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ENEV - Comité permanent

Énergie, environnement et ressources naturelles

 

LE COMITÉ SÉNATORIAL PERMANENT DE L’ÉNERGIE, DE L’ENVIRONNEMENT ET DES RESSOURCES NATURELLES

TÉMOIGNAGES


OTTAWA, le jeudi 26 octobre 2017

Le Comité sénatorial permanent de l’énergie, de l’environnement et des ressources naturelles se réunit aujourd’hui, à 8 h 4, pour étudier les effets de la transition vers une économie à faibles émissions de carbone.

Le sénateur Richard Neufeld (président) occupe le fauteuil.

[Traduction]

Le président : Bonjour, chers collègues, et bienvenue à cette réunion du Comité sénatorial permanent de l’énergie, de l’environnement et des ressources naturelles.

Je m’appelle Richard Neufeld; je suis un sénateur de la Colombie-Britannique et je suis honoré de présider le comité.

Je souhaite la bienvenue à tous ceux qui sont dans la salle et aux téléspectateurs de partout au pays qui nous regardent à la télévision ou en ligne. Je vous rappelle que les audiences des comités sont publiques et sont diffusées en ligne sur le nouveau site web du Sénat, sencanada.ca.

Vous pouvez également trouver tous les autres travaux des comités en ligne, notamment les anciens rapports, les projets de loi étudiés et les listes de témoins.

Je demanderais maintenant aux sénateurs de se présenter. Je vais commencer par présenter le vice-président, le sénateur Paul Massicotte.

Le sénateur Massicotte : Bonjour.

Le sénateur Richards : David Richards, du Nouveau-Brunswick.

Le sénateur MacDonald : Michael MacDonald, de la Nouvelle-Écosse.

Le sénateur Wetston : Howard Wetston, de l’Ontario.

La sénatrice Griffin : Diane Griffin, de l’Île-du-Prince-Édouard.

Le sénateur Patterson : Dennis Patterson, du Nunavut.

La sénatrice Seidman : Judith Seidman, du Québec.

Le président : Nous souhaitons la bienvenue au sénateur Richards à titre de nouveau membre du comité. Il s’agit de sa première réunion. Il remplacera le sénateur Dean. Nous sommes heureux de vous compter parmi nous et nous avons hâte de vous entendre, monsieur.

Des voix : Bravo!

Le président : J’aimerais aussi vous présenter notre personnel, à commencer par la greffière, Maxime Fortin, et les analystes de la Bibliothèque du Parlement, Marc LeBlanc et Sam Banks.

En mars 2016, le Sénat a mandaté le comité de réaliser une étude approfondie des effets, défis et coûts associés à la transition vers une économie à faibles émissions de carbone. Le gouvernement du Canada s’est engagé à réduire ses émissions de gaz à effet de serre à 30 p. 100 sous le niveau de 2005 d’ici 2030. Il s’agit d’une très grande entreprise.

Le comité a adopté une approche sectorielle en vue de réaliser l’étude. Nous allons étudier cinq secteurs de l’économie canadienne qui sont responsables de plus de 80 p. 100 de toutes les émissions de gaz à effet de serre. Ce sont les secteurs de l’électricité, des transports, de l’exploitation pétrolière et gazière, des industries tributaires du commerce à forte intensité d’émissions, et des bâtiments.

Nous avons publié notre premier rapport provisoire sur le secteur de l’électricité le 7 mars et notre deuxième rapport sur le secteur des transports le 22 juin.

Aujourd’hui, pour la 55e réunion de notre étude, nous sommes heureux d’accueillir Benjamin L. Shinewald, président et chef de la direction de BOMA Canada.

Nous vous souhaitons la bienvenue à cette réunion du comité, monsieur. Nous avons hâte d’entendre la déclaration préliminaire que vous avez préparée. Nous passerons ensuite à la période de questions.

Benjamin L. Shinewald, président et chef de la direction, BOMA Canada : Je vous remercie de me recevoir ce matin.

[Français]

Je ferai ma présentation en anglais, mais je répondrai aux questions en français par la suite.

[Traduction]

Je vous ai transmis une présentation il y a quelques jours. Je ne sais pas si vous avez eu l’occasion de la regarder. J’ai tenté de faire une présentation de haut niveau.

J’ai pensé prendre quelques minutes pour vous donner un aperçu de notre organisation et aussi de vous raconter une histoire qui, je l’espère, orientera notre discussion et le travail important que vous réalisez.

Très rapidement, la Building Owners and Managers Association, ou BOMA Canada, a été fondée il y a plus de 100 ans; BOMA B.C. il y a environ 110 ans et BOMA Toronto il y a 100 ans cette année. Nous formons une association mature au sein d’une industrie mature.

Comme vous vous en doutez, notre groupe représente les propriétaires, gestionnaires et fournisseurs de ces deux industries des biens immobiliers commerciaux et institutionnels — dans une certaine mesure — au pays. Nous avons plus de 3 000 membres et intervenants dans nos 11 chapitres à travers le pays. En fait, je rencontrerai les représentants de BOMA Ottawa après la réunion d’aujourd’hui. Voilà qui nous sommes de façon générale.

Je sais que nous ne disposons que d’une heure, alors j’ai pensé vous expliquer notre mandat et notre vision en ce qui a trait aux travaux du comité.

Je raconte souvent cette histoire à titre de métaphore : au lieu de parler d’immeubles, je vais parler de voitures un instant. La plupart d’entre nous sont venus ici ce matin à bord d’un certain type de véhicule. Si l’on sortait dehors sur la rue Wellington, vous remarqueriez peut-être — si les voitures vous intéressent — quelques voitures plus luxueuses ou branchées, mais la grande majorité des voitures sont ordinaires.

La Mercedes, une voiture luxueuse et dispendieuse, attirera peut-être le regard d’une personne qui aime le luxe, tandis que la Prius, une voiture hybride, attirera le regard d’une personne soucieuse de l’environnement. Toutefois, les autobus, les camions, les Mazda, GM et autres véhicules n’attireraient pas notre regard.

Notre industrie est composée de toutes ces voitures, mais les médias, la société et parfois les comités comme le vôtre ne se centrent que sur cette infime portion que sont les voitures hybrides ou électriques. Il est très important d’en tenir compte pour réduire l’impact des voitures sur l’environnement dans ce cas-ci, mais il ne s’agit pas de la seule façon de faire.

Ce matin, j’encourage le comité à résister à la tentation de ne tenir compte que des nouvelles normes de constructions à la mode, parce qu’elles ne représentent qu’une infime partie des défis auxquels notre pays est confronté en matière d’immobilier commercial. Chaque immeuble du pays et de la planète laisse une empreinte écologique : les beaux immeubles comme ceux qui sont laids, les immeubles du centre-ville comme les immeubles des banlieues, les grands immeubles comme les petits, les bureaux, les bâtiments industriels légers, les commerces de vente au détail, les établissements de soins de santé et ainsi de suite.

Comme toutes les voitures, les immeubles laissent aussi leur empreinte. Toutefois, la durée de vie de nos immeubles est habituellement de 50 à 75 ans, alors leur empreinte reste plus longtemps.

Cela m’amène à ma conclusion. Pourquoi? Parce qu’il ne suffit pas d’établir des normes élevées pour les nouvelles constructions, qui ne sont que la pointe de l’iceberg; il faut aussi tenir compte de notre bassin de magnifiques immeubles, des édifices du patrimoine spectaculaires comme celui dans lequel nous nous trouvons aujourd’hui, qui est toujours utilisé à titre d’immeuble de bureaux ou de lieu de travail.

Comment peut-on rendre cet immeuble et les milliers d’autres comme lui plus durables? Il y a deux façons de faire : il y a les mises à niveau, bien sûr, mais on peut aussi le faire dans le cadre de nos activités quotidiennes.

On exploite les immeubles exactement de la même façon qu’on conduit les voitures, selon les mêmes principes : on se place derrière le volant d’une voiture hybride, mais on roule avec les fenêtres baissées et la climatisation en marche; les pneus sont mal gonflés; on n’a pas changé les filtres. On s’immobilise et on repart à grands coups, plus grands qu’il ne le faudrait. C’est exactement ainsi que les professionnels gèrent les immeubles commerciaux aujourd’hui.

Nous avons créé le programme BOMA BEST, dont les principes de base visent à aider les exploitants d’immeubles. Les immeubles forment un ensemble d’organismes axés sur la technologie. Ce ne sont pas des structures statiques avec des gens qui balaient les planchers ou qui travaillent à la réception seulement. Ces gens peuvent accroître le rendement des immeubles, tout comme je peux améliorer le rendement de ma voiture ordinaire — qui n’est pas hybride — avec des pneus bien gonflés, la pédale douce et la climatisation qui fonctionne uniquement si les vitres sont fermées. Je peux surpasser la voiture hybride, mais si en plus son conducteur fait comme moi, alors nous sommes tous gagnants.

Nous avons créé le programme BOMA BEST, mais notre philosophie est la suivante : chaque immeuble a un rôle à jouer et ce rôle consiste en la gestion des immeubles existants de la manière la plus professionnelle et la plus efficace possible.

Je crois que cela résume bien les points qui valent la peine d’être abordés, mais je suis ouvert à toutes vos questions.

Le président : Merci beaucoup, monsieur. Nous allons entendre la question de notre premier intervenant.

Le sénateur Massicotte : Nous vous remercions de votre présence ici ce matin. Nous vous en sommes très reconnaissants.

Au cours des derniers mois, nous avons entendu de nombreux témoins dire qu’on pouvait réaliser d’importants gains en efficacité énergétique à partir de l’actuel parc d’immeubles commerciaux, d’immeubles de bureaux et d’immeubles résidentiels, y compris les maisons unifamiliales et les immeubles de grande hauteur.

En fait, on critique souvent l’industrie en disant que le potentiel et les possibilités sont là. C’est si facile et les retombées sont si importantes et rapides qu’on dit souvent qu’il y a beaucoup de gains à faire dans ce domaine. Nous pouvons réduire notre empreinte carbone de manière significative en travaillant plus intelligemment, surtout en modifiant notre parc actuel.

Est-ce le cas? Si c’est le cas, s’il est sensé sur le plan économique de rénover et d’améliorer les immeubles, alors pourquoi les propriétaires, qui sont très nombreux à avoir beaucoup de liquidités ou à ne pas manquer d’argent, comme les fonds de pension et les sociétés publiques, ne le font-ils pas?

J’ai constaté que vous avez octroyé plus de 2 000 certificats. Ce n’est rien comparé aux centaines de milliers d’immeubles qui se trouvent sur notre territoire. Quel est le problème de l’industrie?

M. Shinewald : Une partie de votre question me plaît, parce que j’ai parfois l’impression d’être une sorte d’évangéliste lorsque j’essaie d’attirer l’attention des gens vers le grand parc d’immeubles existants plutôt que vers le petit nombre de nouvelles constructions attrayantes.

Je crois que vous avez raison. On peut réaliser des gains d’efficacité dans le parc existant, mais ce sera toujours le cas parce que les technologies et les méthodes de travail des exploitants d’immeubles évolueront toujours. Ces deux éléments vont de pair. Ce sont les quasi-investissements de capitaux et les opérations quotidiennes qui, ensemble, permettent d’accroître le rendement des immeubles.

Mon organisation, BOMA Canada, représente les propriétaires et gestionnaires commerciaux. Notre travail ne vise pas les maisons unifamiliales comme celle dans laquelle je vis, par exemple, mais les principes sont les mêmes. Je suis heureux de vous dire que ces quelque 2 600 certifications BOMA BEST ont été octroyées en grande partie à des sociétés appartenant à des fonds de pension et des institutions de partout au Canada. Certaines d’entre elles ont obtenu une certification BOMA BEST pour la totalité de leurs immeubles ou presque.

De plus, notre position nous permet maintenant d’exporter notre programme. Nous avons ouvert la marche. Nous n’en sommes qu’aux tout débuts, mais nous élargissons nos portefeuilles aux États-Unis et ailleurs.

Ce qui est bizarre avec notre industrie, c’est qu’elle est très difficile à définir parce qu’il y a les sociétés dont vous avez parlé, qui s’investissent dans BOMA et dans nos programmes et qui intègrent la durabilité à leur culture de façon sincère, j’en suis certain. Je pourrai y revenir, si vous le voulez. On se trouve à l’autre bout du spectre. Ces sociétés sont là pour gagner.

Ensuite, il y a les plus petites entreprises et les sociétés régionales, et ainsi de suite. Ces entreprises n’ont pas toutes la même capacité d’investir dans ces mesures. Plus votre entreprise est petite, moins vous avez de jeu. On descend de plus en plus bas, jusqu’à se demander si la personne qui loue un logement dans un sous-sol est propriétaire d’un immeuble commercial. Je vais vous revenir dans un instant, monsieur le sénateur, mais plus vous descendez en bas de l’échelle, plus c’est difficile.

Le sénateur Massicotte : Je vais essayer de nouveau. Je comprends que vous jouissiez d’une grande reconnaissance. Je suis prêt à parier que, dans une large mesure, vous avez octroyé les certificats à des immeubles de grande qualité du centre-ville, financés par les cotisations.

Vous dites que les propriétaires de ces immeubles sont les grands fonds de pension. Je conviens que ce sont les plus grands à l’échelle internationale. Il y a les sociétés de placement immobilier publiques, de nombreuses sociétés publiques qui possèdent beaucoup d’immeubles. Il y a aussi de nombreuses familles riches qui sont propriétaires de nombreux immeubles. Toutefois, il y a aussi des propriétaires de duplex, par exemple. Je n’en ai nommé que quatre, mais ils représentent probablement 95 p. 100 de tous les immeubles du Canada.

Je parie que chacun d’entre eux dirait que le gestionnaire de l’immeuble, le membre de BOMA, a recommandé ces améliorations. Si la période de récupération était de sept ans, je suis certain que tous ces propriétaires diraient : « Nous allons le faire et nous l’avons fait. » Selon eux, ces mesures ne sont pas réalisables ni économiques.

Qui dit vrai? Qui nous ment? Qu’est-ce qui se passe ici?

M. Shinewald : Je ne vous mens pas. Pour revenir à ce que vous avez dit, on ne parle pas uniquement des tours de bureaux du centre-ville qui appartiennent aux plus grandes entreprises. Cela représente une infime partie de leurs avoirs et de nos certificats. En fait, notre programme a connu un énorme succès avec les propriétés à vocation industrielle légère des banlieues. Nous offrons sept modules distincts.

Le sénateur Massicotte : Pourquoi ne rénovent-ils pas leurs immeubles s’il est possible et économique de le faire? Même les familles riches souhaitent récupérer leurs investissements. Qu’est-ce qui les retient? Où est la contradiction?

M. Shinewald : Je vous entends. Je crois que le gouvernement peut jouer un rôle à cet égard. Nous tentons d’éduquer nos membres qui, au bout du compte, sont motivés par les résultats. De façon particulière, les immeubles appartenant aux fonds de pension et aux sociétés institutionnelles ont une responsabilité quasi publique à l’égard des participants au fonds de pension. Ils sont progressifs.

Je n’ai pas les chiffres avec moi, mais je pourrais vous revenir là-dessus. Parmi les quelque 2 600 certifications, je dirais que 2 000 ont été octroyées à ces sociétés. La presque totalité de leur parc d’immeubles a reçu une certification.

Il y a aussi beaucoup de sociétés de placement immobilier, que nous ciblons. Nous leur parlons. Certaines d’entre elles comptent très peu de personnel-cadre, ce qui représente un défi pour nous, et non pour elles.

Si le gouvernement offrait des mesures incitatives pour accélérer la récupération, cela attirerait leur attention et leur participation serait accrue. L’analyse de rentabilisation prévaudra toujours, c’est certain.

Est-ce que j’ai bien répondu à votre question?

Le sénateur Massicotte : Oui.

Le président : Nous allons passer à la prochaine intervenante. Il pourra peut-être rajouter quelque chose plus tard.

La sénatrice Griffin : En gros, j’aimerais aborder deux sujets. Puisque la population active vieillit et qu’il y a une pénurie d’exploitants d’immeubles qualifiés, pouvez-vous nous parler de l’Initiative de certification des exploitants d’immeubles? Avez-vous établi un partenariat avec les collèges communautaires?

M. Shinewald : Je suis heureux d’entendre cette question. Hier seulement, nous avons changé le nom de l’initiative, pour une raison qui n’a pas d’importance ici. Je suis heureux de voir que vous la connaissez.

L’un des défis de l’industrie, c’est qu’elle n’est pas associée à un cheminement de carrière clair. Il n’y a pas un adolescent de 16 ans qui se couche le soir en se disant qu’il veut non pas être policier, sénateur ou chef d’entreprise, mais bien exploitant d’immeubles. C’est une profession qui est à la vue de tous, mais qui est invisible. On passe devant ces immeubles tous les jours. On croit que ce sont des endroits statiques, où travaillent des hommes avec une clé et une vadrouille, alors que ce sont des entreprises complexes. Il en va de même pour les membres de notre base.

C’est devenu un cliché dans notre industrie : personne ne choisit cette carrière. Les gens qui obtiennent une MBA veulent être promoteurs, par exemple, mais personne ne veut être gestionnaire des opérations quotidiennes d’une industrie massive, du rez-de-chaussée jusqu’au dernier étage.

Nous travaillons avec nos collègues du domaine à la création de l’initiative d’attestation des exploitants d’immeubles. C’est un genre de coup double, si je puis dire. L’idée, c’est de créer un cheminement de carrière et de nous donner de la visibilité. Mes partenaires, qui travaillent un peu plus directement que moi à ce projet, parlent avec les représentants des écoles secondaires à vocation technique pour intéresser les étudiants coop et les professeurs des collèges également.

De plus, nous tentons de créer une sorte de norme axée sur le marché. Nous ne demandons pas de réglementer ce secteur. Honnêtement, je ne crois pas que cela fonctionnerait. Si l’on pouvait permettre aux gens de s’autoaccréditer, on pourrait établir un marché pour une norme industrielle, de sorte qu’entre deux candidats autrement égaux, celui qui a cette attestation serait considéré comme étant un meilleur candidat ou qu’on exige l’attestation pour l’obtention d’un poste, en raison de sa complexité.

Le travail est très long et fastidieux, mais nous progressons. Nous travaillons surtout avec l’Ordre des métiers de l’Ontario, qui est responsable de la réglementation à cet égard, et qui compte d’excellents partenaires. L’établissement des normes en matière d’éducation et de programmes comporte divers volets. Nous avons réalisé d’importants progrès.

En passant, il y a deux raisons pour lesquelles nous passons par l’Ordre des métiers : d’abord, il est bilingue et ensuite, ses bureaux sont tout près des nôtres, à Toronto. L’idée est de terminer le projet d’ici un an ou deux et qu’il soit adopté par l’ordre des métiers de l’Île-du-Prince-Édouard, du Nunavut et ainsi de suite, afin de créer un sceau.

Tout cela permettra d’accroître l’efficacité et d’aller plus loin grâce à cette base de formation.

La sénatrice Griffin : J’aime beaucoup votre diapositive où vous demandez : « Que peut faire le gouvernement? » C’est formidable. C’est la raison pour laquelle nous sommes ici. Aux trois premières puces, vous expliquez comment le gouvernement donne l’exemple avec les immeubles qu’il possède ou ses baux, ce qui est également excellent.

Le gouvernement a d’autres instruments qu’il gère, par exemple, des instruments économiques ou des instruments réglementaires. Vos trois dernières puces portent principalement sur les instruments économiques tels que des incitatifs à l’investissement dans les technologies durables.

Y a-t-il des instruments réglementaires qui pourraient être utiles à votre industrie?

M. Shinewald : Les occasions pour le gouvernement s’articulent davantage autour des incitatifs. Les incitatifs peuvent être offerts sous différentes formes. Il est improbable que des subventions directes soient versées, mais c’est déjà arrivé. L’accélération de la déduction pour amortissement et le traitement fiscal peuvent être utiles.

Il y a des technologies très impressionnantes pour les immeubles qui sont conçues par des établissements comme le centre de la découverte MaRS à Toronto et d’autres ailleurs au Canada. Ils ne sont pas nos membres, mais ils appuient les jeunes entrepreneurs également. Divers outils peuvent favoriser l’innovation.

Sur le plan de la réglementation, rien ne me vient à l’esprit, mais je ne saurais passer sous silence un point que vous avez soulevé, madame la sénatrice, si vous n’y voyez pas d’inconvénient. Le gouvernement peut être un chef de file. Pour revenir à la question du sénateur Massicotte, c’est le secteur privé qui mène la charge.

Lorsque le sénateur a demandé pourquoi certains propriétaires privés ne s’intéressent pas plus à la rénovation, aux technologies, et cetera, lorsqu’il semble y avoir un avantage financier important, cette observation s’applique tout autant au gouvernement fédéral, aux provinces et aux municipalités.

Certaines provinces ont adopté le programme BOMA BEST et ses principes de manière énergique et vigoureuse. Le Québec est un excellent exemple. L’Université de l’Île-du-Prince-Édouard était certifiée à une certaine époque, mais je pense qu’elle ne l’est plus. Nous tenons des discussions avec les représentants à l’occasion.

Le gouvernement fédéral commence à s’y intéresser, mais son intérêt diminue et s’intensifie avec le secteur public en fonction de l’argent qui est dépensé et les occasions qui s’offrent à lui. Le programme BOMA BEST est, à bien des égards, axé sur l’entretien préventif.

Je ne l’ai pas inclus dans le document, mais j’aurais peut-être dû le faire. Il y a des éléments de preuve soumis par des tiers qui démontrent que BOMA BEST réduit les coûts opérationnels et accroît la valeur sous-jacente de l’actif, ce qui suscite toujours des préoccupations chez le gouvernement car il prolonge le cycle de vie, notamment. C’est peut-être moins le cas pour vous, mais il augmente le taux de rétention des locataires.

J’appuierais en fait les observations du sénateur en lien avec les vôtres pour passer en revue l’immense parc immobilier du gouvernement. Le MDN est le plus important propriétaire au pays, et on n’est pas porté à penser que c’est un ministère axé sur l’immobilier. Il y a une foule de possibilités ici même également.

Le sénateur Wetston : Permettez-moi de vous poser une question directe. Comment le programme BOMA peut-il contribuer à atteindre les cibles de réduction des émissions du Canada?

M. Shinewald : Nous sommes ici pour être votre partenaire, tout simplement. Dans le cadre du BOMA au Canada, nous avons été absorbés par la durabilité dans une certaine mesure. Nous sommes devenus un organisme axé sur la durabilité. Pour nous, c’est à la fois une possibilité et un défi car nous voulons être plus qu’un organisme axé sur la durabilité.

La réponse courte, monsieur le sénateur, c’est que nous pouvons être votre partenaire dans tout ce que nous faisons. J’ai eu une excellente rencontre hier, par exemple, avec des représentants d’un ministère ici à Ottawa. Je ne fournirai pas de détails, mais ils nous ont demandé si nous pourrions travailler avec eux à l’élaboration d’un guide sur l’écologisation de leur parc immobilier. C’est un parc très unique car les immeubles gouvernementaux comportent souvent des caractéristiques uniques. J’ai trouvé l’idée intéressante.

Qu’offrons-nous? Outre le programme que j’ai décrit et que je continue de décrire, que nous devrions adopter énergiquement, à notre avis, nous offrons des connaissances, une expertise et un enthousiasme. Nous pouvons trouver des bénévoles à tous les différents niveaux et relever les subtilités de l’industrie. Les membres de mon organisme adorent faire ce genre de choses. Les gens s’engagent auprès du programme BOMA pour toutes sortes de raisons et participent à ce guichet communautaire au même titre qu’ils pourraient le faire pour un organisme de bienfaisance, car ils ont à cœur la cause de l’industrie.

Nous pouvons adopter toutes sortes de mesures. Nous estimons en faire déjà beaucoup pour faire avancer ce programme. Je dirai également que nous avons remporté un appel d’offres à RNCan il y a un an environ pour mettre en place une récompense en matière de consommation nette zéro. Elle sera offerte directement à partir de notre plateforme au programme BOMA BEST, mais nous nous concentrerons sur ce qui se fait en aval. RNCan voulait visiblement encourager les intervenants de l’industrie à prendre des mesures en vue d’atteindre une consommation énergétique nette zéro. C’est un autre excellent exemple de la façon dont nous pouvons collaborer avec vous.

Je vous donne toutes sortes de réponses disparates, mais la réponse, en un mot, c’est le partenariat.

Le sénateur Wetston : J’aimerais continuer sur la consommation énergétique nette zéro, mais nous en avons beaucoup entendu parler, alors je vais laisser le sujet de côté pour l’instant. Pour mieux comprendre vos statistiques, je regarde votre document et les nouvelles certifications du programme BOMA BEST. Vous avez un certain nombre de catégories différentes. Elles vont jusqu’à platine. Je pense que nous avons vu des immeubles qui appartiennent à la catégorie argent. Avez-vous de nombreux immeubles dans la catégorie argent?

M. Shinewald : Oui.

Le sénateur Wetston : Pour effectuer une ventilation, je regarde votre graphique où vous dites que plus 2 600 certifications sont effectuées au total au Canada et aux États-Unis. Combien d’immeubles la société BOMA compte-t-elle?

M. Shinewald : Nous ne le savons pas. Nous ne demandons pas à nos membres de divulguer ces données car elles changent constamment. La composition de nos membres change sans cesse. Ils achètent, vendent et perdent des immeubles continuellement. La nature des immeubles est en train de changer.

À l’époque, il y avait des divisions claires entre les immeubles à bureaux et les bureaux industriels légers. Avec les bâtiments polyvalents, les immeubles de vente de détail, les hôtels, les condos, et cetera, il est très difficile de les classer en catégories. Les catégories sont nombreuses, mais ce classement est tout simplement impossible à effectuer.

Le sénateur Wetston : Donnez-nous un chiffre approximatif, votre meilleure estimation. Nous ne vous en tiendrons pas rigueur si vous vous trompez.

M. Shinewald : Que diriez-vous que je vous fournisse le nombre d’immeubles de nos membres ultérieurement? Honnêtement, on ne me pose pas la question souvent. Je suis réticent à fournir une réponse car je ne ferais que lancer une hypothèse en l’air.

Le sénateur Wetston : La raison pour laquelle je pose la question est que nous avons beaucoup entendu parler des rénovations et de leur contribution aux réductions de gaz à effet de serre. De nombreux témoins nous ont fourni un grand nombre de preuves techniques. Le sénateur Massicotte a plus ou moins emprunté une orientation quelque peu différente sur la question. À mon avis, je pense que l’information serait intéressante.

Si vous pouviez nous fournir un chiffre approximatif et peut-être le remettre à la greffière, ce serait utile.

M. Shinewald : Je vous ferai parvenir des données.

Le sénateur Wetston : Je n’ai pas terminé d’aborder la question des catégories, platine, or, argent et autre. Parlez-moi de ces catégories et de la relation entre BOMA BEST et la certification LEED.

M. Shinewald : Tout d’abord, il est important de dire que nous nous entendons bien avec le CBDCa, qui offre le programme LEED au Canada. Il est important que le conseil représente son programme. Je ne veux pas représenter ou mal représenter ce qu’il fait.

En bout de ligne, nous avons les mêmes intervenants ou les mêmes propriétaires, pour ainsi dire. Mon président est au bout du couloir de la personne qui est leur président.

Il y a toutes sortes de types de certification. Ces certifications sont mieux connues pour les nouvelles constructions, les projets liés à la structure et à l’environnement, notamment. Ne me citez pas, mais je pense que les immeubles existants représentent l’une des 14 catégories. Ce sont habituellement des immeubles haut de gamme pour des locataires de catégorie A tels que des cabinets d’avocats, des cabinets d’expertise comptable, et cetera. Je crois que le nombre de certifications d’immeubles existants est d’environ 120 au Canada.

Si ma mémoire est bonne, l’idée est de commencer par le haut. Plus les immeubles aux meilleurs rendements énergétiques se portent bien, plus l’industrie suivra. C’est une excellente approche. Nous sommes complémentaires à ce qu’ils font car nous offrons un produit de marché de masse.

Nos certifications peuvent s’appliquer à tous les immeubles commerciaux et institutionnels sur la planète. De ces quelque 2 600 certifications, presque toutes sont au Canada. Nous venons de commencer à exercer nos activités aux États-Unis. Nous en avons environ deux dizaines aux États-Unis et une au Mexique, et d’autres suivront, j’espère.

La façon dont notre programme fonctionne, pour faire un lien avec l’autre partie de votre question, c’est qu’il y a cinq niveaux de certification : certifié, bronze, argent, or et platine. La mention « certifié » est la certification minimale où l’immeuble doit appliquer 16 pratiques exemplaires. J’ai la liste ici, si vous la voulez. Elle s’applique à toutes les catégories d’actifs.

Nous avons sept catégories d’actifs dans le programme. Peu importe s’il s’agit d’un bureau, d’un établissement de soins de santé, de bâtiments d’industries légères ou de commerces de vente de détail ouverts, il y a des principes fondamentaux qu’il faut respecter pour obtenir la certification. Lorsque vous apportez des améliorations supplémentaires, l’immeuble peut être certifié bronze, argent, or ou platine. Ces certifications sont adaptées aux caractéristiques uniques des différentes catégories d’actifs. Les critères sont différents pour un bureau que pour un commerce de vente de détail ouvert.

Ce que je trouve le plus intéressant, c’est les données des tierces parties que nous avons sur notre programme, qui montrent les plus grandes améliorations qui sont apportées, pas à la certification, comme on s’y attendrait, mais à la recertification. C’est un énorme succès. À la recertification, les immeubles ont tendance à monter de catégorie. Toutes les quelques années, nous devons modifier le programme pour relever la norme. Nous venons de le faire l’an dernier.

Qu’en concluez-vous? On constate que c’est un processus continu. Les exploitants d’immeubles doivent continuer à s’améliorer. Ils doivent perfectionner leurs immeubles pour accroître leur durabilité et adopter plus de technologies. Les technologies ne suffisent pas. Il y a de nombreux exemples où des technologies exceptionnelles ont été adoptées, mais les gens ne savent pas comment en optimiser l’utilisation.

C’est un tapis roulant. Il y a un hamster dans une cage qui court sans arrêt. C’est correct car la durabilité ne cesse d’évoluer. C’est comme lorsque vous quittez le concessionnaire à bord de votre voiture hybride le jour de l’achat. Votre parcours vers la durabilité ne s’arrête pas là; il commence.

La sénatrice Seidman : J’allais également vous demander de l’aide pour connaître la différence entre BOMA et LEED car j’ai entendu parler de la certification LEED, mais pas de BOMA. C’est ma faute. J’imagine que c’est en partie une question d’éducation publique. C’est extrêmement important dans ce secteur. De prime abord, je me suis dit que la certification LEED est pour les nouveaux immeubles et le programme BOMA est pour les rénovations et les immeubles plus vieux, mais ce n’est pas le cas. Ce n’est clairement pas le cas, comme vous l’avez expliqué au sénateur Wetston.

Je me posais également des questions à propos des données et des proportions. Je regarde votre graphique où vous dites qu’il y a au total 2 600 certifications au Canada et aux États-Unis, mais je ne sais pas vraiment quel est le dénominateur, alors j’ignore quelle est la proportion pour tous les immeubles, pour ainsi dire.

Pourriez-vous nous dire quelle proportion de l’industrie du bâtiment écologique met l’accent sur la rénovation d’immeubles existants?

M. Shinewald : Eh bien, toute l’industrie se concentre là-dessus.

La sénatrice Seidman : Sur la rénovation?

M. Shinewald : L’expression « se concentrer » est vague.

La sénatrice Seidman : Si vous regardez l’industrie du bâtiment écologique, une partie met l’accent sur la construction de nouveaux immeubles et une autre met l’accent sur la rénovation.

M. Shinewald : Je vais peut-être m’exprimer ainsi, si vous me le permettez. Je ne suis pas certain qu’il y ait une industrie du bâtiment écologique qui soit distincte de l’industrie du bâtiment de nos jours. Je pense qu’il y a un volet écologique à la construction d’immeubles, à la conception, et cetera, mais ce volet est clairement intégré à la propriété et à l’entretien.

Je suis arrivé à ce poste il y a environ cinq ans et demi. J’ai rappelé au sénateur Wetston que dans le cadre de ma recherche d’emploi qui m’a amené à ce poste, je me suis présenté à son bureau à un moment donné pour recevoir d’excellents conseils. C’était enrichissant.

Je n’avais pas d’expérience dans l’immobilier. J’ai d’autres compétences qui, je suppose, sont les raisons pour lesquelles j’ai obtenu le poste. J’étais très ravi de constater au début à quel point l’industrie était véritablement axée sur la durabilité. Cela fait partie intégrante de la culture et de la façon de faire des affaires dans l’industrie.

Il y a entre autres les intervenants de l’industrie, mais ce n’est pas la seule raison. Les locataires en font la demande. Les propriétaires en font la demande. Il convient de noter, pour revenir à l’observation que le sénateur Massicotte a formulée plus tôt, qu’il semble y avoir un lien de causalité direct entre la construction verte, les initiatives environnementales et les avantages financiers. Contrairement à d’autres industries, il peut y avoir des mesures que les intervenants adoptent pour toutes sortes de raisons, mais elles sont souvent perçues comme étant un coût net, du moins du point de vue financier. Pour notre industrie, de façon générale, c’est un gain net.

La sénatrice Seidman : C’est utile. J’essaie de comprendre. Vous avez parlé de la recertification. La certification est valide pendant trois ans, si je me fie à votre document, et il y a un processus de recertification.

Recueillez-vous des données sur, par exemple, le coût des rénovations les plus populaires? Je pose la question car je pense que dans votre énoncé de mission, BOMA Canada offre des programmes destinés à l’industrie et des programmes liés à l’éducation, à la recherche, aux normes et à l’information. Combien de programmes d’information offrez-vous à vos membres pour les éduquer sur les mesures qui pourraient être les plus avantageuses pour eux?

M. Shinewald : Je peux également vous faire parvenir plus tard notre « National Green Building Report ». Il se trouve que nous réorientons la séquence cette année. Nous venons de publier le rapport de 2017, et celui de 2018 sera rendu public dans environ six semaines. Je vais vous envoyer le rapport complet et les comptes rendus sommaires.

Nous embauchons une société d’ingénierie indépendante. Depuis quelques années, nous faisons appel à la société WSP, la firme d’ingénierie mondiale établie au Canada. Nous effectuons une analyse impartiale. Comme vous le verrez dans notre rapport, la situation est bonne dans l’ensemble. Autrement, nous ne serions pas en affaires.

De temps à autre, il y a des bizarreries amusantes dans les données. Nous n’avons pas peur de dire que nous avons remarqué une diminution de la consommation énergétique dans la catégorie bronze dans les industries légères. J’invente au fur et à mesure. L’idée est d’amener ces gestionnaires immobiliers à enquêter et à se pencher un peu sur la raison de cette réduction.

Pour répondre à votre question précédente, il y a deux types de certification. Il y a la certification ponctuelle, un immeuble à la fois, où le cycle est de trois ans. Vous la renouvelez après trois ans. Nous avons également une approche par portefeuille, et c’est la raison pour laquelle nous enregistrons une aussi grande croissance dans le programme. Les immeubles arrivent en très grands nombres, de propriétaires ou d’exploitants très importants des secteurs privé et public. Nous respectons une norme ISO, en effectuant 20 p. 100 des vérifications sur place. Un an après avoir réalisé 20 p. 100 des vérifications, 100 p. 100 des immeubles visés sont certifiés en vertu de la norme ISO. L’année suivante, nous en certifions 20 p. 100 de plus, et cetera.

L’un des avantages de cette approche, c’est que l’industrie la préfère aux autres. Elle fait baisser le prix à un frais annuel, ce qui est avantageux pour tout le monde. Elle permet d’offrir des avantages relatifs à la durabilité sur une base régulière. Dans les cycles de trois ans passés, la certification expirait. Les gens oubliaient de la renouveler. Ils étaient occupés. Une employée était en congé de maternité ou il y avait une autre raison. Nous avons conclu qu’au cours d’un cycle de trois, quatre ou cinq ans, nous perdions tous ces avantages. C’est une façon encore plus efficace d’assurer la durabilité.

Le sénateur Patterson : J’aimerais vous interroger sur le processus de certification. Combien de temps dure-t-il généralement? Je suis certain que la taille de l’immeuble a une incidence. Y a-t-il une tierce partie qui vérifie les renseignements soumis en vue d’obtenir la certification? Quel est le coût moyen pour faire certifier un immeuble?

M. Shinewald : Je me ferai certainement un plaisir de vous répondre. Une grande partie de ces renseignements sont disponibles sur notre site web, y compris les frais qui sont publics. Si ma mémoire est bonne, le coût peut varier de 2 500 $ à 12 000 ou 13 000 $. La somme de 13 000 $ s’appliquerait aux cinq plus grands immeubles au pays.

Nous sommes un organisme sans but lucratif. Nous appartenons à l’industrie et travaillons pour l’industrie. Notre objectif n’est pas de verser des bénéfices financiers à nos membres mais de leur offrir des bénéfices sous forme de valeur, si je peux m’exprimer ainsi. Nos prix sont excellents sur le marché.

La façon dont la certification fonctionne est assez simple. Il y a quelques légères différences d’un immeuble à l’autre ou d’un portefeuille à l’autre, mais vous ouvrez un compte ou créez un profil sur notre système en ligne, avec un nom d’utilisateur et un mot de passe, puis vous commencez à répondre aux questions. Le nombre de questions variera selon la catégorie de l’actif, et chaque catégorie compte environ 170 questions. Une fois que vous avez rempli le questionnaire, vous cliquez sur soumettre.

Il est intéressant de noter que le questionnaire en soi passera en revue les avantages environnementaux en posant des questions qui amèneront l’exploitant de l’immeuble à se dire : « Je n’ai jamais pensé à cela; je peux certainement le faire. » C’est un point très important. La grande majorité du questionnaire porte sur les modifications et améliorations opérationnelles au quotidien qui n’engendreront peu ou pas de frais. À mesure que vous augmentez votre niveau de certification, nous mettons en place des mesures sous forme de quasi-capital comme le remplacement des appareils d’éclairage par des luminaires à DEL, par exemple. Avant de cliquer sur l’icône « soumettre », vous apportez habituellement déjà des avantages de durabilité.

Ensuite, après avoir soumis la demande, un avis est émis. On désigne un vérificateur tiers. Nous avons des vérificateurs d’un bout à l’autre du Canada. Ce vérificateur fera une visite de l’immeuble avec un bloc-notes et dira : « À la question 37, vous avez indiqué que vous respectez six des huit points; prouvez-le. » C’est aussi simple que cela.

Le sénateur Patterson : Des représentants de Travaux publics Canada nous ont parlé des grandes réalisations qu’ils accomplissent avec leurs actifs. Ils ont dit que le changement comportemental fait partie intégrante du tableau d’ensemble.

Je me demande si cela fait partie de la certification ou des programmes de sensibilisation de BOMA BEST et à quel point c’est important pour les économies d’énergie dans les immeubles.

M. Shinewald : Oui, un aspect culturel joue un rôle. Comme je l’ai dit plus tôt, l’industrie a adopté ce programme à un niveau culturel. Nous avons des membres de tous les niveaux qui adhèrent au programme, même au plus petit échelon.

Nous travaillons actuellement avec une équipe multidisciplinaire constituée d’universitaires à l’Université Wilfrid Laurier. Le chercheur universitaire principal est un psychologue, mais l’équipe compte aussi des ingénieurs, des sociologues et d’autres. Nous travaillons avec eux car leur thèse ou leur hypothèse est la même que la nôtre.

Les locataires sont un moyen de combler l’écart, et plus particulièrement dans les immeubles certifiés écologiques à haut rendement énergétique, qui est le titre du groupe de travail. Ce qui est fascinant, c’est qu’ils les appellent les « citoyens de l’immeuble », pour essayer de favoriser un sentiment d’appartenance, une autonomisation et une participation.

On voit souvent, plus particulièrement dans les immeubles du centre-ville de catégorie A, que les locataires commerciaux tels que les cabinets d’avocats, les banques et les cabinets d’expertise comptable créent en quelque sorte une culture où ils n’imagineraient jamais louer des locaux, souvent de grandes superficies, dans un immeuble non certifié écologique, que ce soit par l’entremise de BOMA BEST ou d’une autre initiative. Là encore, c’est l’idée où au moment où vous achetez la voiture hybride, votre parcours vers un virage écologique ne se termine pas, mais commence. Ces locataires occupent ces espaces, mais prennent-ils de simples mesures? Éteignent-ils les lumières la nuit? Éteignent-ils les ordinateurs la nuit?

Nous lancerons un nouveau programme sous peu qui s’intitulera les lieux de travail durables de BOMA BEST. L’idée consiste à amener les locataires à prendre des mesures dans l’espace qu’ils louent pour combler l’écart au chapitre du rendement. C’est un programme très simple et modéré. Vous ne pouvez pas échouer. Nous disons essentiellement : « Vous pouvez adopter vos propres politiques, programmes et procédures qui vous conviennent dans votre lieu de travail. Faites le point avec nous par la suite et nous ferons un examen approfondi et donnerons notre approbation. » Tout ce que vous avez à faire, c’est de nous présenter un rapport une fois par année pour nous montrer que vous avez effectué un examen et relevé la barre. Vous décidez de la façon dont vous relevez la barre.

La solution est si facile, comme éteindre les lumières et les moniteurs le soir ou mettre sur pied un programme de déchets électroniques s’il n’y en a pas déjà un dans votre immeuble pour quand vous jetez une imprimante. Il est facile d’acheminer les imprimantes ailleurs que dans les sites d’enfouissement. Il y a neuf ou dix catégories. C’est une initiative qui nous emballe.

Le sénateur MacDonald : Vous avez abordé un point que j’allais soulever au sujet des locataires étant le dernier pilier du rendement de l’immeuble.

Pourriez-vous décrire votre programme pilote?

M. Shinewald : Oui.

Le sénateur MacDonald : Comment mesurez-vous tout cela? Comment amenez-vous les gens à respecter les principes?

M. Shinewald : Il y a toujours différentes façons de faire, mais je crois que la plus efficace, c’est la culture. Ce n’est pas une réponse équivoque. C’est très efficace.

Nos bureaux au centre-ville de Toronto partagent un étage avec un détaillant de vêtements de marque. Il y a constamment des jeunes de 20 ans qui entrent dans leurs bureaux et en sortent. C’est le groupe qui se souciera de plus en plus de la façon dont l’employeur se comporte à l’égard de la culture et oubliera l’immeuble. Il y aura une guerre parmi les employeurs pour attirer ces talents. Il y a de nombreuses données que j’aurais dû inclure dans mon document qui laissent entendre que les membres de la génération Y choisissent leurs employeurs et même leurs cheminements de carrière en fonction de la durabilité.

Nous espérons que ce sera initialement une caractéristique distinctive : notre cabinet d’avocats a la certification ou a pris des mesures, tandis que celui-ci ne l’a pas, alors venez travailler chez nous. Au fil du temps, nous espérons que ce sera un incitatif pour les jeunes qui ont l’environnement à cœur.

Le sénateur MacDonald : Le gouvernement nous demande de nous pencher sur les enjeux associés à la transition vers une économie à faibles émissions de carbone. Dans votre présentation, vous demandez ce que le gouvernement peut faire. Dans vos réponses, vous dites qu’il pourrait entreprendre l’analyse comparative de ses propres immeubles et exiger la certification BOMA BEST là où il loue des locaux. Puis vous faites une série de recommandations.

Avez-vous fait ces recommandations aux trois ordres de gouvernement, et, le cas échéant, quelle a été la réponse?

M. Shinewald : Nous le faisons régulièrement. J’ai eu deux réunions à ce sujet, hier, ici même, dans la région de la capitale nationale. Les applications sont fragmentaires. Dans certains cas, tout se fait de manière impeccable et avec grande uniformité, alors que dans d’autres, les choses laissent à désirer.

À la décharge du gouvernement, l’une des difficultés que nous avons sur le plan des communications, c’est la différence de taille entre lui et nous. Nous n’avons pas suffisamment de ressources pour aller frapper à toutes les portes, que ce soit à Ottawa ou ailleurs.

Services publics et Approvisionnement Canada a instauré cette norme dans 50 immeubles et plus dans l’ensemble du Canada atlantique, ce qui est formidable. Pour la toute première fois, il y a environ deux ans, le premier ministre de Terre-Neuve-et-Labrador a indiqué dans la lettre de mandat à son ministre des Transports et des Travaux publics que BOMA BEST devrait être la norme cible pour nos immeubles provinciaux. La première ministre de l’Alberta a fait à peu près la même chose récemment.

Étant donné la taille du gouvernement, il n’y aura jamais d’uniformité intégrale. Je comprends cela. J’ai travaillé pour le gouvernement pendant trois ans, juste ici, de l’autre côté de la rue. Il y a encore beaucoup à faire. Ce que nous vous proposons, ce sont des façons faciles, efficientes et peu coûteuses de faire de réels changements. Le gouvernement pourrait accomplir beaucoup en faisant cela.

Le sénateur MacDonald : Je n’ai qu’un point à souligner. Dans les années 1980, je travaillais à l’attribution des contrats au ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux, et la certification BOMA BEST était la norme là où nous louions des locaux. Tous les gouvernements louent une quantité énorme de locaux à l’échelle du pays. Le gouvernement est un client de choix pour ceux qui ont des espaces à louer. Seulement avec ce levier, le gouvernement pourrait avoir beaucoup d’effet.

M. Shinewald : Je suis tout à fait d’accord. Le pouvoir d’achat du gouvernement est gigantesque. Essentiellement, ce que vous faites, c’est que vous louez des locaux. La moindre démarche de vos locateurs en faveur d’un meilleur rendement sur le plan environnemental peut avoir une incidence énorme. D’abord, dans l’immédiat, puisque le fonctionnement des immeubles visés sera optimisé, mais c’est sans compter sur l’effet d’entraînement que cela aura sur la culture de l’industrie.

Le leadership du gouvernement serait le bienvenu. Laissez-nous vous montrer de quoi nous sommes capables. Nous sommes prêts.

Le président : Je veux vous poser une question. Je crois que vous avez parlé de 2 000 immeubles.

M. Shinewald : Environ 2 600 sont certifiés, à peu de choses près.

Le président : Sont-ils éparpillés à travers le Canada? Y en a-t-il autant dans l’Ouest que dans l’Est?

M. Shinewald : Absolument, il y en a dans tout le Canada. Si vous le voulez, je peux vous donner une ventilation par province, mais le fait est qu’ils sont bien éparpillés.

Le président : Afin que tout le monde puisse en profiter, veuillez faire parvenir cette information au greffier ainsi que les renseignements que vous avez promis à l’un des autres sénateurs.

Le sénateur Massicotte : Je vais paraphraser votre réponse à ma dernière question. Vous avez dit, bien entendu, que tout allait être gardé au minimum puisqu’il faut que cela tienne la route sur le plan financier. Ce que je comprends de manière intuitive, c’est que les rénovations qu’il est possible de faire aujourd’hui ne se fondent pas sur une période de recouvrement normale, ce qui explique peut-être pourquoi l’industrie ne va pas de l’avant.

Si vous convenez que les immeubles sont achetés pour l’équivalent de 15 à 20 fois le flux net de trésorerie, et si l’on considère que la rénovation n’est pas économique, il faut comprendre que la période de recouvrement doit être de moins que 15 ans, sinon cela ne se ferait pas.

Si vous regardez comment l’industrie fonctionne, les coûts de rénovation pour les bureaux, les commerces de détail et les industries sont assumés par les locataires, et cela s’explique par la façon dont les baux standards sont dictés. Les locataires aimeraient bien, puisque cela permettrait de réduire le coût de fonctionnement. C’est quelque chose d’économique dont ils raffoleraient.

Encore une fois, nous arrivons à la conclusion que cela ne se fait pas parce que la période de recouvrement n’est pas assez avantageuse pour les locataires ou les propriétaires de l’immeuble. Êtes-vous d’accord avec cela?

M. Shinewald : En toute déférence, je ne crois pas que les choses soient aussi tranchées que vous le dites. Le parc immobilier fait chaque jour l’objet de modernisations, de rénovations et d’améliorations. Habituellement, je reçois les avis pour mon immeuble parce que je veux m’y conformer. Nous en recevons constamment pour l’immeuble Cadillac Fairview du Centre Eaton de Toronto.

Il y a une variété de possibilités. Éventuellement, un directeur ou un propriétaire différent pourrait trouver qu’il y a un certain seuil à partir duquel il n’est plus rentable, sur une base marginale, de faire la prochaine chose aujourd’hui. Il y a toutes sortes de raisons particulières qui peuvent expliquer cela. Quelqu’un d’autre qui serait placé dans la même position pourrait voir les choses autrement. Il se peut que ce soit à cause de changements à l’égard de leur charge de travail, de leur flux de trésorerie ou de leurs ressources humaines.

Lorsqu’il s’agit d’élargir le programme, l’une de nos difficultés c’est que les gestionnaires des immeubles sont vraiment pris par leur travail concernant le fonctionnement proprement dit.

Je ne veux pas donner l’impression que rien ne se passe. Ce que vous cherchez à savoir, sénateur, c’est pourquoi certaines de ces choses ne se font pas avec autant d’empressement que vous le souhaitez? La raison en est qu’à un certain point, les choses qui sont un peu plus risquées, un peu plus chères ou un peu plus difficiles concernant le flux des travaux deviennent la goutte qui fait déborder le vase.

C’est à ce moment-là que vous pouvez intervenir et fournir de l’aide. Plus vous offrirez de mesures incitatives pour la réalisation de ces modestes améliorations, plus on en verra. Les prix baisseront. L’industrie le remarquera, et d’autres s’y mettront à leur tour.

Je ne veux pas donner l’impression que rien n’est en train de se faire. Cela se fait sur une base quotidienne. Cela est en train de se faire ici même.

Le président : Merci beaucoup, monsieur. Votre exposé était intéressant, ainsi que certains des échanges que vous avez eus avec les sénateurs. Nous vous sommes reconnaissants d’avoir été là.

Pour la deuxième partie de la séance, j’ai le plaisir de souhaiter la bienvenue à M. David Lapp, qui est chef de pratique, Mondialisation et Développement durable, pour Ingénieurs Canada, ainsi qu’à Emmanuelle van Rutten, qui est directrice régionale pour l’Ontario Nord, l’Est et le Nunavut, à l’Institut royal d’architecture du Canada, et à Bruce Lorimer, qui est le directeur général par intérim de cet organisme.

Nous allons écouter vos exposés, puis il y aura une période de questions.

Vous avez la parole.

David Lapp, chef de pratique, Mondialisation et Développement durable, Ingénieurs Canada : Au nom d’Ingénieurs Canada, je suis enchanté d’être ici pour vous parler des efforts déployés par le secteur du génie pour réduire l’empreinte de carbone de l’environnement bâti du Canada et pour appuyer l’objectif national d’ériger une économie sobre en carbone.

Ingénieurs Canada est l’organisme national qui regroupe les ordres provinciaux et territoriaux chargés de réglementer l’exercice du génie au Canada et de délivrer les permis d’exercice aux ingénieurs du pays, dont le nombre s’élève actuellement à 290 000. Nous travaillons avec tous nos membres afin de faire progresser la profession dans l’intérêt commun.

Ingénieurs Canada s’intéresse à la question des changements climatiques depuis plus de 16 ans, soit depuis l’époque des négociations de Kyoto. Notre travail à cet égard porte principalement sur les façons d’atténuer ces changements et de s’y adapter.

L’environnement bâti, ce qui désigne tout ce qui s’appelle immeuble, est responsable d’environ 35 p. 100 des gaz à effet de serre du Canada.

Les infrastructures de transport sont quant à elle responsables de 24 p. 100 des émissions. La réduction des émissions attribuables à ces infrastructures passe par les politiques gouvernementales ainsi que par les changements apportés aux façons de concevoir, de construire et d’exploiter ces infrastructures. Ces efforts permettent non seulement de réduire leur empreinte de carbone, mais aussi leur coût, sans parler de l’effet stimulant qu’ils ont sur l’industrie des technologies propres au Canada.

Nous encourageons fortement le gouvernement fédéral à investir dans une stratégie nationale de réduction des émissions de gaz à effet de serre et à appuyer l’adoption d’une telle stratégie. Le gouvernement fédéral doit également investir dans le développement et la mise en œuvre de technologies propres qui contribueront, au fil du temps, à instaurer une économie sobre en carbone. Les politiques progressistes imposant la réduction des gaz à effet de serre pour les infrastructures fédérales constituent un excellent exemple pour les autres ordres de gouvernement et rendent compte du leadership que le Canada exerce dans ce domaine sur la scène internationale.

En outre, le soutien au développement et à l’adoption d’énergies et de technologies propres permettra non seulement d’améliorer notre économie interne, mais aussi de bonifier nos possibilités d’exportation et d’ainsi renforcer la croissance. Ces politiques et investissements contribuent à la lutte aux changements climatiques à l’échelle mondiale et à la réalisation des engagements de réduction pris par le Canada aux termes de l’Accord de Paris.

Comme je l’ai dit, l’une des plus importantes sources d’émissions est l’environnement bâti. Des modélisations concernant les façons les plus efficaces de décarboniser l’économie canadienne laissent entendre que le secteur du bâtiment doit réduire ses émissions de 80 à 100 p. 100 d’ici 2050. Notre action doit porter sur deux domaines suivants : les nouvelles constructions et les constructions existantes.

Pour les nouvelles constructions, les orientations stratégiques de tous les ordres de gouvernement suggèrent qu’une norme de consommation énergétique nette zéro à la livraison pourrait être atteinte d’ici 2030. Par exemple, le code progressif pour l’énergie de la Colombie-Britannique établit des objectifs de rendement et fournit une approche cohérente pour réaliser des bâtiments écoénergétiques. La Ville de Vancouver a également élaboré son plan de bâtiments à zéro émission avec des objectifs de rendement énergétique semblables, qui sont applicables dans le cadre de sa politique de rezonage. En plus de ces objectifs de performance énergétique, il existe également des exigences selon lesquelles la construction doit atteindre un certain degré d’étanchéité à l’air pour minimiser la perte de chaleur.

Un autre exemple est la politique d’encadrement des bâtiments à zéro émission de la Ville de Toronto, qui comprend des exigences de rendement pour l’intensité de l’énergie et des émissions de gaz à effet de serre, ainsi qu’une liste de contrôle pour la conception de constructions adaptées aux changements climatiques.

Les nouvelles constructions représentent une petite partie des immeubles au Canada. Aborder uniquement cet aspect ne permettra pas de réduire les émissions de façon considérable dans l’ensemble du parc immobilier. Par exemple, en Colombie-Britannique, on estime que les exigences du code pour les nouveaux bâtiments permettront moins d’un tiers des réductions nécessaires dans le secteur du bâtiment d’ici 2050. Pour atteindre les cibles d’émissions, il est de toute évidence nécessaire de créer et de mettre en œuvre une stratégie globale.

Le Programme sur les bâtiments à carbone zéro du Conseil du bâtiment durable du Canada est le premier du genre au Canada. La norme associée à ce programme est conçue pour évaluer les émissions de carbone des immeubles commerciaux, institutionnels et multifamiliaux. Elle s’applique à un large éventail d’immeubles nouveaux et existants à travers le pays. À l’heure actuelle, les améliorations apportées à l’efficacité énergétique des immeubles existants sont effectuées à l’étape de la recherche et durant la phase pilote.

Les mesures d’atténuation peuvent constituer une force économique positive. Les rénovations pour améliorer l’efficacité énergétique et les bâtiments écologiques sont des moteurs importants de création d’emplois au Canada et un élément clé du passage à une économie sobre en carbone. On estime que chaque million de dollars investi dans l’efficacité énergétique se traduit par une croissance de 3 à 4 millions de dollars et peut créer jusqu’à 13 emplois.

D’importants efforts doivent être déployés afin de renforcer les capacités nécessaires pour assurer cette transition. Or, ces efforts seront encore plus efficaces s’ils sont appuyés par l’adoption de codes basés sur le rendement. Nous aurons besoin de plus de conseillers en énergie, de modélisateurs d’énergie et d’ingénieurs en science du bâtiment. Pour guider ces personnes, il nous faudra mettre au point et adopter des pratiques exemplaires et des lignes directrices en matière de conception.

La ligne directrice nationale d’Ingénieurs Canada sur les principes d’adaptation aux changements climatiques à l’intention des ingénieurs aide les ingénieurs professionnels à tenir compte des répercussions des changements climatiques dans leur pratique professionnelle et leur demande de faire un suivi rigoureux des résultats de ces considérations. Les principes décrits dans cette ligne directrice fournissent une base pour un bon jugement professionnel et permettent aux ingénieurs de mieux aborder cet élément de leur pratique. En ce qui concerne les changements climatiques, les démarches d’adaptation et d’atténuation fournissent des possibilités d’économiser de l’argent et de protéger la santé et la sécurité publiques.

Merci d’avoir invité Ingénieurs Canada à donner son point de vue sur cette importante question. Nous espérons que le comité reconnaît le rôle essentiel que les ingénieurs professionnels jouent dans l’environnement au Canada et qu’il sait que les gens de notre profession sont disposés à prêter main-forte au gouvernement fédéral au sujet de cet important enjeu.

[Français]

Emmanuelle van Rutten, directrice régionale, Ontario Nord, Est et Nunavut, Institut royal d’architecture du Canada : Monsieur le président, honorables sénateurs, au nom de l’Institut royal d’architecture du Canada, nous vous remercions de nous avoir invités à vous présenter nos commentaires aujourd’hui.

[Traduction]

Notre mandat est de promouvoir l’excellence du cadre bâti au Canada, et de montrer comment le design peut améliorer notre qualité de vie et comment il est possible de remédier à d’importants problèmes de société par le recours à une architecture responsable. L’Institut royal d’architecture du Canada, l’IRAC, s’intéresse à nos défis environnementaux depuis des décennies. Il le fait par son travail d’éducation, de revendication et par la promotion du Défi 2030. Notre comité sur les constructions durables a joué un rôle d’incubateur pour le Conseil du bâtiment durable du Canada.

À l’heure actuelle, c’est notre comité sur les milieux régénérateurs qui se fait le champion d’un environnement bâti sobre en carbone. Nos deux autres comités qui sont fortement axés sur la durabilité sont le Groupe de travail sur les communautés autochtones durables, qui s’intéresse aux conditions de vie des communautés autochtones et du Nord, et le groupe de travail sur les options en matière de logement adapté aux besoins des aînés, qui considèrent que le réaménagement des logements est un enjeu important dans le contexte du vieillissement de la population actuel. Notre champ d’action est national et nous faisons aussi partie d’un réseau international d’associations axées sur l’architecture grâce auquel nous pouvons échanger de l’information sur la durabilité.

Les architectes sont formés pour résoudre des problèmes complexes et peuvent par conséquent prêter main-forte. Le design est l’acte de créer des solutions holistiques. Les architectes conçoivent déjà des immeubles à haut rendement, et ils dirigent des équipes multidisciplinaires aptes à mener à bien des projets innovateurs.

À l’échelle des bâtiments individuels, les architectes peuvent réduire la production de carbone opérationnel et le carbone intrinsèque par des stratégies de conception passive, des mesures d’efficacité énergétique, une conception visant une durabilité et une résilience accrues, des innovations visant à économiser l’espace utilisé, l’intégration de sources d’énergie renouvelables, le recours à des matériaux de construction à faible impact environnemental, la promotion de l’utilisation des escaliers et du cyclisme, l’intégration de bornes de recharge pour les véhicules électriques et une conception susceptible d’encourager les gens à adopter des comportements respectueux de l’environnement. Ces stratégies servent non seulement à réduire les émissions, mais aussi à améliorer la santé des personnes et la productivité.

Nous avons aussi des diapositives, au cas où vous voudriez suivre l’exposé de cette façon. Nous sommes rendus à la diapositive où nous montrons l’intégration de l’équipe.

Les choses ne sauraient se résumer à de simples ajustements techniques. Les projets réussis nécessitent une approche holistique et intégrée du processus de conception et de construction, ainsi que des modèles d’exécution tablant sur la collaboration. Nous préconisons l’adoption de méthodes d’exécution axées sur une implication précoce et soutenue des propriétaires, architectes, consultants, constructeurs, fabricants et utilisateurs finaux dans un environnement de collaboration efficace, d’objectifs mutuellement définis et de partage d’informations ouvert. Parmi les autres avantages, un processus d’exécution intégré peut accroître la créativité et l’innovation, ce qui, selon nous, est essentiel pour atteindre les objectifs ambitieux en matière de durabilité.

Le secteur du bâtiment offre beaucoup de façons de favoriser le passage à une économie sobre en carbone. Au Canada, les bâtiments résidentiels, commerciaux et institutionnels consomment près de 30 p. 100 de l’énergie et produisent près de 25 p. 100 de l’ensemble des émissions de gaz à effet de serre. Dans les centres urbains du Canada, les bâtiments seraient responsables d’environ la moitié de toutes les émissions.

[Français]

Aujourd’hui, il existe de nombreuses barrières à l’innovation. La façon dont les projets sont définis au départ, la façon dont les experts sont sélectionnés et le rapport avec les clients et usagers ont tous un impact important sur le développement du projet et sur ses résultats. Le gouvernement fédéral fait preuve de leadership, mais il doit néanmoins en faire plus. En tant que propriétaire d’édifices et de terrains le plus important, et à titre d’important locataire, établir un standard élevé de durabilité environnementale est essentiel.

[Traduction]

Au sein des 26 ministères et organismes fédéraux qui sont les gardiens des immeubles, il y a des disparités en ce qui concerne le degré d’engagement et d’application à l’égard des objectifs durables. L’approvisionnement a une grande incidence sur la réalisation des objectifs des projets et sur l’innovation.

L’approvisionnement du gouvernement fédéral n’est certes pas un tout monolithique, mais ses méthodes sont souvent axées sur le moindre coût, ce qui nuit à l’innovation. En outre, le fait de placer des intermédiaires tels que les fournisseurs de services de gestion des bâtiments pour gérer l’approvisionnement et l’exécution peut créer des obstacles à la réalisation de tous les avantages que les architectes peuvent apporter à un projet.

Le transfert de risques non assurables aux professionnels est aussi un sérieux obstacle à l’innovation, parce que cela crée un milieu craintif et une atmosphère de confrontation. Il y a un meilleur modèle qui valorise la qualité, les compétences et l’innovation. La sélection fondée sur les compétences obtient un appui croissant au Canada de la part d’organismes comme la Fédération canadienne des municipalités et pratiquement toutes les associations nationales de services professionnels.

Le mois dernier, l’Institut royal d’architecture du Canada, l’Association des ingénieurs-conseils du Canada et Services publics et Approvisionnement Canada ont participé à un atelier organisé par un membre de l’Institut royal d’architecture du Canada sur la valeur de la sélection fondée sur les compétences. L’objectif de l’atelier était de commencer à discuter d’un projet pilote en vue d’explorer les avantages de la sélection fondée sur les compétences dans le cadre de plusieurs projets de Services publics et Approvisionnement Canada.

Vous avez entendu du Conseil du bâtiment durable du Canada que de 20 à 40 p. 100 des possibles économies d’énergie se trouvent dans les bâtiments existants. Nous appuyons fortement les modernisations ciblées qui contribuent à une solide économie et qui permettent de préserver nos quartiers et de protéger notre patrimoine. Les normes et les cadres comparatifs de LEED et de Living Building Challenge sont un moyen efficace d’améliorer le rendement des nouveaux édifices et des édifices actuels. Cependant, comme leur adoption est de nature volontaire dans la majorité des endroits, ils sont utilisés dans un faible pourcentage d’édifices.

La révision et la mise en œuvre obligatoire du Code national du bâtiment et du Code national de l’énergie doivent en fin de compte être le principal objectif.

Enfin, notre but est de collaborer avec le gouvernement fédéral pour stimuler l’innovation et favoriser un changement de culture vers une économie à faibles émissions de carbone et une compréhension globale des objectifs durables. Nos principales recommandations sont que le gouvernement fédéral puisse montrer l’exemple en harmonisant les pratiques d’approvisionnement comme l’adoption d’un programme de sélection fondée sur les compétences sous la forme d’un projet pilote; la réévaluation des services d’approvisionnement par des tiers; le partage adéquat des risques entre les membres de l’équipe et l’adoption de principes concernant la réalisation de projets de manière collaborative où des propriétaires, des constructeurs et des concepteurs partagent des objectifs communs et les risques liés aux projets. Le gouvernement fédéral doit aussi faire preuve de leadership en établissant des normes durables élevées au moyen d’un Code national de l’énergie révisé, d’analyses comparatives et de normes harmonisées plus élevées pour les édifices fédéraux.

Au nom de l’Institut royal d’architecture du Canada, je tiens à vous remercier de nous donner l’occasion de discuter avec vous aujourd’hui.

Le président : Merci beaucoup. Passons maintenant aux questions.

[Français]

Le sénateur Massicotte : Merci à vous trois d’être avec nous ce matin, et merci aussi de vos présentations. J’entends de votre présentation que vous pouvez nous aider, que vous êtes utiles, que vous avez beaucoup à apporter à ce dossier et que vous voulez être le partenaire du gouvernement canadien. Vous savez que tout le monde veut être partenaire. Tout le monde croit qu’il a beaucoup à apporter, surtout avec l’argent des autres. Y a-t-il quelque chose de plus précis ou de plus concret? Le gouvernement s’est engagé à changer le code pour les nouveaux bâtiments et pour les bâtiments existants. Des études se font actuellement à ce sujet et on prend une orientation du point de vue économique et qui vise l’efficacité des bâtiments. Y a-t-il quelque chose de plus précis ou de plus concret, à part votre disponibilité, pour arriver aux objectifs de lutte aux changements climatiques?

Mme van Rutten : Effectivement, le but premier est de changer et de réduire le niveau énergétique des bâtiments et de faire en sorte que ces normes soient incluses dans le code, de même que dans le mandat individuel des bâtiments du gouvernement fédéral. L’harmonisation doit se faire à travers les différents ministères.

Le code, comme la présentation du CNR l’a démontré la semaine dernière, est vraiment le standard minimum acceptable pour toutes les provinces. En Ontario, actuellement, le code énergétique est déjà plus élevé que le code national le sera. C’est donc un minimum. Au-delà de ce point, je crois que le gouvernement performera mieux à mesure que le code changera et s’améliorera.

Il faut aussi trouver une façon de créer un climat qui puisse encourager les autres clients privés à arriver à de meilleurs standards et à hausser leur niveau.

On a aussi parlé des questions d’approvisionnement, qui sont importantes pour s’assurer que l’on génère un environnement qui fait la promotion de l’innovation dans ces domaines. C’est également un aspect important.

[Traduction]

Le sénateur Massicotte : Je vais élargir un peu ma question. Si nous prenons vos professions, vous êtes des ingénieurs, des architectes, et cetera, et votre principale relation est avec les propriétaires des nouveaux édifices et des édifices existants. C’est là que se trouve votre principale relation. C’est là que se trouve votre gagne-pain.

Comment pouvez-vous tirer profit de votre influence? Vous entretenez d’importantes relations avec ces gens. Ce sont eux qui décident s’ils rénovent ou améliorent la qualité ou la conception des nouveaux édifices ou des édifices existants. Que pouvez-vous faire pour influencer le plus possible ces décideurs clés?

C’est correct concernant le gouvernement par rapport à ses édifices, mais je me demande ce que vous pouvez faire et ce que vous faites pour contribuer à l’atteinte de nos objectifs en matière de changements climatiques concernant ces décideurs clés et les nouveaux édifices ou les édifices existants.

Mme van Rutten : La promotion et l’éducation sont certainement une part importante de ce que notre association et les architectes font quotidiennement. Nous faisons la promotion des enjeux environnementaux par l’entremise de l’association et de nos principaux comités. L’éducation passe par nos programmes de formation continue qui nous permettent de sensibiliser à la question non seulement les architectes, mais aussi les clients qui sont souvent eux aussi des professionnels. Les clients délèguent normalement la réalisation des projets à des gestionnaires de projets qui peuvent souvent être des architectes ou des ingénieurs de formation. Leur formation est essentielle pour nous assurer que les clients sont bien au courant des questions durables.

C’est une relation réciproque; nous devons tous les deux sensibiliser le client à la question, et cela doit être réciproque pour créer un dialogue constructif entre les parties.

Bruce Lorimer, directeur général par intérim, Institut royal d’architecture du Canada : Si vous me le permettez, l’équipe d’architectes ou de consultants peut expliquer aux clients la valeur sociale ou les avantages économiques des pratiques durables. Par exemple, vous pouvez voir un grand nombre de magasins qui font maintenant connaître à des fins de commercialisation leur engagement envers les édifices durables.

M. Lapp : Je me fais certainement l’écho de mes collègues en ce qui a trait aux approches adoptées relativement à l’éducation et aux professionnels.

Par ailleurs, nous avons beaucoup de projets de démonstration avec des propriétaires triés sur le volet que certains pourraient qualifier de champions dans le domaine. Ensuite, dans le cadre de notre perfectionnement professionnel, nous faisons venir ces personnes qui ont en fait utilisé ces outils et ces approches pour convaincre les autres qui tardent peut-être à adopter ces approches de le faire.

Cela vise notamment à essayer de renforcer les capacités internes et d’ensuite transférer ces capacités aux propriétaires et aux professionnels. C’est une autre approche élargie.

[Français]

La sénatrice Galvez : Je vous remercie. C’est très gentil de votre part d’être parmi nous ce matin pour nous expliquer des choses très techniques.

[Traduction]

J’ai travaillé pour vous à plusieurs reprises, parce que je me suis rendue un peu partout au Canada pour agréer et réviser les programmes de génie des universités canadiennes. Je comprends très bien ce que vous dites lorsque vous mentionnez que cela doit être une relation qui se fonde sur l’éducation. Vous entretenez des relations avec les universités, et les universités entretiennent des relations avec vous.

Cependant, je tiens à mentionner que d’après mon expérience nous avons été assujettis à vos lignes directrices, mais je ne constate pas vraiment que notre travail dans les universités se répercute suffisamment rapidement dans la pratique réelle. L’organisme Ingénieurs Canada fait un travail spectaculaire pour harmoniser les programmes de génie dans les universités canadiennes. C’est très positif comparativement à ce que nous voyons en Europe ou ailleurs dans le monde. J’appuie vraiment ce travail.

La révision tous les cinq ans des programmes, comme le code, est trop espacée dans le temps. C’est exactement la même chose qui prévaut pour les programmes de génie. Trop de temps s’écoule entre les révisions.

Vous n’avez pas mentionné un aspect très important. Il s’agit de l’enseignement de la notion du risque au premier et au deuxième cycles pour que les ingénieurs qui sortent des universités puissent savoir comment s’y prendre dans l’environnement actuel où il est important de comprendre les risques et d’en tenir compte dans ce que nous concevons. L’autre point est d’être en mesure de concevoir des données et d’utiliser des outils.

Premièrement, comment donnez-vous suite aux recherches et à l’innovation qui ont cours dans les universités et comment les intégrez-vous dans la pratique réelle? Deuxièmement, nous sommes d’accord pour dire que le Code du bâtiment doit être révisé, et nous essayons de prendre des mesures pour ce faire. Qu’avez-vous fait pour améliorer le Code du bâtiment? Tout le monde peut exercer une certaine influence à cet égard.

M. Lapp : Vous posez des questions très pertinentes dans le cadre du débat en cours.

Ingénieurs Canada est en fait très actif dans le domaine de l’évaluation des risques. Nous avons en fait créé en 2005 un programme en collaboration avec Ressources naturelles Canada pour élaborer un protocole en vue d’évaluer les risques climatiques pour les infrastructures. Nous avons élaboré le protocole CVIIP que nous avons mis en œuvre. Nous avons collaboré avec Ressources naturelles Canada et de nombreux ministères fédéraux et provinciaux et services municipaux en vue de mettre en œuvre ce protocole pour évaluer les risques climatiques pour les infrastructures existantes et futures. Nous avons réalisé près de 50 projets au Canada concernant divers types d’infrastructures et d’édifices.

Nous créons une banque de données sur les vulnérabilités que nous utilisons pour fournir de l’information au Conseil national de recherches du Canada et l’aider dans sa révision du code. Le gouvernement a affecté des fonds à l’amélioration du Code du bâtiment pour tenir compte des changements climatiques. Cela fournit des données probantes pour justifier ces modifications.

Lorsque nous le faisons, nous discutons avec de nombreux propriétaires d’infrastructures pour leur faire comprendre les risques climatiques pour leurs infrastructures. Ce qui ressort de ce protocole, ce sont des conclusions et des recommandations pour les prochaines étapes. Ce sont en fait les propriétaires qui les mettent en œuvre.

Par exemple, nous travaillons avec la Ville de Welland pour évaluer son système d’eau de ruissellement et d’eaux usées. Des risques climatiques faibles, moyens et élevés ont été évalués. Nous avons formulé 44 recommandations, et la Ville en a mis en œuvre 33 depuis que nous avons réalisé ce projet il y a trois ans. Nous avons réalisé de tels travaux à beaucoup d’endroits au Canada, et le protocole suscite maintenant de l’intérêt sur la scène internationale. Nous sommes en fait actifs dans d’autres pays au sujet de ce protocole.

Ce protocole a été élaboré en partenariat avec le gouvernement du Canada. Le ministère des Ressources naturelles est notre partenaire. Plus récemment, nous avons suggéré de tenir compte des risques dans le cadre des nouveaux programmes d’infrastructure qui s’en viennent. Nous devons adopter une perspective axée sur les changements climatiques dans les activités d’approvisionnement pour les nouvelles infrastructures et inclure des critères en ce sens.

Notre protocole est une évaluation des risques et de la vulnérabilité. C’est considéré comme une méthode. Évidemment, vous ne pouvez pas prescrire une certaine méthode; vous devez laisser une certaine marge de manœuvre. C’est une méthode parmi d’autres. Transports Canada a récemment annoncé un programme d’évaluation des risques et de la vulnérabilité de 60 millions de dollars sur cinq ans, et le protocole est mentionné comme une méthode pour évaluer les biens fédéraux.

Nous travaillons vraiment d’arrache-pied avec les divers ministères fédéraux pour faire la promotion de l’intégration de la notion d’évaluation des risques et de la vulnérabilité.

Cela dépend de la mesure dans laquelle nous réussissons à l’intégrer pleinement. Vous avez parlé d’éducation. C’est également très important. Je ne suis pas la personne qui devra composer avec les changements climatiques à venir. Ce seront nos étudiants et nos jeunes. Il est de plus en plus question de la gestion des risques dans les programmes de génie de premier cycle ainsi que des changements climatiques. Nous sommes très actifs à ce chapitre.

Lorsque nous agréons les programmes, nous ne dictons pas la manière de les offrir, mais nous tenons certainement à ce que les changements climatiques fassent partie des programmes. Nous collaborons avec les responsables des programmes universitaires pour trouver le moyen d’intégrer cet aspect dans les programmes.

Il y a cet élément, puis il y a évidemment les ingénieurs en exercice.

Le président : Je dois vous interrompre un instant. Vous avez énormément suscité l’intérêt des sénateurs qui veulent tous poser des questions.

M. Lapp : Je m’excuse.

Le président : Je surveille l’heure. Je sais que je suis le méchant.

M. Lapp : C’est nécessaire.

Le président : Vous avez considérablement dépassé le temps imparti, et d’autres personnes veulent poser des questions. Je vais en fait passer à la prochaine intervenante. Allez-y.

La sénatrice Griffin : J’ai regardé les recommandations que vous formulez dans vos mémoires. C’est excellent qu’elles soient très similaires; vous recommandez principalement que le gouvernement montre l’exemple dans ses pratiques d’approvisionnement et fasse certaines autres choses comme adopter des méthodes de réalisation de projets de manière collaborative et faire preuve de leadership. Je suis heureuse de voir que vous avez indiqué que la révision du Code national de l’énergie en serait une, mais le gouvernement peut aussi avoir recours à des mesures économiques et réglementaires.

Voyez-vous des mesures réglementaires que le gouvernement pourrait adopter en vue de contribuer à atteindre l’objectif que nous essayons d’atteindre ici?

M. Lorimer : Je vais essayer de vous répondre, sénatrice.

Je ne suis pas certain de la différence qui existe entre un règlement, une norme ou une politique. Étant donné que le gouvernement fédéral a 26 différents ministères et organismes responsables et de nombreux types d’édifices dans des endroits où nous avons diverses conditions géographiques et climatiques, je crois qu’il peut établir des normes concernant la gestion de l’énergie et des ressources en fonction du type d’édifice, de son âge et de l’endroit où il se trouve. Je ne sais pas si cela fera partie intégrante d’un contrat au moyen d’un règlement ou d’une politique, mais je crois que c’est possible de le faire et que le gouvernement a l’expertise pour y arriver évidemment avec notre soutien.

La sénatrice Griffin : Nous n’expliquerons pas aujourd’hui la différence entre un règlement et une ligne directrice. Nous pouvons le faire en dehors du comité.

La sénatrice Galvez : Puis-je demander à M. Lapp de répondre par écrit à ma question?

Le président : Je peux vous redonner la parole lors de la deuxième série de questions; si cela concerne ce qu’a demandé la sénatrice Griffin, j’examinerai la question.

La sénatrice Galvez : Il n’a pas terminé sa réponse.

Le président : Nous y reviendrons, sénatrice Galvez.

La sénatrice Seidman : Madame van Rutten, ma question s’adresse à vous. Dans votre exposé, vous avez dit qu’il y a trois comités qui font la promotion d’un cadre bâti à faibles émissions de carbone. Le premier est le Comité sur les environnements régénératifs; le deuxième est le Groupe de travail sur les Autochtones de l’IRAC; le troisième est celui dont j’aimerais parler. Il s’agit du Groupe de travail sur les logements adaptés aux besoins des aînés, qui considère les modernisations comme un aspect important du vieillissement à la maison.

Selon mon expérience à un autre comité, auquel j’ai siégé longtemps, le vieillissement à la maison est en fait la voie de l’avenir pour plusieurs raisons; c’est notamment ce que préfèrent les consommateurs, mais c’est également un bon choix pour de nombreuses raisons économiques.

Dans quelle mesure considérez-vous cela comme un aspect important de la durabilité et du processus de modernisation? Je vais plus loin avec ma question, mais votre démarche globale pour la réalisation de projets intégrés m’a grandement impressionnée, parce que cela doit intégrer divers domaines et milieux et l’échange d’information dans un certain cadre psychosocial et une démarche économique. Je crois que vous pouvez voir où je veux en venir.

C’est très important étant donné que nous examinons la durabilité des édifices. C’est un aspect très important à considérer.

Mme van Rutten : Je dois tout d’abord apporter une précision. Les deux autres comités que nous avons mentionnés, soit le Groupe de travail sur les communautés autochtones et le Groupe de travail sur les logements adaptés aux besoins des aînés, ne mettent pas l’accent sur la réduction des émissions de carbone. Ils se concentrent sur leur domaine respectif, mais ils ont abordé la question des pratiques durables.

Je vais répondre en premier à votre dernier point sur la conception globale. L’un des messages que nous voulions transmettre aujourd’hui est que c’est un problème global dans le cas précis des émissions de carbone. La durabilité au sens large est associée à ce concept. Comme vous le savez, cela découle de l’approche en vase clos, qui est une manière de voir les choses de manière intégrée. L’une des raisons pour lesquelles nous avons aujourd’hui des problèmes liés à l’énergie, c’est que nous avons essayé de régler un problème avec un autre et que nous n’avons pas tenu compte du portrait global de la situation.

Le vieillissement à la maison a vraiment trait à cet enjeu. Comment pouvons-nous traiter de la question du vieillissement de différentes manières ou perspectives? Nous avons beaucoup à gagner sur le plan social et humain à déterminer comment nous pouvons vieillir à la maison. Ce comité se penche justement sur cette question.

Comment cela se rapporte-t-il aux questions relatives aux émissions de carbone et aux pratiques durables? C’est une question plus vaste. Si vous n’avez pas besoin de reconstruire un logement et que vous pouvez utiliser et transformer les ressources existantes, c’est un principe très solide et très durable que nous aimerions examiner de plus près. Cela permet de garder intactes les collectivités, et c’est un élément social très utile et très important.

La sénatrice Seidman : Je vous remercie de vous pencher sur cette question en particulier. Cela ne concerne pas seulement les pratiques durables ou la réduction des émissions de carbone. Vous devez examiner l’intégration, les questions sociales et la façon d’y arriver de manière communautaire. Je crois que c’est un aspect important de la question, et je vous en remercie énormément.

Le sénateur Wetston : J’aimerais vous poser des questions concernant vos exposés. J’aimerais que vous m’aidiez un peu à comprendre le transfert des risques non assurables dont vous avez parlé dans votre exposé.

Avez-vous des difficultés avec les assureurs pour ce qui est de ces risques? Êtes-vous souvent poursuivis en justice? Y a-t-il beaucoup de litiges? Que se passe-t-il?

Mme van Rutten : Dans le contexte actuel, on semble avoir tendance à transférer les risques aux professionnels, alors que ce n’était pas le cas traditionnellement. Notre profession repose sur la responsabilité et le devoir de diligence, mais malheureusement, il y a beaucoup de personnes sans expérience, non seulement au sein du gouvernement fédéral, mais aussi dans d’autres entités, qui semblent transférer ces risques.

Ce faisant, on crée un environnement qui conduit à des poursuites et qui étouffe l’innovation. Nous voulons ramener le tout à la notion d’innovation. Pour passer à une économie à faibles émissions de carbone, nous voulons promouvoir l’innovation dans tous les secteurs de l’industrie de la construction, en collaboration avec les architectes, les ingénieurs, les constructeurs, les gens de métiers et les fabricants, afin de créer un environnement qui favorise de nouvelles façons de penser et de faire.

Lorsqu’on transfère les risques, on limite cette innovation parce qu’on crée une atmosphère de confrontation.

Le sénateur Wetston : J’ai une question complémentaire, si vous me le permettez. Je ne comprends pas vers où les risques sont transférés. Dans le cadre de vos activités professionnelles, vous évitez les risques et vous avez un devoir de diligence. Vous redoutez la négligence ou, en quelque sorte, les actions en responsabilité civile qui pourraient s’ensuivre. J’essaie simplement de comprendre s’il y a un transfert de risques.

Premièrement, pouvez-vous obtenir l’assurance professionnelle dont vous auriez évidemment besoin? Deuxièmement, en quoi consiste au juste le transfert de risques dont vous parlez?

M. Lorimer : Veuillez m’excuser, mais ce dossier est nouveau pour moi aussi. L’expression « par intérim » signifie que je suis arrivé au poste récemment, et je vais d’ailleurs quitter mes fonctions dans quelques mois.

Le sénateur Wetston : Je ne veux pas vous poser une question injuste.

M. Lorimer : Non, ce n’est pas une question injuste. C’est une question très sérieuse qui met en cause surtout le fournisseur de services de Services publics et Approvisionnement Canada, lequel exige des niveaux d’assurance très élevés pour des tâches relativement simples.

Dans la province de l’Ontario, sous l’égide de l’Ordre des architectes de l’Ontario, tous les architectes doivent acheter leur couverture d’assurance par l’entremise d’une entreprise associée à l’ordre. Toutefois, cette entreprise refuse de reconnaître certaines des exigences qui sont imposées. Selon nous, il faut mettre un terme à cette tendance afin de promouvoir l’innovation et la création d’équipes de concepteurs qui travaillent en collaboration.

Le sénateur Wetston : S’il y a un deuxième tour, je poserai une autre question.

Le président : Il y en aura un.

Le sénateur Patterson : Nous n’avons peut-être pas le temps d’entrer dans les détails maintenant, mais pourriez-vous m’envoyer quelques renseignements? Comme je viens du Nord, pourriez-vous me faire parvenir des renseignements sur le travail accompli par le groupe de travail autochtone de l’Institut royal d’architecture, ou pourriez-vous envoyer l’information au greffier, je vous prie?

M. Lorimer : Le groupe de travail a organisé, il y a plusieurs mois, un colloque dont les résultats sont en ligne. Je peux commencer par vous envoyer le lien. Un rapport sera publié à la mi-novembre, et nous pourrons également vous en faire parvenir une copie. Par ailleurs, des études de cas sont en cours pour le compte du ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien, et elles devraient prendre fin en mars. Nous pourrons également vous les transmettre.

Le sénateur Patterson : C’est très utile. Merci.

Services publics et Approvisionnement Canada est le plus grand propriétaire et détenteur de biens immobiliers au pays. Vous avez dit que son approche en matière d’approvisionnement et d’exécution laisse à désirer et qu’il y a lieu de l’améliorer grâce à la sélection fondée sur les compétences.

Pourriez-vous m’expliquer, en termes simples, quel est le défaut de la gestion de l’approvisionnement et de l’exécution? En quoi la sélection fondée sur les compétences serait-elle une meilleure approche, et comment permettrait-elle d’optimiser les ressources?

Mme van Rutten : Loin de moi l’idée de dire que l’acquisition des services laisse à désirer. Les marchés évoluent et s’adaptent aux services d’approvisionnement, d’où la nécessité d’apporter des améliorations au fil du temps.

Le problème, c’est que le modèle d’approvisionnement actuel repose sur un ratio de 90:10, c’est-à-dire que les compétences comptent pour 90 p. 100 et les frais pour 10 p. 100. En raison de la méthode d’évaluation actuelle axée sur les 90 p. 100, beaucoup de gens finissent par obtenir une note très similaire. Un grand nombre d’architectes et d’équipes hautement qualifiés, de partout au Canada, soumissionnent pour le projet. Le facteur de sélection finit donc par être basé sur les frais de 10 p. 100.

Il y a suffisamment d’études que nous pouvons vous faire parvenir pour démontrer que ce modèle devient une approche fondée sur les frais, même si telle n’était pas l’intention, et qu’il ne conduit pas nécessairement à la meilleure qualité de résultats pour le client. Les frais sont plus restreints pour les concepteurs et les équipes de conception. Le potentiel d’innovation est moins grand, et il y a moins de possibilités d’examiner différentes solutions pour veiller à ce que le projet procure des avantages à long terme aux propriétaires et aux clients.

Le sénateur Patterson : Pourriez-vous nous envoyer des renseignements sur ce qui différencie la sélection fondée sur les compétences?

Mme van Rutten : Oui, certainement.

Le sénateur MacDonald : Le sénateur Patterson vient d’effleurer un sujet dont je veux vous parler. Le représentant de BOMA vient de nous expliquer comment l’association participe à l’approvisionnement et fait affaire avec le gouvernement. Je rappelle que le gouvernement nous a demandé d’examiner les réalités de la transition vers une économie à faibles émissions de carbone.

Encore une fois, j’aimerais revenir sur ce que le sénateur Patterson a mentionné au sujet de l’approvisionnement aux plus bas soumissionnaires. Vous avez dit qu’on gaspille ainsi 5 milliards de dollars par année. Je me demande comment vous avez calculé ce montant. Il n’existe aucun problème qui ne puisse être résolu si vous avez assez d’argent à cette fin, mais bien entendu, il n’y a jamais assez d’argent pour résoudre tous les problèmes.

Je suis donc curieux d’en savoir plus sur le montant de 5 milliards de dollars. C’est une somme non négligeable. Comment déterminez-vous cela?

M. Lorimer : Ce chiffre a été établi par un groupe qui étudie la sélection fondée sur les compétences depuis plusieurs années. Il nous faudra obtenir le rapport pour le transmettre au comité.

J’ai passé 30 ans à occuper diverses fonctions : gestionnaire de projet, gestionnaire régional, directeur régional dans deux régions, puis directeur général à Services publics et Approvisionnement Canada. J’ai vu comment, malgré les meilleures intentions possibles, le ratio de 90:10 finit par déformer les résultats parce que les soumissionnaires obtiennent des notes trop rapprochées.

J’ajouterais que la sélection fondée sur les compétences ne fait pas abstraction des coûts ou des frais. C’est un processus semblable à celui que le gouvernement utilise actuellement. La première étape serait une présélection ou l’établissement de la liste des soumissionnaires admissibles. La deuxième étape consiste en une évaluation des capacités et de l’approche de l’entreprise. Ensuite, il y a une négociation avec l’entreprise retenue.

Les fonctionnaires doivent recevoir une formation solide en matière de négociation. Si cette première négociation n’aboutit pas, on passe à la deuxième équipe. Il s’agit d’une méthode qui est utilisée assez fréquemment aux États-Unis et qui donne de bons résultats.

Si les frais sont peu élevés, l’équipe cherchera des moyens de les compenser. Cela donne lieu à la confrontation, et l’argent gaspillé auquel on a fait allusion est justement attribuable à cette adversité parce que les équipes de consultants cherchent, de façon juste ou injuste, des façons de compenser ce qu’ils estiment être des pertes.

Le président : Nous allons maintenant entamer la deuxième série d’interventions et laisser la sénatrice Galvez poser sa deuxième question, qui est restée sans réponse. Vous pourriez peut-être la poser de nouveau.

La sénatrice Galvez : Non. Comme il s’agit d’une réponse technique, je préfère que le témoin nous la transmette par écrit.

M. Lorimer : Entendu.

La sénatrice Galvez : J’ai une autre question. Dans votre graphique, vous dites que l’innovation ou la solution réside dans le Code national du bâtiment, et vous ajoutez que l’un des obstacles est la question de savoir s’il s’agit de normes volontaires ou obligatoires. Dans sa forme actuelle, le code du bâtiment vous paraît-il satisfaisant?

Est-ce bien la version actuelle du code du bâtiment que vous voulez rendre obligatoire, ou y a-t-il lieu d’y apporter certaines améliorations et, le cas échéant, lesquelles?

Mme van Rutten : La version actuelle du Code national du bâtiment a certes besoin d’améliorations sur le plan de la priorité accordée à la durabilité. Je sais que ce travail est imminent.

La sénatrice Galvez : Pourriez-vous préciser les changements auxquels vous vous attendez?

Mme van Rutten : En ce qui concerne les codes énergétiques, le Code national du bâtiment sera accompagné d’une nouvelle édition des codes énergétiques, ce qui donnera lieu à des normes de très haut niveau. J’ignore au juste quel est le niveau visé.

À l’heure actuelle, en Ontario, les nouveaux codes énergétiques sont très rigoureux. Je ne sais pas s’ils répondent à l’objectif de réduction des émissions nettes de carbone, mais il s’agit de normes de haut niveau qui donnent d’assez bons résultats.

La sénatrice Galvez : Les codes du bâtiment exigent des normes très peu élevées. Il y est question de la sécurité, de la sûreté et de l’énergie, mais il n’y a rien sur la durabilité, les risques ou les matériaux.

Êtes-vous en train de dire que vous êtes satisfaite des normes sur la santé, la sûreté, la sécurité et l’énergie, ou y a-t-il d’autres normes que nous devrions inclure dans le code du bâtiment afin de l’harmoniser avant de le rendre obligatoire?

Je ne veux pas vous faire dire des choses que vous n’avez pas dites, mais je trouve frustrant que vous n’en sachiez pas plus sur cet outil si important dans votre profession.

Mme van Rutten : Ce que j’ignore, c’est la nature des changements en cours d’élaboration. À l’heure actuelle, les codes proprement dits ne sont pas suffisants. Nous savons qu’une révision est en cours, mais nous en ignorons la teneur. Je ne peux pas me prononcer là-dessus.

M. Lapp : Les codes sont insuffisants en ce sens qu’ils ne font pas état des changements climatiques. Nous devons nous assurer que ces codes tiennent compte des conditions climatiques futures. On parle ici du cycle de vie des infrastructures qui seront là au cours des 50 à 100 prochaines années, dans certains cas. Notre climat est en évolution, et nous devons tenir compte de cette période.

Je sais que le CNRC dispose en ce moment d’un financement assez important. Il s’emploie à mettre à jour le code du bâtiment et les valeurs de calcul climatiques applicables aux bâtiments. Le travail suit son cours. Une autre amélioration du code pourrait être l’instauration du principe d’évaluation du cycle de vie. Au lieu de bâtir pour les besoins immédiats, on doit examiner tout le cycle de vie, ce qui comprend non seulement la construction, mais aussi l’exploitation et l’entretien. Il s’agit là d’une amélioration. Les codes doivent imposer plus d’exigences relativement à la prise en compte du climat, car il s’agit du changement le plus important durant cette période.

Par ailleurs, le Code national du bâtiment est une norme minimale. Ce n’est pas une norme maximale. Nous demandons aux ingénieurs de l’utiliser comme point de départ pour la conception. Ils doivent examiner la situation locale et tenir compte du champ de compétence locale; par exemple, l’Ontario a son propre code du bâtiment, qui constitue une amélioration par rapport au Code national du bâtiment.

Bon nombre des infrastructures sont régies à l’échelle provinciale. Le Code national du bâtiment peut servir de modèle pour l’ensemble des provinces et des territoires, mais certaines administrations choisiront de l’améliorer. Il doit y avoir de bonnes interfaces entre ces codes.

À cela s’ajoutent certains outils comme le document du devis directeur national au sein du CNRC. Voilà un autre document que l’on peut adapter pour tenir compte des conditions climatiques futures.

Au moment de présenter une conception d’infrastructure, nous aimerions que le plan comprenne également un calendrier des activités et des travaux d’entretien. La difficulté qu’éprouvent les propriétaires et les exploitants, c’est qu’il existe un décalage lorsqu’une infrastructure est conçue, mais que son exploitation et son entretien relèvent d’un autre champ de compétence ou d’une autre réserve de fonds.

Les exploitants des infrastructures subissent des pressions pour maintenir les budgets à un niveau adéquat. C’est un peu comme une voiture dont la garantie prévoit qu’à 6 000 kilomètres, vous devez faire telle ou telle chose. Si on avait un calendrier des activités et des travaux d’entretien pour garantir la conception d’une infrastructure, ce serait une nette amélioration au chapitre de l’infrastructure.

Le sénateur Wetston : C’est un domaine compliqué. Nous comprenons le travail important que vous effectuez, tous deux, en collaboration avec les ingénieurs et les architectes dans ce dossier. Notre objectif est d’essayer de comprendre et de traiter la question de la réduction des émissions de gaz à effet de serre.

Nous parlons beaucoup des codes, qui sont importants, et de la compétence fédérale. Il existe aussi de nombreux édifices provinciaux et municipaux. Nous sommes conscients que la relation entre tous ces gouvernements est d’une importance cruciale pour que vous soyez en mesure de faire votre travail dans un contexte qui tient compte des objectifs généraux des gouvernements.

Il y a un certain nombre d’aspects à considérer. Je voulais vous demander une question très générale sur le Cadre pancanadien sur la croissance propre et les changements climatiques. Je sais que vous êtes, tous deux, au courant de ce document et que vous y avez longuement réfléchi. Dites-moi ce que vous en pensez de façon générale.

Le cadre sera-t-il suffisant pour atteindre les objectifs que le gouvernement du Canada a établis pour 2030? Dans la négative, qu’est-ce qui s’impose, selon vous? Nous avons votre liste des défis et des obstacles, mais pouvez-vous me donner une idée générale de ce que les deux organisations en pensent?

M. Lapp : Nous avons contribué très activement à l’élaboration du cadre, du début à la fin. Nous avons fait des représentations et nous avons participé au processus.

C’est un très bon document comme cadre d’action, mais c’est le résultat qui compte. Il s’agit, en partie, d’aller plus loin et de passer de la parole aux actes. Autrement dit, il faut concrétiser le tout. Pour ce faire, il faut une collaboration entre tous les ordres de gouvernement, ainsi qu’avec les professionnels du milieu. À bien des égards, ce sont eux qui devront mettre en œuvre le cadre.

Une fois que vous avez mis en place les cadres stratégiques et les accords, alors, pour paraphraser le slogan de Nike, passez à l’action. Voilà, en somme, le nœud de la question. Nous devons créer un environnement propice à cela.

Le plan prévoit également des ressources. C’est bien beau d’avoir un plan, mais encore faut-il des ressources pour appuyer sa mise en œuvre. Il existe des ressources au sein de divers ministères fédéraux. J’ai bon espoir que le plan pourra être mis en œuvre parce que les ressources sont là, de même que la volonté des gouvernements et des professionnels de travailler ensemble dans ce dossier.

Mme van Rutten : Si vous me le permettez, j’aimerais donner ma réponse par écrit à une date ultérieure.

Le sénateur Wetston : Nous recevons une foule de documents. Je suppose que nous pouvons toujours en accepter d’autres.

Le sénateur Massicotte : J’aimerais revenir un peu sur la même question. Vous vous trouvez dans une situation privilégiée grâce à votre connaissance approfondie des bâtiments, bien entendu. Vous en savez également beaucoup sur toutes les nouvelles technologies qui rendent les édifices plus efficaces du point de vue de l’adaptation aux changements climatiques, et cetera. Vous avez aussi un accès privilégié aux propriétaires de la plupart des immeubles au Canada. Vous connaissez beaucoup de chiffres et vous savez si de telles rénovations s’avèrent rentables ou non.

Quel a été le résultat? Quel a été le résultat de cette acquisition de connaissances jusqu’à maintenant, et comment l’expliquez-vous?

Je vais légèrement vous aider. Je vais vous suggérer une réponse possible. Bon nombre de gens nous ont indiqué que certains bâtiments pourraient faire l’objet d’importantes améliorations et rénovations et qu’il serait économique de le faire. On nous a dit également que très peu des travaux possibles avaient été effectués pour apporter ces améliorations.

Pourquoi? Donnez-nous une idée de ce qui se passe. Pourquoi semblons-nous réagir aussi lentement? Est-ce économique? Que se passe-t-il en ce moment? Pourquoi n’agissons-nous pas plus rapidement afin d’atteindre nos objectifs en matière de lutte contre le changement climatique?

Mme van Rutten : Je peux peut-être répondre à cette question. Ma réponse sera certes fondée davantage sur mon expérience. Lorsque l’on nous confie un mandat clair à l’étape initiale du projet, que ce mandat soit lié au code du bâtiment ou au désir d’un client d’atteindre un certain niveau de durabilité, cela aide. Lorsque les clients visent ces objectifs, cela fixe la barre dès le début du projet.

Par ailleurs, si le client ne poursuit pas un certain but personnel et qu’il ne s’agit pas d’un objectif mandaté, il est souvent très difficile de le convaincre que l’investissement donnera des résultats à long terme. Le client doit investir des capitaux plus importants. Le pourcentage d’augmentation ne sera peut-être pas très élevé, mais il pourrait s’agir d’une hausse de quelques points de pourcentage au chapitre des coûts d’investissement. Des bénéfices à long terme peuvent être observés par la suite.

Tout dépend si le client est le propriétaire définitif du bâtiment. S’il planifie de le vendre, il ne sera peut-être pas motivé à le construire de façon efficace, initialement.

Le sénateur Massicotte : Le fait est que la plupart des propriétaires de bâtiments choisissent d’acheter des bâtiments ayant un certain rendement. Leurs décisions sont axées sur l’aspect financier. Ces entrepreneurs de notre pays sont socialement responsables, mais fortement influencés par les chiffres.

Je sais que vous attendez que l’on vous confie un mandat, mais, avant que cela se produise et compte tenu du fait que vous avez accès à ces décisionnaires, êtes-vous en mesure d’avancer un argument financier selon lequel ils devraient prendre des mesures écologiques, ils devraient agir de façon préventive, sinon les chiffres ne justifieront pas les problèmes?

Mme van Rutten : Nous tentons effectivement d’influer sur les décisions des propriétaires concernant les projets. Par exemple, la construction de condominiums à Toronto, à Ottawa et dans diverses autres villes est en plein essor en ce moment, mais les promoteurs ne seront pas les propriétaires finaux de ces bâtiments. Il est donc très difficile de les convaincre de la nécessité pour eux d’investir maintenant dans les bâtiments, parce qu’ils les vendront à des propriétaires individuels. Les promoteurs se préoccupent énormément des bénéfices et de la rentabilité, et pas nécessairement des coûts à long terme et des répercussions de leurs décisions.

Nous tentons effectivement de les convaincre. Par exemple, certains promoteurs cherchent à obtenir la certification LEED, en tant qu’outil de commercialisation de leurs bâtiments, mais ils ne sont pas vraiment motivés à investir des capitaux dans les bâtiments en tant que tels, étant donné qu’ils ne leur appartiendront pas en fin de compte.

Le président : Monsieur Lapp, au cours de votre exposé, vous avez mentionné que l’utilisation d’énergies propres et l’adoption de technologies propres enrichiraient notre économie, mais les politiques et les investissements de ce genre contribuent à remédier au changement climatique à l’échelle mondiale.

Est-il possible de réduire le CO2 à l’échelle planétaire en utilisant seulement des technologies et des énergies propres? Nous vivons tous sur la même planète. Nous partageons tous la même atmosphère. L’énergie propre suffit-elle?

J’apporte un petit bémol à ce que j’ai dit. Je crois comprendre qu’il y a environ 2 000 centrales au charbon, dont certaines sont en construction en ce moment et d’autres sont planifiées pour les années à venir. Et pourtant, à partir des côtes est et ouest du Canada, nous pourrions exporter du gaz naturel liquéfié, ce qui contribuerait à accroître les émissions de gaz à effet de serre au Canada.

J’aimerais que vous m’expliquiez comment vous pensez que cela réduit les gaz à effet de serre à l’échelle mondiale.

M. Lapp : Lorsque je parle d’énergies propres, je parle surtout d’énergies renouvelables, comme celles tirées de l’eau, du soleil, du vent et des ressources de ce genre. Aucune de ces ressources n’est un remède miracle. Elles font partie d’une série de stratégies qui doivent être mises en œuvre.

Du point de vue de cette industrie, l’acquisition de compétences et leur application au Canada créent la possibilité de les exporter à l’étranger. C’était la logique de cet argument.

En ce qui concerne les autres sources, la surveillance des énergies employées dans le monde entier démontre que nous utiliserons les combustibles à base de carbone pendant encore longtemps. Dans le cas de sources d’énergie comme le charbon, les technologies qui réduiront leurs émissions offrent un certain potentiel. On ne laisse plus les produits de la combustion s’échapper dans l’air comme par le passé. Il est possible d’adopter des technologies qui réduisent énormément les émissions de gaz. Le captage et le stockage du carbone sont d’autres options à envisager. D’ailleurs, nous prenons certaines de ces mesures au Canada.

En ce qui a trait au transport du gaz naturel liquéfié, tout dépend de la façon dont vous l’envisagez. Des gaz à effet de serre sont émis par les navires qui transportent le gaz naturel liquéfié vers d’autres pays.

Je considère cette initiative d’une façon plus stratégique, en ce sens qu’en appliquant des technologies de ce genre dans d’autres pays et en leur montrant qu’elles peuvent fonctionner, on contribue en général à réduire nos gaz à effet de serre. Nous pouvons faire partie des promoteurs de ces technologies et appuyer ainsi notre secteur des technologies propres en pleine croissance. Si vous consultez le site web de Technologies du développement durable Canada, vous pourrez examiner le profil d’une industrie qui prospère et qui contribue considérablement à l’économie canadienne. Nous pourrions renforcer cette industrie en mettant l’accent sur ce secteur.

Le président : J’ai une autre brève observation à formuler, et je ne vous demanderai pas de me fournir une réponse. Vous vous êtes déjà engagés à nous faire parvenir, par l’entremise de la greffière, un certain nombre de réponses par écrit, afin que tous obtiennent la même réponse.

M. Lapp : Oui.

Le président : Pour donner suite à la question du sénateur Wetston, j’examine en ce moment les objectifs et les chiffres du gouvernement. Ce ne sont pas les miens, mais plutôt ceux du comité. D’ici 2030, nous sommes censés réduire nos émissions de gaz à effet de serre de 219 mégatonnes. C’est une énorme quantité.

Il est prévu qu’en 2030, l’industrie pétrolière et gazière produise à elle seule 233 mégatonnes de gaz à effet de serre. Si nous supprimions plus ou moins la totalité de l’industrie pétrolière et gazière et que le Canada n’utilisait plus aucun combustible fossile d’une sorte d’une autre, il se pourrait que nous réussissions à atteindre cet objectif.

J’aimerais que vous m’expliquiez par écrit comment, selon vous, nous pouvons éliminer quelque part au Canada ces 219 mégatonnes sans détruire notre économie et le mode de vie auquel les Canadiens se sont habitués.

Je sais qu’il faudra apporter des changements, mais j’aimerais connaître un peu mieux les idées que vous avez tous deux à cet égard.

M. Lapp : Je serais ravi de le faire.

Le président : Je vous remercie de vos exposés. Ils ont été très intéressants, et nous avons assurément entendu de bonnes questions et d’excellentes réponses.

(La séance est levée.)

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