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Délibérations du comité sénatorial permanent de
l'Énergie, de l'environnement et des ressources naturelles

Fascicule 6 - Témoignages


OTTAWA, le mardi 4 février 1997

Le comité sénatorial permanent de l'énergie, de l'environnement et des ressources naturelles se réunit aujourd'hui à 15 h 30 pour poursuivre l'étude du projet de loi C-29, Loi régissant le commerce interprovincial et l'importation à des fins commerciales de certaines substances à base de manganèse.

Le sénateur Ron Ghitter (président) occupe le fauteuil.

[Traduction]

Le président: Nous souhaitons la bienvenue à notre groupe d'experts. Veuillez commencer.

M. Yves Landry, président-directeur général, Chrysler Canada Limitée: Monsieur le président, merci de nous avoir invités à vous rencontrer pour partager nos opinions au sujet du projet de loi C-29.

Comme vous le savez, il s'agit pour notre secteur d'une question cruciale, puisque nous souhaitons respecter nos obligations en matière d'environnement à l'égard des consommateurs aussi bien que des agents de réglementation. Nous avons donc réuni une équipe solide qui, nous en sommes convaincus, sera en mesure de répondre à toutes vos questions et ainsi de vous permettre de procéder à un second examen objectif, ce qui est votre rôle, tout en assurant l'adoption rapide du projet de loi C-29.

[Français]

Comme aide-mémoire, on vous a distribué la brochure préparée par l'Association canadienne des constructeurs de véhicules. Je sais que vous connaissez tous assez bien l'industrie de l'automobile. Ce que bon nombre de gens oublient, c'est qu'elle est directement ou indirectement responsable d'un emploi sur sept au Canada et qu'à eux-seuls, les trois grands de l'automobile ont investi au-delà de dix milliards de dollars au Canada depuis cinq ans.

Ma présence parmi vous aujourd'hui revêt donc une double fonction, celle de président de l'Association canadienne des constructeurs de véhicules, jumelée à celle de président-directeur général de Chrysler Canada. Je suis accompagné de Mark Hutchins, président-directeur général de Ford du Canada, de Mme Maureen Kempston-Darkes, présidente-directrice générale de General Motors du Canada et de M. Mark Nantais, président de l'Association des fabricants de véhicules motorisés du Canada.

[Traduction]

Bien que nous croyions pouvoir confier toute question technique ou réglementaire à M. Nantais, nous sommes accompagnés de certains de nos ingénieurs principaux.

Monsieur le président, permettez-moi de préciser très clairement le point crucial du débat. L'élimination du MMT du carburant fait l'objet d'un consensus international parmi les experts techniques pour ce qui est du meilleur moyen de réduire les émissions des systèmes des véhicules. L'initiative n'est ni nouvelle, ni canadienne. Pour l'ensemble des fabricants d'automobiles, un peu partout dans le monde, elle correspond à un problème technique important.

Chacun de notre côté nous avons tiré les mêmes conclusions, que ce soit à Stuttgart, en Allemagne, à Toyoto City, au Japon, et à Detroit, aux États-Unis.

Le Canada se situe au coeur même de la question.

C'est en Amérique du Nord que les normes de limitation des polluants sont les plus rigoureuses. Nous avons donc mis au point d'excellents systèmes de limitation des émissions. Cependant, de tels systèmes présupposent la disponibilité de carburants sans MMT, ce qui est la norme aux États-Unis, et devait l'être également ici, selon les assurances que nous avait données le gouvernement canadien.

Or, il existe des produits de remplacement du MMT. Aux États-Unis, par exemple, le ETBE et le MTBE sont déjà disponibles, et d'autres produits de rechange déjà facilement disponibles sont fort acceptables.

[Français]

J'aimerais de plus mentionner que le dossier n'est pas nouveau pour nous. Au contraire, l'essence au MMT est à l'origine de nos préoccupations depuis sa venue il y a quelques vingt ans alors qu'elle avait été adoptée comme solution de rechange afin d'augmenter l'octane dans l'essence sans plomb.

En 1985, Environnement Canada ordonnait une étude indépendante pour déterminer l'impact du MMT sur les émissions des véhicules. L'étude a été effectuée par un groupe de travail multipartie réunissant des intervenants des industries pétrolière et de l'automobile, du gouvernement et de la compagnie Ethyl, sous la direction du comité de la normalisation des formulaires de l'Office des normes générales du Canada. Cette étude a pris fin en 1986.

La conclusion primaire de l'étude reconnut que le MMT augmentait l'émission d'hydrocarbures par le système d'échappement. En conséquence directe de ce constat, Transports Canada contrôle depuis 1986 les normes sur les systèmes d'échappement des véhicules neufs en se servant de véhicules qui font usage de carburant sans MMT.

Au premier abord, on était surtout préoccupés par l'encrassement des bougies et le colmatage des catalyseurs. Or, depuis la venue de la deuxième génération d'ordinateurs diagnostiques, mieux connus sous le nom d'analyseur OBD II, la gravité des problèmes techniques a pris de l'ampleur.

[Traduction]

La présence de MMT dans le carburant fera en sorte que nous ne pourrons respecter les normes antipollution actuelles de la Colombie-Britannique et la réglementation relative aux émissions des véhicules proposée par Transports Canada pour 1998, qui supposaient la disponibilité de carburant sans MMT.

La présence de MMT dans le carburant coûtera passablement cher aux consommateurs en réparations superflues. Elle sera pour eux une source d'irritations, puisqu'elle fera déclencher les voyants lumineux et les obligera à perdre du temps à faire faire des diagnostics. Enfin, la présence de MMT dans le carburant entraînera une détérioration de la qualité de l'air au Canada.

Mesdames et messieurs, mes collègues de Ford du Canada, de General Motors du Canada ainsi que tous les autres fabricants ailleurs dans le monde partagent le point de vue que je viens d'exprimer à ce sujet.

J'aimerais également vous donner certains détails au sujet de la situation chez Chrysler. Nos véhicules de modèle 1997 ont été livrés avec le système de diagnostic intégré OBD-II, un système vulnérable au MMT, et nos clients risquent d'être importunés. Les manuels du propriétaire de 1997 contiennent des avertissements au sujet de l'utilisation de carburant contenant du MMT. Nous serons vraisemblablement obligés d'enlever les systèmes antipollution perfectionnés des voitures de 1998 si le projet de loi C-29 n'est pas adopté dans les meilleurs délais. Nous aurons bientôt à prendre une décision à ce sujet.

Nous avons déjà annulé l'introduction du premier véhicule canadien à émissions réduites, la Néon Verte, même si nous avions déjà annoncé en 1995 que cette voiture serait disponible en Colombie-Britannique et ailleurs au Canada à partir de 1997.

Je vais maintenant céder la parole à mes collègues, Mark Hutchins et Maureen Darkes, qui vont vous dire très clairement quelles répercussions aurait sur l'industrie en général et sur leurs sociétés en particulier le fait de ne pas adopter le projet de loi C-29 dans les meilleurs délais. Ensuite nous céderons la parole à M. Mark Nantais, président de l'Association canadienne des constructeurs de véhicules, qui vous donnera une brève description technique des répercussions du MMT sur nos systèmes.

M. Mark Hutchins, président, Ford du Canada: Je m'appelle Mark Hutchins. Je suis président-directeur général de la société Ford du Canada. Je suis très reconnaissant de l'occasion qui m'est donnée de vous parler aujourd'hui au sujet du projet de loi C-29. Il s'agit d'une question d'importance cruciale pour Ford, pour nos concessionnaires et, ce qui importe encore davantage, pour nos clients.

Certains d'entre vous ne seront pas surpris que je leur dise aujourd'hui que Ford du Canada ne se limite pas à vendre des voitures et des camions, et ce, même si nous avons assemblé plus de 500 000 véhicules et vendu plus de 270 000 voitures et camions à des consommateurs canadiens l'an dernier.

Bref, l'objectif véritable de notre société consiste à satisfaire la clientèle. Pour réussir en 1995, le fabricant d'automobiles doit déterminer avec exactitude ce que souhaite le consommateur et le lui fournir de la façon la moins coûteuse et la plus efficace possible.

Le consommateur d'aujourd'hui, aussi bien au Canada que partout dans le monde où nous exportons nos produits, exige des véhicules de grande qualité, de haute technicité, qui soient en mesure de répondre aux normes les plus exigeantes et de le faire de la façon la plus écologique possible.

Pour répondre aux besoins de la clientèle, les véhicules fabriqués aujourd'hui sont munis du matériel antipollution le plus avancé sur le plan technique. L'élément clé en est le OBD-II, soit notre système de diagnostic intégré de deuxième génération. Il s'agit d'un système totalement intégré de limitation des émissions. C'est l'aboutissement des efforts de mise au point consentis par Ford depuis le milieu des années 80, efforts qui lui ont coûté plusieurs centaines de millions de dollars.

De plus, comme on vous le dira aujourd'hui, d'autres fabricants d'automobiles ont mis au point leur propre système au cours de la même période. Les automobiles et camions légers que nous vendons aujourd'hui sont munis du matériel antipollution le plus récent, qui élimine 98 p. 100 des hydrocarbures, 96 p. 100 de l'oxyde de carbone et plus de 90 p. 100 des oxydes d'azote des gaz d'échappement des véhicules.

Les consommateurs canadiens qui achètent et conduisent ces nouveaux véhicules le font en sachant que leurs émissions sont nettement réduites par rapport aux niveaux d'il y a quelques années seulement.

Cependant, les consommateurs canadiens n'auront accès à un tel niveau de protection de l'environnement que si les carburants canadiens sont libres de MMT. L'additif d'essence MMT a un effet extrêmement néfaste sur les systèmes d'émission des véhicules modernes. L'utilisation de MMT dans l'essence entraîne des dépôts importants de manganèse sur certaines composantes essentielles des systèmes, y compris les bougies d'allumage, les détecteurs d'oxygène et les convertisseurs catalytiques. En se dégradant, ces composantes réduisent l'efficacité du moteur et du catalyseur et accroissent les rejets de polluants dans l'atmosphère.

Le matériel antipollution de pointe qui est la norme pour tous les véhicules produits aujourd'hui n'aura pas le rendement prévu si le carburant contient du MMT. Or, les consommateurs canadiens exigent des véhicules plus efficaces sur le plan de l'écologie et paient pour qu'ils soient dotés de ce qu'il y a de plus avancé en fait de matériel antipollution, et ils sont pourtant privés des avantages de cette technologie du fait qu'ils utilisent du carburant additionné de MMT.

Et comme s'il n'était pas suffisant que les consommateurs canadiens soient privés des avantages des dispositifs antipollution, ils risquent en plus d'assumer des frais d'entretien plus élevés en raison des dommages causés par le MMT à certains organes du véhicule.

Ainsi, sans que ni eux ni la société Ford en soient responsables, nos clients doivent se contenter d'un rendement amoindri et de dépenses superflues du fait qu'ils ne peuvent alimenter leurs véhicules avec le carburant qui convient.

Nos clients ont tous acheté leurs véhicules de bonne foi en étant convaincus qu'ils allaient bénéficier du meilleur système antipollution en Amérique du Nord, selon les normes fédérales. Or, à l'heure actuelle et pour les années qui viennent, ils seront de plus en plus déçus à mesure qu'ils se rendront compte que le carburant sans MMT recommandé dans leur manuel du propriétaire n'est pas disponible au Canada.

Il ne manque pourtant pas de données sur les effets du MMT sur les automobiles. Comme l'a déjà signalé mon collègue de Chrysler, les fabricants d'automobiles du monde entier, y compris Ford, ont mis au point de façon autonome leur propre système de diagnostic intégré de deuxième génération et ont constaté que le MMT nuit au fonctionnement efficace de ce système et au rendement du véhicule.

La question a fait l'objet d'abondantes discussions. Dès 1984, les pouvoirs publics ont participé à diverses discussions et ont été saisis de propositions qui définissaient quels étaient et quels allaient être les problèmes liés au MMT. Les pouvoirs publics et le secteur pétrolier savaient à l'avance que le MMT allait être nuisible aux nouveaux systèmes d'émission dont la mise au point visait la conformité à des normes anti-émissions de plus en plus rigoureuses.

Les représentants du secteur pétrolier eux-mêmes le reconnaissaient dès 1984, comme en fait foi un mémoire qu'ils ont soumis au gouvernement à l'époque et que vous avez reçu.

Le gouvernement a cherché à résoudre le problème en adoptant le projet de loi C-29 et en le renvoyant au Sénat pour approbation. Le Sénat a maintenant l'occasion d'agir dans l'intérêt de la protection de l'environnement et des consommateurs de l'ensemble du pays. Il lui suffit d'adopter rapidement le projet de loi C-29.

Le problème est crucial pour Ford, et ce, à un niveau très pratique. Le 13 février 1997, Ford du Canada présentera au public le nouveau modèle Ford Windstar de l'année 1998, construit pour le marché mondial par les 3 500 hommes et femmes de notre usine de montage d'Oakville, en Ontario.

La Windstar sera le premier modèle de l'année 1998 offert au Canada. Cependant, en raison de la non-disponibilité de carburant sans MMT, ce véhicule fabriqué au Canada ne peut respecter ni les normes fédérales canadiennes en matière d'émissions ni celles de la Colombie-Britannique. Par ailleurs, en l'absence de carburant sans MMT, tous les véhicules au Canada finiront par ne pas répondre aux normes d'émission de 1998. Étant donné que plus de 85 p. 100 des Windstar que nous produisons sont exportées aux États-Unis, chaque Windstar quitte Oakville avec un plein réservoir d'essence sans MMT. Savez-vous qui nous vend cette essence? C'est un fournisseur d'essence canadien. Cependant, contrairement aux Windstar 1998, expédiées à des clients aux États-Unis, celles qui seront vendues à nos propriétaires canadiens ne feront plus jamais le plein d'essence sans MMT, à moins que le projet de loi C-29 ne soit adopté. C'est paradoxal, mais c'est surtout injuste pour nos consommateurs canadiens.

Pensez-y bien. Vingt fabricants de véhicules qui vendent des véhicules au Canada ont, chacun de leur côté et dans le plus grand secret, conçu leur propre système de limitation des émissions et de diagnostic intégré, et ils en arrivent tous au même constat: le MMT entraîne la dégradation et le mauvais fonctionnement des systèmes. On peut difficilement trouver mieux comme preuve, sinon nous ne serions pas ici.

Je vous exhorte fortement à agir dans l'intérêt du Canada en adoptant le projet de loi C-29 dès maintenant.

En bref, l'utilisation du MMT dans le carburant canadien abrège la vie des systèmes d'émission, accroît les frais de fonctionnement des véhicules et a des effets néfastes sur l'environnement. Les coûts additionnels de carburant attribuables à la suppression du MMT, comme le montrent des études effectuées aussi bien par le gouvernement que par des entreprises privées, représenteraient moins d'un quart de cent le litre, soit environ 5 $ par année pour l'automobiliste moyen, si l'on suppose que les sociétés pétrolières canadiennes transfèrent ce coût au consommateur canadien. Voilà qui est bien peu, compte tenu des dépenses très considérables que consentent les consommateurs canadiens pour se doter du matériel antipollution intégré le plus récent. Au Canada, les acheteurs de nouveaux véhicules paient chaque année plus de 2 milliards de dollars pour l'achat de matériel antipollution dont sont dotées leurs automobiles et camions. Voilà qui est très considérable. Par comparaison, les coûts accrus potentiels du carburant ou du raffinage sont quasi insignifiants. Ford du Canada, de même que les autres fabricants d'automobiles canadiens, a contribué à produire des véhicules dotés des dispositifs de protection de l'environnement les plus récents. Au tour maintenant du Sénat de veiller à ce que les Canadiens disposent de carburant sans MMT, de manière à ce que nous puissions tous faire ensemble des progrès en matière d'assainissement de l'environnement.

Merci. Je céderai maintenant la parole à Maureen Darkes.

Mme Maureen K. Darkes, présidente, General Motors du Canada Limitée: Je m'appelle Maureen Kempston Darkes. Je suis présidente-directrice générale de General Motors du Canada.

Notre société, comme tous les autres fabricants de véhicules automobiles du Canada, a fort bien réussi à faire réduire les émissions des véhicules depuis les années 70. Comme l'a signalé M. Hutchins, les trois types d'émissions faisant l'objet d'une réglementation -- les hydrocarbures, l'oxyde de carbone et les oxydes d'azote -- ont été réduites de 98, 96 et 90 p. 100 respectivement pour toutes les nouvelles voitures. À mesure que les nouvelles voitures plus propres remplaceront les plus anciennes, les émissions vont continuer de baisser. Nous souhaitons aller encore plus loin en matière de réduction. Cependant, la présence de MMT dans l'essence canadienne nous limite. Voilà pourquoi nous comparaissons aujourd'hui devant vous.

Le système de diagnostic intégré OBD-II représente une technologie de deuxième génération de fine pointe en matière de diagnostic. Ce système contrôle le moteur et le système antipollution et prévient le conducteur de toute défaillance grâce à un voyant lumineux. Nous misons beaucoup sur de tels systèmes dans le cadre de notre stratégie de limitation des émissions, puisque, d'après les données, une faible proportion des véhicules qui circulent sur les routes font partie de la catégorie de ceux que nous appelons les «gros émetteurs». Il s'agit de voitures qui ont été modifiées, qui n'ont pas été bien maintenues, qui ont été mal alimentées en carburant, ou dont une composante du système antipollution ne fonctionne pas comme elle le devrait. Selon nos estimations ces véhicules représentent moins du quart des véhicules-milles parcourus aujourd'hui, mais produisent au moins les deux tiers des émissions totales. Les systèmes OBD-II sont conçus pour détecter de très faibles augmentations d'émissions. Pour l'ensemble du parc automobile, on peut en arriver à une réduction considérable des émissions.

Lorsque les sociétés pétrolières canadiennes ont décidé ensemble qu'elles n'allaient pas de leur plein gré fournir une essence sans MMT aux automobilistes canadiens, nous n'avons eu aucun choix chez General Motors, sinon celui de modifier certains éléments des systèmes OBD-II de manière à ce que nos clients ne soient pas indisposés par le déclenchement des voyants lumineux à cause de dépôts de manganèse dans le moteur résultant de la consommation d'essence contenant du MMT. Nous nous inquiétions du fait que cela entraînerait non seulement un désagrément immédiat, mais aussi, à long terme, une baisse de confiance des automobilistes, ces derniers en venant à ne plus se fier au dispositif de diagnostic intégré comme composante clé de leur système antipollution.

Il devait s'agir d'une mesure temporaire, appliquée seulement jusqu'à ce que l'essence sans MMT devienne disponible pour les automobilistes canadiens. Les ingénieurs de General Motors s'inquiètent depuis de nombreuses années des conséquences des dépôts de manganèse pour les chambres de combustion et pour le matériel antipollution des véhicules. Dès 1988, on a reconnu chez Transports Canada les effets néfastes du MMT sur les dispositifs antipollution, et c'est pourquoi on a accepté l'utilisation de carburant sans MMT dans les tests de certification fondés sur l'accumulation du kilométrage. Même Ethyl Corporation reconnaît que 80 p. 100 du manganèse contenu dans le MMT se dépose et s'accumule dans les organes de transmission de nos automobiles. Pour 160 000 kilomètres parcourus, près d'une demi-livre de manganèse s'accumule dans le moteur et les composantes connexes du véhicule. Voilà qui a une incidence directe sur le fonctionnement du système OBD-II.

D'après les données de General Motors, dont nous avons partagé certains éléments avec des représentants de toutes les grandes pétrolières canadiennes, nos clients subissent des pannes touchant les organes de transmission et les systèmes antipollution beaucoup plus fréquemment que les automobilistes des États-Unis, où le MMT n'est pas utilisé. Ces données sur les garanties vont directement à l'encontre des résultats des programmes d'essai d'Ethyl Corporation, selon lesquels aucun problème ne surviendrait en pratique. Également, il ressort clairement de nos données d'essai et de laboratoire que le MMT est le seul agent qui entraîne la détérioration rapide des bougies d'allumage.

Sénateurs, permettez-moi de faire circuler des photographies de bougies d'allumage utilisées dans les véhicules canadiens et américains. Vous constaterez que celles qui ont été utilisées aux États-Unis continuent de fonctionner comme prévu après un plus grand nombre de kilomètres parcourus. Par contre, pour celles qui sont utilisées au Canada, où l'essence contient du MMT, on constate des défaillances à un très faible kilométrage.

Les ratés d'allumage causés par l'accumulation de manganèse sur les bougies entraînent un accroissement des hydrocarbures imbrûlés et de la production d'oxyde de carbone. De plus, le catalyseur, élément clé du système antipollution, subit une dégradation en étant exposé au carburant à l'état brut.

Par ailleurs, le manganèse déposé sur le catalyseur réduit son efficacité, et les émissions d'hydrocarbures, et d'oxydes de carbone et d'azote sont par conséquent plus fortes. Résultat net: une bonne partie des perfectionnements apportés à la conception des automobiles sont annulés dans leurs effets. La détérioration du rendement risque de se produire après quelques milliers de kilomètres seulement et peut s'accentuer progressivement selon la teneur en MMT de l'essence qu'utilise le consommateur.

Or, nos clients veulent avoir des véhicules qui exigent peu ou pas du tout d'entretien. Pour cette raison, ainsi que pour réduire au minimum les émissions, General Motors et la plupart des fabricants d'automobiles mettent sur le marché des bougies de longue durée qui n'ont à être changées qu'à tous les 100 000 ou 160 000 kilomètres. Toutefois, tout comme auparavant, ces bougies peuvent finir par s'encrasser de manganèse à la longue. Nous constatons que les clients sont passablement frustrés de devoir acheter de nouvelles bougies et jeter celles qui ont encore une bonne vie utile, tout simplement parce qu'elles sont encrassées de MMT. General Motors ne constate pas le même problème aux États-Unis, où le MTT continue d'être interdit dans les régions où la qualité de l'air est menacée, comme en Californie et dans l'Est, et là où 18 importantes sociétés pétrolières, y compris les sociétés mères de certains des principaux opposants au projet de loi C-29, ont accepté volontairement de fournir à leurs clients du carburant sans MMT. De toute évidence, on reconnaît aux États-Unis que la qualité de l'air passe notamment par la qualité du carburant.

Les ministres de l'Environnement provinciaux et fédéral ont été prévenus que nous comptons harmoniser les mêmes dispositifs antipollution dernier cri pour que nos clients canadiens puissent disposer des mêmes dispositifs que nos clients américains. Ainsi, les Canadiens obtiendront les mêmes avantages maximums sur le plan de la qualité de l'air au prix le plus bas. Toutefois, afin de pouvoir réaliser cela, nous devons avoir l'assurance que les additifs que contient l'essence ne risquent pas d'abîmer les mécaniques automobiles sophistiquées. Par exemple, à l'instar des États-Unis, Transports Canada a proposé d'imposer aux modèles 1988 des normes de rejet lors de l'utilisation qui sont conçues pour garantir non seulement que les véhicules rejettent de faibles quantités d'émissions aux portes de l'usine, mais aussi que cela est maintenu pendant la majorité de leur durée de vie utile moyenne. Nous souhaiterions souscrire à ces normes, car ainsi les Canadiens bénéficieraient d'un air plus propre, mais parce que le MMT abîme le groupe motopropulseur et le dispositif antipollution de nos véhicules, General Motors sera impuissante tant que l'essence canadienne contiendra du MMT.

Si on retarde l'adoption du projet de loi C-29, nous nous trouvons, nous et nos clients, dans une situation épineuse en Colombie-Britannique, car le gouvernement provincial vient de décréter les normes que nous avions volontairement offert de respecter à l'échelle du Canada. La société Chevron offre volontairement sur le marché de la Colombie-Britannique un carburant sans MMT, alors que les autres pétrolières ne le font pas. Le gouvernement de la Colombie-Britannique, nos concessionnaires dans cette province, nos clients et les constructeurs de voitures attendent impatiemment l'adoption du projet de loi C-29 pour pouvoir respecter la loi de la province.

General Motors mettra ses premiers modèles 1998 en vente au printemps. Si le projet de loi C-29 est adopté dans les plus brefs délais, nous sommes sûrs que le secteur pétrolier pourra promptement se conformer à ses dispositions. Par exemple, les entreprises de raffinage comme Irving ont déjà commencé à produire du carburant sans MMT pour le marché américain. D'autres, comme Imperial Oil, fournissent déjà des millions de litres de carburant sans MMT à toutes nos usines d'assemblage en Ontario et au Québec pour nos essais en usine.

Nous sommes fiers des réalisations remarquables dues à nos efforts pour réduire les émissions de nos produits et de nos procédés. Nous avons dépensé des milliards de dollars depuis 20 ans pour mettre au point des moteurs à plus haut rendement énergétique qui produisent moins d'émissions, et nous avons dépensé des centaines de millions de dollars au Canada seulement pour réduire les émissions de nos installations manufacturières. Si nous l'avons fait, c'est parce que nous voulons contribuer à résoudre les problèmes environnementaux du Canada. Nous demandons tout simplement que nos clients puissent acheter les carburants plus propres qui leur sont indispensables pour bien faire fonctionner leurs véhicules.

Le projet de loi C-29 va garantir que nos clients pourront compter sur du carburant sans MMT, et les Canadiens pourront ainsi tirer la pleine valeur de leur investissement dans un nouveau véhicule tout en bénéficiant d'une qualité de l'air maximale. Je demande que vous adoptiez le projet de loi C-29 immédiatement afin qu'au Canada l'air soit plus propre.

Je souhaiterais maintenant donner la parole à Mark Nantais, qui va conclure notre exposé en expliquant comment le MMT agit sur les dispositifs antipollution.

M. Mark Nantais, président, Association canadienne des constructeurs de véhicules: Notre association représente Chrysler Canada, Ford du Canada Limitée, General Motors du Canada, de même que Volvo Canada, la Société Navistar International, Freightliner of Canada et Western Star Trucks.

Nous nous occupons des problèmes communs à nos membres, et le MMT vient en tête de liste depuis un bon moment. Permettez-moi pendant quelques minutes de vous donner des renseignements précis sur ce que le MMT cause aux pièces composantes des automobiles, et je vais pour cela vous montrer des photographies et des échantillons de pièces d'automobiles que nous avons réunis à cette fin.

M. Hutchins vous l'a dit tout à l'heure, il existe quantité de renseignements quant aux effets du MMT sur les pièces automobiles. Je crois que les membres du comité ont déjà reçu un dossier là-dessus et peuvent en conclure que ce ne sont pas les renseignements qui manquent. J'espère que chacun a son dossier.

Nous pouvons compter sur près de 25 dossiers techniques préparés par la Society of Automobile Engineers entre 1975 et 1994. Ces dossiers ont été constitués par des ingénieurs qui travaillaient pour des sociétés de recherche indépendantes, des ingénieurs en mécanique automobile, de même que par Ethyl Corporation. Vous pouvez prendre connaissance des sommaires de ces dossiers et vous constaterez qu'une grande majorité d'entre eux prouvent que le MMT endommage les dispositifs antipollution des voitures. Il est intéressant de faire remarquer que les seules études qui vantent les effets bénéfiques du MMT ont été préparées par Ethyl elle-même. Malgré tout, quatre des sept études préparées par Ethyl signalent certains problèmes du côté de l'obturation des convertisseurs catalytiques, sur le plan de l'augmentation des émissions et des particules, problèmes reliés au MMT.

En outre, nous vous avons fourni des rapports de l'Université de Waterloo, qui a procédé à une analyse des documents fournis par Ethyl. Ces rapports mettent en doute les méthodes et les conclusions des procédés utilisés par Ethyl, qui se prononce sur les émissions causées par le MMT.

En clair, tous les fabricants de voitures vendues au Canada se sont prononcés indépendamment après avoir conclu que le MMT n'est pas compatible avec les dispositifs modernes qu'exige le respect des normes nationales les plus rigoureuses de contrôle des émissions. Mes collègues participant à cette table ronde vous l'ont dit, et je suis sûr que les représentants des constructeurs étrangers vous diront la même chose plus tard au cours de la journée.

Certains détracteurs du projet de loi C-29 ont demandé d'en retarder l'adoption afin que l'on procède à de soi-disant études indépendantes. Selon moi, étant donné la quantité de renseignements que nous possédons déjà, cette requête est ni plus ni moins une tactique dilatoire.

Toutes ces sociétés savent, étant donné les essais en laboratoire et l'expérience pratique, que les bougies d'allumage, les détecteurs d'oxygène, les convertisseurs catalytiques et les autres composants des dispositifs de rejet et de consommation du carburant sont endommagés par le MMT. Cela signifie des réparations plus fréquentes et des quantités d'émissions plus élevées au Canada qu'aux États-Unis.

Outre les vignettes que General Motors a préparées et qui indiquent que les systèmes de diagnostic intégrés de deuxième génération ne sont pas compatibles avec les carburants canadiens contenant du MMT, nous souhaitons vous montrer aujourd'hui d'autres échantillons et illustrations de pièces d'automobiles afin que vous compreniez mieux les conséquences de l'utilisation du MMT.

Il y a tout d'abord les détecteurs d'oxygène, qui constituent une composante essentielle des épurateurs d'échappement actuels.

Prenez par exemple le cahier de Ford. Monsieur le président, avec votre permission, j'aimerais distribuer certaines choses aux membres du comité.

Dans une première photographie, on compare deux détecteurs d'oxygène: le premier est celui d'une Windstar 1995, 3,8 litres, canadienne, qui a parcouru environ 37 000 kilomètres, et c'est l'image que vous voyez à gauche de la page. À droite, vous avez le détecteur d'oxygène d'une Windstar, 3,8 litres, américaine, de 1995, ayant parcouru environ 56 000 kilomètres. Entre-temps, j'aimerais distribuer, pour que l'on puisse faire des comparaisons, un détecteur d'oxygène flambant neuf afin que vous puissiez le comparer aux deux détecteurs, le canadien et l'américain que vous voyez sur la photo.

Le détecteur d'oxygène canadien, à gauche, est enrobé d'une substance rougeâtre, qui est de l'oxyde de manganèse. Celui de droite, qui appartient au véhicule américain, alimenté avec un carburant ne contenant pas de MMT, n'est pas enrobé de quoi que ce soit, et il est propre et de couleur blanche. Quand le technicien a retiré ce détecteur d'oxygène du véhicule américain, il fonctionnait encore parfaitement bien. Le détecteur canadien comportait des défectuosités, à telle enseigne que le voyant indicateur de dérangement s'était activé.

Dans le cas du véhicule canadien, le détecteur défectueux a été retiré par le technicien. Il est important de faire remarquer que le véhicule américain a pu rouler 11 000 kilomètres de plus que le véhicule canadien sans que l'on puisse constater une accumulation d'oxyde de manganèse ou une défectuosité quelconque.

Les autres photos de détecteurs d'oxygène que vous trouverez dans les pages suivantes signalent des problèmes identiques pour d'autres couples de véhicules canadiens/américains. Dans chacun des cas, on constate sur le véhicule canadien, fonctionnant au carburant contenant du MMT, des signes d'encrassement à l'oxyde de manganèse et le déclenchement du voyant indicateur de dérangement.

Il y a une autre composante essentielle du dispositif antipollution, et c'est le convertisseur catalytique. Cette composante a pour fonction de convertir les gaz d'échappement et de réduire les niveaux d'oxydes d'azote, d'émissions d'hydrocarbures et de monoxyde de carbone rejetés par le tuyau d'échappement.

Si vous passez à la section portant sur les convertisseurs catalytiques, vous trouverez une série de photographies qui illustrent le problème que connaissent tous les fabricants de véhicules. On constate plus particulièrement que sur ces convertisseurs catalytiques il y a des dépôts d'oxyde de manganèse, à la surface, qui causent des défaillances de fonctionnement mesurables.

Permettez-moi de vous signaler que le dépôt rougeâtre qui semble collé sur la majeure partie de la surface de ce convertisseur catalytique est un dépôt d'oxyde de manganèse.

Prenez la 4e photographie, celle du convertisseur catalytique que l'on a retiré d'une Thunderbird 1982, 2,3 litres, ayant circulé en Alberta sur environ 214 674 kilomètres. Comparez ce convertisseur catalytique à celui d'une Thunderbird 1987, 2,3 litres, ayant circulé à Philadelphie, en Pennsylvanie, sur 190 476 kilomètres. Étant donné que ces véhicules sont munis de moteurs identiques et de dispositifs antipollution identiques, on peut tout à fait les comparer, mais il y a une différence énorme, car le convertisseur catalytique du véhicule canadien, ayant fonctionné à l'essence contenant du MMT, est enduit d'un dépôt sur sa surface. L'analyse de ce dépôt rougeâtre qui colle aux parties névralgiques du convertisseur catalytique prouve qu'il s'agit d'oxyde de manganèse.

J'ai apporté aujourd'hui pour vous les montrer les convertisseurs catalytiques eux-mêmes. M. Hutchins tient entre ses mains le convertisseur de la Thunderbird 1987 américaine. L'autre est celui du véhicule canadien. Vous voyez encore là la photographie qui montre un dépôt brun très dense sur la surface du convertisseur.

Le président: Pouvez-vous nous expliquer comment fonctionne le convertisseur catalytique, car certains d'entre nous n'ont que des notions techniques élémentaires?

M. Nantais: Je vais essayer de réduire les choses au plus simple possible. Le convertisseur catalytique réduit les émissions d'hydrocarbures, d'oxydes d'azote et de monoxyde de carbone rejetées par le tuyau d'échappement. Je vais demander à un de nos ingénieurs de vous donner de plus amples explications.

M. Ron Bright, directeur, Environnement, Énergie et sécurité des véhicules, Ford du Canada Limitée: Le convertisseur catalytique comporte un revêtement catalytique qui opère la conversion. D'habitude, c'est un métal précieux comme le platine qui produit une réaction chimique permettant de rabaisser les gaz les plus toxiques et les gaz les plus concentrés à une limite respectant les normes.

Le sénateur Taylor: Je remarque du noir et du brun. Quelles sont les couleurs d'origine?

M. Bright: D'habitude, la couleur est beige pâle, mais cela peut varier selon le revêtement.

Le sénateur Taylor: Il y en a un qui est noir. Comment pouvons-nous savoir que celui-là n'est pas obturé par une substance noire, tout comme le brun le serait par une substance brune?

M. Bright: Voilà pourquoi nous avons procédé à une analyse qui a mis en lumière les déficiences. Il y a une différence appréciable d'efficience entre les deux convertisseurs catalytiques. En fait, sur la surface obturée, il n'y a manifestement aucune efficience, car rien ne passe à travers le catalyseur.

Le sénateur Taylor: Je regarde maintenant les photographies des Taurus, 3 litres, du New Jersey et d'Oakville. À mon humble opinion, les deux convertisseurs catalytiques sont en piteux état. L'un est noir et l'autre est brun. Dans un cas, on dirait que l'obturation est due au manganèse et dans l'autre cas, au carbone.

M. Bright: Sur chacun d'eux il y a un enduit. Dans un cas, cet enduit n'est pas aussi néfaste pour le fonctionnement du convertisseur catalytique que l'oxyde de manganèse. Il est indéniable qu'avec le temps les convertisseurs catalyseurs perdent de leur efficacité, mais très peu. En fait, actuellement, étant donné les exigences sur le plan de l'environnement, nous ne pouvons pas nous permettre de perdre plus de 1 à 2 p. 100 d'efficacité. Il y a des années, cette marge était beaucoup plus souple, mais ce n'est plus vrai. Les convertisseurs catalytiques américains nous permettent de respecter les normes actuelles, mais non pas les canadiens.

Le sénateur Spivak: Il y a trois émissions: l'oxyde d'azote, les hydrocarbures et le monoxyde de carbone, n'est-ce pas?

M. Bright: Oui. Il s'agit des gaz qui font l'objet d'un règlement.

Le sénateur Spivak: Et le gaz carbonique?

M. Bright: Il y a aussi le gaz carbonique.

Le sénateur Spivak: Je me demande si le convertisseur catalytique est efficace dans ce cas-là. Pourquoi seulement ces trois émissions-là?

M. Bright: Il s'agit des émissions de gaz visées par un règlement... les hydrocarbures, le monoxyde de carbone et les oxydes d'azote.

Le sénateur Spivak: Et vous me dites que le convertisseur catalytique, ce mécanisme en tout cas, n'a pas d'effet sur le gaz carbonique, n'est-ce pas?

M. Bright: Non, il n'en a pas.

Le sénateur Buchanan: Pour ce qui est de la Taurus 1990 -- celle de Kitchener, en Ontario, qui est comparée à celle de Topeka, au Kansas -- il ne semble pas y avoir de différence.

M. Bright: Si vous prenez le convertisseur de Kitchener, vous constaterez qu'en son milieu il y a beaucoup de cellules qui sont obturées. Toutefois, en comparant avec l'autre, vous voyez qu'il est devenu noir, mais il est encore libre d'obturation. Cela signifie que les gaz y circulent librement, alors que le convertisseur de la Taurus canadienne ne permet plus cela.

Le sénateur Buchanan: Pourquoi y a-t-il une telle différence entre les Taurus -- celle de Kitchener et celle de Topeka -- et les Thunderbird -- celle de Vermillion, en Alberta, et celle de Philadelphie, en Pennsylvanie?

M. Bright: L'accumulation d'oxyde de manganèse dépend de deux facteurs essentiellement. Elle dépend tout d'abord de la quantité de carburant qui passe par ce dispositif, c'est-à-dire la quantité de carburant consommé par la voiture, ce qui se traduit dans la plupart des cas par le kilométrage de la voiture. L'autre facteur essentiel est la quantité de manganèse que contient l'essence. Cela varie d'une compagnie pétrolière à l'autre, d'une région à l'autre, de la quantité de divers pétroles bruts utilisés. Le plein à une station-service n'est pas identique au plein à la station-service suivante.

Le sénateur Buchanan: Voulez-vous dire qu'il y a plus de manganèse dans l'essence que l'on trouve en Alberta que dans celle que l'on trouve à Kitchener, en Ontario.

M. Bright: C'est fort possible. Absolument. Tout dépend du pays et de la marque.

Le sénateur Cochrane: Cet enduit brun est causé par l'utilisation du MMT, n'est-ce pas?

M. Bright: C'est cela.

Le sénateur Cochrane: Avez-vous pris en compte d'autres défectuosités? Pourrait-il être causé par une défectuosité électrique? Pourrait-il s'agir d'une défectuosité mécanique? Comment êtes-vous sûrs que ce soit causé par le MMT?

M. Bright: Nous avons procédé à une série d'essais chimiques pour déterminer la composition de cette substance. À la société Ford, nous avons procédé à un essai dynamométrique sur 42 000 milles où la seule différence entre les véhicules comparés tenait au fait que dans un cas le carburant contenait du MMT. Voilà les résultats que nous obtenons systématiquement quand le carburant contient du MMT.

M. Nantais: Pour ce qui est du dépôt d'oxyde de manganèse, qui augmente avec l'augmentation du volume de carburant utilisé, je vous demanderais de vous reporter à la dernière photographie du livret. Il s'agit de la photographie d'une Taurus, 3 litres, ayant parcouru 288 000 kilomètres à Welland, en Ontario. On voit clairement la gravité du problème de congestion ici. Voyez à quel point la surface est obturée et quelle est l'épaisseur de l'enduit. Comme l'a signalé Mme Darkes, cela s'explique du fait que 80 p. 100 du manganèse que contient le carburant reste dans la voiture, et une grande partie de ce manganèse se trouve à l'intérieur du convertisseur catalytique. Dans un tel cas, le catalyseur perd de son efficacité et ne fonctionne plus assez bien pour respecter les normes d'émission rigoureuses imposées par le gouvernement fédéral. À cause du MMT, le convertisseur catalytique ne peut plus accomplir sa fonction, soit réduire les émissions.

Il faut savoir que les fabricants d'automobiles ont non seulement à homologuer leurs véhicules pour répondre aux nouvelles normes d'émission ou aux normes d'émission quand elles sont fixées, mais doivent aussi homologuer leurs produits pour qu'ils se conforment à des normes lors de l'utilisation, c'est-à-dire quand une certaine distance a déjà été parcourue. Par exemple, Transports Canada et les autorités de la Colombie-Britannique proposent de nouveaux règlements pour 1998, de sorte que les véhicules devront respecter des normes à l'intérieur d'une fourchette de 120 000 kilomètres d'utilisation. Je vous ai signalé des problèmes réels auxquels sont confrontés tous les constructeurs de voitures sur le marché canadien.

Monsieur le président, avec votre permission, je voudrais distribuer le livret de Chrysler Canada. Chrysler a également réuni une série de photographies qui confirment l'encrassement des bougies d'allumage et l'existence de problèmes dans le cas des convertisseurs catalytiques et des détecteurs d'oxygène.

Les problèmes dans le cas des bougies d'allumage ne sont pas spécifiques à une compagnie, à une seule bougie. À la page 3 de ce livret, vous constaterez que la photographie en haut de la page est celle d'une bougie d'allumage d'un véhicule canadien qui répond actuellement aux exigences des normes d'émission, bougie encrassée par de l'oxyde de manganèse rougeâtre. Cette photographie est importante à plusieurs titres. C'est celle d'une bougie d'allumage de longue durée, 160 000 kilomètres, conçue pour durer durant toute la durée de vie utile du dispositif antipollution. On se sert de plus en plus de ces bougies à cause des normes d'émission plus rigoureuses qui sont désormais imposées. La bougie d'allumage que vous voyez sur cette photographie n'a servi que pendant 42 000 kilomètres, c'est-à-dire pendant environ le quart de sa durée de vie utile escomptée. Dans ce cas-ci, le carburant utilisé ne contenait que la moitié du MMT maximum admis en vertu des normes de l'Office des normes générales du Canada.

Comparez, encore une fois, la bougie canadienne à la bougie d'allumage de longue durée américaine qui ne fonctionne qu'avec du carburant ne contenant aucun MMT. Elle reste propre, n'ayant, aucune trace de dépôt de manganèse ni de cheminement.

D'après l'expérience de Chrysler Canada, les problèmes reliés au manganèse dans les détecteurs d'oxygène et dans les catalyseurs sont les mêmes que ceux mentionnés par les fabricants canadiens et étrangers.

Nous savons tous qu'en 1995 une cour fédérale d'appel aux États-Unis a permis que l'enregistrement du MMT par Ethyl Corporation aille de l'avant. Du point de vue technique, la décision de l'EPA américaine d'interdire pendant 20 ans l'utilisation du MMT a été cassée pour des raisons de procédure, ce qui rendait l'utilisation du MMT possible.

De 1976 à 1995, on ne trouvait pas de MMT dans l'essence sans plomb aux États-Unis, alors qu'il était disponible au Canada.

Même si les tribunaux américains ont cassé l'interdiction, nous croyons savoir que l'EPA cherche par tous les moyens à imposer à nouveau l'interdiction, puisque le jugement du tribunal aurait été fondé sur la procédure, et non pas sur le fond de l'affaire, et parce que l'EPA continue à étudier les répercussions possibles que pourrait avoir le MMT sur les systèmes de diagnostic intégrés.

De plus, l'usage du MMT reste toujours strictement limité, en dépit du jugement des tribunaux américains, tout simplement parce que le MMT ne peut pas être utilisé dans l'essence destinée aux régions considérées comme non accessibles. Il s'agit en général de zones incluant de grandes villes qui connaissent de graves problèmes de fumard et qui sont conséquemment réglementées de façon beaucoup plus sévère qu'ailleurs. L'équivalent canadien de ces zones non accessibles pourrait être, par exemple, le sud de la vallée du Fraser, en Colombie-Britannique, le corridor entre Windsor et Québec et la région de Saint-Jean, au Nouveau-Brunswick.

Dans les documents que nous vous avons fournis, vous remarquerez qu'il se trouve une copie du règlement californien qui maintient une interdiction totale de l'utilisation du MMT dans l'essence. L'imposition conjointe des règlements du gouvernement fédéral et du gouvernement des États fait que le MMT, qui est toujours légal aux États-Unis d'un point de vue technique, ne peut être utilisé sur bien des marchés les plus populeux du pays.

De plus, depuis septembre 1996, Amoco, Anchor Gasoline, ARCO, BP, Chevron, Conoco, Exxon, Hess, Marathon Oil, Mobil, Pennzoil, Phillips, Shell, Sun et Texaco ont toutes affirmé qu'elles n'utilisaient plus de MMT dans l'essence qu'elles distribuaient aux États-Unis. Dans les déclarations faites par l'Environmental Defense Fund, dont je vous ai fait tenir copie, bon nombre de ces sociétés sont même allées jusqu'à dire qu'elles n'avaient pas l'intention d'utiliser le MMT dans un avenir rapproché. Avec votre permission, monsieur le président, j'aimerais que l'on fasse circuler ces déclarations. Vous remarquerez que les sociétés mères de quelques sociétés canadiennes se trouvent citées.

Étant donné toutes ces restrictions qui s'appliqueront à l'utilisation du MMT, tous les fabricants d'automobiles aux États-Unis continuent à mettre au point des véhicules qui sont conçus pour répondre aux normes nationales d'émission les plus élevées, qui, soit dit en passant, ne sont pas compatibles avec l'utilisation du MMT. On a toujours pris comme hypothèse de base que cette substance ne serait pas disponible aux États-Unis, et l'industrie automobile adhère à cette hypothèse.

Le gouvernement canadien a déjà dit qu'il souhaitait harmoniser ses normes d'émission et de sécurité des véhicules avec celles des États-Unis. L'industrie automobile canadienne, qui exporte 88 p. 100 des véhicules fabriqués au Canada vers les États-Unis, souscrit sans réserve à cette déclaration. Une harmonisation des normes ferait en sorte que les véhicules pourraient être produits pour l'ensemble du marché nord-américain et permettrait un maximum d'efficience dans la production et une introduction plus rapide des progrès technologiques dans tout le marché.

Monsieur le président, je vais également vous faire tenir copie d'une déclaration que la MVMA de l'époque, de même que nos collègues fabricants étrangers de l'AFIAC, et l'ICPP ont signée en 1994. Cette déclaration sur l'harmonisation précise que ces derniers s'engagent à fournir des carburants qui répondent aux normes fédérales américaines d'émission et qui aident le fabricant à garantir que ses véhicules respectent ces normes, normes qui incluent le fonctionnement, de même que la satisfaction du client, le rendement et la durabilité. Je vous ferai tenir copie de cette déclaration, puisqu'elle montre bien l'orientation que notre industrie et l'industrie pétrolière ont décidé de prendre d'un commun accord. Malheureusement, cette orientation ne semble pas se traduire par du concret.

De plus, comme mes trois collègues l'ont expliqué à l'unanimité, l'harmonisation ne peut se faire sans que le Canada élimine le MMT de l'essence. Les véhicules conçus et produits dans le but de fonctionner avec de l'essence épurée ne peuvent répondre aux critères de rendement et de durabilité s'ils sont contaminés par le MMT.

Faute de supprimer le MMT de l'essence, au Canada, notre pays se trouvera dans une situation très embarrassante. Il sera impossible d'atteindre les normes d'émission fixées pour 1998, et nous n'aurons d'autre choix que de rabaisser nos normes, ce qui rendra le contrôle des émissions moins strict au Canada qu'aux États-Unis.

Pour conclure, sénateurs, les PDG de trois des plus grandes sociétés canadiennes sont venus aujourd'hui vous faire part de leur inquiétude devant l'inaction du Canada à ce jour en ce qui concerne le MMT. Nous croyons vous avoir fourni suffisamment d'information pour vous permettre de prendre une décision judicieuse. Nous vous avons fourni quantité de chiffres confirmant nos inquiétudes au sujet du MMT. Le Canada est une anomalie dans le reste du monde, puisqu'il continue à permettre l'utilisation du MMT dans l'essence; le gouvernement doit donc agir de façon musclée pour pouvoir rattraper les normes nationales qui sont actuellement imposées aux États-Unis.

Nous vous exhortons à agir promptement, puisque, comme l'a expliqué M. Hutchins, le premier véhicule de l'année 1998 sera mis sur le marché d'ici quelques jours. Plus le Parlement mettra aux voix rapidement ce projet de loi, mieux ce sera pour tous les consommateurs canadiens, pour l'industrie automobile du Canada et pour la qualité de l'air dans notre pays.

Nous répondrons avec plaisir à toutes les questions qui pourraient porter sur ce que nous avons dit.

Le président: Merci de vos exposés fort bien préparés, qui soulèvent beaucoup de questions chez mes collègues.

Le sénateur Kenny: Bienvenue au Sénat. J'aimerais savoir, tout d'abord, pourquoi vous avez demandé à comparaître. Pourquoi utilisez-vous le temps précieux du comité alors que vous menez une guerre contre les grandes compagnies pétrolières et que cette situation pourrait être réglée ailleurs?

Mme Darkes: Cela fait déjà plusieurs années que nous cherchons à régler ce différend avec les grandes compagnies pétrolières. J'ai personnellement rencontré les présidents de plusieurs de ces grandes sociétés pétrolières pour leur demander leur aide. Nous avons toujours essuyé une fin de non-recevoir. À vrai dire, nous croyions que le problème avait été résolu en 1994, au moment où nous avons conclu une entente avec l'Institut canadien des produits du pétrole. L'entente portait sur ce qui suit: le carburant fourni aux consommateurs canadiens devait être compatible avec tous les dispositifs de contrôle des émissions installés sur les nouveaux véhicules pour assurer le fonctionnement convenable de ces véhicules, pour répondre aux demandes des consommateurs et pour respecter les normes d'émission fédérales américaines. De plus, les carburants disponibles à l'échelle commerciale au Canada ne devaient pas empêcher qu'un véhicule respecte les normes de certification s'appliquant aux émissions, ni les normes d'émission en usage, ni même le rendement de la technologie de contrôle de ces émissions pour toute la durée de vie du véhicule.

Voilà l'accord que nous avons conclu avec l'industrie pétrolière en 1994, mais qui est resté lettre morte de leur part.

Si nous sommes ici, c'est parce que nous croyons qu'une loi est devenue nécessaire pour imposer les carburants appropriés aux véhicules au Canada. Faute d'adopter rapidement cette loi, nous nous retrouverons avec toute une autre série de véhicules aujourd'hui sur les routes qui ne pourront répondre aux nouvelles normes d'émission qui sont en instance à l'échelle fédérale ni aux normes d'émission qui doivent être imposées en Colombie-Britannique. Ce projet de loi est nécessaire, et nous avons fait tout ce qui est en notre pouvoir pour nous entendre avec l'industrie pétrolière.

M. Landry: Nos clients risquent d'être très insatisfaits au fil des mois s'ils doivent se faire facturer une réparation non couverte par la garantie, comme par exemple une réparation d'un convertisseur catalytique coûtant de 600 à 1 000 $ ou une réparation de 200 $ en vue de remplacer un détecteur. Tous ces coûts devront être assumés par quelqu'un, que ce soit nous ou le client. L'essence au MMT finira bien à un moment donné ou à un autre par causer des problèmes aux clients. Tout cela est très sérieux, et voilà pourquoi nous sommes ici.

M. Hutchins: D'abord et avant tout, c'est une question de satisfaction des clients, et nous en faisons notre affaire. Nous voulons vendre 1,3 million de véhicules de plus cette année au Canada, et il serait tout de même incroyable de mettre sur la route ces véhicules tout en connaissant fort bien -- comme vous pouvez le voir vous-mêmes sur les photos et d'après les données -- les conséquences que cela peut avoir sur ces véhicules. Après tout, c'est le client qui en fera les frais, que la réparation soit couverte par la garantie ou pas.

Le sénateur Kenny: Mais l'ICPP a laissé entendre plus tôt aujourd'hui que le système de diagnostic intégré de première ou de deuxième génération pourrait ne pas fonctionner pour toutes sortes de raisons, et pas seulement à cause du MMT. Sans vouloir me faire leur porte-parole, ces gens ont dit que la plupart de ces problèmes de fonctionnement étaient dus à d'autres causes. Qu'en pensez-vous?

M. Nantais: Nous avons ici des spécialistes qui pourraient vous répondre parfaitement. Je demanderais à Roger Thomas de répondre.

M. Roger Thomas, gérant, Activités de réglementation dans le secteur de l'automobile, General Motors du Canada: Le système de diagnostic qui existe actuellement était sans doute l'un des plus grands défis techniques que nous ayons jamais relevés. Il a fallu un travail considérable pour concevoir ce système, système qui sert de programme intégré d'inspection et d'entretien des véhicules.

Nous avons connu quelques difficultés de mise au point, mais elles étaient mineures. Toutefois, si vous regardez quel effet nocif a le MMT sur nos véhicules canadiens, les problèmes que nous avons eus sont vraiment minimes.

Mme Darkes: L'ICPP faisait peut-être allusion à un bulletin d'entretien publié par General Motors. À part les carburants, les seules autres choses mentionnées dans le bulletin d'entretien se trouvent être les conditions météorologiques extrêmes, telles que les inondations, qui sont extrêmement rares; l'utilisation de pièces d'équipement qui ne sont pas les pièces originales du manufacturier, ce qui peut effectivement entraîner des problèmes; et les démarrages à répétition dans le froid, surtout si le véhicule ne fait que rouler sur quelques centaines de mètres. J'ai ici un exemplaire de ce bulletin d'entretien, si cela vous intéresse. La plus grande partie de ce bulletin porte sur les carburants, car c'est une question importante dans le cadre des systèmes de diagnostic intégrés de deuxième génération. Les autres cas signalés sont extrêmement rares, mais le bulletin signale que certains carburants contiennent un remonteur d'octane connu sous l'appellation MMT, qui peut nuire aux diverses composantes du dispositif antipollution du véhicule. Cela peut se traduire par des ratés ou par des DTC dans les détecteurs d'oxygène. Le MMT peut également nuire à la capacité du système de diagnostic du convertisseur catalytique de déceler les ratés qui se seraient produits. Une diminution du niveau du carburant pourrait entraîner des pannes d'alimentation, un appauvrissement du fonctionnement du moteur et, éventuellement, un raté par DTC.

Je crois que j'ai ici en main le bulletin dont auraient parlé ces gens, et il est clair qu'il porte surtout sur le carburant en tant que composante du système de diagnostic intégré de deuxième génération. Hormis cela, on fait allusion à des événements exceptionnels, tels que les inondations.

M. Hutchins: Ce qui me semble ironique, c'est de constater, à la lumière de ce qui se passe dans les États du Nord-est des États-Unis et à la lumière des garanties offertes aux États-Unis par rapport à celles qu'offre le Canada, que nous rencontrons des problèmes multiples au Canada qui ont tous à voir avec les bougies d'allumage, avec les convertisseurs catalytiques et avec les détecteurs. Or, la seule différence qui existe entre le Canada et les États-Unis, c'est dans le choix du carburant.

Le président: À cet égard, je me dois de préciser que le bulletin d'entretien de GM dont vous avez parlé, madame Darkes, en dit beaucoup plus long. À première vue, il n'y a qu'un seul paragraphe de deux lignes qui mentionne le MMT. Tout le reste du bulletin mentionne d'autres problèmes. On parle beaucoup de carburant, de déséquilibre dans la pression de vapeur du carburant, de l'utilisation d'un carburant avec le mauvais indice d'octane, du remplissage du réservoir et du capuchon de celui-ci, de la boue, de l'environnement, du comportement routier du véhicule, de vibrations graves et de mauvais entretien, tous des facteurs qui pourraient avoir les mêmes conséquences. Il faut bien avouer que votre bulletin en disait beaucoup plus long.

Mme Darkes: Mais, sénateur, le fait de ne pas acheter des pièces originales, celles du fabricant, constitue un problème que peut gérer le client, tout comme oublier de recapuchonner le réservoir à essence. Mais ce sur quoi le consommateur n'a aucune prise, c'est la qualité du carburant qu'il achète, et c'est justement ce que mentionne le bulletin. Le consommateur n'a aucune prise non plus sur les inondations, mais il peut certainement faire quelque chose pour ce qui est de la qualité du carburant qu'il achète.

Le président: Et le déséquilibre dans la pression de vapeur? N'est-ce pas là un problème technique de construction de l'automobile?

Mme Darkes: Ici encore, nous construisons des automobiles comprenant des systèmes qui permettent d'atteindre un meilleur équilibre de la pression de vapeur. Mais le consommateur ne peut rien changer à la qualité du carburant, puisque ce dernier lui est fourni.

M. Landry: Monsieur le président, on peut dire, l'un dans l'autre, que les problèmes qui surviennent aux États-Unis dans des circonstances semblables se reproduisent ici aussi. La grande différence entre les deux pays, c'est la présence ou l'absence de MMT dans le carburant. Or, c'est cette différence qu'il est possible de supprimer.

Le président: Nous y reviendrons certainement plus tard. Je voulais simplement apporter cette précision.

Le sénateur Kenny: Je crois vous avoir entendu dire qu'opter pour un système de rechange tel que le MTBE coûterait à peu près 7 $ par année au consommateur, ce qui est minime si on compare cela aux centaines de dollars que coûteraient les réparations. Est-ce là le point de vue politique que vous soumettez au comité, à savoir que faute de loi il en coûtera des centaines de dollars de réparations qui devront être assumées soit par le truchement de la garantie, soit par le consommateur, plutôt que de simples frais de 7 $? Est-ce si simple que cela, d'après vous?

M. Hutchins: Tout tourne autour de la satisfaction du client, et c'est la bonne chose à faire. La seule chose que j'essaye de vous faire comprendre, c'est que nous avons investi des millions de dollars dans ces dispositifs, et 15 fabricants d'automobiles ont, indépendamment les uns des autres, installer ces dispositifs dans leurs voitures. Soit dit en passant, aucun de ces dispositifs n'entraîne la présence de MMT.

Vous voyez que tout cet argent a déjà été investi dans ces dispositifs; or, si on empêche que le dispositif fonctionne de façon optimale, la simple présence de MMT pourrait coûter au client de 600 à 1 000 $ s'il doit remplacer son convertisseur catalytique, de 40 à 100 $ s'il doit remplacer ses bougies d'allumage et 200 $ s'il doit remplacer son détecteur d'oxygène. Cela fait un total de 1 500 $. Il est assez ironique de constater que les constructeurs d'automobiles ont déjà investi jusqu'à 1 500 $ par voiture dans ces dispositifs.

Le sénateur Kenny: On a parlé de débrancher l'équipement. Qu'allez-vous faire si le projet de loi n'est pas adopté?

M. Landry: Deux choses se produiront: d'abord, nous ne pourrons respecter les normes antipollution de la Colombie-Britannique, ni non plus les normes antipollution de 1998 pour l'ensemble du Canada. Nous aurons peut-être également besoin d'une clause d'exonération de responsabilité pour tout ce que nous faisons. Nous devrons peut-être également débrancher le système de diagnostic intégré de deuxième génération. Il y aura sans doute d'autres décisions qui en découleront et qui nuiront peut-être au travail déjà entrepris pour assainir l'environnement.

Il y a déjà quelques années, on a assisté au problème des moteurs à quatre cylindres, et notre industrie a dépensé 40 milliards de dollars en peu de temps pour répondre aux normes. Plus les moteurs changeaient, plus il était devenu difficile de respecter les normes, et la méthode choisie a été celle du système de diagnostic intégré de deuxième génération. Ce système est des plus efficaces, dans la mesure où toutes les conditions sont respectées en ce qui concerne l'essence.

À défaut de cela, je ne sais pas ce qui nous attend à court terme et ce que nous pourrons retirer des millions de dollars que nous avons déjà dépensés en recherche et en développement pour en arriver où nous en sommes aujourd'hui.

Le sénateur Kenny: Les trois compagnies font-elles front commun là-dessus?

M. Hutchins: Ford Canada félicite ses collègues de General Motors d'avoir eu suffisamment de vision pour débrancher le voyant lumineux. Nous n'avons pas bougé, pour notre part, croyant que le gouvernement agirait en toute bonne foi et adopterait le projet de loi.

Or, nous allons lancer dès le 13 février le nouveau modèle Windstar 1998, et, à quelques jours près, nous ne savons toujours pas ce qu'il nous faudra faire. Nous espérons que la question sera réglée rapidement ici même, car cela pourrait nous faire gagner beaucoup de temps et nous épargner bien des ennuis.

Mme Darkes: Nous avons débranché les voyants du OBD-II. Nous attendons l'issue de votre réflexion pour déterminer ce que nous ferons pour 1998. Sous peu, nos modèles de 1998 seront distribués sur le marché, mais tant que nous ne saurons pas ce que vous aurez décidé, nous garderons les voyants débranchés.

Le sénateur Taylor: Comment pouvez-vous être si optimistes et croire que la démarche législative se fera aussi rapidement que cela? La question ne sera peut-être réglée que pour les modèles de 2001.

M. Landry: Cela fait longtemps que nous attendons.

M. Hutchins: Nous aussi.

Le sénateur Taylor: J'aimerais savoir du président de Ford de quelle raffinerie il a obtenu son essence sans MMT au Canada?

M. Landry: Nous l'avons obtenue d'Esso et de Shell.

Le sénateur Taylor: Ces deux-là nous ont pourtant dit ce matin que cela leur était très difficile.

M. Landry: Nous savons que c'est Irving qui les approvisionne. Ceux qui sont capables de produire l'essence sans MMT la fournissent aux États de l'Est.

Le sénateur Taylor: Tout comme la raffinerie Irving et celle de Come By Chance.

M. Hutchins: Il y en a beaucoup en Colombie-Britannique. Je crois que Chevron vend de l'essence sans MMT dans 40 p. 100 de la province.

M. Nantais: Chevron fournit 40 p. 100 du marché environ, mais elle produit également de l'essence sans MMT qu'elle distribue dans la partie sud de la vallée du Fraser.

Le sénateur Taylor: Ce n'est donc pas une denrée rare. Je crois qu'on vous l'a déjà dit, mais je suis moi aussi assez surpris de vous voir comparaître.

Si le gouvernement instaure des règlements antipollution, et s'il se trouve que certaines entreprises raffinent déjà et commercialisent déjà de l'essence sans MMT, pourquoi ne laisserait-on pas la libre entreprise suivre son cours? On pourrait dire aux acheteurs de voitures que s'ils utilisent de l'essence sans MMT, ils respecteront les critères, à défaut de quoi les émissions de leurs tuyaux d'échappement feront l'objet de vérifications.

Pourquoi ne pas informer le consommateur et lui dire que s'il utilise de l'essence avec du MMT, vous ne garantirez pas son véhicule, alors que s'il en utilise, vous le protégerez sans réserve?

Mme Darkes: Nous convenons que les consommateurs devraient pouvoir exercer leur choix. Malheureusement, le carburant sans MMT n'est tout simplement pas disponible au Canada. Nous avons demandé aux industries pétrolières de nous aider en s'assurant qu'il y a une pompe distribuant du carburant sans MMT à chaque station-service. Ce serait à l'industrie pétrolière de déterminer la meilleure façon d'y parvenir. Or, l'industrie pétrolière a refusé. Nous avons beau recommander au consommateur d'utiliser de l'essence sans MMT, nous ne pouvons rien faire pour l'aider, puisque cette essence n'est pas distribuée dans les stations-services.

Le sénateur Taylor: Prenez tous ces as de la distribution, comme Mohawk dans l'Ouest, qui fournissent de l'éthanol. Ne pensez-vous pas qu'ils en profiteraient pour sauter à pieds joints dans le marché? Certains sénateurs pourraient même en profiter et s'assurer une bonne part du marché en se lançant dans la vente de l'essence sans MMT. Ne pensez-vous pas que ce type de distribution pourrait supplanter les autres rapidement?

Mme Darkes: Nous sommes aussi surpris que vous de constater que les compagnies pétrolières ont toutes refusé de nous fournir du carburant sans MMT. Par ailleurs, ce n'est pas la première fois qu'une telle chose nous arrive. Au Canada, nous nous sommes heurtés au même problème à l'époque où nous avions besoin de carburant diesel à faible teneur en soufre pour les nouveaux moteurs diesels mis au point pour les camions lourds. Or, nous avons été dans l'impossibilité de mettre la main sur du carburant diesel à faible teneur en soufre, alors qu'il était disponible aux États-Unis.

Il nous a donc fallu plusieurs années d'attente avant de pouvoir installer nos nouveaux moteurs, alors qu'ils étaient déjà distribués aux États-Unis. C'est donc un problème qui ne nous est pas inconnu. Nous avons donc décidé de comparaître pour réclamer ces règlements.

Le sénateur Whelan: Je suis ravi de constater que les trois grands de l'automobile se serrent autant les coudes, puisqu'ils viennent de la même région que moi et que j'ai moi-même travaillé comme outilleur-ajusteur de matrices et dans la fabrication de pièces d'automobiles.

Le sénateur Taylor: Vous n'achèterez plus jamais de voiture japonaise.

M. Hutchins: C'est seulement pour une heure et demie.

Le sénateur Whelan: Qu'arrivera-t-il aux garanties visant les nouvelles voitures si on ne retire pas le MMT de l'essence au Canada? Allez-vous respecter votre garantie?

M. Landry: Tout cela dépendra de ce que cela représentera en tant que coûts multiples. Mais nous n'en sommes pas encore là. Nous devrons prendre sous peu notre décision eu égard aux modèles de 1998. Mais nous avons déjà inscrit une clause de désaveu de responsabilité dans notre garantie, pour imposer le MMT.

Nous avons le choix de débrancher l'OBD-II ou de désavouer notre garantie, mais si vous multipliez le coût par le nombre de voitures sur la route, cela devient astronomique. Aucun d'entre nous ne pourrait individuellement en assumer les coûts.

Le sénateur Whelan: Ce matin, j'ai posé plusieurs questions aux autres témoins. J'ai également cité un de mes gendres bien informé qui est maître technicien chez un concessionnaire General Motors.

Le président: Il devrait venir témoigner.

Le sénateur Whelan: Il est un de ceux qui doivent réparer les pots cassés quand le MMT fait des dégâts. On pourrait en effet lui demander de venir témoigner et d'expliquer aux sceptiques tous les dégâts que fait le MMT. Il pourrait vous expliquer qu'il répare tous les jours des voitures et doit débrancher quotidiennement des dispositifs qui fonctionnent mal et qui détruisent les convertisseurs catalytiques. Il vous expliquera qu'il travaille dans la poussière et que son médecin essaie de le convaincre de porter un masque et un sarrau qui le protégeraient de pied en cap, de façon qu'il respire moins de ces produits chimiques si nocifs.

J'ai déjà parlé à des médecins de la poussière qui sort de ces convertisseurs catalytiques. J'anime une petite émission de radio et j'ai déjà demandé à un médecin du Manitoba de nous en parler. Ce ne sont pas uniquement les coûts du point de vue mécanique qui nous intéressent, mais aussi les risques pour la santé. Je suis sûr que cela vous préoccupe vous aussi.

M. Landry: Bien sûr. Monsieur le président, j'aimerais faire savoir aux sénateurs que M. Whelan conduit une voiture Chrysler.

Le sénateur Taylor: Est-ce pour cela qu'il est toujours en retard?

Le sénateur Whelan: Je conduis une Chrysler depuis 1950, mais ma femme conduit une Ford. Comme nous possédons également une voiture GM, vous voyez que nous n'avons pas de parti pris.

M. Landry: Il est également un excellent politicien.

Le sénateur Whelan: Aux États-Unis, qu'ajoute-t-on à l'essence au lieu du MMT? Est-ce qu'on y ajoute quoi que ce soit?

M. Nantais: Aux États-Unis, on y trouve ce que l'on appelle un pool à indice d'octane plus élevé. Il n'est peut-être pas nécessaire d'ajouter quoi que ce soit à l'essence pour obtenir un octane plus élevé, mais on utilise également plus volontiers le MTBE, qui est facilement disponible et qui est une solution de rechange au MMT tout à fait acceptable, dans la mesure où il faut trouver une solution de rechange. C'est ce que l'on fait généralement.

Le sénateur Whelan: Avez-vous essayé l'éthanol dans vos moteurs ou dans vos usines? Dans ce que vous nous avez montré, on trouve aussi le propane. J'imagine que cela devrait être la même chose avec des véhicules alimentés au gaz naturel? J'imagine que les bougies d'allumage et les convertisseurs catalytiques ne sont pas beaucoup endommagés, n'est-ce pas?

M. Nantais: Comme on le signale dans les manuels du propriétaire, les fabricants d'automobiles acceptent jusqu'à 10 p. 100 d'éthanol dans le mélange d'essence. Cela ne nuit en rien à leurs produits. Soit dit en passant, l'éthanol constitue également une autre solution de rechange acceptable.

Le sénateur Whelan: Je suis un fervent de l'éthanol. Ce matin, les témoins ont laissé entendre que certaines raffineries devraient fermer leurs portes. Ils nous ont expliqué qu'au cours des 15 dernières années de 12 à 15 raffineries ont dû fermer leurs portes, mais pas à cause du MMT.

Vous vous êtes débarrassés des banques et vous financez désormais vous-mêmes la fabrication de vos voitures. Pourquoi ne pas vous lancer sur le marché du raffinage du pétrole?

M. Landry: C'est déjà commencé, sénateur: j'ai commencé moi-même ma carrière dans l'industrie pétrolière, et j'y suis resté environ 10 ans. Nous devrions peut-être en effet nous intéresser au raffinage du pétrole.

Le sénateur Whelan: Il y a de moins en moins de concurrence dans le secteur pétrolier aujourd'hui; on rachète les raffineries pour les fermer. Dans certains cas, on me dit qu'il s'agit d'excellentes installations. Cela ne me semble pas être très avisé parce que dans l'ensemble leur situation financière est assez bonne.

M. Landry: Voilà l'autre chose. Ce n'est pas une question de santé financière. Je trouve dommage que nous soyons allés si loin alors que le besoin est bien là.

Oubliez un instant les trois grands fabricants qui sont représentés ici et pensez à tous les autres qui feront des démarches auprès du comité. Je parle de Honda, Toyota et Mercedes. Ils vous diront essentiellement la même chose: ça ne fonctionne pas s'il y a du MMT dans l'essence. Cela détraque le système. Cela finira par coûter de l'argent à quelqu'un et cela nous empêche d'atteindre les normes que le gouvernement réclame de nous.

Je suis désolé de devoir débattre d'une question qui fait l'objet de recherches indépendantes par tout le monde. Cela se fait dans chaque compagnie. On n'échange pas d'information sur la garantie. Nous arriverions tous à la même conclusion. Cela me dépasse, sénateur.

Le sénateur Whelan: Je suis résolument contre le MMT et je voulais simplement reprendre à mon compte ce que le sénateur Kenny a dit.

J'ai du mal à croire qu'il vous faille venir ici alors qu'il est bien évident qu'une grande partie de la recherche est effectuée aux États-Unis par les mêmes compagnies. Avez-vous rencontré des parlementaires, comme des ministres?

M. Landry: Nous en avons rencontré plusieurs. Nous avons rencontré quelques sénateurs et nous avons promis de les rencontrer tous.

Le sénateur Whelan: Vous avez rencontré des députés aussi, n'est-ce pas?

M. Landry: Oui. Nous avons passé en revue la situation et les sujets de préoccupation. Le projet de loi est actuellement à l'étude en comité. Nous avons hâte que le projet de loi C-29 soit chose du passé, et c'est sans doute la principale raison pour laquelle nous sommes ici.

M. Hutchins: Sénateur, vous avez parlé de mise en garde. Il en est question dans le guide d'entretien. J'ai ici le guide d'entretien de la Crown Victoria 1997. À la page 239, à propos du choix du carburant, je trouve ceci:

L'usage de l'essence avec plomb est interdit par la loi et peut endommager votre véhicule. Il se peut que les dommages ne soient pas couverts par votre garantie. Votre véhicule n'a pas été conçu pour consommer de l'essence contenant des additifs à base de manganèse, comme le MMT.

Plus loin, on y trouve ceci:

Il se peut que votre garantie ne couvre pas les réparations des dégâts causés par l'usage d'une essence pour laquelle votre véhicule n'a pas été conçu.

Les gens nous posent des questions à propos de cela. Chaque acheteur nous dit: «Est-ce que c'est couvert ou pas?»

Le sénateur Rompkey: Ces contradictions m'intéressent.

M. Hutchins, dans sa déclaration, a dit ceci: «En 1997, pour réussir, un fabricant automobile doit déterminer avec précision ce que veut le consommateur.»

Or, le consommateur des compagnies pétrolières, c'est vous. Pourquoi ne déterminent-elles pas avec précision ce que vous, vous voulez?

M. Hutchins: J'aimerais bien pouvoir vous répondre, sénateur. Je n'ai pas de réponse.

Comme Maureen l'a dit, nous avons eu des rencontres avec les compagnies de pétrole. Nous pensions avoir un protocole d'entente. C'est sur la foi de cette entente que nous sommes allés de l'avant. Je vous l'avoue, c'est la raison pour laquelle je suis coincé. Je me retrouve ici avec un modèle 1998 sur la route parce qu'elles n'ont pas écouté le consommateur, j'imagine.

Le sénateur Rompkey: Leurs représentants disaient ce matin que les méchants dans cette histoire, c'était vous, et que la situation était tout à fait différente aux États-Unis. Ils disent vouloir une étude indépendante à laquelle pourront participer toutes les parties. Ils disent que c'est ce qui se fait aux États-Unis, mais pas ici.

On en a discuté avec eux. Ils nous ont dit ce qu'ils pensent être la raison. J'ai trouvé intéressant d'entendre M. Landry nous dire qu'il avait déjà travaillé pour une compagnie pétrolière. On nous a dit qu'une des raisons pour lesquelles il y aurait coopération aux États-Unis, c'est que l'on trouve des membres des conseils d'administration qui siègent à la fois au conseil des compagnies pétrolières et des fabricants automobiles aux États-Unis.

On dirait que le problème se règle différemment au Canada et aux États-Unis. À quoi tiennent ces contradictions?

M. Landry: Il y a entre 15 et 20 compagnies pétrolières américaines qui produisent de l'essence sans MMT et qui n'ont pas l'intention de changer. Certaines sont affiliées, pour ainsi dire, à leur filiale à 100 p. 100 au Canada qui n'offre pas d'essence sans MMT.

Chaque fois qu'il faut consentir des investissements -- il est arrivé la même chose dans le cas de l'essence à faible teneur en soufre -- on hésite et on retarde. De plus, on n'atteint pas les normes que le pays nous a demandé de respecter.

On ne peut pas dédoubler la technologie chaque fois que l'on fait quelque chose. Cette technologie a été conçue un peu partout dans le monde par quantité d'entreprises indépendantes. C'est ce que nous pouvons faire de mieux, et sans cela nous ne pouvons pas respecter les normes. Nous ne pouvons pas faire ce qu'on nous demande du point de vue de l'environnement.

J'espère que cela répond à votre question, parce que je ne peux pas vous en dire plus à propos de l'industrie du pétrole.

M. Nantais: J'ajouterai qu'il parlait sans doute d'un programme pilote que réalise actuellement notre association jumelle. Cette expérience fait suite aux mesures de l'EPA et à la décision du tribunal.

L'EPA a jugé que malgré la décision du tribunal elle continue de s'inquiéter des effets du MMT sur les systèmes de diagnostic intégrés de deuxième génération. Ce programme a pour but d'ajouter à l'information que l'on possède déjà pour que l'EPA puisse réévaluer la situation. Comme nous l'avons dit, l'agence réétudiera la question. Les nouveaux renseignements viendront s'ajouter à ce que l'on sait déjà.

Le sénateur Cochrane: Je n'ai pas la citation exacte, mais un des témoins de ce matin a dit que la raison pour laquelle ils s'opposent tant à cette idée, c'est que cela créerait un exemple terrible.

M. Landry: Un précédent.

Le sénateur Cochrane: Un précédent qui servirait à interdire d'autres composantes de l'essence. Ils ne veulent pas bouger là-dessus, pour éviter que d'autres choses éventuellement nocives pour l'environnement dans l'essence ne fassent pas l'objet d'interventions de l'État.

Mme Darkes: Eh bien, je pense que nous demandons au gouvernement d'intervenir ici, et nous avons demandé aux compagnies pétrolières de faire quelque chose, parce qu'il existe des preuves irréfutables que le MMT dans l'essence nuit aux dispositifs antipollution et cause des défaillances.

Les preuves accumulées qui ont été déposées ici sont claires. Je ne vois pas pourquoi cela créerait un mauvais précédent. Ce que l'on demande à l'État, c'est d'interdire une substance dont la nocivité a été avérée.

Le sénateur Buchanan: Comme vous le savez, monsieur le président, je suis un homme politique qui ne fait pas de bruit qui vient de la Nouvelle-Écosse, province petite, mais où la qualité de vie est grande. Tout cela sème la confusion dans mon esprit. Ayant fait de la politique provinciale pendant 24 ans et ayant été premier ministre de la province pendant 13 de ces années, j'ai parfois du mal à ne pas penser autrement qu'en homme politique provincial.

Pour moi, ou bien vous ne vous êtes pas préparés comme il faut, ou bien ce sont les autres qui ne l'ont pas fait, parce que huit gouvernements provinciaux et leurs premiers ministres s'opposent à ce projet de loi. C'est assez rare en politique canadienne, et j'en fais depuis longtemps.

Je précise aussi que je conduis une Buick, que ma femme conduit une Plymouth et qu'un de mes fils conduit une Ford Windstar. Je fais le plein chez Esso, Irving, Petro-Canada, Ultramar, Wilson Fuels, Shell et Mercer Fuels, à Sydney.

Le sénateur Taylor: Aucune fidélité.

Le sénateur Buchanan: Je les encourage tous, vous voyez.

Le président: Et votre question?

Le sénateur Buchanan: Tous les premiers ministres provinciaux s'opposent à ce projet de loi. Premièrement, parce qu'il s'agit d'une atteinte au commerce interprovincial, ce contre quoi nous ne cessons de nous élever; deuxièmement, parce qu'ils ne voient aucune preuve concluante de danger ou de dégât pour l'environnement, enfin pas encore; et troisièmement, à cause de l'économie et de la précarité des emplois dans la plupart de ces provinces, où il y a de petites raffineries périphériques, où les travailleurs risquent de perdre leur emploi à cause de la situation financière précaire de certaines de ces installations.

Que répondez-vous à tout cela? Que répondez-vous à ces huit gouvernements provinciaux, dont trois ou quatre ont déjà dit qu'ils allaient traîner le gouvernement fédéral en cour?

Mme Darkes: Il est évident que le gouvernement fédéral a la compétence de légiférer en la matière, parce que nous estimons que celui-ci dispose de l'autorité en ce qui concerne...

Le sénateur Buchanan: Je parle des accords interprovinciaux.

Mme Darkes: ... le commerce interprovincial et le commerce extérieur.

Le sénateur Buchanan: Un instant. Je ne sais pas avec quel constitutionnaliste vous avez parlé, mais pour ce qui est du commerce interprovincial, cela fait 50 ans que nous nous battons à ce sujet au Canada, et jamais le gouvernement fédéral n'a laissé entendre qu'il avait compétence dans ce domaine et pouvait dicter aux provinces ce qu'elles devaient faire en matière de commerce interprovincial jusqu'à l'entente d'il y a quelques années.

M. Landry: C'est sans doute là que nous avons fait une erreur, sénateur. Avant de créer notre système de diagnostic intégré, nous aurions dû consulter un constitutionnaliste.

Mme Darkes: Sénateur, nous devons nous en remettre au gouvernement pour qu'il choisisse l'endroit où le texte de loi doit être débattu, mais ce qui est essentiel pour nous, c'est que soit adopté immédiatement le projet de loi C-29, pour interdire le MMT pour tous les motifs que nous avons énumérés ici aujourd'hui.

Le sénateur Buchanan: Avez-vous rencontré les représentants des gouvernements provinciaux?

Mme Darkes: Nous en avons rencontré plusieurs, et, comme vous le savez, l'Ontario appuie vigoureusement le projet de loi.

Le sénateur Buchanan: C'est compréhensible.

Mme Darkes: Tout comme la Colombie-Britannique. Elle a déjà une loi à cet effet. Les faits sont irréfutables. Le MMT dans l'essence détraque les dispositifs antipollution, et chacun sait ce qu'il faut faire. Nous reconnaissons que cela suppose des coûts, et c'est une réalité avec laquelle nous nous débattons tous. L'industrie automobile a dépensé des centaines de millions, voire des milliards de dollars, pour combattre la pollution. Je peux vous donner deux exemples dans les usines de General Motors. Notre atelier de peinture de Sainte-Thérèse et celui d'Oshawa, pour les camions, utilisent un système de peinture en solution aqueuse. À eux seuls, ces deux ateliers nous ont coûté des millions de dollars en frais de conversion. C'est difficile à faire, mais nous sommes arrivés à la conclusion que si nous voulons améliorer l'environnement, il faut engager ces frais. Ce n'est jamais le bon moment, mais en fin de compte il faut engager ces dépenses si nous voulons faire ce qu'il faut pour l'environnement. Je suis consciente de la difficulté.

Le sénateur Buchanan: J'ai une autre question. L'Imperial a une raffinerie à Dartmouth. Vous savez ce que le gouvernement et le premier ministre de la Nouvelle-Écosse ont dit à propos de cela: ils craignent que la raffinerie ne pâtisse si le MMT est interdit. Ce n'est pas sûr, parce que l'Imperial n'a jamais dit qu'elle fermerait l'usine, mais c'est une interrogation de plus.

Je voudrais aussi poser une question à M. Nantais à propos de Volvo, qui a aussi une usine en Nouvelle-Écosse. Je sais beaucoup de choses à propos de cette usine. C'est moi qui l'ai inaugurée, et je ne voudrais surtout pas qu'elle soit compromise. Quelle est la position de Volvo à propos du MMT?

M. Nantais: J'aurais dû le dire plus tôt. J'ai eu des discussions avec le président de Volvo avant de venir ici. Il comptait participer à l'audience. Malheureusement, lui et toute son équipe de direction ont dû se rendre en Suède. Ils regrettent de ne pas être parmi nous. Je peux néanmoins vous dire que Volvo Canada et Volvo aux États-Unis appuient entièrement les conclusions que vous ont communiquées les autres fabricants aujourd'hui. Ils ont beaucoup de craintes à propos du MMT. Comme vous le savez, Volvo est installée en Nouvelle-Écosse depuis 1963 et voudrait continuer ses activités dans cette province.

Le sénateur Cochrane: Il existe un document publié par Ethyl Corporation, intitulé «MMT and On-Board Diagnostic Evaluation of Engine Misfires» (octobre 1996). Dans ce document, on cite un représentant de Ford qui a déclaré à une conférence au Michigan que «... sur une période de plusieurs années, nous avons examiné des bougies d'allumage contaminées au MMT et, jusqu'à présent, nous n'en avons pas rencontré une où il y avait un problème».

Monsieur Hutchins, que pensez-vous de cette divergence de vues, semble-t-il, à propos du MMT?

M. Hutchins: Je ne connais pas cet article, la source de l'information ou le reste. Je ne suis pas d'accord. Je ne peux pas commenter l'article, parce que je ne connais pas le contexte.

M. Nantais: J'ajouterais que d'autres fabricants de bougies d'allumage -- et je pense avoir fourni l'information au comité, mais si ce n'est pas le cas nous allons le faire -- ont bien déclaré dans les médias que leurs produits ont connu des défaillances prématurées causées par le MMT. Qui faut-il croire?

M. Hutchins: Nous avons aussi les données de la garantie. Si l'on compare le Nord-est des États-Unis et le Canada, on s'aperçoit qu'il y a eu des défaillances. Évidemment, le coût est démultiplié au Canada par rapport aux États-Unis en ce qui concerne les bougies, les capteurs et les convertisseurs. La seule différence, c'est le carburant.

Le sénateur Cochrane: C'était une citation d'un représentant de Ford.

M. Hutchins: J'ignore qui c'était.

Le sénateur Cochrane: J'ai une autre question. Si vous êtes convaincus que le MMT nuit à l'environnement, pourquoi êtes-vous prêts à accepter ce projet de loi? Après tout, le texte n'interdit pas le MMT. Ne devriez-vous pas être en faveur de l'interdiction complète du MMT?

M. Nantais: Encore une fois, sénateur, ce n'est pas à nous de choisir la méthode. Évidemment, ce serait l'idéal. Dans les faits, cette loi aurait pour effet d'interdire le MMT. Oui, on pourrait bâtir une usine de MMT dans chaque province, ce serait l'échappatoire, mais je vous dis franchement qu'il n'en est pas question.

Le sénateur Hays: La performance de l'automobile change-t-elle de quelque façon que ce soit si le système de diagnostic intégré ne fonctionne pas? Roule-t-elle aussi vite et fonctionne-t-elle de la même façon sans le dispositif antipollution?

M. Nantais: Comme Mark l'a dit, le système de diagnostic est un programme intégré d'inspection et d'entretien. Il surveille 17 fonctions différentes du groupe motopropulseur et moteur, comme les bougies d'allumage et l'efficacité du pot catalytique. Sa fonction est de veiller à ce que le véhicule maintienne ses caractéristiques pendant toute sa vie utile et réduise les émissions comme prévu.

Le sénateur Hays: Donc, lorsque vous le débranchez, il n'y a pas que les émissions qui soient touchées.

M. Nantais: Le système de diagnostic intégré ne fait que surveiller ces fonctions. Évidemment, s'il y a des ratés d'allumage, certaines quantités de carburant sont rejetées sans combustion.

Le sénateur Hays: Mais si le système est débranché, il n'y a plus de surveillance du groupe motopropulseur.

M. Nantais: Il existe un certain nombre de codes différents. Vous pouvez désactiver certains codes tout en laissant les autres en place.

Le sénateur Hays: Savez-vous ce que les gens veulent pour se convaincre que le MMT est un problème pour vos systèmes de diagnostic? Vous nous avez présenté des preuves qui semblent concluantes pour le profane. De toute évidence, cela ne les impressionne pas. Savez-vous ce qui les impressionnerait?

M. Nantais: La question n'est pas de les impressionner.

Le sénateur Hays: Ou de les convaincre.

M. Nantais: Je pense que pour eux, c'est une question de rentabilité. Le président de l'ICPP a reconnu devant moi qu'il s'agit strictement d'un problème de rentabilité. Il en a peut-être parlé ici ce matin. Le problème n'est pas la technologie; elle existe.

Le sénateur Hays: Ils ont dit que le problème est une lutte d'influence dans l'industrie, ce qui a déjà été soulevé, et une question d'économie. Ils ont aussi dit, si je les ai bien compris, que pour eux ce n'est pas un problème.

Savez-vous ce qu'il faudrait pour les convaincre? Vous ont-ils donné un signal?

M. Landry: La plus grande preuve que nous pourrions donner, c'est que 20 fabricants automobiles au Canada, de partout dans le monde, ont tous, indépendamment les uns des autres, dégagé la même conclusion: que le MMT est nocif et que nous n'avons pas de substitut. Voilà la situation.

M. Hutchins: Nous pensions qu'en venant ici cela pourrait les convaincre. Attendons voir.

Le sénateur Hays: Dans la même veine, l'un d'entre vous a déclaré que les concepteurs du système l'avaient conçu pour d'autres carburants que l'essence à base de MMT. J'imagine que dès le début vous aviez décidé d'exclure l'essence à base de MMT comme carburant.

Peut-être pourriez-vous nous en dire un peu plus sur la conception du système de diagnostic intégré.

M. Nantais: J'aimerais demander à Stuart Perkins de s'avancer. Il pourra vous répondre brièvement.

M. Stuart Perkins, directeur des Études techniques, Chrysler Canada: Le système a été conçu pour fonctionner au carburant. Il s'agit essentiellement d'essence à laquelle sont ajoutés des additifs. Nous avons observé que le système de diagnostic ne pouvait pas tolérer l'épuisement du MMT. Cela troublait les capteurs de diagnostic. Ce n'est pas que nous les avons conçus pour fonctionner sans MMT, c'est que le MMT, lui, n'était pas compatible.

Le président: Nous vous remercions beaucoup d'avoir comparu devant nous et de nous avoir communiqué votre avis. C'est très important.

Je souhaite maintenant la bienvenue au groupe suivant. Je vous remercie d'être venus nous faire part de votre position. C'est très important pour nous. Nous savons que votre emploi du temps est chargé et que vous avez fait de gros efforts pour être ici aujourd'hui. Nous vous en sommes reconnaissants.

Vous avez vu comment nous procédons. Prenez le temps qu'il vous faut pour nous expliquer votre position. Mes collègues et moi-même discuterons ensuite avec vous.

Allez-y.

M. Kiyoharu Owada, président, Nissan Canada, Association des fabricants internationaux d'automobiles du Canada: Au nom des membres de l'Association des fabricants internationaux d'automobiles du Canada, je tiens à vous remercier de l'occasion qui m'est offerte de prendre la parole devant vous pour discuter des effets du MMT sur nos véhicules.

C'est un honneur pour moi, à titre de président du conseil de l'Association des fabricants internationaux d'automobiles du Canada, de vous présenter mes éminents collègues.

M'accompagnent aujourd'hui M. Ernst Lieb, président de Mercedes-Benz Canada; M. Yoshio Nakatani, président de Toyota Canada Inc.; M. Ikuo Shimizu, président de Honda Canada Inc.; et à M. Don McArthur, président de l'association. Ils font tous partie du conseil d'administration de l'association.

Nos conseillers techniques sont MM. Manfred Mokry, Mercedes-Benz Canada; Glen Brickshaw, Honda Canada Inc.; et Martin Ehmann, Toyota Canada Inc.

Les 15 membres de notre association fabriquent et vendent des véhicules partout dans le monde et la plupart d'entre eux ont des usines en Amérique du Nord. Il y en a trois au Canada. La production totale de ces trois usines canadiennes dépasse aujourd'hui considérablement les importations d'automobiles d'outre-mer.

Les fabricants internationaux d'automobiles sont des chefs de file dans la conception de véhicules durables et économes d'énergie, équipés de dispositifs antipollution avancés. Nous savons que les Canadiens veulent des véhicules qui brûlent sans résidus. Nos membres ont développé des dispositifs antipollution perfectionnés qui leur permettront de répondre aux normes nationales antipollution les plus rigoureuses du monde.

Toutefois, les fabricants d'automobiles de tous les pays font face à un grave problème. Les dispositifs antipollution ne font pas leur travail s'il y a du MMT dans l'essence. C'est la conclusion à laquelle sont arrivés Nissan et d'autres fabricants mondiaux, chacun de leur côté, à partir de données réelles et compilées à l'usage.

Le Canada est au coeur du débat. Nos dispositifs antipollution dépendent de la disponibilité du carburant sans MMT, connu aux États-Unis et partout dans le monde, et qui devait être disponible ici d'après les assurances du gouvernement canadien.

Ne pas éliminer le MMT du carburant au Canada aujourd'hui nous empêcherait de respecter les règles d'intégration des émissions des véhicules proposées pour 1998 par Transports Canada et qui reposent sur l'existence de carburant sans MMT. Cela va occasionner des coûts inacceptables et des réparations couvertes par la garantie tout à fait inutiles et irritera inutilement les consommateurs à cause de voyants lumineux qui s'allumeront pour rien. C'est la raison pour laquelle le MMT est un problème de si grande envergure ici au Canada.

Le carburant sans MMT est essentiel au bon fonctionnement de nos dispositifs antipollution. Sans les carburants sans MMT promis, nous serons incapables de respecter immédiatement le règlement sur les émissions en Colombie-Britannique et nous ne pourrons respecter le règlement fédéral proposé pour le Canada en 1998.

Je ne connais pas les raisons initiales qui ont mené à la décision du Canada dans les années 70 de permettre l'utilisation de cette toxine, que l'on soupçonnait d'être neutre, comme solution de rechange au plomb, qui servait de releveur d'octane dans le carburant, mais on sait depuis longtemps dans les milieux techniques internationaux que cela pose un problème pour les voitures. Les bougies d'allumage et les convertisseurs catalytiques sont dégradés par le MMT depuis les années 70. Nous avons dû accepter cela jusqu'à présent si nous voulions faire des affaires au Canada, mais cela n'a jamais été à notre satisfaction. Avec l'introduction des récents dispositifs antipollution, cependant, nous ne pouvons plus l'accepter. Mes collègues de Toyota Canada, de Honda Canada, de Mercedes-Benz Canada et les fabricants d'automobiles nord-américains sont d'accord avec cette évaluation de la situation.

Vous avez tous reçu l'information détaillée que nous vous avons fait parvenir. Nous avons amené avec nous aujourd'hui une équipe d'experts techniques qui peuvent répondre à vos questions. Nissan appuie fermement l'adoption du projet de loi C-29. Le carburant sans MMT est absolument nécessaire pour nos systèmes de diagnostic intégrés perfectionnés de deuxième génération, OBD-II, que Nissan a commencé à installer sur les modèles de 1995 en prévision des carburants sans MMT compatibles.

Mon collègue de Toyota Canada va maintenant vous donner les grandes lignes des activités de recherche de Toyota à cet égard et de ses préoccupations et de l'impact prévisible en cas de non-adoption du projet de loi C-29. M. Nakatani sera suivi de M. Shimizu, qui décrira la situation technique de Honda. M. Lieb vous parlera brièvement des activités de Mercedes-Benz et résumera quelles seront les conséquences si le projet de loi C-29 n'est pas rapidement adopté.

Je vous remercie. Nous sommes impatients de voir cet important projet de loi adopté.

M. Yoshio Nakatani, président, Toyota Canada, Association des fabricants internationaux d'automobiles du Canada: C'est un plaisir pour Toyota de comparaître devant ce comité du Sénat du Canada.

Comme vous le savez, Toyota fabrique et distribue des véhicules automobiles au Canada et dans le monde entier. Je suis heureux de vous présenter un exposé aujourd'hui. Notre projet d'expansion de l'usine de Cambridge, qui vise une capacité de production de 200 000 véhicules, progresse bien. Le projet sera terminé en mai ou en juin, et nous pourrons alors produire de nouvelles Corolla dans de nouvelles installations.

Grâce à des activités poussées de recherche et de développement, Toyota a mis au point ce qui se fait de mieux en matière de dispositif antipollution pour les véhicules automobiles. Cette technologie est capable de réduire les émissions nocives d'hydrocarbures, de monoxyde de carbone et d'oxydes d'azote à des niveaux extrêmement bas. Nous avons conçu cette technologie pour respecter les règlements les plus stricts en matière de contrôle des émissions dans le monde et pour assurer un bon rendement pendant toute la vie utile du véhicule.

Je suis ici aujourd'hui parce que j'ai de graves préoccupations concernant le fait que l'essence au Canada contient du MMT. Tout d'abord, j'ai des préoccupations quant au fait qu'il existe des preuves selon lesquelles le MMT est responsable de l'émission potentiellement nocive d'oxyde de manganèse. Deuxièmement, je crains que le MMT ne nuise à nos dispositifs antipollution et ne fasse en sorte que les émissions d'hydrocarbures et de monoxyde de carbone soient encore plus élevées. Troisièmement, je crains que le MMT interfère avec le fonctionnement de notre système de diagnostic intégré qui veille au bon fonctionnement du dispositif antipollution.

Ces préoccupations sont très importantes pour nous, car notre capacité de contribuer à la qualité de l'environnement et de respecter des normes de plus en plus strictes en matière de contrôle des émissions est compromise. Des données indiquent que les émissions d'oxyde de manganèse causées par le MMT sont neurotoxiques. De nombreuses données scientifiques indiquent que parce que l'essence contient du MMT au Canada il y a des dépôts d'oxyde de manganèse sur les convertisseurs catalytiques et les détecteurs d'oxygène. Dans certaines circonstances, le dépôt d'oxyde de manganèse sur le convertisseur catalytique nuit au bon fonctionnement de ce dernier et augmente le niveau d'émissions nocives.

On craint par ailleurs que les dépôts d'oxyde de manganèse sur les détecteurs d'oxygène ne puissent nuire au bon fonctionnement du dispositif antipollution et du système de diagnostic intégré. Notre analyse de ce problème appuie ces conclusions.

J'aimerais pendant quelques instants vous parler du genre de données que nous avons recueillies et vous expliquer comment notre analyse de ces données a soulevé des préoccupations non seulement pour Toyota mais pour les consommateurs et l'environnement canadien.

En 1993, nous avons installé nos dispositifs antipollution et nos systèmes de diagnostic intégré les plus perfectionnés sur des modèles choisis de nos véhicules 1994 fabriqués pour la Canada et les États-Unis. Nous avons effectué des contrôles systématiques de ténacité sur les éléments du dispositif antipollution en prenant ces éléments sur des véhicules dont on se sert au Canada et en les installant sur des véhicules qu'on met à l'essai au Japon. Les émissions des éléments canadiens ont été comparées à celles des éléments américains. Les données américaines ont été recueillies de la même manière mais il s'agissait de carburant sans MMT. Nous avons constaté que les éléments canadiens faisaient augmenter les niveaux nocifs d'émissions d'hydrocarbures et de monoxyde de carbone.

Pour déterminer la cause de l'émission de niveau plus élevé d'hydrocarbures et de monoxyde de carbone, nous avons inspecté les composantes canadiennes. Les résultats ont indiqué que, tout d'abord, des dépôts d'oxyde et de manganèse étaient présents sur les convertisseurs catalytiques et les détecteurs d'oxygène; ensuite, que la quantité des dépôts de manganèse augmentait avec le millage; et, enfin, que le MMT était responsable des dépôts d'oxyde de manganèse.

Nous avons par ailleurs effectué une analyse détaillée des données concernant le système d'échappement recueillies à partir des systèmes de diagnostic intégré de véhicules utilisés au Canada et aux États-Unis. Notre analyse nous a permis de conclure que les dépôts d'oxyde de manganèse trouvés sur les convertisseurs catalytiques pouvaient, dans certaines circonstances, réduire l'efficacité de ces derniers, ce qui fait augmenter les niveaux d'émissions nocives.

À la suite de notre analyse, nous avons par ailleurs conclu que les dépôts d'oxyde de manganèse risquent de nuire au dispositif antipollution et à la capacité du système de diagnostic intégré de vérifier adéquatement le bon fonctionnement du dispositif antipollution.

Le système de diagnostic intégré est conçu pour alerter le chauffeur d'un véhicule en cas de mauvais fonctionnement du dispositif antipollution. Une réduction de l'efficacité du convertisseur catalytique et l'éventuelle incapacité du système de diagnostic intégré d'alerter le chauffeur d'un véhicule lorsque le convertisseur catalytique fait défaut, sont de très graves problèmes. Nous croyons que ces problèmes risquent de compromettre notre capacité à respecter les règlements stricts en matière de contrôle des émissions édictés par la Colombie-Britannique et proposés par le gouvernement fédéral.

Nous avons fourni au gouvernement de la Colombie-Britannique et au gouvernement fédéral une description détaillée de nos conclusions.

Nous croyons comprendre que le règlement de la Colombie-Britannique et le projet de règlement du gouvernement fédéral se fondent sur la disponibilité de carburant sans MMT au Canada.

Même si j'ai passé un certain temps à vous parler de nos préoccupations techniques, je crois qu'il y a des préoccupations encore plus importantes qui touchent les consommateurs canadiens et l'environnement canadien. Les consommateurs canadiens peuvent maintenant acheter les dispositifs antipollution les plus perfectionnés au monde. Nous avons réussi à maintenir cette technologie à un coût abordable en la mettant à la disposition de tous les nord-Américains et en faisant en sorte qu'elle soit conçue pour fonctionner pendant toute la vie utile du véhicule. Cependant, si l'essence au Canada contient du MMT, nous craignons que les coûts de garantie liés à cette technologie n'augmentent et aient un impact sur le prix du véhicule. Cette préoccupation est devenue encore plus réelle depuis que le gouvernement de la Colombie-Britannique et le gouvernement fédéral ont introduit des mesures législatives pour faire en sorte que les véhicules satisfassent à des normes de plus en plus strictes en matière d'émissions. Nous craignons par ailleurs qu'après l'expiration de la garantie, le coût des réparations n'augmente pour les consommateurs. Par conséquent, le MMT dans l'essence au Canada pourrait faire augmenter le coût d'un véhicule pour les consommateurs canadiens.

Nous savons que le marché des nouveaux véhicules diminue au Canada. Nous croyons que la principale raison pour laquelle ce marché rétrécit est l'abordabilité. Nous aimerions continuer à construire de nouveaux véhicules munis de dispositifs antipollution dernier cri à des prix abordables pour tous les consommateurs canadiens. Nous aimerions que l'abordabilité des véhicules stimule le marché des nouveaux véhicules et l'économie canadienne et contribue à la prospérité continue du Canada. Nous aimerions que la technologie de pointe en matière de dispositif antipollution contribue à la santé des Canadiens et à la qualité de l'environnement au Canada. Cependant, il est peu probable que l'on atteigne ces objectifs si le carburant au Canada contient du MMT.

M. Ikuo Shimizu, président, Honda Canada: C'est avec plaisir que je comparais aujourd'hui devant le comité sénatorial permanent de l'énergie, de l'environnement et des ressources naturelles au sujet du projet de loi C-29.

Chez Honda, nous sommes fiers d'être réceptifs à la vulnérabilité de l'environnement et de notre réputation sur le plan écologique. Nous continuons d'être des chefs de file en matière de conception, de mise au point et de vente d'automobiles et d'autres produits écologiques partout dans le monde.

Depuis les années 70 en Amérique du Nord, les produits Honda ont été les premiers à dépasser la norme en matière d'éco-efficacité et d'économie de carburant. Tout au long des années 80, la gamme des produits de conception améliorée n'a cessé de s'élargir. Durant les années 90, Honda a été le premier constructeur automobile à certifier et à construire des véhicules à faible taux d'émissions alimentés à l'essence conventionnelle, connus sous l'appellation LEV.

Puisque nous sommes à l'avant-garde mondiale en matière de conception et de mise au point de ce type de véhicules très perfectionnés sur le plan technologique, nous avons, chez Honda, une bonne compréhension des problèmes qui découlent de l'utilisation des mauvais carburants.

En octobre 1994, Honda Canada soumettait un rapport confidentiel à Environnement Canada et à Transports Canada dans lequel nous expliquions nos inquiétudes au sujet de l'additif du carburant MMT. Depuis ce moment-là, nous avons préconisé très ouvertement la disponibilité de carburants sans MMT sur le marché canadien pour aller de pair avec les véhicules perfectionnés que nous avons déjà introduits.

Chez Honda, nous sommes arrivés à la conclusion que les produits de combustion du MMT, surtout des oxydes de manganèse, nuisent au fonctionnement des détecteurs d'oxygène et des convertisseurs catalytiques des véhicules, ce qui les rend moins aptes à contrôler et à limiter les gaz d'échappement nocifs que nous nous sommes tellement efforcés de réduire au minimum.

Mes collègues ont déjà exposé antérieurement les inquiétudes que suscitent chez eux les effets de l'oxyde de manganèse sur les systèmes antipollution. J'aimerais cependant vous montrer l'un de nos détecteurs d'oxygène, qui a été encrassé d'oxyde de manganèse. L'un des échantillons représente des détecteurs en bon état après utilisation aux États-Unis sur une distance de 140 000 kilomètres. L'autre représente des détecteurs défaillants qui ont servi au Canada sur 75 000 kilomètres.

Chez Honda, nous nous enorgueillissons de l'excellence de notre système de gestion du moteur. Grâce à notre groupe de génie de l'environnement, nous avons pu transférer l'expérience acquise sur les moteurs de Formule I pour en faire profiter les automobilistes ordinaires un peu partout dans le monde. Cependant, pour bien fonctionner, le système doit être doté de détecteurs en bon état, et le MMT ne le permet pas.

Certains ont laissé entendre que les constructeurs d'automobiles auraient des raisons particulières d'appuyer l'adoption du projet de loi C-29. Pour Honda, il n'y a aucun motif sous-jacent. Notre objectif est clair: nous sommes convaincus que les effets nocifs du MMT sont indiscutables, cumulatifs et irréversibles et que l'utilisation de MMT entraînera une augmentation des émissions d'échappement des véhicules, une augmentation des coûts de garantie et d'entretien, de même que l'insatisfaction du consommateur.

Pour l'avenir, Honda souhaite conserver sa position en introduisant sur le marché nord-américain des véhicules encore plus propres. Malheureusement, pour des raisons liées à la qualité du carburant, Honda ne sera pas en mesure de le faire au Canada sans assumer un risque de plus en plus grand de défaillance des systèmes antipollution, aussi bien durant la période de garantie que par la suite.

À titre de président de Honda Canada je suis fermement résolu à introduire au Canada, pour l'année automobile 1998 et par la suite, nos véhicules à technologie antipollution de pointe. Vous pouvez m'aider à rendre disponible le carburant sans MMT en adoptant le projet de loi à l'étude. Le moment est venu d'agir de façon décisive pour protéger l'environnement au Canada et les consommateurs canadiens par l'adoption du projet de loi C-29. Merci de m'avoir donné l'occasion de comparaître devant votre comité.

M. Ernst Lieb, président, Mercedes-Benz Canada: J'aimerais reprendre à mon compte certains des commentaires de mes collègues en exposant les points de vue de Mercedes-Benz au sujet de l'incidence du MMT sur les véhicules que nous vendons au Canada.

Avant d'aborder cette question, cependant, j'aimerais vous dire à quel point il est important que la mesure soit adoptée sans délai de manière à ce que le MMT soit enfin supprimé de l'essence au Canada. Personne n'ignore que la qualité de l'air pose un grave problème dans certaines régions du Canada. C'est dans le corridor Québec-Windsor et dans les basses terres de la vallée du Fraser que le problème se pose avec le plus d'acuité.

Dans notre secteur, nous nous sommes rendu compte que nous avions un rôle important à jouer dans l'amélioration de la qualité de l'air et la réduction du smog. Au cours de la dernière décennie, le secteur de l'automobile a de son propre gré doté les véhicules vendus au Canada de systèmes antipollution plus efficaces. La technologie est conçue de manière à réduire les émissions qui créent le smog de 90 à 98 p. 100 pour les véhicules particuliers. Il en résulte que le secteur de l'automobile est le seul au Canada qui affiche une réduction des émissions entre les années 85 et 2000.

Après avoir investi des milliards de dollars à mettre au point et à introduire dans nos véhicules des dispositifs antipollution et du matériel de diagnostic très perfectionnés, nous nous trouvons maintenant dans une situation au Canada, où la technologie ne peut fonctionner comme elle le devrait en raison de la présence de MMT dans les carburants. La question est d'importance primordiale pour ce qui est de nos rapports avec notre clientèle. En effet, nos clients s'attendent à profiter pleinement de la technologie dont ils ont fait l'acquisition en achetant un nouveau véhicule.

Elle a une importance critique également, pour ce qui est de notre capacité de respecter la réglementation antipollution que propose Transports Canada pour 1998, et celle qu'a déjà adoptée la Colombie-Britannique. En formulant cette réglementation, on a supposé que le consommateur aurait accès à un carburant sans MMT. La réglementation peut être respectée, mais seulement à la condition qu'il n'y ait plus de MMT dans le carburant.

En continuant d'utiliser le MMT, le Canada ne serait plus au diapason avec le reste du monde. Aucun autre pays de l'OCDE n'autorise l'utilisation du MMT. Même aux États-Unis, où une décision technique rendue par les tribunaux a obligé la Environmental Protection Agency à accorder à Ethyl Corporation, une dispense lui permettant d'utiliser le MMT, cet additif continue d'être interdit en Californie et dans les principales villes américaines, où la Clean Air Act des États-Unis exige des carburants reformulés.

À vrai dire, la réduction des émissions des véhicules est prioritaire pour les gouvernements du monde entier.

Mercedes-Benz a introduit en 1994 une technologie antipollution perfectionnée qui surveille sans arrêt le système et signale au conducteur toute panne qui devrait donner lieu à une visite au garage. Nous avons pu toutefois constater que l'encrassement du système antipollution par les dépôts de MMT, entraîne prématurément le non-fonctionnement des voyants lumineux. Dans nos marchés de l'Europe de l'Ouest, où les véhicules particuliers sont dotés d'une technologie d'antipollution similaire, nous n'avons constaté aucune plainte des consommateurs au sujet des systèmes antipollution qui soit attribuable à des dépôts de MMT.

Pour l'année automobile 1998, Mercedes-Benz Canada prévoit introduire une technologie antipollution encore plus perfectionnée, pour respecter la réglementation de la Colombie-Britannique et celle qui est proposée pour 1998 par le gouvernement fédéral. Si ces véhicules ne peuvent avoir accès à un carburant sans MMT, nous devrons peut-être, en dépit de nos réticences, juger nécessaire de désactiver le système pour éviter l'insatisfaction de notre clientèle.

Monsieur le président, honorables sénateurs, la journée d'aujourd'hui est plutôt inhabituelle pour nous. Nous n'avons pas coutume de comparaître devant le Sénat du Canada, et encore moins de le faire en même temps que nos concurrents à l'échelle de la planète. Nous espérons cependant, que notre comparution et que l'intérêt que nous portons tout particulièrement à la question du MMT vous convaincra qu'il s'agit là d'un enjeu très important pour l'ensemble de notre secteur.

Voilà qui met fin à nos déclarations liminaires. J'espère que nous aurons maintenant l'occasion de répondre à toutes vos questions au sujet des répercussions du MMT sur nos véhicules en faisant valoir pourquoi il est si important que ce projet de loi C-29 soit adopté et entre en vigueur dans les meilleurs délais possibles.

M. Owada: Si vous avez des questions, nous nous ferons un plaisir d'y répondre.

Le président: Nous en avons certainement. Domo arigato gozaimasu. Nous vous remercions de votre participation.

Le sénateur Kinsella: Monsieur Owada, en bas de la page 3 de votre exposé, vous déclarez que le gouvernement du Canada vous avait assuré que le carburant sans MMT serait disponible au Canada. Est-ce bien ce que vous soutenez dans votre témoignage?

M. Owada: Ai-je bien compris? Vous nous demandez si nous concevons nos dispositifs antipollution en fonction d'un carburant sans MMT?

Le sénateur Kinsella: En bas de la page 3, vous déclarez:

Nos systèmes antipollution supposent la disponibilité de carburant sans MMT; ce qui correspond à la norme aux États-Unis et partout dans le monde et ce dont nous avait assuré le gouvernement canadien pour le Canada.

J'aimerais vous interroger au sujet de cet énoncé.

Quel représentant du Gouvernement du Canada vous a donné de telles assurances?

M. Owada: Nous avons tout simplement compris qu'on nous viendrait en aide, mais je ne sais pas qui nous a fourni de telles assurances.

M. Nakatani: D'après ce que je comprends, le gouvernement fédéral du Canada, Transports Canada, détermine la norme en matière de limitation des émissions pour l'année automobile 1998 à la condition d'utiliser une essence sans MMT. Il s'agit d'une exigence ou d'une norme du gouvernement canadien.

Afin de respecter la norme fixée par le gouvernement fédéral canadien, nous avons tous travaillé d'arrache-pied.

Le sénateur Kinsella: Est-ce que vous êtes en train de dire que cette assurance ne vous avait été donnée par aucun ministre du gouvernement canadien?

M. Don McArthur, président, Association des fabricants internationaux d'automobiles du Canada: Peut-être que si nous pouvions faire appel à ceux qui se sont chargés des négociations avec le gouvernement fédéral à l'époque, ils seraient mieux à même de vous répondre plus précisément.

M. Martin Ehmann, directeur de la conformité des véhicules, Opérations techniques, Toyota Canada Inc.: Au sein du groupe de travail, dans les discussions que nous avons eues à propos de la réglementation, il était clair que le carburant contenant du MMT entraînerait cette décision 1998 du côté fédéral. Il était également tout à fait évident pour la Colombie-Britannique que, pour assurer une observation permanente à long terme, il faudrait du carburant sans MMT. En fait, il y en a beaucoup actuellement en aval de la vallée du Fraser en Colombie-Britannique.

Le sénateur Kinsella: Y a-t-il un ministre fédéral qui vous ait donné cette assurance?

M. Ehmann: Je n'étais pas présent moi-même à ces rencontres, monsieur.

Le sénateur Kinsella: Je passerai à une autre question.

Monsieur Nakatani, je me reporte à votre exposé, plus précisément à la page 3, au troisième paragraphe, où vous expliquez au comité que:

[...] vous vous êtes inquiété que des dépôts d'oxyde de manganèse sur les détecteurs d'oxygène puissent entraver la technologie de contrôle des émissions et la capacité des systèmes de diagnostic intégré de surveiller convenablement ces techniques antipollution.

Quand en êtes-vous arrivé à cette conclusion? J'ai lu un document rédigé pour le gouvernement canadien et daté du 19 juillet 1994 sous la plume de M. E. Crupi dans l'ASFBB. Il déclare:

Ceci résume des données récemment soumises par [...] Toyota (13 juillet 1994) [...]

Le gouvernement canadien dit ensuite dans cette note:

Toyota a suivi les codes OBD-II sur 24 véhicules canadiens et 10 véhicules américains, modèle 1994, afin de déterminer si le MMT avait sérieusement entravé la fonction du contrôle des convertisseurs catalytiques au Canada. Toyota a conclu que rien ne semblait indiquer que le MMT aurait provoqué des erreurs de détection dans ces systèmes de contrôle.

Il semble que ces deux déclarations soient contradictoires.

Le sénateur Kenny: Peut-on leur fournir copie de ce document? Pourrait-on savoir de qui sont ces initiales? Pourrait-on le faire distribuer aux membres du comité, s'il vous plaît?

Le président: Ce sera en effet bien. Lorsque vous en aurez terminé, veuillez le faire circuler.

Le sénateur Kenny: Il est difficile de suivre la question lorsque l'on cite un document que je n'ai pas vu. Je ne sais pas si d'autres sénateurs l'ont vu. Je ne sais pas ce qu'est l'ASFBB. Je ne connais pas cet organisme au sein de l'administration.

Le président: Terminez votre question et nous obtiendrons cela après.

M. Nakatani: Dans ma déclaration, aujourd'hui, je n'ai pas parlé des tests que nous avions effectués sur les modèles de 1994. Mon rapport repose sur les mêmes tests et les mêmes dates que vous, sénateur. Peut-être ne devrais-je pas le dire, mais je suis arrivé au Canada il y a 18 mois, en juillet 1994. J'étais alors à Tokyo. Mon collaborateur technique Martin Ehmann peut vous expliquer cela.

M. Ehmann: Le document dont vous parlez, sénateur, est en fait une réponse à quelque chose qui s'était produit longtemps auparavant... pour être précis, en mars 1993. À l'époque, notre recherche initiale était assez limitée sur la configuration de ce moteur particulier et sur la technologie de l'environnement. Nous avions auparavant présenté et installé à la fin 1993, seulement dans quelques familles de moteurs, ce que nous considérons être un système OBD-II.

Nous avons pris contact avec Transports Canada pour expliquer nos grosses inquiétudes. Nous avons apporté nos photos, le résultat de nos recherches et des analogies. Nous nous inquiétions en effet que le voyant risque de s'allumer pour rien. Nous avons convenu de le retirer temporairement mais de laisser les fonctions de contrôle et d'effectuer un sondage dans les premiers modèles 1994 à partir de véhicules en circulation.

Cette étude fut effectuée très vite après la sortie du véhicule, comme vous pouvez le comprendre. Ça a été fait en 1994 sur les modèles 1994. Bien que nous en arrivions à presque brancher le voyant, nous ne l'avions pas fait. Toutefois, nos inquiétudes ne furent pas atténuées parce qu'avec l'âge et le millage, nous pensions que les problèmes se présenteraient.

Depuis lors, nous avons effectué d'autres recherches qui ont confirmé qu'en fait, c'était un problème sérieux.

Le sénateur Kinsella: C'est la question que j'allais poser aux autres témoins, monsieur le président.

Suite à la question du sénateur Hays, lorsque vos ingénieurs étaient en train de concevoir le système de diagnostic intégré, n'ont-ils pas pris en considération le fait qu'au Canada, notre carburant est essentiellement enrichi de MMT?

M. Owada: À Nissan, nous pensons que nous avons l'une des technologies antipollution les plus avancées du monde. Grâce à la recherche et au développement, nous croyons qu'il n'y aura plus de MMT. C'est comme cela que je vois les choses.

Le sénateur Kinsella: Si vos ingénieurs avaient su que pour le marché canadien leur système de diagnostic intégré devrait pouvoir accepter du carburant enrichi de MMT, ils en auraient tenu compte dans la conception industrielle, n'est-ce pas?

M. Shimizu: Tout d'abord, lorsque nous certifierons nos véhicules conformes aux règlements canadiens sur les émissions, tous les tests auront été effectués sans MMT. Le système est conçu sans MMT.

Le sénateur Kinsella: Même si le carburant au Canada contient du MMT, vous allez faire vos tests sur de l'essence sans MMT?

M. Shimizu: C'est la première condition.

M. Lieb: Le processus d'homologation est en fait décrit par Transports Canada. C'est Transports Canada qui fournit le carburant sans MMT pour l'homologation. Il s'agit ensuite de mesurer les systèmes et de s'assurer qu'ils fonctionnent tous bien. Ces voitures parcourent ensuite un certain millage après quoi on prend certaines autres mesures. Là encore, c'est toujours fait avec du carburant sans MMT fourni par Transports Canada, provenant de raffineries canadiennes.

Lorsque ces voitures sont finalement remises au client, c'est la première fois qu'elles sont exposées au MMT. La conception d'un système qui tiendrait compte d'un additif MMT est techniquement impossible. Nos collègues d'Amérique du Nord l'ont dit tout à l'heure et nous sommes tous d'accord pour dire que c'est techniquement impossible. C'est un problème auquel nous faisons maintenant face depuis près de 15 ans. Si j'avais trouvé une solution ces deux dernières années, je l'aurais mise en oeuvre. Il n'y a pas de solution technique à l'heure actuelle.

Le problème deviendra plus grave lorsque les modèles 1998 apparaîtront sur le marché, ce qui sera le cas dans 15 jours environ pour Mercedez-Benz. Nous aurons au Canada une voiture équipée d'une OBD-II pour le modèle 1998 et cela posera des problèmes. Il n'y a pas de solution technique. Le processus d'homologation repose sur du carburant sans MMT.

Le président: J'aimerais vous poser une question qui est fondamentale si je veux essayer de comprendre ce qui se passe à l'heure actuelle.

Au Canada, comme vous le savez, il y a environ neuf premiers ministres provinciaux et tous nos ministères de l'Environnement, à l'exception de quelques-uns, s'inquiètent de la situation. Vous savez aussi que nos grands constructeurs automobiles, qui représentent un secteur très important de notre industrie nationale, et nos producteurs et raffineurs de pétrole se font la guerre. Ce n'est pas souhaitable ni pour vous ni pour eux.

Considérant tout ce que vous avez dit et tous les aspects négatifs du MMT, je crois que le secteur pétrolier a déclaré l'automne dernier au ministère de l'Environnement et aux constructeurs automobiles: «Constituons un groupe d'experts. Examinons la question et si l'on peut démontrer d'une façon ou d'une autre que l'utilisation du MMT est nocive pour l'environnement, ou entrave les systèmes de diagnostic, on arrêtera.» On prévoit que cette étude prendra trois mois.

Tous nos premiers ministres, ou les huit ou neuf, et nos ministres de l'Environnement concernés, à l'exception de ceux de la Colombie-Britannique et de l'Ontario, se sont déclarés d'accord.

Pourquoi ne pas accepter cela, faire le travail, en finir et si ce que vous dites est vrai, ce sera terminé et ils arrêteront et cette bataille incessante entre ces deux secteurs majeurs de l'industrie canadienne cessera?

Pourquoi vous opposer à cet examen si vous êtes si certain de votre position, pourquoi ne pas accepter ce que nos premiers ministres et ministres partout au pays ont dit qu'ils souhaiteraient?

M. Lieb: Il faut considérer les années passées. Ce n'est pas un problème nouveau ni un problème dont nous ne discutons que depuis six mois. Nous en parlons depuis 15 ans.

Nous avons un protocole d'entente signé en 1994 par le secteur pétrolier ainsi que par les constructeurs automobiles qui établit très clairement que le secteur pétrolier fournira du carburant qui nous permettra de respecter la norme fédérale concernant les émissions. Ce n'est pas le cas. Cela remonte à trois ans.

Le président: Vous n'étiez peut-être pas là ce matin mais le secteur pétrolier dit que c'est justement ce qu'il fait. Il dit qu'il respecte le protocole.

M. Lieb: Alors il doit nous fournir du carburant sans MMT et ce n'est pas ce qu'il fait.

Le secteur automobile est coincé. D'un côté, il nous faut adopter un système que nous avons tous mis au point. Nous avons dépensé des millions de dollars à mettre au point ce système. Il marche pratiquement partout au monde. L'année dernière, nous avons construit 640 000 voitures de tourisme dont 5 000 sont venues au Canada. J'ai des problèmes avec ces 5 000 voitures. Les 635 000 autres ne m'en posent aucun à ce sujet.

Nous avons un système dans lequel nous avons investi des millions de dollars. Nous avons un processus d'homologation qui correspond aux règles imposées par Transports Canada en utilisant du carburant sans MMT. Nous obtenons tous l'homologation sans problème.

Dès que le véhicule est lancé sur la route, nous avons des problèmes de garantie et nous aurons finalement des problèmes avec nos clients quand les convertisseurs catalytiques, les détecteurs et autres pièces tomberont en panne.

Nous livrons une voiture certifiée conforme aux normes OBD-II pour 1998 mais, dès que cette voiture, au Canada seulement, est lancée sur la route, le problème est que les normes d'émission fédérales ne sont plus satisfaites. Nous ne pouvons le garantir. Voilà où nous en sommes.

Le président: Vous n'avez toujours pas répondu à ma question. J'accepte tout ce que vous dites pour le moment. Je ne remets rien en doute, même s'il y en a ici qui seraient peut-être tentés de le faire.

Je vous demande simplement pourquoi vous n'accepteriez pas l'offre du secteur pétrolier de passer trois mois avec Environnement Canada à faire cet examen puisqu'il a dit qu'il arrêterait si cet examen permettait de conclure que ce que vous dites est vrai? Pourquoi ne pas le faire?

M. Lieb: Le problème, pour Mercedez-Benz, c'est que d'ici au 14 février, nous aurons mis sur ce marché les premiers modèles 1998 équipés des systèmes OBD-II. Chrysler a dit la même chose à propos de la Windstar. Nous n'avons pas le temps d'attendre encore trois mois. Voilà le problème. C'est la raison pour laquelle nous sommes ici et nous vous signalons que toutes les recherches qui ont été faites et que toutes les statistiques de garantie indiquent clairement que le MMT crée des problèmes en ce qui concerne les émissions.

Le président: Pourriez-vous alors répondre, afin que je comprenne bien votre position, à ce que les compagnies pétrolières nous ont dit ce matin à savoir qu'elles essaient depuis 1993 de faire examiner ces questions afin de pouvoir parvenir à une conclusion et que vous n'avez jamais répondu, qu'elles n'ont pas eu de réponse de vous et que votre secteur refuse de participer. Que répondez-vous à cela?

M. McArthur: Monsieur le président, j'aimerais revenir à des témoignages qui avaient été présentés en 1994.

À l'époque, notre secteur pensait être arrivé à un consensus avec le secteur pétrolier; nous avions cru convenir que ce dernier fournirait le type d'essence nécessaire. C'est pourquoi nous avons fabriqué des véhicules munis du système de diagnostic intégré et qui utiliseront de l'essence sans MMT.

Nous savions pertinemment au départ que ces véhicules ne pourraient pas utiliser d'essence contenant du MMT.

Le président: Monsieur McArthur, cette entente portait-elle sur le MMT?

M. McArthur: Non, monsieur le président, elle ne portait pas spécifiquement sur le MMT. On parlait plutôt d'essence ou de carburant compatible qui nous permettrait de respecter les règlements antipollution américains parce que nous avions de notre propre gré convenu de respecter ces règlements à cet égard. Tout cela s'est fait par protocole d'entente. On ne parlait pas précisément du MMT mais on savait que le nouveau système ne pourrait pas fonctionner de façon efficace si on utilisait de l'essence contenant du MMT. C'est ce qu'on avait convenu et tout était très clair.

Le président: Je ne sais pas si j'ai vu le texte de ce protocole d'entente. Peut-être se trouve-t-il parmi tous les documents que nous avons reçus récemment. Avons-nous une copie du texte?

M. McArthur: Je crois qu'il se trouve dans cette grosse boîte de documents que vous avez reçus. Monsieur le président, je peux vous faire parvenir copie de ce protocole; ainsi vous n'aurez pas besoin de chercher dans cette grosse boîte.

M. Shimizu: M. Bryksaw de Honda Canada connaît bien la situation qui existait en 1994 et pourra vous en parler.

M. Glen B. Bryksaw, coordonnateur de la conformité, Honda Canada Inc.: À l'été 1994, nous avons rencontré des représentants du secteur pétrolier pour discuter précisément de cette question. Lors d'une réunion à huis clos nous avons joué cartes sur table. À l'époque, le secteur de l'automobile a fourni toutes les données, chaque fabricant présentant les résultats pertinents à l'ICPP pour que l'on comprenne bien que nous présentions tous des données indépendantes. En d'autres termes, General Motors présentait un exposé et des données. Puis nous faisions de même, puis Chrysler Canada et enfin Ford. Nous l'avons tous fait de façon indépendante.

Il y avait trois représentants de comité embauchés par l'ICPP pour étudier ces données dans le cadre de réunions d'un comité «impartial». Il est intéressant de noter que le seul membre du comité qui connaissait bien le secteur de l'automobile a accepté nos conclusions. Il a dit que nos données étaient facilement définissables et pouvaient être facilement comprises. Le représentant du secteur pétrolier a convenu qu'il n'y avait pas de données. Le troisième membre du comité ne pouvait pas se décider.

Nous discutons de la question avec l'Institut canadien des produits pétroliers depuis que je m'occupe de l'observation, et cela n'a rien donné. L'institut reconnaît qu'il existe un problème. Nous avons fourni les données, comme nous l'avons fait avec vous, sénateur. Nous l'avons fait lors de réunions à huis clos parce que nous ne voulons pas révéler de données sur nos garanties. Après tout la concurrence existe. Nous avons fait, tout au moins nous le croyons, tout ce que l'ICPP nous a demandé de faire. Pourtant l'institut refuse de reconnaître qu'il existe un problème.

Le sénateur Carstairs: Un peu plus tôt aujourd'hui certains des témoins discutaient de leur voiture personnelle. Simplement pour vous rassurer, je peux vous dire que dans ma famille nous avons deux Toyota.

Ce n'est évidemment pas ce sur quoi porteront mes questions.

L'année 94 semble être une année critique. Lorsque vous avez lancé le projet de système de diagnostic intégré, vos tests étaient faits avec des véhicules utilisant de l'essence sans MMT. Les compagnies pétrolières étaient-elles au courant de la situation à l'époque? Savaient-elles que vous lanciez ce programme d'évaluation en utilisant un carburant sans MMT?

M. McArthur: Madame le sénateur, si vous me permettez de répondre, j'aimerais rappeler qu'il s'agissait d'une condition préalable à ces tests, à la fois pour l'évaluation initiale et pour les autres tests et l'évaluation qui suivra plus tard. Ce n'était pas nos exigences mais bien celles du gouvernement fédéral. Je n'ai pas de preuve mais je suis convaincu que tous les intéressés étaient au courant.

Le sénateur Carstairs: Chacun savait que vous mettiez à l'essai ce système, et que vous utilisiez de l'essence sans MMT. On suppose que le secteur pétrolier le savait à l'époque où il a signé ce protocole d'entente. Même si ce n'était pas écrit noir sur blanc, on savait que l'essence ne contiendrait pas de MMT quand vous lanceriez le système de diagnostic intégré.

M. McArthur: C'est exact.

Le sénateur Carstairs: Mon autre question porte sur l'expérience que vous avez vécue à l'extérieur du Canada. Clairement, Mercedes-Benz est un parfait exemple puisque cette compagnie fabrique 640 000 véhicules et que seuls 5 000 d'entre eux viennent au Canada. Installez-vous ces systèmes de diagnostic intégré dans tous vos véhicules, peu importe où ils sont fabriqués? Sinon, pourquoi pas? Si oui, le marché canadien est-il le seul où vous avez eu des problèmes?

M. Lieb: Ce problème ne se produit qu'au Canada. Nous avons d'autres données, qui sont de nature confidentielle et que je ne peux communiquer à qui que ce soit; cependant elles indiquent clairement que nous avons des problèmes avec certains éléments du système de diagnostic intégré au Canada. Ce problème est clairement attribuable à l'additif MMT.

Je ne peux pas vous parler de toutes les voitures fabriquées par notre compagnie mais je peux vous dire qu'en Europe, principalement en Allemagne où nous vendons entre 250 000 et 280 000 des 640 000 véhicules, nous avons les mêmes systèmes et nous n'avons pas de problème. En Allemagne nous utilisons de l'essence sans MMT. Il n'y a pas d'additifs en Allemagne. Le processus de raffinage est différent c'est pourquoi il n'est pas nécessaire d'avoir recours aux additifs.

M. Shimizu: Puis-je ajouter quelque chose? Nous vendons le même système aux États-Unis, au Japon et dans nos principaux marchés. Comme M. Lieb l'a signalé, nous n'avons pas vraiment d'expérience des autres marchés. L'année dernière aux États-Unis, par exemple, nous avons vendu près de 800 000 véhicules munis de ce système et nous n'avons pas eu de problème. Ce problème existe uniquement au Canada.

Le sénateur Whelan: Monsieur le président, je serai bref. Je suis pratiquement renversé de constater que nous sommes en fait isolés dans le monde des utilisateurs d'essence. Nous sommes le seul pays de l'OCDE, si j'ai bien compris ce qu'on nous a dit, qui utilise du MMT. Je ne fais pas partie de ce comité depuis longtemps, mais je crois que les questions posées ici sont ridicules et incroyables, tout comme les propos tenus par ceux qui laissent entendre que le MMT est une bonne chose. On n'a pas encore pu me démontrer que c'était vrai, j'ai lu toutes sortes de documents, j'ai entendu les médecins et bien d'autres intervenants. En fait on discutait déjà de la question lorsque j'étais député ministériel. Je suis désolé que nous vous ayons demandé de prendre le temps de venir. C'est tout ce que j'ai à dire.

Je dois partir mais ce n'est pas parce que je suis choqué; c'est simplement que j'ai deux autres réunions et je suis déjà en retard d'une demi-heure.

Le sénateur Spivak: Comme je l'ai déjà mentionné au témoin précédent, un des témoins que nous avons entendus nous a dit que la raison pour laquelle nous nous opposons à l'élimination du MMT c'est par crainte que cela ne crée un précédent regrettable. Mais ce genre de commentaire va à l'encontre du simple fait que le secteur pétrolier a signé ce protocole d'entente en 1994 pour fournir cette essence.

Quelle est la vraie attitude du secteur pétrolier? Je crois qu'il comprend probablement l'effet qu'a le MMT sur vos systèmes de diagnostic intégré, mais il a une autre raison, et il nous a dit carrément ce matin ce qu'elle était. Quelle est en fait son attitude?

M. Lieb: Nous devons supposer que les producteurs pétroliers ne veulent pas apporter cette modification et ce simplement pour des raisons financières. Il faudra faire des investissements. Je n'oeuvre pas dans le secteur pétrolier, mais c'est ce que j'ai lu et entendu et je dois supposer que c'est vraiment là la raison.

Le sénateur Spivak: Ils nous ont également dit qu'ils pourraient changer de type d'essence en 24 heures, et je suppose que cela est possible simplement parce qu'ils produisent déjà une certaine quantité d'essence sans MMT.

M. Lieb: Si le projet de loi prend deux semaines de plus, ils devront peut-être le faire.

Le sénateur Spivak: Dans son exposé le représentant de Mercedes-Benz a dit que le secteur de l'automobile est le seul qui a démontré qu'il avait réduit les émissions. En Californie également on a parlé d'une réduction de 90 p. 100 et de 98 p. 100 de certains types d'émissions.

Si tout cela fonctionnait comme il faut, ces émissions baisseraient encore plus. Comme tout le monde le sait, le Canada n'a pas respecté sa promesse de réduire ses émissions, et il dépasse en fait le niveau d'émissions prévu par 13 p. 100.

L'usage approprié de ces nouveaux systèmes de diagnostic intégré permettra-t-il de réduire les émissions et l'impact qu'elles ont sur les changements climatiques en Amérique du Nord?

M. Lieb: Certainement. Je ne peux pas vous donner de pourcentage. General Motors a donné des chiffres plus précis un peu plus tôt.

Le sénateur Spivak: Les sociétés pétrolières nous ont également dit ce matin que si elles n'utilisaient plus le MMT, il y aurait une augmentation de soufre. Ainsi, quel serait l'impact sur les émissions? Quel serait l'impact sur les sources d'émissions polluantes fixes et mobiles?

M. Ehmann: Je ne suis pas en mesure de parler des sources d'émissions fixes, mais je serais très heureux de vous parler du secteur automobile.

Il est évident que les chiffres que l'on vous a donnés plus tôt sont exacts. La réduction de 98 p. 100 des hydrocarbures depuis l'application des règlements dans les années 70, est un fait. Nous avons l'intention de respecter des normes toujours plus strictes qui permettront de réduire encore plus les émissions, qu'il s'agisse d'émissions d'hydrocarbures, de monoxyde de carbone ou d'oxyde d'azote. Si l'on continue à utiliser de l'essence qui ne nous permet pas de nous fier à nos nouvelles technologies, ou n'atteindra pas vraiment ces objectifs.

Le sénateur Spivak: La diminution des émissions aura-t-elle un impact sur les changements climatiques?

M. Ehmann: Certainement. Si l'on parle du réchauffement de la planète et de la pollution en général, nous parlons à ce moment-là de dioxyde de carbone et je dois répondre par l'affirmative. Cela permettra de réduire encore plus les émissions de dioxyde de carbone. Si nous pouvons réduire de façon plus marquée les émissions grâce à des technologies de pointe et l'acceptation du fait que l'essence et le système font partie de la même équation, nous pourrons à ce moment-là assurer une plus grande protection.

Le sénateur Spivak: Vous n'avez mentionné que trois types d'émissions. Est-ce que les hydrocarbures sont en fait du dioxyde de carbone?

M. Ehmann: Non. Les hydrocarbures, le monoxyde de carbone et les oxydes d'azote sont les trois principaux polluants qu'on nous a chargés de contrôler. Cependant, les émissions des systèmes d'échappement se convertissent en dioxyde de carbone, ce qui contribue au réchauffement de la planète et je crois que le Canada n'a pas respecté ses engagements.

Le sénateur Buchanan: Je suis tout particulièrement intéressé par les commentaires que la plupart d'entre vous avez faits, soit que vos nouveaux systèmes de diagnostic intégré pour les véhicules utilisant de l'essence sans MMT diminueront les émissions qui causent le smog. Si c'est le cas, pourquoi l'Alberta a-t-elle dit tout à fait le contraire, soit que tout cela entraînera une augmentation des gaz à effet de serre et de l'oxyde d'azote. La Nouvelle-Écosse a dit la même chose; rien ne démontre pas que l'absence de MMT créera des problèmes environnementaux, mais tout semble indiquer que cette absence entraînera une augmentation des émissions d'oxyde d'azote. Le Nouveau-Brunswick a dit la même chose, tout comme la Saskatchewan, le Québec et le Manitoba. Je n'ai pas lu les autres mémoires.

Tous ces intervenants ont clairement indiqué dans leurs lettres qu'une des raison pour lesquelles ils s'opposent à ce projet de loi, c'est que les émissions contribuent de façon importante à la création d'ozone des basses couches de l'atmosphère et représentent un polluant transfrontalier. La majorité d'entre eux disent que si l'on élimine le MMT, il y aura une augmentation entre 8 p. 100 et 20 p. 100.

Les experts-conseils du secteur de l'éthyle ont dit qu'il y aurait une augmentation d'environ 20 p. 100. L'IPPC a dit qu'il y aurait une augmentation d'environ 8 p. 100 d'oxyde d'azote. S'il y a une augmentation d'oxyde d'azote, comment peut-il y avoir une diminution du smog dans les régions où l'on n'utilise pas d'essence contenant du MMT?

M. Bricksaw: Pour ce qui est de la réduction de 20 p. 100 qu'on a citée à plusieurs reprises, j'aimerais signaler qu'un groupe de statisticiens fiables et de bonne renommée à l'Université de Waterloo a étudié les données fournies par ce groupe d'experts. Ces statisticiens ont conclu de façon indépendante que, statistiquement, ce genre d'affirmation n'était pas fondé.

L'analyse était clairement défectueuse. Des statisticiens de l'Université de Waterloo nous ont dit que les données concernant les émissions de sources mobiles n'étaient pas bien étayées.

En tant que fabricants d'automobiles, nous savons qu'il serait possible de réduire les oxydes d'azote. Ce serait très simple. Il faut comprendre qu'il s'agit de trouver le bon équilibre dans le fonctionnement d'une voiture. Il faut faire des compromis pour tenir compte des trois polluants qui font l'objet des règlements; d'un côté, il y a les oxydes d'azote, et de l'autre, il y a les hydrocarbures et l'oxyde de carbone. Ce n'est que le juste milieu qui permet de réduire ces trois polluants au maximum. Si l'on cherche à réduire davantage les oxydes d'azote, les hydrocarbures et l'oxyde de carbone vont augmenter.

Lorsque le système de diagnostic intégré II fonctionne bien, il y a une inspection et un entretien intégré qui s'effectue. Le système indique au client s'il y a un problème et si la voiture doit être réparée. Si le système ne fonctionne pas bien, la voiture aura davantage d'émissions de toutes sortes. Elle consommera plus d'essence; elle créera plus d'émissions de gaz carboniques, d'hydrocarbures et d'oxydes de carbone. Selon nos données, la même chose vaut pour les oxydes d'azote. Voilà notre position.

Le sénateur Buchanan: J'ai cité le chiffre de 20 p. 100, qui est un des chiffres qui a été mentionné. L'ICCP a utilisé le chiffre de 8 p. 100. Vous dites que le chiffre n'est même pas de 8 p. 100, qu'il est moins élevé?

M. Brickshaw: Je ne sais pas d'où vient le chiffre de 8 p. 100. Je ne sais pas s'il provient des mêmes données, celles qui découlent de la première étude. Les statisticiens de l'Université de Waterloo ont dit qu'il y a eu tant de variations dans les résultats des tests que la réduction des oxydes d'azote était tout à fait possible selon les données. Il serait impossible de faire une déclaration catégorique selon leurs données. Nous avons clairement compris qu'il ne s'agit pas d'une évaluation valable fondée sur les données.

Le sénateur Buchanan: Même certains fabricants d'automobiles disent que «tous sont d'accord pour dire que le MMT réduit les émissions d'oxydes d'azote». Les compagnies pétrolières et les fabricants d'automobiles le disent.

M. Brickshaw: C'est ce que je viens de dire. Nous pouvons réduire les oxydes d'azote, mais nous allons augmenter les émissions d'hydrocarbures, d'oxydes de carbone et de gaz carbonique, parce que les voitures vont consommer plus d'essence. C'est simple. Nous pourrions le faire, mais vous nous demandez de faire quelque chose que nous ne pouvons pas faire si nous voulons respecter les règlements concernant les niveaux acceptables des trois polluants.

Le sénateur Buchanan: Quels règlements?

M. Brickshaw: Les règlements concernant les émissions.

M. Shimizu: Le MMT a une incidence sur les émissions. À long terme, il créera davantage d'émissions.

Le sénateur Rompkey: Est-ce que le témoin aimerait commenter la position adoptée par les provinces et les raisons pour lesquelles elles l'ont prise?

M. Brickshaw: Je ne suis pas en mesure de juger de leurs opinions, mais je les trouve plutôt surprenantes, compte tenu du fait que le CCME a appuyé les normes concernant les émissions de 1998. Je ne comprends pas comment ces organismes provinciaux peuvent prendre une position qui va à l'encontre de celle prise par leurs ministres de l'Environnement.

Le sénateur Buchanan: Mais ce sont huit des ministres de l'Environnement qui ont lancé le débat au sujet de l'interdiction du MMT. Il y en a deux qui n'étaient pas du groupe.

M. Brickshaw: Je ne comprends pas comment ils peuvent changer d'avis comme cela.

Le sénateur Buchanan: C'est facile parfois.

M. Brickshaw: Je m'excuse. Je ne comprends pas.

M. Lieb: Essentiellement, on dit que si on réduit les oxydes d'azote, les hydrocarbures augmenteront de façon considérable.

Le sénateur Spivak: C'est ça la politique.

Le sénateur Buchanan: Je ne sais pas ce que vous voulez dire, car ce n'est pas de la politique.

Le sénateur Spivak: Ils prennent deux positions différentes en même temps.

Le sénateur Buchanan: Vous ne parlez pas de la politique partisane.

Le sénateur Spivak: Je dis tout simplement que c'est de la politique.

Le sénateur Rompkey: Est-ce que les provinces ont pris leur position à la lumière de l'étude sur l'éthyle?

M. Brickshaw: Je ne sais pas pourquoi les provinces ont pris cette position.

Le sénateur Taylor: Il s'agit d'une question commerciale.

Le sénateur Buchanan: C'est une des questions. Mais si je comprends bien, huit des ministres de l'Environnement, et le représentant du Yukon ont dit très clairement lors de la dernière conférence qu'ils s'opposent à l'adoption du projet de loi.

Le président: Non, je ne le pense pas, sénateur. Si je comprends bien, ils veulent que les compagnies pétrolières collaborent avec l'industrie de l'automobile pour faire les tests.

Le sénateur Buchanan: Oui, mais ils s'opposent à l'adoption du projet de loi jusqu'à ce que ce soit fait.

Le sénateur Taylor: C'est pour des raisons commerciales.

Le président: Je pense qu'il serait préférable de tenir ces discussions internes entre nous.

M. Nakatani: Il est parfois difficile pour les hommes d'affaires japonais qui travaillent ici de bien comprendre la responsabilité du gouvernement fédéral par rapport à celle des gouvernements provinciaux.

Le sénateur Carstairs: Les Canadiens ont du mal à comprendre cela aussi.

M. Nakatani: En même temps, je comprends que chaque province peut avoir son opinion à cause de sa situation particulière. Cependant, sur des questions nationales concernant l'environnement ou la santé, le gouvernement fédéral devrait prendre l'initiative, quelles que soient les opinions des provinces.

Le président: Il faut comprendre que le gouvernement fédéral a décidé que le projet concernait l'environnement plutôt que le commerce. Le gouvernement aurait pu interdire le produit dans un projet de loi environnemental. Ce n'est pas ce qu'il a fait. Selon le gouvernement fédéral, le projet de loi porte sur le commerce. Par conséquent, les provinces et les territoires, qui sont responsables du commerce intérieur dans notre pays, estiment que cette décision n'est pas bien avisée. Il s'agit d'une querelle entre le gouvernement fédéral et les gouvernements des provinces et des territoires. C'est ce qui fait la force du Canada.

Le sénateur Rompkey: Le sénateur Landry l'a très bien dit. Il a dit que l'industrie de l'automobile aurait dû consulter un expert sur la Constitution avant de comparaître devant le comité.

Le président: Sur ce, je tiens à vous remercier de nouveau de votre comparution aujourd'hui et des renseignements fort utiles que vous nous avez donnés.

La séance est levée.


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