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ENEV - Comité permanent

Énergie, environnement et ressources naturelles

 

Délibérations du Comité sénatorial permanent de
l'Énergie, de l'environnement et des ressources naturelles

Fascicule nº 41 - Témoignages du 29 mars 2018


OTTAWA, le jeudi 29 mars 2018

Le Comité sénatorial permanent de l’énergie, de l’environnement et des ressources naturelles se réunit aujourd’hui, à 8 heures, pour étudier les effets de la transition vers une économie à faibles émissions de carbone.

La sénatrice Rosa Galvez (présidente) occupe le fauteuil.

[Traduction]

La présidente : Bonjour. Bienvenue à cette réunion du Comité sénatorial permanent de l’énergie, de l’environnement et des ressources naturelles. Je m’appelle Rosa Galvez. Je suis une sénatrice représentant le Québec, et je suis présidente de ce comité. Je demanderais maintenant aux sénateurs autour de la table de se présenter.

[Français]

Le sénateur Massicotte : Paul J. Massicotte, du Québec.

[Traduction]

Le sénateur Richards : Dave Richards, du Nouveau-Brunswick.

[Français]

La sénatrice Seidman : Judith Seidman, de Montréal, au Québec.

Le sénateur Mockler : Le sénateur Mockler, du Nouveau-Brunswick.

La sénatrice Dupuis : Renée Dupuis, de l’île d’Orléans, au Québec.

La présidente : J’aimerais également vous présenter le personnel du comité : Maxime Fortin, greffière du comité, que vous connaissez déjà et qui organise les rencontres, et nos analystes de la Bibliothèque du Parlement, Sam Banks et Jesse Good.

En mars 2016, le comité a commencé son étude sur la transition vers une économie à faibles émissions de carbone. Le comité s’intéresse à cinq secteurs qui, ensemble, sont responsables de plus de 80 p. 100 des émissions de gaz à effet de serre au Canada, soit l’électricité, le transport, le pétrole et le gaz, les industries tributaires du commerce et à forte intensité d’émissions de gaz à effet de serre et les bâtiments.

[Traduction]

Aujourd’hui, nous accueillons, de l’Institut canadien du chauffage, de la climatisation et de la réfrigération, M. Warren Heeley, président, M. Martin Luymes, directeur, Programmes et relations et M. Bruce Passmore, président du conseil d’administration. De L’Association canadienne de l’immeuble, nous avons Mme Dina McNeil, directrice des relations gouvernementales et M. Dil Puar, gestionnaire des relations gouvernementales.

Merci de vous joindre à nous. Je vous invite chacun à faire votre déclaration préliminaire, après quoi nous passerons aux questions et réponses.

[Français]

Bruce Passmore, président du conseil d’administration, Institut canadien du chauffage, de la climatisation et de la réfrigération : Merci beaucoup de votre attention ce matin.

[Traduction]

Merci beaucoup de nous avoir invités.

Nous sommes venus vous suggérer des possibilités merveilleuses. Nous n’allons ni nous plaindre ni faire des suggestions négatives. Toute notre présentation est très positive.

Au nom de l’Institut canadien du chauffage, de la climatisation et de la réfrigération, je tiens à souligner le message que nous tenons à vous transmettre. Lorsque vous envisagerez de prendre des mesures sur les changements climatiques, nous vous prions d’en discuter avec nous. Après le domaine des transports, celui du chauffage, de la climatisation et de la réfrigération consomme entre 50 et 60 p. 100 de notre énergie. Pour réduire les émissions de carbone, ce secteur devra trouver des solutions efficientes. Nous sommes très heureux de pouvoir y apporter notre contribution.

L’industrie du chauffage, de la ventilation, de la climatisation et de la réfrigération fait partie intégrante de presque tous les secteurs économiques et sociaux du Canada. Nos sociétés membres assurent le confort des foyers et des bureaux. Toutefois, leur contribution à l’économie globale du pays dépasse tout cela de beaucoup. Elles assurent la gestion du climat au sein de la chaîne d’approvisionnement mondiale, elles amènent les produits agricoles de la ferme au marché, elles fournissent les processus de réfrigération nécessaires pour faire progresser les sciences et la médecine, et elles fournissent une climatisation de fine pointe pour les salles où se trouvent les serveurs qui maintiennent le Canada à la fine pointe de la technologie de l’informatique et des télécommunications en ligne.

Sans nos produits et nos services, le Canada ne pourrait pas soutenir la concurrence des marchés mondiaux. Notre industrie génère chaque année des revenus d’environ 7 milliards de dollars et emploie plus de 41 000 personnes. Nous ne sommes absolument pas invisibles. Pensez un peu au système de chauffage qui fonctionne dans votre maison depuis 10 ans sans que vous ne vous en occupiez. C’est un appareil mécanique qui fonctionne continuellement nuit et jour pour réchauffer ou rafraîchir votre foyer. Voilà exactement ce que fait notre industrie. Nous désirons que vous et le reste du Canada entendiez ce que nous proposons pour améliorer l’efficience de notre économie et pour réduire notre impact sur l’environnement et sur les changements climatiques dans le monde.

Warren Heeley, président, Institut canadien du chauffage, de la climatisation et de la réfrigération : Bonjour et merci de nous avoir invités à venir vous parler. Je vais vous présenter notre association. Elle s’étend dans tout le pays et compte plus de 1 300 sociétés membres qui représentent tous les maillons de la chaîne d’approvisionnement : la fabrication de produits et de systèmes, leur distribution, puis leur installation et leur entretien.

Sa fondation date de 1968. Nous célébrons sa 50e année. Nos plus grandes sociétés membres sont les entrepreneurs en installation. Ce sont de petites entreprises qui, pour la plupart, comptent moins de 10 employés. Comme le disait Bruce, elles s’occupent du confort de votre foyer et de vos locaux ainsi que des processus de réfrigération que nous utilisons quotidiennement.

Les services que nous fournissons à nos membres sont, à peu près, les mêmes que ceux de nombreuses associations. À l’heure actuelle, nous nous concentrons avant tout sur la défense des causes et sur les relations avec les instances gouvernementales fédérales, provinciales et municipales. En effet, un grand nombre de nos membres sont de petites entreprises dont les services ne s’étendent pas plus loin que la municipalité ou la région où elles se trouvent.

Nous assurons aussi la communication. Comme notre industrie est très réglementée dans les domaines de l’environnement et de l’énergie, nous nous efforçons de tenir nos membres au courant des règlements qui régissent leur fonctionnement quotidien.

Nous offrons aussi de la formation. Nous examinons les cours de formation dans les différents métiers et nous offrons des cours de suivi pour aider nos sociétés membres à respecter les codes du bâtiment et les autres règlements imposés dans les différentes régions du pays.

Voilà. Je vous ai donné un aperçu des activités et de la structure de notre association. Je vais passer la parole à Martin, qui va vous expliquer le contenu de notre mémoire.

Martin Luymes, directeur, Programmes et relations, Institut canadien du chauffage, de la climatisation et de la réfrigération : Bonjour. Comme notre temps de parole est limité, nous avons préparé un document que nous vous avons remis. Il semblerait qu’il n’ait pas été traduit en français. Je vous demande pardon de ne pas vous l’avoir envoyé assez tôt pour le faire traduire. Comme vous l’avez sous les yeux, je ne vais pas faire référence au contenu de ce document. Comme ce débat porte sur le rôle de l’industrie dans le cadre d’une transition vers une économie à faibles émissions de carbone, je vais vous parler du rôle de notre industrie ainsi que des effets que cette orientation politique pourrait avoir sur elle.

Notre industrie, le cadre stratégique sur le changement climatique et la stratégie de transition vers une économie à faibles émissions de carbone sont principalement reliés par le changement de combustibles pour chauffer et refroidir les habitations ainsi que par l’efficience énergétique. Notre industrie y travaille très fort. Comme vous le lirez dans notre document, nous avons lancé de nombreuses initiatives sur ce plan. Nous collaborons avec le gouvernement fédéral à la transformation du marché du chauffage des locaux. Nous sommes en pourparlers avec RNCan à ce sujet.

Je vais maintenant laisser ce thème des discussions en cours pour vous expliquer les effets les plus importants qu’aura cette stratégie sur notre industrie, puis je passerai aux recommandations que nous voulons présenter au comité.

Je vais d’abord vous parler des débouchés que ce cadre stratégique ouvre à notre industrie. Il est évident que ce cadre pancanadien crée plusieurs bonnes occasions pour notre secteur puisque les produits de chauffage, de ventilation, de climatisation et de réfrigération deviennent toujours plus efficients. Comme notre industrie se lance déjà dans cette voie, ce cadre augmente ses occasions de vendre ses produits.

La transition des produits qui brûlent des combustibles fossiles vers ceux qui dépendent davantage de l’électricité crée aussi des possibilités. Elle créera de très nombreuses rénovations dans les immeubles et dans les habitations, occasions que nos sociétés membres pourront saisir si elles sont bien encadrées.

Notre secteur produit aussi des dispositifs de contrôle de domotique. Cela ouvre de nombreux débouchés à la gestion des immeubles. On ne cesse d’innover et de perfectionner les produits dans ce domaine. Notre industrie est prête à aller de l’avant tout en veillant à ce que ses progrès suivent exactement l’orientation du gouvernement. Soulignons que notre industrie n’est pas uniquement axée sur les produits, mais aussi sur les processus. L’installation est essentielle, et les systèmes de construction sont en pleine évolution. Autrement dit, notre industrie applique les pratiques exemplaires de l’installation et de l’entretien des appareils. Nous nous concentrons très activement sur cette question.

Comme je l’ai souligné tout à l’heure, notre industrie a de nombreux atouts dans son jeu. Nous vous en donnons quelques exemples dans notre document. Mais il en existe bien plus que cela. Comme je le disais, nous collaborons activement avec le gouvernement sur ces produits.

Cependant, le cadre pancanadien présente également des défis à notre secteur. Le plus important est celui de s’adapter pour profiter des occasions extraordinaires qu’offre cette stratégie. Nous devons modifier la structure des entreprises. L’innovation des produits nécessaires pour passer à de nouveaux types de combustibles pose de grands défis aux entreprises qui ont un parti pris pour un côté ou pour l’autre. Les fabricants se heurtent à la difficulté de respecter des normes toujours plus sévères en matière d’efficience énergétique. Il leur est difficile de suivre le perfectionnement des codes du bâtiment et des systèmes de construction. Nous commençons à souffrir d’un manque de travailleurs qualifiés pour accomplir tout ce travail.

Par exemple, la transition aux thermopompes, dont on fait une forte promotion dans certaines régions du pays, perturbe quelque peu notre industrie. Elle constitue tout un défi. Cependant, nous saurons nous y adapter avec le temps. Soulignons aussi que les règlements fédéraux dans le cadre de la transition des frigorigènes à base de CFC vers les HCFC, et maintenant vers les frigorigènes aux HFC et aux hydrocarbures, accélèrent l’innovation des produits et causent de gros maux de tête aux travailleurs qualifiés de notre secteur.

Je voudrais aussi souligner une chose. Bruce parlait de l’importance de notre industrie. En effet, il faut que vous compreniez à quel point elle est essentielle dans toute l’économie et dans la vie des Canadiens. Malheureusement, ce fait est très peu reconnu. Les Canadiens considèrent notre industrie comme un acquis. Cela pose un défi de plus à notre secteur. Nous avons toujours eu beaucoup de peine à attirer l’attention des décideurs.

Quoi qu’il en soit, je vais maintenant passer aux recommandations que nous désirons présenter au comité. Elles reposent sur des principes essentiels que notre industrie a besoin que l’on respecte.

Premièrement, il faut à nos fabricants et à nos distributeurs une bonne marge de manœuvre pour appliquer les lois. Ils ont besoin d’une période de transition assez longue pour mettre en œuvre les règlements qui entrent en vigueur. À long terme, il nous faut du temps pour développer les produits qui répondent aux exigences du marché et à plus court terme, il nous arrive souvent que les gouvernements fixent des règlements et des politiques et lancent des programmes de soutien sans consulter notre industrie. Nous sommes pris par surprise. Cela n’avantage jamais les consommateurs, l’industrie et même la politique en question, parce que vous n’atteindrez pas vos objectifs si vous ne laissez pas à notre industrie le temps de s’y préparer.

Le deuxième principe est le besoin crucial d’harmoniser les règlements du Canada à ceux des États-Unis et, dans la mesure du possible, d’uniformiser ceux des provinces. Nos fabricants ont bien de la peine à offrir des produits qui respectent les multiples règlements des marchés canadiens. Il est crucial que l’on harmonise les règlements dans toutes les régions du pays. Nous expliquons en détail dans notre document plusieurs de nos préoccupations à ce propos.

Les entreprises de notre secteur attendent des signes clairs et cohérents du gouvernement pour investir et pour suivre son orientation. Il faut que nous sachions dans quelle direction nous engager au cours des 5, 10 ou même 15 années à venir.

Enfin, il est important d’établir des règles du jeu équitables pour tous les produits et pour toutes les sources d’énergie. Il est absolument essentiel de consulter notre industrie. Comme le disait Bruce, nous sommes toujours prêts à participer aux consultations du gouvernement et nous saisirons toutes les occasions qu’il nous offrira pour cela. Il est crucial que le gouvernement demande fréquemment des conseils à notre industrie, qui possède toutes les connaissances technologiques nécessaires pour prendre les décisions requises.

Voici donc nos recommandations. Vous en trouverez les détails dans notre document, mais je vais vous les présenter rapidement. La première est la suivante : dans le cadre de la transformation du marché du chauffage des immeubles, le gouvernement devrait montrer l’exemple en transformant celui de ses propres édifices fédéraux. Nous ne préconiserons jamais assez la nécessité de transformer la consommation énergétique des édifices gouvernementaux. Vous en retirerez deux avantages. D’abord, vous générerez immédiatement des économies et vous utiliserez l’argent des contribuables d’une manière efficiente. Ensuite, vous montrerez l’exemple aux entreprises et aux consommateurs. Nous vous suggérons de mettre rapidement en œuvre votre stratégie pancanadienne en lançant dans le marché, entre autres choses, des systèmes d’étiquetage et d’information pour les consommateurs comme les systèmes de cotes ÉnerGuide pour les habitations et Portfolio Manager pour les immeubles commerciaux. À notre avis, le gouvernement fédéral pourrait jouer un rôle crucial en soulignant les avantages de l’efficience énergétique aux utilisateurs finals et aux Canadiens pour renforcer le message que notre industrie transmet dans les marchés. Les communiqués efficaces du gouvernement valideront notre message.

La R-D a aussi besoin de soutien. Nous menons des discussions intenses avec RNCan pour définir ce soutien au développement de certains types de produits et de pratiques, comme je l’ai dit tout à l’heure.

Nous voudrions que le gouvernement s’efforce d’harmoniser les normes, les codes et les règlements. Comme je l’ai dit plus tôt, le gouvernement devrait, en tout temps, soutenir la cohérence de ses politiques et de ses règlements. À notre avis, même les changements de gouvernement ne devraient pas modifier les objectifs à long terme des politiques gouvernementales.

À l’heure actuelle, notre objectif premier consiste à créer des outils financiers pour débloquer les investissements à long terme du secteur privé, et nous pensons bien suivre l’ordre d’idées du gouvernement à ce sujet. Les investissements gouvernementaux ne suffiront pas. Nous désirons établir des mécanismes financiers stables pour débloquer les capitaux privés afin de les investir dans l’amélioration du parc immobilier.

Nous avons besoin d’aide pour transformer les marchés de la main-d’œuvre afin de répondre aux exigences de la fabrication de produits et des nouvelles pratiques pendant la transition vers une économie à faibles émissions de carbone. Nous désirons examiner les crédits d’impôt à offrir aux entreprises qui investissent dans l’amélioration de l’efficience énergétique des immeubles. Enfin, nous vous recommandons de consulter fréquemment et aussitôt que possible les industries que ces questions touchent de plus près. Voilà donc les messages que nous tenions à vous présenter. Merci beaucoup.

Dina McNeil, directrice des relations gouvernementales, L’Association canadienne de l’immeuble : Bonjour, mesdames et messieurs. Je m’appelle Dina McNeil et je suis la directrice des relations gouvernementales de L’Association canadienne de l’immeuble, ou ACI. Je suis accompagnée de M. Di Puar, gestionnaire des relations gouvernementales. Nous tenons à remercier le comité de nous avoir invités à participer à son étude sur les effets de la transition vers une économie à faibles émissions de carbone.

[Français]

Nos membres comptent plus de 125 000 courtiers et agents immobiliers répartis partout au pays. L’Association canadienne de l’immeuble (ACI) est l’une des associations à vocation unique les plus importantes au Canada. Nous travaillons au nom de nos membres ainsi que des acheteurs de maison et du grand public.

[Traduction]

Les courtiers immobiliers ont un point de vue très particulier à présenter dans le cadre de l’étude du Sénat sur les effets de la transition vers une économie à faibles émissions de carbone, car ils entretiennent des liens très étroits avec les propriétaires d’habitations. De façon générale, nous reconnaissons l’importance du Cadre pancanadien sur la croissance propre et les changements climatiques. Toutefois, n’oublions pas que le secteur résidentiel ne produit qu’une part mineure des émissions de gaz à effet de serre. La mise en œuvre de cette stratégie devrait donc tenir compte des énormes différences entre le secteur immobilier résidentiel et les autres secteurs comme ceux de la production d’électricité et des transports afin d’établir des politiques qui réduiront le plus efficacement possible les émissions de carbone.

Soulignons que le secteur immobilier a déjà fait des pas de géant en visant volontairement des normes d’efficience énergétique plus élevées. Dans un rapport publié en 2013, Environnement Canada prévoit que l’émission des gaz à effet de serre du secteur résidentiel demeurera relativement stable de 2005 à 2020, ajoutant qu’elle ne s’élèvera que de 3 mégatonnes malgré la création des 3 millions d’habitations que l’on prévoit d’ici à 2020.

Entre 1990 et 2014, les émissions de gaz à effet de serre du secteur immobilier ont diminué de 11 p. 100. Cela est attribuable en grande partie aux progrès de la technologie, ce qui comprend l’amélioration des matériaux utilisés pour l’isolation ainsi que pour les fenêtres et les recouvrements extérieurs. Cette diminution est aussi attribuable à l’adoption volontaire de normes d’efficience énergétique plus sévères.

Nous désirons souligner les conséquences imprévues que l’imposition d’un Code du bâtiment plus sévère et d’étiquetage sur l’efficience énergétique des habitations et des immeubles risque d’avoir, particulièrement sur le parc immobilier actuel. L’ACI et ses membres craignent les effets potentiels de ces initiatives sur l’abordabilité des logements. Nous sommes, tout à fait, d’accord avec le besoin d’améliorer l’efficience énergétique du marché de l’immobilier, mais que les coûts des rénovations et des améliorations que cela imposerait aux propriétaires canadiens nous inquiètent profondément. Étant donné l’augmentation rapide du prix des maisons, il est important de tenir compte des effets qu’auraient ces changements sur l’achat et la vente de maisons. Face aux coûts des améliorations qu’une vérification de la consommation énergétique exigerait, certains propriétaires renonceraient à vendre. Les propriétaires de maisons plus anciennes, tout comme les propriétaires de maisons à faible revenu, en souffriraient plus que les autres, car ils ne pourraient pas assumer les coûts des améliorations que le nouveau code exigerait.

En outre, les propriétaires qui auront déjà installé des systèmes efficients perdront l’avantage que cela leur procure. Les propriétaires qui devront vendre rapidement risquent aussi d’être considérablement retardés par les exigences de la vérification et de la divulgation.

L’étiquetage et la divulgation prévus dans les nouveaux codes du bâtiment réduiront le volume de vente des maisons et augmenteront leurs prix. Cela nuira beaucoup au marché et ultimement à l’économie du pays. Nous estimons que, en 2017, les achats et les ventes interagences de maisons ont injecté 31,8 milliards de dollars en dépenses de consommation à l’économie canadienne et ont créé plus de 220 000 emplois.

Pour résoudre nos préoccupations face aux difficultés que le nouveau code créerait aux propriétaires de maisons plus anciennes, on pourrait appliquer une échelle mobile. On ajusterait ainsi le code de rénovation en fonction de l’âge de la maison. Par exemple, une maison plus vieille pourrait faire l’objet d’un programme de rattrapage énergétique moins intensif, qui tiendrait compte de l’âge de la maison et du coût des rénovations suggérées. Dans certains cas, il n’est peut-être pas rentable d’apporter à des maisons plus vieilles d’importantes rénovations qui ne réduiraient pas nécessairement les émissions de gaz à effet de serre de ces habitations.

De plus, nous ne sommes pas sûrs du tout que les vérificateurs de la consommation énergétique et les professionnels de ce domaine appliqueront les mêmes normes et restrictions partout au pays. Les divers choix de rénovation qui coûtent souvent très cher risquent d’entraîner un manque d’uniformité troublant pour les propriétaires. Nous recommandons fortement l’établissement d’une norme nationale ou d’une approche cohérente pour éviter de créer un ensemble disparate de mécanismes d’application de la loi dans les municipalités et dans les provinces.

Pour faire progresser l’efficience énergétique et pour appuyer l’innovation dans le secteur immobilier, il est crucial d’offrir des programmes volontaires progressifs. Nous reconnaissons que l’efficience énergétique réduira considérablement les émissions de gaz à effet de serre. Nous recommandons par conséquent d’offrir certaines formes de partage des coûts pour ne pas imposer des frais supplémentaires aux propriétaires de maisons. On pourrait réduire les coûts de rénovation des immeubles en offrant des programmes de crédits d’impôt ou de remise qu’il faudra annoncer très clairement aux consommateurs. Par exemple, le programme écoÉNERGIE Rénovation a accordé aux propriétaires des crédits pouvant atteindre 5 000 $ pour moderniser l’isolation, le toit, les fenêtres et les portes de leur maison. Ces types de programmes complètent les incitatifs provinciaux et territoriaux et appuient les efforts que nous déployons pour passer à une économie à faibles émissions de carbone.

Nous reconnaissons également l’urgent besoin de corriger le manque de connaissances qu’ont les Canadiens sur la consommation énergétique. C’est pourquoi nous avons participé à la rédaction d’un document de RNCan visant à fournir aux agents immobiliers, aux acheteurs et aux vendeurs de l’information utile sur l’efficacité énergétique des maisons. Vous en avez un exemplaire devant vous.

Intitulé A HomeOwner’s Guide to Energy Efficiency, cet ouvrage est distribué dans tout le pays aux courtiers immobiliers ainsi qu’aux acheteurs et aux propriétaires de maisons. Nous en avons reçu des commentaires très positifs. Nous poursuivrons cette collaboration avec RNCan et nous continuerons à distribuer des ressources d’éducation dans nos réseaux afin de sensibiliser les gens sur cet enjeu important.

Nous attendons avec impatience de lire le rapport du comité. Nous nous ferons un plaisir de collaborer avec vous ainsi qu’avec le gouvernement du Canada pour lutter contre les changements climatiques tout en évitant d’imposer des conséquences imprévues au secteur du logement.

[Français]

Merci de votre temps. M. Puar et moi serons fiers de répondre aux questions des membres du comité.

La présidente : Merci beaucoup.

[Traduction]

Le sénateur Massicotte : Merci d’être venus aujourd’hui. Nous devons tous apporter notre contribution à l’objectif de cette stratégie. Il est crucial de l’atteindre aussi rapidement que possible.

Je ne sais plus lequel d’entre vous nous a parlé du chauffage, de la ventilation, de la climatisation et de la réfrigération. Vous nous avez décrit plusieurs défis et problèmes en nous demandant de ne pas trop accélérer le rythme de la transition parce que vous avez besoin d’aide. Vous avez ajouté que nous devrons vous indiquer avec précision ce que nous voulons de vous. Vous comprenez que nous consultons votre industrie au sujet du cadre pancanadien pour mieux en définir les objectifs. Je vous avoue que tout le monde recommande cela. Nous ne sommes pas experts en votre domaine. Nous ne connaissons pas comme vous les détails à fond. Nous voulons définir les objectifs, et vous savez ce que nous visons.

Dans cette même allocution, vous nous accusez de ne pas être assez précis. Il faut que vous fassiez un choix. Nous devons fixer des objectifs, mais nous comptons sur vous pour les préciser.

Vous nous parlez de nombreuses contraintes, vous tenez compte de ceci et de cela. Cependant, vous savez quels objectifs nous nous sommes fixés pour 2020 et pour 2030. Le rapport que les vérificateurs généraux de toutes les régions du Canada ont publié cette semaine nous annonce que nous n’atteindrons pas ces objectifs, alors je ne tiens pas vraiment à vous entendre parler de contraintes. Je voudrais que vous nous offriez une solution. Dans quelle voie devrions-nous nous engager? Comment atteindre nos objectifs? Donnez-nous autre chose que vos antécédents historiques en demandant une promesse et une solution. Quel est l’objectif global à viser? Faut-il améliorer les technologies?

Pour le moment, nous nous contentons d’appliquer la technologie actuelle, mais existe-t-il un moyen plus efficace? Comment pourrons-nous l’appliquer?

M. Luymes : Je ne peux vous répondre qu’en partie. Pour reprendre ce qu’a dit Bruce tout à l’heure, nous ne sommes pas venus pour nous plaindre. Nous menons des pourparlers constructifs et actifs sur le rythme de cette transition avec RNCan et avec le ministère de l’Environnement et du Changement climatique du Canada. Vous l’avez bien compris, l’industrie ne peut pas avancer trop rapidement. Nous désirons présenter nos solutions aux moments opportuns, mais nous devons pour cela dialoguer continuellement. Nous participons à ces discussions, et nous sommes venus vous dire que nous en sommes heureux. Nous tenons à poursuivre ces pourparlers.

Dans le cas de l’élaboration des produits et de la R-D, nous savons que cette transition nous amènera avant tout aux diverses thermopompes électriques géothermiques et à l’air. Ces installations sont déjà très fréquentes, mais notre industrie a de la difficulté à livrer des produits rentables sur les marchés. Voilà pourquoi il nous faut plus de temps.

Comme vous l’avez dit, le gouvernement fédéral a pour rôle de fixer des objectifs. Je sais que les provinces ont de la peine à élaborer des stratégies qui prévoient des moyens de respecter ces exigences. Nous collaborons avec les gouvernements provinciaux pour établir des systèmes de soutien.

Le sénateur Massicotte : D’après les rapports que nous lisons, nous n’avons pas assez progressé. Les méthodes du passé ne nous permettent pas d’avancer assez rapidement. Je comprends que vous avez besoin d’une marge de manœuvre, mais je vous dirai que nous n’avançons pas assez rapidement. Nous devons avancer plus vite et plus efficacement. Comment allons-nous faire? Nous devons complètement changer notre façon de penser et d’agir. Les méthodes historiques ne conviennent plus, elles ne sont pas assez rapides. Comment progresser plus rapidement?

M. Luymes : Selon moi, le seul moyen de combler cet écart est d’y injecter des fonds, n’est-ce pas? Pourquoi certaines technologies ne se répandent-elles pas partout? Parce que le coût au consommateur est trop élevé. Comment surmonter cet obstacle? Nous pourrions offrir des remises. Nous ne recommandons pas nécessairement un retour au Programme écoENERGIE, parce que si je ne m’abuse, le gouvernement fédéral en a transmis la responsabilité aux provinces. Nous allons donc collaborer avec les provinces pour qu’elles établissent de bons systèmes de soutien financier.

Comme nous l’avons dit tout à l’heure, le financement est la meilleure façon d’aider les gens à surmonter les obstacles que posent les coûts et de ramener ces coûts à un niveau acceptable.

Le sénateur Massicotte : Donc, ce que vous avez dit est très important. Vous nous dites que ces appareils ne sont pas rentables. Les gens et les entreprises ne les installeraient que s’ils étaient financièrement rentables, et ce n’est pas le cas à l’heure actuelle.

M. Luymes : Exactement.

Le sénateur Massicotte : C’est un problème de taille. Autrement dit, pour que les gens fassent installer ces appareils, il faudrait soit en modifier le coût soit, comme vous le disiez, obtenir une meilleure remise des gouvernements.

Les gouvernements ne peuvent pas maintenir ces remises à long terme. Ce sont des encouragements artificiels, si vous voulez bien, et il faudra trouver moyen de rendre les appareils plus rentables.

M. Luymes : Le chauffage au gaz naturel crée un énorme obstacle à notre secteur. Il est extrêmement répandu, et le coût du gaz au mètre cube n’a jamais été si bas. Tant que nous faisons face à ces conditions du marché, nous n’arriverons pas à inciter les gens à passer des combustibles fossiles aux technologies plus écologiques. C’est notre plus gros obstacle sur le marché.

La sénatrice Seidman : Merci beaucoup pour vos allocutions. Madame McNeil, on nous a beaucoup parlé de nouvelles normes de rénovation et des effets qu’elles risquent d’avoir sur les propriétaires d’habitations, surtout dans le cas des aînés qui désirent vendre leur maison pour emménager dans de plus petits logements, dans des condos ou même dans des foyers pour personnes âgées. La majeure partie de leurs économies se trouvent souvent dans leur maison, ce qui leur permet de jouir d’une meilleure qualité de vie quand ils la vendent.

On s’inquiète beaucoup des exigences qu’ils doivent respecter avant de vendre leurs maisons, qui sont plus anciennes que les autres. Vous avez parlé des torts que pourraient causer les nouveaux codes. Je voudrais que vous nous parliez de ce problème et de ce que nous pourrions faire pour le régler. Je voudrais aussi qu’un représentant de l’Institut canadien du chauffage, de la climatisation et de la réfrigération s’étende un peu sur votre recommandation suggérant que le gouvernement prêche par l’exemple en rénovant les édifices dont il est responsable. Parlez-nous des cibles ou des analyses comparatives, des critères de divulgation et de transparence qu’il faudrait fixer ainsi que de vos plans pour l’avenir.

J’intègre cette question de rénovation. Vous en avez tous parlé d’une façon ou d’une autre. Je voudrais savoir quelles sont vos opinions à ce sujet.

Mme McNeil : Je vous remercie d’avoir posé cette question. Nous nous préoccupons beaucoup des maisons plus anciennes, des gens qui vivent dans des maisons construites au XXe siècle, même au début du siècle, et qui désirent emménager dans un plus petit logement. Si leur maison se classe plus bas que les autres, que vont faire ces propriétaires? Voilà pourquoi nous proposons d’établir une échelle mobile. Une habitation construite en 1950 ne sera jamais aussi efficiente qu’une maison construite en 2014. Que fera le propriétaire dont la maison serait classée à 5 sur une échelle de 10, par exemple? Il n’arrivera jamais à la ramener à la cote de 10. Cette échelle mobile lui indiquerait qu’en la ramenant à une cote de 6, sa maison sera considérée comme étant efficiente.

Voilà donc nos inquiétudes, particulièrement dans le cas des propriétaires plus âgés qui désirent laisser leur maison pour un autre style de vie. Cette échelle mobile pour les maisons plus anciennes serait une solution à examiner.

La sénatrice Seidman : C’est donc l’échelle mobile que vous proposez?

Mme McNeil : Pour les vieilles maisons, oui, absolument. On peut changer les fenêtres et ajouter de l’isolant au grenier, mais connaissant les codes de 1902, pourra-t-on rendre cette maison aussi efficiente que celles que l’on construit à l’heure actuelle? Nous ne pensons pas. Il faut absolument éviter de faire perdre toutes leurs économies aux propriétaires de ces maisons. C’est définitivement une solution à envisager pour les vieilles maisons.

La sénatrice Seidman : Je comprends. Merci.

M. Luymes : Je ne vois pas vraiment en quoi votre question se rapporte à notre mémoire, mais nous n’avons jamais vraiment pris position sur la tarification énergétique des maisons et sur la divulgation obligatoire des transactions immobilières. Des recherches menées par l’Alliance de l’efficacité énergétique du Canada indiquent que les Canadiens désirent investir dans l’efficacité énergétique. Ils se heurtent cependant à un manque d’accès au financement des immobilisations. Il faut aussi qu’ils disposent de bons renseignements. Nous avons toujours appuyé les systèmes d’étiquetage énergétique des maisons, et nous sommes d’accord avec la position présentée plus tôt selon laquelle les systèmes d’information devraient être les mêmes dans tout le pays.

Le gouvernement fédéral a mis en place depuis 2012, je crois, un système de cotes énergétiques des maisons qui, selon nous, est très solide. On parle de gigajoules de consommation. Il n’est pas question d’échelle de cotation. Ce système donne aux gens les données dont ils ont besoin pour prendre des décisions éclairées au sujet de leur maison et de leur immeuble. Cette information n’a pas été diffusée à grande échelle. De notre point de vue, on aurait dû le faire il y a longtemps. Comme une échelle de cotation ou des données sur le rendement d’une automobile, les gens devraient avoir des données sur le rendement de leur maison et de leur immeuble. Cette information devrait être cohérente et fondée sur de bonnes données scientifiques. Tous les systèmes sont en place pour le faire, alors nous exhortons le gouvernement à imposer cela sur le marché. Il est évident que notre industrie aurait avantage à ce que les gens soient bien renseignés et à ce qu’ils prennent des décisions éclairées en investissant dans leurs maisons et dans leurs immeubles, mais il leur faut des données fiables pour prendre ces décisions, et le gouvernement dispose des outils nécessaires pour les aider à le faire.

Quant à savoir si ce processus devrait être obligatoire ou volontaire, nous ne prendrons pas position à ce sujet.

La sénatrice Seidman : Je vous ai inclus dans le groupe auquel je posais cette question parce que, dans votre allocution, vous avez dit que le gouvernement devrait montrer l’exemple. Il s’agit de l’une des recommandations de votre industrie. Dans vos recommandations pour 2030, vous exigez que l’on mène des analyses comparatives du rendement des édifices publics et que les résultats soient divulgués. Vous voulez imposer aussi cela aux investisseurs privés qui bénéficient de subventions gouvernementales. Vous voulez exiger que les nouveaux édifices publics ne consomment pour ainsi dire pas d’énergie et que l’on effectue des rénovations énergétiques à grande échelle dans les édifices publics.

D’un côté, nous parlons d’investissements personnels, c’est-à-dire de ma maison ou de celle d’autres gens. Cependant, dans cette recommandation, vous parlez des édifices publics et des rénovations que vous voulez que le gouvernement y effectue.

M. Luymes : Ce sont deux outils politiques différents. Le premier consisterait à accroître les exigences juridiques des codes sur le rendement des immeubles. Voilà dans quelles circonstances notre industrie a besoin d’une bonne marge de manœuvre. Il faudra progresser graduellement à un rythme que notre industrie pourra suivre. C’est un principe important.

Entre-temps, pendant que nous avançons ainsi, vous pouvez offrir des encouragements sur le marché pour que la transition se fasse plus rapidement. Voilà l’utilité des encouragements et des données à fournir non seulement aux consommateurs, mais aux propriétaires d’immeubles. Les gens qui investissent dans des immeubles commerciaux ont besoin de données fiables pour prendre des décisions éclairées et pour connaître le rendement éventuel de leur investissement. Ce sont de bons renseignements fournis volontairement. Ces deux outils se complètent.

[Français]

La sénatrice Dupuis : À partir de l’information que vous nous avez fournie au départ, je constate que la majorité de vos membres sont de petites et moyennes entreprises. Est-ce que cela crée des conditions particulières, des difficultés particulières? J’aimerais faire le lien entre cela et le fait que vous ayez dit qu’il y avait des normes diverses à l’échelon provincial et fédéral et que cela devenait complexe selon qu’on avait affaire à un endroit ou à un autre.

Est-ce plus difficile au Canada comparativement aux États-Unis parce qu’il y a des normes étatiques dans chacun des États? En fait, la situation est-elle si différente ici par rapport aux États-Unis en ce qui concerne la divergence des normes d’une province à l’autre? Aussi, le fait que votre industrie soit principalement composée de petites et moyennes entreprises est-il un problème ou un avantage dans ce processus de transition vers moins d’émissions de carbone?

[Traduction]

M. Passmore : Il est intéressant de constater que l’industrie du chauffage diffère un peu partout au Canada. Quand vous ouvrez un robinet en Colombie-Britannique, il coule de la même manière qu’un robinet du Nouveau-Brunswick. Cependant, la situation est un peu plus complexe dans notre industrie à cause des différents combustibles et technologies que les gens utilisent ainsi que des différents tarifs et accès aux sources d’énergie. Une chose est certaine : pour résoudre le problème, il faut viser l’efficience, quel que soit le combustible utilisé. Ensuite, il faut que le gouvernement oriente les gens vers les combustibles les plus efficaces et les moins néfastes et pour que nous les utilisions de la manière la plus efficiente. C’est ainsi que nous atteindrons les cibles de réduction des émissions de carbone.

Si nous parlons des entrepreneurs qui appliquent réellement cette technologie, nous nous heurtons à tout un défi, parce qu’ils sont extrêmement nombreux. Ces gens de métier sont déterminés à faire de l’excellent travail, mais il est difficile de rester à l’avant-garde de la défense des intérêts et de la technologie. C’est notre rôle en tant qu’organisme et en tant qu’association de l’industrie de les tenir au courant des technologies disponibles et de l’orientation que les gouvernements et les municipalités prennent en fixant les codes. Nous devons aider ces spécialistes à adopter les nouvelles technologies et philosophies de conception afin qu’ils appliquent tous les produits qu’il faut pour rendre l’industrie plus efficace et pour accroître l’efficacité des infrastructures.

M. Heeley : De plus, la situation au Canada est fondamentalement différente de celle des États-Unis. Ici, nous visons l’harmonisation, mais les domaines de l’énergie et de l’environnement relèvent des provinces. Les normes énergétiques diffèrent d’une région à une autre.

Aux États-Unis, le gouvernement fédéral a un droit de préemption sur les États, ce qui empêche ces derniers de lancer des initiatives inédites. Cette différence fondamentale complique les relations de notre industrie et celle des autres secteurs avec les États-Unis, parce que la structure de gouvernance et de responsabilité est différente au Canada.

[Français]

La sénatrice Dupuis : Merci de votre réponse. J’aimerais aussi savoir si l’ensemble de l’industrie du bâtiment, résidentielle ou commerciale, partage des consensus sur la façon d’arriver à des gains d’énergie. Sans vouloir être plus sévère que vous l’êtes envers vous-même, vous avez dit qu’il était difficile d’attirer l’attention sur la contribution réelle de votre industrie. Et la partie concernant la défense des intérêts est importante à faire.

Est-ce qu’il y a un consensus dans l’industrie du bâtiment en général — l’industrie commerciale, industrielle ou résidentielle — sur les façons d’avancer, peut-être pas sur le rythme d’avancement, mais sur ce qu’on doit viser et comment y arriver?

[Traduction]

M. Passmore : Merci. D’autres nations se servent des technologies de chauffage existantes pour améliorer l’efficience de leurs infrastructures. Les pays scandinaves se sont écartés des combustibles fossiles pour adopter la technologie des thermopompes, qui est parfaitement efficiente. Cette technologie existe, et on l’utilise ailleurs dans le monde.

Nous n’avons rien à inventer. Il nous suffit de choisir avec soin la technologie qui conviendra à notre infrastructure de production électrique pour l’appliquer au Canada. Ensuite, nous encouragerons l’utilisation de cette technologie. Nous n’avons rien à inventer, elle existe, et d’autres nations l’utilisent déjà.

Au cours de ces 25 dernières années, nous avons misé sur l’efficacité et administré des programmes de gestion de la demande afin d’encourager l’amélioration de nos infrastructures et l’application des technologies à haut rendement dont nous parlons ici.

Nous savons tous ce que nous pourrions commencer à faire dès aujourd’hui. Comme Martin l’a dit, dans certains cas, le coût est prohibitif. Le coût du cycle de vie est de plus en plus rentable, parce que les carburants coûtent chaque année un peu plus cher. Le point commun, cependant, c’est l’efficacité. Il faut que nous choisissions les carburants qui ont le moins d’impact et qui sont les plus efficients. Notre association industrielle tient à travailler avec vous en partenariat pour traverser cette transition.

La présidente : Avant de céder la parole au sénateur Wetston, je voudrais faire quelques observations.

Au début des années 2000, je vivais en Europe. De ce temps-là, quand vous vouliez acheter une maison, vous receviez une trousse d’information sur les maisons. On y mentionnait non seulement l’efficience énergétique, mais la conservation de l’eau. Il y avait aussi de l’information sur l’élimination des déchets. Il y a 18 ans de cela.

Vous avez dit qu’il est grand temps d’agir dans certains dossiers. De votre côté, vous dites que tout est clair en ce qui concerne les nouvelles maisons, mais que les vieilles maisons posent un problème différent, parce que leur rénovation coûte souvent très cher. Toutefois, quand je compare cela à l’Europe où toutes les maisons sont vieilles, il me semble que nous comprenons mal la situation ou que nous manquons un concept qui nous crève les yeux.

Dans le cas du Code du bâtiment, il semble que certains soient en faveur et que d’autres ne le soient pas — « arrêtez, ne le faites pas ». Mais les codes du bâtiment doivent évoluer. C’est une nécessité. Je comprends que le nouveau code et les anciens doivent être différents.

Je pense que nous posons tous la même question : comment pouvons-nous avancer plus rapidement? Vous dites que la technologie existe. Je reconnais que les subventions ne peuvent pas être une situation à long terme. Qu’est-ce qu’il manque?

M. Luymes : Je vais répondre très brièvement, de notre point de vue. Je suis d’accord avec la réponse que m’a faite Bruce : le principal facteur en Europe a été le coût de l’énergie, ce qui n’est pas le cas ici. J’irai plus loin en disant que les recherches indiquent que les Canadiens ont le sentiment d’avoir droit à de l’énergie à faible coût. Ce phénomène a nui à la promotion de bâtiments très efficaces, parce que les Canadiens estiment qu’ils ont droit à de l’électricité à faible coût et au gaz naturel au coût le plus bas. Il s’agit simplement du privilège de vivre dans un pays où les ressources sont abondantes. Je pense qu’il y a une tendance culturelle à cet égard et il faut la contrer.

Nous ne dirons pas au gouvernement comment régler le problème de la tarification du carburant, mais la taxe sur le carbone est une façon d’y arriver et de commencer à faire du coût de l’énergie un facteur pour modifier les comportements. Nous croyons que c’est probablement la bonne direction à prendre. Pour que les gens puissent prendre des décisions éclairées quant à l’utilisation plus efficace de l’énergie, ils doivent avoir accès à de bons renseignements. Nous appuyons le modèle que vous avez décrit en Europe, qui consiste à donner aux gens toute l’information dont ils ont besoin pour prendre des décisions éclairées par rapport à leurs maisons et immeubles.

M. Heeley : Ce qu’il faut ajouter, c’est ce dont nous parlions tout à l’heure, c’est-à-dire de la nécessité d’offrir des mesures incitatives et de l’argent qu’il faut consacrer à ces mesures d’encouragement. Nous commençons à les voir apparaître dans certaines régions du pays, et certaines d’entre elles sont importantes. Notre industrie n’est pas nécessairement d’accord, mais l’un des obstacles à la vente de projets de rénovations est l’incapacité de les vendre en fonction du rendement que le bâtiment obtient grâce à ces rénovations, en raison du coût de l’énergie. Les décisions se prennent tout le temps sur une base financière, surtout dans le secteur commercial. Si l’un de nos membres - -un entrepreneur, un concepteur ou qui que ce soit — peut proposer une habitation dont le rendement sur une période raisonnable sera intéressant, elle devient très facile à vendre. Mais compte tenu de la comparaison des coûts énergétiques entre l’Europe et le Canada, par exemple, c’est beaucoup plus difficile à faire. C’est pourquoi il a fallu mettre en place des mesures d’encouragement dans bien des cas.

Dil Puar, gestionnaire des relations gouvernementales, L'Association canadienne de l'immeuble : Mes collègues ont abordé les deux points que j’allais soulever à ce sujet.

Il est important de noter que, en ce qui concerne le secteur du logement en particulier, ce n’est pas en imposant l’efficacité énergétique dans les codes que nous en sommes arrivés là. Dans le domaine des changements climatiques et des émissions de gaz à effet de serre, le secteur du logement représente une réussite canadienne. Le secteur résidentiel est le seul secteur à avoir atteint les objectifs de réduction du Protocole de Kyoto. C’est important, parce que les changements apportés au Code du bâtiment en matière d’efficacité énergétique n’ont été mis en place au Canada qu’en 2012. À ce moment-là, on avait déjà constaté une réduction des émissions de 11 p. 100, avant même que les codes ne soient modifiés.

Il faut noter que dans le secteur du logement en particulier, nous apportons des améliorations tous les jours. Les guides aident les propriétaires à rendre leur maison plus écoénergétique.

Le sénateur Wetston : C’est une question d’argent. C’est toujours une question d’argent. Je ne vais pas parler de l’argent.

Il y a deux choses dont j’aimerais discuter avec vous. Je m’intéresse beaucoup aux modèles de gouvernance, surtout ceux qui ne fonctionnent pas très bien. Mes collègues ici présents m’ont déjà entendu dire que l’un des plus grands défis que nous avons à relever pour atteindre les objectifs dont vous parlez — et je pense que nous pouvons tous être d’accord là-dessus —, ce sont les modèles de gouvernance du pays — les gouvernements fédéral et provinciaux et les municipalités.

Pouvez-vous nous dire quelles sont, selon vous, les possibilités d’atteindre les objectifs que nous approuvons tous, je crois, dans ce modèle fragmenté de contrôle gouvernemental et l’incapacité, de temps à autre, d’assurer la coordination et la collaboration de toutes les parties prenantes? Nous accomplissons beaucoup de choses, mais cela demande un effort énorme, et les résultats ne sont pas nécessairement apparents.

J’aimerais vous parler un peu des municipalités. Soit dit en passant, je suis un sénateur de l’Ontario. Je vis à Toronto.

Deuxièmement, j’aimerais vous entretenir des 150 nouvelles tours d’habitation en construction dans la région du Grand Toronto. Je pense que nous sommes tous au courant. Sont-elles toutes écoénergétiques? Respectent-elles les normes que vous appuieriez pour atteindre l’efficacité énergétique? Pouvez-vous me dire ce que vous en pensez, si vous avez des points de vue particuliers?

M. Luymes : J’aimerais faire un bref commentaire au sujet de la première question. Je ne pense pas que nous puissions résoudre nos problèmes constitutionnels par ce processus. Nous avons vu des mesures encourageantes mises en place récemment dans le cadre pancanadien, qui ont permis de constater une certaine collaboration entre les provinces et un engagement à faire adopter rapidement les codes du bâtiment, par exemple, partout au pays, en collaboration avec le gouvernement fédéral. Mais quelques changements à l’échelle provinciale pourraient modifier rapidement ce niveau de collaboration, et nous reviendrions en arrière. Je ne sais donc pas si nous pouvons résoudre ce problème.

En ce qui concerne le défi municipal, nous pensons que Toronto est en fait un peu un chef de file dans la promotion de bâtiments très efficaces. Diverses normes peuvent être utilisées. Les bâtiments dont vous parlez ne sont pas tous construits selon les normes que nous souhaitons voir adopter. Il ne s’agit pas seulement du Code du bâtiment, mais d’un code idéal. Je ne peux même pas penser aux noms des différentes normes. Il y a la norme verte de Toronto et il existe également un certain nombre de normes volontaires.

Dans une certaine mesure, c’est une question de marketing. Comme vous l’avez dit, il s’agit en partie de présenter cette information aux promoteurs pour qu’ils sachent que la construction du bâtiment le plus efficace, muni d’un système de chauffage et de climatisation géothermique par exemple, peut donner toutes sortes d’avantages, peut-être pas dans 2 ans, mais certainement au bout de 10 ans. L’éducation fait partie de la solution. De plus, les codes et les normes volontaires sont un moyen d’y parvenir.

Je dirais, pour revenir à notre point précédent, que l’éducation de toutes les parties prenantes présentes dans le marché est un autre outil que nous pouvons utiliser. Ce n’est pas seulement une question d’argent; c’est aussi une question d’information de qualité.

Le sénateur Wetston : J’ai une brève question complémentaire. Qu’en est-il des codes obligatoires? Oubliez les mesures volontaires.

M. Heeley : Les codes obligatoires, le Code national du bâtiment, les codes provinciaux, dont la majorité sont adoptés par les provinces, vont dans ce sens depuis un certain temps. Je suis convaincu que les membres du comité sont au courant. Des exigences en matière d’efficacité énergétique sont ajoutées pour certains produits, qu’il s’agisse de bâtiments commerciaux ou résidentiels. Il y a eu beaucoup de progrès. Si vous comparez le code de 1985 et les plus récents, ceux de 2012 ou de 2015, vous constaterez d’énormes changements dans beaucoup de domaines distincts, l’isolation, les fenêtres aussi bien que l’équipement de chauffage, de ventilation, de climatisation et réfrigération.

Pour ce qui est des appartements en construction, l’Ontario a adopté le code le plus récent qui établit la norme d’efficacité pour ces logements particuliers. Martin soulève notre préoccupation concernant le délai de cinq à sept ans nécessaire après la publication du code pour que toutes les provinces s’y conforment. Je pense que le manque d’uniformité est la source du problème.

Vous avez parlé de modèles de gouvernance, et bien que nous ne voulions pas nous engager sur la voie constitutionnelle, je dirais qu’il y a un problème avec les ressources provinciales. Y a-t-il des gens pour aider à l’adoption du code? Parfois, des ressources trop importantes indiquent que des modifications sont apportées parce que l’on estime essentiel pour la province d’apporter des changements au code modèle. Nous avons toujours de la difficulté à obtenir une certaine uniformité en matière d’efficacité énergétique, certaines mesures étant appliquées à la fois dans les nouvelles constructions et les rénovations et, dans certains cas, uniquement dans les rénovations.

Le sénateur Richards : Ma question s’adresse à Mme McNeil ou à tout autre membre du comité. Vous avez parlé de l’inefficacité des maisons dans les années 1950. J’ai vu des maisons construites au cours de cette décennie. Je vis dans une maison construite en 1895 et qui pourrait être modernisée, mais j’ai aussi une maison d’été qui a été construite en 1920, et c’est formidable.

J’ai vu des maisons construites à Toronto. Le contreplaqué n’est plus utilisé. On emploie plutôt des panneaux pressés à base de pétrole. Je me demande simplement si les codes jouent vraiment un rôle déterminant si les fabricants et les promoteurs n’utilisent pas de matériaux haut de gamme pour construire ces maisons? Nous retrouvons par exemple des planches de deux par deux qui traversent un sous-sol au lieu des planches traditionnelles de deux par quatre. Les panneaux pressés remplacent le contreplaqué un peu partout à Toronto. Je les ai vus.

S’il y a un incendie, par exemple, ces maisons vont s’enflammer trois fois plus vite que n’importe quelle autre maison des années 1950. L’habitation peut sembler écoénergétique, mais je ne suis pas vraiment certain, en raison des matériaux de construction qui sont utilisés, qu’il s’agit d’une solution avantageuse pour les acheteurs de ces maisons.

M. Heeley : Je pense que le plus grand changement, survenu probablement dans les années 1980, c’est que nous nous sommes penchés sur le type de maison ou de bâtiment commercial canadien en construction et sur la technologie en vigueur. L’accent a été mis sur l’enveloppe du bâtiment, et cela ne s’est pas produit dans les années 1920 et 1950. Cela ne fait aucun doute. Quant à l’aspect fondamental du choix des matériaux de construction, il ne fait aucun doute qu’on ne peut pas comparer les deux. Des briques et toutes sortes d’autres matériaux ont été utilisés pour créer la structure et, dans une certaine mesure, créer de l’efficacité. Quand on utilise des blocs de cendre et qu’on pose de la brique à l’extérieur, on crée une assez bonne valeur isolante, en quelque sorte. Dans les années 1980, on a créé un type de maison scellée, parce que le chauffage dans notre pays est une exigence incontournable et qu’il nous faut une technologie qui nous permet d’éviter les fuites et l’infiltration d’air, surtout pendant la saison froide.

Je pense que c’est la différence. Je ne suis pas du genre à comparer les matériaux de construction, comme vous l’avez fait, et à déterminer s’ils seront meilleurs à long terme ou non. Ce n’est pas mon domaine d’expertise, mais c’est la raison pour laquelle cette décision a été prise.

De plus, je crois que cela tient en partie au coût ainsi qu’à l’évaluation du coût et de la disponibilité de ces différents matériaux au fil du temps.

Le sénateur Richards : Bien sûr. Et c’était là ma question. Si les promoteurs optent pour le nivellement des coûts vers le bas afin de construire ces bâtiments le plus rapidement possible, est-ce vraiment dans l’intérêt public?

M. Heeley : Il faut faire attention quand on dit cela. Les promoteurs doivent respecter les codes du bâtiment. Des normes existent pour à peu près tous les types de matériaux utilisés dans une maison ou dans un bâtiment commercial, et ils doivent se conformer aux normes minimales. Est-ce bien de s’en tenir aux normes minimales? C’est un débat qui pourrait durer un certain temps. Il y a des normes qui s’appliquent à peu près à tout, et le Code du bâtiment les contient toutes.

Le sénateur Richards : Vous et moi préférerions qu’un mur soit érigé avec du contreplaqué au lieu d’un panneau pressé. Si vous vous adressez à un promoteur aujourd’hui, il vous dira que ses coûts sont astronomiques et que la solution réside dans le panneau pressé. C’est tout ce que j’essaie de dire. Les immeubles d’aujourd’hui sont peut-être plus performants en ce qui concerne ces codes, mais j’ai vu des immeubles érigés et construits dans les années 1950 et je pense que je préfère ces immeubles construits dans les années 1950.

M. Passmore : Sénateur, il y a une chose dans notre industrie qui est absolument merveilleuse et dont je suis fier : le modèle de base d’une chaudière installée aujourd’hui dans une nouvelle maison, autrement dit, la technologie de chauffage, respecte une norme qui représentait le niveau de qualité le plus élevé il y a 10 ans, il y a 5 ans.

Il ne fait aucun doute que des compromis par rapport à certains matériaux sont faits pour des raisons de rentabilité, mais nous sommes très chanceux dans notre industrie que les codes aient évolué. En mettant l’accent sur l’efficacité énergétique et la qualité des matériaux, la chaudière de base que vous trouvez aujourd’hui dans votre maison est un produit très efficace et de grande qualité que vous auriez payée plus cher il y a cinq ans.

Le sénateur Richards : Je suis tout à fait d’accord avec vous, et je ne remets pas cela en question. Je parle de la structure des maisons, c’est tout. Cela m’a un peu inquiété lorsque j’ai vu que ces matériaux étaient installés partout à Toronto pendant 14 ans. C’est tout ce que je voulais dire, monsieur.

La présidente : Merci beaucoup. Nous avons deux questions supplémentaires.

[Français]

La sénatrice Dupuis : Ma question s’adresse à Mme McNeil. Vous avez parlé des codes et de la nécessité de tenir compte de l’âge des bâtiments. Faites-vous une différence entre les propriétaires de condominiums qui ont été bâtis il y a 40 ou 50 ans et les condominiums de cette année, et les propriétaires de maisons individuelles? Ce que je veux savoir surtout concerne une maison qui a été construite en 1920 et qui a été bien entretenue même si elle n’est pas conforme aux normes d’aujourd’hui. Autrement dit, le propriétaire a fait un entretien de la maison à ses frais, ce qui fait que sa maison est encore efficace. Devrait-on le pénaliser parce que sa maison date de 1920 ou de 1950?

On sait que dans les bâtiments à logements multiples, certains d’entre eux n’ont pas été entretenus du tout. Les mesures incitatives à la rénovation ne devraient-elles pas être établies aussi en fonction du fait que vous avez ou non entretenu votre maison? En d’autres mots, on ne veut pas subventionner des propriétaires d’immeuble qui n’ont jamais entretenu leur immeuble et qui ont laissé vivre leurs locataires dans des appartements qui n’étaient pas au point. Uniquement parce que leur maison a été construite en telle ou telle année, par exemple, on leur accordera une subvention.

Mme McNeil : Oui, c’est un bon point. Ce n’est pas quelque chose qu’on a étudié en détail. On s’est concentré davantage sur les maisons. Et vous avez raison lorsque vous faites référence aux maisons qui ont été bien entretenues. Mais, il y a tellement de facteurs à prendre en compte. Les acheteurs ne peuvent pas entretenir certaines maisons selon différents codes. Il faudrait examiner cela et faire plus de recherches, ne pas généraliser et dire que toutes les maisons bâties en 1920 ne sont pas efficaces. Les acheteurs ont peut-être aussi fait beaucoup de rénovations, notamment en ce qui concerne la climatisation et le chauffage. Ce n’est pas juste ce qu’il y a à l’extérieur de la maison, mais aussi ce qui se trouve à l’intérieur. Il faut examiner le tout dans son ensemble.

[Traduction]

Le sénateur Wetston : Quelle est la solution la plus facile pour obtenir des résultats dans le domaine de l’efficacité énergétique? Est-ce par l’intermédiaire des entrepreneurs? Je suis propriétaire d’une maison depuis longtemps. Mon âge en est la preuve. Des compétences, des connaissances, de l’information — lisez autant de dépliants que vous voulez, de toute provenance. Je pense que le véritable défi réside chez l’ensemble des entrepreneurs. Vous devez le constater dans votre travail. Quelle est la façon la plus simple d’y arriver? Est-ce par l’entremise des entrepreneurs? Est-ce là la voie à suivre? Ne parlons pas d’argent. C’est une autre question.

Le sénateur Massicotte : Je savais que vous y arriveriez.

M. Luymes : Je ne sais pas si le fait de passer par les entrepreneurs représente la solution facile, mais je dirais que dans le marché de la rénovation, les entrepreneurs peuvent être des ambassadeurs de l’efficacité, un terme que nous avons déjà utilisé. Pour ce faire, ils doivent être formés. Chaque fois qu’ils se trouvent dans une maison ou un immeuble, ils doivent voir les possibilités de mise à niveau par opposition à la seule résolution de problèmes techniques, l’axe traditionnellement privilégié par notre industrie.

Si une chaudière ne fonctionne pas ou qu’un système de climatisation doit être remplacé, leur formation et leur orientation les amènent à proposer le produit le plus économique possible.

Notre organisation essaie d’éduquer nos entrepreneurs pour qu’ils voient des occasions d’améliorer le rendement énergétique des habitations. En fait, nous avons suggéré à certains de nos membres d’envisager de s’intéresser à l’ensemble de la maison de sorte que, comme Warren l’a dit plus tôt, le système mécanique fonctionne en harmonie avec l’enveloppe du bâtiment.

Si nous réglons les problèmes d’enveloppe et que nous renforçons les mesures d’efficacité, tant sur le plan de la valeur d’isolation que de la valeur d’étanchéité de l’enveloppe, cela crée des possibilités de réduire la dimension ou la capacité de la chaudière, par exemple. Il est possible de réduire la quantité de chaleur requise de 50 p. 100.

Ce genre de problème devrait être réglé conjointement. Les entrepreneurs ont vraiment besoin de savoir s’il y a une possibilité d’affaires en adoptant cette pratique, étant donné que leurs clients n’en font pas la demande. Cela peut se faire de plusieurs façons. On peut soit motiver le marché à demander ce genre de rénovations, soit former des entrepreneurs pour promouvoir de façon proactive ce genre d’adaptations.

M. Heeley : Le meilleur de nos entrepreneurs, c’est celui qui entre dans une maison et qui en examine l’ensemble pour son client. Nous aimerions avoir davantage de ces entrepreneurs. C’est ce vers quoi nous travaillons. Toute aide gouvernementale à cet égard serait, à mon avis, très positive.

La présidente : Merci beaucoup.

M. Puar : L’éducation et la sensibilisation sont des solutions faciles. Plus vous éduquez les gens, plus ils savent ce qu’ils peuvent tirer de leurs rénovations et plus ils sont susceptibles d’y arriver.

La présidente : Merci beaucoup pour cet échange des plus intéressants. Nous avons apprécié les questions des sénateurs et les réponses des témoins.

J’aimerais maintenant souhaiter la bienvenue à notre deuxième groupe de témoins. Nous accueillons Lyse Langevin, directrice générale, Direction générale des infrastructures communautaires, Secteur des opérations régionales.

Nous accueillons également Mark Hopkins, directeur général, Direction générale des ressources naturelles et de l’environnement, Organisation des affaires du Nord, Relations Couronne-Autochtones et Affaires du Nord.

De la Société canadienne d’hypothèques et de logement, nous accueillons Mme Luisa Atkinson, directrice, Logement des Premières Nations.

Vous pourrez faire une déclaration liminaire, après quoi nous passerons aux questions et réponses.

[Français]

Lyse Langevin, directrice générale, Direction générale des infrastructures communautaires, Secteur des opérations régionales, Services aux Autochtones Canada : Bonjour, madame la présidente et membres du comité. Je vous remercie de l’invitation. Avant de commencer, j’aimerais souligner que nous nous trouvons en territoire algonquin traditionnel non cédé. Je suis heureuse de me joindre à vous pour vous donner un aperçu des programmes de logements autochtones offerts par Services aux Autochtones Canada et Relations Couronne-Autochtones et des Affaires du Nord Canada.

[Traduction]

Les communautés autochtones sont parmi les plus vulnérables aux changements climatiques en raison de leur relation avec le monde naturel, de leur mode de vie traditionnel, et dans certains cas, de leur emplacement géographique.

Les changements climatiques et les catastrophes naturelles comme l’érosion, les inondations et les incendies ont des répercussions sur leur relation avec la nature et leur mode de vie traditionnel. Des travaux sont déjà en cours en partenariat avec des organisations autochtones afin d’élaborer des approches efficaces à long terme pour appuyer la prise en charge, le contrôle et la gestion de logements et d’infrastructures connexes sécuritaires, sains et abordables.

Pour répondre aux besoins urgents, le budget de 2016 a accordé un total de 554 millions de dollars sur deux ans, à compter de 2016-2017, à Services aux Autochtones Canada et à la Société canadienne d’hypothèques et de logement pour répondre aux besoins immédiats de logement dans les réserves.

Grâce à ce financement ciblé, Services aux Autochtones Canada a attribué, au 31 décembre 2017, 1 254 projets dirigés par des Premières Nations qui ont donné lieu à la construction, à la rénovation ou à l’entretien de 5 553 logements situés dans 452 collectivités des Premières Nations desservant plus de 412 000 personnes.

Dans le Nord, les trois régions inuites financées par le ministère des Relations Couronne-Autochtones et des Affaires du Nord, le Nunavut, le Nunatsiavut et la région des Inuvialuit, ont reçu 80 millions de dollars dans le cadre du budget de 2016 qui ont été versés directement aux gouvernements et aux organismes inuits de revendications territoriales pour répondre aux besoins en matière de logement dans ces régions sur une période de deux ans.

En poursuivant sur cette lancée, les budgets de 2017 et de 2018 comportaient 600 millions de dollars sur 3 ans pour le logement des Premières Nations, 400 millions de dollars sur 10 ans pour le logement des Inuits — en plus des 240 millions de dollars sur 10 ans accordés par la Société canadienne d’hypothèques et de logement au Nunavut —, et 500 millions de dollars sur 10 ans pour le soutien au logement de la nation métisse.

Bien que ces investissements représentent un premier pas dans la bonne direction, nous savons qu’il reste encore beaucoup à faire, car même avec l’augmentation récente du soutien fédéral, le financement n’a pas suivi le rythme de la croissance démographique et des besoins en matière de logement.

Le gouvernement travaille de concert avec des partenaires autochtones pour faire en sorte que la prise en charge, le contrôle et la gestion du logement soient assurés par les Autochtones.

Dans l’esprit d’une relation renouvelée, respectueuse et inclusive, les organismes autochtones et le gouvernement collaborent à l’adoption de mécanismes efficaces à long terme en matière de logement, mécanismes devant répondre aux besoins et aux aspirations des peuples autochtones, sous la forme de stratégies nationales en matière de logement fondées sur les distinctions pour les Premières Nations, les Métis et les Inuits.

J’aborderai ensuite les programmes de logement actuels. Le financement du logement des Inuits est assuré par le ministère des Relations Couronne-Autochtones et des Affaires du Nord dans les trois régions de l’Inuit Nunangat et il repose sur une approche d’autodétermination qui confère aux gouvernements et aux organismes inuits de revendications territoriales, la responsabilité, le pouvoir décisionnel et la capacité de répondre aux besoins en matière de logement dans leurs collectivités.

Les économies de coûts associées à l’adoption de mesures d’efficacité énergétique dans les logements des régions nordiques ont encouragé les collectivités inuites à adopter des modèles écoénergétiques.

Par exemple, en 2013, le gouvernement du Nunatsiavut a reçu le Prix Inspiration Arctique pour son initiative de logements sains dans les collectivités prospères du Nunatsiavut, le premier projet durable résidentiel à logements multiples du Nunatsiavut.

Les nouveaux prototypes d’appartements multifamiliaux sont équipés de chauffage électrique et de panneaux solaires qui maximisent l’efficacité énergétique, et de porches froids qui réduisent les pertes de chaleur.

Le gouvernement du Nunatsiavut a également utilisé le budget de 2016 pour soutenir son projet pilote de chauffage abordable qui permet de fournir des poêles à bois à haut rendement aux ménages dans le besoin.

[Français]

Enfin, 2015, la Société Makivik a collaboré avec la Société d’habitation du Québec et d’autres organismes régionaux pour créer un prototype de logement muni de murs extérieurs d’une épaisseur de 11 pouces injectés d’isolant à haute densité, de fenêtres plus grandes situées au sud et de fenêtres à triple vitrage à haut rendement énergétique afin de maximiser l’apport solaire.

[Traduction]

Le logement des Premières Nations est géré et fourni par les Premières Nations. Dans le cadre de la Politique de 1996 sur le logement dans les réserves, Services aux Autochtones Canada accorde en moyenne 143 millions de dollars par année aux Premières Nations. Ceci s’ajoute aux récentes annonces budgétaires.

Les Premières Nations peuvent utiliser cette allocation à leur guise pour la construction, la rénovation, l’entretien, l’assurance, le renforcement des capacités, le service de la dette, la planification et la gestion de leur portefeuille de logements.

En règle générale, les collectivités des Premières Nations construisent des habitations conformes aux codes nationaux et provinciaux du bâtiment, qui peuvent inclure des normes d’efficacité énergétique et l’utilisation de matériaux non classés. Le ministère encourage fortement le respect des codes du bâtiment actuels.

Par exemple, dans le cadre des investissements ciblés dans les budgets de 2016 à 2018, tous les projets de construction et de rénovation doivent respecter les codes du bâtiment nationaux ou provinciaux applicables à la région où se trouve la collectivité des Premières Nations, et des certificats d’inspection sont exigés à la fin des projets.

Par ailleurs, le ministère appuie actuellement le partenariat de l’Association nationale des agents du bâtiment des Premières Nations avec le Centre canadien de matériaux de construction en vue de la publication d’un manuel de spécifications techniques à l’intention des Premières Nations qui facilitera l’application des codes et des normes du bâtiment, lesquels seront assortis de lignes directrices en matière d’efficacité énergétique.

[Français]

La question de la durabilité n’est pas limitée à la façon dont les maisons sont construites. Elle touche aussi à l’exploitation de celles-ci, une fois érigées. Par exemple, 72 des 99 collectivités du Yukon, des Territoires du Nord-Ouest, du Nunavut, du Nunavik et du Nunatsiavut dépendent presque uniquement du diesel. De plus, au sud du 60e parallèle, il y a actuellement près de 40 collectivités dépendantes du diesel. Nous devons trouver des solutions énergétiques plus abordables et respectueuses de l’environnement pour les maisons nordiques. À titre d’exemple de projets financés pour réduire la dépendance au diesel, citons le projet récemment annoncé pour raccorder Pikangikum au réseau de distribution d’électricité provincial, qui permettra de fournir suffisamment d’électricité pour répondre aux besoins de la collectivité pendant plusieurs années. Le coût estimatif est de 60,2 millions de dollars. Ce projet devrait être terminé à l’automne 2018.

[Traduction]

De plus, le programme de Relations Couronne-Autochtones et des Affaires du Nord finance des projets d’énergie solaire, de biomasse, d’énergie éolienne et de petites centrales hydroélectriques, mais le champ d’application actuel n’inclut pas le logement.

En conclusion, nous reconnaissons que les communautés autochtones sont parmi les plus vulnérables aux changements climatiques en raison de leur relation avec le monde naturel, de leur mode de vie traditionnel et, comme je l’ai mentionné, dans certains cas, de leur emplacement géographique.

Nous continuons de travailler avec nos partenaires autochtones pour promouvoir la mise en œuvre de mesures et de technologies écoénergétiques dans les logements autochtones, y compris l’utilisation de carburant à faible teneur en carbone. Le gouvernement fait des progrès considérables dans l’élaboration de stratégies de logement fondées sur les distinctions, en collaboration avec des groupes des Premières Nations, des Inuits et des Métis.

Alors qu’il s’efforce de mettre en œuvre la réforme des infrastructures et du logement, le gouvernement continue de collaborer avec les collectivités autochtones pour qu’elles incluent l’efficacité énergétique dans la planification et la construction, la rénovation et la réparation de logements. Pour ce faire, il appuie notamment les initiatives de formation sur la gouvernance et de renforcement des capacités.

Je vous remercie de votre temps.

Luisa Atkinson, directrice, Logement des Premières Nations, Société canadienne d’hypothèques et de logement : Je suis ravie d’être ici au nom de la Société canadienne d’hypothèques et de logement. La SCHL est l’organisme national responsable de l’habitation au Canada. Notre mission est d’aider les Canadiens à répondre à leurs besoins en matière de logement.

Beaucoup de gens nous connaissent en raison de nos activités de financement de l’habitation, comme l’assurance prêt hypothécaire, qui aide les Canadiens à accéder au marché du logement. Nous offrons également des analyses de marché, des renseignements et des recherches qui aident les entreprises, les gouvernements et le public à prendre des décisions éclairées en matière de logement.

Vous vous souviendrez que l’automne dernier, mon collègue, Duncan Hill, s’est adressé à ce comité au sujet de certaines de nos activités de recherche et de démonstration concernant les maisons écologiques.

[Français]

La Société canadienne d’hypothèques et de logement (SCHL) finance également des solutions de logement abordable dans les collectivités partout au Canada, y compris dans le Nord. Nous le faisons en partenariat avec les provinces et les territoires, les collectivités autochtones, les municipalités et d’autres organismes.

[Traduction]

Dans le Nord, les besoins en matière de logement sont importants et les défis sont nombreux. En 2016, par exemple, les besoins en matière de logement atteignaient 36,5 p. 100 au Nunavut, comparativement au taux national de 12,7 p. 100. Cela signifie que plus du tiers des habitants du Nunavut consacrent plus de 30 p. 100 de leurs revenus au logement et vivent dans des maisons surpeuplées qui nécessitent des réparations.

Parmi les défis que pose le logement dans le Nord, il faut mentionner un manque d’accessibilité à des terres durables pour le logement, la logistique et le coût du transport des matériaux et de l’équipement de construction vers le Nord, les matériaux spécialisés et souvent coûteux, et les pratiques nécessaires à la construction de maisons dans un climat extrême.

C’est pourquoi la Stratégie nationale sur le logement a alloué 300 millions de dollars sur 10 ans pour compenser les besoins en matière de logement et les coûts plus élevés dans le Nord. Ce financement aidera environ 3 000 familles du Nord à trouver un endroit salubre, convenable et abordable qu’elles puissent considérer comme leur foyer.

Il est important de noter, particulièrement pour ce comité, que la Stratégie nationale sur le logement aidera à transformer et à préparer le secteur du logement pour qu’il atteigne un degré plus élevé d’efficacité environnementale. Ce sera fait de plusieurs façons.

Par exemple, les demandes de financement fédéral pour de nouveaux projets de construction et de réparation, ou pour le renouvellement de projets de logements abordables seront classées par ordre de priorité en fonction de l’efficacité énergétique visée.

Également dans le cadre de cette stratégie, la SCHL lancera de nouvelles initiatives de démonstration et de laboratoires de solutions que les intervenants du secteur du logement dans le Nord pourront utiliser pour les aider à innover, à résoudre des problèmes et à promouvoir la durabilité environnementale des habitations nordiques.

Une des initiatives importantes de la stratégie dont je voudrais parler est le Fonds national de co-investissement pour le logement. Je ne peux pas encore entrer dans les détails à ce sujet, car nous allons l’annoncer au cours des prochaines semaines. Je peux toutefois vous dire que les projets présentés dans le cadre de ce fonds doivent faire de l’efficacité énergétique une priorité.

L’accent que met le fonds sur les projets qui rassemblent de nombreux partenaires de tous les ordres de gouvernement et de nombre de secteurs peut contribuer à promouvoir des solutions durables sur le plan environnemental.

Nous avons vu cette situation se produire avec des projets antérieurs dans le Nord, par exemple, dans le lotissement du plateau à Iqaluit, la première subdivision arctique fondée sur les principes du développement durable. Ce projet primé a été financé par la SCHL et par le fonds municipal vert de la Fédération canadienne des municipalités. La ville d’Iqaluit a offert le terrain, et son service d’urbanisme a établi des normes de durabilité pour les promoteurs. Le projet a été réalisé en consultation avec les résidants.

En conséquence, il y a un quartier avec des aires naturelles protégées, notamment des zones de cueillette de petits fruits, des sentiers pédestres et des sentiers de motoneige. Les routes sont alignées avec la direction des vents dominants de manière à réduire les coûts de déneigement et les maisons ont été construites selon la norme R2000 ou une norme supérieure.

C’est cette même approche collaborative et globale en matière de construction de bâtiments écologiques que nous chercherons à soutenir pour tous les projets financés dans le cadre de la Stratégie nationale sur le logement. La SCHL a réalisé un certain nombre d’études sur des projets pilotes afin de mieux comprendre comment les maisons peuvent être plus efficaces dans le Nord. Je n’aborderai pas ces questions parce que mon collègue, Duncan Hill, en a déjà parlé lors d’un témoignage antérieur. Il suffit de mentionner que nos études soulignent constamment la nécessité d’une expertise locale en matière de construction et d’entretien de logements écoénergétiques adaptés aux climats nordiques et la consultation des communautés autochtones pour trouver les meilleurs moyens de construire des logements qui répondent aux besoins culturels.

L’appel à des ouvriers spécialisés du Sud ajoute considérablement au coût de construction et d’entretien des maisons écologiques dans le Nord.

La SCHL dispose actuellement de quelques programmes et initiatives visant à développer le potentiel en matière de logement dans les collectivités autochtones. En finançant le développement des compétences, la SCHL collabore avec les communautés des Premières Nations pour déterminer les besoins en matière de capacité et de formation. Cela comprend le soutien aux membres de la communauté au moyen de la formation dans les métiers. Nous avons également travaillé en étroite collaboration avec l’Institut de technologie du Sud de l’Alberta et le Groupe consultatif sur les services techniques des Premières Nations à un programme de formation pour les gestionnaires d’habitation. En fait, la première cohorte de 14 étudiants a terminé le programme de formation en janvier dernier. Ce fut un véritable succès.

Il y a quelques semaines à peine, nous avons rencontré des représentants d’autres établissements d’enseignement pour discuter de la façon dont nous pourrions accroître le nombre d’inscriptions et développer davantage le programme. Nous offrons également un programme de stages pour les jeunes Autochtones dont les résultats sont prometteurs puisque celui-ci fait la promotion des carrières dans le domaine du logement. Mentionnons à titre d’exemple le stage organisé par l’association du logement de Repulse Bay.

Le renforcement des capacités locales dans le domaine du logement sera plus important que jamais avec l’approche décisionnelle du gouvernement fédéral d’appuyer le logement autochtone.

Madame la présidente, j’espère que cet aperçu a contribué à montrer la façon dont les programmes de la SCHL encouragent l’efficacité énergétique ainsi que les programmes écologiques, et comment la priorité environnementale de la Stratégie nationale sur le logement fera en sorte que cet investissement dans le logement soit aussi un investissement dans des collectivités nordiques durables. Je serai heureuse de répondre à vos questions.

[Français]

La sénatrice Dupuis : J’ai une question pour Mme Langevin et une autre pour Mme Atkinson. Je vais commencer avec Mme Atkinson. Vous parlez de la Stratégie nationale sur le logement. Je pense que c’est une initiative fédérale extrêmement importante. Elle est fondée, entre autres, sur le droit au logement. On essaie de changer l’orientation de cette stratégie pour l’asseoir sur la reconnaissance du droit des individus d’avoir un logement abordable et décent qui respecte certaines conditions.

Dans votre présentation, vous dites qu’il y a une approche fondée sur la distinction qu’apporte le gouvernement fédéral pour soutenir le logement autochtone. Vous parlez, à la page 3, de la stratégie qui prévoit 300 millions de dollars sur 10 ans pour compenser les besoins et les coûts plus élevés en matière de logement dans le Nord. Cela aidera environ 3 000 familles. Avez-vous un tableau qui indique le nombre de logements requis à l’heure actuelle? Est-ce qu’on a ces données pour l’ensemble du Nord du Canada? Quels sont les besoins en logement et où s’insèrent-ils quant aux différents aspects et programmes de soutien au logement? Un point n’est pas clair, selon moi, et cela n’a rien à voir avec votre travail. Ce n’est pas du tout une critique de ce que vous faites. Mais si l’on a décidé de changer d’orientation, il faudra aussi changer l’orientation des programmes qui découlent de cette stratégie en matière de logement. En ce sens, avez-vous des données précises que vous pourriez nous transmettre quant à la façon dont les mesures répondent aux besoins identifiés?

[Traduction]

Mme Atkinson : Merci de votre question. Je ne les ai pas sous la main, mais nous avons des données qui montrent qu’il y a un besoin extrême de logements dans le Nord pour chacun des trois groupes autochtones. Mon collègue pourra vous en dire davantage sur les stratégies de logement des Autochtones qui seront élaborées dans le cadre d’une approche fondée sur les distinctions pour ces communautés.

Dans le cadre des programmes actuels, nous sommes très limités quant à ce que nous pouvons offrir à ces groupes fondés sur les distinctions, mais la Stratégie nationale sur le logement vise à créer des possibilités plus inclusives pour les Autochtones. En fonction de différents critères, les Autochtones de tout le pays pourront présenter une demande dans le cadre des programmes et initiatives de la Stratégie nationale sur le logement, ce qui permettra de cerner différents besoins, qu’il s’agisse de développement des compétences ou de la capacité de formation en matière de services techniques. Bon nombre de ces programmes serviront à construire de nouveaux logements sociaux abordables, à rénover, bien sûr, et à remettre en état des logements existants.

Les besoins sont très variés selon l’endroit où vous allez au pays. Il s’agit de travailler directement avec les collectivités autochtones, de déterminer quelles sont leurs priorités et comment nous pouvons les aider à respecter ces priorités. D’une collectivité à l’autre, cela pourrait être complètement différent. Dans le Nord, il s’agirait probablement davantage de s’assurer que les logements sont adaptés au climat et de s’attaquer également à certains problèmes de surpeuplement.

[Français]

La sénatrice Dupuis : Monsieur Hopkins, je trouvais intéressant que Services autochtones Canada nous donne à la fois les informations pour Services autochtones Canada et pour le ministère des Relations Couronne-Autochtones et des Affaires du Nord. Le ministère est divisé en deux, si je comprends bien. Quand on parle du logement, qui est responsable de quoi? Quand vous dites qu’il y a une dévolution d’argent aux Premières Nations qui gèrent la question, elles gèrent un budget. Encore une fois, je veux faire le lien avec la Sratégie nationale sur le logement. Si le logement est un droit, on peut dire ceci : « Vous êtes responsables du logement, on vous envoie 123 millions de dollars, faites ce que vous pouvez selon vos priorités. » L’intention est louable, mais on ne fait peut-être pas grand-chose par rapport aux besoins réels. On a partagé les ministères en deux. On veut que le ministère des Relations Couronne-Autochtones et des Affaires du Nord établisse la nouvelle relation qu’on veut avoir avec les Premières Nations. En ce qui a trait au logement, comment cela se traduit-il en pratique?

Mme Langevin : Je vous remercie de votre question. L’amélioration du logement pour les peuples autochtones est une priorité pour les deux ministères. Vous avez raison, cela porte un peu à confusion. Les deux ministères collaborent de très près. Je vais essayer de clarifier la division entre les deux et comment cela fonctionne. Le ministère des Services aux Autochtones est responsable des logements aux Premières Nations et le ministère des Relations Couronne-Autochtones et des Affaires du Nord est responsable des logements pour les Inuits et les Métis. Cependant, c’est quand même un dossier pour lequel les deux ministères travaillent en étroite collaboration.

En ce qui concerne les stratégies en matière de logement pour les différents peuples autochtones, les Premières Nations doivent elles-mêmes diriger l’élaboration de leur stratégie nationale afin de veiller à ce que l’avenir de la réforme du logement soit envisagé de leur point de vue. Il y a aussi le concept de ce qui détermine le besoin. Il y a un besoin très large qui est près de 9 milliards de dollars. Donc, les 143 millions de dollars par année, vous avez raison, ne répondent pas aux besoins. Nous travaillons avec les Premières Nations pour voir quelle serait la réforme, quels seraient les nouveaux programmes gérés par eux, soit « care, control and management by First Nations », et comment cela se déroulera. Nous faisons du codéveloppement de cette stratégie en ce moment.

La sénatrice Dupuis : Et à combien de logements correspondent les 9 milliards de dollars? Y a-t-il des régions du Canada où il y a plus ou moins de besoins, plus ou moins de surpeuplement?

Mme Langevin : Cela varie selon chaque province. J’ai les chiffres sur le plan national. C’est une étude qui a été réalisée en 2011 et renouvelée en 2016 avec les données du recensement.

La sénatrice Dupuis : Peut-on l’obtenir?

Mme Langevin : Il s’agit de 41 000 maisons et de 44 000 rénovations majeures en 2016. On a investi dans 5 000 rénovations et constructions l’an dernier. Le chiffre serait donc un peu moins élevé. En 2016, on parle de 41 000 nouvelles constructions et de 44 000 rénovations.

La présidente : Nous savons que, pour la population des Premières Nations, le taux de natalité est beaucoup plus important. Vous disiez que les besoins pressants sont reflétés dans les chiffres que vous venez de donner. Quels sont les besoins à moyen et à long terme, compte tenu de la croissance de la population métisse et autochtone?

Mme Langevin : Ce chiffre ne concerne que les Premières Nations. Il comprend une projection à long terme sur 10 ans.

La présidente : Vous dites qu’il faudrait s’adresser à un autre service pour obtenir les données sur les Inuits et les Métis.

Mme Langevin : M. Hopkins les a ici.

La présidente : Nous vous serions reconnaissants de nous transmettre une copie du rapport.

Mme Langevin : D’accord.

[Traduction]

Le sénateur Patterson : Soit dit en passant, au cours des dernières années, le comité sénatorial des peuples autochtones a mené des études approfondies sur le logement des Premières Nations et sur le logement de l’Inuit Nunangat.

Ma question s’adresse à Mme Langevin. Merci de votre exposé. Je vois que vous avez constaté qu’une grande majorité des collectivités du Nord dépendent presque exclusivement du diesel. Comme vous le savez, c’est 100 p. 100 des habitants dans ma région du Nunavut.

Notre comité étudie la possibilité de passer à une économie à faibles émissions de carbone. J’ai été surpris que vous n’ayez pas mentionné l’initiative budgétaire d’Affaires autochtones et du Nord Canada, annoncée pour la première fois en 2016-2017, soit un budget de 10,7 millions de dollars sur 2 ans, « pour mettre en œuvre des projets d’énergie renouvelable dans les collectivités autochtones et nordiques hors réseau qui dépendent du diesel et d’autres combustibles fossiles pour produire de la chaleur et de l’électricité ». Je cite votre site web.

Puis, en 2017, 53,5 millions de dollars sur 10 ans pour la mise en œuvre de produits d’énergie renouvelable dans le même but, c’est-à-dire ne plus dépendre du diesel. Qu’est-il advenu de cet argent? Quels projets ont été mis en place dans ma région du Nunavut, qui dépend entièrement du diesel?

Mme Langevin : Je vais laisser mon collègue, M. Hopkins, répondre à la question.

Mark Hopkins, directeur général, Direction générale des ressources naturelles et de l’environnement, Organisation des affaires du Nord, Relations Couronne-Autochtones et Affaires du Nord : Vous avez posé une question très précise, et nous y donnerons suite en fournissant une liste des projets qui ont été financés au Nunavut précisément au cours de cette période. Je crois que c’était là votre question. De façon plus générale, oui, ces programmes sont en place et ils fonctionnent de façon continue. Ils prennent, en fait, appui sur un programme que nous avons en place depuis près de deux décennies. Je peux tout de suite vous donner quelques exemples de projets au Nunavut. Il y a d’abord le soutien au système de chauffage centralisé, et la nouvelle piscine à Iqaluit, qui était très coûteuse par rapport à l’envergure du programme. Comme vous le savez, il s’agit d’environ 5 millions de dollars par année, ce qui est très insuffisant pour commencer à apporter des changements dans ne serait-ce que les 25 collectivités du Nunavut, sans parler du Nunatsiavut, du Nunavik, des Territoires du Nord-Ouest et du Yukon. Il faut comprendre que ce programme est très modeste par rapport à l’ampleur du défi.

Nous finançons principalement, encore une fois en raison de l’envergure du programme, des projets qui concernent davantage les études de faisabilité et les évaluations. Par exemple, nous appuyons l’évaluation de l’énergie éolienne en construisant des tours météorologiques qui sont importantes pour recueillir des données permettant d’évaluer s’il est faisable d’avoir recours à l’énergie éolienne et de déterminer quels seraient les meilleurs emplacements dans les collectivités. Nous travaillons là-dessus à Iqaluit. Nous finançons également l’installation de quatre tours météorologiques dans diverses collectivités du Nunavik qui seront déplacées progressivement dans différentes collectivités pour dresser, espérons-le, une cartographie plus étendue du Nunavik. Cela vous donne une petite idée.

Le sénateur Patterson : Oui. Je vous remercie de votre réponse franche concernant les fonds disponibles qui sont très modestes. Je sais que le centre aquatique d’Iqaluit utilise maintenant la chaleur résiduelle de la centrale électrique voisine, et cela représente une avancée considérable. Mais, en réalité, il n’y a pas de projets d’énergie de remplacement importants en place au Nunavut, et je suis heureux que des études soient en cours pour déterminer ce que nous pourrions faire.

Ce qui m’amène à ma prochaine question. Le Cadre pancanadien sur les changements climatiques auquel le Nunavut a courageusement adhéré établit la tarification du carbone, pour employer la terminologie politiquement correcte, pour dissuader les citoyens d’utiliser les combustibles fossiles. Bien sûr, nous avons tous cet objectif.

Étant donné qu’il n’y a pas encore de projets d’énergie de remplacement dans ma région et qu’il y a un très petit budget disponible pour éliminer la dépendance au diesel, comme M. Hopkins l’a si bien dit, je me demande simplement si vous pensez qu’il serait judicieux de mettre en œuvre la tarification du carbone au Nunavut en 2018, comme l’indique l’objectif du gouvernement, alors que les citoyens n’ont aucune solution de rechange aux combustibles fossiles. Certaines personnes m’ont dit : « Eh bien, nous pouvons peut-être retourner à des traîneaux à chien au lieu d’utiliser des motoneiges pour la chasse. Nous pouvons utiliser de l’huile de phoque pour chauffer nos maisons, comme nous le faisions dans les igloos. Les enfants peuvent peut-être se rendre à l’école à pied dans des blizzards ou utiliser des bicyclettes en janvier. » Concrètement, tout ce que la tarification du carbone va engendrer au Nunavut, c’est une augmentation de tous les coûts — le transport aérien, le chauffage résidentiel, la production d’électricité — dont la majeure partie est déjà assumée par le gouvernement du Nunavut lui-même.

J’aimerais vous demander ce qui suit : compte tenu des progrès primitifs que nous réalisons dans le développement d’autres sources d’énergie au Nunavut, la tarification du carbone au Nunavut est-elle une politique publique judicieuse efficace pour encourager la réduction des émissions de gaz à effet de serre?

M. Hopkins : Eh bien, cela ne fait pas partie du mandat de mon ministère ni de mon ministre. Vous semblez me demander une opinion personnelle, que je ne vais évidemment pas donner ici. En ce qui concerne la tarification du carbone, c’est vraiment hors de la responsabilité de notre ministère, et cela relève du ministre de l’Environnement.

La présidente : Puis-je intervenir et poser une question complémentaire dans le même domaine? Je suis vraiment d’accord avec le sénateur Patterson sur le fait que nous devons être cohérents.

Au comité, nous entendons parler du gaz naturel, et les intervenants ont dit qu’ils étaient prêts à aller dans le Nord. Bien entendu, il s’agit toujours de combustibles fossiles, mais avec une empreinte carbone beaucoup plus faible et, par conséquent, une taxe sur le carbone moins élevée.

Vous avez dit que vous construisez des maisons avec des toits solaires. Les nouvelles maisons ont des toits solaires et des fenêtres à haut rendement énergétique orientées vers le sud.

Parmi ces idées et ces projets visant l’apport de gaz naturel, est-ce quelque chose que vous avez évalué ou imaginé?

M. Hopkins : Je ne sais pas si nous avons une étude à présenter. La logistique est un facteur très important. Il y a des régions du Nord — comme Inuvik dans la région des Inuvialuit — où l’on retrouve une source de gaz naturel, très proche; la faisabilité est donc très différente de celle d’autres régions du Nunavut et du Nunavik, par exemple, où il faut expédier des carburants. Le même problème se présente avec le diesel pour ce qui est de l’expédition; par conséquent, cela devient quand même très coûteux, car c’est le principal élément qui influe sur le coût. Mais l’empreinte carbone est certainement beaucoup plus faible que le diesel.

La présidente : Cela devient peut-être trop technique, mais il n’est pas plus dangereux ni difficile de transporter le gaz naturel liquide que le diésel. Le gaz naturel peut aller partout où va le diésel. Je ne vois pas le vrai problème.

M. Hopkins : Je ne vous donne qu’une réponse partielle parce que vous voulez aussi savoir si… Parce que l’autre facteur, ce sont les centrales au diésel elles-mêmes, dont un grand nombre, surtout au Nunavut, sont très vieilles, et dont certaines, comme vous l’avez peut-être entendu, ont dépassé de 20 à 30 ans leur durée de vie théorique. Infrastructure Canada, vous le savez sans doute, a un programme pour essayer de régler le problème.

La question est alors de savoir si ces centrales au diésel peuvent fonctionner au gaz naturel. Les dépenses d’investissement pour l’installation de production de diésel sont aussi un élément de coût important. Donc, je ne saurais répondre à votre question avec certitude.

La présidente : Pensez-vous pouvoir compléter la réponse et envoyer un complément d’information à la greffière?

M. Hopkins : Oui.

La présidente : Merci.

Le sénateur Patterson : J’aimerais parler de la question du logement, qu’a soulevée Mme Langevin.

Vous avez fait état des sommes affectées au logement des Inuits sur une période de 10 ans. Le Nunavut est probablement parmi les régions où le logement est le plus généreusement financé. C’est peut-être justifié par l’explosion démographique, que notre présidente a signalée, par les taux de croissance naturelle de la population du tiers monde.

Soyons réalistes. Je vais me concentrer sur ma région, le Nunavut. Le budget de l’an dernier engageait 240 millions de dollars sur 10 ans pour le logement au Nunavut, comme vous l’avez signalé. C’est 24 millions de dollars par année. Je crois que, d’après le coût du logement de nos jours, cela représente environ 40 à 60 logements par année.

Le comité sénatorial a documenté la pénurie actuelle, et la Société d’habitation du Nunavut a signalé une pénurie de 3 000 logements. Nous avons maintenant un engagement fédéral pour, mettons, 60 maisons par année au Nunavut et, dites-vous, il reste beaucoup à faire.

Vous l’avez dit dans votre exposé, même avec une augmentation de l’aide fédérale, le financement n’a pas suivi la croissance démographique et des besoins. Je vous cite : « Le gouvernement travaille avec des partenaires autochtones en vue de transférer aux Autochtones la prise en charge, le contrôle et la gestion du logement. » Vous avez aussi dit qu’il y aura désormais « des stratégies nationales sur le logement axées sur les distinctions pour les Premières Nations, les Métis et les Inuits. »

Faut-il comprendre que la stratégie du gouvernement fédéral consiste en quelque sorte à transférer aux peuples autochtones les soins, le contrôle et la gestion du logement, pour régler la grave pénurie? Est-ce là la stratégie de votre ministère pour combler cette grave pénurie dans ma région et dans toutes les autres?

Mme Langevin : Merci de votre question. C’est davantage dans l’ensemble du système et pas seulement dans votre région, et je reconnais la pénurie dans votre région. La stratégie s’applique aux Premières Nations, aux Inuits et aux Métis, mais davantage dans un cadre urbain.

Le plan n’est certainement pas de laisser les soins, le contrôle et la gestion du logement aux trois groupes axés sur les distinctions en espérant que le même financement donnera de meilleurs résultats. Tel n’est pas le plan. Le plan est plutôt de travailler avec les Premières Nations pour voir quelles sont les approches novatrices possibles, combien de financement il faudrait, et comment nous pourrions ensemble, et plus tard nous-mêmes, arriver à une meilleure solution.

La ministre Philpott a déclaré lors de sa conférence de presse de janvier que l’un des objectifs de Services aux Autochtones Canada est de finir par disparaître pour cause d’obsolescence, et aussi de faire en sorte que les Autochtones puissent se prendre en main et être équipés pour faire du meilleur travail que l’ancien ministère.

La stratégie, qui est élaborée conjointement, donne lieu à de longues conversations sur la suffisance et la durabilité. Le résultat sera le même si l’on se contente de prendre les programmes et d’en faire la même chose avec de nouveaux groupes de personnes. Ce n’est pas ce que nous cherchons.

Nous travaillons à l’ensemble des résultats qui définiraient le succès avec nos partenaires des Premières Nations, des Métis et des Inuits, et nous élaborons ou rédigeons les stratégies conjointement avec eux. Nous en sommes au stade du développement et je ne voudrais pas parler en leur nom, mais la durabilité et la suffisance sont des sujets très importants dans la discussion.

M. Hopkins : Je voudrais faire un retour en arrière pour vous donner plus d’explications sur le fonctionnement du programme dans le Nord, dont nous n’avons pas parlé à la question précédente. Pour ce qui est de la façon dont Relations Couronne-Autochtones et des Affaires du Nord finance en particulier trois des quatre signataires d’ententes sur les revendications territoriales dans l’ensemble de l’Inuit Nunangat, notre financement prend essentiellement la forme d’une subvention aux Inuvialuit, au Nunavik et au Nunatsiavut. Comme vous le savez, le financement pour le Nunavut va au gouvernement territorial par l’entremise de la Société canadienne d’hypothèques et de logement. Cela s’appuie sur une approche dite d’autodétermination. La prémisse, c’est que les signataires des ententes sur les revendications territoriales reçoivent l’argent. Ce n’est pas inconditionnel, mais il n’y a pas d’exigences particulières applicables à l’investissement. C’est aux sociétés signataires des ententes sur les revendications territoriales elles-mêmes qu’il incombe d’évaluer, de la même manière, la quantité et la qualité. La durabilité devient un facteur important, d’où la discussion de tout à l’heure sur la Société Makivik et les bâtiments expérimentaux aux murs épais qu’elle met en place.

Je dirais que c’est positif, mais ce n’est pas encore très avancé et il faudra du temps et de l’argent pour déployer complètement ce genre de pratiques de construction dans le Nord.

La présidente : J’ai une brève question avant de donner la parole au sénateur Mockler. Je m’inquiète des conséquences des changements climatiques dans le Nord et du fait que toutes les collectivités sont tout près de l’eau. Nous savons que les niveaux d’eau augmentent et que le pergélisol fond. Or la construction de ces logements a besoin de bases solides, et il faut forer jusqu’au roc pour en assurer la stabilité.

La construction de vos maisons neuves tient-elle compte de ces aspects pour que vous n’ayez pas à recommencer dans quelques années?

M. Hopkins : Ce n’est pas nous qui construisons ces maisons; nous accordons des subventions aux sociétés signataires d’ententes sur les revendications territoriales pour leur construction. C’est à elles qu’il appartient de déterminer les normes et les codes de construction et de s’y conformer.

Nous avons bien un programme distinct, le Programme d’adaptation aux changements climatiques, qui traite de façon très ciblée des répercussions des changements climatiques dans l’Arctique, et qui accorde des fonds précisément à cette fin. Il fournit des fonds pour la cartographie du pergélisol et la cartographie des dangers pour aider les collectivités à voir où le pergélisol est à risque.

Ainsi, nous avons investi précisément dans une étude géotechnique sur le pergélisol pour un complexe résidentiel à Sanikiluaq. Il existe un programme de financement distinct pour répondre à ces besoins de logement au fur et à mesure.

Le sénateur Mockler : Je suis président du Comité sénatorial permanent des finances nationales, et je veux simplement faire part d’une chose aux fonctionnaires, avant de leur poser une question. C’est un peu effrayant d’entendre cela pour la Société canadienne d’hypothèques et de logement et je ne vois pas beaucoup de progrès, surtout lorsque je considère les pénuries. Par exemple, au Nunavut, on parle de 3 000 logements; il faudra 50 ans pour les construire.

Le sénateur Patterson : Pour le rattrapage seulement.

Le sénateur Mockler : Oui, pour le rattrapage seulement. J’ai lu le rapport du Comité des peuples autochtones sur le logement. J’ai deux petites questions.

Dans tout le Nord, quelle est l’ampleur de la pénurie par région? Pouvez-vous nous donner ces faits? C’est bien beau de parler de la gestion du carbone, mais il y a d’autres domaines où le Canada pourrait gérer encore mieux, et nous pourrions cibler des programmes rapides pour aider le Nord.

[Français]

S’il y a de la bonne volonté, on pourra trouver des solutions et des programmes rapidement.

Premièrement, connaissez-vous le manque à gagner en ce qui concerne les besoins urgents? Pouvez-vous nous fournir une grille, de la Société canadienne d’hypothèques et de logement, pour que le comité puisse faire quelque chose, même si ce n’est pas sa responsabilité? On pourrait faire des recommandations au gouvernement. Le Comité sénatorial permanent des finances nationales porte ces éléments à l’attention du gouvernement afin de voir ce qu’il fera rapidement pour venir en aide à une certaine proportion de notre société. Tout le monde en parle, mais les choses avancent au ralenti. Je ne veux surtout pas blâmer personne. Les fonctionnaires sont des professionnels. Vous vous adressez à des parlementaires. On vous a demandé de venir témoigner afin que nous puissions formuler des recommandations en faveur des personnes les plus vulnérables de la population.

[Traduction]

M. Hopkins : Nous nous efforcerons d’établir une mesure des besoins pour le Nord. Je ne pense pas l’avoir déjà. Cela pose des problèmes. Le premier, c’est que le besoin grandit. Ensuite, il y a des problèmes avec les arrangements familiaux. Il y a des problèmes de qualité de construction, des problèmes avec le nombre de logements, le type de logement, le nombre de personnes, les arrangements multifamiliaux, la marge de manœuvre pour l’ajustement de la façon de construire le milieu de vie, autant de facteurs qui entrent en ligne de compte dans le calcul des besoins. Ce qui ne veut pas dire que je ne pense pas que tout le monde comprend à quel point c’est dramatique, mais c’est difficile à quantifier.

Je vais voir ce que nous avons. Il y aura certainement beaucoup d’hypothèses à faire à ce sujet.

La présidente : Vous vouliez ajouter quelque chose?

Mme Atkinson : Oui. Je voulais ajouter que vous avez, tout à fait, raison. Nous sommes tous passionnés par le changement et par la possibilité d’apporter du vrai changement dans les collectivités.

Il faut une approche pangouvernementale et pancommunautaire pour réaliser les changements. Il n’y a pas de solution universelle. Nous faisons plus de recherche. Nous travaillons avec nos partenaires. Nous travaillons avec les promoteurs du logement à l’échelle du pays pour voir comment nous pourrions étirer nos fonds pour faire plus. Nous mettons tous la main à la pâte.

Je tenais à le dire, parce que la recherche est continue. Il y a des partenariats avec des entreprises de construction, des scientifiques et divers Canadiens qui veulent des solutions. Le financement dont parlent mes collègues est un pas dans la bonne direction. C’est le premier pas, mais il y a beaucoup à faire, et nous le savons. Merci de votre question.

Le sénateur Patterson : Permettez-moi d’abord de rappeler que le Comité des peuples autochtones a recommandé de transférer aux trois régions du Nord canadien le contrôle des fonds destinés au logement des Inuits. Je suis heureux que le gouvernement ait répondu. Les coûts d’administration et les retards entraînés par la distribution de ces fonds par l’entremise des gouvernements provinciaux dans ces trois régions diminueraient les fonds disponibles.

Nous comprenons que le gouvernement ne peut pas gérer tout seul ces énormes pénuries de logements. Le gouvernement peut aider les Premières Nations et les autres peuples autochtones à tirer parti des programmes existants afin de trouver des partenaires privés et d’ouvrir d’autres sources de revenus. Je veux tout simplement mentionner certains aspects que le comité a examinés et qu’il appuie.

Je ne veux pas créer de controverse, mais les Premières Nations ont été exclues du partage de la taxe d’accise sur la production de marijuana dans les réserves. Elles ont des besoins sociaux et de logement, des besoins en santé mentale et en éducation. Les provinces, le gouvernement fédéral et les territoires tiennent à leur part des recettes fiscales. Les Premières Nations, elles, sont laissées pour compte. Votre ministère ou votre gouvernement va se voir recommander de céder une part de ces recettes aux Premières Nations pour qu’elles puissent commencer à établir leurs propres sources de revenus.

En second lieu, la monétisation des contributions en vertu de la Loi sur la gestion financière des premières nations a été un moyen efficace de dégager des fonds du secteur privé.

Il y a une occasion en or d’aller plus loin en monétisant les contributions destinées aux bandes des Premières Nations dont la bonne gouvernance est attestée par un certificat délivré en vertu de la Loi sur la gestion financière des premières nations. C’est un véhicule.

Il y a la question des fonds indiens perçus par le gouvernement fédéral et qui sont disponibles, il faut l’espérer, pour attirer d’autres fonds du secteur privé. J’espère que la Coalition de grands projets des Premières Nations travaille avec votre ministère pour obtenir de l’aide pour participer aux possibilités d’exploitation des ressources, là où les Premières Nations sont intéressées.

Je mentionne ces possibilités. J’espère que vous en tiendrez compte dans vos stratégies de développement conjoint. Il y en a probablement d’autres.

Je ne sais pas si vous avez des commentaires à faire à ce sujet. Le gouvernement ne peut pas tout faire.

Mme Langevin : Merci. C’est très intéressant. Cela rejoint les conversations que nous avons avec nos partenaires.

Nous avons un groupe de travail composé de l’Assemblée des Premières Nations, de Services aux Autochtones, et de la Société canadienne d’hypothèques et de logement. Nous invitons régulièrement d’autres collègues fédéraux de différents ministères. Nous avons tenu et tiendrons des séances de consultation régulières.

Tout au long de l’année dernière, les partenaires des Premières Nations et Services aux Autochtones Canada, avec l’aide de la SCHL, ont défini conjointement un cadre stratégique, qui a été approuvé en décembre 2017 par l’Assemblée extraordinaire des chefs. C’était là une étape clé de l’élaboration d’une stratégie nationale de logement et d’infrastructure pour les Premières Nations, afin d’accroître la prise en charge et le contrôle du logement et de l’infrastructure par les Premières Nations.

En même temps, nous travaillons avec de nombreuses organisations des Premières Nations à l’examen de choses comme la monétisation et l’accès aux marchés des capitaux privés par la monétisation. Il y a aussi la stabilisation des sources de financement pour la propriété privée dans les réserves. Il y a toute une série de questions concernant la propriété privée dans les réserves. Par exemple, comme la terre appartient à la Couronne, il est impossible de reprendre possession d’une maison, si bien qu’il arrive que les banques s’inquiètent des hypothèques. Nous nous penchons sur la question.

Le logement ne saurait être que social. Il faut du logement social à toutes les étapes de la vie, mais il y a des gens qui aimeraient être propriétaires de leur maison. Nous travaillons à la création d’outils qui donneront accès à un continuum complet de logements. Par le passé, la Première Nation présentait une demande dans le cadre de nos programmes et obtenait du financement pour la construction d’un type particulier de maison. Aujourd’hui, nous examinons l’ensemble du continuum avec nos partenaires, en commençant par les appartements pour les plus jeunes. Comme nous nous plaisons parfois à le dire, la maison n’est jamais de la taille qui convient au stade où l’on en est dans la vie. Lorsqu’on est jeune, elle est trop grande. Lorsqu’on a une famille, c’est trop petit. Lorsqu’on est âgé, il y a des escaliers.

C’est pourquoi nous examinons le continuum complet du logement avec nos partenaires, et les coûts sont différents pour différents modèles. Si nous construisons la même maison — vous aviez un coût d’environ 300 000 $ à 400 000 $, parce que la construction dans le Nord coûte cher —, nous n’y arriverons jamais.

Le sénateur Patterson : De 400 000 $ à 600 000 $.

Mme Langevin : Désolée, je me suis trompée dans mon calcul. Il est important d’analyser tout le continuum et les différents types de choses possibles. En votre nom, je vais demander à l’Assemblée des Premières Nations de vous faire part de cette stratégie. Elle en faisait une large diffusion, et je pense qu’elle serait heureuse de vous en faire part, mais je vais devoir lui poser la question.

[Français]

La sénatrice Dupuis : Monsieur Hopkins, vous avez dit que vous alliez déposer des données ou des documents concernant les Inuits. Pourrait-on avoir une évaluation des besoins en matière de logement pour les Inuits? On a parlé de 9 milliards de dollars pour les logements des Premières Nations, des Inuits et des Métis. Peut-on obtenir les évaluations du ministère quant à ces besoins?

Également, pouvez-vous nous fournir des informations sur la façon dont se comparent les initiatives fédérales en matière de réduction des émissions de carbone d’un territoire à l’autre? On verrait, par exemple, les données du Nunavut par rapport à celles des Territoires du Nord-Ouest et du Yukon.

[Traduction]

M. Hopkins : Je vais commencer par la deuxième question, qui concerne les initiatives fédérales de réduction des émissions de carbone dans les trois territoires. Cela prendra un certain temps; l’information n’est pas facilement disponible, parce qu’un très grand nombre de ministères fédéraux ont des activités qui ont une incidence sur les émissions de carbone dans le Nord.

Je peux vous donner assez facilement une idée des programmes spécifiquement ciblés et des retombées qu’ils ont eues. Je peux restreindre la portée de ma réponse.

[Français]

Mme Langevin : En ce qui concerne les Métis, jusqu’à présent il n’y a jamais eu de programme. Je vais demander à mes collègues, mais je ne sais pas si la recherche est assez avancée pour obtenir des chiffres, car il s’agit d’une toute nouvelle approche. On vérifiera, mais on ne peut pas vous faire de promesses.

La présidente : Maxime fera le suivi sur les questions et les documents qu’on a promis de fournir au comité.

[Traduction]

Merci beaucoup pour les questions et les réponses.

(La séance est levée.)

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