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SOCI - Comité permanent

Affaires sociales, sciences et technologie

 

LE COMITÉ SÉNATORIAL PERMANENT DES AFFAIRES SOCIALES, DES SCIENCES ET DE LA TECHNOLOGIE

TÉMOIGNAGES


OTTAWA, le mercredi 1er mai 2019

Le Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie, auquel a été renvoyé le projet de loi C-81, Loi visant à faire du Canada un pays exempt d’obstacles, se réunit aujourd’hui à 16 h 15 pour étudier ce projet de loi.

La sénatrice Chantal Petitclerc (présidente) occupe le fauteuil.

[Français]

La présidente : Bon après-midi, honorables sénateurs et témoins.

[Traduction]

Bonjour. Bienvenue au Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie.

[Français]

Je m’appelle Chantal Petitclerc, sénatrice du Québec. C’est un privilège de présider cette réunion.

[Traduction]

Avant de céder la parole à nos témoins, j’inviterais mes collègues à se présenter.

La sénatrice Seidman : Judith Seidman, de Montréal, au Québec.

[Français]

La sénatrice Poirier : Rose-May Poirier, du Nouveau-Brunswick.

[Traduction]

La sénatrice Eaton : Nicky Eaton, de l’Ontario. Bienvenue.

Le sénateur Ravalia : Bienvenue. Mohammed-Iqbal Ravalia, de Terre-Neuve-et-Labrador.

Le sénateur Oh : Victor Oh, de Toronto.

[Français]

La sénatrice Forest-Niesing : Josée Forest-Niesing, du Nord de l’Ontario.

La sénatrice Mégie : Marie-Françoise Mégie, du Québec.

[Traduction]

Le sénateur Kutcher : Stan Kutcher, de la Nouvelle-Écosse.

La sénatrice Omidvar : Ratna Omidvar, de Toronto.

La sénatrice Moodie : Rosemary Moodie, de Toronto.

La sénatrice Dasko : Donna Dasko, de Toronto.

La sénatrice M. Deacon : Marty Deacon, d’Ottawa, Ontario.

Le sénateur Munson : Jim Munson, d’Ottawa.

[Français]

La présidente : Merci beaucoup. Honorables sénateurs, nous poursuivons l’étude du projet de loi C-81, Loi visant à faire du Canada un pays exempt d’obstacles. Nous sommes privilégiés de vous avoir parmi nous. Merci de contribuer à l’étude de ce projet de loi important.

Aujourd’hui, nous accueillons, de AGE-WELL, Mme Rosalie Wang, professeure adjointe au Département des sciences du travail et d’ergothérapie de l’Université de Toronto et, de l’Association des sourds du Canada, Frank Folino, président.

[Traduction]

Nous aimerions vous accorder du temps pour faire vos déclarations liminaires, puis nous passerons aux questions.

[Note de la rédaction: Les interventions sont interprétées en langage des signes.]

Frank Folino, président, Association des sourds du Canada : Merci de me donner l’occasion de comparaître devant le Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie dans le cadre de son étude du projet de loi C-81, Loi canadienne sur l’accessibilité.

L’Association des sourds du Canada est un organisme national sans but lucratif qui fait la promotion de l’accessibilité pour les personnes sourdes qui utilisent l’American Sign Language, l’ASL, et la langue des signes québécoise, la LSQ.

L’ASC est un membre actif de l’équipe de direction de l’Alliance pour une loi fédérale sur l’accessibilité, l’ALFA, qui a présenté des amendements devant être apportés au projet de loi C-81, tels que des délais et des processus de normalisation pour le règlement des plaintes en temps opportun et d’autres.

Nous félicitons le gouvernement du Canada et la ministre d’avoir présenté le projet de loi C-81, qui est une mesure importante et positive pour faire du Canada un pays accessible. Cependant, une partie intégrante du projet de loi C-81 qui permettra d’atteindre l’objectif de faire du Canada un pays exempt d’obstacles est la reconnaissance légale de l’ASL et de la LSQ en tant que langues des personnes sourdes. Cette reconnaissance fera toute une différence pour les Canadiens sourds, par l’entremise de l’accessibilité, de renseignements, de communications et de services.

Depuis que le Canada a ratifié la Convention relative aux droits des personnes handicapées, de nombreux autres pays l’ont ratifiée aussi. Les gouvernements de plus de 45 pays ont déjà reconnu leurs langues des signes nationales. Citons notamment la Grèce, l’Irlande, l’Écosse, l’Italie, le Mexique, la Nouvelle-Zélande et de nombreux autres. Le Canada — notre pays — ne figure pas sur la liste. De plus, la convention reconnaît clairement que les langues des signes sont équivalentes aux langues parlées et écrites qui sont étroitement liées à d’autres articles de la convention, qui fait mention de droits précis relativement aux langues des signes et à l’accessibilité.

Offrir l’accessibilité aux personnes sourdes en reconnaissant l’ASL et la LSQ assurera la pleine participation, la protection et la promotion. Elles pourront exercer pleinement leurs droits et leurs responsabilités dans un Canada exempt d’obstacles.

En voici quelques exemples : la production de vidéos en ASL et en LSQ sur les sites web du gouvernement fédéral, des services en ASL et en LSQ et l’interprétation vidéo aux services du gouvernement fédéral et des écrans qui diffusent des services d’interprétation en ASL et en LSQ par la télédiffusion et les communications numériques. Par exemple, on pourrait diffuser les débats des chefs fédéraux et des alertes d’urgence et offrir d’autres services accessibles.

Il y a l’exemple de la fusillade qui est survenue récemment en Nouvelle-Zélande. C’était un incident horrible et tragique, et la première ministre de la Nouvelle-Zélande a fait son annonce à la télévision avec des interprètes en langue des signes à ses côtés pour que les citoyens sourds aient un accès complet aux renseignements. Le pays reconnaît la langue des signes. Il sait que cette reconnaissance est nécessaire pour avoir un pays accessible. Le Canada peut saisir cette occasion et emboîter le pas à d’autres pays.

Le principe qui a guidé l’élaboration de la CDPH est « Rien ne se fera pour nous sans nous ». Pour respecter ce principe, il faut absolument que le Sénat amende le projet de loi C-81 et ajoute à l’article 6 ce qui suit :

Toute personne sourde doit avoir un accès exempt d’obstacles à une participation pleine et égale dans la société, et l’American Sign Language (ASL) et la langue des signes québécoise (LSQ) doivent être reconnues comme étant les langues des personnes qui sont sourdes au Canada.

C’est l’amendement que nous proposons au Sénat d’envisager.

Nous ne demandons pas qu’elles soient reconnues en tant que langues officielles. C’est notre langue, notre culture, notre communauté, et cette reconnaissance nous permettra de participer pleinement à la société. Nous vous proposons de tenir cette discussion.

De plus, nous recommandons que l’article 117 soit amendé pour exiger une réglementation sur l’accessibilité pour promouvoir l’objectif et les principes de la loi. Cela permettra au Canada de respecter ses obligations en matière de droits de la personne.

La communauté internationale a hâte de participer à la Conférence des États Parties, à la CDPH au siège de l’ONU en juin 2019. J’ai hâte de me joindre à ces célébrations en tant que fier Canadien, et j’aimerais pouvoir annoncer à ce moment-là que le Canada reconnaît aussi l’ASL et la LSQ.

À la suite de la sanction royale, l’ASC a hâte de travailler avec le gouvernement du Canada à la mise en œuvre de la Loi canadienne sur l’accessibilité, y compris la reconnaissance de l’ASL et de la LSQ en tant que langues des personnes sourdes au Canada.

Je me ferai un plaisir de répondre à vos questions. Merci.

[English]

Rosalie Wang, professeure adjointe, Département des sciences du travail et d’ergothérapie, Université de Toronto, AGE-WELL : Merci de me donner l’occasion de m’adresser à vous aujourd’hui au nom d’AGE-WELL. AGE-WELL est un réseau sur le vieillissement et la technologie qui est financé par le gouvernement fédéral par l’entremise du Programme des réseaux de centres d’excellence. En tant que réseau pancanadien, nous comptons des chercheurs, des adultes plus âgés, des aidants naturels, des organismes partenaires et des stagiaires dont l’objectif commun est d’accélérer la prestation de solutions axées sur la technologie qui améliorent considérablement la vie des Canadiens.

Comme vous le savez tous, la population du Canada est vieillissante, et la prévalence des invalidités augmente avec l’âge. En 2016, pour la première fois, plus de Canadiens étaient âgés de 65 ans et plus que de Canadiens âgés de moins de 15 ans. Même si de nombreux aînés sont actifs et en santé, 38 p. 100 des Canadiens âgés de 65 ans et plus disent souffrir d’une invalidité. Chez les Canadiens de 75 ans et plus, c’est 47 p. 100. Ces taux contrastent avec les 20 p. 100 des Canadiens âgés de 25 à 64 ans qui disent souffrir d’une invalidité. Un Canada exempt d’obstacles aidera considérablement les personnes âgées qui ont un handicap à bien vieillir, à participer pleinement et également aux activités qui comptent pour eux dans leur communauté et dans la société, et à être des citoyens à part entière.

Par conséquent, AGE-WELL appuie sans réserve l’adoption rapide du projet de loi C-81. Nous saluons le leadership du gouvernement actuel et de la ministre Qualtrough et leur détermination à déposer ce projet de loi phare. Nous sommes encouragés par la prévoyance de la ministre de tenir compte des technologies en rapide évolution et d’autres innovations dans le secteur de l’accessibilité.

AGE-WELL s’emploie à créer des produits et des services. Par exemple, nous mettons en place des technologies de l’information et des communications accessibles pour faciliter les interactions sociales entre les aînés et leur famille éloignée, recourons à l’intelligence artificielle pour contribuer au dépistage précoce de changements fonctionnels ou cognitifs et utilisons la robotique pour permettre aux personnes en fauteuil roulant électrique de se déplacer dans leur communauté en toute sécurité. Nous savons à quelle vitesse la technologie progresse. Nous savons également comment la technologie peut transformer la vie des personnes handicapées en donnant des chances égales à tous et en facilitant la participation sociale, économique et civique.

Nous proposons au comité d’examiner deux points. Premièrement, nous aimerions que l’on reconnaisse explicitement dans les principes du projet de loi les personnes qui sont la cible de multiples formes de discrimination dans la société canadienne. Nous aimerions que l’on reconnaisse les défis auxquels sont confrontées les personnes qui sont victimes de formes de discrimination multiples et complexes. Plus particulièrement, les aînés continuent d’être la cible de discrimination généralisée fondée sur l’âge dans la société. Cette discrimination est amplifiée si les personnes ont un handicap et sont, par exemple, des femmes qui vivent dans la pauvreté.

Deuxièmement, nous aimerions qu’il y ait un examen plus poussé du rôle des technologies d’aide personnelle pour faciliter une inclusion complète des Canadiens handicapés dans la société et un leadership fédéral pour soutenir un accès universel et plus équitable à ces technologies. Le projet de loi C-81 porte sur les obstacles à l’emploi, l’environnement bâti, les technologies de l’information et des communications et de nombreux autres secteurs, mais pour atteindre l’objectif d’avoir un Canada réellement inclusif, où les personnes handicapées peuvent bénéficier de chances égales, les technologies d’aide personnelle continueront d’être nécessaires. De nombreux intervenants dans nos recherches ont souligné la nécessité d’avoir des initiatives en matière d’accessibilité environnementale offrant l’accès à des technologies requises.

Par exemple, des rampes d’accès dans les ascenseurs ou des services de transport accessibles ne seront pas utiles à une personne qui est confinée à la maison parce qu’elle n’a pas un fauteuil roulant adéquat, et des services bancaires accessibles en personne ne seront pas utiles à une personne qui ne peut pas exprimer ce qu’elle souhaite à l’aide d’un dispositif de communication personnalisé.

Il y a un important besoin à combler en matière de soutien aux personnes handicapées, ce qui inclut des technologies d’assistance, avec 24 p. 100 des Canadiens handicapés âgés de 15 ans et plus qui signalent un besoin non comblé. L’accès à des technologies d’assistance au Canada est inéquitable, en raison d’un accès limité par des critères tels que l’âge et le type d’invalidité dans certaines instances. Cela peut constituer une violation à la Charte canadienne des droits et libertés.

Nous reconnaissons que la majorité du financement prévu pour les technologies d’assistance et les programmes de services relèvent des ministères de la Santé et des Services sociaux provinciaux et territoriaux. Cependant, en vertu du projet de loi C-81, la ministre aura le pouvoir, le devoir et la fonction de collaborer avec ces provinces et ces territoires pour coordonner les efforts déployés en lien avec l’accessibilité. Nous exhortons le ministère à soulever les préoccupations en matière d’équité et à soutenir une stratégie élaborée et adoptée collectivement qui concorde avec les principes et les objectifs de la Loi canadienne sur l’accessibilité et les programmes et les services des technologies d’assistance.

Merci encore une fois de m’avoir donné l’occasion de vous faire part de nos points de vue. Au nom d’AGE-WELL, nous avons hâte de travailler avec le gouvernement fédéral et de contribuer à l’expertise collective du réseau pour bâtir un Canada réellement exempt d’obstacles.

La présidente : Merci à tous les deux de vos déclarations liminaires. Nous avons des questions pour vous. Je tiens à rappeler à mes collègues que nous essaierons de ne pas dépasser cinq minutes pour les questions. Donc, plus votre préambule sera court, plus vous pourrez poser de questions.

La sénatrice Seidman : Merci à tous les deux de vos exposés. Madame Wang, j’aimerais commencer avec vous, s’il vous plaît. Vous avez parlé de multiples formes de discrimination dont sont victimes les aînés.

D’après les données de l’Enquête canadienne sur l’incapacité, je constate que 26 p. 100 des personnes âgées de 65 à 74 ans souffrent de handicaps et que 42,5 p. 100 des personnes de 75 ans et plus ont des handicaps. Ces données sont assez vieilles; je ne sais pas si vous avez des données plus récentes pour donner l’heure juste.

Vous voulez ces données.

Mme Wang : Oui.

La sénatrice Seidman : C’est important car ce sont des chiffres très élevés. J’aimerais avoir l’assurance que cette mesure législative reflète les enjeux auxquels sont confrontés les aînés et qu’elle répond à leurs besoins.

Pensez-vous que ce projet de loi répond aux besoins des aînés? Y a-t-il des obstacles qui sont uniques aux aînés canadiens handicapés?

Mme Wang : Les statistiques que j’ai citées sont tirées de la plus récente enquête sur les invalidités réalisée en 2017, qui a été rendue publique à la fin de l’année dernière, si bien que ces données sont exactes. Donc, 38 p. 100 des personnes âgées de 65 ans et plus ont une invalidité, et pour les personnes âgées de 75 ans et plus, c’est 47 p. 100. Chez les personnes de 65 ans et plus, la prévalence des invalidités est presque le double que chez les adultes plus jeunes en âge de travailler.

Pour la Loi canadienne sur l’accessibilité, le fait d’avoir un Canada accessible exempt d’obstacles aidera les aînés et tous les membres de la collectivité qui ont une forme de handicap quelconque. Même s’il y a encore beaucoup de travail à faire par l’entremise de la réglementation, je pense que l’adoption du projet de loi est un excellent point de départ.

La sénatrice Seidman : Je comprends cela. Je pense que nous le comprenons tous, et nous aimerions avoir l’impression que les besoins des aînés sont satisfaits d’entrée de jeu avec cette mesure législative.

Y a-t-il quelque chose que nous ne comprenons pas? Y a-t-il des handicaps particuliers avec lesquels des aînés sont aux prises au quotidien et pour lesquels nous pourrions améliorer la situation des personnes touchées par ces handicaps en apportant, par exemple, une modification à cette mesure législative?

Mme Wang : J’examinais la version récente plus vaste de la définition de « handicap » qui inclut les déficiences mentales, cognitives et intellectuelles, ainsi que les troubles d’apprentissage. Je pense que la définition couvre potentiellement des changements de l’état cognitif tels que la démence. La définition de « handicap » est en soi déjà aussi inclusive qu’elle peut l’être à l’heure actuelle.

La sénatrice Seidman : Merci beaucoup. Je vous suis très reconnaissante des remarques que vous faites.

Monsieur Folino, merci beaucoup d’être des nôtres. Vous avez très clairement fait savoir, sans équivoque, à quel point la reconnaissance de l’ASL et de la LSQ est importante pour la communauté des personnes sourdes. Je me demande s’il y a une section particulière dans la mesure législative où vous aimeriez que ce renvoi soit fait. Est-ce qu’on l’inclurait dans les principes fondamentaux? Est-ce qu’on l’insérerait au début de la loi? Y a-t-il une section dans la mesure législative où vous aimeriez qu’un renvoi à cette reconnaissance de base soit inclus?

[Interpretation]

M. Folino : Merci, sénatrice Seidman, de votre question. Durant mon exposé, j’ai proposé d’apporter un amendement à l’article 6 visant à ajouter que toute personne sourde doit avoir un accès exempt d’obstacles à une participation pleine et égale dans la société, et l’American Sign Language (ASL) et la langue des signes québécoise (LSQ) doivent être reconnues comme étant les langues des personnes qui sont sourdes au Canada. Nous estimons que cet ajout s’inscrit bien dans l’article 6.

C’est notre raisonnement pour proposer cet ajout à l’article 6. Toutefois, si vous pensez qu’il devrait être intégré ailleurs, que notre proposition n’est pas appropriée, nous sommes disposés à en discuter.

[English]

La sénatrice Seidman : Je pense que ce serait très utile. Je suis désolée, mais j’ai clairement raté ce que vous avez dit au sujet de l’article 6 car j’étais tellement captivée par votre proposition d’amendement. Vous avez été parfaitement clair, et je vous en remercie. Je pense que l’article 6 est la disposition sur les principes, si je ne m’abuse.

[Interpretation]

M. Folino : Oui.

[English]

La sénatrice Seidman : Je crois comprendre que vous voulez que ce soit inclus dans les principes fondamentaux de cette mesure législative.

[Interpretation]

M. Folino : Oui, c’est exact.

[English]

La sénatrice Seidman : Merci beaucoup.

La présidente : Le parrain du projet de loi a une question.

Le sénateur Munson : Merci beaucoup d’être ici. Nous devons absolument réfléchir à ce que vous nous avez dit, et j’espère que nous le ferons demain dans le cadre de l’étude article par article.

J’ai deux questions. La question courte est la suivante : dans la communauté des personnes sourdes, quel pourcentage de la population bénéficierait d’un projet de loi amélioré?

[Interpretation]

M. Folino : Merci, sénateur Munson, de votre question. Nous n’avons pas les données récentes exactes, mais nous évaluons à 370 000 le nombre de personnes culturellement sourdes au Canada. Notre calcul a été effectué à partir d’un dixième de la population. Nous avons également des personnes malentendantes et d’autres membres de la collectivité qui utilisent le langage des signes. Nous évaluons sommairement le nombre à trois millions de personnes.

Lorsque l’ASL et la LSQ seront reconnues, Statistique Canada pourra ajouter les bonnes questions à poser dans le recensement pour que nous puissions connaître le nombre exact de personnes sourdes qui utilisent l’ASL et la LSQ.

[English]

Le sénateur Munson : Merci.

Les emplois sont très importants pour tout le monde, et ce que nous avons entendu dans la communauté des personnes sourdes, bien entendu, c’est que le taux de chômage est extrêmement élevé car il y a de la discrimination systémique. Les employeurs se disent, « Je ne vais pas vous embaucher; je vais seulement détourner le regard car je peux trouver quelqu’un d’autre pour faire ce travail ».

Dans ce projet de loi ou dans toute activité qu’il couvre, avec vos recommandations, est-ce que cette mesure législative améliorerait les chances que ces personnes occupent des emplois à temps plein dans la fonction publique ou dans d’autres entités associées à la fonction publique?

[Interpretation]

M. Folino : Encore une fois, merci de votre question. Absolument. À l’heure actuelle, le taux de chômage chez les Canadiens sourds s’élève à presque 60 p. 100. Si ce projet de loi est adopté, et que nous reconnaissons l’ASL et la LSQ, cela créera de nombreuses possibilités d’emploi.

La ministre Qualtrough, ministre des Services publics et de l’Approvisionnement et de l’Accessibilité, a mentionné que 5 000 nouveaux emplois seraient créés à la suite de l’adoption du projet de loi. Si vous permettez l’accès à l’ASL et à la LSQ, les personnes sourdes pourront travailler.

Un autre exemple serait à Service Canada. Pour renouveler leur passeport, les membres de notre communauté obtiendraient des services d’interprétation vidéo à distance — une application —, car ils pourraient se brancher à cette application et avoir accès à des interprètes.

De plus, si des personnes sourdes travaillent à Service Canada et offrent des services au grand public et qu’un membre de la population s’adresse à l’employé sourd, il peut également utiliser les services d’interprétation vidéo à distance et avoir accès aux services d’un interprète. Ce faisant, nous éliminons les obstacles et nous avons les mêmes chances de travailler que n’importe quel autre citoyen canadien.

Ce projet de loi est certainement un pas dans la bonne direction et une première étape pour atteindre une accessibilité complète, que ce soit pour avoir accès à des services gouvernementaux ou être à l’emploi du gouvernement fédéral. Ce sera un jalon pour accroître les perspectives d’emploi pour les personnes sourdes.

[English]

Le sénateur Munson : Je vous remercie de nouveau. Je ferai brièvement remarquer que les mots « peut » et « doit » font l’objet d’un débat au sein de notre comité, qui cherche à déterminer si le gouvernement « peut » ou « doit » faire quelque chose. Je suis intrigué par ce que vous avez dit sur l’annonce faite par la première ministre de la Nouvelle-Zélande, qui était accompagnée d’une personne assurant le service d’interprétation.

À votre avis, devrait-on être obligé de fournir ce genre d’interprétation, même quand nous présentons notre rapport et donnons une conférence de presse à ce sujet, ou quand le premier ministre ou un premier ministre quelconque font une annonce sur une catastrophe, comme les inondations qui ont frappé la région d’Ottawa, étant donné qu’il s’agit de sujets cruciaux? Le projet de loi comprend-il cette garantie?

[Interpretation]

M. Folino : Ici encore, je vous remercie de cette question. Ce doit être une obligation, car nous voulons avoir accès et être informés au sujet des catastrophes. En ce qui concerne les inondations qui ont touché la région, par exemple, aucune annonce publique n’a été faite avec interprétation dans la langue des signes. Les gens n’ont aucune idée de ce qu’il se passe à ce sujet et pourraient ainsi être exposés à des risques.

Si on fait des annonces publiques, il faudrait fournir l’interprétation dans la langue des signes afin que nous puissions nous préparer, protéger nos maisons ou nos logements, et assurer la sécurité de nos concitoyens.

Oui, le projet de loi doit indiquer « doit ». Nous avons besoin d’interprètes. Notre pays devrait faire figure de chef de file à cet égard.

Le Mexique est déjà en avance et offre un service d’interprétation lors des annonces. La France, le Royaume-Uni, l’Allemagne, l’Europe, l’Europe de l’Est, l’Autriche et la Russie offrent tous ce genre de services; nous accusons donc du retard. Nous devons assurer un accès égal.

Quand le premier ministre fait des annonces en direct, nous, à titre de citoyens sourds, voulons avoir accès à l’information dans notre langue première, en American Sign Language ou en langue des signes québécoise.

[English]

Le sénateur Munson : Peut-être pourrait-on l’appeler American-Canadian Sign Language?

La présidente : Vous pouvez le proposer.

La sénatrice Eaton : J’aimerais donner suite aux questions du sénateur Munson.

Quels sont les obstacles? Le besoin semble évident. Vous avez dit que lors de la crise qui a ébranlé la Nouvelle-Zélande il y a deux semaines à la suite de la terrible attaque terroriste, vous avez vu la première ministre de ce pays, derrière laquelle un interprète gestuel s’est tenu tout au long de l’annonce. Le problème vient-il de la simple ignorance, d’un manque d’argent ou d’une mauvaise coordination entre les gouvernements fédéral et provinciaux? Qu’en pensez-vous?

Si vous étiez la ministre Qualtrough, de quel pays vous inspireriez-vous pour assurer l’accès si une personne se présente à l’urgence ou s’il faut diffuser des annonces urgentes à la télévision? Quel pays est le meilleur? Qu’est-ce qui nous empêche d’instaurer un système au Canada?

[Interpretation]

M. Folino : Je vous remercie de me poser cette question.

Ce qui fait obstacle, au chapitre du financement provincial et fédéral, c’est qu’on n’est pas conscient du problème. C’est de l’ignorance. Les gens pensent que le sous-titrage permet un accès égal, mais ce service n’est pas offert dans la langue première des intéressés. Leur langue première n’est pas l’anglais ou le français, mais l’American Sign Language ou la langue des signes québécoise. C’est donc une question d’attitude. Pourquoi offrir les services d’interprètes gestuels? Le sous-titrage suffit. Mais cela ne suffit pas à notre communauté, car ce n’est pas notre langue première. Si vous voulez établir un lien avec notre communauté, vous devez utiliser la langue des signes.

Par le passé, nous utilisions l’appareil de télécommunication pour sourds, qui était toutefois très lent et encombrant. Pendant des années, tout le monde affirmait que ce n’était pas assez bon. Au Canada, il a fallu une éternité avant de mettre en place un service de relais vidéo en temps réel. Maintenant, je peux enfin, grâce à la vidéo, prendre rendez-vous avec mon médecin, parler à ma famille ou appeler à mon travail.

[English]

La sénatrice Eaton : Quand vous appelez votre médecin...

[Interpretation]

M. Folino : J’ai ainsi accès dans ma langue première.

[English]

La sénatrice Eaton : Quand vous appelez votre médecin grâce au service de relais par vidéo, est-ce que quelqu’un fait l’interprétation en langue des signes dans son cabinet?

[Interpretation]

M. Folino : Les interprètes se trouvent dans des centres d’appels. Nous utilisons ce service, qui relaie plus de 30 000 appels chaque jour. Je peux prendre rendez-vous par l’entremise d’un interprète quelque part au Canada. Je joins donc les gens par téléphone.

Quand le médecin ou la réceptionniste décroche le combiné, j’utiliserai l’application sur un écran d’ordinateur ou un appareil mobile pour me brancher; l’interprète interprétera mon message en temps réel, puis parlera à la réceptionniste. La communication se fait dans ma langue première. Voilà qui offre une meilleure qualité de vie grâce à la reconnaissance de l’American Sign Language et de la langue des signes québécoise. Cela améliorera la qualité de vie des Canadiens et des Canadiennes atteints de surdité.

[English]

La sénatrice Eaton : Quand vous vous présentez chez le médecin...

[Interpretation]

M. Folino : Initialement, par le passé, je devais utiliser une machine à écrire encombrante, puis appeler un opérateur relais afin de tenir une conversation, ce qui prenait du temps.

[English]

La sénatrice Eaton : Mais que se passe-t-il quand vous vous présentez en personne chez le médecin?

[Interpretation]

M. Folino : Quand je me rends chez le médecin, un interprète gestuel sera sur place. Je dois réserver ces services à l’avance. Par exemple, quand j’appelle par l’entremise du service de relais vidéo pour prendre un rendez-vous quatre semaines à l’avance, je demanderai qu’on réserve les services d’un interprète gestuel. Le service organisera le tout et l’interprète sera là le jour de mon rendez-vous. Il y aura un interprète sur place.

[English]

La sénatrice Eaton : Mon temps est-il écoulé?

La présidente : Oui. Merci de vos questions, et merci, monsieur Folino, de vos réponses.

Le sénateur Ravalia : Je vous remercie tous les deux de vos exposés.

Ma question concerne les communautés immigrantes qui se sont assimilées au Canada et pour qui la langue de communication pourrait ne pas être l’American Sign Language ou la langue des signes québécoise. C’est la première question que je veux poser à M. Folino.

Quant à vous, madame Wang, disposez-vous de programmes adaptés aux différences culturelles en ce qui concerne les handicaps chez les populations immigrantes? Merci.

[Interpretation]

M. Folino : Je vous remercie de cette question. Il y a effectivement de nouveaux immigrants, un grand nombre de Canadiens sourds, pour qui la langue est un obstacle, car ils connaissent peut-être leur propre langue des signes, qui diffère de l’American Sign Language. Il existe plus de 300 langues des signes dans le monde.

Nous espérons que quand le projet de loi C-81 reconnaîtra notre langue des signes, cela favorisera l’essor du métier d’interprète utilisant la langue des signes pour les sourds. Ces interprètes deviendront des facilitateurs qui soutiendront ces nouveaux immigrants, car ils auront avec ces derniers un lien et une même compréhension culturelle.

Par exemple, quand les nouveaux immigrants arrivent à l’aéroport, les obstacles sont légion, car ils ne savent pas écrire en anglais. Ils viennent d’arriver et ne savent pas comment communiquer. Le projet de loi favorisera l’essor du métier d’interprète. Nous pourrions ainsi offrir le service à l’aéroport et permettre aux nouveaux immigrants sourds qui se présentent d’obtenir l’aide de ces interprètes.

Les nouveaux immigrants bénéficient des services d’interprètes qui parlent chinois, allemand ou diverses langues orales, qui sont disponibles sur place. À l’aéroport, ils sont immédiatement dépêchés pour aider les nouveaux immigrants à communiquer dans leur langue maternelle.

Quand une personne sourde arrive, toutefois, elle n’a pas accès aux mêmes services et au même genre de soutien. Ainsi, si nous voulons que le Canada soit exempt d’obstacles, nous encourageons la formation d’interprètes relais, ce qui favorisera l’emploi de ces interprètes pour que ce service puisse être offert à l’aéroport. Merci.

[English]

Le sénateur Ravalia : Merci beaucoup, monsieur Folino.

La présidente : Madame Wang, souhaitez-vous répondre à la seconde question?

Mme Wang : Oui. Merci de me poser cette question.

Notre réseau pancanadien effectue moult recherches auxquelles participent de nombreuses personnes, qu’il s’agisse d’aînés ou de fournisseurs de soins dans le cadre de nos projets, de nos services de développement de technologie, et de notre élaboration de politiques et de pratiques.

Certains projets font participer les communautés autochtones et francophones, et incluent tout un éventail de communautés du pays. Je ne connais pas de projet qui s’adresse expressément à un sous-ensemble de la population constitué de nouveaux immigrants, mais un grand nombre de nos projets incluent des aînés et des fournisseurs de soins afin de les faire participer au programme de recherche.

Le sénateur Ravalia : Merci.

Le sénateur Oh : Je remercie nos témoins. Je vais revenir à la question des transporteurs aériens effleurée plus tôt par M. Folino. À titre de grand voyageur, je n’ai pas vu beaucoup d’aide en langue des signes dans nos aéroports. Or, les voyages aériens sont essentiels. Pour des raisons de sécurité, la langue des signes est importante pour protéger ce groupe particulier de citoyens dans ce mode de transport dangereux. Pouvez-vous traiter de la question? Que peut faire ce projet de loi sur les plans des voyages aériens et des transports publics?

[Interpretation]

M. Folino : Je vous remercie de cette question, sénateur Oh. Vous avez raison : il importe d’offrir des services en langue des signes dans les aéroports pour des raisons de sécurité. Une compagnie aérienne diffuse une vidéo sous-titrée, mais elle devrait également transmettre le message avec la langue des signes. Prenez moi, par exemple. Je suis assis à l’aéroport et je ne peux pas entendre. Je n’entendrai pas l’annonce d’un changement de vol ou de porte d’embarquement. Je ne sais pas si je dois me déplacer ou s’il y a un retard. Il n’existe aucun mécanisme pour m’avertir d’un changement ou d’une urgence. Pourtant, la technologie nous permet d’avoir un système qui envoie des alertes sur mon téléphone ou de m’aviser s’il y a un changement. Le message doit être transmis par l’entremise de texte et de la langue des signes. Dans un aéroport international où je suis passé, on communiquait par la langue des signes.

J’ai l’impression que l’adoption du projet de loi C-81 et la reconnaissance de I’American Sign Language et de la Langue des signes québécoise permettra de créer un Canada exempt d’obstacles et assurera l’accessibilité dans les aéroports. Quand on se présente au comptoir du service à la clientèle ou quand on montre son passeport à l’agent de bord avant de monter dans l’avion, on pourrait utiliser divers iPad et technologies d’interprétation vidéo à distance afin d’avoir accès à un interprète en direct. Je pourrais ainsi communiquer efficacement avec le service à la clientèle ou l’agent de bord dans ma propre langue.

Je souligne, une fois de plus, que la Convention relative aux droits des personnes handicapées indique que la langue écrite et la langue orale sont sur un pied d’égalité avec les langues des signes. Voilà qui favorisera l’égalité au Canada.

[English]

Le sénateur Oh : Vous utilisez certainement votre téléphone plus que moi au cours des vols.

[Interpretation]

M. Folino : Oui.

[English]

Le sénateur Oh : Madame Wang, voulez-vous intervenir?

Mme Wang : Merci. Je pense qu’il existe bien des occasions d’améliorer l’accessibilité pour les voyageurs âgés. Je sais que des mécanismes sont actuellement en place pour fournir un service d’aide à la mobilité. Toute l’aide nécessaire pour se déplacer d’une porte d’embarquement à l’autre est en place.

Je pense toutefois que sur le plan du service, il serait souvent utile d’être plus conscient de la diversité des gens sur le plan de la capacité afin de former les employés qui travaillent dans le secteur des transports pour qu’ils soient sensibilisés à la question. Par exemple, un aîné pourrait réagir lentement à diverses choses ou subir des changements cognitifs, alors que les choses vont très vite. Il serait utile d’offrir plus de formation aux employés de service pour qu’ils puissent s’adapter aux divers besoins afin que la communication soit plus claire.

Nous dépendons de plus en plus de la technologie dans les transports, mais ce n’est pas tout le monde qui est à l’aise avec elle. L’utilisation d’une application pour transmettre un message annonçant le changement d’une heure de départ ou autre chose permet de communiquer efficacement l’information. Cependant, si on ne connaît pas bien la technologie ou si on n’a pas les appareils nécessaires, cela pourrait nous empêcher d’être au bon endroit au bon moment.

La présidente : Merci beaucoup.

La sénatrice M. Deacon : Je vous remercie, monsieur Folino et madame Wang, de témoigner aujourd’hui. Ce n’est pas un secret que nous travaillons à un projet de loi très important et que nous approchons du moment où nous porterons notre attention sur les éléments qui pourraient lui conférer encore plus de force, de mordant et de perspective. Je suis heureuse que vous soyez ici aujourd’hui.

Nous continuons notamment de nous intéresser aux délais dans la version actuelle du projet de loi. J’aimerais savoir ce que vous en pensez tous les deux. Certains considèrent que le fait d’établir une date ne le rendrait pas suffisamment fort ou pourrait retarder les choses, pour différentes raisons dans différentes conversations. J’aimerais savoir ce que vous en pensez. Quels avantages y aurait-il à fixer des délais dans ce document qui n’en contient actuellement pas?

Mme Wang : Je pense que les délais s’avèrent fort utiles sur le plan de la reddition de comptes et qu’il serait avantageux d’en établir. J’abonde dans le même sens que la ministre Qualtrough, qui a indiqué qu’il faut être souples au chapitre de l’évolution des technologies, mais que si on impose une échéance, cela pourrait retarder les choses, le temps que les gens se rendent jusqu’aux dates établies. Je pense qu’il convient de fixer des délais appropriés et réalistes.

La sénatrice M. Deacon : Merci.

[Interpretation]

M. Folino : Je vous remercie de la question. Je conviens qu’il est très important de prévoir des délais dans le projet de loi, car cela oblige les gens à rendre des comptes et on s’assure ainsi que tout le monde suit. Je crains qu’en l’absence de délais, les gens mettent 25, 30 ou 40 ans à combler les besoins en matière d’accessibilité, besoins qui iront croissant au fil du temps. Il faut encourager l’adoption de délais adéquats tout en étant souples, afin que les gens aient des comptes à rendre sur la satisfaction des exigences du projet de loi. En Ontario, par exemple, il faut attendre 25 ans pour que les mesures soient entièrement mises en œuvre et que la province soit exempte d’obstacles. C’est trop long. Voilà ce qui me préoccupe.

À l’heure actuelle, le projet de loi ne prévoit aucun délai. Je crains que cela aura le même effet qu’en Ontario. Quand vous effectuerez l’étude article par article, je vous encouragerais à ajouter des délais. Fixez une échéance allant jusqu’à cinq ans, pour la mise en œuvre des règlements initiaux du moins, pour que nous puissions assurer le suivi à la deuxième étape.

Il faut établir des échéances concernant les règlements, car si le projet de loi ne contient aucun délai pour l’adoption du premier groupe de règlements, je pense qu’il n’y aura pas de suite à l’affaire. Voilà qui me préoccupe.

[English]

La sénatrice M. Deacon : Merci.

Monsieur Folino, je pense que vous avez indiqué qu’il faudrait ajouter un délai de cinq ans lors de l’étude article par article. À quel point la mesure devrait-elle être ferme?

[Interpretation]

M. Folino : Je ne veux pas qu’elle soit trop souple. Elle doit être stricte. Entre-temps, il faut qu’un système soit en place, à défaut de quoi l’encadrement sera bien trop souple. Je ne veux pas que ce soit le cas. Je veux une structure pour que les gens honorent leurs obligations.

[English]

La sénatrice Poirier : Je vous remercie tous les deux de témoigner. Ma première question s’adresse à M. Folino et fait suite à celle de la sénatrice Eaton. Vous avez indiqué que quand vous allez chez le médecin, vous appelez divers centres d’accès, qui prennent un rendez-vous pour vous à l’avance, et que quand vous vous présentez au cabinet, il y a quelqu’un qui peut fournir le service d’interprétation en langue des signes pour que vous puissiez échanger avec votre médecin.

Comme je viens d’une petite communauté rurale du Nouveau-Brunswick, je me demande quels services sont offerts dans les régions rurales comparativement à ceux disponibles dans les régions urbaines du Canada. Savez-vous si ces services sont offerts partout au pays? Je me demande simplement dans quelle mesure il serait possible pour un médecin de faire venir quelqu’un pour offrir ces services dans certaines régions. Connaissez-vous le pourcentage pour l’offre de services au Canada, si un tel chiffre existe?

[Interpretation]

M. Folino : Je vous remercie de cette question. Il existe une association nationale du nom de Canadian Association of Sign Language Interpreters, ou CASLI, dont les quelque 800 à 900 membres, qui sont des interprètes gestuels professionnels, servent les utilisateurs de l’American Sign Language. Quant aux personnes utilisant la langue des signes québécoise, elles peuvent recevoir les services d’environ 200 interprètes membres de l’Association québécoise des interprètes en langues des signes, ou AQILS. Il s’agit de deux associations professionnelles. Il existe donc 800 interprètes de langue anglaise et 200 interprètes de langue française, soit environ 1 000 interprètes au Canada.

Oui, j’admets que c’est peu. Quand le projet de loi aura été adopté, le soutien sera en place pour faire augmenter la capacité et aider les programmes à former plus d’interprètes gestuels. Il y aura ainsi plus d’occasions d’emploi pour les interprètes servant les personnes sourdes afin de faciliter la communication.

Pour répondre à votre question sur les régions rurales, l’interprétation sur place présente certainement un défi selon l’endroit dont il est question, mais les gens pourraient recourir à l’interprétation à distance en communiquant avec un interprète par l’entremise de la technologie vidéo lors des rendez-vous. Il est toutefois indéniable qu’il faut plus d’interprètes gestuels et qu’il faut augmenter la capacité. La reconnaissance de l’American Sign Language et de la langue des signes québécoise contribuera à faire du Canada un pays exempt d’obstacles.

[English]

La sénatrice Poirier : J’aborderai un sujet différent et poserai une question qui s’adresse à vous deux. Le projet de loi propose que quatre organes distincts soient responsables du traitement des plaintes relatives à l’accessibilité. D’après ce que nous avons entendu, les groupes de défense des droits de la personne et les experts en matière d’accessibilité s’inquiètent à ce sujet, considérant que cela pourrait semer la confusion.

Le cadre de plaintes proposé dans le projet de loi vous préoccupe-t-il?

La présidente : Qui veut répondre à cette question?

[Interpretation]

M. Folino : Je vais y répondre. Nous partageons ces préoccupations. À l’instar des personnes handicapées, les personnes sourdes s’interrogent à propos de l’endroit où elles déposeraient leurs plaintes. S’il y a quatre entités, le dépôt d’une plainte peut devenir mêlant. Il faut qu’il y ait un guichet unique afin de faciliter le processus. Ce sera plus efficace et résoudra le problème au lieu de nous obliger à nous adresser à divers organes, pour nous faire dire ensuite que nous avons déposé notre plainte au mauvais endroit. Cela ne ferait que rallonger le processus, qui pourrait prendre deux, trois ou quatre ans avant de connaître son dénouement. Voilà ce qui nous préoccupe.

Nous voudrions qu’il existe une norme, un guichet où déposer nos plaintes.

Par exemple, le commissaire principal à l’accessibilité pourrait recevoir les plaintes et les trier. Cela aiderait. Le fait que le processus de plaintes soit simplifié réduirait l’anxiété chez les personnes handicapées et sourdes.

[English]

Mme Wang : Je suis entièrement d’accord avec lui. Il sera très utile de bénéficier d’un processus simplifié.

Toutes les recherches que nous avons effectuées sur l’accès aux services en ce qui concerne les technologies d’assistance et les services de réadaptation montrent que l’existence de plusieurs guichets pour accéder aux services complique énormément les choses. Les gens déplorent qu’ils doivent répéter leur histoire à maintes reprises. Cela porte un coup à leur dignité dans bien des cas, car ils doivent répéter leur histoire à différentes personnes qui, à chaque étape de la discussion, pourraient ne pas toujours comprendre parfaitement la nature de leurs problèmes.

La présence d’un point d’accès unique où les plaintes seraient triées ou acheminées vers l’autorité compétente améliorerait certainement la vie des personnes handicapées.

La sénatrice Omidvar : Je vous remercie tous les deux de témoigner. Ma première question s’adresse à Mme Wang. J’aimerais ensuite entendre M. Folina également.

Madame Wang, vous avez parlé des diverses formes de discrimination auxquelles les personnes sont confrontées au fil du vieillissement. Pourriez-vous traiter de la complexité de l’intersectionnalité? Quand on vieillit, on peut développer de nombreux handicaps, mais la race, l’ethnicité, l’orientation sexuelle et d’autres facteurs ont également une incidence. Pourriez-vous nous en dire un peu plus sur ce que vous avez observé dans vos recherches?

Mme Wang : Pour nombre de personnes ayant participé à mes recherches ou à d’autres projets faisant partie d’AGE-WELL, l’âgisme est souvent attribuable au fait que les gens ne comprennent pas nécessairement les personnes atteintes de la maladie d’Alzheimer ou de troubles cognitifs, auxquels s’ajoutent de multiples formes de problèmes physiques. Les maladies associées à l’âge font l’objet de nombreux préjugés.

Les personnes âgées indiquent qu’elles ne sont pas traitées comme les personnes jeunes et productives de la communauté. Si elles sont à la retraite, elles peuvent souvent être victimes d’une certaine forme de discrimination parce qu’elles ne sont pas considérées comme des « membres productifs de la société », ce qui est, en soi, erroné.

Le problème est aggravé si une personne est atteinte de troubles cognitifs, qui font en sorte qu’il lui est bien plus compliqué de se démêler dans l’environnement ou entre les services. À cela s’ajoutent les problèmes relatifs aux changements visuels et auditifs, qui compliquent l’accès aux divers services offerts dans la communauté.

La perte d’une part importante des soutiens sociaux pourrait compliquer encore davantage la situation. Si une personne a un statut socioéconomique peu élevé en raison de son travail ou de son éducation, elle pourrait être exposée à d’autres formes de discrimination.

La sénatrice Omidvar : Monsieur Folino, je suis sûre que les membres de votre communauté et de l’Association des malentendants canadiens présentent diverses intersections de handicaps. Or, rien dans le projet de loi ne porte sur l’intersectionnalité. Pensez-vous que nous devrions inclure l’intersectionnalité dans les principes du projet de loi pour que les législateurs tiennent compte d’une multitude de facteurs et de caractéristiques pouvant entraîner la discrimination?

[Interpretation]

M. Folino : La réponse brève est oui, certainement. Les personnes sourdes présentent diverses intersectionnalités : outre leur surdité, elles peuvent être des personnes de couleur, faire partie de la communauté LGBT, avoir des handicaps ou être aveugles. Les intersectionnalités sont légion au sein de notre communauté. La question me tient à cœur, et j’appuierais l’inclusion de l’intersectionnalité dans les principes du projet de loi. Dans sa présentation, le Conseil des Canadiens avec déficiences parle de l’intersectionnalité et l’Association des sourds du Canada appuie sa position.

[English]

La sénatrice Forest-Niesing : Je commencerai par vous, madame Wang. J’ai reçu dans mon bureau des personnes très impressionnantes qui réalisent des recherches et des travaux au sein du Réseau canadien des soins aux personnes fragilisées. Elles ont mis en lumière certains éléments révélateurs, faisant remarquer que même si la fragilité n’entre peut-être pas dans la catégorie des handicaps, elle devrait y être incluse.

Jugez-vous que la définition de handicap que contient le projet de loi dans sa forme actuelle est assez vaste pour englober les conséquences de la fragilité?

Mme Wang : Je pense que oui.

La sénatrice Forest-Niesing : Merci.

Monsieur Folino, je vous remercie de témoigner. Nous avons tous entendu quelques exclamations étouffées quand vous avez indiqué qu’il existe 300 langues des signes dans le monde. Voilà qui nous préoccupe beaucoup, car si nous envisageons d’inclure l’American Sign Language et la langue des signes québécoise dans les langues utilisées par la population canadienne, nous faisons manifestement fi des autres langues des signes que des Canadiens pourraient utiliser.

Même si je ne peux pas imaginer que nous puissions raisonnablement nous attendre à ce que tout le monde doive ou puisse obtenir des services dans sa propre langue des signes, je me demande ce que vous pensez de l’inclusion de la langue des signes autochtone.

[Interpretation]

M. Folino : Merci. Oui, je pense que c’est important. Je ne veux pas représenter la communauté autochtone ou parler en son nom. Je me considère comme une personne blanche, mais j’appuie l’inclusion des langues des signes autochtones, car les Autochtones sont les premiers habitants de notre pays. Le projet de loi C-91, Loi concernant les langues autochtones, est rendu à l’étape de la troisième lecture à la Chambre des communes, et nous en appuyons l’adoption. En vertu du projet de loi C-8, ou comme la ministre Qualtrough l’a indiqué, il sera possible, dans l’avenir, d’élaborer des mesures législatives afin de reconnaître les langues des signes autochtones pour les personnes handicapées. La communauté autochtone a indiqué qu’il pourrait y avoir un autre projet de loi qui porterait le titre de loi sur les handicaps chez les Autochtones. Voilà une autre mesure législative où les langues des signes autochtones pourraient être reconnues. Je considère que ces langues devraient être reconnues dans le projet de loi C-91, Loi concernant les langues autochtones, dans le projet de loi C-81, ou dans leur propre loi sur les langues autochtones.

[English]

Le sénateur Kutcher : Merci infiniment. Vous avez tous les deux parlé de la valeur des technologies novatrices comme outil important pouvant aider à surmonter les obstacles. Savez-vous s’il existe des programmes, des initiatives ou des fonds fédéraux destinés particulièrement à la conception de ces types de technologies?

Mme Wang : Le réseau AGE-WELL développe ces types de technologies. J’aimerais peut-être que vous expliquiez un peu votre question.

Le sénateur Kutcher : Au sens plus large, par exemple, il y a des organismes de financement au Canada qui financent en particulier la recherche dans certains domaines. Est-ce qu’il y en a qui se pencheraient sur diverses technologies pour les personnes sourdes ou pour d’autres groupes?

Mme Wang : Il y a du financement qui vient du Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie du Canada, le CRSNGC, mais c’est un programme ouvert en ce qui concerne les projets qui sont proposés, ce qui fait que le financement n’est pas assuré. Il est semblable à ce que proposent les Instituts de recherche en santé du Canada, les IRSC. Le financement n’est pas assuré, mais ils financent effectivement des recherches liées aux technologies d’assistance. Je devrai peut-être vous transmettre l’information ultérieurement.

Je crois qu’il y a du soutien pour les technologies d’assistance en collaboration avec le fédéral, mais que c’est surtout mené par l’industrie. Je crois que c’est le ministère de la Recherche et de l’Innovation, mais je n’en suis pas sûre. Je peux trouver la réponse.

La présidente : Merci beaucoup.

[Interpretation]

M. Folino : La technologie de l’avenir pour les personnes sourdes est l’interprétation vidéo à distance ou IVD. C’est déjà conçu. Il s’agit maintenant de financer la croissance de cette technologie, mais ce n’est pas la seule technologie. Nous pouvons créer des systèmes économiques pour les sourds grâce à l’innovation technologique. Par exemple, il y a la production de vidéos en ASL et en LSQ. Ils pourraient obtenir des contrats du gouvernement fédéral pour fournir ce service.

Le Royaume-Uni a un programme spécifique avec BBC News. Ils ont des programmes particuliers, un ou deux soirs par semaine, qui s’adressent aux personnes sourdes. Ce sont des émissions pour les sourds, des vidéos pour les sourds, des émissions culturelles, des nouvelles, des histoires de personnes sourdes. C’est un canal qui est destiné à cela. C’est diffusé partout en Europe, en Asie, aux États-Unis, au Mexique et en Amérique du Sud. Nous n’avons pas encore cela au Canada. Nous espérons avec ce projet de loi et la reconnaissance de l’ASL et de la LSQ qu’il y aura des ressources et des fonds à l’appui de cette communauté et que cela permettra le développement de ce type de technologie. Merci.

[English]

La présidente : Je remercie mes collègues de leurs excellentes questions. Merci infiniment à nos témoins. Vos témoignages nous sont d’une très grande utilité pour notre étude du projet de loi C-81.

[Français]

Honorables sénateurs, nous poursuivons notre étude du projet de loi C-81, Loi visant à faire du Canada un pays exempt d’obstacles. Nous avons des témoins par vidéoconférence et nous en avons ici dans la salle.

[Traduction]

Par vidéoconférence, nous avons, à titre personnel, M. David Onley, ancien lieutenant-gouverneur de l’Ontario, ainsi que Mme Donna Jodhan, présidente de Canada sans barrières. Je vous remercie d’être là. Nous avons également avec nous M. Christopher T. Sutton, directeur général national de l’Association des malentendants canadiens, et Mme Seema Lamba, coordonnatrice par intérim, Section des programmes de l’Alliance de la fonction publique du Canada.

Comme vous pouvez le voir, nous allons entendre un bon groupe de témoins avant de passer à l’étude article par article du projet de loi demain. Je vais vous demander de poser des questions bien précises et d’essayer de vous en tenir à une question ou à trois ou quatre minutes. Veiller à préciser à qui vous adressez vos questions, en particulier pour nos témoins qui sont là par vidéoconférence. Ce sera beaucoup plus efficace ainsi.

L’hon. David Onley, ancien lieutenant-gouverneur de l’Ontario, à titre personnel : Mesdames et messieurs, je vous remercie beaucoup de me donner l’occasion de vous parler du projet de loi C-81.

Au cours de la dernière année, j’ai réalisé l’examen de la Loi de 2005 sur l’accessibilité pour les personnes handicapées de l’Ontario, qu’on appelle en Ontario la LAPHO. Après avoir entendu des centaines de personnes de partout en Ontario, nous avons soumis le rapport de notre examen au gouvernement provincial le 31 janvier.

Parce que j’ai acquis cette expérience et que j’ai en plus été la première personne ayant un handicap physique à occuper le poste de lieutenant-gouverneur de l’Ontario, et ce, pendant sept ans, je crois pouvoir vous faire part de certaines idées qui, je l’espère, vont ajouter quelque chose à vos délibérations visant la Loi canadienne sur l’accessibilité.

Quand je suis devenu lieutenant-gouverneur en 2007, j’ai adopté l’accessibilité comme thème principal de mon mandat. J’ai défini l’accessibilité comme étant « ce qui permet aux gens de réaliser leur plein potentiel ».

J’ai proposé cette définition parce que je voulais que les gens voient que l’accessibilité dépasse nettement ce qui nous vient à l’esprit en entendant ce terme — des choses comme les bateaux d’accès de trottoir, les rampes, les places de stationnement prévues pour les fauteuils roulants et les portes automatiques. L’accessibilité, c’est beaucoup plus que l’affiche omniprésente du fauteuil roulant sur fond bleu.

L’enquête canadienne sur l’incapacité fait écho aux conclusions d’autres enquêtes : près de 20 p. 100 des Canadiens, soit plus de 6 millions de personnes, ont au moins un handicap qui nuit à leurs activités quotidiennes. De plus, les personnes handicapées forment notre plus important groupe minoritaire. C’est le seul groupe minoritaire que d’autres personnes peuvent joindre, et c’est bien le cas, non par choix, mais par accident, à cause d’une maladie ou, dans bien des cas, simplement à cause du vieillissement.

C’est un pourcentage important, mais je vais vous fournir la donnée la plus importante : quand on inclut les membres de la famille immédiate des Canadiens handicapés, plus de 53 p. 100 des Canadiens sont directement touchés par un handicap. Cela signifie qu’en ce moment, la majorité des Canadiens sont touchés personnellement, soit par leur propre invalidité ou par celle d’un membre de leur famille immédiate.

C’est vraiment une constatation très importante. La raison pour laquelle je pense que c’est important, c’est que cela nous dit, étant donné le pourcentage important des incidents — et nous n’en connaissons pas le nombre exact —, que c’est malheureusement un effet dérivé du vieillissement. C’est la perte de mobilité et la perte d’accessibilité ou de fonctionnalité permettant de circuler. Nous pouvons dire avec assez de certitude qu’un pourcentage supérieur de Canadiens vont souffrir d’une incapacité et que cela va avoir des répercussions sur les membres de la famille et sur leur vie quotidienne.

Je commence par mentionner cela parce que je sais que vous avez entendu des commentaires venant d’autres témoins sur l’importance de fixer des dates pour la réalisation des objectifs, dans la mesure où des normes doivent être respectées et des objectifs doivent être atteints en matière d’accessibilité. Je suis entièrement d’accord, et je dois dire qu’il m’a fallu du temps pour en arriver à cela, en particulier pendant la mise en œuvre de la LAPHO. J’ai participé aux discussions au début de 2005, et j’ai été le premier président du comité consultatif du ministre sur la mise en œuvre de la loi. La plupart des membres du premier comité consultatif et moi estimions que la persuasion et la bonne volonté suffiraient pour atteindre les objectifs.

Le premier examen de la loi réalisé en 2010 par l’ancien député Charles Beer a conclu au contraire, tout comme le deuxième examen réalisé par l’ancien doyen de l’école de droit de l’Université de Toronto, Mayo Moran. Quand j’ai entrepris mon examen en février 2018, j’ai tenu compte de cela, mais je demeurais toujours convaincu que la persuasion et les bons arguments économiques, très nombreux, suffiraient à convaincre les sociétés et les particuliers de voir l’atteinte de la pleine accessibilité comme étant un objectif raisonnable que nous devrions entreprendre très rapidement.

Après avoir écouté, comme je l’ai dit, des centaines de personnes de partout dans la province et avoir reçu des mémoires par courriel et entendu des témoignages en personne, mon opinion a changé. Je crois maintenant très fermement que la seule façon de réaliser une accessibilité véritable et complète est d’avoir des dates définissables pour le respect des diverses normes et l’atteinte des objectifs, ainsi que d’avoir un gouvernement qui est prêt à assurer la mise en œuvre de ces mesures.

Si nous avions prévu cela dans la LAPHO en 2005, je crois que la situation serait très différente aujourd’hui. L’objectif initial de la loi était de rendre l’Ontario entièrement accessible pour 2025. Au début, je me souviens avoir pensé très nettement que ce serait réalisable en 7 ans, ou 10 ans tout au plus. Mais au fil de mes audiences, et compte tenu des examens antérieurs et des témoignages des gens sur les obstacles auxquels ils font face et les situations déprimantes dans lesquelles ils se trouvent, j’en suis venu à tirer une conclusion complètement différente.

Je sais qu’il y a des différences marquées entre les points de vue à ce sujet, mais je vous dirai simplement que quand vous regardez d’autres mesures prises par le gouvernement, qu’il s’agisse de questions liées aux changements climatiques ou à l’environnement, ou encore quand vous traitez avec des étudiants comme je le fais à l’Université de Toronto, en sciences politiques, vous devez avoir une date, une échéance et un objectif clair à l’esprit. Sinon, c’est un processus qui n’en finit plus.

La présidente : Monsieur Onley, je suis désolée, mais je vais devoir vous interrompre.

M. Onley : C’est très bien.

La présidente : Je sais que nous aurons de nombreuses questions et que vous aurez la chance d’approfondir ce que vous nous dites. Je vous remercie de votre exposé, mais nous voulons avoir assez de temps pour tout le monde.

Nous allons maintenant entendre Mme Jodhan, de Canada sans barrières, par vidéoconférence. Nous vous écoutons. Merci.

Donna Jodhan, présidente, Canada sans barrières : Bonjour, et merci beaucoup. Canada sans barrières est une organisation communautaire et non partisane. Elle a été fondée vers la fin de 2014 et a joué un rôle important dans le lancement de la campagne visant à faire pression sur le gouvernement canadien pour qu’il adopte une loi sur les personnes handicapées du Canada garantissant un Canada sans barrières.

En ce moment nous avons l’appui de plus de 25 organisations nationales à l’échelle du Canada. Les villes de Toronto et d’Halifax nous ont donné leur appui, de même qu’environ 2 000 particuliers, dont le nombre est d’ailleurs en croissance constante.

Nous sommes également présents dans les médias sociaux, et nous comptons plus de 3 000 abonnés sur Facebook et des centaines d’abonnés à notre groupe Facebook appelé BFC Advocating for Change. Nous avons également des milliers d’abonnés sur Twitter.

À Canada sans barrières, nous sommes reconnaissants d’avoir cette occasion de nous faire entendre. Nous croyons qu’une fois adoptée, cette loi passera à l’histoire comme étant l’une des lois les plus importantes, étant donné qu’elle porte sur les droits des Canadiens handicapés, de leurs amis et de leurs familles. Nous nous réjouissons à l’idée de continuer à travailler avec le gouvernement à ce texte législatif très important.

Le projet de loi C-81 doit comporter des échéanciers. Il faut absolument des échéanciers pour garantir la prise de mesures relatives à l’accessibilité. Il faut également des échéanciers pour mesurer les progrès en matière d’accessibilité. Nous appuyons en particulier les recommandations voulant que le projet de loi comporte un échéancier pour la réalisation d’un Canada sans barrières et des échéanciers pour la conception de normes en matière d’accessibilité et pour leur intégration dans la loi. Des échéanciers sont aussi requis pour l’établissement de l’infrastructure nécessaire à la mise en œuvre du projet de loi.

Le projet de loi C-81 n’impose aucune obligation de la part du gouvernement d’utiliser les pouvoirs prévus dans le projet de loi. Nous appuyons les recommandations voulant qu’on remplace « peut » par des verbes au présent indiquant l’obligation, de manière à garantir que le gouvernement met en œuvre les étapes clés pour l’atteinte des objectifs d’accessibilité.

Le projet de loi C-81 exige que les organismes réglementés par le gouvernement fédéral établissent des plans sur l’accessibilité. Cependant, le projet de loi n’exige pas que ces plans soient de bons plans. Il n’exige pas d’une organisation qu’elle mette en œuvre son plan sur l’accessibilité.

Le projet de loi C-81 cause, à tort, une dispersion du pouvoir d’établir des normes d’accessibilité, notamment par règlement, ainsi que du pouvoir d’appliquer la loi dans l’ensemble des nombreux organismes fédéraux. À cause de cette dispersion, la mise en œuvre et l’application de la loi seront moins efficaces, porteront à confusion, seront plus compliquées et plus coûteuses, et il y aura une augmentation des retards.

Le projet de loi C-81 donne de manière inappropriée au gouvernement fédéral et à divers organismes fédéraux le pouvoir étendu, injustifié et arbitraire d’exempter des organismes de diverses obligations importantes en matière d’accessibilité. Le gouvernement peut même s’exempter lui-même. Le projet de loi n’exige pas du gouvernement fédéral qu’il utilise son pouvoir actuel de veiller à ce que les fonds fédéraux ne soient jamais utilisés par quelque bénéficiaire que ce soit pour créer ou perpétuer des obstacles. Le projet de loi doit être modifié de manière à tirer parti du pouvoir de dépenser du gouvernement fédéral pour favoriser l’accessibilité.

Le gouvernement fédéral est le plus important employeur et la plus importante organisation à devoir se soumettre à cette loi. Par conséquent, les principaux organismes fédéraux qui vont concevoir des normes en matière d’accessibilité, exercer de la surveillance et appliquer cette loi doivent être indépendants du gouvernement fédéral. En vertu du projet de loi, ils ne le sont pas. Ils relèvent tous du gouvernement fédéral.

Nous appuyons les recommandations visant des modifications qui garantiraient que l’OCENA, le commissaire à l’accessibilité et d’autres organismes clés sont suffisamment indépendants.

Le projet de loi C-81 ne tient pas suffisamment compte des barrières créées par la pauvreté et la discrimination intersectionnelle, et il ne tient pas compte non plus des barrières uniques auxquelles les Autochtones et membres handicapés des Premières Nations font face.

Le projet de loi C-81 ne reconnaît pas l’ASL et la LSQ comme étant les langues officielles des personnes sourdes.

Malheureusement, des sanctions doivent parfois être imposées pour non-conformité. Dans le projet de loi, le plafond des sanctions est de 250 000 $. Il n’y a pas de minimum.

Les trois catégories de violation qui s’appliquent normalement sont les violations mineures, graves ou très graves. Nous demandons qu’une sanction minimale s’applique à toute violation et que cette sanction minimale soit de 50 000 $. Toute violation a des effets considérables sur les personnes handicapées.

Nous espérons sincèrement que le projet de loi C-81 recevra la sanction royale avant les prochaines élections fédérales en octobre. Sinon, nous craignons que les années de travail acharné de la part du gouvernement actuel et des nombreux autres organismes et particuliers aient été inutiles.

Enfin, nous remercions le Sénat de son travail assidu et de son dévouement. Nous remercions particulièrement le sénateur Jim Munson de son leadership. Nous sommes impatients de voir le Sénat laisser sa marque sur ce texte législatif historique. Merci.

La présidente : Merci.

Christopher T. Sutton, directeur général national, Association des malentendants canadiens : Honorables sénateurs, merci de l’honneur que vous me faites en me permettant de prendre la parole au nom de l’Association des malentendants canadiens, alors que vous arrivez à la fin de votre recherche sur le projet de loi C-81. L’Association des malentendants canadiens a été créée en 1982, et il s’agit du principal organisme de défense de consommateurs représentant près de 4 millions de Canadiens ayant une perte auditive. Forte d’un réseau qui couvre le Canada entier, notre organisation travaille de concert avec des professionnels, des fournisseurs de services et le gouvernement à fournir de l’information, du soutien et de l’assistance visant à améliorer la vie des personnes ayant une perte auditive et à veiller à ce qu’elles puissent surmonter les obstacles dans tous les aspects de leur vie.

Je m’appelle Christopher Sutton, et je suis le directeur général national de l’Association des malentendants canadiens. Comme la plupart de mes collègues que vous avez rencontrés au cours de ce processus, j’ai la chance d’avoir une carrière gratifiante à travailler au nom des personnes handicapées dans le secteur des entreprises, le secteur sans but lucratif et le secteur public. Malgré mon niveau de scolarité élevé et mes succès professionnels, je suis atteint d’un handicap invisible et je dois par conséquent faire face quotidiennement à des obstacles.

L’Association des malentendants canadiens appuie le projet de loi C-81. Nous reconnaissons que les lois et les normes ne sont qu’une partie de ce qu’il faut faire pour abattre les obstacles, mais nous le voyons comme une étape positive en vue de garantir que chacun, peu importe ses capacités, peut vivre dans une société sans obstacle. Ayant vécu aux États-Unis, où ils ont l’Americans with Disabilities Act, je nourris beaucoup d’espoir concernant ce que cette loi canadienne pourra accomplir.

L’Association des malentendants canadiens félicite le gouvernement du Canada de son travail d’élaboration du projet de loi ainsi que du processus qu’il a mis en œuvre pour consulter les personnes handicapées afin de s’assurer que le projet de loi répond à nos besoins. L’Association des malentendants canadiens a été un partenaire du processus de consultation et elle poursuit son travail en tant qu’un des membres fondateurs de l’Alliance pour une loi fédérale sur l’accessibilité, qui compte 95 membres. Nous sommes ravis de voir que de nombreuses recommandations que nous avions faites se retrouvent dans ce projet de loi crucial.

Il serait possible d’améliorer des aspects du projet de loi pour en faire le meilleur projet de loi possible et pour permettre au Canada d’être un chef de file mondial dans les domaines de l’accessibilité, de l’inclusion et de la diversité permettant de garantir à tous une société sans obstacle.

En tant qu’une des organisations partenaires ayant travaillé avec l’Alliance pour une loi fédérale sur l’accessibilité, nous appuyons les 11 recommandations qui ont été présentées au comité et nous aimerions insister sur ce qui suit.

Adoptez le projet de loi C-81 maintenant. Nos communautés ont travaillé si fort pour ce projet de loi, et nous ne voulons pas qu’il échoue à cause des élections à venir. Nous vous encourageons à faire en sorte que ce projet de loi soit adopté le plus rapidement possible.

Nous reconnaissons que ce projet de loi n’est pas parfait. Il nous offre toutefois une base permettant d’apporter des changements importants au bénéfice de la communauté des personnes handicapées. Nous sommes conscients que le travail véritable s’amorcera avec l’élaboration des normes et des règlements nécessaires, et nous sommes convaincus que nous disposons ici d’une tribune nous permettant de régler quelques-unes de ces questions.

Si des amendements doivent être apportés au projet de loi, voici ce que nous recommanderions. Nous vous encourageons à établir un échéancier pour en arriver à un Canada exempt d’obstacles. C’est ce qu’on a fait dans le cadre de la Loi sur l’accessibilité pour les personnes handicapées de l’Ontario en fixant à 2025 le moment où cette province devra avoir éliminé tous les obstacles. En précisant ainsi dans la loi des échéanciers et des dates butoirs, on permet aux gens de dégager une vision et des objectifs à atteindre pour créer une société sans obstacles. Nous comprenons bien que cela ne se fera pas du jour au lendemain, mais nous estimons tout de même que c’est essentiel.

Nous voulons nous assurer que cette loi et les règlements qui seront pris en application de celle-ci figureront toujours au rang des priorités, peu importe le gouvernement au pouvoir.

En second lieu, il faut assurer l’accès à des aménagements et des mesures de soutien pour les communications. Bien que les gens aient une assez bonne idée de ce que l’on entend par environnement bâti accessible, nous préconisons vivement l’adoption de solutions novatrices en la matière. Ces mesures d’aménagement et services de soutien pour les communications comprennent notamment le sous-titrage en temps réel et l’accès à des comptoirs de service, des salles de conférence et d’autres installations permettant l’utilisation d’appareils d’aide auditive, de la communication par texte, du langage gestuel et d’autres formes de soutien à la communication. Il faut que l’accès à de telles mesures soit rendu obligatoire par les normes et la réglementation.

Des fonds doivent être prévus pour indemniser les personnes handicapées et les organisations qui les représentent et travaillent en leur nom pour leur contribution à l’élaboration et à la mise en œuvre de cette loi. On demande trop souvent à ces personnes de parler de leur expérience de vie avec un handicap et de nous faire bénéficier de leur expertise sans les indemniser financièrement pour leurs connaissances et le temps qu’elles consacrent à de telles consultations.

On a aussi besoin de financement pour la conception et la distribution de trousses, de guides, de matériel de formation et d’autres ressources afin que la mise en œuvre de cette loi soit couronnée de succès.

Il convient également d’offrir un financement additionnel aux organisations comme la Société canadienne des malentendants qui s’emploient à améliorer le sort des personnes handicapées au Canada. C’est ainsi que nous pourrons leur offrir les ressources et les mesures de soutien dont ces personnes ont besoin pour mener une vie productive et exempte d’obstacles.

Il est en outre absolument essentiel de créer une culture fondée sur l’inclusion et l’équité. Toutes les personnes travaillant au sein de la fonction publique fédérale, y compris les parlementaires et leur personnel, doivent participer à un programme intensif de sensibilisation de telle sorte qu’elles comprennent bien la réalité de tous ces gens aux capacités variées et qu’elles adoptent des attitudes inclusives et des pratiques équitables à leur endroit.

Nous estimons également qu’il faut mettre en place des politiques et des pratiques permettant de changer les attitudes, et voir à ce qu’elles soient respectées. De plus, les stratégies d’emploi doivent comprendre le recrutement actif de personnes handicapées à tous les niveaux, des postes de première ligne jusqu’à ceux de gestion au sein du gouvernement.

Bien que je sois ici pour vous parler de la situation des personnes handicapées dans leur ensemble et pas seulement de celle des gens souffrant d’une déficience auditive, il est important de noter que s’amorce aujourd’hui le Mois de la parole et de l’audition. Comme notre organisation est le principal porte-parole des personnes vivant avec une déficience auditive au Canada, je me dois de vous sensibiliser à une réalité que vous ne pouvez absolument pas ignorer. Je parle du nombre croissant de personnes souffrant d’une déficience auditive acquise et du fardeau économique qui en résulte pour le Canada et le reste de la planète lorsque les mesures d’aménagement nécessaires à cet égard ne sont pas prises.

La déficience auditive est un enjeu qui a rarement obtenu la faveur populaire et, bien que certaines provinces aient mis en œuvre une stratégie concernant les soins auditifs, il y a encore énormément de chemin à faire pour en arriver à un niveau suffisant de sensibilisation et d’allocation de ressources pour ces soins spécialisés. C’est vraiment préoccupant. Un Canadien ayant une déficience auditive non traitée risque fort de souffrir de dépression, d’isolement, d’anxiété et de pertes cognitives précoces, autant de problèmes graves qui se traduisent par des coûts supplémentaires pour notre système de santé.

L’Association canadienne des malentendants a travaillé en partenariat avec des associations de l’industrie et des organisations professionnelles pour créer l’Alliance pour la santé auditive du Canada. Cette coalition doit collaborer avec le gouvernement fédéral pour veiller à l’élaboration et à l’adoption d’une stratégie nationale en matière de soins auditifs.

L’Association canadienne des malentendants est déterminée à poursuivre sa collaboration avec votre comité et le gouvernement pour assurer la mise en œuvre de ce projet de loi de manière à répondre aux besoins de toutes les personnes handicapées.

Merci encore de votre invitation et de l’intérêt que vous portez à notre mission de créer un Canada accessible. Je me ferai un plaisir de répondre à toutes vos questions.

La présidente : Merci. À vous la parole, madame Lamba.

Mme Seema Lamba, coordonnatrice par intérim, Section des programmes, Alliance de la fonction publique du Canada : Bonsoir à tous. Merci de m’avoir invitée à prendre la parole devant vous au nom de l’Alliance de la fonction publique du Canada (AFPC). L’AFPC représente plus de 180 000 travailleurs de tout le pays, y compris des milliers de fonctionnaires fédéraux au sein notamment des ministères et organismes gouvernementaux, des sociétés d’État, des musées, et des aéroports et administrations portuaires dans le secteur des transports sous réglementation fédérale.

Notre syndicat appuie la Loi canadienne sur l’accessibilité qui vise à faire du Canada un pays sans obstacles. Les personnes handicapées doivent pouvoir participer pleinement et équitablement à tous les aspects de la société canadienne. En notre qualité d’agent négociateur, nous vous présentons un mémoire mettant l’accent sur l’accessibilité à l’emploi et les répercussions sur les fonctionnaires fédéraux vivant avec un handicap.

Le projet de loi C-81 et la Loi sur l’équité en matière d’emploi exigent tous deux que les employeurs fédéraux créent des plans pour éliminer les obstacles à l’emploi des personnes handicapées. Il y a entre ces deux textes législatifs des chevauchements que nous jugeons inquiétants du fait qu’il est impossible de savoir ce qu’ils signifient concrètement pour les fonctionnaires ayant un handicap, les employeurs et les syndicats. À notre avis, il serait préférable d’améliorer la Loi sur l’équité en matière d’emploi et de se référer à ses dispositions à l’égard de ces enjeux, plutôt que d’en inclure dans le projet de loi C-81, ce qui crée un dédoublement. Le moment est bien choisi pour le faire, puisque la clause d’examen quinquennal de la Loi sur l’équité en matière d’emploi n’a pas été mise en application depuis 2002. Un examen de cette loi s’impose de toute urgence.

L’AFPC s’inquiète aussi du fait que le projet de loi C-81 ne mentionne aucunement le rôle des syndicats. Pourtant, les syndicats sont des acteurs importants dans les milieux de travail et sont légalement tenus de représenter leurs membres en matière d’emploi, ce qui les amène notamment à exiger une plus grande accessibilité et l’élimination des obstacles en milieu de travail pour leurs membres handicapés.

Plusieurs syndicats, dont l’AFPC, participent activement à la mise en œuvre des plans d’équité en emploi dans le secteur public fédéral. La Loi sur l’équité en matière d’emploi stipule en effet que les employeurs sont tenus de consulter les agents négociateurs et de collaborer avec eux. Les exigences du projet de loi C-81 sont différentes; il oblige seulement les employeurs à consulter les personnes handicapées lors de l’élaboration de leurs plans sur l’accessibilité. Les agents négociateurs devraient participer à l’élaboration et à la mise en œuvre de ces plans au même titre qu’ils le font actuellement pour les plans relatifs à l’équité en matière d’emploi.

Un autre aspect important de l’accessibilité de l’emploi est l’obligation d’adaptation en milieu de travail. Malgré la protection offerte par la Loi canadienne sur les droits de la personne, les fonctionnaires continuent de se voir refuser régulièrement des mesures d’adaptation. À titre d’exemple, une directive du Conseil du Trésor sur les congés et les modalités de travail spéciales continue de désavantager bon nombre de personnes handicapées en les forçant à prendre leur retraite de la fonction publique après deux ans.

Il faut souvent des années pour régler les griefs liés aux mesures d’adaptation et les plaintes relatives aux droits de la personne, ce qui vient s’ajouter aux problèmes des gens ayant besoin rapidement de mesures semblables en risquant d’aggraver leur état.

Le gouvernement fédéral a adhéré au Protocole facultatif de la Convention des Nations unies relatives aux droits des personnes handicapées. Il a également désigné la Commission canadienne des droits de la personne comme organisme national de surveillance de la mise en œuvre de cette convention. De par cet engagement, le Canada est tenu de veiller à ce que les personnes handicapées puissent jouir pleinement de leurs droits fondamentaux conformément à la Convention des Nations unies ratifiée en 2010.

Dans le rapport final du Groupe de travail conjoint syndical-patronal sur la diversité et l’inclusion, on apprend que les deux principaux obstacles à la diversité et à l’inclusion sont, de l’avis des travailleurs, les politiques et les pratiques en matière de dotation et de recrutement et le niveau d’adaptation et d’accessibilité du milieu de travail. Les résultats du Sondage auprès des fonctionnaires fédéraux montrent également que le taux de discrimination envers les personnes handicapées est très élevé.

Le groupe de travail recommande d’adopter une démarche centralisée et systématique pour la gestion de l’accessibilité et des mesures d’adaptation, et de centraliser le financement de ces mesures. Ces responsabilités sont actuellement dévolues aux ministères, ce qui crée une mosaïque d’applications manquant d’uniformité par rapport à l’obligation d’adaptation de l’employeur.

L’AFPC appuie les objectifs du projet de loi C-81 et, compte tenu du calendrier parlementaire, ne veut pas en freiner l’adoption. Nous vous encourageons donc à prendre connaissance des recommandations que nous formulons à votre intention dans notre mémoire écrit, et de les prendre en considération lorsque vous vous pencherez sur les amendements à apporter à cette loi ou à une mesure semblable ainsi que lors des examens futurs de celle-ci.

Merci de m’avoir donné l’occasion de comparaître devant vous aujourd’hui.

La présidente : Nous passons maintenant aux questions des sénateurs. Je demanderais à chacun d’indiquer à qui il souhaite adresser sa question.

La sénatrice Seidman : Merci beaucoup pour vos exposés. À n’en pas douter, c’est une excellente façon pour nous de conclure nos audiences, car nous avons eu droit aujourd’hui à des présentations très claires et des plus convaincantes. Je tiens à vous en remercier.

Nous allons procéder demain à l’étude article par article. Je peux vous dire que nous avons bel et bien entendu votre dernier plaidoyer. Depuis le début de cette étude, on nous a répété à maintes reprises que la communauté des personnes handicapées veut éviter de faire quoi que ce soit qui risquerait de mettre en péril ce projet de loi. On est convaincu que c’est un premier pas important dans la bonne direction, et cela ressort des témoignages que nous avons entendus.

Nous avons considéré des amendements très clairs et précis qui amélioreraient ce projet de loi au moyen de dispositions que l’on pourrait considérer contraignantes, et qui pourraient selon nous obtenir l’aval de la Chambre. Il s’agit en effet d’un enjeu important, car tous les amendements que nous adoptons doivent être soumis à la Chambre des communes.

Je vais vous poser ma première question, madame Jodhan, mais tout le monde pourra ensuite aussi y répondre. Si vous pouviez nous demander d’améliorer un aspect particulier de ce projet de loi, ce serait quoi exactement?

Mme Jodhan : Je vous demanderais de veiller à ce que des délais et des échéanciers soient précisés dans le projet de loi C-81 de telle sorte qu’il soit plus facile d’en assurer le respect. Ce serait donc ma réponse à votre question.

La sénatrice Seidman : Parfait. Merci.

M. Onley : Je partage cet avis. C’est tout à fait ce qu’il nous faut : des délais et des échéanciers. Vous pourriez même aller jusqu’à exiger que l’on atteigne l’objectif d’un Canada exempt d’obstacles d’ici le 1er janvier 2040. Cela peut sembler loin, mais ça ne l’est pas vraiment.

En l’absence d’un tel objectif temporel précis, l’exercice peut devenir un simple éloge de la vertu comme nous en avons déjà trop connu au fil des décennies.

La sénatrice Seidman : Merci, c’est très utile. Monsieur Sutton?

M. Sutton : Je suis d’accord avec mes collègues. Il est essentiel de fixer des échéanciers.

Comme nous avons pu le constater dans bien des cas, lorsqu’un dossier ne figure pas au rang des priorités pour un gouvernement, il peut facilement se retrouver sur la voie d’évitement. C’est vraiment primordial, car si le gouvernement au pouvoir a inscrit l’accessibilité au rang de ses priorités en proposant ce projet de loi, rien ne nous garantit que ceux qui vont le suivre en feront autant. Nous avons réellement besoin d’une vision bien claire et d’une échéance précise.

Celle-ci a été fixée par exemple à 2025 dans le cas de l’Ontario. Nous savons que nous ne nous réveillerons pas le 1er janvier 2025 dans une province totalement accessible, mais nous avons la certitude qu’un grand nombre de mesures auront été mises en œuvre d’ici cette date butoir. Nous pourrons dès lors nous appuyer sur cette base pour adopter davantage de normes et de règlements. Les délais et les échéanciers sont essentiels.

La sénatrice Seidman : Merci.

Mme Lamba : Pour notre part, nous souhaiterions voir une plus grande concordance entre la Loi sur l’équité en matière d’emploi et les plans sur l’accessibilité.

Je dois aussi préciser que seuls les fonctionnaires assujettis à la Loi sur les relations de travail dans le secteur public fédéral ont accès au processus de grief, ce qui crée un manque d’uniformité dans le traitement des demandes de mesures d’adaptation en milieu de travail.

La sénatrice Seidman : Merci.

Le sénateur Munson : Comme nous sommes en mode conclusion, c’est à peu près les questions que je voulais moi aussi poser.

Est-ce que ce projet de loi suscite un certain enthousiasme au sein de la fonction publique? Vous représentez des dizaines de milliers de fonctionnaires. Est-ce que la situation a été difficile par le passé pour ceux qui souhaitaient travailler au gouvernement fédéral et pour ces fonctionnaires qui ont dû démissionner après quelques années seulement parce que l’environnement de travail n’était plus vivable pour eux? J’aimerais savoir comment on voit les choses au sein de la fonction publique.

Mme Lamba : Il y a en fait deux questions. Est-ce qu’il y a de l’enthousiasme? Il y en a effectivement chez nos membres. Deuxièmement, je veux souligner que le taux de cessation d’emploi de ces personnes est presque deux fois plus élevé que leur taux d’accès à la fonction publique fédérale, alors que leur taux de représentation est à peu près le même. Il y a donc un nombre disproportionné de personnes handicapées qui doivent quitter la fonction publique fédérale.

Le sénateur Munson : J’ai une question qui n’a pas encore été posée. Je me suis adonné à réfléchir à des considérations d’ordre philosophique en sachant très bien que nous n’avons pas le temps de nous arrêter à de telles choses. Depuis plusieurs années déjà, il est beaucoup question des analyses sexospécifiques dans le contexte des pratiques d’embauche et de l’emploi au sein de la fonction publique. J’adresse donc ma question à tous nos témoins. Un peu sur le modèle de cette analyse sexospécifique utilisée au sein du gouvernement fédéral, ne pourrions-nous pas envisager que l’optique des personnes handicapées soit prise en compte lors de l’élaboration de règlements et d’autres mesures semblables? Je suis conscient que toutes les parties intéressées ont été consultées comme il se doit, mais les considérations particulières à la situation des personnes handicapées ne devraient-elles pas peser dans la balance dans les efforts déployés pour atteindre les objectifs d’embauche et d’intégration?

Comme nous avons perdu la communication avec nos témoins par vidéoconférence, je ne sais pas si M. Sutton ou Mme Lamba voudrait répondre d’abord à cette question.

La présidente : Peut-être que l’un de nos témoins ici présents pourrait répondre, le temps que nous rétablissions la communication.

M. Sutton : Merci pour la question, sénateur. De nombreux gouvernements examinent ces enjeux en tenant compte de la situation des personnes handicapées. J’estime que c’est absolument essentiel. Je peux vous donner mon exemple personnel. Mes parents ont découvert ma déficience auditive alors que j’avais sept ans et demi. Je n’arrivais pas vraiment à m’exprimer verbalement; je bégayais. Je disais que je m’appelais Chester. Je pouvais à peine parler. Mes parents ont alors dû décider quelle langue j’allais apprendre et ont opté pour l’anglais.

J’ai posé ma candidature pour des emplois dans la fonction publique fédérale, mais mon unilinguisme m’a maintes fois fermé des portes. J’y vois malheureusement une conséquence de mon handicap. Je crois donc qu’il est important d’évaluer les perspectives d’emploi et même la possibilité d’imposer des quotas en tenant compte de la situation particulière des personnes handicapées. Je n’aime pas tellement l’idée des quotas car je les juge discriminatoires, mais il est tout de même important que nous ayons un taux de représentation correspondant à la place que nous occupons au sein de la population.

Le sénateur Munson : J’aurais encore bien des questions, mais je veux laisser du temps à mes collègues sénateurs. Un grand merci à vous tous. C’est un enjeu qui m’apparaît des plus importants alors que nous abordons la problématique sous un angle nouveau pour aider toutes ces personnes qui pourraient travailler.

La présidente : Vouliez-vous ajouter quelque chose?

Mme Lamba : Oui. Je vous parlais du groupe de travail mixte réunissant des agents négociateurs et le Conseil du Trésor qui a mené une étude sur la diversité et l’inclusion. Ce groupe a recommandé un filtre d’analyse en matière de diversité et d’inclusion dans le cadre d’une approche des différentes mesures prises qui tiendrait davantage compte des diverses interactions entre ces éléments. Je vous signale que ce groupe de travail a noté parmi les principaux obstacles la dotation, le recrutement et la gestion des personnes dans son ensemble. Je dirais que cela fait partie des principaux éléments empêchant les personnes handicapées d’avoir accès à un emploi.

La présidente : Merci.

La sénatrice Moodie : Ma question s’adresse à l’honorable David Onley. Peut-être pourriez-vous nous en dire davantage au sujet de l’expérience ontarienne, car je sais que nous avons dû interrompre votre exposé. Quels enseignements avons-nous tirés de cette expérience? Quels sont les écueils que nous devrions chercher à éviter, outre cette absence d’échéanciers que vous avez très clairement déplorée?

M. Onley : Je pense que cette expérience nous a surtout appris qu’il y avait beaucoup de gens très frustrés face à l’incapacité du gouvernement à vraiment traduire ses promesses en mesures concrètes. Dans le cadre de nos discussions concernant la loi ontarienne, la conversation déviait inévitablement, sans même que l’on interpelle les gens à ce sujet, sur la loi fédérale et l’enthousiasme considérable que suscite l’adoption tant attendue d’une approche nationale en matière d’accessibilité.

Selon moi, c’est sans doute le principal élément qui ressort de tout cet exercice. Les discussions prenaient toujours la même tournure, que ce soit à l’Université Carleton ici même à Ottawa, à Thunder Bay au nord, à London ou ailleurs en Ontario. Sans même que nous ne soulevions la question, c’est le même message qui revenait sans cesse. Des attentes ont donc été créées et la déception sera grande si l’on en arrive à une version édulcorée ou affaiblie de ce projet de loi. Les gens veulent voir des résultats concrets.

La sénatrice M. Deacon : Merci à tous de votre présence aujourd’hui. Nous approchons en effet de la ligne d’arrivée de cette très longue course. C’est toutefois seulement le début d’un processus global et nous sommes très heureux de pouvoir compter sur votre contribution afin de solidifier quelques-unes de nos assises en prévision des prochaines étapes.

Mon observation ou ma question s’adresse à l’honorable David Onley. Je tiens à vous remercier. Votre vidéo est encore largement utilisée dans la province et dans tout le pays pour l’éducation et la formation. J’en parle pour une raison très particulière. Vous avez souligné la nécessité des échéanciers, et nous vous avons bien entendu. À l’issue de votre troisième examen, vous avez insisté sur cet aspect de l’éducation et de la formation en traitant des enseignements tirés de la loi ontarienne et des prochaines étapes à franchir. Nous n’avons pas l’impression qu’une telle volonté soit énoncée expressément dans ce projet de loi. J’aimerais que vous puissiez nous parler de cet effort d’éducation et de formation et des répercussions qui en ont résulté pour l’évolution de la culture d’après ce que vous avez pu constater en Ontario.

M. Onley : Ce fut assurément un processus graduel. Je crois que des groupes comme Racines de l’empathie, pour ne nommer que celui-là, y ont contribué chacun à leur manière dans le but commun d’améliorer notre société. C’est aussi le cas de divers groupes de défense des droits qui ont été pour nous une source d’inspiration pour poursuivre notre travail en la matière.

Avant que les caméras ne soient mises en marche, je discutais avec Donna de toute la fatigue que nous ressentons à force de devoir défendre cette cause. C’est un commentaire que bien d’autres intervenants me font également. Lorsqu’on l’a fait pendant toutes ces décennies — et je parle bien de décennies, et non d’années —, on en vient immanquablement à se demander pendant combien de temps encore on pourra continuer à poursuivre les mêmes objectifs.

Je ne sais pas si j’ai bien répondu à votre question, mais soyez assurés que si vous parvenez à proposer aux gens un projet de loi efficace et de qualité, ils vont y adhérer avec beaucoup d’enthousiasme. Sur cette base, il deviendra plus facile de faire le nécessaire en matière d’éducation et de formation.

La sénatrice M. Deacon : Je tiens à vous remercier tous les quatre pour votre travail sans relâche dans ce dossier.

Le sénateur Ravalia : Ma question s’adresse également à l’honorable David Onley. Je vous remercie tous pour les exposés que vous nous avez présentés. Votre Honneur, exception faite des échéanciers, y a-t-il des aspects du projet de loi C-81 qui, d’après vous, ne contribueraient pas pleinement à l’atteinte de cet objectif de permettre à chacun de s’épanouir pleinement, comme vous l’avez si bien dit au départ?

M. Onley : Non, je pense que ce point a été bien couvert. Je le pense vraiment. Cela exigera du travail à l’entrée en vigueur de cette loi, mais il faudra également que la province de l’Ontario, par l’entremise des nombreuses recommandations que j’ai formulées dans l’examen, ainsi que d’autres provinces, de leur propre initiative — contrairement à une analogie du domaine sportif, ce ne sera pas une tentative de passe désespérée où la loi entrera en vigueur, la sanction royale sera reçue et nous commencerons à organiser des parades pour l’accessibilité. Il nous reste encore beaucoup de chemin à parcourir, mais ce sera encourageant pour les groupes de défense des droits et pour les autres provinces qui ont des lois en matière d’accessibilité et cela encouragera aussi, je l’espère, les provinces qui n’ont pas de telles lois à les adopter sur leur territoire.

Le sénateur Ravalia : Merci.

La présidente : Les autres témoins ont-ils quelque chose à ajouter?

Mme Jodhan : J’aimerais me faire l’écho des commentaires de l’honorable David Onley. Notre communauté souhaite ardemment réussir, et nous espérons et nous prions que le projet de loi soit adopté. S’il ne l’est pas, je ne sais pas combien d’entre nous auront l’énergie, l’endurance et les moyens de tout recommencer.

Dans mon cas, je ne recommencerai probablement pas. Lorsqu’on se bat pendant des années pour défendre une cause, on se fatigue à la longue. Mais j’aimerais ajouter — et j’aimerais féliciter le gouvernement d’avoir entrepris cela, car c’était la première fois qu’un premier ministre nous faisait cette promesse — que nous avons hâte que cela soit mis en œuvre. Et nous espérons et nous prions que cela se concrétisera.

En ce qui me concerne, je suis très optimiste et je crois que cela va se concrétiser. Je tiens à féliciter le Sénat et le gouvernement actuel d’avoir eu le courage et l’intuition nécessaires d’entreprendre un tel projet. Il reste maintenant à espérer et à prier que le projet de loi soit adopté. Merci.

La sénatrice Omidvar : J’aimerais remercier les témoins d’être ici aujourd’hui. Madame Lamba, vous avez parlé du chevauchement et de la confusion créée par les interactions entre les différentes lois. Vous ou d’autres témoins peuvent-ils formuler des commentaires sur la confusion que pourraient créer le chevauchement et les compétences fédérales-provinciales conflictuelles dans la création d’un Canada exempt d’obstacles? Quelle serait la meilleure façon de régler ces problèmes?

Mme Lamba : J’ai remarqué que vous avez dit fédérales-provinciales. Je sais que ce projet de loi peut seulement avoir compétence sur les secteurs publics réglementés par le gouvernement fédéral, c’est-à-dire les secteurs publics et privés sous réglementation fédérale. Mais je tiens à souligner que même dans ce cas, il y aura de la confusion.

Par exemple, la Loi sur l’équité en matière d’emploi prévoit un programme de contrats fédéraux qui vise souvent des entités provinciales en vertu de cette loi. Cela vise donc des centaines de milliers de travailleurs qui doivent avoir un plan d’équité en matière d’emploi, et cela pourrait créer une certaine confusion. Mais à part cela, cette loi n’aura aucun impact sur les compétences provinciales, car ce n’est pas son objectif. Est-ce ce que vous voulez dire?

La sénatrice Omidvar : Je comprends cela, mais j’aimerais savoir si l’honorable David Onley peut faire des commentaires liés à son examen sur la Loi sur l’accessibilité pour les personnes handicapées de l’Ontario et à ses nombreuses années d’expérience en Ontario. Je suis Ontarienne, et j’ai donc vécu cela. Les choses sont-elles claires ou y a-t-il du chevauchement ou de la confusion? Et quelle serait la meilleure façon d’aborder la situation?

M. Onley : Comme tous les autres éléments de la politique canadienne, est-ce une question de savoir si c’est du ressort fédéral ou provincial? La réponse est oui.

Pourvu que les gens voient que des efforts concrets sont déployés dans les sphères d’influence ou de responsabilité respectives, tout chevauchement qui pourrait inévitablement se produire sera perçu comme un acte de bonne volonté plutôt que comme une façon de créer de la confusion.

Les domaines sous responsabilité fédérale sont clairement établis, et ceux sous responsabilité provinciale sont également assez bien définis. Je pense donc que sa mise en œuvre vigoureuse représentera un grand encouragement.

La sénatrice Omidvar : Merci.

La présidente : Merci beaucoup. Je crois qu’il n’y a pas d’autres questions, et j’aimerais donc prendre le temps de remercier nos témoins. Comme nous l’avons déjà dit, c’était la dernière réunion sur le projet de loi C-81 jusqu’à demain, lorsque nous ferons l’étude article par article et terminerons nos travaux à cet égard. Vos témoignages ont été très utiles.

Nous vous remercions d’avoir comparu et d’avoir passé un bon nombre d’années à défendre cette cause; nous vous sommes grandement redevables. Nous vous remercions également de l’impact que vous produisez non seulement dans la vie des personnes handicapées, mais également dans celle de tous les Canadiens.

À moins qu’il y ait un autre point à aborder, nous nous rencontrerons demain.

(La séance est levée.)

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