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ENEV - Comité permanent

Énergie, environnement et ressources naturelles

 

Délibérations du Comité sénatorial permanent de l'Énergie,
de l'environnement et des ressources naturelles

Fascicule nº 11 - Témoignages du 9 juin 2016


OTTAWA, le jeudi 9 juin 2016

Le Comité sénatorial permanent de l'énergie, de l'environnement et des ressources naturelles se réunit aujourd'hui à huis clos, à 8 h 7, à huis clos, afin d'étudier un projet d'ordre du jour et en public, afin d'étudier les effets de la transition vers une économie sobre en carbone et l'ébauche d'un budget.

Le sénateur Paul J. Massicotte (vice-président) occupe le fauteuil.

[Traduction]

Le vice-président : Chers collègues, nous avons ici un budget pour nos déplacements proposés dans le cadre de notre étude sur l'économie sobre en carbone. Le budget prévoit trois séjours : un séjour d'une fin de semaine en Saskatchewan, en Alberta et en Colombie-Britannique et deux séjours plus courts, un dans le sud de l'Ontario et l'autre à Montréal, au Québec.

Si vous êtes d'accord, j'ai besoin d'une motion pour que la demande d'un budget spécial d'études de 154 983 $ visant la tenue d'une mission d'enquête dans l'Ouest, en Ontario et à Montréal dans le cadre de l'étude du comité sur la transition vers une économie sobre en carbone pour l'exercice en cours prenant fin le 31 mars 2017 soit approuvée aux fins de présentation au Comité permanent de la régie interne, des budgets et de l'administration.

La motion est-elle proposée? Vous plaît-il, mesdames et messieurs les sénateurs, d'adopter cette motion?

Des voix : Oui.

Le vice-président : La motion est adoptée.

[Français]

Je souhaite à tous la bienvenue à cette séance du Comité sénatorial permanent de l'énergie, de l'environnement et des ressources naturelles. Je m'appelle Paul Massicotte, je représente la province du Québec au Sénat et je suis vice- président de ce comité.

J'aimerais souhaiter la bienvenue aux membres du public qui sont présents dans la salle et à ceux qui nous regardent à la télévision. Les audiences du comité sont ouvertes au public et elles sont diffusées sur notre site Internet à l'adresse sen.parl.gc.ca. Vous trouverez aussi plus de renseignements sur l'horaire des témoins sous l'onglet « Comités du Sénat ».

J'invite maintenant les sénateurs autour de la table à se présenter, en commençant par mon collègue à ma droite.

[Traduction]

Le sénateur MacDonald : Michael MacDonald, de la Nouvelle-Écosse.

[Français]

La sénatrice Ringuette : Pierrette Ringuette, du Nouveau-Brunswick.

[Traduction]

Le sénateur Patterson : Dennis Patterson, du Nunavut.

Le sénateur Mockler : Percy Mockler, du Nouveau-Brunswick.

[Français]

Le vice-président : J'aimerais aussi présenter notre personnel, en commençant par notre greffière, Marcy Zlotnick, et nos deux analystes de la Bibliothèque du Parlement, Sam Banks et Marc LeBlanc.

Nous en sommes aujourd'hui à notre quatorzième réunion dans le cadre de notre étude sur les effets de la transition vers une économie à faibles émissions de carbone, transition nécessaire pour atteindre les objectifs annoncés par le gouvernement du Canada en matière de réduction des émissions de gaz à effet de serre.

C'est avec plaisir que nous accueillons nos témoins pour la réunion d'aujourd'hui : M. Eric Denhoff, président- directeur général de l'Association canadienne de l'hydrogène et des piles à combustible, Mme Andrea Kent, présidente de la firme Industries renouvelables Canada, ainsi que M. Barrie Kirk, directeur général du Canadian Automated Vehicles Centre of Excellence.

Je vous remercie tous les trois d'avoir accepté de témoigner devant nous aujourd'hui. Je vous invite tout d'abord à faire tour à tour votre déclaration liminaire, après quoi nous passerons à la période des questions et des réponses. La parole est à vous.

[Traduction]

Eric Denhoff, président-directeur général, Association canadienne de l'hydrogène et des piles à combustible : Nous avons déjà fourni tous les documents. Je ne vais pas lire chaque mot puisque je pense qu'ils sont à la disposition des sénateurs.

Notre exposé comporte essentiellement deux volets. Il vise d'abord à souligner que le Canada est, fait inhabituel, un chef de file au chapitre de cette technologie, au même titre qu'il l'est dans certains domaines, comme l'aérospatiale et d'autres secteurs de haute technologie. Au Canada, environ 2 000 employés dans cette petite industrie, qui génère environ 200 millions de dollars en revenus annuels, dont la plus grande partie provient d'exportations.

Nous produisons des piles à combustible destinées au secteur de l'automobile, à l'alimentation électrique fixe, aux autobus et à l'alimentation électrique de secours et pouvant servir à une nouvelle approche mystérieuse qu'on appelle la conversion de l'électricité en gaz, qui utilise le surplus d'énergie éolienne ou solaire sans aucuns frais ou presque. L'hydrogène est produit, puis peut être injecté dans des conduites à gaz, qui servent de réservoirs, puis renvoyé dans le réseau électrique de la même manière, ou il peut être injecté dans le réseau de distribution électrique au moyen de piles à combustible. Les entreprises canadiennes ont vendu cette technologie au plus grand fournisseur d'électricité en Allemagne, E.ON, et elle est utilisée de manière remarquable dans le Nord, dans une mine de l'Arctique appelée la mine Raglan, où on a déjà économisé plus deux millions de litres de carburant diesel cette année grâce à cette technologie sans émissions.

Ce qui nous pose problème, c'est la recherche de possibilités d'utilisation domestique accrue de véhicules à piles à combustible sans émissions et d'autres applications de piles à combustible. Lorsqu'elles emploient de l'hydrogène renouvelable, les émissions produites par ces piles deviennent presque nulles, et la quantité d'hydrogène renouvelable disponible augmente considérablement grâce à l'utilisation des surplus d'énergie solaire et éolienne et de la biomasse.

Même si les véhicules électriques à batterie permettent également de réduire les émissions — et nous n'avons aucune objection ni aucune plainte au sujet des véhicules électriques à batterie, nous croyons qu'elles ont des applications également fantastiques —, les automobiles à pile à combustible sont les seules à pouvoir répondre aux besoins d'une autonomie plus grande et à la demande en réapprovisionnement rapide — elles peuvent être réapprovisionnées en deux ou trois minutes — des consommateurs à ce moment-ci, et leur efficience est le triple de celle d'un véhicule à moteur à combustion interne.

Par exemple, si nous avions 5 000 véhicules à pile à combustion sur les routes d'ici 2020, les émissions de gaz à effet de serre diminueraient de 14 750 tonnes par année; s'il y avait 20 000 véhicules d'ici 2025 et 100 000 véhicules d'ici 2035, la réduction pourrait être, au bout du compte, de 290 000 tonnes de GES.

Chose intéressante, au Canada, nous produisons des piles à combustible que nous exportons partout dans le monde, mais nous n'en utilisons pas beaucoup nous-mêmes. À Vancouver, Daimler/Mercedes a investi plus de 70 millions de dollars pour construire la première usine au monde entièrement automatisée de fabrication de piles à combustible. Plus de 50 employés y travaillent afin de commercialiser rapidement à grande échelle une production de plusieurs milliers de piles à combustible par année qui seront renvoyées en Allemagne et installées dans les voitures Mercedes vendues là- bas.

Deux cent vingt-cinq de nos employés travaillent dans une coentreprise de Daimler et Ford à Vancouver qui effectue de la recherche et du développement en vue de la commercialisation de piles à combustible. Ballard a conclu une entente de services d'ingénierie de cinq ans avec Volkswagen d'une valeur d'environ 100 millions de dollars.

Cette année, tout à coup, nous vendons des piles à combustible comme de petits pains chauds partout dans le monde, à l'exception du Canada.

Hydrogenics, une entreprise située à Toronto, a vendu pour plus de 100 millions de dollars de piles à combustible destinées à des autobus et à des tramways en Chine. L'entreprise a vendu à la France plus de 100 ensembles de piles à combustible destinées à des trains.

Cette année seulement, Ballard a vendu 300 autobus à la Chine et a mis la dernière main à ses soumissions concernant, je crois, une commande de 25 autobus destinés aux États-Unis, et l'entreprise soumissionnera sous peu à l'égard d'un appel d'offres concernant 142 autobus à pile à combustible ne générant pas d'émissions destinés à l'Europe. Bien évidemment, 50 ou 100 autobus circulent déjà sur les routes.

Hyundai offre la location de véhicules à pile à combustible au Canada. Vous pouvez maintenant en louer à Vancouver. Il y en a 15 ou 20 en circulation actuellement, et la première a été louée à Toronto il y a quelques semaines.

Des entreprises ont pris de l'expansion en Europe, comme Greenlight Innovation, qui a ouvert un bureau en Allemagne et qui vend de l'équipement servant à la mise à l'essai de piles à combustible dans le monde entier.

Seule la Colombie-Britannique offre un incitatif de 6 000 $ par voiture si vous achetez une voiture à pile à combustible, contrairement à l'Ontario, qui offre possiblement des subventions combinées totalisant environ 14 000 $ pour les voitures électriques à batterie.

Ce qui est différent des automobiles à pile à combustible, c'est qu'il n'y a pratiquement aucune composante électrique de la batterie des véhicules utilisant ce type de batterie qui est produite au Canada. Les éoliennes ne sont pas produites au Canada, et les générateurs solaires ne sont habituellement pas produits au Canada, mais les piles à combustible sont toutes conçues soit à Vancouver, soit à Toronto, dans le cas des éléments dont je parle.

Un autobus à pile à combustible est deux ou trois fois plus efficient qu'un autobus régulier et permet de diminuer les émissions de CO2 de plus de 1 100 livres par année. Un autobus de ce type est 200 p. 100 plus efficient qu'un autobus au diesel. C'est un peu comme faire fonctionner un trolleybus électrique sans les câbles. Si nous avions une flotte de 5 000 autobus à pile à combustible au Canada, nous pourrions réduire les émissions de GES de 450 000 tonnes par année.

Diverses sociétés canadiennes travaillent à la construction de postes de ravitaillement. Cela nous ramène, bien évidemment, au problème de la poule et de l'œuf. Il n'y a pas beaucoup de voitures à pile à combustible tant qu'il n'y aura pas de postes de ravitaillement. Nous construisons d'excellents postes de ravitaillement. Nous en construisons dans le monde entier, partout sauf au Canada. Nous construisons certains des nouveaux postes de ravitaillement en Californie dans le cadre du déploiement de 100 postes de ravitaillement qui est en cours dans cet État. La Californie fera construire 50 postes au cours de la prochaine année et 100 postes au cours des deux prochaines années. Nous construisons également des postes de ravitaillement en Allemagne. Nous en construisons uniquement pour les autres; nous n'en fabriquons pas beaucoup pour le Canada.

Nous avons conçu et construit ces stations pour des groupes comme Shell, pour son projet de station d'hydrogène en Californie, et on a recours à nous depuis de nombreuses années, partout dans le monde, pour la construction de postes de ravitaillement. Vancouver a eu, à une certaine époque, je crois, jusqu'à cinq postes de ravitaillement, mais nous n'en avons qu'un seul aujourd'hui en raison du manque de disponibilité des voitures.

Les projections financières pour le marché mondial de la pile à combustible fonctionnant à l'hydrogène seront, d'ici la fin de l'exercice, de 8,5 milliards de dollars; le Canada a donc réellement une chance de s'appuyer sur ce qu'il a et d'établir un marché de haute technologie et de grande valeur qui contribue au PIB, aux recettes fiscales et à la fierté nationale. Nous pourrions créer des milliers de nouveaux emplois et nous pourrions trouver de nouvelles possibilités touchant la chaîne d'approvisionnement de l'industrie automobile pour les entreprises ontariennes qui veulent produire des composantes de piles à combustible destinées aux nouvelles voitures ainsi dotées et favoriser l'intégration de cette technologie.

J'ai mentionné certaines de nos réalisations internationales. Nous ne disposons pas du même niveau de financement gouvernemental que d'autres pays. Le Canada injecte probablement, je ne sais pas, de 10 à 20 millions de dollars par année pour la recherche et le développement liés aux piles à combustible; le département de l'Énergie des États-Unis investit à lui seul plus de 100 millions, et d'autres départements, comme celui de la défense, et divers autres groupes investissent probablement presque autant. Le Canada fabrique des produits pour les Américains, par exemple dans le domaine de la défense. Nous produisons des piles à combustible comme source d'alimentation personnelle pour des soldats membres d'un peloton parce qu'ils sont actuellement si lourdement chargés d'appareils technologiques que, autrement, ils devraient transporter de lourdes batteries pour mener leurs opérations.

D'autres pays ont des mesures incitatives pour les véhicules que nous n'avons pas à l'échelle nationale, et chaque pays qui évolue dans ce secteur, à l'exception du Canada, possède une stratégie nationale relative aux piles à combustible. La Corée, le Japon, les États-Unis et l'Europe ont des stratégies nationales quant à la manière dont ils ont l'intention d'intégrer les piles à combustible à hydrogène à leur économie et à ce qu'ils ont l'intention de faire à cet égard.

L'Europe dépensera 1 milliard de dollars au cours de la prochaine année pour le déploiement de la pile à combustible à hydrogène, et, comme je l'ai dit, les États-Unis dépensent bien plus de 120 millions de dollars, tandis que le Japon et la Corée dépensent bien au-delà de 100 millions de dollars par année.

En tant qu'association, nous avons commencé à exercer des pressions auprès du gouvernement fédéral pour qu'il y ait une stratégie nationale. Je vais simplement être franc : les conservateurs détestaient les piles à combustible. Ils les percevaient comme une initiative qu'avaient mise en branle les libéraux, ce qui n'est pas vrai : M. Mulroney a été le premier à investir dans la technologie des piles à combustible. À l'origine, c'était une affaire de conservateurs, mais la bureaucratie fédérale l'a perçue comme quelque chose de bizarre qui se passait au-delà des Rocheuses, en Colombie- Britannique, et ne comprenait pas du tout ce qui se passait là.

Même si c'est nous qui avons inventé la technologie des piles à combustible et qui l'avons commercialisée et que nous avons suscité une passion à son égard dans le monde entier, notre propre gouvernement fédéral, après un certain temps, a décidé qu'il en avait assez et qu'il voulait passer à d'autres stratégies.

C'est une vraie tragédie pour le Canada, puisque nous avons ici d'extraordinaires possibilités. Nous avons un produit merveilleux. Il fonctionne. Il est maintenant commercialisé, et il faut que des mesures incitatives semblables à celles offertes par d'autres gouvernements soient mises en place, particulièrement dans le cadre d'une stratégie nationale.

Je ne vais pas parcourir tout l'exposé en détail; je pense que cela suffit. Ce n'est que pour dire que, en tant que berceau national de la commercialisation des piles à combustible et de l'hydrogène, le Canada a une occasion à saisir et devrait réellement accorder plus d'attention à la technologie et faire des investissements modestes.

Nous sommes très heureux que le nouveau gouvernement ait lancé un appel d'offres en vue de l'installation de nouveaux postes de ravitaillement au Canada; il offre de payer la moitié des coûts et cherche d'autres façons de déployer la technologie. Nous sommes impatients de travailler avec le nouveau gouvernement dans un contexte aussi favorable afin de tirer parti de notre créativité et de permettre à notre industrie de s'épanouir dans l'avenir.

J'aimerais réellement remercier le Sénat de m'avoir permis d'être ici aujourd'hui. Nous n'avons pas souvent la possibilité de nous adresser directement aux sénateurs sur ce sujet, et cela est très apprécié. Puisque nous sommes de la Colombie-Britannique, nous préférerions que les séances se tiennent dans l'après-midi, bien évidemment — nous nous levons vers 4 heures du matin pour venir ici —, mais je pense que le Sénat est un bon ami de notre industrie depuis les 10 dernières années environ. Certains sénateurs nous ont manifesté beaucoup d'intérêt, et nous avons comparu quelques fois devant des comités. Je crois que cela a réellement aidé à préserver l'intérêt public à l'égard d'un sujet qui, autrement, aurait pu finir par échapper aux feux des projecteurs, alors merci beaucoup.

Andrea Kent, présidente, Industries renouvelables Canada : Bonjour à vous tous, monsieur le président et, bien évidemment, membres du comité. J'aimerais me faire l'écho des commentaires de M. Denhoff et vous remercier de me donner la possibilité de comparaître devant vous aujourd'hui.

Nous sommes des partisans de longue date de toute initiative mise en place par le gouvernement, à l'un et l'autre endroit, visant à découvrir des manières dont nous pouvons éliminer les émissions de GES dans tous les secteurs en adoptant, en fait, une approche sectorielle. Si l'on regarde les cibles ambitieuses qui ont été établies par le nouveau gouvernement, nous faisons certainement face à un défi de taille, et beaucoup de travail nous attend. Nous sommes reconnaissants d'avoir la possibilité d'apporter notre point de vue et de contribuer à cette conversation ainsi qu'à ce dialogue stratégique continu.

Je m'appelle Andrea Kent. Comme je l'ai mentionné, je suis la présidente d'Industries Renouvelables Canada. Je me doute que certains d'entre vous connaissent mieux notre association sous son ancien nom, lequel était, bien évidemment, l'Association canadienne des carburants renouvelables. Notre association représente les producteurs, les distributeurs et les détaillants de biocarburants au Canada depuis plus de 30 ans. Nous sommes très fiers du chemin parcouru. Pour tout dire, le changement de nom s'est produit il y a exactement deux semaines. Il vise réellement à refléter la trajectoire ascendante et le mouvement et l'évolution de l'industrie des carburants renouvelables au Canada et la diversité des entreprises qui exercent actuellement leurs activités, non seulement dans le secteur du biocarburant, mais à vrai dire dans toute l'économie du biocarburant où nous pouvons remplacer une quantité toujours croissante de produits pétroliers et de combustibles fossiles par des biomatériaux, des carburants de remplacement et, bien évidemment, des carburants liquides servant au transport.

Depuis un certain temps, nos membres travaillent très fort à cet égard pour faire prendre de l'expansion à leurs entreprises et diversifier leurs produits pour aller au-delà des carburants. Je serais heureuse de revenir et de vous en parler plus en détail à l'occasion d'une prochaine séance, mais, pour aujourd'hui, nous croyons pouvoir mettre en commun notre expertise et contribuer d'une certaine manière à examiner le défi qui se présente devant nous et la mesure dans laquelle la politique canadienne relative aux biocarburants a contribué à la réduction des émissions de GES jusqu'à présent et nous pencher sur les possibilités d'élargir ce potentiel et d'accroître ces avantages, d'un point de vue tant environnemental qu'économique.

Comme vous le savez, les 195 signataires de l'accord de Paris ont déclaré que leur objectif était de s'assurer que l'augmentation de la température moyenne mondiale ne dépasse pas 2 degrés Celsius par rapport aux niveaux de l'époque préindustrielle et également de respecter les engagements pris dans le cadre de la COP21, soit de réduire de manière importante les émissions de gaz à effet de serre. Lorsqu'on examine ces cibles et qu'on les compare avec la conjoncture actuelle, les résultats donnent plutôt à réfléchir.

Les émissions de GES au Canada n'ont jamais diminué. De fait, elles augmentent de façon exorbitante depuis des décennies. C'est la tendance que nous voulons contrer ici. Selon les données du gouvernement du Canada, les émissions totales de GES en 2014 ont été d'environ 730 mégatonnes de dioxyde de carbone. Si l'on veut que le Canada réussisse à atteindre sa cible d'émissions de 622 mégatonnes en 2020, il nous faut trouver un moyen de réduire les émissions annuelles d'au moins 110 mégatonnes. Cela représente environ 15 p. 100 des émissions de 2014. Je sais que nous avons fourni quelques diapositives simples qui illustrent ces statistiques d'une manière assez efficace.

Il y a encore grandement place à l'amélioration. Nous sommes ici afin de nous prononcer de manière honnête et pragmatique sur ce défi et dire qu'il est possible de le surmonter, mais, pour y arriver, nous ne devons ménager aucun effort en ce qui a trait à la recherche de moyens de réduire les émissions de gaz à effet de serre.

En 2014, le secteur du transport du Canada a été responsable de l'émission de 171 mégatonnes de GES au total. Cela représente environ 23 p. 100 du total des émissions. Ce secteur se classe au deuxième rang derrière le secteur pétrolier et gazier. Si nous voulons gagner la bataille contre le changement climatique, nous devons éliminer les émissions de GES causées par le secteur du transport — c'est aussi simple que cela —, et les biocarburants peuvent continuer de jouer un rôle vital dans l'atteinte de cet objectif.

De notre point de vue, les producteurs de carburants renouvelables font réellement partie des pionniers de l'économie sobre en carbone. Les données probantes continuent de montrer que l'adoption des biocarburants est l'une des façons les plus économiques et les plus efficaces d'éliminer les GES émis par le secteur du transport. L'éthanol, par exemple, peut réduire les émissions jusqu'à 62 p. 100 au cours de son cycle de vie, soit depuis le début du processus jusqu'au moment où les émissions sortent du tuyau d'échappement. Pour ce qui est du biodiesel, la réduction de ces émissions de GES, au cours de son cycle de vie, peut être aussi élevée que 99 p. 100 par rapport au pétrodiesel.

Le Canada possède actuellement des règlements pris aux termes de la Loi sur la protection de l'environnement qui prévoient que l'essence vendue peut contenir 5 p. 100 d'éthanol et 2 p. 100 de biodiesel. Ces stratégies renouvelables se sont avérées très efficaces. Il a été prouvé que les exigences prescrites avaient permis d'éliminer 4,2 mégatonnes de GES de l'environnement par année. Autrement dit, cet avantage pour l'environnement équivaut au fait d'éliminer un million d'automobiles sur les routes chaque année.

Ce que nous proposons, c'est un simple changement réglementaire qui permettrait d'étendre la portée de ces exigences au chapitre des normes fédérales sur les carburants renouvelables qui ferait grimper à 10 p. 100 le taux d'éthanol permis dans l'essence et ferait passer le taux maximal de biodiesel de 2 à 5 p. 100. Puisque nous procéderions par étapes et de manière progressive, les parties concernées auraient suffisamment de temps pour s'assurer qu'il n'y a aucune barrière technique à la mise en œuvre du changement.

Il convient de noter que ces carburants sont déjà en place et intégrés au marché aujourd'hui. Il n'y a absolument aucun coût d'infrastructure associé à l'accroissement des quantités prescrites. Aucun changement dans le comportement du consommateur n'est requis. L'avantage que vous obtenez réellement, c'est une réduction supplémentaire des GES dans le secteur du transport. Si l'on augmentait les quantités prescrites de la façon que je viens de décrire, ce serait comme si on éliminait un million d'automobiles de plus sur les routes, du point de vue des émissions de carbone.

Nous avons beaucoup d'autres idées. Évidemment, il s'agit là d'une question très complexe. Tout comme nos collègues ici, nous avons des idées quant à la manière dont l'infrastructure peut être améliorée et dont la portée du soutien du gouvernement peut être élargie au chapitre de l'innovation de manière générale, mais je crois que la méthode la plus simple et la plus directe pour diminuer les GES à court terme est un recours accru aux biocarburants, une source d'énergie connue et fiable et qui existe déjà. Si nous faisons cela aujourd'hui plutôt que demain, nous serons encore plus près d'atteindre ces cibles pour 2020 et 2030 également.

Encore une fois, merci de m'avoir donné la possibilité de comparaître devant vous aujourd'hui. J'ai très hâte de discuter avec vous et de répondre à vos questions.

Barrie Kirk, directeur exécutif, Canadian Automated Vehicles Centre of Excellence : Bonjour, mesdames et messieurs. Encore une fois, merci de m'avoir invité ici.

Le Centre d'excellence des véhicules automatisés du Canada — ce nom est long à prononcer, donc nous disons CAVCOE — a été formé il y a trois ans pour aider les secteurs public et privé à se préparer à l'arrivée des voitures sans conducteur. Nous ne travaillons avec aucune des entreprises qui produisent ou élaborent actuellement des voitures sans conducteur; nous nous intéressons davantage aux possibilités et défis pour le reste du monde.

Ce que je tiens à vous dire avant tout, c'est que la première génération de voitures sans conducteur existe déjà. Vous pouvez vous rendre dans une salle de démonstration aujourd'hui et acheter des voitures semi-autonomes qui sont dotées d'un régulateur de vitesse adaptatif, d'un avertisseur de sortie involontaire de voie, d'un système automatique d'évitement des piétons et de freinage et d'une fonction de stationnement automatisé. Ce ne sont que quelques-unes des caractéristiques. De plus, en Europe, il existe des autobus navettes autonomes et pleinement automatisés.

En ce qui concerne les sables bitumineux, Suncor a commandé 175 remorques lourdes autonomes, ces camions- bennes gigantesques. C'est un grand pas en avant. Suncor en a mis un à l'essai durant environ un an et a constaté que les ordinateurs étaient réellement de meilleurs conducteurs que les humains. Ce n'est pas une surprise. L'un des inconvénients, c'est que Suncor mettra à pied environ 800 personnes. Chaque avancée technologique vient avec un inconvénient, et, pour ce qui est des voitures autonomes, l'un de ces inconvénients est la suppression d'emploi.

Ford, Toyota et d'autres constructeurs automobiles prévoient mettre sur le marché des voitures autonomes d'ici environ 2020.

General Motors a déjà investi plus de 1 milliard de dollars dans les voitures sans conducteur, et le constructeur automobile avance à grands pas dans le domaine des taxis autonomes. En fait, selon un rapport dans l'édition du Globe and Mail parue hier, General Motors annoncera aujourd'hui qu'il embauche 1 000 ingénieurs et autres professionnels de la recherche et du développement à Oshawa et à Markham pour travailler sur les véhicules autonomes et connectés. Même si le premier ministre Trudeau et la première ministre Wynne seront présents lorsqu'on fera l'annonce, l'embauche de 1 000 personnes sera entièrement financée par General Motors, ce qui montre le niveau d'intérêt et d'investissement.

On peut aborder toute cette question à beaucoup de niveaux. Je préfère ne pas parler uniquement des véhicules autonomes; je parle des véhicules autonomes, connectés et électriques. Ils possèdent un large éventail d'avantages. Le plus grand avantage est la sécurité. Toutes les personnes qui évoluent dans ce secteur constatent que les ordinateurs sont plus sécuritaires que des conducteurs humains idiots et stupides. J'espère — et je prie pour que ce soit le cas — que nous pourrons réduire de 80 p. 100 les collisions, les accidents mortels et les blessures chaque année.

Un deuxième avantage, tout aussi important, touchera l'environnement et l'énergie, parce que la grande majorité de la conduite que nous faisons se passe dans des régions urbaines. Les véhicules électriques seront très écologiques, profiteront à l'environnement et entraîneront bon nombre d'avantages en aval. Les premiers travaux réalisés sur les véhicules autonomes se fondent sur des véhicules électriques. La voiture de Google, par exemple, fonctionne à l'électricité. Les autobus navettes dont j'ai parlé, qui sont en fonction en Europe actuellement et qui font partie de la deuxième génération d'autobus navettes pleinement autonomes, sont électriques.

La tendance vers l'utilisation partagée de véhicules autonomes suppose l'arrivée des taxis sans conducteur. De moins en moins de gens posséderont une voiture, et il y aura de plus en plus de taxis partagés électriques et autonomes. Cela permettra aux villes d'exploiter la puissance de cette technologie pour redéfinir complètement leur approche à l'urbanisme.

La Ville de Toronto est l'un de nos clients, et elle comprend que les possibilités touchant les véhicules autonomes lui donnent, en aval, l'occasion de redessiner complètement Toronto. Elle n'a pas toutes les réponses détaillées, mais elle a une vision d'ensemble.

J'aime la vision de Helsinki, qui prévoit la mise en place d'un système de mobilité — voitures, vélos, transport en commun — qui serait si intégré, pratique et abordable que personne ne voudrait posséder son propre véhicule. C'est une vision fantastique.

Le gouvernement du Canada et nous avons deux grandes possibilités : prendre du recul et laisser l'industrie déployer cette technologie, ou gérer nous-mêmes la situation. Tout comme d'autres, nous croyons qu'il est important de nous ranger derrière cette technologie, de la guider et de la stimuler, et nous recommandons d'agir dans ce sens.

Des pays du G7, non seulement le Canada est bon dernier dans ses préparatifs en vue de tirer profit des VA, mais il est loin derrière les six autres pays. J'aimerais non seulement que nous rattrapions les autres pays, mais également que nous devenions un chef de file. L'une des façons d'y parvenir est de créer ce qu'on appelle une initiative canadienne relative aux véhicules automatisés. Les Pays-Bas l'ont fait, comme l'Australie, Singapour et le Royaume-Uni, mais pas nous.

Nous avons ici une réelle possibilité de guider la technologie, son déploiement et les efforts stratégiques. Cela nous aidera entre autres à aller de l'avant, à réduire notre empreinte carbonique et à exploiter la puissance des véhicules électriques, particulièrement dans les déplacements urbains.

Un comité parlementaire du Royaume-Uni a reconnu qu'il s'agissait non pas simplement d'une question de transport en commun ou de transport, mais d'une question pangouvernementale. Le comité parlementaire sur le transport du Royaume-Uni a recommandé l'établissement d'un ministère pour les véhicules sans conducteur qui assurera la coordination à l'échelle du gouvernement. Si j'avais beaucoup plus de temps, je pourrais expliquer de nombreuses autres répercussions.

Nous devons également devenir beaucoup plus attrayants pour l'industrie. Il est bien connu que le gouvernement ontarien, depuis le 1er janvier, a autorisé la mise à l'essai des VA sur les routes publiques de l'Ontario. La province possède un cadre réglementaire à cet effet. La réalité, qui est moins connue, c'est que jusqu'à ce jour, aucune entreprise n'a présenté de demande pour obtenir ce permis. Les constructeurs automobiles ne nous connaissent absolument pas, sauf peut-être GM. Nous devons changer cela. Nous devons nous montrer beaucoup plus favorables à l'écosystème des VA.

Nous devons travailler avec les autres ordres de gouvernement au sujet des plans directeurs de transport.

Au gouvernement américain, Anthony Foxx, secrétaire du département du Transport des États-Unis, a rédigé un article étonnant l'année dernière dans lequel il dit que, grâce aux technologies des véhicules connectés et autonomes, nous pouvons multiplier par cinq la capacité de circulation sur nos routes. En ayant des véhicules qui peuvent circuler plus près les uns des autres en toute sécurité, nous pouvons faire en sorte qu'il y ait beaucoup plus de véhicules par kilomètre.

Pour être franc, je ne crois pas que cette affirmation soit vraie, mais, si nous pouvons utiliser la technologie pour multiplier la capacité sur les routes ne serait-ce que par deux ou trois, ce serait fantastique. Je me demande pourquoi nous envisageons dépenser des dizaines de milliards de dollars pour de nouvelles infrastructures alors que nous pourrions investir beaucoup moins dans les technologies et obtenir le même résultat. Je reconnais que nous devons réparer l'infrastructure en place, mais, en ce qui a trait aux nouvelles infrastructures, je soutiens que toute demande de financement fédéral pour une nouvelle infrastructure ou un nouveau réseau de transport en commun ou de transport devrait comprendre une évaluation de l'incidence des véhicules autonomes et connectés.

Une autre chose : l'Organisation de coopération et de développement économiques à Paris, l'OCDE, a rédigé un rapport l'année dernière. Il peut être consulté gratuitement sur son site web. Selon sa conclusion étonnante, grâce aux taxis sans conducteur, qu'elle appelle TaxiBots, et au transport en commun conventionnel dans les grandes villes, nous pouvons éliminer des routes 9 voitures détenues par des particuliers sur 10. Bon, c'est une conclusion beaucoup plus optimiste. En comparaison de l'OCDE, je suis un modéré. Même si nous pouvions retirer des routes de nos grandes villes 4 ou 5 véhicules appartenant à des particuliers sur 10, ce serait un immense pas en avant.

Je conseille vivement à tous ceux qui m'écoutent non pas d'investir uniquement dans l'infrastructure, mais plutôt de consacrer une partie de l'investissement aux infrastructures intelligentes et à la technologie afin de permettre l'atteinte des mêmes objectifs globaux.

Conclusion : j'ai repensé au XXe siècle, bien, peut-être la dernière moitié du XXe siècle, mais j'ai quand même lu mes livres d'histoire... Nous savons que les voitures ont eu une immense répercussion sur nos vies personnelles au cours du XXe siècle. Elles ont eu une grande incidence sur la société, sur la planification urbaine de nos villes et sur le monde. Selon moi, au XXIe siècle, l'arrivée des voitures autonomes aura une incidence tout aussi grande. Certains des avantages les plus importants toucheront l'énergie et l'environnement, en raison de notre empreinte carbonique.

Encore une fois, merci de m'avoir écouté. Comme les autres intervenants, je serai heureux de répondre à vos questions.

Le vice-président : Merci, monsieur Kirk. Je dois ajouter que, si quiconque doute que la conduite automatisée peut être plus sécuritaire que la conduite humaine, c'est que cette personne n'a jamais vu la sénatrice Ringuette conduire une voiture.

Le sénateur MacDonald : Merci à vous tous d'être ici. Il y a tant de choses dont nous pouvons discuter ici. Il y a tant de choses au programme.

Monsieur Kirk, vous serez heureux d'apprendre que je suis le vice-président du Comité sénatorial des transports, et les véhicules automatisés sont sur la liste. Nous allons nous pencher sur la question prochainement. Nous nous rendrons à Edmonton bientôt. Je ne vous questionnerai pas sur ce sujet aujourd'hui. Je vais attendre que notre comité soit en place et opérationnel.

Je vais commencer par M. Denhoff et les piles à combustible à hydrogène : cette technologie m'a toujours intéressé, et j'ai suivi les débuts de Ballard. Vous avez dit que nous fabriquons des piles à combustible dans le monde entier. Qui les produit? Est-ce Ballard ou un sous-traitant? Est-ce votre association? Qui les produit?

M. Denhoff : Non, monsieur le sénateur, elles sont produites par Ballard à Vancouver, par Hydrogenics, une société du Mississauga, une société concurrentielle cotée en bourse, ainsi que par Mercedes/Daimler à Vancouver, à des fins d'exportation vers l'Allemagne. Nous avons une grappe industrielle à Vancouver et une autre plus petite à Toronto où les activités sont axées soit sur l'approvisionnement en composantes, soit sur l'élargissement des applications des piles à combustible.

Le sénateur MacDonald : Sommes-nous encore vus comme le chef de file dans le domaine de la technologie de l'hydrogène dans le monde?

M. Denhoff : Oui, même si je crois que, dans certains domaines, tout dépend du domaine, d'autres personnes nous ont soit rattrapés, soit dépassés. Le Japon investit beaucoup d'argent, tout comme l'Europe et même la Corée; je pense que si le Canada n'investit pas des sommes plus considérables au cours des cinq prochaines années, nous serons à la traîne.

Si vous avez un sous-marin pour lequel vous avez besoin de piles à combustible, ces piles à combustible viennent probablement du Canada. Si vous avez une alimentation de réserve pour les télécommunications en Indonésie, elle fonctionne probablement au moyen d'une pile à combustible provenant du Canada. Si vous avez des autobus en Chine, ces autobus, selon toutes probabilités, fonctionnent à l'aide d'une pile à combustible venant du Canada.

Le sénateur MacDonald : Vous déplorez le manque d'investissement du gouvernement dans cette technologie. Je regarde certains chiffres. Le manque d'investissement ne semble pas être attribué à un ordre de gouvernement en particulier ou à des principes précis. Les gouvernements canadiens ont investi environ 7 p. 100 en tout. Ce n'est pas beaucoup d'argent.

Pourquoi y a-t-il si peu de croissance et d'investissement dans cette technologie au Canada? L'un des problèmes que nous avons soulevés ici tient au fait que la situation est la même avec la technologie nucléaire : nous exportons notre technologie nucléaire partout, mais nous n'avons pas bâti de nouveau réacteur depuis 30 ans. Le problème semble être le même.

M. Denhoff : Je pense qu'il s'agit d'un ensemble de facteurs. Je crois que l'industrie a pris des engagements excessifs trop tôt. Lorsque je me suis joint à l'association il y a quatre ou cinq ans et que j'ai regardé les anciennes coupures de presse, j'ai constaté que, il y a 10 ans, on croyait que l'industrie allait prendre de l'expansion beaucoup plus rapidement qu'elle ne le pouvait. Les principaux défis touchaient la réduction des coûts — le coût du platine qui est l'un des principaux ingrédients d'une pile à combustible — et l'augmentation de la durabilité. Les gens n'étaient pas prêts à attendre aussi longtemps avant qu'on en arrive à des résultats à cet égard.

Des fonds investis au Canada —, disons, environ 1 milliard de dollars au cours des 30 dernières années — la majeure partie vient du secteur privé, et ce secteur continue d'investir à ce jour. En fait, il y a une reprise marquée des investissements depuis la dernière année ou les 18 derniers mois; les gouvernements des États-Unis et d'outre-mer et le secteur privé intensifient leurs investissements.

Je crois que c'est souvent difficile pour le gouvernement fédéral, puisqu'on lui demande de choisir notamment entre l'électricité à batterie, l'électricité à pile à combustible ou les carburants de remplacement. Nous ne lui demandons pas de choisir notre secteur exclusivement ni de faire un choix en particulier. Nous souhaitons simplement d'être traités d'une manière comparable. Il y a une déduction pour amortissement accéléré pour l'énergie éolienne et solaire, par exemple, mais, pour quelque raison que ce soit, il n'y en a pas pour les piles à combustible à hydrogène. Nous croyons qu'il y a des choses aussi simples que cela.

Je dois dire que le gouvernement du Québec a fait un travail fantastique récemment en introduisant des exigences réglementaires minimales en matière de véhicules à zéro émission semblables à celles de la Californie, un peu comme mon collègue le disait à propos des carburants renouvelables. Le Québec a dit que les constructeurs qui désiraient vendre des voitures à essence dans la province allaient devoir vendre 15 p. 100 de véhicules à zéro émission. Ces choses existent dans d'autres administrations, et elles stimulent les investissements des fabricants d'équipement d'origine ou encore ceux que font les responsables des autres aspects.

Si le Canada fait deux ou trois choses très simples, nous maintiendrons notre rôle de chef de file et reprendrons notre vitesse de croisière. Nous sommes un peu bizarres. Qu'on pense à Avro Arrow ou à toutes les sortes d'autres technologies, nous aimons les inventer, puis nous les faire arracher par quelqu'un d'autre. J'ai assisté à une réunion avec le sous-ministre à Ottawa. Il a dit qu'il s'agissait d'une bonne technologie et qu'elle nécessitait probablement quelques investissements, et que cela viendrait. Il a ajouté que les Américains ou les Européens allaient investir de l'argent dans cette technologie et que nous allions bénéficier un jour des avantages que présentent ces véhicules ultérieurement de toute manière, et qu'il ne voyait pour quelle raison il devait risquer son argent.

Je comprends le raisonnement. Je suis plus nationaliste que cela, donc je préférerais que nous investissions ou simplement que nous disposions d'un cadre réglementaire équivalant à ceux que nous voyons être mis en place en Californie et ailleurs où, si vous voulez vendre des véhicules, lesquels produisent possiblement le quart de la pollution au pays, un certain pourcentage de ces voitures doit être sans émission.

Nous avons un problème très étrange; ces voitures sont toutes disponibles sur le marché. Hyundai, Honda et Toyota produisent et louent ou vendent des voitures à pile à combustible. Mais ils les produisent par lots de 3 000, de 5 000 et de 10 000. Lorsque vous voulez être en concurrence pour que ces véhicules soient expédiés au Canada, ils disent que, en Californie, s'ils ne livrent pas les véhicules, ils se voient infliger une pénalité allant de 85 000 $ à 100 000 $ par véhicule. En Scandinavie, ces véhicules sont libres de droits à l'importation, qui sont de 100 p. 100 par véhicule livré. Ceux qui achètent ces véhicules ont un droit de passage gratuit sur les traversiers, bénéficient gratuitement d'une voie réservée aux VMO et ne paient pas le stationnement. Nous sommes en concurrence pour que ces véhicules soient vendus et nous n'avons pas les outils qu'il nous faut pour cela. Nous n'avons pas les mesures incitatives qu'ont les autres.

Le sénateur MacDonald : Vous avez dit que nous avions besoin d'investissements modestes. Qu'entend-on par « investissement modeste »?

M. Denhoff : Je pense qu'il faut mettre les choses en contexte : au Canada, nous consacrons des fonds à la recherche et au développement en vue de réduire la quantité de platine nécessaire pour fabriquer une pile à combustible et d'augmenter la durabilité de ces piles, notamment. Nous croyons qu'il devrait y avoir de modestes augmentations continues dans le financement.

Le gouvernement fédéral a augmenté le financement pour le PARI — Programme d'aide à la recherche industrielle — considérablement, et cela aide beaucoup notre industrie. C'est le genre de chose qui est importante.

Ensuite, nous croyons que ce type de changement réglementaire visant à autoriser la déduction pour amortissement accéléré — ce coût s'élèverait littéralement à quelques millions pour le Trésor public. Je ne crois pas que ce soit même de l'ordre de 10 ou de 20 millions de dollars par année. Ce serait très modeste.

Enfin, il y a les investissements dans l'infrastructure. Il faut construire des postes de ravitaillement. En Californie, par exemple, pour installer 100 postes un peu partout dans l'État — les responsables estiment qu'il s'agit d'un nombre approprié vu la quantité de véhicules attendus —, le gouvernement de la Californie dépense, je crois, environ 100 millions de dollars sur cinq ans, plus ou moins, sous forme de subventions pour ces postes dans un contexte concurrentiel. L'industrie investit également. Toyota y consacre des fonds, et le gouvernement aussi.

Pour procéder au déploiement initial dans de grands marchés comme la région du Grand Toronto, Montréal, Vancouver et des lieux comme cela, vous aurez aussi probablement besoin d'installer environ 100 postes au cours des cinq prochaines années. Cela devrait offrir une couverture suffisante. Puis, vous allez déployer les bornes, comme vous l'avez fait pour les Superchargeurs Tesla. Le gouvernement fédéral a ouvert le bal en offrant un financement à parts égales pour les quelques prochains postes. Le gouvernement de la Colombie-Britannique offre un certain financement pour les postes de ravitaillement. Nous devons accélérer le processus.

À l'échelon fédéral, je crois qu'il serait probablement question, sur cinq ans, d'un maximum d'environ 50 millions de dollars destinés aux postes de ravitaillement, et cela permettrait de construire de 100 à 200 postes au pays et d'offrir le réseau initial dont vous aurez besoin. C'est une grosse somme, mais ce n'est pas exorbitant.

Le sénateur MacDonald : Lorsqu'il est question de cette technologie, les moyens de transport qui me viennent à l'esprit sont les autobus et d'autres véhicules de ce genre. Comment est-il possible de transférer cette technologie à d'autres moyens de transport, que ce soit, disons, les trains, les traversiers ou des véhicules plus gros et plus imposants? Est-elle intéressante pour ces types de transport?

M. Denhoff : Elle semble l'être pour les trains. Alstom, la grosse entreprise française, et Hydrogenics, de Toronto, exécutent une commande de 100 unités d'alimentation destinées à des trains pour la France. La Chine en achète également, et je crois que Bombardier, si je me souviens bien, a mis à l'essai une telle unité il y a quelques années, à des fins expérimentales seulement. Je ne crois pas qu'il s'agisse d'une question d'application commerciale; je pense qu'il s'agit simplement d'une question d'adoption. Il s'agit d'une industrie très conservatrice.

J'ai vu, en Écosse et en Scandinavie, plusieurs exemples où l'on fait l'essai des piles à combustible pour des traversiers, parfois comme alimentation d'appoint et, parfois, comme alimentation principale, et je suis d'avis qu'il n'y a pas de raison commerciale particulière de ne pas les utiliser. Je le répète, ce n'est qu'une industrie conservatrice utilisée pour le diesel et d'autres choses.

Elle est utilisée largement pour l'alimentation d'appoint dans les entreprises de télécommunications. Si vous n'avez pas d'électricité et que vos téléphones cellulaires ne fonctionnent pas, il n'y a pas de revenus. Aux Bahamas, durant le dernier ouragan important, les stations ayant comme alimentation d'appoint des piles à combustible ont toutes fonctionné parfaitement, alors que celles utilisant des batteries de secours ont interrompu leurs activités après quelques heures ou quelques jours et, dans beaucoup de cas, celles qui fonctionnaient au diesel ont été endommagées pendant la tempête.

Il existe beaucoup de bons usages pour les applications stationnaires. Aux États-Unis, des piles à combustible à haute température sont utilisées par de très grands fournisseurs de données qui gèrent d'énormes quantités de données et, par conséquent, utilisent beaucoup d'énergie. Ils utilisent du gaz naturel, le nettoient et éliminent les GES qu'il contient en le faisant passer dans des piles à combustible; ils alimentent ensuite d'énormes centres de données avec ces piles, et cela présente des avantages du point de vue de l'environnement.

Chose intéressante, l'application la plus commerciale a trait aux chariots élévateurs et à la manutention. Coca-Cola, Whole Foods, Canadian Tire et Walmart ont passé leurs cinquième, sixième et septième séries de commandes, parce que le produit est concurrentiel sur les marchés, contribue à la réduction des GES et est facile à déployer. Nous voyons maintenant beaucoup d'applications différentes qui n'étaient probablement pas envisagées il y a 5 ou 10 ans.

La sénatrice Ringuette : J'y crois très fort, et, comme mon collègue, je m'intéresse depuis maintenant 20 ans au développement de la société Ballard.

Nous avons parlé d'applications de transport, de télécommunications et d'autres choses. Comment la recherche relativement aux besoins énergétiques des bâtiments, qu'il s'agisse de domiciles, de complexes commerciaux ou d'autres choses, avance-t-elle? Voyez-vous, au final, je crois que vous cherchez à savoir comment votre technologie peut remplacer les marchés des combustibles fossiles. Où vous situez-vous par rapport à ce genre d'application relative aux bâtiments?

M. Denhoff : Merci, madame la sénatrice. C'est une question très intéressante. Des sociétés canadiennes comme Ballard ont créé des applications d'alimentation par pile à combustible pour l'édifice du siège social de Toyota en Californie. Des piles à combustible de Ballard le faisaient fonctionner, et l'on utilisait de l'énergie de biomasse pour alimenter les piles à combustible.

Au Canada, de façon générale, dans des endroits comme le Québec et la Colombie-Britannique, l'hydroélectricité est si bon marché qu'elle coupe vraiment l'herbe sous le pied à l'hydrogène. En Alberta, le gaz naturel est si peu coûteux que l'on se tourne vers des sources d'énergie au gaz.

Aux États-Unis, on en utilise beaucoup plus, comme je l'ai dit, dans des immeubles où l'on procède au reformage du gaz naturel pour le transformer en hydrogène et on le fait passer dans une pile à combustible. Cette mesure vise surtout à réduire la quantité de GES, parce qu'il ne s'agit pas vraiment d'une solution moins chère. Il en coûte davantage pour le reformage du gaz naturel.

Au Japon, c'est incroyablement populaire. Il y a des centaines et des centaines de milliers de maisons alimentées par des applications de piles à combustible, et ce, pour plusieurs raisons. D'abord, ce n'est pas vraiment plus cher que le système d'électricité utilisé là-bas, mais aussi, on veut être indépendant du réseau, parce que, après des événements comme ce qui s'est passé à Fukushima, entre autres, on souhaite vraiment que les maisons puissent être indépendantes du réseau.

Au Canada, c'est difficile à promouvoir uniquement en raison du prix. Lorsqu'on a de l'hydroélectricité très peu coûteuse et du gaz naturel très peu coûteux, c'est une solution difficile à faire adopter pour les maisons comme pour les établissements. C'est encore plus difficile pour les véhicules.

La sénatrice Ringuette : Cela m'amène à ma deuxième question. En ce qui concerne le coût, où vous situez-vous par rapport à d'autres sources d'énergie?

M. Denhoff : Nous sommes compétitifs, selon la source de l'hydrogène. L'hydrogène renouvelable, tout particulièrement, est très concurrentiel, et l'hydrogène qui provient d'un sous-produit de procédés industriels est habituellement assez concurrentiel, selon les coûts de transport. L'hydrogène produit sur place — si on installait une minuscule tour éolienne à l'arrière de l'immeuble, puis qu'on générait de l'électricité et utilisait un électrolyseur pour produire l'hydrogène — serait probablement assez concurrentiel, parce qu'il n'y a pas de coût de transport.

Je vais vous donner un exemple. On a dû transporter de l'hydrogène de Québec jusqu'à Calgary pour les chariots élévateurs de Walmart. Même après avoir transporté l'hydrogène sur tout ce chemin, le profil de GES était encore inférieur à celui des chariots élévateurs à batterie fonctionnant à Calgary, parce qu'on utilisait là-bas de l'électricité produite par des centrales au charbon. Mais les coûts de transport ont fait augmenter le prix de l'hydrogène par rapport à celui du gaz naturel ou de l'électricité.

Le prix diminue assez rapidement, et il y a déjà en Amérique du Nord des marchés où le prix de l'hydrogène concurrence celui de l'essence. Les moteurs sont plus efficaces, et il n'y a donc pas de raison de croire que cela ne peut être concurrentiel à grande échelle.

La sénatrice Ringuette : J'ai une autre question, et celle-ci s'adresse à Mme Kent. Madame Kent, j'ai été députée à la Chambre des communes durant les années où nous avons approuvé la législation entourant les carburants à l'éthanol. Je dois admettre que, à l'époque, je trouvais qu'il s'agissait d'une solution intéressante. Toutefois, depuis ce temps, je dois dire que les différentes études sur les répercussions de l'utilisation de produits alimentaires dans l'essence ou le diesel et les conséquences partout dans le monde au chapitre de l'approvisionnement alimentaire et du coût de cet approvisionnement sont certainement une grande source de préoccupation.

Vous demandez au gouvernement fédéral de faire passer de 5 à 10 p. 100 la concentration d'éthanol dans l'essence, soit le double. Avez-vous examiné les ramifications sur le plan de la disponibilité des aliments et du coût des aliments que suppose votre recommandation? Vu toutes les nouvelles solutions de rechange différentes, je ne crois pas que j'appuierais l'augmentation à 10 p. 100. Avez-vous fait des études concernant l'effet de doubler les exigences en éthanol au Canada?

Mme Kent : Absolument, madame la sénatrice, et merci de poser la question. C'est une question qui revient beaucoup. C'est aussi une question générale touchant la durabilité, et il continue d'être très important pour nous de nous assurer que notre industrie rend des comptes à ce chapitre.

Lorsque les quantités initiales ont été établies en 2007, celles-ci émanaient en grande partie de pressions du secteur agricole, partie intéressante et très pertinente pour ce qui est de comprendre le raisonnement initial qui sous-tend l'établissement de la norme sur les carburants renouvelables. Ce n'était pas seulement une politique environnementale, comme vous vous en souvenez certainement : c'était une politique très motivée par le secteur agricole et aussi associée à une dimension économique touchant les régions. Les agriculteurs voulaient davantage de débouchés pour leurs cultures au Canada. Ils voulaient un marché intérieur plus grand pour ces cultures.

En ce qui concerne les questions internationales de sécurité et de pénurie alimentaires et les questions de durabilité, si on examine la déforestation et d'autres pratiques qui se font à l'échelle mondiale, si on examine le contexte canadien — je pense qu'il est juste qu'on l'examine et qu'on l'analyse dans le contexte que nous avons évoqué, c'est-à-dire un mandat canadien pour la production de biocarburants nationaux.

Nous avons bien sûr continué de surveiller cela. Au moment où les politiques ont été adoptées — et même encore plus aujourd'hui — la production agricole au Canada a continué de tendre dans une direction qui indique que nous produisons davantage de cultures sur une moindre grande superficie de terres cultivées. En ce qui concerne le profil de durabilité et le profil de responsabilité environnementale, d'un point de vue des cultures canadiennes, il n'y a aucune préoccupation sur le plan de la concurrence des cultures vivrières du fait d'augmenter la part d'éthanol dans l'essence.

Lorsque l'on examine le prix du pétrole et le prix des aliments — pour revenir au volet alimentaire, plutôt que celui des carburants, dont vous avez parlé — on voit qu'il y a des liens. Évidemment, le prix des aliments et le prix du pétrole ont tendance à bouger, à atteindre des sommets et des creux en tandem. Toutefois, si l'on examine le prix du maïs de la même façon, l'effet est vraiment atténué. Pour toute demande de prix du maïs ou toute augmentation soupçonnée dans le coût de la nourriture comme résultat des biocarburants, nous avons prouvé — par l'intermédiaire de données accessibles au public tirées de l'indice des prix mondiaux — qu'il n'y a là aucune menace et qu'il n'y a aucune concurrence entre les deux produits de base.

Je pense que, ce qui est vraiment au cœur des préoccupations des gens par rapport à la pénurie et à la sécurité alimentaires, ce sont des questions qui dépassent maintenant les biocarburants. Je pense que cela a affaire avec le gaspillage alimentaire; je pense que cela a affaire avec des facteurs économiques très malheureux partout dans le monde qui exercent ces pressions.

Je serais très heureuse de vous faire part des dernières conclusions. Nous avons présenté dans le cadre de quelques tribunes ouvertes beaucoup de ces renseignements sur le marché des carburants, les perspectives, le prix des produits de base et la façon dont ils continuent de travailler ensemble dans un contexte de marché élargi. Nous avons invité des représentants d'Environnement Canada, de Ressources naturelles Canada et d'Agriculture Canada, les trois industries principales, afin de leur montrer ces renseignements, et tout est accessible en ligne. Je vais bien sûr m'assurer que les dernières données sont là, parce que les préoccupations sont valides dans le contexte mondial de la sécurité alimentaire.

Il importe de surveiller de près comment le marché des aliments et le marché des biocarburants fonctionnent en réalité et comment ils se soutiennent l'un l'autre au Canada, parce que c'est le contexte canadien et la réalité qui entourent ces politiques. Si l'on songe à faire passer la concentration d'éthanol de 5 à 10 p. 100, si l'on regarde l'étiquette de l'essence en Ontario, on voit que celle-ci indique déjà une concentration en éthanol pouvant aller jusqu'à 10 p. 100. Étant donné l'avantage du prix de l'éthanol et son escompte de gros par rapport au prix de l'essence — qui continue d'être à environ 20 cents du litre — de nombreuses parties visées par l'obligation mélangent déjà régulièrement jusqu'à 7 ou 7,5 p. 100 d'éthanol à l'essence.

L'autre question, c'est que nous ne changeons pas fondamentalement notre comportement. Nous ne changeons pas vraiment de façon fondamentale le marché des cultures vivrières et de la production de biocarburants. L'augmentation dont il est question dans le mandat, c'est simplement l'ajout dans la politique d'une certitude, de sorte que nous puissions garantir un niveau soutenu minimum d'avantages supplémentaires en matière de réduction des GES ainsi que les retombées économiques découlant de la certitude intégrée à la politique afin de nous permettre de croître au sein d'une industrie très prospère.

J'apprécie le fait que vous m'ayez donné le temps de répondre à cette question.

La sénatrice Ringuette : Je suis impatiente d'examiner les données. Tout de même, j'espère que vos données sont très concluantes, parce que, jusqu'à maintenant, si j'avais la possibilité de revoir mon vote en faveur de l'éthanol, je le retirerais probablement.

Mme Kent : Vous faites bien de vous exprimer en toute franchise. Il est important de se rendre compte que ce ne sont pas nos données. Ce sont les données d'Environnement Canada et d'Agriculture Canada, des renseignements sur l'indice des prix mondiaux et les données de Statistique Canada. Je serais plus qu'heureuse de les communiquer.

En ce qui concerne la connaissance du public en matière d'énergie, il est important de comprendre ces questions. Cela devrait s'appliquer à tous les secteurs, et cette rigueur devrait s'appliquer à l'ensemble des options stratégiques également. L'électrification en est un bon exemple. Dans les administrations qui fonctionnent au charbon, au bout du compte, ce n'est pas une option à faible teneur en carbone; mais si l'on examine les options dont il est question ici, cela peut être un énorme avantage sur le plan environnemental.

Le vice-président : Merci. C'est une question tellement importante, et il peut y avoir là beaucoup de désinformation. Je sais que vous y avez répondu, mais je ne suis pas sûr que la plupart des Canadiens — y compris de nombreux sénateurs et moi-même — ont compris votre réponse. Ai-je raison de dire que, au Canada, nous importons des sources alimentaires pour créer nos biocarburants? Autrement dit, la demande excède l'approvisionnement local à l'échelle du pays?

Mme Kent : Je crois que cela concerne surtout l'éthanol de maïs, car vous ne parlez pas vraiment autant du biodiesel, donc je répondrai en fonction de ce contexte. L'éthanol de maïs est ce que nous envisageons ici, sous l'angle de l'intégration au carburant d'automobile. Le biodiesel utilisé dans la préparation de distillats provient de biomasses différentes, comme les gras fondus, les huiles de graines écrasées ou les graisses de frites. Elles sont différentes.

La question de la sénatrice Ringuette portait précisément sur le mandat visant l'éthanol et la production de maïs.

Le vice-président : Pourquoi ne pas l'élargir davantage? Je ne veux pas éluder la question en ne parlant que d'un seul élément. Pourriez-vous tenir compte de l'ensemble de la source alimentaire? Je pense que le canola en constitue une partie importante, tout comme le maïs.

Mme Kent : Bien sûr, oui.

Le vice-président : Répondons-nous à notre demande localement? Importons-nous?

Mme Kent : Oui, nous importons, mais nous importons aussi de l'essence. Une bonne partie de cela est déterminée par le prix. Nous nous occupons d'un carburant de transport liquide, ce dont nous parlons ici. À de nombreux égards, nous nous comporterons dans le marché de la même façon que les producteurs d'autres carburants. Il y a un volet d'importation et d'exportation qui y est associé.

Si l'on regarde l'éthanol au Canada, nous avons 15 producteurs nationaux. La capacité totale est de 1,8 million de litres par année. Nous exploitons régulièrement toutes ces installations à leur pleine capacité, ou presque. Soixante pour cent de l'éthanol est produit en Ontario.

Le cycle débute dans le champ de l'agriculteur, où le produit est transporté à l'installation de traitement, puis est mélangé et mis sur le marché des carburants. Souvent, il se retrouve à l'intérieur d'un rayon de 100 kilomètres. Il est placé de façon stratégique près des sources de biomasse agricole. Il est produit à l'échelle nationale. Il fournit de l'emploi à des gens des régions rurales, puis il est mélangé dans le volume de carburants. Cela s'applique partout.

Le vice-président : Pourriez-vous vous en tenir à la réponse courte? Selon les statistiques que j'ai vues, nous faisons des importations. Mais pour augmenter le pourcentage de biocarburants dans nos carburants, notre diesel et d'autres produits, nous devrons augmenter la production au pays ou, fort probablement à court terme, importer davantage.

Le Conference Board du Canada a mené une étude récemment — et la Banque mondiale a aussi récemment émis des commentaires — concernant le fait que nous allons devoir importer davantage et forcer la création d'un plus grand nombre de sources alimentaires. Le contre-argument, s'il en est, c'est que l'offre et la demande dicteront ce qu'il faut produire. Comme l'a souligné la Banque mondiale, il y a certes un problème de coût associé à la source alimentaire, et même un problème de pauvreté du point de vue mondial, parce que nous importons surtout des États-Unis. Il est peut- être assez pertinent de dire seulement que nous n'avons aucun problème au Canada, mais cela semble être un vrai problème. De nombreuses études ont démontré que, à partir d'un approvisionnement total, y compris de l'eau, certains des produits — y compris le maïs, étant donné les ingrédients et les coûts totaux — ne sont peut-être pas une si bonne idée.

Mme Kent : Si c'est ainsi que le marché se comporte, je serais d'accord pour dire qu'il ne serait pas à la hauteur sur le plan économique.

Les avantages au chapitre des GES profiteront à l'endroit où le carburant est utilisé. Même lorsque l'on voit arriver quelques importations, comme en ce moment, tant et aussi longtemps que ces biocarburants sont utilisés au Canada, on réussit à faire la transition vers une économie sobre en carbone. C'est une sorte de cas unique et technique, mais il importe d'établir le contexte pour retourner au cœur de l'étude dont nous parlons. Je soupçonne fortement que, si l'on examinait la façon dont la quantité initiale de 0 à 5 p. 100 a fonctionné, on verrait qu'elle a créé dans un secteur une certitude sur le plan des politiques, de sorte que les investissements puissent prendre racine et servir à construire une industrie nationale.

Nous avons des importations en ce moment, mais la majorité de celles-ci ont à voir avec ce que nous appelons la « conformité volontaire » — ce surmélange dont j'ai parlé. Même si l'exigence concernant l'essence est de 5 p. 100, en raison de cet avantage financier, la plupart des fois où on fait le plein, on met sans le savoir 7, 7,5 p. 100, 8 ou près de 10 p. 100 d'éthanol dans le réservoir. C'est pourquoi l'étiquette sur le carburant indiquera jusqu'à 10 p. 100 d'éthanol.

Si l'on prend le mandat de faire passer la teneur en éthanol de 5 à 10 p. 100, nous savons déjà qu'il n'y a aucun obstacle technique à son application. Nous savons déjà que la relation entre les aliments et les carburants au Canada n'est pas du genre à créer des problèmes de pénurie ou de durabilité. Ce qu'on fait, c'est envoyer un signal sur les marchés canadiens. On leur donne cette certitude. Prenez par exemple l'annonce de l'Ontario concernant l'augmentation de son exigence visant l'essence qui a été présentée dans son plan d'action sur les changements climatiques. Je sais que certains producteurs de biocarburants appellent déjà la banque, car ils cherchent à élargir leurs activités nationales pour répondre à cette demande localement.

La question qui s'est posée, c'est que nous sommes à pleine capacité pour ce qui est de répondre au mandat existant. Nous comblons l'excédent volontaire au moyen d'importations, parce qu'il n'y a pas eu un fort signal de la part du marché pour augmenter la capacité nationale. En plus de l'équivalent en GES d'un million de voitures supplémentaires que l'augmentation de 5 à 10 p. 100 permettrait d'éliminer, on ferait aussi face au rebond économique de la production nationale.

De nouveau, le cycle doit être virtuel.

Le vice-président : La question ne concernait pas seulement les importations, mais aussi le fait de savoir si cela serait bon pour l'économie et la société compte tenu de la source entière. De toute évidence, une augmentation de la demande pour une certaine source alimentaire influera sur le prix, la production et la déforestation si l'on doit importer beaucoup. Il y a une conséquence à tout cela. Je pense que c'est l'élément que nous essayons de faire ressortir.

Monsieur Denhoff, évidemment, vous faites concurrence en quelque sorte aux voitures électriques. J'aimerais faire remarquer que vous semblez perdre cette compétition. De fait, M. Musk de Tesla a récemment parlé de « piles à con » plutôt que de « piles à combustible ». Pourquoi perdez-vous cette réputation de concurrent des voitures électriques si c'est si avantageux?

M. Denhoff : Je ne suis pas sûr que nous l'ayons encore perdue. Dans les deux cas, ce sont des véhicules électriques. Les piles à combustible dans un véhicule électrique sont les mêmes que dans un véhicule à batterie. M. Musk a une personnalité particulière qui a tendance à attirer une grande couverture médiatique. Il est en quelque sorte le Donald Trump du monde du transport. Ses usines de fabrication de batteries seront énormes.

Écoutez, c'est un produit fantastique si avez 120 000 $ à dépenser. Il n'a pas encore construit le nouveau modèle moins coûteux. Si vous voulez dépenser 120 000 $ ou 140 000 $, vous pouvez participer au système de suralimentation : attendez-vous à attendre entre une demi-heure et toute une nuit pour charger la batterie. Si vous conduisez d'Ottawa à Toronto et que ça ne vous ennuie pas d'arrêter à mi-chemin et de vous asseoir là pour environ une heure afin de charger votre véhicule, alors l'application est bonne. Certes, elle est mieux adaptée au transport urbain dans la ville, où vous utiliserez beaucoup moins la batterie et pourrez faire une recharge pendant la nuit.

Le vice-président : Pourquoi a-t-il choisi cette technologie et non pas l'hydrogène?

M. Denhoff : À son avis, il est possible de réduire la taille et le poids de la batterie dans le véhicule et d'augmenter la distance à parcourir avant le chargement de sorte qu'il aura un avantage concurrentiel.

Lorsqu'on a un véhicule à piles à combustible à hydrogène et que l'on s'arrête à la station Shell de Newport, en Californie, il faut de deux à trois minutes pour faire le plein, exactement comme pour une voiture à moteur à combustion interne ordinaire; et, sur la route, on peut rouler environ 500 kilomètres avant d'avoir à remettre de l'essence.

En ce moment, le problème avec les véhicules électriques à batterie, c'est qu'on ne peut pas encore obtenir une batterie suffisamment petite, un poids suffisamment faible et un moteur assez fort. Cela ne fonctionne pas bien dans les grandes applications énergétiques. Cela fonctionne bien pour les petites voitures, mais pas pour les camions, et cela ne fonctionne pas bien lorsqu'il fait froid. M. Musk et d'autres personnes n'ont pas encore été en mesure de démontrer qu'ils peuvent diminuer le poids de la batterie et le prix de façon suffisante.

Voyons les choses comme ceci : prenons une compagnie comme Toyota. Le président et directeur général de Toyota, Takeshi Uchiyamada, était le dessinateur principal de Prius, probablement la voiture ayant connu le plus de succès dans l'histoire de Toyota et l'une des voitures ayant connu le plus de succès dans le monde. Il a personnellement décidé que les véhicules fonctionnant à piles à combustible à hydrogène étaient les véhicules de l'avenir. Non pas qu'il n'y avait pas de rôle pour la batterie électrique : il a clairement vu cela également. Plus de 1 milliard de dollars ont donc été investis : tout un pari.

Le président de Hyundai, fabricant coréen, a fait le même pari et investi plus de 1 milliard de dollars dans des véhicules à piles à combustible même s'il connaissait très bien la batterie électrique. Dans l'entreprise conjointe européenne de piles à combustible, des sociétés comme Daimler, Volkswagen et d'autres dépensent des milliards de dollars de plus.

L'un des deux ressortira gagnant, ou bien ce seront les deux. Il se peut très bien que, au fil du temps, Elon Musk ne puisse abaisser de façon suffisante les coûts et avoir une durée de la batterie assez longue pour lui permettre de vendre avec succès des véhicules pour des applications de longue portée. Il pourrait s'agir de véhicules à créneaux pour des personnes fortunées qui sont prêtes à payer et à attendre l'arrivée de compresseurs d'alimentation. Par ailleurs, cela pourrait prouver que, à long terme, ces véhicules multiplient les succès et chassent d'autres technologies, comme les piles à combustible à hydrogène.

Nous ne demandons pas au gouvernement d'investir dans une technologie ou une autre. Nous disons au gouvernement que l'impératif urgent concernant les réductions des GES est si grand que l'on devrait faire preuve d'impartialité et simplement avoir un environnement réglementaire selon lequel nous voulons des véhicules à zéro émission, puis laisser le marché décider. Le marché peut se remplir de véhicules à piles à combustible à hydrogène ou de véhicules à batterie électrique.

Une des stratégies concernant le Canada, c'est qu'Elon Musk a très brillamment fait sortir du triangle traditionnel Détroit-Windsor-Oshawa la fabrication de ces véhicules et déménagé l'usine de fabrication de batteries et les usines de production automobile en Californie et ailleurs. Cela présente un risque très grand pour l'Ontario; de fait, si la nouvelle génération de véhicules à batterie électrique n'a pas à résider en Ontario, au Michigan et à des endroits comme ceux-là, on peut décentraliser la fabrication automobile, et toute cette chaîne d'approvisionnement et tout le reste disparaît de l'Ontario. Donc, la raison pour laquelle l'Ontario et le gouvernement fédéral ne veulent pas consentir un investissement modeste pour s'assurer que, en choisissant les piles à combustible, ils ne choisissent pas la mauvaise technologie me dépasse. Ce n'est pas un investissement majeur.

La plus grande partie de la question est simplement de nature réglementaire. C'est comme le Québec. Disons que vous fournissez de 10 à 15 p. 100, ou peu importe le chiffre modeste que le gouvernement juge approprié, puis vous laissez le marché décider.

Nous ne sommes pas des ennemis de la batterie électronique. Elle alimente des véhicules électriques, comme nous.

Le vice-président : Monsieur Kirk, vous êtes un expert en la matière. Vous parlez beaucoup de vos voitures automatisées et vous avez bien précisé que l'avenir réside dans les voitures électriques. Celles-ci fonctionnent-elles à batterie ou à hydrogène? Quelle technologie embrassez-vous et pourquoi prévoyez-vous cela?

M. Kirk : Ma prédiction pour l'avenir, c'est que les voitures autonomes et les véhicules et les taxis sans conducteur seront électriques. Les entreprises qui fabriquent en réalité de tels véhicules aujourd'hui, comme les sociétés européennes, fabriquent des navettes à faible vitesse. Nous avons parlé de Tesla, et Google a ses prototypes. New Flyer, à Winnipeg, a des autobus alimentés par batterie. Les sociétés travaillent toutes à la conception d'un modèle électrique à batterie et ont l'impression que c'est ce qui est le plus prometteur.

Comme je l'ai mentionné plus tôt, la réalité, c'est que l'on conduit surtout en région urbaine. Je suis d'accord pour dire que, en ce moment, la technologie alimentée par batterie a quelques problèmes de rayon d'action, mais la technologie à batterie et la technologie par transmission s'améliorent d'environ 8 p. 100, ce qui représente beaucoup de changements, et la technologie de charge s'améliore. À mesure que nous approchons les années 2020, vous verrez beaucoup de véhicules électriques à batterie utilisés.

Je suis d'accord avec mon collègue pour dire que les véhicules de Tesla en ce moment sont chers, mais il y a deux choses sur lesquelles je souhaite insister. La première, c'est que le prix des véhicules électriques et autonomes baisse. Ford a annoncé que ses véhicules autonomes seront destinés aux « masses ». À mesure que nous passerons à des taxis partagés sans conducteur et que le nombre de propriétaires de voitures diminuera, le coût du transport diminuera.

L'an dernier, nous avons publié un rapport conjoint avec le Conference Board du Canada qui révélait que, grâce à l'utilisation des taxis sans conducteur, la famille moyenne canadienne économiserait 3 000 $ par année. Cette économie tient bien sûr compte du fait qu'il est facile d'utiliser les véhicules, mais je pense qu'il le sera, si l'on se fie à la façon dont l'industrie fonctionne. Tous les joueurs travaillent à atteindre cet objectif. Nous ne nous attendons pas à ce que les gens achètent une voiture chère; nous nous attendons à ce qu'ils achètent un trajet.

Le vice-président : Mais pourquoi pas l'hydrogène? L'argument semble si simple et si valable. On n'a pas à attendre dix ans pour être capable de faire le trajet de la Floride et à la Californie en automobile.

M. Kirk : Peut-être que les piles à combustible seront utiles pour de longues distances, mais pour ce qui est de l'utilisation urbaine, la tendance de l'industrie est certainement aux véhicules électriques à batterie.

Le vice-président : Mais pourquoi?

M. Kirk : Pour être honnête, je ne suis pas tout à fait certain. Je ne suis pas un expert des batteries. Je sais seulement que l'industrie s'en va dans cette direction. Les gens de l'industrie ont leurs propres raisons, et c'est une bonne question à poser à certains des fabricants, mais pour être honnête, monsieur le président, je n'ai pas une réponse simple pour vous.

M. Denhoff : Si vous me le permettez, monsieur le président, je suis heureux que vous ayez parlé de New Flyer Industries, parce qu'il s'agit d'une formidable entreprise canadienne de Winnipeg. C'est un merveilleux constructeur qui fabrique des autobus au Canada et aux États-Unis.

Cette société était le constructeur initial d'autobus à pile à combustible pour Vancouver, où elle a fabriqué une vingtaine d'autobus à pile à combustible. Elle les fabrique maintenant et les exporte aux États-Unis, et je crois savoir qu'elle a remporté — je pense, qu'on l'a annoncé ou qu'on va l'annoncer— une commande majeure aux États-Unis pour des autobus à pile à combustible.

Van Hool, principal constructeur d'autobus en Europe, produit des centaines d'autobus à pile à combustible. Aberdeen, en Écosse, vient tout juste de lancer le plus grand parc d'autobus à pile à combustible d'Europe, et 10 ou 20 autobus sont sur la route. Oakland — en Californie — a un grand parc d'autobus à pile à combustible. Ces autobus ont le même taux de disponibilité que les autobus diesel, n'émettent aucune émission de GES, fonctionnent très bien dans les environnements urbains et ont d'excellentes applications parce qu'il ne faut qu'une seule station de ravitaillement pour l'ensemble du parc. Les autobus roulent toute la journée sans avoir à être rechargés.

Dans certaines applications urbaines, les piles à combustible fonctionnent déjà extrêmement bien. Le profil de coûts et la disponibilité de combustible sont avantageux. Dans d'autres applications, les véhicules électriques à batterie fonctionnent très bien. Pour les camions de gros tonnage, une alimentation électrique à batterie ne fonctionnera pas. Les véhicules de distribution postale de gros tonnage et autres véhicules du genre ne se prêtent pas à cela en ce moment, mais les véhicules à pile à combustible, eux, fonctionnent.

Il y a des domaines où la batterie électrique est nettement supérieure, et il y a des domaines où nous dirions que c'est la pile à combustible qui est supérieure. Laissons le marché décider de cela. C'est la raison pour laquelle nous avons un marché.

Le vice-président : Dans votre cas, je crois comprendre — je ne suis pas un expert ni un scientifique — que d'un côté, vous tirez de l'hydrogène du gaz naturel, et que de l'autre, vous le tirez de l'eau, ce qui est plus compliqué. J'en déduis que la plus grande partie de l'approvisionnement vient de l'électricité ou du gaz naturel pour créer de l'hydrogène. Est- ce le cas?

M. Denhoff : Actuellement, il existe un éventail de possibilités intrigantes. Nous avons de l'hydrogène dérivé du traitement de la biomasse.

Le vice-président : Donnez-moi une idée de la proportion.

M. Denhoff : Cela varie d'un endroit à un autre, mais au Canada, je dirais que le gros vient de sous-produits industriels du Québec et d'endroits de ce genre. Nous ne faisons pas vraiment beaucoup de reformage de gaz naturel au Canada à cette fin, mais on en obtient un peu avec ce procédé.

Et puis, une partie vient du vent, grâce à l'électrolyseur. Si on utilise l'éolien pour créer de l'hydrogène au moyen d'un électrolyseur, et on peut ensuite le stocker dans des réservoirs ou l'envoyer directement dans le réseau de gaz naturel.

Il vient principalement de processus industriels à ce point-ci, mais l'exploitation de sources renouvelables comme l'énergie éolienne hors période de pointe, l'énergie solaire et la biomasse augmente rapidement.

Le sénateur MacDonald : Je veux revenir à votre sujet. Lorsqu'on parle de cette technologie, y a-t-il des domaines où elle n'est pas vraiment applicable, où elle ne serait pas faisable sur le plan technologique?

M. Denhoff : Je crois qu'il est assez difficile de vanter les mérites de la production d'électricité à partir d'une source fixe au Canada. Il y a peu d'applications. C'est excellent pour les collectivités éloignées, comme la Mine Raglan où les travailleurs se sont pratiquement affranchis du diesel et utilisent maintenant l'éolien et l'hydrogène. Pour un grand bâtiment à Ottawa, c'est excellent comme alimentation de secours, mais si on doit utiliser du gaz naturel et le reformer pour l'utiliser dans une pile à combustible, on doit tenir compte des coûts. À mes yeux, c'est non pas une source d'énergie principale, mais une source d'appoint. Mais, pour la plupart des autres applications, oui, je crois que cela fonctionne très bien, même au Canada.

Le sénateur MacDonald : Si vous aviez à conseiller le gouvernement et le comité sur un ensemble de recommandations concernant la croissance de l'utilisation de piles à combustible à hydrogène, quelles seraient vos principales recommandations?

M. Denhoff : Je crois que ce serait très simple. D'abord, on doit seulement élaborer une stratégie nationale qui est similaire à celle d'autres pays et, à partir de celle-ci, étudier des cadres de politique et des cadres réglementaires et fiscaux et qui pourraient encourager encore davantage l'investissement gouvernemental ou privé, ou les deux, dans le secteur. Je crois que cette brève réponse englobe l'ensemble des enjeux.

Le gouvernement peut effectuer sa propre évaluation de l'efficacité de la technologie, de sa commercialisation, de sa viabilité, des avantages pour le Canada et d'autres choses du ce genre. Industrie Canada et d'autres ont mené des études au fil du temps. Cela ne leur prendrait pas beaucoup de temps. En six mois, ils pourraient procéder à des analyses et se faire une idée des avantages des piles à combustible à hydrogène pour le Canada, puis élaborer un cadre qui permettrait davantage d'investissements à cet égard. Il faudra y travailler. C'est très technique, mais on devrait pouvoir faire le travail relativement vite. C'est pourquoi j'ai accepté l'emploi, afin de pouvoir dire : « Oui, c'est très technique. »

Le sénateur MacDonald : Madame Kent, nous ne vous avons pas oubliée. Parons des biocarburants. Je suis de ceux qui ont un point de vue radical lorsque vient le temps de faire pousser de la nourriture. Je crois que nous devons la faire pousser pour la manger. J'ai toujours eu du mal avec le concept de faire pousser de la nourriture pour la transformer en carburant.

Je sais que c'est un enjeu qui a fait couler beaucoup d'encre aux États-Unis, il y a un certain nombre d'années, vu les sommes d'argent qui étaient dépensées par les gouvernements d'État dans l'industrie des biocarburants, particulièrement pour l'éthanol et le maïs, et, vraiment, la plupart d'entre eux ont dû éliminer la plupart de ces programmes parce que les subventions consenties à cette industrie avaient un effet désastreux sur le plan économique.

J'imagine que nous sommes vulnérables aux mêmes pressions au Canada. Comment répondez-vous à ces préoccupations?

Mme Kent : Je passe du bon temps ici aujourd'hui, et, avec tout le respect que je vous dois, au sujet de la façon dont la conversation se déroule, j'ai remarqué une tendance générale à poser des questions tournées vers l'avenir à mes deux collègues ici présents, ce qui est fantastique dans le cadre d'une discussion sur l'innovation favorisant la transition vers une économie sobre en carbone, mais les questions sur les biocarburants semblent, de bien des façons, dater d'il y a 15 ans.

Le vice-président : Ce n'est pas très technique.

Mme Kent : Je ne suis pas non plus une technicienne.

Ici au Canada, nous n'avons pas beaucoup de programmes de subventions comme ceux des États-Unis que vous avez mentionnés, sénateur MacDonald. D'ailleurs, nous ne demandons pas cela pour le Canada. Je crois qu'il importe de souligner cette différence. Même si les deux marchés sont similaires, nous avons bâti l'industrie d'une manière très différente, et notre marché est une souris en comparaison de l'éléphant qu'est le leur.

Nombre de ces études et de ces programmes de subventions se sont vraiment attachés à l'obstacle que représentent les règles de composition de l'essence aux États-Unis et aux parts de marché du pétrole en comparaison du contenu renouvelable. Ici, je suis très fière de l'approche canadienne qui a été beaucoup plus intégrée et moins polarisée. Lorsqu'on examine ce que nous défendons ici, il ne s'agit vraiment que d'aligner les exigences officielles sur ce que fait déjà le marché.

Je crois que nous aurions probablement avantage à mettre en commun plus d'information à jour au sujet de l'utilisation et de la production de cultures ainsi que des prix des aliments. Cela confirmerait vraiment ce que j'essaie d'expliquer ici concernant les problèmes de rareté et de sécurité des aliments qui ne font pas partie de la chaîne de valeur intérieure pour la production de biocarburants telle qu'elle est maintenant et telle que nous la voulons dans l'avenir.

L'autre aspect que nous n'avons pas abordé est que l'innovation comporte deux volets. L'innovation est transformatrice. Elle est perturbatrice. Mais, en même temps, elle renforce et améliore aussi la technologie existante, et elle accroît l'efficacité de plateformes technologiques existantes.

Ce qui s'en vient, c'est la prochaine génération d'éthanol cellulosique ou avancé. Nous avons de l'avance sur les autres, à certains égards, pour ce qui est de sa commercialisation au Canada. Une de nos entreprises membres, Enerkem, se trouve à Edmonton. C'est une technologie de transformation de déchets en biocarburants qui utilise des déchets solides de municipalités — lesquels finiraient autrement dans un site d'enfouissement et créeraient littéralement des tonnes de méthane — pour les transformer en biocarburants avancés. C'est un mariage entre une technologie de pointe unique en son genre et le fait d'être en mesure d'exploiter une plateforme de carburants renouvelables établie et performante. Nous devons être capables de travailler en tandem, particulièrement à court et à long terme. Ici, les biocarburants peuvent jouer un rôle important.

Je crois avoir entendu les sénateurs autour de la table dire haut et fort, avec honnêteté et candeur — et je vous en remercie —, que nous avons probablement besoin de mieux faire notre travail pour ce qui est de vous fournir un portrait actuel de la façon dont notre industrie est arrivée là où elle se trouve. Évidemment, il y a des enjeux alimentaires propres à notre procédé, mais ils ne font pas vraiment partie du portrait actuel. Ils ne devraient certainement pas être une préoccupation dans l'avenir, particulièrement à la lumière de la demande fondamentale que nous avons présentée ici.

Je vous remercie de m'avoir donné la chance de parler un peu plus de ce qui s'en vient.

Le président : Nous avons hâte de recevoir l'information.

Le sénateur Patterson : Je tiens à dire que cette table ronde a été des plus stimulante. Les trois témoins m'ont emballé et m'ont éclairé. Je crois qu'ils se complémentaient.

Monsieur Denhoff, vous avez présenté des arguments très convaincants à l'égard des piles à combustible dans les véhicules. Je me demande si vous pourriez parler de la question du coût. Vous avez parlé de la Tesla et de son coût exorbitant. Comment les piles à combustible dans les véhicules se comparent-elles sur le plan du coût?

M. Denhoff : Si vous prenez à bail un véhicule à pile à combustible, en Californie, je crois que c'est 499, environ 499 par mois, carburant compris. Je crois que c'est similaire au Canada. En raison de la dépréciation du dollar, c'est peut- être un peu plus élevé, dans les 500. C'est pour un VUS, le VUS Tucson de Hyundai. Sur le marché, vous verriez un prix relativement comparable pour un véhicule légèrement haut de gamme. On n'obtiendra pas encore un véhicule à pile à combustible équivalant à une Honda Civic, et il s'agit seulement d'économies d'échelle. Si un constructeur fabrique 3, 4 ou 5 000 de ces véhicules par année, les économies grande échelle ne sont tout simplement pas au rendez- vous.

Nous voyons — par exemple, avec les autobus — que les autobus à pile à combustible coûtaient presque 3 millions de dollars initialement. Ensuite, ils coûtaient 2,5, puis 2, puis 1,8, 1,7, et maintenant, avec la commande de 142 autobus, je crois, en Europe, on s'attend à ce que le prix des autobus à pile à combustible soit de l'ordre de 700 000 à 900 000 dollars, ce qui les rend compétitifs par rapport à un trolleybus.

C'est la même chose pour les véhicules. À la décharge de M. Musk, la raison pour laquelle les Teslas coûtent 100 000 $ est l'échelle de production. Il soutient qu'il pourra offrir un véhicule milieu de gamme d'environ 35 000 $ aux États- Unis une fois qu'il aura augmenté la production. Ce véhicule n'aura pas accès aux super stations. Les gens devront payer.

Pour tous les constructeurs, qu'on parle de piles à combustible ou de véhicules électriques à batterie, il faut augmenter la production pour obtenir des automobiles moins chères. Sur le marché, on peut maintenant les prendre à bail ou les acheter à prix compétitifs, mais les constructeurs absorbent essentiellement cette subvention.

Ce qui est très intéressant — et je fournirai des données plus tard —, c'est que, pour des entreprises comme Ballard, leurs autobus à pile à combustible initiaux, par exemple, coûtaient environ 3 millions de dollars, et leur durabilité était de X heures : 3, 4 ou 5 000 heures. Maintenant, leur autobus à pile à combustible coûterait un peu plus d'un million de dollars, et elles ont réduit le coût de la pile à combustible de moitié, mais la durabilité a augmenté au point d'être dans une fourchette comparable au moment où on remplacerait le moteur d'un autobus diesel ordinaire.

Nous étions très satisfaits; il y a eu un projet de démonstration de 20 autobus à Vancouver. À la fin de presque cinq ans d'utilisation, Ballard s'attendait, si on renouvelait le projet, à devoir installer dans tous les autobus un nouveau système de pile à combustible, mais je crois que moins de 20 p.100 de ces autobus ont eu besoin d'une nouvelle pile à combustible, et une nouvelle génération de piles dure encore plus longtemps.

Nous sommes certainement sur le point d'avoir des coûts et des prix plus compétitifs. Ces autobus sont plus chers que les autobus ordinaires. Les trolleybus coûtent un million de dollars, alors qu'un autobus diesel est à environ 600 000 $. Pourquoi ferions-nous le changement? Parce que d'est bon pour l'environnement. Les véhicules électriques à batterie et ceux à pile à combustible se dirigent vers cette fourchette idéale où les gens peuvent payer pour les bienfaits environnementaux sans se ruiner.

Le sénateur Patterson : Le sénateur MacDonald a demandé les recommandations de M. Denhoff. J'aimerais entendre celles des deux autres témoins. Ce sujet m'emplit d'enthousiasme. Que devrions-nous recommander, madame Kent? Vous avez parlé d'apporter des changements réglementaires au chapitre du maximum d'éthanol. Y a-t-il autre chose que le Canada devrait faire et que nous devrions recommander au gouvernement fédéral?

Mme Kent : Je recommanderais, comme je l'ai mentionné, une augmentation de l'exigence actuelle, alors envisager de faire passer la teneur en éthanol de 5 p. 100 à 10 p. 100, et celle pour le biodiesel de 2 p. 100 à 5 p. 100. Ces augmentations seraient certainement nos principales demandes à court terme.

Un autre domaine de travail qui serait intéressant pour votre groupe est l'analyse d'autres initiatives que le gouvernement a déjà annoncées. Dans le budget de 2016, un important volet relatif aux infrastructures touchant les carburants de rechange a été confié à Ressources naturelles Canada. À notre connaissance, les biocarburants ne sont pas considérés comme un carburant de rechange dans le contexte de la mise en place de ces infrastructures. M. Denhoff l'a bien dit : nous ne sommes pas en concurrence avec une autre solution de rechange en matière de carburant renouvelable. Il faut seulement s'assurer d'avoir cette comparabilité des politiques sur toute la ligne pour que les possibilités offertes par les marchés soient présentées et que les consommateurs puissent décider par eux-mêmes. À cet égard, l'aménagement d'infrastructures pour les biocarburants serait une bonne chose.

L'examen des cadres fiscaux et réglementaires favoriserait l'innovation en amont en matière de nouvelles technologies et permettrait de reconnaître qu'on a déjà accompli du bon boulot, mais qu'on a aussi toujours besoin d'aide en ce qui concerne la commercialisation, que ce soit au moyen d'exonérations fiscales ou d'autres politiques. On a exonéré le gaz naturel et le propane de la taxe d'accise sur le carburant pour stimuler leur utilisation. Quelque chose de similaire pourrait être fait pour l'éthanol cellulosique — dont nous avons parlé il y a un moment — afin de l'aider aussi à se tailler une place sur le marché.

Le sénateur Patterson : Monsieur Kirk, vous avez parlé d'exiger des propositions concernant les infrastructures de transport en commun qu'elles soient assorties d'une stratégie sur les véhicules autonomes. Nous sommes sur le point de dépenser des milliards en projets d'infrastructures de transport en commun. Nous avons peut-être raté l'occasion ici, j'ai bien peur, de mettre en œuvre votre recommandation. Ajouteriez-vous autre chose?

M. Kirk : Je ne crois pas qu'il soit trop tard. C'est une bonne question. Évidemment, ici à Ottawa, on lance la phase I du système de train léger d'Ottawa. L'expansion du projet dans le cadre de la phase II est toujours au stade de la planification. J'ai lu le plan d'activités du projet et j'ai été troublé de constater qu'il n'y avait aucune mention des véhicules autonomes ou automatisés ni d'autoconduite. On part implicitement du principe selon lequel l'avenir est le prolongement du passé. Tout ce que je dis et que les experts du domaine disent, c'est que les véhicules autonomes, les véhicules ACE et les taxis sans conducteur seront bientôt ici et que, par conséquent, le passé n'est pas un guide pour l'avenir.

Un peu plus tard cette année, nous nous attendons à ce que le gouvernement fédéral fasse des annonces concernant des dépenses en infrastructures et un programme d'innovation. Je souhaite et je recommande que cela comprenne une étude d'impact des VA.

Voici la préoccupation que j'ai : prenons l'exemple du SLR d'Ottawa. Je reconnais d'emblée qu'un système léger sur rail était certainement la bonne décision à prendre lorsqu'on a élaboré les plans il y a dix ans, mais au cours des cinq dernières années, on a fait énormément de progrès dans le domaine des véhicules autonomes et sans conducteur. Les progrès ont été très rapides.

Supposons que les véhicules sans conducteur sont la voie de l'avenir pour les années 2020. Plus tôt, j'ai mentionné General Motors, qui a dépensé un milliard de dollars. Elle a acheté Lyft, une technologie d'autopartage. Elle a investi dans Cruise, qui utilise une technologie de véhicule autonome, et elle fait d'autres investissements. Le président de General Motors aux États-Unis a dit que l'attention de la GM sera portée sur les taxis sans conducteur, qu'elle est maintenant très bien placée pour pénétrer ce marché, qu'elle voit le marché des taxis sans conducteur comme le point de départ logique pour commencer les véhicules autonomes et qu'elle fera concurrence avec toutes sortes d'options de transport en commun.

J'écoutais, plus tôt cette semaine, un reportage de la CBC concernant le nouveau SLR d'Ottawa. Disons que des gens vivent à Kanata, où j'habite. Ils vont travailler. Ils peuvent marcher jusqu'à un arrêt d'autobus, prendre l'autobus, passer ensuite au système léger sur rail, descendre du train et aller au bureau. C'est un itinéraire multimodal compliqué. Si l'industrie du taxi sans conducteur, dans les années 2020, peut offrir la possibilité à deux ou trois voisins de partager un taxi sans conducteur et d'aller au centre-ville en un déplacement, sans tous les changements de moyens de transport, il y aura un marché pour cela, même s'il coûte un peu plus cher que le transport en commun ordinaire. Cela va faire diminuer l'achalandage du transport en commun classique ainsi que les revenus et fera augmenter la subvention d'exploitation des contribuables pour le système léger sur rail pour le reste du siècle.

Je recommande que les VA et les taxis sans conducteur fassent partie du plan d'activités et soient explicitement intégrés au modèle financier. Je vous le dis sans détour : avec ses trajets et ses horaires fixes, pour se rendre d'un point à un autre le système léger sur rail est selon moi une solution du XXe siècle. La tendance du XXIe siècle est au déplacement sur demande et flexible d'un point à un autre. Une solution de taxi sans conducteur répond à ces critères, mais pas le système léger sur rail. Le maire de Los Angeles l'a dit à deux occasions en public : « Pourquoi construisons- nous toujours des systèmes légers sur rail? » Son opinion sur le système léger sur rail est qu'il appartient au XXe siècle.

Au lieu d'installer des rails dans ces tunnels sous la ville d'Ottawa, si on avait déjà une plateforme asphaltée ainsi que des autobus électriques ou à pile à combustible ou peu importe, alors on pourrait utiliser la même plateforme asphaltée pour les taxis sans conducteur et réduire une partie de la congestion dans les rues.

Il n'y a pas de solutions simples pour le transport en commun, peu importe la ville, que ce soit Ottawa ou ailleurs, mais le pire scénario possible est d'ignorer l'évidence dont on ne veut pas parler, et la meilleure chose à faire est de s'en occuper et de l'inclure dans le plan d'activités et les modèles financiers.

Le vice-président : Si on prend une personne ordinaire qui achète une voiture ordinaire, dites-moi le prix en comparaison d'une automobile à hydrogène, d'un véhicule électrique et peut-être d'un véhicule à essence actuel. Donnez-moi une idée de comment elles se comparent. Disons qu'une personne achète une automobile à 25 000 $. Combien devra-t-elle débourser de plus pour une voiture à hydrogène?

M. Denhoff : Il n'y a pas d'automobiles à pile à combustible à hydrogène bas de gamme sur le marché. Il s'agit habituellement de produits milieu de gamme. Elles seraient en concurrence avec des VUS ou des automobiles dans la fourchette de prix de 499 $ en location-bail par mois.

Le vice-président : Simplifiez-nous la tâche. Quel est le prix d'achat en comparaison d'un véhicule classique?

M. Denhoff : La plupart du temps, on les cède à bail, alors il faudrait que je m'informe. La fourchette de coût de location est de 499 à 599 $ par mois, ce qui les place dans le haut du milieu de gamme.

Le vice-président : C'est un écart important. C'est 20 p. 100. Disons 525 $ par mois.

M. Denhoff : Je dirais.

Le vice-président : Faites la comparaison avec les véhicules classiques existants.

M. Denhoff : Dans cette fourchette, honnêtement, je ne peux pas répondre avec certitude. Il s'agirait d'une voiture plus coûteuse, mais la différence ne serait pas énorme. Je suis certain qu'on peut louer une Hyundai ordinaire ou son équivalent Toyota Mirai à moindre coût, mais je n'ai pas les prix sous la main.

Le vice-président : Plus de 10 p. 100 ou moins de 10 p. 100?

M. Denhoff : Je crois qu'on parlerait de 10 à 20 p. 100.

Le sénateur Mockler : Nous pourrions être ici encore pendant deux heures à approfondir certaines des questions du sénateur MacDonald.

Pouvez-vous nous fournir une grille des villes d'Amérique du Nord qui devraient avoir un plan d'activités où il est question des nouveaux types de véhicules? Je vous suis reconnaissant d'avoir dit cela. Pourriez-vous fournir cela au comité?

M. Kirk : Assez facilement. La triste réalité, c'est que plus de 90 p. 100 des plans directeurs de transport et des stratégies de transport en commun dans toute l'Amérique du Nord — au Canada et aux États-Unis — ne tiennent pas compte des véhicules autonomes. C'est l'exception. Quelques municipalités commencent à y réfléchir. J'ai mentionné Toronto. Calgary commence à y penser, mais aucune municipalité — à ma connaissance — au Canada n'a intégré les véhicules autonomes à son plan directeur de transport ou de transport en commun, alors la grille devient très simple.

Le vice-président : Si Moncton le fait en premier, elle sera alors la première au monde.

M. Kirk : Absolument, oui.

Le sénateur Mockler : Merci, monsieur le président. J'ai déjà essayé une Tesla à Moncton, en fait, et j'ai été impressionné. L'informatisation de ce véhicule est incroyable.

Ma question est la suivante : où s'inscrivent les batteries au lithium dans votre concept?

M. Kirk : Vous me regardez, monsieur, mais je ne suis pas un expert des batteries au lithium. Je suis ingénieur, et je connais les limites de mes connaissances. Avec tout le respect que je vous dois, monsieur, je passe mon tour pour cette question.

M. Denhoff : Il existe une diversité de technologies de batterie utilisées pour diverses solutions dans ces situations. Je ne peux tout simplement pas émettre un commentaire. Je ne consacre pas de temps à cet aspect.

Le sénateur Mockler : Puis-je communiquer un peu d'information sur le sujet? D'où la sénatrice Ringuette et moi- même venons, nous avons beaucoup de bûcherons. J'ai eu l'occasion d'examiner des scies à chaîne avec des batteries au lithium qu'on peut acheter au Walmart, au Canadian Tire et ailleurs. Nous étions très impressionnés dans notre coin de pays — le Canada atlantique — par Oregon, entreprise spécialisée en scies à chaîne. Nous savons qu'elle est crédible. Elle offre une scie à chaîne, un élagueur-sécateur et des coupe-herbes à batterie au lithium. La durée de la batterie est de quatre heures et demie à six heures. Nous étions très impressionnés par cette durée.

M. Denhoff : Pour de petites applications, ces batteries sont excellentes. Elles sont vraiment dures à battre. C'est lorsqu'il faut davantage de puissance ou une durée de fonctionnement plus longue qu'on commence à éprouver des problèmes.

Comme je l'ai mentionné plus tôt, les piles à combustible ont des applications intéressantes dans le domaine de la défense. Les Américains viennent juste de passer une autre commande de 5 millions de dollars à Ballard pour l'utilisation de piles à combustible pour l'alimentation d'un véhicule de transport de personnel pouvant accueillir un peloton entier. Le véhicule est assorti d'outils de navigation et transporte des centaines de livres d'équipement électronique, et les batteries requises pour fournir une alimentation prolongée sont trop lourdes.

Je peux affirmer sans me tromper que certaines de ces applications battent les piles à combustible à plat de couture, comme celles d'une scie à chaîne. Nous n'en avons pas encore une à cette fin. Il existe des applications de piles à combustible pour les téléphones, mais elles ne sont pas concurrentielles. Par contre, lorsqu'on parle de gros camions ou de temps très froid, entre autres, alors nous faisons mieux. Tout le monde a ses forces.

Le vice-président : J'ai fait un commentaire plus tôt sur la conduite dangereuse de la sénatrice Ringuette. Imaginez si elle avait une tronçonneuse à côté d'elle.

Le sénateur MacDonald : La chose dont nous n'avons pas encore discuté est le point de départ de nos travaux, à savoir le fait que nous tentons de réduire les émissions de CO2 et que les émissions de CO2 sont foncièrement mauvaises en ce qui concerne le réchauffement climatique et les choses de la sorte. Bien sûr, quand il est question de l'énergie éolienne, nous supposons qu'il s'agit d'une énergie verte, mais il y a beaucoup d'émissions de CO2 causées en amont par l'énergie éolienne. On construit des tours et des turbines, et cela produit des émissions de carbone. On coupe des arbres pour aménager ces installations, et il y a un coût à cela. On exploite des mines de cuivre pour produire des générateurs, et il y a aussi un coût à cela. Comme pour l'hydroélectricité, il y a un coût en amont. Même si cette énergie est verte, produire de l'hydroélectricité est destructeur. Quels sont vos coûts en amont? Quels sont les coûts en matière d'émissions de carbone pour produire des carburants renouvelables ou des piles à combustible à hydrogène?

Mme Kent : Quand nous disons que nos émissions de carbone sont de 60 à 99 p. 100 inférieures, cela repose sur l'analyse du cycle de vie. Cela comprend toutes les étapes du processus. Nous étudions la biomasse, où et comment elle est cultivée, comment elle est transportée aux installations de production, comment elle est transformée, comment le produit transformé est transporté au mélangeur, comment il est mélangé... Bref, jusqu'au moment où quelque chose sort du tuyau d'échappement. Toute la chaîne de valeur est prise en considération. Il y a un coût, mais il y a encore un avantage net.

M. Denhoff : C'est la même chose pour nous. Nos chiffres, lorsque nous les indiquons, représentent le total. Si vous produisez de l'hydrogène à partir de l'éolien, exactement comme vous l'avez dit, il y a tout cet acier qu'on utilise, l'infrastructure et le combustible pour l'aménagement. Si on utilise des batteries électriques, on tire une énorme quantité d'hydroélectricité du réseau pour les voitures. À certains endroits, lorsqu'on vous tient de construire de nouvelles centrales électriques, des gens s'opposent à la réalisation du projet dans la localité, et vous avez aussi des problèmes liés aux lignes de transmission.

Il n'y a pas de technologie sans conséquence. Toutes réduisent les émissions de GES au bout du compte. Je suis parfaitement d'accord avec vous pour dire qu'il n'y a pas de solution miracle qui ne produit aucune émission. Même pour la biomasse, vous devez utiliser de la grosse machinerie.

Le sénateur MacDonald : En ce qui a trait à l'énergie éolienne, lorsque les installations sont abandonnées, cela ne fait que gâcher le paysage.

Le vice-président : Quel est le pourcentage de la réduction du coût du cycle de vie?

M. Denhoff : J'ai présenté cela par écrit. Cela dépend du fait qu'il s'agisse d'autobus ou de voitures ou du type d'utilisation. Les moteurs dotés d'une pile à combustible sont deux ou trois fois plus efficients que le moteur au diesel, en raison de sa performance, et les réductions des émissions de GES apparaissent dans le mémoire que je vous ai remis. Cela dépend s'il s'agit de voitures ou d'autobus.

Le vice-président : C'est 30 p. 100?

M. Denhoff : Quelque chose comme cela.

La sénatrice Ringuette : Au sujet des incitatifs fiscaux, que vous semblez tous chercher à obtenir afin d'investir dans l'industrie pour réduire les coûts et produire à plus grande échelle, ne serait-il pas plus efficient pour le gouvernement fédéral d'octroyer un crédit d'impôt annuel aux consommateurs qui achètent une voiture qui ne produit pas d'émissions de carbone? Cet incitatif fiscal décourageant la consommation d'essence et les émissions de GES pourrait être instauré de façon permanente, et cela stimulerait la demande, l'échelle de production et le reste. Nous nous y prenons peut-être de la mauvaise façon. Si nous voulons augmenter la présence de ces technologies au Canada, peut- être que la façon d'y parvenir serait d'offrir un crédit d'impôt aux consommateurs plutôt qu'un crédit d'impôt à l'industrie.

M. Denhoff : Nous faisons un peu cela en Colombie-Britannique. Un crédit de 6 000 $ est offert là-bas. On le fait dans d'autres provinces également. La solution la moins coûteuse de toutes serait tout simplement de prendre un règlement qui oblige les fabricants d'équipement d'origine à fabriquer un certain pourcentage de véhicules qui ne produisent pas d'émissions s'ils souhaitent vendre leurs véhicules ordinaires au Canada, et cela ne coûte rien au contribuable. Mais les deux fonctionnent.

Mme Kent : Je crois que les deux sont nécessaires. Si on veut vraiment faire la transition vers une économie à faibles émissions de carbone, il faut s'attaquer à chaque véhicule du parc tout en veillant à ce que tout le carburant utilisé soit plus propre. Pourquoi choisir une seule option lorsqu'on peut faire les deux?

M. Kirk : Comme je l'ai dit plus tôt, la plupart des leaders d'opinion sont d'avis que l'époque où les gens sont propriétaires d'une voiture tire lentement à sa fin. Il y aura davantage de taxis sans conducteur. Morgan Stanley, aux États-Unis, a prédit que nous assistons au début de la fin de l'industrie automobile telle que nous la connaissons actuellement. Ces changements sont extrêmement perturbateurs, et tout incitatif doit viser le marché du taxi sans conducteur plutôt que celui de la voiture personnelle.

Le vice-président : Merci beaucoup à vous trois. J'ai trouvé la discussion très intéressante, et nous avons certainement appris beaucoup de choses. Espérons que nous mettrons ces informations à profit afin de réduire la production de gaz carbonique au Canada. Merci beaucoup.

(La séance est levée.)

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