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Délibérations du comité sénatorial permanent des
Banques et du commerce

Fascicule 33 - Témoignages du 7 octobre 1998


SASKATOON, le mardi 27 octobre 1998

Le comité sénatorial permanent des banques et du commerce se réunit aujourd'hui à 8 heures pour examiner la situation actuelle du régime financier du Canada (Groupe de travail sur l'avenir du secteur des services financiers canadien).

Le sénateur Michael Kirby (président) occupe le fauteuil.

[Traduction]

Le président: Sénateurs, nous en sommes aujourd'hui à notre deuxième jour d'audiences à Saskatoon pour entendre les témoignages qui nous sont présentés au sujet du rapport du Groupe de travail sur l'avenir du secteur des services financiers canadien.

Les premiers témoins que nous allons entendre ce matin sont les représentants de la SIAP, avec à leur tête M. Al Morson, son président-directeur général. Comme nombre d'entre vous s'en souviennent, la SIAP est l'équivalent dans le secteur de l'assurance de la Société d'assurance-dépôts du Canada, la SADC. C'est l'organisation qui fait en sorte que les souscripteurs de polices d'assurance soient protégés lorsqu'une société d'assurance fait faillite. Je vous signale qu'aux pages 253 et 254 du sommaire du rapport MacKay, les recommandations 117 et 118 préconisent que l'on fusionne la SIAP et la SADC. M. Morson est venu ici nous parler de cette question en particulier ainsi que d'autres questions susceptibles de découler du rapport. Merci d'être venu. Je pense, sénateurs, que vous avez une copie du mémoire de M. Morson. Vous pouvez commencer par nous présenter votre exposé et nous nous ferons ensuite un plaisir de vous poser des questions.

M. Alan E. Morson, président-directeur général, SIAP: Merci, monsieur le président, d'avoir donné à la SIAP l'occasion de comparaître ce matin devant votre comité sénatorial. J'ai à mes côtés Gordon Dunning, le vice-président exécutif de la SIAP.

Nous sommes d'avis que le groupe de travail a fait un examen sérieux et fouillé du secteur des services financiers et des défis auxquels ce dernier doit faire face sur un marché mondial qui évolue rapidement. Dans le cadre de cette vaste étude, le groupe de travail a repéré certains problèmes relativement à la protection des consommateurs canadiens en cas d'insolvabilité de leur établissement financier.

Le groupe de travail reconnaît que le choix des consommateurs ne devrait pas être influencé par le soutien accordé par les divers ordres de gouvernement à l'organisme d'indemnisation d'une industrie donnée, et il recommande d'éliminer cette distorsion de concurrence dans ce domaine. Le groupe de travail reconnaît aussi la tendance croissante vers une convergence des industries et des produits, ainsi que la nécessité pour les organismes d'indemnisation de tenir compte de cette tendance. Il a également traité de la confusion qui règne actuellement dans l'esprit des consommateurs quant à l'application et au niveau de la protection et à l'organisme d'indemnisation qui intervient dans le cas d'un produit donné.

Après avoir répertorié ces problèmes, le groupe de travail entreprend d'envisager des solutions précises. Il recommande deux modèles possibles. Ce faisant, le groupe de travail mentionne qu'il existe quand même toujours des différences quant à la nature et à l'étendue des risques associés aux entreprises d'assurance-vie et aux établissements de dépôts. Le groupe de travail n'approfondit cependant pas cette question et met plutôt l'accent sur les similitudes. Nous considérons que cette question mériterait une plus grande réflexion au cours de la prochaine étape qui consistera à modifier les organismes d'indemnisation. Il y a lieu également de réfléchir au degré souhaitable de participation des gouvernements fédéral et provinciaux, ainsi que de l'industrie des assurances de personnes.

Le groupe de travail a proposé deux scénarios comme solutions possibles. Dans le mémoire qu'elle a présenté au groupe de travail, l'ACCAP en a proposé un troisième. En tant qu'acteur principal dans le domaine de la protection des consommateurs, la SIAP estime qu'il lui incombe de faire connaître son point de vue sur les problèmes soulevés et les solutions proposées.

À ce stade-ci, il convient d'évaluer la pertinence des problèmes soulevés et de confirmer la nécessité de s'y attaquer. Toutefois, avant que ne soit prise une décision quant à la façon de modifier ou de fusionner les organismes d'indemnisation, nous recommandons que des représentants des fonds de garantie, de l'industrie et des pouvoirs publics, connaissant bien le domaine, procèdent à une étude plus approfondie de cette question, afin de déterminer la meilleure façon de résoudre les problèmes soulevés par le groupe de travail, à la lumière des autres questions pertinentes que nous allons évoquer.

Je vais maintenant demander à Gordon Dunning de commenter les questions qui ont été directement soulevées par le groupe de travail.

Gordon M. Dunning, vice-président exécutif, SIAP: Merci, M. Morson. La première question que je tiens à aborder est celle de l'égalité des chances face à la concurrence. La SIAP appuie résolument le principe selon lequel, dans l'éventualité de l'insolvabilité d'un établissement financier, quel qu'il soit, les consommateurs devraient pouvoir bénéficier du même soutien de l'État.

À l'heure actuelle, les consommateurs qui achètent des produits d'un établissement de dépôts bénéficient d'une protection garantie par l'État et d'un accès presque immédiat à leurs fonds lors d'une insolvabilité, et ce, grâce aux liquidités que l'État est prêt à fournir à la SADC. Les titulaires de polices d'assurance-vie, eux, ne bénéficient d'aucun de ces deux avantages.

À ce jour, les titulaires de polices n'ont pas vraiment eu à souffrir de cette iniquité, car la SIAP a su honorer toutes ses obligations dans le cas des trois insolvabilités qui sont survenues jusqu'à présent. Les assurés de Confédération-Vie se sont vu restreindre l'accès à leurs fonds, mais les effets de cette restriction ont été atténués par la mise en place d'un comité chargé d'étudier le cas de personnes ayant un besoin urgent de leurs fonds. Dans un contexte de taux d'intérêt différents, en l'occurrence si les taux d'intérêt avaient augmenté, nul doute qu'il aurait été plus difficile de satisfaire les besoins des titulaires de polices. La possibilité pour l'industrie d'obtenir des liquidités du Trésor public permettrait aux titulaires d'avoir plus facilement accès à leurs fonds et d'avoir davantage d'options. Malgré les succès remportés par notre organisme, le grand public considère toujours que la protection offerte par la SIAP en cas d'insolvabilité d'un assureur est une protection moins solide que celle de la SADC. Il s'agit donc d'une question capitale sur le plan de la concurrence, tant pour les consommateurs que pour l'industrie. La SIAP considère que l'État devrait accorder le même soutien aux établissements de dépôts et aux entreprises d'assurance-vie. Nous ne préconisons pas un degré en particulier de soutien de l'État, mais nous pensons que des solutions faisant appel à une aide limitée des pouvoirs publics répondraient bien aux attentes actuelles du grand public et de l'État.

Je vais maintenant commenter une autre question soulevée par le groupe de travail, celle de la convergence au niveau des industries. Dans ce secteur, le groupe de travail a relevé la convergence de plus en plus grande des industries, qui risque de causer des problèmes en cas d'insolvabilité d'un conglomérat. Lorsque plusieurs types d'établissements financiers se retrouvent au sein d'un conglomérat, il en résulte l'intervention de plusieurs organismes d'indemnisation. C'est un problème qui se pose de plus en plus.

Dans l'éventualité de la défaillance d'un conglomérat financier, il pourrait être difficile de déterminer, en raison d'une piètre tenue des livres, problème courant dans les entreprises en difficulté, et d'actifs en transit, quels sont dans la pratique les actifs appartenant à chacun des membres du groupe, à savoir: l'associé d'assurance-vie, la banque, la société de fiducie, l'organisme de placement collectif et la société d'assurance IARD à l'intérieur de ce groupe.

Nous partageons l'inquiétude du groupe de travail et estimons que pour dûment parer à ce problème, toute étude subséquente devra prendre en compte non seulement les établissements de dépôts et les sociétés d'assurance-vie, mais aussi les organismes de placement collectif, les courtiers en valeurs mobilières et les assureurs IARD. La fusion de la SIAP et de la SADC n'est certainement pas la seule solution, et il est peu probable qu'elle soit la meilleure.

Le groupe de travail a par ailleurs relevé l'importance de la question de convergence des produits et il a très bien su mettre en lumière la similitude marquée des produits offerts par les sociétés-vie et par les établissements de dépôts. Cette convergence risque de s'intensifier pendant que les deux secteurs continueront à élaborer leurs produits.

Toutefois, le groupe de travail n'a pas vraiment traité dans son rapport de l'assurance-vie, de l'assurance-invalidité et des rentes viagères qui ne sont pratiquées que par les sociétés-vie. Ces produits sont uniques à notre industrie et doivent être pris en compte de façon très différente lors d'une insolvabilité. Pour les titulaires de ce genre de contrat, il faut maintenir la couverture en vigueur et non leur verser une somme au comptant. Ceux-ci doivent continuer de verser des primes à une entreprise insolvable pour pouvoir maintenir leur protection. Cette différence fondamentale modifie sensiblement l'approche à envisager dans le cas d'une liquidation selon qu'il s'agit d'une société d'assurance-vie ou d'un établissement de dépôts.

L'approche adoptée dans le cas des établissements de dépôts consiste à liquider l'actif et à payer les créances. Par contre, dans le cas d'une société d'assurance-vie, on interrompt son activité commerciale, mais on maintient ses autres opérations. Ainsi, on garde en vigueur les contrats tout en cherchant à les faire prendre en charge par de nouveaux assureurs, et on poursuit les activités de placement à long terme tout en cherchant à résoudre les problèmes d'actif.

Le groupe de travail a aussi relevé dans ce rapport le problème de la confusion qui règne chez les clients, que l'on peut résumer en disant qu'il y a une certaine confusion dans l'esprit des consommateurs quant à l'organisme devant intervenir dans le cas d'un produit donné. Cette confusion n'existe pas seulement à l'égard des produits des établissements de dépôts et des sociétés d'assurance-vie, mais elle touche aussi toutes les autres branches du secteur des services financiers, qu'il s'agisse des courtiers en valeurs mobilières, des organismes de placement collectif ou des sociétés d'assurance IARD.

L'un de nos objectifs à l'heure actuelle est de veiller à ce que les consommateurs comprennent bien que les fonds communs de placement ne sont pas couverts par un organisme d'indemnisation et que la protection offerte par la SIAP dans le cas des fonds distincts se limite aux garanties offertes par l'assureur-vie lui-même. Ces problèmes de communication avec les titulaires de polices d'assurance sont importants pour nous et nous avons d'ores et déjà entrepris d'en résoudre un certain nombre en collaboration avec d'autres organismes d'indemnisation.

Je vais maintenant redonner la parole à M. Morson.

M. Morson: Concernant les deux modèles de fusion de la SIAP et de la SADC, le rapport recommande le maintien de deux comptes séparés alimentés par les cotisations des sociétés adhérentes, l'un pour les établissements de dépôts et l'autre pour les sociétés-vie. Le groupe de travail reconnaît ainsi la différence entre les risques et les coûts d'une insolvabilité dans chacun des secteurs. La SIAP a acquis de l'expérience dans la surveillance des risques d'insolvabilité des sociétés-vie et, comme vient de vous le préciser M. Dunning, des mesures spéciales doivent être prises pour maintenir la couverture des assurés lors de la défaillance d'un assureur. Si les bons risques vont s'assurer ailleurs, ne laissant que les mauvais risques, le principe de la compensation des risques en assurance est faussé et le coût de la défaillance grimpe. Toute nouvelle forme d'organisme d'indemnisation devra pouvoir continuer de gérer ces risques particuliers.

Monsieur le président, je tiens aussi à aborder deux autres points qui n'ont pas été précisément traités de manière détaillée dans le rapport du groupe de travail.

Le premier d'entre eux porte sur la possibilité de mettre en pratique un plan national par opposition à un plan fédéral. Bien que l'insolvabilité d'une société-vie relève principalement du fédéral, la protection des consommateurs et les dispositions contractuelles relèvent des provinces. Le règlement intérieur de la SIAP prévoit l'adhésion des 13 administrations publiques du Canada, en l'occurrence les dix provinces, les deux territoires et le gouvernement fédéral. Toute modification exige la participation et l'agrément de toutes ces administrations publiques. Le partage des risques et des coûts se fait sur une base nationale. Cela veut dire que le coût est réparti à l'échelle du pays. C'est la force de notre régime actuel, qui est national, et la solution qui sera finalement retenue devra tenir compte de cette réalité.

Le second point porte sur la participation de l'industrie. Même si un certain soutien de l'État en dernier ressort a été requis pour donner la confiance nécessaire aux consommateurs et pour pallier tout risque systémique éventuel, quoique improbable, il n'en reste pas moins que l'industrie a un rôle important à jouer.

Nous considérons que la participation de l'industrie est nécessaire non seulement pour assurer que les fonds de garantie suivent l'évolution des produits et des risques dans les différents secteurs des services financiers, mais également pour réduire les coûts que devront en fin de compte supporter les titulaires de polices et leurs déposants. Plus grande sera la participation de l'industrie, moins élevés seront les coûts pour l'administration publique qui surviennent nécessairement lorsque l'État intervient. Tous les ordres de gouvernement cherchent aujourd'hui des moyens de réduire leurs interventions.

En guise de conclusion, monsieur le président, nous considérons que le groupe de travail a rendu un service précieux en relevant les problèmes que posent les fonds de garantie et en suggérant deux solutions possibles. Nous exhortons le comité à recommander que soit acceptée la proposition d'égaliser les conditions de concurrence et que soient étudiées plus en profondeur cette question et les questions connexes de convergence au niveau des institutions et des produits. Il existe plusieurs solutions qui permettraient de régler ces problèmes. Nous nous réjouissons à l'avance de participer à toute réflexion future sur celles qui seraient les plus appropriées.

Ce sont là, monsieur le président, les commentaires que nous avons préparés, et nous nous nous ferons un plaisir de répondre à toutes les questions que les sénateurs voudront bien nous poser.

Le président: Au sujet de l'égalité des chances face à la concurrence que vous préconisez, vous soutenez qu'il est important de pouvoir accéder aux liquidités apportées par le Trésor public en alléguant que la société d'assurance-dépôts du Canada en bénéficie déjà. Pourtant, lorsque vous évoquez les situations différentes dans lesquelles vous vous trouvez, vous et la SADC, face à un cas d'insolvabilité, vous signalez que lorsqu'un établissement de dépôts fait faillite, la SADC rembourse les déposants. En ce qui vous concerne, par contre, vous maintenez les polices d'assurance-vie en vigueur et vous vous contentez d'arrêter les ventes. Il est donc évident que vos besoins de liquidités sont largement inférieurs à ceux d'un établissement de dépôts qui fait faillite. Je n'ai donc jamais compris et je ne comprends toujours pas pour quelle raison la possibilité d'accéder aux fonds de la SADC est jugée si importante dans votre secteur. Nombre de vos chefs d'entreprises prétendent que la protection accordée par la SADC, étant donné qu'elle est garantie par le gouvernement, confère un avantage significatif aux établissements de dépôts face à la concurrence. J'ai demandé à l'ACCAP de m'envoyer des justificatifs, ce qu'elle a fait, mais à mon avis ces derniers ne permettent absolument pas de conclure comme ils le font. Cela dit, ce n'est pas avec vous qu'il faut débattre de cette question et je la laisserai donc pour plus tard, éventuellement lorsque d'autres chefs d'entreprises viendront comparaître la semaine prochaine à Toronto.

Étant donné que vous avez su si bien régler l'affaire de la Confédération-Vie, pouvez-vous m'expliquer pour quelle raison vous avez besoin d'accéder au crédit du Trésor public, si ce n'est pour des questions de convenance personnelle?

M. Morson: Tout d'abord, monsieur le président, je préciserais qu'il s'agit là avant tout d'un enjeu face à la concurrence et non pas d'un enjeu opérationnel. D'un point de vue opérationnel, comme vous venez de le dire, l'affaire de la Confédération-Vie a été réglée de manière satisfaisante, mais c'est en partie en raison de la conjoncture s'appliquant aux taux d'intérêt. Les produits qu'avait vendus la Confédération-Vie au cours des années ayant précédé la faillite comportaient des taux d'intérêt élevés et ces taux d'intérêt, les taux d'intérêt prévus aux contrats, ont été maintenus. Lorsque les titulaires de polices d'assurance de la Confédération-Vie retrouveront, comme nous l'espérons, l'intégralité de leur argent, cela englobera les taux d'intérêt prévus aux contrats à compter de la date de l'insolvabilité jusqu'à celle du paiement. Lorsqu'un établissement financier est défaillant, l'incertitude est grande et les gens aimeraient pouvoir reprendre leur argent pour aller le placer ailleurs. Dans le cas de la Confédération-Vie, ils n'ont pas été autorisés à le faire. Les remboursements ont été bloqués pendant quatre ans. Nous avons mis sur pied un comité se réunissant toutes les semaines pour régler tous les cas d'urgence. Si une personne avait un besoin légitime, des crédits étaient alors débloqués, mais si son intention était d'aller placer l'argent dans un autre établissement financier, la demande était déclarée injustifiée. À la fin, environ 85 p. 100 de ces demandes ont été approuvées. Ce qui s'est passé, c'est que l'on a pu jouer les «bonnes âmes charitables» vis-à-vis des consommateurs, parce qu'ils touchaient de meilleurs taux d'intérêt en laissant leur argent dans cet établissement, mais si les taux d'intérêt avaient augmenté, je pense qu'ils auraient considéré la situation d'un tout autre oeil et qu'ils se seraient plaints bien davantage. Ce que nous disons, tout simplement, c'est que les fonds ont été bloqués pendant quatre ans alors qu'à la Confederation Trust, la filiale, ils ont pu retirer leurs fonds dans les trois mois.

Le président: J'ai deux commentaires à faire. Tout d'abord, nous devons vous féliciter de votre performance en ce qui a trait à la Confédération-Vie. Lorsque nous avons tenu des audiences à ce sujet, il semblait que les titulaires de polices d'assurance risquaient bien de perdre plusieurs centaines de millions de dollars. De toute évidence, vous avez fait un travail magnifique dans cette affaire, vous et votre personnel. En second lieu, vous nous dites que c'est avant tout un enjeu face à la concurrence. J'aimerais que vous m'en donniez les raisons.

M. Morson: C'est un enjeu face à la concurrence parce qu'après avoir fait des sondages pendant des années, avant comme après l'affaire de la Confédération-Vie, les responsables du secteur se sont aperçus qu'une forte proportion de consommateurs dans le grand public déclaraient préférer la garantie du gouvernement. Lorsque la conjoncture est bonne, comme maintenant, le problème ne se pose pas vraiment, parce que lorsque tout va bien, les consommateurs ne se demandent pas qui est leur intermédiaire. Toutefois, dans des périodes d'instabilité financière, comme après la faillite de la Confédération-Vie, tous les acheteurs de produits posent des questions au sujet de la nature de la protection du consommateur. Les sondages nous indiquent que la question est toujours présente mais qu'elle ne devient importante que dans une conjoncture économique instable.

Le président: Je vais passer la parole au sénateur Angus, mais je ne peux m'empêcher de faire un commentaire. Si l'on obtient cette réponse dans les sondages, c'est parce que l'on pose la question de manière à solliciter la réponse que l'on attend. Si vous demandez: «Préférez-vous la garantie du gouvernement fédéral à tout autre type de garantie?», les gens vont toujours vous répondre qu'ils préfèrent la garantie du gouvernement fédéral. Ce n'est absolument pas une question qui relève de la concurrence. Elle ne relève de la concurrence que si le consommateur décide de placer son argent dans un établissement de dépôts plutôt que dans une société d'assurance sur la vie en raison de l'existence de cette protection, et ce n'est pas ce que font les consommateurs. L'ACCAP m'a dit elle aussi que c'était là la réponse qu'elle avait recueillie, mais je sais trop bien comment on peut établir un questionnaire pour obtenir les réponses que l'on veut, et ce n'est donc pas probant ici.

Le sénateur Angus: J'estime que vous avez fait preuve d'une grande diplomatie dans votre exposé et je vous en sais gré, mais comme vous pouvez le constater, notre président aime bien aller tout de suite au fond du problème. Dans votre exposé, vous avez indiqué que les questions soulevées par le groupe de travail nécessitent en fait «une plus grande réflexion», ce que j'interprète, en me référant à l'ensemble de votre argumentation, comme un commentaire qui signifie que le comité a bien répertorié les enjeux mais qu'il a proposé des solutions qui ne se tiennent absolument pas.

M. Morson: Sénateur, je ne voudrais pas que l'on me fasse dire que ces solutions ne se tiennent pas du tout, parce que ce n'est pas le cas. Je considère que les solutions que le comité a avancées peuvent être intéressantes, mais j'estime qu'il y a d'autres points à étudier de manière suffisamment détaillée pour voir dans quelle mesure il s'agit là des solutions qui s'imposent ou s'il n'y a pas d'autres solutions. Nous pensons qu'il y a d'autres solutions.

Le sénateur Angus: De meilleures solutions, j'imagine.

M. Morson: Disons que nous n'en sommes pas encore sûrs parce que tant que nous n'aurons pas parlé à la SADC et aux fonctionnaires du gouvernement, nous ne pourrons pas savoir ce qui est ou non acceptable. Nous considérons cependant, je le répète, que la question du régime national par opposition au régime fédéral a son importance. Nous avons un régime national et nous considérons qu'il y a beaucoup d'avantages à répartir les coûts à l'échelle de l'ensemble du pays plutôt que d'avoir des régimes provinciaux distincts se superposant à un régime fédéral. Nous pensons qu'il faut en tenir compte mais nous ne sommes pas sûrs de la solution qui doit être retenue en définitive et nous ne voulons pas nous prononcer à l'avance. En somme, nous indiquons que nous ne nous sommes pas encore entretenus avec les responsables de la SADC ou les fonctionnaires du gouvernement pour en discuter. Lorsqu'il a fait cette recommandation, le groupe de travail ne s'est pas entretenu avec nous pour nous dire s'il était possible de mettre en oeuvre ces solutions.

Le sénateur Angus: C'est essentiellement ce que je pensais vous avoir entendu dire et je pourrais d'ailleurs le reformuler d'une autre manière, c'est une question de degré. Êtes-vous prêt à dire que le statu quo est préférable aux solutions qui ont été proposées en raison des situations complexes que vous avez évoquées?

M. Morson: Non. Je pense que le comité a mis le doigt sur des enjeux très importants et que des changements sont nécessaires en raison de l'évolution du marché des services financiers. Nous estimons qu'il est justifié de se préoccuper de l'égalité des chances face à la concurrence dans notre secteur.

Le sénateur Angus: J'ai relevé aussi avec intérêt ce que vous avez dit de la convergence des secteurs. Même si c'est une question dont la portée est plus large, le groupe de travail évoque dans son rapport différentes structures que l'on pourrait envisager dans le secteur des services financiers, notamment un modèle de société de portefeuille. Cela nous a quelque peu préoccupés en ces lieux. Vous avez indiqué qu'il y avait des chevauchements et des confusions d'actif en cas de liquidation d'une société comportant différents types d'établissements et de compagnies d'assurance. Pouvez-vous nous préciser davantage ce que vous pensez du modèle de société de portefeuille et de ses incidences du point de vue de la réglementation? Est-ce que ce modèle sera en quelque sorte semblable à celui qui est envisagé aux États-Unis?

M. Dunning: En cas d'insolvabilité, c'est la structure propre au conglomérat concerné qui nous préoccupe avant tout. Je pense que nous pouvons faire face à toute structure logique des conglomérats. Le véritable enjeu, c'est que le conglomérat déborde aussi bien du secteur de l'assurance-vie que de celui des établissements de dépôts, parce qu'il y a d'autres institutions au sein d'un tel groupe. Bien entendu, lorsqu'il s'agit d'une société de holding non réglementée, le problème se complique du fait de la difficulté à préciser quelle est la part respective de l'actif dans les établissements réglementés et dans la société de portefeuille non réglementée. Nous sommes donc évidemment aussi préoccupés par les sociétés de portefeuille non réglementées.

Le sénateur Angus: Bien entendu, vous êtes au courant de la situation de la Royal Trust. Nous avons souvent entendu dire que si la structure avait été différente, l'affaire aurait pu se terminer de toute autre manière. Je comprends qu'en cas d'insolvabilité, vous ne vous préoccupez pas de la structure. Toutefois, y a-t-il une structure particulière que vous préférez, un modèle de relations entre la société mère et ses filiales, par exemple? Y a-t-il quelque chose que vous recommandez?

M. Dunning: Je pense qu'il nous faudrait nous pencher davantage sur la question. Bien évidemment, la réponse toute simple c'est que nous préférerions que les sociétés d'assurance-vie se situent en aval et soient bien autonomes, mais ce n'est pas la réalité du marché. Nous ne pouvons pas inventer la structure, nous devrons nous y conformer, à mon avis.

Le sénateur Angus: Vous avez bien su défendre de manière générale la participation des entreprises de votre secteur et la nécessité de demander à des gens familiarisés avec la nature de votre entreprise de prendre part aux solutions. Nous avons beaucoup entendu parler de la question de la démutualisation et de la complexité des règles proposées à l'origine, qui ont gêné l'opération. Avez-vous quelque chose à nous dire qui pourrait nous aider dans ce domaine?

M. Morson: Au sujet de l'indemnisation des consommateurs?

Le sénateur Angus: Oui.

M. Morson: Notre régime d'indemnisation n'est pas visé par la démutualisation. Nous espérons que cela pourra se faire le plus rapidement possible parce qu'il est évident que les directions sont préoccupées par plusieurs choses à la fois lorsque cette opération est en cours. Il y a des sociétés par actions et des sociétés mutuelles; les sociétés par actions fonctionnent très bien et c'est ce que les sociétés mutuelles vont devenir. Je pense que le mécanisme en place est excellent et nous espérons qu'il se mettra en place rapidement.

Le sénateur Oliver: Vous avez dit que vous aimeriez que l'on propose différents modèles pour la protection des consommateurs et des titulaires de polices d'assurance en cas de faillite ou de défaillance. J'aimerais savoir si vous avez procédé à une étude des modèles retenus par d'autres pays. Dans l'affirmative, quels modèles avez-vous rencontrés? J'aimerais plus particulièrement savoir s'il existe des modèles qui prévoient une certaine forme d'autoréglementation ou d'autoassurance, et non simplement une assurance par la province ou le gouvernement fédéral. Si je vous pose cette question, c'est parce que vous avez déclaré dans votre exposé: «Nous ne préconisons pas un degré en particulier de soutien de l'État, mais nous pensons que des solutions faisant appel à une aide limitée des pouvoirs publics répondraient bien aux attentes actuelles du grand public et de l'État». Il me semble qu'il ressort implicitement de cette déclaration qu'il faudrait éventuellement que l'on accorde en dehors du gouvernement une certaine forme de protection du public. Dans l'affirmative, est-ce que cela figure dans vos modèles?

M. Morson: Par «attitudes du grand public et de l'État», j'entends les attitudes du public et du gouvernement canadien et non pas celles du public et des gouvernements dans le monde. Quant aux autres pays étudiés, nous sommes assez familiarisés avec un modèle envisagé au Royaume-Uni. À l'heure actuelle, on étudie dans ce pays un régime que l'on espère mettre en place en 1999 ou en l'an 2000 sous la responsabilité des services financiers. C'est un régime public comportant trois volets différents, l'un pour l'assurance, le deuxième pour les établissements de dépôts et le troisième pour les courtiers en valeurs mobilières.

Quant aux régimes du secteur privé, nous ne connaissons que le nôtre. Dans le mémoire qu'elle a présenté séparément au groupe de travail, l'ACCAP a proposé un modèle visant à faire en sorte que la SADC bénéficie moins du soutien du gouvernement et que la SIAP en bénéficie un peu plus, les deux régimes appartenant à chacun des secteurs et le gouvernement devenant le prêteur de dernier recours. Avec le gouvernement comme prêteur en dernier recours, les consommateurs auraient la garantie du gouvernement en cas de besoin. Le risque systémique serait par ailleurs pris en compte étant donné qu'une procédure serait en place en cas de grave difficulté.

Le sénateur Oliver: Êtes-vous cependant en faveur d'un système qui ferait que le gouvernement ne serait pas le prêteur en dernier recours dans l'un des modèles qui vous paraissent fonctionner?

M. Morson: La SIAP a réussi à fonctionner jusqu'à présent, ce n'est donc pas impossible. Je suis convaincu, cependant, qu'il convient de tenir compte du risque systémique, soit à l'avance en instaurant une procédure, soit après coup, éventuellement dans un environnement chaotique. Je ne pense pas que le risque systémique soit un gros problème pour les établissements de dépôts ou l'assurance-vie au Canada, mais ce n'est pas impossible à l'avenir.

Le sénateur Oliver: Lorsque le sénateur Angus a cherché à savoir quelle était votre véritable réaction face à certaines recommandations du groupe de travail, on aurait dit qu'il vous arrachait une dent et vous n'avez pas suffisamment bien défini les points faibles des recommandations pour que je puisse vous comprendre. Puisqu'une plus grande réflexion s'impose, pouvez-vous nous dire exactement ce qui doit être étudié et pour quelle raison? Il y a peut-être des choses que notre comité pourrait faire plus tard.

M. Morson: Il y a deux questions clés qui à notre avis doivent être abordées lorsqu'on cherche de quelle façon il faut faire fusionner les deux régimes pour conserver les points forts de la SIAP. Tout d'abord, selon le mode de fonctionnement de la SADC, lorsqu'une entreprise fait faillite, la Société vend son actif et rembourse les dettes. La démarche adoptée par la SIAP consiste au contraire à maintenir en exploitation la société d'assurance-vie, à continuer à percevoir les primes et à trouver d'autres repreneurs se chargeant de couvrir les risques avant que les vies assurées ne disparaissent. Nous voulons que ce point fort soit conservé.

En second lieu, il y a le fait que la SIAP est désormais un régime national. Les dix provinces, les deux territoires et le gouvernement fédéral en font partie. Du point de vue de l'évaluation des risques, de la façon de traiter le risque et du paiement des frais, c'est un régime national unique qui s'appuie sur l'ensemble de la population canadienne, qui compte entre 25 et 30 millions de personnes. Un régime fédéral n'engloberait pas les sociétés provinciales et par conséquent il nous faudrait des régimes provinciaux distincts, ayant une assise plus faible, ou il nous faudrait d'une manière ou d'une autre intégrer ces sociétés provinciales au régime fédéral. Vous n'ignorez pas qu'il y a d'une part la SADC et d'autre part la RADQ et que cette question a été négociée pendant de longues années au prix de très grandes difficultés. Nous ne pensons pas que cette question a été prise en compte alors qu'elle devrait l'être. C'est un point fort de notre régime à l'heure actuelle et nous estimons qu'il est dans l'intérêt du consommateur de le conserver dans toute la mesure du possible.

Le sénateur Oliver: Est-ce que des sociétés d'assurance-vie sont venues vous présenter des modèles de changements qui leur paraissent intéressants pour leurs titulaires de polices d'assurance?

M. Morson: Oui, effectivement. En fait, elles ont présenté un mémoire au groupe de travail MacKay sur cette question et elles ont recommandé que la SIAP reste dans l'état actuel et que la SADC soit, disons, privatisée, pour qu'elle devienne une organisation professionnelle comparable à la SIAP, et que l'on mette en place un mécanisme d'apport de liquidités par le fédéral pour que l'une comme l'autre de ces sociétés puisse avoir accès aux crédits du Trésor public en cas de manque de liquidités ou de difficultés.

Le sénateur Oliver: Et cet organisme apportant les liquidités, c'est le gouvernement?

M. Morson: Oui, en effet, mais uniquement comme prêteur en dernier recours. Du point de vue du consommateur, on saura que le gouvernement peut intervenir en dernière analyse et, par conséquent, les régimes ne pourront être défaillants. De son côté, le gouvernement n'aura pas à intervenir à moins qu'un problème majeur se pose.

Le sénateur Meighen: S'agirait-il de faire en sorte que le gouvernement donne sa garantie dans les deux secteurs pour le même montant au niveau de chaque demande individuelle? Autrement dit, si je me souviens bien, la SADC garantit un maximum de 60 000 $. Est-ce que ce sera la même chose pour la SIAP?

M. Morson: La SIAP a 60 000 $ pour ce qui est des rentes cumulées, qui s'apparentent aux CPG, mais pour l'assurance-vie, elle garantit 200 000 $. Pour ce qui est des rentes à vie non réversibles qui sont en cours de paiement, c'est 2 000 $ par mois. Pour l'assurance-santé, c'est 60 000 $ par demande. Pour l'assurance-incapacité, c'est 2 000 $ par mois. Pour les fonds gérés séparément, la garantie est d'un maximum de 60 000 $. Tout à l'heure, nous vous avons dit que le groupe de travail avait mis l'accent sur les similitudes, telles que les CPG et les rentes à versements différés, mais il y a dans notre secteur bien d'autres produits qui sont très différents.

Le sénateur Oliver: Pour ce qui est des produits s'apparentant aux CPG, par exemple, ce sera le même montant?

M. Morson: Oui; 60 000 $.

Le sénateur Kelleher: Je vous renvoie maintenant à la page 3 de votre mémoire, au dernier paragraphe placé sous le titre «Convergence au niveau des industries». Nous avons un mécanisme d'indemnisation, celui de la SADC, et dans ce paragraphe vous faites état de votre mécanisme. Vous nous dites qu'il nous faut prendre en compte non seulement les établissements de dépôts et les sociétés d'assurance-vie, mais aussi les fonds communs de placement, les courtiers en valeurs mobilières et les sociétés d'assurance IARD.

Vous laissez entendre qu'il nous faut englober tous ces secteurs, et cela me fait une peur bleue. Je vous avoue bien franchement que je n'ai vraiment pas envie de voir proliférer tous ces régimes de sauvetage patronnés par le gouvernement et toutes ces solutions de dernier recours. Je considère que celles que nous avons déjà constituent un fardeau bien suffisant. Allons-nous nous retrouver, si l'on vous écoute, avec toute une foule d'autres régimes?

M. Dunning: Il y a en fait un régime d'indemnisation qui s'applique aux courtiers en valeurs mobilières.

Le sénateur Kelleher: Oui, je le sais.

M. Dunning: Et il y en a un autre pour les sociétés d'assurance IARD. Ce que nous essayons de faire comprendre, c'est qu'il n'y a pas de régime qui s'applique aux fonds communs de placement. La procédure que nous voulons instituer part du principe qu'une certaine forme de collaboration sera nécessaire entre les différents régimes d'indemnisation parce qu'en cas d'insolvabilité, nous aurons tous à faire face aux consommateurs, et ce faisant nous serons tous amenés à coopérer. Nous avons absolument besoin d'un mécanisme qui nous permette de le faire. Le groupe de travail MacKay propose de nous regrouper avec la SADC. Cela pourrait permettre d'apporter des solutions dans la plupart des cas, mais pas dans tous.

Le sénateur Kelleher: Excusez-moi, mais je ne pense pas que vous ayez répondu à ma question. J'aimerais savoir si vous estimez ou non que le gouvernement doit intervenir et jouer un rôle quelconque au sujet de ces différents régimes. Doit-il fournir des crédits ou prendre des mesures en dernier recours?

M. Morson: Nous acceptons les enjeux. Les enjeux sont là et nous disons que la question ne se pose pas seulement entre les banques et les sociétés d'assurance-vie si l'on veut éviter la confusion chez les consommateurs et offrir une bonne couverture des produits. Ça va plus loin que ça. C'est pourquoi nous disons qu'une plus grande réflexion s'impose. Nous ne préconisons pas un niveau donné d'appui de l'État. Ce que nous disons, c'est que dans les produits qui s'apparentent aux dépôts, il est important que les règles du jeu soient les mêmes pour tout.

Le sénateur Kelleher: Ce que je veux savoir, c'est si vous préconisez ou non un plus grand appui de la part de l'État.

M. Morson: Non, nous ne préconisons pas cela.

Lorsqu'on parle de ces autres produits, il faut bien comprendre que les fonds communs de placement n'ont pas de régime de protection des consommateurs.

Le sénateur Kelleher: Je le comprends bien.

M. Morson: Mais bien des gens ne le comprennent pas. Nous disons que c'est une question importante et qu'il convient d'en tenir compte. Nous essayons pour l'instant de la régler en instaurant des régimes de protection du consommateur. Tout ce que nous voulons vous dire, c'est que cette fusion entre la SIAP et la SADC ne résoudra pas ces problèmes.

Le sénateur Kelleher: Il y a un an environ, monsieur le président, lorsque notre comité s'est penché sur le rapport de la SADC, nous avons eu jusqu'à l'audace de recommander que l'on fixe une certaine franchise. En l'occurrence, il s'agissait de faire en sorte que le consommateur de ces services assume une certaine responsabilité lorsqu'il décide de placer son argent dans tel ou tel établissement. Que pensez-vous du principe voulant qu'on établisse une certaine forme de franchise ou de coassurance si ce projet voit le jour?

M. Morson: À mon avis, la question ne se posait pas du fait qu'elle ne figurait pas dans le rapport du groupe de travail MacKay. Il se peut que l'on n'ait pas fini d'en reparler parce que c'est une mesure qui a déjà été recommandée auparavant.

Le président: Le groupe de travail a peut-être vu à quel point notre comité s'était fait éreinter les trois fois où il a proposé cette mesure, et il a décidé que le plus sûr était de ne rien dire.

Le sénateur Kelleher: Notre comité n'abandonne pas facilement.

M. Morson: Les entreprises de notre secteur ne s'entendent pas toutes sur la question, mais mon expérience personnelle me fait dire qu'il serait bon d'avoir une certaine forme de coassurance. Il ne faudrait pas que la franchise soit très élevée, parce que l'on ne peut pas s'attendre à ce que les consommateurs comprennent toute la complexité d'une société d'assurance. À mon avis, toutefois, ils devraient faire attention lorsqu'ils placent leur argent. Ce n'est pas nécessairement l'avis de tout le monde dans notre secteur.

Le sénateur Kelleher: Non. À notre avis, cependant, vous faites certainement partie des rêveurs.

Le sénateur Callbeck: Avez-vous un conseil d'administration?

M. Morson: Oui, en effet.

Le sénateur Callbeck: Est-ce que les 13 juridictions sont représentées au sein du conseil?

M. Morson: Non, mais elles sont informées de la tenue de chacune des réunions et elles peuvent y assister. Une fois par an, John Palmer, le surintendant des assurances, assiste à une réunion du conseil. L'inspecteur général des institutions financières du Québec reçoit aussi une invitation spéciale pour assister à une réunion du conseil une fois par an et discuter avec nous de questions d'ordre général. Les représentants des différentes juridictions peuvent venir, mais ils ne le font pas.

Nos neuf administrateurs sont tous indépendants. Ils ne sont associés à aucun de nos membres, mais ils sont compétents. Plusieurs d'entre eux sont des présidents à la retraite de sociétés d'assurance-vie. M. McKinlay, le président de la SADC, est membre de notre conseil. Nous avons des avocats et des comptables et d'éminents représentants au sein du conseil, mais les administrateurs sont indépendants.

Pour répondre précisément à votre question, oui, les responsables de la réglementation peuvent assister aux réunions de notre conseil, mais en général ils ne le font pas.

Le sénateur Callbeck: Comment sont nommés les administrateurs?

M. Morson: Les administrateurs sont nommés par les membres du secteur. Lors de nos assemblées annuelles, un comité de nomination au sein du conseil désigne les candidats administrateurs, qui sont alors élus par nos membres.

Le sénateur Callbeck: À la page 4 de votre mémoire, vous nous parlez de confusion des consommateurs. Dans la dernière phrase, vous nous dites que vous avez entrepris de résoudre les problèmes de communication avec d'autres organismes d'indemnisation. De quels organismes d'indemnisation parlez-vous?

M. Dunning: Nous avons des réunions mixtes avec la SADC, les fonds communs de placement, le CIPF et l'Association canadienne des courtiers en valeurs mobilières. Nous venons juste d'entreprendre une étude comparative des risques couverts et des politiques de communication. Nous nous efforçons de mettre en place un projet de communication conjoint pour mettre en relief ces différentes questions. Ces questions sont très difficiles à faire comprendre aux consommateurs lorsque tout va bien, parce que de manière générale les consommateurs ne s'y intéressent qu'à partir du moment où un problème se pose.

Le sénateur Meighen: Je me demande jusqu'à quel point vous agissez vraiment. Mes parents me disaient toujours: «Lorsqu'on vit dans une maison de verre, on ne lance pas de pierres», mais vous arrivez au seizième rang pour ce qui est de la clarté et de l'exhaustivité des renseignements fournis aux consommateurs.

Nous, qui sommes des sénateurs et des politiciens, nous sommes habitués à occuper le dernier rang des sondages, de sorte que cette situation ne me préoccupe pas trop, mais je me demande comment vous réagissez. Que faites-vous pour dissiper les critiques concernant la clarté et l'exhaustivité des renseignements et face à la polémique entourant la disparition des primes? Est-ce que vous appuyez les recommandations du groupe de travail MacKay au sujet de la divulgation et de la transparence?

M. Morson: Il s'agit de la divulgation et de la transparence des sociétés d'assurance par opposition à celles des organismes d'indemnisation, n'est-ce pas?

Le sénateur Meighen: Oui.

M. Morson: Pour l'instant, nous n'agissons pas du tout. Nous avons laissé ce soin à l'Association professionnelle et à ses membres. Nous cherchons à protéger le consommateur en cas d'insolvabilité et non pas dans les autres circonstances. C'est l'insolvabilité qui est notre domaine, et non pas la protection en général.

Le sénateur Meighen: Pour ce qui est de vos responsabilités en cas d'insolvabilité, puis-je partir du principe que vous ne voyez aucune objection aux recommandations du groupe MacKay concernant la transparence et la divulgation?

M. Morson: Non.

Le sénateur Kroft: J'aimerais maintenant que vous vous penchiez sur une recommandation légèrement différente du rapport MacKay. Nous avons parlé exclusivement de protection. La recommandation 112b) du rapport MacKay dispose:

b) Étant donné l'importance d'une concurrence efficace dans le secteur des services financiers au Canada et l'évolution rapide des réalités concurrentielles, le mandat du BSIF devrait être modifié afin de préciser que le BSIF doit parvenir à un équilibre entre, d'une part, la concurrence, l'innovation et la compétitivité et, d'autre part, la solidité et la stabilité financières, comme il y est déjà tenu.

Voilà qui amène toute une série d'autres responsabilités et qui élargit à n'en pas douter le mandat du bureau. Je me demandais ce que vous pensiez des avantages, des complications et des différentes conséquences d'un élargissement de ce mandat.

M. Morson: Le BSIF aura bien du mal à prendre en charge cette question. Ce sont les cas d'insolvabilité qui nous préoccupent et je pense que la contrepartie, c'est la solvabilité à long terme dans un bon cadre concurrentiel. Si l'on ne tient pas compte de la concurrence, nous craignons que la situation soit bonne à court terme mais que l'on éprouve des difficultés à long terme. Je n'ai rien contre cette recommandation, mais je pense que le BSIF aura bien du mal à l'appliquer dans de bonnes conditions. Je suis convaincu que cela va lui poser de gros problèmes.

Le président: Notre comité a été étroitement mêlé aux audiences qui ont suivi la chute de la Confédération-Vie. Puisque vous étiez là, pourriez-vous nous résumer très rapidement ce qui s'est passé? Si j'en crois ce que vous avez dit tout à l'heure, vous ne pensez pas qu'il y aura des pertes en dépit du fait que l'on avait évoqué le chiffre de 400 millions de dollars lorsque la Confédération-Vie a mis la clé sur la porte.

Pour l'information du comité, pourriez-vous nous résumer où nous en sommes et éventuellement nous dire ce que vous avez fait pour en arriver là? C'est un exemple concret et il est toujours utile de bien comprendre comment ces choses fonctionnent.

M. Morson: Je vais demander à Gordon Dunning de le faire.

M. Dunning: Telles que les choses se présentent actuellement, les titulaires de polices d'assurance qui ne dépassent pas les seuils fixés par la SIAP continuent de percevoir 100 p. 100 de leurs prestations. Les seuils qui s'appliquent à l'ensemble des titulaires de polices d'assurance permettent actuellement de verser globalement 90 p. 100 des prestations.

Le président: Si je me souviens bien, ce seuil était de 200 000 $ pour l'assurance-vie. C'est bien ça?

M. Dunning: Oui, 60 000 $ pour les produits cumulés, 200 000 $ pour les produits de l'assurance-vie et 2 000 $ par mois pour les rentes à vie et les rentes d'invalidité. Les titulaires de polices d'assurance portant sur des produits remboursables ont eu accès aux fonds correspondants il y a 18 mois environ. Les consommateurs ont donc retrouvé leur pouvoir de décision. On ne s'est pas précipité à la banque et les consommateurs ont désormais confiance dans la capacité de payer du liquidateur.

Les états financiers remis au tribunal par le liquidateur sont tels que les titulaires de polices d'assurance peuvent désormais s'attendre à retrouver la totalité de leur argent. On indique qu'il devrait y avoir une centaine de millions de dollars d'excédent.

Le président: Pour les titulaires de polices d'assurance au-delà du seuil de 200 000 $?

M. Dunning: Oui. Au-delà de nos seuils. Ce sont les détenteurs de polices d'assurance au-delà du seuil et cela correspond en fait à notre propre taux de recouvrement. La liquidation fait état d'un excédent de 100 millions de dollars à l'heure actuelle. Toutefois, avant que le liquidateur ne puisse distribuer cette somme aux titulaires de polices d'assurance, il faut que ces montants soient certains et qu'un certain nombre de choses se produisent.

Il faut que le liquidateur retire des registres comptables davantage de biens qui posent des difficultés, et cela englobe le portefeuille hypothécaire correspondant à certains placements privés. Ce sont là des éléments d'actif à haut risque. Nous devons les transformer en liquidités pour plus de certitude. Nous devons aussi supprimer certains éléments du passif des registres pour renforcer cet élément de certitude.

Comment sommes-nous parvenus à ce résultat? Je pense que nous avons mis en oeuvre une stratégie à long terme qui a payé. Si nous avions cherché à nous débarrasser rapidement des dettes, les pertes encourues par les titulaires de polices d'assurance auraient été importantes. Nous avons procédé à une liquidation ordonnée. Cela remonte au mois d'août 1994, comme le savent les sénateurs.

L'une des opérations clés a été la vente rapide des activités de l'assurance-vie. La branche de l'assurance-vie individuelle a été vendue à la Maritime Life. L'assurance de groupe a été vendue à Manuvie au tout début de la liquidation et ces ventes rapides nous ont valu la confiance des gens du secteur. Les éléments d'actif à long terme, les rentes à long terme et certains produits cumulés ont été conservés et la reprise de l'économie canadienne nous a permis de réaliser dans de bonnes conditions ces éléments d'actif à long terme. Voilà de manière générale comment nous avons procédé.

Le sénateur Austin: La recommandation du groupe de travail qui vise à regrouper les deux organismes part selon moi de la nécessité de renforcer la concurrence, principe qui régit toutes les recommandations du groupe de travail. Le groupe de travail n'avance rien qui puisse démontrer que la concurrence est insuffisante dans ce secteur, et je me demande ce que vous en pensez.

Ainsi que l'a déclaré notre président, rien ne prouve que le consommateur penche en faveur de produits assurés par la SADC et se détourne des produits protégés par la SIAP. Concernant la marche à suivre, il y a trois possibilités.

La première consiste à porter le niveau de protection dans le secteur de l'assurance au niveau de celui de la SADC, ce qui est la recommandation du groupe de travail.

La deuxième consiste à rabaisser ce niveau de protection, ce que je vous entends proposer, et à collaborer avec le gouvernement pour qu'il serve de prêteur en dernier recours.

La troisième consiste à supprimer purement et simplement l'assurance-dépôts et à laisser le consommateur prendre les décisions. Les règles du jeu seraient les mêmes pour tous et il y a des pays dans le monde qui ne prévoient pas d'assurance-dépôts.

J'en reviens à ma première question. Le secteur de l'assurance est-il incapable de concurrencer les banques en ce qui a trait au placement de l'épargne étant donné que la SADC fausse les règles du jeu?

M. Morson: Je pense qu'il est préférable de laisser aux entreprises du secteur le soin de se prononcer sur les questions de concurrence. Elles l'ont fait cependant de deux manières. Tout d'abord, elles peuvent effectivement citer des exemples qui démontrent cette réalité, exemples qu'elles ont communiqués au groupe de travail MacKay.

Des sondages ont été faits. Le président reste assez sceptique à leur sujet, mais ils ont été réalisés à plusieurs reprises et ils ont montré qu'il y avait un problème.

Le problème est particulièrement inquiétant lorsque la conjoncture est mauvaise. Vous avez évoqué les trois solutions possibles. À notre avis, on peut mettre tout le monde sur le même pied, soit en renforçant l'appui apporté par le gouvernement à la SIAP, soit en réduisant l'appui qu'il fournit aux établissements de dépôts. Nous ne pensons pas cependant que l'on puisse y parvenir en se débarrassant de l'assurance-dépôts. La coassurance n'ayant pas fonctionné, il est peu probable par conséquent qu'une suppression totale de l'assurance-dépôts donne des résultats.

Le sénateur Austin: Lorsque le comité chargé de se pencher sur les cas d'urgence a été mis sur pied, je crois savoir que l'obligation que s'est faite le secteur de l'assurance de le financer était une décision commerciale. Il n'était aucunement obligé en droit de fournir ces crédits.

M. Morson: Oui, c'est exact.

Le sénateur Austin: Si la conjoncture avait été différente en ce qui concerne les taux d'intérêt, l'obstacle aurait été plus difficile à surmonter dans le secteur.

M. Morson: Nous aurions néanmoins procédé de la même manière, mais l'on aurait entendu davantage parler de certains cas particuliers. Je considère qu'il est tout à fait étonnant qu'à l'issue d'une faillite de cette ampleur, il y ait si peu, si tant est qu'il y en ait eu, de consommateurs qui aient fait connaître leurs difficultés à la presse. Avec des taux d'intérêt différents, je veux bien croire que des pressions énormes se seraient exercées pour qu'on accélère la procédure.

Le sénateur Austin: L'un des aspects de la recommandation, qui rejoint votre propre position, c'est que si le gouvernement est le prêteur en dernier recours, les entreprises du secteur n'ont pas à disposer des liquidités. Il faudra peut-être bien à un moment donné qu'elles apurent le passif, mais sans avoir à disposer immédiatement des liquidités. C'est l'avantage recherché par votre secteur.

M. Morson: Il y a là aussi un enjeu économique. Le fait de ne pas avoir à fournir les fonds à la demande permet probablement d'économiser de l'argent à long terme, et ce sont les titulaires de polices d'assurance des sociétés en bonne santé qui paient ce service. Il s'agit là d'une question difficile.

Le sénateur Austin: L'une des questions sous-jacentes relatives à la concurrence se rapporte aux petits et aux gros établissements au sein du système; celui de la SADC, par exemple. Vous n'ignorez pas que les grosses banques soutiennent que cette mesure est inutile et revient tout simplement à subventionner les petits établissements financiers. Si l'on veut favoriser la concurrence, par contre, c'est une très bonne chose. Dans le secteur de l'assurance, comment faites-vous face au problème de concurrence entre les gros et les petits établissements?

M. Morson: Nous avons le même problème. Il y a 138 sociétés d'assurance-vie qui exercent leurs activités au Canada -- des entreprises qui accordent directement des polices -- et le système fonctionne à l'heure actuelle. Toutefois, la concentration est de plus en plus forte dans notre secteur. Aujourd'hui, les sept plus grosses sociétés ont quelque 60 p. 100 du marché en raison des fusions qui ont eu lieu, et le problème va de plus en plus se poser. Jusqu'à présent, cependant, notre système a fonctionné.

Le sénateur Austin: Si vous adoptez le principe du rapport MacKay, qui est de renforcer la concurrence et d'encourager les nouveaux arrivants, tout système que nous serons amenés à recommander devra protéger les petits établissements. C'est ce que je peux observer. Vous n'avez pas à me répondre sur ce point.

Le sénateur Angus: Ma question porte encore sur la liquidation de la Confédération-Vie. Je pense que l'on avait signé des effets de commerce et que dans un certain nombre de cas il y a eu des défaillances. En avez-vous eu connaissance? Qui s'est chargé de rembourser?

M. Dunning: Non, les détenteurs des effets de commerce et les créanciers non privilégiés sont les grands perdants à l'heure actuelle dans l'affaire de la Confédération-Vie. Il est peu probable qu'ils soient remboursés mais ils pourraient éventuellement recevoir de petites sommes.

Le sénateur Angus: Vous avez parlé du montant qui a été dégagé. Je crois savoir que ce montant est mis de côté à l'intention des titulaires de polices d'assurance?

M. Dunning: Non, il s'agit en fait d'un excédent par rapport à la provision qui est faite pour les titulaires canadiens de polices d'assurance.

Le sénateur Angus: En plus des provisions indispensables?

M. Dunning: Oui, nous estimons pouvoir payer tous nos titulaires canadiens de polices d'assurance et enregistrer en plus un excédent. Cet excédent nous aidera alors à accomplir nos obligations vis-à-vis des titulaires de polices d'assurance des États-Unis. Si ces deux types d'obligations envers les titulaires de polices d'assurance sont remplis, il pourra rester un peu d'argent pour les créanciers non privilégiés, notamment les détenteurs d'effets de commerce et les créanciers de second rang.

Le sénateur Angus: Quel en est le montant au Canada?

M. Dunning: Je n'en connais pas le montant au Canada. Il y a entre 500 millions et 1 milliard de dollars de créances non privilégiées.

Le sénateur Angus: Comme vous pouvez le voir, monsieur le président, tout n'est pas aussi rose. Le montant se situe entre 500 millions et 1 milliard de dollars.

Le président: Je savais que c'était une quantité importante.

Le sénateur Angus: C'est un fiasco du point de la vue de la réglementation.

Le président: Comme je vous l'ai dit, toutefois, la situation s'est améliorée par rapport à ce qu'elle était au départ.

Merci, messieurs, d'être venus, nous sommes heureux que vous ayez pris le temps de venir parmi nous.

M. Morson: Je vous remercie.

Le président: Sénateurs, le témoin suivant est M. Keith Martell, le président de la First Nations Bank of Canada. Certains d'entre vous se souviennent peut-être que l'on a discuté au sein de ce comité, en 1992 ou en 1993, la possibilité de créer la First Nations Bank of Canada. Ce n'était pas l'objet de cette série d'audiences, mais on en avait évoqué la possibilité. Je me souviens en particulier d'en avoir discuté avec la Banque TD, qui depuis lors a contribué à lancer cet établissement.

Merci d'être venu, monsieur Martell. Nous sommes heureux d'être chez vous -- du moins je pense que c'est ici que se trouve votre siège social. C'est bien ça?

M. Keith Martell, président du conseil, First Nations Bank of Canada: Oui, vous êtes dans la ville qui abrite le siège social de la First Nations Bank of Canada.

Le président: Nous allons entendre votre exposé, et nous vous poserons ensuite un certain nombre de questions. Vous pourriez peut-être nous dire en deux minutes ce qu'a fait la First Nations Bank depuis sa constitution il y a quatre ans.

M. Martell: Je tiens à remercier les membres du comité de nous avoir invités à comparaître ce matin. Je pense que la structure, les mécanismes et le fonctionnement de la First Nations Bank sont bien particuliers au sein du secteur canadien des services financiers. Je considère aussi que le type d'établissement que nous exploitons sur le marché spécialisé des Premières nations de notre pays alimente vraiment la concurrence conformément aux recommandations faites par le rapport du groupe de travail.

Je vous dirai quelques mots de notre structure et de notre exploitation pour vous donner une idée de la façon dont nous fonctionnons. Je pense ensuite évoquer les recommandations précises qui à notre avis doivent à la fois influencer et appuyer le développement de notre banque à l'avenir.

Je suis le président du conseil d'administration de la First Nations Bank of Canada. Nous sommes l'une des 11 banques à charte nationales de notre pays. À mon avis, les recommandations du rapport, lorsqu'on les envisage dans leur globalité, reflètent de manière juste et équilibrée l'évolution du secteur canadien des services financiers. J'estime que notre banque et que nos clients tireront profit de l'application des recommandations du rapport.

Pour bien comprendre dans quelle mesure un opérateur qui occupe un petit créneau sur le marché peut tirer profit de sa restructuration, je considère qu'il est important que l'on penche sur la structure de notre banque et sur les objectifs et les aspirations des fondateurs de notre établissement. Cet établissement, je le répète, est tout à fait particulier. Nous avons été créés en tant que société en participation avec la Banque TD. Nous nous sommes cependant imposés l'obligation de devenir un établissement financier autochtone national indépendant dont les actions seront largement diffusées dans la communauté. C'est une précision très importante: «établissement autochtone national dont les actions sont largement diffusées dans la communauté».

Nous occupons de toute évidence un créneau spécialisé, mais nous estimons que l'économie canadienne a une taille et une envergure suffisante pour que nous soyons viables et pour que nous puissions offrir les produits et les services que nous avons à offrir en conférant à nos actionnaires un bon rendement sur leur investissement. Nous sommes convaincus que les recommandations du rapport nous permettront de nous développer en partenariat avec la Banque TD au rythme que nous avons prévu. Nous sommes aussi convaincus que les recommandations nous permettront de devenir un établissement financier plus fort et plus indépendant lorsque notre partenariat avec TD prendra fin et lorsque nous serons pleinement indépendants.

La première explication qu'il me faut toujours donner c'est pourquoi -- en l'occurrence, quelle est la philosophie à la base de la First Nations Bank? Pour quelle raison les Autochtones veulent avoir leur propre banque? Pourquoi ne pas prendre tout simplement une participation dans un établissement financier canadien ou, mieux encore, être un simple client et se faire servir en fonction de ses besoins?

Par le passé, on a établi des banques à charte chaque fois qu'une collectivité ou qu'un groupement de gens d'affaires avait besoin de services financiers que ne pouvaient pas dispenser les établissements existants. La Banque de Toronto a été l'un des prédécesseurs de la Banque Toronto-Dominion. Elle a été constituée en 1855 par un groupe d'horticulteurs qui trouvaient que leurs banques ne répondaient pas à leurs besoins de croissance et d'expansion. La Banque de Toronto, comme bien d'autres banques créées à cette époque, s'est développée avec l'économie canadienne à mesure que la Confédération devenait un pays. Ces établissements se sont développés en même temps que notre pays et sont devenus les sociétés d'envergure mondiale que nous connaissons aujourd'hui.

Au Canada, les Premières nations en sont arrivées au point où nous sentons la nécessité de nous doter d'un établissement financier qui va croître, fusionner et se développer en même temps que nos économies naissantes. En substance, ces économies ne sont pas très différentes de celles du Canada en 1867. Nous partons de la base et nous commençons à croître, à nous développer et à nous diversifier. Cet établissement doit être pour nous un pas important sur la voie de l'autonomie économique des autochtones et nous considérons l'autonomie économique comme un grand pas vers l'autodétermination politique.

Voilà la philosophie qui sous-tend notre banque. C'est pourquoi nos fondateurs ont voulu que nous établissions une banque à charte nationale servant les intérêts des autochtones.

L'histoire de la création de la banque est elle aussi intéressante. En 1982, la Fédération des nations indiennes de la Saskatchewan a créé la Saskatchewan Indian Equity Foundation, la première société financière autochtone au Canada. Cette création répondait à la nécessité de pallier le manque de capitaux visant à assurer le développement et l'expansion des entreprises des Premières nations.

Les gens des Premières nations n'avaient pas de cote de crédit, très peu de capitaux propres, aucune expérience des entreprises et très peu d'expérience des établissements financiers. À l'époque cependant, nous commencions à prendre le contrôle de notre propre économie, de nos finances au niveau des Premières nations, et nous n'avions pas vraiment les moyens de développer les entreprises dont avaient besoin nos collectivités. Les magasins, au sein de nos collectivités, étaient exploités par des gens venus de l'extérieur. Les autobus étaient achetés par le ministère des Affaires indiennes, et exploités par ce ministère. Il y avait très peu de membres de nos Premières nations qui possédaient une entreprise, quelle qu'elle soit.

La Saskatchewan Indian Equity Foundation a eu du succès. Elle a progressé au point d'avoir un capital de 7 millions de dollars 12 ans après sa création au début des années 80 et elle avait consenti à recouvrer des prêts pour un montant de plus de 30 millions de dollars. Les études que nous avons faites nous permettent d'évaluer à 3 000 le nombre d'emplois créés pour les Premières nations dans la seule Saskatchewan. Cet établissement a par ailleurs réalisé -- c'est très important -- un taux de pertes sur prêts de moins de 1 p. 100 en 1995. Ce n'était plus une caisse de prêts de développement; c'était devenu en fait une caisse de prêts commerciaux.

Au début de l'année 1993, la Saskatchewan Indian Equity Foundation a reconnu la nécessité de développer sa société de financement autochtone pour répondre aux besoins de ses clients et des entreprises des Premières nations en Saskatchewan. La SIEF a rencontré un certain nombre de grands établissements financiers pour chercher à mettre en place, dans le cadre d'un partenariat, une banque à charte offrant l'intégralité des services. Le choix qui s'offrait à l'époque était soit de constituer une société de fiducie régionale, soit une caisse de crédit régionale, soit une banque nationale.

En passant en revue les résultats obtenus par le passé par les petits établissements régionaux dans un secteur donné de l'économie, nous en sommes venus à la conclusion qu'une banque nationale s'insérant dans l'économie autochtone à l'échelle du pays s'imposait si l'on voulait que nos établissements aient du succès. Deux projets présentés par des établissements en place ont été acceptés et, après avoir étudié à fond la question, nous avons retenu l'offre de TD, qui est devenue notre partenaire pour créer cet établissement.

Les négociations menées avec la Banque TD en vue de créer cette entreprise en participation ont débuté en 1994 et nous avons reçu notre charte constitutive, en vertu des dispositions de la Loi sur les banques, le 19 novembre 1996.

La structure de notre banque a été élaborée avec soin pour répondre aux exigences de la Loi sur les banques. Elle autorise la Banque TD à transmettre dans un délai donné aux investisseurs des Premières nations le contrôle exercé à l'origine ainsi que la conduite de l'exploitation. Elle reconnaît l'importance de l'expérience, des systèmes et de la technologie de TD lors de l'étape de création de la banque. Elle reconnaît aussi l'existence des débouchés, l'intérêt qu'ont nos clients à disposer de leur propre établissement et les connaissances de notre personnel et du conseil d'administration des Premières nations lorsqu'il s'agit de servir les ressortissants des Premières nations au Canada.

Les services de la First Nations Bank sont à la disposition de tous les clients, autochtones ou non. Nous avons des services s'adressant aux particuliers et aux entreprises et nous avons même certains clients institutionnels.

Grâce au partenariat avec TD, les services ont pu être dispensés à l'origine par l'intermédiaire des 949 succursales de TD. L'avantage pour nous est de pouvoir disposer des services, des réseaux, des produits et des possibilités d'accès de nos clients à une banque à charte nationale même si nous ne sommes qu'un établissement très régional occupant un créneau spécialisé sur le marché.

Je vais maintenant aborder certaines recommandations du groupe de travail. Je considère que la recommandation du groupe de travail qui a le plus fait parler d'elle est celle qui porte sur l'évaluation des fusions bancaires proposées. Je souscris aux conclusions du rapport, qui affirme que ces fusions peuvent constituer d'intéressantes stratégies commerciales visant à faire des banques des concurrents d'envergure mondiale. Les recommandations du rapport qui visent à mettre en place un secteur national des services financiers solide et concurrentiel n'en sont pas moins celles qui sont les plus fondamentales.

Mes investisseurs et mes clients sont des gens des Premières nations. Leur économie reste locale et leurs préoccupations le sont aussi. Ils ont des besoins de services locaux. Ils font des placements internes et ont besoin de faire des placements croisés avec les autres Premières nations du Canada. Les activités bancaires dans le Sud-Est asiatique, en Amérique du Sud, en Afrique ou en Europe n'ont pas autant d'importance pour mes clients qu'elles en ont pour certains investisseurs et clients des grandes à charte.

Cela dit, je considère que les fusions ne se feront pas au détriment du développement de notre établissement. Nous avons intérêt à ce que les frais d'exploitation de la banque qui est notre partenaire baissent et nous estimons que cela sera facilité par les fusions. Nos clients et notre banque profiteront de la baisse des coûts des banques ayant fusionné, que cela se fasse par un recours accru à la technologie ou grâce aux économies d'échelle que vont procurer à notre avis ces fusions.

En second lieu, lors de notre étape de développement, nos clients vont bénéficier d'un accès accru aux services grâce à l'augmentation du nombre de succursales de notre partenaire après la fusion. Nous serons mieux représentés dans certains secteurs et certaines régions du Canada, là où TD n'a pas encore de succursales ou ne s'est pas encore développée.

Enfin, notre banque continuera à privilégier les besoins de ses clients sans s'occuper de la fusion. J'ai une formation de comptable agréé et j'ai pu assister à un certain nombre de fusions dans le secteur comptable.

D'après ce que je peux voir, chaque fois qu'il y a eu fusion, on voit apparaître par ailleurs une entreprise locale ou régionale. Ces nouvelles entreprises sont mieux à même de répondre aux besoins de leurs clients. Elles sont en mesure de privilégier les besoins des clients et d'offrir les prix, la constance au niveau du personnel, le service et les produits que veut le client.

Je ne pense pas que les banques ayant fusionné vont pouvoir conserver leur part du marché, et nous pourrons en profiter dans nos créneaux spécialisés. Je pense aussi que les conséquences des fusions seront positives pour la First Nations Bank of Canada.

Certaines recommandations bien précises du groupe de travail portent sur ce que l'on peut appeler la restructuration ou la remise à niveau du secteur dans lequel nous opérons. Ces recommandations sont très importantes pour un établissement qui démarre comme le nôtre.

La recommandation visant à supprimer le capital minimum de 10 millions de dollars va offrir une plus grande marge de manoeuvre aux banques qui en sont à leur premier stade de développement. Même si nous ne sommes qu'un très petit établissement et si nous n'utilisons pas la totalité de nos capitaux comme levier pour procurer un rendement à nos investisseurs, nous sommes tenus d'avoir dès le départ un capital de 10 millions de dollars.

Le délai d'exonération de 10 ans qui est recommandé en matière d'impôt sur le capital sera aussi extrêmement bénéfique pour un petit établissement comme le nôtre qui démarre. À l'heure actuelle, la First Nations Bank of Canada paie des centaines de milliers de dollars en impôt sur le capital avant que nos investisseurs puissent obtenir un rendement. Il s'agit là d'un gros obstacle à surmonter pour une entreprise qui arrive sur le marché. C'est d'autant plus vrai pour les banques à charte implantées en Saskatchewan que la Saskatchewan ajoute son propre impôt sur le capital à l'impôt fédéral correspondant.

La recommandation qui vise à élargir le fonctionnement du réseau de guichets automatiques aura des effets positifs sur les petites banques. Elle nous donnera accès au réseau élargi des guichets automatiques. Les possibilités de choix de nos clients augmenteront en conséquence et nous pourrons avoir accès à ces clients sans avoir à faire les énormes investissements nécessaires à l'établissement de notre propre réseau de guichets automatiques installés à grande échelle.

Le rapport propose par ailleurs qu'on réduise le fardeau de la réglementation administrative en fonction de la taille de l'établissement. Cette recommandation est tout à fait la bienvenue. À l'heure actuelle, les petits établissements comme le nôtre sont soumis aux mêmes mécanismes complexes de réglementation et de comptes rendus que ceux qui s'appliquent aux grandes banques canadiennes. C'est un très lourd fardeau administratif pour les petits établissements.

Le rapport recommande par ailleurs qu'un établissement réglementé dont les actions sont largement diffusées dans le public puisse détenir jusqu'à 100 p. 100 des actions d'un autre établissement réglementé. Cette mesure autoriserait certaines situations particulières telles que l'aide apportée par la Banque Toronto-Dominion au développement de la First Nations Bank.

Même si nous sommes déterminés à atteindre notre objectif d'indépendance vis-à-vis de TD, nous reconnaissons en même temps qu'à l'heure actuelle la Loi sur les banques limite à 10 ans la période d'investissement de TD dans notre établissement. Cette recommandation ne remettrait pas en cause notre objectif d'indépendance, mais elle nous procurerait une plus grande marge de manoeuvre en nous garantissant que le jour où nous déciderons de nous séparer de TD, nous serons en mesure de réussir par nos propres moyens.

La First Nations Bank doit compter sur les services de la Banque TD pour opérer les compensations au moyen de l'infrastructure électronique qui, de plus en plus, est possédée et exploitée par quelques grosses banques au Canada. Pour que la concurrence soit équilibrée, il faut que ce soient les services fournis aux clients qui soient déterminants -- en l'occurrence, le choix des produits et des services fournis. Il ne faut pas que les services de compensation ne permettent pas à tous les établissements financiers du Canada d'accéder dans les mêmes conditions aux mécanismes de compensation.

Il y a une dernière question qui s'applique précisément à la collectivité autochtone et aux autres groupes économiquement défavorisés à l'intérieur des villes. Aux États-Unis, il y a la Community Reinvestment Act. Les établissements des États-Unis doivent démontrer au responsable de la réglementation du pouvoir central qu'ils ne se contentent pas d'écrémer les activités les plus rentables au sein des collectivités en évitant en fait les véritables opérations bancaires. Ils sont tenus de leur démontrer que lorsqu'ils sont implantés au sein d'une collectivité, ils répondent à tous les besoins de celle-ci.

Ce mécanisme, s'il était appliqué au Canada, répondrait bien aux besoins des établissements comme la First Nations Bank of Canada, qui occupe un créneau spécialisé, en obligeant les grosses banques à exercer leur concurrence sur l'ensemble de notre créneau. Si elles veulent profiter des secteurs les plus rentables de notre marché, il leur faudra aussi fournir des capitaux pour le logement, les prêts automobiles et les prêts à la consommation sur lesquels comptent les habitants de nos communautés.

C'est ce qui a largement motivé la création de la First Nations Bank. Une fois que le mécanisme de dévolution des terres aux termes d'un traité a été mis en place en Saskatchewan et que les Premières nations ont reçu un capital de quelque 450 millions de dollars, les banques se sont montrées très intéressées à faire des affaires avec nos collectivités. Jusqu'alors, elles s'en étaient désintéressées. Nos collectivités se sont aperçues qu'elles étaient très intéressées à gérer cet argent et à prendre ces 450 millions de dollars en dépôt mais qu'elles l'étaient bien moins lorsqu'il fallait installer un magasin, prêter de l'argent à un conducteur d'autobus ou contribuer à lancer une nouvelle entreprise de débardage dans le nord de la Saskatchewan.

Voilà ce que j'avais à dire au sujet des différentes recommandations. Je suis tout disposé à répondre aux questions que vous voudrez me poser.

Le sénateur Austin: Merci de votre exposé. La création de la banque remonte à l'époque où j'étais ministre du Développement social et il est tout à fait fascinant de voir tout le chemin qu'a parcouru cette organisation. Il y a quelques points que je voudrais aborder avec vous. Tout d'abord, comment structurez-vous les prêts de vos clients du point de vue de la taille et des risques?

Vous avez obtenu d'excellents résultats sur le plan du recouvrement de vos prêts. Vous avez un profil de risque que l'on peut normalement considérer comme étant plus élevé étant donné que vous avez affaire à de petites entreprises. Avez-vous un modèle particulier dans ce cas précis pour décider de l'ampleur des risques que vous pouvez accepter? Est-ce que c'est différent des grosses banques?

M. Martell: Lorsqu'il s'agit de prêter aux Premières nations, bien des banques disent: «On ne peut pas obtenir une garantie sur une maison du nord de la Saskatchewan et nous ne pouvons pas mettre une hypothèque sur toute une collectivité.» Nous ne considérons pas que nous faisons de l'immobilier. Nous considérons que notre travail, c'est de prêter de l'argent et de recouvrer les prêts, de payer nos actionnaires et d'exploiter un réseau de services financiers au sein de la collectivité.

Nous nous servons pour cela de nombreuses structures communautaires existantes. Ainsi, nous avons des conseils de bande qui cautionnent des particuliers. Nous avons aussi établi des régies du logement au sein des collectivités, dont les particuliers peuvent faire partie et qui disposent d'un certain montant de capitaux pour garantir les hypothèques. Nous pilotons un tel projet en ce moment même dans le Nord du Québec. Nous tirons largement parti du besoin qu'a la collectivité de s'intégrer à l'économie.

Celui qui veut protéger ses biens et obtenir des garanties doit accepter que l'on impose des conditions à l'accès aux capitaux. La Saskatchewan Indian Equity Foundation a établi ce droit dès le départ. Nous avons fait savoir à nos interlocuteurs et aux gens à qui nous prêtions de l'argent qu'ils n'étaient pas seulement des emprunteurs, qu'ils étaient aussi propriétaires de l'établissement. Nous avons établi ces mêmes relations en tant que banque des Premières nations. Nous nous attendons à ce que nombre des principales collectivités avec lesquelles nous faisons affaire soient par ailleurs des investisseurs au sein de la banque et il n'est pas dans leur intérêt de renoncer à rembourser leurs prêts. Nous recourons par conséquent à nombre de ces mécanismes pour gérer le risque.

Le sénateur Austin: Les pressions exercées par le groupe au sein des communautés autochtones imposent donc une certaine discipline pour ce qui est des comportements économiques?

M. Martell: Oui, c'est ce que nous croyons.

Le sénateur Austin: Comment résolvez-vous le problème de la qualité des gestionnaires? Est-ce que la banque accorde un intérêt particulier à la formation, celle des chefs d'entreprises, et à l'encadrement des entreprises au cours de leur développement? Est-ce qu'elle joue un rôle plus actif au sein de ces communautés et auprès de vos emprunteurs que ne le ferait normalement une grosse banque?

M. Martell: Nous ne jouons pas le rôle d'une banque de développement. Nous sommes un établissement commercial, une banque à charte. Il y a 33 sociétés de financement autochtones au Canada et nous sommes étroitement en contact avec ce réseau parce que ses responsables connaissent bien les clients locaux et la population.

Étant donné toutefois le stade de développement de la plupart des entreprises des Premières nations, nous devons être très présents lorsque nous dispensons nos services à nos clients. Nous allons devoir nous adjoindre des cadres et du personnel qui connaissent les collectivités autochtones, qui sont en mesure de les servir, qui peuvent traiter de leurs problèmes et qui savent qu'il y a là de véritables enjeux qui intéressent la banque et qu'il ne s'agit pas d'apporter une simple aide en passant.

Le sénateur Austin: Au cours de cette première période de 10 ans, est-ce que vous privilégiez le rendement sur le capital? J'imagine que vous voulez obtenir un certain rendement mais, pour l'instant, est-ce que vous exploitez votre banque en vous intéressant moins au rendement sur le capital que ne le ferait une banque commerciale normale?

M. Martell: Oui, c'est ce que nous faisons, et il y a à cela deux raisons. Tout d'abord, le démarrage est coûteux. Ensuite, le minimum de 10 millions de dollars de capital exigé ne nous permet pas d'avoir le même effet de levier que les autres banques.

Le sénateur Austin: La capacité de passer à la vitesse supérieure.

M. Martell: En effet. Dernièrement, nous avons passé beaucoup de temps au sein des collectivités à mettre en place des mécanismes nous permettant d'être autonomes. Tous les gains de ces 10 premières années sont essentiellement «recapitalisés» au sein de la banque pour garantir davantage notre indépendance.

Le sénateur Austin: Pour ce qui est des prêts que vous faites aux collectivités autochtones, j'ai cru comprendre que votre clientèle était nationale et qu'elle ne se limitait pas à la Saskatchewan?

M. Martell: En effet.

Le sénateur Austin: Est-ce que vous prêtez en dehors de la Saskatchewan?

M. Martell: Notre deuxième succursale se trouve dans le Nord du Québec -- à Chisasibi, dans le territoire cri de la baie James. Actuellement, nous exerçons nos activités dans l'ensemble des provinces et des territoires du Canada. Les possibilités qui s'offrent, notamment avec les fusions, sont nombreuses, celles qui consistent par exemple à acheter certaines succursales des banques actuelles.

Sur certains marchés -- comme Iqaluit et le Nunavut -- les deux seules banques qui sont installées en ville sont la Banque de Montréal et la Banque Royale. Si les fusions se font, il n'y aura là plus qu'un seul établissement. Nous nous intéressons donc de près à ce marché et nous serons très heureux d'y exercer nos activités.

Le sénateur Austin: Quel est le montant maximal des prêts que vous pouvez consentir?

M. Martell: Nous avons des limitations internes et il y a les contraintes imposées par la Loi sur les banques. Selon les dispositions actuelles de la Loi sur les banques, aucun prêt ne peut dépasser 25 p. 100 de notre capital, soit environ 2,5 millions de dollars avec notre capitalisation actuelle de 10 millions de dollars.

Le sénateur Austin: Vous ne faites pas de prêt de ce montant, n'est-ce pas?

M. Martell: Nous l'avons fait dans certains cas. Il y a aussi le fait que grâce à notre partenariat avec la Banque TD, nous avons largement fait appel aux services d'autorisation de crédit de cette banque. Nous avons examiné des projets portant sur des centaines de millions de dollars. Nous n'assumons que la dernière partie de ces prêts et, de manière générale, c'est notre partenaire qui bénéficie des meilleures conditions de prêt étant donné que c'est lui qui a fait tout le travail d'évaluation du projet pour notre compte.

Le sénateur Austin: Quel est votre pourcentage de succès lorsque vous cherchez à amener les collectivités autochtones à placer leur argent chez vous?

M. Martell: Les progrès sont plus lents que nous l'attendions. Notre succursale n'est entrée en fonctionnement qu'en juin 1997 et il n'y a donc qu'un peu plus d'un an que nous exerçons nos activités. Notre succursale de Chisasibi n'a été ouverte qu'en juin 1998. Ce qui nous gêne surtout auprès des Premières nations, c'est le manque de personnel chargé de faire le travail nécessaire dans les Premières nations pour qu'elles puissent changer d'établissement financier.

On passe beaucoup de temps à changer les systèmes, à commander de nouveaux chèques, à faire passer des résolutions par le conseil de bande et à obtenir des garanties, à changer les mécanismes de débit automatique, et cetera. Nous faisons porter entre autres nos efforts sur le manque de ressources humaines au niveau des Premières nations, ce qui se répercute de manière générale sur les services financiers de la First Nations Bank.

Nous avons réuni une équipe chargée d'aller aider les collectivités et de dégager les possibilités qui s'offrent afin que nous puissions faire une soumission. Une fois que nous avons fait la soumission, cette équipe retourne une ou deux fois sur le terrain pour aider les responsables à procéder aux changements de banque. J'espère que cela va accélérer les choses.

Le sénateur Austin: Peace Hills Trust est un établissement comparable même si évidemment il ne s'agit pas d'une banque à charte. Vous avez laissé entendre dans votre mémoire, cependant, qu'un regroupement serait souhaitable à un moment donné.

M. Martell: Je ne pense pas l'avoir dit dans mon exposé, et j'espère que je ne l'ai pas fait. Il n'est aucunement prévu de fusionner avec Peace Hills Trust. Peace Hills Trust est au courant de notre création. D'ailleurs, le président de Peace Hills Trust faisait partie du conseil d'administration de la Saskatchewan Indian Equity Foundation lorsque nous avons entrepris de lancer notre projet bancaire.

La seule différence au niveau des principes, c'est que nous nous considérons comme un établissement dont la propriété est largement répartie dans le public. Cette société est toujours la propriété d'une Première nation en particulier, qui possède 100 p. 100 du contrôle sur son capital. Nous avons considéré que les économies d'échelle et les possibilités de croissance nous permettraient d'obtenir de meilleurs résultats si nous avions une envergure nationale, et c'est pourquoi nous avons choisi cette voie.

Le sénateur Meighen: Pour ce qui est des prêts, pouvez-vous me dire comment ça se passe en fait dans chacune des succursales de TD, par exemple? J'imagine que cela va se passer dans une succursale de TD. Vous n'avez pas de bureau d'exploitation distinct, n'est-ce pas?

M. Martell: Si, nous en avons. Nous avons deux succursales qui nous appartiennent.

Le sénateur Meighen: D'accord. Prenons quand même l'exemple d'une succursale TD dans laquelle vous exercez vos activités. Y a-t-il un guichet distinct ou un panneau, ou est-ce qu'un bureau est consacré aux activités de la First Nations Bank?

M. Martell: Non, pas à l'heure actuelle. Il y a des succursales spécialisées qui ont tous les formulaires et tous les services sur place. N'importe quelle succursale de TD peut demander cette information. Si un client entre dans une succursale de TD et veut traiter avec la First Nations Bank, il peut demander que cette documentation soit envoyée à la succursale, qui traite alors avec notre client. Nous avons un numéro 1-800 et le client peut faire ses opérations bancaires avec nous par téléphone ou par des moyens informatiques.

Le client peut aussi s'adresser aux succursales spécialisées. C'est ainsi que certaines succursales de TD se trouvent sur notre marché ou à proximité, ce qui fait qu'elles se spécialisent. Leur personnel sait comment fonctionne notre système, comment nous renvoyer les clients et faire en sorte qu'ils signent tous les formulaires sur place afin de pouvoir utiliser nos services. Il s'agit là d'une succursale spécialisée.

Sinon, si vous communiquez avec notre banque par l'intermédiaire du réseau des guichets automatiques, par exemple, vous êtes traité comme un client de la First Nations Bank dans n'importe quel des 1 000 guichets automatiques de la TD.

Le sénateur Meighen: Avez-vous un service de carte de crédit?

M. Martell: Il est trop onéreux au départ d'accéder au réseau des cartes de crédit. Nous avons une carte affiliée à TD, mais c'est essentiellement une carte TD avec notre nom en bas. Le marché n'a pas une taille suffisante pour que l'on puisse exercer cette activité dans un premier temps.

Le sénateur Meighen: Vous avez parlé de «carte affiliée». Est-ce la même chose qu'une carte d'affinité?

M. Martell: Non, pas exactement. Ça reste une carte TD. Lorsque ce sera vraiment notre carte, elle aura alors le logo des Premières nations.

Le sénateur Meighen: Le rapport MacKay recommande que l'on adopte une disposition législative permettant que les biens meubles personnels qui se trouvent dans les réserves puissent servir de garantie. Êtes-vous d'accord avec cette formule?

M. Martell: La Saskatchewan Indian Equity Foundation a pu exercer ses activités en l'absence de cette modification. Nous siégeons avec d'autres banques au sein d'un comité d'étude de l'accès aux capitaux pour les Premières nations, et les autres banques affirment bien haut qu'elles ont besoin de cette mesure pour faire des affaires avec les Premières nations. Ce n'est pas pour nous une priorité.

Le sénateur Meighen: Il semble que vous soyez le véritable prototype du développement des prêts aux petites entreprises, qui semblent depuis toujours faire une peur bleue au secteur bancaire canadien. Est-ce que vous accordez un prix quelconque au risque? Les petites entreprises se plaignent du fait qu'elles sont prêtes à payer un taux plus élevé -- c'est indispensable si elles veulent accéder aux capitaux, et qu'elles ne peuvent même pas obtenir de prêts même si elles sont disposées à payer des taux d'intérêt plus élevés. Avez-vous emprunté cette voie d'une manière ou d'une autre? En l'occurrence, avez-vous relevé les taux d'intérêt pour pouvoir consentir des prêts plus risqués?

M. Martell: Nous espérons ne pas avoir à faire de prêts plus risqués. Nous estimons que l'on peut faire des affaires avec les Premières nations sans avoir à augmenter les risques. Lorsqu'on s'adresse à une collectivité donnée, on ne va pas consentir 30 à 40 hypothèques individuelles dans le cadre d'un projet hypothécaire s'adressant à une Première nation, mais on va accorder une hypothèque communautaire de 40 millions de dollars. En somme, nous n'avons pas l'impression de prendre beaucoup de risques en matière hypothécaire et lorsqu'on regroupe tous ces prêts communautaires on s'aperçoit que dans une certaine mesure les risques sont en fait moins élevés.

Le sénateur Meighen: J'en conviens, mais vous recevez certainement des demandes de prêts qui sont éventuellement prometteuses, mais assez risquées? Il pourra s'agir par exemple d'une personne très connue, très respectée, mais qui n'a pas beaucoup de biens pour appuyer sa demande. Êtes-vous disposé à lui prêter à un taux de quatre ou cinq points au-dessus du taux privilégié? Les banques à charte nous répondent qu'elles ne le font pas par peur d'être trop critiquées par le public, si les choses se passent mal, lorsque ce dernier s'aperçoit qu'elles pratiquent des taux d'intérêt si élevés. Elles estiment que ce serait catastrophique sur le plan des relations publiques. La catastrophe n'est peut-être pas aussi grande pour vous étant donné que vous appartenez à une communauté bien définie.

M. Martell: Notre société mère est une société de financement autochtone et il y a des fonds en réserve dans notre pays pour prendre en charge les prêts qui ne répondent pas aux critères fixés par les banques. La Saskatchewan Indian Equity Foundation est devenue une banque. C'est la raison pour laquelle nous l'avons créée -- pour exercer ses activités dans ce secteur.

Il peut arriver, comme vous l'avez dit, qu'il y ait des prêts que l'Equity Foundation ne peut pas prendre en charge, et nous devons nous en occuper. Là encore, cependant, nous disons à nos actionnaires que c'est leurs fonds propres qu'ils risquent lorsqu'ils consentent ces prêts.

Le sénateur Meighen: Imaginez que je sois membre des Premières nations, que je vienne faire une opération bancaire et que j'ajoute: «Dites-moi, j'ai aussi besoin d'assurance», vers qui me renverriez-vous?

M. Martell: À l'heure actuelle, nous ne prévoyons aucunement de pénétrer sur ce marché. David Ross, le président de notre banque, a témoigné la semaine dernière devant vos collègues du comité des finances de la Chambre des communes. Il leur a dit qu'il considérait l'assurance comme une possibilité devant permettre de faire un meilleur usage des installations, qu'il n'y voyait aucun inconvénient et qu'il allait en fait encourager cette orientation. Nous avons enregistré à ce moment-là beaucoup d'opposition de la part des courtiers d'assurance indépendants qui étaient dans la salle.

Nous n'envisageons pas à l'heure actuelle de vendre de l'assurance. D'un autre côté, toutefois, nous irons à l'occasion nous installer dans une Première nation regroupant 1 200 ou 1 300 habitants dans le nord du Canada. Nous n'y implanterons pas une succursale; nous exercerons nos activités en collaboration avec le bureau de poste ou un magasin. Nous y ferons de la banque électronique et les employés du magasin seront en même temps des employés de banque à temps partiel. Il est très important d'utiliser à plein ces installations dans ce genre de collectivité et si nous réussissons à offrir davantage de produits et de services par l'intermédiaire de ces installations, il en résultera une diminution du coût des installations techniques et une augmentation des services offerts à cette collectivité. S'il est possible de vendre de l'assurance dans ces collectivités, cela pourra améliorer notre rendement.

Le sénateur Meighen: Voulez-vous aussi être autorisé à faire des prêts-bail sur de petits véhicules?

M. Martell: Le prêt-bail sur les petits véhicules constitue aussi un service que les banques devraient pouvoir offrir.

Le sénateur Meighen: Y a-t-il des recommandations que vous n'aimez pas dans le rapport MacKay?

M. Martell: Je suis sûr qu'en cherchant je pourrais trouver. Pris dans son ensemble, je considère que c'est un rapport juste et équilibré. Si nous n'aimons pas certaines choses, il y a des compensations. Je pense que le rapport MacKay autorise directement les entreprises qui opèrent sur un créneau spécialisé à s'intégrer au marché, ce qui règle par là même la question de la concurrence. Voilà qui répond aux besoins d'un établissement comme le nôtre qui opère sur un créneau spécialisé.

Le sénateur Angus: Êtes-vous membre de la Fédération des Indiens de la Saskatchewan?

M. Martell: Les 72 Premières nations de la Saskatchewan sont les bandes qui sont nos membres. Oui, je suis membre de l'une des Premières nations qui fait partie de la fédération.

Le sénateur Angus: Et vous êtes président de la First Nations Bank?

M. Martell: Effectivement. Le président de banque le moins payé au Canada.

Le sénateur Angus: Et directeur général aussi?

M. Martell: Non. C'est un poste qui actuellement ne fait pas partie de la direction. Ça le restera pendant les deux premières années et par la suite, en février 1999, nous réévaluerons la situation.

Le sénateur Angus: Je vois que M. Ross est le directeur de l'exploitation. Qui est le directeur général?

M. Martell: À l'heure actuelle, il n'y a pas de directeur général. Le travail est essentiellement fait par un comité. Nous utilisons largement les services de la haute direction de TD. Notre conseil d'administration comprend trois vice-présidents principaux de TD qui ont une longue expérience de la banque, ainsi que l'ancien vice-président du conseil d'administration de TD.

Le sénateur Angus: C'est M. Somerville, n'est-ce pas?

M. Martell: L'ancien vice-président, c'est Urban Joseph.

Le sénateur Angus: Avez-vous directement accès au système des paiements du Canada?

M. Martell: Pas directement, non. Nous y accédons par l'intermédiaire de notre partenaire, la Banque TD.

Le sénateur Angus: C'est ce que je pensais. Au début de votre exposé, vous avez clairement indiqué que votre but était en fin de compte de devenir une banque autochtone nationale dont la propriété serait largement diffusée dans le public.

M. Martell: En effet.

Le sénateur Angus: Comme le sénateur Austin, j'ai été fasciné par le développement de vos activités et la vitesse à laquelle vous avez progressé. J'essayais d'imaginer quels seraient vos concurrents si l'on excepte les candidats évidents. Est-il possible, par exemple, que d'autres banques des Premières nations apparaissent ou estimez-vous que tous les projets bancaires des Premières nations seront chapeautés par vous?

M. Martell: Nous espérons pouvoir les chapeauter. Lorsqu'on voit la taille et l'envergure de l'économie des Premières nations au Canada, on a l'impression qu'un autre intervenant aura bien du mal à mettre sur pied un plan d'exploitation qui nous mette tous deux à ce niveau. Il se peut que quelqu'un ne soit pas d'accord et réussisse à le faire, tant mieux pour lui. Toutefois, grâce au partenariat avec TD, nous avons pu prendre un temps d'avance, mettre en place nos systèmes et devenir un établissement national sans que notre développement traîne en longueur. Nous avons une succursale à Saskatoon et une autre dans le Nord du Québec. Nous avons joint les deux bouts et il nous suffit de remplir le milieu.

Le sénateur Angus: Oui. Je pensais justement à certaines régions bien connues dans lesquelles il semble que des réservoirs importants de capitaux se soient constitués chez les Premières nations. Je pensais en particulier à la bande de Sawridge en Alberta, à la Colombie-Britannique, et cetera. Je me demandais simplement s'il n'y avait pas un risque, d'une part, ou éventuellement une chance d'expansion ou d'apparition d'un concurrent?

M. Martell: Il y a eu par le passé beaucoup de jalousie au niveau régional entre les Premières nations. C'était le genre «Pourquoi toi et pas moi?»

Le sénateur Angus: Oui. C'est la question que je me posais.

M. Martell: Elles sont devenues de plus en plus pragmatiques avec le temps et elles se rendent compte que l'économie dépend de la capacité en ressources humaines, des capitaux et autres choses de ce genre. Nous sommes en fait, à mon avis, la première entreprise des Premières nations qui s'est développée à l'extérieur de ses frontières et nous espérons que ça restera comme ça. Notre conseil d'administration comprend des représentants des Premières nations de l'Alberta, du Manitoba et du Québec et, je le répète, nos activités s'étendent d'un bout à l'autre du pays et nous avons des clients dans l'ensemble des provinces et des territoires.

Le sénateur Angus: Il y a une question que je me dois de poser. Je suis sûr que ce n'est pas le cas, mais est-ce que la Nations Bank est un organisme des Premières nations ou est-ce par pure coïncidence que les noms sont si semblables?

M. Martell: J'aimerais que ce soit la banque des Premières nations. Non, ce n'est pas le cas. Nous sommes l'un des fondateurs, cependant, d'une organisation qui s'appelle la North American Native Bankers Association. Cela englobe la Peace Hills Trust, la First Nations Bank et huit banques qui sont la propriété de tribus aux États-Unis. Nous traitons nombre de questions propres aux Premières nations, les prêts aux Autochtones, le développement des entreprises et autres questions de ce genre. Nous avons un administrateur à plein temps qui travaille en Oklahoma. Cette organisation a réellement fait des progrès. Elle met de bons services de recherche, comme le fait l'Association des banquiers canadiens, à la disposition des banques autochtones.

Le sénateur Callbeck: Vous avez mentionné dans votre exposé la Community Reinvestment Act et nous savons, bien entendu, qu'elle a été adoptée aux États-Unis parce que l'on avait là-bas l'impression que les banques ne prêtaient pas d'argent dans les régions pauvres et faisaient preuve par ailleurs de discrimination envers certaines catégories de personnes. On sait que M. MacKay n'a pas recommandé cette mesure dans son rapport parce qu'il a estimé qu'il n'était pas prouvé que la même situation existait aujourd'hui dans notre pays. Je me demande si vous avez présenté un exposé devant le groupe de travail MacKay?

M. Martell: Oui, nous l'avons fait, et je pense qu'il faut que nous puissions disposer d'un certain mécanisme nous garantissant que les banques servent bien l'ensemble de la collectivité. Lorsque nous avons négocié nos revendications territoriales, l'argent déposé était tout à fait le bienvenu -- les gros montants d'argent sont toujours les bienvenus -- mais on s'est en fait désintéressé du reste. Nous nous sommes longuement penchés sur la Community Reinvestment Act au sein de l'Association des banquiers autochtones de l'Amérique du Nord et nous estimons que c'est un modèle qui fonctionne. Vous avez raison, ça n'a pas été directement recommandé, mais nous considérons que c'est nécessaire.

Le sénateur Callbeck: Que pensez-vous de la recommandation qui dispose que plutôt que d'adopter l'équivalent de la Community Reinvestment Act, il faudrait rendre des comptes à la collectivité?

M. Martell: Effectivement, lorsqu'on examine la Community Reinvestment Act aux États-Unis, c'est le compte rendu annuel que doivent présenter les grands établissements qui est la disposition la plus efficace de la loi. C'est pourquoi je considère que la recommandation, même si elle ne va pas aussi loin que la Community Reinvestment Act, aux termes de laquelle il convient de déclarer publiquement: «Voilà comment nous exerçons nos activités dans ce secteur» est la partie la plus efficace. C'est ainsi par exemple que les banques des États-Unis ont versé des capitaux d'un montant de 150 000 $ à notre Association des banquiers autochtones de l'Amérique du Nord lors de notre première année d'existence parce qu'il leur fallait montrer au public qu'elle faisait le nécessaire pour que tous les secteurs soient bien servis. Par conséquent, c'est cette exigence de compte rendu, pour s'assurer que les intéressés démontrent publiquement qu'ils font le nécessaire, qui est la disposition la plus efficace de cette loi. Si les recommandations vont dans le même sens, nous pensons que ce sera efficace.

Le sénateur Tkachuk: Monsieur Martell, j'ai seulement trois questions à vous poser. En évoquant l'avenir de la First Nations Bank, vous avez parlé d'établir des succursales chez les détaillants et dans les bureaux de poste. Est-ce que vous envisagez une organisation s'appuyant avant tout sur des succursales indépendantes dans tout le pays, un mélange des deux ou essentiellement l'utilisation d'autres magasins au détail qui vous serviront de succursales?

M. Martell: Les localités dans lesquelles sont concentrées nos populations ont tendance à être petites, rurales et éloignées. Pour être rentables, il faut souvent que l'exploitation soit mise en commun et nous prévoyons qu'une bonne part de notre expansion se fera selon le modèle des concessionnaires, une banque concessionnaire s'installant au sein d'un autre établissement de la collectivité. Nous attendons beaucoup des possibilités d'accès électronique. Les Premières nations sont étonnamment prêtes à recourir aux techniques électroniques, à l'accès informatique, et nous voyons là une véritable possibilité de nous développer. La technologie des cartes de paiement, par exemple, intéresse beaucoup les collectivités des Premières nations. Elles consacrent beaucoup de temps et d'efforts à faire venir des liquidités, cet argent circule et dans 99 p. 100 des cas ressort de la collectivité, ce qui est un mécanisme très coûteux. Nous avons bien hâte qu'arrivent les cartes électroniques de paiement. Nous pensons que les Premières nations ont là une véritable chance de faire fonctionner plus efficacement leurs collectivités et leur économie.

Le sénateur Tkachuk: Est-ce que votre partenaire, la Banque Toronto-Dominion, vous a laissé entendre qu'éventuellement, à la suite de sa fusion avec la CIBC, elle sera disposée à vous vendre ses succursales dans les régions qu'elle va quitter?

M. Martell: On ne nous a rien fait savoir officiellement. De nous-mêmes, nous lancerons ce genre de discussion parce que nous nous intéressons à certaines succursales que ces banques vont éventuellement abandonner dans certains de nos marchés spécialisés.

Le sénateur Tkachuk: Un peu plus tôt dans votre exposé, vous avez parlé des réticences des banquiers traditionnels. Ils étaient prêts à accepter les dépôts mais ils n'étaient pas nécessairement disposés à consentir des prêts et à accorder des crédits aux gens des Premières nations. Maintenant que votre banque exerce pleinement ses activités, avez-vous constaté un changement de leur comportement vis-à-vis des Premières nations en raison de la concurrence qui s'exerce?

M. Martell: Bien évidemment. Elles font très attention à la concurrence. Lors de notre création, presque du jour au lendemain certaines Premières nations parmi les plus grosses, comme celle de La Ronge dans le nord de la Saskatchewan, se sont vues offrir des succursales après avoir essayé en vain pendant des années d'en obtenir dans leur réserve. Avant même d'être officiellement constitués, nous sommes allés présenter notre établissement à la bande de Kamloops en Colombie-Britannique. Nous lui avons exposé la façon dont notre banque allait être structurée, comment elle allait fonctionner et son banquier lui a offert de renégocier son contrat d'hypothèque. Elle a économisé des milliers de dollars parce que les autres ont vu venir la concurrence. Pour l'instant, les Premières nations n'ont pas tant bénéficié directement des services de la First Nations Bank que de la concurrence qu'elle a contribué à créer.

Le sénateur Kroft: Oui, j'ai deux types de questions à vous poser. Si je comprends bien la composition de votre capital, 100 p. 100 de vos actions ordinaires sont désormais la propriété des établissements fondateurs. Toutes les actions de catégorie B sont la propriété de la Banque TD et il y a aussi un million de dollars d'actions privilégiées convertibles. Quel est le scénario idéal selon vous quant à l'évolution de la propriété de votre capital? Est-ce que vous pensez que l'on va s'orienter vers une propriété largement répartie dans le public?

M. Martell: Tout à fait. L'offre de placement privé pour les gros investisseurs des Premières nations est désormais prête et elle va être lancée dans les deux mois à venir. Certains des membres de notre conseil qui ne sont pas originaires de la Saskatchewan sont très intéressés, ils ont suivi le développement de notre établissement depuis le départ et il est indéniable qu'ils ont accès à des capitaux au sein de leurs collectivités. Nous voulons être largement diffusés dans le public. Selon le scénario que nous envisageons, nous prendrons lentement le contrôle et nous nous assurerons ensuite, en dispensant une formation, que nous avons les compétences nécessaires en matière de gestion au niveau du conseil d'administration et que les responsables prennent une part active au développement de la banque. Nous pourrons alors nous détacher de TD. Il faut que les responsables de la réglementation soient d'accord pour que TD ne contrôle plus le conseil. Cette substitution va donc se produire mais, si les règles restent les mêmes, nous bénéficions d'un délai de dix ans et en fait de huit ans parce que nous aurons besoin de deux ans pour que les responsables se retirent et nous regardent fonctionner.

Le sénateur Kroft: On nous dit ici que seules les personnes d'origine autochtone peuvent être propriétaires des actions ordinaires. Lorsque vous commencerez à commercialiser vos services, je ne sais pas si cette disposition va être compatible avec la Charte. Comment justifiez-vous cette démarche?

M. Martell: Nous pouvons assumer cette démarche. Ça devient difficile si l'on veut que les actions soient cotées en bourse. Ça restera ou non permanent, mais la raison pour laquelle nous avons créé cet établissement, c'est parce que nous avons reconnu qu'il était intéressant pour l'avenir d'avoir une banque agréée au Canada. Nous nous sommes aperçus qu'il pourrait être très intéressant pour un autre groupe de reprendre une petite banque régionale et d'en changer l'orientation. Cette orientation continuera à être axée sur les Premières nations tant que la banque sera contrôlée par des autochtones. C'était notre intention.

Le sénateur Kroft: Et légalement vous pouvez le faire?

M. Martell: Oui, c'est ce que nous dit le BSIF.

Le sénateur Kroft: Je vais aborder un domaine tout à fait différent. Sur votre marché, quel est le degré d'activité de la Banque de développement du Canada et de la Société du crédit agricole? Est-ce qu'elle vous concurrence ou est-ce qu'elle coopère avec vous?

M. Martell: La Banque de développement du Canada s'est efforcée d'accroître ses activités sur le marché des Premières nations. Elle a quelques capitaux, elle prête de l'argent et elle dispense certains services aux entreprises. Nous avons avec elle le même problème qu'avec bien des banques qui pénètrent sur notre marché. Elles n'ont aucune expérience des peuples autochtones. Elles ne connaissent pas la culture, les communautés, les risques et les possibilités propres à ce secteur. Il y a parfois des succès limités, mais nous n'y voyons pas la meilleure façon d'aider nos collectivités. Pour ce qui est des caisses de développement, nous avons la structure des sociétés d'investissement autochtones qui sont administrées par les collectivités et qui, pour la plupart, ont eu du succès. Lorsque nous avons repris au gouvernement les activités de prêts, lorsque nous avons créé la Saskatchewan Indian Equity Foundation, le taux de perte sur prêts du gouvernement se situait aux environs de 80 p. 100. Les gens ne voyaient tout simplement pas là un outil au service de la collectivité. Ils considéraient ça comme des subventions et non pas comme des prêts et pour nous ce genre d'institutions ne sert pas nos collectivités. Il faut rendre les gens responsables de leurs propres décisions. C'est ce que font nos établissements.

Le sénateur Oliver: La Société du crédit agricole est venue témoigner et elle a déclaré qu'elle faisait beaucoup de travail pour les agriculteurs. Si des autochtones, dans différentes régions du Canada, veulent obtenir un financement en matière agricole, qu'ont-ils à gagner à s'adresser à vous plutôt qu'à la Société du crédit agricole, dont le personnel est composé d'agriculteurs et de gens qui comprennent l'agriculture, et qui pratiquent des taux tout à fait compétitifs? En second lieu, l'un des grands besoins d'argent des autochtones vient du fait qu'il leur faut payer des avocats et d'autres experts dans le cadre des grandes négociations territoriales. Si jamais ils obtiennent gain de cause, ils en retireront de gros montants d'argent qui seront placés dans votre banque. Est-ce que vous financez un grand nombre de ces négociations territoriales au Canada et, dans la négative, dans quelle mesure, et jusqu'à quel point les financez-vous? Troisièmement, vous dites constamment que votre banque occupe un créneau spécialisé. En nous déplaçant dans tout le Canada, l'une des choses que nous avons apprises, c'est qu'il existe une nouvelle forme de créneaux occupés par les banques. Ces banques spécialisées ne sont pas de tout petits établissements comme le vôtre, qui s'efforce de faire un peu toutes les opérations bancaires traditionnelles. Ce sont plutôt des banques qui se spécialisent dans les cartes de crédit et les hypothèques, les prêts-bail automobile, qui réduisent leurs coûts au maximum, qui deviennent très concurrentielles et qui gagnent beaucoup d'argent. Est-ce ce genre de créneau spécialisé que veut occuper votre banque?

M. Martell: Nous parlons davantage dans ce cas de prédateurs sectoriels que de banques occupant un créneau spécialisé. Je reçois bien deux fois par semaine des publicités par la poste pour des cartes de crédit à faible taux d'intérêt en provenance d'établissements des États-Unis qui n'ont absolument aucun bureau ici. Ce sont des prédateurs sectoriels. Essentiellement, ils détruisent lentement la rentabilité des activités des banques locales en écrémant tout ce qui est le plus rentable. Nous ne pensons pas que le marché des Premières nations soit prêt pour cela. Il a tendance à s'en tenir aux établissements qu'il connaît et auxquels il peut faire confiance à l'échelle de la collectivité. Nous estimons pouvoir occuper un créneau spécialisé parce que nous offrons tout l'éventail des produits et parce que la moitié de notre personnel est autochtone et en mesure de parler la langue des collectivités locales dans lesquelles il se trouve. Voilà pourquoi nous allons pouvoir occuper ce créneau.

La Société du crédit agricole n'est pas la panacée. Si certains de nos agriculteurs indiens ont des besoins qui relèvent davantage de l'agriculture que des questions indiennes, nous allons les encourager à s'adresser éventuellement à la Société du crédit agricole. D'ailleurs, il y a une question de protection. Les agriculteurs sont mieux protégés parfois que les Indiens et la Société du crédit agricole est mieux placée que les banques pour régler certaines questions. Nous avons d'ailleurs nous aussi une société de prêt indienne en Saskatchewan, qui est une société financière autochtone traitant directement avec nos agriculteurs pour ce qui est des prêts de développement. Nous les encourageons donc à s'adresser à l'établissement qui répond le mieux à leurs besoins.

Le sénateur Oliver: Pour ce qui est du financement des revendications territoriales?

M. Martell: Nous attendons que les promesses soient mieux tenues en matière de règlement des revendications territoriales par le gouvernement. À l'heure actuelle, il semble dépenser autant d'argent à lutter contre les revendications territoriales qu'à les régler.

Le sénateur Oliver: Est-ce que vous vous occupez toutefois de financer ces énormes procès?

M. Martell: C'est très difficile parce que rien ne garantit que ces questions vont être réglées un jour. D'un point de vue purement bancaire, il nous faudrait obtenir des garanties sur d'autres biens des Premières nations pour pouvoir les financer. Nombre d'entre elles se débrouillent comme elles le peuvent pour payer ces frais, mais je pense que toutes les parties défraient le coût énorme de ces revendications territoriales, y compris le gouvernement.

Le président: Dans le rapport, on nous dit qu'il est souhaitable de mettre sur pied des banques communautaires avec d'ailleurs à peu près le même capital au départ que le vôtre, soit 10 millions de dollars. Lorsque notre comité s'est déplacé aux États-Unis pour parler avec les banques communautaires, nous avons pu constater que le capital de départ se situait entre 10 à 20 millions de dollars. Vous êtes le seul exemple au Canada d'une banque communautaire qui a été créée récemment. Bien sûr, votre cas ne correspond pas à la définition courante d'une banque communautaire, qui a trait à une communauté géographique. Vous êtes une communauté culturelle. À en juger simplement par votre expérience, pensez-vous qu'une banque communautaire, et prenons le cas d'une collectivité géographique, peut survivre ou non et prospérer avec au départ un capital tel que le vôtre? Vous avez des caractéristiques bien particulières, ce qui vous donne un avantage par rapport à la concurrence dont ne bénéficieraient pas les autres établissements. Est-ce que vous êtes le seul type de petite banque communautaire en mesure d'investir au Canada et d'intéresser une catégorie particulière de clients, ou estimez-vous que les petites banques communautaires peuvent s'en sortir si elles s'adressent à une collectivité locale plutôt qu'à une communauté ethnique.

M. Martell: En Saskatchewan, nous voyons ce genre de banques partout. On les appelle des caisses de crédit et elles opèrent en fait avec ce genre de capital, en répondant à des intérêts locaux, en offrant un service local. En fait, nous avons repoussé le principe d'une caisse de crédit non pas parce qu'il ne répondait pas à ce que nous voulions, mais parce qu'il ne nous offrait pas la possibilité de nous développer au plan national. Nous sommes effectivement une banque possédée par ses clients, qui leur offre des services sous la forme, dans la langue et dans les domaines qui leur conviennent. Nous comprenons leurs problèmes et c'est pourquoi nous avons du succès. Nous pensons que l'on peut avoir du succès à l'échelle d'une petite collectivité. Nous l'avons expérimenté d'un point de vue commercial lorsqu'on sait combien il en coûte en déplacements et en frais d'exploitation pour une banque qui exerce ses activités d'un bout à l'autre du pays. Nous estimons qu'un établissement qui dessert un million d'habitants peut être viable dans une région comme la Saskatchewan. Il aura du succès dans la mesure où ses fondateurs sauront adapter la philosophie de leur banque à celle de la population qu'ils desservent. C'est ce qui se passe avec nos clients et nos actionnaires, qui sont les mêmes dans notre cas. Nous pensons donc qu'il y a là une chance.

Le président: Vous nous dites que la recette, pour qu'une banque communautaire fonctionne bien, c'est de faire en sorte, si je vous comprends bien, qu'elle s'adresse à une communauté clairement définie. Elle doit aussi refléter le système de valeurs de cette communauté, quel que soit ce système.

M. Martell: La majorité des membres de l'Association des banquiers autochtones de l'Amérique du Nord, et tous ceux qui sont aux États-Unis, sont essentiellement des banques communautaires. La plupart des gros investisseurs sont des organisations tribales qui possèdent ces établissements, ou des membres de la collectivité dans lesquelles elles exercent leurs activités. Certaines d'entre elles se sont développées au point de devenir des établissements régionaux d'assez bonne taille dans la région de San Diego, et d'autres dans le sud des États-Unis, en Floride. Elles ont beaucoup de succès. C'est essentiellement sur ce principe qu'elles ont été bâties et c'est pourquoi nous avons été heureux de voir qu'il avait été retenu dans le rapport parce que nous sommes à notre avis l'un des premiers établissements à avoir été constitué de cette manière.

Le président: Monsieur Martell, je tiens à vous remercier au nom du comité de cet exposé très bien construit des activités de votre banque. Nous espérons être tenus au courant de ce que vous faites parce que j'estime que c'est une expérience tout à fait fascinante et pleine de promesses.

M. Norm Halldorson, président, comité des finances de la Chambre de commerce de la Saskatchewan: Je vous remercie au nom de la Chambre de commerce de la Saskatchewan de nous donner la possibilité d'intervenir ici.

Nous avons eu le plaisir il y a un mois d'entendre un exposé d'Harold MacKay devant le conseil d'administration de la Chambre de commerce de la Saskatchewan. C'est ce qui nous a incités à comparaître devant vous aujourd'hui pour vous faire part de notre avis.

Vous devez bien comprendre, j'en suis sûr, qu'une organisation comme la nôtre n'a pas la même compétence que les membres de votre comité dans des domaines bien précis. Nous représentons entre 1 400 et 1 500 entreprises dont la taille et les intérêts sont variés en Saskatchewan. Nous nous efforçons de prendre le pouls de nos membres sur les questions qui leur paraissent importantes et de recueillir leur avis sur ce qu'elles jugent indispensable si l'on veut que le secteur des entreprises soit florissant en Saskatchewan.

Lors de notre congrès annuel qui s'est tenu au printemps, nous avons répertorié un certain nombre de problèmes. Le problème clé consiste à renforcer la compétitivité des entreprises en Saskatchewan. Pour cela, on a fait un certain nombre de recommandations précises portant dans différents domaines, notamment la fiscalité, l'infrastructure et les services financiers.

De manière générale, donc, nous nous efforçons par nécessité de répondre au rapport MacKay en faisant la synthèse des opinions exprimées par nos membres. Nos commentaires seront donc de nature très générale.

Nous résumerons notre position en disant que nous appuyons les quatre grandes lignes de recommandations énoncées dans le rapport MacKay pour renforcer la concurrence. Nos membres, quel que soit leur domaine d'activité, ne manquent pas de nous dire que c'est important pour eux et qu'ils y sont favorables. Nous ne voyons aucun inconvénient à appuyer ce principe.

Le deuxième principe qui consiste à donner davantage de pouvoirs aux consommateurs nous paraît très important. La Saskatchewan a un grand territoire et une faible population. Nous estimons que certains de ces pouvoirs auront une grande importance, que ce soit le commerce électronique, qu'a évoqué le témoin qui m'a précédé, ou de l'accès; puisqu'il n'est tout simplement pas possible d'implanter des succursales dans les régions éloignées, d'autres formes d'accès sont les bienvenues. Ce principe consistant à renforcer les pouvoirs des consommateurs est important aux yeux de nos membres. Ils sont bien évidemment en faveur d'une rédaction plus claire des documents.

Le troisième principe établi par le rapport se rapporte à ce que l'on attend des établissements. Il est important que l'on parte du principe que les petites entreprises doivent pouvoir bénéficier de crédits dans toute la province et que l'on se penche sur des questions comme celles qui préoccupent les autochtones et dont a parlé M. Martell. Bien évidemment, il nous paraît important que, loin de le restreindre, on facilite l'accès au crédit.

Nous n'avons donc aucune objection, sur le plan des principes, à ce que l'on adopte les quatre grandes lignes du projet d'amélioration du cadre réglementaire. Nous comprenons bien que certaines modalités d'application peuvent inquiéter certains intervenants, que ce soit les banques, les sociétés d'assurances ou certains de nos membres. Nous estimons que dans ces différents domaines, il appartient aux institutions concernées de défendre leur cause, parce que ce sont elles qui sont les spécialistes. Notre groupe représente tous les secteurs d'entreprises et nous n'avons pas cette compétence spécialisée.

Nous sommes de manière générale favorables au rapport MacKay et nous nous attendons à ce qu'un dialogue très fructueux s'instaure directement avec nos membres par les voies appropriées. Nous attendons avec impatience de voir comment vont être mis en application ces grands principes qui intéressent nos membres.

Le président: Ma question a trait à l'observation que vous avez faite concernant l'utilité des banques et la nécessité de faire en sorte que les prêts témoignent d'une certaine «responsabilité envers la collectivité» selon l'expression que vous avez employée.

Dans le rapport, on recommande que les établissements financiers déposent un état annuel des répercussions sur la collectivité, des «rapports sur la responsabilité envers la collectivité» c'est ainsi qu'on les appelle dans le rapport, concernant la façon dont l'établissement s'est comporté dans les différentes localités.

J'aimerais savoir quelle est la réaction des gens comme vous face à cette mesure. Si je vous le demande, c'est parce que les témoins nous ont fait des réponses contradictoires. Il y a des gens qui ont trouvé l'idée excellente et d'autres qui nous ont dit que c'était un excès de zèle réglementaire, une intrusion non justifiée du gouvernement sur le marché. Je suis curieux de savoir ce que vous en pensez.

M. Halldorson: J'imagine que nos membres auront des réactions aussi diverses que celles que vous venez de mentionner. Je dois vous avouer qu'une chambre provinciale comme la nôtre n'a pas d'idée précise à ce sujet. Je pense que nos différents membres feront connaître leurs préoccupations. Nous entérinons en fait le principe général selon lequel «il faut faire le maximum pour renforcer la concurrence et donner davantage le choix à nos membres».

Le sénateur Tkachuk: Est-ce que les membres de la Chambre de commerce de la Saskatchewan estiment qu'ils sont bien servis à l'heure actuelle par les banques sur le plan commercial lorsqu'il s'agit d'avoir accès à des fonds ou à des marges de crédit?

M. Halldorson: J�imagine bien �videmment que certains d�entre eux estiment �tre bien servis et d�autres non. Tout d�pend de la nature de l��tablissement, de son emplacement, du secteur dans lequel il exerce ses activit�s, de sa capitalisation, de son potentiel aux yeux du pr�teur, et cetera. Il nous appara�t donc que les avis sont tr�s divers, certains �tant satisfaits, d�autres non. Je ne pense pas qu�il y ait l� une r�alit� unique qui influe sur chacun de nos membres.

Le s�nateur Tkachuk: Y a-t-il un type d�entreprises, selon la taille, le secteur ou la r�gion g�ographique qui s�est plaint aupr�s de la chambre d�avoir des difficult�s avec les banques?

M. Halldorson: Des craintes concernant l�acc�s au cr�dit ont �t� exprim�es dans les petites localit�s, o� les banques ferment. Mais c�est une tendance qui existe partout et la plupart de nos entreprises rurales n�y �chappent pas. Elles se regroupent; elles se d�veloppent. Elles se rendent compte qu�une grande partie de leurs op�rations bancaires se font avec des centres bancaires commerciaux �loign�s et non pas avec les banques locales.

Le s�nateur Tkachuk: Est-ce qu�elles en sont satisfaites?

M. Halldorson: Je ne sais pas si elles en sont satisfaites. Certaines le sont, d�autres pas. Je consid�re toutefois que les possibilit�s d�acc�s ont une importance primordiale pour nos membres. Lorsqu�on a besoin d�acc�der � un centre bancaire commercial, � partir du moment o� on peut le faire par l�interm�diaire d�un terminal d�ordinateur plut�t que d�avoir � faire 200 ou 300 kilom�tres en voiture, il est peu probable qu�ils y voient un inconv�nient.

Le s�nateur Tkachuk: Tr�s bien. Mais si, par exemple, un magasin de Rosthern a 2 000 $ en liquide � la fin de la journ�e et qu�il n�y a pas de succursale bancaire pour les d�poser, �a devient un probl�me.

M. Halldorson: C�est tout � fait vrai. Il y a un probl�me dans les r�gions rurales de la Saskatchewan d� � la d�mographie et au fait qu�il y a de moins en moins d�habitants dans ces petites localit�s.

Le s�nateur Tkachuk: Vos membres ne s�inqui�tent-ils donc pas des fusions et ne vous disent-ils pas que cela ne va faire qu�aggraver le probl�me?

M. Halldorson: Nous avons entendu toutes sortes de commentaires � ce sujet; certains sont pour, d�autres contre. D�apr�s ce que nous pouvons voir, le rapport ne se limite pas � traiter du cas des fusions, loin de l�. Il �tablit tout simplement la proc�dure � suivre en cas de fusion, les parties int�ress�es devant d�montrer qu�elles tiennent compte des int�r�ts de la collectivit�. Je pense que ce principe est bien accept� par nos membres et qu�il faut absolument tenir compte des int�r�ts de la collectivit�.

Le s�nateur Tkachuk: Notre comit� essaie de faire face � certains aspects de la concurrence. Pour assurer la concurrence sur le march� en Saskatchewan, nous avons des probl�mes tout � fait sp�ciaux parce que nous sommes une province rurale dont la population est peu dense, et la question de la fusion se pose. La chambre n�a-t-elle pas �tudi� cette question et d�termin� sa position, parce qu�elle devra bient�t le faire?

M. Halldorson: Non, pas encore.

Le s�nateur Tkachuk: Hier, nous avons re�u un groupe de courtiers en assurances de l�ensemble de la province. Ils ont fait un expos� sur la vente d�assurances multirisques par les banques. Plusieurs m�ont dit que l�opinion g�n�rale de la chambre �tait qu�elle aimerait que les banques vendent des assurances par l�interm�diaire de leurs succursales, et cela ne leur plaisait pas du tout.

Est-ce votre position? Si vous �tes d�accord avec le rapport du groupe de travail MacKay, la chambre est-elle d�avis que les assurances pourraient �tre vendues dans les succursales et que les banques pourraient pratiquer la location-bail?

M. Halldorson: Je suis content d�apprendre qu�ils sont intervenus eux-m�mes, parce que je pense qu�ils peuvent le faire beaucoup mieux que nous ne pouvons le faire en leur nom. En appuyant le rapport, nous disons que nous sommes d�accord avec les principes fondamentaux du renforcement de la concurrence. Mais, au niveau conceptuel, si on aplanit le terrain, cela ne veut pas dire qu�il faut apprendre � conduire la niveleuse, qu�on passe le bulldozer partout et qu�on pose le gazon.

On ne conna�t pas encore les d�tails ni les modalit�s d�application. Nous supposons qu�on examinera ce que vont faire les compagnies d�assurances multirisques et d�assurances-vie, les banques et les autres parties concern�es qui feront valoir leurs propres int�r�ts et qu�on d�finira la fa�on d�aplanir le terrain. Nous disons simplement qu�en appuyant les principes du rapport, nous nous montrons en faveur d�un renforcement de la concurrence dans l�int�r�t g�n�ral de nos membres.

Le s�nateur Tkachuk: Je sais que nous sommes tous en faveur d�une concurrence accrue. Mais il y a deux recommandations explicites dans le rapport du groupe de travail MacKay: que les banques soient autoris�es � pratiquer la location-bail et � vendre des assurances dans leurs succursales. �tes-vous d�accord avec cela?

M. Halldorson: Nous n�avons pas �tudi� les r�percussions de ces recommandations et, en toute franchise, nous ne connaissons pas assez bien le secteur bancaire ou celui des assurances pour vous donner une r�ponse intelligente. Nous appuyons le principe de la chose, mais nous n�avons pas �tudi� le d�tail de la mise en oeuvre et nous ne pouvons r�ellement pas pr�ciser davantage comment on pourrait proc�der pour accro�tre la concurrence.

Le s�nateur Tkachuk: Nous essayons d��tudier ce rapport et de faire des recommandations et nous vous demandons de nous y aider. Donc, m�me si vous �tes d�accord avec le principe, puisque vous n��tes pas au courant de certains d�tails du probl�me, vous n�appuyez pas cela, ou bien est-ce le contraire?

M. Halldorson: Nous disons qu�il est difficile de nous prononcer sur des recommandations individuelles pour dire que nous les appuyons ou non, si nous ne comprenons pas l�ensemble de leurs r�percussions �ventuelles.

Au lieu de faire cela, nous vous faisons part de ce qui nous para�t �tre l�opinion g�n�rale de nos membres telle qu�elle a �t� exprim�e lors de la derni�re r�union de notre conseil d�administration. Cela dit, il faut accueillir favorablement la notion de concurrence accrue et de meilleures possibilit�s d�agir. Nous nous rendons compte qu�il y aura toutes sortes d�obstacles, et que certaines parties auront l�impression que cela va � l�encontre de leurs int�r�ts alors que d�autres penseront que cela les sert. Mais nous laisserons les parties concern�es, qui sont celles qui connaissent leur propre secteur, entamer ce dialogue.

Le s�nateur Kroft: Je souhaite vivement que nous ne nous en tenions pas l� et que nous ne refusions pas aux gens de la Saskatchewan la possibilit� de se faire entendre. J�insisterai donc avec ent�tement aupr�s du s�nateur Tkachuk. Pour moi, votre position est celle d�une organisation qui repr�sente des membres vari�s. Vous essayez de nous donner un point de vue g�n�ral et un ensemble de principes.

Mais si nous voulons retenir deux ou trois choses auxquelles vous pensez et qui sont des pr�occupations particuli�res du milieu des affaires de la Saskatchewan que vous repr�sentez, pouvez-vous essayer de nous dire ce qu�elles devraient �tre?

M. Halldorson: Je peux essayer de le faire et j�encourage certainement les autres membres du panel � intervenir s�ils veulent ajouter quelque chose. Je pense que pour nous, l��l�ment cl� serait que les documents soient r�dig�s en termes simples. C�est tr�s important. Deuxi�mement, je pense que nous aimerions qu�il y ait une protection des renseignements personnels. Si nous acceptons le commerce �lectronique, nous voulons �tres s�rs que les renseignements personnels sont prot�g�s.

La troisi�me chose est l�am�lioration de l�acc�s. Nous reconnaissons qu�il n�y aura pas des succursales dans toutes les petites villes, mais il faut faciliter l�acc�s d�une fa�on ou d�une autre.

Voil� les trois messages cl�s que j�aimerais que vous reteniez.

Le s�nateur Kroft: Pour ce qui est des questions comme les fusions �ventuelles de banques, vous ne nous dites pas express�ment si, � votre avis, cela favoriserait ou compromettrait l�atteinte de ces objectifs?

M. Halldorson: C�est exact. Nous pensons que les banques devront d�montrer en quoi cela servira les int�r�ts de la communaut�. Le rapport donne aux banques la responsabilit� de le faire.

Le s�nateur Callbeck: Le rapport MacKay d�clare qu�il faut am�liorer les rapports entre les petites entreprises et les banques et il mentionne trois domaines qui, � son avis, devraient �tre examin�s. Il pense notamment que les banques devraient tenir compte des risques. En d�autres termes, plus un pr�t est risqu�, plus le taux d�int�r�t doit �tre �lev�. Qu�en pensez-vous?

M. Halldorson: En tant qu�homme d�affaires, je dirai que je pense que c�est ce qu�elles font maintenant. Le co�t des pr�ts est certainement tr�s vari�. Je crois que le risque et le gain doivent aller de pair, c�est un principe �conomique fondamental. Je pense que c�est in�vitable.

Le s�nateur Callbeck: Quand vous parlez d�une grande variation, vous voulez dire combien de points de plus que le taux de base?

M. Halldorson: Cela peut aller du taux de base au taux de base plus 3, 4 ou 5 p. 100. Le plus souvent, un pr�t n�est tout simplement pas accord� si le risque para�t trop �lev�. Nous esp�rons que, dans ce domaine, la situation sera �valu�e avec soin avant d�accorder �ventuellement un financement suppl�mentaire pour des cr�ations d�entreprises.

Ici, � Saskatoon, nous sommes un centre de technologie de pointe. Il y a des gens qui ont des id�es nouvelles mais pas de capitaux, et ils ont �norm�ment de mal � trouver un financement. Dans ce cas, le risque est certainement plus �lev�, mais cela peut �galement rapporter gros.

� l�heure actuelle, je pense qu�il est difficile d�obtenir un financement. Je ne peux pas vous dire comment ce probl�me sera r�solu, mais je suis certainement d�accord pour qu�on discute de la fa�on de mieux r�gler le probl�me du risque que posent les pr�ts aux gens d�affaires.

Le s�nateur Callbeck: Quand vous mentionnez le taux de base plus 5 p. 100, parlez-vous des banques � charte?

M. Halldorson: Non, pas pr�cis�ment. Nous examinons simplement le co�t g�n�ral du financement. Il pourrait s�agir d�une location-bail ou d�un pr�t accord� par une banque � charte ou un autre organisme.

Le s�nateur Callbeck: Comme je l�ai dit, le rapport parlait de trois domaines. Le premier �tait la prise en compte du risque. Le deuxi�me �tait le remplacement fr�quent des directeurs de comptes. Le troisi�me �tait que les actions posaient plus de probl�mes que les emprunts. Le rapport encourage les institutions � augmenter leur participation dans le capital des petites entreprises. Y a-t-il d�autres domaines qu�il faudrait, selon vous, examiner pour am�liorer les rapports entre les banques et les petites entreprises?

M. Halldorson: Aucune autre recommandation ne me vient � l�esprit. Quelqu�un d�autre veut-il proposer quelque chose? Non. Je pense que le principal, comme je l�ai d�j� mentionn�, est l�acc�s � l�am�lioration de l�acc�s �, en particulier dans les zones �loign�es.

Quant � la concurrence, nous constatons que les taux sont meilleurs quand il y a plus de gens qui essaient d�obtenir le m�me compte que s�il n�y a qu�une personne. Donc, si on peut accro�tre la concurrence en offrant plus de choix, cela nous convient. Pour ce qui est de la protection des renseignements personnels, si nous faisons toutes sortes de transactions �lectroniques � et, en toute franchise, nous pensons que c�est in�vitable dans notre province �, nous ne pensons pas que le statu quo est acceptable. Les effets de la situation d�mographique se font sentir dans tous nos secteurs d�activit�s, qu�il s�agisse des compagnies c�r�ali�res, des quincailleries ou des institutions financi�res. Il y en a de moins en moins dans les zones �loign�es, et il faut trouver quelque chose pour les remplacer afin que les entreprises commerciales puissent fonctionner dans ces zones �loign�es. En toute franchise, nous consid�rons que le commerce �lectronique est tr�s attrayant et nous offre de multiples possibilit�s, et nous esp�rons qu�il pourra �tre mis en oeuvre. Nous jugeons encourageant que ce soit une des choses envisag�es ici et que, dans ce contexte, la question de la protection des renseignements personnels soit plac�e au premier plan.

M. Kent Smith-Windsor, directeur ex�cutif, Saskatoon and District Chamber of Commerce: Si vous me le permettez, je poserai quelques questions � propos de ce que vous allez faire apr�s avoir voyag� dans le pays et entendu toutes ces choses.

Le pr�sident: Oh, je suis ravi de vous en parler. Notre comit� et le comit� des finances de la Chambre des communes feront rapport au Parlement par l�entremise de leur Chambre respective et, par l� m�me, au gouvernement aux alentours du 1er d�cembre. � ce moment-l�, le gouvernement aura �videmment re�u la contribution de MacKay, puisque que son groupe de travail est � l�oeuvre. Nous aurons les r�sultats de la s�rie d�audiences publiques tenues par nous-m�mes et par la Chambre des communes.

Le gouvernement sera alors en mesure de commencer � d�cider ce qu�il fera au sujet des diverses recommandations de MacKay. � ma connaissance, le gouvernement n�a pas un �ch�ancier fixe pour l�annonce de ses d�cisions. De son point de vue, je pense qu�il �tait important qu�il ait non seulement le rapport du groupe de travail, mais �galement des renseignements au sujet de ce que les gens pensent de ce rapport dans l�ensemble du pays avant de finaliser ses propres positions.

Je suppose que cela prendra quelques mois. Je veux dire que je ne pense pas qu�il faille attendre un an, mais, certainement, environ deux ou trois mois pour que le gouvernement d�cide ce qu�il va faire au sujet du rapport MacKay en tenant compte des deux s�ries d�audiences publiques tenues par nous et par le comit� des finances de la Chambre des communes.

M. Smith-Windsor: Un suivi sera-t-il possible? Quand on voit les 124 recommandations, il est difficile de parcourir la liste en disant oui, non, oui, non. Y aura-t-il d�autres possibilit�s d�intervenir? Certaines industries voudraient soulever certains points; o� peuvent-elles le faire � part ici, ou auront-elles au moins cette possibilit�?

Le pr�sident: � ma connaissance, aucune d�cision d�finitive n�a �t� prise � ce sujet, mais permettez-moi de vous dire ce qui, je pense, va se passer.

Dans un domaine aussi complexe que celui-ci, une fois que le gouvernement a d�cid� quels d�tails techniques paraissent raisonnables, il pr�pare un livre blanc ou un projet de loi, et ces d�tails font, en fait, l�objet d�une consultation qui est r�alis�e tant�t par des comit�s parlementaires, tant�t par le gouvernement lui-m�me. Il me para�t tout � fait raisonnable de supposer que d�autres consultations auront lieu avant l�entr�e en vigueur d�une loi ou d�un r�glement quelconque. Je pense qu�on ne sait simplement pas encore si c�est, disons, nous qui le ferons ou si cela sera fait par la bureaucratie elle-m�me. Les deux m�thodes ont �t� utilis�es fr�quemment au fil des ans et, � ma connaissance, la d�cision n�a pas encore �t� prise.

Je pense que vous pouvez �tre s�rs qu�avant que les changements ne deviennent d�finitifs, il y aura une autre possibilit� de les commenter, surtout pour ce qui est de certains secteurs particuliers.

M. Smith-Windsor: C�est encourageant, parce que, dans nos discussions au sujet des recommandations, nous avons essay� de d�terminer les int�r�ts communs que devait d�fendre la Chambre de commerce de Saskatoon, et cela nous a paru un cadre appropri� pour avoir un d�bat sur chacun de ces domaines. Soit dit en passant, je pense que c�est nous qui sommes coupables d�avoir suscit� une discussion comme celle qui a eu lieu au sujet du secteur des assurances. Dans ce secteur, beaucoup se demandent si ce rapport va assez loin pour �galiser les chances. Je ne suis certainement pas capable de r�pondre � toutes leurs pr�occupations � cet �gard. Je souhaite que ce secteur ait la possibilit� de soulever cette question.

Il y a une autre chose que vous pourriez �galement retenir. M�me si on supposait un instant qu�il n�y a jamais eu de rapport MacKay, la question des ventes li�es avec coercition resterait importante. Je pense que de nombreuses entreprises des secteurs financiers voisins sont vivement pr�occup�es par le fait que ce rapport ne se penche pas suffisamment sur cette question.

Le pr�sident: Nous avons entendu, en fait, des t�moins repr�sentant les institutions financi�res voisines, qui font r�ellement concurrence aux banques, pr�cis�ment au sujet des ventes li�es avec coercition.

Dans l�intervalle, les choses se mettent en place. Si vous avez des membres qui ont des pr�occupations sp�cifiques au sujet de l��galisation de chance, il serait tr�s utile pour nous qu�ils nous envoient simplement une lettre d�ici 15 jours. Pensez-y quand vous r�fl�chirez � vos recommandations, mais il faut que cela se fasse dans les quinze jours, parce que nous aurons termin� d�ici la fin novembre.

M. Smith-Windsor: Je les encouragerai certainement � le faire, et nous aurons l�occasion d�examiner �galement cela pour nous aider � mieux nous informer sur la question.

Mme Diane Brisebois, pr�sidente-directrice g�n�rale, Conseil canadien du commerce de d�tail: Bonjour et merci de prendre le temps d�entendre et de discuter le point de vue des d�taillants du Canada au sujet du rapport du groupe de travail MacKay. Tout au long de ces audiences, nous utiliserons le sigle CCCD pour d�signer le Conseil canadien du commerce de d�tail. Mon confr�re, Ken Morrison, est consultant en services financiers aupr�s du CCCD. M. Morrison a travaill� pour la Banque Royale pendant 32 ans et, pendant 25 de ces ann�es, il a si�g� au sein de plusieurs comit�s de l�ACP et de l�Association des banquiers canadiens. Il a �galement t�moign� � titre d�expert pour notre conseil dans l�affaire Interac devant le Tribunal de la concurrence, et il repr�sente plusieurs autres intervenants qui ont des int�r�ts identiques. Il passe �galement un temps consid�rable � l�ext�rieur du Canada � s�occuper de la structure des syst�mes et des r�seaux bancaires dans les pays �mergents.

Vous avez re�u la brochure du CCCD et vous connaissez donc les documents auxquels nous allons nous r�f�rer. Le document intitul�: �Restructuring the Canadian Financial Services Sector: The Views of Canadian Retailers� constitue le m�moire du Conseil.

Les deux autres documents sont des sondages. �Retail Finance Executive and Owner-Manager Survey: Restructuring Financial Services in Canada� inclut non seulement les r�sultats obtenus aupr�s de 350 d�taillants ind�pendants, mais �galement 75 entrevues approfondies r�alis�es aupr�s de d�taillants de taille moyenne ou grande dans l�ensemble du pays. Le sondage �Survey of Retailers� Experience With Payment Systems� a �t� r�alis� l�ann�e derni�re en juin et publi� en novembre 1997. Les points saillants des r�sultats de ces deux sondages figurent dans la partie principale du m�moire du CCCD.

Nous serons brefs. Nous axerons nos commentaires et recommandations sur un certain nombre de questions: la stabilit� et la valeur du syst�me du point de vue des d�taillants, la comp�titivit� de notre secteur des services financiers telle que la voient les d�taillants, les implications de la structure et de la r�glementation du march� pour les d�taillants et leurs clients et, enfin, l�impact des nouvelles technologies sur les d�taillants, leurs clients et, en fait, tous les consommateurs canadiens. Permettez-moi de vous donner un bref aper�u du Conseil canadien du commerce de d�tail. Notre m�moire vous donnera, bien entendu, des renseignements plus complets. Nous sommes une association corporative � but non lucrative financ�e par ses membres. Nous repr�sentons plus de 7 500 d�taillants de l�ensemble du pays dont le chiffre d�affaires total repr�sente 65 p. 100 de la valeur des ventes au d�tail au Canada. Notre secteur emploie plus de 1,4 million de Canadiennes et de Canadiens. Environ 90 p. 100 de nos membres sont de petits d�taillants ind�pendants qui exploitent un ou deux magasins. Nos membres repr�sentent toutes les branches du commerce de d�tail, y compris les magasins sp�cialis�s, les �piceries, les magasins d�escompte, les grandes surfaces, les stations-services, les grands magasins, les grandes cha�nes sp�cialis�es, sans oublier, �videmment, les d�taillants ind�pendants de toutes les villes de notre pays.

Pour passer aux �l�ments principaux de notre m�moire, permettez-moi de simplement r�sumer certaines de nos conclusions et recommandations.

Les d�taillants sont tr�s directement concern�s par les d�cisions qui pourraient modifier en profondeur la structure concurrentielle du secteur financier et des services qu�il fournit dans les villes du Canada. Si les d�cisions prises sont bonnes, cela pourrait pr�senter d�importants avantages. Si elles sont mauvaises, cela pourrait, � notre avis, ouvrir la voie � une r�duction de la concurrence et � une augmentation du prix des services bancaires, et les d�taillants de nombreuses villes ne pourraient plus facilement avoir acc�s aux services financiers dont ils ont besoin pour le fonctionnement normal de leur entreprise.

Il y a des d�taillants dans les localit�s petites et grandes du Canada, et ils savent combien il est essentiel pour eux d�avoir des institutions financi�res qui comprennent les r�alit�s de leur march� et la nature de leur entreprise. Ils appr�cient ce qui fait la force du syst�me bancaire national du Canada, la stabilit� et la solidit� financi�re des institutions bancaires et la pr�sence de succursales bancaires locales qui fournissent toute une gamme de services. Ce sont des caract�ristiques fondamentales du syst�me financier canadien que les d�taillants appr�cient et qui, selon eux, doivent �tre pr�serv�es.

Depuis plusieurs ann�es, les d�taillants disent qu�il faut une concurrence plus efficace dans le secteur des services financiers. Ils se disent pr�occup�s par la d�t�rioration du service personnel que fournissent les institutions financi�res, qui r�duisent les heures d�ouverture de leurs succursales, ferment certaines d�entre elles et transf�rent aux d�taillants une portion croissante du co�t des nouveaux services de paiement utilis�s par les consommateurs.

Les d�taillants comprennent les possibilit�s croissantes qu�offre la technologie. Ils savent �galement que la technologie est loin de remplacer de fa�on compl�te et ad�quate les services fournis par les succursales locales d�institutions financi�res se faisant concurrence.

Je voudrais attirer votre attention sur les pages 11, 12 et 13 de notre m�moire principal. Nous avons essay� de vous donner une id�e de la fa�on dont les d�taillants utilisent les institutions financi�res dans l�ensemble du pays, du type de services dont ils ont besoin et de la fr�quence de leur utilisation de ces services. C�est un �l�ment cl� de notre m�moire, qui cherche � vous permettre de mieux comprendre la forte d�pendance des d�taillants sur les succursales locales pour le fonctionnement courant de leur entreprise, quelle qu�en soit la taille, cela soit dit en passant. Il peut s�agir de l�exploitant d�un seul magasin, d�une cha�ne r�gionale aussi bien que de nos plus gros d�taillants nationaux.

Cela refl�te la r�alit� des contacts quotidiens des d�taillants avec les institutions financi�res. Nous avons pens� qu�il serait utile de vous donner une id�e des rapports qui existent entre le secteur financier et le secteur du commerce de d�tail. Bien que tr�s complet, le rapport du groupe de travail ne s�est pas pench� sur plusieurs pr�occupations importantes des d�taillants. Il met fortement l�accent sur les services au consommateur, les services financiers, la technologie et les possibilit�s d�accroissement de la concurrence, mais ne mentionne gu�re les services bancaires courants que les d�taillants doivent obtenir d�une succursale locale pour assurer le fonctionnement normal de leur entreprise et r�pondre aux besoins des consommateurs.

Le rapport ne dit rien sur la fa�on de faire en sorte que tous les services dont ont besoin les d�taillants et, � vrai dire, toutes les autres entreprises du Canada continuent d��tre fournis � des prix concurrentiels.

Dans l�analyse des projets de fusion publi�e jusqu�� pr�sent, il y a des lacunes en ce qui concerne l��valuation de l�impact des diff�rents produits et des �ventuelles mesures l�gislatives auxquelles il faudra recourir pour assurer une concurrence satisfaisante. C�est ainsi que les fusions concernant les quatre plus grandes banques entra�neront une �norme concentration de la part de march� des fournisseurs des services Visa et MasterCard aux d�taillants. La question de la dualit� de ces cartes de cr�dit � et nous nous �tendrons avec plaisir sur cette question si vous le souhaitez dans la suite de cette audience � doit �galement �tre abord�e.

Les d�taillants ont encourag� le Bureau de la politique de concurrence � examiner individuellement tous les services et produits financiers et � insister pour obtenir des donn�es concr�tes sur les services que les concurrents vont fournir et les endroits o� ils le feront. Les risques encourus par les d�taillants sont trop grands pour qu�on autorise des changements en se fondant sur des simples hypoth�ses.

Les d�taillants se rendent compte que les institutions financi�res du Canada doivent �tre concurrentielles au niveau mondial et fonctionner de fa�on efficace. Nous pouvons vous assurer que beaucoup de nos membres se trouvent aujourd�hui dans la m�me situation. Ils recommandent toutefois d�examiner attentivement les fusions pour faire en sorte que les nouvelles structures de ce secteur r�pondent aux besoins des d�taillants et de tous les Canadiens.

Nous recommandons, en fait, sp�cifiquement qu�on examine en d�tail les r�percussions que les recommandations du groupe de travail MacKay concernant les services bancaires auront sur les entreprises et les consommateurs dans un laps de temps donn�. Nous recommandons �galement qu�on �value dans quelle mesure toute nouvelle forme potentielle de concurrence sera r�ellement � l�avantage des consommateurs canadiens et des entreprises. Il faudrait notamment examiner les produits et les services que chaque banque va fournir, les endroits o� elle le fera et les consommateurs auxquels elle s�adressera.

Une concurrence plus efficace est essentielle et ne peut pas �tre laiss�e au hasard. Il est peut-�tre n�cessaire de prendre des mesures pour g�rer la prestation des services, surtout pendant la p�riode durant laquelle le march� s�adaptera aux changements. Comme nous l�avons dit tout � l�heure, le Bureau de la politique de concurrence devrait examiner la nature de la concurrence service par service, y compris la question de la dualit�. Il faudrait �valuer en d�tail les propositions de fusion entre les grandes banques en suivant les recommandations du groupe de travail, que nous appuyons. Il ne faudrait pas autoriser ces fusions tant que le secteur financier n�a pas �t� r�form� pour ouvrir les march�s � une concurrence plus efficace et qu�on n�a pas de preuve solide que cette concurrence va vraiment se concr�tiser et r�pondra aux besoins des entreprises et des consommateurs. Il faudra mettre en oeuvre des mesures assurant un acc�s plus large aux r�seaux du syst�me de paiement et de services �lectroniques. C�est n�cessaire pour encourager la concurrence sur le march� et obtenir des services de qualit� � des prix raisonnables. Comme vous le savez, nous n�avons pas gard� le silence � ce sujet ces derni�res ann�es. Il faudrait notamment permettre aux d�taillants de continuer de fournir des services de paiement �lectronique � leurs clients lorsque le syst�me �lectronique est en panne. Je suis s�r que ceux d�entre vous qui ont utilis� des cartes de d�bit ont eu l�exp�rience de ce probl�me.

Il y a �galement d�autres mesures que nous souhaitons: �largir l�acc�s des d�taillants au syst�me de paiement gr�ce � la cr�ation d�autres structures de traitement, offrir aux consommateurs et � d�autres entreprises l�acc�s au service de paiement et, enfin, permettre aux d�taillants de participer plus directement � la compensation et au r�glement des transactions commerciales sans assumer les co�ts de la cr�ation d�un organisme de type bancaire. Nous vous soumettons respectueusement tout cela, et j�esp�re que nous avons �t� assez brefs et concis.

Le s�nateur Kroft: Comme vous l�avez mentionn�, vos membres attachent manifestement une grande importance � la disponibilit�, � la rapidit� et � la commodit� des services financiers. Vous devez pouvoir les obtenir l� o� vous en avez besoin, quand vous en avez besoin.

Les tableaux que vous nous avez pr�sent�s me paraissent extr�mement pr�cieux, parce qu�ils nous rappellent utilement que ce qui est en jeu ne se limite pas aux quelques �l�ments auxquels chacun d�entre nous peut penser. Quand je vois les produits et services mentionn�s sur deux ou trois pages, cela contribue encore davantage � me ramener � ma question.

En ce qui concerne cette question, et au-del� de celle-ci, nous partons de l�hypoth�se g�n�rale que les cha�nes font la loi, que le statu quo a disparu et que, d�une fa�on ou d�une autre, les liaisons �lectroniques vont r�pondre � tous nos besoins dans tous les domaines.

Pour ce qui est plus pr�cis�ment du tableau et des besoins des d�taillants, je voudrais comprendre le r�le de la succursale bancaire traditionnelle avec des employ�s et situ�e � un endroit pratique pour les clients si on le compare aux transactions effectu�es en appuyant sur des touches dans un kiosque ou, chez soi, en utilisant la t�l�vision.

Consid�re-t-on g�n�ralement qu�on abandonne massivement les contacts humains pour un certain nombre de ces services? Les contacts individuels seront-ils remplac�s par un monde �lectronique? J�essaie de me faire une id�e assez rassurante de ces questions.

J�ai des opinions � ce sujet � un niveau humanitaire plus g�n�ral, mais, pour le moment, parlons des besoins de vos clients. Je pense que nous risquons ici de nous laisser emporter par certaines hypoth�ses, et il est bon que, de temps � autre, nous ayons des t�moins qui nous pr�sentent un point de vue diff�rent. C�est, je crois, M. Clark, de Canada Trust, qui a dit que toute personne qui croit que les succursales bancaires sont condamn�es se trompe. Il a dit qu�elles sont l��l�ment cl� de son entreprise, que c�est l� qu�elle g�n�re ses activit�s et qu�elle veut en avoir plus, et non pas moins.

Toutefois, dans l�ensemble, nous prenons le chemin du remplacement de l�interaction humaine par l��lectronique. Je sais que c�est une question tr�s vaste, mais j�aimerais r�ellement savoir ce que vous en pensez en ce qui concerne le type de services dont vos membres ont besoin.

Mme Brisebois: C�est une question int�ressante et tr�s pertinente pour les d�taillants, et c�est pourquoi nous l�avons incluse dans le tableau des pages 11 � 13.

�tant donn� que le rapport MacKay et les repr�sentants de plusieurs institutions financi�res parlent du monde �lectronique, nous avons pens� qu�il �tait important de faire comprendre au comit� que de nombreuses activit�s se d�roulent encore au niveau des succursales. Certaines d�entre elles concernent l�aspect commercial, mais il y en a aussi qui ont un r�le humanitaire.

Nous ne pouvons pas n�gliger cela. Il y a un nombre surprenant de d�taillants ind�pendants qui nous ont dit que le fait de ne pas avoir de rapports avec le directeur de leur succursale et les personnes qui y travaillent les inqui�te beaucoup.

Ces rapports ne sont pas seulement un gage de s�curit�. Ces commer�ants ont plut�t grandement besoin de leur succursale pour demander des conseils, pour parler de l�avenir de leur entreprise et pour examiner d�autres options financi�res permettant sa croissance. Je pense qu�il serait tr�s na�f de penser que tout cela peut se faire �lectroniquement, tout au moins d�ici trois ou quatre ans. Nous sommes toutefois pr�occup�s par le fait que les localit�s desservies par ces institutions financi�res risquent de ne pas avoir leur mot � dire � cet �gard.

En outre, nous trouvons pr�occupant que les communications �lectroniques ne soient pas encore consid�r�es comme totalement s�res. Beaucoup de nos membres, plus particuli�rement les d�taillants ind�pendants, ne se sentent pas � l�aise avec les fa�ons �lectroniques de traiter avec des institutions financi�res. M. Morrison pourrait peut-�tre vous donner plus de d�tails parce qu�il a particip� � certaines des entrevues. Le malaise est manifestement �norme.

L� encore, je pense que le tableau montre qu�il faut que de nombreux services soient fournis par la succursale pour permettre le fonctionnement quotidien d�un magasin de vente au d�tail.

M. Morrison: Permettez-moi de vous donner quatre exemples pr�cis de l�importance d�une succursale locale pour un d�taillant. Premi�rement, il y a le d�p�t des esp�ces et des ch�ques qui, malgr� les grands progr�s de l��lectronique, repr�sentent encore plus de 50 p. 100 des paiements d�pos�s quotidiennement par les d�taillants. Il faut souvent effectuer le d�p�t dans la journ�e pour s�assurer que le compte est encore suffisamment garni pour pouvoir payer les ch�ques arriv�s � la banque le m�me jour. Deuxi�mement, apr�s la fermeture de la banque, les magasins qui sont ouverts tard le soir doivent pouvoir disposer d�un tr�sor de nuit.

Troisi�mement, le d�taillant doit se rendre � la succursale pour n�gocier tous les services �lectroniques auxquels nous faisons r�f�rence � les services de gestion des fonds, les lettres de cr�dit qui peuvent maintenant �tre �tablies �lectroniquement, le service de carte de d�bit Interac et les services �lectroniques pour les cartes de cr�dit. La technologie ne remplace pas les avantages qu�il y a � rencontrer quelqu�un � son bureau pour n�gocier le prix et la qualit� de ce service.

Le quatri�me exemple est la n�gociation d�un emprunt. Il y a de grands progr�s dans le domaine des t�l�conf�rences et des vid�oconf�rences, mais cela ne remplace pas la pr�sence quotidienne dans la ville du directeur de la succursale locale ou d�un repr�sentant local de la banque. Cette personne conna�t la situation de l��conomie locale, sait quelles entreprises sont ou non en gr�ve et quel est le taux exact de ch�mage. Elle peut rencontrer le d�taillant en comprenant tr�s pr�cis�ment les influences qui s�exercent sur son entreprise et elle peut n�gocier les modalit�s des lignes de cr�dit.

Le s�nateur Kroft: Je voudrais passer maintenant � votre sentiment au sujet du droit d�une institution financi�re � ouvrir ou fermer une succursale � sa guise. J�aimerais savoir ce que vous pensez des questions concernant les pr�avis de fermeture et les limitations de ce droit.

Consid�rez-vous qu�il serait appropri� de limiter le droit d�une institution financi�re � fermer une succursale? Que penserait un membre de votre organisation qui exploite un supermarch� d�une restriction analogue? J�essaie d�examiner, au sens large, ce qui est �quitable en ce qui concerne la limitation de la libert� d�action sur le march�.

Mme Brisebois: Demandez-vous s�il y a des divergences d�opinion entre les diff�rents types de d�taillants, par exemple entre un �picier et un autre commer�ant, dans une localit� o� une succursale pourrait �tre ferm�e?

Le s�nateur Kroft: En fait, non. Je demandais si le droit d�un exploitant de supermarch� � fermer son magasin devrait �tre le m�me que le droit d�un banquier � fermer sa succursale.

Mme Brisebois: Il ne fait, � mon avis aucun doute que les d�taillants comprendraient la situation si la fermeture d�une succursale �tait n�cessaire. Ils ne s�attendent pas � ce que les institutions financi�res fassent la charit�; ils comprennent le contexte commercial. Je pense que les d�taillants sont certainement les mieux plac�s pour comprendre les probl�mes que certaines succursales posent aux institutions financi�res.

Les d�taillants travaillent dans un des milieux les plus concurrentiels. Je pense qu�ils ont du mal � comprendre pourquoi on parle tant de la fermeture de succursales alors que, ces quatre derni�res ann�es, le commerce de d�tail au Canada a �t� plus concurrentiel que jamais. Le nombre de d�taillants n�a pas diminu�, il a augment�. Les services ne sont pas moins nombreux, ils sont plus nombreux. Les prix n�ont pas augment�, ils ont baiss�. Voil� la situation dans le milieu du commerce au d�tail.

Par cons�quent, les d�taillants ont beaucoup de mal � comprendre la n�cessit� d�un regroupement dans le secteur des services financiers. Ils ne comprennent pas pourquoi les frais de service augmentent apparemment toujours et ne diminuent jamais, et ils trouvent que l�existence d�un bon rapport solide entre le client et son banquier fait d�faut.

Il ne fait aucun doute qu�ils comprennent le march� et les raisons de la rationalisation. En l�occurrence, ils ont du mal � les accepter, et ils me paraissent avoir tout � fait raison. Ils vivent dans un milieu concurrentiel. Ils comprennent pourquoi il faut prendre ces d�cisions, mais ils ne comprennent pas sur quoi sont fond�es les d�cisions qui sont prises � l�heure actuelle.

Le s�nateur Kroft: Pensez-vous qu�il faudrait imposer des restrictions � l�ouverture et � la fermeture des succursales des institutions financi�res?

Mme Brisebois: Dans l�ensemble, nos d�taillants disent que non. Ils sont toujours extr�mement r�ticents � proposer des mesures l�gislatives pour prot�ger un march�, par exemple. Toutefois, ils ne sont pas convaincus que les raisons pour lesquelles les institutions financi�res ferment des succursales sont toujours bonnes. Je pense que c�est l� que se situe le dilemme. Mais, d�apr�s les discussions que j�ai eues � et, monsieur Morrison, n�h�sitez pas � intervenir �, je ne crois pas que nos membres seraient en faveur d�une loi quelconque qui forcerait les institutions financi�res � maintenir certaines succursales ouvertes.

M. Morrison: Je pense qu�� cet �gard, nous devons �galement tenir compte du fait que les d�taillants ne peuvent pas traiter du jour au lendemain avec une autre banque si leur succursale ferme ses portes.

Il y a plusieurs choses � faire pour changer de banque. Il faut signer des formulaires pour ouvrir de nouveaux comptes. La nouvelle institution financi�re, s�il y en a, en fait, une autre sur place, doit se familiariser avec les ant�c�dents de l�entreprise pour transf�rer les lignes de cr�dit existantes. Il faut transf�rer les comptes et les services �lectroniques. Il y a de nombreux d�tails comme l�impression de nouveaux ch�ques portant le nom de la nouvelle institution financi�re. Les d�taillants ne sont donc pas oppos�s � la fermeture des succursales, mais ils ont certainement besoin de temps pour faire les ajustements n�cessaires.

Le s�nateur Kroft: En d�autres termes, m�me si vos membres n�appr�cient pas l�ing�rence dans le fonctionnement du march� et ne seraient pas d�accord pour qu�on refuse � une banque le droit de fermer une succursale, trouveriez-vous acceptable qu�il y ait des r�gles concernant les pr�avis?

Mme Brisebois: Il est certain qu�ils seraient en faveur de toute r�gle leur permettant de continuer � g�rer leur entreprise de fa�on efficace. Je pense que l�important � cet �gard est que nous encourageons un accroissement de la concurrence.

Le s�nateur Kroft: N�est-ce pas ce que M. MacKay dit qu�il consid�re le plus important?

Mme Brisebois: Oui. Nous sommes toutefois d�accord avec le groupe qui a comparu avant nous. Ses recommandations sont int�ressantes et encourageantes, mais elles ne sont pas tr�s concr�tes.

M. Morrison: La r�ponse � cette question d�pend �galement dans une large mesure des autres options dont un d�taillant dispose localement. Par exemple, il lui est tout simplement impossible de fermer un magasin chaque jour entre 10 heures et 16 heures pour couvrir les nombreux kilom�tres qui le s�parent d�une nouvelle banque afin d�y faire son d�p�t quotidien d�esp�ces et de ch�ques. C�est un aspect pratique, surtout s�il n�y a pas d�autres possibilit�s sur place pour ce d�taillant.

Le s�nateur Oliver: Une des choses que, je crois, vous dites tous deux est que ces changements modernes sont merveilleux, mais que la technologie ne r�pond pas encore aux besoins des d�taillants en mati�re de services bancaires locaux.

Il est certainement merveilleux d�avoir toutes ces nouvelles cha�nes sp�cialis�es qui n�ont pas une grosse infrastructure et offrent des services meilleur march�, mais quand on voit toutes les choses dont les petits d�taillants continuent d�avoir besoin chaque jour et chaque semaine, la technologie n�est pas encore � la hauteur. Elle n�assure pas la protection des renseignements personnels, la s�curit�, la rapidit� des transactions ni le contact personnel. Votre intervention est donc extr�mement importante. Avant de recevoir le rapport du groupe de travail MacKay, notre comit� a eu l�occasion de se rendre en Europe, au Royaume-Uni, en Hollande, en Suisse, ainsi qu�aux �tats-Unis, � Washington et � New York. Nous avons appris beaucoup de choses qui nous sont utiles, et j�aimerais vous en mentionner quelques-unes pour voir si, d�une fa�on ou d�une autre, le Conseil canadien du commerce de d�tail pourrait tirer profit de certains de ces nouveaux changements.

Aux �tats-Unis, General Electric et Ford, qui sont des institutions non bancaires non r�glement�es, sont maintenant deux des plus grosses soci�t�s de services financiers. GE est en forte expansion en Europe et au Japon et fait directement concurrence aux fournisseurs locaux de services financiers.

Au Royaume-Uni, nous avons m�me constat� que Sainsbury�s, Marks & Spencer, et Tesco, entreprises bien connues, encaissent des d�p�ts et accordent �galement des pr�ts � leurs clients � l�int�rieur m�me de leurs magasins. En fait, une de ces soci�t�s a accumul� 2 milliards de livre de d�p�ts en un an seulement. C�est un �norme succ�s pour elle.

Nous voyons maintenant au Canada beaucoup d�entreprises sp�cialis�es qui ciblent �galement les march�s des cartes de cr�dit, des hypoth�ques et du cr�dit-bail pour certains types d��quipement. La diminution du co�t de la technologie est �videmment � l�origine de l�augmentation du nombre des fournisseurs sp�cialis�s de services financiers.

Que pensez-vous du r�le que jouent les organisations non r�glement�es sur le march� financier du Canada et d�ailleurs et que peut faire le Conseil pour en faire profiter tous vos clients, les petits magasins?

M. Morrison: Dans les r�ponses � notre sondage, nous constatons d�j� clairement que les organisations de financement sp�cialis�es jouent un certain r�le, particuli�rement nos grandes soci�t�s de vente au d�tail, qui cherchent activement � r�pondre � certains besoins de financement des immobilisations. Elles jouent donc ce r�le.

Les soci�t�s �mettrices de cartes de cr�dit, par exemple GE, que vous avez mentionn�e, et Capital One, qui sont actives � l�ext�rieur du Canada, et celles qui le sont au Canada, y compris Capital One et MBNA, ne fournissent aucun service aux d�taillants. En fait, nous nous demandons si ces sortes d�organisation vont r�ellement entrer dans ce secteur ou y voient un int�r�t.

Le s�nateur Oliver: Pouvez-vous �tre plus pr�cis? Quel est le service que MBNA et Capital One n�offrent pas aux d�taillants? Qu�est-ce que ces soci�t�s omettent de faire? Que voudriez-vous qu�elles vous proposent d�autres?

M. Morrison: Dans le secteur des cartes de cr�dit, il y a deux choses diff�rentes: l�une est l��mission de cartes au consommateur et l�autre, la r�ception des transactions r�alis�es avec ces cartes chez les d�taillants et le d�p�t des montants correspondants pour les d�taillants.

Ces soci�t�s ne fournissent pas ce service aux d�taillants ni, en fait, pour le moment � aucune autre entreprise qui accepte des cartes. Elles �mettent des cartes de cr�dit pour les consommateurs, mais elles n�acceptent pas les transactions pour le moment. Rien ne les emp�che de le faire. Nous n�avons simplement rien constat� qui montre qu�elles commencent � le faire.

M�me en Asie, il y a des organisations, y compris certaines des grandes banques des �tats-Unis comme Citibank, qui sont tr�s actives pour ce qui est de l��mission de cartes de cr�dit. Elles voient qu�elles peuvent gagner de l�argent en traitant avec les consommateurs, mais pas n�cessairement en se dotant d�une infrastructure utilisable pour les transactions effectu�es chez les d�taillants, et elles n�ont pas investi dans la technologie n�cessaire pour cela.

Le s�nateur Kroft: Pourriez-vous �tre un petit peu plus pr�cis, afin que je sois s�r de bien comprendre ce que vous voulez dire?

M. Morrison: Comme je l�ai dit, il y a deux choses diff�rentes dans le domaine des cartes de cr�dit, si je peux m�exprimer ainsi. D�une part, il s�agit d��mettre les cartes aux consommateurs, de tenir les comptes des d�tenteurs de carte, de leur fournir des �tats de compte et de gagner de l�argent sur les sommes qu�ils empruntent.

De l�autre c�t�, il y a des organisations qui disent aux d�taillants: �Je vais prendre en charge les transactions r�alis�es au moyen d�une carte de cr�dit � partir des terminaux install�s sur votre comptoir. Je m�occuperai de l�autorisation de ces transactions en entrant en contact avec l�organisation �mettrice.

En fin de journ�e, je cr�diterai votre compte du montant des transactions r�alis�es avec une carte de cr�dit dans votre magasin.�

Il y a une s�paration tr�s nette entre ces deux c�t�s, non seulement au Canada, mais �galement dans la plupart des autres pays. En fait, cette s�paration est plus apparente aux �tats-Unis qu�au Canada.

Le s�nateur Tkachuk: Pourriez-vous nous en dire davantage au sujet des frais encourus et de la concurrence � cet �gard entre Visa, American Express et Diners Club, par exemple?

M. Morrison: Oui. L� encore, cela concerne l�aspect �mission des cartes de cr�dit. L�organisation fournissant un service � un d�taillant pr�l�ve aupr�s de lui ce qu�on appelle des frais d�escompte, c�est-�-dire un pourcentage du total des achats dont l�organisation d�pose chaque jour le montant. Ce pourcentage se situe entre 1,5 p. 100 et un peu plus de 4 p. 100 pour toutes les cartes. Il y a des diff�rences entre elles, mais les chiffres se situent g�n�ralement dans cette fourchette.

Il y a �galement d�autres frais, par exemple pour le versement du d�p�t dans le compte; c�est un montant forfaitaire. Le principal revenu de ces organisations est l�escompte, ce qu�on appelle le taux d�escompte.

Le s�nateur Tkachuk: Est-ce qu�American Express donne maintenant l�argent au moment du d�p�t ou devez-vous encore attendre un moment? Avec Visa et MasterCard, vous faites le d�p�t et c�est r�gl�, n�est-ce pas? Est-ce qu�American Express et Diners Club offrent maintenant ce service le jour o� le d�p�t est fait?

M. Morrison: Toutes ces soci�t�s font des progr�s et agissent maintenant plus rapidement, mais ce n�est toujours pas le m�me jour. Toutefois, il y a des exceptions. Si vous �tes un bon n�gociateur inflexible, si votre volume de transactions est suffisant et si vous acceptez un nombre suffisant de leurs cartes, vous recevrez le cr�dit le m�me jour, si c�est ce que vous voulez.

Le s�nateur Oliver: Monsieur Morrison, je vous ai coup� la parole au moment o� vous r�pondiez en fait � ma question principale. N�h�sitez pas � terminer cette r�ponse si vous le voulez, puis j�aimerais poser une question au sujet des caisses populaires.

Parlez-nous des pays europ�ens et des soci�t�s et des cha�nes de supermarch� qui offrent des services bancaires dans leurs locaux.

Mme Brisebois: Vous pourriez faire la comparaison avec ce qui se passe chez Loblaws et Wal-Mart.

M. Morrison: Il y a des organismes de m�me nature qui sont form�s au Canada, des alliances entre la Banque Canadienne Imp�riale de Commerce et Loblaws ainsi qu�entre la Banque Toronto-Dominion et Wal-Mart.

Le s�nateur Oliver: Cela n�est-il pas dans votre int�r�t?

M. Morrison: C�est certainement dans l�int�r�t du consommateur pour ce qui est de la prestation de services, et c�est certainement dans l�int�r�t des institutions financi�res, parce que cela augmente le nombre de leurs guichets et r�duit la fr�quentation de leurs succursales.

On ne sait pas encore tr�s bien dans quelle mesure cela sera, en fait, dans l�int�r�t des d�taillants. Dans notre sondage, plus de 60 p. 100 des petits d�taillants ont dit qu�ils trouveraient int�ressant d�examiner la possibilit� d�utiliser un gros d�taillant pour certains services, comme l�obtention du volume quotidien ou hebdomadaire de pi�ces n�cessaire pour rendre la monnaie au consommateur, ou peut-�tre m�me effectuer des d�p�ts. Mais pour que les d�taillants grands ou petits puissent obtenir les services �lectroniques dont ils ont besoin � c�est-�-dire Interac ou les cartes de d�bit, ou les autorisations de cartes de cr�dit �, il faudrait qu�ils aient acc�s au r�seau �lectronique dont parle le groupe de travail. Toutefois, il y a des restrictions qui s�y appliquent, m�me si la d�cision du Tribunal de la concurrence a impos� une certaine ouverture.

En fin de compte, ces restrictions forceraient un d�taillant � constituer une sorte d�organisme de service financier pour pouvoir participer � cela, ce qui n�cessite �videmment des frais initiaux, m�me s�il est possible que l�investissement requis � cette fin puisse diminuer. La constitution d�un holding pourrait permettre une sorte d�alliance. Mais il reste des probl�mes � surmonter pour que certains d�taillants puissent fournir ces services aux petits d�taillants.

Le s�nateur Oliver: � la page 17 de votre rapport, vous mentionnez plusieurs choses qui constituent, en fait, des lacunes dans le rapport du groupe de travail MacKay pour ce qui est des besoins quotidiens actuels des d�taillants. Les questions que vous avez soulev�es ne sont pas des questions concernant la politique gouvernementale auxquelles nous pouvons r�pondre; en r�alit�, elles n�cessitent un examen beaucoup plus approfondi.

Je suppose qu�il y a implicitement dans ce que vous dites l�espoir qu�avant la r�alisation de fusions massives, et cetera., il y aura quelque chose en place gr�ce � quoi les petits d�taillants pourront �tre prot�g�s tout en trouvant un moyen de satisfaire leurs besoins fondamentaux sur le plan bancaire. Est-ce exact?

Mme Brisebois: Oui. Et je dirai que les besoins des petits d�taillants sont tr�s semblables � ceux de la plupart des petites entreprises de l�ensemble du pays. � part certains services sp�cialis�s qui sont n�cessaires pour eux � cause de la nature de leurs activit�s, je pense que leurs pr�occupations sont tr�s semblables � celles de la plupart des petites entreprises de notre pays, et une pr�occupation importante est l�acc�s au service dans la zone qu�ils desservent.

Le s�nateur Oliver: En tant que Conseil canadien du commerce de d�tail, qui est une organisation nationale, pensez-vous que les caisses populaires devraient ou non pouvoir combler une bonne partie de ce vide si on leur donnait un peu plus de possibilit�s d�expansion?

Mme Brisebois: Il ne fait aucun doute que nous sommes en faveur de cela. Mais les questions qu�il faut se poser sont les suivantes: premi�rement, sont-elles pr�tes � investir pour offrir les services qu�offrent maintenant les institutions financi�res et, deuxi�mement, y aura-t-il un r�seau national? C�est une autre chose tr�s importante.

Ce que je voudrais dire est que cela ne s�applique pas seulement aux petites entreprises. Le rapport explique �galement comment les cha�nes de taille moyenne fonctionnent dans l�ensemble du Canada. Au niveau local, leur fonctionnement est tr�s semblable � celui des petits d�taillants. Elles ont besoin du tr�sor de nuit, des services de change, de pi�ces de monnaie, et cetera.

Il est important de comprendre que les recommandations que nous faisons ne r�pondent pas seulement aux besoins des commer�ants ind�pendants. En fait, dans notre �tude, nous avons remarqu� que la plupart de nos d�taillants, � l�exception de quatre ou cinq tr�s grosses entreprises, fonctionnent de la m�me fa�on dans tous les march�s. Ils ont des rapports tr�s �troits avec leur succursale.

Le s�nateur Oliver: Vous avez tous deux mentionn� les pi�ces de monnaie. J��tais aux �tats-Unis il y a 15 jours dans un supermarch� � Atlanta. Il y avait une machine qui encourage les gens � apporter les pi�ces qu�ils ont dans leur tirelire � la maison pour les �changer contre des billets. Le supermarch� prend une commission de 2 � 3 p. 100 pour ce service. La plupart des gens mettent leurs pi�ces, prennent les billets et vont ensuite faire leurs achats, mais la machine fournit �galement des pi�ces. C�est quelque chose que nous devrions envisager de faire ici au Canada.

Mme Brisebois: Permettez-moi simplement d�ajouter que les d�taillants sont tr�s novateurs et qu�un chiffre de 2 ou 3 p. 100 constitue un bon rapport. Toutefois, ces types de services risquent simplement d�encourager les institutions financi�res � transf�rer au niveau du magasin de vente au d�tail un grand nombre des services qu�elles fournissent actuellement au public. Je pense que nous devons examiner la prestation de ces services et nous assurer que cela ne cr�e pas, en fait, une concurrence d�loyale � l�int�rieur d�un certain march�.

Il est hors de doute qu�un nombre de plus en plus grand de ces services financiers seront offerts par les principaux d�taillants. Cela se fait d�j� au Canada et peut �tre extr�mement utile dans les petites localit�s. C�est une solution �ventuelle que nous ne rejetons pas. Mais, l� encore, certains services que les d�taillants ne peuvent pas fournir doivent �tre fournis par les institutions financi�res.

Le s�nateur Austin: J�ai une question br�ve, qui est r�ellement une sorte de remarque. La plupart des banques qui existent aujourd�hui sont n�es pour r�pondre aux besoins des producteurs commerciaux et des d�taillants au XIXe si�cle.

Apr�s vous avoir �cout� et avoir lu votre m�moire, je suis tent� de vous demander pourquoi vous ne cr�ez pas une banque du Conseil canadien du commerce de d�tail, qui fournirait des services aux d�taillants de la fa�on que vous souhaitez, parce que votre secteur a, collectivement, les moyens financiers de le faire. Y a-t-il quelque chose qui vous en emp�che?

Mme Brisebois: Je devrais vous demander de joindre votre signature � la mienne sur la demande. Oui, je pense que nous serions tout � fait d�accord avec vous.

Toutefois, en r�alit�, il y a des limitations et des contraintes. Cela ne serait certainement pas possible aujourd�hui. Je pense que M. Morrison pourrait vous donner plus de renseignements au sujet des �l�ments pr�cis qui nous emp�cheraient de le faire maintenant.

Le s�nateur Austin: Le groupe de travail veut qu�il y ait davantage de concurrence et davantage d�activit�s de second niveau. Nous formulons bien entendu toutes nos questions pour d�terminer comment on peut promouvoir la concurrence. J�insiste donc r�ellement pour que vous me disiez pourquoi vous ne cr�eriez pas votre propre institution financi�re pour veiller � vos propres int�r�ts?

M. Morrison: La r�glementation n�est peut-�tre pas ce qu�il est le plus facile de modifier, mais elle peut certainement l��tre pour que cela puisse se faire.

La page 37 du �Document d�information no 1� du groupe de travail montre la r�partition des actifs des institutions financi�res, et, bien entendu, les grandes banques se situent en haut de l��chelle.

Nous avons un syst�me qui a prosp�r� pendant de longues ann�es en b�n�ficiant d�une grande protection. L�id�e que les d�taillants mettent en place une infrastructure de ce type est une notion int�ressante qui m�rite discussion, mais il faut du temps pour faire un investissement de ce genre, pour obtenir une approbation, en fait, et pour acqu�rir une part du march� suffisante pour qu�une banque du Conseil canadien du commerce de d�tail rapporte de l�argent. C�est r�alisable, mais une p�riode d�ajustement est certainement n�cessaire quand on passe d�un syst�me dont l�expansion a eu lieu en b�n�ficiant d�une forte protection � un syst�me o� des entreprises pourraient cr�er des organisations de cette nature. Il y a �galement des co�ts � assumer.

Bien entendu, les avantages fiscaux qui lui seraient octroy�s initialement sont �galement attrayants si, en fait, ils pouvaient se concr�tiser.

Le s�nateur Austin: Quel rapport y a-t-il entre les structures de propri�t� et les cr�ations d�institutions nouvelles?

M. Morrison: Il y a des organisations qui ont des structures de propri�t� sans limitations strictes. Si une organisation comme la banque du Conseil canadien du commerce de d�tail connaissait un grand succ�s, elle se heurterait � des obstacles � certains niveaux et, � ce moment-l�, elle serait contrainte de modifier sa structure de propri�t� pour pouvoir continuer.

Le s�nateur Austin: N�aimeriez-vous pas en �tre l� maintenant, confront� � cet obstacle de 5 milliards de dollars?

Mme Brisebois: Oui.

M. Morrison: Oui. Vous pouvez dire oui.

Mme Brisebois: J�ai dit oui.

Le pr�sident: Mes questions portent sur deux domaines, les cartes de cr�dit et les paiements �lectroniques. � la page 17 de votre rapport, vous dites que vous �tes contre la dualit�.

Pourquoi? Pourriez-vous d�abord, en une phrase ou deux, expliquer de quoi il s�agit, parce que beaucoup de t�l�spectateurs ne comprennent peut-�tre pas r�ellement ce que c�est.

M. Morrison: On parle de dualit� quand une banque g�re deux cartes de cr�dit concurrentes, par exemple Visa et MasterCard. Ces deux cartes seraient offertes par la m�me entreprise, � la diff�rence de la situation actuelle o� la Banque Royale a Visa et la Banque de Montr�al, MasterCard, par exemple.

M. Morrison a expliqu� tout � l�heure que, quand les d�taillants acceptent des cartes de cr�dit dans leurs magasins, ils paient �galement des frais � la banque qui g�re cette carte. Dans le contexte actuel, la carte MasterCard est offerte � un prix plus concurrentiel que Visa.

Ce qui pr�occupe le plus nos membres est que, si ces deux cartes se retrouvent g�r�es par la m�me banque, rien ne donne � penser que les frais que les commer�ants doivent payer pour Visa baisseraient; au contraire, nous pensons qu�ils augmenteraient pour MasterCard et atteindraient le niveau actuel des frais de Visa.

Par exemple, nos membres paient, par l�entremise du programme de notre conseil, approximativement 1,45 p. 100 pour MasterCard et 1,8 p. 100 pour Visa. Ils ne croient pas que, si ces deux cartes �taient g�r�es ensemble, le taux factur� pour Visa baisserait � 1,45 p. 100; il est plut�t probable que c�est le contraire qui se passerait.

Il y a �galement une question de concentration du march�. Ces deux banques ne sont pas les seules � offrir MasterCard ou Visa, mais elles auraient probablement la plus forte concentration si cela se produisait.

Le pr�sident: Avez-vous exprim� ce point de vue au Bureau de la concurrence?

M. Morrison: Oui.

Le pr�sident: Je vais maintenant passer en revue une s�rie de commentaires que vous avez faits au sujet du syst�me de paiement �lectronique, parce que je ne sais pas tr�s bien combien d�entre eux concernaient des questions d�int�r�t public et combien, des probl�mes techniques.

Le premier est au bas de la page 22 et en haut de la page 23. Vous dites, en gros, que quand le syst�me Interac est en panne, les d�taillants ont besoin d�une autre fa�on de traiter les transactions. Vous proposez diverses solutions, mais votre probl�me n�a pas encore �t� r�solu de fa�on satisfaisante. Ai-je raison de supposer que ce n�est pas une question d�int�r�t public, mais un diff�rend entre deux entreprises? Vous ne vous attendez pas � ce que le gouvernement puisse faire quelque chose pour vous aider � r�soudre ce probl�me, n�est-ce pas?

M. Morrison: Chercher � trouver avec l�organisation d�Interac une solution pratique autre que les ch�ques ne constitue pas directement un probl�me d�int�r�t public. Mais, qu�il s�agisse de l�autorisation �lectronique des cartes de cr�dit ou de la machine qui accepte les pi�ces � la quelle le s�nateur a fait r�f�rence, une fois qu�on a acquis une certaine d�pendance � l��gard de ce genre de technologie, c�est peut-�tre le cas.

Le pr�sident: En d�autres termes, ce n�est pas le cas actuellement, mais cela pourrait l��tre ult�rieurement si vous ne pouvez pas r�soudre l�autre probl�me.

M. Morrison: On s�attend � ce que plus de deux milliards de transactions soient r�alis�es chaque ann�e au moyen du r�seau Interac d�ici la fin de l�an 2000. Il y aura aujourd�hui �galement un milliard de transactions �lectroniques avec une carte de cr�dit, et il y a la gestion de l�encaisse. On est donc proche du stade o� Interac devient un service public r�pondant � des crit�res tr�s pr�cis et tr�s stricts, dans l�int�r�t non seulement des d�taillants, mais �galement de leurs clients, qui se pr�sentent � la caisse en s�attendant � ce que leur carte fonctionne et qui n�ont souvent pas d�autres moyens de paiement.

Bien entendu, si les clients utilisent un guichet automatique, en supposant qu�il y en a un sur place, pour obtenir de l�argent, ils constatent g�n�ralement qu�il est �galement hors-service ou ne fonctionne pas, parce que c�est le m�me syst�me.

Le pr�sident: Puis-je donc en conclure qu�aux fins des pr�sentes audiences, vous n�attendez rien de nous pour le moment, mais que ce sera peut-�tre le cas dans un avenir relativement rapproch�? Est-ce que je r�sume correctement vos propos?

M. Morrison: Oui.

Le pr�sident: Il y a quelque chose en haut de la page 24 que, franchement, je ne comprends tout simplement pas. Vous parlez du fait que, suite � la d�cision rendue en 1996 par le Bureau de la concurrence au sujet d�Interac, les soci�t�s concurrentes non financi�res ont �t� autoris�es � offrir leurs services. En fait, c�est ce qu�elles ont fait, ce qui a eu des r�percussions sur les taux. Mais, dans un certain sens, les d�taillants ne sont apparemment pas autoris�s � fournir des services en tant qu�institutions non financi�res. Est-ce le probl�me?

M. Morrison: L�arr�t du Bureau de la concurrence a permis � d�autres soci�t�s d�offrir le service Interac, comme vous l�avez dit, et il y a davantage de concurrence dans ce domaine. Mais, si je suis un fournisseur de services qui s�adresse aujourd�hui � un d�taillant pour lui offrir le service Interac, je peux lui dire que je vais prendre en charge toutes ses transactions Interac. Je peux �galement prendre en charge et traiter �lectroniquement toutes ses transactions Visa et MasterCard, mais je ne peux pas faire les d�p�ts dans son institution financi�re pour les transactions Visa et MasterCard. Je ne peux pas devenir ce qu�on appelle un acqu�reur de ces transactions. Je peux seulement en traiter une partie.

Le pr�sident: C�est exact. C�est parce que l�acqu�reur doit faire partie du syst�me de paiement et doit donc �tre une institution financi�re.

M. Morrison: Ce sont les r�gles des soci�t�s MasterCard et Visa.

Le pr�sident: Cette question concerne-t-elle MasterCard et Visa ou l�Association canadienne des paiements?

M. Morrison: Un peu les deux, mais, � l�heure actuelle, les cartes de cr�dit ne sont pas incluses dans ce qui est couvert par l�Association canadienne des paiements; elles sont en dehors.

Le pr�sident: C�est donc une question qui concerne l�Association canadienne des paiements?

M. Morrison: Les cartes de cr�dit n�ont rien � voir avec la question du syst�me de paiement.

Le pr�sident: C�est exact. Je d�crirais les cartes de cr�dit comme un mode de paiement. Mais cela m�ne logiquement � vos commentaires, � la page 26, o� vous utilisez l�expression �libert� d�acc�s� en ce qui concerne le fait de fournir non seulement les services de Visa et de MasterCard, mais �galement l�acc�s direct aux services de compensation et de r�glement. Peut-�tre devrions-nous parler de cela pendant une minute. C�est ce que le Conseil demande depuis des ann�es. Il ressort, de fa�on g�n�rale, de l��tude que nous avons faite d�autres pays que cela ne se fait pas ailleurs.

Vous ajoutez que, contrairement � l�argument qu�on invoque souvent contre cela, la stabilit� du syst�me n�est nullement menac�e si on permet aux d�taillants d�avoir un acc�s direct au syst�me de paiement. Pouvez-vous nous dire s�il y a un autre pays industrialis� o� il en est ainsi maintenant? C�est-�-dire, y a-t-il un autre pays o� le syst�me de paiement a �t� ouvert � la concurrence encore plus que ne le propose le rapport MacKay pour notre syst�me, au point d�inclure l��quivalent de vos membres?

M. Morrison: Dans de nombreux pays, une des institutions financi�res membres du syst�me de paiement est, par exemple, la poste, qui est un d�taillant � de nombreux �gards. Il y a d�autres d�taillants qui ne sont pas directement membres du syst�me de r�glement, mais qui peuvent disposer d�un m�canisme, d�une ligne de cr�dit aupr�s d�une institution financi�re gr�ce � laquelle ils sont au moins en mesure de participer au traitement des transactions de fa�on un peu plus pouss�e.

Le pr�sident: Vous avez donn� l�exemple de la poste, et je pense que la r�ponse est non, il n�y a pas d�autres exemples. Penchons-nous encore sur la d�finition. Si vous ne faites pas partie du syst�me de paiement, mais du syst�me de r�glement, jusqu�� quelle �tape du traitement pouvez-vous vous en occuper et, en toute franchise, cela en vaut-il r�ellement la peine? Cela soul�ve toute une s�rie d�autres questions � propos desquelles je pense que beaucoup d�entre nous auraient de vives pr�occupations. Pour le moment, ne nous soucions pas de savoir si c�est une bonne politique d�int�r�t g�n�ral. Est-ce m�me r�aliste? Je ne vois pas ce que vous gagnez en en faisant un peu plus.

M. Morrison: En tant que d�taillant, non, ce n�est pas la question. Les d�taillants pourraient �tre ces nouveaux concurrents; ils pourraient constituer la banque du Conseil canadien du commerce de d�tail. Ils pourraient faire comme Sainsbury�s ou Tesco. Les d�taillants qui feraient partie d�une alliance de ce type ou qui participeraient � la structure d�une institution financi�re de ce type devraient alors avoir acc�s � un syst�me de paiement. C�est dans ce contexte que nous l�envisageons.

Le pr�sident: Prenons votre exemple, Sainsbury�s, ou celui de Mme Brisebois, Wal-Mart. Dans un tel cas, l�acc�s au syst�me de paiement ne fait aucun doute, puisque l�institution qui g�re le service financier est alors une banque. Il se trouve qu�elle est install�e dans un magasin Wal-Mart, qu�elle a des liens avec Wal-Mart et qu�il existe m�me des rapports commerciaux. Ce qui est en jeu n�est toutefois pas l�acc�s du d�taillant au syst�me de paiement. Il s�agit seulement du lien entre un d�taillant et une institution financi�re. Le syst�me de paiement est une institution financi�re, et je ne pense pas que cela pourrait �tre emp�ch� m�me par les r�gles canadiennes actuelles.

Mme Brisebois: Non.

Le pr�sident: Vous ne demandez pas un acc�s direct, ce que j�avais compris. Puisque tout le monde fait des remarques, je vais en faire une derni�re.

Madame Brisebois, cela ne figure pas dans votre texte, mais, dans votre d�claration liminaire, vous avez, en gros, fait la d�claration suivante. Vous avez dit qu�il serait r�ellement utile et souhaitable d�examiner en d�tail les r�percussions de chacune des recommandations du rapport MacKay sur les diff�rents secteurs de l��conomie et sur les consommateurs avant de les appliquer. Je vois ce qu�il y a comme subtilit� th�orique dans ces propos. Je r�pondrai qu�en pratique, ce serait impossible � faire. Permettez-moi de vous dire pourquoi. Je donnerai mon exemple favori, celui des soci�t�s d�assurances multirisques, qui nous parlent des effets catastrophiques qui se produiraient si on autorisait les institutions de d�p�ts � vendre des assurances multirisques. Or, si nous regardons ce qui se passe dans d�autres pays ou m�me au Qu�bec, o� les caisses populaires le font depuis une dizaine d�ann�es, il semble que les courtiers d�assurance exag�rent un peu quand ils parlent d�un cataclysme. Je ne sais pas comment on pourrait pr�voir les r�percussions qu�aurait vraisemblablement une transformation des conditions du march�. Je pense qu�il faut faire une supposition r�fl�chie. Si on allait aussi loin que vous le souhaiteriez, cela entra�nerait toutefois une stagnation absolue. De surcro�t, personne ne serait jamais d�accord avec cette analyse, si bien que vous feriez tout aussi bien de porter un jugement et de passer � autre chose.

Mme Brisebois: Permettez-moi de faire une observation. On s�expose toujours � un danger quand on sait que quelqu�un �coute attentivement ce qu�on dit.

Je ne voulais pas dire que nous irions aussi loin. En fait, je pense que votre exemple est appropri�. Il y a de nombreuses donn�es au Canada, parfois au niveau des provinces, ou � l�ext�rieur du Canada qui prouvent que nombre des recommandations du groupe de travail pourraient avoir des effets positifs. Voil� ce que je voulais dire.

Nous f�licitons certainement le comit� s�natorial de s��tre rendu dans d�autres pays ainsi que dans diff�rentes provinces pour �tudier leur syst�me. L�exemple cit� tout � l�heure me para�t parfait. Je dirais que c�est ce que nous recommandons dans notre rapport. Le march� fournit de nombreuses indications. Nous esp�rons que la Chambre des communes, de m�me que le S�nat et, en fin de compte, le gouvernement auront le courage de prendre ces d�cisions sans essayer de prot�ger un march� au d�triment d�un autre.

Comme je l�ai dit, les d�taillants vivent dans un milieu tr�s concurrentiel. Ils doivent r�guli�rement s�adapter. Ils n�ont certainement jamais �t� en faveur du statu quo. Ils encouragent donc votre comit�, ainsi que le gouvernement, � relever la barre un peu plus.

Le s�nateur Kelleher: Les banques qui esp�rent pouvoir fusionner nous ont toutes fait savoir, directement ou dans les discours qu�elles ont prononc�s, qu�elles doivent agir maintenant, c�est-�-dire qu�elles commencent � manquer de temps si elles veulent rester � la hauteur de leurs concurrents et pouvoir faire face � eux dans le monde entier. Les banques disent que nous devons r�gler la question.

Par ailleurs, je regarde vos recommandations, page 32 � en particulier le num�ro 5. Je vais en faire lecture � l�intention de notre public:

Il ne faudrait pas autoriser les banques � fusionner tant que le secteur financier n�a pas �t� r�form� pour ouvrir les march�s � une concurrence plus efficace et qu�on n�a pas de preuve que cette concurrence va se concr�tiser.

D�une certaine fa�on, ceci est dans le prolongement des observations du s�nateur Kirby. Prenons, par exemple, la recommandation du comit� MacKay, selon laquelle une fa�on de combler le vide qui r�sulterait peut-�tre des fusions entre les banques serait d�autoriser les caisses populaires � fournir des services bancaires.

D�apr�s mon interpr�tation de votre recommandation num�ro 5 � je ne conteste pas ce que vous dites, mais, connaissant le gouvernement et la fa�on dont il proc�de pour l�gif�rer, quel que soit le parti au pouvoir �, il faudra probablement attendre environ un an avant qu�une telle loi soit promulgu�e. Vous dites ensuite:

... et [tant] qu�on n�a pas de preuve que cette concurrence va se concr�tiser.

Supposons donc que la loi existe; cela ne nous dit toutefois pas grand chose, parce que nous ne savons pas combien de caisses populaires vont offrir des services bancaires. Il faudra attendre un moment avant de voir les r�sultats. J�estime � et je pr�dis l�avenir aussi bien ou aussi mal que n�importe qui � que cela prendra environ quatre ans: deux pour la pr�sentation et l�adoption du projet de loi, et deux autres pour sa mise en oeuvre. Les banques disent que nous devons le faire maintenant, et, selon vous, il faut mettre en place une loi qui accro�tra la concurrence et attendre pour voir les r�sultats. J�aimerais entendre vos commentaires � ce sujet. Ce que vous proposez est, en quelque sorte, exactement le contraire de ce que les banques elles-m�mes souhaitent voir se produire.

Mme Brisebois: S�nateur, permettez-moi de faire un commentaire � propos de ce qui se passerait. Comme vous l�avez mentionn�, tout cela prendrait quatre ans. Pour une loi sur les services financiers, c�est tr�s rapide. Donc, nous progressons. Ce serait quelque chose de positif.

Je pense qu�il faut replacer ce commentaire dans son contexte. Il porte sp�cifiquement sur les pr�occupations des d�taillants au sujet des services fournis localement par les succursales. Je vous encouragerai certainement � placer � c�t� de ce paragraphe une note renvoyant � la page 11, parce que c�est r�ellement ce que nous voulons dire. Nous n�avons certainement pas l�intention de dire quelle forme la concurrence doit prendre dans d�autres secteurs ni qui devrait �tre pr�sent sur le march� dans des secteurs autres que celui de la vente au d�tail. Ce paragraphe porte sp�cifiquement sur les services dont nos d�taillants ont besoin dans leurs activit�s quotidiennes.

En ce qui concerne la fusion, nous �tions notamment pr�occup�s par le fait que cette nouvelle organisation serait tent�e de laisser tomber certains des services qui lui rapportent moins au profit de services de haut de gamme. En fait, ceux qu�elle consid�rerait comme des services rapportant moins sont ceux dont nos membres ont besoin quotidiennement. Nous ne savons pas s�il y aurait plusieurs options, d�autres fournisseurs en mesure de fournir ces services sur le march�, si cette grande organisation ou ces grandes organisations d�cidaient de ne plus les fournir. Je ne sais pas si je me fais bien comprendre. Je pourrais peut-�tre vous donner quelques exemples.

Le s�nateur Kelleher: Je pense que je comprends ce que vous voulez dire, permettez-moi donc de vous poser directement une question. Pensez-vous qu�avant d�autoriser les fusions, il faudrait qu�il existe une loi autorisant d�autres formes de concurrence? Dans l�affirmative, pendant combien de temps devrait-elle �tre appliqu�e avant la r�alisation des fusions?

Mme Brisebois: C�est une question � laquelle il est difficile de r�pondre.

Le s�nateur Kelleher: Je le sais. Je ne connais pas la r�ponse, mais je pensais que vous auriez peut-�tre une suggestion � faire.

Mme Brisebois: Si j�avais la r�ponse, je ne serais peut-�tre pas l�. Il faudrait que je fasse la part des choses et vous dise que, dans certains cas, selon les services que nous examinons, ceux qui doivent �tre fournis, une loi serait peut-�tre n�cessaire pour garantir que quelqu�un fournisse ce service. Par ailleurs, il y a les forces naturelles du march�, et nous ne consid�rons pas la voie l�gislative comme la solution � tous nos maux ou tous nos probl�mes.

Le message que nous essayons de transmettre dans ce paragraphe et, en fait, dans l�ensemble de notre m�moire est que nous n�encourageons pas la recherche d�une solution l�gislative comme moyen d�atteindre un certain r�sultat, mais qu�il est important de se rendre compte que nombre des services dont les consommateurs et les d�taillants canadiens ont besoin quotidiennement n�cessitent une certaine forme de protection pendant cette transition ou cette restructuration. Si une loi est n�cessaire pour cela, qu�il en soit donc ainsi. Sinon, alors tant mieux.

[Fran�ais]

Le s�nateur Hervieux-Payette: On nous a dit que le taux d�utilisation pour le consommateur des guichets automatiques des banques actuellement �tait de 60 p. 100. Dans votre m�moire, vous mentionnez qu�environ 15 p. 100 des consommateurs utilisent la carte Interac. Les guichets automatiques ont servi les int�r�ts des banques en r�duisant leurs co�ts d�op�rations. Comment se fait-il que l�implantation de la carte Interac soit aussi lente? Comme consommateur, j�aimerais l�utiliser pour chaque transaction, sauf que les frais sont tellement �lev�s que j�attends de faire une transaction substantielle pour l�utiliser, c�est-� dire qu�en bas de 100 dollars, je trouve que c�est un vol. Cela m�oblige donc � faire un retrait � la banque.

Est-ce que collectivement votre organisme pourrait n�gocier ce service? On pourrait alors r�duire l�utilisation de la monnaie. Cela serait une solution pour les sous noirs quui deviendraient une pi�ce de collection. J�ai l�impression qu�il y a un frein quelque part et qu�il n�est pas dans l�int�r�t des banques d�implanter cela � la m�me vitesse qu�ils ont implant�es les guichets automatiques. Qui � le r�le de de pousser dans le dos des banques pour que ce service soit disponible � des prix abordables? Est-ce que ce n�est pas un organisme comme le v�tre? Quels seraient les m�canismes qui pousseraient dans le dos des institutions financi�res pour que l�utilisation de cette carte soit plus r�pandue?

Mme Diane Brisebois: Vous mentionnez que cette carte devrait �tre plus r�pandue sp�cifiquement dans les magasins de d�tail. La r�alit� aujourd�hui est que le petit marchand qui offre la carte de d�bit � n�oubliez pas que ce marchand vous offre la carte Visa et la carte MasterCard, le paiement par ch�que ou par argent � cela lui co�te en moyenne 35 $ par mois pour louer la machine et approximativement entre 12 et 15 sous par transaction. Alors, non seulement devriez-vous payer le marchand mais lui-m�me doit payer des frais � la banque. Le troisi�me co�t, est celui de la ligne de communication, c�est-�-dire une ligne de t�l�phone pour utiliser le syst�me.

Comme vous le savez, 50 p. 100 des employ�s qui travaillent au niveau du d�tail sont � temps partiels. Il y a donc un roulement continuel du personnel. � cela s�ajour un co�t r�el pour les marchands afin de s�assurer que les employ�s soient bien inform�s.

Le Conseil canadien du commerce au d�tail fait �norm�ment de lobbying aupr�s des banques pour s�assurer la baisse des co�ts. Il semble que le conseil n�a pas remport� de succ�s � ce jour. Je ne suis pas certaine que ce soit le r�le du Conseil canadien du commerce de d�tail. Je pense que ce soit plut�t le r�le d�un comit� comme celui-ci qui pourrait nous aider afin qu�il y ait beaucoup plus de comp�tition dans le march�. Cela s�en vient tranquillement. Mais encore on sait, quand on regarde les profits chez les banques, que les frais pour ces services repr�sentent un aspect tr�s important. Il est difficile, d�une journ�e � l�autre, de d�cider si oui ou non on devrait charger pour ce genre de transaction. Je pense que c�est une question de lobbying pour les marchands, les communaut�s et les consommateurs.

Le s�nateur Hervieux-Payette: Quand vous parlez des frais de service de 35 $ par mois, est-ce que ces frais sont allou�s pour la l�achat ou la location de l��quipement ou simplement l�utilisation du service?

Mme Brisebois: Jusqu�� tout r�cemment, les marchands devaient louer ces machines par l�entremise d�une banque. Depuis un certain temps, ils peuvent acheter la machine et ils sont responsables dut maintien de la machine. La plupart de nos petits marchands louent la machine par l�entremise de leurs banques et c�est en fait un co�t de location de 35 $ par mois. Deuxi�mement, il y a le co�t de chaque transaction. Troisi�mement, le co�t de la communication et la formation. Finalement, les co�ts pour le compte.

Le s�nateur Hervieux-Payette: Dans leur volont� de servir le public canadien, cette priorit� est peut-�tre plus �lev�e pour vos membres qu�elle ne l�est pour les banques?

Mme Brisebois: Oui, s�nateur.

Le s�nateur Hervieux-Payette: Le gouvernement exige que les institutions financi�res contribuent � des projets communautaires. Certaines personnes disent que les banques ne seront pas trait�es sur un pied d��galit�. Donc, cela implique un co�t, et un impact pour tous les utilisateurs, parce que s�ils vont donner des argents, il est �vident que ce n�est pas la banque et les actionnaires qui vont payer. Mais �ventuellement, le consommateur va recevoir la facture. Avez-vous �tudi� cette partie du rapport o� il est mentionn� que chaque ann�e, par la l�gislation, le secteur financier est oblig� de contribuer au secteur communautaire? Trouvez-vous que c�est une id�e qu�il faut favoriser et supporter?

Mme Brisebois: La question n�a pas �t� pos�e directement. J�ai abord� le sujet avec un des s�nateurs un peu plut�t. C�est ambigu, parce que nos membres vivent dans un march� libre. S�ils favorisent la comp�tition des institutions financi�res, ils croient qu�on ne devrait pas obliger les institutions financi�res � promouvoir certains projets. Il nous semble que ce sont des projets communautaires importants. Nous encourageons ce genre d�appui au sein de la communaut�. Mais si l�on sugg�re des lois pour s�assurer que cela se fasse, nous ne sommes pas d�accord.

Le s�nateur Hervieux-Payette: Est-ce que certains de vos membres font de la vente par la poste via Internet?

Mme Brisebois: Nous repr�sentons plusieurs formats. Plusieurs de nos membres, les membres qui ont le �brick and motor� ont Internet, on conna�t le catalogue.

Le s�nateur Angus: Madame Brisebois, je vous souhaite la bienvenue. Que voulez-vous dire par le statu quo. Si j�ai bien compris votre t�moignage, vos membres vous ont dit que le statu quo n�est pas suffisant. Les repr�sentants des banques ont comparus et nous ont dit que le statu quo n�est pas acceptable. Je pense qu�ils veulent dire quelque chose de diff�rent de ce que vos membres vous ont dit. Pouvez-vous nous expliquer quel statu quo n�est pas acceptable?

Mme Brisebois: Au sens g�n�ral du terme statu quo, je pense que nos membres nous donnent la m�me d�finition que celle des institutions financi�res. Pourtant, quand nos membres discutent du statu quo, ils discutent sp�cifiquement de la nature de la comp�tition du march� canadien. D�apr�s leur r�alit� et leur exp�rience journali�re, nos membres nous disent qu�on doit changer continuellement, on doit �tre � la fine pointe, on doit comprendre nos consommateurs et on doit r�pondre � leurs besoins. Il n�est pas de mon ressort de dire au consommateur ce qu�il ou ce qu�elle doit acheter. Je dois �tre � la fine pointe et je dois comprendre les changements du march�. Par l�entremise de notre m�moire, nos membres nous disent qu�ils ont l�impression que les institutions financi�res ne sont pas rest�es � la fine pointe des demandes du consommateur et des clients en g�n�ral. Voici le contexte du statu quo.

Le s�nateur Angus: Si j�ai bien compris, pour vous, il y a actuellement beaucoup de comp�tition dans le march� et il y a toujours de la place pour plus de comp�titions. D�apr�s le rapport MacKay, on nous dirige vers d�autres moyens d�augmenter la comp�tition dans le march�. Si j�ai bien compris votre m�moire, vous conseillez la prudence afin qu�on ne proc�de pas trop vite � l�adoption des mesures mentionn�es dans le rapport MacKay?

Mme Brisebois: Jusqu�� un certain point s�nateur. J�ai mentionn�, lors de nos discussions avec le s�nateur Kirby, qu�il faut rester r�aliste. Nous pensons qu�il y a beaucoup de preuve sur le march� canadien ou a l�ext�rieur pour faciliter de bonnes d�cisions. Nous encourageons beaucoup les recherches et les �tudes. Nous n�allons pas plus loin. Nous sugg�rons qu�il faut s�assurer d��tre bien inform� avant de prendre la d�cision finale.

Le s�nateur Angus: D�apr�s vos membres et � votre connaissnce, est-ce qu�il est important que les institutions banquaires soient canadiennes? Par exemple, nous avons d�j� en place le r�glement du 10 p. 100. Il y a toujours la possibilit� de permettre aux banques �trang�res de s��tablir ici. Il y a toujours la possibilit� d�avoir plus de banques canadiennes. Avez-vous quelque chose � ajouter � ce sujet? Peut-�tre que je pourrais vous donner le context de ma question.

Comme le s�nateur Kirby et le s�nateur Oliver nous l�ont dit, les banques nous disent que cela presse. Il faut permettre la fusion des banques tout de suite, sinon le Canada pourrait vivre la situation qu�a v�cu la Belgique o� � un moment donn� il n�y avait plus de banques belges. Est-ce que cela est un danger au Canada?

Mme Brisebois: J�imagine que l�exemple parall�le serait ce qui est arriv� dans le domaine du d�tail. Si vous aviez demand�, il y a 15 ans, aux consommateurs s�ils magasineraient dans les magasins �trangers, ils auraient probablement dit non. Vous connaissez la r�alit� aujourd�hui. La priorit� c�est de recevoir un bon produit, un produit comp�titif, un bon service et une stabilit�. Alors, si je peux parler pour nos membres, je dirais qu�il n�y a pas autant d�inqui�tude pour l�investissement de l��tranger. Il y a beaucoup plus d�inqui�tude pour un syst�me s�curitaire, un syst�me stable et un syst�me sain.

Le s�nateur Angus: En r�ponse au s�nateur Kirby, vous avez expliqu� la dualit� des cartes de cr�dits. Nous avons lu aujourd�hui dans les journaux que le Bureau de comp�titon a des questions sur les cartes de cr�dits. Si on donne notre accord � la fusion entre la Banque de Montr�al et la Banque Royale, pouvez-vous r�it�rer ces commentaires sur la dualit�? Quelle est la nature des probl�mes d�apr�s vous?

Mme Brisebois: La dualit� au niveau des cartes de cr�dits, c�est vraiment quand une banque sert sa client�le avec deux cartes comp�titives. Par exemple, aujourd�hui, la carte Visa est offerte par la Banque Royale et la carte MasterCard est offerte par la Banque de Montr�al. Le consommateur a un choix � faire. S�il y a une fusion, les deux cartes comp�titives vont demeurer sous le m�me toit. L�inqui�tude existe au sein des marchands canadiens en ce qui concerne le co�t demand� au marchand quand il offre cette carte au consommateur. Par exemple, en moyenne, les frais que nos marchands paient approximativement sont de l�ordre de 1,8 p. 100 par ann�e pour la carte Visa et 1,45 p. 100 pour la carte MasterCard. Ils pensent que les co�ts ne diminueront pas mais qu�ils vont augmenter et que la carte MasterCard sera au m�me niveau que la carte Visa, d�o� leur inqui�tude.

Le s�nateur Angus: Un repr�sentant de Capital One a t�moign� vendredi dernier � Montr�al. Il nous a expliqu� que la MBNA, et nous avons tous re�u le courrier direct pour ses cartes, sont des concurrents pour la carte Visa et la carte MasterCard et ils sont sous le m�me toit que la fusion entre la Banque Royale et la Banque de Montr�al.

Mme Brisebois: Je pense ce qui est important aujourd�hui, c�est de comprendre la concentration du march� au niveau de la carte Visa et de la carte MasterCard sous la fusion de la Banque de Montr�al et la Banque Royale. Il est bien beau de dire qu�il y a des nouveaux comp�titeurs dans la march�. Mais si celui qui est bien �tabli dans le pays � au moins 50 � 70 p. 100 du march�, il est presque impossible pour un nouveau comp�titeur de faire un investissement important et d�assumer qu�il pourra avoir au moins 10,15 ou 20 p. 100 du march� sur une petite p�riode de temps. Alors, il est tr�s important, non seulement de regarder s�il y a de la comp�tition ou non, mais aussi le genre d�investissement que ce nouveau comp�titeur doit faire pour s�assurer une pr�sence dans le pays. Ce sont de s�rieux dilemmes que nous demandons au comit� de bien v�rifier et d��tudier.

Le s�nateur Meighen: J�aurais une question suppl�mentaire � poser, si vous me le permettez, monsieur le pr�sident. N�est-il pas vrai que le Bureau de comp�tition pourrait bien demander, dans le context de la fusion entre la Banque de Montr�al et la Banque Royale. de se d�barrasser de l�une ou l�autre des deux cartes? Ce serait la solution qui �viterait le probl�me que vous avez soulevez quant au taux d�int�r�t?

Mme Brisebois: Cela est le dilemme. Nous ne pouvons pas vous dire imm�diatement que c�est la solution parfaite. Les deux banques dont nous discutons ont une concentration du march� qui est tr�s importante. Que se passera-t-il si on d�cide de ne pas utiliser la carte MasterCard sous cette fusion? Est-ce que la plupart des gens qui utilisaient cette carte de la Banque de Montr�al vont tout simplement changer pour la carte Visa? Nous avons pens� � ce sc�nario. Il est bien difficile d�imaginer une solution parfaite entre s�il devrait y avoir une fusion ou non de ces banques. J�encourage mon coll�gue � vous en parler un peu plus car il a �tudi� la question.

[Traduction] Je vais demander � mon coll�gue, M. Morrison, de dire quelques mots.

M. Morrison: C�est pr�cis�ment la question cl� � quelle sera la concentration restant sur le march�, son ampleur, une fois que les changements de ce type auront �t� faits? Quels que soient ces changements, que les clients de MasterCard abandonnent MasterCard pour prendre Visa, ou que ce soit le contraire, la concentration entre un nombre tr�s limit� d�institutions sera si forte que, si on r�partit diff�remment certains �l�ments, on se retrouvera encore confront� � un probl�me.

M. Roy Carr, pr�sident, POS Pilot Plant Corporation: La soci�t� POS Pilot Plant Corporation est install�e � Saskatoon, � Innovation Place. �POS� veut dire �protein, oil and starch�, c�est-�-dire �prot�ine, huile et amidon�, les principales composantes de la production agricole de l�ouest du Canada, des produits marins des Maritimes et des produits forestiers de la Colombie-Britannique, ce qui vous donne une id�e de leur importance.

POS fournit aux gens d�affaires et aux entreprises des experts scientifiques et du mat�riel pour installations pilotes afin de leur permettre de proc�der � la mise � l��chelle de leurs id�es jusqu�� ce qu�elles se retrouvent avec un produit final qu�elles peuvent tester sur le march�. Nous fournissons essentiellement un contrat de service de recherche et de d�veloppement � et je fais une distinction entre les deux.

Suite fait que ces activit�s, nous avons lanc� diverses soci�t�s canadiennes, dont certaines ici, � Saskatoon. Beaucoup d�entre elles embauchent du personnel. Beaucoup de leurs produits sont export�s � vers le Japon et les �tats-Unis, par exemple � dans de nombreuses parties du monde. Nous g�n�rons des exportations, des emplois pour les gens de cette r�gion.

Comment se situe le Canada dans le monde en ce qui concerne la recherche et le d�veloppement? Pour la recherche, le financement est consid�rable. La qualit� de notre recherche est reconnue dans le monde entier. D�autre part, quand on �value les petites entreprises, leur dynamisme et leur d�veloppement dans 23 pays, le Canada se place g�n�ralement au 22e ou au 23e rang. Pourquoi en est-il ainsi? Pourquoi excellons-nous dans la recherche mais nous retrouvons-nous parmi les derniers dans le domaine du d�veloppement et de la commercialisation? La premi�re �tape est la recherche. Au Canada, elle suscite un int�r�t consid�rable, les formes qu�elle prend sont tr�s connues, elle est donc tout � fait bien financ�e. Comme je l�ai indiqu�, on fait de bons travaux de recherche.

La deuxi�me �tape est le d�veloppement. Voil� pourquoi je dis qu�il y a une diff�rence entre les deux. Dans ce domaine, il y a ce que nous appelons les �besoins de capitaux de lancement�. Le probl�me est de trouver des organisations pr�tes � investir de l�argent pour le d�veloppement. Il faut r�aliser la phase de d�veloppement dans l�installation pilote ou avec l��quipement de mise � l��chelle pour mettre � l��preuve le prototype du produit. � partir de l�, vous pouvez le tester sur le march� en utilisant les moyens dont dispose POS. Vous pouvez alors �laborer votre plan d�entreprise.

Une fois que vous avez un plan d�entreprise en place et que vous connaissez le RCI pour ce produit, si celui-ci est attrayant, il y a beaucoup d�investisseurs de capital-risque qui pourront s�y int�resser � ce moment-l�. Le probl�me est de passer, apr�s la recherche et la mise � l��chelle, � l��tape o� on a assez de donn�es pour �laborer le plan d�entreprise.

Dans ce domaine, nous essayons depuis 15 ans d�obtenir la collaboration des gouvernements f�d�ral et provinciaux, mais ils ne sont pas pr�ts � le faire; tout le monde h�site � agir pour combler les lacunes dont soufre la commercialisation.

Le premier groupe qui a commenc� � s�int�resser � ce domaine est la Banque Royale, ici, � Saskatoon. Suite � des discussions, elle a cr�� un comit� pour s�occuper des entreprises ax�es sur le savoir. Elle voulait comprendre la nature des probl�mes, c�est-�-dire ceux que je vous explique ici aujourd�hui. � la suite de cela, elle a cr�� un groupe distinct � Toronto, � son si�ge, sous la direction de Susan Smith. Elle a fait des efforts remarquables et s�est int�ress�e aux nouvelles entreprises qui voient le jour au Canada. La Banque Royale a �galement fait de son mieux pour soutenir leurs activit�s, compte tenu du fait qu�elle doit r�aliser des b�n�fices. Tout le monde a beaucoup de mal � assumer des risques. La Banque Royale a au moins le m�rite d�avoir essay� de faire quelque chose dans ce domaine.

Tout r�cemment, le PDG de la Banque Royale a annonc� qu�elle pourrait se montrer plus active dans ce domaine si elle pouvait prendre de l�expansion et se renforcer. Je voudrais donc recommander aujourd�hui que, dans l�int�r�t du Canada, nous essayons de renforcer notre secteur bancaire. Je m�int�resse plus particuli�rement � la Banque Royale, mais si toutes les banques �taient renforc�es, si on les autorisait � fusionner, elles pourraient devenir plus actives dans ce domaine o� le Canada pr�sente certaines faiblesses, c�est-�-dire le domaine du d�veloppement. Je m�en tiendrai l�. Avez-vous des questions?

Le pr�sident: Pourriez-vous nous dire avec un peu plus de d�tails quelle est la structure de votre soci�t�. Je ne sais pas si c�est une entreprise commerciale ou plut�t une organisation ax�e sur la recherche.

M. Carr: Eh bien, elle est unique en son genre. Elle est partiellement financ�e par le gouvernement f�d�ral. Nous sommes li�s � lui par une charte et, � l�heure actuelle � bon, quand nous avons commenc�, il y avait environ 95 p. 100 d�argent fourni par le gouvernement f�d�ral et 5 p. 100 venant du secteur priv�. Nous nous sommes de plus en plus tourn�s vers la pratique au fil des ans et l�argent que nous recevons maintenant provient pour approximativement 30 p. 100 du gouvernement f�d�ral et pour 70 p. 100 des entreprises.

On a fait des �tudes pour d�terminer s�il serait rentable de combiner des fonds priv�s et des fonds f�d�raux au sein de notre organisation, qui est � but non lucratif. M. Brinkman, de l�Universit� de Guelph, a �tudi� pendant un an les retomb�es de l�utilisation de nos scientifiques et de notre �quipement par le secteur priv�. Il a constat� que chaque dollar investi dans POS � � raison de 2 $ par des entreprises et 1 $ par le gouvernement f�d�ral � rapportait 8 $ � l��conomie canadienne. Une organisation comme la n�tre a donc une profonde influence; le probl�me concerne ce qui emp�che d�en tirer le meilleur parti possible. C�est un peu comme si on poss�de une Mercedes, mais qu�il n�y a que deux gouttes d�essence dans le r�servoir � la voiture avance par �-coups.

Bien des choses pourraient se faire beaucoup plus rapidement si nous recevions de l�argent du secteur priv�. L�exemple que j�ai utilis� est celui des activit�s de la Banque Royale dans le domaine du d�veloppement et de la mise � l��chelle ou pour combler ce que je consid�re comme les lacunes de la commercialisation.

Le s�nateur Kelleher: Si j�ai bien compris, vous travaillez surtout dans le domaine des produits d�riv�s de la prot�ine, de l�huile et de l�amidon. Y a-t-il d�autres organismes � but non lucratif comme le v�tre, comme POS, dans d�autres secteurs industriels?

M. Carr: Pas dans cette r�gion. Il y a des groupes provinciaux qui s�int�ressent principalement � la r�alisation du produit final, par exemple du poisson congel� et des produits de viande pr�ts � �tre mis sur le march�. Notre sp�cialit�, mise au point � la demande de l�industrie, concerne certaines composantes de grande valeur qu�on trouve dans ces produits � les produits marins, m�me le requin � et qu�on peut utiliser dans ce que nous appelons les nutriceutiques, les cosm�ceutiques et les m�diceutiques.

Les nutriceutiques vous permettent de vous sentir mieux; ils concernent la nutrition. Les cosm�ceutiques vous rendent plus beau. Les m�diceutiques sont utilis�s dans la lutte contre les maladies. � Saskatoon, il y a une excellente organisation de biotechnologie en activit�. Ce qu�elle fait est renomm� dans le monde entier.

Le principal � et je peux vous laisser cette documentation � est le probl�me qu�ont les petites entreprises pour obtenir un soutien dans le domaine du d�veloppement. Tout est expliqu� clairement l�-dedans.

Le s�nateur Meighen: Est-il essentiel qu�une organisation comme la v�tre soit � but non lucratif? Pensez-vous qu�un jour elle r�alisera des b�n�fices?

M. Carr: C�est certainement notre ambition. Nous venons de terminer une expansion de 1,5 million de dollars dans le domaine des capacit�s d�extraction � la possibilit� d�extraire des produits de base ce dont nous avons besoin. La demande dans ce domaine conna�t une croissance fantastique � cause des soci�t�s qui font des nutriceutiques, et cetera. Nous venons de terminer cette expansion. Il nous a fallu beaucoup d�argent.

Le s�nateur Meighen: O� avez-vous trouv� l�argent, si je peux vous le demander?

M. Carr: Il venait de plusieurs sources: notre propre argent et des fonds fournis par la Banque Royale, le Programme de diversification �conomique de l�Ouest et la province de la Saskatchewan. Nous avons eu �galement un client qui a achet� pour 400 000 $ d��quipement et en a fait don � POS � cause de ce que nous faisons. Voil� donc comment nous fonctionnons. Nous obtenons un petit quelque chose ici, un petit quelque chose l�, et nous rassemblons le tout. Cette expansion est termin�e. Notre prochaine �tape est de progresser dans le domaine de ce que nous appelons l�autofinancement. Notre but est de nous autofinancer � 75 p. 100 d�ici la fin de l�ann�e prochaine. En m�me temps, nous essayons de maintenir aux niveaux les plus bas possibles les frais que nous facturons aux entrepreneurs et aux PME qui utilisent nos installations. Nous sommes sur la corde raide.

Toutefois, �tant donn� que les petites entreprises qui se lancent nous demandent de plus en plus souvent de fabriquer des produits pour elles � titre temporaire � permettez-moi de revenir en arri�re un instant. Nous fabriquons pour elles un produit qu�elles mettent sur le march� pour voir comment il est accueilli avant de s�adresser au gouvernement et de lui dire: �Donnez-moi de l�argent pour construire une installation.� En d�autres termes, ces petites entreprises peuvent faire l�essai de leur produit en utilisant nos capacit�s. Une fois qu�elles ont test� le march� et mis au point leur plan d�entreprise, pour ce qui est de la valeur de cette technologie, elles peuvent solliciter la participation du secteur priv�. Celui-ci n�intervient pas � l��tape du d�veloppement. C�est la bataille que nous menons tout le temps.

Le s�nateur Meighen: Vous dites que vous esp�rez �tre autosuffisants � 75 p. 100 d�ici la fin de l�ann�e prochaine. Depuis combien de temps existez-vous?

M. Carr: La soci�t� a ouvert ses portes en 1977. J�y suis entr� en 1984. Au d�but, elle s�int�ressait principalement aux nouveaux produits de canola, pour remplacer le colza. � cette �poque, elle faisait la transformation pour trouver un moyen d�utiliser l�huile et la moul�e pour faire un produit de grande qualit�. En 1984, j�ai modifi� la composition du personnel, et cetera., pour axer nos activit�s davantage sur la pratique. Suite � cela, l�utilisation de nos installations par l�industrie a d�coll�.

Le s�nateur Meighen: Comment expliquez-vous la r�ticence � la r�ticence apparente, d�apr�s vous, jusqu�� l�arriv�e de la Banque Royale � des banques � pour citer leur exemple � � chercher � rem�dier aux lacunes en mati�re de commercialisation, comme vous l�avez dit, et � intervenir au niveau du d�veloppement? Quelle en est la raison?

M. Carr: C�est le risque d��chec, la peur de l��chec. Tant qu�on n�accepte pas certains �checs, on ne peut pas progresser. C�est une des raisons pour lesquelles nous sommes au 23e rang et nous disputons avec l�Italie la derni�re place parmi les 23 pays technologiquement avanc�s.

Le s�nateur Meighen: Cela soul�ve une question tr�s int�ressante � laquelle notre comit� a �t� confront� � plusieurs reprises. On nous a dit, par exemple, aux �tats-Unis qu�on peut facturer beaucoup plus cher pour tenir compte des risques. Nous avons demand� � un banquier: �Pourquoi n�imposez-vous pas des frais en fonction des risques?� D�apr�s ce que j�ai compris, la r�ponse est apparemment: �Eh bien, nous ne le faisons pas principalement parce que nous avons peur du probl�me de relations publiques qui se poserait si nous devions exiger le remboursement de notre pr�t.� Les m�dias annonceront que les banques font payer 6 points au-dessus du taux de base et sont de terribles usuriers.

Elles pr�f�rent donc ne pas s�en m�ler. Est-ce que cela a le moindre sens?

M. Carr: Les investisseurs de capital-risque n�interviennent pas avant qu�il ne reste pratiquement plus aucun risque. En d�autres termes, une fois qu�on a prouv� qu�il n�y a pas de risque, ces soci�t�s d�investissement sont pr�tes � participer. Voil�, en quelques mots, l�attitude traditionnelle des banques face au risque. Ce qu�a fait la Banque Royale est qu�elle nous a aid�s un petit peu en ce qui concerne ce risque, la lacune de la commercialisation dont j�ai parl�. Il faut que d�autres banques en fassent autant. Donc, avec les fusions, nous pourrons peut-�tre faire pression aupr�s d�elles pour qu�elles s�engagent plus dans le secteur � risque.

Le s�nateur Meighen: En d�autres termes, si elles �taient regroup�es, elles pourraient se permettre de prendre plus de risques?

M. Carr: C�est exact.

Le s�nateur Meighen: Y a-t-il un autre facteur? Par exemple, que pensez-vous de la mesure dans laquelle le r�gime d�imposition des gains en capital au Canada pourrait permettre de rem�dier au manque de commercialisation? Si j��tais Paul Martin et que j�avais une baguette magique pour �liminer les gains en capital ou adopter plus d��l�ments du syst�me am�ricain, dans lequel le taux diminue en fonction du nombre d�ann�es pendant lesquelles on d�tient un investissement, cela contribuerait-il � r�gler ce probl�me?

M. Carr: Eh bien, je pense que l�id�e �tait bonne, mais que la fa�on dont elle a �t� appliqu�e n��tait pas favorable aux gens qui ont besoin de cet argent pour aller plus loin et commercialiser leur concept ou leur id�e. De nombreux fonds qui ont �t� constitu�s investissent dans un terrain de golf ou quelque chose de ce genre, alors qu�ils obtiennent des all�gements fiscaux s�ils investissent dans un domaine � risque. Le syst�me a donc �t� con�u en fonction de cela.

� mon humble avis, je ne pense pas qu�il soit aussi efficace qu�il aurait pu l��tre.

Le s�nateur Meighen: Je pensais plut�t aux capitaux priv�s, aux investissements priv�s pour cette �tape du d�veloppement o�, comme vous l�avez reconnu vous-m�me, le risque est consid�rable.

M. Carr: Oui.

Le s�nateur Meighen: Pensez-vous que l�imp�t sur les gains en capital au Canada fausse d�une fa�on quelconque les rapports, c�est-�-dire que le risque est grand, mais que les possibilit�s de r�aliser r�ellement un profit sont fortement limit�es?

M. Carr: Plus nous examinons les retomb�es fiscales pour les gens qui sont pr�ts � investir � par exemple, il y a environ deux mois, j�ai lu un article qui indiquait que la Saskatchewan avait le taux d��pargne par habitant le plus �lev� du Canada. Il faut trouver une fa�on de proposer des conditions assez attrayantes pour que ces gens sortent leur argent de la banque et l�investissent dans certaines de ces petites organisations qui viennent de voir le jour. Comment le faire? Je dirai qu�il faut mettre en place des avantages fiscaux. Je ne sais pas comment le faire, mais il faudrait le faire.

Le s�nateur Callbeck: Je conviens avec vous qu�il y a un probl�me r�el � cette �tape du d�veloppement. Dans la province d�o� je viens, on fait de la recherche, on met au point le produit, mais le probl�me se pose ensuite avant sa mise en vente dans les magasins � c�est ce que vous appelez l��tape ou le domaine du d�veloppement. Vous nous dites que la Banque Royale apporte maintenant une aide, est � l��coute.

M. Carr: Oui, elle t�te le terrain. Si elle peut devenir plus grosse et plus solide, elle aura plus d�argent, m�me si le pourcentage est le m�me, � investir dans ce domaine.

Le s�nateur Callbeck: Vous avez dit que vous avez l�impression que, si les fusions se r�alisaient, la Banque Royale serait plus active dans ce domaine.

M. Carr: Son PDG l�a dit; je cite simplement ses propos.

Le s�nateur Callbeck: Je me demande pourquoi elle serait plus pr�te � prendre ce risque que maintenant, parce que, � mon avis, c�est un probl�me r�el.

M. Carr: Eh bien, le secteur bancaire est ce qu�il est. Si vous examinez ce qui s�est pass� il y a dix ans, on n�envisageait pas du tout d�investir dans les domaines � risque. Le fait que la Banque Royale s�y int�resse est une am�lioration �norme, un changement �norme. Il faut qu�elle se sente plus � l�aise dans ce domaine pour qu�elle y participe davantage. Je pense qu�elle peut le faire progressivement. Il faut encourager les banques � s�engager dans ce domaine. En dehors de ce que je dis, il faut �galement des pressions de l�ext�rieur pour que les banques s�int�ressent davantage � ce domaine.

[Fran�ais]

Le s�nateur Hervieux-Payette: Vous nous apportez un point de vue qu�on peut relier directement au rapport, � savoir le r�le tradionnel des banques, que se soit la Banque Royale, La Banque Toronto-Dominion, la CIBC ou autres, relativement au projet de la deuxi�me phase de d�veloppement apr�s la recherche.

Si notre comit� recommandait au ministre des Finances et au gouvernement d�utiliser cette nouvelle structure qui permettrait � des institutions financi�res d�oeuvrer dans le domaine du courtage, des services banquaires, de l�assurance et des fiducies, on d�velopperait des expertises, surtout du cot� du courtage des organisations qui pourraient constituer des fonds de capital de risque pour le domaine du d�veloppement. Est-ce la vocation d�une banque d�investir dans du capitlal de d�veloppement? Le rendement est excellent g�n�ralement, pour un million de dollars dans la recherche. Vous avez environ dix millions de dollars � investir en d�veloppement pour r�colter un chiffre d�affaire de 100 millions. Ce sont toujours des multiples par dix.

Si on ne passe pas le stade du d�veloppement, on n�aura jamais le 100 millions de revenus. Il me semble que la bourse sp�cialis�, la NASDAQ, a �t� un des m�canismes qui a mis �norm�ment d�argent au service de ce genre de d�vellopement.

� votre connaissance, si les �tats-Unis et l�Europe sont meilleurs au niveau du d�veloppement, est-ce parce que c�est via le syst�me banquaire ou via d�autres m�canismes financiers ou d�autres institutions financi�res? Quel serait le mod�le qu�on pourrait pr�coniser dans notre rapport?

[Traduction]

M. Carr: Je suis n� au Canada mais j�ai travaill� pendant 14 ans aux �tats-Unis pour de grandes soci�t�s, Proctor & Gamble, Weston Foods, et cetera; j�ai donc une assez bonne id�e de ce qui se passe aux �tats-Unis. Ensuite, je suis revenu au Canada.

Aux �tats-Unis, le gouvernement participe de plus en plus � cela � j�h�site � soulever cette question parce que vous �tes des repr�sentants du gouvernement. Par exemple, le minist�re de l�Agriculture des �tats-Unis a un programme permettant aux gens de proposer un concept qui est trait� de fa�on confidentielle. Ce programme, l�ARC, a un budget de plus de 200 millions de dollars, je crois, qui peuvent �tre utilis�s pour examiner certains de ces concepts. Ceux qui paraissent prometteurs sont financ�s, en incluant m�me la recherche.

Si mes renseignements sont exacts, je crois que les gouvernements europ�ens s�int�ressent �galement � ce domaine. Il y a, disons, plus d�all�gements fiscaux aux �tats-Unis. Je ne sais pas exactement ce qu�il en est pour l�Europe, mais les �tats-Unis accordent beaucoup plus lib�ralement des all�gements fiscaux aux soci�t�s actives dans ce domaine pendant plusieurs ann�es. Donc, aux �tats-Unis, il y a davantage de deniers publics disponibles pour ce domaine � risque. Au Canada, on semble avoir peur de l��chec.

[Fran�ais]

Le s�nateur Hervieux-Payette: Vous ne r�pondez pas � ma question. Vous r�pondez que ce sont les gouvernements. Est-ce que les banques sont impliqu�es aux Etats-Unis? Vous nous proposez le mod�le o� les banques investissent dans ce secteur. Est-ce que, � votre connaissance, les banques am�ricaines ou les banques europ�ennes sont dans ce secteur, ou si c�est simplement les organisations gouvernementales par des fonds directs et par des mesures fiscales?

[Traduction]

M. Carr: Excusez-moi. Je pensais que vous demandiez quel mod�le on pouvait utiliser pour faire accepter cela. Je ne suis certainement pas un sp�cialiste du secteur bancaire, mais, suite aux discussions que j�ai eues avec des gens aux �tats-Unis et � mes s�jours dans ce pays, j�ai l�impression qu�on peut plus facilement collaborer avec les gens dans ce domaine � risque. En d�autres termes, les Am�ricains semblent accepter un petit peu plus de risques que les Canadiens. Toutefois, c�est simplement une opinion; elle n�est pas �tay�e par des faits. [Fran�ais]

Le s�nateur Hervieux-Payette: Votre conclusion est que vous pr�conisez que les banques puissent investir davantage. Mais vous ne sauriez nous dire si les fonds viennent du secteur priv� ou du secteur publique dans tout le d�veloppement.

Monsieur le pr�sident, j��tais vice-pr�sidente du d�veloppement chez SNC et j�ai fait ce genre de financement. En g�n�ral, les banques �taient tr�s loin des dossiers de d�veloppement. Ils ne connaissaient pas les technologies et n�avaient pas les ressources n�cessaires � l�int�rieur pour �valuer le risque. Est-ce qu�aujourd�hui, les banques peuvent �valuer ces risques?

[Traduction]

M. Carr: Je ne sais pas si elles ont des sp�cialistes parmi leurs employ�s. De fa�on g�n�rale, on peut engager des consultants pour examiner une technologie. C�est ce que je ferai moi-m�me dans six � huit mois. Il y a des consultants qui sont disponibles pour �valuer ces choses et faire une recommandation � la banque. Je ne pense pas que les banques ont, parmi leurs employ�s, des sp�cialistes pour faire cela.

Je pense qu�il faut � la fois que les banques et le gouvernement y participent davantage, et peut-�tre pourraient-ils collaborer. La Banque Royale a, par exemple, un accord avec le Programme de diversification de l�Ouest, et peut-�tre le secteur public et le secteur priv� pourraient-ils s�engager davantage dans des domaines pr�sentant plus de risques s�ils collaboraient financi�rement. Pour moi, il est essentiel de travailler en �quipe. Nous devons collaborer; le secteur public et le secteur priv� doivent collaborer pour faire quelque chose � propos de ce probl�me que nous avons au Canada.

Le s�nateur Austin: Je voudrais me concentrer sur ce qui me para�t �tre l��l�ment principal de votre m�moire, le fait que les banques commerciales sont pr�tes � fournir un soutien primaire � la recherche menant � des r�sultats commerciaux. Vous avez fait allusion, de fa�on g�n�rale, au r�le de la Banque Royale. Pourriez-vous nous dire plus pr�cis�ment combien d�argent et quel type de rapports la Banque Royale veut avoir pour assumer ce risque plus �lev�. Par exemple, veut-elle obtenir une redevance proportionnelle aux r�sultats commerciaux ou une partie du capital? Se comporte-t-elle essentiellement comme un investisseur de capital-risque dans ce domaine? Fixe-t-elle un plafond pour la taille des investissements qu�elle est pr�te � faire dans les projets que vous lui recommandez, par exemple 500 000 $ ou 1 million? Concr�tement, qu�obtenez-vous exactement d�elle?

M. Carr: Eh bien, comme je l�ai dit, elle s�engage progressivement dans ce domaine, et je ne pense pas qu�elle ait encore des lignes directrices importantes. En ce qui nous concerne, elle collabore avec le Programme de diversification de l�Ouest et a mis sur pied un syst�me de pr�t nous permettant d�emprunter de l�argent � un taux raisonnable. Nous pouvons l�utiliser pour renforcer nos capacit�s afin de mieux desservir les entreprises qui s�adressent � nous. Elle a investi, � l�occasion, dans une entreprise nouvellement cr��e, mais je ne sais pas si elle avait pris une participation au capital ou s�il s�agissait d�un pr�t.

Le s�nateur Austin: Dans le premier cas, elle contribue � l�accord d�un pr�t � POS, qui doit, de fa�on g�n�rale, le rembourser � m�me l�ensemble de ses revenus.

M. Carr: C�est une observation.

Le s�nateur Austin: Elle conna�t vos r�sultats financiers depuis 1984 ou je ne sais quand. Est-elle s�re que, de fa�on g�n�rale, vous �tes en mesure de rembourser?

M. Carr: Oui.

Le s�nateur Austin: C�est donc une premi�re �tape. Va-t-elle, dans la prochaine �tape, soutenir la recherche pour les projets particuliers des gens qui poss�dent des entreprises qui ont la technologie n�cessaire et utilisent vos installations pour la d�velopper davantage?

M. Carr: Oui. Mais, jusqu�� pr�sent, elle l�a seulement fait deux ou trois fois.

Le s�nateur Austin: Vous faites une recommandation quand vous voyez une technologie qui vous para�t pr�senter un potentiel r�el, et la banque r�agit occasionnellement de fa�on positive. C�est ce que vous voulez dire?

M. Carr: Cela d�pend du client. Il doit obtenir suffisamment de capitaux pour passer � l��tape suivante. En d�autres termes, nous sommes seulement une organisation technique. Nous avons plusieurs personnes qui s�occupent de cela. Au cours des dix derni�res ann�es, nous avons lanc� une deuxi�me entreprise qui s�appelle NVI, Nuvotech Ventures International. Son r�le est d�essayer d�aider les entreprises � trouver des sources de financement, comme les programmes PARI et les choses de ce genre qui peuvent les aider.

Le s�nateur Austin: Est-ce que POS a mis sur pied cette activit�?

M. Carr: Oui. Et c�est une soci�t� priv�e imposable.

Le s�nateur Austin: Quel est le montant de l�aide financi�re la plus importante que la Banque Royale a accord� � POS sur le march�?

M. Carr: Eh bien, en collaboration avec le Programme de diversification de l�Ouest, elle a mis � notre disposition un pr�t d�un montant maximum d�un million de dollars.

Le s�nateur Austin: Elle a mis � votre disposition une ligne de cr�dit d�un million de dollars?

M. Carr: Oui. Nous devons faire un investissement avant que les gens s�adressent � nous. Nous avons fonctionn� � un certain niveau, puis nous avons constat� que ce que nous faisons int�ressait apparemment les gens, et le nombre de ceux qui se sont adress�s � nous d�passe nos possibilit�s. Nous avons d� pr�parer quelque chose, passer � l��tape suivante pour investir et augmenter nos capacit�s. Nous avons alors constat� que les petites entreprises existantes souhaitent r�ellement que nous fabriquions des produits pour elles � titre temporaire. Nous avons donc adopt� une d�marche diff�rente et, maintenant, nous avons ce syst�me de pr�t que nous pouvons utiliser pour acheter de nouveaux types d��quipement ou pour am�liorer nos capacit�s, et nous le remboursons progressivement.

Le s�nateur Austin: Et quand le Programme de diversification de l�Ouest et la Banque Royale mettent conjointement cette ligne de cr�dit � votre disposition, obtiennent-ils des garanties de POS de la fa�on normale?

M. Carr: L��quipement et les choses de ce genre, oui.

Le s�nateur Austin: Est-ce qu�ils prennent une hypoth�que immobili�re?

M. Carr: C�est exact, oui.

Le s�nateur Austin: Je vous remercie de nous donner ces d�tails suppl�mentaires. Connaissez-vous le Conseil de recherches de la Colombie-Britannique?

M. Carr: Oui.

Le s�nateur Austin: Jouez-vous � peu pr�s le m�me r�le dans la pratique?

M. Carr: Dans la pratique, oui, mais, sur le plan technique, nous sommes tout � fait diff�rents. Nos domaines d�activit� sont diff�rents.

Le s�nateur Austin: Du point de vue technique, vous travaillez dans un domaine diff�rent, mais, au plan op�rationnel, dans les deux cas, n�essayez-vous pas essentiellement de faire passer diverses id�es techniques du niveau conceptuel au niveau de l�installation pilote?

M. Carr: Pour autant que je sache, ce conseil n�a pas d�installations pilotes, ou elles ne sont pas tr�s importantes.

Le s�nateur Austin: Il en avait. Elles ont subi des compressions.

M. Carr: C�est exact.

Le s�nateur Austin: Eh bien, je vous remercie beaucoup pour ces renseignements. C�est un facteur. Je ne sais pas quel r�le ce type de soutien donn� par une banque peut jouer en ce qui concerne les questions plus g�n�rales que sont la concurrence, la mondialisation et la structure financi�re intermodale, mais il est certainement tr�s int�ressant d�entendre parler de cela.

M. Carr: Nous ne pensons pas que ce sera une solution compl�te, mais ce sera une �tape, et on peut esp�rer que cela encouragera d�autres banques � s�int�resser � cela et � contribuer encore davantage � combler cette lacune. J�esp�re que c�est la premi�re �tape. Il faut encourager les banques � prendre certains risques et � s�int�resser � ce domaine.

Le pr�sident: Je tiens � remercier tous ceux qui ont particip� aujourd�hui � nos d�bats.

La s�ance est lev�e.


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