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RIDR - Comité permanent

Droits de la personne

 

Délibérations du comité sénatorial permanent des
Droits de la personne

Fascicule nº 31 - Témoignages du 13 juin 2018


OTTAWA, le mercredi 13 juin 2018

Le Comité sénatorial permanent des droits de la personne, auquel a été renvoyé le projet de loi C-65, Loi modifiant le Code canadien du travail (harcèlement et violence), la Loi sur les relations de travail au Parlement et la Loi no 1 d’exécution du budget 2017, se réunit aujourd’hui, à 11 h 30, en séance publique et à huis clos, pour étudier le projet de loi.

La sénatrice Wanda Elaine Thomas Bernard (présidente) occupe le fauteuil.

La présidente : Bonjour.

Avant de commencer, je demanderais aux sénatrices de bien vouloir se présenter, en commençant par la vice-présidente.

La sénatrice Ataullahjan : Salma Ataullahjan, de l’Ontario.

La sénatrice Andreychuk : Raynell Andreychuk, de la Saskatchewan.

La sénatrice Cordy : Jane Cordy, de la Nouvelle-Écosse.

La sénatrice Hartling : Nancy Hartling, du Nouveau-Brunswick.

La présidente : Mon nom est Wanda Thomas Bernard, présidente du comité et sénatrice de la Nouvelle-Écosse. Je vous souhaite la bienvenue. Nous poursuivons aujourd’hui notre étude du projet de loi C-65, Loi modifiant le Code canadien du travail, harcèlement et violence, la Loi sur les relations de travail au Parlement et la Loi no 1 d’exécution du budget 2017.

J’encourage les sénatrices à consulter la greffière si elles prévoient de proposer des amendements au projet de loi cet après-midi

Pour notre premier groupe de témoins, nous sommes heureux d’accueillir par vidéoconférence Gail Gatchalian, avocate et enquêtrice sur le lieu de travail, Pink Larkin; Francyne Joe, présidente, Association des femmes autochtones du Canada; Anne Levesque, coprésidente du Comité directeur national, et Suki Beavers, directrice de projet, Association nationale de la femme et du droit; et, enfin, Phanikiran Radhakrishnan, professeure agrégée, Université de Toronto, à titre personnel.

Maître Gatchalian, vous avez la parole.

Gail Gatchalian, avocate et enquêtrice sur le lieu de travail, Pink Larkin : Honorables sénatrices, bonjour d’Halifax. Merci beaucoup de m’avoir invitée à témoigner aujourd’hui pour vous faire part de mes réflexions sur certains amendements proposés dans le projet de loi C-65. Mon exposé portera principalement sur le harcèlement en milieu de travail.

J’aimerais d’abord vous parler un peu de moi. Je suis avocate spécialisée en droit du travail et dans les droits de la personne au cabinet Pink Larkin, à Halifax. Je mène des enquêtes indépendantes sur le milieu de travail lorsque des plaintes de harcèlement sexuel en milieu de travail sont déposées. J’offre de la formation à des professionnels en ressources humaines sur la façon de mener de bonnes enquêtes sur le milieu de travail.

En m’appuyant sur ce que je considère des pratiques exemplaires en matière d’enquêtes, je vous fournirai mon opinion sur trois aspects du projet de loi C-65 en ce qui a trait au harcèlement sexuel en milieu de travail : premièrement, la définition de harcèlement; deuxièmement, le dépôt d’une plainte auprès d’un superviseur ou de son remplaçant désigné; et, troisièmement, le manque de détails concernant les enquêtes sur des plaintes.

J’aurais deux commentaires à formuler au sujet de la définition de harcèlement proposée à l’article 0.1. Premièrement, la définition introduit une ambiguïté potentielle pouvant mener à une confusion et à des litiges inutiles; deuxièmement, à mon avis, la définition devrait être remplacée par des définitions, dont une définition distincte de harcèlement sexuel.

Les enquêteurs sur le milieu de travail, avocats spécialisés en droit du travail et professionnels en ressources humaines utilisent une définition plutôt normalisée de harcèlement sexuel. Il existe une jurisprudence abondante qui fournit beaucoup de certitude sur la façon dont le harcèlement sexuel doit être défini et interprété. À mon avis, le projet de loi devrait refléter la définition normalisée afin d’accroître la certitude et réduire toute confusion possible quant à la définition de harcèlement sexuel dans le code.

Concernant l’ambiguïté potentielle, la définition proposée dit ceci :

harcèlement et violence : Tout acte, comportement ou propos, notamment de nature sexuelle, qui pourrait vraisemblablement offenser ou humilier un employé ou lui causer toute autre blessure ou maladie, physique ou psychologique, y compris tout acte, comportement ou propos réglementaires.

La phrase « […] toute autre blessure ou maladie, physique ou psychologique […] » laisse entendre que les mots « offenser » et « humilier », qui la précèdent, doivent entraîner une blessure ou maladie, physique ou psychologique. Je ne crois pas que l’intention était de définir de façon aussi étroite le genre de comportement qui pourrait constituer du harcèlement ou de la violence. Une définition aussi étroite ne serait pas conforme aux pratiques exemplaires.

Ma recommandation serait à tout le moins de retirer le mot « autre » de la définition. D’ailleurs, à mon avis, la définition devrait être remplacée par des définitions distinctes de harcèlement, de harcèlement sexuel et de violence en milieu de travail conformes avec les pratiques exemplaires et qui permettraient d’accentuer la certitude concernant les comportements régis par le code. Un remplacement total de la définition proposée permettrait également de résoudre le problème d’ambiguïté.

À mon avis, la Loi sur la santé et la sécurité au travail de l’Ontario, qui propose des définitions distinctes de harcèlement, de harcèlement sexuel et de violence en milieu de travail, est conforme aux pratiques exemplaires et les employeurs et enquêteurs peuvent l’appliquer facilement et avec certitude. Je recommande que la définition proposée à l’article 0.1 du projet de loi soit remplacée par ces définitions.

Mon deuxième commentaire concerne le dépôt d’une plainte auprès d’un superviseur ou de son remplaçant désigné.

Comme nous avons pu le constater récemment avec la divulgation publique de cas d’inconduite sexuelle très médiatisés, certaines femmes ont attendu des années, parfois des décennies, avant de soulever des allégations d’inconduite sexuelle contre leur employeur ou superviseur par crainte de représailles et parce qu’elles n’avaient pas confiance au mécanisme interne de plaintes. À mon avis, les amendements proposés ne permettent pas d’éliminer cet obstacle important et de réduire ce déséquilibre du pouvoir auquel les victimes de harcèlement sexuel en milieu de travail sont confrontées.

Le paragraphe 5(1) du projet de loi propose de remplacer les paragraphes 127.1(1) et (2) du code par un libellé qui permettrait à un employé de déposer une plainte de harcèlement ou de violence auprès de son superviseur ou de son remplaçant désigné, selon la politique de l’employeur. La Loi sur la santé et la sécurité au travail de l’Ontario règle la question des plaintes d’inconduite contre les employeurs et superviseurs en exigeant que les employeurs incluent dans leurs politiques des mesures et procédures pour permettre aux travailleurs de signaler des cas de harcèlement à une personne autre que l’employeur ou le superviseur, si l’employeur ou le superviseur est visé par la plainte. Je recommande donc d’ajouter du texte au paragraphe 127.1(1) pour obliger un employeur à adopter de telles mesures et procédures lorsque l’employeur ou le superviseur est ciblé par une plainte.

Mon troisième et dernier commentaire concerne le manque de détails concernant les enquêtes sur des plaintes.

À mon avis, un des outils les plus importants pour s’attaquer à l’inconduite sexuelle en milieu de travail, régler les déséquilibres du pouvoir et dissuader les craintes que peuvent avoir les femmes de signaler ces cas, c’est de permettre à ces femmes de profiter d’enquêtes compétentes, justes, rapides et neutres.

Encore une fois, la Loi sur la santé et la sécurité au travail de l’Ontario exige que les employeurs mènent des enquêtes « appropriées selon les circonstances » lorsque des plaintes de harcèlement sont déposées. Elle précise également qu’un inspecteur peut ordonner que l’employeur fasse faire, à ses frais, une enquête « par une personne impartiale possédant les connaissances, l’expérience et les qualités requises que précise l’inspecteur ».

Dans sa forme actuelle, le Règlement canadien sur la santé et la sécurité au travail précise que si la situation n’est pas réglée, l’employeur doit nommer une personne compétente pour enquêter sur les cas de violence en milieu de travail. Le règlement définit une personne compétente comme étant toute personne impartiale et considérée comme telle par les parties, ayant des connaissances, une formation et de l’expérience dans le domaine de la violence en milieu de travail et connaissant les textes législatifs applicables.

Je recommande que du texte soit ajouté au paragraphe 127.1(2) du code pour exiger que l’employeur, si la situation n’est pas réglée, fasse faire une enquête par une personne compétente. Je recommande également que le projet de loi, dans un nouveau paragraphe 127.1(9), donne le pouvoir au ministre d’ordonner à un employeur de nommer une personne compétente pour mener une enquête.

Enfin, je recommande que l’expression « personne compétente » soit définie soit dans le texte du code ou dans les règlements comme étant une personne impartiale et considérée comme telle par les pairs, ayant des connaissances, une formation et de l’expérience dans le domaine du harcèlement en milieu de travail, du harcèlement sexuel ou de la violence, selon le cas, et connaissant les textes législatifs applicables.

Cela serait conforme aux pratiques exemplaires.

Encore une fois, merci de m’avoir donné l’occasion de témoigner aujourd’hui. J’espère que mes commentaires vous seront utiles.

La présidente : Merci. Nous aurons des questions à vous poser à la fin des exposés.

Francyne Joe, présidente, Association des femmes autochtones du Canada : Weytk et bonjour, présidente Thomas Bernard, membres du comité, témoins et invités distingués. Mon nom est Francyne Joe. Je suis présidente de l’Association des femmes autochtones du Canada.

Je tiens à reconnaître la nation algonquine, puisque nous nous trouvons aujourd’hui sur les terres traditionnelles non cédées de cette nation. J’aimerais également remercier le comité de nous donner cette occasion de témoigner sur le projet de loi C-65.

L’AFAC défend les droits et le bien-être des femmes des Premières Nations, inuites et métisses depuis 1974. Grâce à la mobilisation communautaire et à l’analyse législative et des politiques, nous travaillons à la préservation des cultures, familles et communautés des femmes autochtones en faisant entendre la voix de ces femmes à l’échelle nationale et internationale.

L’AFAC a été encouragée d’apprendre que le gouvernement du Canada reconnaît que les cas de harcèlement et de violence sexuelle en milieu de travail sont à la fois sous-déclarés et sous-enquêtés et que des mesures seront prises pour réparer ces injustices.

Les femmes autochtones vivent à l’intersection de plusieurs formes de marginalisation. Nous sommes victimes de harcèlement en milieu de travail, d’intimidation et de discrimination en tant que femmes et femmes autochtones au sein d’une société coloniale. Cela s’ajoute aux obstacles et à la discrimination avec laquelle nous devons composer en raison de notre lieu géographique, de notre éducation, de nos capacités, de notre identité ou de notre orientation sexuelle. Tous ces facteurs font en sorte que de nombreuses femmes autochtones sont vulnérables au harcèlement et à la violence, surtout en milieu de travail où les dynamiques du pouvoir compliquent davantage les relations interpersonnelles et favorisent la vulnérabilité.

Pour ces raisons, toute mesure législative visant à s’attaquer au harcèlement sexuel doit tenir compte de ces intersections et ne pas chercher à faire la distinction entre les enjeux des femmes et ceux des femmes autochtones ou l’inverse. Il est important de souligner qu’en raison de cet entrecroisement d’oppressions, de dynamiques du pouvoir, de crainte de représailles et d’appréhensions associées à la navigation des processus coloniaux, les femmes autochtones sont moins susceptibles de signaler des cas de harcèlement. Cela doit être abordé et reflété dans la loi et l’élaboration de politiques ayant un impact sur la vie professionnelle des femmes autochtones.

De façon similaire, la mesure législative doit mettre en premier plan la nécessité d’offrir une formation adéquate et continue en matière de compétences culturelles, de mettre en place des systèmes de signalement rigoureux et d’offrir aux victimes et survivants, avant, pendant et après le signalement, des mesures de soutien sécuritaires sur le plan culturel.

Il existe une culture de harcèlement, de violence et d’intimidation en milieu de travail. Cette mesure législative doit chercher à changer, à long terme, ces pratiques néfastes ancrées depuis si longtemps.

De plus, cette mesure législative doit distinguer si et comment les crimes haineux sont différents des diverses formes de harcèlement en milieu de travail. Pour les femmes autochtones, la violence et la discrimination basées sur le sexe ne s’opèrent pas séparément de la violence et de la discrimination raciales. Il est impératif de savoir comment et où ces limites seront établies afin d’élaborer la formation à l’intention des employeurs et employés. Ceci doit être enchâssé dans la loi pour être efficace.

La plupart des femmes autochtones qui travaillent pour le gouvernement fédéral occupent des postes contractuels ou temporaires, souvent des postes administratifs. Les relations d’emploi précaires font partie d’une disparité socioéconomique beaucoup plus large qui trouve ses racines dans l’histoire coloniale du pays et la marginalisation continue des femmes autochtones.

Par conséquent, les femmes autochtones peuvent ne pas se sentir à l’aise de déposer une plainte par crainte de représailles, en raison du manque d’anonymat ou simplement parce qu’elles ignorent les mesures de soutien auxquelles elles ont accès. Pour que la loi puisse satisfaire à leurs besoins, ces vérités doivent être abordées.

De plus, les organisations et ministères doivent disposer d’un financement adéquat pour satisfaire aux exigences stipulées dans le projet de loi en matière de formation et de système de soutien. Les employeurs et employés doivent avoir accès à une formation de qualité appropriée sur le plan culturel, continue et qui tient compte de la spécificité des sexes.

En outre, les peuples autochtones n’ont pas été consultés de façon adéquate. Selon ce que nous avons pu comprendre, cette mesure législative s’applique aux gouvernements des Premières Nations sous réglementation fédérale. Si c’est exact, le gouvernement du Canada doit alors mener une consultation véritable auprès des peuples autochtones.

Les femmes autochtones, en particulier, n’ont pas été consultées de façon adéquate. Dans le rapport qui a suivi la consultation publique sur le harcèlement et la violence sexuelle, rapport sur lequel cette mesure législative s’appuie, on remarque que seulement 28 femmes autochtones ont été consultées et qu’une seule séance de dialogue a été organisée avec l’Ontario Native Women’s Association. La mesure législative, dans sa forme actuelle, ne semble pas tenir compte des résultats de ces consultations.

Les femmes autochtones à l’emploi du gouvernement fédéral ou des gouvernements des Premières Nations devront respecter le système de plaintes prévu dans la mesure législative. Ce système n’est ni satisfaisant sur le plan culturel ni sécuritaire, et il ne reflète pas les pratiques exemplaires ou les modes de connaissances et de guérison autochtones. Comme je l’ai déjà souligné, les femmes autochtones doivent surmonter plus d’obstacles lorsqu’elles souhaitent déposer une plainte, surtout si cette plainte est déposée au sein de leurs propres communautés ou nations, en raison du manque d’anonymat et des craintes de représailles.

En terminant, si l’on tient compte de tout cela, il est impératif d’effectuer une analyse plus large de ce problème et de cette mesure législative, une analyse comparative entre les sexes pertinente sur le plan culturel, de façon à ce que les expériences et besoins des femmes autochtones soient reflétés dans la mesure législative. Pour cela, il faudrait également mener une véritable consultation plus large auprès des femmes autochtones et de leurs communautés pour s’assurer que ce processus visant à traiter le harcèlement et la violence n’est pas imposé à grande échelle.

Je vous remercie de votre temps et de votre attention. Meegwetch.

La présidente : Merci.

Suki Beavers, directrice de projet, Association nationale de la femme et du droit : Merci beaucoup. Nous souhaitons d’abord remercier le comité d’offrir à l’Association nationale de la femme et du droit cette occasion de témoigner au sujet du projet de loi C-65.

Comme plusieurs d’entre vous le savent, l’ANFD est une organisation féministe à but non lucratif qui fait la promotion des droits à l’égalité des femmes au Canada par l’entremise de l’éducation juridique, de la recherche et de la promotion de la réforme du droit. Nous souhaitons également remercier la ministre, tous les députés, sénateurs et membres de leur personnel, ainsi que les membres des groupes féministes et de promotion de l’égalité, sans oublier les survivants qui ont participé à l’élaboration du projet de loi C-65 de façon à ce que cette mesure législative offre un cadre juridique plus complet afin de prévenir les cas de violence, de harcèlement et de harcèlement sexuel dans les milieux de travail sous réglementation fédérale, y compris la Colline du Parlement, et réagir à ce genre de cas.

Nous sommes heureux de voir que certaines recommandations d’amendements formulées par l’ANFD et d’autres organisations ont été incluses dans la version révisée du projet de loi à l’étude.

Par conséquent, à cette étape-ci, nous aimerions nous concentrer sur quelques amendements supplémentaires particulièrement importants pour assurer la conformité du projet de loi C-65 à l’approche fondée sur les droits de la personne et faire en sorte que la mesure législative reconnaisse les vulnérabilités uniques et intersectorielles de certains travailleurs, surtout les femmes.

Pour favoriser l’adoption de cette approche axée sur les droits de la personne, nous souhaitons formuler les recommandations suivantes. Premièrement, nous voulons réitérer la recommandation formulée précédemment au comité HUMA selon laquelle un article devrait être ajouté pour expliquer clairement que le projet de loi C-65 ne limite en aucun cas les recours et remèdes auxquels ont droit les employés sous réglementation fédérale en vertu de la Loi canadienne sur les droits de la personne.

Deuxièmement, la section sur les objectifs ou le préambule devrait clairement reconnaître que les travailleurs ont droit à un milieu de travail libre de violence, de harcèlement et de harcèlement sexuel. En outre, puisque les femmes au Canada continuent d’être victimes de nombreuses formes de discrimination et de violence axées sur le sexe, que certains milieux de travail sous réglementation fédérale, y compris la Colline du Parlement, continuent d’être dominés par les hommes et demeurent des milieux où de nombreuses femmes doivent composer avec des dynamiques du pouvoir nuisibles fondées sur le sexe et que les éléments d’information montrent très clairement que les femmes continuent d’être très largement les cibles de harcèlement sexuel au travail, du langage spécifique devrait être ajouté de façon à démontrer que le projet de loi C-65 vise à faire progresser l’égalité des sexes et à assurer que les droits des travailleuses, y compris celles qui font face à des formes intersectorielles de discrimination, sont respectés, protégés et réalisés.

Troisièmement, nous souscrivons à l’utilisation d’un libellé sur la prévention dans l’ensemble du projet de loi C-65 et à l’obligation de protéger et de prévenir que l’on retrouve au paragraphe 125(1) du Code canadien du travail. Conformément à l’approche fondée sur les droits de la personne, l’ANFD propose que le langage de prévention, de protection et de réaction soit ajouté aux éléments du projet de loi sur la violence, et que le harcèlement et le harcèlement sexuel en milieu de travail soient ajoutés à l’ensemble du projet de loi. Ce libellé est important, car il met l’accent sur l’obligation positive qu’a l’employeur non seulement de réagir aux cas de violence, de harcèlement et de harcèlement sexuel, mais aussi de créer un milieu qui protège les femmes contre la violence, le harcèlement et le harcèlement sexuel et prévient ce genre de cas.

Un autre secteur crucial qui doit être modifié porte sur la nomination de personnes désignées compétentes. Pour avoir accès à la justice, il faut un enquêteur juste et impartial qui possède des compétences particulièrement en matière de violence axée sur le sexe, le harcèlement et le harcèlement sexuel en milieu de travail, de même qu’une formation sur les droits de la personne et sur les droits des femmes.

Les plaignants doivent être perçus comme étant des détenteurs de droits et doivent ainsi avoir droit à l’équité judiciaire et à l’application régulière de la loi. Par exemple, les plaignants devraient recevoir une copie complète des rapports préparés en lien à leur plainte.

Enfin, pour éviter les préjugés auxquels sont souvent confrontés les victimes et les survivants de harcèlement et de violence lorsqu’ils dénoncent ces actes, nous proposons de modifier le libellé du paragraphe 127.1(8) proposé lié aux circonstances où le ministre n’est pas tenu d’enquêter sur une plainte. Les termes « frivole ou vexatoire » devraient être remplacés par « abus du processus ».

Anne Levesque, coprésidente du Comité directeur national, Association nationale de la femme et du droit : Comme Mme Beavers l’a mentionné, la deuxième priorité de l’ANFD est que la loi reconnaisse que, bien que le harcèlement, le harcèlement sexuel et d’autres formes de violence, y compris la violence fondée sur le sexe, constituent de graves problèmes de santé et de sécurité en milieu de travail, les torts qu’ils causent aux femmes sont différents des torts que causent d’autres dangers présents dans le milieu de travail.

Cela nous amène à notre deuxième série de recommandations, et plus particulièrement en ce qui concerne la définition. À l’instar de la Commission canadienne des droits de la personne, nous sommes en faveur d’une définition ouverte du harcèlement et de la violence. Nous proposons que le terme « inclut » plutôt que « signifie » soit adopté dans la définition.

Deuxièmement, nous préconisons une définition qui renferme l’énoncé suivant : « la violence familiale qui peut exposer un travailleur à une blessure dans le milieu de travail ». L’obligation d’un employeur d’intervenir en cas de violence familiale prévue dans la Loi sur la santé et la sécurité au travail de l’Ontario fournit un bon exemple qui pourrait être repris dans ce projet de loi. Tout comme avec la loi en Ontario, le projet de loi C-65 pourrait expressément créer une responsabilité pour l’employeur d’intervenir en cas de violence familiale qui peut exposer un travailleur à des préjudices ou à des blessures dans le milieu de travail.

Nous avons deux dernières suggestions. Il y a les obligations en matière de reddition de comptes, à savoir que les données doivent être ventilées selon les motifs de la Loi canadienne sur les droits de la personne pour comprendre qui sont les personnes touchées par la violence et les formes de discrimination connexes. Enfin, en ce qui concerne la personne compétente qui est désignée pour enquêter sur les allégations de harcèlement et de violence, créez une liste de membres de groupes historiquement désavantagés, qui comprend au moins 50 p. 100 de femmes.

À notre avis, ces amendements proposés au projet de loi seraient conformes aux obligations du Canada relatives au droit international et national en matière de droits de la personne et feraient du Canada un chef de file international pour ce qui est de reconnaître les droits des travailleurs d’être à l’abri d’actes de violence et de harcèlement dans le milieu de travail.

Phanikiran Radhakrishnan, professeure agrégée, Université de Toronto, à titre personnel : Merci, mesdames et messieurs les sénateurs, de m’avoir invitée aujourd’hui pour discuter du projet de loi C-65. C’est un très grand honneur pour moi d’étudier et de commenter le projet de loi C-65.

J’effectue des recherches scientifiques sur le harcèlement en milieu de travail depuis 1992, lorsque j’étais étudiante au doctorat à l’Université de l’Illinois. Je continue d’étudier ce phénomène tout en enseignant les ressources humaines dans le poste actuel que j’occupe au Département de gestion à l’Université de Toronto.

Il est très réconfortant pour moi de voir que ce projet de loi considère le harcèlement comme étant un problème de sécurité au travail. Le harcèlement en milieu de travail est comme une implosion. Il n’y a pas que la cible directe du harcèlement qui en souffre; ses effets radioactifs sont également ressentis par ceux dans l’organisme qui en sont témoins, qui en entendent parler ou qui aident la victime à surmonter le problème. J’appelle ces témoins des spectateurs. Lorsqu’une personne est victime de harcèlement, les spectateurs commencent à craindre qu’ils seront peut-être les prochaines victimes. Ils se demandent : « Si mon entreprise n’est pas intervenue lorsque quelqu’un dépose une plainte, interviendra-t-elle si je suis victime de harcèlement et que je le signale? ».

Nous n’attendons pas qu’un accident nucléaire se produise ou que la contamination se propage. Nous visons à empêcher que ces incidents se produisent. Nous ne devons pas attendre que des victimes portent plainte pour harcèlement; nous devons empêcher le harcèlement et veiller à ce que ses effets néfastes touchent d’autres personnes dans le milieu de travail. Nous devons mettre des mesures de protection en place, tout comme nous le faisons pour prévenir les accidents nucléaires.

Je vais me prononcer sur trois parties du projet de loi, puis je vais relever des mesures qui peuvent être prises en m’appuyant sur des recherches scientifiques. Je formulerai ensuite des suggestions précises. Je vais m’attarder sur la définition, car améliorer la définition contribuera également à vos efforts en matière de prévention et de reddition de comptes. Je vais terminer en expliquant comment on peut exiger que des formations obligatoires soient offertes pour créer un milieu de travail exempt de harcèlement.

La définition proposée est une bonne première étape. Je vous encourage à la rendre plus inclusive et précise, à savoir que vous devriez inclure des groupes protégés dans votre définition. Vous devriez également préciser comment interpréter les comportements de harcèlement en fonction de leurs effets dans le milieu de travail.

En plus des autres définitions à la Commission des droits de la personne et dans le Code canadien du travail, je vous recommande aussi d’examiner la définition utilisée par l’Equal Employment Opportunity Commission des États-Unis. Cette définition est plus inclusive, et elle précise ses effets sur le milieu de travail. Elle inclut de multiples groupes protégés.

Le harcèlement n’est pas seulement de nature sexuelle; il peut aussi être fondé sur la race, la couleur de la peau, l’origine nationale ou ethnique, l’orientation sexuelle, l’identité ou l’expression de genre, la religion, l’âge et l’invalidité. Tout comme une personne peut appartenir à de multiples groupes protégés, elle peut aussi être la cible de multiples formes de harcèlement; les cas varient.

Nos recherches révèlent que le harcèlement peut prendre différentes formes pour différents groups protégés. Je vais illustrer comment c’est possible pour le harcèlement sexuel et ethnique. Dans le cadre de nos recherches, nous demandons aux gens de décrire ce qu’ils perçoivent comme étant du harcèlement. Nous constatons que le harcèlement ethnique ne prend pas seulement la forme de plaisanteries et de remarques désobligeantes, mais elle se manifeste aussi en excluant une personne dans le milieu de travail en lui disant : « Retourne d’où tu viens », et en retenant de l’information qui peut l’aider à bien faire son travail.

L’utilisation d’une définition qui inclut de multiples groupes protégés reconnaît qu’une personne peut être la cible de multiples formes de harcèlement. Vos intervenants font une recommandation semblable.

La définition de l’EEOC précise également les comportements qui sont considérés comme étant du harcèlement en fonction de leurs effets. Elle fait état que les comportements de harcèlement créent un environnement de travail hostile, interfèrent avec le rendement d’une personne au travail ou nuisent à ses possibilités d’emploi. Dans le cadre de nos recherches, nous demandons aux gens de nous dire à quelle fréquence ils sont témoins ou victimes de harcèlement comme des plaisanteries ou des remarques désobligeantes, des comportements où une personne est exclue du milieu de travail ou des situations où l’on ne divulgue par des renseignements liés à l’emploi d’une personne. Des comportements de la sorte créent un environnement de travail hostile, interfèrent avec le rendement au travail d’une personne et nuisent à ses possibilités d’avancement.

Je vais maintenant parler de la disposition qui exige la production de rapports annuels. Je suis heureuse de constater qu’ils sont obligatoires. Cependant, pour obtenir une évaluation authentique et valide du harcèlement en milieu de travail, ces rapports obligatoires doivent aller au-delà que simplement consigner les plaintes officielles déposées par les victimes.

Comme de nombreux autres témoins l’ont mentionné, les études relèvent sans cesse qu’il est peu probable que les victimes déposent une plainte officielle de harcèlement. Il est encore moins probable qu’ils le fassent lorsqu’ils ne peuvent pas déposer la plainte de façon anonyme.

Là encore, l’analogie des matières dangereuses présentes sur le lieu de travail est utile. Nous ne pouvons pas nous permettre d’attendre les signes qu’une matière radioactive a été mal manipulée ou entreposée de façon non sécuritaire. De plus, nous ne pouvons pas attendre que les victimes déposent des plaintes officielles en temps opportun. Au moment où une victime dépose une plainte, la nature radioactive du harcèlement au travail a déjà causé des ravages importants dans le milieu de travail. De nombreux incidents de harcèlement se sont peut-être déjà produits, et de nombreuses autres personnes dans le milieu de travail ont peut-être déjà été touchées. Nos recherches révèlent que les spectateurs qui sont témoins ou entendent parler de harcèlement au travail se déclarent en mauvaise santé et sont insatisfaits de leurs superviseurs, de leurs collègues de travail et de leur emploi, et ce, parce qu’ils ont été exposés aux effets du harcèlement en milieu de travail.

On ne peut pas se fier aux plaintes officielles des victimes pour déterminer s’il y a des cas de harcèlement dans un organisme. Nous devons utiliser d’autres moyens pour détecter le harcèlement. Je vous recommande d’obliger les organismes à mener des sondages réguliers anonymes auprès de tous les employés. Vous pourrez ainsi mieux évaluer la fréquence des comportements de harcèlement dont les employés sont la cible ou sont témoins. Ce sera une évaluation plus exacte du harcèlement dans le milieu de travail. Le caractère anonyme des sondages permettrait également de répondre aux préoccupations en matière de protection liée aux renseignements personnels que vos intervenants ont relevées.

En ce qui concerne la disposition relative à la formation, je vous félicite d’avoir rendu la formation obligatoire pour les employeurs et les employés. Cependant, je vais discuter de la façon dont vous pouvez utiliser les recherches scientifiques pour que cette formation soit efficace.

Un sondage mené auprès de 34 000 militaires s’est penché sur les effets relatifs de trois facteurs : le personnel a-t-il reçu de la formation, les unités ont-elles des politiques sur le harcèlement, et les employés estiment-ils que les dirigeants à différents niveaux de l’organisme déploient des efforts raisonnables pour prévenir le harcèlement?

Vous ne seriez pas surpris d’entendre ce que les employés pensent des efforts des dirigeants pour prévenir les cas de harcèlement ethnique.

Même si les employeurs sont obligés de suivre de la formation et savent ce qu’ils doivent faire lorsqu’il y a des cas de harcèlement, il sera possible de réduire le harcèlement seulement s’ils prennent des mesures crédibles. En termes simples, si vous apprenez aux employés comment intervenir lorsque des personnes ont des comportements de harcèlement envers d’autres personnes, ces aptitudes ne seront pas efficaces si elles ne sont pas appliquées lorsqu’il y a du harcèlement dans l’organisme.

C’est semblable à ce que nous constatons lorsque nous examinons les recherches sur la formation en matière de sécurité. Il est crucial que les dirigeants de l’organisme encouragent les employés à adopter des comportements sécuritaires pour veiller à ce qu’ils appliquent ce qu’ils ont appris à propos de la sécurité au travail.

La formation obligatoire des employeurs, à elle seule, ne réduira pas le harcèlement en milieu de travail. Les employeurs devraient être obligés de démontrer l’efficacité de cette formation en réduisant le harcèlement. Là encore, des sondages réguliers anonymes sur le harcèlement au travail peuvent être utilisés pour évaluer l’efficacité de la formation. Ces sondages peuvent fournir des estimations de base et peuvent être utilisés pour évaluer les progrès réalisés par les employeurs dans les efforts qu’ils déploient pour réduire le harcèlement.

C’est la même exigence que nous avons en place pour les laboratoires où l’on retrouve des matières radioactives. Même si la chercheure principale ne manipule peut-être pas des isotopes radioactifs, elle doit suivre une formation sur la façon de manipuler ces matières. Toutefois, elle est également responsable de s’assurer que ces matières sont entreposées de façon sécuritaire et manipulées correctement. Au final, cependant, si des accidents surviennent, la chercheure principale serait tenue responsable de ces accidents. Nous ne pouvons pas nous permettre d’absoudre la chercheure principale de ces accidents si elle a suivi la formation obligatoire. On la tiendrait responsable.

En plus de la formation obligatoire pour les employeurs, on doit les obliger à prévenir le harcèlement en milieu de travail.

En résumé, je vous recommande de rendre la définition plus inclusive et précise, pour aller au-delà des plaintes officielles de harcèlement et obliger les employeurs à prévenir le harcèlement en milieu de travail. Merci, honorables sénateurs, de m’avoir donné l’occasion de discuter de la façon dont les recherches scientifiques peuvent contribuer à ce que le projet de loi C-65 prévienne le harcèlement en milieu de travail.

La présidente : Merci à vous toutes de vos témoignages ce matin.

Nous allons entreprendre la période des questions, en commençant avec la marraine du projet de loi, suivi du critique du projet de loi.

La sénatrice Hartling : Merci beaucoup de vos formidables exposés, de votre savoir, de votre passion et de vos excellentes contributions et idées sur la façon dont nous pouvons améliorer ce projet de loi.

Je considère ce projet de loi comme un tournant décisif générateur de changements. Je vous suis reconnaissante des excellentes suggestions que nous pouvons étudier, et plus particulièrement celles relatives aux droits de la personne au Canada. Nous avons entendu ces suggestions. Ce sont des suggestions très catégoriques que nous pouvons examiner.

Les consultations se poursuivront. Je suis désolée d’apprendre que vous jugez que votre organisation n’a pas été suffisamment consultée. Les consultations doivent continuer. Elles se poursuivront avec la réglementation. J’espère que votre voix sera entendue.

Je sais que nous pouvons obtenir le projet de loi, prendre toutes les mesures nécessaires, et y incorporer les définitions, les personnes compétentes et tous ces processus. Que devons-nous faire pour changer la culture entourant ce problème très grave au Canada? Tous ceux qui veulent intervenir peuvent le faire.

Mme Joe : J’ai travaillé en gestion des ressources humaines pour une organisation autochtone en Colombie-Britannique. Nous avons bien au-delà de 200 bandes des Premières Nations en Colombie-Britannique. Nous avons peut-être six spécialistes des ressources humaines certifiés et nous avons quelques personnes qui travaillent dans le domaine de la santé et de la sécurité au travail. Il est pratiquement impossible de trouver une personne qui peut comprendre la communauté autochtone, surtout dans une perspective sexospécifique. Nous devons nous assurer d’offrir de la formation. Il doit y avoir des écoles qui comprennent que les problèmes auxquels est confrontée une communauté autochtone sont différents de ceux d’une communauté syndicale ou non syndicale.

Pour les femmes qui travaillent dans différents organismes gouvernementaux, des organismes des Premières Nations, c’est triste. Notre instinct nous met en garde lorsque nous rencontrons certaines personnes et nous savons que nous ne devrions pas être seuls dans une salle avec ces personnes. C’est ainsi que les choses fonctionnent à l’heure actuelle.

La sénatrice Hartling : Merci beaucoup. Quelqu’un d’autre veut intervenir?

Mme Levesque : L’élaboration de normes législatives est une excellente première étape. Elles établissent des attentes à l’égard des normes de conduite acceptables. Elles montrent ce à quoi l’on s’attend d’un employé, plus particulièrement à l’aide d’une approche fondée sur les droits, et elles encouragent les victimes et les survivants à se manifester. Si vous utilisez une approche fondée sur les droits assortie de règles d’équité procédurale, les victimes et les survivants se sentent mieux outillés à signaler les incidents et à faire confiance au processus, et ils savent, par exemple, qu’ils ne seront pas victimes de représailles, ce que nous constatons dans d’autres processus.

Il est important d’avoir des programmes fondés sur les droits transparents car ils établissent les normes de conduite attendues et donnent confiance aux victimes de harcèlement pour signaler les incidents.

La sénatrice Hartling : Merci.

Mme Beavers : Je vais ajouter une observation à propos des changements des normes sociales car c’est ce dont nous sommes en train de discuter. Un engagement à long terme est nécessaire. Il faut avoir du financement et garder le cap. Le leadership est le point de départ et doit être maintenu, mais il faut aussi du financement. Ce doit être compris si l’on veut avoir un processus à long terme à plusieurs volets.

Je vais réitérer la recommandation de ma collègue, Anne, qui a dit que ce doit est un élément critique. Ce n’est certainement pas le seul aspect, mais la mise en œuvre de ce cadre législatif et ces normes en matière des droits de la personne est un élément important et nécessaire si l’on veut apporter des changements aux normes sociales.

La sénatrice Hartling : Merci.

La sénatrice Ataullahjan : Je vous remercie toutes de vos témoignages ce matin.

Pour revenir aux questions de la sénatrice Hartling, j’ai interrogé la ministre à propos du processus de consultation et je lui ai demandé quels organismes ont été consultés. Elle a dit qu’elle me fournirait une liste. Vos organismes ont-ils été consultés? Non? Je pose la question à vous toutes. Est-ce que l’un ou l’autre de vos organismes ont été consultés durant l’élaboration de ce projet de loi? La ministre a signalé que de vastes consultations ont été menées, comme la sénatrice Hartling l’a dit, et elles se poursuivront. Vos organismes ont-ils été consultés?

Mme Beavers : Dans l’élaboration initiale du projet de loi, l’ANFD n’a pas été consulté. Nous avons comparu devant le Comité HUMA à une date ultérieure.

Mme Joe : Il en va de même pour l’Association des femmes autochtones du Canada.

La sénatrice Ataullahjan : Comment pouvez-vous rendre le milieu de travail sécuritaire dans des bureaux où il y a deux ou trois employés? Je parle plus précisément des bureaux sur la Colline où des gens travaillent dans des bureaux de personnes qui ont du pouvoir. Il y a deux ou trois employés et l’un d’eux a une conduite inconvenante. Comment pouvons-nous rendre ce bureau sécuritaire? Ce sont généralement des jeunes personnes qui travaillent dans ces bureaux. À qui ces personnes peuvent-elles s’adresser? Comment encourageons-nous les victimes à signaler ces incidents? Souvent, si elles ne se manifestent pas, cette situation peut se solder par la fin de leur carrière à ce lieu de travail.

Que pouvons-nous faire pour leur faciliter la vie?

Mme Radhakrishnan : J’ai déjà vécu la situation à l’université, où il y a beaucoup de bureaux où l’on peut dénoncer la violence sexuelle. Il est pourtant peu probable qu’une personne y porte plainte; il est aussi peu probable qu’elle porte plainte officiellement. Si la personne qui reçoit la plainte n’a aucun pouvoir sur la personne qui a commis le harcèlement, elle n’a aucun recours.

En ce moment, le système est tel que la personne qui reçoit les plaintes peut avoir une formation pertinente et connaître la loi, mais elle n’a pas de pouvoir de contrôle. Il est important de tenir compte de la personne à qui l’on porte plainte.

Pouvez-vous répéter la deuxième partie de votre question?

La sénatrice Ataullahjan : Comment protégeons-nous les victimes et comment les encourageons-nous? Cela signe généralement la fin de leur carrière. Elles ne travailleront plus dans ces bureaux.

Mme Radhakrishnan : Effectivement. Il faut maintenir l’anonymat, d’une certaine façon, mais quand il n’y a que deux ou trois personnes dans un bureau, c’est impossible. Nous sommes coincés.

Mme Beavers : Si je peux ajouter quelque chose, le processus doit être centré sur la victime pour qu’elle se sente en confiance, faute de quoi, les victimes n’oseront pas dénoncer l’agresseur. C’est ce qui se dégage clairement des études.

Ensuite, pourquoi une personne dénoncerait-elle son agresseur s’il n’existe aucun recours utile pour la victime? La question des recours est fondamentale. Encore une fois, nous répétons l’importance de rappeler explicitement que tous les recours prévus à la Loi canadienne sur les droits de la personne demeurent. Il faut aussi préciser ce qui arrivera à l’agresseur. C’est un élément important pour le personnel politique et parlementaire.

C’est la raison pour laquelle aux premières étapes de l’étude de ce projet de loi, nous avons souligné la nécessité d’analyser précisément ce qui peut fonctionner sur la Colline, en raison de la nature fondamentalement politique de l’endroit et des particularités sexuelles très présentes dans la dynamique des pouvoirs sur la Colline.

Nous recommandons donc la tenue assez rapide d’une enquête sur les pratiques exemplaires d’autres pays dont nous pourrions nous inspirer pour lutter contre la violence, le harcèlement et le harcèlement sexuel dans les assemblées législatives. C’est tout nouveau. La gestion du harcèlement en milieu de travail dans divers contextes professionnels est moins nouvelle. Il y a beaucoup d’exemples de bonnes pratiques, mais il n’y en a pas tellement sur la façon de gérer ces comportements pour ces raisons mêmes dans les assemblées législatives.

Il serait donc utile d’étudier davantage les bonnes pratiques et les raisons pour lesquelles elles fonctionnent, pour que nous puissions examiner nos propres façons de faire et y apporter les modifications requises.

La sénatrice Ataullahjan : J’aurais une question à poser à Mme Radhakrishnan en particulier. J’ai posé la même à la ministre. Quand nous parlons de harcèlement, je pense aux minorités et aux nouvelles immigrantes qui occupent un premier emploi au Canada et qui en sont très contentes, mais qui ne savent pas ce que constitue le harcèlement, vers qui elles peuvent se tourner et qui ont très peur de parler.

Comment ces femmes peuvent-elles porter plainte? Savent-elles seulement qu’elles peuvent le faire?

Mme Radhakrishnan : Oui, c’est un problème, parce que nous attendons que les victimes portent plainte. Ce n’est pas utile d’attendre. D’autres personnes observent la situation, savent des choses, et si elles pouvaient intervenir pour remédier à la situation sans que la victime ait à faire de signalement, cela les aiderait.

Quand on lit les récits des témoins, ils observent ce qui se passe et appuient la victime de toutes sortes de façons. Parfois, les témoins pourraient avoir plus de pouvoir et aider la victime. Encore une fois, le fait que nous dépendions exclusivement du témoignage de la victime est une particularité culturelle de notre approche. Il faut faire confiance à l’unité de travail elle-même ou aux personnes à qui les victimes se confient. Elles peuvent aussi être des témoins fiables en qui nous pourrions avoir confiance.

La sénatrice Cordy : Je vous remercie toutes infiniment. Vous nous avez présenté d’excellents exposés, détaillés, utiles. Je suis très heureuse que ces discussions aient lieu sur la Colline du Parlement, parce que c’est le dernier bastion pour ce genre de discussion. C’est bien.

La ministre a comparu devant nous hier et a dit que la loi ne suffirait pas pour résoudre le problème, que nous devions changer des choses.

Je reviens aux observations de la sénatrice Ataullahjan. Madame Joe, vous avez parlé d’envoyer des signaux de fumée pour qu’une personne sache qu’elle a intérêt à ne pas se trouver seule dans une pièce avec quelqu’un. Je pense que les femmes sont assez bonnes pour se dire avec qui elles ne doivent pas se retrouver seules, où elles ne doivent pas aller et ce qu’elles ne doivent pas faire. Ce n’est pas comme cela que nous devrions vivre, mais c’est ce qui se passe.

Nous savons qu’il est peu probable que les victimes portent plainte. Sur la Colline du Parlement, le déséquilibre des pouvoirs est omniprésent. Il y a les politiciens, soit les sénateurs, les députés et les ministres. Il y a divers postes, et bien des jeunes viennent travailler sur la Colline du Parlement. Il y a, de toute évidence, un déséquilibre des pouvoirs.

Le harcèlement ne touche pas que les femmes. Madame Radhakrishnan, vous avez parlé aussi d’attaques culturelles, raciales, de toutes sortes de choses, mais on a aussi tendance à se dire que ce n’est pas si grave, qu’on peut passer par-dessus.

Madame Beavers, vous avez parlé de changement de norme sociale. Nous avons parlé hier, pendant nos séances, d’un changement de culture.

Comment pouvons-nous susciter ces changements? La législation ne suffit pas. Il faut dire que c’est correct d’en parler. Ce n’est pas banal, c’est grave. Comment pouvons-nous créer ce genre d’environnement dans nos milieux de travail?

Maître Gatchalian, vous êtes avocate. Quand une affaire vous parvient, c’est que les parties ne s’entendent pas. Vous intervenez bien au-delà de la première étape dont je parle. Vous pouvez peut-être nous parler de ce qui se passe quand on s’en remet à la loi. Que faisons-nous?

Mme Gatchalian : Si je puis me permettre, sénatrice, je pense que vous me demandez quels sont les recours, au-delà de la plainte et des mécanismes d’enquête, pour créer le changement sociétal et le changement de culture en milieu de travail nécessaires.

Je pense que la formation sur l’intervention des témoins est très prometteuse. J’ai participé à un balado de l’Association canadienne du Barreau intitulé « Tolérance zéro » lancé en mars 2017. L’idée, pour reprendre les observations de l’intervenante précédente, c’est que le fardeau de la dénonciation d’un mauvais comportement en milieu de travail ne devrait pas incomber directement aux cibles ou aux victimes, parce que ce sont les plus vulnérables et les moins susceptibles de porter plainte.

Il faut expliquer clairement, par des campagnes d’éducation publique, des politiques et de la formation en milieu de travail que même en l’absence d’une plainte officielle — et bien sûr, cela concorde avec les meilleures pratiques qui s’observent —, si un problème de harcèlement vient aux oreilles de l’employeur, qu’il s’agisse de harcèlement sexuel ou de toute autre forme de harcèlement en milieu de travail, il est obligé de mener enquête.

Il faudrait aussi indiquer clairement dans la formation, les campagnes d’éducation publique et les politiques que les témoins de harcèlement et de violence, les observateurs, sont tenus de porter plainte et qu’ils sont eux aussi victimes d’un milieu de travail toxique quand ils sont témoins de violence ou de harcèlement à l’encontre de leurs collègues.

Je pense que nous avons encore beaucoup à faire pour améliorer la formation sur l’intervention des témoins.

La sénatrice Cordy : Quelqu’un d’autre?

La présidente : Je pense que nous devrons continuer après cette réponse.

Mme Joe : Je constate, dans les communautés autochtones, qu’il y a souvent des questions, mais personne pour répondre aux employés autochtones. Nous devons aussi offrir une meilleure éducation. Cette éducation doit venir du chef et du conseil. Elle doit faire partie du système d’éducation de la communauté. Quand des personnes de l’extérieur de la communauté s’y joignent, elles doivent aussi être assujetties aux normes établies par la communauté.

La présidente : Merci. Il nous reste environ 10 minutes, et il y a trois sénatrices inscrites sur la liste.

La sénatrice Pate : Je vous remercie toutes d’être ici aujourd’hui. Je m’excuse de mon retard. J’avais une autre réunion. Si j’ai manqué quelque chose, n’hésitez pas à me dire que vous en avez déjà parlé, et je lirai la transcription.

Je suis particulièrement curieuse, madame Beavers, madame Levesque et vous toutes, compte tenu des témoignages que vous avez présentés à l’autre endroit, ici et dans vos mémoires. Vous parlez beaucoup de la nécessité de certaines modifications. À ce temps-ci de l’année, on nous met énormément de pression pour que nous n’apportions pas de modifications et que nous adoptions le projet de loi, parce que c’est mieux que rien. Parfois, ce genre d’attitude nuit à notre travail.

De votre point de vue, si notre comité faisait des observations fortes, cela nous empêcherait-il d’avancer ou serait-ce suffisant? Auriez-vous confiance que les règlements et modifications nécessaires verraient le jour?

Ensuite, au sujet des témoins d’agressions, particulièrement sur la Colline, certains d’entre nous ont souligné qu’il fallait éduquer les gens ne serait-ce qu’à ce qui constitue du harcèlement.

J’ai vu bien des jeunes femmes, en particulier, être pratiquement traitées comme des proies. Ce qu’elles peuvent considérer comme flatteur de la part d’hommes en position de pouvoir peut leur laisser un goût bien amer dans la bouche plus tard.

Quel genre de modèles d’éducation pourrions-nous utiliser, à votre avis? Existe-t-il déjà des outils que nous pourrions recommander ou qui devraient être intégrés au règlement? Avez-vous des recommandations à nous faire? Merci beaucoup.

Mme Beavers : Merci, sénatrice Pate.

Je commencerai par une petite réflexion sur le temps. Nous appuyons vivement cette initiative, qui était attendue depuis longtemps. On ne peut souligner assez l’importance de mettre en place un cadre juridique fort. Cela ne signifie pas pour autant qu’il ne faut pas prendre le temps d’y apporter toutes les modifications essentielles pour que le projet de loi soit aussi fort qu’il peut l’être et que sa mise en place soit efficace et adéquate.

Il y a des détails dont nous avons discuté aujourd’hui qui pourraient tout à fait être réglés par règlement. Nous savons qu’il y a des consultations en cours. Or, nous pensons aussi qu’il y a des amendements importants à apporter à la loi elle-même. Nous vous les avons présentés ce matin.

Vous nous parlez ensuite de programmes d’éducation. L’éducation peut prendre diverses formes. Il faut bien réfléchir à la forme à privilégier. L’éducation doit être permanente, bien financée, obligatoire, culturellement sensible et sexospécifique. Tous ces éléments doivent faire partie des mesures d’éducation qui doivent accompagner la loi.

Je veux aussi souligner la valeur éducative de la loi elle-même. Il est essentiel d’y inclure une définition robuste. Il demeure aussi important de faire le lien avec les autres recours et ressources qui existent, notamment en vertu de la Loi canadienne sur les droits de la personne.

Mme Radhakrishnan : Je suis d’accord avec Mme Beavers. Je pense qu’il nous faut une définition forte, qu’il faut parler des effets des comportements agressants, entre autres sur le milieu de travail, pour éviter toute ambiguïté. Il faut qu’il soit très clair que ce sont des comportements hostiles qui nuisent aux travailleurs et à leur sécurité. Cela nous aidera beaucoup à définir le harcèlement et la violence dont nous parlons.

La sénatrice Pate : Merci.

La sénatrice Martin : Je m’excuse moi aussi d’être arrivée en retard.

J’entends trois recommandations principales concernant le rôle des témoins et la formation sur l’intervention des témoins. Je pense que c’est un élément important. Il est intéressant de vous entendre affirmer que les témoins peuvent aussi être traumatisés tout en faisant partie du problème. Je pense que c’est très important de le dire.

Au sujet des modèles d’éducation, j’écoutais les réflexions de Mme Joe sur l’importance de tenir compte des particularités culturelles. Nous pouvons avoir un cadre, mais il doit y avoir un vaste éventail de modules adaptés.

Vous dites qu’il nous faut des définitions ou des articles inclusifs, mais qu’ils doivent aussi être très précis pour éviter toute ambiguïté. J’ai du mal à comprendre. Ce projet de loi, avec toutes ses lacunes — parce qu’il contient tellement d’exceptions particulières et qu’il y a tellement de choses à prendre en considération —, n’est pas parfait. Seriez-vous d’accord pour dire que c’est tout de même une mesure importante et que les réponses à ces préoccupations pourraient être fournies par règlement?

Je sais que nous en ferons bientôt l’étude article par article. Je suis déchirée en raison de mon désir de le rendre plus précis et de l’améliorer à la lumière de toutes les recommandations fournies. Le temps est compté, et il ne nous en restera bientôt plus. J’aimerais que vous me garantissiez que c’est un projet de loi important, que nous devons franchir cette étape et tenir compte de tous les enjeux que vous soulevez en vue de sa mise en œuvre.

Mme Joe : J’étais heureuse d’entendre les suggestions de mes collègues du milieu juridique et de celui de la formation. Je viens d’un milieu de travail très empreint de népotisme, comme il semble y en avoir chez tous les peuples autochtones, et je pense que nous avons besoin de voir comment ce projet de loi s’appliquera à nos Premières Nations, à l’environnement de travail de la bande et quelles ressources seront mises à notre disposition.

En ce qui concerne les témoins d’agressions, j’ai déjà été témoin d’une agression, et j’ai perdu mon emploi parce que je l’avais dénoncée. Il n’y avait rien pour m’aider. J’ai été témoin du harcèlement sexuel d’une amie; il lui a fallu presque deux ans pour franchir toutes les étapes du processus. La fatigue mentale qu’elle ressentait était énorme. En fin de compte, elle a été congédiée.

C’est un bon premier pas. Il nous faut des ressources éducatives et des outils pour nos femmes autochtones et toutes les femmes confrontées à ces problèmes au quotidien, faute de quoi elles préféreront fuir que de se battre pour leur emploi. Ce n’est pas correct. Merci.

La présidente : Il ne nous reste que quelques minutes.

La sénatrice Andreychuk : J’ai beaucoup aimé la dernière intervention. Cela me rappelle mes propres expériences de travail à certains endroits. J’ai vécu à peu près la même chose. Je vous en remercie publiquement.

Si j’ai bien compris, les deux amendements qui seraient probablement les plus utiles seraient d’abord celui apporté à l’article sur les définitions, qui consisterait à remplacer le mot « signifie » par le mot « comprend », à l’article 0.1, et à en supprimer le mot « autre ». Ce serait un premier pas vers une définition utile. J’ai oublié qui l’a proposé.

La sénatrice Hartling : Je pense que c’est Mme Gatchalian.

Mme Gatchalian : À mon avis, la suppression du mot « autre » est l’amendement le plus essentiel à ce stade-ci si vous voulez adopter le projet de loi.

La sénatrice Andreychuk : Je n’ai pas examiné la chose sous cet angle, et malheureusement, j’ai manqué une séance en raison des débats à la Chambre, mais l’autre serait d’ajouter une disposition pour préciser que rien dans ce projet de loi n’annule les droits protégés par la Commission des droits de la personne et son processus.

Ce serait les deux enjeux que vous jugeriez prioritaires pour commencer. Les autres semblent concerner davantage le processus réglementaire et pourraient exiger une réflexion approfondie, mais ce sont les deux qui ressortent d’un point de vue juridique. Voulez-vous ajouter quelque chose à ce sujet?

Mme Beavers : Si je peux vous proposer un autre amendement, je vous recommanderais d’inclure quelques mots pour dire que l’objectif de la loi est de protéger les droits de la personne et des femmes, particulièrement des femmes confrontées à de la discrimination sexospécifique en milieu de travail. Ces deux éléments visent à reconnaître le droit à un milieu de travail exempt de violence, de harcèlement et de harcèlement sexuel et d’inclure, dans l’objet de la loi, l’idée de favoriser l’égalité des sexes et l’autonomisation des femmes. Cela concerne les femmes de toutes les diversités et vise à reconnaître la discrimination sexospécifique.

La sénatrice Andreychuk : J’aurais besoin d’une précision. Quand vous avez parlé de la violence conjugale et de la façon dont elle se reflète dans le milieu de travail, je n’ai pas bien compris. Je pense qu’il faut être sensible à ce que les gens vivent à la maison et à ce qu’ils apportent au bureau, et vice versa. Je ne suis pas certaine de comprendre ce que vous vouliez dire.

Mme Levesque : En vertu de la Loi sur la santé et la sécurité au travail de l’Ontario, les employeurs sont tenus d’intervenir quand ils sont informés ou quand ils devraient raisonnablement être informés du fait qu’une personne vit de la violence conjugale qui expose une travailleuse à une blessure physique en milieu de travail. L’employeur a alors le devoir d’intervenir.

La sénatrice Andreychuk : D’accord.

Mme Levesque : À titre d’organisation féministe, nous croyons que c’est une avancée positive dans la loi que de reconnaître la dichotomie publique/privée qui soustrait souvent la violence conjugale de tout examen.

On reconnaît ainsi la forme de violence à laquelle les femmes sont le plus communément exposées.

En ce qui concerne la façon dont la violence conjugale peut se répercuter sur une travailleuse en milieu de travail, l’employeur ne peut pas tout simplement fermer les yeux, il a l’obligation d’agir. Ce serait un ajout très positif à la loi, qui la rendrait plus inclusive à l’expérience des femmes.

La sénatrice Andreychuk : Merci.

La présidente : Je vous remercie toutes infiniment. J’aurais bien aimé pouvoir accorder plus de temps à votre groupe, mais c’est impossible. Je souhaite vous remercier toutes du temps que vous nous avez consacré ce matin. Nous avons bien entendu ce que vous avez dit.

(La séance se poursuit à huis clos.)

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