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NFFN - Comité permanent

Finances nationales

 

Délibérations du Comité sénatorial permanent des
Finances nationales

Fascicule no 94 - Témoignages du 7 mai 2019 (réunion de l'après-midi)


OTTAWA, le mardi 7 mai 2019

Le Comité sénatorial permanent des finances nationales se réunit aujourd’hui, à 13 h 30, afin d’étudier le Budget principal des dépenses pour l’exercice se terminant le 31 mars 2020.

Le sénateur Percy Mockler (président) occupe le fauteuil.

Le président : Je m’appelle Percy Mockler; je suis sénateur du Nouveau-Brunswick et président du Comité. Je souhaite la bienvenue à toute l’assistance et aux gens de tous les coins du pays qui nous suivent à la télévision ou en ligne.

J’aimerais aussi rappeler aux auditeurs et aux auditrices que les audiences du comité sont publiques et accessibles en ligne à sencanada.ca.

[Traduction]

Je demanderais aux sénateurs de se présenter.

Le sénateur Klyne : Marty Klyne, de la Saskatchewan.

[Français]

Le sénateur Forest : Éric Forest, du Québec, région du Golfe. Bienvenue.

Le sénateur Pratte : André Pratte, du Québec

[Traduction]

La sénatrice Duncan : Pat Duncan, du Yukon.

La sénatrice M. Deacon : Marty Deacon, de l’Ontario.

Le sénateur Boehm : Peter Boehm, de l’Ontario.

Le sénateur Neufeld : Richard Neufeld, de la Colombie-Britannique.

La sénatrice Marshall : Elizabeth Marshall, de Terre-Neuve-et-Labrador.

[Français]

Le président : Je voudrais aussi souligner la présence de la greffière du comité, Gaëtane Lemay, ainsi que celle de nos analystes, Alex Smith et Shaowei Pu, qui, ensemble, soutiennent les travaux du comité.

[Traduction]

Honorables sénateurs et membres du public, le mandat de notre comité est d’examiner les questions relatives au budget fédéral en général, ainsi qu’aux finances publiques.

Nous poursuivons l’étude des dépenses prévues dans le Budget principal des dépenses pour l’exercice se terminant le 31 mars 2020.

[Français]

Cet après-midi, nous recevons trois organisations canadiennes afin de discuter de leurs demandes de fonds contenues dans le Budget principal des dépenses.

[Traduction]

Je remercie les témoins d’avoir répondu à notre invitation.

En premier lieu, de Services aux Autochtones Canada, nous accueillons M. Paul Thoppil, dirigeant principal des finances, des résultats et de l’exécution.

[Français]

Nous recevons également Paul Pelletier, directeur général, Direction générale de l’Éducation. Merci d’avoir accepté notre invitation.

[Traduction]

Ensuite, d’Infrastructure Canada, nous avons Nathalie Bertrand, sous-ministre adjointe et dirigeante principale des finances, Services ministériels; et Nathalie Lechasseur, directrice générale, Intégration des programmes, Opérations des programmes. De la Société canadienne d’hypothèques et de logement, M. Evan Siddall, président et premier dirigeant, accompagné de Mme Lisa Williams, chef des finances.

Merci d’avoir accepté notre invitation. Nous allons demander à M. Thoppil de faire son exposé. Après votre exposé, les sénateurs vous poseront des questions.

[Français]

Monsieur Thoppil, la parole est à vous.

Paul Thoppil, dirigeant principal des finances, des résultats et de l’exécution, Services aux Autochtones Canada : Monsieur le président, honorables sénateurs, je vous remercie de m’avoir invité à discuter du Budget principal des dépenses de Services aux Autochtones Canada (SAC) pour l’exercice 2019-2020. Votre comité joue un rôle important dans l’examen des dépenses ministérielles et je suis ravi d’avoir l’occasion de vous parler de ce budget avec mes collègues. Je suis heureux de vous informer qu’un projet de loi officialisant l’établissement du ministère des Services aux Autochtones Canada (SAC) a été présenté. Ce projet de loi définit les pouvoirs et les fonctions du ministère et abroge la Loi sur le ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien afin de dissoudre officiellement Affaires autochtones et du Nord Canada.

[Traduction]

Avant de voir de plus près le Budget principal des dépenses de 2019-2020, j’aimerais souligner certains points saillants des résultats obtenus par Services aux Autochtones Canada au cours du mandat du gouvernement.

Premièrement, en ce qui concerne les infrastructures, depuis novembre 2015, un total de 83 — désormais 85 — avis à long terme sur la qualité de l’eau potable ont été levés. De même, au 31 décembre 2018, un total de 6 842 logements et lots, qui sont du ressort du ministère, étaient en voie de construction, de rénovation ou de viabilisation, selon le cas, et 3 883 des projets sont aujourd’hui achevés.

Deuxièmement, au chapitre de l’éducation, de la maternelle à la 12e année, plus de 180 Premières Nations ont maintenant la maîtrise de leur éducation; et l’entente tripartite sur l’éducation en Colombie-Britannique a été lancée avec succès.

Troisièmement, conformément au principe de Jordan, le Canada veille désormais à ce que les enfants des Premières Nations reçoivent les services dont ils ont besoin, au moment où ils en ont besoin. Depuis juillet 2016, le ministère a approuvé plus de 216 000 demandes de service.

Enfin, le 28 février 2019, le projet de loi C-92, Loi concernant les enfants, les jeunes et les familles des Premières Nations, des Inuits et des Métis, a été déposé au Parlement. Il énonce des principes nationaux pour guider la manière de fournir les services aux enfants et aux familles autochtones et confirme clairement le droit inhérent des Premières Nations, des Inuits et des Métis d’exercer leur compétence en matière de services à l’enfance et à la famille.

J’aimerais maintenant attirer l’attention des sénateurs sur une présentation que vous avez sous les yeux, qui s’intitule « Budget principal des dépenses 2019-2020 », et qui vous a été distribuée plus tôt. La présentation commence par un aperçu du Budget principal des dépenses 2019-2020 et se termine par des renseignements sur les dépenses et un exposé des tendances pour les principaux secteurs de programme.

[Français]

À la deuxième diapositive, on constate que le Budget principal des dépenses du ministère pour 2019-2020 sera d’environ 12,3 milliards de dollars, soit une augmentation nette d’environ 2,9 milliards de dollars — ou de 32 p. 100 — comparativement au Budget principal des dépenses de l’an dernier. Une partie de cette augmentation peut s’expliquer par l’exclusion d’un crédit d’exécution du budget pour chacun des investissements prévus dans le budget de 2019, pour un total de 700 millions de dollars, principalement pour le maintien du principe de Jordan. L’inclusion des initiatives du budget de 2019 dans le Budget principal des dépenses permet un meilleur alignement entre le budget fédéral et les cycles du budget des dépenses. De plus, elle permet au ministère d’avoir accès au financement dès que le Conseil du Trésor approuve l’initiative. La diapositive 3 explique les autres éléments importants qui contribuent à l’augmentation du Budget principal des dépenses, notamment : 481,5 millions de dollars pour le Plan d’action pour l’approvisionnement en eau potable et le traitement des eaux usées des Premières Nations et pour améliorer la surveillance et l’analyse de l’eau potable des collectivités dans les réserves; 357,9 millions de dollars pour les services de santé non assurés des Premières Nations et des Inuits; et, enfin, 324,8 millions de dollars pour des projets d’infrastructure dans les collectivités autochtones. Comme l’indique la diapositive 4, les dépenses de Services aux Autochtones Canada pour le Budget principal des dépenses de 2019-2020 se composent d’environ 9,6 milliards de dollars, soit 78 p. 100 en paiements de transfert; environ 2 milliards de dollars, soit 16 p. 100 en frais de fonctionnement; environ 700 millions de dollars, soit 6 p. 100 en crédits d’exécution du budget; et, enfin, environ 5,6 millions de dollars pour les besoins relatifs aux immobilisations.

[Traduction]

La diapositive 5 aligne ce financement sur le cadre ministériel des résultats.

À la diapositive 6, j’aimerais signaler que, à compter de 2019-2020, Services aux Autochtones Canada mettra en œuvre une nouvelle subvention appelée « Subvention à l’appui de la nouvelle relation financière avec les Premières Nations régies par la Loi sur les Indiens ». Cette nouvelle subvention contribuera à faire progresser l’autodétermination en améliorant la prévisibilité et la souplesse du financement pour les Premières Nations admissibles en fonction de critères d’admissibilité élaborés conjointement. Plus de 80 Premières Nations reçoivent déjà du financement grâce à ce nouveau mécanisme.

Enfin, à partir de la diapositive 7, nous vous fournissons des renseignements sur les tendances des dépenses dans les principaux secteurs de programme. Ces grands secteurs de programme — à savoir l’éducation, le développement social, l’infrastructure et la santé des Premières Nations et des Inuits — représentent environ 10,9 milliards de dollars, ou 89 p. 100, des 12,3 milliards de dollars prévus au Budget principal des dépenses.

Monsieur le président, ce budget des dépenses nous permettra de continuer de prendre des mesures concrètes pour répondre aux besoins des peuples autochtones.

En 2019-2020, Services aux Autochtones Canada s’attachera, en partenariat avec les peuples autochtones, aux cinq domaines prioritaires suivants, qui sont interreliés : les enfants et les familles, l’éducation, la santé, l’infrastructure et la prospérité économique.

J’ai hâte de discuter de ce budget, avec l’aide de mes collègues, et de répondre à vos questions concernant ma présentation. Merci.

[Français]

Le président : Merci, monsieur.

Nathalie Bertrand, sous-ministre adjointe et dirigeante principale des finances, Services ministériels, Infrastructure Canada : Merci, monsieur le président, d’avoir invité Infrastructure Canada à venir vous parler aujourd’hui. Je m’appelle Nathalie Bertrand et je suis dirigeante principale des finances et sous-ministre adjointe des Services ministériels au ministère. Je suis accompagnée aujourd’hui par ma collègue Nathalie Lechasseur, directrice générale, Intégration des programmes.

Je suis ici aujourd’hui pour vous parler du Budget principal des dépenses de notre ministère, qui a été déposé à la Chambre des communes le 11 avril 2019. Pour soutenir la mise en œuvre des programmes d’Infrastructure Canada, y compris le plan Investir dans le Canada, le ministère demande un total de 10,7 milliards de dollars en autorisations dans son Budget principal des dépenses de 2019-2020.

Le plan Investir dans le Canada a été conçu pour octroyer des fonds en deux phases. La première phase est axée sur la réparation et la remise en état d’infrastructures existantes liées au transport en commun, à l’approvisionnement en eau, au traitement des eaux usées et au logement social. Cette phase va bon train partout au pays. La phase suivante est la phase à long terme dans le cadre de laquelle l’ensemble des 36 programmes ont été lancés.

Les investissements effectués au titre du plan sont administrés par 14 ministères et organismes fédéraux, chargés chacun de mettre en œuvre des programmes et d’octroyer des fonds pour permettre aux collectivités de tout le pays de relever les défis auxquels elles sont confrontées et de profiter des possibilités qui se présentent. En ce qui concerne Infrastructure Canada, toutes les provinces et tous les territoires ont officiellement signé leur entente bilatérale, et des projets sont régulièrement approuvés. À ce jour, près de 20 milliards de dollars de financement ont été engagés dans le cadre du plan Investir dans le Canada et des milliers de projets sont en cours d’un océan à l’autre.

[Traduction]

Le ministère demande plus de 9,5 milliards de dollars en paiements de transfert par l’entremise de ses programmes.

Bon nombre des programmes du ministère distribuent des fonds en fonction des demandes de remboursement présentées par les provinces et les territoires. Cela assure la surveillance et la protection de l’argent des contribuables.

Le ministère demande aussi 5,2 milliards de dollars en subventions et contributions, comme près de 1,5 milliard de dollars pour le Fonds pour l’infrastructure de transport en commun; plus de 1 milliard de dollars pour le volet Projets nationaux et régionaux du Nouveau Fonds Chantiers Canada, un des anciens programmes du ministère; plus de 854 millions de dollars provenant du Fonds pour l’eau potable et le traitement des eaux usées; et près de 100 millions de dollars pour le Fonds d’atténuation et d’adaptation en matière de catastrophes.

[Français]

Le ministère cherche également à fournir aux provinces et territoires plus de 572 millions de dollars pour des projets soumis aux fins de financement dans le cadre de la phase à long terme de son plan, et plus de 289 millions de dollars de financement pour remplir des engagements pris par PPP Canada et qui relèvent maintenant d’Infrastructure Canada.

Dans le cadre du Budget principal des dépenses de 2019-2020, le ministère demande également 4,3 milliards de dollars pour le Fonds de la taxe sur l’essence, qui est un poste législatif. Le Fonds de la taxe sur l’essence est une source de financement permanente, prévisible et indexée qui permet aux municipalités de remettre en état et de construire des infrastructures publiques essentielles. Dans le cadre du FTE, plus de 2,2 milliards de dollars sont versés en deux paiements annuels aux provinces, aux territoires et aux associations municipales, qui, à leur tour, versent ces fonds aux municipalités afin d’appuyer les priorités locales en matière d’infrastructure.

Dans le budget de 2019, le gouvernement du Canada s’est engagé à allouer un complément ponctuel de 2,2 milliards de dollars au Fonds de la taxe sur l’essence fédéral, ce qui est indiqué dans le Budget principal des dépenses de 2019-2020.

[Traduction]

Le ministère s’est engagé à tenir les Canadiens au courant des résultats de nos investissements. Nous le faisons par divers moyens. Notre géocarte en ligne donne de l’information sur les projets qui ont été annoncés à l’échelle du gouvernement fédéral dans le cadre du plan Investir dans le Canada. Notre tableau de données montre les fonds remboursés à nos partenaires de projet à ce jour. Le portail des données ouvertes fournit de l’information sur l’avancement des projets qu’Infrastructure Canada a appuyés dans le cadre de ses programmes. Nous avons affiché sur notre site web les ententes bilatérales signées, avec la lettre de mandat du ministre. Nos décisions de financement sont annoncées à l’occasion d’événements spéciaux et dans les médias sociaux. Des affiches sont installées sur les chantiers financés par le gouvernement fédéral pour montrer aux Canadiens où nous investissons dans leur collectivité.

Le ministère continuera de rendre compte des résultats de nos investissements à mesure que nous réaliserons les programmes et dégagerons le financement par où passe l’avenir du Canada.

De plus, le ministre de l’Infrastructure et des Collectivités doit présenter aux médias une mise à jour sur les progrès du plan Investir dans le Canada dans les prochains jours. Le rapport d’étape sera présenté aux Canadiens en même temps et affiché sur le site web du ministère.

[Français]

J’aimerais terminer en vous parlant brièvement du versement du financement fédéral à nos partenaires. Infrastructure Canada travaille en étroite collaboration avec ses partenaires en vue de trouver des moyens de verser plus rapidement les fonds pour que les paiements soient effectués à mesure que les travaux de construction avancent. C’est ce qu’on appelle la facturation progressive.

Cela signifie que nous verserons des paiements aux provinces et aux territoires en fonction de l’information fournie au ministère sur l’avancement des projets, ce qui permettra un meilleur alignement du versement des fonds et des activités de construction. En passant à un modèle de financement à facturation progressive, le paiement initial sera effectué plus tôt. Au fil du temps, elle devrait permettre d’en arriver à une meilleure harmonisation des investissements fédéraux et de la comptabilité avec les activités économiques qui ont lieu en temps réel.

Merci de nous avoir invités à vous parler aujourd’hui de l’important travail qu’Infrastructure Canada effectue au nom des Canadiens. Nous serons heureuses de répondre à vos questions.

Le président : Merci, madame.

[Traduction]

Evan Siddall, président et premier dirigeant, Société canadienne d’hypothèques et de logement : Merci. Je suis heureux d’être accompagné de Lisa Williams, notre chef des finances, pour répondre à vos questions et vous présenter ces quelques observations préliminaires.

Comme vous le savez, la SCHL, la Société canadienne d’hypothèques et de logement, pilote la mise en œuvre de la Stratégie nationale sur le logement du Canada, qui vise à soustraire plus de 530 000 ménages canadiens aux besoins de logement et à réduire l’itinérance de moitié. En tant qu’organisme national du logement du Canada, nous aimerions viser plus haut. Nous avons récemment annoncé un objectif audacieux et ambitieux : d’ici 2030, nous voulons que tous les Canadiens aient un logement abordable répondant à leurs besoins.

L’abordabilité du logement préoccupe les Canadiens. La prospérité économique a propulsé la demande de logement au Canada, et certains Canadiens sont laissés pour compte. S’il survenait une autre crise financière, les marchés de l’habitation inquiéteraient beaucoup plus d’entre nous. Comme l’a déclaré Matthew Desmond dans son ouvrage Evicted, qui lui a valu un prix Pulitzer, « Sans abri stable, tout s’écroule ».

[Français]

Les Canadiens dépendent de la SCHL, et nous avons fait de l’abordabilité du logement une priorité. Nous avons développé une vaste stratégie qui inclut les éléments suivants : utiliser des technologies de l’information afin d’automatiser les tâches répétitives, travailler avec de nouveaux partenaires non traditionnels, être à l’avant-garde de l’innovation révolutionnaire en matière de logement et jouer le rôle de facilitateur national afin de faire le lien entre les défis et les solutions en matière de logement.

Nous avons également restructuré la SCHL afin d’éliminer les cloisonnements qui ont étouffé la collaboration et l’innovation pendant trop longtemps et d’améliorer les services commerciaux et à but non lucratif que nous fournissons à nos clients, les Canadiens. Je crois que notre société est mieux placée que jamais pour produire des résultats et réaliser nos aspirations.

La Stratégie nationale sur le logement, dans le cadre de laquelle le gouvernement fédéral s’est engagé à faire des investissements à long terme, constitue un élément essentiel de notre stratégie sur l’abordabilité.

La Stratégie nationale sur le logement est financée par des crédits du Parlement et inclut de nouveaux investissements annoncés dans le budget de 2019. Dans quelques minutes, Mme Williams donnera les détails de nos demandes de fonds pour 2019-2020.

[Traduction]

En premier lieu, cependant, j’aimerais faire le point sur les récentes mesures visant à renforcer la Stratégie nationale sur le logement et à fournir de nouveaux outils pour soutenir les fournisseurs de logement communautaire.

Le mois dernier, notre ministre, l’honorable Jean-Yves Duclos, a annoncé le projet de loi sur la Stratégie nationale sur le logement, qui favorisera la réalisation progressive du droit à un logement convenable selon le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, dont le Canada est signataire.

À titre de conseillère du gouvernement en politiques de logement, la SCHL a joué un rôle clé dans la rédaction de ce projet de loi, qui fait partie de la loi d’exécution du budget de 2019 et qui adopte une approche du logement fondée sur les droits de la personne. Enchâsser dans la loi le besoin d’une stratégie nationale sur le logement, c’est reconnaître la valeur d’une approche coordonnée, d’une vision commune et d’une véritable responsabilisation. C’est un moyen de rapprocher le logement et les droits.

À cette fin, la nouvelle loi obligerait les futurs gouvernements à adopter et à maintenir une Stratégie nationale sur le logement qui prioriserait les besoins des plus vulnérables, et obligerait à présenter régulièrement des rapports au Parlement sur les progrès réalisés vers l’atteinte des objectifs et des résultats de la stratégie. Elle établirait également un conseil national du logement, formé de représentants aux expériences variées, y compris des personnes ayant vécu l’expérience des besoins en matière de logement et de l’itinérance, pour conseiller le ministre sur des enjeux liés à la Stratégie nationale sur le logement, dans le but d’améliorer les résultats en matière de logement.

Enfin, il créerait un poste de défenseur fédéral du logement, appuyé par la Commission canadienne des droits de la personne, pour cerner les problèmes systémiques auxquels font face les personnes et les ménages appartenant à des groupes vulnérables. Ce défenseur présenterait un rapport annuel avec recommandations au ministre, qui le déposerait au Parlement.

Par ailleurs, la loi d’exécution du budget de 2019 créera l’incitatif à l’achat d’une première propriété, qui aidera directement le groupe de base des Canadiens que j’ai mentionnés tantôt et qui sont laissés pour compte. Comme dans le cas du projet de loi sur la Stratégie nationale sur le logement, la SCHL a joué un rôle clé de conseiller du gouvernement pour cet incitatif et met la dernière main aux détails du programme au moment même où nous nous parlons.

Ce programme a été soigneusement ciblé pour aider les jeunes acheteurs, sans pour autant annuler les progrès que nous, le ministère des Finances du Canada et le Bureau du surintendant des institutions financières, avons réalisés grâce à des mesures pour empêcher les emprunts excessifs et limiter l’inflation du prix des maisons.

À 1,25 milliard de dollars, la portée et la taille du programme font qu’il n’y aura essentiellement aucune incidence sur le prix des logements. Nous ne pensons pas que l’effet de l’incitatif pour l’achat d’une première propriété dépassera 0,02 à 0,04 p. 100, en moyenne, à l’échelle du pays. La limitation de l’inflation du prix des maisons permettra de garder le logement plus abordable, beaucoup plus que certains des autres changements de politique et de réglementation qui ont été proposés par les défenseurs, comme l’assouplissement du test de résistance hypothécaire de l’assurance hypothécaire ou la prolongation de 25 à 30 ans de la période maximale d’amortissement.

Avant de céder la parole à Mme Williams, j’aimerais rappeler au Comité que la SCHL offre aussi un important financement hypothécaire par l’entremise de programmes d’assurance prêt hypothécaire et de titrisation. Ces activités ne nécessitent pas de crédits parlementaires, mais elles sont néanmoins au cœur de notre rôle en tant qu’institution financière d’importance systémique dont le mandat est d’appuyer la stabilité financière du Canada.

Je vous remercie de m’avoir donné l’occasion de faire cette brève déclaration préliminaire, monsieur le président. Je passe maintenant la parole à Mme Williams.

Lisa Williams, chef des finances, Société canadienne d’hypothèques et de logement : J’aimerais prendre quelques minutes de votre temps pour décrire les demandes de financement de la SCHL pour chacune des trois responsabilités correspondantes selon notre cadre ministériel des résultats.

En commençant par l’Aide pour les besoins en matière de logement, une responsabilité essentielle, la SCHL fournit du financement pour améliorer l’accès à des logements abordables pour les Canadiens ayant des besoins de logement, y compris les Autochtones, les personnes ayant des besoins spéciaux ou distincts et certains groupes vulnérables.

Comme l’indique le Budget principal des dépenses, la SCHL prévoit des dépenses budgétaires d’un peu plus de 2 milliards de dollars pour ce travail en 2019-2020. Ce chiffre représente une diminution budgétaire totale d’environ 48 millions de dollars, ou 2,3 p. 100, du Budget principal des dépenses de l’année précédente. Le gros de la diminution s’explique par l’expiration des initiatives du Fonds consacré à l’infrastructure sociale annoncées dans le budget de 2016. Le programme Investissements dans le logement abordable a également pris fin, tout comme un certain nombre d’ententes de financement à long terme pour le logement social.

Ces diminutions et d’autres encore sont partiellement compensées par un financement de près de 357 millions de dollars pour de nouveaux accords de partenariat avec les provinces et les territoires dans le cadre de la Stratégie nationale sur le logement. Nous demandons aussi une augmentation de financement de 6 millions de dollars pour maintenir l’abordabilité des logements communautaires administrés par le gouvernement fédéral.

Notre deuxième responsabilité fondamentale est le financement de l’habitation, dans le cadre de laquelle la SCHL dégage du financement pour une gamme d’initiatives liées au logement. Le financement demandé pour ces activités continue de croître et a plus que doublé au cours du présent exercice, pour dépasser 502 millions de dollars. Près de 180 millions de dollars de cette augmentation sont destinés au Fonds national de co-investissement pour le logement, qui offre des prêts et des subventions pour aider d’autres ordres de gouvernement et des organismes privés et sans but lucratif à construire et à réparer des logements abordables.

En outre, l’initiative Financement de la construction de logements locatifs recevra 58 millions de dollars de plus au cours de l’exercice, ce qui comprend les nouveaux fonds annoncés dans le budget de 2019. Le FCLL offre des prêts à faible coût aux municipalités et aux promoteurs immobiliers pendant les phases les plus précoces et les plus risquées du développement.

La SCHL demande aussi plus de 14 millions de dollars pour la première année de l’incitatif à l’achat d’une première propriété, auquel M. Siddall a fait allusion dans ses observations. À compter de septembre, les acheteurs admissibles qui auront la mise de fonds minimale requise pour un emprunt hypothécaire assuré pourront financer une partie de l’achat d’une propriété au moyen d’un prêt hypothécaire avec participation de la SCHL.

[Français]

Le Budget principal des dépenses prévoit également un financement pour le Fonds d’aide aux fournisseurs de prêts hypothécaires avec participation, en vue d’aider les fournisseurs existants à élargir la portée de leurs activités et d’encourager de nouveaux acteurs à entrer sur le marché. En ce qui concerne notre troisième responsabilité essentielle, le savoir-faire en matière de logement et le développement du potentiel, nous demandons près de 136 millions de dollars au titre du Budget principal des dépenses, une augmentation d’environ 14 p. 100 par rapport à l’exercice précédent. Ces fonds permettront à la SCHL de continuer d’élargir ses activités de recherche, d’analyse de données et d’élaboration de politiques.

[Traduction]

En 2019-2020, nous investirons 4,4 millions de dollars de plus dans la recherche sur le logement et 14 millions de dollars dans d’autres initiatives de la Stratégie nationale sur le logement, y compris des initiatives de recherche et de données sur le logement de la SCHL et l’approche du logement fondé sur les droits de la personne.

Monsieur Siddall et moi-même serons heureux de répondre aux questions du Comité. Merci.

Le président : Merci.

Honorables sénateurs, avant de passer aux questions, je dois dire que nous avons eu une collaboration exceptionnelle ce matin pour le respect de la règle des cinq minutes. Nous allons donc continuer de surveiller cette règle. Il ne fait pas de doute que vous allez demander le deuxième tour.

La sénatrice Marshall : Merci beaucoup à tous nos témoins de leur présence.

Ma première question s’adresse à la SCHL. Je m’intéresse au programme d’achat d’une première propriété, étant donné le coût qu’il représentera pour le gouvernement au cours des trois prochaines années. Je sais que vous en êtes aux stades de la planification, mais je constate, d’après votre déclaration préliminaire, que vous y avez déjà travaillé.

Pourriez-vous nous en toucher un mot? Je m’intéresse à la question dans la perspective du risque, parce qu’il s’agit d’une somme considérable, et que vous compterez sur les acheteurs pour la rembourser à un certain moment donné.

Pouvez-vous nous parler un peu de ce programme?

M. Siddall : Certainement. Si vous voulez que je réponde, je vais le faire.

Les conditions particulières du programme attendent toujours la décision finale du ministre des Finances, mais je peux vous dire que le gouvernement du Canada investira effectivement avec un propriétaire-occupant par l’entremise de la SCHL, et que ce propriétaire-occupant n’aura pas à porter le fardeau financier d’un emprunt de ce montant. Dans le cas d’une maison de revente, ce serait 5 p. 100 de la valeur de la propriété. Dans le cas d’une maison neuve, ce serait 10 p. 100 ou jusqu’à 10 p. 100. L’objet est de stimuler la construction neuve, car nous voulons que l’offre modère le prix des logements.

L’emprunt est remboursé au moment de la vente de la maison ou lorsque le propriétaire-occupant le souhaite. C’est essentiellement ce qui se produit. Ce n’est pas comme un emprunt, où il y a une date limite pour le remboursement. Nous sommes en train de déterminer la durée du prêt. Mais c’est ainsi que cela fonctionnerait.

La sénatrice Marshall : Donc, tous ces postes seront presque comme une créance pour le propriétaire. Est-ce ainsi que cela sera comptabilisé par la SCHL?

M. Siddall : Encore une fois, c’est une chose que nous sommes en train d’examiner. Il pourrait s’agir d’un prêt hypothécaire de second rang enregistré sur le titre comme tel, mais ce ne sera pas un prêt hypothécaire ou un prêt au sens d’un remboursement obligatoire.

La sénatrice Marshall : Donc, lorsque le propriétaire vend sa maison, que se passe-t-il si elle a perdu de sa valeur?

M. Siddall : Alors, nous partageons la perte.

La sénatrice Marshall : Vous partagez la perte avec le propriétaire. Je suppose que la SCHL a dû emprunter ces fonds, mais le propriétaire devra-t-il payer des intérêts sur le programme?

M. Siddall : Il n’y aura pas d’intérêt.

La sénatrice Marshall : Il y a quelques domaines qui m’intéressent. Parlez donc de l’évaluation des risques. Si je ne me trompe pas, le vérificateur général s’est déjà penché sur l’évaluation des risques effectuée par la Société canadienne d’hypothèques et de logement, et je croyais qu’il avait dit qu’elle devrait être plus robuste. Ce programme ferait-il l’objet d’une évaluation des risques quelconque?

M. Siddall : En fait, j’étais à un comité de la Chambre des communes la semaine dernière, avec le vérificateur général, qui n’a pas relevé de lacunes importantes dans nos pratiques de gestion des risques. Il a recommandé des améliorations, que nous sommes en train de faire, madame. Dans ce programme particulier, la SCHL est mandataire du gouvernement du Canada. Donc, toutes les pertes que nous subirons nous seront remboursées par voie de crédits parlementaires. La SCHL comme telle n’assume aucun risque. Il y a un risque inhérent au programme, dans la mesure où les prix baisseraient; et, bien sûr, le programme a un coût, que le gouvernement du Canada supportera.

La sénatrice Marshall : Le programme aura-t-il donc été soumis à un processus d’évaluation des risques? Oui, n’est-ce pas?

M. Siddall : Bien sûr.

La sénatrice Marshall : Et que dire de la surveillance de la SCHL? J’ai déjà lu que, selon le Fonds monétaire international, la SCHL devrait être soumise à une supervision indépendante. Avez-vous quelque chose à dire à ce sujet?

M. Siddall : La SCHL fait l’objet d’une supervision indépendante et, chaque année, le ministre responsable de la SCHL — en l’occurrence, l’honorable Jean-Yves Duclos — reçoit un rapport du Bureau du surintendant des institutions financières. La supervision selon la loi est l’affaire du ministre des Finances. Et en fait, le ministre des Finances et le ministre responsable de la SCHL s’en remettent à un rapport de supervision du BSIF.

La sénatrice Marshall : Pourriez-vous nous renseigner sur l’initiative appelée Financement de la construction de logements locatifs? Je crois que l’idée a germé à l’occasion du budget de 2017 ou de 2018. Or, le ministre, dans son budget, a en quelque sorte fait le point sur l’initiative et indiqué que l’objectif était de construire 14 000 nouvelles unités. On a toutefois donné l’impression qu’il n’y en avait que 500 jusqu’à présent. Pourriez-vous nous en parler aussi?

M. Siddall : Nous croyons que nous allons atteindre notre objectif. En fait, le gouvernement du Canada s’est de nouveau engagé, dans le budget de 2019, à élargir considérablement la portée de ce programme en le prolongeant de neuf ans et en le bonifiant à hauteur de 10 milliards de dollars. Comme vous pouvez l’imaginer, il faut plus d’une journée pour lancer la construction d’un immeuble locatif, et il y a un certain décalage entre le début du programme, la prise en compte des demandes, l’obtention des fonds et le début des travaux.

Donc, ce que vous voyez, sénatrice, c’est simplement un écart temporel. À notre avis, nous parviendrons toujours à atteindre ces objectifs.

La sénatrice Marshall : D’accord. De plus, dans le document budgétaire, le ministre a indiqué qu’un groupe d’experts sur le logement serait mis sur pied. Pourriez-vous faire le point à ce sujet?

M. Siddall : Je pense que cette initiative relève du ministre des Finances. C’est le groupe d’experts qu’il a mis sur pied avec la province de la Colombie-Britannique. Je sais qu’il y a des discussions en cours.

La sénatrice Marshall : La SCHL y participerait-elle?

M. Siddall : La SCHL va fournir un soutien administratif à ce groupe et je participerai peut-être aux travaux, si le ministre me le demande, mais la décision lui revient.

La sénatrice Marshall : J’ai terminé. J’aimerais passer au deuxième tour, s’il vous plaît.

Le sénateur Pratte : J’ai une question de suivi à poser à la SCHL au sujet de l’incitatif à l’achat d’une première propriété. Je crois comprendre que vous en avez examiné l’incidence sur le marché du logement. Vous avez mentionné plus tôt que la société d’État veut stimuler la construction de nouveaux logements et de nouvelles maisons, n’est-ce pas?

M. Siddall : Oui, monsieur.

Le sénateur Pratte : Ce programme aura donc pour effet d’augmenter l’offre et la demande, ai-je raison?

M. Siddall : Je dirais que c’est le cas, oui.

Le sénateur Pratte : Alors, comment arrivez-vous à estimer que l’impact sur les prix sera extrêmement limité?

M. Siddall : Quelques facteurs entrent en ligne de compte, sénateur. Le premier est la taille du programme par rapport à celle du marché hypothécaire et du marché immobilier en général; 1,25 milliard de dollars, c’est beaucoup d’argent sur deux ans et demi et c’est une aide importante pour les personnes marginalisées. Toutefois, dans le contexte d’un grand marché immobilier, c’est une approche très chirurgicale à un problème particulier. En outre, cela est limité non seulement par la taille du programme, mais aussi par le revenu des personnes.

Le revenu du ménage ne peut dépasser 120 000 $, et le rapport prêt-revenu — le montant du prêt par rapport à ce revenu — ne peut pas être plus de quatre fois plus élevé. Il y a un certain nombre de raisons qui expliquent que la demande est un peu limitée par le concept sous-tendant le programme.

Le sénateur Pratte : Y a-t-il ailleurs dans le monde un programme qui se rapproche de celui-ci?

M. Siddall : Il n’y en a pas de tout à fait comparable, non. Il y a quelques années, il y avait un programme du genre au Royaume-Uni, mais il était différent. Bien que les modalités de notre programme n’aient pas encore été établies par le ministre des Finances, elles étaient assorties d’un rendement asymétrique. Je ne me souviens pas des chiffres, sénateur, mais disons que si l’autorité a retenu 10 p. 100 de la valeur de la maison, elle recevrait plus de 10 p. 100 du produit si les prix augmentaient. Bien sûr, c’est un concept très différent; il s’agit d’une caractéristique qui pourrait faire beaucoup varier l’impact du programme et la demande pour le programme lui-même.

Le sénateur Pratte : Merci beaucoup.

[Français]

Ma prochaine question s’adresse aux représentants d’Infrastructure Canada. Tout d’abord, si vous le pouvez, donnez-moi des nouvelles du pont Champlain.

Mme Bertrand : L’ouverture à la circulation du pont Champlain est prévue pour la fin juin, comme prévu. Nous sommes en pourparlers avec notre partenaire, SSL, pour les dernières discussions en ce qui a trait aux pénalités et aux délais encourus. Cependant, l’ouverture à la circulation est toujours prévue pour la fin juin.

Le sénateur Pratte : Il n’y aura pas de nouveaux délais?

Mme Bertrand : Aucun délai supplémentaire n’est prévu pour l’instant.

Le sénateur Pratte : En raison des inondations qui se sont produites en Ontario, au Québec et au Nouveau-Brunswick, il y a eu plusieurs déclarations sur la disponibilité de fonds fédéraux, notamment de la part d’Infrastructure Canada et d’autres, qui pourraient servir aux municipalités qui ont été touchées ou dans le but de prévenir des dégâts futurs. Il y a un peu de confusion quant à la disponibilité de ces fonds, notamment dans le cas du Québec, car le gouvernement du Québec n’a pas conclu d’entente relativement au fonds contre les catastrophes naturelles. Pourriez-vous donner un aperçu de ce qui est disponible pour les municipalités qui auraient des besoins particuliers à la suite des récents événements ou pour prévenir de futures inondations?

Nathalie Lechasseur, directrice générale, Intégration des programmes, Opérations des programmes, Infrastructure Canada : Le Fonds d’atténuation et d’adaptation en matière de catastrophes compte jusqu’à présent 26 projets. Le ministère est en contact avec les provinces affectées pour voir comment il peut les aider à soumettre leur projet le plus tôt possible pour qu’il puisse les étudier.

Le sénateur Pratte : Ce programme est conçu pour des initiatives de réparation ou de prévention?

Mme Lechasseur : Des programmes de prévention.

Le sénateur Pratte : Dans le cas d’une municipalité qui a subi des dégâts importants et qui voudrait faire financer la réparation d’une digue, cela pourrait-il correspondre aux critères du programme?

Mme Lechasseur : Il faudrait étudier le cas plus en détail.

Le sénateur Pratte : Quelle est la position du gouvernement du Québec, qui n’a pas signé d’entente?

Mme Lechasseur : Comme le programme est fondé sur le mérite, chacun vient proposer son projet, il n’y a nul besoin d’une entente spécifique. Une fois le projet sélectionné, on peut conclure une entente avec le gouvernement du Québec.

Le sénateur Pratte : Merci.

[Traduction]

La sénatrice Eaton : Ma question s’adresse à la Société canadienne d’hypothèques et de logement et à Services aux Autochtones Canada. Vous avez dit, dans votre discours que, d’ici 2030, tout le monde au Canada pourra se payer un logement qui répond à ses besoins et qu’il s’agit d’un droit à un logement adéquat reconnu dans le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels.

Ce qui m’inquiète, c’est qu’au nord du 60e parallèle au Canada, entre juillet 2016 et mars 2019, 280 000 demandes ont été présentées — il y a toujours une grave pénurie de logements dans l’Arctique, au Nunavut, à Iqaluit, au Nunavik. Je me pose des questions, car vos estimations à Services aux Autochtones Canada sont passées de 12 milliards de dollars à 14 milliards de dollars pour construire 300 maisons par année alors qu’il faudrait probablement en construire près de 3 000 en très peu de temps. Il ne semble pas que les choses changent ou progressent. Chaque année, vous comparaissez devant nous et votre réponse est toujours la même. Avec ce nouveau Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, le PIDESC, puis le nouvel objectif que vous aspirez à atteindre, soit que d’ici 2030, tout le monde au Canada pourra se payer un logement qui répond à ses besoins, est-ce que ce sera le cas pour nos frères Inuits dans le Nord? Auront-ils des logements adéquats d’ici 2030 dans le Nord? Au rythme où nous progressons à l’heure actuelle, ce ne sera pas le cas.

M. Siddall : En ce qui concerne l’objectif que « nous » aspirons à atteindre, c’est l’objectif que vise la Société canadienne d’hypothèques et de logement. Cela n’implique pas Services aux Autochtones Canada.

La sénatrice Eaton : Cela ne touche-t-il pas tous les Canadiens? Les Inuits ne sont-ils pas des Canadiens?

M. Siddall : C’est certainement notre objectif, sénatrice.

La sénatrice Eaton : C’est ce que je vous demande.

M. Siddall : Je veux répondre au nom de la SCHL. Je veux simplement m’assurer que la question, dans la mesure où elle concerne les services aux Autochtones, peut nous être adressée comme il se doit. C’est nul doute un objectif ambitieux, une sorte d’idéal, sénatrice.

La sénatrice Eaton : C’est un idéal depuis 2016, mais on semble faire du surplace.

M. Siddall : Je comprends. À la SCHL, en ce qui concerne les habitants du Nord, nous avons en fait doublé les fonds, mais nous n’avons qu’un petit programme pour aider les gens dans les réserves.

La sénatrice Eaton : Je ne parle pas des Autochtones dans les réserves. Je parle des communautés inuites.

M. Siddall : Je le comprends. Dans nos ententes avec les provinces et les territoires, nous avons pris des arrangements pour les gens du Nord. Nous avons accordé la priorité aux dépenses dans le Nord. Je ne vous dis pas que nous avons tous les outils pour le faire...

La sénatrice Eaton : Ni tous les fonds.

M. Siddall : Ni tous les fonds. Je reconnais que notre objectif est un objectif non financé. Or, si nous ne faisons rien pour l’atteindre, nous ne l’atteindrons pas. C’est exactement en réponse à la préoccupation légitime que vous avez au sujet des gens au nord du 60e parallèle.

La sénatrice Eaton : Les représentants de Services aux Autochtones Canada ont-ils quelque chose à ajouter?

M. Thoppil : Sénatrice Eaton, le logement des Inuits relève de Relations Couronne-Autochtones et non de Services aux Autochtones Canada. Cela étant dit, à ma connaissance, les crédits prévus pour le logement inuit sont fonction de la capacité des Inuits détenant des intérêts dans le cadre des revendications territoriales de pouvoir livrer efficacement le produit. La capacité de 300 unités est essentiellement justifiée par leur capacité de livrer la marchandise dans une certaine période.

La sénatrice Eaton : Avec tout le respect que je vous dois, je vous suggère de lire le rapport du Sénat lorsqu’il sera publié, parce que ce n’est pas ce que nous avons entendu lorsque nous avons traversé l’Arctique. Ils ne reçoivent aucune aide du Sud. Merci.

Le sénateur Klyne : Je souhaite la bienvenue aux témoins. Ma question s’adresse à Services aux Autochtones Canada. Si nous en avons le temps, je reviendrai à la Loi sur la salubrité de l’eau potable des Premières Nations. Ma question porte sur les 83, maintenant 85, avis à long terme sur la qualité de l’eau potable qui ont été levés. Il semble que nous soyons en bonne voie d’éliminer ces avis dans les réserves.

Combien d’autres réserves font l’objet d’avis à long terme sur la qualité de l’eau potable et quand aurez-vous terminé?

M. Thoppil : Merci, sénateur, de votre question. Il nous en reste encore 50 ou 51 et nous sommes sur la bonne voie. Nous nous réunissons périodiquement. Nous avons un tableau de bord qui nous permet de suivre tous les avis au pays et nous rencontrons périodiquement le premier ministre pour voir où nous en sommes. Selon la dernière évaluation, nous réaliserons la vision du gouvernement qui consiste à lever tous les avis à long terme sur la qualité de l’eau potable d’ici 2021.

Le gouvernement a également investi, dans le budget de 2019, des fonds supplémentaires pour des projets liés à l’eau afin de veiller à englober les systèmes dont nous n’avons pas connaissance et qui sont probablement vulnérables et à haut risque afin d’aider le gouvernement à atteindre cet objectif.

Le sénateur Klyne : D’accord. C’est une bonne nouvelle. Si un système est irréparable, c’est-à-dire lorsqu’il faut un nouveau système, en a-t-on établi un qui peut être transféré d’une province à l’autre? Il y a quelque 600 réserves. J’ai probablement entendu 10 versions différentes de systèmes efficaces. Quels sont ceux que vous utilisez?

M. Thoppil : Ce qu’il y a d’intéressant au sujet de la gravité de la situation, c’est que la solution en matière d’eau n’est pas la même partout au pays, parce que la qualité de l’eau et la solution pour remédier aux problèmes qui y sont liés varient selon le territoire, la région. Vous aurez peut-être besoin d’une solution différente, selon les composants ou les éléments qui se trouvent dans la source d’eau. Il est difficile de normaliser quand la concentration d’un ingrédient quelconque varie, qu’il s’agisse, par exemple, de faibles concentrations de mercure. C’est là qu’il faut calibrer. C’est vraiment une situation qui se définit sur place avec des experts.

Parfois, c’est facile si, par exemple, la réserve des Premières Nations se situe près d’une municipalité et que nous n’avons peut-être pas besoin de tirer parti de cette ressource locale en eau, mais simplement de prolonger le réseau municipal qui existe déjà. Nous l’avons fait à certains endroits. Dans d’autres cas, c’est très complexe et dans d’autres, on essaie simplement de recruter et de retenir les services d’un expert en eau qui est disposé à rester dans une collectivité éloignée pour assurer le fonctionnement du système. Tout dépend vraiment du problème à l’origine de l’avis à long terme concernant la qualité de l’eau.

Le sénateur Klyne : Je comprends tout à fait cela et je pense que le tableau que vous avez brossé de la situation est exact. Il y en a qui disent qu’ils pourraient même nettoyer les effluents au moyen d’un système de fracturation ou de toute autre méthode que vous pourriez leur présenter. Je vais peut-être leur demander de s’adresser à votre ministère.

M. Thoppil : Bien sûr, faites, je vous en prie.

La sénatrice Andreychuk : J’ai un certain nombre de questions, mais je vais me limiter, car, je dois malheureusement être au Sénat pour remplir une obligation.

En ce qui concerne votre programme de la SCHL, vous dites, dans votre série de points, qu’il a été soigneusement ciblé pour aider les jeunes acheteurs de propriété sans pour autant annuler les progrès que nous et nos partenaires fédéraux avons réalisés grâce à des mesures visant à prévenir les emprunts excessifs et à limiter l’inflation du prix des maisons.

Nous entendons dire que les jeunes acheteurs ont maintenant l’impression de ne pas pouvoir entrer sur le marché, et qu’ils ne souscrivent pas à des prêts excessifs parce qu’ils n’en ont pas la possibilité. On nous dit aussi que l’inflation, qui est passée par un creux, est en train de remonter. Certes, vous offrez ce programme, mais le marché n’est pas uniquement influencé par les jeunes acheteurs, car il y a aussi les acheteurs étrangers et les types de logements construits. Sur quoi vous êtes-vous fondé pour imaginer ce programme destiné à remettre les choses à plat pour les jeunes acheteurs, étant donné que tout Canadien aspire notamment à posséder son chez-soi, sous une forme ou une autre.

M. Siddall : Il est difficile d’acheter une maison, parce que les prix des maisons sont élevés. Le problème se limite à peu près à ce constat.

La Banque du Canada a fait un certain travail, tout comme nous, mais elle a publié des ouvrages expliquant comment les ménages partout au pays arrivent à contracter un emprunt qui correspond à quatre fois leur revenu et comment le test de résistance hypothécaire a permis de calmer la situation.

Le Bureau du surintendant des institutions financières a, comme on le sait, étendu le test de résistance hypothécaire aux prêts hypothécaires non assurés au moyen de la ligne directrice B-20, en vigueur depuis janvier 2017. En octobre 2016, à l’initiative du ministre des Finances, ce test qui ne s’appliquait avant qu’aux prêts hypothécaires de moins de cinq ans, s’applique maintenant aux prêts de cinq ans.

L’activité a ralenti et a ralenti considérablement chez les jeunes acheteurs de propriété qui ne veulent plus s’endetter lourdement. Le secteur de l’immobilier est porté à blâmer le test de résistance pour cela. En fait, les prix des maisons sont élevés. Bien sûr, les acteurs du secteur immobilier s’en plaignent, parce qu’ils vont perdre de l’argent. Toutefois, les propriétaires sont exposés à des situations financières graves et risquent d’emprunter plus de 80 fois leur mise de fonds avec le programme de prêts hypothécaires assurés.

Le test de résistance a eu l’effet souhaité en limitant la souscription des emprunteurs très endettés. Nous voulions instaurer un programme qui ne rétablissait pas cet effet de levier, mais qui permettait aux gens d’entrer sur le marché. Pour ce faire, le gouvernement du Canada assume un peu de risque en marge sur les prix des maisons en participant à la mise de fonds. C’est le concept sous-jacent.

La sénatrice Andreychuk : Tout cela était fondé sur l’hypothèse que l’inflation des prix des maisons ne se poursuivrait pas au même rythme. Elle a ralenti, en effet, mais il semble qu’elle accélère de nouveau. Comment en tiendrez-vous compte dans votre programme?

M. Siddall : Nous ne savons pas si les prix augmentent ou diminuent. Le programme ne se fonde pas sur la hausse ou la baisse des prix des maisons. Il s’est passé des choses depuis non seulement la mise en œuvre du test de résistance, mais aussi de certaines activités dans les provinces — le gouverneur de la Banque du Canada a prononcé un discours hier dans lequel il a dit qu’en plus des modifications réglementaires, il y a eu sur les marchés un changement de sentiment ou de psychologie qui a eu une grande incidence et que les prix des maisons ont considérablement diminué à Vancouver et à Toronto.

À ma connaissance, rien n’indique que l’inflation a recommencé d’augmenter comme vous dites, sénatrice, mais notre décision d’offrir un incitatif à l’achat d’une première maison n’est pas fonction de ce facteur. En fait, pendant longtemps, les prix des maisons ont progressé plus rapidement que les revenus et l’IPC, et nous essayons simplement de combler l’écart qui s’est creusé.

La sénatrice Andreychuk : Je ne m’étendrai pas sur le sujet, mais je tiens à dire que toute la planification semble viser Toronto, Vancouver et les grands centres, mais la situation touche les jeunes acheteurs de propriétés ailleurs aussi, et il me semble que vous devez en tenir compte. Ils ne font pas face aux mêmes pressions et leurs attentes et leur revenu ne sont pas les mêmes; pourtant, d’une façon ou d’une autre, ils subissent les contrecoups d’un programme qui semble avoir été conçu pour les grands centres urbains.

M. Siddall : Permettez-moi de vous rassurer, sénatrice...

La sénatrice Andreychuk : On va peut-être m’interrompre et vous aussi.

Le président : Veuillez répondre en 20 secondes.

M. Siddall : Le programme a été conçu pour tous les marchés du logement au Canada, sénatrice, pas seulement pour ceux de Toronto et Vancouver, je peux vous l’assurer.

[Français]

Le sénateur Forest : Dans le cadre de votre programme de construction de logements locatifs sociaux, qui est capitalisé à hauteur de 18 millions de dollars, je comprends qu’il y a la dimension de l’achat d’une première maison. Toutefois, il y a un phénomène relativement aux personnes âgées, c’est-à-dire que, lorsqu’on construit des logements locatifs, les coûts réservés à la porte deviennent importants. La SCHL y participe, mais les municipalités, les provinces, le milieu doivent également contribuer d’une manière assez importante.

Une des réalités à laquelle on doit faire face, c’est que les besoins sont souvent calculés pour une personne âgée qui vit seule, mais c’est de plus en plus difficile de rentabiliser un projet avec des logements de trois pièces et demie, par exemple. Si on décide de construire un édifice locatif avec des logements de quatre pièces et demie, donc pour deux personnes, on réussit à baisser quelque peu le coût de la porte.

Y a-t-il des mesures compensatoires en place? Il arrive souvent que, dans un couple de personnes âgées, lorsqu’une des deux personnes meurt, la personne qui reste n’arrive pas à garder sa maison. Il y a donc des besoins immenses pour cette clientèle.

Y a-t-il des mesures d’atténuation qui sont prévues dans votre programme de logements locatifs sociaux?

[Traduction]

M. Siddall : Permettez-moi de répondre dans ma langue, j’irai ainsi plus vite.

Je suppose que vous faites allusion à l’initiative Financement de la construction de logements locatifs lorsque vous parlez du « programme ». Est-ce bien cela, monsieur? D’accord.

Cette mesure vise à stimuler l’offre de logements locatifs dans l’ensemble du marché. Elle ne cible pas les populations vulnérables. En revanche, dans la Stratégie nationale sur le logement, il y a un programme de quelque 13 milliards de dollars appelé le Fonds national de co-investissement dans des logements destinés à des personnes désireuses d’aider des populations vulnérables. La priorité serait accordée à des groupes vulnérables, y compris les aînés, puis nous prendrions des mesures d’adaptation en conséquence. Je pense que ce programme serait davantage indiqué.

[Français]

Le sénateur Forest : Auparavant, la SCHL était très active dans le secteur des projets de logements sociaux. Elle s’est, depuis, retirée. Par rapport à votre fonds d’initiative de 18 millions, est-ce que la SCHL redevient plus active dans l’aide aux communautés et aux municipalités pour la construction de ce type de logements, qui sont très difficiles à viabiliser? Si on souhaite qu’il y ait une adéquation entre les besoins et les logements que l’on construit, les plus petits logements deviennent très difficiles à viabiliser. Est-ce que, grâce à ces nouveaux fonds, la SCHL pourra venir en aide aux collectivités?

[Traduction]

M. Siddall : En effet, nous travaillons beaucoup plus étroitement avec les provinces, les territoires et les municipalités au sujet des nouveaux logements à offrir. Le Fonds national de co-investissement pour le logement exige la participation d’une province ou d’une municipalité pour que le projet soit admissible. Ce que nous essayons de faire, c’est de mieux coordonner les efforts à l’échelle du pays grâce à ce programme.

[Français]

Le sénateur Forest : C’est assez succinct comme information. Si vous pouviez nous envoyer plus d’informations sur le programme d’aide aux provinces, aux territoires et aux municipalités relativement à ce type de besoin, je vous en saurais gré.

[Traduction]

M. Siddall : Nous le ferons.

[Français]

Le sénateur Forest : J’ai une question rapide au sujet des catastrophes. Il y a une somme de 50 millions de dollars allouée au Fonds d’atténuation et d’adaptation en matière de catastrophes. Pourtant, en même temps, on interdit la relocalisation de collectivités entières.

Comment définissez-vous une collectivité entière? Est-ce que ce fonds peut servir si on ne déménage qu’une partie d’un quartier?

Mme Lechasseur : Le fonds est accessible pour les mesures de prévention. À ce compte, on ne pourrait pas déplacer la population. D’autres programmes sont disponibles, même si ce n’est pas à Infrastructure Canada. Je pense que certaines provinces ont déjà mis en place des programmes de ce genre.

Le sénateur Forest : Même si le directeur parlementaire du budget disait qu’on ne peut pas utiliser les crédits disponibles pour aider ces collectivités à faire de la prévention, Infrastructure Canada n’a pas de programme visant à s’assurer qu’elles soient moins atteintes lors des prochaines catastrophes?

Mme Lechasseur : Nos programmes sont basés sur les résultats, et le résultat visé, c’est vraiment la prévention. On vous a parlé du Fonds d’atténuation et d’adaptation en matière de catastrophes. Il y a aussi le plan Investir dans le Canada, où l’entente est déjà signée, et les provinces peuvent accorder la priorité à leurs projets par rapport à cette entente.

[Traduction]

Le sénateur Boehm : Merci à tous les témoins que nous avons entendus aujourd’hui. J’aimerais revenir rapidement sur une question posée par le sénateur Klyne à propos des avis à long terme sur la qualité de l’eau potable. Ma question s’adresse à vous, monsieur Thoppil.

Je me demande si vous tenez compte des événements climatiques actuels, les inondations, par exemple, dans votre échéancier quand vous aspirez à atteindre l’objectif d’ici 2021.

M. Thoppil : Merci, sénateur, de votre question. Comme je l’ai mentionné plus tôt en réponse à la question du sénateur Klyne, nous reconnaissons qu’il y a des systèmes d’approvisionnement en eau qui ne sont actuellement pas visés par des avis à long terme sur la qualité de l’eau potable, mais qui pourraient l’être. Le nombre de ces systèmes pourrait augmenter en raison des changements climatiques, selon les répercussions sur le territoire. Encore une fois, c’est la raison pour laquelle le gouvernement a décidé de redoubler d’efforts pour s’assurer de respecter l’objectif en affectant plus de 100 millions de dollars supplémentaires pour l’eau.

Le sénateur Boehm : Merci. J’ai une question pour Mme Bertrand. En ce qui concerne la somme de 5,2 milliards de dollars que vous demandez, j’aimerais beaucoup savoir quel est votre temps d’absorption. J’ai écouté attentivement vos commentaires sur la facturation progressive des travaux de construction qui seraient effectués, mais les provinces tardent aussi à approuver les projets d’infrastructure. Il y a peut-être un manque d’intérêt dans certaines provinces à l’égard de certains des projets.

Comment planifiez-vous cela? En fait, quel est l’échéancier et envisagez-vous des montants non utilisés importants?

Mme Bertrand : Je vous remercie de votre question, monsieur le sénateur.

Je suis heureux d’annoncer que pour 2018-2019, l’année qui vient de se terminer, 97 p. 100 de nos crédits seront des contributions. Nous aurons dépensé pratiquement chaque dollar qui nous a été attribué sous forme de contribution dans des projets d’infrastructure. Cela est attribuable à plusieurs facteurs : à une surveillance accrue de notre part, à une collaboration accrue avec les provinces et à l’introduction de la facturation progressive. Trois provinces se sont inscrites à la facturation progressive : l’Alberta, la Saskatchewan et la Nouvelle-Écosse. Nous avons déboursé 5,2 millions de dollars jusqu’à maintenant dans le cadre de cette nouvelle approche.

Nous avons déjà signé des accords de contribution pour l’année prochaine, qui représentent une grande part de l’argent attribué aux infrastructures. Nous continuons de travailler en étroite collaboration avec nos collègues provinciaux pour nous assurer que tout l’argent sera dépensé selon les attributions destinées aux infrastructures.

Le sénateur Boehm : Il n’y a donc pas de crédits inutilisés importants?

Mme Bertrand : Non, nous ne prévoyons pas de crédits inutilisés importants.

La sénatrice Duncan : Je remercie les témoins d’être ici aujourd’hui.

J’aimerais attirer l’attention de Services aux Autochtones Canada sur la présentation d’Anna Banerji au caucus ouvert des sénateurs du 14 avril. Il était question de la vaccination contre le RSV des enfants inuits. Il y a 400 bébés au Nunavut qui bénéficieraient de ce vaccin.

Le problème, c’est que le coût de la vaccination est de 3 millions de dollars. Le problème, évidemment, relève du ministre de la Santé. Toutefois, lorsque ces bébés tombent malades, ils sont évacués du territoire vers les hôpitaux du Québec, du Manitoba ou de l’Ontario. Il faut alors payer le coût du transport pour évacuation sanitaire à même les 357,9 millions de dollars de votre ministère.

J’aimerais voir le détail de ces dépenses quelque part, avoir un peu plus d’information. Je tiens à attirer votre attention là-dessus, parce que j’ai mentionné cela à Santé Canada, dont c’est la responsabilité et les gens se disputent : « C’est à vous. Non, c’est à eux. » C’est un problème important et cela fait partie des dépenses budgétaires.

Ma question précise est la suivante : la santé et l’éducation sont des compétences provinciales, mais le fédéral offre du financement dans le cadre de Services aux Autochtones Canada. Une autre priorité de votre ministère est l’éducation. Vous avez dit que plus de 180 Premières Nations bénéficiaient de programmes d’éducation gérés par les Premières Nations. Le financement de l’éducation s’applique-t-il uniquement aux réserves ou s’applique-t-il aux Premières Nations qui ont conclu des ententes-cadres définitives, comme au Yukon, où elles ont la capacité de puiser dans le budget de l’éducation, mais où la négociation est très compliquée?

Ma question précise est la suivante : le financement de l’éducation est-il réservé uniquement aux Autochtones vivant dans les réserves, ou est-il accessible à d’autres Premières Nations — à celles qui ont conclu des accords sur des revendications territoriales?

M. Thoppil : Je vais demander à mon collègue, Paul Pelletier, directeur général de l’Éducation, de répondre à votre question, madame la sénatrice.

Paul Pelletier, directeur général de l’Éducation, Services aux Autochtones Canada : Je vous remercie de votre question. Une petite somme d’argent est prévue. Les Premières Nations autonomes qui ont cette disposition dans leur accord peuvent avoir accès à ce fonds. Il y en a un nombre limité et, au fur et à mesure que les discussions et les négociations se poursuivront, il faudra surveiller les sommes issues de ce nouveau financement qui seront versées aux écoles élémentaires et secondaires.

La sénatrice Duncan : Ce que je vous ai entendu dire, si je ne m’abuse, c’est que, oui, ces sommes pourront être versées. Puis-je simplement avoir l’assurance que cette question de la vaccination contre le RSV a bel et bien été entendue, s’il vous plaît?

M. Pelletier : Oui.

La sénatrice Duncan : Merci.

[Français]

La sénatrice Forest-Niesing : Ma question s’adresse au représentant de Services aux Autochtones Canada et elle rejoint en partie le sujet dont vous venez de traiter, plus particulièrement l’accès aux études postsecondaires par les Autochtones, les Inuits et les Métis.

Ma question sera longue, car la mise en contexte est importante. Je vais utiliser mon temps de parole pour vous parler d’un exemple précis en vous demandant, à la toute fin, si vous êtes réceptif à la possibilité d’examiner le problème d’une perspective différente.

Quand j’étais présidente du Conseil des régents à l’Université de Sudbury, nous cherchions des moyens de rejoindre davantage les jeunes Autochtones de la région et plus particulièrement ceux du Grand Nord de l’Ontario, près de la baie James. Le recteur de l’époque a eu l’idée formidable de reconnaître que, trop souvent et depuis toujours, nous traitions le problème d’accès aux études postsecondaires pour les peuples autochtones d’un point de vue strictement financier. Ce faisant, en attribuant des bourses ou en octroyant des fonds supplémentaires, on croyait combler les lacunes importantes que présente la population autochtone dans nos institutions d’enseignement postsecondaire.

Sa brillante idée a été de reconnaître que le problème était plus fondamental que cela et était plutôt relatif à la rétention de ces jeunes personnes. Même si certains pouvaient bénéficier d’une bourse pour aller à l’université, ils se retrouvaient à vivre dans un milieu urbain pour la première fois de leur vie, ils quittaient leur terre pour la première fois de leur vie ainsi que leur communauté, ils voyaient un autobus de la ville pour la première fois, un guichet automatique, et cetera. Cela représente tout de même un choc culturel important pour une jeune personne autochtone, ce qui pouvait expliquer pourquoi ces jeunes éprouvaient plus de difficulté à répondre aux exigences des études postsecondaires, qui sont déjà un défi pour tous nos jeunes Canadiens.

Après que cette lacune a été identifiée, un beau programme dont je suis très fière a été créé dans la communauté de Moose Factory, afin d’offrir des cours en personne — pas des cours de qualité moindre par Internet ou autrement, mais en personne, dans une salle de classe. Les cours ont été livrés dans la communauté de Moose Factory et ont donné lieu à des réussites absolument extraordinaires.

L’université a eu accès à une subvention qui, malheureusement, n’a pas été reconduite. On a dû cesser d’offrir ces cours, au grand désarroi de ceux qui cheminaient vers un diplôme universitaire. C’est épouvantable comme résultat.

Voici maintenant ma question : dans l’élaboration de vos programmes et des mesures ayant trait à la rétention des jeunes Autochtones au sein de nos institutions d’enseignement postsecondaire, tenez-vous compte de la possibilité de livrer les programmes de manière à assurer une meilleure réussite pour ces jeunes étudiants dont les besoins sont si différents?

M. Thoppil : Merci de la question. Je suis tout à fait d’accord avec vous. La solution est plus complexe que de simplement accorder du financement. C’est vraiment plus complexe, étant donné les facteurs que vous avez mentionnés.

[Traduction]

Nous avons un programme qui offre ce que j’appellerais des services de soutien intégrés précisément pour cette raison. Pour eux, il ne s’agit pas seulement de la capacité de payer les frais de scolarité, mais aussi du soutien culturel, du fait qu’ils sont loin de leur famille, de leurs proches — la collectivité éloignée, les milieux urbains, l’accès possible à un guérisseur autochtone, que ce soit à l’université ou dans un pavillon. Tout cela est très important pour que l’étudiant se sente réconforté, qu’il se sente bien accueilli et qu’il reste. C’est cela, le problème.

Je vais demander à Paul d’expliquer un peu mieux ce que nous faisons.

M. Pelletier : Vous avez tout à fait raison. La possibilité d’offrir aux étudiants des expériences postsecondaires dans la collectivité d’une manière adaptée à leur culture est très bénéfique et fructueuse.

Le financement dont nous parlons ici vise davantage les étudiants qui vont à l’école, mais, comme mon collègue l’a mentionné, lorsqu’on travaille avec les Inuits, les Métis et les Premières Nations, et qu’on prévoit en quelque sorte la distribution de ces fonds destinés aux études postsecondaires, on porte un intérêt spécial à la prestation de services de soutien intégrés qui répondent aux besoins uniques de ces élèves pendant qu’ils sont à l’école, on travaille même avec les élèves avant qu’ils arrivent à l’école pour les préparer à ce qui les attend : on voit à l’organisation de services d’orientation pour qu’ils sachent simplement où aller faire l’épicerie, comment cela fonctionne, comment obtenir du financement, comment trouver ses cours. Il faut des interventions adaptées aux Autochtones, si l’on souhaite recruter ces étudiants et faire en sorte qu’ils n’abandonnent pas.

Il ne s’agit donc pas seulement des frais de scolarité et des livres : il y a une panoplie d’autres mesures de soutien. C’est là l’orientation de ce programme pour l’avenir.

La sénatrice Marshall : Ma question s’adresse à M. Thoppil de Services aux Autochtones Canada. Pourriez-vous nous parler du fait que cette année, dans votre budget...

Le président : Madame la sénatrice Marshall, puis-je vous interrompre, s’il vous plaît?

La sénatrice Marshall : Oui.

Le président : Encore une fois, j’ai fait une erreur, et je donnerai d’abord la parole au sénateur Neufeld.

Le sénateur Neufeld : En fait, je n’ai qu’une question, ou peut-être qu’il y en aura une autre.

Concernant le financement pour les Premières Nations dans les réserves de la maternelle à la 12e année, je vais prendre l’exemple de la Colombie-Britannique. Il y a beaucoup de Premières Nations qui ont leurs propres écoles dans les réserves, mais elles ne reçoivent pas le même montant de financement par élève que dans le système scolaire public hors réserve. Sommes-nous près du but? Peut-être que oui. Peut-être l’avons-nous déjà atteint, je ne le sais pas. Mais sommes-nous près du but et avons-nous l’intention de nous rapprocher de ce qui se fait dans le système scolaire public hors réserve?

M. Pelletier : Je vous remercie de votre question. À la suite des investissements consentis dans le budget de 2016 pour le primaire et le secondaire, nous avons travaillé avec l’Assemblée des Premières Nations à l’élaboration d’un nouveau cadre stratégique qui reposait en grande partie sur un financement durable, prévisible et comparable.

À partir de ce cadre, nous avons, depuis le 1er avril, mis en place une formule de financement provisoire qui offre aux écoles des Premières Nations des niveaux de financement comparables pour tous les aspects que les provinces incluent, afin que les élèves qui fréquentent les écoles des Premières Nations dans les réserves reçoivent le même niveau de financement que s’ils étaient hors réserve.

Cela dit, certaines Premières Nations examinent la question de plus près parce qu’elles ont des besoins et des circonstances uniques et qu’il n’y a pas adéquation avec les priorités des provinces et nous poursuivrons ces discussions.

En outre, au-delà de la comparabilité provinciale, nous finançons la maternelle à temps plein. Ce n’est pas le cas dans toutes les provinces. Nous investissons également dans la langue et la culture.

Le sénateur Neufeld : Je suppose que je peux en déduire que si je me rends dans la Première Nation de Fort Nelson et que je me renseigne à savoir si celle-ci reçoit un financement comparable à celui du système scolaire public de la collectivité de Fort Nelson — et d’autres endroits un peu éloignés —, ils me répondraient : « Oui, nous recevons le même financement ».

M. Pelletier : Je ne dirais pas cela. Lorsqu’on regarde tout ce qu’une province finance, dans certains cas, la Première Nation pourrait à juste titre penser que le niveau de financement n’est pas suffisant ou que la façon dont une province détermine, par exemple, le degré d’isolement géographique, n’aboutit pas à des comparaisons justes. Mais il est possible d’utiliser la formule et d’arriver à un montant qui soit adéquat en fonction de l’emplacement géographique particulier, même s’il y a des écoles provinciales qui peuvent être dans la même bande. Toutes les Premières Nations ne seront pas nécessairement d’accord pour dire qu’elles obtiennent un niveau de financement équitable en raison de ces détails techniques.

Les discussions se poursuivent. Pour l’avenir, nous encourageons fortement les ententes régionales en matière d’éducation, qui permettent aux collectivités de définir leurs priorités. S’il y a des lacunes, comment peuvent-elles travailler avec nous et les conseils scolaires provinciaux pour établir la responsabilité et le rôle de chacun et jeter les bases d’un système qui permettra à l’avenir de mieux cerner la façon de combler les lacunes?

La sénatrice Marshall : Ma question s’adresse à M. Thoppil, de Services aux Autochtones Canada. Je sais que lorsque vous avez témoigné lors de réunions précédentes, nous avons parlé des indicateurs de rendement. Votre ministère demande une augmentation importante du financement cette année. C’est presque trois fois plus qu’il y a deux ans, en 2017-2018.

Pourriez-vous nous donner une idée de la façon dont vous allez vérifier le rendement? Avez-vous établi des indicateurs de rendement pour tous ces nouveaux programmes? Si l’on regarde ce qui se passe ailleurs, beaucoup de ministères et d’organismes ne réussissent même pas à atteindre un rendement de 50 p. 100 selon leurs indicateurs, et dans certains cas, les résultats ne sont même pas disponibles. Il y a toutes sortes de problèmes.

Comment allez-vous vous assurer que les objectifs de vos programmes seront atteints? Je parle des avis sur la qualité de l’eau potable, par exemple. Où en êtes-vous dans l’établissement d’indicateurs et comment allez-vous vous assurer d’atteindre vos objectifs?

M. Thoppil : Merci de votre question, monsieur le sénateur. Étant donné l’importance de l’écart socioéconomique entre les Autochtones et les non-Autochtones, ces indicateurs font partie intégrante du ministère en quelque sorte, car ils permettent de démontrer l’écart entre les deux.

Depuis 2016, nous avons délaissé la norme selon laquelle le ministère établissait des indicateurs de rendement en réaction aux observations du vérificateur général sur les indicateurs socioéconomiques, pour nous diriger vers l’élaboration conjointe de ces indicateurs avec les peuples autochtones.

Comme Paul l’a dit, nous travaillons à l’élaboration conjointe de ces indicateurs de rendement, programme par programme, dans le cadre d’une réforme.

La sénatrice Marshall : Cela a-t-il été fait ou êtes-vous en train de le faire? Parce que, l’année prochaine, vous allez devoir produire un rapport en fonction de ces indicateurs de rendement. Sont-ils établis ou est-ce quelque chose qui est en train de se faire?

M. Thoppil : Par exemple, en Colombie-Britannique, où nous venons tout juste de signer l’entente tripartite sur l’éducation, il y a un ensemble très solide d’indicateurs de rendement, plus solide qu’auparavant, malgré le fait que les membres des Premières Nations se plaignaient d’être responsables du fardeau redditionnel. Lorsqu’elles ont compris qu’elles allaient désormais avoir le contrôle de leur éducation en Colombie-Britannique, en fait, elles ont répondu en ajoutant des indicateurs de rendement afin de pouvoir — cela fait partie de la prise de responsabilité que suppose l’accès à l’autodétermination — être témoins d’une amélioration qualitative proportionnelle aux sommes reçues.

Nous sommes actuellement en pourparlers avec d’autres provinces pour reproduire le modèle de la Colombie-Britannique à l’échelle du pays, alors c’est un bon exemple de projet qui, en cours d’élaboration, se fonde sur un précédent. Ce processus se répète pour chacun des programmes.

Nous avions déposé — je pense que je l’ai déposé ici ou c’était peut-être devant le comité de la Chambre — notre plan des programmes, mais nous avons élaboré un projet de cadre national de résultats mesurables conformes aux ODD de l’ONU, qui permet également au Canada de respecter ses obligations à l’égard des peuples autochtones en la matière. Les Premières Nations sont également consultées sur le plan décisionnel.

La sénatrice Marshall : Mais ces indicateurs, ils sont numériques, ils ne sont pas seulement subjectifs. Ils ont bien un aspect quantitatif, n’est-ce pas?

M. Thoppil : Ce sont des cibles fermes. Vous pouvez en consulter quelques-unes dans le plan ministériel déposé récemment au Parlement par le ministère.

La sénatrice Marshall : Nous devrions donc voir des résultats l’année prochaine grâce au financement approuvé cette année, ou est-ce que ce sera l’année d’après?

M. Thoppil : Cela dépend du cycle de collecte des données. Certains résultats ne seront pas disponibles dans un délai d’un an; d’autres sont pluriannuels, c’est selon la source des données.

La sénatrice Marshall : Merci.

Le sénateur Pratte : J’ai une question plus technique. Je regarde ces graphiques qui montrent l’évolution des dépenses en éducation, en infrastructure et en développement social. Pour 2019-2020, il y a un montant lié à la nouvelle relation financière. Pourriez-vous nous expliquer comment cela fonctionne? Apparemment, vous savez ou il a été convenu que, dans le cadre de cette nouvelle relation financière, certaines sommes seraient consacrées à l’éducation et d’autres sommes iraient à l’infrastructure. Pourriez-vous nous expliquer le rôle de cette nouvelle relation financière?

M. Thoppil : Certainement, sénateur. Je vous remercie de votre question.

En vertu des principes de la nouvelle relation financière, nous cherchons à régler trois aspects : la suffisance, la souplesse et la prévisibilité. C’est ce que demandent les Premières Nations.

En ce qui concerne la suffisance, vous verrez, en réponse aux observations de la sénatrice Marshall sur l’augmentation importante du budget de Services aux Autochtones Canada, que SAC essaie de réaliser ses objectifs quant à la suffisance tout au long du cycle budgétaire fédéral. Dans les budgets fédéraux actuels, ce sont 21,3 milliards de dollars qui sont alloués aux peuples autochtones.

Pour ce qui est de la souplesse et de la prévisibilité, les Premières Nations souhaitaient planifier sur un horizon plus long qu’une période de 1 an ou de 5 ans, alors elles ont prévu une période de 10 ans.

Ensuite, en ce qui a trait à la souplesse, nous avons dit que nous ne paralyserions pas les efforts des Premières Nations qui sont en mesure de démontrer une saine gouvernance fondée sur une norme financière appropriée. Dans les cas où la qualité de la gouvernance serait adéquate — selon la définition d’une institution financière autochtone —, on passerait de la contribution, ou du financement de base, à la subvention. Ainsi, cette offre de subvention de 10 ans a été faite à plus de 100 Premières Nations admissibles et environ 80 ou 82 d’entre elles l’ont acceptée. Cette subvention vaut pour les services des programmes de base, pas pour tout. Elle comprend, par exemple, certains fonds ciblés pour financement de propositions — on ne parle pas d’infrastructure ciblée — comme l’éducation, un certain nombre de programmes de santé, l’infrastructure, le fonctionnement et l’entretien, soit des éléments qui reviennent chaque année.

D’autres années, lorsqu’on examinera le Budget principal des dépenses de Services aux Autochtones Canada — nous espérons voir les Premières Nations accepter en nombre de plus en plus grand l’offre de subvention — on verra de plus en plus, dans la section des paiements de transfert du Budget principal des dépenses, une conversion en contribution des montants initialement octroyés. Cela se produira lorsque les Premières Nations démontreront leur capacité de gouverner, comme le fait n’importe quelle municipalité du même niveau. Elles devraient donc avoir la même marge de manœuvre que ce type de gouvernement pour affecter les montants de financement selon leurs priorités locales.

Le sénateur Pratte : Cela veut-il dire que, par exemple, si je regarde les 554 millions de dollars réservés à l’éducation en 2019-2020, les Premières Nations, dans le cadre de la nouvelle relation financière... En fait, ce montant serait plus théorique, parce que les Premières Nations pourraient décider que leur priorité est davantage l’infrastructure ou le développement social que l’éducation, et elles pourraient utiliser cet argent à ces fins?

M. Thoppil : C’est comme pour n’importe quel autre ordre de gouvernement au pays. Si elles décident, en fonction de leurs électeurs, que c’est leur priorité, alors elles devraient avoir la même capacité d’investir davantage dans l’éducation, si c’est là ce que souhaite la collectivité, et moins dans l’infrastructure, selon leur propre jugement, et ce, par opposition à la situation qui prévalait avant la réconciliation, alors que les bureaucrates et le ministère définissaient ce qu’elles devaient dépenser et comment elles devaient le faire.

Le sénateur Pratte : Et elles doivent rendre des comptes à leur peuple?

M. Thoppil : Elles doivent rendre des comptes à leurs citoyens, en fonction d’un plan communautaire élaboré à partir de cibles précises. Ensuite, à la fin de l’année, elles doivent montrer à la collectivité où l’argent est allé et quelles cibles ont été atteintes.

Le sénateur Klyne : Le sénateur Boehm m’avait préparé le terrain au cas où je voudrais revenir à la Loi sur la salubrité de l’eau potable des Premières Nations, mais j’y reviendrai si nous en avons le temps.

Pour ce qui est de l’infrastructure et du logement, vous avez plus de 6 800 logements et de lots — vous avez fait des progrès importants à cet égard, en terminant 57 p. 100 d’entre eux. Sont-ils tous dans les réserves?

M. Thoppil : Nos pouvoirs sont limités aux réserves.

Le sénateur Klyne : À ce chapitre, il vous en reste probablement encore près de 3 000 à construire, avez-vous songé à inclure une stratégie de développement des compétences ou de renforcement des capacités?

M. Thoppil : Je vous remercie de votre question. Nous travaillons de concert avec l’Assemblée des Premières Nations à l’élaboration d’une stratégie du logement durable qui tienne compte de la façon dont les collectivités pourraient tirer parti de leurs compétences locales dans un but de durabilité.

Certaines Premières Nations ont fait des progrès en la matière et utilisent effectivement les projets comme moyens de former leurs jeunes, de sorte que, lors de la mise en œuvre des projets, ils ne dépendent pas de l’entrepreneur.

Nous voyons donc un certain nombre d’éléments de développement économique positifs, si je peux m’exprimer ainsi — comme la formation professionnelle des jeunes — dans le cadre du programme d’infrastructure. Je pense que l’objectif est d’essayer d’étendre ces pratiques à tout le pays.

Le sénateur Klyne : Je suis heureux de l’entendre. Merci.

[Français]

Le sénateur Forest : J’ai une question d’ordre plutôt existentiel. J’ai passé 25 ans à l’autre bout du pipeline. On faisait des demandes pour des programmes et des projets. Les besoins sont immenses dans toutes les collectivités du Canada.

Quand je regarde le Fonds des petites collectivités, par exemple, et que je vois que le rapport du directeur parlementaire du budget indique que 40 p. 100 des crédits alloués n’ont pas été dépensés, j’ai du mal à m’expliquer cela. Je vois une différence de près de 6 p. 100 entre les 212 millions de dollars alloués dans le cadre du Nouveau Fonds Chantiers Canada — volet Infrastructures provinciales-territoriales – Fonds des petites collectivités, qui est très recherché, et une réduction du budget à près de 200 millions de dollars cette année.

Est-ce en raison du fait que le programme est trop restrictif? Comment expliquez-vous que c’est plutôt l’inverse et que l’on manque de fonds? Avec le Nouveau Fonds Chantiers Canada, et particulièrement avec le Fonds des petites collectivités, c’est comme s’il y avait trop de fonds pour les besoins. Mon instinct me dit qu’il y a des besoins immenses. Est-ce qu’on est trop restrictif dans les objectifs ou dans le type de projet qu’on doit présenter? Est-ce que le fonctionnement est complexe en raison des trois ordres de gouvernement, municipal, provincial ou territorial et fédéral? Je sais qu’il y a eu des délais, mais, pour une fois, le Québec n’était pas trop en retard pour signer son entente. Comment expliquez-vous, avec l’expérience que vous avez, qu’on en arrive à ce résultat?

Mme Bertrand : Merci de la question. Les chiffres qui vous sont présentés sont des chiffres établis à partir de programmes. Donc, les gouvernements annoncent la mise sur pied de certains programmes avec une certaine limite de fonds, et ces programmes sont établis pour une certaine période de temps. Ce que vous voyez là, ce n’est pas nécessairement à propos de la demande, mais plutôt de l’argent disponible au total.

Si on revient à mon commentaire précédent, pour l’année 2018-2019, tous les fonds reçus ont été dépensés. Les fonds sont disponibles; est-ce que la demande va au-delà de certains des programmes? Dans certains cas, peut-être que oui. On est quand même limité par un certain montant fixe de fonds disponibles qui sont octroyés de manière différente selon le programme. Parfois, ce sont des programmes méritoires; parfois, ce sont des programmes qui sont mis en place selon la population.

Le sénateur Forest : Le Fonds des petites collectivités est-il méritoire?

Mme Bertrand : Non.

Le sénateur Forest : Si on dépose un projet et qu’il est approuvé par la province, est-il automatiquement financé?

Mme Lechasseur : Je dois préciser que le Fonds des petites collectivités représente des allocations identifiées par les provinces et territoires. Celles-ci donnent la priorité à leurs projets et nous les soumettent, et nous les approuvons. Dans le Fonds des petites collectivités, ce que vous voyez, ce sont les dépenses. L’argent a été alloué à des projets.

Le sénateur Forest : J’ai une dernière question. Si elle est trop complexe, vous n’avez pas besoin d’y répondre aujourd’hui. J’imagine qu’il y aura un bilan, puisque c’était un élément stratégique important du gouvernement actuel. Ces crédits sont investis par le gouvernement fédéral, mais si je prends l’exemple du Fonds des petites collectivités, une partie des fonds est investie par les municipalités, qui entament souvent les projets, et par le gouvernement provincial ou territorial. Allez-vous faire une évaluation de l’impact global de ce que les différents programmes du Fonds Chantiers Canada ont pu générer comme activité économique?

Mme Bertrand : Nous travaillons en étroite collaboration avec Statistique Canada, entre autres, pour aider à déterminer l’impact économique de ces programmes et leur impact sur la création d’emplois.

Le sénateur Forest : C’est important. Notre comité a produit un excellent rapport sur les infrastructures, et ce pourrait être une annexe importante à ce rapport.

Le président : Si vous croyez pouvoir nous fournir des informations supplémentaires, madame Bertrand, vous pouvez le faire par l’intermédiaire de notre greffière.

[Traduction]

La sénatrice M. Deacon : Je vous remercie de vos exposés et de votre présence aujourd’hui.

Plus tôt, ma collègue, la sénatrice Eaton, a posé une question à M. Siddall au sujet de l’ambition de 2030, et je dois dire que le terme clé dans cette déclaration était « tout le monde ». Je comprends un peu mieux l’administration, faute d’un autre terme, dont c’est le rôle. Je pense que ce serait une grande ambition collective à réaliser.

Quelque chose qui m’a frappé en révisant cela au cours de la dernière heure et demie, une chose dont vous avez parlé tout à l’heure, c’est-à-dire la restructuration du travail et l’intention de votre organisation d’éliminer le cloisonnement par le double emploi et la répétition. L’innovation s’en trouvait peut-être un peu freinée.

J’aimerais que vous nous en disiez un peu plus à ce sujet. Nous rencontrons différents groupes représentant des intérêts communs bien que différents, et cela semble poser un défi en ce moment, utiliser les meilleures personnes efficacement et de la meilleure façon. Qu’avez-vous fait ou que pensez-vous faire?

M. Siddall : Je vous remercie de votre question, monsieur le sénateur. Nous avons annoncé une stratégie dans notre plan directeur, d’abord dans le plan stratégique que nous avons publié l’automne dernier, puis, en groupe, nous avons décidé de restructurer la société pour appuyer cette stratégie en mettant les clients, donc les Canadiens, au cœur de notre mission.

Nous avions une organisation par fonction. Dans ce cadre, nous avions une entreprise d’aide au logement et une entreprise commerciale, qui comprenait la titrisation et l’assurance. Ensuite, nous avons eu un groupe d’orientation stratégique. Nous avons éliminé cette division entre nos entreprises commerciales et non commerciales. Il y a une fonction opérationnelle et une fonction de fabrication — fabrication avec un petit « f », s’entend —, qui visent à assurer une prestation plus uniforme de nos services, donc plus efficiente.

Nous avons beaucoup investi dans les TI : nous voulons automatiser nos processus pour les rendre plus rapides. Ensuite, il y a ce que nous appelons une entreprise de solutions clients — qui regroupe différents groupes d’intervenants potentiels avec lesquels nous traitons, comme les prêteurs, les fournisseurs de logements, les provinces, les territoires, et cetera —, qui se charge de la recherche dans le but de développer une approche axée sur l’expérience client.

À la suite de cette réorganisation, depuis le début d’avril, les deux tiers de nos employés ont un nouveau superviseur. Il s’agit d’une réorganisation très importante de la société.

La sénatrice M. Deacon : Tout cela est donc très récent. Vous en êtes toujours aux balbutiements à ce stade. Il semble que vous ayez adopté une structure plus familiale, selon ce que vous avez dit au début de votre intervention.

Y a-t-il des indicateurs précoces qui vous font croire que vous êtes sur la bonne voie? Ou bien vous croyez être sur la bonne voie, mais ce sont les politiciens de notre côté qu’il vous reste à convaincre? Je suis curieux.

M. Siddall : Il est un peu trop tôt pour le dire. Littéralement, les gens tentent encore de trouver leur chemin jusqu’à la DPF, par exemple.

La sénatrice M. Deacon : Ici.

M. Siddall : Qui serait ravie de répondre à une question, j’ajouterais.

Un indicateur, et c’est anecdotique... Alors que nos différentes activités fonctionnaient séparément, nos agents des services à la clientèle et les gens aux opérations se réunissent maintenant pour gérer l’entreprise. Il aurait pu s’installer une sorte d’esprit de clocher au fil du temps, mais la collaboration au sein de l’entreprise s’est certainement améliorée.

Mme Williams : J’ajouterais que cela s’observe même dans les fonctions de soutien, qui sont de mon ressort. On voit les murs tomber et la collaboration est vraiment axée sur notre mission envers les Canadiens.

La sénatrice M. Deacon : Merci.

Le sénateur Klyne : Je vais essayer d’être bref. En ce qui concerne la Loi sur la salubrité de l’eau potable des Premières Nations, l’accès à de l’eau potable salubre et sûre, le traitement efficace des eaux usées et la protection des sources d’eau potable sur les terres des Premières Nations, dans la perspective des changements climatiques et du récent rapport de l’ONU, collaborez-vous avec Environnement et Changement climatique Canada et la consultez-vous, de même que l’Agence canadienne d’évaluation environnementale?

M. Thoppil : J’invite ma collègue Claudia Ferland, qui est responsable de notre programme d’infrastructure, à venir s’asseoir à la table pour mieux répondre à votre question, monsieur le sénateur.

Le sénateur Klyne : Je comprends qu’il vous faut tenir compte d’une vaste liste de priorités dans le cadre de cette loi.

M. Thoppil : À la Direction générale de la santé des Premières Nations et des Inuits, nous avons des experts en surveillance de l’eau et ils jouent un rôle clé pour ce qui est de savoir si des avis d’ébullition de l’eau à long terme doivent être émis.

Le sénateur Klyne : J’aimerais savoir si vous êtes sur la bonne voie pour protéger les sources d’eau potable sur les terres des Premières Nations. Ou est-ce encore un autre programme qui reviendra à Infrastructure Canada?

[Français]

Le président : Madame, pouvez-vous vous présenter, s’il vous plaît?

[Traduction]

Claudia Ferland, Directrice générale, Direction générale de la mise en œuvre des projets d’infrastructures régionaux, Services aux Autochtones Canada : Je m’appelle Claudia Ferland. Je suis la directrice générale des projets d’infrastructure régionaux à Services aux Autochtones Canada.

Malheureusement, je vais devoir vous revenir avec une réponse précise. Cela dit, pour tous nos projets d’infrastructure, nous travaillons en collaboration avec RNCan, Environnement Canada et le Cadre pancanadien sur la croissance propre et les changements climatiques. Nous travaillons avec un certain nombre de partenaires stratégiques à des projets d’infrastructure. Je vais vous revenir là-dessus, mais je peux certainement vous assurer que nous travaillons avec ECCC.

Le sénateur Klyne : J’aimerais revenir au nombre de projets que vous avez à réaliser et à leur coût. Disposez-vous des budgets appropriés? Merci.

La sénatrice Marshall : J’ai une question pour M. Siddall. Je voulais poursuivre l’évaluation des risques, parce que le programme portant sur l’Incitatif à l’achat d’une première propriété coûte très cher : c’est plus de 1 milliard de dollars.

Donc, lorsque vous faites votre évaluation des risques, le risque du programme dépend de sa conception et de son administration, n’est-ce pas? L’objectif est-il de minimiser le risque pour la SCHL et de s’assurer de récupérer le milliard de dollars et plus? Comment voyez-vous la chose? Quel est votre objectif?

M. Siddall : Ces 1,25 milliard de dollars seraient investis. Ils ne seraient pas nécessairement perdus ou assimilés à des coûts dans la mesure où ils seront remboursés...

La sénatrice Marshall : C’est ce que je me demande.

M. Siddall : Effectivement. L’objectif de la politique est de substituer le montant de cette participation à l’endettement, puis, à mesure que les prix augmentent ou diminuent, nous gagnerons ou perdrons de l’argent. Je dois vous assurer, madame la sénatrice, qu’il n’y a pas de rendement objectif sur cet investissement ou cette perte. Ce n’est pas le but du programme.

La sénatrice Marshall : Ce sera donc un risque partagé, n’est-ce pas, avec l’acheteur?

M. Siddall : C’est tout à fait exact.

La sénatrice Marshall : Merci.

Le président : Avant de terminer, j’aimerais poser une question, si vous me le permettez, honorables sénateurs. Elle s’adresse à la Société canadienne d’hypothèques et de logement.

Au cours des derniers mois, j’ai eu l’occasion de parcourir le Canada et de poser des questions à plusieurs ministres, politiciens et maires au sujet de l’itinérance et des sans-abri dans nos rues. Il y en a de plus en plus. L’itinérance est en croissance au Nouveau-Brunswick. Elle est en croissance dans le Canada atlantique.

Lorsque vous demandez à la SCHL — et j’ai eu l’occasion de le faire lorsque j’étais ministre de la Santé du Nouveau-Brunswick —, vous leur demandez, donc, un crédit de 2,6 milliards de dollars, soit une augmentation de 9 p. 100 par rapport à 2018-2019. Pouvez-vous nous faire connaître les programmes que vous avez mis en place au cours des deux dernières années budgétaires, et ceux que vous nous recommandez au Sénat pour contrer l’itinérance?

Votre exposé à la SCHL portait sur son objectif ambitieux selon lequel tous les Canadiens auront un logement qu’ils peuvent se payer d’ici 2030. Il y a loin de la coupe aux lèvres. J’ai connu cela dans le passé, avec les gouvernements provinciaux et le gouvernement fédéral. Nous annoncions que nous allions éradiquer la pauvreté. Et je suis très sensible à tout cela, je l’ai vécu. Je veux que vous nous disiez, que vous expliquiez aux Canadiens pourquoi je devrais recommander la somme de 2,6 milliards de dollars. Dites-moi comment nous allons aider nos sans-abri.

M. Siddall : Merci, monsieur le président. Je dois dire que nous ne promettons pas d’atteindre cet objectif. Nous disons que c’est ce que nous visons. Et nous ne faisons certainement pas cette promesse au nom du gouvernement du Canada. Nous la faisons au nom des gens de la SCHL et c’est une des raisons pour lesquelles nous nous rendons au travail.

Quant aux 2,6 milliards de dollars, vous serez peut-être heureux d’apprendre qu’il y a même des sommes supplémentaires qui s’ajoutent, qui ne font pas partie de notre budget, mais qui viennent d’EDSC Canada, de ce qu’on appelait autrefois la Stratégie des partenariats de lutte contre l’itinérance. L’aide à l’itinérance fait généralement partie d’un programme de soutien du revenu et les fonds pour l’itinérance proviennent d’une enveloppe distincte d’EDSC, et non de la SCHL, du moins à ce jour. Je ne sais pas si vous voulez voir la ventilation des 2,6 milliards de dollars.

Le président : Vous n’avez pas à détailler la ventilation. Nous avons reçu une copie de cela. Ce que je veux, c’est que vous nous expliquiez — avec statistiques à l’appui, si vous le pouvez, vous pouvez consulter vos dossiers et nous revenir par l’entremise de la greffière — l’impact que la SCHL a eu. Vous êtes une société remarquable. Cela ne fait aucun doute. Mais nous sommes de plus en plus confrontés à un dilemme dans nos collectivités, petites et grandes, partout au Canada, et c’est celui de l’itinérance.

M. Siddall : Nous pourrons certainement répondre par écrit à votre question, monsieur le président.

Le président : Merci beaucoup aux témoins. Vous nous avez beaucoup appris. Et si vous voulez ajouter quelque chose, je vous prie de le faire par l’entremise de la greffière lorsque vous consulterez le hansard.

(La séance est levée.)

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