Délibérations du Comité sénatorial permanent des
Peuples autochtones
Fascicule no 28 - Témoignages du 1er novembre 2017
OTTAWA, le mercredi 1er novembre 2017
Le Comité sénatorial permanent des peuples autochtones se réunit aujourd’hui, à 18 h 47, pour étudier la réponse du gouvernement au cinquième rapport du Comité sénatorial permanent des peuples autochtones intitulé Le logement dans l'Inuit Nunangat : Nous pouvons faire mieux!
[Traduction]
La sénatrice Dyck : Avant de commencer la séance, chers collègues, étant donné que la motion du 7 décembre 2016 au sujet de la composition du comité a expiré hier, le 31 octobre, je vous demande le consentement de présider la séance d’aujourd’hui, qui a pour objet d’entendre les témoignages. Le consentement m’est-il accordé?
Des voix : Oui.
La sénatrice Dyck : Merci, mesdames et messieurs les sénateurs.
Bonsoir. Je remercie les sénateurs et les membres du public qui suivent cette séance du Comité sénatorial permanent des peuples autochtones, que ce soit en personne ou sur le Web.
Dans un esprit de réconciliation, je tiens à souligner que nous nous réunissons sur le territoire ancestral non cédé des peuples algonquins du Canada. Je m’appelle Lillian Dyck. Je suis une sénatrice de la Saskatchewan, et j’ai le privilège de présider le comité ce soir.
J’invite maintenant mes collègues sénateurs à se présenter, en commençant à ma droite.
Le sénateur Tannas : Scott Tannas, Alberta.
Le sénateur Doyle : Norman Doyle, Terre-Neuve-et-Labrador.
La sénatrice Bovey : Pat Bovey, Manitoba, et je ne suis pas membre du comité.
Le sénateur Enverga : Tobias Enverga, Ontario, et je suis membre du comité.
[Français]
La sénatrice Dupuis : Renée Dupuis, les Laurentides, au Québec.
Le sénateur Brazeau : Patrick Brazeau, de la belle province de Québec.
[Traduction]
Le sénateur Sinclair : Murray Sinclair, Manitoba.
Le sénateur Watt : Charlie Watt, Nunavik.
La sénatrice Lovelace Nicholas : Sénatrice Lovelace Nicholas, Nouveau-Brunswick.
La sénatrice Dyck : Merci, sénateurs.
Aujourd’hui, nous prenons du recul par rapport à notre étude en cours et nous revenons à notre étude précédente sur le logement dans le Nord. Vous vous rappellerez que, le 1er mars 2017, nous avons déposé notre rapport intitulé Le logement dans l’Inuit Nunangat : Nous pouvons faire mieux!, qui comportait 13 recommandations, et que nous avons reçu une réponse du gouvernement le 19 juillet suivant.
Aujourd’hui, nous accueillons avec joie l’honorable Jean-Yves Duclos, ministre de la Famille, des Enfants et du Développement social, ainsi que l’honorable Jane Philpott, ministre des Services aux Autochtones, pour discuter de ce rapport. Après votre exposé, madame et monsieur les ministres, nous passerons aux questions des sénateurs. Madame Philpott, je pense que vous avez l’intention de prendre la parole en premier.
[Français]
L'honorable Jane Philpott, C.P., députée, ministre des Services aux Autochtones : Bonjour à tous. Madame la présidente, honorables sénateurs, je vous remercie de nous accueillir aujourd’hui, le ministre de la Famille, des Enfants et du Développement social et moi, pour discuter du rapport de votre comité sur le logement dans le Nord.
[Traduction]
C’est un plaisir de me joindre à mon collègue ce soir. Je souligne, comme vous, honorables sénateurs, que nous nous réunissons sur le territoire ancestral des Algonquins.
Je tiens à remercier le comité d’avoir préparé le rapport et de s’être penché sur cet enjeu important. À titre de ministre des Services aux Autochtones, je suis heureuse que le gouvernement appuie les recommandations du rapport, comme l’indique la réponse du gouvernement présentée en juillet 2017.
Comme vous le savez, nous demeurons résolus à collaborer avec les Autochtones ainsi qu’avec les partenaires provinciaux et territoriaux pour veiller à ce que tous les Canadiens, y compris les Inuits qui habitent dans le Nord canadien, aient accès à un logement adéquat, sécuritaire et abordable.
Le titre du rapport du comité est tellement important. Vous l’avez intitulé Le logement dans l’Inuit Nunangat : Nous pouvons faire mieux! Non seulement nous pouvons faire mieux, mais nous devons faire mieux.
Le rapport indique que :
Dans l’ensemble de leurs territoires ancestraux, les Inuits font face à une grave crise du logement qui menace leur santé et leur sécurité.
Il note la pénurie de logements criante, la piètre qualité des logements, le surpeuplement et l’itinérance cachée.
Comme vous l’avez peut-être remarqué dans les chiffres du plus récent recensement, en 2016, plus de 40 p. 100 de la population inuite vivait dans un logement surpeuplé, comparativement à seulement 6 p. 100 de la population canadienne totale. Ce pourcentage est encore plus élevé dans l’Inuit Nunangat, où un peu plus de la moitié de la population, soit 51,7 p. 100, vivait dans un logement surpeuplé.
Plus de 26 p. 100 de la population inuite vivait dans un logement surpeuplé nécessitant des réparations majeures. Au Nunavut et au Nunatsiavut, plus de 30 p. 100 de la population vivait dans un logement nécessitant des réparations majeures.
Au Nunavik seulement, plus de 1 000 logements sont nécessaires pour combler la pénurie de logements adéquats. Ceux d’entre vous qui connaissent la région savent que bien souvent, jusqu’à 15 personnes vivent dans une petite maison de trois chambres à coucher et un bon nombre de ces maisons nécessitent des réparations majeures.
Comme le sénateur du Nunavut le sait, les chiffres sont encore plus élevés au Nunavut. On estime qu’environ 3 000 logements sont nécessaires pour combler la pénurie de logements entre le Nunavut et le reste du Canada.
[Français]
L’environnement difficile du Nord, les coûts de construction élevés, la courte saison d’expédition et de construction ainsi que la croissance rapide de la population ont contribué à l’important surpeuplement et au nombre de logements insuffisant.
[Traduction]
Selon Statistique Canada, la population inuite de l’Inuit Nunangat continue de croître plus rapidement que la moyenne canadienne, et cette croissance de la population, comme vous le comprendrez, exerce une pression sur une situation en matière de logement déjà préoccupante.
Tel qu’indiqué dans votre rapport, la pénurie croissante et constante de logements dans le Nord n’est rien de moins qu’une urgence de santé publique. Je suis médecin et je sais, comme vous d’ailleurs, que le surpeuplement est lié à de nombreux et graves problèmes de santé ainsi qu’à une qualité de vie inférieure. Par exemple, nous savons que les logements inadéquats — surpeuplement et maisons mal ventilées — peuvent entraîner des taux élevés de maladies respiratoires, notamment.
Je vais vous parler plus spécifiquement du problème de la tuberculose. Nous savons que les cas de tuberculose chez les Inuits sont 270 fois plus fréquents que chez la population canadienne non autochtone. Des enfants et des adultes meurent, au Canada, d’une maladie infectieuse curable — en 2017. Ces chiffres alarmants sont le résultat du surpeuplement et de plusieurs autres facteurs, par exemple, de la pénurie de personnel infirmier, des barrières linguistiques, des évacuations médicales, des retards attribuables aux intempéries, des diagnostics différés et de bien d’autres encore. Cette épidémie qui persiste chez les Inuits du Canada depuis plus d’un siècle est inacceptable et le problème est intrinsèquement lié à la pénurie de logements.
Le logement est un besoin fondamental et est à la base de collectivités dynamiques et saines. Avoir accès à un logement approprié, adéquat et abordable est essentiel pour améliorer les résultats en santé ainsi que pour être protégé de la violence. Nous savons tous qu’un domicile est essentiel pour appuyer un environnement d’apprentissage positif à l’intention des enfants et des jeunes.
[Français]
Régler la crise du logement dans le Nord canadien est une priorité urgente, une priorité que notre gouvernement prend très au sérieux.
[Traduction]
Trois régions inuites ont reçu 80 millions de dollars jusqu’à maintenant en fonds alloués au logement dans le budget de 2016, sous la forme d’un financement direct aux gouvernements et aux organisations signataires d’accords sur les revendications territoriales, pour répondre aux besoins en logement dans ces régions sur une période de deux ans. Ce financement répond directement à la première recommandation du rapport du Sénat et respecte et renforce le partenariat entre l’État et les Inuits. Plus précisément, pour cette désignation, le Nunavik, au Québec, a reçu 50 millions de dollars; le Nunatsiavut, à Terre-Neuve-et-Labrador, reçoit 15 millions de dollars; enfin, la région désignée des Inuvialuit, dans les Territoires du Nord-Ouest, reçoit 15 millions de dollars.
Je suis ravie de vous signaler qu’il y a de nombreux exemples de la façon dont ce financement change réellement les choses. Au Nunavik, environ 144 maisons seront construites. Au Nunatsiavut, je peux vous parler de complexes à logements multiples qui sont en construction et qui logeront, par exemple, des parents dont les enfants auraient autrement été pris en charge parce qu’ils n’avaient pas de logement convenable. Je suis ravie de dire que lors d’une visite récente à Nain, au Labrador, j’ai eu la chance de voir l’un de ces magnifiques complexes à logements multiples. Cela s’ajoute aux nouvelles maisons qui ont été construites au Nunatsiavut en 2016 et en 2017, et aux neuf autres maisons qui le seront au cours du prochain exercice.
Je devrais préciser aussi que le budget de 2016 octroie 97 millions de dollars sur deux ans aux territoires par l’intermédiaire de l’initiative Investissement dans le logement abordable de la Société canadienne d’hypothèques et de logement pour répondre aux besoins urgents en logement dans les collectivités nordiques. Mon collègue va également parler de cela.
Je tiens aussi à souligner qu’aider les collectivités à s’adapter aux changements climatiques est essentiel pour garantir leur durabilité. À cette fin, dans son budget de 2016, le gouvernement a annoncé l’octroi de 130 millions de dollars sur cinq ans pour l’adaptation aux changements climatiques. Cet argent va à sept ministères et organismes différents, et servira à des choses comme améliorer la base scientifique pour éclairer la prise de décisions; protéger la santé et le bien-être des Canadiens; renforcer la résilience dans le Nord et dans les collectivités autochtones; accroître la compétitivité des principaux secteurs économiques.
Ces programmes qui relèvent du Projet d’adaptation aux changements climatiques ont été divisés en deux parties, entre le Nord et le Sud, afin de souligner l’importance des programmes propres au Nord.
Les coûts de fonctionnement des maisons dans le Nord, comme vous le savez peut-être, sont extrêmement élevés. Environ 72 des 99 collectivités du Yukon, des Territoires du Nord-Ouest, du Nunavut, du Nunavik et du Nunatsiavut dépendent presque exclusivement du diesel comme source d’énergie. Nous devons trouver des solutions énergétiques plus abordables et respectueuses de l’environnement pour les domiciles dans le Nord. Je suis ravie de vous dire que j’ai été très impressionnée par nos conversations avec des dirigeants inuits qui ont d’excellentes idées sur les façons dont ils pensent pouvoir apporter certaines mesures d’adaptation efficaces sur le plan de l’énergie.
Pour compenser les coûts élevés de fonctionnement des domiciles dans le Nord, le gouvernement s’est engagé, dans son budget de 2016, à verser 10,7 millions de dollars sur deux ans pour la mise en œuvre de projets d’énergie renouvelable dans les collectivités non reliées au réseau qui dépendent du diesel et d’autres carburants fossiles pour produire de la chaleur et de l’électricité.
Je suis sûre que vous trouverez aussi encourageant d’apprendre que ces investissements ont également pour effet de créer des emplois et de développer les compétences.
[Français]
Grâce au budget de 2017, notre gouvernement a fait des investissements additionnels pour répondre aux besoins accrus en logement dans les collectivités nordiques et autochtones, et pour compenser les coûts de fonctionnement plus élevés de leurs domiciles.
[Traduction]
Je vais vous donner des précisions au sujet du budget de 2017 qui prévoit l’investissement, sur 11 ans, de 300 millions de dollars dans le logement dans le Nord, de 225 millions de dollars dans le logement des Autochtones dans les régions urbaines et rurales et de 4 milliards de dollars pour appuyer l’infrastructure dans les collectivités autochtones, notamment le logement.
Le rapport du comité recommande que le gouvernement fédéral élabore une stratégie en matière de logement dans l’Inuit Nunangat et que toute solution pour régler la crise du logement doive impliquer directement les Inuits vivent dans ces conditions tous les jours et qui les comprennent. Il est essentiel que ce travail soit réalisé en partenariat complet avec les groupes autochtones, les gouvernements territoriaux et provinciaux et autres intervenants; d’ailleurs, j’ai déjà rencontré de nombreux partenaires clés. Une partie de ce travail a été réalisée dans le cadre des discussions au Comité de partenariat entre les Inuits et la Couronne et au moyen de la Déclaration de l’Inuit Nunangat sur le partenariat entre les Inuits et la Couronne, qui a été signée en février dernier. Cette entente prévoit que les deux parties travaillent ensemble pour élaborer conjointement une stratégie de logement qui répondra mieux aux besoins des Inuits dans l’Inuit Nunangat.
[Français]
Nous devons faire mieux. Le premier ministre a indiqué clairement, dans ses lettres de mandat à tous les ministres, qu’il est résolu à renouveler la relation entre la Couronne et les peuples autochtones au Canada.
[Traduction]
Il s’agit, chers collègues, d’une obligation morale. À titre de ministre des Services aux Autochtones, ma lettre de mandat cite le logement comme l’une de mes priorités. Le premier ministre s’attend à ce que je, et je cite :
Veille à la mise à exécution des importants montants investis dans les services aux Autochtones dans le cadre du budget de 2016 et du budget de 2017, notamment la construction et la réparation de logements.
Je prends cette responsabilité très au sérieux et j’admets qu’il y a énormément de travail à faire. Je suis persuadée que tous les Canadiens sont à l’origine des objectifs de notre gouvernement et ces objectifs visent à faire une différence véritable et positive dans les vies des Autochtones du Canada.
Nous devons agir maintenant. Nous savons à quel point ce sujet est important. II est important, car un nombre fulgurant d’enfants inuits meurent de la tuberculose en 2017. En 2017, des familles inuites vivent dans des logements surpeuplés et insalubres qui influent énormément sur leur qualité de vie. Le statu quo n’est pas une option.
Notre gouvernement est déterminé. Nous sommes fermement résolus à assurer la justice et l’équité pour tous les Canadiens, y compris les Autochtones au Canada. Nous continuerons notre travail crucial de faire en sorte que toute la population dans le besoin dans l’Inuit Nunangat ait accès à un logement sécuritaire, adéquat et abordable, dans l’esprit de partenariat, de collaboration et de réconciliation.
Je cède maintenant la parole au ministre Duclos, et nous répondrons avec plaisir à vos questions par la suite.
Merci. Chi-Meegwetch.
[Français]
L'honorable Jean-Yves Duclos, C.P., député, ministre de la Famille, des Enfants et du Développement social : Merci, madame la présidente. Je suis heureux d’être ici avec ma collègue, la ministre des Services aux Autochtones, Jane Philpott, pour présenter la réponse de notre gouvernement au rapport du comité sur le logement dans l’Inuit Nunangat. Je tiens à rappeler que nous nous rencontrons, aujourd’hui, sur le territoire traditionnel de la nation algonquine.
J’aimerais aussi souligner que je suis en compagnie de Charlie MacArthur et de Michel Tremblay, de la Société canadienne d’hypothèques et de logement.
Je voudrais débuter en saluant le travail que le comité a accompli relativement à cette importante question et nous appuyons, Mme Philpott et moi, dans une large mesure, les recommandations formulées dans votre rapport.
[Traduction]
Notre engagement à prendre des mesures pour améliorer le logement dans l’Inuit Nunangat repose sur deux principes fondamentaux. Tout d’abord, comme l’a mentionné le premier ministre, il n’y a pas de relation plus importante pour le Canada que celle qu’il entretient avec les peuples autochtones. La ministre Philpott en a déjà parlé dans son allocution. En second lieu, notre gouvernement est conscient du fait que le logement sûr, abordable et accessible est l’élément essentiel qui permet d’établir des collectivités durables et inclusives et d’offrir à toutes les familles canadiennes une chance réelle et équitable de réussir.
Un chez-soi, c’est bien plus qu’un simple toit. C’est un refuge et aussi un tremplin. C’est un endroit où les familles peuvent prospérer, où les gens trouvent la stabilité, où ils se sentent en sécurité, et où ils peuvent avoir confiance en leur avenir et l’avenir de leurs enfants. C’est un endroit où les enfants peuvent apprendre et s’épanouir, où les traditions sont transmises d’une génération à l’autre et où les aînés peuvent vieillir et vivre dans la dignité.
Nous sommes conscients du fait que de nombreux Canadiens d’un océan à l’autre ont de la difficulté à trouver des logements adéquats et abordables et nous savons que le problème, comme vous l’avez entendu, est particulièrement marqué et complexe dans le Nord et au sein des communautés inuites, la région présentant des défis particuliers qui lui sont propres. Nous sommes résolus à améliorer les résultats et à changer les choses pour tous les Canadiens.
[Français]
C’est la raison pour laquelle les budgets de 2016 et de 2017 ont injecté près de 13 millions de dollars à l’Initiative de stages en habitation pour les jeunes des Premières Nations et les jeunes Inuits.
Je suis heureux d’annoncer que les investissements effectués dans le cadre du budget de 2016 ont permis la création de 692 stages pour les jeunes Autochtones, dont 79 dans le Nord. En outre, les investissements prévus dans le budget de 2017 devraient créer 565 stages supplémentaires.
L’Initiative de stages en habitation pour les jeunes des Premières Nations et les jeunes Inuits a déjà des répercussions importantes dans les communautés du Nord. Dans la communauté de Naujaat, au Nunavut, six jeunes adultes ont pu acquérir une expérience de travail enrichissante et suivre une formation en cours d’emploi dans le cadre de cette initiative. L’expérience acquise grâce à ces stages a même permis à deux d’entre eux d’obtenir un emploi dans une entreprise de construction locale et de participer à la construction d’ensembles d’habitation de 10 logements dans leur communauté.
[Traduction]
Les communautés nordiques profitent également du doublement de l’investissement dans le logement abordable, annoncé dans le budget de 2016. Grâce aux investissements des gouvernements fédéral et territoriaux, huit nouveaux logements destinés à des ménages à faible revenu ont été inaugurés en mai, à Dawson, au Yukon. Ces logements construits localement et appartenant à la communauté contribuent à combler les besoins en matière de logement locatif abordable dans le Nord.
Notre détermination à améliorer les résultats est également la raison pour laquelle notre gouvernement met au point pour la première fois une Stratégie nationale sur le logement, laquelle prévoit de nouvelles initiatives en matière de logement qui regrouperont de multiples efforts au sein d’une approche pangouvernementale cohérente et intégrée. Notre objectif est beaucoup plus vaste que le simple fait de construire plus de logements. Nous souhaitons que nos investissements permettent d’améliorer les résultats sur les plans social, économique et environnemental.
[Français]
Grâce à la Stratégie nationale sur le logement, le gouvernement fédéral recommencera à exercer un leadership fort et fera en sorte d’améliorer les résultats pour tous les Canadiens. Nous mettrons l’accent sur les populations les plus vulnérables, collaborerons de manière novatrice avec plus de partenaires, et réduirons l’itinérance, entre autres bienfaits.
Comme vous le savez, nous nous sommes engagés à offrir un financement à long terme de plus de 11 milliards de dollars pour faire en sorte que les Canadiens aient accès à des logements sûrs, qui répondent à leurs besoins et qu’ils aient les moyens de se payer. Le budget de 2017 a aussi prévu un financement à long terme de 4 milliards de dollars pour l’infrastructure, comme le logement, dans nos communautés autochtones.
Ces investissements viennent s’ajouter à ceux annoncés par notre gouvernement dans le budget de 2016 qui profitent déjà aux familles du Nord et aux familles inuites.
Cependant, il est évident que nous devons faire plus. Dans le cadre de la Stratégie nationale sur le logement, des investissements additionnels dans le logement seront effectués dans toutes les régions du Nord. Ces engagements en matière de financement ont été soulignés dans notre réponse à votre rapport, et de plus amples détails seront annoncés bientôt.
[Traduction]
Notre réponse décrit également les mesures particulières que nous prenons ou que nous allons prendre en réponse à chacune des recommandations du comité dans quatre principaux domaines : concevoir de nouvelles solutions pour le logement dans le Nord, y compris un financement prévisible et à long terme; soutenir une variété d’options en matière de logement dans l’Inuit Nunangat; encourager l’innovation, la recherche et la technologie à l’appui de la construction de logements durables; enfin, supprimer les obstacles afin d’améliorer les résultats en matière de logement.
Comme l’a mentionné la ministre Philpott, la SCHL continue également de soutenir son ministère pour ce qui est de collaborer avec des partenaires autochtones aux fins de l’élaboration d’initiatives distinctes en matière de logement pour les Premières Nations, les Métis et les Inuits.
Notre objectif est de trouver des solutions à long terme qui amélioreront les résultats au titre du logement et feront en sorte que les Autochtones exerceront un contrôle accru en matière d’habitation.
[Français]
Je tiens à assurer encore une fois que nous sommes déterminés à collaborer avec tous nos partenaires autochtones, provinciaux et territoriaux, pour faire en sorte que les familles inuites, de même que tous les Canadiens, aient accès à des logements adéquats et abordables.
Cela conclut mes propos. Ma collègue, la ministre Philpott, et moi serons enchantés de répondre à vos questions.
Merci. Qujannamiik.
[Traduction]
La sénatrice Dyck : Merci aux ministres pour leurs rapports. Nous cédons maintenant la parole aux sénateurs.
Le sénateur Tannas : Merci, madame et monsieur les ministres, de votre présence ce soir. Vous avez parlé d’un retard de 3 000 unités de logement dans le Nord. Cette étude était le deuxième volet de notre étude sur le logement. Le premier volet ciblait le Sud, et nous savons que le problème est 10 fois plus important dans les communautés des Premières Nations au sud du 60e parallèle. C’est un problème dont la facture s’élève à 10 milliards de dollars et avec lequel ces communautés cohabitent tous les jours. Loin de moi l’idée de manquer de respect, mais les chiffres qui ont été présentés semblent très élevés, mais vous avez aussi indiqué que la population augmente très rapidement.
Madame Philpott, vous êtes-vous prononcée sur la façon de gérer ce dossier pour nous permettre d’avoir une certaine idée à savoir si nous progressons ou si nous reculons? Nous attaquons-nous à ce retard et, le cas échéant, de combien a-t-il diminué? Je viens du milieu des affaires et ce qui est mesuré est géré.
Je me demande à quel point il serait logique de revenir dans un an et de nous dire si l’arriéré est passé à 2 900 ou à 3 100, et si vous seriez disposée à le faire. Avec tous les projets dont vous nous avez parlé, je doute que nous parvenions à nous en sortir, alors nous n’arriverons jamais à combler notre retard pour les 3 000.
Comme vous prenez les rênes de ce ministère, je suis curieux de savoir si vous envisagez de commencer à claquer du fouet pour que les choses bougent dans ce dossier.
Mme Philpott : Je vais commencer et le ministre Duclos voudra peut-être renchérir.
C’est une excellente question et je vous remercie de l’avoir posée. Vous avez tout à fait raison; continuer comme d’habitude, même si c’est mieux que d’habitude, ne nous permettra pas de nous attaquer à l’écart. Vous avez parlé d’un écart de 10 milliards de dollars; vous avez été généreux, en fait. J’ai entendu des chiffres beaucoup plus élevés quand il est question de ce qu’il faudrait pour combler cet écart.
Vous avez raison. Nous devons mesurer et je pense qu’une mesure a été établie ces dernières années d’une façon peut-être meilleure que par le passé; nous pouvons ainsi parler de 144 unités ici et de tant d’unités là, c’est une contribution importante, mais cela ne permettra pas de combler l’écart.
Je dirais que certains facteurs contribuent à la réussite et qu’il faudra jeter un regard totalement différent sur les mesures à prendre pour éliminer les écarts en matière de logement. Une partie vient du financement à long terme et certaines mesures ont été annoncées à ce chapitre — l’Inuit Nunangat est l’un des meilleurs exemples pour illustrer la raison pour laquelle il est nécessaire de prévoir du financement à long terme. Si vous n’êtes pas certain d’avoir du financement l’année suivante, vous n’irez pas de l’avant avec une livraison de marchandises. Il est impératif de mettre en place un mécanisme de financement à long terme.
Cela dépend énormément aussi de notre capacité à trouver des modèles de financement novateurs, d’envisager les modèles de propriété sous un angle différent et de s’arrêter pour songer à quoi ressemblera une nouvelle relation financière avec les peuples autochtones et comment nous pouvons faire preuve de beaucoup plus de créativité dans la conception technique des bâtiments. En fait, les peuples autochtones nous disent qu’il ne faudrait pas créer des programmes pour aider à livrer des maisons, mais bien favoriser le développement des institutions, et on entend que les institutions qui s’occupent de l’infrastructure des Premières Nations, des Inuits et des Métis se pencheront vraiment sur des modèles beaucoup plus créatifs.
Je suis persuadée que, en tant qu’homme d’affaires, vous avez beaucoup de bonnes idées à ajouter.
Le sénateur Tannas : En fait, dans notre rapport sur le logement des Premières Nations, nous avons spécifiquement parlé de cette nécessité. Plus le financement est pérenne, plus les institutions locales sont en mesure d’emprunter de leur côté sachant qu’elles pourront rembourser. Comme vous le dites, il y a probablement d’autres options. Il y a notamment le concept de location et paiements par les utilisateurs qui sera mis au point avec le temps. Vous avez abordé la solution, et il en est peut-être question dans votre cahier d’information que vous pourrez consulter ou alors les membres de votre équipe pourraient vous mettre au courant des recommandations que nous avons formulées en nous inspirant de modèles de financement uniques sur lesquels nous sommes tombés en cherchant des idées venues d’ailleurs.
M. Duclos : La ministre Philpott a déjà souligné à quel point nous sommes tous conscients de l’immense écart qui existe non seulement entre le Nord et le Sud, mais aussi entre l’état actuel du logement dans le Nord et les besoins des communautés et des familles nordiques et inuites.
Il y a deux grandes choses à faire pour commencer à combler cet écart et la première concerne les ressources. Les ressources sont importantes. Je ne veux certainement pas m’engager dans un débat partisan, mais pour des raisons de transparence je tiens à signaler qu’entre 2015 et 2017, les transferts aux régions du Nord ont essentiellement été multipliés par cinq. C’est un signe du leadership renouvelé du gouvernement fédéral et du fait qu’il comprend mieux qu’il faut agir.
Cela dit, tout comme la ministre Philpott, j’ai eu le plaisir et le privilège de visiter le Nunatsiavut il y a quelques semaines et j’ai eu des discussions très intéressantes avec les dirigeants de l’organisme Inuit Tapirit Kanatami, l’ITK, et c’est exactement ce que nous disaient le président et les administrateurs. Il n’y a pas que les ressources qui importent; le type de relations que les Inuits ont avec le gouvernement fédéral et leur capacité d’utiliser les ressources fédérales pour renforcer leur autonomie et de faire une différence dans la vie de leurs communautés et de leurs familles sont tout aussi importants.
Ils savent très bien qu’ils n’auront pas la vie facile s’ils décident de régler les questions plus vastes que vous avez soulevées. Que devrions-nous faire? À long terme, comment pouvons-nous développer un secteur du logement inclusif, efficace et durable afin de mieux servir nos familles et nos collectivités?
Dans un contexte plus général, la SCHL a aussi réalisé des progrès considérables, si vous me permettez de parler de ce que fait la SCHL. Pour la toute première fois, en 2016, les trois régions inuites et le Nunavut ont bénéficié du soutien direct de la SCHL, plutôt que d’avoir à travailler avec les gouvernements provinciaux ou territoriaux. Depuis 2016, ils reçoivent des transferts directs leur permettant d’agir sur le terrain et d’utiliser le soutien du gouvernement fédéral de la façon la plus efficace possible.
Le sénateur Enverga : Merci pour vos exposés.
En fait, nous faisons partie de l’équipe qui est allée dans le Nord. Nous sommes allés aussi loin qu’Igloolik. Nous avons pu voir comment 10 membres d’une même famille vivent dans des logements à deux chambres à coucher. Certains logements sont dans un état de délabrement avancé. C’est ce que nous avons vu. Nous nous inquiétions beaucoup pour ces familles.
Ma question se rapproche davantage de celle posée par le sénateur Tannas. Vous nous avez dit qu’il y avait environ 4 000 logements à construire et que 144 logements avaient été construits jusqu’ici. Avez-vous un échéancier pour les travaux? À quel moment aura-t-on construit la moitié de ces 4 000 logements? À ce stade, je sais que nous avons beaucoup d’argent, mais à quel moment allons-nous faire une différence? Disons 2 000 logements. Est-ce qu’il y a un échéancier qui peut être envisagé?
M. Duclos : C’est une excellente question. Merci de me l’avoir posée. J’ai déjà identifié le problème. Les trois régions de l’Inuit Nunangat, soit le Nunatsiavut, l’Inuvialuit et le Nunavik, sont responsables de la rénovation des logements existants et de la construction de nouveaux logements. Pour ces raisons, ils optimisent l’utilisation des ressources, tout en gardant en tête que la rapidité d’exécution amène souvent une baisse de la qualité dans le secteur du logement. Nous savons tous que, dans le Nord, la construction et la rénovation demandent non seulement une bonne planification, mais aussi du temps. La planification et le temps sont des ressources importantes pour la livraison des logements bâtis grâce à l’argent des transferts. Travailler avec les collectivités du Nord demande plus de temps que de travailler dans le Sud du Canada, à cause des contraintes d’ordre climatiques et physiques auxquelles nous faisons face.
Nous aimerions tous que ces logements soient construits le plus rapidement possible. Cependant, puisque nous désirons renforcer la relation de la Couronne avec les Inuits et les organisations inuites en particulier, et que nous voulons construire des logements correctement, pour qu’ils durent longtemps, nous devons parfois être plus patients que nous le serions dans le Sud.
Le sénateur Enverga : Dans votre exposé, vous avez dit que vous aviez l’impression de vous fier davantage sur la population locale pour construire les logements. Est-ce que je me trompe? Il y a des gens qui ont vraiment besoin de ces logements. Pourquoi est-ce si long? Qui assume le rôle de leader ici? Vous n’avez qu’à leur dire qu’ils devraient construire des logements, puisqu’ils ont leur argent. Pouvons-nous leur parler ainsi? Est-ce que ce sont vraiment eux qui empirent le problème?
M. Duclos : C’est une question très intéressante. Encore une fois, nous ne devons pas perdre nos deux objectifs de vue. Si nous travaillons bien, ces deux objectifs seront complémentaires. Le premier objectif est d’augmenter et d’améliorer les conditions de vie et de logement des Inuits. Le deuxième est de renforcer la capacité des leaders inuits et des collectivités à prendre le contrôle de leur vie. Ces deux objectifs sont complémentaires.
Aller de l’avant en s’inspirant de notre passé colonialiste, où le gouvernement fédéral prenait le contrôle du logement et planifiait la construction des logements et les activités du domaine du logement, et mettre de côté les leaders inuits et les compétences en bâtiment de la région nuirait à notre relation. De plus, cela n’aiderait pas les Inuits à atteindre le niveau d’autonomie que nous souhaitons qu’ils atteignent à long terme.
Le sénateur Enverga : Je suis curieux. Ils veulent avoir ces logements, mais ils causent des délais. Allez-vous leur donner une échéance? Allez-vous leur dire que vous avez de l’argent et qu’ils vont devoir agir dans un certain laps de temps, faute de quoi vous garderez l’argent, puisqu’ils n’en ont pas besoin?
Mme Philpott : Dans une certaine mesure, je reprendrai les propos de M. Duclos. Nous continuerons à défendre l’approche voulant que les Autochtones soient responsables de la planification et de l’établissement des priorités, avec le soutien de notre gouvernement et d’autres intervenants, bien entendu, pour rendre la chose possible.
Vous alliez aborder le concept d’objectifs. Lorsque nous fixons le budget et que nous cherchons des ressources pour aider à la construction de logements, nous fixons un objectif très précis de logements qui peuvent être construits avec une certaine somme d’argent. Ce qui peut être difficile à faire, puisque le coût de construction d’un logement à Iqaluit n’est pas le même que celui d’un logement construit plus au sud.
Pour en venir à ce que vous disiez à propos de l’échéancier, nous devons revenir à la discussion que nous avons eue avec le sénateur Tannas, où nous avons dit que la méthode actuelle n’allait pas combler tout l’écart. Encore une fois, je vous rappelle le besoin urgent d’établir une nouvelle relation financière qui garantit que les Premières Nations, les Inuits et les Métis ont accès aux capitaux par le biais d’organismes comme l’Administration financière des Premières Nations, par exemple. Si nous devions payer notre logement en entier avant de pouvoir l’habiter, aucun d’entre nous ne serait propriétaire d’un logement. Je soupçonne que la plupart des gens présents ici ont dû obtenir un prêt hypothécaire à un moment ou l’autre de leur vie avant de pouvoir rêver à être propriétaire d’un logement. Nous devons trouver ces mécanismes et les appuyer pour que ces gens puissent contrôler leur vie comme tous les Canadiens souhaitent le faire — d’avoir accès aux capitaux et d’être en mesure de prévoir leur futur de cette façon. Si nous voulons vraiment combler le fossé du logement, nous devons appuyer la planification communautaire globale et les nouvelles instances financières afin de soutenir l’autodétermination.
Charlie MacArthur, premier vice-président, Activités régionales et Aide au logement, Société canadienne d’hypothèques et de logement : Je peux vous faire part du point de vue de la SCHL. Notre financement a un échéancier de deux ans. Nous travaillons avec le Nunavut pour mettre en œuvre le plan et nous travaillons de près avec eux pour nous assurer que les travaux soient faits. Nous recevons des rapports sur l’avancement des travaux sur une base continue. Nous travaillons avec les autres gouvernements territoriaux du Nord de la même façon.
L’atteinte des objectifs peut se faire de plusieurs façons. Ils ont le choix. Ils peuvent choisir d’ériger de nouvelles constructions ou décider qu’un certain secteur est prioritaire. Ils peuvent choisir de rénover ou encore d’ajouter aux logements sociaux et autres. Ils nous rendent compte sur une base continue des progrès réalisés en matière de dépenses et du nombre d’unités prises en charge.
Le sénateur Watt : J’aimerais poser une autre question, pour remettre les choses en perspective afin que nous sachions exactement de quoi il en retourne.
Quand vient le temps de se demander pourquoi ils sont incapables de le faire eux-mêmes, il faut d’abord trouver le point de départ de l’ingénierie. Où sont les techniciens sur le site? Où doivent-ils aller pour acheter les matériaux? Tous ces facteurs doivent être pris en compte. Je crois qu’ils sont importants, car en ce moment, les Inuits n’ont aucune formation en menuiserie ou en génie. Ils ne connaissent rien des codes des bâtiments. Si nous ne regardons pas ces questions sur un plan général, je ne crois pas que nous pouvons nous attendre à ce qu’ils deviennent immédiatement des experts en génie, en architecture ou toutes ces choses reliées au secteur de la construction. Je regrette, mais je ne crois pas que nous y arriverons.
J’aimerais aider mon collègue et parler du fait que l’ingénierie a lieu dans le Sud. La fabrication proprement dite se fait aussi au Sud. Quand vient le temps de construire des logements, il y a très peu de perspectives d’emplois pour les Inuits dans le Nord.
S’il y a une chose que les Inuits savent très bien faire, c’est construire des igloos, alors nous devrions modifier l’approche gouvernementale et regarder du côté des constructions qui ne demandent pas de bois ou de clous. Si nous étions en mesure d’utiliser les ressources naturelles disponibles, comme le sable, nous n’aurions qu’à exporter la finition intérieure et le ciment dans le Nord. Quand on y pense, nous pourrions réduire les coûts de manière draconienne, n’est-ce pas?
Mais il y a un ministère qui doit décider quel genre de bâtiment on construit au Canada. Peut-on construire un bâtiment rond? Non, je ne crois pas qu’il y ait de politique là-dessus. Ils peuvent construire seulement des bâtiments carrés. Si on s’éloigne des bâtiments carrés, il y a une possibilité. Comme mon ami l’a mentionné, cette question pourrait être réglée immédiatement, soit beaucoup plus rapidement que nous le faisons en ce moment.
Je croyais qu’il serait bon de porter ce sujet à votre attention. Peut-être que le ministère et la Société canadienne d’hypothèques et de logement pourraient se pencher là-dessus. Les décideurs, ces gens qui disent oui ou qui disent non, devraient aussi être informés. Oui, il y a une façon, mais nous ne l’utilisons pas.
La sénatrice Dyck : Est-ce que les ministres souhaitent répondre? Il y avait quelques questions. Quels programmes de formation avez-vous envisagés ou entamés? Avez-vous songé à des méthodes alternatives de construction qui profiteraient des ressources naturelles disponibles dans le Nord?
M. Duclos : Je peux parler de deux sujets. Ensuite j’inviterais peut-être mes collègues de la SCHL à parler du troisième.
Mon premier commentaire porte sur la formation. Dans mon exposé, j’ai parlé de l’initiative de stages en habitation pour les jeunes des Premières Nations et les jeunes Inuits. Il s’agit d’une importante initiative qui vise les mêmes objectifs que vous avez mentionnés, soit de faire en sorte que les Inuits soient en mesure de s’occuper de la construction et de la rénovation des logements afin de profiter du soutien renouvelé du gouvernement fédéral. Évidemment, il faudra un certain temps avant que les compétences et l’expérience des jeunes Inuits soient à la hauteur de vos attentes, mais cela viendra avec le temps.
Deuxièmement, il y a la capacité des acteurs locaux à s’assurer que les ouvriers locaux, et plus particulièrement les jeunes, profitent autant que possible des activités du domaine du logement qui sont appuyées et prévues pour l’avenir.
Finalement, il y a le degré de flexibilité dont le secteur du logement dans le Nord pourrait mériter et dont il pourrait avoir besoin. Je vais demander à mon collègue assis à ma droite de répondre.
Michel Tremblay, premier vice-président, Politiques, Recherche et Relations publiques, Société canadienne d’hypothèques et de logement : Bien sûr, la SCHL collabore et travaille avec les fournisseurs de logements du Nord pour tenter de trouver une nouvelle façon d’aborder la question du logement. Nous souhaitons que la construction soit plus écoénergétique, qu’elle varie les designs et utilise différents matériaux, en plus d’être adaptée à la culture, afin qu’elle réponde aux besoins des gens qui vont véritablement vivre dans ces logements.
Nous en avons eu des exemples dans chaque territoire. Nous avons des logements à Arviat, au Nunavut; à Inuvik; et à Dawson City, au Yukon. Nous avons aussi travaillé avec RNCan — je crois que c’était au Nunatsiavut — pour améliorer le rendement d’un immeuble résidentiel à logements multiples. Nous surveillons le rendement. Grâce à la Stratégie sur le logement, nous avons tenu des tables rondes d’experts et nous avons rencontré des gens qui ont du vécu. Nous poursuivons ces activités afin de recueillir de l’information. Nous étudions les pratiques exemplaires de l’Alaska et d’autres pays nordiques. Nous sommes certes ouverts à l’idée de repenser la conception.
Mme Philpott : Je peux ajouter, brièvement, à ce que nos collègues ont dit. Mais d’abord, je tenais aussi à vous féliciter, sénateur Watt, d’avoir lancé un nouveau comité de l’Arctique. Je ne sais pas à quelle étape vous en êtes, mais je crois qu’il s’agit d’un geste très judicieux. Je suis très heureuse de l’entendre. De toute évidence, vous allez grandement aider à régler ces problèmes.
Je voulais ajouter quelque chose à ce que notre collègue de la SCHL a dit à propos de la créativité et des logements adaptés à la culture, qui sont des enjeux très importants. Il fait référence à un immeuble de six logements, à Nain, que j’ai vu. Le design de l’immeuble a été réalisé dans le cadre du Prix Inspiration Arctique, un concours récompensant le design novateur organisé en collaboration avec une entreprise montréalaise. Il y a fort à faire dans ce domaine. Peut-être que certains d’entre vous ont pu voir un court reportage diffusé sur les ondes de la CBC ce matin montrant comment les universités et les cabinets d’architectes s’associent afin d’appuyer l’élaboration de plans mieux adaptés à la culture. Si vous rentrez à la maison à temps ce soir pour regarder le bulletin d’information de CBC, je crois qu’ils diffuseront un long reportage sur le design créatif des logements des peuples autochtones. Nous arriverons peut-être à la maison à temps pour le regarder.
Le sénateur Sinclair : Merci aux ministres et à leur équipe d’être ici. Dans ces rencontres, j’essaie toujours de devancer le sénateur Watt, car il ne manque jamais de poser toutes les questions auxquelles nous devons répondre en matière de problèmes des Inuits. Je tiens à le remercier pour les points qu’il a mis en évidence.
Je tiens aussi à souligner qu’en général, lorsqu’il est question des problèmes sociaux et des problèmes de logement dans le Nord, nous accordons trop d’importance au volet financier. C’est important, j’en conviens, mais nous nous concentrons trop sur l’argent en tant que solution potentielle, sans véritablement identifier nos objectifs.
J’ai entendu M. MacArthur dire que l’un des véritables problèmes sur lequel nous devons nous pencher est le nombre de logements que nous devons bâtir afin de répondre aux besoins des collectivités. Avez-vous réfléchi au nombre de logements que vous allez devoir bâtir, ou aider à bâtir, afin de répondre aux besoins en matière de logement des Inuits qui sont identifiés dans ce rapport?
M. Tremblay : Je vais commencer et Stephen pourra peut-être commenter ensuite.
Comme les deux ministres l’ont mentionné, nous travaillons conjointement à l’élaboration d’une stratégie en matière de logement propre aux Inuits, aux Métis et aux Premières Nations. Dans le cadre de ce travail, ils nous aident à identifier les besoins en matière de nouveaux logements et de rénovations, en plus d’essayer de nous donner des idées. Nous sollicitons leurs commentaires sur les meilleures façons de livrer ce genre de logements, de mettre en place les autorités inuites, et cetera, afin d’atteindre ce niveau. Nous vous appuyons. Peut-être que vous, Stephen, êtes mieux…
Stephen Van Dine, sous-ministre adjoint, Affaires du Nord, Affaires autochtones et du Nord Canada : Absolument. L’approche de partenariat est certes un élément central que nous envisageons pour essayer de résoudre ces problèmes.
Pour ajouter à ce que Mme Philpott a dit, je dirais que la question de l’argent est importante, mais il reste à savoir de quelle poche provient l’argent. Nous essayons d’atteindre le point où les occasions de générer de la richesse dans les collectivités créent d’autres options pour régler le problème. Cela devient une démarche multidimensionnelle de résolution de problème.
Comme vous le savez très bien, plusieurs autres collectivités dans d’autres régions du Canada jouissent d’un marché immobilier, comme elles l’appellent, dans lequel on retrouve des logements à prix faible et d’autres à prix élevés, de même qu’un grand choix de logements. Nous n’en sommes pas encore là dans plusieurs des collectivités du Nord, mais nous travaillons très fort pour répondre aux besoins critiques, afin de progresser par rapport à la vision holistique de marché, et pour avoir une collectivité saine et dynamique qui génère des solutions de logement pour sa propre collectivité.
Le sénateur Sinclair : Dans son exposé, le sénateur Watt a fait allusion à la nature des expériences de logement que les collectivités elles-mêmes ont vécues. Je voulais simplement y donner suite avec un commentaire, après quoi j’aurai une question.
Il me semble tristement ironique que, lorsque l’on pense à l’histoire du logement dans le Nord, plus particulièrement chez les Inuits, ceux-ci avaient développé des logements sur les plans culturel et environnemental qui répondaient parfaitement à leurs besoins. Puis, le gouvernement est arrivé et tout a changé. Le gouvernement les a pratiquement ruinés en les obligeant à s’établir à des endroits spécifiques et en mettant en œuvre d’autres pratiques impliquant des enfants, des pensionnats, et cetera. Donc, établir un partenariat avec ces collectivités et leurs dirigeants me semble tout à fait indiqué.
Dans le rapport déposé par le comité, nous avons formulé une suggestion très importante concernant les nouvelles technologies. Une section du rapport porte sur les exposés présentés au comité qui traitaient des nouvelles technologies pouvant aider à réduire les coûts de construction de logements dans le Nord, comparativement à la méthode actuelle.
Comme vous le savez, et j’ai pu le constater moi-même, le comité également, les logements construits dans le Nord sont souvent plus adaptés au Sud qu’au Nord. Si on pouvait trouver de nouvelles technologies qui les rendent mieux adaptés au climat nordique, ce serait vraiment intéressant.
Êtes-vous en mesure de me dire si le gouvernement du Canada envisage de lancer des projets de recherche sur de nouvelles technologies permettant de bâtir de meilleurs logements à moindre coût, ou d’aider les collectivités du Nord intéressées à le faire?
M. MacArthur : Je peux répondre. Deux choses : nous avons un programme de recherche et nous effectuons de la recherche dans le Nord. Nous sommes prêts à examiner les technologies qui pourraient faire l’affaire. Nous vérifions s’il y a des choses appropriées sur le plan culturel qui ont fonctionné. Des fois, l’innovation doit se tourner vers le passé et nous sommes prêts à le faire.
En plus de la recherche, le budget de 2016 prévoyait des crédits pour l’innovation. Une fois la recherche menée à bien, les résultats confirmés et le tout disponible, nous pourrions également intervenir et aider à voir si, dans les faits, cette innovation pourrait être utile aux collectivités et être reproduite.
Nous menons un assez grand nombre de recherches dans le Nord et l’adaptabilité culturelle est l’une des choses que nous examinons. À part de cela, nous pourrions envisager l’innovation. Il arrive que l’innovation ramène au-devant de la scène des choses qui ont marché. C’est quelque chose que nous pourrions faire pour soutenir les bonnes et riches idées et le reste, et courir le risque que ça marche.
Mme Philpott : J’ajouterais que j’ai fait référence, dans mes observations, aux ressources en matière d’adaptation au changement climatique. Je pense que vos arguments sont valables quant à l’expérience historique des Inuits dans le domaine du logement. Il est évident que les changements climatiques ont un impact profond sur leur vie. Une partie des sommes investies dans la recherche et l’innovation appuient leur capacité à s’adapter, étant donné les changements climatiques.
Les solutions proposées par les leaders inuits m’impressionnent. J’ai mentionné précédemment le nom de Duane, le président de la Société régionale inuvialuit. Il parle d’un nombre incroyable d’innovations quant à la façon dont ils pensent arriver à bâtir des maisons écoénergétiques. Nous devons fournir les ressources nécessaires à ce genre de personnes pour leur permettre de créer.
J’ai vécu en Afrique occidentale pendant 10 ans. J’avais l’eau courante chez moi et un truc qui permettait d’ouvrir le gaz pour faire circuler l’eau rapidement dans un tuyau qui chauffait l’eau instantanément sans trop consommer d’énergie. Duane dit qu’ils ont besoin exactement de ce genre de choses pour alimenter les maisons en eau chaude dans le Nord. Il est ridicule d’avoir des réservoirs d’eau chaude partout au pays. Avec ce genre de trucs novateurs qui permettent aux habitants d’utiliser l’énergie avec efficacité, des fenêtres à triple vitrage et autres choses du genre, Duane et son équipe sont prêts à embarquer. Il nous faut seulement les aider.
La sénatrice Raine : Je vous remercie d’être là. Nous réalisions cette étude il y a trois ans, donc il y a longtemps qu’on attend cela.
Nous avions parlé à Ressources naturelles Canada, qui était en train de concevoir un prototype de maison nordique à déploiement rapide. Vous en avez peut-être entendu parler. La construction de ce type de maison se ferait à un coût deux fois moindre qu’une maison typique sur place. Une telle maison peut être construite et assemblée de manière à être expédiée dans un conteneur. Nous avons un gros rattrapage à faire et cette option semblait offrir une solution rapide. Où en sommes-nous à ce sujet?
M. Van Dine : Je vous remercie, madame la sénatrice, de soulever la question. Nous sommes excités par ce projet. Mme Philpott occupe son poste depuis huit semaines et nous n’avons pas eu l’occasion de l’amener voir l’usine de Kanata, mais c’est une possibilité excitante. La maison est modulaire. Il est possible de construire un immeuble à deux ou quatre étages ou à configuration variable. Il est également possible d’y intégrer une unité de chauffage et d’y connecter l’eau potable et autres installations. C’est un produit excitant.
Comme toute innovation, ce sur quoi on peut tous se mettre d’accord, c’est qu’en région éloignée sous un climat nordique, il faut s’assurer que les produits sont fiables et prévisibles. Passer de la recherche à la distribution, en passant par la mise à l’essai et la commercialisation, ça prend du temps, mais cette innovation en particulier suscite pas mal d’intérêt. Je crois savoir que nos confrères de Parcs Canada ont l’intention de la mettre à l’essai dans quelques-uns des endroits éloignés où ils ont des installations eux aussi.
La sénatrice Raine : J’espérais que les essais seraient terminés, depuis le temps, et que ce serait prêt à démarrer.
M. Van Dine : Certains tests sont en cours. Je crois savoir que le principe de précaution veut que l’on commence par l’utiliser pour les établissements publics avant de le mettre à la disposition des constructeurs de maisons et de logements, mais le travail est en cours.
La sénatrice Raine : Il faut attaquer le problème du logement dans le Nord sur tous les fronts. On devra utiliser des maisons modulaires et des préfabriquées, tout ce genre de choses. Il y a urgence. On doit le mettre en place parce que ce que nous avons vu était difficile à supporter.
Le sénateur Patterson : Veuillez excuser mon retard. Il y avait une tempête à Iqaluit cet après-midi et je viens d’arriver.
J’aimerais remercier M. Duclos, ministre responsable de la Société canadienne d’hypothèques et de logement, d’avoir donné une réponse favorable à la recommandation du comité voulant que certaines régions reçoivent elles-mêmes du financement. La réponse a été rapide et a été la bonne, et je tiens à le souligner.
J’ai quatre questions à poser rapidement au ministre Duclos. Premièrement, vous nous avez intrigués quand vous avez parlé de la Stratégie nationale sur le logement et que vous avez affirmé qu’elle faisait suite à des recommandations clés de notre rapport et répondait notamment à un besoin crucial et qu’elle donnait suite à l’une des recommandations les plus importantes sans doute, soit le financement prévisible et à long terme. L’irrégularité du rythme de financement entraîne une grande paralysie et un dysfonctionnement des chantiers dans les territoires nordiques.
Le programme de construction dans le Nord l’année prochaine est en cours d’élaboration. Il est vraiment urgent d’apporter des changements à la stratégie concernant le Nord. Quand vous parlez du futur proche, pouvez-vous nous donner une idée de ce que ça veut dire?
À ce sujet également, la réponse de votre gouvernement parle de tenir un forum sur le logement dans le Nord en janvier 2018. Confirmez-vous que ce forum aura bien lieu? Est-ce que des membres du comité pourront être invités à y prendre part ou à y assister? Est-ce qu’un résumé des discussions sera publié? C’était ma deuxième question.
J’aimerais continuer rapidement à poser des questions.
La sénatrice Dyck : Il serait bon que vous vous arrêtiez là pour leur donner la possibilité de vous répondre.
Le sénateur Patterson : Bien.
M. Duclos : Vos questions sont très pertinentes. Je vais répondre aux deux premières et j’écouterai ensuite celles qui suivront.
En ce qui concerne la première où vous demandiez dans combien de temps, avant la fin de 2017, la Stratégie nationale sur le logement serait dévoilée, vous allez constater qu’elle représente une partie importante de la réponse tant aux besoins qu’aux conditions du Nord. En ce qui concerne la stratégie sur le logement respectueuse des particularismes, elle viendra plus tard parce qu’il faut travailler avec respect et efficacité avec les populations autochtones.
La deuxième question touchait aux fonds annoncés dans le budget de 2017 pour le logement dans le Nord. Le financement atteindra 300 millions de dollars étalés sur plus de 10 ans. La somme est répartie entre les trois territoires. En 2018, d’autres investissements auprès des collectivités autochtones représenteront une part importante des stratégies nationales sur le logement respectueuses des particularismes.
Le sénateur Patterson : Je vous ai posé une question sur le forum sur le logement prévu en janvier 2018 dont il est question dans la réponse du gouvernement. Je me demandais si c’était encore au programme.
Quant aux initiatives de la SCHL dont vous avez fait mention, il y a un Fonds d’innovation pour le logement locatif abordable de 200 millions de dollars récemment créé et un programme de prêts à faible coût d’une valeur de 2,5 millions de dollars. Est-ce que votre gouvernement a mis de côté une partie de ces sommes destinées à l’ensemble de la population canadienne, afin de financer spécifiquement le logement dans les régions de l’Inuit Nunangat? Si c’est le cas, pouvez-vous, aujourd’hui ou à une date ultérieure, faire part au comité des sommes en question?
M. Duclos : Ces deux initiatives sont offertes aux responsables du logement dans le Nord ou du logement autochtone et les collectivités intéressées peuvent soumettre une proposition. Elles s’ajoutent, comme je l’ai dit tout à l’heure, aux ressources et aux débouchés qui seront offerts à la nation métisse, aux Premières Nations et aux Inuits dans le cadre de la stratégie sur le logement respectueuse de leurs particularismes.
Pour en revenir aux deux initiatives que vous avez présentées, elles sont ouvertes aux Autochtones parce que ce fonds sert en partie à rendre le logement abordable là où c’est un problème et à répondre aux besoins impérieux de familles ou de collectivités en particulier dont le revenu ne saurait à lui seul leur permettre de faire face à leurs conditions de vie précaires. Pour ces deux raisons, il est clair que les Autochtones et les collectivités autochtones sont invités à soumettre leur candidature au financement offert dans le cadre de ces deux initiatives.
Le sénateur Patterson : Puis-je poser une question à la ministre Philpott? Je vous souhaite la bienvenue, madame la ministre.
Vous avez fait mention du problème des collectivités nunavoises qui dépendent du diesel et vous avez parlé du programme que votre ministère met en branle en vue de réaliser des projets visant à offrir des sources d’énergie renouvelable aux collectivités non connectées à un réseau local, aux collectivités autochtones et aux collectivités du Nord qui abandonnent le diesel.
Le Nunavut incarne la dépendance au diesel dans les trois territoires. Je n’en suis pas fier. Sa dépendance est totale; il n’y a pas d’autres sources d’énergie. Un nouveau gouvernement vient d’être élu, lundi. L’exécutif se réunit le 21 novembre; il viendra à peine d’entrer en fonction au moment où la tarification du carbone entrera en vigueur en vertu du cadre pancanadien auquel le Nunavut s’est hardiment engagé à participer.
Le problème, c’est qu’il devait y avoir une étude conjointe sur les répercussions de la tarification du carbone. Le gouvernement et le premier ministre avaient promis de trouver un compromis avec le Nunavut en raison des besoins particuliers de ce dernier, mais on ne connaît pas les résultats de cette étude. Le diesel accapare environ le cinquième de notre budget de 2 milliards de dollars environ, malheureusement. La tarification du carbone est imminente et cette mesure aura d’énormes répercussions sur les prix, y compris sur celui des habitations.
J’aimerais savoir, madame la ministre, si vous êtes au courant que nous avons un nouveau gouvernement, que nous ne connaissons pas et craignons tous les répercussions qu’aura la tarification du carbone sur le coût de la vie déjà exorbitant, le plus élevé au Canada, et notamment sur les frais d’habitation. Êtes-vous au courant?
Ce que j’aimerais vous dire en fait, c’est que je pense que le Nunavut devrait être exempté de l’application de cette taxe, ce que j’appelle un prix, en attendant d’en connaître les répercussions et jusqu’à ce que les travaux donnant accès à d’autres sources d’énergie soient plus avancés. Le prix du carbone est censé amener les gens à adopter d’autres formes d’énergie, mais nous n’en avons aucune à ce jour et aucun plan n’est prêt à cet égard, au Nunavut. C’est la question que je voulais vous soumettre, madame Philpott.
Mme Philpott : Je vous remercie. Votre opinion m’intéresse beaucoup; il est évident que votre expérience de vie là-bas vous a beaucoup appris. Vous avez raison de dire qu’il faut laisser le temps à un nouveau gouvernement de s’installer alors même que ces nouveaux mécanismes sont mis en place.
Une partie de la démarche incombe au ministère de Mme McKenna. La responsabilité du Cadre pancanadien sur les changements climatiques a exigé beaucoup de travail de sa part au sein de notre gouvernement.
Je pense que vous demandez qu’on reporte à plus tard le recours aux mécanismes du marché et qu’on attende jusqu’à ce que d’autres sources d’énergie soient disponibles, ou encore qu’on utilise les modes de tarification du carbone pour affirmer, à l’échelle du pays, que la seule façon de nous obliger à aller de l’avant consiste à fixer un prix au carbone et, parallèlement, à investir ces sommes dans le développement de sources d’énergie renouvelable.
Il ne fait aucun doute qu’un endroit tel que le Nunavut est plus vulnérable que tout autre endroit au Canada probablement, quant aux répercussions d’une telle tarification. Des ressources disponibles dans un Fonds pour une économie à faibles émissions de carbone aideront des endroits tels que le Nunavut à mettre en œuvre ces nouvelles technologies. Ce n’est pas un instrument qui m’est familier pour l’instant, mais il me fera grand plaisir de vous revenir là-dessus pour vous donner les détails de son mode d’application. Je serai également heureuse de faire part personnellement de vos préoccupations à la ministre McKenna quant aux répercussions de cette mesure sur la population du Nunavut.
Je pense que les habitants du Nunavut savent mieux que quiconque au Canada qu’il est urgent de lutter énergiquement contre les changements climatiques parce que les répercussions sur les habitations sont terribles. À défaut d’adopter ces nouvelles approches, nous ne réussirons jamais.
[Français]
Le sénateur Brazeau : Merci d’être parmi nous ce soir.
Ma question est d’ordre général, et je vous la pose à titre d’information. Y a-t-il une raison spécifique pour laquelle les ressources financières, dans ce cas-ci pour le logement, sont encore transférées et filtrées par les gouvernements provinciaux et territoriaux, plutôt que d’être transférées directement aux communautés autochtones?
M. Duclos : Je vous remercie de cette question. Cela me permet de clarifier quelque chose que j’ai certainement dit sans être assez clair tout à l’heure.
Depuis 2016, pour la première fois de l’histoire de la relation entre le gouvernement canadien et les Inuits, les transferts aux quatre régions inuites, c’est-à-dire le Nunavut, le Nunavik, le Nunatsiavut et l’Inuvialuit, se font directement entre le gouvernement canadien et les quatre régions, plutôt que de passer par les provinces. Cette situation retardait souvent les transferts, et occasionnait des frais d’administration, réduisait l’impact des transferts et réduisait également les capacités des gouvernements des quatre régions à utiliser le plus efficacement possible les transferts. On a donc pu mettre cela en place. La SCHL trouvait cela un peu difficile au début parce qu’elle ne l’avait jamais fait auparavant, mais avec la collaboration des ministères de Mme Bennett et de Mme Philpott, nous avons réussi à faire cela.
Le sénateur Brazeau : J’imagine qu’il ne serait pas insensé de penser que si les transferts du gouvernement fédéral étaient versés aux gouvernements provinciaux et territoriaux, il pourrait y avoir des frais d’administration pour ces derniers qui pourraient s’élever jusqu’à 20 p. 100, par exemple. Est-ce exact?
M. Duclos : Je ne connais pas les frais qui étaient imposés avant, mais depuis 2016 les frais des provinces et des territoires ont disparu parce que le gouvernement canadien transfère directement ces fonds aux quatre gouvernements inuits.
Le sénateur Brazeau : J’aime le discours qui tend davantage à une relation de nation à nation, en termes de réconciliation aussi. Selon vous, serait-il temps que les transferts soient directement versés aux communautés autochtones pour embellir cette relation de nation à nation, plutôt que de transférer ces sommes aux provinces qui, on va se le dire, ne sont pas nécessairement des experts à ce titre? Les communautés autochtones connaissent leurs besoins, alors pourquoi aujourd’hui, en 2017, ne pourrait-on pas transférer les sommes directement aux communautés?
Mme Philpott : Il y a des Premières Nations, particulièrement celles qui sont dans une situation d’autogouvernance, à qui l’on transfère directement les ressources. Avec les Inuits, cela a très bien fonctionné. En ce qui a trait aux Premières Nations en réserve, des mécanismes ont été mis en place pour leur transférer des fonds.
[Traduction]
Je m’excuse, mon français n’est pas très bon.
Le sénateur Brazeau : Ce n’est pas grave.
Mme Philpott : Je pense que là où vous voulez en venir, c’est que la relation fructueuse avec les Inuits du point de vue du transfert de l’argent et de leur prise en charge des affectations de cet argent et des habitations qui seront bâties doit servir d’exemple, comme vous l’avez dit, dans le genre de rapprochement souhaité avec les autres communautés autochtones au pays. Dans une certaine mesure, cette relation existe avec les Amérindiens qui vivent dans les réserves et avec les Premières Nations autogouvernantes, mais je pense qu’on peut faire beaucoup plus que simplement transférer de l’argent et y ajouter la délégation du pouvoir de décision et de gestion quant à l’utilisation de cet argent et un financement de plus longue durée.
La sénatrice Lovelace Nicholas : Je suis heureuse de vous parler ce soir, madame Philpott. Vous avez indiqué que trois régions inuites ont obtenu 80 millions de dollars dans le budget de 2016. Ce montant était-il destiné à chacune des communautés ou devait-il être séparé entre les trois?
Mme Philpott : Des 80 millions destinés aux trois régions inuites, dans le budget de 2016, 15 millions ont été versés au Nunatsiavut, 15 autres millions aux Inuvialuit et 50 millions au Nunavik. Dans le cadre de ces ententes sur les revendications territoriales, les gouvernements, selon les circonstances, avaient la capacité de décider des collectivités qui en bénéficieraient et ont travaillé avec mon ministère afin de déterminer où étaient les besoins les plus pressants. Je suis certaine que vous pouvez obtenir plus d’information sur le processus décisionnel en vous adressant au ministère, mais beaucoup de collectivités avaient déjà une liste des infrastructures les plus urgentes.
La sénatrice Lovelace Nicholas : Quelle proportion de ces sommes a servi au logement tel quel? Il y a des frais de transport, comme vous le savez, parce que ces collectivités sont en région éloignée. Est-ce que les 80 millions de dollars ont servi au logement en fin de compte?
M. Van Dine : Vous avez parfaitement raison. Le prix de n’importe quelle maison, dans ces endroits, tient compte de tous les éléments que vous avez mentionnés. On ne peut pas faire une distinction entre les frais de transport, le coût de lotissement et la construction des dalles de béton nécessaires; tout cela doit être inclus.
Ce que je dirais, c’est que nous connaissons les chiffres quant au nombre d’unités produites à l’aide de cette somme d’argent, et, de loin, sur la base de l’expérience et de la capacité présentes au Nunavik, la Société Makivik a été en mesure de bâtir plus de maisons par dollar que les deux autres régions. En effet, la Société Makivik, avec 50 millions de dollars, a été capable de bâtir 144 unités, ce qui est stupéfiant, étant donné qu’elle fait face à tous les éléments que vous avez mentionnés.
Dans les autres régions, ils bâtissaient environ 34 unités dans la Région désignée des Inuvialuit. Les avantages et désavantages sur le plan du transport étaient légèrement différents, comparativement à d’autres unités. Au Nunatsiavut, la côte est plus raide et le nombre d’unités bâties par dollar dépensé est moindre, mais je suis certain qu’avec le temps, le Nunatsiavut va offrir le même rendement que les autres régions commencent à offrir.
La sénatrice Lovelace Nicholas : Je vous remercie.
La sénatrice Dyck : Il semble que les ministres devront partir bientôt, et je me demandais si vous accepteriez de répondre à une question de la sénatrice Raine et à une autre de la part du sénateur Watt. Chacun d’eux posera une courte question. Nous déciderons après de la suite des choses, car les autres représentants des ministères resteront, je crois, pour répondre aux questions.
La sénatrice Raine : Je vous remercie beaucoup. Ma question porte sur votre portefeuille qui consiste notamment à fournir des services aux Premières Nations, aux Inuits et à la population autochtone. Je pense que l’une de nos séances les plus captivantes a été celle où de jeunes Inuits nous ont expliqué l’impact du manque de logements sur leur éducation et qu’en fait, beaucoup de jeunes abandonnent les études, se marient et ont des enfants à un jeune âge, s’inscrivent sur la liste d’attente pour obtenir un logement social et cherchent quasiment un moyen de réussir à avoir leur nom sur cette liste d’attente. D’autres terminent leurs études secondaires, font des études universitaires, mais découvrent, s’ils postulent un emploi dans leur région, qu’il n’y a pas de logement disponible et que leur nom est loin sur la liste d’attente. Au fond, certains décident simplement de rester au Sud. Pourriez-vous vous pencher sérieusement sur cette question? Le rapport n’a pas grand-chose à voir là-dedans, mais en y donnant suite, une des choses les plus importantes qu’on peut faire pour ces jeunes, c’est de leur donner espoir de recevoir une éducation et une formation et d’utiliser la liste d’attente pour un logement comme un genre d’incitatif.
Mme Philpott : Je crois que c’est un très bon argument. Vous citez en quelque sorte toutes les réalités qui font du logement une chose essentielle. Je pense aux services et au nombre de jeunes qui veulent une formation pour ensuite retourner dans leurs collectivités pour travailler comme infirmières, enseignants, travailleurs sociaux, ingénieurs ou comptables, mais qui n’ont pas d’endroit où retourner et rester. Une des difficultés auxquelles nous sommes confrontés en matière de services est de trouver un logement pour une nouvelle infirmière inuite afin qu’elle puisse vivre au Nunavut et combattre l’épidémie de tuberculose qui y sévit, mais dans certaines collectivités il n’y a pas de logement pour cette infirmière. C’est un cercle vicieux et c’est la raison pour laquelle le logement est un élément essentiel, pas seulement pour que les gens aient un endroit où vivre, mais aussi pour qu’ils puissent se former et travailler.
La sénatrice Raine : Nous sommes abasourdis qu’une partie des logements pour le personnel...
La sénatrice Dyck : Madame la sénatrice Raine, nous n’avons plus le temps.
Le sénateur Watt : Permettez-moi de vous remercier pour votre exposé et d’être parmi nous aujourd’hui pour nous dire ce que font les différents ministères. Nous ne sommes pas forcément d’accord sur tout, mais il y a beaucoup de choses dont nous n’avons pas parlé.
Je veux vous dire que l’argent ne reste pas dans le Nord. L’argent retourne dans le Sud, quasiment jusqu’au dernier cent. Certains jeunes ont tenté de créer des entreprises, mais il y a trop de concurrents dans le Sud. Ils créent des richesses grâce aux architectes et aux ingénieurs et lorsqu’ils se rendent dans le Nord, ils utilisent leur propre matériel et passent des accords avec les entreprises. Cela nous empêche d’avancer. Il faut que vous preniez cela en compte.
Je voudrais également dire que je remercie Dieu pour l’existence du Comité sénatorial permanent des peuples autochtones. Lorsque le budget a été établi en 2016, nous avons réalisé qu’il prenait en compte la dimension ethnique pour la première fois. Cela n’a pas suscité beaucoup de débats. Nous avons tiré parti du fait que pour la première fois de son histoire, le budget mentionnait la dimension ethnique.
Notre comité a donc recommandé au ministère de permettre que l’argent aille directement aux personnes. Merci d’avoir fait en sorte que cela se produise. Cela a beaucoup compté dans la collectivité.
Ce faisant nous avons créé un problème et je veux que vous en ayez conscience. Au niveau provincial, le Québec était un peu réticent de s’occuper de la maintenance qui est normalement requise. Cela a-t-il été rectifié? C’est ma première question.
Je veux évoquer aujourd’hui un autre problème, les logements coûtent entre 350 000 $ et 500 000 $ à construire. La rénovation coûte le même prix. Pourquoi dépensons-nous de l’argent dans des logements déjà délabrés? Lorsque les logements restent étanches à l’air, le bâtiment devient malsain. Si nous ne pouvons pas respirer, nous tombons malades. C’est la même chose pour les logements. C’est un gros problème dans le Nord.
L’autre gros problème selon moi, ce sont les fosses septiques intercalées entre les deux étages du bâtiment. Il y a un trop-plein. Où se déverse ce trop-plein? Au bas du bâtiment, tout à fait. Alors il est retiré, rénové et réparé. Cela coûte 500 000 $ au gouvernement. Merci d’examiner cette question.
La sénatrice Dyck : Monsieur le sénateur Watt, vous avez posé deux questions. Les ministres veulent-ils répondre?
M. Duclos : Je suis en mesure de répondre à deux de vos questions, pour la troisième, je vais demander à mes collègues de la SCHL de vous donner des précisions.
Vous connaissez mieux que moi la Société Makivik. D’après ce que je sais, ses représentants tirent une grande fierté de l’effet qu’ont leurs investissements pour le logement sur les entreprises et l’emploi local, car cet effet est bien plus important que ce dont ils ont l’habitude.
Deuxièmement, vous avez évoqué les choix liés à la rénovation ou à la construction de nouveaux logements. Là encore ce sont les personnes situées dans les collectivités locales qui sont en principe le mieux à même de prendre les meilleures décisions. Elles peuvent observer et faire les choix les plus pertinents en matière de coûts et d’avantages. C’est mon modeste point de vue. Nous pourrions peut-être approfondir ce sujet.
Troisièmement, concernant comme vous l’avez dit, le fait qu’au Québec il a été décidé, d’après les informations que nous a transmises votre comité, que les transferts iraient directement au Nunavik, cela a causé quelques angoisses au Québec. C’était un débat important...
Le sénateur Watt : Cela a-t-il été rectifié? C’est l’objet de ma question.
M. Duclos : C’est pourquoi je me tourne vers mes collègues de la SCHL, qui connaissent bien ce problème.
M. MacArthur : Il va falloir que je vous recontacte. Nous savons que c’était un problème dans les Territoires du Nord-Ouest et je sais que cela a été rectifié là-bas. Il faut que j’en parle à la Société immobilière SSQ, et nous vous recontacterons ensuite.
Le sénateur Watt : Il est donc possible que cela n’ait pas été rectifié?
M. MacArthur : Je n’en suis pas sûr, je ne veux pas émettre de suppositions.
La sénatrice Dyck : Je remercie les ministres d’être venus comparaître devant le comité et de répondre à nos questions. Au nom des membres du comité, merci.
Je tiens également à remercier les membres du comité pour leurs questions. Nous avons la chance d’avoir parmi nous le sénateur Patterson et le sénateur Watt, qui ont vécu et vivent toujours dans le Nord et nous font donc profiter de leur expérience vécue.
Nous allons commencer le deuxième tour de questions avec les fonctionnaires.
La sénatrice Raine : Merci encore d’être parmi nous.
J’ai toujours conscience du temps qui passe, car il y a des familles qui sont logées dans des conditions insupportables. J’aimerais vous demander à tous les trois ce qui peut être fait pour accélérer l’amélioration de la qualité et de la quantité des logements dans le Nord. Essayez peut-être de sortir des sentiers battus, quels seraient vos souhaits? Je ne sais pas si votre statut de fonctionnaire vous le permet, mais peut-être y a-t-il des choses que nous ignorons et qui nous aideraient, car je crois personnellement que les compétences des personnes vivant dans le Nord sont incroyables. Que peut-on faire?
M. MacArthur : Il me semble que c’est ce comité qui m’avait interrogé sur notre programme de stages pour les jeunes et sur les chiffres. À l’époque j’avais pu répondre : « Cinq. » Nous avons réfléchi à cela, à la jeunesse et à ce que nous pourrions faire de plus avec l’argent disponible. Ce chiffre est passé de 5, ce qui était insuffisant, à 76, dont 62 jeunes Inuits. Ils ont acquis une expérience pratique et sont donc capables de faire des choses dans les logements du Nord. Voilà comment nous avons utilisé les ressources dont nous disposons d’une façon originale afin d’en faire davantage pour le nord.
La SCHL travaille avec les sociétés de logement dans le Nord et nous collaborons étroitement avec elles pour nous assurer que les fonds sont dépensés dans les délais que nous fixons. Nous travaillons avec elles pour être sûrs qu’elles sont en mesure de faire ces investissements. Nos relations sont très bonnes. Nous avons des réunions régulières pour évaluer les autres besoins. Nous faisons des recherches culturellement adaptées. Nous sommes très ouverts à ces idées. Nous essayons d’optimiser au maximum les fonds dont nous disposons. Nous parlons d’unités de logement. Nous sommes parfaitement conscients qu’il s’agit de familles et qu’il s’agit de changer la vie de ces familles. C’est ce que fait le logement, il aide à changer la vie des gens. Alors nous faisons le maximum.
Nous avons pu déployer les investissements dans les logements du Nord. Nous sommes en cours de discussion avec les territoires du Nord pour voir comment nous pouvons rapidement déployer les 300 millions de dollars prévus dans le budget, à cause du profil de financement. Nous réfléchissons à la manière de le faire rapidement, de façon pratique et non bureaucratique, car nous comprenons parfaitement qu’il faut commencer à réfléchir maintenant aux logements qui pourront être construits au printemps prochain, si cela se fait. Nous essayons d’avoir l’esprit pratique et de prendre en compte les réalités. Lorsque nous pouvons optimiser quelque chose, nous le faisons.
Nous ne sommes pas en opposition, pour répondre à la question du sénateur Sinclair. S’il y a des idées innovantes sur la manière dont nous pouvons faire les choses différemment au sujet du logement ou du financement, nous utiliserons ces outils, nous sommes très ouverts sur ce point. Lorsque nous avons créé le fonds pour l’innovation, nous avons réfléchi aux conseils dont nous aurions besoin et nous avons choisi quelqu’un de la société de placement immobilier Northern Property ayant de l’expérience dans le Nord, afin de nous guider lorsque nous serions face au projet.
C’est un effort constant et nous sommes profondément concernés par cette question. À mon sens cela va au-delà de l’argent, au-delà des unités de logement. Il s’agit de créer l’égalité des chances pour les personnes pour lesquelles nous travaillons dans le Nord.
M. Tremblay : C’est difficile d’ajouter quelque chose à ces paroles. Ce qu’a dit Charlie est fondamental.
En tant que gouvernement, nous avons été plus réceptifs aux idées ouvertes sans nous contenter d’exporter les idées du Sud vers le Nord. Avec le recul il est évident que cela n’a pas fonctionné. La situation du logement ne serait pas si mauvaise si cela avait été une réussite.
Comme je l’ai indiqué, par le biais de la Stratégie nationale sur le logement, nous avons largement consulté l’ensemble des Canadiens. Nous avons en particulier organisé des tables rondes d’experts dans le Nord et nous continuons à le faire. Nous devons travailler avec nos partenaires, les provinces et les territoires afin d’éviter le genre de situation décrite par le sénateur, lorsqu’une bonne intention qui consiste à transmettre l’argent par l’intermédiaire d’un organisme inuit devient un problème à résoudre. Nous, Canadiens, devons mieux travailler ensemble pour régler ce problème.
Le sénateur Watt : Je pensais que mon temps de parole était terminé et qu’à l’instar du sénateur Sinclair je ne pourrais plus m’exprimer, mais vous m’en donnez la possibilité et je vous en remercie.
J’apprécie moi aussi les éclairages que vous nous donnez sur le fonctionnement de votre ministère et sur ce qui se passe. Je voudrais dire que s’agissant de la formation, vous vous trompez peut-être d’objectif. Je tiens à vous le dire. Si vous déterminez un certain montant et une formule élaborée spécialement pour le Nunavik, si nous recevons ces fonds, nous pouvons les gérer. Nous pouvons les administrer. Nous pouvons créer des programmes. Nous pouvons créer des programmes de formation sans aucune aide extérieure. Alors pourquoi n’essayez-vous pas de donner une somme globale? Laissez-nous nous occuper des besoins en matière de formation. Je pense que cela sera une amélioration concernant l’argent et sa destination. Cela serait plus logique. Au moins l’argent ne retournerait pas dans le Sud jusqu’au dernier cent, l’argent resterait et circulerait dans la collectivité. Nous avons besoin de l’économie, tout comme le Sud en a besoin. Nous ne sommes pas différents sur le plan des nécessités économiques. Le coût de la vie est élevé, le coût du transport l’est également. À Kuujuaq, notre pouvoir d’achat ne représente que le quart de celui du Sud.
Voici ma question : seriez-vous prêts à envisager cette idée, voir de quelle manière l’argent pourrait arriver directement à l’endroit prévu, sans être acheminé par le gouvernement provincial? Laissez-nous nous en occuper nous-mêmes. Croyez-vous que cette idée soit envisageable? Vous n’êtes pas obligé de répondre tout de suite, mais réfléchissez-y.
M. Van Dine : Merci monsieur le sénateur. Je voudrais reprendre certaines des remarques qui ont été formulées jusqu’ici et prolonger l’intervention de la sénatrice Raine.
Je voudrais apporter une note optimiste, ce qui caractérise le Nord et ses régions, vous le savez, c’est que l’histoire n’est pas encore terminée. L’histoire continue de s’écrire et elle est désormais écrite et racontée par ceux qui vivent là-bas, bien plus que par ceux qui n’y vivent pas et qui ont un point de vue beaucoup plus nostalgique.
Le sénateur Watt : Nous en avons assez de la microgestion, disons.
M. Van Dine : En décembre dernier, le premier ministre a annoncé qu’il songeait à remplacer la stratégie pour le Canada du Nord par un nouveau cadre stratégique pour l’Arctique. Nous n’en sommes qu’au début des travaux sur cette question, mais vous vous souvenez certainement que la ministre Bennett a désigné Mary Simon pour formuler des propositions sur ce qu’il conviendrait de faire.
Nous avons la chance de bénéficier des recommandations de Mary sur la manière d’aborder ce problème, mais pour l’essentiel ses remarques disaient qu’il fallait offrir la possibilité aux économies durables d’être la source de l’autodétermination. Si les collectivités locales bénéficiaient des formations, des emplois, de l’activité et des possibilités économiques, elles seraient en mesure de commencer à régler elles-mêmes une partie de ces grands problèmes.
Votre suggestion est excellente. Je crois qu’elle donne précisément la mesure du type d’idées que nous devons concevoir pour trouver de nouvelles solutions et de nouvelles approches. Nous nous réjouissons de travailler avec les organismes régionaux et les gouvernements territoriaux et provinciaux dont l’aide sera précieuse pour nous aider à élaborer les nouvelles politiques et les nouvelles stratégies du Canada.
Le sénateur Sinclair : Vous vous souvenez peut-être que le rapport du comité recommandait que le Programme d’adaptation aux changements climatiques soit rétabli. La réponse du gouvernement indique que le programme a été modifié et qu’il y en a désormais deux, le Programme d’adaptation aux changements climatiques des Premières Nations et le Programme : Se préparer aux changements climatiques dans le Nord. Pouvez-vous nous donner la part du financement de ces deux programmes allouée aux fins de la collecte de renseignements visant à minimiser les effets des changements climatiques? Avez-vous des informations sur ce point?
M. Van Dine : Tout à fait. Vous avez raison, deux nouveaux programmes ont été lancés, ils se basent en partie sur des travaux préexistants issus du budget de 2016. Je vais rapidement vous donner quelques éléments.
En ce qui concerne les changements climatiques, notre ministère a reçu 83,8 millions de dollars sur cinq ans au titre du budget de 2017 pour établir une meilleure compréhension de ces phénomènes et orienter les mesures d’adaptation. Mais aussi pour augmenter la résilience des collectivités autochtones par le biais de la planification des infrastructures et la gestion d’urgence dans un contexte d’accroissement des risques de crues et pour accroître la résilience dans les collectivités du Nord grâce à l’amélioration de la conception et de la construction des infrastructures. Un montant de 25 millions de dollars sur cinq ans est en particulier affecté à l’amélioration du niveau de préparation face aux changements climatiques dans le Nord. Cela a été annoncé dans le budget de 2016 dans le but de soutenir le développement d’infrastructures résilientes.
Ce programme vise à trouver des fonds pour que les collectivités et les organismes s’adaptent aux changements climatiques grâce à des analyses de la vulnérabilité et des risques liés aux effets des changements climatiques, à l’élaboration de cartes des risques et de plans d’adaptation et à la mise en place de solutions d’adaptation liées à la construction d’infrastructures résilientes, notamment des logements. Ce programme s’appuie sur les parties intéressées et s’organise autour de groupes de travail auxquels participent des organismes autochtones et des organismes de revendication territoriale ainsi que les territoires et les provinces. Il s’agit de 25 millions de dollars sur cinq ans.
Le deuxième volet comprend un budget de 31,8 millions de dollars sur cinq ans pour la création d’un programme de suivi du climat basé sur la participation des collectivités autochtones au suivi des effets des changements climatiques pour mieux en comprendre les impacts sur leurs moyens de subsistance. Ces fonds soutiennent les initiatives de suivi basées sur les collectivités, la standardisation des données et la création de réseaux regroupant ces initiatives de suivi des changements climatiques.
Nous réfléchissons à un autre programme, vous l’avez peut-être remarqué dans le budget, il s’agit du Programme pilote de gardiens autochtones. Un petit budget pilote y a été alloué et nous espérons relier ces programmes les uns aux autres afin d’en tirer le meilleur parti.
Voilà pour ce point. Il y a aussi des programmes de sortie du diesel dont je peux parler, si vous voulez.
Le sénateur Patterson : La recommandation no 11 demandait l’établissement de codes du bâtiment adaptés au nord. Nous avions souligné — et ma question s’adresse aux deux témoins — que l’actuel Code national du bâtiment fonctionne certainement très bien dans le Sud, mais il y a des problèmes de ventilateurs-récupérateurs de chaleur qui gèlent à cause de l’accumulation de neige et la condensation. Nous avions recommandé que la SCHL, Affaires autochtones et du Nord Canada et d’autres ministères travaillent sur un code du bâtiment adapté aux conditions du Nord.
Lors d’une séance du Comité sénatorial permanent de l’énergie, de l’environnement et des ressources naturelles le 19 octobre, j’ai posé la question aux représentants du Conseil national de recherches et j’ai été déçu d’entendre : « Nous espérons lancer ce projet au cours de l’année prochaine. Tous les partenaires sont réunis. Nous avons l’expertise nécessaire pour mettre ce code au point. »
Cela fait des décennies que l’on construit des maisons dans le Nord. Ces logements pourraient être plus efficaces, plus durables et mieux adaptés au climat du nord. La seule réponse que nous obtenons est que les ministères viennent juste de se réunir et espèrent commencer l’année prochaine. Eh bien, cela fait déjà deux ans que nous avons fait cette recommandation.
Pourriez-vous me donner des garanties sur le fait que cela sera logique et constituera une priorité? Je sais que ce ne sont pas vos ministères qui mènent ce projet, mais vous êtes les principaux financeurs du logement dans le Nord. Pouvez-vous me dire si cela sera fait ou pas?
M. Tremblay : Comme vous l’avez dit, la société de la Couronne et le ministère qui sont représentés ici ne mènent pas ce projet, mais il est certain que nous ferons part du caractère urgent de la situation à nos collègues de Ressources naturelles Canada pour voir si nous pouvons avancer au plus vite sur ce dossier.
Le sénateur Patterson : J’ai aussi une question très précise à poser aux représentants de la SCHL. Je n’ai peut-être pas été clair lorsque j’ai interrogé votre ministre à ce sujet. Dans la réponse du gouvernement sur la Stratégie nationale sur le logement, la société de la Couronne a expliqué que la prochaine étape clé serait une conférence sur le logement dans le Nord prévue en janvier 2018 qui réunira les parties intéressées fédérales, provinciales, territoriales, autochtones et du Nord. Pourriez-vous nous dire quelques mots de l’avancement de l’organisation de cette conférence prévue en janvier 2018? Les membres du comité pourront-ils participer à la conférence ou y assister? Un résumé des débats sera-t-il rendu public?
M. Van Dine : Vous faites référence en particulier à nos collègues de la SCHL qui siègent à un comité de recherche technique nordique auquel participent le Conseil national de recherches du Canada, nos collègues de Ressources naturelles Canada, notre ministère et nos collègues de Savoir polaire Canada. Je sais qu’une réunion préparatoire a eu lieu sur ce sujet et qu’une autre est prévue, mais suite à votre demande nous allons recontacter les organisateurs de ces événements pour savoir où ils en sont.
Les organisateurs envisagent la participation des parties intéressées fédérales, provinciales, territoriales, autochtones et du Nord. Je ne sais pas dans quelle mesure cela s’étendra au-delà pour inclure d’autres parties intéressées et notamment les sénateurs, mais nous nous efforcerons de connaître leurs intentions et leur politique d’invitations.
En ce qui concerne le résumé des débats, étant donné la nature du sujet, il serait surprenant que ce résumé ne soit pas accessible au public, mais comme nous ne sommes pas les organisateurs de cet événement, je poserai la question afin d’en savoir davantage sur la diffusion ultérieure des documents.
Le sénateur Patterson : Je vous remercie.
Vous avez entendu mes inquiétudes au sujet de l’énergie au Nunavut. Je sais que votre ministère est à la tête du projet de substitution au diesel, dont le financement est assez faible au regard de la proportion du Canada concernée. Je crois que cela ne concerne pas que les régions situées au nord du 60e parallèle, mais aussi les provinces nordiques. Beaucoup de collectivités autochtones dépendent du diesel. Pouvez-vous nous dire où nous trouverons les financements nécessaires à la mise en œuvre des projets d’énergies renouvelables?
Je crois que c’est vous qui menez le débat sur les énergies de remplacement. Les représentants de l’Association canadienne du gaz naturel m’ont dit qu’ils n’étaient pas les bienvenus pour participer aux consultations. Les combustibles fossiles sont-ils interdits dans ce débat? S’agit-il uniquement de solaire et d’éolien? Ce sont des sources d’énergie formidables, mais le vent ne souffle pas toujours et le soleil ne brille pas en permanence.
Comment votre ministère envisage-t-il de traduire ses travaux par la mise en œuvre de projets d’énergie de remplacement dans les collectivités tributaires du diesel? Vous ne disposez pas du budget pour les mettre en œuvre. Le ministre a évoqué le fonds vert. Mettez-vous en commun d’autres ressources? Collaborez-vous avec d’autres ministères pour cet important travail?
M. Van Dine : Je crois que vous avez mis le doigt sur un fait important. Les coûts connus de la transition majeure que vous venez de décrire sont considérables et l’argent qui y est affecté pour l’instant ne pourra résoudre qu’une partie du problème.
Nous collaborons étroitement avec nos collègues de Ressources naturelles Canada et d’Infrastructure Canada qui sont d’importants partenaires sur ce dossier. Infrastructure Canada entretient des relations bilatérales avec les provinces et territoires afin de mettre en place un accord autour d’un Fonds pour l’énergie dans l’Arctique qui correspond à 300 ou 400 millions de dollars dans les engagements budgétaires de 2017. C’est une participation importante. Nous allons essayer d’établir des partenariats avec les territoires et les provinces pour garantir que ces fonds viennent en complément de ce que nous ferons dans nos propres programmes.
De plus, les solutions à long terme en matière de sources d’énergie requièrent une réflexion à long terme. Nous commençons tout juste à examiner toutes les solutions disponibles pour nous aider à résoudre ce problème, y compris en matière de financement. Il y a clairement un intérêt grandissant de la part des sociétés de développement autochtones qui voient la possibilité de participer au capital et aux initiatives liées aux services. Tout cela est prometteur et permet d’espérer que l’argent de l’économie qui entre dans la région reste dans la région pour, comme l’a souligné le sénateur Watt, donner lieu à de nouvelles occasions économiques.
La sénatrice Dyck : Ainsi se termine notre second tour de questions.
Je tiens à remercier les témoins de cette deuxième réunion de la soirée : Michel Tremblay, premier vice-président, Politiques, Recherches et Relations publiques à la SCHL; Charlie MacArthur, premier vice-président, Activités régionales et Aide au logement à la SCHL; Stephen Van Dine, sous-ministre adjoint, Affaires du Nord, Affaires autochtones et du Nord Canada.
Merci, messieurs, d’avoir répondu aux questions des sénateurs.
(La séance est levée.)