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Délibérations du comité sénatorial permanent des
Banques et du commerce

Fascicule 22 - Témoignages du 7 mars


HALIFAX (Nouvelle-Écosse), le vendredi 7 mars 1997

Le comité sénatorial permanent des banques et du commerce, se réunit aujourd'hui à 9 heures pour étudier le projet de loi C-79, Loi modifiant la Loi sur la taxe d'accise, la Loi sur les arrangements fiscaux entre le gouvernement fédéral et les provinces, la Loi de l'impôt sur le revenu, la Loi sur le compte de service et de réduction de la dette et des lois connexes.

Le sénateur Michael Kirby (président) occupe le fauteuil.

[Traduction]

Le président: Chers collègues, nos premiers témoins sont Peter O'Brien, vice-président de la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante, la FCEI, M. Mike Henderson, directeur de la fabrication de vêtements chez Standields et un ancien étudiant à moi, alors soyez gentils envers lui. Notre troisième témoin, M. Ed MacDonald, est président-directeur général de la Nova Scotia Textile.

M. Mike Henderson, directeur de la fabrication de vêtements, Standields: Même si l'harmonisation de la taxe de vente est peut-être une bonne idée, il est sûr que le fait de l'imposer à une seule région du pays causera des difficultés. Toutefois, l'entêtement des gouvernements fédéral et provinciaux en cause pour que le prix affiché taxes comprises fasse partie de cette mesure législative, pourrait avoir des effets désastreux.

Dans notre industrie, on exige que la plupart des produits soient préétiquetés à la source lorsqu'ils sont expédiés par le fabricant. Comme la plupart des autres industries, nous nous conformons à une méthode nationale de pré-étiquetage pour le détail. C'est essentiel si on veut minimiser les coûts, et si l'on veut le délai de mise en oeuvre, le plus rapide qui soit pour les commandes. Le prix affiché taxes comprises pour nos trois provinces annulera ces avantages. Si nous devons étiqueter le prix de détail sur tous les articles en stock dans les magasins de cette région, il faudra tous les déballer et leur apposer un nouveau prix. Non seulement il en coûtera beaucoup d'argent, mais cela fera augmenter jusqu'à 40 p. 100 l'entreposage des commandes dans cette région.

C'est bien sûr exactement le genre de service que nos clients ne peuvent pas accepter à notre époque. Ce n'est pas nous qui pourrons absorber les coûts de la manutention supplémentaire à notre usine, il faudra les refiler aux détaillants, ce qui nous rendra moins concurrentiels, et cela ne fera qu'attiser l'inflation inutilement.

Nos produits seront moins concurrentiels comparativement aux produits importés, dont les fabricants refuseront naturellement de fournir ce service à une petite région du pays. En plus, nous devrons élargir nos entrepôts pour faciliter le réétiquetage ou prévoir des zones distinctes de collecte pour des articles semblables qui devront être étiquetés différemment.

Plusieurs détaillants se sont dotés d'un programme qui décourage l'inobservation, aux termes duquel on impose des pénalités exorbitantes aux fabricants qui commettent des erreurs d'étiquetage. Ainsi, si un article étiqueté pour les trois provinces de l'Est se retrouve par erreur dans un magasin hors de la zone harmonisée, ou inversement, nous risquons d'écoper d'une amende qui peut aller jusqu'à 10 p. 100 de la valeur de la commande, et le prix de ces commandes dépasse habituellement les cinq chiffres. Pour être sûrs d'observer les directives, nous devrons augmenter le nombre de contrôleurs à l'emballage pour prévenir des erreurs de ce genre, ce qui n'arriverait pas si l'on n'était pas tenus d'afficher le prix taxes comprises. Chose certaine, l'harmonisation haussera l'emploi, mais tous ces nouveaux employés vont vite rendre non concurrentielles les entreprises locales.

Il faut aussi songer à d'autres situations comme des prix de détail invraisemblables qui pourraient résulter du prix affiché taxes comprises et il se pourrait que cela complique davantage le problème de l'étiquetage à la source. Par exemple, un article qui coûte aujourd'hui 12 $ au détail devra désormais afficher un prix taxes comprises de 13,80 $. La plupart des détaillants refuseront de marcher, et ils vendront à un prix plus conventionnel comme 13,50 $ ou 14 $. Comment allons-nous savoir quel prix exiger? Va-t-on assister à de nouvelles scissions dans la région? Même s'il y a des consommateurs qui veulent voir le prix total, taxes comprises, combien d'autres, qui seront nombreux, seront découragés par des prix qui paraîtront exorbitants. Par exemple, un polo de golf à 39,95 $ peut sembler un achat avantageux, même avec la taxe qui suit, alors que le même polo, étiqueté à 45,95 $, ne trouvera jamais preneur chez bon nombre de consommateurs. Comment peut-on estimer les pertes que subiront les entreprises à cause de ce facteur?

Vous avez entendu les détaillants se plaindre amèrement des coûts de conversion, du réétiquetage des articles en magasin, de la reprogrammation des caisses enregistreuses, de la publicité, et cetera. N'allez jamais penser que ce sera le seul groupe qui sera aux prises avec des dépenses supplémentaires et inutiles. Nous allons dépenser beaucoup d'argent pour le traitement des données et la comptabilité, pour que nos factures aux clients nationaux soient conformes à la nouvelle loi. La plupart des commandes pour ces clients nationaux sont envoyées de Truro à un centre de distribution à Montréal, puis sont réacheminées vers le Canada atlantique. Nous devrons prendre des mesures pour que l'on nous renvoie les articles dûment préétiquetés, et pour que l'on puisse ventiler la facture cumulative selon les diverses zones fiscales. Encore là beaucoup de dépenses; est-ce vraiment nécessaire?

Stanfield's Limited ne réclame pas de traitement de faveur, mais nous ne voulons pas non plus que notre entreprise soit sacrifiée sur l'hôtel de l'opportunisme politique. Je résumerai en disant que le prix affiché taxes comprises dans notre contexte régional est l'une des décisions politiques les plus malavisées qui ait jamais vu le jour. Les responsables doivent immédiatement reconnaître leur erreur et retirer ce projet de loi au plus vite, sans songer au risque de perdre la face et aux promesses politiques qu'ils ont faites.

M. Edward MacDonald, président-directeur général, Nova Scotia Textiles: Mon témoignage aujourd'hui vient renforcer celui de nos clients qui ont comparu hier: les témoignages de Mark' Work Warehouse et Saan's Stores parce que leurs préoccupations expriment bien les difficultés que les fabricants et les détaillants vont éprouver avec la mise en oeuvre des exigences relatives au prix de la TVH.

Je dois vous dire que je suis très heureux de témoigner aujourd'hui en compagnie de nos amis de Truro, Stanfield's. Je suis d'accord, absolument et inconditionnellement, avec tout ce que Mike a dit. À mon avis, il a très bien décrit le problème du point de vue des fabricants et des détaillants. Nous ne nous opposons pas à l'intégration de la TPS et de la TVS, mais nous voulons simplement vous dire les problèmes que posera la mise en oeuvre de la nouvelle TVH.

Notre entreprise, la Nova Scotia Textiles, est une usine de tricotage à intégration verticale située à Windsor, en Nouvelle-Écosse, un endroit moins connu, diriez-vous, que celui où se trouve Stanfield's mais il s'agit d'une industrie très semblable. Nous produisons une gamme spécialisée de haute qualité de sous-vêtements d'hiver, de survêtements, de t-shirts et de produits de tricot ignifugés. Notre usine, qui était une entreprise familiale à ses débuts en 1893, a toujours été la propriété des Néo-Écossais qui la dirigeaient. À l'heure actuelle, nos produits se vendent dans tout le Canada et le Nord des États-Unis, et nous avons trouvé des débouchés en Grande-Bretagne et au Japon. Nous employons jusqu'à 200 personnes dans notre usine de Windsor.

À l'heure actuelle, nous avons 1600 comptes clients actifs aux quatre coins du Canada. Certains d'entre eux sont des magasins indépendants, alors que plusieurs autres, comme Mark's, Saan's, Root's, Sears et Work Wear World, sont des chaînes de détail. Pour nous conformer aux règlements sur les prix qui sont proposés, nous serons obligés de faire affaire avec deux pays au régime commercial différent: les provinces à TVH et le reste du Canada. Ce dédoublement va faire augmenter nos coûts, comme M. Henderson vous l'a expliqué, et va diminuer l'efficience de nos services d'expédition et des centres de distribution de nos clients. Nos produits doivent être pré-emballés pour chaque magasin. Le prix et le code-barre doivent être intégrés conformément aux exigences de chaque détaillant.

On vous a décrit la situation où l'on facture l'utilisateur. La tâche de nos expéditeurs, et les tâches de nos détaillants dans les centres de distribution, seront compliqués davantage par les exigences relatives au prix affiché taxes comprises de la TVH. En substance, à notre avis, tout cela ne servira à rien. Afficher un prix taxes comprises sur les rayons des magasins pour ensuite ventiler les taxes sur le reçu que l'on remettra au client est une manoeuvre bien malhabile pour le politique qui cherche à dissimuler la taxe, et cela n'offre aucune utilité pour qui que ce soit.

Les méthodes qu'on propose pour afficher le prix taxes comprises ne feront que confondre le client parce que ces méthodes vont varier d'un endroit à l'autre. Le consommateur aura beaucoup de mal à comparer les prix correctement. Nous croyons qu'une mise en oeuvre réussie de la taxe de vente harmonisée exige un système d'étiquetage des prix clair, aisément réalisable sur les rayons du magasin, et cela peut se faire efficacement si l'on continue simplement à afficher tous les prix au détail sans les taxes applicables. Et cela, messieurs, réglerait le problème.

M. Peter O'Brien, vice-président, Fédération canadienne de l'entreprise indépendante: Il y a longtemps que la FCEI s'intéresse aux diverses versions de la taxe à valeur ajoutée; plus de dix ans. Au milieu des années 80, nous avons fait une recherche internationale sur la TVA parce qu'il était évident qu'une forme quelconque de taxe à la valeur ajoutée serait imposée au Canada. À la fin des années 80, la FCEI a présenté des instances à maintes reprises aux comités compétents de la Chambre des communes et du Sénat, aux ministres, fonctionnaires et autres, afin d'exprimer les vues des entrepreneurs indépendants du Canada.

Ce que nous avons constaté -- et je pense que nous le constatons encore aujourd'hui -- c'est que nos membres depuis une dizaine d'années ne cessent de répéter qu'une taxe de vente harmonisée à l'échelle nationale répond à l'intérêt supérieur du Canada. Je ne crois pas qu'on puisse y échapper. Cependant, au sujet de la dernière proposition, nous avons fait ce que nous faisons normalement: nous avons longuement interrogé nos membres. Notre texte renferme plus de détails sur certains résultats du sondage que je ne vais vous communiquer maintenant.

Près de 1 300 entreprises ont répondu à notre sondage, soit un taux un peu plus faible que la normale, mais nous n'avions que deux semaines pour réaliser notre sondage parce que nous voulions communiquer nos résultats au comité des banques de la Chambre des communes. Ces résultats montrent à mon avis que nos membres s'intéressent de très près à cette question. Je pense que si nous avions eu plus de temps pour faire notre enquête, nous aurions aisément doublé le nombre de répondants.

Une proportion de 46,8 p. cent s'attendent à ce que la taxe de vente harmonisée ait des effets quelque peu ou très négatifs tandis que 44,2 p. 100 s'attendent à des effets positifs ou neutres; et 9,1 p. 100 n'étaient pas sûrs des effets que la taxe aurait. Le principal avantage qu'on voit dans cette nouvelle taxe est le fait qu'elle serait plus simple à comprendre, que l'entreprise réaliserait ainsi un meilleur profit, et que le taux de la taxe combinée serait plus faible pour ceux qui exigent actuellement la taxe provinciale de vente.

Les plus gros inconvénients formulés étaient les suivants: le taux d'imposition plus élevé sur des services qui ne sont pas assujettis pour le moment à la taxe de vente provinciale; les coûts qu'entraîne la conversion des caisses enregistreuses ne semble pas par contre poser un problème aussi épineux qu'on l'avait prévu; ensuite, qu'entraînerait le réétiquetage des articles étiquetés à la source ainsi que la croissance de l'économie parallèle, question qui, je crois, n'a pas été abordée très souvent devant votre comité mais qui préoccupe considérablement l'industrie du bâtiment, et à certains égards, l'industrie des services comme la coiffure et d'autres.

Au sujet du prix affiché taxes comprises, 46,4 p. 100 s'y opposaient; 47,8 p. 100 étaient en faveur ou neutres, et 5,8 p. 100 n'avaient pas d'opinion. Soit dit en passant, je dois vous dire que ceux qui s'y opposaient le plus se retrouvaient dans le commerce de détail, le bâtiment, les transports et les services, dans cet ordre. Ceux qui s'y opposaient le moins se retrouvaient dans l'hôtellerie, la restauration et la vente d'aliments et de boissons.

Depuis que nous avons reçu les résultats de ce sondage, nous avons fait ce que nous faisons toujours lorsqu'on propose des modifications fiscales dans notre pays: nous avons eu des entretiens constants et permanents avec les quatre gouvernements. En toute franchise, je dois dire que les portes des quatre gouvernements sont ouvertes et le sont restées. Nous avons pu obtenir quelques changements mineurs qui, à mon avis, aideront certaines personnes pour ce qui est de l'affichage prix taxes comprises, mais pas tout le monde, et nous devons le dire franchement.

Nous croyons que nous avons la responsabilité de maintenir ce dialogue. C'est l'une des raisons pour lesquelles nous sommes ici aujourd'hui, et pour lesquelles nous allons continuer de communiquer avec les gouvernements parce qu'à notre avis, il s'agit là d'une oeuvre en cours, tout comme la TPS était une oeuvre en cours dès le départ, comme en témoignent les changements qui ont été apportés à cette taxe encore l'an dernier. Il s'agit là à notre avis d'un processus continue.

On peut facilement comprendre le raisonnement à l'appui des prix affichés taxes comprises, et qui est la question la plus importante dont vous êtes saisis, si nous avions affaire à un effort d'harmonisation à l'échelle nationale. Cependant, comme nous n'avons affaire qu'à trois provinces, et comme on n'a pas la preuve que les consommateurs souhaitent vivement l'affichage des prix taxes comprises, nous croyons que le coût de l'observation n'est pas encore justifié.

Jusqu'à présent, la FCEI a collaboré étroitement avec les pouvoirs publics pour trouver des moyens de réduire les problèmes liés à l'affichage des prix taxes comprises, et nous continuerons de le faire. Cependant, éliminer cette exigence serait la façon la plus efficace de dissiper un grand nombre de préoccupations des entreprises à propos des coûts de la main-d'oeuvre liés au réétiquetage, de même que d'autres préoccupations concernant la compétitivité.

En ce qui concerne le problème le problème de la concurrence injuste de la part d'entreprises situées en dehors de la zone harmonisée, les entreprises des secteurs de la confection et de la chaussure ainsi qu'un grand nombre d'entreprises du secteur tertiaire sont particulièrement préoccupées. Elles s'inquiètent de la situation car elles ne savent pas comment on fera respecter cette règle; il faut que le gouvernement réponde de façon claire et précise à leur crainte. C'est le contraire qui s'est produit par le passé, car on nous avait demandé d'accepter l'auto-réglementation comme solution. Lorsque nous achetions des marchandises de l'extérieur de la région, il nous fallait payer la taxe de vente provinciale. Mais cela ne s'est jamais produit. L'avantage que présente cette taxe est que les détaillants de la région se retrouveront sur un pied d'égalité avec ceux qui expédient dans la région des marchandises en provenance de l'extérieur. Cela présente donc certains avantages ainsi que des inconvénients.

En terminant j'aimerais ajouter que nous sommes d'avis que vous vous trouvez dans une situation plutôt précaire. En fait, hier, un de nos membres importants, qui a 19 points de vente dans la région atlantique, m'a fait parvenir sa nouvelle étiquette, qui est conforme aux exigences stipulées dans les règlements. Il lui a fallu investir beaucoup de temps, d'efforts et d'argent, à mon avis, pour produire cette étiquette. Il a fallu changer complètement la politique et la méthode d'établissement des prix. C'est un problème qu'ont déjà éprouvé nombre d'entreprises qui ont dû préparer de nouvelles étiquettes.

Nous avons également noté un ralentissement des ventes au détail dans l'attente du changement, parce que dans plusieurs cas cela représente une diminution des prix. Je dois avouer que nos membres s'emportent lorsque d'aucuns disent que la baisse des prix ne sera pas transférée aux consommateurs. Lorsque ce sera possible, cette diminution du prix sera transférée. Notre région se remet à peine d'une récente récession, et les gens d'affaires feront tout ce qu'ils peuvent pour favoriser la croissance économique et les dépenses de consommation. Nous ne voulons pas lancer le type de débat qui ralentira le taux de croissance qui existe dans la région et que nous avons noté au cours des quatre derniers mois, en fait jusqu'à ce qu'il y a quelques semaines.

Enfin j'aimerais signaler qu'il existe beaucoup de confusion dans le secteur des affaires, et chez les consommateurs, parce que le gouvernement n'a pas bien su communiquer sa politique. La fédération a consacré beaucoup de temps et d'efforts à la question, à collaborer avec les fonctionnaires fédéraux et provinciaux pour élaborer un document pertinent qui sache répondre aux questions que les gens se posent; ce document sera remis à nos membres et à quiconque le désire, dès que le résultat de vos travaux seront rendus publics, de telle sorte que nous puissions fournir aux intéressés les renseignements les plus pertinents possible. C'est très important. Dans très peu de temps nous serons rendus au 1er et au 7 avril, et ces renseignements devront être communiqués le plus tôt possible. Je vous exhorte donc à mettre fin à vos travaux sans tarder.

Le sénateur Oliver: Les statistiques de M. O'Brien sont très utiles. Nous en avons reçu d'autres auparavant, mais au moins les vôtres sont réelles et pertinentes parce qu'elles vous ont été fournies par vos membres.

Tout comme vous, plusieurs personnes ont soulevé la question de l'économie parallèle et de son impact sur notre pays. Cependant, personne n'a suggéré à notre comité les solutions qu'il peut prendre pour régler le problème. Lorsque vous avez soulevé la question ce matin, je me suis souvenu que le Conseil économique des provinces de l'Atlantique avait soulevé la même question dans son rapport. Si vous le permettez, j'aimerais vous lire un bref extrait de ce rapport puis vous demander quelles recommandations vous aimeriez formuler à notre comité à l'égard de ce problème. Dans son rapport le Conseil économique précise:

En vertu de la TVH, les services de main-d'oeuvre pour l'installation de nombre de produits seront désormais imposés à 15 p. 100 au lieu de 7 p. 100. Le matériel ou le produit qu'on installe coûtera probablement moins cher. Cela encouragera peut-être les gens à avoir recours à l'économie parallèle pour faire installer ces produits. Les consommateurs décideront ainsi peut-être d'acheter eux-mêmes les produits ou matériaux en se prétendant bricoleurs par exemple, mais ils embaucheront en cachette un ouvrier pour les installer, évitant ainsi de payer la TVH pour l'installation.

Que devrions-nous faire?

M. O'Brien: C'est là un problème très grave, qui a des ramifications qui vont bien au-delà de cette taxe. Par exemple, les consommateurs ne savent pas que lorsqu'ils embauchent quelqu'un pour réparer leur maison ou faire des travaux, ils sont responsables pour l'assurance d'indemnisation des accidents du travail, si la personne qu'ils ont embauchée n'a pas déjà cette assurance. Les consommateurs doivent être mieux renseignés. Il faut absolument les éduquer. En fait, les avantages qu'ils pensaient avoir en ayant recours à l'économie parallèle n'existent pas toujours.

Le crédit de taxe sur les intrants de 15 p. 100 permet de compenser les choses dans une certaine mesure. Je crois qu'il faut assurer une meilleure observation des règlements, et que les fonctionnaires qui travaillent à la direction des taxes et impôts déploient de plus grands efforts. Par exemple, un des membres de la fédération m'a appelé l'été dernier pour me dire qu'il avait à dessein amené déjeuner son vérificateur pour la TPS pour lui montrer 12 personnes qui faisaient partie de l'économie parallèle. Le vérificateur lui a dit que c'était bien intéressant mais qu'il était plus rentable pour lui d'étudier les états financiers de notre membre que d'essayer de faire payer toutes les taxes pertinentes à ces gens qui travaillent au noir. Ce genre de choses doit changer.

Nous avons rencontré la ministre du Revenu national, l'honorable Jane Stewart, pour discuter de la question; elle a signalé qu'elle était prête à multiplier les efforts pour identifier et pénaliser ceux qui font vraiment partie de l'économie parallèle, non pas les petites entreprises qui sont inscrites et qui paient des taxes, mais ceux qui ne le font pas. Je crois que c'est ce genre de choses qui doit se produire et il va falloir faire des efforts concertés pour s'attaquer au problème; de plus les sanctions imposées doivent être suffisamment importantes pour faire disparaître tout avantage qu'il y aurait à travailler au noir.

Le sénateur Oliver: Avez-vous des recommandations particulières à formuler à notre comité?

M. O'Brien: Vous devez vous pencher sur les sanctions. Vous devez également vous assurer que ce seuil de 30 000 $ n'augmentera pas. Il y a là un véritable danger, parce que si ce plafond augmente, un nombre toujours croissant de gens n'auront pas à faire rapport de leurs activités. Je crois que les provinces envisagent de demander à toutes les entreprises de s'inscrire, et non pas seulement à celles qui ont des revenus de plus de 30 000 $. Ce ne serait pas une mauvaise idée. En fait, c'est peut-être la meilleure façon de procéder. Il ne sera peut-être pas nécessaire de prélever des taxes auprès de toutes ces entreprises, mais tout au moins elles seraient toutes inscrites; de cette façon vous sauriez où elles sont, ce qui serait utile au moment de la vérification. J'en ferai certainement la recommandation.

Le président: C'est une très bonne idée. Le ministre des Finances de Terre-Neuve a une anecdote intéressante à nous raconter; il nous a dit qu'on avait visité une série d'entreprises et compagnies qui se trouvent à proximité des bureaux du ministère des Finances à Terre-Neuve pour voir si ces entreprises étaient inscrites; 75 p. 100 d'entre elles ne l'étaient pas même si elles auraient dû l'être. Comme il nous l'a signalé, c'était juste à côté des bureaux du ministère des Finances.

Le sénateur Oliver: Je voulais demander aux deux détaillants s'ils pensent que les dates prévues au mois d'avril sont appropriées. Le comité des banques retourne à Ottawa aujourd'hui et fera rapport du projet de loi au début de la semaine prochaine. À ce moment-là l'étude sera terminée. Cependant, j'aimerais savoir si tout le monde aura le temps de faire tout ce qui est nécessaire. Devrions-nous proposer une autre date? Devrions-nous proposer par exemple le 1er septembre, faire la publicité nécessaire pour que tout le monde sache quand le nouveau régime entrera en vigueur. J'aimerais savoir quand ce nouveau régime devrait entrer en vigueur. Qu'en pensez-vous?

M. Henderson: Tout d'abord je dois signaler que nous ne sommes pas des détaillants, mais plutôt des fabricants qui procèdent à l'étiquetage à la source, comme je l'ai signalé tout à l'heure. Je crois qu'un report de la date d'entrée en vigueur du nouveau régime serait une bonne chose. Puisque nous ne savions pas vraiment ce qui allait se passer, nous n'avons pas commencé à étiqueter nos produits. Nous procédons au même étiquetage qu'auparavant, et nous n'avons pas encore pris de mesures pour assurer l'étiquetage des prix taxes comprises.

Si le nouveau régime entre en vigueur le 1er avril, nous devrons faire des pieds et des mains, assurer beaucoup de travail en temps supplémentaire pour que les produits portant les étiquettes pertinentes puissent être expédiés aux détaillants. Ce sera déjà le 1er avril d'ici peu. Je ne crois pas que nous soyons vraiment en faute. Vous vous demanderez peut-être pourquoi nous ne sommes pas mieux préparés. Nous répondrons simplement que c'est en raison des audiences comme les vôtres et d'autres interventions; nous avions entendu des rumeurs qu'il se pourrait que l'on décide de reporter la date d'entrée en vigueur du nouveau régime. Il nous fallait attendre. Il fallait savoir si les étiquettes devaient indiquer les prix taxes comprises.

M. MacDonald: Nous nous trouvons dans une situation semblable. Vous devez vous rappeler que les fabricants, quand on pense au système de distribution, respectent les exigences particulières de chaque chaîne de magasins de détail du pays. Lors de certaines réunions auxquelles nous avons participé, d'aucuns ont mentionné qu'il y aurait mise en oeuvre progressive du nouveau régime et qu'une observation totale ne serait pas exigée dès le 1er avril; de toute façon, même si la date d'entrée en vigueur officielle était le 1er avril, je ne crois pas que tout le monde sera en mesure d'observer les nouvelles exigences.

Cependant, je crois qu'un problème fondamental se pose en l'occurrence. Est-il juste et approprié, pour le consommateur, l'industrie, la région et le pays de mettre en oeuvre un régime de prix taxes comprises. C'est là le coeur du problème à mon avis. M. O'Brien a fait état d'autres problèmes qui touchent cette question, mais je crois que vous pourriez formuler une recommandation bien particulière à ce sujet parce que ces prix n'offrent aucun avantage réel au consommateur. Depuis plusieurs années, pour diverses raisons, il existe au Canada divers taux d'imposition dans les provinces, et je crois que c'est plutôt humiliant de noter que d'après le gouvernement le consommateur ne sait ce qu'il doit payer que si l'on inclut les taxes dans les prix sur l'étiquette. Nous ne sommes pas tout à fait stupides, mais c'est ce que semble laisser entendre le gouvernement.

Vous avez l'occasion de prendre une décision importante et d'avoir un impact sur la région atlantique et le reste du pays car, comme M. O'Brien l'a signalé, un jour ou l'autre, notre régime fiscal devra être plus cohésif; cependant, il nous faut procéder de façon organisée et réfléchie. Il ne faut pas simplement apporter des modifications par simple opportunisme politique.

[Français]

Le sénateur Losier-Cool: Bonjour Stéphane, ça me fait plaisir de te voir. Je voudrais revenir sur la question du travail au noir que le sénateur Oliver a mentionnée tout à l'heure. On a beaucoup discuté de cette question au Québec. Est-ce que le Québec a entrepris des mesures pour éliminer ce problème? Êtes-vous au courant?

M. Robichaud: Il n'y a pas de mesures comme telles qu'on connaisse au Québec. Mais vis-à-vis cette question ici en Atlantique, on a déjà rencontré la ministre du Revenu qui a démontré un intérêt de vraiment vouloir s'attaquer au problème à la source. Je crois que, comme la taxe elle-même, c'est un travail en progrès, cette question-là aussi. C'est quelque chose qui doit être lié. Parce que l'économie parallèle va certainement être une question sur laquelle il va falloir s'attarder. C'est déjà un problème sérieux. Je crois qu'il va y avoir des opportunités de pouvoir travailler là-dessus. Cette économie parallèle est causée d'abord et avant tout par un haut niveau de taxe. C'est lorsque le niveau de taxe est élevé qu'on voit l'avantage de travailler au noir afin de ne pas payer de taxe. On croit qu'il y a une opportunité au niveau de l'assurance-emploi où l'on pourrait peut-être réduire les taux afin d'offrir une marge de manoeuvre pour s'attaquer justement à l'économie parallèle.

Le sénateur Losier-Cool: Avec l'harmonisation, est-ce que le niveau de taxe plus élevé va favoriser le travail au noir?

M. Robichaud: Actuellement, c'est la TPS qui s'applique à la main-d'<#0139>uvre passera de 7 p. 100 à 15 p. 100.

[Traduction]

Le sénateur Losier-Cool: Comme vous le savez, les prix incluant les taxes préoccupent notre comité. Hier un représentant de l'Association des épiceries nous a dit qu'il fallait leur donner plus de temps et reporter l'entrée en vigueur de ce nouveau régime; je crois en fait que Revenu Canada sera disposé à donner plus de temps aux intéressés. Monsieur Henderson, vous opposez-vous au prix incluant les taxes parce que les consommateurs n'en veulent pas, ou parce que les détaillants sont d'avis que cela leur créera trop de problèmes et leur coûtera trop cher?

M. Henderson: Je dois répondre oui à ces deux questions, parce que les consommateurs, et détaillants et je dois reconnaître notre groupe non plus n'en veulent pas.

Le sénateur Losier-Cool: Saviez-vous que lors d'un sondage effectué tout récemment au Canada, on a conclu que 52 p. 100 des répondants voulaient que les prix incluent les taxes? Il s'agit là des consommateurs.

M. Henderson: Oui, je suis au courant de ce sondage, et je suis d'accord avec ce qu'a dit M. MacDonald, tout particulièrement en ce qui a trait à la taxe de 15 p. 100 dont nous parlons; il ne serait pas difficile pour le consommateur de calculer combien un produit coûtera une fois la taxe ajoutée, même si les prix indiqués n'incluent pas les taxes. Je crois que les gens s'y sont fait, même avec des chiffres un peu étranges comme 18,8 p. 100 ou peu importe; c'est le genre de taux que nous avons depuis qu'il faut payer la taxe provinciale et la TPS. Ajouter 15 p. 100 au prix sera un calcul très facile pour le consommateur.

Je suis d'accord avec lui. Selon moi les gens des Maritimes en particulier sont tout à fait capables de le faire. Je ne sais pas qui a fait le sondage, mais je pense que c'est une des situations qui permet d'obtenir n'importe quelle réponse. J'en suis convaincu car je pense que cette taxe nuira aux consommateurs, aux détaillants et certainement aux fabricants qui sont dans notre cas et qui doivent se soumettre à une politique nationale d'étiquetage à la source.

Je crains que cela fasse diminuer notre chiffre d'affaires au profit d'autres clients au Canada qui estimeront que les coûts d'administration et de modification n'en valent pas la peine et qui décideront peut-être de réduire le volume d'affaires avec notre région ou encore de ne pas l'accroître. Je ne pense pas que les gens seront nombreux à partir mais certains de nos clients nous ont dit qu'ils seraient moins tentés de se tourner vers les Maritimes au moment d'une expansion éventuelle.

Le sénateur Losier-Cool: Vous ne souscrivez pas à la recommandation qui veut qu'on demande un sursis? Vous demandez tout simplement que le prix affiché n'inclut pas les taxes, c'est tout, n'est-ce pas? Monsieur MacDonald, pensez-vous de même car je n'ai entendu que la dernière phrase de vos remarques.

M. MacDonald: Oui. En réponse à votre question, voici comment j'interprète les résultats du sondage dont vous parliez: les gens préféreraient que le prix affiché comprenne la taxe si toutes choses étaient égales par ailleurs, et si les calculs étaient faits pour eux. Dans cette équation, il est un élément capital que l'on n'a pas pris en compte, et c'est le fait que l'inclusion de la taxe dans le prix correspondra ni plus ni moins pour les fabricants et les détaillants à un facteur supplémentaire de majoration du prix de revient.

M. Henderson a décrit une situation qui est identique à ce qui se produit dans nos services d'expédition à Windsor et à Truro, quoiqu'il y ait de légères différences de mise en marché entre les deux compagnies. Nos clients demandent le même service: que les commandes soient transmises électroniquement, un délai de mise en oeuvre rapide, l'étiquetage à la source et le préemballage. Ils veulent que le produit passe par leur centre de distribution. Les entrepôts sont choses du passé; nous recourrons désormais à de très petits centres de distribution où tout est préparé d'avance.

L'inclusion de la taxe dans le prix va faire augmenter les coûts à cause du double emploi occasionné qu'il faudra transmettre en partie au détaillant, qui à son tour haussera le prix de vente pour compenser. Les produits n'auront plus comme prix de détail 19,95 $. La hausse du prix de détail va atteindre le cran suivant et je pense que ce sont les renseignements qui sont absents du sondage. Je vous mets donc en garde car à mon avis, il y a cet élément bien réel qui manque.

Toutefois, en réponse à votre question, je dis sans ambages, «Non». Nous n'avons pas besoin d'inclure les taxes dans le prix.

Le sénateur Losier-Cool: Actuellement, divers détaillants ne procèdent pas de la même façon pour établir les prix et le consommateur s'y retrouve. Si on va dans un magasin, certains disposent la marchandise sur des rayons et d'autres ont recours à des supports ou...

M. MacDonald: Mais quand il s'agit de vêtements, personne n'inclut les taxes dans le prix. Ainsi, le consommateur sait ce que coûte la marchandise car il connaît le montant des taxes. Cela me semble une approche raisonnable. Je me permets de dire aux membres du comité que nous ne voyons pas de raison péremptoire d'inclure la taxe dans le prix.

Le sénateur Losier-Cool: Le consommateur ne veut pas de surprise une fois arrivé à la caisse. C'est à la caisse que la question du prix se présente.

M. MacDonald: Il n'y a pas de surprise puisque que le consommateur sait à quoi s'attendre quand il achète chez un marchand raisonnable. Personne ici ne prétend que les taxes sont moins élevées en Nouvelle-Écosse qu'en Alberta par exemple. On sait qu'il y a des structures différentes suivant les régions. C'est pourquoi j'insiste sur l'idée d'équité et je dis qu'il faut que les prix soient comparables. Le consommateur sait, en allant d'un magasin à l'autre, qu'il peut obtenir à meilleur marché un produit de marque dans certains magasins où les produits sont offerts en réclame à l'occasion. Mais si l'on inclut la taxe dans l'équation, c'est-à-dire que si certains magasins l'incluent et d'autres ne le font pas, et si certains magasins ont des réclames et d'autres non, cela complique la vie au consommateur qui veut faire la meilleure affaire possible.

Je tiens à dire qu'à part le coût administratif dont Mike a parlé, cela ne représente pas un avantage direct sur le plan des taxes pour nos compagnies. Nous voulons bien servir nos clients et les détaillants. Voilà pourquoi nous sommes ici.

Le sénateur Rompkey: Monsieur le président, je porte ce matin un sous-vêtement Stanfield, ce que je me contenterais de signaler même si je reconnais qu'il a été acheté à l'extérieur de la zone où la taxe est harmonisée.

Je voudrais que M. O'Brien nous parle des chiffres que révèle le sondage car on constate que 46,4 p. 100 des répondants s'opposent à l'inclusion de la taxe, alors que 47,8 p. 100 y sont favorables ou sont neutres, 5,8 p. 100 étant incertains. Si l'on tient compte du pourcentage des incertains qui sont favorables, cela signifie qu'il a un peu plus d'avis positifs ou neutres que de négatifs.

Vous avez ajouté que c'était le commerce de détail, le bâtiment, les transports et le secteur des services qui étaient farouchement contre alors que le milieu hôtelier qui est en expansion dans la région, était positif. Votre association se prononce contre l'inclusion de la taxe dans le prix et vous dites que le coût de mise en oeuvre n'en est pas justifié. Pouvez-vous développer votre pensée. Les chiffres sont environ 50-50, peu ou prou.

M. O'Brien: Nous convenons qu'au bout du compte une taxe de vente harmonisée nationale, une plutôt que deux, correspond exactement à nos besoins. Ce qui se produit dans les trois provinces est un bon pas dans cette direction. Nous souhaiterions que les sept autres provinces soient aussi judicieuses que les Maritimes et comme je suis Terre-neuvien, je puis vous dire que d'ordinaire ce n'est pas le cas.

Il ne faut pas oublier que cela complique la vie des grandes sociétés en particulier et c'est ce que nous trouvons très préoccupant. Nous comptons en effet de grandes sociétés dans notre fédération -- non seulement des PME -- qui affichent les prix taxes comprises. C'est devenu une pierre d'achoppement majeure qui va contrarier les consommateurs comme les commerçants. On a entendu dire que certains n'expédieraient plus de marchandises dans les provinces de l'Atlantique. J'ai eu une algarade épistolaire avec un grand détaillant d'Ottawa qui prétend qu'il va perdre 6 p. 100 de son chiffre d'affaires. Je ne pense pas que ce soit le cas mais c'est en raison de la complexité réelle ou imaginaire qu'il le dit.

Pour l'instant, il y a des complications que nous ne soupçonnons pas alors que certaines choses qu'on juge compliquées ne le seront pas. C'est toujours la même chose quand il y a modification d'une taxe. Cette réaction n'est pas différente de celle que l'on constate quand le gouvernement change quelque chose. Les milieux d'affaires ne font pas confiance au gouvernement, facteur qui intervient également.

Essentiellement, je suis venu ici ce matin pour vous dire qu'un retard de trois ou six mois, voire deux jours, aurait pour effet de réduire la consommation, et c'est cela qui m'effraie. La récession est encore fraîche pour nous, plus que dans le reste du pays. Il y a encore dans notre région des endroits où le chômage dépasse 25 p. 100. Cela n'a pas changé et nous venons tout juste d'entrevoir la reprise de la consommation.

Il y a peut-être d'autres aspects de la question que vous voudrez prendre en compte. Déjà dans les documents techniques on dit que la mise en oeuvre effective sera le 1er août, dans la mesure où les gens s'y plieront. Vous voudrez sans doute réfléchir à cela mais je ne pense pas qu'il soit judicieux de changer la date du 1er avril. J'hésite à le dire car je sais que certains de nos membres éprouveront de réelles difficultés à cette date-là, en l'occurrence les deux personnes qui m'accompagnent. Toutefois, les problèmes ne seront pas moins graves pour ceux qui ont déjà fait le changement, et ils sont nombreux à l'avoir fait, en prévision du 1er avril. Nous faisons face à un véritable dilemme.

Le sénateur Rompkey: En résumé, tous les quatre, vous êtes contre le prix affiché toutes taxes comprises mais vous êtes favorables à une taxe de vente harmonisée, n'est-ce pas?

M. O'Brien: Absolument.

Le sénateur Buchanan: Je voudrais une précision concernant le sondage dont vous avez parlé. J'ai les résultats sous les yeux et je demandais si vous saviez que 90 p. 100 des répondants ne savaient rien de la TVH ou très peu? En outre, on posait la question: «Préféreriez-vous que les taxes figurent dans le prix?» Très peu de gens ont compris ce que cela signifiait, mais de toute façon 73 p. 100 ont dit que oui. Toutefois, ils ne se rendaient absolument pas compte qu'une telle mesure risquait de faire augmenter le prix des produits achetés. Ils ne se rendaient pas compte non plus que l'inclusion de la taxe dans le prix ne visait que trois petites provinces qui représentent 8 p. 100 de la population totale. Sur les résultats de ce sondage, on bâtit pourtant toute la stratégie de l'inclusion de la taxe dans le prix. Le saviez-vous?

M. O'Brien: Oui, sénateur, et je me demande si je dois vous rappeler ce qu'un grand homme d'État de l'Ouest du Canada, pensait de l'utilité des sondages dans les années 50 et 60.

Le sénateur Buchanan: Je l'ai bien connu.

M. O'Brien: À vrai dire, il n'y a pas eu de sondage. Il y a eu une enquête auprès des gens qui étaient un peu au courant et qui allaient être touchés par la mesure. Étant donné tout ce que l'on a dit depuis le début au sujet de cette question, plus personne ne comprend ce qui se passe. À part ceux qui se sont occupés de cette question de part en part, peu de gens comprennent tout à fait ce que représente la modification. Dans certains cas, les complications, les aspects négatifs et les aspects positifs, n'ont pas été décrits avec assez de précision et c'est un problème majeur.

Le sénateur Buchanan: Je voudrais ajouter que si les rédacteurs de ce projet de loi sur l'harmonisation de la taxe de vente avaient su ce qu'ils savent maintenant, à mon avis, ils n'auraient jamais proposé le prix affiché taxes comprises. Ce n'est pas judicieux sur le plan politique, sur aucun plan du reste. Toutefois, on pourra toujours s'en débarrasser. On pourrait très bien supprimer cette partie-là sans tronquer le projet de loi sur la TVH.

M. O'Brien: Sénateur, dès le mois de juillet, nous avons commencé à talonner les gens qui avaient préparé ce projet de loi et vous me connaissez, je m'y connais quand il s'agit de taper aux portes des gens. Ma devise est de ne jamais renoncer, d'être impitoyable. Il y a des gens à Ottawa qui le savent et il y en a maintenant qui le savent aussi dans les trois provinces.

Dès le départ, c'est l'orientation qu'on a voulu donner et quand nous avons constaté cela, nous avons protesté et même si l'on s'est rendu à notre point de vue dans certains cas, ici nous n'avons pas obtenu gain de cause. Je pense que c'est un élément qui était propre aux principes qui ont guidé l'évolution de la taxe dès le départ.

M. MacDonald: Monsieur le président, permettez-moi de faire une brève remarque là-dessus.

Le président: Allez-y monsieur MacDonald.

M. MacDonald: Je tiens à dire que nous allons respecter la loi, quelle qu'elle soit. Il n'y a pas de doute là-dessus.

Le président: Je pense que c'est ce que nous présumions tous.

M. MacDonald: Tout à fait. Je voudrais signaler autre chose: en faisant cela, nous allons peut-être mécontenter et incommoder certains de nos clients car leurs besoins pourraient être différents de ce que la loi permet. Il serait injuste de mettre qui que ce soit dans cette situation. Les sénateurs, au sein du comité et au Sénat, ont l'occasion de faire abstraction de l'aspect positif de telle ou telle situation pour faire une recommandation de bonne gestion économique. Il n'est pas nécessaire que cette recommandation soit fondée sur des sondages qui remontent à quelque temps déjà. Il suffit de s'en tenir à des principes de bonne gestion économique pour l'avenir du régime fiscal dans cette région et dans le reste du Canada.

Le président: Honorables sénateurs, notre prochain témoin est M. Bill Black, de la Maritime Compagnie d'Assurance-Vie.

M. Bill Black, président-directeur général, la Maritime Compagnie d'Assurance-Vie: Bonjour, sénateurs. Je suis accompagné aujourd'hui de Tracey Jennings, notre experte fiscale et, dès que nous abandonnerons les généralités pour passer aux questions je me ferai très discret et je céderai la parole à Tracey qui vous expliquera précisément comment tout cela fonctionne.

D'entrée de jeu, je tiens à dire que nous sommes en faveur d'une taxe de vente harmonisée. Nous pensons qu'il s'agit là d'une politique gouvernementale valable. Et ce, malgré le fait qu'au bout du compte, nous payerons environ 70 p. 100 plus de taxes qu'en vertu du régime précédent. À court terme, cela ne sera pas le cas. Nous payerons en fait un peu moins qu'à l'heure actuelle, mais uniquement en attendant que d'autres provinces emboîtent le pas. Avec l'adhésion de provinces additionnelles, notre situation fiscale changera au point que nous payerons environ 70 p. 100 de plus que nous ne payons à l'heure actuelle. Nous pensons néanmoins que c'est une politique valable.

Je me dois de dire qu'à l'origine, lorsque la mesure a été proposée, elle suscitait un problème grave pour le volet assurance-vie de nos activités, et on a pris assez rapidement des dispositions pour le résoudre. Nous sommes reconnaissants des initiatives qui ont été prises à cet égard. Toutefois, nous demeurons aux prises avec un problème grave en ce qui a trait au fonds distinct de notre entreprise. Je signale que dans une compagnie d'assurance-vie, un fonds distinct est identique à un fonds mutuel à tous points de vue, sauf pour le nom. Du point de vue du consommateur, ils sont tout à fait semblables. De notre point de vue, en tant que fournisseur, il est aussi analogue à un fonds mutuel. Aux termes de la structure juridique qui nous gouverne, il s'agit d'un fonds distinct.

Le président: J'aimerais obtenir une précision. C'est essentiellement un fonds en fiducie, n'est-ce pas?

M. Black: Oui.

Le président: C'est pour cette raison qu'il est distinct?

M. Black: Vous avez raison. Ce fonds est distinct des autres éléments d'actifs de la société, et il est géré exactement comme un fonds mutuel.

Le président: J'essayais de comprendre le pourquoi de ce terme «distinct». Si j'ai bien compris, c'est parce que le fonds est distinct des autres éléments d'actifs, précisément parce qu'il est de nature fiduciaire?

M. Black: C'est exact. Selon la loi, le fonds fiduciaire doit être un résidant quelque part. Étant donné que nos quartiers généraux sont ici, notre fonds est considéré comme un résidant ici. Dans la version initiale de la mesure, le libellé proposé aurait fait en sorte que notre fonds, nous aurait payé, à nous et à la Assumption Mutual du Nouveau-Brunswick, la taxe de vente harmonisée, mais nous aurions été les seules sociétés au Canada qui auraient payé cette taxe. Par conséquent, nous nous serions retrouvés désavantagés par rapport à nos concurrents.

Dans les communications écrites que nous avons reçues du ministère des Finances, sous forme de documents techniques, et cetera, et dans nos discussions avec Paul Martin et ses collaborateurs, il a été précisé que le gouvernement n'avait nullement l'intention de nuire à la compétitivité des entreprises établies dans la zone harmonisée. Par conséquent, je ne pense pas que le problème ait été créé délibérément. Après avoir été témoin du dialogue engagé par Tracey, j'estime que nous sommes en présence d'une certaine intransigeance bureaucratique, ce qui est une façon polie de dire les choses.

La solution qu'on nous a proposée était utile, intéressante et plutôt bizarre. Essentiellement, elle contribuait à résoudre notre problème à l'égard des consommateurs de l'extérieur de la zone harmonisée mais laissait entier celui qui se posait pour les consommateurs à l'intérieur de la zone harmonisée. Autrement dit, nous payerions la taxe, à l'exclusion de tous les autres.

Ce qui me dérange, ce n'est pas de payer la taxe, c'est que nous soyions les seuls à la payer. Je suis pratiquement sûr que là n'était pas l'intention des autorités politiques. Néanmoins, c'est une conséquence indéniable. Il va de soi que nous ayons présenté des instances tant au niveau provincial que fédéral. Nous avons comparu à Ottawa devant le comité parlementaire de la Chambre des communes. Diane Brushett était là, ainsi que d'autres personnalités lorsque nous avons expliqué notre point de vue. Tous les participants ont souri gentiment, ont hoché la tête ou se sont tordu les mains et ont froncé les sourcils, mais au bout du compte, rien n'a changé. Cela nous a quelque peu découragés.

Il faut que vous sachiez que notre clientèle vient de partout au Canada. Nos activités se déroulent à 85 p. 100 dans l'Ouest du Nouveau-Brunswick, mais sur 900 employés, 600 d'entre eux sont ici à Halifax et, pour moi qui suis originaire d'ici, c'est très bien ainsi. Nous préférons que les emplois soient ici plutôt qu'ailleurs. Nous pourrions résoudre le problème en exportant des emplois à Calgary ou à Montréal, mais ce n'est pas vraiment l'option privilégiée. Nous souhaitons plutôt une solution législative qui concrétise fidèlement l'intention originale de tous les intervenants politiques. Voilà ce que nous avons expliqué au comité de la Chambre des communes et ce que nous voulons vous faire comprendre ici ce matin.

Je suis très heureux de vous annoncer que tard hier, le gouvernement de la Nouvelle-Écosse qui rendra d'ailleurs public un communiqué ce matin, a offert de résoudre notre problème provisoirement pour deux ans. Cela tombe à point nommé car le 1er avril approche à grands pas et nous étions quelque peu coincés. Je suppose que les autorités provinciales étaient aussi perplexes que nous devant l'absence de réaction de leurs homologues fédéraux. Quoi qu'il en soit, nous sommes très reconnaissants au gouvernement de la Nouvelle-Écosse de nous offrir une solution provisoire.

J'ajouterais qu'à mon avis, ce n'est pas à ce niveau que se trouve la solution à long terme. La solution à long terme qui s'impose relève du gouvernement fédéral. Dans le mémoire que nous vous avons présenté ce matin, nous avons énoncé deux façons différentes de résoudre le problème. Il y en a probablement une dizaine, mais nous en avons présenté deux. Je répète encore une fois, que nous n'avons pas d'objection à payer la taxe. Ce qui nous dérange c'est de la payer à l'égard d'un groupe de clients, alors que d'autres ne la paient pas. C'est là le noeud du problème.

Le président: Avant de céder la parole au sénateur Angus, pour qu'il amorce la période de questions, puis-je vous poser une question technique? Votre problème peut-il être résolu par voie de réglementation ou faut-il modifier le projet de loi? Si je pose cette question, c'est que nous avions cru comprendre que la Assumption Life du Nouveau-Brunswick avait résolu son problème par voie réglementaire et comme vous venez de dire que vous pouviez obtenir un délai de deux ans en vertu d'une entente avec le gouvernement de la Nouvelle-Écosse je suis porté à croire qu'il ne s'agit pas d'un problème législatif, mais d'un problème réglementaire. Madame Jennings, pouvez-vous nous aider à ce sujet?

Mme Tracey Jennings, analyste de l'impôt des sociétés, Maritime Compagnie d'Assurance-Vie: Tout d'abord, permettez-moi de vous expliquer ce que renferme la loi fédérale et ce que le gouvernement provincial nous a offert. Aux termes de la loi fédérale actuelle, nous serions tenus d'imposer à un résidant de la Nouvelle-Écosse une taxe de 15 p. 100 sur les droits relatifs à notre fonds distinct. Cependant, ce résidant de la Nouvelle-Écosse pourrait acheter ce fonds distinct auprès d'un représentant de la London Life ou d'une autre société située ailleurs et ne payer que 7 p. 100 de taxe. Nous en sommes arrivés là parce que le gouvernement fédéral a proposé une disposition d'allégement qui dit: «Les habitants de l'Ontario ne sont pas tenus de payer la taxe; essentiellement, nous allons vous remettre la taxe sur le fonds distinct à condition que ce soit un résidant de l'Ontario qui soit acheteur du fonds.»

Le président: Est-ce dans le projet de loi?

Mme Jennings: Il s'agit d'une disposition de remise ajoutée après les séances du comité de la Chambre des communes. Essentiellement, cette disposition stipule qu'un fonds distinct aura droit à une remise fondée sur le nombre de détenteurs d'unités ou du nombre de détenteurs d'unités à l'extérieur de la zone harmonisée. Il y aura remise de taxe dans la mesure si on l'a imposée aux détenteurs résidant à l'extérieur de la zone, mais cela ne règle pas notre problème pour ce qui est des détenteurs à l'intérieur de la zone.

Voilà notre problème. Nous sommes tenus d'imposer la taxe à un résidant de la Nouvelle-Écosse, mais les sociétés établies ailleurs qu'en Nouvelle-Écosse, au Nouveau-Brunswick et à Terre-Neuve ne seront pas tenues de le faire. Je crois que la solution à notre problème réside dans une loi fédérale. À notre avis, c'est vraiment de là que devrait venir la solution car dans leurs efforts pour mettre en oeuvre l'harmonisation, les autorités provinciales et fédérales ne veulent pas, comme cela est mentionné dans leur document technique, désavantager les fournisseurs en fonction de leur situation géographique.

Le président: Avez-vous proposé un amendement juridique qui réglerait le problème?

M. Black: Il se trouve dans le mémoire.

Mme Jennings: Au dos du document. À partir de la disposition autorisant une remise pour les détenteurs d'unités, j'ai rédigé un libellé de modification qui apporte une solution et qui met tous les intervenants du secteur sur un pied d'égalité.

Le président: À votre connaissance, les quatre gouvernements qui ont signé l'entente ne souhaitaient pas que cela en soit la conséquence. Autrement dit, c'est une conséquence fortuite.

Mme Jennings: Comme nous l'avons dit dans notre exposé, il est dit clairement dans le document technique sur l'harmonisation et dans l'entente qu'aucun fournisseur ne serait défavorisé en raison de sa situation géographique. Que vous transigiez à l'intérieur ou à l'extérieur de la zone, votre situation devrait être la même avant et après l'harmonisation et c'est là où le bât blesse.

M. Black: J'ajouterai, sénateur, que le sous-ministre des Finances de la province a écrit à son homologue fédéral en novembre dernier, dès qu'il s'est rendu compte du problème pour lui demander de le résoudre dans le sens que nous souhaitons aujourd'hui. Manifestement, ce résultat n'était pas voulu au niveau provincial.

Le sénateur Angus: Votre exposé ne portait que sur un seul problème et je trouve votre mémoire excellent. Je voudrais mettre les choses en perspective en vous posant la question suivante: pourriez-vous éliminer le problème si vous déménagiez votre siège social en Ontario?

Mme Jennings: Oui.

M. Black: Oui.

Le sénateur Angus: Je n'ai pas d'autres questions.

M. Black: En fait, pour ce que ça vaut, Montréal et Calgary seraient toutes deux un meilleur choix, d'un point de vue strictement fiscal.

Le président: Pour des raisons qui transcendent la TVH?

M. Black: Non, strictement à cause de la TVH. À tous les autres points de vue, Halifax est le meilleur endroit au Canada pour notre siège social.

Le sénateur Angus: À votre connaissance, aucune raison n'explique cela. Personne n'a laissé entendre que l'on souhaitait que vous déménagiez dans une autre région du Canada à la suite de l'adoption de cette loi. Par conséquent, c'est vraiment une anomalie. D'ailleurs, j'en veux pour preuve le fait que si une société à fonds distincts, comme la vôtre -- la London Life, par exemple -- avait des détenteurs d'unités ici, en Nouvelle-Écosse, elle n'aurait quand même pas ce problème.

M. Black: C'est exact.

Le président: Étant donné que le problème relève de la loi fédérale, qu'est-ce que le gouvernement provincial a été en mesure de faire pour vous aider? Vous avez dit que les autorités de la Nouvelle-Écosse avaient résolu votre problème pour deux ans.

Mme Jennings: Permettez-moi de prendre quelques minutes pour vous expliquer ce qu'elles peuvent faire. Il y a une loi fédérale portant sur l'harmonisation. Il y a aussi une loi provinciale qui stipule que nous devons imposer la taxe harmonisée. Dans la mesure législative présentée en Nouvelle-Écosse, une disposition habilite les autorités provinciales à autoriser, par voie réglementaire, une remise au point de vente, dans des circonstances spéciales. C'est d'ailleurs ainsi que l'on a réglé le problème des livres. Chaque province a prévu dans sa réglementation une disposition prévoyant que les livres seraient exempts de taxe.

Voilà pourquoi, étant donné que nous ne recevons pas d'aide du côté fédéral, et étant donné que ce n'est tout simplement pas équitable parce que nous ne pourrons pas être compétitifs en Nouvelle-Écosse, ce que nous proposons pour le moment, c'est ce que le gouvernement provincial lui-même a dit: «Étant donné que nous ne pouvons pas obtenir du gouvernement fédéral qu'il règle le problème qui doit être réglé avant le 1er avril, nous allons vous offrir une remise.» Autrement dit, nous ne serons pas obligés d'exiger la taxe des résidants de la Nouvelle-Écosse.

Le président: Le gouvernement fédéral vous a-t-il dit que si, à un moment donné, ce projet de loi devait être amendé, il réglerait votre problème?

M. Black: Non.

Mme Jennings: Ce que le représentant du gouvernement fédéral nous a dit, c'est que si un jour l'Ontario décide d'harmoniser, le fédéral va repenser sa proposition. Autrement dit, il va réexaminer les dispositions de la Loi sur la taxe harmonisée. D'après ce que j'ai compris, c'est que nous ne sommes pas assez gros pour qu'on s'en inquiète pour le moment.

M. Black: J'aimerais souligner ceci, c'est que si l'on s'imagine qu'un jour l'Ontario va adhérer au régime à un moment donné, tout le projet de loi va s'autodétruire ce moment-là au sujet de cette question. Il faudra leur écrire de toute façon parce qu'à un moment donné, cette loi ne touchera pas seulement une ou deux entreprises, mais la plupart des entreprises du pays. Essentiellement, tout ça ne marche pas. Que l'on épouse notre proposition ou une autre, il faudra tout refaire d'une manière ou d'une autre, le jour où les autres provinces opteront pour l'harmonisation.

Mme Jennings: Les deux solutions que nous recommandons, c'est ou bien que tout le monde exige la taxe, ou que personne ne l'exige. Nous acceptons ces deux solutions.

Le président: Chers collègues, notre prochain témoin est Diane Brushett, députée fédérale de Cumberland-Colchester.

Mme Diane Brushett, députée fédérale, Cumberland-Colchester: Je m'appelle Diane Brushett, et je représente, au fédéral, la belle circonscription de Cumberland-Colchester, au nord de la péninsule de la Nouvelle-Écosse. Je suis native de Truro. Je siège au comité permanent des finances de la Chambre des communes.

J'aimerais d'abord ce matin répondre aux préoccupations de mes électeurs qui m'ont téléphoné ou qui ont écrit à mon bureau au sujet de cette taxe de vente. Je vous dirai d'abord que la première question qu'on pose est celle-ci: Pourquoi vous en prendre à nous de la région de l'Atlantique, la région la plus pauvre du pays? Je réponds à cela que nous ne nous en prenons pas à la région de l'Atlantique; nous allons abaisser notre taux d'imposition dans les trois provinces pour le rendre compétitif, et ce taux se situe actuellement entre 19 et 20 p. 100, selon la province où l'on se trouve dans l'Atlantique, et le taux harmonisé sera abaissé à 15 p. 100. C'est une réduction d'au moins 4 p. 100.

C'est une bonne nouvelle pour l'Atlantique et, d'après ce qu'on me dit, pour les épiciers. Selon le Conseil canadien de la distribution alimentaire, les Canadiens vont à l'épicerie environ deux fois par semaine, et de 30 à 40 p. 100 des produits qu'ils y achètent sont imposables. Approximativement, le prix de 30 à 40 p. 100 de tout ce que les Canadiens achètent deux fois par semaine sera réduit de presque 4 p. 100 en taxes. Voilà pourquoi cette taxe est bonne pour les Canadiens de l'Atlantique.

Deuxième chose, monsieur le président, je tiens à dire que nous ne sommes pas une cible. Nous serons compétitifs. Il en sera ainsi grâce à la réduction de la taxe, et grâce à l'incitatif que cela donnera aux entreprises et à la création d'emplois. Cette taxe n'est pas un remède miracle. Il s'agit ici de vision à long terme; il s'agit d'établir une économie viable dans le Canada atlantique.

La plupart des idées erronées qui circulent à propos de cette taxe sont essentiellement cela: des idées erronées. Voilà pourquoi je voudrais présenter au comité certains faits. D'abord, avec l'harmonisation, les provinces en auront plus à donner des numéros d'exonération d'impôt. C'est une chose que bien des gens ignorent. Ils croient qu'ils vont continuer à obtenir un numéro d'exonération accordé aux exploitants agricoles. Or, ce n'est pas le cas. Ces numéros n'existeront plus. Tout le monde paiera la taxe harmonisée.

La remise actuelle de 7 p. 100 va passer à 15 p. 100, et le gouvernement fédéral va toucher 7 p. 100 de cela, et ici en Nouvelle-Écosse, le gouvernement provincial va toucher 8 p. 100. Le gouvernement fédéral a versé un montant de transfert ponctuel à la région atlantique de 961 millions de dollars, qui sera partagé entre les trois provinces. Ce transfert sera fait parce que nous allons perdre des taxes de vente provinciales au-dessous du seuil de 5 p. 100, et c'est pourquoi nous y avons droit.

Si l'Île-du-Prince-Édouard devait adhérer au régime d'harmonisation, elle aurait droit à 60 millions de dollars, et c'est parce que la province perdrait des recettes avec la réduction de la taxe de vente provinciale. Voilà pourquoi on transfère cet argent. Il ne s'agit pas d'un pactole pour les provinces de l'Atlantique; il s'agit simplement d'un ajustement raisonnable pendant une période de transition.

Voici une question qu'on a posée souvent: Pourquoi n'a-t-on rien donné au Québec? Pourquoi ne lui offre-t-on pas d'argent pour l'harmonisation? Si l'on ne donne rien au Québec, c'est qu'il n'a subi aucune perte en taxe de vente provinciale en-dessous du seuil de 5 p. 100. Ce sont là des faits essentiels, et l'Ontario suivrait demain si nous avions les moyens de lui donner de l'argent et de compenser la réduction de sa taxe de vente. Cependant, nous ne sommes pas en mesure de le faire à ce moment-ci.

En 1992, Statistique Canada révélait que les entreprises de la Nouvelle-Écosse avaient versé à leur gouvernement pour 196 millions de dollars en taxe de vente. Sous le régime harmonisé, cet argent va rester entre les mains de la petite entreprise parce que c'est elle, essentiellement, qui crée nos emplois en Nouvelle-Écosse et maintient notre économie à flot. C'est de l'argent qui va rester entre les mains de ceux que j'appelle les petites gens, parce que ce sont eux qui créent les emplois.

On estime que l'harmonisation de la taxe de vente provinciale permettra de réaliser des économies de l'ordre de 700 millions de dollars dans les trois provinces atlantiques. Il s'agit de la réduction de 11 p. 100 à 8 p. 100 de la taxe et cet argent restera entre les mains de l'entrepreneur qui pourra employer plus de gens, créer davantage d'emplois et stimuler l'économie de l'Atlantique.

J'aimerais souligner maintenant un fait important. Tout le monde dit: «Pourquoi l'Atlantique? Pourquoi ces trois petites provinces?» Je viens d'entendre le sénateur dire il y a quelques instants: «Nous, les petites provinces, nous qui sommes si petites, pourquoi nous?» J'illustrerai ma réponse en rappelant que lorsque l'assurance-santé est née, dans les années 60 -- et il est très important de le rappeler -- deux provinces seulement ont adhéré à l'assurance-santé au début, et il a fallu six ans pour faire adhérer les autres provinces canadiennes à cette mesure sociale que nous aimons, que nous respectons et pour laquelle nous nous battrions à mort aujourd'hui. Ce qui est très important de rappeler, c'est que des idées comme celle-là doivent naître quelque part, et moi je dis qu'il faut commencer ici.

J'ai reçu récemment plusieurs lettres au sujet de Lee Valley Tools d'Ottawa, et au sujet aussi des entrepôts de New York. Comme bon nombre d'entre vous le savez, lorsqu'on siège au comité des finances, on entend des témoins des quatre coins du pays et tous les secteurs de l'économie, et c'est pourquoi je me demande souvent: Est-ce que je dois défendre ces gens qui sont simplement des propriétaires d'entrepôts et qui font venir des biens de Taïwan? On fait transiter ces biens par un entrepôt ou par un bureau des douanes, et ensuite on les vend à nos gens. Et l'argent s'en va; rien ne reste ici pour stimuler notre économie.

C'est ce que fait Lee Valley Tools. À l'heure actuelle, cette entreprise exerce des pressions dans la région de l'Atlantique; 25 000 lettres: acheter par catalogue d'Ottawa, ou de New York, ou d'ailleurs. Je dis à ces gens qui encouragent Lee Valley Tools: «Bien sûr, c'est bien, mais qu'advient-il alors de notre économie? L'argent s'en va, ces entreprises n'investissent rien dans les emplois dans notre région, elles n'investissent pas dans la viabilité de notre économie.» Je ne verserai donc pas une seule larme pour Lee Valley Tools ou toutes autres entreprises d'ailleurs au pays qui ne font rien pour l'économie de l'Atlantique.

Beaucoup de gens se sont dits favorables à l'harmonisation et au prix affiché toutes taxes comprises. Il ne s'agit pas d'une question simple à laquelle on répond par oui ou par non, mais parmi ceux qui demeurent favorables à la taxe harmonisée sur les biens et les services, on retrouve: l'Association des comptables généraux agréés du Canada, l'Alliance Manufacturers and Exporters of Canada, le Conseil canadien de la distribution alimentaire, l'Atlantic Building Supply Association, l'Association canadienne des automobilistes, la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante, les magasins Co-op, qui font déjà de la publicité dans leurs publications: «Ce que vous voyez, c'est ce que vous payez», ainsi de suite. Il y a aussi Elizabeth Weir du CEPA, le Conseil économique des provinces de l'Atlantique. Cette taxe présente donc pour la région de l'Atlantique des avantages qui dépassent de loin tous les inconvénients. Il s'agit simplement de simplifier la fiscalité. Cette taxe abat les barrières interprovinciales et elle n'est pas inflationniste.

J'aimerais maintenant dire un mot sur la lettre que j'ai reçue hier d'Ottawa, et qui était adressée à l'honorable Colin Kenny, et elle nous vient du Conseil canadien du commerce du détail qui a témoigné devant vous à Ottawa il y a quelques jours. Avec cette lettre, j'aimerais rappeler ce qui a été dit devant votre comité parce que je pense qu'on a mal interprété ses propos. Il y est dit:

Le Conseil canadien du commerce du détail est résolument favorable à la taxe de vente harmonisée.

Il s'agit d'une lettre de trois pages, et j'ai pris la liberté d'en faire parvenir une copie à vos collègues du comité des banques, et aux députés fédéraux et provinciaux du Canada atlantique pour qu'ils aient eux aussi l'assurance que le Conseil canadien du commerce de détail et les représentants des gouvernements vont s'employer de concert à faciliter la transition au nouveau régime fiscal. Cette lettre provenait du Conseil canadien du commerce de détail, mesdames et messieurs.

J'aimerais maintenant porter mon attention sur certaines observations de l'opposition qui ont été rapportées dans la presse d'ici -- par exemple celles de notre sénateur John Buchanan -- qui ont paru dans The Chronicle-Herald du jeudi 27 février. Il aurait dit:

La TVH va faire mal aux Canadiens aux revenus faible et moyen, ainsi qu'aux locataires qui devront payer des loyers plus chers à cause de l'harmonisation.

Je mets le sénateur au défi de répéter ici et maintenant que les loyers ne seront pas imposés dans les secteurs résidentiels, et que les loyers commerciaux vont rester comme avant. Ils seront imposés, et les propriétaires auront droit à leurs remises dans le cadre des activités commerciales.

De même, et je dois dire que j'ai trouvé cela très intéressant, j'aimerais rappeler comment l'idée de cette taxe a vu le jour en 1990. On revient souvent à cela, et la plupart du temps, c'est pour critiquer le Sénat. Le 27 septembre 1990, huit sénateurs ont été nommés, et j'aimerais vous les citer. Mais avant, j'aimerais vous dire que ce sont en fait 24 sénateurs que Brian Mulroney a nommés: 24 sénateurs conservateurs, en moins de 30 jours en 1990. Ces 24 étaient: Michael Forrestall, James Ross, Normand Grimard, Thérèse Lavoie-Roux, Janis Johnson, Eric Berntson, Pat Carney, Mario Belliveau, Nancy Teed, Gérald Comeau, Consiglio Di Nino, Richard Hatfield, Donald Oliver, John Sylvain, John Buchanan, Noël Kinsella, Claude Castonguay, John Lynch-Staunton, Trevor Eyton, Mabel DeWare, James Kelleher et Walter Twinn. Vingt-quatre sénateurs progressistes-conservateurs qui ont été nommés du 30 août 1990 au 27 septembre 1990, pour nous imposer la TPS.

Nous voici ici aujourd'hui, devant cette même Chambre dont les membres sont nommés, et dont certains essaient de discréditer la taxe harmonisée qui fera plus de bien à la région de l'Atlantique qu'aucune autre mesure.

Honorables sénateurs, permettez-moi de vous parler de moi un peu: je suis d'une famille propriétaire d'une exploitation forestière, une famille qui a géré une exploitation forestière viable pendant plusieurs générations dans la campagne du Nouveau-Brunswick, une entreprise qui existe encore aujourd'hui. Voilà pourquoi, enfant, j'ai grandi dans une famille de gens d'affaires. Devenue adulte, j'ai ouvert une entreprise avec mon ancien mari, avec presque rien, une entreprise qui s'appelait Dominion Biologicals Limited qui a connu de grands succès. Cette entreprise a créé des emplois pour les jeunes scientifiques ici dans le Canada atlantique. Nous étions naïfs, mais nous étions aussi idéalistes, à tel point que nous avons investi dans nos rêves pour créer des emplois.

Voilà pourquoi je suis ici aujourd'hui; parce que je crois dans la région de l'Atlantique. Il y a longtemps que je vis ici, et ce que nous voulons faire ensemble, c'est créer une économie viable. C'est une chose que nous n'avons pas dans notre région depuis longtemps, et on me dit que les gens d'ici vont créer des emplois grâce à cette taxe. Les gens vont revenir ici, et nous devons travailler à partir de nos actifs et de nos points forts. J'ai une soeur ici en ville qui possède neuf entreprises, elle, son mari et sa famille. Toutes ces entreprises, du secteur manufacturier ou du détail, vont profiter de la taxe de vente harmonisée. Quand je leur ai demandé: «Comment est-ce que ça vous aide? Est-ce que ça vous fait mal?», on m'a répondu: «C'est bon pour nous.»

J'aimerais maintenant parler du prix taxes comprises. Lorsqu'une entreprise touche une remise de 15 p. 100, elle peut avec cet argent produire davantage, créer davantage d'emplois, et elle peut aussi faire profiter le consommateur de ces économies. Je ne représente pas que des entrepreneurs, je représente aussi des consommateurs. J'ai près de 85 000 électeurs dans ma circonscription de Cumberland-Colchester, et ils m'ont dit qu'ils tenaient au prix taxes comprises. Nous avons le sondage du 13 février 1997, et 79 p. 100 des répondants au sondage Ekos voulaient le prix taxes comprises. C'est parce que le prix qu'ils verront sera le prix qu'ils paieront. C'est le concept qui fait la base de la taxe sur la valeur ajoutée. C'est un seul système. On ne le ventile pas pour donner à l'entreprise l'avantage de la remise de 15 p. 100 et lui dire: «Très bien, nous allons seulement harmoniser.» À la place, on refile au consommateur des économies grâce au prix taxes comprises, afin qu'il en profite lui aussi, parce que c'est comme ça qu'on fait dans une société globale et complexe.

Honorables sénateurs, j'en ai terminé, et je serai heureuse de répondre à toutes vos questions.

Le sénateur Comeau: Madame Brushett, vous qui êtes membre d'un comité de la Chambre des communes, vous n'avez consacré que trois jours d'audiences à Ottawa sur un projet de loi qui touche la Nouvelle-Écosse, Terre-Neuve et le Nouveau-Brunswick. Les chambres ne siégeaient pas, si bien que la plupart des journalistes n'y étaient pas. Le comité n'a pas entendu de ministres, fédéraux ou provinciaux. On n'a donné aux témoins que trois minutes. Et maintenant que les parlementaires non élus sont ici dans le Canada atlantique pour écouter les préoccupations des gens d'ici, vous décidez de venir témoigner. En réalité, ce que vous avez fait, comme députés fédéraux du Canada, c'est refuser le droit de parole à vos propres électeurs.

Vous venez nous dire que vous avez fait des sondages, et vous vous appuyez sur ces sondages pour mettre en oeuvre des mesures comme le prix taxes comprises. Pourquoi avez-vous refusé à vos propres électeurs ici, dans le Canada atlantique, le droit de venir témoigner devant votre comité pour nous faire part de toutes les choses que nous avons entendues au cours de la dernière semaine? Deuxièmement, au sujet du prix taxes comprises, croyez-vous que les parlementaires élus ont raison de fonder la politique gouvernementale sur des sondages d'opinion publique? Est-ce que ce sont les sondages d'opinion publique qui vont inspirer la politique gouvernementale de l'avenir?

Mme Brushett: Je vais d'abord répondre à votre observation au sujet des audiences à Ottawa. Elles ont duré trois jours. J'y étais, jour et nuit. Il y avait plusieurs journalistes présents parce que j'en reconnais certains parmi eux aujourd'hui. Nous avons entendu John Hamm, chef du Parti conservateur de la Nouvelle-Écosse. Nous avons reçu Alan Billiard, candidat conservateur dans la circonscription de Dartmouth. Nous avons entendu Robert Chisholm, le candidat néo-démocrate. On n'a refusé à personne le droit de venir à Ottawa, à nos frais, pour témoigner devant le comité permanent des finances, et nous avons siégé jour et nuit. On n'a refusé ce droit à personne.

Une deuxième chose: nous étions dans la région de l'Atlantique en novembre 1996 et le public, encore là, aurait pu se prononcer sur n'importe quelle question, qu'il s'agisse du budget préliminaire, de la TPS, au cours de cette période en novembre. Moins de deux mois avant le moment que vous évoquiez, nous étions ici même. Le public a donc eu son mot à dire.

En ce qui me concerne, j'ai aidé les gens à se faire entendre. J'ai mis des annonces dans le journal; j'ai fait de la publicité. N'importe qui peut venir à Ottawa; on n'a refusé ce droit à personne. Je tiens à le dire haut et fort. On n'a refusé à personne un voyage payé à Ottawa pour se faire entendre.

Deuxièmement, pour ce qui est du public, je considère que je suis une femme d'affaires expérimentée. J'ignore combien d'entre vous ici aujourd'hui ont déjà été en affaires, ont eu à rencontrer la banque, à assurer la paie des employés, à créer des emplois et à produire pour le public canadien, de telle sorte qu'ils peuvent savoir la valeur qu'il y a à stimuler une économie qui deviendra plus viable, avec une vision pour l'avenir.

Nous ne nous fondons pas du tout sur les sondages d'opinion publique. Monsieur le président, à propos de cette taxe, la solution a commencé à voir le jour en 1989 et 1990, et dès le début, le public discutait d'harmonisation. J'ai présenté une thèse qui était une idée absolument neuve en 1993, au début de 1994, mais dont on n'avait pas voulu parce que les provinces souhaitaient une harmonisation éventuelle. Il s'agit de s'entendre sur un taux d'imposition acceptable, qui présente un certain avantage pour elles, parce qu'une telle mesure a en effet pour conséquence de simplifier la fiscalité.

Le sénateur Losier-Cool: Il est bon de vous voir ici, et je vous remercie d'être venue au comité. Je dois dire que je vous vois à l'oeuvre sur la colline du Parlement à Ottawa, au caucus de l'Atlantique, au caucus national, au caucus féminin, et je vous entends si souvent exprimer les préoccupations de vos électeurs que souvent je me dis: «Ces gens-là ne savent pas la chance qu'ils ont d'avoir une personne qui travaille si dur pour eux et qui en fait autant.» Des fois, je vous vois et vous me dites: «J'étais debout à 6 h ce matin», et vous en faites tant pour donner suite aux préoccupations de vos électeurs. Je pense qu'ils ont bien de la chance.

Je sais que vous êtes en affaires, et nous avons entendu à Terre-Neuve des témoins du milieu de l'artisanat, de grands et de petits commerces, et ils ont parlé du plafond de 30 000 $. Est-ce qu'il y a des gens ou des entreprises de chez vous qui vous ont parlé de cela?

Mme Brushett: En effet, cette taxe en préoccupe plusieurs parce que c'est une taxe très complexe. Ce n'est pas simple. Cependant, le seuil de 30 000 $ demeurera le même; quiconque ne gagne pas plus de 30 000 $ sera exempté.

De même, l'avantage qu'il y avait à être à Ottawa pour les audiences, c'était que nous avions les experts du ministère des Finances derrière nous, et nous pouvions apporter des amendements sur-le-champ en réponse aux nombreuses préoccupations qui nous étaient exprimées. C'est un avantage formidable que d'avoir le ministère à sa disposition et de le faire travailler avec vos témoins dès qu'ils ont fait valoir leur cause. Nous avons pu ainsi régler un tas de choses, par exemple relativement aux ventes par catalogue, et la nécessité de mettre des mises en garde dans les catalogues par opposition au prix taxes comprises dans une seule région du pays, si bien qu'on pouvait simplifier autant que possible et ne pas compliquer la vie des gens. Cette taxe vise à profiter à notre économie, et il ne s'agit pas de compliquer la vie des gens qui sont en affaires.

Pour ce qui est des petites entreprises, oui, il y a un avantage pour elles aussi. Les artisans ont exprimé leurs préoccupations, mais je crois qu'on a déjà donné suite à la plupart d'entre elles, tout comme le secteur de l'assurance qui est venu nous parler de ces fonds de fiducie indépendants. On s'est penché sur la question, et même si celle-ci n'a pas encore été réglée définitivement, il y a moyen d'y voir.

Je pense que les gens ont confiance dans cette taxe parce que déjà Lawton Drugs Store, par exemple, affiche les deux prix. J'y suis allée l'autre jour pour acheter un stylo, et l'on affichait le prix du stylo TPS non comprise. On affichait aussi le prix taxes comprises. Cependant, cette pharmacie ne fera pas payer le taux réduit avant le 1er avril, mais c'est déjà prévu. Les gens ordinaires sont des consommateurs plus avertis que l'on ne le croit habituellement, et les consommateurs savent comment cette taxe va fonctionner.

Le président: Nos témoins suivants sont M. Larry Wark, premier vice-président de la Fédération du travail de la Nouvelle-Écosse, et David Peters, président de la Nova Scotia Government Employees Union.

M. Larry Wark, premier vice-président, Fédération du travail de la Nouvelle-Écosse: Nous sommes heureux de témoigner devant votre comité ce matin. Ce doit être un peu difficile pour certains membres du comité, sachant le gâchis dans lequel nous nous trouvons aujourd'hui en conséquence de la mise en oeuvre même de la TPS.

Cependant, je crois qu'il est juste de dire que cette nouvelle taxe, la taxe de vente harmonisée, même s'il s'agit d'une excellente chose aux yeux de certains -- par exemple, pour ceux qui vont acheter des biens de luxe comme des voitures, des meubles et d'autres commodités coûteuses de la vie, si vous envisagez la question du point de vue du consommateur ordinaire, vous allez constater que pour les nécessités de la vie, ces choses que l'on consomme toutes les semaines, cette nouvelle taxe de vente harmonisée va causer de grands torts au Néo-Écossais moyen. De toute évidence, vous ne serez pas très surpris d'apprendre que moi, une fois de plus -- et dans ce cas-ci, je suis même d'accord avec de nombreux entrepreneurs --, je pense que cette taxe ne donnera pas tous ces emplois promis, ni une fiscalité plus équitable pour la population, parce que de toute évidence, ce sont ceux qui ont moins les moyens de payer qui souffriront le plus, car un bon nombre de produits de consommation qui n'étaient pas taxés auparavant le seront désormais.

C'est pourquoi nous tenons à dire d'emblée qu'à notre avis, la stratégie du gouvernement a pour objet de taxer ceux qui ont moins les moyens de payer cette taxe. Nous considérons essentiellement que cette taxe est injuste, et qu'il y aurait eu une façon bien meilleure de mettre en oeuvre ce plan que ce qu'en ont décidé les gouvernements fédéral et provincial.

M. David Peters, président, Nova Scotia Government Employees Union: Je suis également heureux d'être ici ce matin en compagnie de la Fédération du travail de la Nouvelle-Écosse. C'est la troisième fois que je témoigne devant un comité législatif au sujet de la TVH, et j'espère que votre présence dans notre région veut enfin dire qu'on prend nos préoccupations au sérieux. Dans mon allocution liminaire, je parlerai brièvement de nos préoccupations au sujet du processus qu'on a employé pour adopter ce projet de loi, du contenu du projet de loi lui-même, de son effet probable sur les Néo-Écossais en général, et de son effet probable sur les finances provinciales.

Le président: Auriez-vous l'obligeance de vous en tenir aux aspects saillants de votre mémoire, parce que nous allons lire votre mémoire, vous pouvez en être absolument sûr; mais nous trouvons que le dialogue est beaucoup plus utile.

M. Peters: Merci, monsieur le président. Au sujet du processus, nous trouvons très irritant le processus qu'on a employé pour adopter ce projet de loi qui fusionne toutes les taxes de vente. En pratique, on n'a pas donné au public la possibilité de participer à la création de cette taxe. Ce qui nous a le plus offusqués, ça été le refus du comité permanent des finances de la Chambre des communes de tenir des audiences dans les provinces touchées par cette nouvelle taxe, et pas seulement à Ottawa.

Pour ce qui est du contenu du projet de loi lui-même, même si nous avons critiqué le gouvernement de la Nouvelle-Écosse qui a produit un maigre projet de loi de sept pages, dépourvu de tout contenu significatif, nous sommes troublés d'un autre côté à la vue de ce projet de loi fédéral très technique de 355 pages. Ce projet de loi vise de toute évidence à confondre le public quant au sens de cette nouvelle taxe, et à miner l'autorité législative ainsi que la reddition de comptes.

La complexité de projet de loi pose un sérieux problème quant à sa mise en oeuvre, sachant particulièrement que la plupart des autres provinces ne sont pas d'accord. Pour ce qui est de l'effet sur les Néo-Écossais, ce qui nous dérange le plus, c'est le caractère régressif de cette taxe pour la plupart des Néo-Écossais, et on se demande dans quelle mesure la plupart de nos gens s'en trouveront appauvris. Cette nouvelle taxe va alourdir le fardeau financier des membres de mon syndicat, dans leur vie tant personnelle que professionnelle, parce qu'ils ne pourront plus facturer à une tierce partie pour les frais de voyage et de logement afin que le gouvernement provincial puisse toucher sa TVH, si bien que nos membres devront payer ces frais de leurs poches et attendre le remboursement.

Rien ne prouve, d'aucune manière, que des milliers d'emplois seront créés, comme du moins on le prétend ici dans la province. De fait, c'est exactement le contraire qui est vrai. Les entrepreneurs provinciaux du bâtiment ont parlé d'une perte de plus de 2 000 emplois dans leur secteur, consécutive à la mise en place de l'harmonisation. Les autorités de la province avaient tant besoin d'arguments pour faire la publicité de la TVH, qu'elles ont demandé à nos syndiqués du ministère des Finances une liste de secteurs d'activité qui profiteraient de la nouvelle législation, en omettant de leur demander le nom des entreprises qui seraient perdantes. Nous avons d'ailleurs demandé que des excuses soient présentées aux membres de notre syndicat chargés de cette tâche, et effectivement des excuses ont été présentées.

Quant à l'impact de cette taxe sur les finances provinciales, il se situe dans la droite ligne de ce que le transfert canadien a déjà inauguré, à savoir une réduction massive des crédits aux programmes sociaux essentiels des secteurs de la santé, des services sociaux et de l'enseignement supérieur. Il en résultera une fermeture précipitée et massive de services au public, en raison de la perte nette que connaîtra la recette provinciale, le fardeau du financement se trouvant alors à la charge des habitants de la Nouvelle-Écosse sous forme d'augmentation de la taxe pour toute une nouvelle gamme de biens et services à laquelle elle s'appliquera, à savoir un certain nombre de biens de première nécessité tels que l'électricité, le mazout pour le chauffage, les articles vestimentaires de moins de 93 $, les chaussures d'enfants, et cetera.

En conclusion, cet impôt n'est qu'une nouvelle opération main basse, qui portera atteinte au niveau de vie de la plupart des habitants de la région, tout en renforçant et étendant par ailleurs le pouvoir et l'influence des grandes sociétés.

Nous recommandons donc que le comité, et tous les sénateurs, usent des moyens dont ils disposent et fassent obstacle à l'adoption du projet de loi C-70, pour notamment:

D Permettre qu'une consultation approfondie de la population ait lieu sur le projet de loi C-70 et les ententes fédérales-provinciales, et notamment dans la région de l'Atlantique;

D Permettre une révision de la législation, afin qu'y soient inscrites des garanties financières concernant le simple citoyen, une diminution des charges des petites entreprises et un financement adéquat et stable des programmes de l'État, dans les secteurs de la santé, de l'enseignement et des services communautaires plus spécialement.

D Inclure dans le projet de loi l'entente fédérale-provinciale, sans aucune clause prioritaire ni restriction limitant l'application des autres lois fédérales ou provinciales.

D Exiger une révision complète de la fiscalité, en vue de l'adoption d'un régime réellement progressif, qui allège l'impôt et les charges imposés aux tranches moyennes de revenu et aux petites entreprises.

L'adoption de cette mesure fiscale aurait des conséquences irréparables au plan des relations entre cette région et le reste du pays, en raison notamment de la façon dont la mesure nous a été brutalement imposée, et de ce qu'elle n'est appliquée qu'à cette seule région pour le moment. Nous remercions le comité sénatorial de s'être déplacé jusqu'à nous, pour nous entendre.

Le sénateur Oliver: Voilà des mémoires excellents, qui vont beaucoup nous aider dans nos travaux.

Il y a deux domaines que j'aimerais aborder avec vous; le premier concerne l'inclusion de la taxe dans le prix et l'autre, l'évasion fiscale et l'économie souterraine, que pourrait entraîner l'adoption de cette nouvelle taxe.

D'abord, donc, l'inclusion de la taxe dans le prix affiché. Au Nouveau-Brunswick, à Terre-Neuve et maintenant en Nouvelle-Écosse, de simples Canadiens -- des personnes âgées dont le revenu est fixe, mais également les personnes les plus pauvres, certains détaillants, et les consommateurs et clients des commerces de façon générale -- nous ont dit qu'il ne fallait pas inclure la taxe dans le prix affiché, car cela ferait augmenter les coûts des commerces et le prix de la marchandise.

Des spécialistes, de leur côté, tels que les ministres des Finances, nous ont dit que la question de l'inclusion de la taxe dans le prix était distincte de celle de l'harmonisation, et pouvait être traitée à part; c'est-à-dire à part de la fusion de la TPS et de la taxe provinciale.

Ma question est donc celle-ci: les membres de votre syndicat vous ont-ils parlé de cette question de l'inclusion de la taxe dans le prix, et dans l'affirmative, que vous ont-ils dit?

M. Peters: Cette inclusion contribuerait évidemment à masquer la réalité de la taxe. Comme vous vous en souviendrez, lorsque nous nous sommes débarrassés de la taxe sur les ventes des fabricants, la raison invoquée était que cette taxe était cachée, et que l'on voulait que les choses soient visibles et transparentes. L'argument nous semble encore valable: les consommateurs devraient pouvoir savoir quel est le prix de l'article, et quelle est la part de l'impôt. Ne cherchons pas à tromper, ne cherchons pas à leurrer.

Dans certains grands magasins on affiche des avertissements et cetera, et vous avez tout à fait raison, cela ne fait que troubler et déconcerter le consommateur qui n'a pas l'habitude des chiffres dans son quotidien.

M. Wark: Vous n'avez sans doute pas eu la possibilité, sénateurs, de passer en revue la presse et les médias locaux, mais si vous regardez certaines des entrevues et les sondages qui ont été faits, notamment les émissions de la télévision locale, toutes les personnes interrogées ont déclaré que masquer cette taxe laisserait penser que la tromperie est encore plus grave que ce qu'ils n'avaient imaginé jusqu'alors.

Je ne vois pas pourquoi on ne pourrait pas tout simplement dire: «L'article coûte 2 $, et la taxe sur ces 2 $ est de tant»; dans la plupart des cas, les gens aimeraient savoir, lors d'une transaction, ce qui est la part de la taxe et ce qui représente le reste. Sinon, comment savoir ce qu'on achète? Tout ce que l'on voit c'est une augmentation importante. L'idée de masquer l'impôt s'accompagne du soupçon qu'il y a quelque part quelque chose de pas très clair, même si ça n'est pas le cas. Les gens se demandent pourquoi on cache quelque chose.

Prenons l'exemple de la taxe sur l'essence, qui donne de temps en temps l'occasion aux compagnies pétrolières et autres de rappeler à leur clientèle quelle est la part de la taxe, et quel est réellement le prix du litre, et c'est à n'en pas croire ses oreilles. L'impression générale, dans les provinces de l'Atlantique, une fois de plus, c'est qu'on nous refait le même coup à chaque fois. Et également que toute modification se fera sans que nous n'en sachions rien, puisque rien n'est visible.

Le sénateur Oliver: Pourriez-vous maintenant répondre à ma deuxième question?

M. Peters: Il y a encore quelque chose d'important à ajouter. Comme vous le savez, cette taxe qui va faire augmenter les prix à la consommation, devrait en principe permettre certaines économies aux entreprises, lesquelles devraient également profiter au consommateur; pourtant, ce que va coûter aux entreprises la nécessité de recalculer leurs prix et de l'indiquer, annulera les bénéfices qu'aurait pu en retirer le consommateur. En effet, la reformulation du prix va coûter quelque chose à l'entreprise. Les grandes marques nationales n'incluront pas la taxe dans le prix, mais les commerces locaux devront l'inclure à l'étape de l'étiquetage.

Le sénateur Oliver: Pourriez-vous alors nous parler maintenant de l'économie souterraine qui pourrait en résulter?

M. Peters: Oui. Je ne sais pas si les sénateurs connaissent les réalités de l'économie clandestine dans notre coin de pays. Je vais prendre le tabac pour exemple. Les ventes clandestines de tabac représentent dans cette province une perte fiscale astronomique. C'est exactement ce qui va se passer pour certains biens et services qui n'étaient pas taxés jusqu'ici, mais qui le seront sous le nouveau régime. Ceux des Canadiens dont les budgets sont déjà au point de rupture, chercheront des moyens de contourner la loi de l'impôt et il y en aura toujours qui réussiront effectivement à court-circuiter la taxe sur les biens et services.

M. Wark: Pour ce qui est de cette économie clandestine, et des conséquences pour le fisc de façon générale, rappelons que ce qui se passe à Toronto ne s'applique pas à notre région. Nous nous trouvons dans une partie rurale du Canada, et dans les petites collectivités on a de multiples occasions de contourner la Loi de l'impôt, en s'arrangeant de diverses façons qui ne sont pas forcément visibles; dans la plupart des cas c'est impossible à détecter. C'est pourtant bien une réalité, les gens en parlent entre eux. Ils s'arrangent, arrivent à trouver une autre façon de faire les choses, et de contourner le règlement.

Si des provinces rurales telles que la Nouvelle-Écosse, le Nouveau-Brunswick et Terre-Neuve voulaient créer une économie souterraine dynamique et durable, elles n'auraient justement qu'à le faire dans les régions les plus rurales où cela échapperait à l'attention générale. Il est bien évident que les fraudeurs ne vont pas venir s'en vanter à Halifax, ni faire de grandes déclarations auprès des autorités. On est donc en train de donner à des gens qui normalement paieraient leur impôt, l'occasion de ne pas le faire.

Le sénateur Rompkey: Par ailleurs, et c'est ce qu'on nous a dit, ce système d'une taxe en cascade est un incitatif pour certains à s'inscrire, pour pouvoir bénéficier du système de report au palier suivant.

Le sénateur Oliver a fait une distinction entre la question de l'inclusion de la taxe dans le prix et celle de l'harmonisation à proprement parler. Il est vrai, je pense, que la plupart des témoins que nous avons reçus, du milieu de l'entreprise et des affaires, se sont déclarés contre cette inclusion -- en grande majorité --, mais il faut ajouter que la plupart d'entre eux étaient également favorables à l'harmonisation de la taxe de vente, dont ils pensent qu'elle bénéficiera à l'économie de la Nouvelle-Écosse et créera de l'emploi.

Avez-vous discuté avec la petite entreprise de l'harmonisation? Nous avons entendu ce matin M. O'Brien de la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante, qui représente pas mal de petites entreprises dans la région de l'Atlantique, et de façon générale au Canada. Selon M. O'Brien, une petite minorité des membres de sa fédération approuvaient l'inclusion de la taxe, mais de façon générale la fédération s'y opposait. Mais elle était favorable à l'harmonisation à proprement parler. Avez-vous discuté avec les petits entrepreneurs des conséquences de la nouvelle mesure et notamment en matière de création d'emplois?

M. Wark: Pas de façon directe, mais en qualité de Fédération des travailleurs, nous avons parlé à M. O'Brien et à certains responsables. Ce que nous trouvons troublant, c'est que l'Association des vendeurs d'automobiles de la Nouvelle-Écosse est furieuse parce qu'on va conserver le taux de 17 p. 100 jusqu'en 1999, ce qui fait que le nouveau taux de 15 p. 100 qui entre en principe en vigueur le 1er avril -- ce qui peut paraître déconcertant -- ne s'appliquera pas aux automobiles. Ceux qui pensaient pouvoir en profiter se sont trompés. Pas d'économies à attendre de ce côté-là. Terre-Neuve a décidé de procéder différemment. Tout cela devient très confus, et on ne sait plus très bien ce que les entreprises voient d'un bon oeil ou non.

Certaines petites entreprises peuvent envisager de faire certaines économies. On nous avait déjà dit la même chose au moment où l'on a remplacé la taxe sur les ventes des fabricants par la TPS: il y aurait de la création d'emplois, et un recul des prix. Il n'y a pas un seul Canadien qui a payé son automobile moins cher, sous prétexte que 6 p. 100 quelque part ont été gagnés.

Je ne crois pas que ce genre de mesure et refonte du régime fiscal profite véritablement à la population, en création d'emplois et économies réalisées; certains entrepreneurs se font peut-être des illusions à cet égard. La fédération de M. O'Brien y voit peut-être une source de gains inespérés. D'autres secteurs du monde des affaires ne sont pas de cet avis. Cela découle sans doute du manque de cohérence dans la façon dont on a présenté les choses à la population. Et l'on est maintenant en train de changer les règles du jeu, même pour l'ensemble des provinces de l'Atlantique, en procédant province par province. Ça ne va certainement pas cadrer avec les prévisions des uns et des autres, devant le comité.

M. Peters: Je pourrais peut-être ajouter quelque chose à cela, monsieur le sénateur. Je défie quiconque de nous donner la preuve que ce nouveau régime va créer de l'emploi. Les entrepreneurs du bâtiment de cette province nous parlent d'une perte de 2 000 emplois. Ce n'est pas moi qui le dis, c'est eux. À mon avis, les 80 millions de dollars qui vont être ponctionnés aux consommateurs auront l'effet inverse, puisque c'est la dépense de consommation qui crée de l'emploi.

En ce qui concerne le bénéfice qu'en retireront les entreprises, celles-ci déclarent déjà que ce sera peu de chose, et il ne sera pas non plus question de création d'emplois. Les 84 millions de dollars supplémentaires que les consommateurs verseront à l'impôt ne seront pas réinjectés dans l'économie, et il n'y aura pas de création d'emplois. Au contraire, ce sera une perte nette sur le plan de l'emploi. Voilà notre avis, après notamment en avoir discuté avec des petits entrepreneurs au sein de notre association.

Le président: Merci d'avoir comparu, messieurs. Merci de nous avoir consacré une partie de votre précieux temps, et de nous avoir notamment remis des mémoires écrits, cela nous sera très utile.

Honorables sénateurs, nous recevons maintenant Daryl Lingley de la Halifax County Business Association, Terry Norman, coprésident du groupe de travail sur la TVH, à la Chambre de commerce du Grand Halifax; Valerie Payn, directrice générale de la Chambre de commerce du Grand Halifax, et Dan Boyd du Conseil municipal de Windsor.

M. Daryl Lingley, président, Halifax County Business Association: Monsieur le président, honorables sénateurs, bonjour. Je me présente: Daryl Lingley, président de la Halifax County Business Association. Nous sommes une petite association d'entrepreneurs et de gens d'affaires, de divers secteurs d'activité, qui font campagne pour réduire le fardeau de la bureaucratie d'État, évoluer vers une fiscalité plus équitable et amener les autorités à reconnaître que la petite entreprise est un des premiers ressorts de l'économie canadienne. Je dois d'ailleurs ajouter que de la bonne résolution de toutes ces questions dépend la rentabilité de la plupart des petites entreprises.

La confusion dans laquelle le débat sur la TPS a été mené, et le mécontentement qui en a résulté dès le départ, se répètent à propos de la TVH, et c'est encore un de ces exemples de la façon dont on fait perdre un temps précieux aux entreprises, et entrave leur élan. On voit par ailleurs le revenu disponible des consommateurs -- quand il y en a un -- perdre son pouvoir d'achat. Notre niveau de vie se dégrade. Fondamentalement, le coût de la vie augmente de façon radicale, du fait de l'augmentation des prix de l'électricité, du mazout, de l'essence et d'un certain nombre de biens essentiels, en raison de l'application de la TVH. Que penser, que faire?

Ceux qui devaient acheter un logement à 125 000 $, par exemple, auront entre 5 000 $ et 10 000 $ de plus à payer en taxe. Cette somme sera déduite du versement initial comptant que les acheteurs auraient pu faire. Au bout du compte, on devra souvent renoncer à ce nouvel achat.

Et qui va perdre? Le petit entrepreneur, bien sûr. L'agent immobilier, les entrepreneurs du bâtiment, les promoteurs, et cetera. J'aimerais aussi ajouter qu'appliquer la TVH à une voiture que je revends à mon frère, à ma tante, ou qui que ce soit d'autre, n'est pas justifiable. Je ne vois pas comment on pourrait le justifier. En ce qui concerne plus particulièrement nos propres entreprises, et les conséquences de cette TVH, il est bien évident que moins le consommateur peut dépenser, moins nous vendrons de produits et services. C'est donc une mesure qui va à contre-courant de ce que l'économie exigerait.

Lorsque nous nous sommes réunis récemment pour discuter de l'opportunité de venir témoigner, nombreux ont été ceux d'entre nous qui ont réagi avec scepticisme. On a parlé du temps qu'il faudrait consacrer à se préparer, du manque d'information détaillée par secteur d'activité sur la TVH, et de la confusion qui règne de façon générale, si bien que la réaction a été très négative. Les plus radicaux d'entre nous -- j'utilise le terme avec émotion -- ont parlé d'organiser une présentation de chiens et chevaux savants pour retenir votre attention. Ils voulaient surtout que vous preniez connaissance des réalités et des difficultés que connaissent les petites entreprises de la Nouvelle-Écosse, et cela de façon mémorable et prégnante. Puisque le chien savant devait être moi, j'ai fait usage de mon autorité de président, comme vous pouvez le voir, pour laisser les bonnes manières l'emporter. J'ai accepté une petite concession: vous trouverez dans notre exposé un certain nombre de dessins humoristiques, qui vont droit au coeur du sujet.

Parmi toutes nos sources de mécontentement, il y en a deux qui retiennent plus particulièrement l'attention, qui permettent de comprendre pourquoi nous ne faisons pas confiance au gouvernement dans ce dossier. D'un côté il y a la question des intérêts politiciens et des allégeances de parti, et nous qui sommes des gens d'affaires apolitiques avons le sentiment qu'un peu moins de politique politicienne permettrait à nos élus de faire preuve de plus de bon sens dans la gestion des affaires de l'État.

Il y a ensuite une autre question qui nous touche plus particulièrement. Pendant tout le débat législatif, provincial et fédéral, chaque palier de gouvernement a organisé des consultations. Ces audiences ont représenté pour nous du temps, ainsi qu'une dépense financière et nerveuse. Et pourtant, l'on peut dire que l'avis de la population, si l'on s'en tient aux recommandations, a été complètement ignoré. Le gouvernement fédéral n'a même pas eu la politesse la plus élémentaire de se déplacer jusque dans les provinces de l'Atlantique pour y tenir des audiences. De plus, chaque palier de gouvernement a brandi la menace de la guillotine lors du débat, ou de tout autre recours qui permettrait d'étouffer celui-ci dans les chambres respectives. Comment s'étonner alors de la juste colère qui a été la nôtre? Je pense que tout le monde comprendra, et je pense m'être fait comprendre.

Je vous remercie sincèrement, sénateurs, d'avoir organisé ces séances de comité, et de nous avoir donné la possibilité de vous parler. Au nom des membres de la Halifax County Business Association, je vous remercie.

Le vice-président: Honorables sénateurs, pour votre information, les dessins humoristiques en question se retrouvent en annexe au mémoire de la Halifax County Business Association.

Monsieur Lingley, je vous félicite. Les chiens et chevaux savants n'ont pas été mauvais non plus.

Mme Valerie Payn, directrice générale, Chambre de commerce du Grand Halifax: Monsieur le président, sénateurs, nous sommes heureux de présenter au comité sénatorial permanent des banques et du commerce le point de vue de la Chambre de commerce du Grand Halifax sur la question de l'harmonisation des taxes de vente.

Au mois d'avril 1996, la Chambre de commerce a organisé un groupe de travail et de recherche chargé de présenter un certain nombre de recommandations bien informées à notre conseil d'administration. Le groupe de travail, mettant à contribution notre personnel et des ressources bénévoles de la Chambre, a consacré un temps et une énergie considérables à cet effort. Nous avons procédé à une consultation approfondie auprès de plusieurs centaines d'entreprises et organismes membres, six comités de la Chambre de commerce et plus d'une douzaine d'associations locales et nationales d'industriels. De plus, nous avons tenu trois réunions à Ottawa avec des représentants du gouvernement fédéral, que nous avons d'ailleurs reçus à trois reprises à Halifax à leur tour. Nous avons, au cours des derniers mois, organisé au moins une douzaine de réunions avec les représentants du gouvernement provincial.

La Chambre de commerce a longtemps défendu le principe d'un remplacement des taxes de vente provinciales par une taxe sur la valeur ajoutée, et nous avons reconnu qu'il y avait un certain nombre d'avantages à intégrer les fiscalités fédérale et provinciale. La Chambre est un partisan convaincu de l'harmonisation, mais nous ne pouvons pas approuver l'inclusion de la taxe dans le prix affiché tant que la majorité des provinces n'y souscrit pas.

Les premières raisons de notre approbation à l'harmonisation découlent des avantages économiques et des gains en efficacité qu'elle signifiera pour l'entreprise. Taxe sur la valeur ajoutée, cette taxe de vente harmonisée nous débarrassera de certaines entraves à la capacité de production de la taxe de vente provinciale actuelle. Cette libération améliorera la rentabilité des investissements industriels, accélérant ainsi la croissance économique en Nouvelle-Écosse. Les frais incompressibles en seront réduits, nos exportations seront plus concurrentielles, et la croissance économique de la Nouvelle-Écosse en sera stimulée. Fusionner deux régimes fiscaux en un permettra des gains d'efficacité en facilitant les procédures administratives, et en libérant ainsi au sein du gouvernement et de l'industrie des ressources qui pourront être mieux utilisées ailleurs.

La question de l'inclusion de la taxe dans le prix affiché n'est pas une question de fiscalité; cela intéresse plutôt le secteur consommation et affaires commerciales. En attendant d'imposer l'inclusion de la taxe dans le prix, ce qui pourra se faire à une date ultérieure à l'échelle nationale, l'harmonisation peut être mise en oeuvre, sans que soient remis en cause les principes économiques et fiscaux qui la sous-tendent.

En principe, notre chambre ne s'oppose pas à l'inclusion de la taxe dans le prix à l'échelle nationale, à condition que le montant de la taxe soit bien clair pour le consommateur. Cependant, nous sommes opposés à l'idée d'exiger une inclusion de la taxe dans le prix pour trois des dix provinces canadiennes seulement: la Nouvelle-Écosse, le Nouveau-Brunswick, Terre-Neuve et le Labrador. Cette mesure ne devra être appliquée que lorsque la majorité des provinces, en y incluant l'Ontario, auront donné leur accord au nouveau régime.

L'application régionale de l'inclusion de la taxe dans le prix aura des conséquences négatives pour les entreprises et les consommateurs de la région de l'Atlantique, car nos entreprises ne pourront pas être partie prenante aux systèmes nationaux de distribution ni profiter des techniques marchandes appliquées à grande échelle, lesquelles fonctionnent sur le modèle de l'exclusion de la taxe du prix affiché. Il faut aussi tenir compte des coûts supplémentaires pour le réétiquetage et les campagnes publicitaires où il faudra afficher un prix taxes incluses. Ce sont les entreprises et les consommateurs des trois petites provinces concernées qui supporteront ces coûts. De plus, l'inclusion de la taxe dans le prix, créant deux régimes différents à l'intérieur du Canada, rendra toute expansion de nos détaillants à l'extérieur de notre région plus difficile.

Appliquer cette politique de l'inclusion de la taxe dans le prix dans trois provinces seulement pourrait amener le consommateur à croire que les prix y sont plus élevés que dans le reste du pays, alors qu'ils sont les mêmes, ou peut-être plus bas. Le secteur du détail, mais également d'autres secteurs tels que le tourisme, important pour notre économie régionale, en souffriraient.

Vouloir exiger que les prix soient affichés taxes comprises risque par ailleurs de masquer le bénéfice que le consommateur retirera de l'existence des crédits de taxe sur intrants. L'impression générale pourrait être alors que l'impôt a globalement augmenté, bien qu'il ait été réduit de 18,8 p. 100 à 15 p. 100 dans bien des cas.

Dans 25 jours, certaines entreprises au Canada vont commencer à percevoir la taxe de vente harmonisée, et d'ici 31 jours elles devront avoir appliqué la politique du prix taxes comprises. Puisque nous avons été invités à témoigner, c'est que la nouvelle mesure n'est pas encore en vigueur. Nous sommes fermement partisans d'une harmonisation des taxes de vente appliquée à la date prévue du 1er avril 1997, en raison des bénéfices économiques importants que la Nouvelle-Écosse en retirera. Cependant, nous exhortons vivement le gouvernement à reporter l'application de la réglementation concernant l'inclusion de la taxe dans le prix.

Le gouvernement a déclaré qu'il attendrait pour cela le 1er août 1997, à condition que les entreprises se montrent disposées à faire ce qu'il faut pour cela. Voilà qui est ambiguë, et qui paraît être la porte ouverte à l'arbitraire. Nous estimons qu'il faut reporter l'application de cette mesure, et faire des déclarations claires à cet égard à l'intention des intéressés.

En résumé, la Chambre de commerce du Grand Halifax approuve sans réserves la taxe de vente harmonisée, et nous recommandons vivement au gouvernement du Canada de la mettre en oeuvre dès le 1er avril 1997 comme il l'a prévu. Cependant, nous recommandons que l'on retarde l'adoption du prix taxes comprises tant et aussi longtemps qu'on n'aura pas l'accord de la majorité des provinces, dont l'Ontario.

Le président: Monsieur Norman, j'imagine que vous ne comptiez pas ajouter autre chose. Vous attendez les questions?

Mme Payn: M. Norman m'aidera à répondre aux questions que vous aurez.

M. Dan Boyd, conseiller municipal, municipalité de Windsor, Nouvelle-Écosse: Je vous remercie vivement d'avoir accepté de m'entendre aujourd'hui. Mes observations ce matin porteront sur l'effet négatif qu'aura la nouvelle taxe de vente harmonisée sur les gouvernements municipaux de la Nouvelle-Écosse, et tout particulièrement sur la municipalité de Windsor où je suis conseiller municipal.

Notre gouvernement provincial a refusé d'exiger du gouvernement fédéral qu'il maintienne l'exemption pour les municipalités pour la partie provinciale de la taxe. Il en résultera que toutes les municipalités vont payer des millions de dollars en taxes supplémentaires à la province. Rien que pour maintenir le même niveau de services que l'an dernier, il faudra en conséquence augmenter la taxe foncière.

Le projet de loi, sous sa forme actuelle, doit être rejeté si l'on veut épargner des obligations financières discriminatoires aux municipalités de la Nouvelle-Écosse, sans parler des augmentations d'impôt exorbitantes pour les contribuables. Dans le cas de Windsor où je suis conseiller municipal, nous avons calculé que la taxe supplémentaire que nous devrons payer cette année rien que pour les services -- et je tiens à souligner ce chiffre -- sera de 80 000 $.

Outre la taxe supplémentaire sur les services, nous devrons faire face à une augmentation colossale de la taxe sur les projets en immobilisation qui seront entrepris dans le cadre du programme d'infrastructure fédéral-provincial. Si nous voulons maintenir nos services d'égout, d'aqueduc et de réfection des rues au même niveau qu'ils étaient au cours des deux dernières années, nous devrons emprunter 472 000 $ de plus pour la taxe supplémentaire rien que pour faire les mêmes travaux. Ce sont là des coûts supplémentaires qu'une petite municipalité de 3 800 habitants ne peut tout simplement pas se permettre.

Au nom des citoyens de Windsor, j'implore le comité de prendre les mesures voulues pour que ce projet de loi ne soit pas adopté sous sa forme actuelle, et de s'assurer que les gouvernements municipaux de notre province ne seront pas imposés indûment et inutilement par le gouvernement provincial avec la fusion de la taxe de vente provinciale et de la TPS, parce que nous n'avons tout simplement pas les moyens de nous le permettre.

Le président: Merci, monsieur Boyd. Je veux m'assurer de bien comprendre le problème. Le problème se pose parce que, à l'heure actuelle, vous payez la TPS sur les achats municipaux, n'est-ce-pas?

M. Boyd: Oui, c'est ça.

Le président: Essentiellement, le problème est causé par le fait que la fusion de la taxe -- ou l'on pourrait dire aussi l'élargissement de l'assiette fiscale -- veut dire que maintenant, pour les achats provinciaux, vous allez payer la taxe de vente provinciale de 8 p. 100, et ce 8 p. 100 fait partie du 15 p. 100?

M. Boyd: C'est exact.

Le président: C'est donc l'élargissement de l'assiette fiscale qui cause le problème?

M. Boyd: C'est exact. Nous avons toujours payé la TPS, mais jusqu'à présent, on nous en remettait une partie, 57 p. 100.

Le président: Savez-vous si l'on compte vous remettre une partie de la taxe provinciale?

M. Boyd: Des négociations ont eu lieu, comme nous l'ont appris les bulletins de nouvelles du président de l'Union des municipalités de la Nouvelle-Écosse, mais d'après les bulletins de nouvelles que j'ai lus ces négociations n'aboutissent pas.

Le président: Votre problème, c'est donc l'élargissement de la taxe provinciale?

M. Boyd: Absolument.

Le sénateur Rompkey: Je veux seulement avoir une bonne idée de la position des gens d'affaires parce que je constate des différences entre ce que dit la Halifax County Business Association et ce que dit Valerie Payn au nom de la Chambre de commerce du Grand Halifax. Jusqu'à présent, je pense avoir bien compris la position des groupes de gens d'affaires qui ont témoigné devant notre comité. Je crois comprendre qu'ils sont contre l'inclusion de la taxe dans le prix taxe, mais ils sont cependant résolument en faveur de la taxe de vente harmonisée. Encore ce matin, la Chambre de commerce du Grand Halifax a explicité la même position.

Cependant, les bandes dessinées que nous avons vues disent: «Votez pour la TVH et détruisez notre clientèle»; «Encouragez l'économie souterraine. Votez pour la TVH»; et «Le gouvernement se remplit encore les poches».

Je ne m'y retrouve plus. Je veux savoir une fois pour toutes ce que pense le milieu des affaires de la Nouvelle-Écosse, et si vous vous êtes parlé tous les deux, j'aimerais savoir s'il y a des divergences de vue entre vous ou non.

Mme Payn: Je pense que le mieux serait que chacun vous parle un peu de son organisation, et je serai brève. La Chambre de commerce du Grand Halifax est la seule chambre de commerce de la région métropolitaine de Halifax, qui regroupe les anciennes chambres de commerce de Halifax, Dartmouth, Bedford et Sackville. Cela donne une population d'environ 330 000 personnes. Nos membres proviennent de tous les secteurs des affaires et représentent 2 300 personnes.

M. Lingley: Nous avons certainement des divergences de vue. La Halifax County Business Association est née dans l'ancien comté de Halifax, quoique nous ayons des membres dans toute la région métropolitaine. Cette organisation regroupe essentiellement des promoteurs immobiliers, de petites entreprises de construction, des associations de camionnage et plusieurs groupes de cette nature. Nous représentons aussi des entreprises qui éprouvent toutes sortes de problèmes: problèmes environnementaux, fiscaux, problèmes de planification et de développement. Nous comptons très peu de détaillants dans notre groupe, mais chose certaine, les quelques détaillants que nous représentons ont exprimé certaines réserves au sujet de la TPS, à l'exception des éléments que mentionne Mme Payn.

Pour ce qui est de nos préoccupations à nous, comme je l'ai dit, nous formons surtout un groupe de défense de nos intérêts sur ces grandes questions, et particulièrement pour ce qui est des coûts supplémentaires pour le consommateur, nous ne faisons que constater que ces taxes supplémentaires étouffent nos entreprises, ou une bonne part des petites entreprises que nous représentons. Nous ne sommes pas en désaccord à 100 p. 100, mais il y a des domaines où nous avons des vues légèrement différentes, je crois. Ai-je éclairé votre lanterne?

M. Terry Norman, membre du Conseil d'administration, coprésident du groupe de travail sur la TVH, Chambre de commerce du Grand Halifax: J'ai aussi des observations à ce sujet, si vous me permettez. Notre groupe de travail a été formé en avril 1996, et il se compose de plusieurs membres représentatifs de la région de Halifax, et il comprend aussi des experts de la fiscalité et des gens du détail. Nous avons commencé par sonder toutes les entreprises qui sont membres de notre chambre, et nous avons tâché de déterminer quels problèmes allait poser la TVH.

Nous avons ensuite soumis un rapport découlant de ce sondage aux gouvernements fédéral et provincial. Nous avons eu de bonnes discussions, un bon dialogue. En conséquence, en août dernier, nous avons proposé cinq changements que nous jugions nécessaires. Quatre de ces cinq changements ont été apportés, et nous en sommes très heureux. Le cinquième changement, soit le prix taxes comprises, n'a pas encore été apporté.

Cependant, nous avons également eu plusieurs discussions avec d'autres chambres de commerce du Canada atlantique, ainsi qu'avec la Chambre de commerce du Canada. Nous avons siégé aussi au comité fiscal de la Chambre de commerce du Canada. C'est donc un groupe de travail qui a beaucoup travaillé. Nous sommes probablement le groupe qui dispose de la plus longue expérience au pays sur cette question, et nous avons fourni des renseignements à d'autres chambres pour les aider. J'ajoute que ce groupe de travail existe depuis plus d'un an, et que des bénévoles de la chambre y ont consacré un très grand nombre d'heures de travail.

Le sénateur Rompkey: Bien sûr, Ted Williams vous aurait répondu que quatre sur cinq est une très bonne moyenne au bâton. En outre, votre cinquième proposition a fait l'objet de longues discussions. Une dernière question pour terminer: Est-ce qu'on peut dire que la majorité des entreprises de la Nouvelle-Écosse, petites et grandes, même si elles ont de sérieuses réserves quant au prix taxes comprises, sont tout à fait acquises à la taxe de vente harmonisée? Est-ce le cas?

M. Norman: Oui, absolument, la majorité des entreprises croient que la taxe de vente harmonisée leur sera très bénéfique et qu'elle tonifiera l'économie de la Nouvelle-Écosse. Nous pensons que cette taxe va créer des emplois en Nouvelle-Écosse, contrairement à ce qu'on a pu vous dire. Nous avons examiné toute cette question en détail. Nous avons procédé à une analyse économique détaillée, et il est devenu très évident que cette taxe sera une bonne chose pour les entrepreneurs et les consommateurs de la Nouvelle-Écosse.

Le sénateur Rompkey: Une dernière question au sujet de l'économie souterraine. Tenants et opposants ont fait valoir cet argument. Ils dont dit que ça va encourager l'économie souterraine, ou que ça va la décourager parce que ces entrepreneurs pourront maintenant demander les transferts fiscaux. Que dites-vous à ce sujet?

M. Norman: Il est certes fort possible que cette initiative encourage l'économie souterraine parce que dans certains secteurs -- la construction domiciliaire, par exemple --, la petite entreprise de construction ou le particulier pourrait aisément adhérer à l'économie souterraine au lieu de s'inscrire. Cependant, ces entrepreneurs seront fortement incités à s'inscrire pour obtenir les transferts fiscaux eux-mêmes.

Je pense que c'est le genre de chose qu'il faut suivre de très près. Cependant, je pense que c'est une question qui n'a rien à voir avec la taxe de vente harmonisée et qui doit être traitée de manière distincte.

Le sénateur Cochrane: Avant que vous veniez, nous avons entendu des gens qui représentaient des constructeurs domiciliaires et autres, et qui nous ont dit qu'ils pensaient perdre 2 000 emplois dans la région si la taxe de vente harmonisée était adoptée.

Si cette taxe de vente harmonisée est adoptée, combien d'emplois pensez-vous que les entreprises que vous représentez vont perdre, ou y aura-t-il tout simplement des pertes?

M. Norman: J'aimerais répondre à cette question. Selon l'analyse que nous avons faite de l'industrie de la construction domiciliaire, il y aura des remises en Nouvelle-Écosse pour les constructeurs domiciliaires, mais il semble qu'il subsistera une différence dans les coûts. Nous ne savons pas exactement de combien elle sera. Il semble qu'elle se situera dans les 1 p. 100 ou 2 p. 100, nets des remises.

Nombreux sont ceux qui ont dit que le prix des maisons allait augmenter de beaucoup après le 1er avril, et en conséquence, la constructions domiciliaire a connu une explosion au cours des trois premiers mois de l'année. Il se pourrait qu'il y ait une baisse après le 1er avril, rien qu'à cause de cette demande artificielle qui s'exprime maintenant. Je ne pense pas que le secteur du bâtiment va beaucoup souffrir à long terme, et il faudra qu'il s'adapte à l'économie. De manière générale, ce secteur est très compétitif, et si la situation est compétitive, alors vous allez voir le transfert des crédits d'impôt sur les intrants s'exprimer dans les prix en conséquence.

Nous ne pensons pas que la taxe de vente harmonisée nous fera perdre beaucoup d'emplois. Il y aura des effets, certes, mais je ne pense pas que l'industrie va souffrir beaucoup d'ici un an ou deux, d'une manière ou d'une autre.

Le sénateur Cochrane: Dans le secteur du bâtiment lui-même, entrevoyez-vous une croissance de l'économie souterraine?

M. Norman: Nous avons remarqué une croissance de ce côté-là. Cela nous préoccupe, et je crois que le gouvernement comme l'industrie doivent porter une attention particulière à ce problème.

Le sénateur Cochrane: J'aimerais poser une question à Mme Payn. Vous avez mentionné expressément le tourisme, et vous avez décrit l'effet que cette taxe aura sur le tourisme. Pouvez-vous nous donner plus de détails?

Mme Payn: En fait, si vous le permettez, Terry Norman est le monsieur qui a dirigé le groupe de travail chargé de prévoir tous les effets de cette taxe, donc si je peux céder la parole à Terry?

M. Norman: Il y aura un effet sur l'industrie du tourisme à cause de l'élargissement de l'assiette fiscale. Par exemple, un petit Café-couette ne sera pas obligé d'exiger la taxe de vente harmonisée, alors qu'un motel ayant un revenu de plus de 30 000 $ par année devra la percevoir. Il y a des secteurs particuliers de l'industrie du tourisme qui seront touchés par ce changement. Nous pensons qu'il faudrait aussi accorder une certaine attention à cela si nous voulons que cette taxe soit appliquée uniformément à toute l'industrie.

Ce qui préoccupe l'industrie du tourisme, particulièrement pour ce qui concerne le prix taxes comprises, c'est que nos prix sembleront plus élevés ici que dans d'autres régions du pays. Si les touristes s'informent par téléphone, ou par Internet ou quoi que ce soit d'autre, il faut leur dire que le prix comprend la taxe. Ainsi une chambre d'hôtel à Halifax, par exemple, à 100 $ la nuit au Sheraton, où nous sommes maintenant, doit être annoncée à 115 $, alors que la même chambre d'hôtel à Toronto à 100 $ sera annoncée à 100 $, même si on paiera toujours 115 $ à la sortie.

Ce qui nous préoccupe, c'est que le public pensera qu'on l'encourage à voyager ailleurs, au lieu de venir dans notre région du pays, parce qu'il va penser que les prix sont plus élevés ici alors qu'en fait ils ne le seront pas.

Le sénateur Cochrane: Cela va donc défavoriser l'industrie du tourisme; et c'est une industrie qui est en pleine croissance, particulièrement dans le Canada atlantique.

M. Norman: C'est exact; c'est une de nos principales industries, et nous voulons faire tout en notre pouvoir pour l'aider, et on ne veut pas modifier la perception des touristes et les encourager à aller ailleurs. Nous pensons que nous devons encourager davantage de gens à venir ici.

Le sénateur Angus: J'aimerais adresser une question générale à nos témoins. Je pense que vous avez tous fait d'excellents exposés. Comme je l'ai dit hier matin au début de la séance, nous, les sénateurs conservateurs, comptons exiger que l'on retarde la mise en oeuvre du prix taxes incluses. Nous comptons agir en ce sens à notre retour à Ottawa lundi matin. Je veux seulement m'assurer que c'est bien ce que vous voulez. Comme vous savez, nous avons été à Saint John, Nouveau-Brunswick, et à St-Jean, Terre-Neuve, et nous avons entendu près de 73 témoins, qui nous ont tous dit, tant entrepreneurs que consommateurs, que la TVH est une belle chose mais que l'inclusion de la taxe dans le prix taxe n'a tout simplement pas de sens, et ils voulaient tous un prix taxes exclues. Je ne veux pas aller de l'avant si ce n'est pas ce que vous voulez. Voulez-vous s'il vous plaît confirmer que c'est bien ce que vous attendez de nous?

Mme Payn: Comme je l'ai dit dans notre exposé, la Chambre ne s'oppose pas au prix taxes comprises; nous préférons plutôt qu'on attende. Nous ne voulons pas du prix taxes comprises dans les trois provinces comme on le propose maintenant. À l'échelle nationale, si on devait l'imposer et qu'on devait nous demander notre avis plus tard lorsqu'on proposera cette mesure à l'échelle nationale, je pense que notre chambre de commerce sera d'accord, mais pas maintenant pour les trois provinces. Absolument pas.

M. Lingley: Je suis d'accord avec Mme Payn. Les quelques membres que nous avons dans le secteur du détail n'ont pas exprimé d'autres préoccupations.

Le sénateur Angus: D'accord, et j'imagine, monsieur Boyd, que vous êtes du même avis?

M. Boyd: Je n'en ai pas contre ça; ce n'est pas pour cette raison que je suis ici ce matin, pour vous parler du prix taxes comprises.

Le sénateur Angus: Je comprends que ce n'est pas cela qui retient votre attention, mais seriez-vous d'accord pour qu'on s'y oppose?

M. Boyd: Je n'aurais aucune objection

Le sénateur Angus: À ce sujet, Mme Payn a dit qu'elle ne serait pas d'accord tant et aussi longtemps que plusieurs autres provinces canadiennes n'embarqueront pas, dont l'Ontario. Par exemple, si on disait quelque chose comme ceci: «la mise en oeuvre du projet de loi C-70 sera retardée en ce qui concerne l'inclusion de la taxe dans le prix. Cet article n'entrera pas en vigueur tant et aussi longtemps que, disons, cinq autres provinces canadiennes, comptant au moins 50 p. 100 de la population du Canada, seront d'accord...» Est-ce que vous pourriez vivre avec ça?

M. Norman: Ce serait certainement une amélioration. Nous croyons qu'il est important que l'Ontario embarque parce que plusieurs détaillants sont basés en Ontario, et bon nombre de prix nous viennent de l'Ontario. Si l'on devait imposer dès maintenant le prix taxes comprises, ça donnerait 15 p. 100, ce qui est justement ce que nous avons ici aujourd'hui. Les détaillants de l'Ontario nous disent qu'ils seraient d'accord si l'on procédait à l'échelle nationale, et nous pensons qu'il est important que l'Ontario emboîte le pas. Si nous avions cinq autres provinces, mais sans l'Ontario, le réaliste que je suis vous dit que ça ne marcherait pas.

Le président: J'ai une dernière question pour M. Boyd, qui a soulevé ce problème qui concerne la municipalité où il est conseiller. Ai-je raison de dire que le problème que vous soulevez est un problème qui se pose à toutes les municipalités de la Nouvelle-Écosse.

M. Boyd: Absolument.

Le président: Autrement dit, c'est un problème de groupe; ce n'est pas un problème propre à la municipalité de Windsor.

M. Boyd: Non, ce n'est pas un problème propre à la situation de Windsor, mais ma conviction est ferme à ce sujet; sachant ce qu'a été notre processus budgétaire cette année, cette taxe va littéralement nous tuer.

Le président: Je comprends tout à fait votre position. Je voulais seulement m'assurer que votre problème n'était pas unique.

Chers collègues, le groupe suivant de témoins nous vient de la Corporation canadienne des retraités concernés, de l'Association nationale des retraités fédéraux et de la Nova Scotia Federation of Seniors. Ces témoins auraient-ils l'obligeance de s'avancer?

Mme Myrna E. Slater, présidente sortante, Corporation canadienne des retraités concernés: Au nom de la Corporation canadienne des retraités concernés, organisation sans but lucratif, nous vous remercions d'avoir accepté d'entendre les vues de nos membres concernant la TVH. Nous sommes préoccupés, voire insultés, par le processus qu'on a employé pour adopter cette loi dans cette province; en particulier, nous sommes mécontents du fait qu'on n'ait pas écouté les habitants de cette province. Il nous semble qu'on aurait dû nous écouter avant que le projet de loi n'atteigne ce stade-ci.

Statistique Canada nous dit qu'il y a plus de 120 000 Néo-Écossais âgés de 65 ans ou plus. Nous comptons donc pour environ 15 p. 100 de la population. Nos recherches nous ont appris qu'environ 50 p. 100 des personnes âgées touchent un revenu brut de moins de 24 000 $ par année par ménage. Même si c'est surtout ce segment important de la population qui nous préoccupe, nous craignons également l'effet que la TVH aura sur tous les Néo-Écossais, particulièrement les personnes à faible revenu et leur famille.

J'aimerais commencer -- pour le cas où M. le président ne m'interrompe avant que j'aie fini -- par vous dire quelles recommandations nous avons faites dans les textes qui vous ont été remis, et il y en a quatre. La première, que l'on repense la liste des produits et des services auxquels s'appliquera la TVH. Vous devez faire tout en votre pouvoir pour exclure le mazout, l'électricité, l'essence et les vêtements de moins de 94 $ de cette liste. On pourrait peut-être ajuster le taux d'imposition pour d'autres produits ou mettre en place un système de remise. Avec le temps qu'il fait depuis les deux jours que vous êtes ici, je pense que vous avez compris l'importance vitale du mazout, de l'électricité et de l'essence dans notre région.

Deuxièmement, comme l'a recommandé le Conseil canadien du commerce de détail, il ne faut pas mettre en oeuvre le prix taxes comprises tant et aussi longtemps que toutes les provinces ne participeront pas au processus d'harmonisation. Troisièmement, que l'on ne permette aucun changement au taux de la TVH sans l'accord de toutes les provinces participantes. Il faut également s'interroger sur la constitutionnalité du fait que deux provinces participantes en forcent une troisième à accepter des changements.

Quatrièmement, à quatre semaines avant l'entrée en vigueur de cette taxe régressive en Nouvelle-Écosse, on n'a toujours pas complété le règlement de cette loi habilitante. Cela pourrait compliquer de beaucoup la vie des entreprises, et cela pourrait semer la confusion chez les consommateurs. Comme vous le savez, les règlements peuvent jouer de drôles de tours aux lois.

J'aimerais donner davantage de détails sur ces recommandations, si on m'en donne le temps. Les habitants de cette province, particulièrement ceux qui sont actifs dans le secteur du détail, sont vivement inquiets de cette taxe. Les personnes âgées sont particulièrement inquiètes de l'effet que cette taxe aura sur des nécessités comme le mazout, l'électricité et les transports. On vient d'augmenter de 16 p. 100 le prix du mazout domestique, on a augmenté aussi le coût de l'électricité et de l'essence. L'adjonction d'une nouvelle taxe ne fera qu'alourdir ces fardeaux.

Les personnes âgées se préoccupent également des effets que la TVH pourrait avoir sur le coût du logement. Elles craignent que les propriétaires n'augmentent leurs loyers ou ne leur dispensent moins de services étant donné qu'il leur en coûtera plus cher pour les services qu'ils doivent acheter. Elles s'inquiètent de voir augmenter les prix des services postaux, le coût des vêtements et le coût des chaussures de moins de 94 $, les frais d'obsèques, que nous devrons tous payer un jour, et des services d'auxiliaires ménagères qui sont fournis par des agences privées et qui ne font pas intervenir du personnel infirmier autorisé ou auxiliaire. Même des services comme l'établissement de la déclaration d'impôt sur le revenu et la rédaction de testaments coûteront davantage avec l'imposition de la TVH.

Selon les calculs, pour compenser les augmentations causées par la TVH, il faudra acheter pour plus de 5 000 $ de produits dont le prix sera abaissé. Ce qui aggrave les choses pour les personnes âgées, c'est que leurs revenus seront moindres du fait qu'il leur en coûtera davantage pour leur programme d'assurance-médicaments, pour les changements au recyclage et les frais annexes, et pour les services téléphoniques locaux qui coûteront plus cher. En outre, nous avons des personnes âgées qui ne travaillent pas et dont les revenus sont fixes, et dont les revenus sont toujours plus bas parce que les rendements sur leurs investissements sont plus faibles. On constate également que les changements que l'on prévoit apporter aux programmes fédéraux au cours des quelques prochaines années défavoriseront aussi un grand nombre de personnes âgées. Vous savez de quoi je parle.

La presse nous dit que les gens d'affaires ne sont pas favorables au prix taxes comprises. Ils ne s'attendent à aucune économie de ce système, et en fait, ils croient qu'il leur en coûtera davantage, ce qui réduit les chances que les consommateurs auront de faire des économies. On sait que lorsque la TPS a été imposée, on nous a dit que l'élimination de la taxe fédérale de vente ferait baisser les prix. Ça n'est pas arrivé.

L'un des aspects les plus irritants de ce processus, c'est le manque de consultation entre le gouvernement et les contribuables de cette province. Bon nombre de nos membres pensent aujourd'hui que ceux qu'ils ont élus pour les représenter ont manqué à leurs obligations. Ils ont préféré soutenir leur parti plutôt que leurs électeurs. Il semble à bon nombre d'entre nous que notre gouvernement provincial comptait sur les fonds fédéraux pour équilibrer son budget, et qu'il voulait tout faire pour aider le gouvernement fédéral à se soustraire aux engagements qu'il avait pris concernant la TPS. Voilà ce qu'on appelle de la myopie. Et aujourd'hui, alors qu'il ne reste que quatre semaines avant l'entrée en vigueur de la TVH, nous n'avons toujours pas de règlement.

Peu avant que la loi soit adoptée au Parlement de la Nouvelle-Écosse, nous avons appris que pendant la période d'attente de quatre ans au cours de laquelle on n'apporterait aucun changement au taux d'imposition, deux des trois provinces participantes pourraient modifier le taux d'imposition sans le consentement de la troisième, et la troisième province serait obligée d'en faire autant. Il nous semble qu'il faudrait s'interroger sur la constitutionnalité de cet accord.

M. Rex Guy, directeur régional, région de la Nouvelle-Écosse, Association nationale des retraités fédéraux: Même si l'imposition de la TVH, qui combine la TPS de 7 p. 100 et la taxe provinciale de vente de 11 p. 100 dans une seule taxe de 15 p. 100, semble représenter une amélioration par rapport à la situation actuelle où l'on ne fait qu'additionner taxe sur taxe, l'application de la TVH à une gamme de biens et de services plus grande que celle à laquelle s'appliquait la taxe de vente provinciale, aura en fait pour effet d'alourdir le fardeau fiscal des consommateurs et aura un effet négatif disproportionné sur les personnes âgées, qui tendent à consommer davantage de biens et de services que les autres segments de la population.

Par ailleurs, la TVH distinguera en fait, le Nouveau-Brunswick, la Nouvelle-Écosse et Terre-Neuve du reste du Canada. L'autre jour, j'ai lu un article de journal dans lequel on disait que l'un des principaux établissements de commandes par catalogue en Ontario avait annoncé qu'il allait discontinuer ce service dans notre province. Il n'enverra même plus de catalogue et n'acceptera plus de commandes téléphoniques de notre province.

Par ailleurs, il semble que la taxe de vente harmonisée soit en train d'obliger certaines entreprises à fermer. Dans mon journal local il y a deux jours, on disait que dans la vallée de l'Annapolis, il y avait trois entreprises qui devaient fermer, des entreprises établies depuis longtemps, et la TVH semble être la goutte qui ait fait déborder le vase et qui les ait obligées à fermer.

Au cours des dix dernières années, les initiatives successives du gouvernement ont lentement mais sûrement démantelé les prestations de retraite, causant ainsi l'érosion continue du revenu de retraite; revenu qui sera davantage réduit par le fardeau fiscal additionnel imposé par la TVH. Les changements les plus importants ont été qu'en 1986, le crédit d'impôt sur le revenu pour les personnes âgées d'au moins 65 ans a été réduit, passant de l'indexation intégrale à l'inflation moins 3 p. 100, ce qui a déclenché toute une série d'événements, notamment l'élimination de la déduction fiscale de 1 000 $ pour revenu de placement. Cette mesure avait été introduite pour encourager les gens à économiser et à investir, et l'élimination de cette mesure a touché davantage les personnes à la retraite qui comptent sur les revenus de placement provenant de leurs épargnes.

Les exemptions d'impôt sur le revenu ont été converties en crédits fiscaux, et cela a augmenté l'impôt pour les retraités qui ont un revenu au-dessus de la tranche d'imposition la moins élevée, et cela continue. La disposition de récupération de la sécurité de la vieillesse a détruit l'universalité de la sécurité de la vieillesse puisque la disposition de récupération touche sur le revenu. Étant donné que le seuil est indexé au taux d'inflation moins 3 p. 100, la récupération affecte de plus en plus de personnes à chaque année. Vous trouverez une liste détaillée dans le mémoire écrit que je vous ai remis.

Deux événements se sont produits en 1995: le gouvernement de la Nouvelle-Écosse a changé son programme d'assurance-médicaments, imposant un montant additionnel de 215 $ à chaque personne de plus de 65 ans dans cette province, à titre de cotisation pour participer au programme d'assurance-médicaments. Le fait qu'il ait réduit la quote-part n'a aucun rapport. En même temps, le gouvernement a annoncé qu'en 2001, la déduction de 1 000 $ pour revenu de pension et la déduction pour les personnes de plus de 65 ans seront éliminées pour toutes les personnes de plus de 65 ans au Canada, peu importe qu'elles choisissent de participer au régime de la sécurité de la vieillesse ou au régime du supplément du revenu garanti, car certains d'entre nous pourront choisir. L'élimination de ces deux avantages représente en fait une augmentation du fardeau fiscal se situant entre 1 200 $ et 2 000 $ par an pour les gens qui seront touchés par cette mesure: c'est-à-dire toutes les personnes âgées de 65 ans ou plus.

Tous ces avantages pour la retraite, nous les avons payés directement ou indirectement pendant notre vie active. Et tout le monde devait en profiter. On a encouragé les gens à s'appuyer sur ces avantages pour leur sécurité financière à la retraite et aujourd'hui, ayant atteint l'âge de la retraite, ces mêmes personnes s'aperçoivent qu'on est en train de couper ces avantages et que leur revenu de retraite diminue à un rythme alarmant. Cette situation sera exacerbée par les taxes additionnelles découlant de la taxe de vente harmonisée.

Prenez, par exemple, mon propre cas. Nous nous sommes préparés pour la retraite, et j'ai pris ma retraite de la Marine en 1983. À l'époque, nous avions une résidence libre de toute hypothèque et nous avons fait toutes les bonnes choses qu'il fallait faire. Aujourd'hui, quelques années plus tard, nous constatons que chaque mois nous devons puiser dans nos économies pour joindre les deux bouts car notre revenu de retraite a diminué. Très bientôt, je suppose, la situation empirera et je devrai trouver un autre endroit pour vivre, mais ce sera pour plus tard.

Dans de nombreux cas, le fait de remplacer la TPS et sa taxe de vente provinciale superposée de 11 p. 100 par une simple taxe de vente harmonisée de 15 p. 100 réduit le coût pour le consommateur. Cependant, cette taxe s'applique à une plus grande gamme de produits et services qui n'étaient pas auparavant visés par la taxe de vente provinciale, et bon nombre de ces produits et services sont utilisés par les personnes âgées. Les taxes sur des choses comme le mazout domestique, l'essence, le propane, le bois de chauffage -- on vous les a déjà sans doute énumérés à plusieurs reprises -- les vêtements et les chaussures, les services professionnels et personnels, augmenteront de 7 p. 100 à 15 p. 100. La taxe sur l'électricité, qui est déjà très élevée, passera de 10,21 p. 100 à 15 p. 100.

Un autre exemple est mon propre cas. J'ai reçu ma facture d'électricité lundi et j'étais en train de préparer ma visite ici aujourd'hui, alors j'ai fait un petit calcul pour voir combien je devrais payer de TVH sur ma facture d'électricité. Il y aura une augmentation de 30 p. 100 par mois sur cette facture uniquement. Je reçois six factures pas an, ce qui fait que je devrai payer 180 $ de plus par an sur ma facture d'électricité à cause de la TVH.

Parce qu'elles vieillissent ou que leur santé se détériore, les personnes âgées ne peuvent plus accomplir certaines tâches comme l'entretien de leur propriété et bon nombre d'autres services personnels qu'elles pouvaient faire elles-mêmes lorsqu'elles étaient plus jeunes. Parce qu'elles vieillissent, elles sont obligées d'acheter de tels services. Plus on vieillit, moins on résiste au rhume, de sorte que les coûts de chauffage augmentent et il faut dépenser davantage pour acheter des vêtements plus chauds.

L'augmentation des coûts des transports est directement proportionnelle au nombre de rendez-vous médicaux auxquels il faut se rendre, et comme les services de soins de santé diminuent de nos jours, il est parfois nécessaire de parcourir des distances considérables pour se rendre à ces rendez-vous. Encore une fois, par exemple, le service de soins de santé le plus près de chez moi, qui auparavant se trouvait à quatre milles de chez moi, se trouve dorénavant à 20 milles, ce qui représente un voyage de 40 milles aller et retour chaque fois que je dois m'y rendre. La dépense additionnelle que cela représente est quelque chose que je n'avais pas prévu au départ.

Pour toutes ces raisons, l'assiette fiscale plus large de la taxe de vente harmonisée aura un impact important pour les personnes âgées. La TVH, avec son assiette fiscale plus large, imposera une taxe additionnelle de 170 $ à 250 $ par an pour chaque habitant de la Nouvelle-Écosse. Il s'agit d'une moyenne. L'impact pour les personnes retraitées sera encore plus important.

Afin de compenser partiellement la taxe supplémentaire qui devra être versée avec la nouvelle TVH, l'impôt provincial sur le revenu sera réduit à compter du 1er juillet prochain. Cela représentera une petite réduction fiscale de 120 $ pour une personne âgée ordinaire célibataire, ce qui ne compense pas l'augmentation de mes factures d'électricité. Dans la plupart des cas, cela ne peut même pas compenser l'effet de la TVH et sera loin de compenser l'élimination du crédit d'impôt pour les personnes de plus de 65 ans et de la déduction de 1 000 $ pour revenu de pension en l'an 2001. Le pourcentage d'impôt provincial sur le revenu sera peut-être moins élevé, mais ce sera un pourcentage moins élevé d'un montant beaucoup plus considérable.

En résumé, la TVH, avec son assiette fiscale plus large, réduire considérablement le revenu discrétionnaire des personnes âgées en Nouvelle-Écosse. La réduction de l'impôt sur le revenu ne suffira pas à compenser le coût additionnel de la taxe de vente harmonisée. Tout avantage sera perdu lorsque le crédit d'impôt en raison de l'âge et la déduction pour revenu de retraite seront abolis. En fait, nous vivons dans la seule région du pays où un timbre de 45 cents coûtera 52 cents.

Il y a trois recommandations que j'aimerais vous présenter. La première est le report de la taxe de vente harmonisée jusqu'à ce qu'elle puisse être mise en vigueur de façon équitable dans tout le Canada. Si ce n'est pas le cas, si la TVH doit entrer en vigueur le 1er avril 1997, elle devrait alors s'appliquer à la même assiette fiscale que la taxe de vente provinciale; c'est-à-dire sans ajouter une taxe aux produits et services qui ne sont pas à l'heure actuelle visés par la taxe de vente provinciale.

Enfin, le fait que la taxe soit incluse ou non semble causer à tout le monde beaucoup de problèmes pour ce qui est du marquage des produits, des étiquettes, et cetera. Nous recommandons que cela soit laissé à la discrétion du négociant et de ceux qui envoient des catalogues, pourvu que tout soit bien clair pour le client.

Mme Vivian Macmillan, représentante, Hants County Seniors, Nova Scotia Federation of Seniors: Il me semble que tout a déjà été dit, et mon mémoire est simple car je l'ai écrit au nom des personnes âgées de condition modeste. Comme vous l'avez entendu, nous n'avons pas été consultés; nous n'avons pas eu la chance de faire connaître nos opinions. C'est pourquoi nous remercions les sénateurs d'être venus nous écouter.

J'essaie ici aujourd'hui, de jouer deux rôles, car depuis trois jours, je suis au téléphone avec notre président qui n'a pu se rendre ici à cause de la tempête. Ce que je cherche ici aujourd'hui, ce sont des réponses. Il y a une semaine, nous avons reçu des dépliants que je distribue aux gens, mais ces dépliants arrivent à une date tardive et ne touchent pas à toutes les questions.

Vous avez tous entendu parler de nos préoccupations, notamment en ce qui concerne le chauffage de nos maisons, que ce soit au mazout, au propane ou autres, la taxe sur les vêtements et les chaussures. Vivre dans sa propre maison, chose que les personnes âgées ont à coeur, est un droit. Comme dans la plupart des cas, les Néo-Écossais ont travaillé et épargné de sorte qu'à la retraite, ils ont acquis ce privilège. Si une personne doit être à loyer, le locateur va certainement augmenter le loyer. De quel autre moyen dispose-t-il pour couvrir toutes ses dépenses?

Le transport public est en fait la principale raison pour laquelle j'ai décidé de venir ici. Il s'agit d'un service qui est presque inexistant dans la plupart des régions de la Nouvelle-Écosse, et si quelqu'un n'a pas une voiture, avec cette taxe, le coût d'un taxi sera plus élevé, tout comme le coût d'un billet d'autobus. Le prix de l'essence va augmenter. Qu'arrivera-t-il alors à nos permis, nos assurances? Nous ne le savons pas encore, et nous devons payer 3 $ lorsque nous achetons un pneu.

Ce qui me préoccupe vraiment, ce sont les bénévoles. En effet, que ferions-nous sans eux? Ils planifient les programmes pour les personnes qui sont confinées à la maison et dans la plupart des cas ils leur fournissent le transport. Cela représentera une dépense supplémentaire, puisque ce transport est habituellement fourni par une autre personne âgée. Que va-t-il arriver au transport vers les services de soins médicaux pour ceux qui ont besoin des hôpitaux, des cliniques, des centres dentaires ou d'autres centres de la santé, services qui diminuent également? Les personnes âgées doivent souvent se déplacer pour subir des tests si elles veulent demeurer en santé et continuer à vivre chez elles, et il est de plus en plus difficile de recevoir des soins hospitaliers.

Si une personne est obligée de vendre sa maison, y aura-t-il des coûts supplémentaires pour des services immobiliers, les honoraires d'avocat et d'autres services? Les coûts liés à l'entretien d'une maison augmentent, il y a toujours la possibilité qu'on soit obligé de vendre, lorsqu'on n'a plus les moyens de vivre là où on veut vivre.

Je me demande si les hommes et les femmes politiques pensent parfois au jour où ils seront à leur tour à la maison et où le simple fait d'attendre l'arrivée du journal le matin sera le véritable événement de leur journée. Je l'ai vécu moi-même chez moi avec ma mère de 98 ans. Est-ce que le petit hebdomadaire, où on peut lire ce qui se passe dans sa collectivité, coûtera plus cher? Ce ne sont peut-être que quelques sous ici et là, mais les uns s'ajoutent aux autres.

Il y a également les gens qui vivent seuls et qui sombrent dans la dépression lorsqu'ils ne voient personne. Un autre manque de contact, car nous ne pouvons pas les faire sortir. On pourrait leur écrire une lettre ou une carte postale: le timbre, le papier, l'enveloppe, le crayon. Il y a également les coûts de transport pour aller chercher un message d'un membre de la famille ou d'un ami. Tout cela va-t-il coûter davantage? Lorsque le gouvernement nous dit qu'il faut rester dans sa propre maison, nous sommes tous d'accord, mais pas au point où l'on se sent seul et où l'on sombre dans la dépression.

En tant que personne âgée qui parle et qui travaille avec d'autres personnes âgées, nous savons qu'il y a de nombreuses personnes âgées dans notre région et que bon nombre d'entre elles vivent près ou en dessous du seuil de la pauvreté. Ces augmentations ne seront pas importantes et, comme telles, n'ajouteront pas un fardeau financier, mais c'est la somme de toutes ces petites augmentations qui feront en sorte que bon nombre de personnes âgées craindront ne plus pouvoir continuer à vivre de façon indépendante, et nous estimons qu'elles méritent de pouvoir le faire. Si une personne âgée n'a pas le moyen de payer ses propres dépenses, elle devra peut-être demander de l'aide sociale. Cela coûtera plus cher au gouvernement, et il faudra en partie blâmer cette nouvelle taxe, peu importe comment on l'appelle.

Je travaille en étroite collaboration avec plus de 30 000 personnes âgées au sein de la Nova Scotia Federation. Ce qui les préoccupe, c'est l'effet qu'aura la TVH sur les articles essentiels qui sont consommés quotidiennement. À vous les membres du comité des banques et du commerce qui examinent le projet de loi C-70, nous vous demandons respectueusement d'écouter la voix des gens des Maritimes et, à l'instar d'autres provinces, de rejeter la proposition de créer une taxe qui inquiète considérablement les personnes âgées de la Nouvelle-Écosse.

Mme Lucy Riley, représentante de Halifax, Nova Scotia Federation of Seniors: Notre fédération de personnes âgées et de pensionnés représente un nombre important de personnes âgées, environ 30 000. Bien que nous n'ayons pas eu l'occasion de consulter toutes ces personnes, nous avons certainement eu l'impression, au cours des assemblées que nous avons tenues, que les personnes âgées sont convaincues qu'elles ne peuvent pas payer des taxes plus élevées, et que cette taxe leur rendra la vie vraiment difficile. Nous approuvons certainement à peu près tout ce qui a été dit au sujet des personnes âgées en général.

Le sénateur Cochrane: Je suis heureuse de vous voir tous ici, et je me réjouis que vous ayez pris le temps de venir ici ce vendredi matin, après la grosse tempête que nous avons eue en Nouvelle-Écosse. Nous respectons les points de vue des personnes âgées, et nous allons certainement en tenir compte sous un angle que la plupart des gens de votre âge ne nous pense sans doute pas capables, mais nous sommes vraiment d'avis que les personnes âgées sont un groupe qui mérite toute notre considération et nous attachons certainement de l'importance à vos points de vue.

Madame Slater, vous représentez une organisation nationale, n'est-ce pas?

Mme Slater: Oui.

Le sénateur Cochrane: Ce matin même, nous avons entendu Mme Brushett, députée de Truro. Elle a dit que les gens de la Nouvelle-Écosse avaient eu toutes les possibilités au monde de comparaître devant son comité pour exprimer leurs points de vue et faire connaître aux députés leurs préoccupations, mais vous me dites que vous n'êtes pas satisfaite du processus. Eh bien, il y a ici des points de vue contradictoires, madame. Vous pourriez peut-être nous en parler.

Mme Slater: Le député dont vous parlez doit avoir une source d'information différente de la mienne, et je sais qu'elle n'est pas une personne âgée. Ça fait une différence également. Le problème, c'est que pour la plupart des autres questions sur lesquelles nous avons eu l'occasion de présenter notre point de vue, nous avons eu beaucoup de préavis, de nombreuses lettres du gouvernement. Pour la question à l'étude, nous n'avons rien eu, et je sais de quoi je parle.

Sénateur Cochrane, nous ne sommes pas tout simplement insultés, comme vous l'avez dit; nous représentons 15 p. 100 de la population de cette province. Il s'agit d'un nombre de votes important. Je pense qu'il ne faut pas l'oublier, car nous aimons avoir l'occasion d'exprimer notre opinion sur ce que ces changements signifient pour nous. Nous ne sommes pas contre le changement; nous devons nous en accommoder depuis beaucoup plus longtemps que n'importe qui. Nous savons ce que le changement signifie, mais nous savons également que nous n'avons eu aucune occasion de faire connaître notre point de vue concernant cette mesure législative en Nouvelle-Écosse; je ne sais pas ce que mon collègue en dirait.

M. Guy: Je ne voulais pas vous interrompre. Je voulais aborder la même question que Myrna et souligner qu'ici, en Nouvelle-Écosse, nous avons une organisation unique des dirigeants des groupes de personnes âgées, qui sont maintenant au nombre de neuf, et qui font partie d'un comité consultatif auprès du Secrétariat des personnes âgées. Nous rencontrons les ministres de la province deux fois par an, en moyenne, et nous leur présentons alors de façon officielle toutes ces questions. En fait, nous venons tout juste de le faire il y a environ un mois. Toutes les questions qui ont été soulevées ici aujourd'hui leur ont déjà été présentées. Nous profitons de toutes les tribunes qui nous sont offertes.

Le sénateur Cochrane: Avez-vous exprimé ces mêmes préoccupations, notamment au sujet des tarifs postaux, des vêtements, des chaussures de moins de 94 $, des frais d'obsèques, des services de soins à domicile, des agences privées, du chauffage résidentiel, du transport... vous avez exprimé vos préoccupations concernant toutes ces questions?

M. Guy: De diverses façons et à divers moments, elles ont été exprimées, oui.

Le sénateur Cochrane: Et quelle a été la réaction?

M. Guy: La réaction a été qu'ils examineraient toutes ces questions.

Mme Slater: J'aimerais que ma collègue Joan Lay, la vice-présidente de notre division de la Nouvelle-Écosse, parle de nos préoccupations relativement aux services de soins à domicile, car c'est une préoccupation très importante pour les personnes âgées. Joan en connaît davantage que moi sur ce sujet.

Mme Joan F. Lay, membre, Corporation canadienne des retraités concernés: Ce qui nous préoccupe essentiellement, c'est le fait que la TVH devra être payée sur les services de soins à domicile lorsqu'ils sont fournis par des organismes privés, et bon nombre de personnes âgées doivent maintenant recourir à ces organismes privés parce que le programme du gouvernement n'offre pas de services de soins à domicile. Il y a de nombreux services qui ont été éliminés, et les organismes privés doivent donc compenser. Si le coût de ces services augmente, cela représentera des difficultés exceptionnelles pour les personnes âgées et leurs familles, car bon nombre d'entre elles doivent payer les coûts des services privés de soins de santé.

Le sénateur Cochrane: Vous dites -- et avec raison, car je pense que c'est vraiment ce que pensent les personnes âgées aujourd'hui -- que vous avez le droit de vivre dans votre propre maison, et que ce qui vous préoccupe surtout, c'est le transport. Vous savez que c'est votre premier ministre provincial qui a fait équipe avec les premiers ministres de Terre-Neuve et du Nouveau-Brunswick, et ils sont allés à Ottawa pour négocier une entente avec le gouvernement en vue d'harmoniser cette taxe de vente. Avant d'aller à Ottawa, ou même pendant le processus, est-ce que les personnes âgées ont été consultées?

Mme Macmillan: C'est ce que nous craignons, et ce que nous entendons dire c'est qu'elles n'ont pas été consultées. Je n'aime pas beaucoup vous dire que nous avions un conseil de la santé en Nouvelle-Écosse et que ce conseil s'est adressé à la province pour donner son avis, mais il a été démantelé. Je pense que les gens ont l'impression qu'aujourd'hui est la première fois où ils ont pu se faire entendre sur ces questions.

Sur une note personnelle, aujourd'hui, à Windsor, se tient un déjeuner pour personnes âgées dont j'ai fait la publicité. Lorsque nous avons de tels événements, nous téléphonons aux gens et nous leur offrons de les y amener en voiture, de sorte que j'ai dû travailler à cela avant de venir ici. L'autre jour, une dame m'a donné 5 $ pour l'avoir amenée. Je lui ai demandé: «Pourquoi?», car je devais passer devant sa maison de toute façon, et elle a répondu: «C'est pour payer votre dîner et mon transport». Elle habitait juste un peu plus loin dans ma rue. Je lui ai dit que j'allais au dîner de toute façon, et que notre projet consiste à faire en sorte qu'elle et 90 autres personnes âgées puissent profiter d'un bon repas de cuisine familiale pour un tout petit montant. Elle a dit que pour elle cela valait le 10 $, car elle était prête à verser un autre 5 $ pour se faire amener à ce dîner en voiture.

Mme Slater: Monsieur le président, et sénateurs, nous sommes très conscients du fait qu'en Nouvelle-Écosse il y a des lacunes au niveau du transport pour tout le monde, mais plus particulièrement pour les personnes âgées, qui ne sont pas toutes en mesure de conduire une voiture, et des services d'autobus qui sont limités, pour ne pas dire pratiquement nuls. C'est un problème qui persiste, et cette taxe va tout simplement continuer à limiter ce service.

Le sénateur Losier-Cool: Je voudrais moi aussi vous souhaiter la bienvenue à notre comité. Je suis toujours impressionnée par les personnes âgées, les retraités, et tous les autres groupes et personnes que vous représentez, et par la quantité de travail que vous accomplissez chaque fois que vous venez faire un exposé. Je tiens également à vous remercier de votre merveilleuse contribution à la société canadienne. Continuez votre bon travail; vous êtes notre modèle de comportement.

De façon générale, on se préoccupe de savoir quelles taxes doivent être augmentées et on veut faire en sorte que tous les services que nous avons soient disponibles pour tous les Canadiens. Je veux parler ici de l'universalité du régime de soins de santé et de la nécessité de le maintenir ou même de l'améliorer. Auriez-vous des suggestions ou des solutions de rechange à proposer en ce qui concerne les changements que nous pourrions apporter aux taxes, car nous devons imposer des taxes quelque part. Je crois comprendre que la facture de chauffage n'est pas un bon endroit; personne ne veut cela. Avez-vous des solutions de rechange à proposer, ou en avez-vous déjà discuté avec vos groupes? Je sais que c'est votre première recommandation, que nous abolissions cette taxe.

Mme Macmillan: On nous a répété à maintes reprises au cours des dernières années que la solution était que les personnes âgées continuent à vivre dans leur maison, et nous en convenons. Cependant, nous estimons qu'il faut faire quelque chose pour nous aider à y rester; quelque chose de plus que ce que l'on fait à l'heure actuelle. Je n'ai pas de suggestion, mais nous espérons que nos entrevues ici aujourd'hui donneront lieu à certaines idées.

Mme Riley: J'ai l'impression que les personnes âgées s'entraident énormément, et le gouvernement provincial s'attend de plus en plus à ce que des bénévoles prennent la relève, car il ferme des hôpitaux, réduit le personnel, et si on veut faire en sorte que les bénévoles et les personnes âgées s'entraident, il est important de ne pas leur imposer d'autres taxes. Je pense qu'il est déjà difficile de trouver des bénévoles qui estiment avoir les moyens de conduire quelqu'un en voiture un peu partout. Pour attirer des bénévoles à notre centre de personnes âgées, par exemple, nous devons leur trouver un stationnement, payer leur stationnement, et c'est quelque chose qui me fait réfléchir et me demander s'ils peuvent vraiment aider. Le recours aux bénévoles est une bonne chose pour nous car cela nous permet de rester alertes, et cetera, mais d'un autre côté ça peut être difficile pour nous.

Mme Lay: Si nous pouvions peut-être avoir notre mot à dire quant au règlement qui accompagnera le projet de loi, alors à ce moment-là nous pourrions peut-être proposer certaines idées, et oui, il doit y avoir une taxe, mais qu'est-ce qui doit être visé par la taxe? Pour ce qui est des bénévoles, il pourrait peut-être y avoir un genre de remboursement ou autre, s'ils veulent maintenir le service de bénévoles, après avoir été obligés de payer davantage pour l'essence, pour ceci et pour cela. C'est peut-être une solution.

Le sénateur Losier-Cool: J'aimerais poser une autre question pour satisfaire ma curiosité. Au Nouveau-Brunswick, la fédération des personnes âgées nous a parlé des réformes importantes qui ont été apportées dans cette province pour les personnes âgées concernant leur maison, le fait qu'elles soient propriétaires de leur propre maison. Elles nous ont dit que si elles devaient quitter leur maison parce qu'elles ne sont pas assez bien pour l'entretenir en prendre soin, et aller vivre dans un foyer pour personnes âgées, elles devaient dorénavant mettre leur maison en vente et remettre une partie de cet argent au gouvernement, et qu'elles devaient faire cela dans un délai de deux ans. Est-ce à peu près la même chose en Nouvelle-Écosse?

Mme Lay: Non, cela a été changé par une loi provinciale, et s'il s'agit de votre résidence principale, vous n'êtes pas obligé de remettre de l'argent au gouvernement. Cet argent vous appartient.

Le sénateur Losier-Cool: Vous pouvez garder l'argent?

Mme Lay: Pour vos personnes à charge, oui.

Le sénateur Bonnell: Je voulais tout simplement féliciter nos personnes âgées de leur excellent exposé, mais je suis plutôt déprimé car je serai bientôt moi-même une personne âgée. En fait, j'ai atteint cet âge il y a quelque temps. Je croyais que ce serait merveilleux, que je pourrais profiter de la vie et de toutes les économies faites par ma grande amie de la Marine. J'ai moi aussi mis quelques dollars de côté lorsque j'étais jeune. Le problème, c'est que les taux d'intérêt sont si peu élevés aujourd'hui que je marche à reculons.

Je suis de l'Île-du-Prince-Édouard, qui est un petit patelin, de l'autre côté du détroit, berceau de notre pays, et à partir de maintenant, les personnes âgées vont pour la plupart emprunter le pont de la Confédération pour se rendre au Nouveau-Brunswick et y faire leurs emplettes parce que là-bas tout est bien moins cher. Ils vont également emprunter ce nouveau traversier de l'île Wood pour aller à Pictou ou à New Glasgow afin d'y faire leurs emplettes parce que cela leur coûtera moins cher.

Nous entendons plusieurs sons de cloche ici, et je ne sais pas lequel je dois écouter. J'ai toujours cru que la vie serait belle quand je serais vieux, mais apparemment, elle ne sera pas aussi belle que je l'imaginais. Je me disais que j'aurais ma maison, que je n'aurais pas à payer de taxe pour acheter une nouvelle maison. Je garderais l'ancienne. Je n'aurais pas besoin de nouveaux meubles, je garderais les vieux. Il n'y aurait pas de taxe de vente, pas de TPS ou de TVH. Toutefois, je me demande si je peux espérer vivre à l'Île-du-Prince-Édouard, où il n'y a pas de communication, pas de train... On a même retiré les voies ferrées.

Mme Slater: Nous n'avons pas de train non plus.

Le sénateur Bonnell: Je pensais qu'il y avait un train entre Halifax et Montréal.

Mme Slater: Je sais bien mais cela ne nous sert pas à grand-chose à nous qui voulons nous déplacer dans la province.

Le sénateur Bonnell: Tout ce que je peux vous dire c'est de venir à l'Île-du-Prince-Édouard où il n'y a qu'une seule taxe, où il n'y a pas d'harmonisation; c'est un endroit magnifique pour y prendre sa retraite.

Mme Slater: Sénateur, vous n'avez pas besoin de faire de la réclame touristique pour nous vanter à nous l'Île-du-Prince-Édouard. Nous l'adorons. Ce qui nous inquiète énormément, ce que nous craignons, c'est que ce genre de taxe puisse être mis en vigueur dans seulement trois provinces de notre pays. Nous avons l'impression d'avoir été floués, tout simplement.

Mme Macmillan: En fait, elle félicite ni plus ni moins l'Île-du-Prince-Édouard.

M. Guy: Ce matin, on disait à la radio que nous allons tous nous hâter d'aller à l'Île-du-Prince-Édouard, en empruntant le pont de la Confédération, pour nous approvisionner à Mark's Work Warehouse, où il n'y a pas de taxe. Je pense que les voitures vont affluer pour cette raison même.

À propos de personnes âgées, il faut vous dire que nous sommes las d'être mis dans la catégorie des personnes âgées. Nous préférerions qu'on dise de nous que nous avons un avantage chronologique ou que nous sommes les aînés de la tribu. Le jour de notre 65e anniversaire, nous ne sommes pas réduits à néant.

Quant à des suggestions pour modifier le régime fiscal, je dirais pour ma part que le privilège de vivre ici et de jouir des privilèges et des avantages que cela comporte, cela vaut bien tout ce que je verse en impôt. Je pense me faire ici la voix de la plupart des personnes âgées quand je dis qu'elles ne voient pas d'inconvénients à verser leurs impôts. Elles ne veulent pas toutefois payer plus que les autres car il y a des taxes qui visent exclusivement les personnes âgées, les autres ne sont pas touchés.

Pour ce qui est du régime fiscal, j'estime qu'il y a beaucoup trop de percepteurs et à chaque courrier, on vous demande de l'argent. Vous devez envoyer de l'argent soit au gouvernement fédéral, ce que j'ai dû faire la semaine dernière, ou au gouvernement provincial, car on vient de me signaler que l'évaluation foncière a été haussée, ce qui signifie que mes taxes foncières augmentent de 40 p. 100 cette année.

Il faut que tous les percepteurs d'impôts soient coordonnés, car une taxe en entraîne une autre. En effet, une modification à l'impôt fédéral sur le revenu se traduit automatiquement en une modification de l'impôt provincial, car ce dernier représente un pourcentage du premier. Il y a toutes sortes d'éléments insidieux qui font rage dans le régime fiscal et qu'il faut contrôler, ce qui est sans doute impossible étant donné la complexité du système, tous les paliers administratifs ayant la possibilité d'imposer des taxes, que ce soit le gouvernement fédéral ou la commission scolaire locale, ou comme dans mon cas, la brigade des pompiers. Cela devient un peu exagéré et bientôt les gens n'auront plus d'argent et ne pourront plus rien envoyer à ces percepteurs qui ne cessent de réclamer de l'argent.

Le sénateur Oliver: Quand le ministre du gouvernement de la province de la Nouvelle-Écosse a comparu, il a dit qu'il faisait tous les efforts pour renseigner les personnes âgées et les autres citoyens, grâce à toute une série de dépliants qui décrivent la nouvelle taxe harmonisée. Avez-vous lu le dépliant à l'intention des personnes âgées, et dans l'affirmative, ajoutez-vous foi à certaines choses qu'il contient, comme par exemple que les loyers n'augmenteront pas, et cetera?

Mme Macmillan: Je reçois toutes sortes de dépliants et je m'emploie à les diffuser et à dire aux gens de les lire. Mais les gens me disent: «Qu'en est-il de ces autres choses?» Autrement dit, les dépliants contiennent des renseignements que nous connaissons déjà et ils ne parlent pas de ce que nous ignorons, et c'est là notre principal problème.

Le sénateur Oliver: Les représentants de la chambre immobilière sont venus nous dire que quelqu'un qui est propriétaire d'un immeuble d'habitation devra désormais payer la taxe sur les réparations et les rénovations, sur la publicité, sur les services professionnels, sur le déblayage de la neige, sur l'enlèvement des ordures, de sorte qu'elle sera répercutée sur les personnes âgées car on augmentera les loyers. On constate donc que le dépliant ne donne pas une juste idée de la réalité.

Mme Macmillan: J'en parle dans mon mémoire. Quand j'ai reçu le dépliant, je l'ai lu attentivement et je n'ai rien vu concernant les loyers, mais déjà les personnes âgées s'inquiétaient car on ne peut s'attendre à ce que les propriétaires absorbent la totalité de ce coût supplémentaire.

Mme Slater: Sénateur Oliver, la Corporation canadienne des retraités concernés est une association qui regroupe plusieurs générations, car nous nous intéressons à nos petits-enfants car nos petits-enfants nous préoccupent et à ce titre, ils sont membres de notre association. Il y a de quoi s'affoler quand on entend parler de la hausse des prix des vêtements pour enfants. Il faut se limiter à 94 $ parce que les vêtements pour enfants coûtent cher et qu'ils deviennent rapidement trop petits. Je ne pense pas qu'on ait pris cela en compte.

Nous ne représentons pas seulement les personnes âgées mais toute la société. Les personnes âgées font leurs les soucis de leurs petits-enfants.

Le sénateur Oliver: Nous avons bien compris ce que vous avez voulu nous dire.

Le vice-président: Nous accueillons maintenant Mme Sandra Pelley de Comcare Limited.

Mme Sandra Pelley, administratrice, Comcare Canada Limited, Nouvelle-Écosse: Tout d'abord, permettez-moi de vous remercier de me donner l'occasion de m'adresser à vous. Je vous parle au nom de Comcare.

Comcare est une compagnie de soins infirmiers à domicile. Nous existons depuis plus de 26 ans et nous offrons des services à nos clients à domicile à l'échelle du Canada. Nous employons des centaines de Canadiens dans les provinces de l'Atlantique et leur travail équivaut à des milliers d'heures de soins par semaine représentent toutes les classes d'âge et souffrent de divers problèmes de santé.

En vertu du régime fiscal actuel, quand un particulier reçoit des soins infirmiers à domicile par l'intermédiaire d'un organisme de bienfaisance, ce service est exempté de TPS. Si ce soin est fourni par Comcare ou d'autres compagnies, et que ce service est financé en totalité ou en partie grâce à un programme gouvernemental, le service est également exempté de la TPS. Par contre, si Comcare fournit un service identique à un particulier sur une base privée, ce dernier doit payer 7 p. 100 de TPS, auxquels s'ajouteront désormais 8 p. 100. C'est essentiellement injuste pour les raisons que je vais vous donner: tout d'abord, certains habitants de la Nouvelle-Écosse sont obligés de payer 15 p. 100 de taxe pour un service que leur voisin, qui obtient le même service grâce à un programme gouvernemental ou à un organisme de bienfaisance, ne paie pas. Deuxièmement, la perception de la taxe peut créer des difficultés économiques forçant quelqu'un à renoncer à obtenir ce service auprès de l'agence de son choix. Troisièmement, les fournisseurs de soins infirmiers sont mis dans une situation d'inégalité concurrentielle, les règles du jeu n'étant pas uniformes.

Permettez-moi de vous donner ici un exemple de l'injustice de ce régime fiscal: M. Macdonald prend soin de sa femme à la maison. Elle souffre de la maladie d'Alzheimer et elle a besoin de soins infirmiers. Elle obtient ces soins par l'intermédiaire d'un organisme de bienfaisance, et ce service est exempté de TPS. La voisine de M. Macdonald, Mme McGillevery, s'occupe également d'un des siens à la maison. Mariée depuis plus de 40 ans, son mari est atteint de la maladie d'Alzheimer. Mme McGillevery a besoin d'aide pour les soins personnels et la toilette de son mari. C'est Comcare qui lui offre ce service. Mme McGillevery paie actuellement 7 p. 100 de TPS et dès le 1er avril, elle paiera 15 p. 100 de taxe sur ce service. Est-ce que c'est juste pour le consommateur de la Nouvelle-Écosse? Les gens ont-ils le choix?

Le choix est très difficile. Elle peut ou bien laisser tomber l'aide à domicile qu'ill préfère ou bien payer la taxe. Le service n'est pas un luxe. C'est un service nécessaire tant pour la personne qui reçoit les soins que pour la personne qui fournit des soins au foyer. Ceux qui ne sont pas admissibles, pour une raison ou une autre, à un programme gouvernemental n'ont pas besoin qu'on les force à s'inquiéter davantage pour savoir si le service qu'ils fournissent est imposable ou exonéré. Ils ont déjà bien assez de choses qui les inquiètent sans cela.

Comcare a soigneusement révisé sa liste de prix à cause de cette augmentation du taux d'imposition. Cela nous inquiète. Nous craignons de perdre nos clients à des organismes de bienfaisance. Cela causera du stress à nos clients qui perdront leur travailleur de soins au foyer de Comcare et nous craignons que nos travailleurs aillent s'ajouter à la liste des sans emploi de la Nouvelle-Écosse. Comcare ne s'oppose pas à la taxe de vente harmonisée, mais seulement à son application injuste. Nous croyons que tous les services de soins à domicile devraient être exonérés.

Le sénateur Cochrane: Je comprends certainement votre inquiétude et je sais que les soins à domicile sont très importants pour les personnes âgées. Ils le sont vraiment. Elles se sentent rassurées si elles connaissent la personne qui vient les aider et si elles souvent qu'elles peuvent toujours avoir accès à la même personne. Cela leur donne un sentiment de sécurité.

D'après ce que vous avez dit, vous trouvez que l'application de la taxe est injuste. Avez-vous rencontré des représentants du gouvernement pour leur exprimer ces préoccupations?

Mme Pelley: Nous n'avons pas rencontré de représentant du gouvernement pour exprimer nos préoccupations, mais je dois dire que là n'est pas vraiment la question. Nous avons tous entendu ici des gens qui ont rencontré des représentants du gouvernement pour exprimer leurs préoccupations et qui sont encore tous dans le même tas que nous.

Le sénateur Cochrane: Pensez-vous qu'il y a encore de l'espoir?

Mme Pelley: Je compte sur votre comité pour nous redonner de l'espoir.

Le sénateur Cochrane: Merci. Je partage vos sentiments. Vous dites que vous craignez de perdre vos clients à un organisme de bienfaisance, ce qui veut dire que vous seriez obligés de fermer vos portes et que vos employés perdraient leur emploi. Est-ce bien ce que vous dites?

Mme Pelley: Selon le régime actuel et avec la nouvelle taxe de vente harmonisée, comme je le signale dans mon mémoire, les organismes de bienfaisance ne sont pas obligés de faire payer la taxe à ceux qui reçoivent des soins alors que nous devons la faire payer parce que nous sommes une compagnie privée. Nous avons dû réviser nos prix et nous devrons faire payer cette augmentation à nos clients, mais bon nombre d'entre eux sont des personnes âgées handicapées, bon nombre ont un revenu fixe et ils n'ont pas les moyens de payer cette augmentation. Ils devront faire un choix et ils décideront peut-être de laisser tomber leur travailleur au foyer régulier de Comcare à cause de cette hausse de coût et de s'adresser à un organisme de bienfaisance. À ce moment-là, s'il n'y a plus de travail pour Comcare, pourquoi resterions-nous en affaires?

Le sénateur Oliver: Quand nous étions au Nouveau-Brunswick et à Terre-Neuve, nous avons entendu des représentants de médecins et de l'association médicale et, hier, le président de l'Association médicale de la Nouvelle-Écosse a témoigné devant le comité. Le problème, c'est que les médecins ont le même problème que vous. La nouvelle taxe harmonisée leur coûtera environ 2400 $ par année et ils ne peuvent pas transférer ces frais à d'autres. Je leur ai demandé s'il y avait d'autres groupes ou catégories de fournisseurs de services médicaux qui auraient le même problème et ils nous ont dit que des compagnies comme Comcare, qui fournissent des services à domicile, auraient aussi les mêmes problèmes. Ils voudraient donc que notre comité recommande qu'ils s'en soient exonérés, vous le voulez vous-mêmes. Vous êtes donc en bonne compagnie. Ils ont vraiment insisté auprès de notre comité et du gouvernement à ce sujet et nous devrons espérer que vous pourrez être visés par l'exonération que les médecins obtiendront peut-être. Le principal, c'est que vous n'êtes pas les seuls dans cette situation.

Le sénateur Rompkey: Je voulais simplement avoir une idée du marché pour les soins à domicile. Est-ce que par exemple Comcare s'est développé au cours des cinq dernières années? Pourriez-vous me décrire votre part du marché comparée à celle des services gouvernementaux ou des organismes de bienfaisance. Quelle est votre part du marché et la situation a-t-elle changé au cours des cinq dernières années?

Mme Pelley: Ce que je puis dire, c'est qu'actuellement, en Nouvelle-Écosse, environ la moitié du travail de Comcare s'adresse à des clients qui bénéficient d'une forme ou d'une autre d'assistance gouvernementale, mais l'autre moitié s'adresse à des clients qui paient nos services à titre privé.

Comcare, partout au Canada, assure des services dans le cadre de programmes gouvernementaux. Je ne puis vous dire ce qu'il en est dans le reste du pays mais une bonne partie de nos clients paient eux-mêmes nos services.

Le sénateur Rompkey: Je comprends bien ce que vous dites, mais je vous demandais plutôt une comparaison par rapport à la totalité des personnes qui ont recours à des soins à domicile. Est-ce que la plupart obtiennent ces soins par l'intermédiaire d'organismes gouvernementaux, d'organismes de bienfaisance ou de votre entreprise?

Mme Pelley: Je dois dire -- et je ne sais pas vraiment -- que la majorité... en fait, je ne sais pas. Je puis dire qu'il y a certainement des gens qui obtiennent ces services dans le cadre du programme de soins à domicile de la Nouvelle-Écosse. Je sais aussi qu'il y a beaucoup d'organismes privés tels que Comcare sur le marché qui offrent des services privés et qui ne le font pas dans le cadre de programmes gouvernementaux.

Le sénateur Rompkey: Je m'interrogeais simplement sur les pourcentages: 50/50, 75/25?

Mme Pelley: Je n'ai aucun moyen d'avoir de tels chiffres. Je suis désolée.

Le président: Sénateur Bonnell, voulez-vous expliquer les vertus de ce magnifique projet de loi? Dites-nous pourquoi l'Î-.P.-É. n'a pas adhéré.

Le sénateur Bonnell: Je vais vous expliquer. Il y avait à l'époque un gouvernement libéral qui avait dit non, le présent et ce gouvernement a dit oui. C'est la raison principale. Le nouveau gouvernement de l'Île-du-Prince-Édouard, le gouvernement conservateur au pouvoir, n'était pas d'accord. Mais lorsqu'il a dit non, les contribuables ont tous voté contre et l'ont renversé. Peut-être aurait-il dû dire oui. En tout cas, revenons à l'essentiel.

Dans la Loi sur les anciens combattants, il y a ce que l'on appelle le Programme pour l'autonomie des anciens combattants. Avez-vous beaucoup d'anciens combattants parmi vos clients?

Mme Pelley: Oui, en effet.

Le sénateur Bonnell: Cette taxe représentera-t-elle un problème pour ces anciens combattants. Le gouvernement canadien paie toutes les taxes, TVP et TPS et tout le reste, pour les anciens combattants, si bien qu'on peut rajouter une dizaine de taxes et cela ne changera absolument rien pour vos clients, n'est-ce pas?

Mme Pelley: Les clients qui bénéficient d'un programme financé par le gouvernement ne paient pas la TPS et je suppose qu'ils n'auront donc pas à payer non plus cette taxe harmonisée. Je ne crois donc pas que cela aura une incidence quelconque sur les anciens combattants.

Le sénateur Bonnell: Les anciens combattants constituent-ils la majorité de vos clients?

Mme Pelley: Non, pas la majorité. Nous en avons mais ils ne représentent pas la majorité de nos clients. Cinquante pour cent, environ, bénéficient d'un programme d'assistance gouvernementale, qu'il s'agisse des anciens combattants, ou du ministère des Services communautaires ou encore des soins à domicile de la Nouvelle-Écosse. L'autre moitié sont des clients qui paient eux-mêmes ces services. C'est eux qui seront touchés par la taxe harmonisée.

Le sénateur Bonnell: Quel genre de certificat doit posséder votre personnel pour faire ce travail, pour s'occuper de personnes âgées, malades et handicapées à domicile? Faut-il que ce soit des infirmiers ou infirmières autorisés? Leur faut-il suivre un ou plusieurs cours? Doivent-ils suivre une formation? Ou peuvent-ils simplement se présenter, se faire embaucher et se faire payer pour ce travail?

Mme Pelley: Il y a trois catégories de personnes qui offrent des services à domicile. Les infirmiers et les infirmières autorisés et les auxiliaires. Ce mémoire ne parle ni des uns ni des autres parce qu'ils sont dans la catégorie des services infirmiers professionnels qui sont déjà exonérés. C'est la catégorie des aides à domicile qui serait touchée par cette nouvelle taxe et tous les aides à domicile de Comcare sont formés à l'interne. Ils ont tous un certificat de secourisme et de réanimation cardiorespiratoire, et ils suivent un cours donné par notre société.

Le sénateur Bonnell: Votre société leur décerne peut-être un certificat, mais qui a les qualifications voulues pour les former dans votre société? D'où vient cette formation?

Mme Pelley: Ce sont des infirmiers et des infirmières qui assurent la formation de nos aides à domicile.

Le sénateur Bonnell: Ce sont donc des infirmiers et des infirmières qui assurent cette formation?

Mme Pelley: C'est exact.

Le sénateur Bonnell: Vous nous dites que ces gens-là, ces aides à domicile, peuvent aller s'occuper de ces personnes âgées, de ces malades sans aucune qualification sanctionnée par le gouvernement?

Mme Pelley: Ce genre de travail n'exige pas de licence quelconque dans notre province.

Le sénateur Bonnell: Ces gens que vous formez qui s'occupent des personnes âgées et des malades à domicile offrent-ils des garanties, les personnes qu'ils soignent peuvent-elles être assurées que des choses ne disparaîtront pas chez elles, que ces gens-là n'iront pas parler dans le quartier de ce qui se passe chez elles. Ou n'y a-t-il vraiment aucune protection, aucun permis, rien du tout?

Le vice-président: Sénateur Bonnell, je ne voudrais pas me mêler de vos questions mais, à titre de président, j'ai un peu de mal à comprendre le lien que ceci peut avoir avec le projet de loi C-70 ou l'exposé de ce témoin.

Mme Pelley: Je voudrais simplement rassurer le sénateur et lui dire que tout le personnel de Comcare est assujetti au secret professionnel, et cautionné et couvert par une assurance contre la faute professionnelle et une assurance-responsabilité, et je conviens que ceci n'a rien à voir avec notre exposé.

Le sénateur Bonnell: Si, parce que si les gens que vous servez connaissent vos qualifications, ils savent s'ils veulent continuer à se prévaloir de vos services parce que vous faites un bon travail et que vous avez une personnalité qui leur plaît ou s'ils devraient s'adresser à quelqu'un d'autre.

Mme Pelley: D'accord. Vous avez raison.

Le président: Sénateurs, les témoins suivants viennent du Presbytère de l'Église unie de Halifax. Nous recevons le révérend Ivan Gregan, président, accompagné du révérend Gordon K. Stewart, membre du Church and Society Committee.

Le révérend Ivan Gregan, président, Presbytère de Halifax de l'Église unie du Canada: Les déficits annuels et la dette accumulée, fédéraux et provinciaux, doivent être pris au sérieux. Les Canadiens ne peuvent continuer à vivre au-delà de leurs moyens. Ce ne sont toutefois pas les pauvres qui sont coupables d'extravagances. Néanmoins, c'est sur les plus défavorisés que retombe une part disproportionnée du coût de la réduction du déficit.

La TVH s'appliquera aux premières nécessités que sont l'électricité, les vêtements pour enfants et les fournitures scolaires, le mazout et l'essence, et c'est donc une taxe régressive. Les plus pauvres parmi les pauvres verront leur situation empirer du fait de ce fardeau supplémentaire.

Le gouvernement fédéral se décharge de sa responsabilité sur les gouvernements provinciaux; les gouvernements provinciaux en font autant sur les municipalités et le secteur bénévole; et la présente génération se décharge des siennes sur celle qui suivra.

Il y a une vingtaine d'années, le Conseil canadien du développement social, disait que les 20 p. 100 de la population qui bénéficiaient des revenus personnels les plus élevés recevaient plus de 40 p. 100 du total des revenus personnels au pays, alors que les 20 p. 100 dont les revenus étaient les plus faibles n'en recevaient que 4 p. 100. C'était déjà déplorable mais, depuis lors, l'écart s'est encore accru. Il y a beaucoup de gens qui sont mal nourris, qui sont privés de l'essentiel et qui dépendent des banques d'alimentation alors que des présidents de banque, PDG et sportifs touchent des millions de dollars de revenus annuels.

Il y a quelque 2 700 ans, le prophète Isaïe parlait de ceux «qui accaparent maison sur maison, champ sur champ, jusqu'à ce qu'il ne reste plus un acre disponible et qu'ils se retrouvent tout seuls», ayant évincé tous les autres. C'est ce qui se produit au Canada aujourd'hui. Nous estimons qu'il faut mieux répartir le fardeau de l'impôt.

Un chant patriote scandinave, écrit il y a quelque 150 ans, annonce une société où rares seront ceux qui ont trop et encore plus rares ceux qui n'ont pas assez. Le Canada a toujours été fier de garantir une société juste pour tous, mais nous nous éloignons toujours davantage de cet idéal.

Le résultat: il y a de plus en plus de monde qui ont recours aux banques d'alimentation -- ce que nous savons très bien --, les problèmes de santé se multiplient, les dépenses augmentent pour les enfants et les petits enfants, il y a de plus en plus de problèmes sociaux et l'on peut prévoir de l'agitation sociale. La taxe de vente harmonisée va encore désharmoniser un peu plus notre société, car cela représentera un fardeau trop lourd pour les faibles revenus.

Nous suggérerions qu'au moins les vêtements pour enfants et les fournitures scolaires soient exonérés et que l'exemption de base de l'impôt sur le revenu soit relevée. Nous vous remercions de nous avoir permis de vous faire part de notre point de vue.

Le sénateur Oliver: Comme vous le savez, nous sommes allés au Nouveau-Brunswick et à Terre-Neuve aussi et nous avons entendu près de 80 témoins jusqu'ici. L'un des premiers qui se soient présentés devant nous à Halifax est M. Gillis, ministre des Finances de la Nouvelle-Écosse, et celui-ci nous a déclaré: «Je sais que certains parleront de taxe régressive et je sais qu'il faut faire quelque chose pour les pauvres parce que les vêtements et l'essence vont coûter plus cher», et cetera. Il nous a dit qu'il y a deux ans, il y avait une subvention de 12 millions de dollars pour aider les pauvres et les faibles revenus et cela avait encore été augmenté dans le budget de 1996. Il y a donc un programme de 24 millions de dollars pour aider les habitants de la Nouvelle-Écosse à faible revenu. Le saviez-vous? Si oui, qu'en pensez-vous?

M. Gregan: Nous sommes au courant de toutes les subventions qui existent et nous nous en félicitons, mais elles n'atteignent pas ceux qui en ont le plus besoin. Il est difficile de donner une subvention à quelqu'un qui se trouve dans la rue et n'a pas d'adresse. Il est difficile de donner un remboursement d'impôt à quelqu'un qui vit dans la rue sans adresse. Il est difficile de vêtir les gens qui vivent derrière l'une de nos églises dans des boîtes en carton. Il est difficile d'atteindre ceux qui passent d'un appartement à l'autre parce qu'ils ne peuvent payer le loyer. Il est difficile de venir en aide à ces gens qui changent continuellement d'adresse parce qu'ils n'ont pas d'argent. L'église a quotidiennement affaire à ces gens-là et chaque fois que l'on ajoute une taxe à quoi que ce soit dont ils ont besoin, leur situation s'aggrave.

Le sénateur Oliver: Quelqu'un a dit que ces nouvelles subventions représenteront une différence de 100 $ par an pour certains, ce qui n'aidera pas en fait à grand-chose lorsqu'il s'agit de se vêtir ou de payer la facture d'électricité, et cetera. Je pense qu'une partie du problème relève du provincial et l'autre du fédéral. Que voudriez-vous que ce comité fédéral suggère à Ottawa? Quels changements voudriez-vous voir apporter?

M. Gregan: L'exemption que l'on ajoute à certaines choses qui relèvent du provincial, comme les voitures d'occasion, est importante. Faites pression sur les gouvernements provinciaux pour que les vêtements d'enfants échappent à cette taxe de vente harmonisée, pour que tous les produits alimentaires y échappent et pour que le mazout y échappe. C'est quelque chose qui ne choque peut-être pas le citoyen moyen qui chauffe sa maison à l'électricité ou celui qui a de quoi payer ce genre de choses. Mais les pauvres, ceux qui n'ont rien, ajouter quoi que ce soit à leur fardeau fiscal est un crime. Aussi, si le gouvernement fédéral pouvait d'une façon ou d'une autre alléger ce fardeau et veiller à ce que les gouvernements provinciaux l'allègent aussi, ce serait très apprécié.

Mais lorsque le gouvernement fédéral ajoute au fardeau des plus pauvres parmi les pauvres, c'est à notre avis un crime.

Le président: Notre témoin suivant est Eric Zscheile, conseiller juridique de la Confederacy of Mainland Micmacs, qui représente aussi l'Assemblée des chefs de la Nouvelle-Écosse.

M. Eric Zscheile, conseiller juridique, Confederacy of Mainland Micmacs: Je remercie beaucoup le comité de bien vouloir écouter ce que les 13 chefs micmacs la Nouvelle-Écosse ont à dire à propos de la nouvelle taxe de vente harmonisée. Je commencerai par vous prier de nous excuser. Les chefs auraient voulu venir eux-mêmes s'adresser aux sénateurs. Toutefois, ils sont actuellement en réunion au sujet d'une entente récemment signée sur l'éducation des Micmacs, car il reste quelques détails à régler.

Le président: Le chef Marshall est venu hier, n'est-ce pas? Je croyais l'avoir reconnu dans le fond de la salle.

M. Zscheile: Oui, le chef Lawrence Paul était également venu et en fait, ce qu'ils auraient voulu que je dise recoupe à peu près ce que je vais justement vous dire. Il semble dommage que parfois les communications entre les gouvernements et les peuples micmacs ne soient pas aussi bonnes qu'elles devraient l'être. Il appert en effet que les chefs n'ont appris qu'hier la tenue de ces audiences en voyant les reportages à la télévision hier soir et, en apprenant de quoi il était question, ils ont absolument tenu à faire connaître leur point de vue. Nous espérons qu'après vous avoir fait part de leurs observations et qu'après en avoir discuté, on comprendra mieux qu'il faut améliorer les communications entre les Premières nations du Canada et le gouvernement fédéral.

Je vous dirai d'abord quelques mots sur moi-même. Comme vous le disiez, je suis le conseiller juridique de la Confederacy of Mainland Micmacs. Nous sommes l'un des deux conseils tribaux de la Nouvelle-Écosse. La Union of Nova Scotia Indians et nous-mêmes représentons treize Premières nations de la Nouvelle-Écosse. Sur des questions comme celle qui nous occupe ici, les 13 chefs de la Nouvelle-Écosse se réunissent pour former l'Assemblée des chefs de la Nouvelle-Écosse, et le mémoire qui vous est présenté l'est au nom de tous les chefs de cette assemblée.

Le régime fiscal appliqué jusqu'ici, d'après les Micmacs de la Nouvelle-Écosse, a mené à une situation des plus improductives. On peut dire que parmi les Premières nations, l'impôt est considéré comme un sujet de conflit et de confrontation et mène malheureusement à des procès et au non-respect des lois. Les problèmes sont interminables et je ne pense pas que ce soit particulier à la Nouvelle-Écosse. Cela s'applique à pratiquement toutes les Premières nations du pays.

En fait, il y a de nombreux procès en cours en ce moment en Nouvelle-Écosse au sujet de l'application de l'article 87 de la Loi sur les Indiens concernant l'exonération fiscale à la TPS. D'après ce que nous dit le gouvernement fédéral, les règles de la TPS concernant cette exonération s'appliqueront à la taxe de vente harmonisée. Cela ne représente donc aucun changement ni aucune modification au régime s'appliquant à la TPS puisqu'il demeurera le même pour la taxe de vente harmonisée.

Les Micmacs estiment qu'il est dommage que nos relations de nation à nation, relations sanctionnées par les traités signés entre les Micmacs et la Couronne, soient remplacées par des tribunaux appelés à statuer. Les Micmacs estiment qu'à l'avenir, il sera beaucoup plus productif d'envisager des négociations de nation à nation pour régler les problèmes d'impôt que d'avoir recours aux tribunaux. Malheureusement, les tribunaux sont en effet limités. Ils reposent sur un système accusatoire et ne permettent pas d'examiner à fond la relation fiduciaire qui existe entre les Micmacs et le gouvernement fédéral.

C'est aussi dommage parce que juste avant que l'on annonce la taxe de vente harmonisée, 13 chefs micmacs étaient en train de négocier avec la province une exonération de la taxe de vente provinciale et pensaient en arriver à s'entendre avec ce gouvernement qui avait d'ailleurs dit que si ce n'avait été de la nouvelle taxe de vente harmonisée, il aurait pu y avoir en effet une entente fiscale.

Cette entente consistait à accorder une exonération totale sur les achats micmacs, dans les réserves ou hors réserves, à mettre sur pied un système de cartes fiscales afin d'éviter les abus ou infractions de la part des acheteurs micmacs. Un deuxième élément, pour les achats effectués dans des réserves par des Indiens non inscrits, serait un système qui permettrait de faire percevoir les taxes par les entrepreneurs micmacs et selon lequel la province et la bande concernées négocient une entente sur la façon dont ces fonds pourraient être utilisés par la bande à ses propres fins; autrement dit, la bande pourrait bénéficier de son propre régime de taxe de vente pour financer ses besoins par le biais des achats effectués dans la réserve.

Le troisième élément était un bureau de vérification micmac qui permettrait d'éliminer une partie de la méfiance et des appréhensions que l'on aurait de part et d'autre dans la façon dont on fait respecter ce nouveau régime fiscal. Il devrait ainsi y avoir un bureau, composé de la province et représentants des Micmacs, pour examiner la situation.

Malheureusement, comme je l'ai dit, lorsque ces négociations ont échoué, les chefs micmacs se font fait dire que la TVH et les dispositions de l'article 87 de la Loi sur les Indiens ainsi que les dispositions d'exécution relevaient maintenant de la compétence fédérale et que la province n'y pouvait plus rien et qu'ainsi toute négociation devrait avoir maintenant lieu avec l'administration fédérale.

On nous a assurés que la province nous viendrait en aide dans la défense de cette entente. Toutefois, la province a finalement dit que cela regardait le gouvernement fédéral.

Après des consultations, ou des prétendues consultations, avec le gouvernement fédéral, les Micmacs se sont fait dire que les règles applicables à la TPS continueraient de s'appliquer -- il n'y a pas eu de vrai dialogue -- et qu'il n'était pas question de changer cela. Voilà le résultat des communications que nous avons eues avec le gouvernement fédéral.

Je vous exposerai maintenant brièvement les inquiétudes que nous avons à propos de la TVH, telle que proposée -- vous trouverez aussi cela dans notre mémoire -- et je commencerai d'abord par le fait qu'il n'y a pas eu de consultation. Les Micmacs estiment qu'étant donné les obligations fiduciaires du gouvernement fédéral, il serait bon qu'il y ait au moins quelques consultations de nation à nation lorsque l'on modifie le régime fiscal, en particulier lorsque la situation est tellement controversée entre les Premières nations et le gouvernement fédéral.

En fait, non seulement nous avons le sentiment qu'il n'y a pas eu du tout de consultation, mais nous estimons qu'on nous a totalement laissés pour compte dans tout cet exercice et que nous nous retrouvons face à un mur de briques sans qu'il ne soit possible de manoeuvrer aucunement.

Deuxièmement, les chefs micmacs s'inquiètent du vieux problème de la compétence provinciale sur les réserves et pour ce qui est des problèmes concernant les Premières nations. Beaucoup des chefs s'inquiètent du fait que, comme il s'agit d'une taxe combinée, entre deux ordres de gouvernement, cela pourrait être une méthode indirecte qui permettrait aux autorités provinciales de commencer à imposer une taxe dans les réserves alors qu'il n'y en avait pas par le passé.

Troisièmement, au cours des dernières semaines, le gouvernement canadien, le gouvernement de la Nouvelle-Écosse et les 13 chefs micmacs ont convenu de participer à ce que l'on appelle un forum tripartite. Essentiellement, il s'agit d'organiser un forum réunissant tous les ordres de gouvernement afin de discuter des questions qui préoccupent les trois parties. L'impôt est un exemple classique de choses dont devrait être saisi ce forum tripartite afin que les trois parties puissent en discuter entre elles et en public.

Nous en sommes particulièrement convaincus, sachant que l'impôt, pour les Micmas, est considéré comme beaucoup plus que de simples règles et règlements; c'est une question d'autonomie gouvernementale et économique. Les Micmacs commencent à considérer l'impôt non pas comme une simple exonération pour ceux qui vivent hors réserve ou dans les réserves, mais comme un outil économique qui devrait permettre de répondre à certains des besoins énoncés dans le rapport de la Commission royale sur les peuples autochtones.

D'une façon ou d'une autre, les Premières nations doivent finir par s'intégrer à l'économie du pays. Il faut encourager et favoriser l'entrepreneuriat. Les bandes doivent échapper à la spirale de l'assistance sociale et de la dépendance. Malheureusement, nous considérons les règles sur l'exonération fiscale et la façon dont elles sont appliquées -- par exemple la nécessité de faire livrer les choses dans les réserves -- simplement comme un moyen de faire circuler l'argent de la réserve dans la réserve mais sans attirer d'autre argent dans la réserve. S'il n'en vient pas d'autre, il n'y aura pas de croissance économique parce que 95 p. 100 de l'argent qui se trouve dans la réserve vient de l'assistance sociale.

La raison pour laquelle nous voudrions donc que ce forum tripartite discute de la question et la raison pour laquelle nous pensons qu'il faut examiner de beaucoup plus près la façon dont les exonérations fiscales sont envisagées est que nous devons trouver une méthode économique d'utiliser le régime fiscal pour permettre aux Premières nations de rattraper le reste du pays afin que leur indépendance économique devienne un objectif réalisable et pas seulement un simple rêve utopique. Voilà ce que j'avais à vous dire et je serais heureux de répondre à vos questions.

Le sénateur Angus: J'aurais juste une ou deux questions, monsieur. Vous vous appelez Eric Zscheile. Je suppose que vous êtes avocat, monsieur.

M. Zscheile: C'est exact.

Le sénateur Angus: Travaillez-vous dans un cabinet, ici, à Halifax?

M. Zscheile: Non. Je travaille directement au Conseil tribal de la Confederacy of Mainland Micmacs.

Le sénateur Angus: Qui se trouve où, monsieur?

M. Zscheile: Dans la réserve Millbrook, juste à côté de Truro.

Le sénateur Angus: Vous savez que l'objet de nos audiences est le projet de loi C-70 et non pas les questions beaucoup plus vastes que vous avez portées à notre attention. Si j'ai bien compris, ce qui vous inquiète à propos de ce projet de loi, c'est le fait qu'il n'y a pas eu suffisamment de consultations et que vos clients, les gens pour lesquels vous travaillez et que vous représentez, n'aient pu faire état de leur point de vue. Est-ce bien ce que vous nous avez dit?

M. Zscheile: En effet. J'ajouterais aussi le genre d'action directe qui nous semblerait possible à cette étape. C'est dommage, mais les chefs du Nouveau-Brunswick nous ont dit aussi qu'ils n'avaient pas eu la possibilité de comparaître devant vous.

Au Nouveau-Brunswick, une décision intéressante sur cette question vient d'être rendue l'année dernière. La cour avait examiné l'application par le Nouveau-Brunswick de la règle concernant l'exemption fiscale qui se trouve actuellement dans la loi sur la TPS et qui sera intégrée à la TVH, mais qui se trouvait dans la taxe provinciale du Nouveau-Brunswick au moment de ces audiences. Dans ce cas, les juges ont déclaré que les exigences concernant la livraison étaient contraires aux droits garantis à l'article 87 de la Loi sur les Indiens. Nous avons donc essayé de demander au gouvernement fédéral de suivre la loi, telle qu'énoncée dans ce cas, et d'appliquer plus libéralement l'article 87 de la Loi sur les Indiens. Les règles concernant la TPS sont beaucoup trop limitées pour l'application de cette exemption.

Le sénateur Angus: Je comprends bien et je crois que mes collègues du Parti libéral en ont pris note et en feront part à leurs maîtres politiques à Ottawa. Pour notre part, je veux simplement que vous sachiez que nous partageons vos préoccupations au sujet de ce projet de loi et de la rapidité à laquelle on nous demande de l'examiner pour des raisons que ni nous, de notre côté, ni beaucoup de témoins ne pouvons comprendre.

Par conséquent, si, comme vous l'avez mentionné dans votre mémoire, vous estimez devoir nous fournir des documents plus détaillés, sentez-vous bien libre de le faire. Nous leur accorderons toute notre attention.

Le président: Monsieur Zscheile, j'aimerais qu'une chose soit claire aux fins du compte rendu: vous payez la taxe fédérale sur les ventes dans la réserve, mais dans le passé, vous n'avez pas payé de taxe provinciale sur ces ventes, même si la TVP existe depuis longtemps?

M. Zscheile: Ce qui prête à confusion, c'est que la taxe n'est pas perçue sur les ventes effectuées dans la réserve pour les Indiens inscrits.

Le président: Je comprends cela.

M. Zscheile: C'est ainsi. Dans le passé, la TPS a été perçue, mais pas la TVP.

Le président: C'est exact, et cela s'applique... eh bien, depuis que la TPS a été instituée. Cependant, pour ce qui est de ne pas percevoir la TVP... J'essaie de me rappeler l'époque où je faisais partie du gouvernement de la Nouvelle-Écosse. Nous ne percevions pas la TVP sur les ventes effectuées dans les réserves il y a 25 ans.

M. Zscheile: C'est exact, et cela met en relief la question de savoir si ce n'est pas un moyen pour le gouvernement provincial qui, d'après ce que nous avons compris, percevra un pourcentage de la taxe de vente harmonisée, de percevoir dorénavant une taxe de vente auprès des Indiens inscrits.

Le président: Très bien. Je voulais être certain de comprendre le problème. Je vous remercie beaucoup d'être venu, et veuillez remercier les chefs de ma part. Je suis désolé de ne pas avoir eu l'occasion de les rencontrer hier.

Honorables sénateurs, nos prochains témoins sont Stephen O'Regan, président de la Canadian Automobile Dealers Association et M. John Sutherland, vice-président exécutif de la Nova Scotia Automobile Dealers Association et M. George Green, directeur de la Young Drivers of Canada.

M. George Green, directeur, Young Drivers of Canada: Je vous remercie beaucoup de tenir cette séance aujourd'hui et de nous donner ainsi l'occasion de nous faire entendre. Je commencerai par une hypothèse: je suppose que vous avez sans doute entendu plus de plaintes que de compliments au sujet de cette taxe de vente harmonisée.

Comme bon nombre de Canadiens, je sais que le gouvernement perçoit des taxes pour nous permettre de jouir du niveau de vie qui est le nôtre. Par conséquent, je ne suis pas contre les prélèvements fiscaux en soi, mais je suis contre les taxes discriminatoires, abusives ou mal conçues. Étant donné que la taxe de vente harmonisée qui est proposée tombe dans cette catégorie, je suis obligé d'ajouter ma voix à celle de ses autres détracteurs.

Je suis contre le fait qu'elle ne soit pas appliquée de façon cohérente dans tout le Canada et je suis personnellement dégoûté que notre premier ministre ait le culot d'affirmer qu'étant donné qu'il a convaincu trois des dix provinces d'accepter une taxe de vente fédérale et provinciale harmonisée, il a tenu sa promesse d'abroger la TPS. C'est une promesse qu'il a bel et bien faite, nous le savons tous et, je suis convaincu qu'elle a contribué pour une large part à l'élection du Parti libéral du Canada.

Ma petite entreprise compte, outre moi-même, qui en suis le propriétaire-gérant, quatre employés à temps plein. Je possède une franchise Young Drivers of Canada, comme je l'ai dit tout à l'heure. Elle offre des cours de conduite défensive aux habitants de la Nouvelle-Écosse et, dans mon esprit, c'est une petite entreprise typique. Elle est aussi unique en ce sens qu'il est prouvé que le service que nous offrons sauve des vies humaines, autrement dit, Cela signifie qu'il permet également au gouvernement d'épargner énormément d'argent dans le domaine de la santé et de la réadaptation car les conducteurs qui ont reçu leur formation chez nous réussissent à éviter les accidents d'automobile. Je pourrais vous fournir les noms de personnes qui vous diront que notre cours leur a permis d'éviter de se retrouver à l'hôpital.

Les autorités des deux ordres de gouvernement concernés nous disent que la TVH proposée avantagera à la fois les chefs de petites entreprises et les consommateurs car elle se traduira par une taxe globale moins élevée. Les entreprises pourront refiler leurs économies à leur clientèle en leur offrant leurs services à des prix inférieurs. Dans le cas de mon entreprise, et cela vaut pour toute autre franchise Young Drivers of Canada en Nouvelle-Écosse, au Nouveau-Brunswick ou Terre-Neuve, la taxe sur nos services augmentera de 8 p. 100.

Ce qui est discriminatoire, c'est que la TPS continuera d'être imposée sur les services offerts par Young Drivers Canada ailleurs au pays, mais seulement la TPS; on n'y ajoutera pas 8 p. 100. Cela signifie que, contrairement à mes collègues à l'extérieur de la zone harmonisée, pour rester concurrentiel, ici, au Nouveau-Brunswick, j'ai dû envisager de baisser le prix de mon cours pour subventionner une nouvelle taxe dans l'intérêt de ma clientèle. Dans de nombreuses entreprises, y compris la mienne, les marges bénéficiaires sont déjà plutôt minces. Et pourtant, nos dirigeants actuels répètent sans cesse qu'ils savent à quel point le secteur de la petite entreprise est important pour l'économie. Et du même souffle, ils prennent des mesures qui lui sont préjudiciables ou qui risquent carrément de le détruire.

Le fait d'absorber une portion de la nouvelle taxe, allié aux augmentations progressives des taxes de la masse salariale, notamment la hausse des cotisations au régime de pensions du Canada, risque de compromettre les quatre années de dur labeur que j'ai déjà consenties étant donné que j'aurai de plus en plus de mal à payer mes frais généraux et mes salaires. Si je devais perdre, ne serait-ce que 15 p. 100 de ma clientèle, il me faudrait licencier un employé qui dépend de ma franchise pour subvenir à ses besoins. Vous seriez sans doute étonnés -- comme tout le monde d'ailleurs -- de la résistance et des plaintes auxquelles je fais encore face lorsque j'annonce aux gens que je dois imposer la TPS en sus des frais de cours. Et c'est une taxe qui est en place depuis des années.

Je peux vous dire quel a été l'effet de la taxe sur l'entreprise Young Drivers of Canada en 1991, année où elle a été instaurée. La franchise de Halifax de Young Drivers of Canada a vu son chiffre d'affaires baisser de 21 p. 100 par rapport à 1990. À l'échelle nationale, Young Drivers of Canada a accusé une baisse de 15,12 p. 100 de son chiffre d'affaires en 1991. Ces pourcentages se sont traduits par des licenciements et par un accès réduit à ce que nous considérons comme un service essentiel. Par conséquent, si je me fonde sur l'expérience liée à la taxe précédente, il n'est pas du tout irréaliste de ma part de craindre une réduction potentielle de ma clientèle de l'ordre de 15 p. 100.

Les Canadiens ne veulent pas payer ce qu'ils estiment être des taxes excessives sur les biens et services. Le service que nous offrons est discrétionnaire, du point de vue du consommateur, ce qui signifie que s'il n'est pas prêt à accepter une hausse de prix liée à une taxe plus élevée, il va soit opter pour un service de moindre qualité, mais moins cher, se procurer le service clandestinement ou laisser tomber. Dans mon domaine, ce n'est pas seulement d'argent dont il s'agit, mais de vies potentielles.

Par conséquent, si ce scénario devait se réaliser, j'ai une question à poser, par l'entremise du comité sénatorial des banques, à M. Paul Martin et à M. Jean Chrétien. Auquel des deux devrais-je envoyer l'avis de congédiement? Auquel des deux devrais-je demander d'aller expliquer à l'un de mes employés pourquoi les affaires sont si mauvaises, alors qu'elles semblaient aller si bien avant l'entrée en vigueur de cette taxe?

Les gouvernements qui ont adopté la taxe de vente harmonisée ne font absolument pas de faveurs à des petits entrepreneurs comme moi. Ils n'aident pas mon entreprise, et aucune autre d'ailleurs, à prospérer. Au lieu de cela, le fisc nous égorge lentement et tue des emplois du même coup. Sachez que comme nombre d'autres propriétaires d'entreprise, je ferai tout ce qu'il faut pour surmonter les difficultés que j'anticipe. Cela va de soi. N'importe quel homme ou femme d'affaires le ferait.

Si le Sénat adopte cette mesure législative, je peux vous dire tout de suite qu'en dépit des directives j'annoncerai clairement la couleur à mes clients et je leur dirai précisément combien coûte le cours et combien coûte la taxe. À mon avis, le client a le droit de savoir où ira son argent avant de faire une acquisition et moi, j'ai le droit de déterminer pourquoi un client éventuel n'achète pas mon service. Je trouve navrant d'être forcé, rien que pour aider notre entreprise à survivre, de devoir me préoccuper d'amendes ou de complications juridiques désagréables. Au lieu de continuer à investir dans mon entreprise avec confiance, au lieu de faire en sorte qu'elle soit une réussite, je m'inquiète des obstacles que met sur ma route le gouvernement par ses malencontreuses initiatives.

On ne le dirait peut-être pas, mais en fait, je suis un optimiste de nature, et il a fallu que la coupe soit pleine pour que je vienne comparaître devant vous. C'est dire à quel point ce changement fiscal m'a exaspéré. Demandez à n'importe quel homme ou femme d'affaires ils vous diront que pour courir les risques qu'ils courent, il faut être optimiste. Les deux vont de pair. Cependant, j'ai du mal à accepter que cet optimisme ainsi que le plaisir et la satisfaction que je tire du fait de pouvoir offrir des emplois rémunérateurs et intéressants à mes compatriotes, ainsi qu'une chance de bâtir leur avenir, ne soient encouragés par un gouvernement qui trouve constamment des moyens de me démolir. Il faut que vous sachiez aussi que je n'abandonnerai jamais.

J'en suis arrivé à la conclusion que mon pays, sous le gouvernement actuel, n'est plus favorable à la petite entreprise. En conclusion, il semble que certains politiciens à Ottawa et les dirigeants de trois provinces Atlantiques estiment qu'il n'y a rien de répréhensible à adopter une mesure allant à l'encontre de la volonté de la majorité de la population qui les a élus. Je me souviens d'un homme politique qui, il n'y a pas tellement longtemps, a ajouté des sièges au Sénat pour faire adopter une autre mesure législative. Je ne l'ai pas vu sur la Colline récemment. Par conséquent, je vous invite respectueusement et instamment à modifier le projet de loi pour qu'il s'applique au pays tout entier, ou en empêcher l'adoption. Je vous remercie pour votre temps.

M. Stephen O'Regan, président, Canadian Automobile Dealers Association: En guise d'introduction, j'aimerais vous signaler que la Canadian Automobile Dealers Association est une association commerciale nationale représentant l'organisme franchisé New Automobile and Truck Dealers of Canada. Elle compte 3 700 concessionnaires qui vendent des automobiles et des camions neufs, d'importation ou non, et qui en assurent le service au Canada. Ils emploient plus de 100 000 personnes, affichent des ventes annuelles de l'ordre de 30 milliards et accumulent un investissement total au Canada d'environ 6,7 milliards sous forme d'avoir foncier, d'immeubles et d'équipement. En Nouvelle-Écosse, nos 117 membres emploient 3 300 personnes.

La Canadian Automobile Dealers Association appuie l'entente d'harmonisation de la taxe de vente qu'a conclu le gouvernement fédéral avec la Nouvelle-Écosse, le Nouveau-Brunswick, Terre-Neuve et la Labrador. Nous pensons que la TVH simplifiera le système actuel de la taxe de vente. La CADA se réjouit de ce que la nouvelle TVH dans le Canada atlantique concrétise l'harmonisation moyennant une réduction du chevauchement et du double emploi. Cela dit, nous exhortons les gouvernements fédéral et provinciaux qui n'ont pas encore signé d'accord sur la taxe de vente harmonisée à le faire.

L'harmonisation a pour effet d'élargir l'assiette fiscale, et nous estimons que du fait que cette taxe de remplacement englobe davantage de biens et services, le gouvernement sera en mesure d'apporter des changements positifs au régime fiscal. Premièrement, le taux de la taxe peut être réduit sans que cela n'entraîne de baisse des recettes; deuxièmement, le régime fiscal deviendra plus simple à comprendre et à administrer; troisièmement, le gouvernement peut contrer les aspects régressifs d'une taxe dont l'assiette est plus large moyennant le versement de crédits d'impôts plus généreux aux Canadiens à faible revenu.

Après avoir examiné sérieusement toutes les solutions de rechange à la TPS, la CADA a recommandé au comité des finances parlementaires de la remplacer par une taxe à la valeur ajoutée multi-stades. Notre organisme est d'avis qu'une telle taxe serait fondamentalement préférable à une taxe de vente au détail. La principale lacune d'un système de taxe de vente au détail est son effet de cascade.

Dans la majorité du commerce de détail, et assurément dans l'industrie automobile, le prix de vente annoncé est le critère ultime sur lequel les clients fondent leur décision d'acheter. Les taxes de vente sur les articles chers, comme les automobiles, sont considérables et ont une incidence indéniable sur les ventes. Un détaillant tenu d'annoncer un prix de vente taxes comprises sera désavantagé par rapport à ses concurrents qui n'ont pas cette obligation.

Dans le cas de la taxe de vente harmonisée qui est proposée, cet inconvénient concurrentiel sera supprimé dans les provinces signataires. Cependant, les commerçants des localités des provinces limitrophes non signataires seront désavantagés face à leurs concurrents étant donné que bien des services dans les provinces non signataires sembleront moins cher. Encore une fois, la CADA invite tous les gouvernements provinciaux à adopter la TVH, éliminant ainsi les problèmes de concurrence transfrontalière entre provinces signataires et non signataires.

Aux termes de la loi actuelle, il n'est pas nécessaire d'appliquer la TPS à la vente privée de biens usagés, y compris les automobiles. Cette disposition a créé sur le marché un sérieux déséquilibre entre les concessionnaires automobiles légitimes, qui doivent appliquer la TPS à la vente des voitures d'occasion et les personnes qui vendent leurs véhicules privément ou dans le contexte de l'économie clandestine et n'appliquent pas la TPS. À la suite de ce déséquilibre dans le traitement fiscal des véhicules d'occasion, les consommateurs sont généralement peu enclins à les acheter chez des concessionnaires légitimes accrédités. Nos membres sont donc nettement désavantagés à cause de cela. Et pour aggraver les choses, l'année dernière, le gouvernement fédéral a retiré le crédit de taxe sur les intrants qui faisait contrepoids en permettant aux concessionnaires de mieux concurrencer les vendeurs privés d'automobiles.

Dans les provinces signataires, la taxe de vente harmonisée supprimera ce désavantage au niveau de la concurrence. L'unique TVH s'applique à la vente privée de véhicules d'occasion et elle est perçue lorsque le nouveau propriétaire enregistre le véhicule auprès des autorités provinciales au moment du transfert de titre. La CADA appuie la TVH puisqu'elle supprime cet obstacle à la concurrence dans les provinces signataires. Cependant, je répète que la CADA invite instamment tous les gouvernements provinciaux à adopter la TVH, supprimant ainsi ce problème lié à la concurrence dans les provinces non signataires.

En conclusion, la Canadian Auto Dealers Association appuie l'entente conclue entre le gouvernement fédéral et la Nouvelle-Écosse, le Nouveau-Brunswick et Terre-Neuve et le Labrador au sujet de l'harmonisation de la taxe de vente. Notre association de concessionnaires et ses membres continueront de collaborer avec les pouvoirs publics de tous ordres pour faire en sorte que l'ensemble des Canadiens bénéficient du meilleur régime fiscal possible.

Le sénateur Angus: Lorsque nous sommes allés à Saint John, au Nouveau-Brunswick, plus tôt cette semaine, le ministre des Finances, M. Blanchard, a comparu devant nous et nous a dit qu'il s'agissait d'une mesure législative formidable qui allait grandement avantager le Canada atlantique. Il l'a appelé Avantage Atlantique. Or, je vous ai tous les trois entendu prononcer le mot «désavantage». Chose certaine, les deux présentateurs l'ont mentionné.

Hier, le ministre des Finances local, M. Bill Gillis, a comparu devant nous, et il a tenu les propos suivants: «L'harmonisation est une bonne chose pour la Nouvelle-Écosse. Nous allons rendre notre économie florissante, et nous avons les atouts et les traditions qui nous permettront d'y arriver. L'harmonisation n'est qu'une arme dans notre arsenal, un autre outil dans notre coffre à outils. Notre avenir réside dans l'exportation. Nous avons toujours été une région commerçante qui vendait ses produits à l'étranger. À l'heure actuelle, nous nous rapproprions cet aspect de notre histoire et nous le remettons à l'ordre du jour. Depuis quatre ans, nos exportations dans les pays étrangers ont augmenté de 35 p. 100, et la TVH nous permettra d'augmenter ce pourcentage. Nous pensons que ce n'est qu'un début.»

Il a ajouté: «L'harmonisation va donner un coup de pouce à notre secteur stratégique de la technologie de pointe et de l'information. À cause de la TVH, il est plus rentable pour une entreprise de logiciels ou une entreprise électronique de s'établir ici, en Nouvelle-Écosse. La TVH fait en sorte qu'il est plus avantageux pour les entreprises de prendre de l'expansion ici ou encore pour les nouvelles entreprises de s'implanter en Nouvelle-écosse. Nous sommes en train de devenir un endroit privilégié où faire des affaires. La TVH n'est pas la seule raison d'investir en Nouvelle-Écosse, mais elle fait pencher la balance en notre faveur.»

Dois-je conclure de vos observations, monsieur Green, que vous ne seriez pas du tout d'accord avec ce ministre?

M. Green: Pour être franc, je vous dirai que notre province était effectivement l'endroit privilégié pour faire des affaires avant l'avènement de la TVH.

Le sénateur Angus: Avant cette mesure?

M. Green: Oui. Je suis Ontarien d'origine, et lorsque j'ai déménagé ici, on m'a dit que j'étais fou à cause du chômage, et cetera. Je suis venu quand même et j'ai démarré mon entreprise. Aujourd'hui, je donne du travail à quatre habitants de la Nouvelle-Écosse, dont deux touchaient des prestations d'assurance-chômage avant que je ne les embauche.

Si mon chiffre d'affaires baisse de 15 p. 100, ce qu'il n'est pas déjà raisonnable d'envisager si je dois ajouter 8 p. 100 de plus au prix de mon cours, je ne serai pas en mesure d'employer autant de résidants de la Nouvelle-Écosse. Le consommateur offre une énorme résistance à toute hausse de prix. Je trouve que c'est une coïncidence plutôt heureuse que ces messieurs soient assis à mes côtés. Si je licencie quelqu'un, ou si je ne peux embaucher quelqu'un, c'est une voiture de moins qu'ils peuvent vendre. J'achète une automobile, ou plutôt l'instructeur en achète une, parce qu'il a un emploi chez moi. Si je ne peux embaucher quelqu'un, pas de vente d'automobile. Si je dois licencier quelqu'un, cette personne sera peut-être obligée de vendre sa voiture.

Les coûts liés à l'entretien de ce véhicule ont aussi une incidence sur l'économie. En moyenne, un instructeur achètera pour 3 000 $ d'essence pendant l'année pour donner ses cours aux étudiants. Il s'ensuit que dans cette région, il y aura un détaillant d'essence qui perdra cette vente. Les entreprises d'assurance seront aussi touchées. Cette taxe provoquera une réaction en chaîne. Elle nuira, et je suis contre.

Je pense que si cette taxe pouvait être appliquée à tous les Canadiens... Pour en revenir à un argument avancé tout à l'heure, la disparité et les désavantages qu'elle crée sur le plan de la concurrence sont inacceptables. D'ailleurs, je ne pense pas que ce paiement de transfert de 960 millions de dollars accordé aux trois provinces qui ont accepté ce mécanisme s'avérera avantageux à long terme. À mon avis, il s'agit d'un expédient à court terme. L'argent sera dépensé rapidement et ensuite, nous nous retrouverons à la case départ.

Il nous faut, non seulement ici, mais dans tout le pays, un cadre fiscal qui soit favorable aux entreprises, qui encourage le consommateur à y dépenser. C'est ainsi que le gouvernement recueillera les recettes fiscales dont il a besoin. C'est de cette façon que je réglerais le problème. Et vous avez raison, je ne suis pas d'accord avec ce ministre.

Le sénateur Angus: À votre avis, cela avantage-t-il ou non le Canada atlantique?

M. Green: Tout à fait.

Le sénateur Rompkey: Monsieur Green, êtes-vous membre de la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante, ou avez-vous des liens avec la Chambre de commerce de Halifax?

M. Green: À l'heure actuelle, je suis membre du Bureau d'éthique commerciale. Pour ce qui est de la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante, je n'ai pas fait de démarches pour y adhérer. Je connais cet organisme, mais je n'en suis pas membre.

Le sénateur Rompkey: Je pense pouvoir affirmer que même si les associations de gens d'affaires de la Nouvelle-Écosse qui ont comparu devant nous étaient contre un prix de vente taxes comprises, ils étaient tous sans réserve en faveur de la TVH, et dans leurs témoignages aujourd'hui et hier, la plupart d'entre eux, sans exception, ont affirmé que cela serait une bonne chose pour la Nouvelle-Écosse.

Je comprends votre position. Je comprends ce que vous dites, mais je me demandais simplement si au sein de ces associations, il n'y avait pas de négociation entre les entreprises et si des entreprises comme la vôtre pouvaient s'y faire entendre, car j'entends un son de cloche différent des organismes qui représentent à la fois de grandes et de petites entreprises.

M. Green: Je peux aussi comprendre leur point de vue, car vous avez sans doute entendu des propriétaires d'entreprises qui facturent déjà la TVP et la TPS, de telle sorte que dans leur cas, une baisse de la taxe globale peut être avantageuse. Cependant, comme la TVP ne s'applique pas à l'heure actuelle à mon service, cette nouvelle taxe se traduit pour moi par une hausse de prix de 8 p. 100. Encore là, je ne serais pas contre si la taxe était appliquée uniformément à tous les Canadiens et si tous les intervenants du secteur tertiaire y étaient assujettis. Ce qui me dérange, c'est que je sois tenu d'imposer une taxe de 15 p. 100 sur un service et qu'un consommateur du Québec, de l'Ontario ou d'ailleurs, puisse obtenir un service identique au mien avec une taxe de 7 p. 100. Autrement dit, cela gonfle mes prix et rend mon service moins attrayant pour le consommateur. Voilà ma principale objection à ce changement fiscal. Je ne suis pas contre les taxes en soi, je comprends qu'elles sont nécessaires, sinon nous n'aurions pas le même niveau de vie.

Le sénateur Rompkey: En ce qui a trait aux répercussions sur la Nouvelle-Écosse, je suppose que les concessionnaires automobiles diraient -- et d'ailleurs ils l'ont dit dans leur mémoire -- que bien qu'ils seront désavantagés par un prix de vente taxes comprises, essentiellement ils sont convaincus qu'une taxe de vente harmonisée est une bonne chose pour les provinces participantes. Peut-être pourriez-vous nous donner des détails sur la façon dont vous voyez ces avantages.

M. John K. Sutherland, vice-président exécutif, Nova Scotia Automobile Dealers Association: Monsieur le président, sénateurs, je pense qu'il serait intéressant d'examiner ce qui s'est produit récemment à Terre-Neuve. Bien que l'harmonisation y ait déjà été avancée, le 13 décembre 1996, le gouvernement provincial a réduit sa taxe de vente provinciale à un taux qui, allié à la TPS, équivalait à une taxe de vente harmonisée de 15 p. 100. Chose intéressante, en moins de deux semaines, en décembre 1996, les ventes de véhicules ont augmenté de 50 p. 100, comparativement à celles de décembre 1995.

Habituellement, le mois de janvier n'est pas un très bon mois dans le secteur de la vente automobile à Terre-Neuve. Cependant, dans ce contexte où la taxe de vente avait été réduite à 15 p. 100, les ventes de janvier pour 1997 ont augmenté d'environ 32 p. 100 par rapport à l'année précédente, c'est-à-dire par rapport à janvier 1996. Dans notre secteur, la politique fiscale a une très forte incidence. Une automobile coûte cher. La bonne nouvelle, c'est qu'un taux moins élevé s'applique à un article cher. On estime donc que le consommateur a jugé plus acceptable d'acheter cet article et, en fait, d'économiser sur la taxe. Par conséquent, nous estimons que ce changement fiscal sera avantageux, mais comme nous l'avons signalé dans notre mémoire, nous appuyons une taxe nationale et une taxe harmonisée car il existe des problèmes entre provinces limitrophes signataires et non signataires.

Le sénateur Rompkey: Je ne demanderai pas à M. O'Regan si quelqu'un dans sa famille dans la province de Terre-Neuve et Labrador se trouvait parmi les acheteurs de voitures neuves. Je pense en fait que c'était le cas de l'un d'eux.

M. O'Regan: Cela se pourrait.

Le sénateur Rompkey: Je voulais simplement que vous me précisiez comment transpireraient ces avantages. Si les gens dépensent davantage, cela se traduira-t-il par une augmentation du nombre d'emplois créés et, de façon générale, par un effet tonique pour l'économie?

M. O'Regan: Certainement.

Le sénateur Oliver: J'ai une question pour M. O'Regan. Dans son exposé, il a répété à maintes reprises que son organisme et lui-même souhaitaient que toutes les provinces du Canada adoptent la TVH. Nous étudions aujourd'hui le projet de loi C-70, et trois provinces canadiennes seulement ont adopté ce changement. Nous ne savons absolument pas si d'ici la date butoir du 1er avril, l'Ontario et les provinces de l'Ouest se rallieront. Par conséquent, je me demande si votre témoignage n'est pas en quelque sorte coloré par cet espoir qu'un jour, il y aura une taxe nationale alors qu'en fait, elle ne s'applique que dans trois provinces du Canada atlantique?

M. O'Regan: Il ne fait aucun doute que nous l'espérons, et notre association est prête à travailler d'arrache-pied pour que se concrétise l'harmonisation. Le régime d'assurance-maladie a commencé dans deux provinces canadiennes et s'est implanté ensuite dans tout le pays. Nous espérons que la TVH connaîtra le même sort.

Le sénateur Oliver: Quels effets négatifs subira la Nouvelle-Écosse en particulier du fait que 90 p. 100 de la population canadienne n'adhère pas à ce mécanisme d'harmonisation?

M. O'Regan: Cela créera des problèmes dans les provinces avoisinantes qui ne sont pas signataires.

Le sénateur Oliver: De quel genre?

M. O'Regan: C'est bien ce que vous voulez savoir? Cela tiendra à la perception, surtout à la suite de la publicité, que les prix dans notre province seront plus élevés.

Le sénateur Oliver: Cela nous vous inquiète-t-il pas?

M. O'Regan: C'est effectivement un problème. C'est certain.

Le sénateur Oliver: Cette perception risque-t-elle de nuire aux ventes des 117 concessionnaires de la Nouvelle-Écosse?

M. O'Regan: Oui, surtout dans les régions limitrophes des provinces non signataires. La perception est toujours ce qui compte le plus.

Le sénateur Oliver: Ce n'est donc pas tout rose?

M. O'Regan: Non.

Le sénateur Buchanan: En politique, nous connaissons l'importance des perceptions et nous savons qu'elles peuvent devenir la réalité. Je sais ce que vous voulez dire, Steve.

Nous avons entendu un concessionnaire d'automobiles, à Terre-Neuve et au Labrador, je pense, qui était d'accord avec le principe de la TVH, mais qui s'inquiétait du prix affiché taxes comprises sur l'étiquette qu'on place d'habitude sur les automobiles. Maintenant, le prix affiché comprendra le plein montant de la taxe, ce qui relèvera le coût du véhicule aux yeux du consommateur. Cela changera la façon traditionnelle des vendeurs de négocier avec les consommateurs pour en arriver au prix le plus bas. Maintenant, vous prenez comme point de départ le prix indiqué sur l'étiquette, vous négociez un prix plus faible et vous ajoutez ensuite la taxe. Il disait que cela va changer et qu'il y aura des problèmes.

En outre, le fait d'afficher un prix taxes comprises coûtera quelque chose à son entreprise. Ce qui l'intéressait surtout, c'était les avantages du nouveau système, et il y en a certainement. Le coût d'achat d'une automobile baissera de 3,7 p. 100, mais les conséquences de cette réduction seront affaiblies par les coûts supplémentaires et les autres problèmes et la confusion que cela créera. L'économie pour les consommateurs représentera moins de 3,7 p. 100 ou plus à Terre-Neuve. Ce concessionnaire nous a dit qu'il préférerait qu'on supprime dans le projet de loi, la mention du prix comprenant la taxe ce qui est possible, ou qu'on attende pour le faire que toutes les provinces soient passées au nouveau système. Seriez-vous d'accord?

M. O'Regan: Nous ne serions certes pas déçus qu'on attende que la taxe soit harmonisée dans toutes les autres provinces. Le prix taxes comprises cause certainement un problème si toutes les régions ne sont pas dans la même situation. Il serait donc très logique d'attendre pour instaurer le prix comprenant la taxe. C'est une très bonne chose dans l'ensemble et c'est certainement ce que nous devrions viser pour plus tard, mais si seulement quelques-unes des provinces appliquent le nouveau système, le prix affiché taxes comprises causera beaucoup de problèmes.

Le président: Honorables sénateurs, notre premier témoin surprise est M. Walter Fitzgerald, le maire de la Municipalité régionale de Halifax.

M. Walter Fitzgerald, maire, Municipalité régionale de Halifax: Je suis accompagné aujourd'hui de M. Corrigan, notre directeur des finances, et de Diane Eisenhauer, qui s'occupe de la planification pour la nouvelle taxe.

Nous avons quelques objections à formuler au sujet du changement fiscal. Nous ne sommes pas du tout en faveur de ce changement et la Municipalité régionale de Halifax recommande énergiquement que l'on modifie le projet de loi sur la taxe de vente harmonisée pour neutraliser ses conséquences sur la municipalité et ses contribuables.

La mise en oeuvre de la TVH et le fait qu'elle s'appliquera à tous les produits et services signifient que le taux de 15 p. 100 s'appliquera à tous les biens et services sur lesquels on paie maintenant une TPS de 7 p. 100. Cela aura des conséquences négatives sur la Municipalité régionale de Halifax. La principale raison pour laquelle la TVH aura des conséquences négatives, c'est que la municipalité ne paie pas maintenant de taxe de vente provinciale sur les biens et services. Nous devrons donc payer 8 p. 100 de plus.

Nous luttons avec notre gouvernement provincial depuis quelque temps à ce sujet. J'ai rencontré les représentants du gouvernement à maintes reprises et j'aurais aussi bien fait de m'adresser au mur. Ils nous feront payer des frais supplémentaires qui représentent six millions de dollars. Autrement dit, nos impôts augmenteront de 2 p. 100 et le gouvernement provincial récupérera son argent. J'ai vécu au Canada toute ma vie, comme la plupart d'entre vous, et je considère que c'est une taxe injuste pour la municipalité.

À cause de la TVH, non seulement la municipalité devra-t-elle payer 8 p. 100 de plus pour la partie de la TVH représentant la taxe provinciale sur tous les produits et services, mais elle ne pourra pas récupérer le plein montant de la taxe versée. Dans la plupart des cas, les municipalités ne peuvent recouvrer que 57,14 p. 100 de la taxe. C'est ce que nous avions accepté il y a quelque temps. Nous nous étions entendus pour cela à une époque où l'instauration de la nouvelle n'était qu'une lointaine possibilité. Malgré le remboursement, la taxe représentera un coût annuel supplémentaire de 5 millions de dollars pour les contribuables résidentiels et commerciaux de la Municipalité régionale de Halifax.

Il est toujours démoralisant pour un gouvernement ou pour les contribuables d'avoir à payer tellement d'impôts supplémentaires, surtout à une époque où ils essaient de remonter la pente après la dernière récession. Si vous jetez un coup d'oeil par la fenêtre, vous aurez vue sur le port. Il n'y a cependant pas beaucoup de navires qui passent par Halifax et le port tourne au ralenti. Les pêcheurs ne peuvent même pas gagner assez d'argent pour que cela vaille la peine d'aller pêcher.

Selon nous, ce transfert du fardeau fiscal aura des conséquences sur notre budget global et nous forcera à imposer une augmentation nette des impôts municipaux d'environ 2 p. 100 en moyenne ou bien de réduire les services municipaux pour absorber la perte. Puisque la province de la Nouvelle-Écosse ne faisait pas payer d'impôt aux municipalités auparavant, cela représente en réalité une nouvelle taxe pour la municipalité et tous ses contribuables.

Au nom de ces propriétaires fonciers, la Municipalité régionale de Halifax demande donc officiellement que le remboursement aux municipalités de la TVH de 15 p. 100 soit relevé de 57,14 à 80 p. 100. Cela rétablirait le caractère neutre de la taxe pour la Municipalité régionale de Halifax.

Notre demande est approuvée à l'unanimité par la Municipalité régionale de Halifax, qui englobe tout ce que vous pouvez voir autour de vous, à partir de Hubbards jusqu'à Ecum Secum. Notre municipalité comprend un peu plus du tiers des habitants de la province. Nous représentons une bonne assiette fiscale et nous pouvons jouer un rôle positif. Si vous voulez favoriser le développement en Nouvelle-Écosse, vous devez favoriser le développement dans la Municipalité régionale de Halifax.

Le sénateur Buchanan connaît bien toute la région et il conviendra probablement avec moi que, si la Municipalité régionale de Halifax prospère, tout le monde prospérera aussi. C'est ici que tout se passe. Nous possédons beaucoup d'atouts dans la région et il y a des richesses partout, mais le seul endroit où nous avons une population concentrée est Halifax. Nous sommes convaincus que, si l'on ne réduit pas la TVH et si la province ne fait rien pour nous aider, nous aurons énormément d'ennuis.

Sénateurs, vous êtes les seuls à pouvoir nous aider. J'en suis vraiment convaincu. Le gouvernement provincial ne nous a pas écoutés jusqu'ici et nous sommes convaincus que, s'il ne fait pas quelque chose, cette hausse d'impôt fera plus de tort que de bien et que vous devrez revenir dans la région pour vous attaquer à de nouveaux problèmes. Nous devrons tous nous attaquer à ces problèmes en tant que Canadiens.

À ma connaissance, l'Île-du-Prince-Édouard ne va pas participer à l'harmonisation et le gouvernement de cette province est très futé. Nous sommes prêts à payer 20 p. 100, mais pas 80 p. 100. Nous croyons que c'est juste et équitable. Je ne peux pas trop insister là-dessus. Notre directeur des finances, Larry Corrigan, serait d'accord avec moi pour dire, même si nous avons parfois des opinions divergentes, que nous ne devrions pas payer plus de 20 p. 100. C'est ce que je viens de proposer. Nous vous demandons donc, à vous sénateurs, de tenir compte de nos doléances et si vous voulez nous poser des questions, à moi, à M. Corrigan, ou même Mme Eisenhauer, qui travaille surtout avec des chiffres, nous vous répondrons volontiers.

La Municipalité a récemment mené un sondage auprès des gens d'affaires de la région de concert avec la Greater Halifax Partnership. Nous sommes en train d'analyser les résultats, mais il est bien évident que les entreprises se préoccupent énormément des impôts. C'est la même chose partout dans le pays. Nous avons constaté au moment de ce sondage et dans nos conversations avec les gens d'affaires qu'ils considèrent la TVP comme un obstacle à la croissance économique. Je n'ai pas assisté à toutes les réunions, mais d'après les conversations que j'ai eues avec les contribuables, je peux vous dire que cette nouvelle taxe inquiète tout le monde. Bien des gens ont signalé que la TVP nuira à la croissance économique.

En leur nom, nous vous prions de réexaminer les conséquences de la taxe pour vous assurer qu'on minimisera les effets négatifs sur les gens d'affaires pour qu'ils ne soient pas défavorisés par rapport aux entreprises du reste du Canada qui ne sont pas visées par la TVP. Sinon, il y aura des entreprises ici qui paieront la TVP alors que d'autres ailleurs ne la paieront pas. C'est la pagaille.

Sénateurs, je suis venu cet après-midi pour vous implorer d'être raisonnables et de nous donner le bénéfice du doute. Nous sommes prêts à payer 20 p. 100, mais c'est tout, 20 p. 100 au total. Je ne suis pas prêt à payer autre chose et je suis tout à fait disposé à aller en prison. Je suis vice-président de la Nova Scotia Union of Municipalities. Je ne parle pas en son nom aujourd'hui, mais à titre d'ancien président, je peux vous dire que moi-même et quelques autres sommes prêts à ne pas payer la taxe et que nous préférons aller en prison. Je ne suis pas certain de vraiment vouloir le faire, mais je veux vous le dire de toute façon. Nous hésitons un peu à ce sujet, mais nous avons vraiment des opinions très catégoriques là-dessus parce que nous sommes convaincus que cette taxe est un facteur dissuasif qui nous nuira plutôt que le contraire.

Il ne nous manque que 90 millions de dollars ou 95 millions de dollars environ. Le gouvernement aura tôt fait de percevoir ce montant grâce aux changements et, si les municipalités ne paient rien de plus que 20 p. 100, je suis certain qu'on arrivera très vite aux résultats souhaités. Vu que l'économie remonte la pente, cela augmentera davantage les recettes du gouvernement vu que plus d'impôts seront payés. Pourquoi mettre un frein à notre croissance économique? Notre taux de croissance est déjà insuffisant et nous luttons à propos du port, nous luttons à propos de l'aéroport et nous luttons pour tout. Nous sommes censés avoir un gouvernement libéral. Apparemment, si n'importe quel autre parti était au pouvoir, ce serait probablement pire. Je ne pense pas que cela puisse être pire. Voilà ce que j'avais à dire, sénateurs, et je me suis exprimé de façon très énergique. J'espère avoir été clair.

Le président: Nous entendrons maintenant M. Terry Donahoe, député à l'Assemblée législative. Pendant longtemps, M. Donahoe a fait partie du cabinet du sénateur Buchanan et il a aussi été à un moment donné leader par intérim de l'opposition en Nouvelle-Écosse.

M. Terry Donahoe, député à l'Assemblée législative de la Nouvelle-Écosse: Comme l'a dit le sénateur Kirby, je m'appelle Terry Donahoe et je suis député à l'Assemblée législative de la Nouvelle-Écosse pour la circonscription de Halifax-Citadel. À ce titre, j'ai parlé longuement et très souvent pour essayer de convaincre le gouvernement libéral de la province de comprendre pourquoi cette mesure d'harmonisation de la taxe de vente est malvenue. Le gouvernement ne m'a pas écouté et je suis donc venu aujourd'hui dans l'espoir que non seulement vous m'écouterez, mais aussi que vous tiendrez compte de mon point de vue et ferez le nécessaire.

Il y a suffisamment de Libéraux, de sénateurs et de députés des autres partis au Sénat et à la Chambre des communes pour faire ce qu'il convient de faire et vous pouvez le faire si vous avez la volonté nécessaire. Le projet d'harmonisation de la TPS et de la TVP proposé dans le projet de loi C-70 échoue sur trois plans: il ne fait rien pour les consommateurs et les contribuables de la Nouvelle-Écosse, il ne fait rien pour les gens d'affaires et il ne fait rien pour la région de l'Atlantique vu qu'il nous isole des marchés clés.

Je voudrais d'abord vous parler des conséquences de la taxe pour les consommateurs et les contribuables. D'après les propres chiffres du gouvernement provincial, la TVP entraînera des taxes supplémentaires de 84 millions de dollars pour les consommateurs de la Nouvelle-Écosse. D'après certains calculs, cela représente quelque chose comme 172 $ en nouveaux impôts en moyenne pour chaque famille de la Nouvelle-Écosse. Je vous prie de songer aux conséquences d'une telle ponction fiscale pour ceux que nous essayons tous de représenter sur la scène politique et dont nous parlons toujours beaucoup, en l'occurrence bien sûr, les familles à faible et à moyen revenus de nos régions.

Monsieur le président, honorables sénateurs, les Canadiens se font assommer par un régime fiscal beaucoup trop onéreux. Il est de plus en plus difficile de joindre les deux bouts. Depuis quelques années, les Canadiens ont vu leur revenu disponible baisser de façon dramatique. Ceux qui ont la chance d'avoir un emploi ont dépensé leurs économies et vivent maintenant d'une paie à l'autre. Le taux des économies personnelles n'avait pas été aussi faible depuis un quart de siècle et le nombre de faillites dans cette province et partout dans le pays bat tous les records. On veut maintenant nous imposer une taxe qui enlèvera de l'argent à toutes les familles à faible et à moyen revenus de la Nouvelle-Écosse. C'est une mesure bien mal avisée et tout à fait illogique.

Sénateurs, si le projet de loi C-70 est adopté, la taxe sur les nécessités de la vie doublera pour les consommateurs. Cela nous coûtera plus cher d'acheter des vêtements et des fournitures scolaires pour nos enfants. Cela nous coûtera plus cher de faire le plein et de chauffer nos maisons. Cela nous coûtera plus cher d'acheter une nouvelle maison ou de louer un appartement. Ce coût supplémentaire s'ajoutera à un fardeau fiscal déjà trop lourd.

Je pense qu'il importe de mettre la TVP dans un contexte quelconque. Sénateurs, les travailleurs canadiens ont vu leur facture d'impôt augmenter graduellement ces dernières années. Par exemple, les charges sociales sont inutilement élevées. Les cotisations au régime d'assurance-emploi constituent une taxe directe sur les emplois et elles font disparaître les emplois. Le gouvernement fédéral a refusé de réduire les cotisations à l'assurance-emploi malgré un excédent énorme dans la caisse.

Nous avons appris tout récemment que les cotisations au RPC augmenteront. Les travailleurs canadiens paieront presque deux fois plus en cotisations au RPC au cours des six prochaines années sans que l'on réduise en conséquence leur impôt sur le revenu personnel. C'est une autre initiative gouvernementale qui fera certainement disparaître des emplois. Au cours des prochaines semaines, quand les contribuables rempliront leur déclaration d'impôt, bon nombre d'entre eux constateront que l'inflation les a fait passer dans une catégorie d'imposition plus élevée. Ils paieront plus d'impôts même si leur rémunération nette n'a pas vraiment augmenté.

Sénateurs, les contribuables canadiens se sont fait saigner à blanc depuis trois ou quatre ans. Nous sommes en difficultés. Les contribuables canadiens sont en difficultés, surtout, je dois dire dans notre région. Nous ne pouvons tout simplement tolérer une autre ponction fiscale. Je n'hésite nullement à affirmer que la seule façon de décrire la TVP est de la qualifier de ponction fiscale.

Les gouvernements fédéral et provincial continuent de dire que la TVP ne constitue pas une augmentation d'impôt. Ils prétendent que les remboursements de l'industrie feront économiser aux entreprises et que ces économies seront transmises aux consommateurs. Cependant, les gens d'affaires nous ont dit, et je sais qu'ils ont dit la même chose au comité, que cela n'arrivera probablement pas. Ceux qui appuient ce projet mal conçu de TVP prétendent que les économies réalisées par les entreprises seront transmises aux consommateurs. En réalité, comme vous le savez aussi bien que moi, sénateurs, ces entreprises, qui dans bien des cas, réaliseront quelques économies à cause du nouveau système, ont elles-mêmes été harcelées ces dernières années par le régime fiscal au point où elles n'ont tout simplement pas la capacité financière ou la souplesse voulue pour transmettre ces économies aux consommateurs. C'est ce que m'ont dit les gens d'affaires; c'est ce qu'ils ont dit à notre caucus provincial; c'est ce qu'ils ont dit au gouvernement provincial et, à mon avis, c'est ce qu'ils vous ont dit avec éloquence au cours des audiences.

En réalité, je pense que cette taxe fera augmenter de façon spectaculaire le coût des affaires, le Conseil canadien du commerce de détail nous a dit, et il vous a dit la même chose, que cela coûtera à leurs membres au moins 100 millions de dollars par an pour mettre sur pied un régime distinct de prix affichés taxes comprises pour la région de l'Atlantique. Les entreprises ne peuvent pas transmettre d'économies qui n'existent pas. La paperasserie administrative causée par cette nouvelle taxe fera monter les prix. Les Néo-Écossais sont des consommateurs intelligents, comme vous le savez. Ils ne veulent qu'une portion plus grande de leur budget familial déjà trop étiré, serve au supposé privilège d'afficher des prix taxes comprises.

Les témoignages de ces derniers jours ont clairement démontré aussi que cette loi fera du tort aux affaires. Elle dissuadera les consommateurs. Cette nouvelle taxe les transformera en clients de l'économie souterraine et je peux vous dire que je l'ai ressentie personnellement ces dernières semaines. Il faudra en même temps que les entreprises se débrouillent pour trouver de l'argent en attendant leurs chèques de remboursement et ces problèmes sont tout aussi sérieux que l'inclusion de la taxe dans le prix.

Ces problèmes, messieurs les sénateurs, comme vous le savez, j'en suis certain, ne sont ni imaginaires ni hypothétiques. Toute une série de grands détaillants: K-Mart, Woolworth, Carlton Cards, Mark's Work Warehouse ont prévenu qu'ils allaient soit supprimer des emplois soit quitter la région atlantique. Malgré cela, monsieur Gillis, le ministre des Finances de la Nouvelle-Écosse essaie de vous faire croire et de faire croire à tous, par l'intermédiaire des médias, que cette initiative sera créatrice d'emplois. Pourquoi K-Mart, Woolworth et toutes ces autres grandes chaînes menacent-elles de supprimer des emplois ou de fermer leurs magasins dans la région atlantique? L'impact de cette taxe sera réel; il sera personnel et pour les employés et les petites entreprises qui perdront leur gagne-pain, il sera tragique.

Avant, les expressions «économie mondiale» et «compétitivité» n'était que du jargon politique. Les événements des dernières années ont changé tout cela et de manière spectaculaire. Les Canadiens ont vécu leur première relance économique sans création d'emplois de leur histoire. Ils savent que leur avenir et leur sécurité dépendent de l'entrepreneuriat, des innovations et de leur capacité d'adaptation. Le projet de loi C-70, messieurs les sénateurs, impose un fardeau administratif aux entreprises, qui contredit ces valeurs et ces priorités.

De plus, le projet de loi C-70 est le premier régime fiscal du monde à imposer des taux différents dans un même pays sur une base géographique. Bravo pour cette première historique! Il n'y a vraiment pas de quoi être fier. La région atlantique ne représente que 8 p. 100 du marché de détail du Canada. Il nous faut déjà travailler plus dur et mieux pour être compétitifs. Or, nous voici avec une loi qui va isoler le Canada atlantique, couper les détaillants de leurs principaux marchés et décourager les investissements dans la région. C'est un coup d'arrêt pour la croissance économique et la création d'emplois dans le Canada atlantique et la disparition d'emplois en Nouvelle-Écosse.

Le gouvernement fédéral n'a pas réussi à convaincre toutes les provinces d'adopter un système de taxe nationale unique. Ce n'est pas une excuse pour faire des expériences, encore moins pour les faire avec l'économie la plus fragile de tout le Canada. Il faut oublier la politique partisane et revenir à la case départ. Le meilleur programme de politique sociale reste le développement et la création de nouvelles richesses et de nouveaux emplois. Le meilleur tremplin pour la création d'emplois ce n'est pas une augmentation mais au contraire, à mon avis, une réduction des niveaux de taxe. Moins de formalités administratives et une libre circulation des biens et des services entre provinces.

Depuis combien de temps entendons-nous dire dans notre pays qu'un des éléments qui étouffe la croissance économique, la création de nouvelles richesses et de nouveaux emplois est l'existence de toutes ces barrières interprovinciales, d'une province à l'autre, d'un bout à l'autre du pays. Et que faisons-nous ici, encore une fois, avec cette TVH, si ce n'est de créer toute une nouvelle série d'entraves au commerce interprovincial.

Ce projet d'harmonisation est un échec, messieurs les sénateurs, un échec lamentable à tous les points de vue. Si l'intention du gouvernement actuel est d'harmoniser la TVP et la TPS, je le supplie de le faire correctement. Reprenons le projet à zéro et fixons-nous comme objectif une taxe nationale à un seul taux et administrée par une seule instance. Introduire cette taxe de manière partielle ne répond à aucune logique et justifie amplement que vous et vos collègues ainsi que ceux de l'autre endroit, repoussiez le projet de loi C-70.

Je conclurais, messieurs les sénateurs, en vous suppliant de tuer le projet de loi C-70. Comment peut-on imaginer d'introduire un régime fiscal dans trois provinces atlantiques, dans trois économies provinciales fragiles, qui les coupe du marché économique canadien? C'est absurde et il ne faut pas que cela se fasse.

Le président: Notre témoin suivant est M. Bill Casey qui comme beaucoup d'entre vous s'en souviendront a représenté la circonscription de Cumberland-Colchester.

M. Bill Casey: Je souhaite témoigner brièvement car il y a quelque chose qui me gêne dans toute cette initiative fiscale. Il me semble qu'un des principes fondamentaux s'est perdu dans les détails administratifs et la confusion administrative. Il est certain que c'est probablement le plus grand transfert fiscal de l'histoire de la province.

Les gouvernements provinciaux n'adopteront jamais un régime fiscal qui permette aux entreprises de ne plus du tout payer d'impôts. C'est impossible; on ne le leur permettrait pas mais c'est exactement ce qui peut arriver avec la TVH. Les entreprises cesseront d'assumer leur juste part de taxes de vente provinciales. Non seulement la TVP est-elle mêlée à la TPS dans la TVH mais elle est transformée de manière spectaculaire.

En ce moment, dans le régime actuel, nous avons une taxe sur les biens et services qui est une taxe à la valeur ajoutée. Nous avons également une taxe de vente provinciale qui est une taxe sur la vente. La taxe de vente est payée par les entreprises et les particuliers. Après l'introduction de la TVH, la TPS restera exactement la même. Elle ne changera pas mais la partie TVP de la taxe de vente harmonisée sera désormais convertie en taxe à la valeur ajoutée, tout comme la TPS, et elle ne sera plus payée par les particuliers et les entreprises mais uniquement par les particuliers. C'est un transfert total de taxes des entreprises aux particuliers.

En Nouvelle-Écosse, le fardeau de la taxe de vente ne sera plus partagé par les entreprises et les particuliers; il sera entièrement supporté par les particuliers. Comparez cette situation à la situation en Ontario, par exemple, où le fardeau de la taxe de vente est partagé entre les entreprises et les particuliers. Ici il sera entièrement supporté par les particuliers, et les municipalités, devrais-je ajouter. Je crois qu'il est injuste de demander aux Néo-Écossais d'assumer à eux seuls ce fardeau.

Regardez à la page 3 de mon petit document bleu. Dans le premier tableau, par exemple, si IBM, compagnie nationale, paie 30 000$ une voiture destinée à son directeur local, elle ne paie aucune taxe de vente, ni TVH, ni TPS, ni TVP; rien du tout. Si un simple Néo-Écossais achète exactement la même voiture le 2 avril, il devra payer 5 100 $ de taxe de vente. Je n'arrive pas à voir l'avantage pour les Néo-Écossais.

Si Wal-Mart achète un ordinateur de 3 500 $ pour compter son argent, il ne paiera pas de TVH. Si un étudiant néo-écossais achète le même ordinateur il paiera 525 $. Je ne vois pas l'avantage pour les Néo-Écossais. Si DuPont Chemicals ou toute autre compagnie achète pour 300 $ de chaussures de travail et de combinaisons de travail, elle ne paie pas de taxes. Si un travailleur néo-écossais achète pour lui-même ces vêtements et ces chaussures de travail, il paie 35 $ de taxes.

Les économies réalisées par ces compagnies ne seront pas répercutées sur les consommateurs en Nouvelle-Écosse. Ces compagnies ne pourront pas et ne voudront pas fixer des prix différents pour leur clientèle néo-écossaise et maintiendront leurs prix nationaux. La Nouvelle-Écosse n'en tirera aucun avantage et les Néo-Écossais verront leur part de taxes fortement augmentée. À une époque où beaucoup pensent que les entreprises ne paient pas leur juste part d'impôts et de taxes, il est curieux que les gouvernements leur offrent l'ultime échappatoire fiscale, l'exonération de la taxe de vente.

C'est tout ce que je veux dire. Je pense, comme tous ceux qui m'ont précédé, à savoir que s'il doit y avoir taxe harmonisée, il faut que le régime soit national que les Ontariens paient leur part de taxe de vente tout comme les Néo-Écossais. Il faut également qu'elle soit administrée par une seule instance et qu'elle vise tous les Canadiens et ne s'adresse pas simplement un petit groupe qui sera le seul à en profiter.

À la page 4 de mon mémoire, je pose quelques questions et j'aimerais vraiment avoir la réponse à la première si quelqu'un la connaît. Pour les autres, j'attendrai que votre comité me les envoie plus tard si c'est possible.

Le gouvernement provincial a déjà fait monter la TVH à 17 p. 100 pour un article en particulier: les voitures. Est-ce que les gouvernements provinciaux auront le loisir d'augmenter la TVH le 2 avril pour certains articles s'ils le désirent? Le pourront-ils? Est-ce que quelqu'un a la réponse à cette question?

Le président: Je crois qu'ils ont ajouté une surtaxe pour certains articles de la même manière que sont ajoutées périodiquement des surtaxes sur l'impôt. Je dois supposer que c'est légal, mais j'ai la grâce de ne pas être juriste; donc je n'en suis pas sûr.

M. Casey: La réponse est affirmative. Ils le peuvent; tout gouvernement provincial dans le groupe de la TVH peut augmenter n'importe quand la TVH ou y ajouter une surtaxe.

Le président: C'est vous qui en tirez cette conclusion. Je vous ai simplement dit ce que je savais. Je ne peux pas vous donner de réponse légale, car je ne la connais pas.

M. Casey: C'est pourtant ce qu'ils ont fait dans ce cas, ce qui semble indiquer que d'ici à six mois ils pourraient ajouter un pourcentage ou deux de plus pour certains produits, par exemple. Ce qui veut dire aussi qu'ils pourront probablement augmenter la TVH à loisir. Je trouve cela extrêmement dangereux et injuste, et c'est une grave erreur.

Et la taxe de transition, est-ce que les entreprises paieront la taxe de transition?

Le président: Le but de ces réunions est de permettre aux gens de s'exprimer, et non pas de dialoguer avec les témoins ou les participants. Vous posez des questions de caractère technique. Il faudrait que des spécialistes y répondent. C'est avec plaisir que je les contacterai une fois ces audiences publiques terminées. Nous nous ferons un plaisir de les mettre en contact avec vous.

M. Casey: Faisons-en une question à laquelle nous aimerions avoir une réponse: les entreprises paieront-elles la taxe de transition, ou bénéficieront-elles aussi d'un remboursement en plus de l'intégralité de la TVH? Que personne autour de cette table ne connaisse la réponse à cette question est la preuve de la confusion qui y règne.

Cela met fin à mon témoignage, mais j'aimerais avoir des réponses aux questions que je pose dans mon document, car le gouvernement provincial a été incapable d'y répondre.

Le président: Vous les aurez.

Notre témoin suivant est M. Jim Gourlay.

M. Jim Gourlay, éditeur, Eastern Woods and Waters Magazine: Monsieur le président, messieurs les membres du comité, je m'appelle Jim Gourmet. Je publie le périodique en couleur non subventionné le plus important et le plus ancien du Canada atlantique. Je suis ici en tant que représentant officieux des 12 autres éditeurs régionaux de cette région du pays, et un peu à titre de membre ex officio de la Canadian Magazine Publishers Association.

Je me présente devant vous, je suppose, en désespoir de cause, car les tentatives de dialogue de mon industrie avec le gouvernement sur les conséquences très négatives de la taxe de vente harmonisée pour les périodiques, tout d'abord dans les provinces participantes, puis, c'est à craindre, dans l'ensemble du pays, ont échoué.

En tant qu'éditeur de périodique du Canada atlantique, j'estime que la manière très hâtive dont cette taxe harmonisée est imposée menace l'existence même de l'édition de périodiques, tout d'abord dans cette région et, ensuite comme je l'ai dit, dans l'ensemble du pays. Elle promet une ouverture encore plus grande à la domination américaine sur les industries culturelles canadiennes. Cette taxe affaiblira encore plus une industrie déjà assiégée à l'avantage de ses concurrents étrangers.

La Canadian Magazine Publishers Association, qui compte plus de 300 membres, y compris Maclean's, Saturday Night, Canadian Living, et cetera, dont 13 dans le Canada atlantique, de concert avec la Don't Tax Reading Coalition, s'alarme des conséquences de cette taxe pour une industrie culturelle canadienne qui repousse déjà difficilement les assauts massifs de la concurrence américaine. En termes constitutionnels, il est universellement reconnu que la liberté d'accès à l'information est un élément indissociable de toute démocratie et que l'État ne devrait en aucune manière permettre le contrôle, la manipulation ou la restriction de l'information. Taxer l'écrit est par conséquent interprété par certaines démocraties comme une atteinte à ce principe. Pour cette raison, les États-Unis, le Japon, la Grande-Bretagne, l'Australie, l'Irlande et d'autres pays ne taxent pas l'écrit et en reconnaissent la valeur constitutionnelle. Dans beaucoup d'autres pays où il y a des taxes nationales à la consommation, le taux pour l'écrit est de loin inférieur au taux général.

Au Canada, ce qui est pire et ce qui est effrayant c'est que cette taxe n'est que tacitement appliquée à nos concurrents étrangers. Six ans plus tard, et malgré les promesses, le gouvernement canadien n'a toujours pas trouvé comment faire payer la TPS sur les abonnements à des magazines américains. Cela nous désavantage de 7 p. 100. Après le 1er avril, ce désavantage par rapport à mes concurrents étrangers sera de 15 p. 100. On pourrait penser qu'il n'y a qu'au Canada que le gouvernement défavorise ses industries locales au bénéfice des concurrents étrangers.

Les conséquences pratiques de cette taxe sont encore plus graves quand elles ne sont appliquées que de manière partielle dans le pays. Mon périodique est distribué dans toutes les provinces et tous les territoires du pays, aux États-Unis et en Europe, et l'administration de cette taxe est un véritable casse-tête, mais je vais essayer de vous expliquer de mon mieux ma propre situation pour que vous en saisissiez les répercussions.

J'en suis à ma quatorzième année de publication, et l'impact dramatique de ces changements fiscaux inconsidérés est comme suit: en 1991, immédiatement après l'imposition de la TPS sur l'écrit, le prix de mon magazine a augmenté de façon arbitraire de 7 p. 100, puisque avant nous n'étions pas taxés, et mes renouvellements d'abonnements ont diminué de 55 p. 100. En plus de ces 55 p. 100 de pertes de revenus d'abonnements pendant les deux premiers trimestres de 1991, nos recettes publicitaires ont diminué proportionnellement à la chute d'abonnements de plus de la moitié, et le résultat a été immédiat et catastrophique. Vingt et un mois après le 1er janvier 1991, la compagnie était devenue insolvable, et nous avons failli abandonner. Nous avons de justesse évité le dépôt de bilan.

J'estime que, ne nous étant pas encore totalement remis de l'imposition de la TPS, avec la taxe harmonisée, comme j'en comprends les dispositions, l'histoire se répétera, et je n'aurai plus, comme tous ceux que je connais dans cette région, qu'à mettre la clé sous la porte si j'essaie d'ajouter cette taxe au prix de mon produit. Augmenter arbitrairement mon prix de 8 p. 100 supplémentaire serait suicidaire, et, pour parler franchement, il faudra que je l'avale.

Laissez-moi vous en expliquer les conséquences. Dans cette région du pays, les marges de l'édition sont d'environ 3,5 p. 100. Avaler la taxe harmonisée me fera perdre environ 3,5 p. 100 de mes revenus bruts. Autrement dit, il me faudra donner 100 p. 100 de mes bénéfices au gouvernement. Je vous le demande, qui voudra continuer dans ces conditions?

J'en conclus qu'après l'introduction de la taxe de vente harmonisée la publication de périodiques dans le Canada atlantique de marginale deviendra non viable, et que cette région devra désormais s'approvisionner à l'extérieur, avec une diminution correspondante de revenus et une désertification culturelle.

Je vous demande d'user de votre influence sur les gouvernements pour retarder l'application de cette taxe inconsidérée afin que toutes ses conséquences puissent être correctement et pleinement examinées. Je vous demande également d'user de votre influence sur les gouvernements pour égaliser les règles dans le domaine de l'édition en exemptant de cette taxe les abonnements aux journaux et aux périodiques canadiens, de la même manière que ces gouvernements, par défaut, exemptent de cette taxe nombre de journaux et de périodiques américains.

J'ajouterais pour finir, monsieur le président, que si vous me posez la question à propos des livres, les livres sont exemptés. Malheureusement -- et c'est ironique -- la vaste majorité des livres sont maintenant publiés aux États-Unis, si bien que si je veux m'informer sur les derniers rebondissements du procès d'O.J. Simpson, je peux le faire sans payer de taxes; par contre, si je veux, dans un esprit civique, m'informer sur ce qui se passe dans ma propre communauté, je dois payer une taxe pour ce privilège.

Dr Thomas Hutchinson, Nova Scotia Veterinary Association: Merci, honorables sénateurs, mesdames et messieurs. Nous parlons au nom de la Nova Scotia Veterinary Association, qui représente les vétérinaires de cette province. Nous sommes opposés à la taxe de vente harmonisée. Certaines de nos raisons sont les suivantes: il est notoire que les personnes âgées qui ont des animaux domestiques restent plus longtemps chez elles et en meilleure santé. Elles ont beaucoup moins recours à l'assistance publique, que ce soit pour les services de santé ou d'autres services.

Il est également notoire que le taux de survie postopératoire est prolongé quand il y a des animaux domestiques à la maison. L'augmentation des frais de stérilisation et de castration des animaux fera augmenter le nombre d'animaux domestiques non désirés, d'où des coûts supplémentaires pour les services municipaux concernés. Il sera plus difficile aux familles à revenu fixe d'avoir un animal domestique, excellent apprentissage des responsabilités pour les enfants, et si les animaux sont moins bien soignés le risque d'une augmentation de l'incidence de zoonoses est réel. Ce sont les maladies transmises par les animaux aux hommes, la rage étant la zoonose la plus fréquente.

Dr Ernie Prowse, Nova Scotia Veterinary Association: Le lien entre l'homme et l'animal est un lien très fort, et la taxe supplémentaire rapportera beaucoup moins qu'elle ne coûtera, pour les raisons énoncées par mon collègue. Elle aura également un impact négatif sur la profession de vétérinaire, sur les techniciens en santé animale, les aides vétérinaires, les réceptionnistes, les marchands d'aliments pour animaux et les autres industries de détail liées aux animaux, les salons de toilettage, les pensions et autres services d'animaux domestiques.

Nous souhaitons saisir cette occasion pour remercier le comité du Sénat de nous avoir invités, et nous comptons sur une décision favorable.

Mme Bev Sweetman, directrice du commerce de détail, The Dorchester Corporation: Je représente en fait deux groupes: pour commencer, l'entreprise pour laquelle je travaille, à savoir la Dorchester Oaks Property Management, Inc. C'est une grosse compagnie de gestion de biens qui a des succursales dans tout le pays et qui gère de nombreux biens ici en Nouvelle-Écosse. Parmi nos biens nous comptons un grand nombre de magasins de détail, et c'est principalement pour cette raison que je suis ici. Mes locataires et moi-même sommes contre l'inclusion de la taxe dans le prix.

Je compte un certain nombre de détaillants nationaux parmi mes locataires, et le coût pour eux, comme vous le savez -- et je suis certaine qu'on n'a pas cessé de vous le répéter au cours des derniers jours -- est phénoménal. Je suis en train de renégocier les baux dans mes centres avec plusieurs détaillants nationaux tout en essayant d'y attirer de nouveaux détaillants, et je dois dire qu'ils sont très réfractaires au nouveau climat qu'ils risquent de rencontrer en venant ou en restant en Nouvelle-Écosse, dans la perspective du coût de conversion au prix toutes taxes comprises et du coût d'administration d'un système différent de celui de leurs autres magasins dans le reste du pays.

En outre, du point de vue de la trésorerie, cette taxe de vente harmonisée n'est pas enthousiasmante. Nous savons tous que c'est une taxe multi-stades, mais au niveau de la trésorerie la période d'attente jusqu'à ce que les chèques de remboursement arrivent représente un fardeau pour beaucoup de mes détaillants et de mes autres locataires, et dans le climat de détail actuel et dans le climat général actuel, c'est la goutte d'eau qui pourrait faire toute la différence.

Ce sont en fait mes deux points principaux. Je ne vois pas l'intérêt de vous ennuyer plus longtemps. Cependant, j'espère que vous ne les oublierez pas. La vie est déjà assez difficile en Nouvelle-Écosse, et nous n'avons vraiment pas besoin de ce fardeau supplémentaire.

Mme Louise Moores: Monsieur le président, mesdames et messieurs, je vous remercie d'avoir pris l'initiative de venir dans les Maritimes pour écouter ce que nous avons à dire sur notre prochaine taxe de vente harmonisée. J'espère sincèrement, au nom des petites gens, des citoyens ordinaires comme moi, que les recommandations que vous ferez à notre gouvernement fédéral à Ottawa seront suffisamment informées et vigoureuses pour causer sa suppression pure et simple.

Nous nous considérons moi-même et ma famille comme appartenant à la classe moyenne, monsieur le président, et quand nous comptons toutes les taxes qui sont payées par un membre de cette famille -- mon mari, puisque c'est le seul de la famille qui travaille -- même s'il a un très bon salaire, ce qu'il rapporte à la maison après impôts est très décourageant. Au Canada, on paie presque plus d'impôts qu'on ne gagne d'argent.

Les cotisations d'assurance-emploi et celles du Régime de pensions du Canada viennent tout juste d'augmenter. Devinez quoi: mon mari vient d'obtenir une petite augmentation, et son chèque de paie est inférieur à ce qu'il me donnait d'habitude, à cause de l'augmentation de ces deux cotisations. J'ai deux enfants qui vont à l'université et je n'ai pas le choix. Quand je fais mes courses, monsieur le président, je dois faire attention et je m'efforce de toujours acheter les vêtements en solde, mais de bonne qualité. Actuellement il n'y a pas de taxes, sauf la TPS, qui est de 7 p. 100. Dorénavant il y aura 15 p. 100 sur les vêtements. La même chose pour les chaussures.

Qu'adviendra-t-il des pauvres? Ils ont besoin de s'habiller. Ils ont besoin de chaussures. Il leur faudra sortir 8 p. 100 de plus. Où prendront-ils l'argent? Riche ou pauvre, une maison ou un appartement, ça se chauffe. Le mazout coûtera 8 p. 100 de plus. Par exemple, ma dernière livraison approchait les 300 $. La prochaine approchera probablement 324 $. Le mazout est livré toutes les trois semaines pendant les mois d'hiver. Qu'arrivera-t-il à ceux qui n'ont pas beaucoup d'argent et qui ont un budget très serré?

Le chef de l'opposition conservatrice au Sénat, M. John Lynch-Staunton... je ne sais pas s'il est là.

Le président: Non, il n'est pas là.

Mme Moores: J'ai lu dans le journal que son parti veut essayer de modifier ou de repousser le projet de loi en troisième lecture au Sénat la semaine prochaine. Je veux simplement ajouter un petit commentaire personnel qui ne figure pas dans notre document.

Sénateurs, vous savez qu'on a parlé de votre situation dernièrement dans les médias: les sénateurs ne servent à rien, ils ne sont là que pour toucher une belle pension de retraite et les dividendes de services politiques rendus. Quoi qu'il en soit, je tiens à vous remercier de l'initiative que vous avez prise cette fois-ci. C'est la preuve que nos sénateurs à Ottawa peuvent faire quelque chose. C'est un commentaire personnel, et je vous suis reconnaissante de votre initiative.

Je veux vous parler de voitures d'occasion. Quand on n'a pas trop d'argent, c'est ce qu'il faut envisager. Avant cette taxe, sur un tel achat on payait 11 p. 100 de taxe provinciale. Désormais, avec la nouvelle TVH, ce sera 15 p. 100 -- et je ne parle que de voitures d'occasion. Comme je viens de vous le dire, le mazout me coûtera 24 $ de plus la prochaine fois. Les vêtements et les chaussures... il y aura 8 p. 100 de taxe de plus sur tout.

Je tiens à citer certains des propos d'hier de M. Gillis. Je serais venue s'il avait fait plus beau. Il vous a dit que l'harmonisation de cette taxe représentait une diminution du fardeau fiscal pour la Nouvelle-Écosse. Il vous a dit: «Ce n'est pas une taxe de plus; c'est un abattement. Nous ferons rentrer environ 100 millions de dollars de moins chaque année dans les caisses.» Nous sommes déjà pauvres. Je ne vois pas comment ils peuvent nous donner tout cet argent en nous faisant payer plus de taxes. Je ne comprends pas. Il y a beaucoup de choses que nous ne comprenons pas et que nous devons accepter sans rien dire.

Quel sera le prix pour les pauvres et pour les classes moyennes? La Nouvelle-Écosse est l'une des provinces les plus pauvres du Canada. Surtout après tout ce qu'ils ont fait aux pêches. Quel est l'objectif? Qu'est-ce qu'on essaie de faire? Les riches s'enrichiront et les pauvres s'appauvriront. Les riches, plus; les pauvres, moins.

Relativement aux achats, je peux vous donner un autre exemple auquel j'ai songé. Je connais des gens qui ont de l'argent. Ils ont de bons emplois et sont prêts à dépenser quelques dollars pour s'acheter de belles choses. Par exemple, les hommes se rendent dans les boutiques du chemin Spring Garden ou de la place Barrington -- et ceux d'entre vous qui viennent parfois dans la région ont peut-être eu l'occasion de visiter ces mêmes boutiques -- et ils acceptent de payer jusqu'à 100 $ pour une cravate s'ils en ont besoin. Ces hommes économiseront 3,8 p. 100 chaque fois qu'ils feront un tel achat, parce qu'ils paient maintenant une taxe de 18,8 p. 100.

Un autre exemple serait celui d'une femme qui va dans une boutique pour acheter un chemisier de soie qui coûte 125 $. Elle pourra elle aussi mettre 3,8 p. 100 dans sa poche chaque fois qu'elle fera un tel achat. Les riches qui en ont les moyens feront donc des achats et empocheront 3,8 p. 100 chaque fois. Cela leur donnera plus d'argent à dépenser pour autre chose.

Je sais qu'il y a des riches en Nouvelle-Écosse, mais ils ne constituent pas la majorité. Comme d'autres avant moi l'ont signalé, je pense que nous devrions aussi essayer de nous entendre avec les autres provinces pour avoir un régime plus stable qui permettra d'appliquer la même taxe partout dans le pays. Sinon, il y aura beaucoup de confusion pour les touristes ici et ailleurs.

Sénateurs, je vous incite à remanier sérieusement le projet de loi C-70 avant qu'il ne soit trop tard et de faire en sorte que les taxes soient moins dispendieuses pour les pauvres, les citoyens ordinaires et les classes moyennes de tout le Canada. Les Maritimes ne sont pas une région riche. Pourquoi permettrions-nous qu'on nous impose quelque chose d'aussi ridicule et pourquoi serions-nous les premiers à en souffrir? Nous serons effectivement les premiers. Nous sommes les plus pauvres, mais devons-nous donner l'exemple? Qu'est-ce que notre gouvernement provincial veut prouver ou obtenir?

Je vous remercie de m'avoir écoutée. Je ne suis qu'une femme comme les autres.

Mme Debbie Kelly: Une chose que je veux dire aux membres du comité, c'est que je les remercie beaucoup d'être venus permettre aux citoyens de la Nouvelle-Écosse de donner leur avis sur la TVH, ce qui n'a pas été le cas pour le projet de loi 91 de la province, sur lequel nous n'avons pas pu nous exprimer.

Je suis venue exprimer mon point de vue personnel et celui de ma famille et d'autres citoyens comme moi qui savent que nous allons souffrir à cause de la TVH. On vous l'a certainement déjà dit, mais le mazout deviendra bientôt trop cher pour nos moyens. J'essaie déjà de faire des calculs pour voir où je peux réduire mes dépenses pour pouvoir payer le mazout, l'électricité et les nécessités de la vie. J'ai chez moi une lettre de mon fournisseur de mazout que j'ai reçue ce mois-ci et qui me dit que le prix du mazout vient d'augmenter de 39 p. 100. L'année dernière, notre facture d'électricité a augmenté de 6 p. 100.

Mon salaire est toujours le même, mais tout le reste a augmenté. Maintenant, on veut faire payer de la taxe sur les aliments essentiels, et même sur le mazout. On nous enlève même notre dignité pour que nous puissions vivre et mourir ici. La Nouvelle-Écosse a déjà été suffisamment durement touchée. Si j'avais les moyens de payer 100 $ pour une paire de souliers, je ne serais pas venue ici vous parler; je serais bien à l'aise chez moi. Tout augmentera à cause de cette taxe: le coût du chauffage, des aliments, de l'électricité et des vêtements. Vous devez comprendre que les gens ordinaires comme moi ont du mal à joindre les deux bouts. Je veux parler de la classe moyenne, puisque je me considère comme faisant partie de la classe inférieure ou moyenne. Cela fait 15 ans que je lutte pour garder ma maison, et je lutte encore. Il faudrait que les politiciens le comprennent.

Nous sommes très heureux que le Sénat puisse aider à prendre une décision et à faire quelque chose pour les Néo-Écossais comme moi pour empêcher que nous soyons obligés d'endurer une telle chose et pour qu'on puisse jeter cette taxe aux ordures comme elle le mérite.

Dans le domaine des soins de santé à domicile, j'ai moi-même été victime des coupures dans les soins de santé. Mon père aussi. Nous avons dû mendier pour obtenir le moindre service à domicile. Ces soins n'étaient pas fournis par la province, mais par des compagnies du secteur privé. Ces compagnies ont fourni à mon père les soins dont il avait besoin, et nous avons dû mendier pour tout obtenir, et mon père a dû verser la moitié de sa pension pour payer. Cette nouvelle taxe aurait augmenté le montant qu'il devait payer pour ses soins à domicile, à partir du prix de location de son fauteuil roulant jusqu'à ses bonbonnes d'oxygène 24 heures sur 24, l'infirmière-visiteuse, et tout le reste.

Sénateurs, je vous supplie à genoux de vous débarrasser de cette taxe, de l'éliminer et de la mettre aux ordures, parce que nous n'en voulons pas. Si nous voulons une harmonisation de la taxe, nous ne voulons pas qu'on relève la taxe sur les nécessités de la vie. Je ne vois pas comment quiconque aurait pu vouloir que la taxe s'applique à ces choses. Je ne comprends vraiment pas pourquoi quelqu'un voudrait percevoir une taxe sur des choses essentielles. Y en a-t-il parmi vous qui ont déjà essayé de subsister en mangeant du macaroni tous les jours pendant des années? Ou qui ont essayé de faire en sorte qu'un paquet de saucisses fumées dure un mois simplement pour pouvoir manger un peu de viande?

C'est à peu près tout ce que j'ai à dire, et je sais que bien d'autres témoins ont déjà dit la même chose. Je vous remercie de m'avoir écoutée, et j'espère bien que nous réussirons à vous faire comprendre notre situation.

Le président: Je constate, monsieur White, que vous nous avez remis un mémoire de huit ou neuf pages. Pourriez-vous nous en décrire les points saillants au lieu de le lire en entier?

M. Wade White: J'ai déjà condensé la version plus longue. Je suis venu ici essentiellement pour représenter les pauvres et ceux qui seront le plus touchés par l'application de la TVH prévue dans le projet de loi C-70.

Tout d'abord, je dois dire que nous sommes au courant du référendum national auquel nous avons participé déjà. M. Chrétien a fourni à M. Bouchard les moyens de provoquer un autre référendum en présentant cette loi sur la taxe de vente harmonisée. J'ai consulté le dictionnaire pour trouver la définition de «distinct» et cela signifie différent, dissemblable, séparé, autre, clair, explicite. Tous ces adjectifs peuvent être utilisés pour définir la façon dont le gouvernement fédéral a décidé d'administrer et de mettre en oeuvre la taxe de vente harmonisée dans la région de l'Atlantique.

La loi sur la taxe de vente harmonisée décrit et appuie une société distincte. Je ne pense pas que le gouvernement de M. Chrétien se rende compte des problèmes qui pourraient découler de la taxe de vente harmonisée une fois que la loi sera entrée en vigueur. La Constitution du Canada se fonde sur des ententes provinciales. Une fois que l'on commence à jouer avec nos ententes provinciales, il devient nécessaire de modifier la Constitution.

Les taxes font vraiment partie de notre association de provinces. Je suis convaincu que si la loi sur la taxe de vente harmonisée redéfinit ce principe fondamental, cela modifiera l'association des provinces au sein de la Constitution. La loi sur la taxe de vente harmonisée appuiera donc le projet de séparation du premier ministre Bouchard. Lorsque le Sénat examinera la loi sur la taxe de vente harmonisée, je vous prie de garantir que la mesure législative ne modifiera pas les ententes d'association des provinces qui définissent notre Constitution canadienne et n'y fera pas obstacle.

Je voudrais maintenant vous décrire les pauvres, monsieur le président, c'est-à-dire ceux qui seront le plus touchés par cette taxe. Il s'agit des personnes âgées, des gagne-petit, des étudiants et des assistés sociaux. Vu les choses auxquelles la taxe de vente harmonisée s'appliquera, elle touchera chaque personne, chaque entreprise et chaque association de la région de l'Atlantique.

Monsieur le président, je n'ai pas l'intention de me contenter de vous lancer des critiques sans vous proposer de solution. Si l'on veut atténuer le coût supplémentaire de la taxe de vente harmonisée pour les pauvres et les consommateurs, on pourrait redistribuer les économies que M. Gillis nous a annoncées aux pauvres et aux consommateurs grâce au programme de remboursement de la TPS fédérale. Si l'on augmentait le montant du remboursement de la TPS et le nombre de versements, cela aiderait non seulement les pauvres, mais aussi les entreprises et l'ensemble de l'économie de l'Atlantique.

Je sais que le projet de loi C-70 ne porte pas sur la TPS. Je sais qu'il s'agit d'une taxe distincte. Cependant, au lieu d'isoler la région de l'Atlantique et de la définir comme une région pauvre et au lieu d'aller à l'encontre des politiques fiscales qui touchent tout le pays, le gouvernement aurait dû se servir du régime de la TPS qui existe déjà au lieu de créer une chose que personne ne comprend et qui fait du tort à tout le monde. On aurait pu aider tout le monde grâce au programme de remboursement de la TPS qui est déjà établi. Cela permettrait d'aider ceux qui en ont le plus besoin. Lorsque vous allez acheter une paire de bottes à votre enfant, ou même simplement une tranche de saucisson de Bologne... vous considérez peut-être une tranche de saucisson comme une chose tout à fait ordinaire, monsieur le président, mais ce n'est pas le cas de la majorité des Canadiens de la région de l'Atlantique.

Le système de remboursement de la TPS se fonde sur la consommation, tout comme la TVH. Si l'on distribue les économies réalisées grâce au régime de la TPS, ce sera une façon acceptable d'aider ceux qui seront le plus touchés par la mise en oeuvre de la taxe de vente harmonisée. La TPS existe déjà partout dans le pays. Si l'on incluait dans le remboursement de la TPS le remboursement pour la TVH, ce serait conforme à ce qui se fait ailleurs dans le Canada, sans parler de nos ententes d'association et de la Constitution du Canada.

Le remboursement de la TPS serait facile à administrer pour chaque contribuable sans toucher à d'autres sources de revenu, qu'il s'agisse de mesures sociales du gouvernement ou du revenu d'affaires d'une entreprise du secteur privé. Le système de remboursement de la TPS n'est nullement partial et il aiderait les parents qui n'ont pas la garde des enfants, de même que les parents qui ont la garde de leurs enfants et les personnes âgées, et cetera.

La taxe de vente harmonisée coûtera très cher aux entreprises. Je conseille au comité du Sénat de modifier le projet de loi pour supprimer le prix comprenant la taxe. Cela aidera les entreprises. Elles sont elles aussi des assistées sociales. Les temps sont durs pour tout le monde.

Le coût pour les entreprises de la région de l'Atlantique de rajuster leurs prix peut aussi être pris en compte dans le cadre du programme de remboursement de la TPS pour les entreprises si l'on décide de se servir de ce système plus tard. On pourra pour cela se servir des économies que les gouvernements pensent réaliser grâce à la mise en oeuvre de la taxe de vente harmonisée dans la région de l'Atlantique. Le fait d'utiliser le système de remboursement de la TPS pour les entreprises pour mettre en oeuvre la loi sur la taxe de vente harmonisée fera économiser de l'argent aux entreprises de la région. Revenu Canada se sert déjà du programme de la TPS. Autrement dit, on ne serait pas obligé de créer un autre organisme pour s'occuper simplement de la région de l'Atlantique.

La loi sur la taxe de vente harmonisée n'harmonise pas vraiment les taxes fédérales et provinciales. Prenons l'exemple d'un lait frappé, monsieur le président. Vous avez une boule de crème glacée, un pichet de lait et de la vanille. Très bien. Disons que la crème glacée est la taxe du gouvernement fédéral, le lait la taxe provinciale, et la vanille, qui rehausse le goût, la taxe municipale. Monsieur le président, quand je fais un lait frappé, je mets la crème glacée, le lait et la vanille dans le mélangeur et j'obtiens une chose qu'on appelle un lait frappé. C'est une erreur de parler d'une taxe intégrée. Pour moi, intégré signifie unique. Quand vous parlez de la taxe, vous parlez encore d'une taxe fédérale de 7 p. 100 et d'une taxe provinciale de 8 p. 100. Pour moi, ce n'est pas une taxe intégrée. Je vais maintenant résumer.

Monsieur le président, le fait est que la taxe de vente harmonisée prévue dans le projet de loi C-70 est vraiment grotesque. Si vous ne pouvez vraiment pas l'éliminer, je vous prie de songer aux entreprises de la région de l'Atlantique et de supprimer la disposition relative au prix comprenant la taxe.

M. Leo Greenwood: Je représente les gagne-petit. Je suis chauffeur de taxi à Dartmouth. Il y a bien des raisons pour lesquelles tous les habitants de la Nouvelle-Écosse pensent qu'ils ne devraient pas être obligés de payer ou de faire payer la TVH. Je vous en donnerai seulement deux. Les membres de l'industrie du taxi, conformément aux saines pratiques commerciales, fournissent des services de transport au public et satisfont à des besoins auxquel ne répond pas le système de transport public de la région. Nous devrions donc être exonérés de la TVH au même titre que tous les autres moyens de transport public. Le seul mode de transport qui fonctionne 24 heures sur 24 dans la municipalité régionale de Halifax, c'est l'industrie du taxi. Le service d'autobus s'arrête vers minuit et reprend seulement à six heures le matin, mais il est exonéré de la TVH. Il n'y a aucune raison pour laquelle les chauffeurs de taxi ne devraient pas être exonérés de la TVH tout comme les autobus.

La deuxième raison, c'est que, à ma connaissance du moins, personne dans l'industrie du taxi des provinces de l'Atlantique ne fait plus de 30 000 $ par année. C'est l'une des raisons pour lesquelles bien d'autres entreprises sont exonérées de la TPS: elles ne font pas des recettes de 30 000 $. Malheureusement, nous sommes la seule industrie qui était exemptée de cette disposition, et nous devons payer la taxe. Vu que nous ne faisons pas beaucoup d'argent, cela représente un coût énorme pour l'industrie du taxi de la municipalité régionale de Halifax.

Depuis neuf ans, l'industrie du taxi de la zone de Dartmouth n'a pas relevé le prix de ses courses, sauf de 7 p. 100, à cause de la TPS, ce qui nous a d'ailleurs fait perdre 25 p. 100 de nos recettes. Si nous ajoutons encore 8 p. 100 au prix de la course, cela nous fera probablement perdre encore de 20 à 25 p. 100 de nos recettes. Il ne nous restera plus rien.

Nous ne savons pas quoi faire. Nous ne savons pas comment les gagne-petit qui essayent de se rendre au travail à quatre ou cinq heures du matin et qui n'ont pas d'autre moyen de transport vont se débrouiller pour payer ce coût supplémentaire. Les membres de l'industrie du taxi se demandent pourquoi on accepte d'exonérer une partie du système du transport public de la TPS, et pas l'autre. Nous n'arrivons pas à le comprendre et nous demandons aux sénateurs d'en tenir compte. Puisque nous sommes un élément important du réseau de transport public de la région, nous voudrions être exonérés de la TVH, si possible, et nous voudrions que les sénateurs proposent un amendement à cette fin.

Le président: Sénateurs, notre dernier témoin est M. John Gardiner.

M. John Gardiner: Je suis un ancien propriétaire de garderie de la ville de Halifax qui doit maintenant payer 7 000 $ à cause de la TPS et qui devra payer environ 15 000 $ après l'instauration de la TVH si je veux essayer d'exploiter une entreprise, ce que je trouve tout à fait injuste. C'est Revenu Canada qui m'a présenté cette facture en déclarant que j'ai construit un immeuble que je n'ai jamais construit.

Les autres entreprises ne sont pas traitées de cette façon. Les autres entreprises ne sont pas exonérées de la TPS, mais elles reçoivent des crédits de taxes sur les intrants si elles convertissent un immeuble en vue d'une utilisation résidentielle. Des garderies, il n'y a pas vraiment de conversion, parce que l'immeuble sert déjà de maison dans la plupart des cas. Il ne s'agit pas de prendre un poste d'essence et de le transformer en condo, mais simplement de revendre ce que vous avez déjà. À cause du zonage, je ne peux rien faire d'autre de cette propriété. Je ne peux pas décider d'ouvrir un magasin de peinture ou devenir détaillant en pièces automobiles comme un autre commerçant. À mon avis, je suis traité injustement.

Le président: Honorables sénateurs, cela met fin à nos audiences. Je voudrais dire deux choses. Tout d'abord, et je demanderai au greffier de faire les calculs, nous avons entendu près de 200 témoins cette semaine. Dans certains cas, deux ou trois représentaient la même association, mais nous avons de toute façon entendu environ 200 témoins. Nous avons eu presque 40 heures d'audiences depuis lundi, ce qui est beaucoup, mais au nom de nous tous, je voudrais déclarer que l'expérience a été très utile et très instructive.

Au nom du comité, je tiens à remercier les interprètes, qui ont travaillé très fort pour nous pendant ce voyage, et les sténographes, qui ont eu beaucoup de mal, vu qu'ils sont très peu nombreux, mais qui ont réussi malgré tout à tout noter.

Honorables sénateurs, le comité s'ajourne jusqu'à 9 heures lundi matin. À ce moment-là, M. Martin sera notre dernier témoin, de 9 heures à 10 h 30.

La séance est levée.


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