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Débats du Sénat (Hansard)

Débats du Sénat (hansard)

1re Session, 36e Législature,
Volume 137, Numéro 16

Le mercredi 5 novembre  1997
L'honorable Gildas L. Molgat, Président


LE SÉNAT

Le mercredi 5 novembre 1997

La séance est ouverte à 13 h 30, le Président étant au fauteuil.

Prière.

[Traduction]

Le décès de l'honorable Walter P. Twinn

Hommages

L'honorable John Lynch-Staunton (chef de l'opposition): Honorables sénateurs, Walter Twinn a été mon premier voisin de pupitre au Sénat alors que nous avons été nommés au Sénat à quelques jours d'intervalle. Même si notre arrivée a été mémorable et pas très plaisante, à cause des très longues séances, qui semblaient sans fin, qui ont eu lieu à l'automne de 1990, ces séances ont quand même donné à ceux qui entraient au Sénat cette année-là une occasion unique de se connaître les uns les autres d'une façon qui aurait été autrement impossible.

Je connaissais peu les réalisations et les ambitions de Walter à l'époque, car il parlait peu de lui-même, il était quelque peu timide et très réservé, sauf lorsqu'il parlait de la bande indienne de Sawridge et des problèmes auxquels elle était confrontée, à l'instar de beaucoup d'autres bandes indiennes. Il se laissait alors emporter par l'émotion tellement il se préoccupait du sort de ces gens.

Walter était un homme d'affaires avisé et, à titre de chef de la bande Sawridge, il n'a jamais oublié la confiance que ce poste supposait. La réussite économique de sa bande est inhabituelle et Walter a réussi à veiller à ce qu'on s'en serve aux profits de tous les membres, malgré une vive résistance de la part de beaucoup de gens face à certaines de ses priorités. Avec le temps, ils ont fini par reconnaître la sagesse de ses objectifs.

Sa principale préoccupation, cependant, résidait dans le sentiment qu'il avait que les bandes indiennes méritaient un meilleur statut au sein de la société canadienne et qu'on ne pouvait plus les traiter comme des êtres inférieurs ou les pupilles de l'État. Il a consacré toutes ses énergies à promouvoir ces valeurs, en présentant notamment un projet de loi en ce sens au Sénat, projet de loi qui, nous l'espérons, ne mourra pas avec lui.

Le projet de loi sur l'autonomie gouvernementale des premières nations que le sénateur Twinn a parrainé créerait, dans le cadre d'une loi, une méthode grâce à laquelle les collectivités des Premières nations deviendraient autonomes sur le plan politique. On réussirait cela sans passer par le processus beaucoup trop lent des modifications constitutionnelles. Une fois l'autonomie gouvernementale acquise dans le cadre de cette loi, une collectivité aurait alors le pouvoir d'adopter des lois pour la paix, l'ordre et le bon gouvernement, et les communautés indiennes contrôleraient notamment l'enseignement.

Walter croyait fondamentalement que grâce à l'autonomie gouvernementale, les Indiens du Canada obtiendraient l'indépendance économique et la dignité personnelle qu'ils méritent tant et qu'on leur nie depuis trop longtemps. Le plus grand hommage qu'on puisse rendre à Walter est de se pencher sur les motifs qui justifiaient le projet de loi et de veiller à ce que ce texte devienne loi.

Walter était un mari affectueux, un père aimant, un chef dévoué et un sénateur consciencieux. Sa perte crée un grand vide qu'il sera difficile de combler au sein de sa bande et au Sénat. Je ne peux qu'espérer que son remplaçant aux deux endroits partagera les principes de Walter.

À sa chère épouse Catherine, à ses enfants et à sa famille, aux membres de sa bande qui étaient tous ses amis, j'offre mes condoléances les plus sincères à la suite de cette mort tragique qui, je le sais, nous touche tous au Sénat.

L'honorable B. Alasdair Graham (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, je voudrais me faire l'écho des propos éloquents qu'a tenus le chef de l'opposition au Sénat.

Quiconque connaissait le souvent timide, parfois flamboyant et dynamique chef de la bande Sawridge de Slave Lake, en Alberta, que nous, dans cette Chambre, connaissions mieux en tant que le sénateur Walter Twinn, savait qu'une de ses passions de toute une vie était la boxe. «Non seulement je les mets knock-out, mais c'est moi qui choisis les rounds», a dit un jour le boxeur et champion Mohammed Ali. Le sénateur Twinn éclaterait sans doute de rire s'il entendait cela, mais ces paroles résument assez bien un homme dont la volonté, l'assurance et la détermination à elles seules ont fait en sorte qu'il choisisse les rounds dans la vie.

Il est né dans la pauvreté, dans une réserve crie, il y a 62 ans. Il a fréquenté l'école résidentielle. Il a pratiqué la chasse, le piégeage, la pêche et le bûcheronnage. Il était pauvre et cela ne lui plaisait pas. Il a choisi le round et a mis knock-out la privation et l'adversité.

On a découvert du pétrole dans la réserve Sawridge en 1966, deux ans après que Walter Twinn est devenu chef. Cette heureuse découverte a permis à la bande d'investir dans plusieurs entreprises, y compris dans des hôtels à Jasper et à Fort McMurray et dans une entreprise de Calgary qui assurait des services d'ingénierie à l'industrie pétrolière et dans laquelle la bande possédait des intérêts majoritaires.

Cependant, c'est dans son bien-aimé Slave Lake que le nom Sawridge apparaît partout, comme nous l'avons vu hier. On le voit sur un centre commercial à construction fermée, sur un relais-routier et sur un vaste hôtel situé à l'entrée de la ville et à l'extérieur de la réserve, témoin des négociations décousues du chef Twinn avec les fonctionnaires du ministère des Affaires indiennes de l'époque et signe annonciateur de la participation accrue de la bande dans les décisions concernant le moment où elle dépenserait ses redevances pétrolières, où et comment elle le ferait.

Ce n'est là qu'un cas où Walter Twinn a manifesté un sens très progressif de leadership au profit des autochtones de notre pays. Il savait que les Premières nations du Canada devaient apprendre à gérer et à diriger leurs propres affaires, de sorte qu'il fallait presser le pas dans la marche vers l'autonomie politique.

Le règlement des revendications territoriales est crucial pour l'avenir des collectivités des Premières nations, a souligné le sénateur Twinn dans son premier discours dans cette Chambre. C'est un dossier qu'il a défendu vigoureusement, par son travail dans sa collectivité et au Sénat et par son appui à un projet de loi visant à créer un cadre de règlement des revendications territoriales globales. Le sénateur Twinn avait un esprit créateur et novateur. Il était un géant parmi ses concitoyens et un leader pour sa génération.

(1340)

Avec l'honorable Président, le chef de l'opposition et quelques-uns de nos collègues, j'ai eu le privilège d'assister hier aux funérailles du sénateur Twinn, à Slave Lake. J'ai été très heureux de pouvoir le faire, car cela m'a permis de beaucoup mieux comprendre ce que le sénateur Twinn représentait pour ses concitoyens et pour sa collectivité. Il fallait être là pour sentir l'émotion, le respect, l'amour et la perte que cette collectivité éprouvait.

À sa femme, Catherine, à leurs magnifiques enfants, et à toute la collectivité, je transmets, au nom de tous les sénateurs, mes plus profondes condoléances.

L'honorable Gerry St. Germain: Honorables sénateurs, le leader du gouvernement au Sénat et le chef de l'opposition au Sénat ont tous deux couvert les nombreux aspects de la vie du chef Walter Twinn. J'aimerais parler aujourd'hui de cet homme, de cet ami, de ce père et de ce dirigeant de la communauté autochtone.

À l'instar de plusieurs sénateurs des deux côtés de la Chambre, j'ai assisté hier au service funèbre qui a eu lieu à Slave Lake, en Alberta, à la mémoire de Walter Patrick Twinn, sénateur, chef de la bande crie de Sawridge, mari, père, grand-père, entrepreneur et ami respecté de par le monde.

Le sénateur Twinn a été prématurément enlevé aux siens. Néanmoins, il faudra de nombreuses années pour que certains d'entre nous apprécient pleinement les nombreuses contributions qu'il a faites dans tous les domaines. Pour ceux d'entre nous qui sont d'origine autochtone, il était une source d'inspiration et un héros. C'était un homme admirable.

Le sénateur Twinn a su combler le fossé entre les composantes autochtones et, pour reprendre l'expression entendue hier au service, la société dominante qui a encerclé la population autochtone. Walter Twinn transcendait sans mal toutes les barrières, qu'elles soient raciales, commerciales ou politiques. Le meilleur exemple que je puisse donner pour faire comprendre ce que l'homme a accompli de multiples façons - et ce n'est là qu'un détail -, c'est peut-être hier, quand s'est posé pour moi le problème du transport une fois la décision prise d'assister au service. Le problème n'est pas demeuré sans solution longtemps parce que sa famille a décidé que je devais utiliser l'avion familial pour me rendre d'Edmonton à Slave Lake afin d'assister au service.

Quel contraste, honorables sénateurs, entre le fait que je sois monté dans un des avions d'affaires de Walter et le moment où, pour être acheminé vers la petite église catholique de Slave Lake, en Alberta, son cercueil a été déposé dans un simple chariot que les Indiens cris utilisent à cette fin depuis des générations. La voiture était tirée par un attelage de chevaux et conduite par un ancien, accompagné d'une garde d'honneur composée d'autochtones à cheval. Voilà qui illustre bien le monde dans lequel vivait le chef Walter Twinn. Il était fier de posséder des avions d'affaires, mais il n'a jamais oublié pour autant le monde qui l'avait vu naître.

Nous avons appris hier que Walter n'avait peut-être jamais compris ce qu'étaient vraiment ses racines autochtones. Il y a quelques années, il avait pourtant pris la peine d'étudier ses traditions autochtones et ancestrales avec certains spécialistes de ces aspects de la vie des Cris. Cela traduit bien ce que Walter pensait vraiment de son peuple. En dépit de sa richesse et de ses réalisations dans notre monde matérialiste, Walter a toujours reconnu qu'il y avait beaucoup plus que la célébrité et l'accumulation de richesses.

Malgré sa réussite impressionnante, Walter Twinn a pris le temps d'aider les membres moins fortunés des bandes de l'Alberta - en fait, du Canada et même de toute l'Amérique du Nord. Hier, le chef Wayne Roan, de Smallboy Camp, a prononcé un discours, sans recourir à des notes ni aux services d'un rédacteur. Il a parlé du travail formidable que le chef Walter Twinn a accompli pour les membres de Smallboy Camp qui, je le sais avec certitude, se trouvaient dans une misère extrême avant son arrivée.

Oui, honorables sénateurs, c'était un homme incomparable, un chef avisé avec qui il était possible de s'asseoir et de discuter. Pourtant, la société dominante dans laquelle il vivait ne lui a jamais fait oublier son engagement envers ses valeurs autochtones. La bonté et l'humilité du sénateur qui a occupé la banquette derrière la mienne pendant des années étaient constamment à l'oeuvre.

Je ne crois pas qu'on puisse trouver les mots pour décrire avec précision le type d'héritage que le chef Walter Twinn aurait voulu laisser. Je voudrais citer devant les honorables sénateurs le texte qu'a lu une des anciennes au cours de la cérémonie. Les anciens jouent un rôle prépondérant dans la vie des autochtones. L'ancienne Mary Capo a déclaré:

J'ai laissé l'aigle planer en liberté. Avant longtemps, mon petit-enfant s'ennuiera du chant d'un huard, de l'éclair d'un saumon, du murmure des aiguilles de cèdre ou du cri strident de l'aigle, mais il ne pourra plus se lier d'amitié avec ces créatures et son coeur déçu me maudira. Aurai-je fait mon possible pour préserver l'air frais? Me serai-je assez préoccupée de l'eau? Aurai-je laissé l'aigle planer en liberté? Aurai-je fait mon possible pour mériter l'affection de mon petit-enfant?

Une partie de l'héritage du chef Walter Twinn sera le soin, l'esprit de partage et le sens des responsabilités qui l'incitaient à améliorer la vie pour ses descendants.

Moi aussi, j'offre ma profonde sympathie à sa femme, Catherine, et à ses neuf enfants ainsi qu'à la grande famille et aux nombreux amis qu'il laisse.

Honorables sénateurs, je suis peiné d'avoir perdu ce grand ami, mais heureux d'avoir pu lui rendre hommage au Sénat aujourd'hui.

L'honorable Willie Adams: Honorables sénateurs, j'ai moi aussi assisté aux funérailles du sénateur Twinn hier à Slave Lake. Le sénateur Twinn était un homme très intéressant. Je ne l'avais pas connu avant sa nomination au Sénat. Cependant, après être allé dans sa communauté hier, j'ai vu tout ce qu'il y avait accompli avant d'être nommé au Sénat.

(1350)

Le sénateur Twinn est tombé malade il y a deux ou trois ans. Après avoir passé des radiographies, il a subi une opération. Le médecin lui a dit qu'il ne pouvait rien faire d'autre pour lui. Il est ensuite rentré chez les siens, qui ont pris soin de lui au cours des trois dernières années. C'est il y a trois ans qu'on avait diagnostiqué qu'il avait subi une crise cardiaque.

Il était intéressant de voir tous ceux qui ont assisté aux funérailles hier. Quand je suis entré dans l'église, le prêtre circulait dans le vestibule et je l'ai reconnu immédiatement pour l'avoir connu en 1945 dans mon village natal du nord du Québec. Il était venu de France au Canada et exerçait son ministère à l'époque dans de petites localités des territoires. J'ai été plutôt étonné de le voir là-bas. Il m'a dit: «Je vous connais, sénateur Watt». Certains de mes amis disent que nous nous ressemblons tous, mais il avait seulement oublié mon nom. Je lui ai répondu: «Je suis le sénateur Adams, pas le sénateur Watt», mais je me suis abstenu de lui dire que nous vieillissons tous et ne pouvons plus reconnaître personne.

J'avais toujours voulu faire la connaissance du sénateur Twinn avant qu'il vienne siéger au Sénat. Je n'avais pas compris son total dévouement à sa bande et ce qu'il représentait. À mon arrivée là-bas, j'ai compris à quel point il s'en occupait. J'ai vu les cheminées et la flamme qui sortait des tuyaux, l'exploitation du gaz naturel et du pétrole dans la région, ainsi que l'exploitation forestière.

Je sais à quel point il tenait à ce que sa bande soit maître des affaires de sa propre communauté. Le sénateur Twinn a tâché de faire adopter plusieurs mesures législatives au cours de la dernière session, dont une est restée en plan au Feuilleton au moment du déclenchement des élections en avril dernier. Le sénateur Tkachuk n'est pas présent aujourd'hui, mais j'espère qu'il présentera de nouveau cette mesure dans un avenir rapproché. Le sénateur Twinn se préoccupait de toutes les bandes avec lesquelles il a travaillé.

Il aurait été bien que le sénateur Twinn réussisse à faire régler les revendications territoriales dans sa communauté avant de mourir. L'autorité des chefs lui tenait à coeur, comme nous l'avons entendu hier à l'église. Il appuyait énergiquement les chefs pour qu'ils prennent en main les affaires de leurs communautés.

La localité elle-même est très grande, assez grande pour posséder une piste d'atterrissage. Cependant, pour l'atterrissage, il faut approcher la piste par le lac. Si le pilote rate la piste, l'avion se pose dans l'eau. Au décollage, l'avion doit partir depuis le bout même de la piste. Quand le pilote lâche les freins, nous tombons à la renverse dans nos sièges. S'il ne partait pas comme il le fait, l'avion serait tombé au bout de la piste.

J'exprime toutes mes condoléances à la famille et aux amis du sénateur Twinn. Je lui rends hommage pour tout le travail qu'il a accompli. Comme l'a dit le sénateur Graham, il a beaucoup fait pour sa communauté. Il nous reste cependant encore beaucoup à faire pour régler la question de l'autonomie gouvernementale.

L'honorable Len Marchand: Honorables sénateurs, je regrette de n'avoir pu assister aux funérailles du sénateur Twinn hier, mais je suis très heureux que le Sénat y ait été largement représenté.

Je prends aujourd'hui la parole pour m'associer aux hommages éloquents que le chef de l'opposition et le leader du gouvernement au Sénat ont rendus à Walter Twinn. Je ne connaissais pas très bien Walter Twinn. Les Okanagans et les Cris sont séparés par les distances, mais peut-être aussi par d'autres choses. J'ai appris à connaître le sénateur ici même. J'ai lu à son sujet. Je comprends les réalisations qu'il a accomplies au nom de nos deux peuples et qui tiennent maintenant de la légende.

La nouvelle de son décès m'a fait un choc. Il est trop jeune pour se retrouver dans les territoires de chasse éternels. Son décès m'a donné à réfléchir, car le sénateur avait une année de moins que moi, et je crois que c'est bien trop jeune pour mourir. Mais nous n'avons aucun droit de regard sur ces choses-là.

Dans toutes nos cultures, en tout cas chez les Okanagans, nous avons un Créateur. Nous parlons du Créateur. Nous espérons tous un jour aller dans des territoires de chasse éternels. J'espère que Walter s'y trouve, mais je ne suis pas pressé de l'y rejoindre.

À Catherine et aux membres de sa famille, j'offre mes condoléances et mes prières. Mes meilleurs voeux les accompagnent.

L'honorable Anne C. Cools: Honorables sénateurs, je voudrais me joindre à tous les sénateurs qui rendent hommage au sénateur Twinn et m'associer aux propos respectueux qui ont été tenus aujourd'hui.

J'ai rencontré le sénateur Twinn et son épouse il y a plusieurs années, lorsqu'ils ont comparu tous deux devant le comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles. Le comité étudiait alors la Loi sur les Indiens. Le sénateur Twinn avait une opinion très arrêtée sur les modifications proposées. Il a alors manifesté selon moi un courage immense, car il soutenait un point de vue minoritaire à l'époque.

Mes condoléances les plus sincères vont à son épouse, aux membres de sa famille, à son conseil, à sa tribu et au peuple des Premières nations en général, car je crois qu'ils ont perdu un grand guerrier.

Le programme d'échange de pages avec la Chambre des communes

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, je voudrais vous présenter deux pages de la Chambre des communes qui se joignent à nous cette semaine dans le cadre du programme d'échange de pages.

[Français]

Chantal Beaupré, de Timmins, Ontario, étudie à l'Université d'Ottawa et est inscrite à la faculté des arts en linguistique.

[Traduction]

(1400)

Nous avons aussi Eric Stephenson, de Guelph, en Ontario. Il étudie également à l'Université d'Ottawa où il est inscrit à la faculté des sciences sociales et se spécialise en sciences politiques.

Au nom de tous les honorables sénateurs, je vous souhaite la bienvenue au Sénat.


DÉCLARATIONS DE SÉNATEURS

L'Association canadienne des parlementaires pour la population et le développement

L'honorable Erminie J. Cohen: Honorables sénateurs, je tiens à appuyer aujourd'hui comme elle le mérite une organisation qui a été créée pour faire prendre encore plus conscience de l'importance de la population dans le développement. L'Association parlementaire canadienne pour la population et le développement, qui est présidée par notre collègue, le sénateur Losier-Cool, et par la députée Jean Augustine, vise à reconnaître le rôle clé de la population dans le développement durable.

En tant que représentants du peuple canadien, nous sommes en mesure de susciter et de maintenir l'intérêt pour toutes les questions de population et de développement, dont la santé génésique, la santé de l'enfant, l'éducation nutritionnelle et l'hygiène, par exemple. Nous pouvons examiner les politiques et les tendances en matière démographique et collaborer avec divers ministères fédéraux, des gouvernements étrangers et des organisations internationales. Puis, nous pouvons alors déterminer quelle est la meilleure contribution que le Canada peut faire.

La population mondiale va atteindre les 6 milliards de personnes d'ici à 1998. Un intervenant nous a dit que trois bébés naissent dans le monde à chaque minute. Quelque 95 p. 100 de la croissance démographique totale se produira dans les pays en voie de développement et plus de la moitié, en Afrique et en Asie, dans des pays qui sont le moins capables d'absorber une telle croissance. Une croissance démographique rapide, honorables sénateurs, réduit la qualité de vie de tous et surtout des femmes et des enfants. Un intervenant nous a rappelé que les problèmes démographiques ne sont pas l'apanage exclusif des pays en développement. Par exemple, le Canada doit s'attaquer au problème croissant de la grossesse chez les adolescentes.

Les populations, une croissance économique soutenue et le développement durable sont tous étroitement liés. La collaboration internationale est essentielle à l'amélioration de la qualité de vie des habitants du monde entier. Notre participation à l'Association parlementaire canadienne pour la population et le développement est une étape critique pour assurer le respect de droits humains universellement reconnus.

Honorables sénateurs, j'espère que vous serez nombreux à accorder temps et appui à cette association extrêmement valable.

La détérioration des conditions sociales

L'honorable Lorna Milne: Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd'hui pour exprimer ma vive inquiétude à la suite des déclarations scientifiques qui confirment mes intuitions personnelles sur l'évolution de notre société depuis les années 70. Je m'inquiète d'un article qui est paru dans le quotidien montréalais The Gazette du 3 novembre 1997 et qui explique que, même si tous les indices économiques sont à la hausse dans notre pays, celui des conditions sociales diminue constamment depuis les années 70.

Ce n'est pas un hasard si le déclin du bien-être social s'est amorcé à peu près en même temps que le gouvernement a adhéré aveuglément à la théorie de l'économie de la percolation, théorie à laquelle ont fermement souscrit les adeptes du «thatcherisme» en Grande-Bretagne et ceux du «reaganisme» aux États-Unis. Les tableaux affolants de cet article montrent aussi très bien l'augmentation des pouvoirs et de l'influence de solides méga-entreprises multinationales dont les administrateurs se versent des traitements scandaleux tout en déménageant leurs installations dans n'importe quel pays du monde où les dispositions législatives sur les droits de la personne sont les plus laxistes et où les salaires sont les plus bas.

Cette détérioration correspond presque parfaitement à l'écart croissant entre les nantis et les démunis de notre société occidentale. Cet écart a toujours existé en Grande-Bretagne, mais il a atteint un niveau affolant, ces dernières années, aux États-Unis, où il est souvent associé à la ghettoïsation de gens d'origines raciales différentes.

Je vois cela se produire également ici au Canada, à mon grand désarroi. On prévoit qu'il y aura 9 000 sans-abri dans les rues de Toronto cet hiver.

Cet écart qui va en grandissant dans notre société résulte réellement du déclin de l'importante classe moyenne qui a été la bâtisseuse et le pivot d'une société démocratique. La version occidentale de la démocratie moderne a vu le jour au Moyen Âge, avec la montée de la classe moyenne. Je pense que son maintien dans l'avenir dépend d'une classe moyenne forte. Voyons la situation dans le monde. Les pays qui jouissent des bienfaits d'une démocratie et des avantages qui s'ensuivent, comme la paix, le respect des droits de la personne et la sécurité sociale, sont presque uniquement des pays dont la classe moyenne est dynamique.

Permettez-moi de vous donner une idée des faits mentionnés dans l'article en question. Le ministère canadien du Développement des ressources humaines a élaboré un indice des conditions sociales qui prévoit ceci:

L'indice donne à penser que, depuis la fin des années 70, les améliorations constatées sur le plan économique ne se sont pas accompagnées d'une augmentation équivalente du bien-être social des Canadiens. En réalité, il montre que les conditions sociales des Canadiens se sont détériorées à mesure que l'économie a connu une croissance.

À propos des récessions du début des années 80 et 90, l'article cite le rapport du ministère sur les conditions sociales:

Mais ce qu'il faut surtout retenir, c'est que la reprise constatée au niveau du PIB ne l'est pas au niveau de l'indice parce que le chômage est demeuré élevé et que les salaires réels continuent de baisser.

Lorsque je vois mes intuitions confirmées par des statistiques et des indices comme ceux-là, je désespère. Le plus décourageant, ce sont les données sur les enfants. Selon le rapport, la situation des enfants était pire en 1995 qu'à n'importe quel moment pendant les années 70. De plus, on a constaté que les enfants sont particulièrement vulnérables aux ralentissements économiques. Ce rapport devrait nous alerter tous de même que le gouvernement.

Les droits de la personne

L'extension de la protection des lois provinciales contre la discrimination fondée sur l'orientation sexuelle

L'honorable Ron Ghitter: Honorables sénateurs, hier, j'ai eu l'occasion de passer la journée à la Cour suprême, où j'ai assisté à l'audition de la cause Delwin Vriend c. Sa Majesté la Reine du chef de l'Alberta.

Il est paradoxal, dans un sens, que l'audition de cette cause ait eu lieu pendant que nombre de mes collègues étaient au lac des Esclaves pour honorer un grand Albertain qui était membre d'un groupe minoritaire. Nous avons été informés de toutes ses réalisations au cours des merveilleux hommages rendus au regretté sénateur Twinn.

Franchement, en tant qu'Albertain, j'étais embarrassé hier. M. Vriend, comme vous le savez, a été congédié de son poste de professeur au collège King d'Edmonton quand il a admis être homosexuel. Quand il a voulu déposer une plainte auprès de la Commission des droits de la personne de l'Alberta, on l'a informé qu'il ne pouvait le faire parce que l'orientation sexuelle n'était pas comprise dans les motifs de discrimination interdits aux termes de la Loi sur les droits de la personne de l'Alberta.

Il convient de mentionner que seules les lois sur les droits de la personne de l'Alberta, des Territoires du Nord-Ouest et de l'Île-du-Prince-Édouard n'interdisent pas la discrimination fondée sur l'orientation sexuelle. Ainsi, le gouvernement de l'Alberta est d'avis qu'il est acceptable de refuser un emploi, un logement ou des avantages à des citoyens à cause de leur orientation sexuelle. Ainsi, le gouvernement de l'Alberta, qui a déjà été reconnu comme un pionnier dans la défense des droits des minorités, a l'effronterie d'envoyer ses avocats à Ottawa pour affirmer que la discrimination contre un groupe minoritaire peut se pratiquer en Alberta avec la bénédiction du gouvernement. Ainsi, en Alberta, des citoyens sont privés d'une tribune où ils peuvent demander réparation pour leurs difficultés, citoyens que la Cour suprême a décrits comme il suit:

[...] ils ont souffert de désavantages dans le passé. Les homosexuels sont souvent la cible de harcèlement public et d'insultes.

Cela est fréquent en Alberta.

[...] Les homosexuels masculins et féminins ont été victimes de crimes violents contre leur personne à cause de leur orientation sexuelle. [...] Ils ont été exclus de certains aspects de la vie publique à cause de leur orientation sexuelle. [...] La stigmatisation des homosexuels et la haine affichée par certains individus à leur endroit ont poussé nombre d'homosexuels à cacher leur orientation.

(1410)

Il ne s'agit pas ici d'accepter ou de rejeter le style de vie d'un gay ou d'une lesbienne. Il ne s'agit pas d'accorder des droits particuliers comme peut le prétendre un ministre albertain mal conseillé ou mal informé. Il ne s'agit pas non plus de l'interprétation dogmatique d'un passage de la Bible faite par quelque groupe évangélique ou de publications qui pervertissent des valeurs religieuses. Il s'agit d'une question d'égalité, de compassion et de justice. Il s'agit de comprendre et d'accepter d'autres personnes en refusant les stéréotypes, les préjugés et l'ignorance.

Comme un intervenant l'a déclaré devant le tribunal hier, rester silencieux ou neutre reviendrait à encourager l'intolérance. Si on s'en prend aujourd'hui aux gays et aux lesbiennes, est-ce que ce sera demain les sikhs, les musulmans, les juifs, les autochtones? Trop souvent, le silence a eu d'horribles conséquences.

Je dois dire que, hier, ma fierté et mon admiration pour notre système judiciaire ont augmenté de plusieurs crans. J'éprouve une gratitude et un respect sans bornes pour les représentants de la profession juridique qui ont gratuitement donné temps et énergie pour faire avancer une cause. Je suis très heureux que nous ayons une Charte des droits et libertés, mais, en tant qu'Albertain, j'ai été attristé et embarrassé. C'était un jour sombre que j'aimerais oublier très rapidement.

Des voix: Bravo!

L'honorable Jean B. Forest: Honorables sénateurs, je voudrais appuyer les déclarations d'aujourd'hui de mon honorable ami, le sénateur Ghitter. Le sénateur Ghitter a présenté le projet de loi qui est devenu en 1972 la loi albertaine dite Individual Rights Protection Act, loi sur la protection des droits des individus. Depuis cette époque, il est un ardent défenseur des droits des minorités dans notre province.

Je siégeais à la première commission albertaine des droits de la personne et depuis ce temps, nous avons recommandé la modification. Moi aussi je suis triste que la question ait dû aller jusqu'à la Cour suprême du Canada. Cependant, je suis convaincu que la décision qui sera rendue permettra aux Albertains victimes de discrimination d'obtenir le juste traitement auquel ils ont droit.

Il s'agit-là d'une question de justice fondamentale, et je félicite le sénateur Ghitter pour la fougue dont il fait preuve dans la défense de tous les groupes désavantagés de notre province depuis 25 ans.

Des voix: Bravo!

La Semaine canadienne de l'orientation

L'honorable Brenda M. Robertson: Honorables sénateurs, étant donné que le chômage, particulièrement chez les jeunes Canadiens, est beaucoup trop élevé, je veux souligner la Semaine canadienne de l'orientation, qui se déroule du 2 au 8 novembre.

Le thème de cette année est «Les plans de carrière sont des plans de vie». Ce thème montre que, qu'il s'agisse d'un étudiant qui essaie de décider quel programme d'étude il doit suivre, d'un jeune qui cherche un emploi pour la première fois, d'un chômeur qui songe à se recycler ou d'un travailleur âgé qui réfléchit à l'avenir, les décisions que ces gens prendront auront des répercussions sur leur revenu, leur domicile et leur mode de vie. Autrement dit, le plan de carrière que nous établissons aujourd'hui déterminera aussi notre vie à venir.

Le monde du travail est en constante évolution. Cela veut dire que les gens auront beaucoup de questions à se poser et de choix à faire pour déterminer les ramifications des tendances du marché du travail, pour se préparer à une entrevue et pour postuler un emploi.

Je recommande fortement la trousse d'information de la Semaine canadienne de l'orientation, qui a été élaborée en collaboration avec Partenariat en renseignements de carrière Canada. Les deux publications qui composent la trousse, «Perspectives canadiennes - Guide canadien de planification des carrières» et «Palmarès des carrières», sont pleins de renseignements utiles et de conseils pratiques au sujet des orientations de carrière et des possibilités d'emploi pour l'avenir ainsi que d'idées pour aider les Canadiens à relever leurs défis professionnels.

Je félicite Partenariat en renseignements de carrière Canada pour ses efforts à l'égard de questions difficiles et complexes comme l'acquisition de l'autonomie individuelle et le développement des compétences professionnelles, questions qui sont si importantes compte tenu du rythme rapide auquel bat la société d'aujourd'hui.

J'espère que les documents produits par ce groupe seront distribués dans tous les établissements d'enseignement afin que les jeunes puissent profiter des sages conseils qu'ils renferment.


AFFAIRES COURANTES

La Loi de 1985 sur les normes de prestations de pension La Loi sur le Bureau du surintendant des institutions financières

Projet de loi modificatif-Rapport du comité

L'honorable Michael Kirby: Honorables sénateurs, j'ai l'honneur de déposer le troisième rapport du comité sénatorial permanent des banques et du commerce concernant le projet de loi S-3, Loi modifiant la Loi de 1985 sur les normes de prestations de pension et la Loi sur le Bureau du surintendant des institutions financières, avec sept propositions d'amendement.

Je demande que le rapport soit imprimé dans les Journaux du Sénat d'aujourd'hui.

(Le texte du rapport figure à la page 148 des Journaux du Sénat d'aujourd'hui.)

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, quand étudierons-nous le rapport?

(Sur la motion du sénateur Kirby, l'étude du rapport est inscrite à l'ordre du jour de la prochaine séance.)

[Français]

La Bibliothèque du Parlement

Présentation du premier rapport du comité mixte

L'honorable Philippe Deane Gigantès: Honorables sénateurs, j'ai l'honneur de présenter le premier rapport du comité mixte permanent de la Bibliothèque du Parlement.

Le mercredi 5 novembre 1997

Le comité mixte permanent de la Bibliothèque du Parlement a l'honneur de présenter son

PREMIER RAPPORT

Votre comité recommande qu'il soit habilité à conseiller les présidents du Sénat et de la Chambre des communes dans l'exercice de leur autorité sur la Bibliothèque du Parlement; et qu'il soit habilité à faire des recommandations aux présidents des deux chambres concernant la régie de la bibliothèque et la bonne utilisation des crédits affectés par le Parlement à l'achat de documents ou objets destinés à y être déposés.

Votre comité recommande que le quorum soit de sept (7) membres, à condition que les deux chambres soient représentées au moment d'un vote, d'une résolution ou de toute autre décision, et que les coprésidents soient autorisés à tenir des réunions pour entendre les témoignages et à en autoriser la publication dès que quatre (4) membres sont présents, à condition que les deux Chambres soient représentées; et, que le comité puisse obtenir les services d'experts, de sténographes et de commis, selon les besoins.

Votre comité recommande aussi au Sénat qu'il soit autorisé à siéger durant les séances du Sénat.

Un exemplaire des Procès-verbaux pertinents (réunion no 1) est déposé à la Chambre des communes.

Respectueusement soumis,

Le coprésident,
PHILIPPE DEANE GIGANTÈS

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, quand étudierons-nous ce rapport?

(Sur la motion du sénateur Gigantès, l'étude du rapport est inscrite à l'ordre du jour de la prochaine séance.)

[Traduction]

Projet de loi portant création d'un parc historique national pour commémorer l'affaire «personne»

Première lecture

L'honorable Colin Kenny dépose le projet de loi S-6, Loi portant création d'un parc historique national pour commémorer l'affaire «personne».

(Le projet de loi est lu une première fois.)

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, quand lirons-nous le projet de loi pour la deuxième fois?

(Sur la motion du sénateur Kenny, la deuxième lecture du projet de loi est inscrite à l'ordre du jour de la séance du mardi 25 novembre 1997.)

[Français]

La conférence internationale sur la gouvernance pour la croissance durable et l'équité

Dépôt du rapport

L'honorable Peter Bosa: Honorables sénateurs, j'ai l'honneur de déposer, dans les deux langues officielles, le rapport du groupe canadien de l'Union interparlementaire qui a représenté le Canada à la Conférence internationale sur la gouvernance pour la croissance durable et l'équité, tenue au siège de l'Organisation des Nations Unies, à New York, du 28 au 30 juillet 1997.

[Traduction]

(1420)

L'Association parlementaire Canada-Europe

L'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe-Sixième réunion annuelle de l'Assemblée parlementaire, à Varsovie, en Pologne-Dépôt du rapport de la délégation canadienne

L'honorable William M. Kelly: Honorables sénateurs, j'ai l'honneur de déposer le rapport de l'Association parlementaire Canada-Europe, qui a représenté le Canada à la sixième réunion annuelle de l'Assemblée parlementaire de l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe, qui s'est tenue à Varsovie, en Pologne, du 5 au 9 juillet 1997.

Enseignement postsecondaire

Autorisation au comité spécial d'engager du personnel

L'honorable M. Lorne Bonnell: Honorables sénateurs, avec la permission du Sénat et par dérogation à la directive 2:03 des «Directives régissant le financement des comités du Sénat», annexe II du Règlement du Sénat, je propose:

Que le comité sénatorial spécial de l'enseignement postsecondaire soit autorisé à retenir les services des conseillers juridiques et du personnel technique, d'employés de bureau ou d'autres personnes nécessaires pour examiner l'enquête au sujet de la gravité de l'état de l'enseignement postsecondaire au Canada.

Son Honneur le Président: La permission est-elle accordée, honorables sénateurs?

Des voix: D'accord.

(La motion est adoptée.)

La Conférence internationale sur la gouvernance pour la croissance durable et l'équité

Réunion tenue à New York-Avis d'interpellation

L'honorable Peter Bosa: Honorables sénateurs, je donne avis que, le mardi 18 novembre 1997, j'attirerai l'attention du Sénat sur la Conférence internationale sur la gouvernance pour la croissance durable et l'équité, tenue au siège des Nations Unies, à New York, du 28 au 30 juillet 1997.

La santé

La non-production du Règlement d'application de la Loi réglementant certaines drogues et autres substances, visant à proclamer les dispositions relatives à la culture du chanvre-Avis d'interpellation

L'honorable Lorna Milne: Honorables sénateurs, je donne avis que, le mardi 18 novembre 1997, j'attirerai l'attention du Sénat sur la Loi réglementant certaines drogues et autres substances, dans laquelle le Parlement a dit approuver la culture du chanvre; sur les débouchés économiques de la culture du chanvre pour les agriculteurs canadiens; et sur le fait que seize mois après la sanction royale, les fonctionnaires du ministère de la Santé chargés de l'application de la Loi réglementant certaines drogues et autres substances n'ont toujours pas produit le projet de règlement requis pour proclamer les dispositions relatives à la culture du chanvre.

 


Visiteurs de marque

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, avant de passer à la Période des questions, je voudrais vous signaler la présence à notre tribune de plusieurs visiteurs de marque. Il s'agit des membres du comité de la protection de l'environnement et des ressources naturelles du Congrès national du peuple de la République de Chine.

Des voix: Bravo!

Son Honneur le Président: Au nom de tous les sénateurs, je vous souhaite la bienvenue au Sénat.


PÉRIODE DES QUESTIONS

La justice

L'enquête sur la vente d'avions Airbus à Air Canada- La lettre de retrait et d'excuses envoyée aux autorités suisses-La position du gouvernement

L'honorable John Lynch-Staunton (chef de l'opposition): Honorables sénateurs, le 25 janvier 1997, le gouvernement du Canada et la GRC annonçaient qu'ils étaient parvenus à un règlement avec l'ancien premier ministre Mulroney, disant que:

Les termes de la lettre rogatoire donnaient à penser, à tort, que la GRC avait conclu que M. Mulroney s'était livré à des activités criminelles.

C'est tiré de l'article 3 de l'accord de règlement.

Ma question au leader du gouvernement au Sénat est la suivante: ne pense-t-il pas que, étant donné cet aveu, on devrait demander aux autorités suisses, à qui était adressée la lettre rogatoire, de considérer la lettre nulle et non avenue, et que le gouvernement dont il est membre, ainsi que la GRC, devraient présenter des excuses pour le tort sans précédent causé à la réputation, non seulement d'un Canadien distingué, mais du pays tout entier?

L'honorable B. Alasdair Graham (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, comme je l'avais promis, je me suis renseigné sur la teneur de la lettre qui a été envoyée et je donnerai une réponse complète à mon honorable collègue à l'avenir.

Le sénateur Lynch-Staunton: Honorables sénateurs, c'est l'opinion personnelle du ministre que j'aurais voulu connaître; j'aimerais donner plus de force à ma requête en lui rappelant que, aux termes du règlement, la GRC a été obligée de payer les honoraires et les débours des avocats dont le montant total était à déterminer par arbitrage exécutoire et définitif par l'honorable Alan Gold qui, dans la décision arbitrale qu'il a rendue le 6 octobre, a déclaré:

Je commence par dire que je suis fermement convaincu que le but du règlement était de redresser les torts très graves subis par le demandeur [...]

- c'est-à-dire M. Mulroney -

[...] alors qu'il n'y était pour rien. On n'en attend pas moins de la simple justice et d'un traitement équitable.

Cela se trouve à la page 4 de la décision du juge Gold. Cet ancien juge en chef de la Cour supérieure du Québec, membre de la profession juridique respecté d'un bout à l'autre du pays, a qualifié de très graves les torts subis par M. Mulroney.

Le leader du gouvernement au Sénat ne convient-il pas, après que son gouvernement ait convenu que M. Mulroney avait subi des torts, après que l'ancien juge en chef Gold ait confirmé ces torts, les qualifiant de très graves, que l'on devrait au moins retirer son nom de la lettre rogatoire si le gouvernement, pour une raison qui m'échappe, continue à insister que la lettre dans son entier doit rester entre les mains des autorités suisses?

Le ministre peut-il convenir au moins que le nom de M. Mulroney devrait être supprimé de la lettre?

Le sénateur Graham: Honorables sénateurs, je compatis avec le chef de l'opposition, mais il serait tout à fait inapproprié que, agissant en ma qualité de membre du Cabinet, je donne mon opinion personnelle.

Le développement des ressources humaines

La réforme du Régime de pensions du Canada- L'effet pour les retraités de la réduction des prestations et de la hausse des cotisations- La position du gouvernement

L'honorable Donald H. Oliver: Honorables sénateurs, ma question s'adresse au leader du gouvernement au Sénat et porte sur la réforme du RPC. Le régime de retraite canadien est fondé sur trois piliers: premièrement, un niveau minimum de revenu de retraite tiré des recettes fiscales, comme c'est le cas avec la SV et le SRG; deuxièmement, une pension universelle basée sur l'emploi essentiellement conçue pour remplacer 25 p. 100 du revenu gagné, jusqu'à concurrence du salaire industriel moyen établi aux fins du Régime de pensions du Canada; troisièmement, des épargnes de retraite volontaires avec reports d'impôt en tant qu'incitatifs, comme dans le cas des REER.

Le gouvernement libéral a choisi de diminuer les bénéfices du premier pilier en vertu du nouveau programme de prestations aux personnes âgées; de hausser les cotisations et de réduire les prestations du deuxième pilier, le RPC; enfin, de réduire les incitatifs fiscaux du troisième pilier en modifiant les conditions et en réduisant l'âge d'encaissement des REER. Le leader du gouvernement au Sénat pourrait-il expliquer en quoi une réduction des bénéfices et une hausse des cotisations assureront une meilleure retraite aux Canadiens?

L'honorable B. Alasdair Graham (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, c'est une question en trois volets à laquelle il faudra que je réfléchisse. Je ne veux même pas essayer de donner tout de suite une réponse exacte sur l'un ou l'autre de ces volets. Je tiens à assurer au sénateur que sa question m'intéresse. Je partage ses préoccupations et je lui donnerai très bientôt une réponse qui convient.

La réforme du Régime de pensions du Canada-La source des fonds pour permettre aux contribuables de maximiser leurs régimes enregistrés d'épargne-retraite-La position du gouvernement

L'honorable Donald H. Oliver: Honorables sénateurs, à une époque où le revenu réel diminue, les taux d'intérêt à long terme augmentent, les impôts sont élevés, les cotisations au RPC bondissent et les primes d'AE sont ridiculement élevées, où le leader du gouvernement pense-t-il que les Canadiens, qui recevront moins de prestations des régimes publics, trouveront de l'argent pour investir dans des REER afin d'assurer leur retraite.

L'honorable B. Alasdair Graham (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, je ne ferais qu'une observation générale. L'économie elle-même s'améliore et la création d'emplois s'accélère. Cela est attribuable à une chute prononcée des taux d'intérêts depuis 1995 et à l'amélioration de la confiance des entreprises et des consommateurs. La protection de cette confiance et le maintien de l'économie sur la voie d'une croissance soutenue sont le meilleur moyen d'assurer la progression des gains provenant de l'emploi et donc de minimiser les conséquences de la transition vers des cotisations plus élevées au RPC.

L'hypothèse que les travailleurs paieront le coût intégral des cotisations au RPC n'est que cela, une hypothèse. Naturellement, on peut faire des hypothèses diverses, comme l'a fait mon collègue, et on peut arriver à des conclusions différentes. Nous pourrions parler de cela éternellement, comme le font les économistes, mais nous n'avons pas tout ce temps-là. Si nous voulons restaurer la confiance en notre régime de pensions et nous préparer pour une génération du «baby boom» vieillissante, nous devons agir, et agir dès maintenant.

L'environnement

La vente de réacteurs Candu à la Turquie- L'évaluation de l'impact préalable à la conclusion de l'accord-La position du gouvernement

L'honorable Mira Spivak: Honorables sénateurs, une récente note secrète du Cabinet, dont Radio-Canada a obtenu copie, révèle premièrement que, selon le ministère de la Justice, le gouvernement pourrait perdre sa cause dans la poursuite intentée contre lui par le Sierra Club du Canada, qui l'accuse de s'être soustrait à la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale lors de la vente de deux réacteurs Candu à la Chine.

(1430)

Deuxièmement, la note révèle que si la Cour fédérale du Canada tranche en faveur du Sierra Club, cette décision pourrait compromettre la vente des réacteurs Candu à la Turquie, que le gouvernement entend compléter bientôt et à laquelle il s'est préparé en approuvant un autre prêt de 1,5 milliard de dollars à la Turquie afin d'«adoucir» la soumission pour les Candu.

La note révèle aussi que la stratégie présentée au Cabinet proposait qu'une évaluation environnementale pro forma soit effectuée, dont les conclusions seraient rendues publiques au besoin, mais pas nécessairement. En vertu de la LCEE, toute évaluation pro forma viole entièrement les principes démocratiques fondamentaux de la loi. Les articles 21 à 24 stipulent que la population doit pouvoir s'exprimer et exigent qu'un rapport sur l'impact environnemental soit rendu public.

Le Cabinet a contourné ces exigences fondamentales de divulgation publique il y a un an, lorsqu'il a approuvé les règlements de la LCEE pour les projets réalisés à l'extérieur du Canada, et il le fera encore une fois, semble-t-il, même si ses propres avocats laissent entendre que le tribunal pourrait juger que son geste de l'année dernière est ultra vires puisque, je le répète, le gouvernement s'est soustrait avec désinvolture à la loi canadienne dans le but de conclure une vente.

Les questions que j'adresse au leader du gouvernement au Sénat sont donc les suivantes: est-ce qu'une évaluation pro forma des ventes de réacteurs à la Turquie est en cours ou a-t-elle déjà été réalisée? Le gouvernement publiera-t-il les résultats de cette évaluation avant de conclure une entente avec la Turquie?

L'honorable B. Alasdair Graham (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, la politique d'EACL stipule que EACL doit procéder à une évaluation de l'impact environnemental pour tous ses projets. Si EACL est le soumissionnaire gagnant pour la vente de réacteurs à la Turquie, elle se conformera aux exigences environnementales de la Turquie et du Canada.

En ce qui concerne l'examen pro forma, j'ai aussi lu les rapports de presse, mais je n'ai rien vu qui concerne une opposition ou un examen pro forma.

À l'heure actuelle, comme le sait ma collègue, les tribunaux sont saisis d'une cause portant sur l'application de la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale à de telles transactions, et je ne crois pas qu'il conviendrait de commenter les détails maintenant.

Le sénateur Spivak: Je comprends la réponse du sénateur. Cependant, j'aimerais lui poser une autre question.

Si le tribunal décide que le geste était effectivement ultra vires - je parle ici du gouvernement qui a contourné la loi sur l'évaluation environnementale il y a un an - quelle sera la réaction du Cabinet? Qui sera invité à démissionner advenant une telle situation, puisque le Cabinet serait alors trouvé coupable d'infraction à la loi canadienne? Nous sommes le Canada et non le Politburo.

Le sénateur Lynch-Staunton: Ils blâmeront quelque commis de la fonction publique.

Le sénateur Graham: Je considère qu'il s'agit d'une question hypothétique; nous devons donc attendre l'évolution de la situation.

Le Sénat

La nomination de l'huissier du Sénat-Les changements apportés au titre traditionnel de gentilhomme huissier de la Verge noire-La position du gouvernement

L'honorable Noël A. Kinsella (chef adjoint suppléant de l'opposition): Honorables sénateurs, je voudrais poser une question au leader du gouvernement au Sénat. Le cabinet du premier ministre a émis un communiqué de presse le 20 octobre 1997 au sujet de la nomination de l'huissier du Sénat. Étant donné les articles 19 et 20 du Règlement du Sénat qui portent sur les étrangers présents au Sénat, et étant donné la question que j'ai posée au leader du gouvernement au Sénat il y a quelque temps, et le fait que la nomination dont on parle dans le communiqué de presse a déjà eu lieu, j'ai appelé le numéro qui figurait sur ce communiqué de presse pour obtenir davantage d'informations. Au service de presse du premier ministre, on m'a invité à appeler deux numéros. Le premier était celui du greffier du Sénat et l'autre était celui du Service des communications du Sénat, et j'ai donc fait le tour rapidement.

Je voudrais revenir à ma question à l'honorable leader du gouvernement au Sénat à ce sujet. Mon honorable collègue a-t-il pu établir notre position sur cette question, étant donné que dans une semaine environ la personne à laquelle on a confié ce nouveau poste arrivera ici? Il est important pour nous d'éviter tout problème.

L'honorable B. Alasdair Graham (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, je crois comprendre que la personne en question sera à son poste à notre retour de vacances.

Je demande à l'honorable sénateur de m'excuser, car je n'ai pas pu obtenir une réponse à la question à laquelle il a fait allusion plus tôt, mais je poursuis mes efforts en ce sens et je lui soumettrai une réponse le plus tôt possible.

Le sénateur Kinsella: Honorables sénateurs, j'ai une question complémentaire.

L'honorable leader du gouvernement au Sénat pense-t-il qu'un comité ou un sous-comité du Sénat pourrait peut-être se pencher sur cette question de façon urgente dans la mesure où cela pourrait entraîner une question de privilège? Peut-être le comité permanent des privilèges, du Règlement et de la procédure ou un groupe semblable pourrait-il examiner la question pour éviter des problèmes?

Le sénateur Graham: Honorables sénateurs, je ne voudrais pas renvoyer ou proposer de renvoyer officiellement cette question au comité, mais c'est une bonne suggestion. Le président et les membres du comité pourront peut-être étudier la proposition de mon collègue.

Le patrimoine canadien

Les modifications proposées au Musée canadien de la guerre-Assurances demandées au ministre concernant les intentions d'honorer les anciens combattants et la tradition-Demande de réponse

L'honorable J. Michael Forrestall: Honorables sénateurs, il y a quelque temps, j'ai demandé au leader du gouvernement au Sénat s'il pouvait se pencher sur l'état déplorable de la solde et des allocations des membres des Forces armées canadiennes de réserve. Il avait promis de s'en occuper.

Il a sans doute eu le temps de se pencher aussi sur la question de la modification du nom et du mandat du Musée canadien de la guerre. Pourrait-il nous assurer, de son propre chef, que le canon qui orne nos murs ne sera pas enlevé avant le jour de l'armistice?

L'honorable B. Alasdair Graham (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, je suis toujours à la recherche d'une réponse sur les salaires.

En ce qui concerne la possibilité de modifier le nom du Musée canadien de la guerre, je puis assurer mon collègue qu'il n'en est pas question. Nous avons d'ailleurs aujourd'hui une réponse différée à la question du sénateur Forrestall à ce sujet.

Le sénateur Forrestall: La ministre responsable du Patrimoine canadien a dit dans l'autre endroit qu'elle espérait qu'il n'y aurait pas de changement. Le ministre peut-il être plus catégorique que cela?

Le sénateur Graham: Je peux dire sans hésitation que le conseil d'administration du Musée canadien des civilisations n'a pas l'intention de rebaptiser le Musée canadien de la guerre.

Le développement des ressources humaines

Modifications au Régime de pensions du Canada- Attributions du nouvel Office d'investissement échappant au contrôle du vérificateur général- La position du gouvernement

L'honorable Terry Stratton: Honorables sénateurs, ma question s'adresse au leader du gouvernement au Sénat. Il semble un peu fatigué aujourd'hui. C'est peut-être à cause de sa longue journée d'hier et de son long voyage en avion, qui a débuté, sauf erreur, à quatre heures. Je comprends que l'honorable sénateur se fasse discret aujourd'hui. Honorables sénateurs, je pose ma question au nom des Canadiens qui, depuis de nombreuses années, comptent sur le vérificateur général pour s'assurer non seulement que le gouvernement présente une comptabilité juste, mais qu'il administre efficacement ses programmes et ne dilapide pas les fonds publics.

Les modifications proposées au Régime de pensions du Canada comportent notamment la création d'un Office d'investissement qui aura pour fonction de gérer les investissements du RPC. Le vérificateur général continuera de vérifier la caisse du RPC, mais pas celle de l'Office d'investissement.

Le ministre peut-il expliquer pourquoi le gouvernement juge nécessaire de soumettre le Régime de pensions du Canada à deux vérificateurs qui tiendront des dossiers en deux endroits distincts?

L'honorable B. Alasdair Graham (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, je n'ai pas la réponse précise à cette question. Le gouvernement veut que l'Office d'investissement soit complètement indépendant du gouvernement. Les 12 membres de l'office rempliront des mandats échelonnés de trois ans et un comité de nomination a été constitué, comme je crois l'avoir déjà indiqué dans une réponse à une question que mon collègue avait posée. Si je ne me trompe, le comité est censé se réunir vers le 20 novembre pour procéder aux choix définitifs.

Je ne sais pas pourquoi ce ne serait pas le vérificateur général lui-même, mais je chercherai à obtenir la réponse à cette question.

Le sénateur Stratton: Honorables sénateurs, il semble que le vérificateur général ne pourra vérifier la rentabilité de l'Office d'investissement du Régime de pensions du Canada que si ce dernier le lui demande. Bref, l'Office d'investissement du Régime de pensions du Canada et ses membres pourront faire ce qu'ils voudront, sans avoir à craindre que le vérificateur général ne relève des cas de gaspillage et de mauvaise gestion.

(1440)

Le leader du gouvernement au Sénat pourrait-il nous dire deux choses: premièrement, pourquoi la mesure législative proposée n'autorise-t-elle pas le vérificateur général à vérifier la rentabilité de ce nouvel office, d'autant plus que ce dernier gérera bientôt un budget de 200 milliards de dollars? Deuxièmement, le gouvernement a-t-il l'intention de demander un jour au vérificateur général d'examiner la gestion de ce nouvel office?

Le sénateur Graham: Honorables sénateurs, il se peut que le gouvernement veuille ultérieurement faire appel au vérificateur général. Beaucoup de questions ont été posées au sujet du RPC. La mesure législative est maintenant examinée dans l'autre endroit. Nous espérons en être bientôt saisis. En fait, des discussions ont actuellement lieu entre les dirigeants des deux côtés en ce qui concerne une étude préalable de cette importante et imposante mesure législative. Je m'attends à ce que des questions soient posées en comité à propos de cette mesure législative.

Le sénateur Stratton: Le ministre pourrait-il dire au Sénat pourquoi le gouvernement n'a pas encore désigné la firme qui sera chargée de vérifier les comptes de l'office, alors que celui-ci doit bientôt entrer en fonction?

Le sénateur Graham: Honorables sénateurs, il est possible que le gouvernement attende que l'office soit constitué pour le laisser choisir lui-même la firme.

L'agriculture

Le commerce transfrontalier avec les États-Unis- L'Impact sur les agriculteurs canadiens des restrictions proposées par les Américains concernant les produits visés

L'honorable Leonard J. Gustafson: Honorables sénateurs, je voudrais poser une question au leader du gouvernement au Sénat. Le président des États-Unis s'est apparemment rangé du côté du Sénat en ce qui concerne notamment le commerce des produits agricoles, principalement le boeuf et le blé. Notre gouvernement semble ne rien faire. L'examen accéléré de la situation commerciale est très bien, mais nous devons traiter équitablement tous les produits.

J'ai en main un article de journal intitulé «Clinton sacrifie le Canada». On y parle de mesures rigoureuses contre l'exportation de bétail et de céréales vers les États-Unis, ainsi que des mesures qui protègent les offices de commercialisation et qui empêchent l'importation de produits concurrentiels au Canada.

Que fait le gouvernement à cet égard? Cette question dépasse la compétence du ministre de l'Agriculture ou du ministre responsable de la Commission canadienne du blé et doit être examinée par le Cabinet.

L'honorable B. Alasdair Graham (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, il s'agit-là d'une question sérieuse. J'ai vu l'article que mentionne le sénateur Gustafson. Des discussions ont sans doute eu lieu entre homologues du Canada et des États-Unis. Je tenterai de fournir une réponse complète au sénateur.

Le sénateur Gustafson: Honorables sénateurs, ce serait très déplorable si cette situation prenait la même ampleur que le conflit des pêches, lorsque les relations entre les États-Unis et le Canada sont devenues inacceptables de part et d'autre.

Le leader du gouvernement au Sénat pourrait-il saisir le Cabinet et le premier ministre de ce dossier? Il s'agit-là d'un dossier très sérieux. Les éleveurs de bétail et, notamment, les céréaliculteurs sont très préoccupés.

Le sénateur Graham: Lorsque l'honorable sénateur Gustafson présente des instances de la sorte, il le fait parce qu'il connaît fort bien ce secteur. Nous prenons ses instances au sérieux et je ferai exactement ce qu'il a proposé.

Réponses différées à des questions orales

L'honorable Sharon Carstairs (leader adjoint du gouvernement): Honorables sénateurs, j'ai l'honneur de présenter la réponse à la question posée au Sénat le 23 octobre 1997 par l'honorable sénateur J. Michael Forrestall au sujet de la rumeur voulant que le nom du Musée canadien de la guerre soit changé.

Le patrimoine canadien

La rumeur de changement de nom du Musée canadien de la guerre-La position du gouvernement

(Réponse à la question posée par l'honorable J. Michael Forrestall le 23 octobre 1997)

Le conseil d'administration du Musée canadien des civilisations n'a pas l'intention de modifier le nom du Musée canadien de la guerre.


ORDRE DU JOUR

La Loi sur le Parlement du Canada

Projet de loi modificatif-Deuxième lecture

L'honorable Sharon Carstairs propose: Que le projet de loi C-13, Loi modifiant la Loi sur le Parlement du Canada, soit lu une deuxième fois.

-Honorables sénateurs, je suis heureuse d'intervenir aujourd'hui pour parler du projet de loi C-13, Loi modifiant la Loi sur le Parlement du Canada. J'aimerais prendre quelques instants pour décrire brièvement le projet de loi à l'intention des honorables sénateurs. Ce projet de loi apporte à la Loi sur le Parlement du Canada deux modifications concernant le Bureau de régie interne de la Chambre des communes.

Comme le savent les honorables sénateurs, le Bureau de régie interne de la Chambre des communes est responsable de toutes les questions financières et administratives de la Chambre des communes et de ses membres. En fait, il équivaut à notre comité sénatorial permanent de la régie interne, des budgets et de l'administration.

Le Bureau de régie interne de la Chambre des communes, ou son équivalent, existait avant même la Confédération. Jusqu'en 1985, il a été formé uniquement de membres du Conseil privé; en pratique, cela signifiait qu'il était formé uniquement de membres du Cabinet. En 1984, le comité spécial de la réforme de la Chambre des communes, communément appelé le comité McGrath, a formulé une série de recommandations en vue de la restructuration de ce bureau de façon qu'y soient représentés les caucus du gouvernement et de l'opposition, ainsi que le Conseil privé.

Le comité McGrath a proposé que le bureau soit composé du Président de la Chambre des communes, du président adjoint de la Chambre des communes, de deux ministres, du chef de l'opposition officielle ou de son délégué et de quatre autres députés - deux députés choisis par le caucus du gouvernement et deux par les caucus d'opposition, à tout le moins celui de l'opposition officielle. Telle est la composition actuelle du bureau.

En 1991, des modifications ont été apportées à la Loi sur le Parlement du Canada qui codifiaient les modifications recommandées par le comité McGrath et prévoyaient qu'un deuxième parti d'opposition pourrait être représenté au sein du bureau, à condition que ce parti dispose d'au moins 12 sièges, autrement dit, qu'il jouisse du statut de parti officiel.

Cette formule a bien fonctionné jusqu'aux élections de 1997. La formule qui est actuellement en vigueur au bureau ne prévoit pas la présence des cinq partis officiels que compte la Chambre des communes, dont quatre partis d'opposition.

L'article 1 du projet de loi C-13 modifierait les paragraphes 50(2) et (3) de la Loi sur le Parlement du Canada concernant la composition du Bureau de régie interne de la Chambre des communes, afin d'autoriser la représentation de tous les partis officiellement reconnus. Selon le nouvel article, le bureau serait composé du Président de la Chambre des communes, de deux membres du Conseil privé et du chef de l'opposition ou de leurs délégués. S'il n'y avait qu'un parti d'opposition officiellement reconnu, son caucus nommerait deux députés et le caucus du parti gouvernemental en nommerait un. S'il y avait plusieurs partis d'opposition officiellement reconnus, chaque caucus nommerait un député et le caucus du parti gouvernemental en nommerait un de moins que le total des membres nommés par les partis d'opposition.

Aujourd'hui, le bureau compte neuf membres. En vertu du projet de loi C-13, étant donné la composition actuelle de la Chambre, il y aurait onze membres, c'est-à-dire le Président de la Chambre, deux ministres, le chef de l'opposition - un député nommé par chacun des partis réformiste, bloquiste, conservateur et néo-démocrate - et trois membres nommés par le caucus du parti gouvernemental. Par conséquent, il y aurait toujours un nombre égal de députés de l'opposition et du parti gouvernemental, plus le Président de la Chambre qui préside le bureau.

Honorables sénateurs, à l'heure actuelle, en cas d'absence, d'empêchement ou de décès du Président, le quorum serait de cinq membres, dont le président suppléant, qui présiderait. Toutefois, le président suppléant ne fait plus partie du bureau aux termes de la formule proposée dans l'article du projet de loi. L'article 2 du projet de loi prévoit donc un président suppléant.

Selon l'article 2, le quorum est formé de cinq membres, dont un doit être membre du Conseil privé. Le bureau désignerait donc un des membres présents pour présider les travaux.

Honorables sénateurs, le projet de loi C-13 est relativement simple et traduit les complexités actuelles de la Chambre où siègent cinq partis officiellement reconnus.

L'honorable C. William Doody: Honorables sénateurs, le sénateur qui parraine le projet de loi autorise-t-elle une question?

Le sénateur Carstairs: Oui.

Le sénateur Doody: La Chambre des communes entend-elle rendre les travaux du Bureau de régie interne plus transparents pour la population? Les journalistes et les membres du public pourront-ils assister à ses travaux, comme c'est le cas au Sénat, ou est-ce que ces travaux se feront derrière des portes closes?

(1450)

Le sénateur Carstairs: Honorables sénateurs, je ne peux pas répondre à cette question, mais je tâcherai d'obtenir cette information pour le sénateur.

L'honorable Philippe Deane Gigantès: Honorables sénateurs, moi aussi, j'ai une question pour madame le leader adjoint du gouvernement. Lorsqu'elle se renseignera auprès de ses collègues de l'autre endroit pour obtenir une réponse à la question du sénateur Doody, aurait-elle l'amabilité de leur faire savoir que nous n'adopterons pas le projet de loi tant qu'ils n'auront pas fait preuve d'ouverture dans leurs travaux?

L'honorable Michel Cogger: Honorables sénateurs, on m'a demandé de dire quelques mots au sujet du projet de loi C-13. Je ne parlerai pas longtemps, pour la simple raison que j'en sais très peu au sujet du projet de loi C-13, à part ce que vient de nous en dire notre collègue, le sénateur Carstairs. Je n'ai pas à m'en excuser.

Même si je ne peux pas éclairer davantage mes collègues au sujet du projet de loi C-13, je profiterai néanmoins de l'occasion pour souligner un fait avec lequel nous devons vivre de nos jours. J'espère toutefois que cela ne se reproduira pas trop souvent. Depuis le début de la nouvelle législature, cela s'est produit quelques fois, notamment avec le projet de loi C-13. Je parle de cette manière qu'a le gouvernement de faire traîner les choses pour soudainement accélérer l'adoption d'un projet de loi afin qu'il entre en vigueur le jour suivant ou la semaine suivante. Il croit que nous sommes une usine de fabrication de saucisses produisant à toute vitesse.

Qu'est-ce que c'est que cette absurdité selon laquelle nous avons maintenant des délais à respecter? Nous nous sommes vu imposer une date limite tant pour la résolution concernant le Québec que pour celle concernant Terre-Neuve. Un projet de loi qui sera renvoyé au comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles et qu'on désigne couramment sous le nom de projet de loi sur les mandats est sous le coup d'une échéance imposée par la Cour suprême du Canada - le 22 novembre, je crois. Apparemment, ce sera le déluge s'il n'est pas adopté d'ici-là. Le gouvernement du Canada, la ministre de la Justice, le BCP et tous les fonctionnaires le savaient. Ça ne leur est pas soudainement tombé du ciel.

Le Sénat n'a pas encore reçu le projet de loi sur les mandats, un important projet de loi qui remet en question des éléments de la Constitution et de la Charte. Honorables sénateurs, nous avons des chances de le recevoir demain mais, selon moi, c'est peu probable. Le Sénat n'est pas censé siéger la semaine prochaine. Lorsque nous reviendrons le mardi suivant, le gouvernement du Canada nous mettra un canon sur la tempe et nous dira: «Adoptez ce projet de loi d'ici le 22 novembre, parce qu'il y a une échéance et si elle n'est pas respectée ça ira mal.»

Honorables sénateurs, je sais bien que cela n'a pas grand-chose à voir avec le projet de loi C-13, mais cela a un rapport avec le cheminement suivi par le projet de loi C-13 jusqu'à son arrivée ici.

J'aimerais bien que les dirigeants de la majorité au Sénat fassent savoir à leurs collègues députés que cette Chambre - les sénateurs conservateurs en tout cas - ne fonctionne pas avec des échéances.

La modification constitutionnelle concernant le Québec est d'une grande importance et mérite toute l'attention qu'elle reçoit. Nous n'avons pas à nous excuser de prendre notre temps et de faire notre travail. En ce qui concerne la modification constitutionnelle relative aux écoles de Terre-Neuve, si quelqu'un vient me dire: «Nous en avons besoin pour telle date, parce que nous en avons convenu ainsi avec le gouvernement de Terre-Neuve», je lui répondrai: «Vous avez convenu, pas moi.»

Notre responsabilité est d'accorder le temps et l'attention nécessaires aux questions qui nous sont présentées. Prenez-en note.

Le sénateur Gigantès: Honorables sénateurs, je voudrais poser une question au sénateur Cogger. Ne se rappelle-t-il pas que notre parti s'est plaint de la même chose lorsque c'était son parti qui gouvernait?

Le sénateur Cogger: Honorables sénateurs, j'étais déjà ici et je me souviens de l'excellente collaboration que nous avons reçue de la part de l'autre côté. Est-ce que c'est ce que veut le sénateur?

Le sénateur Gigantès: Pourquoi pas? C'était bien plus drôle!

[Français]

L'honorable Pierre Claude Nolin: Honorables sénateurs, j'aurais une question à poser à mon collègue, le sénateur Cogger. Est-ce que j'ai bien compris que vous étiez d'accord avec le projet de loi?

Le sénateur Cogger: Je saurais difficilement vous répondre, je ne l'ai pas vu.

[Traduction]

(La motion est adoptée et le projet de loi est lu une deuxième fois.)

Renvoi au comité

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, quand lirons-nous ce projet de loi pour la troisième fois?

(Sur la motion du sénateur Carstairs, le projet de loi est renvoyé au comité permanent des affaires juridiques et constitutionnelles.)

Terre-Neuve

La réforme du système scolaire-La modification de la clause 17 de la Constitution-La création d'un comité mixte spécial-Adoption de la motion

L'honorable William J. Petten, au nom du sénateur Carstairs, avis ayant été donné le 29 octobre 1997, propose:

Que le Sénat se joigne à la Chambre des communes pour constituer un comité mixte spécial du Sénat et de la Chambre des communes pour étudier les différents aspects du projet de résolution concernant la modification que l'on propose d'apporter à la clause 17 des Conditions de l'union de Terre-Neuve avec le Canada à l'égard du système scolaire de Terre-Neuve;

Que sept sénateurs et seize députés fassent partie du comité;

Qu'il soit enjoint au comité de se livrer à des consultations aussi nombreuses et à un examen aussi approfondi des différents aspects de la question qu'il le jugera opportun;

Que le comité soit habilité à siéger pendant les séances et les ajournements du Sénat;

Que le comité soit habilité à soumettre des rapports périodiques, à demander à rencontrer certaines personnes ou à voir certains documents ainsi qu'à reproduire tous les documents ou autres éléments de preuve qui lui sembleront utiles;

Que le comité soit habilité à entendre les témoins par le biais de la vidéoconférence;

Que le comité soit habilité à engager des experts ainsi que du personnel professionnel, technique et de bureau;

Que le quorum soit de douze membres chaque fois que l'on passe une question aux voix, que l'on adopte une résolution ou que l'on veut prendre quelque autre décision, dans la mesure où les deux Chambres sont représentées, et que les coprésidents soient habilités à convoquer une réunion, à recevoir des éléments de preuve et à en autoriser l'impression dans la mesure où six membres sont présents et que les deux Chambres sont représentées;

Que le comité soit habilité à désigner certains de ses membres pour constituer autant de sous-comités qu'il le jugera utile, et à déléguer auxdits sous-comités la totalité ou une partie de ses pouvoirs, à l'exception de celui de faire rapport au Sénat et à la Chambre des communes;

Que le comité soit habilité à autoriser la télédiffusion ou la radiodiffusion d'une partie ou de la totalité de ses délibérations;

Que le comité soumette son rapport final d'ici le 5 décembre 1997;

Que, nonobstant les pratiques courantes, si la Chambre ou le Sénat ne siège pas le jour où le comité déposera son rapport, celui-ci soit remis au greffier de la Chambre qui ne siège pas, ou au greffier de l'une et l'autre Chambres si aucune des deux ne siège à cette date, le rapport devant dès lors être considéré comme ayant été déposé devant l'une ou l'autre Chambre, ou les deux, selon le cas; et

Qu'un message soit transmis à la Chambre des communes pour l'en informer de ce qui précède.

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, avant d'inviter le sénateur Petten à prendre la parole, je signale qu'il y a entente, sauf erreur, pour que l'auteur de la motion et le sénateur qui prendra la parole après lui aient droit tous les deux à 45 minutes, même s'il ne s'agit pas d'un projet de loi. Est-ce convenu des deux côtés?

Des voix: D'accord.

Le sénateur Petten: Honorables sénateurs, le sénateur Rompkey souhaitait donner ce discours, mais il a dû se rendre à Terre-Neuve pour assister à la présentation publique d'une entente de principe concernant un accord sur les revendications territoriales des Inuit du Labrador dont il s'est occupé pendant de longues années.

Honorables sénateurs, je suis heureux d'intervenir dans le débat de cette motion. Elle vise à constituer un comité mixte spécial du Sénat et de la Chambre des communes chargé d'étudier le projet de modification de la Constitution afin que la province de Terre-Neuve et du Labrador puisse remplacer le système scolaire confessionnel actuel par un système unique non confessionnel.

Comme les honorables sénateurs le savent très bien, la province de Terre-Neuve et du Labrador essaie depuis plusieurs années de réformer son système scolaire qui est vraiment unique au Canada. Contrairement à ce qu'on voit dans les autres provinces, tout le système scolaire y est confessionnel. Les élèves fréquentent des écoles dirigées par l'Église catholique romaine, par l'Assemblée pentecôtiste, par l'Église adventiste du septième jour ou par un regroupement des églises anglicane, presbytérienne, unie et de l'Armée du Salut. Sauf pour une seule école pour les enfants sourds, il n'y a tout simplement pas d'école publique non confessionnelle à Terre-Neuve et au Labrador. Comme beaucoup d'entre vous le savent, ce système a entraîné au fil des ans beaucoup de double emploi, d'inefficacité et de coûts élevés qui n'ont rien à voir avec l'éducation même de nos enfants.

Je ne prendrai pas le temps d'expliquer dans les détails les problèmes que cause ce système. Cependant, beaucoup de Terre-Neuviens jugent qu'on a tout simplement tort aujourd'hui de faire les fortes dépenses qu'exige le maintien de plusieurs systèmes scolaires. Les difficultés économiques de ma province sont bien connues. Nous avons une faible population, environ un demi-million, éparpillée sur un vaste territoire. Nous avons besoin de pouvoir concentrer et canaliser nos ressources économiques de manière à assurer la meilleure éducation possible à nos enfants au lieu d'en diluer l'utilité en répartissant ces ressources financières limitées entre plusieurs systèmes.

D'autres problèmes se posent également. Par exemple, les Terre-Neuviens qui n'épousent aucune des sept confessions protégées se retrouvent sans possibilité de se faire entendre pour l'éducation de leurs enfants. Ces parents ont été obligés d'envoyer leurs enfants à une école dirigée par un groupe confessionnel auquel ils n'appartiennent pas, mais financée par l'argent de leurs impôts. La religion a servi de critère pour l'embauche et le congédiement d'enseignants, même si de nombreux Terre-Neuviens croient que ce critère ne devrait simplement plus être appliqué de nos jours.

(1500)

Il y a eu, au fil des ans, bien des tentatives pour réformer le système scolaire. En 1992, une commission royale a effectué une étude exhaustive du système scolaire et recommandé la création d'un seul système interconfessionnel, qui engloberait le système confessionnel d'écoles séparées déjà en place. De longues négociations ont alors été entreprises avec les Églises dans le but de tenter de réformer le système sans modifier la Constitution. Malheureusement, ces tentatives ont échoué.

Finalement, la province a obtenu l'accord de tous les intéressés pour modifier la clause 17. Le projet de modification comme tel représentait un compromis. Il n'aurait pas aboli les écoles dites uniconfessionnelles à Terre-Neuve. Toutes les écoles seraient demeurées des écoles confessionnelles. L'Assemblée législative de Terre-Neuve aurait eu le pouvoir de regrouper les écoles dans un système d'écoles interconfessionnelles, où tous les groupes protégés, notamment les catholiques et les pentecôtistes, auraient préservé leurs droits ou dans un système d'écoles uniconfessionnelles, selon certains critères qui se seraient appliqués à toutes les écoles.

Toutefois, la loi qui a été adoptée pour apporter ces changements a été contestée devant la Cour suprême de Terre-Neuve. Des représentants de l'Église catholique et des Assemblées de la Pentecôte ont demandé et obtenu une injonction qui a interrompu tout le processus de réforme scolaire. Essentiellement, le juge Leo Barry a établi que la nouvelle Loi scolaire favorisait les écoles interconfessionnelles au détriment des écoles uniconfessionnelles. Il a soutenu qu'un juge de première instance déciderait probablement que la loi est contraire à la clause 17 modifiée et la déclarerait donc inconstitutionnelle. Par conséquent, il a accordé l'injonction demandée.

Comme l'avait prévu le juge Barry dans sa décision, cela a grandement perturbé les enseignants, les directeurs d'école et les écoliers qui avaient déjà été affectés à de nouvelles écoles. Certaines écoles ont même dû être rouvertes. Des enseignants qui avaient été mis à pied ont dû être réembauchés. Le débat sur l'éducation, que les gens de ma province croyaient finalement terminé, a été rouvert.

J'ai été frappé par un certain nombre de passages du jugement du tribunal. Le juge Barry a reconnu qu'il était contraint de maintenir et d'appliquer le système confessionnel prévu dans l'actuelle clause 17. Néanmoins, il a fait remarquer plusieurs fois que:

[...] le Parlement et l'Assemblée législative, en maintenant un système d'écoles confessionnelles conformément à la clause 17[...]

- c'est-à-dire la nouvelle clause 17 -

[...] devait savoir que cela n'offrirait pas les possibilités maximales d'éducation aux enfants de cette province.

Après avoir signalé des lacunes de l'ancien système confessionnel, il a ajouté ceci:

On peut donc raisonnablement conclure que l'assemblée législative a adopté une norme d'éducation moins qu'optimale en décidant de préserver au moins en partie le système des écoles confessionnelles.

Il semble que le gouvernement de Terre-Neuve et du Labrador et les Terre-Neuviens sont finalement d'accord avec le juge Barry. Si l'objectif est d'offrir aux enfants de la province les meilleures possibilités d'éducation, il faut alors se défaire complètement du système des écoles confessionnelles.

Le gouvernement a interjeté appel de la décision mais, au bout du compte, il n'a pas poursuivi l'affaire. Il a plutôt décidé de tenir un second référendum. Cette affaire était très simple. La question posée aux Canadiens de Terre-Neuve, ma province, était la suivante:

Êtes-vous en faveur d'un système scolaire unique dans lequel les enfants, quelle que soit leur appartenance religieuse, fréquentent les mêmes écoles où l'instruction et les manifestations religieuses sont permises?

Cette question - tout le monde en conviendra, je crois - était claire et simple.

Le scrutin a eu lieu le 2 septembre, le jour de la Fête du travail où les enfants de toute la province rentraient à l'école après les vacances d'été. En d'autres mots, c'était la journée où l'éducation était au premier plan des préoccupations des parents, un excellent jour pour exprimer leurs vues sur l'orientation à donner à l'éducation dans la province. Les résultats obtenus, honorables sénateurs, sont clairs et sans équivoque. Soixante-treize pour cent des électeurs ont exprimé leur appui à la réforme proposée. Soixante-treize pour cent des électeurs ont déclaré qu'ils voulaient un seul système scolaire pour tous les enfants, peu importe leur affiliation religieuse.

L'an dernier, un certain nombre de sénateurs et d'autres personnes ont exprimé la crainte que les minorités touchées n'aient pas approuvé la modification à la clause 17. Cette fois-ci, il est clair que ces craintes ne sont pas fondées. La réforme proposée n'a pas été adoptée par une mince majorité, mais par 73 p. 100 des électeurs. La proposition l'a emporté dans 47 des 48 circonscriptions électorales de Terre-Neuve.

Les analyses du vote que j'ai vues appuient la conclusion selon laquelle les minorités qui se sentent elles-mêmes particulièrement touchées par la réforme appuient la modification proposée. Dans les régions où il y a beaucoup de catholiques romains, la proposition a obtenu une nette majorité. Dans la région de St. George's Bay, catholique romaine à 74 p. 100, le «oui» l'a emporté par 59 p. 100. Dans la péninsule de Burin, catholique romaine à 48,5 p. 100, 72 p. 100 ont voté «oui». Dans la péninsule d'Avalon, catholique romaine à 48,5 p. 100, et aussi la région la plus peuplée de la province - région que je connais bien parce que j'y vis -, 72 p. 100 de la population a dit «oui». Honorables sénateurs, ce sont là des chiffres convaincants.

Les quatre circonscriptions où les pentecôtistes sont concentrés ont aussi appuyé la proposition par des majorités allant de 57 à 64 p. 100. Qui plus est, le 5 septembre, les députés à l'Assemblée législative de Terre-Neuve et du Labrador ont accordé leur appui unanime à la proposition de modification de la clause 17. Cela comprenait les quatre députés pentecôtistes qui représentaient les districts comptant une forte population pentecôtiste ainsi que tous les députés catholiques et pentecôtistes qui avaient fait campagne activement pour le «non».

Autrement dit, honorables sénateurs, la modification proposée à la clause 17 fait clairement l'objet d'un consensus à Terre-Neuve et au Labrador.

Je tiens à signaler que la clause 17 proposée n'abolirait pas la pratique et l'enseignement religieux dans les écoles publiques. Au contraire, elle exigerait que l'assemblée législative prévoie des cours de religion qui ne sont pas propres à une confession en particulier. De plus, la clause 17 proposée autoriserait la pratique religieuse dans les écoles à la demande des parents.

Comme le disait l'honorable John Crosbie, ancien député conservateur et ministre de la Couronne, dans l'avis juridique fourni au gouvernement de Terre-Neuve et du Labrador, puisque l'obligation de donner des cours de religion est prévue dans la clause 17, ces cours sont donc garantis par la Constitution. J'ai téléphoné à M. Crosbie hier pour lui demander de confirmer que cela était bien précisé dans son rapport, ce qu'il a fait.

Toutefois, le but réel de la modification, comme le premier ministre Tobin l'a dit dans le discours qu'il a adressé à la province pour annoncer le référendum, est de mettre fin au système scolaire qui sépare les enfants selon leur religion et de le remplacer par:

[...] un seul système scolaire pour tout le monde, un système où tous les enfants suivent les mêmes cours, ont les mêmes professeurs, prennent le même autobus [...] un système scolaire où tous les enfants apprennent ensemble.

Nous savons que cette proposition a été appuyée massivement à Terre-Neuve et au Labrador, mais, évidemment, le Parlement du Canada n'est pas là pour entériner automatiquement les modifications constitutionnelles proposées par les provinces. Nous devons examiner et évaluer chaque modification proposée avec tout le soin qu'elle mérite. Je crois que le comité mixte spécial dont la création est proposée donnera aux députés et aux sénateurs une excellente tribune où étudier en toute objectivité la modification proposée, afin de voir nous-mêmes ce qui sert le mieux l'intérêt de la province en question et de décider si le projet jouit d'un appui suffisant, notamment parmi les minorités visées.

(1510)

Honorables sénateurs, j'ai le plaisir d'appuyer la motion visant à créer ce comité mixte, car il donnera aux Terre-Neuviens une tribune importante où faire valoir leur point de vue pour ou contre le projet.

Pour ces raisons, j'espère que, comme moi, les honorables sénateurs appuieront la création d'un comité mixte spécial chargé d'étudier le projet de modification.

L'honorable C. William Doody: Honorables sénateurs, pour commencer, je remercie le Sénat de surseoir à l'application du Règlement pour que nous puissions tenir ce débat dans un délai raisonnable aujourd'hui.

Il y a environ un an, j'ai signalé au Sénat que l'on ne traite pas une résolution de la même façon qu'une mesure législative ordinaire. J'espère que ceci sera l'occasion, pour le comité du Règlement, de modifier ce dernier pour tenir compte du fait qu'une modification constitutionnelle mérite au moins autant d'attention qu'une modification au Code de la route ou à toute autre mesure législative.

Comme le sénateur Petten l'a si éloquemment expliqué, cette motion prévoit que nous nous joignions à la Chambre des communes pour constituer un comité mixte spécial chargé d'étudier cette proposition, qui se veut la plus récente tentative de Terre-Neuve visant à faire modifier la clause 17 des Conditions de l'union de Terre-Neuve avec le Canada.

Je dois dire que, au départ, l'idée même des comités mixtes ne me souriait guère. Cela paraît bien, du point de vue de la cohésion parlementaire, mais il reste que ce ne sont pas sept sénateurs parmi seize députés qui peuvent défendre pleinement les intérêts du Sénat. Nous ne faisons pas le poids et, si l'on fait le décompte par parti, cela se défend encore moins. Les trois sénateurs conservateurs, auxquels s'ajoutera peut-être un conservateur de l'autre endroit, formeront une toute petite minorité représentant les partis politiques de cette Chambre. On semble avoir une tendance alarmante à créer de plus en plus de comités mixtes, ce qui me donne à penser que l'on cherche à miner l'autorité, les pouvoirs et l'influence du Sénat en tant que chambre indépendante.

Quoi qu'il en soit, un comité mixte est nettement préférable à la façon de procéder de la Chambre des communes lors de la dernière tentative visant à modifier la clause 17. À l'époque, il n'y avait pas de comité. La Chambre a débattu de la question pendant deux ou trois heures et l'a ensuite renvoyée à cet endroit. Le Sénat, et c'est tout à son honneur, a renvoyé la question à son comité permanent des affaires juridiques et constitutionnelles. De vastes audiences ont eu lieu à Ottawa et à St. John's.

Certains d'entre nous contestent le rapport final qui a été préparé par le personnel de ce comité dont les travaux ont été très bien dirigés et présidés avec compétence. Le rapport n'a pas été accepté par la majorité des membres du comité. Les représentants du parti ministériel au sein du comité ont mystérieusement et comme par magie produit un rapport complètement nouveau dès le lendemain, ce qui constitue un exemple d'efficacité inégalé dans tous les travaux parlementaires dont j'ai été témoin. Quoi qu'il en soit, ces représentants ont présenté un rapport complet et entièrement nouveau qu'ils ont appuyé avec enthousiasme et qu'ils ont renvoyé à titre de recommandation du comité. Or, il ne s'agissait pas de la recommandation du comité, mais de celle d'une bande de magiciens qui représentaient le parti ministériel au sein du comité. J'ai l'impression que les lutins s'emploient actuellement à rédiger le nouveau rapport, même si le comité n'est pas encore formé.

Le Sénat a eu la sagesse de proposer un amendement à la modification originale dont il avait été saisi et il l'a renvoyée à la Chambre des communes avec une proposition sensée qui prévoyait que, là où le nombre le justifie, les écoles confessionnelles soient acceptées et que les autorités confessionnelles aient leur mot à dire dans l'orientation des programmes scolaires.

La Chambre des communes n'a pas tenu compte de ces deux amendements, et la modification originale a été approuvée automatiquement, puis renvoyée à St. John's. Les tribunaux de Terre-Neuve ont fini par la rejeter. Dès le départ, nous avions dit au gouvernement que cela risquait de se produire, mais il a persisté, il a exercé des pressions et il a eu l'air ridicule, au bout du compte.

Voilà ce qui s'est produit. Nous recommençons de nouveau. Nous avons une autre incarnation de la modification à la clause 17 des Conditions de l'union.

Le sénateur Kinsella: Ont-ils appuyé le dernier?

Le sénateur Doody: Malheureusement, ils n'étaient pas convaincus du bien-fondé et de la justesse de notre point de vue, mais il n'est pas rare que cela se produise.

Un autre problème lié aux comités mixtes est que ceux-ci sont structurés de façon beaucoup plus rigide que ce à quoi nous sommes habitués au Sénat. J'imagine que c'est inévitable. Si vous avez un comité composé de 23 membres, vous devez fixer des délais précis. Le membre A aura une minute pour poser une question, une demi-minute pour sa question complémentaire, puis on passera au suivant. Il n'y a ni suivi ni échange comme on est habitué d'en voir ici, ce qui est beaucoup plus instructif et utile lorsqu'on veut aller au fond des choses.

Quoiqu'il en soit, je crains bien que c'est ce qui va se produire dans ce cas-ci. Étant donné que le comité sera composé majoritairement de députés de la Chambre des communes, c'est la formule de l'autre endroit qui prévaudra et cela me préoccupe.

Le comité doit aussi déposer son rapport le 5 décembre, soit dans un mois à peine. Si l'on élimine les week-ends, et je présume que l'on ne va pas siéger pendant la semaine de l'armistice - nous ne l'avons jamais fait depuis que je suis ici - cela laisse très peu de jours au comité mixte pour tenir des audiences sur une modification constitutionnelle.

La Constitution du Canada a été tellement au coeur des activités du pays ces dernières années que le fait de se pencher de façon superficielle, hâtive ou irréfléchie sur une telle modification déprécie ou dévalorise tout le processus. Si l'on ne tient pas de véritables audiences et que l'on n'entend pas le plus grand nombre d'intéressés possible, le processus sera dévalorisé.

La demande pour se joindre à la Chambre des communes ne renferme pas d'autorisation de se déplacer. La motion laisse entendre que l'on aura recours aux téléconférences. Ainsi, des personnes sans visage à Ottawa s'adresseront à des résidants de Terre-Neuve dont le style de vie traditionnel, les valeurs morales et les traditions ne seront plus jamais les mêmes si cette mesure législative est adoptée. Les gens de Terre-Neuve seront invités à s'exprimer dans une boîte et les seigneurs d'Ottawa les écouteront et décideront ce qui est bon pour eux et ce qui ne l'est pas. Ce n'est pas correct. J'espère que je me trompe et que l'on aura l'autorisation de se déplacer.

Les personnes importantes peuvent venir à Ottawa pour y présenter leur point de vue. Il n'y a pas lieu de s'inquiéter pour elles. Toutefois, les personnes directement touchées, notamment les parents qui ont des enfants d'âge préscolaire à Terre-Neuve, seront exclues du processus. Ce sera tragique, non seulement pour ces personnes, mais aussi pour le Parlement, pour le Canada et pour la réputation du Parlement au pays. J'espère que je me trompe et que le comité pourra se déplacer. En fait, celui-ci devrait être encouragé à le faire.

Ce sont véritablement les droits des minorités qui sont en cause.

(1520)

J'ai parlé à quelques reprises des droits des minorités, comme je l'ai fait maintes et maintes fois au cours du débat précédent sur la même modification, et d'autres sénateurs l'ont fait aussi. Je reconnais que nombre de sénateurs d'en face, d'amis, de connaissances et d'autres collègues ont tous dit qu'il ne s'agissait pas en l'occurrence d'un problème lié aux droits des minorités, mais d'un problème relatif à l'éducation, et uniquement à l'éducation. Eh bien, honorables sénateurs, je suis d'avis qu'ils avaient tort, qu'il s'agit en fait d'un problème lié aux droits des minorités, et c'est pourquoi la protection a été prévue initialement à l'article 17. Cet article visait à protéger les minorités jouissant de certains droits et privilèges en matière d'éducation confessionnelle avant l'entrée de la province dans la Confédération.

Si les sénateurs me permettent de prouver mes dires, je lirai un extrait d'une lettre que j'ai reçue le 18 août et qui vient d'une femme de Botwood, à Terre-Neuve. Voici ce qu'elle dit:

Cher M. Doody,

Je fais partie d'une catégorie de personnes visée et protégée par l'article 17 des Conditions de l'union avec le Canada.

Le 2 septembre 1997, à Terre-Neuve, le gouvernement provincial a tenu un référendum dans lequel il demandait à la population de l'autoriser à supprimer l'article 17, dans son libellé actuel, de la Constitution canadienne.

Dans une proportion de 72 p. 100, la population lui a donné cette permission.

Je suis pentecôtiste, et j'appartiens à un groupe minoritaire qui ne représente que 8 p. 100 de la population. Étant donné que les minorités ne sont jamais assez nombreuses pour imposer leur point de vue à la population en général, il serait impossible pour nous de conserver, par voie électorale, un droit qui a été garanti dans la Constitution canadienne.

Je vous demande donc respectueusement de songer aux droits des minorités quand vous voterez au Parlement. Les droits d'une minorité peuvent-ils être supprimés par un vote de la majorité? Dans l'affirmative, quels autres droits seront les prochains à partir?

Je vous renvoie au paragraphe 93(1) de la Constitution du Canada qui stipule: dans chaque province, la législature pourra exclusivement décréter des lois relatives à l'éducation, sujettes et conformes aux dispositions suivantes: rien dans ces lois ne devra préjudicier à aucun droit ou privilège conféré, lors de l'union, par la loi à aucune classe particulière de personnes dans la province, relativement aux écoles séparées (denominational).

Donc voici ma question: la modification proposée est-elle légale ou contrevient-elle au paragraphe 93(1) de la Constitution du Canada? Les pentecôtistes ne cherchent nullement à imposer l'éducation confessionnelle à la majorité dans cette province. Nous tenons simplement à ce que nos droits à nous soient mis à part de ceux de la majorité. Je vous demande respectueusement de rejeter la modification de la clause 17.

Honorables sénateurs, il me semble qu'il y a une minorité qui crie dans le désert. Voici un membre d'une minorité - dans sa lettre, elle parle de 8 p. 100, mais selon mes chiffres, c'est 7 p. 100; le principe est le même. On a absolument tort de priver ces gens de ce droit dont ils jouissent depuis l'adhésion de Terre-Neuve à la Confédération canadienne. C'est un vote d'une majorité qui prive une minorité d'un droit.

En 1982, ces membres des Assemblées de la Pentecôte de Terre-Neuve ont demandé à l'Assemblée législative de la province de Terre-Neuve et du Labrador, ainsi qu'au Parlement du Canada, aux deux Chambres, d'être inclus parmi les classes particulières de personnes dont les droits tels qu'ils existaient avant la Confédération sont protégés par la clause 17 des Conditions de l'union. Les Assemblées de la Pentecôte ne faisaient pas partie de ce groupe au moment de la Confédération, et c'est pourquoi elles ont présenté une demande spéciale, qui bien sûr a été traitée rapidement, de sorte qu'elles ont été accueillies avec empressement et enthousiasme en tant que membres de ces groupes ou classes de personnes.

J'aimerais vous citer des passages des Débats du Sénat cette journée-là. J'ai eu l'honneur de présenter la résolution pour le parti ministériel et le sénateur Lewis, mon bon ami de Terre-Neuve, a pris la parole au nom de l'opposition à l'époque et a affirmé:

Honorables sénateurs, je suis très heureux de prendre la parole pour appuyer cette motion qui propose l'adoption de la première modification des Conditions de l'union de Terre-Neuve avec le Canada.

Il poursuit ensuite en décrivant les conséquences de cela pour la Constitution et la marche à suivre pour modifier la Constitution afin d'accueillir les Assemblées de la Pentecôte. Je cite encore le sénateur Lewis:

Les Assemblées de la Pentecôte souhaitent depuis assez longtemps jouir d'une situation semblable à celle des autres groupes confessionnels qui ont des écoles. En dépit des circonstances, les Assemblées de la Pentecôte n'ont cessé de s'occuper de leur système scolaire et de l'agrandir et ils exploitent aujourd'hui certains des établissements scolaires les plus modernes, les plus efficaces et les plus avant-gardistes de la province. Il y a lieu de leur rendre hommage pour ce service très précieux qu'ils offrent à la société et, en particulier, au système scolaire confessionnel de la province.

Le sénateur Lewis poursuit en disant:

Ce système est très important pour le tissu de la société distincte qu'est la province de Terre-Neuve. Le moment est sûrement venu de régulariser la situation selon les souhaits des Assemblées de la Pentecôte et d'enchâsser leurs droits dans la Constitution. Comme l'a fait remarquer le sénateur Doody dans sa motion, le gouvernement de Terre-Neuve a demandé cette modification et une résolution en ce sens a été adoptée par l'Assemblée législative de Terre-Neuve le 10 avril. Elle a été entérinée également par la Chambre des communes le 23 juin. Honorables sénateurs, vu ces faits, je préconise vivement l'adoption de la motion aujourd'hui sans renvoi à un comité.

Honorables sénateurs, nous sommes maintenant en 1997, 15 ans plus tard. En 1982, les Assemblées de la Pentecôte ont été accueillies à bras ouverts dans le giron constitutionnel du Canada et aujourd'hui, on demande qu'elles en soient à nouveau exclues. Pourquoi méritent-elles un tel sort? Honorables sénateurs, elles ont le malheur de constituer seulement 7 ou 8 p. 100 de la population de la province. Voilà pourquoi elles méritent ce sort.

De toute évidence, cette modification est présentée sans le consentement des pentecôtistes. Malgré les chiffres que le sénateur Petten a cités, la majorité des pentecôtistes ont voté contre cette résolution, et quiconque connaît un tant soit peu la démographie de Terre-Neuve pourra examiner les sondages et montrer que jusqu'à 80 p. 100 des pentecôtistes ont voté contre la perte de leur droit à l'enseignement confessionnel.

Le problème que pose manifestement cette résolution, c'est qu'elle retire un droit à un groupe de personnes sans son consentement. Si les adeptes de la religion pentecôtiste ou de la religion catholique romaine avaient voté pour se départir de leurs droits de protection, cette résolution ne poserait aucun problème. D'autres confessions de Terre-Neuve l'ont fait. Elles ont dit, comme le sénateur Petten l'a souligné, qu'elles pouvaient fonctionner très aisément dans un système intégré. Elles n'ont pas besoin qu'on enseigne leur type de religion dans les écoles. C'est très bien. Il n'y a rien à redire à ce sujet. C'est leur droit. Elles ont tous les droits de le faire. Cependant, les personnes qui ne sont pas du même avis ont également des droits, et ces droits sont sur le point de disparaître.

Honorables sénateurs, plus tôt cette année, Terre-Neuve a ordonné aux parents de la province d'inscrire leurs enfants dans les diverses écoles en prévision de l'année scolaire qui approchait. Ils ont eu le choix de les inscrire dans une école confessionnelle ou dans ce qu'on a appelé une école multiconfessionnelle, c'est-à-dire une école publique. Quelque 24 000 enfants catholiques romains sont inscrits dans le système catholique romain. Le gouvernement provincial leur a donné ce choix et ils en ont tiré parti. Or, on a entièrement fait abstraction du fait que 24 000 personnes avaient exprimé le désir de recevoir un enseignement dans une école catholique romaine. Les inscriptions ont été déchirées, les ayatollahs du huitième étage ont dit qu'ils avaient changé d'avis et qu'il n'y aurait pas d'écoles confessionnelles. Ils auraient un système dans lequel il n'y aurait aucune sorte d'enseignement confessionnel dans les écoles de Terre-Neuve.

Je renvoie mes honorables collègues à un mémoire rédigé par le Roman Catholic Education Committee et présenté au premier ministre du Canada et aux députés le 17 octobre dernier. On y expose cinq scénarios différents qui présentent des chiffres basés sur certaines hypothèses montrant qu'environ 50,1 p. 100 à 62 p. 100 des catholiques romains qui ont voté l'ont fait contre cette résolution. Je demande aux sénateurs et aux autres personnes intéressées de dénicher ce mémoire, de l'examiner et de demander à leurs propres experts d'analyser les chiffres pour voir s'ils sont exacts et valables. Je pense que tel est le cas car ils ont été établis par des analystes indépendants, à l'Université Memorial, à la demande des autorités catholiques. Je dois donc avoir confiance en leur crédibilité.

(1530)

En elles-mêmes ces choses suffisent pour que, avant qu'on ne supprime les droits des minorités à l'éducation religieuse qui étaient protégés par la clause 17, nous veillons à ce qu'on accorde une grande attention et beaucoup de soins au processus. Le comité dont on propose la création fait partie de ce processus.

Je tiens à ce qu'il soit parfaitement clair qu'il se pourrait que le comité mixte ne permette pas à cet endroit de s'acquitter de ses responsabilités et que nous devrons alors demander à notre propre comité des affaires juridiques et constitutionnelles, ou à un autre comité du genre, de se pencher sur la question. Le Sénat a des responsabilités spéciales et particulières en ce qui concerne la Constitution et les droits des minorités. Si nous nous trouvons noyés dans le comité de la Chambre des communes, et que nous estimons que la question n'a pas été correctement traitée ou que nous désapprouvons le processus suivi par le comité mixte, nous devrions penser sérieusement à renvoyer la question à notre propre comité. C'est le moins que nous puissions faire pour les minorités de Terre-Neuve.

Au sujet du référendum même, il se pose de graves questions qui demandent une réponse. J'espère que les comités exploreront aussi ce sujet. Tout d'abord, il y a la question mentionnée par le sénateur Petten il y a un moment. Il a dit qu'elle était très claire. La voici:

Êtes-vous en faveur d'un système scolaire unique dans lequel les enfants, quelle que soit leur appartenance religieuse, fréquentent les mêmes écoles où l'instruction et les manifestations religieuses sont permises?

À la lecture de cette question on peut dire, comme le sénateur Petten: «Oui, je peux envoyer mes enfants à la même école que mes voisins. Ils pourront tous recevoir une éducation religieuse. Je suppose que mon enfant pourra être formé au système pentecôtiste et d'autres enfants auront le droit d'apprendre le catéchisme catholique, et il en sera de même des autres confessions.» C'est la conclusion que l'on peut facilement tirer de cette question.

La formulation exacte de la modification dont nous serons bientôt saisis, et qui sera présentée au comité, à savoir la modification proposée à la clause 17, se lit comme suit:

(1) En ce qui concerne la province de Terre-Neuve, la présente clause s'applique au lieu de l'article quatre-vingt-treize de la Loi constitutionnelle de 1867.

(2) Dans la province de Terre-Neuve et pour cette province, la Législature a compétence exclusive pour légiférer en matière d'éducation, mais elle doit prévoir un enseignement religieux qui ne vise pas une religion en particulier.

Le sénateur Kinsella: Des religions d'État!

Le sénateur Doody: C'est incroyable. L'article 3 dit que «l'observance d'une religion doit être permise dans une école si les parents le demandent» quel que soit le sens réel de cette phrase. Les ayatollahs décideront ce qu'elle signifie.

C'est très précis. En vertu de ce texte, tout enseignement religieux confessionnel est hors la loi. On n'a jamais rien vu de pareil. Cela diffère totalement de ce que bon nombre des gens des diverses confessions religieuses croyaient appuyer lorsqu'ils ont voté lors du référendum.

Imaginez un peu, honorables sénateurs, l'État, l'assemblée législative - qui représente l'État à Terre-Neuve - décidera de la forme et du fond de l'enseignement religieux dans les écoles. C'est tout un recul dans le temps! C'est une mesure qui plairait bien au président Mao! C'est exactement ce qui se passe en Afghanistan. L'État choisit la religion, l'État pensez donc! L'État c'est moi!

Je devrais préciser, honorables sénateurs, que les 24 000 étudiants inscrits, par des parents catholiques romains, dans les écoles du système catholique qu'ils croyaient obtenir, représentaient environ 60 p. 100 de la population des écoles catholiques de la province à l'époque. Parmi les 40 p. 100 restants, certains étudiants catholiques se sont inscrits dans des écoles interconfessionnelles simplement parce qu'ils n'étaient pas assez nombreux. C'est-à-dire que leur nombre ne justifiait pas la présence d'une école catholique dans leur collectivité ou dans leur région. Les autres, dans les grandes collectivités comme St. John's, ont simplement exercé leur droit de fréquenter des écoles de confessions autres que catholique romaine.

Nous n'avons rien contre cela. C'est leur droit. Ils peuvent fréquenter l'école de leur choix - du moins ils le pouvaient. Cependant, nous contestons le fait que le référendum et la résolution visant à modifier la clause 17 traduisent l'intention du gouvernement de retirer aux parents tout choix en ce qui concerne l'éducation de leurs enfants. Cette situation a quelque chose d'extrêmement tragique, surtout qu'elle n'est pas nécessaire.

Les honorables sénateurs se souviendront que, assez récemment, au moment où nous avons débattu de la clause 17, il y avait 27 conseils scolaires à Terre-Neuve. Cela a soulevé un tollé général. Par la suite, le nombre a été réduit, ce qui fait qu'il y a désormais 10 conseils scolaires dans l'ensemble de la province. Ces conseils scolaires ont examiné attentivement le nombre d'écoles dans les divers secteurs et les groupes confessionnels qui les dirigeaient avant de déterminer les écoles qui étaient viables.

À la fin du mois de juillet dernier, les comités catholiques et pentecôtistes ont signalé aux conseils les écoles catholiques et pentecôtistes qu'ils consentaient à fermer ou à désigner «écoles interconfessionnelles». Cela a entraîné la fermeture d'un grand nombre d'écoles. Environ 30 écoles catholiques séparées et 13 écoles pentecôtistes séparées ont été fermées. De nombreuses autres écoles catholiques et pentecôtistes ont été regroupées et sont devenues des écoles interconfessionnelles. Tous les élèves suivent le programme établi par le ministère de l'Éducation de Terre-Neuve, mais ont droit à un enseignement religieux séparé.

Le processus suit son cours. La réforme s'amorce. Le système a été réduit, ce qui a permis d'économiser de l'argent. Voici qu'aujourd'hui on nous impose cette nouvelle formule draconienne qui est tout à fait inconcevable.

En terminant, je voudrais parler du référendum comme tel. Bien des Terre-Neuviens sont mécontents de la façon dont le tout s'est déroulé. J'ai déjà décrit la différence entre d'une part la question référendaire et d'autre part le projet de modification qui sera soumis à un comité ou à plusieurs comités. La question de l'équité est analysée en détail dans le mémoire qui a été remis au gouvernement le 17 octobre et qui a été assez longuement débattu. Le gouvernement a totalement refusé d'accorder une aide financière au camp du «non», mais a dépensé jusqu'à 500 000 $ pour convaincre la population de voter «oui».

Nous avons mentionné que 73 p. 100 des électeurs ont voté «oui», mais il faut rappeler que 75 p. 100 des effectifs scolaires à Terre-Neuve fréquentent déjà des écoles interconfessionnelles. Ainsi, la majorité des gens était en faveur du statu quo. C'est seulement dans des endroits comme St. John's et Cornerbrook, les plus grandes villes, qu'il y avait beaucoup d'écoles uniconfessionnelles. C'est beaucoup plus complexe que ce que les nombres semblent indiquer. Le gouvernement de Terre-Neuve a dépensé plus de 500 000 $ pour convaincre la population de voter «oui».

J'ai déjà dit que les comités catholiques romains et pentecôtistes ont fait diligence pour présenter au gouvernement un plan qui prévoyait la fermeture d'un certain nombre d'écoles et l'établissement de plusieurs autres écoles multiconfessionnelles. Le gouvernement de Terre-Neuve a même admis que le travail avait été exécuté de façon responsable.

Sans plus de préparatifs, le 31 juillet, le premier ministre Tobin annonçait que son gouvernement solliciterait un mandat de la population qui prendrait la forme d'un référendum proposant la fermeture de toutes les écoles catholiques romaines et pentecôtistes. À l'époque, on n'avait jamais mentionné qu'il était question de bannir complètement l'enseignement religieux confessionnel dans ces écoles. C'est venu plus tard. On laissait environ 32 jours à la population pour réfléchir à cette question référendaire, le référendum devant avoir lieu en août, soit pendant les vacances. Les questions d'éducation ne soulèvent pas beaucoup d'enthousiasme ni d'intérêt à Terre-Neuve, province qui n'est pas renommée pour ses longs étés chauds. Quand on a quelques beaux jours en août, on en profite.

Comme pour le référendum de 1995, le jour du vote était aussi le jour de la rentrée des classes. On avait beaucoup critiqué ce choix, parce que les gens n'avaient pas eu le temps de se familiariser avec toutes les facettes de cet enjeu complexe, mais le gouvernement est allé de l'avant et a retenu cette même journée pour le référendum de 1997.

(1540)

Je le répète, les représentant du camp du «non» ont demandé des fonds au gouvernement. On a rejeté leur demande. Le libellé de la modification proposée a été rendu public le 25 août, à la veille du scrutin par anticipation et sept jours avant le scrutin lui-même. Il faut être capable d'apprendre rapidement pour suivre ce processus. Ce n'était pas une très bonne façon de procéder.

Le sénateur Lynch-Staunton: Quand la question a-t-elle été connue?

Le sénateur Doody: On a publié la question 32 jours avant le jour du scrutin. La modification elle-même n'a été connue que sept jours avant le jour du scrutin.

Vient ensuite la question des représentants au scrutin. Je ne sais pas jusqu'à quel point cela est important, mais il y a eu un immense tollé dans la province au sujet du fait que le camp du «non» a demandé à obtenir le droit d'avoir des représentants dans les bureaux de scrutin, ce qui lui aurait été refusé. J'ignore si cela s'est déjà produit au Canada auparavant. Même dans de petites élections locales ou dans un club social, on invite généralement des représentants des divers candidats à être présents dans la salle lorsqu'on compte les bulletins de vote. C'est plutôt étrange. J'ignore l'importance de tout ceci, mais je suis persuadé que c'est l'une des questions que le comité soulèvera.

Honorables sénateurs, je ne fais que soulever ces problèmes. Je ne m'attends pas à ce que vous croyiez qu'il s'agit d'une analyse exhaustive de la situation. On n'a pas eu beaucoup de temps pour procéder à une analyse de ce genre, mais on en aura, si nous ne sommes pas liés par ce délai idiot du 5 décembre.

Quoi qu'il en soit, honorables sénateurs, j'appuie à regret la proposition du comité mixte. Je ne pense pas que ce soit la meilleure façon de procéder, mais à ce stade-ci, cela semble être la seule solution. Je vais attendre un peu avant de me prononcer.

L'honorable Noël A. Kinsella (chef adjoint suppléant de l'opposition): J'invite les honorables sénateurs à examiner le Feuilleton et Feuilleton des avis, à la page 3, sous les rubriques «Ordre du jour» et «Motions». On y retrouve la modification à la clause 17 dont nous parlons et sur laquelle le sénateur Doody a attiré notre attention tout à l'heure. Je vous demande de lire très attentivement ce que dit exactement la clause 17, notamment le paragraphe 17 (2), qui dit:

Dans la province de Terre-Neuve et pour cette province, la Législature [...] doit prévoir un enseignement religieux [...].

C'est autour de ce paragraphe que tourneront mes réflexions sur la proposition de créer un comité mixte du Sénat et de la Chambre des communes pour examiner cette question. Ça m'intéresserait beaucoup à condition que ce comité examine cette question très en détail.

Honorables sénateurs, la liberté de religion est l'un des droits civils et politiques les plus fondamentaux. La Charte canadienne des droits et libertés reconnaît, au paragraphe 2a) la liberté de conscience et de religion.

Le Pacte international relatif aux droits civils et politiques a été ratifié par le Canada en 1976, avec l'appui de toutes les provinces et tous les territoires du Canada. Chaque province et chaque territoire, ont convenu, comme le gouvernement fédéral, que le Canada devrait ratifier le Pacte international des Nations Unies relatif aux droits civils et politiques. Par conséquent, la province de Terre-neuve était d'accord pour que, conformément au droit international des traités, le Canada assume les obligations qui étaient les siennes en vertu de ce pacte.

Honorables sénateurs, j'attire votre attention sur l'article 18 du pacte, auquel nous sommes tenus en tant que pays. Il est essentiel et exprime parfaitement le droit à la liberté de la religion. L'article 18 dit ceci:

1. Toute personne a droit à la liberté de pensée, de conscience et de religion; ce droit implique la liberté d'avoir ou d'adopter une religion ou une conviction de son choix, ainsi que la liberté de manifester sa religion ou sa conviction, individuellement ou en commun, tant en public qu'en privé, par le culte et l'accomplissement des rites, les pratiques et l'enseignement.

2. Nul ne subira de contrainte pouvant porter atteinte à sa liberté d'avoir ou d'adopter une religion ou une conviction de son choix.

3. La liberté de manifester sa religion ou ses convictions ne peut faire l'objet que des seules restrictions prévues par la loi et qui sont nécessaires à la protection de la sécurité, de l'ordre et de la santé publique, ou de la morale ou des libertés et droits fondamentaux d'autrui.

Le paragraphe 4 est très important; il s'énonce ainsi:

4. Les États parties au présent Pacte [...]

- c'est-à-dire le Canada -

[...] s'engagent à respecter la liberté des parents et, le cas échéant, des tuteurs légaux de faire assurer l'éducation religieuse et morale de leurs enfants conformément à leurs propres convictions.

Honorables sénateurs, le libellé du projet de modification de la clause 17 présente une menace très dangereuse pour le droit à la liberté de religion. Le texte du paragraphe 17(2) sur lequel j'ai attiré votre attention dans la proposition comporte les mots suivants:

 

Dans la province de Terre-Neuve et pour cette province, la Législature [...] doit prévoir un enseignement religieux [...]
C'est la législature qui «doit» donner un enseignement religieux. C'est la législature qui définira le contenu et les objectifs de l'enseignement de la religion, non les élèves ou les parents.

Cependant, ce n'est pas l'État qui a le droit à la liberté de religion; ce sont les citoyens qui ont ce droit contre le pouvoir de l'État.

Je vous lis ce passage du Pacte international:

4. Les États parties au présent Pacte s'engagent à respecter la liberté des parents et, le cas échéant, des tuteurs légaux de faire assurer l'éducation religieuse et morale de leurs enfants conformément à leurs propres convictions.

Autrement dit, les parents ont la liberté de définir l'éducation religieuse pour leurs enfants. Ce n'est pas à l'État qu'est reconnu le droit de définir l'éducation religieuse des enfants.

De plus, honorables sénateurs, le droit de la personne qui est reconnu dans le cadre de la liberté de religion est le droit des parents de veiller à ce que leurs enfants reçoivent une éducation religieuse conformément à leurs convictions religieuses. L'État n'a aucun droit reconnu de donner l'éducation religieuse conformément aux convictions religieuses de l'État. Cela est sans précédent. Le libellé même de la clause 17 telle que proposée constitue un assaut terrible contre la liberté de religion, même si les rédacteurs avaient une autre intention. Je crois bien franchement que telle n'était pas leur intention. Ils voulaient se défendre de l'allégation que leur proposition consistait à sortir Dieu des écoles. Cependant, comme vous pouvez le constater très clairement, le libellé de la proposition fait de Terre-Neuve le seul endroit en Amérique du Nord où l'État définira et donnera l'éducation religieuse, alors que ce droit appartient aux parents.

Il faut changer cette proposition. Le comité, qu'il s'agisse du comité mixte proposé dans la motion, d'un comité spécial ou d'un comité permanent du Sénat, doit considérer très attentivement cette proposition. Elle est très dangereuse.

(1540)

Analysons de façon plus approfondie l'opposition entre l'enseignement religieux non confessionnel et l'enseignement religieux qui ne vise pas une religion en particulier. La nouvelle clause 17 exige du gouvernement qu'il prévoie un enseignement religieux qui ne vise pas une religion en particulier. Il est important de tenir compte de la distinction entre l'enseignement religieux non confessionnel et ce que la clause 17 exige, c'est-à-dire un enseignement religieux qui ne vise pas une religion en particulier.

En réfléchissant à cette distinction, un point important apparaît. Pour se conformer à cette nouvelle clause, il suffit de donner un enseignement religieux qui vise plus qu'une religion. Qu'arrive-t-il alors des droits des membres des religions qui ne font pas l'objet d'un enseignement? Quels droits ont-ils puisque l'article 15 de la Charte garantit, sans faire acception de personne et en s'appliquant à tous, qu'il n'y ait aucune discrimination fondée sur la religion?

De plus, est-ce que l'enseignement religieux non confessionnel viole d'autres droits garantis par la Charte? Même si des écoles devaient donner un enseignement religieux tout à fait non confessionnel, elles devraient veiller à ce que cet enseignement, que ce soit en vertu de son contenu ou de la manière de le donner, ne privilégie aucune religion par rapport à une autre.

À cet égard, il vaut la peine de rappeler le précédent établi par la décision de la Cour d'appel de l'Ontario dans l'affaire opposant l'Association canadienne des libertés civiles au ministre de l'Éducation de l'Ontario. Le tribunal a annulé tout le programme d'enseignement religieux de l'Ontario, en déclarant que, dans les faits, il s'agissait d'un endoctrinement chrétien. Le tribunal est allé plus loin que nécessaire en décidant que la loi en question contrevenait à l'alinéa 2a) de la Charte. La loi même était neutre sur le plan religieux, mais un conseil scolaire l'appliquait de telle sorte qu'il faisait de l'endoctrinement chrétien.

La Cour d'appel de l'Ontario a rendu cette décision à cause du précédent établi par l'affaire Big M Drug Mart, où la Cour suprême avait déclaré que la loi pouvait être inconstitutionnelle parce qu'elle contredisait la Charte quant à son objet ou à son effet. La loi doit donc réussir le test de l'objet et celui de l'effet. Si elle échoue au premier, elle ne peut être maintenue, peu importe si ses effets sont excellents. Si la nouvelle clause 17 avait pour objet ou pour effet de faire enseigner une religion chrétienne par la province, ce serait une violation de la Charte.

Il vaut la peine de signaler que dans l'affaire Libertés civiles canadiennes c. Ontario (ministre de l'Éducation), la Cour d'appel établit une distinction cruciale entre l'éducation visant à enseigner la religion et à promouvoir les valeurs morales sans endoctrinement dans une religion en particulier et l'endoctrinement dans une confession particulière. Ce dernier serait considéré comme une violation des droits de la personne conformément aux articles 2 et 15 de la Charte.

Là-dessus, on peut se poser - et j'espère que le comité le fera - les questions suivantes: si le gouvernement concevait un cours de sociologie des religions, un tel cours exposerait-il plus de perspectives religieuses que d'autres, le culte de l'Église unie plus que celui de l'Église pentecôtiste, par exemple?

Si un cours de religion non confessionnel était offert, ne pourrait-on pas prétendre qu'un tel cours fait la promotion d'une certaine idée de la religion qui va à l'encontre de ses convictions religieuses? Dans ce cas, il ne s'agirait d'aucune doctrine particulière, mais d'une conception générale de la croyance religieuse. Si l'on enseignait que la religion est surtout une projection de l'aliénation humaine ou l'opinion psychologique que la religion est le produit de divers complexes, cela ne violerait-il pas aussi la liberté de culte?

Dans son ouvrage, Christopher Richter fait une excellente observation concernant la prestation d'un cours d'instruction religieuse strictement neutre. Un cours d'étude comparée des religions serait libre de toute morale et n'empièterait donc pas sur la liberté religieuse de l'élève. Un tel cours aurait pour objectif d'encourager la compréhension de diverses religions plutôt que d'enseigner une seule religion. La différence, c'est qu'un cours d'étude comparée peut être considéré comme appuyant le relativisme moral plutôt qu'offrant une éducation religieuse et morale.

Le prix d'une école commune acceptable pour tous, c'est que les parents qui veulent que leurs enfants reçoivent une instruction religieuse et morale ne peuvent plus compter sur le système scolaire public pour s'en occuper, à moins qu'ils appartiennent à une minorité protégée par l'article 93. Étant donné que le droit de choisir l'éducation morale et religieuse de son enfant est reconnu en droit international, cela semble être une lacune importante du système public d'éducation.

Dans la proposition à l'étude, le paragraphe 17(3) parle de pratique religieuse. Il est intéressant, puisqu'il accorde un droit aux parents.

L'observance d'une religion doit être permise dans une école si les parents le demandent.

Il me semble que c'est le modèle typique qu'on envisagerait pour les droits protégés de l'autorité de l'État, les droits détenus par les citoyens. Dans ce cas-ci, la province peut autoriser la pratique religieuse si les parents le demandent.

Cependant, même cela ne va pas sans de graves difficultés. La nouvelle clause 17, au paragraphe (3) prévoit la pratique religieuse dans les écoles publiques. Il semble probable que certains interpréteront cette pratique comme une violation de l'article 2, du paragraphe 15(1) et de l'article 27 de la Charte, et qu'il y aura contestation devant les tribunaux.

Il y a déjà eu une contestation semblable en Ontario, et la cour d'appel a jugé que la pratique religieuse allait effectivement à l'encontre de la Charte. Il s'agit de la cause Zylberberg. Dans cette cause, la cour d'appel a décidé que les pratiques religieuses par lesquelles la journée d'école débute violent le paragraphe 2a) même si les élèves peuvent s'y soustraire. Il s'agit d'une charge indirecte ou non intentionnelle. Devoir se soustraire à une pratique religieuse de la majorité constitue une charge, et le paragraphe 2a) de la Charte s'applique donc.

Honorables sénateurs, il y a de très graves questions de droits aux termes de la Charte qu'il faut étudier de près, soit au comité mixte, soit à notre propre comité. En ce qui concerne le comité mixte, le sénateur Doody nous a clairement fait comprendre à quel point il était difficile pour un comité de 23 personnes d'entrer dans les détails. Si les comités sénatoriaux ont été aussi efficaces, c'est peut-être parce qu'ils ont permis davantage d'échanges avec les témoins et qu'ils ont eu plus de souplesse pour examiner les détails. À l'instar du sénateur Doody, je suis prêt à accepter que le Sénat examine la résolution avec la Chambre des communes. Cependant, si le comité mixte n'examine pas les questions très fondamentales liées aux droits de la personne dont je viens de parler et qui concernent la liberté, la liberté historique au coeur même de notre existence...

(1600)

Son Honneur le Président: Je dois interrompre l'honorable sénateur Kinsella et lui signaler que les 15 minutes dont il disposait sont écoulées.

Honorables sénateurs, l'honorable sénateur a-t-il la permission de continuer?

Des voix: D'accord.

Le sénateur Kinsella: Si je pouvais déposer mes notes, honorables sénateurs, je le ferais. Je sais toutefois que ce n'est pas un usage de cet endroit. Je le ferais parce que j'ai tout un chapitre sur les répercussions de la situation actuelle, c'est-à-dire l'abolition des droits découlant de la résolution dont nous sommes saisis. Le sénateur Doody a mentionné le fait que cette question a déjà été examinée au moins deux fois. De toute évidence, elle l'a été en 1949. Elle l'a de nouveau été lorsque la modification pentecôtiste a été proposée. Elle a aussi été examinée ici, il y a à peu près un an. Chaque fois, il n'a jamais été question d'abolir les droits d'une catégorie de personnes. Cette fois, cependant, c'est exactement ce que l'on nous demande de faire.

J'ai entendu les arguments que le sénateur Petten a fait valoir et répétés cet après-midi, relativement à la question de savoir si les catégories de personnes qui ont ces droits ont consenti à ce que ces derniers soient abrogés à la suite de ce processus. Je n'ai pas encore tiré mes propres conclusions sur les droits des minorités. Je voudrai mettre à profit l'expérience que nous tirerons de l'étude en comité.

Je veux me concentrer davantage sur le libellé de ce qui est proposé. Pour éviter que les honorables sénateurs perdent de vue le point que j'ai voulu faire valoir, je vais me rasseoir.

L'honorable John G. Bryden: Honorables sénateurs, l'honorable sénateur accepterait-il de répondre à une question ou deux?

Le sénateur Kinsella: Je serais heureux de répondre aux questions du sénateur.

Le sénateur Bryden: Je n'ai pas pris part à la discussion la première fois que la question de l'article 17 a été soulevée. Je n'ai certainement pas pris part à la discussion sur la modification constitutionnelle touchant le Québec. Je ne l'ai pas fait parce que je sais à quel point les questions de croyance religieuse sont personnelles et viscérales pour une foule de gens. Cependant, j'ai écouté les discussions et les arguments sur les droits des minorités. Je crois que je les comprends.

Toutefois, ce qui m'embête, c'est que la minorité touchée dans les deux cas concerne les enfants. Les enfants deviennent membres d'une religion par simple accident de naissance. Pour que cela soit compris, je vous donne l'exemple suivant.

Disons que deux jeunes catholiques se marient et qu'ils ont un enfant. Quatre mois plus tard, ces jeunes catholiques se convertissent à une autre religion après avoir entendu un évangéliste prêcher honnêtement et sincèrement. Ils se joignent alors à l'Église pentecôtiste. Ils sont baptisés par immersion et, quelques mois plus tard, ils ont un enfant.

D'après ma connaissance de la doctrine catholique, la vie de l'enfant a commencé dès sa conception et il était alors catholique. Par ailleurs, d'après ma connaissance de la doctrine protestante, la vie commence à la naissance, de sorte que l'enfant était pentecôtiste au moment de sa naissance.

Qui peut prétendre avoir des droits sur l'enfant? Quelle hiérarchie peut prétendre avoir des droits sur l'enfant?

Des voix: Les parents.

Le sénateur Kinsella: Je crains de ne pas connaître suffisamment les théologies du monde pour pouvoir donner une réponse approfondie au sénateur. Ma collègue, soeur Peggy, pourrait peut-être fournir une meilleure réponse.

Le sénateur Bryden: Si la question devait être tranchée, quel tribunal pourrait le faire? Est-ce que ce serait le tribunal de l'Église catholique? Je suppose que la décision serait prise par un collège de diacres de l'Église pentecôtiste, comme il y en a dans d'autres religions protestantes. Ou est-ce que l'État interviendrait et prendrait la décision au nom de l'enfant? L'État statuerait peut-être que l'enfant a le droit d'être un peu catholique, un peu pentecôtiste, un peu juif, un peu musulman, et de choisir lui-même sa religion à l'âge de la majorité.

Le sénateur Kinsella: Je trouve la question complémentaire du sénateur plus directe, et il est donc plus facile d'y répondre parce que, du point de vue des droits de la personne, chacun a droit à la liberté de conscience et de religion. Les parents, ou les tuteurs légaux, ont le droit d'exiger que leur enfant reçoive un enseignement religieux conforme à leurs convictions.

Le sénateur Bryden: Je comprends cela. Le sénateur veut-il dire leur convictions au moment où l'enfant a été conçu ou au moment où il est né?

Le sénateur Kinsella: Je peux dire ceci aux sénateurs. Du point de vue des droits de la personne, la liberté de religion dans notre système s'applique à tout le monde. Une des choses intéressantes au sujet de notre Charte des droits et libertés, c'est qu'il y a seulement trois de ces droits qui sont limités aux citoyens canadiens. Tous les autres droits prévus dans notre charte s'appliquent à tout le monde.

Dans bien d'autres pays, les droits constitutionnels sont limités aux citoyens. Au Canada, seuls le droit de vote, le droit de revenir au Canada et le droit à l'instruction dans la langue de la minorité sont limités aux citoyens.

Durant le grand débat sur la Déclaration universelle des droits de l'homme, le représentant du Liban, un grand philosophe thomiste, voulait qu'on définisse quelles personnes avaient ces droits et à partir de quand elles les avaient. Il a présenté un argument appuyé par certains catholiques, argument selon lequel les personnes sont des personnes à partir du moment de la conception. Lorsqu'elles ont adopté la déclaration universelle, les Nations Unies et sa commission n'ont ni accepté ni rejeté cette définition. Elles ont plutôt évité la question.

(1610)

Chacun a le droit à la liberté de religion. Les parents ont le droit d'éduquer leurs enfants selon leurs propres convictions religieuses. La liberté de religion n'appartient pas à l'État et ce dernier n'a pas de convictions religieuses à imposer aux enfants.

C'est précisément ce que dit le projet de paragraphe 17(2). C'est extrêmement dangereux et un amendement s'impose.

J'en rappelle le texte:

Dans la province de Terre-Neuve et pour cette province, la Législature a compétence exclusive pour légiférer en matière d'éducation [...]

Le texte pourrait s'arrêter là car la suite est, au mieux, superflue. Le fait d'imposer à la province de Terre-Neuve l'obligation constitutionnelle de prévoir un enseignement religieux, ce qui va à l'encontre du droit des parents et des enfants d'honorer leurs propres convictions, équivaut à laisser l'État dicter aux gens ce qu'ils doivent croire. Pis encore, cela pourrait s'appliquer à plus d'une religion.

Une des nombreuses solutions que le comité pourrait examiner consisterait à ajouter, au paragraphe (3), que l'observance d'une religion et l'enseignement religieux, même à caractère confessionnel, doivent être permis dans une école si les parents ou un groupe de parents le demandent. Voilà où devrait figurer cette disposition.

L'honorable Philippe Deane Gigantès: Honorables sénateurs, je voudrais poser une question au sénateur Kinsella.

Sénateur Kinsella, les membres de certaines sectes musulmanes au Canada affirment que leur religion prescrit la mort par lapidation pour les femmes adultères et la mutilation génitale des jeunes filles. Or, ces droits ne sont pas reconnus au Canada. Nous avons adopté un projet de loi, l'an dernier, leur interdisant de procéder à la mutilation sexuelle, en dépit du fait que cela fait partie de leur religion. Je prétends que l'État s'est mêlé de ces questions et qu'il a interdit certaines pratiques, mêmes si les tenants d'une religion particulière ont prétendu que ces pratiques sont religieuses et sont les leurs.

Son Honneur le Président: Le sénateur Petten, au nom du sénateur Carstairs, appuyé par le sénateur Forrest, a proposé:

Que le Sénat se joigne à la Chambre des communes pour constituer un comité mixte spécial du Sénat et de la Chambre des communes pour étudier les différents aspects du projet de résolution concernant la modification que l'on propose d'apporter à la clause 17 [...]

Des voix: Suffit!

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, vous plaît-il d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.

(La motion est adoptée.)

Régie interne, budgets et administration

Adoption du troisième rapport du comité

Le Sénat passe à l'étude du troisième rapport du comité sénatorial permanent de la régie interne, des budgets et de l'administration (dépenses des témoins) présenté au Sénat le 30 octobre 1997.

L'honorable Pierre Claude Nolin propose: Que le rapport soit adopté.

- Honorables sénateurs, le rapport à l'étude aujourd'hui contient deux recommandations: premièrement, que nous revenions à notre ancienne pratique d'imputer les dépenses des témoins à un budget central du Sénat, à savoir celui de la Direction des comités, plutôt que de les imputer aux budgets des différents comités; et deuxièmement, que l'on adopte des directives exigeant des témoins qu'ils présentent leur note de frais dans les 60 jours suivant leur comparution.

[Français]

Honorables sénateurs, le comité de la régie interne, des budgets et de l'administration a décidé, le 7 février 1996, de transférer à titre d'essai les crédits pour les dépenses des témoins d'un budget central au budget de chaque comité. On espérait, à l'époque, par ce transfert de fonds, rendre chaque comité plus responsable des dépenses de ses témoins. Les budgets des comités pour la deuxième session de la 35e législature ont été faits en fonction de cette directive.

Avant la prise de cette décision, donc jusqu'en 1996, les dépenses des témoins étaient imputées à un budget central relevant de la Direction des comités, conformément à l'article 102 du Règlement du Sénat qui dit ceci:

Le greffier du Sénat est autorisé à verser, à tout témoin invité ou sommé à comparaître devant un comité particulier, une indemnité raisonnable pour frais de voyage et de séjour, sur présentation d'un certificat du greffier du comité attestant que le témoin s'est effectivement présenté devant le comité sur invitation ou citation.

Le retour à l'ancienne méthode offre deux avantages: premièrement, en redonnant la préparation du budget à la direction des comités, nous minimiserons le risque de péremption des fonds à la fin de chaque exercice. Effectivement, à la fin du dernier exercice, 100 000 $ n'ont pu être alloués à d'autres postes budgétaires parce que chaque comité avait fait des prévisions pour les dépenses des témoins, et si nous additionnons toute ces prévisions de dépenses qui n'ont pas été effectuées, nous avons une péremption, un montant de 100 000 $ qui aurait pu être dépensé à bon escient à d'autres postes budgétaires.

Deuxièmement, la transparence et l'obligation de rendre compte seront maintenues, car les comités, lorsqu'il feront rapport de leurs dépenses au Sénat en vertu de l'article 104 du Règlement du Sénat, indiqueront quels montants ont été dépensés pour les frais des témoins mais imputés à un autre budget administratif.

[Traduction]

Le comité de la régie interne recommande donc que le budget relatif aux dépenses des témoins soit établi au niveau de la Direction des comités. Dans leurs rapports sur les dépenses de session, les comités devront, conformément à l'article 104 du Règlement, faire état des dépenses encourues au titre du défraiement des coûts pour les témoins mais qui ont été imputées ailleurs dans le budget administratif du Sénat.

On recommande ensuite que les témoins soient tenus de demander à être indemnisés pour leurs frais de voyage dans les 60 jours qui suivent leur comparution. Les honorables sénateurs connaissent bien cette règle puisque c'est le délai qui nous a été imparti pour présenter nos propres demandes de remboursement. À l'heure actuelle, on n'astreint pas les témoins à une limite de temps pour la présentation de leurs demandes de remboursement, alors que les sénateurs doivent respecter le délai des 60 jours.

Sur le plan budgétaire, il est difficile d'allouer des fonds au titre des dépenses. Cela brouille les prévisions. Sur le plan administratif, il serait préférable d'informer les témoins qu'ils devront présenter leur demande de remboursement dans un délai de tant de jours.

Nous recommandons donc que les témoins disposent de 60 jours à compter de la date de leur comparution pour présenter une demande de remboursement des frais de voyage. Le défaut de respecter le délai de 60 jours entraînera le non-remboursement de leurs frais de voyage. Toutefois, dans des circonstances exceptionnelles, le président d'un comité pourra prolonger le délai.

Honorables sénateurs, je propose que nous adoptions ce rapport.

Son Honneur le Président: Si aucun autre sénateur ne veut prendre la parole, je vais mettre la question aux voix. Vous plaît-il d'adopter la motion?

(La motion est adoptée, et le rapport est adopté.)

[Français]

Adoption du deuxième rapport du comité

Le Sénat passe à l'étude du deuxième rapport du comité permanent de la régie interne, des budgets et de l'administration (budget supplémentaire), présenté au Sénat le 30 octobre 1997.

L'honorable Pierre Claude Nolin: Honorables sénateurs, je propose l'adoption de ce rapport.

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, vous plaît-il d'adopter la motion?

Le sénateur Nolin: Honorables sénateurs, ce budget supplémentaire est demandé pour pouvoir effectuer des dépenses imprévues et des dépenses ponctuelles qui doivent être faites pendant l'exercice 1997-1998.

Le deuxième rapport de notre comité, qui a été présenté au Sénat jeudi dernier, décrit les rubriques où des fonds additionnels sont nécessaires. Il s'agit, premièrement, des comités; deuxièmement, de la sécurité et de la prévention des incendies; troisièmement, de l'achat de mobilier et d'équipement pour les salles de comités parlementaires nouvellement rénovées et pour répondre aux normes de santé et de sécurité; quatrièmement, de la portion assumée par le Sénat des dépenses des associations parlementaires gérées conjointement avec la Chambre des communes; et, cinquièmement, de l'achat de matériel informatique et de logiciels pour le Sénat demeure compatible avec la Chambre des communes et la Bibliothèque du Parlement.

[Traduction]

On a souvent établi ici qu'une des principales tâches du Sénat consistait à étudier les politiques gouvernementales. Si les députés consacrent beaucoup de temps aux questions se rapportant à leurs électeurs, nous consacrons le nôtre aux travaux des comités.

Cette année, un certain nombre d'études spéciales doivent être financées au moyen de budgets supplémentaires parce qu'elles n'avaient pas été prévues au moment de l'établissement du budget principal. Ces études incluent l'état actuel du système financier du Canada; l'état de l'enseignement postsecondaire; la Société de développement du Cap-Breton; l'importance croissante de la région Asie-Pacifique pour le Canada; le transport et la sécurité; les ententes entre parents après une séparation ou un divorce. Il ne fait aucun doute que ces études sont importantes aux yeux des Canadiens. Nous pensons qu'il nous faudra 900 000 $ de plus pour terminer nos travaux.

[Français]

Au chapitre de la sécurité et de la prévention des incendies, le déficit de fonctionnement enregistré est attribuable surtout aux dépenses additionnelles faites lorsque, conformément à une entente conclue avec la Chambre des communes, le Service de sécurité du Sénat a pris la responsabilité de toutes les mesures de sécurité dans l'édifice de l'Est. Comme l'indique notre rapport, cette mesure qui entre dans sa deuxième année d'implantation entraînera des économies nettes de 80 000 $ par année après une période initiale de remboursement de trois ans, ce qui est beaucoup plus court que la période de référence utilisée dans de pareils cas par le Conseil du Trésor. Le Sénat a installé un équipement de surveillance spécialisé qui a réduit le nombre de patrouilles à pied et entraîné des économies salariales pour les contribuables. Nous avons aussi centralisé les mesures de sécurité dans l'édifice de l'Est et avons réduit l'effectif de deux années-personnes. Les fonds demandés pour la sécurité et la prévention des incendies dans le budget supplémentaire se chiffrent à 627 000 dollars.

Dans le domaine des associations parlementaires dont les frais sont partagés avec la Chambre des communes à raison de 30-70 p. 100, des crédits additionnels de 125 000 $ sont demandés. Cette demande a été faite au comité de la régie interne par le conseil interparlementaire mixte et a été approuvée par le Bureau de la régie interne de la Chambre des communes. La demande nous a été envoyée pour deux raisons: la première, le Canada a accepté la présidence, en 1997, de l'Association internationale des parlementaires de langue française. Je suis heureux de souligner que cet honneur revient à notre collègue, le sénateur Gauthier. En votre nom à tous, je le félicite d'avoir été élu à la présidence de l'AIPLF. Deuxièmement, il nous faut payer le coût additionnel des activités des associations parlementaires cette année.

[Traduction]

Le total des fonds nécessaires pour les autres postes que j'ai mentionnés - à savoir l'informatique, les communications et la santé et la sécurité - s'élève à environ 2,5 millions de dollars. En 1996, sous la direction du sénateur De Bané, et avec la collaboration de quelques collègues, dont les sénateurs Carstairs, Milne, Comeau, nous avons examiné tout le système informatique dépassé du Sénat. Une nouvelle infrastructure de base a été installée, mais on n'a pas donné suite à tous les projets recommandés, aussi faut-il des fonds supplémentaires.

Il faut également d'autres fonds pour terminer l'aménagement des salles des comités parlementaires. Nous avons besoin de quelques salles pour remplacer les salles inutilisables par les travaux de rénovation en cours et en raison de l'activité accrue de nos comités. Deux salles ont été livrées l'an dernier et deux autres le seront cette année. Ces salles doivent être meublées et il faut aussi y installer les systèmes pour l'interprétation simultanée, comme l'exige la Loi sur les langues officielles.

Enfin - et c'est important - je souligne que, en 1993, le Conseil du Trésor a mis en application une politique de reports qui permet aux ministères de réclamer une partie des fonds qu'ils n'ont pas utilisés les années précédentes. En vertu de cette politique, le Sénat peut réclamer 1,14 million de dollars cette année. Compte tenu de ce report, les besoins nets en fonds supplémentaires pour l'année 1997-1998 s'élèvent à 3,14 millions de dollars.

Honorables sénateurs, je demande au Sénat d'adopter le rapport. Cependant, si vous avez des questions, je suis prêt à y répondre.

Son Honneur le Président: Plaît-il aux honorables sénateurs d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.

(La motion est adoptée et le rapport est adopté.)

Terre-Neuve

La réforme du système scolaire-La modification de la clause 17 de la Constitution-Désignation des membres du comité mixte spécial

Permission ayant été accordée de revenir aux avis de motions du gouvernement:

L'honorable Sharon Carstairs (leader adjoint du gouvernement): Honorables sénateurs, avec la permission du Sénat et nonobstant l'alinéa 85(1)b) du Règlement, je propose:

Que les sénateurs suivants soient désignés pour représenter le Sénat au sein dudit comité mixte spécial chargé d'étudier le projet de modification constitutionnelle de Terre-Neuve: les honorables sénateurs Doody, Fairbairn, Gigantès, Kinsella, Murray, Pearson et Rompkey; et

Qu'un message soit transmis à la Chambre des communes pour l'en informer.

Son Honneur le Président: Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.

(La motion est adoptée)

Affaires sociales, sciences et technologie

Motion autorisant le comité à surveiller la mise en oeuvre et l'application des lignes directrices sur les pensions alimentaires pour enfants

L'honorable Lowell Murray, conformément à l'avis donné le 30 octobre 1997, propose:

Que le comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie soit autorisé à surveiller la mise en oeuvre et l'application du chapitre 1 de la Loi modifiant la Loi sur le divorce, la Loi d'aide à l'exécution des ordonnances et des ententes familiales, la Loi sur la saisie-arrêt et la distraction de pensions et la Loi sur la marine marchande du Canada, et des lignes directrices qui s'y rapportent, soit les lignes directrices fédérales sur les pensions alimentaires pour enfants.

-Honorables sénateurs, cette motion est à peu près identique à celle qui a été adoptée en cette Chambre pendant la trente-cinquième législature - plus précisément le 12 mars, 1997 - à l'initiative de notre collègue, le sénateur DeWare. Comme celle-ci, l'autre motion découlait du débat parlementaire qui a eu lieu durant la dernière législature sur le projet de loi C-41, Loi modifiant la Loi sur le divorce, la Loi d'aide à l'exécution des ordonnances et des ententes familiales, la Loi sur la saisie-arrêt et la distraction de pensions et la Loi sur la marine marchande du Canada.

(1630)

Honorables sénateurs, vous vous souviendrez que cette mesure gouvernementale était très controversée. Celle-ci avait fait l'objet de vigoureuses représentations au comité et d'un débat animé dans cette Chambre. Le projet de loi fut finalement adopté, mais pas avant que le gouvernement, qui faisait l'objet de pressions considérables de la part des parlementaires, ne fasse deux concessions importantes. La première a été d'accepter la création d'un comité mixte du Sénat et de la Chambre des communes pour étudier la question de la garde et celle de l'accès aux enfants dans la société canadienne. Mes collègues savent que cette motion est quelque part dans le processus parlementaire. La motion était ici la semaine dernière, et je crois qu'elle a été modifiée puis renvoyée à l'autre endroit. La première concession avait été acceptée par le ministre de la Justice de l'époque, M. Rock.

La deuxième concession du gouvernement avait été faite par le leader du gouvernement au Sénat à l'époque, le sénateur Fairbairn. Dans une lettre adressée au comité, celle-ci avait convenu que le comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie devait surveiller l'application des lignes directrices sur les pensions alimentaires pour enfants. Je signale que ces soi-disant lignes directrices sont en fait beaucoup plus que de simples lignes directrices. Elles doivent obligatoirement être suivies pour calculer le montant des pensions alimentaires.

Au cours de la dernière législature, le comité s'est dit préoccupé par le recours de plus en plus fréquent aux règlements pour définir des points juridiques importants qui ont une incidence sur la vie des Canadiens, puisque cette façon de faire empêche toute intervention parlementaire. Le comité a été jusqu'à dire que cette tendance était troublante et que la solution immédiate au problème était un ordre de renvoi au comité permanent afin de surveiller l'application des lignes directrices.

Comme les honorables sénateurs le savent, la présente législature et le comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie ne sont pas liés par la décision prise par la législature précédente. Toutefois, j'ai consulté des membres du comité la semaine dernière et ceux-ci étaient d'avis que, par respect pour ceux qui ont fait de vigoureuses représentations au comité, et par respect pour la concession et l'entente auxquelles on en était arrivé afin d'accélérer l'adoption du projet de loi, il nous incombe d'assumer la tâche qu'on envisageait de nous confier au cours de la dernière législature.

Honorables sénateurs, le comité m'a autorisé à notre dernière réunion à vous présenter cet ordre de renvoi, et je vous invite à l'appuyer.

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, si aucun autre honorable sénateur ne souhaite intervenir, vous plaît-il d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.

(La motion est adoptée.)

Autorisation au comité d'étudier les services de santé à la disposition des anciens combattants

L'honorable M. Lorne Bonnell, conformément à l'avis donné le 30 octobre 1997, propose:

Que le comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie soit autorisé à faire une étude et à présenter un rapport sur l'état des soins de santé au Canada dispensés aux anciens combattants et aux personnes des Forces armées canadiennes; que l'étude porte sur l'accessibilité, la qualité et les critères des soins de santé à la disposition des anciens combattants et des personnes des Forces armées canadiennes;

Que le comité soit habilité à autoriser la télédiffusion et la radiodiffusion, selon ce qu'il juge à propos, d'une partie ou de la totalité de ses délibérations; et

Que le comité fasse rapport au plus tard le 30 juin 1998.

-Honorables sénateurs, la semaine prochaine, nous nous souviendrons d'eux. La semaine prochaine, nous nous souviendrons qu'il y a 52 ans, la Deuxième Guerre mondiale a pris fin, et qu'il y a 80 ans, la Première Guerre mondiale a pris fin. À mon avis, à l'occasion de cette semaine des anciens combattants, le moment ne peut être plus opportun pour créer un comité chargé d'étudier les services à la disposition des anciens combattants.

L'honorable Orville H. Phillips: Honorables sénateurs, je suis heureux d'appuyer la motion. L'été dernier, il a été question à plusieurs reprises d'incidents malheureux concernant les soins dispensés aux anciens combattants. J'aimerais que l'on se penche là-dessus ainsi que sur les soins de santé en général.

J'ai une raison particulière pour vouloir faire adopter cette motion aujourd'hui. Il y a une rumeur qui circule selon laquelle l'honorable sénateur Bonnell envisage une retraite anticipée, et j'aimerais que l'on traite des aspects de cette motion qui concernent la santé avant qu'il ne quitte le Sénat. Nous tenons à pouvoir profiter de ses connaissances spéciales.

Son Honneur le Président: Si aucun autre sénateur ne souhaite intervenir, plaît-il aux honorables sénateurs d'adopter la motion?

Des voix: D'accord

(La motion est adoptée.)

Le Sénat s'ajourne à 14 heures demain.


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