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Débats du Sénat (Hansard)

Débats du Sénat (hansard)

2e Session, 36e Législature,
Volume 139, Numéro 17

Le mardi 7 décembre 1999
L'honorable Gildas L. Molgat, Président


LE SÉNAT

Le mardi 7 décembre 1999

La séance est ouverte à 14 heures, le Président étant au fauteuil.

Prière.

DÉCLARATIONS DE SÉNATEURS

Son excellence M. Farès Bouez

Député de Kesrouan au Parlement libanais

L'honorable Pierre De Bané: Honorables sénateurs, je suis très heureux, en ma qualité de président du comité exécutif du Groupe parlementaire Canada-Liban, de souligner la présence au Canada de Son Excellence M. Farès Bouez, député de Kesrouan au Parlement libanais, président du Groupe parlementaire Liban-Canada et ministre des Affaires étrangères de la République libanaise pendant près de huit ans et demi à compter de 1990.

M. le ministre Bouez est le fils de l'éminent juriste et parlementaire Nouhad Bouez et de Mme Jacqueline Bouez, née Debs. Il est le mari de Mme Zalfa Hraoui et ils sont les heureux parents de quatre enfants, Rhea, Nouhad, Tarek et Andréa. Tout comme son père, ses oncles et ses cousins, Son Excellence M. Farès Bouez a choisi la carrière juridique. Détenteur d'une maîtrise en droit libanais de l'Université St-Joseph de Beyrouth, il se spécialise en droit français à la faculté Jean-Moulin de Lyon et fait un stage à l'Université Georgetown de Washington.

C'est une grande joie pour nous d'accueillir M. Farès Bouez. Il est arrivé au Canada le dimanche 5 décembre et sera parmi nous jusqu'à la fin de la semaine. M. Bouez a déjà assisté à une séance de travail avec le ministre des Affaires étrangères, M. Lloyd Axworthy. Ce sera, en fait, leur seconde rencontre puisque M. Bouez a reçu M. Axworthy à Beyrouth lors de sa visite officielle au Liban. M. Bouez rencontrera, durant son séjour au Canada, les diplomates du ministère des Affaires étrangères qui suivent la situation au Moyen-Orient, de même que les hauts fonctionnaires de l'Agence canadienne de développement international.

(1410)

Au Parlement, M. le ministre Bouez a également donné une conférence au Middle East Study Group sur la situation au Moyen-Orient. Il prononcera également une allocution cet après-midi à l'Université d'Ottawa où il est l'invité du recteur, M. Marcel Hamelin. Il sera reçu également par le Président du Sénat, l'honorable Gildas Molgat, et rencontrera la direction de l'autre Chambre de notre Parlement.

M. le ministre Bouez visitera, au cours de son séjour, la Ville de Montréal, où il sera reçu officiellement par le maire Pierre Bourque. Il aura également des échanges avec des chercheurs de l'Institut des études stratégiques. Il sera reçu par le président du Conseil de l'OACI, le docteur Assad Kotaite, un éminent citoyen de la République libanaise.

Durant son séjour dans notre pays, M. le ministre Bouez rencontrera des représentants de la communauté canadienne d'origine libanaise. Je voudrais mentionner la contribution exceptionnelle de la communauté canadienne d'origine libanaise.

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, la période de trois minutes allouée au sénateur De Bané est terminée. La permission est-elle accordée au sénateur de poursuivre sa déclaration?

Des voix: D'accord.

Le sénateur De Bané: Honorables sénateurs, la communauté libanaise est non seulement très présente, elle s'est aussi illustrée dans tous les secteurs au Canada, entre autres, l'enseignement universitaire, la médecine, le droit, les affaires et la haute fonction publique canadienne. On se souvient du rôle important qu'ont joué deux médecins d'origine libanaise auprès de deux premiers ministres du Québec.

Par-delà l'éloignement géographique qui, en vérité, s'estompe devant l'émergence du village global, Beyrouth est aussi proche de nous que les autres villes canadiennes. Grâce à la technologie moderne des télécommunications et à Internet, nos deux pays partagent les mêmes valeurs de démocratie, de tolérance, d'économie libérale et de pluralisme confessionnel et culturel. De plus, la présence au Canada d'une communauté importante d'origine libanaise constitue une base solide et permanente de relations étroites entre nos deux pays.

Le Canada appuie vigoureusement l'indépendance, la souveraineté et l'intégrité territoriale du Liban. De plus, le Canada appuie la résolution 425 du Conseil de sécurité et l'extension de l'autorité libanaise sur tout son territoire.

Le Canada a reçu la visite du président de la République libanaise à Moncton l'été dernier lors du Sommet de la Francophonie qui fut tenu au Nouveau-Brunswick. Nous avons noté avec satisfaction que la première visite du président Lahoud en dehors de la région du Moyen-Orient s'est déroulée au Canada. Le Liban est d'ailleurs le seul pays du Moyen-Orient qui est membre à part entière de la Francophonie. De plus, le prochain Sommet de la Francophonie, faisant suite à celui de Moncton, au Nouveau-Brunswick, se tiendra au Liban en 2001.

Honorables sénateurs, le Liban incarne des valeurs exemplaires de tolérance, de générosité et de ténacité. Il a subi les affres d'une guerre terrible, promue et alimentée par les puissances étrangères qu'il a vaincues par le courage et la ténacité de sa population. En cela, il est un exemple pour le monde entier. Je voudrais rappeler aussi au président du Parlement libanais, Son Excellence M. Nabih Berri, et au président du Groupe parlementaire Liban-Canada, Son Excellence M. Farès Bouez, notre volonté de travailler étroitement avec eux au renforcement des relations entre nos deux pays.

[Traduction]

Les droits de la personne

L'honorable Calvin Woodrow Ruck: Honorables sénateurs, il y a plus de 200 ans, un grand mouvement d'émancipation a eu lieu au sein de l'Empire britannique et des États-Unis d'Amérique qui a permis aux Noirs - hommes, femmes et enfants - d'être physiquement libérés des chaînes de l'esclavage. Pourtant, en cette ère éclairée, les Noirs sont encore jugés d'après la couleur de leur peau.

Honorables sénateurs, nous avons fait beaucoup de progrès depuis l'époque de l'esclavage. Mes ancêtres étaient des esclaves. Aujourd'hui, nous vivons dans un pays démocratique où de nombreux débouchés s'offrent à nous. La Loi sur les droits de la personne de 1977 a fait beaucoup pour ce qui est d'aider les membres des minorités visibles à tirer parti des avantages et de tout ce que ce grand pays à offrir, mais, en tant que pays, nous avons cependant des problèmes à rester unis. J'ai recommandé qu'ensemble, nous poursuivions nos efforts afin que les gens ne soient plus jugés d'après la couleur de leur peau, mais d'après ce qu'ils ont dans le coeur.

Grâce à la Loi sur les droits de la personne, je peux maintenant habiter où je veux en Nouvelle-Écosse. Avant la Loi sur les droits de la personnes, certains quartiers des villes étaient interdits aux Noirs. Nous étions censés vivre dans certains quartiers réservés exclusivement aux membres des minorités visibles. La Loi sur les droits de la personne a changé tout cela. Nous avons fait de grands progrès et il reste beaucoup à faire, mais je suis d'accord avec ceux qui disent que le Canada est le pays du monde où il fait le mieux vivre.

Le processus de paix au Soudan

L'honorable Lois M. Wilson: Honorables sénateurs, au cours des neuf derniers mois, il y a eu d'importants développements dans la guerre civile au Soudan. Le conflit entre le Nord et le Sud n'a pas pris fin et le nombre de barils de pétrole produits s'est accru depuis la fin des travaux de mise en place du pipeline entre le Sud-Soudan et Port-Saïd, dans le nord. La communauté internationale, y compris le Canada, a dégagé des crédits pour financer un modeste secrétariat composé de quatre personnes et basé au Kenya, sous les auspices de l'Autorité intergouvernementale pour le développement, ou IGAD. Cette initiative africaine, dont le mandat est de négocier un plan de paix, a l'appui de l'International Partners Forum, dont fait partie le Canada.

Le 26 octobre 1999, le ministère canadien des Affaires étrangères a annoncé deux nominations - la mienne, à titre d'envoyé spécial dans le cadre du processus de paix au Soudan, et celle de John Harker, à titre de conseiller spécial sur les questions africaines. Les deux fonctions sont complémentaires mais poursuivent des objectifs différents, conformément à la politique publique du Canada à l'égard du Soudan. Ma mission consistera à revigorer le processus de paix à l'issue de vastes consultations auprès d'ONG et d'universitaires canadiens, de membres de la communauté soudanaise au Canada et de représentants de pays frères qui apportent leur soutien au processus de médiation, ainsi que du gouvernement et de l'opposition armée du Soudan.

Cette semaine, par exemple, certains d'entre nous rencontrerons M. Bethuel Kipligat, un chef de file de la société civile kényane qui travaille à un processus de paix à deux volets en vue d'assurer la réconciliation entre les dirigeants des ONG soudanaises du Nord et du Sud, avec l'appui de Project Ploughshares de Waterloo et d'Alternatives de Montréal. La semaine suivante, à Ottawa, j'aurai une rencontre avec M. Haruun Ruun et M. Telar Ring Deng, deux représentants du New Sudan Council of Churches, qui oeuvre à l'édification de la paix et à la mise en place de solutions aux questions Nord-Sud, en collaboration avec l'IGAD, de même qu'à la coordination du développement des Églises dans ce pays ravagé par la guerre.

La position du Canada est rien de moins que la mise en oeuvre d'un plan de paix global et contrôlé. Le travail consistant à revigorer le processus de pays repose sur le long terme car il n'existe pas de solution miracle. L'équipe d'experts de John Harker est déjà sur les lieux, au Soudan, et son mandat a été expliqué en long et en large dans les médias. M. Harker soumettra son rapport au début de l'année prochaine.

La politique canadienne est légèrement plus complexe que sa contrepartie américaine en ce qu'elle fait place à un dialogue animé avec le secteur privé canadien. S'il appert que l'extraction pétrolière exacerbe le conflit au Soudan ou donne lieu à des violations des droits de l'homme, alors il sera envisagé de mettre en oeuvre des restrictions au commerce ou tout autre instrument à disposition.

Seule une action rapide en faveur d'une paix équitable au Soudan permettra à la population soudanaise de tirer parti de cette ressource naturelle. C'est ce qui explique que le Canada ait procédé à ces deux nominations complémentaires et qu'il semble avancer à une allure plus mesurée que son voisin du sud, par exemple, pour régler ces questions épineuses.

La violence contre les lesbiennes et les gais

L'honorable Erminie J. Cohen: Honorables sénateurs, le 7 novembre 1999, Robert Peterson, étudiant en première année de droit à l'Université du Nouveau-Brunswick à Fredericton, a été brutalement agressé alors qu'il rentrait chez lui à pied tard le soir. L'agresseur a été lâche en ce qu'il a attaqué M. Peterson de dos, lui portant des coups répétés au visage. Ce faisant, il a abreuvé d'injures haineuses et homophobes ce pauvre jeune homme qui mérite tellement mieux. Environ deux semaines après cette agression, un incident similaire s'est produit dans le même quartier du centre.

Honorables sénateurs, j'interviens aujourd'hui en réponse à un appel à l'action lancé par un groupe de Néo-Brunswickois préoccupés. Il ressort de cette haine et de ces actes nuisibles que les dirigeants de la nation canadienne doivent prendre position et dénoncer les préjugés et la violence qui rongent notre société. Robert Peterson n'est par le premier homosexuel à être confronté à tant de méchanceté dans nos rues, et il ne sera pas le dernier non plus - à moins que la société canadienne ne prenne position et n'exprime sa vive désapprobation. Ce n'est qu'en dénonçant ce type de fanatisme et de discrimination que nous commencerons à en voir la fin.

En tant que juive, cet acte flagrant de haine me consterne. Nous aurions dû tirer des leçons des horreurs de l'Holocauste sur ce que fait la haine à une personne, à une famille, à une communauté ou à un pays. Je trouve ce type de racisme et de discrimination déplorable. Il est consternant que des gens ignorants continuent de juger leurs voisins en fonction de leur race, de leur religion ou de leur orientation sexuelle. Ces caractéristiques ne définissent pas la personne dans son ensemble et ce n'est que par la compréhension que nous dépasserons les stéréotypes et que nous mettrons fin aux préjugés.

Honorables sénateurs, on ne devrait pas fermer les yeux sur l'incitation à la haine contre les gais et les lesbiennes ou la dissimuler. On devrait l'exposer au grand jour. En fermant les yeux sur ces actes, on permet aux gens de s'y livrer. En prenant la parole pour dire que cela suffit, nous montrerons aux victimes que nous nous préoccupons de ces problèmes. Nous ne devons pas être satisfaits de nous. En tant que pays, nous devrions nous efforcer de comprendre nos différences et de vivre en harmonie. Les gais et les lesbiennes ont le droit de se sentir comme nous tous en sécurité en rentrant chez eux le soir. Ce sont des êtres humains. Le type de lâcheté illustré par l'agresseur de Robert Peterson est profond et empreint de haine et de fanatisme.

(1420)

M. Peterson projette maintenant de quitter l'Université du Nouveau-Brunswick et la région de Fredericton. Quelle honte qu'un jeune homme franc et courageux éprouve le besoin de quitter sa nouvelle collectivité et sa nouvelle université à cause de l'ignorance, de l'intolérance et du fanatisme! Je l'applaudis pour le courage dont il a fait preuve en se présentant afin de parler des blessures morales et physiques qui lui ont été infligées. Je ne peux qu'espérer que, en tant que leaders, nous donnerons l'exemple à tout le pays et que nous ferons preuve de leadership moral en dénonçant ces crimes motivés par la haine.

Les relations canado-américaines

Les problèmes aux postes frontières

L'honorable Jerahmiel S. Grafstein: Honorables sénateurs, plus tard aujourd'hui, je déposerai le rapport de la délégation canadienne à la Conférence de l'Alliance commerciale transfrontalière canado-américaine qui a eu lieu à Washington, D.C., du 12 au 14 septembre 1999. M. Joe Comuzzi, de l'autre endroit et moi-même, en tant que coprésidents de la section canadienne du Groupe interparlementaire Canada-États-Unis, avons été invités à parler lors de cette réunion historique d'intervenants commerciaux importants des deux côtés de la frontière.

Les honorables sénateurs ne sont pas sans savoir que le commerce bilatéral entre nos deux pays représente maintenant plus de 1,3 milliard de dollars par jour et ne cesse de grossir. Le commerce bilatéral a quadruplé au cours de la dernière décennie. Malheureusement, on fait face à des embouteillages, à des problèmes de saturation et de congestion aux passages frontaliers. Des attentes longues et coûteuses sont courantes. J'estime qu'il y a trois ordres de gouvernement, ainsi que des autorités privées et au moins 17 organismes gouvernementaux des deux côtés de la frontière qui régissent d'une façon ou d'une autre nos postes frontières. Nous ne pouvons que noter un manque de leadership pour ce qui est de rénover cette barrière bureaucratique à l'efficience commerciale qui obstrue nos couloirs frontaliers tous les jours.

Avec l'arrivée de la notion du «juste à temps» dans les pratiques de stockage et étant donné que la livraison des produits «juste à temps» prend une expansion incroyable à cause d'Internet, ce cancer qu'est la saturation ne fera que s'intensifier tous les jours et s'étendre. Le résultat, c'est que la productivité et la compétitivité du Canada continueront d'en souffrir. Jusqu'à maintenant, il n'y a eu aucun plan d'ensemble pour remédier à cette situation évidente, à cette détérioration des conditions. Plutôt que les intéressés fassent preuve de leadership politique, nous voyons les diverses bureaucraties éviter le problème, être inefficaces et pire, se livrer à des guerres de compétence.

Joe Comuzzi et moi-même nous sommes joints aux membres du Congrès américain, y compris le sénateur Moynihan de l'État de New York, le sénateur Abraham du Michigan et notre vieil ami et collègue le sénateur Frank Murkowski de l'Alaska, coprésident du Groupe interparlementaire Canada-États-Unis, en tant que conférenciers extérieurs. Nous avons tous transmis avec véhémence, chacun à notre façon, le même message.

Nos collègues américains ont été sensibilisés au problème. Le Congrès vient d'approuver des investissements massifs dans l'infrastructure routière notamment. Par contre, les autorités canadiennes n'ont pas accordé la même priorité à ces investissements. Les dirigeants, les ministres et les ambassadeurs doivent se rencontrer pour élaborer un plan commun pour résoudre ce problème bureaucratique.

Honorables sénateurs, ce n'est que lorsque nous joindrons le geste à la parole que nous deviendrons une nation commerçante aussi bien au sol que dans les airs. On peut espérer que le nouveau millénaire réveillera nos gouvernements responsables et les incitera à assumer leurs responsabilités dans l'intérêt de tous les Canadiens.

L'Ontario

Le projet de loi de restructuration régionale-La proposition visant à déclarer la ville d'Ottawa unilingue anglaise

L'honorable Marie-P. Poulin: Honorables sénateurs, j'aimerais faire part de mon immense déception à la nouvelle rapportée aujourd'hui dans le quotidien Ottawa Citizen et sur la première page du Droit. Je trouve plutôt étonnant et surtout très choquant que l'on ne déclare pas officiellement la dualité linguistique de la capitale de ce pays bilingue dans le projet de loi de la restructuration régionale actuellement à l'étude à Queen's Park.

Quel genre de message envoie-t-on par là aux Canadiens de partout au pays, lorsque la capitale fraîchement renouvelée qui abrite le Parlement du pays continue d'adhérer aux vestiges de l'unilinguisme? Le gouvernement provincial est-il à la fois si pressé d'imposer une restructuration massive de la région et tout à fait indifférent à l'égard des francophones visés?

Le sénateur De Bané: Quelle honte!

Le sénateur Poulin: Il ne serait certainement pas très compliqué pour le gouvernement de l'Ontario de déclarer la région d'Ottawa région bilingue, dans la foulée des autres recommandations contenues dans le magnifique rapport déposé par M. Glen Shortliffe.

[Français]

Honorables sénateurs, c'est bien plus qu'une question régionale, c'est bien plus qu'une question provinciale. C'est une question de fierté nationale.

Le Canada joue un rôle primordial sur la scène internationale. Ottawa accueille régulièrement les chefs d'État du monde entier. Ottawa est le siège des ambassadeurs, de leurs équipes qui représentent, entre autres, les liens diplomatiques et commerciaux de leur pays respectif avec le Canada.

Ottawa est le siège du Parlement du Canada, de la fonction publique fédérale où tous les parlementaires et tous les fonctionnaires peuvent choisir de travailler en anglais ou en français.

[Traduction]

Honorables sénateurs, je vous demanderais de bien vouloir vous joindre à moi pour exhorter le gouvernement de l'Ontario à bien réfléchir aux conséquences de ses actes et à rétablir dans son projet de loi de restructuration qui est à l'étude le concept d'une capitale bilingue du Canada, la nouvelle ville d'Ottawa.

Des voix: Bravo!

[Français]

L'honorable Marcel Prud'homme: Honorables sénateurs, je voudrais joindre ma voix à celle de l'honorable sénateur Pierre De Bané, puisque j'ai très souvent rencontré M. le ministre Bouez et l'ambassadeur du Liban.

Aujourd'hui, au moment où des membres d'un pays multiconstitutionnel nous visitent pour jeter un regard sur un pays qui se dit bilingue et multiculturel, il est dommage que nous recevions la nouvelle à laquelle a fait référence le sénateur Poulin.

[Traduction]

Je n'abuserai pas de ce privilège aujourd'hui. Je reviendrai plus tard sur cette question. Vous connaissez tous mon opinion sur ce pays et vous savez tous ce que je pense de la ville d'Ottawa. Ottawa est la capitale de tous les Canadiens.

[Français]

Il serait impensable qu'Ottawa soit la capitale nationale et que l'on n'y parle qu'une seule des deux langues officielles, et que les Canadiens français et autres francophones ne puissent dire qu'Ottawa est aussi leur capitale.

[Traduction]

(1430)

Je n'en dirai pas davantage pour le moment car le débat sera long, mais je reviendrai sur le sujet. Les honorables sénateurs voudront sûrement se joindre au sénateur Poulin et aux autres sénateurs pour dire qu'il faut faire quelque chose pour qu'Ottawa reflète la véritable nature du Canada. Nous disons bien des choses dans le monde, et nous devrions nous mettre à les refléter ici à Ottawa, au Canada.


[Français]

Visiteur de marque

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, j'aimerais attirer votre attention sur la présence, dans nos tribunes, de M. Farès Bouez, ancien ministre des Affaires étrangères du Liban et président du Groupe parlementaire Liban-Canada.

[Traduction]

M. Bouez est accompagné de Son Excellence l'ambassadeur du Liban au Canada.


[Français]

AFFAIRES COURANTES

Projet de loi de 1999 pour la mise en 9uvre de conventions fiscales

Rapport du comité des banques et du commerce

L'honorable Céline Hervieux-Payette, membre du Comité sénatorial permanent des banques et du commerce, présente le rapport suivant:

Le mardi 7 décembre 1999

Le Comité sénatorial permanent des banques et du commerce a l'honneur de présenter son

DEUXIÈME RAPPORT

Votre comité, auquel a été déféré le projet de loi S-3, Loi mettant en oeuvre un accord, des conventions et des protocoles conclus entre le Canada et le Kirghizistan, le Liban, l'Algérie, la Bulgarie, le Portugal, l'Ouzbékistan, la Jordanie, le Japon et le Luxembourg, en vue d'éviter les doubles impositions et de prévenir l'évasion fiscale en matière d'impôts sur le revenu, a, conformément à l'ordre de renvoi du mercredi 24 novembre 1999, étudié ledit projet de loi et en fait maintenant rapport sans amendement.

Respectueusement soumis,

Membre du Comité,
CÉLINE HERVIEUX-PAYETTE

[Traduction]

Renvoi du projet de loi au comité des affaires étrangères

Son Honneur le Président: Conformément à un ordre spécial proposé avec la permission du Sénat et adopté le 24 novembre, et nonobstant le paragraphe 97(4) du Règlement, le projet de loi est maintenant renvoyé au Comité sénatorial permanent des affaires étrangères.

Projet de loi sur la protection des renseignements personnels et les documents électroniques

Le rapport du comité

L'honorable Michael Kirby, président du Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie, présente le rapport suivant:

Le mardi 7 décembre 1999

Le Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie a l'honneur de présenter son

QUATRIÈME RAPPORT

Votre comité, auquel a été déféré le Projet de loi C-6, Loi visant à faciliter et à promouvoir le commerce électronique en protégeant les renseignements personnels recueillis, utilisés ou communiqués dans certaines circonstances, en prévoyant l'utilisation de moyens électroniques pour communiquer ou enregistrer de l'information et des transactions et en modifiant la Loi sur la preuve au Canada, la Loi sur les textes réglementaires et la Loi sur la révision des lois, conformément à l'ordre de renvoi du lundi 6 décembre, a étudié ledit projet de loi et en fait maintenant rapport avec les modifications suivantes:

1. Page 3, article 2: ajouter après la ligne 15, ce qui suit:

««renseignement personnel sur la santé» En ce qui concerne un individu vivant ou décédé:

a) tout renseignement ayant trait à sa santé physique ou mentale;

b) tout renseignement relatif aux services de santé fournis à celui-ci;

c) tout renseignement relatif aux dons de parties du corps ou de substances corporelles faits par lui, ou tout renseignement provenant des résultats de tests ou d'examens effectués sur une partie du corps ou une substance corporelle de celui-ci;

d) tout renseignement recueilli dans le cadre de la prestation de services de santé à celui-ci;

e) tout renseignement recueilli fortuitement lors de la prestation de services de santé à celui-ci.».

2. Page 23, article 30:

a) Ajouter après la ligne 4 ce qui suit:

«(1.1) La présente partie ne s'applique pas à une organisation à l'égard des renseignements personnels sur la santé qu'elle recueille, utilise ou communique.»;

b) Ajouter après la ligne 7 ce qui suit:

«(2.1) Le paragraphe (1.1) cesse d'avoir effet un an après l'entrée en vigueur du présent article.».

Respectueusement soumis,

Le président,
MICHAEL KIRBY

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, quand étudierons-nous ce rapport?

Le sénateur Kirby: Honorables sénateurs, avec la permission du Sénat et nonobstant l'alinéa 58(1)g) du Règlement, je propose que l'étude du rapport soit inscrite à l'ordre du jour de la présente séance.

Son Honneur le Président: La permission est-elle accordée, honorables sénateurs?

Des voix: D'accord.

Son Honneur le Président: Plaît-il aux honorables sénateurs d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.

(La motion est adoptée et l'étude du projet de loi est inscrite à l'ordre du jour de la présente séance.)

L'ajournement

L'honorable Dan Hays (leader adjoint du gouvernement): Honorables sénateurs, avec la permission du Sénat et nonobstant l'alinéa 58(1)g) du Règlement, je propose:

Que, lorsque le Sénat ajournera aujourd'hui, il demeure ajourné jusqu'à demain, le mercredi 8 décembre 1999, à 13 h 30;

Que, à 15 h 30 demain, si le Sénat n'a pas terminé ses travaux, le Président interrompe les délibérations pour ajourner le Sénat; et

Que tous les points figurant à l'Ordre du jour et au Feuilleton des avis, qui n'ont pas été abordés, demeurent dans leur ordre actuel.

Son Honneur le Président: La permission est-elle accordée, honorables sénateurs?

Des voix: D'accord.

(La motion est adoptée.)

Le groupe interparlementaire Canada-États-Unis

La conférence de l'Alliance commerciale transfrontalière canado-américaine-Dépôt du rapport de la délégation canadienne

L'honorable Jerahmiel S. Grafstein: Honorables sénateurs, j'ai l'honneur de présenter, dans les deux langues officielles, le rapport de la délégation canadienne à la conférence d'automne de l'Alliance commerciale transfrontalière canado-américaine, qui a eu lieu à Washington, D.C., du 12 au 14 septembre 1999.

Richard G. Greene

Sa désignation comme haut fonctionnaire honoraire du Sénat à l'occasion de sa retraite

L'honorable J. Bernard Boudreau (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, avec la permission du Sénat, je suis heureux de proposer, appuyé par le chef de l'opposition, l'honorable sénateur Lynch-Staunton:

Que le Sénat désire exprimer sa vive appréciation des distingués états de service de M. Richard G. Greene, sous-greffier et greffier principal des services législatifs du Sénat; et

Qu'en reconnaissance de la dignité, du dévouement et de l'érudition dont il a fait preuve dans l'exercice de ses fonctions, il soit désigné comme haut fonctionnaire honoraire de cette Chambre avec ses entrées au Sénat et un siège au Bureau à l'occasion de cérémonies.

Des voix: Bravo!

Son Honneur le Président: Est-ce d'accord, honorables sénateurs?

Des voix: D'accord.

Son Honneur le Président: Plaît-il aux honorables sénateurs d'adopter la motion?

L'honorable Dan Hays (leader adjoint du gouvernement): Honorables sénateurs, je suis heureux de pouvoir prendre quelques minutes pour exprimer mon soutien à la motion.

C'est une occasion à la fois joyeuse et triste. C'est une triste occasion parce que Richard Greene - en disant son nom, je pense sénateur Greene - nous quittera à la fin de l'année. En fait, je pense à lui pour ce qu'il est exactement, c'est-à-dire un greffier extraordinaire du Sénat. L'occasion est joyeuse parce que Richard Greene est si jeune. Il est plus jeune que moi et, pour moi, c'est très jeune.

Mais Richard est ici depuis un temps impressionnant, 44 ans. Je suis allé dans le couloir voir les photographies des leaders du gouvernement au Sénat- malheureusement, ils ne prennent pas de photographies des chefs de l'opposition - et le leader du gouvernement à l'époque où Richard était venu travailler au Sénat était un certain William Ross Macdonald, de l'Ontario. Je suis convaincu que vous êtes une des rares personnes dans cette salle, Richard, qui connaissez ce nom. Je le connais maintenant et je connais bien ses réalisations seulement d'après mes lectures. Richard, vous avez vu passer huit premiers ministres puisque vous êtes entré en fonction sous Louis St. Laurent.

Honorables sénateurs, Richard Greene est un être tout à fait à part au Sénat et, j'en suis persuadé, ses états de service se démarquent dans l'ensemble de la fonction publique. Il a fait une contribution exceptionnelle, débutant comme page pour accéder au poste de greffier adjoint.

Richard, vous nous avez servis avec une distinction et une érudition extraordinaires, et nous vous en remercions. Je suis heureux d'appuyer la motion proposée, et j'espère vous revoir à bien des cérémonies officielles. Puissiez-vous avoir une longue et heureuse retraite. Je vous présente nos meilleurs voeux, à vous ainsi qu'à votre famille, en cette journée spéciale en votre honneur. Nous vous souhaitons une excellente année 2000 et bien d'autres belles années.

L'honorable John Lynch-Staunton (chef de l'opposition): Honorables sénateurs, je suis très heureux de prendre la parole pour appuyer avec enthousiasme la motion du sénateur Boudreau, même si je n'étais poussé que par l'égoïsme ou même la crainte. En effet, il est inutile de rappeler que Richard Greene, plus que tout autre membre du personnel, voit tout et entend tout, et que, jusqu'à maintenant il a dit fort peu de choses, si tant est qu'il a ouvert la bouche. Cela paraît d'autant plus important quand on prend conscience que, depuis son arrivée ici, en 1956, il a vu défiler 277 des 827 sénateurs qui ont été nommés depuis la Confédération. Le tiers d'entre eux ont été soumis à son examen. Il a été au service de 14 présidents et il a conseillé neuf gouverneurs généraux.

Quelles histoires Richard Greene pourrait raconter au sujet de ces 40 années et plus qu'il a passées ici, et combien il est rassurant de savoir qu'il ne peut rien dire tant qu'il sera au service du Sénat, même à un poste honorifique! Honorables sénateurs, je crois que cette raison suffit pour appuyer la motion sans la moindre hésitation, et même avec un empressement indécent, peu importe le nombre de permissions nécessaires.

Je tiens à souligner plus particulièrement l'impartialité de Richard, même si son affiliation politique nous paraît suspecte. C'est qu'il dispense ses conseils compliqués sur la procédure de façon absolument égale et sans parti pris. Le fait est, honorables sénateurs, sauf pour son humour douteux, que le Sénat ne sera pas le même quand nous reviendrons l'an prochain parce que Richard emportera avec lui un petit morceau du Sénat. Il a bien trop fait partie des meubles pour qu'il en soit autrement. J'espère seulement qu'il emportera aussi avec lui notre respect, notre gratitude et notre affection, car, dans l'esprit de la décision rendue hier par la présidence, personne n'a mieux servi le Sénat que lui.

Le sénateur Boudreau: Honorables sénateurs...

Son Honneur le Président: Je dois informer le Sénat que si le sénateur Boudreau prend maintenant la parole, son discours aura pour effet de clore le débat sur la motion.

Le sénateur Boudreau: Honorables sénateurs, je suis tout à fait d'accord avec le leader adjoint, le distingué chef de l'opposition et tous ceux qui ont offert leurs voeux à Richard en privé. Je le félicite, et lui souhaite une très heureuse, fructueuse et prospère retraite dont profitera toute sa famille. Il nous tarde aussi de vous voir dans cette enceinte en tant qu'invité honoraire très spécial.

Cela étant dit, je propose que la motion soit adoptée.

Des voix: Bravo!

Son Honneur le Président: Le sénateur Boudreau, appuyé par le sénateur Lynch-Staunton, propose:

Que le Sénat souhaite exprimer sa vive appréciation des distingués états de service de M. Richard G. Greene, sous-greffier et greffier principal des services législatifs du Sénat; et

Qu'en reconnaissance de la dignité, du dévouement et de l'érudition dont il a fait preuve dans l'exercice de ses fonctions, il soit désigné comme haut fonctionnaire honoraire de cette Chambre avec ses entrées au Sénat et un siège au Bureau à l'occasion de cérémonies.

Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.

(La motion est adoptée.)

Le Programme d'échange de pages avec la Chambre des communes

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, je voudrais vous présenter le page de la Chambre des communes que nous avons avec nous cette semaine dans le cadre du Programme d'échange de pages avec la Chambre des communes.

[Français]

M. Julien Morrissette, qui est originaire d'Ottawa, étudie à la faculté des sciences politiques de l'Université d'Ottawa.

De la part de tous les honorables sénateurs, je vous souhaite la bienvenue au Sénat et nous espérons que votre séjour parmi nous sera agréable, mais surtout intéressant et utile.


[Traduction]

PÉRIODE DES QUESTIONS

Les transports

La possibilité d'une prise de contrôle des Lignes aériennes Canadien International par Air Canada-Le service aux aéroports régionaux

L'honorable Ethel Cochrane: Honorables sénateurs, ma question s'adresse au leader du gouvernement. Selon le Globe and Mail d'hier, le ministre des Transports a déclaré ce qui suit:

À notre avis, nous devons créer un milieu favorisant la concurrence intérieure pour le nouveau transporteur...

Nous ne voulons absolument pas revenir à l'ancien régime de réglementation...

C'est là la réaction du ministre à la prise de contrôle imminente des Lignes aériennes Canadien International par Air Canada. Le leader peut-il nous dire si le gouvernement est conscient qu'il n'y a présentement pas de concurrence dans la majorité des petits aéroports du Canada? La question n'est pas ici de savoir quelle société aérienne choisir, mais plutôt de déterminer si une société aérienne desservira encore l'aéroport local.

L'honorable J. Bernard Boudreau (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, je remercie l'honorable sénateur de sa question. C'est manifestement un sujet de préoccupation, particulièrement dans certaines régions du Canada atlantique. À mon avis, l'honorable sénateur a porté à l'attention du Sénat la situation de Stephenville, où il n'y a pas, temporairement du moins, de service de transport aérien et où les gens doivent faire une centaine de kilomètres pour prendre l'avion.

Stephenville est sans doute un bon exemple du problème auquel fait face le secteur du transport aérien à l'heure actuelle, car cet aéroport a déjà été source de problèmes dans le passé. Avant les récents événements qui ont marqué le secteur du transport aérien, il y avait eu des problèmes entourant la fourniture de service de transport aérien à partir de cet aéroport. Le ministre est bien au courant de la situation et les observations énergiques faites par des sénateurs et des députés venant en particulier du Canada atlantique et d'autres petits centres contribueront sans nul doute à faire en sorte qu'il demeure bien au fait de cette question.

Le sénateur Cochrane: Honorables sénateurs j'habite à environ 120 kilomètres de Deer Lake. Toutefois, d'autres collectivités sont désormais privées de service et les gens devront parcourir environ 150 kilomètres. Je pense aux gens de collectivités comme Port aux Basques et Cape St. George, dans la partie continentale, et de la péninsule de Port au Port, qui devront franchir des distances beaucoup plus grandes.

Ma question complémentaire, honorables sénateurs, est la suivante: le ministre des Transports a élaboré une politique qui est dans l'intérêt de Toronto, de Montréal, de Vancouver, de Calgary et d'Halifax, mais qui laisse pour compte les Canadiens vivant dans de petites collectivités. Le gouvernement ne se rend-il pas compte qu'une politique favorisant la concurrence ne va pas faire décoller des avions de Stephenville, Charlo ou Chatham, au Nouveau-Brunswick, ni des autres aéroports qui ont été déjà été abandonnés par InterCanadien?

Le sénateur Boudreau: Honorables sénateurs, la déclaration du ministre, je présume, ne se voulait pas une solution globale. J'ai mentionné à plusieurs reprises dans cette enceinte les grands principes de la politique du gouvernement, et l'un d'entre eux concerne la liaison aérienne avec les petites localités de notre pays. Le ministre a mentionné maintes fois, à la Chambre des communes et ailleurs, que la nécessité de desservir les petites localités était au coeur de la politique gouvernementale.

(1450)

Le Conseil du Trésor

La préparation en vue de l'an 2000-La possibilité d'une audience en comité plénier

L'honorable J. Michael Forrestall: Honorables sénateurs, ma question s'adresse au leader du gouvernement, mais tout autant au leader adjoint du gouvernement. Elle résulte d'une question que m'a posée il y a quelques instants notre whip.

Le sénateur DeWare m'a demandé où je serais au jour de l'An. J'ai répondu que je serais chez moi mais que j'ai un nouveau numéro de téléphone et je le lui ai donné. J'ai dit: «Pourquoi voulez-vous savoir où je serai?» Elle a répondu: «Ah, au cas où il y aurait quelque chose qui ne tournerait pas rond à minuit ce jour-là.»

J'ai de plus en plus l'impression que le gouvernement ne sait pas au juste où en est le Canada en ce qui concerne les problèmes potentiels liés au bogue de l'an 2000. Afin de nous rassurer, le leader du gouvernement au Sénat pourrait-il demander aux ministres compétents, comme le ministre de la Défense, de comparaître brièvement devant le Sénat réuni en comité plénier en compagnie d'un ou de deux de ses experts, avant que le Sénat n'ajourne pour la période de Noël? Cela permettrait aux sénateurs de poser des questions sur toute une série de problèmes possibles.

L'honorable J. Bernard Boudreau (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, madame la ministre Robillard, présidente du Conseil du Trésor, est la ministre responsable pour les préparatifs en vue du bogue de l'an 2000. On m'a assuré que des mesures ont été prises dans tous les secteurs essentiels et que le gouvernement du Canada ne s'attend pas à ce qu'il y ait des problèmes lors du passage au nouveau millénaire.

Il est toujours bon de faire preuve de prudence dans ce genre de situation. Il peut être important de savoir où les personnes-clés, comme l'honorable sénateur, peuvent être contactées à tout moment. Ceci à des fins de planification, seulement à titre de prudence. Je ne crois pas que cela devrait déclencher la panique.

Le sénateur Forrestall: Honorables sénateurs, le whip du gouvernement a-t-il ou non jugé nécessaire de chercher à obtenir des renseignements à ce sujet? Dans l'affirmative, peut-il ajouter foi à cette éventualité?

Ma question complémentaire s'adresse au leader adjoint du gouvernement au Sénat. A-t-il l'intention de demander au ministre compétent et à un membre de son personnel de nous consacrer une vingtaine de minutes ou une demi-heure pour nous rassurer sur ce point?

L'honorable Dan Hays (leader adjoint du gouvernement): Honorables sénateurs, je sais par expérience qu'il est déplacé de ma part de répondre à une question à moins que le leader ne soit absent. Toutefois, sans répondre à la question, je prends note des paroles de l'honorable sénateur et j'essaierai d'y donner suite.

Le patrimoine

La Ligue nationale de hockey-La possibilité d'une nouvelle loterie pour aider les équipes canadiennes-L'annonce du ministre

L'honorable David Tkachuk: Honorables sénateurs, du bogue de l'an 2000, je passe à Sheila Copps, qui représente elle-même un bogue de l'an 2000. Nous pouvons toujours espérer qu'elle tombe en panne après le 31 décembre.

Honorables sénateurs, on pouvait lire récemment dans le Globe and Mail que Sheila Copps avait annoncé un nouveau plan. Fidèle à la grande tradition des gouvernements libéraux depuis 1993, elle en a fait l'annonce à l'extérieur du Parlement. Elle a l'intention d'utiliser un système de loterie pour venir en aide aux équipes de hockey professionnel au Canada. Comme elle n'a pas annoncé ce qu'elle compte faire à l'autre endroit, le leader du gouvernement au Sénat pourrait-il expliquer le nouveau plan?

L'honorable J. Bernard Boudreau (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, je dois dire à l'honorable sénateur que je n'ai pas été présent à une réunion où un tel plan aurait été annoncé. Je crains donc de ne pas pouvoir l'aider à ce sujet.

Le sénateur Tkachuk: Voilà une réponse honnête, honorables sénateurs. Il semble que c'était là aussi la réponse honnête qu'a faite le ministre responsable de ce dossier, M. Manley, qui n'avait lui non plus aucune idée de la teneur de cette annonce.

À qui, au Cabinet, incombe-t-il de trouver une solution au problème? Est-ce à Sheila Copps, ministre du Patrimoine canadien, ou à John Manley, ministre de l'Industrie?

Le sénateur Boudreau: Honorables sénateurs, tous les membres du conseil exécutif partagent certainement certaines préoccupations et une certaine responsabilité à cet égard. Le ministre Manley est cependant celui qui en est le principal responsable.

Le sénateur Tkachuk: Honorables sénateurs, je suis intrigué par la façon dont le gouvernement s'occupe des problèmes nationaux depuis quelque temps. La ministre Copps a conçu un plan, dont elle a discuté avec les premiers ministres Harris et Klein à l'occasion du match de la coupe Grey. Or, le ministre Manley n'en a pas la moindre idée. En fait, elle a annoncé son plan à l'extérieur du Parlement. Il a été rapporté dans le Globe and Mail avant que les parlementaires n'en aient jamais entendu parler. Le ministre responsable ne sait rien de ce plan. Cela ne me donne pas grand confiance que quelqu'un finira par trouver une solution à ce que les équipes canadiennes de la LNH ont décrit comme un grand problème à régler pour qu'elles puissent rester en activité ici.

Si tous les ministres et tous les ministériels sont chargés de trouver une solution à ce plan, il serait peut-être utile que le ministre nous explique la démarche. Comment peut-on trouver une solution à un problème comme celui-là?

Le sénateur Boudreau: Honorables sénateurs, je suis sûr que cette question préoccupe tous les membres du Conseil privé. En dernière analyse, c'est le gouvernement qui prendra une décision. Cette décision sera soigneusement pesée et il sera tenu compte de toutes les considérations pertinentes.

L'enseignement qu'il faudrait peut-être tirer de cet incident, c'est qu'il ne faut pas toujours croire tout ce qu'on lit dans le Globe and Mail.

Les affaires intergouvernementales

Le Québec-Les conditions éventuelles d'un référendum-La date de l'annonce par le premier ministre

L'honorable Lowell Murray: Honorables sénateurs, selon tous les rapports, c'est aujourd'hui que le Cabinet devait se prononcer sur l'initiative du premier ministre d'établir les paramètres du gouvernement fédéral à l'égard de tout référendum éventuel au Québec. Une décision a-t-elle été prise?

L'honorable J. Bernard Boudreau (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, les résultats de toute discussion qui aurait eu lieu, le cas échéant, seraient rendus publics par le premier ministre en temps utile. Le sénateur le sait sûrement.

Le sénateur Murray: Honorables sénateurs, je comprends naturellement que le leader du gouvernement hésite à damer le pion au premier ministre au sujet de son annonce. Cependant, peut-il nous dire quand nous pouvons espérer que le premier ministre fera une annonce à cet égard?

Le sénateur Boudreau: Je suis désolé, mais j'hésite à faire des conjectures sur le moment où le premier ministre voudra faire une annonce sur une question aussi importante à ses yeux. Comme je risque d'induire involontairement les sénateurs en erreur, je prie le sénateur de ne pas me demander de donner une réponse directe et je dirai plutôt, pour utiliser une expression courante, «en temps et lieu». Espérons que le premier ministre fera son annonce dans un avenir assez rapproché.

Le sénateur Murray: Honorables sénateurs, je comprends cela. Je ne cherche pas à précipiter les choses. Je pose la question tout simplement parce qu'il est possible, voire probable, que le Parlement, qui englobe évidemment le Sénat, sera mis à contribution.

(1500)

J'essaie de déterminer si nous devrions nous tenir prêts, sinon à examiner une question, au moins à prendre note d'une initiative présentée au Parlement avant le congé de Noël.

Le sénateur Boudreau: Honorables sénateurs, si le premier ministre entend procéder par la voie législative, le Sénat aura forcément un rôle important à jouer. À savoir si cela peut coïncider avec nos célébrations de Noël, je serais porté à croire que nous célébrerons tous Noël avec nos familles.

Le travail

La situation critique des sans-abri-L'état d'avancement de la stratégie gouvernementale

L'honorable Brenda M. Robertson: Honorables sénateurs, ma question s'adresse au leader du gouvernement au Sénat et porte sur la stratégie du gouvernement visant à redresser la situation des sans-abri. En fait, ma question fait suite à une réponse fournie par l'honorable leader du gouvernement à une question posée par le sénateur Cohen, le 23 novembre dernier.

À la fin de l'hiver dernier, le gouvernement a chargé la ministre du Travail de coordonner la solution que le gouvernement a proposée au problème des sans-abri. À ce moment, la situation paraissait urgente. On avait exprimé de nombreuses inquiétudes, car bien des gens avaient souffert au cours de l'hiver. Madame la ministre avait alors dit qu'elle élaborerait la stratégie du gouvernement en moins d'un mois.

Honorables sénateurs, ce qui me préoccupe, étant donné le temps écoulé, c'est la possibilité que cette stratégie s'enlise quelque part au gouvernement. C'est d'ailleurs ce que laisse entendre un article paru hier dans le Toronto Star, que le leader a sûrement lu. On cite une source gouvernementale qui aurait déclaré ce qui suit:

Nous n'avons pu livrer la marchandise. Personne ne s'en réjouit. La ministre a travaillé fort et nous pouvons dire que nous avons fait des choses, mais nous n'avons pas pu tenir parole.

Je ne voudrais pas me fier uniquement à cet article. Le leader du gouvernement pourrait peut-être apporter des précisions concernant la réponse qu'il a donnée au sénateur Cohen il y a une quinzaine de jours, informer le Sénat de l'état d'avancement de la stratégie concernant les sans-abri et expliquer sur quoi il se fondait en disant que des mesures seraient annoncées sous peu. Employée ici, l'expression «sous peu» est toujours étrangement élastique.

L'honorable J. Bernard Boudreau (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, la ministre responsable a fait un travail remarquable en se rendant dans toutes les régions du pays pour consulter les gens et rencontrer les groupes directement en cause. Elle a couvert bien du terrain et a présenté très énergiquement des positions de principe et des programmes en faveur des sans-abri.

Je puis assurer à l'honorable sénateur que ce processus ne s'est pas enlisé. Le ministre s'affaire avec diligence et dynamisme à la mise en oeuvre de ses recommandations.

En ce qui concerne la date exacte des annonces, à nouveau je dois dire qu'il appartiendra au ministre d'en décider. Cependant, je partage l'espoir du sénateur et je compte bien que l'annonce ne tardera pas trop.

Le sénateur Robertson: Honorables sénateurs, je remercie le leader du gouvernement de cette réponse. Ce qui me dérange, c'est que le gouvernement a affirmé prématurément qu'une stratégie serait en vigueur depuis belle lurette. Cela a créé des attentes qui ont terni un peu les bonnes intentions du gouvernement et qui ont décontenancé tous ceux qui voulaient s'attaquer à ce grave problème.

Selon le même article du Toronto Star, le ministre des Finances aurait dit que, pour donner de bons résultats, la stratégie doit être acceptée par les trois paliers de gouvernement. Bien des honorables sénateurs, dont le leader du gouvernement et moi-même, ont déjà participé à la négociation d'ententes fédérales-provinciales. Nous savons à quel point de telles négociations peuvent être difficiles et longues, alors qui sait à quel moment nous obtiendrons une stratégie sur les sans-abri? Vu qu'il faut maintenant que les provinces et les municipalités s'entendent, le processus pourrait prendre deux ou trois ans. Entre-temps, bien des gens souffrent.

Le leader du gouvernement au Sénat pourrait-il nous dire si les négociations avec les provinces ont débuté et quel est l'échéancier?

Le sénateur Boudreau: Honorables sénateurs, les autres ordres de gouvernement ont nettement responsabilité de nous aider à relever ce défi de taille qui se pose partout au pays. Il est clair qu'ils ont un rôle à jouer. Tout programme présenté par le gouvernement fédéral ne remplacerait pas les responsabilités qui, moralement et constitutionnellement, appartiennent aux gouvernements provinciaux et, par procuration, aux administrations municipales.

Je transmettrai les questions de l'honorable sénateur à madame le ministre et je ferai de mon mieux pour revenir avec le plus de renseignements possible.

Le sénateur Robertson: Honorables sénateurs, ce qui inquiète de nombreux Canadiens, entre autres choses, c'est qu'au moment où l'annonce a été faite l'hiver dernier, il n'a pas été question de la participation des provinces ou des municipalités. Il semble que le gouvernement fédéral n'a pas joué un rôle de chef de file, comme il l'avait promis. C'est inquiétant, et j'aimerais obtenir des réponses claires et catégoriques, afin de pouvoir répondre de manière sensée aux gens qui communiquent continuellement avec mon bureau.

Le sénateur Boudreau: Honorables sénateurs, je comprends, disons, l'impatience que le sénateur manifeste à l'égard de cette question. Je puis seulement lui donner l'assurance que madame la ministre s'intéresse de très près au dossier et qu'elle continue de le faire avancer. Au risque de me répéter, je vais livrer toute l'information qu'il m'est possible de communiquer à l'honorable sénateur afin d'apaiser certaines de ses inquiétudes.

Les affaires étrangères

Le rapport du Conseil canadien pour la coopération internationale-La recommandation préconisant l'établissement d'un groupe de travail-La position du gouvernement

L'honorable Douglas Roche: Honorables sénateurs, ma question s'adresse au leader du gouvernement au Sénat. Aujourd'hui, le Conseil canadien pour la coopération internationale a rendu public un rapport intitulé: «Bilan de l'aide»; ce rapport souligne que la contribution du Canada à l'aide publique au développement a atteint son plus bas niveau en 30 ans et que notre pays est maintenant onzième parmi les 21 pays donateurs de l'OCDE, alors qu'il se classait au septième rang en 1996. C'est un piètre bilan pour le meilleur pays où vivre dans le monde.

Compte tenu du fait que le gouvernement a annoncé l'intention du Canada d'accroître son budget d'aide, la question de la qualité de l'aide est toujours de mise. Par conséquent, le conseil a recommandé la création d'un groupe de travail sur le renouvellement de l'aide canadienne, groupe qui entreprendrait un examen systématique des priorités de programmes de l'ACDI.

Le leader du gouvernement au Sénat aurait-il l'obligeance de transmettre cette recommandation au gouvernement et de faire ensuite rapport au Sénat afin de lui dire si pareil groupe de travail sera créé et, dans le cas contraire, pour quelle raison?

L'honorable J. Bernard Boudreau (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, je sais de quel rapport parle l'honorable sénateur. À moins que je me trompe, il a été rendu public aujourd'hui, de sorte que je suis convaincu que le ministre en question n'a pas encore eu l'occasion de l'analyser en détail.

Dans le discours du Trône, le gouvernement s'engage clairement à accroître l'aide au développement international. Il s'engage aussi à faire en sorte qu'elle soit consentie selon de nouvelles modalités innovatrices qui permettront d'aider de façon plus efficace les pays pauvres à obtenir des résultats en matière de développement économique. J'espère que l'on donnera suite aux sentiments exprimés dans le discours du Trône dans le cadre du processus budgétaire.

(1510)

Pour répondre plus précisément à l'honorable sénateur, je ferai part de cette question au ministre intéressé. Nous devrions accorder au ministre le temps de prendre connaissance du rapport, mais je m'engage à obtenir une réponse à la question de l'honorable sénateur.

Le plan visant à établir une politique cohérente d'aide étrangère

L'honorable Lois M. Wilson: Honorables sénateurs, j'ai participé aujourd'hui à la table ronde organisée par le CCCI et à laquelle étaient présents des fonctionnaires de l'ACDI. Une des questions soulevées et que j'aimerais maintenant poser au leader du gouvernement est la suivante: quel plan est proposé par le gouvernement en vue d'aboutir à une plus grande cohérence dans la politique d'aide étrangère afin d'établir un équilibre entre les besoins du commerce et les droits humains, les affaires étrangères et l'environnement? Où est la tribune chargée de résoudre ces contradictions afin que notre politique d'aide présente plus de cohérence?

L'honorable J. Bernard Boudreau (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, le discours du Trône indiquait clairement que l'on reverrait notre politique d'aide étrangère. Cette révision se déroulera au fur et à mesure que nous progresserons dans le cycle budgétaire et que nous aborderons certains des importants problèmes qui ont été soulevés à cet égard.

Les décisions concernant l'aide étrangère doivent manifestement concorder avec les objectifs visant à réduire la pauvreté, à améliorer la santé et l'éducation et, de fait, à instaurer une saine gestion publique dans tous les pays du monde. Cela demeure un objectif important du ministère des Affaires étrangères et du Commerce international.

Le sénateur Wilson: Honorables sénateurs, tout cela est fort rassurant, mais la réponse reçue cet après-midi indique qu'il n'existe pas de plan.

Le sénateur Boudreau: Honorables sénateurs, je m'en voudrais d'être aussi catégorique. Les plans d'action mentionnés dans le discours du Trône seront élaborés pendant les semaines et les mois à venir. Au fur et à mesure que nous progresserons dans le cycle budgétaire, je pense bien que madame le sénateur observera des éléments qui la rassureront.

La composition du budget de l'aide étrangère

L'honorable A. Raynell Andreychuk: Honorables sénateurs, le premier ministre a indiqué que le budget de l'aide sera augmenté. Ce budget n'a jamais été aussi faible en 30 ans. Il comprend désormais également une aide humanitaire accrue et les actions de maintien de la paix, comme celles en cours au Kosovo. Le gouvernement s'est-il engagé à augmenter les crédits de l'aide consacrée aux programmes traditionnels d'éducation et d'hygiène de base, en lieu et place des autres programmes qui s'inscriraient, à juste titre d'ailleurs, dans d'autres catégories?

L'honorable J. Bernard Boudreau (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, le rôle du Canada sur la scène internationale a pris une importance des plus prépondérante grâce à nos forces armées. Nous avons sans doute plus de militaires en service outre-mer aujourd'hui que depuis la guerre de Corée. Notre rôle en matière de maintien de la paix a pris énormément d'ampleur. Je n'ai pas eu le temps de lire le rapport intitulé: «Bilan de l'aide 2000», et je ne sais donc pas sous quelles rubriques sont inscrites de telles dépenses. J'ai l'impression qu'elles n'auront pas été groupées, à des fins budgétaires, avec les dépenses d'aide dont a parlé le premier ministre, ni avec les initiatives énoncées dans le discours du Trône.

Le sénateur Andreychuk: Je pourrais peut-être éclairer le ministre. Les coûts associés aux initiatives de maintien de la paix, les interventions militaires, la consolidation de la paix et les actions humanitaires, ont été en bonne partie imputés sur le budget de l'aide. Les dépenses inscrites sous cette rubrique ont augmenté, alors que celles prévues pour d'autres programmes d'aide ont diminué. Je saurais gré au ministre d'envisager d'accroître l'aide accordée à la résolution de problèmes fondamentaux à l'origine de l'agitation dans les pays en développement.

L'assujettissement de l'aide étrangère au respect des droits de la personne-La position du gouvernement

L'honorable A. Raynell Andreychuk: Honorables sénateurs, si le discours de Maria Minna reflète fidèlement la politique gouvernementale actuelle, l'aide canadienne dépendra à l'avenir de l'adhésion des pays bénéficiaires aux politiques de consolidation de la paix. Est-ce là la politique du gouvernement? S'agit-il d'un changement de position du gouvernement libéral? Le Parti libéral a, par le passé, dénoncé l'assujettissement de l'aide aux droits de la personne.

L'honorable J. Bernard Boudreau (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, n'ayant pas connaissance du discours dont parle le sénateur Andreychuk, je soulèverai la question auprès du ministre responsable et j'apporterai une réponse à l'honorable sénateur dès que possible.

Les travaux du Sénat

Recours au Règlement

L'honorable Noël A. Kinsella (chef adjoint de l'opposition): Honorables sénateurs, si j'en avais eu le temps durant la période des questions, j'aurais posé une question au président du Comité sénatorial permanent des banques et du commerce. Le sénateur en question n'est pas présent, mais je vois le vice-président et plusieurs membres du comité des banques.

Aujourd'hui, le sénateur Hervieux-Payette a présenté un rapport du comité des banques qui a été lu et déposé. Je suis allé l'examiner et il n'avait pas été certifié comme rapport du comité par le président du Comité sénatorial permanent des banques et du commerce. Les greffiers au bureau m'ont informé qu'ils l'avaient également remarqué et avaient renvoyé le rapport au sénateur Hervieux-Payette afin qu'elle le signe.

Le vice-président du Comité sénatorial permanent des banques et du commerce peut-il nous décrire la nature de la réunion lors de laquelle il a été décidé - si toutefois cela a été décidé - que le comité des banques étudierait le projet de loi S-3 article par article? Existe-t-il un compte rendu de cette réunion? Une motion a-t-elle été présentée et existe-t-il un compte rendu de cette motion, demandant au président ou au vice-président de présenter ce rapport au Sénat?

L'honorable David Tkachuk: Honorables sénateurs, la réponse est «oui».

Le sénateur Kinsella: Le vice-président peut-il expliquer pourquoi un autre sénateur que le président ou le vice-président, comme le veulent la coutume et l'usage, a été désigné pour présenter le rapport au Sénat ?

Le sénateur Tkachuk: Honorables sénateurs, je ne suis pas le sénateur Kolber. Je ne sais pas à quoi il a pensé. À l'origine, lorsque nous avons convenu de faire rapport du projet de loi, le sénateur Kolber a déclaré qu'il présenterait le rapport au Sénat le mercredi 8 décembre. Lors de la réunion de jeudi dernier, il a déclaré qu'il pourrait présenter le rapport avant mercredi.

Hier, mon bureau a reçu un message me demandant de présenter le rapport sur le projet de loi, mais j'étais parti de Saskatoon pour Ottawa et, comme vous le savez, le voyage prend toute une journée. Par conséquent, je n'ai pas répondu à cette demande.

(1520)

La première fois que j'ai entendu dire que le rapport serait présenté aujourd'hui, c'est lorsque l'honorable sénateur Hervieux-Payette l'a mentionné.

Le sénateur Kinsella: Honorables sénateurs, à la page 14 d'une publication de la Direction des comités du Sénat datée de novembre 1999 et intitulée Introduction aux comités sénatoriaux, on explique comment les rapports doivent être transmis au Sénat par un comité. On y dit que, lorsque le président d'un comité présente un rapport, le comité déclare qu'il a terminé les travaux que le Sénat lui avait confiés dans son mandat. Dans le cas d'un projet de loi, cela inclut l'étude article par article du projet de loi. L'usage veut que l'on demande au comité quand le rapport sur le projet de loi sera présenté. Un membre du comité présente alors une motion à ce sujet. En adoptant la motion, le comité donne au président la permission de présenter le rapport. Selon cette publication, le rapport est présenté par le président ou par un autre membre désigné du comité.

En l'absence du président et du vice-président, je voudrais déterminer le processus qui a été suivi pour qu'un autre membre du comité soit ainsi désigné. Il faut assurer le contrôle du processus pour savoir si oui ou non le rapport d'un comité est en fait le rapport sur lequel la majorité des membres du comité se sont entendus. C'est un des problèmes que j'ai avec le rapport qui a été déposé dans cette enceinte plus tôt au cours des délibérations.

Mon autre problème, c'est que je ne sais pas au juste - parce que je n'ai pas encore le compte rendu - ce que Son Honneur a déclaré au moment de la présentation de ce rapport. Je crois que j'ai entendu que la permission avait été accordée, mais j'ignore si cela faisait allusion aux délibérations qui ont eu lieu ici aujourd'hui ou à la décision qui a été prise il y a quelque temps lorsque le projet de loi a été renvoyé au comité des banques. On se demandait à l'époque s'il était renvoyé à un comité ou deux comités.

Nous devons obtenir des éclaircissements sur ces deux questions.

L'honorable Dan Hays (leader adjoint du gouvernement): Honorables sénateurs, je voudrais répondre à ce rappel au règlement.

J'ai écouté le sénateur Kinsella. J'ignore au juste s'il s'inquiète de trois questions ou d'une seule. Il a tout d'abord soulevé la question de la signature nécessaire sur le projet de loi, et je crois comprendre qu'il s'est aperçu après avoir examiné le projet de loi qu'il ne portait aucune signature. Si je ne m'abuse, cette situation a été corrigée depuis.

La deuxième question consiste à savoir si le projet de loi a été bien étudié par le comité. Je crois comprendre, à la lumière de l'intervention du sénateur Tkachuk que, à son avis, une motion portant le renvoi du projet de loi a été adoptée.

La troisième question est de savoir si on a bien désigné un membre du comité chargé de déposer le projet de loi, soit le président, qui n'est pas ici et ne pouvait en faire rapport, le vice-président ou un autre membre du comité, en fait, le sénateur Hervieux-Payette, qui a parrainé le projet de loi. Je ne sais pas si cela va à l'encontre des convenances ou des procédures normales, mais je prétends que non. Un membre du comité peut déposer un rapport à la place du président, lorsque le vice-président est présent, même si on s'attend normalement à ce que le vice-président agisse en l'absence du président.

En ce qui concerne les paroles du président à la suite du dépôt du rapport, je vais les répéter. On m'en a transmis une copie.

Le sénateur Lynch-Staunton: Vous êtes bien le seul.

Le sénateur Hays: On y lisait:

Conformément à l'ordre spécial proposé avec la permission du Sénat et adopté le 24 novembre et nonobstant le paragraphe 97(4) du Règlement, le projet de loi est maintenant renvoyé au Comité sénatorial permanent des affaires étrangères.

Je l'ai reçu en entrant au Sénat. Je suis désolé que mon homologue n'en ait pas reçu une copie. Je vais m'assurer qu'il en reçoive une.

Je crois comprendre que cela visait à faire en sorte que cette mesure législative soit étudiée de façon ordonnée, selon les désirs du Sénat. J'essayais de voir à ce que le projet de loi soit étudié à la fois par le comité des banques et par celui des affaires étrangères en raison des questions qui ont été soulevées par les sénateurs relativement aux détails du projet de loi. Je ne m'arrêterai toutefois pas sur cette question.

L'honorable John Lynch-Staunton (chef de l'opposition): Honorables sénateurs, la question est de savoir si l'on peut permettre à un membre du comité de déposer un rapport sans l'autorisation du comité, si c'est bien le cas, alors que ce rapport est approuvé par le comité.

Le comité a décidé de faire rapport du projet de loi. Que je sache, personne n'a vu le projet de rapport, peut-être même pas le président ni le vice-président. Par souci des convenances et par respect pour leur poste, il aurait fallu au moins qu'ils voient le rapport ou en autorisent la divulgation. Sauf erreur, ce ne fut pas le cas, et madame le sénateur Hervieux-Payette n'a pas été officiellement autorisée à déposer le rapport. Je demande confirmation de ces faits.

Le sénateur Tkachuk: Non, cela ne s'est pas fait.

Le sénateur Lynch-Staunton: Deuxièmement, je ne veux pas que nous nous enlisions dans la procédure et j'espère que nous ne créons pas ici un précédent en renvoyant le projet de loi à plus d'un comité, mais je ne vois pas comment le Président peut être autorisé à renvoyer d'un comité à un autre, à l'étape des affaires courantes, un rapport qui n'a même pas été débattu ici. Je ne vois pas le lien que la présidence peut faire. Qu'on me corrige si je me trompe, mais je supposais, après les deux jours de débat consacrés à cette question, que le rapport serait déposé ici et que le Sénat déciderait de son sort. Il s'agit d'un rapport destiné au Sénat et non à la présidence. J'ignore ce qu'on entend par «ordre spécial». On constate, en relisant le débat, qu'il est dit simplement, comme le sénateur Hays l'a expliqué le deuxième jour en rectifiant des propos qui n'avaient pas été correctement transcrits dans le compte rendu officiel, que la question devait être renvoyée à un endroit, puis à l'autre.

L'hypothèse était que, pour aller d'un endroit à l'autre, il lui fallait être reconfirmé ici. La présidence a agi en notre nom, sans explication ni avertissement. J'ai toujours cru que, au bout du compte, c'était le Sénat qui décidait comment il fallait traiter les projets de loi et les rapports et où ils devaient aller. Dans ce cas-ci, toutefois, même si nous voulons que le rapport aille au comité des affaires étrangères, cela s'est fait sans que le Sénat ait son mot à dire. Le Sénat n'a jamais eu l'occasion d'examiner le rapport ni de voir ce qu'il y avait dedans.

Le sénateur Hays: Je voudrais présenter une autre observation au sujet du recours au Règlement, et plus particulièrement de la préoccupation exprimée par le sénateur Lynch-Staunton, à savoir si le projet de loi devait revenir ici avant d'être renvoyé au comité des affaires étrangères ou être transmis au comité des affaires étrangères après que le comité des banques en eut fini avec lui.

Je n'ai pas la citation exacte devant moi, mais je crois que la présidence avait interprété cela comme voulant dire qu'il irait d'abord au comité des banques puis que, une fois que le comité des banques en aurait fini avec lui, il irait au comité des affaires étrangères. Nous n'avons rien dit de plus, et il est raisonnable d'interpréter cela comme voulant dire qu'il irait directement au comité des affaires étrangères une fois que le comité des banques en aurait fini avec lui. Il est aussi possible d'interpréter cela à la façon du sénateur Lynch-Staunton. De toute manière, je crois savoir que le comité des affaires étrangères n'a pas commencé ses délibérations.

Le sénateur Lynch-Staunton veut-il ajouter quelque chose quant à son désir que la question soit maintenant entendue au Sénat plutôt qu'au comité des affaires étrangères?

(1530)

Le sénateur Tkachuk: Honorables sénateurs, puis-je aussi poser une question à cet égard? Je crois qu'il y a un recours au Règlement qui me concerne aussi.

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, je suppose que nous débattons d'un recours au Règlement, et tout le monde peut prendre la parole concernant un recours au Règlement.

Le sénateur Tkachuk: Je n'ai pas eu l'occasion de demander au sénateur Kroft, qui comme moi est membre du comité directeur du comité des banques, s'il savait que le sénateur Hervieux-Payette avait déposé le rapport à la Chambre aujourd'hui.

Son Honneur le Président: Je suis désolé, mais la question au sénateur Kroft n'est pas recevable pour l'heure. Toutefois, s'il veut y répondre et si le Sénat veut bien l'entendre, il n'en tient qu'à lui.

Le sénateur Tkachuk: Il serait peut-être utile que j'explique la raison de ma démarche. Le sénateur Kinsella a soulevé un point intéressant. Je ne suis ici que depuis six ans, mais j'ai été président du comité des finances pendant un certain temps, tandis que le sénateur Kirby était président du comité des banques. Si je ne pouvais pas déposer un rapport, je demandais, en tant que président, au sénateur De Bané de le faire à ma place. Quand nous ne pouvions ni l'un ni l'autre être ici, nous prenions un autre arrangement. C'est la même chose avec le sénateur Kirby. Ou bien il déposait le rapport, ou bien il me demandait de le faire à sa place. Si nous n'avions pu le faire ni l'un ni l'autre, nous nous serions entendus sur la personne à désigner pour ce faire - si besoin était.

Le sénateur Kirby et moi-même n'avions pas de comité directeur. Nous formions à nous deux le comité directeur, et nous nous en tirions très bien. Je me demande si le sénateur Kroft le savait. Voilà qui nous permettrait de comprendre comment il se fait que cela se soit produit sans que j'en sache rien ni n'y appose ma signature.

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, je n'étais pas au fauteuil, mais je crois savoir que nous sommes maintenant saisis de deux rappels au règlement.

Le sénateur Lynch-Staunton: Ils se ramènent à un seul. Votre Honneur a décidé lors des affaires courantes - moment où l'on ne peut ni invoquer le Règlement ni soulever un élément de discussion sans en avoir obtenu la permission - d'envoyer à un autre comité un rapport de comité qui venait tout juste d'être déposé. Le Règlement prévoit qu'au moins un jour doit s'écouler entre le dépôt d'un rapport et la troisième lecture. Dans ce cas-ci, de toute évidence, nous ne pouvions pas passer à la troisième lecture, mais nous n'avons même pas pu voir le rapport. Il a été déposé puis retiré de la table, et le voilà disparu. J'avais espéré que, si Votre Honneur devait rendre une décision, vous l'auriez fait lors de l'ordre du jour, auquel cas nous aurions pu alors recevoir une explication concernant cette décision exceptionnelle. En passant, ce n'est pas nous qui avons créé cette situation.

En second lieu, le sénateur Hervieux-Payette n'ayant pas été officiellement autorisée par le comité à présenter le rapport, le rapport a-t-il effectivement été présenté en bonne et due forme?

Le sénateur Kinsella: Honorables sénateurs, ce rappel au Règlement comporte plusieurs éléments.

Concernant l'analyse du projet de loi par le comité des banques, son examen article par article et son rapport au Sénat, j'ai été jusqu'à la table pour consulter le rapport déposé. Un rapport s'y trouvait effectivement, mais il ne portait pas la signature du sénateur qui l'avait présenté, ce qui a suscité en moi une interrogation, à savoir quelle était la marche à suivre. Le rapport n'a été déposé ni par le président ni par le vice-président. À moins que le procès-verbal des travaux du comité ne mentionne qu'un autre sénateur a été chargé de le présenter - et je ne l'ai pas sous les yeux -, je ne sais trop si le rapport a été déposé au Sénat en bonne et due forme ou pas.

L'autre question, qui est inhabituelle, et tout le monde en conviendra, tient au fait que, par ordre du Sénat, le rapport doit être envoyé à deux comités plutôt qu'à un seul. La décision de le faire examiner par le comité des banques s'expliquait par une série de préoccupations soulevées à l'étape de la deuxième lecture et qui concernaient des questions fiscales, ce qui correspond tout à fait aux compétences du comité des banques.

Honorables sénateurs, si le Sénat est saisi de ce rapport en bonne et due forme, nous devons en débattre et décider si la partie du projet de loi portant sur les questions que le comité des banques était censé examiner a été acceptée ou non. Le projet de loi sera ensuite renvoyé au comité des affaires étrangères, conformément à l'ordre adopté plus tôt. Nous devrions étudier le rapport du comité des banques avant de renvoyer le projet de loi au comité des affaires étrangères parce qu'il est possible qu'il y ait un lien entre les problèmes d'imposition qu'a examinés le comité des banques et les questions liées aux affaires étrangères - notamment, les questions relatives aux droits de la personne qui ont fait partie des points examinés à l'étape de la deuxième lecture. Toutes ces questions devraient être examinées.

Honorables sénateurs, il est possible que nous agissions de façon un peu prématurée. Un rapport seulement a été déposé. Nous ne l'avons pas examiné. Il existe, à mon avis, un lien substantiel entre l'analyse du rapport et l'analyse du projet de loi, qui serait ensuite renvoyé au comité des affaires étrangères. C'est ce qui m'a amené à m'interroger sur la recevabilité de la question.

Le sénateur Hays: Honorables sénateurs, j'ai déjà dit ce que je pensais de la recevabilité du travail effectué par le comité des banques et la question exposée par le sénateur Lynch-Staunton. Toutefois, je trouve l'argument du sénateur Kinsella très intéressant. Si je comprends bien, il dit que nous ne devrions pas avoir renvoyé le projet de loi à deux comités. Nous aurions dû le renvoyer seulement au comité des banques qui aurait dû nous le renvoyer pour que nous puissions examiner le rapport et laisser au Sénat le soin de décider quoi faire du projet de loi.

Pour ce qui est du jour - je n'arrive pas à remettre la main sur le compte rendu des délibérations de ce jour-là - des membres des deux comités ont formulé le désir de se pencher sur la question, surtout en raison de la nature du projet de loi et d'un des éléments du projet de loi qui a trait aux droits de la personne. Nous avons essayé de faire en sorte que le projet de loi soit renvoyé à deux comités successivement. Le comité des banques se serait penché sur le premier projet de loi. Les termes que nous avons utilisés alors étaient en prévision de ceci. Après avoir été examiné par le comité des banques, le projet de loi devait être renvoyé au comité des affaires étrangères.

La question est la suivante: que fait le Sénat ou comment traite-t-il le produit du travail du comité? Mon interprétation des déclarations à ce sujet et de toutes les choses que nous avons faites jusqu'ici, sur le fait que le rapport n'ait pas été signé et sur la question de savoir s'il est conforme au Règlement ou non qu'un membre du comité autre que le président ou le vice-président présente un rapport sans une motion spécifique - et je dirais que cela ne constitue pas un obstacle - c'est que nous voulons que le projet de loi soit renvoyé à deux comités et que les rapports des deux comités nous reviennent pour être étudiés en même temps. Si cela est fait, le sénateur Kinsella n'aura plus lieu de s'inquiéter. Rétrospectivement, je dirais que les suggestions de l'honorable sénateur étaient peut-être la manière correcte de procéder - c'est-à-dire que nous n'aurions peut-être pas dû renvoyer le projet de loi aux deux comités l'un après l'autre. Toutefois, puisque nous avons procédé ainsi, ce qui arrive est exactement ce que nous devions faire pour parvenir au résultat souhaité, à savoir avoir devant nous le travail des deux comités afin de pouvoir l'examiner. Or, pour faire cela, nous devons avoir les deux rapports devant nous en même temps.

Son Honneur le Président: Y a-t-il quelque autre honorable sénateur qui souhaite prendre la parole au sujet du rappel au Règlement? Sinon, je vais prendre la question en délibéré. Je n'étais pas ici la semaine dernière lorsque la question a été soulevée pour la première fois et je n'ai pas entendu tous les arguments.

(1540)

Toutefois, j'aimerais rappeler aux sénateurs que lorsqu'un projet de loi est renvoyé à un comité, ce dernier doit faire un rapport. S'il le rapport est déposé sans propositions d'amendement, je pose alors d'office la question suivante: quand lirons-nous ce projet de loi une troisième fois? Aucun amendement et aucune motion ne sont déposés à ce moment. Il n'y a pas de discussion. C'est la situation qui prévaut à l'heure actuelle. Toutefois, je vais me pencher sur la question et je vous en rendrai compte dès que possible.


ORDRE DU JOUR

Les travaux du Sénat

L'honorable Dan Hays (leader adjoint du gouvernement): Nous passons maintenant aux affaires du gouvernement et j'aimerais, au nom des sénateurs du parti ministériel, appeler le premier article pour considération, soit le rapport du Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie portant sur le projet de loi C-6.

Projet de loi sur la protection des renseignements personnels et les documents électroniques

Adoption du rapport du comité

Le Sénat passe à l'étude du quatrième rapport du Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie (projet de loi C-6, Loi visant à faciliter et à promouvoir le commerce électronique en protégeant les renseignements personnels recueillis, utilisés ou communiqués dans certaines circonstances, en prévoyant l'utilisation de moyens électroniques pour communiquer ou enregistrer de l'information et des transactions et en modifiant la Loi sur la preuve au Canada, la Loi sur les textes réglementaires et la Loi sur la révision des lois), déposé plus tôt aujourd'hui.

L'honorable Michael Kirby propose: Que le rapport soit adopté.

- Honorables sénateurs, à titre de parrain du projet de loi C-6 et de président du Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie qui a déjà consacré beaucoup de temps à l'étude du sujet traité dans le projet de loi C-6 et qui a récemment étudié le projet de loi lui-même après que le Sénat en eut fait la deuxième lecture, j'interviens dans ce débat sur le rapport produit par le comité sur le projet de loi C-6. Mes commentaires aujourd'hui porteront principalement sur le projet de loi en général, mais également et plus particulièrement sur les amendements au projet de loi qui sont proposés dans le rapport du comité déposé au Sénat plus tôt cet après-midi.

Dans le contexte de l'économie mondiale, l'information est devenue une marchandise importante et précieuse. Alors qu'auparavant les gouvernements étaient considérés comme les principaux collecteurs et détenteurs de renseignements personnels, de nos jours, le secteur privé joue un rôle de plus en plus important dans ce domaine. Depuis l'apparition de réseaux comme Internet, la divulgation et la distribution des renseignements personnels est devenue une source d'inquiétude pour les Canadiens qui craignent de voir leur vie privée se rétrécir à mesure que ces réseaux s'étendent.

Au Canada, le gouvernement fédéral et la plupart des gouvernements provinciaux ont déjà des lois qui traitent de la collecte, de l'utilisation et de la divulgation de renseignements personnels par le secteur privé, mais seul le Québec a promulgué une loi sur la protection des renseignements personnels qui régit le secteur privé. Certaines organisations ont adopté des codes volontaires relativement à la collecte et à l'utilisation des renseignements personnels, mais l'utilisation de ces codes n'est pas répandue et n'est pas uniforme d'un océan à l'autre.

En 1996, le gouvernement fédéral s'est engagé à élaborer une loi pour protéger les renseignements personnels recueillis par le secteur privé. L'objectif du gouvernement était alors de légiférer avant le début de l'an 2000. Le projet de loi C-6 découle de cet engagement.

Un projet de loi qui cherche à protéger les renseignements personnels doit nécessairement tenir compte du droit d'une personne de savoir et d'accepter que des renseignements à son sujet seront recueillis, utilisés ou divulgués à certaines fins. Le projet de loi C-6 vise l'équilibre entre des objectifs conflictuels, à savoir, d'une part, ce droit d'une personne de consentir à fournir des renseignements et de comprendre pourquoi des renseignements sont recueillis et comment ils seront utilisés et, d'autre part, la nécessité d'assurer un fonctionnement adéquat et efficient de l'économie.

Honorables sénateurs, à l'exception du seul amendement proposé dans le rapport du comité, je peux vous assurer que l'étude du projet de loi C-6 en comité a montré qu'il s'agit d'une mesure législative remarquable. Le gouvernement a produit un véritable chef-d'oeuvre sur le commerce électronique. Le projet de loi réalise ce difficile équilibre entre le monde des affaires et les intérêts des consommateurs.

Honnêtement, honorables sénateurs, je n'ai jamais vu un projet de loi que les entreprises et les groupes de consommateurs sont tout autant impatients de voir adopté. Tous les représentants d'entreprises, de consommateurs, de firmes technologiques, de compagnies d'assurance, de banques, et même d'évaluation du crédit, qui ont témoigné devant le comité ont réclamé l'adoption rapide du projet de loi. Tous ces intervenants conviennent qu'il représente un ensemble juste et raisonnable de pratiques d'information. En effet, des témoins de tous les secteurs de l'économie canadienne, à l'exception du secteur de la santé, ont employé des expressions comme «équilibre délicat», «résultat d'années et de mois de négociation», «très bon consensus», et cetera, pour décrire ce projet de loi et demander son adoption avec célérité.

Les témoins qui ont adopté ce point de vue comprenaient non seulement des représentants du secteur des entreprises, mais aussi, par exemple, des défenseurs des droits civils et des experts en protection des renseignements personnels. Bref, le ministre de l'Industrie a accompli un travail remarquable pour dégager un consensus au sujet d'une situation très compliquée et très délicate. Il est parvenu à ce consensus dans un laps de temps relativement court, 18 mois, auprès d'un vaste pan de l'économie canadienne.

Par conséquent, honorables sénateurs, si ce projet de loi est aussi bon que je viens de le dire, pourquoi le comité y a-t-il proposé un amendement? C'est à cette question que je crois devoir consacrer la majeure partie de mes observations. C'est parce que, en dépit du soutien massif des entreprises et des consommateurs, un secteur très important s'oppose à l'unanimité à son adoption, pour l'instant. Bref, un secteur, celui de la santé, est tout autant unanime dans son opposition au projet de loi.

Il est clair que l'ensemble du secteur de la santé ne faisait pas partie de l'admirable consensus dont j'ai parlé il y a un instant. En effet, même au sein de ce secteur, il n'y a absolument aucun consensus sur ce que devrait être la bonne solution, en ce sens qu'il ne s'est pas présenté comme un groupe homogène qui réclamait un ensemble précis d'amendements. Il a réclamé toutes sortes d'amendements. Permettez-moi de vous donner quelques exemples pour illustrer la situation.

Certains témoins ont recommandé que les renseignements sur la santé soient complètement exclus du projet de loi. D'autres, comme les porte-parole de l'Association médicale canadienne et de l'Association dentaire canadienne, estimaient que le projet de loi ne protégeait pas suffisamment les renseignements personnels sur la santé. D'autres se demandaient si les dispositions relatives au consentement étaient suffisantes puisqu'elles ne parlaient pas précisément de consentements informés et réels.

Tous les membres du secteur de la santé qui ont témoigné devant le comité avaient des doutes quant à la portée et à l'application du projet de loi. Tous craignaient que le projet de loi, en ce qui concerne le secteur de la santé, ne crée ce qu'ils appelaient un système de protection des renseignements personnels à deux vitesses; en effet, à cause de la façon dont le projet de loi est structuré, une série de règles s'appliqueraient initialement à un établissement du secteur public de la santé comme un hôpital, par exemple, ou à un laboratoire fonctionnant au sein de cet hôpital, tandis que les établissements du secteur privé, comme le laboratoire où beaucoup d'entre nous allons habituellement pour subir des tests ou donner du sang servant aux analyses et ainsi de suite, seraient assujettis à une autre série de règles. Tous les représentants du secteur de la santé qui ont témoigné devant le comité se sont dits très préoccupés, bien que sous des angles différents, à propos de la nature du système à deux vitesses qui en résulterait pour la réglementation de la protection des renseignements personnels.

Les préoccupations que j'ai présentées schématiquement, honorables sénateurs, viennent de milieux très divers, par exemple des médecins, des dentistes, des pharmaciens, des infirmières, des hôpitaux, des laboratoires médicaux, des milieux de la recherche médicale, des ministères provinciaux de la Santé, des responsables de l'accréditation des services de santé, et autres.

À dire vrai, honorables sénateurs, aucun des groupes du milieu de la santé qui ont comparu devant le comité ou lui ont fait parvenir un mémoire n'était favorable à l'adoption du projet de loi dans sa forme actuelle. Le comité a également été troublé par le témoignage de nombreux représentants du secteur de la santé qui ont dit ne pas avoir joué un rôle sérieux dans les consultations qui ont précédé le dépôt du projet de loi. Certains d'entre eux ont même déclaré au comité qu'ils avaient communiqué avec les responsables gouvernementaux il n'y a guère que huit ou neuf mois, et qu'ils s'étaient fait répondre qu'il n'y avait pas lieu de s'inquiéter de ce projet de loi parce qu'il portait en fait sur le commerce électronique et non sur le secteur de la santé.

(1550)

Par conséquent, honorables sénateurs, le consensus si admirable que le ministre a réussi à dégager en très peu de temps dans le reste de l'économie, soit environ 18 mois, n'englobait pas le secteur de la santé parce que le projet de loi devait porter sur le commerce électronique. Il s'ensuit qu'on n'a pas songé sur le coup à inclure le secteur de la santé parmi ceux qui devaient jouer un rôle essentiel dans les négociations.

Le secteur de la santé présente une seconde caractéristique propre. Les secteurs public et privé y sont beaucoup plus intimement liés que dans tout autre secteur de l'économie canadienne. De nombreux services de santé sont à la charge de l'État, mais les personnes et les organisations qui les fournissent concrètement peuvent appartenir au secteur privé, au secteur public ou encore au secteur du bénévolat. Il existe donc des liens beaucoup plus étroits entre secteur public et secteur privé que ce n'est le cas dans quelque autre domaine de l'économie canadienne.

Or, honorables sénateurs, le secteur des soins de santé hésite beaucoup à prendre le projet de loi tel qu'il est. Ce qui est intéressant, toutefois, c'est qu'il n'y a pas que les défenseurs des soins de santé qui s'inquiètent du manque de clarté quant aux effets de ce projet de loi sur le secteur des soins de santé. D'autres personnes aussi sont inquiètes. Valerie Steeves, éminente spécialiste de la protection de la vie privée, a dit au cours de son témoignage que, à son avis, ce projet de loi concernait, en fait, le commerce électronique. Elle l'a qualifié de projet de loi de commerce électronique et non de pur projet de loi de protection de la vie privée, une opinion que partagent d'autres témoins experts. En fait, le ministre de l'Industrie a appuyé implicitement ce raisonnement lorsqu'il a comparu devant le comité des affaires sociales, jeudi dernier, à propos de l'application du projet de loi C-6 à l'information sur la santé et a dit que, dans les trois années suivant l'entrée en vigueur du projet de loi, son incidence sur le secteur des soins de santé serait limitée. Il a soutenu que cette incidence serait tellement limitée qu'elle ne justifiait nullement de retarder l'application de ce projet de loi pour clarifier son incidence sur le secteur des soins de santé.

Honorables sénateurs, les membres du comité ont compris les arguments du ministre et les faits sur lesquels ils étaient fondés, et ils en sont pourtant arrivés à une conclusion totalement différente. Le comité continue de craindre que ce projet de loi de commerce électronique n'ait des effets secondaires obscurs et imprévus; plus important encore, le comité voudrait surtout connaître la nature probable de ces effets secondaires. En effet, l'incidence probable du projet de loi sur le secteur des soins de santé est loin d'être claire.

S'il est vrai, comme l'a fait valoir le ministre, que le projet de loi n'aura des répercussions que sur une infime partie du secteur des soins de santé dans les trois premières années suivant sa proclamation, il est donc possible, pendant un certain temps, de clarifier les effets qu'il aura sur les renseignements particulièrement délicats et personnels sur la santé des gens, sans compromettre ses répercussions sur le vaste secteur commercial qui reste. Puisque, avec cet amendement, le projet de loi n'aura des répercussions sur le secteur public des soins de santé que trois ans après son entrée en vigueur, nous donnons au gouvernement et aux parties concernées la possibilité d'élaborer des règles et des règlements qui garantiront aux Canadiens que les renseignements personnels sur leur santé seront traités convenablement par les intervenants du milieu de la santé.

Honorables sénateurs, compte tenu de cette possibilité et du fait que tous les autres secteurs de l'économie canadienne étaient unanimes à souhaiter que le projet de loi soit adopté rapidement, le comité s'est alors demandé s'il y avait une façon de donner satisfaction à ceux qui souhaitaient une adoption rapide du projet de loi, tout en répondant aux réserves exprimées par le secteur des soins de santé.

Le comité a rejeté à l'unanimité l'idée de soustraire entièrement à l'application du projet de loi sur la protection des renseignements personnels le secteur des soins de santé, comme l'ont proposé certains témoins. Il a toutefois jugé opportun de prévoir une brève période afin de déterminer s'il est possible d'arriver à un consensus sur les modifications à apporter au projet de loi pour rendre ses répercussions sur le secteur des soins de santé justes et équitables. La question suivante s'est alors posée: pendant combien de temps devrait-on laisser se poursuivre les négociations à ce sujet?

Jeudi dernier, nous avons entendu différents témoins représentant le secteur des soins de santé. De toute évidence, ils se sont concertés avant de venir témoigner, car ils ont tous proposé exactement le même amendement; ils ont tous proposé d'attendre cinq ans avant d'assujettir le secteur des soins de santé aux dispositions du projet de loi.

Compte tenu de l'importance capitale des renseignements personnels en matière de santé et de la nécessité que ces derniers soient protégés par la loi sur la protection des renseignements personnels, le comité estime que cinq ans, c'est bien trop long. Nous avons opté plutôt pour un délai d'un an après la proclamation, ou de deux ans à compter du jour où le projet de loi reçoit la sanction royale. Le ministre a déjà dit que la loi ne sera proclamée qu'un an après avoir reçu la sanction royale, de sorte que notre proposition est que le délai soit de deux ans après la sanction royale ou d'un an après la proclamation. À notre avis, un délai de deux ans devrait être suffisant pour permettre aux parties intéressées du secteur de la santé et aux fonctionnaires des ministères de la Santé et de l'Industrie d'en arriver à un consensus sur les modifications à apporter au projet de loi pour qu'il influe efficacement sur le secteur de la santé et pour dissiper une bonne partie de l'incertitude qui l'entoure maintenant.

Nous croyons aussi, honorables sénateurs, que la structure de notre amendement présente un important avantage sur le plan de la négociation. En effet, nous proposons, dans cet amendement, que si, deux ans après la sanction royale ou un an après la proclamation, aucun consensus ne s'est dégagé et qu'aucune modification n'a été présentée, le projet de loi tel que libellé entrera en vigueur dans le secteur de la santé. Par conséquent, honorables sénateurs, nous croyons que cette mesure inciterait modérément le secteur de la santé à en arriver à un consensus afin d'éviter tous les problèmes dont il dit s'inquiéter. Le fait d'imposer une date limite à laquelle le projet de loi entrera en vigueur à moins qu'un consensus ne soit atteint serait un moyen très efficace.

Je dois dire, honorables sénateurs, que le comité a fait un travail remarquable en un très court laps de temps. Nous avons eu beaucoup d'heures d'audiences. Nous avons entendu 25 témoins, ce qui est à peu près la moitié des gens qui avaient demandé au départ à être entendus. Dans les derniers jours des audiences, d'autres personnes se sont présentées en demandant à être entendues. Il est donc devenu évident pour le comité que, si nous voulions trouver une solution acceptable au problème du secteur de la santé en gardant le projet de loi au Sénat jusqu'à ce qu'une solution négociée puisse être trouvée, il faudrait beaucoup de temps. Il nous aurait fallu entendre tous les témoins et tenter de parvenir à un consensus. Si nous avions choisi cette voie, le projet de loi ne deviendrait pas loi et il ne s'appliquerait pas à tous les autres secteurs de l'économie canadienne qui le souhaitent.

Par conséquent, nous avons jugé que la chose logique à faire était de ne pas retarder l'application de la loi à tous les secteurs de l'économie qui souhaitent que le projet de loi soit adopté, mais d'en retarder l'application à un seul secteur et pendant un an seulement après la proclamation.

Ce sont là, honorables sénateurs, les fondements du rapport. Si vous voulez une analyse plus détaillée des témoignages entendus par le comité, qui, à mon avis, vont dans le sens des conclusions du comité, je vous renvoie à la deuxième partie du rapport du comité, qui a été déposé au Sénat hier. J'exhorte les honorables sénateurs à lire cette partie du rapport.

Je le répète, nous estimons qu'un report d'un an après la proclamation, soit deux ans après la sanction royale, permettra la tenue de négociations très pointues entre les ministères de la Santé et de l'Industrie et le secteur de la santé.

En terminant, honorables sénateurs, je voudrais aussi parler de la Loi sur la protection des renseignements personnels. Le commissaire à la protection de la vie privée a fait une observation intéressante lors de son passage devant le comité. Il a souligné qu'il y avait des écarts majeurs entre le projet de loi C-6 et la Loi sur la protection des renseignements personnels. Par exemple, selon la Loi sur la protection des renseignements personnels, on peut s'adresser à la Cour fédérale uniquement dans les cas où l'accès à des dossiers a été refusé. Les plaintes concernant la collecte, l'utilisation ou la communication de renseignements par une institution gouvernementale ne peuvent faire l'objet d'un renvoi devant la Cour fédérale. Pourtant, aux termes du projet de loi C-6, les plaintes concernant la collecte, l'utilisation ou la communication de renseignements par le secteur privé peuvent faire l'objet d'un appel devant la Cour fédérale.

(1600)

Honorables sénateurs, en tant que parlementaires, il va sans dire que nous devons imposer aux institutions gouvernementales et aux institutions privées les mêmes exigences en matière de protection de la vie privée. Le comité en est venu à la conclusion que, si le projet de loi C-6 entrait en vigueur, il faudrait mettre à jour la Loi sur la protection des renseignements personnels pour que les institutions gouvernementales et les institutions privées soient au moins assujetties aux mêmes exigences en matière de protection des renseignements personnels.

Toujours sur cette question, honorables sénateurs, si le projet de loi préconise un programme de sensibilisation du public par le commissaire à la protection de la vie privée et si le projet de loi C-6 impose de nouvelles responsabilités et élargit considérablement le mandat du Commissaire à la protection de la vie privée, il va de soi, encore une fois, qu'une partie inhérente du rapport du comité recommande d'affecter des ressources additionnelles au Commissaire à la protection de la vie privée pour qu'il s'acquitte de son mandat élargi.

En terminant, honorables sénateurs, je signale que le comité a tenté d'établir un équilibre tel que l'application de ce projet de loi à la vaste majorité de l'économie canadienne - ou au plus grand nombre de secteurs économiques - se ferait sans tarder et que, pour une période très brève, disons un an après la proclamation du projet de loi, cette application ne toucherait pas le secteur des soins de santé dans l'espoir que, dans les 24 mois subséquents, nous pourrions arriver à une solution négociée concernant ce projet de loi.

Voilà, honorables sénateurs, dans quel contexte se situe le projet de loi. L'amendement a été adopté à l'unanimité au comité. Aucun sénateur n'a formulé d'opinion dissidente concernant l'amendement proposé. Par conséquent, honorables sénateurs, je vous invite à adopter le rapport du comité.

L'honorable Donald H. Oliver: L'honorable sénateur accepterait-il de répondre à une question?

Le sénateur Kirby: Oui.

Le sénateur Oliver: Vous avez dit tout au long de votre intervention qu'il n'y avait qu'un secteur qui ne faisait pas l'objet d'un consensus et que c'était le secteur des soins de santé. Vous avez également déclaré qu'une partie de la réponse résidait dans le fait qu'il est conçu comme un projet de loi sur le commerce électronique et non sur les soins de santé.

Qu'est-ce qui est allé de travers et quelle leçon peut tirer le Sénat de ce processus? Comment peut-on s'assurer que cela ne se reproduira pas? Nous amendons là un projet de loi et nous le renvoyons à l'autre Chambre. Qu'est-ce qui est allé de travers durant ce processus?

Le sénateur Kirby: Je ne peux qu'échafauder des hypothèses sur cela. Votre question est excellente. Vous comprendrez que nous nous sommes concentrés sur la teneur du projet de loi et sur la réaction qu'elle suscite chez les gens, étant donné le peu de temps dont nous disposions et notre désir de terminer rapidement notre étude. Ce que je m'apprête à dire est tiré de divers extraits de témoignages plutôt que d'une conclusion détaillée.

Premièrement, le projet de loi a tout d'abord été un projet de loi sur le commerce électronique et sur la protection des renseignements personnels dans le commerce électronique. Lorsqu'on pense au commerce électronique, on ne pense pas immédiatement au secteur des soins de santé au Canada, car il est subventionné par l'État. C'est normalement ce que l'on pense. Si nous devions citer tous les secteurs liés au commerce électronique, même si nous pensions au secteur des soins de santé, la plupart d'entre nous l'écarteraient. On peut donc comprendre qu'il n'ait pas été au premier plan des négociations initiales.

La seconde chose qui distingue le projet de loi est qu'il s'applique aux activités commerciales du secteur privé. De nouveau, lorsqu'on pense aux activités commerciales, on n'est pas enclin à penser instinctivement au secteur des soins de santé. Toutefois, lorsqu'on est contraint de réfléchir à la question, on prend conscience du fait que des laboratoires et autres ont des activités commerciales. Néanmoins, lorsque la question des activités commerciales est soulevée pour la première fois, on ne pense pas immédiatement qu'il y a un grand nombre de sociétés commerciales dans le secteur des soins de santé.

Enfin, il y a un facteur dans le domaine de la santé qui n'existe nulle part ailleurs: un grand nombre d'établissements publics et privés offrent des services identiques. Les laboratoires offrent un exemple patent. Il y a également des services de praxithérapie et des services de diagnostic. Nous ne considérons pas qu'ils sont différents, car ce sont les mêmes gens qui paient la note.

Aussi, je crois que cela a été un oubli de bonne foi. Il convient peut-être de noter que lorsque ce projet de loi a été étudié par le comité de l'industrie de la Chambre des communes - et pour montrer l'intérêt que ce projet de loi a suscité, je tiens à vous signaler qu'il y a eu 18 jours d'audiences là-dessus - on a consacré très peu de temps à la santé peu de témoins avaient demandé à comparaître devant le comité. On a beaucoup plus parlé des soins de santé devant le comité sénatorial que devant le comité de la Chambre, ce qui n'est en rien une critique du comité de la Chambre. Personne dans le secteur de la santé n'avait compris que ce projet de loi aurait d'importantes répercussions dans ce secteur.

En partie, alors qu'on entre dans de nouveaux domaines commerciaux comme le commerce électronique et le reste, les barrières traditionnelles entre les divers secteurs de l'économie s'effondrent. À l'avenir, lorsque nous examinerons des projets de loi touchant ces nouveaux types de systèmes de communication, ce que le commerce électronique est en fait, nous devrons veiller à adopter des mesures exhaustives et à regrouper tous les intéressés. Je ne pense pas que qui que ce soit devrait être à blâmer, car il n'y a pas de bouc émissaire. Une série de choses s'est produite avec le temps ici, la meilleure preuve de cela résidant dans le fait que la présidente-directrice générale de l'Association canadienne des soins de santé, Sharon Sholzberg-Gray, a déclaré qu'elle s'est rendue au ministère de la Santé pas plus tard qu'en avril ou mai dernier et qu'on lui a dit de ne pas s'inquiéter, que ce projet de loi ne s'appliquait pas à son organisation.

Honorables sénateurs, une série de choses se sont produites ici par inadvertance. C'est un excellent projet de loi, mais le comité pense qu'il est sensé s'attaquer à ce problème. Par contre, si on adopte le projet de loi sans amendement, on impose un projet de loi à un secteur important de la société canadienne à l'encontre des souhaits de toutes les organisations du secteur. Nous croyons que ce n'est probablement pas une bonne façon d'établir la politique publique.

Le sénateur Oliver: Cela m'amène à ma seconde question. Un certain nombre de témoins du secteur de la santé qui ont comparu ont déclaré qu'une solution possible pour eux consisterait à annexer leur code tel que rédigé ou amendé. Pouvez-vous nous expliquer pourquoi le comité n'a pas accepté ces instances venant d'un certain nombre de témoins du domaine médical?

Le sénateur Kirby: Oui. C'est une bonne question. Le meilleur exemple est celui de l'Association médicale canadienne, qui avait dit que nous devrions intégrer son code au projet de loi. Le problème, c'est que vous ne pouvez le faire rapidement. Pourquoi retenir le code de l'Association médicale canadienne et non pas celui de l'Association des dentistes ou des pharmaciens? Chacun a son code de protection des renseignements personnels. Dès l'instant où vous posez cette question, vous embarquez dans le processus détaillé de négociations et d'établissement d'un consensus qui est exigé, comme je l'ai dit. Le comité a conclu que, bien qu'on puisse agir de la sorte, cela prendrait manifestement plusieurs mois. Nous avons donc privilégié l'adoption du projet de loi relativement aux secteurs de l'économie où tout est dans l'ordre et de consacrer les 24 mois suivants à l'établissement d'un consensus. Il est vrai que plusieurs des organismes professionnels et institutionnels ont mentionné qu'ils possèdent déjà un code de protection des renseignements personnels, de sorte que les membres du comité envisageaient avec optimisme la possibilité que l'on puisse élaborer, au cours de cette période de 24 mois, à partir de ces divers codes, un ensemble de codes qui feraient consensus et qui s'appliqueraient au secteur des soins de santé. À notre avis, il était préférable d'agir de la sorte plutôt que de prendre le code de l'un des groupes, puis de l'adopter et de l'appliquer à tous.

(1610)

L'honorable Lowell Murray: Honorables sénateurs, je reprends là où les sénateurs Oliver et Kirby ont arrêté.

Premièrement, les gens du secteur de la santé nous ont en général dit qu'ils n'ont pas participé à l'élaboration du code de l'Association canadienne de normalisation sur lequel le projet de loi est fondé. Deuxièmement, comme le sénateur Kirby l'a mentionné, certains d'entre eux estiment qu'un membre du gouvernement leur a laissé entrevoir que le projet de loi ne s'appliquerait pas au secteur des soins de santé. En réalité, il semble qu'il ne s'applique pas à de vastes pans du secteur de la santé, soit les volets «non commerciaux», y compris aux liens professionnels entre le patient et le médecin, le patient et l'hôpital, et cetera. Quoi qu'il en soit, lorsque vous cherchez à dissocier les activités commerciales des activités non commerciales dans le secteur de la santé, il devient très difficile de déterminer où et comment fonctionnera le projet de loi. Ces deux facteurs ont été fort importants en ce qui concerne le secteur de la santé.

Quant à la possibilité de publier le code de déontologie des médecins et des dentistes ou de quelque autre profession en annexe au projet de loi, je dois dire que j'ai été grandement tenté de le proposer. À la lecture de ces codes, il est clair qu'ils forment un ensemble de normes plutôt supérieur au code issu d'un consensus de l'Association canadienne de normalisation. Je crois cependant que, même si nous avions décidé de le faire, nous nous serions engagés en terrain constitutionnel très peu sûr. On aurait laissé entendre que nous voulions légiférer et réglementer à l'égard des professions, un domaine qui relève dans la plupart des cas de la compétence exclusive des provinces.

Honorables sénateurs, il est inutile pour moi d'essayer d'ajouter quoi que ce soit à ce que nous avons entendu de la part du président du comité sous forme d'explication, de contexte ou de justification pour l'amendement dont nous sommes saisis. Son intervention à cet égard a été complète et précise, et je me contenterai de dire que je suis entièrement d'accord avec tout ce qu'il a dit. J'espère que l'amendement saura gagner l'approbation du Sénat et finalement du gouvernement et de la Chambre des communes.

Je profite cependant de l'occasion pour remercier le président du comité de nous avoir conduits à bon port et avec succès, jusqu'à présent, tout au long d'un examen très attentif d'une mesure législative très importante à laquelle nous avons consacré une vingtaine d'heures. Je le remercie de nous avoir menés à une solution; bien qu'elle n'ait peut-être pas été la solution préférée de tous ceux qui ont témoigné devant le comité ni même de tous les membres du comité, elle représente néanmoins un compromis honorable et pratique qui, je le répète, saura gagner l'approbation du Sénat et du gouvernement. La tâche n'a pas été facile pour lui, et nous tous, membres du comité, apprécions sa patience et son leadership.

Je le répète, je n'ajouterai rien à l'explication et au contexte qu'il nous a exposés concernant le secteur de la santé. Je tiens cependant à signaler un autre aspect du projet de loi. Ce n'est pas un point sur lequel le comité s'est prononcé, mais il s'agit d'une chose qui me préoccupe beaucoup. Je vous la signale uniquement pour vous demander d'y réfléchir ce soir car j'ai l'intention d'y revenir à l'étape de la troisième lecture afin de proposer tout probablement un amendement.

Honorables sénateurs, selon une disposition de ce projet de loi, des renseignements très personnels recueillis par des entreprises commerciales dans le cadre de leurs activités peuvent être communiqués 20 ans après le décès des personnes en question. À mon avis, cette disposition est indéfendable et, si je le peux, j'entends proposer qu'elle soit supprimée du projet de loi au moment de sa troisième lecture. J'ai demandé à divers témoins qui ont comparu devant le comité - du ministre au commissaire à la protection de la vie privée, en passant par toutes sortes de défenseurs des droits à la protection des renseignements personnels - de justifier le bien-fondé de cette disposition, et aucun d'eux n'a pu le faire. La seule explication qu'ils ont pu donner, c'est qu'il existe une disposition parallèle dans la Loi sur la protection des renseignements personnels, une disposition qui traite des renseignements recueillis par le gouvernement fédéral et ses organismes. Il peut exister quelque raison valable, dans la politique gouvernementale, pour prévoir une telle disposition en ce qui a trait aux renseignements recueillis par le gouvernement - je l'ignore et je voudrais y revenir plus tard -, mais je ne peux imaginer aucun motif justifié de communiquer, à quelque moment que ce soit, des renseignements personnels sur des cartes de crédit, sur une hypothèque, sur des comptes bancaires ou sur un dossier de pharmacie, qui sont recueillis par des organisations commerciales à des fins commerciales.

De toute évidence, le projet de loi traite déjà de la possibilité d'enquêter sur un crime, d'assurer la sécurité nationale et ainsi de suite. On nous a dit: «Ces renseignements ne peuvent pas être communiqués. Il faut avoir une raison de le faire. Peut-être le commissaire à la protection de la vie privée pourrait-il intervenir à un certain moment.» Tout cela est très subjectif, surtout 20 ans après le décès des personnes en question.

Un avocat qui a comparu devant nous, M. Lawson, dont j'ai parlé hier, et qui est, comme la plupart des gens qui ont comparu devant nous, un ardent défenseur du projet de loi, a dit que, selon lui, le droit à la protection de la vie privée ne devrait s'appliquer qu'aux personnes vivantes. Je suis tout à fait contre cette idée et je suis d'avis que nous devrions la rejeter.

Je ne veux pas anticiper sur le discours que je ferai probablement demain après-midi, mais je voudrais vous en donner un avant-goût. Je veux que vous sachiez que je vous saisirai de cette disposition et j'invite les collègues à me fournir une justification détaillée, s'ils le peuvent. Sinon, je vous inviterai à vous joindre à moi pour modifier le projet de loi à l'étape de la troisième lecture de façon à supprimer cette disposition.

Honorables sénateurs, comme je l'ai mentionné à la deuxième lecture, en gros, c'est un projet de loi qui bénéficie et mérite de bénéficier de l'appui de tous à la Chambre et partout au pays parmi ceux qui sont au courant. C'est qu'il étendra la protection de la Loi sur la protection des renseignements personnels à l'immense quantité de renseignements personnels que les entreprises commerciales recueillent sur chacun de nous dans le cadre de leurs transactions. À l'exception de la disposition dont j'ai parlé tout à l'heure, tout permet de croire que ces mesures de protection sont solides et efficaces.

Comme le sénateur Kirby nous l'a dit, ce projet de loi est le fruit d'un consensus extraordinaire auquel sont arrivés le secteur privé, le gouvernement fédéral, les divers groupes de défense de la protection de la vie privée et les groupes de défense des libertés fondamentales. Le gouvernement peut à juste titre être fier d'avoir su réaliser ce consensus.

Pour tous ceux et toutes celles qui croient, et je pense que la plupart d'entre nous en sont, que la protection de la vie privée fait partie intégrante de la dignité et de l'autonomie humaines et que c'est un droit humain, il s'agit d'une étape majeure. Je crois qu'en adoptant le projet de loi nous aurons considérablement amélioré les mesures de protection et le cadre juridique des droits humains en ce pays.

(1620)

Tous les Canadiens ne sont peut-être pas au courant de ce que nous sommes en train de débattre et de faire aujourd'hui, mais je pense que ce projet de loi modifié sera l'un des accomplissements historiques de cette législature ou des dernières législatures.

L'honorable Sharon Carstairs: Honorables sénateurs, je remercie le sénateur Murray et le sénateur Kirby pour l'excellent travail qu'ils ont fait en ce qui concerne ce projet de loi. Le sénateur Murray n'est pas normalement membre du comité mais, comme il l'a dit plus tôt dans son intervention, c'est une mesure législative à laquelle il s'est toujours intéressé. Bien qu'en principe cela ne soit pas prévu dans le Règlement du Sénat du Canada, notre comité directeur était composé de quatre membres. Le sénateur LeBreton, le sénateur Kirby et moi-même avons associé le sénateur Murray à nos discussions en raison de l'intérêt profond qu'il porte à cette mesure législative.

Comme le sénateur Kirby et le sénateur Murray, j'appuie en général le projet de loi C-6. J'appuie aussi l'amendement sans aucune réserve. Cela intéressera peut-être le sénateur Murray et le sénateur Kirby de savoir qu'on vient juste de me livrer une lettre venant de l'Association dentaire canadienne. L'association n'aime pas particulièrement cet amendement. Elle voulait que nous allions dans une autre direction. Ses représentants nous ont demandé à la réunion du comité de renforcer la loi. Ils ont dit que l'Association dentaire canadienne avait toujours été en faveur de l'adoption du projet de loi C-6, moyennant des amendements qui assureraient une plus grande protection des renseignements personnels que les dispositions du code CSA, en exigeant le consentement éclairé de l'intéressé.

Je suis d'accord avec eux. Je souhaiterais moi aussi renforcer cette protection. L'impasse devant laquelle s'était trouvé le comité était attribuable à la question du consentement. Si nous avions mis de côté tous les autres aspects du projet de loi pour ne traiter que de l'utilité pour la santé communautaire d'une protection accrue de la vie privée, je ne pense pas, honorables sénateurs, que nous aurions pu adopter la moindre disposition de ce projet de loi avant peut-être six mois. Notre amendement avait pour objet d'accélérer l'adoption et l'application des articles traitant du commerce électronique en dehors du cadre de la santé. Entre-temps, nous pouvions prendre le temps de réfléchir, non pas nécessairement au Sénat, mais dans le cadre d'entretiens avec le secteur de la santé, le secteur de l'industrie, les ministres de la Santé et de l'Industrie et leurs collaborateurs respectifs. Toutes ces parties prenantes auraient pu mettre au point des modifications qui auraient permis à ce texte de répondre aux besoins et objectifs de l'industrie des soins de santé.

Honorables sénateurs, cette question s'est retrouvée au centre de mes préoccupations pour la durée de notre étude du projet de loi. Certains témoins n'ont traité que des articles concernant le commerce électronique. Ils représentaient l'industrie de l'informatique, l'ordinatique en quelque sorte, le secteur des banques, le secteur du marketing, et ils étaient tous favorables au projet de loi, ne formulant que des objections mineures concernant sa teneur. En fait, ils y souscrivaient avec enthousiasme. Ils se sont félicités de l'exploit monumental qu'avait été le fait d'avoir rallié le consensus de tous ces groupes au sujet du code de la CSA.

Comme le sénateur Kirby l'a expliqué, le problème a surgi lorsque les milieux médicaux, qui croyaient n'être aucunement visés par le projet de loi, ont constaté, seulement en juin 1999, qu'ils étaient bel et bien concernés, que certaines dispositions du projet de loi touchaient leurs activités.

Les membres du comité n'ont pas tardé à remarquer qu'il n'y avait pas consensus dans les milieux médicaux. Les médecins et les dentistes ont soutenu que leurs propres codes étaient supérieurs au modèle de la CSA. Les pharmaciens, pour leur part, et ceux qui recueillent de l'information sur les services de santé réclamaient une exemption totale. Pour ma part, je n'étais pas disposée à la leur accorder. S'ils veulent utiliser ou vendre mes renseignements personnels, je devrais avoir mon mot à dire sur les renseignements qui leur tomberont entre les mains.

Fait plus important encore, nous n'avons jamais discuté de deux questions cruciales, soit les définitions des expressions «activité commerciale» et «consentement éclairé». J'ai été étonnée d'entendre le commissaire à la protection des renseignements personnels affirmer que tous les consentements sont des consentements éclairés. Malgré tout le respect que je dois à Bruce Phillips, je ne suis pas de cet avis. Si on me traîne dans une salle d'urgence où je me retrouve devant cinq médecins et 16 autres membres du personnel qui me disent que j'ai besoin de certaines interventions médicales d'urgence, je vais signer n'importe quoi. J'espère que ceux qui pourront avoir à se prononcer à ma place signeront n'importe quoi pour que j'obtienne les soins nécessaires. Mais ce n'est pas un consentement éclairé. Je ne connais pas les effets secondaires du traitement préconisé et, au fond, je ne m'en inquiète pas terriblement.

La question des définitions n'a pas été clairement étudiée, en ce qui concerne les renseignements personnels en matière de santé. J'appuie donc sans réserve la recommandation du comité voulant que nous prévoyions un délai pour étudier certains de ces problèmes. Honorables sénateurs, il faut acculer les parties en cause au pied du mur. Les membres du comité ont entendu des témoignages divergents et qui sèment la confusion. Il faut du temps pour définir des règles claires régissant les renseignements personnels en matière de santé après avoir eu des échanges avec tous ceux qui recueillent ou utilisent ces renseignements.

Il ne suffit pas de retarder de deux ans l'entrée en vigueur du projet de loi pour atteindre notre objectif. Ce que nous cherchons à faire en modifiant le projet de loi, c'est de presser les intervenants de se réunir et de résoudre correctement les problèmes. Les Canadiens méritent que des lignes directrices claires régissent l'utilisation de leur dossier médical et prévoient notamment leur consentement éclairé à cet effet.

Les Canadiens ne souhaitent pas, pour la plupart, que leur dossier médical soit protégé au point qu'il ne puisse pas servir à des recherches visant à trouver un remède à une maladie ou à une affection. Si cette information est nécessaire pour tester de nouveaux médicaments, il faudra trouver alors un équilibre. Un tel équilibre n'existe pas dans ce projet de loi. Nous pouvons seulement espérer que cet équilibre sera trouvé grâce à notre réflexion et à cet amendement.

L'honorable Jerahmiel S. Grafstein: Honorables sénateurs, j'ai une brève question à poser. J'en ai averti le sénateur Carstairs plus tôt aujourd'hui.

Je n'ai pas examiné le projet de loi aussi soigneusement que j'aurais dû le faire et je n'ai pas pris connaissance des témoignages. Toutefois, en écoutant les argumentations, je me demande si l'on ne devrait pas avoir pour politique publique de séparer l'identité de la personne dont l'information est requise du contenu de cette information.

Par exemple, le Princess Margaret Hospital, à Toronto, traite chaque année 60 000 femmes atteintes du cancer du sein. À côté, la clinique du cancer du sein du Mount Sinai Hospital reçoit 25 000 femmes par année. C'est ainsi que dans ce périmètre de quelque 92 mètres, 85 000 Canadiennes sont soignées chaque année pour le cancer du sein. L'information à ce sujet est actuellement recueillie et colligée auprès des chercheurs et diagnosticiens et regroupée en des points centraux. D'énormes progrès ont été réalisés, à tout le moins, dans le traitement du cancer du sein.

(1630)

Cela étant dit, si l'on veut concevoir un traitement, le contenu de l'information est indissociable des progrès accomplis par le secteur de la recherche. Si cette information n'était pas recueillie, colligée et triée, la lutte contre cette terrible maladie qu'est le cancer du sein ne progresserait pas. Le même raisonnement vaut aussi pour le VIH ou toute maladie qui nous afflige.

Je n'ai pas trop compris si le comité ou l'amendement tient compte de cette question fondamentale. En réalité, atténue-t-on le problème ou complique-t-on la tâche des chercheurs qui doivent avoir accès à cette information pour l'avancement de la recherche? Au lieu d'améliorer la situation, ne sommes-nous pas en train de rendre vaine la recherche?

Le sénateur Carstairs: Honorables sénateurs, vous serez peut-être intéressés d'apprendre que nous avons entendu les témoignages de deux groupes de chercheurs dont les opinions divergent sur cette question. Un groupe est d'avis qu'il faut établir davantage de mesures de contrôle pour protéger la vie privée des personnes qui fournissent l'information. L'autre groupe estime que la recherche de cette nature ne doit absolument pas être assujettie aux dispositions du projet de loi. Il croit que ces mesures de contrôle provoqueraient le scénario catastrophique que l'honorable sénateur vient d'évoquer relativement à l'incapacité de produire l'information épidémiologique nécessaire.

Fait à signaler, le docteur Keon s'est rangé aux côtés des tenants de mesures de contrôle plus rigoureuses pour protéger la confidentialité de la relation patient-médecin, et je ne pense pas trahir la pensée du docteur Keon sur cette question, car il a appuyé fermement l'exposé de l'Association médicale canadienne, qui préconisait des lignes directrices plus rigoureuses.

L'honorable sénateur a expliqué notre dilemme. Nous avons entendu des exposés très sérieux de témoins qui nous ont dit que ce projet de loi limiterait la collecte de données de recherche comme celle qu'a décrite l'honorable sénateur. D'autres ont prétendu qu'il ne nuirait pas à la collecte. En fin de compte, nous ne savions pas si le projet de loi allait nuire ou non. Nous proposons donc cette période de deux ans afin que des protocoles à cet égard puissent être mis au point. De cette manière, nous ne porterons pas préjudice à la recherche. Nous allons permettre la collecte de données, tout en assurant la protection fondamentale de la vie privée des patients de notre pays.

Nos chercheurs ont fait du bon travail à cet égard dans le passé. D'aucuns soutiennent que quiconque ne veut pas participer à un projet de recherche devrait avoir le droit de refuser que son travail serve à pareil projet. Il faut donc concevoir des protocoles. Franchement, toutefois, il nous faut du temps pour le faire.

Le sénateur Grafstein: Honorables sénateurs, si ce projet de loi donne lieu à un dilemme, pourquoi se presser? Pourquoi nous croyons-nous obligés d'étudier ce projet de loi si certains de ses partisans cultivent de sérieux doutes à son égard?

Le sénateur Carstairs: Le problème avec ce projet de loi, sénateur Grafstein, c'est que, de façon générale, personne - et certainement personne à la Chambre des communes - ne s'est penché sur les répercussions des renseignements en matière de santé sur le projet de loi.

Le sénateur Grafstein: Encore du travail bâclé à l'autre endroit.

Le sénateur Carstairs: Ils ont fait un travail bâclé à l'autre endroit. Soit dit en toute justice cependant, ils ne l'ont pas fait délibérément.

Les intervenants du secteur de la santé ont eux-mêmes appelé le ministère de l'Industrie. Ils lui ont dit: «Ce projet de loi concerne le commerce électronique. Il n'a pas d'effet sur nous.» Par conséquent, les représentants de la santé qui auraient normalement comparu devant nous au début du processus ne l'ont pas fait parce qu'ils estimaient que le projet de loi n'aurait pas d'effet sur eux. Ce n'est qu'en mai ou en juin de cette année, après l'étude du projet de loi à l'autre endroit, que les intervenants de la santé sont devenus suffisamment inquiets pour dire: «Ce projet de loi aura des effets sur nous. Heureusement qu'il y a une deuxième Chambre, une Chambre de réflexion, car nous pouvons maintenant aller lui exposer notre point de vue.» Et c'est exactement ce qu'ils ont fait.

Cela étant dit, le projet de loi traite sans doute à 90 p. 100 de commerce électronique, et presque pas du secteur de la santé. On y trouve d'intéressantes modifications garantissant la protection des renseignements personnels dans le domaine du commerce par Internet ainsi que l'échange et la diffusion d'informations sur Internet. Ces mesures devraient entrer en vigueur dès que possible. Je ne voudrais pas retarder tout le processus à cause de cette fenêtre que, je l'espère, nous avons ouverte et par laquelle un vent de renouveau soufflera pour que nous puissions continuer d'examiner la question et, peut-être, imposer des changements favorables en ce qui concerne les renseignements en matière de santé publique.

Son Honneur le Président: Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.

L'honorable Dan Hays (leader adjoint du gouvernement): Avec dissidence

(La motion est adoptée, et le rapport est adopté à la majorité.)

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, quand lirons-nous ce projet de loi, tel que modifié, pour la deuxième fois?

(Sur la motion du sénateur Kirby, la troisième lecture du projet de loi est inscrite à l'ordre du jour de la prochaine séance.)

[Français]

La loi sur le casier judiciaire

Projet de loi modificatif-Adoption du rapport du comité

L'ordre du jour appelle:

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Milne, appuyée par l'honorable sénateur Chalifoux, tendant à l'adoption du deuxième rapport du Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles (projet de loi C-7, Loi modifiant la Loi sur le casier judiciaire et une autre loi en conséquence, avec des amendements), présenté au Sénat le 30 novembre 1999.

L'honorable Pierre Claude Nolin: Honorables sénateurs, je tenterai d'être bref. Je n'ai pas l'intention de reprendre l'exploration des composantes de ce projet de loi.

Je prends la parole aujourd'hui pour appuyer l'adoption du deuxième rapport du Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles concernant le projet de loi C-7. J'aimerais vous relater une histoire criminelle qui a cours présentement au Québec, une histoire qui est reliée au projet de loi C-7.

Il est évident, honorables sénateurs, que lorsqu'il s'agit d'agression sexuelle envers des enfants ou des personnes vulnérables, il faut agir promptement. Une agression sexuelle en est une de trop. Les conséquences sont graves et nous devons faire tout ce qui est en notre pouvoir comme parlementaires pour éviter que de tels événements ne se reproduisent.

J'aimerais démontrer aujourd'hui la nécessité pour le Parlement fédéral d'adopter le projet de loi C-7, en me référant à un cas d'agression sexuelle survenu plus tôt cette année sur trois enfants dans une garderie du Québec. Je ne nommerai pas la ville, parce que les accusations criminelles sont pendantes. Je tenterai autant que faire se peut de ne pas trop identifier les circonstances nominatives de cette question criminelle, mais je veux tenter quand même de vous les présenter tout en respectant les règles parlementaires.

En 1985, un homme bien en vue d'une ville québécoise crée une garderie. Il s'agit de l'unique garderie de cette localité située à proximité de Montréal. Le 22 novembre dernier, il est arrêté et accusé d'agression sexuelle sur trois fillettes de quatre ans qui lui avaient été confiées.

Remis en liberté le même jour, il est arrêté de nouveau le lendemain pour être retourné sur les lieux de la garderie et pour avoir parlé à des éducatrices de la garderie, et donc d'avoir contrevenu aux conditions de sa mise en liberté.

(1640)

C'est la Direction de la protection de la jeunesse qui a alerté la police municipale après avoir reçu une plainte de parents qui utilisaient les services de la garderie. Ce qui a mis le feu aux poudres au Québec, c'est qu'on a découvert récemment que ce même individu, en 1992, avait été trouvé coupable et condamné avec sursis pour des actes similaires.

À l'époque, personne, dans la ville où il avait créé la garderie, même les services de police, n'avait été mis au courant des antécédents criminels du requérant. Le chef de police de la localité en question où se trouve la garderie n'a pris connaissance des antécédents criminels de l'individu que le 26 octobre dernier, donc quelques jours avant que les actes d'accusation ne soient portés contre l'individu en question.

Honorables sénateurs, ces événements ont provoqué plusieurs remous dans la société et les médias québécois au cours des deux ou trois dernières semaines. La ministre québécoise déléguée à la Famille, Mme Léger, a dû répondre aux accusations de laxisme qui étaient dirigées contre son ministère en ce qui a trait au processus de vérification des antécédents criminels des propriétaires de garderie lors de la délivrance d'un permis d'opération pour ce type d'activité.

Pour éviter que les parents qui envoient leurs enfants dans les garderies québécoises ne perdent confiance dans le système d'octroi des permis d'opération d'une garderie, le ministre de la Sécurité publique, M. Ménard, a annoncé, le 25 novembre dernier, un plan d'action pour corriger cette situation. Ce dernier prévoit une plus grande coopération entre le ministère de la Famille et la Sûreté du Québec pour que les antécédents judiciaires de tous les détenteurs de permis de garderies soient vérifiés pour éviter que des cas comme celui dont je vous ai relaté les faits ne se reproduisent.

Le même jour, la ministre déléguée à la Famille a également annoncé des mesures supplémentaires pour répondre aux préoccupations soulevées par un député libéral de l'Assemblée nationale, M. Copeman. Ce dernier avait demandé au gouvernement, le 25 novembre dernier, lors de la période des questions à l'Assemblée nationale, si les mesures de vérifications des antécédents judiciaires s'étendaient aux 12 000 travailleurs québécois du réseau des garderies.

Selon la ministre Léger, un nouveau mécanisme de contrôle devrait être mis en place d'ici le début de l'an prochain, donc dans quelques jours, pour vérifier les antécédents judiciaires des 12 000 travailleurs de garderies du Québec. Une partie de cette responsabilité relèvera des titulaires de permis de services de garde et des membres des conseils d'administration des centres de la petite enfance, lesquels seront par ailleurs tous contrôlés par le ministère de la Sécurité publique. Cette vaste opération de vérification commencera au cours des prochains jours et se poursuivra, dans les mois à venir, de façon intensive.

Je suis sûr, honorables sénateurs, que ceux d'entre vous qui avez suivi les travaux de cette Chambre sur le projet de loi C-7 me voyez venir. L'Assemblée nationale, dans son effervescence, avait oublié, si ce n'avait été par ce concours de circonstances, qui n'est certainement pas heureux, que cette question relevait de la compétence du Parlement fédéral. Lorsqu'on se préoccupe de ce qui s'est passé lors de cet événement au Québec, on ne peut qu'être satisfait de la clairvoyance de ce Parlement à se pencher sur les mesures énoncées dans le projet de loi C-7.

Je n'avais pas l'intention de parler longuement, mais je voulais vous relater cette histoire morbide qui a cours présentement au Québec. Comme nous le rappelait le sénateur Andreychuk hier, le projet de loi C-7 n'est certainement pas une panacée. Il ne réglera pas tout. Il ne faudrait pas croire que parce que nous mettons en place ces mesures, nous serons tous protégés dorénavant lorsque nous placerons nos enfants en garderie. Au contraire, nous autorisons la mise en place d'un mécanisme additionnel de protection des enfants et des personnes vulnérables. J'espère que cette mesure pourra bénéficier de votre appui à l'étape de la troisième lecture et qu'elle aidera à faire du Canada une société où l'on est encore capable de vivre en sécurité.

L'honorable Gérald-A. Beaudoin: Honorables sénateurs, j'aimerais dire quelques mots au sujet du projet de loi C-7, Loi modifiant la Loi sur le casier judiciaire.

La présidente du Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles, l'honorable Lorna Milne, a traité hier du rapport de notre comité. J'appuie ce rapport.

Le projet de loi C-7 porte essentiellement sur le processus de réhabilitation et vise à faciliter la réinsertion sociale des délinquants qui ont démontré, lorsqu'ils étaient incarcérés, leur volonté de devenir des citoyens respectueux des lois.

Ce projet de loi comportait au départ certaines lacunes qui ont été corrigées grâce aux amendements demandés par le comité. Ainsi, on retrouve dorénavant dans la loi la définition du mot «enfant» et de l'expression «personnes vulnérables». On ne peut pas disposer dans les règlements des définitions aussi importantes. Les pouvoirs réglementaires sont maintenant prévus dans la loi; le système de marquage des casiers judiciaires est limité aux individus qui ont été condamnés pour des infractions à caractère sexuel. À cet égard, une liste des infractions visées a été ajoutée en annexe au projet de loi.

Je dois dire, en terminant, que lorsque le comité des affaires juridiques et constitutionnelles étudie un dossier sur le casier judiciaire, comme c'est le cas dans la présente instance ou sur un sujet comme l'ADN, nous redoublons toujours d'efforts pour bien nous assurer que la Charte canadienne des droits et libertés est respectée. Nous savons tous que les articles 7 et 8 de notre Charte constitutionnelle protègent la vie privée. C'est une valeur fondamentale dans notre système. Je pense que l'on peut dire que le projet de loi C-7, qui est à l'étude, respecte au meilleur de notre connaissance la Constitution, y compris la Charte constitutionnelle de 1982.

[Traduction]

L'honorable Joan Fraser: Honorables sénateurs, j'aimerais dire quelques mots sur la question soulevée hier par le sénateur Andreychuk parce qu'elle est très importante.

(1650)

Elle s'inquiète, et avec raison, de la possibilité que nous portions atteinte à l'intégrité du système de pardon si nous commençons à le gruger lentement. Je crois que les membres du comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles sont tout à fait disposés à reconnaître que, premièrement, nous voulons préserver l'intégrité du système et, deuxièmement, le projet de loi ne porte pas atteinte à cette intégrité et l'exception qu'il prévoit, compte tenu du nombre total de pardons accordés, est si mineure et si justifiée que nous ne devrions pas nous en préoccuper outre mesure.

Honorables sénateurs, c'est statistiquement une petite exception, et j'ai pensé que vous seriez intéressés à connaître ces statistiques. Au cours des 28 dernières années, près d'un quart de million de pardons ont été accordés, toutes infractions confondues. Seulement 4 500 de ces pardons ont été accordés à des auteurs d'infractions à caractère sexuel. Nous parlons ici d'une très petite proportion du total. Il est très clair que le projet de loi, tel qu'amendé, ne vise que les infractions à caractère sexuel. Il faudra l'autorisation du Parlement pour toute autre atteinte à l'intégrité du système des pardons, et je crois que le Parlement réfléchira sérieusement avant de toucher à ce système.

Son Honneur le Président: Si aucun autre honorable sénateur ne désire prendre la parole, je mettrai aux voix la motion portant adoption du rapport.

Plaît-il aux honorables sénateurs d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.

(La motion est adoptée, et le rapport est adopté.)

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, quand ce projet de loi sera-t-il lu une troisième fois?

(Sur la motion du sénateur Fraser, la troisième lecture du projet de loi, tel que modifié, est inscrite à l'ordre du jour de la prochaine séance.)

Section canadienne de l'Église morave d'Amérique

Projet de loi privé visant à modifier la loi d'incorporation-Deuxième lecture

L'honorable Nicholas W. Taylor propose: Que le projet de loi S-14, Loi modifiant la loi constituant en personne morale le Conseil des anciens de la section canadienne de l'Église morave d'Amérique, soit lu une deuxième fois.

- Honorables sénateurs, mon discours sera probablement le plus court jamais prononcé au Sénat.

Ce projet de loi a franchi l'étape de la deuxième lecture trois fois au cours des six dernières années. Cette fois-ci, rien n'a changé. L'Église morave d'Amérique s'est installée ici au tournant du siècle, juste après la création du Sénat. Le Sénat s'intéresse à ce projet de loi depuis 1986, année où l'Église s'est pour la première fois adressée à lui pour faire modifier son nom pour qu'il soit le même en français et en anglais et pour faire modifier sa personne morale. Ces gens n'aiment pas se présenter ici pour demander notre permission, mais c'était un des articles initiaux de l'Église au tournant du siècle.

Je prie donc les honorables sénateurs de faire avancer ce projet de loi.

Son Honneur le Président: Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.

(La motion est adoptée et le projet de loi est lu une deuxième fois.)

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, quand lirons-nous ce projet de loi une troisième fois?

Le sénateur Taylor: Honorables sénateurs, avec votre permission, à la prochaine séance du Sénat.

Son Honneur le Président: Honorable sénateur Taylor, les projets de loi sont normalement renvoyés à un comité. C'est la pratique habituelle.

Le sénateur Taylor: Je le sais, honorables sénateurs, mais ce n'est pas un projet de loi habituel. C'est la troisième fois qu'il vient devant nous. Toutefois, cela étant, je propose que le projet de loi soit renvoyé au Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles.

Son Honneur le Président: Il est proposé par l'honorable sénateur Taylor et appuyé par l'honorable sénateur Poy que le projet de loi soit renvoyé au Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles.

L'honorable Eymard G. Corbin: Honorables sénateurs, à moins que quelqu'un ait des observations spéciales à faire au sujet de ce projet de loi et compte tenu du fait qu'il a déjà été renvoyé au comité, comme l'honorable sénateur Taylor vient tout juste de le dire, la Chambre a certes le pouvoir de décider de sauter cette partie du processus et de passer à la troisième lecture. Je me demande s'il n'y a pas une volonté d'agir de la sorte, à moins qu'il y ait un élément de controverse qui mérite d'être réexaminé à l'étape du comité.

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, je suis bien sûr entièrement à la disposition du Sénat. Je voulais simplement rappeler au Sénat que la coutume veut que tous les projets de loi soit renvoyés à des comités.

Le sénateur Corbin: Je vais alors proposer une motion en ce sens.

Son Honneur le Président: Je suis désolé, j'ai une motion à l'étude.

Le sénateur Corbin: Dans ce cas, honorables sénateurs, je proposerai un amendement à la motion. Je propose que le projet de loi ne soit pas renvoyé, comme c'est la coutume, audit comité, mais que le Sénat consente à le lire une troisième fois à la prochaine séance.

Son Honneur le Président: L'honorable sénateur Corbin propose, appuyé par l'honorable sénateur Ferretti Barth, la motion d'amendement suivante: Que le projet de loi ne soit pas renvoyé au comité maintenant, mais qu'il soit lu une troisième fois à la prochaine séance.

Plaît-il aux honorables sénateurs d'adopter la motion d'amendement?

Des voix: D'accord.

(La motion d'amendement est adoptée.)

Son Honneur le Président: Plaît-il aux honorables sénateurs d'adopter la motion ainsi modifiée?

Des voix: D'accord.

(La motion modifiée est adoptée et la troisième lecture du projet de loi est inscrite à l'ordre du jour de la prochaine séance.)

(1700)

Énergie, environnement et ressources naturelles

Autorisation au comité d'engager du personnel et de se déplacer

L'ordre du jour appelle:

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Spivak, appuyée par l'honorable sénateur Cochrane:

Que le Comité sénatorial permanent de l'énergie, de l'environnement et des ressources naturelles soit habilité à retenir les services de conseillers, techniciens, employés de bureau ou autres éléments nécessaires pour examiner les projets de loi, la teneur des projets de loi et les prévisions budgétaires qui lui ont été déférés; et

Que le Comité soit autorisé à se déplacer à travers le Canada et à l'étranger aux fins de tels examens.-(L'honorable sénateur Hays).

L'honorable Dan Hays (leader adjoint du gouvernement): Honorables sénateurs, j'ai eu l'occasion de discuter de cette motion avec son auteur, le sénateur Spivak. Je suggère de régler cette question maintenant. Si le Sénat y consent, nous pourrions modifier la motion ou l'expédier au moyen d'un amendement. Je suggère que le sénateur Spivak modifie la motion en supprimant les mots «et à l'étranger» dans la dernière phrase de sorte que la motion se lise comme suit: «Que le comité soit autorisé à se déplacer à travers le Canada aux fins de tels examens», et non pas comme elle se lit maintenant, à savoir «Que le comité soit autorisé à se déplacer à travers le Canada et à l'étranger aux fins de tels examens».

J'invite le sénateur Spivak à nous faire part de ses commentaires à ce sujet.

L'honorable Mira Spivak: Honorables sénateurs, dans la discussion que j'ai eue avec le sénateur Hays, j'ai donné mon accord à deux conditions. Premièrement, que la même chose s'applique à tous les comités et, deuxièmement, que la question des déplacements à l'étranger puisse être soulevée quand l'occasion le permet ou à la fin de l'exercice financier.

Le sénateur Hays: Honorables sénateurs, je ne crois pas pouvoir accepter des conditions, mais je peux peut-être satisfaire le sénateur Spivak en lui indiquant que je ne connais aucun autre comité qui ait un tel pouvoir. Il est dans mon intention, en tant que leader adjoint du gouvernement au Sénat, d'adopter la même position à l'égard du comité de l'énergie, des ressources naturelles et de l'environnement.

Bien entendu, sénateur Spivak, tout comité peut venir en cette enceinte afin d'obtenir la permission ou des instructions pour voyager hors du Canada. J'espère que cela satisfait le sénateur pour cette question.

[Français]

L'honorable Fernand Robichaud: Honorables sénateurs, la modification proposée par l'honorable sénateur Hays demande que le comité «soit autorisé à se déplacer à travers le Canada». L'an dernier, le comité des pêches voulait se déplacer aux fins d'une étude et on lui a plus ou moins recommandé de ne pas le faire par l'entremise d'un sous-comité parce que cela demandait au comité d'autoriser des dépenses. Dans ce cas, le comité reçoit-il l'autorisation et les fonds nécessaires, automatiquement, pour se déplacer partout au Canada sans en faire une demande au comité de la régie interne?

[Traduction]

Le sénateur Hays: Honorables sénateurs, je vais traiter cela comme une question qui m'est adressée lors du débat sur le sujet.

La réponse à la question du sénateur Robichaud qui demande si des ressources sont automatiquement allouées à un comité pour des voyages au Canada est «non, ce n'est pas le cas». En tant qu'ex-président du comité de l'énergie et personne responsable de l'obtention du mandat assez large que je mets maintenant en doute en tant que leader adjoint du gouvernement, ce mandat large avait été demandé parce que le comité a coutume de participer à des conférences et à des événements qui ont lieu dans d'autres parties du Canada. Par exemple, le sénateur Spivak m'a indiqué que le comité aimerait envoyer un ou des représentant(s) à la conférence GLOBE 2000. Le comité a toujours envoyé un représentant à cette conférence et ce dernier fait un rapport au comité. Je pense que cela s'avère très utile pour les travaux du comité. Toutefois, pour obtenir les ressources nécessaires pour y envoyer un membre du comité, il faut passer par le Comité permanent de la régie interne, des budgets et de l'administration et faire approuver le budget. Habituellement, ce comité le fait. C'est la seule réponse que je sois en mesure de fournir au sénateur Robichaud.

J'invite le sénateur Spivak à nous indiquer si elle est disposée à modifier sa motion ou s'il est nécessaire d'y apporter un amendement.

Le sénateur Spivak: Honorables sénateurs, je suis disposée à la modifier. Pour répondre au sénateur Robichaud, tous les crédits sont précisés et seront examinés à fond au vu des travaux qui nous attendent dans l'année à venir.

Son Honneur le Président: Sénateur Spivak, dois-je en déduire que vous souhaitez que soient retirés de votre motion les mots «et à l'étranger»?

Le sénateur Spivak: Tout simplement les mots «et à l'étranger». Voilà ce que je souhaite supprimer.

Le sénateur Hays: Uniquement les mots «et à l'étranger».

Le sénateur Spivak: C'est exact.

Son Honneur le Président: Avons-nous le consentement unanime pour supprimer ces mots?

Des voix: D'accord.

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, revenons à la motion principale telle que modifiée. Pourrions-nous la mettre aux voix?

Des voix: D'accord.

Son Honneur le Président: Madame le sénateur Spivak, appuyée par le sénateur Cochrane, propose: Que le Comité sénatorial permanent de l'énergie, de l'environnement et des ressources naturelles...

Des voix: Suffit!

Son Honneur le Président: Plaît-il aux sénateur d'adopter la motion modifiée?

Des voix: D'accord.

(La motion modifiée est adoptée.)

[Français]

Examen de la politique canadienne antidrogues

Motion autorisant la formation d'un comité sénatorial spécial-Ajournement du débat

L'honorable Pierre Claude Nolin, conformément à l'avis du 2 novembre 1999, propose:

Qu'un comité spécial du Sénat soit formé afin de réévaluer les lois et les politiques canadiennes antidrogues, de consulter abondamment la population canadienne pour déterminer les besoins spécifiques des différentes régions du pays, plus particulièrement là où les problèmes sociaux liés au trafic et à l'usage de drogues illicites sont plus manifestes, d'élaborer des propositions pour diffuser toute information relative à la politique canadienne antidrogues et, enfin, de produire des recommandations pour en arriver à l'adoption d'une stratégie antidrogues mise au point par et pour les Canadiens encourageant tous les paliers de gouvernement à travailler en étroite collaboration à la réduction des méfaits liés à la consommation de drogues illicites.

Sans que ce qui suit ait pour effet de restreindre son mandat, que le comité soit autorisé à:

  1. - réexaminer l'approche adoptée par le gouvernement fédéral pour combattre la consommation de drogues illicites au Canada, son efficacité comme moyen de réduire les effets de la consommation de stupéfiants et la mesure dans laquelle son application est juste;
  2. - élaborer une politique nationale de réduction des méfaits afin d'atténuer les impacts négatifs de la consommation de drogues illicites au Canada et faire des recommandations sur la façon d'appliquer cette politique, notamment la possibilité de considérer avant tout l'usage et l'abus de drogues comme un problème socio-sanitaire;
  3. - étudier les modèles de réduction des méfaits adoptés par d'autres pays et déterminer s'il y aurait lieu de les appliquer, partiellement ou intégralement, au Canada;
  4. - examiner le rôle et les obligations internationales qui incombent au Canada en vertu des conventions des Nations Unies sur les stupéfiants, de la Déclaration universelle des droits de l'homme et d'autres traités connexes afin de déterminer si ces traités l'autorisent à prendre des mesures autres que les poursuites criminelles et la pénalisation des contrevenants à l'échelle internationale;
  5. - explorer les effets du cannabis sur la santé et étudier la question de savoir si l'emploi de politiques alternatives au sujet de l'usage du cannabis conduirait à une augmentation de l'usage et de l'abus à court et à long terme;
  6. - étudier la possibilité que le gouvernement use du pouvoir de réglementation que lui confère la Loi sur les contraventions comme moyen supplémentaire d'appliquer une politique de réduction des méfaits comme il est d'usage dans d'autres juridictions;
  7. - étudier toute autre question relative à la politique canadienne antidrogues que le comité juge appropriée pour accomplir son mandat.
Que le comité spécial soit composé de cinq sénateurs et que le quorum soit de trois membres;

Que le comité ait le pouvoir de faire comparaître des personnes et de produire des documents, d'entendre des témoins, de faire rapport de temps à autre et de faire imprimer au jour le jour documents, mémoires et témoignages selon les instructions du comité;

Que les mémoires reçus et les témoignages entendus lors de l'examen du projet de loi C-8, Loi portant sur la réglementation de certaines drogues et de leurs précurseurs ainsi que d'autres substances, par le Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles durant la deuxième session de la trente-cinquième législature, soient déférés au comité;

Que le comité soit habilité à autoriser, s'il le juge opportun, la radiodiffusion, la télédiffusion et la diffusion par le biais des médias électroniques de la totalité ou d'une partie de ses délibérations et des informations qu'il détient;

Que le comité soit autorisé à siéger pendant les ajournements du Sénat en vertu du paragraphe 95(2) du Règlement du Sénat; et

Que le comité présente son rapport final au plus tard trois ans après la date de sa création.

- Honorables sénateurs, le 14 juin dernier, j'ai déposé en cette Chambre une motion demandant au Sénat de créer un comité spécial pour examiner la politique canadienne antidrogues. Aujourd'hui, je peux vous affirmer que je suis plus déterminé que jamais à aller de l'avant avec ce projet. Je n'ai pas l'intention de parler aussi longtemps que la dernière fois, mais j'ai l'intention de vous tenir informés de l'évolution du dossier. Ce dossier a soulevé beaucoup de passion et d'intérêt. Je tiens aujourd'hui à vous en faire part. Je n'ai pas l'intention de présenter à nouveau la problématique à laquelle fait face le Canada en matière d'usage et de trafic de drogues illégales. Je l'ai amplement fait lors de mon discours du 14 juin dernier.

Honorables sénateurs, au cours des trente dernières années, l'inaction de nos gouvernements successifs dans ce dossier et l'intensification de la guerre contre la drogue en Occident depuis le début des années 1980 ont coûté très cher à la société canadienne. Les coûts associés au contrôle et à la répression des drogues illégales sont sans commune mesure avec le niveau de consommation ou avec ses effets sur la société ou les individus.

Vous voudrez bien admettre, honorables sénateurs, que c'est une situation qui mérite un examen des plus rigoureux. C'est pourquoi, le 2 novembre dernier, j'ai déposé à nouveau devant cette Chambre une motion demandant qu'un comité spécial du Sénat soit formé afin de réévaluer les lois et les politiques canadiennes antidrogues.

L'objectif de cet exercice sera, premièrement, de donner aux Canadiens une information exacte et rigoureuse relative aux drogues illégales; deuxièmement, d'évaluer les standards de moralité de la société canadienne à l'égard de l'usage des drogues illégales et, finalement, de donner au gouvernement canadien l'information nécessaire afin qu'il puisse développer et implanter une législation et des politiques adéquates qui reflètent les valeurs et la volonté du peuple canadien en ce qui a trait aux drogues actuellement identifiées comme étant illégales.

Honorables sénateurs, vous avez perçu, sans doute, un changement d'attitude chez les Canadiens en ce qui a trait aux politiques de contrôle des drogues et à leurs résultats. Les Canadiens et les Canadiennes commencent à se rendre compte que les sommes importantes investies dans la répression de la consommation et du trafic des stupéfiants n'apportent pas les résultats escomptés.

(1710)

Nous avons aussi besoin de connaître les expériences menées dans ce domaine dans d'autres pays. Nous nous devons d'évaluer les solutions de rechange pratiquées par d'autres pays, des solutions moins coûteuses et qui assurent une meilleure réinsertion sociale d'une tranche importante de la société.

Durant tout l'été dernier, j'ai eu la chance de parcourir le pays et de rencontrer plusieurs Canadiens qui furent agréablement surpris par mon intention de vous demander de créer un comité spécial du Sénat pour réévaluer la politique canadienne antidrogues. Ils proviennent de tous les milieux. J'ai rencontré des policiers, des intervenants auprès des usagers de drogues, des médecins, des pères et des mères de famille, des avocats, des sénateurs, des professeurs d'université, des étudiants, des journalistes. J'ai également participé à plusieurs émissions de lignes ouvertes au cours de l'été. Beaucoup d'intervenants étaient d'accord pour dire que la politique du gouvernement en matière de contrôle de drogues ne fonctionne pas et que, finalement, cette politique de répression coûtait extrêmement cher et causait beaucoup plus de tort que de bien.

Plusieurs ont émis l'opinion que ce dont nous parlons n'est pas un problème relevant de la justice ou de la criminalité, mais plutôt une question de santé publique. Nombre de personnes et d'institutions m'ont offert leur expertise, leurs ressources et leur participation aux travaux du futur comité.

À la fin septembre, lors d'une semaine d'information reliée à la drogue, j'ai pris part à un débat organisé par l'association étudiante de l'Université de la Colombie-Britannique. L'un des invités était nul autre que le policier de Vancouver Gil Puder, qui est malheureusement décédé le mois dernier. Au cours des 15 dernières années, M. Puder s'est battu contre les ravages engendrés par la guerre contre la drogue sur la population des quartiers pauvres de cette ville. Il a consacré les dernières années de sa vie à organiser des campagnes de prévention et de sensibilisation auprès des jeunes de la communauté, pour leur démontrer les conséquences néfastes de l'utilisation de substances illicites. Il a également pris part à de nombreuses campagnes pour demander au gouvernement fédéral d'adopter une politique antidrogues qui considérerait ce problème comme étant une question de santé publique plutôt que criminelle.

Je tiens à transmettre, par le présent discours, mes sincères condoléances aux membres de sa famille. Je souhaite également rendre hommage au courage et à la détermination dont M. Puder a fait preuve au cours des dernières années ainsi qu'à l'ensemble de son travail. Je ferai remarquer que le message de condoléances du sénateur Chalifoux à son endroit a été remarqué et apprécié.

Le mois dernier, j'ai participé à deux exercices similaires à l'Université d'Ottawa et à l'Université de Moncton. Malgré un horaire chargé, de nombreux étudiants se sont déplacés pour participer à ces discussions. Cette expérience fut très enrichissante pour moi car les étudiants, contrairement à ce que l'on peut penser, n'appuient pas nécessairement une légalisation totale des drogues comme la marijuana ou d'autres drogues illégales. Cependant, ils sont en faveur d'une recherche de solutions alternatives aux politiques répressives actuelles.

En réaction à l'annonce de mon projet, plusieurs éditorialistes et commentateurs des médias de partout au Canada ont réagi positivement. Ces derniers ont été surpris qu'une telle initiative provienne du Sénat. Je dirais qu'ils ont accueilli le dépôt de ma motion comme une bouffée d'air frais dans le paysage politique canadien.

À ce titre, dans son édition du 21 juin dernier, le Globe and Mail affirmait que le Sénat devait absolument donner son accord à ce projet pour démontrer une fois pour toutes que nos politiques actuelles en matière des drogues ne fonctionnent plus, et je cite:

[Traduction]

Certaines questions de politique publique sont tellement épineuses que les politiciens font presque tout pour éviter d'en parler. La conception juridique de l'utilisation non médicale des drogues est une de ces questions... Un rapport sérieux du Sénat pourrait exposer le coût direct élevé de la politique actuelle et le comparer avec celui de solutions de rechange réalistes. Si ce rapport trouvait un vaste appui auprès du public, il pourrait convaincre les politiciens timides que des réformes sont acceptables. C'est la politique, non la raison, qui a amené les députés à refuser il y a trois ans un projet d'étude conjointe de la question par les Communes et le Sénat. Les sénateurs accompliraient un service public s'ils se chargeaient eux-mêmes de cette étude.

[Français]

Honorables sénateurs, le 26 novembre dernier, lors du caucus des maires des 21 plus grandes villes du Canada, les membres de la Fédération canadienne des municipalités, j'ai présenté mon projet. Cette association, qui regroupe plus de 600 municipalités canadiennes, a adopté, il y a deux ans, une résolution qui appuyait la politique prohibitionniste du gouvernement fédéral en matière de contrôle des drogues illicites. Cette résolution enjoignait les autorités fédérales à ne pas modifier les dispositions de l'actuelle Loi réglementant certaines drogues et autres substances.

Toutefois, le 21 avril dernier, l'Association canadienne des chefs de police a recommandé au gouvernement fédéral de décriminaliser et non de légaliser la possession de petites quantités de stupéfiants, incluant l'héroïne. Ce qui était le plus encourageant dans la prise de position de l'Association canadienne des chefs de police, c'est qu'elle recommandait à la population canadienne et au gouvernement fédéral d'adopter une approche qui traiterait toutes les questions relatives à la consommation abusive de stupéfiants comme un problème de santé publique. Je tiens à vous rappeler que cette position a été appuyée par la Gendarmerie royale du Canada.

Depuis cette prise de position, la Fédération canadienne des municipalités est en train de réviser sa propre position sur cette question. Elle tente de développer une nouvelle stratégie dans ce domaine, axée sur la réduction des méfaits envers les usagers de drogues. La fédération, au nom de ses membres, a fait parvenir une lettre au ministre de la Justice demandant que le gouvernement crée un forum où cette question serait débattue. C'est ce que je vous propose aujourd'hui avec la création d'un comité spécial sur les drogues illégales.

Les municipalités ont un rôle important à jouer dans la réforme de nos politiques antidrogues. Elles constituent le niveau de gouvernement le plus proche du citoyen. Elles occupent une position privilégiée pour déterminer quels sont les principaux problèmes et conséquences sociales engendrés par nos politiques répressives antidrogues. Les maires sont conscients de cette responsabilité et ils ont demandé ce qu'ils pourraient faire pour modifier cette situation. Comme nous tous, ils sont à la recherche de solutions alternatives à ces problèmes sociaux. Comme nous, ils en sont venus à la conclusion que les politiques de répression utilisées pour le contrôle des drogues illégales sont inefficaces et coûtent très cher aux citoyens.

Par ailleurs, les membres du caucus des maires des grandes villes canadiennes ont félicité les membres du Sénat d'avoir bien accueilli la proposition que j'ai présentée en juin dernier. De plus, le caucus a adopté à l'unanimité et dans son intégralité la motion qui est devant vous.

À cet effet, voici ce que le maire d'Edmonton, Bill Smith, écrit dans sa lettre du 29 novembre 1999:

[Traduction]

J'appuie certainement la motion que vous avez présentée au Sénat. À mon avis, cela vient certainement étayer la nécessité d'un Sénat et le bon travail qu'accomplit cette institution. Comme je l'ai dit à la réunion, cela m'offusque toujours d'entendre des gens au Canada critiquer le Sénat. Je connais personnellement de nombreux sénateurs et je sais à quel point ils travaillent fort pour le Canada.

[Français]

Je tiens à souligner que plusieurs des maires que j'ai rencontrés souhaitaient apporter leur contribution aux travaux de ce comité.

Revenons maintenant au déroulement des travaux du comité. À partir du mandat décrit dans la motion, l'étude que je vous propose aujourd'hui sera divisée en 12 thèmes. Les honorables sénateurs qui voudront participer aux travaux sont les bienvenus mais, à des fins d'efficacité, je tente de limiter à cinq les sénateurs qui seront attitrés aux travaux du comité. Chacun des cinq sénateurs qui seront membres du comité devra s'engager à prendre en main les travaux de recherche sur deux ou trois des 12 thèmes. Je tiens à vous en avertir, la tâche de diriger la recherche et de sélectionner des témoins ne sera pas réservée uniquement au directeur de la recherche et au coordonnateur du comité. Il s'agit d'un travail rigoureux. Chacun des sénateurs, qui prendra en charge ces sujets, devra faire rapport aux autres membres du comité de l'avancement de ses recherches.

(1720)

Certains d'entre vous vont peut-être dire qu'il s'agit d'une approche trop rigoureuse. À ceci, je répondrai que je crois fermement qu'en adoptant cette façon de travailler, nous pourrons accomplir notre mandat d'une façon objective et sérieuse. Nous voulons donner une information transparente, objective et vérifiée par les membres du comité. Si nous voulons élever le débat à un niveau plus sérieux et bien informer les Canadiens et le gouvernement, nous n'avons pas d'autre choix que d'adopter ce type d'approche.

Honorables sénateurs, je n'ai pas l'intention aujourd'hui d'aborder en détail chacun des 12 thèmes qui seront inclus dans cette étude. Je vais parler uniquement de ceux qui sont vraiment importants à mes yeux pour que le comité puisse étudier ces questions.

Vous avez tous, j'en suis convaincu, pris connaissance du document que je vous avais remis en juin dernier. Je suis sûr que vous avez, à la lecture de ce document, constaté que si nous sommes sérieux dans notre approche, nous devons absolument offrir aux Canadiens, dans un premier temps, un maximum d'informations.

Lorsqu'ils seront informés, le comité devra les inviter à participer à nos travaux pour tenter de découvrir quel est leur niveau de moralité en matière de drogues. Pourquoi ai-je utilisé le mot «moralité», honorables sénateurs? Vous allez comprendre en lisant la documentation sur l'histoire de la prohibition au Canada et dans le monde. Vous allez comprendre que les questions de santé publique n'ont jamais été prises en compte lorsque venait le temps de légiférer et de prohiber, et ceci dès la première prohibition, qui a été celle de l'opium.

Il n'a jamais ou presque été question de santé publique, mais il a amplement été question de moralité publique, de racisme, de commerce international, de l'importance qu'on devait accorder aux sociétés de produits pharmaceutiques. Toutes les questions de commerce et de moralité ont engendré la prohibition qu'on connaît aujourd'hui.

Les Canadiens comprendront que tous les signataires de ces traités ont mené tranquillement la population de nos pays, car les parlementaires, de bonne foi, ne se sont jamais retournés pour voir d'où venait la prohibition. On a cru ce que nos ancêtres nous avaient dit, on a foncé et on a continué à prohiber et à signer des traités pour prohiber encore plus.

Aujourd'hui, on se retrouve dans la situation que le docteur Riley vous a décrite dans le rapport que j'ai déposé en juin dernier. Je pourrais vous en parler pendant longtemps, mais je n'ai pas l'intention de prendre davantage de votre temps. Vous avez devant vous les paramètres détaillés du mandat que je vous demande pour le comité, un mandat d'une durée de trois ans.

Comme je l'ai dit tout à l'heure, chaque membre aurait la responsabilité de certaines facettes du mandat global, et c'est un travail très rigoureux. Pourquoi? Il existe déjà beaucoup de recherches scientifiques dans ce domaine. C'est peut-être le sujet qui a été le plus étudié dans la deuxième moitié du XXe siècle. Il s'agit de faire l'inventaire de cette recherche et de mettre de côté les recherches douteuses. Indépendamment de quel côté vous vous tenez de cette barricade, vous allez découvrir des recherches qui ont été truquées de part et d'autre. Il s'agit d'éliminer ce type de recherche et de se concentrer avec rigueur sur la recherche scientifique pure.

Chaque membre du comité aurait la responsabilité d'une des facettes de l'examen. Tout cela peut facilement s'échelonner sur près de deux ans. Après cela, il s'agira de rédiger un rapport intérimaire, d'informer les Canadiens de ce que nous aurons découvert, de susciter ensuite leurs réactions pour en arriver à l'étape du rapport.

Il y aura en cours de route une élection fédérale. J'ose penser que nous serons à même d'éviter les écueils que peut nous apporter une élection fédérale, surtout lorsqu'il est question d'un sujet aussi sensible. Je préfère donc avoir plus de temps pour faire le travail et ainsi éviter d'être forcé de produire un rapport qui sera jeté en pâture à des politiciens qui ne rechercheront que des sujets pour lesquels les passions des Canadiens pourraient être éveillées sans qu'on leur donne toute l'information nécessaire.

Honorables sénateurs, je vous propose la création de ce comité spécial. Si vous avez des questions à poser, je suis disponible pour y répondre.

(Sur la motion du sénateur Kenny, le débat est ajourné.)

Pêches

Autorisation au comité d'étudier des questions relatives à son mandat

L'honorable Gerald J. Comeau, conformément à l'avis du 2 décembre 1999, propose:

Que le Comité sénatorial permanent des pêches soit autorisé à étudier des questions relatives à l'industrie des pêches afin de présenter un rapport à ce sujet;

Que le Comité fasse rapport au plus tard le 12 décembre 2000; et

Que le Comité soit autorisé, nonobstant les pratiques habituelles, à déposer son rapport auprès du Greffier du Sénat si le Sénat ne siège pas, et que ledit rapport soit réputé avoir été déposé au Sénat.

[Traduction]

L'honorable John Lynch-Staunton (chef de l'opposition): Honorables sénateurs, je voudrais faire une observation sur l'élaboration de l'ordre de renvoi à l'égard d'une grande question comme celle des pêches, qui est indispensable et que j'appuie entièrement. La semaine dernière, nous en avons élaboré un sur l'agriculture et un autre sur les forêts. Le sénateur Nolin en demande un sur les drogues illicites. Le sénateur Kirby en demande un sur les services de santé. Certaines des études en question dureront peut-être un an ou deux. Dans le cas de celle du sénateur Nolin, elle durera trois ans.

Avant d'approver ces études spéciales, nous devrions obtenir un aperçu des coûts en question, d'autant plus que, à ma connaissance, le budget de nos comités - je ne crois pas que la situation ait changé ces dernières années - est toujours très limité. Il s'agit probablement du poste budgétaire le plus sollicité et toujours sous-financé. Je ne veux pas mettre un frein à l'étude proposée par les sénateurs Comeau et Robichaud. Avant que nous n'allions trop loin, j'estime cependant que nous devrions avoir un aperçu général de ce que ces études coûteront au Sénat et du montant que nous sommes disposés à engager au cours des deux et trois prochaines années. Nous constaterons peut-être que nous ne pourrons pas terminer certaines de ces études, faute de fonds ou de prévoyance.

(1730)

Le sénateur Comeau: Le problème qu'il y a à présenter un budget avant d'obtenir un mandat, c'est que sans mandat, on ne peut présenter un budget. D'abord, il faut avoir le mandat et ensuite, nous pouvons nous adresser à notre comité et préparer le budget. Si le comité permanent de la régie interne, des budgets et de l'administration croit que nous devrions aller de l'avant avec l'étude, on pourra en discuter à ce moment-là, mais nous ne pouvons tout simplement pas préparer un budget sans avoir au préalable un mandat.

L'honorable Dan Hays (leader adjoint du gouvernement): Honorables sénateurs, j'ai une question à poser au sénateur Comeau. Je pense que je connais la réponse, mais permettez-moi de le confirmer. Je crois que cette motion est présentée avec l'approbation des membres du comité, et je suppose que c'est une approbation unanime, mais j'apprécierais une observation à ce sujet.

Je comprends le point de vue défendu par le sénateur Lynch-Staunton ainsi que celui du sénateur Comeau. En tant que président d'un comité, il est difficile de savoir ce qui passe en premier dans ces cas-là. Quoi qu'il en soit, je sais que le comité a fait de l'excellent travail au cours de la dernière législature à la suite d'un renvoi de ce genre. Le comité a tenu compte d'un renvoi au budget des dépenses pour fonder son étude, et nous en arriverons là à un moment donné dans cette enceinte.

J'aimerais qu'on me dise ce qu'il en est de la décision du comité de saisir le Sénat de cette motion.

Le sénateur Comeau: Honorables sénateurs, la motion dont parle le leader adjoint, soit celle portant sur les prévisions budgétaires, est la troisième motion que je vais présenter. J'y viendrai dans un instant. Ma troisième motion propose que, au cas où les prévisions budgétaires seraient renvoyées au comité, nous ayons le moyen de déposer le rapport sur ces prévisions budgétaires. Cependant, pour l'instant, si les prévisions budgétaires ne sont pas renvoyées à notre comité, bien entendu, nous ne les renverrons pas au greffier si le Sénat ne siège pas.

[Français]

L'honorable Fernand Robichaud: Honorables sénateurs, j'aimerais ajouter quelques commentaires et peut-être rassurer l'honorable sénateur Lynch-Staunton. Lorsque nous avons considéré cette motion, il s'agissait en fait d'avoir un mandat assez large pour nous permettre d'étudier toutes les questions relatives aux pêches. Il était tout à fait entendu que si nous devions voyager, un budget serait préparé et présenté au Comité de la régie interne, des budgets et de l'administration afin que nous puissions respecter les directives que chaque comité a reçues de contrôler ses dépenses.

L'an dernier, le comité des pêches a justement remis un voyage sur la côte Ouest parce qu'on ne pouvait pas trouver les fonds nécessaires pour effectuer ce voyage. Il est bien compris que ce n'est pas une question de budget et de se promener un peu partout au Canada.

Le sénateur Lynch-Staunton: Ce n'était pas mon intention de laisser planer un doute autour de la motion du sénateur Comeau. Je voulais demander qu'on soit autant que possible toujours soucieux du fait que nos budgets sont très limités. Aussi louables que soient les études demandées, surtout celles qui se prolongent sur une période de deux ou trois ans, il serait bon que le Sénat soit saisi des coûts immédiatement pour ne pas avoir de mauvaises surprises.

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, aucun autre sénateur ne désire prendre la parole. Vous plaît-il d'adopter la motion, honorables sénateurs?

Des voix: D'accord.

(La motion est adoptée.)

Autorisation au comité de permettre la diffusion de ses délibérations par des moyens électroniques

L'honorable Gerald J. Comeau, conformément à l'avis du 2 décembre 1999, propose:

Que le Comité sénatorial permanent des pêches soit habilité à permettre le reportage de ses délibérations publiques par les médias d'information électroniques, en dérangeant le moins possible ses travaux.

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, vous plaît-il d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.

(La motion est adoptée.)

[Traduction]

Autorisation au comité d'engager du personnel

L'honorable Gerald J. Comeau, conformément à l'avis qu'il a donné le 2 décembre 1999, propose:

Que le Comité sénatorial permanent des pêches soit habilité à retenir les services de conseillers, techniciens, employés de bureau ou autres éléments nécessaires pour examiner les projets de loi, la teneur de projets de loi et les prévisions budgétaires qui lui ont été déférés.

(La motion est adoptée.)

[Français]

Transports et communications

Autorisation au comité de diffuser ses délibérations par les médias d'information électroniques

L'honorable Lise Bacon, conformément à l'avis du 6 décembre 1999, propose:

Que le Comité sénatorial permanent des transports et des communications soit autorisé à permettre la diffusion de ses délibérations publiques par les médias d'information électroniques, de manière à déranger le moins possible ses travaux.

L'honorable Eymard G. Corbin: Honorables sénateurs, de plus en plus, tous les comités demandent au Sénat l'autorisation de radiodiffuser et de télédiffuser leurs audiences publiques. Nous en sommes au point où nous devrions donner une licence générale à tous les comités qui veulent procéder de la sorte. Nous vivons quand même à une époque où tout le monde est branché, tout le monde veut regarder et écouter. Cette exigence est devenue superflue. Le Comité des privilèges, du Règlement et de la procédure devrait se pencher sur ce préalable et il devrait biffer du Règlement cette exigence. Nous laisserions les comités maîtres de leur destinée dans ce domaine.

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, y a-t-il d'autres sénateurs qui voudraient prendre la parole?

Des voix: Non.

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, vous plaît-il d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.

(La motion est adoptée.)

Autorisation au comité de retenir des services

L'honorable Lise Bacon, conformément à l'avis du 6 décembre 1999, propose:

Que le Comité sénatorial permanent des transports et des communications soit habilité à retenir les services de conseillers, techniciens, employés de bureau ou autres éléments nécessaires pour examiner les projets de loi, la teneur de projets de loi et les prévisions budgétaires qui lui ont été déférés.

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, vous plaît-il d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.

(La motion est adoptée.)

(Le Sénat s'ajourne au mercredi 8 décembre 1999, à 13 h 30.)


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