LE COMITÉ SÉNATORIAL PERMANENT DES AFFAIRES SOCIALES, DES SCIENCES ET DE LA TECHNOLOGIE
TÉMOIGNAGES
OTTAWA, le vendredi 26 juin 2020
Le Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie se réunit aujourd’hui, à 11 h 30 (HE), par vidéoconférence, afin de poursuivre son étude sur la réponse du gouvernement à la pandémie de COVID-19.
La sénatrice Chantal Petitclerc (présidente) occupe le fauteuil.
[Traduction]
La présidente : Honorables sénateurs, avant de commencer, je vais faire quelques rappels.
Premièrement, les sénateurs sont priés de laisser en tout temps leur microphone en sourdine, et nous nous occuperons de les activer et de les désactiver pendant la réunion. Avant de parler, attendez d’être nommé. Une fois que vous avez été nommé, faites une pause de quelques secondes pour que le signal audio soit prêt. Veuillez parler lentement et garder le microphone près de votre bouche. Si vous avez choisi un canal d’interprétation, ne parlez que dans la langue du canal choisi.
Veuillez signaler à la présidente les difficultés techniques concernant en particulier l’interprétation, et l’équipe technique travaillera à les résoudre. Si vous éprouvez d’autres problèmes techniques, communiquez avec le greffier du comité en utilisant le numéro d’assistance technique qui a été fourni.
Ne faites pas de copies, d’enregistrements ou de saisies des écrans Zoom. Vous pouvez utiliser et diffuser les délibérations officielles qui sont diffusées sur le site web SenVu.
Enfin, veuillez noter que si le comité décide de poursuivre la séance à huis clos, l’utilisation de plateformes en ligne ne garantit pas la protection des conversations et l’absence d’écoute clandestine. Par conséquent, les participants doivent tous être conscients de ces contraintes et restreindre la divulgation éventuelle de renseignements confidentiels, délicats ou protégés du Sénat. Les participants doivent s’installer dans un endroit privé et être attentifs à leur environnement, de manière à ne pas divulguer par inadvertance des renseignements personnels ou de l’information sur l’endroit où ils se trouvent.
Bonjour. Bienvenue au Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie.
[Français]
Je m’appelle Chantal Petitclerc, sénatrice du Québec, et c’est avec plaisir que je préside cette réunion virtuelle.
[Traduction]
Avant de donner la parole à nos témoins, j’aimerais présenter les sénateurs qui participent aujourd’hui à cette réunion virtuelle. Nous avons le sénateur Munson, la sénatrice Seidman, la sénatrice Bovey, la sénatrice Deacon, la sénatrice McCallum, la sénatrice Griffin, la sénatrice Dasko, la sénatrice Forest-Niesing, la sénatrice Pate, la sénatrice Mégie, la sénatrice Poirier, la sénatrice Moodie et le sénateur Kutcher.
[Français]
Je vous souhaite la bienvenue. Sans plus tarder, nous allons vous présenter les témoins pour la réunion d’aujourd’hui.
[Traduction]
Le 11 avril 2020, le Sénat a adopté une motion autorisant ce comité à étudier la réponse du gouvernement à la pandémie de COVID-19. Aujourd’hui, nous tenons notre septième réunion dans le cadre de cette étude.
[Français]
Pour la première partie de cette réunion, nous avons le privilège et le plaisir d’accueillir l’honorable Patty Hajdu, ministre de la Santé. Elle est accompagnée de deux représentantes de l’Agence de la santé publique du Canada, soit la Dre Theresa Tam, administratrice en chef, et Mme Tina Namiesniowski, présidente. Nous accueillons également M. Stephen Lucas, sous-ministre, Santé Canada, le Dr Michael Strong, président, Instituts de recherche en santé du Canada, et Dre Siddika Mithani, présidente, Agence canadienne d’inspection des aliments.
[Traduction]
Madame la ministre, je vous invite à présenter votre déclaration liminaire.
L’honorable Patty Hajdu, c.p., députée, ministre de la Santé : Madame la présidente, honorables sénateurs, merci beaucoup de m’avoir invitée à comparaître devant vous aujourd’hui. Je sais que vous travaillez tous très fort dans vos propres circonscriptions et que vous suivez de très près l’évolution de la COVID-19 ainsi que la réponse du Canada.
Comme vous l’avez mentionné, je suis accompagnée de plusieurs fonctionnaires — dont je ne répéterai pas les noms — du ministère de la Santé ainsi que de l’Agence de la santé publique du Canada, des Instituts de recherche en santé du Canada et, bien sûr, de l’Agence canadienne d’inspection des aliments. Je vais occasionnellement leur demander de fournir plus de précisions sur le travail que fait notre gouvernement. Je tiens également à les remercier devant vous pour le travail incroyable qu’ils accomplissent au nom des Canadiens, et ce, depuis bien avant que la situation actuelle occupe l’esprit des Canadiens. Je sais que c’est grâce à leur leadership que la réponse du Canada est si forte.
Aujourd’hui, je vais parler de notre réponse à la pandémie de COVID-19. Je vais vous demander d’être patients, car je devrai changer de canal de temps en temps.
[Français]
Notre réponse à cette crise a toujours été guidée par les meilleures et les plus récentes données disponibles. Nous adaptons notre approche à l’évolution des circonstances et à la disponibilité des nouvelles informations.
[Traduction]
Je crois qu’on a tendance à oublier la nécessité de changer de canal.
Le fait est qu’il s’agit d’un nouveau virus, que nous continuons d’en apprendre à son sujet, et qu’il présente des défis particuliers à bien des pays partout dans le monde. Au Canada, nous avons fondé notre réponse sur les données et méthodes scientifiques les plus récentes. Au fur et à mesure que nous en apprenons plus sur la COVID-19, nous adaptons notre réponse et notre approche dans le but d’assurer la sécurité des Canadiens.
Nous savons qu’il y a encore beaucoup de travail à faire, mais nous avons des raisons d’être optimistes, dans notre pays, car dans les faits, la transmission a ralenti. Nous en sommes maintenant au point où les provinces et les territoires entament prudemment la réouverture et relâchent progressivement les restrictions. Cependant, comme nous le montrent les expériences vécues dans d’autres pays du monde, cela ne signifie pas que la pandémie est terminée. Comme la Dre Tam l’a dit, nous risquons d’avoir d’autres cas et d’autres éclosions dans certaines régions, avec l’assouplissement des mesures de santé publique. Nous devons continuer de travailler fort, ensemble, à l’échelle du pays, car nous savons que nous en avons encore pour un bon bout de temps.
Avec la réouverture qui s’amorce, nous pouvons nous attendre à ce que le virus continue de se propager et à ce qu’il y ait même une augmentation. Nous en sommes à un moment critique, et il est important de rappeler à tous les Canadiens qu’il n’y a rien de honteux à tomber malade. La réalité est que malgré toutes les précautions, il demeure possible de tomber malade. En fait, ce que nous savons maintenant, c’est que nous sommes nombreux à peut-être transporter le virus sans même le savoir, et c’est la raison pour laquelle il est si important que les Canadiens qui ont besoin d’être testés ou traités puissent le faire sans crainte et sans gêne. Il sera essentiel de dépister et d’isoler les nouveaux cas pour contenir les éclosions futures. Quand nous parlons aux Canadiens, nous devons leur rappeler que nous sommes tous dans le même bateau. Nous devons faire preuve de gentillesse les uns envers les autres, et nous devons nous soutenir entre nous.
Avec l’épidémie qui s’est propagée partout au pays, il est devenu clair que nous avons besoin de plus de renseignements sur certains groupes qui courent un plus grand risque d’être exposés à la COVID-19 ou d’en subir des effets graves. En collaboration avec des partenaires et intervenants variés, nous déployons des efforts sur plusieurs fronts pour améliorer nos connaissances des incidences de la COVID-19 sur différentes populations et communautés, et il est crucial à cette fin que cela se fasse d’une manière qui respecte les lois relatives au respect de la vie privée de même que l’autonomie individuelle. Entre autres, nous travaillons avec nos partenaires provinciaux et territoriaux à améliorer la collecte de données sur la race et l’ethnicité, ainsi que sur d’autres variables clés de l’ensemble de données nationales visant la COVID-19, et nous réalisons des enquêtes spécialisées sur des populations clés, comme les travailleurs de la santé et les aînés qui vivent dans des établissements de soins de longue durée.
C’est une période stressante, et nous avons également lancé d’importantes conversations sur la santé mentale et le bien-être. La COVID-19 a des effets particulièrement perturbateurs pour ceux qui n’ont pas facilement accès à leurs réseaux habituels de soutien. Forcés de rester à la maison, de nombreux Canadiens n’ont pas pu voir leurs amis et les membres de leur famille, et pour certains, il y a augmentation du risque de violence familiale, de dépression, de problèmes de santé mentale et de problèmes de toxicomanie. Personne ne devrait vivre seul de telles situations. C’est la raison pour laquelle nous avons conçu des outils numériques dont l’objectif est d’aider les Canadiens à demeurer en santé et informés. Notre portail Espace mieux-être Canada a été créé pour diriger les Canadiens vers du soutien pour la santé mentale et la consommation de substances. Depuis le 19 juin, plus de 230 000 Canadiens ont consulté cet outil.
Nous savons aussi que des jeunes et des enfants souffrent. C’est la raison pour laquelle nous aidons Jeunesse, J’écoute au moyen d’un investissement de 7,5 millions de dollars qui les aidera à continuer d’offrir leurs services essentiels de soutien à la santé mentale aux jeunes Canadiens en ces temps difficiles.
Les Canadiens ont fait d’incroyables sacrifices pendant cette pandémie, et ils se sont unis d’une manière remarquable au cours des quelques derniers mois dans un effort pour aplatir la courbe. Il reste certainement beaucoup à faire, mais je crois que les Canadiens vont continuer de faire ce qu’il faut pour lutter contre la COVID-19, et ce, avec compassion, empathie et gentillesse, car après tout, c’est ainsi que nous sommes et c’est ainsi que nous allons assurer la sécurité et la santé de nos collectivités pendant la prochaine phase de la pandémie et après.
Je vous remercie beaucoup. Je serai ravie de répondre à vos questions.
[Français]
La présidente : Merci, madame la ministre. Nous sommes heureux de votre présence parmi nous ce matin.
[Traduction]
C’est maintenant le moment de poser des questions. Je tiens à vous rappeler rapidement que, conformément à ce que nous faisons normalement, vous avez cinq minutes pour vos questions, ce qui comprend les réponses. Si vous voulez poser une question, utilisez la fonction « lever la main » dans Zoom. Quand vous posez une question, veuillez nommer la personne à laquelle elle s’adresse ou indiquer si la question s’adresse à plus d’une personne.
La première intervenante aujourd’hui est notre vice-présidente, la sénatrice Poirier.
La sénatrice Poirier : Merci d’être avec nous aujourd’hui, madame la ministre. Je remercie également tous les autres témoins qui sont prêts à répondre à nos questions. Je vous en sais gré, et je crois que vous nous fournissez de l’information très importante alors que nous sommes sur le point de terminer la première partie de notre étude actuelle.
Ma première question s’adresse en fait à la Dre Tam, si vous me le permettez. D’innombrables témoins entendus par le comité dans le cadre de notre étude ont parlé de la difficulté d’accès à de l’équipement de protection individuelle. C’est la préoccupation première, dans le contexte de la pandémie. Les hôpitaux et les travailleurs ont dû rationner leur équipement en attendant d’être réapprovisionnés, et certains ont même dû réutiliser de l’équipement. Comme la Dre Margaret Tromp nous l’a dit, cela aurait été considéré comme de la négligence professionnelle, avant la COVID. Docteure Tam, que saviez-vous du manque d’équipement de protection individuelle dans notre Réserve nationale stratégique d’urgence? Pouvez-vous dire au comité si vous avez personnellement averti le gouvernement du sous-financement ou du manque de fournitures de la Réserve nationale stratégique d’urgence?
Dre Theresa Tam, administratrice en chef de la santé publique, Agence de la santé publique du Canada : Je vous remercie de votre question.
Dans le contexte canadien, tous les ordres de gouvernement, en particulier les provinces et les territoires, sont responsables du système de soins de santé comme tel. Chaque gouvernement provincial ou territorial s’assure d’avoir une réserve, et c’est là que l’équipement de protection individuelle est principalement utilisé.
La Réserve nationale stratégique d’urgence, qui est gérée par l’Agence de la santé publique du Canada, ne comportait en fait pas tellement d’équipement de protection individuelle avant cette pandémie en particulier. Je crois que c’est assez transparent, car la réserve elle-même est dans une grande mesure axée sur des réserves inhabituelles de vaccins et de médicaments que les provinces n’accumulent pas normalement dans leurs réserves. Il y avait une petite quantité d’équipement de protection individuelle qui pouvait servir au cas où les réserves des provinces et territoires ne suffiraient pas.
Bien entendu, cet événement nous a enseigné qu’il faut une quantité incroyable d’équipement de protection individuelle dans le contexte d’une telle pandémie, et le gouvernement, de concert avec divers ministères, Services publics et Approvisionnement Canada et l’Agence de la santé publique, Santé Canada et nos collègues d’ISDEC, se sont rapidement mobilisés pour mettre en œuvre de multiples approches différentes pour acquérir le plus rapidement possible de l’équipement de protection individuelle, et ce, sur un marché d’approvisionnement inhabituel et très concurrentiel, de manière à acheminer cet équipement aux Canadiens et pour ensuite établir un approvisionnement national. Il s’est donc fait beaucoup de travail, le plus rapidement possible, au début de la pandémie.
La sénatrice Poirier : Merci, docteure Tam.
Dernièrement, nous voyons aussi de plus en plus de cas sur la scène mondiale, et il semble chaque jour y avoir un nouveau record du nombre de cas enregistrés en un jour. Nous avons maintes fois entendu que nous ne sommes pas prêts pour une deuxième vague et que nous devons nous y préparer. La question n’est pas de savoir s’il y aura une deuxième vague, mais quand il y aura une deuxième vague, d’après ce que nous entendons. Docteure Tam, quel est votre plan pour veiller à ce que nous soyons prêts pour la deuxième vague? Que diriez-vous aux travailleurs de la santé à la veille de la deuxième vague, pour les assurer que nous sommes prêts, que nous avons l’équipement nécessaire et que le gouvernement est préparé?
Dre Tam : En ce moment, comme tout le monde le comprend, les Canadiens, de nombreux partenaires et tous les ordres de gouvernement se sont vraiment efforcés de faire obstacle à cette vague initiale, mais nous gardons constamment à l’esprit le risque de résurgence et demeurons vigilants. Il n’est pas uniquement question d’une deuxième vague. Étant donné que le virus demeure présent dans le monde, compte tenu du contexte canadien, et parce que nous n’avons pas de vaccin, la population risque peu d’avoir un degré élevé d’immunité, ce qui fait que le risque de résurgence est très réel. Ce sont les mesures de santé publique que tout le monde a mises en œuvre qui limitent en ce moment la propagation du virus, et cela a été efficace.
Cependant, bien sûr, tandis que nous rouvrons avec prudence certains secteurs de notre société, il se fait simultanément une planification rapide en cas de résurgence. Par exemple, les modélisateurs ont travaillé avec acharnement à nous démontrer que si nous ne mettons pas en place une juste combinaison de mesures de santé publique comprenant le dépistage, la recherche des contacts, l’isolement et la quarantaine, une résurgence est très vraisemblable.
Ce que nous essayons de faire tandis que nous travaillons à éliminer tout risque d’éclosion immédiatement — c’est le plan —, c’est de nous préparer à une vague encore plus importante à l’automne et l’hiver. Cela pourrait se produire n’importe quand, en fait, et nous devons donc être prêts en tout temps et constamment améliorer notre capacité. Ce qui nous préoccupe en ce moment, et ce pour quoi nous faisons actuellement des plans avec tous les médecins-hygiénistes en chef du Canada, c’est la possibilité d’une vague qui serait simultanée à une éclosion d’influenza. Nous travaillons très fort à cela.
Le premier ministre et les premiers ministres des provinces ont établi des conditions pour la réouverture. Outre les capacités et mesures de santé publique établies, par exemple le dépistage et la recherche des contacts, il faut absolument que le système de soins de santé ait la capacité requise pour faire face à toute résurgence.
Pendant la première vague, en fait, les provinces et territoires ont été en mesure de maintenir une sorte de surcapacité du système de soins actifs. Cela a donc été relativement bien géré pendant la première vague, avec le maintien de places vacantes. Certains de mes collègues ici présents pourraient en dire plus à ce sujet.
Il se fait beaucoup de travail de modélisation des besoins en équipement de protection individuelle selon les différents scénarios, et des efforts sont déployés pour obtenir les besoins des provinces et des territoires en temps réel, mais aussi pour faire de la planification. Localiser tout l’équipement est un travail colossal qui se poursuit.
Nous croyons tous, bien sûr, que protéger les travailleurs de la santé et quiconque travaille dans le système de soins de santé est crucial, mais bien sûr nous n’oublions pas nos aînés et les résidences de soins de longue durée également. Le système de soins actifs n’a pas été touché, mais les résidences de soins de longue durée et les résidences pour aînés le sont, et ces établissements ont besoin d’équipement de protection individuelle également.
La sénatrice Poirier : Merci beaucoup, docteure Tam.
La sénatrice Griffin : Merci aux témoins d’être avec nous aujourd’hui. Nous en sommes ravis.
J’ai une question pour Dre Mithani, de l’Agence canadienne d’inspection des aliments. Je me préoccupe de la sécurité alimentaire. Comme vous le savez, il y a des retards dans les usines de transformation de la viande. Trois usines à l’échelle du pays font 95 % de la transformation de la viande. C’est assez incroyable. Et bien sûr, il y a eu des éclosions de COVID-19 parmi les employés de ces usines.
Ce qui est intéressant, c’est qu’en 1988, il y avait 119 transformateurs du bœuf sous inspection fédérale au Canada. Il n’y en a maintenant plus que 20. Par surcroît, le transport interprovincial de viande pose un problème, comme c’est le cas pour de nombreux autres produits. Heureusement, la pandémie a amené l’ACIA à décréter une exemption temporaire permettant la libre circulation de la viande entre les provinces.
J’aimerais que vous me parliez de deux choses : la faisabilité d’usines de transformation plus petites et le transport interprovincial de la viande. Quelles mesures l’ACIA met-elle en place pour que la transformation de la viande soit moins centralisée et pour que le transport interprovincial soit plus simple? Merci.
Dre Siddika Mithani, présidente, Agence canadienne d’inspection des aliments : Je vous remercie beaucoup de la question.
Depuis le début de la pandémie, l’ACIA prend des mesures immédiates et décisives afin de garantir, premièrement, que nos aliments sont sûrs et fiables; deuxièmement, qu’il n’y a aucune interruption de la chaîne d’approvisionnement alimentaire; et troisièmement, surtout, que la santé et la sécurité des employés sont protégées également.
Quant à vos questions sur la faisabilité de petites usines, le rôle de l’ACIA est de veiller à ce que dans ces petites usines, les exigences en matière de salubrité des aliments soient respectées. Dans cette perspective, la production ou la transformation de viandes dans de petits établissements sont tout à fait faisables et viables. L’ACIA serait prête à aider les personnes et les entreprises qui souhaiteraient établir un plus grand nombre d’établissements de transformation des viandes.
Quant au commerce interprovincial, avant la COVID-19, je travaillais à explorer des avenues afin de déterminer s’il y avait des accords d’équivalence à examiner concernant le mouvement de produits alimentaires dans les provinces. Afin de garantir que nous n’avons pas de pénurie d’aliments, la réglementation permet au ministre de décréter une exemption ministérielle. Nous avons donc rendu possible cette exemption ministérielle en cas de pénurie d’aliments.
Je dirais qu’après la COVID, il y aura encore des discussions sur la façon de mieux veiller à ce qu’il n’y ait pas de pénurie d’aliments au pays.
La sénatrice Griffin : Je vous remercie. Je n’ai pas d’autres questions.
Le sénateur Munson : Je remercie les témoins et la ministre de leur excellent travail de protection des Canadiens. Madame la ministre, vous avez aussi probablement la meilleure chef de cabinet de la Colline. Je tenais à le dire.
J’en arrive maintenant à la question du sénateur qui se fait journaliste sur le montant de 600 $ versé aux personnes handicapées : le premier ministre a annoncé ce montant, et je resterai poli en disant que la question est devenue politique. Cependant, au sein de la communauté, de nombreux défenseurs et groupes disent que c’est trop peu, trop tard. Où en sommes-nous en ce moment?
J’ai une autre question que je tiens à poser. Concernant le crédit d’impôt pour personnes handicapées de l’Agence du revenu du Canada, certains groupes sont admissibles à ce montant, mais je crois comprendre que les personnes autistes — un groupe avec lequel je travaille étroitement — et peut-être les personnes diabétiques ne sont pas inscrites pour le crédit d’impôt pour personnes handicapées de l’ARC et n’obtiendront par conséquent pas les 600 $.
J’ai donc deux questions, et j’ai d’autres questions auxquelles la Dre Tam répondra, je l’espère. Où en sommes-nous? Pouvez-vous changer cela? Croyez-vous qu’une révision pourrait rendre cela équitable pour toutes les personnes handicapées?
Mme Hajdu : Merci, sénateur. Je ne sais pas si ma chef de cabinet est présente à Santé Canada en ce moment, mais je vais lui transmettre vos bons mots. Je suis d’accord avec vous. Je vais dire cela à Sabine Saini.
En ce qui concerne le crédit d’impôt pour personnes handicapées, je sais que ma collègue, la ministre Qualtrough, travaille avec passion à essayer d’améliorer l’aide aux personnes handicapées. En fait, j’ai eu l’honneur de participer à une des premières tables rondes qu’elle a tenues avec des personnes handicapées pour savoir de quelle façon la pandémie les touche très concrètement. Nous avons entendu des histoires vraiment déchirantes. Elle était également déçue du rejet de la mesure législative qui aurait permis un paiement forfaitaire. Je vous rappelle cependant que d’autres moyens servent à acheminer de l’argent aux personnes à faible revenu, par exemple l’augmentation du crédit pour TPS et ainsi de suite. Ce sont des possibilités auxquelles elle travaille dans le but d’améliorer l’approche proposée pour réagir à l’enjeu que vous soulevez concernant les personnes que le mécanisme d’acheminement néglige.
Encore une fois, c’est un peu hors de mon champ de compétence, à titre de ministre de la Santé — j’ai dû dans une grande mesure rester dans ma voie et laisser mes collègues gérer certains des aspects de la réponse économique —, mais je dirais qu’un des défis que nous avons concernant la réponse économique, c’est que nous avons un système qui n’est pas conçu pour acheminer l’argent le plus rapidement possible, avec nos systèmes existants, comme l’ARC et l’assurance-emploi. Ces systèmes sont essentiellement surchargés en temps normal, et ils se trouvent vraiment devant le défi de fonctionner selon des méthodes nouvelles et rapides.
Je vais veiller à ce que vos préoccupations lui soient transmises. Je sais qu’elle travaille en ce sens, et je sais qu’elle est, au Canada, l’une des personnes les plus déterminées à travailler avec les personnes handicapées dans une véritable optique d’inclusion.
Je vous remercie de vos questions, et j’aimerais pouvoir fournir plus d’éclaircissements, mais bien sûr, cela dépend essentiellement du déroulement des prochaines étapes.
Le sénateur Munson : Je vais continuer d’insister là-dessus, parce que je pense qu’il est extrêmement important pour le milieu de l’autisme de ne pas être exclu du crédit d’impôt pour personnes handicapées. C’est très important.
Docteure Tam, il y a quelques jours, Statistique Canada a lancé un sondage à l’intention des Canadiens handicapés. Les données qui seront ainsi recueillies iront à l’Agence de la santé publique du Canada. Je suis curieux de savoir comment ce sondage aidera les Canadiens handicapés à avoir de meilleurs résultats en matière de santé pendant la pandémie. Dans tout cela, on dirait que ce sont les personnes oubliées. Je sais que les gens ont des préoccupations, et ainsi de suite, et je comprends cela, mais quel est votre plan de travail concernant ces données — étant donné que le sondage se termine le 6 juillet — quant à des résultats tangibles qui aideraient les personnes handicapées?
Dre Tam : Merci. Si je n’en sais pas assez, nous vous fournirons ultérieurement toute l’information que nous pouvons.
Comme nous le savons tous, il manque de données dans le contexte de cette pandémie en particulier, concernant diverses populations de Canadiens, et je crois que les personnes handicapées devraient vraiment faire l’objet d’un soutien efficace pendant la pandémie. Par conséquent, les données sont importantes pour l’établissement de programmes ou de politiques.
À l’Agence de la santé publique du Canada, nous avons eu le privilège de pouvoir consulter des personnes handicapées pour la conception de certains de nos conseils sur la façon de soutenir les personnes handicapées pendant la pandémie. Il y avait de nombreux détails différents, par exemple l’équipement de protection individuelle, le port d’écrans faciaux qui évitent aux gens de devoir porter un masque qui couvre leur bouche, afin de faciliter la communication pour les personnes ayant une déficience auditive, visuelle ou autre. C’est important. Nous n’avons pas assez d’information à cet égard.
Je n’en sais pas assez à propos des données d’enquête particulières, mais l’agence a déjà des fonds, par exemple, pour travailler avec des personnes handicapées, mais également avec des personnes se situant n’importe où sur le spectre de l’autisme. J’espère que les données pourront aussi servir à tous nos programmes existants. Nous avons des équipes, à l’agence, qui travaillent avec Statistique Canada, et nous pouvons certainement vous fournir plus d’informations sur la façon dont les données sont utilisées.
La pandémie évolue constamment, et il doit en être de même pour notre approche et notre réponse. Les données devraient nous aider à apporter des rectifications à la réponse.
Le sénateur Munson : Merci. Je comprends tout cela, mais je ne peux pas m’empêcher de souligner, concernant les données, qu’un Canadien sur cinq a une déficience. Il faut que cela soit au premier plan, d’après moi.
La sénatrice Seidman : Je vous remercie, madame la ministre, docteure Tam et tous les membres du ministère, pour le travail acharné que vous accomplissez chaque jour afin d’aider les Canadiens à traverser en toute sécurité cette période très difficile. J’ai trois questions : une pour la Dre Tam, une pour la ministre Hajdu, et une pour le Dr Strong. Je vais commencer par les deux premières, et je verrai si je me rends à la troisième.
Ma question à la Dre Tam porte sur le dépistage rapide et la recherche des contacts. J’aimerais aller au cœur de cela. Nombreux sont ceux qui ont dit que nous aurions des éclosions, plutôt qu’une deuxième vague. J’aimerais avoir la certitude que nous avons les moyens d’enrayer les éclosions le plus rapidement possible. Il faudrait donc à cette fin un dépistage stratégique et rapide dans les régions ou les milieux de travail où les risques sont élevés, puis la recherche des contacts.
Il y a beaucoup de rumeurs à propos d’un appareil de dépistage rapide qui est facile à utiliser n’importe où au pays, par exemple dans un lieu de travail ou une région particulière, et qui peut donner les résultats immédiatement. J’aimerais savoir où nous en sommes avec ce dispositif, car cela serait vraiment important pour la suite des choses. Quels sont les plans pour compléter la recherche des contacts au moyen de la nouvelle application qui semble en être à l’étape des essais?
Je vous laisse réfléchir à cela un peu, et je vais poser ma question à la ministre. Elle saura à quoi s’attendre après les réponses de la Dre Tam. Je veux vous parler de la collecte de données normalisées à l’échelle nationale. Je vous ai interrogée à ce sujet à la fin de mars, au comité plénier du Sénat. J’aimerais savoir ce que le gouvernement fédéral a appris de la pandémie de COVID concernant le système de surveillance de la santé publique du Canada. Plus précisément, comme matière à réflexion, il y a le Centre européen de prévention et de contrôle des maladies, qui vient de remplacer 17 systèmes de collecte de données indépendants couvrant 27 pays et 23 langues par un unique système de surveillance intégrée des maladies infectieuses.
Si la Dre Tam veut bien répondre à la première question, ce serait formidable. Merci.
Dre Tam : Pour ce qui est de soumettre des personnes au dépistage de la COVID-19, il y a différentes méthodes et plateformes de dépistage. En ce moment, les tests les plus courants qui sont utilisés sont les tests moléculaires. Ils utilisent la technologie PCR ou une technologie semblable pour détecter la présence du génome du virus et ainsi déterminer si une personne est en ce moment atteinte. Je vous parlerai aussi un peu du travail qui se fait en sérologie, soit le dépistage d’anticorps montrant votre réponse immunitaire au virus.
La sénatrice Seidman : Pardonnez-moi, docteure Tam. Je ne veux pas vous interrompre et être impolie, mais j’aimerais que vous nous parliez spécifiquement d’un test qui peut être fait dans l’immédiat et qui pourrait être utilisé de manière stratégique en cas d’éclosion dans un milieu de travail ou dans une région, car je pense que c’est là le problème. Si nous voulons vraiment réagir aux éclosions, il nous faut un test immédiat, facile à faire passer, qu’on pourrait presque faire soi-même, sans recourir à un laboratoire, qui donne des résultats en 30 minutes, avant même qu’un travailleur entre au travail. C’est le genre de dépistage qui suscite l’intérêt des gens, et j’aimerais savoir [Difficultés techniques].
Dre Tam : Oui. S’il y a un cas et qu’il y a une éclosion, les provinces et les territoires sont organisés pour se concentrer essentiellement sur ce point chaud, car ils ont les capacités de dépistage nécessaires, lesquelles comportent le recours à un laboratoire. En ce moment, pour le dépistage rapide au point de service, nous nous concentrons sur les collectivités éloignées et isolées, parce qu’elles n’ont pas facilement accès à un laboratoire. Je crois que nos collègues de Santé Canada travaillent en ce moment très fort à des stratégies d’approvisionnement agressives, de concert avec l’Agence de la santé publique et d’autres partenaires, et essaient d’obtenir des services novateurs d’analyse en laboratoire.
Il y a aussi des ordonnances provisoires visant à accélérer l’examen de tous les appareils médicaux. En ce moment, nous n’avons pas un très grand nombre d’appareils de cette nature sur le terrain. L’un de ces appareils, le GeneXpert, ne donne pas des résultats instantanément, mais il peut être utilisé dans certaines collectivités du Nord et ailleurs, comme nous l’avons vu dans le nord de la Saskatchewan pour certaines éclosions récentes à La Loche et dans les environs.
Dans les autres régions du Canada, on utilise les laboratoires existants de santé publique ainsi que certains laboratoires privés, mais nous faisons l’acquisition de ce type d’appareils de dépistage rapide au point de service au fur et à mesure qu’ils deviennent disponibles. Ces appareils ont des caractéristiques de rendement différentes, et il faut en faire l’essai afin de voir s’ils sont efficaces.
La sénatrice Seidman : Excusez-moi, encore une fois. Je vais manquer de temps. Je suis désolée de vous interrompre continuellement, mais je sais qu’on pourrait me dire à tout moment que mon temps est écoulé.
Très brièvement, pourriez-vous me donner un élément de réponse concernant l’application de recherche des contacts? J’aimerais avoir le point de vue de la ministre au sujet de la surveillance nationale.
Dre Tam : Le sous-ministre Lucas allait donner une réponse au sujet de l’application, si vous le permettez.
Stephen Lucas, sous-ministre, Santé Canada : Merci, sénatrice.
Le premier ministre a annoncé que nous aurons une application nationale de notification d’exposition fonctionnant par Bluetooth qui enregistrera les contacts étroits. L’application, utilisée en partenariat avec les provinces et territoires, permet d’aviser les personnes qui ont été en contact étroit avec une personne dont le test est positif. Elle devrait être lancée en Ontario au courant de la semaine et sera complémentaire au travail des responsables de la santé publique pour assurer le suivi téléphonique auprès des gens qui ont eu des contacts étroits. Les gens seront incités à s’isoler et à se faire tester. Ce sera complémentaire aux efforts existants.
La sénatrice Seidman : Merci beaucoup. J’aimerais laisser la parole à la ministre Hajdu pour une ou deux minutes.
Mme Hajdu : Merci beaucoup, sénatrice.
Je suis très favorable à une approche nationale pour la collecte de données, surtout depuis que j’ai constaté l’état fragmentaire des données collectées par les provinces et les territoires et, plus encore, transmises au gouvernement fédéral.
Comme vous le savez, d’assez importantes sommes sont en jeu actuellement alors que nous négocions avec les provinces et les territoires pour assurer un redémarrage en toute sécurité. Je suis certaine que vous suivez cela de près. Nos négociations avec les provinces et les territoires portent notamment sur le renforcement des normes nationales en matière de données. Nous appuyons sans réserve une approche selon laquelle les provinces et les territoires s’engageraient, dans un premier temps, à collecter des données détaillées afin d’avoir une meilleure idée des disparités, comme je l’ai indiqué plus tôt, notamment les façons dont certaines maladies — abstraction faite de la COVID-19, pour le moment — touchent différemment certains groupes précis. Il s’agit aussi de permettre la communication rapide de ces données au gouvernement fédéral. Notre capacité de savoir réellement ce qui se passe à l’échelle nationale a été une de nos faiblesses tout au long de cette crise, et même pour les informations les plus élémentaires, au début, dans certains cas. La Dre Tam et son équipe ont travaillé d’arrache-pied au sein du comité consultatif spécial pour améliorer ce processus, mais il va sans dire que nous visons une certaine harmonisation et une approche nationale.
La présidente : Merci.
La sénatrice Seidman : Merci. J’aimerais intervenir au deuxième tour, si possible.
La présidente : D’accord.
[Français]
La sénatrice Forest-Niesing : J’aimerais remercier tous les témoins de leur travail inlassable depuis le début de la pandémie. C’est très apprécié.
Mes questions porteront sur les leçons apprises depuis le début de cette pandémie et sur la possibilité des vagues successives qui nous attendent.
Je vais d’abord m’adresser à la Dre Tam.
Les professionnels de la santé qui ont comparu devant le comité ont indiqué que les directives de la santé publique et de la protection civile sont peut-être allées un peu trop loin lors de la première vague du virus, en empêchant les proches d’un malade ou même d’une personne qui recevait des soins palliatifs de se rendre à son chevet, et ce, même si ces proches utilisaient les équipements de protection que portent les travailleurs de la santé.
Ils ont dit que, dans les faits, cela a représenté un traitement cruel et insensible face aux personnes âgées, qui ont été, dans bien des cas, forcées à mourir seules, isolées et bien souvent sans comprendre ce qui leur arrivait. Pour les vagues à venir, quelles seront les directives relativement à ces situations?
Ma seconde question s’adresse à la ministre : le gouvernement fédéral va-t-il exercer des pressions sur les provinces afin que les directives à cet égard soient modifiées?
[Traduction]
Dre Tam : Je m’excuse. Dans la salle, nous entendions le français et l’anglais simultanément, de sorte que nous n’avons pas entendu la question. Je me demande si quelqu’un peut régler ce problème technique.
La sénatrice Forest-Niesing : Je peux poser ma question en anglais. Je vais la reformuler.
Ma question porte sur le très regrettable constat et les directives empêchant les proches d’une personne en soins palliatifs ou à l’article de la mort de se rendre à son chevet, créant un stress énorme pour les familles, en particulier pour les personnes qui, malheureusement, seraient seules pour affronter la mort. Docteure Tam, dans la perspective d’une nouvelle vague, quelles seront les directives relativement à ces situations? A-t-on l’intention de les réviser?
J’aimerais que la ministre nous dise quelles pressions, le cas échéant, le gouvernement fédéral compte exercer auprès des provinces afin qu’on modifie les orientations ou des restrictions à cet égard.
Dre Tam : Je vous remercie de la question. Je pense qu’il est absolument et extrêmement tragique qu’une personne ne puisse pas être au chevet d’un membre de sa famille ou d’un être cher au moment où cette personne en a le plus besoin.
L’Agence de la santé publique ne fournit pas de telles directives. À moins que j’aie mal compris votre question, cela concerne généralement les hôpitaux ou les établissements de soins de longue durée, qui relèvent des gouvernements provinciaux et des administrations locales. Cela dit, toutefois, nous pouvons certainement transmettre cet important message à tous nos partenaires au pays.
Mme Hajdu : Merci beaucoup, sénatrice.
Comme vous le savez, pour faire écho à la Dre Tam, le gouvernement fédéral ne peut contraindre les provinces et les territoires à adopter des règles ou des règlements à cet égard. Bien entendu, nous négocions de plus en plus avec les provinces et les territoires lorsque nous transférons de l’argent, en fait, par le biais du travail de notre gouvernement, pour obtenir des mesures de résultats. C’est tout de même un travail très difficile, et je suis certaine que vous le comprenez, compte tenu de ce que vous avez sans doute pu voir et lire dans les médias.
L’approche collaborative semble fonctionner dans le cas de la COVID-19. Ce n’est pas parfait. À certains moments, les provinces et les territoires sont en désaccord entre eux et ne sont pas du même avis que le gouvernement fédéral. Dans l’ensemble, je dirais que dans le cadre de mon travail sur la scène politique ces cinq dernières années — et j’ai conscience d’être encore une novice par rapport à certains —, il s’agit de l’une des expériences les plus axées sur la collaboration que j’aie connues, étant donné la grande diversité des allégeances politiques en cause. L’un des avantages du Canada, ou de l’approche canadienne, c’est que contrairement à nos très chers voisins du Sud, nous n’avons pas connu le même genre de tensions politiques, pour ainsi dire, concernant certains des aspects les plus fondamentaux de la gestion de la pandémie de COVID-19. J’en suis très reconnaissante. Je pense que cela a contribué à certains de nos succès, même s’il faut reconnaître que nous avons aussi eu nos défis.
Nous continuerons de travailler avec les provinces et les territoires par l’intermédiaire du Comité consultatif spécial et de la table ronde FPT dont j’assure actuellement la coprésidence avec la province de l’Ontario. En outre, j’entretiens de bonnes relations bilatérales avec tous les ministres de la Santé, relations qui offrent des possibilités que nous avons mises à profit lorsqu’il y avait des zones chaudes ou des foyers d’éclosion préoccupants. Il a aussi été extrêmement utile de pouvoir communiquer directement avec le ministre responsable et de faire appel à mes collègues au besoin, selon le secteur concerné.
La sénatrice Forest-Niesing : Merci. Je comprends évidemment que la pression est limitée et que cela relève de la compétence des provinces, mais étant donné les témoignages très percutants que nous avons entendus des professionnels au sujet de ces très tristes répercussions, je vous encourage à être aussi clairs que possible dans vos communications avec les provinces à cet égard. Je vous remercie.
[Français]
Je ne sais pas si c’est possible de poser ma question en français. Avons-nous toujours des problèmes avec l’interprétation?
La présidente : Nous avons quelques défis, sénatrice Forest-Niesing, et nous n’avons plus beaucoup de temps. Je vous suggère de vous inscrire au deuxième tour. Nous tentons de régler les problèmes de double langue dans la salle. Est-ce que cela vous va?
La sénatrice Forest-Niesing : C’est malheureux, mais je comprends.
La présidente : Merci beaucoup, c’est très apprécié.
[Traduction]
La sénatrice Dasko : Je remercie les témoins.
Ce sont tous des sujets très importants. J’aimerais approfondir un peu plus les questions liées aux données et aux applications de recherche des contacts, pour poursuivre dans la même veine que les questions de la sénatrice Seidman.
Premièrement, de nombreux témoins ont parlé des problèmes liés aux données et se sont plus particulièrement attardés aux trois caractéristiques nécessaires à la collecte de données, soit des données à jour, uniformes et complètes. Elles sont parfois contradictoires, mais c’est ce qu’on vise lors de la collecte de données. Ma question est pour la ministre ou la Dre Tam. Y a-t-il eu des améliorations concernant l’un ou l’autre de ces aspects de la collecte de données? Si oui, lequel? Quelles données importantes nous manque-t-il toujours pour atteindre ces objectifs? Comment peut-on y parvenir? Par exemple, le sénateur Munson a parlé de la collecte de données sur les personnes handicapées. Cherchons-nous à obtenir plus de données d’enquête, cherchons-nous de meilleures données administratives qui, la plupart du temps, viennent des provinces? J’aimerais savoir quels seraient les aspects à améliorer.
Deuxièmement, en ce qui concerne la recherche des contacts, j’aimerais demander à la Dre Tam ou à son collègue quel est le degré d’adoption nécessaire pour que cela connaisse du succès. Ensuite, à quel taux d’adoption chez les Canadiens vous attendez-vous après la mise en œuvre de ce système? Je sais que le premier ministre l’a mentionné il y a quelques semaines. Quel est le degré d’utilisation requis et quelles sont vos attentes à l’égard du public canadien quant à l’utilisation de cette application?
Revenons à la première question concernant la collecte de données. Merci.
Dre Tam : Il nous faut des informations très actuelles pour suivre l’évolution et la trajectoire de cette éclosion. Je suis ravie de souligner qu’il y a une excellente collaboration. Les autorités de santé publique locales ont été extrêmement occupées. Au début, les données n’étaient pas aussi à jour et complètes qu’elles le sont aujourd’hui. Je suis heureuse de dire que nous avons convenu d’un ensemble minimal de données essentielles qui, selon nous, était vraiment important pour suivre la trajectoire épidémiologique. Essentiellement, 99 à 100 % des données que nous recevons maintenant pour tracer ces courbes épidémiologiques comprennent les ensembles de données de base, avec les données démographiques, mais moins de données sur le moment où les personnes sont tombées malades ou ont été testées.
Toutefois, certains aspects ne sont pas bien couverts, comme les données permettant de savoir si les gens se sont déclarés comme membres des Premières Nations, des Inuits ou des Métis. Nous cherchons à avoir des données épidémiologiques actualisées, mais nous n’avons pas actuellement de données sur la race ou l’appartenance ethnique. Nous y travaillons très fort.
Nous avons essayé d’obtenir certaines de ces données désagrégées sous-jacentes. Nous avons examiné la littérature publiée; c’était une revue de la littérature scientifique. Nous travaillons actuellement très fort avec les provinces, à court terme, pour obtenir plus de données sur la race et l’appartenance ethnique, entre autres. Vous avez peut-être constaté que certaines administrations municipales, dont la Ville de Toronto, collectent maintenant ce type de données, et nous espérons les obtenir. Nous travaillons aussi avec divers partenaires pour mener des enquêtes spécialisées et des activités de surveillance améliorées auprès des principales populations d’intérêt, dont certaines sont des communautés racialisées.
Nous travaillons aussi en partenariat avec les IRSC, les Instituts de recherche en santé du Canada, pour coordonner les efforts afin de faciliter les activités de recherche, car beaucoup de ces données ne peuvent être obtenues par la surveillance ou les enquêtes. Il nous faut une approche concertée. Nous travaillons aussi avec Statistique Canada et je crois savoir que dans le cadre de ce partenariat, Statistique Canada publiera bientôt un nouveau tableau de bord de données ethnoculturelles. Nous devons chercher à obtenir des données sur tous les fronts, mais nous recevons maintenant les données de base clés en temps opportun.
La sénatrice Dasko : Excusez-moi. Est-ce que nous recevons ces données des provinces? Je crois comprendre que ces données viennent en grande partie des provinces. Ce sont des données administratives concernant l’adoption et d’autres mesures. Les provinces vous donnent-elles vraiment de meilleures données à analyser?
Dre Tam : Pour les données de santé publique, oui. Elles sont transmises des autorités locales aux autorités provinciales, puis au gouvernement fédéral. Nous communiquons avec Statistique Canada pour que les chercheurs aient aussi accès à ces données. Elles sont publiées sur notre site web pour que vous puissiez les consulter.
Les données administratives, comme les données sur les hospitalisations, proviennent souvent des provinces et des territoires, évidemment. On nous fournit les données de base sur les hospitalisations et les cas aux soins intensifs. Toutefois, les données administratives plus complètes sont ensuite communiquées à l’ICIS, l’Institut canadien d’information sur la santé, par exemple, qui fait aussi partie de notre approche collective à l’égard des données.
La sénatrice Dasko : Merci.
Concernant la recherche des contacts, quelles sont les attentes concernant la participation? Quel est le taux requis? Quelles sont les attentes par rapport à la recherche de contacts? Quel est le calendrier? Merci.
M. Lucas : Concernant le calendrier, l’objectif est de lancer l’application en Ontario dans la prochaine semaine, puis de le faire dans les autres provinces et territoires en collaboration avec les autorités, puisqu’il est important d’être connecté à leur réseau de santé pour la transmission des données sur les cas.
On atteint l’utilité maximale avec un taux d’adoption de 50 à 60 % dans la population. Il va sans dire que cela nécessitera un important effort de sensibilisation. Nous misons sur le consentement volontaire, mais je pense qu’une importante campagne de publicité et de sensibilisation sera nécessaire partout au pays pour atteindre ces taux. Cela se fera dans le contexte important de protection de la population canadienne, comme pour les autres mesures de santé publique.
La sénatrice Dasko : Avez-vous une idée du degré d’adoption possible?
M. Lucas : Je pense que l’objectif sera d’utiliser toutes les méthodes que j’ai mentionnées pour maximiser l’utilisation, mais quant à une prédiction précise, c’est difficile à dire. L’objectif est de travailler à convaincre les Canadiens qu’il s’agit d’un outil important parmi d’autres pour contribuer à freiner rapidement la propagation lorsqu’un test est positif.
La sénatrice Dasko : Je peux donc déduire de vos propos que vous visez un taux de 50 %.
M. Lucas : Oui.
La sénatrice Dasko : Merci à tous.
Le sénateur Kutcher : Madame la ministre, chers témoins, je vous remercie d’être ici aujourd’hui. Je vous remercie aussi — ainsi que tout votre personnel de vos organismes respectifs — du travail acharné et efficace que vous avez accompli afin de limiter la propagation de la maladie dans la population pendant cette pandémie. Je vous remercie.
Ma question s’adresse probablement plus à M. Lucas et au Dr Strong, mais n’importe qui peut y répondre. Au début de la pandémie, il circulait rapidement et à grande échelle une quantité incroyable de mauvais renseignements et de désinformation sur les questions de santé, et cela se poursuit. De plus, la réaction des Canadiens qui ont adhéré à cette désinformation a mis en évidence la nécessité d’améliorer considérablement la littératie en matière de santé au pays. Quelles stratégies compte-t-on élaborer à l’avenir pour mettre en place des moyens rapides et efficaces de lutter contre les fausses informations sur la santé? Que ferez-vous pour améliorer la littératie des Canadiens en matière de santé?
Mme Hajdu : Merci beaucoup, sénateur. Je vous remercie aussi de communiquer continuellement avec moi pour traiter des questions de santé mentale et de langue. J’espère que vous avez constaté que vos conseils et vos idées se reflètent dans mes discussions avec les Canadiens. Cela m’a été très utile.
Je dirais que la désinformation dirigée contre les Canadiens, qui ne se limite pas à la santé, mais qui touche tout le reste, fait l’objet de discussions constantes parmi les politiciens, mais sans doute parmi les autres responsables au gouvernement du Canada. Nous avons su très tôt que nous devions réagir rapidement et avec force pour fournir des renseignements crédibles. La création du site web sur la COVID-19 par le ministère et l’Agence de la santé publique du Canada dès le début de la pandémie a été une très bonne chose. Le site web a pris de l’ampleur et a évolué à mesure que nous accumulions des connaissances et que nous avions plus de renseignements à communiquer aux Canadiens.
Avoir pu régulièrement diriger les gens vers le site Canada.ca/COVID-19 a donné aux Canadiens un complément d’information par rapport aux autres sites officiels et sources numériques d’information et, à mesure que nos ressources augmentaient et que notre compréhension de la maladie et de ses mécanismes de prévention se confirmaient, nous avons pu communiquer par toutes sortes de canaux différents, y compris par les médias sociaux, la presse écrite, et des médias ethniques divers et variés. Nous avons immédiatement compris qu’il nous fallait aussi fournir ces informations dans d’autres langues. Nous avons utilisé toutes sortes de méthodes et, comme je l’ai dit, nous avons communiqué avec des organes de presse plus petits qui informent souvent tout un groupe de gens, et, dans notre cas, nous avons également demandé à certains députés qui parlent d’autres langues d’aller voir les médias locaux pour élargir nos canaux de communication officiels. Encore une fois, ils rappelaient aux Canadiens que les unités locales de santé publique ou les pages web officielles des gouvernements fédéral ou provinciaux étaient les sources de communication dignes de confiance. On peut toujours en faire plus.
Nous sommes dans l’ère de la désinformation. Cependant, je crois, et les données le prouvent, que les Canadiens, plus que dans les autres pays, font beaucoup plus confiance aux fonctionnaires et au gouvernement de leur pays, et cela a été un atout quand il s’est agi de rappeler aux Canadiens qu’il existe une source d’informations fiable qui corrige au fur et à mesure les informations erronées, pour s’assurer que les Canadiens reçoivent les informations les plus à jour sur le virus et sur son évolution et pour utiliser des méthodes de communication différentes avec des groupes différents.
Bien sûr, nous pouvons en faire davantage en termes de communication des risques. C’est quelque chose qu’il faut, selon moi, stimuler au sein de l’Agence de santé publique du Canada et au sein de Santé Canada. J’ai hâte de faire ce travail. Entretemps, nous avons de la chance dans ce pays d’avoir la capacité de rectifier quelque peu ces informations erronées.
Merci, sénateur.
M. Lucas : Pour faire suite à ce que disait la ministre Hajdu, avoir cette source fiable d’informations accessible dans différentes langues est fondamental. Nous avons compté plus de 202 millions de visites sur le site web, en tant que point de contact unique pour ces informations de confiance, y compris par l’application COVID Canada, la plateforme mobile à laquelle les Canadiens ont accès.
Il est sûr que rectifier la désinformation fait partie de cette stratégie, tout comme discuter de journalisme responsable avec les médias. Ainsi, le travail sur les politiques et le travail sur les sciences comportementales et sociales essaient de trouver ce qui sous-tend ce phénomène. Nous avons travaillé avec le Forum des politiques publiques sur cette question de culture scientifique et sanitaire en tant que secteur d’intérêt essentiel de notre époque d’informations erronées et de désinformation. Nous avons également travaillé sur des campagnes de consultation avec différents groupes et segments de la population, y compris des enfants et des jeunes dans des secteurs comme le cannabis, le vapotage et les opioïdes, et d’autres problèmes de santé publique, mais qui sont aussi fondamentaux pour soutenir ce travail de culture et de compréhension sanitaires, tout comme le Guide alimentaire canadien l’a été pour la nutrition. C’est une stratégie avec plusieurs outils qui est désormais le véritable point de convergence dans le contexte de la COVID.
Le sénateur Kutcher : Merci pour cela, j’apprécie énormément ce que vous avez fait. Ce travail a été de premier ordre en ce qui concerne la réceptivité.
Je pourrais approfondir deux points. Ce que je comprends de la recherche publiée c’est que, confrontées à des informations erronées, deux mesures sont particulièrement efficaces. D’une part, une réponse rapide, précise et ciblée émanant de leaders réputés dans le domaine de la santé, comme des organisations nationales de médecins ou des organisations nationales d’infirmières, qui démentent précisément ces informations erronées. D’autre part, le Canada dispose d’une communauté solide et dynamique de communicateurs scientifiques dans d’excellentes universités telles que l’Université Lakehead et l’Université Ryerson. Avez-vous l’intention d’utiliser ou avez-vous déjà utilisé ce type de mesures stratégiques ciblées, soit les réponses rapides émanant de leaders réputés dans le domaine de la santé et l’utilisation de cette communauté robuste et dynamique de communicateurs pour faire passer votre message?
Mme Hajdu : Merci beaucoup, sénateur.
Je dirais très franchement que l’un des communicateurs les plus fiables que voient les Canadiens est la Dre Tam. Elle a été, avec les médecins-hygiénistes des différentes provinces, une leader pour ce qui est de la communication aux Canadiens. Le Dr Henry, en Colombie-Britannique, est très admiré et a beaucoup fait pour corriger les informations erronées.
Nous avons été disponibles tous les jours pour les médias, à l’exception de quelques jours ou fins de semaine de-ci de-là, pour être prêts à corriger les informations erronées et pour nous assurer que les gens comprenaient comment trouver des informations dignes de foi. Je sais que l’ASPC et Santé Canada ont fait régulièrement appel à tout un éventail d’experts.
L’autre motif de réconfort dans l’éclosion de la COVID, c’est que la communauté universitaire a fait cohésion pour appuyer la réponse du Canada, cohésion que je n’avais jamais vue auparavant. Ces structures sont souvent formelles et difficiles à mettre en place. En ce qui nous concerne, plusieurs experts de différents secteurs nous ont approchés pour nous aider dans notre réponse, et nous nous sommes empressés d’accepter leurs avis et leurs observations. J’espère que vous pouvez constater ce fait dans nos réponses, comme je l’ai mentionné dans mes remarques liminaires.
En tant que ministre de la Santé, j’ai trouvé cela particulièrement utile. J’ai été formée en santé publique et communication des risques, j’ai donc une certaine chance de ce côté-là. J’ai été également très bien secondée par plusieurs universitaires, de façons officielle et informelle, qui m’ont approchée pour m’aider à éclaircir certains points et pour me proposer des suggestions sur la façon de gérer certaines situations, et j’ai accepté leur avis avec gratitude.
[Français]
La sénatrice Mégie : Merci à nos témoins. Ma question s’adresse à la ministre Hajdu. Je vais combiner deux questions en une. On sait que plus de 80 % des décès liés à la COVID-19 se sont produits dans des résidences de personnes âgées. Le comité a reçu un témoin, le Dr Réjean Hébert, qui nous a proposé et suggéré que le gouvernement investisse davantage dans les soins à domicile. Il a travaillé très fort sur la question des soins à domicile au Québec, mais les élections sont arrivées et tout est tombé à l’eau. Qu’est-ce que vous pensez du fait d’investir davantage dans les soins à domicile pour cette clientèle formée par les personnes âgées?
[Traduction]
Mme Hajdu : Merci beaucoup, sénatrice, de votre question.
Il est clair dans l’esprit des Canadiens que des réformes dans le secteur des soins de longue durée sont nécessaires. Bien sûr, y injecter plus d’argent est toujours une solution, mais je crois que le débat est plus complexe. Jusqu’à présent, manifestement la compétence des soins de longue durée est fermement détenue par les provinces et territoires. Le gouvernement fédéral n’a eu en réalité aucune obligation en ce qui concerne les soins de longue durée. Nous n’avons pas de normes nationales et aucun transfert n’est effectué aux provinces et territoires pour les soins de longue durée. Il a été très difficile à ce stade de s’entendre sur la suite. Vous avez entendu le premier ministre dire que nous étions prêts à appuyer les provinces et territoires pour, tout d’abord, traverser cette phase critique et protéger les gens pour éviter d’autres pertes de vie et d’autres atrocités constatées pendant la vague montante, mais aussi je pense qu’il faut effectuer des changements structurels.
Nous avons constaté une véritable entente, comme vous le savez, sur la valeur en tant que telle du travail de soignant. J’en ai déjà parlé dans mes deux fonctions antérieures, comme ministre de la Condition féminine et ministre de l’Emploi et du Développement de la main-d’œuvre. Les gens qui prodiguent les soins dans ces foyers, outre les professionnels de la santé que sont les médecins et les infirmiers, soit les préposés aux services de soutien à la personne ou les assistants, sont souvent des gens issus de communautés racialisées, sont souvent des femmes et sont souvent payés de façon telle que la charge de travail qu’ils effectuent en notre nom à tous n’est pas véritablement reconnue. Il faut parler plus sérieusement de la valeur que donnons au travail des femmes. Sans vouloir offenser les messieurs qui travaillent dans ce domaine, et c’est quelque chose que j’ai déjà dit, je n’arrive pas à comprendre pourquoi nous valorisons ceux qui entretiennent nos véhicules beaucoup plus que ceux qui prennent soin de nos proches. On me fait tout le temps des ennuis quand je dis cela. Je reçois toujours des courriels de personnes en colère qui me disent à quel point travailler sur nos véhicules est un travail complexe, et je ne le nie pas, je dis aussi que prendre soin de gens est également un travail complexe.
Nous avons là l’occasion d’une discussion, entre les provinces et territoires et le gouvernement fédéral, sur la façon de renforcer les normes des soins de longue durée et de modifier notre système de valeurs pour valoriser davantage le travail de soignant, que ce soit dans le secteur des soins de longue durée ou de la garde d’enfants. Ce sont des rôles extrêmement importants que nous devons réellement valoriser. La valorisation de ce travail, nous l’avons vue pendant la pandémie, a mené à quelques défis. Quand les gens n’arrivent pas à se débrouiller pour gagner leur vie en travaillant 40 heures dans un seul foyer et qu’ils doivent faire 20 heures supplémentaires dans un autre foyer juste pour payer le loyer, c’est effroyable.
Désolée, mais je prends ce sujet à cœur. J’ajouterais une dernière chose. Il y a deux semaines, j’allais à l’unité de services de santé publique d’Ottawa pour les remercier de leur travail, en toute distanciation sociale et faisant cela de manière appropriée bien sûr, et nous parlions d’un des foyers d’infection dans un refuge pour sans-abri qu’ils avaient résorbé. L’infection avait débuté avec deux préposés aux services de soutien à la personne philippins qui étaient nouveaux au pays et qui travaillaient dans le secteur des soins de longue durée. Ils étaient tombés malades et vivaient dans un refuge pour sans-abri. Si cela ne vous fend pas le cœur, je ne sais pas ce qu’il vous faut. Ce sont des gens qui prodiguent des soins à nos proches, qui ne gagnent pas suffisamment, même en travaillant à temps plein, pour pouvoir se loger dans une ville canadienne.
Je crois que nous avons beaucoup de travail à faire ensemble, et j’espère que je n’ai pas été trop longue.
[Français]
La présidente : Merci beaucoup, madame la ministre.
La sénatrice Mégie : Ai-je du temps pour poser une question à la Dre Tam? J’aimerais savoir, surtout pour ce qui est des soins de longue durée, serait-il possible, dans vos plans, de tenir compte de toutes les difficultés associées à la distanciation physique? Par exemple, vous savez que les chambres comptent trois ou quatre résidants. Autour d’une table de salle à manger, il peut y avoir trois ou quatre résidants et un préposé tout près d’eux qui leur donne à manger. Y a-t-il des normes, ou plutôt des conseils ou un plan pour tenter d’éviter d’autres éclosions dans de telles situations?
[Traduction]
Dre Tam : Nous devons prendre en compte le caractère évolutif de la recherche, mais aussi l’expérience de ceux qui gèrent les situations sur le terrain. Nous avons fourni des lignes directrices, qui ont été publiées, pour aider les établissements de soins de longue durée, mais nous cherchons constamment à savoir en quoi nous pouvons être utiles. Nos lignes directrices concernent la prévention et la maîtrise des infections, et comprend ce que nous appelons la hiérarchie des mesures de contrôle, parmi lesquels l’espace physique, la façon dont vous adaptez ces facteurs, ainsi que d’autres facteurs, comme les techniques et le flux. Nous avons des conseils, bien sûr, mais c’est une chose que de les écrire et une autre que de les mettre en œuvre. Je crois qu’il serait essentiel d’avoir des commentaires sur ce qui s’est réellement passé pour pouvoir adapter les lignes directrices.
La sénatrice Moodie : Merci, madame la ministre Hajdu, et tous ceux qui sont là aujourd’hui pour faire un peu la lumière sur la réponse à la COVID. Mes questions vont porter sur ce qui a été, nous l’avons entendu, le manque de réponse opportune et l’échec de la chaîne d’approvisionnement des équipements de protection individuelle.
Madame la ministre, la chaîne d’approvisionnement de l’équipement de protection individuelle au Canada a posé de sérieux problèmes. Les travailleurs de première ligne se sont retrouvés à risquer leur vie par manque de mesures opportunes. Plusieurs témoins nous l’ont dit, et nous l’avons également lu dans un article du Globe and Mail du 25 juin, à savoir que certains le savaient ou l’avaient constaté bien avant. Certaines provinces, comme l’Alberta, ont réagi dès décembre 2019 et ont commencé à stocker leurs fournitures. Ils ont acheté en surplus, et ils ont été en mesure de partager et d’aider d’autres provinces par la suite. Les grossistes en fournitures de sécurité nous ont appris que, dès janvier, les particuliers et les hôpitaux individuels faisaient la queue à leurs portes, et que les provinces sont arrivées en mars quand il n’y avait plus rien depuis longtemps. Nous avons également appris, par le sondage de l’AMC effectué en avril, que 75 % des médecins pratiquant hors les hôpitaux étaient très inquiets du manque d’EPI et qu’ils ne recevaient aucune réponse sur le statut de leurs commandes quand il le demandaient. Ainsi, il semble que janvier ait été la période cruciale pour faire des stocks.
Madame la ministre, pouvez-vous nous dire pourquoi le gouvernement fédéral, en tant que coordinateur de la réponse, n’a pas relayé les renseignements au reste du pays? Où étaient les mesures, la communication et la coordination du gouvernement? Pourquoi cela a-t-il pris tant de temps avant que les provinces commencent à obtenir des ÉPI et avant que le gouvernement fédéral ne travaille avec les provinces pour s’assurer de cet approvisionnement? Trois mois après le début de la pandémie, comprenez-vous désormais ce qui précisément n’a pas fonctionné dans l’approvisionnement en ÉPI? L’autre côté de la médaille dans tout ça, c’est de s’assurer que tout a été rectifié après coup de sorte que, quand l’économie repartira et que nous nous préparerons pour la deuxième vague, nous pourrons réellement protéger les travailleurs essentiels de première ligne grâce à une chaîne d’approvisionnement fiable en ÉPI.
J’ai une deuxième question pour la Dre Tam, si le temps me le permet. Je voudrais être sur la liste pour une deuxième question, si possible.
Mme Hajdu : Merci beaucoup, sénatrice. Je vais répondre dans les grandes lignes, puis la Dre Tam pourra parler du travail du Comité consultatif spécial.
Certaines prémisses dans cette question ne sont pas tout à fait exactes. Nous savions manifestement qu’il s’agissait d’un problème de santé publique. Dre Tam a créé le Comité consultatif spécial tout au début janvier, elle me corrigera si je me trompe. Elle a convoqué ce comité tout au début du mois de janvier, voire plus tôt, afin de discuter de la menace grandissante que représentait la COVID-19 au Canada et afin d’activer le réseau de réponses qui a été très utile. Tous les administrateurs en chef de santé publique de tout le pays qui ont travaillé de concert, c’est une des leçons tirées du SRAS, et je suis reconnaissante de leur travail.
Maintenant, pour vos questions à propos des ÉPI, une partie de la difficulté réside dans le fait que ce n’est pas le mandat du gouvernement fédéral que de fournir des ÉPI aux provinces et territoires. Dès les premiers jours, nous nous sommes efforcés de définir les stocks existants dans les provinces et territoires, leurs besoins en autres matériels nécessaires en cas d’accélération de la contagion, ce que nous anticipions ou ce pour quoi nous nous préparions, et les meilleures façons de commander en grandes quantités. L’ennui était la différence, selon la province ou le territoire, de leur connaissance des stocks, de leurs besoins actuels et subséquents une fois qu’ils commenceraient à puiser dans leur stock existant, ce qui s’appelle, en termes techniques, le temps d’absorption.
Nous avons assez vite compris que cela représenterait un défi pour les provinces et territoires et avons décidé d’effectuer l’approvisionnement au niveau fédéral, en nous basant sur les meilleures estimations et les meilleures hypothèses quant à nos besoins probables en tant que nation. Très rapidement, nous avons invité Santé Canada et Services Publics et Approvisionnement Canada à nous aider à mettre en place un mécanisme et des mesures qui faciliteraient dans les faits ces acquisitions.
Par ailleurs, nous étions conscients des débuts de pénurie. N’oubliez pas que la crise a commencé en Chine et que c’est justement là que sont fabriqués ces produits. Avoir une crise dans le pays qui, de bien des façons, est le plus important producteur d’ÉPI au monde, a été doublement responsable du fort resserrement de la chaîne d’approvisionnement qui s’est propagé partout dans le monde.
C’est aussi pour cette raison que nous avons très vite décidé de mettre en place une réponse nationale. Cette réponse, comme vous le savez, a été menée par le fédéral et nous donnera l’assurance d’une vraie production nationale non seulement d’ÉPI, mais encore de certains éléments des composantes des tests, par exemple, qui nous permettront de composer avec les éclosions subséquentes.
Au cours des trois derniers mois, nous avons beaucoup appris sur la nécessité de se diversifier pour résoudre les problèmes d’ÉPI, que le monde devra continuer de résoudre puisque les chiffres continuent d’augmenter.
Je vais donner la parole à la Dre Tam qui vous parlera des premières conversations du Comité consultatif spécial. Merci, sénatrice.
Dre Tam : J’ai alerté les médecins en chef le 2 janvier. Nous avions entendu parler d’une grappe inhabituelle de maladies respiratoires le 1er janvier, je crois, et j’ai tout de suite pris contact avec les médecins en chef le 2 janvier. Nous avons envoyé une alerte de santé publique par le biais de nos systèmes le 7 janvier.
Je n’ai pas bien entendu ce que la ministre Hajdu a dit, mais après cela, il y a eu une coordination gigantesque au sein du système des soins de santé auquel est liée la santé publique. En ce qui concerne la complexité de la chaîne d’approvisionnement en ÉPI, et cetera, nous avons énormément appris. Comme je l’ai dit au début en répondant à une autre question, cela a pris plusieurs ministères du gouvernement fédéral, travaillant de concert avec plusieurs représentants provinciaux, pour essayer de déterminer les besoins réels et le taux d’utilisation. Ces éléments sont désormais en planification pour l’avenir, dans un monde qui est encore quelque peu précaire en matière d’ingrédients, d’approvisionnement et de construction d’une capacité nationale.
Beaucoup de leçons ont été apprises et par tous. Je ne crois pas que le système a été en état d’alerte, cependant c’est absolument le cas du système de santé publique. En ce qui concerne les soins de santé, je ne peux pas vraiment faire de commentaires à l’heure actuelle, mais nous nous attachons désormais à faire tout notre possible afin de nous préparer à toute résurgence de la maladie.
La présidente : Merci beaucoup, sénatrice Moodie, voulez-vous essayer d’être sur la liste pour la deuxième série de questions?
La sénatrice Moodie : Oui, s’il vous plaît.
La sénatrice Omidvar : Merci, mesdames et messieurs les témoins, d’avoir comparu et pour tout le travail que vous avez accompli. J’ai une série de questions pour la ministre. Mes questions seront brèves, ainsi j’espère pouvoir les poser toutes.
Je vais me focaliser sur les personnes vulnérables pour ma première série de questions et je vais viser tout particulièrement les personnes âgées. Nous savons et vous savez, madame la ministre, que pour les personnes âgées le meilleur endroit, c’est chez elles. Toute la recherche scientifique le confirme. Pourtant, nous savons aussi qu’il est particulièrement difficile pour les personnes âgées d’avoir accès à des soins à domicile. En 2017, votre gouvernement s’est engagé à verser 6 millions de dollars sur une période de 10 ans aux provinces et territoires pour améliorer les services de soins à domicile. Savez-vous exactement ce que cet argent est devenu? Savez-vous comment il a été utilisé? Quels résultats cela a-t-il donnés, et cet argent a-t-il concrètement aidé ces personnes?
Mme Hajdu : Merci beaucoup, sénatrice.
Je vais demander à M. Lucas de répondre de façon plus détaillée, mais je voudrais dire que vous avez tout à fait raison, je suis d’accord avec votre point de vue, le meilleur endroit pour vieillir est chez soi. Nous savons qu’il y a des gens qui souffrent de problèmes de santé complexes et qui ont besoin d’un niveau de soins supérieur. En définitive, c’est le rêve de tous de rester chez soi le plus longtemps possible et de vieillir dans le confort de sa propre maison. Là vous avez raison. C’est pourquoi notre gouvernement a engagé 6 millions de dollars supplémentaires, afin de promouvoir davantage d’accès aux soins à domicile au Canada.
C’est très difficile, je dirais, parce que je suis une nouvelle ministre de la Santé, mais j’ai déjà été ministre. Lorsque ces importants montants de transfert vont aux provinces et aux territoires, il est très difficile de prévoir dans les détails la façon dont ils seront utilisés. Généralement, les provinces et territoires s’engagent à mesurer les résultats et par conséquent je vais demander à monsieur Lucas qui sait sans doute mieux que moi si nous avons reçu ou non les rapports sur cet engagement de 2017.
M. Lucas : Merci. Les fonds engagés sont arrimés, d’une part, à un énoncé de principes communs sur les priorités partagées en santé avec les provinces et sur plusieurs domaines dans lesquels il est convenu d’investir, et qui incluent la dotation et la formation en matière de soins à domicile, et d’autre part, des accords bilatéraux individuels avec les provinces qui comportent des exigences en matière de rapports y compris par le biais de l’Institut canadien d’information sur la santé ou ICIS. Ainsi, nous pouvons certainement faire le suivi des domaines précis où des mesures ont été prises et des informations qui ont été fournies à l’ICIS jusqu’à présent.
La sénatrice Omidvar : Merci. Vous me dites tous les deux qu’on ne sait pas encore, mais vous m’enverrez ou vous nous enverrez les réponses, n’est-ce pas?
M. Lucas : Oui.
La sénatrice Omidvar : Je comprends que la question des compétences pose problème, particulièrement en santé. Madame la ministre, nous avons entendu l’un de nos témoins parler d’une solution qui ne serait pas fondée sur des négociations avec les provinces. Il s’agirait de créer une allocation canadienne pour les soins à domicile pour personnes âgées, un transfert d’argent fait directement aux personnes qui paient des soins particuliers à domicile. Pouvez-vous me donner votre réponse à propos de cette proposition?
Mme Hajdu : Merci. Cela me semble intrigant comme idée. Évidemment, une approche comme celle-là soulève aussi des questions, par exemple, le montant serait-il suffisant ou ce type de soins serait-il accessible dans la province ou le territoire de résidence de cette personne. Il y a un certain nombre de difficultés, mais j’ai hâte de voir l’idée que vous proposez.
Encore une fois, je pense aux collectivités rurales qui se battent pour avoir cet accès. Je représente une circonscription qui est en partie urbaine et en partie rurale, et même avec des soins à domicile fournis par la province, cela peut constituer un assemblage très précaire pour les gens qui vivent à l’extérieur des grands centres. Je veux revenir à la question des préposés aux soins à domicile eux-mêmes et à la précarité de leurs salaires. Je ne sais pas si beaucoup d’entre vous ont vécu cette expérience, mais ayant eu une personne âgée dans ma vie dans le cadre du système de soins à domicile de l’Ontario, rien n’est plus difficile pour la personne censée recevoir ces soins et pour le membre de sa famille que de recevoir un appel le matin même leur disant que le préposé ne pourra pas venir prodiguer les soins. Ces choses-là, comme vous le savez, sont souvent le fait de l’instabilité de la main-d’œuvre elle-même liée aux conditions de travail.
La sénatrice Omidvar : Madame la ministre, vous parlez à une cliente d’un service de soins à domicile, car ma mère âgée habite avec moi, et je ne peux pas vous décrire avec suffisamment de détails à quel point il est difficile de travailler avec le système provincial. J’ai donc renoncé au système provincial et je fais seulement affaire avec le secteur privé, mais ce n’est pas une option offerte à tout le monde.
Permettez-moi maintenant d’aborder une question qui concerne une autre population vulnérable, c’est-à-dire les travailleurs migrants. Certains témoins nous ont dit, dans leur exposé, que l’un des problèmes qui se posent, c’est que les travailleurs migrants n’ont pas suffisamment accès à l’équipement de protection individuelle, même lorsqu’ils sont infectés. Je comprends que vous avez dit, il y a quelques minutes à peine, qu’il n’incombe pas au gouvernement fédéral de distribuer de l’équipement de protection individuelle dans les provinces. Toutefois, j’aimerais savoir s’il est possible pour vous, c’est-à-dire pour le gouvernement fédéral, de fournir à chaque nouveau travailleur migrant qui arrive au Canada — et ils continueront d’arriver, car la saison de cueillette se poursuit jusqu’en novembre, et même parfois jusqu’en décembre — un équipement de protection individuelle. N’oublions pas que ces travailleurs migrants sont essentiels à notre sécurité alimentaire. Tout comme ils obtiennent leur permis de débarquement et leur visa, ils obtiendraient leur équipement de protection individuelle.
Mme Hajdu : Je vous remercie, sénatrice.
Selon moi, la question des travailleurs migrants et de l’infection est beaucoup plus vaste que cela et elle ne se limite pas à l’équipement de protection individuelle. En effet, tout l’équipement de protection individuelle du monde ne protégera pas une personne qui dort dans un dortoir avec 12 à 15 autres personnes qui n’ont peut-être pas la possibilité de pratiquer la distanciation, et qui n’ont certainement pas accès à des salles de bain ou à des cuisines privées. Selon le type d’exploitation agricole, de produits et de producteurs, il y a des problèmes liés au fait que les employés doivent travailler côte à côte. Je travaille activement sur l’éclosion dans la région de Windsor—Essex, et je peux vous dire que les histoires que j’apprends sur la façon dont les travailleurs migrants sont traités dans notre pays, qu’ils soient en règle ou non, vous feraient dresser les cheveux sur la tête si vous ne les connaissez pas déjà. La façon dont ces travailleurs sont traités est une honte nationale. Je tiens à préciser que ce ne sont pas tous les exploitants agricoles. En effet, de nombreux excellents exploitants agricoles et d’excellentes exploitations agricoles font un bon travail, mais d’autres ne protègent pas la santé de leurs travailleurs ou ne la prennent pas au sérieux.
Le gouvernement fédéral, comme vous le savez, a payé pour le confinement et la protection des travailleurs qui arrivaient d’autres pays, afin de les isoler correctement. En effet, les Canadiens craignaient fortement qu’ils représentent un vecteur d’importation de cas. En fait, quelques travailleurs malades ont pu recevoir un traitement approprié pendant cette période de confinement, mais les éclosions ont été provoquées par des Canadiens et des travailleurs clandestins qui travaillent sur des exploitations agricoles et qui sont en contact avec les travailleurs étrangers temporaires. Je dirais donc que l’équipement de protection individuelle représente une petite partie de la protection des travailleurs sur les exploitations agricoles.
La sénatrice Omidvar : Je comprends parfaitement, mais il faut toujours commencer quelque part. J’entends vos préoccupations au sujet des travailleurs migrants. Je vous remercie d’avoir parlé des dortoirs. Dois-je comprendre, par l’entremise de votre réponse, que le gouvernement fédéral envisagera d’établir des normes nationales en matière d’hébergement pour les travailleurs migrants?
Mme Hajdu : Je vous remercie beaucoup, sénatrice. Ma collègue, la ministre Qualtrough et moi-même travaillons actuellement sur ses idées liées à une réforme du Programme des travailleurs étrangers temporaires. Entretemps, à titre de ministre de la Santé, je travaille activement avec d’autres échelons de gouvernement pour protéger d’abord et avant tout la santé des travailleurs.
La sénatrice Omidvar : Je vous remercie, madame la ministre.
Sénatrice Petitclerc, me reste-t-il du temps?
La présidente : Non, il ne vous reste plus de temps. Je vous remercie, sénatrice.
Avant de continuer, quelques sénateurs qui ne sont pas membres du comité participent à notre réunion et je tiens à leur permettre de poser quelques questions, mais je vais donner la parole à la sénatrice Forest-Niesing.
[Français]
Sénatrice Forest-Niesing, nous avons dû vous interrompre tout à l’heure à cause de problèmes techniques. Il semble que tout soit maintenant réglé et que tout fonctionne. Il vous restait du temps pour poser une brève question; si vous voulez utiliser ce temps, je vais vous laisser prendre la parole tout de suite avant de poursuivre avec les sénateurs qui ne sont pas membres du comité.
La sénatrice Forest-Niesing : Merci beaucoup, et merci de me donner cette chance. Le thème de mes questions portait sur les leçons qui ont été apprises. Peut-être puis-je poser ma question de façon plus générale. Le mandat de notre comité est d’évaluer la réponse du gouvernement à la crise pandémique. Je vais donc vous poser directement la question, madame la ministre.
Dans quelle mesure jugez-vous que le gouvernement était prêt, et a-t-il bien réagi? Quelles leçons avons-nous apprises et quelles corrections devrons-nous apporter, puisqu’on s’attend à une prochaine vague?
[Traduction]
Mme Hajdu : Je vous remercie beaucoup.
C’est une question à laquelle il est très difficile de répondre, car même si nous avons l’impression d’avoir franchi une étape importante, nous sommes toujours au milieu d’une pandémie au Canada. Je dirais que nous avons beaucoup appris sur certaines des lacunes qui ont rendu les choses très difficiles au début. On a beaucoup discuté des données au cours de cette réunion et de nombreuses autres, afin d’avoir une meilleure idée de ce qui se passe au niveau granulaire et d’être en mesure de faire rapport au gouvernement fédéral.
Nous avons appris qu’il était nécessaire de collaborer et d’agir rapidement en cas d’éclosion. Nous avons appris certains des éléments particuliers — en fait, ce n’est pas un nouvel apprentissage, mais cela nous rappelle certainement que si nous n’investissons pas dans les personnes et les milieux vulnérables, cette maladie infectieuse peut s’installer et ensuite menacer la santé de tous. À titre d’ancienne responsable de la santé publique, ce qui m’a poussée à faire de la politique, c’est la notion selon laquelle les investissements dans les personnes vulnérables profitent, au bout du compte, à l’ensemble de la société. Ainsi, une bonne politique sociale est une bonne politique fiscale.
Je pense que nous avons beaucoup appris au sujet de la nécessité d’investir dans la santé publique. L’Agence de la santé publique du Canada est un très petit organisme. Les gouvernements successifs n’ont pas investi de manière substantielle dans l’Agence de la santé publique du Canada afin de lui permettre d’adopter une approche solide, non seulement en ce qui concerne la protection de la santé en cas d’épidémie, mais également la sensibilisation et la prévention des maladies au Canada. Je pense qu’il faut mener des réflexions importantes sur la manière dont nous soutenons la santé publique à l’échelon national et provincial.
Sommes-nous prêts pour la prochaine étape de cette pandémie au Canada? À mon avis, nous sommes nettement plus prêts que nous ne l’étions au moment du déclenchement de l’épidémie, car nous avons établi des relations beaucoup plus étroites avec les provinces, les territoires et les gouvernements locaux pour pouvoir agir rapidement en cas d’éclosion. Nous avons certainement une bien meilleure idée de la façon de gérer les approvisionnements à l’échelon national et international. Nous avons certainement renforcé notre capacité à mener des tests et à rechercher les contacts en cas d’éclosion. C’est, comme vous le savez, un élément essentiel pour gérer les éclosions, pour pouvoir tester rapidement les personnes et pour établir ensuite une stratégie d’isolement qui comprend l’isolement des contacts étroits.
Je pense que tous les échelons de gouvernement ont pris l’engagement politique de poursuivre ces efforts. Je pense qu’il n’y a pas une seule personne dans le domaine politique au Canada qui ne comprend pas que l’économie du pays est en fait étroitement liée à la capacité de protéger la santé des Canadiens. Nous avons beaucoup appris. Il y aura des leçons à tirer à l’avenir, j’en suis certaine, mais j’aimerais encore une fois remercier l’Agence de la santé publique du Canada et Santé Canada du travail incroyablement difficile qui a été accompli ces derniers mois pour nous amener où nous en sommes aujourd’hui.
La présidente : Les témoins seront avec nous pour les 10 prochaines minutes, et nous leur en sommes reconnaissants. Trois sénateurs qui ne sont pas membres du comité souhaitent poser des questions. Si une seule question est posée à un seul témoin à la fois et que nous nous en tenons à cela, je crois que ce sera possible.
La sénatrice McCallum : Ma question s’adresse à Mme Hajdu. Elle concerne l’équité et le fait d’engager des ressources appropriées dans la recherche pour les peuples autochtones du Canada. Que ces ressources soient humaines, financières ou liées à la recherche ou à l’éthique, elles doivent être distribuées de façon équitable, afin que les Premières Nations, les Métis et les Inuits cessent d’être marginalisés. En effet, c’est par l’entremise de cette constante marginalisation que les peuples autochtones continueront d’être victimes de morbidité et de mortalité dans une deuxième vague.
Votre bureau veillera-t-il à faire les choses suivantes? Tout d’abord, veiller à ce que les chercheurs autochtones, qui sont des experts en matière de connaissances scientifiques et autochtones et qui travaillent déjà avec les peuples autochtones, participent concrètement et utilement à la recherche liée à la COVID-19. Ensuite, veiller à ce que les peuples autochtones soient respectés, conformément à l’Énoncé de politique des trois Conseils, et que cet Énoncé soit mis en œuvre par les représentants du gouvernement fédéral responsables d’examiner les propositions liées à la COVID-19. De plus, veiller à ce que les données liées aux peuples autochtones, comme le propose le Cercle consultatif autochtone, soient appuyées, afin de les uniformiser d’un bout à l’autre du pays et de les rendre compatibles avec d’autres systèmes semblables, ce qui permet aux données d’être partagées dans d’autres bases de données électroniques. Aussi, veiller à ce que des directives éthiques et rigoureuses et formelles soient suivies, car ces recherches concernent la vie des peuples autochtones. Enfin, veiller à ce que le conflit d’intérêts personnel réel ou perçu soit pris en compte par les personnes qui examinent les propositions et qui prennent des décisions à leur sujet. Je vous remercie.
Mme Hajdu : Je vous remercie beaucoup, sénatrice McCallum.
Je vous dirai simplement que nous avons placé l’inclusion et le leadership des populations autochtones au cœur de notre programme de recherche. En fait, le Groupe de travail sur l’immunité face à la COVID-19 reçoit des conseils des Autochtones.
Je vais rapidement donner la parole au Dr Strong, car je sais qu’il participe grandement à ce volet de notre réponse. Docteur Strong, pouvez-vous offrir une contribution?
Dr Michael Strong, président, Instituts de recherche en santé du Canada : Je vous remercie, madame la ministre.
Je vous remercie de cette excellente question. En fait, nous nous sommes absolument efforcés de répondre aux besoins de nos collègues autochtones en ce qui concerne la recherche. À titre d’exemple, je peux citer la plus récente phase deux du volet de réponse rapide dans lequel nous avons veillé à ce que des fonds soient accessibles pour remplir nos obligations et même les dépasser en ce qui concerne le financement des chercheurs autochtones. Il s’agit là d’un objectif primordial pour nous, et il le restera.
C’est la même chose en ce qui concerne le conflit d’intérêts. Vous soulevez un enjeu très important. C’est une chose à laquelle nous portons toujours attention, surtout dans le cadre de notre Institut de la santé des Autochtones. Des recherches ont suivi cela de très près et on s’est assuré qu’il n’y a pas de conflit d’intérêts en ce qui concerne le processus d’examen lorsque des fonds sont versés.
Votre question est bien fondée, mais nous travaillons très fort et au cours de ce dernier cycle, nous avons été en mesure d’atteindre et même de dépasser nos objectifs.
La sénatrice Pate : Je vous remercie, madame la ministre, du travail que vous accomplissez avec vos collègues.
Ma question s’adresse à la Dre Tam. Malgré les recommandations des Nations Unies et de l’Organisation mondiale de la Santé concernant les stratégies de dépeuplement des détenus, ainsi que le même appel lancé par plus de 150 professionnels de la santé [Difficultés techniques], sans parler de la directive formulée par le ministre Blair lui-même à la fin du mois de mars pour réduire le risque pour les détenus, le personnel et le public, le SCC n’a pas adopté une telle stratégie. Au lieu de cela, contrairement au droit international et au droit canadien, et contrairement aux recommandations des médecins, les prisonniers ont été isolés et maintenus, pendant des mois, dans des conditions de détention que des professionnels médicaux et juridiques ont décrites comme étant préjudiciables sur le plan physique, psychologique et neurologique, et qui peuvent même s’apparenter à la torture.
Docteure Tam, d’après notre correspondance et les témoignages précédents d’autorités de santé publique devant notre comité, il a été indiqué que le fait de recommander le dépeuplement des prisons afin de permettre une distanciation physique humaine et appropriée, ainsi que des mesures de santé physique et d’hygiène, ne relève pas de votre mandat. Cela signifie que cette décision, qui a une grande importance sur la santé des détenus, du personnel et des membres des collectivités environnantes, a été laissée au SCC, c’est-à-dire le Service correctionnel du Canada.
À la suite des appels urgents que nous avons reçus de professionnels de la santé en milieu carcéral ainsi que des membres du personnel qui s’inquiétaient du fait que les conseils et les normes internes de santé publique, notamment en matière de dépeuplement, n’étaient pas appliqués par le SCC, comme vous le savez, je vous ai écrit à deux ou trois reprises, comme d’autres autorités sanitaires provinciales et territoriales, pour vous demander d’intervenir afin d’inspecter et de vérifier les conditions dans les prisons.
Je suis curieuse et j’aimerais savoir, s’il vous plaît, si vous avez fourni des renseignements concernant les éléments essentiels de santé publique liés au dépeuplement. Le SCC a-t-il profité d’autres conseils indépendants en matière de santé publique pour prendre sa décision de ne pas s’engager dans l’exercice de dépeuplement et d’utiliser plutôt des mesures d’isolement?
Dre Tam : Je ne peux pas commenter la décision concernant le dépeuplement, mais je peux dire que l’Agence de la santé publique et Santé Canada se sont tous deux engagés à fournir une expertise en matière de prévention des infections et de contrôle de la santé dans l’environnement et au travail, notamment en Colombie-Britannique, c’est-à-dire à l’Établissement de Mission. Grâce aux leçons apprises et particulièrement aux liens établis avec les autorités de santé publique locales, mais aussi avec les provinces, nous avons essentiellement fourni des conseils.
Mais nous savons, du moins si nous nous fions aux renseignements fournis, que les 43 établissements du Service correctionnel du Canada, je pense — nous pouvons le vérifier —, ont maintenant tous fait l’objet d’une inspection et d’un audit de leurs méthodes. Je pense qu’on tentait de transposer les connaissances dans tous les établissements. Nous avons également fourni des outils, des formations, des webinaires, des formations sur l’équipement de protection individuelle, ainsi que des conseils sur la manière de procéder à une détection rapide et de réagir à une éclosion avec les services de santé publique locaux. Je sais qu’il faut probablement en faire plus, mais je sais aussi que ces tâches ont été effectuées.
La sénatrice Pate : Je vous remercie.
La sénatrice Bovey : J’aimerais remercier la ministre et la Dre Tam d’être avec nous aujourd’hui.
Ma question sera brève, et elle concerne l’Arctique. Je crois que nous avons été chanceux, car la première vague n’a pas causé d’éclosion dans l’Arctique, mais elle a entraîné de graves conséquences comme l’insécurité alimentaire, les coûts liés à la sécurité, l’interruption de la médecine par vidéo et des inquiétudes en matière de santé mentale. Pouvez-vous nous parler davantage de l’état de préparation à l’égard d’une deuxième vague qui pourrait toucher l’Arctique, étant donné les distances et le manque de fiabilité de la connexion Internet là-bas? Je suis particulièrement préoccupée par l’équipement de protection individuelle et les tests dans le Nord.
Mme Hajdu : Je vous remercie beaucoup, sénatrice.
Je pense que la Dre Tam a dit à maintes reprises que la meilleure prévention consiste, en premier lieu, à éviter que l’épidémie n’atteigne les populations vulnérables. Tout d’abord, je tiens à remercier les dirigeants inuits, autochtones et métis de leur travail incroyable, et le ministre Miller, très franchement, qui a lancé un appel convaincant à l’égard de l’autonomie en disant que nous fournirons des fonds, mais qu’en fait, ce sont les dirigeants autochtones qui sauront le mieux comment gérer et préparer leurs propres collectivités. Les représentants de 12 collectivités de ma propre circonscription m’ont dit que c’était un élément essentiel de leur réponse. La flexibilité des fonds, sans aucune restriction quant à la manière dont ils seraient dépensés, a été, je pense, essentielle dans ce que nous avons considéré comme des mesures largement efficaces prises par les collectivités autochtones pour prévenir l’exposition à la maladie.
Nous avons également concentré nos efforts sur le maintien de l’opérationnalité du Nord, comme vous l’avez souligné. En effet, nous savons que cette région présente des défis uniques sur les plans du transport et de la sécurité alimentaire. Il s’agit donc d’une réponse pangouvernementale. Le ministre des Transports, par exemple, et le ministre des Affaires autochtones et du Nord ont activement participé au processus et ont souligné, à chaque étape, les différentes composantes de la vie dans le Nord qui étaient précaires ou menacées par les mesures d’isolement extrêmes qui ont dû être mises en œuvre pour protéger ces collectivités.
Nous continuerons de travailler avec les dirigeants autochtones et inuits pour nous assurer que nous comprenons en quoi consiste une réponse efficace pour permettre cette connectivité des différentes façons que vous avez mentionnées. Nous travaillons également à améliorer l’accès à Internet à large bande et à haute vitesse parce que nous savons que c’est une solution partielle à certains des problèmes que vous avez soulevés — l’accès à des soins de santé à distance, les soins de santé numériques, mais aussi l’apprentissage numérique et toutes les autres choses qui, d’une certaine manière, font que les Canadiens se rendent tous compte à quel point la vie dans le Nord est difficile, car ils doivent également utiliser des moyens numériques pour se connecter à toutes sortes de soins et de services.
Nous faisons un travail important avec les collectivités autochtones, inuites et métisses pour nous assurer qu’elles sont vraiment à la tête de la réponse, et nous continuerons d’adopter cette approche. Jusqu’à présent, elle semble fonctionner. Je tiens à remercier à nouveau tous les Canadiens, y compris les collectivités et les membres inuits, métis et autochtones, de leurs incroyables sacrifices qui ont permis au Canada d’aplanir la courbe.
La présidente : Merci. Nous avons commencé la réunion avec du retard, et je suis ravie d’entendre que nos témoins, la ministre et son équipe acceptent de rester avec nous encore 5 ou 10 minutes. Nous vous sommes très reconnaissants du temps que vous nous accordez. Merci. Cela nous permettra de poser quelques questions additionnelles dans le cadre d’une deuxième série d’interventions. Essayons de poser une question à un témoin pour maximiser le temps. Encore une fois, merci, madame la ministre, de votre temps.
La sénatrice Poirier : Encore une fois, merci, madame la ministre, de nous accorder plus de temps.
Ma question s’adresse à vous, madame la ministre. Plus tôt dans mes questions, la Dre Tam a parlé de la réserve qui était peut-être sous-financée ou insuffisante, à savoir la Réserve nationale stratégique d’urgence. Madame la ministre, à quel moment le gouvernement ou vous avez été informés que la réserve était insuffisante et sous-financée?
Nous avons également entendu de nombreux témoins dire craindre la deuxième vague et un manque de préparation pour la deuxième vague, et beaucoup d’entre eux estiment que nous ne sommes pas préparés. Pourriez-vous, s’il vous plaît, confirmer l’état de la Réserve nationale stratégique d’urgence à l’heure actuelle? Sommes-nous financés? Sommes-nous préparés pour la deuxième vague à venir?
Mme Hajdu : Merci beaucoup de la question.
Je pense que les déclarations de la Dre Tam font état que la Réserve nationale stratégique d’urgence n’était pas destinée à stocker d’énormes quantités d’équipements de protection individuelle. En outre, il est difficile pour la Réserve nationale stratégique d’urgence de le faire, car différentes infections nécessitent différents types d’EPI et différents types d’équipement.
Cela dit, nous savons ce dont nous avons besoin avec la COVID-19 et, en fait, Approvisionnement Canada a un tableau de bord disponible publiquement qui peut vous donner un aperçu direct de ce que nous avons commandé et acheté.
Nous avons une entente avec les provinces et les territoires selon laquelle 20 % de nos acquisitions sont conservées dans la Réserve nationale stratégique d’urgence afin que nous puissions répondre à leurs besoins accrus en cas d’une hausse marquée de cas dans une région particulière du pays. Je dois remercier mes partenaires provinciaux et territoriaux de travailler si fort en ce sens. Cela leur permet également de constituer leurs réserves avec l’équipement dont ils pourraient avoir besoin en cas d’une hausse marquée de cas ou d’une deuxième vague, tout en permettant au gouvernement fédéral de reconstituer les réserves dont nous avons besoin pour soutenir cette opération.
Les provinces et les territoires demandent fréquemment de l’équipement ou de l’équipement de protection individuelle provenant de la Réserve nationale stratégique d’urgence. Je pense que nous avons reçu plus de 45 de ces demandes, et nous avons réussi à répondre à toutes les demandes des provinces et des territoires; je pense donc que nous sommes sur la bonne voie.
Pour ce qui est du moment où j’ai été informée, j’ai été nommée à ce poste environ un mois et demi avant le début de la pandémie. Nous préparions des lettres budgétaires, des demandes concernant le vaccin contre la grippe, etc. Ces conversations ont eu lieu très tôt pour savoir ce que nous avions et n’avions pas et ce que nous allions devoir acheter.
Enfin, en ce qui concerne l’engagement du gouvernement fédéral à se procurer suffisamment d’EPI, je peux vous dire qu’aucune dépense n’est épargnée pour veiller à ce que les Canadiens soient prêts à affronter la prochaine vague, quelle qu’elle soit.
La sénatrice Poirier : Merci, madame la ministre.
La présidente : Sénatrice Seidman, vouliez-vous poser une question?
La sénatrice Seidman : Oui. Merci beaucoup. En fait, c’est une question qui, je crois, a laissé perplexe l’ensemble du comité, et peut-être que la ministre de la Santé peut nous aider.
Nous avons entendu les témoignages de Réjean Hébert et de Roger Wong, qui étaient tous les deux membres de votre Groupe de travail sur les soins de longue durée, créé par le Bureau du conseiller scientifique principal. Ils ont tous les deux fait savoir que le groupe de travail avait eu cinq réunions, mais qu’aucune n’était prévue. Le groupe de travail semblait avoir terminé son travail, mais des rapports étaient en cours de préparation. Le premier rapport allait porter sur les actions immédiates et le deuxième, sur les actions à moyen terme. Je me demande si ces rapports seront rendus publics et si, en fait, ce groupe de travail a terminé ses travaux ou si son mandat est terminé. Le cas échéant, ne sera-t-il pas là pour assurer une surveillance ou donner des conseils sur la mise en œuvre des recommandations?
Mme Hajdu : Merci, sénatrice. Je vais essayer de faire des remarques générales, et mes fonctionnaires en sauront peut-être plus à ce sujet. La scientifique en chef a son propre groupe de travail. Ces gens ne relèvent pas de moi, alors je ne sais pas quels sont leurs plans futurs. Je vais maintenant céder la parole au sous-ministre Stephen Lucas, qui pourra fournir des renseignements additionnels.
M. Lucas : Merci, madame la ministre et madame la sénatrice.
Le groupe de travail a été créé pour examiner les recommandations à court et à long terme. Les rapports ont été préparés, et je crois savoir qu’ils seront affichés.
Il est certain qu’avec ces rapports, une multitude d’autres études, le rapport des Forces canadiennes, il existe un ensemble important de renseignements pour aider à éclairer les mesures à prendre, comme la ministre l’a souligné, y compris la conversation sur les normes nationales et la prévention et le contrôle des infections qui doivent être mis en place pour aider à protéger ces personnes vulnérables.
Si le besoin s’en faisait sentir, nous travaillerions avec le conseiller scientifique en chef pour convoquer le groupe afin d’approfondir la question, mais on met maintenant l’accent sur l’ensemble des travaux, y compris ceux du groupe de travail, pour envisager de prendre des mesures dans tout le pays par l’entremise des provinces et des territoires afin de nous assurer que les personnes âgées sont protégées dans les établissements de soins de longue durée et autres résidences avec assistance.
La sénatrice Seidman : Merci.
Le sénateur Munson : Je vais adresser ma question à la Dre Tam, quoi que la ministre voudra peut-être y répondre.
Nous avons vu ce qui se passe aux États-Unis aujourd’hui, qui sont si près de nous. Docteure Tam, des scientifiques, dans l’un des principaux journaux, ont mis en garde aujourd’hui qu’il y aura une deuxième vague et qu’elle sera 10 fois plus importante que la première. Il est difficile de dire « si », mais c’est une possibilité qui subsiste. Que feriez-vous s’il y avait une deuxième vague au pays? Est-ce que la ministre et vous êtes prêtes à isoler le pays à nouveau, d’une manière encore plus stricte? Maintenant que nous avons eu l’occasion de souffler un peu, ce pourrait être très difficile à faire.
Dre Tam : À l’heure actuelle, les restrictions à la frontière qui ont été mises en place avec les États-Unis et d’autres pays sont encore en vigueur, à l’exception d’un groupe exempté de travailleurs des services essentiels ou des personnes qui transportent nos aliments, par exemple. Une quarantaine obligatoire de 14 jours est encore en vigueur pour les personnes qui entrent au Canada. Ce sont là quelques-unes de nos principales mesures de santé publique. Elles sont toujours en place.
Nous n’irons pas de l’avant rapidement, sauf dans le cadre de discussions très étroites avec les provinces et les territoires pour savoir où nous en sommes à l’échelle nationale. Nous sommes tout à fait conscients de ce qui se passe chez nos voisins du Sud, et l’épidémiologie de la situation aux États-Unis fait partie intégrante des conseils. Jusqu’à présent, le mantra ou le principe de la réouverture a été de procéder soigneusement et lentement, et je crois que cela continuera.
Nous nous préparons à des hausses marquées de cas, qui pourraient survenir à l’automne. Nous espérons qu’elles ne se produiront pas plus tôt. Nous devons nous préparer au pire scénario, tout en redoublant d’efforts pour éviter les petites étincelles d’introduction ou de résurgence. C’est la stratégie, qui consiste à éteindre ces feux ou ces étincelles tout en se préparant à une éventuelle vague plus importante.
La présidente : Madame la ministre, vouliez-vous ajouter quelque chose à ces remarques avant qu’on vous laisse partir?
Mme Hajdu : Oui. Je suis d’accord avec la Dre Tam que notre priorité est d’aller de l’avant lentement et graduellement.
Je pense que votre question portait moins sur la frontière que sur la surveillance de ce qui se passe chez nos voisins du Sud et sur la possibilité que cela se produise ici. Tout est possible. Nous ne connaissons pas le virus. Nous ne savons pas comment il va changer, et nous en savons peu sur le virus. Ce que nous avons appris au cours des six derniers mois, ce sont des mesures que nous pouvons prendre pour mieux protéger les Canadiens.
Je dirai également qu’il y a une énorme différence entre les États-Unis et le Canada quant à la manière dont nous avons traité le virus et les communications concernant le virus depuis le tout début. Nous n’avons pas le niveau d’animosité politique que nous voyons chez nos voisins du Sud quant à savoir si le virus était réel ou non, si vous vous souvenez bien, au début. Aucun homme politique au Canada n’a remis en question si ce virus était réel ou non, ce qui a aidé les Canadiens à le prendre au sérieux.
Nous avons un système de soins de santé public ici, si bien qu’il n’y a pas d’obstacles aux tests ou aux traitements. Les gens ne sont pas limités par les ressources financières pour se présenter et se faire tester. Ce n’est même pas un concept pour les Canadiens, qu’ils devraient payer pour savoir s’ils ont contracté la COVID-19 ou non. La plupart d’entre nous ont grandi avec l’avantage d’un système de santé public qui leur offre l’accès à des soins.
Je suis très fière de mes collègues qui comprennent que notre économie est étroitement liée à la santé des Canadiens. Il n’y a pas de dichotomie, comme nous le voyons dans certains autres pays, entre la santé et l’économie. En fait, au Canada, avec mes collègues autour de la table du Cabinet, nous sommes très conscients, et je dirais même à l’échelon provincial, que l’économie dépend en fait de la santé des Canadiens. Levez la main si vous voulez aller au Texas aujourd’hui. Pas moi. Les États-Unis ont ajouté 34 000 nouveaux cas à leur bilan hier — et ce ne sont que les cas dont ils ont connaissance. Cela a évidemment un effet très néfaste sur leur économie.
Nous croyons que pour poursuivre la réouverture de l’économie canadienne, nous devons le faire en plaçant la santé des Canadiens au centre de nos préoccupations. Tout le travail que nous faisons pour augmenter notre capacité, pour tester, pour retracer les contacts et pour nous assurer que les Canadiens comprennent la nécessité de continuer à s’éloigner physiquement et à se protéger, de porter des masques lorsqu’ils ne peuvent pas être physiquement éloignés, tout ce travail doit se poursuivre pendant que nous rouvrons lentement et prudemment notre économie.
Comme la Dre Tam l’a dit, je ne doute pas que nous connaîtrons des éclosions, mais je suis de plus en plus rassurée par le fait que nous apprenons rapidement ce qu’il faut faire lorsque nous voyons ces éclosions. Je suis également réconfortée par le niveau de collaboration que je constate dans tout le pays, quel que soit le parti politique qui dirige à ce niveau, qu’il y a une volonté de faire front commun et de régler ces problèmes très difficiles. Merci.
La présidente : Merci à vous tous de votre temps, de votre disponibilité et de vos témoignages. Votre contribution est très utile à mesure que nous concluons la première partie de notre étude et que nous nous préparons à rédiger un rapport préliminaire aujourd’hui et lundi. Votre contribution arrive à point nommé, et nous vous en sommes très reconnaissants.
[Français]
Merci à tous.
Nous poursuivons notre étude sur la réponse du gouvernement à la pandémie de COVID-19, et nous accueillons maintenant nos témoins pour la prochaine heure.
Nous accueillons, du ministère de la Défense nationale et les Forces armées canadiennes, le major-général Marc Bilodeau, médecin général adjoint/directeur général des services cliniques, Groupe des Services de santé des Forces canadiennes, et la brigadière-générale Lise Bourgon, directrice générale, opérations, Commandement opérations interarmées du Canada.
[Traduction]
Nous allons commencer en demandant à la brigadière-générale Bourgon de faire sa déclaration liminaire.
Bgén Lise Bourgon, directrice générale, opérations, Commandement opérations interarmées du Canada, ministère de la Défense nationale et les Forces armées canadiennes : Merci beaucoup, madame la présidente.
Madame la présidente, distingués membres du Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie et de la COVID-19, je vous remercie de votre invitation à discuter du rôle que les Forces armées canadiennes ont joué dans la réponse de l’ensemble du gouvernement à la pandémie. Je suis accompagnée du major-général Marc Bilodeau, le médecin général adjoint des FAC. Nous avons tous deux été étroitement associés à la planification et à l’exécution de la réponse des FAC à la pandémie de COVID-19.
La participation des Forces armées canadiennes aux premières étapes de la pandémie a commencé dans le cadre de l’opération Globe, notre soutien militaire à Affaires mondiales Canada pour le rapatriement des Canadiens qui se trouvaient à l’extérieur du pays et qui ne pouvaient pas rentrer chez eux. Alors qu’Affaires mondiales Canada était responsable de la coordination de la logistique des vols de retour pendant l’opération Globe, le personnel médical des Services de santé des Forces canadiennes à bord des avions a veillé à ce que les protocoles de contrôle avant l’embarquement, en vol et après le vol, élaborés en étroite collaboration avec l’Agence de la santé publique du Canada, soient suivis pour rendre les vols aussi sûrs que possible pour les Canadiens rapatriés.
À leur arrivée au Canada, les Forces armées canadiennes, en coordination avec l’ASPC et la Croix-Rouge, ont facilité la période de quarantaine de 870 Canadiens à la BFC Trenton.
Alors que la COVID-19 évoluait pour prendre les proportions d’une pandémie mondiale, les FAC ont lancé l’opération Laser, dont l’objet était de protéger leurs propres membres et d’être en mesure de répondre efficacement aux objectifs du gouvernement du Canada et aux demandes d’assistance. Des groupes opérationnels ont été préparés dans chacune de nos six régions dotées d’une force opérationnelle interarmées, avec des navires et des équipages prêts à intervenir sur chaque côte, une force opérationnelle aérienne Laser avec des détachements de soutien dispersés, et des ressources supplémentaires de l’ARC sur préavis de déplacement réduit, tout cela pour soutenir les Canadiens.
Au pic de l’opération, 24 000 militaires ont été mobilisés, prêts à répondre aux demandes du gouvernement pour aider les Canadiens dans tout le pays. Cela comprenait non seulement 7 000 réservistes, mais aussi 1 180 Rangers canadiens spécifiquement en attente pour répondre aux besoins uniques de nos communautés nordiques et autochtones.
En avril, le gouvernement du Canada a reçu des demandes d’assistance pour gérer la détérioration de la situation dans les établissements de soins de longue durée des provinces de Québec et de l’Ontario. Les FAC ont été chargées de fournir un soutien médical et non médical aux établissements de soins de longue durée, ou ESLD, touchés par la COVID. Les membres des FAC ont reçu une formation spécialisée et des équipements de protection individuelle pour s’assurer qu’ils étaient prêts à effectuer cette tâche militaire inhabituelle, afin de soutenir efficacement et en toute sécurité une population particulièrement vulnérable.
Nous reconnaissons que la COVID-19 présente des risques uniques pour les membres des FAC déployés dans ces établissements. À ce jour, 55 militaires (41 au Québec et 14 en Ontario) travaillant dans des ESLD ont reçu un résultat positif au test de dépistage de la COVID-19. Parmi eux, 49 se sont rétablis et aucun n’a eu besoin de soins hospitaliers.
Récemment, nous avons acquis une capacité de dépistage supplémentaire qui nous permet de renforcer nos processus de contrôle. Les membres des FAC sont testés avant leur déploiement dans un établissement de soins de longue durée, ainsi qu’à la fin de leur isolement post-déploiement. Cette approche nous permet de réduire le risque de toute propagation de la maladie au sein des FAC, des ESLD ou de la population civile.
En outre, nous avons développé de nouvelles tactiques, techniques et procédures concernant la protection de la santé des forces qui amélioreront les réponses des FAC dans un environnement COVID. Nous acquérons également davantage d’équipements de protection individuelle afin de nous assurer que nous sommes prêts à réagir à toute exigence future, qu’il s’agisse de pandémies, d’incendies ou d’inondations.
Aujourd’hui, le 26 juin, le soutien des FAC aux ESLD en Ontario et au Québec prendra fin, à l’exception de l’Ontario qui a signalé hier son intention de demander une éventuelle prolongation du soutien à un établissement de soins en Ontario — Woodbridge — jusqu’au 3 juillet. Au Québec, les équipes des FAC resteront de garde et sur appel pour soutenir cinq ESLD jusqu’à ce que toutes les conditions retournent à la normale.
À ce jour, nous avons affecté des équipes de soins civils renforcés des Forces armées canadiennes dans 47 établissements de soins de longue durée au Québec et dans 7 établissements en Ontario, pour un total de 54 établissements. Voilà qui a contribué à y stabiliser la situation pour que les provinces puissent reprendre le contrôle. Nous sommes fiers du travail que nos militaires ont accompli dans des conditions difficiles et en s’exposant à des risques. Si le gouvernement fait de nouveau appel à nous à cet égard, nous disposons d’une force opérationnelle de soins d’urgence composée de 10 équipes formées, correctement équipées et prêtes à intervenir, avec les éléments de troupes de soutien associés, capables de réagir dans un délai de 24 heures, et nous resterons aussi longtemps que nécessaire. Ces militaires sont actuellement positionnés à Montréal et je suis convaincu qu’ils peuvent de nouveau intervenir rapidement, efficacement et avec compassion, comme ils l’ont fait au cours des quatre derniers mois.
Je voudrais conclure en disant que la sécurité, la santé et le bien-être des membres de nos forces armées, qu’ils soient en activité au pays ou à l’étranger, sont toujours notre principale préoccupation. Pour assurer le bien-être mental de nos militaires travaillant dans le contexte très exigeant de l’opération LASER, nous avons mis en place un programme de réintégration sur mesure pour combler la période entre leur emploi dans les établissements de soins de longue durée et leur domicile.
[Français]
Merci beaucoup. Le major-général Bilodeau et moi sommes impatients de répondre à vos questions.
La présidente : Merci beaucoup à vous deux et merci d’être là. Merci aussi de la part de tous les sénateurs. Je pense à tous les membres des Forces armées canadiennes et je peux vous dire que nous apprécions tous énormément le travail que vous faites sur le terrain. Nous vous sommes reconnaissants d’être ici aujourd’hui pour répondre à nos questions et nous aider dans cette étude.
[Traduction]
Les sénateurs vous poseront maintenant des questions. Je vous rappelle que, comme d’habitude, vous disposez de cinq minutes pour les questions et les réponses, d’autant plus que nous ne bénéficions de la présence des témoins que pour la prochaine heure. Je vous demanderais donc de porter attention au temps que vous prenez pour poser des questions pour que nous puissions poser toutes celles que nous voulons.
Nous commencerons avec la vice-présidente du comité, la sénatrice Poirier.
La sénatrice Poirier : Je vous remercie tous les deux de témoigner aujourd’hui. J’exprime aussi toute ma gratitude à tous les membres des Forces armées canadiennes qui ont répondu à l’appel et qui, malheureusement, s’exposent ainsi à un risque.
Le rapport publié en mai révèle les failles du réseau de soins de longue durée de l’Ontario, des failles que nous n’avons malheureusement pas le temps de corriger avant que la deuxième vague ne frappe probablement. Pourriez-vous nous indiquer si vous jugez que vous disposez des ressources humaines, financières et matérielles dont vous avez besoin pour combattre une deuxième vague dans les établissements de soins de longue durée, comme l’armée l’a fait lors de la première vague?
Bgén Bourgon : Je vous remercie de poser cette question.
Je pense que les Forces armées canadiennes constituent la force de dernier recours. Nos membres sont prêts à intervenir à la demande du gouvernement fédéral. Nous disposons effectivement du personnel et des ressources nécessaires, et quand on nous demandera de retourner dans les établissements de soins de longue durée parce qu’il y a un besoin, nous nous exécuterons.
La sénatrice Poirier : D’accord. Quel a été le plus gros défi que les Forces armées canadiennes ont dû relever jusqu’à présent dans les établissements de soins de longue durée?
Bgén Bourgon : Je pense que je répondrai en premier, puis je céderai la parole au général Bilodeau. Je pense que la tâche différait de tout ce que les Forces armées canadiennes ont eu à faire auparavant. D’entrée de jeu, le plus gros défi a consisté à offrir la formation et à assurer la logistique et la coordination dans les établissements de soins de longue durée pour que nous connaissions nos rôles et les besoins, car c’était quelque chose de nouveau. Nous avons l’habitude d’aider la population canadienne lors d’inondations et d’incendies, mais c’était la première fois que nous intervenions dans des établissements de soins de longue durée. C’est le principal enseignement que nous avons tiré de l’expérience. Major-général Bilodeau, voulez-vous intervenir?
Major-général Marc Bilodeau, médecin général adjoint / directeur général des services cliniques, Groupe des Services de santé des Forces canadiennes : J’ajouterais qu’à titre de médecin, le plus gros défi venait du fait que le milieu dans lequel nos membres étaient à l’œuvre était hautement infectieux. Le milieu posant un risque élevé, nous avons dû faire moult préparations pour nous assurer que nos membres étaient aussi protégés que possible afin de protéger leur santé, celle de leurs collègues civils qui étaient déjà en poste dans les établissements et, surtout, celle des résidants qui y étaient hébergés.
Le fait est que ce genre de tâche d’ordre médical était nouvelle pour nous, car nous n’avions manifestement jamais affecté de membres des forces armées dans des établissements de soins de longue durée auparavant. Voilà qui a exigé beaucoup de préparations également. La formation a notamment consisté à comprendre la nature des milieux de soins de santé et la manière dont nous pouvions apporter de l’aide malgré le fait que nous n’étions pas experts en la matière.
La sénatrice Poirier : Je vous remercie. J’ai deux autres brèves questions, que je formulerai ensemble dans l’espoir de pouvoir les poser.
D’abord, nous avons entendu dire qu’une pénurie d’équipement de protection individuelle, ou EPI, sévissait à bien des endroits. Je me demande si les Forces armées canadiennes ont été confrontées au même problème. Disposiez-vous d’EPI en quantité suffisante?
De plus, lors de la première vague, vous n’êtes intervenus que dans deux provinces. Si vous devez intervenir dans d’autres provinces du pays lors de la deuxième vague, êtes-vous équipés pour le faire? Êtes-vous prêts à agir? Disposez-vous de l’effectif nécessaire?
Bgén Bourgon : Je commencerai avec la question sur l’EPI. Cet équipement comprend toujours deux genres de fournitures: l’équipement médical et non médical. Initialement, avant que la crise ne frappe, l’EPI était laissé à la discrétion des régions. Il incombait donc à chacune de nos bases et de nos escadres de s’approvisionner en EPI. Avec la crise de la COVID-19, nous avons rapidement constaté que l’ensemble du gouvernement ne disposait pas d’EPI en quantité suffisante. L’Agence de la santé publique du Canada et Services publics et Approvisionnement Canada ont donc pris le contrôle du processus d’approvisionnement pour l’ensemble des organismes gouvernementaux afin de coordonner un achat de masse, qui a déjà été effectué. L’équipement commence lentement à arriver.
En ce qui concerne le matériel non médical, ce sont les gants et les masques qui sont très importants pour nous. La commande de masse qui, comme je l’ai indiqué, a été effectuée vient de Chine. Elle a été légèrement retardée, mais nous sommes convaincus qu’elle arrivera au cours de l’été. Ainsi, si une deuxième vague frappe, nous disposerons de l’équipement nécessaire pour faire le travail.
Je laisserai au major-général Bilodeau le soin de traiter de l’aspect médical, puis je vous dirai ce que nous pourrons faire pour les provinces dans l’avenir.
Mgén Bilodeau : Outre les gants et les masques non chirurgicaux destinés aux professionnels des soins de santé, nous avons besoin de masques N95. Je suis certain que vous en avez entendu parler. Il s’agit d’une ressource difficile à obtenir actuellement. Nous avons aussi besoin de blouses et d’écrans faciaux, de l’équipement initialement difficile à obtenir. Nous sommes maintenant dans une meilleure position et nous commençons à constituer des réserves qui nous permettront d’être prêts en cas de demandes supplémentaires potentielles. Je vous rends la parole, brigadière-générale Bourgon.
Bgén Bourgon : Pour ce qui est d’aider les autres provinces, nous disposons d’un nombre limité d’employés médicaux. Les Forces armées canadiennes employant seulement le personnel médical dont elles ont besoin pour prendre soin de leur effectif et pour participer aux opérations en déploiement, nous n’avons pas beaucoup d’employés médicaux. Bien entendu, si une autre crise survient et que nous devons aider plus de provinces, nous devrons établir des priorités. Si tous nos membres agissent de nouveau à titre de force de dernier recours, nous affecterons tout notre personnel et nous formerons nos équipes, mais le gouvernement fédéral devra établir certaines priorités pour que nous puissions aider les installations essentielles des provinces de notre mieux avec les ressources dont nous disposons.
La sénatrice Poirier : Je vous remercie beaucoup. Une fois encore, je vous remercie tous de ce que vous faites pour nous et pour le pays. Nous vous en sommes très reconnaissants. Merci.
La sénatrice Griffin : J’avais quelques questions brillantes à poser, mais la matière a déjà été couverte. Je passerai donc mon tour, en vous remerciant.
La sénatrice Moodie : Je remercie les témoins qui comparaissent aujourd’hui.
Mes questions portent sur votre expérience et un peu sur le soutien dont vous avez eu besoin quand vous prêtiez main-forte dans les établissements de soins de longue durée. En ce qui concerne l’exposition de vos membres, pouvez-vous nous donner un aperçu du nombre de membres qui ont eux-mêmes été infectés par la COVID-19? Le virus a-t-il été transmis à d’autres membres des forces armées?
De plus, qu’avez-vous fait et quelle approche avez-vous adoptée au chapitre de la détection? Avez-vous effectué les tests vous-même à titre d’organisation distincte ou avez-vous été testés dans les établissements où vous travailliez?
Je pense que la troisième question concerne la manière dont vous avez fonctionné et le soutien qui était offert. Avez-vous dépêché votre propre personnel médical dans chaque établissement ou vous êtes-vous fiés à celui qui y était en poste? Dans quelle mesure considérez-vous que le soutien offert par le personnel médical travaillant dans ces établissements était lacunaire? Je vous remercie.
Mgén Bilodeau : Comme nous l’avons indiqué lors de notre exposé, 55 membres ont été infectés alors qu’ils travaillaient dans des établissements de soins de longue durée. Tous, à l’exception de cinq d’entre eux, se sont entièrement rétablis. Les autres sont en train de se remettre, et aucun d’entre eux n’a besoin de soins hospitaliers. Dans l’ensemble, donc, la maladie s’est avérée bénigne dans leur cas.
Nous ne cherchons pas les infections secondaires qu’ils pourraient avoir provoquées, car dès que nous avons su qu’ils avaient été déclarés positifs ou qu’ils étaient malades, nous les avons rapidement mis en isolement. Ils se sont manifestement rétablis et sont isolés des autres membres pour éviter que d’autres personnes ne soient infectées.
Sachez que 40 % d’entre eux étaient asymptomatiques, ce qui signifie qu’ils ont subi un test parce qu’un régime de dépistage était en place dans les établissements pour tenter de tester les gens et de déceler les porteurs asymptomatiques qui pourraient être la source d’une éclosion incontrôlable. C’est ainsi que certains de nos membres ont subi un test.
En outre, nous avons instauré une clinique afin d’appuyer chacune des missions, l’une se trouvant à Toronto et l’autre à Saint-Jean, au Québec. Si l’un de nos membres présentait des symptômes, il était isolé et éloigné de l’établissement de soins de longue durée, et il devait se présenter à nos cliniques, où nous pouvions prélever un échantillon pour l’envoyer à un laboratoire civil afin d’obtenir un diagnostic. C’est ainsi que nous avons pu diagnostiquer initialement les membres qui ont été déclarés positifs.
Nous disposons maintenant d’un régime de dépistage plus proactif. Initialement, nous n’avions pas accès à d’autres tests que ceux du réseau de soins de santé civil. Un contrat nous lie maintenant à un laboratoire privé, ce qui nous permet d’être plus proactifs. Avant qu’un membre ne se présente dans un nouvel établissement, nous pouvons le soumettre à un test pour être certains qu’il ne s’agit pas d’un porteur asymptomatique qui pourrait introduire la maladie dans l’établissement.
Les membres subissent aussi un test à la fin de la mission, après les 14 jours d’isolement et avant qu’ils ne rentrent chez eux. Nous pouvons ainsi nous assurer qu’ils ne rendent personne malade quand ils retournent à la maison ou à leur lieu de travail.
En ce qui concerne votre question sur le soutien offert au personnel médical dans les établissements de soins de longue durée, nous avons affecté des infirmiers et des techniciens médicaux qui y ont agi à titre de préposés aux services de soutien à la personne. Nous considérons qu’il s’agit de notre contribution la plus importante, une contribution réclamée par les provinces que nous avons aidées. Il n’a pas été nécessaire d’affecter de médecins dans ces établissements.
En outre, du personnel non médical était en poste pour se charger de la logistique, des tâches ménagères et d’autres fonctions semblables.
Bgén Bourgon : Dès que les membres des Forces armées canadiennes étaient déployés, ils étaient accompagnés par une équipe de reconnaissance. Ils se rencontraient dans les établissements afin de déterminer les besoins. La contribution des Forces armées canadiennes dépendait des besoins observés sur place. Comme le major-général Bilodeau l’a souligné, des préposés aux services de soutien et de soin et des soldats traditionnels se chargeaient d’autres tâches, selon les besoins sur place. La structure était la même dans chaque établissement, mais elle dépendait des besoins sur place, et nous avons ciblé des demandes et des besoins précis.
La sénatrice Moodie : En clair, vous nous dites que vous n’avez jamais eu l’impression que le soutien médical était lacunaire et qu’en fait, vous avez fourni le nécessaire.
Mgén Bilodeau : Il faudrait définir en quoi consiste le « soutien médical ».
La sénatrice Moodie : Je fais référence à un médecin à qui poser une question ou pouvant offrir de l’aide au sujet des normes, à des normes en matière d’isolement ou à quelque chose de semblable.
Mgén Bilodeau : Le rapport sur l’Ontario indique qu’il a parfois été difficile de joindre des médecins dans certains établissements de soins de longue durée, mais nous ne considérons pas que ce soit un problème systémique. Le rapport comprend quelques constats, qui ont été communiqués à la province. Je ne pense pas, toutefois, que ce soit un problème systémique dans la plupart des établissements.
La sénatrice Moodie : Je vous remercie.
Le sénateur Munson : Je vous remercie des services que vous rendez à notre merveilleux pays.
Les affectations dans les établissements de soins de longue durée étaient-elles volontaires ou obligatoires?
Bgén Bourgon : Sénateurs, à titre de soldats, nous acceptons très bien les ordres. Les affectations n’étaient pas volontaires, mais faisaient partie de nos devoirs et de la mission. Les soldats ont été choisis. Ils étaient disponibles et ont été déployés parce que les Canadiens avaient besoin d’aide. C’est notre travail.
Le sénateur Munson : C’est bon à entendre.
Le comité n’a pas entendu de propriétaires du secteur des établissements privés de soins de santé réglementés. Comme les forces armées sont intervenues pour aider les établissements de soins en état de crise, vous possédez une expérience de première main. Dans quelle mesure le secteur privé diffère-t-il du secteur public? Lequel est le pire?
Mgén Bilodeau : Nous pouvons difficilement nous prononcer sur la question, car nous ne sommes intervenus que dans un échantillon d’établissements de soins de longue durée du Québec et de l’Ontario. Nous ne pouvons donc vraiment pas faire de déclaration concluante sur le statut des établissements privés et publics.
Initialement, les établissements où nous sommes intervenus étaient tous en très mauvaise posture quand nous sommes arrivés, et nous avons été en mesure de leur offrir un certain soutien. La liste comprend des établissements tant privés que publics.
Bgén Bourgon : Les soldats avaient comme ordre d’apporter de l’aide, mais ce que je voulais souligner lors de ma réponse précédente, c’est le fait qu’ils étaient extrêmement fiers de le faire et d’aider les résidants. Ils étaient tous extrêmement fiers après leur mission et même lorsqu’ils étaient encore à l’œuvre. Leur expérience s’est avérée très précieuse, et ils ont tous adoré le temps qu’ils ont passé dans les résidences. Alors oui, ils sont intervenus parce qu’ils avaient reçu l’ordre de le faire, mais ils en tirent une immense gratification.
Le sénateur Munson : Je vous remercie beaucoup de ces observations. Quand j’étais journaliste, il y a un certain temps, on m’a demandé d’aller à Tchernobyl. Je n’étais pas obligé d’accepter et j’ai décliné l’offre, préférant traiter d’autres affaires, me rendant dans des zones de guerre pour voir ce qu’il se passe et écrire sur le sujet. Parfois, quand la maladie est invisible, certains peuvent éprouver quelques craintes quand ils arrivent dans le milieu. Je vous ai interrogé à ce sujet et je m’attendais à votre réponse, mais je pense qu’il est bon de savoir que nos soldats sont aux premières lignes de la lutte contre la COVID.
La Dre Theresa Tam et d’autres témoins ont proposé de modifier la Loi canadienne sur la santé afin d’assurer la réglementation et de combler les besoins des établissements de soins de longue durée. D’après ce que vous avez observé dans 30 établissements de soins de longue durée de l’Ontario et du Québec — je sais que vous êtes fonctionnaires, mais vous avez tout vu —, êtes-vous favorables à une modification de la Loi canadienne sur la santé afin de réglementer ces établissements? Nombreux sont ceux qui considèrent que c’est l’absence de réglementation qui nous a menés là où nous en sommes aujourd’hui, avec 80 % des infections répertoriées dans ces établissements de soins.
Mgén Bilodeau : Il ne m’appartient manifestement pas de me prononcer sur la question. Tout ce que je puis dire, c’est qu’on nous a confié une mission, dans laquelle nous avons investi toute notre énergie et que nous avons menée à bien.
Le sénateur Munson : Je sais que vous portez l’uniforme et je le respecte, mais d’après ce que vous avez observé, considérez-vous qu’il faille apporter des améliorations dans les établissements de soins du pays en imposant une réglementation ou en prenant d’autres mesures pour qu’il ne soit plus nécessaire d’y dépêcher des soldats? Ces derniers sont faits pour défendre notre pays et pour prendre part à d’autres activités, bien entendu.
Mgén Bilodeau : Nous convenons tous qu’il y a place à amélioration, bien entendu, puisque le fait que les Forces armées canadiennes ont dû être appelées en renfort montre qu’il y avait des problèmes.
Je considère toutefois que grâce à notre collaboration avec les deux provinces, ces dernières s’emploient à cerner entièrement les besoins pour améliorer les services et disposent d’un bon plan à cet égard.
Le sénateur Munson : Je vous remercie.
[Français]
La présidente : Merci beaucoup pour ces réponses à des questions qui ne sont pas faciles.
[Traduction]
Elles nous aident beaucoup, mais elles ne sont pas toujours faciles pour les témoins, et nous le comprenons.
[Français]
La sénatrice Forest-Niesing : Merci aux témoins d’être parmi nous. Je vais poursuivre sur la même lancée que le sénateur Munson. J’aimerais vous poser une question au sujet des problèmes dont vous faites état dans les rapports qui ont été produits à l’intention du Québec et de l’Ontario.
Si l’on constatait qu’il y avait aussi des problèmes dans les territoires et dans les autres provinces, quel devrait être, selon vous, le rôle du gouvernement fédéral face à ce qui serait [Difficultés techniques] en ce qui a trait aux soins de longue durée partout à travers le pays?
Mgén Bilodeau : Cette question va bien au-delà du rôle des Forces armées canadiennes. C’est difficile pour nous de faire des commentaires là-dessus plus spécifiquement. Il est clair que les problèmes que nous avons identifiés doivent être des leçons pour d’autres provinces, et nous espérons qu’elles seront communiquées aux institutions de façon à mieux les protéger contre une deuxième vague potentielle.
La sénatrice Forest-Niesing : Merci, je me rends bien compte que ma question était assez large et qu’il est difficile d’y répondre.
J’aurais une question sur le lancement d’un appel à l’innovation pour trouver des solutions aux principaux défis auxquels le Canada doit faire face, et ce, parallèlement à un engagement financier initial de 15 millions de dollars.
Pouvez-vous nous décrire l’initiative qui vise à solliciter des idées novatrices pour relever ces défis auxquels fait face le Canada pendant la pandémie? Quels ministères et organismes collaborent à cette initiative?
Mgén Bilodeau : Je ne peux pas vous dire exactement quels ministères et organismes y collaborent.
Nous avons eu vent, de notre côté, des différentes occasions d’investissements résultant de ces programmes, et cela nous a permis de créer une liste de priorités du point de vue médical pour ce qui est des zones de recherche qui pourraient nous être bénéfiques.
Tout ce qui touche la prévention des infections, y compris l’équipement de protection individuel, est une zone de recherche importante. Il y a beaucoup de choses qu’on ne connaît pas encore sur ce virus, et je pense que plus on va apprendre des choses sur la façon de protéger les gens, que ce soit les professionnels de la santé, les patients ou les gens du public, mieux on sera en position de réduire la morbidité de cette maladie au cours des prochaines années. Le développement de vaccins et la mise au point de thérapies spécifiques contre le virus représentent des zones de recherche intéressantes.
Pour ce qui est de la Défense nationale, notre mandat est unique et différent. Ce qu’on doit étudier davantage, c’est de voir comment on peut réussir à fonctionner comme organisation militaire dans un milieu hautement infectieux, comme celui de la COVID-19, et comment on peut continuer de mener des opérations internationales et des entraînements au pays sur nos différentes bases dans un environnement sûr.
Je crois que ce sera là notre objectif de recherche, c’est-à-dire de déterminer comment nous pouvons protéger nos troupes tout en poursuivant nos missions.
Bgén Bourgon : Durant la pandémie, nous avons tiré beaucoup de bonnes leçons du côté des résidences, mais aussi du côté des opérations. Nous travaillons maintenant avec Zoom; c’est quelque chose que nous n’aurions jamais pensé faire avant Noël. Donc, nous n’avons pas eu le choix de nous adapter à cause de la pandémie; je crois que cela a ouvert une boîte de Pandore et que notre manière de fonctionner dans la vie de tous les jours va beaucoup changer.
Cette situation nous a amenés à penser différemment, et nous allons continuer d’aller de l’avant en pensant d’une manière différente.
La sénatrice Forest-Niesing : Merci.
[Traduction]
Le sénateur Kutcher : Je vous remercie des services que vous rendez au pays et de témoigner devant nous aujourd’hui. Je vous sais gré du travail colossal que vous avez accompli en montant au combat alors qu’il fallait si désespérément le faire.
Je crois comprendre que les forces ont été déployées dans des établissements tant publics que privés. Est-ce exact? Est-ce que je comprends bien? Je vous remercie. En ce qui concerne le déploiement dans les établissements privés, recouvrez-vous l’entièreté des coûts des soins de santé que vous y avez prodigués?
Bgén Bourgon : Quand nous répondons à des demandes d’aide, ce sont le ministre de la Défense nationale et notre sous-ministre qui se chargent du recouvrement des coûts. Pour le moment, nous dressons la liste des coûts relatifs aux dépenses, à la main-d’œuvre et à l’équipement, mais la question relève d’instances de loin supérieures à nous. C’est avec le ministre de la Défense nationale et notre sous-ministre qu’il faudra discuter du recouvrement des coûts, de l’aide fédérale et de tout cela. Nous ne nous engagerons pas dans cette discussion.
Le sénateur Kutcher : Pouvons-nous alors demander que le comité obtienne une réponse à cette question pour que nous sachions si nous récupérons l’argent des contribuables utilisé pour les soins de santé privés?
La présidente : Oui, nous le pouvons.
Le sénateur Kutcher : Je vous remercie.
Quelles répercussions les services de soins de santé prodigués dans les établissements de soins de longue durée ont-ils eues sur les besoins en soins de santé du personnel des forces armées? La capacité de fournir des soins de santé aux forces s’en est-elle trouvée amoindrie?
Mgén Bilodeau : La situation a été difficile pour nous, car le nombre de professionnels des soins de santé travaillant au sein des forces armées est évidemment limité. Il a essentiellement fallu que tout le monde mette l’épaule à la roue, si l’on peut dire, afin de venir en aide à un aussi grand nombre d’établissements de soins de longue durée.
Cela s’est toutefois produit à un moment où la société était en grande partie à l’arrêt — comme vous le savez pour avoir certainement été tous victimes de la situation —, à un moment où ce ne sont pas nécessairement les besoins, mais la demande en soins de santé qui diminuait. Le phénomène ne s’est pas limité aux forces armées et s’est observé dans l’ensemble de la société. La demande en soins ambulatoires et en médecine familiale a décru. De nombreux médecins du pays étaient disponibles, mais n’étaient pas occupés parce que les gens ne les consultaient pas, soit parce qu’ils n’étaient pas à l’aise avec l’approche virtuelle, soit parce que les cliniques ne leur étaient pas accessibles en raison du confinement.
De toute évidence, nous n’avons pas observé d’augmentation de la demande, ce qui ne signifie pas que la détresse n’a pas augmenté. Nous nous attendons à ce que la demande augmente maintenant que les mesures sociétales de santé publique ont été assouplies, et nous renforçons nos équipes, notamment dans le domaine des soins de santé. Nous avons des professionnels des soins de santé en poste à 37 endroits au pays afin de fournir des soins primaires et des soins de santé mentale, et nous sommes en train de les équiper afin d’offrir des services virtuels et des services en personne respectant les restrictions de santé publique...
Le sénateur Kutcher : Pardonnez-moi, major-général. C’est bon à entendre, mais il aurait été très difficile de prévoir une diminution de 40 % ou d’un autre pourcentage de la demande. Pourtant, vous avez déployé les Forces armées canadiennes sans savoir que vous pourriez aisément combler la demande des forces armées. C’est ce que je comprends.
J’ai une autre question. Si vous aviez dû intervenir à l’étranger, auriez-vous pu déployer le personnel de soins de santé nécessaire pour le faire?
Bgén Bourgon : Quand on nous a demandé d’aider les établissements de soins de longue durée, nous avons examiné la capacité dont nous disposions en tenant compte des activités que nous devions appuyer à l’étranger et au pays. Nous avons envoyé tout le personnel disponible pour offrir de l’aide dans les établissements. Nous avons couru un léger risque dans notre propre clinique, omettant les contrôles de routine quotidiens. Au bout du compte, toutefois, le gouvernement fédéral a demandé aux Forces armées canadiennes d’aider les citoyens et des Canadiens, et nous avons affecté toutes les ressources nécessaires pour le faire.
Le sénateur Kutcher : Je ne vous critique absolument pas d’avoir agi comme vous avez fait. Je remercie Dieu que vous l’ayez fait. Je craignais simplement que vous ayez pu, par inadvertance, avoir été incapables de combler vos propres besoins pendant que vous répondiez à cette demande et que vos propres troupes aient pu avoir été exposées à un risque si vous aviez eu à les déployer.
Bgén Bourgon : Vous avez raison. Le déploiement de notre personnel médical a eu un prix, car, comme je l’ai souligné au début, nous disposons de ressources limitées dans nos installations médicales, mais nous avons établi nos priorités. Les Canadiens de l’Ontario et les aînés du Québec avaient plus besoin de services que nous; nous les avons donc aidés, au détriment de nos propres services, mais c’est la vie.
Le sénateur Kutcher : Je vous remercie beaucoup de ces précisions.
[Français]
La sénatrice Mégie : Je remercie les témoins. Ma première question fait suite à celle du sénateur Kutcher. Vous avez tiré des leçons de la pandémie. Toutefois, s’il y avait une nouvelle vague, vos militaires seraient-ils mieux préparés à faire face à une autre crise, et auriez-vous suffisamment de personnel?
Bgén Bourgon : On a appris beaucoup de choses sur le plan médical et sur le plan de l’entraînement. Comme je l’ai dit au départ, on n’avait jamais travaillé dans les CHSLD. On a mis au point notre entraînement très rapidement pour permettre à nos soldats et à nos techniciens médicaux d’apporter du soutien le plus rapidement possible. On va toucher du bois pour que la prochaine vague ne se pointe pas, mais l’entraînement est déjà fait. On a aussi appris à faire de la coordination avec l’Ontario et le Québec, avec les différents ministres de la Santé. Les Forces canadiennes n’ont pas beaucoup d’expérience à cet égard. On a appris beaucoup de choses. On commence à travailler avec la Croix-Rouge. C’est une autre organisation avec laquelle on apprend à travailler et à partager. Quant au nombre de soldats, cela dépend toujours des demandes d’assistance. On a environ 100 000 soldats. On a des capacités médicales, mais elles ne sont pas très élevées. C’est une question de priorisation. Le gouvernement fédéral et les provinces devront discuter de la façon dont les Forces armées canadiennes peuvent aider du mieux qu’elles le peuvent, selon les besoins sur le terrain. C’est vraiment la question.
La sénatrice Mégie : Compte tenu de la grande proximité de vos soldats lorsqu’ils sont dans les bâtiments de la marine, comme les bateaux et les sous-marins, comment arrivez-vous à assurer leur bien-être dans ce contexte?
Bgén Bourgon : En ce qui concerne les bateaux, on a mis en isolement les membres de nos équipages pendant 14 jours avant de les envoyer en mer. On pouvait, dès le départ, savoir qui était clean, si je peux m’exprimer ainsi, lorsqu’ils sont partis en mer. Donc, à ce moment-là, ils pouvaient être proches les uns des autres, parce qu’on savait que personne n’était infecté. C’est ce qui a permis de mener les opérations. Nous avions d’autres bateaux en mer depuis longtemps où il n’y avait aucun cas. Après 14 jours, nous étions à peu près certains que personne n’était malade ou contagieux. À ce moment-là, la proximité n’est pas un problème.
La sénatrice Mégie : D’accord. Merci beaucoup.
[Traduction]
La sénatrice Pate : Je remercie nos deux témoins de comparaître. Je remercie également tous les membres des forces armées du travail qu’ils accomplissent. Pour avoir été la gamine de service il y a quelques années et pour être quelqu’un dont la mère réside dans un établissement de soins de longue durée, je vous suis évidemment très reconnaissante.
J’ai lu avec intérêt certains des rapports qui ont été publiés, notamment celui du brigadier-général Milkowski. Il comprend un certain nombre d’exemples de manquements à la prestation de soins adéquats qui semblent attribuables à des économies de coûts, comme le fait de garder sous clé l’équipement nécessaire, comme les lingettes pour les mains et d’autres fournitures d’hygiène, d’avoir des médicaments expirés et d’éprouver des problèmes semblables. Je sais que vous ne voulez pas vous prononcer sur la différence entre les secteurs privé et public, mais il me semble qu’un certain nombre d’exemples indiquent que le problème venait fondamentalement des économies de coûts.
Je m’interroge au sujet de deux choses. Premièrement, quels sont les profils démographiques que vous avez observés chez les patients et aussi chez les employés des établissements de soins de longue durée, si vous avez eu beaucoup d’interaction avec ces derniers? Nous avons notamment entendu parler du nombre de femmes, de personnes racialisées et de gagne-petit. De plus, compte tenu de vos observations et de vos expériences, quelles normes nationales recommanderiez-vous de mettre en place afin d’améliorer les soins prodigués dans l’avenir aux aînés et aux personnes handicapées qui résident dans les établissements de longue durée?
Mgén Bilodeau : Je n’ai évidemment pas les profils démographiques précis des résidants des établissements de soins de longue durée, mais je sais que la plupart d’entre eux sont âgés. Cela n’a rien d’étonnant, mais ils ont aussi de nombreuses comorbidités qui les rendent vulnérables à la COVID, laquelle peut les rendre très malades, voire entraîner leur décès. Je ne connais pas exactement le statut du personnel des établissements de soins de longue durée non plus; je ne peux donc pas traiter précisément de la question.
Pour ce qui est des recommandations, les deux provinces ont certainement tiré de nombreuses leçons de la crise, des leçons qu’elles mettront en application dans les prochains mois. Comme je l’ai fait remarquer précédemment, d’après les échanges que j’ai eus avec les deux gouvernements provinciaux, je pense qu’ils connaissent les problèmes et qu’ils ont un plan pour les corriger.
La sénatrice Pate : Auriez-vous des normes nationales à recommander afin de prévenir certaines des situations que vous avez observées et que votre personnel a affrontées directement?
Mgén Bilodeau : Il existe déjà des normes nationales et internationales en matière de soins de santé, notamment dans les établissements de soins de longue durée. La plupart des provinces ont leurs propres normes également. Je pense donc qu’il existe des normes.
La sénatrice Pate : Certaines personnes ont parlé des normes de l’Australie par rapport à celles de l’Ontario et du Québec, par exemple. Si vous n’avez pas de renseignements précis, c’est correct, mais si vous en avez, ce serait formidable.
La sénatrice Omidvar : Je remercie tous nos témoins de tout ce qu’ils font pour notre pays, particulièrement en ces temps de crise. Je pense que vous bénéficiez de la gratitude et de la reconnaissance de tous les Canadiens.
Ma question concerne ce que nous avons entendu au sujet de l’avenir. Nous savons qu’il y aura d’autres pandémies, une deuxième ou une troisième vague de la COVID ou peut-être un autre virus. Afin de se préparer pour l’avenir, je me demande si vous pourriez traiter de votre propre capacité en ce qui concerne les professionnels de la santé des Forces armées canadiennes et nous dire si vous recommanderiez d’accroître le nombre de ces professionnels pour nous aider à affronter l’avenir.
Mgén Bilodeau : La nécessité d’accroître le nombre de professionnels de la santé au sein des Forces armées canadiennes avait déjà été observée bien avant la pandémie. Le problème n’a donc rien de nouveau. Nous sommes en recrutement depuis bien des années. L’ennui, c’est que nous faisons concurrence au réseau civil de soins de santé. Nous puisons dans le même bassin de candidats, et les besoins sont aussi, voire plus élevés dans le secteur civil que dans les Forces armées canadiennes, comme l’a fort bien démontré la pandémie, selon moi. Nous devons tenter de trouver un délicat équilibre en engageant suffisamment de personnes dans les forces tout en disposant d’un nombre suffisant de professionnels des soins de santé. Il est question ici de médecins, de personnel infirmier, de physiothérapeutes, de spécialistes de la santé mentale, ainsi que de radiologistes, de techniciens de laboratoire et de l’éventail entier de professionnels. Il y a aussi les spécialistes et le personnel infirmier dans les hôpitaux, bien entendu. C’est un défi. Nous devons établir un juste équilibre, mais nous savons certainement que nous devons augmenter l’effectif des forces armées et nous avons certainement un plan en ce sens pour mieux nous équiper en vue des prochaines missions que nous confiera le gouvernement.
De toute évidence, nous devons aussi augmenter nos réserves d’équipement de protection individuelle. Nous avons constaté que les réserves actuelles sont insuffisantes et nous sommes en train de les augmenter. Nous avons commencé à le faire il y a quelques mois et nous poursuivrons nos efforts dans les prochains mois. Nous avons lancé plusieurs processus d’approvisionnement avec le soutien de l’Agence de la santé publique du Canada afin de disposer d’équipement en quantité suffisante pour affronter une autre vague ou d’autre virus ou bactéries qui pourraient nous menacer dans l’avenir.
La sénatrice Omidvar : Pendant que vos membres travaillaient dans les établissements de soins de longue durée, vous avez dû beaucoup agir en interaction avec les préposés aux soins de santé semi-professionnels. Lors de l’audition de groupes de témoins et de témoignages précédents, quelqu’un a recommandé de réglementer les activités du personnel de soutien qui fournit des soins quotidiens à de nombreux aînés. L’absence de normes a des répercussions sur le genre de soins qui sont prodigués. Auriez-vous quelque chose à dire à propos de cette recommandation?
Mgén Bilodeau : Tout ce que je puis dire d’un point de vue générique, c’est que si un aussi grand nombre de professions du domaine des soins de santé sont réglementées, c’est parce que nous savons qu’au final, cela améliore la qualité des soins offerts et permet de mieux contrôler la qualité des soins et l’identité de ceux et celles qui peuvent poser certains gestes dans certaines circonstances.
La sénatrice Omidvar : Je m’intéresse au rôle des réservistes et des Rangers dans le cadre de cette mission. J’ignore si vous l’avez déjà précisé, et si cela m’a échappé, j’en suis désolée, mais je me demande s’ils ont également été déployés. Si c’est le cas, en quoi consistaient leurs tâches? Qu’avez-vous observé et que recommanderiez-vous à leur sujet en cas de pandémies futures?
Bgén Bourgon : Quand nous examinons les Forces armées canadiennes, nous les voyons comme un concept global. Dès le départ, alors que nous nous préparions pour la pandémie, nous avons cherché à optimiser le nombre de soldats, de membres des forces aériennes et de matelots que nous aurions à notre disposition pour aider les Canadiens. Nous avons tenté de recruter des membres et de réengager la majorité des réservistes afin d’optimiser le nombre de membres des Forces armées canadiennes disponibles.
Nous avions engagé environ 7 000 réservistes pour l’été, et un bon nombre d’entre eux travaillent actuellement dans les établissements. Ils ont reçu une formation et sont à l’œuvre dans les établissements; ils sont donc entièrement qualifiés. Nous leur avons offert de la formation, et ils participent maintenant à toutes nos activités. Nous ne faisons pas de distinction entre les Forces régulières et les réservistes, considérant les forces comme un concept global.
Les Rangers apportent une capacité unique dans le Nord, car ils sont membres des diverses communautés. La situation est la même pour eux. Nous signons autant de contrats que nous le pouvons avec eux pour qu’ils offrent du soutien dans les communautés du Nord. Certains d’entre eux ont été déployés dans les Territoires du Nord-Ouest, aidant les communautés en accomplissant des tâches relatives à la COVID, en distribuant des denrées alimentaires et en prenant soin des leurs, car ils font partie de la communauté. Il en va de même au Québec, dans la région de la Basse-Côte-Nord, et au Nunavut. Environ 200 Rangers ont fourni du soutien dans leurs communautés.
Ici encore, nous avons fait appel à leur aide en fonction des besoins des territoires et des provinces, et ils ont accompli un travail extraordinaire. Ils comprennent réellement leurs communautés et ce sont des joyaux.
La sénatrice Omidvar : Je vous remercie. C’était très intéressant.
[Français]
La présidente : Merci beaucoup. Il nous reste un peu de temps avec vous et je crois que toutes nos questions les plus pertinentes ont déjà été posées.
J’ai une dernière question qui est davantage une question de curiosité. J’aimerais en savoir plus sur votre expérience, parce qu’on a vu énormément d’images des membres de nos Forces armées canadiennes qui étaient présents pour nos aînés. Je voudrais vous entendre sur l’accueil que vous avez reçu et sur la façon dont les gens ont apprécié votre travail, et ce, en ayant à l’esprit que, pour la population d’ici, ce n’est pas courant de travailler avec les Forces armées canadiennes. J’ai donc envie d’en entendre un peu plus, si vous avez quelque chose à partager avec nous à ce sujet.
Mgén Bilodeau : En fait, je peux partager avec vous quelques petites anecdotes qu’on nous a transmises.
D’entrée de jeu, lorsque nos premières équipes sont arrivées dans les CHSLD au Québec, certains se sont fait accueillir non seulement à bras ouverts, mais aussi avec des pleurs de la part du personnel qui était déjà sur place. Cela montre dans quel état de souffrance et de détresse se trouvaient ces personnes. Je pense que cela illustre aussi les besoins que nous avons comblés en nous présentant dans ces résidences.
L’autre chose qui a été remarquable, à mon avis, c’est que, chaque fois que nous avons terminé une mission dans un CHSLD ou dans un centre de soins de longue durée en Ontario, on a toujours tenu une cérémonie. Cela fait partie de nos traditions; les militaires aiment tenir des cérémonies pour souligner les débuts et les fins. À chacune de ces cérémonies, nous invitions le personnel civil. Ces cérémonies étaient très émouvantes et on y a vu beaucoup de pleurs, pas des embrassades, évidemment, parce que les règles de la santé publique sont claires à cet effet. Nous avons vu beaucoup de reconnaissance de la part du personnel civil.
Des liens forts se sont créés entre notre personnel et le personnel civil de ces établissements, mais également entre les résidants et notre personnel. Certains de ces résidants avaient seulement besoin de parler, d’être soutenus ou de se faire prendre la main, et nos employés étaient là pour eux.
La présidente : Merci beaucoup d’avoir partagé votre expérience avec nous. C’est tout le temps que nous avions pour vous entendre à ce sujet. Nous vous remercions de vos réponses. Je crois que vous avez été nos témoins les plus efficaces, tant en ce qui a trait à la rapidité qu’à la précision, et nous vous en sommes très reconnaissants.
[Traduction]
Je vous remercie de nouveau de votre participation. Vous nous avez énormément aidés dans le cadre de notre étude, et nous vous en savons gré.
Distingués sénateurs, distinguées sénatrices, avant de déclarer le huis clos, je voudrais prendre un instant pour formuler les observations suivantes en votre nom, puisqu’il s’agit de notre dernière séance publique avant la pause estivale.
Je veux profiter de l’occasion pour remercier publiquement le personnel technique, les interprètes, les sténographes et les employés de la Direction des comités de l’aide qu’ils nous ont apportée en permettant la tenue virtuelle de nos séances. La période a été difficile pour tous, individuellement et collectivement, et de grands changements se sont produits en peu de temps. Notre équipe nous a permis de poursuivre le travail du comité. Nous vous remercions de cet effort.
Je souhaite également remercier les membres du Sous-comité du programme et de la procédure, soit les sénatrices Poirier et Griffin, de leur dévouement et du temps qu’elles ont investi au cours des dernières semaines, ici encore dans des circonstances auxquelles nous ne sommes pas habitués, travaillant à distance, communiquant par téléphone, œuvrant ensemble au sein du Comité de direction pour planifier nos séances. Nous vous remercions beaucoup de ce travail.
Enfin, je tiens, bien entendu, à remercier tous les membres du comité du temps qu’ils ont accordé, de leur dévouement, de leur patience et de leur compréhension. La tenue de séances virtuelles a été pour nous tous une nouvelle aventure, et l’équipement a parfois posé des problèmes, mais votre aide a été très précieuse.
J’ai une demande spéciale de notre greffier, Daniel Charbonneau, qui vous remercie d’avoir fourni les questions du jour avant la séance. Il vous en est fort reconnaissant. Je veux remercier M. Charbonneau de l’aide qu’il nous a tous apportée, à vous et à moi à titre de présidente. Nous avons fort bien travaillé et je suis très fière de ce que nous avons accompli malgré les nombreuses embûches.
Plaît-il aux distingués sénateurs et aux distinguées sénatrices de se réunir maintenant à huis clos pour discuter de l’ébauche de rapport? Que tous ceux qui sont d’accord lèvent la main et la laissent en l’air pendant 10 secondes. Baissez la main. Qui est contre cette proposition? Qui s’abstient? La proposition est acceptée.
Je vous demanderai d’attendre que le greffier nous signale que la séance est maintenant à huis clos. Merci.
(La séance se poursuit à huis clos.)