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Débats du Sénat (Hansard)

Débats du Sénat (hansard)

2e Session, 35e Législature,
Volume 135, Numéro 43

Le mercredi 23 octobre 1996
L'honorable Gerald R. Ottenheimer, Président pro tempore


LE SÉNAT

Le mercredi 23 octobre 1996

La séance est ouverte à 13 h 30, le Président pro tempore étant au fauteuil.

Prière.

DÉCLARATION D'UN SÉNATEUR

La Commission mixte internationale

La démission de la commissaire canadienne

L'honorable Mira Spivak: Honorables sénateurs, la présidente canadienne de la Commission mixte internationale, a démissionné le mois dernier. La CMI a perdu en même temps le directeur exécutif de sa section canadienne. Avant d'être nommée au poste de présidente canadienne, Adele Hurley était une militante respectée et efficace en faveur de l'assainissement de l'air dans les deux pays. Pourquoi a-t-elle démissionné? Les faits sont éloquents.

Mme Hurley et les cinq autres commissaires de la CMI savaient en avril dernier que le Conseil consultatif international sur la qualité de l'atmosphère avait rapporté que la qualité de l'air dans le sud de l'Ontario allait probablement se détériorer à cause des plans formulés dans les États du Midwest américain en vue d'augmenter la production des centrales à charbon. Ils savaient que les experts du conseil - des scientifiques et des chercheurs en médecine des deux pays - avaient signalé que la Federal Regulatory Commission des États-Unis avait négligé de prendre en considération l'impact que les émissions accrues de soufre, d'oxydes d'azote et de mercure auraient outre-frontière. Les commissaires savaient également que le gouvernement canadien ne s'occupait pas du problème. Le conseil consultatif avait signalé ceci dans son rapport:

... bien qu'au courant de ces faits, le gouvernement du Canada n'a pas réagi jusqu'à présent.

Les commissaires savaient qu'ils avaient le pouvoir de remédier à la situation. Il leur suffisait d'adresser aux deux gouvernements un message accompagné du rapport des experts pour que l'agence américaine de protection de l'environnement passe à l'action.

Or, les commissaires américains ne voulaient pas exercer leur pouvoir avant les élections américaines. Chose incroyable, un des commissaires canadiens, M. Francis Murphy, s'est dit d'accord avec eux et le rapport a donc été supprimé.

Seule Mme Hurley a refusé de revenir en arrière, de laisser perdre des années de progrès dans la lutte contre les pluies acides; elle seule a refusé de convenir que les votes étaient plus importants que des vies humaines. Il a fallu sa démission et le retentissement qu'elle a suscité pour faire honte aux autres commissaires et les amener à faire ce qui s'imposait, c'est-à-dire transmettre le rapport des experts aux gouvernements.

Le premier ministre avait été informé au préalable de la démission de Mme Hurley, mais il n'a rien fait au sujet de M. Murphy, lui donnant ainsi un appui tacite. Le premier ministre a maintenant l'occasion de changer d'avis. Il peut et devrait annuler la nomination du commissaire canadien qui n'a pas su agir dans les intérêts supérieurs des Canadiens et de la commission. Pour rétablir l'intégrité de l'organisme, le premier ministre devrait veiller à ce qu'on trouve rapidement un nouveau président canadien, quelqu'un qui possède une réputation en matière de défense de l'environnement aussi forte et aussi parfaite que celle de Mme Hurley.

 


AFFAIRES COURANTES

AFFAIRES ÉTRANGÈRES

Autorisation au comité de siéger
en même temps que le Sénat

L'honorable John B. Stewart, président du comité sénatorial permanent des affaires étrangères, avec la permission du Sénat et nonobstant l'alinéa 58(1)a), propose:

Que le comité sénatorial permanent des affaires étrangères soit autorisé à siéger à 15 h 30 aujourd'hui, le mercredi 23 octobre 1996, même si le Sénat siège à ce moment-là, et que l'application du paragraphe 95(4) du Règlement soit suspendue à cet égard.

Son Honneur le Président pro tempore: Permission accordée, honorables sénateurs?

Des voix: D'accord.

(La motion est adoptée.)

 


PÉRIODE DES QUESTIONS

La Société de développement du Cap-Breton

Le rétablissement du comité spécial-
La position du gouvernement

L'honorable J. Michael Forrestall: Honorables sénateurs, je devrais peut-être poser ma question au sénateur Rompkey, mais, par respect pour le protocole, je vais l'adresser au leader du gouvernement au Sénat.

Un comité spécial que le sénateur Rompkey a fort bien présidé a publié un rapport sur la Société de développement du Cap-Breton. La ministre se souviendra que le comité spécial a notamment recommandé dans son rapport déposé en juin dernier que le comité spécial soit remis sur pied à l'automne pour poursuivre son étude et voir comment les choses progressent à la société. Nos collègues, les sénateurs Buchanan, Murray et MacDonald ainsi que d'autres sénateurs qui ont siégé au comité gardent un réel intérêt pour les résultats obtenus.

Le chef de mon parti en Nouvelle-Écosse, M. John Hamm, et M. Alfie MacLeod, collègue à lui qui a comparu devant le comité, ont écrit au sénateur Rompkey pour lui demander si le comité serait remis sur pied. Madame la ministre peut-elle nous éclairer ou, peut-être, demander au président du comité de le faire?

 

  • (1340)
L'honorable Joyce Fairbairn (leader du gouvernement): Certainement, honorables sénateurs. La question est à l'étude. Le leader adjoint et les sénateurs Rompkey et Murray en ont discuté, et les discussions se poursuivront.

[Français]

 

La taxe sur les produits et services

L'harmonisation avec les taxes de vente provinciales-Les ententes avec les provinces
de l'Atlantique-La ventilation des dépenses
publiques-La position du gouvernement

L'honorable Roch Bolduc: Honorables sénateurs, dans son rapport financier annuel, le vérificateur général, M. Desautels, affirme que le gouvernement a fait une entorse à ses règles en incluant un paiement de 961 millions de dollars à trois provinces maritimes, au titre de l'harmonisation de la TPS dans le déficit de l'exercice budgétaire s'étant terminé le 31 mars 1996. Or les ententes avec ces provinces, à l'exception de Terre-Neuve, n'ont pas encore été signées.

Pourriez-vous m'expliquer en vertu de quelle manipulation des finances publiques le ministre a réussi à faire cela?

[Traduction]

L'honorable Joyce Fairbairn (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, en ce qui concerne les accords d'harmonisation dont parle l'honorable sénateur, j'ai un peu les mains liées, car le ministre des Finances fera une déclaration à ce sujet à la Chambre des communes un peu plus tard aujourd'hui. Tant qu'il ne l'aura pas faite, je ne peux faire de commentaires. De toute façon, la décision a été prise et il en discutera plus tard aujourd'hui.

Pour répondre à la question sur l'engagement figurant aux comptes publics, je signale que nous avons abordé la question au moment où le gouvernement fédéral a pris cet engagement envers les trois provinces de l'Atlantique qui participent au programme d'harmonisation. À l'époque, le ministre jugeait, et il le croit encore aujourd'hui, que le gouvernement fédéral avait l'obligation de prendre cet engagement financier au moment même où l'accord a été conclu avec les parties. Voilà pourquoi le montant de l'indemnité a été inscrit au budget de 1995-1996.

[Français]

Le sénateur Bolduc: Mais comment pouvez-vous expliquer que le ministre donne un biscuit d'un milliard de dollars et ajoute qu'il va signer une entente? Est-ce que cela ne vous intrigue pas? Le Parlement n'est pas encore saisi de la question et le ministre a déjà envoyé l'argent. Qu'est-ce que cela signifie? Je suis convaincu que le sénateur Stewart n'aimerait pas être dans votre peau pour répondre à cette question.

[Traduction]

Le sénateur Fairbairn: Honorables sénateurs, il ne s'agissait pas simplement de distribuer une somme d'argent. Il s'agissait plutôt d'un engagement exécutoire que le gouvernement fédéral a pris envers trois gouvernements provinciaux. Le gouvernement fédéral a jugé qu'il avait l'obligation d'inscrire clairement cette somme dans son budget. L'entente était exécutoire, tout comme l'engagement qu'il avait pris. Les ententes ont été signées. Il est vrai que le vérificateur général a même fait des commentaires à leur sujet. Le gouvernement fédéral croit fermement qu'il avait l'obligation, à l'époque, d'inscrire cette somme dans son budget. C'est ce qu'il a fait d'ailleurs, et il a respecté l'engagement qu'il avait pris.

[Français]

Le sénateur Bolduc: Honorables sénateurs, est-ce que le leader du gouvernement au Sénat considère qu'une entente entre des provinces fait partie de ce que l'on appellerait la prérogative royale, au même titre qu'un traité entre deux pays? Il s'agit ici d'une entente à l'intérieur du Canada. Par conséquent, elle doit être soumise à l'autorisation préalable du Parlement, particulièrement en matière de finances publiques.

[Traduction]

Le sénateur Fairbairn: Honorables sénateurs, oui, il est clair qu'il s'agissait d'une importante entente à l'intérieur du Canada. L'indemnité à verser représentait un aspect important de l'entente conclue. Elle a été inscrite au budget et bien précisée. Nous nous apprêtons aujourd'hui à confirmer officiellement cet accord.

Le gouvernement a jugé qu'il était important qu'il soit tenu responsable des répercussions financières de ses décisions dans l'année même où l'engagement a été pris. Voilà pourquoi il a inscrit cette somme au budget.

 

L'harmonisation avec les taxes de vente provinciales-
Le refus de supprimer la taxe sur les imprimés-
La position du leader du gouvernement

L'honorable Lowell Murray: Honorables sénateurs, à propos d'engagements exécutoires, j'ai une question à poser au leader du gouvernement au Sénat.

L'autre jour, à l'instar de tous les autres sénateurs, je suppose, j'ai reçu une invitation à une réception en faveur de l'alphabétisation à Rideau Hall, où Son Excellence le Gouverneur général et le sénateur Fairbairn, en tant que ministre responsable de l'alphabétisation, seront les têtes d'affiche.

Comment la ministre peut-elle se montrer à une telle cérémonie alors que le gouvernement n'a pas tenu sa promesse de supprimer la TPS sur les imprimés?

L'honorable Joyce Fairbairn (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, cela m'encourage de voir que mon collègue me considère comme une tête d'affiche. Je l'en remercie.

Comme je l'ai déjà dit maintes fois ici, mon espoir le plus vif à ce sujet doit être évident pour mon collègue et pour quiconque a lu mes discours.

Nous nous sommes battus sur la question de la TPS. Nos efforts ont porté fruit dans trois provinces du pays et nous espérons que ce succès s'étendra à tout le Canada.

Ce que je ne peux pas faire aujourd'hui, c'est parler à mon collègue des observations que le ministre des Finances fera dans la déclaration qu'il va présenter plus tard aujourd'hui. Elles ne seront peut-être pas satisfaisantes pour mon collègue, mais elles constituent certes un pas en avant.

Le sénateur Murray: Honorables sénateurs, cela ne me satisfera pas, parce que je crois savoir quel est le plan à l'égard de la TPS dans les trois provinces de l'Est.

Ce dont il est question, en l'occurrence, c'est d'une taxe fédérale appliquée d'un océan à l'autre. Mon honorable collègue coprésidait la campagne du Parti libéral en 1993. Aucun ministre - aucun - n'est associé plus étroitement que mon honorable collègue à l'engagement de soustraire les imprimés à l'application de la TPS. Par-dessus le marché, c'est elle la ministre responsable de l'alphabétisation.

Il y a peu de chances que M. Martin honore cet engagement puisqu'il a déjà écarté cette idée pour des raisons que je comprends et que j'ai moi-même invoquées lorsque j'étais de ce côté-là. Madame la ministre n'arrive-t-elle pas à la conclusion que sa démission du Cabinet, pour une question de principe, serait indiquée en l'occurrence?

 

  • (1350)
Des voix: Bravo!

Le sénateur Stewart: Voyez l'explication dans le livre rouge!

Le sénateur Fairbairn: Je respecte certainement la rigueur de l'argumentation du sénateur. Cependant, il parle d'un engagement dans le livre rouge alors qu'il sait pertinemment que le livre rouge ne contient aucun engagement en ce sens. Je reconnais qu'à maintes reprises dans le passé, lorsque j'étais de l'autre côté du Sénat, j'ai certainement souhaité ardemment voir le résultat que mon honorable collègue a...

Le sénateur Murray: Supprimer la TPS. Dites-le. N'ayez pas peur des mots.

Le sénateur Fairbairn: C'est exactement ce que nous avons fait valoir à mon honorable collègue lorsqu'il se tenait à l'époque là où je suis.

Mon honorable collègue est parfaitement au courant de la complexité de cette taxe qui a été instituée par son gouvernement et qui s'applique d'un océan à l'autre, ainsi que de la volonté du gouvernement de modifier cette taxe, en commençant dans les trois provinces du Canada atlantique.

Pour ce qui est de l'alphabétisation, je puis dire à mon honorable collègue que ce serait certainement la prérogative du premier ministre de prendre une décision comme celle dont il a parlé. Personnellement, j'ai lutté fermement pour faire progresser ce dossier. Nous avons réussi en partie. Pour la croissance économique de notre pays, il est très important que nous épaulions le mieux possible les programmes d'alphabétisation et d'apprentissage, en partenariat avec les provinces, les organismes et les groupes sur le terrain.

Le ministre des Finances est aussi un défenseur de l'alphabétisation. Je ne puis anticiper sur la déclaration qu'il pourrait faire aujourd'hui. Ce n'est peut-être pas la réponse que mon honorable collègue souhaiterait, mais des progrès considérables sont accomplis et continueront de l'être. Le ministre des Finances et moi-même y travaillerons au fil des mois.

Le sénateur Murray: Je ne prendrai pas davantage de temps, sauf pour demander à madame la ministre s'il n'est pas vrai que la suppression de la TPS sur les imprimés n'exige pas l'accord des provinces ni une application progressive. Il suffit que le ministre des Finances et le Cabinet décident de supprimer la TPS sur les imprimés.

Le sénateur Fairbairn: Je ne conteste pas ce que dit mon honorable collègue. Le ministre des Finances a toutefois une énorme responsabilité envers chaque région du Canada. Il travaille très fort pour que les finances de notre pays soient dans un état où elles n'ont pas été depuis très longtemps. Nos promesses concernant le déficit ne sont pas des promesses en l'air. Nous avons toujours atteint, voire dépassé, nos objectifs année après année. Lorsque le ministre des Finances s'occupe de l'avenir de notre pays, lui et moi sommes partenaires.

Le sénateur Murray: Oui, oui.

Le sénateur Fairbairn: Vous le savez très bien, sénateur Murray, c'était comme cela pour vous aussi. Nous travaillons d'arrache-pied pour atteindre nos objectifs, mais pas nécessairement en adoptant la solution que mon honorable collègue souhaiterait m'entendre annoncer aujourd'hui.

 

L'harmonisation avec les taxes de vente provinciales-
La position du leader du gouvernement

L'honorable John Lynch-Staunton (chef de l'opposition): J'ai une question complémentaire à poser. Nous avons tous entendu le vibrant plaidoyer que madame le leader du gouvernement a fait dans le passé au Sénat, et qu'elle fait semble-t-il encore maintenant, pour faire exempter les imprimés de la TPS. Puis-je rappeler à la ministre qu'elle aura l'occasion de confirmer ce plaidoyer en appuyant le projet de loi du sénateur Di Nino, dont le Sénat est actuellement saisi. S'il est adopté, ce projet de loi confirmera que les deux partis sont d'avis que les imprimés devraient être exemptés de la TPS.

Madame le leader du gouvernement est-elle prête à appuyer ce projet de loi, confirmant ainsi son plaidoyer au moyen d'un vote que le gouvernement ne pourra pas méconnaître?

L'honorable Joyce Fairbairn (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, je n'ai pas fait de vibrant plaidoyer; je n'ai fait que citer de simples faits concernant le lien entre la croissance et le progrès économiques du pays, d'une part, et l'alphabétisation et d'autres importantes questions sociales, d'autre part. L'alphabétisation est effectivement un enjeu économique très important au Canada.

Le sénateur Lynch-Staunton: Oui.

Le sénateur Kinsella: Oui ou non?

Le sénateur Fairbairn: Comme je l'ai dit au sénateur Murray, j'ai collaboré activement avec le ministre des Finances dans ce dossier. Je comprends que le sénateur soit un partisan et un promoteur inconditionnel du projet de loi du sénateur Di Nino. Il s'agit d'un projet de loi d'initiative parlementaire, et quand vient le temps de prendre une décision ou de débattre d'une question au Sénat, chaque sénateur doit assumer ses responsabilités; j'assumerai donc les miennes.

Le sénateur Lynch-Staunton: La réponse est donc que le leader du gouvernement ne l'appuiera pas, n'est-ce pas?

 

L'environnement

Les usines de fabrication de particules orientées au Manitoba et en Saskatchewan - Les motifs de la décision du ministre fédéral - Demande de précisions

L'honorable Mira Spivak: Honorables sénateurs, récemment, le ministre de l'Environnement a décidé de ne pas soumettre à un examen fédéral les projets de fabrication de panneaux de particules orientées le long de la frontière entre le Manitoba et la Saskatchewan. Il se fiera à ce que beaucoup considèrent comme une évaluation inadéquate, faite par le gouvernement du Manitoba, d'un plan de la société Louisiana-Pacific en vue de récolter du bois pour le plus important projet du genre dans le monde. Le ministre a donc choisi d'attendre pour voir si la compagnie fournira un jour de bonnes données de base pour déterminer l'impact de ses activités, d'attendre pour voir si on tiendra compte des préoccupations des autochtones, d'attendre pour voir ce qui arrivera aux oiseaux migrateurs, et ainsi de suite.

En informant le ministre de l'Environnement du Manitoba de sa décision, le ministre fédéral a admis qu'il espérait que, à l'avenir:

...les gouvernements et la compagnie seront capables de déterminer les véritables effets du plan de gestion forestière de la Louisiana-Pacific sur l'écosystème et de les atténuer au besoin.

Le ministre n'a pas jugé bon d'exiger un examen, et sa décision est probablement fondée sur des motifs juridiques, mais on se demande si une proposition pouvant être si dommageable et pouvant avoir des ramifications à l'échelle internationale ne justifie pas un examen fédéral.

Madame le leader du gouvernement au Sénat pourrait-elle nous dire, maintenant si elle a le renseignement ou plus tard si elle ne l'a pas, quel conseil le ministère de la Justice ou quelque autre instance a donné au ministre de l'Environnement pour qu'il en arrive à cette conclusion?

L'honorable Joyce Fairbairn (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, ma collègue soulève une question importante. Toutefois, je ne peux pas y répondre aujourd'hui. Je dois vérifier auprès de mon collègue, le ministre de l'Environnement, pour connaître le fondement de sa décision et aussi auprès de mon collègue, le ministre de la Justice, pour voir dans quelle mesure ces renseignements peuvent être rendus publics.

 

Les relations Canada-États-Unis

Le projet de loi d'initiative parlementaire
faisant réplique à la loi Helms-Burton -
La position du gouvernement

L'honorable A. Raynell Andreychuk: Honorables sénateurs, le leader du gouvernement au Sénat est certainement au courant du projet de loi Godfrey-Milliken, qui a été présenté à la Chambre des communes. Je tiens à dire que le projet de loi Godfrey-Milliken est certainement le meilleur outil de négociation et de persuasion internationale conforme aux règles du droit et, à mon avis, la meilleure réplique à la loi Helms-Burton.

Si je me souviens bien, la première réaction du gouvernement a été d'exprimer ses inquiétudes concernant les conséquences de la loi Helms-Burton sur le régime à Cuba. Cependant, nous aurions plutôt dû nous concentrer sur notre droit de souveraineté et éviter de nous lancer dans un débat sur la légitimité du régime et l'état des droits de la personne à Cuba.

Dans ce contexte, la ministre peut-elle me dire si le gouvernement appuiera le projet de loi Godfrey-Milliken? Avons-nous l'assurance que cette voie de négociation internationale sera suivie et que le Canada ne changera pas sa position concernant le respect des droits?

L'honorable Joyce Fairbairn (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, il m'est impossible de donner une réponse à mon vis-à-vis à ce moment-ci.

 

  • (1400)
Ces derniers mois, le gouvernement s'est uni à différents pays alliés pour faire opposition à divers éléments de la loi Helms-Burton. À un moment donné, nous avons même amené le président des États-Unis à indiquer qu'il voulait reconsidérer une des dispositions de cette loi.

Le gouvernement du Canada reste déterminé à contester cette loi ici-même au Canada et chez ses alliés. Le projet de loi présenté par deux députés de la Chambre des communes est une mesure importante. Cependant, il m'est pour l'instant impossible d'exprimer le point de vue du gouvernement sur la question.

Le sénateur Andreychuk: J'ai une question complémentaire. Je crois que la présentation de ce projet de loi constitue une bonne stratégie de négociation internationale. Je félicite les deux députés, MM. Godfrey et Milliken, qui l'ont présenté. Cependant, le gouvernement a-t-il pensé aux emplois qu'il serait possible de créer au Canada aujourd'hui, puisque la création d'emplois est sa première priorité?

Il est évident que les avocats et les comptables auraient plus de travail. Je présume qu'il y aurait aussi d'autres honoraires conditionnels connexes. Je ne peux pas voir d'autre secteur où le potentiel de croissance soit plus élevé.

Le sénateur Fairbairn: Dès que je recevrai le hansard de demain, je transmettrai le point de vue de l'honorable sénateur aux ministres compétents et à messieurs Milliken et Godfrey.

 

L'ENVIRONNEMENT

Le niveau de pollution par le manganèse à Hamilton, en Ontario-La position du gouvernement

L'honorable Noël A. Kinsella: Honorables sénateurs, certains de nos collègues entament leurs recherches concernant un projet de loi qui nous parviendra prochainement de l'autre endroit. Cette mesure traite en partie de la pollution par le manganèse.

La Direction des mesures de la pollution à Environnement Canada est le service chargé de surveiller les niveaux de pollution à la grandeur du Canada. Les niveaux de manganèse dans l'atmosphère présentent un intérêt considérable pour les parlementaires puisque la réduction de cette forme de pollution qui affecte les Canadiens d'un océan à l'autre est l'un des objectifs avoués du gouvernement.

Dans mon étude préliminaire de la question, je n'ai pas pu vérifier les concentrations de manganèse présents à Hamilton, en Ontario, lieu de résidence de l'ancienne ministre de l'Environnement.

Il convient de souligner que Hamilton est la seule grande ville canadienne à ne pas avoir fait connaître ses taux de pollution récemment. Les données disponibles les plus récentes indiquent que Hamilton avait le plus haut taux de concentration de manganèse au Canada.

Madame le leader peut-elle s'informer pour nous des raisons pour lesquelles les données concernant les niveaux de pollution à Hamilton ne sont pas à jour et ne sont même pas disponibles?

L'honorable Joyce Fairbairn (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, je serai heureuse de m'en informer.

Le sénateur Kinsella: J'ai une question complémentaire. Si le manganèse pose un problème tel que le gouvernement a jugé nécessaire de déposer le projet de loi C-29, pouvons-nous nous attendre à ce qu'il dépose prochainement un projet de loi visant à interdire la production d'acier par Dofasco et Stelco à Hamilton?

Le sénateur Fairbairn: Je ne ferais pas de conjectures à ce sujet, honorables sénateurs.

 

RÉPONSES DIFFÉRÉES À DES QUESTIONS ORALES

L'honorable B. Alasdair Graham (leader adjoint du gouvernement): Honorables sénateurs, j'ai la réponse à une question que l'honorable sénateur Finlay MacDonald a posée le 24 septembre 1996 à l'occasion d'une déclaration de l'honorable sénateur Erminie J. Cohen au sujet du Forum Canada-États-Unis sur la santé des femmes, ainsi que la réponse à une question que l'honorable sénateur Noël Kinsella a posée le 21 octobre 1996 au sujet du décret visant madame le juge Arbour.

 

FORUM CANADA-ÉTATS-UNIS
SUR LA SANTÉ DES FEMMES

La première conférence Canada-États-Unis-
L'exclusion de sénateurs progressistes-conservateurs-
La position du gouvernement

(Réponse à la question posée par l'honorable Finlay MacDonald et à la déclaration de l'honorable Erminie J. Cohen le 24 septembre 1996)

Le Forum Canada-États-Unis sur la santé des femmes devait d'abord avoir lieu du 18 au 20 mars 1996, selon une annonce faite le 12 novembre 1995. Toutefois, le 19 février 1996, un communiqué a été diffusé pour annoncer que le Forum se tiendrait plutôt du 8 au 10 août 1996. Des copies des communiqués sont disponibles aux fins de consultation.

Le Forum a été organisé pour réunir des représentants de plusieurs groupes ou secteurs: des professionnels, des chercheurs et des universitaires du domaine de la santé; des décideurs des gouvernements fédéral et provinciaux; des organisations non gouvernementales, notamment des organisations féminines, et enfin des citoyens engagés. Tous les délégués devaient avoir des connaissances spécialisées dans le domaine de la santé des femmes.

La tenue du Forum n'était pas un secret. Pour inviter les gens à proposer des participants, on a diffusé des communiqués et des formulaires de mise en candidature à grande échelle. On s'est aussi servi du site Web du Forum et du bouche-à-oreille.

Comme le Forum était une conférence de travail articulée autour de 13 thèmes d'atelier, l'expertise des personnes proposées comme participants devait cadrer avec les 13 thèmes en question.

Santé Canada a reçu plus de 400 mises en candidature et de nombreuses demandes de renseignements sur la participation au Forum. Les 150 personnes sélectionnées représentaient des femmes et des hommes de tous les âges et de tous les points de vue et provenaient de divers milieux, régions, et groupes ethniques et linguistiques.

Le processus d'invitation a attiré davantage l'attention sur le Forum. Tous les efforts possibles ont été déployés pour aider les gens qui téléphonaient afin d'obtenir une invitation.

 

LA JUSTICE

Le décret visant Mme le juge Arbour-
Demande de précisions

(Réponse à la question posée par l'honorable Noël A. Kinsella le 21 octobre 1996)

Le décret C.P. 1996-la 1543, daté du 1er octobre 1996, approuve le congé accordé à Mme le juge Louise Arbour du 1er octobre 1996 au 31 octobre 1996, pour lui permettre de remplir les fonctions de procureur du Tribunal international chargé de poursuivre les personnes présumées responsables de violations graves du droit international humanitaire commises sur le territoire de l'ex-Yougoslavie et du Tribunal international pour le Rwanda.

Le décret respecte les articles 54, 55, 56 et 57 de la Loi sur les juges.

Le décret a été autorisé en vertu du paragraphe 54(1) de la Loi sur les juges dans sa version actuelle, sans référence aux modifications contenues dans le projet de loi C-42 que le Sénat étudie en ce moment. Au cours du congé approuvé par le décret C.P. 1996-1543, Mme le juge Louise Arbour est autorisée à exercer les fonctions expressément indiquées par le gouverneur en conseil. Par conséquent, ces fonctions sont conformes aux articles 55, 56 et 57 de la Loi.

DÉPÔT DE LA RÉPONSE
À UNE QUESTION AU FEUILLETON

l'assurance-emploi-DEMANDE DE PRÉCISIONS

L'honorable B. Alasdair Graham (leader adjoint du gouvernement): Honorables sénateurs, j'ai aussi la réponse écrite à la question no 53 inscrite au Feuilleton par le sénateur Stratton.

 


ORDRE DU JOUR

LA LOI SUR LES JUGES

Projet de loi modificatif-Troisième lecture-
Suite du débat

L'ordre du jour appelle:

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Bryden, appuyé par l'honorable sénateur Stollery, tendant à la troisième lecture du projet de loi C-42, Loi modifiant la Loi sur les juges et une autre loi en conséquence.

L'honorable Richard J. Doyle: Honorables sénateurs, le projet de loi C-42 n'a rien de très éclatant. Au premier coup d'oeil, cela semble être une simple mise à jour d'ordre administratif qui règle des problèmes grandissants dans le système de justice pénale du Canada. Il ne sera pas trop exigeant pour les sénateurs, ces pauvres sénateurs à qui l'on demande de travailler si fort pour faire un second examen objectif du processus législatif qu'a suivi un projet de loi approuvé en juin dernier avec à peine quelques manifestations de dissidence à la Chambre des communes.

Il s'agit en gros de dispositions sur la pension du conjoint, de règles plus strictes pour le Conseil canadien de la magistrature concernant le traitement des juges désignés pour siéger aux tribunaux internationaux, de détails à confirmer sur la rémunération et les frais de représentation. C'est de ce genre de choses qu'il est question.

Toutefois, à la deuxième lecture au Sénat, des esprits plus critiques se sont manifestés. Des deux côtés de la Chambre, des sénateurs ont calmement signalé les dangers qui couvaient sous cette mesure. On nous a rappelé que l'indépendance de la magistrature dépendait entièrement de la stricte observation des règles.

Madame le sénateur Andreychuk est l'un des adversaires du projet de loi. Elle est le seul ancien juge à siéger au Sénat et mérite qu'on prête attention à ses réserves, ce que nous faisons. Elle nous a dit:

Le public ne peut comprendre pourquoi le juge A a certaines possibilités, et pas le juge B. Dans de telles circonstances, lorsqu'un juge prend la parole à l'extérieur de la cour, le public peut-il vraiment comprendre à quel titre il le fait? Ce projet de loi semble résulter d'une priorité de l'ACDI et du gouvernement en matière de politique étrangère dans ses efforts en vue de renforcer nos institutions démocratiques. Toutefois, nous ne pouvons pas aller dans des pays dits du tiers monde et parler d'indépendance judiciaire en tant que pierre angulaire de nos démocraties pour ensuite adopter des projets de loi comme le projet de loi C-42 sans une réflexion sérieuse au préalable et sans prévoir les sauvegardes.

Le projet de loi a été lu une deuxième fois et il a ensuite reçu toute l'attention qu'il méritait du ministre de la Justice, M. Allan Rock, qui lui a accordé environ 45 minutes de son temps au cours du congé du Sénat. Ce ministre a comparu devant le comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles accompagné de deux hauts fonctionnaires de son ministère.

Le ministre a vite fait de dissiper l'impression que le Sénat retardait l'adoption des lois.

 

  • (1410)
Le ministre de la Justice a déclaré:

Nous avons presénté le projet de loi...

- à la Chambre des communes, qui l'a adopté...

...le plus tôt possible, en juin, je pense. [...] J'espère qu'aucun sénateur ne pense que nous avions présumé que le Sénat allait agir les deux derniers jour de juin. Cela aurait été bien, mais le rôle de cet endroit, évidemment, consiste à examiner consciencieusement les projets de loi. [...] Je respecte beaucoup le soin que vous apportez dans l'examen de cette mesure législative et je vous en remercie.

Le ministre passe ensuite au seul point urgent. Le projet de loi légitimera la nomination de Mme Louise Arbour, juge de la Cour d'appel de l'Ontario, au poste de procureur en chef du tribunal international pour les crimes de guerre.

Tant que le projet de loi n'aura pas été révisé, comme le ministre le dit ensuite:

La Loi sur les juges ne renferme pas de disposition permettant à un juge nommé par le gouvernement fédéral [...] d'obtenir un congé non rémunéré afin de travailler pour une organisation internationale [...] ou une entité autre que le gouvernement du Canada ou, dans le cas des frais, autre que le gouvernement d'une province.

Au moment de l'audience du comité, le juge Arbour était encore rémunérée par le Canada, mais elle avait déjà consacré deux jours à son poste aux Nations Unies.

Les 45 minutes passent rapidement comme des secondes. Le ministre, en partant, laisse ses représentants répondre aux questions supplémentaires. Le sénateur libéral, madame Cools, prend la parole:

Il me semble que la décision de libérer un juge de ses fonctions judiciaires est une question parlementaire et politique dont n'a pas à ce préoccuper le conseil de la magistrature.

M. Andrew Watt, avocat général principal aux affaires judiciaires, répond:

La pratique au ministère veut que le conseil de la magistrature soit consulté au sujet des modifications envisagées aux lois qui influeraient sur l'administration de la justice [...] Il [le conseil] regroupe tous les juges en chef et tous les juges en chef adjoints du Canada.

Deux semaines plus tard, le comité se réunit de nouveau, cette fois pour entendre des personnalités du monde universitaire. Ce ne sont pas tous les témoins invités qui ont accepté l'invitation du comité. Peut-être que certains hésitent à se mêler de quelque chose ayant rapport aux tribunaux avec un préavis aussi court. Le ministre des Affaires étrangères ne se présente pas, il laisse témoigner le ministre de la Justice.

Le professeur H.W. Arthurs de Osgoode Hall déclare:

Ensuite, si le Parlement estime [...] qu'il nr revient pas à l'organisation internationale de payer le juge détaché [...] le gouvernement pourrait alors continuer de payer de juge et ensuite demander un remboursement à l'organisme international.

Le professeur Ted Morton, de l'Université de Calgary, déclare quant à lui:

Je crois respecteusement que ces questions ont une importance telle que, à l'inverse de ce que le gouvernement semble disposer à faire, il y aurait lieu d'étudier le dossier plus à fond et, de ce fait, d'y accorder plus de temps.

Il rappelle qu'il faut se méfier des perceptions et tenir compte de la réalité lorsqu'il est question de la magistrature. Il dit: «Je dois observer que le moment ne pourrait être plus mal choisi.»

Les questions continuent tard dans l'après-midi. Plus nous essayons de dissiper le brouillard, plus il devient épais et plus il semble nécessaire de réviser soigneusement le projet de loi.

Pour les sénateurs de l'opposition siégeant au comité, la surprise du jour vient lorsque le sénateur Lewis propose que le projet de loi fasse l'objet d'un rapport sans proposition d'amendement. Le sénateur Nolin demande à consulter le caucus conservateur qui doit se réunir le 23 octobre. Il déclare:

Nous n'entendons pas les témoins juste pour le plaisir. [...] Je souhaite examiner le texte.

Le sénateur Stanbury, qui n'était pas là pour entendre les témoins du matin, déclare:

Nous sommes réunis aujourd'hui, si j'ai bien compris, dans le but d'adopter le projet de loi. [...] L'opinion des caucus est importante, mais nous avons déjà eu amplement le temps de discuter de cette mesure avec eux.

Et le sénateur Carstairs d'ajouter:

Nous avons une motion. [...] Plaît-il aux honorables sénateurs d'adopter la motion? [...] La motion est adoptée.

Cela conduit certains membres du comité à se demander si ce comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles, jadis si combatif, ne devient pas un simple organisme d'approbation.

Des voix: Honteux!

Le sénateur Doyle: Le projet de loi à l'étude n'avait rien de partisan. Il soulevait cependant beaucoup de questions au sujet de la protection de la démocratie à une époque où les tribunaux jouent un rôle bien plus actif dans la gestion du pays.

Lorsque le ministre de la Justice avait comparu, deux semaines auparavant, il avait rappelé aux sénateurs que ce même comité, plus tôt au cours de l'examen du projet de loi, «avait fait traîner les choses, ce qui avait conduit au retrait de certains amendements». Or, tout cela, c'est dans le passé. Venons-en au présent. Comme ils disent à la Banque de Montréal, les temps changent.

(Sur la motion du sénateur Cools, le débat est ajourné.)

 

  • (1420)

LA LOI SUR LES MESURES
EXTRATERRITORIALES ÉTRANGÈRES

Projet de loi modificatif-Deuxième lecture-Ajournement du débat

L'honorable Jerahmiel S. Grafstein propose: Que le projet de loi C-54, Loi modifiant la Loi sur les mesures extraterritoriales étrangères, soit lu une deuxième fois.

- Honorables sénateurs, avant de passer en revue les principes du projet de loi C-54, Loi modifiant la Loi sur les mesures extraterritoriales étrangères de 1984, permettez-moi de brosser le portrait de la loi Helms-Burton, adoptée cette année par le Congrès américain sous le titre «Cuban Liberty and Democratic (Libertad) Act of 1996», à laquelle cette mesure législative tente de remédier.

La loi Helms-Burton s'inscrit dans une longue lignée de mesures maladroites et tragiques prises dans le cadre de la politique étrangère dénuée de tout sens que les États-Unis pratiquent à l'égard de Cuba. La guerre froide ayant pris fin, le vent glacial qui soufflait de Cuba sur les relations cubano-américaines aurait pu se réchauffer. Quelle belle occasion perdue!

Le recours aux sanctions et aux embargos dans le domaine des relations internationales se justifie, mais dans chaque cas, il faut en mesurer la portée et en surveiller constamment l'efficacité. À quels dangers et à quelles menaces essaie-t-on de parer et quels sont les effets sur le comportement de l'État et de la population? Les années 90 ne sont pas les années 60, mais il existe encore des arguments valables pour déclarer contre Cuba un embargo stratégique sélectif et limité.

Il n'en demeure pas moins que, du point de vue canadien, il est temps de dégeler les relations cubano-américaines, d'ouvrir la porte aux échanges avec Cuba, de prendre des mesures constructives et d'appuyer activement l'évolution pacifique de Cuba tant sur le plan économique que politique. Parmi les facteurs qui accéléreront la réforme démocratique à Cuba et l'avènement d'une société davantage pluraliste dans ce pays, citons le fait que Cuba souscrit aux normes internationales en matière de droits de la personne, la promotion des échanges entre particuliers, les encouragements prodigués aux voix de l'opposition, la diplomatie économique, la diplomatie par l'intermédiaire de la télévision, le dialogue et les échanges.

Les systèmes cubains d'éducation universelle et de soins de santé universels peuvent, dans le contexte d'une politique étrangère éclairée, servir de modèles aux pays de l'Amérique centrale et de l'Amérique du Sud qui essayent désespérément de réduire le fossé qui sépare riches et pauvres dans ces régions de notre hémisphère et d'adopter des pratiques plus démocratiques.

Honorables sénateurs, bien que nous poursuivions nos relations commerciales avec Cuba depuis 1945, le Canada n'a jamais hésité à souscrire aux résolutions des Nations Unies condamnant la lamentable performance de Cuba au plan des droits de la personne. Le Canada s'est empressé de condamner l'attaque, en février 1996, de deux avions américains et le recours abusif par Cuba à la force excessive, ce qui va à l'encontre des principes mondialement admis. Le Canada a soulevé la question des droits de la personne auprès du gouvernement cubain, et ce ici même à Ottawa, à la Havane par le truchement de notre ambassadeur, ainsi qu'à diverses tribunes internationales. Le Canada a été un précieux intermédiaire pour Cuba.

Or, des actions provocatrices sous forme d'incursions illicites dans l'espace aérien cubain et dans les eaux cubaines, une série de rebuffades d'ordre économique servies aux Cubains en quête d'un engagement constructif vis-à-vis de l'Amérique, tout cela a retardé l'avènement de la démocratie. Cuba est sur le point de se convertir à la démocratie. Les Cubains aspirent à une réforme démocratique et économique. Or, la loi Helms-Burton est un obstacle qui se dresse sur la route d'un rapprochement graduel et d'une réforme pacifique dans les règles.

La loi Helms-Burton est révisionniste en théorie, contradictoire en principe et maladroite en pratique. Elle est contraire à la pratique actuelle du droit aux États-Unis. Les tribunaux américains ont maintes fois déclaré que, même flagrante, la confiscation par les États des biens de leurs propres ressortissants n'allait pas à l'encontre du droit international.

Les dispositions de la loi Helms-Burton enfreignent le principe de la primauté du droit international, le principe même auquel les Américains voudraient soumettre les Cubains. Le Congrès américain aurait pu faire mieux.

Nul n'est besoin de critiquer cette loi. Il suffit de s'en remettre aux annales du Congrès, aux sénateurs et aux députés américains qui ont fait ressortir les contradictions et les graves incohérences que recèle la loi.

En un mot, la loi Helms-Burton vise à imposer unilatéralement la compétence extraterritoriale des tribunaux américains au chapitre des investissements étrangers à Cuba. Elle prévoit deux catégories de revendicateurs: d'une part, les sociétés américaines possédant des biens à Cuba et, d'autre part, les anciens Cubains et autres, maintenant citoyens américains, qui possédaient des biens, lesquels auraient été confisqués, expropriés ou nationalisés par Cuba, alors même qu'ils n'étaient pas des citoyens américains à l'époque. Les entreprises étrangères poursuivant des activités liées à ces biens constituent les principales cibles de la loi Helms-Burton.

Les administrateurs et les dirigeants de ces sociétés sont également visés. Il leur est interdit, ainsi qu'à leurs familles et à leurs agents, de se rendre aux États-Unis. La portée de la loi Helms-Burton est beaucoup plus vaste qu'il n'y paraît à première vue.

Le Canada s'oppose à cette loi parce qu'elle vise à étendre l'embargo américain à des pays tiers, dont le Canada. Le Canada est une nation commerçante; 50 p. 100 de nos emplois sont tributaires du commerce. Le Canada craint qu'une pareille loi ne crée un dangereux précédent international qui risque de nuire sérieusement au commerce international et aux méthodes d'investissement, principes que nous partageons avec les Américains et avec le Congrès des États-Unis.

Permettez-moi de mentionner seulement une critique qu'a faite devant le Sénat américain le sénateur Dodd, grand spécialiste des affaires étrangères. Le sénateur Dodd a souligné les nombreuses imperfections et incohérences de la loi. Il a soutenu que cette dernière consacre l'embargo contre Cuba, allant beaucoup plus loin que les mesures prises par les États-Unis contre la Libye, l'Iran, l'Iraq, la Chine, le Vietnam ou la Corée du Nord.

Les mêmes droits ne sont pas offerts aux Hongrois, aux Polonais, aux Ukrainiens, aux Tchèques ou aux Vietnamiens qui deviennent citoyens américains et dont les biens ont été expropriés dans leur pays d'origine.

Comme le sénateur le souligne, avec l'adoption de la loi, le gouvernement américain a les mains liées et le président n'a plus la souplesse voulue pour apporter les modifications nécessaires à la politique étrangère. Honorables sénateurs, cette loi fait souffler un vent glacial sur les relations internationales.

La question des biens nationalisés ou expropriés n'est pas unique à Cuba. Qu'on songe à la portée de cette loi si ses principes s'appliquaient à la Russie, à l'Ukraine, à la Pologne, aux pays baltes, pour ne nommer que quelques pays de l'Est, de même qu'à la Chine. Ses conséquences s'étendraient même à l'Europe de l'Ouest et au Canada.

Comme le souligne le sénateur Dodd, cette loi va beaucoup plus loin que toute loi punitive antérieure, car sa portée est vaste, contradictoire et contre-productive. Il n'est pas étonnant que la loi Helms-Burton ait été dénoncée partout, en Europe, en Amérique du Sud et ailleurs. Des mesures législatives sont actuellement mises en place dans les pays membres de l'Union européenne, comme le Royaume-Uni et la Hollande, pour bloquer les effets de la loi Helms-Burton. Le projet de loi du Royaume-Uni propose de suivre de près les sociétés américaines établies au Royaume-Uni qui comptent tirer parti des dispositions de la loi Helms-Burton.

Comme des membres du Congrès américain et des sénateurs américains l'ont signalé, cette mesure viole les dispositions relatives à l'OMC, ainsi que l'ALE et l'ALENA et une multitude de traités commerciaux bilatéraux et multilatéraux. Ce qui explique qu'on s'oppose à cette mesure dans le monde entier.

La Communauté européenne et le Mexique ont rédigé des lois semblables à celle que nous proposons, et d'autres nations envisagent de prendre des mesures semblables.

Sous l'impulsion du Canada, l'OEA a présenté, en août dernier, un rapport qui concluait à l'unanimité que la loi Helms-Burton était contraire au droit international et à la primauté du droit international.

Que faut-il de plus, honorables sénateurs, pour convaincre les Américains des répercussions négatives de ce projet de loi sur le plan du commerce international, chez leurs alliés les plus proches et leurs principaux partenaires commerciaux? Cela va nuire beaucoup aux initiatives américaines sur la primauté du droit ailleurs dans le monde.

L'article 3 de la loi Helms-Burton permet d'intenter, avec effet rétroactif, des actions en justice au sujet de biens expropriés. En juillet, le président des États-Unis a suspendu le droit de citoyens américains de poursuivre des entreprises canadiennes aux termes de la loi. Cependant, on n'a pas suspendu l'application dans son ensemble de l'article 3. Des Américains peuvent encore poursuivre les propriétaires de biens si le président revient sur sa décision. Le président ne peut suspendre le droit d'intenter des poursuites aux termes de la loi que pour six mois à la fois. S'il veut prolonger cette suspension de six autres mois, il devra le faire d'ici le 16 janvier 1997.

La décision du président n'a, bien entendu, aucune répercussion sur les autres dispositions de la loi, qui sont toujours en vigueur.

 

  • (1430)
L'article 4, sur les restrictions d'entrée au pays, restreint encore l'entrée aux États-Unis de cadres supérieurs de sociétés canadiennes, des membres de leur famille et de leurs agents. La direction d'au moins une entreprise canadienne, une entreprise mexicaine et une entreprise italienne, ainsi que les membres de leur famille, ont déjà reçu des mises en garde des autorités américaines. Nous ignorons, à ce stade-ci, quelles autres sociétés canadiennes peuvent faire l'objet d'une enquête par les autorités américaines, mais la liste peut être très longue. Il est possible, voire probable que beaucoup d'autres organismes et sociétés de gouvernements étrangers, notamment des sociétés d'État, puissent être poursuivis par des citoyens américains pour avoir violé cette loi. Même si la loi ne vise qu'un petit nombre d'entreprises canadiennes pour l'instant, le Canada s'oppose avec véhémence au précédent dangereux qu'on établit et aux répercussions de ce projet de loi qui limite les échanges et les investissements internationaux.

Aux termes du droit international, les Américains auraient pu choisir une autre voie, notamment la Commission des réclamations étrangères, pour valider les réclamations de citoyens américains et les faire respecter par d'autres États. On peut utiliser la règle de droit de bien d'autres façons pour s'attaquer au problème que les Américains ont essayé de résoudre au Congrès.

Honorables sénateurs, je vais maintenant traiter brièvement de la Loi sur les mesures extraterritoriales étrangères, ou LMEE, que le Canada a adoptée en 1984. Le Canada voulait ainsi bloquer les tentatives des gouvernements et des tribunaux étrangers qui voulaient appliquer au Canada leurs lois et leurs décisions inacceptables. La LMEE confère au procureur général du Canada le pouvoir de défendre nos intérêts contre des lois et des jugements déraisonnables et nuisibles d'autres pays.

Plus précises, les modifications proposées dans le projet de loi C-54 permettront au Canada de répliquer à de nouvelles mesures prises aux termes de la loi Helms-Burton. Compte tenu des modifications proposées, la LMEE fournira au Canada les boucliers et les épées nécessaires pour se défendre contre les revendications financières aux termes de la loi Helms-Burton. Les Canadiens pourront obtenir des tribunaux canadiens tout montant accordé dans le cadre d'une poursuite autorisée en vertu de la loi Helms-Burton devant les tribunaux américains, ainsi que tous les frais découlant de poursuites aux États-Unis et au Canada, et de fortes amendes pourront être imposées dans les cas où des Canadiens contreviennent à nos lois. Grâce aux modifications proposées, le Canada sera mieux préparé pour bloquer toute autre tentative des États-Unis ou d'un autre pays d'appliquer au Canada leurs lois ou leurs jugements que nous considérons inacceptables.

Aux termes de la LMEE ainsi modifiée, le procureur général pourra prendre des arrêtés de «non-reconnaissance» de jugements rendus en vertu de lois étrangères, interdisant ainsi l'application de ces jugements au Canada. Si le procureur général est d'avis qu'une loi étrangère est contraire au droit international, la loi autorisera des Canadiens à s'adresser aux tribunaux canadiens pour réclamer les sommes accordées en vertu de décisions étrangères, plus tous les frais afférents à ces poursuites au Canada ou dans le pays étranger. On dit qu'il s'agit d'une disposition de récupération. Elle autorisera le ministre des Affaires étrangères à dresser la liste des lois étrangères qui, selon lui, sont contraires au droit international et pouvant être visées par la LMEE. Cela signifie que tout Américain dont la revendication est agréée n'obtiendra et ne gardera aucun avantage au Canada. De plus, les modifications donnent aux Canadiens forcés de se défendre dans des poursuite en vertu de la loi Helms-Burton aux États-Unis la possibilité de s'adresser aux tribunaux canadiens afin de récupérer les frais engagés de la partie américaine, même avant que la cause soit terminée et sans tenir compte du jugement.

Honorables sénateurs, cette réplique par voie législative n'est pas parfaite. Elle vise à contrer les dispositions nettement plus inéquitables de la loi Helms-Burton. Nous pourrions faire davantage. Nous pourrions user de représailles contre des Américains qui font des revendications au Canada.

Honorables sénateurs, ces modifications sont une réaction soigneusement mesurée à la loi Helms-Burton, dans l'espoir et l'attente que, après les élections américaines, une politique plus saine et plus judicieuse prendra le dessus, et que disparaîtront les aspects insidieux de la loi Helms-Burton, tellement contraire aux pratiques, traités et accords internationaux et à la primauté du droit au niveau international.

Il est très regrettable que, au nombre de ceux qui profitent de la loi Helms-Burton, se trouvent les dirigeants cubains, doctrinaires et autoritaires, qui cherchent encore à raffermir leur emprise sur les Cubains et à les couper de l'influence de la démocratie occidentale. De cette manière mesquine et méprisable, la loi Helms-Burton sera une réussite. Pourtant, le ton de la loi n'est ni conciliant, ni excessif, comme dans la grande tradition américaine. En ce sens, c'est un grand recul dans la politique étrangère américaine.

Le Canada partage la conception américaine du pluralisme et de la démocratie, et souhaite lui aussi que ces deux valeurs se répandent plus rapidement dans le monde, y compris à Cuba. Par cette loi, les États-Unis ont fait reculer la cause de la réforme démocratique parce qu'elle recourt à des mesures contraires à la primauté du droit au niveau international, primauté dont le Canada et les États-Unis sont pleinement convaincus. La conviction ne suffit pas, sénateurs. Il faut pratiquer ce qu'on prêche. Dans notre marche vers un monde meilleur, principe et pratique vont de pair.

(Sur la motion du sénateur Berntson, le débat est ajourné.)

La Loi sur l'extraction du quartz dans le Yukon
La Loi sur l'extraction de l'or dans le Yukon

Projet de loi modificatif - Deuxième lecture

L'honorable Len Marchand propose: Que le projet de loi C-6, Loi modifiant la Loi sur l'extraction du quartz dans le Yukon et la Loi sur l'extraction de l'or dans le Yukon, soit lu une deuxième fois.

- Honorables sénateurs, j'interviens aujourd'hui pour vous présenter le projet de loi C-6 modifiant la Loi sur l'extraction du quartz dans le Yukon et la Loi sur l'extraction de l'or dans le Yukon. Je suis très heureux de vous recommander cette mesure qui contribuera à faciliter le développement durable des ressources minières du Yukon.

Pour situer les choses dans leur contexte, la Loi sur l'extraction du quartz dans le Yukon et la Loi sur l'extraction de l'or dans le Yukon ont respectivement été adoptées en 1924 et 1906. Elles contiennent des dispositions concernant l'administration des droits miniers de la Couronne et la perception des redevances dans le territoire du Yukon. Bien que ces deux lois aient efficacement soutenu, depuis près d'un siècle, l'extraction du minerai comme la principale industrie du Yukon, elles ne renferment aucune disposition pour assurer la protection de l'environnement. Cette situation est inacceptable pour notre gouvernement, pour la grande majorité des résidants du Yukon et pour l'ensemble des Canadiens.

Honorables sénateurs, le projet de loi C-6 représente une solution largement acceptée à un problème qui existe depuis longtemps. Tous les principaux intéressés au Yukon - depuis les sociétés minières jusqu'aux écologistes en passant par les premières nations et le gouvernement territorial - ont participé à l'élaboration de ce projet de loi. Tous ces intervenants sont maintenant d'avis qu'il est temps d'aller de l'avant.

Avec le projet de loi C-6, les Yukonais ont mis au point leur propre solution à une situation qui est unique au Yukon. C'est au Yukon Mining Advisory Committee qu'on doit en grande partie le mérite d'avoir élaboré ce régime de réglementation. Cet organisme regroupant plusieurs parties intéressées a été créé en 1990 et se compose de représentants de la Klondike Placer Miners Association, de la Yukon Chamber of Mines, de la Yukon Conservation Society, du Council for Yukon First Nations et des gouvernements du Yukon et du Canada. Ce nouveau régime assurera un niveau responsable de protection de l'environnement tout en permettant à l'industrie minière de continuer à être un élément moteur de la croissance économique au Yukon.

Honorables sénateurs, cette mesure doit être considérée comme une réalisation majeure pour plusieurs raisons. Tout d'abord, elle confirme l'engagement du gouvernement en faveur du développement durable, en favorisant des pratiques écologiques d'exploitation minière. En appliquant pour la première fois les règlements d'utilisation des terres aux activités initiales sur les concessions minières, la législation du Yukon sera conforme à celle des autres provinces et territoires du Canada.

Dans le contexte du développement durable, le projet de loi est un élément important du processus permanent visant à favoriser la création d'un environnement plus propice à l'exploitation minière, de même que le développement économique du Yukon. Ce processus complète la réforme législative découlant de la mise en oeuvre du règlement des revendications territoriales des premières nations du Yukon.

  • (1440)
Honorables sénateurs, on reconnaît depuis longtemps la nécessité d'étendre les règlements environnementaux à toutes les activités minières menées au Yukon. L'entrée en vigueur de la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale de 1994 n'a fait que nous rappeler ce besoin. De plus, le 29 novembre 1995, les lacunes du régime actuel ont été mises à jour lorsque la Cour fédérale du Canada a établi que les exigences fédérales en matière d'évaluation environnementale ne s'appliquaient pas à la Loi sur l'extraction du quartz dans le Yukon ou à la Loi sur l'extraction de l'or dans le Yukon.

Honorables sénateurs, cette mesure législative possède de nombreuses facettes et je voudrais vous donner un bref aperçu de certaines des dispositions que renferme le projet de loi C-6. Les deux lois sur l'exploitation minière demeurent inchangées, exception faite de modifications mineures relatives à des considérations environnementales. Une fois le projet de loi C-6 promulgué, les deux lois actuelles formeront la partie I de la nouvelle loi et les exigences en matière de protection environnementale dont nous sommes saisis aujourd'hui formeront la partie II.

Le projet de loi C-6 crée quatre classes d'activités minières, en fonction du niveau d'activité et des impacts environnementaux. Plus le niveau d'activité est élevé, plus les exigences concernant l'approbation des projets et les mesures de réduction des perturbations sont sévères. Des règlements seront élaborés pour l'exploration de la roche dure, l'extraction de l'or et les projets d'exploration.

La Loi sur l'extraction du quartz dans le Yukon contient des dispositions particulières sur l'émission de permis pour l'exploration et la production. Le projet de loi C-6 établit les pouvoirs nécessaires à l'application de ce régime, et confère au gouverneur en conseil celui d'élaborer des règlements.

Outre le fait qu'il confère des pouvoirs de réglementation, le projet de loi C-6 détermine le champ de compétence du chef de l'utilisation des terres minières, qui sera chargé de l'application du nouveau régime au Yukon. Il prévoit la nomination d'inspecteurs qui auront le pouvoir de faire appliquer la réglementation. Le projet de loi prévoit aussi un mécanisme pour en appeler des décisions, un processus permettant à la Couronne de recouvrer les coûts encourus pour les travaux de remise en état, ainsi que des dispositions exigeant des dépôts de garantie et imposant des sanctions pour les manquements aux règlements.

Ces modifications prévoient jusqu'à 100 000 dollars d'amende par jour en cas de non-respect des conditions d'approbation d'un projet. Cela correspond aux amendes qui peuvent être imposées pour des activités similaires d'utilisation des terres dans le Nord, et je ne doute pas que cette mesure sera efficace.

Le projet de loi C-6 prévoit aussi un délai pour l'entrée en vigueur du nouveau Règlement sur l'utilisation des terres. Dans le cas du quartz, les exploitants auront six mois pour rédiger et soumettre leur demande de projet. Le Règlement sur l'utilisation des terres accompagnant la Loi sur l'extraction de l'or dans le Yukon entrera en vigueur au bout d'une saison complète d'extraction, soit habituellement sept mois.

Le règlement qui est en cours de rédaction précisera quelles terres seront visés par le nouveau régime. Le projet de loi C-6 s'appliquera à toutes les terres du Yukon. Toutefois, une décision quant à l'application de ce règlement aux terres conférées par règlement de revendications territoriales ne sera prise qu'après consultation avec les premières nations. Les dispositions des ententes définitives avec les premières nations et des ententes d'autonomie gouvernementale seront prises en compte dans la décision finale. Tout système de gestion de rechange devra respecter ou excéder le règlement proposé conformément à ce projet de loi. Les sénateurs doivent aussi savoir que ce projet de loi n'est pas rétroactif.

Ce projet de loi et le règlement qui l'appuie sont très simples. Ils sont justes et raisonnables pour toute personne au Yukon, dans le reste du Canada ou ailleurs qui investit dans le secteur minier du Yukon ou qui est préoccupée par la protection de l'environnement dans le Nord.

Je le répète, les habitants du Yukon veulent que nous appliquions tout de suite le nouveau régime environnemental. Ce projet de loi a pris des années à mettre au point et nous ne devrions pas retarder encore les choses. C'est en songeant à cela que j'exhorte les sénateurs à appuyer le projet de loi C-6.

L'honorable A. Raynell Andreychuk: Honorables sénateurs, je participe moi aussi au débat sur le projet de loi C-6, qui concerne l'extraction du quartz et de l'or au Yukon. J'ai certaines réserves à propos de lacunes graves que pourrait comporter le projet de loi. Nous avons toutefois bon espoir qu'il sera possible d'y remédier lors de l'étude en comité.

La prospection et l'exploitation minières existent depuis très longtemps au Yukon. L'industrie minière a joué un rôle capital dans le développement économique et culturel de ce territoire. Le projet de loi dont nous sommes saisis tente de régler le conflit entre le développement de l'industrie minière et la protection de l'écosystème fragile du Yukon. En fin de compte, pour la survie du Yukon, il est indispensable d'équilibrer la promotion et le développement de l'activité industrielle par l'entremise de l'exploitation minière, d'une part, et la protection de la faune, du milieu sauvage et de la biodiversité, d'autre part.

Le projet de loi à l'étude est l'aboutissement d'un processus qui a été amorcé en 1990 par le gouvernement de l'époque. Celui-ci avait institué un processus de consultation des groupes d'intérêts concernés en formant le Yukon Mining Advisory Committee. Ce processus n'a malheureusement pas donné des résultats aussi rapidement qu'il l'aurait pu. Six ans se sont écoulés avant que le gouvernement fédéral se penche enfin sur ces graves problèmes d'exploitation minière. Malgré le long délai, il semble toutefois que certaines questions importantes ne soient pas encore réglées.

Le principal défaut du projet de loi C-6, c'est qu'il ne semble pas traduire une orientation claire. Il n'établit pas de principes clairs sur lesquels pourrait s'appuyer la prise de décisions, dont pourraient s'inspirer les décisions concernant la délivrance de permis et les procédures d'approbation. Le projet de loi n'énonce pas de principes, de lignes directrices, ni de mécanisme permettant de respecter ces lignes directrices. Il ne prévoit pas de structure qui permettrait de déterminer comment éviter la destruction de l'habitat, réduire au minimum les répercussions sur l'environnement, éviter les préjudices causés à la biodiversité et aux populations de ce milieu. Au lieu de cela, il n'établit que la procédure administrative à suivre aux fins de l'approbation. Même si la Loi canadienne sur la protection de l'environnement permet l'examen des répercussions sur l'environnement, il serait préférable d'inclure dans le projet de loi à l'étude des lignes directrices traitant expressément de la prospection et de l'industrie minières, et plus particulièrement du Yukon.

Le deuxième problème a trait à la classification de l'activité minière en différents niveaux relativement à ces effets sur l'environnement. Le projet de loi C-6 crée quatre niveaux d'activité par ordre ascendant sur le plan des dommages causés à l'environnement. Le principal problème avec ce système de classification, c'est que le premier niveau est trop bas. Les activités de type I ne nécessitent aucune approbation de la part du ministère. Dans le cadre de ces activités, on pourra défricher un secteur d'une superficie maximale de 200 mètres carrés et faire de l'excavation dans un secteur d'une profondeur maximale de 400 mètres cubes, tout cela sans avoir à obtenir la moindre approbation du gouvernement.

D'aucuns estiment que la possibilité de pratiquer la coupe à blanc et d'extraire tout le minerai d'une mine en toute liberté ne causerait pas de pression indue sur l'environnement. D'autres, par contre, sont d'avis qu'un tel développement aurait des effets néfastes sur la faune, la flore, l'eau douce et la vie animale. Sans demander l'approbation de quiconque, tout demandeur pourrait procéder à des activités d'exploration de type I sans égard à l'importance des terres du point de vue écologique.

Le projet de loi C-6 crée un système qui ne prévoit pas de méthode pour signaler certains secteurs où le risque est grand. La Colombie-Britannique, les Territoires du Nord-Ouest et l'Alaska ont adopté des lois semblables qui, toutefois, ne laissent pas entière liberté dans certains secteurs de l'exploration. Même si la Loi sur les terres territoriales s'applique à certains secteurs, elle ne régit pas le développement minier. Par conséquent, il est possible et probable qu'un demandeur doive demander l'approbation du gouvernement pour la construction d'une route pour se rendre à un secteur d'exploration, mais qu'il n'ait pas à le faire pour l'exploitation du secteur lui-même.

Il existe un autre problème sur lequel je voudrais attirer l'attention des sénateurs. Il s'agit du plafond des amendes que l'on trouve dans le projet de loi. Les amendes maximales sont seulement de 5 000 dollars à 20 000 dollars. Comment se fait-il que la Loi sur les pêches et la Loi canadienne sur la protection de l'environnement prévoient des amendes maximales d'un million de dollars, mais que celles prévues par le projet de loi C-6 ne s'élèvent qu'à une fraction de ce montant?

On nous dit que cette loi vise à protéger l'environnement d'une exploration dommageable, sans scrupules et effrénée. Par conséquent, il n'est que raisonnable que les amendes imposées pour de telles pratiques soient suffisamment élevées pour dissuader quiconque de le faire. Si le projet de loi est adopté tel quel, ces amendes seraient considérées comme un risque insignifiant pour tout entrepreneur minier opportuniste voulant mettre en oeuvre un projet.

Un autre problème est le poids de la réglementation. Encore une fois, on constate l'érosion de l'autorité parlementaire, comme en témoignent non seulement le projet de loi dont nous sommes saisis, mais aussi le recours croissant à la réglementation pour contourner des mesures effectives prévues par les lois. J'estime qu'il s'agit là d'une érosion de la démocratie parlementaire.

Le ministre des Finances, l'honorable Paul Martin, a, durant la campagne électorale de 1993, fait une promesse tirée de son document sur la conception libérale de la protection de l'environnement. Il a garanti:

... aux citoyens le droit de recourir aux tribunaux pour veiller à ce que les lois environnementales fédérales soient bien appliquées et observées.

L'application de la loi par les citoyens est déjà une procédure courante dans la législation environnementale du Yukon. Les habitants du Yukon qui sont au courant d'infractions peuvent porter ces affaires devant les tribunaux. L'application de la loi par les citoyens sert de mesure de protection dans certains cas et est un complément utile aux procédures d'inspection. Cela ne semble pas avoir été inclus dans le projet de loi C-6. Nous voudrions entendre les fonctionnaires dire au comité comment, selon eux, le projet de loi C-6 maintient le droit des citoyens d'appliquer la loi, comme l'a promis le ministre.

Honorables sénateurs, je soulève ces questions pour m'assurer que ce projet de loi est conforme au principe du développement durable. Le Yukon a attendu très longtemps pour avoir ce projet de loi; une mesure législative semblable a été adoptée pour les Territoires du Nord-Ouest il y a plus de 30 ans. Cependant, on doit tenir compte des préoccupations exprimées par les personnes les plus directement touchées qui connaissent bien la situation qui existe aujourd'hui au Yukon.

Un groupe représenté au sein du Yukon Mining Advisory Committee a retiré son appui au projet de loi. D'autres groupes ont également soulevé des questions. Par conséquent, il est important que nous fassions une étude approfondie de ce projet de loi en comité pour nous assurer que nous avons atteint le meilleur équilibre possible entre l'industrie minière et l'environnement.

(La motion est adoptée et le projet de loi est lu une deuxième fois.)

 

Renvoi au comité

Son Honneur le Président pro tempore: Honorables sénateurs, quand lirons-nous ce projet de loi pour la troisième fois?

(Sur la motion du sénateur Marchand, le projet de loi est renvoyé au comité permanent des peuples autochtones.)

 

le Projet de loi sur les océans

Deuxième lecture

L'honorable Raymond J. Perrault propose: Que le projet de loi C-26, Loi concernant les océans du Canada, soit lu une deuxième fois.

- Honorables sénateurs, au cours de notre siècle, six êtres humains sont allés sur la lune, mais seulement deux sont allés dans les fosses les plus profondes des océans. Nous reconnaissons maintenant l'importance capitale des océans pour l'existence de l'humanité.

Les océans nous donnent la vie. On croit que l'écorce terrestre et les océans ont été formés à l'ère azoïque, soit il y a environ quatre milliards d'années, après l'apparition d'une algue et du phénomène de photosynthèse qui a donné naissance à l'atmosphère riche en oxygène dans laquelle nous vivons, et qui, hélas, est maintenant partout menacée par la pollution. Les océans sont la dernière région de notre planète qui n'a pas encore été explorée. Il faut les protéger. La Loi sur les océans du Canada nous aidera à le faire.

Je veux être juste en reconnaissant que le gouvernement précédent s'intéressait beaucoup à la question. Ce n'est pas un sujet qui prête à la partialité. Nous parlons ici de l'existence même des êtres humains et de la civilisation sur la terre.

Environ les deux tiers de la population de la terre vit dans les régions côtières. Aussi incroyable que cela puisse paraître, le Canada possède 15 p. 100 de toutes les côtes de la terre, soit un plus long littoral que tout autre pays. Le Canada est entouré par trois océans où les écosystèmes sont très variés. Il y a le plus petit océan de la planète, l'océan Arctique, le plus grand, l'océan Pacifique, et le deuxième pour l'étendue, l'Atlantique.

Il est donc évident que beaucoup de Canadiens sont directement touchés par les océans. En préparant le projet de loi, le gouvernement a consulté ces Canadiens. Le résultat de ces consultations est le projet de loi que nous avons devant nous.

Tout d'abord, la Loi sur les océans du Canada renforce le rôle du Canada comme leader dans la gestion et la protection des océans et de leurs immenses ressources. Beaucoup de Canadiens qui négocient pour notre pays sur la scène mondiale ont obtenu une reconnaissance internationale pour leur expertise dans le domaine des océans, ce dont nous pouvons être fiers.

Le projet de loi respecte tous les critères d'une loi du Parlement puisqu'il établit un bon équilibre entre la fermeté et la souplesse. Il a été pensé pour répondre aux besoins diversifiés et changeants des Canadiens et aux préoccupations de toutes les parties intéressées.

La Loi sur les océans du Canada consacre les droits et les responsabilités prévus en droit international et aborde les questions de gestion des océans de manière à servir efficacement les Canadiens pendant de nombreuses années.

Le fonctionnement du processus législatif jusqu'ici nous garantit que la Loi sur les océans sera une loi raisonnable. Nos collègues de la Chambre des communes, par l'intermédiaire du comité permanent des pêches et des océans, ont examiné le projet de loi et l'ont renforcé à l'étape du rapport. Des députés ont fait des suggestions utiles qui ont permis de le raffermir. Par conséquent, nous croyons que nous avons devant nous le projet de loi souhaité par les Canadiens. C'est une mesure législative dont avaient besoin les océans du Canada, le Pacifique, l'Atlantique et l'Arctique. La Loi sur les océans du Canada étendra de façon officielle la responsabilité du Canada sur toutes nos zones maritimes.

Le projet de loi à l'étude aujourd'hui s'appuie sur les disposition de textes internationaux. Le Canada ne s'est pas comporté en flibustier qui se serait approprié les océans par des moyens détournés. Ce projet de loi est conforme au droit international et jouit de l'appui de personnes de diverses allégeances politiques et de divers milieux.

Le projet de loi établit non seulement la compétence du Canada sur ses eaux intérieures, sa mer territoriale, ses zones de pêche et son plateau continental, mais également sur une nouvelle zone contiguë de 12 milles marins et une zone économique exclusive de 200 milles marins. Certains diront que ce projet de loi aurait dû venir plus tôt. Quoi qu'il en soit, nous en sommes maintenant saisis.

Même si le projet de loi ne comportait que ces mesures, ce serait déjà beaucoup. Nous nous sommes battus énergiquement et longtemps pour établir les droits du Canada sur ses océans. Mais le projet de loi va plus loin encore. Il regroupe des attributions fédérales en vue de définir clairement le rôle d'un ministère qui agira comme chef de file dans la gestion des océans. Cette mesure a été prise en réponse aux préoccupations exprimées au sujet du leadership et de la responsabilité du Canada et de la nécessité d'avoir une stratégie de gestion des océans. Le projet de loi rationalise et accroît les responsabilités du gouvernement fédéral afin d'assurer une gestion efficace des océans. Il va même jusqu'à jeter les bases législatives d'une nouvelle stratégie globale et coopérative de gestion des océans.

La Loi concernant les océans du Canada propose une nouvelle approche de la gestion des océans, fondée sur la coopération entre le gouvernement fédéral et tous ceux qui ont un intérêt dans l'avenir de nos vastes océans. Cela comprend des résidants des provinces, des territoires et des diverses communautés, les pêcheurs, les entreprises et les environnementalistes, qui constituent une base de soutien complète. Pendant l'étude du projet de loi concernant les océans du Canada faite par le comité permanent de l'autre endroit, des Canadiens sont venus de partout pour se faire entendre. Cet important projet de loi a soulevé un intérêt considérable. Les témoins ont demandé que le projet de loi tienne davantage compte des parties prenantes. Il a été modifié en conséquence. Ils ont demandé que les zones de protection marine et les catégories de qualité du milieu marin soient étendues, ce qui a été fait. Ils ont demandé que les dispositions d'exécution de la loi aient plus de mordant. Les amendements nécessaires ont été apportés.

Outre tout cela, la Loi concernant les océans du Canada reconnaît la valeur des connaissances écologiques traditionnelles et encourage le développement durable qui est, à long terme, le seul espoir pour l'industrie de la pêche. Que ce soit sur la côte est ou sur la côte ouest, nous devons assurer le développement durable.

Le projet de loi adopte une approche prudente à l'égard de la gestion des océans. Je dirais presque qu'il pêche par excès de prudence. Il reconnaît aussi les droits des autochtones et les droits issus des traités.

Qui est à l'origine de ces changements? Des Canadiens, bien sûr, des Canadiens qui comprennent les océans, qui ont passé leur vie près des océans et qui gagnent leur vie grâce aux produits des océans, des Canadiens que l'on a consultés au fil des ans, qui ont écrit au ministre des Pêches et des Océans et qui ont comparu devant le comité permanent de la Chambre. Ils reconnaissent l'importance de cette mesure législative et l'importance de veiller à ce que les générations futures puissent continuer de profiter de nos vastes ressources océaniques.

D'autres amendements clés visant à renforcer ce projet de loi ont été proposés à la Chambre lors du débat à l'étape du rapport. Le préambule a été réécrit de façon à mettre en relief la méthode des écosystèmes, un concept sous-jacent à la stratégie de gestion des océans décrite dans la partie II du projet de loi. Le préambule a également été modifié afin de reconnaître les possibilités importantes qu'offrent les trois océans du Canada.

La Loi concernant les océans du Canada a été rédigée de façon à garantir une coopération optimale à tous les niveaux - international, national, provincial et local. Elle représente un type très encourageant de coopération dans notre pays. Elle reconnaît les intérêts légitimes de toute une série de protagonistes. Elle reflète un engagement à l'égard de la coopération entre le gouvernement fédéral et les différents protagonistes. Cet engagement se retrouve partout dans la loi qui encourage la gestion intégrée des ressources marines, soit un travail d'équipe à tous les niveaux des gouvernements, de l'industrie et des collectivités.

La Loi concernant les océans du Canada constitue un engagement à l'égard de la coopération en matière de gestion des océans. Le rôle des provinces est mis en relief. Il est clairement stipulé dans le préambule, qui décrit les buts de cette mesure législative, que la Loi concernant les océans du Canada respecte l'intégrité territoriale, les droits et les privilèges des provinces et des territoires du Canada. Elle ne change rien au cadre constitutionnel actuel ou à la répartition des pouvoirs entre le gouvernement fédéral et les provinces.

Encore une fois, la Loi concernant les océans du Canada porte sur la coopération. Cette loi permettra aux Canadiens de travailler ensemble à la préservation de leurs ressources maritimes. En fait, le ministre des Pêches et des Océans avait dit clairement qu'il prendrait rapidement, sérieusement et efficacement des mesures pour concevoir cette loi, mais qu'il n'agirait pas seul. Il s'était engagé à solliciter les conseils et les idées de tous les Canadiens pour élaborer une stratégie de gestion des océans qui allie les objectifs nationaux et les décisions régionales et qui établisse des buts nationaux fondés sur la sagesse, les besoins et les désirs des populations locales.

Bref, la Loi concernant les océans du Canada établit la compétence du Canada sur ses zones maritimes. Elle jette les bases d'un leadership fédéral solide et éclairé dans le domaine des océans et crée le cadre législatif nécessaire à l'élaboration d'une stratégie de gestion des océans moderne et très attendue.

En établissant ces mesures, le projet de loi crée les conditions qui permettront à tous les Canadiens d'assurer à nos océans un avenir dont nous pourrons tous être fiers. En recevant la sanction royale, ce projet de loi permettra au Canada de maintenir sa réputation de leader dans la gestion des ressource maritimes.

Les autres pays reconnaissent que le Canada donne aux océans une place prioritaire au nombre de ses objectifs politiques. Je suis particulièrement heureux de penser que l'adoption du projet de loi sur les océans maintiendra la renommée du Canada.

En tant que sénateur originaire de la Colombie-Britannique, je constate toute l'importance des océans pour la survie de notre pays et l'importance des mesures qui sont prises. Je suis sûr que mes bons amis des provinces atlantiques ressentent la même chose à l'autre bout du pays.

Les gouvernements et les industries du monde entier connaissent actuellement un moment critique, devant régler des problèmes de portée nationale et internationale en manifestant un leadership éclairé, de la coopération et du dévouement à la cause des grands principes environnementaux. La Loi sur les océans du Canada est la concrétisation de tout cela. Elle aidera le Canada à passer ce moment critique pour finalement traiter la question des océans dans un esprit propre au XXIe siècle.

Je tiens à remercier les gens de partout au Canada qui ont des allégeances politiques différentes, tant nos collègues de l'opposition à la Chambre que les autres, qui ont collaboré à mettre au point ce projet de loi très prometteur pour nous tous.

L'honorable Donald H. Oliver: Honorables sénateurs, pour commencer, j'aimerais féliciter le sénateur Perrault de l'excellence de son exposé. Il nous a donné un aperçu complet et détaillé du projet de loi C-26.

C'est avec grand plaisir que je prends part aujourd'hui au débat sur la Loi concernant les océans du Canada. Je suis natif de la Nouvelle-Écosse, que je représente ici. C'est une province dont l'existence et l'économie sont liées à la mer. Que ce soit dans les chantiers navals, la pêche ou le transport maritime, les hommes et les femmes de la Nouvelle-Écosse tirent leur subsistance de la mer depuis des centaines d'années. C'est pourquoi il est des plus importants que la Chambre étudie de très près cette mesure législative. Elle aura une influence sur la capacité des gens à gagner leur vie dans la pêche et les autres entreprises qui dépendent de l'océan, et ce, sur les trois côtes de notre pays, comme l'a déjà fait remarquer le sénateur Perrault.

J'ai passé au peigne fin les mémoires des témoins qui ont comparu devant le comité des pêches et des océans de l'autre endroit. Un thème se retrouve dans presque tous leurs exposés: n'allez pas si vite. Nous n'avons pas encore été consultés; nous ne sommes pas certains des effets qu'aura ce projet de loi.

La table ronde de l'association des pêcheurs de la Nouvelle-Écosse a dit de ce projet de loi que:

Les pêcheurs n'ont pas été consultés et n'ont pas participé à son élaboration.

La critique sans doute la plus révélatrice du processus qui a abouti à l'élaboration de ce projet de loi se dégage d'un échange entre le président du comité, le député libéral Ron MacDonald, et Paul Okalik, conseiller de la société Nunavut Tungavik Inc, qui représentait les Inuit.

  • (1510)
Cet échange va comme suit:

Le président: Est-ce que la NTI a été expressement incluse dans les consultations préalables au dépôt du projet de loi en première lecture?

M. Okalik: Non.

Le président: Pas du tout? Vous en êtes absolument sûr?

Toute cette question de consultation nous hante depuis environ une semaine, à savoir qui a été consulté et qui n'a pas été consulté. Le fait que NTI, qui vient tout juste de conclure une entente très importante avec la Couronne, n'ait pas été consultée m'inquiète. Nous avons trois océans, et une grande partie de l'un de ces océans se trouve dans la région visée par l'accord. Il est étonnant que vous n'ayez pas été consultés.

Personne ne vous a consultés ou demandé si vous étiez en désaccord?

M. Okalik: Non.

Le président: C'est la première fois qu'on vous consulte?

M. Okalik: Oui.

De toute évidence, une consultation a eu lieu, mais le processus a été, au mieux, très superficiel. Les sénateurs ont déjà vu d'autres cas où l'on a omis de consulter de grands groupes de personnes parce qu'ils étaient susceptibles de s'opposer à une mesure législative. Il suffit de songer au projet de loi sur le contrôle des armes à feu présenté lors de la session précédente. En fait, dans ce cas, la seule véritable consultation a été menée par les sénateurs de ce côté du Sénat.

Par conséquent, j'invite les membres du comité sénatorial permanent des pêches, qui étudiera ce projet de loi, à prendre le temps d'entendre des témoins et de s'assurer que tout le monde soit conscient de ses répercussions.

En ce qui concerne les éléments précis du projet de loi, ils visent trois objectifs. D'abord, reconnaître en droit une zone économique exclusive incluant la zone de pêche de 200 milles, ainsi que toutes les activités économiques provenant de l'océan jusqu'à 200 milles marins de la ligne de base de la côte. Dans cette zone, le Canada aurait des droits quant à l'exploration, la conservation et la gestion de toutes les ressources biologiques et non biologiques des eaux, des fonds marins et du sous-sol. C'est un but valable et nous devons féliciter le gouvernement de l'avoir inclus dans le projet de loi.

Cependant, les deux autres parties du projet de loi n'échappent pas autant à la critique. La partie II établit le cadre législatif nécessaire à l'élaboration d'une stratégie nationale de gestion des océans. La partie III clarifie les responsabilités quant à la gestion des océans du Canada. Je voudrais attirer l'attention des honorables sénateurs sur certains articles plus discutables.

Les articles 28 à 36 portent sur la mise en oeuvre d'une stratégie de gestion des écosystèmes estuariens, côtiers et marins. Voici certains des problèmes que posent ces articles.

L'article 29 stipule que la stratégie sera élaborée en collaboration avec un certain nombre d'organisations qui sont énumérées, mais les rédacteurs ont ajouté la phrase «autres personnes de droit public et de droit privé». Je voudrais savoir comment on déterminera ces autres personnes de droit public et de droit privé. Le critère déterminant sera-t-il l'intérêt qu'elles portent aux océans et aux pêcheries ou un autre critère quelconque? Ce point est important car cette phrase est répétée à maintes reprises dans le projet de loi et elle donne lieu à un certain flou.

L'article 32 traite de la mise en oeuvre des plans de gestion intégrés et utilise le mot «peut» en ce qui concerne la consultation par le ministre. Autrement dit, le ministre des Pêches et Océans n'a pas à consulter d'autres personnes en ce qui concerne la création d'organismes consultatifs ou de gestion et la nomination de membres à ces organismes. En critiquant ce libellé et en recommandant que le mot «peut» soit remplacé par quelque chose de plus fort, comme «doit», l'Institut canadien des océans déclarait:

Le ministre des Pêches et Océans ne peut aucunement espérer mettre au point une stratégie de gestion des océans, ni la mettre en oeuvre, simplement en fonction de ce qui se fait à son ministère. L'aide et la collaboration d'autres organismes est nécessaire et, par conséquent, le ministre devrait être tenu de les consulter.

Par conséquent, on devrait utiliser le mot «doit» plutôt que le mot «peut», qui laisse trop de liberté au ministre.

Également dans l'article 32, on utilise le mot «gestion» dans le contexte de la constitution d'«organismes de gestion». Cela signifie que le projet de loi permettra la délégation de l'autorité de gestion de ressources à toute personne que le ministre pourra juger bon de désigner. Cependant, le projet de loi ne définit pas les organismes de gestion.

La gestion des ressources halieutiques, en particulier les décisions relatives à l'accès aux ressources et à leur répartition, est extrêmement critique pour les pêcheurs. Je crains que la délégation de ces décisions puisse conduire à la gestion des pêches par des groupes d'intérêts spéciaux au détriment des pêcheurs indépendants. Il devrait être clair dans la loi que les pêcheurs indépendants ou les groupes de pêcheurs peuvent également constituer des organismes de gestion.

Le paragraphe 35(3) donne au gouverneur en conseil de vastes pouvoirs en ce qui concerne l'adoption de règlements ou directives relatifs aux critères concernant la qualité du milieu dans les eaux côtières et marines et la mise en oeuvre d'accords préparés conclus en vertu de ce projet de loi. J'estime que ces règlements, comme tout règlement pris en vertu de ce projet de loi, devraient être l'objet d'un examen par des comités du Parlement dont les membres ont l'expérience du monde des pêches et des océans. Cela garantirait au moins une participation des sénateurs qui ont une grande expérience des pêches. L'examen en comité garantirait aussi des audiences publiques sur l'effet d'un tel règlement sur l'industrie des pêches. Par conséquent, on aurait une approche plus équilibrée au lieu de tout laisser aux hauts fonctionnaires du ministère des Pêches et Océans.

Je passe maintenant à la partie III du projet de loi, qui contient des articles qui permettent au ministre de facturer l'utilisation des services et des installations. La facturation sera fixée par règlement publié dans la Gazette du Canada.

Les articles 47 à 50 inclusivement, qui établissent le système de facturation, ont fait l'objet d'intenses critiques de la part de l'Association des pêcheurs de crabes des neiges de la zone 19, de Cheticamp, en Nouvelle-Écosse. Voici ce que les représentants de l'association avaient à dire au comité des pêches et des océans de l'autre endroit :

Dans la partie III, nous estimons que le libellé de l'article 49, où l'on autorise le ministre, sous réserve de la réglementation du Conseil du Trésor, à fixer les prix à payer pour la fourniture de services ou d'installations, est ambigu. Nous ne voyons aucune définition du mot «installation» [...].

L'article 50, qui donne aussi au ministre la possibilité d'imposer des frais pour des produits, droits et avantages, nous préoccupe également beaucoup en ce qui concerne les accords de partenariat et les structures de prix double. D'après notre conception du partenariat entre les secteurs public et privé, bon nombre de services qui ont été fournis jusqu'ici par générosité gouvernementale pourraient être confiés en sous-traitance au secteur privé. Ce transfert de services viserait à diminuer les coûts et la nécessité d'imposer des frais.

Dans les cas où les pêcheurs assument le coût de services comme la surveillance à quai, la collecte de données et la recherche scientifique, nous estimons que les prix des produits, droits et avantages se rapportant à ces services doivent être ajustés en conséquence si l'on veut éviter une discrimination flagrante et l'imposition d'un prix double.

Il est évident que le comité sénatorial permanent des pêches doit examiner attentivement les questions soulevées par l'Association des pêcheurs de crabes des neiges dans le secteur 19. Au comité, nous pouvons interroger les représentants du ministère et les fonctionnaires pour voir si les préoccupations de l'association sont fondées et, dans l'affirmative, déterminer si le ministère va apporter des ajustements afin que les pêcheurs n'aient pas à payer deux fois pour le même service.

Les prix exigés aux termes des articles 47 et 49 en ce qui concerne les services, l'utilisation des installations et les nombreuses approbations nécessaires ne doivent pas dépasser le coût de ces services, etc. Cependant, à l'article 48, les prix à payer pour la fourniture de produits ou l'attribution de droits ou avantages au titre du projet de loi par le ministre lui-même ou le ministère ne sont pas assujettis aux mêmes limites. Les honorables sénateurs devraient se renseigner pour savoir pourquoi on fait cette différence dans ces trois articles. Il me semble qu'il n'y a aucune raison valable pour que cela se produise, si ce n'est qu'on veut escroquer les utilisateurs du service. Si c'est le cas, nous voudrons peut-être amender ce projet de loi pour nous assurer que tous les prix exigés pour les services ne sont pas supérieurs aux coûts de fourniture de ces services.

La Fédération maritime du Canada craint que les prix exigés pour les services fournis par la Garde côtière ne soient exorbitants. Les membres de la fédération croient qu'il y a de grandes lacunes dans la prestation des services par la Garde côtière et que les utilisateurs devraient payer un montant équitable pour la prestation de services sûrs et rentables en partant du principe que l'utilisateur-payeur est celui qui décide. Ils n'ont rien contre le fait de payer un prix raisonnable s'il peut être justifié.

Honorables sénateurs, à mon avis, ce projet de loi devrait faire l'objet d'un examen approfondi au comité et les sénateurs qui siégeront alors feront bien d'attacher la plus grande importance à la modification du processus de prise de règlements que prévoit ce projet de loi. Les articles 25, 26, 35(3) et 47 à 50 confèrent au gouvernement le pouvoir de réglementer divers aspects de la gestion des océans. Tous les règlements établis en conformité avec ce projet de loi devraient plutôt être renvoyés au comité sénatorial permanent des pêches, dont les membres sont des spécialistes du domaine des pêches et des océans.

Je recommande que les règlements établis en conformité avec ce projet de loi soient déposés sur le bureau des deux Chambres et, après quoi, automatiquement renvoyés, à tout le moins en ce qui concerne cette Chambre, au comité des pêches. Ces règlements ne devraient entrer en vigueur que 90 jours après leur renvoi au comité compétent. Cela permettrait aux sénateurs et aux autres personnes intéressées de se faire entendre avant qu'ils entrent en vigueur.

Cette procédure devrait également s'appliquer aux modifications et règlements adoptés en conformité avec ce projet de loi. J'imagine que, le cas échéant, les augmentations de frais donneront lieu à des modifications des règlements en vigueur. Le comité sénatorial permanent des banques et du commerce a appliqué cette procédure avec succès au moins à deux reprises.

Ainsi, dans son rapport de 1992 sur la révision des banques à charte, le comité des banques a recommandé que les règlements modificatifs lui soient renvoyés aux fins d'examen, ce qui fut fait. De même, en 1993, lors de l'étude du projet de loi sur la Société pour l'expansion des exportations, le comité a demandé expressément au ministre Wilson de lui renvoyer les règlements établis en conformité avec cette loi, ce qui fut fait également. Les honorables sénateurs sont donc à même de constater que mon idée concernant les règlements établis en conformité avec le projet de loi sur les océans ne constitue pas un précédent.

Je vous remercie, honorables sénateurs, de l'occasion qui m'a été offerte de prendre part au débat sur ce projet de loi. Je compte bien participer aux délibérations de notre comité.

Le sénateur Perrault: Honorables sénateurs...

Son Honneur le Président pro tempore: Honorables sénateurs, je dois informer le Sénat que, si l'honorable sénateur Perrault prend la parole maintenant, son discours aura pour effet de mettre fin au débat sur la motion portant deuxième lecture du projet de loi.

Le sénateur Perrault: Honorables sénateurs, le sénateur Oliver a soulevé certains points importants. J'espère qu'ils pourront être examinés à sa satisfaction lorsque le projet de loi sera renvoyé à un comité et je vais proposer dans un instant qu'il soit renvoyé au comité sénatorial permanent des pêches.

Son Honneur le Président pro tempore: Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.

(La motion est adoptée et le projet de loi est lu pour la deuxième fois.)

 

Renvoi au comité

Son Honneur le Président pro tempore: Honorables sénateurs, quand lirons-nous le projet de loi une troisième fois?

(Sur la motion du sénateur Perrault, le projet de loi est renvoyé au comité sénatorial permanent des pêches.

TERRE-NEUVE

LES CHANGEMENTS APPORTÉS AU SYSTÈME SCOLAIRE-
LA MODIFICATION DE LA CLAUSE 17 DE LA CONSTITUTION-
LE RAPPORT DU COMITÉ-MOTION D'AMENDEMENT-
SUITE DU DéBAT

L'ordre du jour appelle:

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Rompkey, c.p., appuyé par l'honorable sénateur De Bané, c.p. tendant à l'adoption du treizième rapport du comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles (modification de la Constitution du Canada, clause 17 des Conditions de l'union de Terre-Neuve avec le Canada), déposé auprès du greffier du Sénat le 17 juillet 1996.

Et sur la motion en amendement de l'honorable sénateur Doody, appuyé par l'honorable sénateur Kinsella, que le rapport ne soit pas adopté maintenant, mais qu'il soit modifié par substitution aux mots «sans amendement, mais avec une opinion dissidente», des mots :

avec l'amendement suivant:

Supprimer le passage de l'alinéa b) de la clause 17 qui précède le sous-alinéa (i) et le remplacer par les mots «là où le nombre le justifie: ».

L'honorable Noël A. Kinsella: Honorables sénateurs, je sais que le mercredi nous essayons de siéger moins longtemps, mais comme je ne voudrais pas donner l'impression que les sénateurs de ce côté-ci retardent le débat sur cette importante question, je vais aller de l'avant. Toutefois, je serai bref.

Honorables sénateurs, je suis d'avis qu'il ne saurait y avoir un débat plus important au Sénat que celui dont nous sommes actuellement saisis, qui est un exemple classique de la lutte de pouvoir qui oppose depuis toujours la majorité, d'une part, et la minorité, d'autre part. Il s'agit ici, honorables sénateurs, d'un affrontement entre la minorité catholique romaine, la minorité pentecôtiste et la minorité adventiste, d'une part, et le gouvernement de Terre-Neuve et du Labrador qui s'entête, d'autre part.

D'un côté, il y a des groupes minoritaires qui jouissent d'un droit à des écoles confessionnelles. Ces droits sont protégés par la Constitution du Canada et, dans certains cas, ils sont inscrits dans la Constitution parce qu'ils font partie de l'entente qui a permis à Terre-Neuve d'entrer dans la Confédération. De l'autre côté, il y a le gouvernement de Terre-Neuve et du Labrador qui, utilisant à fond l'extraordinaire pouvoir de l'État, cherche à retirer aux groupes minoritaires, et contre leur gré, leurs droits.

Le droit que l'État tente d'enlever de force aux communautés pentecôtiste et catholique romaine, entre autres, est un droit qu'on a délibérément placé hors de la portée des législateurs, en inscrivant le droit à des écoles confessionnelles dans la Constitution même.

La tentative que fait le gouvernement de Terre-Neuve et du Labrador pour retirer à des gens leur droit à des écoles confessionnelles, contre leur gré, est d'une effronterie éhontée. Le gouvernement provincial a reçu un appui majoritaire à l'égard de cette mesure, l'appui de tous les partis représentés à l'Assemblée législative de Terre-Neuve. Il ne fait aucun doute dans l'esprit des minorités que leurs partis politiques les ont trahies.

La province en a profité pour tenir un référendum et la majorité qui s'est prononcée a été favorable à une réforme du système scolaire. D'autres, honorables sénateurs, se sont demandé si la façon dont s'est tenu ce référendum était équitable. Ce qui est clair, c'est qu'en vue du référendum, le gouvernement a fait paraître une brochure dans laquelle on déclare que «les parents ont droit à l'école de leur confession, là où le nombre le justifie». Du point de vue des minorités, le pouvoir écrasant de la majorité qui s'est exprimé au référendum fait peur, comme le démontre d'ailleurs cette affaire.

La notion de la loi du plus fort et l'idée que toute justice est affaire d'opportunisme sont bien enracinées dans l'histoire des hommes. Toutefois, cette histoire n'a jamais été favorable aux minorités. La situation est tragiquement illustrée dans le récit des négociations de paix entre les Athéniens et les Mèdes. Pour les Athéniens, en ce monde, la loi n'était qu'une affaire d'équilibre de pouvoirs entre égaux; le plus fort l'emportait toujours et le plus faible devait endurer son sort.

Nul doute que le Parti réformiste, avec son engouement aveugle pour les référendums, épouserait cette conception où les puissants ont des droits aussi longtemps qu'ils ont le pouvoir tandis que les faibles ne peuvent se montrer injustes qu'en ne supportant pas leur sort.

Honorables sénateurs, les Hébreux, qui étaient gardés en captivité en Babylonie pendant le sixième siècle avant J.C., ont acquis leur liberté non pas grâce au pouvoir de la minorité mais plutôt grâce à la grande charte de Cyrus le Grand, qui a proclamé en 538 avant J.-C. que les Hébreux étaient libres de retourner dans leur patrie; il s'agit là de l'un des exemples les plus anciens de la reconnaissance des droits d'une confession religieuse minoritaire protégés par le pouvoir de la majorité.

Honorables sénateurs, nous pouvons aussi nous reporter à des exemples canadiens où la majorité s'est portée à la défense des droits de la minorité. Le 3 mars 1896, sir Wilfrid Laurier a prononcé ce que certains considèrent comme son meilleur discours. Il s'est porté à la défense des droits de la minorité au Manitoba à l'étape de la deuxième lecture du projet de loi 58, intitulé Acte réparateur. Wilfrid Laurier, qui n'était pas encore premier ministre, a demandé si le gouvernement

 

«était mû par le désir de rendre justice à la minorité».
  • (1530)
Et il poursuit:

... dans une société dirigée par un gouvernement libre, dans un pays libre comme celui-ci, sur toute question impliquant des conceptions différentes du juste et de l'injuste, des types différents de ce qui est juste ou injuste, c'est aux hommes d'État de ne pas violenter les opinions d'une partie de la population, mais de s'efforcer à amener toute la population à un type uniforme et à une conception uniforme de ce qui est juste.

Honorables sénateurs, nous n'avons pas besoin d'être aussi éloquents que Laurier, et nous ne le sommes pas, bien sûr, pour demander si le gouvernement de Terre-Neuve avait besoin de cette modification de la clause 17 pour faire la réforme de l'éducation qu'il souhaitait. D'après mon analyse, qui est fondée sur les travaux du comité, il n'est pas du tout clair que la modification ait été ou soit nécessaire.

La thèse avancée par les partisans de la résolution, celle de l'efficience et de la compression des dépenses, a de quoi inspirer la frayeur à tout défenseur des droits. Peut-être que les droits de la personne ou les droits des minorités n'ont rien d'efficace, mais, comme l'a dit Clifford Lincoln, les droits restent toujours des droits. Sir Wilfrid Laurier savait, à une époque si lointaine, que les droits ont pour rôle de limiter et de civiliser le pouvoir de l'État et d'en atténuer les effets.

Contrairement à cette conception utilitariste selon laquelle la fin justifie les moyens, le concept des droits de la personne est une approche éthique qui impose des limites au pouvoir. C'est ce que dit une lettre du 27 mai 1996 que l'archevêque Francis J. Spence, président de la Conférence des évêques catholiques du Canada, a écrite au premier ministre:

La responsabilité première du gouvernement du Canada [...] n'est pas la réforme du système d'éducation de Terre-Neuve, dont toutes les parties reconnaissent la nécessité, mais la protection des droits de la minorité, aux termes de notre Constitution, contre l'arbitraire de la majorité.

Les majorités ne peuvent arbitrairement retirer aux minorités les garanties constitutionnelles qu'elles ont durement gagnées. Qu'il soit clairement dit que la communauté catholique, représentant 36 ou 37 p. 100 de la population, a bien précisé qu'elle ne veut pas renoncer à son droit de diriger des écoles catholiques. De même, la communauté pentecôtiste, représentant environ 7 p. 100 de la population de Terre-Neuve et du Labrador, a soutenu qu'elle n'était pas disposée à céder à l'État le droit qui lui est garanti dans la Constitution de diriger des écoles confessionnelles et de s'en remettre au bon vouloir de la majorité.

Honorables sénateurs, les Athéniens ont compris il y a très longtemps ce que le poète anglais Dryden a écrit à l'aube de l'ère moderne:

Les lois sont vaines qui par droit nous protègent si impunément les rois les peuvent détruire.

Les gouvernements doivent reconnaître l'indivisibilité des droits et respecter les droits des minorités qui sont consacrés dans la Constitution. Les Conditions de l'union de Terre-Neuve sont inscrites dans la Constitution du Canada. Le premier ministre Tobin ne semble plus les respecter. Nous, sénateurs, ne pouvons souscrire à cette méthode de gouvernement non conforme à nos traditions historiques.

L'affaire dont le Sénat est maintenant saisi, c'est que les groupes minoritaires, dont les catholiques romains et les pentecôtistes, risquent de perdre un droit que leur garantit la Constitution, un droit qui fait partie des Conditions mêmes de l'union de Terre-Neuve au Canada.

Vers qui, je vous le demande, ces groupes peuvent-ils se tourner? Peuvent-ils essayer de faire entendre leur voix à l'assemblée législative? Celle-ci a-t-elle trahi les minorités avec l'accord des trois partis politiques? La volonté de la majorité a-t-elle suffi à garantir les droits de la minorité? Ma foi non! C'est évident quand on voit dans toute l'histoire les nombreux conflits entre la minorité et la majorité. Voilà exactement pourquoi la politique réformiste d'adhésion aveugle au gouvernement par référendum est rarement dans l'intérêt public et presque jamais dans l'intérêt légitime de la minorité.

Il y a des questions qui exigent vraiment une action majoritaire et d'autres qui sont au-delà du cadre de la décision de la majorité. La règle de la majorité a beaucoup de répercussions lorsqu'il s'agit de libertés civiles comme la liberté de parole, la liberté de réunion et la liberté d'association. J'ajouterai que, comme le mot «majorité» signifie la majeure partie, cela suppose qu'il y a d'autres parties ou encore une ou plusieurs minorités.

Certains diront que les minorités sont des entités marginales dans la société; d'autres, que les minorités sont la preuve que la société peut offrir des solutions de rechange sûres. Si le consentement est le fondement du pouvoir démocratique, toute violation du droit à l'autodétermination nierait donc aussi la logique des majorités. C'est là une puissante raison pour que les majorités tolèrent l'existence d'autres groupes.

Le référendum terre-neuvien constitue le fondement de l'argumentation du premier ministre Tobin - et de la nécessité d'être prudent au plan financier. Est-il prudent d'agir, toutefois, lorsque 28 p. 100 de la population se sont prononcés en faveur d'une réforme du système des écoles confessionnelles?

Une autre argumentation avancée par le premier ministre Tobin est que:

...tout cela n'est qu'une affaire de pouvoir, un pouvoir que les Églises ne veulent pas abandonner.

Pourquoi voudraient-elles renoncer à leurs droits garantis par la Constitution en faveur d'un parti politique, de quelque parti politique que ce soit?

Comme l'a dit le professeur Colin Irving lorsqu'il a témoigné devant notre comité:

Si vous choisissez de «respecter» le résultat du référendum, vous pouvez, d'après moi, accepter le vote en faveur d'une réforme en tenant compte du fait que la proposition soumise à ceux qui ont voté «oui» prévoyait des écoles confessionnelles «lorsque le nombre de justifie». Si le libellé proposé est remplacé par la condition «lorsque le nombre le justifie», je crois que vous respecterez le résultat du référendum tout en faisant de la clause une véritable garantie constitutionnelle semblable aux autres. À mon avis, c'est la seule solution.

Par conséquent, honorables sénateurs, nous devrions appuyer l'amendement proposé par le sénateur Doody.

L'honorable Jerahmiel S. Grafstein: L'honorable sénateur me permettra-t-il de poser une question?

Le sénateur Kinsella: Certainement.

Le sénateur Grafstein: D'après l'expérience de mon collègue en la matière, en vertu de la loi actuelle, y a-t-il des droits garantis par la Constitution pour les minorités qui veulent que leurs enfants reçoivent une éducation laïque ou non confessionnelle à Terre-Neuve?

Le sénateur Kinsella: Cette question a été soulevée durant les audiences du comité à Terre-Neuve. Rien n'interdit au gouvernement de Terre-Neuve d'établir de telles écoles.

Le sénateur Rompkey: Il y a la question de l'argent.

Le sénateur Kinsella: Légalement, rien ne l'interdit.

Le sénateur Grafstein: Ce n'est pas ce que je veux savoir. Ces minorités à Terre-Neuve ont-elles, en vertu de la loi actuelle, un droit égal et garanti par la Constitution qui leur permet de donner à leurs enfants une éducation laïque ou non confessionnelle?

Le sénateur Kinsella: On me dit que la réponse est non.

Le sénateur Grafstein: J'aborderai peut-être cette question ultérieurement, au cours du débat.

  • (1540)
L'honorable Richard J. Stanbury: Honorables sénateurs, compte tenu du point que j'ai soulevé hier au sujet de l'interprétation de la clause, je voudrais poser une question fort simple au sénateur Kinsella.

À votre point de vue, l'alinéa a) de la clause 17 accorde-t-il le droit garanti par la Constitution aux écoles confessionnelles des minorités protégées de donner une éducation religieuse?

Le sénateur Kinsella: Je pense que la réponse est non dans la mesure où, selon le libellé actuel de la clause, cette question relève des provinces. La promesse faite à la population de Terre-Neuve et du Labrador, telle que formulée dans le document qui a été distribué, ou l'engagement pris à cet égard, c'est que le droit aux écoles uniconfessionnelles serait maintenu là où le nombre d'élèves le justifie. C'est une solution d'un autre point de vue.

J'ai des réserves à l'égard de toute la résolution, mais les parties qui ont témoigné devant le comité, à Terre-Neuve, et ici, à Ottawa, ont parlé de ce qu'elles trouveraient acceptable relativement à la disposition «là où le nombre le justifie», qui leur avait été promise dans la question référendaire.

Je crois qu'il y a un problème dans le libellé de la résolution. J'ai entendu vos remarques l'autre jour sur votre interprétation de la résolution. Cela ne peut faire autrement que nous amener à la conclusion qu'il y a un problème dans le libellé. Vous voyez un problème et j'en vois un aussi à cause du droit qui sera abrogé, et cela ne faisait pas partie de l'entente proposée lors du référendum.

Le sénateur Stanbury: Lorsque vous en aurez la chance, auriez-vous l'obligeance de lire attentivement la clause 17? Sauf le respect que je vous dois, il me semble que vous faites exactement ce que le sénateur Doody et d'autres ont fait, soit confondre les alinéas a) et b) et les sous-alinéas b)(i) et b)(ii), en disant que les écoles confessionnelles ne jouiront plus des droits consacrés dans la Constitution, alors que je crois qu'on ne peut pas lire l'alinéa a) sans conclure qu'elles continueront de jouir de ces droits. Vous les confondez avec les écoles uniconfessionnelles visées au sous-alinéa b)(i), et c'est là qu'intervient l'amendement du sénateur Doody, à savoir si on aura «sous réserve du droit provincial d'application générale» ou «là où le nombre le justifie».

Toutefois, ce n'est pas là la question que je posais. Je parle des écoles confessionnelles, même si elles sont vraiment des écoles interconfessionnelles, et il est clair qu'elles continueront de jouir de tous les droits consacrés dans la Constitution.

Le sénateur Doody: Beaucoup de gens ne sont pas d'accord.

Le sénateur Kinsella: Le débat porte sur l'amendement du sénateur Doody, qui concerne l'alinéa b), mais je vais relire la clause à la lumière de ce que vous avez dit. Cependant, aux fins du débat sur l'amendement du sénateur Doody, le problème est l'absence des mots «là où le nombre le justifie» à l'alinéa b), tel qu'on l'avait promis.

Le sénateur Stanbury: C'est une question beaucoup plus étroite.

L'honorable P. Derek Lewis: J'ai deux questions à poser au sénateur Kinsella. Premièrement, je crois comprendre que, si vous appuyez l'amendement du sénateur Doody, cela veut dire que vous appuieriez la résolution si elle était modifiée de cette façon.

Le sénateur Lynch-Staunton: L'amendement à la motion ou l'amendement du sénateur Doody?

Le sénateur Lewis: Il appuie l'amendement à la motion. Si cet amendement est adopté, appuierait-il la motion elle-même? Il a fait savoir que oui. Nous étions tous les deux aux audiences du comité. Dans le rapport, il était question des mots «là où le nombre le justifie». Comme il a été dit, et comme des témoins l'ont affirmé, les adventistes du septième jour, qui sont un des sept groupes protégés, perdraient sans aucun doute leurs droits. Il s'agit d'une très petite minorité. Je crois qu'ils ne représentent que 0,1 p. 100 de la population. Si l'amendement proposé par le sénateur Doody avait pour résultat de faire perdre ses droits à cette petite minorité, comment pouvez-vous affirmer être motivés par la volonté de protéger les droits des minorités?

Le sénateur Kinsella: C'est une très bonne question, sénateur Lewis. Lorsque nous avons examiné cet aspect sous l'angle de la protection des droits des minorités, puisque la communauté adventiste du septième jour fait partie des groupes dont le droit à l'enseignement confessionnel est protégé par la Constitution, je crois savoir qu'il y a quelques jours, cette communauté a écrit à la présidente du comité des affaires juridiques et constitutionnelles pour l'informer de son appui à la proposition d'amendement du sénateur Doody et lui dire qu'elle estimait que, dans les collectivités où le nombre est suffisant, ses intérêts seraient protégés.

Je propose que la présidente du comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles fasse circuler cette lettre de l'Église adventiste du septième jour parmi tous les sénateurs car elle traite précisément de cette question.

Le sénateur Lewis: Je ne suis pas au courant de cette lettre. Si cela a pour effet de supprimer leurs droits, comment conciliez-vous ce résultat avec votre préoccupation et celle du Sénat pour les droits des minorités?

Le sénateur Kinsella: C'est un problème. Les choses ne sont absolument pas symétriques. Les communautés qui ont elles-mêmes reconnu être tellement petites - je ne me souviens pas des statistiques, mais je crois que c'est moins de un pour cent - ont aussi indiqué qu'elles préféreraient que la résolution actuelle soit modifiée pour permettre une détermination du droit qui serait ensuite protégé par la nouvelle Constitution en vertu du critère «là où le nombre le justifie», celui-ci devant être laissé au jugement non pas de l'assemblée législative, mais à celui d'un tiers ou d'un tribunal. C'est ce qu'elles semblent dire.

Je peux voir que cette communauté, en tant que petite minorité, s'en trouverait mieux si la résolution dont nous sommes saisis était rejetée. Si j'étais leur porte-parole, je dirais que les droits dont elle jouit à présent en tant que minorité seraient mieux protégés par le statu quo que par cette résolution, mais elle semble dire qu'elle est prête à accepter une modification. Cependant, la modification qu'elle était prête à accepter, ce n'est pas la clause 17 telle qu'elle se présente dans cette résolution, mais une clause où figurerait l'amendement proposé par le sénateur Doody.

Le sénateur Doody: Elle a davantage confiance dans les tribunaux que dans les politiciens.

Le sénateur Lewis: Aujourd'hui, il s'agit de l'Église adventiste du septième jour, mais, dans un avenir plus ou moins rapproché, il se pourrait que l'une des dénominations reconnues voie le nombre de ses fidèles diminuer à un point tel qu'elle constituerait une très petite minorité, et la même chose s'appliquerait dans son cas à ce moment-là.

L'honorable Bill Rompkey: J'aimerais demander au sénateur Kinsella de répondre à la question que le sénateur Watt a posée hier. À part les minorités qui sont membres des églises chrétiennes, il existe d'autres minorités dans les provinces. Je ne parle pas des minorités religieuses, mais des autres minorités telles les autochtones, par exemple.

Il y a trois groupes autochtones distincts dans la province. Ces groupes auraient-ils une plus grande certitude de pouvoir contrôler leurs écoles en vertu de la nouvelle clause 17 ou en vertu de l'ancienne? Le sénateur Kinsella, qui était avec moi à St. John's, a entendu le témoignage. Seuls deux chefs autochtones ont comparu: Ovide Mercredi, ici à Ottawa, et Todd Russell, président de l'association des métis du Labrador. En réponse à une question que je lui posais pour savoir s'ils auraient davantage de latitude en vertu de la nouvelle clause 17 pour créer des conseils scolaires autochtones, M. Russell a dit:

En ce qui concerne votre question, je répondrais que cette clause nous offre probablement une meilleure occasion de le faire que l'ancienne [...]

Le sénateur pourrait-il expliquer dans quelle mesure les autochtones pourraient exercer leurs droits et s'ils pourraient avoir leurs propres conseils scolaires?

Le sénateur Kinsella: Si tout allait bien, ce pourrait être le résultat, mais j'encourage les peuples autochtones de Terre-Neuve et du Labrador à essayer de trouver cette protection dans le cadre du droit autochtone à l'autonomie.

Le problème que les peuples autochtones ont eu et continueront d'avoir si la question que nous avons devant nous établit une sorte de précédent dynamique - c'est-à-dire si l'on en vient à permettre que l'assemblée législative puisse décider d'abroger un droit qui ne relève pas de sa compétence et qui, en fait, figure dans la Constitution -, c'est qu'ils n'auront pas beaucoup de succès s'ils s'appuient sur une garantie constitutionnelle pour assurer la permanence de l'enseignement autochtone, vu que cette affaire prouve que la Constitution peut être modifiée facilement. C'est ça, le problème.

(Sur la motion du sénateur Milne, le débat est ajourné.)

LES TRAVAUX DU SÉNAT

L'honorable B. Alasdair Graham (leader adjoint du gouvernement): Honorables sénateurs, comme nous sommes mercredi et que c'est le jour où les comités se réunissent, je pense que vous serez d'accord pour que tous les autres articles restent au Feuilleton.

Son Honneur le Président pro tempore: Est-ce d'accord, honorables sénateurs?

Des voix: D'accord.

(Le Sénat s'ajourne à demain, à 14 heures.)

 


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