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Débats du Sénat (Hansard)

Débats du Sénat (hansard)

1re Session, 41e Législature,
Volume 148, Numéro 59

Le jeudi 8 mars 2012
L'honorable Donald H. Oliver, Président intérimaire


LE SÉNAT

Le jeudi 8 mars 2012

La séance est ouverte à 13 h 30, le Président intérimaire étant au fauteuil.

Prière.

[Traduction]

DÉCLARATIONS DE SÉNATEURS

La Journée internationale de la femme

L'honorable Marjory LeBreton (leader du gouvernement) : Honorables sénateurs, aujourd'hui, nous soulignons la Journée internationale de la femme. Chaque année, le 8 mars, la Journée internationale de la femme nous donne l'occasion de souligner la contribution indispensable que les femmes apportent et continueront d'apporter dans toutes les sphères de la société, ici au Canada et dans le monde entier.

Le thème de cette année, « Force des femmes, Force du Canada — Les femmes dans les collectivités rurales, éloignées et nordiques : clé de la prospérité du Canada », est particulièrement pertinent. Cette reconnaissance spéciale des millions de femmes qui vivent dans les collectivités rurales, éloignées et nordiques, y compris dans les collectivités autochtones, tombe à point nommé. Rona Ambrose, ministre d'État à la Condition féminine, a pris la parole aux Nations Unies le mois dernier et a signalé, à juste titre, que ces femmes sont confrontées à des difficultés et à des possibilités uniques, comme de nombreuses femmes qui vivent dans des collectivités rurales et éloignées partout dans le monde.

À titre de femme membre du Parti conservateur, je suis particulièrement fière du bilan du gouvernement dans de nombreux secteurs d'activités liés aux femmes. Nous avons augmenté le financement des programmes destinés aux femmes à un niveau sans précédent, de sorte que les groupes qui présentent des demandes sont plus nombreux que jamais. Manifestement, notre approche pratique est largement reconnue et fonctionne.

Par exemple, cette semaine, pour souligner la Semaine internationale de la femme et la Journée internationale de la femme, la ministre Ambrose a annoncé que plus de 12 millions de dollars seraient consacrés à de nouveaux projets pour les femmes des collectivités rurales et éloignées et des petits centres urbains. Cette aide ciblée est octroyée pour des projets locaux communautaires dans tout le pays dans le but d'aider les femmes en région rurale à faire face à certaines de leurs plus grandes difficultés : la violence, l'isolement et l'instabilité économique.

Comme je l'ai déjà dit à maintes reprises dans cette enceinte, nous sommes résolus à travailler avec les Canadiens partout au pays pour mettre un terme aux mauvais traitements infligés aux femmes et aux jeunes filles. Depuis 2007, nous avons investi plus de 42 millions de dollars dans des projets destinés à aider à éliminer la violence faite aux femmes et aux jeunes filles. Au cours des deux dernières années seulement, Condition féminine Canada a consacré plus de 4,5 millions de dollars à des projets qui visent directement à éradiquer la violence faite aux femmes autochtones.

De plus, le gouvernement a pris des mesures dans de nombreux domaines afin d'accroître la sécurité économique et la prospérité des femmes. Nous travaillons sans relâche pour créer une économie saine, qui profite à tous les Canadiens. Condition féminine Canada finance aussi des projets qui aident à créer des emplois pour les femmes autochtones, à favoriser la croissance des entreprises qui appartiennent à des femmes et à accroître la présence des femmes dans des postes de direction et de décision dans des secteurs non traditionnels, comme les sciences, le génie, les métiers et la technologie.

Je sais que tous les sénateurs se joindront à moi pour souligner la Journée internationale de la femme et pour reconnaître les contributions importantes des femmes qui vivent dans les collectivités, petites et grandes, d'un bout à l'autre de notre merveilleux pays.

[Français]

L'honorable Claudette Tardif (leader adjoint de l'opposition) : Honorables sénateurs, j'aimerais ajouter ma voix à celle de mes collègues afin d'attirer l'attention du Sénat sur la Journée internationale de la femme.

Cette journée, qui est l'occasion de faire un bilan sur la situation des femmes et de revendiquer l'égalité entre les sexes, est célébrée depuis plus de 100 ans. Au cours de cette période, nul besoin de vous rappeler que des progrès importants ont été accomplis dans la poursuite de l'égalité.

Le thème retenu cette année est la force des femmes dans les collectivités rurales du Canada. Ce thème revêt une importance particulière en Alberta, où plus de 20 p. 100 des femmes habitent dans une communauté rurale. Je tiens donc à souligner le rôle important que jouent les femmes dans la prospérité économique des régions rurales, éloignées et nordiques.

Je tiens également à rappeler que les progrès réalisés ne sont pas accidentels. Ils sont survenus grâce à l’audace et au courage de nombreuses femmes qui ont fait preuve d’une volonté indomptable. Je parle de femmes qui ont refusé le statu quo, comme les « Cinq femmes célèbres» de l’Alberta dans l’affaire « personne », qui ont contesté la situation des femmes de leur époque et, ce faisant, ont ouvert la voie aux femmes et leur ont permis de participer pleinement à la vie publique. Je parle de pionnières comme Carrie Derick, première femme nommée professeure dans une université canadienne, qui, après avoir complété ses études doctorales, n’a pu recevoir son diplôme parce que l’université qu’elle fréquentait ne décernait pas encore de tels diplômes aux femmes. Je parle de parlementaires comme Agnes Macphail, première femme élue à la Chambre des communes, et Cairine Wilson, première femme nommée au Sénat.

Si l'histoire du Canada est marquée par la poursuite de l'égalité, c'est notamment grâce à elles ainsi qu'à d'innombrables autres femmes qui accomplissent tellement de choses extraordinaires tenues pour acquises et qui ne sont pas applaudies comme elles le devraient.

Cependant, le constat du progrès ne devrait pas nous distraire de la réalité quotidienne que vivent encore bien des femmes, une réalité marquée par l'inégalité et l'injustice. Plusieurs de ces réalités nous sont bien familières : l'iniquité salariale qui persiste toujours entre les hommes et les femmes au Canada; le fait que chaque jour 3 000 femmes canadiennes environ trouvent refuge dans un centre d'hébergement pour échapper à la violence domestique enfin; en dépit du fait que les femmes forment la moitié de la population, elles ne représentent que 25 p. 100 des parlementaires à Ottawa, et 30 p. 100 des juges dans les tribunaux fédéraux. Ces statistiques prouvent que l'égalité entre les sexes n'est pas encore une réalité au Canada.

Il en revient à chacun de nous, hommes et femmes, d'envisager des mesures concrètes et de combattre les attitudes menant à l'inégalité afin de continuer les progrès qui ont caractérisé l'histoire du Canada.

(1340)

[Traduction]

La semaine « Cerveau en tête »

L'honorable Kelvin Kenneth Ogilvie : Honorables sénateurs, j'aimerais attirer votre attention sur la semaine « Cerveau en tête », qui se déroulera du 12 au 18 mars 2012, et sur les Organismes caritatifs neurologiques du Canada, une coalition de 26 organismes de bienfaisance du secteur de la santé qui travaillent en vue d'améliorer la qualité de vie des gens atteints de maladies, de troubles ou de lésions neurologiques.

Profitons tous de l'occasion pour nous sensibiliser à l'importance de la santé neurologique et pour nous rendre compte que le cerveau est l'un des organes essentiels du corps humain. Un cerveau qui ne fonctionne pas bien nuit à tous les aspects de la vie.

Au Canada, 5,5 millions de personnes souffrent de maladies neurologiques chroniques. La plupart de ces maladies sont progressives et dégénératives, et on n'en connaît ni la cause ni le traitement. Pour certaines de ces maladies, il existe des thérapies; toutefois, dans la plupart des cas, il n'est pas possible d'arrêter leur progression ni même de la ralentir.

Les maladies du cerveau ne sont pas une conséquence normale du vieillissement. Cependant, la fréquence de ces troubles augmente avec le vieillissement. Selon certains analystes, les troubles neurologiques deviendront, au cours des 20 prochaines années, la principale cause de décès et d'invalidité au Canada.

Bien vivre avec une maladie du cerveau n'est pas seulement une question de santé. Dés le début et au fur et à mesure de sa progression, une maladie neurologique chronique change la vie de la personne touchée de façon permanente. Une telle maladie entraîne des problèmes et des défis qui n'existaient pas auparavant. Elle se répercute sur tous les aspects de la vie présente et future de la personne, y compris ses relations avec sa famille, son emploi, l'endroit où elle habite, sa stabilité financière, ses possibilités de formation, sa santé et sa vie sociale.

Je tiens également à rappeler que le gouvernement a pris cette question très au sérieux. Il a, entre autres, alloué jusqu'à 100 millions de dollars dans le budget de 2011 à l'appui de l'établissement d'un fonds canadien de recherche sur le cerveau. Celui-ci appuiera les travaux des meilleurs chercheurs en science neurologique au Canada, favorisant la recherche concertée et accélérant les découvertes afin d'améliorer la santé et la qualité de vie des Canadiens qui souffrent de troubles neurologiques. Au total, les dépenses publiques au titre de la santé mentale au Canada dépassent 14 milliards de dollars par an.

Cette année, mais surtout durant la troisième semaine de mars, apprenons-en tous davantage sur les défis auxquels sont confrontées quotidiennement les personnes atteintes de troubles neurologiques, comme par exemple l'accès aux fournisseurs de soins et les défis liés à la discrimination. Sensibilisons-nous davantage à ces défis et appuyons ceux qui se consacrent à l'amélioration de la vie des personnes atteintes de lésions neurologiques.

[Français]

La Journée internationale de la femme

L'honorable Rose-Marie Losier-Cool : Honorables sénateurs, nous célébrons aujourd’hui l’édition de 2012 de la journée internationale de 52 p. 100 de la population de la planète. Je parle évidemment des femmes.

La bonne gestion de nos sociétés et de notre planète ne saurait se passer des femmes. Elles sont une moitié essentielle de nos civilisations successives. Pourtant, elles ont encore et toujours le plus petit bout du bâton, souffrant parfois et partout dans le monde d'un accès inégal à l'éducation, à l'emploi, au pouvoir et à la richesse.

[Traduction]

Je suis heureuse du thème choisi pour 2012 par le site web anglais de la Journée internationale de la femme : Connecting Girls, Inspiring Futures, que je traduirais ainsi : Filles connectées, avenir prometteur. Je suis également très encouragée par le rapport des Nations Unies déposé le 30 janvier, intitulé Gens résilients, planète résiliente : un avenir qui mérite d'être choisi. Dans ce rapport, les Nations Unies font valoir que, pour assurer le développement durable, il est essentiel de donner aux femmes les moyens d'agir et de leur permettre de jouer un rôle plus important dans l'économie.

[Français]

Vous le savez, l'ancienne éducatrice que je suis ne cesse de répéter que la clé du succès, c'est l'éducation. Par conséquent, vous comprendrez que je prêche aujourd'hui en faveur d'une meilleure éducation des jeunes filles et des jeunes femmes avant qu'elles ne deviennent femmes, et, à ce titre des actrices à part entière de leur société.

Si nous continuons d’éduquer les jeunes filles, au moins jusqu’à la fin de l’école secondaire, nous leur permettrons d’acquérir les compétences en littératie et en numératie nécessaires dans la vie de tous les jours. Elles comprendront alors les documents qu’elles liront, qu’il s’agisse d’avis de santé publique, de tracts électoraux ou de manuels d’instructions. Elles sauront poser des questions pour se renseigner davantage. Elles pourront ainsi avoir une influence sur la vie économique et sociale de leur collectivité en participant aux discussions.

[Traduction]

Cependant, l'éducation des jeunes filles et des jeunes femmes devrait aller au-delà des manuels scolaires. En effet, il faut apprendre à ces femmes de l'avenir comment utiliser les technologies de l'information, qu'il s'agisse d'un téléphone intelligent ou d'un ordinateur. Il faut également aborder avec elles les questions de santé fondamentales, comme la santé en matière de sexualité et de reproduction.

[Français]

En éduquant ces jeunes filles et ces jeunes femmes, on leur donne les outils nécessaires à une participation pleine et équitable à la vie de leur communauté, de leur région, et même de leur pays. On leur offra une autonomie qui leur permet de prendre leur juste place sur notre planète.

J'encourage donc notre gouvernement à continuer de privilégier, dans ses programmes nationaux et son aide internationale, tous les projets ou organismes qui permettent aux jeunes filles et aux jeunes femmes de s'instruire pour construire.

Je profite donc de cette journée spéciale pour souhaiter à ces jeunes filles et à ces jeunes femmes bonne! Une route jalonnée de petits et de grands bonheurs, d'accomplissements pour devenir des femmes épanouies.

[Traduction]

La Journée mondiale de la plomberie

L'honorable Donald Neil Plett : Honorables sénateurs, il est facile de prendre pour acquis l l'eau potable et les systèmes sanitaires. Nous avons pu constater à la suite du tremblement de terre dévastateur de 2010, en Haïti, et du tsunami de l'an dernier, au Japon, et nous voyons chaque jour dans de nombreuses réserves des Premières nations à quel point la plupart d'entre nous sommes chanceux d'avoir accès à de l'eau potable et à des systèmes sanitaires qui fonctionnent correctement.

L'eau potable et des installations sanitaires de base ne devraient pas être un luxe. Chaque habitant de la planète — surtout ici au Canada — devrait y avoir accès. L'eau douce est sans contredit la ressource naturelle la plus précieuse de la planète. L'industrie de la plomberie est consciente de l'équilibre que l'humanité doit préserver pour assurer sa survie.

Honorables sénateurs, hier, nous avons entendu le sénateur Patterson prononcer un excellent discours sur le projet de loi S-8, Loi sur la salubrité de l'eau potable des Premières Nations, récemment présenté par le gouvernement. Le texte répond à des préoccupations concernant la santé et la sécurité sur les terres de réserve et certaines terres déterminées. Il prévoit la prise de règlements relatifs à l'eau potable et au traitement des eaux usées dans les collectivités des Premières nations. En outre, le gouvernement conservateur a prévu environ 2,5 milliards de dollars au cours des sept prochaines années au titre de l'eau potable dans les réserves. Cette nouvelle mesure législative fera fond sur cet investissement.

Les Nations Unies ont proclamé les années 2005 à 2015 la Décennie internationale d'action : l'eau, source de vie. C'est d'une importance cruciale dans un monde où les maladies évitables liées à l'eau et au manque d'installations sanitaires tuent plus de 3 millions de personnes chaque année, dont la majorité sont des enfants qui ont moins de cinq ans. Les statistiques des Nations Unies montrent que 783 millions de personnes sur la planète n'ont pas accès à de l'eau potable.

Aujourd'hui, je souligne la Journée mondiale de la plomberie, qui est célébrée partout dans le monde le 11 mars. C'est la troisième année qu'on souligne cette journée visant à mieux faire comprendre au grand public le rôle crucial de l'industrie de la plomberie dans la protection de la santé et de la sécurité publiques dans les pays développés et en développement. Cette journée permet en outre de renseigner le public au sujet du travail accompli par cette industrie pour conserver les ressources mondiales d'eau potable, qui sont de plus en plus surexploitées, ainsi que pour promouvoir l'efficacité énergétique et l'utilisation accrue des sources d'énergie renouvelables.

(1350)

Honorables sénateurs, je vous invite à vous joindre à moi le 11 mars pour souligner la Journée mondiale de la plomberie ainsi que l'apport inestimable du Conseil mondial de la plomberie et de ses membres, qui se consacrent à l'amélioration des conditions de vie partout dans le monde.

Le Sommet mondial des femmes

L'honorable Pana Merchant : Honorables sénateurs, en cette Journée internationale de la femme, nous soulignons la contribution des femmes au développement de la société. Le 22e Sommet mondial des femmes aura lieu à Athènes du 31 mai au 2 juin.

On m'a demandé de diriger la délégation canadienne, faisant ainsi honneur à cette Chambre. Le Sénat, le gouvernement et des femmes d'affaires ont participé à ces réunions par le passé, dont notre amie, madame le sénateur Poy, qui a pris part au sommet de 2001 à Hong Kong.

Des événements comme le Sommet mondial des femmes de 2012, qui aura lieu sous peu, aident nos amis européens dont l'avenir financier est menacé, tout en appuyant les femmes du monde entier dans leurs avancées vers l'égalité.

Les femmes entrepreneures sont à l'avant-garde puisqu'elles favorisent l'adoption de pratiques exemplaires en vue d'accroître l'excellence et la productivité dans le milieu des affaires et au sein du gouvernement.

Même dans les pays qu'on dit avancés, les femmes entrepreneures et celles qui veulent faire carrière en politique se heurtent à des obstacles systémiques. Ainsi, elles doivent avoir plus de possibilités de participer à l'élaboration de programmes d'innovation et d'apprentissage, disposer d'un véritable accès aux marchés internationaux et être libres de participer aux marchés mondiaux.

L'un des obstacles particulièrement difficile à surmonter pour les femmes d'affaires est l'accès limité au crédit, y compris le microcrédit.

L'architecture socioéconomique et sociopolitique du gouvernement et de la société varie grandement d'un pays à l'autre et d'un continent à l'autre. Trop souvent, les obstacles systémiques auxquels les femmes se heurtent ont des répercussions négatives et font en sorte qu'elles ne peuvent jouer qu'un rôle minime à l'extérieur de leur cellule familiale. Logiquement, il s'ensuit que les femmes qui veulent développer leur entreprise au sein de leur propre pays et à l'extérieur de celui-ci, sur les marchés mondiaux, doivent modifier le fonctionnement de l'État.

[Français]

Encore aujourd'hui, à l'échelle mondiale, nous élisons le minimum de femmes au sein de tous les ordres du gouvernement. Le Canada se classe parmi les 10 premiers pays où le taux de représentation des femmes est le plus élevé à la Chambre haute, avec plus de 35 p. 100. À la Chambre des communes, au Canada, ce taux se situe autour de 20 p. 100.

[Traduction]

Le Sommet mondial des femmes est un moteur de changement, une tribune importante où des femmes peuvent partager leurs expériences au sein des entreprises ou des gouvernements et ainsi se préparer plus adéquatement à diriger et à gérer leur propre entreprise.

J'espère que le Canada sera l'hôte du Sommet mondial des femmes dans un proche avenir et je suis certaine que nous serons fort bien représentées au sommet d'Athènes.

Le décès du sergent William Stacey

L'honorable Michael L. MacDonald : Honorables sénateurs, l'année dernière, les Canadiens ont assisté à la fin de notre mission de combat d'une durée de 10 ans en Afghanistan. Toutefois, cette guerre n'est pas terminée et elle peut encore toucher les Canadiens de façon inattendue.

Depuis 1940, ma ville natale, Louisbourg, publie un bulletin mensuel intitulé le Louisbourg Seagull. L'édition de janvier 2012 comprenait un article du journaliste australo-américain intégré au United States Marine Corps, relatant l'histoire du sergent William Stacey, qui était sur le point de terminer son quatrième déploiement en Afghanistan. Même s'il était âgé d'à peine 23 ans, le sergent Stacey avait reçu, entre autres mentions et décorations, le Purple Heart, la Navy and Marine Corps Achievement Medal, la médaille de l'Afghanistan assortie de deux insignes de bronze, ainsi que la médaille de l'OTAN pour la FIAS en Afghanistan.

Le United States Marine Corpsa été déployé en Afghanistan en tant que soutien à la mission de la FIAS, la Force internationale d'assistance à la sécurité. Il s'agit de la même mission à laquelle les Forces canadiennes ont participé avec grand courage pour aider la population de l'Afghanistan.

Il est évident que le journaliste, tout comme les militaires qui ont servi avec le sergent Stacey, le tenaient en haute estime.

Le sergent Stacey a un lien avec ma ville natale. En effet, la famille Stacey est bien connue et est établie depuis longtemps dans la région de Louisbourg. Les Stacey sont de vrais Cap-Bretonnais.

Même si William et ses parents étaient citoyens américains, son grand-père Frank a, pendant des décennies, religieusement fait un voyage dans son pays avec sa famille pour que ses enfants et ses petits-enfants restent en contact avec leurs racines cap- bretonnaises. J'ai quantité d'agréables souvenirs de la famille de Frank, surtout de feu ses frères Charlie et George, et j'ai entendu bien des histoires au sujet de Wylie, leur père.

Même s'il a grandi à Seattle, dans l'État de Washington, le jeune William Stacey faisant le voyage régulier à Louisbourg depuis sa tendre enfance jusqu'à ce qu'il s'engage dans les marines. Il aimait la petite ville natale de son grand-père et il était impatient d'y retourner chaque été pour aller sur le quai avec sa canne à pêche et taquiner le maquereau.

Le Seagull a publié un addenda à cet article dans son numéro de février 2012. Le 31 janvier 2012, alors qu'il effectuait une patrouille à pied dans la province de Helmand, dans le Sud de l'Afghanistan, le sergent Stacey et ses compagnons d'arme ont été fauchés par un engin explosif improvisé, ou EEI, un acronyme que nous avons malheureusement appris à connaître. L'explosion a blessé une personne et en a tué une autre, soit le sergent William Stacey. Il avait 23 ans.

Depuis son décès, on se souvient de lui comme d'un homme sûr de lui, charismatique et grandement respecté par ses pairs.

Lawrence Dabney, l'auteur de l'article de janvier 2012 qui portait sur William, a écrit ceci :

Rarement une personne m'a impressionné davantage que Will. Chacun des mots que j'ai écrits à son sujet dans cet article est honnête et véridique. Le fait qu'il ne deviendra pas l'être incroyable qu'il était en voie de devenir est une tragédie qu'il me faudra un certain temps à surmonter [...] En quelques années seulement, il a laissé une marque plus grande que nature derrière lui.

Honorables sénateurs, j'aimerais partager avec vous une partie de la lettre que le sergent Stacey a laissée à ses parents, Bob et Robin, s'il perdait la vie.

Ma mort n'a pas changé le monde, et vous vous demandez probablement à quoi elle rime, mais elle a une signification plus profonde. Je n'ai peut-être pas changé le monde. Il y reste peut-être toujours de l'injustice. Mais il s'y trouve un enfant qui vivra parce que des hommes ont quitté la sécurité dont ils jouissaient dans leur pays pour venir dans le sien. Et cet enfant aura appris dans les nouvelles écoles qui ont été construites [...] Il grandira pour devenir un homme bon qui tentera de relever tous les défis que son cœur lui dictera. Il jouira du cadeau de la liberté, dont j'ai bénéficié si longtemps. Si ma vie permet d'acheter la liberté d'un enfant qui, un jour, changera le monde, alors je sais que ça en valait la peine.

J'ai été profondément touché par les mots du sergent Stacey. Ils illustrent parfaitement l'esprit de la mission en Afghanistan. Tous les marines, les soldats, les marins et les aviateurs, peu importe leur nationalité, devraient être fiers de la bravoure dont ils font preuve dans leur lutte pour le peuple afghan. C'est bien plus qu'un simple combat contre le terrorisme. C'est une mission contre la sédition et pour la défense des plus vulnérables.

Grâce à des hommes comme le sergent Stacey, les enfants de l'Afghanistan pourront jouir du cadeau de la liberté, la liberté d'aller à l'école, la liberté de vivre sans peur.

Au nom de ma ville natale, Louisbourg, et du Sénat du Canada, j'aimerais profiter de l'occasion pour offrir mes plus sincères condoléances à son père Bob, sa mère Robin, à ses grands-parents et à tous les membres de la famille Stacey. Le sergent Stacey sera enterré plus tard, ce mois-ci, au cimetière national d'Arlington, en Virginie. Sa famille érigera également un monument en son honneur dans le lot familial à Louisbourg, la petite ville du Cap-Breton qui était sa deuxième demeure.

Que Dieu bénisse le sergent William Stacey, et puisse son âme reposer en paix et une lumière éternelle briller sur lui.

La Journée internationale de la femme

L'honorable Elizabeth Hubley : Honorables sénateurs, la première Journée internationale de la femme s'est tenue il y a plus de 100 ans. À cette époque, les femmes sont descendues dans les rues en Europe et aux États-Unis pour manifester et pour exiger qu'on leur accorde des droits démocratiques fondamentaux, par exemple le droit de voter et de se présenter à une élection. C'était une journée de solidarité internationale et d'action politique, une journée où les femmes pouvaient élever leur voix et s'exprimer. Aujourd'hui, des femmes de partout dans le monde luttent encore pour obtenir les mêmes droits démocratiques et les mêmes droits de la personne.

(1400)

Au cours de l'année dernière, de la place Tahrir à la place Rouge, des milliers de femmes sont allées manifester dans les rues. Les femmes qui ont participé au printemps arabe en Égypte, en Libye et en Tunisie ont souvent mis leur vie en danger en luttant pour la démocratie et la liberté. Tous les espoirs sont maintenant permis pour l'avenir. C'est une période déterminante pour ces démocraties émergentes. Il est essentiel que la voix de ces femmes soit entendue et que leurs droits soient pleinement respectés et intégrés dans toutes les nouvelles institutions politiques.

Toutefois, tandis que ces pays restructurent leurs gouvernements et ratifient de nouvelles constitutions, les droits des femmes sont encore très vulnérables. L'approbation récente, par le président afghan Hamid Karzaï, d'un décret proclamant que les femmes sont des citoyens de seconde zone s'inscrit dans une tendance préoccupante qui menace non seulement l'avenir des femmes dans ces pays, mais aussi l'avenir de ces démocraties. Les femmes sont des ressources incroyables. Elles ont beaucoup de compétences, d'intelligence, de créativité et d'énergie. Un pays qui ne reconnaît pas les talents extraordinaires de ses femmes et n'en tire pas parti ne pourra pas prospérer.

En ce 101e anniversaire de la Journée internationale de la femme, j'encourage vivement les femmes de tous les pays à demeurer vigilantes, actives et toujours bien renseignées. La lutte pour la démocratie, l'égalité et les droits de la personne se poursuit. Les femmes de nombreux pays, particulièrement au Moyen-Orient, ont encore besoin de notre soutien et de nos encouragements.

La guerre de Corée

La Princess Patricia's Canadian Light Infantry—La compagnie D

L'honorable Yonah Martin : Honorables sénateurs, il y a 61 ans et un jour, le 7 mars 1951, les hommes de la compagnie D du Princess Patricia's Canadian Light Infantry se sont levés à 4 heures. Le soir précédent, ils étaient sur la ligne de front. Puis on leur a permis de s'éloigner du front, de recevoir l'absolution des prêtres, de se laver et d'enfiler des vêtements secs. Ensuite, il se sont munis de grandes quantités de munitions. Dans la neige jusqu'aux chevilles, ils ont alors parcouru cinq longs milles, à la noirceur, pour rejoindre le point de départ de l'attaque.

Leur objectif était de prendre l'immense colline 532, d'une hauteur de 40 étages. Peu de temps après avoir franchi leur point de départ, ils ont été la cible de fusils-mitrailleurs mais sont tout de même parvenus à franchir l'arrière-garde ennemie. Des frappes aériennes contre l'ennemi avaient été prévues, mais le ciel était chargé de nuages annonçant de la neige, et les avions ne sont jamais venus.

La compagnie D a tout de même continué de grimper. La pente était raide, à une inclinaison de 20 degrés, et devenait encore plus abrupte à proximité du sommet. Ayant trois pelotons avancés, la compagnie a encore grimpé pendant deux heures, avant de se retrouver sous une pluie de balles tirées par des fusils-mitrailleurs dissimulés. Les soldats ennemis étaient là en grand nombre; ils étaient cinq fois plus nombreux que les Canadiens. Les tirs étaient intenses. Des Canadiens s'effondraient. Les munitions commençaient à manquer. Les provisions de grenades étaient complètement épuisées. De petits groupes de Canadiens courageux ont continué d'avancer et de grimper. Ils étaient toujours la cible de tirs acharnés.

L'attaque s'est poursuivie pendant quatre heures. Les Canadiens étaient épuisés, mais ils ont continué d'avancer, un pas à la fois, jusqu'à arriver à cent verges du sommet. Une cinquantaines d'ennemis avaient été abattus. Le sentier qui dévalait la colline enneigée était recouvert du sang de soldats des deux camps.

Peu avant la tombée du jour, le caporal Roy Rushton, originaire de la petite ville de Tanner Hill, en Nouvelle-Écosse, a demandé au capitaine John Turnbull de faire cesser la marche de ses hommes. L'attaque des Canadiens ayant réussi, les soldats ennemis ont établi une arrière-garde avant de se retirer vers le pied de la colline. La victoire a été consolidée tôt le lendemain matin, quand les derniers soldats ennemis, peu nombreux, se sont rendus.

Ce petite troupe de combattants canadiens a attaqué des forces bien établies et cinq fois plus nombreuse, dotée d'armes automatiques et de grenades en quantité illimitée. Elle a remporté la bataille. Elle a perdu huit hommes et 27 autres ont été blessés. C'est le tiers de la compagnie. La bataille est tombée dans l'oubli. Seuls ceux qui y ont participé s'en souviennent.

Honorables sénateurs, 61 ans et un jour plus tard, rappelons-nous cette bataille et ces soldats. Nous nous souviendrons d'eux, lest we forget.

L'Académie de Lunenburg

L'honorables Wilfred P. Moore : Honorables sénateurs, c'était la dernière journée d'école, hier, à l'Académie de Lunenburg, située dans la ville historique de Lunenburg, en Nouvelle-Écosse. L'école que l'on surnomme affectueusement le « château sur la colline » a été construite en 1894-1895 sur la colline Gallows. Le site a été choisi au terme d'un débat acrimonieux au conseil municipal. L'égalité des voix a été rompue par le maire Watson Oxner, qui a voté en faveur. Il a été défait aux élections suivantes.

Les plans ont été dessinés par H. H. Mott, de Saint John, au Nouveau-Brunswick, et l'école a été construite par la Oxford Furniture Company d'Oxford, en Nouvelle-Écosse. Lorsque le constructeur a dépassé le budget de 35 000 $, le conseil municipal l'a congédié et a engagé le maître-charpentier local, Solomon Morash, pour achever les travaux.

L'Académie de Lunenburg a ouvert ses portes le 7 novembre 1895 et faisait partie du système des écoles du comté administré par le ministère de l'Éducation de la Nouvelle-Écosse. On y enseignait aux élèves de la 1ère à la 12e année. Jusqu'à sa fermeture hier, l'académie était la dernière école de cette époque à avoir servi d'établissement d'enseignement de façon continue. On y donnait le cours primaire, jusqu'à la 5e année. Le 21 mars 2012, la Bluenose Academy ouvrira ses portes aux élèves de la 1ère à la 9e année.

Le 6 mars 1984, la Commission des lieux et monuments historiques du Canada a désigné l'Académie de Lunenburg site d'importance architecturale nationale. En 1995, pour souligner les cent ans d'existence de l'académie, un timbre a été édité à son effigie.

Ce bâtiment remarquable est un point d'intérêt dans la ville de Lunenburg. Son style architectural inhabituel est mis en valeur par l'abondance de la décoration de l'ère victorienne, que l'on associe parfois aux maisons en pain d'épice, ce qui crée une structure unique admirée tant par les résidants que par les visiteurs.

L'Académie de Lunenburg appartient à la ville du même nom. En 1981, la Fondation de l'Académie de Lunenburg a été constituée en société bénévole, dont le mandat est de rénover, conserver et entretenir l'académie. Ce travail communautaire a été mené avec succès sous la direction bienveillante de Mmes Roxanna Smith et Jane Ritcey. Il revient maintenant à la ville et à la fondation de veiller à ce que les installations de l'académie continuent d'être employées à des fins éducatives. Nous leur souhaitons bonne chance en ce sens.


AFFAIRES COURANTES

Le commissaire à l'intégrité du secteur public

Dépôt d'un rapport sur les conclusions découlant d'une enquête sur une divulgation d'actes répréhensibles

Son Honneur le Président intérimaire : Honorables sénateurs, conformément au paragraphe 38(3.3) de la Loi sur la protection des fonctionnaires divulgateurs d'actes répréhensibles, j'ai l'honneur de déposer, dans les deux langues officielles, un rapport sur le cas du Commissariat à l'intégrité du secteur public.

[Français]

L'Assemblée parlementaire de la Francophonie

La réunion de la Commission politique, tenue du 1er au 5 mai 2011—Dépôt du rapport

L'honorable Michel Rivard : Honorables sénateurs, j'ai l'honneur de déposer, dans les deux langues officielles, le rapport de la section canadienne de l'Assemblée parlementaire de la Francophonie (APF) concernant sa participation à la réunion de la Commission politique de l'Assemblée parlementaire de la Francophonie, tenue à Liège, en Belgique, du 1er au 5 mai 2011.


(1410)

[Traduction]

PÉRIODE DES QUESTIONS

La justice

Les femmes autochtones disparues et assassinées

L'honorable Sandra Lovelace Nicholas : Honorables sénateurs, j'ai une question à poser au leader du gouvernement au Sénat. C'est aujourd'hui la Journée internationale de la femme. Ici, au Canada, je prends la parole à titre d'Autochtone, et j'ai honte du gouvernement actuel parce qu'il a fait la sourde oreille aux appels des femmes autochtones qui déplorent le meurtre de leurs mères, tantes, filles, sœurs et enfants. Le gouvernement n'a pas su rendre justice aux victimes et guérir les familles, ni mettre un terme à la violence. Le gouvernement devrait avoir honte.

L'ONU a sonné l'alarme il y a des années au sujet des femmes autochtones disparues et assassinées, et elle vient de lancer une enquête sur la question. Le gouvernement refuse d'agir et il ferme les yeux sur ce grave problème, ce qui ne fait qu'entacher d'avantage la réputation du Canada dans le monde. Le mépris du gouvernement pour les Autochtones est effroyable.

Le gouvernement conservateur va-t-il arrêter de mettre le Canada dans l'embarras sur la scène internationale et acceptera-t-il de coopérer pleinement à l'enquête de l'ONU?

L'honorable Marjory LeBreton (leader du gouvernement) : Honorables sénateurs, je remercie madame le sénateur de sa question. Comme toutes les femmes et tous les Canadiens, je conviens que le meurtre et la disparition de femmes dans les collectivités autochtones et la violence contre les femmes en général méritent une condamnation sans ménagement. À titre de Canadienne et de parlementaire, j'estime, bien que madame le sénateur ait parfaitement le droit de voir les choses comme elle le fait, que ni le gouvernement ni aucun d'entre nous ne considèrent le problème comme elle le décrit.

Nous sommes parfaitement au courant de la note qui aurait été envoyée à l'ONU. Que je sache, nous n'avons pas reçu de communication officielle de l'ONU, bien que je puisse me tromper. Je vérifierai pour le sénateur Lovelace Nicholas.

Pour nous tous, c'est un fléau, et le problème dure depuis des années. Le sénateur a tout à faire raison de dire que c'est intolérable. Tout ce que nous pouvons faire pour lutter contre le problème et trouver une solution devrait être fait, et nous faisons de notre mieux. Nous continuerons de collaborer avec les policiers, les gouvernements provinciaux et territoriaux et les groupes autochtones non seulement pour corriger cette situation terrible, mais aussi pour assurer la sécurité constante des femmes et des filles.

En octobre 2010, nous avons annoncé sept mesures concrètes afin d'honorer notre engagement à dépenser plus de 10 millions de dollars sur deux ans pour nous attaquer au problème des femmes autochtones disparues et assassinées. Grâce à ces fonds, de nouveaux outils ont été mis à la disposition des policiers, et des améliorations sont apportées au système de justice.

Cela ne veut pas dire, honorables sénateurs, que tout va bien, mais il me semble très injuste et inexact de décrire la situation dans les termes que le sénateur a employés.

L'honorable Mobina S. B. Jaffer : Avant de passer à ma question principale, j'ai une question complémentaire à poser qui fait suite à la question du sénateur Lovelace Nicholas.

Je m'adresse au leader du gouvernement au Sénat. J'ai déjà posé la question et je reviens à la charge : comme elle le sait pertinemment, il y a une enquête, en Colombie-Britannique, sur les femmes autochtones disparues. Malheureusement, les avocats des femmes disparues viennent de se désister parce que les femmes, au bout de 50 ans, n'ont pas encore pu faire entendre leur voix.

Le gouvernement fédéral fait-il quelque chose pour aider ces familles?

Le sénateur LeBreton : Bonne question. Il s'agit d'une enquête publique menée en Colombie-Britannique. Je ne sais pas au juste quelle est la participation du ministère fédéral de la Justice au processus, mais c'est avec plaisir que j'essaierai de me renseigner.

La condition féminine

La violence faite aux femmes

L'honorable Mobina S. B. Jaffer : Honorables sénateurs, ma question s'adresse au leader du gouvernement au Sénat. Aujourd'hui, le jeudi 8 mars, c'est la Journée internationale de la femme, qui nous donne l'occasion de saluer les réalisations économiques, politiques et sociales des femmes dans le monde. Malheureusement, c'est aussi l'anniversaire de la mort de Mme Arlene May. Le 8 mars 1996, tandis que la communauté internationale célébrait la Journée internationale de la femme, la famille d'Arlene May pleurait le décès de celle-ci. C'est ce jour-là, en 1996, qu'Arlene May a été assassinée par un homme qui avait été à un moment son conjoint de fait.

Hélas, le cas d'Arlene May n'est pas isolé. Tous les jours, il y a plus de 3 000 Canadiennes qui vivent dans des refuges d'urgence pour échapper à la violence au foyer.

Comme je l'ai dit à d'autres occasions, je sais que, lorsqu'elle travaillait avec le premier ministre Mulroney, madame le leader a joué un grand rôle dans la mise en place de nombreux programmes visant à prévenir la violence faite aux femmes. Aujourd'hui, à titre de leader du gouvernement au Sénat, aurait-elle l'obligeance de nous informer de ce que le gouvernement fait au juste pour protéger des femmes comme Arlene May qui sont victimes de la violence familiale et conjugale?

L'honorable Marjory LeBreton (leader du gouvernement) : Je remercie madame le sénateur de sa question. Elle a tout à fait raison. Il s'agit d'un dossier dont je me suis beaucoup occupée pendant une bonne période, notamment, comme elle l'a dit, au sein du gouvernement Mulroney. C'est alors que j'ai pu rencontrer madame le sénateur Jaffer pour la première fois. Nous l'avons nommée membre d'un groupe spécial chargé d'étudier la violence faite aux femmes.

J'ignore si le sénateur était présente lorsque j'ai fait ma déclaration, tout à l'heure, mais je rappelle qu'il y a eu des augmentations notables des fonds. La ministre de la Condition féminine, Mme Ambrose, vient d'annoncer l'injection de nouveaux fonds. L'accent est mis cette fois sur les femmes qui vivent dans les régions rurales et éloignées et plus particulièrement sur les programmes qui concernent l'isolement, la sécurité économique et, surtout, la violence faite aux femmes. Il y a une longue liste de programmes auxquels le gouvernement a participé par l'entremise non seulement du ministère de la Condition féminine, mais aussi du ministère de la Justice et du ministère de la Sécurité publique.

J'ai une longue liste. Je le sais, puisque je m'en sers pour de nombreux discours que je prononce sur la question. Ce serait un plaisir de donner au sénateur Jaffer une longue réponse détaillée par écrit.

Le sénateur Jaffer : Je comprends que madame le leader ne puisse pas donner une réponse verbale. C'est normal. Toutefois, lorsqu'elle partagera cette information, aurait-elle aussi l'obligeance de préciser les mesures que le gouvernement prend ou a prises pour que nous ayons des moyens de prévenir la violence faite aux femmes? Quelles sont ces mesures au juste? Quels sont les moyens actuellement en place pour garantir la sécurité de femmes comme Arlene May? Enfin, y a-t-il des programmes précis qui ciblent les immigrantes nouvellement arrivées?

Le sénateur LeBreton : Honorables sénateurs, le gouvernement s'est engagé dans divers programmes pour combattre la violence faite aux femmes. La campagne contre les mauvais traitements infligés aux aînés a été une sorte de retombée de la campagne que le gouvernement actuel et les gouvernements précédents ont menée contre la violence faite aux femmes.

(1420)

En ce qui concerne les immigrantes, nous avons examiné la semaine dernière le projet de loi C-10, dont certaines dispositions portent sur la traite de personnes et l'exploitation des immigrants qui arrivent au pays.

Je serai heureuse d'ajouter ces sujets à ma réponse lorsque je la fournirai.

Le sénateur Jaffer : Je vous remercie. Je tiens à féliciter le leader pour la campagne de lutte contre les mauvais traitements infligés aux aînés que le gouvernement a organisée. Je l'ai trouvée très instructive.

Je voudrais maintenant demander au leader d'envisager une campagne conçue pour les nouveaux arrivants au pays, afin de les renseigner sur l'aide qu'elles peuvent obtenir et de ne pas les laisser seules ou isolées face à la violence.

Le sénateur LeBreton : Encore une fois, comme je l'ai mentionné, des dispositions spéciales seront mises en œuvre une fois le projet de loi C-10 adopté. Ces dispositions ciblent les personnes qui maltraitent les femmes — ce sont le plus souvent des femmes, parce que plusieurs des victimes sont des travailleuses domestiques.

Pour faire suite à une question posée par le sénateur Lovelace Nicholas, je voudrais, avec la permission du sénateur Jaffer, lui fournir une copie d'une réponse. C'est le sénateur qui avait posé la question concernant les femmes et les filles autochtones disparues et assassinées en Colombie-Britannique. Nous avions donné une réponse à la question qui avait été posée en novembre et en décembre derniers. La réponse avait été déposée au Sénat le 7 février. Avec la permission du sénateur Jaffer, je voudrais m'assurer que le sénateur Lovelace Nicholas en obtienne une copie.

Les ressources humaines et le développement des compétences

L'assurance-emploi—Les femmes qui vivent dans la pauvreté

L'honorable Art Eggleton : Honorables sénateurs, en cette Journée internationale de la femme, je voudrais attirer l'attention sur le fait que beaucoup trop de femmes du Canada vivent dans la pauvreté. À 10 p. 100, le taux global de pauvreté est déjà bien trop élevé. Néanmoins, il atteint 36 p. 100 parmi les femmes autochtones, 35 p. 100 parmi les femmes membres des minorités visibles et 21 p. 100 parmi les mères seules. Ce sont des statistiques abominables pour un pays plutôt riche.

L'une des principales raisons pour lesquelles les femmes se retrouvent dans la pauvreté, c'est que 40 p. 100 des salariées ont des emplois atypiques : elles travaillent à temps partiel ou ont un emploi temporaire, occasionnel ou à contrat. Dans le système actuel d'assurance-emploi, dont les prestations sont fondées sur les heures travaillées, les femmes sont moins susceptibles que les autres d'être admissibles à ces prestations.

Je demande à madame le leader du gouvernement au Sénat si elle veut bien intervenir auprès de ses collègues du Cabinet pour que le gouvernement modifie le programme d'assurance-emploi de façon à tenir compte des difficultés particulières éprouvées par les femmes.

L'honorable Marjory LeBreton (leader du gouvernement) : Honorables sénateurs, il n'y a pas de doute que beaucoup de gens, hommes et femmes, vivent en deçà du seuil de la pauvreté. Le gouvernement a beaucoup fait pour aider les personnes à faible revenu, les aînés qui vivent seuls et les femmes.

Honorables sénateurs, il convient de noter que, même si nous avons des problèmes et que beaucoup de gens méritent de recevoir et obtiennent l'aide du gouvernement à différents niveaux, il y a au Canada de nombreux organismes gouvernementaux et privés qui prêtent leur concours à ceux qui ont moins de chance que nous. Comme je l'ai mentionné en réponse au sénateur Jaffer, le gouvernement a mis en œuvre de nombreux programmes, allant de la radiation des personnes à faible revenu du rôle d'imposition au versement de prestations fiscales pour les enfants. Bien sûr, plusieurs de ces femmes sont des mères. Comme je l'ai dit au sénateur Jaffer, il y a une longue liste de programmes administrés par RHDCC, par Condition féminine Canada, par le ministère de la Santé et même par le ministère de la Sécurité publique, qui sont conçus pour aider les gens qui ont moins de chance que nous.

Je serai heureuse de fournir cette liste au sénateur Eggleton. Qu'on soit au gouvernement ou qu'on travaille pour une agence sociale ou un organisme de bienfaisance, personne n'aime voir des gens qui vivent dans des conditions moins qu'optimales. Comme je l'ai dit, je serai très heureuse de transmettre au sénateur tous les détails parce qu'ils sont importants.

Le sénateur Eggleton : J'ai deux points à soulever à ce sujet. Premièrement, j'ai simplement demandé au leader d'intervenir en faveur de la modification d'un programme gouvernemental particulier, l'assurance-emploi, au sujet des difficultés que connaissent les femmes.

Oui, le leader parle fréquemment des choses auxquelles le gouvernement consacre de l'argent, ce qui est très bien. Il serait cependant bon d'obtenir de temps en temps une réponse donnant les résultats des dépenses faites et l'influence qu'elles ont eue sur la situation. Année après année, nous recevons des statistiques montrant que les choses n'ont pas vraiment changé. J'aimerais beaucoup mieux avoir des listes de résultats que des listes de dépenses.

J'ai une question complémentaire à poser. Il y a une autre raison importante pour laquelle les femmes se retrouvent dans la pauvreté. C'est le manque d'accès à l'éducation préscolaire et à des services de garde d'enfants. Nous savons que, si ces services sont disponibles à un prix abordable, les parents peuvent travailler ou, s'ils sont au chômage, suivre des programmes de formation afin d'acquérir de nouvelles compétences. De plus, l'éducation préscolaire aide les enfants à réussir plus tard. En fait, une analyse canadienne des coûts et avantages a révélé que chaque dollar dépensé rapporte 7 $ à la société sous forme d'avantages sociaux et économiques. Pour moi, c'est un investissement qui en vaut la peine.

Lorsque le gouvernement a annulé les ententes fédérales- provinciales sur la garde d'enfants en 2006, il a dit que c'était parce qu'il voulait donner plus de choix aux parents. Toutefois, des milliers de places de garderie ont été perdues. Sauf erreur, des places perdues limitent le choix des parents.

Je voudrais demander encore une fois à madame le leader si elle veut bien intervenir auprès de ses collègues du Cabinet en faveur d'un programme spécial de financement de l'éducation scolaire et des places de garderie dans le budget de 2012.

Le sénateur LeBreton : Honorables sénateurs, le sénateur parle d'un programme universel de garde d'enfants que le gouvernement dont il faisait partie a préconisé de 1993 à 2006. On en parlait constamment, mais on ne prenait aucune mesure pour le réaliser. Dans notre cas, nous avons très clairement dit que nous n'étions pas en faveur de ce programme.

Par contre, les honorables sénateurs devraient savoir que les provinces et les territoires reçoivent 250 millions de dollars par an pour appuyer la création de nouvelles places en garderie. C'est ainsi que les provinces et les territoires ont annoncé la création de 102 000 nouvelles places depuis mars 2007. Les provinces disposent maintenant d'un financement prévisible et croissant dans le cadre du Transfert canadien en matière de programmes sociaux. Elles ont reçu 1,28 milliard de dollars pour l'éducation préscolaire et la garde d'enfants dans la seule année 2010-2011, et ce montant augmente de 3 p. 100 par an.

Honorables sénateurs, nous investissons trois fois plus que le gouvernement précédent dans l'éducation préscolaire et la garde d'enfants soit, au total, 6 milliards de dollars en 2011-2012. C'est l'investissement le plus important de l'histoire du Canada.

Le sénateur a demandé des résultats. Au chapitre de la violence contre les femmes, nous avons approuvé des projets totalisant plus de 42 millions de dollars pour mettre fin à cette violence. Je ne sais pas comment mesurer les résultats, mais on peut espérer que cet investissement de 42 millions a sérieusement atténué le problème. Je ne sais pas s'il y a des moyens de mesurer le succès de certains de ces programmes, mais notre gouvernement a agi énergiquement et a toujours été le premier à s'attaquer à ces questions.

(1430)

Le supplément de Sécurité de la vieillesse

L'honorable Grant Mitchell : Honorables sénateurs, ma question s'adresse au leader du gouvernement au Sénat. Pourquoi les femmes mariées ou veuves âgées de 60 à 64 ans qui vivent dans la pauvreté sont-elles admissibles à un supplément de la Sécurité de la vieillesse, alors que les femmes divorcées ou jamais mariées dans les mêmes circonstances ne le sont pas? Est-ce juste?

L'honorable Marjory LeBreton (leader du gouvernement) : Je pense que le sénateur a tort. Grâce à notre gouvernement, il suffit de demander le Supplément de revenu garanti une seule fois. L'admissibilité est calculée en fonction du revenu. Il faudra que le sénateur me donne un exemple précis.

Le Supplément de revenu garanti est ce qu'il est. C'est un supplément de revenu garanti destiné aux gens dont le revenu les rend admissibles. Je doute que l'état matrimonial entre en ligne en compte. À moins que le sénateur ne soit en mesure de me citer un cas précis où l'état matrimonial est entré en ligne de compte, je vais devoir maintenir mon hypothèse selon laquelle le sénateur est mal renseigné.

Le sénateur Mitchell : Le Supplément de revenu garanti est destiné aux personnes de plus de 65 ans. Bon sang, madame le sénateur devrait le savoir puisqu'elle était ministre responsable des aînés.

Je parle d'un supplément spécial à la Sécurité de la vieillesse accordé aux femmes mariées ou veuves âgées de 60 à 64 ans qui n'est pas accordé aux femmes dans la même tranche d'âge qui vivent en deçà du seuil de la pauvreté, mais qui sont divorcées ou n'ont jamais été mariées. Peut-être madame le leader devrait-elle se renseigner à ce sujet, parce qu'elle devrait vraiment le savoir.

Le sénateur LeBreton : Je devais avoir la tête ailleurs lorsque j'ai présenté ce programme.

Le sénateur a parlé du Supplément de revenu garanti. Le Supplément de revenu garanti est offert à tous; il est ce qu'il est. C'est un supplément à la pension de vieillesse. Je serais reconnaissante au sénateur Mitchell de bien vouloir m'envoyer une petite note qui donnerait un exemple de ce dont il parle.

La condition féminine

L'écart entre les sexes—Le Forum économique mondial

L'honorable Joan Fraser : Honorables sénateurs, ma question s'adresse au leader du gouvernement au Sénat. Elle porte sur un rapport récent du Forum économique mondial, une organisation qu'on pourrait difficilement accuser d'être représentative des « cinglés de la gauche ».

Chaque année, le Forum économique mondial publie un classement selon l'indice des inégalités entre les sexes. Cet indice représente l'accès aux ressources et les perspectives offertes pour les femmes comparativement aux hommes, dans 114 pays, selon quatre critères : vie politique, éducation, santé et économie.

Lorsque le premier classement selon cet indice a été publié, en 2006, le Canada était au 14e rang, ce qui n'était peut-être pas aussi bon que nous aurions pu l'espérer, mais tout de même pas trop mauvais.

Seulement trois ans plus tard, en 2009, nous avons dégringolé de la 14e place à la 31e place pour ce qui est de l'écart entre les hommes et les femmes au Canada sur les plans de l'accès aux ressources et des perspectives offertes. Quelqu'un a dû s'apercevoir que quelque chose ne tournait pas rond, car nous avons repris quelques échelons dans le classement. L'année dernière, nous étions à la 18e place, ce qui n'est toujours pas aussi bon qu'en 2006, mais qui est tout de même beaucoup mieux que 31e. Cependant, nous avons perdu cinq années précieuses. Pourquoi?

L'honorable Marjory LeBreton (leader du gouvernement) : Honorables sénateurs, j'imagine que la crise économique mondiale a eu quelque chose à voir dans tout cela, mais je ne peux pas en être certaine.

Je peux seulement vous répondre au sujet de ce que le gouvernement a fait. Il s'agit d'une vaste étude qui tient compte de beaucoup de facteurs : industrie et entreprises, secteur privé et secteur public. Je peux seulement vous dire ce que le gouvernement a fait. Je crois que, lorsqu'on jette un coup d'œil en toute équité au nombre de femmes qui occupent présentement les échelons supérieurs de la fonction publique, force est d'admettre que ce nombre a augmenté. Le sénateur Losier-Cool me téléphonera à ce sujet, j'en suis certaine. Nous faisons tous les efforts possibles pour augmenter le nombre de femmes dans le système judiciaire. Nous avons notamment nommé pour la première fois une femme au poste de juge en chef de la Cour d'appel du Québec.

Les nominations devant se faire par décret nous permettent d'accroître le nombre de femmes au sein de l'appareil de l'État. Je suis bien au courant de ce dossier et je peux vous dire qu'en 1986, lorsque j'ai commencé à m'en occuper, moins de 13 p. 100 des postes dont le titulaire est nommé par décret appartenaient à des femmes. Celles-ci étaient confinées à des rôles stéréotypés, par exemple au Conseil de révision des pensions ou au Bureau de la coordonnatrice de la situation de la femme. Sur une période de sept ans seulement, j'ai haussé cette proportion de moins de 15 p. 100 à 33 p. 100. Des femmes ont dirigé Exportation et Développement Canada et le Tribunal des anciens combattants et ont occupé la vice-présidence de l'Office des transports du Canada, entre autres.

De nos jours, le gouvernement fait très attention à ce que les femmes soient bien représentées dans les processus de nomination et de promotion au sein de la fonction publique. Il me faudrait de plus amples renseignements sur les conditions dans lesquelles le sondage a été réalisé et sur les personnes qui y ont pris part, mais je ne peux que répondre au nom du gouvernement. Ce que je peux affirmer toutefois, c'est qu'en tant que femme qui sert au sein de ce gouvernement, je n'ai jamais été aussi à l'aise dans la vie politique.

Le sénateur Fraser : J'imagine que c'est la modestie qui empêche madame le leader de mentionner que le leader du gouvernement au Sénat est une femme. Non pas la première, mais une femme tout de même.

Il est intéressant de noter que, parmi les quatre critères que mesure l'indice, dans le secteur privé — celui où, selon le leader, l'État a le moins d'influence —, la participation économique et les possibilités est celui où le Canada se classe le mieux, soit 10e sur 114. En ce qui concerne la scolarisation, nous sommes au 31e rang; pour la santé et la survie, au 49e; et pour l'habilitation politique — que le leader vient de mentionner avec fierté — au 36e à peine.

Les pays qui nous déclassent comprennent évidemment les pays scandinaves, des États où nous savons que la condition féminine est extrêmement évoluée, mais également les Philippines, le Lesotho et l'Afrique du Sud. Pour ce qui est de l'habilitation politique, nous sommes à la remorque du Burundi, du Costa Rica, du Mozambique, de l'Argentine, de l'Ouganda, de l'Autriche, du Guyana, de l'Équateur, du Chili et de bien d'autres.

Je pose à nouveau la question : l'habilitation politique relève tout à fait du gouvernement, donc pourquoi accusons-nous un tel retard?

Le sénateur LeBreton : Je précise avant tout que le sénateur Fraser me demande de commenter un rapport dont j'ignore la méthodologie. Je ne sais pas non plus quelles questions ont été posées. Je dois d'abord me familiariser avec le contenu du document.

Honorables sénateurs, en tant que femmes, nous n'aidons pas du tout notre cause en soutenant que nos perspectives ne sont pas aussi alléchantes que celles des hommes dans notre pays. Lorsque j'étais à l'école, il était inconcevable qu'une femme fasse des études universitaires. Nous devions devenir des femmes au foyer, des enseignantes, des secrétaires ou des infirmières. Croyez-le ou non, mais je croyais vraiment que je serais infirmière. C'est ce que je voulais faire à l'origine.

La réalité, honorables sénateurs — et le sénateur Fraser le sait aussi bien que moi —, c'est qu'actuellement, dans les facultés de médecine et de droit de nos universités, les femmes sont majoritaires. Comme le savent les sénateurs, je participe à un vaste programme de bourses à l'Université d'Ottawa, et de plus en plus de femmes y obtiennent un diplôme en droit. Les choses évoluent. Le bassin de femmes est beaucoup plus vaste que lorsque j'étais jeune, et ces femmes finiront par faire de la politique si elles le désirent.

(1440)

Le sénateur Fraser sait — et l'expérience me l'a confirmé — que davantage de choix s'offrent aux femmes que par le passé. J'ai essayé d'inciter des femmes à entrer en politique et à accepter des nominations par décret, je sais donc aussi que les femmes examinent l'ensemble de la situation. Elles tiennent compte de leurs proches, de leurs semblables et de leurs collègues de travail. Lorsque l'on demande à une femme si elle souhaite obtenir un poste dans l'administration publique fédérale ou être candidate pour un parti politique, elle examine tous ces éléments. La plupart du temps, les femmes refusent, et c'est leur droit.

Lorsque je faisais des démarches pour recruter des gens, surtout en ce qui a trait aux nominations par décret, et que je demandais à un homme s'il souhaitait occuper un tel poste, il répondait par l'affirmative sans même envisager de consulter ses proches.

Plusieurs facteurs entrent en jeu lorsqu'on demande à une femme d'entrer en politique. Cependant, j'ose dire que le Sénat fait assez bonne figure. Je me souviens d'une époque où il n'y avait qu'une seule députée, puis deux. Il reste encore beaucoup de chemin à parcourir, mais il ne faut pas minimiser les grandes avancées qui ont été enregistrées.

Recours au Règlement

Décision de la présidence

Son Honneur le Président intérimaire : Honorables sénateurs, hier, l'honorable sénateur Kenny a invoqué le Règlement au sujet de commentaires faits plus tôt cette semaine dans cette enceinte. Il a soutenu notamment que ces commentaires traitaient d'une réunion tenue à huis clos par un comité, il y a plusieurs mois et d'une session précédente. Durant la discussion sur le rappel au Règlement, il s'est dit peu de choses susceptibles d'éclairer le Président sur ce qui s'était réellement passé. Il n'incombe pas au Président d'essayer de découvrir ce qui s'est dit ou non au cours d'une réunion tenue il y a si longtemps. Je voudrais cependant profiter de l'occasion pour rappeler aux honorables sénateurs de ne pas faire référence à des délibérations ou à des documents concernant des réunions tenues à huis clos. Il faut tenir compte de cette limitation. Je considère que le dossier est clos.


ORDRE DU JOUR

Les travaux du Sénat

L'honorable Claude Carignan (leader adjoint du gouvernement) : Honorables sénateurs, conformément à l'article 27(1) du Règlement, j'avise le Sénat que, lorsque nous passerons aux affaires du gouvernement, le Sénat abordera les travaux dans l'ordre suivant : le projet de loi C-19, la motion no 32, le projet de loi S-7 et le projet de loi S-8.

[Français]

Le Code criminel
La Loi sur les armes à feu

Projet de loi modificatif—Deuxième lecture

L'ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Lang, appuyée par l'honorable sénateur Stewart Olsen, tendant à la deuxième lecture du projet de loi C-19, Loi modifiant le Code criminel et la Loi sur les armes à feu.

L'honorable Céline Hervieux-Payette : Honorables sénateurs, c'est une journée un peu triste pour moi puisqu'en cette Journée internationale de la femme, et en tant que critique de l'opposition, je dois parler du projet de loi C-19.

Je suis originaire d'une province où les femmes ont été des victimes d'armes à feu mais où elles ont aussi fait une campagne extraordinaire afin d'obtenir l'adoption du projet de loi qu'on veut abandonner aujourd'hui. L'abandon de ce projet de loi enlèvera aux parents et amis des victimes la satisfaction de voir que le sacrifice de leur fille, de leur amie, n'aura pas servi à rien.

Je vais donner un aperçu global de la situation afin de faire comprendre à mes collègues du Parti conservateur que les changements apportés à cette loi sont des mesures qui ne feront certainement pas avancer le Canada sur le plan international, et ne feront sûrement pas non plus avancer la cause des droits des femmes.

J'aimerais tout de même bien cerner la question en vous lisant la définition du dictionnaire de ce qu'est une arme à feu :

Arme permettant d'envoyer à distance des projectiles, au moyen de gaz produits par la déflagration (combustion rapide et confinée d'un composé chimique détonnant).

Depuis quelques siècles, tard dans la Renaissance, les armes à feu sont devenues les armes prépondérantes de l'humanité, ce qui a provoqué de profondes mutations dans l'art militaire.

Je rappelle qu'aujourd'hui, les armes à feu prolifèrent à travers le monde entier. J'aurai l'occasion de donner des statistiques plus tard. La prolifération des armes à feu n'a certainement pas amélioré la condition humaine ni le sort des femmes et des enfants dans notre pays. En fait, l'adoption de la Loi sur les armes à feu, en 1995, avait justement pour but de réduire les incidents meurtriers dont sont victimes, entre autres, les personnes qui utilisent les armes à feu à mauvais escient.

Il ne s'agit pas de condamner l'usage d'une arme à feu, que ce soit pour les agriculteurs ou pour les chasseurs. Mon père était un chasseur émérite et mon goût pour la venaison vient certainement du fait que, pendant toute son existence, j'ai pu consommer régulièrement du chevreuil, du caribou, de l'orignal et des lièvres. Cela prouve que je ne suis donc pas idéologiquement contre ce projet de loi. Je pense qu'il est de la responsabilité du gouvernement d'encadrer l'usage des armes à feu afin qu'elles soient utilisées à bon escient.

Je veux montrer que, à titre de sénateurs, nous devons réfléchir sur l'usage des armes à feu, qui sont des instruments dangereux qui sèment la mort à travers le monde entier.

Lorsque cette loi entrera en vigueur, l'enregistrement des armes à feu ne sera plus obligatoire, à moins qu'il ne s'agisse d'une arme à feu prohibée ou d'une autre arme à feu à autorisation restreinte. On recule donc très loin en arrière et, en fait, il y aura moins d'obligations qu'avant l'adoption de la loi en 1995.

En éliminant l'enregistrement obligatoire des armes à feu, le gouvernement Harper ira qu'à l'encontre des enseignements dégagés par la Cour suprême dans le Renvoi relatif à la Loi sur les armes à feu, qui stipule que l'enregistrement est une « partie intégrante et nécessaire du régime » qui vise « la promotion de la sécurité par la réduction de l'usage abusif de toutes les armes à feu. »

Comme le rapporte la Coalition pour le contrôle des armes dans son mémoire de 2011, ce projet de loi, tout d'abord, rend optionnelle la vérification du permis lors de l'achat d'armes non restreintes, ce qui facilitera l'accès à des armes légales par des individus qui ne détiennent pas de permis en règle ou qui se sont vu retirer le privilège de posséder et d'utiliser des armes par suite d'une ordonnance d'interdiction émise par un tribunal.

Deuxièmement, on va détruire les données sur les 7,1 millions d'armes non restreintes déjà enregistrées, en dépit du fait que ces données pourraient être utiles au travail d'enquête des policiers, afin de retracer les armes à feu qui ont servi à commettre des actes criminels. Plusieurs traités internationaux exigent que les pays conservent les traces relatives aux ventes d'armes à feu pour fins de retraçage. Cela dépasse les frontières du Canada et, évidemment, celles du continent.

Troisièmement, cela n'inclut pas des dispositions visant à rétablir l'obligation pour les entreprises de tenir des registres de vente d'armes à feu. Cette obligation existe depuis 1977, et a été abrogée afin d'être en harmonie avec la loi de 1995, puisque l'information serait désormais inscrite au registre. En abolissant le registre, on abolit l'obligation de 1977.

Sans cette information, il n'existera plus aucun moyen pour les policiers d'enquêter sur la provenance des carabines et des fusils utilisés lors des crimes ou de confisquer ce type d'armes des mains des suspects.

Quatrièmement, on détruit un outil utilisé par les policiers pour retirer des armes des mains de personnes dangereuses ou suicidaires, ainsi que pour appliquer les ordonnances d'interdiction et prendre des mesures préventives.

Voilà l'étendue du projet de loi C-19 qui est devant nous.

Le sénateur conservateur Daniel Lang, la semaine dernière, affirmait au Sénat que son gouvernement, notamment par l'entrée en vigueur du projet de loi C-10, allait permettre d'imposer des peines plus dures mais justes, et de mettre en place un système correctionnel conçu pour corriger le comportement criminel.

(1450)

Par contre, l'Association du Barreau canadien ne partage pas cette opinion. Elle a montré, au contraire, à l'aide de preuves tangibles, que le projet de loi C-10, adopté la semaine dernière et intitulé Loi sur la sécurité des rues et des communautés, risque plutôt de mettre en péril la sécurité publique canadienne. Si le projet de loi C-10 crée de nouvelles prisons, impose des peines d'emprisonnement pour les infractions mineures et non violentes, justifie le mauvais traitement des détenus et complique la réinsertion sociale des délinquants, à mon avis, l'ajout du projet de loi C-19 nous mène dans une impasse.

D'autre part, l'Association du Barreau canadien craint qu'en adoptant ce projet de loi, aussi à caractère idéologique, comme c'est le cas du projet de loi C-19, la sécurité de la communauté dans son ensemble, mais surtout celle des policiers et en particulier, dans ce cas-ci, des membres des familles, ne soit compromise.

Le sénateur Lang affirmait aussi que, pour faire reculer la criminalité, le gouvernement Harper s'assurait de mettre plus de policiers dans les rues. Pourquoi donc le gouvernement n'écoute-t-il pas l'avis des policiers en ce qui a trait au projet C-19? L'Association canadienne des chefs de police, l'Association des policières et policiers provinciaux du Québec, la Gendarmerie royale du Canada militent tous pour le maintien du registre des armes d'épaule, puisqu'ils estiment que celui-ci sauve des vies et leur permet d'accomplir leur travail de manière plus sécuritaire.

Le gouvernement conservateur s'entête donc à vouloir abolir un registre qui, selon la GRC, est très utile pour les services judiciaires et policiers. Dans une évaluation récente du Programme canadien des armes à feu, la GRC rapportait trois éléments permettant de confirmer que le registre des armes d'épaule est primordial pour la sécurité des citoyens canadiens. Tout d'abord, il améliore la sécurité des agents de service. La GRC a établi que l'existence du registre permettait à ses agents de mieux préparer leurs interventions dans une résidence, d'évaluer les menaces potentielles et de savoir combien d'armes s'y trouvent. On pourrait qualifier ces avantages d'évidents.

La GRC est également d'avis que les enquêtes sont soutenues par ce registre. Il permet de retracer les armes. Le registre informatisé et centralisé permet aux corps policiers d'accélérer les recherches directement sur les lieux où ils en ont besoin. En plus d'améliorer la sécurité publique, on permet la saisie d'armes à feu dans les cas de violence familiale ou de perturbation mentale.

Le but et l'objectif du maintien du registre des armes à feu est clair et évident. Il respecte cette idée de sécurité publique. L'abolition du registre fera en sorte que la police aura bien plus de difficulté à anticiper la présence d'armes à feu lorsqu'elle est appelée sur les lieux d'un crime potentiellement violent.

Au Québec, la position du gouvernement provincial est sans équivoque. Les autorités croient en un système d'enregistrement universel des armes à feu, qui est un outil précieux qui favorise notamment la prévention du crime, le travail des policiers, des procureurs et des intervenants du domaine de la santé.

Contrairement à la position du gouvernement fédéral, celle du gouvernement québécois est soutenue par de nombreux organismes, des experts de la santé et de la sécurité publique et par les organisations policières du Québec.

Pour sa part, le sénateur conservateur Daniel Lang prétendait, la semaine dernière, que rien ne prouve que l'élimination du registre puisse changer quoi que ce soit au drame des suicides et des homicides. Comment l'honorable sénateur peut-il tenir de tels propos sans nous fournir des données?

Les statistiques et faits scientifiques démontrent que de nombreux progrès, en termes de sécurité publique, sont attribuables en grande partie à la création du registre des armes d'épaule, en 1995. D'ailleurs, l'organisme Poly le rappelait dans son mémoire, déposé au Comité permanent de la sécurité publique et nationale, en 2011. Voici les conclusions auxquelles en sont arrivés ces chercheurs.

Premièrement, le nombre de décès par arme à feu a diminué de 34 p. 100 entre 1995 et 2008.

Deuxièmement, le nombre d'homicides commis à l'aide d'armes d'épaule, carabines et fusils de chasse a diminué de 41 p. 100 entre 1995 et 2010. En 2009, le nombre d'homicides par armes d'épaule a atteint son plus bas niveau depuis que ces données ont commencé à être comptabilisées, en 1961.

Troisièmement, selon Statistique Canada, la diminution des homicides commis à l'aide d'une arme à feu constatée depuis le début des années 1980 peut être attribuée en grande partie à la baisse des homicides commis à l'aide d'une carabine ou d'un fusil de chasse.

Quatrièmement, avant l'adoption de la Loi sur les armes à feu, en 1991, les armes d'épaule représentaient environ 60 p. 100 des armes à feu utilisées pour commettre un meurtre, contre 30 p. 100 avec des armes de poing. En 2010, c'était 23 p. 100. Si la majorité des meurtres par balle sont aujourd'hui commis à l'aide d'une arme de poing, soit 64 p. 100 en 2010, ce n'est pas parce que les armes d'épaule sont moins dangereuses; c'est parce que la loi a eu l'effet souhaité sur les armes qu'elle encadrait pour la première fois, soit les armes d'épaule, jusque là le plus souvent utilisées à des fins de chasse ou pour abattre des animaux qui perturbent les fermes.

Cinquièmement, le nombre d'homicides conjugaux de femmes par armes à feu a diminué de 64 p. 100 entre 1995 et 2007. Il est difficile d'ignorer l'ampleur de cette baisse. De 2000 à 2009, près du quart, soit 23 p. 100, des homicides entre conjoints, étaient commis avec une arme à feu. Ce pourcentage se situe au deuxième rang, derrière ceux qui ont été commis avec des couteaux.

Sixièmement, le nombre de vols commis avec des armes à feu a diminué de 56 p. 100 entre 1995 et 2010.

Septièmement, le taux de suicides par armes à feu a diminué de 48 p. 100 entre 1995 et 2008.

Huitièmement, le maintien du registre est extrêmement efficient. Selon les dernières données, il ne coûte que 4 millions de dollars par année. L'argent dépensé jusqu'à maintenant pour le mettre en place n'est certainement pas récupérable et représente un investissement dans la santé et la sécurité publique. À cet égard, je vous donnerai plus tard quelques chiffres. Dans l'administration de cette loi, il faut considérer le registre, mais également tous les autres ministères impliqués, comme la GRC.

Il n'est pas étonnant d'entendre le sénateur Lang dire que les données statistiques ne font ressortir aucune corrélation entre la mise en place du registre des armes d'épaule et une diminution de l'utilisation criminelle des armes à feu. Après tout, depuis quand le gouvernement conservateur donne-t-il foi aux faits scientifiques et aux données statistiques, après le sort qu'il a réservé à Statistique Canada?

Le sénateur Daniel Lang a ajouté, dans son discours au Sénat, que le gouvernement « fait reculer la criminalité en dépensant efficacement l'argent des contribuables ». Je rappellerai à l'honorable sénateur Lang, ainsi qu'à ses collègues conservateurs, que le directeur parlementaire du budget, Kevin Page, vient justement de déposer un rapport sur l'incidence fiscale des changements qu'amènera une seule disposition du projet de loi C- 10. Or, il semble présenter une version diamétralement opposée à celle du sénateur Lang. À ce jour, du moins au Sénat, aucune étude sérieuse du gouvernement n'a fourni aux Canadiens les coûts de la mise en place de la loi — et je parle de tous les chapitres de la loi. M. Page l'estime en milliards de dollars.

Dans son étude rendue publique le mardi 28 février, Kevin Page a affirmé que la modification d'un seul article, soit l'article 741.2 du Code criminel, au projet de loi C-10, pourrait engendrer des dépenses supplémentaires de plusieurs dizaines de millions de dollars par année pour Ottawa et les provinces.

On nous parle de coûts. Je parle de la vie des femmes qui ont été sacrifiées parce qu'on veut libérer les armes et supprimer le registre.

J'aimerais bien demander au sénateur Lang, lorsqu'il prétend que son gouvernement entend dépenser efficacement l'argent des contribuables, si l'on doit inclure les coûts supplémentaires liés à une seule mesure du projet de loi C-10, qui s'élève à 8 millions de dollars par année pour le gouvernement fédéral et à 137 millions de dollars pour les provinces.

L'intention du gouvernement conservateur d'abolir le registre est un paradoxe étonnant, pour ne pas dire lamentable.

À cet égard, le Barreau du Québec nous rappelle que le gouvernement conservateur s'est donné pour objectif « de garantir la sécurité des rues et des collectivités », ce qui l'a d'ailleurs motivé à déposer, à l'étape de la première lecture, le 20 septembre dernier, le projet de loi C-10.

(1500)

Considérant cette soi-disant volonté de sécuriser la population canadienne, la suppression de l'obligation d'enregistrer les armes d'épaule et la destruction du registre des armes à feu existant constituent des choix législatifs contre-productifs en regard des objectifs de protection du public que le gouvernement affirme vouloir atteindre par ce moyen.

De plus, je ferai référence aux propos du sénateur St. Germain, qui a mentionné un montant de 2 milliards de dollars; c'est toujours facile de parler de coûts échelonnés sur une période de 17 ans. Honorables sénateurs, je suis membre du Comité des finances et, aux dernières nouvelles je n'ai jamais vu, dans les estimés budgétaires, de budgets présentés sur une période de 17 ans. Généralement, il s'agit du budget courant et, s'il y a des dépenses additionnelles, il y a un budget supplémentaire. On parle tout de même d'une période allant de 1995 à 2012.

En 2001, le coût annuel de l'administration du programme s'élevait à 200 millions de dollars, selon la vérificatrice générale du Canada. La vérificatrice générale du Canada a aussi dit que le financement annuel s'élevait actuellement à 82,3 millions de dollars. Cette dernière prenait en compte le fait que plusieurs ministères et des administrations provinciales participent au programme, mais que la responsabilité première est celle du Centre des armes à feu Canada.

Parmi les partenaires fédéraux qui encourent des coûts figurent la Gendarmerie royale du Canada, l'Agence des services frontaliers du Canada, le Service correctionnel du Canada, la Commission nationale des libérations conditionnelles, le ministère de la Justice, ainsi que d'autres organismes.

Il ne faut pas faire une histoire en disant que le registre lui-même coûte 100 millions de dollars. Les chiffres parlent d'eux-mêmes et on peut constater, dans les données officielles du gouvernement, que tous ces organismes contribuent à l'administration du registre, mais aussi à assurer la sécurité des Canadiennes et des Canadiens.

J'aimerais vous parler de l'industrie des armes à feu. Il faut quand même — si je ne réussis pas à convaincre mes collègues de l'importance de conserver le registre — examiner un peu la situation. J'aimerais faire une comparaison entre le Canada et les États-Unis.

Au moment où on se parle, d'après les plus récentes statistiques consultées et qui datent de 2010, 270 millions d'armes à feu se trouvent sur le territoire américain. Chaque année, 10 000 personnes en moyenne perdent la vie à cause d'une arme à feu. Chaque année aux États-Unis, 17 000 personnes se suicident par arme à feu sur un nombre total de 32 000 suicides. Cela veut dire que plus de la moitié des suicides américains sont faits au moyen d'une arme à feu.

Concernant les données sur les accidents à cause du maniement des armes, les décès sont au nombre de 789. Chaque année, les États-Unis — même s'ils sont des grands producteurs d'armes à feu et qu'ils en exportent — importent pour une valeur de 1 585 242 738 $ d'armes à feu. C'est donc dire que c'est un secteur très lucratif qui rapporte beaucoup d'argent à ceux qui font des affaires dans ce domaine.

Je vais maintenant vous donner un aperçu de la situation canadienne. Nous avons au Canada 9 950 000 armes à feu détenues par des particuliers. C'est donc dire qu'un Canadien sur trois possède une arme à feu. Concernant le nombre d'armes à feu au Canada, le Canada se situe au 13e rang de différents pays parmi les pays de l'OCDE ou développés. Pour les États-Unis, en moyenne 88 personnes sur 100 possèdent une arme à feu. Le Canada se situe donc au 13e rang, avec 30 armes à feu pour 100 personnes, et ceci parmi un groupe de pays tels la Suède, la Norvège, la France et l'Australie, qui ont eux aussi environ un tiers de leur population qui possède une arme à feu. Rappelons-nous qu'au Canada 80 p. 100 de la population vit en milieu urbain et que 20 p. 100 de la population vit en milieu rural.

Le nombre d'armes enregistrées est de 7 514 385. Nous parlons des armes, mais qui sont les propriétaires? Il y a 3 500 000 propriétaires qui ont participé et fait enregistrer leur arme. Il s'agit là d'une moyenne de trois armes par personne.

Je vous fais part d'autres statistiques afin qu'on connaisse bien la situation au Canada. Le Canada exporte aux États-Unis pour 90 237 690 $ d'armes à feu. Le Canada est un petit exportateur. Toutefois, nous importons pour une valeur de 154 645 493 $ d'armes à feu, de façon légale. Ces armes à feu sont inscrites au registre.

En examinant la situation, on se rend compte que, légalement, un registre existe; on parle de millions d'utilisateurs, de millions d'armes et on parle d'un système élaboré par les Canadiens, pour les Canadiens et payé par les Canadiens de tout le pays. C'est un système qui fonctionne, malgré des difficultés au démarrage.

Lorsqu'on lit le rapport de la vérificatrice générale, on s'aperçoit qu'il y avait des difficultés d'innovation dans ce secteur. Il s'agit là du domaine de l'enregistrement, de l'interaction entre les ministères et de la question de l'informatique qui devait traiter toutes ces données et effectuer la cueillette de données. Je ne vais pas aujourd'hui blâmer les fonctionnaires et les experts qui ont élaboré ce système. Lorsqu'on met en place un nouveau système — pensons, par exemple, au système de gestion SAP et à son implantation en entreprise —, vous saurez qu'on parle de beaucoup de dollars.

J'en viens maintenant aux préoccupations d'un groupe qui m'est très cher, soit la Fédération des femmes du Québec et la Fédération des ressources d'hébergement pour femmes violentées et en difficulté au Québec.

Ces dernières disent que le projet de loi qui vise à démanteler le contrôle des armes à feu au Canada — en dépit du fait que la loi a fait ses preuves et soit considérée comme un outil essentiel au travail des policiers — fait peu de cas de la Charte canadienne des droits et libertés, qui stipule que « chacun a droit à la vie, à la liberté et à la sécurité de sa personne ».

Lorsqu'on parle du Registre des armes à feu, on parle d'un moyen de protéger la vie et la sécurité des Canadiens. Elles ajoutent que la loi ne fait d'exception pour personne et s'applique également à tous, et que tous ont droit à la même protection et au même bénéfice de la loi, indépendamment de toute discrimination.

Il ne s'agit pas de mettre en opposition les gens qui habitent le Grand Nord, les gens qui habitent les Prairies ou les gens qui habitent les grandes villes. La loi, au Canada, lorsqu'il s'agit de protéger les citoyens, s'applique de la même façon à tous. Je pense que la fédération a parfaitement raison.

Ces dernières ajoutent que le projet de loi C-19 est totalement contraire à l'esprit et à la lettre d'une récente déclaration contre la violence faite aux femmes adoptée par les membres de l'Organisation internationale de la Francophonie dans le cadre d'une séance présidée par le gouvernement du Canada. À ce moment, la séance était présidée par notre collègue, le sénateur Josée Verner, alors qu'elle était ministre des Affaires intergouvernementales.

Je rappelle à mes collègues que nous avons des antécédents que et nous sommes ici pour travailler ensemble et adopter les meilleures solutions. Nous ne sommes pas ici pour répondre aux désirs d'une industrie extrêmement florissante.

(1510)

Je rappelle aujourd'hui à notre esprit que, au Québec, à la tragédie de Polytechnique, il faut ajouter celles du Collège Dawson et de l'Université Concordia, ainsi que l'intervention armée à l'Assemblée nationale du Québec. Le passé au Québec a bien montré l'utilisation malveillante des armes à feu. Le contrôle des armes à feu est un moyen de réduire des tragédies en ce sens.

Le Canada qui, il n'y a pas longtemps, souhaitait faire partie du Conseil de sécurité des Nations Unies, a travaillé dans le passé, dans le cadre de la Convention sur la criminalité transnationale, au Protocole sur les armes à feu qui a été adopté le 31 mai 2001 par l'Assemblée générale et est entré en vigueur le 3 juillet 2005, après que le nombre nécessaire de pays l'ait ratifié.

Malheureusement, les États-Unis, alors qu'ils ont participé à l'élaboration du protocole, ont signifié qu'ils ne le signeront pas Nous aurons l'occasion dans quelques minutes de voir pourquoi les États-Unis ont reculé. Par contre, la Communauté européenne l'a signé le 16 janvier 2002 et, en 2010, la Communauté européenne a proposé une mesure législative visant à conformer ses lois aux dispositions de l'article 10 du protocole. L'article 8 du protocole prévoit le marquage des armes à feu aux fins de leurs indications, l'article 7 demande la conservation des informations pendant au moins dix ans, et l'article 10 définit les obligations générales concernant le système de licence et d'autorisation de transfert.

De plus, ce protocole définit la confiscation, la saisie et la neutralisation des armes à feu et demande aux États d'adopter des mesures législatives nécessaires à l'incrimination. Il exige une coopération et un échange d'informations régulières entre les États, et demande d'établir des mesures de contrôle sur les activités de courtage.

Honorables sénateurs, avec le projet de loi C-19, le Canada ne sera jamais en mesure de respecter l'esprit et la lettre du protocole auquel il a participé mais que, évidemment, le gouvernement conservateur n'a pas ratifié. On ne peut que déplorer que le Canada se range du côté des pays qui n'ont pas à cœur de se conformer à une règle sur le plan international à laquelle 57 pays ont déjà souscrit.

Par contre — je voulais vous donner un petit aperçu de ce qui se passe en Europe, parce qu'il y a des pays qui ne font pas partie de l'Union européenne —, on se rend compte d'une chose en faisant une analyse de la législation sur les armes et munitions de six pays européens, c'est-à-dire l'Allemagne, le Danemark, l'Espagne, la Grande-Bretage, les Pays-Bas et la Suisse : dans chacun de ces pays, les conditions d'acquisition, de détention, d'utilisation de port et de transport des armes à feu par les particuliers ont été étudiées en profondeur.

Dans ce résumé de leur législation, le Danemark et les Pays-Bas sont les seuls pays qui ont décidé d'une interdiction générale. Autrement dit, en général, les gens ne peuvent pas s'acheter des armes à feu, que ce soit pour la chasse ou tuer des animaux malfaisants, mais il y a une exception qui leur permet, lorsqu'ils prouvent qu'ils en ont besoin, d'obtenir une arme à feu. C'est une interdiction générale à laquelle est assortie une exception.

Les quatre autres pays autorisent l'acquisition et la détention de certaines catégories d'armes à feu. Par contre, je ne peux pas dire que ce soit les mêmes armes pour tous les pays, mais en général, les armes de poing sont évidemment interdites ainsi que les fusils, parce que la chasse sportive en Europe est très répandue. Il faut savoir qu'ils sont soumis à des lois sévères et qu'ils doivent faire l'enregistrement de leurs armes.

Dans certains cas, l'enregistrement se fait localement, mais tous ces pays se conforment à un enregistrement de leurs armes à feu. Pour des pays qui ont passé à travers la guerre, c'est une mesure qui leur permet de garantir la sécurité des citoyens.

Je me dis tout le temps que mes collègues d'en face sont certainement des gens intelligents, alors comment peuvent-ils adhérer à l'abolition du registre des armes à feu? En faisant des recherches, je crois avoir trouvé le coupable.

Le coupable, vous ne serez pas surpris de le savoir, est un organisme qui s’appelle la National Rifle Association. C’est un lobby extrêmement puissant aux États-Unis qui veut qu’aucun contrôle d’aucune sorte ne soit imposé à toutes les armes à feu et qui œuvre depuis longtemps, tant aux États-Unis qu’au Canada, pour l’abolition du registre. On sait maintenant que la National Rifle Association — et je cite maintenant un célèbre conservateur, M. Tony Bernardo, qui est un ardent défenseur des armes à feu et directeur général du Canadian Institute for Legislative Action :

[Traduction]

La NRA a accordé un appui logistique et tactique à des organismes comme le CILA — l'Institut canadien pour l'action législative —, lequel a été mis sur pied en 1998 pour exercer des pressions auprès du gouvernement fédéral pour qu'il abolisse le registre.

Il a également écrit ce qui suit dans le Canadian Firearms Digest :

La NRA fournit également au lobby canadien des armes à feu un appui logistique considérable. Cela ne se fait pas sous forme financière parce que les statuts de l'association l'en empêchent, mais elle nous accorde généreusement toutes sortes d'autres formes de soutien...

De plus, en 2000, la NRA a versé 100 000 $ pour un publireportage concernant ce qu'on a appelé « la situation au Canada ». Selon M. Bernardo, qui figure dans le reportage, celui-ci a été diffusé sur les réseaux nationaux américains. Cela signifie que la NRA a fourni du matériel pour que l'information soit diffusée, et nous savons tous qu'il n'existe aucune barrière entre le Canada et les États-Unis en matière de télédiffusion.

M. Bernardo est souvent invité aux émissions-débats de la NRA pour tenir les propriétaires d'armes à feu américains au courant de la lutte menée pour abolir le registre canadien des armes à feu. La NRA l'a aidé à mettre sur pied son groupe de pression et lui a fourni tout le soutien technique voulu pour qu'il travaille ici à faire en sorte que le registre soit aboli.

Je citerai maintenant une personne de l'Ontario. J'ai lu dans un rapport que l'ancien procureur général de l'Ontario, Michael Bryant, avait dit de la NRA qu'elle « [...] manœuvre dans les coulisses politiques du Canada depuis des années ».

Je parle d'un organisme qui soutient un organisme canadien et qui lui a donné de l'argent. J'aimerais rappeler à mes collègues que lorsqu'il est question d'environnement, c'est un péché de parler de soutenir une cause avec de l'argent provenant des États-Unis, mais lorsqu'il s'agit du registre des armes à feu, ce n'est plus un péché et on ne considère plus cela comme un obstacle. Je n'ai pas entendu un seul conservateur mentionner le fait que la NRA a beaucoup contribué à appuyer l'abolition du registre des armes à feu.

D'autres personnes y ont aussi beaucoup contribué, et je pense en particulier au député conservateur Garry Breitkeuz. Je ne le connais pas, mais je sais qu'il était tout à fait en faveur de la NRA et qu'il était soutenu par la NRA. Il y a un lien direct entre la NRA et les conservateurs. Tous les rapports que j'ai pu consulter le prouvent amplement. Il y a aussi eu Candice Hoeppner, qui a assisté à l'assemblée annuelle de 2010 de la CSA. Elle y est allée avec la NRA, ce qui signifie que vous avez des gens qui étaient partie prenante, qui étaient appuyés et qui en font partie.

Une autre personne qui a travaillé de très près avec la NRA est Gary Mauser, un professeur de marketing à la retraite, un membre actif du Parti conservateur depuis longtemps et ancien directeur de l'association de circonscription conservatrice de New Westminster- Coquitlam. En 2006, le professeur Mauser était président du comité des candidatures dans cette circonscription. Il a donné à titre personnel plus de 11 000 $ au Parti conservateur et à ses prédécesseurs.

(1520)

Opposé au registre depuis sa création, le professeur Mauser a beaucoup écrit en faveur de la possession d'une arme pour se défendre — son coin de pays doit être dangereux —, et ses premières recherches ont été financées par devinez qui? La National Rifle Association. Il est aussi un bon ami d'un opposant bien connu au registre, Stockwell Day.

Il va sans dire qu'il existe un lien direct entre la NRA et le Parti conservateur.

C'était vraiment désolant de lire, deux jours après la fusillade du 13 septembre au Collège Dawson, que Tony Bernardo avait déclaré qu'il avait « beaucoup de plaisir à tirer » avec sa Beretta CX4 Storm, le type d'arme utilisé dans la fusillade. C'était seulement deux jours après que des gens aient été tués. Je trouve très étrange qu'on puisse considérer cette personne parfaitement normale.

J'aimerais conclure mon intervention au sujet de la NRA en disant que cette association a créé une fondation exonérée d'impôt aux États-Unis. Bien entendu, ses activités visent à promouvoir l'utilisation des armes à feu. Voilà leur mandat :

[...] sensibiliser la population aux armes à feu dans leur contexte historique, technologique et artistique.

J'aurais besoin d'un cours pour comprendre le contexte artistique des armes à feu. Il en existe peut-être un quand elles sont exposées dans des musées, mais je ne vois rien d'artistique dans les armes semi-automatiques dont il est question ici.

J'ai constaté que c'est plus ou moins une question d'argent, d'affaires et de lobbying. Bon an mal an, aux États-Unis, on verse 15 millions de dollars aux candidats qui appuient, bien entendu, la diminution des restrictions visant l'utilisation des armes à feu dans ce pays. Comme je l'ai indiqué, les Américains sont trois fois plus susceptibles de posséder une arme à feu que toute autre personne sur la planète.

Je m'en voudrais de ne pas parler au nom de ma province.

[Français]

J'aimerais vous rappeler les propos du ministre de la Sécurité publique du gouvernement du Québec, M Robert Dutil. On a souvent entendu que le gouvernement conservateur Harper était un gouvernement qui travaillerait main dans la main avec les provinces, qu'il n'y aurait plus aucune échauffourée, qu'il y aurait une consultation permanente, mais jusqu'à maintenant, je n'ai pas vu beaucoup ce genre de consultation.

Le ministre Dutil dit qu'au Québec, le registre des armes à feu est consulté 700 fois tous les jours. Considérant qu'il y a 24 heures dans une journée, cela fait plusieurs fois par heure. Le registre des armes à feu est donc un outil essentiel dans l'exercice des fonctions des policiers au Québec. Faites vos enquêtes dans vos provinces respectives.

Le ministre ajoute que la violence est un phénomène connu que l’on déplore au Québec. Par contre, il conclut en disant que le registre contribue à la prévention des drames et des crimes contre la personne. M. Dutil a mentionné que, entre 2006 et 2010, on a recensé au Québec 264 événements de violence conjugale impliquant des carabines ou des fusils. Les statistiques nous montrent que les armes de chasse sont plus souvent utilisées que les armes de poing dans les cas de violence conjugale. Évidemment, puisqu’il est beaucoup plus difficile de se procurer une arme de poing. Les statistiques l’ont prouvé. Le nombre de meurtres par fusil, dans les cas de violence conjugale, a substantiellement diminué.

J'en viens à un autre sujet dramatique lié à l'usage des armes à feu, le suicide. Les statistiques de l'Institut national de la santé publique du Québec nous disent que, sur les 650 suicides commis par armes à feu répertoriées au Québec sur une période de quatre ans, 565 l'ont été avec une arme à feu sans restriction, un fusil.

Le registre des armes à feu est donc un outil très important de prévention du suicide. Le fait d'enregistrer les armes à feu sans restriction vise à les rendre moins accessibles aux personnes susceptibles d'en faire une mauvaise utilisation comme, par exemple, les personnes dépressives. Il contribue également à la protection des personnes atteintes de troubles mentaux et de leurs proches.

L'enregistrement universel permet au contrôleur des armes à feu de vérifier si des armes à feu sont possédées par des personnes visées par une ordonnance de garde en établissement ou d'évaluation psychiatrique. En vertu de la loi Anastasia, le contrôleur des armes à feu est systématiquement informé de ces demandes et, entre le 1eranvier 2008 et le 1er novembre 2011, 18 661 demandes d'ordonnances lui ont été signalées, et la consultation du registre a permis d'effectuer plus de 1 000 interventions afin d'assurer la sécurité des personnes.

Quand quelqu'un, dans un couple, une famille, que ce soit un enfant ou un conjoint, est perturbé, a des problèmes de comportement, souffre de maladie mentale, on peut intervenir auprès du contrôleur des armes à feu afin de s'assurer que l'arme à feu soit retirée de façon légale. Il n'y a pas d'intervention de l'État dans la famille, c'est la famille qui demande l'aide de l'État. Le projet de loi C-19 va empêcher ce genre d'intervention et il est de la responsabilité du gouvernement fédéral de ne pas permettre cela.

Le ministre conclut en disant que si l'enregistrement des armes à feu sans restriction ne devait sauver qu'une seule vie, nous serions justifiés, sur le plan moral, de continuer nos démarches afin de le maintenir.

Nous savons que ce registre a sauvé plusieurs vies. En ce qui me concerne, ceux qui contribueront à l'abolir auront certainement sur la conscience l'augmentation des suicides ou des meurtres.

J'aimerais conclure avec ce que disent les différents corps policiers au Québec. L'Association canadienne des chefs de police est évidemment contre le projet de loi. Il en va de même au Québec. Nous sommes souvent ridiculisés par des gens qui disent que le crime organisé n'enregistre pas ses armes. Personne n'a jamais cru cela. On sait depuis très longtemps qu'il y a des endroits où des armes à feu passent des deux côtés de la frontière. On parle ici du monde criminel; le registre est pour les gens honnêtes.

Puis-je obtenir cinq minutes de plus?

[Traduction]

Son Honneur le Président intérimaire : Honorables sénateurs, la permission est-elle accordée pour que madame le sénateur puisse poursuivre pendant encore cinq minutes?

Des voix : D'accord.

Son Honneur le Président intérimaire : Madame le sénateur a cinq minutes de plus.

[Français]

Le sénateur Hervieux-Payette : J'aimerais terminer en vous parlant de deux communications que j'ai reçues de gens œuvrant dans le domaine de la santé mentale. L'Association pour la santé publique du Québec nous dit qu'il y a eu une diminution significative du nombre actuel de décès par balle au Canada. L'association endosse totalement la position que nous avons, c'est- à-dire que ce projet de loi est totalement inutile et contre-productif.

Par contre, ce qui me tient tant à cœur, c'est que les directeurs des services de santé publique de toutes les régions du Québec nous ont envoyé une note, et j'aimerais en lire un petit extrait. Pour les médecins en question, et je cite :

Au Canada, les suicides sont de loin la première cause de décès par arme à feu, puisqu'ils représentent 73 p. 100 d'entre eux. Dans au moins 43 p. 100 de ces cas, en 2008, l'arme en cause était une arme à feu sans restriction ou arme d'épaule.

(1530)

En 2010, cette catégorie d'armes à feu, comprenant les carabines et les fusils de chasse, représentait 23 p. 100 des homicides commis à l'aide d'une arme à feu. Il a été démontré que les décès liés aux armes à feu concernent surtout des personnes aux prises avec des problèmes personnels.

J'ajoute, en terminant, que les sommes épargnées par les centaines de vies sauvées sont évaluées à environ 400 millions de dollars chaque année, selon une estimation de l'Institut national de la santé publique, en 2010. Les coûts associés à l'enregistrement des armes à feu sont d'environ 9,1 millions de dollars par année — on parle du coût d'opération. Ces coûts sont minimes par rapport à ceux entraînés par les décès et les blessures par arme à feu évalués à 6,6 milliards par an en 1991, soit environ neuf milliards en 2009, considérant l'inflation.

Honorables sénateurs, afin d'éviter de nommer les 298 organisations, avec la permission du Sénat, j'aimerais déposer un document qui s'intitule Experts canadiens qui se sont opposés à l'abolition du projet de registre des armes d'épaule, — projet de loi C- 391, 2009-2010. Ces derniers m'ont autorisée à donner cette liste et je ne voudrais pas la lire devant tout le monde. Est-ce que vous me le permettez?

[Traduction]

Son Honneur le Président intérimaire : La permission est-elle accordée pour que madame le sénateur puisse déposer le document?

Des voix : D'accord.

Le sénateur Carignan : Non.

Son Honneur le Président intérimaire : La permission n'est pas accordée.

[Français]

Le sénateur Hervieux-Payette : J'aimerais tout simplement conclure en disant que, comme Québécoise et comme Canadienne, j'étais fière d'appuyer le registre des armes à feu. Je ne ferai pas partie des gens qui ont dit que le tout était parfait à son démarrage, mais ce projet de loi a accompli son objectif, il nous mettait dans les rangs des pays avancés sur le plan de la justice. Pour moi, c'est un élément des droits fondamentaux de tous les citoyens canadiens dont on doit protéger la vie et la sécurité; c'est dans la Constitution canadienne.

Contrairement à la Constitution américaine, qui permet à tout le monde d'avoir une arme à feu. Qui était là pour protéger les Américains lorsqu'ils se battaient le Nord contre le Sud au XIXe siècle? Je crois qu'au Canada, on n'a pas à se battre entre l'Est et l'Ouest, entre le Nord et le Sud, entre les villes et les campagnes. Tous les Canadiens doivent être protégés et tous les Canadiens ont bénéficié du Registre des armes à feu. Je supplie mes collègues de faire une étude sérieuse du projet de loi et de le rejeter.

[Traduction]

L'honorable Mobina S. B. Jaffer : Honorables sénateurs, dans le cadre de mon intervention à l'étape de la deuxième lecture du projet de loi C-19, Loi modifiant le Code criminel et la Loi sur les armes à feu, j'aimerais prendre quelques instants pour rappeler à tous les sénateurs pourquoi le projet de loi a été présenté à l'origine et les inviter à réfléchir sur les raisons pour lesquelles il est important que notre pays demeure vigilant dans le dossier du contrôle des armes à feu.

Le 6 décembre 1989 est un jour d'une tristesse et d'une horreur sans égal dans l'histoire du Canada. Cc jour-là qu'un enragé armé d'une carabine de calibre .22 a fait irruption dans les couloirs de l'École Polytechnique, à Montréal, animé par la mission qu'il s'était donnée de tuer toutes les femmes sur son passage. Pendant 45 minutes, cet homme a rôdé dans les couloirs de l'université criant « Je cherche des femmes; je cherche des femmes, » et « Je hais les féministes. » Après avoir pénétré dans une salle de classe où se trouvaient 60 étudiants en génie, il a séparé les hommes des femmes. Après s'être assuré que tous les hommes avaient quitté la pièce, il a ouvert le feu. Puis, il a quitté la salle de classe et s'est livré à une autre fusillade, cette fois-ci dans les couloirs. Quatorze femmes sont mortes ce jour-là dans l'un des pires actes de violence à l'endroit des femmes de l'histoire du Canada.

Tandis que les parents pleuraient leurs filles, que les maris pleuraient leurs épouses, les femmes dans l'ensemble du pays s'employaient à sensibiliser la population à toutes les formes de violence à l'endroit des femmes.

[Français]

Ce qu'il est désormais convenu d'appeler « le massacre de Polytechnique » a suscité l'indignation à la grandeur du pays, et des Canadiens de toutes les provinces et de tous les territoires ont uni leurs voix pour exhorter le gouvernement du Canada à renforcer le régime canadien de contrôle des armes à feu.

En réponse aux protestations du public, le gouvernement a adopté en 1995 la Loi sur les armes à feu, qui visait à renforcer la réglementation du contrôle des armes à feu.

L'élargissement du système d'enregistrement pour inclure des armes à feu jusque-là non réglementées, comme les carabines et les armes d'épaule, était l'une des principales mesures faisant partie intégrante de cette nouvelle loi. Aux termes de ce nouveau projet de loi, les carabines de calibre 22, comme la Ruger-Mini-14 utilisée par l'auteur du massacre de Polytechnique, seraient désormais réglementées.

Plusieurs de ceux qui critiquent le registre des armes d'épaule, dont mon estimé collègue, le sénateur Lang, qui parraine ce projet au Sénat, se sont dits d'avis que le registre était discriminatoire pour tous les habitants du Nord, qui voient dans une arme d'épaule un outil nécessaire au quotidien.

[Traduction]

Honorables sénateurs, le premier ministre Mulroney m'a nommée, avec huit autres personnes, membre du Comité canadien sur la violence faite aux femmes, dont les travaux se sont déroulés entre 1992 et 1994. Nous nous sommes rendus à divers endroits au Canada, y compris dans le Nord et dans l'Ouest, pour étudier les causes de la violence contre les femmes et pour faire des recommandations visant à prévenir cette violence.

La première réunion de notre comité a eu lieu à Montréal, où nous avons rencontré les familles des 14 jeunes femmes qui ont perdu la vie dans le massacre de l'École Polytechnique. La salle était envahie par le chagrin et la douleur, et il a été extrêmement difficile pour notre comité de trouver les mots pour exprimer nos condoléances à la suite de ce geste insensé. Pendant cette réunion, nous avons entendu Mme Suzanne Edward, qui a perdu sa fille dans ce massacre. C'est à ce moment qu'elle nous a parlé de créer un registre des armes à feu qui, espérait-elle, serait un moyen d'éviter que d'autres mères aient à subir la douleur de perdre un enfant à cause d'une arme d'épaule.

Au cours de l'étude réalisée par notre comité, nous avons en outre appris que les armes d'épaule étaient souvent employées pour perpétrer des actes de violence familiale. En fait, 75 p. 100 des femmes assassinées au moyen d'une arme à feu tombent sous les balles d'une arme d'épaule, et non d'une arme de poing.

Il est incroyablement malheureux que le débat entourant le registre des armes d'épaule ait été détourné pour opposer les Canadiens des régions rurales à ceux des régions urbaines. Le registre des armes d'épaule ne prive pas les agriculteurs et les chasseurs de leurs droits. Il constitue un outil aidant la police à protéger les femmes. Le taux de décès par balle est en fait plus élevé dans les régions rurales et nordiques qu'ailleurs au pays. Ce sont les femmes des régions rurales qui bénéficient de la protection additionnelle fournie par le registre des armes à feu, car ce sont ces femmes qui sont touchées de manière disproportionnée par la violence familiale ou conjugale.

Le rapport produit par notre comité, intitulé Un nouvel horizon : éliminer la violence, atteindre l'égalité, donne des exemples de plusieurs femmes vivant dans les régions rurales du Canada. Les propos suivants d'une femme sont cités dans le rapport :

J'espère ne plus avoir à vivre l'enfer. J'habite dans une région rurale avec mes deux jeunes enfants. La Police provinciale de l'Ontario m'a dit qu'elle ne pouvait se rendre chez moi dans un délai plus court qu'une heure. Entre 2 heures et 6 heures du matin, personne ne peut répondre à mes appels.

Honorables sénateurs, étant donné que les femmes vivant dans les régions rurales sont souvent isolées et ont de la difficulté à obtenir de la protection, il est de plus en plus difficile pour elles d'échapper à la violence.

(1540)

En 1994, l'année où le registre des armes à feu a été créé, 91 femmes ont été victimes d'homicides conjugaux commis avec une arme à feu dans l'ensemble du pays. En 2008, après la mise en place du registre des armes à feu, ce nombre avait baissé à neuf.

Chaque année au Canada, plus de 100 000 femmes et enfants quittent leur domicile pour aller s'abriter dans un refuge. Dans la majorité de ces cas, il y a des actes de violence commis avec une arme à feu, ce qui intimide les femmes et les rend vulnérables. En effet, selon des recherches qui ont été effectuées, le taux d'homicides dans les situations de violence conjugale augmente considérablement quand il y a une arme à feu dans la maison. Comme il a déjà été mentionné, les armes d'épaule sont les armes privilégiées, pas les armes de poing.

Ce qui me rend perplexe, c'est que le contrôle des armes à feu est très similaire à celui des voitures. Les Canadiens doivent obtenir un permis pour conduire, et ils doivent enregistrer leurs véhicules, tout comme ils doivent avoir un permis pour posséder, emprunter ou obtenir des armes à feu. Ils doivent également enregistrer leurs armes à feu.

Honorables sénateurs, nous enregistrons nos voitures, nos animaux, nos mariages, nos naissances, nos décès et nos armes de poing. Pourquoi voyons-nous tellement d'inconvénients à enregistrer nos armes d'épaule?

Aujourd'hui, j'ai l'impression que je suis en train de pousser un rocher très gros — beaucoup plus gros que moi — vers le haut d'une colline. Je sais que ce que je dis aujourd'hui ne changera peut-être rien puisque le sort du registre des armes d'épaule a déjà été décidé. Je sais que je ne convaincrai peut-être personne de changer d'avis. Puis, je pense à Jane.

Avant ma participation au Comité canadien sur la violence faite aux femmes de 1990 à 1992, j'étais la présidente du groupe de travail sur la violence familiale de la Colombie-Britannique, et j'ai produit un rapport intitulé Is Anyone Listening?. J'ai parlé à beaucoup de femmes victimes de violence. Je me souviens tout particulièrement de Jane.

J'ai fait la connaissance de Jane lorsque le Groupe d'étude sur la violence familiale s'est rendu dans un village rural de Colombie- Britannique. Dès le premier coup d'œil, j'ai vu que Jane était gravement défigurée. Jane nous a raconté ce qui lui était arrivé, et les membres du groupe de travail l'ont écoutée le cœur gros. Un soir, son conjoint était rentré à la maison de très mauvaise humeur. Il trouvait à redire à tout ce qu'elle faisait : les enfants étaient trop bruyants, la maison était trop en désordre, le souper était trop fade, elle était trop laide. Jane savait d'expérience qu'elle ferait mieux de se taire et d'endurer cette violence psychologique. Elle savait que, si elle sortait de son mutisme, les choses empireraient.

Sa fille, Elizabeth, a malheureusement essayé de l'aider et elle a tenu tête à son père. Jane a vu son mari prendre soudainement sa carabine et mettre sa fille en joue. Jane a paniqué et s'est brusquement ruée sur sa fille pour la mettre hors d'atteinte . C'est elle qui a reçu la balle en plein visage. Le conjoint de Jane est parti ce soir-là pour ne plus jamais revenir.

L'ambulance et la police ont mis une heure avant d'arriver. Jane avait déjà perdu beaucoup de sang. Elle a dû subir des traitements prolongés et plusieurs chirurgies. Elle nous a dit que, bien que la douleur qu'elle ressent au visage puisse un jour se résorber, la douleur qui afflige son cœur, elle, ne s'estompera jamais. Elle a affirmé en terminant qu'aucune femme ne devrait avoir à endurer une telle douleur. « Vous êtes mon dernier espoir; il vous revient de protéger nos enfants. »

Depuis que j'ai rencontré Jane, je ne ménage aucun effort pour lutter contre la violence faite aux femmes. En collaboration avec divers organismes, j'ai consacré plusieurs années de ma vie à militer en faveur de l'établissement du registre des armes à feu, et je suis attristée de savoir qu'il sera vraisemblablement bientôt aboli. Si tel devait être le cas, nous aurions alors trahi la confiance de Jane et de milliers de femmes comme elle partout au Canada.

Je suis désolée, Jane.

[Français]

Comme j'ai collaboré de très près avec beaucoup de femmes qui vivent dans les régions rurales du Canada, je peux confirmer à tous mes honorables collègues que la violence conjugale est une bien triste réalité pour bien des femmes de ces régions.

Par conséquent, c'est une erreur d'affirmer que le registre des armes d'épaule est simplement un outil qui opprime les Canadiennes qui vivent dans les régions rurales.

Le registre des armes d'épaule est plutôt un outil de sécurité publique qui protège tous les Canadiens, qu'ils vivent dans une région rurale ou urbaine.

Honorables sénateurs, j'ai étudié de près les précédentes versions du projet de loi C-19 et j'ai été très attentive au débat entourant cette question.

[Traduction]

J'ai lu les témoignages de nombreuses femmes indignées qui ont été publiés par la Coalition pour le contrôle des armes à feu. Ces femmes se sont prononcées contre ce projet de loi et j'aimerais faire part aux honorables sénateurs de certains propos qu'elles ont tenus.

Karen Vanscoy, infirmière en psychiatrie dont la fille, Jasmine, a été tuée par balle à l'âge de 14 ans à St. Catharines, a dit ceci :

Depuis le moment où j'ai appris le décès de ma fille jusqu'à aujourd'hui, je vis avec les répercussions accablantes qu'entraîne la violence causée par les armes à feu. Les infirmières sont des intervenantes de première ligne en ce qui a trait à toutes les formes de violence perpétrée avec des armes à feu. Je suis une infirmière en psychiatrie et j'ai donc fréquemment affaire à des gens suicidaires. Je comprends l'importance d'avoir des mesures de contrôle en place pour prévenir le suicide. Des études révèlent qu'il y a eu en moyenne 250 suicides de moins chaque année au pays depuis l'entrée en vigueur de lois en matière de contrôle des armes à feu. L'assouplissement des exigences relatives à la délivrance des permis facilitera l'accès aux armes à des personnes suicidaires. Il est incompréhensible de constater que, la journée même où les députés voteront pour la Loi sur le cadre fédéral de prévention du suicide, ils voteront pour mettre fin au registre des armes d'épaule.

Pamela Harrison, coordonnatrice de l'Association des maisons d'hébergement pour femmes de la Nouvelle-Écosse, dit ce qui suit :

Les divisions issues de l'enjeu du contrôle des armes au pays sont nourries par la désinformation. Parce qu'il est relativement facile de se les procurer, les fusils de chasse — carabines et fusils sans restriction — sont les armes les plus fréquemment utilisées pour menacer et intimider les femmes et les enfants dans les situations de violence conjugale. Les menaces faites avec ces armes ne sont pas comptabilisées dans les statistiques, mais les dommages qu'elles causent sont bien réels. Abolir le registre épargnera à la GRC moins de 4 millions de dollars par an, mais combien cela coûtera-t-il aux Canadiens? Le gouvernement a estimé de manière conservatrice la valeur d'une vie humaine à 5 millions de dollars.

[Français]

Alexa Conradi, présidente de la Fédération des femmes du Québec, a dit ceci :

La sécurité des femmes doit l'emporter sur une simple tracasserie administrative.

Les armes à feu ne sont enregistrées qu'une seule fois et ce, sans frais pour le propriétaire. La décision du gouvernement de détruire les données existantes est une mesure punitive qui n'a rien à voir avec la confidentialité et tout à voir avec l'idéologie.

[Traduction]

M'accorderez-vous cinq minutes de plus?

Son Honneur le Président intérimaire : Accordons-nous cinq minutes de plus au sénateur?

Des voix : D'accord.

[Français]

Le sénateur Jaffer : Les contribuables ont considérablement investi dans la collecte de ces données et les provinces devraient pouvoir les rapatrier afin d'assurer la sécurité de leurs collectivités.

Honorables sénateurs, les voix de ces femmes ne doivent pas tomber dans l'oreille d'un sourd. Leurs préoccupations sont réelles et elles exigent notre attention.

La semaine dernière, j'ai entendu plusieurs de mes collègues attirer l'attention sur les coûts liés au registre des armes d'épaule. S'il est vrai que la mise en place du registre a coûté plus d'un milliard de dollars en 1995, aujourd'hui l'administration du registre des armes à feu coûte environ 4 millions de dollars par an.

Cette somme peut paraître élevée, mais des études économiques montrent que des interventions préventives comme le registre des armes d'épaule, qui visent à prévenir la violence interpersonnelle, permettent d'économiser davantage que ce qu'elles en coûtent.

[Traduction]

Je le répète. Le coût du maintien du registre des armes à feu est d'environ 4 millions de dollars par année. Dans un rapport publié en 2008 par le ministère de la Justice et intitulé Les coûts de la criminalité, la valeur attribuée à la perte d'une vie humaine est de 5 millions de dollars. Donc, si le registre des armes à feu ne sauvait qu'une seule vie, il ferait économiser de l'argent aux Canadiens.

(1550)

Plusieurs de mes collègues ont remis en question l'efficacité du registre des armes à feu, disant craindre qu'il ne contribue pas vraiment à la sécurité publique. Je trouve cela très intéressant, quand on pense que des agents de police ont déclaré qu'ils consultaient le registre 16 000 fois par jour — 16 000 fois chaque jour — et que c'était un outil utile pour assurer la sécurité publique.

Selon une évaluation effectuée en 2010 par les responsables du Programme canadien des armes à feu, qui relève de la GRC, le registre est un outil utile pour faire respecter la loi. Il protège les policiers et les aide à effectuer leurs enquêtes et à maintenir la sécurité publique.

Honorables sénateurs, comme je siège au Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles, j'ai étudié à fond le projet de loi C-10, Loi sur la sécurité des rues et des communautés. Tout au long de notre étude, nous avons entendu à plusieurs reprises que nous devions utiliser tous les outils dont nous disposons pour veiller à la sécurité de nos rues et de nos collectivités. Jeudi dernier, j'ai entendu un grand nombre de mes collègues souligner l'importance de maintenir la sécurité dans nos rues et nos collectivités.

C'est exactement ce que permettrait de faire le maintien du registre des armes à feu. Nos rues et nos collectivités n'en seraient que plus sûres et, surtout, il protègerait les femmes, qui sont trop souvent victimes de violence sexiste.

La Coalition canadienne pour le contrôle des armes, créée dans la foulée du massacre commis à Montréal, a fait une déclaration extrêmement profonde qui devrait nous faire réfléchir. Elle a dit : « Le registre des armes à feu n'a jamais tué quiconque, mais l'abolir pourrait avoir une telle conséquence. »

Honorables sénateurs, je vous demande instamment de ne pas oublier les situations difficiles auxquelles sont confrontées certaines femmes dans tout le pays et la position vulnérable dans laquelle elles sont trop souvent mises. Sauvez le registre des armes à feu et sauvez des vies.

Son Honneur le Président intérimaire : Les honorables sénateurs sont-ils prêts à se prononcer?

Des voix : Le vote!

Son Honneur le Président intérimaire : L'honorable sénateur Lang, avec l'appui de l'honorable sénateur Stewart Olsen, propose que le projet de loi C-19, Loi modifiant le Code criminel et la Loi sur les armes à feu, soit lu pour la deuxième fois.

Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?

Des voix : D'accord.

Des voix : Avec dissidence.

(La motion est adoptée avec dissidence et le projet de loi est lu pour la deuxième fois.)

Renvoi au comité

Son Honneur le Président intérimaire : Honorables sénateurs, quand lirons-nous le projet de loi pour la troisième fois?

(Sur la motion du sénateur Carignan, le projet de loi est renvoyé au Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles.)

[Français]

Le Sénat

Adoption de la motion tendant à la création d'un comité spécial chargé d'étudier les projets de loi du gouvernement

L'honorable Claude Carignan (leader adjoint du gouvernement), conformément à l'avis donné le 6 mars 2012, propose :

Qu'il y ait création d'un comité spécial du Sénat chargé d'étudier, après la deuxième lecture, les projets de loi du gouvernement qui lui seront renvoyés pendant la session en cours, y compris le projet de loi S-7, Loi modifiant le Code criminel, la Loi sur la preuve au Canada et la Loi sur la protection de l'information;

Que, nonobstant l'article 85(1)b) du Règlement, ce comité spécial comprenne neuf membres, à savoir les honorables sénateurs Andreychuk, Dagenais, Dallaire, Day, Frum, Joyal, C.P., Segal, Smith, C.P. (Cobourg), et Tkachuk, et que le quorum soit constitué de quatre membres;

Que le comité soit habilité à convoquer des personnes, à obtenir des documents et des dossiers, à entendre des témoins et à faire imprimer au jour le jour des documents et témoignages, selon ses instructions;

Que, conformément à l'article 95(3)a) du Règlement, le comité soit habilité à se réunir du lundi au vendredi, même si le Sénat est alors ajourné pour une période de plus d'une semaine;

Que le comité soit autorisé à permettre la diffusion de ses délibérations publiques par les médias électroniques, d'une manière qui perturbe le moins possible ses travaux;

Que le comité soit habilité à retenir les services de professionnels, d'employés de bureau, de sténographes ou d'autres personnes qu'il juge nécessaires.

(La motion est adoptée.)

Le Code criminel
La Loi sur la preuve au Canada
La Loi sur la protection de l'information

Projet de loi modificatif—Deuxième lecture

L'ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Frum, appuyée par l'honorable sénateur Ogilvie, tendant à la deuxième lecture du projet de loi S-7, Loi modifiant le Code criminel, la Loi sur la preuve au Canada et la Loi sur la protection de l'information.

L'honorable Roméo Antonius Dallaire : Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd'hui au sujet du projet S-7, Loi modifiant le Code criminel, la Loi sur la preuve au Canada et la Loi sur la protection de l'information, connue comme la Loi sur la lutte contre le terrorisme.

Le sénateur Frum, marraine de ce projet de loi, a déjà présenté en cette Chambre ses grandes lignes et l'a mis en contexte. Il s'agit de mesures législatives que plusieurs d'entre nous connaissent bien puisqu'elles ont été présentées au cours des trois sessions parlementaires précédentes. L'historique de ce projet de loi a été bien décrit par le sénateur Frum lors de son allocution.

[Traduction]

Mon objectif aujourd'hui est de soulever plusieurs préoccupations à l'égard du projet de loi S-7, notamment de mettre l'accent sur plusieurs recommandations qui n'ont pas été appliquées, de remettre en question la nécessité de ce projet de loi et d'analyser ses répercussions sur les jeunes.

Je prends également la parole pour encourager le Comité sénatorial spécial de l'antiterrorisme — qui sera bientôt mis sur pied — à prendre le temps qu'il faudra pour étudier, assidûment et de manière détaillée, les dispositions et les répercussions du projet de loi, à la lumière des nouvelles informations disponibles concernant cette mesure législative.

Lorsque la première version de ce projet de loi a été présentée, le ministre de la Justice a déclaré, dans le communiqué de presse publié par son ministère, que « le terrorisme demeurera une menace dans un avenir prévisible ». Il a raison. La nature des conflits a changé. Les conflits et la conduite de la guerre conventionnels sont choses du passé. Le terrorisme continuera à jouer un rôle dans les conflits à l'avenir.

Dans le droit international, l'esprit de la loi est fondé sur les pratiques de la guerre en dehors des combats, et tous les pays du monde sont tenus de s'y conformer. Les dispositions en question se trouvent dans le droit de La Haye, le droit de Genève, la Convention sur le génocide de 1948, la Charte des Nations Unies, la Cour pénale internationale et les tribunaux internationaux des crimes de guerre.

De nos jours, nous n'avons plus à composer avec des guerres conventionnelles, comme nous en avons connu pendant des décennies. On peut penser à la guerre froide et, avant cela, aux guerres classiques, comme la Seconde Guerre mondiale. Nous sommes entrés dans une ère nouvelle, qui n'est pas une période de guerre ni de paix, au sens classique du maintien de la paix, mais plutôt quelque part entre les deux — c'est-à-dire d'Haïti à l'Afghanistan en passant peut-être, qui sait, par l'Iran.

Dans le contexte de ces conflits, ce qui ressort, c'est le fait que la menace ou l'opposition ne vient pas d'un État-nation en tant que tel, ni même d'une force structurée. Au contraire, il s'agit souvent d'une structure qui ne relève pas d'une force ou d'un État. En fait, on parle plutôt d'une structure entièrement rebelle ou terroriste. Ces forces non conventionnelles ne respectent pas les lois ou les conventions que je viens de nommer. À notre époque, l'opposition ne se conforme à aucune des règles connues.

La question qui se pose est celle-ci : afin de garantir notre sécurité, allons-nous suivre une voie semblable? Allons-nous continuer de jouer selon les règles et garantir notre succès dans ce contexte, qui comprend les droits de la personne, ou les droits de l'individu, le droit humanitaire, les libertés civiles et, bien entendu, les conventions internationales, ou bien allons-nous prendre une tangente qui porte atteinte à ces lois fondamentales, comme nous avons eu tendance à le faire après les événements du 11 septembre? Allons-nous jouer avec nos libertés civiles en présentant un projet de loi qui les modifierait ou les brimerait? Allons-nous jouer avec les droits internationaux de la personne en permettant des choses comme la torture afin d'établir les sources d'information? Irons- nous jusqu'à jouer avec les conventions internationales, comme la Convention de Genève, en créant et en appuyant des entités comme Guantanamo?

La réponse est non. Nous ne souhaitons pas emprunter cette voie, et loin de nous l'idée d'assurer notre sécurité en agissant ainsi. Au contraire, ce que nous cherchons à faire, c'est de trouver la façon d'assurer notre sécurité tout en ne portant pas atteinte à ces lois et à ces préceptes fondamentaux qu'il a fallu non pas des décennies, mais plutôt des siècles à établir.

(1600)

Cette loi antiterroriste devrait faire partie d'un débat où nous nous demandons si nous remplissons nos obligations en matière de sécurité, s'il nous manque la vision nécessaire pour réussir à le faire ou si, au contraire, nous allons trop loin. Ce débat mérite notre attention. Il est même essentiel. Nous devons tenir ce débat, soulever la question devant un forum comme le nôtre, afin que le projet de loi ne favorise pas la sécurité de la collectivité au détriment des libertés civiles des individus, mais qu'il arrive plutôt à établir et à garantir un équilibre.

Tout comme nous devons reconnaître que les terrorismes national et international font maintenant partie de notre réalité, nous devons aussi constater que nous ne pouvons plus compter sur les mesures exceptionnelles et provisoires pour lutter contre ces situations à long terme. Il est vrai que cette réalité est apparue malgré nous, sans que nous l'ayons vue venir ni prévenue au moyen de mesures destinées à éviter les conflits, les atrocités de masse et la rage qui est l'origine de ce terrorisme et de cet extrémisme galopants.

[Français]

Pour débattre comme il se doit du bien-fondé du projet de loi, il faut comprendre les raisons pour lesquelles on a jugé nécessaire de le présenter. La première étape de toute opération consiste à analyser les renseignements recueillis sur la menace précise. Après le discours de madame le sénateur sur le projet de loi, je lui ai demandé si elle avait eu accès aux évaluations confidentielles des menaces sur lesquelles se fonde vraisemblablement le besoin de déposer ce projet de loi. Elle m'a répondu qu'elle n'y avait pas accès; que, en tant que citoyenne ordinaire qui lit le journal, elle sait que, tous les jours, des activités terroristes ont lieu quelque part dans le monde et qu'il n'existe aucune raison de présumer que le Canada sera épargné. Je crois qu'il y a tout de même un fondement à cet argument.

La rage existe toujours dans le monde et ce, basée sur la pauvreté, le refus de partager les droits et l'extrémisme imposé par des dictateurs dans des pays en développement. Je conviens, comme tous les honorables sénateurs, qu'il serait irresponsable de présumer que le Canada ne sera pas menacé par le terrorisme.

[Traduction]

Quoique, si l'on se fie aux cartes des chroniqueurs météo américains, on pourrait penser que les gens ne nous prendront jamais pour cible. Pourquoi? Parce que sur ces cartes, il n'y a rien au Nord des États-Unis. Nous pourrions certes continuer de compter sur le fait qu'au fond, personne ne veut nous attaquer. Comme nous construisons depuis toujours nos infrastructures en fonction de cette pensée magique, nous n'avons jamais pris la peine de protéger — même de la façon la plus élémentaire — les ressources qui sont essentielles à l'évolution de notre pays.

Lorsque j'étais commandant du secteur du Québec et que je visitais les installations hydroélectriques de la province, on voyait tout de suite que nous n'avions même pas de commissionnaires octogénaires ou d'anciens combattants de la Deuxième Guerre mondiale pour assurer la garde de ces immenses installations. Leur vulnérabilité était flagrante.

[Français]

On ne sera pas nécessairement protégés du fait que nous ne constituons pas une des premières cibles du terrorisme. Cependant, lorsqu'il est question de légiférer au nom de la sécurité nationale, les articles de journaux ne constituent pas un fondement suffisant sur lequel prendre des décisions d'envergure en ce qui concerne la position dans laquelle nous nous trouvons. Il ne suffit pas non plus que le gouvernement nous dise simplement qu'il faut des mesures extrêmes, comme des investigations et un engagement assorti de conditions, pour garantir notre sécurité. En qualité de parlementaires, nous devrions pouvoir anticiper la menace afin de déterminer si ce projet de loi est non seulement utile, mais essentiel pour la sécurité de notre pays.

[Traduction]

En tant que parlementaires, nous devons être en mesure d'évaluer les menaces à la sécurité qui se posent à un niveau supérieur. À l'heure actuelle, nous fermons complètement les yeux sur ces menaces — nous les ignorons. Il est donc beaucoup plus difficile de déterminer la nécessité du projet de loi S-7. C'est pourquoi je demande qu'on mette sur pied un comité de parlementaires sur la sécurité et le renseignement nationaux : pour que l'on puisse évaluer — sérieusement évaluer — le caractère essentiel du projet de loi. La création d'un tel comité avait été proposée en 2005 dans le projet de loi C-81, puis de nouveau, en 2007, à une époque où nous jugions essentiel d'accroître les capacités de nos forces de sécurité pour assurer notre protection.

Aux recommandations 58, 59 et 60 de son rapport intitulé Droits, restrictions et sécurité : un examen complet de la Loi antiterroriste et des questions connexes, le Sous-comité sur la revue de la Loi antiterroriste convenait de la nécessité d'établir un tel comité formé de parlementaires qui seraient chargés de superviser l'ensemble de la structure canadienne de collecte de renseignements et de sécurité. Voici ce que prévoit la recommandation 58 :

Le Sous-comité recommande que le projet de loi C-81 présenté lors de la 38e législature, Loi constituant le Comité de parlementaires sur la sécurité nationale, ou une variante de ce projet de loi, soit présenté au Parlement dans les plus brefs délais.

Honorables sénateurs, saisissons l'occasion de présenter cette mesure législative dans la foulée du présent projet de loi. Un comité sur la sécurité nationale et le renseignement de sécurité serait composé d'un nombre restreint de parlementaires, issus tant du gouvernement que de l'opposition ainsi que des deux Chambres. Ils seraient tenus au secret et ce serment leur donnerait accès à des renseignements confidentiels et de nature délicate concernant l'état de la sécurité nationale afin d'assurer une surveillance des activités de renseignement. Des comités de ce genre existent depuis 1994 au Royaume-Uni et depuis 1976 au Sénat américain.

En tant qu'officier général en service, j'avais accès à l'époque à 100 fois plus de renseignements de sécurité que ce à quoi j'ai accès pour les travaux du Sénat et du comité. Il est insensé que les parlementaires — du moins certains d'entre eux — n'aient pas une chance de consulter des documents secrets liés au caractère essentiel de la sécurité de notre pays, pour lequel nous avons la responsabilité de présenter et d'adopter des mesures législatives qui garantissent cette sécurité.

En 2005, tous les partis en sont arrivés à un consensus visant à fournir aux parlementaires et au Parlements d'importants moyens pour surveiller le milieu canadien de la sécurité et du renseignement de sécurité. Il est temps de ranimer ce débat et de considérer sérieusement cette proposition au cours des travaux, surtout en comité, visant à faire progresser le caractère essentiel — je dis bien « essentiel » et non « nécessaire » — de cette mesure législative dans le cadre du projet de loi S-7.

[Français]

Je le répète, sans une telle infrastructure il est difficile d'estimer la nécessité voire l'essentialité, du projet de loi actuel. Pourquoi les mesures prévues au Code criminel ne suffisent-elles pas à empêcher la menace terroriste? Dans des cas récents, notamment celui des 18 de Toronto, de Mohammad Momin Khawaja, de Saïd Namouh et dans le cas actuel de Mohamed Hassan, il n'a pas été nécessaire de recourir à des investigations et à l'engagement assorti de conditions et mesures extraordinaires pour prévenir d'éventuels actes de terrorisme et poursuivre les auteurs. Des accusations ont été portées en se fondant sur les dispositions du Code criminel.

Enfin, avant qu'on ne les rende caduques, les mesures antérieures n'avaient jamais été utilisées. Lorsque la menace s'est présentée au pays, à quatre reprises, on a pu intervenir de façon proactive. Nous sommes justement en train de traduire ces personnes en justice avec les lois et conditions qui existent déjà dans le Code criminel.

(1610)

On a déjà soutenu que, puisque ces mesures n'ont pas été utilisées entre 2001 et 2007, cela ne signifie pas qu'elles ne seront plus nécessaires. C'est une logique que je comprends. On espère et on suppose que, si on y avait eu recours, on l'aurait fait dans de très rares cas. Cependant, il faut se rappeler que les investigations et l'engagement assorti de conditions se voulaient seulement des mesures extraordinaires.

De tels pouvoirs ne peuvent constituer une solution à long terme à la lutte au terrorisme. L'équilibre entre les libertés civiles, le respect de la vie privée et la sécurité nationale est trop précaire. De toute façon, la preuve qu'il existe un vide juridique qu'il faut combler demeure douteuse. Le cas n'a pas été articulé, c'est-à-dire que la menace n'a pas été articulée en exigeant ces méthodes et ces instruments extraordinaires. Sans la possibilité d'évaluer les menaces à la sécurité, en tant que sénateur et parlementaire, je ne peux que demander la preuve que ces mesures ne s'avèrent non pas nécessaires, mais essentielles. Le comité pourra peut-être en faire la preuve. D'ici là, j'en doute et j'en douterai jusqu'à ce que cette preuve soit bien établie par le comité qui, j'espère, fera un travail de façon assidue et détaillée.

[Traduction]

La prévention du terrorisme doit dépasser les simples pouvoirs de détention préventive. Je sais qu'il se fait du travail en ce sens, comme on peut le lire dans le document Renforcer la résilience face au terrorisme, publié en février, qui décrit la stratégie du gouvernement en matière de lutte au terrorisme. Je félicite le gouvernement de l'avoir produit et de lui avoir donné cet excellent titre.

Si nous voulons « renforcer la résilience », nous devons être proactifs et prévenir les dangers. Notre objectif, c'est d'empêcher que ces actes terroristes se produisent. Comme je le disais la semaine dernière au moment de la présentation de ce projet de loi, cet objectif est conforme à un nouveau concept dans le domaine des opérations policières, le concept d'activités policières axées sur le renseignement, d'après lequel les forces policières s'efforcent de prévenir le crime, ce qui permet d'éviter les victimes et les souffrances qui découleraient de ces crimes.

J'aimerais m'attarder davantage sur cette question et parler des liens entre les mesures antiterroristes et les jeunes. Nous savons que des groupes terroristes comme al-Chabaab, un mot qui signifie « les jeunes », recrutent de jeunes Canadiens. Pendant ses déplacements au Kenya, le sénateur Jaffer a rencontré certains de ces jeunes qui étaient en route pour la Somalie. J'ai moi-même découvert, en faisant des recherches sur les enfants soldats, que des enfants sont recrutés pour devenir pirates. En fait, dans les endroits où nos soldats sont déployés actuellement pour combattre des pirates, la plupart de ces pirates sont des jeunes de moins de 18 ans.

Le sénateur Jaffer a dit ceci la semaine dernière, en réponse à une question :

Je leur ai demandé pourquoi ils avaient quitté notre merveilleux pays pour aller poser de tels gestes. Ils m'ont répondu que c'est en partie parce qu'ils ne se sentaient pas inclus dans le tissu de notre merveilleux pays.

« Ils ne se sentaient pas inclus dans le tissu de notre merveilleux pays. » Ce genre de problème n'est pas d'ordre juridique : c'est un problème social, un problème multiethnique. Il est lié à la nature du tissu dans lequel nous inculquons nos valeurs et nos croyances aux gens, leur procurons la stabilité et les aidons à mieux vivre dans notre merveilleux pays.

Honorables sénateurs, je suis depuis longtemps convaincu que les jeunes exclus, particulièrement les jeunes Autochtones et immigrants, peuvent devenir des menaces pour la sécurité nationale. J'en ai témoigné devant le Comité des peuples autochtones, et ce sujet a été repris récemment par les médias. Ils pourraient représenter une menace croissante. En ce moment même, la présence de jeunes Canadiens dans les rangs d'al-Chabaab en Somalie nous montre qu'ils peuvent représenter une menace à l'échelle mondiale. Nous fournissons de nouvelles recrues aux organisations terroristes déjà établies dans d'autres pays. Que ces terroristes menacent notre pays ou la communauté internationale, leurs activités peuvent nuire à nos intérêts, avoir des répercussions sur le commerce, réduire l'accès à des métaux précieux, favoriser l'instabilité dans les pays en cause, et augmenter le nombre de réfugiés et les risques de pandémie associés aux grands camps de personnes déplacées ou réfugiées. Ce phénomène pourrait même avoir une incidence sur les diasporas de notre pays. C'est inacceptable. Ce problème déborde du cadre de la loi. Il touche les efforts que nous faisons pour maintenir la cohésion de notre pays et assurer sa prospérité continue, plutôt que sa simple survie.

Il faut nous demander si nous présentons une mesure législative pour survivre, ou si nous présentons une mesure législative et d'autres programmes pour nous permettre de prospérer et pour permettre à ces jeunes d'atteindre leur plein potentiel.

Le projet de loi S-7 prévoit la possibilité d'entamer des poursuites contre les jeunes, ce qui m'inquiète. Les dispositions du projet de loi S-7 ne précisent aucun âge limite. Je ne sais pas au juste dans quelle mesure la future loi tiendra compte de la Loi sur le système de justice pénale pour les adolescents. Ce n'est pas clairement précisé. Je sais que le projet de loi S-7 n'est pas censé être une exception à la Loi sur le système de justice pénale pour les adolescents. Par contre, on y trouve suffisamment d'explications nébuleuses sur le terrorisme, notamment en ce qui concerne les nouvelles infractions créées dans le projet de loi, pour alerter ceux qui, comme moi, veulent obtenir la garantie que les jeunes seront protégés et que leurs libertés civiles seront bien sûr respectées.

Si on n'établit pas de distinctions claires dans le projet de loi entre les adultes et les jeunes, on court le risque de créer d'autres situations comme celle d'Omar Khadr, qui est embarrassante pour le Canada et assez troublante pour notre système juridique. Cette question est toujours en suspens.

J'ai déjà dit que les conflits de notre époque ne sont pas de nature traditionnelle. Nous savons que la majorité des conflits armés de l'époque moderne sont des conflits internes et qu'ils sont le fait de multiples groupes armés qui recrutent souvent des enfants. Notre époque est marquée par l'implosion et la déroute de pays, où les crises, les révolutions ou l'action d'intervenants non étatiques se transforment en conflits qui, en plus de faire des victimes, engendrent l'extrémisme, lequel s'incarne ensuite dans des actes terroristes commis à l'extérieur des pays en déroute. Certains de ces groupes armés peuvent naturellement employer les tactiques terroristes qui nous inquiètent et que nous avons observées au cours des deux dernières décennies.

Le Canada a signé la Convention relative aux droits de l'enfant et le protocole facultatif concernant l'implication des enfants dans les conflits armés. Nous avons mené la charge. Les États-Unis ont été nos meilleurs alliés. Nos deux pays ont milité pour le protocole facultatif pour les droits de l'enfant, qui définit clairement qui sont les enfants soldats et les enfants en zone de conflit. Le protocole facultatif interdit aux groupes armés de recruter des enfants. Il demande aussi aux États parties de prendre toutes les mesures possibles pour empêcher le recrutement et l'utilisation des enfants, notamment au moyen de mesures juridiques comme la criminalisation. Le projet de loi S-7 ne criminalise pas le recrutement d'enfants soldats, mais criminalise le fait de quitter ou de tenter de quitter le Canada pour participer à des activités terroristes. Il s'agit là d'un aspect tout à fait nouveau, qui ne faisait pas partie du projet de loi auparavant; il convient de l'étudier fort attentivement.

Je suis préoccupé par la définition d'une activité terroriste à cet égard. Si des enfants canadiens sont recrutés à l'étranger pour se joindre à des forces rebelles ou à des groupes armés, gouvernementaux ou non, pourrait-on qualifier ces activités de terrorisme et celles-ci feraient-elles l'objet de poursuite en ce sens?

Le protocole facultatif définit les enfants soldats comme « tout être humain de moins de 18 ans » et parle d'un engagement « de force ou sous la contrainte », ou encore volontaire, bien que l'engagement « volontaire » en zone de conflit n'existe pas vraiment. Je me souviens clairement que, du temps où je commandais des troupes, lors de conflits, j'avais condamné sans appel la fraternisation. Je l'ai fait parce que personne ne tombe amoureux en zone de conflit. Les femmes qui étaient tombées entre les mains des soldats étaient là parce qu'elles avaient besoin de protection. Elles ont peut-être besoin d'argent et de nourriture pour leur famille; elles ne participent pas volontairement à de tels actes en tant qu'adultes.

(1620)

Le protocole facultatif indique ceci :

[...] toute personne [...] enrôlée dans une force armée ou un groupe armé régulier ou irrégulier, quelle que soit la fonction qu'elle exerce, notamment mais pas exclusivement celle de cuisinier, porteur, messager, et toute personne accompagnant de tels groupes qui n'est pas un membre de leur famille. Cette définition englobe les filles recrutées à des fins sexuelles et pour des mariages forcés. Elle ne concerne donc pas uniquement les enfants qui sont armés ou qui ont porté des armes.

Pour moi, cette définition fait en sorte que des jeunes recrutés pour prendre part à des activités terroristes pourraient être considérés comme des enfants soldats. On peut faire cette déduction et effectuer cette analyse. Nous devons examiner ce que cela signifie dans le contexte du système juridique canadien et de nos obligations en vertu du droit international. Le protocole facultatif ne comprend aucune disposition relative à la responsabilité ou rendant un enfant soldat responsable de sa participation à des hostilités. Cela dit, il semble bien que le projet de loi S-7 pourrait les rendre responsables avant même qu'ils se rendent à ce point. Nous pourrions alors les poursuivre en justice.

Nos lois sont conçues de manière à punir les adultes. Elles ne s'appliquent pas nécessairement aux enfants et ne prévoient pas nécessairement de sanctions appropriées pour eux, étant donné que leur niveau de culpabilité et leur état mental et physique sont différents de ceux des adultes. Le protocole facultatif exige que les États parties collaborent à la démobilisation, à la réadaptation et à la réintégration des enfants soldats. Par conséquent, en l'absence de responsabilité criminelle, le protocole met l'accent sur le statut particulier des enfants et reconnaît qu'ils sont des victimes et doivent bénéficier de mesures de réadaptation. Nous avons signé ce protocole. Nous l'avons produit. Nous l'avons défendu. Je crois qu'il est une fois de plus mis à l'épreuve par cette mesure législative proposée.

Il n'est pas toujours approprié d'emprisonner les jeunes. Il est essentiel d'assurer leur pleine intégration à la société canadienne, de leur donner accès à toutes les occasions de s'instruire et de leur donner toutes les possibilités économiques que le Canada a à offrir pour faire face à la radicalisation des jeunes et la prévenir. Nous croyons que le gouvernement a aussi dit que personne ne doit être laissé pour compte.

La distinction entre un enfant soldat et un terroriste demeure floue. J'espère que nous pourrons éclaircir cette question au comité et voir à ce que la mesure législative soit conforme aux instruments juridiques canadiens ainsi qu'à nos obligations en vertu des conventions ou des traités internationaux que nous avons signés et rédigés et qui ont été adoptés par d'autres pays parce que nous les avons convaincus de leur bien-fondé.

[Français]

Bien qu'on puisse tenter d'accélérer l'adoption du projet de loi en se fondant sur des considérations provenant de sessions parlementaires précédentes, c'est-à-dire l'historique de ce projet de loi, je rappelle aux honorables sénateurs que ce projet de loi contient de nouvelles dispositions dont j'ai parlé et dont il n'a jamais été question dans les versions antérieures, particulièrement tout le volet du recrutement de personnes qui sont déployées ou qui volontairement ou involontairement se trouvent dans des structures organisationnelles dites terroristes pour l'entraînement et même l'emploi.

Le projet de loi S-7 prévoit de nouvelles infractions de terrorisme liées à l'interdiction de quitter ou de tenter de quitter le Canada dans le but de faire face à certaines infractions de terrorisme. Les articles 6, 7 et 8, en particulier, du projet de loi doivent être étudiés de très près et avec diligence pour clarifier cette situation et éviter justement qu'on prêche contre d'autres droits, ou plus clairement même d'autres conventions auxquelles on a accepté de participer et qu'on a même produites et dont on a reçu l'approbation des Nations Unies et des pays qui sont nécessairement membres.

Puisque le comité est l'endroit où les mesures législatives sont étudiées en profondeur, j'aimerais porter à l'attention de mes collègues certaines préoccupations qui devraient faire l'objet d'un débat et d'une étude, outre la preuve demandée quant à la nécessité du projet de loi. Je le répète, ce besoin d'un comité national de sécurité, qui pourrait éventuellement nous donner les informations essentielles sur la nécessité d'adopter un projet de loi semblable, ses effets sur les jeunes et la création d'un comité de sécurité nationale et de renseignements devra être débattu et même être poursuivi.

D'autres volets, comme l'examen parlementaire des lois sur l'antiterrorisme, la nécessité d'un avocat spécial, qui pourrait servir d'intermédiaire si jamais on ne voulait pas donner aux parlementaires l'accès aux documents sécuritaires, on pourrait avoir cette entité intermédiaire entre le juge et la personne devant lui pour avoir accès à l'information sécuritaire et servir d'intermédiaire pour donner à l'individu la chance de recourir à une entité qui aura fait une analyse indépendante des informations sécuritaires dont l'individu pourrait risquer même d'être accusé.

Cela n'existe pas, car le gouvernement n'est pas obligé de fournir les informations classifiées selon lesquelles il pourrait prendre cet individu dans le contexte de ce projet de loi pour aller quérir les informations et, éventuellement, amener cette personne devant les tribunaux pour terrorisme.

Maintenant, je vais parler des préoccupations relatives au profilage racial et à l'utilisation des renseignements obtenus sous la torture. Le profilage racial a été étudié lors de toutes les autres occasions où ce projet de loi a été présenté. Cette nouvelle dimension a été articulée par le ministre de la Sécurité publique en ce qui concerne la torture, qui est un affront fondamental aux droits humains, et donc, aux droits de l'individu.

Si on est prêt à recevoir de l'information sous la torture, ce qui va à l'encontre d'une convention qu'on a signée, cela exige qu'on analyse autrement plus en profondeur l'impact de cette source et le besoin de son utilisation voire même de la légalité fondamentale de notre pays devant, peut-être un jour, la Cour suprême du pays pour voir si justement il y a légalité à aller quérir ces informations sous le joug de la torture.

En dernier lieu, je parlerai du caractère primordial de l'éminence de la menace terroriste parmi d'autres points qui devront toujours être considérés comme un besoin essentiel.

Je me répète, mais, jusqu'à aujourd'hui, on n'a pas eu recours à quelque chose d'aussi extraordinaire pour prévenir quatre scénarios de terrorisme qui ont été tentés dans notre pays et ce, depuis 2001.

[Traduction]

J'ai hâte de travailler à ce dossier avec le sénateur Frum et les sénateurs des deux côtés de la Chambre, en particulier au comité. Je suis certain que le comité dynamique étudiera toutes les nuances de cet important projet de loi, ce qui est essentiel pour assurer notre sécurité nationale grâce à des mesures réfléchies, équilibrées et nécessaires.

Honorables sénateurs, je recommande le renvoi de ce projet de loi au comité, afin que nous puissions le décortiquer et prouver qu'il est essentiel à nos besoins et qu'il protégera les droits individuels pour la sécurité collective.

Son Honneur le Président intérimaire : Les honorables sénateurs sont-ils prêts à se prononcer?

Des voix : Le vote!

Son Honneur le Président intérimaire : L'honorable sénateur Frum, avec l'appui de l'honorable sénateur Ogilvie, propose que le projet de loi S-7, Loi modifiant le Code criminel, la Loi sur la preuve au Canada et la Loi sur la protection de l'information, soit lu pour la deuxième fois maintenant.

Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?

Des voix : D'accord.

(La motion est adoptée avec dissidence et le projet de loi est lu pour la deuxième fois.)

Renvoi au comité

Son Honneur le Président intérimaire : Honorables sénateurs, quand lirons-nous le projet de loi pour la troisième fois?

(Sur la motion du sénateur Frum, le projet de loi est renvoyé au Comité sénatorial spécial sur certains projets de loi gouvernementaux.)

(1630)

Régie interne, budgets et administration

Adoption du septième rapport du comité

Le Sénat passe à l'étude du septième rapport du Comité de la régie interne, des budgets et de l'administration (prévisions budgétaires du Sénat 2012-2013), présenté au Sénat le 29 février 2012.

L'honorable David Tkachuk propose que le rapport soit adopté.

— Honorables sénateurs, à titre de président du Comité de la régie interne, des budgets et de l'administration, je suis heureux de vous présenter le Budget principal des dépenses du Sénat pour 2012-2013. Nous avions prévu le faire aujourd'hui, et je suis conscient que notre vice-président est absent, mais je crois qu'il a un remplaçant hors pair pour présenter ses observations. Le budget s'élève à 92 215 846 $, ce qui représente une baisse de 1 740 336 $, ou 1,85 p. 100, par rapport au Budget principal des dépenses de 2011-2012.

Le Parlement n'était pas tenu de réduire ses dépenses au titre de l'Examen stratégique et fonctionnel du gouvernement, mais nous avons jugé nécessaire que le Sénat contribue aux efforts. Notre examen n'a épargné aucun programme ni aucune dépense. Les bureaux des sénateurs et l'Administration du Sénat ont reçu le mandat de rationaliser le fonctionnement et de réorganiser les activités. Le Sénat cherche constamment à accroître sa transparence et sa responsabilité sur le plan fiscal.

Plusieurs postes budgétaires ont été touchés, comme le budget total de dépenses de bureau et de recherche, mais non celui des sénateurs. On a également réduit les comptes de frais divers des sénateurs ainsi que le budget respectif des caucus, des agents politiques, des comités, des affaires internationales et interparlementaires, et de l'Administration du Sénat.

Honorables sénateurs, le processus a été entamé le printemps dernier. Il s'agissait d'un effort conjoint des deux côtés. Le sénateur Furey, le greffier et moi avons alors commencé un plan de travail, longtemps avant que la plupart des autres ministères aient entrepris leurs propres démarches. Nous avions un plan et nous nous y sommes tenus. Les désaccords ont été rares, que ce soit au comité directeur ou à notre propre comité. Le Comité de la régie interne a adopté le budget à l'unanimité.

J'aimerais profiter de l'occasion pour remercier mes collègues du comité, les membres de l'administration et le personnel des sénateurs pour le travail accompli dans ces temps complexes et difficiles. J'invite tous les sénateurs à adopter le rapport.

L'honorable Jim Munson : Honorables sénateurs, j'ai préparé un discours de 30 minutes. Oh, ce n'est pas le bon! George Baker, où êtes-vous quand on a besoin de vous?

Sénateurs, au nom du vice-président du Comité permanent de la régie interne, des budgets et de l'administration, je suis moi aussi heureux de la présentation des prévisions budgétaires du Sénat pour 2012-2013 en vue de leur adoption. Le travail consacré à la préparation de ce rapport a été long et exhaustif. J'aimerais remercier les sénateurs Tkachuk et Stewart Olsen pour leur prudence, leurs efforts et leur contribution. Il n'a pas toujours été facile de concilier compressions et maintien des services nécessaires aux sénateurs afin qu'ils puissent accomplir leur travail parlementaires Ce fut toute une tâche.

J'aimerais également remercier notre greffier, M. O'Brien, la directrice des finances, Nicole Proulx, ainsi que les membres de son personnel, et tous les gestionnaires principaux qui ont contribué à la présentation de ce budget. Les années à venir devraient nous réserver d'autres défis, mais je suis persuadé que nous pourrons les relever. Je demande à mes collègues des deux côtés d'appuyer l'adoption de ce rapport.

Son Honneur le Président intérimaire : La motion portant adoption du rapport a été proposée et appuyée.

Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?

Des voix : D'accord.

(La motion est adoptée, et le rapport est adopté.)

Pêches et océans

Autorisation au comité d'étudier la pêche au homard au Canada Atlantique et au Québec

L'honorable Fabian Manning, conformément à l'avis donné le 7 mars 2012, propose :

Que le Comité sénatorial permanent des pêches et des océans soit autorisé à étudier, afin d'en faire rapport, la pêche au homard au Canada atlantique et au Québec;

Que les documents reçus, les témoignages entendus et les travaux accomplis sur la question par le comité depuis le début de la deuxième session de la quarantième législature soient renvoyés au comité;

Que le comité fasse de temps à autre rapport au Sénat, mais au plus tard le 31 mars 2013, et qu'il conserve, jusqu'au 30 juin 2013, tous les pouvoirs nécessaires pour diffuser ses conclusions.

Son Honneur le Président : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?

Des voix : D'accord.

(La motion est adoptée.)

[Français]

L'ajournement

Adoption de la motion

Permission ayant été accordée de revenir aux avis de motion du gouvernement :

L'honorable Claude Carignan (leader adjoint du gouvernement) : Honorables sénateurs, avec la permission du Sénat et nonobstant l'article 58(1)h) du Règlement, je propose :

Que, lorsque le Sénat s'ajournera aujourd'hui, il demeure ajourné jusqu'au mardi 13 mars 2012, à 14 heures.

Son Honneur le Président intérimaire : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?

Des voix : D'accord.

(La motion est adoptée.)

(Le Sénat s'ajourne au mardi 13 mars 2012, à 14 heures.)


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