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SOCI - Comité permanent

Affaires sociales, sciences et technologie

 

Délibérations du comité sénatorial permanent des
Affaires sociales, des sciences et de la technologie

Fascicule no 19 - Témoignages du 29 mars 2017


OTTAWA, le mercredi 29 mars 2017

Le Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie se réunit aujourd'hui, à 16 h 21, pour poursuivre son étude sur le rôle de la robotique, de l'impression 3D et de l'intelligence artificielle dans le système de santé.

Le sénateur Kelvin Kenneth Ogilvie (président) occupe le fauteuil.

[Français]

Le président : Je vous souhaite la bienvenue au Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie.

[Traduction]

Je m'appelle Kelvin Ogilvie, de la Nouvelle-Écosse, et je préside le comité. Je vais demander à mes collègues de se présenter, à partir de ma gauche.

[Français]

Le sénateur Cormier : René Cormier, du Nouveau-Brunswick.

[Traduction]

Le sénateur Dean : Tony Dean, de l'Ontario.

La sénatrice Hartling : Nancy Hartling, du Nouveau-Brunswick.

La sénatrice Stewart Olsen : Carolyn Stewart Olsen, du Nouveau-Brunswick.

Le président : Je vous rappelle que nous poursuivons aujourd'hui notre étude sur le rôle de la robotique, de l'impression 3D et de l'intelligence artificielle dans le système de santé.

Nous sommes absolument ravis d'accueillir nos deux témoins d'aujourd'hui, que je présenterai dans l'ordre. Il n'y a eu aucun bras de fer pour déterminer qui allait commencer, de sorte que je suivrai l'ordre dans lequel les témoins figurent sur l'ordre du jour, à moins qu'il n'y ait une objection.

Monsieur Bernstein, je vous souhaite la bienvenue en tant que président et chef de la direction de l'Institut canadien de recherches avancées, ou ICRA. Nous sommes ravis de vous accueillir. Nous vous invitons à présenter votre exposé.

Alan Bernstein, président et chef de la direction, Institut canadien de recherches avancées (ICRA) : Merci beaucoup, sénateur. Je suis très heureux d'être ici. Je pense que les sénateurs sont conscients qu'il s'agit d'un sujet d'actualité, plus particulièrement depuis les dernières semaines, au moment où le budget a été déposé.

Je vais parler de l'intelligence artificielle et de l'avenir des soins de santé. Peut-être devrais-je commencer par une introduction sur l'intelligence artificielle, c'est du moins ce que j'essaierai de faire. J'ai distribué un ensemble de diapositives. Je les regarde, je ne suis pas certain qu'elles expliquent vraiment ce dont je veux parler, mais j'essaierai de vous dire quelques mots puis de vous donner des exemples, ce qui sera un bon début.

À vrai dire, l'ICRA a lancé un programme il y a plusieurs années sous la direction de Geoff Hinton. Ces derniers jours, vous avez peut-être vu la photo du Dr Hinton et entendu des histoires à son sujet. Il est le véritable fondateur de l'apprentissage en profondeur ou des réseaux neuronaux profonds, qui ont révolutionné l'intelligence artificielle. C'est Geoff qui a réuni un groupe de scientifiques d'ici et d'ailleurs — c'est le mandat de l'ICRA — pour essayer de s'inspirer de la façon dont le cerveau apprend, selon nous, pour ensuite appliquer la même logique aux ordinateurs.

Nous pensons que le cerveau apprend lorsque des cellules du cerveau, les neurones, forment des liaisons qu'on appelle des jonctions synaptiques. Lorsqu'un enfant apprend de plus en plus de choses, par exemple que deux et deux font quatre, puis qu'il continue d'apprendre, la force de ces jonctions se décuple, puis l'information devient programmée. Je suis persuadé que vous avez tous déjà entendu ce mot. L'information devient programmée dans votre cerveau. Le Dr Hinton et ses collègues ont donc essayé de modéliser mathématiquement ce processus dans des ordinateurs au moyen d'algorithmes ou d'instructions données à l'ordinateur.

Tout neurone peut être lié à trois ou quatre neurones, de sorte que notre cerveau reçoit constamment des renforcements positifs et négatifs pendant que nous apprenons. Les couches de neurones s'additionnent jusqu'à ce que vous compreniez enfin que deux et deux font quatre. Voilà pourquoi on parle d'un apprentissage en profondeur; c'est attribuable aux couches et à la hiérarchie des neurones.

L'une des diapositives que je veux vous montrer est celle-ci, qui porte sur les éléments fondamentaux de l'apprentissage en profondeur. Il s'agit d'une représentation imagée des intrants d'un neurone à l'autre. La diapositive vous a peut-être laissé plutôt perplexe, mais permettez-moi de vous donner un exemple d'une chose que nous savons tous, simplement pour y réfléchir.

Disons que vous conduisez votre voiture et que vous voyez un ballon qui roule sur la chaussée. Si le ballon arrive de votre droite, vous allez probablement regarder à droite pour vérifier si un enfant court après le ballon, non pas parce que vous avez vu l'enfant, mais bien parce que vous savez d'expérience que les ballons ne roulent pas eux-mêmes sur la chaussée. Il y a habituellement un enfant qui joue avec le ballon, de sorte que vous allez freiner par précaution. Il y a un enfant neuf fois sur dix. C'est pour cette raison que vous regardez vers la droite.

Les premiers ordinateurs comme Deep Blue, qui ont battu des humains aux échecs il y a 20 ans, n'utilisaient pas l'apprentissage. L'ordinateur n'apprenait jamais; il utilisait sa vitesse et sa grande mémoire pour évaluer les déplacements de pièces possibles. Ce qu'on observe maintenant, c'est que l'apprentissage en profondeur permet à l'ordinateur d'apprendre, dans une certaine mesure, à jouer aux échecs comme le ferait un être humain.

Voilà les principes de base de l'intelligence artificielle. Permettez-moi de vous donner un exemple d'application dans le domaine de la médecine. Dans la présentation, vous trouverez une diapositive commençant par « Nature ».

Cet article a été publié il y a quelques semaines. Pour cet article, les scientifiques et les cliniciens ont soumis quelque 130 000 images de lésions cutanées à un ordinateur, notamment des images de dermatites, de piqûres d'insectes, de réactions allergiques, d'acné et de lésions cancéreuses. Les chercheurs ont téléchargé dans l'ordinateur le véritable diagnostic associé à chacune de ces lésions d'après les informations fournies par les cliniciens qui les avaient examinées. On a donc fourni à l'ordinateur ce qu'on appelle une séquence d'apprentissage.

C'est ainsi que nous apprenons, en quelque sorte. Nous apprenons par expérience. Un étudiant en médecine regarde de nombreuses images, et le professeur indique qu'il s'agit d'une dermatite, d'une piqûre de moustique ou d'un mélanome. Il en va de même pour l'ordinateur, à certains égards.

On a ensuite fourni à l'ordinateur une série d'images de lésions pour lesquelles un diagnostic final n'avait pas encore été posé. Les mêmes images ont été présentées à des dermatologues. On a comparé la capacité de l'ordinateur et des dermatologues à poser un diagnostic exact sur ces lésions.

Avancez maintenant de deux diapositives. La diapositive a pour titre « L'apprentissage en profondeur donne de meilleurs résultats que le dermatologue moyen pour classer les cancers de la peau ». Je pense que c'est très évocateur. Dans tous les cas — qu'il s'agisse du cancer de la peau, d'un mélanome, d'un nævus ou d'un cancer —, un algorithme d'apprentissage en profondeur est parvenu à poser un diagnostic avec autant d'exactitude, sinon plus, que des dermatologues chevronnés. L'ordinateur recherche certaines caractéristiques des anomalies.

Cette étude, publiée il y a quelques semaines, est un exemple probant de l'application médicale de l'apprentissage profond. En somme, lorsque vous apprenez quelque chose, vous apprenez essentiellement à prévoir ultérieurement certaines choses avec une grande précision. Donc, si vous voyez une balle, vous en déduirez qu'il y a un enfant à proximité. Dans le cas d'une lésion, vous arriverez à déterminer si elle est cancéreuse ou non avant qu'elle ait été examinée par un pathologiste. L'apprentissage profond permet à un ordinateur de faire ce genre de prédictions, comme un être humain. Au quotidien, nous ne pourrions pas fonctionner sans cette capacité d'anticipation. Ce serait le chaos permanent. Par exemple, lorsqu'on arrive dans ce bâtiment, on sait qu'on aura à passer par l'appareil à rayons X. Il le faut, à tout le moins. Grâce à l'apprentissage profond, un ordinateur peut faire des prédictions, et c'est essentiellement ce qu'il fait.

Si on parvient à appliquer ce genre de raisonnement, alors... J'ai parlé du cancer de la peau. L'exemple suivant porte sur le cancer du sein. Comme vous le voyez sur la diapositive, le taux d'erreur des pathologistes est de 3,5 p. 100 contre 2,9 p. 100 pour l'intelligence artificielle. Donc, les résultats de l'ordinateur sont meilleurs que ceux des pathologistes. En combinant les deux, le taux d'erreur baisse d'un demi-point de pourcentage. Le taux d'erreur précis est déterminé après l'obtention des résultats des biopsies pratiquées par les pathologistes confirmant ou infirmant le diagnostic de cancer du sein.

L'exemple suivant est un cas de maladie oculaire diabétique; on obtient des résultats similaires.

Ce que vous devez retenir, à mon avis, c'est que l'intelligence artificielle et particulièrement l'apprentissage en profondeur — une découverte ou une invention canadienne, peu importe le terme qu'on puisse utiliser — révolutionneront la médecine.

Geoff Hinton, un éminent spécialiste du domaine, a été cité dans le New Yorker cette semaine, dans un article écrit par Siddhartha Mukherjee, l'auteur d'un livre sur l'application de l'intelligence artificielle dans le domaine de la médecine intitulé L'empereur de toutes les maladies : une biographie du cancer. Le Dr Hinton a dit ce qui suit : « On devrait immédiatement cesser de former des radiologues. »

Je pense que c'est probablement une exagération, car on aura sans doute encore besoin de radiologues dans un avenir prévisible. Toutefois, je pense qu'on peut affirmer sans se tromper qu'on aura de plus en plus recours à cette technologie. Une personne qui penserait avoir une lésion prendra une photo à l'aide d'un appareil comme celui-ci et l'enverra à l'ordinateur par courriel. Ensuite, en quelques secondes, l'ordinateur enverra au patient ou à son médecin une réponse sur la nature de la lésion, par exemple un cancer de la peau.

J'ai un dernier exemple. Un jeune homme du nom de Brendan Frey, un boursier de deux programmes de l'ICRA — la génétique et l'intelligence artificielle — a démarré une entreprise appelée Deep Genomics. La recherche du Dr Frey porte sur le séquençage de l'ADN, de nos gènes, pour cerner les différences génétiques qui ont une incidence sur la santé.

Au total, on compte environ trois milliards de bases d'ADN pour tous ceux qui sont dans cette salle. C'est beaucoup d'information, mais nos différences ne représentent que 0,01 à 0,02 p. 100 du total. En outre, ces différences ne sont pas toutes importantes. Certains ont les cheveux noirs, d'autres des cheveux bruns, ou roux, et d'autres sont atteints de calvitie. On compte des hommes et des femmes. Toutefois, certains d'entre nous ont un gène qui prédispose aux maladies cardiaques.

On cherche à savoir quelles différences ont une incidence sur la santé et lesquelles n'en ont pas, ce qui n'a rien de facile. Grâce à l'apprentissage en profondeur, l'ordinateur peut éliminer les interférences et déceler les signaux probants. Il suffit d'avoir assez de données et de contexte sur une population donnée et de verser ces informations dans l'ordinateur. Le Dr Brendan Frey a utilisé cette approche avec une grande précision pour un cas type pour des enfants atteints de la maladie d'Aran-Duchenne et pour des cas de fibrose kystique et de cancer du côlon chez les adultes. Il s'agit, dans ce cas, de la convergence de deux technologies très puissantes : la génomique et l'intelligence artificielle.

Je souligne encore une fois que l'intelligence artificielle repose sur l'intégration des données. Nous recueillons tous des données considérables au fil de nos expériences de vie. Il en va de même pour les programmes d'intelligence artificielle. Il faut lui fournir des données pour qu'il puisse apprendre. C'est ce cadre d'apprentissage qui permet d'obtenir des prévisions assez précises. Selon moi, cette technologie sera d'abord utilisée comme outil de diagnostic. Je crois savoir que mon collègue traitera des applications liées à la chirurgie, peut-être aussi à la prévention et à d'autres aspects des soins de santé.

Je vais arrêter ici, sénateur.

Le président : Merci. Nous accueillerons un spécialiste de la génomique fondamentale. Nous faisons de notre mieux pour traiter de tous les aspects du domaine. Vous nous avez présenté un excellent résumé et une excellente introduction. Merci beaucoup.

Nous passons maintenant au Dr Christopher Schlachta, qui est directeur médical du Canadian Surgical Technologies & Advanced Robotics, mais qui témoigne aujourd'hui à titre personnel. Docteur Schlachta, la parole est à vous.

Dr Christopher Schlachta, directeur médical, Canadian Surgical Technologies & Advanced Robotics (CSTAR), à titre personnel : Merci beaucoup. Je vous suis reconnaissant du privilège de comparaître au comité aujourd'hui. Avant de commencer, je tiens à préciser que je suis aussi un chirurgien. Je suis donc à l'aise dans le contexte de cette discussion. J'ai fourni une déclaration écrite au préalable. J'en ferai la lecture tout en essayant de l'agrémenter quelque peu.

Tout d'abord, l'une des plus récentes révolutions dans le monde de la chirurgie est le concept de chirurgie à effraction minimale. En 150 ans de chirurgie moderne, nous n'avons jamais présenté nos excuses aux patients pour les souffrances et les traumatismes causés par l'incision que nous devons pratiquer afin d'effectuer une procédure dans une cavité corporelle. Sur le plan technique, cette incision est la partie inutile d'une intervention chirurgicale. Lorsqu'on pense aux étapes d'une intervention chirurgicale, l'important est l'intervention dans la cavité abdominale, et non l'incision pour y avoir accès. Or, jusqu'à tout récemment, il n'existait aucun autre moyen pour le chirurgien de voir le problème et d'intervenir. Cette incision entraîne de la douleur, des retards dans le rétablissement et des complications. Elle a toujours été nécessaire simplement parce que nous devions avoir accès à l'intérieur du corps.

En guise de contexte, précisons qu'un changement de paradigme s'est produit à la fin des années 1980, avec l'arrivée de la chirurgie assistée par ordinateur. La laparoscopie diagnostique existait depuis des décennies, mais son utilisation était limitée parce que c'était une procédure fastidieuse. Le chirurgien utilisait un laparoscope qu'il devait tenir d'une main. Cela lui permettait d'examiner une articulation ou le pelvis, par exemple, en passant par une petite incision. Il fallait manipuler l'appareil avec soin afin d'éviter de contaminer le laparoscope, qui était stérile, avec son œil pendant l'examen. Seul le chirurgien pouvait voir à l'intérieur. Avec un peu de chance, le chirurgien avait une main libre pour pratiquer une ligature des trompes par laparoscopie, par exemple, mais ne pouvait guère faire plus. C'était un outil plutôt limité.

L'ajout d'une caméra numérique moderne à l'extrémité de l'appareil a permis de généraliser les interventions chirurgicales endoscopiques avec effraction minimale. Cela a permis de libérer la deuxième main du chirurgien. En outre, toutes les personnes présentes dans la salle d'opération peuvent voir la même chose que le chirurgien, notamment les assistants en chirurgie qui peuvent avoir leurs propres instruments. Donc, même si la laparoscopie existe depuis longtemps, ce n'est qu'à la fin des années 1980 que le nombre d'interventions par micromanipulation chirurgicale a explosé.

On a commencé par la chirurgie de la vésicule biliaire. La durée d'hospitalisation a été considérablement réduite en l'espace de sept ans. Si vous étiez hospitalisé pour l'ablation de la vésicule biliaire — beaucoup d'entre vous connaissent probablement quelqu'un qui a subi cette procédure —, le séjour à l'hôpital était auparavant de 7 à 10 jours. De nos jours, étant donné la petite taille des incisions, quelque 80 p. 100 des ablations de la vésicule biliaire sont faires en chirurgie ambulatoire. Maintenant, en 2017, pratiquement toutes les procédures impliquant des cavités corporelles peuvent être pratiquées avec effraction minimale à l'aide d'un appareil endoscopique quelconque. Le but est d'éliminer les incisions inutiles et de passer par des incisions de plus en plus petites.

Parlons maintenant du CSTAR. Le CSTAR, un centre de recherche chargé de mettre au point une nouvelle génération de robots chirurgicaux, a été fondé en 2003. Les ingénieurs du CSTAR possèdent une expertise particulière en haptique — l'ajout du sens du toucher sur les robots — et en télémanipulation.

Par exemple, un instrument de laparoscopie pour le système da Vinci, qui permet de procéder à la palpation peropératoire de tissus et d'effectuer des procédures peropératoires d'échographie, a été mis au point au CSTAR. Ces travaux ont reçu le prix de la meilleure innovation lors du Surgical Robot Challenge de 2015 tenu au symposium Hamlyn à l'Imperial College. Ils ont été choisis parmi les travaux soumis par un grand nombre de concurrents. Je mentionne cet exemple parce que nos propres recherches en laboratoire ont démontré que la sensibilité du doigt robotisé, pour ainsi dire, est supérieure à celle d'un doigt humain. Cette information pourrait servir de contexte pour notre discussion.

Les programmes de recherche du CSTAR ont reçu du financement octroyé à la suite d'un examen par les pairs, dans le cadre de programmes du gouvernement fédéral comme la FCO, le RCE, le CRSNG et les IRSC. Nos ingénieurs sont sans doute d'avis que le CSTAR est le centre de recherche en robots chirurgicaux le mieux équipé au pays. Les ingénieurs du CSTAR disposent d'un vaste réseau de collaboration, qui englobe notamment le réseau AGE-WELL dont on vous a déjà parlé. Nos diplômés en génie sont très convoités par l'industrie de la robotique et par les entreprises canadiennes qui conçoivent des technologies médicales assistées par ordinateur.

En plus de mettre des technologies au point... Permettez-moi de vous parler brièvement d'innovation, un terme surutilisé ces temps-ci. Je dirais que la véritable innovation ne se limite pas aux inventions; elle doit aussi comprendre la transformation de thérapies prometteuses en soins de première ligne.

Le CSTAR a commencé à offrir de la formation médicale. Comme vous l'avez souvent entendu, les erreurs médicales sont une cause importante de morbidité et de mortalité. Ce problème est exacerbé par un environnement où le rythme de changement et l'introduction de nouvelles technologies sont rapides et vont en s'accélérant. À une certaine époque, les aspirants chirurgiens suivaient une formation de quatre ou cinq ans au terme de leurs études en médecine et pouvaient ensuite avoir une carrière de 30 à 35 ans. Aujourd'hui, étant donné le rythme effréné de l'intégration de nouvelles technologies dans le domaine de la chirurgie, et en médecine en général, nous devons examiner la possibilité d'offrir des cours de perfectionnement à l'ensemble de la main-d'œuvre, et ce, à intervalles réguliers. En ce moment, nous n'en avons pas la capacité, mais il convient d'y réfléchir sérieusement.

Des patients seront blessés et de nouvelles technologies échoueront si elles ne sont pas mises en pratique de manière sûre grâce à des programmes de formation responsables. Le CSTAR a ouvert le Kelman Centre for Advanced Learning, un laboratoire axé sur les compétences en chirurgie. Nous offrons actuellement un grand nombre de programmes de simulation destinés aux professionnels de la santé, et non seulement aux chirurgiens.

Un avantage de la chirurgie assistée par ordinateur est qu'il s'agit d'une technologie numérique. De fait, en créant une simulation virtuelle, il n'est plus nécessaire d'avoir un patient présent. Pensez aux méthodes que nous avons utilisées au fil du temps pour la formation des étudiants en médecine et des chirurgiens. Ils pratiquent leurs compétences sur les patients, en fait. C'est un programme de responsabilisation graduelle, un cadre hautement supervisé qui a donné de bons résultats jusqu'à maintenant. Toutefois, la plupart des patients seront sûrement soulagés d'apprendre qu'ils ne serviront plus de cobayes et qu'on aura plutôt recours à des modèles en réalité virtuelle, à des mannequins et à des simulations pour que les gens atteignent un certain niveau de compétence.

Une des plus importantes subventions de recherche que nous avons reçues jusqu'à maintenant provenait du Fonds pour la recherche en Ontario et visait à mettre au point des technologies de simulation sur ordinateur. Le Dr DiRaddo, du CNRC, a témoigné au comité. Nous avons collaboré avec lui dans le cadre du programme NeuroTouch.

Nous avons commencé à nous intéresser à la téléprésence, également dans le domaine de la formation. Nous avons collaboré avec l'entreprise Intuitive Surgical, qui a conçu et fabriqué le robot da Vinci, qui est actuellement le seul robot chirurgical multifonction offert sur le marché, voire la norme pour le marché. Nous avons collaboré avec l'entreprise lorsqu'elle a procédé au premier essai de son prototype de téléchirurgie. Toutefois, la téléchirurgie à distance pose d'importants problèmes de faisabilité. C'est avec plaisir que j'en discuterai avec vous plus tard.

Nous avons également mis au point notre propre programme de télémentorat. Il est impossible de pratiquer une intervention chirurgicale à distance, mais on peut certes aider un chirurgien à distance. Je préside actuellement le groupe de travail sur le télémentorat de la Society of American Gastrointestinal and Endoscopie Surgeons.

Étant donné que nous nous intéressons depuis longtemps à la chirurgie robotisée et que nous avons élaboré des programmes de simulation et de formation, Intuitive Surgical, l'entreprise qui fabrique le système de chirurgie assistée par robot da Vinci, a choisi le CSTAR comme centre de formation canadien pour son système. Essentiellement, nous formons les chirurgiens selon les normes établies pour le système da Vinci pour qu'ils puissent l'utiliser en milieu de travail. Nous avons formé de nombreux chirurgiens.

Nous offrons aussi des programmes destinés aux coordonnateurs de services infirmiers, car ce sont vraiment les infirmières qui font tout le travail lié aux systèmes robotisés.

Je travaille au CSTAR parce que je crois fermement que l'avenir de la chirurgie et des soins médicaux en général repose sur l'interposition d'un ordinateur entre le patient et le fournisseur de soins de santé. Tout comme l'intelligence artificielle facilite l'établissement d'un diagnostic et la prise de décisions, la chirurgie guidée par l'image et la mécatronique donnent des capacités surhumaines au chirurgien et lui permettent de pratiquer des interventions avec effraction minimale. Elles comportent également de nombreux mécanismes pour réduire d'éventuels maux causés par des erreurs.

Nous devrons relever un certain nombre de défis avant de concrétiser cette vision, mais avec l'expérience et l'expertise que nous avons acquises depuis quelques décennies, d'après moi, l'objectif est atteignable. Les fournisseurs de soins de santé canadiens, surtout, et les centres de recherche canadiens contribuent activement à l'atteinte de cet objectif de recherche.

Je serai ravi de répondre à vos questions.

Le président : Merci. Je donne maintenant la parole à mes collègues.

La sénatrice Stewart Olsen : Vos deux exposés étaient très instructifs. Nous comprenons que nous en sommes au point de départ à bien des égards.

Monsieur Bernstein, j'aimerais revenir au début. Utilisons l'exemple de la dermatologie. Qui choisit les lames et les études de cas, et qui les entre dans l'ordinateur? Ensuite, qui déclare quel est le diagnostic confirmé? Comment faites- vous pour que l'ordinateur apprenne? Comment trouvez-vous l'information?

M. Bernstein : Dans l'étude dont j'ai parlé — et je vais généraliser, car je crois que ce sera vrai dans l'ensemble des cas —, les lames venaient de divers endroits aux États-Unis. C'est un groupe associé à Google qui a accompli ce travail. Les membres du groupe ont recueilli les lames et ils connaissaient le diagnostic formel. Si c'était le cancer, ils le savaient grâce à la pathologie, et si c'était une éruption ou autres, ils le savaient grâce au clinicien local. Ils ont recueilli un grand nombre d'échantillons partout aux États-Unis, dans divers hôpitaux d'enseignement qui avaient prélevé de véritables lésions cutanées au fil des années. Ils ont entré tout cela dans l'ordinateur. Il y avait donc de nombreux échantillons, soit 194 000.

Ce n'est pas ce que vous m'avez demandé, mais cette réponse me permet de soulever un autre point. Un étudiant en médecine n'examine pas 194 000 échantillons pour apprendre à devenir médecin. Cela montre qu'à l'heure actuelle, l'apprentissage en profondeur n'en est probablement qu'au stade embryonnaire de la science. Des formes beaucoup plus puissantes d'apprentissage en profondeur — ou peu importe ce qu'on l'appellera — verront probablement le jour dans les 5 à 10 prochaines années, à mesure que la recherche se poursuit.

La sénatrice Stewart Olsen : Docteur Schlachta, je vous poserais à peu près la même question. Lorsqu'on programme un ordinateur pour qu'il effectue une intervention chirurgicale, qui entre la meilleure façon de pratiquer l'intervention? Faites-vous la même chose; prenez-vous une vaste gamme d'exemples? Comment faites-vous la personnalisation?

Dr Schlachta : Les robots chirurgicaux d'aujourd'hui ne sont pas encore assez autonomes pour qu'on puisse programmer un ordinateur afin de lui faire pratiquer une intervention chirurgicale. Nous utilisons principalement des systèmes robotisés de type appelé « maître-esclave ». Le robot fait uniquement ce que je lui dis de faire, précisément en mouvant mes mains et mes doigts. Il reproduit exactement mes gestes.

Certains systèmes robotisés peuvent faire des opérations de façon partiellement autonome. Il existe un robot Mako qui fait de l'arthroplastie des genoux et des hanches. La première fois que j'ai rencontré les fabricants de cet appareil, ils l'ont présenté comme étant un robot partiellement autonome : ils font un examen de tomodensitométrie avant l'intervention chirurgicale, ils travaillent avec des images tridimensionnelles pour concevoir un genou artificiel parfait, par exemple, puis le chirurgien présente l'articulation du genou au robot. En gros, on peut appuyer sur un bouton et le robot alèse l'articulation et il fournit un point de contact parfait pour la prothèse. À l'heure actuelle, le système est vendu comme un système contrôlé et manœuvré par le chirurgien; le robot fournit des limites, et le chirurgien peut sentir une résistance lorsqu'il arrive à la limite où il peut aléser l'os. Toutefois, il n'est pas encore autonome. Ces systèmes rencontrent une certaine opposition.

La sénatrice Stewart Olsen : À mesure que la technologie évolue, je peux voir qu'il sera extrêmement important de surveiller comment les données sont entrées dans les deux cas. Sur le plan éthique, des critères ont-ils été adoptés, ou commencez-vous à songer à l'expertise nécessaire pour en établir à mesure que vous réalisez des progrès? La technologie prendra la relève dans bien des cas, surtout dans les régions éloignées, ce que je trouve formidable. Toutefois, en amont, il faudra faire très attention.

M. Bernstein : Je vais essayer de répondre. L'exemple que je vais donner ne relève pas du domaine de la santé, mais lorsque vous vous rendez sur le site web d'Amazon et que vous cherchez des choses à acheter, Amazon utilise un programme d'intelligence artificielle qui scrute les données que vous entrez et les données de millions d'autres utilisateurs partout dans le monde. À partir de ces données, il décide quelle quantité d'un produit il commandera et quels produits il cessera d'offrir. C'est fait en temps réel, et vos décisions d'achat forment vos données.

Dr Schlachta : Si vous me le permettez, j'aimerais ajouter qu'un article est paru ce mois-ci dans une revue intitulée Science Robotics. Je crois qu'il s'agit d'un éditorial rédigé par maints auteurs, dont notre directeur de l'ingénierie. On y fournit un système de classification des robots chirurgicaux allant de 0 à 5, et les robots sont classés selon leur niveau d'autonomie : la classe 0 comporte les systèmes mécatroniques dits « maître-esclave », tandis que la classe 5 compte les robots pensants entièrement autonomes qui font les interventions chirurgicales eux-mêmes. Même dans leur article, les auteurs considèrent encore aujourd'hui la classe 5 comme de la science-fiction, mais c'est certainement l'objectif que nous cherchons tous à atteindre.

Tout comme l'invention de la calculatrice et de l'ordinateur n'a pas mis les comptables au chômage, je ne pense pas que les robots autonomes remplaceront complètement les chirurgiens. Leurs conseils et leurs indications sont nécessaires. De nombreux aspects de la chirurgie requièrent du jugement. Même si l'intelligence artificielle est grande, je pense que les gens seront préoccupés de savoir qui prendra les décisions. Où fera-t-on l'incision? Sur qui rejettera-t- on la responsabilité si le robot commet une erreur? Un chirurgien peut s'excuser et admettre qu'il a fait une erreur, mais si le robot commet une erreur, comment le patient ayant subi les complications le prendra-t-il?

La sénatrice Stewart Olsen : Merci beaucoup.

Le président : Docteur Schlachta, pouvez-vous fournir la référence de l'article dont vous venez de parler à notre greffière, s'il vous plaît?

Dr Schlachta : Je le ferai.

Le président : J'aimerais obtenir des précisions sur ce que la sénatrice Stewart Olsen cherchait, je crois. Dans les exemples d'interventions chirurgicales que vous avez donnés, vous avez mentionné une intervention normale dirigée et faite par le chirurgien; puis, dans le dernier exemple, qu'on voit de plus en plus, l'appareil délimite le mouvement de l'outil chirurgical et il appuie le chirurgien à l'intérieur de la cavité réelle créée par l'intervention chirurgicale. Cet exemple était très clair.

Si l'on revient au cas dans lequel le chirurgien manœuvre l'appareil durant l'opération, la question qui reste est de savoir à quel point l'appareil chirurgical aide le chirurgien à effectuer une intervention presque parfaite. Bien sûr, la stabilité est un des facteurs. Certains articles montrent qu'en général, la stabilité de l'outil robotisé est un des facteurs qui appuient le chirurgien.

Pouvez-vous nous aider à mieux comprendre ce que l'appareil fait pour augmenter considérablement la précision et l'efficacité de l'intervention chirurgicale lorsqu'il est manœuvré par le chirurgien?

Dr Schlachta : L'appareil contribue à cela de nombreuses façons; je vais donc tenter de répondre le plus succinctement possible.

Le facteur le plus simple est, comme vous l'avez dit, la stabilité de l'appareil. D'autres facteurs sont l'ergonomie et le recours à la chirurgie guidée par l'image. Ce sont tous des aspects importants pour les chirurgiens, car lorsqu'ils doivent faire de longues interventions complexes, la possibilité d'utiliser un système qui réduit la fatigue et les efforts requis les aide de façon générale à maintenir leur attention et leur concentration. Je sais que ce n'est pas exactement ce que vous vouliez savoir.

Nous nous tournons vers des systèmes où l'ordinateur mène une certaine partie de l'intervention dans un but précis. Par exemple, ce que l'utilisation de robots durant des interventions d'arthroplastie a montré, c'est que les taux de contact des prothèses posées par les meilleurs chirurgiens varient entre 70 à 80 p. 100. En utilisant un robot, on peut atteindre des taux bien au-delà de 90 p. 100. Si la planification peut être faite avant l'opération et si la précision de l'intervention peut être parfaite, les résultats seront vraisemblablement meilleurs. Or, il y a de nombreuses réserves liées à cela.

Il existe actuellement des défis. Le système pourrait être partiellement autonome. Certains chirurgiens préfèrent toujours manier les instruments eux-mêmes et se faire avertir par l'ordinateur lorsqu'ils s'approchent de la limite, par exemple. Or, on pourrait intégrer beaucoup d'autres fonctions dans le système. On pourrait y entrer des zones interdites. Si des complications catastrophiques pouvaient survenir durant l'intervention chirurgicale, par exemple si le bras robotisé était déplacé vers la mauvaise partie du corps, on pourrait programmer le système pour interdire au bras d'aller à un certain endroit, ce qui empêcherait le chirurgien d'accomplir ce geste. Ce sont là des fonctions élémentaires.

La reconnaissance d'images; durant les interventions chirurgicales, les chirurgiens doivent voir ou reconnaître des structures essentielles, et bientôt, la reconnaissance d'images permettra au système de dire au chirurgien : « Voici l'uretère. Au cas où vous ne l'ayez pas encore remarqué, il est là. Vous n'avez pas à le chercher; je l'ai déjà trouvé pour vous. » Ce sont les fonctions élémentaires qui existent aujourd'hui.

Comme nous en venons à des fonctions plus autonomes, l'idée serait probablement que le chirurgien aide à dresser le plan préopératoire, puis que le robot exécute ce plan sous la supervision d'un chirurgien.

Le président : Merci pour ces renseignements très utiles.

La sénatrice Seidman : Merci beaucoup à vous deux pour vos exposés.

Monsieur Bernstein, j'aimerais parler avec vous du fondement de l'apprentissage en profondeur, que vous avez tenté de nous décrire, car il s'agit manifestement de l'essence même de l'intelligence artificielle. Une de vos diapositives porte sur l'apprentissage en profondeur; selon Lukas Masuch, cette forme d'apprentissage est exceptionnellement efficace pour l'apprentissage de tendances, elle utilise des algorithmes et elle assimile beaucoup d'information. Essentiellement, on tente de simuler les itérations du cerveau et la façon dont il traite les données, puis de produire des réactions algorithmiques.

Je pense maintenant précisément aux soins de santé et au recours à l'intelligence artificielle pour établir des diagnostics et prendre des décisions d'ordre médical. Certains soutiendraient que l'art d'établir des diagnostics et de prendre des décisions d'ordre médical va au-delà d'une simple itération ou d'un simple traitement de données. Est-ce vrai? Je ne sais pas comment ce serait possible d'intégrer cela dans l'intelligence artificielle, mais tente-t-on de le faire? Bien sûr, il faudrait également tenter d'inclure suffisamment de normes morales et éthiques dans le processus décisionnel algorithmique.

M. Bernstein : Ce sont deux très bonnes questions ou observations. Je ne suis pas médecin; j'ai un doctorat en philosophie. Ma sœur est médecin de famille. Lorsque l'article dont j'ai parlé au comité est paru dans le magazine Nature, j'en ai parlé à ma sœur, et elle a dit qu'elle ne confierait jamais la tâche d'établir des diagnostics pour ses patients à un ordinateur. Nous avons eu une très bonne discussion à ce sujet. Elle n'a pas changé d'avis, mais j'ai souligné que si un ordinateur pouvait rendre des diagnostics exacts et si, après un certain temps, un médecin responsable finissait par se fier uniquement à l'ordinateur — c'est une machine, après tout —, un clinicien qui aurait confiance aux diagnostics de l'ordinateur pourrait en fait passer plus de temps avec ses patients.

Je pense que nous avons tous vécu cela. Pour une raison quelconque, nous nous sentons mieux une fois que nous savons de quoi nous souffrons, même s'il n'existe pas de traitement efficace. « J'ai quelque chose à la peau, docteur. Que se passe-t-il? J'ai des lésions horribles. Dites-moi ce que c'est, s'il vous plaît. » Le médecin répond : « Vous êtes atteint de... », suivi d'un long nom. Vous ne savez pas du tout de quoi il s'agit, mais votre médecin le sait, et cela vous rassure. D'après moi, cette information doit venir d'un être humain. Ce n'est pas la capacité de la machine qui est en cause, c'est l'interaction humaine relativement à l'interaction entre un humain et une machine. C'est une question de psychologie, du moins à ce point-ci, et de notre capacité d'établir des rapports avec un être humain relativement à notre capacité d'établir des rapports avec une machine.

Toutefois, je crois que cela permettra aux médecins de passer plus de temps avec leurs patients. Au lieu de déclarer : « Vous avez un mélanome. Je vais vous voir la semaine prochaine. C'est au tour du prochain patient. », le médecin pourra parler au patient des implications du diagnostic, qu'il soit grave ou non, et de ses options. Je pense donc que c'est une bonne façon, une façon positive, de voir les choses.

Le président : Dr Schlachta aimerait aussi répondre, madame la sénatrice.

La sénatrice Seidman : Absolument, puisque la robotique a recours à l'intelligence artificielle. Comment gérerez- vous cela?

Dr Schlachta : Pour répondre à la question concernant l'art de la médecine, j'enseigne à des étudiants en médecine et à des résidents, et la discussion sur l'art revient souvent. En réalité, c'est une question d'expérience et d'intuition. Quand on voit souvent quelque chose, on commence à avoir des pressentiments. L'intuition, qu'est-ce que c'est? Ce n'est rien de surnaturel. C'est la reconnaissance de tendances complexes, et c'est quelque chose que nous n'avons pas encore appris à expliquer clairement.

D'après moi, un système informatique assez intelligent pourra acquérir la même intuition que nous. Nous n'arrivons tout simplement pas à expliquer comment nous avons trouvé la réponse. Des étudiants en médecine me demandent parfois : « Comment le savais-tu? ». Je réponds : « Je ne sais pas; j'avais un pressentiment. » Or, ce pressentiment est le fruit d'un processus rationnel; je ne peux tout simplement pas encore l'expliquer. Je suis certain qu'un ordinateur assez intelligent pourra y arriver aussi bien que nous.

M. Bernstein : Si je peux intervenir, c'est justement l'apprentissage en profondeur. Je ne préconise pas de remplacer les humains par des machines, mais tout le processus de l'apprentissage en profondeur consiste à entrer des données dans l'ordinateur, puis l'ordinateur se sert des données pour établir un diagnostic et il obtient immédiatement de la rétroaction qui lui indique s'il a raison ou s'il a tort. Dans l'exemple que je vous ai donné, l'ordinateur a reçu les 130 000 ensembles de données, ou lames dans ce cas-là, puis il a obtenu la rétroaction. Ainsi, l'ordinateur « apprend » et il acquiert la même intuition qu'un étudiant en médecine, ou non, mais il semble l'acquérir, et dans l'exemple en question, l'ordinateur a obtenu de meilleurs résultats que les dermatologues dans la grande majorité des cas.

C'est parce que l'ordinateur a la vitesse et la remémoration qu'il faut et des capacités que nous n'avons pas. Il y a un aspect d'apprentissage. Ce que nous appelons l'intuition est en fait de l'apprentissage.

La sénatrice Seidman : L'expérience, jusqu'à un certain point.

M. Bernstein : Exactement. Je peux vous donner un autre exemple. Il est tiré d'un article du New Yorker. Si l'on montre à l'ordinateur l'image d'une bicyclette, il sera facile pour lui de déterminer qu'une bicyclette a deux roues, un guidon et un siège. C'est simple. Un enfant fera la même chose, mais lorsqu'on montre à un enfant à faire de la bicyclette, il apprend. Quand on veut tourner à gauche à bicyclette, on sait qu'on ne doit pas se pencher vers la gauche. La bicyclette tombera. On se penche vers la droite. On l'a appris. C'est quelque chose qui relève de l'expérience et qui est difficile à enseigner, en fait, mais tout enfant qui apprend à faire de la bicyclette l'apprend et ne l'oublie pas. C'est presque ancré. Voilà de quoi il s'agit.

La sénatrice Seidman : Ce que vous dites sur l'apprentissage en profondeur, l'intuition et l'art est vraiment utile. Qu'en est-il de la question qui survient toujours au sujet de l'éthique? Comment intégrer cela dans un système d'intelligence artificielle et de robotique, ou doit-on le faire? Laisse-t-on des gens de l'extérieur s'en occuper? Pouvez- vous intégrer des mesures de protection de l'éthique de sorte qu'une machine ou un robot ne fassent pas des choses d'une manière...

Dr Schlachta : C'est une question très complexe. C'est un sujet qui fait l'objet de bien des discussions. Il y a deux ou trois semaines, je participais à une table ronde sur l'éthique en robotique à l'Institut de philosophie Rotman de l'Université Western. J'étais le chirurgien du groupe, mais il y avait des spécialistes des armes létales autonomes et de diverses choses. C'est une question importante.

En fin de compte, on peut intégrer des règles de base. On peut revenir aux trois lois d'Asimov et intégrer une hiérarchie de règles. Ce qui était formidable au sujet de ces livres, c'était lorsque les règles ne fonctionnaient pas et qu'il fallait essayer de déboguer le logiciel. C'est ce qui fait que ces histoires sont aussi intéressantes.

L'autre élément qui s'ajoute, c'est la compassion, dont j'ai déjà parlé, mais c'est un aspect important à prendre en considération et, des deux côtés, ce qui effraie le plus tout le monde, c'est une machine dénuée de sentiments. Viendra-t- il un moment où il y aura des machines spirituelles correspondant à la description de Kurzweil dans son livre? Je suppose qu'on peut s'attendre à tout avec l'intelligence artificielle.

Le président : La question éthique est une autre question liée à l'apprentissage en profondeur parce qu'il y a tellement de niveaux d'éthique. Le plus simple, ce serait de déterminer si l'on est convaincu que la technologie automatisée utilisée est hautement efficace. Quels sont les niveaux de risque et a-t-on informé le patient comme il se doit, ce que vous faites régulièrement pour la chirurgie de toute façon? Il y a ensuite la question de savoir si l'instrument pourra prendre le contrôle de la salle d'opération et enlever des parties à sa guise. Nous n'examinerons pas la question en profondeur. Vous avez donné une bonne première réponse.

Je crois vous avoir tiré d'affaire, docteur Schlachta. L'article dont vous avez parlé a été publié dans Science Robotics, et vous avez dit que c'était un éditorial, n'est-ce pas?

Dr Schlachta : Oui.

Le président : Et le premier auteur est Dr Yang, n'est-ce pas?

Dr Schlachta : Cela me semble exact. L'article a été publié le 17 ou le 24 mars, je crois.

Le président : C'est cela. Vous n'aurez donc pas à nous fournir d'autres renseignements à ce sujet.

Monsieur Bernstein, en répondant à une question, vous avez donné un exemple intéressant concernant l'acceptation d'un diagnostic, c'est-à-dire que vous voulez qu'un vrai médecin pose le diagnostic. Dans un témoignage précédent, on nous a dit qu'une fois que le diagnostic a été posé et lorsque la chirurgie est pratiquée, les patients sont ravis de savoir qu'un système robotique aide à guider le chirurgien. C'est un aspect complémentaire de la nature humaine très intéressant, non? On nous a dit que le degré de confiance chez les gens quant aux machines était très élevé à cet égard, mais de toute évidence, pour ce qui est des diagnostics, votre exemple limité propose que l'humain adopte une approche différente.

M. Bernstein : Notre société part du principe que les humains sont plus fiables que les machines sur ce plan. C'est probablement compréhensible. Je ne serais pas surpris si avec l'expérience, nous changions de point de vue.

Samedi, j'ai accordé une entrevue à la télévision au sujet de l'intelligence artificielle, et auparavant, on rapportait qu'une voiture Uber avait été frappée par une voiture conduite par un humain, et que la voiture avait été renversée. L'entreprise Uber a retiré toutes ses voitures intelligentes de la route. On émettait l'hypothèse que quelque chose avait fait défaut dans la voiture sans conducteur. Or, quand on y pense, la voiture conduite par un humain a frappé la voiture Uber et l'a renversée. Il est raisonnable, voire plus raisonnable, de supposer qu'une erreur humaine et non une erreur de la machine est à l'origine de l'accident. Les primes élevées d'assurance nous indiquent que les humains commettent beaucoup d'erreurs en conduisant.

Le président : Je ne veux pas que nous nous éternisions sur le sujet, mais les analyses effectuées à cet égard montrent que l'argument que les gens font valoir, c'est qu'un humain pourrait avoir vu quelque chose que la voiture Uber n'a pas vu, et même si la faute revient au véhicule qui est entré en collision avec l'autre, l'instinct humain ferait peut-être en sorte qu'un humain qui conduit la voiture Uber aurait bien pu faire une manœuvre d'évitement. Encore une fois, nous pourrions continuer à en parler longtemps. Vos observations sont excellentes, mais ce sont les questions qui seront soulevées à mesure que nous avancerons dans le processus.

Le sénateur Neufeld : Je vous remercie, messieurs. Vous nous fournissez de l'information très intéressante.

Vous avez donné l'exemple d'une personne qui a une éruption sur la main et où l'on prend une photo à l'aide d'un iPhone, et un ordinateur dira immédiatement de quoi il s'agit. Que se passe-t-il s'il s'agit d'un problème interne plutôt que d'une lésion sur la peau, le bras ou la main? Comment procède-t-on? Se sert-on de de l'ADN, qu'on intègre dans le iPhone ou l'ordinateur?

M. Bernstein : Il se trouve que l'exemple que j'ai donné concerne des lésions cutanées, mais on commence à voir des exemples concernant les biopsies pour le cancer du sein ou les électrocardiogrammes pour les maladies du cœur. Il existe de nombreux moyens de voir ce qui se passe à l'intérieur du corps humain, dont les radiographies.

L'ICRA a tenu un atelier en Europe avec Siemens, l'entreprise d'électronique, une entreprise de diagnostic, pour déterminer comment les choses se dérouleront lorsque l'IA sera appliquée à des diagnostics médicaux et à des appareils de radiographie. Des entreprises comme Siemens et General Electric et de jeunes entreprises souhaitent vivement appliquer l'intelligence artificielle sur ce plan.

Je vais me répéter un peu. Lorsqu'on alimente l'ordinateur d'un ensemble d'apprentissages de milliers de radiographies indiquant la bonne réponse, par exemple, pour un problème dans l'estomac, le pancréas ou un organe interne, avec les données scientifiques actuelles, après environ 100 000 images et la bonne réponse, l'ordinateur apprendra quelle est la bonne réponse pour le cas suivant. Pour tout diagnostic médical imaginable, qu'il s'agisse de l'examen d'une lésion cutanée à l'aide d'un iPhone, d'une radiographie, d'un appareil de RMN ou d'IRM ou d'une biopsie, on pourrait théoriquement — et je pense que nous le voyons de plus en plus dans la pratique — introduire l'information dans un ordinateur avec un programme d'apprentissage en profondeur.

Le sénateur Neufeld : Je ne pense pas craindre que les ordinateurs prennent ces décisions, car ils prennent déjà beaucoup de décisions pour nous dans le domaine médical maintenant, pour les analyses de sang, par exemple. Ce n'est pas un médecin qui fait le travail, mais une machine, et il en est ainsi depuis longtemps. Ce n'est pas le genre de choses qui me font peur. Je présume qu'il s'agit de savoir jusqu'où on ira.

Je viens d'une époque — je suis assez âgé — dans laquelle nous n'avions même pas de cartes de paiement. Il fallait aller à la banque pour encaisser un chèque. Nous obtenions l'argent, nous avions les billets de 20 $ dans nos mains et tout allait bien. Lorsque les cartes de paiement sont apparues, au départ, je me suis dit que je n'allais pas m'en procurer une parce que je ne pensais pas qu'un ordinateur était fiable, mais j'aime la machine. Il ne m'a pas fallu beaucoup de temps pour le savoir. On insère la carte et tout est fait automatiquement, et c'est correct. On ne vérifie habituellement pas le compte. Tout est là. Ce type de choses est formidable pour ce qui est de la façon dont nous progresserons en ce qui a trait aux soins de santé.

L'autre élément, c'est la robotique dans les opérations. Des médecins m'ont opéré au cœur et ne se sont pas servis de leurs mains, mais d'une forme de technologie robotique. Je voulais seulement que cela se règle. Je ne me disais pas que c'était fou et je ne me demandais pas comment je pouvais avoir confiance en ce type de choses. On insère des caméras, comment puis-je avoir confiance en ce genre de choses? Je faisais toujours confiance au médecin qui s'en occupait.

Je pense que les gens accepteront davantage ce qui se présentera dans le domaine des soins de santé que ce à quoi nous nous attendons peut-être quant à la mesure dans laquelle l'IA et la robotique sont en fait mieux pour nous. Je suis probablement assez âgé pour être effrayé par ce genre de choses, mais je ne le suis pas, en fait.

Dr Schlachta : Je suis ravi de répondre à cette observation. Je pense qu'elle est tout à fait éclairante.

Les patients veulent s'assurer qu'ils recevront des soins sûrs. La discussion sur le consentement éclairé qui a lieu lorsqu'on propose une thérapie et une opération — et on discute des risques potentiels et des complications reconnues —, c'est la partie terrifiante de la discussion. Personne ne veut entendre parler de 1 p. 100 de ceci et de 5 p. 100 de cela. Les gens veulent savoir qu'ils feront partie du groupe de personnes pour lesquelles les choses « vont presque toujours bien ».

Je n'approuverais pas l'observation qu'un témoin précédent vous a peut-être faite, soit la mesure dans laquelle des patients préféreraient qu'une partie de l'opération soit effectuée par une machine. J'ai rencontré de nombreux patients qui sont réfractaires à l'idée qu'un robot participe à leur chirurgie. Leur crainte principale concerne la question de la compassion, dont nous avons déjà parlé, et ils se demandent comment on peut savoir que le robot ne commettra pas d'erreur. Hollywood n'a rien fait pour aider à cet égard, mais comment sait-on qu'il n'y aura pas de pépin, et que le programme ne déraillera pas, tandis qu'on sait que l'humain gardera le contrôle de la situation et fera les choses correctement? Je répondrais tant que le système est surveillé par un chirurgien, qu'il soit autonome ou non.

Nous utilisons déjà des appareils dans la salle d'opération qui sont des appareils semi-autonomes. À une certaine époque, si l'on voulait faire une ligature pour un vaisseau sanguin durant une opération, on faisait une suture. Nous le faisons encore la majeure partie du temps. Or, il y a toute une gamme d'appareils qui sont utilisés couramment chaque jour dans la salle d'opération qui utilisent des formes d'énergie comme l'électrochirurgie et l'énergie ultrasonique pour sceller des vaisseaux sanguins. Ils comprennent une puce d'ordinateur qui évalue l'impédance du tissu et renvoie un signal sonore au chirurgien qui indique que le vaisseau sanguin a été scellé. Un « bip » est émis et on coupe, et l'opération se poursuit. Nous avons confiance en l'appareil : il nous dira si nous avons bien scellé le vaisseau; si ce n'est pas le cas, il y aura beaucoup de saignements. Nous avons déjà intégré ces technologies dans la salle d'opération. Je crois que le patient ne doute pas que nous les utilisions bien.

Le président : Docteur Schlachta, vous avez apporté des précisions et ce que vous avez dit est compatible avec les propos du témoin précédent. Nous parlions de la robotique contrôlée par le chirurgien. Les patients se sentaient extrêmement confiants en ce qui concerne la chirurgie robotique sous la supervision du chirurgien. Il ne s'agissait pas d'une chirurgie robotique complètement autonome. Je ne l'ai pas dit et vous l'avez précisé. J'aurais mieux décrit les choses en disant que le témoin avait dit que le degré de confiance était très élevé pour ce qui est de l'utilisation de la technologie robotique par un chirurgien.

La sénatrice Raine : Je vous remercie beaucoup, tous les deux. C'est très intéressant.

Je pense qu'à un moment donné, docteur Schlachta, vous avez dit qu'il ne fallait pas obtenir une formation de radiologue, mais vous n'avez pas dit quelle formation on devrait suivre. Nous disons vraiment que pour ce qui est du domaine du diagnostic, on pose un diagnostic sur ce qui ne va pas. Nous utilisons un grand nombre de différentes technologies présentement — radiographie, IRM, tomodensitométrie, TEP, biopsies, et cetera. Cela ne correspond-il pas au domaine du radiologue? Il envoie l'information au pathologiste, qui l'envoie à la personne qui prend la décision au bout du compte. Comment cela fonctionne-t-il? Avec ce nouveau secteur, où se situe l'interprétation de l'intelligence artificielle dans le secteur du diagnostic?

Dr Schlachta : Je pourrais dire tout d'abord que c'est M. Bernstein qui a dit qu'il n'y avait pas d'avenir dans la radiologie.

M. Bernstein : Eh bien, ce n'est pas tout à fait cela.

Dr Schlachta : Pour le diagnostic et concernant le processus, il y a l'imagerie médicale, la biopsie, et cetera. Puisque les outils ne cessent de s'améliorer, je ne crois pas que cela élimine nécessairement le besoin qu'il y ait un spécialiste dans ce domaine. Je ne crois pas qu'il y aura des pertes d'emplois catastrophiques dans le secteur des ressources humaines en santé. Les outils permettront simplement aux fournisseurs de santé de faire un meilleur travail.

La sénatrice Raine : Très peu de TEP sont réalisées au Canada à l'heure actuelle. Pourtant, je crois comprendre que c'est l'un des meilleurs outils de diagnostic. Est-ce que ce qui s'en vient fera en sorte que ce sera plus facilement accessible ou nécessaire?

Dr Schlachta : À mesure que ces outils de diagnostic seront disponibles, l'un des plus grands problèmes — et c'est un sujet de discussion entièrement distinct —, ce sont les coûts qui y sont liés, car ils ne font qu'augmenter. La question qui se pose est la suivante : à quel point les soins reçus seront-ils meilleurs, à quel prix obtiendra-t-on ces meilleurs soins, et la société est-elle prête à payer pour cette amélioration progressive des soins?

La TEP et l'IRM suscitent beaucoup d'inquiétudes. Nous ne remarquons pas une amélioration des résultats sur le plan de la santé dans la population à mesure que ces appareils augmentent en nombre. Dans la mesure où ils sont utilisés de la bonne façon, ils peuvent être très utiles, mais on peut également en faire un usage excessif, et il y aurait alors des résultats faussement positifs.

M. Bernstein : Pour en revenir à votre première question, ma réponse sera un peu différente de celle de mon collègue. Je ne suis pas en désaccord avec lui, mais je pense que mon point de vue est un peu différent.

Concernant l'application de l'intelligence artificielle à la médecine, l'IA est une technologie transformatrice. Il n'y aura pas d'amélioration graduelle dans le diagnostic. Il s'agit d'une technologie transformatrice ou perturbatrice — on utilise ces expressions. Lorsque des technologies perturbatrices apparaissent, il est très difficile pour nous de prévoir les répercussions à long terme sur la médecine, dans ce cas-ci. Je ne pense pas que nous connaissions encore les répercussions à long terme sur la médecine, car nous en sommes au début. Les revues spécialisées commencent à peine à publier des articles sur le sujet. Je crois que nous en sommes au début d'une aventure et que nous devrons voir où elle mènera. Il ne s'agit pas seulement d'avoir un meilleur appareil de radiographie. C'est une tout autre façon d'analyser les données que nous n'avons jamais eue auparavant. À mon avis, ce sera intéressant.

J'ai tendance à utiliser des métaphores, alors je vous demande un instant d'indulgence. Songez à l'époque où le tracteur a fait son apparition dans le secteur agricole. Cette machine a largement remplacé les humains et, en somme, elle a permis aux agriculteurs de nourrir la planète, en plus de faire accroître la productivité. Toutefois, lorsque les tracteurs ont été mis sur le marché pour la première fois au début du XXe siècle — si vous lisez un peu les publications de l'époque, comme je l'ai fait —, force est de constater que les prévisions de leur impact sur l'agriculture étaient complètement erronées.

Je crois donc que nous devons surveiller la situation et voir comment les choses évolueront afin de déterminer, en l'occurrence, les répercussions sur la main-d'œuvre médicale.

Le sénateur Dean : J'ai récemment subi une chirurgie par laparoscopie, alors je peux attester des avantages de cette technologie. Je ne serais probablement pas ici aujourd'hui si j'avais subi l'autre forme d'intervention chirurgicale.

Vous nous avez fait d'excellents exposés. Je dois reconnaître les efforts du Dr Bernstein non seulement dans le travail qu'il effectue à l'ICRA, mais aussi dans l'organisation de discussions partout au pays entre plusieurs organismes prestigieux pour assurer la cohérence de la récente annonce du gouvernement.

Ma question porte sur le rôle du gouvernement. Au début de ces audiences, nous nous demandions où est la place du gouvernement dans tout cela? Dispose-t-il d'une stratégie? Nous avons, en quelque sorte, une réponse très solide en ce qui concerne le financement et, bien entendu, les partenariats avec certains organismes de premier plan. Que peut faire de plus le gouvernement pour favoriser et maximiser les avantages de cette technologie, qu'il s'agisse d'édicter des règlements, d'offrir d'autres mesures incitatives ou de s'enlever du chemin? Dans le cadre de vos entretiens sur les autres formes de soutien qui pourraient être possibles auprès des différents ordres de gouvernement, y a-t-il d'autres mesures que nous devrions prendre, mis à part le fait de vous accorder du financement et de vous demander de contribuer à l'élaboration d'une stratégie?

M. Bernstein : C'est une excellente question, sénateur, et je vous remercie également de vos observations.

Pour revenir à ce que j'ai dit tout à l'heure, il s'agit d'une nouvelle technologie déstabilisante. Certes, si j'examine la stratégie que le gouvernement a convenu de financer par l'entremise de l'ICRA, il y a plusieurs grands volets.

Un des volets consiste à bâtir une fondation pour l'innovation afin de renforcer l'économie canadienne. C'est clair. Nous avons également demandé des fonds, et le gouvernement a donné son accord, pour régler certaines des questions sociales, éthiques, juridiques et philosophiques qui sont associées à l'intelligence artificielle. Le gouvernement a aussi un rôle important à jouer en ce qui concerne — et cela ne vous surprendra pas — les répercussions de l'intelligence artificielle sur la société en général, y compris la médecine, sans toutefois s'y limiter. Il est difficile de prévoir avec précision comment tout cela va se dérouler.

Voici une des questions philosophiques qui se poseront, et c'est une anecdote que j'aime raconter lors de soupers intimes. De nombreuses données révèlent que, dans le cas d'une personne qui vit seule ou qui est malade, le fait d'avoir un animal de compagnie a un effet salutaire sur son sentiment de bien-être et son rétablissement. Ce constat peut-il s'appliquer à une machine intelligente? Nous ne le savons pas.

Nous entendons beaucoup d'histoires d'horreur sur le sort des aînés qui sont négligés dans les foyers. Aujourd'hui, SIRI peut nous parler sur notre iPhone et répondre aux questions. La reconnaissance vocale est une forme d'intelligence artificielle.

Verrons-nous des robots jouer valablement le rôle de pourvoyeurs de soins dans le système de santé? Quel est le rôle du gouvernement dans l'acquisition de cette technologie? Je suppose que ce sera dispendieux. Comment devons-nous réglementer ce domaine et régler certaines des questions éthiques qui surgissent? Ce sont là de gros points d'interrogation.

Dr Schlachta : Je peux peut-être enchaîner là-dessus. Il y a lieu d'aborder la question sous plusieurs angles.

J'ai pris connaissance d'un article qui décrit une étude menée auprès d'aînés présentant un risque de démence. On les a répartis aléatoirement en deux groupes. Un des groupes s'est vu attribuer un robot aux allures et aux comportements d'un enfant de deux ans. En comparant les résultats au fil du temps, on a constaté que la progression de la démence était moins marquée auprès de ce groupe. Ces données sont déjà disponibles.

Il y a, d'une part, une vision globale et, d'autre part, une vision ciblée. Je suis heureux de parler de la vision globale parce que je suis tout à fait convaincu qu'un jour, il y aura des médecins et des chirurgiens entièrement autonomes, mais ce ne sera pas de sitôt.

La chirurgie robotique n'a pas évolué à un rythme aussi rapide que nous l'avions tous prévu. J'ai déménagé à London, il y a 12 ans, pour travailler au sein du CSTAR. Si vous m'aviez demandé alors à quoi ressemblerait la chirurgie dans 12 ans, je vous aurais dit que nous ferions tout avec l'aide de robots. Pourtant, aujourd'hui, le taux de pénétration demeure très faible. Il existe beaucoup d'obstacles. C'est, en grande partie, une question de coûts. Il ne suffit pas de dire que le système a besoin de plus d'argent, mais c'est l'un des enjeux auxquels nous faisons face en ce moment. Certains pays ont adopté d'autres modèles de financement pour gérer leur système de santé. Par conséquent, ils s'y prennent autrement que nous pour refiler ces coûts.

Le grand défi que nous devons relever est le suivant : avec l'expansion de la chirurgie robotique au Canada, chaque hôpital qui dispose actuellement d'un robot en a fait l'acquisition grâce à la philanthropie. Lorsqu'un hôpital reçoit un robot en guise de don, il doit alors s'occuper du contrat de service et des coûts de fonctionnement, ce qui fait gonfler son budget de fonctionnement. Ce n'est pas nouveau. Nous savons tous que le système de santé éprouve des difficultés, et nous voulons être aussi rentables que possible, mais les nouvelles technologies coûtent toujours plus cher à leurs débuts. Si la robotique est vouée à l'échec dès maintenant parce que nous n'avons pas les moyens de financer les premières étapes de la chirurgie robotique, alors nous perdrons la possibilité de profiter de l'avenir prometteur qui nous attend à mesure qu'un plus grand nombre de systèmes robotiques seront mis sur le marché. Il y a déjà de nombreux concurrents qui convoitent le système da Vinci. Nous nous attendons tous à ce que les coûts s'effondrent, mais nous ne voulons pas prendre du retard à ce stade-ci, faute de ressources financières pour adopter cette technologie.

D'une part, il faut trouver des moyens d'encourager l'utilisation responsable des technologies chirurgicales ou médicales. D'autre part, il faut s'occuper de la réglementation, comme vous l'avez évoqué. Je suis sûr qu'il serait presque insultant pour moi de dire que le gouvernement doit assumer une responsabilité pour ce qui est de protéger les citoyens, mais encore faut-il que cette réglementation n'entrave pas l'innovation.

La sénatrice Hartling : Merci beaucoup. Votre exposé était très impressionnant et très instructif.

On dirait bien que le Canada excelle en matière d'innovation. Vous avez parlé de marketing et de commercialisation de certains de ces produits et services. Comment vos organisations se débrouillent-elles? D'après vous, que faut-il faire?

M. Bernstein : En ce qui a trait à l'intelligence artificielle, si je puis me permettre d'intervenir en premier, dans le discours du budget, le ministre Morneau a annoncé 125 millions de dollars pour financer l'élaboration d'une stratégie pancanadienne sur l'intelligence artificielle par l'entremise de l'ICRA. Cette stratégie vise à attirer et à conserver les talents aux plus hauts échelons et à accroître le nombre d'étudiants diplômés qui se lancent dans ce domaine, ainsi qu'à régler certains des problèmes sociaux et éthiques dont nous venons de parler. Je crois que nous entendrons bientôt d'autres annonces concernant des innovations. Il faut donc un jumelage entre les entreprises et les talents nécessaires pour faire les recherches scientifiques, y compris les jeunes qui suivent une formation.

Dans le budget, le ministre Bains a annoncé 900 millions de dollars pour la création de super grappes. J'ignore lesquelles finiront par être financées, mais de nos jours, il est difficile d'imaginer un secteur de l'innovation qui ne dépend pas de l'intelligence artificielle. Je pense que nous verrons bientôt ce genre de situation.

Aujourd'hui, l'esprit d'entreprise est très présent chez les jeunes, les étudiants diplômés et les étudiants de premier cycle. Je sais pertinemment que, partout au pays, de nombreux jeunes lancent de petites entreprises dans toutes sortes de domaines axés sur l'intelligence artificielle. Il y a quelques semaines, le Globe and Mail publiait, dans la section affaires, un article très important sur le Creative Destruction Lab à la Rotman School of Management de l'Université de Toronto. Le Creative Destruction Lab encadre justement certains de ces jeunes qui ont des idées d'entreprise, un peu comme dans l'émission Dragons' Den, puis on leur fournit les ressources financières nécessaires pour démarrer leur entreprise.

Je crois que nous commençons à voir une activité entrepreneuriale un peu plus dynamique qu'avant dans ce domaine. Je suis en fait très optimiste.

Dr Schlachta : Je pense que mon collègue a très bien résumé la situation.

[Français]

La sénatrice Mégie : Je reviens à la question que mon collègue vous a posée par rapport à l'appareil qui permet d'obtenir un diagnostic pour une lésion de la peau. J'essaie de voir quels en seraient les avantages. Maintenant, on prend la photo, puis on l'envoie au médecin. Par la suite, le médecin fixe un rendez-vous pour effectuer une biopsie, parce que de nombreuses lésions de la peau se ressemblent. Si on prend une photo, on ne peut pas savoir s'il s'agit d'un cancer ou non. Les lésions se ressemblent toutes. Il faut absolument faire la biopsie. Le fait de le faire, est-ce que cela change quelque chose pour nous comparativement à ce qu'on fait en ce moment? Maintenant, on prend la photo et on l'envoie au médecin, qui donne un rendez-vous. Y a-t-il un avantage de plus à cela?

[Traduction]

M. Bernstein : Je n'ai pas pu entendre l'interprète, mais je pense avoir compris votre question. Du moins, je le crois. Vous me corrigerez, vous ou peut-être le président, si jamais je me trompe.

À mon avis, nous aurons quand même besoin, pour le moment, d'une intervention combinée de la machine et du médecin afin d'assurer un bon diagnostic et d'inspirer un sentiment de confiance propre au contact entre humains. Je pense qu'il en sera ainsi pour des années à venir. Pour ce qui est de savoir si cela se poursuivra dans un avenir lointain, je l'ignore. Je ne sais pas si j'ai répondu à votre question, sénatrice.

Dr Schlachta : Si vous me le permettez, je pense avoir compris, moi aussi, votre question. Lorsqu'un dermatologue ou un spécialiste des lésions cutanées — peu importe son champ de spécialité — examine une lésion cutanée, dans la vaste majorité des cas, il s'agit de faire une analyse visuelle de la lésion avant d'exercer son jugement et de déterminer si un examen plus approfondi s'avère nécessaire. Il n'y aurait rien de mal à ce qu'un système d'intelligence artificielle recommande une biopsie à un moment donné, mais pas nécessairement dans chaque cas. Il pourrait même s'agir d'une biopsie automatisée, accompagnée d'un diagnostic pathologique automatisé et d'un résultat généré par ordinateur.

[Français]

La sénatrice Mégie : On va voir. Merci.

Le sénateur Cormier : Je tiens à vous remercier pour la qualité pédagogique de vos présentations. Nous suivons ces travaux depuis un certain temps, et je dois vous avouer que j'ai eu beaucoup de difficulté à m'y intéresser, étant donné que je ne suis pas de ce secteur-là, mais vos présentations sont fort passionnantes et éclairantes.

Nous sommes conscients de tous les avantages que cela représente. Cela dit, quelles sont les réticences principales du corps médical par rapport à tous ces changements et quels sont les enjeux pour la formation des médecins et du corps médical avec l'arrivée de ces nouvelles technologies? Je pose cette question dans le contexte des établissements d'enseignement et des régions. On peut imaginer l'accès à de la formation dans les grands centres, mais dans les plus petites régions, comment voyez-vous ces enjeux?

[Traduction]

Dr Schlachta : Merci beaucoup de cette question, qui est d'ailleurs très pertinente. Cela dépend de ce qui est en cause. Si nous parlons de futurs systèmes robotiques entièrement autonomes, je ne sais pas trop comment aborder le sujet à l'heure actuelle. C'est tellement lointain que cela relève de la science-fiction, même si je crois que nous en serons là probablement un jour.

Sur le plan pratique, en ce qui concerne les systèmes robotiques ou toute nouvelle technologie, c'est un véritable enjeu en ce moment. La question est la suivante : ces systèmes améliorent-ils réellement nos pratiques chirurgicales? La chirurgie à effraction minimale fait l'objet d'un débat permanent depuis 30 ans, c'est-à-dire depuis sa création. Certains chirurgiens continuent de rejeter catégoriquement toute preuve selon laquelle cette technique est forcément meilleure qu'une chirurgie ouverte nécessitant une incision.

Tout cela est une question de changements de paradigme, et il faut du temps. Une génération de chirurgiens doit prendre leur retraite pour faire place à une nouvelle génération qui adhère à ce mode de pensée, qu'il soit fondé ou non sur des données probantes. Mais il y a toujours, à mon avis, une bonne dose de scepticisme scientifique par défaut qui consiste à dire : « Si c'est mieux pour mes patients, prouvez-le moi. »

Du point de vue de la formation, il s'agit d'un vrai problème. En ce qui concerne les résidents en formation, nous avons tiré une leçon bien claire dans le contexte de la chirurgie de la vésicule biliaire avec effraction minimale, si je peux utiliser cet exemple. Ce n'est pas un système d'intelligence artificielle.

La complication la plus redoutée d'une opération à la vésicule biliaire par laparoscopie, c'est une blessure au conduit biliaire. Le conduit biliaire n'est pas nécessairement visé par cette intervention chirurgicale, mais c'est tout près. On ne peut pas vivre sans conduit biliaire. Si le chirurgien se déconcentre et coupe le conduit par accident, le patient devra alors subir une chirurgie reconstructive majeure, après quoi il sera condamné à une vie de misère.

Le risque de cette complication a triplé avec l'avènement de la chirurgie de la vésicule biliaire par laparoscopie. Nous sommes tous d'avis que c'est principalement attribuable à la façon dont la laparoscopie a été diffusée. En effet, la technologie était très axée sur l'industrie. Les chirurgiens se réunissaient, parcouraient le pays et donnaient des cours en fin de semaine en utilisant un modèle animal, puis le lundi matin, ils agressaient leur premier patient en essayant de faire une chirurgie de la vésicule biliaire par laparoscopie. Nous reconnaissons tous, avec le recul, que ce n'est probablement pas la bonne façon de mettre en pratique de nouvelles technologies, mais il s'agit d'une question qui revient sans cesse et qui porte sur la façon dont nous recyclons l'effectif.

Avant de recevoir leur diplôme dans une toute nouvelle spécialité chirurgicale, les résidents suivent une formation sur ces nouvelles technologies dans un environnement contrôlé. Nous ne leur permettons pas de procéder aux examens ou à la pratique tant que nous ne sommes pas convaincus qu'ils ne présentent aucun danger. Or, voici le problème : lorsqu'une nouvelle technologie fait son apparition et qu'il y a déjà des milliers de chirurgiens, comment faut-il s'y prendre pour leur enseigner cette nouvelle technologie? Nous n'avons pas encore résolu ce problème.

Notre approche actuelle consiste à essayer d'élaborer des programmes de mentorat et de télémentorat, dans le cadre desquels nous nous rendons, physiquement ou virtuellement, dans la salle d'opération des chirurgiens pour travailler avec eux. Ce genre de formation pratique constitue actuellement un domaine de recherche et de développement très convoité. Cela ne règle pas la question de l'intelligence artificielle ou de l'autonomie, mais la nécessité d'offrir des possibilités de recyclage présente un défi constant. J'ignore si cela répond à la question.

M. Bernstein : Si vous me le permettez, je suis tout à fait d'accord avec le Dr Schlachta et je me contenterai d'ajouter une observation.

Sénateur, votre question portait également sur les petits centres. Dans la foulée de ces nouvelles technologies de pointe, peu importe lesquelles — laparoscopie, chirurgie robotique, intelligence artificielle ou génomique —, il devient crucial de transférer ces technologies vers les petits centres pour que les Canadiens aient un accès égal à des soins de qualité. Cette dissémination a déjà lieu, mais elle ne vise pas d'abord les petits centres; cela ne fait aucun doute. On commence par les hôpitaux d'enseignement en plein centre-ville, les soi-disant centres de soins tertiaires ou quaternaires, et la diffusion se fait à partir de là. Je crois que c'est un problème, mais je ne sais pas quelle est la solution.

Le président : Avant de passer au second tour, j'aimerais vous poser quelques questions.

Tout d'abord, docteur Schlachta, en ce qui a trait à votre observation sur les longs délais liés à l'adoption de la chirurgie robotique, je me souviens qu'il y a 25 ans ou plus, ceux d'entre nous qui utilisaient des ordinateurs s'attendaient à ce que nous ayons tous un dossier de santé électronique dans quelques années. Pourtant, ce n'est toujours pas le cas au Canada, même si nous avons dépensé des milliards de dollars. Il y a donc des leçons à tirer pour la suite des choses.

Monsieur Bernstein, j'ai trouvé que votre analogie du tracteur était bonne; cela montre que les choses ne se déroulent pas comme prévu. L'automobile pourrait même être un exemple plus frappant, car on a commencé à l'utiliser avant que les routes n'existent, et les prévisions variaient d'un extrême à l'autre : pour certains, ce monstre motorisé annonçait la fin du monde et pour d'autres, c'était signe que tout était possible. Comme vous l'avez dit à juste titre, l'utilisation imminente de la technologie était assez différente de ce que les gens avaient prévu au début. Voilà pour mes observations. J'aimerais vous poser deux questions.

À ce jour, la plupart des exemples qu'on nous a donnés portent sur un soin de santé précis, comme une chirurgie ou un diagnostic, ou encore sur un élément précis des soins de santé. Le problème auquel le Canada fait maintenant face au chapitre des soins de santé ne concerne pas seulement la grande efficacité de la chirurgie en tant que telle, mais bien l'obtention du diagnostic. Notre système cloisonné de prestation de soins de santé est problématique, car il nous oblige à consulter un généraliste, à attendre un an ou plus pour avoir un premier rendez-vous avec un spécialiste et à patienter souvent une autre année pour pouvoir être opéré, et ainsi de suite.

Voilà en quoi consiste la prestation des soins de santé — il s'agit du processus global au Canada. Pouvez-vous vous pencher, de quelque façon que ce soit, sur la manière dont notre connaissance, notre apprentissage approfondi de l'utilisation de l'intelligence artificielle, nous aidera à modifier la prestation pour faire en sorte de réduire la durée du processus entre le diagnostic et la solution au problème du patient?

M. Bernstein : Une excellente question, sénateur Ogilvie, et très ambitieuse, qui plus est. J'aimerais revenir à votre premier commentaire concernant les automobiles. Lorsque les voitures sont entrées sur le marché, personne ne se souciait des accidents de la route ou de la pollution qui détruirait nos villes. Personne ne songeait à ces choses. Une des leçons que nous pouvons tirer de cet exemple est que nous comprenons et prévoyons mal les effets secondaires, positifs ou négatifs, d'une nouvelle technologie.

Je pourrais donner bien d'autres exemples; je mène cette étude dans mes temps libres. Je vais vous en donner un de plus. Lorsque la télé a fait son apparition, ma mère voulait que je m'éloigne de l'appareil à cause des rayons X. Elle ne se préoccupait nullement de la programmation. Je pense que nous avons du mal à prévoir les effets négatifs d'une nouvelle technologie.

Pour en revenir à votre question, il est intéressant de songer à privilégier une approche globale ou systémique à l'égard des soins de santé qui soit appuyée par de nouvelles technologies, comme l'intelligence artificielle. L'intelligence artificielle permet de passer en revue les données, en gros, qui ont été isolées et se révèle être une façon judicieuse d'en examiner une grande quantité. Nous sommes 35 millions d'habitants au pays, et je comprends que la santé est de compétence provinciale, mais nous générons beaucoup de données. Si nous étions astucieux, nous essayerions de saisir autant de données que possible concernant le style de vie, la génétique et la génomique, l'âge, la démographie et les groupes ethniques, et nous tenterions de les utiliser, non pas pour personnaliser la médecine, mais bien la prévention. Nous parlons tous de médecine personnalisée et de la façon dont nous personnalisons le traitement de votre maladie à vous, mais comment peut-on en faire autant avec la prévention? Vous et moi sommes différents. Notre bagage génétique n'est pas le même, par exemple. Je n'ai pas encore tout à fait répondu à votre question. Je la contourne et j'en suis conscient. C'est un aspect d'une approche globale à l'égard de la santé par opposition aux soins de santé. Comment peut-on dresser le portrait complet de cette personne et adapter une stratégie de prévention qui lui soit propre?

Bien entendu, cela n'éliminera pas entièrement la maladie. J'en suis conscient.

Le président : J'aimerais vous ramener un peu en arrière. Il y a un exemple de cas au Canada dans lequel un hôpital donné a reçu un certain nombre de personnes souffrant de symptômes particuliers, tous liés au même souci de santé. Au lieu de soumettre les patients au triage habituel à l'urgence, on a choisi de faire venir les médecins spécialisés dans les symptômes de la maladie. Ils ont formé une petite équipe de deux ou trois personnes. Comme ce cas est fréquent dans cet hôpital urbain, on a constaté que, en faisant appel à ces spécialistes pour faire le triage, il était possible de déterminer bien plus efficacement quels patients avaient besoin d'être traités immédiatement par rapport à ceux qui pouvaient attendre un peu. Après six mois, on avait, en gros, diminué de moitié le temps nécessaire pour intervenir et enregistré un bien plus haut taux de satisfaction auprès des patients et des travailleurs de la santé concernés.

C'est ce que j'avais en tête lorsque je vous ai posé la question, car si vous êtes dans une situation où vous avez eu la possibilité d'approfondir le volet connaissances grâce à la quantité extraordinaire de renseignements dont on dispose sur le système, vous êtes en mesure de suivre les processus pour faire le diagnostic afin de déterminer qui devraient être traités rapidement et comment ils devraient l'être.

Le second point que j'ajouterai est que, dans un certain nombre de nos études sur les divers aspects des soins de santé, nous avons observé — et j'ai parlé de cloisonnement tout à l'heure — que si un diabétique se présente chez le médecin, il compose avec plus d'une maladie. Les problèmes qui surviennent au cours du traitement d'un patient émergent sur de nombreux mois plutôt que dans le cadre d'un traitement global dès le départ. Vous avez aussi parlé de traitement global, monsieur Bernstein.

Je me demande si vous pouvez envisager, à un moment donné, une approche globale à l'égard du diagnostic dans un contexte qui permettra d'orienter plus rapidement et efficacement les patients afin qu'ils soient traités plus vite qu'avant.

M. Bernstein : Je pense que c'est une excellente question, alors j'y donnerai une réponse aussi brève que possible. Je crois que ce dont nous avons besoin au Canada est de privilégier une approche beaucoup plus novatrice à l'égard des soins de santé, et nous pouvons mener 10 expériences pour mettre à l'essai ce que vous venez de nous expliquer, alors il y a des façons de faire. Dans une de mes vies antérieures, j'étais le président des IRSC, et nous avons financé la recherche sur la prestation des soins de santé. Nous devons ne pas avoir peur des innovations dans le système de santé du moment qu'elles sont testées et mesurées : les choses dont vous parliez sont-elles meilleures ou pires au chapitre de la rentabilité, du temps, et cetera?

Cette innovation peut se traduire, notamment, par la nature d'une équipe qui traite un patient à l'urgence, comme dans l'exemple que vous nous avez donné. Il peut s'agir de la façon dont nous pouvons utiliser les données tirées de toutes les expériences passées d'un patient qui se présente à l'urgence et qui dit éprouver une douleur aiguë à l'estomac. Qu'est-ce qui se passe ensuite? C'est là où l'intelligence artificielle peut jouer un rôle afin d'aider le médecin ou l'infirmière urgentiste à décider rapidement de la marche à suivre et du médecin à qui référer le patient en priorité. Alors je pense que, au chapitre de la prestation des soins de santé, l'amalgame technologie et volonté d'innover est une combinaison gagnante. Nous avons besoin d'en voir beaucoup plus au pays.

Le président : J'aimerais m'adresser au Dr Schlachta, mais d'abord mentionner que nous avons publié un rapport. Le Parlement du Canada a autorisé le comité à étudier l'accord de 2004 sur les soins de santé, et nous avons ensuite produit un rapport sur l'innovation dans les soins de santé, qui a pour titre « Un changement transformateur s'impose ».

M. Bernstein : Bravo.

Dr Schlachta : Je ne veux pas que ma réponse soit trop simpliste, mais je crains un peu qu'elle ne le soit. Cependant, entre le moment où un patient passe du stade de la première inquiétude ou de la présentation des symptômes à la consultation d'un spécialiste et au traitement final, il y a bien des engorgements dans le système. Tout le monde veut voir son spécialiste rapidement et passer bien du temps avec cette personne, et la réponse habituelle est que vous pouvez soit le voir rapidement, soit passer beaucoup de temps avec lui ou elle, mais sa journée est bien remplie. Je parle au nom de tous les spécialistes; mon cas n'est pas particulièrement unique.

Nous avons habituellement géré les temps de consultation avec les spécialistes en essayant de recruter d'autres professionnels de la santé du même domaine pour absorber une partie de leur charge de travail. C'est donc dire que j'ai besoin de passer moins de temps avec mon patient parce que mon infirmière responsable des stomies ou des plaies ou quelqu'un d'autre se charge de ce problème en particulier. Il est donc très facile d'en conclure que tout type d'intelligence artificielle ou de mécanisme automatisé de collecte des données peut me sauver du temps. Si les antécédents du patient sont saisis dans l'ordinateur, quand j'arrive, je peux étudier les détails qui ont déjà été recueillis et gagner du temps.

Il en va de même pour les patients qui se présentent à l'urgence et qui font un entretien en personne avec une machine ou remplissent un questionnaire. Compte tenu du système Watson et de toutes les autres choses que nous avons maintenant, je croirais que vous êtes probablement déjà en mesure de faire le triage des patients en vous servant seulement de leurs antécédents lorsqu'ils se présentent à l'urgence, avant même de voir un être humain. Le danger évident réside dans la perte, notamment, de contact humain et de compassion, mais cela nous permettra clairement de simplifier ce processus.

L'autre question est celle de déterminer comment passer des soins primaires aux soins spécialisés et s'il est possible de faire quelque chose en ligne. À l'heure actuelle, nous vivons, selon moi, à l'ère de la désinformation. Si une personne se trouve chez elle et qu'elle a un problème, peut-elle aller en ligne immédiatement et vérifier ses symptômes? Il existe de multiples ressources en ligne, dont la plupart donnent des informations erronées. S'il y avait une source crédible à consulter — que nous sommes capables d'offrir en ce moment —, un système qui puisse vraiment fournir un diagnostic exact, il pourrait peut-être les renvoyer directement à un spécialiste et leur épargner les délais d'attente.

Le président : C'est une question cruciale, nous en convenons. En fait, dans un autre de nos rapports, nous avons dit que nous croyions que l'Agence de la santé publique du Canada devrait jouer un rôle beaucoup plus important pour offrir un accès direct aux pratiques exemplaires et aux questions. En fait, j'ai constaté dans mes recherches sur le réseau que c'est bien pire aujourd'hui que par le passé, car maintenant, vos recherches s'accompagnent de publicités. Il est de plus en plus difficile pour une personne moyenne de déterminer quel site lui sera utile, et non plus simple.

Nous devrons finir par avoir recours à l'intelligence artificielle d'une façon qui nous renvoie à des sources beaucoup plus clairement identifiées que nous pourrons consulter rapidement. Je ne vais pas en dire plus à ce sujet.

J'aimerais poser une question précise concernant la chirurgie, car nous essayons de savoir non seulement ce que nous pouvons faire maintenant, mais ce que nous pourrons faire plus tard. J'ai posé une question à un témoin précédent en raison d'une autre situation dont j'étais au courant. Les questions liées au cancer de la prostate sont faciles, car quand on les aborde, on constate qu'elles se rapportent à de nombreuses chirurgies semblables touchant des petits organes ou à des problèmes relatifs à des organes complets. On a cité comme exemple le recours à l'intelligence artificielle, conjuguée avec l'analyse radiologique de l'état de la prostate, pour donner une vue tridimensionnelle de cet organe. Nous savons que nombre de problèmes latéraux importants dans les chirurgies de la prostate peuvent survenir dès le prélèvement d'un échantillon pour la biopsie initiale et découler d'autres activités chirurgicales, ainsi que de la proximité de l'organe à un certain nombre d'autres systèmes qui, s'ils sont touchés, peuvent occasionner des problèmes supplémentaires. L'exemple qu'on a décrit a été celui de l'utilisation de diverses techniques radiologiques pour donner une image de l'organe complet et ensuite d'un outil chirurgical guidé par un médecin pour mener une activité chirurgicale beaucoup plus ciblée.

Je veux m'en servir comme exemple pour vous poser la question suivante : voyez-vous ce type de combinaison? Vous parliez plus tôt d'aller à l'intérieur du corps pour régler le problème. Estimez-vous que cette combinaison puisse donner aux chirurgiens beaucoup plus d'exactitude dans des chirurgies qui seraient autrement risquées et difficiles autour d'organes qui peuvent être examinés dans une optique globale?

Dr Schlachta : La réponse brève à cette très bonne question est oui. Je tente de comprendre la portée de la question que vous essayez de me poser. Bien sûr, nous avons déjà des systèmes qui permettent de procéder à des chirurgies et des biopsies guidées par l'image, et autres. Ces technologies évoluent. Il est maintenant possible de développer des images en 3D à partir de tomodensiogrammes, d'imagerie par résonance magnétique et de segmentation des images. Elles ressemblent un peu à des dessins animés, mais la résolution s'améliore au fur et à mesure que les ordinateurs se perfectionnent et que la vitesse des processeurs augmente, mais nous pouvons assurément le faire maintenant.

Il existe actuellement des systèmes pour procéder à des biopsies de la prostate et à des interventions en cas de maladie du foie qui permettent au chirurgien de voir où se trouvent vraiment les voies biliaires et les vaisseaux sanguins dans une construction en 3D du foie et qui lui permettent aussi de guider une sonde pour pouvoir procéder à une biopsie ou à l'ablation d'un tissu dans l'état dans lequel l'organe se trouve. Je prévois vraiment que cela deviendra une partie normale des soins de santé.

Je ne sais pas si cela répond vraiment à la question que vous me posez, par contre.

Le président : Je pense que je vais en rester là. Vous avez couvert un certain nombre de facettes de la question.

Mon dernier commentaire porte sur l'exemple que vous avez donné plus tôt concernant la vésicule biliaire. Par coïncidence, pendant le week-end, j'ai parlé à deux personnes de la même famille, dont une avait subi une opération il y a une vingtaine d'années et l'autre venait d'en subir une la semaine dernière, dans une région rurale de la Nouvelle- Écosse. Dans le premier cas, le patient a séjourné entre une semaine et 10 jours à l'hôpital tandis que dans l'autre, il est sorti au bout de quelques heures. Le deuxième a vécu une expérience diamétralement opposée à celle du premier. Si nous prenons cela dans le contexte de ce que nous pouvons qualifier d'évolution traditionnelle des techniques chirurgicales, les avantages potentiels qu'offre à l'humanité l'utilisation des capacités d'apprentissage en profondeur dont nous disposons ne peuvent être que de bon augure si nous les utilisons de façon appropriée.

La sénatrice Raine : Je m'intéresse depuis quelques années à l'activité physique et aux taux croissants d'obésité qui entraînent des problèmes de santé chez les Canadiens, mais je me préoccupe vivement des jeunes et je songe à la façon dont nous initions les enfants à la technologie à un âge de plus en plus tendre. Ces types de choses sont maintenant omniprésents.

Quelqu'un m'a dit récemment que les enfants d'aujourd'hui n'apprennent pas à écrire et à développer la motricité fine pour écrire. C'est une chose d'écrire en majuscules, mais une autre d'écrire en cursive. Si nous perdons cela en l'espace d'une génération, je commence à me demander s'il s'agit d'une habilité dont les chirurgiens ont besoin et que nous aurions tout intérêt à protéger chez nos jeunes.

Dr Schlachta : Je présume que vous demandez si nous passons de la chirurgie ouverte traditionnelle — la chirurgie manuelle — à la chirurgie plus assistée par ordinateur, nous perdrons l'art pour un chirurgien d'opérer manuellement.

C'est une question très perspicace, car c'est une discussion très commune que l'on tient presque tous les jours dans la salle d'opération. Lorsque nous sommes passés des chirurgies ouvertes de la vésicule biliaire aux chirurgies à effraction minimale, nous en sommes arrivés à faire presque toutes nos chirurgies de la vésicule biliaire par des petits trous.

J'étais interne lorsqu'on a commencé à faire des chirurgies de la vésicule biliaire par laparoscopie. Une des raisons pour laquelle j'ai choisi cette spécialité est que j'ai été sidéré la première fois que je suis allé en salle d'opération et que j'ai vu un patient se faire enlever la vésicule biliaire. Les lumières se sont éteintes et il y avait 20 personnes dans la pièce. C'était si cool avec les moniteurs vidéo, comment voulez-vous ne pas choisir de gagner votre vie ainsi? De nos jours, la chirurgie de la vésicule biliaire à travers des petits trous est tellement banale que si vous prévoyez de faire une chirurgie de la vésicule biliaire traditionnelle, tous les résidents en chef monteront dans la salle d'opération pour voir cette procédure. « J'ai entendu dire qu'il y aurait une opération ouverte et je veux la voir. »

Une question qui est régulièrement soulevée est la suivante : si nous enseignons à tout le monde comment faire cette chirurgie par laparoscopie, ou au moyen d'une quelconque nouvelle technologie émergente, allons-nous perdre les anciennes habilités? Je fais valoir que, selon moi, le fait de procéder à ces opérations de moins en moins manuelles qui dépendent de plus en plus de la technologie fait de vous un meilleur chirurgien. Nous savons que les meilleurs chirurgiens sont ceux qui causent le moins de traumatisme tissulaire, respectent les plans tissulaires, comprennent clairement l'anatomie, ne travaillent pas à tâtons et occasionnent moins de saignements, et cetera.

Lorsque vous faites une chirurgie effractive et que vous touchez directement les tissus, vous pouvez tricher et causez beaucoup de traumas. À l'opposé, lorsque vous faites une chirurgie par laparoscopie, robot chirurgical ou tout autre moyen, le chirurgien doit d'abord et avant tout connaître l'anatomie et tenir compte des plans tissulaires, parce que vous ne pouvez plus faire la chirurgie et que vous perdez la possibilité d'utiliser cette technologie s'il y a un saignement. Je crois que cela fait de vous un meilleur chirurgien. Si vous faites une chirurgie effractive, tout le monde se dit : « Wow, je n'ai jamais vu cela être fait ainsi auparavant », parce que vous avez une méthode beaucoup plus précise.

Il ne faut évidemment pas perdre de vue que les chirurgies que nous faisons actuellement évolueront probablement au fil du temps, étant donné que les vieilles approches dont nous avions besoin ne seront peut-être plus nécessaires pour faire entrer des instruments à l'intérieur du corps et procéder à l'ablation de tissus, à des biopsies ou à des réparations.

Je comprends l'inquiétude concernant la perte de cette vieille approche, mais je n'ai pas l'impression que les gens se portent mal d'avoir perdu la capacité de monter à cheval. Tant que nous sommes certains de pouvoir facilement avoir accès à ces technologies lorsque nous en avons besoin, je crois que tout ira pour le mieux.

La sénatrice Raine : Ma question ne portait pas vraiment sur la transition des compétences entre la chirurgie manuelle et la chirurgie assistée. Je pensais davantage à la motricité fine qui se développe durant l'enfance. Risque-t-il d'y avoir une perte en la matière? La motricité fine est-elle encore nécessaire pour réaliser une chirurgie robotisée?

Dr Schlachta : Je m'excuse. J'ai peut-être totalement mal compris votre question. Permettez-moi de préciser ma réponse. Vous vous demandez si la perte des aptitudes à écrire, par exemple, chez nos enfants pourrait nuire à leur capacité de réaliser une chirurgie plus tard dans leur vie.

Je suis certain que vous l'avez déjà entendu, mais voici l'un des aspects les plus intéressants. Je ne connais pas la réponse à cette question, mais une panoplie d'études ont montré qu'en ce qui concerne l'arrivée de la chirurgie à effraction minimale guidée par l'image qui est réalisée en regardant un écran pour déplacer les instruments, et ce, sans regarder le patient, si vous êtes un amateur de jeux vidéo, vous êtes meilleur à réaliser de telles chirurgies que si vous ne l'étiez pas. Il est possible que nous perdions une certaine motricité fine, comme vous l'avancez, mais nous pouvons aussi dire que nous remplaçons l'écriture avec des crayons par l'utilisation de manches à balai et de boutons. Ce seront peut-être les outils que les chirurgiens utiliseront dans l'avenir au lieu de s'inquiéter de leur doigté.

La sénatrice Raine : J'ai eu deux chirurgies par arthroscopie. La première fois, j'étais sous anesthésie. La deuxième fois, j'ai pu regarder en direct sur un écran le travail du chirurgien à l'intérieur de mon genou. C'était très intéressant. Cela ne fait aucun doute que c'est la voie de l'avenir. Si nous prenons l'exemple de la chirurgie du genou et des progrès que nous avons réalisés à cet égard, c'est incroyable. Je suis certainement du même avis que mon collègue; je ne suis pas du tout effrayée par les chirurgies robotisées ou guidées. C'est la voie de l'avenir. Merci.

Le président : Merci beaucoup.

Dans le cadre de notre étude, nous essayons d'examiner les effets que cela aura sur le système de santé en général. Cela inclut évidemment des exemples précis de questions liées aux interventions chirurgicales et aux soins de santé, mais cela concerne aussi la prestation des soins à long terme. Nous pouvons nous pencher sur cet aspect, et nous aurons de nombreux autres exemples concernant la prestation de soins de santé en milieux ruraux et l'utilisation accrue de l'accès à distance. Tous ces éléments sont importants en vue de modifier la prestation des soins de santé et d'en améliorer l'accès.

Nous avons l'expérience du Dr Schlachta relativement au fonctionnement global et complexe de l'organisation d'un hôpital. Si vous pensez après coup à une manière dont nous pourrions utiliser le concept de l'apprentissage en profondeur et fournir des renseignements sur le système organisationnel d'un hôpital dans un tel contexte pour que les programmeurs posent de bonnes questions sur la façon de les utiliser, ce qui est évidemment l'élément important, de même que l'ajout de nouvelles connaissances dans un contexte d'apprentissage en profondeur pour être en mesure de le consulter pour obtenir des réponses, pouvez-vous nous en faire part par l'entremise de la greffière? Nous aimerions vraiment entendre toute réflexion que vous pourriez avoir après la réunion au sujet d'un exemple auquel vous n'avez pas pensé aujourd'hui ou un aspect qui pourrait être une réalité un jour dans le domaine et que vous pensez qui pourrait nous intéresser d'après nos questions. Nous vous en serions reconnaissants. Autrement dit, nous vous demandons de continuer de travailler pour nous après la réunion, comme vous n'avez vraisemblablement rien de mieux à faire de vos journées.

Sur une note un peu plus sérieuse, au nom du comité, je tiens à vous remercier tous les deux d'avoir pris le temps de venir témoigner devant le comité. Vous nous avez fait part de renseignements on ne peut plus importants et précieux. Vous êtes tous les deux actifs dans ce domaine et l'avenir; c'est important sur le plan mondial, et c'est extrêmement important pour nous ici au Canada.

Docteur Bernstein, nous avons hâte de voir la distribution fort judicieuse des fonds que vous avez injectés dans votre système au pays en vue de contribuer à mettre sur pied les types de centres dont nous avons besoin pour aider la société canadienne dans l'avenir et rendre notre économie concurrentielle par rapport à celles des autres pays, ce qui nous donnera en fait les moyens d'utiliser aussi ces technologies dans l'avenir.

Je tiens vraiment à vous remercier. Vos réponses à nos questions nous seront très utiles. Je répète encore une fois que nous serions ravis d'entendre toute réflexion que vous pourriez avoir après coup.

(La séance est levée.)

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