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Débats du Sénat (Hansard)

Débats du Sénat (hansard)

1re Session, 36e Législature,
Volume 137, Numéro 44

Le jeudi 26 février 1998
L'honorable Gildas L. Molgat, Président


LE SÉNAT

Le jeudi 26 février 1998

La séance est ouverte à 14 heures, le Président étant au fauteuil.

Prière.

[Traduction]

 

L'honorable Richard J. Doyle

Hommages à l'occasion de son départ à la retraite

L'honorable John Lynch-Staunton (chef de l'opposition): Honorables sénateurs, je doute qu'il y ait un seul sénateur qui ait été surpris que les médias, en rendant compte de la décision prise la semaine dernière par le Sénat de suspendre l'un de ses membres, ait donné la priorité au fait qu'un certain nombre de sénateurs étaient absents lors du vote. Cela a permis à la florissante industrie qu'est devenu le dénigrement systématique du Sénat de relancer sa campagne en vue de convaincre les Canadiens que le seul critère acceptable pour évaluer la contribution des sénateurs est le nombre de fois qu'ils sont présents à la Chambre. Assiduité égale activité; absence égale abdication.

Aux yeux de ces gardes-chiourme, dont les excès de langage ne sont surpassés que par leur ignorance du fonctionnement de cet endroit en particulier, et du Parlement en général, la feuille des présences est la seule preuve concrète de la valeur d'une personne. Ce que fait un sénateur n'est plus une mesure de sa participation responsable, seul compte le nombre de fois que son nom figure sur le registre de séance. Ce n'est plus qu'avez-vous fait, mais pourquoi n'étiez-vous pas là? Le décès d'un proche, un conjoint gravement malade, un adolescent souffrant de toxicomanie, rester auprès d'un malade aux soins intensifs, être membre d'une délégation en voyage à l'étranger, sillonner le pays avec un comité qui tient des audiences sur un important projet de loi, ces préoccupations personnelles et autres du même genre, ainsi que les responsabilités politiques, ne doivent en aucun cas entraver ce que ces redresseurs autoproclamés du comportement du Sénat ont convenu de promouvoir comme étant une conduite sénatoriale acceptable.

Par conséquent, personne n'est à l'abri du courroux de ces puristes parlementaires malavisés qui, à l'instant même, calculateur en main, sont certainement en train de vérifier notre assiduité.

Prenons le sénateur Doyle, par exemple. Pendant la durée de son mandat, le Sénat aura siégé 902 fois, et il est consigné qu'il n'était présent que 790 fois - une assiduité médiocre de 87,6 p. 100.

Des voix: Bravo!

(1410)

Le sénateur Lynch-Staunton: Que la toujours vigilante équipe d'intervention anti-Sénat ait omis d'inscrire le sénateur Doyle sur sa liste noire est un mystère. Ce doit être un oubli, surtout quand on sait ce qu'il faisait pendant ses absences. C'était un membre actif et consciencieux du comité mixte du libre-échange. C'était un membre actif et consciencieux du comité mixte des relations internationales. C'était un membre actif et consciencieux du comité mixte de la Bibliothèque du Parlement. C'était un membre actif et consciencieux du comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles. C'était un membre actif et consciencieux du comité de la régie interne dont il présidait les sous-comités des budgets et du personnel. C'était un membre actif et consciencieux du comité sénatorial permanent des affaires étrangères. C'était un membre actif et consciencieux du comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie. C'était... mais ça suffit. La liste de ses activités extérieures continue, mais je pense en avoir assez dit pour apaiser nos détracteurs.

En tout cas, comment être surpris par les états de service de Dic Doyle quand on se souvient qu'il avait été nommé au Sénat par l'ancien premier ministre Brian Mulroney qui, comme on nous le rappelle souvent, a joyeusement comblé les sièges vacants au Sénat en y plaçant des partisans intéressés et d'aveugles loyalistes comme les sénateurs Beaudoin et Keon?

Il n'y a qu'à voir ses antécédents. Toute sa carrière a été consacrée au journalisme. Il a commencé au Chatham Daily News où il est resté jusqu'en 1942 quand il a quitté pour entrer dans l'Aviation royale du Canada. Il a servi à l'étranger dans le Bomber Command de la RAF jusqu'à la fin de la guerre. Il est ensuite retourné au journalisme et est entré en 1951 au journal The Globe and Mail où il a occupé plusieurs postes importants, dont ceux de rédacteur administratif, de rédacteur en chef et de rédacteur émérite.

En 1983, lorsqu'il a été fait membre de l'Ordre du Canada, voici ce que la mention accompagnant la médaille disait:

 

En tant que rédacteur administratif et, depuis 1979 jusqu'à récemment, en tant que rédacteur en chef du journal The Globe and Mail, Richard Doyle a été l'intelligence derrière l'élaboration de la politique éditoriale influente et la couverture des événements nationaux et internationaux par le principal journal anglophone du Canada. Grâce à lui, le journal a établi des normes élevées de rédaction et d'éthique dans le domaine du journalisme.
Je signale que depuis 1967, 3 848 Canadiens ont été décorés de l'Ordre du Canada, dont moins de 100 journalistes. Je ne céderai pas à la tentation d'expliquer pourquoi le comité de sélection a choisi aussi peu de représentants de cette profession. Je suis cependant convaincu qu'elle compte peu de membres possédant autant de probité professionnelle que celle que Dic Doyle a apportée à cette profession, à laquelle il est profondément attaché.

En passant, sur les 100 sénateurs qui siègent présentement ici, dix sont membres de l'Ordre du Canada. Cela apportera sans doute de l'eau au moulin de ceux qui prônent la réforme du Sénat.

Un de ses proches collègues au journal The Globe and Mail dit du sénateur Doyle, lorsqu'il y travaillait, qu'il se distinguait par un conservatisme fortement teinté de compassion et de conscience sociale, qu'il était un ardent défenseur des libertés civiles et professait un amour universel de l'humanité. Heureusement pour nous, ces mêmes principes l'ont guidé ici, pour le plus grand bienfait des deux côtés de la chambre. Ses collègues du caucus ont également l'avantage de pouvoir profiter de sa sagesse et de ses bons conseils, qui nous ont souvent évité d'adopter une ligne de conduite que nous aurions pu regretter par la suite.

La fondation du journal The Globe and Mail remonte à George Brown qui, pour beaucoup, est le vrai père de la Confédération. Quiconque est allé dans le bureau du sénateur Doyle aura constaté que Brown y occupe une place de premier choix sur les murs. Le sénateur Doyle ne cache pas son admiration pour son distingué prédécesseur et le seul fait de mentionner son nom l'amène inévitablement à parler longuement de son héros et à déplorer qu'il n'ait pas joui de la reconnaissance généralisée qu'il méritait en tant que grand architecte de la Confédération. Dans son ouvrage intitulé Hurly Burly, le sénateur Doyle cite la phrase suivante de celui qui était alors le rédacteur du Globe, John Willison:

 

Brown aurait été meilleur politicien s'il n'avait pas été journaliste, et meilleur journaliste s'il n'avait pas été politicien.
Brown aurait certainement été enchanté d'apprendre que le sénateur Doyle était et demeure un excellent politicien et un excellent journaliste. Sa grande compétence dans les deux domaines nous manquera beaucoup, de même que ses sévères mises en garde, ses généreux conseils et son merveilleux sens de l'humour. Nous nous ennuierons de ses notes manuscrites aux observations sibyllines, dans lesquelles il louangeait les discours réussis, dénonçait par des commentaires caustiques les performances incertaines. Il était cependant toujours là pour encourager et soutenir, surtout lorsque les choses tournaient mal.

Nous nous ennuierons surtout de cet homme qui nous rappelait nos responsabilités en tant que parlementaires et la nécessité de les exercer sans excès, mais de les respecter sans retenue. Somerset Maugham a écrit que la conscience était gardienne des règles communes. Le sénateur Doyle était le gardien des nôtres.

Le sénateur Dic Doyle s'est donné entièrement au Sénat, même si les dernières années ne l'ont pas ménagé sur le plan de la santé physique. Il nous manquera beaucoup, mais nous lui souhaitons néanmoins de vivre une longue retraite bien méritée auprès de sa famille, dont il est si fier, de sa charmante épouse Flo, de leurs enfants Judith et Sean et de leur petite-fille Kaelan. Âgée de près de quatre ans, Kaelan s'est assise dans le fauteuil de Dic la semaine dernière et a déclaré qu'un jour elle serait, elle aussi, sénateur. Si elle y arrive, nous ne pouvons qu'espérer qu'elle saura faire preuve de la même assiduité que son grand-père et en tirer profit.

L'honorable B. Alasdair Graham (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, Edmond Burke disait un jour qu'il y a trois états au Parlement, mais que le plus important de tous était le quatrième. Lorsque le sénateur Richard Doyle est arrivé au Sénat, en 1985, il amenait avec lui l'esprit curieux et doué d'un critique et d'un réformiste, celui d'un rédacteur en chef droit et honnête. Ayant combattu des politiciens de toutes tendances, il aurait été entièrement d'accord avec la vieille expression: «Le jour où vous écrivez pour plaire à tout le monde, vous n'êtes plus journaliste, vous êtes dans le spectacle.»

Le spectacle n'a jamais été le style du sénateur Doyle. Officier de l'Ordre du Canada et membre distingué du Temple de la renommée de la presse, le sénateur Doyle s'est toujours laissé guider par sa conscience. En ce sens, les décisions de l'Université King's College de Halifax, ainsi que de ma propre université, l'Université St. Francis Xavier d'Antigonish de remettre un doctorat honorifique de droit au sénateur Doyle sont particulièrement appropriées. Les honorables sénateurs admettront, j'en suis sûr, que le Sénat a beaucoup profité du fait que Richard Doyle est resté, corps et âme, un membre du quatrième état et une personne convaincue qu'un public éduqué doit surveiller ses édiles.

Bruce Hutchison a qualifié un jour la création d'un journal de miracle quotidien. Le sénateur Doyle qui, dès l'âge de sept ans, savait qu'il voulait être journaliste a transformé son rêve de jeunesse en carrière, une carrière qui l'a vu rédacteur, puis rédacteur en chef du Globe and Mail pendant plus de deux décennies. Il comprenait donc le miracle quotidien qu'est la publication d'un journal.

Ayant commencé comme rédacteur en 1951, il a été influencé par la direction dynamique et novatrice de George McCullogh à la tête d'un des journaux les plus importants du Canada fondé, comme le rappelait le sénateur Lynch-Staunton, par le brillant George Brown, un des pères de la Confédération. Je dirais à tous les sénateurs une chose que n'a pas mentionnée le sénateur Lynch-Staunton, à savoir que George Brown était un vrai libéral.

Le sénateur Lynch-Stauton: Nous ne lui en tiendrons pas rigueur.

Le sénateur Graham: Le sénateur Doyle a ensuite travaillé avec Howard Webster...

Le sénateur Lynch-Staunton: Qui n'était pas un vrai libéral.

Le sénateur Graham: ... succédant au grand Oakley Dalgeish au poste de rédacteur en chef. Son conseil aux journalistes, dont il a été un collègue distingué durant tant d'années, a toujours été le même. Les journalistes ne devraient jamais exprimer par écrit leur avis sur des sujets d'ordre politique. Selon lui, il s'agissait d'un travail de commentateurs. Le public instruit se formerait une opinion sans le concours de la rédaction.

(1420)

Un des ouvrages les plus amusants et les plus profonds de notre histoire contemporaine reste Hurly Burly, où le sénateur Doyle raconte les années passées au Globe. C'est le regard qu'un initié porte sur la vie et les moeurs du Canada. Il y raconte également ses expériences au sein de la 115e escadrille du Bomber Command de la RAF durant la Deuxième Guerre mondiale, ses luttes incessantes avec les gouvernements et ses rencontres avec quelques grands du journalisme.

À titre de rédacteur en chef, le sénateur Doyle s'est battu pour une presse libre, capable d'autodiscipline. C'était un rédacteur en chef qui prenait plaisir à déceler les opinions hasardeuses ou les inexactitudes dans la presse écrite. Il comprenait le rôle crucial que les membres du public peut jouer à titre d'éditorialistes et de jurés indépendants à l'égard du processus démocratique et de la vie politique canadienne.

Dans une série de réflexions publiées récemment dans le Globe and Mail à l'occasion du millénaire qui approche, le sénateur Doyle insiste sur le fait que surveiller la scène politique est un des services les plus utiles que peuvent rendre les citoyens d'un pays. Il soutient que les citoyens ordinaires doivent participer au processus de réforme, prendre le temps de surveiller de près leurs enfants et leur droit à la protection gouvernementale. Il invite les gens à se rendre dans les réserves indiennes les plus proches pour s'assurer que celles-ci ont leur juste part et en rendre compte à leurs gouvernants.

Cependant, l'âme de ce distingué critique, rédacteur et réformateur, de cet ardent défenseur des droits et des libertés, comme en témoignent les observations avisées et perspicaces que nous avons eu le privilège d'entendre dans cette Chambre, renferme un grand amour pour le Canada et une passion pour son pays que seul peut connaître un ancien combattant distingué de l'ARC qui a fait partie du Bomber Command.

Winston Churchill a dit un jour que l'homme n'a que sa conscience pour guide: les seuls remparts de sa mémoire sont la rectitude et la sincérité de ses actes.

En défendant bon nombre de ses vieux camarades de l'ARC, ces aviateurs qui ont libéré l'Europe du joug des nazis, il a dénoncé les faussetés présentées dans des docudrames réalisés récemment au Canada, des docudrames qui, à son avis, partaient de points de vue étroits et passaient très souvent et fort malheureusement pour la réalité. Il a écrit d'une manière émouvante que la déformation des faits et le désespoir ne sont pas un hommage à rendre aux 46 000 Canadiens, dont 13 000 de l'ARC, qui ont laissé leur vie au cours de la Seconde Guerre mondiale. Il nous a rappelé que per ardua ad astre ou «Vers les étoiles à travers l'adversité» est la devise d'un service fier et distingué, où plus de 5 000 Canadiens ont reçu des décorations pour actes de bravoure.

Sur cette question, comme sur d'autres, il a éclairé notre pays et cette Chambre. Très peu de gens connaissent mieux que Richard Doyle la profonde vérité que recèle la célèbre remarque de Ben Bradlee, à savoir que les informations constituent le premier brouillon de l'histoire. Nous n'avons en réalité qu'une seule chance de la raconter avec exactitude, peu importe à quel état nous appartenons.

Sénateur Doyle, vous avez apporté une très importante contribution aux travaux du Sénat. Je sais que votre esprit et votre plume continueront d'être au service de la justice et de la vérité. Nous vous offrons nos voeux les plus chaleureux, à vous, à Flo et à votre famille. Nous espérons aussi que vous resterez en rapport avec nous et que vous reviendrez nous voir bientôt.

L'honorable Lowell Murray: Honorables sénateurs, les discours que le sénateur Doyle a prononcés dans cet endroit ont rehaussé bien des débats et éclairé bien des jours ternes. Sa prose orne les pages du hansard, pour faire le bonheur du futur lettré qui s'arrêtera peut-être sur ces joyaux en lisant péniblement le fruit des efforts oratoires, plus arides, du reste d'entre nous.

Sa prose occupe également une place de choix dans mes dossiers. Au cours d'une certaine période, le sénateur Doyle m'a fait parvenir des douzaines de notes personnelles et privées, des commentaires savoureux, mordants, irrévérencieux, iconoclastes et quasi diffamatoires sur la politique et certains politiciens, sur les à-côtés des parlementaires, sur son interprétation des saintes écritures, sur le journalisme et certains journalistes, et sur bien d'autres choses encore. Je réserve ces notes pour publication future, afin d'en tirer un revenu d'appoint, si jamais ma situation financière devenait insupportable.

Inutile de dire que j'accorderai le droit de premier refus sur ces documents au sénateur Doyle lui-même. Il aura toutes les raisons de faire une offre, et il aura amplement les moyens de le faire, puisqu'il mènera bientôt la grande vie grâce non seulement à la généreuse retraite que lui a accordée lord Thompson, dans The Globe and Mail, mais aussi à sa «scandaleuse» pension de sénateur.

J'aime à penser que le Sénat a beaucoup contribué à l'éducation du sénateur Doyle. Il est arrivé ici se croyant très expérimenté, sans illusions, en journaliste impitoyable qui a tout vu et presque tout essayé. Quelques mois d'apprentissage au comité de la régie interne avec le sénateur Colin Kenny ont révélé chez le sénateur Doyle un naïf impénitent, un ingénu, un jeune homme qui a encore tout à apprendre. Pour se faire réconforter et rassurer, il s'est tourné vers madame le sénateur Lavoie-Roux, elle-même vétéran de la politique montréalaise et québécoise, mais elle n'avait jamais vu elle non plus rien de semblable. Le sénateur Doyle est arrivé ici en soupçonnant que le pouvoir corrompt, et il a seulement constaté qu'il scandalise.

Honorables sénateurs, la participation du sénateur Doyle aux travaux du Sénat a été remarquable non seulement par l'élégance et l'éloquence de sa prose, mais aussi par la qualité et la richesse de sa contribution. Il s'est distingué par la sagesse et la modération, certes, mais aussi par la passion de l'équité, de la justice et du respect et enfin, ce qui n'étonnera pas chez une personne aussi attachée à sa profession, par la passion de la vérité. Il a été d'un apport précieux pour le Sénat et, inutile de le dire, pour son parti politique.

Avant de lui dire au revoir, je tiens à reconnaître ma dette de gratitude envers lui, une profonde gratitude pour tous les gestes de bienveillance et de considération qu'il a eus à mon endroit. Que de fois je me suis senti ragaillardi grâce à ses encouragements judicieux et à son soutien, qu'il dispensait toujours au moment le plus utile. Je ne suis certainement pas le seul à avoir chaudement apprécié sa généreuse amitié.

L'honorable Joyce Fairbairn: Honorables sénateurs, il ne m'est pas facile de dire au revoir au sénateur Doyle aujourd'hui, car ce n'est un secret pour personne que nous sommes des âmes soeurs. Nous avons régulièrement exprimé notre admiration et notre affection mutuelles, et cela ne dérange pas nos conjoints, Mike et Flo, parce qu'ils comprennent parfaitement.

Dic et moi ne sommes pas que de vieux amis. Nous sommes aussi des scribes de la vieille école, des gratte-papier aux mains tachées d'encre qui croient vraiment que la plus belle époque de leur vie fut celle qu'ils ont passée à arpenter les salles de nouvelles à toutes les heures du jour ou de la nuit, à couvrir des événements d'une importance considérable, mais qui ne permettaient d'écrire qu'un ou deux paragraphes, sans espoir de rien faire paraître sous sa signature dans un publication digne de ce nom au Canada.

Nous avons en commun cette impression très particulière, quasi mystique, que les journaux sont, ou du moins étaient à l'époque, des créatures vivantes qui ont un coeur, une âme, une conscience. Nous avons eu la chance de pratiquer ce type de journalisme.

(1430)

Le sénateur Doyle a toujours cru que le journalisme devait porter sur la réalité et la vérité, et non sur des hypothèses et des rumeurs.

Honorables sénateurs, le sénateur Doyle et moi ne sommes pas du même âge, mais là n'est pas la question. Il y a aussi une légère distinction du fait qu'il a occupé toutes les fonctions possibles au sein d'un journal pour aboutir au poste tout puissant de rédacteur en chef du prestigieux Globe and Mail de Toronto, tandis que moi, par plusieurs caprices du sort, je me suis retrouvée, à un âge ridiculement jeune, à la tribune de la presse parlementaire pour suivre les activités de la colline. Rien de tout cela ne compte. Il a fait ses premières armes au Chatham Daily News et moi, au Herald de Lethbridge. Nous avons acquis beaucoup de connaissances qui transcendent toute considération sur l'âge ou le titre.

J'ai été très heureuse d'apprendre sa nomination comme sénateur environ un an après mon arrivée au Sénat. J'ai accepté avec regret, bien sûr, mais sans étonnement sa décision de siéger à titre de conservateur. Cette nomination en a surpris un grand nombre. On se demandait ce que le Sénat pouvait lui offrir après l'activité fébrile qu'il avait connue à la tête du quotidien The Globe and Mail.

Pour ma part, je savais ce que Dic Doyle allait faire - il allait travailler d'arrache-pied. Il allait procéder avec habileté et précision, éloquence et ténacité, humour et honneur. Personne ne se serait attendu non plus à ce que, face à une maladie terrible, il travaille avec un courage immense et un grand coeur.

Des voix: Bravo!

Le sénateur Fairbairn: Honorables sénateurs, nous partageons nos tâches. Personnellement, j'ai surtout aimé faire partie du comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles. Je garde un précieux souvenir de nos déplacements partout au Canada avec le regretté sénateur Earl Hastings, espérant - peut-être naïvement - recueillir les opinions des détenus dans les pénitenciers fédéraux sur les modifications proposées à la Loi sur la libération conditionnelle.

Le sénateur Doyle a loyalement et constamment appuyé la cause de l'alphabétisation, qui occupe aujourd'hui une grande partie de ma vie sur la colline parlementaire et à l'extérieur. Je le remercie sincèrement pour cet appui. Il a lutté avec acharnement pour les droits de victimes de la tragédie du sang contaminé, comme l'indique l'enquête Krever, et je le félicite pour cela.

En définitive, honorables sénateurs, Dic Doyle a été un vrai bon sénateur, comme il continue d'être un vrai bon journaliste. C'est un patriote inébranlable, un ancien combattant fier et un défenseur solide et tenace - Dieu sait qu'il était tenace pendant les périodes des questions - de sa province d'Ontario et de la ville de Toronto.

Le sénateur Doyle est un gentleman très gentil, et je reconnais que j'aurai toujours un faible pour lui. Il me manquera beaucoup. À lui et à Flo, je souhaite d'être très heureux pendant des années à écouter de la musique, à écrire et à échanger avec leur petite-fille, Kaelan, qui voudrait devenir sénateur comme son grand-papa.

L'honorable Noël A. Kinsella (chef adjoint suppléant de l'opposition): Honorables sénateurs, j'ai eu la chance d'être le voisin de banquette du sénateur Doyle. Je ne sais cependant pas pourquoi il a eu la malchance de m'avoir à sa droite. C'était peut-être une pénitence pour quelque acte inédit.

Depuis quelque temps déjà, le sénateur Doyle garde sur son pupitre des copies des merveilleuses inscriptions murales qui ornent l'appartement du Président. Voici une citation de Sénèque: Nihil ordinatum est quod praecipitatur et properat - rien de hâtif et de précipité n'est bien ordonné. C'est peut-être la leçon qu'il essayait de m'apprendre.

Grâce aux interventions réfléchies qu'il a faites au cours des années dans cette enceinte, le sénateur Doyle a certainement essayé de nous enseigner que la sagesse passe par la prudence et par l'examen consciencieux. Il a été un bon maître, et je tiens à exprimer publiquement ma reconnaissance pour les nombreuses leçons qu'il nous a apprises. Ses discours étaient pleins de bonnes leçons, car il ne faisait pas que nous présenter de l'information que nous n'avions pas, mais il faisait disparaître, pour ceux qui écoutaient, les oeillères de la répression qui nous empêchent souvent de voir ce que nous savons peut-être déjà. Cet ancien aviateur n'hésitait pas à nous engager dans une bataille militante contre les forces qui créent ces oeillères, cette répression, ces clichés et ces préjugés. Pour toutes ces raisons, nous devons beaucoup au sénateur Doyle.

Honorables sénateurs, le génie de la langue anglaise trouve une expression créatrice dans les écrits de ce membre de l'Ordre du Canada qui a présidé aux destinées du Globe and Mail. Ce rédacteur en chef émérite, à l'instar de tous les rédacteurs en chef, arrive à donner à divers matériaux une forme littéraire. Comme d'autres y ont fait allusion cet après-midi, nous avons souvent été la cible de ses notes plus ou moins sibyllines, qui font toutes ressortir sa maîtrise de l'art d'écrire.

Pour saluer mon collègue et voisin de pupitre, je tiens à citer des vers du poème de J.R. Smart intitulé «Le rédacteur en chef du périodique scolaire».

 

Le rédacteur en chef était assis,
Papier, plume et encre avec lui;
(Pas sur lui, mais devant lui,
Sur son pupitre!) Sur la table, oui.
Et le rédacteur fronçait les sourcils;
L'appréhension et le désespoir profond
Semblaient être son lot pour de bon.
Sur ses godasses et son pantalon, en masse,
Tombaient les cheveux arrachés de sa tignasse!
«Abracadabraire et rastacouère,»
(Le rédacteur connaissait seul le mystère)
«Si par le tonnerre, et par la terre»
Je m'occupe encore d'un périodique scolaire,
Je veux bien être pendu, ou bien vendu.
Si je perds encore ainsi la berlue,
Car personne ne se soucie du périodique
Ni du rédacteur la terrible panique!

Honorables sénateurs, les lecteurs du journal The Globe and Mail et les sénateurs sont chanceux que le sénateur Doyle tienne tant à son pays et au régime de gouvernement où la liberté est respectée.

À vous, mon ami, je dis bonne chance: Ad moltos annos.

L'honorable Philippe Deane Gigantès: Honorables sénateurs, j'ai la chance de connaître le sénateur Doyle depuis plus longtemps qu'aucun d'entre vous. J'ai travaillé pour lui en 1956, il y a 42 ans. Il était mon patron, l'un des meilleurs que j'aie jamais eus, et, à ce titre, ne manquait jamais de faire preuve de discernement et d'équité. Tous les défauts que vous aurez découverts en moi depuis ne peuvent lui être imputés. Il ne m'a enseigné aucune de mes mauvaises habitudes.

Il parvenait à diriger les journalistes grincheux que nous étions, à nous mettre au pas, à veiller à ce que nous fassions notre travail dans le respect de l'équité, des faits et des convenances. Certains ont fait remarquer que, à l'époque où le sénateur était rédacteur en chef du journal The Globe and Mail, ce quotidien se classait parmi les 10 meilleurs journaux au monde. Tout le mérite lui en revenait. Ce journal est cité partout dans le monde, du moins il l'était à l'époque où le sénateur y travaillait.

(1440)

Dans son livre, le sénateur m'a reproché d'avoir fait le baisemain à son épouse. Comment faire autrement? Elle était et est encore si charmante. Elle ne semblait pas m'en vouloir. Lui, par contre, avait l'air mécontent.

J'ai toujours eu et j'ai encore beaucoup d'admiration pour le sénateur Doyle. C'est un homme remarquable.

L'honorable Consiglio Di Nino: Honorables sénateurs, je suis heureux de rendre hommage à quelqu'un qui est respecté de tous pour son intégrité, son intelligence et son bon sens.

Au nom des Canadiens, le sénateur Doyle a défendu des causes qui n'étaient pas toujours populaires ou qui n'avaient pas le plein appui du Sénat et même de ses propres collègues, et ceux qui ont pu manifester du mépris pour le respect qu'il vouait aux principes de l'équité, de la justice et de la vérité se sont attiré ses foudres.

Le sénateur Doyle a toujours été pour moi un maître et un ami et j'ai beaucoup appris de lui en le côtoyant.

Dic, j'espère que vous et Flo vivrez une retraite longue et heureuse, entourés de ceux qui vous sont chers. Votre sagesse et votre humour nous manqueront énormément.

[Français]

L'honorable Thérèse Lavoie-Roux: Honorables sénateurs, à l'occasion du départ de notre collègue, le sénateur Richard Doyle, vous me permettrez de lui rendre ce témoignage.

[Traduction]

Honorables sénateurs, lorsqu'il a accepté d'être nommé au Sénat, en 1985, le sénateur Doyle a décidé de siéger du côté conservateur. La légende veut que ce soit ses sympathies à l'égard des minorités qui l'aient incité à le faire. Tout le monde a bien accueilli sa nomination. La réputation du sénateur Doyle en tant que l'un de nos journalistes les plus en vue au Canada nous permettait de croire que ce nouveau sénateur ferait sa marque au Sénat. C'est ce qu'il a fait.

En tant que rédacteur en chef du journal The Globe and Mail, le sénateur Doyle n'était pas actif sur la scène politique avant de devenir sénateur, mais il était certes puissant sur le plan politique. Lorsqu'il est arrivé au Sénat, en 1985, il a dû apprendre son Beauchesne, mais la procédure parlementaire ne lui était pas tout à fait étrangère.

Certains sénateurs savent sûrement que le sénateur Doyle a l'honneur peu enviable d'être le seul sénateur siégeant parmi nous à avoir été censuré par le Parlement. Cela ne surprendra personne d'apprendre que l'incident en question, qui s'est produit en 1977, touchait la liberté de la presse et le droit du public de savoir.

Cette même préoccupation pour le droit à l'information du public l'a incité à persuader ses collègues sénateurs d'ouvrir les portes de notre comité de la régie interne au public, à une époque où on remettait sérieusement en question le manque de transparence de ce comité. C'est à l'époque où nous avons travaillé ensemble au sein du comité de la régie interne que j'ai commencé à vraiment apprécier les nombreuses qualités remarquables du sénateur Doyle.

Aujourd'hui, je profite de l'occasion pour le remercier publiquement de son appui merveilleux et constant, de sa sagesse et de son intégrité totale. Le grand sens du devoir du sénateur Doyle, qui voulait appuyer notre institution et ses collègues, n'est surpassé que par son sens des responsabilités et du devoir à l'égard des contribuables du pays. Il a toujours été évident qu'il croit fermement que les citoyens canadiens doivent être la principale préoccupation des parlementaires.

Les services rendus par le sénateur Doyle à notre pays et aux Canadiens ont été remarquables. Au cours de la Seconde Guerre mondiale, il a servi dans l'Aviation royale canadienne, au sein du Bomber Command, et il s'est retiré en 1945 avec le grade de lieutenant d'aviation. Il a fait sa marque sur le plan littéraire en écrivant deux livres que beaucoup d'entre vous connaissez, The Royal Story et Hurly Burly: A Time at the Globe, dont on a parlé plus tôt. Le sénateur Doyle a été nommé officier de l'Ordre du Canada en 1983. Sa carrière importante, surtout en tant que rédacteur en chef du journal The Globe and Mail, reflète certes les services qu'il a rendus aux Canadiens.

Son talent de rédacteur a été utile au Sénat. La facilité avec laquelle il manie la langue et sa forte capacité d'analyse lui ont certes permis de se distinguer parmi nous. Nous avons eu d'innombrables possibilités d'entendre le sénateur Doyle parler au Sénat et de voir à quel point il maîtrisait l'anglais et savait nous en faire apprécier toutes les subtilités.

Je me rappelle d'un cas où nous travaillions au comité sénatorial spécial sur l'euthanasie et le suicide assisté. Le sénateur Doyle n'était pas un membre de ce comité, mais il suivait ses travaux. Durant un débat sur le suicide assisté, il m'a glissé une note sur laquelle il était écrit une phrase dont la profondeur m'a frappé. Nous craignions les répercussions de la légalisation du suicide assisté sur la conscience sociale. Si je ne m'abuse, cette phrase disait ce qui suit:

 

Une forme de suicide est-elle liée à une autre - du moins par les liens de l'acceptation accrue?
C'était un genre d'avertissement pour décourager l'aide au suicide parce que ce lien serait alors trop facile à faire. La note de Dic souligne bien l'idée que l'acceptation de l'aide au suicide vulgarise la notion du suicide.

Dic, je désire vous remercier de tout mon coeur pour vos innombrables contributions dont je n'ai souligné que quelques-unes aujourd'hui. Vous avez tellement de talents. Je suis persuadée que vous continuerez d'en jouir tout au cours de votre retraite et que vous continuerez également d'avoir une influence positive sur les gens de votre entourage. Votre petite-fille Kaelan a beaucoup de chance de pouvoir compter sur la sagesse et les qualités de son grand-père.

Je parle de retraite, mais je suis certaine que nous n'en avons pas fini pour autant d'entendre parler du sénateur Doyle. Ses habitudes de chien de garde et ses profonds sentiments pour le Canada le pousseront sans aucun doute à continuer de garder un oeil sur les événements politiques.

Nous vous invitons à rester en contact avec nous, tout particulièrement, si je peux me le permettre, au chapitre des dossiers sociaux.

J'espère que vous aurez davantage de temps à consacrer à la musique, à Flo, à votre famille et à vos bons amis.

Dic, je peux vous assurer que tout au cours des années qu'il me reste à passer au Sénat, je continuerai de respecter les objectifs et les principes que nous avons toujours partagés. Je vais tenter de porter bien haut la bannière de la justice, de l'équité et de la transparence.

De vous avoir connu et d'avoir travaillé avec vous fait partie des bons souvenirs qui me resteront toujours du Sénat.

[Français]

Merci pour votre amitié, votre confiance et l'appui que vous m'avez toujours accordé dans des moments parfois assez pénibles.

Sachez que vous avez une bonne amie au Québec et que je serai toujours heureuse de vous y accueillir. Je souhaite à d'autres collègues qu'ils puissent connaître une expérience aussi positive et significative que la mienne, soit de pouvoir travailler avec quelqu'un de votre qualité.

Dic, merci pour tout.

[Traduction]

(1450)

Je vous remercie de tout ce que vous avez apporté au Sénat et à vos concitoyens pendant toutes ces années. Je vous souhaite beaucoup de bonheur. Comme plusieurs l'ont déjà dit avant moi, vous nous manquerez beaucoup.

[Français]

Mais, comme dit la chanson, ce n'est qu'un au revoir. Nous nous reverrons bientôt.

[Traduction]

L'honorable Gérald-A. Beaudoin: Honorables sénateurs, j'aimerais dire quelques mots sur la contribution remarquable du sénateur Doyle au comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles.

J'ai été nommé au Sénat en 1988, il y a donc près de dix ans. Dès le début, j'étais fasciné par le comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles dont je suis devenu membre. Le sénateur Doyle en faisait déjà partie. Les membres du comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles doivent avoir certaines connaissances en droit, mais certains peuvent avoir une formation différente, comme c'est le cas du sénateur Doyle. J'aimerais souligner que le sénateur Richard Doyle a toujours fourni un travail très constant et très exceptionnel au comité.

[Français]

Avant de venir au Sénat, notre collègue était rédacteur en chef au Globe and Mail, un quotidien de très grande réputation qui fait partie de l'histoire du Canada depuis George Brown, dont on a souligné les mérites des deux côtés de la Chambre cet après-midi. Un bon éditorialiste doit avoir des idées justes et une belle plume. C'est le cas de notre collègue le sénateur Doyle. Ces qualités, bien sûr, il a continué d'en faire montre au Sénat. En plus, il a ajouté des discours qui sont toujours très intéressants.

Il a remporté plusieurs honneurs, dont celui d'être fait membre du Temple de la renommée de la presse en 1990.

[Traduction]

Le sénateur Doyle est un homme doué d'un grand sens de l'humour, d'un très bon jugement, d'une logique impeccable, bref, d'une «tête bien faite», comme on dit en français; et qui plus est, c'est un philosophe! Nous avons besoin de personnes comme lui dans tous les comités et au Sénat.

[Français]

À mon avis, le sénateur Doyle sera très difficile à remplacer.

[Traduction]

L'honorable A. Raynell Andreychuk: Honorables sénateurs, il semble que je sois le seul sénateur à avoir hésité et à ne pas vouloir prendre maintenant la parole au sujet du sénateur Doyle. Je ne voulais pas que l'on compare mon intervention à la sienne, car je crois savoir qu'il interviendra en dernier.

Comme j'ai passé plusieurs heures à lire et à relire ses discours, je trouve que beaucoup d'autres, dont les miens, ne souffrent pas la comparaison. Au Sénat, personne n'a eu autant de talent que le sénateur Doyle pour s'exprimer et autant de sincérité pour se montrer constamment à la hauteur de ses discours.

À peine arrivée au Sénat, par le même processus infâme que lui semble-t-il, comme le sénateur Beaudoin et le sénateur Keon, je suis allée voir le sénateur Doyle à maintes reprises pour obtenir des conseils, me faire encourager, parfois me faire gronder, ou y trouver à l'occasion une dose d'optimisme. Comme le sénateur Fairbairn, je sentais naître un petit béguin pour le sénateur Doyle. Je pensais que j'étais la seule dans cette situation, peut-être à cause de la façon dont j'étais arrivée au Sénat. Cependant, il ne m'a pas fallu longtemps ici pour me rendre compte que le genre de rapports spéciaux que le sénateur avait avec moi n'étaient pas si spéciaux. Il les entretenait avec tous les sénateurs.

Il y a beaucoup d'excellents sénateurs ici. Nous en avons déjà bien assez entendu, comme le dirait le sénateur Doyle, à propos de ses succès et de ses contributions au Sénat. Je tiens cependant à souligner qu'il a été un modèle de comportement, un ami et un exemple pour tous les sénateurs ici. Le fait qu'il nous ait donné de son temps illustre bien son intégrité personnelle et son attachement au Sénat; cependant, par divers moyens - ses petites notes, son humour, ses questions - il a fait de nous tous de meilleurs sénateurs.

Je lui souhaite bonne chance. Je sais qu'il restera un ami du Sénat et un tenant du processus démocratique comme il le conçoit. Je sais qu'il a passé bien des heures et bien des jours à réfléchir à la conception que se feront du Canada non pas les politiciens, mais les simples citoyens. Longtemps après que beaucoup d'entre nous seront partis à la retraite, beaucoup continueront de respecter le Sénat en lisant et en citant les paroles du sénateur Doyle.

Sénateur Doyle, je vous adresse mes meilleurs voeux, et j'espère que la plupart d'entre nous pourront être à la hauteur de l'exemple que vous nous avez donné.

L'honorable Richard J. Doyle: Honorables sénateurs, vous avez entendu ce que j'ai entendu. Vous avez entendu les témoignages. C'est pourquoi je vous dis: quatre années de plus!

En même temps, je voudrais rappeler aux sénateurs qu'il y a toujours deux versions à une même histoire. Vous en avez entendu une, et vous allez maintenant entendre l'autre.

Je voudrais vous ramener un peu en arrière, quand la fin de la cinquantaine et le début de l'ennui m'ont amené dans cette auguste assemblée il y a 13 ans. Dès mon arrivée, j'ai cru prudent d'identifier tant la jeunesse que l'expérience. J'ai demandé à être initié au Sénat par Duff Roblin, leader du gouvernement et seul Canadien que je connaisse qui puisse porter le kilt sans avoir l'air ridicule. Pour l'aider, j'ai choisi Lowell Murray, qui, des années plus tard, allait diriger avec brio et audace un Sénat assiégé pendant la crise de la TPS.

Je n'avais pas l'intention de passer plus d'un an ou deux au Sénat, après avoir épuisé toutes les occasions que la Chambre haute peut offrir à un journaliste blasé et blessé. Pendant qu'on me souhaitait la bienvenue, quelqu'un - quelqu'un d'en face, j'en suis convaincu - s'est amusé à circuler un article que j'avais écrit peu de temps avant dans The Globe and Mail. Il commençait assez innocemment en faisant allusion au passage à Toronto, d'où je viens, des rédacteurs du magazine Playgirl, qui:

(1500)

 

[...] ont très clairement fait comprendre que très peu était laissé au hasard dans le choix des modèles des pages centrales. Ils ont placé des annonces pour trouver des spécimens en vue de la publication d'un numéro spécial sur les mâles canadiens.
Cinq cents candidats se sont présentés au lieu dit et à l'heure dite, se sont dévêtus jusqu'à la taille, ont joué des pectoraux et ont souri à la caméra. Après écrémage, une douzaine ont été retenus pour poser dans toute leur splendeur, et de face.

Je n'arrive toujours pas à comprendre pourquoi, dans tant d'aspects de la vie canadienne, beaucoup ne sont pas appelés avant d'en choisir si peu. Ce qui m'étonne encore davantage, c'est que nous acceptions que le choix se fasse parmi un groupe aussi restreint puisqu'il est évident que nous ne manquons pas de confiance en notre capacité de soutenir la concurrence dans les grandes oeuvres et d'accomplir le travail qui doit être fait. Dieu sait que les rédacteurs de Playgirl sauraient plus habilement que nous choisir les sénateurs. Ici, le choix est la prérogative du premier ministre et nulle part ailleurs ne se laisse-t-il guider par sa fantaisie avec autant de délectation. Rares sont les fois où il se donnera la peine de demander conseil avant de nommer un sénateur. La dernière fois que Pierre Trudeau a demandé un avis, il s'est adressé au premier ministre de l'Ontario qui a refilé le susucre à son collecteur de fonds. Quant à nous, nous ne savons même pas si cet homme a des pectoraux.

C'est ce qui était écrit et, pour la première fois au cours d'une longue carrière, il y avait des gens qui réclamaient l'auteur. Seul le whip de l'époque - ce vieux de la vieille, un ami discret, Orville Phillips - a vu les dangers auxquels je m'exposais. Il m'a attribué un fauteuil entre les deux sénateurs les mieux armés pour contrer toute interférence divine avec ma liberté de parole. Le sénateur Phillips m'avait placé entre le docteur Paul David et le docteur «Staff» Barootes. Si jamais mon coeur devait flancher ou ma vessie éclater, j'étais entre bonnes mains.

J'ai pris le temps de compléter ce que j'avais appris dans la rue et dans les journaux trouvés dans les toilettes sur les collecteurs de fonds. Jack Godfrey n'a jamais été embarrassé par la volonté de son parti d'acquérir des connaissances. Il n'a pas non plus été intimidé au moment de sévir contre un taux d'absentéisme scandaleux au sein de son propre parti. Guy Charbonneau, ici, de notre côté, était un des rares champions que nous avons eu au cours d'une longue sécheresse politique au Québec. Son courage serein pendant le débat sur la TPS a, à mon avis, contribué pour une bonne part à notre survie pendant cette crise.

Le Sénat a ses fautes et ses défauts, mais ce n'est pas aux hommes généreux qui viennent à la rescousse des finances de leur parti qu'il faut les reprocher.

Ai-je dit «hommes»? Au comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles avec Nate Nurgitz et Derek Lewis, j'ai rarement eu des reproches à formuler contre la femme qui présidait nos travaux, Joan Neimann, ou contre la vigueur d'une Anne Cools. J'ai aussi fait partie du comité du Règlement sous la présidence de Brenda Robertson et j'y ai trimé dur, pour un résultat productif et de grande valeur. Le point marquant de mes 13 années ici - et très souvent l'expérience la plus exigeante que j'y ai vécue - c'est le travail acharné que nous avons accompli au sein du comité de la régie interne, avec l'aide de Bill Doody et sous la direction rigoureuse de Thérèse Lavoie-Roux. Quelle femme forte! En pleine récession, elle a réussi à faire épargner des millions de dollars au Sénat sans qu'il ait à remercier de ses services un seul de ses employés.

À n'importe quel moment dans le cadre de ces adieux, il est de mise de dire un mot au sujet de Lowell Murray. Il a réussi à faire fonctionner cette boîte, à être le bras droit de Brian Mulroney dans le dossier de l'unité nationale et à réconforter de nouveaux sénateurs conservateurs, dont bon nombre donnaient l'impression de s'éloigner de chez eux pour la première fois et je me demande encore comment il réussi à faire toutes ces choses en même temps. Une seule de ses qualités - et je suppose que la plupart d'entre nous pouvons la lui pardonner - est révoltante et exaspérante. Évidemment, je veux malheureusement parler de sa capacité de prendre la parole sans préavis et de discourir pendant des heures, sans notes, en faisant des phrases baroques qu'il faut décortiquer. Mon bon ami, le sénateur Barootes, avait l'habitude de dire de Lowell qu'il se démarquait parce qu'il y avait autour de lui bien des gens qui perdaient leur temps à des futilités. Ma femme va plus loin que cela. L'autre jour, elle a dit que Murray paraissait bien pour un homme de 36 ans.

(1510)

Le sénateur Murray a fait bien des choses qui sont dignes de mention, mais une de celles qui restera dans ma mémoire le plus longtemps, c'est le discours qu'il a fait l'autre jour, à cet endroit, afin de présenter aux Canadiens les excuses du Sénat pour n'avoir pas agi plus tôt dans l'affaire Thompson.

Dans les observations que j'ai faites plus tôt cette semaine, j'ai cité abondamment les discours du sénateur John Lynch-Staunton. Les paroles du sénateur Lynch-Staunton que j'ai citées avaient trait au rôle central qu'il a joué dans l'affaire de l'aéroport Pearson. Comme les sénateurs Lazarus, Phillips et Grattan O'Leary avant lui, le sénateur Lynch-Staunton croit que la véritable fonction du Sénat est de voir à ce que les libertés et les droits individuels soient respectés et protégés.

Il n'y a pas longtemps, j'ai pris la parole au Sénat pour exprimer mon admiration à l'égard d'un autre de nos leaders. Je suis, en effet, un admirateur de Joyce Fairbairn. L'autre jour, j'ai fait remarquer à ma femme que le sénateur Fairbairn paraissait bien pour une femme de 32 ans! Dois-je maintenant avouer que le sénateur Fairbairn et moi-même avons déjà convenu de faire fi de la ligne de parti pour maintenir les comités dans le droit chemin de la justice et de la vérité?

Nous devrions ici rechercher la vérité et la justice. Nous avons fait un terrible gâchis avec l'affaire Airbus. Les détracteurs de notre précédent premier ministre n'ont montré aucun remords pour le mal qu'ils avaient fait, et ses défenseurs n'ont rien fait pour se préparer à un long combat. C'est Brian Mulroney qui m'a ouvert la porte de cette Chambre. J'aime à penser que, finalement, il sera lavé de tous les blâmes qui pèsent contre lui et qu'il sera accepté comme l'un des grands de l'histoire du Canada.

Aujourd'hui, j'aurais voulu faire plus que simplement mentionner les gens envers qui j'ai une dette. Raynell Andreychuk m'a redonné l'espoir que nous ayons un jour un Sénat plus consciencieux. Elle partage en outre ma soif de vérité et de justice. Le sénateur Jim Balfour n'a pas besoin de hausses le ton ou, du moins, il n'a pas besoin de le faire souvent pour être entendu des deux côtés de la Chambre. Ce fut un honneur pour moi de siéger dans la même Chambre que Wilbert Keon, qui pourrait amener le Sénat à enfourcher de nouveaux chevaux de bataille en l'instruisant comme il le fait des risques et des dangers qui guettent le système médical. Don Oliver m'oblige à m'arrêter et à réfléchir. Mon ami, Con Di Nino, me pousse à bout dans les discussions, jusqu'à ce que je sois sûr d'avoir raison. Bill Kelly et Trevor Eyton me donnent accès aux conseils d'administration dont je n'ai pas fait partie. Gérald Beaudoin est l'université où je ne suis pas allé. Michael Meighen renforce mes attaches avec le parti. Norman Atkins et moi pleurons ensemble les mêmes causes perdues.

Ce fut un privilège d'avoir mon fauteuil dans le même îlot que Noël Kinsella et Eric Berntson, qui ont essayé de me sensibiliser à l'âme de l'Est et de l'Ouest tout en me laissant mes attaches à Toronto, mon chez-moi.

Janis Johnson, Mira Spivak, Eileen Rossiter et Ethel Cochrane m'ont tenu au pas en ce qui concerne les grandes causes sociales et culturelles, nonobstant David Angus.

Mon bon ami Duncan Jessiman restera au Sénat jusqu'au début de l'été. À ce moment-là, on le jettera dehors sans cérémonie, comme tous les autres. D'ici là, je compte sur lui pour prendre tous les messages de la bande de la marijuana.

(1520)

Je quitte sur une confession à mon whip - la loyaliste du parti, le sénateur DeWare. Il est temps que je vous dise, Mabel, que le sénateur Gigantès était mon ami quand je suis arrivé au Sénat et qu'il est toujours mon ami. Qui plus est, j'aime Al Graham et j'admire John Stewart. Enfin, je souhaite bonne chance au sénateur Lorna Milne dans la tâche difficile qui lui incombe de présider le comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles, le comité que j'ai préféré au cours des 13 années où j'ai siégé au Sénat.

Depuis quelque temps déjà, Marjory LeBreton et moi publions un journal clandestin. Puisse ce journal continuer de gagner en popularité et faciliter l'ascension pure et certaine de Jean Charest.

À mon arrivée au Sénat, le greffier de comité Paul Bélisle a pris soin de m'expliquer que la plupart du temps, au Sénat, les apparences sont trompeuses. Paul, qui a commencé sa carrière comme page au Sénat et qui est aujourd'hui greffier du Sénat, greffier des Parlements et gardien de la flamme pour cette institution, est admirablement appuyé au bureau par Richard Greene, Blair Armitage, Gary O'Brien, Heather Lank et Charles Robert. Je vous garantis que, s'ils le voulaient, tous ces gens pourraient exercer plus de pouvoir que nous. Que Dieu me vienne en aide si jamais ma timide assistante Cheryll Hannaford se tourne contre moi.

Dressons la liste: greffiers de comité, employés de la bibliothèque, chefs de services, messagers, agents de sécurité, secrétaires, recherchistes, tous ces aimables employés des restaurants et des cafétérias, tous ceux qui gardent les locaux propres et brillants, ceux qui donnent des cours de français ou d'anglais et qui souffrent autant que nous, malgré leurs grands efforts - ils sont tous sur ma liste!

Je me souviens qu'il y a quelques années, un incendie s'est déclaré vers midi à la cuisine, de sorte que nous nous sommes tous précipités dans les escaliers vers l'extérieur où il pleuvait. Le sénateur David Walker, gentleman nommé sénateur à vie, ne sachant pas comment l'incident tournerait, a quitté le restaurant tenant à la main le verre de vin qu'on venait de lui verser. Une fois dehors, il a regardé les sénateurs qui grelottaient autour de lui. Il a levé galamment levé son verre en disant: «Quel beau tableau!» Bon nombre d'entre nous en avons convenu.

Quant à moi, j'ai des raisons spéciales d'être reconnaissant pour la patience des gens qui travaillent ici - à l'intérieur comme à l'extérieur du Sénat. Les particularités du traitement par radiation m'ont donné une voix qui semble passer à travers des tampons à récurer SOS et vous, mes amis, avez eu la gentillesse d'en supporter les conséquences.

J'ai des nouvelles pour vous: Brenda Robertson et le comité du Règlement sont sur le point de faire adopter un appareil électronique qui viendra en aide aux personnes souffrant d'un handicap vocal, ce qui permettra de supprimer un autre des épouvantables obstacles à la fonction publique. En temps opportun, Brenda et ses collègues du comité feront une annonce plus détaillée à ce sujet.

Ah! j'oubliais une chose. Je dois mentionner mon vieil adversaire au comité, le sénateur Colin Kenny. J'ai été chargé de dire une chose. Vous voyez, ma bonne grand-mère Doyle, qui est née ici, dans la vallée, était une Kenny. Un généalogiste m'a dit que Colin et moi sommes peut-être cousins. Ma dette envers Brian Mulroney ne s'éteindra-t-elle jamais?

Des voix: Bravo!


ORDRE DU JOUR

Permission ayant été accordée de passer à l'article no 1 de l'ordre du jour:

La Loi sur la Commission canadienne du blé

Projet de loi modificatif-Deuxième lecture

L'ordre du jour appelle:

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Taylor, appuyé par l'honorable sénateur Pépin, tendant à la deuxième lecture du projet de loi C-4, Loi modifiant la Loi sur la Commission canadienne du blé et d'autres lois en conséquence.

L'honorable Noël A. Kinsella (chef adjoint suppléant de l'opposition): Honorables sénateurs, nous avons terminé, de notre côté, l'analyse du projet de loi C-4 à l'étape de la deuxième lecture et sommes par conséquent favorables à son renvoi au comité.

(La motion est adoptée et le projet de loi est lu une deuxième fois.)

Renvoi au comité

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, quand lirons-nous le projet de loi une troisième fois?

(Sur la motion du sénateur Carstairs, le projet de loi est renvoyé au comité sénatorial permanent de l'agriculture et des forêts.)

Agriculture et forêts

Autorisation au comité de siéger en même temps que le Sénat

Permission ayant été accordée de passer à la motion no 57:

L'honorable Leonard J. Gustafson, conformément à l'avis du 25 février 1998, propose:

Que le comité sénatorial permanent de l'agriculture et des forêts soit autorisé à siéger à 15 h 30, même si le Sénat délibère, et que l'application du paragraphe 94(4) du Règlement soit suspendue à cet égard.

(La motion est adoptée.)


[Plus tôt]

Visiteurs de marque

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, je voudrais vous signaler la présence à la tribune d'un groupe de chefs autochtones de Russie, qui sont au Canada pour participer au projet de création d'institutions pour les autochtones du Nord de la Russie, qui est parrainé par la Conférence circumpolaire inuit du Canada.

Au nom de tous les sénateurs, je vous souhaite la bienvenue au Sénat.


L'honorable Stanley Haidasz, c.p.

Hommages à l'occasion de son départ à la retraite

L'honorable B. Alasdair Graham (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, le sénateur Stanley Haidasz est le fils d'immigrants polonais qui a appris nos deux langues officielles à l'école et qui en est ensuite arrivé à comprendre le slovaque et l'ukrainien. Stanley n'a jamais oublié le propriétaire d'une petite boutique qui lui avait refusé un emploi parce qu'il n'aimait pas la prononciation de son nom, ni l'organisateur électoral qui avait essayé de lui faire changer de nom en prévision de la campagne électorale de 1957 où il a été élu pour la première fois à la Chambre des communes.

On dit qu'au royaume des aveugles, les borgnes sont rois. Le sénateur Haidasz s'est arrangé pour que le Canada ne soit pas le domaine des borgnes. À ses côtés se tenait sa ravissante épouse polonaise, Natalie, avec qui Stanley est tombé en amour la première fois qu'il l'a vue et l'a entendue chanter la magnifique mélodie polonaise intitulée When Irish Eyes are Smiling. Natalie est à la tribune aujourd'hui avec leur famille élargie. Ensemble, ils ont consacré de longues heures à un pays où l'ouverture d'esprit et la bienveillance étaient aussi naturels que l'air que l'on respire.

En tant que médecin et praticien au service des travailleurs, dont la plupart provenaient de minorités ethniques, il connaissait les effets de la discrimination et de la pauvreté et savait qu'il fallait mettre sur pied un système de soins médicaux de qualité et équitable pour tous les Canadiens.

Devons-nous juger un pays selon la majorité ou la minorité? «Par la minorité, sûrement», a dit Ralph Waldo Emerson. En sa qualité de parlementaire, Stanley représentait un minuscule microcosme de la planète elle-même. Avec une ferveur évangélique, il a commencé à défendre la cause des minorités culturelles du Canada au Parlement. S'adressant aux collectivités composées de minorités d'un bout à l'autre du pays, il a fait l'éloge de leur détermination à maintenir leur culture et leur identité. Il a fait l'éloge de leur loyauté et de leur dévouement envers leur nouveau pays, des vertus du partage et du don de soi, de leur engagement envers les valeurs familiales, le travail et l'éducation pour les jeunes et, surtout, de leur défense du droit de grandir égal. Il a souligné le fait que les minorités, à bien des égards, détiennent souvent la clé d'une société meilleure, d'une collectivité meilleure, d'un pays meilleur. Ce n'est que par ceux qui ne craignent pas d'être différents, a-t-on dit un jour, que viennent les progrès de l'humanité.

Ayant été le premier à occuper le poste de ministre d'État au Multiculturalisme, en 1972, le sénateur Haidasz s'est battu pour ce droit - pour le droit d'être différent. Il a réclamé du financement pour les programmes culturels qui consacraient ce droit. Le droit à la différence a ensuite agi comme catalyseur de progrès et de changement au sein de la vie et de la société canadiennes. Il a enrichi tous les Canadiens, renforçant par le fait même l'unité canadienne. Le sénateur avait compris que l'unité nationale tenait en bonne partie aux valeurs que partagent les Canadiens d'un océan à l'autre, et qu'il fallait donc les rendre plus fortes et plus présentes.

C'est particulièrement vrai pour les Canadiens polonais, arrivés, pour la plupart, avec l'une des grandes vagues d'immigration polonaise que nous avons connues tout au long de notre siècle. La Pologne est un pays qui a cruellement souffert de nombreuses occupations et divisions au cours des siècles, les plus cruelles étant peut-être l'occupation nazie de la Seconde Guerre mondiale et l'invasion soviétique dévastatrice dont elle a été victime durant les derniers mois de la guerre.

Le jeune Karol Josez Wojityla est peut-être l'un des leaders mondiaux les plus connus à avoir combattu dans les rangs de la résistance, mais la plupart des immigrants qui sont arrivés au Canada à la fin de la guerre avaient une expérience semblable à celle de Sa Sainteté le pape Jean-Paul II. Ils avaient connu ou vu de près la souffrance, la peur et la faim, la détresse de familles divisées, la torture et la persécution. Beaucoup d'entre eux avaient tout perdu. Ils sont venus au Canada avec l'espoir et le désir de s'engager. Particulièrement doués pour la musique et la littérature, les Polonais nous enrichissaient aussi de leur riche culture immémoriale. Tous voulaient avoir une vie meilleure et recommencer à neuf. Ils savaient que la liberté n'est pas un cadeau du ciel, mais une récompense gagnée au prix d'un dur combat.

Étant donné les valeurs qui tiennent à coeur aux Canadiens polonais, des valeurs que toutes les minorités de notre pays chérissent également - des valeurs comme la paix et la coopération, la tolérance et le respect des droits de la personne, des valeurs tout aussi présentes dans l'histoire de notre nation - chaque nouvelle vague d'immigration polonaise renforçait les valeurs que nous partagions. C'est ainsi que notre pays est devenu beaucoup plus que la somme de ses parties.

Aux heures sombres de la domination communiste dans sa patrie d'origine, Stanley a su entretenir l'espoir. Depuis ses premières années à titre de secrétaire parlementaire de Paul Martin père, il a toujours contribué à maintenir le contact entre le Canada et la Pologne, que ce soit en sa qualité de président du Polish Millennium Fund, par sa collaboration à des échanges médicaux entre le Canada et la Pologne ou par sa lutte pour obtenir le droit, pour les sociétés aériennes polonaises, d'offrir des vols nolisés vers le Canada.

Les honorables sénateurs se souviendront aussi des efforts du sénateur Haidasz, à la fin des années 80, pour obtenir davantage d'aide du Canada pour le gouvernement du syndicat indépendant Solidarité.

Aujourd'hui, la Pologne libre se dégage d'un passé douloureux. L'une des enfants de cette nouvelle démocratie, Aleksandra Brylant, est venue au Canada il y a plusieurs années, à l'âge de deux ans, pour une intervention chirurgicale qui lui a sauvé la vie. Née avec trois trous dans le coeur, elle est également atteinte du syndrome de Down. Bien que le Fonds Herbie d'assistance médicale aux enfants désavantagés ait pris en charge la majorité des coûts médicaux, le sénateur Haidasz a contribué à faire venir la petite Aleksandra au Canada pour lui donner un nouveau départ dans la vie. Et elle n'est pas la seule qu'il a ainsi aidée.

Stanley, nous partageons tous l'immense fierté que vous avez ressentie, et à juste titre, il y a une semaine aujourd'hui, lorsque vous avez reçu, à Varsovie, l'Ordre du mérite polonais.

Stanley, pendant les moments les plus sombres, vous n'avez pas baissé les bras. La petite Aleksandra et tous ceux que vous avez aidés vont entamer le nouveau millénaire dans un pays tressaillant d'espoir et, grâce à vous, le Canada est moins que tout autre pays au monde le royaume des aveugles. De par vos efforts, le roi borgne est banni pour toujours. Le Canada où la petite Aleksandra pourra revenir un jour sera un endroit où l'ouverture d'esprit et la générosité du coeur seront aussi naturelles que l'air que nous respirons.

Sénateur Haidasz, vous êtes un homme passionné, un homme de principes, un homme de convictions. Votre contribution à cette Chambre est énorme. Vous allez nous manquer. Tous les honorables sénateurs se joignent à moi pour vous offrir à vous et à Natalie tous nos voeux de santé et de bonheur à l'occasion de votre retraite.

Dovidzenia. Goodbye. Au revoir. Dovidenia. Dosvidania.

(1540)

L'honorable Consiglio Di Nino: Honorables sénateurs, c'est avec plaisir que je prends la parole pour rendre hommage à l'honorable sénateur Stanley Haidasz.

Le sénateur Haidasz a servi avec compétence le Canada, ses électeurs et sa communauté, pendant plus de quatre décennies, tant en sa qualité de parlementaire que de médecin. Pendant toutes ces années, il est demeuré fidèle à ses électeurs et à ses convictions.

Les habitants du quartier Parkdale de Toronto ont élu le sénateur Haidasz pas moins de six fois. C'est pendant ses deux premiers mandats en l'autre endroit que j'ai passé mes années de formation à Parkdale avec ma famille. C'était un quartier peuplé en grande majorité d'immigrants récemment arrivés d'Europe septentrionale, mais où se retrouvait le rare méridional - «rare» est le mot clé - comme moi. Mes amis d'enfance étaient principalement d'origine polonaise, ukrainienne et balte.

Pendant ces années particulièrement difficiles, le sénateur Haidasz à eu un rôle de modèle qui nous a donné confiance en nous-mêmes et nous a incités à tenter de réaliser nos objectifs. En tant que premier ministre responsable du Multiculturalisme, il a préparé et fait appliquer des positions qui reflétaient mieux le Canada de l'heure - ce n'était pas facile à une époque où les Canadiens débattaient encore des mérites du biculturalisme.

Honorables sénateurs, j'ai été à la fois témoin et victime de ces premiers jours, lorsque beaucoup d'entre nous étaient vus par trop de nos voisins comme une race étrange et inférieure. Ce sont des gens comme le sénateur Haidasz qui nous ont donné une lueur d'espoir, un espoir qu'il faut continuer d'entretenir.

Sénateur Haidasz, je vous présente mes félicitations et mes remerciements, et je vous souhaite de nombreuses bonnes années, entouré de votre famille et de vos amis.

L'honorable Sharon Carstairs (leader adjoint du gouvernement): Honorables sénateurs, en écoutant les hommages d'aujourd'hui, je me disais que nous devrions peut-être les faire à la moitié de la carrière d'un sénateur, pour que nous connaissions mieux la capacité des gens avec qui nous servons ici.

En tant que personne intéressée par le domaine du multiculturalisme, je connaissais la contribution du sénateur Haidasz à cette importante entreprise de notre pays. J'ai été témoin de ses efforts, il a des années, lorsque le sénateur Haidasz est venu à Winnipeg pour l'inauguration de la nouvelle église de la communauté catholique polonaise, construite sur le site d'une autre église remontant à 1870.

L'inauguration de la nouvelle église, beaucoup plus élaborée que l'était l'ancienne - et magnifiquement éclairée par une séries de vitraux illustrant les stations du chemin de croix - fut un moment très spécial de l'histoire de la ville de Winnipeg. Le sénateur Haidasz était l'invité d'honneur.

Ce qui m'a surprise, c'est que tout le monde dans la pièce, hommes, femmes et enfants, connaissaient le nom du sénateur. Ils connaissaient sa contribution à la communauté polonaise de tout le Canada. Ils savaient qu'il avait contribué à maintenir l'espoir de beaucoup de Polonais à la période noire du communisme. Leur admiration, leur affection et leur amour véritable pour cet homme fut exprimé éloquemment - oralement par certains, mais seulement par les regards d'admiration pour beaucoup, stupéfaits et reconnaissants que cet homme puisse être parmi eux.

Honorables sénateurs, la communauté polonaise du Canada lui est reconnaissante, en fait, de l'éloquence avec laquelle il a représenté sa cause.

Je vais conclure mes hommages sur une note humoristique. L'autre soir, à une fête en l'honneur du sénateur Haidasz, il m'a dévoilé une partie de sa vie que j'ignorais. Il semble que dans sa jeunesse, il ait été novice pendant un an. Cela a conduit d'autres membres du caucus libéral, notamment le sénateur Losier-Cool, à formuler des observations intéressantes. Elle a annoncé qu'elle avait aussi été novice pendant un an. Comme vous le savez, au service de l'église, on doit respecter trois voeux, à savoir les voeux d'obéissance, de pauvreté et de chasteté. J'ai été quelque peu surprise d'entendre le sénateur Losier-Cool dire qu'elle n'avait eu aucun mal avec les voeux d'obéissance et de pauvreté, mais que le voeu de chasteté lui avait posé un réel problème. Elle voulait savoir ce que le sénateur Haidasz avait trouvé le plus difficile durant son noviciat. Le sénateur Haidasz a souri et lui a répondu que tous les trois voeux lui avaient posé des problèmes.

L'honorable Wilbert J. Keon: Honorables sénateurs, je vais moi aussi rendre hommage à notre honorable collègue, Stanley Haidasz. Son départ du Sénat va marquer la fin d'une carrière riche et remarquable en tant que parlementaire et, plus particulièrement, sur le plan humanitaire.

Lorsque notre honorable collègue a été élu pour la première fois par les électeurs de Trinity, et plus tard, Parkdale, à Toronto, pour les représenter à la Chambre des communes, en 1957, il a utilisé son pouvoir d'élu et il a déployé des efforts incessants pour les plus vulnérables au Canada: les immigrants et les réfugiés nouvellement arrivés, les orphelins de guerre, les prisonniers revenant des camps de travail et des camps de concentration nazis, les personnes déplacées, les personnes âgées et les gens privés de leurs droits de représentation. En fait, son engagement ferme à l'égard des défavorisés, ainsi que ses efforts continus pour renforcer les relations entre les Polonais et les Canadiens, devaient être motivés par les mêmes raisons qui l'ont conduit pendant longtemps à être un médecin de famille respecté.

Alors qu'il étudiait en philosophie à l'Université d'Ottawa, il a eu tout à coup la vocation pour la médecine. C'est alors qu'il a décidé de poursuivre des études médicales à l'Université de Toronto. Après avoir été un jeune interne de 28 ans à l'hôpital St. Joseph, il a passé rapidement à la formation chirurgicale au renommé Shouldice Hospital. Il a ensuite obtenu son diplôme de cardiologie au Cool County School of Medicine, de Chicago, et celui de gériatrie à l'Université de la Saskatchewan. En fait, la dévotion et la contribution de notre honorable ami à la médecine est un sujet de grande fierté pour nous tous, dont votre serviteur, dans la profession médicale.

Le docteur Haidasz a eu son propre cabinet à Toronto au cours des 40 dernières années et jusqu'en mai dernier, il offrait ses services de médecin la fin de semaine et il faisait des consultations à domicile dans le cas de ses plus vieux patients.

Inutile de dire que les entreprises du sénateur Haidasz pour ce qui est de consolider sa carrière politique et médicale dans l'intérêt des Canadiens, des Européens de l'Est et de toute l'humanité, sont innombrables et remarquables. En tant que parlementaire, à la Chambre des communes et, depuis 1978, au Sénat du Canada, il a défendu avec passion les droits oubliés. Il a joué un rôle de premier plan dans la lutte pour obtenir que les produits pharmaceutiques soient vendus à un prix abordable et il a été un pionnier pour ce qui est de faciliter l'accès à des produits pharmaceutiques génériques pour des patients plus défavorisés en Pologne et dans d'autres pays.

(1550)

En 1978, le docteur Haidasz a représenté notre pays en tant que sénateur à la première réunion internationale sur les soins de santé primaires tenue à Alma-Ata, dans l'ancienne Union soviétique, et la même année, il a établi un programme d'échange de médecins entre le Canada et la Pologne. En 1984, en tant que cofondateur du Fonds pour la scoliose, à l'hôpital pour enfants de Toronto, il a inauguré des visites humanitaires à des centres polonais, pour traiter la scoliose chez les enfants avec l'aide des collèges de chirurgie. Il a toujours été là pour offrir son appui.

Honorables sénateurs, notre collègue a prouvé qu'il était un ardent défenseur du droit fondamental aux soins médicaux. En déposant de nombreux projets de loi, il a cherché à protéger la maternité et le caractère sacré de la vie. À titre de délégué à la première conférence internationale de l'ONU sur la population à Bucarest en 1974, il a appuyé le droit fondamental à la vie et souligné la nécessité des soins de santé primaires et du développement ainsi que l'urgence de mettre fin à l'exploitation des femmes par la désinformation, la mutilation, la stérilisation forcée et l'avortement.

Pendant quarante-cinq années en médecine et en politique, l'honorable sénateur a ardemment défendu la médecine préventive. Il a livré au cours des quarante dernières années une lutte incessante au tabac. Son projet de loi d'initiative parlementaire, le projet de loi S-5, a mené les politiques gouvernementales à combattre la dépendance à la nicotine à la source et a constitué une étape importante dans la restriction des éléments nocifs des produits du tabac. En déposant le projet de loi S-71 réglementant les produits du tabac, le sénateur Haidasz a souligné le rôle du gouvernement dans le contrôle direct du contenu en nicotine, en agents cancérigènes et en autres éléments toxiques. De plus, il a fortement insisté sur les incitatifs fiscaux pour encourager les fumeurs à suivre des thérapies pour les aider à abandonner la cigarette.

Aujourd'hui, avec le projet de loi S-8 déposé devant le comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie, le combat du sénateur Haidasz contre la consommation des produits du tabac est plus fort que jamais. Avec cette initiative, bon nombre d'entre nous espèrent comme lui voir la réduction du recours aux addititifs dangereux que contiennent les produits, ainsi qu'un affichage clair des contenus en nicotine et en goudron. Comme il a été souligné précédemment, la lutte contre l'usage du tabac occupe les médecins depuis très longtemps. Le docteur Haidasz a ouvert un chemin qui mènera loin. C'est un exemple à suivre.

Honorables sénateurs, par ces paroles, je voudrais honorer le sénateur Haidasz dont les innombrables et infatigables contributions à la Chambre, aux communautés polonaise et canadienne, à la profession médicale et à la lutte contre le tabac, entre autres, constituent des marques permanentes de la sagesse et de l'expertise que nous avons eu la chance de constater. Sa présence dans cette chambre nous manquera certainement beaucoup et nous lui exprimons nos meilleurs voeux.

L'honorable Richard J. Stanbury: Honorables sénateurs, je voudrais moi aussi rendre brièvement hommage à un ami de longue date, le sénateur Haidasz. Je me garderai de répéter ce que d'autres ont déjà dit, car il suffit d'avoir lu l'une de ses biographies, qui sont tellement impressionnantes, pour voir à quel point le sénateur Haidasz a eu une carrière remarquable.

Le sénateur Haidasz est un intellectuel, un physicien estimé, un politicien respecté, un leader, un diplomate de réputation internationale, un remarquable sénateur et un gentleman qui jouit de l'estime de tous.

Ma relation avec le sénateur Haidasz remonte aux élections de 1957, alors qu'il avait résisté à la première élection de Diefenbaker en se faisant élire dans la circonscription de Trinity. Malheureusement, personne dans la région de Toronto n'avait survécu au second balayage Diefenbaker.

Le sénateur Grafstein: Attendez. Ce n'est pas tout.

Le sénateur Stanbury: Le sénateur Haidasz a dû attendre jusqu'en 1962 pour pouvoir se porter de nouveau candidat aux élections. J'étais alors responsable de la région de Toronto et le docteur Haidasz était l'un des meneurs du balayage Pearson, qui avait donné aux libéraux 14 des 17 circonscriptions de la région de Toronto. C'est à l'occasion de ces élections que Toronto a troqué ses couleurs conservatrices contre les couleurs libérales, et nous ne l'avons jamais regretté.

Le sénateur Lynch-Staunton: Je ne vous entends pas. Je ne comprends pas un mot.

Le sénateur Stanbury: Je me garderai bien d'énumérer la longue liste des postes, publics et privés, que le sénateur a occupés, ni les nombreux honneurs qu'il a reçus. D'autres en ont déjà parlé abondamment. Je dirai seulement que toutes les fois où j'ai eu besoin, en tant qu'élu libéral, de l'aide de députés fédéraux, à Toronto et dans la région, au niveau provincial ou au niveau fédéral, j'ai toujours pu compter sur l'aide enthousiaste de Stan.

Lorsque j'oeuvrais au sein du Conseil de commerce du Canada et du Conseil commercial Canada-Europe de l'Est, afin d'accroître les exportations canadiennes, le sénateur Haidasz, qui connaît très bien cette région du monde, s'est révélé d'une très grande utilité.

Je tiens également à parler de la famille de Stan et de l'importance qu'elle a pour lui. Natalie, son épouse depuis 48 ans, a toujours été une présence charmante dans la carrière publique de Stan, mais je sais qu'elle occupe une place encore beaucoup plus grande dans leur vie privée. Je sais également tout le dévouement de Stan pour les membres de sa famille.

Mon épouse, Marg, m'a demandé de saluer Stan et Natalie en son nom, ce que je fais avec plaisir. Nos meilleurs voeux au sénateur Haidasz et à toute sa famille.

L'honorable Anne C. Cools: Honorables sénateurs, je désire moi aussi rendre hommage au sénateur Haidasz à l'occasion de son départ. J'ai été profondément touchée par le discours du docteur Keon. Lorsqu'il a parlé du docteur Haidasz, cela m'a rappelé que l'autre docteur, le sénateur Bonnell, a récemment quitté cette Chambre. Après le départ du sénateur Haidasz, il ne restera plus guère qu'un seul sénateur médecin au Sénat, Wilbert Keon. Aussi, j'invite le premier ministre à nommer de nouveaux médecins pour remplacer ceux qui sont partis car le Sénat tire profit de l'expérience toute particulière des représentants de cette profession.

Les réalisations et contributions du sénateur Haidasz sont nombreuses. Il a beaucoup fait pour sa famille, pour sa race, pour sa communauté, pour sa province et pour son pays, le Canada. Il est un homme bon et aimable et d'un noble caractère.

Le dévouement du sénateur Haidasz envers son Église, l'Église catholique romaine, est bien connu. Sa défense de l'enfant à naître et du caractère sacré de le vie est remarquable et tout aussi bien connue. Nous devons tous admirer la profonde conviction du sénateur Haidasz. Il a aussi été le premier ministre du Multiculturalisme au Canada.

Honorables sénateurs, je suis honorée d'avoir connu le sénateur Haidasz et d'avoir travaillé à ses côtés. On peut dire que le sénateur Haidasz a fait beaucoup pour bien des gens. En tant que médecin guérisseur, ministre politicien, sénateur, chevalier de Malte, le sénateur Haidasz a vraiment consacré sa vie au service de la population. On peut dire qu'il a servi Dieu, la Reine et le pays.

Je lui souhaite, ainsi qu'à sa famille, aux êtres qui lui sont chers, et particulièrement à sa fille, que je connais bien, bonne chance.

L'honorable A. Raynell Andreychuk: Honorables sénateurs, je voudrais également souhaiter bonne chance au sénateur Haidasz dans sa retraite et ses futures entreprises. Je n'ai pas eu la chance de siéger à un comité sénatorial à ses côtés. J'ai connu le sénateur Haidasz et participé à ses travaux dans les collectivités d'un peu partout au Canada. Comme je viens d'une des collectivités slaves, je suis bien consciente de la difficulté de concilier l'exhortation des immigrants à participer à la vie quotidienne et aux questions de l'heure au Canada, et l'engagement permanent à promouvoir des réformes dans leur pays d'origine.

(1600)

On dit souvent dans la collectivité slave qu'il faut savoir d'où l'on vient pour savoir où l'on va. Nous avons dit fréquemment qu'il est difficile de connaître nos racines, car on nous a empêchés dans bien des cas de visiter le pays de nos ancêtres ou celui d'où nous sommes venus. Nous nous sommes donc tournés vers des modèles et des membres de la collectivité qui pouvaient exceller et réussir au Canada, et continuer de travailler, par l'entremise du gouvernement du Canada, à apporter les réformes nécessaires dans nos pays d'origine. On parle souvent du sénateur Haidasz comme d'un modèle de ce que le Canada permet à ses citoyens de réaliser, et de la façon dont il offre aux Canadiens la possibilité d'apporter constamment leur contribution aux valeurs et aux enjeux qui sont importants pour nous et pour ceux d'entre nous qui luttent en faveur des idéaux que renferment la Déclaration universelle des droits de l'homme.

Je suis très heureuse que le sénateur Haidasz ait eu la chance de couronner une carrière exceptionnelle et fort enrichissante en tant que professionnel, dirigeant de la collectivité et, maintenant, à titre de sénateur. J'espère qu'il continuera d'apporter une contribution à notre société et d'aider les citoyens de la Pologne à poursuivre leurs efforts dans la voie de la démocratie. J'espère aussi qu'il se rend compte que nous respectons et reconnaissons la contribution qu'il a faite aux différentes communautés à travers le Canada. En tant que modèle de comportement, en tant que porte-parole et en tant que citoyen canadien, il a milité en faveur de la Pologne et des pays slaves auxquels il a servi d'exemple.

Je vous adresse à vous ainsi qu'à votre famille tous mes voeux de réussite dans vos futures entreprises.

L'honorable Philippe Deane Gigantès: Honorables sénateurs, le sénateur Haidasz vient d'une longue tradition de philosophes, d'hommes d'État et de dirigeants. Il y en avait partout, mais on les remarquait surtout dans les pays comme son pays d'origine par lequel passaient toutes les terribles invasions, et dans d'autres pays d'Europe et d'ailleurs où le médecin, sans demander d'argent, pansait les blessures, aidait les gens, mettait les enfants au monde, et essayait de comprendre pourquoi le sort était alors si malveillant à l'époque.

Il fait partie de ces gens dévoués à autrui, comme le père du sénateur Johnson et comme le sénateur Keon.

Il est aussi une autre chose dont je voudrais le remercier. Parce qu'il est ce qu'il est aujourd'hui et ce qu'il a été par le passé, les Canadiens qui étaient là avant nous - immigrants de date plus récente - ont été conditionnés et ont appris à bien considérer les immigrants. Si j'ai été bien accueilli dans ce pays, c'est surtout parce que le sénateur Haidasz et ses semblables ont appris aux gens de ce pays que nous, les immigrants, pouvons aimer le pays et le servir. Merci, monsieur.

L'honorable Jerahmiel S. Grafstein: Honorables sénateurs, je voudrais ajouter quelques paroles à l'hommage que nous rendons aujourd'hui à Stanley Haidasz. Je l'ai rencontré pour la première fois en 1961 dans sa circonscription au coeur de Toronto qui était réellement une enclave d'immigrants venus d'Europe centrale. J'ai organisé, en tant que président de la Fédération canadienne des jeunes libéraux à l'époque, l'association des jeunes libéraux dans sa circonscription. C'est ainsi que j'ai fait sa connaissance et celle des membres de sa famille.

Peu après, l'association libérale du district de Toronto a mis sur pied ce que nous appelions le comité ethnique, qui était en réalité un comité multiculturel, pour se concentrer sur les questions multiculturelles. Je pense que c'est la première fois qu'une organisation microscopique de ce genre était créée au sein d'un parti national. Cette organisation a vraiment pris naissance grâce au travail effectué dans la circonscription du sénateur Haidasz et à l'apport du sénateur Haidasz lui-même. Il est intéressant de voir comment des idées venant de la base, venant d'une association de circonscription, peuvent faire leur chemin jusqu'aux échelons supérieurs et devenir ensuite partie intégrante du tissu d'un pays. C'est de cette expérience lointaine de divers groupes ethniques et multiculturels travaillant ensemble sous la direction du sénateur Haidasz et de ses collègues que sont nées ces idées qui ont été adoptées par le gouvernement fédéral et qui ont fini par être intégrées à la politique nationale.

Le sénateur Haidasz était un pionnier au niveau communautaire et l'un des instigateurs de notre politique multiculturelle. Dans ce sens, lorsque nous parlons du caractère bilingue et multiculturel de notre pays, le sénateur Haidasz a joué un rôle de premier plan dans l'élaboration de cette formule.

Nous partageons aussi un autre intérêt. Nous avons tous deux des racines profondes, mais différentes, en Pologne. Nous avons un héros commun, Jozef Pilsudski, qui a été le premier leader après la Première Guerre mondiale en Europe, et, à cette époque, en Pologne, à croire au fédéralisme européen. Ainsi, de temps en temps, nous parlions de la culture, de l'histoire et des passés différents que nous partagions relativement à la Pologne, et, dans ce sens, il me manquera.

Stanley, vous êtes un grand homme, un homme érudit, un homme aux principes et aux croyances inébranlables, et vous nous manquerez beaucoup.

[Français]

L'honorable Marcel Prud'homme: Honorables sénateurs, avant de parler de mon bon ami que je connais le mieux, le sénateur Haidasz, je n'ai pas voulu participer aux salutations pour le sénateur Doyle pour essayer de raccourcir nos délibérations. Je veux dire au sénateur Doyle que j'ai apprécié le connaître. Hier encore, lorsqu'il m'a répondu, j'ai vu que j'ai beaucoup de difficulté à contrôler ce que vous appelez en anglais «a witty person». Je dois dire que c'est ce matin seulement, en relisant son texte, que j'ai réalisé tout ce qu'il avait dit en réponse à mes questions hier. J'ai constaté qu'il m'avait très bien compris sur la question des sénateurs indépendants.

Je lui souhaite d'agréables moments avec sa famille.

[Traduction]

S'il voulait bien me rendre service avant de partir, il pourrait me transmettre la liste des sénateurs de son parti qui songent à joindre les rangs des indépendants. Je serais des plus heureux de leur faire part des difficultés qui pourraient se dresser sur leur chemin.

Sénateur Haidasz, je vous souhaite la meilleure des retraites. Je sais que vous continuerez à nous éclairer par vos écrits. Au risque de scandaliser certains libéraux, je dois avouer que je préfère de beaucoup The Globe and Mail au Toronto Star. Je ne veux pas déclencher un débat mais, comme mon père, j'ai toujours lu le Globe and Mail et je constate que suis le plus souvent en désaccord avec le Toronto Star.

Cela étant dit, je veux rendre hommage à un homme que je connais mieux. Je ne veux pas en dire davantage à son sujet que le reste d'entre vous, mais il faut savoir qu'au moment où je suis arrivé à la Chambre des communes, en 1964, le sénateur Haidasz était déjà là. Il m'a donné un coup de main. Ce n'était pas facile d'arriver seul. Je ne suis pas arrivé ici à la suite d'élections générales où tout le monde est sur un pied d'égalité. Tout le monde voulait que je remporte cette élection partielle et ils savaient qu'un jeune libéral, moi en l'occurrence, pouvait être élu à l'époque. Tout le monde a été très gentil au cours de ma campagne - pas avant mon investiture, mais une fois que j'ai été investi -, puis je me suis retrouvé seul dès mon arrivée à Ottawa. C'est la vie.

Toutefois, le sénateur Haidasz est venu me voir et m'a dit: «Vous êtes du Québec». J'étais étonné, pour avoir participé à plusieurs débats aux quatre coins du pays, de l'entendre me souhaiter la bienvenue dans un français un peu traînant, mais superbe, tout à fait charmant, «Vous êtes le nouveau député. Je vous souhaite la bienvenue», et j'ai toujours vu en lui un parfait gentilhomme.

Je sais qu'il a été candidat en 1957 et qu'il a été élu. Malheureusement, il a dû rentrer chez lui en 1958, à la suite d'un balayage conservateur, mais il n'est pas homme à abandonner la partie, et en cela c'est un exemple pour les gens. Il s'est battu et il est revenu en 1962, puis en 1963 et en 1965. Un de ces jours, vous devrez écrire à ce sujet.

(1610)

On était censé avoir des élections en 1978. Bien des gens ont été nommés et on a tenu des élections partielles parce qu'il n'y a pas eu d'élections générales, et la circonscription du sénateur Haidasz a été perdue. Cependant, immédiatement après les élections générales de 1980, malgré la victoire des conservateurs, les libéraux ont reconquis cette circonscription parce que le sénateur Haidasz n'aurait pas toléré que ce siège tombe aux mains d'un étranger. Par «étranger», j'entends quiconque autre qu'un libéral.

J'ai beaucoup appris à ses côtés. J'ai appris que, si on est une personne profondément religieuse, il ne faut pas avoir peur de le montrer. Si on croit en Dieu, si on est attaché à une foi, quelle qu'elle soit, il faut être un messager au milieu du peuple. C'est ce que le sénateur Haidasz a fait, à sa manière. Il a toujours été une source de lumière.

[Français]

Cette lumière dans les ténèbres affirme sans hésitation son attachement profond à sa religion. Nous savons que c'est un catholique fervent, reconnu, décoré, qui n'a jamais fait campagne à travers tout le pays défendant telle ou telle Église, mais qui affirmait, à sa manière, son appartenance à l'Église catholique romaine. Je l'en remercie. Il est un exemple pour ceux qui souvent ont des difficultés à affirmer leur foi.

[Traduction]

Je tiens à vous dire, docteur Haidasz, que je crois profondément dans votre projet de loi qui a été étudié au comité ce matin. Vous connaissez mon père. Comme médecin, il a mis au monde 9 000 bébés. Cela n'a rien à voir avec le débat sur l'avortement. Nous devons protéger les gens. Ils ne devraient pas être forcés de commettre des actes qu'ils ne commettraient pas autrement à moins qu'on ne le leur demande.

Vous pouvez aller vous reposer, mais vous serez toujours le bienvenu parmi nous. Toutefois, d'autres sénateurs vont poursuivre votre travail. Je vous souhaite tout ce qu'il y a de mieux. Je vous remercie de m'avoir si bien reçu à la Chambre des communes, le 18 février 1964. Vous m'avez fait sentir que j'étais le bienvenu après que M. Pearson m'eut présenté à la Chambre. Tout le monde se demandait qui j'étais. S'il vous plaît, revenez nous voir souvent. Mon bureau est le vôtre n'importe quand.

L'honorable Stanley Haidasz: Honorables sénateurs, je suis extrêmement touché, cet après-midi, par vos hommages, vos louanges, vos paroles d'encouragement et vos souhaits. Je vous en suis très reconnaissant.

Au moment de quitter cette magnifique Chambre haute et cet immeuble où j'ai passé près de 40 ans, soit plus de la moitié de ma vie, j'éprouve beaucoup de gratitude à l'égard non seulement de la Providence, mais aussi de bien des gens, des gens comme mes professeurs à l'Université d'Ottawa et à d'autres écoles qui m'ont donné le goût de la politique, des gens qui m'ont aidé une fois que j'ai été rendu ici, des gens comme vous, sénateurs et collègues que je remercie infiniment pour votre appui et votre bon exemple.

Le sénateur Carstairs a mentionné que j'avais passé un an au noviciat. À cette époque aussi bien qu'à l'époque où j'étais au Scolasticat St-Joseph, dans l'est d'Ottawa, nous, de la congrégation des missionnaires oblats, vivions en communauté et notre premier commandement était d'aimer notre prochain. Nous étions 300 à 400 élèves et on nous encourageait à nous agenouiller et à confesser nos offenses ou nos péchés contre notre prochain.

Je ne me mettrai certes pas à genoux, mais je dois admettre j'en ai probablement offensé et irrité plus d'un dans cette enceinte. Pour toutes ces fautes, je vous demande pardon.

Je suis également reconnaissant à des gens comme le premier ministre Trudeau, qui m'a nommé à la Chambre haute. Comme bien des sénateurs l'ont dit, quand je suis arrivé ici en tant que membre des libéraux de Saint-Laurent en 1957, j'étais un néophyte et je ne connaissais guère non pas Ottawa, mais cette institution. Je n'avais visité le Parlement qu'une fois alors que j'étais étudiant à l'Université d'Ottawa, un soir, en compagnie de mon confrère de classe Jacques Rinfret, dont le père était juge en chef de la Cour suprême du Canada, Thibaudeau Rinfret. Tout était sombre parce qu'il n'y avait aucune activité au Sénat. Toutefois, il y avait une séance à l'autre endroit. Après le débat à l'autre endroit, mon ami m'a fait rencontrer le premier sénateur que j'aie vu de ma vie, Thomas Vien, de Montréal, qui a été Président du Sénat de 1943 à 1945. Ce fut ma première et seule visite dans cette enceinte.

Je n'ai jamais pensé faire de la politique quand j'étais étudiant à l'université ou au séminaire. Je rêvais à autre chose et à d'autres fonctions. Toutefois, je ne regrette pas d'avoir bifurqué vers la politique. Ce fut une expérience enrichissante pour moi, car j'ai pu ainsi mieux connaître mon pays, d'un océan à l'autre. J'ai visité plusieurs fois Terre-Neuve et je suis même monté sur Signal Hill, par exemple. Tous les Canadiens devraient avoir l'honneur de visiter Signal Hill et d'observer les vagues de l'Atlantique se briser sur la falaise. Au cours d'un voyage à Terre-Neuve pendant lequel j'étais le principal orateur à l'occasion du dévoilement d'une statue du premier ministre méthodiste de la province, Joe Smallwood est venu à la fin de la cérémonie et a parlé pendant une heure, au pied levé, des premiers missionnaires ainsi que des coutumes et des luttes religieuses à Terre-Neuve. Ce fut très instructif.

Je suis reconnaissant à ceux qui m'ont amené en politique parce que, je le répète, j'ai appris à connaître mon pays et sa population et comment il est dirigé. J'ai voulu faire quelque chose. Je suis en fait entré en politique, ou plutôt, on m'a convaincu de le faire, parce que l'homme qui était alors le député de Trinity, M. Don Carrick, a été élu seulement lors d'une élection partielle. C.D. Howe lui avait promis de le nommer ministre de la Justice.

Don Carrick s'était porté candidat lors d'une élection partielle parce que le dernier député de Trinity, Lionel Conacher, le plus grand athlète canadien, avait tenté de transformer un triple en coup de circuit, lors d'une partie de balle molle avec des représentants de la presse, sur la pelouse à l'avant. En contournant le troisième coussin, il s'est effondré et a succombé à un infarctus - il ne faut donc jamais essayer de transformer un triple en coup de circuit.

(1620)

Ce fut pour moi un grand honneur de représenter la circonscription de Trinity, au moins pendant une législature. Je ne suis pas revenu avant 1962. Malheureusement, cette année-là, j'ai remporté l'élection contre un de mes meilleurs amis, Arthur Maloney, grand criminaliste et ami du sénateur Atkins. Il était aussi un de mes bons amis, et j'ai été très embarrassé lorsque j'ai remporté l'élection contre lui. J'étais embarrassé parce qu'il était un de mes confrères de classe à St. Michael's. J'étais aussi un ami de sa future femme. Quoi qu'il en soit, ce sont des choses qui arrivent.

Si je vous fais part de ces souvenirs, c'est simplement pour vous expliquer à quel point j'ai aimé la vie politique.

Je répète que ce fut pour moi un grand privilège d'être au service du Parlement. Je suis reconnaissant à tous ceux qui m'ont aidé au moment de mon arrivée ici et avant. Je vois à notre tribune une de mes anciennes secrétaires, Kay O'Meara, qui m'a épaulé pendant près de 17 ans. Je n'ai eu que trois secrétaires. Elle était la deuxième. Elle est ici aujourd'hui, avec ma femme et ma famille, et je les remercie tous de leur appui.

En tant que médecin, j'ai essayé d'être utile dans ce domaine et de présenter des idées nouvelles. En réalité, je suis venu en politique pour mettre en place l'assurance-maladie. J'exerçais des pressions sur ma ministre, Judy LaMarsh. J'étais son secrétaire parlementaire.

Il y a ensuite eu Allan J. MacEachen, le père de l'assurance-maladie. Je suis très fier que mon parti ait proposé la Loi sur l'assurance-hospitalisation et les services diagnostiques, puis l'assurance-maladie, le Régime de pensions du Canada, des améliorations aux allocations familiales et de nombreuses autres mesures législatives. Je pense toutefois que ce qui a été le plus important et le plus utile pour la Canada, c'est la politique éclairée de multiculturalisme que M. Trudeau a annoncée le 8 octobre 1972. Après les élections de 1972, il m'a demandé d'être son ministre principal et de mettre en oeuvre le programme de multiculturalisme, ce que j'ai essayé de faire de mon mieux.

Je voudrais aussi rendre hommage aux autres ministres qui m'ont suivi. Beaucoup étaient de l'autre parti. En fait, c'est le Parti conservateur qui a mis sur pied le ministère du Multiculturalisme. Je crois que la politique du multiculturalisme a été la politique sociale la plus éclairée de tous les gouvernements que le Canada a eus.

Je m'estime privilégié d'avoir pu participer aux travaux préparatoires à ces politiques et je remercie tous ceux qui ont fait partie des comités avec moi, ou du groupe d'étude de notre caucus, ainsi que tous ceux qui ont présenté des mesures législatives visant à faire du Canada un meilleur pays où vivre.

Je pars environ un an et demi avant le troisième millénaire, à une époque où les Canadiens connaissent des crises, des inquiétudes et des peurs. Je parle du spectre d'un autre référendum du soi-disant mouvement souverainiste de la province de Québec, où j'ai vécu pendant quatre ans au milieu des Canadiens français. J'ai appris à bien les connaître et à les aimer. Je suis désolé de voir qu'ils sont malheureux. Nous avons un défi à relever, honorables sénateurs. Nous devons les rendre heureux d'être Canadiens pour qu'ils demeurent au sein de notre magnifique pays dont nous sommes fiers et que nous servons ici.

Honorables sénateurs, je vous passe le flambeau. Continuez ce que nous faisons ici depuis 20 ans. J'espère sincèrement que vous réussirez à garder le Canada fort et uni, à garder les Canadiens heureux et à donner à nos jeunes ce qu'ils désirent, c'est-à-dire un meilleur avenir pour tous au Canada.

Que Dieu bénisse vos efforts en ce sens. Je vous dis à tous adieu. Farewell et dovidzenia. Merci pour votre aide et vos conseils. Je reviendrai, pas pour vous critiquer, mais pour vous aider dans toute la mesure de mes moyens. J'adore Ottawa. J'ai passé tant de temps à Ottawa que je ne pourrai pas en rester éloigné pendant longtemps. Ne soyez donc pas étonnés si vous me revoyez.

Des voix: Bravo!

 


[Français]

DÉCLARATIONS DE SÉNATEURS

Le Code civil du Québec

L'article 35

L'honorable Jacques Hébert: Honorables sénateurs, j'aimerais attirer l'attention de cette Chambre sur une cause judiciaire qui fait la manchette des médias du pays depuis un an et demi. Ce procès met en jeu et en péril deux principes démocratiques fondamentaux: la liberté d'expression et le droit du public à l'information. Un écrivain et historien renommé, Pierre Turgeon, qui a remporté deux fois le prix du Gouverneur général, risque de voir interdit et détruit un de ses livres qui devait paraître au printemps 1996. Cet ouvrage, P.H. le magnifique, l'éminence grise de Duplessis, dresse un portrait vivant et bien documenté du règne de l'Union nationale à travers la biographie d'un des plus grands profiteurs du régime: Paul-Hervé Desrosiers. Je signale en passant que cette information sur M. Desrosiers se trouve dans la biographie de Maurice Duplessis que Conrad Black a publiée voici déjà plus de 20 ans.

Qui demande donc une injonction permanente à la cour supérieure de Montréal contre l'oeuvre de Pierre Turgeon? Il s'agit de Pierre Michaud, qui est le petit-neveu du Paul-Hervé Desrosiers, mort en 1969, et qui se trouve aussi président de Réno-Dépôt, méga-entreprise de quincaillerie qui réalise un chiffre d'affaire d'un demi milliard de dollars par année. Réno-Dépôt trouve ses origines dans Val-Royal, entreprise fondée par P.H. Desrosiers, le grand-oncle de Pierre Michaud et un ami de Maurice Duplessis. Cité dans la Gazette du 13 décembre 1996, le millionnaire Pierre Michaud déclarait, et je cite:

Nous parlons de pots-de-vin politiques. C'est possible qu'il y en ait eu. Je ne critique pas la source qui déclare qu'il y a eu des pots-de-vin - et de toute manière cela faisait partie des coutumes de l'époque. Mais pourquoi en parler dans un livre? Mes employés vont lire cela et dire:

Aye tabarnouche! C'était un maudit bandit. Il a donné des pots-de-vin pour obtenir tous ses contrats.

Ce n'est pas l'image que je veux donner.

Conclut M. Michaud dans son style raffiné.

Sur quels arguments s'appuie donc M. Pierre Michaud pour exiger qu'on relègue au néant un livre qui a demandé plus de trois ans de travail à l'un des auteurs les plus réputés du Canada? Sur un contrat de recherche et un contrat d'édition, dans les détails desquels je n'entrerai pas sauf pour dire qu'il a été établi que jamais, dans ces documents, Pierre Turgeon n'a accordé un droit de regard à Pierre Michaud sur le contenu du livre, que jamais non plus il ne lui a cédé ses droits d'auteur qui lui appartiennent donc de façon inaliénable en fonction de la Loi fédérale sur le droit d'auteur.

Sentant la faiblesse de ses arguments contractuels, Réno-Dépôt a donc décidé d'invoquer l'article 35 du nouveau Code civil québécois, qui stipule qu'il ne peut être porté atteinte à la vie privée d'une personne décédée.

Son Honneur le Président: Je regrette de devoir vous interrompre. Est-ce que cette question est devant la cour maintenant? Si je lis le Règlement, il convient de ne pas soulever en Chambre des questions qui sont en ce moment même le sujet d'un litige en cour. Je cite à cette occasion Beauchesne à l'article 505 qui dit:

Les députés s'entendent pour ne pas évoquer les affaires dont un tribunal ou une cour d'archives sont saisis. Cette convention a pour but de protéger les parties, tant avant que pendant le procès, et les personnes qui pourraient être touchées par le résultat d'une enquête judiciaire. Il s'agit d'une contrainte à laquelle la Chambre s'assujettit elle-même dans l'intérêt de la justice et de l'équité.

Si cette cause est devant la cour maintenant et qu'elle n'est pas encore réglée, je crois, sénateur Hébert, que nous ne pouvons pas entendre votre déclaration.

(1630)

Je vous demanderais, si c'est le cas, de vous désister.

Le sénateur Hébert: C'est bien possible que cette cause soit devant la cour, elle traîne depuis trois ans et demi. Je me demande si je peux donner une opinion non pas sur la cause en question mais sur l'article 35 du Code civil qui s'applique à tout le monde. C'est un article qui, à mon avis, est une atteinte aux droits individuels, peu importe qu'il s'agisse de M. Desrosiers ou de n'importe qui d'autre, cela n'a rien à voir avec la cause.

Son Honneur le Président: Je croirais que l'on peut discuter d'une loi, oui, mais pas en référant spécifiquement à un cas qui se trouve devant la cour.

Le sénateur Hébert: Si vous m'aviez arrêté plus tôt, il n'aurait pas été question de la cause. Maintenant, il en a été question. Ce que je veux dire, c'est que je me suis servi de cette cause pour parler non pas de la cause, mais de l'article 35 qui, à mon avis, est extrêmement dangereux. Je voulais simplement que mes collègues sachent ce qu'est l'article 35 du nouveau Code civil où il n'est pas question de M. Desrosiers.

Son Honneur le Président: Très bien.

Le sénateur Hébert: De tout le défilé des lois absurdes auquel j'ai assisté dans ma vie, l'article 35 remporte la palme du ridicule et de la stupidité. Si l'article 35 est appliqué, il rend impossible d'écrire l'histoire à tout jamais. Je voudrais bien vous raconter la vie de Jacques Cartier. Cela pourrait être intéressant, mais attendez, il faut que je retrace tous ses descendants pour savoir s'ils sont d'accord.

Son Honneur le Président: Je regrette, je dois vous interrompre encore une fois car votre période de trois minutes est terminée. La permission de continuer est-elle accordée, honorables sénateurs?

L'honorable John Lynch-Staunton (chef de l'opposition): Non.

Le sénateur Hébert: On comprend pourquoi vous dites non.

Le sénateur Lynch-Staunton: Je vais soulever un rappel au Règlement à la première occasion.

[Traduction]

L'unité nationale

L'honorable Lucien Bouchard-La politique québécoise

L'honorable Jerahmiel S. Grafstein: Honorables sénateurs, le 8 février 1994, j'ai attiré l'attention du Sénat sur la question du nationalisme, le 22 mars 1994, sur le nationalisme et la démocratie puis, le 8 juin, sur les contradictions du nationalisme québécois. Malheureusement, les contradictions abondent toujours.

La semaine dernière, à Québec, le premier ministre Bouchard a demandé que le gouvernement fédéral, les ministres et les députés fédéraux, même ceux du Québec, n'interviennent pas dans les élections provinciales au Québec ni dans les questions concernant la politique québécoise. Il a fait une sévère mise en garde, décrivant les suites désastreuses qu'aurait l'intervention des politiciens fédéraux dans la politique québécoise. Pourtant, quand M. Bouchard était nommé par le gouvernement fédéral, quand il était député fédéral, ministre d'État fédéral, chef de l'opposition fédérale et chef du Bloc québécois à Ottawa, il intervenait librement et ouvertement dans la politique provinciale québécoise chaque jour - d'abord de son poste à l'étranger, puis d'ici même, à Ottawa.

La semaine dernière, ses collègues fédéraux du Bloc se sont empressés de se présenter devant toutes les assemblées législatives au Canada, et les députés bloquistes fédéraux continuent d'intervenir quotidiennement dans la politique québécoise.

J'en arrive donc - et je le fais avec soin - au renvoi devant la Cour suprême du Canada. M. Bouchard met en garde le gouvernement fédéral qu'il ne peut exercer son droit constitutionnel et démocratique de simplement demander un avis juridique sur les questions concernant le processus constitutionnel et la primauté du droit, aux termes de la Constitution, à l'égard d'une déclaration unilatérale de sécession...

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, l'honorable sénateur Grafstein se reporte à une affaire qui est devant les tribunaux. La décision n'est pas encore rendue.

Le sénateur Grafstein: Je ne me reporte pas à l'affaire comme telle. Je fais simplement allusion à un premier ministre qui se reporte à cette décision. Je ne vais pas traiter de la question à l'étude, mais des commentaires du premier ministre de la province.

Son Honneur le Président: Vous pouvez parler du premier ministre et de tout geste que vous désapprouvez, mais sans faire allusion à une cause dont les tribunaux sont toujours saisis.

Le sénateur Grafstein: Permettez-moi d'ajouter que M. Bouchard se sert de sa conception propre de la démocratie pour appuyer une déclaration unilatérale d'indépendance sans comprendre ni reconnaître que l'essence même de la démocratie, c'est l'égalité de traitement dans un régime de primauté du droit. Dans sa thèse, il n'y a pas de place pour l'égalité de traitement. Il peut utiliser la démocratie à sa guise, mais elle ne peut pas servir les fins des autres.

Il y a environ deux semaines, M. Bouchard a remercié les Américains en faisant paraître une annonce dans un quotidien de Boston. Il les a remerciés de leur aide pendant la crise provoquée par la tempête, mais il n'a pas dit un mot de l'aide apportée personnellement par des milliers de Canadiens, de la contribution d'urgence du gouvernement fédéral, ni de l'aide précieuse des Forces armées canadiennes.

Il y a une quinzaine de jours, M. Bouchard a prétendu que le gouvernement fédéral outrepassait ses pouvoirs en faisant un renvoi à la Cour suprême, et il a refusé de participer à cette cause. La semaine dernière, il a prétendu qu'il y avait eu vice de procédure dans ce renvoi à la Cour suprême qu'il a refusé de reconnaître.

La semaine dernière, M. Bouchard a répété cette fausseté selon laquelle la Loi constitutionnelle de 1982 serait sans effet au Québec. Or, l'automne dernier, comme tous les sénateurs s'en souviendront, il a dépêché des ministres à Ottawa, dont les ministres de l'Éducation et des Affaires intergouvernementales.

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, je suis désolé de devoir interrompre le sénateur, mais ses trois minutes sont terminées. Le sénateur a-t-il la permission de poursuivre?

Des voix: D'accord.

Le sénateur Grafstein: Ils ont été envoyés à Ottawa pour demander au Parlement du Canada, en vertu de cette même Loi constitutionnelle de 1982, de modifier la Constitution afin de pouvoir restructurer le système scolaire québécois.

Il y a deux semaines, M. Bouchard a encore aggravé la confusion chez les jeunes Québécois. Prenant la parole devant les étudiants de la faculté de droit de l'Université de Montréal, il a soutenu que les gestes unilatéraux d'une province pouvaient modifier la configuration d'une fédération sans égard à la règle de droit, consacrée par la Constitution de cette fédération.

Honorables sénateurs, il me semble que si M. Bouchard n'arrive à persuader les Québécois qu'en se contredisant, ces contradictions mêmes vont à l'encontre de la démocratie. Nous ne sommes pas au bout des contradictions. Restez à l'écoute.

Le décès de W.O. Mitchell, c.p.

Hommage

L'honorable Sharon Carstairs (leader adjoint du gouvernement): Honorables sénateurs, je sais qu'il se fait tard, mais je ne pouvais pas laisser passer cette journée sans rendre brièvement hommage à W.O. Mitchell, écrivain de l'Ouest. Il m'a ouvert les yeux et les oreilles aux beautés des Prairies lorsque je l'ai rencontré et qu'il m'a remis un exemplaire de son livre, Who Has Seen the Wind. Après avoir lu ce livre, je suis passée à Jake and the Kid et à tous les autres ouvrages dont cet auteur chéri de l'Ouest a fait cadeau aux Canadiens.

Ce qu'on sait moins, c'est que W.O. Mitchell cultivait les orchidées. J'ai eu l'honneur d'aller chez lui et de visiter sa serre, où j'ai admiré ces fleurs magnifiques qu'il cultivait à Calgary, dans le quartier Rideau Park.

Honorables sénateurs, si vous voulez mieux comprendre l'Ouest du Canada et ses habitants, je vous invite à vous faire le plaisir de lire Who Has Seen the Wind.

[Français]

Le Sénat

Privilèges des sénateurs

L'honorable Eymard G. Corbin: Honorables sénateurs, dans le contexte qui se déroule présentement où les deux collègues qui nous quittent ont été de grands défenseurs, à leur façon, des libertés civiles, des principes démocratiques, alors qu'ils ont fait preuve d'un patriotisme éminent, chacun à leur façon et qu'ils ont servi dans une institution qui a pour rôle, entre autres, la défense du droit de libre expression, je pourrais, par exemple, remémorer un incident qui s'est déroulé ici concernant le sénateur Haidasz. Il s'est levé un jour pour présenter un projet de loi qui ne recevait l'aval de personne. Il ne pouvait trouver aucun parrain pour appuyer son projet de loi.

(1640)

Au nom de la liberté d'expression, principe de base sacré de la démocratie, je me suis levé et j'ai appuyé son projet de loi. Autrement il n'aurait jamais pu nous présenter la question qui le préoccupait. Cela était son droit absolu.

Aujourd'hui, nous vivons à une époque où il y a de moins en moins d'étanchéité entre la Cour suprême, le Parlement et ses Chambres. Certains incidents ont été soulevés, entre autres, par le sénateur Cools. Elle a mentionné des cas où la cour apparemment s'immisce dans un domaine qui relève du Parlement. Mais la cour se défend bien de faire cela. Cependant, nous questionnons ce genre de comportement.

Je crois que la liberté de parole d'un sénateur qui veut porter à notre attention une question devrait être respectée absolument.

Beauchesne, à l'article 505, fait état non pas d'une règle stricte, mais d'une discipline que s'imposent les députés de l'autre endroit. Je crois que cette question est tellement importante que nous devrions demander au comité des privilèges, du Règlement et de la procédure de se pencher sur l'application de l'article 505 de Beauchesne en ce qui concerne notre droit absolu de nous exprimer dans cette enceinte sur n'importe quelle question concernant les intérêts démocratiques des Canadiens.


AFFAIRES COURANTES

Examen de la réglementation

Dépôt du deuxième rapport du comité mixte permanent

L'honorable Céline Hervieux-Payette: Honorables sénateurs, j'ai l'honneur de déposer le deuxième rapport du comité mixte permanent d'examen de la réglementation portant sur les articles 56 et 57 du Règlement de la Gendarmerie Royale du Canada.

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, quand étudierons-nous ce rapport?

(Sur la motion du sénateur Hervieux-Payette, l'étude du rapport est inscrite à l'ordre du jour de la prochaine séance du Sénat.)

[Traduction]

Régie interne, budgets et administration

Présentation du treizième rapport du comité

L'honorable Bill Rompkey, président du comité permanent de la régie interne, des budgets et de l'administration, présente le rapport suivant:

Le jeudi 26 février 1998

Le comité permanent de la régie interne, des budgets et de l'administration, a l'honneur de présenter son

TREIZIÈME RAPPORT

Votre comité a étudié et approuvé le budget supplémentaire présenté par le comité permanent de l'énergie, de l'environnement et des ressources naturelles pour les dépenses projetées dudit comité pour l'exercice se terminant le 31 mars 1998:
Services professionnels et autres   3 570 $
Autres dépenses   18 715 $
TOTAL   22 285 $

Respectueusement soumis,

Le président,
WILLIAM ROMPKEY

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, quand étudierons-nous ce rapport?

(Sur la motion du sénateur Rompkey, l'étude du rapport est inscrite à l'ordre du jour de la prochaine séance.)

L'ajournement

L'honorable Sharon Carstairs (leader adjoint du gouvernement): Honorables sénateurs, avec la permission du Sénat et nonobstant l'alinéa 58(1)h) du Règlement, je propose:

Que, lorsque le Sénat s'ajournera aujourd'hui, il demeure ajourné jusqu'au mardi 17 mars 1998, à 14 heures.

Son Honneur le Président: La permission est-elle accordée, honorables sénateurs?

Des voix: D'accord.

(La motion est adoptée.)

Projet de loi sur la Fondation canadienne de responsabilité sociale de l'industrie du tabac

Première lecture

L'honorable Colin Kenny présente le projet de loi S-13, Loi constituant la Fondation canadienne de responsabilité sociale de l'industrie du tabac et instituant un prélèvement sur cette industrie.

(Le projet de loi est lu une première fois.)

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, quand lirons-nous le projet de loi une deuxième fois?

(Sur la motion du sénateur Kenny, la deuxième lecture du projet de loi est inscrite à l'ordre du jour de la prochaine séance.)


PÉRIODE DES QUESTIONS

Réponses différées à des questions orales

L'honorable Sharon Carstairs (leader adjoint du gouvernement): Honorables sénateurs, j'ai la réponse différée à une question que l'honorable sénateur Ethel Cochrane a posée le 10 février 1998 au sujet de la Loi sur les jeunes contrevenants; j'ai la réponse différée à une question que l'honorable sénateur Leonard J. Gustafson a posée le 12 février 1998 au sujet de la commission du blé; et j'ai la réponse différée à une question que l'honorable sénateur Mira Spivak a posée le 18 février 1998 au sujet de l'annulation de l'étude sur les aînés souffrant d'ostéoporose.

La justice

La Loi sur les jeunes contrevenants-Les modifications demandées par la Saskatchewan-La position du gouvernement

(Réponse à la question posée par l'honorable Ethel Cochrane le 10 février 1998)

À la réunion des ministres fédéraux-provinciaux- territoriaux responsables de la justice, en décembre dernier, l'Alberta, le Manitoba, l'Ontario et l'Île-du-Prince-Édouard ont déposé un certain nombre de projets de modifications à la Loi sur les jeunes contrevenants. Ces provinces ont proposé d'abaisser l'âge minimal de la responsabilité pénale à 12 ans, pour les jeunes contrevenants ancrés dans un certain type d'infraction. Elles ont également proposé l'adoption des mesures suivantes: des dispositions facilitant le renvoi des jeunes récidivistes auteurs d'infractions graves aux tribunaux pour adultes; des dispositions autorisant la publication de l'identité des récidivistes auteurs de crimes violents, une fois que leur culpabilité a été établie; des dispositions accordant un pouvoir discrétionnaire plus grand aux tribunaux au regard de l'admissibilité de preuve par déclaration; et d'autres dispositions restreignant la possibilité de nommer un avocat d'office aux cas où le délinquant ou son tuteur n'ont pas les moyens d'assumer les honoraires d'un avocat.

Dans le communiqué qui a été effectué à l'issue de la conférence des premiers ministres, en 1997, il est affirmé que tous les premiers ministres, sauf celui du Québec, sont d'accord pour que le gouvernement fédéral fasse diligence pour introduire des modifications significatives à la Loi sur les jeunes contrevenants visant à combattre la criminalité juvénile, à protéger les collectivités et à restaurer la confiance de la population dans le système de justice pour les jeunes. Les premiers ministres se sont également entendus sur la nécessité d'une coopération de tous les paliers de gouvernement afin d'améliorer les programmes de prévention et de réhabilitation destinés aux jeunes contrevenants.

En 1995, des représentants des gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux ont créé un groupe de travail sur la justice applicable aux adolescents chargé d'élaborer en commun des propositions de modifications. Il s'est vite dégagé un consensus sur la nécessité de privilégier des mesures de rechange à l'incarcération et des mesures de premières lignes. On s'est également entendu sur des mesures précises propres à améliorer l'administration de la Loi.

Toutes ces recommandations, de même que celles du comité permanent de la justice et des droits de la personne, font actuellement l'objet d'un examen attentif de la part de la ministre de la Justice, qui se prépare à lancer la stratégie sur la justice applicable aux jeunes proposée par le gouvernement. La coopération du gouvernement fédéral et des provinces est essentielle si l'on veut arriver à protéger la société et à réaliser nos engagements communs face aux enfants et aux jeunes.

L'agriculture

La Commission canadienne du blé-Le montant total des impayés-La position du gouvernement

(Réponse à la question posée par l'honorable Leonard J. Gustafson le 12 février 1998)

La CCB a actuellement un solde impayé de quelque 6,6 milliards de dollars dans le cadre du Programme de vente de céréales à crédit (PVCC). Tous les pays sauf l'Irak sont à jour dans leurs remboursements.

Lorsque le grain est vendu dans le cadre du Programme de vente de céréales à crédit, la valeur intégrale de chaque vente est garantie par le gouvernement fédéral et portée au crédit du compte de mise en commun de l'année en question. S'il devait y avoir des pertes, elles seraient assumées par le Trésor fédéral, de sorte que les producteurs ne perdraient rien. Dans les cas où le gouvernement du Canada a convenu de réduire la dette d'un pays pour des raisons de politique nationale, c'est lui qui a absorbé le coût de la radiation, et la CCB a été entièrement remboursée.

Oui. Tous les frais d'intérêt liés aux ventes à crédit s'ajoutent au solde dû par le pays acheteur. Ces montants n'ont pas eu d'incidence négative sur les comptes de mise en commun de la CCB.

La santé

L'annulation de l'étude sur les aînés souffrant d'ostéoporose-La possibilité de rétablir le financement-La position du gouvernement

(Réponse à la question posée par l'honorable Mira Spivak le 18 février 1998)

Le gouvernement fédéral s'est engagé à préserver la santé et le bien-être des aînés du Canada et à promouvoir la recherche sur les questions qui les concernent.

L'ostéoporose est l'un des grands problèmes de santé sur lesquels se penche Santé Canada. Santé Canada est conscient de l'ampleur des coûts que cette maladie dévastatrice entraîne pour les femmes, le système de santé et la société toute entière.

Santé Canada a versé 3,6 millions de dollars, par l'entremise du Programme national de recherche et de développement en matière de santé (PNRDS) et du Programme de recherche sur l'autonomie des aînés (aujourd'hui disparu), pour l'étude pilote et la phase I d'un projet de recherche intitulé: « Étude canadienne multicentrique sur l'ostéoporose » (ECMO). La phase I devait permettre d'évaluer l'efficacité de l'ultrason, par rapport à des techniques plus coûteuses, pour déterminer la densité osseuse, d'estimer la prévalence et l'incidence des principales fractures associées à l'ostéoporose, et d'analyser les facteurs de risque d'ostéoporose associés au profil socio-démographique et au mode de vie. Les partenaires de Santé Canada pour ce projet sont Merck Frosst, Eli Lilly, le Centre de recherches médicales (CRM), les Producteurs laitiers du Canada, Proctor and Gamble Pharmaceuticals, et la Société de l'ostéoporose du Canada. Le financement a débuté en mars 1993 et prendra fin le 31 mars 1998. L'équipe de projet sollicite maintenant des fonds pour la phase II, ce qui porterait à 9 millions de dollars le montant total de financement.

Le CRM continue d'offrir des subventions pour les travaux de recherche clinique comme l'ECMO. Pendant un certain nombre d'années, le PNRDS a accepté lui aussi ce genre de projets. Aujourd'hui, toutefois, le PNRDS ne finance plus la recherche clinique par suite des compressions financières des dernières années et des efforts déployés depuis la phase II de l'Examen des Programmes pour éviter le double emploi entre organismes fédéraux. Le CRM demeure l'organisme gouvernemental canadien auquel il convient d'adresser les demandes de financement de recherches cliniques. Les dernières demandes envoyées par l'équipe de l'ECMO au CRM et aux autres organismes subventionnaires ont été rejetées, mais le CRM a encouragé l'ECMO à présenter une nouvelle demande et a aidé l'équipe de projet améliorer celle-ci.

Pour s'acquitter de son mandat, qui est de préserver et d'améliorer la santé des Canadiens et des Canadiennes, Santé Canada a adopté une approche axée sur la santé de la population. Selon une telle approche, l'action doit porter sur un large éventail de déterminants de la santé (notamment les environnements physique, économique et social). La santé des aînés demeure un secteur d'intervention dans le cadre de cette approche.


ORDRE DU JOUR

Régie interne, budgets et administration

Adoption du douzième rapport du comité

Le Sénat passe à l'étude du douzième rapport du comité permanent de la régie interne, des budgets et de l'administration (budget-comité des affaires sociales, des sciences et de la technologie), qui a été présenté au Sénat le 25 février 1998.

L'honorable Bill Rompkey: Honorables sénateurs, je propose: Que le rapport soit adopté.

Son Honneur le Président: Plaît-il aux honorables sénateurs d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.

(La motion est adoptée, et le rapport est adopté.)

Adoption du neuvième rapport du comité

Le Sénat passe à l'étude du neuvième rapport du comité permanent de la régie interne, des budgets et de l'administration (Plan de dépenses pour 1998-1999), qui a été présenté au Sénat le 12 février 1998.

L'honorable Bill Rompkey propose l'adoption du rapport.

- Honorables sénateurs, le budget proposé par le Sénat pour 1998-1999 est de 41 691 000 $, ce qui représente une augmentation globale de 9,8 p. 100 par rapport au budget de 1997-1998. Toutefois, comme je le dirai dans mes remarques détaillées, l'augmentation du budget des dépenses contrôlé par le Sénat est de 5,9 p. 100. Si on compare cette augmentation à celle du budget proposé dans l'autre endroit, qui est je crois supérieure à 10 p. 100, j'estime que le Sénat continue de faire preuve d'austérité dans une large mesure.

Pour mettre les choses simplement, le comité permanent de la régie interne, des budgets et de l'administration ramène, après l'avoir réduit plusieurs années de suite, le budget du Sénat à un niveau raisonnable pour nous permettre de nous acquitter des fonctions qui sont normalement les nôtres. Si certaines réductions budgétaires étaient le résultat de progrès technologiques et de la rationalisation des opérations, certaines en revanche n'étaient rien d'autre que de fausses économies. Tout ce que nous faisions, c'était de reporter à plus tard les dépenses nécessaires pour le remplacement de certains biens en cours de détérioration.

Par exemple, pendant plusieurs années, nous avons vu les immobilisations se détériorer. Je parle des meubles, du matériel de bureau, des édifices, sans oublier le tapis de l'entrée qui mène au Sénat. On craignait toujours que les questions de santé et de sécurité ne soient pas traitées adéquatement. Notre personnel n'avait pas la souplesse voulue pour s'adapter aux besoins de l'heure ou aux changements du milieu de travail.

Comme je l'ai dit, une partie de la hausse de 9,8 p. 100 est investie dans des dépenses pour lesquelles nous ne pouvons rien. Par exemple, 1 106 000 $, ou 2,7 p. 100 de l'augmentation, est consacré au régime de pensions des employés. Il s'agit-là d'un poste législatif, calculé selon un pourcentage de la totalité des coûts en personnel. Ce pourcentage est fixé par le Conseil du Trésor au début de chaque année. Historiquement, le pourcentage final des avantages sociaux augmente constamment de 10 à 17 p. 100 sur quatre ans. Cette année encore, le Conseil du Trésor a indiqué aux ministères et organismes gouvernementaux que le budget devrait représenter 21 p. 100 des salaires, pour 1998-1999. Au Sénat, cela signifie une hausse de 1 106 000 $.

Le budget comporte aussi une hausse au chapitre de la sécurité et d'autres coûts de fonctionnement dans l'édifice de l'Est, ce pour quoi nous ne pouvons rien non plus. En avril 1996, le Sénat a accepté de prendre à sa charge la responsabilité de la Chambre des communes concernant toutes les mesures de sécurité et de prévention des incendies dans l'édifice de l'Est. Ce changement en est à sa deuxième année, et les provisions en matière de sécurité doivent maintenant être étendues à l'aile rénovée de 1910, qui a été rouverte cette année, et à la nouvelle entrée des marchandises. Ces coûts additionnels augmentent d'au moins 1,2 p. 100 notre budget de 1997-1998.

Honorables sénateurs, du point de vue du Sénat, ce n'est pas un budget parfait. Beaucoup de postes sont toujours sous-financés. Par exemple, les budgets des sénateurs pour la recherche et le fonctionnement de leur bureau sont toujours inférieurs de 22 p. 100 au niveau de financement autorisé. La somme réservée aux comités ne suffit toujours pas à financer les activités sans cesse plus importantes des comités, ce qui est le signe distinctif du Sénat, comme nous le savons. Les fonds supplémentaires qui pourraient être nécessaires pour couvrir les dépenses opérationnelles en 1998-1999 pourraient devoir faire l'objet d'une demande de budget supplémentaire plus tard au cours de l'année.

Pour ce qui est des années à venir, je ne peux me prononcer au nom du comité permanent de la régie interne, des budgets et de l'administration pour l'année qui vient, mais je crois qu'il est raisonnable de présumer qu'on demandera des augmentations supplémentaires pour que nous puissions compter sur une approche graduelle pour ramener le budget du Sénat au niveau approprié.

Quels sont donc les changements importants dans ce budget de 1998-1999? Il y a un certain nombre d'augmentations en comparaison avec le budget de l'an dernier. Ces augmentations comprennent les postes budgétaires qui ont été réduits l'an dernier pour tenir compte des tendances de dépenses pendant une année d'élection comme les dépenses de voyage des sénateurs et des comités. Ces postes ont été partiellement ramenés aux niveaux des années où il n'y a pas d'élection. Comme je l'ai souligné, les besoins en matière de ressources liés à la prise en charge de la sécurité de l'édifice de l'Est par le Sénat et à la réouverture de l'aile de 1910 ont été ajoutés. Les postes budgétaires liés aux réparations et à l'entretien des immobilisations de base du Sénat ont été augmentés.

Comme je l'ai souligné, sur l'avis du Conseil du Trésor, le Sénat, comme tous les ministères, a augmenté la partie de son budget qui a trait à la contribution de l'employeur au Régime de pensions de la fonction publique, au Régime de pensions du Canada, au Régime des rentes du Québec, au Régime des prestations supplémentaires de décès et au compte d'assurance-emploi.

Enfin, des sommes supplémentaires de 500 000 $ ont été mises de côté pour financer la recherche des partis. Chaque sénateur a droit à un budget pour payer son personnel, ses dépenses de bureau et le travail de recherche, mais le montant global sert en général à financer les dépenses liées aux fonctions régulières des sénateurs, ce qui laisse peu pour entreprendre des travaux de recherches spéciaux et d'autres travaux pour le compte du parti.

À la Chambre des communes, les partis politiques reconnus reçoivent un financement spécial. Ces fonds servent à payer le salaire de leur personnel, à négocier des contrats de recherche et à obtenir des services spéciaux, comme des services de relations avec les médias. On fournit également aux agents de recherche des partis toutes les fournitures de bureau nécessaires, comme le matériel et les téléphones.

Le comité permanent de la régie interne, des budgets et de l'administration estime que le temps est venu d'accorder un certain financement aux caucus des partis et peut-être aussi aux sénateurs indépendants. Voilà pourquoi il a été établi qu'une enveloppe devrait être créée à l'intérieur du budget du Sénat pour la recherche des caucus, mais que la valeur de cette enveloppe ne sera déterminée qu'après que les caucus individuels auront pris leurs décisions, ce qu'ils feront au cours des prochaines semaines, en consultation avec les sénateurs indépendants.

Honorables sénateurs, le résumé du budget des dépenses 1998-1999 du Sénat figure en annexe du rapport du comité permanent de la régie interne, des budgets et de l'administration, déposé au Sénat le 10 février. Les sénateurs trouveront également de plus amples renseignements dans le «Résumé du plan de dépenses 1998-1999», également déposé le 10 février.

(1700)

On trouvera des renseignements supplémentaires sur le fonctionnement du Sénat, y compris son budget de 1998-1999, dans le rapport sur les planifications et les priorités, qui devrait être déposé le mois prochain peu après la présentation par le gouvernement de ses prévisions de dépenses pour l'exercice à venir. Ce document va mettre l'accent aujourd'hui sur les priorités, les plans et les résultats attendus de l'administration du Sénat pour ce qui est d'appuyer les sénateurs et notre institution. Il va également nous renseigner sur la rémunération, les indemnités et les budgets offerts aux divers sénateurs. Il s'agit donc, honorables sénateurs, de ce que le comité permanent de la régie interne, des budgets et de l'administration perçoit comme le budget du Sénat pour 1998-1999.

Les Canadiens en ont-ils pour leur argent? Après avoir siégé aux deux Chambres du Parlement, je peux dire, en toute honnêteté, que je crois que c'est le cas. De nombreux Canadiens ne s'attendent pas à entendre que leur Sénat leur coûte beaucoup moins, par habitant, que toute autre assemblée législative au Canada. En effet, le coût par habitant est de 1,50 $, comparativement à 7,13 $ pour la Chambre des communes. Même si le Sénat avait la même taille que l'autre endroit, il en coûterait quand même aux Canadiens 4,50 $ par habitant. On peut comparer ces chiffres au coût par habitant des assemblées législatives provinciales qui vont de 6,97 $ à 17,79 $. La plupart du temps, ce coût est de 9 $ en moyenne.

Même s'il semble être une assemblée législative pas comme les autres, du fait que ses membres ne sont pas élus, le Sénat est quand même représentatif et contribue beaucoup à l'établissement de la politique publique au Canada. De nombreux sénateurs ont développé des domaines de spécialisation en matières sociale, économique et culturelle, comme nous avons déjà pu le constater aujourd'hui, et ils essaient activement de sensibiliser les gens aux questions qui les préoccupent. Les anciens combattants, les droits des enfants, l'éducation, l'alphabétisation et la toxicomanie comptent parmi les nombreux sujets auxquels s'intéressent certains sénateurs, à titre individuel.

Nos comités jouent un rôle important dans un certain nombre de questions comme l'enseignement postsecondaire, la Société de développement du Cap-Breton, l'intégration européenne, la régie des sociétés, les médias, la pauvreté chez les enfants, les transports et les anciens combattants, notamment. Comme nous le savons tous, nos comités font enquête sur des questions sociales clés, formulent des recommandations pour de nouvelles initiatives et aident à bâtir un consensus social autour de solutions possibles. Un professeur d'université, C.E.S. Frank, de l'Université Queen's, a écrit dans son livre de 1989 que les enquêtes des comités du Sénat sont généralement de meilleure qualité que celles des comités de la Chambre des communes. Il n'y a aucun doute dans mon esprit que le Sénat joue un rôle essentiel dans notre régime parlementaire, qu'il fait la promotion de meilleures politiques et qu'il enquête sur un large éventail de questions socio-économiques et culturelles.

Honorables sénateurs, je demande d'appuyer l'adoption de ce rapport. En terminant, je remercie tous mes collègues qui ont siégé et siègent maintenant au comité de la régie interne, et en particulier, le sénateur De Bané, qui dirige notre sous-comité sur la technologie de l'information, et les sénateurs Nolin et Poulin, qui siègent avec moi au comité directeur. Je vous remercie tous profondément.

Avant de conclure, je tiens aussi à rendre hommage à mon collègue qui m'a précédé à la présidence du comité de la régie interne, ce parent du sénateur Doyle, le sénateur Kenny. On reconnaîtra certainement des deux côtés de cette assemblée que le sénateur Kenny a su, pendant sa présidence, assurer des services exceptionnels au Sénat dans son ensemble, et à chacun des sénateurs. Nos installations et l'ambiance dans laquelle nous travaillons sont bien meilleures grâce à son travail exceptionnel, et c'est pourquoi je lui rends hommage.

L'honorable Noël A. Kinsella (chef adjoint suppléant de l'opposition): Honorables sénateurs, je voudrais obtenir des précisions. Le neuvième rapport est un document de deux pages qui se trouve dans les Journaux du Sénat. Il a les allures d'un résumé. Le président du comité vient de donner beaucoup plus de détails dans son exposé. Ma question est la suivante: existe-t-il un rapport détaillé, et a-t-il été remis à tous les sénateurs?

Le sénateur Rompkey: Oui.

Le sénateur Kinsella: Certains d'entre nous n'ont pas reçu leur exemplaire. Quand a-t-il été distribué? Je crois comprendre que c'est le document de deux pages dans les Journaux du Sénat qui a été déposé. La proposition détaillée n'a pas été déposée, et je me demande si nous pouvons en obtenir un exemplaire.

Le sénateur Rompkey: Le sommaire a été déposé, on attend le rapport détaillé qui sera remis à tout le monde.

Le sénateur Kinsella: Le rapport détaillé n'a pas encore été distribué. On l'attend.

Le sénateur Rompkey: C'est exact.

Le sénateur Kinsella: On nous demande d'approuver un rapport, mais nous sommes empêchés d'en examiner les détails. Je ne me souviens pas si cela est déjà arrivé. Peut-être que d'autres sénateurs pourraient participer au débat pour que nous soyons tous absolument sûrs de ce qui se passe.

Le sénateur Rompkey: À ce que je sache, c'est exactement la même procédure que nous avons suivie par le passé.

L'honorable John B. Stewart: Honorables sénateurs, j'ai une question. Le sénateur Rompkey a-t-il bien dit que dans le passé, le Sénat avait adopté la motion d'adoption du rapport avant de recevoir le rapport détaillé?

Le sénateur Rompkey: Je ne peux que répéter ce que j'ai déjà dit, sénateur Stewart. La pratique que nous suivons est exactement la même que celle que nous avons suivie dans le passé.

Le sénateur Kinsella: Je pensais que le sénateur Kenny voulait prendre la parole. Peut-être pourrait-il nous donner des renseignements supplémentaires qui pourraient nous éclairer.

Son Honneur le Président: S'il y a d'autres questions pour le sénateur Rompkey, il faudrait les lui poser maintenant, nous passerons ensuite à un autre discours. Après cela, je ne pourrais plus accepter de questions adressées au sénateur Rompkey.

Le sénateur Kinsella: Je pensais que si un autre sénateur posait une question au dernier intervenant, cela ne m'empêchait pas de poser une question au premier intervenant.

Son Honneur le Président: Pas si le sénateur pose une question; par contre, s'il fait un discours, un autre débat commence. Si le sénateur Kenny veut poser une question, n'importe qui pourra alors poser une question au sénateur Rompkey.

Le sénateur Rompkey: Puis-je donner des éclaircissements? Je vais lire de nouveau la partie pertinente des remarques que je viens de faire.

Le résumé du Budget des dépenses 1998-1999 du Sénat figure en annexe du rapport du comité permanent de la régie interne, des budgets et de l'administration, déposé au Sénat le 10 février. Les sénateurs trouveront également de plus amples renseignements dans le «Résumé du plan de dépenses 1998-1999», également déposé le 10 février. On trouvera des renseignements supplémentaires sur le fonctionnement du Sénat, y compris son budget de 1998-1999, dans le rapport sur les planifications et les priorités qui devrait être déposé le mois prochain peu après la présentation par le gouvernement de ses prévisions de dépenses pour l'exercice à venir.

L'honorable Colin Kenny: Honorables sénateurs, je voudrais poser une question. Si je comprends bien, sénateur Rompkey, et corrigez-moi si je me trompe, c'est que, dans le passé, un résumé assez succinct était déposé au Sénat. Des documents plus détaillés étaient mis à la disposition des membres du comité et des caucus. Le sénateur peut-il nous confirmer que le document qu'il a déposé ici aujourd'hui contient le même niveau de détail que ce que nous avons eu les deux fois précédentes?

Le sénateur Rompkey: Oui, je peux le confirmer.

[Français]

L'honorable Marcel Prud'homme: Honorables sénateurs, j'hésite entre demander l'ajournement du débat ou poser une question.

[Traduction]

Je n'avais pas entendu parler de ce poste pour la recherche pour les caucus. Je ne suis pas membre du comité de la régie interne, des budgets et de l'administration et rien ne m'a été communiqué à ce sujet. J'ai effectivement vu un document et j'ai demandé de quoi il s'agissait. J'ai essayé d'en parler avec le sénateur Rompkey, l'estimé président, lui demandant de penser aux sénateurs indépendants. Toutefois, je n'ai obtenu aucune assurance de sa part.

(1710)

Je ne suis pas sûr qu'un accord sur ce sujet puisse clore la question complètement. C'est bien de proposer des discussions sur le partage de l'argent pour la recherche, mais rien ne garantit que cela conduira à une décision. On s'entendra peut-être pour répartir au pro rata des partis officiels ou au pro rata des sénateurs. Naturellement, on éliminera les postes vacants et les sénateurs indépendants.

Y aura-t-il distribution au pro rata ou fera-t-on un partage moitié-moitié entre les deux caucus? Je ne sais pas. J'aimerais en savoir plus avant de donner mon consentement. Les sénateurs peuvent faire ce qu'ils veulent, mais rien ne m'empêche de protester.

Je n'avais pas entendu parler de cela avant d'entendre une rumeur au sujet d'un poste budgétaire particulier qui pourrait m'intéresser. Il a fallu que je devine quel était le poste en question. Personne ne m'a informé et je ne suis pas allé à la réunion du comité de la régie interne. J'aimerais avoir une réponse.

Le sénateur Rompkey: Honorables sénateurs, un certain montant a été prévu au budget pour la recherche pour les caucus, mais aucune décision n'a encore été prise sur la façon dont cet argent sera dépensé et administré. Aucune décision ne sera prise avant que les caucus en discutent.

Je peux dire à mon collègue, comme j'ai essayé de le faire plus tôt, de façon informelle, que les sénateurs indépendants devront être pris en considération. Je m'engage à le tenir informé des progrès des discussions, de sorte que, le moment venu, ses responsabilités et ses droits de sénateur indépendant seront pris en considération.

Le sénateur Kenny: Honorables sénateurs, j'ai une question à poser au président du comité permanent de la régie interne, des budgets et de l'administration. Je partage les réserves d'autres sénateurs au sujet de cet article du budget. Je veux être sûr que le président soumettra cet article au Sénat afin que nous puissions en discuter.

Je suis satisfait du reste du budget. Seul cet article exige des éclaircissements et un débat. Le président est-il disposé à agréer ma proposition?

Le sénateur Rompkey: Oui, honorables sénateurs. Il mérite manifestement d'être débattu par les deux caucus et par le Sénat. Comme il s'agit d'une somme destinée aux sénateurs, les sénateurs doivent décider au bout du compte comment elle sera dépensée et gérée.

Le sénateur Prud'homme: Honorables sénateurs, je tiens à être très clair. Lorsque je suis arrivé, cet après-midi, on m'a dit que quelque chose dans le budget risquait de m'intéresser. C'est bien, mais cela confirmait ce que j'avais déjà fait. Je suis très heureux d'en avoir été informé d'avance, comme le dit le sénateur. Je n'ai pas l'habitude de répéter ce qu'on me dit en privé mais, puisqu'il le mentionne, je vais le faire. Plus tôt, cet après-midi, on m'a remis cette information.

Je conviens avec le sénateur Kenny que l'affaire devrait être débattue au Sénat. En tant que président, vous pouvez décider de procéder de la façon que vous dites, mais ce n'est peut-être pas le souhait du comité. Les membres du comité décideront peut-être au comité de partager les fonds entre les caucus.

Si vous voulez que le rapport soit adopté aujourd'hui, vous devriez peut-être vous engager à retirer temporairement cet élément de votre budget, afin qu'il puisse être soumis au Sénat dans son ensemble. Le rapport ne devrait pas être adopté simplement parce que, tout le monde étant d'accord, il est inutile d'en discuter. En dernier ressort, je tiens à m'assurer qu'il ne sera pas adopté aujourd'hui. Il y aura une bonne discussion, car je sais que certains sénateurs s'opposent à cette mesure. Des sénateurs des deux partis n'approuvent pas la redistribution de cet argent. Je ne sais pas ce qu'en pensent les autres sénateurs indépendants. Avant d'approuver cela, je voudrais qu'on s'engage à donner amplement le temps au Sénat d'en discuter. Autrement, je demanderai l'ajournement du débat et, si ma motion est appuyée, j'ajournerai le débat et m'étendrai plus longuement sur les autres articles du budget.

[Français]

L'honorable Pierre Claude Nolin: Nous avons discuté à plusieurs reprises du cas des sénateurs indépendants au comité. Nous ne voulions pas imposer la loi de la majorité des deux caucus à trois ou à quatre sénateurs qui n'avaient aucune chance de défendre leur point de vue.

Malheureusement, vous n'étiez pas présent lors de ces discussions. Cela n'a jamais été l'intention du comité de vous empêcher d'avoir accès à ces fonds. Il s'agit de trouver la meilleure façon de le faire. C'est l'engagement que vous avez obtenu du président plus tôt et c'est aussi celui de tout le comité.

Le sénateur Prud'homme: Lorsque vous me dites que je ne suis pas allé au comité, je suis bien heureux de l'entendre puisque je ne suis pas membre du comité. J'ai assisté à plus de réunions de comités comme non-membre que des sénateurs qui sont membres de comités.

[Traduction]

J'ai été présent à plus de comités que certains sénateurs qui sont membres de comités. Cela veut dire que j'y assistais de mon plein gré, parce que cela m'intéresse. On ne saurait me dire simplement que je n'étais pas au comité. Sachez que je ne suis membre d'aucun comité.

J'éprouve encore de l'intérêt parce que j'ai travaillé ferme à la Chambre des communes, en tant que président du comité des services aux députés. Chose sûre, j'ai quelque chose à offrir. Le sénateur Kenny m'a invité à toutes les réunions, m'a fourni toute la documentation et j'ai collaboré avec lui, comme j'espère collaborer avec le sénateur Rompkey. Toutefois, je ne vais pas prétexter que je ne suis pas allé à autant de comités que j'aurais dû parce que j'ai eu une crise cardiaque.

(1720)

Je suis très ami avec le sénateur Nolin et le sénateur Rompkey, mais je connais des gens d'expérience qui semblent perplexes. Si je vois des sénateurs qui sont perplexes, il va sans dire que je le suis, moi aussi.

Je ne veux pas tenir tout un débat sur la place publique si nous sommes tous d'accord; ça va comme ça. Sinon, qu'on s'engage à tenir un débat au Sénat sur la façon de répartir les fonds de recherche.

Je veux un Sénat qui fonctionne, et j'estime que les principaux partis politiques ont droit à des fonds de recherche pour leur caucus parce qu'ils accomplissent le gros du travail. Je ne suis pas contre, en soi. Néanmoins, je veux que vous vous engagiez à faire ce que vous dites avoir l'intention de faire, je veux que cela soit dit publiquement.

Le sénateur Rompkey: Honorables sénateurs, en réponse au sénateur Kenny, j'ai dit que nous soumettrions l'affaire au Sénat avant qu'une seule dépense ne soit acceptée. Il s'agit d'un montant théorique. Aucune somme d'argent n'a été dépensée, aucune décision n'a été prise et personne ne décidera de quoi que ce soit avant que l'affaire ne soit renvoyée au Sénat.

En réponse au sénateur Prud'homme, en ce qui concerne le comité, les deux tiers du comité directeur sont ici. Je pense que nous pouvons vous donner un engagement aussi solide que celui que vous réclamez, à savoir que le comité continuera de prêter une oreille sympathique à votre position de sénateur indépendant, que nous vous tiendrons informé et que nous vous permettrons de participer à la décision finale au sujet de la répartition de ces fonds.

Son Honneur le Président: Si aucun autre sénateur ne désire prendre la parole, vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.

(La motion est adoptée, et le rapport est adopté.)

La fonction gouvernementale autochtone

Adoption du rapport du comité des peuples autochtones demandant l'autorisation de se déplacer et d'engager du personnel

Permission ayant été accordée de revenir aux rapports de comités, article no 4 de l'ordre du jour:

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Watt, appuyée par l'honorable sénateur Chalifoux, tendant à l'adoption du deuxième rapport du comité sénatorial permanent des peuples autochtones (budget - étude relative à la fonction gouvernementale autochtone), présenté au Sénat le 18 février 1998.- (L'honorable sénateur Kinsella).

L'honorable Eric Arthur Berntson: Honorables sénateurs, ce débat a été ajourné par le sénateur Kinsella hier ou avant-hier. Il demandait des éclaircissements sur l'objectif que nous poursuivions dans cette étude sur l'autonomie gouvernementale. Malheureusement, nous ne disposions pas de tous nos éléments à ce moment-là et le sujet a déraillé. Au lieu d'examiner le budget, qui porte sur l'ensemble de l'étude, laquelle comportera peut-être une, deux ou trois étapes - qui sait? - nous avons traité de l'étude proprement dite, ce qui nous a éloignés du sujet.

Hier soir, la réunion du comité a été assez longue. Bien sûr, la vaste majorité de ses membres étaient présents et beaucoup de questions ont été réglées. Ce budget de la première étape vise strictement à étoffer le document de travail que nous avons en mains, à élaborer un plan de travail qui, à notre avis, nous conduira dans la direction que nous entendons prendre à l'égard de l'autonomie gouvernementale. Si, au terme de cette démarche, on estime que nous devrions revenir pour l'étude d'un budget de la deuxième étape, nous le ferons. Cependant, la réalisation de la première étape n'oblige en rien le Sénat à aller plus loin. Cette décision sera prise à ce moment-là.

Son Honneur le Président: Si aucun autre sénateur ne désire prendre la parole, plaît-il aux honorables sénateurs d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.

(La motion est adoptée, et le rapport est adopté.)

Droits de l'enfant non encore né

Motion portant établissement d'un comité parlementaire mixte spécial-Ajournement du débat

L'honorable Stanley Haidasz, conformément à l'avis du 12 février 1998, propose:

Qu'un comité mixte spécial du Sénat du Canada et de la Chambre des communes, appelé comité mixte spécial relatif à l'enfant non encore né, soit formé pour examiner l'à-propos d'adopter des mesures législatives en matière de droits du foetus et de la protection de l'enfant non encore né et faire rapport, en raison:

 

a) de l'absence, dans les lois canadiennes actuelles, de protection de l'enfant non encore né;
b) de l'intérêt de l'État à fournir certaines mesures de protection à l'enfant non encore né, garantissant ainsi le bien-être des générations futures de Canadiens;
c) de l'application des droits et libertés constitutionnalisés dans la Charte canadienne des droits et libertés et du rapport de ces droits et libertés à l'enfant non encore né;
d) de l'arrêt de la Cour suprême du Canada dans l'affaire Office des services à l'enfant et à la famille de Winnipeg (région du Nord-Ouest) c. G.(D.F.), qui fait état d'un vide dans les lois canadiennes actuelles concernant les droits de l'enfant non encore né;
e) des motifs de jugement de la Cour suprême dans l'arrêt précité, où cette dernière dit que toutes les mesures tendant à procurer de la protection juridique à l'enfant non encore né ont des ramifications complexes et devraient être envisagées par le Parlement et non par les tribunaux canadiens puisque le Parlement est en meilleure position d'évaluer l'opportunité, les répercussions et les conséquences de telles mesures;
Que le comité prenne en considération le droit canadien et le droit international, plus particulièrement les modifications apportées au Code criminel en 1969 aux dispositions sur l'homicide concernant le fait de tuer un enfant avant ou pendant sa naissance;

Que le comité fasse rapport au Parlement et propose des mesures de remplacement afin de protéger l'enfant non encore né de manière conforme à la Constitution du Canada;

Que le comité fasse aussi des recommandations au Parlement relativement à l'opportunité de mener d'autres études et enquêtes sur la faisabilité d'adopter des mesures législatives restrictives à l'égard du traitement expérimental du foetus et des nouvelles technologies de reproduction;

Que le comité soit composé de sept députés de la Chambre des communes et de six sénateurs;

Que le quorum du comité soit fixé à six membres à condition que les deux Chambres soient représentées;

Que le comité soit autorisé à siéger pendant les séances et les périodes d'ajournement du Sénat;

Que le comité ait le pouvoir de retenir les services de spécialistes, de personnel professionnel, technique et de bureau;

Que le comité ait le pouvoir de faire rapport au Parlement de temps à autre et qu'il présente son rapport final au plus tard le 31 décembre 2000;

Qu'un message soit transmis à la Chambre des communes la priant de se joindre au Sénat pour les fins susmentionnées et de choisir, si elle le juge à propos, des députés pour la représenter au comité mixte spécial dont la formation est proposée.

- Honorables sénateurs, si vous examinez le texte de la motion, vous le trouverez clair, simple et évident en soi. Je ne ferai pas de discours sur la motion; je vais cependant la mettre en perspective.

Comme vous le savez, la Cour suprême du Canada a rendu trois jugements depuis deux ans sur la question des droits du foetus. Chaque fois, les juges de la Cour suprême ont déclaré qu'il appartenait au Parlement - aux honorables sénateurs ici et à nos collègues de l'autre endroit - d'élaborer un règlement, une déclaration ou une loi visant à combler le vide qui existe du fait de l'absence de loi portant sur les droits du foetus. Voilà pourquoi je présente cette motion. Je voulais présenter un projet de loi, mais mes conseillers juridiques ont été incapables d'en proposer un.

La motion demande que l'on forme un comité mixte du Sénat et de la Chambre des communes afin d'examiner l'à-propos d'adopter des mesures législatives en matière de droits du foetus et de protection de l'enfant non encore né, de même qu'à l'égard du traitement expérimental du foetus et des nouvelles technologies de reproduction.

La Commission royale sur les nouvelles technologies de reproduction a déposé son rapport il y a environ deux ans et demi, mais nous n'avons pas encore entendu aucun ministre parler des initiatives ou des mesures législatives recommandées dans le rapport. La motion vise donc à suppléer à l'inaction du gouvernement dans ce domaine. Il n'a rien fait à l'égard des droits du foetus et des technologies de reproduction comme la Cour suprême nous a invités à trois reprises à le faire dans ses jugements.

J'espère qu'un honorable sénateur présent aujourd'hui au Sénat ajournera la motion en son nom et décidera de relever le défi de porter le flambeau pour faire effectuer cette étude.

La motion demande que le comité fasse rapport au plus tard le 31 décembre de l'an 2000; vous avez donc beaucoup de temps pour étudier cette question très importante et cruciale des droits du foetus.

Je vous remercie beaucoup de votre patience. Adieu, et que Dieu vous accompagne dans vos délibérations.

L'honorable John B. Stewart: Honorables sénateurs, je voudrais poser une question au sénateur Haidasz.

Ai-je raison de penser que le vide juridique dont il a parlé - pas en ces termes - résulte du vote serré qui a eu lieu au Sénat il y a quelques années?

Le sénateur Haidasz: Sur le projet de loi C-43?

Le sénateur Stewart: Oui. Le gouvernement de l'époque avait présenté un projet de loi mais, pour une raison ou l'autre, il n'a pas été adopté dans cette Chambre.

Le sénateur Haidasz: Il n'existe pas de loi qui protège la vie du foetus. Dans trois jugements récents, la cour a demandé au Parlement canadien de légiférer à ce sujet puisque, à son avis, l'État détient un intérêt dans la vie de l'enfant à naître à partir d'un certain stade de développement du foetus. Le gouvernement ni aucun ministre n'ont présenté de projet de loi pour régler la question.

J'ai décidé de lancer une étude de ce très important sujet afin de voir ce qui pouvait être fait pour combler la lacune qui existe.

Le sénateur Stewart: Je me souviens qu'à l'occasion du vote, ceux qui étaient opposés à l'avortement, quel que soit le stade de développement, avaient voté contre le projet de loi. D'autres avaient voté contre parce qu'ils estimaient que le projet de loi limitait trop le droit à l'avortement.

L'honorable sénateur a-t-il une raison de croire qu'un vote au Sénat donnerait un résultat différent maintenant? La détermination des opposants inconditionnels à l'avortement aurait-elle faibli? Est-ce ce que laisse entendre cette motion? Ou est-ce parce que les gens qui trouvaient que le projet de loi précédent était trop restrictif vont maintenant céder? Allons-nous reprendre le même exercice pour aboutir à la même déception? L'honorable sénateur a-t-il une raison ou une indication qui permettent de croire que l'opinion publique a changé?

Le sénateur Haidasz: Honorables sénateurs, depuis le vote sur le projet de loi C-43 il y a environ six ans, la Cour suprême du Canada a été saisie de renvois sur les droits du foetus. La dernière affaire, survenue à Winnipeg, portait sur le cas d'une femme enceinte qui avait la mauvaise habitude de renifler des vapeurs de colle, ce qui nuisait à la santé du foetus. Les travailleurs sociaux l'ont amenée en cour. Une autre femme, à Ottawa, s'est tirée dans l'abdomen pour tuer le foetus qu'elle portait. Il y a également eu une troisième affaire.

Dans chacun de ces cas, la Cour suprême a demandé au Parlement canadien d'émettre des directives ou une décision à son intention. Même madame le juge Martha Wilson croyait, et a indiqué dans son jugement, qu'à partir d'un certain stade de développement, l'État détenait un intérêt dans la vie du foetus. La cour a demandé à trois reprises au Parlement de légiférer.

Comme je n'ai pu présenter aucun projet de loi, j'ai décidé de recommander la tenue d'une étude. Depuis, la Commission royale d'enquête sur les nouvelles technologies de reproduction a déposé son rapport. La motion traite de la question. Je demande simplement aux deux Chambres de constituer un comité mixte pour étudier l'à-propos d'adopter des mesures législatives. Nous devons trouver un moyen de préciser les droits du foetus.

La Cour suprême a statué qu'à partir d'un certain stade de développement, l'État a un intérêt dans la vie du foetus. Personne n'a relevé le défi. J'ai voulu le faire avec un projet de loi, mais je n'ai pas pu. C'est pourquoi je propose la tenue d'une étude sur les droits du foetus.

L'honorable Philippe Deane Gigantès: Honorables sénateurs, si j'ai bien compris la décision du tribunal dans ces causes, il a déclaré qu'il n'appartenait pas aux tribunaux de se prononcer, mais bien au Parlement. La cour ne nous a pas demandé de produire quoi que ce soit. Elle a simplement dit que si quelque chose devait être produit, ce devait être par le Parlement. Il y a là, à mon avis, une distinction.

Le sénateur Haidasz: Je respecte l'interprétation que donne l'honorable sénateur de ces trois décisions publiées par la cour. Mon interprétation, c'est que quelqu'un doit prendre l'initiative et étudier cette question. Les nouvelles techniques de reproduction sont une question pressante. Le Parlement n'a rien fait. Allons-nous renoncer à notre pouvoir de légiférer? Je vous le demande.

L'honorable Noël A. Kinsella (chef adjoint suppléant de l'opposition): Honorables sénateurs, j'ai une perception différente des questions posées par le sénateur Stewart. Je les perçois dans une perspective fédérale-provinciale.

Comme vous le savez, le Canada est membre de l'Organisation des États américains. Un des principaux instruments de protection des droits de la personne de cet organisme est la Convention interaméricaine des droits de l'homme. Depuis huit ans, le gouvernement fédéral et les gouvernements provinciaux étudient cette convention pour déterminer si le Canada devrait la ratifier.

Comme vous le savez, avant que le Canada ratifie des traités internationaux touchant des domaines de compétence provinciale, il doit respecter la convention constitutionnelle établie dans les années 1930 au moment de l'affaire des conventions de travail, qui a été tranchée par le comité judiciaire du Conseil privé. Cette cause a établi que les provinces doivent donner leur accord avant que le pouvoir fédéral canadien puisse ratifier un traité.

Il y a donc eu de très sérieuses négociations fédérales-provinciales entourant cette convention. Sauf erreur, un des principaux obstacles est l'article IV de cette convention, qui affirme et reconnaît tous les droits de la Convention interaméricaine des droits de l'homme à tout être humain dès sa conception.

De nombreuses provinces ont du mal à observer cet article de la Convention interaméricaine des droits de l'homme.

L'honorable sénateur a-t-il des raisons de croire que les gouvernements provinciaux et territoriaux - du fait qu'ils interviennent au même titre que les autorités fédérales - seront bientôt en mesure de s'attaquer à cette question qui concerne directement l'affaire dont nous sommes saisis?

Le sénateur Haidasz: Sur ce point précis, honorables sénateurs, je ne connais pas la solution, mais, compte tenu de l'inertie du gouvernement face aux recommandations de la Commission royale sur les nouvelles techniques de reproduction - et c'est un des points que soulève la motion -, je suis d'avis qu'il devrait y avoir une initiative pour au moins étudier ces recommandations. Des millions de dollars ont été consacrés à l'étude des techniques de reproduction. Le gouvernement n'a pas fait la moindre déclaration substantielle et durable. Je crois qu'il est temps qu'un comité mixte des deux Chambres étudie au moins la possibilité de légiférer en réponse à la difficulté posée aux législateurs par les membres de la commission.

Si cette perspective ne soulève aucun intérêt, tant pis. Je pourrais retirer ma motion, demander le vote ou demander qu'on ajourne le débat. Je quitte à l'instant le Sénat pour toujours. Au revoir. J'ai dit mon dernier mot.

(Sur la motion du sénateur Chalifoux, le débat est ajourné.)

(1740)

Le Sénat

Hommage

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, le Président n'est pas censé prendre la parole lorsque des sénateurs partent à la retraite, mais je suis désolé de voir ces deux sénateurs nous quitter aujourd'hui et je tiens à leur souhaiter bonne chance.

Je voudrais aussi souligner un autre départ du Sénat. Notre page en chef, Greg Doiron, nous quittera. C'est son dernier jour de travail ici. Il sera près du Sénat, mais il ne sera pas ici.

Les travaux du Sénat

L'honorable Jacques Hébert: Honorables sénateurs, même si le Sénat ne siégera pas pendant les deux prochaines semaines, les comités suivants siégeront pendant la deuxième semaine: le comité des banques, celui des affaires juridiques, celui de l'agriculture, celui des transports, celui des privilèges, celui du Règlement, le comité mixte spécial sur la garde et le droit de visite des enfants et, sauf erreur, le comité des affaires étrangères.

L'honorable John B. Stewart: Honorables sénateurs, nous avions l'intention de siéger cette semaine-là, mais comme le Sénat ne siégeait pas, il y avait des incertitudes quant à savoir s'il était possible de le faire. Cependant, comme d'autres comités siégeront, le nôtre siégera aussi.

Le sénateur Hébert: Nous ajouterons donc le comité des affaires étrangères à la liste.

L'honorable Shirley Maheu: Honorables sénateurs, les membres du comité des privilèges et du Règlement se réuniront aussi pendant cette période.

(Le Sénat s'ajourne au mardi 17 mars 1998, à 14 heures.)

 


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