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APPA - Comité permanent

Peuples autochtones

 

Délibérations du Comité sénatorial permanent des
Peuples autochtones

Fascicule no 3 - Témoignages du 9 mars 2016


OTTAWA, le mercredi 9 mars 2016

Le Comité sénatorial permanent des peuples autochtones se réunit aujourd'hui, à 18 h 48, pour étudier les pratiques exemplaires et les problèmes constants du logement dans les collectivités des Premières Nations et les collectivités inuites du Nunavut, du Nunavik, du Nunatsiavut et des Territoires du Nord-Ouest.

Le sénateur Dennis Glen Patterson (vice-président) occupe le fauteuil.

[Traduction]

Le vice-président : Bonjour.

[Note de la rédaction : Le sénateur Patterson s'exprime dans une langue autochtone.]

Je remercie les sénateurs et les membres du public qui suivent cette séance du Comité sénatorial permanent des peuples autochtones, que ce soit en personne, sur CPAC ou sur la toile. Je m'appelle Dennis Patterson, je suis sénateur du Nunavut et j'ai le privilège de présider ce comité aujourd'hui en remplacement de la sénatrice Lillian Dyck.

J'invite mes collègues sénateurs à se présenter.

Le sénateur Moore : Bonjour. Je m'appelle Wilfred Moore et je viens de la Nouvelle-Écosse.

Le sénateur Sibbeston : Je m'appelle Nick Sibbeston, des Territoires du Nord-Ouest.

La sénatrice Beyak : Lynn Beyak, de l'Ontario.

La sénatrice Greene Raine : Nancy Greene Raine, de la Colombie-Britannique.

Le sénateur Tannas : Scott Tannas, de l'Alberta.

Le vice-président : Nous avons pour mandat d'étudier la loi et l'ensemble des questions qui concernent les peuples autochtones du Canada en général. Ce soir, nous allons poursuivre notre étude du logement dans le Nord, puisque nous avons pour mandat d'étudier les pratiques exemplaires et les problèmes constants du logement dans les collectivités des Premières Nations et inuites au Nunavut, au Nunavik, au Nunatsiavut et dans les Territoires du Nord- Ouest.

Je suis heureux d'accueillir Hilda Broomfield Letemplier, membre du Conseil national de développement économique des Autochtones. Nous avons hâte de vous entendre, mais permettez-nous d'abord de traiter du budget proposé pour notre étude du logement dans le Nord. Si les membres du comité sont prêts, j'aimerais que nous examinions ce budget et que nous l'approuvions éventuellement.

Le comité de direction s'est déjà rencontré à ce sujet; il a étudié le budget et a planifié un déplacement de cinq jours dans cette vaste région, si ce n'est que nous avons dû limiter le nombre de destinations à six emplacements au Nunavut, au Nunavik et au Nunatsiavut. Nous aurons la possibilité d'accueillir à Ottawa d'autres témoins en provenance d'autres régions.

Les collectivités proposées sont Iqaluit, Igloolik, Kuujjuaq, Nain, Inukjuak et Sanikiluaq. Le déplacement se déroulera sur une semaine.

Chers collègues, j'aimerais savoir ce que vous pensez de ce budget quand vous l'aurez examiné et entendre vos commentaires à ce sujet, parce que nous espérons que celui-ci sera approuvé afin que nous puissions entamer nos travaux au début du printemps, sans doute dès le mois d'avril.

Le sénateur Moore : On dirait que tout cela a nécessité pas mal de travail. Allons-nous nous déplacer dans le Nord ou rayonner à partir d'un même point? Je vois, par exemple, que des nuitées d'hôtel sont prévues à Iqaluit. Allons-nous revenir tous les soirs à Iqaluit ou passer d'une collectivité à l'autre?

Le vice-président : Avec l'aide de notre personnel compétent, nous avons soigneusement étudié l'aspect logistique et il se trouve que la logistique est déterminante dans le Nord.

Le sénateur Moore : Je n'en doute pas.

Le vice-président : Il ne serait pas possible de réaliser ce programme si nous empruntions une ligne aérienne régulière. Nous recommandons, parce que cela semble donner de meilleurs résultats, de prendre un vol régulier d'Ottawa à Iqaluit, puis nous utiliserons des services nolisés, car il n'est pas facile de se rendre à Nunavik et au Nunatsiavut.

Le sénateur Moore : Vous parlez d'avions ou d'autobus nolisés?

Le vice-président : D'avions. Comme nous l'apprendrons ce soir de la bouche du témoin, il y a un manque d'infrastructures dans le Nord.

Le sénateur Moore : J'en ai entendu parler.

Le vice-président : L'avion est le seul moyen de déplacement dans ces régions.

Le sénateur Moore : Et tous les soirs nous reviendrons à Iqaluit, c'est ça l'idée? Il n'y a pas d'hébergement ailleurs pour nous accueillir?

Mark Palmer, greffier du comité : C'est Iqaluit qui offre les meilleures conditions d'hébergement.

Le sénateur Sibbeston : Pouvez-vous nous expliquer, à grand trait, le déroulement du voyage; par où il va commencer et où il va aboutir?

Le vice-président : Je vais demander au greffier de faire cela pour nous. Nous aurions dû vous fournir une carte et c'est ce que nous avons d'ailleurs fait quand le comité de direction a examiné la question.

M. Palmer : Il est essentiellement prévu que tout le monde se rende à Iqaluit le premier jour, le dimanche. Le lundi, nous effectuerions un déplacement, sans doute au Nunavik, à Igloolik, avant de revenir à Iqaluit. Le deuxième jour, nous irions à Inukjuak et à Sanikiluaq. Le troisième jour, nous irions à Nain et le dernier jour à Kuujjuaq. Tous les soirs, nous reviendrions à Iqaluit qui serait notre base de rattachement.

Le vice-président : Y a-t-il d'autres questions ou commentaires?

Le sénateur Moore : Avons-nous des dates, a-t-on réfléchi à cet aspect? Veut-on faire cela avant le congé d'été?

Le vice-président : Comme il vaut mieux voyager l'été dans le Nord, nous envisageons ce déplacement au début mai.

Le sénateur Moore : Merci.

Le vice-président : Ce budget devra bien sûr être soumis à l'approbation du Bureau de régie interne, tout cela étant sous réserve de l'approbation du bureau. Nous procéderons rapidement pour pouvoir soumettre notre demande assez tôt et donner au personnel la possibilité de planifier les choses.

Nous avons prévu ce déplacement pour 12 sénateurs, mais il est très probable que nous ne serons pas 12.

Le sénateur Moore : La plaque tournante sera donc Iqaluit, mais des indemnités journalières sont aussi prévues pour le Nunavut. De quoi s'agit-il? Nous ne restons pas dans des hôtels là-bas, parce qu'il y en a à Iqaluit.

Le vice-président : Il s'agit des indemnités journalières pour le Nunavut, qui s'applique à Iqaluit, la capitale du Nunavut.

Le sénateur Moore : Ah, très bien.

Le vice-président : On vient juste de me rappeler une chose. Nous devrions proposer que ce déplacement se déroule dans la semaine du 18 avril, si notre budget est approuvé à temps.

La sénatrice Raine : Nous passerions donc sur place le lundi, le mardi, le mercredi, le jeudi et le vendredi également?

M. Palmer : Nous avons budgété un séjour se prolongeant jusqu'au vendredi, tout dépendant de l'heure à laquelle nous rentrerons par avion nolisé, le jeudi. Si nous arrivons à temps pour prendre un vol commercial en soirée, nous le ferons, mais nous avons budgété un retour le vendredi, juste au cas où nous devrions passer une nuit supplémentaire.

La sénatrice Raine : Je viens de l'Ouest et je me demandais s'il ne serait pas possible de partir directement de notre province de résidence le lundi plutôt que le dimanche?

M. Palmer : C'est un aspect logistique sur lequel le comité de direction devra décider en temps voulu.

Le vice-président : Je crois que le budget nous laisse une certaine latitude à cet égard.

La sénatrice Raine : C'était une simple question. Tout me va.

Le sénateur Moore : Pour revenir à la question de la sénatrice Raine, est-il question de tous se retrouver à Ottawa pour prendre un vol vers Iqaluit ou de se retrouver à Iqaluit? Quel est le plan?

Le vice-président : Nous devons nous regrouper à Iqaluit, mais vous devrez tous partir d'Ottawa le dimanche pour cela.

Le sénateur Moore : À quelle heure les vols partent-ils d'Ottawa?

Le vice-président : À 9 heures.

La sénatrice Raine : À ce moment-là, il faudra que je quitte mon domicile le samedi matin.

Le vice-président : Nous pourrions revoir tout cela : le budget nous donne une certaine latitude à ce sujet, et nous pourrions faire glisser la période de cinq jours.

M. Palmer : Il n'est pas nécessaire qu'elle débute dimanche.

La sénatrice Raine : Nous faut-il une motion?

Le vice-président : Oui.

La sénatrice Raine : Je propose que nous adoptions le budget présenté.

Le vice-président : Voici comment se lit la motion, si vous me le permettez, sénatrice Greene Raine : Que soit approuvée la présentation, au comité de direction du Comité permanent de la régie interne, des budgets et de l'administration — à la suite d'un examen final mené par l'Administration du Sénat et encadré par le Sous-comité du programme et de la procédure — de la demande d'autorisation budgétaire suivante, au montant de 212 550 $ pour l'exercice financier se terminant le 31 mars 2017, en lien avec notre ordre de renvoi portant sur la question du logement dans le Nord.

La sénatrice Raine : J'en fais la proposition.

Le vice-président : Merci.

Le sénateur Sibbeston : J'appuie la motion.

Le vice-président : Le sénateur Sibbeston appuie la motion. Y a-t-il discussion? Est-ce que tout le monde est en faveur?

Des voix : Oui.

Le vice-président : Adoptée.

Je tiens à remercier notre témoin pour sa patience.

Madame Letemplier, du Conseil national de développement économique des Autochtones, vous avez la parole. Bienvenue, madame.

Hilda Broomfield Letemplier, membre, Conseil national de développement économique des Autochtones : Bonsoir aux membres du comité et merci de m'avoir invitée à prendre la parole. C'est un réel plaisir et un honneur pour moi de me trouver ici ce soir. Je suis ravie de vous revoir, sénateur Patterson.

Je m'appelle Hilda Broomfield Letemplier et je suis présidente de Pressure Pipe Steel Fabrication Ltd., à Goose Bay, Terre-Neuve-et-Labrador, dans une région régie par le gouvernement du Nunatsiavut. Je suis fière de déclarer que notre entreprise est entièrement détenue par une Inuite, puisque j'en suis propriétaire à 100 p. 100. Nous sommes une fabrique de produits d'acier dans le commerce non traditionnel et sommes un fournisseur des secteurs minier et industriel. C'est un grand honneur pour moi que d'être ici. Mon conjoint a fait tout son possible pour m'enseigner la soudure, mais tout ce que j'arrive à faire, c'est de faire coller la baguette à souder sur la pièce. Voilà toute l'étendue de mes connaissances en soudure.

Je représente le Conseil national de développement économique des Autochtones. Je viens de Happy Valley — Goose Bay et je suis très heureuse de me retrouver ici à Ottawa. Je tiens également à souligner que nous sommes réunis sur le territoire traditionnel des peuples algonquin et anishinaabe.

Comme vous le savez, le Conseil national de développement économique des Autochtones est un organisme consultatif composé de représentants d'entreprises de Premières Nations, inuites ou métisses ainsi que de leaders communautaires de partout au Canada. Il donne des avis au gouvernement sur la façon de promouvoir au mieux le développement économique autochtone, de répondre aux besoins uniques des peuples autochtones au Canada et de s'adapter aux circonstances particulières de ces peuples autochtones.

Je sais que vous avez entamé votre étude sur le logement dans le Nord et que vous êtes intéressés par les pratiques exemplaires et les défis permanents auxquels sont confrontées les Premières Nations et les communautés inuites. Le conseil va vous faire part de son point de vue sur ces enjeux en vous parlant du travail qu'il a entrepris au sujet des infrastructures dans le Nord.

Dans notre travail sur la question hautement importante du développement économique des peuples autochtones dans le Nord, nous avons déterminé que l'infrastructure est un élément déterminant du développement économique et social. Au cours des deux dernières années, nous avons entrepris un vaste chantier de réflexion sur ce sujet qui a débouché sur la formulation de recommandations, dans notre récent rapport, à propos des infrastructures susceptibles de favoriser le développement économique dans le Nord.

En 2014, le conseil a commandé une étude sur les besoins d'infrastructures des collectivités autochtones du Nord. Celle-ci indique que les infrastructures qui favorisent le plus le développement économique sont celles liées aux transports, à l'énergie et aux télécommunications.

Si chaque région du Nord est unique en soi, de nombreuses collectivités autochtones du Nord sont confrontées à des défis semblables sur le plan des infrastructures. Dans les petites collectivités, surtout dans les régions éloignées et peu peuplées, les infrastructures essentielles qui soutiennent le développement économique sont souvent déficientes, pour ne pas dire absentes.

À cause de l'absence de réseaux de transport efficaces, nous n'avons d'autre choix que de recourir à des solutions coûteuses. Les infrastructures portuaires sont particulièrement limitées. Dans la plupart des collectivités, le déchargement des navires fait appel à des barges à bord desquelles on transfère le fret, ce qui est coûteux et prend beaucoup de temps.

L'énergie est essentielle pour le fonctionnement au quotidien de n'importe quelle entreprise. Pour les organisations qui étudient les coûts et les avantages d'un investissement dans des collectivités éloignées, la disponibilité et les coûts de l'énergie sont très importants. Autrement dit, le manque de solutions énergétiques valables sur les plans économique et environnemental constitue un sérieux obstacle aux investissements de nature commerciale.

Pour répondre à leurs besoins énergétiques, de nombreuses collectivités dépendent de groupes électrogènes diesels coûteux, et elles n'ont pas accès à des sources d'énergie verte, fiables et durables. Pour ces collectivités, il est difficile d'accroître la capacité énergétique de façon à répondre à une demande croissante.

En télécommunications, les infrastructures sont également très importantes pour les économies et les collectivités du Nord. Il faut absolument pouvoir participer à l'économie du numérique et donc avoir accès à une bande passante suffisante pour pouvoir bénéficier de nouvelles percées comme la cybersanté et le cyberapprentissage.

Près de la moitié des collectivités du Nord dépendent de liaisons Internet par satellite pour leurs communications de base. Cela veut dire qu'elles ont un accès limité à l'économie du numérique et aux services électroniques à cause des faibles vitesses de transmission, de la mauvaise qualité et du coût élevé de leurs réseaux.

Que déduire de tout cela? Nous savons que les collectivités autochtones du Nord auraient avantage à disposer de plus d'infrastructures et nous savons que les investissements dans les infrastructures — surtout dans les transports, l'énergie et les télécommunications — peuvent stimuler le développement économique. Cependant, la croissance économique à long terme dépend aussi de l'infrastructure communautaire susceptible de favoriser la diversification économique et une bonne qualité de vie des résidants. Compte tenu des pénuries de logements, les entreprises du Nord ont de la difficulté à attirer et à maintenir en poste des employés.

Partant de là, nous nous sommes ensuite demandé quel effet pourrait avoir un investissement supérieur dans les infrastructures du Nord et nous avons commandé une seconde étude, une étude de rentabilisation de huit grands projets d'exploitation de ressources naturelles dans le Nord avec, à la clé, une évaluation du coût des infrastructures nécessaires par rapport aux avantages escomptés des projets.

L'étude révèle que les investissements publics dans les infrastructures économiques du Nord, en lien avec les grands travaux de mise en valeur des ressources, présentent d'intéressantes retombées économiques et fiscales. Dans les cas particuliers des infrastructures de transport et de l'énergie, chaque dollar dépensé se traduit par environ 11 $ en retombées économiques et 11 $ en retombées fiscales.

L'étude révèle que les emplois créés par les grands travaux de mise en valeur des ressources dans le Nord peuvent rapporter 3 $ par dollar que le gouvernement investit dans la prestation de services publics. Ainsi, l'investissement public dans les infrastructures économiques du Nord qui sont créatrices d'emplois représente un apport fiscal notoire pour les gouvernements. Nous avons estimé à près de 1,4 milliard de dollars les retombées fiscales nettes des grands travaux envisagés de mise en valeur des ressources, soit l'écart entre les recettes et les dépenses gouvernementales.

On peut aussi se faire une idée de ce genre d'impact en prenant individuellement chaque grand projet. Partant de l'hypothèse que, sur une durée de vie utile de 15 ans, un grand projet de mise en valeur des ressources dans le Nord peut employer annuellement plus de 430 Autochtones et qu'environ 260 de ces Autochtones étaient au chômage, nous croyons possible de réduire de 50 millions de dollars en 15 ans le coût de la pauvreté des résidants autochtones du Nord pour la société.

Toute diminution de la pauvreté permet de réduire les coûts fiscaux pour tous les gouvernements concernés. C'est important, parce que le fait de hausser le niveau de vie des Autochtones dans le Nord, afin de l'amener à égalité avec celui des autres Canadiens, exigerait des dépenses publiques nettement supérieures à celles que représente la création de débouchées d'emploi pour les Autochtones du Nord.

En plus des études qu'il a commandées en juin dernier, le conseil a tenu une série de tables rondes à Whitehorse pour consulter les détenteurs du savoir et déterminer comment attirer des investissements dans les infrastructures du Nord. Nos études et nos consultations auprès des dirigeants du Nord constituent les fondements de notre rapport qui contient des recommandations sur les infrastructures dans le Nord susceptibles d'appuyer le développement économique.

Le Nord du Canada est confronté à de nombreux défis pour ce qui est des infrastructures nécessaires pour répondre aux besoins des résidants du Nord, comme, par exemple, le fait que la construction et l'entretien de ces infrastructures reviennent à près de 150 p. 100 de plus de ce qu'il en coûte ailleurs au Canada. Il peut être difficile de mettre la main sur des capitaux pour financer les infrastructures de soutien à cause des risques inhérents qui y sont rattachés.

À cause d'un important déficit d'infrastructures, le Nord se retrouve forcément en situation de rattrapage. La plupart des mécanismes de financement disponibles dans le Nord sont sollicités à outrance à cause de l'ampleur des déficits d'infrastructures, ce qui laisse peu de place à des investissements dans les infrastructures stratégiques.

Notre rapport, intitulé Recommandations sur le développement d'infrastructures nordiques à l'appui du développement économique, mentionne un certain nombre de possibilités, dont les trois suivantes : le marché de la dette est en quête d'occasions de placements stables à long terme. Dans le Nord, les investissements dans les infrastructures présentent de bonnes retombées potentielles, puisque, pour chaque dollar qu'il investit dans les grands projets d'exploitation des ressources, le gouvernement peut récupérer 3 $ de recettes par emploi créé.

Afin d'appuyer les infrastructures et le développement économique dans le Nord, le conseil recommande que le gouvernement du Canada entreprenne trois grandes actions : qu'il coordonne les investissements dans les infrastructures qui favorisent le développement économique et qu'il accroisse ce financement; qu'il appuie la capacité des collectivités du Nord en finançant la recherche; qu'il se livre à des planifications exhaustives au niveau communautaire.

Le conseil est d'avis que la modernisation des infrastructures existantes et l'amélioration des infrastructures porteuses de développement économique sont des conditions préalables à respecter pour répondre aux besoins de logements abordables et durables dans le Nord. Il est indéniable que les infrastructures communautaires et les infrastructures de grande échelle vont main dans la main quand on parle de l'appui à accorder à ce Nord qui est prêt à recevoir des investissements.

Les infrastructures dans le Nord ne sont pas adaptées aux besoins des résidants du Nord, ce qui restreint leur capacité à réaliser l'énorme potentiel de cette région. Nous sommes à la croisée des chemins et l'heure est à l'action.

Je serai heureuse de réagir à vos commentaires et de répondre à vos questions.

Avant de commencer, cependant, permettez-moi deux ou trois remarques.

Le sénateur Patterson parlait tout à l'heure de l'aspect logistique des déplacements dans le Nord. Il m'a personnellement fallu trois nuits et deux jours et demi pour me rendre ici. Et cela, depuis Goose Bay seulement.

Permettez-moi de vous dire deux ou trois choses en ce qui concerne les transports qui occupent une place particulière dans mon cœur, puisque, dans sa jeunesse, mon père a été guide. Il a sillonné le territoire du Labrador avec un traîneau à chiens. Il a accompagné des médecins et des missionnaires dans le nord de la péninsule. C'est lui qui a éveillé en moi l'intérêt que je porte aux infrastructures dans le Nord.

Notre entreprise, Pressure Pipe Steel Fabrication Limited, qui a été lancée en 1991, est spécialisée dans la fabrication de cuves à mazout. Comme on continue à beaucoup utiliser le gazole comme source d'énergie dans les collectivités du Nord, et donc de telles cuves d'entreposage, nous avons fabriqué énormément de ces réservoirs destinés aux consommateurs de la côte Nord du Labrador. Avec la situation qu'on connaît sur le plan des infrastructures, ceci explique cela. À l'ère du cyberapprentissage et de la cybersanté, il serait fantastique d'améliorer les télécommunications. Nous économiserions beaucoup d'argent. Je suis prête à répondre à vos questions.

Le vice-président : Merci beaucoup. Je tiens à féliciter le Conseil national de développement économique des Autochtones pour son travail sur les infrastructures dans le Nord. Certains membres de ce conseil viennent de communautés éloignées dans le nord de l'Ontario, mais à part vous, aucun ne réside dans les régions que vous avez étudiées, si bien que la tâche que vous avez entreprise est d'autant plus impressionnante. Avant de céder la parole aux autres membres du comité, je vais vous poser une question.

Vous avez parlé d'une étude de rentabilisation qui a été réalisée par le Conseil national de développement économique des Autochtones parallèlement à l'étude sur les infrastructures. Nous avons, devant nous, vos recommandations très complexes contenues dans votre rapport sur les infrastructures susceptibles de stimuler le développement économique. Y a-t-il un autre rapport sur l'étude de rentabilisation dont vous avez parlé, que nous devrions voir ou qui a été inclus dans le rapport publié de janvier 2016?

Mme Letemplier : Je pense que vous voulez parler de l'étude que nous avons réalisée sur huit collectivités.

Le vice-président : Vous avez commandé une autre étude. Nous avons le rapport de janvier 2016.

Mme Letemplier : L'autre est sur notre site web.

Le vice-président : C'est accessible en ligne?

Mme Letemplier : Oui. Je ne siège au conseil que depuis un an et demi. J'ai plongé d'emblée dans le dossier des infrastructures du Nord; le choix du moment était parfait. Nous avons réalisé ce rapport. Nous avons aussi entrepris l'autre. Puis, nous avons effectué une étude de rentabilisation et organisé la table ronde. Nous venons juste de produire celui-ci. Nous avons des plans d'avenir et je suis certaine que cela fera l'objet d'une question.

Le vice-président : Parfait. Tout cela nous sera très précieux au comité. Voilà qui dresse un très bon portrait global de la situation et des défis que nous constaterons de visu à la faveur de nos échanges avec ceux qui s'occupent de logements.

Mme Letemplier : Effectivement et, au conseil, nous serions ravis d'aider votre comité pour que nous puissions tous progresser. Alors, n'hésitez pas à faire appel à nous.

Le vice-président : Merci. Sénateur Sibbeston?

Le sénateur Sibbeston : Merci. Bienvenue, madame.

Vous avez parlé d'un atelier à Whitehorse. Je constate que vous avez fait porter l'essentiel du débat sur des questions d'ordre général comme le développement économique et les projets dans le Nord pour ce qui est des transports, de l'énergie et des communications, autant de questions très importantes pour cette région. Votre conseil a-t-il réfléchi sur les façons possibles d'obtenir un effet sur le logement dans le Nord, que ce soit sous la forme d'un financement ou autre?

Mme Letemplier : Personnellement, je pense que nous pourrions avoir un impact. La volonté politique est là et des mandats forts ont été confiés dans le sens de l'appui à accorder aux peuples autochtones, pour les aider à régler leurs préoccupations. Le problème, c'est que le financement actuel est ciblé et que les besoins de base ne sont pas comblés. Il est là le problème, parce qu'il est toujours difficile de dégager les fonds nécessaires pour investir dans les infrastructures étant donné l'ampleur du déficit à combler au départ.

Le développement économique est aussi une affaire de ressources humaines, d'assistance à apporter aux gens. On a appris dans les médias que des résidants du Nord fouillent dans les poubelles pour se nourrir. J'ai entendu tant de récits faisant état de personnes qui doivent choisir entre payer leur loyer ou leur service de télécommunications parce qu'elles veulent demeurer brancher sur le reste du monde. Dans bien des cas, elles font l'impasse sur leur loyer pour payer leurs factures de télécommunications. C'est très difficile quand il faut choisir entre payer son loyer et s'acheter à manger. Ce sont de véritables problèmes, de véritables préoccupations. Je suis persuadée que nos interventions auront un impact positif et que nous parviendrons à changer les choses grâce au travail du conseil et à ses recommandations.

Le vice-président : Merci. Sénateur Enverga.

Le sénateur Enverga : Merci, monsieur le président. Votre exposé était excellent. Vous nous avez un peu éclairés, ce qui va nous aider. Je vous propose de parler d'un rapport de 2016 contenant des recommandations concernant les infrastructures dans le Nord qui favorisent le développement économique. On peut y lire ceci :

... les institutions régies par la Loi sur la gestion financière des premières nations doivent garantir que les peuples autochtones qui s'autogouvernent aient accès aux mécanismes d'emprunts du conseil de gestion financière des premières nations en vue de favoriser les investissements en infrastructures.

D'où ma question : Quels éléments ont incité le conseil de développement économique à formuler les recommandations suivantes et pourriez-vous nous donner des détails à ce sujet?

Mme Letemplier : Je ne vois pas exactement ce que vous voulez savoir.

Le sénateur Enverga : Vous avez recommandé que le gouvernement du Canada fasse appliquer la Loi sur la gestion financière des premières nations. De quoi devrait-il être question?

Mme Letemplier : Compte tenu de la nature de notre conseil, nous assistons régulièrement à des exposés donnés par des représentants des différents ordres de gouvernement et même par ceux d'AANC. Nous suivons une courbe d'apprentissage accélérée et le processus est impressionnant, mais il y a beaucoup de choses que nous souhaiterions changer. Nous avons constaté que bien des pratiques antérieures n'ont pas donné les résultats escomptés et nous ne voulons pas continuer à faire et refaire la même chose. Nous voulons apporter certains changements pour améliorer les choses. Si l'on persiste à faire la même chose et que cela ne fonctionne pas, c'est le signal qu'il faut changer. C'est une des choses sur lesquelles nous travaillons et nous cherchons à éliminer la paperasserie. Certaines choses sont faites à l'ancienne, et ce sont celles-là qu'il y a lieu de réformer.

Le sénateur Enverga : Pouvez-vous nous en donner des exemples?

Mme Letemplier : Je ne suis pas certaine de pouvoir le faire.

Le vice-président : Vous avez dit que les régions rurales et éloignées sont rarement destinataires du financement des infrastructures et qu'il faudrait envisager de créer un fonds spécialisé d'investissement dans les infrastructures du Nord.

J'ai beaucoup entendu parler de la nécessité de réduire le temps de déplacement dans les centres urbains grâce à l'amélioration des transports en commun et j'ai souvent constaté que les fonds destinés aux infrastructures aboutissent dans les régions urbaines où sont concentrés les votes et où la densité de population est supérieure. Cependant, votre rapport démontre qu'il est aussi très rentable d'investir dans des régions éloignées. Il est possible que la solution consiste à mettre sur pied un fonds spécialisé d'investissement dans les infrastructures du Nord. Cela représenterait un changement radical par rapport à la façon dont les choses se déroulaient dans le passé. Ne serait-ce pas l'exemple d'un changement à apporter?

Mme Letemplier : Oui. Cela fait près de 30 ans que le conseil existe. Puis-je vous en parler? Je suis certaine que cela va répondre à certaines de vos questions. Les ministres ne se sont jamais tournés vers le Conseil national de développement économique des Autochtones, du moins pas jusqu'à cette année. Nous avons accueilli trois ministres lors de notre dernière réunion du conseil et, si vous le voulez bien, je voudrais vous en toucher un mot.

Le sénateur Enverga : Oui.

Mme Letemplier : Le Conseil national de développement économique des Autochtones réclame une augmentation des investissements dans le développement économique des Autochtones. C'est ce que nous avons fait le 24 février lors de notre rencontre avec les ministres Carolyn Bennett, Jody Wilson-Raybould et Hunter Tootoo. C'était d'autant plus extraordinaire que nous accueillions des ministres pour la toute première fois. Nous avons même eu la chance d'en accueillir trois d'un coup. Le conseil a formulé plusieurs remarques pour aider le gouvernement fédéral à réaliser ses objectifs en ce qui concerne le développement économique des Autochtones et le respect des engagements inscrits dans les lettres de mandat rédigées par le premier ministre Trudeau.

Le gouvernement du Canada a fait de sa relation avec les peuples autochtones sa priorité de premier plan et le conseil estime que cet engagement devrait être reflété dans le budget, ce qui veut notamment dire : tripler les dépenses fédérales destinées à favoriser le développement économique des Autochtones, soit de passer à 834 millions de dollars environ par rapport aux quelque 278 millions actuels; augmenter de 100 millions de dollars le financement accordé aux institutions financières autochtones; un financement additionnel de 150 millions de dollars pour l'établissement du régime et de ses institutions issus de la Loi sur la gestion financière des premières nations; créer un fonds d'investissement dans les infrastructures propres au Nord; assurer le financement nécessaire pour donner suite à l'Évaluation nationale des systèmes d'aqueduc et d'égout des Premières Nations de 2011, selon laquelle des investissements de 4,7 milliards de dollars seront nécessaires dans les 10 prochaines années afin de satisfaire aux normes actuelles et de tenir compte de la croissance démographique prévue; renouveler la relation financière avec les peuples autochtones à partir de la prémisse voulant que les gouvernements autochtones sont égaux aux autres ordres de gouvernement.

Le président du conseil, le chef Clarence Louie, a dit :

Les sommes actuellement consacrées au développement économique des Autochtones sont insuffisantes. Notre conseil revendique depuis longtemps que le niveau de dépenses affectées au développement économique des Autochtones soit d'au moins 10 p. 100 du total des dépenses affectées aux peuples autochtones...

Cela a été dit lors de la réunion du conseil.

Le conseil estime que le développement économique est un élément fondamental de la réconciliation. Des progrès en matière de développement économique, commercial et communautaire peuvent être réalisés lorsqu'ils sont appuyés par des structures de gouvernance autochtone solides, des investissements financiers suffisants et ciblés de façon appropriée ainsi que par l'élaboration d'une politique novatrice, en partenariat avec les collectivités autochtones.

Plus tard, le chef a ajouté :

Il est dans l'intérêt de tous les Canadiens autochtones et non autochtones que les Premières Nations, les Inuits et les Métis soient des participants à part entière de l'économie, en mesure de contribuer de façon significative à la prospérité économique du Canada.

C'est aussi ce qu'a dit le chef Clarence Louie et il a ajouté, à propos de la rencontre de ce jour-là :

... cette rencontre représente un jalon historique d'un partenariat prometteur pour des changements transformationnels de la relation entre le Canada et les peuples autochtones — une occasion de redresser les torts historiques et d'apporter des améliorations durables à la situation socioéconomique des peuples autochtones.

Voilà qui concerne notre conseil mis sur pied en 1990.

Le sénateur Enverga : Vous nous avez donné beaucoup d'exemples, merci.

Mme Letemplier : Merveilleux. Je voulais vous faire part des statistiques extraites du rapport. Celui-ci a été lu par 12,9 millions de personnes, ce qui est fantastique. Les Canadiens connaissent maintenant beaucoup mieux les problématiques et les préoccupations actuelles des peuples autochtones. Le rapport a fait l'objet de 8 articles de journaux et de 115 publications imprimées ou sur le Web; il y a eu 20 interventions dans les médias nationaux notamment à la CBC, à Nation Talk, dans le Times Colonist, à CTV News, dans le Globe and Mail, dans la Presse canadienne et dans Metro, en plus de 96 articles parus dans les médias locaux. La dernière fois, je les ai tous lus mais cette fois-ci, je me contenterai de dire qu'on en parle partout au Canada parce qu'il est effectivement question d'une situation pancanadienne. Les articles ont été partagés 894 fois dans les médias sociaux. Moi-même, j'ai donné 9 entrevues et, le jour même où le rapport a été publié, 200 internautes de plus sont venus sur notre site web.

Et puis, il y a tout ce qui s'est passé depuis. J'ai donné un atelier lors de la conférence Northern Lights 2016. C'est là que j'ai rencontré le sénateur Patterson. J'ai aussi rencontré le premier ministre de Terre-Neuve-et-Labrador, Dwight Ball, et celui du Yukon, Daryl Pasloski, pour parler des conclusions du rapport. J'ai fait un exposé au comité des sous- ministres sur l'Arctique le 23 février et au comité des directeurs généraux de Transports Canada le 25 février. Le communiqué de presse du gouvernement des Territoires du Nord-Ouest indique que le premier ministre Bob McLeod a fort bien accueilli le rapport sur les infrastructures dans les Nord. Même chose dans le cas des Territoires du Nord- Ouest et de la chambre des mines du Nunavut qui déclarent leur appui aux conclusions du rapport sur les infrastructures dans le Nord. La radio de CBC North a annoncé que la maire d'Iqaluit, Madeleine Redfern, est aussi d'accord avec le rapport sur les infrastructures dans le Nord. À l'émission The Current, à la radio anglaise de la SRC, Anna Maria Tremonti a annoncé que le rapport sur les infrastructures dans le Nord était l'une des trois grandes nouvelles de la semaine. La CBC va m'interviewer de nouveau demain au sujet de la séance de ce soir.

Je me sens très bien et très confiante relativement au travail accompli par le conseil. J'estime que c'est précisément ce qu'il faut faire pour que les projets d'infrastructures dans le Nord aboutissent.

Le vice-président : Excellent et très impressionnant. Merci.

Le sénateur Tannas : Merci beaucoup. C'est un privilège de vous accueillir ici. Votre réussite est inspirante et votre président, le chef Louie, est lui aussi inspirant. L'une des premières choses que j'ai faites après être entré au Sénat a été de rendre visite au chef Louie à Osoyoos. J'ai passé deux ou trois heures à parler avec lui de questions très diverses et j'en suis revenu très impressionné. Ce qui le passionne par-dessus tout et constitue l'essentiel de son message, c'est le développement économique et l'emploi, soit les deux axes d'intervention pour mettre un terme à ce cycle.

Je retiens de votre exposé que vous pensez la même chose que lui. C'est-à-dire que, si nous investissons comme il faut, nous créerons un climat favorable au développement économique et que les emplois suivront; suivront aussi de meilleures conditions de logement, puisque les gens voudront posséder, entretenir et construire des maisons ou investir dans l'immobilier. C'est ce que nous avons un peu constaté lors de nos tournées des réserves dans le sud du Canada où, de toute évidence, la qualité des logements est en rapport direct avec le niveau d'emplois. Votre message me parle.

Nous avons visité des emplacements où il n'y avait apparemment pas de débouchés économiques. Que pensez-vous de ces lieux où l'on pourrait toujours investir tout l'argent qu'on veut, mais à fonds perdu parce qu'il y a tellement de choses manquantes ou d'obstacles à surmonter? Je veux parler des collectivités éloignées à propos desquelles on peut penser que le développement économique est impossible.

Qu'en pensez-vous? Vous-même venez d'un lieu éloigné. Je ne suis pas le seul sans doute à avoir l'impression que Happy Valley Goose Bay n'est pas forcément un lieu idéal pour réussir à la tête d'une fabrique de pièces d'acier.

Nous bénéficierions tous de votre point de vue à ce sujet, parce que c'est une question qui trouble beaucoup de gens au sujet des collectivités éloignées. Nous avons discuté avec des gens qui nous ont dit qu'il n'y a aucun débouché économique dans leur coin de pays. Qu'en pensez-vous?

Mme Letemplier : Nous avons de la chance parce que nous sommes tout à côté de la mine de nickel de la baie Voisey's, détenue par Vale. Grâce aux ententes sur les répercussions et les avantages que nous avions signées à nos débuts, en 1991, notre entreprise a fabriqué de grandes quantités de cuves à mazout, mais comme nos produits sont très durables et qu'ils nous survivront, nous en sommes venus à étouffer notre niche commerciale et nous avons cessé de fabriquer ces cuves.

Ainsi, quand la mine a ouvert, elle a donné un excellent coup de pouce à des petites entreprises comme la nôtre. Comme nous avions jugé nécessaire de nous diversifier, nous nous sommes tournés vers tous nos fournisseurs, auprès de qui nous nous étions approvisionnés jusque-là, pour les inviter à signer des accords de fournisseurs privilégiés. Désormais, nous vendons tous les produits que nous achetions jadis auprès des mêmes entreprises pour les vendre à la mine.

Dans notre entreprise, nous sommes convaincus qu'il faut embaucher et former le plus grand nombre d'Autochtones possible. Je vous dirais que nous avons connu des histoires d'horreur. Des entreprises du Nunatsiavut ou des collectivités du Nord ont fait venir leurs manœuvres des quatre coins du Canada. Les entreprises font même venir des signaleurs et affirment qu'elles ne peuvent pas engager les Autochtones sur place parce qu'ils n'ont pas suivi un cours de signaleur. Même quand on offre ce cours à nos gens, ils ne sont pas embauchés.

Comment pensez-vous qu'on se sente quand on voit que les entreprises font venir leurs manœuvres d'ailleurs? Ne sommes-nous même pas assez bons pour être embauchés comme manœuvres?

Nous offrons énormément de formation en entreprise. Certaines collectivités ne sont pas en mesure d'entreprendre des projets d'envergure... Faites donc venir ces travailleurs de l'extérieur, donnez-leur la possibilité d'être embauchés et d'être formés.

Quand vous attirez une grande entreprise d'exploitation des ressources qui fait venir ses manœuvres de partout au Canada, il devient impossible d'embaucher des gens de la région.

Nous avons embauché et formé des travailleurs; comme les Autochtones travaillent très bien de leurs mains, nous en avons beaucoup embauché. Nous avons engagé notre propre personnel spécialisé dans les tuyaux PEHD, les tuyaux en polyéthylène de haute densité. C'est de la soudure sur plastique. Je pourrais sans doute en faire, mais je ne pense pas que mes soudures seraient très belles. Il faut un équipement spécial qui exige une formation.

Avec un de nos fournisseurs, nous sommes allés en Ontario en compagnie de nos gens. Nous leur avons fait suivre un cours en usine, nous les avons formés. À l'époque, ils gagnaient 86 000 $ par an pour six à huit mois de travail. Ils faisaient plus d'argent que nous parce que nous les payions bien. Il m'arrive de rencontrer leurs épouses qui me disent : « J'ai la nostalgie de l'époque où mon époux gagnait autant. » C'est beau de voir cela.

Parmi les projets qu'il caresse, le conseil veut lancer une étude de rentabilisation. Une entreprise nous a fait un exposé fantastique. Il s'agissait d'un projet exécuté comme doit l'être tout grand projet d'exploitation des ressources. Nous allons effectuer une étude de rentabilisation de cette entreprise dans les... nous prendrons le temps qu'il faut pour lancer les choses.

Notre prochain grand projet est le plan d'action. Nous envisageons en effet de réaliser un plan d'action pour déterminer ce que nous devrons faire ensuite.

Il a été question de la diversité des fournisseurs et je voulais vous faire part d'une autre réflexion, car il se trouve que nous avons dû agir sur ce plan pour survivre. Notre entreprise est en pleine croissance. Nous engageons et formons le plus grand nombre possible de gens recrutés localement. Nous essayons toujours d'inviter les autres entreprises à faire la même chose.

Il faut notamment que les grands projets d'extraction de ressources viennent investir dans nos collectivités, qu'elles donnent aux collectivités, qu'elles leur enseignent et que tous les ordres de gouvernement participent afin que l'argent investi dans les infrastructures se retrouve dans les collectivités qui pourront alors s'approprier les projets pour les faire croître. Il sera possible de les aider à découvrir comment rentabiliser les investissements laissés derrière, quand les entreprises d'exploitation des ressources s'en vont.

Voilà ce que je voulais dire au sujet de la diversité, parce que nous avons dû nous-mêmes nous diversifier. Nous avons dû améliorer nos programmes d'approvisionnement pour les entreprises détenues par des intérêts autochtones et étendre ces programmes à d'autres entreprises détenues, celles-ci, par des femmes, par des personnes handicapées et par des membres de minorités visibles.

C'est le mandat qui a été donné à l'industrie pétrolière et gazière sur l'île de Terre-Neuve et au Labrador — toutes ces grandes entreprises ont reçu pour mandat d'appuyer les entreprises autochtones, les femmes d'affaires, les membres de minorités visibles et... je vous en ai cité quatre.

Nous devons également œuvrer sur ce plan. Ce mandat me permet d'aller m'adresser aux administrateurs de n'importe quel projet d'exploitation des ressources pour leur demander de travailler avec nous. Mon entreprise répond en partant à deux des critères énoncés dans leur mandat.

Le sénateur Moore : Merci d'avoir déployé tous ces efforts pour venir nous rencontrer.

Mme Letemplier : Merci. C'est un plaisir.

Le sénateur Moore : Après vous avoir entendu, je ne me plaindrai plus jamais de mes allers-retours entre la Nouvelle-Écosse et Ottawa.

En réponse à la question du président — à moins que ce ne fut celle du sénateur Sibbeston — vous avez dit qu'une fois les besoins de base comblés, il ne reste plus d'argent pour les infrastructures. Que vouliez-vous dire par « besoins de base »?

Mme Letemplier : Ce sont les besoins fondamentaux.

Le sénateur Moore : Certes, les « besoins fondamentaux », mais lesquels sont-ils?

Mme Letemplier : L'adduction d'eau, la mise à l'égout et le développement économique des populations. Comment peut-on fonctionner quand on va fouiller les poubelles pour se nourrir, qu'on n'a pas d'emploi et qu'on vit à 28 dans une maison? On n'a nulle part où s'isoler. C'est dur. Et puis, comment nourrir sa famille?

Il est simplement question des besoins de base. Tout l'argent sert à essayer de survivre et il ne reste plus rien pour les investissements.

Le sénateur Moore : C'est ce que nous avons constaté dans certaines réserves du sud où les conditions sont difficiles à un point que je n'aurais jamais imaginé. Les conditions de logement sont telles que j'en ai eu pitié pour ces gens qui essaient tout simplement de survivre.

Mme Letemplier : Si l'on investissait dans les infrastructures de télécommunications, il serait possible d'offrir des services de cybersanté et de cyberapprentissage. Il n'est pas possible de s'occuper des autres quand on ne peut pas s'occuper de soi-même. Il faut pouvoir prendre soin de soi. Comment subvenir aux besoins de sa famille quand c'est décourageant?

Le sénateur Moore : Vers la fin de votre exposé, vous avez parlé d'une étude de cas à propos d'une entreprise que vous allez attirer. Vous avez aussi parlé d'un plan d'action. S'agit-il d'un plan d'action envisagé par le conseil de développement pour le Nord dans son ensemble ou plutôt pour une région où vous allez lancer un projet pilote? De quoi s'agit-il?

Mme Letemplier : Notre conseil est responsable auprès de toutes les Premières Nations, des Inuits et des Métis du Canada. À Northern Lights, après mon exposé, j'ai constaté que les maires présents voulaient participer, ainsi que les représentants de tous les ordres de gouvernements et des gouvernements territoriaux. Tout le monde s'est dit emballé par ce qui se passait. Tout le monde voulait être là et participer.

Nous avons tenu une table ronde fantastique à Whitehorse. J'ai trouvé que c'était très bien parce qu'après mon arrivée au conseil, j'ai appelé tous ceux et celles que je connaissais pour leur demander de m'aider, de me transmettre des informations, de travailler avec moi. J'ai la liste de tous ceux que j'ai contactés. Eh bien, rien n'a abouti. Je me suis alors dit : « Mon Dieu, cette entreprise est très importante, elle est porteuse d'énormément de possibilités et les gens ne réagissent pas. »

Maintenant, tout le monde répond présent. Des administrateurs de grands projets d'exploitation de ressources sont venus me voir à Northern Lights pour me dire qu'ils veulent faire partie de notre démarche. Il y a aussi ceux qui veulent faire des exposés au conseil. Comme je le disais, les maires de localités du Nord, comme celui de Kuujjuaq, se sont tournés vers moi parce qu'ils se sont dit — imaginez cela! —que je pourrais les aider. Dans notre localité, nous n'avons même pas de garage municipal et nous ne pouvons pas réparer notre équipement. Voilà le genre d'infrastructures qui est nécessaire. Je suis peut-être optimiste, mais c'est sans doute une bonne chose qu'il y ait quelqu'un d'optimiste. Cela change.

Le sénateur Moore : Vous ne pouvez pas vous permettre de vous décourager. Il suffit d'une seule personne au début. Quand on s'est fait à cette idée, on finit par obtenir ce qu'on veut. C'est intéressant de voir tous ces gens qui se tournent vers vous. Ce que vous dites est porteur d'espoir et témoigne d'un sens communautaire, d'une volonté d'avancer. Je vous encourage à poursuivre cet excellent travail.

Mme Letemplier : Merci. Il se trouve que, hier, j'ai pris la parole lors d'un événement dans le cadre de la Journée internationale de la femme. C'était fantastique.

Je suis une motivatrice qui se sent motivée dès qu'elle perçoit l'intérêt des gens et leur désir de participer. Au début, les gens ne voulaient rien entendre, mais maintenant tout le monde veut participer. Je n'ai certes pas toutes les réponses, mais je me ferai un plaisir de continuer ce bon travail et d'accueillir tous ceux qui voudront bien se joindre à nous. Tout le monde a de l'argent. Tout le monde veut faire la même chose, alors pourquoi ne pas travailler ensemble et constituer un regroupement d'organisations?

Le sénateur Moore : Effectivement.

La sénatrice Raine : Merci beaucoup. C'est réjouissant de vous entendre parler de vos expériences, et votre optimisme est communicatif. Il est clair que vous êtes en affaires depuis longtemps, que vous êtes passée par des hauts et des bas, que vous avez changé, que vous avez dû vous adapter et que vous avez pris de l'expansion. En ce moment, vous travaillez pour la mine de nickel de la baie Voisey's. Vous devez être au courant de tous les autres projets qui sont à l'étape de la planification ou en voie de réalisation et vous devez constater qu'il y a tous ces gens qui viennent par avion d'autres parties du Canada pour travailler dans votre région, pour y être formés, parce que c'est l'avenir et qu'il y a des débouchés pour les jeunes. Estimez-vous que l'expérience que vous avez eue dans la baie Voisey's peut être un exemple pour les autres entreprises, quant à la façon de faire les choses?

Mme Letemplier : Je le pense. Dans la baie Voisey's, la minière envisage de passer à l'exploitation souterraine, ce qui nous ravit. Il est indéniable que c'est la voie de l'avenir; nous ne pouvons bien sûr pas tout faire ni être tout pour tout le monde, mais c'est bien que toutes les autres entreprises voient ce que nous faisons depuis 1991, nous qui sommes détenus à 100 p. 100 par des intérêts autochtones. C'était avant qu'on parle autant des ententes sur les répercussions et les avantages.

Nous avons connu des heures difficiles. Je pourrais rédiger un livre sur les hauts et les bas de notre entreprise. On dit qu'il y a toujours les aléas de la route, mais nous avons franchi tous les trous et tous les obstacles sur notre chemin.

J'aime inciter les gens à lancer leur propre entreprise parce qu'il y a tellement de possibilités. Au début, tous les grands projets d'exploitation de ressources partent de rien, si bien que n'importe quel débouché commercial peut conduire au succès.

La sénatrice Raine : Je suppose que dans tous ces grands projets d'exploitation, on construit des camps pour abriter des travailleurs.

Mme Letemplier : Oui.

La sénatrice Raine : Ce sont donc des travailleurs de passage. Y a-t-il certaines choses, dans la vie des camps, qui sont particulièrement intéressantes ou au contraire difficiles pour ces travailleurs? Peut-on en tirer des leçons pour la construction immobilière dans les collectivités? Autrement dit, dans un camp les travailleurs vivent dans des complexes à logements multiples, mais chez eux, ils se retrouvent dans des résidences surpeuplées. Voyez-vous des enseignements à tirer de cet aspect du logement entre les camps de travailleurs et les collectivités?

Mme Letemplier : Les camps de séjour temporaire s'apparentent à des hôtels cinq étoiles, tout équipés. Il y a une salle communautaire que les travailleurs de cultures autochtones peuvent fréquenter pour cuisiner de façon traditionnelle. Il y a un gymnase et une salle d'activités où les gens peuvent jouer de la guitare, faire différentes activités et avoir beaucoup de plaisir. La nourriture est excellente. Ces camps sont fantastiques, mais ce ne sont que des camps pour des séjours temporaires.

Pour ceux qui connaissent des conditions de surpeuplement chez eux, au sein de leurs collectivités, cela ressemble sûrement à des camps de vacances tout confort. Si l'on investissait dans les infrastructures, il ne serait pas nécessaire d'habiter un logement cinq étoiles. Une chambre avec un lit et juste assez d'espace pour fermer la porte suffirait. Ce serait déjà bien d'avoir un petit espace personnel où se réfugier.

En revanche, comme je le disais, quand on est entassés à 28 ou 30 par habitation, c'est plus difficile. Comment fonctionner? Chacun doit pouvoir s'isoler de temps en temps pour réfléchir à son parcours et à ce qu'il fait. Il suffit qu'une personne soit malade pour que tout le monde le soit. On ne peut pas bien fonctionner dans des conditions pareilles.

La sénatrice Raine : Et puis, plusieurs générations habitent dans ces logements surpeuplés. C'est difficile pour les plus vieux et pour les enfants.

Mme Letemplier : C'est difficile pour tout le monde.

La sénatrice Raine : Si nous nous intéressons plus particulièrement au logement, nous demeurons conscients qu'il faut régler les problèmes d'infrastructures en ce qui concerne l'eau, les routes, les télécommunications et l'alimentation électrique. Si l'on vous donnait une baguette magique et qu'on vous demandait de dépenser avec parcimonie, pensez- vous que la formule des résidences multifamiliales pourrait être une solution ou au contraire qu'il faudrait opter pour des logements traditionnels unifamiliaux?

Mme Letemplier : Tout est possible, tout dépend de ce que les gens peuvent se permettre. La collectivité a dit à l'entreprise qui fait l'objet de notre étude de rentabilisation de ne pas faire main basse sur ses ressources, de ne pas venir occuper toutes les résidences parce qu'il en manque pour les résidants.

Cette entreprise fait du bon travail. L'étude de cas n'est qu'une parmi d'autres que nous allons réaliser. L'entreprise a investi et a bâti les logements dont elle a besoin. Cela a permis d'améliorer les réseaux d'alimentation en eau et les réseaux d'égout. Il y a une aire, plutôt grande, où la communauté peut se rassembler pour les mariages ou les événements spéciaux ou communautaires. L'entreprise a donc investi dans la collectivité. Quand on embauche de la main-d'œuvre locale, on la rémunère bien, le niveau de vie des gens s'améliore en général. Ils peuvent alors se bâtir des maisons individuelles ou à logements multiples. Il y a beaucoup de possibilités.

Nous souhaitons définir les possibilités que peut offrir à la collectivité n'importe quel type de grand projet d'exploitation des ressources, possibilités que la collectivité doit pouvoir ensuite exploiter elle-même.

La sénatrice Raine : Est-ce que la majorité des projets en phase de planification ou en cours de réalisation sont situés à proximité d'une collectivité? Y a-t-il toujours une collectivité non loin?

Mme Letemplier : Beaucoup de ces projets se trouvent sur le territoire d'une collectivité, mais certains sont à l'extérieur, comme à la baie Voisey's, à Rankin Inlet ou dans le cas de la mine de diamant. Il faut alors tout faire venir de l'extérieur.

Quand elles se trouvent sur le territoire d'une collectivité, les entreprises ont un puissant effet direct sur celle-ci. Un hôpital a ainsi été bâti chez nous après l'arrivée de la minière, dans le cadre de l'investissement associé au grand projet d'exploitation des ressources, et c'est sans parler des restaurants et des hôtels qui se sont mis à sortir de terre un peu partout.

La sénatrice Raine : Voilà qui est fort intéressant. J'imagine donc que si cette étude de cas se veut un gabarit, vous pourrez appliquer le modèle à d'autres entreprises.

Mme Letemplier : C'est le genre d'influence que nous espérons exercer dans l'avenir.

Le vice-président : Parlez-nous de la relation entre votre conseil et le gouvernement fédéral. À terme, notre comité cherche à formuler des recommandations éclairées pour le gouvernement. Selon nos règles, le gouvernement doit répondre à nos recommandations dans des délais prescrits.

Pour ce qui est des recommandations contenues dans votre rapport, je me demande lesquelles pourraient nous aider dans notre démarche à propos de la situation de l'hébergement dans ces régions. Soumettez-vous officiellement ce rapport au gouvernement fédéral? Si je puis me permettre de vous poser la question, en avez-vous parlé lors de la rencontre que vous avez eue avec les trois ministres fédéraux ou la réunion a-t-elle eu lieu après la publication du rapport?

Mme Letemplier : Le rapport avait déjà été publié.

Nous n'en avons pas vraiment parlé à la réunion. Nous avons demandé aux ministres de nous dire comment nous pouvions les aider. Ce fut une réunion fantastique. Les ministres se sont montrés très humbles dans leurs réponses, nous disant simplement que nous devions poursuivre ce bon travail, faire ce que nous faisions et continuer de produire des rapports et de formuler des recommandations. Nous sommes convaincus de la valeur de notre action parce qu'il y a les lettres de mandat et que la volonté politique existe; nous sommes convaincus d'être en mesure de parvenir à des résultats.

Le vice-président : C'est effectivement ce que le nouveau gouvernement a clairement annoncé, et tous nos vœux l'accompagnent. Je sais qu'il a pour grande priorité de resserrer les liens entre les peuples autochtones et l'État fédéral et j'attribue une partie de votre optimisme au fait que cette nouvelle donne puisse déboucher sur des résultats.

Qui est le ou la ministre de tutelle du Conseil national de développement économique des Autochtones?

Mme Letemplier : Carolyn Bennett.

Le vice-président : Donc, la ministre des Affaires autochtones et du Nord.

Merci, poursuivons.

Le sénateur Moore : Tout à l'heure, vous avez cité quelques chiffres et vous avez notamment dit qu'il faudrait 4,7 milliards de dollars sur 10 ans au titre des infrastructures. C'est bien ce que vous avez dit?

Le vice-président : Je crois que c'était au sujet des services d'approvisionnement en eau et de traitement des eaux usées, sénateur Moore.

Le sénateur Moore : Comment en êtes-vous arrivé à ce chiffre? Votre conseil a-t-il effectué une étude?

Mme Letemplier : Cela vient du conseil.

Le sénateur Moore : Quand vous avez rencontré les ministres, leur avez-vous soumis ces chiffres? Tout à l'heure, vous avez parlé des services de base, de l'approvisionnement en eau et du traitement des eaux usées. Je suppose que c'est de cela dont on parle : l'approvisionnement en eau et le traitement des eaux usées. Les ministres ont-ils vu ces chiffres et avez-vous eu l'impression qu'ils se sont engagés? S'agit-il d'un chiffre ferme à partir duquel ils pensent pouvoir travailler? Où cela se trouve-t-il? Vous avez parlé de services fondamentaux, car nous avons effectivement tous besoin d'eau potable.

Mme Letemplier : Il faut débloquer le financement nécessaire pour donner suite à l'Évaluation nationale des systèmes d'aqueduc et d'égout des Premières Nations de 2011, selon laquelle il faudra réaliser des investissements de 4,7 milliards de dollars dans les 10 prochaines années afin de satisfaire aux normes actuelles et de tenir compte de la croissance démographique prévue.

Cela est contenu dans l'Évaluation nationale des systèmes d'aqueduc et d'égout des Premières Nations de 2011. C'est de là qu'est extraite l'information.

Le sénateur Moore : Quand vous avez rencontré les ministres, êtes-vous entrés dans le détail, avez-vous commencé à parler de certains de ces besoins particuliers?

Mme Letemplier : Non, mais nous pouvons nous estimer chanceux d'avoir pu les accueillir pendant 45 minutes.

Le sénateur Moore : D'autres réunions sont-elles prévues entre votre conseil et la ministre Bennett?

Mme Letemplier : Oui, nous aurons d'autres rencontres. Nous avons recommandé qu'un employé de son cabinet assiste désormais à toutes nos réunions.

Le sénateur Moore : Quelqu'un assurerait donc la liaison entre votre conseil et le cabinet de la ministre?

Mme Letemplier : Oui.

Le sénateur Moore : Comment allez-vous adresser votre demande à la ministre? Comment allez-vous vous y prendre? Vous ne voulez certainement pas passer par quelqu'un assurant la liaison; vous voulez pouvoir regarder la ministre dans les yeux, n'est-ce pas?

Mme Letemplier : Oui, mais je ne doute pas que nous aurons une bonne relation avec la ministre dans l'avenir.

Le vice-président : Avant de passer à la seconde série de questions, je dois vous dire une chose. J'ai été interpelé par votre recommandation qui est de créer un mécanisme destiné à permettre aux Autochtones de se tourner vers l'Administration financière des Premières Nations pour avoir accès à des capitaux — le conseil étant une option de financement supplémentaire pour les gouvernements autochtones dans le Nord. C'est ce qui est écrit à la page 21 de votre rapport.

Notre comité a examiné la situation de l'Administration financière des Premières Nations et a eu plusieurs réunions formelles et informelles avec le Conseil de gestion financière des Premières Nations. J'ai lu dans votre rapport que ce mécanisme qui, selon nous, a donné d'excellents résultats, n'est actuellement pas accessible aux Premières Nations autonomes, pas plus qu'aux gouvernements inuits et métis.

Si j'ai bien compris, vos membres ont l'impression que le modèle des Premières Nations est valable, mais qu'il ne va pas suffisamment loin parce qu'il exclut une partie importante des peuples autochtones et des Premières Nations, y compris les signataires d'ententes de revendication territoriale globale dans les régions où nous allons conduire notre étude, à commencer par le Nunatsiavut, le Nunavik, le Nunavut et les Territoires du Nord-Ouest?

Dois-je comprendre que, pour vous, ce modèle fonctionne pour les Premières Nations et qu'il devrait fonctionner pour les autres peuples autochtones?

Mme Letemplier : Dans l'avenir, nous allons essayer d'appliquer ce modèle.

Je ne suis pas experte dans le dossier des Premières Nations. Après mon arrivée au conseil, il y a un an et demi, j'ai tout de suite plongé dans le rapport sur les infrastructures dans le Nord qui a occupé l'essentiel de mon temps. Je suis au courant de la situation des Premières Nations et des Métis et j'apporte l'aide dont je suis capable dans la limite de mes connaissances, mais je ne suis pas la mieux placée pour répondre à des questions sur les Premières Nations et les Métis.

Je fais ma part au conseil, mais d'autres que moi seraient mieux en mesure de vous répondre dans le dossier des Premières Nations.

Et puis, depuis que je siège au conseil, je veille à ce que celui-ci soit conscient de la nécessité d'accorder la même importance aux besoins des Inuits qu'à ceux des Premières Nations ou des Métis. À mes yeux, nous sommes tous égaux. Ce qui est bon pour les uns est bon pour les autres.

Le vice-président : Voyant que personne d'autre ne semble vouloir poser de questions, je vais mettre un terme à cette séance. Avant cela, permettez-moi de vous dire que j'ai été très impressionné par ce rapport exhaustif qui renferme des recommandations particulièrement valables sur la façon de régler un enjeu sur lequel doit porter notre étude. Nous allons nous intéresser aux besoins de base que vous avez évoqués, à la question du surpeuplement et de l'entretien des infrastructures, mais je ne doute pas que nous allons devoir, comme ce fut le cas pour notre étude sur le logement des Premières Nations dans les réserves, examiner le manque d'infrastructures. Votre rapport répond fort bien à cette question et je répète qu'il arrive à point nommé pour nous et, espérons-le aussi, pour le nouveau gouvernement.

La sénatrice Beyak : Je vous ai entendu préciser que votre entreprise a fabriqué la plupart des cuves à mazout actuellement utilisées.

Mme Letemplier : Principalement dans le territoire du Nunatsiavut.

La sénatrice Beyak : Tout à l'heure, vous avez parlé de sources d'énergie propre, fiables. Il existe maintenant la technologie du diesel propre, mais peut-elle fonctionner dans votre cas? Peut-on miser sur l'énergie éolienne? Sur l'énergie solaire? Qui ont été vos interlocuteurs à ce propos et ces formules sont-elles envisageables?

Mme Letemplier : Nous avons parlé de certaines technologies d'avenir, parce que le gazole appartient au passé. On espère s'en débarrasser, n'est-ce pas? Le conseil a bénéficié d'exposés et effectué ses propres études. Nous pourrions tout à fait nous intéresser à l'énergie éolienne. Les options ne manquent pas.

Nous sommes ouverts à tout ce que nous considérerons comme étant une amélioration pour grand nombre de nos collectivités. Nous choisirons bien sûr ce qui pourrait nous apporter les meilleurs résultats.

La sénatrice Beyak : Par quel moyen le gazole est-il livré?

Mme Letemplier : Il arrive par navire et il est ensuite pompé dans les cuves.

La sénatrice Beyak : Merci, monsieur le président.

Le vice-président : Encore une fois, merci beaucoup. Je suis sûr que les membres du comité pourront trouver des trésors de connaissances sur votre site web dans lesquels ils pourront puiser pour contribuer à notre étude.

Nous espérons que vos recommandations seront retenues et mises en œuvre parce que je les crois essentielles à la réalisation de progrès dans la région que nous étudions sur le plan du logement. Sur ce, merci beaucoup.

Mme Letemplier : Merci.

(La séance est levée.)

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