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ENEV - Comité permanent

Énergie, environnement et ressources naturelles

 

Délibérations du Comité sénatorial permanent de l'Énergie,
de l'environnement et des ressources naturelles

Fascicule nº 10 - Témoignages du 2 juin 2016


OTTAWA, le jeudi 2 juin 2016

Le Comité sénatorial permanent de l'énergie, de l'environnement et des ressources naturelles se réunit aujourd'hui, à 8 heures, pour étudier les effets de la transition vers une économie à faibles émissions de carbone.

Le sénateur Richard Neufeld (président) occupe le fauteuil.

[Traduction]

Le président : Je vous souhaite la bienvenue à cette séance du Comité sénatorial permanent de l'énergie, de l'environnement et des ressources naturelles. Je m'appelle Richard Neufeld. Je représente la province de la Colombie- Britannique et je suis président du comité.

J'aimerais souhaiter la bienvenue aux honorables sénateurs, aux membres du public ici présents et aux téléspectateurs des quatre coins du pays. Je rappellerai à ceux qui nous regardent que les séances du comité sont ouvertes au public et sont également diffusées par webdiffusion sur le site web sen.parl.gc.ca. Vous pouvez également trouver plus d'information sur le calendrier de comparution sur le site web sous l'onglet « Comités du Sénat ».

Je demanderais maintenant aux sénateurs autour de la table de se présenter. Je commencerai par vous présenter mon collègue, à ma droite : le vice-président, le sénateur Paul Massicotte, qui représente le Québec.

Le sénateur Massicotte : Bonjour.

[Français]

La sénatrice Ringuette : Bonjour, je m'appelle Pierrette Ringuette, sénatrice du Nouveau-Brunswick.

[Traduction]

Le sénateur Black : Bonjour. Je suis Doug Black, de l'Alberta.

La sénatrice Seidman : Bonjour. Judith Seidman, de Montréal, au Québec.

Le sénateur Mockler : Percy Mockler, Nouveau-Brunswick.

Le président : J'aimerais également vous présenter notre personnel, à commencer par la greffière, à ma gauche, Marcy Zlotnick, et nos deux analystes de la Bibliothèque du Parlement, Sam Banks et Marc LeBlanc.

C'est aujourd'hui la treizième séance consacrée à notre étude sur les effets de la transition vers une économie à faibles émissions de carbone, laquelle est nécessaire pour atteindre les objectifs de réduction des gaz à effets de serre annoncés par le gouvernement du Canada.

Nous nous concentrerons aujourd'hui sur le secteur de l'électricité. Nous sommes ravis d'accueillir Jeff Lyash, président-directeur général d'Ontario Power Generation, ainsi que Neil Larlee, directeur de la Planification stratégique chez Énergie Nouveau-Brunswick.

Je souhaite la bienvenue à nos deux témoins. Je vous remercie de vous joindre à nous. Nous vous prierons de nous présenter tous deux vos exposés, après quoi nous tiendrons une période de questions. Monsieur Lyash pourrait peut- être commencer.

Jeff Lyash, président-directeur général, Ontario Power Generation : Merci, sénateur. Bonjour à tous. Je vous remercie de m'avoir invité ici aujourd'hui. C'est un très grand honneur.

Je suis honoré d'être ici aujourd'hui pour vous parler du rôle joué par Ontario Power Generation en vue d'atteindre les objectifs du Canada en matière de changements climatiques, ainsi que de notre contribution continue à l'égard de la durabilité et du bien-être des Ontariens et des Canadiens.

Ontario Power Generation, ou OPG, est l'héritière d'une solide tradition en matière de production d'électricité. Cette tradition est marquée par un service à la population de l'Ontario et par un engagement envers le principe qui consiste à produire de l'électricité tout en ayant un but. Les entreprises qui nous ont précédés ont mis en place cette tradition. Grâce à une gamme d'actifs de production efficaces et fiables, elles ont su fournir en toute sécurité de l'électricité aux Ontariens pendant près de 100 ans.

Au cours de la première moitié du XXe siècle, ces actifs étaient pratiquement tous liés à l'hydroélectricité — le produit d'un énorme programme d'acquisitions et de construction qui a permis d'établir l'importance future de l'économie et de la société ontariennes. Dans les années 1950 et 1960, des centrales à combustibles fossiles ont été ajoutées aux actifs pour répondre aux besoins grandissants de la province en énergie. Des centrales nucléaires ont été ajoutées dans les années 1970 et 1990.

En raison de cet héritage, OPG compte sur l'un des plus importants systèmes de production d'électricité au monde — OPG est citée pour la diversité de ses installations de production électrique et pour son excellent dossier en matière de sécurité et de fiabilité.

Au cours des cinq dernières années, nous avons opéré une transition importante. Nous créons de nouveau de l'énergie propre, notre dernier charbon servant à produire de l'électricité ayant été utilisée en 2014. À ce jour, ce jalon demeure la plus importante mesure unique prise en Amérique du Nord pour combattre les changements climatiques. Nous sommes très fiers de cette réalisation, car elle a eu un bienfait immédiat sur la qualité de l'air en Ontario; de plus, cette mesure permet de lutter de façon continue contre le changement climatique mondial et aide le Canada à atteindre ses engagements en matière de réduction des émissions de gaz à effets de serre.

Aujourd'hui, OPG fournit à l'Ontario la moitié de son électricité. Nous avons converti deux de nos centrales au charbon du nord-ouest de l'Ontario en centrales alimentées à la biomasse renouvelable; cette transition a permis de préserver des emplois et de dynamiser le développement économique local. Nos actifs diversifiés comprennent 65 centrales hydroélectriques et 10 unités nucléaires. Ainsi, l'électricité produite par OPG n'entraîne pratiquement plus d'émissions de smog ou de GES, et nous produisons cette électricité à un coût moins élevé que les autres producteurs d'électricité de l'Ontario, dans une proportion d'environ 40 p. 100.

OPG est aujourd'hui une entreprise différente — l'entreprise est plus petite, plus efficace et davantage axée sur le consommateur. Nous misons sur nos partenariats et nos solides relations avec la communauté pour nous aider à accomplir notre mandat. Cela comprend un engagement visant à créer et à favoriser des relations de travail mutuellement bénéfiques avec les communautés autochtones situées près de nos installations actuelles et futures.

Nous avons mis en place un cadre officiel pour évaluer et résoudre les griefs historiques, et depuis 1992, OPG a conclu 23 ententes relatives à des griefs passés avec 21 collectivités des Premières Nations, si bien qu'elle a réglé tous ses griefs historiques. Nos efforts ont jeté les bases d'une série de partenariats réussis pour la production d'électricité.

Le projet du bas de la rivière Mattagami, un partenariat de redéveloppement hydroélectrique de 2,6 milliards de dollars avec la Première Nation Moose Cree, a été achevé l'an dernier, soit plus tôt que prévu et en respectant le budget. Au total, 250 Autochtones locaux ont travaillé au projet, qui a employé un total de 1 800 personnes au plus fort de la période de construction. À titre de partenaire, la Première Nation Moose Cree bénéficiera des retombées de ce projet d'hydroélectricité au cours des années à venir. Il en va de même pour la Première Nation Lac Seul qui a conclu un partenariat avec OPG pour la construction d'une centrale hydroélectrique dans le nord-ouest de l'Ontario.

L'an dernier, en partenariat avec la Première Nation Taykwa Tagamou, OPG a commencé la construction de la centrale hydroélectrique Peter Sutherland Sr. sur la rivière New Post dans le nord-est de l'Ontario. Ce projet de 300 millions de dollars devrait employer 220 travailleurs au plus fort des travaux, et les activités d'exploitation devraient commencer en 2018.

Enfin, le mois dernier, nous avons annoncé un partenariat avec la Six Nations Community Development Corporation pour la construction d'un générateur d'électricité solaire à la centrale électrique de Nanticoke sur le lac Érié, qui était auparavant une centrale au charbon.

J'aimerais inviter les membres du comité à visiter l'un de nos projets de développement pour constater de visu comment il est possible de bâtir de grandes choses si on travaille en partenariat avec les collectivités locales.

Avant de parler de notre production d'énergie nucléaire, j'aimerais vous faire part d'une chose qui me frappe vraiment depuis le tout début de ma carrière d'ingénieur, et je ne l'ai jamais oubliée.

L'amiral Hyman Rickover a été le père de la marine nucléaire aux États-Unis; il était aussi un véritable meneur et tout un personnage. En 1957, l'amiral Rickover a prononcé un discours intitulé « Energy Resources and Our Future ». Ce discours portait sur la façon dont l'énergie et ses applications efficaces font évoluer la civilisation. Il a expliqué que 100 ans auparavant, en 1850, 95 p. 100 de l'énergie consommée provenaient directement des humains et des animaux, tandis que 5 p. 100 provenaient des combustibles fossiles. Un siècle plus tard, les données étaient complètement inversées : quand il a prononcé son discours, en 1957, 95 p. 100 de l'énergie nécessaire à la vie provenaient des combustibles fossiles et moins de 50 p. 100 provenaient des humains et des animaux. Un changement incroyable en seulement 100 ans.

Il s'est demandé sur quoi déboucheraient les 100 années suivantes, soit de 1950 à 2050. Il a expliqué qu'à son avis, les historiens nommeraient un jour la période de consommation de combustibles fossiles « l'âge d'or des combustibles fossiles ». Toutefois, il a soutenu que l'avenir serait de plus en plus énergivore, modulant l'économie et la qualité de vie. Il a aussi ajouté que nous verrions une vague de déploiement d'énergie renouvelable et nucléaire mettant fin à l'ère du combustible fossile. Il s'agissait d'une prévision assez remarquable pour l'année 1957, je trouve.

Si nous l'atteignons, l'objectif du Canada en matière de réduction des émissions de carbone d'ici 2050 ne permettra effectivement pas de mettre fin à l'utilisation de combustibles fossiles, comme il l'avait prédit, mais il permettra certainement d'en réduire la consommation et de changer son rôle considérablement dans notre économie.

Le secteur de l'électricité de l'Ontario est déjà bien engagé dans cette voie, puisqu'il représente actuellement moins de 7 p. 100 du total des émissions de gaz à effet de serre dans l'économie. Le secteur du transport représente environ 35 p. 100 des émissions. L'industrie en représente environ 30 p. 100. Le chauffage des bâtiments, environ 20 p. 100.

Pendant que ces secteurs travaillent en vue de réduire l'intensité de leurs émissions de carbone, on notera une dépendance accrue à l'égard d'une électricité propre. Cela signifie qu'un système d'électricité sans carbone n'est pas seulement une réalisation environnementale. L'énergie propre est le fondement de la compétitivité. L'énergie propre prépare le terrain pour un secteur des transports plus propre et pour l'électrification des voitures et des trains. La production locale d'énergie propre favorise les innovations locales et appuie les industries au-delà du secteur de l'énergie dans les communautés de l'ensemble de la province.

En tout, 62 p. 100 des térawatts-heures produits en Ontario proviennent des centrales nucléaires de Darlington, de Pickering et de Bruce. La valeur à long terme de cette électricité à faible intensité d'émissions de carbone est énorme. L'énergie nucléaire a aidé l'Ontario à se débarrasser du charbon, et l'énergie nucléaire rend possible l'intégration intermittente de l'énergie renouvelable dans le système.

En gardant le regard tourné vers l'avenir, alors que le Canada se demande comment faire la transition vers une économie associée à de faibles émissions de carbone, nous aimons suggérer une approche mixte, c'est-à-dire une approche qui maximise le rôle joué par toutes les technologies à faibles émissions de carbone comme l'énergie nucléaire, l'hydroélectricité, ainsi que l'énergie éolienne, solaire et produite à partir de la biomasse. Ces technologies peuvent contribuer à réduire les émissions de gaz à effet de serre dans l'ensemble de l'économie grâce à l'électrification.

Notre succès à l'égard des efforts pour décarboniser de manière soutenue notre économie repose en grande partie sur la préservation et l'expansion de notre production d'énergie nucléaire et des installations que nous possédons actuellement. C'est pourquoi nous remettons à neuf les unités de Darlington et Bruce Power remet à neuf les unités de Bruce. La centrale nucléaire de Darlington est l'une des plus importantes installations d'OPG. Depuis le début des années 1990, elle produit environ 20 p. 100 de l'électricité en Ontario. Après des années de production fiable, cette importante centrale de production d'énergie propre nécessite une remise à neuf à mi-vie. Le remplacement des éléments du cœur du réacteur permettra à la centrale de Darlington de produire de l'électricité pendant encore 30 ans de manière sécuritaire et fiable.

Plus tôt cette année, le gouvernement de l'Ontario a annoncé sa décision d'investir dans la remise à neuf de la première des quatre unités de la centrale de Darlington. Le coût total pour les quatre unités est de 12,8 milliards de dollars, et 96 p. 100 de ce montant sera dépensé auprès d'entreprises établies en Ontario. En guise de retour sur cet investissement, les Ontariens profiteront de retombées économiques de l'ordre de 14,9 milliards de dollars environ. En moyenne, 8 800 emplois seront créés annuellement. On prévoit ainsi une augmentation du revenu des ménages de l'ordre de 8,5 milliards de dollars, de même qu'environ 5,4 milliards de dollars en revenus pour les trois ordres de gouvernement et des exportations de l'ordre de 94 millions de dollars. Au cours de sa durée de vie prolongée de 30 ans et plus, la centrale de Darlington procurera environ 50 milliards de dollars en retombées économiques additionnelles pour la province. Cela ne comprend pas le faible coût de l'électricité après la remise à neuf, un coût qui sera prévisible et stable pendant une autre génération.

Notre plan consiste à remettre à neuf complètement la première unité de la centrale de Darlington avant le début des travaux à la centrale de Bruce. Les travaux seront réalisés en respectant l'échéancier et le budget établis, fixant ainsi la norme pour la réalisation de mégaprojets. Pour s'assurer que l'Ontario a accès à de l'électricité propre, sûre et à faible coût durant le projet de remise à neuf, OPG évalue des plans en vue de protéger la durée de vie de la centrale nucléaire de Pickering jusqu'en 2024. Cela permettrait aux consommateurs ontariens d'économiser jusqu'à 660 millions de dollars en électricité, d'éviter l'émission de 8 millions de tonnes de gaz à effet de serre et de conserver 4 500 emplois dans la région de Durham.

Compte tenu de l'importance de l'énergie nucléaire pour notre bien-être provincial et national, OPG s'est engagée à assurer une gestion responsable et sécuritaire des déchets nucléaires, une question controversée. Il y a déjà une accumulation de déchets de CO2 dans l'atmosphère héritée de générations de consommation de combustibles fossiles, et nous avons une obligation à l'endroit des générations futures pour ce qui est d'éliminer les déchets nucléaires de façon sécuritaire et responsable dans un endroit où ils ne représenteront pas une menace pour la population ni pour l'environnement.

La Société de gestion des déchets nucléaires poursuit ses efforts en vue de mettre en œuvre le plan du Canada pour la gestion sécuritaire à long terme du combustible nucléaire irradié. En même temps, OPG travaille à trouver une solution permanente et sécuritaire pour gérer les déchets de niveau faible et intermédiaire, que nous avons su transporter et gérer de manière sécuritaire depuis 40 ans. Nous croyons que la création d'un lieu de stockage sûr et permanent pour ces déchets représentera une étape supplémentaire en vue de protéger notre environnement, aujourd'hui et pour l'avenir.

Compte tenu du défi que présente une réduction intense des émissions de gaz à effet de serre, la gestion des déchets contribue également à la préservation des activités des centrales nucléaires existantes et nous permet d'envisager des options de production d'énergie nucléaire avancées pour l'avenir.

J'aimerais conclure avec une dernière réflexion sur OGP, qui est fondée sur mes observations en tant que personne arrivée depuis relativement peu de temps à OPG et au Canada.

L'an dernier, j'ai quitté le secteur privé aux États-Unis pour me joindre à Ontario Power Generation. Il s'agit de mon premier emploi de haute direction pour le compte d'un producteur d'électricité public après 35 ans d'expérience au sein d'entreprises appartenant à des investisseurs. Je m'attendais à certaines différences, mais j'ai été surpris par la nature des différences observées. OGP est une entreprise déterminée à accroître son efficacité — elle a réalisé près de 1 milliard de dollars en économies depuis 2011. L'entreprise s'est engagée à atteindre les normes les plus élevées en matière de sécurité industrielle et publique, et elle s'est engagée à fournir de l'électricité au plus faible coût possible. Or, il y a un but encore plus important qui sous-tend tout ce que fait OPG. En effet, OPG s'efforce d'offrir de la valeur au- delà des résultats. Elle s'efforce d'améliorer le sort des communautés où elle est présente, elle vise à faire une différence pour les consommateurs et veut faire une différence pour la province. Nous appelons cela produire de l'électricité « tout en ayant un but ». L'élément clé pour produire de l'électricité tout en ayant un but consiste à reconnaître que les relations, les personnes et les communautés sont importantes.

Je vous remercie de m'avoir donné l'occasion de m'exprimer. Je serai heureux de répondre à vos questions.

Neil Larlee, directeur, Planification stratégique, Énergie NB : Bonjour, monsieur le président et honorables sénateurs. Je vous remercie de m'offrir l'occasion de comparaître aujourd'hui.

Énergie NB est un service public d'électricité qui produit de l'électricité de façon sûre et fiable pour la clientèle résidentielle, commerciale, industrielle et municipale du Nouveau-Brunswick.

J'aimerais aborder quatre éléments de réflexion en vue d'une transition bien gérée vers une économie à faibles émissions de carbone. Premièrement, je vous donnerai un aperçu d'Énergie NB et de l'incidence de tarifs concurrentiels sur l'économie du Nouveau-Brunswick. Deuxièmement, je vous parlerai du renouvellement de l'infrastructure d'Énergie NB et de sa volonté de réduire et de réorienter la demande. Troisièmement, j'aborderai l'intégration des énergies renouvelables et quatrièmement, le rôle d'Énergie NB dans la région atlantique.

À l'heure actuelle, les trois principaux secteurs qui génèrent des émissions de gaz à effet de serre au Nouveau- Brunswick sont les suivants : l'électricité, à 30 p. 100; les grands émetteurs industriels, à 29 p. 100; le transport, à 27 p. 100.

Énergie NB est bien positionnée, compte tenu de la diversité de ses sources d'électricité, pour offrir aux consommateurs de l'électricité à faible empreinte de carbone. Les achats externes, essentiellement d'hydroélectricité, viennent s'ajouter à l'équation, si bien que plus de 70 p. 100 de l'approvisionnement énergétique de la province vient de sources non émettrices. D'ici 2020, la province dépendra à 75 p. 100 de sources non émettrices grâce à la diversité des sources de production.

En termes d'émissions de gaz à effet de serre, Énergie NB se situe environ à 52 p. 100 en deçà des niveaux de 2005. L'annexe A de notre document contient un graphique qui illustre le système d'Énergie NB.

En raison de la prépondérance des industries énergivores au Nouveau-Brunswick, comme les pâtes et papiers, l'exploitation minière et le raffinage de pétrole, le Nouveau-Brunswick a l'une des économies les plus énergivores au monde. L'annexe B de notre document l'illustre bien. Le Nouveau-Brunswick a absolument besoin d'un approvisionnement adéquat, sûr et fiable pour pouvoir soutenir sa croissance économique en raison de la nature énergivore de son économie.

De plus, l'énergie du Nouveau-Brunswick est parmi celles qui dépendent le plus des exportations de toutes les provinces du Canada. Il est donc important qu'Énergie NB conserve ou améliore la compétitivité de ses tarifs d'électricité par rapport aux autres États ou provinces de l'Amérique du Nord. Il est primordial de bien gérer la transition vers une économie à faibles émissions de carbone pour éviter des difficultés indues.

Il y a ensuite le renouvellement de l'infrastructure.

Il est fondamental pour Énergie NB de pouvoir compter sur un éventail diversifié de sources de production et un réseau de transmission très interconnecté pour pouvoir continuer d'offrir de l'électricité fiable à tarif concurrentiel avec ses ressources naturelles énergétiques limitées. La diversité des sources de production, conjuguée aux achats externes, essentiellement d'hydroélectricité encore une fois, sont tels que plus de 70 p. 100 de l'approvisionnement actuel de la province pour répondre à ses besoins énergétiques provient de sources non émettrices, comme je l'ai déjà mentionné plus tôt, une proportion qui passera à 75 p. 100 en 2020.

Dans cette étude sur la transition vers une économie à faibles émissions de carbone et l'approvisionnement en électricité, il faut reconnaître la nécessité de conserver et d'accroître notre capacité de production de base à partir de sources non émettrices. L'hydroélectricité sera une partie importante de l'équation, à n'en pas douter. De même, nous aurons besoin des centrales nucléaires. Il est fondamental que le Canada conserve et intensifie son programme nucléaire pour atteindre son objectif d'une économie à faibles émissions de carbone.

De même, il sera essentiel de mettre hors service nos installations thermiques en temps opportun pour éviter d'imposer un choc tarifaire à nos consommateurs. Par exemple, la seule centrale au charbon du Nouveau-Brunswick, la centrale électrique de Belledune, devrait fermer ses portes en 2043 selon la réglementation fédérale. Si elle devait cesser ses activités précocement, supposons en 2030, les tarifs augmenteraient d'environ 39 p. 100, en plus des augmentations tarifaires déjà prévues, ce qui aurait un effet dévastateur sur les clients d'Énergie NB et l'économie du Nouveau-Brunswick.

Énergie NB estime que le renouvellement de l'infrastructure doit comprendre des investissements dans les technologies nécessaires pour moderniser les installations. Nous intégrons actuellement la gestion de la demande à notre système de services publics de manière financièrement responsable et mettons l'accent sur l'efficacité énergétique dans le cadre de notre programme de Réduction et déplacement de la demande, ou REDD, comme on l'appelle. En gros, le programme REDD est une stratégie globale qui comprend un volet éducation; des programmes d'efficacité énergétique; l'adoption de pratiques exemplaires par le service public; des modifications aux politiques, aux normes et aux codes; l'intégration de technologies pour faire réduire la demande aux périodes de pointe.

Le programme de REDD se divise en deux principaux volets d'activité. Le premier comprend des programmes d'efficacité énergétique qui influenceront les décisions de nos consommateurs à l'égard de leur consommation d'électricité. C'est une approche bien établie pour régir la demande, et je n'en parlerai pas davantage.

Le deuxième grand volet du programme de REDD vise un déplacement de la demande non perturbateur par le service public en coopération avec nos consommateurs. Celui-ci ne sera pas possible sans un investissement important dans les technologies de l'information et des communications. Énergie NB est un chef de file de l'industrie grâce à son partenariat avec Siemens. Siemens a ouvert un centre de compétence sur le réseau intelligent au Nouveau-Brunswick.

Grâce à ces efforts pour réduire et déplacer la demande, nous déployons les initiatives suivantes : une infrastructure avancée assurant une communication réciproque avec les compteurs; des programmes de gestion de la demande des consommateurs par lesquels le service public offre des incitatifs aux consommateurs afin qu'ils réduisent ou déplacent la demande; l'évaluation de tarifs novateurs, qui pourraient par exemple varier selon l'heure, pour envoyer les bons signaux de prix aux consommateurs; enfin, des outils de gestion de la demande et d'entreposage thermique, qui permettraient aux consommateurs d'espacer leurs périodes de chauffage de l'air et de l'eau en fonction des appareils de stockage de l'énergie thermique. Cette technologie permettra aux consommateurs de devenir eux-mêmes des producteurs d'électricité, en exploitant des sources durables comme l'énergie éolienne et solaire.

Cela nous amène à la question de l'intégration des énergies renouvelables. Les services publics modernes devront optimiser l'intégration des énergies renouvelables dans notre système. Énergie NB a actuellement une capacité éolienne d'environ 300 mégawatts grâce à des contrats signés dans le cadre d'accords d'achat d'énergie. Cette capacité sera bonifiée de 80 mégawatts d'énergie renouvelable de plus des Premières Nations et des collectivités locales d'ici 2020.

Pour permettre tout cela, Énergie NB, avec son partenaire Siemens, a mis en place un logiciel de gestion de la demande qui fonctionne comme une centrale virtuelle. Il permet d'établir une relation plus dynamique entre la consommation et la production d'énergie renouvelable et permettra d'intégrer davantage les énergies renouvelables au système. Notre leadership, en partenariat avec Siemens pour mettre en place cette centrale virtuelle, sera fondamental pour intégrer plus efficacement et de façon plus sûre les énergies renouvelables.

Enfin, j'aimerais parler de la coopération régionale, un élément essentiel de la gestion de la transition vers une économie à faibles émissions de carbone. Les services publics des Maritimes, le Québec et la Nouvelle-Angleterre collaborent depuis plus de 50 ans pour ce qui est de l'achat et de la vente d'énergie et de capacité, et du fonctionnement du réseau d'électricité dans l'intérêt des consommateurs de leur province ou leur état respectif.

Les interconnexions de transmission constituent le catalyseur principal permettant d'assurer une collaboration régionale. Bien que le réseau de transport d'électricité du Nouveau-Brunswick soit solide, on estime qu'il faudra investir dans les interfaces du Québec, de l'Île-du-Prince-Édouard et de la Nouvelle-Écosse, et dans le réseau de transport de l'énergie du Nouveau-Brunswick, pour maintenir et faciliter la circulation d'énergies non polluantes dans ces interfaces. L'annexe C de notre document inclut une carte du système qui l'illustre.

En résumé, lorsqu'on examine le secteur de l'électricité au Canada et qu'on regarde vers l'avenir, vers l'objectif d'une économie à faibles émissions de carbone, il est important de tenir compte de certains éléments.

Tout d'abord, toutes les provinces ou régions canadiennes sont différentes. Les répercussions des changements apportés aux règlements touchant le prix de l'électricité et les conséquences sur les économies provinciales varient d'une région à l'autre et doivent être bien comprises.

Ensuite, le renouvellement des infrastructures effectué au moment opportun et le choix de la bonne ressource, appuyés par notre initiative, ce qui inclut des programmes d'efficacité énergétique et de gestion de la demande, mèneront à de meilleurs résultats. La certitude réglementaire conjuguée à l'exécution efficace de projets favorise le renouvellement. L'exécution de plans bien pensés visant à moderniser les services publics se traduira par une amélioration des résultats environnementaux et de la satisfaction de la clientèle. Une transition gérée vers une économie à faibles émissions de carbone est essentielle.

Enfin, la collaboration régionale s'est révélée très utile et constitue un élément clé pour rendre le secteur de l'électricité plus efficace et plus propre. Il est important que la collaboration régionale se fonde sur des principes commerciaux judicieux pour que chacun en ressorte gagnant.

Merci, monsieur le président. C'est ce qui conclut ma déclaration préliminaire.

Le président : Merci, messieurs. Nous allons passer aux questions. C'est le vice-président du comité qui commence.

Le sénateur Massicotte : Je vous remercie tous les deux de votre présence. Nous sommes vraiment privilégiés que vous nous parliez de votre vaste expérience dans une variété de secteurs de la production de l'énergie, et nous devrions apprendre beaucoup de choses. Je vous remercie de nous faire part de votre point de vue et de partager votre expertise.

Monsieur Lyash, je vais commencer par vous. Comme vous le savez, le gouvernement a créé un plan selon lequel dans 15 ans, les émissions de CO2 devront avoir diminué de 30 ou 40 p. 100. Donnez-moi une idée du calendrier. Autrement dit, si vous avez commencé les projets d'énergie hydroélectrique, éolienne, solaire et nucléaire — et nous convenons que nous allons produire beaucoup d'énergie dans ces quatre secteurs —, pouvez-vous me donner une idée, dans chaque cas, du temps prévu pour la planification, la conception, et ainsi de suite? Quel est le temps prévu pour les approbations et le calendrier de la construction, du début à la fin, jusqu'à ce qu'on commence à produire de l'énergie? Pouvez-vous me donner une petite idée concernant les quatre secteurs et les périodes prévues?

M. Lyash : Cela peut varier. En général, la règle pratique, c'est que si on crée, construit ou met en service un projet éolien ou solaire, cela se fait sur une période de deux ans. Dans le cas d'un projet hydroélectrique, on parle de trois à huit ans, selon l'envergure et la complexité du projet. Nous en avons terminé certains d'entre eux en moins de trois ans, et dans d'autres cas, il a fallu plus de temps. Pour de nouvelles constructions nucléaires, on parle d'environ 10 ans. Si l'on a pris une décision sur la technologie et qu'on est bien engagé sur la voie du développement plutôt que d'en être aux premières étapes d'un projet de développement — permis, conception et mise en service, on parle d'une décennie, environ.

Le sénateur Massicotte : Tous ces plans comprennent l'ensemble des étapes — conception, et cetera?

M. Lyash : Oui.

Le sénateur Massicotte : Dans les journaux, on dit parfois qu'il arrive qu'une approbation ne soit pas obtenue avant cinq ans. De toute évidence, ce n'est pas le cas, car pour les projets d'énergie éolienne et solaire, vous dites qu'il faut deux ans, à partir du tout début jusqu'à la planification et aux approbations, n'est-ce pas?

M. Lyash : Oui. Par exemple, dans le cas de notre projet d'électricité solaire à la centrale de Nanticoke, que nous sommes en train de développer, on nous a attribué le contrat un peu plus tôt cette année, et il s'agit d'un processus d'environ deux ans pour la préparation du site, la conception, l'achat, la construction et la mise en service.

Le sénateur Massicotte : Vous avez fait une offre, ce qui veut dire que vos plans étaient déjà prêts. Vous avez de toute évidence soumis un plan, et vous saviez donc déjà ce que vous vouliez faire auparavant, en fait. Combien de temps cela a-t-il pris?

M. Lyash : Environ six mois.

Le sénateur Massicotte : Vous avez tous les deux une expérience considérable dans le secteur nucléaire, qui est un sujet intéressant. Une partie du monde, qui est peut-être influencée par le Japon — voyez comment a réagi l'Allemagne — est préoccupée par ce secteur, qui a une mauvaise réputation, si l'on veut. Par conséquent, de nombreux pays s'en sont éloignés. Or, bon nombre de pays, comme la Chine et la Russie, font exactement l'inverse.

Qu'en pensez-vous? Mettons les choses en perspective. Ni l'un ni l'autre d'entre vous n'a vécu d'incident important durant les 40 ou 50 années de vie de vos centrales; au Canada, il n'y a jamais eu d'incidents. Plaçons-nous nos craintes au mauvais endroit? Est-ce trop coûteux? Donnez-moi une idée de ce en quoi consiste le nucléaire.

M. Lyash : Je vais vous donner mon point de vue. Personnellement, je crois que la bonne solution, c'est d'avoir un équilibre, ce qui inclut le secteur nucléaire — le nucléaire ne peut pas être la seule solution —, et tout dépend de la région, car chacune a ses ressources, sa culture et ses objectifs.

Cela dit, concernant l'énergie nucléaire en particulier, 75 centrales sont en construction dans le monde actuellement et on prévoit en construire plusieurs centaines d'autres. Aux États-Unis, quatre unités sont en construction et seront mises en service au cours des trois prochaines années, et la semaine dernière, la criticité de la première nouvelle unité a eu lieu, la première en 20 ans, à la centrale nucléaire de Watts Bar.

Il est vrai que l'Allemagne a décidé de renoncer à l'énergie nucléaire, ce qui crée tout un défi pour ce pays, en ce sens que ses émissions de CO2,à mesure que ses unités ferment, sont à la hausse, et elle se tourne, en fait, vers la construction de centrale de charbon, pour remplacer une partie de cela.

Les Japonais sont en train de redémarrer leurs unités, après l'accident de Fukushima.

Si je pense à l'énergie nucléaire, c'est un secteur qui en est encore aux premières étapes de ce qui constitue une vague de construction pour les centrales de troisième génération, et beaucoup de travaux sont en cours pour déployer la quatrième génération, qui inclut de petits réacteurs modulaires. Je crois que c'est important, car bien que l'énergie nucléaire ne puisse pas faire partie de la solution dans chaque région, elle continuera d'être un volet de la solution dans bon nombre de régions du monde.

Le sénateur Massicotte : Monsieur Larlee, voulez-vous dire quelque chose?

M. Larlee : Je suis d'accord avec M. Lyash à cet égard. Comme je l'ai mentionné dans mes observations, il faudra se tourner vers le nucléaire pour combler le besoin en alimentation de base à mesure que nous fermerons nos centrales à combustible fossile. À ce moment-ci, il ne semble pas y avoir de ressource renouvelable pouvant combler ce besoin dans notre région, de sorte que dans notre planification, nous examinerons assurément la possibilité de combler ce manque à l'aide de l'énergie nucléaire.

Le sénateur Massicotte : Monsieur Lyash, compte tenu de votre point de vue à ce sujet, pourquoi prévoyez-vous mettre la centrale de Pickering hors service d'ici 20 ans?

M. Lyash : Les unités de Pickering étaient une version initiale de cette conception du réacteur. Elles sont petites selon les normes nucléaires, et elles sont en train d'atteindre la fin de leur première durée de vie concernant les composants de réacteur. Nous devons prendre une décision quant à la centrale de Pickering : faire des investissements très massifs pour la remettre en état et prolonger sa durée de vie, comme nous le faisons pour les unités de Darlington, ou la mettre hors service.

Les aspects économiques sur la centrale de Pickering nous indiquent que sa remise en état n'est pas un investissement judicieux en raison de sa conception préliminaire et de la taille des unités. Les arguments économiques dans le cas de la centrale de Darlington, c'est-à-dire que le prix de l'électricité provenant de ses réacteurs se situera entre 7 et 8 cents par kilowattheure pendant 30 ans, ne s'appliquent pas dans le cas de la centrale de Pickering. Sur le plan des aspects économiques, il est préférable de construire une nouvelle centrale plutôt que de remettre en état la centrale de Pickering actuelle, ce qui est différent de la situation des centrales de Darlington et de Bruce.

Le sénateur Black : Je veux continuer à parler de l'énergie nucléaire, s'il vous plaît. Permettez-moi avant tout de vous remercier des exposés informatifs que vous nous avez présentés tous les deux; ils nous sont très utiles dans le cadre de nos discussions.

Je voudrais maintenant discuter de ce qu'on appelle le petit réacteur. Comment le définissez-vous?

M. Lyash : Le terme qui est le plus utilisé, c'est « petits réacteurs modulaires », et les mots « petit » et « modulaire », pris individuellement ou ensemble, sont ce qui les caractérise.

« Petit » peut signifier tout réacteur dont la capacité est de 50 à 250 mégawatts. Un réacteur de deuxième génération a une capacité d'environ 1 000 mégawatts.

« Modulaire » est peut-être le mot le plus important en ce sens que l'idée, c'est qu'avec des petits réacteurs, entre 50 et 250 mégawatts, il peut s'agir d'une conception modulaire. Essentiellement, le réacteur peut être fabriqué en usine plutôt que sur le terrain et il peut être livré à un endroit préparé pour l'installation.

Concernant les avantages qu'offrent les petits réacteurs modulaires, c'est que puisqu'ils sont petits, ils requièrent moins d'engagement de capital d'un seul coup; ils peuvent être fabriqués dans des conditions contrôlées de manière à respecter le calendrier de construction et à assurer la qualité; et parce qu'ils sont de petite taille, il est plus facile de les intégrer dans un système de transition. Si un plus gros réacteur nécessite des mises à niveau importantes pour son intégration, c'est moins le cas pour les petits réacteurs modulaires.

Le sénateur Black : La collectivité de Fort McMurray, dans le nord-est de l'Alberta, est la source de l'exploitation des sables bitumineux. En théorie, pouvez-vous imaginer une situation où un petit réacteur jouerait un rôle précis pour cette collectivité et ces projets?

M. Lyash : Oui, certainement. Tout d'abord, l'énergie nucléaire joue un rôle très important lorsqu'elle est jumelée à des énergies renouvelables. Il y a un réel effet synergique lorsqu'on combine des ressources intermittentes, comme des ressources renouvelables, avec des ressources ayant un facteur de haute capacité, comme les ressources hydroélectriques ou nucléaires. Il y a donc un avantage dans ce cas.

Pour une collectivité comme Fort McMurray, je ne connais pas le secteur, mais d'après ce que je sais, il me semble qu'avec un petit réacteur modulaire et de l'énergie nucléaire, non seulement on pourrait produire de l'électricité, mais il y a des conceptions qui peuvent être les producteurs directs de chaleur, ce qui pourrait être une source soutenant l'industrie et ces sites d'exploitations des sables bitumineux qui ne dépend pas du carbone.

Le sénateur Black : Merci beaucoup. Je change de sujet, et j'aimerais parler de l'idée d'exporter de l'énergie partout au Canada. Avez-vous un point de vue à cet égard? Vous vivez plus près de ma province, l'Alberta, que vous, évidemment. On discute souvent de l'idée d'envoyer en Alberta de l'énergie provenant de la Colombie-Britannique, du Manitoba ou de l'Ontario, par des lignes de transport d'énergie, qui n'existent pas présentement. Avez-vous une opinion là-dessus?

M. Lyash : Je vous dirais deux choses à cet égard. Je crois qu'il y a de bonnes raisons, lorsqu'il s'agit de construire un réseau, d'avoir un volume de ressources important dans la région desservie. Il existe des problèmes inhérents au transport d'énergie sur une longue distance à divers égards : stabilité, fiabilité et déséquilibre économique. Il faut tenir compte de ces facteurs.

Cela dit, lorsque j'imagine un avenir à faibles émissions de carbone, je vois une importante électrification de l'économie comme l'une des voies pour y parvenir. Si c'est le cas, un réseau de transport de l'énergie plus solide qui permet un transport plus important d'énergie entre les provinces, et même l'exportation vers les États-Unis au moment où ce pays essaie de résoudre son très grand problème de dépendance au charbon, constitue un aspect très important.

La réserve que je veux formuler, c'est que même si un réseau de transport plus solide et un transport d'énergie plus fluide sont des éléments importants, tout comme les autres aspects, ils ne constituent pas à eux seuls la solution. À mon avis, chacun de ces éléments contribue à un équilibre.

Le sénateur Black : Or, vous proposez que nous envisagions d'établir un réseau national, n'est-ce pas? Je pense que c'est ce que vous disiez.

M. Lyash : Pour ce faire, je crois qu'on n'a pas nécessairement besoin d'un effort généralisé, mais si nous axons nos efforts là-dessus au moment où nous présentons nos plans concrets sur la façon dont le réseau d'électricité doit changer si l'électrification est nécessaire pour une décarbonisation en profondeur, il y aura des contraintes dans le réseau de transport, des contraintes précises qui peuvent être repérées; s'ils sont concentrés sur l'investissement, ce sera bénéfique.

Le sénateur Black : Merci.

La sénatrice Seidman : Monsieur Larlee, mes questions portent sur l'exposé que vous nous avez présenté, en particulier sur l'énergie et l'efficacité, la réduction et l'orientation de la demande et le réseau électrique intelligent. Notre comité en a beaucoup discuté et a entendu parler des espoirs et des rêves que cela suscite. De toute évidence, vous avez de l'expérience et, comme vous le dites, je crois que la situation de votre province est assez unique du fait de votre partenariat avec Siemens. En quoi votre façon d'adapter ce réseau intelligent est-elle différente des autres provinces? Est-ce peut-être en raison de ce lien particulier? De quelle façon les consommateurs acceptent-ils ou considèrent-ils cela?

M. Larlee : Merci. Tout d'abord, ce qui nous distingue dès le départ, c'est qu'en établissant nos liens avec Siemens, nous avons adopté une démarche planifiée. Siemens a amené son expérience mondiale dans les services d'électricité. Nous avons élaboré un plan sur 10 ans pour moderniser le réseau de façon logique et systématique. Ce faisant, nous avons créé de nouvelles capacités au sein de l'organisation, de nouvelles capacités organisationnelles et de nouveaux produits et services pour nos clients. Le premier aspect, c'est que tout cela est le fruit d'un plan.

En ce qui concerne la réaction de nos clients, faire participer nos clients et probablement un plus grand défi que la technologie. La technologie existe et les problèmes sont gérables, mais la mobilisation des clients, c'est une tout autre affaire. C'est pourquoi jusqu'à il y a un an environ, nous nous sommes concentrés presque entièrement sur l'efficacité énergétique afin de favoriser les échanges avec les clients et de lancer cette discussion sur l'énergie avec eux.

De même, nous travaillons à la technologie. Nous en sommes à un point, dans notre collaboration avec Siemens et le Conseil national de recherches, où nous travaillons à mettre au point les technologies et nous nous préparons à commencer la mise en œuvre de notre projet pilote. J'ai mentionné le chauffage de l'eau et des locaux et la connexion de ces charges à notre centrale virtuelle en offrant cette technologie aux consommateurs.

La sénatrice Seidman : Vous dites qu'il est fort difficile d'amener les consommateurs à comprendre la technologie que vous offrez, à y être ouverts et favorables, et à l'utiliser. Il s'agit à bien des égards du plus grand défi. D'après vous, qu'est-ce qui explique cette hésitation?

M. Larlee : Eh bien, le problème touche l'ensemble du marché. Tous les autres services publics rencontrent ces mêmes difficultés. Pour bien des consommateurs, l'énergie n'est tout simplement pas une priorité. Leur interaction avec le service se limite à consulter leur facture d'électricité une fois par mois. Cela leur demande probablement une petite réflexion de quelques minutes, et c'est tout. Ils ne réfléchissent pas plus à l'énergie.

Encourager la participation des consommateurs, éveiller davantage leur attention et leur intérêt, et les inciter à interagir exigeront des efforts continus. Nous avons instauré ce dialogue avec les consommateurs au moyen de programmes d'efficacité énergétique, et nous continuerons à le faire évoluer.

La sénatrice Seidman : Croyez-vous que les générations futures, plus à l'aise avec la technologie interactive, seront plus ouvertes au genre de formule que votre société et d'autres au pays pourraient proposer à l'avenir? Je viens du Québec, et je sais qu'Hydro-Québec tente aussi d'interagir davantage avec ses clients. Mais c'est une question de comportement. Il faut évidemment que les Canadiens changent leur comportement et comprennent qu'ils doivent interagir plutôt que de seulement consulter leur facture une fois par mois. Croyez-vous qu'il s'agira d'un changement générationnel?

M. Larlee : Je pense que les nouvelles générations s'adapteront beaucoup plus vite. Il va sans dire que j'ai horreur des généralisations, mais ces gens sont évidemment habitués à la technologie. Ils ont l'habitude des appareils portatifs, et certains ne peuvent pas imaginer s'en passer. Ils ont l'habitude d'interagir fréquemment avec les médias sociaux, qui joueront d'ailleurs un rôle prépondérant dans la participation des consommateurs. Il existe de nombreux programmes réussis qui utilisent ce genre de technologie. Pour ceux d'entre nous qui connaissent bien la technologie et qui sont prêts à l'utiliser, il ne fait aucun doute que cette méthode nous permettra d'échanger avec les consommateurs.

La sénatrice Ringuette : J'ai des questions à l'intention de nos deux témoins. La première s'adresse au représentant du Nouveau-Brunswick.

Pour commencer, monsieur Larlee, je suis surprise en tant que Néo-Brunswickoise que votre planification stratégique ne mentionne aucune autre initiative nucléaire. Je suis aussi très étonnée de constater que 35 p. 100 de l'électricité produite ou consommée dans la province provient d'un combustible ou du diesel — et je ne parle pas du charbon employé dans la partie nord de la province. C'est beaucoup, surtout dans le cadre de l'étude que nous réalisons en ce moment même. Que proposez-vous afin de diminuer ces 35 p. 100 d'utilisation des combustibles fossiles, sans égard au charbon puisque vous nous avez présenté votre plan relatif à la centrale au charbon? Comment Énergie NB compte-t-elle réduire ses 35 p. 100 de production au moyen de combustibles fossiles?

M. Larlee : Je crois avoir dit en exposé que 70 p. 100 de notre production est sans émissions, de sorte que 30 p. 100 de la production utilise des combustibles fossiles, principalement du charbon et du gaz naturel. Notre consommation de mazout lourd est assez limitée.

Notre exposé porte vraiment sur la gestion de la transition. Nous voulons que l'abandon des combustibles fossiles concorde avec la mise hors service de ces actifs — prenons l'exemple du charbon et de la centrale électrique de Belledune, étant donné que c'est la principale source d'émissions. L'usine devrait être mise hors service vers 2043, de sorte que nous serons alors essentiellement, voire entièrement affranchis des combustibles fossiles.

La sénatrice Ringuette : Mais comment allez-vous procéder?

M. Larlee : Vous voulez savoir comment nous allons faire?

La sénatrice Ringuette : Oui.

M. Larlee : Eh bien, comme je l'ai dit, nous croyons y arriver au moyen d'une combinaison d'énergies renouvelables, en intégrant de grandes quantités d'énergies renouvelables à l'aide de notre initiative de réduction et de déplacement de la demande, et en ayant recours à l'énergie nucléaire pour combler la production de base.

La sénatrice Ringuette : Monsieur Larlee, j'ai fait quelques recherches. Je sais, et Énergie NB le sait fort probablement aussi, que la vallée de la rivière Saint-Jean est un emplacement de choix pour des éoliennes en raison de la capacité constante de production éolienne du terrain. Cela dit, je connais aussi de nombreux projets d'éoliennes dans le nord-ouest de la province qui ont été proposés à Énergie NB ces huit dernières années, mais qui ont été refusés.

Étant donné qu'il faudra à l'avenir produire de l'électricité en émettant moins de gaz à effet de serre pour les consommateurs du Nouveau-Brunswick, comment pouvons-nous accepter vos actions passées relativement à la possibilité de construire des éoliennes dans le nord-ouest de la province? Comment pouvons-nous avoir l'assurance que vous allez examiner ces projets et veiller à ce qu'ils fassent partie de la production électrique sans émissions de la province? Vous avez déjà refusé ces initiatives au cours des sept ou huit dernières années.

Je suis une Néo-Brunswickoise inquiète de l'avenir. Je sais que d'excellents projets ont été soumis, mais ils ont pourtant été refusés par votre organisation. Comment allez-vous étudier ces projets pour qu'ils fassent partie de la transition et permettent d'abandonner les combustibles fossiles au Nouveau-Brunswick?

M. Larlee : La société Énergie NB est tenue chaque année, par la loi provinciale, de présenter un plan à long terme à l'organisme de réglementation. Ce plan doit aussi être repris et renouvelé tous les trois ans. En 2017, nous présenterons un nouveau plan de ressources intégré, comme nous l'appelons, qui s'attarde essentiellement aux besoins d'approvisionnement en électricité de la population provinciale, ainsi qu'aux solutions les plus économiques et écologiquement viables permettant de répondre à ce besoin.

Depuis 2005, nous avons signé des accords d'achat d'énergie avec plusieurs parcs éoliens, y compris ceux du nord-est de la province. Mais pour l'instant, Énergie NB n'a pas besoin de nouvelle production d'énergie pour satisfaire les besoins. À l'avenir, nous nous tournerons effectivement vers l'éolienne et d'autres sources d'énergies renouvelables pour répondre à ces besoins.

Il y a deux éléments dont nous devons tenir compte lorsque nous évaluons quelles ressources peuvent répondre à nos besoins. D'une part, dans quelle mesure la ressource cadre-t-elle dans le système? Autrement dit, faut-il surtout répondre à une demande de pointe, et uniquement lors des grands froids d'hiver, ou s'agit-il de besoins uniformes qu'il faut combler à longueur d'année? Aussi, les ressources correspondent-elles à ces besoins? Nous savons tous que le vent peut varier et que l'énergie est uniquement produite lorsque celui-ci souffle. Il faut donc une autre production de réserve, de sorte que nous devrions peut-être construire des centrales au gaz pour compléter la production des parcs éoliens si la ressource ne suffit pas à répondre à la demande.

D'autre part, il faut évidemment tenir compte du coût : s'agit-il de la ressource la moins coûteuse pour répondre au besoin? Voilà le genre d'éléments que nous examinerons à l'avenir.

La sénatrice Ringuette : Vous vous engagez donc à examiner les projets de parcs éoliens du nord-ouest de la province pour qu'ils fassent partie de votre proposition de 2017?

M. Larlee : Dans le cadre de notre plan de ressources intégré, nous ne nous attardons à aucun projet particulier. Nous évaluons le coût d'un type de production dans son ensemble. Si cette ressource particulière s'avère possible et qu'elle est choisie dans le plan, nous partirons alors à la recherche de projets précis. Si la ressource est retenue, nous examinerons assurément les projets d'un bout à l'autre de la province afin de sélectionner les meilleurs.

La sénatrice Ringuette : D'après les renseignements que j'ai en main, je peux vous assurer qu'il s'agit d'un projet valable. C'est peut-être parce qu'il se trouve dans le nord-ouest de la province qu'il n'obtient pas l'attention qu'il mérite de la part d'Énergie NB.

Puis-je poser une deuxième question rapide?

Le président : Je peux aussi vous placer sur la liste du deuxième tour, mais vous pouvez poser votre question.

La sénatrice Ringuette : Monsieur Lyash, la question des déchets nucléaires est importante. Lorsque vous parlez des petits réacteurs modulaires, ceux-ci pourraient-ils réutiliser les déchets nucléaires? Nous savons que les déchets nucléaires actuels peuvent être réutilisés par les nouveaux réacteurs — je ne suis pas une scientifique. Ces réacteurs pourraient-ils utiliser une deuxième fois les déchets nucléaires actuels?

M. Lyash : La réponse à votre question est oui et non, selon la technologie choisie. Permettez-moi de prendre un instant pour vous expliquer.

Lorsque les déchets sont rejetés, la présente génération de réacteurs n'aura utilisé qu'environ le tiers de l'énergie disponible dans le combustible employé. Sur les plans de la physique ou de la géométrie, le combustible ne peut plus être employé pour ce modèle de réacteur. Le combustible peut alors être entreposé de façon sécuritaire pendant très longtemps après son rejet du réacteur. Si la question vous intéresse, je serai ravi de vous faire visiter la centrale nucléaire de Darlington; je pourrai vous montrer notre combustible épuisé ainsi que la façon dont nous l'entreposons.

On peut également disposer des déchets en toute sécurité au moyen d'un dépôt dans des formations géologiques profondes, si celui-ci a été conçu de façon sûre. C'est d'ailleurs ce que fait la Société de gestion des déchets nucléaires pour le Canada. L'objectif est de créer ce genre de dépôts pour les déchets.

Il y a des modèles de réacteurs Génération IV qui sont conçus pour employer ces déchets, les retraiter et les réutiliser afin d'en extraire de l'énergie supplémentaire et, au bout du compte, de diminuer radicalement le volume et la radiotoxicité des déchets résiduels. Les petits modèles de réacteurs modulaires d'aujourd'hui ne sont pas conçus ainsi. Ils utilisent plutôt un combustible qui ressemble à celui de la génération actuelle de réacteurs. Il y a un autre modèle de réacteurs en train en train d'être mis au point qui est justement conçu pour réutiliser les déchets.

La sénatrice Ringuette : Qui s'occupe de la conception?

M. Lyash : Il y a plusieurs concepteurs, y compris une société canadienne du nom de TerraPower. Terrestrial Energy est un modèle commandité par Bill Gates.

D'autres pays suivent la conception de ces modèles de très près. Plus particulièrement, la Chine a conçu son programme nucléaire de façon à employer une série de modèles de réacteurs différents dans le but de clore la boucle du combustible. Il se pourrait donc que le premier réacteur Génération IV soit construit en partenariat entre Terrestrial Energy et la société chinoise de placement dans l'énergie nucléaire. Le projet est actuellement à l'étude.

Le sénateur Mockler : Comme le président l'a dit, notre ordre de renvoi vise à déterminer, pour en faire rapport, les effets de la transition vers une économie à faibles émissions de carbone. Je conviens bel et bien que tout le monde a un rôle à jouer à cet égard. Je souhaite aborder une possibilité qui n'a pas encore été explorée, à savoir une économie à faibles émissions de carbone qui permettrait d'atteindre les objectifs du Canada en matière de réduction des émissions de gaz à effet de serre. Nous avons tous un rôle à jouer. Nous devons définir quels sont les aspects préoccupants afin de soumettre des recommandations pertinentes au gouvernement fédéral, et je pense que vous pouvez être certains que notre président et notre vice-président déposeront ce rapport. Le Nouveau-Brunswick est une des préoccupations. Tout comme la sénatrice Ringuette, je conviens que les projets qui ont été mis de côté doivent être examinés de nouveau.

J'ai deux petites questions. J'aimerais parler du courant-jet, étant donné qu'un coût y est associé. Il vient du Midwest américain et transporte toutes les émissions de carbone de la région vers l'Est du Canada. Monsieur Lyash, le courant-jet achemine aussi certaines de vos émissions jusqu'à l'Est du pays — et je dirai même jusqu'au Nouveau- Brunswick puisque c'est ma province.

Le sénateur Massicotte : Combien d'argent voulez-vous?

Le sénateur Mockler : Nous sommes une province rurale, et les émissions de carbone auront une incidence sur l'ensemble des régions rurales au pays. Une question a été posée, mais je vais continuer de parler du Nouveau- Brunswick. Comme le sénateur Black l'a proposé, ne pourrions-nous pas réenvisager une opération nucléaire plus modeste pour enfin affirmer que nous avons un programme permettant de réduire les émissions?

J'aimerais connaître l'opinion des deux témoins. Comment pouvons-nous établir le coût associé aux émissions des États-Unis et de l'Ontario qui aboutissent dans l'Est du Canada? Celles-ci auront bel et bien un coût, qui sera soit refilé aux consommateurs, soit payé par les industries qui devront fermer leurs portes.

Je vais commencer par M. Larlee. Quelle est l'approche relative au nucléaire et, comme la sénatrice Ringuette l'a dit...

[Français]

...pour le côté éolien et peut-être même pour le projet de Rivière-Verte?

[Traduction]

M. Larlee : Une fois que nos installations aux combustibles fossiles seront mises hors service, toute initiative visant à réduire les émissions de carbone du Nouveau-Brunswick nécessitera deux types d'investissements nucléaires. Il faudra remplacer ou remettre en état la centrale nucléaire de Point Lepreau, et mettre en place un nouveau mode de production d'énergie pour remplacer la production à partir de combustibles fossiles qui sera mise hors service en 2040. À moins qu'il n'y ait d'autres progrès technologiques importants dont nous ne sommes pas au courant, il semble bel et bien à ce stade-ci que la nouvelle technologie nucléaire de pointe fera partie de la solution.

Le fait de devancer la fermeture de nos installations de production à partir de combustibles fossiles, et plus particulièrement de la centrale de Belledune, entraînerait des coûts. Ce coût comporterait deux volets. D'une part, cette énergie devrait être remplacée. Certains pourraient penser que nous voudrions évidemment la remplacer au moyen d'une production sans émissions. Il est probable que le moins cher soit qu'Énergie NB importe cette énergie de remplacement. Ce n'est toutefois pas une solution à long terme particulièrement intéressante étant donné que notre système et la plupart des systèmes d'électricité sont conçus pour être autonomes. Autrement dit, le recours à l'importation et à l'exportation repose uniquement sur un fondement économique, mais au besoin, il doit toujours être possible de répondre à ses propres besoins intérieurs. L'industrie est tenue de pouvoir le faire. Il faut absorber le coût non seulement du remplacement de l'énergie, mais aussi de la construction d'installations de production qui permettront de répondre à nos besoins.

Comme je l'ai dit dans mon exposé, nous n'avons fait que vous donner un exemple. Si la centrale de Belledune devait fermer ses portes 10 ans plus tôt pour réduire l'empreinte carbone de la province, le prix payé par les habitants du Nouveau-Brunswick grimperait de 39 p. 100 en 2030. C'est toute une incidence. Compte tenu de l'économie provinciale axée sur l'électricité — en raison des industries qui s'y trouvent —, une telle hausse pourrait avoir des répercussions désastreuses. Voilà l'information que nous voulions soumettre au comité.

Le sénateur Mockler : Il nous faut une formule. Quelqu'un doit payer la note. Nous devons mettre en place un mécanisme nous permettant d'aborder les émissions de carbone de façon juste et équitable. Je suis en faveur d'un programme pouvant réduire les émissions, mais quelqu'un doit payer. Prenons l'exemple des émissions des États-Unis et quelque peu de l'Ontario qui sont transportées par le courant-jet. Vous n'êtes pas à blâmer puisque c'est la faute du courant. Quelqu'un devra payer, sans quoi nous allons perdre nos industries manufacturières du Nouveau-Brunswick et du Canada atlantique. Monsieur Lyash, compte tenu de votre expérience au Canada et aux États-Unis, pouvez-vous me dire comment nous pourrions créer une formule qui nous permettrait de fixer un prix pour le carbone qui nous arrive d'ailleurs?

M. Lyash : Je vous remercie de la question, et la réponse est loin d'être simple. Je vais commencer par établir quelques distinctions physiques.

Je crois que nous devons commencer à penser aux enjeux relatifs aux émissions de gaz à effet de serre, au CO2 et au changement climatique d'une façon bien différente que nous l'avons fait pour d'autres questions environnementales. Par exemple, les problèmes d'oxydes d'azote, d'oxydes sulfuriques, de smog et de brume sèche qui polluent l'air, et que nous avons réduits au fil des ans, sont des polluants régionaux. Ils sont émis dans un secteur et ont une incidence sur l'environnement de la région. Ils peuvent aussi être transportés vers des régions adjacentes et y avoir une incidence.

L'impact du CO2, lui, n'est pas régional, mais bien mondial. Le carbone se répand dans l'atmosphère et les océans, peu importe d'où proviennent les émissions. Son impact est mondial, contrairement au smog et à la brume sèche dont l'impact est régional. Le problème est différent.

La deuxième distinction que j'aimerais établir, c'est que si l'on élimine les émissions de NOx et de SOx et les problèmes de brume sèche, il y aura une baisse considérable de ces éléments dans l'atmosphère et la situation s'améliorera très rapidement. Si l'on cessait d'utiliser le charbon, la différence serait très rapidement notable, par exemple, à Toronto. Une fois émise, la molécule de carbone reste très longtemps dans l'atmosphère ou l'océan. Même si l'on élimine les émissions de CO2, il faudrait attendre très longtemps avant de voir une diminution des niveaux de CO2 dans l'atmosphère. Donc, le but en réduisant les émissions est d'éviter l'accumulation. Cela dit, je ne crois pas qu'il s'agisse d'un problème régional ou que le problème soit la façon dont le CO2 est transporté. Le problème, c'est le volume des émissions de CO2 dans le monde.

Sur le plan économique, cela ne règle pas le problème que vous avez soulevé, soit comment payer pour nos émissions de carbone. Si vous souhaitez fixer un prix et répartir également la responsabilité, vous devez mettre en place un mécanisme pour cela.

Les deux mécanismes déjà utilisés sont la taxe sur le carbone et le système de plafonnement et d'échange. Toutefois, ces mécanismes ne sont vraiment utiles que lorsque l'empreinte est grande; l'impact économique est plutôt disparate lorsque l'empreinte est trop petite. Ce sujet fait l'objet de plusieurs débats économiques. Certaines provinces canadiennes ont choisi la taxe sur le carbone, d'autres le plafonnement et l'échange. Les deux mécanismes présentent des avantages.

Pour revenir à ce que vous disiez, un tel mécanisme financier devrait pourvoir évoluer et s'appliquer à très grande échelle pour équilibrer l'impact. Je ne pourrais pas vous donner une solution à ce problème. Il s'agit d'un débat économique, politique et social. Je suis ingénieur; je n'ai pas les compétences pour vous répondre.

Au sujet du nucléaire, je dirais que si l'objectif est de réduire le carbone et que le résultat souhaité est la réduction des émissions de carbone, l'option qui aura le plus d'impact serait la réduction des émissions de carbone des centrales électriques. Toutefois, il y a un coût financier à cela, mais c'est dans ce secteur que la réduction des émissions de carbone serait la plus rentable. La façon de procéder, c'est de construire des centrales nucléaires, hydroélectriques ou d'énergie fossile, si cette option est disponible, avec une capacité de captage et de stockage de carbone et une pénétration adéquate ou une réserve d'énergie renouvelable. Ces centrales pourraient ensuite être utilisées pour réduire les émissions de carbone associées au transport, au chauffage des habitations et aux secteurs industriels. Comme nous l'avons déjà souligné, si nous choisissons cette option, les décisions doivent être prises maintenant, car les délais de production pour certaines de ces centrales sont très longs.

Le sénateur Patterson : Monsieur Lyash, j'aimerais vous poser une question au sujet de la centrale électrique au charbon de Thunder Bay. Vous dites que la conversion de cette centrale à la biomasse a permis de sauver des emplois et de stimuler l'économie locale. Vous êtes certainement au courant du rapport de la vérificatrice générale de l'Ontario. Selon ce rapport, la conversion de cette centrale n'est pas rentable. Semble-t-il que le coût de cette centrale est 25 fois plus élevé que la moyenne des centrales alimentées à la biomasse en Ontario et que la centrale importe de la biomasse de l'étranger. Pourtant, au début, on disait qu'elle aiderait à créer des emplois locaux dans l'industrie forestière.

J'aimerais savoir si, selon vous, il y a des leçons à tirer de cette expérience. Pourquoi les coûts sont-ils si élevés à la centrale de Thunder Bay? Cette conversion a-t-elle créé des emplois locaux dans l'industrie forestière, comme l'espéraient les responsables?

M. Lyash : Oui, je suis au courant du rapport de la vérificatrice générale. Il compare le coût d'une unité d'énergie produite à la centrale de Thunder Bay ou à la centrale d'Atikokan, les deux seules centrales alimentées à la biomasse en Ontario, au coût d'une unité d'énergie produite à l'aide d'autres sources d'énergie — le nucléaire et le gaz naturel. La conclusion de la vérificatrice générale est exacte. Par unité d'énergie, la production est plus dispendieuse dans ces deux centrales.

À mon avis, elle n'a pas accordé suffisamment d'importance à la seconde valeur d'une centrale électrique, soit sa capacité. On ne paie pas uniquement pour les lumens produits, mais aussi pour avoir la certitude que si l'on actionne l'interrupteur, il y aura de l'électricité. Du point de vue du réseau, les centrales de Thunder Bay et d'Atikokan ont été conservées essentiellement pour leur capacité. La transmission d'électricité d'est en ouest est très limitée. La perte de cette capacité dans l'Ouest entraînerait des problèmes de fiabilité les jours de pointe.

La façon équitable d'analyser la question n'est pas de comparer les mégawatts-heure générés par ces centrales à ceux d'une centrale nucléaire, mais bien de comparer le coût de production au coût de construction d'une nouvelle centrale dans cette région. On constate alors que le coût de production des centrales de Thunder Bay et d'Atikokan est tout à fait raisonnable. Je ne dis pas que c'est l'approche la plus économique, mais le coût est raisonnable. Techniquement, le rapport de la vérificatrice générale est juste, mais il n'offre pas une perspective complète de la situation.

Au sujet des emplois, la centrale d'Atikokan utilise des biocarburants générés et transformés localement. Donc, puisqu'elle utilise des produits forestiers locaux, elle a un impact sur l'emploi dans la région.

Pour la centrale de Thunder Bay, nous avons décidé d'utiliser la biomasse avancée. Malheureusement, il n'y a aucun fournisseur local. Donc, c'est vrai que nous importons ce biocarburant. Nous avons choisi cette option, car il était possible de convertir la centrale à la biomasse avancée sans avoir à investir de capitaux, ou très peu. Aucun investissement important n'a été nécessaire pour la conversion, contrairement à la centrale d'Atikokan où il a fallu investir des sommes considérables. À l'époque, nous voulions acquérir de l'expérience dans l'alimentation à la biomasse et voir les résultats sans avoir à investir des capitaux qui pourraient être irrécupérables.

Si la biomasse devient l'option de choix et que son utilisation augmente, nous savons comment attirer des producteurs de biomasse avancée et où situer une telle usine pour alimenter plusieurs centrales. Mais, ce n'est pas le genre d'investissement que l'on fait sans connaître l'avenir de la biomasse, qui est lié au plan d'action sur les changements climatiques.

J'espère que cela répond à votre question.

Le sénateur Patterson : Je ne veux pas trop m'attarder au rapport de la vérificatrice générale, mais celui-ci souligne que l'Ontario a investi plus de 2,3 milliards de dollars entre 2006 et 2014 pour la conversion de centrales. Selon la vérificatrice générale, cet investissement n'a pas nécessairement entraîné des économies de coûts pour la province, car il semble y avoir des périodes où ces centrales ont une surproduction indésirable et que ces surplus d'électricité doivent être exportés à des prix habituellement moins élevés que ce qu'il en coûte pour les produire. L'autre option, c'est de réduire la production des centrales, mais même si elles ne produisent pas d'énergie, il faut tout de même en assurer les coûts.

Si la vérificatrice générale a raison — et j'aimerais connaître votre opinion à ce sujet —, cela semble une façon plutôt perverse de procéder. Les résidants doivent payer pour être plus efficaces sur le plan énergétique. Êtes-vous d'accord avec cette analyse et peut-on corriger la situation?

M. Lyash : À mon avis, les conclusions de la vérificatrice générale se présentent en deux parties. D'abord, l'observation selon laquelle il y a des périodes de surproduction en Ontario. C'est vrai. Ces surplus sont habituellement attribuables à l'intermittence des sources d'énergie renouvelables. Souvent, les éoliennes et les panneaux solaires produisent le plus en dehors des périodes de pointe, ce qui crée des surplus d'énergie.

Il y a trois options pour utiliser ces surplus. La première, le stockage. Mais, pour cela, il faut une capacité de stockage. Je crois que cette technologie évoluera au cours des 10 prochaines années. La deuxième, réduire la production. La troisième, vendre cette électricité en dehors du réseau selon la valeur de récupération. On se tourne généralement vers cette troisième option.

C'est la nature des énergies renouvelables. Il faut tenir compte de cette capacité intermittente sur une période de temps donnée dans la planification du réseau. De ce point de vue, à long terme, on espère pouvoir s'ajuster et réduire ces surplus.

La OPG ne dirige aucun programme de conservation. Donc, je peux seulement parler de ces programmes de façon générale. Ils sont dirigés par des exploitants de systèmes électriques indépendants. Je crois qu'à long terme, les programmes de conservation seront importants, s'ils ciblent les secteurs où il est plus difficile de réduire les émissions de carbone. Autrement dit, s'il est très difficile de réduire les émissions dans un secteur donné, l'efficacité énergétique et la conservation sont des moyens très rentables d'y parvenir.

La province a mis l'accent sur l'élaboration de programmes de conservation. La vérificatrice générale se demande s'il s'agit d'une sage décision, compte tenu des surplus d'électricité, et c'est une question tout à fait légitime. À mon avis, les programmes de conservation et d'efficacité énergétique doivent être élaborés en ciblant le long terme. Le but de la conservation n'est pas d'éliminer une unité d'énergie aujourd'hui, mais bien d'assurer un niveau d'efficacité qui permet d'éliminer une unité d'énergie pour toujours. Le retour sur investissement se réalise beaucoup plus tard.

Le sénateur Massicotte : C'est une discussion intéressante. J'aimerais revenir un peu sur ce qui a déjà été dit. Monsieur Lyash, j'aimerais d'abord savoir quelle est la fourchette de coûts pour la construction d'une nouvelle centrale, que ce soit une centrale photovoltaïque, éolienne, hydroélectrique, nucléaire ou alimentée à la biomasse? Quel est le coût total, de nos jours?

M. Lyash : Les prix associés à l'énergie éolienne et solaire ont beaucoup baissé. Par exemple, la centrale photovoltaïque que nous construisons en ce moment produira de l'électricité à environ 15,5 cents le kilowattheure. Ce sera notre point de référence. C'est beaucoup moins élevé qu'auparavant. Pour l'énergie éolienne, c'est encore moins. On parle de 10 cents le kilowattheure.

Je tiens à préciser que je parle ici du prix de l'énergie. La valeur de la capacité est limitée en raison de l'intermittence de la source. On ne peut pas demander de l'énergie au besoin; il faut prendre ce qu'il y a. À ce coût, il faut ajouter le coût de la solution de rechange utilisée lorsque la production est intermittente. Je dois le signaler, sinon ce sera comme comparer des pommes et des oranges.

En moyenne, le prix de l'énergie hydroélectrique est d'environ 4,6 cents le kilowattheure.

Le sénateur Massicotte : Je suis désolé de vous interrompre, mais cela inclut le coût historique. Si vous deviez construire une centrale aujourd'hui, combien cela coûterait-il?

M. Lyash : Entre 10 cents et 20 cents le kilowattheure, peut-être un peu plus. Tout dépend de la nature de la centrale. La prochaine centrale hydroélectrique sera toujours plus dispendieuse à construire que la précédente.

Le sénateur Massicotte : Et, pour une centrale nucléaire et une centrale alimentée à la biomasse?

M. Lyash : Pour le nucléaire, c'est environ 0,06 $ ou 0,07 $. Lorsque nous aurons terminé la modernisation des centrales de Darlington, en raison des capitaux investis, ce sera entre 0,07 $ et 0,08 $.

Le sénateur Massicotte : Encore une fois, je dirais que c'est un peu injuste. Il y a des coûts historiques. Combien coûterait une nouvelle centrale?

M. Lyash : Oui, entre 0,07 $ et 0,08 $, c'est un très bon prix pour une centrale actuelle. Une nouvelle centrale serait un peu plus dispendieuse.

Le sénateur Massicotte : Combien?

M. Lyash : Habituellement entre 0,08 $ et 0,10 $, selon le type de réacteur. Ce sont des hypothèses, car nous n'avons pas encore le prix final pour ces réacteurs de génération IV.

Le sénateur Massicotte : Et la biomasse?

M. Lyash : Cela varie. J'hésite à vous donner un prix, car on pourrait utiliser la biomasse seule ou avec un autre carburant. Cela dépend si la biomasse est produite à l'échelle locale ou...

Le sénateur Massicotte : Mais, selon ce que vous avez dit plus tôt, vous semblez confirmer les conclusions de la vérificatrice générale selon lesquelles les carburants de remplacement sont généralement plus dispendieux.

M. Lyash : C'est vrai. Je dirais que pour la biomasse, on parle de 0,15 $ à 0,35 $.

Le sénateur Massicotte : Je vous suis très reconnaissant de ces explications, car c'est la première fois que quelqu'un nous donne de tels chiffres. Le prix pour les centrales nucléaires est beaucoup moins élevé que la moyenne internationale, selon les données que j'ai consultées. Ce qui me plaît, c'est que vous dites qu'il faut avoir une source de soutien à l'énergie éolienne ou solaire. Vous ne pouvez pas affirmer que ces chiffres sont concurrentiels, car dans certains cas, vous devez produire de l'électricité à deux reprises, disons.

M. Lyash : Effectivement.

Le sénateur Massicotte : Je crois que c'est très important. J'aimerais aussi ajouter...

M. Lyash : J'aimerais simplement ajouter que l'autre chose dont il faut tenir compte concernant les énergies renouvelables — et, malgré ce que je vais vous dire, je suis un défenseur de l'énergie renouvelable —, c'est qu'il y a une certaine limite à la pénétration de l'énergie renouvelable dans un réseau. Il faut ensuite prévoir une source de soutien. Une fois le niveau de pénétration atteint, s'il faut ensuite utiliser un carburant fossile ou du gaz naturel, par exemple, pour produire l'électricité, les taux de CO2 ne baisseront pas; ils vont augmenter. C'est ce qui s'est produit en Allemagne.

Le sénateur Massicotte : Vous dites également, dans votre présentation, que votre coût concurrentiel est 40 p. 100 moins élevé que d'autres producteurs en Ontario. Cela ne me surprend pas, puisque vous avez des coûts irrécupérables et des coûts historiques considérables que vos concurrents n'ont peut-être pas. Je viens du Québec. J'ai lu plusieurs articles concernant vos contrats d'achat, notamment en ce qui a trait à l'énergie éolienne et solaire, deux solutions très dispendieuses. Selon certains articles, en raison de vos coûts historiques et de ces contrats, vous ne pouvez pas concurrencer les utilisateurs industriels. Vous êtes nouveaux dans vos fonctions. Ce n'était pas votre décision. En rétrospective, il est toujours plus facile de dire que c'était une mauvaise décision pour votre province et votre positionnement économique. Qu'en pensez-vous?

M. Lyash : Comme vous le soulignez, ces décisions ont été prises avant que j'arrive, mais je crois qu'il peut être instructif d'analyser le passé. C'est ce que j'ai fait pour essayer de mieux comprendre où nous en sommes.

Historiquement, le prix de l'électricité, en Ontario, a été très bas pendant très longtemps. Depuis 2005, après avoir cessé d'utiliser le charbon et conclu les accords de tarification incitative, notamment, il a fallu investir dans les infrastructures. Je ne dirais pas que le réseau de transmission et de distribution était peu fiable, mais sa fiabilité n'était pas acceptable. Il a donc fallu investir dans le réseau, ce qui n'est pas inhabituel. Après un certain temps, il faut soit investir dans l'environnement, soit investir dans des infrastructures plus fiables.

L'Ontario est monté assez rapidement dans la courbe de prix. À mon avis, le principal problème est que l'investissement et l'augmentation de l'écart de prix ont eu lieu sur une courte période.

Lorsqu'on regarde les prix absolus en Ontario, en faisant abstraction du fait qu'il s'agissait peut-être d'une augmentation par rapport à des prix artificiellement bas associés à une demande comprimée, ce ne sont sans doute pas parmi les plus bas, mais en Amérique du Nord, ils sont comparables à ce qu'on voit dans les États américains du nord- est et du centre du littoral de l'Atlantique, ou même sur la côte Ouest. Ils sont certainement plus élevés que dans le sud- est des États-Unis, où l'on dépend beaucoup de l'énergie nucléaire, et que dans les États du Midwest, qui dépendent considérablement du charbon. Certes, les prix de l'énergie en Ontario ont augmenté, et cette augmentation a été rapide en raison des investissements qui ont été faits. Ils correspondent aux prix qu'on observe dans plusieurs régions des États-Unis. Cela a une incidence sur la compétitivité.

J'aimerais faire une dernière observation. À mon avis, l'Ontario a déjà pris plusieurs mesures que d'autres administrations n'ont pas encore prises. Je m'attends à une réduction de cet écart de prix lorsque les autres régions commenceront à prendre de telles mesures.

Le sénateur Massicotte : Selon moi, cela a été rapide parce que vous avez d'anciens coûts — très concurrentiels —, comme les coûts du nucléaire, mais que vous avez aussi, d'après ce que je comprends, beaucoup de contrats d'énergie éolienne et peut-être des contrats d'énergie solaire pour lesquelles les prix sont très supérieurs à 15 $ le kilowattheure. Évidemment, en raison de l'évolution des technologies, les nouveaux concurrents auront des prix beaucoup plus faibles, ce qui sera pour vous un désavantage pendant une longue période, étant donné la durée des contrats. Vous semblez être d'accord avec cette affirmation.

Permettez-moi de continuer; le président va bientôt m'interrompre.

Le président : En effet.

Le sénateur Massicotte : J'ai une dernière question. Je tiens d'abord à vous féliciter pour ce qui est des Premières Nations. Vous avez trouvé une façon de résoudre de nombreux problèmes avec les Premières Nations dans votre province. Comme vous le savez, c'est un enjeu majeur au Canada. J'aimerais avoir vos commentaires. Quels sont les succès à cet égard? Je suis un homme d'affaires. Il est toujours très facile d'en arriver à un accord lorsqu'on cède sur tous les plans. Certaines provinces seraient probablement d'avis que l'Ontario a fait trop de concessions et que la province est un mauvais exemple. Pouvez-vous mettre tout cela en perspective?

M. Lyash : Je pense que la clé de nos succès auprès des Premières Nations est très simple; c'est une question de confiance. Il faut du temps; il faut une organisation déterminée à maintenir un dialogue et une relation à long terme, à établir un lien de confiance et ensuite à saisir toutes les occasions d'établir des partenariats, lorsque c'est avantageux pour elle. Je ne ferai rien avec les Premières Nations si cela ne représente pas un avantage pour l'entreprise. Cela dit, toutes les activités menées en collaboration avec les Premières Nations devraient aussi être avantageuses pour ces collectivités. C'est donc l'approche que nous préconisons, et celle que nous avons utilisée pour régler les anciens différends. Nous avons reconnu que les sociétés qui nous ont précédées ont construit des barrages et des centrales hydroélectriques, ont détourné des cours d'eau et modifié le niveau des lacs, ce qui a eu une incidence sur ces collectivités, sans qu'elles aient eu leur mot à dire, du moins pas adéquatement. Le processus a permis aux deux parties de convenir que cette façon de faire était inadéquate et que cela ne devrait plus se reproduire. À mon avis, on ne peut aller de l'avant que lorsque les deux parties l'ont compris et en sont convaincues.

Toutefois, cela constitue un excellent tremplin, car les partenariats avec les Premières Nations ajoutent une valeur considérable. Nous cernons les projets conjointement. Nous entreprenons alors un dialogue sur la pertinence du projet, sur ses effets à long terme et la façon de les atténuer, et sur les mesures à prendre protéger ces territoires pour les générations futures. Il y a toujours suffisamment de points communs pour en arriver à une solution mutuellement avantageuse.

Ensuite, la mise en œuvre d'un projet comporte trois objectifs, essentiellement. Nous voulons que les Premières Nations soient copropriétaires d'une partie du projet. Cela signifie qu'elles ont les mêmes avantages que l'entreprise, soit un accès prévisible, sur une période de temps, à des liquidités, un revenu net, et cetera. Nous essayons de leur offrir des avantages comparables à ceux de l'entreprise.

Le deuxième objectif consiste à trouver des entreprises des Premières Nations pour la prestation des services contractuels pendant la construction des centrales, lorsqu'elles en ont la capacité, et nous essayons d'aider les Premières Nations qui ont besoin de notre aide à le faire. Ces entreprises doivent toutefois avoir des coûts concurrentiels; nous n'attribuons pas un contrat dont le coût est trop élevé simplement parce qu'il s'agit d'une entreprise autochtone. Nous avons toutefois remarqué que nous n'avons pas à le faire, car il y a des entreprises capables de fournir des services de soutien de qualité. Cela a un effet d'entraînement dans la collectivité.

Le troisième objectif est de favoriser l'embauche des Autochtones, tant chez les entrepreneurs qu'au sein d'OPG à l'étape de la construction. L'idée est d'avoir, après le projet, des gens qui ont acquis une formation, de l'expérience et des compétences. Je suis très fier de dire qu'au terme de notre projet du cours inférieur de la rivière Mattagami, des membres des Premières Nations que nous avions embauchés comme apprentis avaient une carte d'ouvrier qualifié et avaient donc des possibilités de faire carrière dans ce domaine.

La sénatrice Seidman : Si vous le permettez, j'aimerais revenir à la question de la collaboration régionale. Monsieur Larlee, vous en avez souligné l'importance et je la comprends très bien, étant donné que je viens du Québec, l'une des régions partenaires du Nouveau-Brunswick. Nous connaissons la complexité de cette collaboration, car elle est liée aux infrastructures et au commerce interprovincial. Nous savons aussi, comme vous l'avez souligné tous les deux, qu'il y a une meilleure collaboration nord-sud qu'est-ouest.

Dans ce contexte précis, monsieur Larlee, j'aimerais revenir à un point que vous avez mentionné dans votre exposé. Vous avez indiqué que la collaboration s'est révélée très avantageuse dans le passé et que c'est un des facteurs essentiels si on veut rendre le secteur de l'électricité plus efficace et plus propre à l'avenir. Il est important que la collaboration régionale soit fondée sur des principes d'affaires judicieux si on veut obtenir des résultats avantageux pour tous, c'est-à- dire pour les entreprises et les consommateurs, je suppose. Si vous pouviez nous en dire plus à ce sujet, cela nous serait utile. Vous pourriez ajouter quelques observations également, monsieur Lyash.

M. Larlee : En raison de sa position géographique, le Nouveau-Brunswick peut effectuer des transactions d'énergie — achat et vente — avec n'importe quel partenaire, peu importe qu'il soit à l'ouest, à l'est, au nord ou au sud. Nous avons toutes les connexions possibles. Pour nous, l'avenir n'est pas lié à la connexion avec d'autres réseaux, mais à l'expansion des réseaux existants.

Nous avons un double avantage : lorsque nos prix d'électricité sont concurrentiels, nous pouvons vendre notre production à nos clients du nord-ouest, et quand ils ne le sont pas, nous pouvons acheter de l'électricité d'Hydro- Québec. L'Île-du-Prince-Édouard est un excellent client; nous comblons tous les besoins en énergie de la province, à l'exception de l'énergie éolienne qu'elle produit. Nous cherchons à renforcer notre relation avec la Nouvelle-Écosse grâce à un projet pilote d'acheminement conjoint qui nous permettrait de mettre nos ressources en commun et de les acheminer ainsi.

L'avenir est prometteur, surtout en raison de la demande en énergie renouvelable dans les États du nord-est des États-Unis. On y réalise là-bas des travaux qui nécessiteront de grandes quantités de ressources renouvelables. Nous sommes convaincus que notre partenariat avec nos partenaires régionaux nous permettra d'être un fournisseur important dans ce marché et de satisfaire à la demande. D'importants travaux d'infrastructures seront nécessaires. Cela aura pour effet d'améliorer la collaboration régionale et ce sera avantageux pour les Néo-Brunswickois; on parle du rendement du capital investi dans ces infrastructures et des recettes provenant de la vente d'énergie.

Notre histoire démontre que les échanges commerciaux avec le Québec et la Nouvelle-Angleterre ont grandement contribué à la faiblesse des tarifs d'électricité du Nouveau-Brunswick, tarifs qui sont parmi les plus bas de la région. Pour nous, rechercher des débouchés à l'échelle régionale, c'est dans l'ordre des choses.

La sénatrice Seidman : Monsieur Lyash?

M. Lyash : Ontario Power Generation a des activités commerciales avec les États du Midwest et du nord-est des États-Unis, tant pour la capacité que pour l'énergie. Nous sommes membres des organisations d'exploitants indépendants de réseau; nous cherchons donc des occasions d'affaires dans ces réseaux. Au Canada, nous avons des échanges commerciaux avec l'ouest et l'est. Nos échanges avec le Québec sont liés à la vente et à l'achat de capacité. Il s'agit d'une relation commerciale mutuellement avantageuse, en raison des périodes de pointe de l'hiver et de l'été. Chaque année, nous comblons la demande, de part et d'autre, et cette relation sera maintenue.

À mon avis, il sera inévitable, à long terme, de consentir des investissements supplémentaires pour éliminer les contraintes et élargir le commerce à l'échelle régionale et interprovinciale, de même qu'avec les États-Unis, en particulier si on cherche réellement à réduire les émissions de carbone. Cela nous ramène aux aspects d'ordre pratique.

Comme je l'ai indiqué, je pense que les meilleures solutions pour réduire les émissions de carbone seront des solutions régionales, selon les ressources des diverses régions. Le Québec a un réseau de production d'hydroélectricité formidable. C'est tout le contraire dans le Midwest des États-Unis. Dans ce contexte, les endroits où il faudra construire des infrastructures semblent évidents, si on veut prendre de l'expansion dans une région et y intégrer un plus large éventail de ressources. J'ai l'impression que ces occasions seront plus claires au fil du temps, lorsqu'on aura pris la pleine mesure des effets d'un plan d'action en matière de changements climatiques et qu'on passera à la planification des réseaux.

La sénatrice Seidman : Les témoins précédents nous ont présenté des opinions divergentes sur les répercussions de la construction d'infrastructures et sur la tâche colossale que cela représente au pays. J'aimerais avoir votre avis à cet égard, étant donné que vous avez clairement indiqué que c'est un aspect important. Par exemple, quel rôle le gouvernement fédéral pourrait-il jouer pour veiller au développement optimal des infrastructures, en particulier si on tient compte des avantages pour les consommateurs?

M. Lyash : La construction d'infrastructures majeures est toujours une tâche colossale. Je ne sais pas lequel des deux est le plus difficile : construire une centrale nucléaire ou une ligne de transmission à haute tension? Il est peut-être plus facile de construire une centrale nucléaire.

Que peut faire le gouvernement? Je crois qu'en raison de leur complexité, les investissements en infrastructure comportent un risque et ont une incidence sur les collectivités et les gens d'une façon ou d'une autre. Le gouvernement doit établir des politiques claires en ce qui concerne le développement d'un programme nucléaire ou un programme d'intégration de lignes de transmission, par exemple, et qu'il doit en souligner la valeur. La valeur se calcule toujours à long terme, tandis que la population se concentre toujours sur les effets à court terme. Il est donc très important d'avoir une politique qui cerne la valeur de ces choses en les situant dans un contexte à long terme. Il s'agit notamment d'établir un équilibre entre la tarification pour les consommateurs, la protection de l'environnement et les retombées économiques.

En outre, la construction d'infrastructures de ce genre requiert une main-d'œuvre formée, qualifiée et disponible. Donc, selon moi, le deuxième aspect est lié à l'appui à la formation, à l'éducation et à l'acquisition des compétences nécessaires pour la construction de ce type d'ouvrage.

Sans vouloir dire qu'il faut prendre des raccourcis — il n'y en a pas —, le troisième aspect pourrait être lié à l'équilibre nécessaire pour les processus d'évaluation, de délivrance des permis et d'approbation. Dans le cadre de ce processus, la participation des parties concernées doit être optimale, les divers points de vue doivent être entendus et les mesures d'atténuation adéquates doivent être prises. L'équilibre, ici, c'est que les processus doivent être conçus de façon à favoriser la prise de décision et les progrès. Sans de tels processus, soit on perd la confiance du public, soit le projet d'infrastructure ne progresse pas. L'absence de progrès est le principal facteur de l'augmentation des coûts, n'est-ce pas? Les retards et les interruptions sont les principaux facteurs contributifs de l'augmentation des coûts des grands projets.

Le président : J'aimerais poser deux ou trois questions. Notre but est de savoir quel sera le prix pour le consommateur moyen — monsieur et madame Tout-le-monde — pour atteindre les cibles fixées par le gouvernement.

Je vous remercie tous les deux de vos exposés; ils étaient excellents et contenaient beaucoup de renseignements.

D'ici 2030, le but fixé par le gouvernement est de réduire les émissions dans l'atmosphère de 291 mégatonnes. Après avoir entendu vos exposés, messieurs, j'aimerais vous demander votre avis : est-il possible d'atteindre cet objectif? Selon vous, quel pourrait être le coût? J'ai entendu le représentant du Nouveau-Brunswick indiquer que si la province devait fermer sa centrale au charbon d'ici 2030, ses tarifs d'électricité pourraient augmenter de 39 p. 100. Monsieur Lyash, vous avez indiqué que nous pourrions décarboniser le secteur de l'électricité. D'après les données, cela ne nous donne que 58 tonnes. Quand on sait d'où vient M. Larlee, cela signifie une hausse importante des tarifs.

Aucun de vous deux n'habite la Saskatchewan ou l'Alberta, où les possibilités d'avoir recours à d'autres modes de production d'électricité sont peu nombreuses. C'est là que l'on trouve le plus de centrales au charbon. Essentiellement, elles utilisent le charbon comme carburant parce qu'elles ont une réserve de quelques centaines d'années; certaines de leurs centrales ont été construites il y a bien longtemps. Pour ces provinces, c'était la façon la plus facile de produire de l'électricité.

J'aurai d'autres questions, mais croyez-vous que ces cibles sont atteignables — environ 300 mégatonnes d'ici 2030 — en faisant certaines des choses dont vous avez parlé? J'aimerais aussi savoir, selon vous, quels seraient les tarifs d'électricité en 2030 si vous réussissiez à décarboniser le secteur.

Permettez-moi de vous donner un autre élément d'information. Pour le secteur pétrolier et gazier, on parle de 242 mégatonnes d'ici 2030. C'est une estimation. Si vous pouviez éliminer ces émissions complètement, ce qui est presque impossible, vous ne parviendriez même pas à atteindre la cible.

Aidez-moi un peu, pour que les Canadiens... C'est ce que nous voulons faire. Personne ne dit aux Canadiens combien cela va coûter.

Le sénateur Mockler : Exactement.

Le président : Je vais être franc : je ne dis pas que nous ne devrions pas faire ces choses, mais nous voulons savoir quel sera le coût pour les consommateurs, en fin de compte, car ce sont eux qui paient. Certains pourraient perdre leur emploi, leurs tarifs augmenteraient, et cetera. Aidez-moi, s'il vous plaît.

M. Lyash : Permettez-moi simplement de préciser une chose : je n'ai jamais voulu laisser entendre que décarboniser le secteur de l'électricité serait facile. C'est seulement la tâche la plus facile parmi un ensemble de tâches très difficiles.

Le président : Dites-le à l'Alberta.

M. Lyash : Je le dis au sens large du terme. Comme vous l'avez souligné, les ressources diffèrent d'une région à l'autre. Y arriver nécessitera des efforts plus ou moins considérables, selon l'endroit où on se trouve.

Sont-elles atteignables? Personnellement, je n'en suis pas certain, pour être honnête. Je ne crois pas qu'il est raisonnable de s'attendre à ce que tout soit clair à ce moment-ci. Porter attention à cet enjeu et faire le nécessaire pour trouver les solutions pratiques qui peuvent être mises en œuvre, en se concentrant sur les solutions qui ont le plus d'incidence à moindre coût, c'est un processus.

Je crois que nous en sommes seulement au début du processus, et à cette étape, je prendrais garde de ne pas écarter certaines solutions de façon à avoir tous les outils possibles. À certains égards, il convient de voir cela comme un large éventail de mesures pouvant être prises à l'échelle nationale et à l'échelle de l'économie, tout en reconnaissant, en fin de compte, qu'il faudra des solutions adaptées aux régions et aux processus propres à l'industrie et que la réduction des émissions de carbone se fera pas au même rythme dans tous les secteurs.

Désolé de ne pouvoir vous répondre concernant les coûts, mais j'ai l'impression que les coûts se préciseront lorsque des mesures concrètes seront prises.

Est-ce que je crois que vous pouvez atteindre les objectifs fixés pour 2030 et 2050? Je pense que c'est possible du point de vue technique. C'est moins sûr du point de vue social. À suivre.

Le président : Monsieur Larlee?

M. Larlee : Je ne crois pas que nous savons actuellement que l'électricité devrait se trouver au premier rang. Nous avons commencé à réaliser des travaux avec un institut de recherche au Royaume-Uni, l'Université du Nouveau- Brunswick et des organismes fédéraux se trouvant au Nouveau-Brunswick pour réaliser une analyse approfondie de la question suivante seulement : où obtiendrons-nous le meilleur rendement sur notre investissement dans la réduction des émissions de CO2 dans notre région? Une analyse assez détaillée est requise. Il est évident que le secteur de l'électricité peut contribuer grandement à cela, mais qu'en est-il des autres secteurs? Ils devront participer et produire leurs données.

Une analyse économique approfondie sur les incidences de la réduction de l'empreinte de carbone dans tous les secteurs de notre économie serait intéressante et nous permettrait de nous attaquer en premier à la tonne qui coûte le moins cher. Dans notre secteur, nous pouvons faire l'analyse. Nous savons combien cela coûterait de réduire les émissions de Belledune d'une mégatonne, car nous remplacerions simplement l'électricité non produite par de l'électricité importée, mais cela ne dit pas tout et nous poursuivons nos efforts pour tenter d'avoir un portrait global de la situation.

Le président : Merci pour vos réponses. C'est exactement ce que nous cherchons à déterminer.

Peut-être que vous pouvez y réfléchir et nous aider un peu. Vous n'avez pas à nous donner une réponse aujourd'hui, mais aidez-nous un peu. Envoyez une lettre à la greffière dans laquelle vous nous direz ce qui arrivera selon vous. La lettre sera distribuée aux membres du comité.

Lorsque vous dites que vous « importeriez de l'électricité pour compenser l'électricité non produite », je trouve génial que vous puissiez faire cela, car les gens du Nouveau-Brunswick veulent s'assurer qu'ils auront assez d'électricité pour allumer leurs lumières. Je comprends ces choses-là.

Monsieur Lyash, j'aurais dû indiquer où j'ai vu cela dans vos notes, mais je pense que vous avez dit que nous pourrions atteindre l'objectif d'ici 2050 et mettre ainsi fin à l'utilisation de combustibles fossiles. J'hésite à croire cela, pour être tout à fait honnête, étant donné l'énorme place qu'occupent les combustibles fossiles dans nos vies avec l'électricité. Cependant, j'entends souvent qu'« il suffit de construire une éolienne et une centrale solaire et le monde se portera bien », mais cela, c'est de l'électricité.

Il y a deux sources d'énergie totalement distinctes. Le gaz naturel ou le pétrole sont présents dans nos vies au même titre que l'électricité et n'ont pourtant rien en commun avec elle.

M. Lyash : Oui.

Le président : Quand vous dites que nous pourrions mettre fin à l'utilisation de combustibles fossiles, que voulez- vous dire? Vous êtes ingénieur, alors vous pouvez m'aider à comprendre. Peut-on fabriquer du plastique à partir d'électricité? Je ne sais pas. Peut-être que toutes ces choses que nous produisons actuellement à partir de produits pétroliers pourraient être fabriquées à partir d'électricité. Vous êtes ingénieur, alors vous pouvez m'éclairer.

M. Lyash : Ce que je disais se rapportait uniquement à l'électricité.

Le président : D'accord.

M. Lyash : Ce que je disais, c'est que nous ne verrons peut-être pas la fin de la consommation de combustibles fossiles, mais au moins un changement considérable de son rôle.

J'irais même jusqu'à dire que je ne suis pas convaincu du tout que nous arrêterons de consommer des combustibles fossiles, même pour la production d'électricité. Je crois que nous continuerons d'en consommer, mais que leur rôle changera considérablement. Nous les utiliserons de manière intermittente comme source d'alimentation complémentaire qui émettra du carbone dans l'atmosphère, quoiqu'en quantité réduite, ou nous continuerons à les utiliser pour produire de l'électricité et mettrons au point des technologies de captage et de piégeage du carbone provenant de sources comme le gaz naturel.

Je crois que l'élimination des combustibles fossiles dans d'autres secteurs de l'économie qui émettent du CO2 est une tâche très difficile. Encore une fois, je suis loin de croire que nous éliminerons totalement l'utilisation des combustibles fossiles qui émettent du CO2; je pense qu'ils auront toujours un rôle important à jouer. Il faut se demander comment diminuer progressivement les émissions de carbone par unité d'énergie consommée.

Pour ce qui est de l'utilisation de gaz naturel et de pétrole dans des produits comme les fertilisants, les plastiques et les polymères, je ne vois pas de solution de remplacement. La question est la suivante : comment peut-on réduire les incidences du cycle de vie du carbone dans ces activités? Comment peut-on réduire l'intensité des émissions de carbone inhérente à l'extraction, à la production et au processus de fabrication dans lequel les combustibles fossiles sont utilisés?

Le président : D'accord, merci. Désolé, je vous ai mal compris lorsque vous avez fait votre exposé. Je n'ai pas entendu le mot électricité. Je croyais que vous disiez que nous pourrions éliminer le carbone. Je vais relire vos notes. Merci beaucoup.

Il nous reste un peu moins que 10 minutes. J'ai pris pas mal de temps. Cela ne plaît habituellement pas au comité que je fasse cela, mais j'aime cela. Et je suis minuté, alors je sais que mon temps de parole est écoulé. Il y a deux autres intervenants qui ont chacun une question rapide et ensuite nous devrons libérer les lieux pour laisser place à un autre comité.

Le sénateur Mockler : Monsieur le président, vous recevez toujours mon appui lorsque vous posez la bonne question au nom de Marthe et Fred.

Je veux m'aventurer en terrain inconnu et profiter de vos connaissances à tous les deux. Je ne suis pas d'accord, par exemple, pour dire que nous devons fermer ceci ou cela pour réduire les émissions. Je crois que lorsque nous avons un projet d'édification de la nation comme le projet Énergie Est...

Le sénateur Massicotte : Je me demandais pourquoi personne n'en avait parlé encore.

Le sénateur Mockler : Nous transportons des hydrocarbures sur les routes et surtout par rail, et des milliers de wagons arrivent toutes les 48 heures à la plus grande raffinerie du Canada, qui se trouve à Saint John, au Nouveau- Brunswick. Regardons maintenant ce pipeline. Il contribuera à consolider la nation.

D'après votre expérience, existe-t-il une formule où tout le monde paye? Une formule qui, à long terme, crée de la richesse, des emplois et donne au Nouveau-Brunswick, au Canada et à toutes les provinces ce qu'ils veulent? Est-ce qu'une telle formule existe? Je veux d'abord m'adresser à l'ingénieur.

Le président : Vous n'auriez peut-être pas dû nous dire que vous étiez ingénieur.

M. Lyash : Je ne suis pas un ingénieur spécialisé dans le pétrole ou le gaz naturel, et je ne travaille pas non plus dans ce domaine, alors je ne peux malheureusement pas vous donner beaucoup de détails à ce sujet.

Le sénateur Mockler : D'accord. Monsieur Larlee, pouvez-vous m'aider? J'essaie d'éviter de faire grimper le coût de notre électricité de 29 p. 100.

M. Larlee : Tout comme la plupart des Néo-Brunswickois, je pense.

Absolument. Énergie NB appuie le projet Énergie Est et est entièrement prête à répondre aux besoins en électricité du projet au Nouveau-Brunswick une fois qu'il sera approuvé et au moment de sa construction.

Je ne suis pas non plus ingénieur pétrolier. Je suis ingénieur, mais je suis assez content de ne pas avoir soulevé la question avant.

Le président : Bon, nous pouvons prendre encore quelques questions.

M. Larlee : Le projet ira de l'avant en supposant que l'industrie en a besoin et nous serons là pour l'appuyer le cas échéant.

Le sénateur Patterson : Monsieur Lyash, c'est avec intérêt que j'ai entendu vos observations concernant les petites centrales nucléaires — 50 mégawatts et plus — qui sont portatives et peuvent être déplacées sur un site prêt à les accueillir. Je comprends qu'il y a derrière cela un concept de piles à combustible, qui sont retirées comme des piles que l'on recharge. Je viens d'une région qui dépend totalement du diesel pour produire de l'électricité et où il y a des mines, existantes ou prévues, qui pourraient facilement utiliser 50 mégawatts. Quel est l'état d'avancement de cette technologie? Et où cette technologie est-elle mise au point?

M. Lyash : Aucune de ces centrales n'est en exploitation ou en construction actuellement. Différentes conceptions de ces centrales en sont à un stade avancé de développement et sont étudiées par la United States Nuclear Regulatory Commission et la Commission canadienne de sûreté nucléaire en vue de l'octroi d'un permis. Je pense que la première de ces conceptions devrait franchir l'obstacle de l'autorisation au cours des deux prochaines années, et passer ensuite à l'étape de la centrale de démonstration initiale ou du déploiement initial.

Aux États-Unis, les deux sites qui les examinent activement sont le site de Hanford, dans l'État de Washington, et le Oak Ridge National Laboratory, au Tennessee. Ce sont deux sites d'installations nucléaires qui appartiennent au gouvernement et qui pourraient être au cœur du premier déploiement de ces petits réacteurs modulaires. La Chine déploie également de grands efforts pour accueillir la première vague de réacteurs.

Il m'est difficile de dire à quel moment il sera possible de visiter un réacteur de ce type en exploitation, mais je dirais que c'est probablement vers 2025 que nous pourrons voir les premiers réacteurs du genre en exploitation.

Le sénateur Patterson : Merci.

Monsieur Larlee, nous connaissons tous le projet de Muskrat Falls, sur le cours inférieur du fleuve Churchill au Labrador, et savons que l'électricité renouvelable sera acheminée vers les provinces maritimes. Vous avez parlé des liens interrégionaux. Aurez-vous la capacité d'accéder à cette électricité lorsqu'elle sera disponible grâce à la ligne de transmission que vous avez actuellement avec la Nouvelle-Écosse?

M. Larlee : Oui, nous l'avons. Selon ce que je comprends, il y aura de l'énergie excédentaire disponible à l'interface et nous y aurons accès, car s'il y a une capacité de transmission, Emera ou Nova Scotia Power seront en mesure d'utiliser le réseau de transmission du Nouveau-Brunswick pour l'acheminer vers le marché.

Le sénateur Patterson : Merci.

Le président : Merci à tous.

(La séance est levée.)

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