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Délibérations du Comité sénatorial permanent de la
Sécurité nationale et de la défense

Fascicule 14 - Témoignages du 7 avril 2003 - Séance du matin


OTTAWA, le lundi 7 avril 2003

Le Comité sénatorial permanent de la sécurité nationale et de la défense se réunit aujourd'hui à 10h 15 afin d'examiner la nécessité, pour le Canada, de disposer d'une politique en matière de sécurité nationale.

Le sénateur Colin Kenny (président) occupe le fauteuil.

[Traduction]

Le président: Bonjour. J'ai le plaisir de vous souhaiter la bienvenue au Comité sénatorial permanent de la sécurité nationale et de la défense. Je m'appelle ColinKenny. Je suis sénateur de l'Ontario et je préside le comité. Immédiatement à ma droite se trouve notre vice-président, le sénateur MichaelForrestall, éminent sénateur de la Nouvelle-Écosse. Le sénateur Forrestall est au service des gens de Dartmouth depuis 37ans, il a été d'abord leur député à la Chambre des communes pour devenir ensuite leur sénateur. Tout au long de sa carrière parlementaire, il s'est intéressé aux questions relatives à la défense et a siégé à divers comités parlementaires portant sur cette question, notamment le Comité spécial mixte de 1993 sur l'avenir des Forces canadiennes.

À l'extrême droite se trouve le sénateur Banks, qui est bien connu des Canadiens parce qu'il est l'un de nos musiciens et artistes de scène des plus accomplis et polyvalents. Avant son entrée au Sénat en 2000, le sénateur Banks a été au coeur d'un certain nombre de manifestations musicales. Le sénateur Banks préside le Comité permanent de l'énergie, l'environnement et les ressources naturelles qui se penche en ce moment sur la sûreté et la réglementation nucléaires.

À l'extrême droite se trouve le sénateur David Smith de l'Ontario. Le sénateur Smith a été par le passé conseiller municipal et vice-maire de Toronto, de même que député à la Chambre des communes et ministre d'État. Il est entré au Sénat en 2002. Il siège également au Comité permanent des affaires juridiques et constitutionnelles et au Comité permanent du Règlement, de la procédure et des droits du Parlement.

Vous voyez à côté de lui le sénateur Cordy de la Nouvelle-Écosse, éducatrice accomplie qui a été très active dans le milieu communautaire avant d'entrer au Sénat en 2000. Elle siège à notre comité et est également membre du Comité permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie du Sénat qui vient de publier un rapport remarquable sur la santé et vient d'entreprendre une étude sur la santé mentale.

À l'extrême gauche se trouve le sénateur JosephDay du Nouveau-Brunswick, avocat et homme d'affaires réputé. Il a été nommé au Sénat en 2001. Le sénateur Day est le vice-président de notre Sous-comité des anciens combattants et du Comité permanent des finances nationales. Il siège également au Comité permanent des transports et des communications ainsi qu'au Comité permanent de l'agriculture et des forêts.

Notre comité est le premier comité permanent du Sénat ayant pour mandat d'étudier la sécurité et la défense. Au cours des 18derniers mois, nous avons publié une série de rapports dont le premier s'intitulait «L'état de préparation du Canada sur les plans de la sécurité et de la défense». Cette étude a été déposée en février 2000 et faisait état des grandes questions relatives à la défense pour le Canada. Le Sénat a ensuite prié notre comité de se pencher sur la nécessité pour le Canada d'avoir une politique de sécurité nationale. Nous avons publié jusqu'à présent trois rapports sur divers aspects de la sécurité nationale. Premièrement, le rapport intitulé «La défense de l'Amérique du Nord: une responsabilité canadienne», qui a été rendu public en septembre 2002; deuxièmement, le rapport intitulé «Pour 130$ de plus... Mise à jour sur la crise financière des Forces canadiennes: une vue de bas en haut», qui a été publié en novembre 2002; et troisièmement, le plus récent, «Le mythe de la sécurité dans les aéroports canadiens», qui a été publié en janvier 2003.

Le comité poursuit son étude sur la capacité qu'a le Canada de contribuer à la sécurité et à la défense de l'Amérique du Nord. Entre autres choses, notre comité a tenu des audiences sur le soutien que le gouvernement fédéral accorde à ces hommes et à ces femmes de notre pays qui sont les premiers à intervenir en cas d'urgence ou de sinistre.

Cependant, le comité a décidé de donner la priorité à son étude de la capacité qu'a le Canada de défendre ses eaux territoriales et de contribuer au maintien de l'ordre sur le littoral continental. Nos audiences nous permettront d'actualiser un rapport que le comité a publié plus tôt, en 2002, «La défense de l'Amérique du Nord», où l'on a constaté que les efforts que fait le Canada pour défendre ses côtes sont largement ponctuels et fragmentaires.

Nous allons entendre ce matin des fonctionnaires de Transports Canada et du ministère de la Défense nationale. Cet après-midi, nous recevons le surintendant KenHansen, directeur du Service de l'exécution des lois fédérales, Gendarmerie royale du Canada, et CharlesGadula, directeur général des Services maritimes, ministère des Pêches et des Océans.

Monsieur Frappier, vous voilà. Vous présidez le comité interministériel chargé de cette question, et nous croyons savoir que vous avez préparé un exposé à l'intention du comité. Il nous tarde de l'écouter.

M. GerryFrappier, directeur général, Sûreté et préparatifs d'urgence, et président du Groupe de travail interministériel sur la sûreté maritime, ministère des Transports du Canada: C'est un honneur pour moi que d'être ici ce matin. J'aimerais faire deux brèves déclarations: la première à titre de président du Groupe de travail interministériel sur la sûreté maritime et l'autre qui porte sur Transports Canada et ses activités.

Le président: Le sénateur Forrestall a une petite question à vous poser.

Le sénateur Forrestall: Pourquoi le ministère des Transports, qui n'est plus que l'ombre de lui-même, préside-t-il ce groupe de travail alors qu'il n'a aucune ressource et qu'il n'est pas habilité à mener à terme le projet qui a été entrepris? Savez-vous pourquoi?

M. Frappier: Je ne suis pas sûr de pouvoir donner une réponse complète à cette question. Vous voudrez peut-être en parler au ministre.

Le sénateur Forrestall: Si vous ne voulez pas nous le dire, ça va.

M. Frappier: Je tiens à mentionner que la Loi sur la sûreté du transport maritime est une loi administrée par Transports Canada qui autorise le ministère à assurer la sûreté maritime. Comme pour tous les autres modes de transport, Transports Canada est le ministère responsable de la coordination et de la mise en oeuvre de la sécurité.

Le sénateur Forrestall: Merci beaucoup.

Le président: Poursuivez votre exposé, monsieur Frappier.

M. Frappier: J'aimerais vous donner un aperçu des travaux du Groupe de travail interministériel sur la sûreté maritime.

[Français]

Comme vous le savez sans doute, Transports Canada est l'organisme fédéral responsable de la gestion et de la sûreté du transport maritime au Canada. Cette responsabilité englobe la planification, l'élaboration et l'exécution de politiques, procédures, lois, règlements et normes nécessaires au maintien de la sûreté, à l'élaboration des plans d'urgence et à la gestion de crises.

Le ministère n'est certes pas la seule organisation participant à cet effort; la protection de la sûreté maritime exige la collaboration d'une vaste gamme de partenaires: notamment d'autres ministères et organismes fédéraux, l'industrie, les groupes d'intérêt public et syndicaux, les navigateurs, les exploitants de ports et installations et la collectivité internationale, en particulier les États-Unis.

[Traduction]

Je ferai brièvement état des mesures que nous avons prises depuis le 11septembre, des travaux du Groupe de travail interministériel sur la sûreté maritime, de certains des grands engagements que nous avons pris relativement à la sécurité, de notre approche à la sûreté maritime et de certaines améliorations qui ont été annoncées récemment.

Le Groupe de travail interministériel sur la sûreté maritime a été créé après le 11septembre. Dans son budget de 2001, le gouvernement a réservé plus de 60millions de dollars sur cinq ans pour la sécurité maritime. Il y a eu augmentation des vols de surveillance de la Garde côtière et accroissement de la présence à court terme de ses navires. La Garde côtière oblige les navires qui entrent dans les eaux canadiennes à donner un avis de 96heures.

Les douanes canadiennes ont également accru leur surveillance des conteneurs. La GRC a renforcé les moyens des équipes tactiques d'intervention. La Garde côtière a accéléré la mise en place du Système d'identification automatique des navires. La GRC a assigné temporairement des équipes chargées de lutter contre le crime organisé dans les trois grands ports du Canada. Le SCRS a renforcé ses mécanismes de collecte et de diffusion de renseignements concernant les menaces à la sécurité.

CIC, soit Citoyenneté et Immigration Canada, a renforcé son réseau d'agents de contrôle de l'immigration et d'agent de liaison du renseignement. On a amélioré les mesures de vérification visant les navires entrant dans la voie maritime. Le gouvernement du Canada appuie de façon proactive les engagements internationaux, en particulier les exigences de l'OMI qui ont été approuvées depuis. Le ministère de la Défense nationale a établi des zones maritimes d'accès contrôlé maritimes à proximité de trois installations navales.

Le Groupe de travail interministériel sur la sûreté maritime a été mis sur pied en octobre2001. Il a pour mandat de coordonner l'intervention fédérale en matière de sûreté maritime, d'analyser notre système maritime afin de déterminer les lacunes en matière de sûreté et d'élaborer des initiatives d'atténuation pour combler ces lacunes.

Seize ministères et organismes fédéraux sont membres de ce groupe de travail. Il est présidé par Transports Canada. Dans les informations que nous vous avons remises, vous trouverez la liste de membres du GTISM.

Nous avons reçu des crédits substantiels. À la page8 de mon exposé, je donne les informations tirées du budget2001. À la page9, nous expliquons comment le budget a été réparti entre les sept grands thèmes, dont je parlerai dans un instant. Et je signale que l'engagement financier total du gouvernement pour la période s'étalant de 2001-2002 à 2007-2008 est de 197millions de dollars.

Que fait le Groupe de travail interministériel sur la sûreté maritime? Premièrement, pour mieux identifier et combler les lacunes en matière de sécurité, le secteur maritime a été divisé en quatre zones: étrangères, eaux internationales, eaux canadiennes et secteurs côtiers. Chaque zone de sécurité a quatre domaines d'activité: sensibilisation, capacité d'intervention, protection et collaboration.

Après avoir pris connaissance de l'état des lieux, nous avons mené une étude pour déterminer quels domaines d'activité et quelles zones de sécurité méritaient plus amples analyses. Vous en trouverez un aperçu à la page12 de mon exposé.

Une fois le niveau de risque établi, des mesures d'atténuation étaient arrêtées et évaluées, et à partir de cela nous avons établi un ensemble d'initiatives générales. Enfin, nous avons créé un ordre de priorité pour abaisser et équilibrer le niveau de risque dans toutes les grandes zones. On s'est ensuite servi des résultats de ce processus pour articuler les recommandations dont faisait état la politique qui a été soumise au Cabinet.

En conséquence de cette démarche, nous avons reçu les crédits budgétaires voulus. Le ministre des Transports, DavidCollenette, a annoncé un train de mesures le 22janvier 2002. Ces mesures prévoyaient jusqu'à 172,5millions de dollars pour des initiatives visant à améliorer la sûreté du système de transport maritime du Canada et de ses frontières maritimes. Ces mesures sont administrées en coopération par divers organismes et ministères fédéraux, qui sont tous membres du GTISM.

Les grands thèmes sont les suivants: surveillance accrue et repérage amélioré du trafic maritime, ce qui comprend l'identification et le repérage presque immédiats des navires qui entrent en eaux canadiennes; l'amélioration du contrôle des passagers et des membres d'équipage des navires; l'installation d'un nouvel équipement de détection dans les ports pour détecter les radiations dans les conteneurs; l'amélioration des équipes tactiques d'intervention de la GRC et la création de postes d'enquête permanents dans les grands ports; l'amélioration de la collaboration et de la coordination entre les organismes et ministères du gouvernement; l'élaboration et la mise en oeuvre de nouvelles exigences de sûreté internationale; et l'amélioration constante de la sécurité portuaire par une meilleure coordination et une meilleure collaboration. Vous recevrez davantage d'information sur chacun de ces thèmes des divers représentants des ministères que vous avez convoqués.

Je vais maintenant vous parler un peu des initiatives de Transports Canada dans ces domaines. Nous sommes le maître d'oeuvre dans quelques-uns d'entre eux.

[Français]

Transports Canada assure la mise en œuvre du Code international de sûreté des navires et des installations portuaires. Le code ISPS a été adopté lors d'une conférence diplomatique tenue au siège social de l'Organisation maritime internationale en décembre 2002.

Les participants à cette conférence ont adopté un certain nombre de modifications à la Convention internationale de 1974 pour la sauvegarde de la vie humaine en mer, dont la plus importante se traduit par le nouveau Code international de sûreté des navires et des installations portuaires. Le code exige entre autres choses la mise en œuvre de plans de sûreté et la désignation d'agents de sûreté pour les navires, les sociétés propriétaires de navires et les installations portuaires, ainsi que l'installation de dispositifs d'alarme et de systèmes d'identification automatique sur les navires. Le code ISPS entrera en vigueur le 1er juillet 2004.

Transports Canada travaille de concert avec l'industrie maritime en vue de la mise en place du code pour la date d'entrée en vigueur. Le gouvernement du Canada est signataire de ce code et, à titre d'autorité désignée du gouvernement du Canada, et en vertu du code ISPS, Transports Canada est responsable de diverses activités dont les suivantes: établir les niveaux de sûreté pertinents; déterminer quelles sont les installations portuaires du Canada qui doivent désigner un agent de sûreté et mettre au point un plan de sûreté; approuver les évaluations et les plans de sûreté des installations portuaires, ainsi que toute modification subséquente à cette évaluation et à ces plans; mettre en application des mesures de contrôle et de conformité; établir les exigences en vue d'une déclaration de sûreté et approuver les organismes de sûreté enregistrés.

Un autre programme très important est le Programme d'autorisation d'accès aux zones réglementées des installations maritimes. Dans le cadre de ce programme, les exploitants des installations maritimes seront tenus d'établir des zones réglementées dans le but de protéger les infrastructures essentielles du réseau de transport maritime. Ce nouveau programme a pour but d'assurer la sécurité des personnes dans les ports et d'empêcher les actes d'interventions illicites dirigés contre le réseau de transport maritime. Le programme prendra modèle sur le Programme d'autorisation d'accès aux zones réglementées des aéroports. La mise en oeuvre se fera en consultation avec les intervenants touchés.

Les zones réglementées ont pour objet d'assurer la sécurité de toutes les personnes qui doivent avoir accès à ces zones, c'est-à-dire les passagers, des membres d'équipage, les visiteurs, le personnel sur place et d'autres employés tels que les livreurs. Les personnes souhaitant accéder aux zones réglementées d'un port seront soumises à une vérification des antécédents, ou devront être accompagnées d'un agent responsable.

Les zones contrôlées par les douanes sont aussi en place et on s'assure qu'il y ait une coordination et une harmonisation entre les efforts de nos zones et celles de l'ADRC. Le processus d'octroi de laissez-passer prendra modèle sur le système déjà en place dans les aéroports canadiens. Les personnes souhaitant accéder aux zones réglementées d'un port seront soumises à une vérification des antécédents, faite en collaboration avec la GRC et le SCRS.

Le nouveau Programme de coordination de la sûreté maritime entrera en vigueur en 2003-2004. Ce programme sera géré par le Groupe de travail interministériel sur la sûreté maritime. Le programme financera des projets ponctuels ou de durée limitée visant à améliorer la collaboration et la coordination des ministères et des organismes fédéraux.

Les prochaines étapes de ce programme est de régler les principales questions de politique rattachées à la mise en oeuvre du code ISPS et du programme d'autorisation d'accès aux zones réglementées des installations maritimes; de travailler avec les intervenants du secteur maritime par l'entremise des mécanismes suivants: la présentation d'exposés dans le cadre de réunions nationale et régionales ou concernant un port en particulier — cette présentation est déjà commencée et se poursuivra jusqu'au début de mai — ; des consultations régionales et nationales dirigées auprès des intervenants touchés; et d'embaucher d'autres spécialistes de la sûreté maritime pour s'assurer d'un programme d'inspection; et, finalement, l'établissement d'une méthodologie en vue d'effectuer des évaluations de sûreté dans les installations maritimes. Nous devrons apporter des modifications aux règlements et aux lois, et établir un programme de surveillance de la sûreté maritime pour s'assurer que les lois et les réglementations seront bien mises en place.

[Traduction]

Je répondrai volontiers à vos questions.

Le président: Merci, monsieur Frappier. Vous nous avez donné un excellent aperçu du travail que vous et votre comité accomplissez.

Au cours de notre audience d'aujourd'hui et dans nos audiences futures, nous allons tâcher d'acquérir une compréhension plus substantielle de ce que vous nous avez dit aujourd'hui. Par exemple, vous avez parlé de certaines initiatives comme celles qui visent à hausser la sûreté maritime ou les opérations de repérage et de surveillance, l'amélioration du contrôle des équipages et des passagers, l'installation d'un nouvel équipement de détection, l'amélioration de la capacité de réagir aux menaces, et l'amélioration de la collaboration et de la coordination ainsi que les améliorations suivies dans la sécurité portuaire. Nous allons vous demander de nous expliquer en détail ce que vous nous avez dit. Les membres du comité tâcheront d'acquérir un portrait aussi complet que possible de l'étude qu'il va faire.

Cette étude est pour nous un complément de notre rapport de septembre, «La défense de l'Amérique du Nord: une responsabilité canadienne», où nous avons examiné surtout les questions relatives à la défense côtière. Ce rapport était une première étape, et nous tâcherons de savoir ce que compte faire le gouvernement à partir de cela.

De manière générale, nous voulons connaître les détails de ces énoncés généraux. Le système des laissez-passer est un bon exemple. Vous nous avez fait quelques remarques sur la manière dont vous comptez améliorer le système de laissez-passer et le rapprocher à celui qu'on a maintenant dans le système aéroportuaire. Lorsque nous sommes allés à Vancouver il y a un peu plus d'un an de cela, nous avons demandé aux responsables du port quel genre de système de laissez-passer ils avaient. Ils ont décrit au comité ce qui a semblé être un assez bon système de laissez-passer.

Ensuite nous leur avons demandé combien de gens étaient visés par ce système. Ils ont répondu que le système s'appliquait aux 127personnes qui travaillent pour l'administration portuaire, mais pas aux 30000autres travailleurs du port. Pourtant, quand nous avons reçu l'information initialement, nous avions eu l'impression que ce système de laissez-passer était en place pour 30000personnes.

Dans nos discussions, quand nous aborderons la question des laissez-passer, nous voulons savoir comment le système fonctionnera et qui sera visé, c'est-à-dire si ce sera seulement le petit groupe qui travaille pour l'autorité portuaire ou bien l'ensemble des travailleurs, vérificateurs, débardeurs et autres qui travaillent dans le milieu portuaire.

Ce sera l'une des questions que nous voudrons tirer au clair. Je voulais vous le préciser tout de suite.

Le sénateur Banks: Est-ce que le groupe de travail a en tête un plan précis qui représenterait la sécurité maritime dans tous ses aspects? Je pose la question parce que personne n'a jamais confirmé que tel est bien le mandat précis. Est- ce le résultat final que vous avez à l'esprit?

Dans l'affirmative, dans combien de temps pensez-vous aboutir à une telle politique claire?

M. Frappier: Je ne crois pas qu'on ait en vue un résultat final, un rapport ou un produit quelconque, après quoi nous dirions que le travail est fini.

Nous croyons que la sécurité maritime ne cessera de mettre toujours en cause, comme cela a toujours été le cas, de nombreux ministères et différents aspects de leurs mandats respectifs. Il est important de s'assurer que le gouvernement du Canada a une vue d'ensemble de ce qui se passe et de ce qui devrait se passer dans le dossier de la sécurité maritime.

La première étape est de veiller à assurer la coordination des politiques. Nous avons déployé beaucoup d'efforts en ce sens durant la préparation du mémoire au Cabinet. La somme de 172,5millions de dollars récemment annoncée était un résultat de ces efforts, si vous voulez. Il faut constamment s'assurer d'avoir une bonne coordination au niveau des politiques.

Le sénateur Banks: Est-ce préférable de coordonner un certain nombre de politiques différentes, comme vous le décrivez, ou bien d'avoir une seule politique que tout le monde doit respecter?

C'est peut-être cynique de ma part de poser cette question. Nous parlons de sécurité. Auparavant, nous pouvions dire: Voici une question qui met en cause la sécurité militaire; dans cet autre dossier, il est question d'immigration; et voici encore un autre dossier qui concerne uniquement le commerce extérieur. Cela n'est plus possible, et tout le monde le sait. Vous le savez mieux que nous.

Pouvez-vous répondre à la question sur la logique d'avoir une foule de politiques différentes— je pense qu'il y en a dix-sept, ou peu importe le chiffre— et d'essayer de les coordonner d'une manière ou d'une autre, plutôt que d'avoir un modèle dans lequel on dirait: «Voici notre politique de sécurité maritime. Chacun doit s'y conformer. Voici comment vous cadrez dans l'ensemble». Il y a une différence.

M. Frappier: Si l'on pouvait isoler tous les autres éléments qui sont en cause dans la politique publique, il serait peut- être logique d'élaborer un document de politique ou une organisation chargée d'appliquer la politique en matière de sécurité maritime.

Le fait est que, comme dans bien d'autres domaines d'affaires publiques, la complexité de ce qui est en jeu et la complexité des mandats des différents ministères signifient qu'il y aura toujours plusieurs intervenants.

Dans le domaine de la sécurité maritime, il faut par exemple s'interroger sur la présence du crime organisé. C'est une question intéressante. On ne peut pas l'englober avec les autres, mais on ne peut pas l'écarter complètement non plus.

Pour ce qui est des douanes, il y a toutes sortes de problèmes qui se posent en matière de contrebande. Nous ne voulons pas avoir une politique d'inspection des conteneurs pour des raisons de sécurité nationale, et puis une autre politique visant l'inspection des mêmes conteneurs du point de vue de la lutte contre la contrebande ou du point de vue des Douanes et du Revenu. Il faut que tout soit intégré. Tel est essentiellement le rôle fondamental du groupe de travail.

Quant à savoir si le résultat sera la rédaction d'un document qui énoncera la politique, nous n'avons pas encore pris de décision là-dessus. Il y aura toujours d'autres ministères en cause et il sera toujours nécessaire de s'assurer que les politiques sont coordonnées relativement aux différents domaines.

Le sénateur Banks: Nous faisons, en même temps que cette étude-ci, une autre étude portant sur les premiers intervenants dans divers scénarios et diverses situations catastrophiques, non seulement dans les ports, mais aussi dans les villes et villages partout au Canada.

Nous avons constaté qu'en certains endroits, on a mis en place un plan qui nous semble bien fonctionner. Ailleurs, il y a parfois des difficultés sur les plans des communications et l'échange d'information, et du partage des priorités et des budgets et de tout le reste entre les diverses organisations qui peuvent être appelées à intervenir en cas de catastrophe.

Dans l'éventualité d'un événement problématique quelconque— il y a fort à parier qu'il sera nouveau et imprévu et, pour utiliser le jargon militaire, non symétrique— dans le domaine de la sécurité maritime, qui prend l'affaire en main? Qui est aux commandes? Il faut bien qu'il y ait un patron.

Par exemple, en matière de recherche et de sauvetage, c'est le ministère de la Défense nationale qui commande les opérations à partir des centres d'où l'on dirige les efforts de recherche et de sauvetage. Ils ont accès à toute l'information et peuvent communiquer avec tous les autres intervenants éventuels, comme la Garde côtière, les Transports, les Pêches, etcetera. C'est le ministère de la Défense nationale qui est aux commandes.

Si un Canadien posait la question «qui est aux commandes?» à la suite d'un événement mettant en cause la sécurité maritime, il semble que la réponse serait: «Eh bien, ça dépend». Nous n'avons pas encore trouvé la réponse à cette question.

Je suis un peu cynique, mais vous avez utilisé l'expression «coopération administrative», en ce sens que le tout serait administré en coopération par les divers ministères gouvernementaux. Cela m'effraie.

M. Frappier: Nous parlions à ce moment-là de coordination des politiques. Il y a aussi des rôles opérationnels. Par exemple, dans le cas d'un attentat terroriste dont on sait qu'il va bientôt se produire dans un environnement maritime, il est clair que c'est alors le plan national de lutte contre le terrorisme qui s'applique, et ce sont donc le Bureau du solliciteur général et le Centre national des opérations de la GRC qui sont aux commandes.

Sur le plan opérationnel, ils auraient alors à leur disposition les ressources matérielles et autres de tous les autres ministères. Notre tâche à nous est de s'assurer non seulement qu'il y a une coordination des politiques, mais aussi que sur le plan opérationnel, tout se passe harmonieusement, qu'il n'y a pas de confusion ou de point d'interrogation, que les gens ne se demandent pas s'ils peuvent compter sur l'appui d'un bateau de la Garde côtière ou de la FOI2 de la Défense nationale, au besoin.

Je pense qu'il y a moyen de s'assurer que l'intervention sera efficace si quelque chose se produit. Il est important d'utiliser les capacités opérationnelles qui sont déjà en place. Par exemple, il faut obtenir la collaboration des services locaux d'intervention d'urgence, en particulier la police locale, etcetera.

La GRC a déjà la capacité d'intervenir en situations d'urgence, et nous voulons nous assurer que cette capacité sera utilisée de façon optimale, parce que de tels événements ne se produiront pas tous les jours, tous les mois ou même tous les ans. Il faut s'assurer que l'on utilisera les systèmes opérationnels qui sont en place.

Si la question est de savoir ce qui se passe sur le terrain, où sont les navires et quels navires sont en cause, c'est clair que le ministère de la Défense nationale est toujours au courant de la situation dans l'environnement maritime et sait où se trouvent les bateaux.

Le sénateur Banks: Nous verrons bien. Je n'en suis pas sûr. C'est justement de cela que je veux parler.

Si un événement survenait à bord d'un navire porte-conteneurs ou d'un pétrolier qui se trouve à 25 ou 50milles au large, en pleine mer, et si l'on déterminait que la GRC devait intervenir, comment les gendarmes se rendraient-ils sur place? La GRC n'a pas de navire ou d'embarcation capable de les amener à 50milles au large.

Examinez-vous la question des communications, du commandement et du contrôle dans une telle éventualité, avec l'autorité, quelle qu'elle soit, chargée de prendre la décision? Comment la GRC va-t-elle se rendre sur place, ou bien la FOI2, ou quel que soit l'intervenant? S'il y a un navire de la Garde côtière cinq milles plus loin, ils ne peuvent rien y faire puisqu'ils n'ont même pas le statut d'agent de la paix. Votre groupe de travail se penche-t-il entre autres sur cette question de la communication, et où en êtes-vous?

M. Frappier: Cela fait assurément partie de notre champ d'étude. Chose certaine, si la GRC a besoin d'un navire de plus grande taille, elle peut faire appel à la Garde côtière ou aux Forces canadiennes et elle peut compter sur les ressources matérielles de ces organismes.

Pour chaque scénario spécifique, quant à savoir où se trouvent les navires, etcetera, il serait préférable de s'en remettre au MDN ou bien à la GRC pour savoir comment ils réagiraient s'ils étaient à 50milles et si la Garde côtière se trouvait tout près. De notre point de vue, c'est important d'imaginer de tels scénarios afin de pouvoir préciser les détails et savoir exactement comment tout cela fonctionnerait. Il est certain que c'est important de s'assurer d'avoir la capacité de faire tout ce qui serait jugé nécessaire.

Le sénateur Forrestall: Je suis plutôt mécontent, pour vous dire la vérité. Ma question de tout à l'heure vous a peut- être mis la puce à l'oreille. J'ai été étonné d'apprendre que le ministère des Transports du Canada, qui, de même que la Garde côtière, n'existe pas, littéralement. S'il existe encore, ce n'est que sur papier, de manière virtuelle. Avez-vous lu ceci?

M. Frappier: J'en ai pris connaissance, je l'ai lu en grande partie. C'était l'un des documents de base dont nous nous sommes inspirés dans nos délibérations en vue de suggérer la voie à suivre au gouvernement.

Le sénateur Forrestall: Quand avez-vous fait cela? Quand le groupe en a-t-il parlé?

M. Frappier: Tout au long de l'automne, mais nous avons commencé nos délibérations pendant l'été. Je pense que votre rapport a été publié en septembre et il tombait donc à pic, en ce sens que nous avions alors des groupes de travail qui analysaient différentes lacunes, etcetera. Il est venu s'ajouter à d'autres sources d'information, et le tout a été passé au crible lors de notre travail d'analyse.

Le sénateur Forrestall: C'est un bon point de départ. L'une des principales préoccupations de notre comité est la sécurité des ports canadiens, c'est-à-dire du littoral, et d'autres questions maritimes.

Nous avons également parlé dans notre rapport d'une coordination viable, acceptable et compréhensible avec les États-Unis, ce qui existait autrefois, chers amis, mais pas dernièrement. Y sommes-nous parvenus? Cela a-t-il fait l'objet de discussions? Quand pouvons-nous escompter connaître les résultats?

Je suppose que j'aurais dû poser cette question plus tôt: Dans quelle mesure votre comité est-il autonome et quelle est l'étendue de ces pouvoirs? Pouvez-vous faire une recommandation dans l'attente raisonnable qu'elle soit adoptée et mise en oeuvre? Où en sommes-nous pour ce qui est de travailler avec la sécurité intérieure aux États-Unis?

M. Frappier: Nous avons beaucoup de contacts avec les États-Unis, comme dans beaucoup d'autres domaines, autant sur le plan national qu'au niveau local. Les Douanes ont programme de travail avec les Douanes des États-Unis et ils ont échangé des agents à différents ports dans le cadre de la sécurité des conteneurs et de la sécurité des biens importés.

Entre Transports Canada et nos homologues de la Transportation and Security Authority des États-Unis, connu sous le sigle TSA, qui fait partie du département de la Sécurité intérieure, nous avons de nombreux protocoles pour ce qui est de l'échange d'information relativement aux navires et personnes susceptibles de nous intéresser.

CIC travaille en très étroite collaboration avec les services d'immigration et de naturalisation des États-Unis, connu sous le sigle INS. Cette même question susciterait des réponses intéressantes de la part de chacun des intervenants qui comparaîtront devant vous aujourd'hui.

Le sénateur Forrestall: Aura-t-on des réponses précises?

M. Frappier: Oui, je pense que vous obtiendrez l'information que vous recherchez.

La Garde côtière américaine est une entité importante aux États-Unis. Transports Canada a de nombreuses relations avec elle en matière de partage de renseignements et d'application des protocoles pertinents dans la voie maritime.

Au plan local, sur la côte Est et sur la côte Ouest, nous avons des réunions de coordination avec la Garde côtière américaine. Le dialogue et la compréhension existent, mais il faudrait les renforcer. Les échanges sont toujours indispensables. Bien sûr, les Américains ont des méthodes différentes des nôtres.

Le sénateur Forrestall: Nous entamons bientôt la troisième année de l'après-11 septembre. En septembre dernier, le comité a recommandé la constitution d'un groupe mixte canado-américain de planification opérationnelle qui comprendrait des représentants de la Marine canadienne, de la Garde côtière canadienne — enfin, de ce qu'il en reste —, de la Marine américaine et de la Garde côtière américaine. Nous avions proposé un effectif d'une cinquantaine de personnes.

Ces 50 personnes devraient se réunir à Colorado Springs, à proximité du NORAD et du personnel de planification. Est-ce que cela s'est concrétisé?

M. Frappier: Oui. En réalité, ce groupe n'est pas exactement celui que vous venez d'évoquer, mais il existe un groupe de planification. Je suppose que le ministère de la Défense nationale serait mieux en mesure que moi de vous l'expliquer. C'est lui qui a organisé ce groupe de planification où il est question à la fois du NORAD et de la coopération militaire.

Il existe des relations étroites entre les autorités civiles. Notre groupe de travail sur la sécurité maritime est un point de contact qui nous permet de poursuivre les discussions sur l'appui à accorder au groupe de planification.

Le sénateur Forrestall: Qu'en est-il de ces deux centres opérationnels que nous avions du côté canadien — l'un à Halifax et l'autre à Esquimalt? Est-ce que la formule s'est concrétisée ou a-t-elle été écartée, et dans ce cas, pourquoi?

M. Frappier: Il y a de l'activité sur les deux côtes. Est-ce que vous parlez du groupe opérationnel canado-américain?

Le sénateur Forrestall: Je parle d'un centre de contrôle opérationnel.

M. Frappier: Je ne sais pas exactement ce qu'il en est du centre de contrôle opérationnel, mais en matière de coordination de l'information, il y a des groupes de travail sur les deux côtes, qui assurent la coordination interministérielle du côté opérationnel.

Le président: Transports Canada est chargé d'assurer la coordination de la sécurité maritime. Est-ce bien exact?

M. Frappier: C'est exact.

Le président: La question du sénateur Forrestall nous amène à nous demander si la marine à Halifax et à Esquimalt était chargée de la coordination opérationnelle de cet élément de la politique que vous êtes en train de définir.

M. Frappier: En ce qui concerne l'information et la compréhension du rôle actuel des navires au sein du système, c'est exact. Mais en ce qui concerne les aspects opérationnels, je dois vous répondre «pas complètement». Par exemple, les Douanes et la GRC font la même chose de leur côté.

Ces activités peuvent se poursuivre de façon indépendante mais chaque service sait ce que font les autres et il y a désormais, comme je l'ai dit, des groupes de travail opérationnels qui assurent des rencontres régulières et de bonnes communications entre les services.

Le président: Parmi les témoins que nous accueillons aujourd'hui, qui est le mieux placé pour nous assurer qu'il n'y a pas de fossé au niveau opérationnel entre ces groupes? Vous ou quelqu'un d'autre?

En définitive, il ne faut pas que chacun tire dans un sens différent des autres.

M. Frappier: Je suis sans doute le mieux placé pour vous le décrire avec une vue d'ensemble. Nous savons qu'il faut encore travailler dans ce domaine. Les ministres ont convenu de constituer un centre de coordination opérationnelle plus performant qui garantira la pérennité de la coordination.

Cela étant dit, les douanes des deux pays devraient pouvoir faire le point de ce qui se passe aujourd'hui dans les ports en matière de coordination entre les services de renseignements et les services chargés d'inspecter les marchandises qui arrivent au pays.

Je considère aussi que les fonctionnaires de la Défense pourraient vous donner une bonne idée de la coordination entre leurs centres de contrôle de la côte Est et de la côte Ouest pour tout ce qui concerne l'information sur les activités en cours dans ces deux secteurs.

Le président: Pour dire les choses sans détour, monsieur Frappier, ce qui nous préoccupe c'est que lorsqu'un problème arrive, nous savons qu'il est possible de reconsidérer votre politique et de la rectifier, mais si un problème se pose au plan opérationnel, nous ne savons pas à qui nous adresser. On a l'impression que la GRC accuse les Douanes, que les Douanes accusent la Marine et que la Marine accuse la GRC.

En définitive, personne n'assume ses responsabilités. Nous aimerions tirer les choses au clair. Ne vous étonnez pas si ce sujet revient sur le tapis dans les questions. Et si le problème n'est pas élucidé aujourd'hui, nous y reviendrons plus tard.

Le sénateur Forrestall: Voulez-vous répondre?

M. Frappier: Je suis convaincu que votre comité étudiera toutes les questions qu'il juge pertinentes.

Sans pouvoir vous donner plus de détails sur ce que nous cherchons, je pense qu'il n'est pas facile, dans une perspective opérationnelle, de déterminer exactement les responsabilités. Comme je l'ai dit, s'il est question d'un événement terroriste et de la façon d'y réagir, je ne pense pas que le système présente la moindre confusion. Personne ne va chercher à se défiler. On va voir que c'est la GRC qui est responsable.

Le président: Si ce point est élucidé, monsieur Frappier, pourriez-vous nous présenter un schéma ou un organigramme qui présente les différents incidents potentiels qui pourraient survenir sur nos côtes? Pourriez-vous nous dire quel organisme serait maître d'oeuvre et quels autres services devraient lui venir en aide? Pourriez-vous nous dire également comment un tel incident déclencherait l'application de vos politiques? Vous nous éviteriez ainsi de tourner en rond. Vous vous rendez sans doute compte que pour nous, les choses ne sont pas claires. Cet organigramme répondrait sans doute aux attentes du comité. Nous pourrions en tout cas voir si la façon de faire est efficace, si elle reste encore trop complexe ou s'il y a lieu de la simplifier.

M. Frappier: Je m'engage à le faire.

Le sénateur Forrestall: Dans ce document, pourriez-vous indiquer également si le ministère des Transports joue un rôle législatif et réglementaire par opposition à un rôle opérationnel en matière de sécurité?

M. Frappier: Voulez-vous parler de la loi et des règlements applicables aux différents scénarios?

Le sénateur Forrestall: Pendant longtemps, la situation est restée satisfaisante en matière de sécurité aérienne. Pensez-vous qu'il puisse encore en être ainsi? Dans ce cas, votre schéma devrait indiquer les autorités chargées d'intervenir et les ressources dont elles disposent à cette fin.

Le président: Pour chaque activité, il faut savoir quelle loi et quel règlement s'appliquent et qui en assume la responsabilité opérationnelle. Supposons qu'une douzaine ou une vingtaine de menaces différentes se présentent et que vous les ayez prévues grâce à votre planification. Le sénateur Forrestall vous demande de nous dire quels éléments législatifs et réglementaires vont s'y appliquer. Quant à moi, je vous demande de nous dire qui aura la responsabilité opérationnelle de veiller à l'application de la loi et qui au bout du compte est responsable du succès de l'opération.

Pensez-vous pouvoir le faire?

M. Frappier: Nous pouvons certainement essayer. J'hésite un peu à cause des différentes lois et des différents règlements. Pour répondre à la question du sénateur concernant Transports Canada, les nombreux règlements qui assurent la sécurité dans l'ensemble des transports relèvent de la responsabilité de Transports Canada. C'est notre ministère qui les impose.

Vous avez beaucoup parlé ce matin de la façon de réagir à un incident. Lorsqu'il est question de réagir, on constitue un scénario en déterminant qui sera chargé d'intervenir. Il existe de nombreux textes législatifs et réglementaires concernant l'infrastructure en place et l'organisme chargé d'intervenir en fonction de cette infrastructure.

Par exemple, une fois que le système de laissez-passer sera en vigueur, nous connaîtrons les travailleurs auxquels Transports Canada aura accordé une autorisation de sécurité. Ainsi, lorsque l'organisme portuaire réagit à un incident spécifique, que les personnes en cause aient des laissez-passer ou non, il va s'y prendre un peu différemment grâce à l'information disponible.

Les mesures législatives et réglementaires sont un peu plus compliquées. S'il s'agit simplement de réagir à l'incident, cela ne devrait pas présenter autant de difficultés.

Le sénateur Forrestall: De façon générale, d'après ce que vous dites, j'ai toujours certains doutes. Transports Canada sera évidemment l'organisme responsable en ce qui concerne toute modification de la réglementation maritime ou l'application des directives gouvernementales. Dans le cas de la GRC, est-ce que c'est le ministère du Solliciteur général? Est-ce que c'est toujours sa responsabilité, c'est-à-dire l'élaboration des politiques et leur mise en oeuvre par quelqu'un d'autre? Est-ce bien ce que vous voulez dire?

M. Frappier: Non. Je ne pense pas qu'il y ait de déplacement. Je veux dire qu'il y a collaboration entre plusieurs ministères dotés chacun de leurs lois et de leurs règlements. Étant donné cette infrastructure, on a ensuite une capacité d'intervention. Par exemple, la GRC est habilitée à intervenir suivant tout acte criminel. Elle peut cependant compter sur un certain nombre d'éléments qui sont déjà en place. Par exemple, il existe de nouveaux règlements concernant l'obligation de doter les navires de systèmes automatisés d'identification ou l'obligation, pour les navires, de s'identifier et de s'annoncer.

On peut obtenir immédiatement une information abondante, dont on sait qu'elle est disponible.

Le sénateur Forrestall: Est-ce que vous considérez l'autorité législative des provinces de la même façon, du moins lorsque les lois provinciales entrent en jeu?

M. Frappier: Je ne m'en occupe pas.

Le sénateur Forrestall: Que faites-vous en cas d'empiétement sur une loi provinciale? Pour poser la question différemment, est-ce que le ministre responsable des relations avec les provinces fait partie de votre groupe de travail?

M. Frappier: Plusieurs ministères ont des relations avec leur homologue provincial. Le Bureau de la protection des infrastructures essentielles et de la protection civile, du ministère de la Défense nationale, est très actif sur ce terrain. Il fait partie du groupe de travail. Il pose souvent des questions concernant l'action ou l'intervention des provinces, ou portant sur la législation provinciale.

Le sénateur Forrestall: Restons-en là pour l'instant, monsieur le président. Je m'inquiète aussi des ressources et des fonds disponibles.

Le sénateur Cordy: Vous avez parlé d'une zone de sécurité, d'une zone autorisée, d'une zone réglementée et d'une zone de sécurité maritime. Est-ce que toutes ces formules sont interchangeables?

M. Frappier: Non. Il y a des zones qui correspondent à chaque élément de l'approche multidimensionnelle de la sécurité. En quelque sorte, nous divisons le monde en différentes zones. En ce qui concerne celles dont vous avez parlé, sénateur, il y a aussi des zones d'accès restreint, c'est-à-dire des zones spécifiquement réglementées qui sont prédéfinies et qui comportent certaines exigences.

Il y a des zones réglementées pour le dédouanement pour lesquelles il existe une structure particulière. Pour analyser l'environnement de sécurité dans lequel nous sommes et que nous voulons garantir, nous utilisons des zones comme les eaux étrangères, les eaux internationales, les eaux canadiennes et le littoral.

Le sénateur Cordy: Est-ce que le port de Halifax est une zone à accès contrôlé?

M. Frappier: Non. Nous allons voir que certaines zones du port de Halifax constituent une zone maritime à accès restreint. Une fois que nous aurons défini la zone à accès restreint, nous verrons que les autorités portuaires sont tenues réglementairement de veiller à ce que toute personne qui pénètre dans cette zone ait un laissez-passer approprié ou soit escortée par un détenteur d'un tel laissez-passer. Pour obtenir le laissez-passer, il faut d'abord obtenir une autorisation de sécurité de Transports Canada.

Une fois ce système mis en place dans le port de Halifax, les zones jugées essentielles forment une perspective de sécurité protégée en ce sens qu'on ne peut pas y circuler à sa guise. Seules les personnes légitimement habilitées à s'y trouver et qui ont obtenu une autorisation de sécurité peuvent y accéder. Ce sont notamment les vérificateurs, les dockers, les surveillants, les gestionnaires et les camionneurs.

Le sénateur Cordy: Au printemps dernier, nous avons consulté les représentants du port de Halifax qui nous ont parlé de la mise en place d'un nouveau système de laissez-passer. À l'époque, j'ai cru comprendre que le laissez-passer comporterait la photo et la signature du titulaire. Est-ce que vous envisagez un système comportant des mesures biométriques ou des codes qui ne donneraient accès qu'à certaines zones du port? Au départ, il m'a semblé qu'on envisageait simplement une carte avec photo. Est-ce que vous prévoyez différents laissez-passer pour les différentes zones du secteur portuaire?

M. Frappier: Il devrait y avoir une évolution. Plusieurs ports ont imposé des laissez-passer avec photo. Ils appliquent des règles différentes en ce qui concerne les personnes qui doivent présenter ces laissez-passer. Ces systèmes visent à répondre aux exigences et aux règlements du gouvernement canadien. Les systèmes actuels devront être perfectionnés car ils ne conviennent pas au contrôle d'une zone à accès restreint. Par exemple, il n'y a pas de vérification des antécédents avant l'octroi du laissez-passer.

Les consultations à venir porteront sur les conséquences des règlements mis en place, qui doivent être applicables au plan opérationnel. Il y sera certainement question de la nécessité de faire figurer des éléments biométriques sur les cartes d'accès.

Du côté aérien, on s'oriente vers l'exigence d'éléments biométriques, comme l'a annoncé le ministre il y a quelques mois. On va sans doute exiger la même chose pour le personnel des ports. La décision n'a pas encore été prise, mais il en sera question au cours des consultations.

Le sénateur Cordy: Vous préparez donc un système national qui imposera les mêmes exigences de sécurité à Halifax, à Vancouver et à Montréal.

M. Frappier: Oui, le système national s'appliquera dans tous les ports désignés.

Le sénateur Cordy: Nous parlons ici de l'accès aux ports par voie terrestre. Qu'en est-il de l'accès par bateau? Je pense aux embarcations de plaisance dans le port de Halifax.

M. Frappier: L'accès par bateau pose encore un problème qu'il nous reste à résoudre. Actuellement, la zone à accès restreint s'applique dans le cas où un bateau accoste. Cependant, il nous reste à déterminer la formule applicable dans les eaux qui entourent les navires présents dans le port.

Le président: Est-ce que la zone portuaire est clôturée? Est-ce qu'elle est entièrement clôturée à Halifax et à Montréal?

M. Frappier: Dans une telle zone, l'accès doit être restreint. La clôture est donc indispensable. Je ne sais pas si toutes les zones sont déjà clôturées. Dans les trois principaux ports, c'est-à-dire Halifax, Montréal et Vancouver, la sécurisation des lieux est déjà en bonne voie.

Le président: Nous sommes le 7avril. Pensez-vous que ces trois ports soient entièrement clôturés?

M. Frappier: Non. Je ne sais pas s'ils le sont entièrement, car je n'ai pas spécifiquement cherché à le savoir. Néanmoins, avec l'entrée en vigueur des exigences concernant les zones à accès restreint, il va falloir s'en occuper.

Le président: Quand?

M. Frappier: D'ici le printemps 2004.

Le sénateur Cordy: J'aimerais que l'on parle du pistage des navires. Je ne sais pas très bien ce qui différencie les régimes américain et canadien en ce qui concerne les avis que doivent donner les navires avant de pénétrer dans les eaux canadiennes ou américaines. Je crois que le préavis est de 96heures avant d'entrer dans les eaux canadiennes

M. Frappier: C'est exact.

Le sénateur Cordy: Pour les eaux américaines, c'est 24heures avant le chargement, n'est-ce pas?

M. Frappier: Je crois que les autorités américaines exigent également un préavis de 96heures. Comme au Canada, c'est indispensable pour pénétrer dans les eaux américaines et pour arriver dans un port, car les deux opérations sont différentes. En plus des obligations douanières, il y a des délais à respecter. Lorsqu'un navire approche des côtes, il doit communiquer à différents points de cheminement.

La surveillance fait aussi l'objet d'une approche multidimensionnelle, qui s'est renforcée grâce aux améliorations récentes. Nous allons avoir un système de radar à haute fréquence qui empêchera les navires de passer inaperçus; ils seront automatiquement repérés par radar. En plus de l'identification des navires à distance, nous aurons le Système d'identification automatisé. Nous connaîtrons l'identité et l'itinéraire des navires qui s'approchent.

Ces deux systèmes fonctionnent conjointement. Si un navire qui s'approche n'est pas doté des éléments du Système d'identification automatisé, le réseau de radar le détectera. Un navire qui n'est pas doté de ce système qu'il est obligé d'avoir va naturellement susciter notre intérêt. La surveillance aérienne va pouvoir entrer en jeu, par l'intervention de la Garde côtière ou des Forces canadiennes, qui vont obtenir de l'information sur ce navire.

L'approche multidimensionnelle permet aux navires de pénétrer dans les eaux canadiennes à des fins commerciales; en outre, elle nous fournit une information précieuse sur tout ce qui touche à la sécurité.

Le sénateur Cordy: Les navires doivent donc donner un préavis de 96heures avant de pénétrer dans les eaux canadiennes, puis s'identifier à l'approche d'un port, n'est-ce pas?

M. Frappier: Chaque navire est obligé de s'annoncer 96heures à l'avance par radio ou par quelqu'autre moyen s'il n'a pas encore pris la mer. C'est ce qui est normalement prévu en matière de communication. Le Système d'identification automatisé est différent. Il s'agit en quelque sorte d'un transpondeur qui se trouve à bord du navire. Cet appareil envoie constamment de l'information dans des conditions définies par règlement sur l'identité du navire, son cap, etcetera. Les renseignements sont reçus par la Garde côtière, indépendamment des communications envoyées par le navire pour signaler sa position. Les deux éléments fonctionnent conjointement.

Le sénateur Cordy: Est-ce que le Système d'identification automatisé est déjà en place?

M. Frappier: Il n'est pas encore obligatoire. Nous avons annoncé qu'il allait devenir obligatoire. L'opération est menée conjointement par tous les pays membres de l'Organisation maritime internationale. C'est un très gros organisme. Le système devrait entrer en vigueur entre juillet et décembre2004.

Le sénateur Cordy: Changeons de sujet. Il existe un sous-comité sur la communication des renseignements. Quel est le but de ce comité? De quoi s'occupe-t-il?

M. Frappier: On a constitué plusieurs sous-comités. Les différents ministères sont habilités, en vertu de leur mandat, à recueillir de l'information sur les navires qui arrivent au Canada et sur les personnes qui se trouvent à leur bord. Nous voulons être en mesure de faire circuler cette information entre les ministères. Le ministère de la Justice nous aide sur ce point. Il faut veiller à ce que l'information ait été recueillie pour des motifs légitimes, et qu'elle ne soit communiquée que dans les cas où sa communication est autorisée. Le comité dont vous parlez nous a aidés à régler plusieurs problèmes juridiques concernant l'échange d'information.

Le sénateur Day: MonsieurFrappier, je vous remercie de vos propos et de votre trousse d'information. Dans le document que vous venez de mentionner, il est question, à la page9, d'un radar haute fréquence à ondes de surface. Ce projet a fait l'objet d'une annonce la semaine dernière. Les 43millions de dollars prévus sont-ils suffisants pour assurer la surveillance radar dont le Canada a besoin?

M. Frappier: Le ministère de la Défense nationale devrait pouvoir vous donner des détails. Il importe cependant de savoir que la Défense a amorcé ce programme il y a quelque temps par des travaux de recherche de haut niveau, qui ont débouché sur des projets pilotes. Il s'agit d'un système modulaire. Chaque radar couvre une certaine zone. Plus on installe de radars, plus on améliore la couverture.

L'étape de la R-D a permis l'aménagement de quelques sites. Ce financement supplémentaire va permettre d'en aménager six autres. Cela devrait suffire à assurer la surveillance des principales voies de navigation vers la côte Est et la côte Ouest. Néanmoins, on en voudrait davantage pour couvrir tout le littoral du pays. Nous avons prévu la surveillance des zones principales d'arrivée des navires.

Le sénateur Day: Est-ce que c'est votre groupe de planification qui a recommandé le montant en question et l'aménagement de ces six nouveaux sites?

M. Frappier: Oui. Tout le monde préférerait une couverture de l'ensemble du littoral, mais la situation financière nous impose des compromis. Le comité a veillé à ce qu'on puisse surveiller au moins les zones par lesquelles arrivent la plupart des navires. Elles sont très fréquentées et nous avons besoin de renseignements nombreux pour être informés de ce qui s'y passe.

Un navire qui s'approche de Montréal par le Saint-Laurent et dont on ignore la présence pose un problème différent de celui qui se trouve à proximité d'une côte où il n'y a ni ville, ni port. Les deux situations sont problématiques, mais elles sont différentes.

Le sénateur Day: À la page13 de votre document, vous nous donnez une bonne idée de votre système. Vous parlez de l'analyse nécessaire du point de vue de la sécurité maritime et de l'analyse systématique à haut niveau. Vous dites que votre groupe de planification a dû trouver l'équilibre entre les exigences idéales et les exigences pratiques. Je trouve qu'il aurait dû indiquer les besoins, quitte à ce que le Cabinet détermine ce qu'il était possible de mettre en place.

Vous semblez dire que vous avez indiqué ce dont on pouvait s'accommoder, sachant qu'il était impossible d'obtenir le système idéal. J'ai l'impression que votre groupe de planification n'est pas allé jusqu'à la formule idéale. Est-ce que j'ai raison?

M. Frappier: Pas tout à fait. Les considérations pratiques, c'est-à-dire les montants disponibles, ne relèvent pas de notre compétence. C'est le Cabinet qui en décide. Cependant, entre l'idéal et le pratique, nous considérons qu'il faut mettre en place un système qui soit compatible, par exemple, avec les exigences du commerce. Du point de vue de la sécurité, l'idéal serait de pouvoir ouvrir et inspecter tous les conteneurs arrivant dans n'importe quel port canadien. Ce serait un excellent système, mais il ne serait pas pratique. Il est impossible d'inspecter tous les conteneurs, à moins de bloquer le commerce international. Nous envisageons l'idéal du point de vue de la sécurité, mais il faut aussi veiller à ce que le système soit opérationnel.

Le sénateur Day: Je comprends votre exemple. Cependant, en ce qui concerne la surveillance radar de notre littoral, si tous les experts nous disent qu'il faudrait 12stations alors que nous en avons que six, est-ce qu'on va faire le travail à moitié sous prétexte que le Cabinet rechigne à accepter le coût de ce qui est idéal ou nécessaire?

M. Frappier: Non. Plusieurs possibilités ont été proposées pour ce projet particulier. Dans la plupart des zones, les possibilités correspondaient aux disponibilités financières. Vous avez cité le cas des systèmes de radar. Il s'agit d'un bon exemple d'un cas où il serait possible d'en faire davantage. Nous avons formulé la proposition dans un mémoire au Cabinet. Il revient au Cabinet de prendre les décisions.

Le sénateur Day: Je constate avec satisfaction que vous connaissez le contenu du rapport de notre comité daté de septembre2002. Aux pages13 et14 du rapport, nous formulons un certain nombre de recommandations. Vous avez abordé certaines d'entre elles.

Nous avons été fort heureux de l'annonce faite par le ministre à Halifax il y a quelques mois. Même s'il n'a pas retenu certaines des recommandations, tout au moins avons-nous apporté quelque chose au débat. Nous avons confirmé que certaines des recommandations de votre groupe interministériel étaient nécessaires et le ministre en a tenu compte, de sorte que tous les Canadiens sont gagnants.

J'aimerais vous voir nous signaler les domaines où il reste encore du travail à faire. Vous en avez abordé certains. Pour ce qui est du premier point, à savoir l'adoption d'une approche multidimensionnelle ou stratifiée, à moins que vous ne jugiez opportun d'en parler davantage, je crois que vous en avez traité suffisamment en réponse aux questions du sénateur Cordy.

Pourriez-vous nous dire quels sont vos progrès par rapport aux recommandations et nous signaler également les recommandations auxquelles il est impossible de donner suite ainsi que celles qui sont vraiment inopportunes? Votre aide en la matière serait appréciée.

M. Frappier: Comme je l'ai dit, le document a été jugé fort important. Nous tenons certainement à remercier le Sénat de l'avoir élaboré. Je n'ai pas parcouru chacune des recommandations, mais le groupe de travail a probablement étudié le document, ainsi que d'autres également. Je ne crois pas pouvoir aborder chaque recommandation en détail.

À la page13, nous avons parlé d'une approche stratifiée en matière de rapport et de surveillance. J'estime que l'annonce récente constitue un pas en avant à cet égard.

En deuxième lieu, le but premier du groupe de travail est d'assurer une plus grande coordination de l'ensemble des ressources canadiennes tant sur le plan de la politique que sur celui de la doctrine opérationnelle. Il est toujours possible de faire mieux. Même s'il s'agit d'un domaine complexe, nous faisons des progrès importants. Je crois que notre groupe de travail doit concentrer ses efforts sur ce domaine précis.

Le sénateur Day: Ai-je bien compris que votre groupe de travail est davantage intéressé par la coordination de la politique que des opérations?

M. Frappier: C'est ce que nous avons fait jusqu'à maintenant. Dans sa décision de janvier, le Cabinet nous a confié comme mandat de nous pencher sur la coordination opérationnelle. Nous nous penchons donc davantage sur cet aspect maintenant.

Nous ne participons pas à ce qui se passe à l'heure actuelle sur la côte Est et nous ne participons pas non plus lorsqu'un événement exige l'intervention de la GRC. Chaque ministère a son rôle et peut fonctionner sans l'approbation de notre groupe de travail. Nous allons veiller à la coordination entre les groupes opérationnels.

Le sénateur Day: Aurez-vous un rôle de surveillance pour ce qui est de la mise en oeuvre des règlements qui entreront en vigueur l'an prochain? Par exemple, votre groupe aura-t-il des responsabilités de veiller à ce que des clôtures de sûreté soient érigées autour des divers ports?

M. Frappier: Le groupe de travail n'a pas la responsabilité de faire appliquer l'ensemble des règlements. L'exemple que vous citez relèverait de ma responsabilité étant donné que cela concerne Transports Canada. Cependant, les Douanes auraient des exigences qui leur sont propres et assureraient l'application des règlements pertinents grâce à leurs propres mesures d'application.

Notre groupe de travail visera à améliorer les choses. Nous serons vraisemblablement informés de toutes questions importantes et nous serons alors peut-être en mesure de combler certaines lacunes. Il se peut que certains règlements ne soient pas élaborés aussi rapidement que prévu et, dans de tels cas, nous aurons à déterminer comment les divers ministères devraient réagir.

Le sénateur Day: Où se situe donc la responsabilité ultime pour ce qui est d'une réglementation particulière visant l'ensemble des mesures de sécurité que vous recommandez? Votre groupe de travail veille à l'élaboration de la réglementation, mais il n'assure pas la mise en oeuvre par la suite.

M. Frappier: Vous avez raison. La responsabilité revient à chaque ministre. Le ministre des Transports, par exemple, assumera la responsabilité de toute la réglementation qui relève de Transports Canada. Pour les questions qui concernent plus d'un ministre, elles seront traitées au Cabinet et aux comités du Cabinet.

Le sénateur Day: Voilà qui explique probablement votre rapport au groupe mixte de planification opérationnelle. Vous avez peut-être d'autres commentaires qui permettraient de mieux comprendre. Ou bien vous estimez nous avoir déjà dit ce que vous jugez important de nous faire savoir.

M. Frappier: Les explications fournies au sujet du groupe de planification opérationnelle ne correspondent pas exactement à la connaissance que j'en ai. Encore ici, nos collègues du ministère de la Défense nationale sont mieux en mesure de répondre.

Nous avons parlé brièvement de coordination des ressources en matière de surveillance et de l'approche stratifiée. Nous cherchons à éviter les vides. En matière de coordination, nous veillons à faire en sorte que l'information circule comme il se doit.

Comme l'a dit le sénateur Cordy, l'un de nos sous-groupes se penche précisément sur l'interopérabilité des sources d'information. Nous cherchons également à améliorer l'infrastructure de télécommunications. Nous souhaitons utiliser le réseau pour faire circuler l'information de façon plus efficace entre les ministères.

Le sénateur Day: Permettez-moi de m'appuyer sur un exemple pratique pour obtenir certaines précisions. Lorsqu'il est question de navires arrivant dans nos ports, nous pensons souvent aux porte-conteneurs ou aux vraquiers. Dans le cas d'un navire de pêche au large de nos côtes, cependant, la responsabilité viendrait aux Pêches ou à la Garde côtière. Est-ce que les responsables des Pêches disposent d'un système d'information automatique qui assurera la transmission d'un signal? Comment assure-t-on la coordination avec la Garde côtière, le ministère de la Défense nationale ou la police? Comment se fait la coordination de renseignements qui relèvent du secteur des pêches?

M. Frappier: Tous les navires de pêche doivent respecter les exigences de Transports Canada se rapportant à la Loi sur la marine marchande du Canada et diverses dispositions de cette nature.

À l'heure actuelle, les exigences concernant les systèmes d'information automatiques visent les navires d'une certaine taille inscrits auprès de l'OMI. Nous déterminerons progressivement s'il convient d'appliquer la même exigence à d'autres navires. Nous étudions la chose dans le cadre du processus de consultation en cours à l'heure actuelle. Nous n'avons encore déterminé si les navires de pêche devront être dotés de tels systèmes. La taille du navire visée par une telle exigence n'a pas encore été déterminée.

Nous avons parlé des centres opérationnels.

Le sénateur Day: C'est le sénateur Forrestall qui avait soulevé la question.

M. Frappier: C'est exact. Pour ce qui est de l'analyse des renseignements relatifs au transport maritime et de la capacité de donner une perspective d'ensemble des opérations, c'est chose faite.

Le sénateur Day: Il nous a semblé que tel n'était le cas lorsque nous avons soumis le rapport il y a un an et demi.

M. Frappier: Le travail abattu depuis ce moment-là est considérable; on a surtout cherché à améliorer la coordination entre les ministères et entre les systèmes d'information. À mesure que nous abordons l'aspect opérationnel, il reste encore certaines difficultés à surmonter. Nous sommes sur la bonne voie.

Le quatrième point porte sur les ententes réciproques entre navires. L'activité a occupé une place importante depuis votre dernière rencontre concernant le processus de l'OMI.

Le président: Excusez-moi, sénateur Day. Le travail que vous faites est utile. Je constate cependant que nous dépassons déjà de 10minutes le temps alloué et que notre prochain groupe de témoins est en attente.

M. Frappier: Serait-ce trop vous demandez que de vous pencher sur les recommandations de notre rapport de février2002 et de celui de septembre2002 également? Les deux rapports portent sur la sécurité portuaire et la sécurité de nos côtes. Pourriez-vous nous fournir une réponse écrite en précisant les mesures prises par votre ministère à la suite de nos recommandations?

J'aimerais bien pouvoir porter cette information au procès-verbal d'aujourd'hui, mais je pense qu'il importe pour nous de terminer le travail auprès des témoins prévus pour aujourd'hui et j'aimerais donc vous demander, monsieurFrappier, de nous fournir ces renseignements.

M. Frappier: Je vais certainement me pencher sur ces aspects.

Le président: Nous sommes impatients de recevoir vos commentaires. Après en avoir pris connaissance, nous serons en mesure de déterminer si vous devrez revenir nous fournir d'autres détails concernant vos réponses. Merci, monsieur Frappier, des renseignements utiles que vous nous avez fournis ce matin. Il s'agit d'un sujet qui continue de nous intéresser. Nous espérons pouvoir compter sur votre aide lorsque nous aurons à nous y pencher à nouveau à l'avenir.

M. Frappier: Je vous remercie de m'avoir invité.

Le président: Nous recevons maintenant le vice-amiral Ronald Buck, chef d'état-major des Forces maritimes. Il est accompagné par le capitaine Peter Avis, directeur de la Politique maritime.

Bienvenus au comité.

Le vice-amiral Ronald Buck, chef d'état-major des Forces maritimes, ministère de la Défense nationale: C'est un plaisir pour moi que de comparaître devant vous aujourd'hui pour vous soumettre un mémoire concernant la défense côtière dans le cadre de votre examen.

[Français]

Je me suis adressé à ce comité pour la dernière fois en août 2002. Vous vous souviendrez probablement que j'avais parlé de la coordination de la surveillance et des opérations des approches maritimes du Canada non seulement entre Canadiens, mais aussi avec nos alliés américains dans leurs zones de responsabilité adjacentes.

[Traduction]

Je suis accompagné aujourd'hui par le capitaine Peter Avis, qui joue un rôle clé au sein du Groupe de travail interministériel sur la sûreté maritime. Comme vous l'a dit M.Frappier, ce groupe a étudié la sûreté maritime du Canada et formulé un certain nombre de recommandations visant à combler certaines lacunes qui nous rendent vulnérables.

Beaucoup d'eau a coulé sous les ponts au Canada en matière de sécurité intérieure depuis le 11septembre. Des projets de loi concernant la sécurité ont été adoptés au Parlement. Des mémoires au Cabinet concernant le Groupe de planification Canada-États-Unis et la sécurité maritime ont été adoptés et un décret concernant les zones de sécurité l'a été également. De plus, l'état de préparation militaire sur le plan intérieur a changé très considérablement dans de nombreux pays, y compris le Canada.

La première obligation du ministère de la Défense nationale et des Forces canadiennes consiste à défendre le pays et ses citoyens contre toutes menaces militaires. Bien qu'il soit critique pour les Forces canadiennes d'avoir la capacité militaire de défendre le Canada, le commandement maritime — la marine — participe également aux activités de sécurité intérieure visant à contrer la menace terroriste aussi bien au Canada qu'en Amérique du Nord. Sur le plan intérieur, le commandement maritime assure la sécurité intérieure en affectant ses ressources militaires à l'appui des organismes civils d'application des lois et en participant à la surveillance des approches maritimes avec d'autres partenaires gouvernementaux.

S'il y a une chose à retenir de la dernière année dans le domaine de la sécurité nationale, c'est bien que le terrorisme a modifié l'espace de combat. Sortis de nulle part et transformant des moyens de transport civils en armes offensives pour s'attaquer à des civils, les terroristes ont changé la façon de penser la sécurité nationale, tant chez les civils que chez les militaires. Avant le 11septembre, il était facile de distinguer les enjeux militaires des préoccupations civiles en matière de sécurité. Ce n'est manifestement plus le cas. Les diverses composantes du gouvernement sont maintenant portées, par la force des choses, à travailler la main dans la main.

[Français]

Le Canada a la plus longue façade côtière au monde, bordée de trois océans et le transport maritime est possible jusqu'au cœur du continent par la voie de maritime du Saint-Laurent et des Grands Lacs. Nous avons donc un immense secteur où circulent un grand nombre de navires transporteurs de passagers et de marchandises, ainsi que des bâtiments de recherche de pêche et de plaisance qui sont tous essentiels au bien-être économique du Canada.

[Traduction]

Appelés à coordonner leurs travaux par l'intermédiaire du Groupe de travail interministériel sur la sûreté maritime, 17ministères et organismes fédéraux se sont appuyés sur la méthode d'atténuation des risques pour cerner les failles dans la sûreté maritime du Canada et proposer des recommandations visant à corriger la situation. En janvier 2003, le gouvernement fédéral a annoncé une série d'initiatives destinées à colmater les brèches dans ce domaine. Les missions à accomplir ont été réparties entre les ministères et organismes concernés, en fonction des domaines de compétence et des responsabilités reconnues de chacun. Ces missions visent toutes à garantir la sûreté maritime du Canada.

De plus, la protection de nos propres forces — c'est-à-dire celle qui vise les installations des Forces canadiennes partout au pays— a été renforcée. Dans la perspective des forces navales, cela a notamment donné lieu à la création de zones d'accès contrôlé dans les ports de Halifax, d'Esquimalt et de Nanoose.

[Français]

La contribution du commandement maritime à la sécurité maritime a pris la forme d'une plus grande collaboration et d'un élargissement de notre capacité de surveillance maritime, ce qui est dans l'intérêt de la sécurité maritime du pays et de celle du continent.

[Traduction]

Dans le cadre des travaux du GTISM, les Forces canadiennes ont obtenu récemment les résultats d'une étude indépendante qui porte sur la nécessité de mettre sur pied le système de gestion des renseignements et d'échange de données maritimes (SGREDM). Il s'agit d'un réseau qui rend plus efficace l'échange de données entre les ministères et organismes participants. Comme le rapport vient d'être rédigé, nous n'avons pas eu l'occasion d'en examiner les constatations ni les recommandations. Le GTISM évaluera le rapport et décidera d'ici la fin du mois s'il y a lieu de poursuivre l'idée d'implanter ce réseau.

L'esprit de collaboration en matière de sûreté maritime que j'ai constaté aux échelons régionaux du Comité interministériel des opérations maritimes pour l'est du Canada, du Comité interministériel des opérations maritimes pour le Pacifique et du Comité de contrôle des navires de la Voie maritime du St.Laurent est certes encourageant. Ces trois groupes communiquent avec le GTISM pour échanger des idées et adopter des politiques.

[Français]

Comme nous l'avions dit en août, le continent nord-américain est divisé en zones de responsabilitéscanadiennes et américaines. Les Forces armées de chaque pays sont au courant des activités de l'autre dans leurs zones respectives et elles échangent continuellement des renseignements sur la circulation des navires dans ces zones.

[Traduction]

Étant donné vos entretiens avec le major-général Daigle et le colonelWilliams le 17mars dernier, vous savez déjà que des gouvernements canadien et américain ont mis sur pied un groupe binational de planification pour renforcer la collaboration militaire, de manière à mieux protéger l'Amérique du Nord. En janvier, ce groupe binational de planification a terminé sa séance d'analyse de mission au Colorado. Il se lancera bientôt dans la rédaction de plans canado-américains pour améliorer la capacité des deux pays à travailler de concert.

Je suis heureux de vous signaler que le contre-amiral James Fraser, l'actuel commandant des Forces maritimes du Pacifique, a été nommé officier de liaison entre le Groupe de planification et le Northern Command. Personne n'est mieux placé que lui pour comprendre les diverses facettes de la sûreté maritime.

Le Groupe de travail sur les plans et la surveillance maritimes, qui relève du groupe canado-américain binational de planification, axera ses travaux, comme son nom l'indique, sur les plans et la surveillance maritimes. Il sera appelé à collaborer notamment avec le GTISM et le Groupe de travail sur la surveillance maritime du NORAD, afin d'élaborer des plans militaires dans la perspective particulière de la collaboration militaire entre les deux pays.

En matière de surveillance, parmi les nouveaux projets de sûreté maritime annoncés par le gouvernement canadien en janvier dernier, mentionnons la décision de la Défense nationale de mieux surveiller les zones de navigation intense sur les voies d'accès à la côte est et à la côte ouest du Canada, en installant des radars haute fréquence à ondes de surface à cinq ou six endroits. Notre capacité de surveillance s'étendra alors à environ 200kilomètres des côtes. Le gouvernement a déjà donné son accord au projet. Il reste maintenant à peaufiner la proposition et à la soumettre au Conseil du Trésor pour en faire approuver le financement.

[Français]

À l'initiative du ministère des Pêches et des Océans, des renseignements supplémentaires seront envoyés à nos centres d'information et de surveillance des opérations maritimes à Esquimalt et Halifax, au moyen des avions de surveillance maritime de la Direction générale de la conservation et de la protection du ministre des Pêches et des Océans.

[Traduction]

Des travaux sont en cours pour examiner la possibilité de prendre d'autres initiatives destinées à combler les lacunes observées sur le plan de la sûreté maritime. Le GTISM se penche actuellement sur le dispositif d'intervention prévu pour faire face à des attentats terroristes et sur la nécessité de se doter de centres chargés de fusionner et de coordonner les mesures de sécurité. Les Forces canadiennes étudient les technologies capables de pousser plus loin l'automatisation de la fusion des données sur la surveillance maritime, y compris celles provenant du réseau de radars haute fréquence à ondes de surface.

[Français]

Les Forces canadiennes, différents ministères et organismes fédéraux ont formé un groupe de travail spécial visant à établir un réseau secret d'information. Ce réseau facilitera les communications tant horizontales que verticales au sein des communications d'intérêt et de sécurité.

[Traduction]

Les Forces canadiennes sont également représentées au sein du Groupe de travail sur la surveillance maritime du NORAD, qui examine la nécessité d'adopter un plan nord-américain de surveillance maritime. Le GTISM ne cesse d'examiner les façons de combler les lacunes sur le plan des informations nécessaires à la surveillance maritime des eaux sous juridiction canadienne, qu'il s'agisse des Grands Lacs, du golfe du Saint-Laurent, de l'Arctique ou des zones qui échapperaient à la portée de radars haute fréquence à ondes de surface.

Le GTISM songe également à élaborer le plan national de sûreté maritime. Ce plan pourrait servir de base, éventuellement, à l'élaboration de la stratégie nationale de sûreté maritime.

[Français]

En conclusion, je voudrais dire que les attentats terroristes du 11 septembre 2001 ont joué un rôle de catalyseur. En effet, ils nous ont conduits à faire un examen critique des vulnérabilités de la sécurité maritime, donc à resserrer notre sécurité maritime et, notamment, à établir un processus d'examen continu des vulnérabilités de la sécurité maritime.

[Traduction]

Voilà qui met un terme à mes commentaires préliminaires. Le capitaine de vaisseau Avis et moi-même répondrons avec plaisir à toutes vos questions.

Le sénateur Forrestall: L'aspect des ressources me préoccupe au plus haut point. Le fait de laisser la planification en matière de sûreté au ministère des Transports m'inspire certaines réserves, d'autant plus que ce ministère, tout comme la Garde côtière, a subi d'importantes compressions. Je m'interroge sur l'utilité de ce ministère est en outre la réglementation. Tout cela pour dire que je m'inquiète quelque peu de voir le ministère des Pêches se mettre à gérer des questions militaires,— et ce, à juste titre, je crois.

Puis-je vous interroger au sujet de notre flotte? Pour réussir, vous allez devoir remettre à contribution le Halifax Rifles pour défendre votre littoral, ou il va falloir prendre des mesures au sujet de nos navires et de la Garde côtière. Nous avons déjà affecté à peu près le tiers des principaux éléments de notre flotte à d'autres activités.

Où pourrons-nous trouver les dragueurs de mine pour effectuer cette surveillance côtière et assurer cette protection? Devons-nous grimper d'un échelon pour faire intervenir vos frégates? Où pouvons-nous nous adresser pour trouver les ressources? Si vous ne les avez pas, comment décririez-vous les ressources idéales qu'il vous faudrait pour satisfaire nos amis américains relativement à la sécurité et à la défense côtières?

Vam Buck: Toute la question de la cohésion et de l'uniformité dans le dossier de la sécurité maritime repose sur quelques éléments de base, dont l'un est ce que j'appelle la «surveillance»; je pense que le comité appelle cela la «connaissance du domaine». D'abord et avant tout, il s'agit de s'assurer que nous avons la capacité requise pour exercer un contrôle. Dans bien des cas, la surveillance sur une vaste superficie se fait soit à partir d'aéronefs à voilure fixe, soit au moyen d'installations de radar fixes.

Les navires eux-mêmes ne sont pas la plate-forme de surveillance optimale; ils sont très limités, dans ce qu'ils peuvent faire à cet égard. Ce sont toutefois d'excellents vecteurs pour effectuer une interception et pour mener à terme une intervention contre une menace quelconque.

Vous m'avez demandé si, en fait, ce rôle était confié uniquement aux navires de défense côtière maritime. Dans la flotte de la marine canadienne, nous avons à la fois de gros navires de guerre, surtout des frégates, mais aussi des destroyers et, dans une certaine mesure, des sous-marins, mais nous avons aussi des navires de défense côtière. Historiquement, et c'est encore vrai aujourd'hui, nous faisons intervenir l'ensemble de ces navires pour jouer le rôle nécessaire. Différents navires ont des capacités différentes.

Vous avez dit qu'environ un tiers de notre flotte de navire de guerre est actuellement déployée. En ce moment même, trois navires sont en poste dans le golfe Persique, et deux autres sont de retour d'une mission là-bas. Le reste de la flotte est essentiellement engagée dans des activités océaniques au large de nos côtes Atlantique et Pacifique.

Ce n'est pas nécessairement une seule catégorie de navires; nous faisons appel à l'ensemble de nos ressources.

En plus des ressources des Forces canadiennes ou maritimes, nous pouvons aussi compter sur certaines ressources de la Garde côtière qui sont disponibles, soit pour servir de postes de recherche et de sauvetage, soit pour accomplir d'autres activités plus courantes de la Garde côtière. En fait, une série de capacités distinctes sont rassemblées pour constituer une capacité holistique.

Un domaine clé sur lequel nous nous sommes concentrés depuis le 11septembre, c'est d'essayer de mettre en place toutes les pièces du casse-tête de la surveillance, et d'échanger plus efficacement l'information sur ce qui se passe dans nos approches océaniques, pour ensuite utiliser au mieux les navires du gouvernement qui sont disponibles pour effectuer l'interception ou l'interdiction.

Le sénateur Forrestall: Est-ce que le ministère des Pêches et des Océans, à cet égard, conviendrait mieux que la Défense nationale?

Vam Buck: Il n'est pas question que je parle au nom du MPO ou de la Garde côtière canadienne. Leur mandat est très différent de l'interdiction de sécurité. Ce n'est pas leur mandat, sauf dans certains domaines légiférés.

Le sénateur Forrestall: Ils demeurent les seuls à pouvoir procéder à des arrestations, par exemple.

Vam Buck: Non. Cela dépend du problème. Si c'est un dossier d'immigration, c'est Citoyenneté et Immigration Canada qui possède le pouvoir requis. Si c'est une affaire de police ou criminelle, c'est plutôt la GRC. L'Agence des douanes et du revenu du Canada, l'ADRC, possède aussi certains pouvoirs. Les pouvoirs, selon la nature de l'incident, sont confiés à un certain nombre d'autres ministères ou organismes gouvernementaux.

Le plus souvent, en cas de problème grave, c'est un navire des Forces canadiennes ayant à son bord des représentants du ministère compétent qui effectue l'interception et éventuellement l'arrestation, mais un certain nombre de ministères gouvernementaux possèdent divers pouvoirs, en fonction du dossier précis.

Le sénateur Forrestall: La marine demeure le principal intervenant, et non pas le ministère des Pêches.

Vam Buck: La marine est la principale source de déploiement des navires, si on veut, pour effectuer les interceptions, essentiellement à cause de la capacité des gros navires de guerre, qui leur donnent une plus grande vitesse, une meilleure endurance et une capacité considérable sur le plan organisationnel.

Le sénateur Forrestall: Quelles ressources, à votre connaissance, possède la Garde côtière? Je devrais peut-être attendre et poser ces questions à la Garde côtière. Sur quelles ressources pouvez-vous compter si vous faites appel à la Garde côtière pour vous aider à assumer vos responsabilités?

Vam Buck: Cela varie, cela dépend des jours. Chose certaine, dans le Pacifique, la Garde côtière déploie des navires d'assez fort tonnage dans des postes de recherche et de sauvetage sur lesquels on peut compter, ainsi qu'un large éventail d'autres navires. Cela dépend vraiment de la nature de l'incident. Quand on élabore un plan pour savoir comment on réagirait face à un problème particulier, il faut d'abord savoir quelle est la nature de l'incident, où il s'est produit, quelles sont les conditions météo, et en fin de compte de quels navires la Garde côtière pourrait disposer, compte tenu du fait que ce n'est pas son premier mandat.

Le sénateur Forrestall: Vous avez dit que vos destroyers et frégates ne sont pas les meilleurs véhicules pour assurer la surveillance maritime.

Vam Buck: C'est exact, mais ils sont très efficaces pour mener à terme une intervention, bien qu'ils soient des plates- formes coûteuses.

Le sénateur Forrestall: Ces plates-formes seraient-elles meilleures si elles avaient à leur bord un 101 ou un Sikorsky?

Vam Buck: Comme nous le savons tous, nous avons hâte que l'on remplace le Sea King.

Le sénateur Forrestall: J'espère que cela se fera avant que vous preniez votre retraite, monsieur.

Vous avez parlé de la côte Ouest. Qu'en est-il de la côte Est, pour ce qui est de la Garde côtière? Quelle est votre responsabilité relativement aux cours d'eau et aux lacs?

Vam Buck: La plupart des marines militaires occidentales n'ont pas compétence sur les eaux intérieures, et à l'heure actuelle, c'est le cas au Canada. Les cours d'eau et les Grands lacs ne sont pas du ressort de la marine.

Le sénateur Forrestall: Et la côte Est?

Vam Buck: Dans l'Atlantique, notre mandat est essentiellement celui de la surveillance, et puis, lorsque le gouvernement ou les autorités compétentes, à savoir la GRC ou Immigration Canada, nous en confie le mandat, nous fournissons un navire pour effectuer une interception, mais sous l'autorité des autres ministères gouvernementaux, pas du nôtre.

Le sénateur Forrestall: Ce que j'essaie de savoir, c'est quelles ressources la Garde côtière canadienne peut mettre à votre disposition pour vous aider dans cette tâche?

Vam Buck: La Garde côtière canadienne a une flotte de plus de 100navires très diversifiés par leur nature et leur taille, mais leur premier mandat ne se situe pas dans ce domaine. Si un plan interministériel est établi et que la GCC a des ressources disponibles, elle fournit généralement des navires, mais seulement très ponctuellement.

Le sénateur Forrestall: Je comprends ce que vous dites, mais c'est un peu trompeur de dire que cette ressource est à votre disposition. Vous n'avez pas dit qu'il y avait 100 navires.

Vam Buck: Ce n'est pas ce que j'ai dit. J'ai dit qu'ils ont une flotte.

Le sénateur Forrestall: Une flotte partout au Canada.

Vam Buck: En effet.

Le sénateur Forrestall: Y compris dans les lacs et les cours d'eau. J'avais posé la question dans le contexte de la côte Est. Je comprends que la côte Ouest est de nature différente. Je comprends la côte Est. Je me demande ce que vous avez à votre disposition.

Vam Buck: Je le répète, c'est une question que vous devrez poser à la Garde côtière canadienne, parce que la réponse serait différente d'un jour à l'autre. Je ne suis pas au courant des contraintes en matière de planification opérationnelle de la Garde côtière. Je sais qu'à l'occasion, quand nous avons demandé des navires, de façon générale, on nous les a fournis.

Le sénateur Forrestall: Est-il possible de faire intervenir les navires de commerce qui naviguent dans nos eaux et qui peuvent se trouver sur place à l'occasion? Êtes-vous autorisés à réclamer leur aide?

Vam Buck: En général, en Amérique du Nord, y compris aux États-Unis, l'exigence imposée à la marine marchande pour ce qui est de coopérer avec la marine de guerre, serait limitée aux opérations de recherche et de sauvetage.

Le sénateur Forrestall: Cela n'inclut-il pas la surveillance?

Vam Buck: La surveillance se ferait sur une base volontaire seulement. C'est la pratique normale pour n'importe quel marin de signaler quoi que ce soit d'anormal, mais il n'y a pas d'obligations.

Le sénateur Forrestall: Dans quelle mesure le secteur volontaire est-il actif, par exemple les pêcheurs?

Vam Buck: De façon générale, ces rapports-là ne sont pas acheminés directement au ministère de la Défense. Ils nous parviennent par l'intermédiaire d'autres ministères et il serait donc préférable de poser la question aux représentants des ministères en question plutôt qu'à moi.

Le sénateur Forrestall: Êtes-vous satisfait de l'accès à l'information tirée de ces rapports?

Vam Buck: Nous avons des sources d'information diverses provenant de toute une variété d'autres ministères, organismes gouvernementaux, nos alliés, classifiée et non classifiée. Notre travail est de prendre l'information, et de la décanter à Halifax ou Esquimalt, dans deux de nos centres d'opérations où sont produits les rapports de situation maritime générale.

Le sénateur Forrestall: Enfin, pourriez-vous nous parler du rôle des réserves dans ce mandat plus vaste?

Vam Buck: Je suis très fier de la réserve navale canadienne. Son effectif est de près de 4000personnes et elle s'acquitte de divers rôles se rapportant directement à la défense côtière, à la surveillance et à la sécurité maritime en général. Plus précisément, les équipages des navires de défense côtière viennent de la Réserve navale. Les divisions de la Réserve navale ont aussi des équipes de plongée et d'inspection des ports bien formées, de même que des accords efficaces pour le contrôle des ports. Tout cela compte pour la sécurité maritime en particulier et en général, non seulement pour la surveillance maritime mais aussi pour la capacité des divers ports canadiens.

Le sénateur Forrestall: Auriez-vous des objections à ce que nous demandions à l'amiral d'aller visiter les réserves de la côte Est, à Halifax?

Vam Buck: Non, pas du tout.

Le président: J'aimerais poser une question, à la suite de celles de M.Forrestall. Avez-vous des navires toujours en poste, au large de chaque côte? Avons-nous une surveillance 24/7, actuellement, au Canada, ou est-ce que les déploiements dans le golfe et ailleurs le rendent impossible?

Vam Buck: Historiquement, même quand nous ne menons pas d'opérations comme nous le faisons actuellement, nous ne proposerions jamais d'assurer une présence permanente. Nous avons une capacité d'action permanente pour nos navires, c'est-à-dire qu'ils sont toujours prêts à intervenir. Rien n'a changé après le 11septembre2001. La clé, c'est d'avoir la meilleure surveillance possible. Plus on a de surveillance, plus efficace sera la position des navires, notamment du point de vue des coûts. Par exemple, la Garde côtière américaine a un mandat pour le faire. Ces navires sont constamment en mouvement, mais est-ce qu'ils couvrent l'ensemble des côtes américaines, 24heures par jour, sept jours par semaine, 365jours par an? Non.

Le président: Pourriez-vous aujourd'hui appuyer sur un bouton, pour qu'un bateau parte à toute vapeur d'ici deux ou trois heures?

Vam Buck: En fait, il pourrait se mettre en route en une demi-heure, puisque nous ne fonctionnons plus à la vapeur.

Le président: J'essayais d'employer des termes nautiques, mon amiral. Il faut être indulgent avec moi, parce que mon équipage me fait la vie dure.

D'après ce que vous dites, vous préparez l'information pour que les autorités nécessaires puissent se rendre au bon endroit, au bon moment. Avez-vous toujours les autorités qu'il faut à bord d'un navire? Que faites-vous si c'est un problème de pêche alors qu'au moment où le navire a quitté le port, on pensait que ce serait l'affaire de la GRC? Si j'ai bien compris, pour un problème de douanes, il faut un agent des douanes, pour un problème de sécurité nationale, un agent de la GRC, et aussi, des agents du MPO. Embarquez-vous automatiquement les trois, en quittant le port? Que faites-vous s'il manque l'un d'eux à bord?

Vam Buck: En général, c'est en fonction de l'incident. Au départ, on a de très bons renseignements sur l'incident à traiter. Normalement, la présence de la GRC est toujours assurée, en plus des autres représentants gouvernementaux pertinents.

Le président: Est-ce qu'un agent de la GRC peut veiller à l'application d'autres lois?

Vam Buck: Non. Ils ont un mandat et un pouvoir d'arrestation de nature générale. Dans certains cas, leur autorité est associée à celle de Pêches et Océans, par exemple.

Le président: Si vous n'avez pas à bord un représentant du ministère des Pêches et des Océans, est-ce que l'agent de la GRC peut s'acquitter de ces tâches et veiller à l'application des lois sur les pêches?

Vam Buck: Non. Il faut obtenir les pouvoirs gouvernementaux appropriés d'une délégation de pouvoir à une personne à bord, que ce soit l'agent de la GRC ou quelqu'un de nos propres forces.

Le président: En fait, si un navire a pris la mer, vous n'avez besoin que d'un message disant que les pouvoirs nécessaires ont été délégués, pour agir?

Vam Buck: Oui.

Le sénateur Cordy: Notre témoin précédent a parlé des zones de sécurité, comme vous l'avez fait vous-mêmes, dans vos propos liminaires. L'approche à plusieurs niveaux pour la surveillance des navires entrant dans les eaux canadiennes, et naviguant en eaux canadiennes, fait l'objet de l'une de vos recommandations et semble certainement être une méthode efficace.

Comment les ministères coordonnent-ils cette surveillance? Est-ce que tout dépend du type de navire, que ce soit un bateau de pêche ou un navire de charge, ou est-ce que tout dépend de sa position, dans les eaux canadiennes?

Vam Buck: Sénateur, je pourrais dire: toutes ces réponses. Mais pour être plus précis, rappelons qu'il y a quantité de renseignements sur les navires en mouvement, qu'il s'agisse de navires de pêche, de navires commerciaux ou autres. Chacun des organismes dispose de ces renseignements, et a accès à bon nombre de sources d'information. Nous essayons de rassembler toute l'information disponible à Halifax et Esquimalt, dans nos centres d'opérations. Il faut tenir compte de la confidentialité de certaines données, mais c'est moins préoccupant quand on a des systèmes sécurisés. Nous pouvons donc regrouper toute l'information et avoir ainsi un tableau complet de tout ce qui est en mouvement et de ce qui est pertinent pour chaque navire en déplacement.

Il ne s'agit pas simplement de savoir s'il y a un navire, mais ce qui est anormal à son sujet et ce qui s'y passe. Cette information nous permet de mettre au point un plan de surveillance plus détaillé, propre à chaque navire. Nous ferons une surveillance directe continue, de manière que s'il est nécessaire d'arrêter quelqu'un ou d'arraisonner un navire, les ressources nécessaires, dans ce cas-ci des bateaux, soient en position d'agir, à l'endroit voulu, avec les autorités appropriées.

Le sénateur Cordy: Vous avez parlé de surveillance des zones de trafic intense sur les côtes Est et Ouest et de radars haute fréquence à ondes de surface. De quoi s'agit-il?

Vam Buck: En termes simples, il s'agit d'un radar qui a une portée de 200kilomètres à partir de sa base. Il y en a deux sur la côte Est. Le gouvernement a approuvé une augmentation de capacité. Nous en avons actuellement deux, qui ne sont pas pleinement opérationnels mais qui le seront bientôt grâce au MDN et nous en aurons plutôt cinq ou six aux points de passage principaux des côtes Atlantique et Pacifique. Nous aurons alors une portée de 200kilomètres dans les zones les plus occupées des côtes et une vue d'ensemble de tous les navires en déplacement, représentés par des points.

Nous disposons aussi de nombreuses autres sources d'information, qu'il s'agisse de rapports sur la gestion du trafic maritime, des rapports de quelques-uns de nos alliés sur le transport maritime commercial ou «blanc». Tout cela arrive au centre d'opérations, avec ces données. On fait le lien avec d'autres données dont nous disposons, pour avoir une vue d'ensemble de ce qui se passe, en temps réel. Nous n'avons pas encore cette capacité.

Mais je le répète, ce qui compte, c'est de savoir s'il se passe quelque chose d'anormal à bord d'un des navires. On pourrait par exemple avoir des renseignements sur un cas de migration illégale, ou une autre forme de menace asymétrique. Quand on reçoit des données précises, on peut préciser la recherche et dire: «Voici un point de contact. Je veux que quelqu'un fasse la surveillance». Dans un cas pareil, nous commencerions la mise en oeuvre d'un plan de surveillance au moyen d'un avion à voilure fixe. On pourrait ainsi le repérer et savoir sa position exacte, pour être en mesure, si on décide de l'arrêter ou de l'arraisonner, de le faire à l'endroit voulu, à sa sortie des eaux internationales vers les eaux canadiennes, ou dans la zone contiguë de 12miles.

Le sénateur Cordy: Au sujet de toutes ces données, vous avez dit que les Forces envisagent actuellement une technique d'automatisation accrue de la fusion des données de surveillance maritime. S'agit-il de la fusion des données recueillies par le MDN ou des données fournies par divers ministères et organismes, comme la GRC et le ministère des Pêches et des Océans?

Vam Buck: Il s'agit de la fusion de toutes les données disponibles, et non seulement de celles du MDN.

Le sénateur Cordy: Est-ce que le port de Halifax est un secteur d'accès contrôlé?

Vam Buck: Oui, en effet.

Le sénateur Cordy: Comment le fait d'être déclaré secteur d'accès contrôlé change-t-il les choses, pour le port de Halifax?

Vam Buck: Le secteur d'accès contrôlé s'applique actuellement uniquement à Halifax, Esquimalt et Nanoose. Il sert à donner une protection aux navires de guerre canadiens ou étrangers.

Ce n'est pas tout le port de Halifax qui est secteur d'accès contrôlé. C'est toutefois le cas pour l'arsenal, autour de Shearwater et de certains points d'encrage du port. Par décret en conseil, ces secteurs ont été désignés à accès limité ou interdit, selon la gravité de la menace. En fait, les militaires ont ainsi le pouvoir de protéger leur navire contre toute menace en provenance de la mer. Auparavant, ils n'avaient pas ce pouvoir qui était plutôt confié à la GRC.

Pour l'arsenal de Halifax, la zone d'exclusion l'entoure d'environ 200verges.

Le sénateur Cordy: Une précision: s'agit-il de Shearwater et de là où mouillent les navires du MDN?

Vam Buck: Shearwater, l'arsenal, divers points d'amarrage dans le port, et d'autres installations dans le secteur de Major's Beach.

Le sénateur Cordy: Et ça va jusque dans l'eau?

Vam Buck: Oui, à partir du rivage. Nous essayons d'éviter des incidents comme celui du USS Cole. Il a été attaqué à partir de l'eau. Dans les eaux internationales, nous avons ce pouvoir. Nous ne l'avions toutefois pas dans nos propres eaux, ce que nous offrent toutefois les secteurs d'accès contrôlé.

Le président: Est-ce que des règles semblables sont prises pour la Garde côtière, du côté de Darthmouth, ou mouillent ses navires?

Vam Buck: Pas que je sache.

Le président: C'est donc toujours une responsabilité de la GRC?

Vam Buck: Oui.

Le président: Vous avez décrit comment fonctionnaient les choses au Canada. Vous nous avez parlé d'une approche à plusieurs niveaux ainsi que de la valeur de la marine pour le transport d'effectifs et de l'utilité des aéronefs et des radars pour identifier les embarcations.

Il semble y avoir une lacune le long du littoral. Aux États-Unis, cette lacune est comblée par la Garde côtière, dont la fonction est tout à fait différente de celle de la Garde côtière canadienne. La Garde côtière américaine dispose de bateaux petits et légers qui peuvent s'approcher des côtes. Elle a aussi des navires plus imposants qui peuvent s'éloigner considérablement des côtes. Elle a des pouvoirs de police, des pouvoirs militaires et la capacité d'intercepter des drogues, des immigrants illégaux et quiconque représente une menace, à proximité du littoral.

Comment comblons-nous cette lacune au Canada? La GRC a des vaisseaux de patrouille. Manifestement, vous avez des navires de haute mer. Des risques semblent toutefois subsister. Qu'en pensez-vous?

Vam Buck: D'abord, je vous rappelle le mandat de la Garde côtière américaine, que vous avez décrit très correctement. Dans les faits, la Garde côtière américaine comporte deux éléments. Il y a une partie de la Garde côtière dont le rôle et le mandat correspondent à ceux de notre Garde côtière. Il y aussi un mandat policier, dont s'acquittent divers types de navires, notamment les garde-côtes à grande endurance.

Tout en ayant une certaine marge de manoeuvre pour le travail policier, eux aussi embarquent des agents des pêches et de l'immigration, comme nous. Dans ce contexte, leur travail est assez semblable au nôtre.

Comme vous le savez tous, je crois, la Garde côtière américaine n'a pas que des navires. Elle dispose aussi d'avions assez imposants, comme des Hercules, leur principal véhicule. De bien des façons, leurs problèmes de surveillance sont semblables aux nôtres. En fait, les États-Unis n'ont pas d'aéronefs de patrouille maritime à grande portée pour effectuer ce genre de surveillance. C'est un problème pour la Garde côtière.

Là où je veux en venir, c'est que les Aurora canadiens, un excellent moyen de surveillance, sont bien plus efficaces que les Hercules. Ce n'est pas parfait aux États-Unis non plus.

La vraie question, au bout du compte, c'est d'adapter la flotte pour qu'elle convienne parfaitement aux besoins relatifs à la sécurité du territoire. Tout d'abord, il faut les bons moyens de surveillance, qui permettront ensuite de mieux évaluer l'optimisation des flottes en fonction de leur rôle. Meilleure est la surveillance, plus grande il est facile de dresser un plan pour arrêter ou arraisonner un navire, surtout quand une surveillance aérienne supérieure permet de déterminer sa position exacte.

Le président: Vous semblez dire au comité que le système américain n'est pas parfait. C'est bien ça?

Vam Buck: Oui.

Le président: Vous dites aussi que leur système comporte une lacune. Je le comprends.

Que vous faut-il en matière de ressources pour que le système canadien soit plus sûr, n'ait pas ce problème? Que vous faut-il pour protéger le littoral et les côtes canadiennes?

Vam Buck: En tout premier lieu, il faut la meilleure capacité de surveillance qui soit, la plus rentable et la plus homogène possible, avec un partage interministériel efficace des données, qui fonctionnera très bien. Ce n'est pas une panacée, mais quand la quantité, le type et les éléments de surveillance sont en place, on peut se demander: «La flotte gouvernementale a-t-elle les ressources nécessaires pour bien jouer son rôle?»

Le président: Vous dites avoir besoin de la capacité de recueillir l'information, le renseignement. Qui a cette responsabilité actuellement? Est-ce vous? Les amiraux responsables de chaque côte, et qui relèvent de vous, sont-ils responsables de la coordination de ces moyens? Si quelqu'un réussit à passer entre les mailles du filet, à qui faut-il s'adresser?

Vam Buck: Le mandat des amiraux sur chaque côte se rapporte principalement à la surveillance, selon les ressources et les biens qui leur sont confiés.

La coordination n'incombe pas officiellement à la marine. En pratique, parce que nos centres d'opérations sont les plus efficaces, nous pouvons rassembler l'information et nous nous sommes acquittés de ce rôle. Le travail du GTISM permet de comprendre la nécessité d'une structure plus officielle pour ce genre de coordination. Nous sommes actuellement en train de discuter de la nécessité de lui donner un caractère officiel.

Le président: Dans notre rapport de septembre, nous disions qu'Esquimalt et Halifax étaient les centres de coordination. Nous nous rappelions les salles que nous avions visitées et nous imaginions leur gestion par la marine. C'était aussi simple que cela. Il est difficile de comprendre pourquoi la marine ne serait pas responsable de la coordination du renseignement et des ressources.

Si j'ai bien compris, vous nous dites qu'il s'agit actuellement d'un arrangement ad hoc, qu'il n'y a pas de politique vous obligeant à le faire et que vous avez assumé ce rôle parce que vous aviez ces centres d'opération, et que vous continuerez d'assurer cette coordination en pratique, jusqu'à ce qu'on vous ordonne de faire autrement.

Ai-je bien résumé la situation?

Vam Buck: Si je me souviens bien, dans votre rapport, vous suggériez que les centres d'opération actuels de Halifax et de Esquimalt soient dotés de personnel de divers ministères. C'est le cas, en partie, puisqu'on y trouve du personnel de la GRC. On y trouve aussi du personnel de la Garde côtière canadienne. Mais rien ne dit officiellement que la coordination incombe à la marine, tout dépend de l'incident dont il est question.

En général, si une interception est nécessaire, et qu'il faut utiliser un de nos navires, c'est à nous automatiquement de nous en charger.

Le sénateur Banks: J'aimerais être rassuré parce que plus nous recevons d'informations, plus nous constatons à quel point nous en savons peu. Je jouerai le rôle du cynique déconcerté.

Nous avons appris et lu ce matin que le ministère des Transports est responsable de la sécurité maritime. La Garde côtière recevra l'information du système d'identification automatique. Le ministère de la Défense nationale a des centres opérationnels à Halifax et Esquimalt et coordonne la recherche et le sauvetage. Nous avons appris ce matin que le terrorisme est la responsabilité de la GRC.

Nous avons le groupe binational de planification, le groupe de travail sur la surveillance et la planification maritime, le groupe de travail interministériel sur la sûreté maritime et le groupe de travail sur la surveillance maritime du NORAD. Le cynique déconcerté dirait que nous sommes en train de tomber dans le piège presque caricatural d'une machine à la Rube Goldberg — une machine qui marche très vite mais n'accomplit rien.

Notre tout dernier rapport, auquel vous avez fait allusion, recommandait l'élaboration d'une politique en matière de sécurité maritime. Nous sommes peut-être trop simplistes à cet égard. Cependant, vous avez dit quelque chose ce matin qui traduit ce que pense le cynique déconcerté, qui considère que les Canadiens excellent à constituer des comités et des groupes de travail mais se demandent s'ils accomplissent vraiment quelque chose. Vous avez dit que le groupe de travail interministériel sur la sécurité maritime envisage d'élaborer un plan intérieur de sécurité maritime et que ce plan pourrait finir par servir de base à une stratégie nationale en matière de sécurité maritime. Je crois que nous pouvons en déduire que cela pourrait déboucher sur un plan.

Pouvez-vous me rassurez en m'indiquant que tout va bien et qu'il y a un responsable? Le cynique déconcerté — malgré l'assurance avec laquelle ont répondu les personnes à qui nous avons eu l'occasion de parler — au bout du compte doit dire, «Oui, mais qui en assume la responsabilité? En cas d'incident, y aura-t-il des liens entre tous ces éléments?»

Au lieu d'essayer de trouver un moyen d'assurer la coordination et l'interopératibilité, la transmission et le partage d'informations parmi des organisations disparates qui sont, dans certaines circonstances, responsables de la sécurité maritime, existe-t-il un modèle qui énoncerait qui est responsable de la sécurité maritime, et que toutes les autres organisations complémentaires relèvent d'une seule organisation, comme vos bureaux à Halifax et Equimalt? Cela nous semble éminemment logique. Cependant, ce n'est pas ce qui semble se passer.

Par conséquent, j'aimerais d'abord savoir si on a envisagé un tel modèle, et deuxièmement s'il existe une certaine coordination qui ne m'inspire pas encore confiance.

Vam Buck: Tout d'abord, en ce qui concerne les mandats et plus précisément ceux de Transports Canada, de la GRC, de l'Armée, de la Garde côtière, de CIC et ainsi de suite, ils existent dans pratiquement tout pays occidental. Il ne serait probablement pas possible, ni faisable de réunir tous ces mandats dans une seule organisation parce qu'ils sont très différents et sont visés par des dispositions législatives différentes.

Le sénateur Banks: En ce qui concerne la sécurité maritime, le secrétaire Ridge semble détenir le contrôle et la responsabilité opérationnelle générale de la sécurité maritime des États-Unis. Tout le monde relève de lui.

Vam Buck: Les membres du département de la sécurité intérieure relèvent en effet directement du Secrétaire Ridge. Cependant, il existe d'autres ministères et organismes du gouvernement américain qui conservent certains éléments du mandat et, même s'ils ne relèvent pas directement de lui, ils coordonnent effectivement leurs activités avec le département de la sécurité du territoire.

En ce qui concerne l'exécution, je conviens effectivement que c'est le cas, dans l'ensemble, pour ce qui est de la Garde côtière américaine. Cependant, même selon sa structure actuelle, elle doit faire appel à un certain nombre d'autres ministères et organismes gouvernementaux. Selon les responsabilités transférées au département de la sécurité du territoire, toutes les activités dans un rayon de 200 milles des côtes seront effectuées dans un véhicule de la Garde côtière. Cela n'existe pas au Canada, mais les mandats multiples existent en fait.

Vous avez parlé de tout rassembler dans les centres opérationnels de Halifax ou Esquimalt. C'est effectivement la façon dont on procède aujourd'hui, même si cela n'a pas été formalisé. Le défi pour le gouvernement et ses ministères et organismes consiste à coordonner leurs activités dans le cadre d'une structure efficace pour le Canada. Bien que cette façon de procéder ne soit peut-être pas formalisée, elle fonctionne très bien dans la pratique et la coopération quotidienne entre les ministères et l'agence est très efficace.

L'important, comme je l'ai dit plus tôt, c'est de savoir ce qui se passe. Même si vous êtes bien préparés à intervenir, cela ne servira à rien si vous ne savez pas ce qui se passe et si vous ne disposez pas de l'information en fonction de laquelle vous pourrez intervenir.

Le sénateur Banks: Avez-vous suffisamment d'information aujourd'hui?

Vam Buck: D'après mon expérience et d'après les opérations auxquelles nous avons participé, nous avons disposé de l'information nécessaire. Bien entendu, nous ne pouvons pas affirmer qu'il n'y aura jamais de défaillances ni que nous serons toujours au courant de tout ce qui se passe. Aucun pays ne peut faire ce genre d'affirmation, y compris les États- Unis.

Le capitaine de vaisseau Peter Avis, directeur, Politique, opérations et état de préparation maritimes, ministère de la Défense nationale: Pour ce qui est d'utiliser ce dont on dispose afin de coordonner ces éléments de façon plus formelle, le groupe de travail interministériel de la sécurité maritime a préparé un mémoire destiné au cabinet sur la façon de réduire la vulnérabilité de la sécurité maritime du Canada. Ce rapport comportait un plan interministériel fondé sur une stratégie de gestion des risques et est une excellente base sur laquelle fonder une stratégie. Le seul petit problème à l'heure actuelle, c'est que ce plan figure dans un mémoire au cabinet et est par conséquent confidentiel. Nous sommes en train d'y travailler. Nous avons l'intention de rendre ce texte public.

Cependant, une fois qu'il sera public, il est très important qu'il soit présenté comme un plan national de sécurité maritime et que nous travaillions d'arrache-pied pour réunir des spécialistes qui présenteront une stratégie maritime. Nous en sommes arrivés à un stade où cela peut être fait assez simplement.

Le sénateur Banks: Je ne suis pas à la recherche d'un plan directeur qui peut être rangé dans un joli petit cahier. Je tiens à ce que vous m'assuriez que tout va bien et que tout le monde communique.

En passant, lorsque j'ai parlé des Américains et du secrétaire Ridge, je ne proposais pas que nous devions nous inspirer de leur façon de procéder. Ce n'est peut-être pas un modèle à suivre. En fait, ça ne l'est pas.

Cependant, comme nous occupons le même continent, nous devons assurer une certaine coordination avec eux. Il existe un groupe de travail près de Colorado Springs qui s'occupe de sécurité maritime, et j'ai trois questions à poser à ce sujet.

Premièrement, existe-t-il une coordination entre Colorado Springs et Esquimalt ou Halifax? Deuxièmement, selon le point de vue du Canada, cette coordination fonctionne-t-elle et avez-vous là-bas les gens dont vous avez besoin? Troisièmement, nous croyons comprendre d'après ce qu'on a appris du côté américain, que les personnes assignées à ce groupe de coordination cumulent tous plusieurs fonctions— ce qui est courant dans ce contexte. Le commandant de NORAD exerce aussi la fonction de coordonnateur de NORTHCOM. Est-ce un obstacle au travail que vous devez faire?

Vam Buck: Vous avez d'abord demandé s'il y a coordination entre Colorado Springs et Halifax et Esquimalt. La réponse est «oui». Le groupe de planification est structuré de façon à rapporter tous plans conjointement par l'intermédiaire du vice-chef d'état major et par mon entremise et enfin aux deux formations côtières. Il s'agit donc d'une démarche uniforme et homogène.

Le groupe de planification élaborera des plans nationaux plutôt que des plans côtiers, ce qui existe dans le cadre des relations que le Canada entretient avec les États-Unis à l'heure actuelle. En passant, cette coordination ne se fait pas uniquement à ce niveau. Les activités maritimes et navales sont coordonnées au Canada par moi et aux États-Unis par le chef des opérations navales, l'amiral VernClark. Nous discutons ensemble régulièrement de la meilleure façon d'assurer la cohésion de cette coordination.

Le sénateur Banks: Nous avons entendu dire et constaté à plusieurs reprises, que les capacités navales des deux pays sont parmi les plus interopérables au monde.

Vam Buck: Tout à fait. On renforce en fait un système qui fonctionne bien.

Vous avez ensuite demandé où nous en sommes dans notre travail. Comme je l'ai indiqué plus tôt, l'évaluation des besoins vient d'être terminée. L'évaluation de ces résultats nous permettra de mieux partager l'information et d'élaborer des plans nationaux uniformes.

Votre troisième question concernait le personnel. Vous avez dit qu'un grand nombre du personnel du côté américain cumuleraient plusieurs fonctions. Le personnel canadien, dans l'ensemble, ne cumulera pas plusieurs fonctions. La majeure partie de ce personnel sera en place cet été, et c'est à ce moment-là que le gros du travail débutera sérieusement.

Pour les États-Unis, le cumul des fonctions est valable. Même si la majeure partie du travail dont nous parlons comportera des liens avec le département de la sécurité du territoire, il continuera à bien des égards à avoir un contexte militaire aux États-Unis. Nous devons nous assurer que le personnel américain qui fait partie du groupe de planification aura des liens opérationnels appropriés au sein des ministères et organismes américains. Il ne s'agit pas uniquement du département de la sécurité du territoire.

Par exemple, sur le plan maritime, nous devons pouvoir communiquer avec la marine américaine par l'intermédiaire du groupe de planification, car autrement cela nous priverait d'un élément clé. Même aux États-Unis, il faut avoir des personnes qui ont des liens avec d'autres organisations.

Le sénateur Banks: Vous avez indiqué plus tôt que les navires ne sont pas forcément les meilleurs moyens d'assurer la surveillance dont vous avez besoin, même que les navires sont un excellent moyen d'interdiction et d'enquête.

Nous croyons comprendre qu'il existe peut-être une lacune au niveau de la capacité des navires au pays. Les véhicules des navires chargés de la défense côtière peuvent-ils être considérés comme des navires efficaces pour la poursuite et l'interception?

Nous avons entendu ce matin qu'il y a peut-être des endroits où ils ne peuvent pas aller à cause de leur tirant d'eau, je suppose. Ne s'agit-il pas d'une lacune? Si un méchant s'en apercevait et disait, «Ah, le navire ne peut pas aller là-bas. C'est donc là où j'irai».

Vam Buck: C'est un problème tant dans le Pacifique que dans l'Atlantique. Y a-t-il une catégorie de navire qui pourrait tout faire? Non. Il y a très peu de ports et de baies où un navire de défense côtière ne peut pas aller. Il a un tirant d'eau d'environ 12pieds.

Notre ministère a un projet pour concevoir un navire côtier. Cependant, un tel navire aurait une endurance très restreinte. Il aurait aussi une capacité limitée de naviguer dans une mer agitée, parce que dès que vous vous éloignez deux ou trois milles de notre côte, il vous faut un navire qui possède une tenue en mer et une endurance excellentes.

Les navires côtiers sont-ils les meilleurs navires pour procéder à l'ensemble des activités d'interdiction? Non, ils ont une vitesse limitée. Leur vitesse maximale est de 16noeuds.

Ces navires sont conçus pour patrouiller et faire la guerre des mines, ce qui nécessite une plate-forme relativement stable. Ce sont des navires à larges baux, pour utiliser un terme nautique. Ils ne sont pas rapides.

Il ne faut pas oublier que l'objectif est d'intervenir aussi loin que possible dans les limites du droit international. Il vous faudra donc une grande tenue de mer et une grande endurance.

Nous prévoyons concevoir d'autres navires qui serviront principalement de navires d'entraînement, mais qui assureront aussi la patrouille des côtes. Ils seront plus rapides. Mais vous aurez encore besoin de navires de la taille ou de la catégorie MCDB pour faire le travail. Il existe un certain nombre d'hydroptères utilisés par un certain nombre de ministères canadiens. Au-delà de trois milles marins de la côte, ils ne sont plus efficaces et en fait chavirent.

Comme je l'ai déjà dit, il faut que le navire ait la capacité d'affronter les conditions qui existent en mer— et pas simplement le long du littoral— mais aussi les approches. Il faut entre autres une plate-forme stable pour l'embarquement.

Le président: Quelle est la taille approximative d'un navire que vous dites être en train de planifier? Sont-ils conçus? Disposez-vous du financement nécessaire? Où en êtes-vous dans ce processus?

Vam Buck: Ils font partie du programme de services de la Défense. Ils attendent de recevoir l'approbation du ministère et seront d'environ 50tonnes.

Le sénateur Smith: Comme je suis le fils d'un ecclésiastique, je ne pouvais pas m'empêcher de me fredonner un hymne: «Launch out into the deep, oh let the shorelines go; Launch out, Launch out in the oceans divine, out where the pull tides flow».

Le président: Pourrions-nous entendre l'air aussi?

Le sénateur Smith: Je pourrais vous le chanter si vous voulez l'entendre. Le connaissez-vous? C'est un hymne assez inspirant.

Vam Buck: Je suis aussi le gardien de la prière des marins.

Le sénateur Smith: J'aime retourner à l'essentiel.

Allons-nous utiliser des navires, des avions de surveillance ou la prochaine génération d'hélicoptères? J'aimerais en savoir un peu plus à ce sujet. Je sais que c'est un des sujets préférés du sénateur Forrestall. Y a-t-il un rôle à jouer à cet égard? Même lorsque les quatre sous-marins sont opérationnels, j'ai de la difficulté à croire que leur participation serait aussi étendue.

Il faut faire des choix rentables. En quoi consiste un plan raisonnable, qui est rentable et abordable et qui donne les résultats que vous escomptez en ce qui concerne ces divers éléments?

Je suis bien au courant des aspects qui se rattachent à la recherche et au sauvetage, mais dans quelle mesure l'aspect militaire des hélicoptères est-il lié à la prochaine génération? Il existe une différence entre recueillir de l'information et procéder aux interceptions au moment voulu. J'ignore comment ils fonctionnent dans le cadre de ces activités; mais pour ce qui est de la distance et de la rapidité, ils sont durs à battre.

Vam Buck: Il ne fait aucun doute que l'hélicoptère maritime va améliorer la capacité de surveillance de nos frégates et de nos destroyers, puisque cette surveillance aéroportée permet un plus grand rayon d'action. Cependant, il serait utilisé principalement lors des dernières étapes d'une intervention.

Par ailleurs, ces hélicoptères amélioreraient notre capacité à déposer des personnes sur des bateaux à partir des airs, ainsi que des membres d'une équipe d'abordage, comme cela se fait à l'heure actuelle. Ils ont un rôle à jouer à cet égard.

Le sénateur Smith: Comment procède-t-on-est-ce que l'on fait descendre un canot pneumatique?

Vam Buck: On fait descendre les gens à l'aide d'un câble comme on l'a fait lorsque nous avons immobilisé le GTS Katie. Cela n'est pas facile avec les SeaKing, mais le nouvel hélicoptère maritime aura une meilleure capacité à cet égard.

J'aimerais aborder brièvement ce que vous avez dit à propos des sous-marins de la catégorie Victoria. Sur le plan acoustique, les sous-marins sont des outils de surveillance efficaces. Leur fonctionnement est par ailleurs très rentable, parce qu'un destroyer compte un équipage de 300personnes, une frégate de 200personnes et un sous-marin de moins de 50personnes. Même nos plus anciens sous-marins de la catégorie Oberon ont été d'une utilisation efficace pour la surveillance et l'interdiction.

Le sénateur Smith: Comment se compare leur vitesse?

Vam Buck: L'important dans le cas d'un sous-marin est de le placer dans la bonne position pour que même avec les navires de surface, vous créez un mouvement de tenailles. Si vous avez un seul navire—un destroyer ou une frégate— qui pourchasse quelqu'un, au bout du compte il faut pouvoir le coincer. Habituellement, il est préférable d'avoir plus d'une plate-forme de sorte que vous pouvez mener votre opération à bien sans avoir à percuter l'autre. Ce n'est pas une façon très efficace de procéder.

Un autre élément important à propos des sous-marins c'est qu'ils ont été utilisés avec efficacité durant la guerre du turbot il y a quelques années, car ils ont pu exercer une capacité de surveillance sans que les gens sachent où ils étaient. Je songe plutôt à une menace militaire qu'à une menace commerciale.

Le sénateur Smith: Lorsque vous parlez de menace militaire, la perspective d'une invasion militaire ne m'effraie pas tellement, mais je crois que nous devons être sensibles au risque d'activités terroristes.

VamBuck: De toute évidence, nous avons un rôle à jouer à cet égard. Tout d'abord, en concevant le meilleur système, il faut que les mandats soient clairs et que l'on sache précisément qui fait quoi. Je crois qu'il est indispensable de définir clairement tous les paramètres de la surveillance. C'est la façon rentable de procéder. Une fois que vous savez l'étendue de la surveillance pour laquelle vous êtes prêt à payer ou que vous êtes prêt à mettre sur pied, alors il faut examiner comment tirer le meilleur parti des flottes existantes ou comment les modifier. Il pourrait être coûteux de s'occuper d'abord de la flotte.

Par exemple, supposons que vous n'ayez aucune surveillance, ou une surveillance très restreinte. Si vous voulez vous assurer d'être suffisamment protégé contre toute intrusion sur vos côtes, vous voudriez peut-être créer une ligne Maginot de navires tout le long des côtes du Pacifique et de l'Atlantique. De toute évidence, cela nécessiterait de très nombreux navires et ce ne serait pas vraiment rentable.

Une surveillance accrue et un mandat clair vous permettront de tirer un meilleur parti des flottes existantes ou des nouvelles flottes.

Capt Avis: Nous comparons souvent nos efforts aux activités similaires en cours aux États-Unis. La Garde côtière américaine est aux prises avec les mêmes problèmes. Nous pensons qu'elle dispose d'énormes ressources, et comparativement à nous, c'est le cas. Cependant, elle affronte le même problème. Ils ne peuvent pas établir de lignes Maginot. Ils ne peuvent pas avoir des navires qui patrouillent 24heures par jour septjours par semaine. Ils doivent d'abord s'occuper des aspects qui se rattachent à la surveillance et à «la connaissance du domaine», puis utiliser leurs ressources matérielles pour assurer l'efficacité de l'interdiction.

Le sénateur Smith: Pouvons-nous parler des Grands Lacs plutôt que des zones côtières, qui représentent probablement ces jours-ci le plus grand défi?

Par curiosité, j'ai une maison de campagne à Cobourg, en bordure de l'eau, à environ 25milles de Trenton. Il arrive qu'un avion vole bas, près du rivage. C'est ce qui se passe chaque fois que l'on apprend que quelqu'un est tombé d'un bateau et qu'on cherche le corps. Est-ce ce que font ces avions? Réduisent-ils leur surveillance s'ils entendent parler d'un bateau «suspect» qui arrive peut-être de Rochester avec à son bord des marchandises illégales? Pouvez-vous m'expliquer ce qu'ils font?

VamBuck: Je peux essayer, mais je ne peux pas être précis parce qu'il ne s'agit pas d'un mandat naval. La marine n'a pas de mandat dans les eaux intérieures. Il y a des navires de la Garde côtière et des avions qui patrouillent la Voie maritime et les Grands Lacs.

Le sénateur Smith: Il semble s'agir d'avions militaires.

VamBuck: Il peut s'agir d'avions en provenance de Trenton; mais toute surveillance effectuée par des avions de Trenton est faite principalement dans le cadre de la recherche et du sauvetage. Elle n'est pas faite à d'autres fins.

Le sénateur Smith: Elle n'est pas liée à la sécurité.

Le sénateur Day: J'aimerais avoir un éclaircissement. Le programme d'échange des données, de gestion et d'information maritime a la possibilité d'améliorer l'échange de renseignements sur la sécurité maritime et la collaboration entre les organismes. Cela me semble un objectif positif et valable— échanger de l'information et coordonner le travail des divers ministères dont nous avons parlé ce matin.

Je crois comprendre que ce groupe interministériel a déjà formulé une recommandation. En partant du principe que nous allons y donner suite, la coordination sera-t-elle assurée par la marine et cela se fera-t-il en conjonction avec Esquimalt et Halifax, ou renforcera-t-elle leurs activités?

Capt Avis: Ce système d'échange de données est pour l'instant à l'étape de projet. Il existe à l'heure actuelle un réseau maritime canadien appelé CANMARNET qui est un système beaucoup moins performant. C'est toutefois l'idée de base qui a indiqué au ministère la façon dont il collaborerait dans le secteur maritime.

À partir de là, lorsque nous avons préparé le mémoire au cabinet au sein du groupe interministériel, nous avons constaté que la collaboration était l'un des principaux aspects qui s'imposait. Comme vous l'avez signalé, la voie à suivre serait d'améliorer la façon dont nous procédons dans le cadre du CANMARNET.

Le groupe interministériel a commandé une étude auprès d'une entreprise indépendante afin de déterminer comment le faire tout en respectant les lois sur la protection de la vie privée et les dispositions de la Charte. Ces gens-là ont examiné comment nous pouvions mieux partager l'information et tous participer à un réseau d'intérêt maritime pour que nous puissions réaliser la «connaissance du domaine» dont l'amiral a parlé à plusieurs reprises.

L'étude vient d'être terminée et sera présentée au groupe interministériel le mois prochain. Lorsqu'il décidera donner suite à ce projet, le groupe utilisera les fonds qui ont été prévus à cet effet dans un fonds de collaboration. Transports Canada en est le fournisseur. Cependant, le MDN demeurerait le principal responsable de l'établissement du système.

Vam Buck: Cela améliorerait ce qui existe déjà.

Le sénateur Day: Cela suppose-t-il la création d'un établissement physique distinct de coordination, ou est-ce que nous utiliserons les centres qui se trouvent à Esquimalt et Halifax?

Capt Avis: Nous utiliserons les centres qui se trouvent à Esquimalt et Halifax.

Vam Buck: Il s'agit d'échanges de données. En ce qui nous concerne, l'analyse est faite à Halifax et Esquimalt, bien que les autres ministères, selon la source des données, ont aussi une certaine capacité analytique.

Le président: J'aimerais avoir de brefs éclaircissements. Vous avez parlé de six sites de radars de haute fréquence à ondes de surface, les deux que nous avons et les quatre qui sont à venir. Pourriez-vous décrire au comité en quoi consiste leur capacité? Où prévoyez-vous les déployer? Quand seront-ils opérationnels? Où l'information qu'ils captent sera-t-elle envoyée et avec qui partagerez-vous cette information?

Vam Buck: Il s'agit d'une dépense d'immobilisations assez importante. Je ne donnerai pas de chiffres pour l'instant parce qu'à un certain moment cela fera partie d'un appel d'offres. Comme je l'ai dit plus tôt, cela nous donnera la capacité d'exercer une surveillance dans un rayon de 200kilomètres ou 120milles, depuis l'endroit où nous les installerons.

L'information qui en découlera sera en grande partie de l'information provenant de radars à ondes de surface plutôt que de radars aéroportés. Il y aura une capacité aéroportée limitée, mais elle ne sera pas énorme. Cette information sera transmise à nos systèmes opérationnels et sera partagée avec nos partenaires opérationnels.

En plus de l'information radar, nous aurons un certain nombre d'autres activités de R-D qui nous permettront de mieux prédire la destination d'un navire. Il y a aura un certain nombre d'outils de technologies d'information qui s'y ajouteront. Il sera directement lié à nos autres systèmes d'information opérationnelle. Par exemple, lorsque le Système d'information automatisé sera mis sur pied, il procédera à une application comparative. Si nous avions d'autres rapports grâce à des réseaux militaires sur la navigation commerciale, ou «blanche», toutes ces données seraient comparatives. Cela améliorera nettement notre capacité actuelle.

Où seront-ils installés? Au stade actuel, où nous aurions quatre ou cinq postes supplémentaires, nous mettrions principalement l'accent sur les points de passage obligés. En termes simples, les postes supplémentaires sur la côte Est couvriront la région du golfe et ses abords, et sur la côte Ouest, les abords du détroit de JuandeFuca, peut-être même jusqu'au détroit de la Reine-Charlotte et ce genre d'endroits.

Il existe des options qui pourraient augmenter le nombre de sites qui finiraient par assurer une pleine surveillance dans l'Atlantique et le Pacifique, mais pour l'instant les fonds que nous avons reçus nous servent à nous concentrer sur les points de passage obligés, qui sont les principales zones de déplacement.

Le président: D'autres pays ont-ils des radars haute fréquence à ondes de surface?

Vam Buck: L'Australie envisage de se doter de cette capacité. Les États-Unis et un certain nombre de pays des Antilles s'intéressent beaucoup au produit canadien.

Le président: Selon les arrangements actuels, échangerions-nous cette information avec les États-Unis?

Vam Buck: Absolument.

Le sénateur Forrestall: Est-ce que cela augmente ou complète la surveillance par satellite?

Vam Buck: Oui. La différence entre un système côtier fixe et un satellite, c'est qu'un satellite fournit une vue relativement étroite de l'océan par exemple, tandis que ce radar nous permettrait d'examiner une vaste étendue d'océan, ce dont nous avons besoin. Par conséquent, il compléterait la surveillance par satellite.

Le président: Le groupe de planification de Colorado Springs constitué en janvier compte un nombre limité de membres à l'heure actuelle. Pouvez-vous nous indiquer combien vous avez de personnes là-bas maintenant?

Vam Buck: Le capitaine de vaisseau Avis a dit qu'ils étaient environ huit, mais ce nombre passera à 30.

Le président: Nous croyons comprendre qu'il n'y a pas de personnel américain qui fait partie de ce groupe de façon permanente. Le fait que les Américains n'aient que des membres à temps partiel au sein de ce groupe influe-t-il sur le groupe?

Vam Buck: Comme je l'ai indiqué plus tôt, je crois que l'important est de s'assurer que les Américains ont le plus grand accès possible aux diverses autres organisations que nous voulons atteindre grâce à ce groupe de planification. Par conséquent, dans ce contexte, le cumul de fonctions ne me préoccupe pas. Je crois comprendre qu'un certain nombre de ceux qui cumulent plusieurs fonctions séjourneront à Colorado Springs avec l'équipe. Je soupçonne que certains seront installés ailleurs. Cependant, pour que le groupe de planification soit efficace dans un contexte américain, il doit pouvoir communiquer de façon réaliste avec un certain nombre d'instances américaines.

Le président: Je ne vous ferai donc pas dire ce que vous n'avez pas dit si je dis que vous préféreriez qu'il y ait cumul de fonctions?

Vam Buck: Il sera toujours nécessaire qu'il y ait un certain cumul de fonctions, effectivement.

Le président: Amiral et capitaine, nous tenons à vous remercier et nous vous sommes reconnaissants de l'aide que vous avez apportée au comité aujourd'hui. Ce que vous nous avez dit a été très utile et nous vous remercions d'avoir comparu devant nous. Nous espérons vous revoir bientôt, peut-être à Halifax.

La séance se poursuit à huis clos.


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