du Québec.

Le sénateur Dagenais : Jean-Guy Dagenais, du Québec.

[Traduction]

Le sénateur Doyle : Norman E. Doyle, Terre-Neuve-et-Labrador.

Le sénateur Oh : Victor Oh, Toronto. Je vous souhaite la bienvenue.

Le sénateur Kutcher : Stan Kutcher, Nouvelle-Écosse.

[Français]

La sénatrice Miville-Dechêne : Julie Miville-Dechêne, du Québec.

[Traduction]

Le sénateur R. Black : Rob Black, Ontario.

La sénatrice Moodie : Rosemary Moodie, Ontario.

Le sénateur Mercer : Terry Mercer, Nouvelle-Écosse. Je crois qu’il faut mentionner que ce pourrait être la dernière réunion du sénateur Maltais aujourd’hui.

La présidente : Nous le ferons, ou voulez-vous le faire pendant que vous y êtes?

Le sénateur Mercer : Je ne serai pas là quand vous le ferez, donc j’aimerais dire que cela a été un plaisir de travailler avec vous. Vous serez difficilement remplaçable et vous nous manquerez. Nous penserons à vous chaque fois que nous allons au Tim Hortons.

Le sénateur Maltais : Merci, Terry. Merci beaucoup.

La présidente : Chaque fois que nous irons dans les stations de recherche canadiennes et que nous verrons des pommes, nous penserons à lui. Nous avons préparé quelques mots pour lui que nous prononcerons un peu plus tard au cours de la réunion, et le sénateur Maltais aura probablement quelques mots à nous dire aussi.

Pour l’instant j’aimerais vous présenter nos deux témoins. Nous accueillons Michael Wolfson, spécialiste du secteur des aliments et boissons à la Division du développement économique et de la culture de la Ville de Toronto. Nous accueillons également Emily Haynes, qui représente Taste of Nova Scotia. Je vous souhaite la bienvenue. Je crois comprendre que c’est M. Wolfson qui présentera le premier exposé, donc la parole est à vous.

Michael Wolfson, spécialiste du secteur des aliments et boissons, Développement économique et culture, Ville de Toronto : Bonjour.

Madame la présidente et distingués membres du comité sénatorial, je suis spécialiste du secteur des aliments et des boissons à la Division du développement économique de la Ville de Toronto. En plus du soutien sectoriel, j’apporte une perspective de développement économique à toutes les questions liées à l’alimentation qui sont importantes pour le conseil municipal de Toronto, comme l’équité, la réduction de la pauvreté et la stratégie alimentaire de la ville. J’ai fait carrière pendant 40 ans dans les secteurs de la fabrication, de la distribution et du courtage de produits alimentaires dans la région de Toronto, et j’occupe mon poste actuel depuis 17 ans. Lorsque j’oeuvrais dans le secteur privé, j’ai surtout travaillé pour des petites et moyennes entreprises alimentaires au Canada et aux États-Unis. Je faisais de l’importation et de l’exportation d’aliments et de boissons.

À la fin des années 1970, l’innovation dans ce secteur a connu un essor. Le commerce de détail était entre les mains de nombreuses entreprises, dont les dirigeants étaient des innovateurs comme Dave Nichol, Sam Steinberg, Max Wolfe et la famille Sobey. Un nouvel entrepreneur dans le secteur des aliments et des boissons pouvait commencer la fabrication de produits dans sa cuisine ou à la ferme familiale. Des marques comme ED Smith, les vinaigrettes Renee, Honey Cup Mustard, les tartes aux pommes Chudleigh et de nombreuses autres ont connu du succès en vendant leurs produits à de nombreuses chaînes de vente au détail.

Les gouvernements à l’époque effectuaient des missions commerciales dans de nombreux États américains à faibles coûts pour les entreprises canadiennes. J’ai assisté à des événements à Detroit, à Boston, à Washington, à Baltimore et à Anaheim. C’est à cette époque que les fabricants d’aliments et de boissons canadiens ont acquis la réputation dans le monde de mettre au point des produits uniques, sécuritaires et dignes de confiance. Des marques privées comme le Choix du Président ont été reconnues dans le monde pour leurs produits uniques et leurs ingrédients de qualité.

Permettez-moi de revenir à aujourd’hui. Le commerce de détail au Canada s’est consolidé au point où il y a désormais très peu d’options pour les fabricants. Le coût pour vendre nos produits dans les magasins ou les services d’alimentation au Canada est très élevé. La réglementation du gouvernement et des détaillants du secteur privé ne permet plus de créer une entreprise depuis la cuisine de sa maison. Les entreprises de produits alimentaires et de boissons rivalisent maintenant avec les entreprises de TI pour avoir accès à des capitaux, et le rendement n’est pas le même dans le secteur des aliments et des boissons, si bien que les institutions financières et les sociétés de capital-risque sont réticentes à investir. Malgré tout, l’industrie continue de croître. Elle est dirigée par de nombreuses nouvelles petites et moyennes entreprises diversifiées sur le plan culturel qui sont solidement enracinées au Canada.

Toronto est une plaque tournante pour cette industrie. Dans la région métropolitaine de recensement, nous avons plus d’un millier de fabricants de produits alimentaires et de boissons, qui créent plus de 65 000 emplois et génèrent des revenus de 17 milliards de dollars. Plus de 75 p. 100 de ces entreprises sont de petite et moyenne taille. Certains entrepreneurs que j’ai connus au début de ma carrière sont maintenant des producteurs multimillionnaires qui possèdent de multiples installations de production dans la région de Toronto.

Dans un effort pour maintenir et accroître le flux d’entreprises et de produits alimentaires nouveaux et novateurs à Toronto, nous avons créé un incubateur agroalimentaire et une installation de commercialisation en 2007, qui est devenue un espace de 20 000 pieds carrés. Nous offrons aux entreprises alimentaires nouvelles et existantes l’occasion de produire des aliments dans une installation certifiée de qualité alimentaire et nous leur enseignons comment exploiter une entreprise prospère. Jusqu’à présent, nous sommes venus en aide à plus de 200 entreprises et avons contribué à créer plus de 500 emplois.

Dans le cadre de mes recherches en vue de la création de notre incubateur agroalimentaire, j’ai découvert qu’au Canada, dans tous les secteurs, moins de 3 p. 100 de tous les fonds dépensés pour la recherche et le développement aboutissent à la commercialisation de produits. Nous devons faire mieux. La production d’aliments à valeur ajoutée est une industrie coûteuse en raison de la réglementation et du coût du capital. En créant et en appuyant un réseau de centres de commercialisation au Canada qui soutient des entreprises alimentaires novatrices, émergentes et en pleine croissance, et en améliorant la réputation des boissons et des aliments canadiens sur la scène internationale, on contribuera grandement à accroître la compétitivité du secteur des aliments à valeur ajoutée au Canada sur les marchés mondiaux.

Avant de conclure mon bref exposé, j’aimerais dire que pour assurer la croissance de ce secteur, nous devons absolument reconnaître l’importance de cette industrie pour l’avenir de l’économie canadienne. Le rapport de Dominic Barton en fait mention. Cependant, le secteur est encore très mal compris. J’occupe ce poste depuis 17 ans, et un ministre m’a déjà dit que tous les aliments transformés sont mauvais. J’ai corrigé le ministre en disant que tous les aliments sont transformés. Je n’ai jamais vu quiconque prendre une bouchée d’une vache ou déterrer une carotte et commencer à la manger. La majorité de nos transformateurs d’aliments sont des producteurs artisanaux soucieux de la qualité de leurs produits finis et de leurs effets sur la santé, qui mettent grandement à contribution les ressources locales pour les fabriquer. Il faut changer la mentalité qui sous-tend la majorité des investissements du secteur public dans les activités rurales et agricoles et mettre l’accent sur la production à valeur ajoutée qui est effectuée principalement dans les centres urbains. Si vous voulez assurer la réussite et la prospérité des agriculteurs du Canada, alors soutenez le secteur de la transformation des aliments.

Je vous remercie tous du temps que vous m’avez consacré aujourd’hui. Je me ferai un plaisir de répondre à vos questions.

La présidente : Je vous remercie de votre exposé. J’ai grandi dans une ferme laitière. Je n’ai jamais pris une bouchée de vache, mais j’ai déjà déterré une carotte pour la manger toute fraîche. C’était fabuleux. Comme le sénateur Doyle l’expliquait, en effet, je la transformais en l’essuyant sur ma manche.

Ceux d’entre vous qui ont participé au voyage récent du comité dans le Sud de l’Ontario se rappellent sans doute Food Starter, qui offre des ressources formidables. J’étais déçue de manquer cette partie du voyage.

Quelques cadeaux de la Nouvelle-Écosse viennent de nous être distribués, donc j’inviterais notre prochain témoin à prendre le micro : Emily Haynes.

Emily Haynes, directrice générale, Taste of Nova Scotia : Je vous remercie, honorables sénateurs, et je vous remercie, monsieur Wolfson. J’ai beaucoup apprécié votre déclaration et je suis d’accord avec beaucoup de choses que vous avez dites.

Je vous remercie de m’offrir cette occasion d’être parmi vous aujourd’hui. C’est pour moi un honneur d’avoir la possibilité de venir vous parler de Taste of Nova Scotia et du rôle qu’il joue dans paysage agroalimentaire canadien.

Je commencerai par vous présenter un peu Taste of Nova Scotia, pour ceux et celles d’entre vous qui ne nous connaissent pas très bien. Nous sommes une association de membres provinciale axée sur le marketing, qui regroupe plus de 200 restaurants, producteurs-transformateurs et autres membres de l’industrie. Nous célébrons notre 30e anniversaire cette année, la Taste of Nova Scotia Society ayant été fondée en 1989. Au départ, c’était une collaboration entre les secteurs public et privé pour faire la promotion des restaurants qui s’engageaient à offrir des aliments locaux de qualité et à respecter des normes en ce sens. En 1994, le Quality Food Council a été établi pour faire la promotion des producteurs-transformateurs soucieux de la qualité de leurs produits et s’engageant à utiliser des ingrédients de la Nouvelle-Écosse. En 2007, le Quality Food Council et la Taste of Nova Scotia Society ont fusionné pour former l’organisme Taste of Nova Scotia que nous connaissons aujourd’hui.

Nous demeurons une association de membres dynamique qui fait la promotion de l’industrie culinaire de la Nouvelle-Écosse grâce à divers outils de marketing et à des mesures pour stimuler l’exportation, le tourisme culinaire, pour améliorer l’éducation et par toutes sortes d’autres moyens. Nous voulons être une ressource de premier plan pour la promotion de l’industrie culinaire néo-écossaise, et nous avons pour mandat de base d’aider nos membres à faire croître leur entreprise, de faire connaître au public la qualité supérieure des produits culinaires néo-écossais et d’encourager nos membres à aider leurs confrères et consœurs membres de Taste.

Taste of Nova Scotia est unique en son genre; il s’agit d’un carrefour qui représente tous les secteurs de l’industrie culinaire. Nous travaillons avec des producteurs-transformateurs de fruits de mer, des producteurs-transformateurs agroalimentaires, des producteurs de boissons alcoolisées et des restaurants. Nous travaillons dans divers domaines, y compris ceux du tourisme culinaire et du développement des exportations. Nous gérons plus d’une cinquantaine d’événements culinaires chaque année. Nous faisons de l’éducation, participons au mouvement de promotion de l’achat local et plus encore.

L’objectif de notre association est de constamment apporter de la valeur à nos membres grâce à nos diverses initiatives. Nous leur offrons des activités de réseautage, de promotion et de croissance sur divers plans, et chaque année, nous achetons plus de biens et de services de nos membres que nous ne leur faisons payer de cotisations. Nous sommes déterminés à réinvestir directement dans nos membres en achetant leurs produits et en les embauchant lors de nos événements. Nous vendons des paniers-cadeaux qui se composent de produits que nous achetons de nos membres. Vous avez devant vous aujourd’hui quelques produits de nos membres qui représentent bien les produits agroalimentaires à valeur ajoutée dont nous faisons la promotion.

Notre association regroupe actuellement 110 restaurants, 88 producteurs-transformateurs et 15 membres associés des secteurs connexes de l’industrie culinaire de la Nouvelle-Écosse, comme des organisateurs de voyages culinaires. Nous avons des membres dans les sept régions de la Nouvelle-Écosse, et 73 p. 100 d’entre eux résident hors de la région de Halifax, ce qui témoigne de l’incidence économique importante de la Nouvelle-Écosse rurale dans notre industrie culinaire. Ces entreprises sont surtout établies dans de petites municipalités rurales, des villages de pêche ou agricoles. Elles apportent une grande valeur aux communautés dont elles font partie. Elles les enrichissent en leur insufflant l’entrepreneuriat, elles les enrichissent en créant des lieux intéressants où vivre et où se rassembler pour échanger. Elles créent de l’emploi. Elles contribuent à véhiculer et à renforcer l’image de marque de la Nouvelle-Écosse, ainsi qu’à raconter notre histoire par les aliments et boissons.

La plupart de ce que nous faisons, chez Taste of Nova Scotia, est rendu possible grâce à notre vaste réseau de partenaires de l’industrie, de partenaires financiers et d’autres collaborateurs. J’aimerais vous nommer quelques-uns de nos partenaires clés. Le ministère de l’Agriculture de la Nouvelle-Écosse a joué un rôle essentiel dans la création de Taste of Nova Scotia, en 1989, et en demeure la seule source de financement externe encore aujourd’hui. Nous travaillons aussi en étroite collaboration avec Tourisme Nouvelle-Écosse, pour le développement et la promotion des produits de tourisme culinaire, puis nous collaborons de près avec l’Agence de promotion économique du Canada atlantique, qui assure un financement essentiel grâce à diverses initiatives de commercialisation, de développement des exportations, d’éducation, et cetera. Comme vous pouvez le constater, nous avons bien d’autres partenaires dans la mise en œuvre de la stratégie culinaire de la Nouvelle-Écosse.

Le marketing des aliments et des boissons passe beaucoup par des récits et des histoires personnelles chez Taste of Nova Scotia. En Nouvelle-Écosse, c’est une occasion sans pareille de raconter notre histoire par les aliments et les boissons. Chaque bol de chaudrée, chaque verre de vin et chaque morceau de tarte aux pommes raconte qui nous sommes et d’où nous venons. Il raconte l’histoire de notre climat froid, de notre géographie, de notre côte infinie, de notre paysage agricole vallonné, de nos agriculteurs, pêcheurs, artisans, vignerons, brasseurs, distilleries et chefs. Il raconte leur engagement, leur passion et leur sens de l’innovation. Il raconte notre passé, notre présent et notre avenir. Nous nous distinguons par notre façon de raconter cette histoire. Il y a beaucoup d’histoires à raconter dans l’industrie agroalimentaire de la Nouvelle-Écosse.

Il y a un certain nombre de choses que j’aimerais souligner aujourd’hui. Premièrement, les exportations agroalimentaires de la Nouvelle-Écosse ont atteint 360 millions de dollars en 2018, ce qui constitue une hausse de 15 p. 100 depuis 2017. Les produits agroalimentaires sont la troisième catégorie d’exportations de la Nouvelle-Écosse, ils représentaient 6 p. 100 de nos exportations internationales en 2018, nos principaux marchés d’exportation étant les États-Unis, les Pays-Bas et la Chine. Le bleuet sauvage est le fruit le plus cultivé en Nouvelle-Écosse : plus de 1 000 producteurs de bleuets exploitent 40 000 acres de terre. Environ 95 p. 100 des bleuets sauvages produits sont vendus à un transformateur. Vous avez un exemple de produit de bleuets transformés devant vous. Voici le jus de bleuets sauvages pur de Van Dyk's, qui connaît beaucoup de succès et qui montre la valeur qu’on peut ajouter à un produit primaire pour en faire un jus exceptionnel, de qualité supérieure, un jus de bleuets pur. Cette entreprise connaît énormément de succès. On trouve ses produits dans tous les commerces de détail du Canada, et ils connaissent aussi beaucoup de succès sur les marchés d’exportation ailleurs dans le monde.

Il y a actuellement plus de 3 900 fermes en Nouvelle-Écosse. On y trouve aussi 23 vignobles et 84 cultivateurs de raisins, qui exploitent près de 1 000 acres de vignes. On peut traverser la vallée de l’Annapolis et y voir des vignobles, des vergers et des terres agricoles magnifiques. Il est important d’en parler, puisque notre industrie agroalimentaire nous permet de nous nourrir de notre vue. C’est à l’auteur Michael Pollan qu’on doit l’idée de manger sa vue. On peut aller dans la vallée de l’Annapolis s’asseoir au vignoble Luckett qui surplombe la vallée de la Gaspereau. On peut y voir les vignes dont sont issus les raisins qui ont servi à fabriquer le vin qu’on boit. On peut admirer la vallée de la Gaspereau et les fermes d’où viennent les aliments qui se trouvent dans notre assiette. On peut littéralement manger la vue. On peut faire la même chose en allant visiter les petits villages de pêche de la Nouvelle-Écosse. En fait, on peut le faire dans toutes les communautés rurales du Canada. Ces entreprises agroalimentaires contribuent à préserver le paysage de notre pays. Elles sauvent les collectivités de pêcheurs. Elles sauvent les paysages agricoles. Elles sont très importantes. Leur valeur ne se limite pas à l’exportation. Elles contribuent à attirer le tourisme, à faire de nos régions des endroits magnifiques où vivre et à visiter. Elles contribuent à renforcer notre image et notre identité de destination superbe aux paysages à couper le souffle.

À l’heure actuelle, il y a 218 entreprises agroalimentaires enregistrées en Nouvelle-Écosse ayant un potentiel d’exportation. Nous avons plus de 50 microbrasseries dans notre bonne vieille Nouvelle-Écosse, ce qui est plus par habitant que dans toute autre province du Canada, et 70 p. 100 de ces microbrasseries sont situées dans des petites localités rurales. Nous avons 11 distilleries artisanales, dont 80 p. 100 sont situées dans des municipalités rurales.

La présidente : Madame Haynes, le temps commence à nous manquer. Pourriez-vous bientôt conclure, s’il vous plaît?

Mme Haynes : Absolument.

Le volet exportation est important dans l’industrie agroalimentaire. Notre plus grand atout, pour l’exportation, c’est en fin de compte la réputation du Canada, qui en fait l’un des pays les plus respectés et dignes de confiance au monde. C’est une chose que nous reconnaissons, en Nouvelle-Écosse. Quand nous nous rendons à Shanghai ou en Europe, ce n’est peut-être pas tout le monde qui connaît la Nouvelle-Écosse, mais tout le monde connaît le Canada. Le Canada inspire la confiance, et nous pouvons continuer de nous fier à cette image quand nous cherchons de nouveaux marchés d’exportation.

Il est crucial de continuer à mettre l’accent non seulement sur l’exportation internationale, mais aussi sur l’importance du soutien à la croissance de l’industrie, comme M. Wolfson l’a dit, et de l’aplanissement des obstacles à la croissance de l’industrie agroalimentaire. Voici quelques exemples de produits, dont les barres de céréales Made with Local. Il s’agit d’une entreprise issue d’un petit marché agricole. Ses instigateurs les fabriquaient dans leur cuisine, à la maison, les emballaient dans du Saran Wrap et les vendaient au marché. En quelques années, l’entreprise a pris de l’expansion et les offre maintenant dans un emballage magnifique. Elles sont vendues partout au pays. Je crois fermement que si ces entrepreneurs choisissaient de tenter leur chance sur les marchés d’exportation internationaux, ils connaîtraient du succès. L’entreprise Made with Local achète ses ingrédients de producteurs locaux pour ajouter de la valeur à ses barres de céréales. Vous voyez aussi devant vous des croustilles de pommes de la ferme Noggins, fabriquées à partir de l’excellente pomme Honeycrisp. C’est un produit exceptionnel. Avec un emballage plus raffiné et un réseau de distribution élargi, il y aurait sûrement un marché pour elles dans les commerces de détail du Canada, de même que sur les marchés d’exportation. Ce doit être un objectif constant, il faut lever les obstacles à la croissance et à la production, et continuer d’appuyer toutes les possibilités d’exportation pour ces petites entreprises en Nouvelle-Écosse, au Canada atlantique en général ou ailleurs au Canada.

Je vous remercie beaucoup de votre accueil aujourd’hui.

La présidente : Je remercie nos deux témoins. Je soulignerai que deux nouveaux sénateurs de la Nouvelle-Écosse se joignent à nous aujourd’hui, le sénateur Colin Deacon et la sénatrice Wanda Thomas Bernard. Il y a donc quatre Néo-Écossais autour de la table et quelques autres sénateurs des provinces voisines. Quelques sénateurs ont déjà donné leur nom pour vous poser des questions. Nous commencerons par le sénateur Maltais.

[Français]

Le sénateur Maltais : Ma première question s’adresse à Michael Wolfson. Pouvez-vous me donner la différence entre les produits transformés et les produits surtransformés?

[Traduction]

M. Wolfson : Il n’y a pas de grande différence entre les deux. Un exemple de produit surtransformé serait celui du sirop de bleuets ou de la bouteille de bleuets que vous avez devant vous. Le produit transformé serait peut-être le bleuet lui-même, une fois nettoyé et emballé. L’étape de transformation subséquente serait la préparation d’un produit différent du produit d’origine.

[Français]

Le sénateur Maltais : Que répondez-vous à l’étude menée en Europe, intitulée NutriNet-Santé, qui fait la une des journaux ce matin, notamment dans un article du journal Le Devoir intitulé « Aliments ultratransformés : la mort dans une assiette »?

[Traduction]

M. Wolfson : Tous les aliments subissent une forme ou une autre de transformation. La majorité des transformateurs canadiens que j’ai rencontrés n’ajoutent pas beaucoup d’additifs ou d’agents de conservation dans leurs produits alimentaires. Je pense que c’est ce à quoi la journaliste faisait allusion dans cet article, mais il n’est pas nécessaire d’en ajouter aux produits alimentaires. Il y a des technologies aujourd’hui qui facilitent l’emballage, qui permettent d’y apposer une étiquette propre et d’offrir divers formats aux consommateurs. C’est le genre d’article qui crée une mauvaise perception de l’industrie.

[Français]

Le sénateur Maltais : Merci, monsieur Wolfson.

Madame Haynes, toutes mes félicitations. Vous êtes une excellente ambassadrice de votre province et de vos produits alimentaires, que nous connaissons bien. La cuisine de la Nouvelle-Écosse est réputée. Nous avons un ambassadeur permanent ici en la personne du sénateur Mercer, qui nous le rappelle deux fois par jour, et avec raison.

Ce matin, à ma grande surprise, vous nous avez distribué ce sachet de pommes Honeycrisp. Le Québec est un grand consommateur de vos pommes, malgré le fait qu’elles coûtent cher une fois arrivées chez nous. Mes petits-enfants raffolent de ces pommes et ils exigent que je n’achète que cette variété. Malheureusement, elles ne sont pas disponibles assez longtemps. Peut-être que, si vous faisiez moins de croustilles, vous pourriez nous envoyer davantage de pommes fraîches. Les pommes Honeycrisp sont aussi cultivées dans le Sud, mais elles ne sont pas aussi goûteuses. C’est la Nouvelle-Écosse qui est l’experte de la culture de ces pommes et tous les foyers québécois les connaissent.

La cuisine de la Nouvelle-Écosse a une particularité : elle est basée sur l’agriculture artisanale et la pêche. Donc, c’est un très beau mélange qui offre une cuisine exceptionnelle.

L’autre point que je voulais soulever, c’est votre production de vin, qui est de plus en plus populaire. Avec les fameuses barrières tarifaires entre les provinces, c’est très difficile pour nous, à moins d’aller en Nouvelle-Écosse comme j’ai fait l’été dernier, d’acheter du vin de la Nouvelle-Écosse.

Votre production est-elle vendue uniquement en Nouvelle-Écosse, ou en vendez-vous également aux États-Unis? Comme Canadien, j’aimerais bien en avoir, mais ce n’est pas possible. Envisagez-vous de distribuer votre vin dans d’autres provinces?

[Traduction]

Mme Haynes : Je vous remercie des belles choses que vous avez dites au sujet de la Nouvelle-Écosse. Parlant de pommes, ma mère a grandi dans une ferme, vieille de 100 ans, de la vallée de l'Annapolis, où on cultivait principalement des pommes. J’en ai tellement mangé quand j’étais enfant que je crois être maintenant en partie pomme.

Pour répondre à votre question au sujet du vin et des barrières tarifaires entre les provinces, il est vrai qu’elles font qu’il est difficile de trouver une variété de vins canadiens de toutes les régions vinicoles du Canada, comme la Nouvelle-Écosse, la Colombie-Britannique, l’Ontario et le Québec. C’est vrai en Nouvelle-Écosse et ailleurs. Nos établissements vinicoles ont de la difficulté à exporter leur vin vers d’autres provinces canadiennes.

Ce sont les établissements vinicoles qui doivent s’organiser eux-mêmes pour que leurs produits soient vendus dans d’autres provinces. Certains y sont parvenus. Ils ont dû travailler fort pour que cela se fasse. Le vignoble Benjamin Bridge est connu pour ses vins mousseux, dont le Nova7, un vin classique qu’ils produisent depuis 11 ans. Ils ont réussi à les faire distribuer partout au Canada. D’autres aussi y sont parvenus, comme Jost Vineyards et Vignobles côtiers Devonien.

La situation demeure difficile non seulement pour les viticulteurs, mais également pour les autres producteurs de boissons alcoolisées, comme les spiritueux, les cidres et les bières artisanales. Il y a de la place à l’amélioration pour aider les producteurs de boissons et d’alcool à avoir accès aux marchés canadiens.

[Français]

Le sénateur Maltais : J’aurais une suggestion à vous faire. La Nouvelle-Écosse devrait prendre le leadership dans ce dossier. Dans chaque province, la distribution de l’alcool est en très grande partie contrôlée par les gouvernements. Y aurait-il moyen de créer une association de distribution d’alcool dans les 10 provinces et territoires qui regrouperait tous les gouvernements, que ce soit la LCBO en Ontario, la Société des alcools au Québec ou votre propre société? Est-il possible de former ce genre d’association? Cela nous permettrait d’avoir des échanges beaucoup plus rapides. Le consommateur serait le grand gagnant. Au lieu d’avoir des vins de la Nouvelle-Zélande ou de l’Australie, je préférerais consommer des vins de la Nouvelle-Écosse, de l’Ontario ou de la Colombie-Britannique. C’est chez nous; ce sont mes voisins.

J’aime bien l’Afrique du Sud, mais c’est loin de chez moi. Est-ce qu’il n’y aurait pas une façon de former une association des distributeurs d’alcool au Canada qui regrouperait toutes les provinces? De cette façon, les plus petits producteurs auraient la même chance que tout le monde de placer leur production dans des provinces différentes. Vous êtes la personne toute désignée pour former cette entreprise. Vous êtes une excellente vendeuse.

[Traduction]

Mme Haynes : Merci. Vous avez raison. Le gouvernement doit élaborer des politiques pour fixer l’orientation tout en collaborant avec l’industrie. Il est essentiel que l’industrie participe et que les établissements vinicoles, comme les distilleries et les brasseries, aient leur mot à dire dans l’élaboration des politiques afin qu’elles servent au mieux les entreprises et l’industrie et leurs intérêts en matière de commerce interprovincial.

Il s’agit certainement d’un point de discussion au sujet duquel le gouvernement et l’industrie doivent avoir un débat exhaustif pour déterminer de quelle façon on peut faire cela tout en défendant les intérêts de l’industrie, des consommateurs et de l’économie canadienne.

[Français]

Le sénateur Maltais : Merci.

[Traduction]

La présidente : Je regarde l’horloge. Il reste encore 11 sénateurs qui veulent poser une question. Il y a déjà quelques personnes prévues à la liste pour la deuxième série de questions. Posez la meilleure question que vous avez et faites qu’elle soit bonne. On vous ajoutera à la liste pour la deuxième série de questions si on y parvient.

Le sénateur Mercer : Le sénateur Maltais a déjà soulevé plusieurs points. Je vous encourage tous à visiter la Nouvelle-Écosse, comme il l’a fait l’été dernier, et à apporter votre porte-monnaie, car l’économie en a besoin.

L’organisme Taste of Nova Scotia connaît un remarquable succès. Je félicite Mme Haynes et tous les membres de l’organisme. Vous avez dit que 110 restaurants et 88 producteurs étaient membres de l’organisme et que vous comptiez 15 membres associés. J’ajouterais les 900 000 Néo-Écossais et plus qui vous appuient et qui sont très fiers du travail que vous faites.

Le sénateur Maltais a soulevé la question du commerce interprovincial, qui pose problème. Or, la Nouvelle-Écosse a fait ce qu’il faut faire lorsqu’un changement est nécessaire. Elle a fait preuve de leadership. Bien sûr, la Nouvelle-Écosse est l’une des seules provinces où il est possible d’importer des vins d’autres provinces. Comme ceux d’entre nous qui ont visité la Colombie-Britannique ont découvert, il est possible d’expédier du vin de là-bas en Nouvelle-Écosse et vice-versa. Voilà le leadership dont on a besoin en Ontario et au Québec. D’autres suivent le pas.

Quels sont les projets d’avenir de l’organisme Taste of Nova Scotia? Je crois qu’il faut s'appuyer sur le succès que vous avez connu.

Comme je n’ai droit qu’à une question, je tiens à ne pas manquer l’occasion de m’adresser également à M. Wolfson. Il a dit quelque chose de très important, soit que nous devons renforcer la production à valeur ajoutée dans les industries que les règlements et les coûts des immobilisations rendent coûteuses. Comment pouvons-nous faire baisser ces coûts tout en favorisant une hausse de la production?

Mme Haynes : Pour ce qui est des plans pour l’avenir de l’organisme Taste of Nova Scotia, je tiens à souligner que l’industrie culinaire de la Nouvelle-Écosse est en pleine croissance et que nous voulons continuer de recruter des membres. Au cours des 10 dernières années, il y a eu une hausse énorme du nombre de producteurs-transformateurs, notamment dans l’industrie des boissons et des alcools, grâce à la multiplication des brasseries artisanales, des établissements vinicoles, des cidreries et des boucheries. Il y a plus de restaurants qui s’ouvrent. Grâce à cet essor, le nombre de membres de notre organisme croît, tout comme les possibilités de travailler dans des domaines variés au sein de l’industrie culinaire de la Nouvelle-Écosse.

Le sénateur Mercer : Je crois que l’intégration des établissements vinicoles, des exploitations agricoles, des restaurants et du tourisme fonctionne bien. Je vis dans une région rurale de la province, où on ne produit pas de vin. Je n’habite pas très loin de la vallée de l'Annapolis. Pratiquement tous les meilleurs restaurants de la Nouvelle-Écosse en ce moment se trouvent sur des terrains vinicoles. Voilà la valeur ajoutée. Vous avez parlé de Luckett’s. On y trouve un paysage magnifique et des aliments et du vin d’excellente qualité.

M. Wolfson : Ce n’est pas facile de faire diminuer les coûts. Tous les prix sont à la hausse. Le prix des matières premières, de l’hydroélectricité et de l’eau. Le point que je tentais de faire, en parlant du fait qu’il faut améliorer la manière dont nous faisons les choses, c’est que nous devons nous pencher davantage sur la commercialisation que sur la recherche et le développement. Au Canada, d’excellents organismes existent déjà qui investissent beaucoup de fonds dans la recherche et le développement, dont le Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie du Canada. Des représentants de ce dernier nous ont dit qu’on fait un excellent travail en matière d’éducation pratique, mais que compte tenu du fait qu’on n’est pas un établissement d’enseignement officiel, comme un collège ou une université, on ne peut pas obtenir de fonds à cette fin. À mon avis, nous devons offrir un soutien davantage du côté de la commercialisation plutôt que de celui de la recherche et du développement. Sans la commercialisation, les fonds investis en matière de recherche et développement finissent par profiter aux États-Unis ou à d’autres pays du monde.

Le sénateur C. Deacon : Bravo!

Le sénateur Oh : Bienvenue. Je suis heureux de vous revoir ici à Ottawa.

Tout d’abord, je tiens à dire à Emily que le comité s’est rendu à Shanghai, il y a trois ou quatre ans, et que certains d’entre nous sont allés au salon de l’alimentation Food and Hotel China (FHC). Je me souviens que l’organisme Taste of Nova Scotia y était, avec des homards, des huîtres et des vins. Je tiens à vous dire que vous avez fait un excellent travail de promotion du Canada. En Chine, vous avez une bonne image de marque, celle de la feuille d’érable, et celle de l’organisme Taste of Nova Scotia. Continuez-vous de participer à ce genre d’activité ou à d’autres grands salons de l’alimentation dans le monde entier?

Mme Haynes : Oui, l’organisme Taste of Nova Scotia œuvre dans le développement des exportations. Nous collaborons avec nos partenaires gouvernementaux. Nous travaillons principalement avec l’Agence de promotion économique du Canada atlantique, les autres provinces du Canada atlantique, soit Terre-Neuve, l’Île-du-Prince-Édouard, et le Nouveau-Brunswick, et d’autres partenaires provinciaux, comme le ministère de l’Agriculture de la Nouvelle-Écosse et Entreprises Nouvelle-Écosse Inc. Nous menons avec eux des missions d’exportations à l’étranger. Nous nous rendons notamment à des foires commerciales importantes. Nous travaillons beaucoup avec Agriculture et Agroalimentaire Canada, en participant aux salons professionnels phares, comme le salon de l’alimentation Food and Hotel China (FHC) à Shanghai. Nous le faisons depuis plusieurs années. Nous participons également au salon Seafood Expo Global à Bruxelles chaque année. Nous avons également eu l’occasion de participer à d’autres importants projets d’exportation au sein de l’Union européenne, au Royaume-Uni et en Asie.

Le sénateur Oh : Très bien, merci.

M. Wolfson, vous avez dit que moins de 3 p. 100 de la recherche donne des produits commercialisés. Le jour de notre visite à votre laboratoire, j’ai constaté que la plupart des gens qui y étaient faisaient de la recherche et produisaient les aliments. C’était une communauté diversifiée. Pourriez-vous parler des nouveaux immigrants qui viennent à vous? Ils vendaient des produits sur des marchés à l’étranger. Ils voient les choses différemment. Ils doivent gagner leur vie et investir. Qu’est-ce qui explique qu’ils occupent ce genre de rôle au Canada?

M. Wolfson : L’une des fonctions principales de l’incubateur agroalimentaire est d’offrir aux nouveaux immigrants, même ceux qui ont déjà créé des entreprises à l’extérieur du Canada, un havre de paix. Aucune entreprise ne va mettre en place une usine de production alimentaire dès son arrivée au Canada. Elles ne savent pas s’il y a un marché ici pour leurs produits. Elles ne connaissent pas les règlements canadiens.

Un espace comme le nôtre leur offre un lieu où arriver tranquillement. Il leur donne le temps de veiller à ce qu’ils respectent bien les normes de sécurité et de production du Canada, à apprendre à acheminer leurs produits aux marchés et à vérifier qu’il existe un marché au Canada sur lequel vendre leurs produits. Une fois que tout cela est fait et qu’ils quittent ce lieu, ils savent qu’ils peuvent vendre leurs produits et qu’ils peuvent investir dans des locaux et embaucher des employés.

C’est l’un des seuls centres axés sur la commercialisation qui existe. Il y a beaucoup de centres de recherche et de centres de développement de produits, comme la cuisine la plus branchée du Canada, à l’Île-du-Prince-Édouard, le Canadian Food and Wine Institute, à Niagara, et le Red River College, qui est en train de créer un programme. Il n’y a pas beaucoup d’endroits au pays où une personne peut, comme vous l’avez vu, concrètement développer un produit pour elle-même. Il faut un plus grand effort coordonné pour créer plus d’endroits de la sorte.

La présidente : Il reste 12 minutes et neuf personnes veulent poser des questions. Je demande aux témoins de donner des réponses courtes et aux sénateurs de poser une seule question courte.

M. Wolfson : Il n’y a pas de limite à la ferveur qui existe au sein de l’industrie alimentaire.

La présidente : Je sais. C’est merveilleux.

Le sénateur Doyle : La Ville de Toronto est très diversifiée du point de vue culturel. Diriez-vous qu’il y a eu une augmentation importante de la diversité culturelle dans le domaine de la transformation des aliments? Le gouvernement provincial ou le gouvernement fédéral participent-ils au financement des possibilités en matière de transformation?

M. Wolfson : Pas autant que je le voudrais. En ce qui concerne la diversité culturelle des produits alimentaires, je dois dire qu’au cours de la dernière année et demie — et je fais partie de cette industrie depuis longtemps — j’ai découvert des produits dont je n’avais jamais entendu parler avant. Il y a des gens qui sont venus à Food Starter pour créer une entreprise produisant des brigadeiros, qui sont des truffes au chocolat brésiliennes à la puissance 10. On ne peut pas imaginer le plaisir que l’on ressent quand on en mange. Vous avez rencontré un des producteurs de kibbeh, qui est un hors-d’œuvre et une collation du Moyen-Orient. Il y a également des gens qui ont produit des empanadas. Beaucoup de gens qui viennent d’ailleurs font affaire avec nous parce qu’ils ont déjà eu l’expérience de produire des aliments dans leurs propres pays, mais ils ont immigré au Canada et ont le désir de produire les mêmes aliments ici.

Le sénateur Doyle : Il n’y a pas de programmes pour les aider ou les appuyer?

M. Wolfson : Le seul programme qui existe — et je ne suis d’ailleurs pas sûr qu’il existe toujours — est un programme fédéral qui vise à attirer des investissements au Canada, mais c’est tout. Il n’y a pas grand-chose à l'échelon provincial ou fédéral.

Le sénateur Kutcher : Je vous remercie tous les deux. J’en ai appris davantage à propos de Taste of Nova Scotia, une formidable initiative. Vous devez faire la fierté de votre mère.

J’aimerais que vous m’indiquiez tous les deux quels liens proactifs vos organisations créent ou envisagent de nouer pour attirer les gens à vous afin d’encourager les entrepreneurs sur la voie du succès dans deux secteurs. L’un d’entre vous a discuté avec le sénateur Doyle des démarches entreprises pour tendre la main aux communautés culturelles. Peace by Chocolate a été créée en Nouvelle-Écosse, mais aucune démarche n’a été entreprise pour la joindre. Le deuxième secteur est celui de l’éducation. Les collèges communautaires, comme le Collège communautaire de Nouvelle-Écosse et le Collège George Brown, sont des instituts culinaires de renom. Que faites-vous pour attirer les étudiants vers vos incubateurs et vos plateformes de réussite commerciale?

M. Wolfson : Nous collaborons avec la majorité des collèges, et ce, tant à l’intérieur qu’à l’extérieur de la ville. Les collèges Niagara, George Brown et Centennial offrent des programmes culinaires et proposent des programmes permettant à certains de leurs étudiants d’aller travailler avec des entrepreneurs dans l’installation afin d’apprivoiser l’aspect entrepreneurial du domaine et d’acquérir une expérience concrète en gestion d’entreprise alimentaire.

J’aimerais que les collèges commencent à délaisser un peu l’aspect culinaire pour commencer à offrir des programmes sur la fabrication d’aliments, car les étudiants en ont besoin. Diplômé du programme culinaire du collège George Brown, j’ai travaillé pendant huit mois dans le secteur des services alimentaires et j’ai compris que je ne voulais pas travailler toute ma vie les soirs et les fins de semaine. Comme j’adorais quand même le domaine, j’ai bifurqué vers le secteur de la fabrication, où le mode de vie est bien plus stable, si l’on peut dire. De nombreux étudiants adoptent de tels programmes.

Le sénateur R. Black : Monsieur Wolfson, nous avons entendu dire, lors de notre visite dans la région de Toronto et du marché des produits alimentaires, que le gouvernement de l’Ontario envisageait peut-être de vendre, de privatiser ou de déménager ce marché. Quelle incidence cela aura-t-il sur les entreprises alimentaires à valeur ajoutée dans la région de Toronto? Avez-vous quelques réflexions à ce sujet?

M. Wolfson : Le Marché des produits alimentaires de l’Ontario est formidable. Il fait office de marché des valeurs des fruits et légumes au Canada en établissant les prix. Son départ...

Le sénateur R. Black : Ou son déménagement.

M. Wolfson : Ou son déménagement empêcherait les indépendants de pouvoir faire concurrence aux exploitants de la chaîne. Ces indépendants obligent les exploitants de la chaîne à fixer des prix honnêtes pour les fruits et légumes. C’est un rôle crucial. La majorité des indépendants œuvrent dans la région de Toronto. J’ignore où le marché pourrait s’installer à l’extérieur de cette région.

La sénatrice Moodie : Monsieur olfson, bienvenue et merci de témoigner. Ma question concerne les tendances émergentes. Je m’intéresse à l’expérience que vous possédez à titre de spécialiste du secteur pour la Ville de Toronto. Pour comprendre certains chiffres relatifs aux tendances qui se font jour, comme celle de la ferme à la table que nous observons, j’aimerais savoir comment ces tendances influencent et favorisent la croissance de l’industrie, peut-être en ayant une incidence sur la distribution établie. Donnez-nous un aperçu de l’incidence de la tendance de la ferme à la table. Dites-nous-en aussi un peu plus sur la croissance des produits alimentaires ethniques au chapitre des chiffres. Que pensez-vous de l’expansion de ce marché?

M. Wolfson : L’engouement pour l’alimentation de la ferme à la table — qu’on peut aussi appeler « alimentation locale » — est une tendance en forte croissance. La tendance la plus marquée actuellement est celle de l’achat d’aliments en ligne. Nous sommes en train d’élaborer une stratégie alimentaire à Toronto pour les 10 prochaines années, que nous espérons publier en mai ou juin. Cette stratégie tiendra compte de cette tendance et de la manière dont elle influencera le secteur du détail. Les détaillants, nombreux à s’intéresser à l’achat en ligne, auront-ils une empreinte substantielle dans leurs magasins de Toronto? Comment acheminera-t-on les marchandises aux néophytes de l’achat en ligne, qui sont probablement ceux qui ont le plus besoin d’aliments? Comment veiller à ce qu’ils aient accès à des produits alimentaires de bonne qualité?

Le sénateur C. Deacon : Je vous remercie tous les deux de témoigner.

Monsieur Wolfson, vous avez indiqué, dans votre exposé, que les coûts de la réglementation faisaient partie des coûts ou des intrants dans cette industrie. Il est crucial que nos analystes comprennent ce concept.

Vous avez tous les deux indiqué qu’il fallait donner un coup de pouce à nos produits de haute qualité. Si le consommateur n’achète pas ces produits, personne ne gagne. On emploie l’expression « de la ferme à la table », mais il importe d’inverser le processus et de veiller à ce que ce soient les consommateurs qui soient à la source de l’inspiration, car si ce n’est pas le cas, il n’y aura pas de vente. Pouvez-vous nous parler de l’accès à ce coup de pouce, qu’il prenne la forme de conseils, de programmes ou d’outils, et nous expliquer ce qu’il faut faire pour que nos produits exceptionnels soient davantage axés sur les goûts des consommateurs? Les ventes constituent la source de revenus la moins chère. Nous pouvons donc accroître les ventes et prendre de l’expansion sur les marchés internationaux. Au lieu de cantonner ces merveilleux produits aux marchés locaux en tirant parti des occasions qui s’y présentent, on peut trouver une autre voie pour pouvoir exploiter les débouchés internationaux.

Mme Haynes : Eh bien, on fait beaucoup de travail au chapitre des marchés extérieurs internationaux. Pour notre part, nous constatons que les gouvernements fédéral et provinciaux offrent un soutien considérable afin d’aider les entreprises prêtes à l’exportation à accéder à de nouveaux marchés. Il est essentiel que les entreprises montrent qu’elles sont prêtes à exporter. Certaines ont du potentiel, mais ne sont peut-être pas encore prêtes. Leurs emballages, leur production ou leur capacité d’accroître leur production pourraient nécessiter du travail, mais le produit et la qualité sont là. C’est un des facteurs clés.

Nous en revenons à la capacité de croissance des installations. Si une excellente entreprise qui offre un formidable produit ne peut approvisionner que le marché local avec son installation de production actuelle, comment peut-on l’aider à percer sur les marchés internationaux? C’est très onéreux. Il faut donc trouver les occasions qui s’offrent; il peut s’agir de possibilités de co-emballage ou d’un nombre accru de centres alimentaires agissant comme des incubateurs qui permettent aux gens d’élargir la distribution de leurs produits du marché fermier aux marchés de détail et d’exportation internationale. C’est une approche en palier. Il est possible d’offrir un accès accru à une production plus abordable afin de favoriser l’expansion de nos produits agroalimentaires actuels, que ce soit en Nouvelle-Écosse ou ailleurs.

M. Wolfson : J’ai vu bien des entreprises croître de cette manière. Elles commencent sur le marché fermier et prennent rapidement de l’expansion. Elles atteignent toutefois un point auquel elles durent un temps, puis disparaissent si elles ne reçoivent pas d’influx de capital. Cet influx leur permet d’augmenter leur productivité et d’acquérir de l’équipement afin de produire davantage. Il faudrait établir un mécanisme leur permettant de se prévaloir de ce capital, car, comme je l’ai souligné dans mon exposé, les institutions financières ne sont pas disposées à accorder des prêts à ces gens et les investisseurs ne sont pas prêts à investir. D’une manière ou d’une autre, nous devons leur donner accès au capital pour qu’elles puissent accroître leur productivité.

Le sénateur C. Deacon : Merci beaucoup.

La sénatrice Bernard : Merci beaucoup de témoigner.

L’insécurité alimentaire me préoccupe toujours, d’autant plus que le problème touche 82,1 p. 100 des Néo-Écossais recevant de l’aide au revenu. Quand je suis arrivée, madame Haynes, vous parliez de la magnifique vallée de l’Annapolis. Sachez que je suis une fière Néo-Écossaise, et quand vous parliez de la vallée de l’Annapolis et de tout ce qui s’y passe sur le plan de la production alimentaire, j’ai pensé au film de Nance Ackerman intitulé Haut comme trois pommes. L’avez-vous vu? C’est un film percutant qui porte sur l’insécurité alimentaire, relatant l’histoire d’une famille à travers les yeux d’un enfant. Cette famille vit dans la vallée de l’Annapolis. Le film raconte comment cette famille voit les fruits et les légumes cultivés dans la vallée être transportés ailleurs, alors qu’elle-même n’a pas les moyens d’acheter ces produits. Je me demande si l’un ou l’autre d’entre vous pourrait me parler des liens que vous pourriez avoir au chapitre des aliments et de l’insécurité alimentaire, et expliquer comment nous pouvons nous attaquer au problème dans notre pays.

Mme Haynes : Vous avez raison : l’insécurité alimentaire sévit en Nouvelle-Écosse et dans toutes les régions du Canada. Le problème est attribuable à un certain nombre de causes, dont la capacité économique des gens d’acheter des aliments, les problèmes de transport pour aller chercher les aliments dans les diverses communautés de la Nouvelle-Écosse et l’accès aux endroits pour acheter de la nourriture. S’il n’y a pas de transports en commun pour se rendre à l’épicerie ou aux marchés fermiers, ce sont des problèmes.

On fait toutefois preuve d’innovation dans certaines régions afin de contrer l’insécurité alimentaire. Il existe en Nouvelle-Écosse un programme appelé Square Roots, qui collabore avec les fermes et les restaurants. Dans le cadre d’un programme, il travaille avec des fermes et même certaines épiceries pour recueillir des produits que les fermes, notamment, ne vendraient peut-être pas au détail parce qu’ils sont amochés, mais toujours propres à la consommation et délicieux, trouvant des occasions pour les proposer aux communautés et aux gens qui n’ont peut-être pas accès à des fruits et légumes frais. Concurremment avec cette innovation et la sensibilisation accrue au problème, nous observons l’arrivée d’un nombre croissant de politiques, et l’industrie se mobilise afin de contribuer à trouver des solutions aux problèmes en matière d'insécurité alimentaire qui sévissent en Nouvelle-Écosse et ailleurs.

La sénatrice Bernard : Est-ce que Taste of Nova Scotia collabore avec ces organisations?

Mme Haynes : L’un des membres de notre conseil d’administration vient de porter le programme Square Roots à notre attention. Nous envisageons d’en rencontrer les responsables afin de voir comment nous pourrions aider nos membres à collaborer avec eux afin d’élargir le programme dans la province et d’aider un plus grand nombre de communautés de la Nouvelle-Écosse.

[Français]

Le sénateur Dagenais : Merci à nos invités de leur présence. Madame Haynes, j’ai une remarque à faire à propos des entreprises de la Nouvelle-Écosse qui exportent leurs produits. Sur leurs produits, on peut lire « Taste of Nova Scotia » plutôt que « Produit au Canada ». Est-ce une nouvelle façon de faire? Je crois que l’étiquetage est différent parce que normalement, quand on exporte, c’est toujours écrit « Produit du Canada ». Donc, je comprends que vos produits ont une plus grande notoriété par rapport à ceux qui sont faits au Canada.

[Traduction]

Mme Haynes : À titre de producteurs-transformateurs membres de Taste of Nova Scotia, les membres dont les produits sont approuvés peuvent afficher notre logo sur leurs emballages pour indiquer qu’il s’agit d’un produit de Taste of Nova Scotia. En ce qui concerne l’exportation internationale, toutefois, nous sommes convaincus que l’image de marque du Canada est la plus puissante sur les marchés extérieurs pour faire valoir la qualité fiable derrière la marque. Nous encourageons donc certainement nos membres qui envisagent l’exportation internationale d’utiliser l’image de marque du Canada sur leurs emballages.

Le sénateur C. Deacon : Je tiens à remercier Mme Haynes d’avoir apporté le déjeuner. C’était fort gentil de sa part.

Mme Haynes : Nous aimons nourrir les gens.

La présidente : Nous tenons à remercier nos témoins. Comme vous pouvez le constater, nous aurions pu discuter plus longtemps, mais notre prochain témoin est prêt.

Notre prochain témoin, qui comparaît par vidéoconférence, est M. David Hughes, professeur émérite en marketing alimentaire à l’Imperial College London. Bienvenue, monsieur Hughes. La parole est à vous. Nous sommes enchantés de vous entendre aujourd’hui.

David Hughes, professeur émérite en marketing alimentaire, Imperial College London, à titre personnel : Bonjour. C’est l’après-midi pour moi, mais le matin pour vous. Je n’ai pas d’exposé mirobolant à présenter.

Sachez que je gagne ma vie en prenant la parole dans diverses régions du monde au sujet de l’évolution de l’industrie alimentaire mondiale et de ses conséquences sur ceux qui m’écoutent, peu importe de qui il s’agit. Ce peut être un transformateur d’aliments américain. La semaine dernière, c’était une coopérative laitière de Vancouver, où je me suis adressé au conseil d’administration, mais ce pourrait être n’importe où. On ne le dirait pas, mais je suis Canadien. J’ai vécu et travaillé au Canada pendant 10 ans, et j’y reviens fréquemment en visite. J’ai, au sujet du secteur à valeur ajoutée, un avis dont je me ferai un plaisir de vous faire part en ce qui concerne le Canada.

Selon moi, le Canada est un producteur et un exportateur d’ingrédients alimentaires de base de renommée internationale, ce qui est brillant en soi. Il appert toutefois que les consommateurs n’en savent pas beaucoup sur ce que le Canada produit. Je me souviens d’avoir étudié des données sur les consommateurs américains, qui ont en commun une longue frontière avec le Canada. De façon générale, les Américains considèrent que les aliments du Canada sont excellents, très fiables et sécuritaires. Toutefois, quand on leur demande ce que les Canadiens produisent exactement, il y a un long silence, puis quelqu’un finira par lancer « du sirop d’érable ».

Il ne faut jamais sous-estimer le peu que les consommateurs savent sur le Canada et ses produits alimentaires. Le problème avec les produits canadiens — problème qui touche d’ailleurs aussi les Britanniques —, c’est que personne dans le monde ne dira : « Allons manger des spécialités canadiennes ». On pourrait le faire pour les produits italiens ou chinois, mais le fait est que les consommateurs ont des connaissances parcellaires au sujet des aliments. Inversement, au chapitre de la production alimentaire italienne ou française, si on demande aux Canadiens si l’Italie produit de bons aliments, ils répondront par l’affirmative. Si on leur demande ce que produit l’Italie, les gens énuméreront toute une gamme de produits alimentaires à valeur élevée. Il en va de même pour la France, dans une certaine mesure. Nos produits ne bénéficient pas de la même notoriété. Depuis des lustres, le pays accorde la priorité aux produits de base.

Pourquoi le pays n’a-t-il pas mis davantage l’accent sur les produits à valeur ajoutée? Revenons en 1973, l’année de mon arrivée au Canada à titre d’analyste des politiques alimentaires pour le gouvernement fédéral. Je me suis penché sur ce qui freinait l’expansion du secteur à valeur ajoutée dans les années 1970 et qui a continué de le faire pendant longtemps, et j’ai constaté que le problème venait des clients, qu’il s’agisse des Japonais ou d’autres pays. Les pays étrangers imposaient des tarifs et des obstacles non tarifaires pour encourager l’exportation de produits de base du Canada et non celles de produits à valeur ajoutée, car ils voulaient ajouter cette valeur eux-mêmes. Le problème subsiste encore dans une certaine mesure, mais je pense que cela explique pourquoi le Canada est devenu un expert mondial des ingrédients de base, domaine dans lequel il excelle. Il n’a donc pas de pression particulière pour se lancer dans la production à valeur ajoutée.

Une fois qu’on se lance dans la production à valeur ajoutée, les risques augmentent plus on se rapproche des produits alimentaires destinés aux consommateurs. Pour une entreprise agroalimentaire canadienne, il est plus risqué de se lancer dans la production à valeur ajoutée et dans la fabrication de produits axés sur les besoins des consommateurs. Pourquoi alors ne pas mettre l’accent sur les exportations d’ingrédients, qui offrent une marge moindre, mais présentent aussi un risque plus faible?

À la réflexion, je peux voir, au fil du temps et même encore aujourd’hui, qu’un grand nombre d’entreprises agricoles et alimentaires canadiennes connaissent peu le consommateur sur les marchés internationaux. Elles n’ont pas pour habitude et pour culture d’amasser des connaissances sur ce que les consommateurs veulent exactement dans des marchés extérieurs donnés.

La proximité des États-Unis n’a pas aidé à mettre l’accent sur les produits à valeur ajoutée, parce que les grandes sociétés alimentaires du monde et, certainement, d’Amérique du Nord, se trouvent juste au sud de notre propre frontière. Voilà qui a en quelque sorte restreint l’expansion du secteur à valeur ajoutée, selon moi. Est-ce sans espoir d’envisager un essor du secteur à valeur ajoutée? Pas du tout.

J’ai suivi le dossier et j’ai moi-même travaillé directement dans l’industrie alimentaire. Ce n’est que récemment que je me suis vu décerner le titre de « professeur ». J’ai exploité des entreprises alimentaires. J’observe une vague de changements dans le domaine de la transformation des aliments, notamment en Amérique du Nord. Les grands producteurs d’aliments, comme Unilever, Danone, Nestlé et General Mills, ont connu une période tortueuse de cinq à sept ans, et ont certainement rationalisé leurs activités. En Amérique du Nord, la croissance de leurs ventes a été maigre ou inexistante. Depuis cinq ans, presque toute la croissance observée dans le secteur nord-américain des aliments préparés et à valeur ajoutée est attribuable à de petites entreprises émergentes souvent lancées par des milléniaux. Les grands acteurs sont donc sous pression alors qu’émergent de petites entreprises perturbatrices exploitées par les milléniaux.

Ce qui m’intrigue, c’est que les entrepreneurs de ces petites entreprises ne viennent pas du secteur agroalimentaire existant. Ils tendent à avoir constitué leur pactole ailleurs, comme à Silicon Valley ou dans les services financiers, et veulent adopter une vie commerciale différente. Forts du soutien d’investisseurs en capital de risque, ils ont considérablement investi dans des entreprises en démarrage offrant des produits de consommation alimentaires à valeur ajoutée.

Est-ce que je crois que cela est en train de se produire au Canada? Oui, dans une certaine mesure. Comme je l’ai dit, je fais passablement de travail ici. Je peux donner des exemples d’un bout à l’autre du pays où des entreprises en démarrage vraiment intéressantes imitent tout simplement ce que je vois se produire en Californie et dans d’autres régions des États-Unis.

Nous assistons en quelque sorte à une renaissance de l’intérêt pour l’industrie alimentaire, qui a toujours été perçue comme étant relativement peu rentable. Sauf que cette renaissance a été alimentée par des gens dont l’expérience dans l’industrie alimentaire est limitée, voire nulle. Je pense que c’est bien. Comme je l’ai dit, il y a de bons exemples canadiens dont je pourrais vous parler, s’il y a quelqu’un que cela intéresse.

Quelle est la contrainte dans le contexte canadien? Dans une certaine mesure, l’infrastructure de transformation permettant de produire des aliments à valeur ajoutée fait défaut. Prenons l’exemple de l’une de vos plus récentes supergrappes qui, si j’ai bien compris, est financée en partie grâce à des fonds fédéraux : les protéines végétales. Il s’agit de légumineuses, de pois et de lentilles. Ce qui est clair pour moi, c’est que dans le domaine des légumineuses et des pois, le Canada a un énorme potentiel. Nous excellons dans la production de ces végétaux. Cependant, nous avons étonnamment peu d’usines de fractionnement au Canada, ces usines où l’on peut séparer la matière première en ses diverses composantes, ce qui crée beaucoup de valeur. D’après ce que j’ai compris, le programme des supergrappes technologiques vise en partie à fournir des fonds pour attirer des investissements de l’étranger et de l’intérieur du pays afin d’assurer la transition vers ces usines de transformation qui permettent d’ajouter plus de valeur aux produits. Je pense qu’il y a là un énorme potentiel.

Il y a beaucoup de choses qui pourraient être faites, mais il y a un bagage historique qui semble avoir contribué à limiter le développement de produits alimentaires et de boissons à plus grande valeur ajoutée au Canada.

Quels sont les pays qui se débrouillent bien à ce chapitre? Je regarde souvent ce qui se passe au Danemark. Même selon les normes canadiennes, le Danemark est un tout petit pays en termes de population. Or, à Copenhague, il y a trois entreprises spécialisées dans les ingrédients alimentaires dans un rayon de 30 kilomètres : Chr. Hansen, Novozymes et DuPont, qui produisent des ingrédients alimentaires de spécialité. Ces trois sociétés sont parmi les entreprises alimentaires les plus rentables au monde.

Pourquoi cela se produit-il au Danemark plutôt qu’au Canada, par exemple? Je pense que cela est encore une question de tradition. Le Canada a toujours été si concurrentiel à l’échelle internationale pour ses denrées alimentaires de base qu’il a toujours réussi à dégager un profit du simple fait de les exporter sans valeur ajoutée. En revanche, les Danois fabriqueny des produits de base, notamment du lait et des produits du porc, mais dans ces domaines, ils ne sont pas concurrentiels sur le plan international. Ils ont donc dû réfléchir très tôt à la façon de générer le maximum de valeur, d’ajouter de la valeur à leurs produits, et c’est ce qu’ils ont fait. C’est ce qui explique leur succès actuel en matière d’exportation.

Voilà quelques questions de départ dont vous voudrez peut-être discuter avec moi.

La présidente : C’est formidable. Oui, ce sont effectivement des aspects à retenir.

[Français]

Le sénateur Maltais : Monsieur Hughes, le Canada est un pays renommé à l’échelle internationale pour les grandes productions, qu’il s’agisse des céréales, du porc, du bovin, des pommes de terre ou de tout autre produit. Au cours des 20 dernières années, le Canada s’est lancé dans une transformation supplémentaire, qu’on appelait précédemment les produits en vrac. Depuis quelques années, le Canada — et là-dessus je vous donne raison, nous avons du retard — s’est dirigé vers la deuxième et la troisième transformation. Cela a permis d’ouvrir de nouveaux débouchés sur les marchés extérieurs en raison des nombreux traités de libre-échange conclus avec d’autres pays.

Aujourd’hui, à l’heure où l’on se parle, le comité mène une étude sur le secteur alimentaire à valeur ajoutée. Dans la valeur ajoutée, il faut faire de la deuxième et de la troisième transformation. Vous êtes un professeur émérite et vous savez fort bien que la surtransformation comporte un danger potentiel pour la sécurité et la santé des citoyens, peu importe où ils sont. Qu’en pensez-vous?

[Traduction]

M. Hughes : Vous voulez savoir si les dangers pour la salubrité alimentaire ou pour l’aspect nutritionnel augmentent avec la surtransformation, c’est bien cela? Je vous pose la question parce que je veux bien comprendre ce que vous cherchez à savoir.

Le sénateur Maltais : Oui, c’est bien le sens de ma question.

M. Hughes : Dans le monde entier, la tendance est manifestement à la réduction de la transformation. En ce qui concerne les consommateurs, presque tous les pays où je me rends sont à la recherche de produits sains. Ils veulent peu d’ingrédients et des ingrédients qu’ils peuvent reconnaître. Les gens font valoir qu’ils devraient être en mesure de prononcer les ingrédients des produits qu’ils vont mettre dans leur bouche. On préfère une transformation allégée. Or, abstraction faite de ce qu’ils disent, le principal moteur de la demande pour les produits alimentaires de consommation, au-delà du bon goût, c’est probablement l’aspect commodité, un aspect où les produits alimentaires non transformés ont de la difficulté. Oui, on peut faire valoir que moins les aliments sont transformés, meilleurs ils sont sur le plan nutritionnel, mais le fait est que si les gens recherchent quelque chose qu’ils pourront manger sur le pouce — et je sais que ce n’est pas une bonne idée —, alors ils vont devoir opter pour des aliments transformés d’une façon ou d’une autre. Il faut donc composer avec ces tensions.

Ce que je dis, c’est que la transformation lourde, la transformation extrême, sous-tend les problèmes que les grandes entreprises alimentaires ont connus ces 10 dernières années. Les Kraft Heinz et General Mills du monde entier ont vu diminuer la demande pour leurs produits alimentaires hautement transformés et elles se sont fait couper l’herbe sous le pied par des entreprises en démarrage qui misent sur des produits qui contiennent moins d’ingrédients, des ingrédients en provenance d’endroits qui ont meilleure réputation — un aspect important du point de vue canadien — et qui ont été moins transformés. Cela dit, je ne pense pas que nous allons assister à un recul des aliments transformés sur les marchés mondiaux.

[Français]

Le sénateur Maltais : Merci.

[Traduction]

Le sénateur R. Black : Monsieur Hughes, étant donné votre connaissance des aliments et des marchés alimentaires mondiaux, de votre compréhension de la dynamique canadienne et du fait que le comité sénatorial permanent que nous sommes étudie la question de la valeur ajoutée, quelles recommandations aimeriez-vous voir incluses dans ce rapport?

M. Hughes : Ce serait bien si je pouvais vous proposer trois recommandations infaillibles, non? Les questions que vous abordez sont complexes. La position du Canada est tributaire de son histoire et des développements qui en découlent.

Je suis vraiment encouragé de voir ce qui se passe au Canada. L’industrie est perçue comme étant plus attrayante qu’elle ne l’était traditionnellement, et de nouveaux venus s’y investissent. Il y a 10, 20 ou 30 ans, les diplômés auraient rejeté l’idée d’opter pour l’industrie alimentaire parce qu’ils auraient eu d’autres ouvertures plus attrayantes, que ce soit dans les services financiers ou dans la haute technologie. Aujourd’hui, la roue semble avoir tourné un peu, et le groupe dit du millénaire, les jeunes consommateurs, semble s’intéresser de nouveau aux aliments qu’ils consomment et à leur provenance. L’industrie attire des gens brillants et intéressants qui sont peut-être limités sur le plan du capital, mais qui veulent se lancer dans ce secteur. Cela devrait être encouragé.

Le gouvernement fédéral a-t-il un rôle important à jouer à cet égard? J’ai mentionné le programme des supergrappes qu’a lancé le gouvernement, et j’estime que c’est une bonne affaire. J’ai beaucoup de temps pour cela, pour me pencher sur les domaines où le Canada a des forces évidentes, ces domaines sur lesquels il pourrait tabler. Prenons l’exemple de la production de protéines végétales dans les Prairies. Il y a actuellement une énorme tendance mondiale — particulièrement dans les pays à revenu élevé — où les consommateurs choisissent de modérer leur consommation de viande tout en augmentant leur consommation de produits à base végétale. Il s’agit d’une occasion en or pour le Canada. En fait, le Canada est très doué pour la viande de bétail et les plantes. Je pense que vous avez un rôle à jouer pour ce qui est d’encourager le développement de grappes.

Pour en revenir à mon exemple de tantôt sur le Danemark, l’une des raisons pour lesquelles ce pays a connu un tel succès — et c’est aussi ce qui s’est produit en Hollande —, c’est que le gouvernement a appuyé le développement de grappes alimentaires. Je suis d’avis que c’est quelque chose qui devrait et qui pourrait bien réussir au Canada.

À vrai dire, je pense que le gouvernement a un rôle limité à jouer à cet égard. Quoi qu’il en soit, vous devriez continuer ce que vous faites, c’est-à-dire mettre en place des accords de libre-échange. C’est extrêmement important pour les exportateurs d’aliments canadiens, et particulièrement au chapitre des exportations d’aliments à valeur ajoutée.

Le sénateur R. Black : Merci beaucoup.

Le sénateur C. Deacon : Monsieur Hughes, merci de votre témoignage instructif et de vos réponses.

Je suis fasciné par ces fameuses entreprises en démarrage de milléniaux. Elles me ravissent à tous points de vue. Il nous en faut plus, et nous devons les aider à se développer. Nous devenons de plus en plus doués à cet égard au Canada. Comme le dit Dolly Parton, nous avons toujours été assez bons pour transformer l’argent en idées, mais pas aussi forts lorsqu’il s’agit de transformer les idées en argent. Nous devons faire beaucoup mieux à cet égard.

Concentrons-nous sur vos recommandations au sujet de ces fameuses entreprises en démarrage de milléniaux. Je ne peux réprimer mon optimisme quant aux possibilités que ces jeunes pousses sont susceptibles de créer pour les Canadiens. Nous avons beaucoup appris au sujet des jeunes entreprises technologiques, mais nous devons nous concentrer davantage sur les jeunes entreprises axées sur les aliments à valeur ajoutée. Concentrons-nous là-dessus et, essentiellement, essayons de broder autour de la question du sénateur Black.

M. Hughes : Permettez-moi de revenir sur les difficultés que les gros joueurs de l’industrie alimentaire — les mauvais joueurs — ont eues au cours des sept dernières années. Toutes les grandes entreprises alimentaires internationales ont cherché à chapeauter, à prendre sous leur aile, des sociétés de capital de risque focalisées sur la recherche de possibilités de cofinancer, de soutenir et peut-être même d’acheter ces fameuses entreprises en démarrage de milléniaux. Depuis que je m’intéresse professionnellement à l’industrie alimentaire — ce qui fait maintenant plus de 40 ans —, je n’ai jamais vu les jeunes entreprises avoir autant de possibilités de chercher et d’obtenir du capital de risque de l’industrie alimentaire elle-même, ce que je trouve plutôt génial, et ce, même si certaines personnes soutiennent qu’il est bien dommage de voir ces petits gars démarrer une entreprise, créer une entreprise et se faire avaler par General Mills, Unilever ou Danone. Cela dépend du point de vue où l’on se place. Si j’étais le petit gars qui s’est fait racheter pour une somme oscillant entre 50 et 100 millions de dollars, je crois bien franchement que cela ne m’empêcherait pas de dormir. Pour peu qu’elles le désirent, les entreprises en démarrage ont maintenant la possibilité d’obtenir du capital de risque auprès de l’industrie elle-même.

Lorsqu’elles sont dans cette période de démarrage, elles ont besoin d’aide. Par exemple, vous avez parlé de croissance. Il y a quelque temps, je suis allé en Alberta. En regardant le Leduc Food Processing Development Centre — le centre pour le développement de la transformation alimentaire de Leduc —, force est de constater que l’approche de type incubateur est très utile en soi. D’un point de vue canadien, ce qui m’intrigue toujours — c’est peut-être dû au fait qu’il s’agit d’une fédération —, c’est que chaque province veut sa propre installation du type « incubateur » pour la transformation des aliments. Je ne pense pas qu’il est nécessaire d’en avoir 10 ou 12 différents. Toutefois, vous devez fournir la possibilité aux jeunes entreprises de tirer avantage de tels endroits. Vous devez leur permettre de commencer à petite échelle et de grandir par la suite. Il ne fait aucun doute qu’il y a de la place pour du financement fédéral et provincial à cet égard.

Le sénateur C. Deacon : Merci beaucoup. Je veux me concentrer sur une chose. C’est plutôt intéressant cette histoire, parce que c’est précisément à cet endroit que l’industrie pétrolière a commencé, à Leduc, en Alberta. Je cherche à comprendre pourquoi c’est une bonne chose pour les jeunes pousses d’avoir ces débouchés. Je crois savoir de quoi il retourne, mais pouvez-vous nous dire dans vos propres mots pourquoi vous pensez que c’est une très bonne chose et que nous devrions nous y habituer? Vous construisez une entreprise et elle est vendue. Quelle sorte de cycle virtuel cela génère-t-il?

M. Hughes : Je ne sais pas si je peux vous donner des exemples représentatifs du Canada. Je peux certainement vous donner des exemples pour le Royaume-Uni où, lorsqu’est rachetée une entreprise en démarrage qui a réussi, l’entrepreneur se lance dans un autre secteur de l’industrie et reproduit le succès. Le succès engendre donc effectivement le succès.

Je pense que les meilleurs exemples de réussite sont lorsque de grandes entreprises alimentaires soutiennent le développement de petites entreprises alimentaires puis les rachètent, mais en prenant soin de garder l’initiateur, l’entrepreneur initial, afin de l’intégrer à ses activités. Si vous voulez avoir une idée de cela, prenez l’exemple d’Unilever qui, il y a 15 ans si l’on se rappelle bien, a acheté Ben & Jerry’s, une entreprise de crème glacée que les gens aimaient beaucoup et qui était perçue comme une organisation qui avait de grandes valeurs, qui se préoccupait de l’environnement, et cetera. Or, 15 ou 20 ans se sont écoulés depuis, et Ben et Jerry sont toujours actifs au sein de Ben & Jerry’s. De plus, c’est quelque chose que les clients et les consommateurs comprennent. Je pense que c’est bon pour l’industrie alimentaire dans son ensemble. Comme je l’ai dit, à tout point de vue, je pense que c’est une dynamique qui profite à tout le monde. Nous n’avons pas à nous désoler pour ceux qui ont été rachetés à hauteur de 50 millions de dollars.

Le sénateur C. Deacon : Je vous remercie.

La sénatrice Moodie : Merci, monsieur Hughes. Ma question porte sur l’évolution des tendances. C’est mon thème d’aujourd’hui. Bien que la consommation de viande est encore relativement élevée en Amérique du Nord, au Canada, les gens semblent s’éloigner de plus en plus de la consommation de viande en grande quantité. C’est une tendance. En fait, compte tenu des préoccupations et des recommandations en matière de santé, il ne fait aucun doute que le Guide alimentaire canadien de 2019 cherche à réduire la quantité de viande qu’il est recommandé de consommer.

Ma question porte sur les substituts de viande. Certaines des grandes entreprises alimentaires que nous voyons se tournent vers le végétalisme — Beyond Meat Burgers et d’autres choses du genre —, vers des idées selon lesquelles il existerait des solutions de rechange à la viande. Quel rôle ces substituts de la viande joueront-ils? Selon vous, comment l’industrie agroalimentaire canadienne peut-elle tirer profit de cette tendance?

M. Hughes : C’est une excellente question.

Tout d’abord, pour en revenir à notre ou votre Guide alimentaire canadien de 2019, disons que cela me fait bien sourire parce que si vous êtes de l’industrie de la viande ou du lait, vous êtes probablement en train de grincer des dents. Quand vous regardez la photo de couverture, vous pouvez à peine discerner la viande, mais ceci n’est qu’une parenthèse.

Vous avez raison. Au Canada, la consommation de viande par habitant est en baisse, contrairement à ce qui se passe chez nos voisins américains, où elle continue d’augmenter et atteint des niveaux étonnants — 106 kilos par habitant, ce qui dépasse l’imagination lorsque l’on essaie de comprendre où ils trouvent le temps pour en manger autant. Dans la plupart des pays à revenu élevé, la consommation de viande par personne est, dans le meilleur des cas, statique. Sauf que dans les faits, dans beaucoup de ces pays, la consommation ne diminue que lentement, surtout en ce qui concerne la viande rouge.

Tout d’abord, si vous êtes dans l’industrie de la viande, cela devrait-il vous faire paniquer? Non, parce que les pays émergents mangent plus de viande qu’avant et que la demande mondiale de viande continue d’être forte. Je crois d’ailleurs qu’elle va le rester pendant 10, 15 ou 20 ans encore.

Pour en revenir à votre question sur les substituts de viande, ce qui est révélateur c’est que les substituts sont soit des produits à base de protéines végétales qui essaient d’imiter des produits carnés, soit de la viande à base de cellules, un procédé qui consiste à « faire pousser » de la viande à partir de cellules animales. C’est un domaine qui a de l’avenir, mais je ne crois pas que cela fasse partie du mandat de votre comité. Je veux dire, il va bien falloir 20 ou 30 ans avant de voir de la viande à base de cellules être mise en marché sous quelque forme que ce soit.

Si, à l’heure actuelle, j’examine les marchés de la viande du monde entier, selon ma terminologie, je dirais que l’éventail de protéines vient de s’élargir. Qu’est-ce que j’entends par là? Dans le passé, nous considérions que les protéines provenaient essentiellement de la viande, en particulier au Canada. Souvenez-vous qu’il y a 40 ans, vous vous rendiez dans les épiceries Dominion principalement pour acheter de la viande, et les Canadiens aimaient trouver un gros morceau de viande au milieu de leur assiette. Cependant, de nos jours, les protéines ne se limitent pas à la viande. Il y a aussi des protéines végétales et les protéines laitières. De plus, les protéines pourraient provenir d’insectes ou de la spiruline. Ce qui est révélateur, c’est que la plupart des grandes entreprises de production de viande, y compris Maple Leaf, au Canada, pour ne nommer qu’elle, investissent maintenant dans des entreprises dont les produits ressemblent à de la viande, sans en être. Je pense que cette tendance se poursuivra. Dans l’ensemble des protéines offertes, nous observerons, d’un côté, le gros morceau de steak en bonne et due forme, la viande dotée d’une histoire, le bœuf Aberdeen Angus d’Alberta, et cetera. De l’autre côté, il y aura les hamburgers d’origine végétale qui n’ont rien à voir avec la viande.

Est-ce une mode? Absolument pas. Lundi et mardi de cette semaine, j’étais en Italie pour parler à des entreprises alimentaires, et j’ai visité des supermarchés là-bas. La culture alimentaire est très prononcée en Italie, et je ne m’attendais pas à voir, dans une telle mesure, ces genres de produits végétariens ou végétaliens dans les supermarchés italiens. Il y a là-bas des mètres d’espace d’étalage consacrés à ces produits. Je les vois partout où je vais. Dans 20 ou 30 années, je m’attends à ce que nous consommions beaucoup plus de protéines que nous le faisons en ce moment. Cependant, la proportion de protéines provenant d’animaux d’élevage sera inférieure. Comme je l’ai indiqué, est-ce un problème pour l’industrie du bétail? Non, parce que les marchés mondiaux d’exportation offrent des débouchés. Est-ce une bonne chose pour notre santé et notre nutrition? À mon avis, c’est probablement le cas. Du point de vue de notre ADN, je ne crois pas que nous ayons été créés pour absorber quelque 100 kilogrammes de viande par personne. Par conséquent, j’estime que nous progressons dans la bonne direction.

Y a-t-il des débouchés au Canada? Absolument. Prenez l’exemple du mouvement flexitarien. Qu’est-ce qu’un produit flexitarien? Au Royaume-Uni, plus qu’au Canada en ce moment — mais vous verrez ce mouvement arriver bientôt au Canada —, les produits de viande flexitariens sont composés de 50 p. 100 de viande et de 50 p. 100 de légumineuses ou de haricots, par exemple. Ils sont délicieux, et leur teneur en protéines et en fibres est élevée, alors que leur teneur en gras est plus faible. Je pense que c’est un excellent développement pour le Canada, en général, et pour les provinces des Prairies, en particulier, car elles comptent des producteurs de lentilles, de pois et de haricots de calibre mondial et que ces aliments feront, à l’avenir, partie intégrante des produits de viande flexitariens, et ce, dans une mesure plus importante qu’ils le font en ce moment. Ces produits représentent une excellente occasion d’affaires.

Le sénateur Kutcher : Monsieur Hughes, je vous suis très reconnaissant de vos observations et de la façon animée dont vous les avez présentées. Merci beaucoup.

Les consommateurs semblent confus quant à la valeur et à la salubrité des aliments transformés. Ils ne comprennent même pas en quoi ils consistent. Cela importe parce que le marché est axé sur les décisions des consommateurs. Pourriez-vous nous communiquer des stratégies efficaces qui ont été employées en vue de remplacer la confusion par le savoir et d’aider les consommateurs à acquérir de bonnes connaissances alimentaires?

M. Hughes : C’est un objectif difficile à atteindre. Les consommateurs ont une foule d’impressions à propos des aliments qui, dans un grand nombre de cas, n’ont rien ou peu à voir avec la réalité dans toutes sortes de secteurs. Nous en parlions à Rome cette semaine, comme je l’ai mentionné, alors que je travaillais avec quelques membres de l’industrie de la volaille. Par exemple, là-bas, les gens ont l’impression que la volaille est truffée d’hormones et d’antibiotiques. Pourtant, dans la plupart des pays, l’utilisation d’hormones pour produire de la volaille a été interdite depuis 10 ans. Cependant, cette impression persiste. Il ne faut jamais sous-estimer l’irrationalité des consommateurs. D’une part, ils affirment vouloir des aliments fraîchement préparés, d’autre part, leur comportement en matière d’achat est tout à fait différent.

L’une des tendances qui aident, à mon avis, c’est le désir croissant des consommateurs d’observer une traçabilité et une transparence dans les aliments qu’ils achètent. Par exemple, même s’il s’agit d’un produit alimentaire transformé, ils se demandent de plus en plus souvent d’où proviennent les ingrédients. Tous les consommateurs ne souhaitent pas s’employer à remonter la chaîne d’approvisionnement afin de découvrir qui a produit les ingrédients. En ce qui concerne ces ingrédients, ils veulent savoir d’où ils viennent, comment ils ont été produits, qui les a produits et si les producteurs sont de véritables agriculteurs. Je pense que c’est un développement très positif.

Votre question, en particulier, est complexe, parce que nous devons accélérer le rythme auquel nous pouvons amener les consommateurs à posséder de nouveau de bonnes connaissances à propos de la façon dont les aliments sont produits. Pour ce faire, vous devez vraiment leur réapprendre les rudiments de l’alimentation. C’est un processus à long terme, mais je pense que nous avançons dans la bonne direction. Cela ne répond peut-être pas à votre question, mais, à mon avis, nous progressons dans la bonne voie.

Il existe quelques fantastiques sous-exemples de nos progrès. L’autre jour, je parlais avec un groupe du Royaume-Uni, et l’un des autres intervenants était un agriculteur. Au Royaume-Uni, il y a un programme intitulé Facetime a Farmer (utilisez Facetime pour communiquer avec un agriculteur). Chaque mois, 200 agriculteurs du Royaume-Uni communiquent chacun avec une même classe, à l’aide de Skype, de Facetime ou d’une application, quelle qu’elle soit. Des enfants de sept ans observent les agriculteurs dans leur ferme et discutent avec eux des travaux qu’ils accomplissent en fonction de la période de l’année. Ce programme s’est avéré incroyablement populaire auprès des enfants, qui sont fascinés par ce qu’ils voient. Ils ignorent tout de la façon dont les aliments sont produits et, étonnamment, c’est aussi le cas de leur professeur. C’est devenu le point saillant du mois. Des petites initiatives comme celles-ci peuvent avoir un effet disproportionné à long terme, car il importe que nous soyons plus renseignés sur les aliments que nous consommons.

[Français]

Le sénateur Dagenais : Merci d’être venu, monsieur Hughes. Dans votre présentation, on comprend que le Canada a investi d’importantes sommes d’argent pour vendre la marque Canada. Vous avez parlé de l’ignorance de la population en général et de celle des autres pays vis-à-vis de nos produits. Les commerçants et les importateurs connaissent bien nos produits. Ils les achètent, mais vous dites que les jeunes ne les connaissent pas tellement. En raison de la méconnaissance de nos produits, à combien s’élèvent les pertes financières pour nos compagnies et nos producteurs?

[Traduction]

M. Hughes : Bien entendu, je ne peux pas vous fournir un chiffre, mais permettez-moi d’inverser la question en la formulant de la façon suivante : quelles recettes l’Italie, la France et l’Espagne touchent-elles en raison des connaissances, parfois erronées, je le répète, que les consommateurs ont au sujet des aliments? Prenez l’exemple de l’huile d’olive. Pour une raison quelconque, l’huile d’olive italienne est perçue comme un produit de première qualité, alors qu’en fait, il s’agit, dans la plupart des cas, d’un mélange qui comprend de l’huile d’olive grecque et espagnole. L’Italie a capté l’œil du consommateur.

D’un point de vue canadien, ces comportements nous restent aussi un peu en travers de la gorge, comme le fait que les Canadiens choisiraient les pâtes soi-disant « authentiques », si on leur demandait de choisir entre les pâtes canadiennes et les pâtes italiennes. Pourtant, ces pâtes sont fabriquées en Italie avec du blé importé du Canada. C’est une limite un peu folle, n’est-ce pas?

Vous avez mentionné l’image de marque du Canada. Je pense que cette image de marque est importante, même si les consommateurs ne savent pas grand-chose sur les aliments que nous produisons. Pourquoi? Parce que, dans une grande mesure, les aliments canadiens sont entourés d’une aura particulière. Les gens s’attendent à ce que le Canada produise des aliments sains et salubres avec intégrité, et cetera. Comme je l’ai mentionné, étant donné que les gens posent de plus en plus souvent des questions à propos de l’origine des ingrédients, c’est très positif lorsqu’ils sont en mesure de dire que le blé, le canola ou l’ingrédient, quel qu’il soit, provient du Canada. Ne sous-estimez pas la valeur de l’image de marque du Canada.

Toutefois, il faut faire attention aux produits que l’on associe à une marque. Je crois que l’intervenant précédent a parlé de l’image de marque de la Nouvelle-Écosse. Permettez-moi de vous dire de nouveau — et je suis sûr que vous le savez déjà — qu’il ne faut jamais sous-estimer le peu de connaissances que les gens, même les plus intelligents et les plus instruits, possèdent à propos de votre pays. Si vous les interrogez à propos des provinces du Canada, vous constaterez qu’ils n’ont aucune idée de leur nom ou de leur nombre. Je travaille beaucoup en Australie, un pays que je considère souvent comme semblable au Canada en ce qui concerne son orientation à l’égard des produits. Prenons la Tasmanie, qui est tout comme la Nouvelle-Écosse. Les Tasmaniens disent : « Assurez-vous que la bouteille indique que le produit est fabriqué en Tasmanie ». Je prends soin de leur rappeler que la plupart des gens qui ne vivent pas en Australie ne font pas la distinction entre la Roumanie et la Tasmanie et qu’il ne faut pas qu’ils confondent les deux. Je connais et aime la Nouvelle-Écosse. Je l’ai visitée et j’y ai travaillé, mais la plupart des gens ignorent où elle se trouve. Je ne dénigre pas son image de marque, qui a clairement une grande valeur au Canada et peut-être même en Écosse, où les gens font le lien, mais il ne faut jamais sous-estimer l’ignorance de votre clientèle.

Le sénateur C. Deacon : Je vous remercie beaucoup, monsieur Hughes, de votre exposé fort instructif et animé. C’était fantastique.

Vous venez d’aborder le sujet dont je souhaitais discuter, c’est-à-dire l’image de marque et l’importance qu’elle joue dans l’accès aux clients et dans l’établissement d’une relation solide et loyale avec eux. Au sein des nouvelles entreprises de haute technologie, les gens comprennent bien cela depuis assez longtemps, mais je ne sais pas si l’industrie alimentaire a bien compris l’importance qu’elle joue dans l’accès aux débouchés ayant la plus grande valeur qui soit et dans la mise en évidence des mesures à prendre pour exploiter l’image de marque et la renforcer. Pourriez-vous nous amener un peu plus loin dans cette voie, parce qu’en ce qui me concerne, ce point est extrêmement important?

M. Hughes : D’accord. Je m’en suis pris un peu aux grandes entreprises alimentaires et aux aliments malsains. Il y a 10 ans, la plupart des grandes entreprises alimentaires, c’est-à-dire les entreprises semblables à General Mills ou PepsiCo, pensaient qu’il était préférable de rationaliser le nombre de leurs marques de commerce. Elles préconisaient de mettre l’accent sur les 10, 20 ou 30 grandes marques de commerce qui rapportaient des milliards de dollars au moment de l’analyse, parce qu’elles étaient foncièrement plus rentables que les petites marques de commerce.

Ce que nous avons observé récemment constitue un renversement complet de la vapeur, et je pense que vous en connaissez la raison. Cela est attribuable aux consommateurs et, en particulier, à ceux qui font partie de l’emmerdante génération du millénaire, lesquels sont d’avis que les grandes marques de commerce et les entreprises auxquelles elles appartiennent ne partagent pas leurs valeurs. Ils ont le sentiment de devoir définir des valeurs qui n’ont rien à voir avec les leurs. Qui plus est, ils n’aiment pas leurs valeurs. La réussite de nouvelles petites entreprises est due au fait que les clients sont de plus en plus à l’aise avec elles. Les consommateurs soutiennent ce qui suit : « Nous pensons que vous êtes dans notre camp. Nous aimons acheter des produits fabriqués par des entreprises qui partagent nos valeurs et soutenir, par le fait même, ces entreprises ». Voilà en quoi consiste l’image de marque. Elle indique que nous appuyons certaines valeurs et que ces valeurs coïncident avec celles de nos clients.

Je pense que vous observez en ce moment une énorme volte-face de la part de l’industrie alimentaire mondiale, une volte-face menée par des entreprises du genre d’Unilever et, dans une moindre mesure, par Danone et Nestlé, qui ont soudainement compris qu’elles devaient revoir leurs modèles. Nous devons produire des aliments que les consommateurs souhaitent manger et qui sont vraiment savoureux. N’oubliez pas que nous mettons les aliments dans notre bouche et que nous souhaitons qu’ils soient délicieux et nutritifs. En, même temps, les aliments doivent être bons pour l’environnement, bons pour les collectivités locales, bons pour les agriculteurs et bons pour les animaux. Les activités des entreprises qui répondent à cette demande et qui réussissent à communiquer ce message à leurs clients sont couronnées de succès. Je crois que les grandes entreprises peuvent adhérer à ce mouvement aussi bien que les petites entreprises, mais le mouvement a été dirigé par des petites entreprises qui comprenaient réellement comment obtenir la loyauté de leurs clients. Par conséquent, les Unilever de l’industrie ont beaucoup à apprendre de ces nouvelles petites entreprises.

Le sénateur C. Deacon : L’authenticité et la traçabilité sont donc cruciales à l’accroissement de la valeur que le produit a pour les clients.

M. Hughes : L’authenticité, la transparence et la traçabilité font partie des valeurs qu’il faut prôner pour faire des affaires de nos jours. Il n’y a plus d’endroit où se cacher. Comme vous le savez tous, lorsque votre produit est problématique, le monde en est informé en quelques secondes. L’établissement de marques de commerce importantes et solides exige des années de travail, et elles peuvent être détruites en quelques secondes.

Le sénateur C. Deacon : Merci beaucoup.

La présidente : Merci. Monsieur Hughes, j’aimerais vous remercier de votre participation à la séance d’aujourd’hui. Comme les autres membres des groupes d’experts l’ont indiqué, nous avons abordé de nombreuses questions. Nous vous en sommes reconnaissants. Merci beaucoup.

M. Hughes : Je vous remercie infiniment de m’avoir donné cette occasion.

La présidente : Il n’y a pas de quoi.

Chers membres du comité, j’aimerais vous parler pendant quelques minutes. Comme le sénateur Mercer l’a signalé plus tôt, il se pourrait que ce soit la dernière séance à laquelle participe notre vice-président, le sénateur Maltais. Je dois demander la permission d’organiser une séance mardi soir. Je ne sais pas si cette permission me sera accordée. J’espère qu’elle le sera plus tard aujourd’hui. Si c'est le cas, je pense que, d’ici jeudi prochain, nous aurons trouvé un sénateur pour remplacer ce membre du comité.

Nous nous réjouissons donc à la perspective de vous voir mardi soir, mais, au cas où vous ne seriez pas là, j’aimerais profiter de l’occasion qui m’est donnée de vous remercier publiquement de votre service au sein du comité. Le sénateur Maltais siège depuis longtemps au sein du comité, où il a assumé de nombreux rôles au fil des années. Il est le président sortant de notre comité et, sous sa présidence, le comité a produit quelques rapports plutôt bons qui, à mon avis, ont été accueillis très favorablement partout au pays. Je lui suis reconnaissant de son mentorat et de son expérience au sein du comité. Comme vous le savez, c’est un sénateur qui a beaucoup voyagé. Chaque fois que nous nous sommes déplacés au Canada, il semblait connaître quelqu’un, ses produits ou son industrie partout où nous allions. Il a été fascinant de travailler avec vous, et je dois dire que vous allez nous manquer. J’aimerais maintenant vous accorder quelques minutes pour faire vos adieux au comité, si vous le souhaitez. Puis, si quelqu’un d’autre a quelque chose à ajouter, nous l’entendrons également.

[Français]

Le sénateur Maltais : Merci beaucoup, madame la présidente, pour ces très belles paroles. Oui, je suis membre du Comité de l’agriculture depuis plus de sept ans. J’ai travaillé avec le président Mockler. J’ai été président du comité et j’ai travaillé avec vous aussi, madame la présidente. Il y a deux facteurs que j’ai retenus au cours de toutes ces années au Comité sénatorial permanent de l’agriculture et des forêts : le consommateur et le producteur.

Ce ne sont pas des colonnes qui montent l’une à côté de l’autre. Ils ne peuvent pas travailler en vase clos. Ils doivent se rejoindre quelque part pour fournir au consommateur des produits de qualité et pour assurer des revenus à l’agriculteur. L’agriculture au Canada est primordiale. On a beau la critiquer, mais il faut chaque matin des croissants, des muffins, des œufs, des rôties et des confitures. On a aussi besoin de légumes, de laitue et de viande. On aura toujours besoin des agriculteurs.

L’agriculture évolue au fil des années et elle continuera d’évoluer. Il faut qu’elle évolue dans le sens où le demanderont les consommateurs et aussi dans le sens où les agriculteurs devront composer avec une agriculture de plus en plus biologique qui réduira ses émissions de GES, même si c’est minime.

Madame la présidente, j’aimerais remercier les membres du comité. Je vais me permettre de faire un petit aparté. Le sénateur Mercer et moi avons siégé ensemble depuis le tout début. Nous avons beaucoup voyagé au Canada, aux États-Unis et à l’extérieur, même en Chine. Le sénateur Mercer m’a toujours été d’un grand soutien. C’est un grand humaniste de l’agriculture. Nous avons eu beaucoup de plaisir à découvrir plusieurs produits. Nous sommes allés chez les producteurs d’œufs, de pommes, des vins et de bleuets. Il nous a fait mieux comprendre la Nouvelle-Écosse.

Je tiens à le remercier. Je sais que ces paroles sont enregistrées et qu’il pourra les entendre. J’aimerais aussi remercier mes trois collègues conservateurs, qui sont presque toujours présents aux réunions, sauf lorsqu’on doit assister à deux séances de comité en même temps. Ce n’est pas toujours évident, mais ils sont presque toujours présents. Jean-Guy, Norm, sénateur Oh, je vous remercie de la confiance que vous m’avez témoignée. Merci à tous les nouveaux membres du comité : le sénateur C. Deacon, le sénateur Kutcher, le sénateur R. Black, avec qui on a eu beaucoup de plaisir, et la sénatrice Moodie, que je n’ai pas eu la chance de bien connaître. Je vous invite à poursuivre votre excellent travail sous la gouverne de madame la présidente, qui fait de l’excellent boulot.

Je pense que les grands gagnants de tout le travail que vous accomplirez au cours de la prochaine année, ce n’est pas vous, mais la population canadienne. J’ai remarqué une chose que M. Wolfson a dite dans son énoncé sur la réduction de la pauvreté.

On en parle beaucoup. On en parle énormément. Qu’est-ce qu’on donne à ces gens? Au cours des prochaines années, regardez les surplus alimentaires avant d’étudier ce qui se passe dans les autres pays. Il faut regarder ce qui se passe dans notre propre pays. J’invite les nouveaux sénateurs à aller se promener dans le marché By. Vous n’avez pas besoin d’aller loin. C’est à environ 500 pieds d’ici. Si des gens vous tendent la main 50 fois, il est inutile d’aller voir dans le fin fond des autres pays. Regardons donc ce qui se passe chez nous. L’agriculture produit des surplus alimentaires. On devrait peut-être regarder comment on peut nourrir ces gens-là. C’est le message que je vous laisse en quittant. Merci beaucoup de votre attention.

[Traduction]

La présidente : Merci. Quelqu’un a-t-il d’autres commentaires à formuler? Je sais qu’il est difficile de faire mieux. Nous vous sommes reconnaissants de vos observations, qui vont nous manquer. Nous vous souhaitons donc une bonne retraite.

Le sénateur Doyle : Il ne prendra pas sa retraite.

La présidente : Il ne prendra pas sa retraite, car il se tiendra occupé.

Le sénateur Oh : Nous le rappellerons.

La présidente : Ce pourrait être une idée.

Merci à tous.

(La séance est levée.)

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